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Madame Guttierez de Estrada - societe d'art, histoire et archeologie ...

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<strong>Madame</strong> Gutierrez <strong>de</strong> <strong>Estrada</strong><br />

C'était la p<strong>et</strong>ite hlle du général SAN<br />

MARTIN. Elle s'appelait Josepha BAL-<br />

CARCE, nommée souvent Pépa ; elle<br />

naquit en 1836 dans la propriété <strong>de</strong> San<br />

Martin à Evry (Grand-Bourg). Elle<br />

reçut une éducation très soignée <strong>de</strong> sa<br />

mère ; celle-ci lui transmit simplement<br />

les principes que lui avait inculqués son<br />

père, à savoir l'ouverture vers son prochain,<br />

la charité du coeur, I'intégrité, le<br />

don <strong>de</strong> soi pour les causes justes, la<br />

reconnaissance, <strong>et</strong>c ... <strong>et</strong> un idéal chrétien<br />

marqué d'une gran<strong>de</strong> tolérance.<br />

Son père, Mariano BALCARCE, un<br />

diplomate argentin, était souvent<br />

absent, occupé en République<br />

Argentine pour les affaires <strong>de</strong> son pays<br />

ou les siennes propres.<br />

Elle avait douze ans quand toute la<br />

famille quitta la région parisienne : les<br />

troubles <strong>de</strong> la révolution <strong>de</strong> 1848 commençaient<br />

<strong>et</strong> San Martin avait horreur<br />

<strong>de</strong>s guerres civiles. On se fixa à<br />

Boulogne où le calme régnait. Après le<br />

décès du "Héros Argentin", toute la<br />

famille regagna Paris (1850).<br />

Pépa épousa en 1861 un diplomate<br />

mexicain Femando CUTIERREZ <strong>de</strong><br />

ESTRADA. Le couple habitait Paris en<br />

hiver <strong>et</strong> Brunoy en été au P<strong>et</strong>it-Château,<br />

propriété <strong>de</strong>s parents BALCARCE<br />

<strong>de</strong>puis 1852.<br />

Le père <strong>de</strong> Fernando GUTIERREZ participa<br />

en 1863 aux négociations avec<br />

Ma"rimilien d'Autriche:il [ur le prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la délégation venue offrir au<br />

prince, le royaume du Mexique.<br />

A la mon <strong>de</strong> Fernando BALCARCE,<br />

Josepha hédta <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Brunoy<br />

(le P<strong>et</strong>it-Château). où elle se fixa <strong>de</strong>finitivement<br />

lorsque son mari décéda en<br />

1904. Dès lors, elle se consacra<br />

entièrement aux humbles <strong>de</strong><br />

Brunoy, suivant en cela les principes<br />

<strong>de</strong> San Martin.<br />

La propriété du P<strong>et</strong>it-Château,<br />

ancien domaine du Comte <strong>de</strong><br />

Provence était très soignée.<br />

Les jardi nier. entr<strong>et</strong>enaient les<br />

jardins avec beaucoup <strong>de</strong><br />

conscience ; les photographies<br />

<strong>et</strong> les cartes postales <strong>de</strong><br />

l'époque nous dévoilent leurs<br />

richesses. Ici "l'411ée <strong>de</strong> Dante"<br />

qui serpente parmi <strong>de</strong> grands<br />

arbres, "1'A1lée Française" avec<br />

d'un côté une pelouse sur toute la<br />

longueur <strong>et</strong> <strong>de</strong> I'autre <strong>de</strong>s rosiers <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s vases <strong>de</strong> marbres sculptés ; un<br />

"Jardin Français" aux bordures <strong>de</strong> burs<br />

er le pelil "Temple <strong>de</strong> Marie-<br />

Antoin<strong>et</strong>te" aux frêles colonnes. Au<br />

milieu <strong>de</strong> tout cela, le grand bassin rond<br />

<strong>et</strong> en bas I'ancien canal, avec sa jolie<br />

passerelle.<br />

<strong>Madame</strong> GUTIERREZ <strong>de</strong> ESTRADA<br />

eut tout <strong>de</strong> suite une réputatiol <strong>de</strong><br />

bonte. avec c<strong>et</strong>te simplicité <strong>de</strong> coeur qui<br />

