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Lecture de Stridences d'un insecte parmi les Saints

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LA PUISSANCE ET LA GLOIRE : DIEU DOMESTIQUE.<br />

Essai sur la notion <strong>de</strong> détournement en matière religieuse,<br />

<strong>Lecture</strong> <strong>de</strong> Stri<strong>de</strong>nces d’un <strong>insecte</strong> <strong>parmi</strong> <strong>les</strong> <strong>Saints</strong>, du pasteur Joël Valleray<br />

Edition revue. Février 2004.<br />

Gérard Gabriel MARION<br />

Professeur d’histoire du droit<br />

Faculté <strong>de</strong> droit et d’économie <strong>de</strong> Martinique<br />

Dieu ne fait ni ce qu'on attend <strong>de</strong> lui, ni comme on le veut. Le constat est amer. Serait-il inutile <br />

Heureusement, il y a une Eglise, ou plutôt <strong>de</strong>s Eglises : la pensée unique est aussi nocive en théologie qu'en<br />

politique, en philosophie qu’en économie. Il faut admettre que le pluralisme en matière religieuse a du bon : plus<br />

on a le choix, plus on est objectif, d'autant qu'en France métropolitaine <strong>de</strong>puis 1905, ou 1911 en Martinique, il n'y a<br />

plus <strong>de</strong> monopole d'Etat dans ce domaine. Insatisfait ici, content ailleurs, ce qui crée <strong>les</strong> croyants pèlerins<br />

gyrovagues : autant d'options religieuses différentes, autant <strong>de</strong> systèmes, autant <strong>de</strong> clergé, autant <strong>de</strong> haines, autant<br />

<strong>de</strong> jours à sanctifier, faute <strong>de</strong> pouvoir modifier le calendrier en fonction <strong>de</strong>s pérégrinations religieuses <strong>de</strong> chacun 1 .<br />

Toutefois, il y a <strong>de</strong>s croyants à qui la stabulation libre répugne, pour <strong>de</strong> nombreuses raisons. Ils sont<br />

stab<strong>les</strong>, ils s'accrochent à leurs convictions, ils en ont : c'est leur enfance, leurs normes, leurs repères, leur<br />

colonne vertébrale, le fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> leur conduite morale, ils suscitent un immense respect : sincères, ils essaient<br />

<strong>de</strong> pratiquer <strong>de</strong>s principes, ils sont honnêtes dans leurs relations avec autrui, y compris avec leur conjoint. Leur<br />

bonne foi est inattaquable, surtout quand ils autorisent autrui à avoir une autre opinion qu'eux, fût-elle religieuse.<br />

Celui qui est honnête dans ses croyances, envers son système métaphysique, est honnête dans tous <strong>les</strong> niveaux <strong>de</strong><br />

sa vie : à s'en faire <strong>de</strong>s amis.<br />

Il faut nuancer cette situation : pour aller à Dieu - faut-il préférer <strong>les</strong> Dieux uniques la question se posera<br />

bientôt - il est forcément nécessaire <strong>de</strong> passer par <strong>de</strong>s intermédiaires. La relation <strong>de</strong> l'homme normal avec son Dieu<br />

est sans doute un idéal, qui, dans <strong>les</strong> faits, ruinerait <strong>les</strong> professionnels <strong>de</strong> la foi, ils perdraient toute influence sur<br />

<strong>les</strong> âmes, ils seraient dépouillés <strong>de</strong> la gloire et <strong>de</strong> l’auréole <strong>de</strong> sainteté. Je place une distance majeure entre <strong>les</strong><br />

croyants, et leur clergé, toutes tendances confondues, car c'est bien du clergé qu'il est ici question.<br />

1<br />

Dans l'histoire <strong>de</strong> France, il y a bien eu une réforme fondamentale. Avec la première Assemblée nationale<br />

constituante, la nouvelle division du pays en départements et <strong>les</strong> organes d'administration afférents sont une trouvaille<br />

géniale, et continuent encore <strong>de</strong> fonctionner aujourd'hui. La Convention va plus loin avec la prétention <strong>de</strong> faire un homme<br />

neuf en créant le calendrier révolutionnaire, bouleversant totalement le rythme <strong>de</strong> la vie. Il est aboli sans regret aucun le 10<br />

nivôse an XIV, 31 décembre 1805. On avait cru cette réforme définitive : on a fait preuve <strong>de</strong> prétention, on a voulu nier<br />

l’histoire, celle-là même qui i<strong>de</strong>ntifie l’individu dans une culture donnée, dans une lignée historique qui le transcen<strong>de</strong><br />

indépendamment <strong>de</strong> sa volonté. Vouloir changer la fonction <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> la semaine, voilà qui paraît bien prétentieux. La<br />

leçon n'a pas été retenue : il faut reconnaître avec courage que l'expérience ne se transmet pas.<br />

