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insieme<strong>Vaud</strong><br />
chemin de Malley 26<br />
case postale 190<br />
1000 Lausanne 16<br />
021 341 04 20<br />
info@insiemevaud.ch<br />
www.insiemevaud.ch<br />
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong><br />
pour les personnes vieillissantes ayant un handicap m<strong>en</strong>tal<br />
quelles réalités ? quelles spécificités ? quel av<strong>en</strong>ir ?<br />
Synthèse de la recherche sur le handicap m<strong>en</strong>tal, l’habitat et le<br />
vieillissem<strong>en</strong>t, réalisée de décembre 2006 à juillet 2009 sur les<br />
cantons de Fribourg, G<strong>en</strong>ève et <strong>Vaud</strong>. Avec le souti<strong>en</strong> de la Fondation<br />
Le<strong>en</strong>aards à Lausanne et de la HES-SO.<br />
insieme<br />
vaud
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2<br />
Vous trouverez dans ce docum<strong>en</strong>t<br />
Introduction .......................................................................... 2<br />
I Informations générales sur les personnes handicapées<br />
m<strong>en</strong>tales vieillissant <strong>en</strong> <strong>famille</strong> ......................................... 3<br />
> Qui sont les personnes adultes ayant un handicap m<strong>en</strong>tal<br />
qui viv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>famille</strong> ?<br />
> Qui vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> aide aux personnes handicapées m<strong>en</strong>tales ?<br />
> Quelle durée pour la cohabitation ? Quelles conditions ?<br />
> De quelle aide ont besoin les personnes handicapées<br />
vivant à domicile ?<br />
> Quels sont les moy<strong>en</strong>s à disposition des <strong>famille</strong>s ?<br />
Quelles sont leurs préoccupations et leurs att<strong>en</strong>tes ?<br />
> Changem<strong>en</strong>ts de lieu de vie, pourquoi ?<br />
> Quels loisirs pour les personnes handicapées ?<br />
II Approfondissem<strong>en</strong>t de la situation des <strong>famille</strong>s vivant<br />
avec une personne adulte handicapée m<strong>en</strong>tale .............. 7<br />
> Comm<strong>en</strong>t les <strong>famille</strong>s voi<strong>en</strong>t-elles la cohabitation<br />
et <strong>en</strong>visag<strong>en</strong>t-elles l’av<strong>en</strong>ir ?<br />
> Comm<strong>en</strong>t s’organis<strong>en</strong>t les <strong>famille</strong>s ? Avec quelle aide ?<br />
> Comm<strong>en</strong>t les <strong>famille</strong>s voi<strong>en</strong>t-elles le monde institutionnel<br />
> Des conseils d’anci<strong>en</strong>s aux jeunes par<strong>en</strong>ts<br />
> Les besoins exprimés par les par<strong>en</strong>ts, les souhaits<br />
En conclusion ...................................................................... 11<br />
L’équipe de recherche : Maurice Jecker-Parvex, Jean-Louis Korpès,<br />
professeurs à la Haute école fribourgeoise de travail social de<br />
Givisiez, avec la contribution de Samuel Charmillot, Anne Devaux<br />
et Maryline Thorin Burgdorfer.<br />
Synthèse : Francine Crettaz, insieme<strong>Vaud</strong>, printemps 2010.<br />
© Photos Sophie Ballmer : portraits de MM. Roger Court et<br />
Werner Desch<strong>en</strong>aux réalisés pour la publication du Livre du 10 e<br />
anniversaire de la Fondation Coup d’Pouce à Lausanne.
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong> Printemps 2010<br />
Introduction<br />
L’étude synthétisée ici compr<strong>en</strong>d deux parties.<br />
La première porte sur des questions générales : combi<strong>en</strong> de personnes<br />
handicapées m<strong>en</strong>tales vieilliss<strong>en</strong>t-elles à la maison avec<br />
leurs par<strong>en</strong>ts ou avec un membre de leur fratrie ? qui sont ces<br />
personnes ? comm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>visag<strong>en</strong>t-elles l’av<strong>en</strong>ir ? comm<strong>en</strong>t les<br />
choses se pass<strong>en</strong>t-elles au quotidi<strong>en</strong> ?<br />
Pour répondre à ces questions, l’étude a porté sur des personnes<br />
handicapées m<strong>en</strong>tales, âgées de 35 ans à 64 ans, domiciliées<br />
dans les cantons de Fribourg, <strong>Vaud</strong> et G<strong>en</strong>ève, à partir de deux<br />
sources de données. D’abord des statistiques de l’Office fédéral<br />
des assurances sociales (OFAS). Ensuite des informations prov<strong>en</strong>ant<br />
de 193 questionnaires reçus suite à un courrier adressé aux<br />
2’052 assurés AI adultes correspondant à la population de recherche.<br />
La deuxième partie de l’étude aborde de manière plus approfondie<br />
la vie <strong>en</strong> <strong>famille</strong> d’adultes handicapés m<strong>en</strong>taux et de<br />
leurs proches. Elle se fonde sur vingt <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s m<strong>en</strong>és avec ces<br />
personnes pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t cette vie de <strong>famille</strong> s’est<br />
constituée et a perduré dans le temps. Elle repère les événem<strong>en</strong>ts<br />
qui ont remis <strong>en</strong> question ou r<strong>en</strong>forcé le mainti<strong>en</strong> à domicile de<br />
la personne handicapée m<strong>en</strong>tale au cours de son parcours de<br />
vie adulte. Elle permet de mieux connaître les li<strong>en</strong>s sociaux et<br />
interpersonnels, ainsi que les réseaux de la personne handicapée<br />
et de ses proches. Enfin, elle aborde la question de l’av<strong>en</strong>ir de la<br />
cohabitation.<br />
L’association insieme<strong>Vaud</strong> est à l’origine de cette recherche,<br />
constatant que parmi ses membres l’on compte de plus <strong>en</strong> plus<br />
de <strong>famille</strong>s de personnes handicapées d’âge mûr ou avancé.<br />