la faisait se m<strong>et</strong>tre au niveau <strong>de</strong>s plus<br />

humbles tout en ga-rdant une gran<strong>de</strong><br />

dignité. Personne ne sonnait en vain à la<br />

porte du château, pour obtenir un<br />

secours. un conseil. Chaque semarne.<br />

elle distribuait <strong>de</strong>s "pot-au-feu" à <strong>de</strong>s<br />

familles indigentes ; elle couvrait les<br />

frais d'hospitalisation <strong>de</strong> ses protégés<br />

quand c'était nécessaire ; elle<br />

tuloyait tout le mon<strong>de</strong>, ca qui la<br />

rendait plus proche <strong>de</strong> ses concitoyens<br />

<strong>de</strong>s Bosserons. En 1904,<br />

elle avait conçu avec son mari, le<br />

proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> constuire une londation<br />

qui recueillerait les vieillards sans<br />

famille au déclin <strong>de</strong> leur existence.<br />

La fondation était déjà bien<br />

avancée lorsque Fernando<br />

GUTIERREZ décéda. Très pieuse,<br />

elle adjoignit au bâtiment une<br />

chapelle pour laquelle elle obtint<br />

I'autorisation diocésaine.<br />

r <strong>Madame</strong> Gutierrez L'établissement fut inauguré le 1".<br />

Colleclion M. HUDELO décembre 1905. L'administration<br />

en<br />

fut<br />

confiée à la<br />

"Congrégation <strong>de</strong>s Filles <strong>de</strong> la Sagesse"<br />

- religieuses à costume <strong>de</strong> bure grise. Il<br />

s'agissait non seulement d'accueillir <strong>de</strong>s<br />

gens déshérités <strong>et</strong> esseulés, mais <strong>de</strong> leur<br />

donner, s'ils le désiraient, l'occasion <strong>de</strong><br />

faire quelque chose à leur portée,<br />

chaque matin, dans les grands jardins<br />

potagers qui entourent les bâtiments,<br />

C'était un soutien moral ; ils pouvaient<br />

à nouveau se sentir utiles à la société.<br />

Pour les dames. on leur offrair la possibilité<br />

<strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s travaux ménagers à la<br />

cuisine, à la lingerie ...<br />

Voici le programme jourralier habituel<br />

<strong>de</strong> la maison :<br />

. 6 heurcs - Réveil - Toil<strong>et</strong>te - Messe<br />

. Puis, P<strong>et</strong>it déjeuner dans les chambres<br />

. Matinée - Menus travaux au jardin, à<br />

la cuisine<br />

. 12 heures - Déjeuner comrnun dans la<br />

salle à manger<br />

. Après-midi - Repos - Visites -<br />

Promena<strong>de</strong>s - P<strong>et</strong>its travaux<br />

. 16 heures - Goûter<br />

. Le soir - Dîner (Salle à manger ou<br />

dans les chambres)<br />

En 1914, à la déclaration <strong>de</strong> la guerre,<br />

Mme GUTIERREZ pensa tout <strong>de</strong> suile<br />

aux futurs blessés <strong>et</strong> spontanément mit<br />

I'hospice à la disposition du service <strong>de</strong><br />

santé <strong>de</strong> I'armée. C'est ainsi que dès le<br />

^ Le P<strong>et</strong>it Château au temos <strong>de</strong> <strong>Madame</strong> Gutierrez 28


olf g-<br />

l6 octobre 1914, "1'Etablissement<br />

CUTIERREZ' <strong>de</strong>vint "l Hôpital auri<br />

liaire N' 89" riche <strong>de</strong> 30 à 60 lits. Des<br />

équipements a 1a pointe du progrès.<br />

notamment la .alle d'opération fqui<br />

fonctionna jusqu'en 1950), furent<br />

offerts par la Châtelaine <strong>de</strong> Brunoy. je<br />

voudrais faire remarquer que I'Hôpital<br />

auxiliaire No 89 ouvrit ses portes dès le<br />

16 octobre, c'est-à-dire seulement 74<br />

jours après la déclâration <strong>de</strong> guerre <strong>de</strong><br />

I'Allemagne.<br />

C<strong>et</strong> hôpital servit au départ, <strong>de</strong> centre<br />

<strong>de</strong> tri <strong>de</strong>s blessés qui arrivaient directement<br />

du front à Brunoy, sommairement<br />

pansés. Ils étaient examinés ; les cas les<br />

plus urgents étaient haités immédiate<br />

ment : les autres. aprèr <strong>de</strong>. roins provisoires<br />

étaient dirigés sur d'autres hôpitaux<br />

en province.<br />

Lorsque l'on put craindre en mai l9l8<br />

que le' troupes ennemier puissent ariver<br />

aux portes <strong>de</strong> Paris (elles étaient au<strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong> Château-Thiery), les autorités<br />