Les générations qui se succè<strong>de</strong>nt à un endroit donné transmettent une manière d'être, <strong>de</strong> penser, <strong>de</strong> se comporter qui<br />

se rattachent inévitablement à <strong>de</strong>s valeurs communes, qui enracinent <strong>les</strong> individus dans un terreau culturel et leur donnent <strong>de</strong>s<br />

références mora<strong>les</strong>. Ceux qui n'ont pas cette assise culturelle forment le gros <strong>de</strong>s sauvageons, pour <strong>les</strong>quels <strong>les</strong> actes<br />

d'incivilité n'ont aucune caractère d'anormalité : ils n'ont pas appris la norme, la société, la place <strong>de</strong> chacun, <strong>les</strong> règ<strong>les</strong>, <strong>les</strong><br />

interdits qui fon<strong>de</strong>nt la civilité, l’urbanité, la politesse ; ils ne sont pas normés. Ils sont a-normés : cf. supra, note 92. § 3.<br />

Les essais mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> vouloir changer la fonction <strong>de</strong>s jours dans la semaine ne sont pas sans poser un problème à<br />

la société. On peut y voir évi<strong>de</strong>mment un phénomène sectaire (sequor, suivre, secare, couper, d'où section, secteur,<br />

sécateur…) dissociant <strong>les</strong> individus <strong>d'un</strong>e société qui a adopté le dimanche comme férié hebdomadaire. Une minorité qui veut<br />

généraliser son férié du samedi à la totalité qui ne partage pas son option religieuse C'est interdire la constitution <strong>d'un</strong>e<br />

majorité nécessaire à toute société, à toute vie politique. C'est imposer son particularisme à autrui, c’est vouloir soumettre le<br />

général au particulier, c’est aller à l’encontre du principe même <strong>de</strong> liberté, c’est refuser <strong>de</strong> comprendre le fonctionnement<br />

d’une société qui a nécessairement besoin <strong>de</strong> dégager <strong>de</strong>s règ<strong>les</strong> généra<strong>les</strong> nécessaires avant <strong>de</strong> privilégier <strong>de</strong>s groupements<br />

minoritaires, voire ultra-minoritaires. La porte est ouverte à différentes formes d'intolérance : il est bien connu que ceux qui<br />

exigent la tolérance pour eux sont souvent d’une insigne intolérance pour autrui.<br />

Dans le fond, personne n'est dupe. Tout individu sait que la sanctification du dimanche, et plus tard son<br />

institutionnalisation comme férié, sont le résultat <strong>d'un</strong>e volonté politique purement conventionnelle, même si <strong>les</strong> chrétiens <strong>de</strong>s<br />

débuts la relèvent explicitement, imposée dans tout l'empire romain au IV e siècle. Vouloir revenir au samedi, le sabbat juif,<br />

est simplement biffer seize sièc<strong>les</strong> pleins d'histoire, c'est réformer l'évolution <strong>de</strong> l'Europe durant cette époque et, partant, du<br />

mon<strong>de</strong>, c'est se démarquer <strong>de</strong> la société civile <strong>de</strong>puis cette date. Colossale prétention, ignorance crasse <strong>de</strong>s mécanismes<br />

culturels et psychologiques, ou seulement grave inconscience Le révisionnisme ne fonctionne pas autrement.


La puissance et la gloire : Dieu domestiqué 2<br />

En effet, dans la religion, le problème n'est pas Dieu. Toute idée blasphématoire mise à part, Dieu est<br />

une notion qui transcen<strong>de</strong> <strong>les</strong> cultures. Si problème il y a, il est constitué hôtes intermédiaires, ceux qu’un<br />

théologien qualifie <strong>de</strong> fonctionnaires <strong>de</strong> Dieu 2 . Ils ont accaparé Dieu à leur profit, ils en ont fait leur chose. Dieu<br />

a été domestiqué par le clergé. Dieu est <strong>de</strong>venu leur gagne-pain et le fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> leur pouvoir. Dieu a quitté<br />

l’au-<strong>de</strong>là pour être ravalé au rang d’alibi du système, <strong>de</strong> cause, <strong>de</strong> prétexte.<br />

Soit le petit ouvrage <strong>d'un</strong> pasteur, à la mo<strong>de</strong> américaine 3 . La leçon du pluralisme est à retenir : il ne<br />

coûte rien <strong>de</strong> lire. C'est ainsi qu'on s'instruit, qu'on forge son jugement, qu'on réfléchit. Il est vrai que la réflexion<br />

use le cerveau, dit un adage populaire : celui <strong>de</strong> nombre <strong>de</strong> nos contemporains semble encore dans son<br />

emballage d'origine. Il y a quelques créolismes sympathiques qui dénoncent gentiment l'origine géographique <strong>de</strong><br />

son auteur. Faites un pari pascalien et allez-y.<br />

Les premiers mots <strong>de</strong> cet ouvrage évoquent une parenté possible avec <strong>les</strong> Versets sataniques 4 . Au<br />

menu, il y a <strong>de</strong> la fatwa dans l’air :<br />

Pieux mensonge 5 : humiliations mesquines subies par l'auteur alors étudiant et administrées par un<br />

chef hiérarchique religieux, lui coupant la bourse en plein cycle d'étu<strong>de</strong>s religieuses. Le pasteur<br />

intéressé est en train <strong>de</strong> découvrir qu'il fait partie <strong>d'un</strong> univers où règne le pouvoir, et que ce pouvoir<br />

s'exerce inconditionnellement. Le mensonge est une arme précieuse et passe-partout : faire croire que,<br />

pour mieux tromper.<br />

Dans la vigne du Seigneur 6 . Authentique racisme au séminaire américain. Une affaire <strong>de</strong> comptes.<br />

