Examen neuropsychologique - Dr Anne Bellmann Thiran
Examen neuropsychologique - Dr Anne Bellmann Thiran
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Le rôle de l’examen <strong>neuropsychologique</strong> dans<br />
l’évaluation des maladies et accidents<br />
professionnels et dans le retour au travail<br />
<strong>Dr</strong> <strong>Anne</strong> <strong>Bellmann</strong> <strong>Thiran</strong><br />
Psychologue spécialiste en neuropsychologie FSP<br />
Responsable de l’Unité de Neuropsychologie de la<br />
CRR-SUVA<br />
CHUV - le 6 juin 2013
PLAN<br />
1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong> <br />
• Evaluation ciblée<br />
• Quantification<br />
• Interprétation<br />
2. Son rôle dans les maladies et accidents professionnels<br />
• Evaluation<br />
Exemple de l’intoxication chronique aux solvants<br />
• Retour au travail<br />
Exemple du traumatisme crânio-cérébral (TCC)<br />
3. Conclusion<br />
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1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong><br />
Une observation du comportement (au sens large) d’un<br />
patient. Cette observation est dirigée et structurée par nos<br />
connaissances des relations cerveau-comportement et du<br />
fonctionnement cognitif, et quantifiée grâce à l’utilisation<br />
d’outils psychométriques.<br />
Une interprétation de cette observation en fonction des<br />
connaissances actuelles et en fonction du contexte<br />
(comparaison inter-tests, prise en compte du contexte<br />
personnel, social, psychologique, médical, médicamenteux,<br />
évolutif…)<br />
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Unité de neuropsychologie<br />
Nom, prénom : Tartampion Luigi Date de naissance : 03.07.1952 N o 31526<br />
Adressé par :<br />
Copie à :<br />
Anamnèse médicale<br />
<strong>Examen</strong> <strong>neuropsychologique</strong> du<br />
Description du patient et de son comportement<br />
Coopération. Plaintes spontanées et sur demande<br />
Langage :<br />
Données médicales<br />
Observations<br />
cliniques<br />
Questionnaires<br />
Praxies :<br />
Gnosies :<br />
Mémoire :<br />
Données <strong>neuropsychologique</strong>s<br />
Fonctions exécutives :<br />
Attention :<br />
Raisonnement :<br />
CONCLUSION :<br />
Interprétation<br />
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1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong><br />
«…. Cette observation est dirigée et structurée…»<br />
Evaluation ciblée<br />
On ne va pas faire le même examen à tous les patients. Nos outils nous<br />
permettent de cibler l’évaluation sur des fonctions spécifiques qui<br />
pourraient être particulièrement touchées dans un contexte spécifique.<br />
«… et quantifiée grâce à l’utilisation d’outils<br />
psychométriques…»<br />
Evaluation quantifiée<br />
• Utilisation de tests validés et normés (pondération par rapport à l’âge et<br />
au niveau de formation)<br />
Déficit sévère = résultat inférieur au centile 1<br />
Déficit modéré = résultat entre le centile 1 et le centile 6<br />
• Possibilité de préciser la gravité de l’atteinte et de mesurer l’évolution<br />
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1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong><br />
«…. Une interprétation de cette observation …»<br />
Une prise de position argumentée<br />
Les résultats aux tests psychométriques ≠ reflet direct du fonctionnement<br />
cérébral.<br />
Facteurs confondants:<br />
- contexte psychiatrique (dépression, PTSD)<br />
- contexte somatique (douleurs, fatigue)<br />
- médication<br />
- aspects linguistiques et culturels<br />
- situation d’examen<br />
- motivation et effort alloué (volontairement ou non)<br />
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1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong><br />
«…. Une interprétation de cette observation …»<br />
Une prise de position argumentée (suite)<br />
⇒ Le neuropsychologue évalue la validité des résultats<br />
Les tests mesurent-ils ce qu’ils sont sensés évaluer<br />
Le tableau est-il cohérent<br />
⇒ Se prononce sur la ou les causes des déficits<br />
Compatible avec une atteinte neurologique<br />
⇒ Peut prendre position sur diverses répercussions<br />
fonctionnelles (retour au travail, besoin de curatelle, conduite<br />
automobile, …)<br />
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PLAN<br />
1. Qu’est-ce qu’un examen <strong>neuropsychologique</strong> <br />
• Evaluation ciblée<br />
• Quantification<br />
• Interprétation<br />
2. Son rôle dans les maladies et accidents professionnels<br />
• Evaluation<br />
Exemple de l’intoxication chronique aux solvants<br />
• Retour au travail<br />
Exemple du traumatisme crânio-cérébral (TCC)<br />
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2. Rôle de l’examen <strong>neuropsychologique</strong> dans<br />
les maladies et accidents professionnels<br />
