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emile cioran, un philopsophe entre deux langues et deux cultures

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EMILE CIORAN, UN PHILOPSOPHE ENTRE DEUX LANGUESET DEUX CULTURES - IIuliana Paştin ∗julpastin@gmail.comAbstract: Romanian-born but a resident of Paris since 1937, Cioran haswritten pessimistic books like The Trouble being born or the Temptation toexist. Cioran's work is marked by its refusal of any philosophical system bydeep skepticism and pessimism proved. Cioran exceeds its initial nihilism by thepractice of fragmentary writing but in an even more paradoxical. It is nowconsidered not only a philosopher of pessimism, but also a great master of style.For to feel the ineffable the author practice the aphorisms that are a desire toachieve a thought of the quintessence.Keywords:aphorisms.pessimism philosopher moralist master of the style,Emile Cioran, <strong>un</strong> apatride métaphysiqueCe philosophe essayiste est né en Roumanie en 1911 <strong>et</strong> il est devenu l’<strong>un</strong> desgrands prosateurs de la langue française auteur d’<strong>un</strong>e œuvre originale où ser<strong>et</strong>rouvent la rigueur classique <strong>et</strong> l’ironie moderne, celle d’<strong>un</strong> écrivain du XXesiècle.Arrivé à Paris en 1937 avec <strong>un</strong>e bourse de L’Institut français de Bucarest avecl’intention de commencer <strong>un</strong>e thèse de doctorat sur Bergson, il ne l’écrira jamais.Mais avant son départ en France, on pourrait affirmer qu’il était déjà <strong>un</strong> auteurprom<strong>et</strong>teur dans son pays, la Roumanie. Sur les cimes du désespoir est <strong>un</strong> livrepublié à Bucarest en 1934 aux Presses de la Fondation royale Carol I. Cinq autreslivres suivent, écrits en roumain. Ces livres sont connus en roumain maiségalement en traduction française: en 1936, Le Livre des leurres, en 1936, LaTransfiguration de la Roumanie, en 1937 Des Larmes <strong>et</strong> des Saints, en 1940, LeCrépuscule des pensées <strong>et</strong> en 1945 Le Bréviaire des vaincus. Pour son activité enRoumanie il faut remarquer <strong>un</strong>e prodigieuse activité de publiciste <strong>et</strong> mentionnerles nombreux articles publiés dans les revues roumaines de l’époque: Calendar,Floarea de foc, Gandirea, Vremea, <strong>et</strong>c. Tous les ouvrages écrits au début enroumain à l’exception de La Transfiguration de la Roumanie(1936) sontaujourd’hui disponibles en traduction française chez Gallimard.L'œuvre de Cioran comporte des recueils d'aphorismes, ironiques, sceptiques<strong>et</strong> pleins d’humour, tel De l'inconvénient d'être né, qui forment l’<strong>un</strong>e de sesœuvres les plus connues, mais on peut aussi y trouver des textes plus longs <strong>et</strong> plusdétaillés. D'<strong>un</strong>e façon générale, l'œuvre de Cioran est marquée par son refus d<strong>et</strong>out système philosophique par <strong>un</strong> profond scepticisme <strong>et</strong> par <strong>un</strong> pessimisme∗ Maître de conférences, Université Chrétienne „Dimitrie Cantemir”, Bucarest.


