Art de vivre 181907 -2007Languedoc-RoussillonC<strong>en</strong>t ans de guerre du vin1907 - 2007, une série d’événem<strong>en</strong>ts sur cette révolte vigneronne qui gronde toujours.ans, avait lieu la dernière grande révoltepaysanne française. En l’espace dequelques mois, <strong>le</strong> mouvem<strong>en</strong>t de 1907a ébranlé l’actuel<strong>le</strong> Région Languedoc-Roussillon et a t<strong>en</strong>u <strong>en</strong> ha<strong>le</strong>ine la press<strong>en</strong>ationa<strong>le</strong> et l’opinion publique. Manifestationsnombreuses et massives, démissionspolitiques, mutinerie, il s’agitpourtant d’une page de l’histoire deFrance quasim<strong>en</strong>t oubliée aujourd’hui.Un sièc<strong>le</strong> plus tard, plusieurs vil<strong><strong>le</strong>s</strong> dela région se mobilis<strong>en</strong>t pour célébrerl’événem<strong>en</strong>t et <strong>le</strong> graver définitivem<strong>en</strong>tdans la mémoire col<strong>le</strong>ctive.C’est un insecte, <strong>le</strong> phylloxera vastatrix,qui bou<strong>le</strong>versera une première fois laviticulture française. Entre 1866 et 1878,l’<strong>en</strong>vahisseur détruira la totalité du vignob<strong>le</strong>national. Une dizaine d’annéeplus tard, découlant <strong>en</strong> <strong>par</strong>tie de cela,débutera la crise de mév<strong>en</strong>te et desurproduction. Le 11 mars 1907, 87 vigneronsdu village d’Argeliers conduits<strong>par</strong> Marcellin Albert, petit vigneron duMinervois, se r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à Narbonne oùsiège une commission d’<strong>en</strong>quête <strong>par</strong><strong>le</strong>m<strong>en</strong>taire<strong>en</strong>voyée pour étudier la crisede mév<strong>en</strong>te des vins qui sévit depuisplusieurs années maint<strong>en</strong>ant.Conséqu<strong>en</strong>ce directe de la périodephylloxérique, <strong><strong>le</strong>s</strong> vignerons multipli<strong>en</strong>tla fabrication de vins artificiels. Ajoutde sucre et manipulations chimiquesdiverses sont au goût du jour. Cette pratique,une fois généralisée, persiste alorsque <strong><strong>le</strong>s</strong> nouvel<strong><strong>le</strong>s</strong> plantations de cépagestrès ferti<strong><strong>le</strong>s</strong> comm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t à produire.Ainsi, <strong>le</strong> nombre d’hectolitres devin produits dans <strong>le</strong> sud ne cesse d’augm<strong>en</strong>ter,provoquant une chute vertigineusedes cours. Beaucoupde viticulteurs nepeuv<strong>en</strong>t plus vivre de<strong>le</strong>ur exploitation et <strong><strong>le</strong>s</strong>ouvriers agrico<strong><strong>le</strong>s</strong>, premièresvictimes de laréduction des dép<strong>en</strong>ses,ne trouv<strong>en</strong>t plus às’embaucher.Afin d’obt<strong>en</strong>ir <strong>le</strong> droitde vivre <strong>en</strong> travaillant<strong>le</strong>ur terre, ils exig<strong>en</strong>t,<strong>en</strong> lançant un ultimatumau Gouvernem<strong>en</strong>t,que la lutte contre lafraude fasse l’objetd’une loi. Bi<strong>en</strong>tôt rallié <strong>par</strong> Ernest Ferroul,maire socialiste de Narbonne, etappuyé sur une mobilisation généra<strong><strong>le</strong>s</strong>ans distinction d’opinion ni de classesocia<strong>le</strong>, ils inaugur<strong>en</strong>t<strong>par</strong>allè<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t une sériede manifestations populairesde plus <strong>en</strong> plusmassives. Ralliés pour lamajorité à la cause desvignerons, <strong><strong>le</strong>s</strong> municipalitésdémissionn<strong>en</strong>t,bloquant ainsi toute lavie administrative de larégion. A <strong>par</strong>tir de cemom<strong>en</strong>t là, <strong><strong>le</strong>s</strong> événem<strong>en</strong>tsvont s’<strong>en</strong>chaînerde manière dramatique.En juin, <strong>le</strong> Gouvernem<strong>en</strong>tdécide de mettre<strong>en</strong> place des méthodes répressives :l’occupation militaire des principa<strong><strong>le</strong>s</strong>vil<strong><strong>le</strong>s</strong> de la région et l’arrestation de laplu<strong>par</strong>t des membres dirigeants dumouvem<strong>en</strong>t. Le 19 juin, l’arrestation deFerroul, qui semb<strong>le</strong> alors être dev<strong>en</strong>u <strong>le</strong>moteur c<strong>en</strong>tral du combat et de son int<strong>en</strong>sification,est perçue comme provocationet donne lieu à une manifestationquasi spontanée à Narbonne. La t<strong>en</strong>sionest int<strong>en</strong>se : injures, jets de pierres. Lespremiers coups de feu éclat<strong>en</strong>t. C’est <strong>le</strong>drame, <strong>en</strong> deux jours, <strong>le</strong> bilan est lourd :six civils tués et beaucoup de b<strong><strong>le</strong>s</strong>sés. Lanouvel<strong>le</strong> se propage rapidem<strong>en</strong>t et trèsvite d’autres vil<strong><strong>le</strong>s</strong> s’embras<strong>en</strong>t.Perpignan, Montpellier, Lodève, ... Faceà cette nouvel<strong>le</strong> flambée de vio<strong>le</strong>nce, <strong>le</strong>Gouvernem<strong>en</strong>t décide d’apaiser <strong><strong>le</strong>s</strong> esprits.A cet effet, repr<strong>en</strong>ant à son compte<strong>le</strong> combat m<strong>en</strong>é <strong>par</strong> Marcellin Albert, ilmet <strong>en</strong> oeuvre différ<strong>en</strong>tes mesures. Lapromulgation de la loi « t<strong>en</strong>dant à prév<strong>en</strong>ir<strong>le</strong> mouillage des vins et <strong><strong>le</strong>s</strong> abusdu sucrage », la libération provisoire desmembres du comité d’Argeliers, et lacréation de la Confédération Généra<strong>le</strong>des Vignerons <strong>en</strong> font <strong>par</strong>tie.La maîtrise de l’histoire à travers sa connaissancepermet d’affronter l’av<strong>en</strong>ir demanière plus audacieuse et constructive.En 100 ans, la lutte a certes évolué maisil n’<strong>en</strong> reste pas moins qu’aujourd’hui lasituation des vignerons anime toujoursbon nombre de débats.Flo.S.Piste de <strong>le</strong>cture ŒnologiqueExplorer la littérature du vin n’est pas toujours aisé.Passer la somme de guides qui <strong>par</strong>aiss<strong>en</strong>t chaqueannée sur <strong>le</strong> sujet, il est <strong>par</strong>fois diffici<strong>le</strong> de se frayerun chemin de <strong>le</strong>cture pour <strong>le</strong> plaisir de découvrir.Choisir un livre qui évoque <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong>, c’est unpeu comme faire son vin, assemb<strong>le</strong>r <strong>le</strong> <strong>par</strong>fum dessaisons et <strong><strong>le</strong>s</strong> images de terroirs tant de fois foulésdu pieds, imaginés ou inaccessib<strong><strong>le</strong>s</strong>.Les Coteaux du LanguedocDe la typicité, <strong><strong>le</strong>s</strong> vins n’<strong>en</strong> manqu<strong>en</strong>t pas mais il <strong>en</strong>est qui ont eu la réputation d’être si atypique qu’il<strong>le</strong>ur a fallu des années pour atteindre la reconnaissance.Ce fut <strong>le</strong> cas des Coteaux du Languedoc,<strong>en</strong>trés dans l’histoire des appellations d’origine<strong>en</strong> 1985, une av<strong>en</strong>ture que bi<strong>en</strong> des nomslocaux ont animé et nourriss<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core tels laClape, <strong>le</strong> pic Saint-Loup, l’Hortus, Picpoul de Pinet,Faugères, Saint-Chinian, <strong><strong>le</strong>s</strong> Grès de Montpellier…Des terroirs composés d’une mosaïque de sols oùs’<strong>en</strong>racin<strong>en</strong>t des cépages de caractère comme <strong>le</strong>gr<strong>en</strong>ache, la syrah et <strong>le</strong> mourvèdre. «Une pa<strong>le</strong>ttequi donne chaque année quelque chose de nouveau»dis<strong>en</strong>t <strong><strong>le</strong>s</strong> vignerons d’ici. L’ouvrage dernièrem<strong>en</strong>t<strong>par</strong>u aux Éditions Romain Pages, c’est unpeu tout cela : <strong><strong>le</strong>s</strong> morceaux d’histoires de chacunmis bout à bout avec des photos de paysages etd’hommes, prises sur <strong>le</strong> vif, pour tout transportémotionnel. C’est un beau voyage à travers <strong><strong>le</strong>s</strong>générations et la culture du Languedoc. Le récit<strong>par</strong><strong>le</strong> de la transmission et du <strong>par</strong>tage. De la terre.De la mémoire. De demain. De nos <strong>en</strong>fants.C. ZamoraLes Coteaux du Languedoc - Ed.Romain PagesRCS Toulouse B 327 469 706Idée origina<strong>le</strong>M<strong>en</strong>deM<strong>en</strong>de, magici<strong>en</strong>ne d’OIl y a quelques mois, la vil<strong>le</strong> de M<strong>en</strong>de s’est vuedécernée <strong>le</strong> grand prix Cap Com 2006 dans lacatégorie «Faire évoluer <strong><strong>le</strong>s</strong> comportem<strong>en</strong>ts»au titre du développem<strong>en</strong>t durab<strong>le</strong>, pour laréalisation de sa bouteil<strong>le</strong> O de M<strong>en</strong>de.L’initiative est à souligner doub<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t caroutre l’esthétisme de la carafe et l’aspectécologique du concept, plus de 95% de lapopulation s’est déjà manifestée, auprès dela mairie, qui mettait cette carafe à la dispositionde tous <strong><strong>le</strong>s</strong> foyers m<strong>en</strong>dois. Les autresexemplaires sont proposés à la v<strong>en</strong>te. Partant duconstat que ses habitants, <strong>en</strong> dépit des effortsm<strong>en</strong>és <strong>en</strong> matière d’eau, ne réalisait pas à sajuste va<strong>le</strong>ur la qualité de l’eau du robinet, la vil<strong>le</strong>a imaginé un cont<strong>en</strong>ant id<strong>en</strong>tifiab<strong>le</strong> visantà rassurer ses habitants tout <strong>en</strong> <strong><strong>le</strong>s</strong> guidantvers une attitude plus responsab<strong>le</strong> <strong>en</strong> matièred’écologie.10x15 1907.indd 1 20/02/07 9:46:18
19PortfolioDepuis près de 15 ans, Patrice Terraz photographie<strong><strong>le</strong>s</strong> invités du Festival Cinéma d’Alès. Cesportraits, ces quelques instants de pause, commedes <strong>par</strong><strong>en</strong>thèses dans <strong>le</strong> marathon des invités,reflèt<strong>en</strong>t évidemm<strong>en</strong>t l’œil de Patrice Terraz. Ils nese ressemb<strong>le</strong>nt pas, chaque artiste semb<strong>le</strong> dessinerson propre univers <strong>par</strong> sa posture, son regard,son attitude, mais ils ont tous quelque chose <strong>en</strong>commun. Ils sont tous séduisants. Pas de cette beautémédiatique et calibrée qui <strong>en</strong>vahit <strong><strong>le</strong>s</strong> écrans et <strong><strong>le</strong>s</strong>magazines. Ri<strong>en</strong> d’évid<strong>en</strong>t ni de trop tapageur. Plutôtun véritab<strong>le</strong> charme, fugace, diffus et intriguant.La vraie séduction est un mystère. Avec Patrice, <strong>le</strong>mystère s’épaissit.Patrice Terraz est photographe indép<strong>en</strong>dantdepuis 1987. Il vit et travail<strong>le</strong> à Marseil<strong>le</strong>. Iladopte librem<strong>en</strong>t <strong>le</strong> reportage, <strong>le</strong> portrait ou <strong>le</strong>paysage nocturne pour ses travaux personnelsqui ont fait l’objet de nombreuses <strong>expos</strong>itionsà Paris, Marseil<strong>le</strong>, Montpellier, Alès, Cannes,Pa<strong>le</strong>rme, Zurich, Londres, Barcelone, New York.Il est éga<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t l’auteur de Welcome on board– reportage sur <strong><strong>le</strong>s</strong> marins abandonnés édité <strong>par</strong>images <strong>en</strong> Manœuvres <strong>en</strong> novembre 2005.Itinérances, est composé de 70 de ces portraits. AuxEditions Sangam (infosangam@yahoo.fr) 18 € ttc.De haut <strong>en</strong> bas, Agnès Varda, Sergio Lopez, Goran Bregovic,Juliette Binoche, B<strong>en</strong>oît Poelvoorde, Budd Boetticher et TerryZwigoff sous l’oeil de Patrice Terraz.