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Mathématiques et Physique. Le langage de la Nature est-il ...

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Mathématiques <strong>et</strong> <strong>Physique</strong>. <strong>Le</strong> <strong><strong>la</strong>ngage</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>Nature</strong> <strong>est</strong>-<strong>il</strong> mathématique?Didier Robert, Laboratoire <strong>de</strong> Mathématiques Jean <strong>Le</strong>ray,Université <strong>de</strong> NantesDepuis l’antiquité <strong>la</strong> formu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature a nécessité<strong>de</strong>s modèles mathématique <strong>de</strong> plus en plus complexes.Commençons par un problème <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong> longueur : quelle <strong>est</strong><strong>la</strong> longueur D <strong>de</strong> <strong>la</strong> diagonale d’un carré <strong>de</strong> côté 1? La réponse <strong>est</strong>donnée par le théorème <strong>de</strong> Pythagorre : D = √ 2. Oui maisPythagorre (580-490 av J.-C) ne connaissait pas √ 2. <strong>Le</strong>s seulsnombres connus alors étaient les nombres fractionnaires, quotient<strong>de</strong> 2 entiers m n .11DD^2 = 1^2 + 1^2 = 2D n’<strong>est</strong> pas un nombre rationnelFigure: <strong>Le</strong> théorème <strong>de</strong> PythagorreParce que ce nombre ne peut pas se représenter comme le quotient<strong>de</strong> 2 entiers (on dit qu’<strong>il</strong> n’<strong>est</strong> pas rationnel) <strong>il</strong> a bien fallu inventerd’autres nombres. ( √ 2 ≈ 1, 414 · · · ).Plus tard, Archimè<strong>de</strong> (287-212 av. J.-C) a inventé une métho<strong>de</strong>pour calculer <strong>la</strong> longueur d’une circonférence, le volume d’unesphère, d’un cylindre, ou encore <strong>de</strong> l’intersection <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cylindres.La métho<strong>de</strong> trouvée par Archimè<strong>de</strong> sera développée beaucoup plustard (17ème siècle par <strong>Le</strong>ibniz <strong>et</strong> Newton, inventeur du calculdifférentiel <strong>et</strong> intégral).Pour ses calculs Archimè<strong>de</strong> avait besoin d’un autre nombre, encoreplus mystérieux que √ 2, le fameux nombre pi, noté π,π ≈ 3, 14159 · · · , que les Babyloniens avaient déjà rencontré vers2000 av. J.-C. Ce nombre π, défini comme le rapport <strong>de</strong> <strong>la</strong>circonférence sur le diamètre du cercle, <strong>est</strong> partout présent enmathématiques <strong>et</strong> en physique. <strong>Le</strong> livre <strong>de</strong> J.P. De<strong>la</strong>haye contientune mine d’informations sur π.


CFigure: <strong>Le</strong> nombre π = C/DPlus tard, <strong>il</strong> faudra même inventer <strong>de</strong>s nombres imaginaires(complexes) pour donner un sens à i = √ −1. Au XVI ième siécleBombelli, Cardan, Tartaglia introduisirent ces nombres pourrésoudre <strong>de</strong>s équations du 3 ième <strong>de</strong>gré. Ils joueront un rôleimportant en mécanique quantique!DSur ces premiers exemples, on perçoit déjà que les mathématiquesinterviennent non seulement pour fournir <strong>de</strong>s techniques <strong>de</strong> calculsmais aussi pour définir <strong>de</strong> nouveaux concepts (par exemples <strong>de</strong>snombres) pour pouvoir réaliser ces calculs. Rappelons ce que disaitle mathématicien allemand L. Kronecker (1823-1891) : “Dieu créales entiers , tout le r<strong>est</strong>e <strong>est</strong> l’oeuvre <strong>de</strong> l’homme”.c<strong>et</strong>te affirmation peut-être discutée. <strong>Le</strong>s concepts mathématiquessont-<strong>il</strong>s le pur produit du cerveau humain ou préexistent-<strong>il</strong>s dans <strong>la</strong>nature? Ce<strong>la</strong> a fait l’obj<strong>et</strong> d’un livre par J.P. Changeux <strong>et</strong> A.Connes.Plus près <strong>de</strong> nous l’étu<strong>de</strong> du mouvement <strong>de</strong>s p<strong>la</strong>nètes conduit à<strong>de</strong>s équations (conséquence <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> Kepler <strong>et</strong> <strong>de</strong> Newton) quiont permis à <strong>Le</strong>verrier <strong>de</strong> prévoir l’existence <strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète Neptuneen 1846 <strong>et</strong> qui fut observée peu <strong>de</strong> temps après par l’astronomeallemand Johann Galle.Figure: Kepler (1571-1630), Newton (1643-1727), <strong>Le</strong>ibniz (1646-1716), <strong>Le</strong> Verrier (1811-1877)L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière à l’échelle <strong>de</strong> l’infinimentp<strong>et</strong>it i.e à <strong>de</strong>s distances <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 −18 m ( soit un m<strong>il</strong>lioniéme<strong>de</strong> m<strong>il</strong>lioniéme <strong>de</strong> m<strong>il</strong>lioniéme <strong>de</strong> métre ) à fait un progrèsimportant lorsque J.J. Thomson (1856-1940) a découvert l’électronen 1897. Paul Dirac (1902-1984), physicien britanique, a prédit en1928 l’existence d’une nouvelle particule: le positron (ouantiélectron) en étudiant les solutions d’une équation (appelée<strong>de</strong>puis l’équation <strong>de</strong> Dirac). L’argument <strong>de</strong> Dirac reposait sur <strong>de</strong>spropriétés <strong>de</strong> symétrie <strong>de</strong> son équation. <strong>Le</strong> positron a été détectéexpérimentalement par An<strong>de</strong>rson (1905-1991) en 1932. (noterl’âge <strong>de</strong> ces chercheurs au moment <strong>de</strong> leurs gran<strong>de</strong>s découvertes!).


