metierUn métier à découvrirPersonnel Technique Ouvrier <strong>de</strong> Service <strong>de</strong>s CollègesLe 1 er janvier 2006, à la suite <strong>de</strong> la loi sur la décentralisation du 13 août 2004, certains fonctionnaires <strong>de</strong> l’Éducation nationa<strong>le</strong> ont été mis à disposition <strong>de</strong>s col<strong>le</strong>ctivitésterritoria<strong>le</strong>s. Avec la possibilité, au bout d’un an, d’intégrer définitivement la col<strong>le</strong>ctivité. En <strong>Haute</strong>-<strong>Savoie</strong>, 89 % <strong>de</strong>s personnels concernés dans <strong>le</strong>s collèges ont fait ce choix.Les autres conservent <strong>le</strong>ur statut <strong>de</strong> fonctionnaire d’État mais tous sont rémunérés par <strong>le</strong> <strong>Conseil</strong> <strong>Général</strong> et relèvent <strong>de</strong> la Communauté éducative du collège. SalvatoreVergori, agent technique bâtiment au collège Jean-Jacques Rousseau <strong>de</strong> Thonon-<strong>le</strong>s-Bains, et Roselyne Vito, chef <strong>de</strong> cuisine au collège d’Alby-sur-Chéran, comptent parmi <strong>le</strong>s 510techniciens ouvriers <strong>de</strong> service du <strong>Conseil</strong> <strong>Général</strong>.Salvatore Vergori, agenttechnique bâtiment« Je suis une sorte <strong>de</strong> Mac Gyver »Le métier« Mon travail consiste avant tout à réparer tous<strong>le</strong>s dégâts internes au collège : é<strong>le</strong>ctricité, peinture,menuiserie, plomberie… Dans <strong>le</strong>s faits,je suis une sorte <strong>de</strong> Mac Gyver. Tout ce queje récupère est réutilisé. Le moindre morceau<strong>de</strong> ferrail<strong>le</strong> peut être reconverti en équerre,<strong>le</strong> moindre morceau <strong>de</strong> bois peut me servir àréparer une porte.Outre <strong>le</strong>s réparations, je suis éga<strong>le</strong>ment là pourrépondre aux besoins du moment, pour créer telou tel élément nouveau. Quand un professeur abesoin d’un meub<strong>le</strong> ou d’une installation x ou y,je m’y col<strong>le</strong>. Récemment, j’ai par exemp<strong>le</strong> mis enplace un vidéoprojecteur sur un plafond.J’ai éga<strong>le</strong>ment un rô<strong>le</strong> à jouer dans <strong>le</strong>s relationsque <strong>le</strong> collège entretient avec <strong>le</strong>s entreprisesextérieures. Dans la mesure où je connais <strong>le</strong>bâtiment quasiment comme ma poche, je suislà pour <strong>le</strong>s orienter quand il s’agit d’i<strong>de</strong>ntifierla source d’un problème.Enfin, je suis l’un <strong>de</strong>s maillons <strong>de</strong> la chaîne pource qui est du contact avec <strong>le</strong>s élèves. Les gaminsm’appel<strong>le</strong>nt tous par mon prénom. Parfois, je<strong>le</strong>ur rends service quand <strong>le</strong> pneu <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur véloest dégonflé. Et quand ils jettent <strong>de</strong>s clés dans<strong>le</strong>s arbres, cassent <strong>le</strong>urs casiers ou perchentun ballon sur <strong>le</strong> toit, je suis éga<strong>le</strong>ment là pourrésoudre <strong>le</strong> problème. »Comment <strong>de</strong>venir technicien ouvrier <strong>de</strong> service ?Conditions <strong>de</strong> travail« Mes conditions <strong>de</strong> travail sont excel<strong>le</strong>ntes. Lecollège est bien loti en atelier et en machines,sans compter que <strong>le</strong> bâtiment est bien fait. Il estvieux, mais très pratique. Les moyens mis à madisposition pour travail<strong>le</strong>r sont donc très bons.En termes <strong>de</strong> travail en équipe, je suis un peuseul maître à bord dans mon domaine. Mais jetravail<strong>le</strong> en lien étroit avec la direction qui saitqu’el<strong>le</strong> peut compter sur moi. J’ai éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>sentiment d’être intégré à l’équipe éducative.Lorsqu’un élève a un projet en arts plastiques,il n’est pas rare que <strong>le</strong> professeur dise à l’élèveen question : « Va voir Salvatore ! »Vocation et qualités requises« Il faut beaucoup <strong>de</strong> patience. Travail<strong>le</strong>r avec<strong>de</strong>s gamins <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une certaine soup<strong>le</strong>ssed’esprit. J’ai été enfant. Je dois donc être apteà comprendre <strong>le</strong>urs âneries. Ce n’est pas parcequ’un élève casse un water que je vais pousser<strong>de</strong>s cris. Cela étant, pour travail<strong>le</strong>r dans uneéco<strong>le</strong>, il faut éga<strong>le</strong>ment savoir se faire respecter.Surtout quand il y a <strong>de</strong>s abus.Pour assurer un travail <strong>de</strong> maintenance dansun établissement scolaire, il faut éga<strong>le</strong>mentêtre organisé et savoir faire face aux imprévus.Quand je travail<strong>le</strong> sur tel ou tel chantier, il m’arrivetrès souvent <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir tout laisser en planpour parer au plus pressé. »Pour <strong>le</strong>s ouvriers d’entretien et d’accueil, il suffit <strong>de</strong> déposer une candidature lorsqu’il y a unepublication <strong>de</strong> poste avant d’avoir un entretien. En revanche, pour <strong>le</strong>s spécialités « maintenance<strong>de</strong> bâtiment » et « cuisine », il faut passer <strong>le</strong> concours <strong>de</strong> la filière technique..Roselyne Vito, chef <strong>de</strong> cuisine« Au four et au moulin »Le métier« En tant que chef <strong>de</strong> cuisine, j’ai la responsabilité<strong>de</strong> la production <strong>de</strong> 700 repas par jour. Pourmener à bien cette tâche, je gère une équipe<strong>de</strong> quatorze personnes. Mon premier travailconsiste à élaborer <strong>le</strong>s menus. Tout en évitantla répétition <strong>de</strong>s repas proposés, je dois tenircompte <strong>de</strong> l’équilibre alimentaire défini par <strong>le</strong>programme national <strong>de</strong> nutrition santé qui,en ce moment, met l’accent sur la lutte contrel’obésité. Un repas type est ainsi composé d’uneentrée, d’un plat accompagné <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux fécu<strong>le</strong>ntset <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux légumes au choix, d’un laitage(fromage ou produit laitier) et d’un <strong>de</strong>ssertqui comprend toujours un fruit dans l’offreproposée.À travers l’élaboration <strong>de</strong>s menus, je chercheà faire découvrir aux enfants l’étendue <strong>de</strong> cequ’il est possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> réaliser au niveau alimentaire.Pour moi, c’est important parce que j’ai<strong>le</strong> sentiment que <strong>le</strong>s jeunes d’aujourd’hui ontmalheureusement perdu une certaine cultureculinaire. Leur apprendre à bien manger est undéfi passionnant.Mon travail consiste éga<strong>le</strong>ment à organiser <strong>le</strong>scomman<strong>de</strong>s, <strong>le</strong> choix <strong>de</strong>s produits frais. Chaquejour, nous faisons appel à <strong>de</strong>s fournisseurs quiont <strong>de</strong>s produits locaux tels que <strong>le</strong>s pommes<strong>de</strong> <strong>Savoie</strong>. Ceci est important parce que celanous permet <strong>de</strong> concevoir <strong>de</strong>s repas à thème.Nous élaborons ainsi un menu par mois encollaboration avec <strong>le</strong>s professeurs. Quand nouscuisinons un menu médiéval, on travail<strong>le</strong> enlien avec <strong>le</strong> professeur <strong>de</strong> français. Quand oncuisine un menu italien ou espagnol, on setourne vers l’enseignant concerné. Dans <strong>le</strong>même esprit, chaque année, nous consacronsune quinzaine <strong>de</strong> jours à un Tour <strong>de</strong> Franceculinaire pendant <strong>le</strong>quel nous cuisinons <strong>de</strong>splats bretons, alsaciens, basques… Une initiativeque nous enrichissons avec <strong>de</strong>s affichages,<strong>de</strong>s animations.La distribution du plat chaud sur la banque<strong>de</strong> self est éga<strong>le</strong>ment l’une <strong>de</strong>s dimensions <strong>de</strong>mon travail. Un aspect que j’affectionne car ilme permet d’avoir un contact privilégié avec <strong>le</strong>sélèves. Ils en profitent souvent pour me poser<strong>de</strong>s questions. »Conditions <strong>de</strong> travail« J’ai la chance <strong>de</strong> pouvoir compter sur uneéquipe soudée. Ce qui est très important carmon métier ne peut être fait avec qualité sansune certaine osmose entre <strong>le</strong>s membres dupersonnel. Cette année, nous avons décidé<strong>de</strong> cuisiner <strong>de</strong> nombreux produits bios. Pourréussir cet objectif, j’ai besoin d’être dans unerelation <strong>de</strong> confiance avec ma chef <strong>de</strong> servicecar ce sera à el<strong>le</strong> <strong>de</strong> chercher <strong>le</strong>s fournisseurs.Mon équipe est vraiment dans un dialogueconstant. C’est d’ail<strong>le</strong>urs la raison pour laquel<strong>le</strong>j’insiste pour que chaque poste <strong>de</strong> travail soitoccupé par <strong>de</strong>ux personnes. En travaillant à<strong>de</strong>ux, on s’ai<strong>de</strong> et on évite <strong>le</strong> stress. Le matin,nous débutons tous à 6 heures, mais dans l’efficacité.Chacun sait ce qu’il a à faire. »Vocation et qualités requises« Avant tout, il faut bien sûr aimer la cuisineet <strong>le</strong>s enfants auxquels je dis souvent : « Pourvous, nous avons mis beaucoup d’amour dansnotre travail. Il faut donc <strong>le</strong> rendre un peu àl’équipe qui est en cuisine en ne gâchant pas,en ne jetant pas ». En-<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cela, pour êtrechef dans une cuisine scolaire, il faut être trèsorganisé. Je dois avoir l’œil partout, être au fouret au moulin. »Salvatore Vergori.Roselyne Vito.page 14 - haute-savoie magazine - numéro 112
evasionTête-à-tête avecLaurentKraif« Nous sommes tousreliés à la même source »Dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong>s Chemins <strong>de</strong> la Culture, dispositif d’ai<strong>de</strong> à l’éducation artistique et culturel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s collégiens mis enplace par <strong>le</strong> <strong>Conseil</strong> <strong>Général</strong> en 2005, <strong>le</strong> compositeur-percussionniste Laurent Kraif va présenter « Logos ». Une œuvreen sept tab<strong>le</strong>aux qui traite <strong>de</strong> la création du mon<strong>de</strong>.Votre création « Logos » abor<strong>de</strong> laquestion <strong>de</strong>s mythes <strong>de</strong> la création dumon<strong>de</strong>. Vaste sujet…Laurent Kraif : Effectivement ! Pour donnerune structure à cette œuvre, je me suis inspiré<strong>de</strong> récits cosmogoniques traditionnels,mais aussi <strong>de</strong>s théories scientifiques <strong>le</strong>s plusrécentes. L’enchaînement <strong>de</strong>s sept tab<strong>le</strong>auxqui composent « Logos » repose sur cettegran<strong>de</strong> marche <strong>de</strong> la vie qui, au fil <strong>de</strong> l’évolution,a construit un langage <strong>de</strong> plus enplus comp<strong>le</strong>xe. En tant que compositeur<strong>de</strong> musique contemporaine, pour rendrecompte <strong>de</strong> cette comp<strong>le</strong>xité, j’ai souhaitéréaliser un véritab<strong>le</strong> brassage culturel. Auniveau <strong>de</strong>s langues, <strong>le</strong> français côtoie doncl’arabe, mais aussi <strong>le</strong> latin ou la langue dupays Dogon. Je me suis éga<strong>le</strong>ment inspiré<strong>de</strong> multip<strong>le</strong>s influences musica<strong>le</strong>s. Logos a<strong>de</strong>s racines ethniques, baroques et contemporaines.Pour l’orchestration, j’ai doncfait <strong>le</strong> choix d’instruments très colorés. Lemariage <strong>de</strong>s percussions avec <strong>le</strong> piano et <strong>le</strong>clavecin riches en harmoniques, l’orchestreà cor<strong>de</strong>s traditionnel avec <strong>le</strong> hautbois et laclarinette basse dont <strong>le</strong> ton est plus chauddonne une orchestration très origina<strong>le</strong>. Lessept