Fictional script p. 1 & 16 par coline sunier & charles mazé des ...
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<strong>Fictional</strong> <strong>script</strong> p. 1 & <strong>16</strong><br />
<strong>par</strong><br />
<strong>coline</strong> <strong>sunier</strong> & <strong>charles</strong> <strong>mazé</strong><br />
<strong>des</strong><br />
FICTIONAL PROJECTS p. 2, 3, 4, 13, 14, 15<br />
<strong>par</strong><br />
DAVID DUBOIS<br />
avec <strong>par</strong> ordre d’ap<strong>par</strong>ition<br />
Makrame № 12<br />
Mural chair<br />
Paper lamp<br />
Makrame № 10<br />
Mirror picture<br />
Protected Vase № 4<br />
Graphic Display<br />
Protected Vase № 2<br />
Makrame № 11<br />
MD light<br />
Protected Vase № 1<br />
et enfin<br />
vive la panique liouy ayylu<br />
de<br />
Cécile bortoletti & david tv<br />
avec la <strong>par</strong>ticipation de<br />
Alice Heart<br />
Ann Lenstam<br />
Anne Steffens<br />
April Mae Alegre<br />
et la collaboration de<br />
Oute Kan<br />
Yagos Koliopanos<br />
Lala Rémi<br />
accompagné de<br />
SOME REFERENCES p. 5, 6, 11, 12<br />
<strong>par</strong><br />
DAVID DUBOIS<br />
avec <strong>par</strong> ordre d’ap<strong>par</strong>ition<br />
Eva Molnar<br />
A-M STRETTER<br />
Makrame № 1<br />
india song<br />
Carlos D’Alessio<br />
Michael richardson<br />
Anne-Marie Stretter<br />
Christian Rizzo<br />
João De Deus<br />
1
2<br />
3
4 5
Une table, une chaise, un lit<br />
L’utopie fictionnelle <strong>des</strong> objets de david dubois<br />
Il y a plusieurs fictions possibles pour un même lieu.<br />
Le lieu : un livre, un film, une maison, un ap<strong>par</strong>tement<br />
en centre-ville, une piscine municipale. J’avais déjà<br />
remarqué que les objets, j’entends « les objets que l’on<br />
appelle usuels », sont souvent les principaux personnages<br />
<strong>des</strong> lieux qu’ils habitent. En somme, un lieu est<br />
rarement un Locus Solus, dans son sens premier, c’està-dire<br />
un lieu solitaire. Et même les non-lieux, décrits<br />
<strong>par</strong><br />
Marc Augé,<br />
ces lieux en marge, aéroports, terrains vagues, lieux<br />
de transit ou sans <strong>des</strong>tination possible, sont <strong>des</strong> lieux<br />
éminemment fictionnels. Il s’y écrit <strong>des</strong> histoires entre<br />
les gens qui les traversent, entre les objets que l’on y<br />
déplace ou qu’on y place. Et entre les gens et les objets.<br />
Bref. Les objets sont <strong>des</strong> personnages, en ce sens qu’ils<br />
habitent les lieux tout autant que nous et ils y inscrivent<br />
indéniablement leur empreinte. Dans la chambre du<br />
motel, coincée entre une zone commerciale à l’abandon<br />
et une route dé<strong>par</strong>tementale, il y a une<br />
table,<br />
une<br />
chaise,<br />
un<br />
lit,<br />
tous retenus au sol comme ancrés dans la réalité bien<br />
tangible de la misère du lieu. Ces objets, mille fois manipulés,<br />
utilisés, <strong>par</strong> <strong>des</strong> usagers de passage, gardent en<br />
eux, quelque chose de l’histoire de chacun. Je sais en<br />
m’asseyant sur cette<br />
chaise,<br />
je sais en m’asseyant face à ce<br />
bureau,<br />
je sais en m’allongeant entre les draps rêches et usés de<br />
ce<br />
lit,<br />
les corps qui s’y sont endormis, abrutis de fatigue, les<br />
