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Docteur en Sciences de gestion Mention ... - Tour du Valat

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Université <strong>de</strong> Cergy-PontoiseEcole doctoraleEconomie Managem<strong>en</strong>t etMathématiques <strong>de</strong> CergyCIREDAgroParisTechTHESEpour obt<strong>en</strong>ir le titre <strong>de</strong><strong>Docteur</strong> <strong>en</strong> Sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>M<strong>en</strong>tion : Environnem<strong>en</strong>tprés<strong>en</strong>tée parFanny GUILLETUNE ANALYSE STRATEGIQUE POUR L’ORGANISATION AFINALITE ENVIRONNEMENTALELe cas d’une ONGE, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesThèse co-dirigée par Laur<strong>en</strong>t MERMET et Maya LEROYpréparée à AgroParisTech (C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Montpellier) et au Laboratoire CIREDsout<strong>en</strong>ue le 8 septembre 2011, à AgroParisTech-<strong>en</strong>gref, c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Paris<strong>de</strong>vant le jury composé <strong>de</strong> :Rapporteurs : Flor<strong>en</strong>ce PALPACUER - Université Montpellier 1 (ERFI)John THOMPSON- CNRS (CEFE)Examinateurs : Jean JALBERT - <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Pierre-Eric TIXIER- Sci<strong>en</strong>ces Po (CSO)Directeurs : Laur<strong>en</strong>t MERMET - AgroParisTech (CIRED)Maya LEROY- AgroParisTech (ERFI)


RésuméAvec la montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong> la préoccupation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans l’espace public, lesONG d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sont att<strong>en</strong><strong>du</strong>es sur leur capacité à remplir leur mission. S’étant donnépour rôle d’agir <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la biodiversité, elles veul<strong>en</strong>taugm<strong>en</strong>ter les impacts positifs <strong>de</strong> leurs actions. La problématique théorique et pratique à laquellecette thèse s’attache à répondre se décompose dans les questions suivantes : (i) comm<strong>en</strong>t agiss<strong>en</strong>tet peuv<strong>en</strong>t agir les ONGE ? (ii) Quel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique peut contribuer à r<strong>en</strong>forcer leursactions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales ? (iii) Comm<strong>en</strong>t appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r et évaluer l’efficacité pourl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces actions qui sont bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t indirectes (s<strong>en</strong>sibilisation, influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>sdécisions, etc.) par rapport aux objets écologiques visés ?Cette recherche s’inscrit dans les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>sorganisations, <strong>en</strong> particulier dans le champ <strong>de</strong> la stratégie, et adopte l’Analyse Stratégique <strong>de</strong> laGestion Environnem<strong>en</strong>tale comme cadre théorique. L’analyse est réalisée à partir d’une démarche<strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion m<strong>en</strong>ée p<strong>en</strong>dant 3 ans au sein d’une ONGE, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>recherche pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes.(i) A travers l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> trois cas d’actions développés par l’ONGE, nous montrons que les choixet la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ces actions sont le fruit d’une articulation <strong>en</strong>tre quatre registresstratégiques : la construction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, le mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour interv<strong>en</strong>ir dans l’espace public, le développem<strong>en</strong>t interne (<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sressources et compét<strong>en</strong>ces) et la position acquise et développée dans le secteur <strong>de</strong> laconservation. (ii) A partir <strong>de</strong> connaissances générées dans l’interaction avec les membres <strong>de</strong>l’ONGE, nous montrons que les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales peuv<strong>en</strong>t être r<strong>en</strong>forcées <strong>en</strong>respectant, au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur construction (<strong>en</strong> interne <strong>de</strong> l’organisation), la démarche suivante :la clarification <strong>de</strong>s objectifs écologiques et l’explicitation <strong>de</strong> la stratégie au regard d’un diagnostic<strong>du</strong> système où il s’agit d’interv<strong>en</strong>ir. (iii) Enfin nous concluons <strong>de</strong> notre analyse <strong>de</strong>s pratiquesd’évaluation qu’il est possible <strong>de</strong> relier la stratégie mise <strong>en</strong> œuvre à ses résultats <strong>en</strong> termesd’efficacité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et l’on propose un cadre d’évaluation permettant <strong>de</strong> retracer lachaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s, <strong>de</strong>puis les objectifs écologiques jusqu’aux résultats <strong>de</strong> l’action déployée. Cettelogique évaluative favorise la réflexion stratégique et l’amélioration <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taledans ses procé<strong>du</strong>res et ses résultats.Mots clé : ONGE, actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, stratégie, évaluation, zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes, conservation.1