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vaud<br />
Un peu moins<br />
des deux tiers des<br />
personnes adultes<br />
habit<strong>en</strong>t <strong>en</strong> institution<br />
et un peu<br />
plus du tiers d’<strong>en</strong>tre<br />
elles viv<strong>en</strong>t soit<br />
<strong>en</strong> <strong>famille</strong>, soit de<br />
manière indép<strong>en</strong>dante.<br />
4<br />
Partie I<br />
Informations générales<br />
sur les personnes handicapées<br />
m<strong>en</strong>tales vieillissant <strong>en</strong> <strong>famille</strong><br />
En préambule, il est important de souligner<br />
la difficulté r<strong>en</strong>contrée par l’équipe<br />
de recherche pour obt<strong>en</strong>ir des données<br />
précises. En effet, les statistiques officielles<br />
de l’OFAS ne répertori<strong>en</strong>t pas le handicap<br />
m<strong>en</strong>tal <strong>en</strong> tant que tel. Ainsi, pour déterminer<br />
cette population, il a fallu recourir à<br />
des croisem<strong>en</strong>ts de variables et à des li<strong>en</strong>s<br />
avec des situations concrètes. Les données<br />
fournies manqu<strong>en</strong>t ainsi de précisions.<br />
Ces procédures ont toutefois permis de<br />
ret<strong>en</strong>ir, parmi les bénéficiaires de l’Assurance<br />
invalidité (AI) des cantons de Fribourg,<br />
G<strong>en</strong>ève et <strong>Vaud</strong>, 2’052 assurés<br />
adultes pour lesquels la probabilité que<br />
leur invalidité soit associée à un handicap<br />
m<strong>en</strong>tal est grande.<br />
En comparant les chiffres de l’OFAS et les<br />
données obt<strong>en</strong>ues par le biais du questionnaire,<br />
l’équipe de recherche peut estimer<br />
le pourc<strong>en</strong>tage de la population handicapée<br />
adulte âgée de 35 à 64 ans qui<br />
habite dans un lieu de vie familial <strong>en</strong>tre<br />
15% et 30%.<br />
En <strong>famille</strong><br />
27.0%<br />
En indép<strong>en</strong>dant<br />
9.8%<br />
En institutions<br />
63.2%<br />
Ainsi, pour les trois cantons concernés par<br />
la recherche, une fourchette de 308 à 616<br />
personnes peut être avancée, à défaut de<br />
chiffre plus précis.<br />
A partir des 193 réponses au questionnaire,<br />
on a pu constater qu’un peu moins<br />
des deux tiers des personnes adultes habit<strong>en</strong>t<br />
<strong>en</strong> institution et un peu plus du tiers<br />
d’<strong>en</strong>tre elles viv<strong>en</strong>t soit <strong>en</strong> <strong>famille</strong>, soit de<br />
manière indép<strong>en</strong>dante.<br />
Dans le détail, un peu plus d’un quart des<br />
personnes ayant répondu au questionnaire<br />
(27,0%) habit<strong>en</strong>t dans un lieu de<br />
vie familial, parmi lesquels 10,4% n’ont<br />
aucune prise <strong>en</strong> charge institutionnelle<br />
et 16,6% avec une prise <strong>en</strong> charge p<strong>en</strong>dant<br />
la journée. La majorité d’<strong>en</strong>tre elles<br />
(63,2%) viv<strong>en</strong>t dans une structure institutionnelle<br />
dont près de la moitié (46,6%) à<br />
temps complet ; une fraction d’<strong>en</strong>tre eux<br />
(10,4%) r<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t au domicile familial p<strong>en</strong>dant<br />
le week-<strong>en</strong>d.<br />
A titre de comparaison, selon une recherche<br />
réalisée <strong>en</strong> Allemagne 1 , 60% des<br />
adultes handicapés m<strong>en</strong>taux viv<strong>en</strong>t avec<br />
un membre de leur <strong>famille</strong>. Une grande<br />
partie d’<strong>en</strong>tre eux viv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core avec leurs<br />
proches après 50 ans. Aux Etats-Unis 2 , <strong>en</strong><br />
2006, 57,8% des personnes ayant des défici<strong>en</strong>ces<br />
intellectuelles et des incapacités<br />
de développem<strong>en</strong>t (tous âges confondus)<br />
viv<strong>en</strong>t au domicile familial, 10,6% viv<strong>en</strong>t<br />
seuls, 3,6% <strong>en</strong> <strong>famille</strong> d’accueil et 28%<br />
résid<strong>en</strong>t <strong>en</strong> structures communautaires.<br />
L’analyse a aussi permis de constater que<br />
les adultes âgés de moins de 50 ans habit<strong>en</strong>t<br />
davantage au domicile familial ; à<br />
l’inverse, les personnes de plus de 50 ans<br />
ont t<strong>en</strong>dance à vivre plus souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> institution.<br />
Il apparaît <strong>en</strong> outre que la proportion de<br />
personnes handicapées adultes vivant<br />
au domicile familial par rapport aux personnes<br />
vivant <strong>en</strong> institution est statistiquem<strong>en</strong>t<br />
plus élevée dans le Canton de<br />
Fribourg que dans ceux de <strong>Vaud</strong> et de<br />
G<strong>en</strong>ève. Cette caractéristique est vraisemblablem<strong>en</strong>t<br />
liée à des facteurs contextuels,<br />
culturels, historiques et administratifs spécifiques.<br />
1 Theuniss<strong>en</strong> Georg: Alt<strong>en</strong>bildung und<br />
Behinderung. Impulse für die Arbeit mit<br />
M<strong>en</strong>sch<strong>en</strong>, die als lern- und geistig behindert<br />
gelt<strong>en</strong>. Bad Heilbrunn Obb. 2002<br />
2 Prouty, R., Alba, K.M., Scott N. L. & Lakin C.:<br />
Where People Lived While Receiving Services<br />
and Supports From The State Developmetal<br />
Disabilities Programs in 2006. In Intellectual and<br />
Developm<strong>en</strong>tal Disabilities. Vol. 46, No 1, pp. 82-<br />
85, February 2008
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong> Printemps 2010<br />
> Qui sont les personnes adultes<br />
handicapées qui viv<strong>en</strong>t<br />
<strong>en</strong> <strong>famille</strong> ?<br />
L’âge moy<strong>en</strong> des personnes vivant <strong>en</strong> <strong>famille</strong><br />