couples adultérins et les amours tarifés. Ces habitants<br />
6<br />
7
de passage n’ont peut-être rien en commun, ou peut-être<br />
que si, mais peu importe. Ils ont indéniablement en<br />
commun cette<br />
table,<br />
cette<br />
chaise,<br />
ce<br />
lit,<br />
et les objets et la mise en espace du lieu trouveront leur<br />
potentiel fictionnel a priori. Je ne connais pas grandchose<br />
au <strong>des</strong>ign. En revanche, au cinéma, je sais ce que<br />
peut être une mise en scène et sa différence avec une<br />
mise en espace. Or, je crois que<br />
David Dubois<br />
est avant tout un metteur en scène. Chaque objet qu’il<br />
crée donne lieu à une manipulation, à une contrainte du<br />
corps qui oblige à s’approprier — ou pas — l’objet, et à<br />
créer un rapport inédit avec lui. Comme le demanderait<br />
un réalisateur à ses acteurs. Le travail de<br />
David<br />
consiste, me semble-t-il, à projeter et à créer <strong>des</strong><br />
espaces volontairement fictionnels. Mais surtout à<br />
travailler a posteriori. Laisser l’habitant s’em<strong>par</strong>er de<br />
l’objet, ne pas être dans un rapport passif avec celui-ci.<br />
Les objets de<br />
David<br />
mettent le trouble au corps. Il faut les apprivoiser,<br />
en comprendre l’humour, les manipuler. À la Villa<br />
Noailles, sur le côté intérieur de la porte de la chambre,<br />
il y a une petite bibliothèque contenant six livres de<br />
MD.<br />
Sur la porte. Ce n’est pas anodin. C’est une invitation à<br />
rester entre les murs, à se réfugier dans la fiction plutôt<br />
que de courir le monde. À « être au désert », pour citer<br />
Saint-Augustin.<br />
Sur le<br />
lit,<br />
un<br />
couvre-lit,<br />
une<br />
écharpe<br />
sur laquelle est inscrite, en gran<strong>des</strong> lettres grises,<br />
A-M STRETTER,<br />
du nom d’un <strong>des</strong> personnages récurrents de livres ou de<br />
films de<br />
MD.<br />
Sur le sol, d’une large fente, en été principalement, <strong>des</strong><br />
fourmis s’échappent et rappellent que<br />
Luis BuÑuel,<br />
réalisateur entomologiste, écrivit ici — peut-être dans<br />
cette même chambre que<br />
David Dubois<br />
a aménagée il y a quelques années. Le<br />
lit,<br />
le<br />
bureau,<br />
la<br />
chaise,<br />
<strong>des</strong>sinés <strong>par</strong><br />
David<br />
ont déjà une histoire, la sienne. Et elle se superpose aux<br />
éléments fictionnels convoqués : les films et les livres de<br />
MD,<br />
et l’histoire du lieu. Cela fait beaucoup et crée quelque<br />
chose de complètement inédit. On pourrait ajouter aussi<br />
que<br />
MD<br />
viendra plusieurs fois à Hyères. Hyères-les-Palmiers,<br />
comme s’est écrit sur le fronton de la gare SNCF.<br />
À Hyères se déroulait le Festival du Jeune Cinéma,<br />
dis<strong>par</strong>u aujourd’hui. Le festival reçut<br />
MD<br />
six fois, de 1975 à 1981, soit en tant que jury, soit en tant<br />
que cinéaste. Parfois les deux. La plage, les flamands<br />
roses, les couleurs, l’eau, le vent, le jardin botanique qui<br />
rappelle à certains endroits quelque chose, j’imagine, de<br />
l’Indochine. Hyères pourrait être une ville pour un film de<br />
Marguerite Duras.<br />
Je le redis, et cela fait beaucoup de choses qui se<br />
projettent alors dans la chambre de la Villa Noailles<br />