Nous verrons que le mon<strong>de</strong> atomique <strong>est</strong> un mon<strong>de</strong> bien étrange ,régi par <strong>de</strong>s lois très différentes <strong>de</strong> celles du mon<strong>de</strong> dans lequelnous évoluons quotidiennement. C’<strong>est</strong> <strong>la</strong> raison pour <strong>la</strong>quellel’abstraction mathématique y joue un rôle aussi fondamental,jusqu’à maintenant irremp<strong>la</strong>çable. Une partie <strong>de</strong>s recherch<strong>est</strong>héoriques actuelles pourraient déboucher sur <strong>la</strong> réalisationd’ordinateurs quantiques, qui pourraient être beaucoup pluspuissants que les ordinateurs actuels si on parvient un jour à enconstruire.L’informatique contemporaine ne serait sans doute pas ce qu’elle<strong>est</strong> sans les travaux mathématiques fondateurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> pério<strong>de</strong>1940-1950 dûs à J. von Neumann (1903-1957) <strong>et</strong> A. Turing(1912-1954).J. von Neumann a également apporté <strong>de</strong>s contributions décisives à<strong>la</strong> théorie quantique, en particulier concernant l’interprétation <strong>de</strong> <strong>la</strong>mesure dans les processus expérimentaux.Figure: J. von Neumann 1940, P.A. Dirac 1925A travers l’exemple emblématique <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantique jevoudrais ici tenter d’analyser <strong>et</strong> commenter les re<strong>la</strong>tions trèsétroites qu’ont toujours entr<strong>et</strong>enues ces <strong>de</strong>ux domaines <strong>de</strong> <strong>la</strong>connaissance scientifique que sont mathématiques <strong>et</strong> physique.Commençons par une discussion plus générale sur <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>smathématiques dans les sciences. Avant tout, <strong>il</strong> <strong>est</strong> bon <strong>de</strong>rappeler que l’origine éthymologique du mot mathématiqueprovient du grecque“mathema” signifiant “apprendre pourconnaitre”. <strong>Le</strong>s ph<strong>il</strong>osophes grecs P<strong>la</strong>ton (-427, -347) <strong>et</strong> Aristote(-384, -322) en ont précisé les contours, proche <strong>de</strong> <strong>la</strong> significationactuelle. Pour les grecs l’obj<strong>et</strong> principal était l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong>géométrie (mesure <strong>de</strong> <strong>la</strong> terre).Voici le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> Gal<strong>il</strong>ée (1564-1642) : “La ph<strong>il</strong>osophie <strong>est</strong>écrite dans ce grand livre qui se tient constamment ouvert <strong>de</strong>vantnos yeux, je veux dire l’univers. Mais elle ne peut se saisir si toutd’abord on ne se saisit point <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>et</strong> si on ignore lescaractères dans lesquels elle <strong>est</strong> écrite. C<strong>et</strong>te ph<strong>il</strong>osophie, elle <strong>est</strong>écrite en <strong>la</strong>ngue mathématique. Ses caractères sont <strong>de</strong>s triangles,<strong>de</strong>s cercles <strong>et</strong> autres figures géomériques, sans le moyen <strong>de</strong>squelles<strong>il</strong> <strong>est</strong> impossible <strong>de</strong> saisir humainement quelque parole, <strong>et</strong> sanslesquelles on ne fait qu’errer vainement dans un <strong>la</strong>byrinthe obscur.”Depuis Gal<strong>il</strong>ée d’autres figures, d’autres espaces géométriques ontété inventés <strong>et</strong> ont trouvé leurs p<strong>la</strong>ces dans diverses théoriesconcernant l’univers.


Henri Poincaré (1854-1912) a produit une oeuvre mathématiqueimmense, souvent à <strong>la</strong> frontière <strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong>physique. On dit parfois qu’<strong>il</strong> <strong>est</strong> passé très prés <strong>de</strong> <strong>la</strong> découverte<strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tivité r<strong>est</strong>reinte, avant Einstein. Sans doutea-t-<strong>il</strong> manqué d’audace pour rem<strong>et</strong>tre en cause l’édifice construitpar Newton, ce que Einstein a eu l’intuition géniale <strong>de</strong> faire.Figure: portrait <strong>de</strong> Gal<strong>il</strong>éeFigure: Henri PoincaréVoici une réflexion <strong>de</strong> Poincaré :“Toutes les lois (<strong>de</strong> <strong>la</strong> nature) sont donc tirées <strong>de</strong> l’expérience;mais pour les énoncer <strong>il</strong> faut une <strong>la</strong>ngue spéciale; le <strong><strong>la</strong>ngage</strong>ordinaire <strong>est</strong> trop pauvre, <strong>il</strong> <strong>est</strong> d’a<strong>il</strong>leurs trop vague pour exprimer<strong>de</strong>s rapports si délicats, si riches, si précis.. . . .Mais ce n’<strong>est</strong> pas tout, <strong>la</strong> loi sort <strong>de</strong> l’expérience mais elle n’en sortpas immédiatement. L’expérience <strong>est</strong> individuelle, <strong>la</strong> loi qu’on entire <strong>est</strong> générale.. . . . En un mot pour tirer <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> l’expérience <strong>il</strong>faut généraliser.. . . .Entre les m<strong>il</strong>le chemins qui s’ouvrent à nous <strong>il</strong> faut faire un choix,dans ce choix qui nous gui<strong>de</strong>ra? Ce ne pourra être quel’analogie.. . . . Qui nous a appris à connaître les analogiesvéritables, profon<strong>de</strong>s, celles que les yeux ne voient pas <strong>et</strong> que <strong>la</strong>raison <strong>de</strong>vine? C’<strong>est</strong> l’esprit mathématique, qui dédaigne <strong>la</strong> matièrepour ne s’attacher qu’à <strong>la</strong> forme pure.”Ce commentaire <strong>de</strong> Poincaré s’applique magnifiquement à <strong>la</strong>mécanique quantique (<strong>et</strong> aussi à théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tivité) qu’<strong>il</strong> a peuconnue puisqu’<strong>il</strong> <strong>est</strong> décédé en 1912 <strong>et</strong> que les gran<strong>de</strong>s avancé<strong>est</strong>héoriques <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantique ont démarré après 1920.Bernard d’Espagnat dans son livre “A <strong>la</strong> recherche du réel, leregard d’un physicien” écrit en 1979 : “<strong>Le</strong> fait que les métho<strong>de</strong>smathématiques perm<strong>et</strong>tent mieux que toutes autres <strong>la</strong> synthèse<strong>de</strong>s divers aspects du réel a <strong>de</strong>s conséquences quant aux manières<strong>de</strong> s’imaginer ce réel. Car le rôle <strong>de</strong>s mathématiques en physiquene se limite pas à celui d’une simple sténographie, autrement dit àun rôle d’écriture <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tions que, si l’on disposait <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> p<strong>la</strong>ce<strong>et</strong> d’avantage <strong>de</strong> temps, on pourrait aussi bien faire dans le<strong><strong>la</strong>ngage</strong> <strong>de</strong> tous les jours. Ce rôle là, bien entendu, existe. Mais <strong>il</strong><strong>est</strong> mineur.


Bien plus fondamental <strong>est</strong> celui joué par le processus <strong>de</strong> définitiond’entités nouvelles. Que l’on pense seulement à l’apparition duconcept d’énergie. . . . . La découverte expérimentale <strong>de</strong>santiprotons, <strong>et</strong> donc l’assurance <strong>de</strong> <strong>la</strong> généralité <strong>de</strong>s processusd’annihi<strong>la</strong>tion <strong>et</strong> <strong>de</strong> création, remontent toutes <strong>de</strong>ux aux années1950. Mais ces faits avaient pu être prédits bien avant par <strong>de</strong>sthéoriciens dont chacun sait qu’<strong>il</strong>s trouvèrent dans l’élégancemathématiques du formalisme le plus sûr gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> leurs succès. ”<strong>Le</strong> physicien Eugen Wigner (1902-1995) par<strong>la</strong>it <strong>de</strong> <strong>la</strong>“déraisonnable efficacité <strong>de</strong>s mathématiques dans les sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong>nature” en pensant sans doute en particulier à <strong>la</strong> mécaniquequantique. Il <strong>est</strong> temps maintenant <strong>de</strong> se poser <strong>la</strong> qu<strong>est</strong>ion :qu’<strong>est</strong>-ce que <strong>la</strong> mécanique quantique?Dans sa définition c<strong>la</strong>ssique, <strong>la</strong> mécanique regroupe le domaine <strong>de</strong>ssciences <strong>et</strong> <strong>de</strong>s techniques qui concernent <strong>de</strong>s corps en mouvement: une automob<strong>il</strong>e, une bicycl<strong>et</strong>te, le système so<strong>la</strong>ire, l’atmosphèr<strong>et</strong>err<strong>est</strong>e. Ces corps en mouvement sont soumis à <strong>de</strong>s forces quiprovoquent <strong>de</strong>s accélérations <strong>et</strong> qui les contraignent à suivre <strong>de</strong>strajectoires bien déterminées. Ceci a été expliqué magistralementpar <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong> Newton <strong>et</strong> sa fameuse équation fondamentale⃗F = m⃗γ<strong>Le</strong> mon<strong>de</strong> physique qui nous entoure ne peut pas être décrituniquement par les mouvements <strong>de</strong>s corps au sens précé<strong>de</strong>nt. Il <strong>est</strong>apparu assez tôt que nous étions entourés d’on<strong>de</strong>s: les sons, lesondu<strong>la</strong>tions à <strong>la</strong> surface d’un p<strong>la</strong>n d’eau, <strong>la</strong> lumière, <strong>la</strong> chaleur, leson<strong>de</strong>s électro-magnétiques.Une on<strong>de</strong> <strong>est</strong> plus diffic<strong>il</strong>e à caractériser qu’un corps en mouvementpuisqu’<strong>il</strong> s’agit d’un phénomène qui n’<strong>est</strong> pas bien localisé dansl’espace. Une on<strong>de</strong> se caractérise par sa pério<strong>de</strong> (ou sa longueur),son amplitu<strong>de</strong> <strong>et</strong> peuvent produire <strong>de</strong>s interférences (<strong>de</strong>ux on<strong>de</strong>squi se rencontrent peuvent s’amplifier ou au contraire se détruire).Figure: portrait <strong>de</strong> Newton