avéré. Paradoxalement, Cioran, dont les écrits sont assez sombres, est <strong>un</strong> hommede très bonne compagnie, sympathique, plutôt gai. «Il déclare avoir passé sa vie àrecommander le suicide par écrit, <strong>et</strong> à le déconseiller en paroles, car dans lepremier cas cela relève du monde des idées, alors que dans le second il a en face delui <strong>un</strong> être de chair <strong>et</strong> de sang. Tout en conseillant <strong>et</strong> déconseillant le suicide, ilaffirme qu'il existe <strong>un</strong>e supériorité de la vie face à la mort: celle de l'incertitude. Lavie, la grande inconnue, n'est fondée sur rien de compréhensible, <strong>et</strong> ne donne pasl'ombre d'<strong>un</strong> argument. Au contraire, la mort, elle, est claire <strong>et</strong> certaine. D'aprèsCioran, seul le mystère de la vie est <strong>un</strong>e raison de vivre» 1 .Son premier ouvrage rédigé en français, Précis de décomposition, paru en1949 a <strong>un</strong> énorme succès car il éblouit le monde intellectuel français par la pur<strong>et</strong>éde son style <strong>et</strong> par la force de ses affirmations.On peut, à tort, accuser Cioran d'avoir pris dans ses écrits <strong>un</strong>e «nuance» dedésespoir. Il semble avoir été profondément triste de ne pas pouvoir établir desystème qui donnerait <strong>un</strong> sens à sa vie, alors même que dans sa je<strong>un</strong>esse il avaitété extrêmement passionné pour la vie <strong>et</strong> pour les problèmes de la société (cf. lesCimes du désespoir). Après la Libération, en France, l’œuvre de Cioran a toujourssuscité de vifs débats.Le cheminement littéraire de Cioran <strong>et</strong> son traj<strong>et</strong> spirituel ont, semble-t-il,trois points de repère majeurs (selon Liliana Nicorescu): «la tentation d'exister»,la tentation d'être Roumain, <strong>et</strong> la tentation d'être juif 2 . Ni sa roumanité réfutée nisa judéité manquée ne pouvaient lui offrir la moindre consolation pourl'humiliation d’exister, pour «l'inconvénient d'être né».En 1987, il publie son ultime ouvrage, Aveux <strong>et</strong> anathèmes, avant demourir, huit années plus tard, en 1995 de la maladie d'Alzheimer sans avoir misà exécution son proj<strong>et</strong> de suicide. 3Beaucoup de critiques, de nos jours, préoccupées surtout pour des problèmesde langue, étudient le corpus français comme <strong>un</strong>e œuvre à part entière. Il s’agitdes œuvres suivantes dont nous citons: Syllogismes de l'amertume (1952); LaTentation d'exister (1956); Histoire <strong>et</strong> Utopie (1960); La Chute dans le temps(1964); Le Mauvais Démiurge (1969); Valéry face à ses idoles (1970); Del'inconvénient d'être né (1973); Essai sur la pensée réactionnaire. À propos deJoseph de Maistre (1977), Fata Morgana (d'abord publié comme préface d'<strong>un</strong>recueil de textes de Joseph de Maistre en 1957 aux éditions du Rocher);Écartèlement (1979); Ébauches de vertige (1979); Face aux instants (L'Ire desvents, 1985); Exercices d'admiration (1986); Aveux <strong>et</strong> Anathèmes (1987); L'Amilointain: Paris, Bucarest (1991); Entr<strong>et</strong>iens (1995); Œuvres (Gallimard-Quarto1995), 1818 p.; Cahiers, 1957-1972 (1997); Cahier de Talamanca (Mercure deFrance 2000); Solitude <strong>et</strong> destin (Gallimard-Arcades 2004); Exercices négatifs(Gallimard 2005).1http://fr.wikipedia.org/wiki/Emil_Cioran2Liliana Nicorescu, conférence, mercredi le 15 février à L’Université de Montréal, salleC-9019,Comment peut-on être Cioran? Thèse de doctorat, La Transfiguration de la Roumanie d’Emile Cioran, thèse soutenue à l’Université de Montréal en 2006.3 http://fr.wikipedia.org/wiki/Emil_Cioran