Remerciem<strong>en</strong>tsIl y a <strong>de</strong>s instants <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce anodins qui peuv<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rablem<strong>en</strong>t changer le regard qu’on portesur les choses. Ainsi, à la fin d’un cours <strong>de</strong> français <strong>en</strong> 1 e , le professeur a tancé la classe qui faisaitdéjà <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre un brouhaha à peine apparues à l’écran les premières pages <strong>du</strong> générique <strong>du</strong> filmque nous avions eu la chance <strong>de</strong> visionner. L’irrespect <strong>de</strong> ces jeunes ingrats <strong>de</strong>vant le travail <strong>de</strong>l’équipe qui avait pro<strong>du</strong>it ce docum<strong>en</strong>taire avait provoqué le courroux <strong>de</strong> notre professeur. Lasurprise <strong>de</strong> cette réaction avait été pour moi une leçon aussi importante que le cont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> film.Depuis, je lis jusqu’au nom <strong>du</strong> costumier lorsque les ban<strong>de</strong>s défil<strong>en</strong>t au son <strong>de</strong>s génériques.De la même manière, si cette thèse porte mon nom <strong>en</strong> première page, elle ne serait pas sans leconcours <strong>de</strong> tous ces autres noms qu’il est maint<strong>en</strong>ant temps <strong>de</strong> faire défiler.Intro<strong>du</strong>ction dans le milieu : Nadine et Michel Guillet, mes par<strong>en</strong>ts, m’ont non seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>seigné lacuriosité qui semble être la clé infaillible pour une inlassable <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> chercher, mais égalem<strong>en</strong>toffert un souti<strong>en</strong> et une confiance dans mes choix, d’une façon tellem<strong>en</strong>t naturelle que c’est inextremis que je p<strong>en</strong>se à les <strong>en</strong> remercier. Ici je p<strong>en</strong>se égalem<strong>en</strong>t à Pierre-Alain Jayet qui a accueillidans son laboratoire et ouvert les portes <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces sociales à cette jeune ingénieure agronomeque j’étais <strong>en</strong> train <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir.La réalisation : Je sais gré à Maya Leroy et Laur<strong>en</strong>t Mermet <strong>de</strong> m’avoir permis <strong>de</strong> concilier mes<strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s aspirations : la recherche et l’action pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. C’est autant sur l’un etl’autre <strong>de</strong> ces aspects que j’ai appris à leur contact, grâce à l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t riche et scrupuleux dontj’ai bénéficié. J’ai égalem<strong>en</strong>t une p<strong>en</strong>sée pour d’autres membres <strong>du</strong> groupe <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong><strong>gestion</strong> sur les territoires et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui ont égalem<strong>en</strong>t animé ce parcours initiatique : <strong>en</strong>particulier Raphaël Billé, Tiphaine Leménager, Sébasti<strong>en</strong> Treyer, Jean-Baptiste Narcy et XavierPoux.Les chefs-opérateurs : Mon comité <strong>de</strong> thèse, composé <strong>de</strong> mes directeurs, Raphaël Billé, Flor<strong>en</strong>cePalpacuer et Jean Jalbert, a consci<strong>en</strong>cieusem<strong>en</strong>t joué le jeu <strong>de</strong> ces évaluations intermédiaires quiont à chaque fois été <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts cruciaux dans la construction <strong>de</strong> ma recherche. C’est pour letemps qu’ils y ont consacré et pour leur implication que je souhaite les remercier <strong>en</strong>core une foisaujourd’hui.L’assistance <strong>de</strong> réalisation – Préparation <strong>du</strong> tournage : J’ai une p<strong>en</strong>sée chaleureuse pour Daniel Théry(CIRED), Christine Bertrand (AgroParisTech) et Malika Badache (Ecole doctorale EM2C) quim’ont r<strong>en</strong><strong>du</strong> les tâches administratives bi<strong>en</strong> plus légères. Je remercie aussi les <strong>de</strong>ux équipes ausein <strong>de</strong>squelles j’ai été accueillie pour réaliser cette thèse. Toute l’équipe <strong>du</strong> groupe <strong>de</strong> formationet <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong> Gestion <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la forêt tropicale(AgroParisTech, c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Montpellier) et tous les membres <strong>du</strong> groupe Alter Managem<strong>en</strong>t etEcologie au laboratoire ERFI (Montpellier 1).Les acteurs : Je remercie vivem<strong>en</strong>t Jean Jalbert et son <strong>en</strong>thousiasme sans faille, Patrick Grillas etson incroyable pati<strong>en</strong>ce pour répondre à mes sollicitations et à mes propositions. Je remercie un àun, bi<strong>en</strong> que ce soit sans les nommer tous ici, tous les membres <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, son comité<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et ses équipes opérationnelles qui ont toujours accepté ma prés<strong>en</strong>ce et ont toujoursrépon<strong>du</strong> positivem<strong>en</strong>t à mes nombreuses sollicitations malgré <strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>das chargés.La logistique : Je dois beaucoup à l’incroyable disponibilité (même dans les fréqu<strong>en</strong>tes pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong>précipitation) <strong>de</strong>s assistances <strong>de</strong> direction Flor<strong>en</strong>ce Daubigney et Sr Nicodème, répondant à mes<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s comme si elles étai<strong>en</strong>t chronométrées. Encore une fois, mille mercis.Les chefs-décorateurs : Au cours <strong>de</strong> ces trois ans, j’ai eu le plaisir <strong>de</strong> partager mon bureau avec (ouplus exactem<strong>en</strong>t d’investir les bureaux <strong>de</strong>) Pierre-Marie Aubert et Sarah Fernan<strong>de</strong>z à3


AgroParisTech, Pascal Contournet, Thomas Galewski et Coralie Beltrame à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Jeti<strong>en</strong>s à les remercier pour ces mom<strong>en</strong>ts partagés. J’ai égalem<strong>en</strong>t une p<strong>en</strong>sée pleine <strong>de</strong> souv<strong>en</strong>irs et<strong>de</strong> reconnaissance pour Cassandre <strong>de</strong> Ferrière qui m’a permis une immersion très efficace dans leterrain au Maroc. Je remercie tous ceux qui m’ont hébergée lors <strong>de</strong> mes diverses missions <strong>de</strong>terrain.Les pairs et autres cinéastes : L’expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la thèse se partage ! Les cont<strong>en</strong>us, mais aussi lesimpressions, les doutes… Pour leur écoute, leur att<strong>en</strong>tion et le plaisir d’avoir partagé cela aveceux, je remercie très amicalem<strong>en</strong>t Samuel Roturier et Tiphaine Leménager, mais aussi ClaireBouteloup, Clém<strong>en</strong>t Peltre, Clém<strong>en</strong>ce Emprin, et d’autres <strong>en</strong>core.Nomination et jury : Je remercie vivem<strong>en</strong>t chacun <strong>de</strong>s membres <strong>du</strong> jury d’avoir accepté d’évaluer cetravail.Ressources (spirituelles) : Mes <strong>de</strong>rnières p<strong>en</strong>sées sont <strong>de</strong>stinées à Claire Sauvage, qui m’a appris larésili<strong>en</strong>ce bi<strong>en</strong> avant <strong>de</strong> connaître les multiples concepts relatifs à l’écologie, et à qui ce travail estsymboliquem<strong>en</strong>t dédié.


Table <strong>de</strong>s matièresIntro<strong>du</strong>ction générale...........................................................................................................9Partie 1Articuler la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et l’impact <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions : cadre théorique etdémarche <strong>de</strong> recherche pour se saisir <strong>du</strong> problème .......................................................... 17Chapitre 1 - De la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE à l’impact <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions : prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> cadred’analyse................................................................................................................................................... 19Chapitre 2 - Une recherche in<strong>du</strong>ctive et interv<strong>en</strong>ante sur une ONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ........ 63Conclusion <strong>de</strong> la première partie ........................................................................................................... 105Partie 2Etudier l’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie dans <strong>de</strong>s situations d’actionsconcrètes............................................................................................................................107Chapitre 3 - La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes ................................................................................................................................. 111Chapitre 4 - Le cas <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya « zone humi<strong>de</strong> s<strong>en</strong>sible associée à uneapproche <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s zones côtières ».......................................................................... 179Chapitre 5 - Construction d’un dispositif pour évaluer l’état et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes................................................................................................................. 229Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partie .......................................................................................................... 283Partie 3Vers un cadrage pour sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique, <strong>de</strong>s actions à leurs impactsécologiques....................................................................................................................... 289Chapitre 6 - La planification stratégique : mom<strong>en</strong>t pour la réflexion et le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sactions futures ...................................................................................................................................... 291Chapitre 7 - Relier stratégie et impact écologique <strong>de</strong>s actions : l’évaluation comme mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la réflexion stratégique ........................................................................................................................ 385Conclusion <strong>de</strong> la troisième partie........................................................................................................... 419Conclusion générale ......................................................................................................... 427Bibliographie......................................................................................................................................... 445Table <strong>de</strong>s matières................................................................................................................................ 4685