Foi et culture 7 . Mention très intéressante <strong>de</strong> bruits, <strong>de</strong>s milans, rapportés et repris comme vérités<br />

premières. Toujours rapportés <strong>de</strong> façon anonymes, ils témoignent <strong>de</strong> l'importance qu'on attribue à ces<br />

ragots pour nuire à un individu.<br />

2<br />

Il n'est pas inutile <strong>de</strong> réfléchir sur ce qu’on appelle la vocation, tellement mystifiée dans la religion catholique, que<br />

<strong>les</strong> protestants n'ignorent pas. Drewermann dit du clergé catholique : Qui sont ces hommes et ces femmes qui veulent tout à la<br />

fois une <strong>de</strong>stinée hors du commun et la sécurité <strong>d'un</strong> emploi bien réglé, et comment peuvent-ils concilier <strong>de</strong>s objectifs si<br />

opposés Op. cit., p. 60.<br />

3<br />

Valleray (Joël), Stri<strong>de</strong>nces d’un <strong>insecte</strong> <strong>parmi</strong> <strong>les</strong> saints. Les références indiquées en notes simplement par la page<br />

sont extraites <strong>de</strong> cet ouvrage référencé en bibliographie. Les Américains, avec le côté extraverti qui peut <strong>les</strong> caractériser,<br />

éprouvent le besoin <strong>de</strong> prendre le mon<strong>de</strong> à témoin et ont souvent <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s exhibitionnistes, ils transforment <strong>les</strong> lecteurs<br />

en voyeurs. Les amateurs <strong>de</strong> Sélection du Rea<strong>de</strong>r Digest par exemple en sont familiers. Ce mo<strong>de</strong> opératoire est peu connu <strong>de</strong>s<br />

vieux pays européens, surtout nordiques, habitués qu’ils sont à davantage d’intériorisation, <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong> leurs sentiments, <strong>de</strong><br />

pu<strong>de</strong>ur. Une différence culturelle qui a peut-être pour base le vieux fonds judéo-chrétien.<br />

Mutatis mutandis, on peut recouper ces propos avec ceux, riches, <strong>de</strong>nses, cultivés <strong>d'un</strong> théologien catholique<br />

allemand, sans doute iconoclaste : Drewermann (Eugen), Fonctionnaires <strong>de</strong> Dieu. Il faut changer fort peu <strong>de</strong> choses pour<br />

adapter son point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> psychanalyste au clergé protestant. Cet auteur catholique connaît le protestantisme, dans lequel il<br />

puise nombre <strong>de</strong> références. L'emploi du nous possessif, surtout dans la secon<strong>de</strong> partie, montre que Drewermann revendique<br />

son appartenance à l'Eglise catholique.<br />

Ces ouvrages peuvent utilement être complétés par celui, au titre lour<strong>de</strong>ment évocateur, <strong>d'un</strong> psychiatre chrétien :<br />

Solignac (Pierre), La névrose chrétienne.<br />

On le verra, le clergé catholique, et sans doute le protestant, sont appelés institutionnellement à faire une césure<br />

entre leur personne et la charge ecclésiale qu'ils assument. C'est le combat <strong>de</strong> David contre Goliath. En définissant le ministre<br />

<strong>d'un</strong>e religion essentiellement par sa fonction, comme un "fonctionnaire" qui administre le "divin", non pas <strong>de</strong> par sa<br />

personne, mais uniquement <strong>de</strong> par la mission objective qui lui vient <strong>de</strong> l'Eglise, on obtient une forme religieuse qui élimine<br />

systématiquement <strong>les</strong> éléments prophétiques, visionnaires et extatiques au profit <strong>de</strong>s éléments bureaucratiques, administratifs<br />

et conservateurs : Drewermann, Op. cit., p. 59. L’idée même d’institution n’implique-t-elle pas celle d’accaparement du<br />

message Débat intense.<br />

4<br />

L'auteur <strong>de</strong> ces lignes ne prétend aucunement s'immiscer dans un débat théologique, <strong>de</strong> quelque nature que ce soit :<br />

il n'a ni la compétence intellectuelle, ni <strong>les</strong> outils conceptuels nécessaires, ni le goût. Mais il n'est pas indifférent aux débats<br />

sur Dieu, produits inévitab<strong>les</strong> <strong>de</strong>s turbulences <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> la zone dépressionnaire liée à la théologie officielle :<br />

Drewermann, Op. cit., p. 155. Par ailleurs, ces Stridulences sont publiées, ce qui veut dire mises à la portée du public, vous,<br />

moi, <strong>les</strong> autres, sans distinction <strong>de</strong> race ou <strong>de</strong> religion, pour peu qu’il s’intéresse au sujet.<br />

5<br />

6<br />

7<br />

Il n’y a aucune intention b<strong>les</strong>sante dans ces propos, mais une réflexion sur <strong>les</strong> mécanismes religieux.<br />

P. 7.<br />

P. 13.<br />

P. 18.


La puissance et la gloire : Dieu domestiqué 3<br />

Pasteur fait du porno 8 . Il faut réviser à la baisse <strong>les</strong> manuels scolaires <strong>de</strong> biologie. Comment <strong>de</strong>s<br />

ignares interprètent mal ce qu'ils ne connaissent pas.<br />

Silence. On tue et tourne la page 9 . Immensément triste, l'histoire <strong>de</strong> cette jeune directrice d'école <strong>de</strong> la<br />

