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numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

Abonnement<br />

numéro 11 juillet / septembre [2007]<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

en savoir plus…<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

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et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées


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château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

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Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

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Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

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Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

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(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

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Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

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Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées<br />

<br />

… posé sur cette photographie actuellement conservée aux archives départementales<br />

de la Haute-Garonne (cote 9 Fi 6). Son support est <strong>un</strong>e plaque de verre stéréoscopique<br />

de format 5,9 × 12,8 cm portant deux images positives en noir et blanc<br />

de format 5,5 ×6 cm. Elle est anonyme, sans date ni légende, n’appartient à auc<strong>un</strong><br />

fonds connu.<br />

Voici <strong>un</strong>e image dépourvue de tout caractère événementiel: elle a été prise<br />

<strong>un</strong> jour où il ne se passe rien de particulier sur la place <strong>du</strong> Capitole. Nous sommes<br />

bien à Toulouse, et la façade de l’hôtel de ville ne dispose pas encore d’horloge.<br />

Le Pierrot, à droite <strong>du</strong> cliché, renvoie au carnaval des étudiants, à la Belle Époque.<br />

L’auteur n’est pas <strong>un</strong> journaliste à l’affût de l’exceptionnel. Ce n’est pas non<br />

plus <strong>un</strong> amoureux de l’architecture monumentale. Nous avons affaire à <strong>un</strong> pêcheur<br />

de temps qui vient d’attraper le quotidien des Toulousains en ce début de xx e siècle.<br />

Il s’est arrêté à l’angle de la rue <strong>du</strong> Taur pour jeter son filet photographique sur <strong>un</strong><br />

banc de passants paisibles, dans le grand vide de la place. Car cet espace urbain<br />

peut renvoyer à la rivière, avec son sol minéral et son ciel maillé par les câbles <strong>du</strong><br />

tramway. Le photographe, installé sur le trottoir comme sur <strong>un</strong>e berge, a choisi<br />

de réaliser <strong>un</strong>e vue stéréoscopique pour que le regard puisse restituer la scène en<br />

relief, comme dans <strong>un</strong> aquarium.<br />

Le cadrage s’appuie sur deux éléments qui peuvent paraître secondaires :<br />

<strong>un</strong> coin de rue et <strong>un</strong>e vespasienne. Les pierres de la maison et le métal de ce<br />

mobilier urbain servent de supports aux annonceurs. À gauche, <strong>un</strong>e affiche de<br />

spectacles voisine avec la mention des pro<strong>du</strong>its que l’on peut trouver À La Civette<br />

Toulousaine: en plus <strong>du</strong> tabac et <strong>du</strong> papier timbré, le commerce propose sûrement<br />

des articles pour fumeurs et des fournitures de bureau. À droite, il est question de<br />

manger et de boire avec le chocolat Menier et le Lilet, <strong>un</strong> apéritif alors très apprécié.<br />

À l’arrière-plan, la façade prestigieuse <strong>du</strong> Capitole sert de toile de fond aux «tentes»<br />

modestes des marchands. L’usage de l’espace public est lui-même paradoxal :<br />

la place rassemble les moyens de transport, fiacres, charrettes ou voitures à bras,<br />

mais ils sont tous à l’arrêt ; la rue est le domaine des piétons, qui sont pour la<br />

plupart en mouvement.<br />

Quels sont donc ces passants pêchés par notre photographe en cette fin<br />

d’après-midi où les ombres sont longues ? Deux hommes à casquette, <strong>un</strong> cocher<br />

de fiacre, des marchandes et des femmes s’affairent au loin. Un militaire fixe la<br />

vitrine cachée de la Civette-Toulousaine. Le premier plan est dédié au mouvement,<br />

celui d’<strong>un</strong>e Toulousaine pressée et d’<strong>un</strong> religieux vu de dos, revêtu de sa<br />

soutane, avec <strong>un</strong> effet de drapé, de voile ou de voilure qui rappelle les toiles des<br />

«tentes». Auc<strong>un</strong> personnage ne prête attention au photographe qui, en ce début de<br />

xx e siècle, a cessé d’intriguer. Dans ce jeu de regards croisés, personne ne s’intéresse<br />

à personne mais le photographe voit tout le monde.<br />

Et ce Pierrot qui vient d’entrer en scène à droite de l’image! De profil, coiffé<br />

d’<strong>un</strong> chapeau de clown blanc, revêtu d’<strong>un</strong> costume à collerette et portant <strong>un</strong><br />

masque, il déambule d’<strong>un</strong> pas serein au milieu de la chaussée. Sa présence étrange<br />

passe étonnamment inaperçue. Pourtant, enlever le Pierrot de cette photographie<br />

lui fait perdre tout son intérêt et casse son équilibre. C’est autour de lui que le<br />

photographe a construit cette scène de fausse quotidienneté où les Toulousains<br />

croisent <strong>un</strong>e figure de carnaval.<br />

Mais le Pierrot n’est-il pas le reflet dans l’image <strong>du</strong> photographe lui-même<br />

sans lequel la photographie ne serait pas possible ? Sa blancheur le distingue des<br />

autres représentants de la société toulousaine, tout de sombre vêtus. Il chemine<br />

paisiblement vers eux, comme s’il allait à leur rencontre, à la manière d’<strong>un</strong>e mort<br />

en blanc qui viendrait chercher les vivants.<br />

Photographie en noir et blanc ou véritable danse macabre avant la Grande<br />

Guerre ?<br />

Marie-Hélène Bernard-Ristorcelli, conservatrice <strong>du</strong> patrimoine


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

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Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

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Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

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dégustation de René Écalle<br />

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Issu de la petite bourgeoisie de la<br />

région parisienne, Lucien Briet caresse<br />

depuis sa je<strong>un</strong>esse des rêves d’aventure<br />

peu en rapport avec sa position<br />

sociale et ses moyens financiers.<br />

Il lui faut attendre le décès de son père<br />

en 1887 pour toucher son héritage et<br />

commencer ses pérégrinations. Pourquoi<br />

les Pyrénées ? Parce qu’il a lu au<br />

collège les récits de Ramond de Carbonnières,<br />

à qui il vouera toute sa vie <strong>un</strong>e<br />

grande admiration. Sur les traces <strong>du</strong><br />

père <strong>du</strong> pyrénéisme, il va d’abord<br />

découvrir le versant nord des Pyrénées,<br />

de 1889 à 1902.<br />

La première mention de Briet dans<br />

les annales <strong>du</strong> pyrénéisme date d’août<br />

1890 : « Parmi les habitués de Gavarnie<br />

[…] se trouvait […] <strong>un</strong> touriste inconnu<br />

de tous, et que l’on désignait sous le nom<br />

<strong>du</strong> ‹ photographe ›. Installé à l’hôtel depuis<br />

plus d’<strong>un</strong> mois, il parcourait les montagnes<br />

en tous sens, photographiant à objectif que<br />

veux-tu. Que diantre pouvait-il faire ? »<br />

Ses clichés connaissent rapidement <strong>un</strong><br />

grand succès auprès des membres <strong>du</strong><br />

Club alpin français. Il fréquente les<br />

plus grands chroniqueurs de l’époque<br />

–Russel, Schrader, Saint-Saud, Brulle ou<br />

encore de Monts–, et ses photographies<br />

et ses récits sont eux-mêmes publiés dans<br />

de grandes revues pyrénéistes, le Bulletin<br />

de la Société Ramond ou l’Annuaire<br />

<strong>du</strong> Club alpin français par exemple.<br />

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En 1902, Briet découvre le versant<br />

espagnol par la vallée de Pineta et,<br />

enchanté par ce territoire pratiquement<br />

vierge, délaisse totalement le versant<br />

français pour se consacrer au Haut-<br />

Aragon : « Vous souvient-il de l’hospitalité<br />

si vantée des peuples orientaux, cher<br />

lecteur ? Eh bien, au pays <strong>du</strong> Cid et des<br />

Abencerrages, quand on vous connaît et<br />

qu’on vous a dit : ‹ Vous êtes ici chez vous ›,<br />

il n’y a point d’arrière-pensée. Vous sentez<br />

de la générosité, de la ‹ hidalguia › dans la<br />

manière d’être de l’Espagnol¹. » Malheureusement,<br />

ses chroniques espagnoles ne<br />

vont guère intéresser les lecteurs français.<br />

À ne fréquenter que le Haut-Aragon, il<br />

se coupe rapidement <strong>du</strong> milieu scientifique<br />

français, ne conservant que quelques<br />

fidèles soutiens, comme le comte de<br />

Saint-Saud. Ses récits de voyages, qu’il<br />

refond sous le titre de Superbes Pyrénées,<br />

ne seront jamais publiés en France,<br />

alors qu’<strong>un</strong>e partie paraîtra en Espagne<br />

en 1913, Bellezas del Alto Aragón,<br />

maintes fois réédité jusqu’à aujourd’hui.<br />

Car si Briet aime les Aragonais, il est<br />

également aimé d’eux, en grande partie<br />

en raison de son engagement pour la<br />

1 Toutes les citations de Lucien Briet sont<br />

issues de sa monographie demeurée inédite,<br />

Superbes Pyrénées (versant espagnol), dont<br />

le manuscrit est conservé au Musée pyrénéen<br />

de Lourdes.<br />

protection de la vallée d’Ordesa, si<br />

fervent qu’il débouchera sur le classement<br />

<strong>du</strong> site en parc national en 1918.<br />

Lorsque, en 1911, Briet abandonne<br />

le Haut-Aragon pour des raisons restées<br />

obscures, c’est également la fin de son<br />

activité créatrice. Il meurt à l’âge de<br />

soixante et <strong>un</strong> ans le 4 août 1921, ruiné,<br />

oublié et amer. À l’annonce de son décès,<br />

Louis Le Bondidier récupérera l’ensemble<br />

de ses travaux et de ses archives pour<br />

les déposer au Musée pyrénéen de Lourdes,<br />

où ils sont encore conservés.<br />

des images exceptionnelles<br />

De ses campagnes photographiques<br />

dans le Haut-Aragon², Briet a ramené<br />

des images exceptionnelles: de paysages<br />

inédits bien sûr, mais aussi –et peut-être<br />

surtout– des hommes et des femmes qui<br />

les peuplaient. Cette prise en compte<br />

de l’humain, qui fait l’originalité de son<br />

regard sur la région, explique la fascination<br />

que ses clichés exercent aujourd’hui<br />

sur nous. En effet, ils sont à la fois les<br />

2 L’ouvrage aborde quelques-<strong>un</strong>es de ses<br />

campagnes entre 1904 et 1911: «Le long<br />

<strong>du</strong> rio Ara » décrit le chemin qu’il suit lors<br />

de chaque arrivée en Espagne, <strong>du</strong> port de<br />

Boucharo à Boltaña par la vallée <strong>du</strong> rio<br />

Ara ; « Évocation de la vallée de Vió » est<br />

<strong>un</strong>e compilation de ses séjours en 1905, 19<strong>10</strong><br />