« Morel avait instinctivem<strong>en</strong>t ouvert la bouche pour répondre, mais s’arrêta àtemps. Ce n’était pas la peine. S’ils n’avai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>core compris, c’est qu’ilsn’avai<strong>en</strong>t vraim<strong>en</strong>t pas ça <strong>en</strong> eux. On l’a, ou on ne l’a pas. Ils n’étai<strong>en</strong>t pasles seuls à ne pas l’avoir. Ce n’est pas <strong>en</strong>core aujourd’hui, p<strong>en</strong>sa-t-il gravem<strong>en</strong>t,que les peuples <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> allai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dre dans la rue pour réclamer <strong>de</strong> leursgouvernem<strong>en</strong>ts quels qu’ils soi<strong>en</strong>t le respect <strong>de</strong> la nature. Mais ce n’était pasune raison pour se décourager : après tout l’Afrique avait toujours été le pays<strong>de</strong>s av<strong>en</strong>turiers et <strong>de</strong>s têtes brûlées, et aussi <strong>de</strong>s pionniers, qui laissai<strong>en</strong>t leurs ospour t<strong>en</strong>ter d’aller toujours plus loin – il n’y avait qu’à faire comme eux.Quand au succès final… Il ne désespérait pas. Il fallait continuer, tout t<strong>en</strong>ter.Évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t, si les hommes n’étai<strong>en</strong>t pas capables <strong>de</strong> se serrer un peu pourt<strong>en</strong>ir moins <strong>de</strong> place, s’ils manquai<strong>en</strong>t à ce point <strong>de</strong> générosité, s’ils necons<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t pas à s’<strong>en</strong>combrer <strong>de</strong>s éléphants, quel que fût le but poursuivi, s’ilss’obstinai<strong>en</strong>t à considérer cette marge comme un luxe, eh bi<strong>en</strong> ! l’homme luimêmeallait finir pas <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un luxe inutile ».Les racines <strong>du</strong> ciel, Romain Gary, 19567


Intro<strong>du</strong>ction généraleSi vous ne savez pas quel impact a votre action, ne la faites pas. Cette formule péremptoire est celleprononcée par le « S<strong>en</strong>ior Vice Presid<strong>en</strong>t for International Governm<strong>en</strong>t Relations » <strong>de</strong> l’ONG<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale Conservation International (CI), <strong>en</strong> 2006, lors d’un conseil sci<strong>en</strong>tifique d’une autreorganisation agissant dans le champ <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité :la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.Ce que révèle l’injonction <strong>de</strong> ce membre <strong>de</strong> CI est le fait que la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> – dont les actionsseront ici analysées <strong>en</strong> profon<strong>de</strong>ur – comme CI et comme bi<strong>en</strong> d’autres ONGE (com.pers. 2008,2009) 1 , se préoccup<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> leur activité et se souci<strong>en</strong>t <strong>de</strong> le r<strong>en</strong>forcer.Ce responsable <strong>de</strong> CI ne s’imaginait sans doute pas soulever le champ <strong>de</strong> questions qui a été àl’origine <strong>de</strong> l’angle d’approche et <strong>du</strong> terrain <strong>de</strong> cette thèse. Quelles actions sont mises <strong>en</strong> œuvrepar les ONGE ? De quels impacts parle-t-on ? Comm<strong>en</strong>t et pourquoi les évaluer ? Ce sont lesquestions que nous nous attacherons à préciser, à démêler, à docum<strong>en</strong>ter et à r<strong>en</strong>seigner dans letexte qui va suivre.Selon le Conseil économique et social <strong>de</strong> l’ONU 2 , une ONG est « une organisation qui n’a pasété constituée par une <strong>en</strong>tité publique ou par voie d’un accord intergouvernem<strong>en</strong>tal, même si elleaccepte <strong>de</strong>s membres désignés par les autorités publiques, mais à condition que la prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>tels membres ne nuise pas à sa liberté d’expression. Les principaux moy<strong>en</strong>s financiers <strong>de</strong>l’organisation doiv<strong>en</strong>t prov<strong>en</strong>ir ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cotisations <strong>de</strong>s particuliers membres <strong>de</strong>l’organisation » (Ecosoc, Résolution 1996/31, 1996). On admet le plus souv<strong>en</strong>t qu’elles secaractéris<strong>en</strong>t par une activité sans but lucratif et reconnue d’intérêt général (Quéinnec & Igal<strong>en</strong>s,1 Cette préoccupation est ressortie <strong>de</strong> nos <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec <strong>de</strong>s membres d’autres ONGE : Comité Français UICN,C<strong>en</strong>tre Méditerrané<strong>en</strong> UICN, Noé Conservation, WWF France.2 Le terme ONG n'est pas mieux défini au niveau <strong>du</strong> droit français. On parle le plus souv<strong>en</strong>t d’associations dans lamesure où la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s ONG françaises ont le statut d'association loi 1901. D’autres ONG ont le statut <strong>de</strong>fondation.9


