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NOUVELLES DE L’INDE<br />

Ambassade de l’Inde juillet-août 2014<br />

Numéro 416<br />

Tripura<br />

un petit état dynamique<br />

Politique<br />

Élection du nouveau gouvernement<br />

Festival<br />

67ème Festival de Cannes<br />

Histoire<br />

Romain Rolland


L’Asie du Sud a fêté l’élection du nouveau<br />

Premier ministre indien, Narendra Modi<br />

©PIB<br />

La cérémonie d’investiture du 15ème Premier ministre de l’Inde, s’est déroulée en présence des chefs d’Etats membres de la SAARC<br />

Le serment du Premier ministre<br />

indien nouvellement élu fut<br />

un événement historique sans<br />

précédent auquel sept chefs<br />

d’Etats de l’Association Sud-Asiatique<br />

pour la Coopération Régionale<br />

(SAARC) ainsi que de l’Ile Maurice<br />

ont été invités. Cette cérémonie<br />

d’envergure a été organisée au<br />

Rashtrapati Bhavan, où furent conviés<br />

plus de 4 000 invités.<br />

En ce 26 mai 2014, le Président<br />

de l’Inde, Pranab Mukherjee a dirigé<br />

la cérémonie d’investiture du leader<br />

du Bharatiya Janata Partya (BJP),<br />

vainqueur des dernières élections<br />

parlementaires, devant les chefs d’Etat<br />

des pays voisins présents.<br />

Y étaient présents : le Premier<br />

ministre du Pakistan, Nawaz Sharif,<br />

le président de l’Afghanistan, Hamid<br />

Karzai, le président du Sri Lanka,<br />

Mahinda Rajapaksa, le Premier<br />

ministre népalais, Sushil Koirala, son<br />

homologue du Bhoutan, Tshering<br />

Tobgay, la Présidente du parlement<br />

bangladais, Shirin Sharmin Chaudhury,<br />

le président des Maldives, Abdulla<br />

Yameen Abdul Gayoom et le chef<br />

du Gouvernement mauricien, Navin<br />

Ramgoolam.<br />

Le lendemain, le nouveau<br />

Premier ministre, Narendra Modi, a<br />

pu s’entretenir en tête-à-tête avec<br />

chacun des chefs d’Etat membres de<br />

la SAARC. Il a par ailleurs insisté sur<br />

le rôle important que doit jouer la<br />

SAARC pour améliorer la coopération<br />

régionale et l’échange. Lors de ces<br />

entretiens individuels, M. Modi a<br />

pu discuter sur la conception de la<br />

SAARC et sur les moyens déployés par<br />

l’Inde pour développer et optimiser la<br />

coopération régionale entre les pays<br />

membres. « Chaque pays membre de<br />

la SAARC a un atout propre et dispose<br />

d’opportunités, c’est ainsi que nous<br />

devons nous inspirer des bonnes<br />

pratiques de chacun », a-t-il déclaré.<br />

Les autres leaders ont répondu<br />

positivement à cette proposition en<br />

adhérant y pleinement et en insistant<br />

qu’elle mérite d’être poursuivie. Par<br />

conséquent, une vision de la SAARC<br />

se dégage, avec – comme enjeux de<br />

taille - l’importance de travailler en<br />

étroite collaboration et à se consacrer<br />

aux questions clés de la coopération<br />

régionale. n<br />

Gauche à droite : le Premier Ministre Sushil Koirala du Népal, la Présidente du parlement Shirin<br />

Sharmin Chaudhury du Bangladesh, le Président Mahinda Rajapaksa du Sri Lanka, le Premier<br />

Ministre Navin Ramgoolam de l’Ile Maurice, le Premier ministre Nawaz Sharif du Pakistan, le Vice-<br />

Président dr. Hamid Ansari, le Président Pranab Mukherjee et le Premier Ministre Narendra Modi<br />

de l’Inde, le Président Hamid Karzai de l’Afghanistan, le Président Abdulla Yameen Abdul Gayoom<br />

des Maldives et le Premier Ministre Tshering Tobgay du Bhoutan<br />

©PIB


EDITORIAL<br />

Chers lecteurs,<br />

Une nouvelle ère commence en Inde avec son 15e Premier Ministre dans l’histoire du<br />

pays. M. Narendra Modi, le premier leader qui a obtenu une majorité écrasante pour<br />

son parti Bharatiya Janata Party (BJP), a prêté serment au Rashtrapati Bhawan, le 26<br />

mai 2014 à New Delhi. M. Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères,<br />

a rencontré Mme Sushma Swaraj, ministre des Affaires extérieures de l’Inde, et a également<br />

rendu une visite de courtoisie au nouveau Premier Ministre, M. Narendra Modi.<br />

Ce numéro est consacré à Tripura, un bel Etat dans le nord-est de l’Inde. Niché dans la<br />

verdure luxuriante de collines, dans des vallées verdoyantes à l’eau translucide, Tripura attire<br />

des touristes du monde entier grâce à la richesse de ses mythes et ses légendes, son art<br />

traditionnel, sa diversité ethnique et culturelle, son histoire et son archéologie, sa flore et sa<br />

faune, sa biodiversité. Nous espérons que l’aperçu que nous vous offrons dans ce numéro vous<br />

donnera envie de poursuivre cette découverte en se rendant en Inde.<br />

Cette livraison souhaite également apporter un éclairage singulier sur Romain Rolland, prix<br />

Nobel de littérature, et sur ses relations avec l’Inde. Son amour pour ce pays peut être résumé<br />

par ses propres paroles : « S’il y a un endroit sur terre où les rêves des hommes vivants ont<br />

trouvé une maison, dès les temps les plus anciens, où l’homme a commencé son rêve de<br />

l’existence, c’est bien l’Inde ». Vous allez donc découvrir ses relations avec les personnalités<br />

indiennes éminentes comme le Mahatma Gandhi, Ramakrishna et Swami Vivekananda, figures<br />

historiques auxquelles Romain Rolland a également consacré des ouvrages.<br />

Nous rendons également notre hommage à Jean Biès, écrivain et poète français, véritable ami<br />

de l’Inde qui nous a quitté au début de cette année, laissant derrière lui un vide irremplaçable.<br />

Enfin, d’autres articles méritent aussi l’attention dont celui sur la participation indienne au<br />

Festival de Cannes, celui sur les dictionnaires français sur l’Inde, le dossier spécial sur la secteur<br />

agro-alimentaire ainsi que nos rubriques habituelles : revue des livres, cafés littéraires et zoom<br />

sur la culture indienne en France.<br />

Continuez à nous écrire… Toutes vos suggestions d’amélioration du magazine seront<br />

bienvenues.<br />

Apoorva Srivastava<br />

Conseiller ( Presse, Information & Culture)<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

03


Sommaire<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles de l’Inde, Paris<br />

Politique<br />

06<br />

Visite du Ministre français<br />

Interview<br />

07<br />

Deepak Chopra<br />

un prophète du bien-être à paris<br />

Hommage<br />

10 Jean Biès<br />

L’Inde au miroir de l’œuvre<br />

de Jean Biès<br />

Sector<br />

14<br />

Production Alimentaire<br />

L’industrie agro-alimentaire<br />

Environnement<br />

16 Les soeurs solaires<br />

Les soeurs solaires Eclairer des vies<br />

Dossier Tripura<br />

20<br />

24<br />

28<br />

Introduction<br />

Tripura, un petit état dynamique<br />

Business<br />

Du caoutchouc et des fruits en abondance<br />

Tourisme<br />

Un enchantement de collines et d’orangers<br />

16<br />

34 Cuisine<br />

Une nourriture carnée saine et authentique<br />

36 Artisanat<br />

Lorsque le bambou et les textiles font<br />

des merveilles<br />

Rencontre<br />

37 Siddhart Dhanvant Shanghvi<br />

Un imaginaire d’hier et d’aujourd’hui<br />

Education<br />

38<br />

Twinning in India 2014<br />

Histoire<br />

40<br />

Romain Rolland<br />

L’Inde Romain Rolland<br />

Le Coin des Enfants<br />

44<br />

Le lac de la Lune<br />

Littérature<br />

46<br />

Revue Des Livres<br />

20<br />

50<br />

Les dictionnaires et l’Inde<br />

54 Les cafés littéraires<br />

Les cafés littéraires de l’ambassade<br />

Culture<br />

55<br />

57<br />

L’agenda de l’ambassade<br />

L’Inde en France<br />

61 Painting<br />

Anuradha Thakur : chantre du rythme<br />

et de l’harmonie<br />

Festival<br />

63 Cannes<br />

67èmeFestival de Cannes<br />

Cuisine<br />

66<br />

Les boissons de l’été<br />

04 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Le Mouvement Gadar<br />

Economie<br />

14<br />

Nouvelles<br />

de I’Inde<br />

NUMERO 416<br />

61<br />

Rédacteur en chef :<br />

Apoorva Srivastava, Conseiller (PIC)<br />

Assistante de rédaction :<br />

Viviane Tourtet<br />

Contributeurs du numéro :<br />

Claire Chaigneau<br />

Ewa Tartakowsky<br />

François Chenet<br />

Gaëlle Gicquel<br />

Jean-Luc Estavoyer<br />

Laurent Adiceam-Dixit<br />

L.K. Sharma<br />

Marie-France Calle<br />

Mireille-Joséphine Guézennec<br />

Patricia De Osti<br />

Poonam Chawla<br />

Roland Roudil<br />

Sylvie Schmidt<br />

Shivkumar<br />

Writtwik Banerjee<br />

Graphistes (Media India Group) :<br />

Anita Channer<br />

Ankita Shamsheer<br />

Pratap Singh Shekhawat<br />

Shikha Bahuguna<br />

NOUVELLES DE L’INDE<br />

Ambassade de l’Inde mai-juin 2014 Numéro 415<br />

NOUVELLES DE L’INDE<br />

Ambassade de l’Inde Février-Avril 2014 Numéro 414<br />

Le Sikkim<br />

l’Etat vert de l’Inde<br />

Politique<br />

Les élections en Inde :<br />

système d’organisation<br />

Anniversaire<br />

Abonnez-Vous<br />

Le TamiL Nadu<br />

De la spiritualité à l’aventure<br />

Economie<br />

Histoire Cinéma<br />

L’ambassadeur de l’Ind en France L’Hôte des Maharajahs<br />

La musique de Satyajit Ray<br />

Femmes indiennes<br />

à la tête de grandes<br />

entreprises<br />

Si vous souhaitez être abonnés gratuitement à la revue «<br />

Nouvelles de l’Inde » ou nous envoyer vos commentaires et<br />

vos remarques sur la revue, merci de nous écrire à l’adresse :<br />

agendainde@ambinde.fr<br />

Publié par le Service Presse, Information & Culture de<br />

l’Ambassade de l’Inde en collaboration avec Media India<br />

Group (www.mediaindia.eu, contact@mediaindia.eu) 13 rue<br />

Alfred Dehodencq, 75016 Paris Tél : 01 40 50 50 18 Fax 01<br />

40 50 09 96 E-mail : agendainde@ambinde.fr<br />

Imprimé en France par l’Imprimerie Hérissey, à Evreux<br />

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Politique Visite du Ministre français<br />

Visite du Ministre français des Affaires Etrangères et du Développent<br />

international M. Laurent Fabius en Inde les 30 juin et 1er juillet 2014<br />

©MEA<br />

©MEA<br />

M. Laurent Fabius et Mme Sushma Swaraj<br />

Le Ministre français des Affaires<br />

Etrangères et du Développement<br />

international, Laurent Fabius, a<br />

effectué une visite officielle en Inde les<br />

30 juin et 1er juillet 2014. Ce fut sa<br />

seconde visite en Inde. Auparavant, M.<br />

Fabius avait accompagné le Président<br />

Hollande durant sa visite d’Etat en<br />

Inde en février 2013.<br />

Durant son séjour à New Delhi,<br />

le Ministre des Affaires Etrangères<br />

Rencontre avec le Premier Ministre indien,<br />

M. Narendra Modi<br />

M. Fabius a également rendu<br />

visite au Premier Ministre indien, M.<br />

Narendra Modi et au Ministre de la<br />

Défense et des Finances, M. Arun<br />

s’est entretenu avec son homologue<br />

le Ministre des Affaires Extérieures,<br />

Mme Sushma Swaraj. Les discussions<br />

ont porté sur des sujets bilatéraux,<br />

régionaux et globaux d’intérêt mutuel.<br />

Le Ministre français a fait le point sur<br />

les grands projets dans les secteurs<br />

de la défense, du nucléaire civil, de<br />

l’espace et de la sécurité. Il a évoqué<br />

le développement des échanges<br />

économiques, les partenariats envisageables<br />

avec les entreprises<br />

indiennes, les investissements croisés<br />

ainsi que le développement des liens<br />

touristiques. Les échanges ont permis<br />

par ailleurs d’aborder le renforcement<br />

de nos échanges universitaires et<br />

scientifiques.<br />

Autre domaine évoqué également,<br />

celui de la lutte contre les<br />

dérèglements climatiques, sur<br />

laquelle la France souhaite travailler<br />

en étroite coopération avec l’Inde<br />

dans la perspective de la conférence<br />

“Paris Climat 2015”. Il a participé,<br />

sur ce thème, à une table-ronde avec<br />

le secrétaire d’État indien chargé de<br />

l’environnement.<br />

Jaitley. Plusieurs autres rencontres se<br />

sont déroulées durant sa visite.<br />

L’Inde et la France entretiennent<br />

une relation bilatérale cordiale et<br />

amicale. Les deux pays partagent des<br />

points de vue similaires sur un large<br />

panel de sujets d’intérêt mondial.<br />

La visite du Ministre français des<br />

Affaires Etrangères fut une occasion<br />

pour les deux parties d’approfondir le<br />

partenariat franco-indien.<br />

M. Fabius était accompagné d’une<br />

délégation officielle. Il s’est également<br />

rendu à Mumbai avec sa délégation.<br />

«<br />

Je suis extrêmement<br />

heureux et honoré<br />

d’être ici pour la<br />

première visite<br />

d’un ministre<br />

européen depuis<br />

les élections. Je<br />

suis reconnaissant<br />

au gouvernement<br />

indien de<br />

m’accueillir dans<br />

ces conditions avec<br />

autant de gentillesse<br />

et de chaleur. Ceci<br />

est évidemment<br />

lié à la qualité des<br />

relations entre<br />

l’Inde et la France<br />

et je définirai ces<br />

relations en disant<br />

« confiance » et<br />

»<br />

« partenariat »<br />

Durant son séjour, le Ministre français<br />

a remis à l’acteur indien Bollywood<br />

Shah Rukh Khan la distinction de<br />

Chevalier de la Légion d’honneur pour<br />

sa contribution à la diversité culturelle<br />

dans le monde. n<br />

©MEA<br />

Le Ministre indien des Affaires extérieures, Mme Sushma Swaraj et le Ministre français des Affaires<br />

étrangères et du Développement international, M. Laurent Fabius lors des discussions avec la<br />

délégation française à New Delhi<br />

Le Ministre Laurent Fabius et l’acteur Shah<br />

Rukh Khan<br />

©PTI<br />

06 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Deepak Chopra<br />

Interview<br />

un prophète du<br />

bien-être à paris<br />

L’entreprise était périlleuse mais my WHOLE project,<br />

société représentée par Virginie Lancetti et Jérôme Oliveira,<br />

deux passionnés de la quête du bonheur, a relevé le défi<br />

d’accueillir Monsieur Deepak Chopra à Paris, au Grand<br />

Rex, pour une conférence exclusive. Pari tenu ! Au moins<br />

3000 personnes étaient au rendez-vous le 19 mai 2014.<br />

Pourquoi une telle vague humaine déferlant sur cette scène<br />

où la prose et le verbe de Deepak Chopra font mouche ?<br />

Qui est cet homme qui semble venir d’un autre millénaire ?<br />

De quoi est-il inspiré ? Que nous veut-il ?<br />

Lui-même se pose et pose des<br />

questions quasi existentielles :<br />

comment notre conscience<br />

construit-elle la réalité ?<br />

Sommes-nous en mesure de<br />

transformer notre destinée ? Ou<br />

encore quelle est la prochaine<br />

étape de l’évolution humaine ? Des<br />

thèmes concernant le cœur d’un mal<br />

endémique flottant sur le monde.<br />

Aucun endoctrinement, simplement<br />

une pratique de soi en une<br />

écoute corporelle et sensorielle avec<br />

pour guide : Deepak Chopra.<br />

Américain d’origine indienne, il est<br />

l’auteur de nombreux ouvrages sur la<br />

médecine alternative. Deepak Chopra<br />

est né à New Delhi, en Inde, en 1946.<br />

Fils de l’éminent cardiologue, Krishan<br />

Chopra, il se prédestine au journalisme<br />

mais, ironie du destin, il se passionne<br />

pour la médecine et étudie au All<br />

India Institute of Medical Sciences.<br />

Une fois établi à Boston, il commence<br />

sa carrière en tant que médecin. Mais<br />

désabusé de la médecine occidentale<br />

après un certain temps d’exercice, le<br />

docteur se tourne vers la médecine<br />

alternative. Il développe un intérêt<br />

pour la philosophie existentialiste. En<br />

1995, il a déclaré : « J’ai été motivé<br />

par une fièvre idéaliste à trouver<br />

ce que vous appelez, faute de toute<br />

©Rob Sitbon


Interview Deepak Chopra<br />

autre expression, le sens de la vie. Je<br />

suis toujours aux prises avec cela.»<br />

Deepak comprend aussi que donner<br />

du bien-être aux gens par un pouvoir<br />

de guérison sur l’esprit est bien<br />

mieux que d’administrer à longueur<br />

de journées des médicaments sans<br />

être un fervent pourfendeur de cette<br />

pratique.<br />

Fumer trop de cigarettes, avaler<br />

des tasses de café et des verres<br />

d’alcool n’ont pas ménagé son stress<br />

et sa santé, mais lui ont plutôt porté<br />

atteinte. Il décide de s’attaquer à<br />

cela et s’oriente vers la méditation<br />

transcendantale.<br />

Les réponses à notre santé et<br />

au bonheur peuvent se trouver à<br />

l’intérieur de notre être selon lui. Ses<br />

méthodes ont trouvé un écho auprès<br />

du grand public. Chopra a déjà publié<br />

de nombreux ouvrages, dont plus de<br />

14 best-sellers traduits en plusieurs<br />

langues.<br />

Prolifique auteur, il fonde le Centre<br />

Chopra pour le bien-être à La Jolla,<br />

station balnéaire, en Californie, Etats-<br />

Unis.<br />

Beaucoup deviennent des adeptes<br />

de Chopra et expérimentent ses<br />

conseils. Les médias américains<br />

l’ont appelé « nouvelle superstar<br />

de l’âge de guérison ». En 1996, le<br />

magazine Time contribue à son éloge :<br />

« Chopra a peut-être fait plus que<br />

quiconque aux États-Unis pour créer<br />

un vocabulaire à l’intersection de la<br />

foi et de la médecine. » La médecine<br />

traditionnelle lui prête oreille et de<br />

ce fait la médecine alternative en fait<br />

de nouveaux pionniers parmi eux.<br />

En outre, Deepak propose un autre<br />

modèle de société. Intervenant à<br />

l’ONU, il y a fondé le projet « Alliance<br />

pour une nouvelle humanité. »<br />

Mais le petit plus de Deepak<br />

Chopra, c’est qu’il explore la Terre<br />

de ses ancêtres et popularise en<br />

Occident la sagesse, la médecine<br />

douce, et les techniques venues<br />

de ses contrées et les expose sans<br />

vergogne à la lumière des avancées<br />

scientifiques contemporaines. Même<br />

s’il est complètement dévot, il expose<br />

peu sa croyance dans ses conférences,<br />

il préfère utiliser le terme :<br />

« spiritualité ».<br />

Son but est de faire prendre<br />

conscience à toute personne qu’il y<br />

a une réflexion essentielle pour le<br />

maintien et le perfectionnement de la<br />

santé du corps comme celle de l’esprit<br />

qui s’assimile au bien-être individuel<br />

et collectif.<br />

©Rob Sitbon<br />

On ne peut qu’être à l’écoute de<br />

cet homme qui prône le bonheur sans<br />

mysticisme et qui a forgé sa réputation<br />

grâce à ses « fidèles ».<br />

Décryptage de la conférence du 19<br />

mai 2014 : des outils et des clefs<br />

pour notre bien-être.<br />

Les deux premières questions<br />

d’emblée sont : qui suis-je et quelle<br />

est ma connexion avec l’Univers ? Et<br />

de quoi l’Univers est-il constitué ?<br />

Des questions qui nous situent<br />

mais qui ne nous déterminent pas. A<br />

chacun de veiller à son introspection<br />

pour trouver sa route, son chemin,<br />

je dirais sa voie dans le sens le plus<br />

spirituel possible nous menant à<br />

l’éveil et la sérénité. Deepak nous fait<br />

un cours scientifique sur l’univers pour<br />

comprendre que nous sommes liés à<br />

lui et lui à nous et que les éléments<br />

biologiques qui gravitent font la Vie,<br />

une Vie consciente avec des êtres<br />

conscients.<br />

Deepak emploie le terme « Qualia »<br />

qui désigne les propriétés de la<br />

perception et généralement de<br />

l’expérience sensible. C’est ce qu’on<br />

ressent lorsqu’on perçoit ou l’on sent<br />

quelque chose : qu’est-ce que ça fait de<br />

voir une rose par exemple ? Les qualia<br />

constituent ainsi l’essence même de<br />

l’expérience de la vie et du monde.<br />

Ce sont des phénomènes psychiques<br />

et donc subjectifs, constitutifs des<br />

états mentaux comme le S.I.F.T : (en<br />

anglais : Sensation, Image, Feeling and<br />

Thought : Sensation, Image, Emotion<br />

et Pensée). Je traduirais « Qualia » par<br />

origine.<br />

En jonglant avec les mots :<br />

gènes, télomère, synapses, opiats,<br />

sérotonine, dopamine, vasopressine,<br />

j’en passe et des meilleurs ! Car il<br />

ne faut pas oublier que Deepak est<br />

médecin et ce jargon-là, il le maîtrise<br />

parfaitement et l’exploite dans tous<br />

ses fondements et théories.<br />

De manière plus philosophique<br />

et prosélytique, Deepak nous fait<br />

l’enseignement de ses Sages, il cite<br />

souvent en exemple le poète mystique<br />

persan du XIIIe siècle : Rûmî, qui, a<br />

largement influencé le Soufisme.<br />

« Nous sommes l’océan dans la<br />

goutte d’eau » ce qui signifie que nous<br />

sommes l’entité mère qui produit les<br />

connexions avec ce qu’elle a pour<br />

essence en elle-même. L’infiniment<br />

grand dans l’infiniment petit.<br />

©Rob Sitbon<br />

08 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Le Coin des Enfants Le lac de la Lune<br />