Dénomination, dont le système tue le bébé…<br />

Mieux vaut être bête et discipliné 10 . En matière <strong>de</strong> personne humaine, ce n'est pas comme <strong>les</strong><br />

meub<strong>les</strong> : possession ne vaut pas titre.<br />

Parler créole au temple est une offense à l'Eternel 11 . On sait que l'anglais est le latin <strong>de</strong>s églises <strong>de</strong> la<br />

Dénomination. Son Dieu est-il donc aussi peu polyglotte que le Dieu catholique avant le concile<br />

Vatican II Le créole y est donc malvenu 12 .<br />

Canal non sanctifié 13 . Un homme d'affaires peut s'improviser prédicateur. Avec un succès pour le<br />

moins mitigé.<br />

Interdit <strong>de</strong> sortie 14 . Ou <strong>de</strong> l'interdiction d'être mala<strong>de</strong>.<br />

Lettres ouvertes 15 . Egalité <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> Dieu, soit, mais certains sont plus égaux que d'autres.<br />

Sit-in 16 . Encore une affaire d’argent : in<strong>de</strong>mnités ou pas in<strong>de</strong>mnités <br />

Y a-t-il <strong>de</strong>s francs-maçons chez nous 17 Interdit d'être mala<strong>de</strong>, suite.<br />

La bergerie livrée aux loups 18 . Il s'agit <strong>de</strong> créer un groupe <strong>de</strong> Guerriers <strong>de</strong> la Prière. Mais comme <strong>de</strong>s<br />

prédicateurs ont <strong>de</strong>s révélations spécia<strong>les</strong> <strong>de</strong> Dieu soi-même, on tend le dos et on peut s'attendre au pire.<br />

Le pire est un pasteur, le missionnaire qui sait tout, inspiré évi<strong>de</strong>mment par le Saint-Esprit, dont la<br />

culture religieuse est semble-t-il polluée par nombre <strong>de</strong> pratiques non chrétiennes, et Philippin 19 .<br />

La traque au marron continue 20 . La nomination contestée <strong>d'un</strong> Prési<strong>de</strong>nt peut faire croire, en haut<br />

lieu, qu'il faut envisager la rétrogradation (<strong>de</strong> la Martinique) au rang <strong>de</strong> mission 21 .<br />

L'affaire Scipion 22 . Un limogeage particulièrement cavalier, annoncé sur un parking. L'agent causal <br />

L'ancien aumônier <strong>de</strong>venu prési<strong>de</strong>nt : le salaud a osé 23 . La victime : un cadre <strong>d'un</strong>e école du Lamentin.<br />

Le fait : un déficit d'éthique chrétienne 24 .<br />

8<br />

9<br />

10<br />

11<br />

12<br />

P. 25.<br />

P. 28.<br />

P. 37.<br />

P. 49.<br />

Il est à noter que <strong>les</strong> prières musulmanes ne peuvent être faites qu’en arabe, même si le croyant ne le comprend pas.<br />

Témoin, la remarque très aimable <strong>d'un</strong> étudiant djiboutien à l'auteur <strong>de</strong> ces lignes : Tu n'as que quelques mots à apprendre. Et<br />

ça suffit, ça marche. Pour lui, l'arabe était une <strong>de</strong> ses langues maternel<strong>les</strong>, et ne présentait que peu <strong>de</strong> difficultés. C'est ai<strong>de</strong>r à<br />

démontrer que l'extension <strong>d'un</strong>e religion passe nécessairement par celle <strong>de</strong> la culture dont elle est issue.<br />

13<br />

14<br />

15<br />

16<br />

17<br />

18<br />

19<br />

20<br />

21<br />

22<br />

23<br />

24<br />

P. 53.<br />

P. 58<br />

P. 67<br />

P. 75.<br />

P. 85.<br />

P. 90.<br />

P. 95.<br />

P. 98.<br />

P. 99.<br />

P. 106.<br />

P. 107.<br />

P. 156.


La puissance et la gloire : Dieu domestiqué 4<br />

Le chant <strong>de</strong> l'<strong>insecte</strong> 25 . Une forme d'épilogue. Honnête. Une réflexion sur ce qui est, et ce qui <strong>de</strong>vrait<br />

être. La longue lettre adressée au Premier Docteur est une véritable confession <strong>de</strong> foi : <strong>les</strong> croyants<br />

peuvent y trouver une légitime fierté 26 .<br />

Une grave question, à la lecture : la Dénomination n'est-elle donc qu'un système fondamentaliste<br />

comme tant d’autres Cet ouvrage impose quelques réflexions diagona<strong>les</strong>, que l'on peut articuler autour <strong>de</strong>s<br />

points suivants : une structure lour<strong>de</strong> trahit la recherche <strong>de</strong> la puissance (I). La négation <strong>de</strong> la liberté par<br />

l’asservissement <strong>de</strong>s individus, montre que la soumission à Dieu passe obligatoirement par celle <strong>de</strong> ses<br />