et 1911 ; «Voyage aux gorges <strong>du</strong> rio Vero »<br />

relate les deux voyages, en 1906 et 1908,<br />

pendant lesquels il découvre, entre Lecina<br />

et Alquezar, le célèbre barranco ; «Les gorges<br />

<strong>du</strong> Flumen et le salto de Roldán » est le récit<br />

de son voyage de 1907 qui le mènera, par<br />

la vallée <strong>du</strong> rio Guarga, jusqu’à Huesca,<br />

capitale de la province.<br />

marqueurs impartiaux de l’évolution <strong>du</strong><br />

paysage pyrénéen et les témoins d’<strong>un</strong>e<br />

société rurale sur le point de disparaître,<br />

figée dans <strong>un</strong>e structure héritée des<br />

temps féodaux. Trois grands ordres la<br />

dominent : d’abord la grosse propriété,<br />

incarnée par de vieilles familles dont les<br />

blasons armoriés qui ornent les façades<br />

attestent de la noblesse, la hidalguia ;<br />

le clergé ensuite, curés au train de vie<br />

modeste, souvent logés à même enseigne<br />

que leurs ouailles, et que seule leur<br />

érudition place au-dessus des paysans;<br />

l’armée enfin –des compagnies de carabiniers<br />

patrouillent régulièrement sur la<br />

frontière et prennent leurs quartiers à<br />

Boltaña, Fanlo ou Bielsa. On trouve<br />

également <strong>un</strong>e classe intermédiaire<br />

de fonctionnaires, de professions libérales,<br />

de politiciens et de petits commerçants<br />

qui vivent dans les bourgades les<br />

plus importantes, tandis que dans les<br />

villages, l’instituteur et le curé sont les<br />

seuls représentants de l’administration<br />

religieuse et civile. Les paysans, enfin,<br />

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représentent la part la plus importante<br />

de la population, métayers ou ouvriers<br />

agricoles le plus souvent, des peóns qui,<br />

lorsqu’ils se louent comme guides, à<br />

l’instar de Joaquin Buisán, sont relégués<br />

à l’étape avec les domestiques. Ils arrachent<br />

leur subsistance jusqu’au pied <strong>du</strong><br />

mont Per<strong>du</strong> (Monte Perdido). Coupés<br />

<strong>du</strong> monde, vivant en quasi-autarcie, ces<br />

montagnards mènent <strong>un</strong>e vie rude qui<br />

s’inscrit dans le paysage même, sillonné<br />

de chemins muletiers: champs en terrasses<br />

–parfois si étroites qu’elles évoquent<br />

des « lanières » – sculptant le flanc des<br />

montagnes jusqu’au fond des barrancos³,<br />

maisons aux proportions monumentales<br />

où bêtes et gens s’entassent à l’abri<br />

<strong>du</strong> froid et des prédateurs, cheminées<br />

ornées de figurines censées éloigner les<br />

3 Ravins entaillant les flancs de la montagne.<br />

En raison de la rareté des terres arables dans<br />

le Haut-Aragon, les paysans y développaient<br />

des cultures, mettant à profit le ruisseau<br />

qui coulait au fond pour irriguer leurs<br />

plantations.<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées


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Il y a <strong>un</strong> mystère Bergougnan. On<br />

voudrait, comme on le fait pour d’autres<br />

peintres, se raccrocher à <strong>un</strong>e histoire<br />

personnelle bien ancrée dans le temps<br />

et s’appuyant sur des éléments irréfutables.<br />

Or, le peu que nous savons de lui<br />

se dérobe devant <strong>un</strong>e investigation trop<br />

poussée. À l’exception de quelques toiles<br />

présentées dans des expositions officielles<br />

qui comportent <strong>un</strong>e indication de<br />

date et <strong>un</strong> titre, souvent bien vague, la<br />

plupart de ses œuvres ne s’accompagnent<br />

d’auc<strong>un</strong>e identification précise. Ainsi,<br />

sur les catalogues <strong>du</strong> Salon des artistes<br />

méridionaux, à côté de collègues plus<br />

loquaces, il n’annonce généralement que<br />

des « Études ». À chac<strong>un</strong> d’y reconnaître,<br />

s’il le veut vraiment, <strong>un</strong> coin de rue, <strong>un</strong><br />

bouquet de fleurs, <strong>un</strong>e bicyclette ou des<br />

boulets de charbon. De toute évidence,<br />

le sujet en lui-même ne l’intéresse guère;<br />

seules comptent ses recherches picturales.<br />

Hors <strong>du</strong> temps et presque toujours<br />

hors des modes.<br />

ReconstRuction d’<strong>un</strong> itinéRaiRe<br />

effacé<br />

Rien que de très banal, <strong>du</strong> moins en<br />

apparence, dans ses quatre-vingt-<strong>un</strong> ans<br />

passés presque entièrement à Toulouse,<br />

entre deux adresses (avenue des Minimes,<br />

puis rue Dalayrac) et deux activités<br />

voisines (photographe et peintre).<br />

Né le 21 décembre 1900, Raoul Bergougnan<br />

apprend le dessin dans l’atelier de<br />

Georges Castex puis, au lendemain de la<br />

guerre, entre comme élève à l’école des<br />

beaux-arts. Ne pouvant vivre seulement<br />

de sa peinture, il est ensuite photographe<br />

aux usines Latécoère. À partir de<br />

1931 et jusqu’en 1939, ses expositions<br />

régulières à la galerie Chappe (32, rue de<br />

la Pomme), seul ou aux côtés d’artistes<br />

tels que Charreton, Lupiac, Bouillière<br />

ou Marliave, attirent vite l’attention sur<br />

<strong>un</strong> talent aussi singulier. « M. Bergougnan<br />

est <strong>un</strong> poète, <strong>un</strong> visionnaire tombé<br />

comme <strong>un</strong> aérolithe à Toulouse, et qu’on<br />

ne peut rattacher à rien dans la tradition<br />

artistique de notre ville », déclare avec<br />

raison Paul Mesplé dans sa chronique de<br />

L’Express <strong>du</strong> Midi (15 mai 1932). Au<br />

cours des années trente, on remarque<br />

aussi sa participation au Salon des<br />

artistes français, qui se tient à Paris.<br />

Il y reçoit même <strong>un</strong>e médaille d’argent.<br />

Toujours à Paris, pour l’Exposition<br />

internationale de 1937, il réalise la<br />

décoration <strong>du</strong> pavillon <strong>du</strong> Languedoc,<br />

en remplacement d’Henri Martin.<br />

Autre déplacement – il y en a si peu<br />

dans sa vie ! –, grâce à <strong>un</strong>e bourse <strong>du</strong><br />

conseil général, il séjourne brièvement<br />

en Espagne, dont il ramène plusieurs<br />

toiles que montre la galerie Chappe en<br />

mars 1936. Elles surprennent par leurs<br />

couleurs inhabituelles qui rompent<br />

avec les tonalités sourdes et grises dont<br />

il s’était fait jusqu’alors <strong>un</strong>e spécialité.<br />

Ajoutons que, de 1930 à 1943, il participe<br />

chaque année au Salon des artistes<br />

méridionaux (comme «associé» en 1930,<br />

puis « sociétaire » à partir de 1932) en y<br />

présentant deux, trois ou au maximum<br />

quatre peintures.<br />

Là s’arrêtent nos informations<br />

concernant sa période de plus grande<br />

activité en tant que peintre. Quel crédit<br />

faut-il accorder aux propos de Joseph<br />

Andrau, repris dans La Dépêche <strong>du</strong><br />

Midi <strong>du</strong> 14 mars 1982, quelques jours<br />

après son décès ? « Durant l’Occupation,<br />

<strong>un</strong> grand amateur d’art (qui devait<br />

périr avec toute sa famille dans <strong>un</strong> de ces<br />

f<strong>un</strong>estes camps de la mort) organisa des<br />

expositions dont l’<strong>un</strong>e fut préfacée par<br />

Francis Carco lui-même, à Lyon, puis à<br />

Genève. Les œuvres <strong>du</strong> peintre toulousain<br />

figuraient aux côtés de celles <strong>du</strong> maître<br />

de l’Ile-de-France, Alfred Sisley, qui<br />

avait su, <strong>un</strong> siècle auparavant, donner<br />

aux teintes mineures toute leur force. »<br />

Séparé de son épouse, il a longtemps<br />

vécu avec sa mère, sa sœur et son fils<br />

dans <strong>un</strong> modeste appartement de l’avenue<br />

des Minimes, qui fut <strong>un</strong>e source<br />

d’inspiration fréquente pour ses scènes<br />

d’intérieur et ses natures mortes. Les extérieurs<br />

sont essentiellement toulousains<br />

<br />

Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

dossier<br />

La Révolution française<br />

28-33<br />

34-39<br />

40-41<br />

42-43<br />

44-45<br />

Les Hautes-Pyrénées<br />

Création révolutionnaire de Barère<br />

Les montres émaillées<br />

sous la Révolution<br />

La Mort de Marat<br />

1793-1799<br />

Toulouse, rempart de la République<br />

Guy Astoul<br />

José Cubero<br />

Michel Hayard<br />

Georges Fournier<br />

59 Questions à Rémy Pech<br />

Christine Dousset<br />

Questions à Michel Vovelle<br />

Louis Peyrusse<br />

46-51 Révolution et guerre de religion<br />

Valérie Sottocasa<br />

en Rouergue méridional<br />

52-58<br />

60-62<br />

64-65<br />

Boissières dans le Quercy<br />

Un cri de colère en pays croquant<br />

Hyacinthe Sermet<br />

Une conscience déchirée<br />

Repères<br />

Dossier coordonné par Christine Dousset<br />

Georges Fournier<br />

Christine Dousset<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées<br />

Le bouleversement qu’a représenté la Révolution française a légué <strong>un</strong> immense patrimoine,<br />

tantôt méconnu, tantôt devenu si familier qu’on en oublie l’origine. La région<br />

Midi-Pyrénées en conserve de nombreuses traces, des cadres administratifs comme les<br />

départements créés en 1790 aux objets et multiples témoignages iconographiques que<br />

renferment musées, bibliothèques et dépôts d’archives. Gravures, tableaux, et même<br />

montres, témoignent des préoccupations des nouveaux citoyens.<br />

Malgré les proclamations permanentes d’<strong>un</strong>ité, ceux-ci se déchirèrent <strong>du</strong>rant toute<br />

la décennie révolutionnaire. Née <strong>du</strong> conflit entre Ancien Régime et aspirations nouvelles,<br />

la Révolution suscita des tensions et des antagonismes qui débouchèrent sur l’usage<br />

de la violence politique. Relativement épargnée ensuite par l’épisode de la Terreur,<br />

la région fut dès 1789 le théâtre de la colère paysanne contre les seigneurs, notamment<br />

en Quercy. Girondins et Montagnards, royalistes et républicains, s’affrontèrent<br />

à Toulouse à plusieurs reprises, la victoire revenant toujours aux partisans <strong>du</strong> pouvoir<br />

instauré dans la capitale. De manière plus originale, les vieux clivages religieux entre<br />

catholiques et protestants furent ravivés à l’occasion de la Révolution dans les zones de<br />

frontière religieuse comme le Rouergue méridional. De ces luttes fratricides naquirent<br />

des mémoires distinctes qui façonnèrent les identités régionales.<br />

Per<strong>du</strong>rent-elles encore aujourd’hui ? Le Bicentenaire en 1989, dont Rémy Pech<br />

rappelle le fort impact en Haute-Garonne, a constitué <strong>un</strong>e étape importante dans<br />

le processus de transmission historique. Alors qu’on proclame désormais partout que<br />

la « révolution est terminée », Michel Vovelle nous livre sa réflexion sur l’héritage révolutionnaire<br />

et sa mémoire. La Révolution française, <strong>un</strong> patrimoine devenu consensuel ?<br />

Ou <strong>un</strong> héritage toujours vivant et polémique ?<br />

Christine Dousset, maître de conférences en histoire moderne à l’<strong>un</strong>iversité de<br />

Toulouse et membre de FRAMESPA /UMR 5136.<br />

Midi-Pyrénnées Patrimoine | DOSSIER 27


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

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Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Par Guy Astoul.<br />