se situe à <strong>en</strong>viron 46,5 ans. 80%<br />
d’<strong>en</strong>tre elles ont moins de 50 ans. La proportion<br />
d’hommes est légèrem<strong>en</strong>t supérieure<br />
à celle des femmes (<strong>en</strong>viron 55%<br />
contre 45). Une moitié des personnes<br />
habite <strong>en</strong> zone rurale. Pour 80,5% de la<br />
population cible de recherche, l’invalidité<br />
a pour origine une infirmité congénitale,<br />
pour 17,3% elle est liée à une maladie et<br />
pour 2,2% à un accid<strong>en</strong>t.<br />
Plusieurs indices laiss<strong>en</strong>t supposer que les<br />
personnes vivant <strong>en</strong> <strong>famille</strong>, ou <strong>en</strong> appartem<strong>en</strong>t<br />
indép<strong>en</strong>dant, possèd<strong>en</strong>t une autonomie<br />
relativem<strong>en</strong>t importante pour faire<br />
face aux exig<strong>en</strong>ces de la vie quotidi<strong>en</strong>ne<br />
(allocation pour impot<strong>en</strong>t de faible degré ;<br />
activités <strong>en</strong> milieu protégé voire <strong>en</strong> milieu<br />
ordinaire ; besoins d’aides réduits ; abs<strong>en</strong>ces<br />
d’aménagem<strong>en</strong>ts particuliers dans la<br />
maison...). 88,1% des personnes ayant<br />
répondu au questionnaire fréqu<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t un<br />
lieu de travail ou d’occupation p<strong>en</strong>dant la<br />
journée. Cet aspect est égalem<strong>en</strong>t développé<br />
dans la deuxième partie de l’étude.<br />
> Qui vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> aide aux personnes<br />
handicapées m<strong>en</strong>tales ?<br />
60% des aidants naturels sont des femmes<br />
et 40% des hommes. Le nombre de<br />
foyers dans lesquels les femmes sont abs<strong>en</strong>tes<br />
est réduit.<br />
Si une grande majorité des aidants naturels<br />
sont les par<strong>en</strong>ts, dans plusieurs situations<br />
un autre membre de la <strong>famille</strong> (sœur,<br />
frère, ou belle sœur) assume ce rôle. Dans<br />
quelques situations, la personne handicapée<br />
vit <strong>en</strong> couple, avec une personne non<br />
handicapée.<br />
L’âge moy<strong>en</strong> des aidants naturels est de<br />
65 ans. 70% d’<strong>en</strong>tre eux ont <strong>en</strong>tre 54 et<br />
76 ans ; <strong>en</strong>viron 16% sont âgés de plus de<br />
77 ans. L’âge moy<strong>en</strong> des par<strong>en</strong>ts est de 70<br />
ans, celui de la fratrie de 52 ans.<br />
En moy<strong>en</strong>ne, il y a 1,7 aidant pour une<br />
personne handicapée. Dans la majorité<br />
des cas, ce sont les par<strong>en</strong>ts qui apport<strong>en</strong>t<br />
l’aide nécessaire, le plus souv<strong>en</strong>t la mère<br />
ou la sœur. Dans de rares situations l’aide<br />
est apportée par quelqu’un d’extérieur à<br />
la <strong>famille</strong> (employé d’un C<strong>en</strong>tre médicosocial,<br />
femme de ménage, tuteur).<br />
La plupart des aidants naturels, bi<strong>en</strong> que<br />
souv<strong>en</strong>t âgés, indiqu<strong>en</strong>t ne pas avoir de<br />
défici<strong>en</strong>ces particulières. Deux personnes<br />
souffrant de mobilité réduite indiqu<strong>en</strong>t<br />
que la personne handicapée leur apporte<br />
une aide.<br />
> Quelle durée pour la<br />
cohabitation ?<br />
Quelles conditions ?<br />
Les personnes qui viv<strong>en</strong>t au domicile familial<br />
cohabit<strong>en</strong>t <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>ne depuis 34 années<br />
(33,9) avec leurs aidants (minimum 3<br />
ans, maximum 52 ans).<br />
La durée de cohabitation de la personne<br />
handicapée avec ses par<strong>en</strong>ts est de presque<br />
40 ans <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>ne et de 16 ans avec<br />
un membre de sa fratrie.<br />
La majorité des personnes vivant au domicile<br />
familial indique ne pas avoir effectué<br />
jusqu’à prés<strong>en</strong>t d’aménagem<strong>en</strong>ts matériels<br />
particuliers dans leur logem<strong>en</strong>t pour<br />
l’adapter à l’évolution de leurs capacités.<br />
De même, la majorité relève ne pas r<strong>en</strong>contrer<br />
de difficultés financières pour accompagner<br />
la personne handicapée.<br />
> De quelle aide ont besoin<br />
les personnes handicapées<br />
vivant à domicile ?<br />
Les activités pour lesquelles les personnes<br />
handicapées sont les plus nombreuses à<br />
avoir besoin d’aide sont : les démarches<br />
administratives (93,6% des personnes<br />
ayant répondu au questionnaire <strong>en</strong> ont<br />
besoin), faire les repas (86,7%), s’occuper<br />
du ménage (84,8%), aller faire les courses<br />
(73,9%), avoir un souti<strong>en</strong> moral (71,1%)<br />
A l’inverse, pour les activités suivantes, les<br />
personnes handicapées sont moins nombreuses<br />
à avoir besoin d’aide : se lever et<br />
se coucher (38,8%), s’habiller/ se déshabiller<br />
(35,4%), aller aux toilettes (27,1%),<br />
manger (18,8%).<br />
Les analyses mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce que si<br />
les personnes handicapées vivant à domicile<br />
sont relativem<strong>en</strong>t autonomes pour<br />
les activités de base, elles ont toutefois<br />
besoin d’une aide préalable pour exercer<br />
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cette autonomie au quotidi<strong>en</strong> (par ex. ; la<br />
personne a besoin d’aide pour aller faire<br />
les courses et préparer le repas mais elle<br />
est indép<strong>en</strong>dante pour manger).<br />
Sans être explicitem<strong>en</strong>t abordée dans les<br />
réponses au questionnaire, la charge psychique<br />
liée à l’aide ressort des précisions<br />
apportées sur la perman<strong>en</strong>ce de l’att<strong>en</strong>tion<br />