Ainsi Michel Jarr<strong>et</strong>y souligne c<strong>et</strong>te préoccupation des critiques que «leslivres écrits en français nouent la pensée à l’écriture d’<strong>un</strong>e manière tropdifférente pour ne pas constituer <strong>un</strong> corpus légitimement séparé» 4 .Il faudrait pourtant chercher <strong>un</strong>e continuité dans la pensée de Cioran en yintégrant aussi les années roumaines afin d’analyser les raisons pour lesquellesCioran avait décidé d’abandonner sa langue d’origine <strong>et</strong> devenir comme ill’affirmait «métaphysiquement apatride». (Entr<strong>et</strong>iens, 27).On remarque quel’œuvre écrite en français construit <strong>un</strong>e identité narrative dans <strong>un</strong> proj<strong>et</strong> de typeautobiographique qui ne se présente pas toujours comme <strong>un</strong>e autobiographieavouée. La philosophie de Cioran subit elle aussi les influences des années d’aprèsguerre qui constatent l’effondrement de tous les systèmes en faveur d’<strong>un</strong>ephilosophie sceptique qui nie les valeurs antérieures <strong>et</strong> qui devient pluspersonnelle voire autobiographique. A l’instar des philosophes Ni<strong>et</strong>zsche,Wittgenstein, Heidegger <strong>et</strong> des penseurs tels que Sartre <strong>et</strong> A. Camus, Cioran vaadopter comme discours le style fragmentaire <strong>et</strong> va penser la philosophie noncomme <strong>un</strong> système abstrait mais surtout comme <strong>un</strong>e «somme d’attitudes» (LaTentation d’exister, p. 11).«La pire forme de despotisme, écrit-il, est le système en philosophie <strong>et</strong>en tout» (De l’Inconvénient d’être né).Cioran exprimera <strong>un</strong> pessimisme sombre à partir d’<strong>un</strong>e expérience vécue <strong>et</strong> ilfera de son travail <strong>un</strong>e réflexion sur le monde, doublée d’<strong>un</strong>e quête de soi. Et c’esten 1947 à l’âge de 36 ans que Cioran décide d’abandonner sa langue natale, leroumain <strong>et</strong> d’adopter le français. La préférence pour la langue française vaconduire Cioran à l’élaboration d’<strong>un</strong>e philosophie faite de paradoxes,d’équivoques, voire de contradictions:«Derrière <strong>un</strong>e phrase proportionnée, écrit-il, satisfaite de sonéquilibre ou gonflée de sa sonorité, se cache trop souvent le malaise d’<strong>un</strong>esprit incapable d’accéder par la sensation à <strong>un</strong> <strong>un</strong>ivers original. Quoid’étonnant que le style soit tout ensemble <strong>un</strong> masque <strong>et</strong> <strong>un</strong> aveu»? (LaTentation d’exister, 91).Si nous nous arrêtons sur le passage de la langue roumaine à la languefrançaise c’est pour souligner que Cioran a cru à sa transfiguration par le françaisqui deviendrait ainsi <strong>un</strong>e forme de salut «<strong>un</strong>e «commotion linguistique», commeil l’appelle, <strong>un</strong>e sorte d’éblouissement à la façon de Pascal. Il s’agit d’<strong>un</strong>eillumination qui le conduira à adopter <strong>un</strong>e nouvelle forme d’expression,c<strong>et</strong>te-fois-ci en français. La publication des Cahiers, rédigés <strong>entre</strong> 1957-1972, ainsique les nombreuses interviews qu’il avait données après 1970 illustrent c<strong>et</strong>teévolution d’<strong>un</strong> auteur situé au carrefour de <strong>deux</strong> <strong>langues</strong> <strong>et</strong> <strong>deux</strong> <strong>cultures</strong>:«Au cours de l’été 1947, alors que je séjournais dans <strong>un</strong> village desenvirons de Dieppe, j’ai essayé, au titre de simple exercice, de traduireMallarmé en roumain. Et j’eus subitement <strong>un</strong>e révélation: tu dois rompreavec ta langue <strong>et</strong> ne plus écrire désormais qu’en français. Je suis rentré àParis le lendemain, <strong>et</strong> je me suis mis tout à coup à écrire dans c<strong>et</strong>te langue4 Michel Jarr<strong>et</strong>y, La Morale dans l’écriture, Camus, Char, Cioran, Paris PUF, 1999.