Figure: mouvement <strong>de</strong> p<strong>la</strong>nètes dans le sytème so<strong>la</strong>ireFigure: On<strong>de</strong>sFigure: expérience d’interférence <strong>de</strong> YoungL’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> propagation <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière (rayon lumineux) posa uneredoutable enigme aux physiciens à <strong>la</strong> fin du XIX ème siécle. Ac<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>il</strong> semb<strong>la</strong>it acquis que <strong>la</strong> lumière était <strong>la</strong>manif<strong>est</strong>ation d’un phénomène purement ondu<strong>la</strong>toire considérécomme un cas particulier d’on<strong>de</strong> électromagnétique décrite par leséquation <strong>de</strong> Maxwell (qui donna ses fon<strong>de</strong>ments théoriques àl’électro-magnétisme).<strong>Le</strong> trava<strong>il</strong> d’unification effectué par Maxwell était considéré commeprodigieux.Il expliquait par les équations qu’<strong>il</strong> a découvertes les expériences <strong>de</strong>Faraday <strong>et</strong> les expériences <strong>de</strong> Hertz m<strong>et</strong>tant en évi<strong>de</strong>nce les on<strong>de</strong>sradio. Si bien que à <strong>la</strong> fin du XIXème siècle avec <strong>la</strong> mécanique <strong>de</strong>Newton d’un coté <strong>et</strong> <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s électro-magnétiques <strong>de</strong>Maxwell <strong>de</strong> l’autre, <strong>la</strong> physique était considérée comme quasimentachevée.


La constante h découverte par P<strong>la</strong>nck <strong>est</strong> très-très p<strong>et</strong>ite, ceciexplique qu’à notre échelle son existence ne se manif<strong>est</strong>e que dans<strong>de</strong>s conditions particulières :Figure: J. C. MaxwellOr autour <strong>de</strong> 1900, Max P<strong>la</strong>nck (1858-1947) dans son expériencedu “corps noir” mis en évi<strong>de</strong>nce le fait suivant. Lorsqu’on chauffeun corps qui absorbe parfaitement tous les rayons lumineuxextérieurs, <strong>il</strong> ém<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière par paqu<strong>et</strong>s dont l’ énergie <strong>est</strong> unmutiple d’une p<strong>et</strong>ite quantité indivisible h appelée <strong>de</strong>puis quantum<strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck ou constante <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck.h = 6, 62 × 10 −34 joule-secon<strong>de</strong>10 −34 = 0, 0 · · · 01, avec 33 zéros après <strong>la</strong> virgule!<strong>Le</strong>s physiciens préfèrent, pour <strong>de</strong>s raisons <strong>est</strong>hétiques, introduire <strong>la</strong>constante (lire h-barre)égale à h2π .Quelques années plus tard (1905), Albert Einstein (1879-1955), sesouvenant <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck, ut<strong>il</strong>isa <strong>la</strong> constante h pourexpliquer l’eff<strong>et</strong> photoélectrique, ce qui lui valu le prix Nobel en1905. Ces travaux sont contenus dans <strong>la</strong> formule <strong>de</strong>P<strong>la</strong>nck-EinsteinE = hνE <strong>est</strong> l’énergie du rayon lumineux émis, ν(l<strong>et</strong>tre grecque nu) safréquence. Avec ce<strong>la</strong> donne E = ω, ω <strong>est</strong> <strong>la</strong> pulsation du signallumineux.Einstein <strong>est</strong> plus connu pour sa théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tivité générale (quiconcerne l’ensemble <strong>de</strong> l’univers) que pour son explicationégalement révolutionnaire <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> photo-électrique qui lui semanif<strong>est</strong>e tous les jours sous nos yeux!L’interprétation <strong>de</strong>s résultats obtenus par P<strong>la</strong>nck <strong>et</strong> Einstein <strong>est</strong> <strong>la</strong>suivante : <strong>la</strong> lumière se présente alors sous forme <strong>de</strong> particulesélémentaires, appelées photons, dont l’énergie ne peut prendre que<strong>de</strong>s valeurs multiples <strong>de</strong> h. C’<strong>est</strong> <strong>de</strong> là que vient l’adjectifQUANTIQUE. On dit que l’énergie <strong>est</strong> quantifiée car elle ne peutprendre que <strong>de</strong>s valeurs discrètes, multiples <strong>de</strong> h. C’était <strong>la</strong>première fois que les physiciens rencontraient ce genre <strong>de</strong>phénomène. C<strong>et</strong>te découverte <strong>est</strong> apparue comme une remise encause radicale <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie ondu<strong>la</strong>toire <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière, résultant <strong>de</strong>séquations <strong>de</strong> Maxwell. <strong>Le</strong> photon se manif<strong>est</strong>ait par sesconséquences mais n’avait jamais été observé directement,autrement que sous forme <strong>de</strong> faisceaux <strong>de</strong> photons, jusqu’à unedate très récente.


<strong>Le</strong> photon <strong>est</strong> une particule étrange: sa masse <strong>est</strong> nulle <strong>et</strong> <strong>il</strong>n’existe qu’a <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière, c ≈ 300.000km.s. Suivant <strong>la</strong>théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tivité r<strong>est</strong>reinte, son énergie E <strong>et</strong> sa quantité <strong>de</strong>mouvement p son reliés par <strong>la</strong> formule E = p/c. C’<strong>est</strong> uneparticule qu’<strong>il</strong> <strong>est</strong> très diffic<strong>il</strong>e d’observer individuellement, c’<strong>est</strong> àdire en <strong>de</strong>hors d’un faisceau lumineux.Une équipe <strong>de</strong> physiciens français du <strong>la</strong>boratoire Kastler-Brossel <strong>de</strong>Paris (Michel Brune, Serge Haroche, Jean-Michel Raimond) vientd’isoler un photon pendant un temps <strong>de</strong> 30 sec. Pour c<strong>et</strong>te raison<strong>il</strong> a été baptisé Mathusalem! <strong>Le</strong> Mon<strong>de</strong> du vendredi 16 mars 2007annonce que c<strong>et</strong>te expérience fait l’obj<strong>et</strong> d’un article paru dans <strong>la</strong>revue <strong>Nature</strong> du 15 mars.Einstein avait imaginé c<strong>et</strong>te expérience qui vient donc d’êtreréalisée, confirmant ainsi <strong>la</strong> validité <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong>P<strong>la</strong>nck-Einstein.Figure: Einstein, P<strong>la</strong>nck <strong>et</strong> BohrBien qu’ayant contribué fortement à l’émergence <strong>de</strong> <strong>la</strong> théoriequantique, Einstein ne l’a jamais complétement acceptée danstoutes ses conséquences. Nous verrons plus tard plus en déta<strong>il</strong>s <strong>la</strong>nature <strong>de</strong> ses objections. La raison vient peut-être <strong>de</strong> saconception du rôle <strong>de</strong>s mathématiques dans <strong>la</strong> physique <strong>et</strong> qu’<strong>il</strong>tenait en particulier à conserver un lien direct avec les capacitésd’observation objective <strong>de</strong> l’être humain. Pour c<strong>et</strong>te raison <strong>il</strong> auraitsans doute été ravi <strong>de</strong> savoir que l’on avait réussi à isoler unphoton.<strong>Le</strong>s objections d’Einstein sont <strong>de</strong> nature fondamentale <strong>et</strong> ont faitprogresser <strong>la</strong> théorie quantique en <strong>la</strong> poussant dans ses <strong>de</strong>rniersr<strong>et</strong>ranchements.Voici <strong>de</strong>ux extraits <strong>de</strong> l<strong>et</strong>tres envoyées par Einstein à <strong>de</strong>s collèguesphysiciens, révé<strong>la</strong>nt son hardiesse scientifique <strong>et</strong> sonnon-conformisme : “Comment formuler <strong>de</strong>s énoncés re<strong>la</strong>tifs audiscontinu sans avoir recours recours à un continuum -l’espace-temps -; ce <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>vrait être exclus <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie, entant qu’<strong>il</strong> <strong>est</strong> une construction adventice que ne justifie pasl’essence du problème <strong>et</strong> qui ne correspend à rien <strong>de</strong> réel. A c<strong>et</strong>égard nous manquons cruellement <strong>de</strong> formalisme mathématiqueadéquat. ” (1916).