et du souti<strong>en</strong> accordés par l’<strong>en</strong>tourage.<br />
Enfin, la personne handicapée apporte elle<br />
aussi sa contribution à la vie <strong>en</strong> <strong>famille</strong> par<br />
sa prés<strong>en</strong>ce, par le souti<strong>en</strong> moral qu’elle<br />
peut donner aux autres personnes et par<br />
sa participation financière.<br />
> Quels sont les moy<strong>en</strong>s<br />
à disposition des <strong>famille</strong>s ?<br />
Quelles sont leurs préoccupations<br />
et leurs att<strong>en</strong>tes ?<br />
Les aidants, quel que soit leur âge, estim<strong>en</strong>t<br />
que les moy<strong>en</strong>s actuels pourrai<strong>en</strong>t<br />
leur permettre d’assurer l’accompagnem<strong>en</strong>t<br />
de la personne p<strong>en</strong>dant <strong>en</strong>core dix<br />
ans ou plus. Certains ont indiqué toutefois<br />
qu’ils ne pouvai<strong>en</strong>t pas donner de<br />
réponse précise et que l’évolution de leur<br />
état de santé constituait un élém<strong>en</strong>t déterminant.<br />
Les aidants exprim<strong>en</strong>t une forte att<strong>en</strong>te<br />
d’individualisation des élém<strong>en</strong>ts à mettre<br />
<strong>en</strong> place. Ils éprouv<strong>en</strong>t des difficultés à anticiper<br />
et à préparer le mom<strong>en</strong>t où ils ne<br />
seront plus à même d’assurer la prise <strong>en</strong><br />
charge. Ils souhait<strong>en</strong>t pouvoir s’appuyer<br />
sur un service de relève à domicile ou d’accueil<br />
temporaire <strong>en</strong> institution (comme<br />
soulagem<strong>en</strong>t temporaire et pour préparer<br />
la personne handicapée à un accueil de<br />
longue durée év<strong>en</strong>tuel).<br />
Les aidants évoqu<strong>en</strong>t de rares besoins<br />
d’aides concrètes pour le ménage ou pour<br />
gérer des aspects administratifs et d’accueil<br />
temporaire <strong>en</strong> cas de problème de<br />
santé.<br />
Une majorité des proches ont imaginé<br />
que la personne handicapée pourrait vivre<br />
ou être accueillie un jour ailleurs qu’à la<br />
maison. Plusieurs ont déjà pris des dispositions<br />
et m<strong>en</strong>tionn<strong>en</strong>t un lieu précis. Certains<br />
estim<strong>en</strong>t que la personne elle-même<br />
pr<strong>en</strong>dra la décision lorsque la question se<br />
posera.<br />
> Changem<strong>en</strong>ts de lieu de vie,<br />
pourquoi ?<br />
Près de 60% des personnes ayant répondu<br />
au questionnaire affirm<strong>en</strong>t avoir habité<br />
<strong>en</strong> institution à un mom<strong>en</strong>t de leur vie.<br />
La plupart d’<strong>en</strong>tre elles ont séjourné <strong>en</strong><br />
institution p<strong>en</strong>dant leur scolarité (56 sur<br />
101) et, <strong>en</strong> moindre proportion, durant<br />
leur vie d’adulte (39 sur 101). Les sorties<br />
d’institution à l’âge adulte pour rejoindre<br />
un domicile familial ou indép<strong>en</strong>dant sont<br />
moins fréqu<strong>en</strong>tes que lors de la période<br />
scolaire ou au tout début de l’âge adulte.<br />
Un décès, des problèmes de santé, l’avancem<strong>en</strong>t<br />
<strong>en</strong> âge des par<strong>en</strong>ts, ainsi que le fait<br />
que personne d’autre ne peut alors s’occuper<br />
de la personne sont les principales<br />
raisons conduisant à un changem<strong>en</strong>t de<br />
lieu de vie. Les raisons d’âge et de santé<br />
de la personne handicapée sont plus rarem<strong>en</strong>t<br />
évoquées, sauf <strong>en</strong> ce qui concerne<br />
l’aggravation du handicap et l’apparition<br />
de troubles de comportem<strong>en</strong>t et/ou psychiques.<br />
Les besoins d’autonomie et d’émancipation<br />
exprimés par la personne handicapée<br />
sont des raisons fréquemm<strong>en</strong>t citées, surtout<br />
lorsque la personne vit actuellem<strong>en</strong>t<br />
dans un logem<strong>en</strong>t indép<strong>en</strong>dant.<br />
Pour des personnes vivant actuellem<strong>en</strong>t<br />
au domicile familial, une des raisons la<br />
plus fréquemm<strong>en</strong>t citée pour argum<strong>en</strong>ter<br />
le changem<strong>en</strong>t de lieu de vie est la prise<br />
<strong>en</strong> charge de la personne handicapée par<br />
la fratrie. Ainsi, dans de nombreux cas, la<br />
fratrie fonctionne comme relais lorsque<br />
les aidants de la génération précéd<strong>en</strong>te ne<br />
peuv<strong>en</strong>t plus s’occuper de la personne.<br />
27,7% des personnes ayant répondu au<br />
questionnaire exprim<strong>en</strong>t le souhait de ne<br />
pas séjourner dans certains lieux de vie,<br />
<strong>en</strong> priorité les institutions (foyers, homes,<br />
ateliers, EMS...), les grandes structures<br />
collectives et les lieux bruyants.<br />
> Quels loisirs<br />
pour les personnes handicapées ?<br />
Les activités de loisirs les plus souv<strong>en</strong>t pratiquées<br />
sont : regarder la télévision, faire<br />
une prom<strong>en</strong>ade accompagnée, faire des<br />
sorties/courses/achats, faire des sorties/<br />
visites (musées). Ces quatre activités re-
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong> Printemps 2010<br />
prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t <strong>en</strong>viron 44% du temps total<br />
consacré aux activités de loisirs par les<br />
personnes handicapées. La pratique de<br />
l’informatique représ<strong>en</strong>te le 1% des différ<strong>en</strong>ts<br />
loisirs.<br />
Les cours le plus souv<strong>en</strong>t fréqu<strong>en</strong>tés sont<br />
des cours de sport (gymnastique, fitness,<br />
pétanque...), d’art (peinture, dessin, bricolage,<br />
musique, chant, danse) et de cuisine.<br />