Docteur en histoire,<br />

il est chargé de cours<br />

en histoire moderne à<br />

l’<strong>un</strong>iversité de Toulouse.<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Mars 1789. Le pays des croquants, si prompt au xvii e siècle à se mobiliser contre les exigences<br />

royales, est de nouveau en ébullition. Confronté à <strong>un</strong>e grave crise politique et financière,<br />

le roi Louis XVI a convoqué les états généraux et, selon la procé<strong>du</strong>re qu’il a engagée en janvier,<br />

chaque comm<strong>un</strong>auté est invitée à lui faire part des doléances de ses sujets. Comme partout<br />

dans le Quercy, les habitants de Boissières se ré<strong>un</strong>issent pour rédiger leur cahier de doléances<br />

et désigner leurs députés à l’assemblée de sénéchaussée. Cela réveille bien des rancœurs.<br />

« Pour obéir aux ordres de Sa Majesté… »<br />

La première assemblée des habitants se ré<strong>un</strong>it le 1 er mars à Boissières. Reflétant <strong>un</strong> débat<br />

probablement très vif à l’encontre <strong>du</strong> seigneur <strong>du</strong> lieu, <strong>un</strong> « cayer de plaintes et doléances que<br />

la comm<strong>un</strong>auté de Boissières prie Son Bon Roy de prendre en considération » est rédigé à la<br />

fin de la ré<strong>un</strong>ion. Une deuxième assemblée est tenue le 8 mars 1789 « au son de la cloche, de la<br />

manière accoutumée. Sont comparus en l’auditoire de la paroisse de Boissières par devant nous<br />

Jean Viguié, procureur d’office, Jean Bris, Jean Pouly, consuls » et d’autres contribuables<br />

<strong>du</strong> lieu. Ce jour-là, il s’agit de désigner les députés de la comm<strong>un</strong>auté qui seront chargés<br />

d’apporter le lendemain à Cahors le cahier de doléances à l’assemblée des députés <strong>du</strong> tiers<br />

état de la sénéchaussée. « La pluralité des suffrages s’est ré<strong>un</strong>ie en faveur des sieurs Jean Viguié<br />

et Jean Cantarel [qui ont] accepté la dite commission et promis de s’en acquitter fidèlement. »<br />

Ils ont pouvoir de « proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins<br />

de l’État… et le bien de tous et de chac<strong>un</strong> des sujets de Sa Majesté ». Une dernière assemblée,<br />

celle des trois ordres pour la préparation des états généraux, se ré<strong>un</strong>it le 16 mars à Cahors:<br />

elle pro<strong>du</strong>it <strong>un</strong> cahier de synthèse de chac<strong>un</strong> des ordres.<br />

L’égalité fiscale réclamée<br />

Le cahier de Boissières est court. Il résume les mécontentements, les revendications<br />

et les remèdes proposés en se limitant à l’essentiel. Adressant ses prières à « Son Bon Roi »,<br />

il témoigne de respect à l’égard de « Sa Majesté » et concentre ses critiques sur la remise<br />

en cause des privilèges.<br />

Les habitants de cette comm<strong>un</strong>auté, comme souvent dans le Quercy, se plaignent<br />

d’abord de la mauvaise qualité de la terre : « Son sol ingrat par lui-même est dénué<br />

de toute fécondité. » Lorsqu’ils mentionnent les « prés environnés de hautes montagnes »,<br />

ils évoquent la topographie <strong>du</strong> lieu : <strong>un</strong>e vallée profondément encaissée dans le plateau<br />

<strong>du</strong> causse où se trouvent les meilleures terres, trop souvent « comblées » par les matériaux <strong>du</strong>s<br />

à l’érosion.<br />

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Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

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Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

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Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Petite province pyrénéenne rattachée au début <strong>du</strong> xviii e siècle à la généralité de Bordeaux,<br />

la Bigorre est entraînée dans divers remaniements territoriaux qui, souvent éphémères, contribuent<br />

à la confusion administrative mais n’en tra<strong>du</strong>isent pas moins, par <strong>un</strong> paradoxe apparent,<br />

la volonté de réforme de la monarchie. Intégrée dans la généralité d’Auch, créée en 1716, elle<br />

échoit de 1784 à 1787 à la généralité temporairement reformée de Pau et Bayonne, avant de<br />

revenir dans le giron d’Auch.<br />

Dès 1764, le marquis d’Argenson, fidèle à l’esprit réformateur des Lumières, envisage <strong>un</strong>e<br />

division <strong>du</strong> royaume en départements, des circonscriptions moins éten<strong>du</strong>es que la plupart des<br />

provinces. Jusqu’en 1789, cependant, les projets avortés se succèdent, conçus par le magistrat<br />

Guillaume Letrosne ou le géographe Robert de Hesseln, le contrôleur général Calonne,<br />

Condorcet ou encore Sieyès. Si bien qu’à la veille de la Révolution, la Bigorre relève <strong>du</strong> gouvernement<br />

de Bordeaux pour les affaires militaires, <strong>du</strong> parlement de Toulouse pour la justice,<br />

de la généralité d’Auch pour toutes les affaires administratives et de l’archevêché d’Auch, celui<br />

de la Novempopulanie, pour les affaires religieuses. Sans oublier la bigarrure des privilèges,<br />

des libertés traditionnelles et autres particularismes locaux découlant des droits acquis et des<br />

droits d’usage. La confusion est telle que, lors de la convocation des états généraux, l’administration<br />

royale s’adresse à des bailliages imaginaires alors qu’elle en oublie de bien réels.<br />

En abolissant les privilèges, tant ceux des indivi<strong>du</strong>s et des ordres que ceux des provinces,<br />

principautés, pays, cantons, villes et comm<strong>un</strong>autés, la nuit <strong>du</strong> 4 août 1789 facilite la discussion<br />

<strong>du</strong> projet de réforme administrative. Les premiers débats ont commencé dès juillet à la Constituante.<br />

Mais les véritables travaux ne débutent que lorsque Thouret, l’<strong>un</strong> de ses membres<br />

les plus influents, favorable à la réforme administrative, « rapporte » devant l’Assemblée le<br />

29 septembre. Au terme d’échanges parfois vifs, la Constituante décide que le territoire sera<br />

divisé en <strong>un</strong> nombre de départements qui pourra varier entre 75 et 85.<br />

« Annexer »<br />

Barère, député de la petite Bigorre, souhaite que la division soit fondée, non sur le territoire<br />

mais sur la population : « La base territoriale est fausse, argumente-t-il ; <strong>un</strong> pays est couvert de<br />

moissons, <strong>un</strong> autre de bruyères ; ici des hommes sont entassés dans des villes ; à côté les campagnes<br />

sont désertes. » Or, estime-t-il, la Bigorre, avec ses « 120 000 habitants dans <strong>un</strong> espace de 144 lieues<br />

carrées […] annonce déjà <strong>un</strong>e population très serrée ».<br />

Dès le mois de novembre, devant le Comité de constitution et en présence des<br />

députés <strong>du</strong> Béarn, de la sénéchaussée d’Auch, <strong>du</strong> Comminges et de l’Armagnac, Barère,<br />

épaulé par le député Dupont, de Luz-Saint-Sauveur, l’autre représentant <strong>du</strong> tiers état de<br />

Par José Cubero.<br />

Historien.<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées


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s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

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la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

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Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

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Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Jean-Paul Marat, l’<strong>un</strong> des personnages les<br />

plus en vue de la Montagne, fut assassiné<br />

le 13 juillet 1793 par Charlotte Corday.<br />

Sa mort provoqua <strong>un</strong>e vive émotion.<br />

David fut chargé de régler les obsèques ;<br />

on lui demanda de peindre <strong>un</strong> portrait<br />

analogue à celui de Le Peletier de Saint-<br />

Fargeau qui ornait déjà la salle des séances<br />

de la Convention. David s’exécuta.<br />

Le tableau – aujourd’hui aux musées<br />

royaux des Beaux-Arts de Belgique, à<br />

Bruxelles, – terminé en octobre, fut offert<br />

à la Convention le 15 novembre. Il devait<br />

être ensuite diffusé par la gravure.<br />

C’est sans doute le chef-d’œuvre de la<br />

peinture révolutionnaire. Marat, dans sa<br />

baignoire, est en train de travailler à son<br />

courrier, la plume à la main. L’intérieur<br />

est spartiate : de la baignoire couverte de<br />

draps rapiécés et d’<strong>un</strong>e méchante couverture<br />

verte sort le buste <strong>du</strong> héros. De la main<br />

gauche, il tient la lettre par laquelle Charlotte<br />

Corday est parvenue à s’intro<strong>du</strong>ire<br />

auprès de lui. Sur <strong>un</strong>e caisse de bois brut<br />

qui sert de table, de quoi écrire, <strong>un</strong> assignat<br />

et <strong>un</strong>e lettre destinant cette aumône<br />

à <strong>un</strong>e pauvre veuve et à ses enfants. Une<br />

plaie au haut de la poitrine, <strong>un</strong> couteau<br />

sanglant à terre, quelques taches de sang<br />

disent le drame. L’inscription « À Marat,<br />

David. L’an deux » sur la caisse de bois a<br />

la dignité d’<strong>un</strong>e stèle antique.<br />

L’artiste a réussi à transposer dans<br />

le domaine de l’héroïsme révolutionnaire<br />

<strong>un</strong>e iconographie chrétienne. Marat fait<br />

preuve de pauvreté et de charité chrétiennes<br />

; son corps ressemble à celui d’<strong>un</strong><br />

Christ descen<strong>du</strong> de la Croix. Il s’est sacrifié<br />

pour la patrie ; il est le martyr de la<br />

cause révolutionnaire. La peinture, dans<br />

son dépouillement sévère, atteint au chefd’œuvre<br />

et ne saurait dialoguer qu’avec<br />

les grandes icônes de l’art engagé signées<br />

de Goya, de Delacroix, de Manet, de<br />

Picasso.<br />

Joseph Roques (1754-1847) offre <strong>un</strong>e<br />

toile sur le même thème le 20 mai 1794 à la<br />

Société populaire de Toulouse et présente<br />

l’œuvre le 4 juin au club des Jacobins.<br />

Datée de 1793, elle a sans doute été antidatée<br />

pour être « en phase » avec l’émotion<br />

populaire. À l’évidence, elle s’inspire de la<br />

composition de David, plus connue sans<br />

doute par des descriptions et des croquis<br />

envoyés depuis Paris que par les gravures,<br />

qui ont tardé. Elle soutient pleinement<br />

la comparaison avec le chef-d’œuvre de<br />

David, que Roques n’a pas vu.<br />

Marat, la tête renversée, perd son<br />

sang dans <strong>un</strong>e baignoire recouverte d’<strong>un</strong><br />

drap blanc et d’<strong>un</strong>e couverture bleue. Le<br />

point de vue en plongée permet de dé<strong>taille</strong>r<br />

le sang qui coule et, à droite, <strong>un</strong>e chaise<br />

paillée, le chapeau et l’écharpe <strong>du</strong> conventionnel<br />

: autant de formes d’insistance sur<br />

les couleurs <strong>du</strong> drapeau tricolore. Le rictus<br />

qui déforme le visage est proche de représentations<br />

connues dans l’atelier de David.<br />

Il suffit de très peu pour que l’équilibre<br />

entre actualité tragique et principes esthétiques<br />

que David avait trouvé soit rompu.<br />

On y perd l’<strong>un</strong>iversalité <strong>du</strong> message.<br />

Roques propose <strong>un</strong>e œuvre ten<strong>du</strong>e,<br />

<strong>un</strong>e parfaite illustration de l’histoire de<br />

son temps. Elle a été jugée de façon trop<br />

sévère. Qu’on la compare avec l’Hommage<br />

f<strong>un</strong>èbre à Marat (musée Carnavalet, Paris)<br />

attribué à Fougea, <strong>un</strong>e œuvre présentée au<br />

concours de l’an II, bien plus anecdotique.<br />

On mesurera combien Roques a su concilier<br />

fidélité au réel et gravité tragique.<br />

Roques est resté célèbre pour avoir<br />

formé dans son atelier <strong>un</strong> je<strong>un</strong>e élève<br />

plein d’avenir, le Montalbanais Ingres,<br />

avant que celui-ci ne continue à Paris<br />

chez David. Il fut, comme nombre de ses<br />

contemporains, <strong>un</strong>e « girouette» politique<br />

– ce qui pose question sur la profondeur<br />

des engagements. Révolutionnaire<br />

pendant la Révolution (La Fête de la<br />

Fédération, 1790 ; La Mort de Marat,<br />

1793-1794…), imagier sous l’Empire (Jeux<br />

nautiques sur la Garonne, 1808), il donne<br />

des gages à la Restauration (Autoportrait<br />

avec l’effigie de Louis xviii le Désiré, 1817<br />

– qui a la valeur d’<strong>un</strong>e proclamation ; La<br />

Comm<strong>un</strong>ion <strong>du</strong> <strong>du</strong>c d’Angoulême dans la<br />

cathédrale de Toulouse, 1829), pour ne rien<br />

dire d’<strong>un</strong>e très abondante pro<strong>du</strong>ction religieuse…<br />