représentants (II).<br />

I. LES MOYENS : LE POUVOIR ET LES MOYENS DU POUVOIR<br />

a- La hiérarchie : Dieu visible<br />

b- Dieu et l’argent<br />

II. LA FIN : LA SOUMISSION A DIEU ET A SES REPRESENTANTS<br />

a- Maîtres et esclaves<br />

b- la conversion, ou comment asservir<br />

En guise <strong>de</strong> conclusion.<br />

C'est tout à l'honneur <strong>de</strong> Joël Valleray, alias le criquet, d'avoir eu le courage, et il en faut, avec <strong>de</strong>s mots<br />

somme toute anodins, <strong>de</strong> révéler à la face du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> tel<strong>les</strong> ignominies, aggravées par le fait que leurs auteurs se<br />

prévalent <strong>de</strong> la vérité divine 27 . Coup <strong>de</strong> tonnerre dans un ciel serein, l'homme par qui le scandale arrive. La bible,<br />

livre théoriquement saint pour <strong>les</strong> chrétiens, ne serait-elle donc rien d'autre qu'un autre Petit-livre-rouge un<br />

catalogue <strong>de</strong> recettes une auberge espagnole d'où l'on tire tout et son contraire un mobile, une cause, un prétexte,<br />

un justificatif 28 Du fondamentalisme mâtiné d'intégrisme. C'est bien du détournement <strong>de</strong> Dieu caractérisé, avec<br />

préméditation et, circonstance aggravante, par personnes ayant autorité. C'est <strong>de</strong> l'abus <strong>de</strong> confiance sur <strong>de</strong>s<br />

personnes qui auraient dû être protégées, c'est <strong>de</strong> la manipulation, <strong>de</strong> la cruauté mentale, physique et financière,<br />

<strong>de</strong> l'abus <strong>de</strong> pouvoir, du mensonge… Le réquisitoire peut être allongé kilométriquement. Le christianisme est-il<br />

tellement ambigu qu’il donne lieu à <strong>de</strong>s interprétations si divergentes Et l’amour, dans tout ça <br />

Le lecteur <strong>de</strong> base se pose une question : même s'il ne le dit nulle part, le criquet est adventiste, une <strong>de</strong>s<br />

nombreuses chapel<strong>les</strong> présentant la double caractéristique d'être à la fois protestantes et nord-américaines ; c'est<br />

ainsi qu'il faut comprendre l'Eglise dite <strong>de</strong> la Dénomination, une pu<strong>de</strong>ur peu compréhensible. Marquée au fer<br />

rouge, son origine. C'est américain <strong>de</strong> part en part, ultralibéralisme en moins, hypercentralisation en plus, et où le<br />

roi dollar partage son règne avec l’euro 29 . Comme il est souvent question d'argent, quand on aime, c'est sûr, on<br />

compte. Mais ce serait aussi protestant, paraît-il. Et là, c'est encore plus grave. La Réforme n'est-elle pas issue <strong>de</strong><br />

la révolte <strong>de</strong> Luther <strong>de</strong>vant l'immense corruption <strong>de</strong> l'Eglise catholique <strong>de</strong> la Renaissance La construction en<br />

apothéose <strong>de</strong> la fastueuse église Saint-Pierre, dans la Rome papale <strong>de</strong> cette époque, signifie la fin <strong>de</strong> l'unité<br />

religieuse, irrémédiablement. Le monopole <strong>de</strong> la vérité religieuse pour l’Occi<strong>de</strong>nt, son exclusivité, son unicité, et<br />

plus tard son infaillibilité, cessent d'être prononcés par le pape, chef <strong>de</strong> l'Eglise catholique, et sa cour <strong>de</strong><br />

cardinaux. C'est la première tentative, hormis la séparation dogmatique, mais surtout géographique, <strong>de</strong>s<br />

orthodoxes en 1054 30 . Révolte scandaleuse <strong>d'un</strong> homme <strong>de</strong> foi et <strong>de</strong> convictions, mais légitime et justifiée. Ce<br />

25<br />

26<br />

27<br />

28<br />

P. 118.<br />

Pp. 129-134,<br />

Un appel à la résistance Pourquoi pas Le 18 juin est un moment fondateur.<br />

Le christianisme ne présente-t-il pas une gran<strong>de</strong> analogie avec l'islam dont le livre saint est le coran : tous <strong>les</strong><br />

extrémismes y sont, mais également <strong>de</strong>s modè<strong>les</strong> <strong>de</strong> conduite morale et sociale dignes <strong>de</strong> tous <strong>les</strong> éloges. Terrib<strong>les</strong>, ces<br />

interprétations à double détente, à double effet, à double face : Docteur Jekill et Mister Hy<strong>de</strong>.<br />

29<br />

Encore une fois, la Dénomination se comporte comme son aînée catholique qu'elle abhorre et peut-être méprise<br />

pour avoir détourné le message sur Dieu : cf. Drewermann, Op. cit., p. 311.<br />

30<br />

Au moins, l'Occi<strong>de</strong>nt conservait une unité religieuse, l'hérésie ne touchant que l'Orient romanisé. Avec Michel<br />

Keroulairos, <strong>les</strong> nouveaux schismatiques se présentent comme orthodoxes : orthos : droit, correct ; doxa : route, opinion, ceux<br />

qui suivent la voie droite, ceux qui ont raison. L'excommunication du pape par le patriarche est conjointe <strong>de</strong> celle du<br />

patriarche par le pape. Décidément, le discours sur Dieu ne serait-il pas frappé irrémédiablement du sceau <strong>de</strong> l'intolérance et<br />

<strong>de</strong> l'exclusion réciproques Le monothéisme, il faudrait l'admettre avec regrets, est un système violent <strong>de</strong> religion.


