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Daniel-Henry Kahnweiler : entre commerce et histoire de l'art

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éalité. Le cubisme, écrira-t-il un jour, l’intéresse seulement comme enrichissement <strong>de</strong> la réalité. Il yaurait aussi beaucoup à dire sur le rôle <strong>de</strong> la vision chez <strong>Kahnweiler</strong> <strong>et</strong> Einstein qui composa même untraité <strong>de</strong> la vision, traité r<strong>et</strong>rouvé dans ses archives <strong>et</strong> publié récemment en France 8 .Nous ne savons pas avec exactitu<strong>de</strong> tous les auteurs que <strong>Kahnweiler</strong> a lus <strong>et</strong> médités. Il en citecertains dans ses écrits ou bibliographies : A. Riegl (<strong>et</strong> bien sûr sa notion <strong>de</strong> Kunstwollen), W.Wundt, W.Worringer qui apparaissent dans Der Gegenstand <strong>de</strong>r Ästh<strong>et</strong>ik 9 , dédié à son ami H. Rupf, (H. MoosVerlag, 1971, München). Fort probablement aussi a-t-il lu K. Fiedler. Les grands auteurs allemands luisont familiers tels Ni<strong>et</strong>zsche (<strong>et</strong> le concept <strong>de</strong> Wille zur Macht), Höl<strong>de</strong>rlin, les romantiques égalementqu’il cite volontiers <strong>et</strong> qui à c<strong>et</strong>te époque n’étaient pas encore réellement connus en France, sauf <strong>de</strong>quelques spécialistes. Il faudra attendre les surréalistes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s germanistes notoires pour les introduirevraiment chez les lecteurs français. C<strong>et</strong>te connaissance du romantisme allemand sera pour <strong>Kahnweiler</strong>,tout comme pour Einstein, une <strong>de</strong>s clefs <strong>de</strong> lecture <strong>de</strong>s tableaux contemporains, ceux <strong>de</strong> Klee enparticulier.Si ses amis, dont Einstein, encouragent <strong>Kahnweiler</strong> à écrire sur ses peintres, par souci d’éthique,ce <strong>de</strong>rnier s’y refuse. Il ne veut pas faire <strong>de</strong> publicité pour les artistes <strong>de</strong> sa galerie, ceux dont il vend lestableaux. Sur ce point, il reste toujours très rigoureux voire rigoriste. C’est c<strong>et</strong>te limite <strong>de</strong> la « critiqued’art » qu’il ne veut pas franchir. Ethique <strong>et</strong> esthétique sont pour lui indissolublement liées. Il s’enexplique auprès <strong>de</strong> Carl Einstein, le 21 juill<strong>et</strong> 1924Vous êtes vraiment aimable à mon suj<strong>et</strong> : vous n’avez pas encore oublié mon activité d’écrivain, bienqu’elle appartienne au passé. Non, je ne veux plus rien publier, puisqu’à présent je suis <strong>de</strong> nouveaumarchand d’art : cela me paraît plus n<strong>et</strong>. En conscience je pourrais bien le faire, car je n’achète que ceque j’aime, mais pour le public cela sentirait cependant la publicité pour mes affaires. Alors je me tais . 10Si <strong>Kahnweiler</strong> a connu une pério<strong>de</strong> d’étu<strong>de</strong>s puis d’écriture sur l’art, celui bien entendu qu’ilappréciait, l’art français <strong>de</strong> Cézanne, <strong>de</strong>s Fauves, <strong>de</strong>s Cubistes, pendant <strong>et</strong> après la Gran<strong>de</strong> Guerre, il n’aen revanche jamais cessé <strong>de</strong> lire les revues d’art alleman<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> consulter <strong>de</strong>s réseaux d’informationsrégulièrement alimentés par ses relations <strong>et</strong> amis allemands. <strong>Kahnweiler</strong> lisait ou survolait, pour être aucourant, les meilleures feuilles sur l’art <strong>et</strong> le marché <strong>de</strong> l’art, en particulier Das Kunstblatt, édité par l<strong>et</strong>rès francophile Paul Westheim, Der Cicerone, les revues expressionnistes Die Aktion, Der Sturm, mêmes’il n’appréciait pas ce mouvement. Carl Einstein n’écrivait-il pas dans Die Aktion, la revue <strong>de</strong> son beau-8 In Les Cahiers du Musée national d’art mo<strong>de</strong>rne, C<strong>entre</strong> G. Pompidou, Paris, 58 hiver 1996, avec commentaires<strong>de</strong> Georges Didi-Huberman <strong>et</strong> Liliane Meffre, p. 5-50.9 Il en adresse un exemplaire à la fille <strong>de</strong> Carl Einstein avec c<strong>et</strong>te mention : « Pour Nina avec ma vieille affection, ensouvenir <strong>de</strong> Carl ».10 Opus cit. p. 67.5

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