SCARABÃE - Energies Renouvelables
SCARABÃE - Energies Renouvelables
SCARABÃE - Energies Renouvelables
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Hommage<br />
Michel Rodot :<br />
un grand chercheur et un ami<br />
M<br />
ichel Rodot nous a quittés<br />
le vendredi 30 mars dernier<br />
au terme d’une vie<br />
placée sous la triple étoile de l’humanisme,<br />
de la recherche et du solaire<br />
photovoltaïque.<br />
Né à Lyon en 1928, il est élève de<br />
l’école polytechnique (X 48) puis,<br />
après un passage rapide dans l’industrie,<br />
il intègre le CNRS en 1954.<br />
Michel Rodot travaille dès 1956 sur<br />
les jonctions P/N éclairées. Il dépose,<br />
avec Henri Valdman, le brevet<br />
Valdman/Rodot en 1960 qui débouche<br />
sur les premières applications industrielles<br />
des photopiles terrestres<br />
mais surtout spatiales.<br />
De 1966 à 1976, il est le directeur du<br />
laboratoire de physique des solides à<br />
Meudon. C’est, comme l’a rappelé<br />
Yves Marfaing lors de la cérémonie<br />
d’adieu, le fameux “Labo Rodot” qui<br />
découvre de nombreux semiconducteurs<br />
propices à la conversion<br />
de l’énergie solaire en électricité<br />
et forme plusieurs générations de<br />
chercheurs. De 1976 à 1981, Michel<br />
dirige le premier programme interdisciplinaire<br />
de recherche sur l’énergie<br />
solaire (Pirdes) et préside à ce<br />
titre le conseil scientifique du<br />
Commissariat à l’énergie solaire<br />
(Comes). Par la suite, il devient un<br />
expert écouté auprès de l’Union<br />
européenne. Apprécié de la communauté<br />
scientifique photovoltaïque, il<br />
mène différentes missions et études<br />
dans le cadre de la direction de la<br />
recherche à Bruxelles.<br />
Quand il n’est pas dans son labo,<br />
Michel est sur le terrain : celui des<br />
idées et celui de l’action. C’est là que<br />
nous l’avons le mieux connu.<br />
Administrateur très actif de l’Observatoire<br />
des énergies renouvelables<br />
dès 1980, il fait partie de la poignée<br />
d’hommes qui fondera “Énergies<br />
pour le Monde”. Il est à nos côtés au<br />
Mali lors de notre premier programme<br />
de pompage solaire photovoltaïque<br />
dans la région du Mandé. Son<br />
expertise et sa sagesse font de lui un<br />
homme respecté sur les campus du<br />
tiers-monde, comme dans les assemblées<br />
de villageois avec lesquelles il<br />
aimait échanger.<br />
Avec Alain Liébard, le président de la<br />
Fondation Énergies pour le Monde, il<br />
ouvre le programme énergie-solidarité<br />
au Vietnam qui compte aujourd’hui<br />
plus de cent villages électrifiés par le<br />
solaire. Il construit cette action avec<br />
le professeur Tuan, son homologue à<br />
Ho Chi Minh, et avec Madame Tô, un<br />
des nombreux docteurs en physique<br />
des solides qu’il a formés à Meudon.<br />
Michel, qui a la force de la conviction,<br />
demande à ses amis chercheurs vietnamiens<br />
du Solarlab de quitter les<br />
manips scientifiques pour faire du<br />
terrain et électrifier les campagnes.<br />
Ce qu’ils feront avec enthousiasme et<br />
talent.<br />
La pédagogie est une de ses exigences,<br />
il est l’inspirateur et le directeur,<br />
avec Abdelhanine Benallou, du<br />
livre “Électricité solaire au service du<br />
développement rural”. Cet ouvrage,<br />
précurseur de la question de l’électricité<br />
rurale décentralisée, est un grand<br />
succès. Plusieurs fois réimprimé, il<br />
fait aujourd’hui l’objet d’une réédition<br />
DR<br />
remise à jour que Michel n’aura pas<br />
vue et dont nous savons qu’il en<br />
aurait été enchanté. Pédagogue, il<br />
l’est encore, à l’école d’été de<br />
l’Unesco où il initie des cadres des<br />
pays en développement aux subtilités<br />
de l’électricité solaire.<br />
Parallèlement, il devient un remarquable<br />
chroniqueur scientifique qui<br />
s’exprime dans les colonnes de<br />
“Systèmes Solaires”. Là, avec bienveillance<br />
et constance, il forme les<br />
journalistes de l’équipe à la complexité<br />
du photovoltaïque. Il défend la<br />
recherche et l’ensemble des filières,<br />
y compris les couches minces,<br />
témoignant d’une curiosité toujours<br />
en éveil. À la retraite, en 1994, il collabore<br />
de plus en plus à<br />
la revue et signe également des<br />
textes plus polémiques et engagés<br />
sous le pseudonyme transparent<br />
de “Phosphore”.<br />
Dans cette période, il nous accompagne,<br />
avec le titre de conseiller<br />
scientifique de la rédaction, dans<br />
tous les congrès photovoltaïques<br />
européens : Montreux, Lisbonne,<br />
Amsterdam, Nice… En ces lieux, où<br />
l’équipe de Systèmes Solaires<br />
fabrique le journal quotidien du<br />
congrès, et malgré d’autres fonctions<br />
officielles, il est de ceux qui,<br />
infatigablement, suggèrent et produisent<br />
textes de fond, interviews…<br />
En ces différents lieux, il est un compagnon<br />
courtois, fraternel et discret.<br />
Quelquefois, il livre des bribes de<br />
son expérience d’homme debout.<br />
Derrière la pudeur et la modestie non<br />
affectées, on discerne la droiture de<br />
l’itinéraire et un sens donné à la vie.<br />
Demain dans nos Conseils, dans la<br />
salle de rédaction de Systèmes<br />
Solaires, ou au prochain congrès<br />
photovoltaïque de Rome, ce n’est pas<br />
ton ombre qui sera là, Michel, mais<br />
ton soleil.<br />
Yves-Bruno Civel, rédacteur en chef<br />
Bulletin du réseau Scarabée, novembre 2002<br />
4