Intro<strong>du</strong>ction générale2004). Si cette définition large, ainsi que leur profusion et leur diversité r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t insaisissable ceque le terme d’ONG – et d’ONGE – recouvre précisém<strong>en</strong>t, ces élém<strong>en</strong>ts nous suffis<strong>en</strong>tnéanmoins à désigner l’objet que l’on se propose d’étudier 3 . Les caractères qui nous import<strong>en</strong>t <strong>de</strong>relever sont les suivants : une ONGE est une organisation formelle et non publique 4 , fondée parune mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. C’est-à-dire que la protection <strong>de</strong> la nature ou <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>test la fois la raison d’être et la finalité <strong>de</strong> l’organisation. La question à laquelle le prés<strong>en</strong>t travails’attachera à répondre est celle <strong>de</strong> la façon dont ces ONGE agiss<strong>en</strong>t et peuv<strong>en</strong>t progresser pouratteindre leurs objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux.Montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong>s ONGE dans l’espace public et développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la littérature surles ONGE dans les sci<strong>en</strong>ces politiquesLes ONGE intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis les origines <strong>de</strong>s mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature <strong>en</strong> tantque porteuses d’actions int<strong>en</strong>tionnelles et <strong>de</strong> politiques publiques, qu’elles ont d’ailleurs contribuéà faire émerger (Charnovitz, 1997 ; 2002 ; 2005 ; Raustiala, 1997). Les auteurs indiqu<strong>en</strong>tcep<strong>en</strong>dant que leur capacité d’influ<strong>en</strong>ce dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la prop<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s Etats à les saisir. Et lesactions que ces ONGE vont pouvoir m<strong>en</strong>er rest<strong>en</strong>t <strong>en</strong>cadrées par les structures institutionnelles<strong>de</strong>s pays (Van <strong>de</strong>r Heijd<strong>en</strong>, 1997), les politiques publiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales adoptées et mises<strong>en</strong> oeuvre par les gouvernem<strong>en</strong>ts aux niveaux nationaux et internationaux. P. Le Prestre dit à cetégard que les ONGE « fonctionn<strong>en</strong>t dans les interstices <strong>du</strong> système international étatique »(2005 : 112). Leur montée <strong>en</strong> puissance dans les années 1970 et <strong>en</strong>core davantage dans les années1990 a suscité l’émerg<strong>en</strong>ce d’un champ prolifique surtout appuyé sur les sci<strong>en</strong>ces politiques, quis’est dans un premier temps conc<strong>en</strong>tré sur la capacité <strong>de</strong>s ONGE à influ<strong>en</strong>cer et développer lagouvernance mondiale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (e.g. Spiro, 2006 5 ). Elles sont <strong>en</strong> effet « actives dans lagénération <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s et la mise à l’ordre <strong>du</strong> jour. Elles particip<strong>en</strong>t aussi <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus auxdélibérations et parfois à la formulation <strong>de</strong>s décisions, et agiss<strong>en</strong>t comme maître d’œuvre oucomme surveillantes <strong>de</strong> leur mise <strong>en</strong> œuvre » (Le Prestre, 2005 : 107). Par leur statut nongouvernem<strong>en</strong>tal, ces organisations ont montré une certaine aisance à dépasser les frontières etont très vite été <strong>de</strong>s souti<strong>en</strong>s aux institutions internationales (Charnovitz, 1997 ; 2002 ; 2005 ; etpour un état <strong>de</strong> l’art sur le sujet : voir Prieur & Guignier, 2006). K. Raustiala (1997) explique3 Définir précisém<strong>en</strong>t et classifier les ONG constitue un travail à part <strong>en</strong>tière qui n’est pas l’objet <strong>de</strong> cette thèse. Atitre d’exemple, l’article <strong>de</strong> A. Vakil (1997) est consacré à ce travail <strong>de</strong> définition.4 Nous n’utilisons pas le mot « privé » qui pourrait faire p<strong>en</strong>ser que les ONGE agiss<strong>en</strong>t <strong>de</strong> manière totalem<strong>en</strong>tindép<strong>en</strong>dante et privé. Or les ONGE agiss<strong>en</strong>t dans le domaine <strong>du</strong> bi<strong>en</strong> public et, dans le cas <strong>de</strong> la France, acquier<strong>en</strong>tleur statut d’utilité publique par <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> l’Etat.5 Dans cet article, l’auteur propose <strong>de</strong> décrire la participation <strong>de</strong>s ONG à la prise <strong>de</strong> décision et à l’évolution <strong>de</strong> lagouvernance internationale <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> trois modèles qui co-exist<strong>en</strong>t : les modèles libéral, <strong>de</strong>s parties-pr<strong>en</strong>antes etpost-national.10


Intro<strong>du</strong>ction généralecomm<strong>en</strong>t la progression <strong>de</strong> la gouvernance internationale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong>gagée parl’impulsion <strong>de</strong>s ONGE, a favorisé <strong>en</strong> même temps la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s questions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales au niveau <strong>de</strong>s Etats. Ce développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ONGE au niveau international aété facilité par l’évolution rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> communication (Spiro, 2002 ; Le Prestre, 2005 :107), ce que reflète l’abondance <strong>de</strong> la littérature issue <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces politiques portant sur lescoalitions d’ONGE à travers la construction <strong>de</strong> réseaux transnationaux (e.g. Hudson, 2001 ;Yanacopoulos, 2005 ; Berny, 2008).Diversification <strong>de</strong>s domaines d’action <strong>de</strong>s ONGE, diversification <strong>de</strong>s approches dans lalittératureLa montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong>s ONGE dans l’espace public serait <strong>du</strong>e, selon S. Charnovitz (1997), àla fois à la démocratisation d’un nombre croissant <strong>de</strong> pays, mais aussi aux « changem<strong>en</strong>ts dans lesappareils d’Etat [qui] ont été favorables à un accroissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> rôle <strong>de</strong>s ONG. Quand lesgouvernem<strong>en</strong>ts ré<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t leurs effectifs et privatis<strong>en</strong>t, ils peuv<strong>en</strong>t considérer que les ONG lesremplac<strong>en</strong>t ». Ce phénomène <strong>de</strong> généralisation <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats public – privé dans <strong>de</strong>s domainespublics <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus nombreux est expliqué par P. Duran dans P<strong>en</strong>ser l’action publique (1999) quitraite <strong>du</strong> cas <strong>de</strong> la France. Cette asc<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s ONGE est égalem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>e à la reconnaissance et la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociales croissantes <strong>en</strong> faveur d’une prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tauxaprès une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> crise dans les années 1980 : « En 1990, le paysage change <strong>de</strong> façon majeure.La problématique <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et le mouvem<strong>en</strong>t écologique voi<strong>en</strong>t leur place et leurinflu<strong>en</strong>ce remonter <strong>de</strong> façon spectaculaire dans la société et la vie politique. Un nouveaugouvernem<strong>en</strong>t permet <strong>de</strong> nouvelles marges <strong>de</strong> manœuvre pour les politiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales »(Mermet & Berlan-Darqué, 2009 : 342). Cette préoccupation sociale et politique continue às’int<strong>en</strong>sifier dans les années 2000 alors que les problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux alarm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus <strong>en</strong>plus l’opinion publique. C’est sur ce constat que D. Salles (2006) intro<strong>du</strong>it son ouvrage sur Lesdéfis <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t :« Force est <strong>de</strong> constater que les ambitions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, affichées par la prise <strong>en</strong>charge publique <strong>de</strong> problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux (air, eau, bruit, déchet, biodiversité,etc.) et au travers <strong>de</strong> la référ<strong>en</strong>ce lancinante aux principes <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable, setra<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t par <strong>de</strong>s résultats <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qui rest<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>çà <strong>de</strong>sobjectifs. Comm<strong>en</strong>t expliquer ce paradoxe qu'une telle mobilisation institutionnelle,illustrée par un dispositif normatif juridico-politico-administratif <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus élaboré,par <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales publiques ou privées plus nombreuses et parl'expression d'une forte <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale d'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ne permette pas <strong>de</strong>contribuer à résoudre les problèmes d'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ? » (Salles, 2006 : 10).11