d’adoption que je choisis d’<strong>un</strong> instant à l’autre Je rédigeai alors très vite LePrécis de Décomposition». 5Comme l’affirme G. Liiceanu 6 : «La rupture d’avec la langue maternelle nerésulte pas d’<strong>un</strong>e délibération, elle n’est même pas le fait d’<strong>un</strong>e décision, ellesurvient simplement, de toute l’autorité d’<strong>un</strong>e vérité suggérée par <strong>un</strong>e instancesupra –individuelle». S’agit-il d’<strong>un</strong>e conversion mystique?Afin d’expliquer c<strong>et</strong>te attitude Cioran, suggère ainsi que ce passage aufrançais comme langue d’expression ne serait pas <strong>un</strong> choix intellectuellementvoulu mais <strong>un</strong> appel divin auquel on ne saurait se soustraire. Ce changement n’estpas accompli sans <strong>un</strong> certain renoncement, sans <strong>un</strong> sacrifice. Cioran abandonnerasa langue natale, car, affirme-t-il, «Le passage à <strong>un</strong>e autre langue ne peut se fairequ’au prix d’<strong>un</strong> renoncement à sa propre langue. Il faut accepter ce sacrifice». 7L’adoption de la langue française vise l’explication d’<strong>un</strong>e transfigurationexistentielle. En abandonnant sa langue maternelle pour écrire en français, lephilosophe a décidé de se lancer dans <strong>un</strong>e aventure qui dépasse largement le cadred’<strong>un</strong> simple changement linguistique, pour essayer de se transfigurer pour gagner<strong>un</strong>e sorte de salut. De c<strong>et</strong>te façon la nouvelle langue fonctionne comme <strong>un</strong>renouvellement, comme <strong>un</strong>e seconde naissance qui lui perm<strong>et</strong> de trouver <strong>un</strong>enouvelle identité.A partir de 1956 avec son livre La Tentation d’exister, Cioran développe <strong>un</strong>eréflexion sur le style «comme aventure» 8 . Dès 1949 la réflexion sur le langage estthématiquement liée à <strong>un</strong>e rupture avec le passé roumain. Cioran, qui se veut <strong>un</strong>homme sans biographie, «<strong>un</strong> apatride métaphysique» a décidé de couper touteattache avec l’homme qu’il a été.«C’est ainsi que j’ai pris la décision de ne plus jamais me mêler des affairesroumaines. Je m’en sens d’ailleurs plus détaché que jamais». 91Il faut pourtant reconnaitre que si la réflexion sur le langage ne s’est pasimposée <strong>un</strong>iquement comme système philosophique, l’auteur m<strong>et</strong> en évidence lesprémisses du divorce métaphysique.«Il existe <strong>un</strong>e modalité bien plus complexe de trahir, écrit-il, sansréférence immédiate, sans rapport à <strong>un</strong> obj<strong>et</strong> ou à <strong>un</strong>e personne. Ainsiabandonner tout sans qu’on sache ce que représente ce tout: s’isoler deson milieu, repousser - par <strong>un</strong> divorce métaphysique- la substance qui vousa pétri, qui vous entoure <strong>et</strong> qui vous porte». (Précis de décomposition, 63).Son objectif, la conquête de la langue étrangère, devient le prétexte d’<strong>un</strong>equête identitaire à laquelle Cioran a décidé de s’amender. Pour y parvenir il s’estfixé <strong>deux</strong> impératifs essentiels à son programme.5 Emile Cioran, «Entr<strong>et</strong>iens avec Gerd Bergfl<strong>et</strong>h», in Entr<strong>et</strong>iens, Gallimard, 1995, p. 143-157,p. 145.6Gabriel Liiceanu, E. M. Cioran, Itinéraires d’<strong>un</strong>e vie, Paris, Michalon, 1995, p. 50.7Cioran, Entr<strong>et</strong>iens, op. cit., p. 114.8Le style comme aventure est le titre de la septième partie de La Tentation d’exister.9 Sonia Franca-Rosoff, «Les imaginaires de <strong>langues</strong>», in Sociolinguistique, territoire <strong>et</strong> obj<strong>et</strong>s,Lausanne, Delachaux <strong>et</strong> Niestlé, Textes de base en sciences sociales, 1996, p. 79, cité par NoëlCordonnier, ibid. p. 86.