2.1. Evaluation<br />
- existe-t-il un déficit cognitif <br />
- de quelle nature <br />
- de quelle gravité <br />
- est-il compatible avec la maladie ou<br />
l’accident professionnel présumé<br />
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Evaluation ciblée<br />
Connaître les vulnérabilités liées aux différentes étiologies<br />
Maladie/accident Structures vulnérables Déficits cognitifs les plus fréquents<br />
TCC<br />
Anoxie<br />
Encéphalopathie<br />
aux solvants<br />
Lobes frontaux et<br />
temporaux antérieurs<br />
(contusions). Matière<br />
blanche (lésions<br />
axonales)<br />
Ganglions de la base,<br />
structures temporales<br />
internes, régions<br />
postérieures<br />
Matière blanche<br />
(axonopathie,<br />
démyélinisation) +<br />
atteintes spécifiques<br />
liées au type de solvant<br />
Conscience des troubles<br />
Fonctions exécutives (organisation, incitation,<br />
inhibition, flexibilité, raisonnement, cognition<br />
sociale)<br />
Mémoire<br />
Attention (sélective, divisée)<br />
Reconnaissance des émotions<br />
Mémoire<br />
Gnosies visuelles<br />
Ralentissement psychomoteur<br />
Dextérité<br />
Mémoire<br />
Attention<br />
Fonctions exécutives<br />
Organisation visuo-spatiale<br />
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Evaluation ciblée<br />
• Les solvants présentent des propriétés neuro-toxiques<br />
(Hydrocarbures aliphatiques, Cétones, alcools, hydrocarbures aromatiques, hydrocarbures aliphatiques<br />
chlorés, Factsheet SUVA 2013)<br />
• Intoxications aiguës: comparable à la prise d’alcool<br />
• Intoxication chronique (≥10 ans). 3 stades OMS (1985):<br />
Stades (OMS) Symptômes caractéristiques<br />
Syndrome affectif<br />
organique<br />
Encéphalopathie<br />
toxique modérée<br />
Encéphalopathie<br />
toxique chronique<br />
sévère<br />
Changement d’humeur<br />
(irritabilité, dépression)<br />
Tr sommeil, plaintes<br />
concentration, mémoire<br />
Asthénie, troubles de<br />
l’humeur, de la mémoire, de<br />
l’attention, de la libido<br />
Syndrome démentiel<br />
Graves tr affectifs et de<br />
personnalité<br />
Subjectif<br />
Tests psychométriques normaux<br />
Réversible<br />
Tests psychométriques perturbés<br />
Réversibilité incertaine ou partielle<br />
Détérioration intellectuelle<br />
objectivée<br />
Anomalies examen physiol; IRM<br />
cérébrale<br />
Irréversible<br />
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Evaluation ciblée<br />
• Recueil des plaintes (+ questionnaire spécifique Euroquest)<br />
• <strong>Examen</strong> <strong>neuropsychologique</strong> focalisé sur 6 domaines:<br />
• Vitesse perceptivo-motrice (ex: TMT-A, code WAIS)<br />
• Dextérité (ex: Purdue)<br />
• Mémoire (mémoire de travail, mémoire à long terme)<br />
• Organisation visuo-spatiale (ex: Hooper, copie figure de Rey)<br />
• Fonctions exécutives (ex: TMT-B, stroop)<br />
• Fonctions attentionnelles (ex: attention sélective et divisée)<br />
(Réf: Geens et al. 09,Bast-Petterson 09, Akila et al. 06, van Hout et al. 06, Boillat 04)<br />
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Evaluation quantifiée<br />
L’examen <strong>neuropsychologique</strong> est une des clés de voûte du<br />
diagnostic: le recours à des tests normés et validés est<br />
nécessaire, entre autres, pour poser un diagnostic<br />
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Interprétation<br />
Attention, les tests psychométriques ne suffisent pas! Ces<br />
déficits sont peu spécifiques! Il faut encore pouvoir<br />
argumenter qu’ils ne sont pas liés à une autre maladie<br />
organique ou psychiatrique ou qu’ils ne sont pas la<br />
conséquence d’un manque d’effort volontaire ou non<br />
⇒ questions spécifiques (TCC, OH, dépression)<br />
⇒ analyse de la cohérence du tableau<br />
⇒ s’il y a un doute, s’aider d’outils spécifiques de validation<br />
de symptômes (Ex: TOMM)<br />
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2. Rôle de l’examen <strong>neuropsychologique</strong> dans<br />
les maladies et accidents professionnels<br />
2.2. Retour au travail<br />
- existe-t-il un déficit cognitif <br />
- de quelle nature <br />
- de quelle gravité <br />
- Avec quelles répercussions<br />
fonctionnelles <br />
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2.2. Retour au travail<br />
- Quelles répercussions fonctionnelles<br />
⇒ connaître les spécificités relatives aux différentes<br />
pathologies et leurs répercussions possibles<br />
⇒ contexte d’examen ≠ vie professionnelle<br />
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2.2. Retour au travail<br />
Spécificités des traumatisés crânio-cérébraux (TCC)<br />
- Anosognosie<br />
- Troubles exécutifs (organisation, incitation, flexibilité,<br />
inhibition)<br />
- Troubles du comportement et de la cognition sociale<br />
- Troubles mnésiques<br />