Intro<strong>du</strong>ction généraleEntre cette place laissée aux initiatives privées dans l’espace public et le <strong>du</strong>rcissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale vis-à-vis <strong>de</strong> solutions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, lacontribution <strong>de</strong> ces acteurs privés spécifiques – les ONGE qui ont pris la responsabilité <strong>de</strong> sedonner une mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale – est une véritable question publique.Cet accès plus large à l’espace public s’est tra<strong>du</strong>it par une augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’effectif <strong>de</strong> cesorganisations et une diversification <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’actions pour interv<strong>en</strong>ir à différ<strong>en</strong>tes échelles, <strong>du</strong>local au global (Mermet, Dziedzichi & Laurans, 2001 ; Lebel & Desforges, 2009). Aux échelleslocales, les ONGE <strong>de</strong> s<strong>en</strong>sibilisation ou d’é<strong>du</strong>cation à l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t se multipli<strong>en</strong>t comme lesassociations citoy<strong>en</strong>nes et militantes qui se constitu<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t pour bloquer <strong>de</strong>s projetsd’aménagem<strong>en</strong>ts et d’infrastructures. De l’échelle locale à l’échelle globale, d’approches c<strong>en</strong>tréessur les écosystèmes et la biodiversité à <strong>de</strong>s approches c<strong>en</strong>trées sur les milieux <strong>de</strong> vie et lesdégradations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, elles agiss<strong>en</strong>t pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s territoires oupousser à la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s pollutions in<strong>du</strong>ites par les activités économiques. Les ONGEconstitu<strong>en</strong>t donc un objet <strong>de</strong> recherche dans les sci<strong>en</strong>ces politiques évoquées plus haut qui sefocalis<strong>en</strong>t notamm<strong>en</strong>t sur leur rôle dans la gouvernance internationale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Maiselles sont égalem<strong>en</strong>t abordées dans d’autres littératures qui r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t compte <strong>de</strong> multiples échelleset domaines d’action pris <strong>en</strong> charge par ces organisations. Il s’agit <strong>en</strong> particulier <strong>de</strong> la littératurequi a émergé autour <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et la conservation <strong>de</strong> la nature 6 ainsi que le domaine <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources naturelles – déjà bi<strong>en</strong> investi sous l’angle <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t (et <strong>de</strong>s ONG<strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t). Les ONGE agiss<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t auprès <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises commerciales dontl’activité est néfaste pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Avec la multiplication <strong>de</strong> ces actions, <strong>de</strong>s travauxapparaiss<strong>en</strong>t concernant l’influ<strong>en</strong>ce directe <strong>de</strong> leurs actions visant à pousser les <strong>en</strong>treprises àré<strong>du</strong>ire leur impact négatif (e.g. Parm<strong>en</strong>tier, 1999 ; Langer, 2009), ou plus généralem<strong>en</strong>t sur lesli<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre ONG et <strong>en</strong>treprises commerciales (Thiery & Perrin, 2005 ; Journée d’étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> groupeinitiative, 2008 ; Capron, 2010). Enfin, les ONGE pro<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t parfois elles-mêmes une littératuresci<strong>en</strong>tifique ou technique, à l’usage <strong>de</strong> la communauté académique ou <strong>de</strong>s pratici<strong>en</strong>s, dans laquellesont mises <strong>en</strong> discussion leurs approches écologiques et stratégiques (e.g. Bostick, 2008 ;McDonald et al., 2007).6 Cette littérature est aujourd’hui très large et compte un nombre important <strong>de</strong> revues, parmi lesquelles on peut citerEnvironm<strong>en</strong>t Developm<strong>en</strong>t and Sustanaibility, Envirom<strong>en</strong>tal managem<strong>en</strong>t, Environm<strong>en</strong>tal monitoring and assessm<strong>en</strong>t, Conservationbiology, etc.12