1) l’usage de la langue française comme exercice d’ascèse2) à travers la langue, acquérir sa propre rédemption dont l’outil d’exécutionsera le langage.Dans les réflexions qu’il fait sur la langue française qu’il qualifie de langue«morte», Cioran estime que le français est <strong>un</strong>e langue figée où l’on n’adm<strong>et</strong> pasl’innovation à cause des règles trop strictes. C’est <strong>un</strong>e langue de grammairiens, dejuristes où les fautes <strong>et</strong> les barbarismes sont bannis. Penser à la langue française,c’est pour Cioran, le moyen d’associer d’<strong>un</strong>e façon originale:«l’ensemble des clichés, des images, des valeurs qui nourrissent laculture, plus exactement: l’ensemble des images que les locuteurs associentaux <strong>langues</strong> qu’ils pratiquent, qu’il s’agisse de valeur, d’esthétique, desentiments normatifs, ou plus exactement métalinguistiques». 10La recherche du style devient pour Cioran <strong>un</strong>e vraie «aventure» dans le sensd’<strong>un</strong> style de vie, de destin.Dans la vie de l’esprit il arrive <strong>un</strong> moment où l’écriture, s’érigeant en principeautonome, devient «destin» (La Tentation d’exister, 89). Cioran constate qu’à <strong>un</strong>elangue pure correspond <strong>un</strong>e pensée pure. «A pensée pure, être pur». La recherchede la perfection de la langue est pour le philosophe l’espace de «la transparenceabsolue» de la clarté <strong>et</strong> de la pur<strong>et</strong>é sans équivoques, le lieu de la vérité d’où lemensonge <strong>et</strong> la tromperie sont exclus. Le portrait que fait Cioran de la languefrançaise est très clair dans le sens que l’auteur cherche depuis l’adoption dufrançais comme langue d’expression. S’il y a donc correspondance <strong>entre</strong> le fond <strong>et</strong>la forme, il y aura transparence <strong>entre</strong> l’auteur <strong>et</strong> son lecteur car <strong>un</strong>e langue clairene cache rien.«Sa clarté provocante, inhumaine, son refus de l’indéterminé, del’obscurité essentielle, torturante, en font <strong>un</strong> moyen d’expression qui peuts’évertuer au mystère, mais qui n’y accède pas vraiment (Entr<strong>et</strong>iens, 141)La clarté du discours est liée à la clarté de l’acte de l’énonciation car, selonCioran, «à pensée claire, discours clair» <strong>et</strong> par conséquent, «à discours clair,pensée honnête».Après c<strong>et</strong>te contrainte, la langue de Cioran s’articule sur <strong>un</strong> discoursclassique à la façon de l’Art poétique de N. Boileau qui repose sur la célèbre idéeque: «ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement»Par conséquent, derrière la représentation 11 que Cioran se fait du français <strong>et</strong>qui ne reflète en auc<strong>un</strong>e façon le style lourd <strong>et</strong> pléthorique 12 de ses fragments, sem<strong>et</strong> en place <strong>un</strong>e dialectique qui va faire de la langue <strong>un</strong>e éthique.S’il lui arrive de manquer de clarté, Cioran l’explique par c<strong>et</strong>te «inaptitude àla clarté» qui caractérise le discours de «l’étranger».10 L<strong>et</strong>tre à P. Comarnescu du 11 janvier 1947, Bucarest, Manuscriptum, 1988.11 Marie Dolle, «La Représentation du français dans les écrits de Cioran», in Langue de l’autreou la double identité de l’écriture, cité par Catherine Rey, Langage, Identité <strong>et</strong> morale dans lesœuvres de Emil Cioran, Milan K<strong>un</strong>dera <strong>et</strong> Andrei Makïne, mémoire de maîtrise, University ofWestern, Australia, p.32.12 Le style pléthorique est celui de Saint Simon. Ce style oratoire s’oppose à l’idée de clarté <strong>et</strong>pur<strong>et</strong>é tellement recherchée par Cioran.

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