Marat fut vite oublié.<br />

Louis Peyrusse<br />

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la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

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Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Par Valérie Sottocasa.<br />

Maître de conférences en<br />

histoire moderne à l’<strong>un</strong>iversité<br />

de Toulouse, elle est membre<br />

de <strong>framespa</strong> /umr 5136.<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Le caractère montagnard <strong>du</strong> Rouergue méridional n’a pas étouffé les échos de la Révolution<br />

française ni épargné au pays les violences qui ont secoué le royaume. Si la Grande Peur<br />

de juillet 1789 gravit péniblement les pentes <strong>du</strong> causse <strong>du</strong> Larzac et celles des monts de<br />

Laca<strong>un</strong>e, renforçant l’ardeur patriotique de la population, des troubles politiques précoces<br />

éclatent dans la région de Millau et de Saint-Affrique. Les questions religieuses suscitent<br />

les premières divisions : Millau est le théâtre de l’<strong>un</strong>e des toutes premières émeutes contre<br />

la Constitution civile <strong>du</strong> clergé, le 25 janvier 1791; Saint-Affrique semble basculer dans <strong>un</strong>e<br />

logique de guerre civile en juillet, lors <strong>du</strong> remplacement <strong>du</strong> curé « réfractaire» par <strong>un</strong> prêtre<br />

ayant accepté de prêter serment à la nouvelle Constitution de l’Église catholique. Dès lors, et<br />

jusqu’à la Restauration, la région est l’<strong>un</strong>e des plus agitées <strong>du</strong> Midi. Terrain d’affrontements<br />

entre patriotes et contre-révolutionnaires, elle voit se déchirer les comm<strong>un</strong>autés villageoises et<br />

urbaines, qui semblent renouer avec <strong>un</strong> passé tragique marqué par la répétition et la violence<br />

des guerres de Religion. Les archives révèlent la vitalité de la fracture qui divise protestants et<br />

catholiques face à la Révolution : les premiers s’engagent dans le mouvement révolutionnaire<br />

– non sans quelques hésitations au moment de la Terreur –, alors que les seconds sont pris<br />

dans <strong>un</strong>e logique de peur et de haine qui les pousse à entrer en résistance.<br />

La Révolution aurait-elle réveillé le souvenir douloureux des guerres de Religion ? La<br />

question soulève nombre d’interrogations portant sur l’équilibre confessionnel dans la région<br />

et la nature des liens qui, tout au long <strong>du</strong> siècle des Lumières, ont pu être tissés entre les deux<br />

comm<strong>un</strong>autés. Elle en appelle d’autres concernant la perception de la question religieuse<br />

au cœur d’<strong>un</strong>e révolution qui est avant tout destinée à changer la politique et la société<br />

d’Ancien Régime. Comment expliquer que des comm<strong>un</strong>autés qui applaudissent à la destruction<br />

de la féodalité se trouvent, quelques mois plus tard, engagées dans <strong>un</strong>e dynamique<br />

contre-révolutionnaire? C’est en revenant sur les grandes étapes qui ont marqué la Révolution<br />

en Rouergue, puis en analysant sur le poids de la mémoire des guerres de Religion dans les<br />

mentalités que des réponses peuvent être apportées à ces interrogations.<br />

Le choc de la Constitution civile <strong>du</strong> clergé<br />

La précocité de la mobilisation populaire contre la réforme de l’Église et <strong>du</strong> clergé est remarquable<br />

dans la région, d’autant que les premiers temps de la Révolution ont été marqués<br />

par <strong>un</strong>e grande sérénité. À plusieurs reprises, les notables locaux et le peuple manifestent<br />

leur approbation à l’égard des mesures révolutionnaires qui mettent à bas l’ancien régime<br />

social et politique. Louis de Bonald, maire de Millau, est à l’origine de la création de l’<strong>un</strong>e<br />

des toutes premières fédérations <strong>du</strong> royaume. Lorsque la nouvelle de l’arrivée de « brigands »<br />

se répand, le 27 juillet 1789 lors de la Grande Peur, le maire prononce <strong>un</strong> discours vibrant<br />

d’émotion en faveur de « l’esprit de concorde et de fraternité » ; dès le 8 août, il lance <strong>un</strong> appel<br />

à l’<strong>un</strong>ion entre les principales cités <strong>du</strong> Rouergue méridional qui forme le socle sur lequel<br />

se met en place la garde nationale dans les mois suivants. Nul ne songe alors à établir <strong>un</strong>e<br />

différence entre les membres protestants et catholiques de cette milice des Temps modernes,<br />

mais il est <strong>un</strong> fait que, tout comme à Nîmes, les réformés sont de loin les plus nombreux en<br />

son sein. Catholiques et protestants, citadins et ruraux soutiennent les premières mesures<br />

de l’Assemblée nationale en faveur de l’égalité civique des citoyens, et les premières élections<br />

m<strong>un</strong>icipales de l’histoire de la nation se déroulent ici sans heurts, alors que les cités de la<br />

plaine, telles Nîmes ou Montauban, voient se fissurer très tôt l’<strong>un</strong>animité patriotique sous<br />

le poids des rivalités politiques et confessionnelles.<br />

Celles-ci éclatent dans le Rouergue méridional lors de l’application de la Constitution<br />

civile <strong>du</strong> clergé. La question religieuse contribue à <strong>un</strong>e indéniable dégradation de l’atmosphère<br />

générale dans le Midi : Montauban en mai, Nîmes en juin, ont été le théâtre de troubles<br />

sanglants. Millau, tournée vers le Midi méditerranéen et peuplée d’<strong>un</strong>e solide minorité<br />

protestante, est sensible à cette évolution politique. Louis de Bonald ne cache pas ses réticences<br />

vis-à-vis de la politique religieuse de l’Assemblée. Devenu membre de l’administration<br />

<strong>du</strong> département, il conserve <strong>un</strong>e influence notable dans la région. Partout, la géographie<br />

religieuse héritée d’<strong>un</strong> passé séculaire est bouleversée par la réforme menée par l’Assemblée<br />

nationale. Des couvents sont fermés, des paroisses supprimées, et l’évêché de Vabre disparaît.<br />

Cette réforme heurte profondément les sensibilités religieuses des Rouergats forgées<br />

par plus d’<strong>un</strong> siècle de Contre-Réforme active. En terre de frontière confessionnelle, curés<br />

et missionnaires ont développé <strong>un</strong>e pastorale engagéeque la révocation de l’édit de Nantes<br />

n’a pas affaiblie. Quoique épargné par les troubles de la guerre des Camisards au début <strong>du</strong><br />

siècle, le Rouergue abrite deux comm<strong>un</strong>autés confessionnelles qui restent méfiantes l’<strong>un</strong>e<br />

envers l’autre. Le serment apparaît ici comme étant l’œuvre des protestants : tout comme les<br />

pasteurs, évêques et curés sont désormais élus par les citoyens, quelle que soit leur confession<br />

ou leur croyance. Les catholiques attachés au culte traditionnel y voient <strong>un</strong>e attaque menée<br />

contre l’Église et destinée à affaiblir son emprise sur les fidèles. C’est toute la construction<br />

mise en place par la Contre-Réforme qui est remise en cause.<br />

À la suite de Millau en janvier 1791, d’autres cités ou bourgs <strong>du</strong> Rouergue sont touchés<br />

par les troubles contre la Constitution civile <strong>du</strong> clergé. Les plus graves surviennent à Saint-<br />

Affrique en juillet de la même année: lors de son arrivée, le curé élu demande immédiatement<br />

à être reçu membre de la Société des amis de la Constitution, où se retrouvent les patriotes,<br />

<br />

Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

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« Grâce à Toulouse, les acquis de la Révolution ont été maintenus dans le Midi, et dans la<br />

France entière, en 1793 et en 1799¹.» Si l’affirmation de Jacques Godechot appelle quelques<br />

nuances, elle con<strong>du</strong>it à s’interroger sur le paradoxe d’<strong>un</strong>e métropole profondément ancrée<br />

dans les traditions d’Ancien Régime, devenue presque sans interruption, de 1793 à 1800,<br />

et <strong>un</strong> des plus fermes bastions républicains.<br />

Avec la suppression des parlements à l’automne 1790, puis la mise en application de la<br />

Constitution civile <strong>du</strong> clergé, les deux institutions les plus prestigieuses et les plus riches de<br />

la ville avaient été démantelées, non sans protestations. La dissolution, en mars 1791, d’<strong>un</strong>e<br />

légion de la garde nationale au cœur <strong>du</strong> quartier parlementaire semblait écarter tout danger<br />

de contre-révolution, mais Toulouse gardait l’image d’<strong>un</strong>e ville où la Révolution avait <strong>du</strong><br />

mal à s’imposer.<br />

Fondé le 6 mai 1790 sous le nom de Société des amis de la Constitution, le club jacobin<br />

de Toulouse, principalement composé de bourgeois aisés, s’était jusqu’alors consacré à<br />

la défense de la politique de la Constituante et à la préparation des élections, qui portèrent<br />

surtout au pouvoir des hommes de loi. Lors de l’émotion provoquée par la fuite <strong>du</strong> roi,<br />

il réaffirma le <strong>10</strong> juillet 1791 son attachement à la Constitution monarchique. Pourtant,<br />

le 14 décembre, <strong>un</strong>e première radicalisation se manifestait par la création d’<strong>un</strong> « comité de<br />

surveillance» et, le lendemain, par <strong>un</strong>e adresse menaçante des « citoyens de Toulouse au roi des<br />

Français ». Le même jour, 354 citoyennes, au nom de <strong>10</strong>00 « qui n’ont su signer », envoyaient<br />

<strong>un</strong>e adresse tout aussi virulente.<br />

Par Georges Fournier.<br />

Il est professeur émérite<br />

d’histoire à l’<strong>un</strong>iversité<br />

de Toulouse.<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Naissance <strong>du</strong> sans-culotte<br />

Dès le début de 1791 le club, devant le retentissement <strong>du</strong> conflit religieux dans les milieux<br />

populaires, décide de faire alterner séances particulières réservées aux sociétaires et séances<br />

publiques. Avec la participation d’ecclésiastiques réputés, la controverse attire <strong>un</strong> nombreux<br />

public ; les femmes y sont admises, avant de développer <strong>un</strong>e certaine autonomie dans <strong>un</strong>e<br />