Intro<strong>du</strong>ction généraleEtudier la stratégie <strong>de</strong>s ONGE et les impacts écologiques <strong>de</strong> leurs interv<strong>en</strong>tionsPar les cas d’étu<strong>de</strong> qui y sont développés et les questions posées, les champs <strong>de</strong> littératureévoqués ci-<strong>de</strong>ssus éclair<strong>en</strong>t les actions <strong>de</strong>s ONGE, certains angles <strong>de</strong> leurs stratégies, ainsi queleurs rôles et leur impact dans la gouvernance internationale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, dansl’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> politiques publiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, ou <strong>en</strong>core face à <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong>conservation et <strong>de</strong> préservation <strong>de</strong>s ressources à <strong>de</strong>s échelles locales.Le prés<strong>en</strong>t travail s’associe à ces recherches sur les rôles et les actions <strong>de</strong>s ONGE, avecl’int<strong>en</strong>tion d’avancer dans les perspectives invoquées par P. Le Prestre (2005 : 102) : « un<strong>en</strong>ouvelle phase <strong>de</strong> recherches où il s’agit moins <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ter leur essor et l’influ<strong>en</strong>ce qu’on leurattribue, que <strong>de</strong> savoir quel type <strong>de</strong> rôle elles jou<strong>en</strong>t, sous quelles conditions elles exerc<strong>en</strong>t unimpact, sur quoi et avec quels résultats – positifs ou non – pour la dynamique <strong>de</strong> la coopérationinternationale […], la définition et la résolution <strong>de</strong>s problèmes qu’affronte l’humanité » et avanttout cela, le mainti<strong>en</strong> voir l’amélioration <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. A cet effet, nousproposons d’abor<strong>de</strong>r la problématique <strong>de</strong> l’action et l’impact <strong>de</strong>s ONGE non pas <strong>en</strong> c<strong>en</strong>trantl’analyse sur <strong>de</strong>s espaces sociopolitiques où les ONGE peuv<strong>en</strong>t interv<strong>en</strong>ir, mais <strong>en</strong> partantdirectem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion interne <strong>de</strong> l’ONGE avant <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ir vers le lieu <strong>de</strong> l’action. End’autres termes, l’<strong>en</strong>trée <strong>en</strong> matière <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong>s ONGE passera non pas seulem<strong>en</strong>t par leterrain écologique et sociopolitique où elles s’exprim<strong>en</strong>t, mais aussi par le lieu <strong>de</strong> leur fabricationdans l’objectif <strong>de</strong> saisir les déterminants <strong>de</strong>s choix stratégiques (qui sont autant internesqu’externes), et <strong>de</strong> les relier à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Cette approche estcomplém<strong>en</strong>taire à celles évoquées dans les travaux sub-cités où les ONGE sont souv<strong>en</strong>tappréh<strong>en</strong>dées comme <strong>de</strong>s acteurs plus ou moins anonymes parmi d’autres types d’acteurs dansun espace public donné.Pour contribuer à la connaissance sci<strong>en</strong>tifique sur les ONGE dans la perspective <strong>du</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, notre proposition consiste à établir les li<strong>en</strong>s<strong>en</strong>tre (1) la stratégie développée et portée <strong>en</strong> interne <strong>de</strong> l’organisation et (2a) ses actions externesdans l’espace public (rôle <strong>de</strong> l’ONGE) et (2b) ses actions externes au regard <strong>de</strong> l’état (niveau <strong>de</strong>conservation) <strong>de</strong>s objets écologiques visés par ses interv<strong>en</strong>tions. Nous <strong>en</strong>gageant ainsi dansl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s « mo<strong>de</strong>s d’agir » (David et al., 2000 : 2) pour gérer l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Mermet et al.,2005), nous nous inscrivons dans les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Notre <strong>en</strong>treprise quiconsiste à étudier l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale portée par l’ONGE et la façon dont elle peut êtrer<strong>en</strong>forcée au regard <strong>de</strong> ses impacts écologiques implique une contextualisation <strong>de</strong> la recherche.Pour A-C. Martinet (2000 : 121), c’est d’ailleurs « la spécificité même <strong>de</strong> la connaissance <strong>en</strong><strong>gestion</strong> qui ne peut que placer au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> ses objets <strong>de</strong> recherche les problèmes et les situations13


Intro<strong>du</strong>ction générale<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> tels qu'ils se manifest<strong>en</strong>t concrètem<strong>en</strong>t dans leurs conting<strong>en</strong>ces et leurs évolutions ».Cette contextualisation <strong>de</strong> la recherche se situe ainsi : (1) dans une ONGE, (2a) dans les systèmessociopolitiques dans lesquels s’inscriv<strong>en</strong>t ses actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, (2b) par rapport à <strong>de</strong>sobjets écologiques, ceux visés par ces actions.1. Etudier la manière dont une organisation fondée par une mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale élabore,met <strong>en</strong> œuvre et fait évoluer sa stratégie <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> l’atteinte <strong>de</strong> cette mission, implique <strong>de</strong> m<strong>en</strong>erune analyse approfondie <strong>de</strong> l’interne <strong>de</strong> l’ONGE. Pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ce travail, nous choisissonsd’une part, <strong>de</strong> c<strong>en</strong>trer l’étu<strong>de</strong> sur une ONGE, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ; et d’autre part, <strong>de</strong> la réaliser àtravers une recherche-interv<strong>en</strong>tion auprès <strong>de</strong> l’organisation. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>recherche pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes, crée <strong>en</strong> 1954. Elle a lestatut <strong>de</strong> fondation reconnue d’utilité publique <strong>de</strong>puis 1978 pour son activité sci<strong>en</strong>tifique pour laconservation et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> d’un domaine (2600 hectares) classé <strong>en</strong> Réserve Naturelle. Elle estsituée <strong>en</strong> plein cœur <strong>de</strong> la Camargue, une <strong>de</strong>s principales zones humi<strong>de</strong>s françaises, sur lacommune d’Arles (Bouches-<strong>du</strong>-Rhône). Elle œuvre pour le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la connaissance etd’initiatives visant à conserver les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et leur biodiversité. Nouschoisissons la démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion (Girin, 1990), car d’une part, voulant éclairerles li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et ses impacts écologiques <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous partageons une préoccupation majeure <strong>de</strong> l’ONGE, et d’autre part,p<strong>en</strong>ser un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale fait appel à uneapproche constructiviste ancrée dans <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Le Moigne, 1990 ; Girin, 1990).En partant <strong>de</strong> l’organisation interne pour éclairer ses actions externes, nous nous inscrivonségalem<strong>en</strong>t dans le champ <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique. D’une part, l’articulation <strong>en</strong>tre la stratégieet l’atteinte <strong>de</strong>s objectifs est l’objet <strong>de</strong> ce champ qui vise principalem<strong>en</strong>t à sout<strong>en</strong>ir l’élaboration etla mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie dans une perspective <strong>de</strong> création <strong>de</strong> valeur pour l’organisation (lavaleur étant dans notre cas une amélioration écologique <strong>de</strong>s écosystèmes). D’autre part,l’articulation <strong>en</strong>tre l’analyse interne et externe <strong>de</strong> l’organisation est un espace étudié, théorisé etoutillé dans la littérature <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique qui prés<strong>en</strong>te, <strong>de</strong>puis les années 1980, la mise<strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’interne et <strong>de</strong> l’externe comme indisp<strong>en</strong>sable à la compréh<strong>en</strong>sion et à l’analyse <strong>de</strong>sstratégies <strong>de</strong>s organisations (Mintzberg et al., 1999 ; Saïas & Metais, 2001 ; Marsch<strong>en</strong>ay, 2004).2a. Pour établir les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et les impacts <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions, nousavons besoin <strong>de</strong> suivre ses actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, <strong>de</strong>puis l’interne <strong>de</strong> l’organisation où ellessont p<strong>en</strong>sées, jusqu’aux espaces sociopolitiques et écologiques, réels, où elles sont déployées.14