Les autres activités de loisirs les plus fréquemm<strong>en</strong>t<br />
pratiquées sont les activités<br />
culturelles (cinéma, théâtre, concerts,<br />
photographie, jeux de société) et sportives<br />
(natation, marche, montagne, ski,...).<br />
Les personnes vivant <strong>en</strong> <strong>famille</strong> font moins<br />
souv<strong>en</strong>t des prom<strong>en</strong>ades accompagnées,<br />
pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t moins souv<strong>en</strong>t des cours et ont<br />
moins de loisirs diversifiés que celles vivant<br />
<strong>en</strong> institution ; elles font cep<strong>en</strong>dant<br />
plus fréquemm<strong>en</strong>t des sorties, visites (musées...).<br />
Partie II<br />
Approfondissem<strong>en</strong>t de la<br />
situation des <strong>famille</strong>s vivant avec<br />
une personne adulte handicapée<br />
m<strong>en</strong>tale<br />
La deuxième partie du rapport se fonde<br />
sur l’étude d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s m<strong>en</strong>és avec des<br />
adultes handicapés m<strong>en</strong>taux habitant au<br />
domicile familial et des personnes vivant<br />
avec elles.<br />
L’échantillon était composé de personnes<br />
appart<strong>en</strong>ant à dix-neuf <strong>famille</strong>s. Vingt <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s<br />
ont été effectués, auprès de onze<br />
par<strong>en</strong>ts, <strong>en</strong> majorité des mères (huit), âgés<br />
de 64 à 80 ans, de cinq sœurs, âgées de<br />
51 à 60 ans vivant <strong>en</strong> couple, et de quatre<br />
personnes handicapées m<strong>en</strong>tales, deux<br />
femmes et deux hommes, âgées de 37 à<br />
45 ans.<br />
Ces <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s montr<strong>en</strong>t d’abord que<br />
chaque histoire familiale est particulière<br />
et singulière. Chaque <strong>famille</strong> cherche la<br />
solution la meilleure pour l’<strong>en</strong>fant et pour<br />
elle-même, <strong>en</strong> regard de son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t<br />
culturel, matériel et financier.<br />
> Comm<strong>en</strong>t la cohabitation s’estelle<br />
installée ?<br />
La cohabitation s’est fréquemm<strong>en</strong>t faite<br />
de manière naturelle. Les par<strong>en</strong>ts ne se<br />
sont pas posés de questions : une fois<br />
leur <strong>en</strong>fant arrivé à l’âge adulte, aucun<br />
autre lieu ne pouvait l’accueillir et/ou ils<br />
s<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t que leur <strong>en</strong>fant souhaitait vivre<br />
avec eux. Les valeurs évoquées sont celles<br />
d’une solidarité familiale, d’un li<strong>en</strong> fort<br />
<strong>en</strong>tre les membres de la <strong>famille</strong>. A cette<br />
dim<strong>en</strong>sion, les par<strong>en</strong>ts rattach<strong>en</strong>t <strong>en</strong> premier<br />
lieu des valeurs familiales et/ou culturelles<br />
et, <strong>en</strong> second plan, la possibilité<br />
ou non d’un accueil <strong>en</strong> institution. Le contexte<br />
d’un accompagnem<strong>en</strong>t à mi-temps<br />
est une formule très propice au mainti<strong>en</strong><br />
à domicile. Nous sommes ainsi loin d’une<br />
image de sacrifice, <strong>en</strong>fermant les par<strong>en</strong>ts<br />
et l’<strong>en</strong>fant dans un rapport fusionnel per-<br />
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man<strong>en</strong>t, p<strong>en</strong>sé souv<strong>en</strong>t comme subi plutôt<br />
que choisi.<br />
Par contre, lorsque c’est un membre de<br />
la fratrie qui cohabite avec la personne<br />
handicapée, le choix est dicté par des opportunités,<br />
une <strong>en</strong>vie d’assurer une continuité,<br />
le fait de bénéficier de conditions<br />
favorables. Pour la personne handicapée,<br />
il s’agissait d’une poursuite de ce qu’elle<br />
avait connu <strong>en</strong>fant ou, plus rarem<strong>en</strong>t,<br />
d’une <strong>en</strong>vie de vivre de manière plus indép<strong>en</strong>dante<br />
qu’<strong>en</strong> institution.<br />
L’hébergem<strong>en</strong>t par un membre de la fratrie<br />
s’opère lors d’événem<strong>en</strong>ts décl<strong>en</strong>cheurs<br />
de changem<strong>en</strong>ts (hospitalisation<br />
ou décès de l’un des par<strong>en</strong>ts).<br />
Les valeurs de solidarité familiale sont prés<strong>en</strong>tes<br />
dans les discours. On préfère offrir<br />
un cadre familial, plutôt que collectif, un<br />
mainti<strong>en</strong> des li<strong>en</strong>s de proximité. Les témoignages<br />
montr<strong>en</strong>t que l’expéri<strong>en</strong>ce est<br />
vécue comme source de richesse.<br />
Lorsque les limites sont évoquées, elles<br />
sont pondérées par l’apport que la personne<br />
handicapée peut procurer à la <strong>famille</strong>.<br />
Les propos recueillis laiss<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t<br />
apparaître une crainte de la solitude<br />
chez les accompagnants comme facteur<br />
motivant le mainti<strong>en</strong> de la cohabitation.<br />
De plus, on constate qu’il est difficile pour<br />
elles de faire confiance aux autres, <strong>en</strong> raison<br />
d’événem<strong>en</strong>ts ayant marqué la personne<br />
handicapée.<br />
Des s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts de devoir dans la prise <strong>en</strong><br />
charge sont prés<strong>en</strong>ts dans les discours.<br />
L’év<strong>en</strong>tualité d’une séparation évoque<br />
alors douleurs et culpabilité. La notion de<br />
loyauté <strong>en</strong>vers les par<strong>en</strong>ts et la personne<br />
handicapée est un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t que partag<strong>en</strong>t<br />
la majorité des interviewés.<br />