Société des citoyennes amies de la Constitution dont on sait peu de choses. Progressivement,<br />

les débats politiques trouvent place dans les séances publiques. À partir de l’été 1792 surtout,<br />

la guerre accentue l’évolution : les volontaires avant leur départ, les soldats de passage,<br />

les lettres des combattants, les récits de la presse entretiennent <strong>un</strong>e atmosphère surchauffée.<br />

Le club ne pouvait renoncer à cet enthousiasme patriotique où, à travers l’énumération de<br />

noms de lieux peu familiers, la France se construisait dans les esprits jusqu’aux confins encore<br />

flous de frontières mouvantes. Aux sociétaires, d’opinions divergentes mais obsédés lors des<br />

séances particulières par la nécessité d’<strong>un</strong>e <strong>un</strong>ité définie après mûre discussion, s’imposait<br />

1 La Révolution française dans<br />

le Midi toulousain, Toulouse,<br />

Privat, 1986, p. 304.<br />

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Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

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cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

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Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

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révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Christine Dousset Dans la première partie de<br />

votre ouvrage, consacrée au « legs de la Révolution<br />

», vous dressez <strong>un</strong> large panorama de<br />

cet héritage matériel et immatériel, <strong>du</strong>rable<br />

ou éphémère : des droits de l’homme au<br />

jacobinisme, des institutions aux symboles<br />

révolutionnaires. Pour vous, quelle est la part<br />

la plus vivante de ce legs dans la France de<br />

2007 ?<br />

Michel Vovelle Il est difficile de dire<br />

ce qui est le plus « vivant », c’est-à-dire enraciné,<br />

et ce qui est ressenti comme tel. Durable<br />

est la conquête démocratique qui, après<br />

bien des aléas, reste <strong>un</strong> acquis que l’on peut<br />

espérer irréversible, fondé sur <strong>un</strong> système<br />

de valeurs, <strong>un</strong>e culture politique, <strong>un</strong>e tradition<br />

de luttes pour la liberté. Et puis tout<br />

<strong>un</strong> ensemble de structures sociales et institutionnelles<br />

certes largement bouleversées,<br />

mais qui livrent les cadres spatio-temporels de<br />

l’<strong>un</strong>ivers collectif, comme l’<strong>un</strong>ité nationale,<br />

le code civil…<br />

Christine Dousset A contrario qu’est-ce qui<br />

vous paraît le plus oublié des Français?<br />

Michel Vovelle Il est certain que<br />

toute <strong>un</strong>e partie de ces traits qui ont façonné<br />

<strong>du</strong>rablement le profil de la France ne sont<br />

plus perçus par nos contemporains comme<br />

<strong>un</strong> héritage historique : le paysage rural par<br />

référence à la vente des biens nationaux, les<br />

départements comme <strong>un</strong> gigantesque découpage<br />

de l’espace, le système métrique – qui<br />

mit <strong>un</strong> temps à s’imposer –, mais aussi bien<br />

le partage laïc, aux fondements de l’état civil,<br />

au même titre que la liberté de pensée, de<br />

religion et d’expression, pour ne prendre que<br />

quelques exemples. Les images aussi s’effacent<br />

: celles des hommes, des événements,<br />

des luttes dont le souvenir, comme celui des<br />

symboles transmis, se perd.<br />

Christine Dousset À ce sujet, quel regard<br />

portez-vous sur la place et le contenu de<br />

l’enseignement de la Révolution, de l’école<br />

primaire au lycée ?<br />

Michel Vovelle Cet enseignement a<br />

représenté <strong>un</strong>e rubrique importante dans le<br />

système pédagogique et civique initié par la<br />

Troisième République. La référence à l’événement<br />

fondateur de la république et de la<br />

démocratie justifiait sa place dans l’enseignement<br />

élémentaire et secondaire évoquant les<br />

journées et les héros.<br />

L’enseignement et la perception de l’histoire<br />

ont évolué: la «longue <strong>du</strong>rée» rend plus<br />

difficilement transmissible l’explication de la<br />

rupture que représente la décennie événementielle.<br />

Mais surtout, la remise en cause par<br />

l’historiographie «critique» <strong>du</strong> discours de la<br />

tradition républicaine et progressiste contribue<br />

à minorer la place réservée dans l’histoire<br />

de l’humanité à la césure de 1789 comme à<br />

l’exception française. La part dévolue à la<br />

Révolution dans les programmes s’en ressent,<br />

de l’école élémentaire jusqu’aux instances de<br />

l’enseignement supérieur et de la recherche.<br />

Si croire à la Révolution aujourd’hui c’est<br />

continuer – sans plus d’illusions qu’il n’en<br />

faut – de croire au progrès de l’émancipation<br />

humaine à partir des luttes collectives, alors<br />

la Révolution n’est pas « terminée ».<br />

Christine Dousset L’actualité récente a mis en<br />

évidence des tentatives politiques de réutilisation<br />

d’<strong>un</strong> héritage directement issu de<br />

la Révolution mais largement abandonné,<br />

voire contesté, comme les références à la<br />

nation et au patriotisme de la Marseillaise,<br />

apparu en 1792 au moment de la guerre et de<br />

la naissance de la République. Quel regard<br />

d’historien portez-vous sur ce phénomène de<br />

résurgence assez inatten<strong>du</strong> qui tra<strong>du</strong>it <strong>un</strong>e<br />

interrogation sur l’identité nationale?<br />

Michel Vovelle La référence à la nation<br />

et à la patrie a tenu <strong>un</strong>e place importante<br />

dans l’héritage de la Révolution et dans <strong>un</strong>e<br />

mémoire véhiculée à partir de symboles<br />

comme le drapeau et l’hymne national.<br />

« Progressistes » au fil des luttes <strong>du</strong> xix e siècle<br />

de la bourgeoisie libérale, qui les instrumentalisa<br />

sous la Troisième République au<br />

service d’<strong>un</strong>e idéologie nationale et civique,<br />

culminant lors <strong>du</strong> choc de la Première Guerre<br />

mondiale, ces symboles étaient récusés par les<br />

mouvements révolutionnaires des travailleurs<br />

à la fin <strong>du</strong> xix e siècle au nom de l’internationalisme.<br />

La montée <strong>du</strong> péril fasciste dans les<br />

années 1930 a provoqué la réconciliation <strong>du</strong><br />

drapeau rouge et <strong>du</strong> tricolore, scellée dans<br />

les combats de la Résistance. Qu’en restet-il<br />

aujourd’hui ? Fin de l’armée nationale,<br />

accaparement par l’extrême droite d’<strong>un</strong>e<br />

idéologie chauvine et discriminante, on se<br />

dispute actuellement <strong>un</strong> peu dérisoirement,<br />

la propriété de symboles qui appartiennent<br />

en fait au peuple français dans sa tradition<br />

révolutionnaire.<br />

Christine Dousset Vous insistez dans votre<br />

livre sur la dimension conflictuelle de l’héritage<br />

de la Révolution, <strong>un</strong>e période marquée<br />

par les luttes et les déchirements politiques<br />

et religieux. Peut-on dire qu’<strong>un</strong>e partie<br />

de l’héritage révolutionnaire est devenue<br />

aujourd’hui consensuelle en se banalisant ?<br />

Et inversement, quels sont les clivages issus<br />

de la période qui survivent encore?<br />

Michel Vovelle Mon ami Maurice<br />

Agulhon, comme d’autres, fait remarquer que<br />

la devise Liberté, Égalité, Fraternité tend à<br />

s’effacer des murs, dans <strong>un</strong>e France moderne<br />

où les libertés fondamentales sont acquises et<br />

(en gros) respectées. Mais l’égalité proclamée<br />

entre les citoyens est loin d’être réalisée, et la<br />

fraternité – rebaptisée solidarité – reste pour<br />

bonne part <strong>un</strong> vœu pieu, car le «consensus»<br />

évoqué se heurte aux réalités d’affrontements<br />

socio-économiques, d’inégalités croissantes,<br />

de cloisonnements culturels accentués par le<br />

caractère pluriethnique de la société contemporaine.<br />

Des failles anciennes que l’on dit<br />

abolies sont susceptibles de rejouer, ainsi sur<br />

le problème de la laïcité… ou sur celui de<br />

la nation à l’occasion d’<strong>un</strong>e consultation sur<br />

l’Europe.<br />

Christine Dousset Vous reprenez dans<br />

l’ouvrage <strong>un</strong>e thématique qui vous est chère :<br />

au moment de la Révolution se dessinent des<br />

« tempéraments » régionaux que vous faites<br />

apparaître à travers tout <strong>un</strong> jeu de cartes<br />

géographiques. Au fil <strong>du</strong> temps, ils se sont<br />

modifiés, mais présentent des éléments de<br />

continuité frappants dans l’espace français.<br />

Dans cette perspective, peut-on dégager <strong>un</strong>e<br />

spécificité de la région Midi-Pyrénées ?<br />

Michel Vovelle En fait, je n’aime guère<br />

le terme de «tempéraments », dont j’use pour<br />

sa commodité, comme certains sociologues<br />

et anthropologues (Hervé Le Bras et Emmanuel<br />

Todd). Je ne crois pas à des ancrages<br />

«invariants » dont la clef se trouverait dans le<br />

paysage… ou la structure familiale. Je crois<br />

à des héritages collectifs complexes (sociaux,<br />

agraires, démographiques et culturels),<br />

<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées


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Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

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château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

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cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

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Des Grands Appartements à l’escalier de la<br />

Reine, de la galerie des Glaces aux fontaines et<br />

autres fabriques <strong>du</strong> parc, Versailles resplendit<br />

de marbres dont la diversité et la richesse furent<br />

expressément voulues par Louis XIV. L’origine de<br />

cette chatoyante parure est souvent ignorée ou,<br />

au mieux, considérée comme italienne. Pourtant,<br />

si les blancs et les gris furent effectivement achetés<br />

en Toscane, à Carrare, de nombreuses variétés<br />

colorées parvinrent <strong>du</strong> sud <strong>du</strong> royaume de France,<br />

des Pyrénées notamment. Mais la provenance de<br />

ces marbres n’est pas leur seule particularité : leur<br />

éclat laisse peu deviner combien leur recherche,<br />

leur extraction ou leur transport donnèrent lieu à<br />

<strong>un</strong>e extraordinaire aventure de la matière, menée<br />

dans la démesure.<br />

les ressources <strong>du</strong> royaume<br />

Ce fut à l’apogée de la haute Renaissance, <strong>du</strong>rant le<br />

règne d’Henri II, que naquit en France la volonté<br />

d’exploiter les ressources des « monts Pyrénées ».<br />

Les marbres qui y furent extraits servirent dans les<br />

palais et les tombeaux royaux, et les carrières continuèrent<br />

à fournir maints décors de châteaux et de<br />

cathédrales <strong>du</strong>rant le xvii e siècle. Toutefois, sous<br />

Colbert, la recherche, l’extraction et le transport<br />

de ces pierres furent véritablement et systématiquement<br />

organisés, éten<strong>du</strong>s au Minervois et à la<br />

Provence. Les besoins suscités par le Louvre, puis<br />

par Versailles, nécessitèrent d’engager <strong>un</strong>e véritable<br />

politique marbrière qui développa les ressources<br />

nationales au profit de l’image royale, <strong>un</strong>e image<br />

digne des reflets les plus brillants de l’Antiquité.<br />

Une recherche et <strong>un</strong>e expertise éten<strong>du</strong>e des carrières<br />

<strong>du</strong> royaume furent entreprises, et leur exploitation<br />

fut menée par des négociants spécialisés, puis par<br />

des compagnies sous contrat.<br />

Dans les Pyrénées, les carrières anciennes de<br />

Campan, au-dessus de Bagnères-de-Bigorre, fournirent<br />

<strong>un</strong> «verd verd» considéré comme «semblable<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