©Rob Sitbon<br />

Il a évoqué un nombre de paroles<br />

sages pour que l’on prenne conscience<br />

de l’essentiel. Et après cela il s’est mis<br />

à marcher tout le long de la scène<br />

en effectuant des allers-retours pour<br />

nous dire que la motricité du corps<br />

est importante : le sommeil, le sport et<br />

l’alimentation, régissent aussi la bonne<br />

aptitude à accroître nos défenses<br />

naturelles. Mais qu’au-dessus de cela,<br />

il faut méditer, être à l’écoute de soi, de<br />

son corps. La méditation n’est pas une<br />

affaire de raison, elle va plus loin que<br />

cela, c’est une pratique universelle.<br />

Nous avons eu droit, en ce jour, à une<br />

leçon de méditation collective, tout le<br />

public s’est plié au jeu.<br />

Le moment présent fournit l’énergie<br />

même « Il faut aller au-delà de l’esprit,<br />

vers un état de silence profond, d’un<br />

état tout de même présent mais<br />

paisible, c’est la méditation ! » Deepak<br />

souligne aussi que le temps est une<br />

qualité de la conscience et que le Yoga<br />

est une bonne forme de discipline<br />

pour forger son bonheur.<br />

Selon Deepak Chopra, l’équation<br />

du Bonheur se résume ainsi :<br />

B = R + C + A<br />

Bonheur = Réglage de base<br />

+ Conditions de vie + Activités<br />

volontaires<br />

R : Le réglage de base du cerveau<br />

doit être sur des ondes positives. Il est<br />

possible de décider de vivre heureux et<br />

de programmer son cerveau pour l’être.<br />

C : Cela porte sur nos facultés<br />

d’adaptation. Tout le monde a à vivre<br />

des étapes dans sa vie. La résilience<br />

émotionnelle, la faculté de rebondir<br />

après une épreuve, aident à améliorer<br />

nos conditions de vie.<br />

A : Il s’agit des activités qui nous<br />

rendent heureux. Les activités de<br />

communauté ou de création rendent<br />

plus heureux que les activités<br />

personnelles (bon repas, Shopping,<br />

etc.).<br />

Deepak a trouvé en Dieu, GOD<br />

en anglais l’acronyme suivant :<br />

Generation – Organisation – Delivery.<br />

« Si vous observez le Christianisme, le<br />

Judaïsme, l’Hindouisme ou l’Islam, vous<br />

trouverez Dieu. La meilleure façon de<br />

penser à Dieu / GOD est : Génération,<br />

Organisation et Livraison. »<br />

Les deux premiers mots parlent<br />

d’eux-mêmes. La Livraison comprend<br />

également la Destruction, afin que<br />

vous puissiez reconstruire. Les trois<br />

forces de la nature sont la création<br />

Deepak Chopra vous invite<br />

à consulter gratuitement<br />

ces méthodes sur<br />

www.deepakchopra.com<br />

(générationnelle), l’Organisation, la<br />

dissolution puis encore la création (le<br />

renouvellement perpétuel).<br />

Je pourrais vous faire l’état de toute<br />

la conférence avec beaucoup d’autres<br />

équations gravitant autour de nous,<br />

mais déjà, ces propos recueillis à forte<br />

teneur en réflexion et en conseils vous<br />

mèneront indéniablement à la quête<br />

du bonheur.<br />

Vous l’aurez compris, Deepak<br />

Chopra nous veut que du bien, en<br />

thérapeute averti, en usant de véritables<br />

archétypes d’une philosophie ordinaire,<br />

il vous promet les béatitudes d’une vie<br />

mais pas n’importe quelle vie ! Savezvous<br />

laquelle ? …Elle est pourtant<br />

simple comme bonjour. n<br />

Laurent Adicéam-Dixit<br />

©Rob Sitbon<br />

Nouvelles De L’Inde juillet-août 2014<br />

09


Hommage Jean Biès<br />

L’Inde au miroir de l’œuvre<br />

de Jean Biès<br />

Essayiste, poète, Jean Biès nous a quittés le 11 janvier dernier et nous<br />

avons souhaité lui rendre un hommage particulier dans ce numéro<br />

avec des extraits d’un article de François Chenet de l’Université de<br />

Paris-Sorbonne (Paris-IV).<br />

Il existe une chaîne de “ passeurs “ ou<br />

d’” intercesseurs “ ayant fait office<br />

de médiateurs dans la réception<br />

de l’Inde en Europe lors même que<br />

l’Inde offrait aux Occidentaux l’image<br />

d’une civilisation complexe, faite<br />

d’apports linguistiques, religieux et<br />

intellectuels multiples. À cette chaîne<br />

qui vibre dans le cercle du temps,<br />

nous devons désormais rattacher,<br />

dernier maillon de la chaîne, Jean Biès,<br />

universitaire, écrivain et essayiste, que<br />

son étude magistrale de la réception<br />

même de l’Inde dans la littérature<br />

française, Littérature française et<br />

Pensée hindoue, des origines à 1950,<br />

qualifiait précisément, mieux que nul<br />

autre, pour tenter à son tour de cerner<br />

et de mettre en perspective le génie<br />

de l’Inde.<br />

Jean Biès publia sa Thèse de<br />

doctorat d’État, Littérature française<br />

et pensée hindoue, des origines à<br />

1950, ouvrage magistral (couronné<br />

du Prix de l’Asie par l’Académie des<br />

Sciences d’Outre-mer) consacré à la<br />

réception de l’Inde dans la littérature<br />

française et plus généralement aux<br />

apports de l’Inde à la France et à<br />

l’Occident. Portant sur tous les genres<br />

- récits de voyage, essais, romans,<br />

théâtre et poésie -, l’enquête suit<br />

la réception de l’Inde et les apports<br />

de l’Inde à la France et à l’Occident,<br />

des fables de La Fontaine à la<br />

sympathie militante d’un Voltaire, à<br />

l’enthousiasme d’un Michelet et d’un<br />

Lamartine, de Leconte de Lisle à ces<br />

grands « pèlerins du monde occidental<br />

» — intercesseurs ou “passeurs” — que<br />

furent en leur temps Romain Rolland,<br />

René Guénon, Lanza del Vasto et René<br />

Daumal.<br />

Par la suite, l’occasion de<br />

mieux cerner le génie de l’Inde fut<br />

précisément son propre voyage en<br />

Inde au début des années 1970,<br />

lequel lui permit, en dépassant<br />

la surface et en crevant l’écran,<br />

d’enrichir d’harmoniques nouvelles<br />

l’image qu’offre aux Occidentaux<br />

l’Inde. De ce voyage dont on sent qu’il<br />

fut plutôt une quête, est née L’Inde<br />

ici et maintenant. Lettres du Pays de<br />

l’Être, ouvrage réédité sous le titre Les<br />

Chemins de la ferveur. Voyage en Inde.<br />

C’est au genre « journal de route<br />

géographique et spirituel » que<br />

ressortissent L’Inde ici et maintenant.<br />

Lettres du Pays de l’Être / Les Chemins<br />

de la ferveur. Voyage en Inde. Le rapport<br />

de Jean Biès à l’Inde est placé sous le<br />

signe de deux sources d’inspiration<br />

majeures : la pensée de René Guénon<br />

et celle de Carl Gustav Jung. Ces deux<br />

sources d’inspiration se croisant,<br />

Jean Biès était dès lors en mesure de<br />

porter un regard tout à fait original et<br />

singulièrement éclairant sur l’Inde, ce<br />

qui lui permit de développer en regard<br />

une analyse spectrale de la civilisation<br />

occidentale et une généalogie de<br />

l’Occident d’une rare acuité et<br />

justesse. Certaines de ses réflexions<br />

seront par ailleurs développées par<br />

Jean Biès dans deux essais non<br />

moins remarquables Passeports<br />

pour des temps nouveaux et Retour<br />

à l’Essentiel. Quelle spiritualité pour<br />

l’homme d’aujourd’hui ?, ainsi que<br />

dans d’autres de ses ouvrages. En fait,<br />

c’est l’œuvre tout entière de Jean Biès<br />

qui se nourrit non seulement d’une<br />

constante référence à l’Inde, mais bien<br />

plus « d’une fraternité avec le génie de<br />

l’Inde » .<br />

L’Inde au sein du parcours biobibliographique<br />

Jean Biès a passé sa jeunesse en<br />

Algérie et c’est à Alger qu’il rencontra<br />

à vingt-ans celle qui allait devenir<br />

son épouse, Rolande-Hélène qui<br />

connaissait déjà Jean Herbert et était<br />

disciple du Swâmi Siddhesvarânanda<br />

(du Centre védântique de Gretz)<br />

et de Brahmânanda, le disciple de<br />

Ramakrishna. C’est ainsi que la<br />

rencontre de Jean Biès avec l’Inde<br />

fut médiée par celle qui avait reçu<br />

pour nom religieux l’auguste nom de<br />

Tarini. À la suite de cette rencontre<br />

providentielle, Jean Biès allait se<br />

familiariser toujours davantage<br />

et entrer en communion avec les<br />

grandes figures de l’Hindouisme et du<br />

Néo-Hindouisme. Parmi ces figures,<br />

il a une dilection particulière pour<br />

celle de Râmakrishna et celle de Shrî<br />

Aurobindo, ainsi que pour celle du<br />

Swâmi Râmdâs.<br />

À travers Râmakrishna, je puis<br />

dire que c’est à l’Inde que j’ai dû<br />

de découvrir dans le christianisme<br />

quelque chose de beaucoup plus<br />

important que ne le soupçonnaient<br />

la plupart des chrétiens eux-mêmes,<br />

et de commencer à m’intéresser à la<br />

religion où j’étais né avec l’attention et<br />

la révérence qu’elle requiert.<br />

Shrî Aurobindo est l’autre<br />

référence élective de Jean Biès. Au<br />

génie visionnaire et à l’immense<br />

penseur qui au XXe siècle réinvestit<br />

et réinterprète à sa manière les<br />

grandes thématiques des religions et<br />

philosophies de l’Inde, il consacre des<br />

pages brillantes et bien informées.<br />

Dans L’Inde ici et maintenant. Lettres<br />

du Pays de l’Être / Les Chemins de<br />

la Ferveur, deux chapitres, intitulés<br />

« Autour du Samadhî » et « Dans<br />

10<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles De L’Inde


Jean Biès<br />

Hommage<br />

l’enfance du futur », lui sont consacrés<br />

à l’occasion de la description de<br />

Pondichéry. Que le tropisme de Jean<br />

Biès pour l’Inde aille de pair avec<br />

une fort bonne connaissance de<br />

cette dernière, c’est ce qu’attestent<br />

les présentations qu’il a données<br />

de certaines grandes figures dans<br />

Les Grands Initiés du XXe s. et dans<br />

Voies de Sages. Douze maîtres<br />

spirituels témoignent de leur vérité :<br />

les présentations de Shrî Aurobindo,<br />

de Mère et de Satprem, de Râmana<br />

Maharshi, du Swâmi Râmdâs, de<br />

Krishnamurti, de Mâ Anandamayî, de<br />

Nisargadatta Maharaj, du Dalaï Lama,<br />

mais aussi de Jean Herbert, d’Henri<br />

Le Saux et d’Arnaud Desjardins sont<br />

des modèles du genre.<br />

Voici donc Jean Biès entré en<br />

sympathie, presque en fraternité,<br />

avec l’Inde à telle enseigne qu’il<br />

y effectuera en 1973 un voyage<br />

d’où il devait ramener L’Inde ici et<br />

maintenant. Lettres du Pays de l’Être<br />

/ Les Chemins de la ferveur. Voyage<br />

en Inde : le voici en quête d’« une<br />

terre primordiale, arborescente<br />

et visionnaire, moins située dans<br />

l’espace qu’à un certain niveau de la<br />

conscience humaine, flottant entre le<br />

temps et l’éternité comme un grand<br />

navire chargé de forêts et de villes »<br />

. Si l’on est en droit de juger que ce<br />

récit remarquable d’intelligence, de<br />

finesse et de sensibilité est de loin<br />

le meilleur jamais écrit sur l’Inde,<br />

c’est parce que Jean Biès réussit ce<br />

tour de force d’allier une justesse<br />

d’observation, une clairvoyance dans<br />

l’analyse et une érudition sans faille à<br />

une forme littéraire éblouissante aussi<br />

éloignée que possible de la pesanteur<br />

universitaire. Le récit de ce voyage en<br />

Inde est, en effet, servi par la grâce<br />

d’une prose poétique dont le style<br />

fluide et inventif, le style vibratile —<br />

style en parfaite adéquation avec ce<br />

milieu vibratoire qu’est l’Inde —, laisse<br />

apparaître ce tremblement léger qui<br />

fait le prix d’un livre : le plaisir de<br />

lire et de vibrer est constant dans ce<br />

livre qui nous convie à une fête de<br />

l’intelligence et du style.<br />

Par ailleurs, l’œuvre poétique de<br />

Jean Biès procède également d’une<br />

inspiration qui fait consciemment<br />

signe vers l’Inde : sa poétique puise<br />

aux sources orientales dès lors que la<br />

poésie, conçue « comme un exercice<br />

spirituel, à l’exemple de la Savitri<br />

d’Aurobindo » , y participe de ce<br />

qu’il est permis d’appeler, avec René<br />

Daumal, un Kâvya-yoga, un « Yoga<br />

poétique » . Plusieurs magnifiques<br />

poèmes de son Miroir de Poésie<br />

évoquent l’Inde.<br />

La spécificité du voyage en Inde<br />

selon Jean Biès<br />

Aucun récit n’a su décrire avec<br />

autant de justesse le paradoxe de tout<br />

voyage en Inde.<br />

Dès lors, qu’est-ce que voyager en<br />

Inde, sinon pratiquer l’introspection<br />

sous couvert de tourisme, et en<br />

se promenant à travers le pays,<br />

se reconnaître dans son miroir, se<br />

retrouver, se réconcilier avec soi<br />

et les autres, redevenir unité ? [...]<br />

Contempler l’Inde, c’est se préparer à<br />

la contemplation de notre profondeur,<br />

rejoindre notre essence par-delà<br />

la bigarrure phénoménale. [...]En<br />

sorte que n’y aurait-il plus un seul<br />

gourou dans toute l’Inde, que le<br />

voyage à travers ce pays éprouvant,<br />

déconcertant, incompréhensible<br />

comme seul peut l’être pour son<br />

disciple un maître spirituel, serait<br />

encore à lui seul une véritable<br />

sâdhanâ.<br />

Cela dit, Jean Biès se garde bien<br />

d’idéaliser l’Inde, attendu qu’il ne<br />

méconnaît pas pour autant la part<br />

d’ombre que recèle l’Inde.<br />

L’Inde au prisme de René Guénon<br />

C’est essentiellement à la lumière<br />

du métaphysicien René Guénon que<br />

Jean Biès aborde l’Inde. De la pensée<br />

de René Guénon il retient un certain<br />

nombre de thèmes, soulignant par<br />

là l’historialité de sa pensée, mais en<br />

se gardant toutefois de souscrire à<br />

certaines de ses assertions excessives<br />

et de verser dans son impatience<br />

apocalyptique assénée sur un ton<br />

péremptoire. Toujours est-il que<br />

c’est René Guénon qui lui révéla «<br />

l’opposition du sacré et du profane,<br />

la distinction entre ésotérisme et<br />

exotérisme, la doctrine des cycles,<br />

le langage symbolique, l’unité<br />

fondamentale des traditions, le procès<br />

du matérialisme et du scientisme, le<br />

chaos social, la primauté de l’action<br />

pour l’action » . R. Guénon est<br />

surtout invoqué à un double titre,<br />

pour sa doctrine “traditioniste” ou<br />

“pérennialiste” (ainsi qu’on a pu la<br />

qualifier afin de la distinguer du simple<br />

traditionalisme), d’une part, et en<br />

sa qualité d’auteur de l’Introduction<br />

générale à l’étude des doctrines<br />

hindoues (1921) et de L’Homme et<br />

son devenir selon le Vedânta (1925),<br />

de l’autre, R. Guénon apparaissant à<br />

Jean Biès comme « un pandit de la<br />

plus pure orthodoxie védântique » .<br />

De fait, l’Inde donne à connaître<br />

une culture qui vit dans le sacré,<br />

replaçant la vie individuelle et<br />

collective dans un nœud de symboles<br />

qui la relie au divin, lui conservant un<br />

sens : « Existe encore en Inde ce qui<br />

assure la durée des civilisations, et<br />

dont l’oubli précipite leur fin : le sens<br />

du mystère et du sacré, dont nous<br />

sommes affranchis » . Au plus loin de<br />

l’humanisme prométhéen de l’homme<br />

moderne fondé sur une révolte contre<br />

Dieu et la “tradition”, l’homme hindou<br />

est avant tout « un homme heureux,<br />

parce que relié » , et il est permis de se<br />

demander s’il n’est pas plus heureux<br />

dans son monde où le merveilleux<br />

est palpable dans un quotidien<br />

illuminé par une foi que nous sommes<br />

incapables de comprendre. Jean Biès<br />

confie à cet égard :<br />

Ce que j’ai ressenti en Inde, c’est que<br />

je m’y sentais beaucoup plus à l’aise<br />

que dans l’Occident sceptique, blasé,<br />

cynique qu’il est devenu ; une Inde où<br />

l’on peut se dire croyant sans honte<br />

ni complexe d’infériorité. L’air y est<br />

encore tellement saturé de sacré que<br />

les attitudes et croyances religieuses<br />

y apparaissent comme totalement<br />

normales et naturelles ; c’est le<br />

contraire qui ne le serait pas ; comme<br />

on le voit dans l’Occident moderne,<br />

où le véritable spirituel est presque<br />

condamné à la clandestinité. Même<br />

si l’Inde elle-même est détériorée, sur<br />

ces relations les plus spontanées avec<br />

le spirituel les Indiens ont beaucoup<br />

à nous apporter. Je me demande<br />

d’ailleurs si notre distinction du sacré<br />

et du profane n’est pas encore un fruit<br />

de l’Arbre dualiste. J’observe plutôt<br />

que le sacré imprègne ici jusqu’au<br />

profane, et mieux, que le profane<br />

n’est pas. [Au contraire], l’Occident<br />

est ainsi devenu insensiblement une<br />

immense liturgie à rebours, fondée sur<br />

tout ce qui peut détruire la beauté,<br />

colmater toutes chances d’élévation,<br />

de dépassement... Le Kali-yuga n’est<br />

pas seulement le temps où il n’y a<br />

plus que des problèmes sans solution,<br />

ni celui où le sacral cesse d’exister. Il<br />

est le temps où tout ce qui s’oppose<br />

fondamentalement au spirituel se fait<br />

passer pour spirituel.<br />

Avec René Guénon, Jean Biès<br />

partage la vision hindoue traditionnelle<br />

d’un temps fondamentalement<br />

cyclique, scandé par une succession<br />

de cycles de durée décroissante,<br />

— Satya-yuga, Tretâ-yuga, Dvâpara-<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

11


Hommage Jean Biès<br />

yuga et, enfin, le fameux Kali-yuga,<br />

« période d’obscuration croissante<br />

en tous domaines, somme de<br />

tous les désordres et de toutes<br />

les monstruosités, où la “ nuit<br />

intellectuelle “ envahit et submerge les<br />

dernières enclaves de la Connaissance,<br />

où toutes choses se trouvent<br />

inversées dans “ l’abomination et la<br />

désolation “ » . Doctrine à l’opposite<br />

de la croyance occidentale au temps<br />

linéaire et progressiste, et qui fait<br />

l’objet d’exposés tout à fait précis et<br />

bien informés sous la plume de Jean<br />

Biès .<br />

Autre notion cardinale de la<br />

conception hindoue traditionnelle, la<br />

notion de Dharma ou d’Ordre sociocosmique<br />

: Le Dharma — “ principe<br />

de conservation des êtres et de<br />

stabilité “ — assure la conformité<br />

à cet ordre. [...] L’ordre social tout<br />

entier voulu par le Dharma repose<br />

sur l’institution des castes, si mal<br />

comprise des Occidentaux, mais dont<br />

la méconnaissance n’entraîne que<br />

désordre et confusion. Cette institution<br />

correspond en fait à une répartition<br />

des êtres humains en conformité avec<br />

“ l’essence individuelle “, la nature de<br />

chacun.<br />

Une relecture originale de l’Histoire<br />

devient dès lors possible :<br />

On ne s’avise pas d’une chose, c’est<br />

que nous sommes arrivés au temps où<br />

les quatre castes ont successivement<br />

joué leur rôle sur la scène de l’Histoire :<br />

les clercs, puis les guerriers, puis les<br />

marchands, enfin le peuple. Or, si l’on<br />

suit l’évolution de chacune de ces<br />

castes, on constate que chacune a<br />

d’abord choisi, — je schématise — ,<br />

le chemin d’en haut, puis, à mesure<br />

de son épuisement, celui d’en bas.<br />

Prenons la caste sacerdotale des<br />

Brahmanes. On la voit se situer<br />

d’abord en direction de la sagesse et<br />

de la sainteté ; elle est détentrice de la<br />

connaissance. Elle s’altère, dégénère<br />

en cléricalisme institutionnel,<br />

s’enferme dans un dogmatisme<br />

autoritaire et finit par se dissoudre,<br />

attaquée de l’extérieur, et se minant<br />

elle-même de l’intérieur. Prenons<br />

la caste guerrière des Ksatriya, —<br />

pouvoir temporel se révoltant contre<br />

l’autorité spirituelle, ce qui n’est pas<br />

sans rappeler chez nous les conflits<br />

entre Papes et Empereurs — ,<br />

elle s’illustre d’abord dans l’héroïsme<br />

chevaleresque, se montre “ généreuse<br />

“, ritualise la guerre, établit une<br />

hiérarchie fondée sur la noblesse.<br />

Elle s’altère à son tour, s’érige en<br />

dictature et s’effondre. Lui succède<br />

la caste marchande des Vaiçya, —<br />

les Vaiçya à leur tour ont usurpé<br />

la place des Ksatriya : tel a été le<br />

sens de la révolution de 1789 — ,<br />

caste qui détient la richesse, l’ennoblit<br />

en la mettant au service de l’art et<br />

du prestige, jusqu’au moment où<br />

la cupidité des “ nouveaux riches “<br />

l’emporte sur la magnificence, où<br />

le capitalisme sauvage évacue des<br />

métaux toute trace de spiritualité,<br />

exalte les seules valeurs mercantiles.<br />

Lui succède la caste populaire<br />

des Çûdra, — tel est le sens de la<br />

révolution bolchevique —, caste<br />

qui domine aujourd’hui et suit la<br />

même courbe que les précédentes.<br />

On la voit d’abord s’embourgeoiser,<br />

adopter un conformisme ennuyeux<br />

qui a perdu tout le pittoresque,<br />

le poétique du peuple, n’a plus<br />

d’imagination créatrice. L’entropie<br />

vient aussi pour elle, endormie<br />

dans son autosatisfaction, qui se<br />

laisse envahir par la vulgarité et le<br />

nivellement. La première caste était<br />

régie par l’être et le savoir, la seconde<br />

par l’agir et le pouvoir, la troisième<br />

par l’avoir et le paraître ; la dernière<br />

l’est par l’instabilité perpétuelle et la<br />

massification.<br />

La disparition des castes,<br />

dégénérées en classes sociales<br />

— « contrefaçon sans valeur ni<br />

portée », selon R. Guénon — ,<br />

coïncide avec la dernière phase<br />

du cycle et aboutit à une égalité<br />

artificielle et totalitaire, destructrice<br />

de toute vocation.<br />

Or, nul ne se pose la question :<br />

quid après la dernière caste ? La voilà<br />

submergée peu à peu par les horscastes,<br />

les cohortes incontrôlables<br />

des hooligans, des trafiquants de<br />

drogue, des terroristes, des mafieux<br />

de haut vol ; tout un monde grouillant,<br />

s’activant dans les bas-fonds comme<br />

dans les hautes sphères, s’appliquant à<br />

détruire les vestiges de la démocratie.<br />

L’Inde au prisme de Carl Gustav<br />

Jung<br />

Pour Jean Biès, synthétique et<br />

intuitif, le symbole non seulement<br />

offre des motifs d’évocation indéfinie,<br />

mais encore, dans la mesure où il<br />

est à la fois spirituel et matériel, lie<br />

ensemble le haut et le bas.<br />

L’Inde nous apprend à<br />

désapprendre. Elle nous introduit<br />

à une forme de pensée archaïque,<br />

synthétique où chaque symbole,<br />

chaque mythe recouvre une<br />

superposition de sens qui dévoilent<br />

leur richesse à mesure de la propre<br />

maturation de chacun, alors que l’esprit<br />

de platitude cogne désespérément<br />

aux vitres du littéralisme.<br />

Je ne vois que nos mythologies<br />

qui aient conservé des descriptions<br />

partielles, parfois défigurées, de ce<br />

monde intérieur édifiées à partir<br />

d’éléments externes, et posé un<br />

système cohérent d’analogies à<br />

interpréter. [...] Nous avons trop<br />

longtemps délaissé les enseignements<br />

mythologiques, faute de n’en avoir<br />

pas gardé les clés, et cela, pour le<br />

pire appauvrissement de la psyché<br />

occidentale. L’Inde n’a jamais oublié,<br />

au contraire, le code initiatique de ces<br />

enseignements.<br />

Or, les symboles se donnent<br />

comme médiateurs du domaine<br />

psychique.<br />

La doctrine jungienne des types<br />

psychologiques reliés aux quatre<br />

grandes fonctions entre lesquelles se<br />

partage la psyché inspire encore à<br />

Jean Biès un rapprochement original<br />

et suggestif : le Râja-yoga serait lié à<br />

l’Intuition, le Jñâna-yoga à la Pensée,<br />

le Bhakti-yoga au Sentiment et le<br />

Karma-yoga à la Sensation .<br />

De Jung Jean Biès retient encore<br />

l’idée directrice que « Contraria sunt<br />

complementa, selon l’antique devise »<br />

. Justement « l’une des grandes leçons<br />

de l’Orient, de l’Inde en particulier,<br />

c’est qu’il faut non pas séparer pour<br />

opposer, mais inclure selon des<br />

niveaux de réalité, des points de vue<br />

différents » :<br />

Pour l’Occident, A ne peut être à<br />

la fois identique à B et différent de B<br />

; pour l’Orient, A peut être identique<br />

à B, différent de B, identique à B et<br />

différent de lui, ni identique à B, ni<br />

différent de lui [où l’on reconnaît le<br />

fameux tétralemme (catuhkoti), ce<br />

schème de pensée qu’affectionne le<br />

Bouddhisme Madhyamaka et qui est<br />

un défi pour la logique occidentale].<br />

À l’encontre d’une pensée analytique,<br />

séparatrice, unilatérale, incomplète,<br />

sensible aux dualités, aux dichotomies,<br />

— et par là, à l’origine de conflits et<br />

d’oppositions incessants , — l’Orient<br />

apporte une pensée synthétique,<br />

englobante, unitive, conciliant et<br />

dépassant les paires d’opposés.<br />

Aussi Jean Biès peut-il interpréter<br />

« le non-dualisme comme cette<br />

conception philosophique qui ne<br />

scinde ni ne sépare, mais réunit,<br />

concilie, transcende les polarités.<br />

12 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Jean Biès<br />

Hommage<br />

Conception du monde unitive,<br />

inclusive, synthétique, alors que la<br />

nôtre se perd en analyses du multiple,<br />

oppose, exclut » .<br />

Dans ces conditions, l’on conçoit<br />

que Jean Biès puisse alors rapprocher<br />

le Soi jungien et l’âtman des hindous :<br />

Jung dit du Soi qu’il est « une sorte<br />

de Dieu » en nous. [...] Il est pour lui<br />

l’harmonisation aboutie de toutes<br />

les composantes de l’inconscient,<br />

obtenue par équilibrages simultanés<br />

: la voie du milieu juste, celle de la<br />

sagesse, beaucoup plus que par une<br />

ascèse mystique, la voie de la sainteté.<br />

Mais on a parfois l’impression que<br />

le Soi jungien échappe parfois à son<br />

concepteur, se hausse au-dessus de<br />

lui-même pour se rapprocher plus<br />

nettement d’une réalité métaphysique.<br />

C’est l’extrême résultat du processus<br />

d’individuation, qui n’est pas sans<br />

rappeler le symbolisme de la croix.<br />

Le « polythéisme de l’âme »<br />

Jean Biès est sensible aux<br />

bénéfices du polythéisme hindou.<br />

Dans une perspective jungienne,<br />

il est clair que pareil polythéisme,<br />

avec son éventail de figures divines<br />

incarnant les divers archétypes<br />

existentiels, apparaît davantage<br />

de nature à satisfaire les besoins<br />

psychiques de l’homme sous la forme<br />

d’un « polythéisme de l’âme » (pour<br />

reprendre l’expression de James<br />

Hillman), tandis qu’en Occident, au<br />

contraire, « névroses et psychoses<br />

sont les trous laissés dans l’âme par<br />

les dieux, une fois que les hommes les<br />

en ont chassés », comme dit joliment<br />

Jean Biès .<br />

Grâce à son polythéisme,<br />

l’hindouisme se montre beaucoup plus<br />

tolérant que les religions abrahamiques :<br />

Vivre au milieu de plusieurs<br />

millions de dieux tend à les faire<br />

considérer sinon comme équivalents,<br />

du moins comme tous valables<br />

ou respectables. Il est certain, au<br />

contraire, que Yavhé, Allâh et le Dieu<br />

trinitaire présentent, surtout du point<br />

de vue exotérique, qui est à peu près<br />

le seul retenu, des incompatibilités<br />

flagrantes. Le monothéisme exclusif<br />

conduit forcément à un niveau<br />

passionnel, volitif, sentimental ; il a<br />

des démangeaisons d’un intolérable<br />

prosélytisme. [...] Aux anathèmes<br />

réciproques entre juifs, chrétiens et<br />

musulmans, même si des tentatives<br />

de rapprochement ont lieu depuis<br />

quelque temps, je préfère de beaucoup<br />

le fait que les Vishnouïtes, dans leurs<br />

litanies des noms de Vishnou, incluent<br />

celui de Shiva, et que les shivaïtes,<br />

dans leurs litanies de noms de Shiva,<br />

incluent celui de Vishnou.<br />

« L’Ynde ou la profuse priorité<br />

féminine »<br />

N’hésitant pas à faire un jeu de mots,<br />

digne de la « langue des oiseaux », avec<br />

le Yin du couple de polarités Yin/Yang,<br />

Jean Biès célèbre la prédominance du<br />

Yin et de la polarité féminine en Inde<br />

: « L’YNDE, c’est, d’abord et partout,<br />

cette profuse priorité féminine. »<br />

« Toujours honorée en Inde,<br />

la féminité y imprime une<br />

douceur, une grâce exquise,<br />

nuancée parfois de mélancolie. »<br />

Parmi les connaisseurs de l’Inde il est<br />

l’un des rares à avoir compris que<br />

l’Inde, derrière une façade patriarcale,<br />

est en fait un matriarcat ou du moins<br />

conserve des traces d’un matriarcat<br />

d’origine, s’il est vrai que les femmes<br />

en Inde sont le réceptacle de la divine<br />

shakti.<br />

L’Inde au prisme de l’Alchimie<br />

Autre approche des plus originales<br />

de l’Inde, celle qui l’aborde à la<br />

lumière de l’Alchimie. aux yeux de<br />

Jean Biès, c’est en Inde que l’Alchimie<br />

trouve son lieu d’élection : « L’Inde,<br />

qui n’a point renié son “ ombre “,<br />

est, aujourd’hui encore, tout entière<br />

alchimique, Alchimie à l’état sauvage<br />

» . De fait, des correspondances se<br />

décèlent entre l’Inde et « l’Art royal, le<br />

Tantra-Yoga de l’Occident » . A la suite<br />

de Jung, Jean Biès puisse tenir que<br />

l’Alchimie offre assez d’éléments<br />

pour constituer un véritable “ yoga de<br />

l’Occident “. [...] Il y a dans l’héritage<br />

de l’Occidental de quoi lui rendre les<br />

possibilités de son propre yoga en<br />

tant que voie autochtone, complète,<br />

originale. Il semble que l’Alchimie, qui<br />

Bibliographie de Jean Biès (sélection) :<br />

perpétue l’art sacerdotal de l’ancienne<br />

Égypte et procure un moyen d’union<br />

au principe divin en faisant passer de<br />

la mort à la résurrection, corresponde<br />

bien à la définition qu’on peut donner<br />

du “ yoga “.<br />

Auteur d’une œuvre qui brille d’un<br />

éclat singulier, Jean Biès est ainsi le<br />

dernier à s’inscrire dans cette théorie<br />

des “ passeurs “ ou “ intercesseurs “<br />

qui ont assuré la réception de l’Inde<br />

en Occident. Parmi le cortège de ces<br />

« passeurs » la figure de Jean Biès se<br />

singularise en ce qu’elle se présente<br />

comme celle d’un éveilleur de l’âme<br />

doublé d’un enchanteur : quelle<br />

merveille de rencontrer en celui qui<br />

se définit comme « un Montaigne<br />

qui aurait lu Shankara » un être<br />

pleinement individué au sens jungien<br />

du terme !<br />

Tant de pèlerinages aux<br />

sources, s’interroge-t-il, finirontils<br />

par transformer l’intelligence<br />

de l’Européen, ses approches<br />

des problèmes, sa sensibilité, son<br />

comportement ?... L’eau qu’il en<br />

rapporte se sera-t-elle échappée<br />

tout entière des valises, quand il les<br />

ouvrira, de retour chez lui ?... Sur tant<br />

de milliers de pèlerins, il ne semble pas<br />

croyable qu’aucun n’ait encore rien<br />

ramené aux marches de l’Occident,<br />

qui ne soit susceptible d’y modifier<br />

lentement l’aspect de certains<br />

domaines. Ces ruées annuelles ne<br />

sont pas rappeler les visites des<br />

Grecs aux derniers initiés d’Égypte,<br />

ou les séjours de Rome auprès des<br />

derniers philosophes athéniens, pour<br />

en acquérir la sagesse qui lui faisait<br />

défaut. En fait l’Orient nous pénètre<br />

déjà de partout. n<br />

François Chenet, Université de<br />

Paris-Sorbonne (Paris 4)<br />

Littérature française et Pensée hindoue, des origines à 1950, Klincksieck, Paris,<br />

1973.<br />

L’Inde, ici et maintenant, Lettres du pays de l’Etre, Dervy-Livres, Paris, 1979.<br />

Retour à l’Essentiel – Quelle spiritualité pour l’homme d’aujourd’hui ?, Dervy-<br />

Livres, Paris, 1980.<br />

Passeports pour des temps nouveaux, Dervy-Livres, Paris, 1982.<br />

Art, Gnose et Alchimie – Trois sources de régénérescence, Le Courrier du livre,<br />

Paris, 1987.<br />

L’Initiatrice, Ed. J. renard, Diff. Le Dauphin, Paris, 1990.<br />

Par les Chemins de vie et d’œuvre – entretiens avec Mireya de Alson, Les Deux<br />

Océans, Paris, 2001.<br />

Petit Dictionnaire d’impertinences spirituelles, Editions Entrelacs, Paris, 2006.<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

13


Sector Production Alimentaire<br />

©http://theagaia.com/<br />

agro-alimentaire<br />

L’industrie<br />

L’Inde est le second plus grand producteur au monde d’alimentation après la Chine et a le potentiel d’être<br />

le plus grand, soutenue par son secteur alimentaire et agricole. La production alimentaire totale en Inde<br />

devrait doubler au cours des dix prochaines années avec un marché alimentaire interne qui, selon les<br />

estimations, devrait atteindre les 258 milliards de US$ d’ici 2015 ; Avec un secteur agricole gigantesque,<br />

un bétail abondant et une compétitivité au niveau des coûts, l’Inde émerge rapidement comme un<br />

pour les produits alimentaires transformés. L’industrie indienne des produits alimentaires transformés<br />

représente 32% de l’ensemble du marché alimentaire du pays. L’industrie alimentaire en Inde a largement<br />

attiré l’attention des investisseurs étrangers comme le pays est proche des marchés du Moyen Orient, de<br />

l’Afrique et de l’Asie du Sud-Est. Le Ministry of Food Processing Industries (MOFPI) fait tous ses efforts<br />

pour encourager les investissements dans le secteur, des incitations pour le développement de la chaîne<br />

du froid et des subventions pour créer des laboratoires équipés pour tester les produits alimentaires.<br />

Le secteur agro-alimentaire est un<br />

important secteur de l’économie,<br />

constituant une part de 9-10%<br />

du PNB dans le secteur agricole<br />

et manufacturier. Affichant actuellement<br />

une croissance de plus de 10% par an, il<br />

devrait atteindre US$ 194 milliards d’ici<br />

2015 contre une valeur de US$ 121<br />

milliards en 2012, selon M. Swapan<br />

Dutta, Directeur Général adjoint de<br />

l’Indian Council of Agricultural Research<br />

(ICAR).<br />

L’industrie des produits alimentaires<br />

emballés est le 5ème plus grand<br />

secteur en Inde. L’industrie s’élève<br />

actuellement at US$ 39,7 milliards<br />

en Inde et devrait atteindre les US$<br />

65,41 milliards d’ici 2020 en raison<br />

14 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Production Alimentaire<br />