aménagée <strong>par</strong><br />
David Dubois.<br />
La chambre est alors une sorte de réceptacle fictionnel<br />
où les habitants, provisoires, doivent s’accommoder de<br />
tout cela : habiter la chambre et ses objets, se confronter<br />
à eux et accepter de ne pas être les principaux habitants<br />
du lieu. Alors, il faut les apprivoiser, se laisser<br />
surprendre, accepter qu’ils ne se donnent pas aussi<br />
facilement. Il y a un temps durant lequel le corps doit les<br />
appréhender. Mais il en est de la chambre, comme il en<br />
est <strong>des</strong> autres objets de<br />
David Dubois.<br />
8 9
À leur surface, se projettent toutes sortes de fictions,<br />
de possibles, d’histoires, de références — le plus<br />
souvent cinématographiques. En fait, on pourrait penser<br />
que ce sont <strong>des</strong> objets hétérotopiques. L’hétérotopie,<br />
explique<br />
Michel Foucault,<br />
permet de juxtaposer en un seul lieu réel plusieurs<br />
espaces qui <strong>par</strong>aissent incompatibles. Des objets sur<br />
lesquels se mêlent différents espaces et différents<br />
temps. La salle de cinéma : sur un écran blanc en trois<br />
dimensions se projette <strong>des</strong> images en deux dimensions.<br />
La chambre à la Villa Noailles : les livres, les films de<br />
MD,<br />
BuÑuel,<br />
le bâtiment lui-même, les corps qui habitent pour<br />
quelques heures ou quelques jours la chambre. Un<br />
assemblage de temps, de personnes, d’écritures, de<br />
corps, de lieux. Mais l’on pourrait même dire que ce n’est<br />
pas seulement un lieu à fort pouvoir fictionnel que cette<br />
chambre, c’est une utopie. Dans une petite note que m’a<br />
laissé<br />
David,<br />
il y a une citation de<br />
MD :<br />
« L’histoire racontée dans India Song l’était à <strong>par</strong>tir de<br />
personnages et de lieux imaginés, superposés, mais qui<br />
fonctionnaient, s’articulaient entre eux. L’Ambassade<br />
de France <strong>par</strong>aissait invraisemblable mais elle était<br />
reconnaissable et <strong>des</strong> gens en sortaient en <strong>par</strong>ticulier :<br />
Anne-Marie Stretter,<br />
Michael Richardson.<br />
Ici l’histoire est racontée à <strong>par</strong>tir <strong>des</strong> lieux vidés <strong>par</strong><br />
la mort. Le son est rigoureusement le même. La bande<br />
son du titre de Son nom de Venise dans Calcutta désert<br />
est celle d’India Song, seule l’image change : mais elle<br />
change du tout au tout, non seulement de nature mais<br />
de sens. »<br />
Alexandre Mare, décembre 2011<br />
10<br />
11
12<br />
13
14 15
Son nom de venise dans calcutta désert<br />
Some people<br />
Anne Roumet<br />
Fanny De Chaillé<br />
Matthieu Doze<br />
Saint-Augustin<br />
puis<br />
Une table, une chaise, un lit p. 7, 8, 9, 10<br />
<strong>par</strong><br />
Alexandre Mare<br />
avec <strong>par</strong> ordre d’ap<strong>par</strong>ition<br />
Marc Augé<br />
UNE table<br />
UNE chaise<br />
UN lit<br />
David Dubois<br />
Saint-Augustin<br />
UN couvre-lit<br />
UNE écharpe<br />
A-M STRETTER<br />
Luis BuÑuel<br />
UN bureau<br />
Marguerite Duras<br />
Michel Foucault<br />
Anne-Marie Stretter<br />
Michael Richardson<br />
elaine lÉvy project<br />
rue Fourmois, 9<br />
B-1050 Bruxelles<br />
WWW.elainelevyproject.com<br />
<strong>16</strong>