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L'Albatros et la fourmi - Lycée Chateaubriand

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Albert Wiel : "<strong>L'Albatros</strong> <strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>fourmi</strong> " Reproduction <strong>et</strong> utilisation interdites sans l’accord explicite de l’auteur ou du C.R.U.Quand l'esprit n'aperçoit pas l'esprit, il ne peut accéder à lui-même, à l'idée c<strong>la</strong>ire <strong>et</strong>distincte de lui-même, à c<strong>et</strong>te idée adéquate qui chasse l'idée inadéquate comme lesoleil chasse les ténèbres. Il subira donc, dans les intermittences de <strong>la</strong> conscienceréfléchie, dans les <strong>la</strong>cunes de l'attention, <strong>la</strong> tentation de <strong>la</strong> confusion <strong>et</strong> de l'indistinction.Il va donc confondre <strong>la</strong> pensée qui ne se pense pas avec <strong>la</strong> pensée qui se pense, <strong>la</strong>monade simple <strong>et</strong> l'esprit. Or une telle confusion est <strong>la</strong> condition de l'attribution depensées à <strong>la</strong> bête : trop habile pour n'être pas intelligente, supérieure dans l'exercice de<strong>la</strong> ruse à l'humain. Le gibier égare le chasseur, <strong>la</strong> bête a de « l'esprit ». Tel est le « festinlittéraire » que La Fontaine entend servir à Madame de <strong>la</strong> Sablière.Descartes refuse <strong>et</strong> réfute à l'avance c<strong>et</strong>te perspective anthropomorphe, sans troppolémiquer toutefois, tant il sait <strong>la</strong> puissance de l'illusion commune au suj<strong>et</strong> del'intelligence animalexv. Le succès de l'entreprise de vivre, <strong>et</strong> « il faut vivre d'abord,philosopher ensuite » n'exige pas, selon lui, <strong>la</strong> permanence de <strong>la</strong> pensée réfléchissante<strong>et</strong> de l'entendement qui juge <strong>et</strong> raisonne, mais seulement <strong>la</strong> mémoire <strong>et</strong> l'habitude. Lesbêtes incapables de parler à proposxvi ém<strong>et</strong>tent toutefois des signes qui correspondentaux mouvements de leurs passions <strong>et</strong> sont perçus par les membres de leur espèce.Elles communiquent donc des pensées obscures <strong>et</strong> confuses, elles en aperçoivent aussiles manifestations chez d'autres bêtes, mais elles ne font toujours pas, <strong>et</strong> ne ferontjamais de géométrie discursive <strong>et</strong> démonstrative. L'homme inattentif qui se <strong>la</strong>isse allerau sommeil de ses habitudes affectives fait de même.C<strong>et</strong>te vision mécaniste <strong>et</strong> désenchantée des passions communes à l'homme <strong>et</strong> àl'animal humain ne porte, quoi qu'on pense <strong>et</strong> dise du cartésianisme, aucun coup àl'usage commun de <strong>la</strong> métaphore animalière. Certes Descartes ne pratique pasvolontiers une telle métaphore. Il pratique plutôt <strong>la</strong> métaphore végétalienne de l'arbre quireprésente <strong>la</strong> croissance de <strong>la</strong> Science Une <strong>et</strong> Uniquexvii. Aucun article du Traité despassions ne fait référence à un animal non humain. Mais en soi, l'animal a les mêmesaffections que l'homme, en tant que toutes les affections dans l'âme, qui sont aperçuesen elle <strong>et</strong> par elle, comme le p<strong>la</strong>isir <strong>et</strong> <strong>la</strong> douleur, <strong>et</strong> que l'homme « rapporte » au corps,sont communes à l'animal <strong>et</strong> à l'homme. Les passions de l'âme, telles l'admiration, ledésir, le joie <strong>et</strong> <strong>la</strong> tristesse, l'amour <strong>et</strong> <strong>la</strong> haine, que l'homme rapporte ordinairement àl'âme, sont donc réputées strictement humaines. La coupure, mode de l'étendue, estdans le doigt <strong>et</strong> <strong>la</strong> douleur, est dans l'âme, mais c<strong>et</strong>te âme est encore, chez l'animal quiéprouve <strong>la</strong> douleur, une disposition des organes du corps, <strong>et</strong> non pas un esprit qui, dansle cadre de l'union des deux substances, aperçoit c<strong>et</strong>te disposition corporelle <strong>et</strong> enmodifie le vécu douloureux par une disposition de <strong>la</strong> volonté. Le désir, <strong>la</strong> joie <strong>et</strong> <strong>la</strong>-9-Cercle de Réflexion Universitaire du lycée <strong>Chateaubriand</strong> de Rennes

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