Sector<br />

de l’augmentation des revenus de la<br />

classe moyenne, le changement dans<br />

le mode de vie urbain et le commerce<br />

de détail moderne. Les personnes qui<br />

résident dans les zones urbaines sont<br />

les plus grands consommateurs de<br />

produits alimentaires emballés, avec<br />

une consommation de 78% de produits<br />

alimentaires emballés en 2011.<br />

Les exportations indiennes de<br />

produits agricoles et agroalimentaires<br />

durant la période avril-décembre 2013<br />

affichaient le chiffre de US$ 16 578,<br />

91 millions contre US$ 15 206,22<br />

durant la même période l’an passé,<br />

selon les données obtenues auprès<br />

de l’Agricultural and Processed Food<br />

Products Export Development Authority<br />

(APEDA). La part des exportations de<br />

produits agroalimentaires dans le total<br />

des exportations de l’Inde est d’environ<br />

12%. Les industries agroalimentaires<br />

en inde ont attiré des investissements<br />

directs étrangers d’une valeur de US$ 5<br />

360, 89 millions durant la période avril<br />

2000-janvier 2014 selon les dernières<br />

données publiées par le Department of<br />

Industrial Policy and Promotion (DIPP).<br />

Les boissons<br />

Le marché indien des boissons non<br />

alcoolisées progresse actuellement<br />

de 15% sur un an. « Etant donné que<br />

davantage de monde favorise les boissons<br />

conditionnées, la consommation de<br />

boissons non alcoolisées en Inde devrait<br />

progresser de 16,5 à 19% au cours<br />

des trois prochaines années », selon un<br />

rapport de l’Indian Council for Research<br />

on International Economic Relations<br />

(ICRIER) et l’Indian Beverage Association<br />

(IBA).<br />

Au sein du marché des boissons,<br />

le jus conditionné a entamé sa forte<br />

trajectoire. En mars 2013, le marché<br />

indien des jus conditionnés était estimé<br />

à Rs 1100 crore (US$ 183,89 millions)<br />

et devrait progresser à un taux annuel<br />

composé de croissance (CAGR) de 15%<br />

au cours des trois prochaines années.<br />

Dabur India Ltd est le leader établi<br />

avec une part de marché de 54% avec<br />

sa marque Real and Real Acti. PepsiCo<br />

India est le second plus grand acteur<br />

avec une part de 25-30% à travers sa<br />

marque de jus de fruit Tropicana.<br />

Le lait et le thé pourrait aussi afficher<br />

une rapide croissance puisque des<br />

sociétés étrangères ont commencé à<br />

regarder du côté de l’Inde comme un<br />

immense marché de produits laitiers.<br />

On prévoit que le secteur du lait en<br />

boîte en Inde progresserait de US$7,<br />

76 milliards à US$ 32,9 milliards et<br />

enregistrer une croissance annuelle de<br />

8% d’ici 2030. Les dix sociétés en tête<br />

en Inde comptent pour 65% du marché<br />

des boissons chaudes.<br />

Les initiatives du gouvernement<br />

Le gouvernement indien a autorisé<br />

les investissements directs étrangers<br />

à hauteur de 100% dans le secteur<br />

agroalimentaire par la voie automatique.<br />

Pour la promotion et le développement<br />

du secteur agroalimentaire, il a<br />

alloué une somme de Rs 5 990 crore<br />

(US$ 1 milliard) au titre de divers<br />

programmes du ministère des industries<br />

agroalimentaires durant le 12 Plan<br />

quinquennal.<br />

Le MOFPI et « Invest India » ont<br />

passé un accord pour mettre sur pied<br />

un « Bureau d’Aide » aux investisseurs,<br />

tant indiens qu’étrangers, afin de<br />

leur proposer une aide en ligne pour<br />

répondre à leurs interrogations et les<br />

guider, notamment à l’étape initiale de<br />

créer leurs usines.<br />

Le Ministère a lancé un Programme<br />

Sponsorisé de manière centrale, la<br />

National Mission on Food Processing<br />

(NMFP) au cours du 12ème Plan.<br />

Une somme de Rs 204,85 crore (US$<br />

34,23 millions) a été octroyé aux Etats/<br />

Territoires de l’Union (UT) dans le cadre<br />

du programme durant l’année financière<br />

2013 et l’année financière 2014<br />

(jusqu’au 31 janvier).<br />

Le Ministère est en train de mettre<br />

en œuvre un programme pour le Human<br />

Resource Development (HRD) dans le<br />

secteur agroalimentaire pour former<br />

des techniciens, des managers, des<br />

entrepreneurs et de la main-d’œuvre<br />

pour la gestion de la qualité dans le<br />

secteur. Le besoin annuel de maind’œuvre<br />

dans l’industrie est estimé à<br />

environ 530 000 personnes.<br />

Dans l’objectif de procurer une aide<br />

pour créer une chaine du froid intégrée<br />

et la préservation des infrastructures<br />

dans le pays, le Ministère met en<br />

œuvre le Programme de chaîne du<br />

froid intégrée, l’ajout de valeur et la<br />

préservation de l’infrastructure.<br />

Sur la voie<br />

La renaissance du secteur agricole<br />

devrait déboucher sur une pléthore<br />

d’opportunités pour les acteurs ayant<br />

de forts liens avec la chaine de valeur<br />

agricole. L’industrie agroalimentaire<br />

devrait être l’un des plus gros<br />

bénéficiaires de ce processus. Des<br />

opportunités d’investissements<br />

sont encore inexploitées dans les<br />

domaines de la gestion de la chaîne<br />

d’approvisionnement (SCM), les<br />

chambres froides, le financement,<br />

le commerce de détail et les<br />

exportations.<br />

Le MOFPI a formulé un Plan d’action<br />

Vision 2015 qui prévoit de tripler la<br />

taille de l’industrie agroalimentaire,<br />

d’augmenter le de transformation des<br />

matériaux périssables de 6 à 20%,<br />

d’augmenter la valeur ajoutée de 20 à<br />

35% et d’accroître la part de l’Inde dans<br />

le commerce alimentaire mondial de 1,5<br />

à 3%.<br />

Taux utilisé : 1 INR = US$0,01671<br />

en date du 28 mars 2014.<br />

Références : Cet article provient des<br />

publications IBEF et se base sur des<br />

informations secondaires émanant du<br />

Ministry of Food Processing Industries<br />

(MoFPI), l’Agricultural and Processed<br />

Food Products Export Development<br />

Authority, des rapports de la presse,<br />

le Department of Industrial Policy and<br />

Promotion (DIPP), le budget de l’Union<br />

2014-15, le Press Information Bureau<br />

(PIB).n<br />

©Media india Group<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

15


Environnement Les soeurs solaires<br />

Les soeurs solaires<br />

Eclairer des vies<br />

Alors que la nuit tombe, les<br />

habitants de 111 villages<br />

reculés de trente-deux pays<br />

africains, latino-américains,<br />

arabes et asiatiques, ont une pensée<br />

pour Tilonia, au Rajasthan ! Leurs<br />

maisons sont éclairées grâce à l’énergie<br />

solaire des panneaux photovoltaïques<br />

installés et entretenus par les mères<br />

et grands-mères de chaque village,<br />

rentrées de l’Inde après une formation<br />

de six mois. Ces villageoises sont<br />

parties de chez elles pour la première<br />

fois de leur vie pour se rendre au<br />

Rajasthan où des femmes sans<br />

formation leur ont appris à monter des<br />

équipements élaborés. En l’absence<br />

d’un langage commun, les formatrices<br />

se sont fait comprendre par des gestes<br />

et des codes-couleurs attribués à<br />

chaque élément de l’assemblage, de<br />

la même manière dont elles ont ellesmêmes<br />

été formées par leurs aînés.<br />

Ces femmes qui viennent au Barefoot<br />

L’heure de lire des histoires<br />

College de Tilonia sans jamais avoir<br />

utilisé ne serait-ce qu’un tournevis sont<br />

les mêmes qui, plus tard, fabriquent<br />

des panneaux solaires et installent des<br />

systèmes d’éclairage. Installée dans des<br />

villages à travers le monde, cette tribu<br />

de plus en plus nombreuse de femmes<br />

formées est surnommée « Les Sœurs<br />

Solaires » ou encore « Les Guerrières du<br />

Soleil ».<br />

Mochozi est une grand-mère<br />

congolaise qui est d’avis qu’il n’est<br />

jamais trop tard pour apprendre de<br />

nouvelles astuces. Venue elle aussi du<br />

Congo, Moyoni, 38 ans et mère de huit<br />

enfants. Elles font partie du nouveau<br />

groupe de vingt-quatre stagiaires parmi<br />

lesquels ne figure qu’un seul homme,<br />

venu de Jordanie. Moyoni a arrêté<br />

l’école après le CM1 en primaire, mais<br />

elle connaît quelques mots d’anglais.<br />

Son séjour dans ce village du Rajasthan<br />

si différent du sien lui plaît beaucoup,<br />

et si le cassava (manioc) lui manque,<br />

goûter à une autre cuisine ne lui pose<br />

pas de problème. Ce groupe, comme le<br />

précédent, est formé par des habitants<br />

locaux. Originaire du village voisin<br />

de Baori, Magan Kanwar, 45 ans, a<br />

appris l’assemblage et l’installation<br />

d’équipements solaires en 2004 et<br />

est depuis devenue formatrice à son<br />

tour. En tant que femme mariée, il fut<br />

un temps où elle ne pouvait pas partir<br />

travailler à l’extérieur et se contentait<br />

donc de quelques travaux de couture<br />

à domicile. Mais c’était avant que le<br />

programme de formation solaire ne<br />

la recrute. Magan Kanwar reconnaît<br />

n’avoir jamais imaginé rencontrer des<br />

femmes de tant d’horizons différents.<br />

Il arrive qu’un ancien stagiaire l’appelle<br />

d’un village au fin fond d’un pays<br />

étranger. Deux autres locaux, Ganpat<br />

et Firoz Khan, font eux aussi partie<br />

de ce programme mené par Bhagwat<br />

Nandan, l’un des premiers élèves de<br />

cette école.<br />

Jusqu’à aujourd’hui, quelque 142<br />

femmes ingénieurs solaires formées<br />

à Barefoot sont reparties dans<br />

trente-deux pays pour allumer des<br />

ampoules électriques dans plus de<br />

10 000 foyers de 111 villages. C’est<br />

la communauté d’un village choisi qui<br />

décide des candidates, dont les frais<br />

de transport et de formation sont<br />

pris en charge par le programme de<br />

coopération technique et économique<br />

du ministère des Affaires étrangères, un<br />

partenariat salué par la communauté<br />

photovoltaïque mondiale. De retour de<br />

leur formation en Inde pour installer un<br />

système d’éclairage solaire dans leurs<br />

villages respectifs, ces mères et ces<br />

grands-mères deviennent des membres<br />

actifs, auto-dépendants et productifs<br />

au sein de la communauté. En 2005,<br />

le Barefoot College a formé trois<br />

grands-mères afghanes qui ont par la<br />

suite assuré l’entretien du premier<br />

village afghan éclairé grâce à l’énergie<br />

solaire. Elles se sont également<br />

occupées de former vingt-sept autres<br />

habitantes locales afin de garantir un<br />

éclairage permanent. Bien d’autres<br />

femmes afghanes sont venues dans<br />

cette école depuis, et l’aide offerte<br />

dans ce cas a également compris<br />

l’approvisionnement d’installations<br />

photovoltaïques pour leur pays.<br />

Les « Sœurs Solaires » ont transformé<br />

la vie des villageois. Des femmes<br />

modestes, ne sachant pas forcément<br />

lire et écrire, ont été formées en groupes<br />

les unes après les autres à Tilonia pour<br />

devenir ingénieurs solaires et eau,<br />

sages-femmes, designers, chargées de<br />

communication, architectes ou mêmes<br />

des entrepreneurs sociaux en milieu<br />

rural. Cette électrification a permis aux<br />

jeunes gens et jeunes filles gardant le<br />

bétail la journée d’étudier après le<br />

coucher du soleil. Les femmes peuvent<br />

obtenir un revenu supplémentaire en<br />

effectuant des travaux d’aiguille le soir.<br />

Les médicaments périssables peuvent<br />

être réfrigérés dans les cliniques de<br />

village. A cela s’ajoutent les avantages<br />

du point de vue environnemental. En<br />

Afrique, une famille rurale brûle environ<br />

60 litres de kérosène par an pour<br />

éclairer son foyer. Une lampe à pétrole<br />

basique rejette l’équivalent d’une<br />

tonne de dioxyde de carbone en moins<br />

de dix ans. En remplaçant le pétrole<br />

et le bois, l’énergie solaire améliore<br />

considérablement la qualité de


Moines transportant des<br />

panneaux solaires au Ladakh


Environnement Les soeurs solaires<br />

Formatrice nettoyant un<br />

panneau solaire dans le<br />

village de Tinginaput, Orissa<br />

l’environnement ainsi que la santé de<br />

la population. C’est également moins<br />

onéreux : les femmes du village n’ont<br />

désormais plus besoin de parcourir de<br />

longues distances pour aller chercher<br />

du pétrole, du bois, des bougies ou des<br />

lampes torches, qui sont des éclairages<br />

coûteux.<br />

Bunker Roy, fondateur du Barefoot<br />

College, a pensé chaque détail de la<br />

stratégie de développement. Dans<br />

toute société traditionnelle, on attribue<br />

aux grand-mères le rôle de nounou,<br />

cuisinière ou bien conteuse d’histoire,<br />

mais peu les imaginent manipulant<br />

des bobines, des régulateurs de charge<br />

et des onduleurs et connectant des<br />

panneaux solaires à des ampoules<br />

via des batteries. Après l’installation,<br />

ce sont ces mêmes grands-mères qui<br />

veillent à l’entretien et aux réparations<br />

du système. Lors du recrutement des<br />

stagiaires, Bunker Roy exerce une<br />

discrimination en faveur des seniors,<br />

pour la simple et bonne raison que les<br />

grands-mères sont réceptives et faciles<br />

à former, et qu’elles ont tout intérêt<br />

à investir dans ce village qu’elles ne<br />

veulent pas quitter. Cela assure le bon<br />

fonctionnement du système d’éclairage<br />

solaire dans le village. Donnez un bout<br />

de papier à un jeune et il partira en<br />

ville à la recherche d’un meilleur travail.<br />

La mission de B. Roy est d’inciter les<br />

jeunes gens et les jeunes femmes<br />

à rester dans leur village pour y<br />

améliorer l’environnement, plutôt que<br />

de s’exiler dans les métropoles pour<br />

finir dans des bidonvilles. La stratégie<br />

de développement rural a encore du<br />

chemin à faire.<br />

Les systèmes d’éclairage solaire<br />

sont soutenus par l’implication et la<br />

participation de la communauté ainsi<br />

que par l’encouragement du savoir-faire<br />

local. La contribution des villageois est<br />

une taxe nominale mensuelle (calculée<br />

par rapport à la quantité de pétrole<br />

utilisée par la famille) destinée à<br />

l’entretien du système. Ils sont témoins<br />

des bénéfices de la collaboration. Ayant<br />

fait le choix de la transparence et du<br />

collectif, la communauté reste engagée<br />

dans le projet et prend en charge<br />

18 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Les soeurs solaires<br />

Environnement<br />

moins développés, est parmi les plus<br />

innovants. Bunker Roy a derrière lui<br />

plus de trente ans d’expérience de<br />

vie et de travail avec les villageois. En<br />

Inde, le Barefoot College est le seul<br />

établissement scolaire dans un village<br />

à être entièrement électrifié grâce<br />

à l’énergie solaire. Les composants<br />

solaires (onduleurs, régulateurs de<br />

charge, batteries, supports) ont tous été<br />

fabriqués au sein-même de l’école et<br />

installés par les ingénieurs de Barefoot<br />

sous la supervision d’un prêtre instruit.<br />

En formant des ingénieurs solaires,<br />

le programme a mis fin à de nombreux<br />

préjugés concernant la pauvreté, le<br />

développement, les programmes<br />

d’aide centralisée et la technologie.<br />

Bunker Roy dirige l’institution avec<br />

des principes directement inspirés du<br />

Mahatma Gandhi, tels que l’importance<br />

de l’autosuffisance mais aussi le<br />

potentiel et les compétences de la<br />

population défavorisée et marginale. La<br />

formation allie nouvelles technologies<br />

et savoir-faire local, et démystifie à<br />

la fois la notion d’apprentissage et la<br />

technologie. Cet apprentissage par<br />

la pratique est basé sur la croyance<br />

fondamentale que les personnes<br />

défavorisées ont elles aussi le droit<br />

d’accéder aux technologies avancées<br />

afin d’améliorer leur quotidien.<br />

Selon B. Roy, le Barefoot College<br />

offre justement cette opportunité<br />

aux villageois, et démontre qu’en<br />

valorisant leur créativité, ces personnes<br />

parviennent bien mieux que d’autres à<br />

identifier et répondre à leurs besoins.<br />

B. Roy a déclaré que l’école a exclu<br />

tout professionnel extérieur issu du<br />

système d’éducation formel. En effet,<br />

pour répondre à des besoins basiques<br />

tels que l’accès à l’eau potable, la<br />

santé, l’éducation, l’emploi, le pétrole<br />

et les combustibles, il croit plutôt<br />

dans l’identification et l’utilisation<br />

des compétences, des acquis et de<br />

l’expérience pratique des personnes<br />

ordinaires au sein de la communauté.<br />

Le programme d’électrification<br />

solaire a également eu un impact à<br />

l’intérieur-même de l’Inde. Dans seize<br />

Etats, quelque 383 ingénieurs solaires<br />

de Barefoot, dont 169 femmes semilettrées,<br />

ont électrifié 648 villages,<br />

rendant ainsi service à 15 000 familles<br />

et 483 écoles proposant des cours<br />

du soir. Elles ont également distribué<br />

5 220 lampes solaires. Ces initiatives<br />

ont permis d’éviter que près de 2<br />

millions de litres de kérosène soient<br />

utilisés chaque année pour l’éclairage.<br />

Ces ingénieurs ont aussi installé des<br />

cuisinières et des chauffe-eaux solaires<br />

dans la région de l’Himalaya. Près du<br />

plus grand lac salé de l’intérieur, dans<br />

la ville de Sambhar au Rajasthan,<br />

l’école a installé la première station<br />

solaire de dessalement par osmose<br />

inverse de l’Inde, pouvant transformer<br />

600 litres d’eau salée en eau (douce)<br />

potable en l’espace d’une heure.<br />

D’autres équipements de ce genre<br />

sont en cours d’installation.<br />

Si le message de Tilonia continue<br />

ainsi que sa diffusion, il est certain que<br />

l’Inde trouvera encore de nombreux<br />

autres pays désireux d’importer cette<br />

révolution solaire ! n<br />

L.K. Sharma<br />

The India idea – Heralding the Era<br />

of Path-breaking Innovations<br />

Recherche photographique :<br />

Shobit Arya<br />

Public Diplomacy Division<br />

Ministry of External<br />

Affairs, Govt. of India<br />

toutes les décisions à son sujet. Cela<br />

supprime la principale cause d’échec de<br />

nombreux projets de développement<br />

rural quand les solutions sont imposées<br />

du haut. Cette stratégie par le bas<br />

encourage quant à elle la collaboration,<br />

la responsabilisation et l’autonomie.<br />

Un simple dollar du programme<br />

d’aide indien a plus d’impact que<br />

celui envoyé par une agence d’aide<br />

occidentale. De plus, l’aide parvient<br />

jusque dans les zones que les<br />

programmes d’aide internationaux ont<br />

du mal à atteindre. L’Inde est, bien<br />

sûr, à la tête de grands projets d’aide<br />

à l’étranger, et pourtant ce modeste<br />

programme rural de formation pour<br />

l’électrification couvrant les pays les<br />

Processus de<br />

fabrication de<br />

panneaux solaires<br />

à Tinginaput<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

19


Infos générales :<br />

Capitale : Agartala<br />

Etats voisins : Le Tripura est entouré par<br />

le Bangladesh au nord, au sud et à l’ouest,<br />

par l’Assam au nord et par le Mizoram à<br />

l’est.<br />

Langues : bengali, tripuri, anglais<br />

Superficie (km²) : 10 491<br />

Districts : 8<br />

Population totale : 3, 6 millions<br />

d’habitants<br />

Répartition par sexe ( nombre de<br />

femmes pour 1 000 hommes) : 961<br />

Taux d’alphabétisation (%) : 87,8<br />

Revenu par tête d’habitant ($)) : 1 011<br />

PIB (Gross state domestic product,<br />

GSDP) en dollars : 3,90 milliards en<br />

2012-13<br />

Tripura,<br />

un petit état dynamique<br />

Dharmanagar<br />

Kamalpur<br />

Kailasahar<br />

Khowai<br />

Kanchanpur<br />

Agartala<br />

Sadar<br />

Chailangta<br />

Ambasa<br />

Ompi<br />

Bishalgarh<br />

Killa<br />

Gandacherra<br />

Amarpur<br />

Udaipur<br />

Sonamura<br />

Matabari<br />

Karbook<br />

Bagafa<br />

Belonia<br />

Hrishyamukh<br />

Rajnagar<br />

Rupalchan<br />

Satchand<br />

Sabroom<br />

Capitale<br />

Principales villes<br />

Le Tripura, petit Etat de collines entouré par le Bangladesh, est la<br />

porte d’entrée sur le nord-est de l’Inde. Il possède des richesses<br />

naturelles à fort potentiel de développement comme le gaz ou<br />

le caoutchouc, une nature préservée et des sites archéologiques<br />

exceptionnels. Un de ses atouts tient aussi à la diversité de sa<br />

population, composée de tribus et d’émigrants bengalis, et à son<br />

excellent taux d’alphabétisation.<br />

20 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Le Tamil Nadu<br />

Dossier<br />

©Media India Group<br />

Sculpture dans la roche à Unakoti<br />

Entouré par le Bangladesh au<br />

nord, au sud et à l’ouest, (soit<br />

84% de ses frontières), par<br />

l’Assam au nord, et par le<br />

Mizoram à l’est, le Tripura, troisième<br />

Etat le plus petit de l’Inde, occupe une<br />

place particulière.<br />

Le gouvernement a décidé<br />

aujourd’hui de tirer profit de sa<br />

situation géographique pour le<br />

présenter comme la porte d’entrée<br />

du Bangladesh et du sud-est asiatique<br />

vers le nord-est de l’Inde.<br />

Cinq chaînes de collines principales<br />

Le Tripura comprend trois zones<br />

géographiques distinctes : des chaînes<br />

de collines, un plateau, une plaine<br />

alluvienne. Les cinq chaînes de collines<br />

principales, qui traversent l’Etat du nord<br />

au sud, sont séparées par des vallées<br />

étroites d’une vingtaine de kilomètres.<br />

Le point culminant, Bethliangchhip,<br />

est à 975 mètres au-dessus du niveau<br />

de la mer. L’Etat possède dix rivières<br />

principales, et de nombreux petits lacs.<br />

Environ 60% du territoire est recouvert<br />

par des forêts, dont 57% sont des<br />

réserves forestières. Les feuillus, les<br />

arbres de plantation (teck, acajou,<br />

gamai, sandhi et chamal) et le bambou<br />

sont les principales espèces.<br />

Agartala, la capitale, située à l’ouest,<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

21


Dossier Le Tripura<br />

dans une plaine, compte 400 000<br />

habitants. Elle se trouve à 150 km de<br />

Dhaka, la capitale du Bangladesh, et à<br />

350 km de Kolkata (si l’on passe par le<br />

Bangladesh).<br />

Au niveau industriel, l’Etat offre<br />

des opportunités intéressantes<br />

pour la production de caoutchouc<br />

et la transformation alimentaire des<br />

fruits. Ses ananas et ses oranges en<br />

particulier sont très réputés pour<br />

leur saveur unique et leur mode de<br />

production biologique. Le Tripura est<br />

aussi un important producteur de thé<br />

(le cinquième en Inde). Le secteur des<br />

technologies de l’information est en<br />

plein développement également, grâce<br />

à une population éduquée. Le bambou,<br />

le gaz naturel, le thé figurent aussi parmi<br />

les principales ressources du Tripura.<br />

Le Tripura possède un héritage<br />

culturel important, et une faune et<br />

une flore riches, qui lui donnent un<br />

bon potentiel de développement au<br />

niveau touristique. Les belles collines<br />

ondulantes de Jampui, les plus à l’est,<br />

bénéficiant d’un climat favorable,<br />

sont déjà bien connues des visiteurs,<br />

qui viennent y chercher le calme et la<br />

fraîcheur. Le tourisme religieux, de<br />

patrimoine, le tourisme vert dans les<br />

collines et le tourisme rural offrent<br />

un potentiel intéressant, ainsi que<br />

l’écotourisme.<br />

Un ancien Etat princier<br />

Le Tripura, un ancien Etat princier,<br />

Parc écologique de Baramura<br />

a été dirigé par un grand nombre de<br />

rois depuis l’Antiquité, dont ceux de la<br />

dynastie Manikya pendant plus de cinq<br />

siècles.<br />

Selon les chroniques de la cour du<br />

Tripura, quelque 179 ou 184 rois de<br />

cette dynastie se seraient succédés<br />

– un fait qui, cependant, n’est pas<br />

confirmé par les historiens.<br />

Toujours Etat princier pendant le<br />

règne britannique, il est devenu, après<br />

l’indépendance de l’Inde, un Etat de<br />

l’Union de la catégorie « C » en octobre<br />

1949, puis un territoire de l’Union en<br />

novembre 1956. Un ministère issu<br />

des urnes a été formé en juillet 1963.<br />

Depuis, le gouvernement est élu au<br />

suffrage universel.<br />

Le 21 janvier 1972 le Tripura s’est<br />

vu octroyer le statut d’Etat, en même<br />

temps que le Meghalaya et Manipur,<br />

deux autres Etats du nord-est.<br />

Après la partition de l’Inde, de<br />

nombreux Bengalis hindous ont<br />

quitté le Pakistan oriental pour se<br />

réfugier au Tripura et des conflits<br />

ont éclaté entre eux et la population<br />

autochtone. De nouveaux arrivants<br />

se sont aussi installés au moment<br />

de la guerre de libération qui a<br />

mené à la création du Bangladesh<br />

en 1971. De ce fait, les populations<br />

tribales, auparavant majoritaires,<br />

sont devenues minoritaires. Des<br />

troubles insurrectionnels graves<br />

ont ébranlé l’Etat ; ils ont culminé<br />

autour de l’année 2000, pour se<br />

calmer ensuite. L’établissement d’une<br />

©Media India Group<br />

Agence Autonome de l’Administration<br />

des Tribus (Autonomous Tribal<br />

Administrative Agency), parmi<br />

d’autres actions, a apaisé la situation<br />

et aujourd’hui l’Etat a retrouvé son<br />

calme.<br />

Tribus et nouveaux arrivants<br />

Au dernier recensement de 2011<br />

le Tripura comptait 3,6 millions<br />

d’habitants, soit 0,3% de la population<br />

indienne.<br />

Une de ses richesses tient à l’extrême<br />

Femme tribale<br />

©http://digitaljournal.com/<br />

22 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Le Tamil Nadu<br />

Dossier<br />

diversité de sa population d’un point de<br />

vue ethnique, linguistique, et culturel.<br />

Les populations tribales d’origine<br />

(répertoriées comme scheduled<br />

tribes), réparties en dix-neuf groupes<br />

ethniques, constituent aujourd’hui<br />

environ 31% de la population. La<br />

majorité des tribus est constituée de<br />

Tripuris. Les autres tribus aborigènes<br />

sont les Reang, Jamatia, Noatia, Lusai,<br />

Uchai, Chaimal, Halam, Kukis, Garos,<br />

Mog et Chakma. D’autres tribus, les Bill,<br />

Munda, Orang, Santal, Lepcha, Khasia,<br />

Bhutias sont arrivées plus tard pour des<br />

raisons économiques, notamment au<br />

début du XXe siècle pour travailler dans<br />

les plantations de thé.<br />

La langue principale des tribus est<br />

le kokborok (ou kakbarak), ou tripuri.<br />

Elle appartient à la branche Bodo<br />

des langues tibéto-birmanes. Huit<br />

communautés sur les 19 la parlent,<br />

ou des langues apparentées. D’autres<br />

communautés continuent de parler<br />

leur propre langue.<br />

Tout comme les Bengalis, la<br />

plupart des tribus du Tripura pratique<br />

l’hindouisme, mais d’autres tribus<br />

observent d’autres religions. Ainsi<br />

les Lusai-Kukis sont principalement<br />

chrétiens, et les Chakmas et les<br />

Mogs pratiquent le bouddhisme.<br />

Ces derniers, venus des collines de<br />

Chittagong, au Bangladesh, ont gardé<br />

leur langue (du même nom) et leur<br />

culture très spécifiques. Les tribus<br />

vénèrent plusieurs dieux de la fertilité,<br />

comme Lam-Pra (la double déité du<br />

ciel et de la mer), Mailu-ma (la déesse<br />

du maïs, identifiée à Lakshmi), Khuluma<br />

(la déesse du coton), et Burha-cha<br />

(le dieu de la guérison).<br />

Les habitants n’appartenant pas<br />

à des tribus sont principalement des<br />

Bengalis de religion hindoue.<br />

Les différentes communautés ont<br />

souvent adopté les fêtes les unes des<br />

autres, au-delà des barrières de la<br />

langue et de l’héritage culturel. Ainsi<br />

les Bengalis se sont appropriés le<br />

festival Chaturdash Debta, célébré par<br />

les tribus au mois de juillet, alors que<br />

ces derniers participent joyeusement<br />

aux fêtes associées à la Durga Puja<br />

hindoue.<br />

Le mélange des cultures et religions<br />

se retrouve au niveau de l’artisanat,<br />

principalement les confections en<br />

bambou et les tissages, reconnus pour<br />

leur grande qualité.<br />

Alphabétisation et éducation<br />

Une des particularités du Tripura<br />

est son exceptionnelle réussite au<br />

niveau de l’alphabétisation. Au<br />

dernier recensement de 2011 son<br />

pourcentage était de 87,8 %, ce qui le<br />

place en troisième position au niveau<br />

national (la moyenne est de 74%),<br />

derrière le Mizoram voisin. L’année<br />

dernière, une étude a relevé le chiffre,<br />

annonçant un taux de 94,6%, ce<br />

qui le met en tête au niveau indien,<br />

passant cette fois devant le Kerala<br />

Le Palais sur l’eau de Neermahal<br />

(93,9%). Ceci est dû à des initiatives<br />

administratives et politiques veillant<br />

à ce qu’aucun enfant ne soit laissé<br />

en dehors du système éducatif. Le<br />

gouvernement a également amélioré<br />

l’infrastructure de l’éducation. Il<br />

souhaite à présent tirer parti de cette<br />

réussite pour développer le secteur<br />

des technologies de l’information (IT).<br />

Il est d’ores et déjà considéré comme<br />

la seconde meilleure destination au<br />

niveau de l’IT dans le nord-est après<br />

Guwahati (Assam). Un succès dû<br />

à son bon réseau d’établissements<br />

d’enseignement sup-érieur, qui ont<br />

permis d’augmenter considérablement<br />

sa main-d’oeuvre formée. Un Software<br />

Technology Park est par ailleurs en<br />

cours de développement à Agartala.<br />

Attirer les investissements<br />

Très désireux d’attirer les<br />

investissements indiens et étrangers,<br />

l’Etat développe les infrastructures. Il<br />

est pour l’instant connecté au reste<br />

de l’Inde par une route principale,<br />

qui passe par l’Assam, le Meghalaya,<br />

de nouveau l’Assam, pour rejoindre<br />

le nord du Bengale occidental et<br />

Kolkata. Dans sa zone industrielle<br />

de Bodhjungnagar, dans la banlieue<br />

d’Agartala, de nouveaux parcs<br />

industriels consacrés à l’alimentation,<br />

ou encore au bambou sont parmi les<br />

derniers projets en cours. n<br />

Gaëlle Gicquel<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

23


Du caoutchouc et des fruits<br />

en abondance<br />

Outre ses vastes réserves de gaz comprenant un fort<br />

taux de méthanol, le Tripura est riche en caoutchouc et<br />

en bambou et possède aussi une large variété de fruits<br />

et de plantations de thé. Le tourisme et les technologies<br />

de l’Information (IT) offrent aussi un fort potentiel.<br />

Le gouvernement modernise les infrastructures et<br />

encourage les investissements nationaux et étrangers.