- Troubles attentionnels<br />
- Fatigue<br />
De nombreuses études montrent une corrélation négative<br />
entre ces déficits (en particulier les 3 premiers) et la reprise du travail<br />
Pour une revue de la littérature: Vuadens, Arnold & <strong>Bellmann</strong> (2006) ‘Return to work after a traumatic brain injury: a<br />
difficult challenge’ In Gobelet & Franchignoni ‘Vocational Rehabilitation’, Paris: Springer<br />
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2.2. Retour au travail<br />
Spécificités des traumatisés crânio-cérébraux (TCC)<br />
• Connaître les déficits de mauvais pronostic pour une<br />
reprise du travail permet d’évaluer ces aspects de façon<br />
plus détaillée et appropriée (ex: anosognosie, troubles du<br />
comportement et tr dysexécutifs nécessitent des investigations particulières qui<br />
dépassent le cadre des tests psychométriques traditionnels)<br />
• Mais aussi d’informer l’employeur et les collègues<br />
• et anticiper les difficultés (adaptations du post de travail, moyens<br />
substitutifs, etc…)<br />
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2.2. Retour au travail<br />
contexte d’examen ≠ vie professionnelle<br />
• Bureau silencieux<br />
• Pas de distractions<br />
• <strong>Examen</strong> structuré (tâches données l’une<br />
après l’autre, incitation et instructions précises<br />
données par l’examinateur)<br />
• Interactions sociales limitées<br />
• Effort intellectuel restreint dans le temps<br />
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contexte d’examen ≠ vie professionnelle<br />
• Des performances réalisées sur une courte durée n’impliquent<br />
pas que le même résultat peut être atteint sur le long terme<br />
- Fatigue chez 72% TCC –Ponsford et al. (1995)<br />
- Riese et al.(1999) : indices psychologiques (sensation de stress) et<br />
physiologiques (pouls, tension artérielle) de la fatigue sur tâche de<br />
simulateur de conduite pdt 50 min. Malgré absence de<br />
détérioration, sensation de stress plus élevée et augmentation<br />
anormale de la tension chez les TCC<br />
• Les troubles exécutifs apparaissent précisément dans les<br />
situations non structurées, où les patients sont soumis à un flot de<br />
stimulations et distractions, doivent identifier par eux-mêmes ce<br />
qu’ils doivent faire, générer des hypothèses, faire des choix,<br />
sélectionner et planifier une stratégie, l’accomplir sans perdre le<br />
but de vue, réaliser plusieurs choses en parallèle, etc…<br />
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contexte d’examen ≠ vie professionnelle<br />
A l’inverse…<br />
En accomplissant des activités complexes mais<br />
familières dans la vie réelle, on bénéficie:<br />
• d’habiletés procédurales<br />
• de connaissances antérieures<br />
• de la multiplication des indices propres<br />
aux situations complexes<br />
(redondances)<br />
• d’une motivation autre (concret!)<br />
• et d’une confiance en soi liée à<br />
l’accomplissement de tâches pour<br />
lesquelles on se sait compétent<br />
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contexte d’examen ≠ vie professionnelle<br />
Pour établir un trait d’union entre bureau et vie réelle:<br />
Nécessité d’ajouter à l’examen psychométrique classique<br />
• des tâches plus écologiques où le patient se trouve face à un<br />
ensemble de tâches et doit s’organiser seul en respectant des<br />
règles données telles que:<br />
- le « Six elements task » (Shallice et Burgess, 91)<br />
- test d’errances multiples<br />
• des discussions avec la famille pour évaluer le comportement<br />
(questionnaires)<br />
• recueil d’informations sur le fonctionnement antérieur<br />
• recueil d’informations sur le poste de travail et la fonction<br />
précise occupée par le patient<br />
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Conclusion<br />
Confronté à un patient victime d’un accident ou d’une maladie<br />
professionnel(e) de nature à engendre une atteinte cérébrale,<br />
le <strong>neuropsychologique</strong> va:<br />
• Cibler son évaluation sur les fonctions susceptibles d’être<br />
atteintes<br />
• Appliquer des tests validés et normés permettant de définir,<br />
quantifier et au besoin ‘monitorer’ l’évolution du déficit<br />
• Se prononcer sur la cohérence du tableau et si possible sur le<br />
lien avec l’accident ou la maladie présumé(e)<br />
En ce qui concerne le retour au travail après une atteinte<br />
cérébrale, le neuropsychologue<br />
• Définit clairement les aptitudes déficitaires versus préservées<br />
• Se prononce sur les répercussions fonctionnel (en tenant compte<br />
des différences entre contexte d’examen et vie réelle, et en sachant repérer<br />
les comportements susceptibles d’avoir un impact particulier, positif ou<br />
négatif, sur la reprise professionnelle)<br />
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