En 1954, un an avant sa mort, voici ce qu’<strong>il</strong> écrivait : “Il me sembleen tout cas que l’alternative continu-discontinu <strong>est</strong> une authentiquealternative; ce<strong>la</strong> veut dire qu’ici <strong>il</strong> n’y a pas <strong>de</strong> compromis possible.... Dans c<strong>et</strong>te théorie, <strong>il</strong> n’y a pas <strong>de</strong> p<strong>la</strong>ce pour l’espace <strong>et</strong> l<strong>et</strong>emps, mais uniquement pour <strong>de</strong>s nombres, <strong>de</strong>s constructionsnumériques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s règles pour les former sur <strong>la</strong> base <strong>de</strong> règlesalgébriques excluant le processus limite. Quant à savoir quelle voiesera <strong>la</strong> bonne, seule <strong>la</strong> qualité du résultat nous l’apprendra. ”Là encore Einstein était à <strong>la</strong> recherche d’un autre formalismemathématique. De ce point <strong>de</strong> vue <strong>il</strong> aurait sans doute commenté(<strong>et</strong> pris position!) sur les tentatives d’A<strong>la</strong>in Connes, à l’origine <strong>de</strong><strong>la</strong> Géométrie Non Commutative. A. Connes <strong>est</strong> l’un <strong>de</strong>s plusgrands mathématiciens français contemporain. Né en 1947, <strong>il</strong> areçu <strong>la</strong> méda<strong>il</strong>le Fields (équivalent du prix Nobel enmathématiques) en 1982, <strong>la</strong> méda<strong>il</strong>le d’or du CNRS en 2004. S<strong>est</strong>ravaux en mathématiques pures sur les algèbres d’opérateurs,l’analogue <strong>de</strong> matrices découvertes par Heisenberg, que l’onrencontrera plus loin, l’ont conduit à inventer une nouvellegéométrie appelée maintenant Géométrie Non Commutative.La Géométrie Non Commutative fournit <strong>de</strong> nouveaux out<strong>il</strong>s pourreprésenter <strong>et</strong> comprendre le mon<strong>de</strong> physique <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>trapeut-être un jour <strong>de</strong> conc<strong>il</strong>ier le discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> le continu comme le<strong>de</strong>mandait Einstein. A. Connes <strong>et</strong> ses col<strong>la</strong>borateurs y trava<strong>il</strong>lent.Figure: A<strong>la</strong>in ConnesA <strong>la</strong> suite <strong>de</strong>s découvertes <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck <strong>et</strong> Einstein, une qu<strong>est</strong>ioncruciale se posait : <strong>la</strong> lumière <strong>est</strong>-elle vraiment une on<strong>de</strong> ou <strong>est</strong>-elleconstituée <strong>de</strong> particules élémentaires?<strong>Le</strong> mouvement <strong>de</strong> charges électriques, dans les atomes (enparticulier l’atome d’hydrogène) posa <strong>de</strong>s difficultés d’interprétationdu même genre : a-t-on affaire à <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s ou à <strong>de</strong>s particules?Revenons aux débuts <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantique <strong>et</strong> aux nouveauxconcepts physico-mathématiques qu’elle a engendrés. Selon lesexpériences réalisées par Thomson <strong>et</strong> Germer en 1929, un faisceaud’électrons (c’<strong>est</strong> à dire <strong>de</strong> particules électrisées) évolue comme ungroupe <strong>de</strong> particules “c<strong>la</strong>ssiques” ou comme une on<strong>de</strong>, capable <strong>de</strong>se diffracter <strong>et</strong> <strong>de</strong> présenter <strong>de</strong>s interférences.


Suivit alors une casca<strong>de</strong> d’idées géniales comme rarement l’histoire<strong>de</strong> <strong>la</strong> science en connait. En <strong>de</strong>ux ans (1924-1925) les bases <strong>de</strong> <strong>la</strong>théorie quantique sont construites <strong>et</strong> sont encore <strong>de</strong>bout plus <strong>de</strong> 80après malgré <strong>de</strong> perpétuelles remises en cause en raison <strong>de</strong>sdifficultés <strong>de</strong> leur interprétation.<strong>Le</strong> français Louis <strong>de</strong> Broglie (1892-1987) puis l’autrichien ErwinSchrödinger (1887-1961) <strong>et</strong> le danois Werner Heisenberg(1901-1976), ont eu l’audace d’affirmer que <strong>la</strong> lumière <strong>et</strong>l’électricité se comportaient à <strong>la</strong> fois comme <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s <strong>et</strong> comme<strong>de</strong>s faisceaux <strong>de</strong> particules <strong>et</strong> que selon les circonstances l’aspectondu<strong>la</strong>toire ou corpuscu<strong>la</strong>ire se manif<strong>est</strong>e.De Broglie introduit sa fameuse fonction ψ (fonction d’on<strong>de</strong>) quicontient l’aspect ondu<strong>la</strong>toire <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule <strong>et</strong> Schrödinger postu<strong>la</strong>que <strong>la</strong> fonction ψ doit vérifier une équation, appelée maintenantéquation <strong>de</strong> Schrödinger.Je trouve ces équations si élégantes que je ne résiste pas au p<strong>la</strong>isir<strong>de</strong> vous les présenterih ∂ψ∂t = − h22m△ψ + V ψ.Pratiquement en même temps que Schrödinger, Werner Heisenbergproposa une autre équation, tout aussi élégante, dont <strong>la</strong> forme <strong>est</strong><strong>la</strong> suivantejustifier son équation Heisenberg inventa un nouveauformalisme algébrique, appelé à l’époque mécanique <strong>de</strong>s matrices(maintenant on parle plutot d’algèbres d’opérateurs). La re<strong>la</strong>tionentre ces équations se fait à travers l’égalité suivante :H = − h22m△ψ + V ψ, [H, A] = HA − AHPour∂A∂t = i h[H, A]