Lorsque le Tripura a rejoint<br />

l’Union indienne en<br />

1949, l’économie était<br />

principalement agricole et<br />

forestière. Il n’avait pas de base<br />

industrielle, son taux d’urbanisation était<br />

faible, et ses infrastructures limitées. Sa<br />

situation géographique excentrée, son<br />

manque de production énergétique, et<br />

le faible développement de son réseau<br />

de transport et de communication le<br />

défavorisaient.<br />

Son développement n’a vraiment<br />

débuté qu’à partir de 1998, de pair<br />

avec le processus d’urbanisation. Il<br />

se poursuit avec dynamisme et de<br />

nouvelles infrastructures se mettent en<br />

place pour attirer les investissements<br />

industriels. L’Etat produit un surplus<br />

d’électricité (en dehors des périodes de<br />

pointe), à des tarifs moins élevés que<br />

dans d’autres régions.<br />

Gros investissements en 2012-2013<br />

Selon l’Indian Brand Equity<br />

Foundation (IBEF), les investissements en<br />

2012-2013 ont atteint 3,02 milliards de<br />

dollars – un très bon résultat. 32% ont<br />

concerné l’industrie, 30,2% l’électricité,<br />

27,2% l’exploitation minière, 9,5% les<br />

services, et 0,6% l’immobilier.<br />

Le gouvernement du Tripura,<br />

désireux d’attirer des investisseurs<br />

nationaux et étrangers, et de développer<br />

les échanges avec le Bangladesh voisin,<br />

a lancé en 2012 un projet de promotion<br />

du développement industriel (Industrial<br />

Investment Promotion Incentive


Dossier<br />

Tripura : Business<br />

©http://wvindia.blogspot.in/<br />

Après la collecte du caoutchouc sur les arbres, le latex est appliqué<br />

uniformément sur des plateaux pour les transformer en bandes de<br />

caoutchouc<br />

Litchi<br />

Scheme). Par ailleurs, une agence<br />

de développement industriel (Tripura<br />

Industrial Development Agency, TIDA) a<br />

été établie pour faciliter les autorisations<br />

administratives.<br />

Les principaux secteurs<br />

Le secteur primaire représente 24,7 %<br />

du produit intérieur net, le secteur<br />

secondaire 15% et le secteur tertiaire<br />

60%. Plus de 75% de la main-d’œuvre<br />

dépend de l’agriculture. La production<br />

agricole, qui occupe environ un quart<br />

de la surface de l’Etat, est consacrée<br />

principalement au riz, ainsi qu’au jute,<br />

à la canne à sucre, au blé, au colza,<br />

à la noix de coco et au curcuma. Au<br />

niveau industriel, on trouve des petites<br />

industries dans les secteurs du thé,<br />

du bambou, du jute, de la sériculture<br />

(élevage du ver à soie), de l’artisanat<br />

et du tissage, de la transformation<br />

alimentaire (au niveau des fruits<br />

notamment) et du tourisme<br />

• Le caoutchouc. Le Tripura est le<br />

second producteur de caoutchouc du<br />

pays après le Kerala, avec un potentiel<br />

de culture de plus de 100 000 hectares.<br />

La surface de plantation de caoutchouc<br />

est d’environ 37 000 hectares avec une<br />

production de caoutchouc d’environ<br />

23 000 tonnes métriques par an. Un<br />

Parc du Caoutchouc est consacré<br />

au développement économique de<br />

ce secteur. Un fort potentiel existe<br />

pour développer de nouvelles unités<br />

industrielles basées sur le caoutchouc.<br />

• La transformation alimentaire. Les<br />

conditions sont favorables à la culture<br />

de nombreuses variétés de fruits et de<br />

plantations horticoles. L’Etat possède<br />

une large variété de plantations de fruits,<br />

principalement des fruits du jacquier,<br />

des oranges, des noix de cajou, des<br />

noix de coco, mais aussi des ananas, des<br />

litchis, etc… Un parc de l’alimentation<br />

est en cours de développement près<br />

d’Agartala, ainsi qu’une zone d’export<br />

de l’ananas. Le Tripura possède un fort<br />

potentiel pour la mise en place d’unités<br />

de transformation alimentaire.<br />

Les ananas et les oranges sont très<br />

réputés pour leur saveur unique et leur<br />

mode de production biologique. Des<br />

opportunités existent aussi au niveau<br />

de la production d’épices biologiques<br />

comme le gingembre, le curcuma, le<br />

piment, le poivre noir, la cannelle, et les<br />

feuilles de laurier.<br />

• Le thé. Le Tripura est le cinquième Etat<br />

producteur de thé parmi les 14 Etats<br />

producteurs de l’Inde, après l’Assam, le<br />

Bengale Occidental, le Tamil Nadu et le<br />

Kerala. Il produit environ 8,9 millions de<br />

kilos de thé par an et compte environ 55<br />

plantations et 4 350 petits producteurs<br />

de thé. Certaines plantations se tournent<br />

à présent vers la production biologique.<br />

La majeure partie de la production<br />

est achetée par l’Etat. Il existe un<br />

fort potentiel de développement.<br />

• Le bambou. Il représente une<br />

large superficie du Tripura : environ<br />

9%. Sur les 130 espèces de bambou<br />

connues en Inde, 21 y sont produites.<br />

La production s’élève à 0,9 million de<br />

mètres cubes. Les objets artisanaux<br />

en rotin et en bambou sont considérés<br />

comme parmi les meilleurs du pays et<br />

ont un fort potentiel à l’exportation. Le<br />

bambou peut aussi être utilisé dans la<br />

construction. La Mission du Bambou<br />

du Tripura (Tripura Bamboo Mission),<br />

lancée en 2007 pour promouvoir la<br />

production en mode de partenariat<br />

public-privé, a dynamisé le secteur.<br />

Un Parc du Bambou est en cours de<br />

développement dans la zone industrielle<br />

d’Agartala. De son côté, le Tripura<br />

Handloom and Handicraft Development<br />

Corporation Ltd ( Purbasha) a développé<br />

des nouvelles stratégies de marketing<br />

pour promouvoir les produits artisanaux<br />

locaux – qu’il vend en ligne.<br />

• Le tourisme. Le nombre d’Indiens<br />

et d’étrangers visitant le Tripura est<br />

en augmentation. Le gouvernement<br />

encourage le tourisme et développe<br />

les infrastructures qui lui sont liées.<br />

Dans cet objectif il a lancé, en 2009,<br />

26 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Tripura : Business<br />

Dossier<br />

©http://industries.tripura.gov.in/image_gallery<br />

Bambou<br />

Plantation de thé de Durgabari<br />

le Tripura Tourism Development<br />

Corporation. Le tourisme religieux, de<br />

patrimoine, le tourisme vert dans les<br />

collines et le tourisme rural, présentent<br />

un potentiel intéressant, de même que l’<br />

écotourisme.<br />

• Le gaz naturel. Le Tripura a<br />

d’importantes réserves de gaz naturel<br />

de grande qualité dans la forme nonassociée<br />

(97% de méthane). Il offre<br />

un fort potentiel pour les investisseurs<br />

souhaitant développer des projets<br />

d’engrais, de méthane, de PVC, de gaz<br />

naturel compressé, etc…Le gaz naturel<br />

peut aussi être utilisé comme source<br />

d’énergie à coût moindre pour des<br />

projets industriels réclamant beaucoup<br />

d’énergie. Le Tripura possède aussi<br />

du sable utilisé pour faire du verre, de<br />

l’argile, du lignite.<br />

• Les technologies de l’information.<br />

Le Tripura, qui connait un fort taux<br />

d’alphabétisation (87,8%), a une<br />

bonne base de travailleurs formés.<br />

Il est considéré comme la seconde<br />

meilleure destination au niveau des<br />

Technologies de l’Information (IT) dans<br />

le nord-est après Guwahati (Assam).<br />

Le Tripura possède un bon réseau<br />

d’écoles et d’écoles supérieures,<br />

qui incluent un National Institute of<br />

Technology, une école d’ingénierie,<br />

deux écoles polytechniques, et huit<br />

ITIS (Instituts des Technologies de<br />

l’Information). La main-d’œuvre<br />

formée dans l’IT a considérablement<br />

augmenté ces dernières années. Un<br />

Software Technology Park est en cours<br />

de développement à Agartala afin de<br />

fournir les infrastructures nécessaires<br />

pour développer les industries de l’IT.<br />

Parmi les secteurs encore<br />

inexploités figure le développement<br />

des plantes médicinales. Le Tripura en<br />

possède une large variété (226 dont<br />

68 espèces d’arbres, 71 espèces<br />

d’herbes, 39 espèces d’arbustes et 88<br />

espèces de plantes grimpantes). Pour<br />

les développer le gouvernement a créé<br />

un conseil spécial, le Medicinal Plant<br />

Board.<br />

Le gouvernement souhaite aussi<br />

voir se développer les plantations de<br />

Jatrophas curcas, une plante qui permet<br />

de produire du carburant biologique.<br />

II encourage les investissements dans<br />

ce secteur sous forme de partenariat<br />

public-privé.<br />

Infrastructures en cours de<br />

modernisation<br />

Au cours de ces dernières années le<br />

gouvernement a pris plusieurs mesures<br />

pour développer les infrastructures. La<br />

voie express nationale reliant Agartala<br />

à Guwahati a été refaite et prolongée<br />

jusqu’à Sabroom (le point le plus au<br />

sud de l’Etat), à 75 km du port de<br />

Chittagong, au Bangladesh.<br />

La ligne de chemin de fer a été<br />

étendue jusqu’à Agartala et sera<br />

prolongée jusqu’à Sabroom. L’aéroport<br />

d’Agartala, deuxième du nord-est pour<br />

la fréquentation de passagers, a été<br />

modernisé et deviendra à terme un<br />

aéroport international.<br />

L’infrastructure télécom est aussi en<br />

cours de modernisation.<br />

Les zones industrielles<br />

La principale zone industrielle du<br />

Tripura se trouve à Bodhjungnagar,<br />

dans la banlieue d’Agartala. Elle<br />

comprend un centre de croissance<br />

industrielle (Industrial Growth Centre),<br />

un Parc industriel de la promotion<br />

de l’exportation (Export Promotion<br />

Industrial Park (EPIP), un Parc alimentaire<br />

(Food Park), un Parc du Caoutchouc<br />

(Rubber Parc).<br />

L’Etat comprend cinq autres zones<br />

industrielles : au nord à Dharmanagar et<br />

à Kumarghat, à l’ouest à Arundhatinagar<br />

et à Dulki, au sud à Dhwajanagar.<br />

Sont en cours de développement :<br />

un Parc du Bambou, à Bodhjungnaga<br />

et trois sociétés de développement<br />

de l’infrastructure industrielle<br />

(Industrial Infrastructure Development<br />

Corporation) : une dans chaque district,<br />

hormis le district ouest. n<br />

Gaëlle Gicquel<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

27


Dossier Tripura : Tourisme<br />

Un enchantement de<br />

collines et d’orangers<br />

Le Tripura, avec ses collines ondulées, ses vallées vertes<br />

luxuriantes, ses rivières et ses lacs, est un écrin de verdure<br />

préservé et authentique, où il fait bon se reposer. Plusieurs sites<br />

archéologiques d’exception, comme Unakoti, s’offrent aussi au<br />

visiteur de passage.<br />

40 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Tripura : Tourisme<br />

Dossier<br />

©Debashis Sutradhar<br />

Collines et vallées se succèdent<br />

dans cet Etat appelé<br />

familièrement « la fille des<br />

collines de l’est ». La chaîne<br />

de collines la plus célèbre et la plus<br />

élevée est celle de Jampui, réputée<br />

pour ses paysages magnifiques et son<br />

climat tonifiant. C’est aussi la plus<br />

touristique.<br />

Le Tripura est par ailleurs très boisé :<br />

pas moins de 60% de la surface est<br />

recouverte de forêts.<br />

Le Tripura possède un patrimoine<br />

culturel très riche. Les sites<br />

archéologiques de Unakoti, Pilak<br />

et Devtamura sont les principales<br />

attractions touristiques. Unakoti est<br />

sans aucun doute un des sites les plus<br />

exceptionnels de tout le nord-est :<br />

ses sculptures géantes, réalisées sur<br />

des parois de pierre, sont grandioses.<br />

Fusionnant religions traditionnelles et<br />

influence tribale, elles témoignent de<br />

la présence d’ordres bouddhistes et<br />

brahmaniques depuis des siècles.<br />

De nombreux temples hindous et<br />

bouddhistes émaillent le territoire,<br />

et parfois se côtoient, signe de la<br />

bonne entente entre personnes de<br />

différentes confessions.<br />

Parmi les monuments à visiter, le<br />

palais Ujjayanta à Agartala, construit<br />

par le Maharaja Radha Kishore<br />

Manikya au tournant du XXe siècle.<br />

L’ensemble, d’un blanc éclatant,<br />

surmonté de trois dômes, fait face à<br />

des jardins de style moghol.<br />

L’Etat possède aussi de très beaux<br />

lacs, dont le Rudra Sagar, sur lequel<br />

le Maharaja Bir Bikram Kishore<br />

Manikya a construit son palais d’été,<br />

le Neermahal, à présent ouvert aux<br />

visiteurs.<br />

Les amoureux de la nature et<br />

des animaux peuvent opter entre<br />

plusieurs réserves naturelles riches en<br />

espèces d’oiseaux très variées, alors<br />

que les éco-parcs permettent des<br />

promenades très cadrées dans une<br />

nature entretenue et aménagée.<br />

Environ 30% des habitants du<br />

Tripura appartiennent à des tribus et à<br />

l’une des 19 communautés recensées.<br />

Les touristes curieux de découvrir les<br />

traditions locales pourront participer<br />

aux festivals traditionnels, où ils<br />

découvriront les chants et danses<br />

des populations autochtones, et aux<br />

autres festivals majeurs communs à<br />

l’Inde entière.<br />

Côté shopping, les visiteurs<br />

peuvent acheter au Tripura des<br />

produits artisanaux de grande qualité.<br />

Qu’ils optent pour le circuit du<br />

sud-ouest, ou celui du nord-ouest (le<br />

nord du Tripura et le district Dhalai),<br />

les touristes sont certains de trouver<br />

au Tripura un environnement préservé<br />

et authentique.<br />

Dans les années à venir, le<br />

gouvernement local souhaite explorer<br />

de nouvelles pistes. Le potentiel est<br />

vaste, qu’il s’agisse d’écotourisme,<br />

de tourisme religieux, de tourisme<br />

de patrimoine, de découverte des<br />

collines ou d’autres zones rurales.<br />

Pour les voyageurs en quête d’univers<br />

nouveaux le Tripura est un Etat à<br />

suivre. Rien d’étonnant alors que<br />

le nombre de touristes soit en<br />

augmentation.<br />

«<br />

Dans les années<br />

à venir, le<br />

gouvernement local<br />

souhaite explorer<br />

de nouvelles pistes.<br />

Le potentiel est<br />

vaste, qu’il s’agisse<br />

d’écotourisme, de<br />

tourisme religieux,<br />

de tourisme de<br />

patrimoine, de<br />

découverte des<br />

collines ou d’autres<br />

zones rurales. Pour<br />

les voyageurs en<br />

quête d’univers<br />

nouveaux le Tripura<br />

»<br />

est un Etat à suivre<br />

Les collines de Jampui<br />

Jampui, la chaîne de collines la<br />

plus élevée du Tripura, à l’est, est<br />

réputée pour sa fraîcheur, son calme,<br />

ses conditions climatiques agréables,<br />

ses forêts denses et ses beaux vergers<br />

d’orangers. Les températures ne<br />

varient pas beaucoup, et rendent<br />

l’endroit idéal pour les touristes.<br />

Appelées « le siège du printemps<br />

permanent », les collines s’étendent<br />

du nord au sud de la région. Certains<br />

endroits offrent de superbes points<br />

de vue de la vallée et des villages<br />

du Mizoram voisin et les touristes<br />

y viennent aussi pour profiter des<br />

levers et couchers du soleil. Le<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

29


Dossier Tripura : Tourisme<br />

©http://ians.in/<br />

Unakoti est situé à<br />

178 km d’Agartala,<br />

dans le district<br />

nord. Les sculptures<br />

géantes gravées dans<br />

la paroi rocheuse,<br />

impressionnantes en<br />

elles-mêmes, sont<br />

situées dans une<br />

superbe forêt, non<br />

loin de cascades.<br />

«<br />

»<br />

point culminant offre une vue sur le<br />

Betling chip, le plus haut sommet du<br />

Tripura, qui culmine à 975 mètres de<br />

hauteur, la vallée Kanchanpur-Dasda,<br />

les Chittagong Hill Tracts et d’autres<br />

©http://aimforseva.org/<br />

Unakoti<br />

Le Palais d’Ujjyanta, vieux de 112 ans, est le<br />

plus grand musée du nord-est de l’Inde<br />

collines du Tripura et du Mizoram<br />

voisin.<br />

Entre mars et mai on peut admirer<br />

plusieurs espèces d’orchidées et<br />

d’arbres sauvages en fleurs. Les<br />

collines se retrouvent dans les nuages<br />

pendant la saison des pluies. Aux mois<br />

d’octobre, novembre et décembre<br />

les orangers sont chargés de fruits<br />

et apportent une touche une touche<br />

colorée au paysage. Chaque année<br />

en novembre, un festival de l’orange<br />

est organisé, auquel participent<br />

de nombreux touristes indiens et<br />

étrangers.<br />

La région comprend onze petits<br />

villages environ. Les Mizo (tribus<br />

Lushai) qui y vivent, ont une identité<br />

culturelle très forte. La plupart<br />

sont chrétiens, parlent un très bon<br />

anglais, et sont financièrement aisés.<br />

Leurs maisons sont équipées du<br />

confort moderne, et il est possible de<br />

séjourner chez eux en tant qu’hôte<br />

payant.<br />

Le tourisme archéologique<br />

Unakoti est situé à 178 km<br />

d’Agartala, dans le district nord. Les<br />

sculptures géantes gravées dans la<br />

paroi rocheuse, impressionnantes en<br />

elles-mêmes, sont situées dans une<br />

superbe forêt, non loin de cascades.<br />

La tête de Shiva au centre et le Ganesh<br />

géant méritent une mention spéciale.<br />

La tête de Shiva, haute de neuf mètres,<br />

comprend une coiffure de trois mètres<br />

de haut. De chaque côté figurent<br />

30 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Tripura : Tourisme<br />

Dossier<br />

Le stupa de Baxanagar<br />

datent des XVe et XVIe siècles.<br />

Pilak est situé à 100 km d’Agartala.<br />

Préservées par l’Archeological Survey<br />

of India, les sculptures, qui datent<br />

d’une période entre le VIIIe et le XIIe<br />

siècle, sont des représentations des<br />

panthéons hindou et bouddhiste, signe<br />

que les deux cultures cohabitaient<br />

pacifiquement.<br />

A Agartala, le musée d’Etat est l’un<br />

des plus beaux du nord-est. La plupart<br />

des sculptures présentées viennent<br />

d’Udaipur, de Pilak et de Jolaibari. Les<br />

plus belles viennent de Pilak, et sont<br />

réalisées en grès.<br />

Le tourisme religieux<br />

Depuis des temps immémoriaux, le<br />

Tripura a abrité toutes les croyances<br />

religieuses et cette diversité se<br />

retrouve dans la société, la sculpture<br />

et l’architecture. Ceci se manifeste<br />

autant dans les lieux de culte actuels<br />

que dans les vestiges archéologiques.<br />

De nombreux temples bouddhistes<br />

et hindous côtoient parfois des<br />

tombeaux musulmans, comme<br />

le Badar Mokam, un important<br />

tombeau islamique, construit au bord<br />

de la rivière Gomati entre le temple<br />

Bhubaneshwari et le temple Mata<br />

Tripureshwari. Ils sont la preuve d’une<br />

parfaite cohabitation entre religions –<br />

une des caractéristiques du Tripura.<br />

Parmi les endroits particulièrement<br />

vivants se trouve l’ancien temple<br />

construit au XVIe siècle de Mata<br />

Tripureshwari à Udaipur, dans le<br />

district sud, rempli de dévots tout au<br />

long de l’année.<br />

Les lacs<br />

A environ 50 km d’Agartala, le lac<br />

Rudra-Sagar et son palais sur l’eau<br />

©http://logminusone.blogspot.com/<br />

Chhabimura, la principale divinité<br />

La Pagode Mahamuni<br />

deux sculptures de femmes. Trois<br />

représentations immenses du taureau<br />

Nandi se trouvent à moitié enterrées<br />

dans le sol. Chaque année sur place,<br />

une grande fête, l’Ashokastami Mela,<br />

a lieu au mois d’avril, à laquelle<br />

participent des milliers de pèlerins.<br />

Deotamura est situé à 75 km<br />

d’Agartala, près d’Amarpur. Le lieu est<br />

célèbre pour ses sculptures réalisées<br />

dans la pierre sur les contreforts des<br />

montagnes, au bord de la rivière<br />

Gomati. Les sculptures des dieux et<br />

déesses, parmi lesquels Shiva, Vishnu,<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

31


Dossier Tripura : Tourisme<br />

La réserve de Trishna<br />

Neermahal constituent l’une des<br />

principales attractions touristiques<br />

du Tripura. Le palais, inspiré de<br />

l’architecture moghole, et possédant<br />

aussi des éléments d’architecture<br />

hindoue, a été construit en 1930<br />

par le Maharaja Bir Bikram Kishore<br />

Manikya pour être sa résidence d’été.<br />

Les touristes peuvent faire du bateau<br />

sur le lac et chaque année, en juilletaoût,<br />

une course de bateau y est<br />

organisée.<br />

Le lac Dumboor, au sud de l’Etat,<br />

qui comprend 48 petites îles, est<br />

un endroit plein de charme, sur une<br />

surface de 42 km 2 . Il est dominé par<br />

trois rangées de collines et une forêt<br />

vierge. On peut y admirer des oiseaux<br />

migrateurs en hiver, et s’adonner aux<br />

plaisirs des sports aquatiques.<br />

Un autre lac est le Kamala Sagar,<br />

à la frontière avec le Bangladesh, à<br />

35 km d’Agartala. Sur ses berges se<br />

trouve un temple célèbre de la déesse<br />

Kali datant du XVIe siècle. C’est un<br />

endroit très prisé pour pique-niquer.<br />

Les réserves naturelles<br />

Située à 25 km d’Agartala, la<br />

réserve naturelle de Sepahijala abrite<br />

plus de 150 espèces d’oiseaux. C’est<br />

aussi un zoo, et l’endroit offre des<br />

promenades en bateau ou à dos<br />

d’éléphant. La réserve de Trishna,<br />

dans le district sud, abrite quant à<br />

elle des bisons, ainsi que des oiseaux<br />

migrateurs. L’immense réserve de<br />

Gomati, également dans le district<br />

sud, permet d’admirer de nombreux<br />

oiseaux, et possède une grande<br />

variété d’arbres. Sa large étendue<br />

d’eau attire les éléphants, les bisons,<br />

les cerfs sambar, les cerfs aboyeurs,<br />

les chèvres sauvages, et des reptiles.<br />

La petite réserve de Rowa, dans le<br />

district nord, abrite plusieurs espèces<br />

de primates et d’oiseaux.<br />

Les éco-parcs<br />

Quatre éco-parcs aménagés permettent<br />

aux visiteurs des promenades dans<br />

une nature entretenue : le parc Tepania,<br />

près d’Udaipur, très visité, est connu<br />

pour son pont suspendu qui traverse la<br />

forêt. On peut aussi y prendre un verre<br />

dans une maison de bois installée dans<br />

les arbres. Le Khumlwang éco-parc, à<br />

25 km d’Agartala, propose des sorties<br />

en bateau sur son lac. Le Baramura<br />

éco-parc, à 37 km d’Agartala, possède<br />

aussi des structures de bois offrant<br />

une vue panoramique sur la nature<br />

environnante. Le dernier est le<br />

Kalapania éco-parc, situé dans une<br />

région où avaient afflué des réfugiés<br />

Lac Dumboor<br />

du Bangladesh pendant la guerre de<br />

1971.<br />

Les festivals<br />

De nombreuses fêtes et de<br />

nombreux festivals sont célébrés dans<br />

cet Etat. Presque chaque tribu possède<br />

32 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Tripura Romain : Tourisme Rolland<br />

Histoire Dossier<br />

Le parc naturel de Kalapania<br />

ses propres danses et festivals, qui sont<br />

célébrés avec beaucoup de dévotion<br />

et d’enthousiasme. Le Kharchi Puja,<br />

qui célèbre quatorze dieux, est célébré<br />

pendant toute une semaine au mois de<br />

juillet dans le temple de Chaturdasha<br />

Devta, près d’Agartala.<br />

Le Pous Sangkranti, près de la<br />

source de la rivière Gomti, à Tirthamu,<br />

dans le district sud, attire de nombreux<br />

dévots de tout le Tripura. Tribaux et<br />

non tribaux se rassemblent pour un<br />

bain sacré dans le lac. L’endroit est<br />

sacré pour les tribaux hindous. Le jour<br />

auspicieux, les gens arrivent par milliers<br />

et rasent leur tête au nom de leurs<br />

ancêtres, vénèrent les divinités et se<br />

livrent à des rituels. L’endroit, entouré<br />

de collines, est d’une grande beauté.<br />

Le festival Ashokastami, à Unakoti,<br />

dans le district nord, a lieu au mois<br />

d’avril. Des milliers de pèlerins venus<br />

de tout le Tripura se rassemblent pour<br />

Le temple Tripura-Gunoboti<br />

faire des offrandes aux images des<br />

dieux et des déesses gravées dans<br />

la pierre. C’est un des sites dédiés à<br />

Shiva les plus importants en Inde.<br />

Durga Puja, célébré au mois<br />

d’octobre dans toute l’Inde, est un des<br />

festivals les plus populaires au Tripura.<br />

Le quatrième jour, les statues de la<br />

déesse Durga sont immergées dans<br />

les rivières ou les grands lacs.<br />

Diwali est particulièrement fêté près<br />

de Matabari, dans le temple de Tripura<br />

Sundari, à Udaipur. Chaque année en<br />

novembre a lieu le festival de l’orange<br />

et du tourisme dans les collines Jampui.<br />

Une fête haute en couleurs à ne pas<br />

manquer lorsque l’on est de passage<br />

dans la région à cette période-là. n<br />

Gaëlle Gicquel<br />

©http://www.fameofcity.com/<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

33


Dossier Tripura : Cuisine<br />

Une nourriture carnée<br />

saine et authentique<br />

De la viande, du poisson séché fermenté, des pousses de bambou,<br />

des légumes verts, des fruits du jacquier…la cuisine du Tripura,<br />

peu grasse et savoureuse, a su garder toute son authenticité.<br />

40 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Tripura : Cuisine<br />

Dossier<br />

Le Tripura est un Etat où le<br />

végétarisme n’est pratiqué que<br />

par une petite minorité. D’une<br />

façon générale, la plupart des<br />

habitants consomme de la viande, qu’ils<br />

soient membres de tribus ou Bengalis.<br />

Les habitudes alimentaires de ces<br />

derniers ressemblent à celles de leurs<br />

pairs en Assam, au Bengale occidental,<br />

et au Bangladesh : beaucoup de riz, du<br />

poisson, du poulet, du mouton et du<br />

porc. A partir des nombreuses espèces<br />

de poissons disponibles sur place et<br />

importés du Bangladesh, ils préparent<br />

aussi des currys épicés.<br />

Une petite partie des musulmans<br />

consomment du bœuf, mais il n’est pas<br />

facilement disponible dans l’Etat.<br />

C’est en fait la cuisine tribale<br />

traditionnelle, appelée mui borok, qui<br />

fait le charme et la particularité de la<br />

cuisine du Tripura. Elle inclut différentes<br />

sortes de viandes et de poissons : du<br />

porc, du poulet, du mouton, du bœuf,<br />

de la tortue, accompagnés de légumes.<br />

La préparation la plus populaire de<br />

poisson est le hilsa, accommodé avec<br />

une sauce à la moutarde et du piment<br />

vert.<br />

C’est une cuisine saine et savoureuse,<br />

qui témoigne que les habitants du<br />

Tripura ont réussi à garder leur identité<br />

culturelle et leur diversité alimentaire.<br />

Un poisson séché et fermenté est<br />

utilisé comme épice. Pour produire<br />

leur riz et leurs légumes sans utiliser<br />

d’engrais chimiques, les tribaux<br />

utilisent la culture alternée. Seules les<br />

cendres de la végétation brûlée des<br />

bois et la bouse de vache sont utilisées<br />

pour enrichir la terre.<br />

Le riz est à la base de la nourriture.<br />

On le combine avec d’autres plats. La<br />

cuisine tripurie se prépare la plupart<br />

du temps sans huile. Lorsque l’on a<br />

besoin de frire les aliments, on utilise<br />

de l’huile de moutarde. Pousses de<br />

bambou, herbes locales, viande grillée,<br />

ragouts de poisson, crevettes, crabes,<br />

grenouilles figurent souvent au menu.<br />

Parmi les nombreuses épices utilisées :<br />

les graines de moutarde, un mélange<br />

de cinq épices (comprenant des graines<br />

d’oignon, de cumin blanc, de fenouil,<br />

de moutarde et de fenugrec), des<br />

piments verts et rouges, du curcuma,<br />

etc…<br />

Yaourt, noix de coco, farine de pois<br />

chiche et maïs sont aussi utilisés dans<br />

les préparations.<br />

L’Etat produit beaucoup de légumes.<br />

Les plus communs sont les aubergines,<br />

les piments, les potirons, les pousses<br />

de bambou, et le maïs.<br />

Légumes tels que pousses de bambou, champignons et carottes<br />

L’ingrédient clé de la cuisine tribale<br />

est un poisson séché et fermenté<br />

appelé berma. Il est considéré comme<br />

étant bon pour la santé, et se prépare<br />

sans huile. Il n’a pas un parfum très<br />

agréable, mais il prend un meilleur goût<br />

une fois cuisiné, et il est utilisé comme<br />

les épices dans la plupart des plats.<br />

Des recettes traditionnelles au porc<br />

Les tribus du Tripura mangent<br />

beaucoup de porc et le consomment<br />

de deux façons différentes. L’une<br />

est le curry de porc accommodé<br />

avec très peu d’épices. L’autre est le<br />

bharta préparé avec du porc cuit à la<br />

vapeur, mélangé avec des oignons, du<br />

gingembre, du piment grillé, une feuille<br />

locale parfumée, et du sel.<br />

Le halud bharta, quant à lui, est<br />

constitué d’une pâte de tamarin crue<br />

mélangée avec du poisson séché, des<br />

oignons, du piment vert cuits dans un<br />

récipient en bambou. Parmi les autres<br />

plats populaires le godhak est une<br />

préparation de légumes bouillis avec<br />

du poisson séché, écrasé à la main avec<br />

Vegan Kosoi (Haricots) Bwtwi<br />

du sel, des oignons et du piment vert. Il<br />

est consommé avec du riz.<br />

Le chakhoi est un cocktail bouilli de<br />

lentilles musur, de porc, de barali (la<br />

partie intérieure du bananier) et de<br />

morceaux de papaye, accommodé<br />

avec du sel et du piment vert. Il est<br />

consommé avec du riz.<br />

Une des recettes traditionnelles,<br />

le chakhwi de porc et pousses de<br />

bambou, se prépare avec des petits<br />

bouts de pousses de bambou, de la<br />

papaye verte, du fruit du jacquier, du<br />

gingembre, des feuilles de citronnier et<br />

du porc.<br />

Une autre, le bwtwi de haricots, se<br />

fait avec des haricots, du piment rouge,<br />

du berma, de l’oignon, de l’ail, de la<br />

poudre de curcuma que l’on fait bouillir.<br />

Une boisson traditionnelle est le<br />

chuak, une bière faite à partir de riz<br />

fermenté. On la boit au cours des<br />

réunions sociales. On l’offre aussi aux<br />

anciens du village lors des célébrations<br />

dans une famille tripurie. n<br />

Gaëlle Gicquel<br />

©http://jeanetteshealthyliving.com/<br />

©http://tamalapaku.blogspot.in/<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

35


Dossier Tripura : Artisanat<br />

Lorsque le bambou et<br />

les textiles font des<br />

merveilles<br />

Dans les villages, les membres des tribus du<br />

Tripura excellent dans l’art de travailler le<br />

bambou et l’osier qui les environnent. Leur<br />

artisanat, réputé dans toute l’Inde, s’exporte<br />

à présent à l’étranger. D’autres sont experts<br />

en tissage et reproduisent à présent les<br />

motifs traditionnels sur des coussins ou des<br />

couvre-lits destinés à une vente à grande échelle.<br />

©http://ecogreenunits.blogspot.in/<br />

Le Tripura est l’Etat du bambou :<br />

pas moins de 9% de son<br />

territoire en est recouvert. C’est<br />

l’une des régions de l’Inde où il<br />

pousse le mieux. Depuis des temps<br />

immémoriaux, les artisans des tribus<br />

se le sont appropriés et ont développé<br />

l’art de le travailler. Il occupe, avec<br />

l’osier, une place à part dans la vie des<br />

habitants, tant au niveau des objets<br />

du quotidien que dans les cérémonies<br />

religieuses.<br />

Cet artisanat s’est imprégné de<br />

différentes influences. Aux motifs<br />

originellement développés par les<br />

tribus se sont ajoutés ceux des artisans<br />

manipuris et bengalis venus s’installer<br />

dans l’Etat. On retrouve aussi dans les<br />

objets les influences de l’hindouisme,<br />

du bouddhisme et de l’islam.<br />

Les touristes peuvent voir les<br />

artisans à l’œuvre dans les villages, et<br />

aussi, lors de leur passage à Agartala,<br />

la capitale, à l’emporium d’Etat appelé<br />

Purbasha.<br />

Un vaste choix d’objets y est<br />

disponible : paravents, sets de table,<br />

nattes, abat-jours, cache-pots, porte-<br />

documents pour les conférences,<br />

éventails, encadrements de miroirs,<br />

barrettes, plateaux, etc… ainsi que<br />

des meubles tels que des chaises de<br />

jardin, des chaises pour bébé, des<br />

fauteuils et même des faux plafonds …<br />

Le Tripura Handloom and<br />

Handicraft Development Corporation<br />

Ltd (Purbasha) vend aussi en ligne ses<br />

produits et les expédie. L’exportation<br />

de l’artisanat est en effet considérée<br />

par le gouvernement comme un<br />

secteur à développer.<br />

Rayures verticales et horizontales<br />

De son côté, l’art du tissage<br />

occupe une place sacrée dans la vie<br />

traditionnelle du Tripura. Les anciennes<br />

histoires traditionnelles et fables<br />

regorgent d’exemples qui le glorifient.<br />

Traditionnellement, les femmes des<br />

différentes tribus tissent elles-mêmes<br />

leurs robes et autres vêtements.<br />

D’une tribu à l’autre les motifs varient,<br />

ce qui permet d’identifier qui, d’une<br />

communauté Chakma, Kuki, Lussai<br />

ou Reang, a réalisé le vêtement. Les<br />

principaux dessins sont des rayures<br />

verticales et horizontales, entremêlées<br />

de broderies de couleurs vives<br />

symboliques.<br />

Les tisserands excellent dans l’art<br />

de retranscrire la beauté de la nature<br />

qui les entoure, avec tous les détails<br />

relatifs à la couleur, aux perceptions,<br />

aux formes… Tout comme les<br />

tresseurs de bambou, ils ont adopté<br />

librement les motifs et techniques des<br />

autres communautés pour enrichir<br />

leurs propres traditions. Le tissage<br />

représente aujourd’hui un mélange<br />

harmonieux de trois traditions –<br />

tribale, manipurie et bengalie. Ces sont<br />

les Bengalis, immigrés du Bangladesh,<br />

qui produisent à plus grande échelle,<br />

notamment des saris en soie et en<br />

coton, des lungis (morceau de tissu<br />

dont les hommes se drapent les<br />

jambes) ou encore des tapis en jute.<br />

Cette industrie qui traditionnellement<br />

procure un deuxième revenu<br />

aux cultivateurs appartenant aux<br />

tribus, joue toujours un rôle important<br />

dans l’économie de l’Etat.<br />

Tout comme pour les objets en<br />

bambou, un large choix de textiles<br />

en coton, en jute et en soie sont<br />

disponibles dans l’emporium d’Etat<br />

Purbasha, à Agartala, ou en vente en<br />

ligne. On y trouve des tuniques, des<br />

saris, des écharpes mais aussi de<br />

superbes accessoires de décoration<br />

intérieure tels que des tentures,<br />

des enveloppes de coussins, des<br />

protège-chaises qui, avec leur touche<br />

« ethnique », ont le pouvoir de donner<br />

un certain cachet à plus d’un intérieur<br />

indien ou européen… n<br />

Gaëlle Gicquel<br />

36 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Siddhart Dhanvant Shanghvi<br />