La puissance et la gloire : Dieu domestiqué 5<br />

fut dans <strong>les</strong> pleurs et dans <strong>les</strong> grincements <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts, c'est le moins qu'on puisse dire, dont une guerre civile, dite<br />

guerre <strong>de</strong> religion, en une France réduite à l'état <strong>de</strong> cadavre à la fin du XVI e siècle 31 . Le protestantisme, cette<br />

autre lecture considérée comme déviance <strong>de</strong>s huguenots et autres religionnaires, s'est institutionnalisé, est<br />

<strong>de</strong>venu Eglise à son tour, et qui dit Eglise dit système, appareil, structure, hiérarchie, et culture, références... La<br />

démocratie, en matière religieuse, est une fiction pour cause théologique, il faut bien le savoir. Dieu n’est pas<br />

soluble dans le peuple. Et l'on se prend tout à coup à songer : <strong>les</strong> protestants américains se ren<strong>de</strong>nt coupab<strong>les</strong> <strong>de</strong><br />

ce que le germanique Luther reprochait à l'Eglise romaine d'alors : détournement du message évangélique,<br />

corruption, recherche <strong>de</strong> la puissance, luttes d'influence, argent 32 . A la réflexion, la Dénomination, l'adventisme,<br />

ne fonctionne-t-elle pas exactement <strong>de</strong> la même façon que l'Eglise dite populaire, la catholique, qu’elle vilipen<strong>de</strong><br />

Les mêmes causes produisent <strong>les</strong> mêmes effets, c'est clair. Angoissante question : la Réforme n'aurait- rien<br />

réformé Dans ce cas, ne faut-il pas réformer la Réforme Ou carrément changer <strong>de</strong> système <br />

La Réforme prétendait réformer l’Eglise. Elle a eu elle aussi ses fanatiques. L’adventisme qui réforme la<br />

Réforme aussi. D’ailleurs, n’est-il pas intégriste dans son essence Toute réforme dans le christianisme n’est-elle<br />

pas une recherche <strong>de</strong> l’intégrité <strong>de</strong>s origines Il est piquant <strong>de</strong> constater que <strong>les</strong> réformateurs ont besoin d’être<br />

réformés. Les pères-la-morale ont besoin évi<strong>de</strong>mment qu’on leur fasse la morale. Les vertueux ont besoin qu’on<br />

leur rappelle la vertu. Ce qu’ils dénonçaient autrefois, ils le commettent eux-mêmes. Ou bien, nouveaux<br />

Robespierres, font-ils régner la terreur <strong>de</strong> la vertu Attention : Thermidor a éliminé ce parangon trop encombrant.<br />

L’esclave du maître est <strong>de</strong>venu le maître <strong>de</strong>s esclaves. Est-ce la structuration en système qui le veut Pourtant, pour<br />

qu’une idée dépasse le cadre d’un individu, elle doit se structurer dans une institution. Le risque majeur, inhérent à<br />

la nature humaine, est que l’institution accapare le message, que le moyen <strong>de</strong>vienne la fin Les individus qui font<br />

fonction <strong>de</strong> cadres ne sont plus alors au service d’une vérité quelle qu’elle soit, mais au service du système qui<br />

prétend la servir. Comme ils sont embauchés par le système, que c’est lui qui <strong>les</strong> fait vivre, qui <strong>les</strong> nourrit, <strong>les</strong> vêt et<br />

paie leur voiture, qui leur donne leur importance sociale, qui <strong>les</strong> porte, qui <strong>les</strong> justifie à la face du mon<strong>de</strong>. Ils ont<br />

donc puissamment intérêt à ne pas couper la branche sur laquelle ils sont confortablement installés, sous peine d’un<br />

suici<strong>de</strong> moral et social. Quitte pour eux à tronquer, et pour tout dire, estomper le message spirituel.<br />

Le principe <strong>de</strong> l'infaillibilité <strong>de</strong> l'Eglise est posé dès le règne du pape Grégoire VII (1073-1085), avec son Dictatus Papae.<br />

C'est une <strong>de</strong>s premières combinaisons du pouvoir et <strong>de</strong> la vérité. Drewermann, qui n'est pas historien, explique <strong>les</strong> fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong><br />

la primauté du pouvoir du pape au milieu du Moyen-Âge : Op. cit., pp. 385 ssqq.<br />

31<br />

C’est un fait notable que Henri IV, seul roi <strong>de</strong> France à avoir été protestant, puis catholique, avec sa finesse<br />

politique, a redressé la France pour lui redonner vie et la relancer dans le concert européen.<br />

32<br />

Qui ne sont peut-être que <strong>les</strong> symptômes. La cause profon<strong>de</strong> : L'incapacité cléricale <strong>de</strong>s théologiens d'alors <strong>de</strong> prendre<br />

en compte <strong>de</strong>s sentiments et <strong>de</strong>s expériences d'homme, ou, à l'inverse, leur inaptitu<strong>de</strong> à exposer leurs propres thèses <strong>de</strong> telle<br />

sorte qu'el<strong>les</strong> auraient permis <strong>de</strong> comprendre et d'interpréter le vécu <strong>de</strong>s personne, qui a fondé et consolidé le schisme :<br />