militaires offrirent à la maîtresse <strong>de</strong>s<br />

Iieur <strong>de</strong> se replier rers Iarriêre. Mme<br />

GUTIERREZ refusa <strong>de</strong> s'en aller <strong>et</strong><br />

continua son travail. Certaines photographies<br />

ou carte\ postale\ conservées<br />

soigneusement par M. ALTOUNIAN<br />

nous montrent la vie dans l'établissement<br />

:<br />

.Ici, <strong>de</strong>s soldats viennent goûter au<br />

soleil dans la cour <strong>de</strong>vant le bâtiment :<br />

bras en écharpes, gros pansements,<br />

béquilles...<br />

.lâ. un "groupe". comme on en laisait<br />

en ce tempslà, pose <strong>de</strong>vant I'opérateur :<br />

blessés, presque tous médaillés, mélangés<br />

avec <strong>de</strong>s infirmiers à la blouse<br />

^<br />

San Martin <strong>et</strong> ses <strong>de</strong>ux p<strong>et</strong>ites filles<br />

Place Grand Bourg à Buenos Aires<br />

Plnto Jacques CAUCHET<br />

blanche, ou avec <strong>de</strong>s brancardiers au<br />

brassard frappé <strong>de</strong> la Croix Rouge ; là<br />

encore. une céremonie oùr Pepa. en noir.<br />

écoute le discours d'un personnage<br />

barbu, en présence <strong>de</strong> nombreux offrciers<br />

supérieÙrs : c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière photo<br />

pounait bien être celle <strong>de</strong> la remise <strong>de</strong><br />

la Croix <strong>de</strong> la Légion d'Honneur à la<br />

fondatrice <strong>de</strong> l'hôpital en 1918, décoration<br />

qui fut pour elle une marque <strong>de</strong><br />

remerciement, Ia reconnaissance <strong>de</strong> ses<br />

bienfaits, <strong>de</strong> son travail, <strong>de</strong> sa générosrté<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> son désintéressemeni. Elle la<br />

pona déiormai\ avec fiené à l'occcsion<br />

<strong>de</strong>s cérémonies auxquelles elle <strong>de</strong>vait<br />

assister. C<strong>et</strong>te reconnaissance honore<br />

aussi ceux qui lui décernèrent.<br />

Durant la guerre. malgré l'hôpital qui<br />

requierait tous ses soins, Mme<br />

GUTIERREZ ne cessa pas d'accueillir<br />

ses vieillards <strong>et</strong> continua son oeuvre <strong>de</strong><br />

bienfaisance. Après le dépafi <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers<br />

blessés, en début 1919, l'hosprce<br />

lut à nouveau consacré uniquement à<br />

recueillir les rerailé\ \ans ressource\ el<br />

sans famille. La fondation existe toujours<br />

aussi vaillante, dirigée par la<br />

"Société Philantropique" à laquelle la<br />

Châtelaine a légué les moyens <strong>de</strong> continuer<br />

son oeuvre. C<strong>et</strong>te société, pour<br />

rénover les bâtiments <strong>et</strong> faire les ffansformations<br />

nécessaires afi n d'aménager<br />

les intérieurs, dut passer un accord avec<br />

la "Caisse In terprofession ne I le <strong>de</strong> prévoyance<br />

<strong>de</strong>s Cadres" <strong>et</strong> laisser quelques<br />

lits à sa disposition.<br />

Quant à Mme GUTIERREZ, elle pouvait<br />

être satisfaite <strong>de</strong> ses efforts <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa<br />

tâche accomplie. Elle décéda en 1924,<br />

regr<strong>et</strong>tée par toute une populatlon<br />

humble du quanier <strong>de</strong>s Bossseron\ qui<br />

avait été à même <strong>de</strong> juger son attitu<strong>de</strong><br />

généreuse.<br />

En reconnaissance <strong>de</strong> ses bienfaits, la<br />

ville <strong>de</strong> Brunoy changea le nom <strong>de</strong> la<br />

n-re du Pont en "Rue CUTTERREZ <strong>de</strong><br />

ESTRADA'. On ne suit comment,<br />

insouciance peut-être, mais un jour, la<br />

rue du Pont reprit son ancien nom.<br />

Nous souhaitons qu'aboutisse le proj<strong>et</strong><br />

actuel d'honorer à Brunoy, Mme<br />

GUTIERREZ <strong>de</strong> ESTRADA. Son<br />

séjour dans notre cité a été un honneur<br />

pour la ville. Elle a mérité qu'on ne I'oublie<br />

pas.<br />

Jacques GAUCHET<br />

Société d'Art, d' Histoire<br />

<strong>et</strong> d'Arch'éologie du Val d'Yeftes<br />

Tombeau <strong>de</strong> San<br />

Martin à Brunoy<br />

<strong>de</strong> l86l<br />

à 1880<br />

Phota .lacques GAUCHET

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