Rencontre<br />

Siddhart Dhanvant Shanghvi<br />

Un imaginaire d’hier<br />

et d’aujourd’hui<br />

De sa venue rapide comme l’éclair, le<br />

vendredi 6 juin 2014, à l’ambassade de<br />

l’Inde, Siddhart a laissé une trace éphémère<br />

mais toutefois diffuse tel un parfum émanant<br />

de ses livres, et à défaut d’un scandale….<br />

Vaporeux, un tantinet<br />

superficiel, des chaussures<br />

ou plutôt des chaussons qui<br />

évoqueraient une sortie lit,<br />

l’auteur de trente-sept ans semble<br />

prendre toutes les situations à la<br />

cause légère. Il faut souligner qu’il<br />

aime surprendre et donc invente<br />

et réinvente une métamorphose à<br />

chaque apparition, une façon à lui<br />

de se faire remarquer pour exister ou<br />

plutôt ne plus jamais grandir.<br />

Ce jour là, avait-il une envie subite<br />

d’écriture, la France lui avait-elle<br />

procuré les effluves nécessaires pour<br />

son prochain roman ? Voilà qu’une fois<br />

à demi-assis dans son fauteuil rouge<br />

tel un trône, il trépigne d’impatience<br />

de nous faire lecture de son « café<br />

littéraire » pour nous faire boire sa<br />

tasse…<br />

A 26 ans, Siddhart devient une star,<br />

plutôt un people au pays de Ganesh, en<br />

2004, ses livres révèlent un véritable<br />

parfum de scandale. En secouant le<br />

politico correct de la nation, il s’est<br />

vite attiré les foudres de la presse<br />

conservatrice indienne qui qualifie<br />

ses écrits d’obscènes et de choquants<br />

« Parce que je parle de la sexualité des<br />

femmes et du plaisir, c’est donc un<br />

sujet tabou. Mes héroïnes sont libres,<br />

fortes, elles dominent les hommes,<br />

les chevauchent pendant l’amour, et<br />

l’on m’accuse de mettre en péril la<br />

virilité de l’homme ! » Siddhart, en<br />

quasi-féministe, s’allie aux femmes<br />

qui le lui rendent bien. Il y a une<br />

vraie mouvance sexuelle en Inde, de<br />

ce fait, Siddhart est bien obligé de<br />

le faire constater mais comment le<br />

crier autrement que dans le roman ?<br />

Détrompez-vous, ce n’est pas la<br />

romance sexuelle entre un Anglais et<br />

un jeune Indien qui fait scandale mais<br />

de toucher au sacré, à la condition<br />

féminine que l’on entrevoit dans les<br />

pages de son livre comme tachée par<br />

des scènes saphiques ou zoophiles :<br />

une épopée certifiée de Kâma-Sûtra<br />

d’un genre !<br />

Tout a commencé par l’Angleterre,<br />

précurseur des démons enfouis dans<br />

la plume de Siddhart, pour cause<br />

comme le précise l’auteur « Il n’y a pas<br />

d’agents littéraires en Inde, … ». Mais<br />

peut-on se poser la question, est-ce<br />

du pain béni pour ces colonisateurs<br />

qui veulent entacher l’Inde par une<br />

pâle vengeance ? Que penser de<br />

cette Inde indo-britannique ? Et<br />

pourtant les Anglais en prennent pour<br />

leur grade. L’auteur montre, dans son<br />

premier roman : « La fille qui marchait<br />

sur l’eau » 2004 Editions des Deux<br />

Terres, une époque révolue, celle des<br />

années vingt au cœur de Bombay<br />

où baignent luxure et débauche sans<br />

limite. Mais qu’à cela ne tienne, la<br />

presse britannique l’encense et voit<br />

en lui un auteur né. Il fréquente la<br />

jet set de Bombay, et grâce à cet<br />

émolument médiatique, l’Inde le<br />

considère, mais comme une sorte<br />

d’anarchiste sexuel et d’élément<br />

perturbateur qui, toutefois, trouve son<br />

public et peut-être, un porte-parole en<br />

la matière. Siddhart attire l’attention,<br />

on lui propose de mettre en avant ses<br />

articles dans de grands quotidiens,<br />

hebdomadaires et autres de la presse<br />

indienne et internationale.<br />

Comme dans son premier ouvrage, il<br />

décrit l’Inde des privilèges, post-érotico<br />

soap-opéra dans une veine de contes<br />

fantastiques en fortes émotions. Dans<br />

son second « Les derniers flamants<br />

de Bombay » 2010 Editions des Deux<br />

Terres, il nous replonge parmi les<br />

nantis de manière plus contemporaine<br />

en toile de fond : Bollywood et son<br />

masala de sexe, d’argent, de célébrité,<br />

et de meurtre qui battent en brèche<br />

les valeurs fondamentales de la haute<br />

société indienne.<br />

Siddhart Dhanvant Shanghvi fait<br />

dans le méli-mélo des genres mais<br />

est-ce là son art ? Il réussit tout de<br />

même à le dépêtrer à qui le veut bien<br />

voir comme à ses lecteurs qui veulent<br />

voyager dans ses rêves et s’imprégner<br />

de son âme littéraire. n<br />

Laurent Adicéam-Dixit<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

37


Education Twinning in India 2014<br />

Ensemble à Christ Nagar International School<br />

South India 2014 et Twinning in India<br />

Echanges scolaires et jumelages entre le Collège Jean Renoir (Bourges) et la Christ Nagar International<br />

School de Trivandrum (Kerala).<br />

En raison des projets pilotes<br />

et des voyages d’élèves qu’il<br />

a initiés avec l’Inde depuis<br />

2007, le Collège Jean Renoir<br />

de Bourges fait partie du réseau<br />

français des « Ecoles associées à<br />

l’UNESCO » ; ces séjours scolaires et<br />

d’études qui se concrétisent tous les<br />

deux ans sont à la fois très appréciés<br />

par l’Académie d’Orléans-Tours pour<br />

leur démarche innovante et soutenus<br />

par le Conseil régional du Centre et le<br />

Conseil général du Cher ainsi que par<br />

différents partenaires nationaux et<br />

régionaux ( MGEN, Fondation Cultura,<br />

Théâtre des Bains Douches…) qui ont<br />

reconnu l’excellence de telles initiatives<br />

en matière d’éducation.<br />

Réputé et réellement estimé pour la<br />

richesse et la qualité de ses multiples<br />

projets pédagogiques orientés vers<br />

l’international, le Collège Jean Renoir<br />

a accueilli en mai dernier un groupe<br />

de 18 jeunes Indiens originaires<br />

de l’Etat du Kerala. Scolarisés à la<br />

Christ Nagar International School de<br />

Trivandrum - ou Thiruvananathapuram<br />

- capitale du Kerala, ces élèves étaient<br />

accompagnés par le Principal de<br />

l’établissement, Père Cyriac Thundiyil et<br />

par deux enseignantes d’anglais. Si ce<br />

programme de jumelage est le premier<br />

à être mis sur pied en 2014, il s’inscrit<br />

dans une politique à l’international<br />

menée par l’établissement de Bourges<br />

qui, depuis 2007, a mis l’Inde au cœur<br />

de ses destinations et de ses priorités<br />

en matière d’ouverture sur le monde et<br />

à la citoyenneté internationale.<br />

En effet, au cours de ces dernières<br />

années, des élèves des classes de 3ème<br />

-dont certains connaissent des difficultés<br />

scolaires ou personnelles - ont eu la<br />

possibilité et la chance de participer à<br />

des voyages d’études en Inde. Chaque<br />

projet est toujours consciencieusement<br />

préparé sur deux années au cours<br />

desquelles les élèves vont découvrir<br />

l’Inde grâce à diverses initiations<br />

leur permettant une approche des<br />

dimensions économiques, écologiques<br />

et des richesses socio-culturelles de<br />

ce si vaste pays-continent. Depuis plus<br />

de 7 ans, l’accent a donc été mis sur la<br />

découverte et l’exploration de deux des<br />

Etats du sud l’Inde : le Tamil Nadu et le<br />

Kerala.<br />

Février 2014 : des élèves du Collège<br />

Jean Renoir et leurs accompagnateurs<br />

se préparent à s’envoler vers<br />

Trivandrum…<br />

Et, si depuis 2007, plus d’une<br />

centaine d’élèves se sont rendus en<br />

Inde, la volonté d’Alain Payen, Principal<br />

du Collège, était aussi de pouvoir<br />

envisager des séjours dans un esprit<br />

de réciprocité. Fort de sa grande<br />

expérience à l’international qu’il conduit<br />

dans une dizaine de pays avec des<br />

membres motivés et dynamiques de<br />

son équipe pédagogique, Alain Payen<br />

est à l’initiative de différents projets<br />

d’envergure avec l’Inde ; un pays dont<br />

il n’a de cesse de nous faire partager<br />

ses découvertes et de témoigner de ses<br />

enthousiasmes…<br />

Consécutivement à des rencontres<br />

de plus en plus affinées que les<br />

enseignants avaient nouées lors de<br />

précédents séjours au Kerala, c’est<br />

donc au cours du premier semestre<br />

38<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles De L’Inde


Twinning in India 2014<br />

Education<br />

Christ Nagar International<br />

School - Photo Emile Carion<br />

2014 que ce jumelage a pu être mis sur<br />

pied avec la “Twinning in India”, tandis<br />

que quelques enseignants indiens<br />

de cette Ecole étaient déjà venus à<br />

Bourges, en 2013, invités par le Collège<br />

Jean Renoir. A titre de préparation<br />

et comme pour chacun des voyages,<br />

les élèves ont reçu pendant deux<br />

ans une initiation leur permettant de<br />

découvrir certains aspects de l’Inde : sa<br />

géographie, son histoire, les traits de sa<br />

culture artistique, si riche et diversifiée,<br />

ses ressources économiques et son<br />

environnement naturel….<br />

Les élèves ont également été initiés<br />

à la technique des Carnets de voyages,<br />

avec Lydie Baron, artiste-illustratrice<br />

et enseignante au Collège. Outre<br />

l’apprentissage vivant de l’anglais, dont<br />

chacun réalise désormais l’importance<br />

capitale, de telles initiatives valorisent<br />

aussi une ouverture vers les arts de la<br />

scène, grâce au danseur-chorégraphe,<br />

Christian Bourrigault qui, pendant<br />

la seconde année, est venu aider les<br />

jeunes à construire leur spectacle<br />

tandis que de nombreux enseignants<br />

associés au projet les ont guidés dans la<br />

rédaction des exposés thématiques qui<br />

seront présentés en anglais devant une<br />

audience de quelque 600 personnes de<br />

la Christ Nagar International School.<br />

Pendant plusieurs jours, nombreuses<br />

furent les animations culturelles et les<br />

manifestations artistiques proposées<br />

par les élèves indiens et français<br />

qui firent vibrer les murs de cet<br />

établissement de renom qui compte,<br />

avec ses quelque 6000 élèves, de<br />

nombreux partenariats à l’étranger.<br />

Puis, diverses visites proposées ont<br />

permis d’allier l’approche touristique de<br />

l’Etat (réserves d’éléphants, plantations<br />

de thé, visite des backwaters ou des<br />

plages du Kerala et de Cochin…) à<br />

la découverte de quelques éminents<br />

centres de recherches scientifiques,<br />

tel l’institut de cancérologie - Regional<br />

Cancer Centre (RCC)- ou bien encore les<br />

studios de Toonz Animation India Ltd, ce<br />

leader mondial de la création des films<br />

d’animation situé dans cette capitale du<br />

Kerala.<br />

Et si pendant cette période (du 7<br />

au 18 février), les 18 collégiens ont été<br />

chaleureusement accueillis dans des<br />

familles de Thiruvananathapuram, ce<br />

fut ensuite au tour des 18 collégiens<br />

indiens d’être reçus dans les familles<br />

berruyères, fières à leur tour de leur<br />

rendre une belle hospitalité.<br />

Mai 2014 : élèves et enseignants du<br />

Kerala en résidence dans une vingtaine<br />

de familles à Bourges.<br />

Après d’heureuses retrouvailles<br />

et une fois installés dans leur famille<br />

respective, les jeunes ont ensemble<br />

rejoint le collège pour participer dès<br />

l’après-midi à des échanges sur le<br />

thème de la condition de la femme<br />

avec quelques enseignants et invitées<br />

afin d’entamer un dialogue autour de<br />

la perception du rôle de la femme dans<br />

chaque pays ; autant de conceptions<br />

relatives marquées par les héritages<br />

socio-culturels. Au cours de la semaine,<br />

des programmes de visites organisées<br />

à Bourges et dans la région ainsi qu’à<br />

Paris permirent aux jeunes Indiens de<br />

découvrir quelques chefs-d’œuvre du<br />

patrimoine architectural - Bourges, sa<br />

magnifique cathédrale ainsi que ses<br />

marais, l’abbaye de Noirlac et quelques<br />

châteaux de la Loire…- ou encore de<br />

visiter des entreprises, telle Veolia, qui<br />

leur a proposé un exposé pédagogique<br />

sur la gestion des déchets.<br />

Il faut souligner que l’organisation<br />

matérielle de tels voyages bénéficie du<br />

précieux appui logistique et de la solide<br />

expérience de terrain de NAMASTE<br />

I.N.D.E (Imaginons Nous Demain<br />

Ensemble) *, une association berruyère<br />

dont les membres se sont rendus à<br />

plusieurs reprises sur le terrain en Inde<br />

et qui associe aux projets du Collège<br />

Jean Renoir, ceux du Lycée Jacques-<br />

Cœur et de l’INSA (Institut National des<br />

Sciences Appliquées) réalisés en Inde<br />

ainsi que quelques établissements de<br />

la région Centre. Ainsi les élèves ont-ils<br />

participé à la conférence sur l’éducation<br />

en Inde organisée par l’Association<br />

Centraider au Lycée jacques Coeur.<br />

Sur invitation du Conseil général<br />

du Cher, enseignants et jeunes<br />

Indiens élégamment vêtus d’un<br />

costume bleu et d’une chemise<br />

claire ont été reçus dans la Salle des<br />

Délibérations, où les attendaient Jean-<br />

Pierre Saulnier, Président du Conseil<br />

général, et Alain Rafesthain, Viceprésident,<br />

en charge des finances et<br />

de la coopération décentralisée. La<br />

question de l’importance décisive de<br />

l’éducation et celle de l’ouverture aux<br />

valeurs citoyennes et interculturelles<br />

ont fait l’objet d’un riche débat, puis<br />

Père Cyriac Thundiyil, Principal de la<br />

Christ Nagar International School, a<br />

également exposé quelques-unes des<br />

priorités en matière d’éducation en Inde<br />

où, près de la moitié de la population,<br />

soit quelque 600 millions de personnes,<br />

a aujourd’hui moins de 25 ans.<br />

Une rencontre qui s’est clôturée<br />

dans la prestigieuse Salle du Duc<br />

Jean autour d’un verre de l’amitié<br />

et d’échanges plus informels, sans<br />

oublier une mutuelle distribution des<br />

cadeaux et les incontournables selfies,<br />

ces autoportraits qui, à l’unanimité et<br />

sur tous les continents, font la joie de<br />

tous!... n<br />

Mireille-Joséphine Guézennec<br />

(Présidente d’honneur de<br />

l’association NAMASTE I.N.D.E)<br />

* NAMASTE I.N.D.E<br />

(www.namasteinde.org)<br />

Avant la fête donné par les élèves - Photo Emilie Carion<br />

Atelier de réflexion à Christ Nagar - photo Emile Carion<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

39


Histoire Romain Rolland<br />

©National Library of France<br />

Même s’il découvre à Normale<br />

Supérieure, où il séjourne de<br />

1886 à 1889, la traduction<br />

par Burnouf de la Bhagavad-<br />

Gîta, la rencontre de Romain Rolland<br />

avec l’Inde ne se réalise vraiment<br />

qu’à partir de la première guerre<br />

mondiale. Dès le début du conflit, le<br />

célèbre auteur du roman-fleuve Jean-<br />

Christophe a décidé de résider en Suisse<br />

et de faire paraître ses articles dans<br />

le Journal de Genève où, il dénonce,<br />

se situant « au-dessus de la mêlée »,<br />

le déferlement de haine entre la France<br />

et l’Allemagne. C’est pourquoi lorsqu’en<br />

février 1915, Ananda Coomaraswamy<br />

lui dédie un article où il affirme<br />

que le renouvellement de la culture<br />

européenne ne peut se faire que grâce<br />

à l’intervention des autres cultures,<br />

l’écrivain s’enthousiasme. Et quand<br />

l’historien de l’art lui envoie son ouvrage<br />

The Arts and Crafts of India and Ceylan,<br />

il s’écrie : « J’éprouve, en feuilletant les<br />

pages illustrées, un ravissement. Cet<br />

univers est trop riche, trop plein ! Ma<br />

poitrine éclate. Elle est trop petite pour<br />

le contenir. »<br />

Les deux hémisphères de l’Esprit<br />

Le discours de Tagore, en juin 1916,<br />

lui apparait comme une véritable<br />

incitation au dialogue avec l’Orient. À<br />

l’Université impériale de Tokyo, l’auteur<br />

de l’Offrande lyrique met en garde le<br />

Japon contre la civilisation d’Europe,<br />

« vorace et dominatrice », et dénonçant<br />

son monopole, prophétise la fin du<br />

monde occidental, essentiellement<br />

scientifique, profondément inhumaine.<br />

Le poète bengali engage l’Asie, à<br />

remettre en question, dans son<br />

processus de décolonisation, les<br />

valeurs prônées par les Européens, et<br />

pour cela à prendre conscience de sa<br />

propre richesse intérieure, ce qui doit<br />

déboucher, pense-t-il, sur un dialogue<br />

d’égal à égal avec l’Occident.<br />

Pour Rolland, abattu de voir<br />

les Européens s’entredéchirer, ce<br />

discours marque un tournant dans<br />

l’histoire du monde. Délaissant<br />

l’Europe fratricide, l’écrivain s’ouvre<br />

à l’internationalisme. Et lorsqu’à<br />

la fin de la guerre, il demande à<br />

Tagore d’adhérer à sa « Déclaration<br />

d’indépendance de l’esprit »,<br />

il précise le sens de sa profession<br />

de foi : « Je voudrais que désormais<br />

l’intelligence de l’Asie prît une part<br />

de plus en plus régulière dans les<br />

manifestations de la pensée d(Europe.<br />

Mon rêve serait que l’on vît, un jour,<br />

l’union de ces deux hémisphères de<br />

l’Esprit ; et je vous admire d’y avoir<br />

contribué plus que quiconque.»<br />

Le poète se rendra plusieurs fois<br />

en Europe et rencontrera Rolland à<br />

plusieurs reprises : à Paris en 1921,<br />

puis en 1926 en Suisse, où il a décidé<br />

de s’installer définitivement, et une<br />

dernière fois à Genève en 1930. Les<br />

échanges portent essentiellement<br />

sur la musique, la poésie, la danse et<br />

la peinture et une correspondance (la<br />

dernière lettre de Tagore date de 1940)<br />

accompagne cette amitié entre les<br />

deux hommes.<br />

40 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Romain Rolland<br />

Histoire<br />

L’Inde<br />

Romain Rolland<br />

Les deux hommes<br />

échangent eux aussi<br />

une correspondance<br />

et Gandhi, de retour<br />

de la deuxième<br />

Conférence de la Table<br />

Ronde à Londres en<br />

1931, lui rendra visite<br />

chez lui, sur les bords<br />

du lac Léman. Mais<br />

l’idéal pacifiste de<br />

l’Hindou, pense-t-il,<br />

n’est pas applicable<br />

en France et le<br />

Mahatma n’apporte<br />

pas de solution au<br />

problème de l’action<br />

sociale en Europe<br />

«<br />

»<br />

Rencontre avec le « Christ des<br />

Indes »<br />

L’Inde se dévoile progressivement<br />

sous ses yeux, culturelle d’abord,<br />

puis politique quand Dilip Kumar Roy,<br />

étudiant à Cambridge, lui parle lors<br />

d’une visite à Villeneuve du succès de<br />

Jean-Christophe dans son pays. Mais il<br />

évoque surtout l’influence magnétique<br />

sur les foules de celui qui a lancé depuis<br />

le massacre d’Amritsar d’avril 1919 le<br />

premier mouvement de désobéissance<br />

civile, et va devenir pour l’écrivain le «<br />

Christ des Indes ». Le Mahatma est bien<br />

ce héros que cherche son cœur pour<br />

faire réagir l’Europe pacifiquement face<br />

au désastre de la guerre et des Traités<br />

de paix. De plus Gandhi semble avoir<br />

subi l’influence des idées de Tolstoï,<br />

sur qui Rolland a écrit une biographie<br />

admirative et, note-t-il, populaire<br />

au Bengale. Ainsi prend-il plaisir à<br />

observer qu’il contribue concrètement<br />

au dialogue entre l’Orient et l’Occident,<br />

échange amorcé depuis un certain<br />

temps déjà par l’écrivain russe.<br />

La biographie de celui qu’en France<br />

on présente comme un « agitateur »,<br />

en réalité « un des types les plus<br />

héroïques du Résistant », parait en<br />

1924. Mahatma Gandhi obtient un<br />

très gros succès et fait connaître le<br />

satyagraha à l’Europe. Cet idéal de<br />

Non-violence, présenté comme une<br />

hypothèse sociale dans la lutte contre<br />

la colonisation, le séduit tout autant<br />

que l’expérience bolchevique dans la<br />

Révolution prolétarienne.<br />

Les deux hommes échangent eux<br />

aussi une correspondance et Gandhi, de<br />

retour de la deuxième Conférence de la<br />

Table Ronde à Londres en 1931, lui rendra<br />

visite chez lui, sur les bords du lac Léman.<br />

Mais l’idéal pacifiste de l’Hindou, penset-il,<br />

n’est pas applicable en France et le<br />

Mahatma n’apporte pas de solution au<br />

problème de l’action sociale en Europe :<br />

le satyâgraha n’est pas compatible<br />

avec la révolution prolétarienne ni<br />

le nationalisme de Gandhi avec les<br />

convictions de l’auteur d’Au-dessus de la<br />

Mêlée.<br />

Dès 1915, l’auteur de Jean-<br />

Christophe a échangé des lettres avec<br />

des correspondants de l’Inde culturelle,<br />

sociale et politique. À partir de la<br />

publication de Mahatma Gandhi, il<br />

reçoit chez lui de nombreuses visites :<br />

personnages politiques comme Lala<br />

Lajpat Rai ou le pandit Nehru, mais<br />

aussi des Indiens du monde littéraire<br />

(Dhan Gopal Mukherji, l’historiographe<br />

de Ramakrishna), du monde<br />

universitaire (Kalidas Nag), ou du<br />

monde scientifique (Jagadis Chunder<br />

Bose). Dans les années qui suivent la<br />

publication de sa biographie, Rolland<br />

approfondit sa connaissance de l’Inde<br />

et précise les raisons de son attirance.<br />

On ne saurait opposer une Inde passive<br />

et intuitive, pense-t-il, à une Europe<br />

dont la pensée serait fondée sur la<br />

seule raison : la science n’est pas<br />

l’apanage de l’Occident. « ... Comment<br />

[les Hindous] arrivent à combiner, dans<br />

le même temps, raison claire et vision<br />

intérieure, c’est une science que ne<br />

Bibliographie<br />

Les publications de Rolland ayant<br />

trait à l’Inde sont nombreuses :<br />

préfaces, avant-propos, introductions<br />

à différents ouvrages, articles<br />

de presse. Nous citons ici les textes<br />

les plus importants.<br />

La correspondance indienne est<br />

publiée chez Albin Michel :<br />

- Rabindranath Tagore et Romain<br />

Rolland, lettres et autres écrits,<br />

Cahiers Romain Rolland, n° 12<br />

(1961).<br />

- Gandhi et Romain Rolland,<br />

Correspondance, extraits du Journal<br />

et textes divers, Cahiers n° 19<br />

(1969).<br />

La correspondance croisée avec<br />

Kalidas Nag est publiée en anglais<br />

sous le titre : Romain Rolland –<br />

Kalidas Nag Correspondence, The<br />

Tower and the Sea, présentée par<br />

Chinmoy Guha, Papyrus,1996,<br />

Calcutta.<br />

Nombreux extraits de lettres à divers<br />

correspondants dans le journal de<br />

Rolland, Inde, 1915-1943, Nouvelle<br />

édition augmentée de textes inédits,<br />

Albin Michel, 1960.<br />

La Vie de Ramakrishna, Stock, 1993<br />

et La Vie de Vivekananda et l’évangile<br />

universel, Stock, 1977.<br />

Les actes du séminaire international<br />

à New Delhi du 15 au 17 janvier<br />

1990, organisé conjointement par<br />

Festival of India et Sahitya Akademi,<br />

ont été édités par Sibnarayan Ray<br />

sous le titre The Universality of Man,<br />

The Message of Romain Rolland,<br />

Sahitya Akademi 1992.<br />

Enfin, Présence de l’Inde dans le<br />

Fonds Romain Rolland, Bibliothèque<br />

nationale de France, département<br />

Littérature et art, Juin 2008,<br />

comporte la liste des ouvrages de la<br />

Bibliothèque de l’auteur concernant<br />

l’Inde. Sur près des 13000 volumes<br />

conservés qui constituaient la<br />

bibliothèque personnelle de l’auteur,<br />

environ 630 ouvrages témoignent<br />

de son intérêt pour l’Inde.<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

41


Le Coin des Enfants Le lac de la Lune<br />

©National Library of France<br />

soupçonnent point les plus intelligents<br />

des Européens », écrit-t-il dans son<br />

Journal. Cette interrogation prend<br />

place dans le large débat d’idées qui<br />

occupe l’Europe dans ces années-là.<br />

Rolland lui-même songe à créer en<br />

Suisse une Maison internationale des<br />

Amis pour offrir une tribune et un foyer<br />

aux esprits indépendants d’Europe et<br />

d’Asie. Mais le projet n’aboutira pas.<br />

L’appel de l’Orient dans les<br />

années 20<br />

Le débat Orient-Occident envahit<br />

le champ intellectuel de l’aprèsguerre,<br />

notamment en 1924-1925.<br />

La « redécouverte » de l’Asie apporte<br />

une clarté sur l’Europe assombrie<br />

par des années de guerre. Lux ex<br />

Oriente... Le comte Hermann von<br />

Keyserling, dont Rolland lit Le Journal<br />

de Voyage d’un philosophe, fonde une<br />

école de la Sagesse où il souhaite<br />

unir intellectualisme occidental<br />

et spiritualisme oriental. Son ami<br />

Hermann Hesse, fait paraître Siddharta.<br />

En 1925 les Décades de Pontigny se<br />

penchent sur les mentalités comparées<br />

des peuples d’Europe et d’Asie. C’est<br />

une véritable ferveur pour l’Inde que<br />

connaît la France à cette époque.<br />

Cet « appel de l’Orient » est<br />

commun à toute une génération<br />

d’après-guerre auquel répondent en<br />

France les voix d’indianistes (Sylvain<br />

Lévi), de comparatistes des religions<br />

(Masson-Oursel), de traditionalistes<br />

(René Guénon) ou d’historiens (René<br />

Grousset). De son côté, habité sa vie<br />

durant par ce « sentiment océanique »<br />

qui est l’objet à cette même époque<br />

d’une correspondance avec Freud,<br />

Rolland se rapproche d’un Orient de<br />

nature religieuse. Affirmant que l’Inde<br />

primitive fut la matrice du monde,<br />

cherchant un sens à l’évolution d’une<br />

humanité qui erre depuis tant d’années<br />

dans les ténèbres, il finit par remonter<br />

le temps et déclare avec Michelet, que<br />

« l’aube est dans les Védas ».<br />

La splendide symphonie de l’Âme<br />

universelle<br />

C’est pourquoi il se lance dans<br />

une étude sur les deux réformateurs<br />

spirituels de l’Inde contemporaine :<br />

Ramakrishna et Vivekananda qui<br />

ont réalisé, dit-il, la « splendide<br />

symphonie de l’Âme Universelle ».<br />

Biographie de Romain Rolland<br />

Dans son Essai sur la mystique et<br />

l’action de l’Inde vivante, il remarque<br />

que dès la fin du 19ème s., un<br />

courant de renouveau a traversé l’Inde<br />

traditionnelle brahmanique, incarné<br />

par des « bâtisseurs de l’unité »<br />

sous le nom de Brahmo Samaj. Ce<br />

mouvement de réforme sociale, légale<br />

et religieuse qui s’inspire d’éléments<br />

de l’hindouisme, mais aussi de l’islam<br />

et du christianisme, rejette le culte<br />

des images et l’idolâtrie, et accorde<br />

une place importante aux questions<br />

sociales, de l’abolition du système des<br />

castes à l’émancipation de la femme.<br />

Voilà de quoi renouer avec l’Europe<br />

chrétienne et fonder dans un esprit<br />

œcuménique la religion universelle<br />

chère à Rolland. Ce mouvement<br />

rappelle à l’auteur épris des idées<br />

de la Révolution française, sa célèbre<br />

29 janvier 1866 : Naissance à Clamecy (Nièvre), dans une famille de notaires.<br />

Sa Bourgogne natale lui inspirera Colas Breugnon (1919).<br />

1880 : Installation à Paris avec sa famille.<br />

1886-1889 : Reçu à l’École Normale supérieure puis à l’agrégation d’histoire.<br />

1889-1891 : Membre de l’École française de Rome. Rencontre décisive avec<br />

Malwida von Meysenbug et découverte de l’art italien.<br />

1892 : Mariage avec Clotilde Bréal dont il divorce en 1901.<br />

1895 : Doctorat de lettres avec une thèse sur Les origines du théâtre lyrique<br />

moderne.<br />

1903 : Vie de Beethoven, suivi de Vie de Michel-Ange (1906) et de Vie de Tolstoy<br />

(1911).<br />

1904 : Enseigne l’histoire de la musique à la Sorbonne.<br />

1904-1912 : Publication de Jean-Christophe.<br />

1908 : Musiciens d’aujourd’hui et Musiciens d’autrefois.<br />

1909 : Publication du Théâtre de la Révolution, que complèteront Le Jeu de<br />

l’amour et de la mort (1925), Pâques fleuries (1926), Les Léonides (1928),<br />

Robespierre (1939).<br />

1914 : Après la déclaration de guerre, non mobilisable, décide de rester en<br />

Suisse.<br />

1915 : Au-dessus de la mêlée où il dénonce la quête des belligérants d’une<br />

victoire totale, au lieu de vouloir négocier une paix équitable. Obtient le Prix<br />