tab<strong>le</strong>aux <strong>de</strong> « Logos » sont ainsi conçuscomme sept cou<strong>le</strong>urs différentes <strong>de</strong>stinéesà servir <strong>de</strong>s textes poétiques puisés dans différentesépoques. Cela va <strong>de</strong> la poésie <strong>de</strong> laRenaissance à cel<strong>le</strong> du xix e sièc<strong>le</strong> <strong>de</strong> Théodore<strong>de</strong> Banvil<strong>le</strong> en passant par cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s Dogonsdu Mali. La création du mon<strong>de</strong> est une thématiqued’une richesse extraordinaire. El<strong>le</strong>démontre que nous sommes tous reliés àla même source. Les hommes ont toujourstendance à se séparer, à se diviser alors quenous sommes intrinsèquement reliés <strong>le</strong>suns aux autres. Pour mettre tout cela enscène, j’ai cherché une écriture musica<strong>le</strong> trèsludique. C’est aussi pour cela que <strong>le</strong> chœur<strong>de</strong> la <strong>Haute</strong>-<strong>Savoie</strong> qui interprète « Logos »,est appelé, sur scène, à bouger, murmurer,chuchoter, crier ou déclamer.Justement, comment avez-vous travailléavec <strong>le</strong> chœur départemental <strong>de</strong>la <strong>Haute</strong>-<strong>Savoie</strong> ?L. K. : Au début, quand nous nous sommesrencontrés avec <strong>le</strong>s membres <strong>de</strong>ce chœur, j’ai parlé <strong>de</strong> mon travail, <strong>de</strong>l’état d’esprit que je souhaitais donner àcette création. Je <strong>le</strong>ur ai dit que je voulais<strong>le</strong>ur faire vivre une expérience particulièrepour un chœur. Par<strong>le</strong>r, chuchoter oumanipu<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s bambous tout en restantdans un registre plus traditionnel étaitforcément déroutant pour ces artistes.Mais, au final, ce processus <strong>de</strong> créationnous a permis <strong>de</strong> nous découvrir <strong>le</strong>s uns<strong>le</strong>s autres. Ce grand puzz<strong>le</strong> a accouchéd’une bel<strong>le</strong> aventure humaine. Et puis,je dois dire qu’avec <strong>le</strong> chef <strong>de</strong> chœurBernard Spizzi, j’ai fait une rencontreartistique très forte. Cet homme a unebel<strong>le</strong> sensibilité. Sa curiosité et sa gran<strong>de</strong>musicalité lui ont permis <strong>de</strong> s’approprier« Logos » sans aucun problème. Il a eu <strong>le</strong>goût <strong>de</strong> marier tradition et innovation.Pour toutes ces raisons-là, nous avonsvécu un partenariat très fructueux.Dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong>s Chemins <strong>de</strong> laCulture, « Logos » va être proposée auxcollégiens <strong>de</strong> la <strong>Haute</strong>-<strong>Savoie</strong>. Êtesvousfier <strong>de</strong> cette forme <strong>de</strong> reconnaissance?L. K. : Très fier ! En ce sens que dans madémarche artistique la pédagogie a toujoursbeaucoup compté. J’ai toujours eu <strong>le</strong> goût<strong>de</strong> transmettre la création contemporaine.Cette œuvre n’est pas spécia<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>stinéeà <strong>de</strong>s collégiens, mais nous allons proposerà chacun <strong>de</strong>s soixante jeunes en questionune sorte <strong>de</strong> parrainage. Un membre duchœur sera aux côtés <strong>de</strong> chaque jeune pourl’accompagner. Tous ces jeunes possè<strong>de</strong>ntune gran<strong>de</strong> force <strong>de</strong> vie qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>qu’à trouver sa place. J’espère que « Logos »sera une très riche expérience pour eux.Parfois ils auront un rô<strong>le</strong> <strong>de</strong> solistes, parfoisils chanteront avec <strong>le</strong> chœur et à d’autresmoments ils joueront d’un instrument. Pourqu’ils vivent un véritab<strong>le</strong> cheminement intérieur,mon but est <strong>de</strong> <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>r à faire jaillir<strong>le</strong>ur créativité personnel<strong>le</strong>.numéro 112 - haute-savoie magazine - page 15