Drewermann, Op. cit., p. 148. Mais on n'a pas vu, et on ne voit toujours pas, que c'est la théologie elle-même qui, par sa forme -<br />

son impersonnalité et sa froi<strong>de</strong>ur affective, ses contradictions et son morcellement - ne cesse d'engendrer ses "rénégats" et ses<br />

"hérétiques" …on laisse constamment hors <strong>de</strong> la discussion le point décisif : la signification du sujet, avec ses expériences et son<br />

affectivité, ses misères et ses angoisses, ses tragédies et ses espoirs… Ibi<strong>de</strong>m ; cf. également 414 ssqq. Le même auteur, relisant<br />

<strong>les</strong> statuts <strong>de</strong> l'ordre <strong>de</strong>s jésuites , chap. I er , 6 e partie : Chacun doit être convaincu que quiconque vit dans l'obéissance doit se<br />

laisser gui<strong>de</strong>r et diriger par la Divine Provi<strong>de</strong>nce, avec l'intermédiaire <strong>de</strong> ses supérieurs comme s'il était un cadavre, qu'on peut<br />

transporter n'importe où… On recomman<strong>de</strong> donc instamment à tous <strong>de</strong> témoigner un grand respect… à leur supérieur… C'est<br />

pourquoi leur vie intérieure et extérieure sera pour le Supérieur comme un livre ouvert… Op. cit., p. 381-382, et 389. C'est en<br />

cela, en fait, que consiste l'initiation si mystifiée qui a fait <strong>de</strong> cet ordre le fer <strong>de</strong> lance <strong>de</strong> l'Eglise : obéissance sans réserve et<br />

absolue, joie à se soumettre, i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> la volonté du supérieur avec celle <strong>de</strong> la Provi<strong>de</strong>nce. C’est la suppression du moi, <strong>de</strong><br />

l’individualité, <strong>de</strong> la personnalité, <strong>de</strong> la subjectivité au profit d’un surmoi qui a totalement phagocyté, dévoré, éliminé ce qui fait<br />

qu’un individu est différent d’un autre. Par étonnant que ces individus décérébrés aient la docilité d’un mouton dans son<br />

troupeau. Ils sont donc <strong>de</strong>s instruments idéalement manipulab<strong>les</strong>. Cf. la religieuse qui consulte, et qui a encore en tête la terrible<br />

règle que sa maîtresse <strong>de</strong>s novices lui disait : On ne se trompe jamais quand on obéit, in Solignac, p. 39. Les dignitaires nazis qui<br />

seront jugés à Nuremberg opposeront cette même réponse. Le contenu toujours caché sous l'idéalisation <strong>de</strong> l'obéissance, c'est<br />

l'idéologie <strong>de</strong> puissance <strong>de</strong> l'Eglise elle-même. Jamais humains n'ont régné <strong>de</strong> façon plus totale et plus absolue que quand ils ont<br />

déclaré comman<strong>de</strong>r à la place <strong>de</strong> Dieu et avoir donc droit à l'obéissance absolue : Drewermann, Op. cit., p. 384. Tous <strong>les</strong> clercs<br />

doivent obéir au Pape, même s'il ordonne le mal ; car personne ne peut s'ériger en juge du pape : Innocent III, in Drewermann,<br />

Op. cit. p. 387. La conséquence est lour<strong>de</strong> : c'est la polarisation <strong>de</strong> la toute-puissance et <strong>de</strong> l'impuissance : p. 386. La seule forme<br />

<strong>de</strong> fonctionnement possible est linéaire, irréversible, pyramidale.<br />

La prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong> la conscience individuelle peut apparaître une fois l'individu bien engagé dans un type <strong>de</strong><br />

vie. L'orage peut dévaster : un homme libre, habitué à réfléchir et à s'autodéterminer restera-t-il dans le sein <strong>de</strong> l'Eglise<br />

traditionnelle se questionne, angoissé, Solignac, in Op. cit., p. 77.<br />

Lune question fondamentale se pose : le christianisme n’est-il qu’une religion du surmoi, ou donne-t-il au moi la<br />

fonction <strong>d'un</strong>e relation avec Dieu Le problème ne se pose-t-il pas <strong>de</strong> façon analogue avec l’islam