Le fait de vivre <strong>en</strong>semble s’est par ailleurs<br />
conjugué fréquemm<strong>en</strong>t avec une opportunité<br />
de l’habitat ou avec des facteurs<br />
facilitateurs (abs<strong>en</strong>ce de problèmes de<br />
santé, relative autonomie de la personne<br />
handicapée, possibilité de travail à temps<br />
partiel...).<br />
> Comm<strong>en</strong>t les <strong>famille</strong>s<br />
voi<strong>en</strong>t-elles la cohabitation et<br />
<strong>en</strong>visag<strong>en</strong>t-elles l’av<strong>en</strong>ir ?<br />
Les années de vie <strong>en</strong>semble ont un effet<br />
important, selon les par<strong>en</strong>ts, sur leur manière<br />
de voir le monde, la vie. Au cours<br />
des années, les li<strong>en</strong>s interpersonnels se<br />
sont resserrés. La cohabitation a été une<br />
source de bonheur et les ont am<strong>en</strong>és à<br />
rester dynamiques, à assumer un <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t<br />
par<strong>en</strong>tal sur la durée.<br />
La durée est vue sous un angle positif<br />
dans les propos de certains par<strong>en</strong>ts qui <strong>en</strong><br />
retir<strong>en</strong>t de la fierté. Parfois cette durée est<br />
teintée d’une émotion plus sombre lorsque<br />
les mères se rappell<strong>en</strong>t les mom<strong>en</strong>ts<br />
de doute, de fatigue, de détresse même<br />
parfois.<br />
Les propos relatifs à l’influ<strong>en</strong>ce sur la vie<br />
de couple sont nuancés : certains ont t<strong>en</strong>dance<br />
à dire que la cohabitation ne l’a pas<br />
r<strong>en</strong>due vraim<strong>en</strong>t possible, d’autres jug<strong>en</strong>t<br />
qu’elle a pu se développer. De manière<br />
générale, les par<strong>en</strong>ts ont t<strong>en</strong>dance à minimiser<br />
l’importance de leur rôle dans le<br />
mainti<strong>en</strong> de la cohabitation et l’incid<strong>en</strong>ce<br />
d’événem<strong>en</strong>ts dans leur parcours de vie.<br />
Le problème réside pourtant dans l’av<strong>en</strong>ir.<br />
Pour beaucoup de par<strong>en</strong>ts, celui-ci<br />
pose deux questions : «que se passera-t-il<br />
une fois que nous ne serons plus là ?» et<br />
«comm<strong>en</strong>t arriver à <strong>en</strong> parler à notre <strong>en</strong>fant<br />
sans le mettre mal à l’aise ?» La plupart<br />
des par<strong>en</strong>ts ont pris consci<strong>en</strong>ce tardivem<strong>en</strong>t<br />
de l’importance de ces questions<br />
ou ont préféré les éluder. Pour les fratries,<br />
l’av<strong>en</strong>ir, est plus fréquemm<strong>en</strong>t organisé et<br />
planifié.<br />
Les par<strong>en</strong>ts r<strong>en</strong>contrés sont unanimem<strong>en</strong>t<br />
consci<strong>en</strong>ts des questions que pose<br />
la cohabitation au fur et à mesure de leur<br />
vieillissem<strong>en</strong>t. Ils sont lucides quant à la<br />
forte probabilité que leur <strong>en</strong>fant leur survive.<br />
Plusieurs par<strong>en</strong>ts évoqu<strong>en</strong>t toutefois<br />
leur souhait que leur <strong>en</strong>fant décède avant<br />
eux.<br />
Cinq attitudes possibles ont été id<strong>en</strong>tifiées:<br />
1) les <strong>famille</strong>s dans lesquelles la question<br />
de l’av<strong>en</strong>ir est tabou mais où chacun est<br />
relativem<strong>en</strong>t confiant <strong>en</strong> p<strong>en</strong>sant qu’une<br />
solution sera trouvée ;
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong> Printemps 2010<br />
2) les <strong>famille</strong>s qui ont pu aborder cette<br />
question et qui ont trouvé une solution,<br />
plus ou moins acceptée par la personne<br />
handicapée ;<br />
3) les <strong>famille</strong>s qui viv<strong>en</strong>t dans l’inquiétude<br />
d’une situation de crise, d’un placem<strong>en</strong>t<br />
dans l’urg<strong>en</strong>ce qui pourrait être mal vécu;<br />
4) les <strong>famille</strong>s à la recherche de solutions,<br />
qui t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>ts essais ;<br />
5) les <strong>famille</strong>s qui ne parvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas à se<br />
mettre d’accord sur la solution à <strong>en</strong>visager.<br />
Les solutions <strong>en</strong>visagées par les par<strong>en</strong>ts<br />
sont, d’une part, une admission dans un<br />
foyer ou un home et, d’autre part, la poursuite<br />
d’un vécu <strong>en</strong> <strong>famille</strong>, chez un frère<br />
ou une sœur. Pour quelques <strong>famille</strong>s, le<br />
recours à un service d’aide à domicile est<br />
prévu, fréquemm<strong>en</strong>t pour une période de<br />
dépannage ou de transition. Plusieurs par<strong>en</strong>ts<br />
ont insisté pour dire que la solution<br />
trouvée devrait, dans la mesure du possible,<br />
ne pas provoquer des changem<strong>en</strong>ts<br />
trop importants dans l’organisation de la<br />
vie quotidi<strong>en</strong>ne de leur <strong>en</strong>fant.<br />
Les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec les personnes handicapées<br />
mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce que celles-ci<br />
sont sereines face à l’av<strong>en</strong>ir. A plusieurs<br />
reprises elles ont laissé <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre qu’elles<br />
sont au clair sur le décès possible de leur<br />
par<strong>en</strong>t et le lieu où elles seront alors accueillies.<br />
> Comm<strong>en</strong>t s’organis<strong>en</strong>t les<br />
<strong>famille</strong>s ? Avec quelle aide ?<br />
Une majorité des <strong>famille</strong>s r<strong>en</strong>contrées assum<strong>en</strong>t<br />
un accompagnem<strong>en</strong>t à mi-temps,<br />
leur <strong>en</strong>fant adulte effectuant une activité<br />
ou un travail régulier ou ponctuel <strong>en</strong> atelier<br />