Intro<strong>du</strong>ction généraleC’est <strong>en</strong> adoptant le cadre d’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale (ASGE)(Mermet et al., 2005 ; Mermet, 2006 ; Leroy, 2006a) que nous pourrons organiser notre recherchesur l’action concrète et la contribution <strong>de</strong> l’ONGE à l’amélioration <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. En effet, ce cadre théorique nous ai<strong>de</strong> à contextualiser la recherche dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et à décrypter la façon selon laquelle ils sont gérés parl’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s acteurs dont les décisions et les pratiques ont une influ<strong>en</strong>ce sur l’état <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t considéré. Etudier l’ONGE <strong>en</strong> tant qu’acteur particulier, c’est-à-dire p<strong>en</strong>ser laconstruction <strong>de</strong> sa stratégie et sa mise <strong>en</strong> œuvre dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> auxquels elleapparti<strong>en</strong>t, permet d’organiser les li<strong>en</strong>s que nous avons pour objectif d’établir <strong>en</strong>tre l’actiondéployée et ses résultats sur le sytème. Cela se tra<strong>du</strong>it par un changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> cesystème <strong>en</strong> faveur d’un meilleur état écologique matériel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Relevant leparadoxe <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans l’arène publique et <strong>de</strong>srésultats toujours <strong>en</strong> <strong>de</strong>çà <strong>de</strong>s objectifs, D. Salles (2006) ou <strong>en</strong>core M. Leroy (2010) rappell<strong>en</strong>t lebesoin perman<strong>en</strong>t d’aller voir, au plus près <strong>du</strong> terrain, la tra<strong>du</strong>ction pratique <strong>de</strong> ces dispositifsnormatifs juridico-politico-administratif. C’est clairem<strong>en</strong>t la perspective adoptée par l’ASGE quinous permettra donc d’ancrer l’analyse <strong>de</strong> l’ONGE dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective qu’elleambitionne <strong>de</strong> changer.2b. Lorsqu’on <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>d <strong>de</strong> travailler sur la contribution <strong>de</strong>s ONGE à la conservation <strong>de</strong>sécosystèmes et <strong>de</strong> la biodiversité, la question <strong>de</strong>s avancées <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t passed’un problème global et collectif à la préoccupation d’une organisation qui travaille pour atteindre<strong>de</strong>s résultats sur lesquels elle doit r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes. Les ONGE exprim<strong>en</strong>t le besoin <strong>de</strong>connaître l’impact <strong>de</strong> leur action pour donner <strong>du</strong> s<strong>en</strong>s à leur activité, faire évoluer leur stratégie etégalem<strong>en</strong>t parce que leur exist<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> dép<strong>en</strong>d (les anglo-saxons parl<strong>en</strong>t d’ « accountability » : Spiro,2002 ; Jordan & Van Tuijl, 2006). Pour communiquer leur mission, les ONGE se réfèr<strong>en</strong>t auxgrands <strong>en</strong>jeux qui font s<strong>en</strong>s dans l’opinion publique, comme la protection <strong>de</strong> la biodiversité, oudans le cas <strong>de</strong> notre ONGE, la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s prés<strong>en</strong>tée comme problèmeurg<strong>en</strong>t, ces milieux étant un <strong>de</strong>s écosystèmes les plus m<strong>en</strong>acés. Ces problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tauxsont remarquables par leur complexité et leur ampleur. Mais on ne peut raisonnablem<strong>en</strong>t att<strong>en</strong>drequ’une ONGE les pr<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> charge et les résolve à elle seule. Pour étudier leur contribution aumainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la biodiversité, nous avons besoin <strong>de</strong> contextualiser l’analyse <strong>de</strong>sactions au regard <strong>de</strong>s objectifs écologiques plus concrets qu’elle se donne. L’<strong>en</strong>jeu est <strong>de</strong> travaillersur la manière dont l’ONGE peut mieux appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les résultats et les impacts écologiques <strong>de</strong>ses interv<strong>en</strong>tions, à la fois <strong>en</strong> termes conceptuels et pratiques.15


Intro<strong>du</strong>ction généraleDéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la thèse <strong>en</strong> trois partiesLa première partie sera <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t consacrée à une formulation <strong>de</strong> la problématique <strong>de</strong>recherche que l’on développera à travers l’exposé <strong>de</strong> notre cadre d’Analyse stratégique <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>s organisations que nous mobiliserons. Dans cettepartie, nous prés<strong>en</strong>terons égalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> détail notre démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion et laméthodologie mise <strong>en</strong> œuvre au cours <strong>de</strong> cette recherche doctorale.Dans la <strong>de</strong>uxième partie, nous nous consacrerons à l’analyse d’actions concrètes mise <strong>en</strong> œuvrepar la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Nous découvrirons à travers trois étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas les différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>sd’action construits et mis <strong>en</strong> œuvre par l’organisation. Nous abor<strong>de</strong>rons ainsi <strong>de</strong>s exemplesd’action liées à la recherche sci<strong>en</strong>tifique pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes, un projet pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> sites <strong>en</strong> zone sud <strong>de</strong> la Méditerranée, etla construction d’un dispositif d’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et politique pour influ<strong>en</strong>cer les cadres <strong>de</strong>la gouvernance <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s à l’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne. A travers ces étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas, nouscompr<strong>en</strong>drons comm<strong>en</strong>t agit l’ONGE <strong>en</strong> <strong>de</strong>vant articuler <strong>de</strong> façon cohér<strong>en</strong>te sondéveloppem<strong>en</strong>t interne et son action externe. Nous verrons, pour chacune <strong>de</strong>s actions concrètesétudiées, comm<strong>en</strong>t appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la contribution <strong>de</strong> ces interv<strong>en</strong>tions à l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>sécosystèmes.Dans la troisième partie, nous abor<strong>de</strong>rons la stratégie d’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’organisation. Nousanalyserons la façon dont la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> construit sa stratégie dans la mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> sondéveloppem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> ses différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion, à travers l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> laplanification stratégique pour son programme quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015 qui a eu lieu dans lapério<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre recherche doctorale. A l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos analyses <strong>de</strong> situations concrètesdéveloppées <strong>en</strong> <strong>de</strong>uxième partie et <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie, nousproposerons <strong>de</strong>s cadres, que certains auteurs qualifi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s « savoirs actionnables » (Argyris,2000[1995] ; Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007), pour sout<strong>en</strong>ir la réflexion et l’élaboration stratégique dansla perspective <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. C’est sur cette même base qu<strong>en</strong>ous revi<strong>en</strong>drons <strong>en</strong>fin à la façon dont l’ONGE peut appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les impacts écologiques <strong>de</strong> sesinterv<strong>en</strong>tions. Nous proposerons un cadre d’évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, assezsouple pour accueillir la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE dans toute la complexité que nous lui découvrirons,mais permettant néanmoins <strong>de</strong> mieux appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la contribution <strong>de</strong>s actions à un meilleur état<strong>de</strong>s écosystèmes.16