à l’émeraude » et <strong>un</strong> vert bleu écharpé de grenat<br />

et fouetté de blanc, dit « campan grand mélange ».<br />

À Sarrancolin, dans la proche vallée d’Aure, ce fut<br />

<strong>un</strong> « gris agate » mêlé d’ocre doré et strié de rouge<br />

écarlate qui fut recherché et exploité jusqu’ « au<br />

haut d’<strong>un</strong> précipice», alors qu’à l’entrée de la même<br />

vallée <strong>un</strong> marbre finement fracassé de blanc et de<br />

noir fut si apprécié que, sous l’appellation prestigieuse<br />

de « petit antique », il fut exporté à Rome<br />

<br />

<br />

<br />

<strong>du</strong>rant des siècles, tout particulièrement pour<br />

y orner autels et sanctuaires¹. En Comminges,<br />

entre Sauveterre et Barbazan, on extrayait deux<br />

autres variétés «propres aux décors lugubres », <strong>un</strong><br />

noir parfait et <strong>un</strong> conglomérat de cailloutis noirs,<br />

ocres et blancs qui reçut le nom de «brèche grise».<br />

À Saint-Béat, enfin, on désespéra de retrouver<br />

le blanc statuaire loué par les Romains, mais on<br />

exploita des gris et des blancs comm<strong>un</strong>s particulièrement<br />

adaptés à l’architecture et aux bassins de<br />

fontaines en raison de leur résistance. La spectaculaire<br />

carrière <strong>du</strong> proche village de Cierp ne fut<br />

qu’<strong>un</strong> temps utilisée, car dès 1670-1675 son rouge<br />

« sang de bœuf » fut supplanté par le fameux<br />

« rouge <strong>du</strong> Languedoc », flammé de blanc et issu<br />

des carrières <strong>du</strong> Minervois. Il associait somptueusement<br />

le rouge de la Passion au blanc de la Résurrection,<br />

d’où son appellation d’« incarnat » et son<br />

succès en colonnes et panneaux pour les retables<br />

d’autels, notamment à Saint-Pierre de Rome et<br />

dans toute l’Italie.<br />

La fourniture de ces marbres nationaux, débutée<br />

en 1664 sous Colbert, atteignit des proportions<br />

considérables jusqu’en 1688, sous la haute direction<br />

de Louvois. Bien que périodiquement interrompue<br />

par les multiples conflits <strong>du</strong> règne, elle permit la<br />

création d’œuvres innombrables dans les demeures<br />

royales. En 1712, l’activité reprit sous l’égide <strong>du</strong><br />

<strong>du</strong>c d’Antin, premier directeur des Bâtiments <strong>du</strong><br />

roi, qui créa <strong>un</strong> véritable département des marbres<br />

au sein de ses services, avec des contrôleurs et des<br />

inspecteurs nationaux et régionaux, afin de hausser<br />

encore la qualité des matériaux extraits. Natif de<br />

Montespan, en Guyenne, le <strong>du</strong>c d’Antin était particulièrement<br />

attaché à ce que les Pyrénées soient<br />

représentées avec honneur à Versailles: « Je ne veux<br />

rien épargner pour cela.» À ces fins, il fit périodiquement<br />

vérifier la qualité des excavations par ses<br />

contrôleurs, tels les marbriers Tarlé, père et fils,<br />

qui recherchèrent partout les veines les plus pures<br />

et firent également ouvrir de nouvelles carrières en<br />

Minervois et en Provence. Ces entreprises furent<br />

assistées par les inspecteurs pyrénéens, les Lassus,<br />

père et fils, demeurant à Montréjeau, qui supervisèrent<br />

les carrières et firent lever des cartes, ouvrir<br />

des routes, rectifier des cours d’eau ou aménager<br />

des ports.<br />

1 Le « noir d’aquitaine », ou «grand antique », avait été<br />

découvert par les Romains à Aubert, en Ariège,<br />

et largement exploité.<br />

<br />

<br />

suite de l’article<br />

Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

<br />

En près d’<strong>un</strong> demi-siècle, des milliers de<br />

blocs et de colonnes furent acheminés à Paris,<br />

dans des conditions de transport souvent difficiles,<br />

de chariots en radeaux, de chemins en torrents,<br />

de canaux en fleuves, bateaux et chalands. Car<br />

les surfaces brillantes des lambris de Versailles ne<br />

sont pas qu’<strong>un</strong>e image de faste et de puissance,<br />

elles sont aussi le fruit d’<strong>un</strong> incroyable périple de<br />

la matière.<br />

de l’extraction au flottage<br />

Une fois les veines de marbre repérées, il était<br />

nécessaire de les dégager, opération de « découvert<br />

» qui se faisait à la pioche, au pic et à la<br />

poudre. Après d’importants déblaiements, les<br />

traceurs délimitaient les blocs, qui étaient isolés<br />

de la roche en les cernant de larges et profondes<br />

tranchées, lentement creusées au pic et à la pointe,<br />

afin, ensuite, de les « lever» à l’aide de masses et de<br />

coins. Parfois aussi, pour épargner la belle matière,<br />

étaient utilisées de longues scies, des lames d’acier<br />

sans dents qui entraînaient l’eau sableuse dont on<br />

les arrosait afin de <strong>taille</strong>r par abrasion, à raison de<br />

2 à 5mm par heure. Ensuite, les blocs obtenus –qui<br />

pouvaient peser jusqu’à 5 ou 6 t – étaient déplacés<br />

par basculement, puis équarris et dimensionnés à<br />

la pointe avant d’être emportés.<br />

Les principales carrières, en Comminges et<br />

en vallée d’Aure, avaient été ouvertes près de la<br />

Garonne et de la Neste, son affluent, ce qui facilitait<br />

les transports. En revanche, <strong>du</strong>rant des siècles,<br />

le transport des marbres de Campan s’était fait<br />

à l’aide de lents charrois jusqu’à Montréjeau, par<br />

manque de cours d’eau navigables. La nécessité<br />

d’améliorer le circuit des marbres royaux poussa<br />

l’inspecteur Pierre de Lassus, en 1714, à créer <strong>un</strong>e<br />

route permettant de faire comm<strong>un</strong>iquer la carrière<br />

de Campan avec la vallée d’Aure afin de rejoindre<br />

la Neste à Sarrancolin. Cette entreprise d’envergure,<br />

menée en quelques années, permit de gagner<br />

plusieurs journées de transport et d’éviter la réquisition<br />

périodique de dizaines de bœufs de labour<br />

qui, <strong>du</strong>rant si longtemps, avait suscité les plus vives<br />

protestations de la part des populations.<br />

Sur la Neste et la Garonne se faisait <strong>un</strong><br />

intense trafic de bois, en bûches dérivantes, en<br />

trains de rondins ou en radeaux. Descen<strong>du</strong>s des<br />

carrières sur des traîneaux, « lissés» en les retenant<br />

par de fortes cordes ou traînés par des bœufs, les<br />

blocs étaient chargés en rivière sur des radeaux de<br />

faible largeur. Selon leur <strong>taille</strong>, de <strong>un</strong> à cinq de<br />

ces blocs étaient placés avec engins et agrès sur<br />

les radeaux, pour <strong>un</strong>e charge de 2 à 6 t environ.<br />

Ces radeaux étaient composés par leurs con<strong>du</strong>cteurs,<br />

qui taillaient, acheminaient et assemblaient<br />

les bois, au minimum sept à huit troncs de sapin<br />

fortement liés entre eux, d’<strong>un</strong>e longueur moyenne<br />

de 11m et de diamètres oscillant entre 25 et 60 cm.<br />

Ils nécessitaient, en eaux tumultueuses et « escaladeuses<br />

», <strong>un</strong> équipage important, fort d’<strong>un</strong> patron<br />

et de quatorze rameurs. L’entreprise était difficile<br />

et dangereuse –il survenait parfois des naufrages–,<br />

car la descente ne pouvait se faire, pour raison de<br />

poids, que lors des hautes eaux, <strong>du</strong>rant la courte<br />

période de la fonte des neiges.<br />

À Montréjeau, où se rejoignent le fleuve et son<br />

affluent, avait lieu la première rupture de charge<br />

afin de passer à des radeaux plus grands, adaptés<br />

au courant. Ces transports étaient honnêtement<br />

payés et les bois s’en trouvaient exonérés de droits,<br />

mais l’appât <strong>du</strong> gain suffisait rarement à motiver<br />

radeliers et marchands. L’aventure était périlleuse<br />

et les hommes, à cause de la pesanteur des blocs,<br />

se trouvaient continuellement immergés dans<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

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<br />

<br />

suite de l’article<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

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Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

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(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

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Le paysage en Midi-Pyrénées<br />

<br />

<br />

<strong>un</strong>e eau glacée. De fait, pour favoriser l’approvisionnement<br />

royal, il fallut souvent recourir à la<br />

contrainte, par arrêt <strong>du</strong> parlement ou ordonnances<br />

des intendants de la province.<br />

Arrivés à Toulouse, au port Garaud, après<br />

avoir franchi avec difficulté le passelit de Cazères,<br />

les marbres étaient à nouveau déposés à terre pour<br />

la vente des bois, et les blocs ne repartaient que<br />

lorsqu’ils pouvaient prendre place sur de nouveaux<br />

radeaux, formés par des marchands bordelais. Dès<br />

la reprise de leur périple, à quelques centaines de<br />

mètres <strong>du</strong> port Garaud, les radeliers devaient<br />

affronter <strong>un</strong>e nouvelle et terrible épreuve: le passelit<br />

des moulins <strong>du</strong> Bazacle, <strong>un</strong>e retenue qui occasionnait<br />

<strong>un</strong> saut de plusieurs mètres de haut sur<br />

<strong>un</strong>e rampe rapide, souvent qualifiée de « cascade<br />

impraticable », cause de nombreux naufrages.<br />

À Toulouse également arrivaient par le canal royal<br />

les «rouges <strong>du</strong> Languedoc», extraits des carrières de<br />

Ca<strong>un</strong>es et de Félines, en Minervois. Au-delà toutefois,<br />

les obstacles étaient moins périlleux, quelques<br />

gravières, des îles, des rochers, des arbres penchés,<br />

des moulins à nef, ou encore le risque de heurter<br />

<strong>un</strong> bloc précédemment per<strong>du</strong> ou de s’égarer lors de<br />

crues soudaines. M<strong>un</strong>is de passeports royaux leur<br />

évitant de payer les droits de passage, les radeliers<br />

descendaient le cours <strong>du</strong> fleuve jusqu’à Bordeaux,<br />

où les marbres étaient déchargés, soit directement<br />

sur des bateaux en accostant à marée haute,<br />

soit, le plus souvent, sur ou aux abords des quais.<br />

Ils étaient ensuite hissés sur des bateaux hollandais<br />

ou sur des frégates royales d’<strong>un</strong> tonnage<br />

suffisant puis, après avoir longé les côtes <strong>du</strong>rant<br />

plusieurs semaines, ils étaient déchargés au Havre<br />

sur de forts radeaux qui les menaient à Rouen.<br />

<br />

Là, ils étaient encore déchargés et stockés, puis<br />

ils étaient placés sur des gribanes à fond plat qui<br />

étaient halées jusqu’à Paris, au port de la Conférence,<br />

près des Tuileries, au niveau de l’actuelle<br />

place de la Concorde.<br />

Là, enfin, ils intégraient les magasins <strong>du</strong> roi<br />

où ils étaient confiés à des équipes de marbriers qui<br />

les mettaient en œuvre. Ils étaient débités, taillés,<br />

moulurés, transformés en pavements géométriques<br />

ou marquetés, en lambris incrustés ou en cheminées<br />

sculptées. L’étape ultime était celle <strong>du</strong> polissage,<br />

qui faisait apparaître et resplendir les veinures,<br />

les brillances et les teintes tant appréciées.<br />

<br />

la gloire <strong>du</strong> roi-soleil<br />

À Versailles, ce fut d’abord l’appartement des Bains,<br />

puis les Grands Appartements qui furent parés<br />

de marbres essentiellement venus <strong>du</strong> Midi et des<br />

Flandres, récemment conquises. Cet approvisionnement<br />

avait été voulu, concerté, afin de rassembler<br />

et d’exposer fièrement les richesses d’<strong>un</strong> royaume<br />

en expansion, capable de modifier le cours <strong>du</strong><br />

temps jusque dans <strong>un</strong> de ses éléments les plus éternels<br />

et les plus symboliques: le marbre, considéré<br />

comme l’<strong>un</strong> des jalons de la création et l’<strong>un</strong>e des<br />