H représente l’énergie <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule étudiée, mais au lieu <strong>de</strong>prendre <strong>de</strong>s valeurs numériques comme dans <strong>la</strong> mécaniquec<strong>la</strong>ssique <strong>de</strong> Newton, ici l’énergie <strong>est</strong> représentée par une matrice.A <strong>est</strong> également une matrice <strong>et</strong> représente l’appare<strong>il</strong> <strong>de</strong> mesureut<strong>il</strong>isé dans l’expérience pour étudier <strong>la</strong> “particule ”.Une matrice en mathématiques <strong>est</strong> un tableau <strong>de</strong> nombres (carréou rectangu<strong>la</strong>ire). On peut manipuler les matrices comme <strong>de</strong>snombres : les additionner <strong>et</strong> les multiplier. Mais contrairement à <strong>la</strong>multiplication <strong>de</strong>s nombres, <strong>la</strong> multiplication <strong>de</strong>s matrices <strong>est</strong> uneopération non commutative : le résultat dépend <strong>de</strong> l’ordre danslequel on fait les opérations. Par conséquent mesurer l’énergie puismesurer <strong>la</strong> position d’une particule ne donne pas le même résultatque mesurer <strong>la</strong> position puis mesurer l’énergie (A = P) car on aHP − PH ≠ 0.Figure: <strong>de</strong> Broglie, Heisenberg, SchrödingerL’équation <strong>de</strong> Schrödinger <strong>est</strong> d’abord apparue comme plusfam<strong>il</strong>ière aux physiciens <strong>de</strong> l’époque. Elle ressemble beaucoup eneff<strong>et</strong> d’une part à l’équation <strong>de</strong> Newton écrite sous une forme quelui a donnée le mathématicien ir<strong>la</strong>ndais W<strong>il</strong>liam Ham<strong>il</strong>ton(1805-1865), d’autre part aux équations d’on<strong>de</strong> <strong>de</strong> Maxwell (JamesClerk Maxwell : Edinburgh, 1831 - Cambridge, 1879).La théorie <strong>de</strong>s matrices <strong>de</strong> Heisenberg était apparamment plusdéconcertante. En réalité, aprés quelques échanges polémiquesavec Heisenberg, Schrödinger démontra que les équations sontmathématiquement équivalentes.Figure: W<strong>il</strong>liam Ham<strong>il</strong>tonHam<strong>il</strong>ton a introduit l’espace <strong>de</strong>s phases associé au mouvementd’une particule, qui <strong>est</strong> décrit par <strong>la</strong> paire constituée par saposition <strong>et</strong> son impulsion. C’<strong>est</strong> donc un espace <strong>de</strong> dimension 6 quipossé<strong>de</strong> une géométrie très riche beaucoup ut<strong>il</strong>isée <strong>de</strong>puis sous l<strong>et</strong>erme <strong>de</strong> géométrie symplectique dans divers domaines <strong>de</strong>smathématiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> physique


L’explication <strong>de</strong>s différents termes <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> Shrödinger <strong>et</strong>Heisenberg <strong>est</strong> un peu technique. Voici néanmoins quelquesprécisions.i = √ −1 <strong>est</strong> un nombre complexe, ∂ψ∂t<strong>est</strong> <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong>dép<strong>la</strong>cement <strong>de</strong> l’on<strong>de</strong>, m <strong>est</strong> <strong>la</strong> masse <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule, − h22m △ψreprésente l’énergie cinétique <strong>et</strong> V ψ l’énergie potentielle.L’interprétation physique <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te fameuse fonction ψ fit coulerbeaucoup d’encre <strong>et</strong> n’<strong>est</strong> pas encore complétement élucidée alorsque son statut mathématique <strong>est</strong> bien établi <strong>de</strong>puis les travaux <strong>de</strong>David H<strong>il</strong>bert (1862-1943). Il inventa les espaces qui portent sonnom (ψ <strong>est</strong> alors considéré comme un point d’un espace <strong>de</strong> H<strong>il</strong>bertH.H<strong>il</strong>bert <strong>est</strong> un mathématicien Allemand dont l’oeuvre considérable<strong>est</strong> comparable à celle <strong>de</strong> Henri Poincaré. Il <strong>est</strong> connu aussi poursa liste <strong>de</strong>s 23 problèmes considérés comme les plus importants àrésoudre qu’<strong>il</strong> annonça au congrès international <strong>de</strong> mathématiciensen 1900. Certains <strong>de</strong> ces problèmes ont été résolus <strong>de</strong>puis, d’autresrésistent toujours.von Neumann a trava<strong>il</strong>lé sous <strong>la</strong> direction <strong>de</strong> H<strong>il</strong>bert à Göttingenavant <strong>de</strong> s’ex<strong>il</strong>er aux usa en 1933.Figure: David H<strong>il</strong>bertDu coté <strong>de</strong> <strong>la</strong> physique, l’on<strong>de</strong> ψ a été l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> polémiques trèsactives, à <strong>la</strong> frontière <strong>de</strong> <strong>la</strong> science <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> ph<strong>il</strong>osophie. La raison<strong>est</strong> que ce formalisme mathématique n’a pas d’interprétationintuitive naturelle. Pourtant, jusqu’à maintenant les prédictions <strong>et</strong>les analyses que l’on a pu tirer <strong>de</strong> l’équation <strong>de</strong> Schrödinger, <strong>et</strong> <strong>de</strong>l’équation <strong>de</strong> Heisenberg, se sont révélées correctes, en accord avecles résultats fournis par les expériences.Ce<strong>la</strong> ne veut pas dire qu’<strong>il</strong> s’agit d’une théorie définitive, mais enattendant mieux elle marche! (“tais-toi <strong>et</strong> calcule!”). Et ceci gràceà un formalisme mathématique, certes compliqué pour le profane,mais d’une gran<strong>de</strong> cohérence interne <strong>de</strong>puis H<strong>il</strong>bert <strong>et</strong> vonNeumann en particulier. C’<strong>est</strong> en ce sens que l’on peut parler <strong>de</strong> <strong>la</strong>beauté d’une théorie scientifique : pouvoir explicatif <strong>et</strong> prédictifavéré, associé à une gran<strong>de</strong> cohérence interne.Maintenant <strong>il</strong> r<strong>est</strong>e à rendre c<strong>et</strong>te théorie compatible avec l’autregran<strong>de</strong> théorie fondée au début du XX ème siécle, achevée parEinstein : <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tivité générale. Ce problème n’<strong>est</strong> toujours pasrésolu actuellement <strong>et</strong> r<strong>est</strong>e <strong>la</strong> principale enigme à résoudre dans ledomaine <strong>de</strong> <strong>la</strong> physique fondamentale du XXI-ième siècle.Des centaines <strong>de</strong> physiciens <strong>et</strong> mathématiciens dans le mond<strong>et</strong>entent <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s modèles complexes (comme <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong>scor<strong>de</strong>s ou <strong>de</strong>s supercor<strong>de</strong>s ou <strong>la</strong> géométrie non commutative) maisaucun ne s’<strong>est</strong> révélé décisif pour le moment. <strong>Le</strong>s chercheurs n’ontpas encore réussi à éliminer toutes les contradictions internes, enparticulier éviter que certaines quantités <strong>de</strong>viennent infinies.


