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Monique Fourdin Une petite fille entre désir de ça-voir et interdit de ...

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Mensuel 53sa<strong>voir</strong> » : elle ne sait « plus » quel âge ont ses frères <strong>et</strong> sœurs, elle nesait pas pourquoi elle vient en consultation au CMPP, elle ne sait« plus » pour quelle raison elle voit la psychologue <strong>et</strong> elle ne sesouvient « plus » en quoi consistent ses problèmes en lecture <strong>et</strong> encalcul. « Ça ne m’embête pas <strong>de</strong> ne pas sa<strong>voir</strong> lire », affirme Marie,qui déclare ne pas a<strong>voir</strong> envie. Lorsqu’elle est invitée à parler <strong>de</strong> saplace – « comment tu te débrouilles avec ce problème ? » – la <strong>fille</strong>tteloge la maîtresse. Elle enchaîne ainsi les énoncés <strong>et</strong> les injonctions <strong>de</strong>l’Autre sans s’arrêter, pendant cinq minutes, sans boucler sesphrases, qu’elle récite comme une litanie. C<strong>et</strong>te logorrhée sans bouclage<strong>de</strong> la chaîne signifiante, l’absence <strong>de</strong> perspective <strong>de</strong> son discours,le mauvais enchaînement <strong>de</strong>s idées, son collage aux signifiants<strong>de</strong> la maîtresse, l’engluement dans la banalité <strong>de</strong>s menus faits <strong>de</strong>l’école <strong>et</strong> <strong>de</strong> la maison évoquent la « débilité 4 ». Marie serait-elledénuée d’« intelligence », faculté qui ne consiste pas seulement àmaîtriser la langue, mais à entendre au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s mots, <strong>entre</strong> leslignes ?Pourtant, Marie sous-entend qu’elle sait quelque chose : ne ditellepas qu’elle ne sait « plus », indiquant sa position <strong>de</strong> suj<strong>et</strong> divisépar le refoulement ? Et surtout, c’est bien elle qui introduit ce qui lapréoccupe : la question <strong>de</strong>s « règles <strong>de</strong> l’école » qu’il « faut respecter »<strong>et</strong> <strong>de</strong>s « bêtises » qu’on n’a pas le droit <strong>de</strong> faire. Ce signifiant, répétéen boucle avec insistance au milieu <strong>de</strong> ce salmigondis, possè<strong>de</strong> iciune résonance singulière que son auditeur a repérée : « Excuse-moi,c’est quoi une bêtise ? » À partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te question qui in<strong>de</strong>xe le suj<strong>et</strong><strong>de</strong> l’énonciation <strong>et</strong> con<strong>de</strong>nse le sens joui, l’<strong>entre</strong>tien va prendre uneautre orientation, dans une optique n<strong>et</strong>tement névrotique : c’est unsuj<strong>et</strong> travaillé par la pulsion <strong>et</strong> traversé par les interrogations fondamentalesque suscite le réel du sexe qui va se dévoiler peu à peu.Pourtant, cela ne s’obtient pas facilement.D’abord Marie se réfugie <strong>de</strong>rrière le « on » impersonnel <strong>et</strong> restreintson propos au domaine <strong>de</strong> l’école : une bêtise, c’est « qu’on nerespecte pas les règles <strong>de</strong> la classe ». Elle dit ne pas a<strong>voir</strong> envie d’enfaire, avant <strong>de</strong> reconnaître qu’il lui arrive d’y penser ; puis elle dresseun catalogue <strong>de</strong> bêtises consistant à porter atteinte au corps <strong>de</strong>4. Ce sont quelques-uns <strong>de</strong>s indices qu’Anny Cordié m<strong>et</strong> sur le compte <strong>de</strong> la débilité (ibid.,p. 186).40

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