La puissance et la gloire : Dieu domestiqué 6<br />

Ce propos n’a aucunement pour but <strong>de</strong> stigmatiser ceux qui ont une foi sincère, ceux qui croient dans le<br />

fond <strong>de</strong> leur cœur, qui appliquent <strong>les</strong> préceptes évangéliques. Ceux-là méritent le plus grand respect. Ils ont<br />

intégré un idéal spirituel, qu’ils essaient <strong>de</strong> vivre. Ils ont <strong>les</strong> vrais croyants, selon le cœur <strong>de</strong> Dieu. Ceux-là ne<br />

sont pas intéressés par ce papier. Mais <strong>les</strong> autres, ceux qui ne considèrent le système que comme paravent,<br />

comme excuse, comme prothèse, comme mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> pouvoir ou <strong>de</strong> domination, ceux-là n’ont droit à rien en fait <strong>de</strong><br />

sympathie. La malhonnêteté <strong>de</strong> leur attitu<strong>de</strong> suffit à <strong>les</strong> éloigner. Que celui qui croit crie encore plus, qu’il soit<br />

encore plus charitable, qu’il considère autrui comme un autre lui-même, avec le respect qui lui est dû. Qu’il<br />

reconnaisse à autrui la liberté <strong>de</strong> croire ou <strong>de</strong> ne pas croire, ou <strong>de</strong> croire différemment : c’est peut-être cela, la<br />

charité.<br />

Pasteur Criquet, vous avez ouvert la boîte <strong>de</strong> Pandore. Il fallait sans doute un grand courage pour cela. En<br />

prenant la parole, vous l'avez libérée : ça, c'est un travail <strong>de</strong> pionnier et <strong>de</strong> titan qu'il faut saluer. Respect. Il peut<br />

vous attirer <strong>les</strong> foudres d'en haut. Apparemment, personne n'avait osé, avant vous. Retournez-en le contenu sur la<br />

table. L'individu lambda que je suis aurait déjà abdiqué, sans espoir <strong>de</strong> retour mais contrairement à vous, je n'ai pas<br />

cette foi : c'est là le résultat <strong>de</strong> mon éducation, <strong>de</strong> ma culture, <strong>de</strong> mon histoire, <strong>de</strong> ma démarche personnelle, <strong>de</strong> tout<br />

ce qui fait <strong>de</strong> moi un ensemble effroyablement complexe et unique ; je crois même que je suis inconvertissable,<br />

compte tenu <strong>de</strong> mon passé très chargé ; j'ai donc fait une lecture infidèle <strong>de</strong> votre ouvrage 33 . Par ailleurs,<br />

absolument libre <strong>de</strong> toute crainte <strong>de</strong>vant d'éventuel<strong>les</strong> représail<strong>les</strong>, je ne suis aucunement susceptible <strong>de</strong> recevoir<br />

<strong>de</strong>s sanctions du type <strong>de</strong> cel<strong>les</strong> que vous dénoncez sans complaisance ; je suis totalement dégagé <strong>de</strong>s influences <strong>de</strong>s<br />

professionnels <strong>de</strong> la foi, <strong>de</strong>s fonctionnaires <strong>de</strong> Dieu et autres systèmes ; je ne présente aucune aspérité sur laquelle<br />

un individu, un régime, une chapelle ou une école pourrait avoir prise sur moi : j'incarne par conséquent toutes <strong>les</strong><br />

caractéristiques <strong>de</strong> l'électron libre. Je ne partage sans doute pas vos convictions religieuses, mais je me veux homme<br />

<strong>de</strong> bonne volonté, et votre ouvrage force ma sympathie : vous pouvez compter fermement sur tous ceux qui<br />

fonctionnent comme moi, qui pensent que tout ce qui libère l'homme, qui lui retire carcans, corsets, et autres<br />

œillères, est positif, que tout ce qui le limite est négatif. Allez plus loin, s'il vous plaît.<br />

J'ose vous suggérer poliment un volume qui ferait suite, car à l'évi<strong>de</strong>nce, vous en avez la matière<br />

première, une sorte <strong>de</strong> Stridulations d’un <strong>insecte</strong> <strong>parmi</strong> <strong>les</strong> saints : le retour. Puisque vous voulez parler à<br />

(votre) prochain selon la vérité 34 , ce que quiconque ne saurait vous reprocher, faites entendre le glas : Dieu est<br />

mort, l'homme avait raison. Les braves gens qui osent prendre le risque <strong>de</strong> la foi prennent aussi <strong>les</strong> moyens <strong>de</strong> la<br />

conforter : Tu es Pierre, et sur cette pierre… leur a-t-on dit.<br />

A propos, puisqu'il faut bien appeler chat un chat, qu'est-ce qui définit concrètement une secte <br />

Bibliographie<br />

1. Valleray (Joël), Stri<strong>de</strong>nces d’un <strong>insecte</strong> <strong>parmi</strong> <strong>les</strong> saints. Sans distributeur. Imprimerie Absalon.<br />

Schoelcher, 2001. 157 p.<br />

2. Drewermann (Eugen), Fonctionnaires <strong>de</strong> Dieu. Albin Michel. Paris, 1993. 758 p.<br />

3. Solignac (Pierre), La névrose chrétienne. Éditions <strong>de</strong> Trévise, Collection Polémique. Paris, 1976. 350 p.<br />

4. Marion (Gérard Gabriel), Les sectes : <strong>de</strong> l’offre à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Conférence. 19 février 2004.<br />

33<br />

Le mot infidèle vous fait sursauter Comprenez-le bien sûr comme celui qui n'a pas la foi (fi<strong>de</strong>s) dans le Dieu<br />

incarné dans le système que vous dénoncez.<br />

34<br />

P. 10. C'est évoquer, encore une fois, la notion même <strong>de</strong> vérité, donc <strong>de</strong> jugement, ce qui inclut métaphysique et<br />

morale. Passionnant, mais immense débat philosophique. Pilate s'en lave <strong>les</strong> mains : c'est une solution d'urgence.

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