Revenons encore à <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> ψ <strong>et</strong> à son interprétation.Celle-ci a été c<strong>la</strong>irement formulée par l’École <strong>de</strong> Copenhague. On adéjà parlé <strong>de</strong>s principaux acteurs que sont Niels Bohr <strong>et</strong> WernerHeisenberg. Contrairement à Heisenberg qui accordait uneconfiance (aveugle?!) aux mathématiques, <strong>et</strong> pour lequell’explication mathématique se suffisait à elle même, Bohr vou<strong>la</strong>itcomprendre <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> <strong>de</strong> manière intuitive, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>son contexte mathématique. Il dit un jour à Heisenberg :“mais à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s fins nous <strong>de</strong>vons expliquer tout ce<strong>la</strong> à Margar<strong>et</strong>”.Margar<strong>et</strong> était <strong>la</strong> femme <strong>de</strong> Bohr qui participait à leurs discussionsà Copenhague.Essayons maintenant <strong>de</strong> décrire sommairement le contenu d’unefonction d’on<strong>de</strong>.D’abord ψ <strong>est</strong> un nombre complexe, que l’on caractérise soit parun couple <strong>de</strong> nombres réels soit par un vecteur du p<strong>la</strong>n ayant unlongueur <strong>et</strong> une direction : ψ = (a, b) ou ψ = (r, θ). On a lesre<strong>la</strong>tionsa = r cos θ, b = r sin θ, r = √ a 2 + b 2 , |ψ| 2 = a 2 + b 2 .Ensuite le nombre complexe ψ dépend du temps t, représentantl’évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule, <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa position spatialeq = (q 1 , q 2 , q 3 ), qui localise <strong>la</strong> particule dans l’espace à 3dimensions, dans un système <strong>de</strong> coordonnées attaché au<strong>la</strong>boratoire.Une première grosse difficulté apparait. Souvenez-vous, uneparticule quantique <strong>est</strong> à <strong>la</strong> fois une on<strong>de</strong> <strong>et</strong> une particule. Or uneon<strong>de</strong> n’a pas <strong>de</strong> position bien localisée! Comment alors parler <strong>de</strong>position pour un tel obj<strong>et</strong> que l’on pourrait qualifié d’ Obj<strong>et</strong> VirtuelNon In<strong>de</strong>ntifié.En 1926, Max Born (1882-1972) publie un article dans lequel <strong>il</strong>propose une interprétation qui choqua beaucoup <strong>de</strong> physiciens,accrochés au principe du déterminisne.Selon Born, “|ψ| 2 donne <strong>la</strong> probab<strong>il</strong>ité <strong>de</strong> détecter <strong>la</strong> particule dans<strong>la</strong> position (q 1 , q 2 , q 3 ) à l’instant t.” Pour ce trava<strong>il</strong> Born reçu leprix Nobel en 1954.Un nouveau pas pour entrer dans le mon<strong>de</strong> quantique venait d’êtrefranchi : <strong>la</strong> mécanique quantique sera une théorienon-déterministe. C<strong>et</strong>te interprétation a été immédiatementcont<strong>est</strong>ée par Einstein, qui jusqu’à sa mort <strong>la</strong> combatit : “Dieu nejoue pas aux dés avec l’univers ” écrivit-<strong>il</strong> à Born. Einsteinadm<strong>et</strong>tait le formalisme quantique construit par Schrödinger <strong>et</strong>Heisenberg, mais <strong>il</strong> pensait qu’<strong>il</strong> était incompl<strong>et</strong>, <strong>et</strong> donc qu’<strong>il</strong>fal<strong>la</strong>it le compléter en y ajoutant <strong>de</strong>s variables supplémentairespour éliminer l’incertitu<strong>de</strong>. Et pourtant malgré <strong>de</strong> nombreus<strong>est</strong>entatives, aucun argument décisif n’a été trouvé <strong>de</strong>puis pourrej<strong>et</strong>er c<strong>et</strong>te interprétation probab<strong>il</strong>iste que l’on nomme <strong>de</strong>puis l’Interprétation <strong>de</strong> Copenhague <strong>de</strong> <strong>la</strong> Mécanique Quantique.Figure: Max Born


Une autre manif<strong>est</strong>ation fondamentale du caractèrenon-déterministe <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique <strong>est</strong> en réalité un théorèmemathématique que l’on démontre à partir <strong>de</strong> l’interprétation <strong>de</strong>Born. Il a été découvert empiriquement par Heisenberg, c’<strong>est</strong> lefameux principe d’incertitu<strong>de</strong>. En voici une première formu<strong>la</strong>tion,vague, pour commencer<strong>il</strong> <strong>est</strong> impossible <strong>de</strong> mesurer avec une précision arbitraire, <strong>et</strong>simultanément, <strong>la</strong> position <strong>et</strong> <strong>la</strong> vitesse d’une particule quantique(par exemple un électron). De même <strong>il</strong> <strong>est</strong> impossible <strong>de</strong> mesurerexactement l’énergie transmise à un instant donné.En voici une version quantitative pour ceux qui aiment <strong>la</strong> précisionmathématique :q désigne <strong>la</strong> position, p désigne l’impulsion, p = mv, m désigne <strong>la</strong>masse <strong>et</strong> v <strong>la</strong> vitesse, δq, δp désignent les variations <strong>de</strong> <strong>la</strong> position<strong>et</strong> l’impulsion. On voit donc que δp <strong>et</strong> δq ne peuvent pas êtreinfiniment p<strong>et</strong>its en même temps. Evi<strong>de</strong>mment ceci ne se fait sentirqu’aux échelles <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> h. Dans notre mon<strong>de</strong> macroscopique<strong>de</strong> tous les jours on peut considérer que h = 0 <strong>et</strong> alors on peutavoir (<strong>et</strong> on a!) δp = δq = 0 comme <strong>il</strong> se doit. (<strong>la</strong> terre décrit un<strong>et</strong>rajectoire bien n<strong>et</strong>te, avec une vitesse connue, autour du sole<strong>il</strong>)δqδp ≥ h4π ,Une autre conséquence <strong>de</strong> l’interprétation <strong>de</strong> Copenhague, mise enforme mathématique par von Neumann, <strong>est</strong> le mystérieux principe<strong>de</strong> réduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong>. Ce<strong>la</strong> veut dire que le fait <strong>de</strong>mesurer une caractéristique physique d’une particule, avec unappare<strong>il</strong> <strong>de</strong> mesure A, modifie son état ψ qui <strong>de</strong>vient alors un étatspécifique (le terme mathématique <strong>est</strong> vecteur propre) ψ j <strong>de</strong>l’appare<strong>il</strong> <strong>de</strong> mesure.En particulier <strong>il</strong> n’<strong>est</strong> pas possible <strong>de</strong> revenir en arrière. Parexemple, si on mesure une impulsion <strong>et</strong> que l’on trouve le résultatnumérique p alors <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> <strong>de</strong>vient <strong>la</strong> fonctionexponentielleψ p (q) = exp( i pq).Einstein a toujours cont<strong>est</strong>é c<strong>et</strong>te interprétation <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécaniquequantique. En 1935, en col<strong>la</strong>boration avec Podolski <strong>et</strong> Rosen <strong>il</strong>publie un article dans lequel les auteurs soulignent le caractèreincompl<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique. Pour eux l’incertitu<strong>de</strong> venait ducaractère inachevé <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie alors que dans l’interprétation <strong>de</strong>Copenhague l’incertitu<strong>de</strong> <strong>est</strong> au coeur <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> <strong>la</strong>mécanique quantique.


