Cendrillon - Théâtre National
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concentration aux côtés des acteurs. Bien avant les répétitions, il lui arrive d’explorer son « sujet » au cours<br />
d’ateliers menés avec des comédiens, de mettre ses intuitions à l’épreuve directe du plateau.<br />
L’univers scénique qui résulte de ces pratiques atypiques est caractérisé par une maîtrise technologique<br />
exigeante mais discrète et exprime un véritable souffle poétique. Les acteurs, dont les voix sont souvent<br />
relayées jusqu’au moindre grain par un subtil système de micros, développent un jeu souvent minimal mais<br />
d’une étonnante présence, libéré de certaines conventions (tensions non naturelles du corps, voix<br />
projetée,…), serti d’une lumière comptée. Les images, semblant « naître » littéralement à partir du noir<br />
total comme dans les yeux fermés du rêveur, sollicitent l’imagination du spectateur, déconcertent par une<br />
beauté parfois inquiétante, cultivant sa parenté avec l’effroi. C’est un théâtre sensible, sensoriel, qui laisse<br />
filtrer l’humour, ouvert à tous, car chacun sait, dans le fond, de quoi il parle et ce qu’il révèle : la vie<br />
humaine « ordinaire » entre désir, croyances et déceptions, familière et mystérieuse, la sauvagerie à peine<br />
dissimulée des rapports sociaux, nos histoires d’enfance, de famille.<br />
En contrepoint de ses créations pour adultes, Joël Pommerat s’investit régulièrement dans une démarche<br />
dédiée à 100 pc aux enfants. Après Le petit Chaperon Rouge en 2006 et Pinocchio en 2008, il revient<br />
aujourd’hui au conte dont il affectionne la dimension<br />
narrative (beaucoup de ses spectacles sont structurés par<br />
la présence d’un narrateur‐présentateur sur le plateau)<br />
et l’art d’exposer, sans résolution simpliste, les multiples<br />
facettes de questions complexes : le bien, le mal, la peur,<br />
la mort,… En réécrivant ses propres versions des contes<br />
traditionnels homonymes, il fait mine de nous emmener<br />
en pays connu (et, dit‐il, ce recours à un fond d’histoires<br />
partagées par tous met l’adulte et l’enfant en relation<br />
Le Petit Chaperon Rouge – photo E. Carecchio<br />
crée un vrai lien dans le public) pour mieux ensuite<br />
dérouter nos imaginaires et nous inviter à opérer nos propres réappropriations d’un matériau très riche<br />
(voir plus loin, « La force du conte »). Il dit aussi aimer sortir du sérieux de l’artiste qui ne créerait que pour<br />
un public « averti », adulte et se mettre au défi car il y a une vraie exigence quand on travaille pour le public<br />
enfant.<br />
Quelques traits singuliers épinglés dans ses précédentes créations : L’usage du décalage (entre son et image,<br />
ex.voir photo ci‐dessus : la « bande son » fait entendre des talons tandis que la « mère » marche sur la pointe de ses<br />
pieds nus), (ou : un narrateur dit les dialogues à la place de deux comédiennes muettes) – La confusion des rôles, le<br />
brouillage des générations et des identités (un enfant est joué par un adulte, ou voix d’homme en play back sur corps<br />
de jeune fille). Son théâtre est peuplé de gens ordinaires qui d’habitude n’ont pas la parole (leur parole n’est pas<br />
reproduite, Pommerat invente une parole qui se concentre sur les instants où éclate la vérité d’un drame intime).<br />
Généralement prévaut un découpage en séquences très brèves, avec une grande fluidité de passage de l’une à<br />
l’autre. Il y a refus du socialement correct, interrogation de la norme sociale, du modèle « convenu » du bonheur<br />
familial. L’écriture est simple, dépouillée, musicale.<br />
Les textes de Joël Pommerat sont édités chez Actes Sud‐Papiers.<br />
QUELQUES REPERES<br />
Pôles (1995) / Treize étroites têtes (1997) / Mon ami (2001) / Au monde (2004) / Le Petit Chaperon rouge (2006) /<br />
D’une seule main (2005) / Les Marchands (2006) / Je tremble (1) (2007) / Pinocchio (2008) / Je tremble (1 et 2)<br />
(Festival d’Avignon 2008) / Cercles‐Fictions (2010) / Ma Chambre Froide (2011) /Joël Pommerat est artiste associé au<br />
<strong>Théâtre</strong> <strong>National</strong> de la Communauté française et à l’Odéon‐<strong>Théâtre</strong> de L’Europe.<br />
<strong>Cendrillon</strong> / Pommerat – Dossier pédagogique ‐ Page 5 sur 28