Nobel de Littérature.<br />

1919 : Publication de Liluli. Devient une figure du mouvement pacifiste<br />

international. Importante correspondance avec entre autres Maxime Gorki,<br />

Stefan Zweig, Sigmund Freud, Richard Strauss, Tagore et Gandhi.<br />

1920 : Publication de romans : Clerambault, histoire d’une conscience libre<br />

pendant la guerre, et de Pierre et Luce.<br />

1924 : Publication de Mahatma Gandhi.<br />

1929-1930 : Publication de l’Essai sur la mystique de l’action et de l’Inde<br />

vivante. La Vie de Ramakrishna. La Vie de Vivekananda et l’Evangile universel.<br />

1930 : S’engage de plus en plus pour la défense de la Russie soviétique.<br />

1933 : Publication de L’Âme enchantée, roman.<br />

1934 : Mariage avec Maria Koudacheva.<br />

1935 : Écrits politiques : Quinze ans de combat et Par la Révolution, la Paix.<br />

Voyage à Moscou et entrevue avec Staline.<br />

1938 : Quitte la Suisse et s’installe à Vézelay (Yonne) où il écrit Péguy, achève Le<br />

Voyage intérieur ainsi que Beethoven, Les grandes époques créatrices.<br />

30 décembre 1944 : mort de Romain Rolland à Vézelay.<br />

42 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Romain Rolland<br />

Histoire<br />

©National Library of France<br />

©National Library of France<br />

devise : « Nous sommes l’Humanité ».<br />

Parce qu’il faut établir la fraternité<br />

entre les croyants dont les religions<br />

respectives constituent, en leur<br />

totalité, une synthèse de la Religion<br />

éternelle, il s’intéresse au Yoga qui,<br />

signifiant « joug » ce qui réunit, n’est<br />

pas éloigné du terme « religion » dont<br />

la racine religare fait référence à l’idéal<br />

de « relier » les hommes entre eux. Or<br />

les Yogas proposent cet idéal de foi,<br />

d’action et de raison en une parfaite<br />

synthèse.<br />

« L’âge noir, l’âge des ténèbres »,<br />

écho du Kali-Yuga des Hindous, lui<br />

rappelle aussi la théorie des âges et la<br />

doctrine des cycles chère à Héraclite<br />

et Empédocle, comme si les deux<br />

continents s’abreuvaient à une source<br />

commune. Jetant des passerelles entre<br />

les religions hindoue et chrétienne,<br />

son Essai tend à retrouver, de Maître<br />

Eckhart et Saint-Jean de la Croix à<br />

Ramakrishna et Vivekananda, une<br />

harmonie du Monde et de l’Être, où<br />

communieraient, les philosophies<br />

védantique et néo-platonicienne et,<br />

dans une sorte de pan-mysticisme,<br />

mystiques chrétiennes et mystiques<br />

hindoues.<br />

Ailleurs, ce sont les travaux de J.<br />

C. Bose, naturaliste spécialisé dans<br />

des recherches sur la sensibilité des<br />

végétaux, qui, en avançant par une<br />

démonstration scientifique l’hypothèse<br />

de l’unité cosmique – les plantes<br />

sont des êtres vivants – éveillent son<br />

attention. Preuve est ainsi faite qu’il n’y<br />

a pas contradiction entre foi et science,<br />

tradition et progrès matériel, Orient<br />

et Occident. C’est pourquoi, dans les<br />

deux livres sur la mystique de l’Inde,<br />

sont cités, à côté du Mahâbhârata et<br />

du Râmâyana, les noms de Cervantès,<br />

Goethe, Beethoven, Shakespeare,<br />

Tolstoï, et Schiller et son « Je suis<br />

concitoyen de ceux qui viendront plus<br />

tard ».<br />

Le Songe d’une Vie<br />

Cette pensée hindoue, si elle le<br />

séduit intellectuellement, Rolland estil<br />

homme à se donner les moyens de<br />

©National Library of France<br />

la vivre au quotidien? Que pouvait<br />

bien signifier son attirance pour la<br />

non-violence si elle n’était pas assortie<br />

d’une décision de vivre le satyagraha<br />

ici et maintenant ? Le Mahatma ne s’y<br />

trompe pas, qui lui fait observer, lors de<br />

son séjour à la villa Olga, qu’il vit dans<br />

une pièce surchauffée, sous un mauvais<br />

climat et qu’il devrait faire une cure<br />

de nature, d’air et de soleil ! L’auteur<br />

aborde l’Inde tout en restant à quai, y<br />

fait escale, pourrait-on dire, sans faire<br />

l’expérience décisive de l’immersion<br />

telle que la vit le voyageur. Le pays<br />

des Brahmanes et des Upanisads<br />

reste un continent mythique. Enfin,<br />

à l’impossibilité d’un voyage vers la<br />

vallée du Gange et de l’Indus, s’ajoute<br />

le rejet d’un aspect du yoga et de sa<br />

pratique fondée sur une philosophie<br />

de l’énergétique. Son étude de l’Inde<br />

révèle sa difficulté à découvrir une<br />

autre culture sans références à la<br />

sienne propre.<br />

« L’œuvre indienne » de Romain<br />

Rolland est toutefois de grande<br />

importance. Même si de nombreuses<br />

circonstances le détournent d’une<br />

confrontation directe, il fut un des<br />

grands passeurs entre le continent<br />

européen et l’Inde, et en France, le<br />

premier à approcher ce pays d’aussi<br />

près, au point de le faire découvrir<br />

et aimer à plusieurs générations de<br />

lecteurs.<br />

En fin de compte, après avoir<br />

répondu à un désir humaniste de<br />

rapprocher les peuples en marche<br />

vers l’unité, action héroïque pour<br />

construire la cité de la fraternité<br />

humaine, le « pèlerinage aux sources »<br />

de Romain Rolland est ramené à<br />

une circumnavigation de l’âme où<br />

la confrontation avec l’Orient est<br />

une étape d’un « voyage intérieur »<br />

identifié au « songe d’une vie », ce<br />

qu’évoque plus largement le reste de<br />

son œuvre. n<br />

Roland Roudil<br />

Dès sa création, en 1999, à Brèves<br />

(Bourgogne), dans le village ou<br />

Romain Rolland repose près de ses<br />

ancêtres, l’Association Romain Rolland<br />

a été rejointe par un grand nombre<br />

d’universitaires français et étrangers<br />

et d’admirateurs de l’auteur de Jean-<br />

Christophe et Au-dessus de la mêlée.<br />

L’association compte en 2014, plus de<br />

350 adhérents et 300 correspondants,<br />

répartis dans 24 pays du monde.<br />

L’Association propose conférences,<br />

journées d’études et colloques sur les<br />

nombreux thèmes qu’offre l’œuvre de<br />

Rolland : pacifisme, Inde, musique,<br />

engagement politique, théâtre… Elle<br />

édite en partenariat avec la Sorbonne,<br />

une revue semestrielle référencée<br />

dans de nombreux pays : les<br />

« Cahiers de Brèves » qui rassemblent<br />

des contributions universitaires<br />

internationales, témoignant de la<br />

vitalité de la recherche rollandienne.<br />

En 2015, à l’occasion du Centenaire du<br />

prix Nobel de Littérature, décerné en<br />

1915 à Romain Rolland, l’Association<br />

Romain Rolland, sera partenaire de<br />

l’Ambassade de l’Inde en France pour<br />

un colloque intitulé « Romain Rolland<br />

et l’Inde ».<br />

Siège de l’Association : 1 rue Colas<br />

Breugnon – 58530 – Brèves - France<br />

Présidente : Martine Liégeois<br />

www.association-romainrolland.org<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

43


Le Coin des Enfants Le lac de la Lune<br />

Le lac de la Lune<br />

Un grand troupeau d’éléphants<br />

vivait dans la jungle. Leur roi<br />

était un vieil éléphant énorme<br />

et majestueux. Il veillait sur<br />

eux avec amour et soin.<br />

Une grande sécheresse s’abattit un<br />

jour sur la région. La pluie n’était pas<br />

tombée depuis des années et tous les<br />

fleuves et réservoirs s’étaient asséchés.<br />

Les oiseaux et les mammifères<br />

mouraient de soif. Beaucoup s’en<br />

allèrent à la recherche d’eau. Les<br />

éléphants sauvages souffraient eux<br />

aussi du manque d’eau. Le roi savait que<br />

s’ils n’en trouvaient pas rapidement,<br />

beaucoup mourraient de soif. Il fallait<br />

trouver de l’eau au plus vite.<br />

Il demanda aux éléphants de partir<br />

chacun de leur côté en quête d’une<br />

source d’eau.<br />

L’un d’eux trouva un immense lac<br />

dans une jungle lointaine. Le roi était<br />

heureux. Il ordonna à tous les éléphants<br />

de rejoindre le point d’eau.<br />

C’était un lac magnifique. Tout<br />

près vivait une colonie de lapins. Pour<br />

passer, les éléphants durent traverser<br />

cette colonie. Des milliers de lapins<br />

moururent piétinés et des milliers<br />

d’autres furent blessés.<br />

La panique s’installa chez les lapins.<br />

Leur roi décida d’organiser une réunion.<br />

- Un troupeau d’éléphants sauvages<br />

traverse notre colonie, dit-il. Ils ont déjà<br />

blessé ou tué des milliers d’entre nous.<br />

Il est urgent de trouver une solution<br />

si nous voulons éviter d’autres morts.<br />

Je veux que chacun d’entre vous<br />

réfléchisse à un moyen de sauver notre<br />

espèce.<br />

Les lapins réfléchirent, réfléchirent.<br />

Comment pourraient-ils arrêter les<br />

éléphants ?<br />

Un petit lapin se leva.<br />

- Votre majesté, dit-il, si vous<br />

acceptez de m’envoyer comme votre<br />

messager auprès du roi des éléphants,<br />

je pourrais peut-être trouver une<br />

solution.<br />

- Très bien, sois mon messager et<br />

vois ce que tu peux faire, répondit le<br />

roi.<br />

Le petit lapin courut accomplir sa<br />

mission.<br />

Il aperçut un groupe d’éléphants<br />

qui revenait du lac. Le roi marchait<br />

au milieu d’eux : l’approcher était<br />

impossible. « Je vais me faire piétiner »,<br />

pensa le lapin. Il monta donc sur un<br />

grand rocher.<br />

44<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles De L’Inde


Le lac de la Lune<br />

Le Coin des Enfants<br />

- Ô roi des éléphants, cria-t-il, je<br />

vous en prie, écoutez-moi.<br />

Lorsqu’il l’entendit, le roi se tourna<br />

vers lui.<br />

- Qui es-tu donc ? demanda-t-il.<br />

- Je suis un messager, répondit le<br />

lapin.<br />

- Un messager ? Mais de qui ?<br />

- Je suis un messager de la puissante<br />

Lune.<br />

- Et quelle est ta mission ? La Lune<br />

a-t-elle un message pour moi ?<br />

- Oui, en effet, Votre Majesté. Mais<br />

vous ne devez pas vous fâcher contre<br />

moi. Rappelez-vous qu’un messager<br />

n’est jamais puni pour ce qu’il doit dire.<br />

Il ne fait qu’accomplir son devoir.<br />

- Très bien. Raconte ce qu’on t’a<br />

envoyé me dire. Je ne te ferai aucun<br />

mal.<br />

- Sire, commença le petit lapin,<br />

voici ce que la Lune avait à vous dire :<br />

« Roi des éléphants, vous avez fait<br />

venir votre troupeau boire dans mon<br />

lac sacré et vous avez souillé son eau.<br />

Des milliers de lapins ont été tués<br />

sur votre passage. Vous savez que les<br />

lapins sont sous ma protection. Tout le<br />

monde sait que leur roi vit à mes côtés.<br />

Je vous demande d’arrêter de tuer les<br />

lapins, ou bien quelque chose chose de<br />

terrible vous arrivera, à vous et votre<br />

troupeau. »<br />

Le roi des éléphants était stupéfait.<br />

Il regarda le petit lapin.<br />

- Vous avez raison, dit-il, il est<br />

possible que nous ayons piétiné un<br />

grand nombre de lapins en nous<br />

dirigeant vers le lac. Je veillerai à ce que<br />

cela n’arrive plus. Je dois demander<br />

pardon à la Lune pour tous mes péchés.<br />

Je t’en prie, dis-moi ce qu’il faut que je<br />

fasse.<br />

- Venez avec moi, seul, répondit le<br />

lapin. Je vais vous conduire auprès de<br />

la Lune.<br />

Le petit lapin conduisit l’énorme<br />

éléphant jusqu’au lac. Ils y virent le<br />

reflet de la Lune sur les eaux calmes.<br />

- Votre Majesté, voici la Lune, dit le<br />

petit lapin.<br />

- Permettez-moi de m’incliner<br />

devant la Lune divine, dit l’éléphant en<br />

plongeant sa trompe dans l’eau.<br />

Immédiatement la surface de l’eau<br />

se troubla. La Lune semblait s’agiter de<br />

tous côtés.<br />

Le lapin déclara :<br />

- Maintenant la Lune est plus fâchée<br />

que jamais.<br />

- Pourquoi ? s’exclama le roi. Qu’aije<br />

donc fait ?<br />

- Vous avez touché les eaux sacrées<br />

du lac, répondit le lapin.<br />

L’éléphant baissa la tête.<br />

- Je t’en prie, demande à la Lune<br />

de me pardonner. Plus jamais nous ne<br />

toucherons les eaux sacrées de ce lac.<br />

Plus jamais nous ne ferons de mal aux<br />

lapins que la Lune aime tant.<br />

C’est ainsi que le roi et son troupeau<br />

s’en allèrent.<br />

Bientôt la pluie tomba et les<br />

éléphants vécurent heureux, sans<br />

jamais se douter qu’un petit lapin<br />

s’était moqué d’eux. n<br />

Extrait du livre Stories from Panchatantra<br />

de Shivkumar, illust. Tapas Guha,<br />

publié par Children’s Book Trust<br />

Traduction Claire Chaigneau<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

45


Littérature Revue Des Livres<br />

Revue Des Livres<br />

Voyage<br />

Aux confins oubliés de l’Inde – Assam, Arunachal Pradesh, Nagaland,<br />

Meghalaya, de Olga et Arnaud de Turckheim, Ed. Actes Sud, 2013.<br />

C<br />

’est vers une nouvelle région,<br />

moins connue des Occidentaux,<br />

que nous conduisent Olga et Arnaud<br />

de Turckheim dans ce nouveau journal<br />

de voyage, toujours superbement<br />

illustré. L’Est de l’Inde, et notamment<br />

la région des Sept Sœurs dont font<br />

partie les quatre Etats visités par ce<br />

couple de passionnés de l’Inde, est<br />

pourtant riche de traditions anciennes<br />

tant au niveau des costumes, du<br />

mode de vie, de l’habitat, des fêtes.<br />

La modernité commence à y faire son<br />

apparition mais les habitants, fiers<br />

de leur patrimoine ancestral, restent<br />

attachés à leurs coutumes. Paradis<br />

perdu des tribus, cette région reste<br />

encore difficile d’accès et peut-être<br />

est-ce là le secret de son charme.<br />

Olga et Arnaud de Turckheim n’y<br />

sont pas restés insensibles comme en<br />

témoigne cet ouvrage. n<br />

C’est la vie ! de Karl Renz et La spiritualité au cœur du quotidien, de Lionel<br />

Cruzille, Ed. Accarias L’Originel, 2014.<br />

Spiritualité<br />

Ces deux ouvrages nous apportent<br />

deux points de vue de la spiritualité,<br />

Lionel Cruzille nous invite surtout à<br />

être dans l’ici et maintenant, attentif à<br />

ce qui se passe en nous, à être dans<br />

le cœur plus que dans les concepts<br />

pour que se révèle la vraie Conscience.<br />

Karl Renz nous livre dans ce petit<br />

livre rapportant une série d’échanges<br />

qui se sont déroulés à Bombay entre<br />

2010 et 2011 une série de propos<br />

complètement décalés tels que « Sois<br />

ce que tu ne peux pas ne pas être » ou<br />

encore « Tu es méditation, tu n’as pas<br />

besoin de savoir ce que c’est. » Au sortir<br />

de la lecture de cet ouvrage, le lecteur<br />

commencera à se poser des questions<br />

sur tout ce qu’il a appris jusque-là puis<br />

il sentira léger, résolument léger et<br />

aura envie de rire. n<br />

Se soucier du monde - trois méditations sur le bouddhisme et la<br />

morale, par Eric Rommeluère, Edition Almora.<br />

Dans son nouveau livre, l’enseignant<br />

bouddhiste Eric Rommeluère<br />

fait une analyse de la signification<br />

de la morale dans le bouddhisme :<br />

quelles en sont les règles ? Quels<br />

sont les enseignements du Bouddha<br />

sur ce sujet ? Comment faudrait-il les<br />

appliquer à l’égard du monde ?<br />

Des questions traitées, dans cet essai,<br />

en trois parties, trois méditations<br />

distinctes: « La possibilité d’un monde »,<br />

« Un agir infini » et enfin « L’exigence<br />

morale ». Quelques précieux conseils<br />

que donne Eric Rommeluère afin de<br />

donner du sens à nos actions dans<br />

un monde moderne en perpétuel<br />

questionnement. n<br />

46 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Revue Des Livres<br />

Littérature<br />

Poésie<br />

Le spontané, chants caryâ et bâul, traduction du bengali,<br />

présentation, commentaires de Prithwindra Mukherjee, Ed.<br />

Almora, 2014.<br />

Prithwindra Mukherjee, éminent<br />

spécialiste des traditions<br />

indiennes, nous invite dans ce livre<br />

à découvrir la beauté poétique<br />

de chants bouddhistes en bengali<br />

remontant au IXe siècle et celle de<br />

chants bâul. Cet ouvrage permettra<br />

au-delà des textes de découvrir une<br />

communauté menacée d’extinction<br />

qu’il est urgent de protéger. Les<br />

textes des mystiques bouddhistes ne<br />

sont pas moins beaux. Le spontané<br />

bat au cœur de ces textes simples, le<br />

spontané issu du cœur omniprésent<br />

dans ces deux traditions, un spontané<br />

qui fait toujours vibrer le cœur de<br />

ceux qui, aujourd’hui, s’intéressent à<br />

l’authenticité. n<br />

L’Inde pour Les Nuls de Jean-Joseph Boillot, First Editions, 2014.<br />

Cet ouvrage, fruit d’un travail de en sept parties. Rien ou presque<br />

longue haleine et d’une équipe, n’est laissé à l’écart. Pour notre<br />

vient combler un vide même si<br />

quelques ouvrages avaient déjà tenté<br />

d’y remédier. L’Inde est un souscontinent<br />

dont la complexité n’est<br />

plus à démontrer et qu’il est difficile<br />

de présenter sous ses divers aspects.<br />

part, la sixième partie, la partie des<br />

Dix dans laquelle l’auteur décline la<br />

symbolique des nombres de 0 à neuf<br />

en Inde, les dix divinités hindoues les<br />

plus populaires, les dix personnalités<br />

intellectuelles et morales, les dix<br />

La tâche n’était pas aisée mais Jean- personnalités politiques, les dix<br />

Joseph Boillot, qui y a séjourné un<br />

grand nombre de fois et y a travaillé<br />

en tant que conseiller financier à<br />

l’ambassade de France dans les<br />

années 2000, a relevé le défi en<br />

dressant un portrait aussi exhaustif<br />

que possible de ce pays émergent<br />

personnalités de la société civile,<br />

les dix incontournables de la culture<br />

populaire indienne, les dix grands<br />

patrons indiens et leurs groupes,<br />

a notre préférence. Il suffit de s’y<br />

plonger pour découvrir à chaque fois<br />

quelque chose de nouveau ! n<br />

Ouvrages généraux<br />

Romans<br />

Bollywood apocalypse, par Manil Suri, Traduit de l’anglais par<br />

Dominique Vitalyos, Ed. Albin Michel, 2014.<br />

Après La Mort de Vishnou (2002) et<br />

Mother India (2009), ce troisième<br />

roman de Manil Suri porte bien son<br />

nom : au cœur d’un Bombay sous<br />

tension, c’est en effet une véritable<br />

« apocalypse » qui se joue pour les<br />

protagonistes. Mêlant humour et<br />

gravité, érotisme et corruption,<br />

conflits politiques et histoires d’amour,<br />

ce roman aborde des sujets forts, si<br />

ce n’est sensibles, que l’auteur manie<br />

avec finesse et ingéniosité. n<br />

Pour quelques milliards et une<br />

roupie, par Vikas Swarup, traduit<br />

de l’anglais par Roxane Azimi, Ed.<br />

Belfond, 2014.<br />

Sur le modèle de ses deux premiers<br />

romans, ce troisième livre de Vikas<br />

Swarup est une fiction fidèle au style<br />

de l’auteur. A travers les nombreuses<br />

péripéties auxquelles est confrontée<br />

Sapna Sinha, jeune femme intrépide,<br />

c’est en fait un véritable portrait de la<br />

société indienne et de ses travers que<br />

dépeint Vikas Swarup. Mariage forcé,<br />

esclavage d’enfants, trafic d’organes,<br />

corruption, autant de dérives que<br />

l’auteur dénonce avec humour malgré<br />

la gravité des sujets. Ajoutez à cela<br />

du suspense et un dénouement<br />

inattendu, et voilà un roman au récit<br />

épicé et captivant ! n<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

47


Littérature Revue Des Livres<br />

Les Falaises de Wangsisina, de Pavan K. Varma, traduit de l’anglais<br />

(Inde) par Sophie Bastide-Foltz, Ed. Actes Sud, 2014.<br />

Les lecteurs qui s’étaient plongés<br />

avec délectation dans les<br />

précédents essais de Pavan K. Varma<br />

vont se réjouir à nouveau. L’auteur a<br />

franchi le pas et excelle autant à dire<br />

vrai dans un autre genre, celui du<br />

roman. Un roman bien ficelé qui nous<br />

dépeint tout d’abord les affres subies<br />

par Anand qui, déjà en proie au<br />

stress lié à ses conditions de travail,<br />

apprend en quelques jours qu’il a un<br />

cancer du pancréas et que sa femme<br />

a une liaison avec son employeur.<br />

C’est pour lui l’occasion de faire<br />

le point sur sa vie qu’il considère<br />

comme ratée mais le Dr. Khurana<br />

revient sur son diagnostic et fort de<br />

la bonne nouvelle qu’il n’a finalement<br />

pas de cancer, Anand décide de tout<br />

recommencer et part au Bhoutan….<br />

L’auteur a ajouté quelques notes<br />

poétiques ici et là et donné à son<br />

livre un rythme qui se balance entre<br />

joie et tristesse faisant de ce premier<br />

roman un ouvrage original, humain<br />

et apaisant, écrit dans un style sobre<br />

et parfait. Du grand art une fois<br />

encore ! n<br />

Histoire<br />

En guise d’autobiographie - Gandhi, Textes choisis par Krishna<br />

Kripalani, traduits de l’anglais et annotés par Guy Vogelweith,<br />

Notice de S. Radhakrishan, Edition Gallimard, 2014.<br />

Réalisée à partir d’extraits de<br />

« Tous les hommes sont frères », cette<br />

biographie offre une nouvelle occasion<br />

de s’inspirer des paroles lumineuses du<br />

plus célèbre défenseur de l’égalité des<br />

droits et partisan de la non-violence,<br />

Mohandas Karamchand Gandhi. « La<br />

seule vertu que je veuille revendiquer<br />

est la vérité et la non-violence. Je ne<br />

prétends à aucun pouvoir surhumain.<br />

Je ne saurais qu’en faire. Je suis de<br />

chair et de sang comme le plus petit<br />

de mes semblables, faible et faillible<br />

comme tout autre homme. » n<br />

L’Inde contemporaine, de Christophe Jaffrelot, Editions Arthème<br />

Fayard/Pluriel, 2014.<br />

L<br />

’objectif de ce livre est, comme<br />

le rappelle l’auteur, directeur de<br />

recherche au CERI-Sciences Po (CNRS),<br />

de permettre à des spécialistes français<br />

de renom de faire connaître à un large<br />

public un pays, considéré comme une<br />

grande puissance émergente, sous<br />

ses aspects politiques, économiques<br />

et sociaux. Les années couvertes<br />

par ce livre sont récentes mais sont<br />

replacées dans une perspective<br />

historique. L’auteur articule son livre<br />

autour de trois parties : Politique et<br />

économie, Religion et société, Monde<br />

rural et monde urbain. A travers cette<br />

étude, le lecteur pourra enrichir ses<br />

connaissances quant au fédéralisme<br />

indien, à la démocratisation et à<br />

l’ethnicisation du système politique,<br />

à la politique étrangère, à l’évolution<br />

de l’hindouisme, au développement<br />

de l’urbanisation, entre autres. Ce<br />

livre documenté et cependant à la<br />

portée de tous permet une meilleure<br />

compréhension d’un pays qui n’a pas<br />

fini de faire parler de lui. n<br />

48 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Revue Des Livres<br />

Littérature<br />

La nuit de Maritzburg, de Gilbert Sinoué, Editions Flammarion.<br />

De Gandhi, nous connaissons et commencera son combat contre la<br />

surtout l’homme qui a dédié sa vie discrimination de ses compatriotes<br />

à la défense des droits de l’homme et indiens. L’auteur y dresse aussi le<br />

de son pays, le modèle de sagesse, portrait de l’homme imparfait qu’il<br />

de non-violence et de dévouement était malgré tout et que l’on oublie<br />

pour des générations entières. Mais souvent : le Gandhi acharné à l’extrême<br />

c’est un autre visage de Mohandas et tyrannique avec son entourage.<br />

Karamchand Gandhi que nous dévoile Dans ses réussites comme dans ses<br />

ici Gilbert Sinoué : à l’aube de son erreurs, Gilbert Sinoué présente un<br />

combat pour l’Indépendance de l’Inde Gandhi finalement méconnu, à travers<br />

et bien avant même de devenir le le regard de Hermann Kallenbach, un<br />

« Mahatma » de sa nation, l’auteur nous architecte juif allemand avec lequel<br />

raconte le récit du petit avocat timide Gandhi a partagé une relation forte<br />

tout juste arrivé en Afrique du Sud où et intime, une véritable « passion »<br />

il découvrira l’apartheid, l’humiliation, chaste. n<br />

Sciences sociales<br />

L’Inde des Lumières – discours, histoire, savoirs (XVIIe-XIXe<br />

siècle), de Marie Fourcade et Inès G. Županov, Ed. de l’EHESS,<br />

2013.<br />

Les Lumières seraient-elles<br />

l’apanage de l’Europe ? Loin s’en<br />

faut. Ce recueil d’essais en témoigne.<br />

L’ouvrage rappelle l’article important<br />

sur la question de Sylvia Murr publié il<br />

y a 31 ans « Les conditions d’émergence<br />

du discours sur l’Inde au Siècle des<br />

Lumières » et l’état des recherches en<br />

cours sur le rôle de l’Asie du Sud dans<br />

l’Europe des Lumières et vice et versa<br />

du rôle des Lumières européennes<br />

en Asie du Sud. La première partie<br />

se penche sur quelques-uns des plus<br />

importants penseurs européens<br />

des Lumières qui ont utilisé des<br />

sources indiennes, François Bernier,<br />

Montesquieu et William Robertson, la<br />

seconde partie traite de la question des<br />

Lumières et du colonialisme européen<br />

et la troisième partie nous donne à<br />

observer les Lumières à travers la<br />

littérature, le théâtre et l’habillement.<br />

La connaissance et la science dans<br />

les Lumières sont étudiées dans une<br />

dernière partie. Comme les lecteurs<br />

s’en rendront compte au fur et à mesure<br />

de la lecture de ces divers articles<br />

scientifiques, l’histoire des Lumières ne<br />

peut se limiter à la seule Europe et se<br />

retrouve dans le monde entier. n<br />

Pour mémoire<br />

L’abîme de feu d’Irina Tweedie, Ed. L’Originel, 2002. Cet ouvrage reproduit le journal<br />

d’une femme qui dans les années 50, a commencé à s’engager dans la voie soufie. Elle y<br />

relate ses joies, ses doutes, sa relation avec le Maître et tout le travail qui finalement l’a<br />

conduite sur la voie de l’abandon, de la liberté absolue une fois qu’elle est parvenue au<br />

terme d’un cheminement long et difficile à s’accepter telle qu’elle était. Un ouvrage qui<br />

montre l’importance du cœur et du lien d’Amour.<br />

Viviane Tourtet et Claire Chaigneau<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

49


Littérature Les dictionnaires et l’Inde<br />

Les dictionnaires et l’Inde<br />

Dictionnaires, encyclopédies, glossaires, abécédaires, répertoires…<br />

autant d’outils qui facilitent l’usage de la connaissance grâce aux<br />

systèmes de classification.<br />

Une tradition ancienne<br />

La tradition d’écriture de<br />

dictionnaires et de glossaires est<br />

ancienne puisqu’elle remonte en Inde à<br />

la période védique, entre 3000 et 1500<br />

avant J.-C. Les premiers dictionnaires<br />

sont d’ailleurs voués à l’explicitation<br />

des termes védiques. C’est le cas du<br />

« Nighantu », compilé par Kashyap<br />

ou du « Nirukta », écrit par Yask sous<br />

une forme plus encyclopédique que le<br />

premier. Ces deux œuvres témoignent<br />

à elles seules d’une extraordinaire<br />

avancée dans la formalisation de ce<br />

type d’ouvrage en Inde ancienne. Le<br />

caractère particulier de ces répertoires<br />

est leur écriture poétique et le non<br />

ordonnancement alphabétique.<br />

D’autres dictionnaires du sanskrit<br />

vont apparaître à la période postérieure<br />

dont le « Shabdakalpadrum »<br />

qui propose lui, un arrangement<br />

alphabétique des mots et énumère par<br />

ailleurs vingt-neuf autres ouvrages du<br />

même type.<br />

« Amarakosha » ou le dictionnaire<br />

immortel est une œuvre que l’on doit<br />

à Amar Singh, érudit jain supposé vivre<br />

à la cour de Chandragupta II au IVe<br />

siècle de notre ère. Appelé initialement<br />

« Namalinganushasan » - soit « la<br />

discipline des noms et des genres » -,<br />

ce dictionnaire est composé en vers<br />

facilement mémorisables, un peu à la<br />

façon des « Métamorphoses » d’Ovide.<br />

L’œuvre d’Amar Singh a directement<br />

inspiré celle Amir Khusrau, poète soufi,<br />

qui outre ses écrits historiques en<br />

prose, compose entre les XIIe et XIIIe<br />

siècles un dictionnaire bilingue persanhindi,<br />

le « Khalikbari ».<br />

L’arrivée des missionnaires chrétiens<br />

en Inde s’accompagne d’un besoin de<br />

traduction et partant, de publication<br />

de dictionnaires bilingues parfois<br />

même trilingues. Cette nouvelle donne,<br />

à la fois linguistique, économique et<br />

politique va, surtout au moment de la<br />

présence britannique en Inde, entraîner<br />

une approche plus occidentale de<br />

la fabrication des dictionnaires,<br />

notamment au niveau du format de<br />

présentation, de l’ordre des entrées<br />

lexicales et la composition…<br />

Aujourd’hui, avec ses 860 langues<br />

dont 22 officiellement reconnues dans<br />

la constitution et 120 parlées par plus<br />

de 10 000 personnes, réparties sur 66<br />

écritures différentes, l’Inde poursuit sa<br />

tradition de création de dictionnaires.<br />

Malheureusement, ces œuvres<br />

restent inaccessibles pour la majeure<br />

partie du public français et francophone.<br />

A défaut, nous avons souhaité<br />

vous présenter des dictionnaires et<br />

glossaires sur l’Inde publiés en France,<br />

occasion d’autant plus opportune<br />

qu’elle se couple avec la récente sortie<br />

du « Petit dictionnaire amoureux de<br />

l’Inde » de Jean-Claude Carrière.<br />

50<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles De L’Inde


Les dictionnaires et l’Inde<br />

Littérature<br />

Dictionnaires sur l’Inde en France<br />

Dictionnaires généralistes<br />

Louis Frédéric, Dictionnaire de la civilisation indienne, Robert Laffont, 1987.<br />