Einstein-Podolski-Rosen ont imaginé une expérience qui selon euxm<strong>et</strong> en évi<strong>de</strong>nce le caractère incompl<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantiquequantique. C’<strong>est</strong> l’exemple type <strong>de</strong> ce que le mathématicienappelle une preuve par l’absur<strong>de</strong>. <strong>Le</strong>s auteurs supposent donc que<strong>la</strong> mécanique quantique <strong>est</strong> une théorie complète <strong>et</strong> par unraisonnement astucieux aboutissent à une contradiction. Onappelle ce<strong>la</strong> le “paradoxe” EPR. D. Bohm a proposé <strong>la</strong> versionsimplifiée suivante. Considérons une molécule M constituée <strong>de</strong><strong>de</strong>ux atomes A <strong>et</strong> B. On sépare les <strong>de</strong>ux atomes <strong>et</strong> on effectue <strong>la</strong>mesure d’une quantité physique appelée spin.<strong>Le</strong> spin <strong>est</strong> une propriété spécifiquement quantique.On peut le définir grossiérement comme le moment cinétiqueintrinsèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> particule en rotation sur elle même. <strong>Le</strong> spindépend <strong>de</strong> 3 directions spatiales perpendicu<strong>la</strong>ires, s x , s y , s z .Au départ on suppose que le spin <strong>de</strong> <strong>la</strong> molécule <strong>est</strong> nul. <strong>Le</strong> spinétant conservé, on a s x (A) + s x (B) = 0, <strong>et</strong> <strong>de</strong> même pour y <strong>et</strong> z.Donc toute mesure sur A donne automatiquement un résultat pourB.Ainsi, en effectuant uniquement <strong>de</strong>s mesures sur A on peut obtenirs x (B) <strong>et</strong> s y (B), ce que le principe d’incertitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Heisenberginterdit car s x <strong>et</strong> s y ne commutent pas. On a donc là unecontradiction (paradoxe EPR).A c<strong>et</strong>te objection d’EPR, Bohr répondit qu’<strong>il</strong> n’<strong>est</strong> pas correcte enmécanique quantique <strong>de</strong> supposer que les atomes A <strong>et</strong> B sontindépendants, mêmes séparés par une longue distance, ces atomesconservent <strong>la</strong> trace <strong>de</strong> leur appartenance dans le passé à une mêmemolécule. Ce phénomène porte le nom d’inséparab<strong>il</strong>ité quantiqueou d’intrication quantique. Il signifie que 2 particules quantiquesqui ont interagit à un moment donné, continueront à interagirdans le future même si on les sépare par <strong>de</strong>s distances très gran<strong>de</strong>s.Ce<strong>la</strong> ressemble à <strong>de</strong> <strong>la</strong> science fiction! Peut-on en déduire que <strong>la</strong>télépathie existe?A priori non, car le phénomène d’inséparab<strong>il</strong>ité ne concerne que lesparticules quantiques <strong>et</strong> toute observation ou mesure détruitinstantément c<strong>et</strong>te intrication quantique, d’après le principe <strong>de</strong> <strong>la</strong>réduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong>.Selon EPR <strong>la</strong> théorie quantique <strong>de</strong>vrait être une théorie locale, <strong>il</strong>fal<strong>la</strong>it donc éliminer c<strong>et</strong>te possib<strong>il</strong>ité d’action instantanée àdistance (ou supérieure à <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière), en adjoignant<strong>de</strong>s paramètres supplémentaires (appelées variables cachées).Or en 1965, John Bell, physicien Ir<strong>la</strong>ndais, annonça un résultatd’une portée considérable, dont voici une <strong>il</strong>lustration.Charles préparent 2 particules pour lesquelles les interactions nepeuvent être que locales. Il en envoie une à Alice <strong>et</strong> une à Bernard.Chacun d’eux effectue 2 mesures, P, Q pour Alice, R, S pourBernard.On s’arrange pour que les résultats soient −1 ou 1. Ils répétent cesmesures un grand nombre <strong>de</strong> fois <strong>et</strong> font <strong>la</strong> moyenne. représente l’opération <strong>de</strong> moyenne. Bell démontre alors que l’on< QS > + < RS > + < RT > − < QT > ≤ 2


En 1980-1982, A. Aspect (université d’Orsay), dans une expérienced’optique remarquable <strong>de</strong> précision, démontre par <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong>po<strong>la</strong>risation <strong>de</strong> photons que l’inégalité <strong>de</strong> Bell n’<strong>est</strong> pas toujourssatisfaite. Il prépare une source <strong>de</strong> photons présentant 2 étatspossibles <strong>de</strong> po<strong>la</strong>risation ±, qu’<strong>il</strong> donne à Alice <strong>et</strong> Bernard.P, Q, R, S sont <strong>de</strong>s mesure <strong>de</strong> po<strong>la</strong>risations <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière dans <strong>de</strong>sdirections différentes. Dans son expérience Aspect trouve que< QS > + < RS > + < RT > − < QT >≈ 2, 697Alors que <strong>la</strong> valeur théorique prédite par <strong>la</strong> théorie quantique <strong>est</strong>≈ 2, 7.Figure: <strong>Le</strong> principe <strong>de</strong> l’expérience d’AspectPar son expérience, qui a été répétée <strong>et</strong> améliorée <strong>de</strong>puis plusieursfois par plusieurs équipes dans le mon<strong>de</strong>, Aspect montre donc quel’inégalité <strong>de</strong> Bell n’<strong>est</strong> pas toujours vérifiée pour <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong>photons intriqués <strong>et</strong> que par conséquent le comportement duphoton n’obéit pas au principe <strong>de</strong> localité <strong>et</strong> réalité cher à Einstein.Bien que bien que séparés dans l’espace les photons <strong>de</strong>meurentintriqués.Dans c<strong>et</strong>te expérience les mesures sont effectuées <strong>de</strong> telle sorte queles photons mesurés par Alice <strong>et</strong> par Bernard n’aient pas le temps<strong>de</strong> communiquer entre eux, par un signal (qui ne peut pas voyagerplus vite que <strong>la</strong> lumière, Einstein, encore!).<strong>Le</strong>s recherches actuelles dans le domaine <strong>de</strong> l’informatiquequantique reposent sur c<strong>et</strong>te étrange propriété appelée l’intricationquantique. <strong>Le</strong> coté étrange <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te propriété a été mis enévi<strong>de</strong>nce par Schrödinger lui-même, dès 1935, dans une expérience<strong>de</strong> pensée connue sous le nom <strong>de</strong> chat <strong>de</strong> Schrödinger. Voic<strong>il</strong>’histoire (triste) du chat <strong>de</strong> Schrödinger.


Un chat <strong>est</strong> enfermé dans une caisse avec un f<strong>la</strong>con <strong>de</strong> cyanure, unmarteau r<strong>et</strong>enu par un f<strong>il</strong> <strong>et</strong> un détecteur quantique (compteurGeiger). On y dépose un élément radioactif dont <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> <strong>est</strong> <strong>de</strong>1h. C’<strong>est</strong> à dire que au bout <strong>de</strong> 1 heure l’atome a une chance sur 2<strong>de</strong> se désintégrer. Si c’<strong>est</strong> le cas, l’émission radioactive <strong>est</strong> détectéepar le compteur, provoque <strong>la</strong> rupure du f<strong>il</strong> qui maintient le marteauqui alors brise le f<strong>la</strong>con <strong>et</strong> provoque <strong>la</strong> mort du chat. Qu<strong>est</strong>ion : lechat <strong>est</strong>-<strong>il</strong> mort ou vivant?Réponse <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie quantique : en l’absence d’observateur lechat <strong>est</strong> dans un état intriqué moitié mort moitié vivant. Lorsqu’unobservateur intervient, <strong>il</strong> y a réduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> <strong>et</strong>l’observateur verra un chat mort ou vivant.Figure: <strong>Le</strong> chat <strong>de</strong> SchrödingerMaintenant que nous sommes un peu plus fam<strong>il</strong>iers avec ce mon<strong>de</strong>quantique si étrange, obéissant à <strong>de</strong>s lois qui exigent <strong>de</strong>sinterprétations subt<strong>il</strong>es, on peut se poser <strong>la</strong> qu<strong>est</strong>ion <strong>de</strong>s rapportsentre c<strong>et</strong> univers <strong>de</strong> l’infinim<strong>et</strong> p<strong>et</strong>it nque nous avons esquissé <strong>et</strong> lemon<strong>de</strong> sensible dans lequel nous vivons <strong>et</strong> où les obj<strong>et</strong>s sedép<strong>la</strong>cent en suivant les lois <strong>de</strong> Newton (au moins tant que l’onn’approche pas <strong>de</strong> <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière!). Commentcommuniquent-<strong>il</strong>s?Nous avons vu que <strong>la</strong> nécessité <strong>de</strong> bâtir une théorie quantiquefaisant appel à <strong>de</strong>s notions mathématiques abstraites s’<strong>est</strong> imposéep<strong>et</strong>it à p<strong>et</strong>it, parce qu’<strong>il</strong> fal<strong>la</strong>it sortir <strong>de</strong>s contradictions danslesquels se débattait <strong>la</strong> physique à <strong>la</strong> fin du XIXème siècle, <strong>et</strong>rendre compte <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te dualité on<strong>de</strong>-corpuscule présente dans lemon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’infiniment p<strong>et</strong>it.<strong>Le</strong> modèle <strong>de</strong> l’atome inventé initialement par N. Bohr étaitd’inspiration newtonienne : l’électron tourne autour du noyaucomme <strong>la</strong> terre tourne autour du sole<strong>il</strong>.Ce modèle étant trop simpliste pour expliquer <strong>la</strong> stab<strong>il</strong>ité <strong>de</strong>l’atome d’hydrogène, on a alors postulé pour l’énergie <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong>quantification adh’oc (Bohr, Sommerfeld, Einstein). Ce<strong>la</strong>apparaissait comme du brico<strong>la</strong>ge, génial certes, mais manquant <strong>de</strong>cohérence.