protégé ou d’occupation. En plus de<br />
la satisfaction qu’elles procur<strong>en</strong>t à chaque<br />
personne, ces activités sont considérées<br />
comme des facteurs favorisant l’épanouissem<strong>en</strong>t<br />
et l’équilibre des personnes et de<br />
la <strong>famille</strong> et permettant à celle-ci de se<br />
considérer dans la norme.<br />
Les par<strong>en</strong>ts sont par ailleurs unanimes à<br />
dire que les souti<strong>en</strong>s et solutions de répit<br />
sont la pierre angulaire de la cohabitation.<br />
Ceux-ci sont utiles autant à la personne<br />
handicapée, qui peut alors côtoyer<br />
d’autres personnes, qu’aux par<strong>en</strong>ts, qui<br />
dispos<strong>en</strong>t ainsi de temps pour eux ou<br />
pour leur couple. Ces souti<strong>en</strong>s sont indisp<strong>en</strong>sables<br />
aussi bi<strong>en</strong> dans la durée que de<br />
manière ponctuelle. Ils sont généralem<strong>en</strong>t<br />
offerts par l’<strong>en</strong>tourage immédiat.<br />
Le recours à des services professionnels<br />
spécialisés (aide à domicile par exemple)<br />
est rare ; les <strong>famille</strong>s ont t<strong>en</strong>dance à se débrouiller<br />
pour trouver des solutions et des<br />
ressources <strong>en</strong> cas de difficultés ou lorsque<br />
des besoins nouveaux apparaiss<strong>en</strong>t. Il a<br />
semblé que les <strong>famille</strong>s avai<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>dance<br />
à minimiser la charge de travail que représ<strong>en</strong>te<br />
l’accueil dans la durée d’une personne<br />
handicapée à domicile. Leurs propos<br />
laiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre qu’elles ont peu ou<br />
pas besoin d’aide, car la personne est relativem<strong>en</strong>t<br />
autonome et eux-mêmes sont<br />
<strong>en</strong> bonne santé.<br />
Au sujet de l’avancée <strong>en</strong> âge de la personne<br />
handicapée, quelques signes de<br />
difficultés sont évoqués (fatigue, oublis...),<br />
mais aussi le fait que celle-ci développe<br />
<strong>en</strong>core des capacités, notamm<strong>en</strong>t sur les<br />
plans relationnel et social. Plusieurs par<strong>en</strong>ts<br />
ont même dit que la vie avec leur<br />
<strong>en</strong>fant adulte dev<strong>en</strong>ait plus agréable avec<br />
les années, <strong>en</strong> raison de cette évolution<br />
des capacités qui permet de prévoir plus<br />
d’activités <strong>en</strong> commun (visites, vacances,<br />
sorties...). Par ailleurs, plusieurs mères ont<br />
indiqué que depuis que le père était à la<br />
retraite, le li<strong>en</strong> de celui-ci avec son <strong>en</strong>fant<br />
s’était r<strong>en</strong>forcé et qu’elles bénéficiai<strong>en</strong>t<br />
aussi d’une aide supplém<strong>en</strong>taire.<br />
> Comm<strong>en</strong>t les <strong>famille</strong>s voi<strong>en</strong>telles<br />
le monde institutionnel ?<br />
Les représ<strong>en</strong>tations des institutions accueillant<br />
des personnes handicapées pour<br />
y vivre ou y travailler sont doubles. D’une<br />
part, elles sont teintées de scepticisme et<br />
de méfiance. Des expéri<strong>en</strong>ces mitigées ou<br />
des essais de placem<strong>en</strong>ts non concluants<br />
sont rappelés, avec des images d’institutions<br />
collectives, insuffisamm<strong>en</strong>t att<strong>en</strong>tives<br />
aux besoins singuliers des personnes.<br />
D’autre part, elles s’appui<strong>en</strong>t sur de bonnes<br />
expéri<strong>en</strong>ces, sur le plan de la collaboration<br />
<strong>en</strong>tre par<strong>en</strong>ts et professionnels.<br />
Ainsi, la perception du milieu socioprofessionnel<br />
(ateliers protégés et occupation-<br />
insieme<br />
vaud<br />
9
insieme<br />
vaud<br />
10<br />
nels) est nettem<strong>en</strong>t plus positive que celle<br />
du milieu socioéducatif (foyers, homes...),<br />
considéré comme concurr<strong>en</strong>t de la cohabitation<br />
au domicile par<strong>en</strong>tal.<br />
> Des conseils d’anci<strong>en</strong>s aux<br />
jeunes par<strong>en</strong>ts<br />
Les par<strong>en</strong>ts vieillissants mett<strong>en</strong>t l’acc<strong>en</strong>t<br />
sur plusieurs points :<br />
– Chaque situation familiale est singulière<br />
et doit être considérée par tous comme<br />
telle. Il n’est dès lors pas possible de donner<br />
une réponse unique.<br />
– La r<strong>en</strong>contre et l’échange avec d’autres<br />
<strong>famille</strong>s ayant un <strong>en</strong>fant handicapé sont<br />
des opportunités appréciables pour trouver<br />
des informations, des aides, des idées.<br />
– Les par<strong>en</strong>ts appr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à dev<strong>en</strong>ir par<strong>en</strong>ts<br />
par l’expéri<strong>en</strong>ce.<br />
– La prise <strong>en</strong> compte du désir de la personne,<br />
quant au lieu où elle aimerait habiter,<br />
est prioritaire.<br />
– La question du placem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> institution<br />
doit si possible être abordée <strong>en</strong> <strong>famille</strong>,<br />
lorsque le fils ou la fille handicapée est <strong>en</strong>core<br />
jeune.<br />
> Les besoins exprimés par les<br />
par<strong>en</strong>ts, les souhaits<br />
Les par<strong>en</strong>ts souhait<strong>en</strong>t d’abord des structures<br />
d’accueil temporaires pour un accueil<br />
de court séjour avec une possibilité<br />
d’hébergem<strong>en</strong>t jour et nuit (accueil de dépannage,<br />
de répit, relais).<br />
Les services à domicile doiv<strong>en</strong>t offrir des<br />
prestations souples, allant d’une prise <strong>en</strong><br />
charge de soins et de besoins de base à<br />