Publiée en 1987, cet ouvrage monumental reste encore aujourd’hui « la » référence<br />

parmi les dictionnaires généralistes consacrés à l’Inde. Le lecteur trouvera dans cette somme<br />

encyclopédique d’environ 1300 pages et 10 000 articles l’essentiel des connaissances sur<br />

l’Inde et sur des pays qui y sont apparentés. Les hommes et les femmes qui ont contribué<br />

au développement de cette civilisation, mais aussi les œuvres littéraires et artistiques,<br />

les religions et les fondements de la vie sociale des habitants de ce subcontinent y sont<br />

scrupuleusement décrits grâce à un immense travail documentaire entrepris durant<br />

plusieurs années par Louis Frédéric, spécialiste des cultures de l’Asie de l’Est et du Sud-Est.<br />

Cet ouvrage, unique dans son genre qui n’a malheureusement pas connu de rééditions,<br />

s’adresse aux chercheurs et étudiants mais reste parfaitement accessible aux voyageurs<br />

ou aux simples curieux désireux d’apprendre sur l’Inde et sa civilisation.<br />

Catherine Clémentin-Ojha, Christophe Jaffrelot, Denis Matringe, Jacques Pouchepadass<br />

(dir.), Dictionnaire de l’Inde, Larousse, 2009.<br />

Dirigé par trois spécialistes du monde indien, l’ouvrage s’ouvre sur une série de<br />

questions posées sur la société contemporaine de l’Inde, singulièrement sur les enjeux<br />

de la progression de son évolution démographique, sur le caractère démocratique et<br />

laïque de ce pays, sur des problématiques sociétales nouvelles portées notamment par la<br />

libéralisation économique et l’apparition de nouvelles classes sociales. Cette introduction<br />

s’appuie sur une mise en perspective historique qui dresse, cartes à l’appui, l’histoire<br />

trimillénaire de ce subcontinent. Les notices qui suivent, œuvre d’une quarantaine<br />

d’auteurs français, anglo-saxons et indiens, sont donc appréhendées dans le cadre de<br />

cette problématique contemporaine, qui ne perd rien en pertinence quant à la profondeur<br />

historique, mais qui s’inscrit dans une perspective renouvelée proposant des pistes de<br />

réflexions sur l’Inde, plus que jamais en constante mutation.<br />

Frédéric Landy (dir.), Dictionnaire de l’Inde contemporaine, Armand Colin, 2010.<br />

Sous la direction de Frédéric Landy, 131 spécialistes nous introduisent à 478<br />

entrées concernant des domaines aussi divers que l’histoire, la géographie et les<br />

sciences politiques, l’économie, la sociologie et la géographie. Cette plongée dans<br />

l’Inde contemporaine passe par les coulisses de l’industrie de Bollywood et de la vie<br />

quotidienne des Indiens, par l’immersion dans la politique aux prises du terrorisme<br />

et séparatisme et dans l’économie en plein boom qui fait côtoyer la nouvelle classe<br />

moyenne et les travailleurs pauvres. L’ouvrage est accompagné de nombreuses<br />

cartes et constitue un outil précieux pour les lecteurs soucieux de comprendre le<br />

versant contemporain de ce pays multiple et parfois contradictoire.<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

51


Littérature Les dictionnaires et l’Inde<br />

Nina et Olivier Da Lage, L’Inde de A à Z, André Versaille éditeur, 2010.<br />

Idéal pour une première approche de la civilisation indienne ancienne et<br />

contemporaine, cet ouvrage nous invite à découvrir au fil des pages le cinéma de<br />

Bollywood, la mythologie de l’Inde, les relations sociales et familiales dont le rôle du<br />

mariage ou encore l’incontournable Taj Mahal ou Tata, l’un des plus vieux groupes<br />

industriels de l’Inde. Ce kaléidoscope fait aussi place à l’histoire à travers des entrées<br />

thématiques comme l’indépendance tout comme des présentations des bâtisseurs de<br />

l’Inde moderne dont Gandhi ou Nehru. Ecrit sans fards en n’ayant pas peur d’éviter des<br />

sujets sensibles, cet abécédaire renvoie pour chacune des notices vers un site Internet<br />

comprenant des illustrations, des vidéos et de plus amples informations sur le thème<br />

abordé.<br />

Jean-Joseph et Flora Boillot, Kal. Un abécédaire de l’Inde moderne, Buchet Chastel,<br />

2011.<br />

83 entrées pour tenter l’impossible, à savoir expliquer aux Occidentaux l’un des<br />

pays qui suscite la plus grande fascination, l’Inde. Cette plus grande démocratie dans<br />

le monde, difficile à cerner au plus près, échappe en effet à notre esprit cartésien.<br />

Intitulé « kal » en référence au « temps », l’ouvrage offre une présentation attrayante<br />

des notices, accompagnées d’une carte de l’Inde en début et fin d’ouvrage ainsi que<br />

d’une bibliographie permettant aux lecteurs d’aller plus loin dans leur découverte du<br />

pays. Cet abécédaire, jalonné de proverbes indiens, constitue donc un excellent outil<br />

généraliste pour découvrir les nombreuses facettes de l’Inde.<br />

Dictionnaires spécialisés<br />

Pierre-Sylvain Filliozat (dir.), Dictionnaire des littératures de l’Inde, PUF, 2001.<br />

Ce dictionnaire, issu du Dictionnaire universel des littératures publié en 1994 sous la direction<br />

de Béatrice Didier, présente quatre millénaires de production littéraire du subcontinent indien. Il<br />

propose des entrées sur les œuvres, les auteurs et les courants littéraires. Dans cette traversée, la<br />

place de la production en sanskrit est la plus importante – plus de la moitié de l’ouvrage – du fait<br />

notamment de son étendue dans l’espace et dans le temps, mais aussi de son caractère matriciel<br />

pour d’autres productions littéraires indiennes. D’autres littératures dans une bonne vingtaine<br />

de langues indiennes y sont aussi représentées, y compris des littératures orales dialectales, qui<br />

depuis le XXe siècle ont été saisies par l’écriture, constituant ainsi un patrimoine écrit original.<br />

Le lecteur désireux de découvrir la littérature moderne et contemporaine ne sera pas non plus<br />

déçu pouvant ainsi se pencher sur cette production particulière, influencée par la rencontre avec<br />

l’Occident, qui ne perd rien dans son indianité s’inscrivant dans la littérature universelle tout en<br />

gardant son originalité propre. Indispensable pour les indianistes, spécialistes de la littérature<br />

indienne et simple amoureux des lettres indiennes, ce dictionnaire se concentre sur les grandes<br />

tendances de cette production pour mieux faire ressortir le caractère d’ensemble au risque, peutêtre,<br />

de gommer certaines singularités.<br />

52 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Les dictionnaires et l’Inde<br />

Littérature<br />

Jean Varenne, Dictionnaire de l’hindouisme, Ed. du Rocher, 2002.<br />

Cette somme, qui présente la culture de la religion hindoue, est l’aboutissement d’une vie<br />

de recherche consacrée aux divers aspects de la culture indienne. Jean Varenne, sanskritiste et<br />

l’un des plus grands spécialistes français de l’Inde, propose dans ce dictionnaire – et selon le<br />

niveau de connaissance de ses lecteurs – la découverte, le rappel ou l’approfondissement des<br />

connaissances sur cette civilisation majeure et fascinante. Dans un rappel historique, l’auteur<br />

revient sur l’appellation « hindouisme » donnée à cette religion par les Européens au XVIIIe siècle<br />

à l’instar d’autres « -isme » occidentaux. Pourtant, elle est aujourd’hui la religion vivante la plus<br />

ancienne dans le monde et même si elle est menacée par les mécanismes socioéconomiques<br />

du monde moderne, il n’en demeure pas moins qu’elle reste très dynamique y compris sous la<br />

forme de représentations populaires dont témoignent des films « mythologiques » produits par<br />

des studios de Bollywood ou des séries télévisées sur le même thème. Chacun découvrira donc<br />

dans ce dictionnaire, à son rythme, les significations des symboles et des mythes hindous, les<br />

principaux concepts, notions, courants religieux, textes sacrés ou profanes, personnages réels ou<br />

mythologiques liés à l’hindouisme, termes sanskrits ou védiques de l’hindouisme passés ainsi au<br />

crible d’une écriture synthétique et claire.<br />

Dictionnaires atypiques<br />

Jean-Claude Carrière, Petit dictionnaire amoureux de l’Inde, Pocket, 2013.<br />

Jean-Claude Carrière, Dictionnaire amoureux de l’Inde, Plon, 2001.<br />

Publié initialement dans la collection des dictionnaires amoureux chez<br />

Plon, ce livre paraît actuellement en format poche chez Pocket dans sa version<br />

condensée et remaniée. Mais cet ouvrage n’est pas à proprement parler un<br />

dictionnaire. Même si les notices suivent une structure alphabétique, elles se<br />

présentent davantage comme un ensemble d’essais subjectifs – « amoureux » -<br />

sur l’Inde. Jean-Claude Carrière invite donc le lecteur à parcourir avec lui<br />

« son » Inde dans une sorte de promenade sensible et intime qui mêle histoire,<br />

souvenirs personnels, récits de voyage. Le voyage commence à Agra avec le<br />

fameux Taj Mahal ou « image emblématique de l’Inde » et à Ajanta, « un site<br />

unique, une des perles du bouddhisme » ; il se poursuit à Bombay avec « son<br />

immense usine à rêves » et à Delhi qui se présente pour l’auteur comme « une<br />

sorte d’agglomération de fantômes sur quoi repose – solidement – l’union des<br />

peuples », à Maduraï qui émerveille par sa splendeur, à Sanchi « un endroit rare »<br />

pour se terminer à Varanasi où « l’hindouisme est plus fervent que jamais ».<br />

Mais outre ces destinations géographiques, Jean-Claude Carrière décrit avec<br />

délicatesse des grandes religions de ce subcontinent, des éléments de la culture<br />

populaire de ce pays comme le cricket ou encore des aspects sociaux de la vie<br />

des Indiens. Bref, un voyage insolite aux côtés de ce grand amateur de l’Inde.<br />

Arnauld Miguet, Dictionnaire insolite de l’Inde, Cosmopole, 2011.<br />

Ce dictionnaire, sans être exhaustif, s’appuie sur un regard personnel de l’auteur, séduit par<br />

cet immense pays qui attire voyageurs, hommes d’affaires et individus en quête de spiritualité.<br />

L’ouvrage permet de saisir la vie quotidienne des Indiens, découvrir des personnalités célèbres<br />

de ce subcontinent, découvrir le tourisme insolite dans des villes et la campagne, la multitude de<br />

langues, les fêtes religieuses appelées « festivals », la célèbre industrie Bollywood qui fascine par<br />

son exubérance et étonne par son kitch ou encore des animaux emblématiques comme vaches<br />

sacrées et éléphants. La perspective subjective confirme qu’à chacun son Inde ; Arnauld Miguet<br />

nous invite à découvrir la sienne.<br />

Ewa Tartakowsky<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

53


Littérature Les cafés littéraires<br />

Les cafés<br />

littéraires<br />

de l’ambassade<br />

Les cafés littéraires se suivent et c’est tant mieux.<br />

Ils attestent d’une part de l’intérêt des éditeurs<br />

français pour la littérature indienne ou pour la<br />

littérature sur l’Inde, d’autre part que les lecteurs<br />

font toujours preuve d’une grande curiosité à leur<br />

égard.<br />

En témoignent les trois derniers cafés littéraires<br />

qui se sont déroulés à l’ambassade.<br />

©Nainesh Ozerker<br />

Le 14ème café littéraire a eu lieu autour du<br />

jeune auteur Siddhart Dhanvant Shanghvi à<br />

l’occasion des 10 ans de la sortie de son premier<br />

roman, « La fille qui marchait sur l’eau », qui a<br />

remporté le Prix Betty Trask au Royaume-Uni, le<br />

Prix Grinzane Cavour en Italie, et a été nominé<br />

pour le Prix IMPAC. Traduit en plus d’une douzaine<br />

langues, le roman est devenu un best-seller<br />

international. Le dernier roman de Shanghvi, « Les<br />

derniers flamants de Bombay », a été nominé<br />

pour le Prix littéraire Asian Man 2008.<br />

Rappelons que ce jeune auteur a fait ses<br />

études en Inde, en Angleterre et en Amérique. Il<br />

a été élu par le « Time India » parmi les 50 jeunes Indiens les plus influents ; l’un<br />

des 10 Indiens mondiaux par le « Times of India » ; parmi les 10 personnes les plus<br />

créatives par « Hindustan Times » ; l’une des 10 personnalités les plus en vogue<br />

par « New Statesmen UK » ; parmi les 50 personnes les plus à la mode par « Elle<br />

Magazine » et parmi les 10 personnes les plus élégantes par « La Stampa » en Italie<br />

; l’une des icônes de la mode 2011 par « Men’s Health ». Shanghvi vit à Bombay et<br />

Goa et contribue régulièrement au « Time » et au « New York Times ». n<br />

Le 15ème café littéraire s’est déroulé le 24 juin autour de deux ouvrages,<br />

« Rodin et la danse de çiva » de Katia Légeret-Manochhaya et « Inde. Les<br />

Meilleures recettes » de Poonam Chawla et Pushan Bhowmick Chawla publiés<br />

respectivement par les éditions Presses Universitaires de Vincennes et Hachette.<br />

Katia Légeret a présenté son livre et lu un extrait d’un texte d’Auguste Rodin sur<br />

la danse de Shiva. Le danseur Sanga a illustré par une série de mudras (gestes) et<br />

l’abhinaya (expression) ce texte. Quant à Poonam Chawla, après la présentation de<br />

son livre par son fils, elle a invité le public à goûter quelques-unes de ses recettes<br />

estivales dont le lassi sucré à l’avocat. n<br />

©Sandesh Parulkar<br />

Un dernier ouvrage a été présenté<br />

lors du 16ème café littéraire, « L’Inde<br />

pour les nuls » publié par First Editions,<br />

de Jean-Joseph Boillot, spécialiste<br />

de l’Inde. Jean-Joseph Boillot, agrégé<br />

de sciences économiques et sociales<br />

et docteur en économie, a enseigné à<br />

l’Ecole normale supérieure et travaillé<br />

comme chercheur associé au CEPII ; il<br />

est l’un des fondateurs du réseau Euro-<br />

India (EIEBG) qui soutient des projets<br />

émanant des jeunes entre l’Europe et<br />

l’Inde. Le Chef de Mission adjoint, M.<br />

Indra Mani Pandey a présenté le livre<br />

puis la parole a été donnée à l’auteur<br />

qui a mis l’accent sur la complexité de<br />

l’Inde et sur le besoin de proposer un<br />

tel ouvrage au public français. Mira<br />

Kamdar, journaliste pour International<br />

M. Rajesh Sharma s’adresse au public<br />

Herald Tribune, directrice de recherche<br />

au World policy institute et écrivain, a<br />

parlé ensuite du formidable potentiel<br />

de l’Inde qu’il convenait de valoriser.<br />

Olivier Da Lage, journaliste pour RFI et<br />

écrivain, a, quant à lui, montré à l’aide<br />

d’une carte combien l’Inde était encore<br />

trop peu présente dans les médias.<br />

Pour finir M. Rajesh Sharma, directeur<br />

de la collection « Lettres indiennes »<br />

chez Albin Michel, a parlé de l’Inde<br />

dans le monde de l’édition. Ensuite<br />

s’est déroulée la remise des Prix de la<br />

radio indienne à Paris « Teental ». Deux<br />

lauréates ont ainsi gagné le livre L’Inde<br />

pour les nuls. La soirée s’est terminée<br />

de manière conviviale autour d’un<br />

cocktail indien. n<br />

Viviane Tourtet<br />

©Ewa Tartakowsky<br />

54<br />

juillet-août2014<br />

Nouvelles De L’Inde


L’agenda de l’ambassade<br />

Culture<br />

L’agenda de l’ambassade<br />

Le 13 juin fut certainement l’un<br />

des grands moments de cette fin<br />

de printemps puisqu’il a célébré à<br />

l’occasion du 100ème anniversaire du<br />

début de la Première Guerre mondiale<br />

la participation des soldats indiens<br />

à cette page d’histoire à travers la<br />

présentation d’un documentaire réalisé<br />

par Noopur Tiwari « India’s Heroes.<br />

Europe’s war ». Après la projection du<br />

film qui met l’accent sur la recherche et<br />

la collecte d’histoires à moitié oubliées<br />

des soldats qui sont venus participer<br />

à une guerre sur un terrain étranger et<br />

difficile, une discussion a eu lieu animée<br />

par plusieurs intervenants en présence<br />

de l’ambassadeur de l’Inde, M. Arun<br />

K. Singh, Dr David Omissi: Senior<br />

Lecturer, University of Hull, Royaume-<br />

Uni, Dr Santanu Das: Reader, King’s<br />

College, London, Royaume-Uni,<br />

Dominiek Dendooven: Directeur<br />

de Recherches, Musée des Flandres,<br />

Ypres, Belgique, Dominique Faivre:<br />

Président de l’Association d’Histoire et<br />

d’Archéologie Militaire, France, Kevin<br />

Bacon: Conservateur Adjoint, Indian<br />

Hospital Gallery au Royal Pavilion,<br />

Royaume-Uni ainsi que M. Douglas<br />

Gressieux des Comptoirs de l’Inde.<br />

Avec l’aide de quelques-uns des<br />

meilleurs experts sur la question,<br />

Noopur a utilisé des vidéos des archives<br />

de musées de Grande-Bretagne, des<br />

enregistrements venant d’Allemagne<br />

des prisonniers de guerre indiens, des<br />

photos de diverses sources incluant le<br />

Royal Pavilion et les Musées, Brighton<br />

& Hove et la collection privée de<br />

Dominique Faivre. n<br />

©Royal Pavilion and Museums, Brighton & Hove<br />

Les Journées Dégustation de Vins<br />

indiens se sont déroulées du 12 au<br />

14 mai dernier. Elles ont été par la<br />

société M/s Pink Lotus Strategies,<br />

une société basée à Paris de relations<br />

publiques spécialisée dans le<br />

développement commercial avec le<br />

soutien de plusieurs partenaires (Air<br />

India, Incredible India (India Tourism),<br />

le restaurant Jodhpur Palace, Detox<br />

Delight et Uppercrust magazine) et<br />

de l’Ambassade de l’Inde dans le<br />

cadre du programme Market Access<br />

Initiative du Ministère indien des<br />

Affaires étrangères. L’objectif de<br />

cette manifestation était de présenter<br />

et de générer une prise de conscience<br />

sur la production de vins indiens, de<br />

montrer la collaboration entre l’Inde<br />

et la France dans le domaine de la<br />

viticulture et notamment d’attirer<br />

les investissements français dans ce<br />

secteur. L’ambassade a organisé le<br />

12 mai une soirée pour promouvoir<br />

l’événement autour des vins indiens<br />

pétillants et de leurs producteurs<br />

: Grover Zampa, Fratelli et York.<br />

Plus de 90 personnes ont assisté<br />

à cette soirée en présence de<br />

l’ambassadeur. Les 13 et 14 réservés<br />

au volet purement commercial se<br />

sont déroulés au Yacht Club de<br />

France à Paris. L’ambassadeur a<br />

présenté l’histoire de la viticulture en<br />

Inde depuis la civilisation de l’Indus<br />

jusqu’à nos jours indiquant que le<br />

Maharashtra et le Karnataka étaient<br />

les deux Etats producteurs les plus<br />

importants en Inde, le Maharashtra<br />

produisant 90% du total de la<br />

production indienne. L’établissement<br />

de l’Indian Grape Wine board (IGPB)<br />

en 2009 et son objectif de promouvoir<br />

les vins indiens et d’introduire<br />

des normes pour contribuer à<br />

l’amélioration de sa qualité marque<br />

une étape importante dans ce<br />

secteur. Christie’s Paris a donné le ton<br />

de la manifestation en témoignant de<br />

son intérêt grandissant pour les vins<br />

en Inde. Ensuite plusieurs maisons<br />

de production de vins ont présenté<br />

leurs produits : Pernod Ricard, Grover<br />

Zampa, York Winery, Alpine Wineries,<br />

Sular Vineyards, Fratelli sans oublier<br />

la présence du PDG de Vinexpo, M.<br />

Guillaume Deglise.<br />

Nouvelles De L’Inde juillet-août 2014<br />

55


Culture L’agenda de l’ambassade<br />

L’Ambassadeur a inauguré une exposition<br />

de peintures intitulée « Women,The Shakti »<br />

réalisée par 10 jeunes étudiants indiens le 16<br />

juin à l’ambassade. Cette exposition s’inscrivait<br />

dans le cadre d’un voyage d’études autour de l’art<br />

organisé par Mme Aradhana Gupta, Secretary,<br />

Global Knowledge Network Society and PHD<br />

Chamber of Commerce and Industry. Le grand<br />

peintre indien M. Sakti Burman a participé à<br />

l’inauguration et encouragé les étudiants. n<br />

©Nainesh Ozerker<br />

Le 17 juin l’ambassade a eu le plaisir de proposer<br />

à ses invités un récital de chant Khyal par Pandit<br />

Shyam Sundar Goswami, accompagné au tabla par<br />

Subhrangshu et à la tampura par Bandana-Françoise<br />

Jalais. Le public, venu nombreux, a partagé un grand<br />

moment d’émotion musicale. Ce musicien enseigne le<br />

chant classique à la Calcutta School of Music. Pour<br />

en savoir plus, consulter le site www.sites.google.com/<br />

site/panditshyamsundargoswami/ n<br />

©Nainesh Ozerker<br />

L’ambassade de l’Inde en association avec Paris-India Connection<br />

a organisé une conférence sur le thème “Vivre et travailler en France”<br />

pour les étudiants et les professionnels indiens le 18 juin. Au cours<br />

de la conférence, des présentations ont été faites sur des sujets<br />

tels que l’immigration par Mme. Fiona Mougenot, Expat Partners ;<br />

les ressources humaines et la masse salariale par Mme. Sapna<br />

Rema Hari, Sodexo Group ; les impôts sur le revenu par Mme.<br />

Françoise Spiri, SPICOFI & Julien Monsenego, Olswang France LLP ;<br />

et la Sécurité sociale par M. Arzhvael Le Fur, Landwell & Associés. n<br />

Le 25 juin Sharmila Sharma, formée notamment par Pandit Rajendra Kumar Gangani (style de Jaipur) et du<br />

célèbre Pandit Birju Maharaj (style de Lucknow) enseigne aujourd’hui dans son école à Paris. Elle a présenté à<br />

un public venu nombreux un récital donné par ses élèves, de tous niveaux. Le public a pu apprécier la qualité de<br />

l’enseignement à travers une belle prestation agrémentée de superbes costumes. Près d’une quinzaine d’élèves<br />

ont pu donner à voir la beauté du style Kathak dans ce qu’il a de plus exigeant, de plus gracieux aussi. Un cocktail<br />