L’un <strong>de</strong>s premiers succès <strong>de</strong> l’équation <strong>de</strong> Schrödinger a été <strong>de</strong>prévoir le spectre d’énergie <strong>de</strong> l’atome d’hydrogène (elle redonneexactement les règles empiriques <strong>de</strong> Balmer).Peu à peu <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> l’univers quantique s’<strong>est</strong> éloignée <strong>de</strong><strong>la</strong> représentation <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> sensible.Revenons maintenant à <strong>la</strong> qu<strong>est</strong>ion fondamentale : quand <strong>est</strong>-ondans le mon<strong>de</strong> microscopique ? Quand <strong>est</strong>-on dans le mon<strong>de</strong>microscopique?Comment se fait <strong>la</strong> transition entre ces <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s? Commentcohabitent-<strong>il</strong>s?Comment se fait <strong>la</strong> jonction entre l’individu humain qui observe <strong>et</strong>mesure <strong>et</strong> <strong>la</strong> particule quantique?La notion <strong>de</strong> particule quantique <strong>est</strong> une entité nouvelle, niparticule au sens c<strong>la</strong>ssique, ni on<strong>de</strong>.Rappelons nous : <strong>la</strong> mécanique quantique a commencé par <strong>la</strong>découverte <strong>de</strong> <strong>la</strong> constante <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck h. A notre échelle c<strong>et</strong>teconstante <strong>est</strong> très p<strong>et</strong>ite (<strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 −34 ). Par une analysemathématique délicate on peut montrer que les équations <strong>de</strong>Schrödinger <strong>et</strong> <strong>de</strong> Heisenberg peuvent être approximées parl’équation <strong>de</strong> Newton lorsque <strong>la</strong> constante <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nck h <strong>de</strong>vientnégligeable <strong>de</strong>vant les autres gran<strong>de</strong>urs en jeu (distances, masses,énergies). C<strong>et</strong>te analyse <strong>est</strong> plus ou moins délicate suivant le <strong>de</strong>gré<strong>de</strong> finesse <strong>et</strong> <strong>de</strong> précision recherché <strong>et</strong> aussi suivant <strong>la</strong> complexitédu système.La compréhension approfondie <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> transition entreces <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s a été l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> nombreux travaux <strong>de</strong> <strong>la</strong> part <strong>de</strong>mathématiciens <strong>et</strong> physiciens <strong>et</strong> se poursuit encore actuellement,notamment pour les système chaotiques, c’<strong>est</strong> à dire très instables.Un mathématicien pourrait sans doute en r<strong>est</strong>er là <strong>et</strong> se satisfaired’une <strong>de</strong>scription formelle du mon<strong>de</strong> quantique, univers abstraitqui lui <strong>est</strong> fam<strong>il</strong>ier. Mais <strong>la</strong> curiosité humaine ne se satisfait pasaussi fac<strong>il</strong>ement. L’objection EPR ayant été rej<strong>et</strong>ée, <strong>la</strong> mécaniquequantique pose naturellement les qu<strong>est</strong>ions suivantes : qu’<strong>est</strong>-ceque <strong>la</strong> réalité <strong>et</strong> que <strong>de</strong>vient l’ objectivité scientifique? <strong>Le</strong>s travaux<strong>de</strong> Zeh, <strong>de</strong> Zurek <strong>et</strong> Omnes tentent d’apporter une réponse enintroduisant <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> décohérence quantique.L’idée générale <strong>est</strong> <strong>la</strong> suivante.Dans une expérience quantique <strong>il</strong> faut considérer l’ensembleconstitué par les 3 composants suivants : le système <strong>de</strong>s particulesétudiées, l’appare<strong>il</strong> <strong>de</strong> mesure, <strong>et</strong> le r<strong>est</strong>e <strong>de</strong> l’univers. <strong>Le</strong> tout <strong>est</strong>régi par les lois quantiques <strong>et</strong> léquation <strong>de</strong> Schrödinger. Ce quinous intéresse c’<strong>est</strong> <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> du sous-système constituépar les particules <strong>et</strong> l’appare<strong>il</strong> <strong>de</strong> mesure. Comme <strong>il</strong> n’<strong>est</strong> paspossible <strong>de</strong> connaitre l’ensemble <strong>de</strong> l’univers, on parvient à extraire<strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong> du sous-système par une opérationmathématique appelée “trace partielle” (Zurek, 1980) que l’oneffectue sur l’état du grand système. (Zurek, 1980) à montré queles résultats ainsi obtenus sont voisins <strong>de</strong> ceux obtenus par leprincipe <strong>de</strong> <strong>la</strong> réduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> fonction d’on<strong>de</strong>.


<strong>Le</strong>s travaux <strong>de</strong> Zurek <strong>et</strong> ses col<strong>la</strong>borateurs sont considérés par lesphysiciens comme étant une gran<strong>de</strong> avancée dans <strong>la</strong>compréhension du mécanisme <strong>de</strong> <strong>la</strong> mesure.L’histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantique ne s’arrête pas là, <strong>il</strong> y aencore beaucoup <strong>de</strong> trava<strong>il</strong> pour éc<strong>la</strong>ircir ces qu<strong>est</strong>ions <strong>de</strong> <strong>la</strong> part<strong>de</strong>s physiciens bien sûr <strong>et</strong> aussi <strong>de</strong>s mathématiciens.Références bibliographiquesB. Hoffmann <strong>et</strong> M. Paty, L’étrange histoire <strong>de</strong>s quantaÉditions du Seu<strong>il</strong>, coll. point sciences, 1979.E. Brézin, <strong>Physique</strong> <strong>et</strong> MathématiquesConférence à l’université <strong>de</strong> tous les savoirs, le 16 juin 2005.sur les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> <strong>la</strong> mécanique quantique :J.-M. Lévy-<strong>Le</strong>blond <strong>et</strong> F. Balibar, Quantique- RudimentsInterÉditions, Paris, 1984V. Scarani, Introduction à <strong>la</strong> physique quantiqueVuibert, 2003.

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