marques les plus vives de l’Empire romain. L’historiographe<br />

<strong>du</strong> Roi-Soleil, André Félibien, exprima<br />

clairement cette concurrence avec l’Antiquité<br />

et avec l’Italie en écrivant, dès 1674 : « Tous ces<br />

lieux sont pavez et enrichis de différentes sortes de<br />

marbre que le roy a fait venir de plusieurs endroits<br />

de son Royaume, où depuis dix ans l’on a découvert<br />

des carrières de marbre de toutes sortes de couleurs,<br />

et aussi beaux que ceux que l’on amenoit autrefois de<br />

Grèce et d’Italie. »<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

Les marbres étaient alors présentés en<br />

panneaux géométriques, comme d’immenses<br />

marqueteries de pierres <strong>du</strong>res mettant en valeur<br />

les variétés les plus rares, à la manière de bijoux<br />

enchâssés. Les embrasures de portes et de fenêtres<br />

furent arasées, afin de laisser glisser la lumière,<br />

alors que sur les murs, les panneautages furent<br />

fortement moulurés pour la retenir. Ce fut encore<br />

le cas dans les grands escaliers, celui des Ambassadeurs<br />

et celui de la Reine, seul conservé, où les<br />

verts de Campan furent particulièrement mis à<br />

l’honneur. Dans le salon de la Guerre, cependant,<br />

s’amorce <strong>un</strong>e mutation qui se déploie dans la galerie<br />

des Glaces, <strong>un</strong> traitement moins fractionné, avec<br />

<br />

<br />

<br />

<br />

de longues plaques jouant plus <strong>un</strong>iformément de<br />

la lumière. Mais dans la chapelle royale, au début<br />

<strong>du</strong> xviii e siècle, on atteignit des sommets dans l’art<br />

de la découpe, avec <strong>un</strong> époustouflant pavement de<br />

fine marqueterie florale. Enfin, au terme de cette<br />

évocation très restreinte des splendeurs marmoréennes<br />

de Versailles, il faut placer les décors <strong>du</strong><br />

salon d’Hercule, débutés <strong>du</strong> vivant <strong>du</strong> roi. Là, les<br />

marbres de la plus haute qualité sont agencés avec<br />

grâce et raffinement, tant sur les murs que dans<br />

la majestueuse cheminée où les bronzes dorés se<br />

marient avec <strong>un</strong> incomparable sarrancolin.<br />

Sous le lustre <strong>du</strong> marbre, dont les teintes<br />

sont rehaussées par les miroitements de l’or,<br />

il faut distinguer le long cheminement de la matière<br />

brute, inerte, informe, révélée à la lumière par la<br />

prouesse des hommes pour, au terme d’immenses<br />

efforts, refléter la gloire <strong>du</strong> Roi-Soleil.


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

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(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

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<br />

L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail est née de deux<br />

circonstances. Tout d’abord, l’ancienne faculté des<br />

lettres construite sous la Troisième République<br />

pour 200 étudiants (effectifs de 1890) étouffe<br />

dans ses anciens locaux, bien trop exigus malgré<br />

des réaménagements. En effet, elle compte à la<br />

fin des années 1960 plus de 12 000 inscrits. Hors<br />

quelques baraquements militaires disponibles sur<br />

l’ancien terrain de l’Arsenal, il n’y a auc<strong>un</strong> moyen<br />

de s’étendre. Il faut construire, mais où? L’Arsenal,<br />

à partager avec les juristes, est trop petit. On songe<br />

<strong>un</strong> moment aux terrains des casernes de Compans<br />

et de Caffarelli¹, mais Louis Bazerque, maire de<br />

Toulouse de 1958 à 1971 et président de la SETOMIP²,<br />

a usé de toute son influence pour amener le rectorat<br />

à délocaliser la faculté sur la rive gauche de<br />

la Garonne. Après mai 1968, les élus ne furent<br />

d’ailleurs pas fâchés de voir <strong>un</strong> foyer de contestation<br />

s’éloigner <strong>du</strong> centre-ville.<br />

De plus, la loi dite « Edgar Faure » <strong>du</strong><br />

12 novembre 1968 transforme la vieille Université,<br />

institution napoléonienne, en établissements autonomes.<br />

Les facultés toulousaines sont alors divisées<br />

en trois entités: Toulouse I, juridique; Toulouse II,<br />

littéraire ; Toulouse III, scientifique et médicale.<br />

Inscrite tardivement dans le quartier nord de la<br />

ville nouvelle prévue pour <strong>10</strong>0000 habitants, l’<strong>un</strong>iversité<br />

hérite des réflexions de l’équipe Candilis-<br />

Josic-Woods développées lors des projets de<br />

concours pour les <strong>un</strong>iversités de Bochum (1962),<br />

de Berlin-Ouest (1963) et de Zurich (1966). Les<br />

bâtiments toulousains ne se comprennent pas si l’on<br />

n’a pas en mémoire les difficultés <strong>du</strong> programme<br />

et de sa réalisation.<br />

1 Durand, Phalip, Sabatié, Viguié, Yssorche, L’Université<br />

dans la ville: rôle dans l’urbanisation, Université de<br />

Toulouse-Le Mirail, D.E.S. de géographie, 1971, p.49.<br />

2 La Société d’équipement de Toulouse Midi-Pyrénées<br />

(SETOMIP) est chargée de l’aménagement de la zone<br />

à urbaniser en priorité (zuP) <strong>du</strong> Mirail.<br />

<br />

<strong>un</strong>E <strong>un</strong>IvErSITé cOnSTruITE danS l’urgEncE<br />

L’<strong>un</strong>iversité n’est donc pas prévue au programme<br />

mis au concours pour la ville neuve <strong>du</strong> Mirail en<br />

1961. Mais on y songe assez vite : en décembre<br />

1964, L’Officiel <strong>du</strong> bâtiment et des travaux publics<br />

de Toulouse Midi-Pyrénées évoque dans <strong>un</strong> article<br />

la réserve foncière effectuée par le rectorat pour<br />

la construction d’<strong>un</strong>e nouvelle faculté de <strong>10</strong> 000<br />

étudiants autour <strong>du</strong> château <strong>du</strong> Mirail. Les architectes<br />

de l’équipe Candilis-Josic-Woods esquissent<br />

le premier projet en 1966. En juillet 1968, le plan<br />

général est approuvé par le Conseil général des<br />

bâtiments de France, avec quelques réserves. À la<br />

faculté et à la bibliothèque <strong>un</strong>iversitaire conçues<br />

par Alexis Josic, Fabien Castaing et Paul Gardia<br />

sont ajoutés deux restaurants et résidences <strong>un</strong>iversitaires<br />

dessinés par J. Lambert, E. Weiler et<br />

J. Bordes, <strong>un</strong>e bibliothèque centrale de prêt signée<br />

P. de Noyers et C. Le Maresquier, <strong>un</strong> centre d’enseignement<br />

par correspondance de J. Villemur, <strong>un</strong><br />

institut <strong>un</strong>iversitaire de technologie, <strong>un</strong> centre de<br />

médecine préventive, <strong>un</strong> centre d’œuvres sociales<br />

et <strong>un</strong>e maison d’activités culturelles. Le tout est<br />

prévu en deux tranches, qui seront inégalement<br />

réalisées. En mars 1970, la capacité d’accueil de<br />

l’<strong>un</strong>iversité est ramenée à 8000 étudiants, malgré la<br />

très vive protestation <strong>du</strong> doyen Jacques Godechot<br />

qui signale en vain au recteur que 12000 étudiants<br />

fréquentent déjà les différents locaux éparpillés<br />

dans la ville. Un seul restaurant est conservé, et<br />

les événements de Mai68 font annuler la construction<br />

de la cité <strong>un</strong>iversitaire de 1 500 chambres sur<br />

le campus pour éviter <strong>un</strong>e trop grande concentration<br />

d’étudiants. Il est prévu de les disséminer<br />

dans les quartiers alentours et, par là même, de se<br />

prém<strong>un</strong>ir contre <strong>un</strong> possible foyer de contestation.<br />

Sur ce programme, les architectes proposent <strong>un</strong><br />

système de bâtiments fondé sur <strong>un</strong>e organisation<br />

urbaine offrant la possibilité d’<strong>un</strong> développement<br />

cohérent, le tout relié à l’environnement extérieur,<br />

le quartier.<br />

En 1969, <strong>un</strong> premier élément de la future<br />

<strong>un</strong>iversité est construit de manière expérimentale.<br />

Il est réalisé sur <strong>un</strong> mo<strong>du</strong>le carré de 6 m de côté<br />

avec <strong>un</strong>e ossature métallique et <strong>un</strong> remplissage<br />

de briques claires non en<strong>du</strong>ites. Pour des raisons<br />

financières, ce procédé de construction est abandonné<br />

et remplacé par <strong>un</strong>e structure de béton<br />

armé, moins coûteuse. Un scandale éclate lors de<br />

l’appel d’offres pour la construction de la nouvelle<br />

phase en juin 1970 : les concours pour les principaux<br />

lots <strong>du</strong> gros œuvre sont déclarés infructueux.<br />

Une entente illicite au profit de la Société des<br />

grands travaux de Marseille est mise au jour.<br />

Le ministère de l’É<strong>du</strong>cation nationale traite alors<br />

de gré à gré avec l’entreprise de travaux publics<br />

Pascal de Grenoble. Le chantier démarre en juin<br />

1971. Des malfaçons, en particulier de nombreuses<br />

infiltrations d’eau, sont immédiatement perceptibles<br />

: la réception définitive des bâtiments n’est<br />

pas signée et <strong>un</strong> procès est engagé. En 2001,<br />

le trib<strong>un</strong>al déboute l’É<strong>du</strong>cation nationale, considérant<br />

que l’occupation des locaux depuis trente ans<br />

équivalait à <strong>un</strong>e réception définitive des travaux.<br />

Il faut ajouter que la construction s’est faite dans la<br />

hâte: dès octobre 1969, les étudiants sont présents<br />

au Mirail. Ils se dispersent suivant les matières entre<br />

le premier bâtiment expérimental, les comm<strong>un</strong>s <strong>du</strong><br />

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pages suivantes


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

Abonnement<br />

Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées<br />

<br />

Jacques Stella (1596 - 1657)<br />

Un peintre lyonnais à Toulouse<br />

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L’exposition, comme la précédente, est présentée<br />

dans des alvéoles de placoplâtre et de contreplaqué<br />

installées dans la nef des Augustins. Les œuvres<br />

sont soumises à cet incroyable instrument de torture :<br />

éclairage médiocre, absence de hauteur, pour ne rien<br />

dire des vitrines abritant les panneaux précieux.<br />

Toulouse, candidate au titre de capitale européenne<br />

de la culture en 2013, doit prendre la mesure de ce<br />

qui manque à ses musées m<strong>un</strong>icipaux : de l’espace,<br />

de l’espace, encore de l’espace. Faute de quoi, on va<br />

droit au ridicule.