une aide pour les assumer ; d’une offre<br />
d’accompagnem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant quelques<br />
heures à un remplacem<strong>en</strong>t des par<strong>en</strong>ts<br />
pour une certaine durée (service de relève).<br />
Les souti<strong>en</strong>s aux par<strong>en</strong>ts devrai<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre<br />
la forme d’aides, de conseils, de possibilités<br />
d’échanges sur l’éducation de leur <strong>en</strong>fant,<br />
sur les questions liées à leur av<strong>en</strong>ir.<br />
De la part des institutions, foyers ou homes,<br />
les par<strong>en</strong>ts att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t une individualisation<br />
des prises <strong>en</strong> charge, une diversification<br />
des offres d’accueil pour répondre<br />
aux besoins et att<strong>en</strong>tes de chaque personne.<br />
Le développem<strong>en</strong>t de structures<br />
de type familial est largem<strong>en</strong>t plébiscité.<br />
Les par<strong>en</strong>ts ont précisé que leurs propositions<br />
s’inspir<strong>en</strong>t des offres <strong>en</strong> faveur des<br />
<strong>en</strong>fants (par exemple dans le Canton de<br />
<strong>Vaud</strong>, Service éducatif itinérant, Phare...)<br />
ou des personnes âgées, mais qu’elles<br />
doiv<strong>en</strong>t s’<strong>en</strong> distinguer. Ils att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t du<br />
personnel qu’il soit formé et expérim<strong>en</strong>té<br />
pour accompagner des personnes adultes<br />
handicapées m<strong>en</strong>tales. Les offres (activités,<br />
cadre,...) doiv<strong>en</strong>t être adaptées et prévues<br />
pour des personnes adultes, n’ayant pas<br />
atteint l’âge de l’AVS. Les par<strong>en</strong>ts att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t<br />
de ces structures qu’elles les considèr<strong>en</strong>t<br />
comme de véritables part<strong>en</strong>aires.
<strong>Vivre</strong> <strong>en</strong> <strong>famille</strong> Printemps 2010<br />
En conclusion<br />
Le nombre exact de personnes vivant actuellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>famille</strong><br />
(soit avec leurs par<strong>en</strong>ts, leur fratrie ou un conjoint, voire de manière<br />
indép<strong>en</strong>dante) n’a pas pu être clairem<strong>en</strong>t établi <strong>en</strong> raison<br />
des limites des données recueillies.<br />
Cette recherche apporte toutefois une contribution originale permettant<br />
de mieux connaître la situation et les conditions d’exist<strong>en</strong>ce<br />
de cette population puisque les informations statistiques<br />
sur les personnes handicapées <strong>en</strong> Suisse sont rares.<br />
Les résultats obt<strong>en</strong>us mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce qu’il existe actuellem<strong>en</strong>t<br />
plusieurs configurations dans la manière de vivre avec une<br />
personne handicapée vieillissante.<br />
Ces configurations dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t de caractéristiques propres à la<br />
personne elle-même, <strong>en</strong> particulier son degré d’autonomie. Elles<br />
dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t des proches, de leur âge, de leur état de<br />
santé, de leur sexe et du type de li<strong>en</strong>s qu’elles <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t avec<br />
la personne handicapée. Enfin, ces configurations sont fortem<strong>en</strong>t<br />
corrélées avec les ressources à disposition dans l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t<br />
de la personne handicapée et de sa <strong>famille</strong>, autant sur le plan<br />
matériel qu’humain.<br />
Les analyses effectuées ont permis de prés<strong>en</strong>ter et de discuter<br />
différ<strong>en</strong>tes hypothèses sur l’avancée <strong>en</strong> âge, l’habitat et les caractéristiques<br />
de la population de recherche.<br />
Les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s approfondis ont permis de mieux compr<strong>en</strong>dre le<br />
quotidi<strong>en</strong> des <strong>famille</strong>s et leur manière d’<strong>en</strong>visager l’av<strong>en</strong>ir. L’originalité<br />
de la démarche a aussi été de donner la parole aux personnes<br />
handicapées elles-mêmes.<br />
* * *<br />
Pour terminer, deux aspects relevés par l’équipe de recherche<br />
nous paraiss<strong>en</strong>t intéressants à souligner.<br />
La première concerne les propos t<strong>en</strong>us spontaném<strong>en</strong>t lors des<br />
<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s, <strong>en</strong> marge du questionnaire. Les par<strong>en</strong>ts évoqu<strong>en</strong>t<br />
alors l’annonce ou la découverte du handicap. Les fratries revi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />
sur leur vécu d’<strong>en</strong>fant avec leur <strong>famille</strong>. Les personnes handicapées<br />
parl<strong>en</strong>t de leur vie quotidi<strong>en</strong>ne actuelle, de leur réseau<br />
de connaissances.<br />
La deuxième concerne l’att<strong>en</strong>te des personnes interrogées sur les<br />
suites de cette recherche. Elles souhait<strong>en</strong>t des informations mais<br />
att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t aussi des réponses concrètes à la question : «qu’advi<strong>en</strong>dra-t-il<br />
de mon fils, de ma fille, de mon frère, de ma sœur,<br />
lorsque je ne pourrai plus m’<strong>en</strong> occuper, ou lorsque je ne serai<br />
plus là ?»<br />
En sout<strong>en</strong>ant cette recherche, insieme<strong>Vaud</strong> espère avoir répondu<br />
à l’att<strong>en</strong>te de ses membres.<br />
insieme<br />
vaud<br />
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insieme<br />
vaud