dans le jardin a permis à tous d’échanger et de féliciter les élèves. n<br />

©Nainesh Ozerker<br />

©Nainesh Ozerker<br />

©Nainesh Ozerker<br />

56 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


L’Inde en France<br />

Culture<br />

L’Inde en France<br />

Jet Airways (India) Limited<br />

Jet Airways qui a commencé ses<br />

opérations en mai 1993 a, en un<br />

court lapse de temps, s’est solidement<br />

implanté comme leader du marché.<br />

La compagnie aérienne a eu la<br />

distinction d’être classée à plusieurs<br />

reprises comme « Meilleure ligne<br />

intérieure » de l’Inde et a remporté<br />

plusieurs récompenses nationales et<br />

internationales.<br />

Basée à Mumbai, la compagnie<br />

aérienne a été fondée par M. Naresh<br />

Goyal en avril 1992. Ce dernier en est<br />

l’actuel président. Elle est membre<br />

de la chambre de compensation<br />

IATA (Association internationale du<br />

transport aérien) et un participant de<br />

l’Accord Multilatéral IATA pour le trafic<br />

de passagers et de marchandises. La<br />

compagnie emploie 13 945 personnes<br />

à travers le monde et opère des vols<br />

vers 21 destinations internationales<br />

et 47 destinations en Inde. Avec une<br />

flotte de 5, 19 ans d’âge moyen,<br />

Jet Airways est l’une des plus jeunes<br />

flottes dans le monde. Elle gère une<br />

flotte de 101 avions.<br />

Puisque Jet Airways étend ses<br />

ailes dans les espaces aériens<br />

internationaux, elle a entamé des<br />

relations de partage de code avec<br />

diverses compagnies aériennes<br />

comme Brussels Airline, Etihad,<br />

United Airlines, South African Airways,<br />

Qantas, Thalys (service de chemins de<br />

fer), Malaysian Airlines, All Nippon, Air<br />

Canada, etc.<br />

Avec le centre de Jet Airway’s<br />

à Bruxelles, les passagers pour<br />

affaires ou agrément peuvent relier<br />

Newark et Toronto chaque jour de<br />

Delhi et Mumbai ainsi que 49 autres<br />

destinations en Inde.<br />

Les revenus de la compagnie pour<br />

l’année fiscale 2012-2013 étaient de<br />

1 740 317 roupies.<br />

Les opérations de Jet Airways<br />

en France Jet Airways a débuté ses<br />

opérations commerciales à Paris en<br />

2008 avec un effectif actuel de 10<br />

employés.<br />

Jet Airways a étendu le 1er avril<br />

2014 son accord de partage de codes<br />

avec Air France signé en juin dernier ce<br />

qui permettra aux passagers des deux<br />

compagnies de voyager sans rupture<br />

entre les destinations.<br />

L’accord permet d’améliorer la<br />

connectivité du réseau pour les<br />

passagers vers 12 grandes villes<br />

en Europe et au Royaume Uni. Les<br />

passagers de Jet Airways pourront<br />

ainsi relier sans interruption Nice,<br />

Lyon, Marseille, Toulouse, Barcelone,<br />

Madrid, Hambourg, Prague, Dublin,<br />

Birmingham, Manchester et Newcastle.<br />

Actuellement Air France place<br />

son code de marketing sur les<br />

vols intérieurs de Jet Airways entre<br />

Mumbai, Delhi, Bangalore et Chennai<br />

, Hyderabad, Kolkata.<br />

Jet Airways a inauguré le vol<br />

Mumbai-Paris avec un Airbus A330 à<br />

partir du 14 mai 2014 , un départ à<br />

midi de Mumbai pour atteindre Paris<br />

CDG le soir et un départ de CDG le<br />

soir pour arriver le lendemain matin à<br />

Mumbai, tout comme les horaires d’Air<br />

India pour le vol Delhi-Paris.<br />

M. Michel Simiaut est le Directeur<br />

Général de Sud Europe (France,<br />

Espagne et Grèce). n<br />

L’ambassadeur, M. Arun K.<br />

Singh, a inauguré une conférence<br />

sur “Opportunités et challenges<br />

pour l’industrie du luxe en Inde”<br />

organisée par le Club Luxe de<br />

l’ESSEC et l’International Luxury<br />

Brand Management MBA Alumni<br />

Association le 13 mai au Centre<br />

d’affaires du Trocadéro in Paris.<br />

Plusieurs représentants des grandes<br />

marques de luxe françaises, des<br />

hommes d’affaires, la presse et des<br />

étudiants en commerce ont assisté à la<br />

manifestation. n<br />

L’Ambassadeur Arun K. Singh a visité<br />

l’exposition Eurosatory 2014 le 18<br />

juin 2014 et a rencontré les exposants<br />

indiens y participant. Une session<br />

interactive aec les sociétés indiennes<br />

des secteurs privé et public fut<br />

organisé au Pavillon indien autour des<br />

perspectives et des défis d’exporter de<br />

l’Inde des produits associés à la défense.<br />

M. G K Pati, Secrétaire (Production de<br />

la Défense), Ministère de la Défense,<br />

était également présent. Au total 17<br />

sociétés indiennes du secteur privé ont<br />

participé à cette édition d’Eurosatory<br />

qui s’est tenue à Paris-Nord Villepinte<br />

du 16 au 20 juin 2014. n<br />

Monsieur Arun K. Singh,<br />

Ambassadeur de l’Inde, s’est rendu du<br />

20 au 21 juin à Aix-en-Provence.<br />

Dans le cadre de cette visite, une<br />

rencontre a été organisée à l’hôtel<br />

de ville avec Madame le Maire, Mme<br />

Maryse Joissains Masini. Monsieur<br />

l’Ambassadeur a également prononcé<br />

une allocution d’ouverture à la<br />

conférence internationale consacrée<br />

à l’histoire des fortifications<br />

indiennes au Deccan (1200 et<br />

1700). Celle-ci a été organisée par le<br />

Laboratoire d’Archéologie Médiévale<br />

et Moderne en Méditerranée de<br />

l’Université Aix-Marseille. n<br />

Nouvelles De L’Inde juillet-août 2014<br />

57


Culture L’Inde en France<br />

Un accord de partenariat<br />

(mémorandum d’entente) a été<br />

signé entre la National Law School<br />

of India University à Delhi et l’Ecole<br />

de Formation professionnelle des<br />

Barreaux de la Cour d’Appel de Paris<br />

(EFB), le 27 mai 2014, en présence de<br />

M. Arun K. Singh, Ambassadeur de<br />

l’Inde, M. Pierre Olivier Sur, bâtonnier<br />

du barreau de Paris, Dr. Ranbir Singh,<br />

Vice-Chancelier de la National Law<br />

University, M. Jean-Louis Scaringella,<br />

Directeur de l’EFB, Mme Manjula<br />

Chawla, Vice-Présidente de la<br />

Société d’avocats indiens, M. Laurent<br />

Martinet, vice-bâtonnier du barreau<br />

de Paris et M. Dan Oiknine, Président<br />

de la Chambre de commerce et<br />

d’industrie franco-indienne. n<br />

Dans le cadre de la représentation<br />

de l’opéra de John Adams, « A<br />

Flowering Tree » qui était présenté du<br />

5 au 13 mai au Châtelet un déjeuner a<br />

été donné par M. Indra Mani Pandey,<br />

Chargé d’Affaires de l’Ambassade<br />

de l’Inde, le 6 mai dernier dans un<br />

restaurant indien, Jodhpur Palace à<br />

Paris.<br />

L’opéra, inspiré d’un conte<br />

populaire d’Inde du Sud, a été<br />

mise en scène par Vishal Bhardwaj,<br />

réalisateur, producteur, écrivain et<br />

scénariste indien. Lors du déjeuner<br />

©Marie-Noëlle Robert. Théâtre du Châtelet<br />

les artistes, les membres de la<br />

direction du Théâtre du Chatelet et<br />

les organisateurs ainsi que d’autres<br />

personnalités ont été conviés pour<br />

discuter de coopérations culturelles<br />

lors de ce moment de convivialité. n<br />

M. Bijoy Jain, l’architecte du “Studio<br />

Mumbai”, est lauréat de la médaille<br />

d’or de l’Académie de l’Archiceture<br />

à Paris pour sa contribution dans le<br />

champ de l’architecture. La cérémonie<br />

de remise a eu lieu le 16 juin en<br />

présence des architectes reconnus,<br />

des conservateurs du patrimoine<br />

ainsi que des urbanistes de renom. n<br />

M. Indra Mani Pandey, chef de<br />

mission adjoint, a inauguré la Journée<br />

« India Business Day », organisée par la<br />

Chambre de Commerce et d’Industrie<br />

de La Réunion et le Consulat Général<br />

de l’Inde. L’évènement a été organisé<br />

à Saint Denis, l’île de la Réunion, le 3<br />

juin dernier. n<br />

58 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


L’Inde en France<br />

Culture<br />

M. Indra Mani Pandey, Chef de<br />

mission adjoint de l’Ambassade de<br />

l’Inde, a inauguré la Saison indienne<br />

à Toulouse qui s’est déroulée du<br />

12 au 27 avril. Ce Festival permet<br />

de découvrir le cinéma, la danse<br />

et la culture indienne. Une riche<br />

programmation cinématographique<br />

a été prévue cette année ainsi que<br />

trois expositions regroupant au moins<br />

cinq artistes : Swati Gupta, Gil Corre,<br />

Pascal Champlon, The Pondicherry<br />

Photography Club et Jean-Christian<br />

Cottu. n<br />

L’art indien s’est récemment<br />

donné à voir dans plusieurs galeries<br />

parisiennes. George. K, sculpteur,<br />

a ainsi exposé du 2 au 31 mai à la<br />

Galerie Vallois, rue de Seine, une<br />

La Galerie Myriane, au Village<br />

Suisse, à Paris, a présenté du 15<br />

mai au 15 juin, une série d’œuvres<br />

picturales d’Anuradha Thakur à<br />

laquelle nous consacrons un article<br />

dans ce numéro. Anuradha Thakur<br />

est née en 1960 dans l’Etat du<br />

Maharashtra. Son travail artistique<br />

dont la galerie nous a présenté un<br />

échantillon est entièrement consacré<br />

à la représentation de cultures<br />

tribales, du Gadchiroli principalement<br />

mais aussi du Sikkim, du Rajasthan<br />

et du Gujarat et même du Népal.<br />

L’artiste, présente lors du vernissage,<br />

série d’œuvres intitulée The Dance<br />

of Life. A l’origine de ce travail, les<br />

interrogations du sculpteur sur<br />

l’histoire et les fonctions sociales,<br />

religieuses et culturelles de la danse<br />

traditionnelle indienne. A partir de<br />

photographies du danseur malais<br />

de Bharata Natyam, Mavin Khoo,<br />

l’artiste a donné vie à des sculptures<br />

empruntant les traits du visage et<br />

le dessin du buste du danseur dont<br />

l’hyperréalisme ne manque pas<br />

d’interpeller ceux qui les observent.<br />

La série de danseurs montre les<br />

Navarasa, les neuf sentiments ou<br />

émotions présents dans l’art indien.<br />

Les œuvres sont réalisées en fibre<br />

de verre et papier journal. Un travail<br />

d’une grande finesse qui s’inscrit<br />

résolument dans le temps présent,<br />

cet ici et maintenant qu’il convient de<br />

célébrer. George. K, né en 1950, vit<br />

et travaille à Chennai. n<br />

a pu échanger et parler de son art<br />

avec les personnes présentes dont<br />

le Chef de Mission Adjoint, M. Indra<br />

Mani Pandey. n<br />

Le Thé des Ecrivains, lieu<br />

atypique du Marais, librairie-galeriesalon<br />

de thé, a invité dans le cadre<br />

de l’opération Nomades les 13, 14<br />

et 15 juin dernier la galerie Anders<br />

hus, à exposer quelques œuvres<br />

d’artistes Gond (Venkat Shyam,<br />

Narmada Tekam, Japani Shyam,<br />

Subhas Vyam, Durga Bai Vyam), dont<br />

Anne Chevalier a présenté le travail<br />

lors d’une interview ; une occasion<br />

de parler de ces artistes, de leur<br />

lisibilité en France, de leurs sources<br />

d’inspiration.<br />

Christophe Ronel,<br />

peintre français fortement<br />

inspiré par l’Inde, a<br />

exposé à la Galerie<br />

Claudine Legrand, rue<br />

de Seine, à Paris du 12<br />

juin au 5 juillet une<br />

sélection d’œuvres dont<br />

certaines ont trait à<br />

l’Inde, à la richesse de<br />

ses mythes. Des œuvres<br />

comme Le lac de pleine<br />

lune, Le périple d’éléphas<br />

ou la lente marche du<br />

monde, Brahma fauve<br />

vers le Rajpoutana,<br />

nous embarquent dans<br />

une Inde inspirante et<br />

inspirée.n<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

59


Culture L’Inde en France<br />

Inauguré par Mme Apoorva<br />

Srivastava, Conseiller culturel de<br />

l’ambassade, avec l’exposition<br />

d’oeuvres d’Anju Chaudhuri, en<br />

présence des personnalités locales et<br />

régionales, le Festival Armor India<br />

2014 s’est déroulé du 25 avril au<br />

4 mai à Morlaix. Pour cette 8ème<br />

édition, l’association AADI a de<br />

nouveau proposé un programme très<br />

diversifié et de qualité, faisant de ce<br />

festival un exemple spécifique en<br />

France. L’ensemble des événements a<br />

accueilli 2.500 personnes, tant pour<br />

le concert unique Tahli Gang et Trilok<br />

Gurtu, la remarquable création “Raag<br />

Panorama” pour 8 danseurs venus de<br />

Pune spécialement que pour la réunion<br />

littéraire avec France Bhattacharya<br />

sur Tagore, l’exposition “Abécédaire<br />

de l’Inde” ou encore le spectacle jeune<br />

public “Quand Rama chante Sita” avec<br />

le Théâtre de la Cruche, et de plus<br />

en plus suivi, un volet cinéma avec 6<br />

projections dans 4 salles de la région.<br />

La présence remarquée des artistes<br />

indiens à Morlaix a été amplifiée par la<br />

visite d’une délégation d’étudiants du<br />

Ramnarain Ruia College de Bombay,<br />

dans le cadre des échanges éducatifs<br />

qu’AADI met en place et développe<br />

avec l’aide de l’ambassade, entre des<br />

établissements d’enseignement de<br />

Bretagne et des Colleges de Bombay<br />

et Pune notamment. n<br />

Le médecin-philosophe Deepak<br />

Chopra a rassemblé un public très<br />

nombreux au Rex lors de sa venue à<br />

Paris autour de la thématique « L’avenir<br />

de notre bien-être » le 19 mai dernier.<br />

Il a proposé à ce public enthousiaste<br />

quelques clés pour améliorer sa<br />

santé, vivre de manière plus zen et<br />

harmonieuse avec les autres. Auteur<br />

de nombreux best-sellers, il enseigne<br />

par ailleurs dans de grandes écoles<br />

comme la Harvard Medical School ou<br />

la Columbia University. n<br />

Une nuit indienne a été organisée au<br />

Festival les Nuits de Fourvière à Lyon<br />

le 21 juin durant laquelle le public a<br />

pu découvrir le spectacle The Kitchen<br />

de Roysten Abel. L’Ambassade de<br />

l’Inde y a été représentée par Mme<br />

Apoorva Srivastava, Conseiller<br />

Presse, Information & Culture.<br />

Le maître d’œuvre de cette<br />

merveilleuse production, Roysten<br />

Abel, est un homme de théâtre.<br />

Et il a décidé d’ajouter aux plaisirs<br />

des yeux et des oreilles, le plaisir de la<br />

bouche et du nez. The Kitchen met en<br />

scène un couple dont la relation est en<br />

mutation. À leurs pieds, deux grands<br />

pots, cent kilos de riz, sucre, mandes,<br />

lait, raisins secs, cardamome… Le<br />

tout servant à cuire le payasam,<br />

dessert traditionnel indien. Mais pardelà<br />

l’empire des sens, The Kitchen<br />

est une époustouflante métaphore de<br />

l’évolution humaine sur le chemin de<br />

la vie. n<br />

Les spectateurs qui ont assisté le 8 mai dernier au récital donné au Châtelet<br />

par la grande légende de Bollywood, Asha Bhosle, se souviendront sans doute<br />

longtemps de leur soirée. Faut-il rappeler que la chanteuse détient le record du<br />

monde du plus grand nombre de chansons enregistrées et qu’elle est apparue<br />

à l’écran un nombre impressionnant de fois ? Faut-il ajouter qu’Asha Bhosle est<br />

autant à l’aise dans le lyrisme bollywoodien que dans les styles pop, classique<br />

ou folk et qu’elle chante dans une vingtaine de langues ? C’est le Metropole<br />

Orchestra d’Amsterdam qui, cette fois, a eu l’honneur d’accompagner le temps<br />

d’un soir de rêve, la grande chanteuse. n<br />

60 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Painting<br />

Culture<br />

chantre du<br />

rythme et de<br />

Anuradha Thakur,<br />

l’harmonie<br />

Les toiles d’Anuradha Thakur accrochées aux cimaises de la galerie Myriane au Village Suisse, ensemble<br />

d’antiquaires, de galeries, n’ont pas manqué d’attirer l’œil des passants par leurs couleurs vives, leurs<br />

rythmes joyeux, leur harmonie.<br />

Anuradha Thakur, diplômée<br />

des Beaux-Arts de l’Etat du<br />

Maharashtra dont elle est<br />

originaire, est en lien avec<br />

les populations tribales depuis sa<br />

jeunesse. Parallèlement à son travail<br />

de peintre (elle compte à son actif<br />

de nombreuses expositions tant<br />

personnelles que de groupe, en Inde<br />

comme à l’étranger), de professeur<br />

d’art, elle écrit (son ouvrage «<br />

Sketches of Rythmic Experiences »<br />

est un formidable concentré de son<br />

travail, de ses rencontres avec les<br />

populations tribales notamment et<br />

nous éclaire sur ce qui l’anime et fait<br />

de sa peinture un hymne à la joie<br />

et à la vie) et anime de nombreux<br />

ateliers. Elle a notamment écrit<br />

pour le journal « Dainik Loksatta »<br />

dans lequel elle a alimenté jusqu’en<br />

2008 une rubrique intitulée Kavadse<br />

témoignant de ses expériences.<br />

C’est par le biais de l’Institute<br />

of Health Management de Pachod<br />

qu’elle a réussi à fréquenter le milieu<br />

rural de près et a été amenée à créer<br />

Nouvelles De L’Inde juillet-août 2014<br />

61


Culture Painting<br />

Isimincte non con re<br />

omniam<br />

Serene harmony<br />

Transcending rhythms<br />

Serene harmony<br />

Festive rhythm<br />

des ateliers. Elle a par ailleurs travaillé<br />

pour le « Vanvasi Kalyan Ashram »<br />

à Bhandardara et fut à même de<br />

témoigner sur la vie tribale puis ce fut<br />

la rencontre avec le Shodhgram, un<br />

vrai tournant dans sa vie pour mieux<br />

connaître les Gond. Il en a résulté une<br />

série de toiles « Autumn’s Harmony ».<br />

Anuradha Thakur a visité de<br />

nombreuses régions en Inde pour<br />

rencontrer les populations indigènes,<br />

mieux connaître leur environnement<br />

et leur vie culturelle. Elle s’est ainsi<br />

rendue dans le Kutch, à Jhabua, au<br />

Rajasthan et au Gujerat, au Sikkim,<br />

dans les Etats du Nord-Est où elle<br />

a vécu de profondes expériences<br />

qui ont donné naissance à plusieurs<br />

séries de peintures comme «<br />

Music of Life », « Colours of Life »,<br />

« Celebration of Life », « Festive Rhythm »,<br />

« Song of Nature », « Ethereal Accords »,<br />

« Ethereal Rhythms », « Rhythm of the<br />

Season ».<br />

Son travail auprès des femmes<br />

relève de l’art thérapie. Ainsi une<br />

femme qui vivait dans des conditions<br />

difficiles lui confia : « Jusqu’à ce jour,<br />

une grande partie de mon esprit était<br />

occupée par une immense montagne<br />

faite de mes problèmes, de mon dur<br />

travail et de mes soucis ; et cela me<br />

pesait. Mais après avoir assisté à ce<br />

camp sur la création de motifs de<br />

rangolis, j’ai vu un moi différent en<br />

moi. J’ai ressenti la joie qui vient de<br />

la création artistique dans laquelle<br />

on est impliqué sereinement et cette<br />

joie a empli mon esprit. L’espace<br />

qu’occupait la tristesse dans mon<br />

esprit a rétréci. Les conditions autour<br />

de moi n’ont pas du tout changé mais<br />

je les vois sous une autre perspective.<br />

»<br />

Grâce à l’œuvre d’Anuradha<br />

Thakur, une facette de l’Inde rurale<br />

s’offre à nos regards de citadins et<br />

nous invite à nous reconnecter à la<br />

joie profonde. n<br />

Viviane Tourtet<br />

62 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Cannes<br />

Festival<br />

Inauguration du Pavillon indien par l’Ambassadeur, M. Arun K. Singh<br />

67ème Festival de Cannes<br />

Chaque année, la Maha Kumbha du Monde du Cinéma a lieu au bord de la Méditerranée, à Cannes. Là,<br />

sous la pluie et les nuages qui rappellent les chansons de Raj Kapoor, parfois le soleil y brille aussi… Le<br />

sifflement lointain du TER me fait soudain penser au vaste champ à travers lequel couraient Apu et sa<br />

sœur Durga dans La Complainte du Sentier de Satyajit Ray, (1954).<br />

Les professionnels du cinéma<br />

que je surnommerai les pèlerins,<br />

viennent des quatre coins du<br />

monde avec pour seul objectif de<br />

toucher le Sacré : la Palme. Imaginons<br />

la caméra comme étant un stylo, nous<br />

pourrions certainement écrire une<br />

épopée qui se déroule chaque année à<br />

Cannes.<br />

Le Monde du Cinéma passe à l’heure<br />

actuelle par une transition, si ce n’est<br />

par un changement de paradigme. La<br />

politique culturelle de certains pays<br />

dont la production cinématographique<br />

a longtemps eu tendance à se limiter<br />

à une théâtralité primitive, mettrait en<br />

avant une autre façon de faire des films,<br />

contrairement à ceux, indubitablement<br />

frappés par une crise financière et dont<br />

la production faiblit.<br />

L’année dernière, l’Inde fêtait avec<br />

faste les cent ans de ses cinémas, aussi<br />

bien chez elle qu’au Festival de Cannes.<br />

Cette année, elle a su mettre en avant<br />

le pouvoir de l’imaginaire collectif à<br />

travers une convergence d’idées liée à<br />

l’économie du cinéma dans un cadre<br />

plus pointu. Elle s’attache à développer<br />

un dialogue réciproque avec l’autre,<br />

tout en mettant l’accent sur la nécessité<br />

de le connaître à travers une invitation<br />

universelle, dite « coproduction ».<br />

De plus en plus l’Inde voit émerger<br />

l’intérêt que le monde porte à son<br />

égard, notamment des pays de l’Ouest.<br />

On constate l’arrivée de nombreuses<br />

publications en langues étrangères sur<br />

les cinémas de l’Inde et une grande<br />

concentration de professionnels étrangers<br />

de l’audiovisuel dans des villes<br />

phares indiennes, où le cinéma serait<br />

le mantra ouvrant sur des possibilités<br />

d’explorer un vaste marché porteur,<br />

de par le nombre de consommateurs.<br />

Aujourd’hui l’Inde est l’un des pays<br />

prioritaires au monde en termes de<br />

négociations liées à la coproduction.<br />

Bien que l’insuffisance des salles de<br />

cinéma, associée à une infrastructure<br />

Allocution de l’Ambassadeur, M. Arun K. Singh, lors de l’inauguration du<br />

Pavillon indien au Festival de Cannes<br />

relative pour ce qui est du circuit des<br />

films indépendants, ceux-ci suscitent<br />

de nombreux débats. L’étonnant<br />

renouvellement de stratégies, de<br />

sensibilité et une participation<br />

importante du peuple, dépassant les<br />

barrières des villes et des banlieues,<br />

permettent au monde du cinéma<br />

de s’engager à long terme et de<br />

promouvoir la notion nouvelle d’une<br />

exception culturelle qui n’est, à juste<br />

titre, pas enfermée dans un cliché de<br />

négociation intergouvernementale.<br />

Le 67ème festival de Cannes<br />

demeurera une année fondatrice pour<br />

Nouvelles De L’Inde<br />

juillet-août 2014<br />

63


Festival Cannes<br />

Photo du film Titli de Kanu Behl<br />

Dr. Kamal Haasan interviewé par Anupama Chopra au Pavillon indien<br />

l’Inde où la culture cinématographique<br />

populaire s’est émancipée de l’idéal du<br />

divertissement. Il s’agit d’une approche<br />

internationale qui établit un dialogue<br />

entre tous les pays. « Vasudhaiva<br />

Kutumbakam- Toute la planète est<br />

une famille ». Produire avec l’Autre un<br />

contenu cinématographique serait,<br />

pour l’Inde, l’un des maîtres-mots pour<br />

envisager une alliance sans frontière.<br />

Alors la définition de la Culture ne serait<br />

plus restrictive et limitée à un pays<br />

donné.<br />

Les événements au Pavillon indien<br />

du 15 au 19 mai, 2014 :<br />

Organisé par la Fédération indienne<br />

des Chambres de Commerce et<br />

d’Industrie (FICCI), le Pavillon indien au<br />

décor minimaliste conçu par Nikheel<br />

Aphale a présenté une clarté des idées<br />

alliée à l’esthétique du regard. Du 15<br />

au 19 mai, le pavillon a accueilli de<br />

nombreuses personnalités avec chaque<br />

jour, une table ronde abordant de<br />

nombreux sujets.<br />

Le 15 mai :<br />

Le Pavillon a été inauguré par M.<br />

Arun K.Singh, Ambassadeur de l’Inde<br />

en France, en présence du Secrétaire<br />

du Ministère indien de l’Information<br />

et de la Radiodiffusion, M. Bimal<br />

Julka, d’Arash Amel, scénariste du<br />

film d’ouverture du festival « Grace<br />

de Monaco » et d’Uday Chopra,<br />

producteur de films et représentant de<br />

Yash Raj Films, dont l’entité américaine<br />

détient une part minoritaire en<br />

tant que coproductrice du film<br />

d’ouverture.<br />

Le discours inaugural de l’ambassadeur<br />

portait sur la présence du<br />

cinéma indien (longs et courts métrages<br />

confondus) dans toutes les sections<br />

du festival. Il a félicité les réalisateurs<br />

indépendants, émissaires de ce<br />

nouveau cinéma indien, qui contribuent<br />

au rayonnement de la culture à travers<br />

le monde, à travers l’image animée.<br />

Le cinéma indien, a-t-il dit, a le devoir<br />

de représenter sa diversité nationale<br />

tout en mettant l’accent sur l’objectif<br />

d’établir un dialogue réciproque avec<br />

les autres.<br />

La deuxième partie de la journée<br />

a été consacrée à de nombreuses<br />

discussions autour du cinéma. Uday<br />

Chopra et Arash Amel ont partagé les<br />

anecdotes de « Grace de Monaco »,<br />

l’équipe du film « Titli » a partagé son<br />

expérience et la conversation s’est<br />

animée grâce à des intervenants<br />

comme : Dibakar Banerjee-réalisateur,<br />

Kanu Behl, réalisateur de Titli, Guneet<br />

Monga-productrice indépendante et les<br />

comédiens du film.<br />

Le 16 mai :<br />

Une table ronde concernant<br />

le partage des savoirs pour créer<br />

une synergie entre cultures a été<br />

organisée entre les professionnels de la<br />

coproduction venant de plusieurs pays.<br />

Les participants ont ainsi analysé les<br />

accords de coproduction que l’Inde a<br />

signés jusqu’à présent.<br />

La journée a été enrichie par<br />

l’échange avec l’acteur légendaire<br />

Kamal Hassan, qui a relativisé l’ambition<br />

de l’Inde en tant que nation du cinéma<br />

s’emparant du marché international à<br />

travers la coproduction. Selon Hassan,<br />

l’Inde devrait rester sur la voie de son<br />

offre unique et solide d’une diversité<br />

multiculturelle interne et n’aurait en<br />

aucun cas besoin de faire plaisir aux<br />

autres en homogénéisant le contenu de<br />

son cinéma. « Plus l’Inde restera ethnique,<br />

plus elle deviendra universelle »,<br />

a déclaré Hassan.<br />

Le 17 mai :<br />

Cette journée fut dédiée à la<br />

négociation internationale compte<br />

tenu de l’intérêt de nos partenaires<br />

stratégiques pour coproduire avec<br />

l’Inde. Le Ministère de l’Information avait<br />

mis en place un échange lié au potentiel<br />

de tournage des films à l’intérieur et à<br />

l’extérieur de l’Inde. Le gouvernement<br />

pourrait mettre en place un système de<br />

portail d’entrée unique (Single Window<br />

Session sur la co-production<br />

64 juillet-août 2014 Nouvelles De L’Inde


Cannes<br />

Festival<br />

Inauguration du Pavillon de la Confédération de<br />

l’Industrie Indienne (CII) au marché du film par<br />

l’Ambassadeur, M. Arun K. Singh en présence<br />

de M. Bimal Julka, secrétaire d’Etat au<br />

Ministère de l’ « Information and Broadcasting »<br />

( I&B ) ainsi que d’autres personnalités<br />

éminentes de l’industrie cinématographique<br />

telles que Mme Mallika Sherawat, M. Ashok<br />

Amritraj, M. Avtar Panesar, M. Sudhir Mishra et<br />

M. Resul Pusukutty.<br />

Clearance). Mais il faudrait comprendre<br />

que la mise en place d’un système<br />

relatif à une seule porte d’entrée n’est<br />

pas synonyme de coproduction mais<br />

qu’il facilite en outre les possibilités de<br />

tournages inter-Etats en Inde même.<br />

Selon une source proche du ministère,<br />

« cette porte d’entrée unique pour<br />

faciliter tout type de dispositif lié au<br />

tournage et au tourisme, offrirait une<br />

transition souple de validation de projet<br />

jusqu’au tournage. Le gouvernement<br />

indien étudie actuellement la possibilité<br />

pour que cette porte d’entrée soit un site<br />

web afin de pouvoir mieux enregistrer<br />

chaque mouvement. Il faut savoir que<br />

le marché indien reste le marché le plus<br />

libéral au monde où l’investissement<br />

direct lié au financement d’un film peut<br />

atteindre jusqu’à 100%.»<br />

Le 18 mai :<br />

Cette journée a été consacrée au<br />

rôle des organisateurs de festivals du<br />

cinéma indien dans le monde. C’est à<br />

travers ce thème que le pavillon indien<br />

a facilité un échange réciproque avec<br />

les organisateurs et les acheteurs de<br />

films. L’échange s’est déroulé de façon<br />

conviviale et chaque représentant-<br />

Œuvres du sculpteur sur sable M. Sudarsan Pattnaik<br />

organisateur étranger de festivals a<br />

partagé son expérience.<br />

Entre une approche subjective<br />

de l’enthousiasme liée au lieu et à<br />

l’évènement de Cannes, et une réalité<br />

transfrontière liée à la portée du cinéma<br />

de l’Inde, la discussion a trouvé sa<br />

propre voie même si de nombreux défis<br />

restent à relever. « Il est tout de même<br />

très difficile de faire connaître la riche<br />

diversité du cinéma indien en Italie,<br />

alors que paradoxalement l’Italie a<br />

façonné le langage cinématographique<br />

en étant la sublime traductrice du néoréalisme,<br />

et que cela n’intéresse plus<br />

personne maintenant », a dit Selvaggia<br />

Velo, directrice du festival de films<br />

indiens River to River, organisé chaque<br />

année à Florence en Italie.<br />

Plus tard dans la journée, une<br />

réception a été conjointement<br />

organisée par le Ministère indien de<br />

l’Information et de la Radiodiffusion<br />

ainsi que la Fédération du film de<br />

l’Inde pour faciliter la communication<br />

interprofessionnelle.<br />

Le 19 mai :<br />

Ce dernier jour d’échange au pavillon<br />

indien a vu la performance brillante de<br />

Sandip Sopparkar. Celui-ci a fait un<br />

exposé sur l’importance de la danse<br />

dans le cinéma indien. Ce moment a été<br />

par ailleurs enrichi par un représentant<br />

de la danse classique indienne en<br />

France, Raghunath Manet.<br />

Une petite heure fut réservée aussi<br />

pour un échange bilatéral entre les<br />

professionnels de l’audiovisuel français<br />

et indiens pour mettre en valeur la<br />

philosophie de la coproduction. Cette<br />

discussion était animée par Pierre<br />

Assouline, qui a partagé son expérience<br />

de travail avec le système indien et sa<br />

rencontre avec notre bureaucratie. n<br />

Writtwik Banerjee<br />

Traducteur-chroniqueur<br />

indépendant sur la coproduction<br />

Quelques repères : L’Inde à Cannes,<br />

2014 :<br />

Long métrage : « Titli », Kanu Behl, Un<br />

Certain Regard<br />

Court métrage : « True Love Story », film<br />

d’animation, Gitanjali Rao, Semaine de la<br />

Critique<br />

Présence indienne au Marché du film :<br />

Plus de 50 représentants venant des<br />

maisons de production indiennes<br />

La délégation indienne était<br />

représentée par :<br />

• Le Ministère de l’Information et de la<br />

Radiodiffusion, Inde<br />

• L’Ambassade de l’Inde en France<br />

• La Fédération indienne des Chambres<br />

de Commerce et d’Industrie (FICCI)<br />

• La Fédération indienne du Film<br />

• La Corporation Nationale pour le<br />

Développement du Film (NFDC)<br />

Nouvelles De L’Inde juillet-août 2014<br />

65


Cuisine Les boissons de l’été<br />

Les boissons<br />

de l’été<br />

Les beaux jours arrivent. L’été, sa joie de vivre,<br />

sa légèreté et son beau temps changent nos<br />

habitudes culinaires. C’est le temps des plats<br />

légers mais surtout des boissons rafraîchissantes.<br />

L’Inde possède un vaste répertoire de boissons<br />

pour cette nouvelle saison, petit coup d’œil sur<br />

les tendances de cet été.<br />

Tout le monde sait que le masala<br />

chai est la boisson nationale<br />

de l’Inde. Ce thé au lait épicé<br />

est consommé toute l’année et<br />

sans modération. On le trouve chez<br />

les marchands de rue, dans tous les<br />

restaurants et on le sert à tous nos<br />

invités. Servi chaud, il rassemble les<br />

amis, la famille à n’importe quelle heure<br />

de la journée. Récemment, cet amour<br />

du thé s’est même étendu dans des<br />

déclinaisons de thé glacé pour un effet<br />

rafraîchissant.<br />

Bien sûr, il n’y a pas que le thé !<br />

Le nimbu pani (« eau citron » en hindi)<br />

est une citronnade consommée<br />

quotidiennement à travers le pays. C’est<br />

la deuxième boisson la plus populaire<br />

en Inde. À base d’eau plate ou gazeuse,<br />

sucrée ou salée, le nimbu pani aide<br />

à lutter contre la déshydratation et<br />

stimule le système digestif.<br />

La cuisine indienne s’exporte dans<br />

le monde entier et le lassi est une des<br />

boissons indiennes les plus reconnues.<br />

Un grand classique à base de yaourt<br />

frappé aromatisé, on en trouve des<br />

versions salées, épicées ou sucrées<br />

dans tous les restaurants indiens du<br />

monde. En Inde, le lassi est le plus<br />

souvent consommé en journée et peut<br />

être servi en accompagnement d’un<br />

plat ou en fin de repas car le yaourt<br />

adoucit et facilite la digestion des<br />

mets épicés. Il est agrémenté d’épices<br />

ou de fruits, les parfums les plus<br />

populaires sont la cardamome, la rose<br />

et la mangue. Servi froid, le lassi est la<br />

boisson parfaite pour profiter des fruits<br />

mûrs de l’été !<br />

Il existe de nombreuses autres<br />

boissons telles que le jus de canne à<br />

sucre pressé, l’eau de coco, la limonade<br />

de mangue verte (aam pana) ainsi que<br />

le thandai (milkshake épicé aux fruits<br />

secs). Le lassi et le masala chai sont<br />

les boissons les plus demandées lors<br />

de mes cours de cuisine à Paris et c’est<br />

ainsi que je vous propose ces deux<br />

recettes simples et rapides à réaliser<br />

que j’ai revisitées sous forme de thé<br />

glacé à la rose (ou Rooh Afza), aux<br />

épices chai et de lassi sucré à l’avocat<br />

et à la cardamome verte. n<br />

Thé indien glacé à la rose<br />

Ingrédients pour 2 verres :<br />

1 sachet de thé de l’Inde, le jus d’un demi-citron, 2 cuillères à soupe de sirop de<br />

rose, 1 verre d’eau fraîche ou des glaçons, et une pincée de masala chai.<br />

Préparation :<br />

Faire bouillir un demi-verre d’eau et laisser infuser le sachet 3 minutes<br />

Ôter le sachet et ajouter le jus de citron, le chai masala, le sirop de rose et<br />

l’eau fraîche.<br />

Laisser refroidir ou ajouter des glaçons et boire tout de suite<br />

Astuce : si vous n’avez pas de chai masala, mettez une lamelle de<br />

gingembre frais à infuser en même temps que le sachet de thé et 2-3<br />

feuilles de menthe fraîche avant de servir.<br />

Lassi à l’avocat<br />

Ingrédients pour 1 verre :<br />

2 pots de yaourt nature, 3 cuillères à café de sucre ou plus selon le goût, une<br />

pincée de cardamome verte, ¼ d’avocat, 3- 4 glaçons.<br />

Préparation :<br />

Dans un blender, mixer l’ensemble des ingrédients pendant 10 secondes pour<br />

bien faire mousser le lassi.<br />

Astuce : remplacer l’avocat par d’autres fruits de votre choix. Plus le fruit est mûr,<br />

moins vous aurez besoin d’ajouter de sucre dans votre lassi.<br />

Article et photos par Pushan Chawla-Bhowmick (www.puxanbc.com)<br />

Recettes de Poonam Chawla (www.chalindia.com)<br />

66<br />

juillet-août 2014<br />

Nouvelles De L’Inde


Découvrez prochainement un film sur<br />

l’heureux métissage culinaire franco-indien<br />

Dans le film Les recettes du bonheur,<br />

Hassam Kadam (Manish Dayal) a un<br />

don inné pour la cuisine. Après avoir quitté<br />

le pays natal, l’Inde, la famille Kadam<br />

s’installe dans le village pittoresque de<br />

Saint-Antonin-Noble-Val, dans le Sud de la<br />

France. Non dépourvu de charme, élégant<br />

et pittoresque village est l’endroit idéal<br />

pour s’installer et ouvrir un restaurant<br />

indien, la Maison Mumbai. Mais les choses<br />

se compliquent : Madame Mallory (Helen<br />

Mirren, primée déjà de l’Oscar pour la<br />

meilleure actrice en 2006), propriétaire<br />

hautaine et chef du célèbre restaurant<br />

étoilé au guide Michelin, Le Saule Pleureur,<br />

entend parler du projet de la famille<br />

Kadam. Ses protestations contre le<br />

nouveau restaurant indien, situé à quelques<br />

mètres du sien, dégénèrent en une lutte<br />

acharnée entre les deux établissements<br />

et même l’amour d’Hassan pour la haute<br />

gastronomie française n’y peut rien. En<br />

effet, Hassan s’appliquera à apprendre<br />

les techniques culinaires françaises grâce<br />

au livre de cuisine Le Cordon Bleu et à<br />

la grande joie de la charmante sous-chef<br />

Marguerite (Charlotte Le Bon). Inspiré par<br />

cette expérience et aidé par son talent, il<br />

organisera un festival de saveurs associant<br />

harmonieusement les deux cultures<br />

culinaires. Cela permettra de dénouer la<br />

situation : Mme Mallory, autrefois ennemie<br />

jurée d’Hassan, finira par reconnaître<br />

son talent et le prendre sous son aile. En<br />

somme, Les recettes du bonheur regorge<br />

de saveurs qui excitent nos papilles. Mais<br />

c’est aussi une victoire sur le déracinement,<br />

un portrait de deux mondes en apparente<br />

contradiction et un chemin parcouru par un<br />

jeune homme à la recherche d’un chez soi<br />

où qu’il soit. n


Profitez d’une nature intacte<br />

Faites-vous plaisir<br />

Trouvez ce que vous cherchez<br />

Une plage aux Andamans, loin de la foule. Pour en savoir plus, www.incredibleindia.org<br />

IndiaTourism Paris 13, Boulevard Haussmann 75009 - Paris. Tel: 0145233045 Email: directorindiatourismparis@gmail.com/www.incredibleindia.org


NO. 416 juillet-août 2014 Nouvelles de l’Inde

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