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

Sommaire<br />

Actualités 2007. Les Portes de Gascogne<br />

s’ouvrent à la culture | Quel avenir pour le<br />

château de Lacroix-Falgarde ? | Le chiffre | Des<br />

chiffres à l’appui… <strong>du</strong> patrimoine | Échos de<br />

la Fondation <strong>du</strong> patrimoine | Sous le regard<br />

désabusé des sculpteurs toulousains | La<br />

cathédrale de Mirepoix. Le centenaire d’<strong>un</strong><br />

monument historique | Canal <strong>du</strong> Midi. Menace<br />

sur les platanes<br />

Archives photographiques<br />

Juste <strong>un</strong> regard…<br />

Découvertes Lucien Briet. Instantanés<br />

<strong>du</strong> Haut-Aragon |Raoul Bergougnan. Esquisse<br />

d’<strong>un</strong> portrait<br />

Dossier La Révolution française.<br />

Boissières dans le Quercy. Un cri de colère en<br />

pays croquant | Les Hautes-Pyrénées. Création<br />

révolutionnaire de Barère | Les montres<br />

émaillées sous la Révolution | Hyacinthe<br />

Sermet. Une conscience déchirée | La Mort<br />

de Marat | Révolution et guerre de religion en<br />

Rouergue méridiona l | 1793-1799. Toulouse,<br />

rempart de la République | Questions à Rémy<br />

Pech | Questions à Michel Vovelle l Repères<br />

Recherches Une aventure de la matière.<br />

Les marbres pyrénéens à Versailles | Georges<br />

Candilis. L’<strong>un</strong>iversité de Toulouse-Le Mirail<br />

Guide Expositions Jacques Stella<br />

(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

« Absolumental 2 ». À voir et revoir absolument |<br />

Cahors exhumé des réserves de son musée |<br />

L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

musées <strong>du</strong> Tarn | De belles tenues de sortie… |<br />

Sous les ponts vieux… coulent le Tarn<br />

et l’histoire… Publications 1914-1918<br />

dans l’édition régionale. Rendez-vous Une<br />

dégustation de René Écalle<br />

guide | expositions<br />

« Absolumental 2 »<br />

À voir et revoir absolument<br />

Le néologisme « absolumental<br />

» peut prêter à confusion<br />

; il est pourtant très<br />

bien choisi. « Absolumental<br />

2 » constitue le second<br />

volet d’<strong>un</strong>e exposition visant<br />

à présenter les dernières<br />

acquisitions <strong>du</strong> musée des<br />

Abattoirs. Parmi les œuvres<br />

exposées, certaines sont<br />

cette fois-ci montrées aux<br />

côtés de pièces issues de<br />

la collection permanente<br />

– moderne et contemporaine.<br />

L’accrochage n’est donc ni<br />

historique ni théorique,<br />

mais davantage thématique.<br />

Un choix qui n’est auc<strong>un</strong>ement restric tif<br />

puisque résistant aux limites d’<strong>un</strong>e définition :<br />

le thème privilégié pointe le règne d’<strong>un</strong> « mental<br />

absolu » dans l’art.<br />

Yayoï Kusama, Dots Obsession, 1998. Les Abattoirs, Toulouse (31).<br />

© photographie jl. auriol / yayoî kusama<br />

Midi-Pyrénées Patrimoine | guide 18<br />

Jan Fabre, Nature morte à l’artiste, 2004. Les Abattoirs, Toulouse (31).<br />

© photographie bernard delorme /droits réservés<br />

Le précédent accrochage énonçait son propos<br />

de façon plus didactique (l’importance accordée<br />

au cerveau et à ses représentations) ; il se trouve<br />

à présent affirmé au travers des échos que suscite<br />

le rapprochement d’œuvres réalisées entre les<br />

années trente et aujourd’hui. Sont ainsi déclinés<br />

les « espaces mentaux » d’artistes<br />

actuels aussi différents<br />

que Yazid Oulab (dont<br />

la vidéo bénéficie d’<strong>un</strong>e<br />

nouvelle présentation au sol<br />

très efficace), Grout /Mazéas<br />

ou Elizabeth Creseveur.<br />

Un point comm<strong>un</strong> ?<br />

Flirter avec les limites – <strong>du</strong><br />

fantasme à l’automatisme<br />

en passant par l’utopique, le<br />

fantastique et l’obsession.<br />

Aussi l’installation de la Japonaise<br />

Yayoï Kusama, Dots<br />

Obsession (1998), apparaîtelle<br />

comme le point d’orgue<br />

de l’exposition, le visiteur<br />

y devenant lui-même sujet<br />

aux hallucinations propres à<br />

l’artiste.<br />

D’<strong>un</strong> espace à l’autre,<br />

les rapprochements proposés<br />

sont subtils. S’ils sont d’ordre<br />

formel, le propos n’en est<br />

jamais littéral et se trouve le<br />

plus souvent problématisé.<br />

La salle qui s’ouvre à droite<br />

de l’entrée donne le la. En<br />

son centre trône, calé sur<br />

deux tréteaux, le paon-cercueil de Jan Fabre pour<br />

<strong>un</strong>e Nature morte à l’artiste (2004). Au-delà d’<strong>un</strong>e<br />

inspiration entomologique qui relie l’artiste belge<br />

à Pierre Bettencourt (Papillons de Colombie, 1961),<br />

c’est son <strong>un</strong>ivers tout entier, inspiré par le monde<br />

organique et animal, qui trouve, entre autres dans<br />

les gouaches (1935-1953) d’Eugène Gabritschevsky,<br />

<strong>un</strong> écho très réussi. Plus encore, l’espace mental<br />

de l’artiste démiurge nous apparaît à présent avec<br />

acuité : celui qui associe ses fantasmagories très<br />

personnelles à des temps immémoriaux, comme<br />

chez Fred Deux, dont les « paysages » où se dressent<br />

parfois les profils des statues de l’île de Pâques<br />

offrent <strong>un</strong> cadre magnifique à ces réflexions.<br />

On entre et l’on sort de l’exposition au son de<br />

La Vie en rose, qui émane de la tombe intégrée dans<br />

l’installation de Joël Hubaut, reliquat <strong>du</strong> Psyclom-<br />

Clom créé aux Abattoirs en 2001. Quant aux vociférations<br />

<strong>du</strong> Dandy John Bock, elles con<strong>du</strong>isent au<br />

film que l’artiste avait réalisé pour Le Printemps de<br />

septembre, qui acquiert dans ce contexte <strong>un</strong>e force<br />

nouvelle.<br />

Réjouissante, « Absolumental 2 » est aussi<br />

stimulante, car elle donne accès à l’<strong>un</strong> des essentiels<br />

de l’art – la capacité créative et imaginative conjuguée<br />

à la liberté de l’esprit. Il est ainsi plaisant,<br />

et jamais vain, de rendre à cette exposition non<br />

seulement <strong>un</strong>e, mais plusieurs visites.<br />

Brigitte Aubry<br />

« Absolumental 2 » | jusqu’au 3 juin |<br />

musée des Abattoirs | 76, allées<br />

Charles-de-Fitte, Toulouse (31) |<br />

05 62 48 58 00 (accueil) / 05 3451 <strong>10</strong> 60 |<br />

www.lesabattoirs.org | ouvert tous les<br />

jours de 11h à 19h, sauf le l<strong>un</strong>di.<br />

Coup d’œil…<br />

Le temps d’<strong>un</strong> été, Olivier Debré en cinq lieux<br />

L’insatiable voyageur que fut Debré (1920-1999)<br />

aurait sans doute apprécié que son œuvre soit ainsi<br />

présentée au travers des expositions organisées<br />

conjointement par cinq musées français.<br />

L’exigence <strong>du</strong> peintre s’impose dans l’approche<br />

rétrospective (1944-1997) choisie à Cahors (46)<br />

quand c’est sa prédilection pour les grands formats<br />

qui est montrée à Angers (49). De façon cohérente,<br />

à Roanne (42) est souligné combien la Loire<br />

fut <strong>un</strong> de ses lieux de ressourcement, alors que<br />

le « monde » comme source d’inspiration prévaut<br />

à Millau (12). Les monochromes sur papier impres-<br />

« Olivier Debré, parcours 1944-1997 »<br />

<strong>du</strong> 2 juin au 1 er octobre | musée de Cahors<br />

Henri-Martin (46) | www.mairie-cahors.fr<br />

Cahors exhumé des<br />

réserves de son musée<br />

Le musée comme kaléidoscope de la ville et des<br />

hommes qui l’ont créée. C’est sur ce thème que le<br />

musée de Cahors Henri-Martin poursuit son cycle d’expositions<br />

temporaires préfigurant sa restructuration, et<br />

il se veut cette fois-ci introspectif.<br />

En guise d’archéologie, il exhume les « trésors »<br />

qui dormaient dans ses réserves et nous convie<br />

à <strong>un</strong>e visite de tous les lieux comm<strong>un</strong>s, parfois les<br />

plus éculés, qui fondent le mythe de Cahors depuis<br />

le xix e siècle. Improbable juxtaposition de quelques<br />

chefs-d’œuvre et d’objets plus anecdotiques : l’œil<br />

de verre de Gambetta, le diable <strong>du</strong> pont Valentré…<br />

Pas sûr qu’on les revoie de sitôt !<br />

Le conservateur s’amuse. Avec ses collections,<br />

qu’il prend <strong>un</strong> malin plaisir à dépoussiérer, ordonnancer,<br />

documenter. Avec les codes muséographiques, dont il<br />

teste les genres pour le futur musée, de la série à l’installation,<br />

sans oublier le cabinet de curiosités. Avec<br />

son métier, présentant aussi bien <strong>un</strong>e œuvre <strong>du</strong> Fonds<br />

national d’art contemporain que l’abondante correspondance<br />

qui a permis d’obtenir son dépôt permanent.<br />

Avec son visiteur bien sûr, à qui il fait croire que<br />

son fétiche des îles Gambier, emballé dans <strong>un</strong>e caisse,<br />

est sur le départ ; <strong>un</strong> visiteur finalement<br />

autorisé à pénétrer dans son arrièreboutique,<br />

pleine de surprises.<br />

Si le touriste de passage n’y<br />

piochera, au hasard, que quelques<br />

perles, le Ca<strong>du</strong>rcien se délectera<br />

de cette madeleine au parfum d’enfance.<br />

Mais le musée n’est-il pas<br />

aussi fait par et pour ses habitants ?<br />

« Une archéologie de<br />

Cahors - Les images<br />

de la ville » | jusqu’au<br />

15 mai | musée de Cahors<br />

Henri-Martin | 792,<br />

avenue Émile-Zola,<br />

Cahors (46) |<br />

0565208866 |<br />

www.mairie-cahors.fr/<br />

musee | ouvert tous les<br />

jours de 11h à 18h et le<br />

dimanche de 14h à 18h.<br />

Le Dieu Rongo, Mangareva,<br />

archipel des îles Gambier,<br />

antérieur à 1833.<br />

© photographie nespoulous /<br />

musée de cahors henri-martin<br />

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Prochain dossier…<br />

Le paysage en Midi-Pyrénées


numéro <strong>10</strong> avril /juin [2007]<br />

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(1596 - 1657). Un peintre lyonnais à Toulouse |<br />

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L’estampe, <strong>un</strong> art <strong>du</strong> multiple… dans deux<br />

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