Première partieArticuler la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et l’impact<strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions : cadre théorique etdémarche <strong>de</strong> recherche pour se saisir <strong>du</strong>problèmeComm<strong>en</strong>t peut agir et agit une ONGE ? Comm<strong>en</strong>t contribue-t-elle à la réalisation <strong>de</strong>sobjectifs normatifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux dont elle est le relais ? Comm<strong>en</strong>t l’ONGE peut-eller<strong>en</strong>forcer sa stratégie <strong>de</strong> manière à accroître cette contribution <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ? Répondre àces questions implique <strong>de</strong> découvrir à la fois le fonctionnem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong> l’organisation et lafaçon dont elle élabore sa stratégie. Cela <strong>de</strong>man<strong>de</strong> égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> suivre la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> cettestratégie dans <strong>de</strong>s situations d’action concrètes, qui sont le plus souv<strong>en</strong>t complexes dès lors qu’ils’agit <strong>de</strong> problématiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales – dans la mesure où celles-ci concern<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fait ungrand nombre d’acteurs, <strong>de</strong> règles, d’objets écologiques, dont les interactions et leursconséqu<strong>en</strong>ces ne peuv<strong>en</strong>t être toutes maîtrisées. Cette première partie est consacrée à la mise <strong>en</strong>place <strong>de</strong> l’architecture théorique qui va nous permettre <strong>de</strong> poser le problème et d’outiller l’analyse<strong>de</strong> l’ONGE. Elle est organisée <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux temps.Dans un premier chapitre, nous prés<strong>en</strong>terons les ressources théoriques que nous avonsmobilisées. Ce faisant, nous formulerons <strong>de</strong> manière précise les termes <strong>de</strong> notre problématique <strong>de</strong>recherche. Notre recherche s’inscrit dans le cadre <strong>de</strong> l’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la GestionEnvironnem<strong>en</strong>tale. Ce cadre d’analyse est fondé autour d’une question qui d’un bout à l’autre <strong>de</strong>la réflexion sert <strong>de</strong> fil con<strong>du</strong>cteur : « qui peut agir, et comm<strong>en</strong>t, pour assurer la persistance ou lerétablissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s qualités désirables <strong>de</strong> notre <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t naturel ? » (Mermet, 2006 : 254). Il17


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEnous permettra <strong>de</strong> suivre les actions propres <strong>de</strong> l’ONGE dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> etresponsabilités auxquels elle apparti<strong>en</strong>t et qu’elle <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>d <strong>de</strong> changer <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. C’est dans ce cadre que nous mobiliserons les théories <strong>de</strong>s organisations pourétudier <strong>de</strong> façon approfondie la situation dans laquelle l’ONGE se trouve lorsqu’elle veut agir :<strong>de</strong> quels moy<strong>en</strong>s dispose-elle, comm<strong>en</strong>t les r<strong>en</strong>forcer, comm<strong>en</strong>t choisir, inv<strong>en</strong>ter et développer<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action efficace ? La théorie <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces (Lorino & Taron<strong>de</strong>au,2006), l’analyse stratégique croziéri<strong>en</strong>ne (Crozier & Friedberg, 1977) et l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pratiques(Jarzabkowski et al., 2007) seront toutes nécessaires à l’appréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s multiples facettes d<strong>en</strong>otre problème.Le <strong>de</strong>uxième chapitre sera dédié à l’exposé <strong>de</strong> notre démarche <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> construction<strong>de</strong>s données. Après avoir prés<strong>en</strong>té La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, l’organisation sur laquelle nous avonsfocalisé notre recherche, nous prés<strong>en</strong>terons <strong>en</strong> détail la démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre.Celle-ci est guidée par la démarche <strong>de</strong> la sociologie croziéri<strong>en</strong>ne (Friedberg, 1997[1993]), pourune posture clinique et une approche in<strong>du</strong>ctive <strong>de</strong> la stratégie, et par une approche constructiviste<strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissance lié à notre démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion. Les métho<strong>de</strong>s<strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données utilisées associ<strong>en</strong>t les trois techniques <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> semi-directif, <strong>de</strong>l’analyse docum<strong>en</strong>taire et <strong>de</strong> l’observation in situ, permettant <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire un corpus <strong>de</strong> donnéesqualitatives et triangulées. En faisant le choix <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er une démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion,l’analyse <strong>de</strong> la stratégie d’une ONGE nous place dans une relation organisation-analysteparticulière. Vi<strong>en</strong>dra alors le temps <strong>de</strong> retranscrire la nécessaire réflexivité <strong>de</strong> l’analyste qui mènesa recherche dans une organisation, <strong>en</strong> nous appuyant sur les travaux relatifs à la rechercheinterv<strong>en</strong>tiondans les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et dans le champ <strong>de</strong>s organisations (Arnaud, 1996 ;Plane, 2000). Cet exercice est un préalable à la négociation avec l’organisation pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong>ce travail visant à l’accompagner dans le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa stratégie pour l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Nous refermerons cette partie <strong>en</strong> donnant les contours <strong>du</strong> statut <strong>de</strong> laconnaissance que nous pourrons pro<strong>du</strong>ire par cette démarche <strong>de</strong> recherche auprès <strong>de</strong>l’organisation. Du fait <strong>de</strong> « la conting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s situations » 7 <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, nous ne pourrons mettre à jour <strong>de</strong>s régularités sur lesquelles construire <strong>de</strong>sactions simples pour <strong>de</strong>s solutions simples. Nous travaillerons au contraire à pro<strong>du</strong>ire unraisonnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s cadres assez souples pour accueillir la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE dans son<strong>en</strong>semble et sout<strong>en</strong>ir la construction <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> situation complexe.7 Termes empruntés à E. Friedberg (1997[1993] : 301) qui caractéris<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.18


Chapitre 1De la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE à l’impact <strong>de</strong> sesinterv<strong>en</strong>tions : prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> cadre d’analyse1.1 L’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale : un cadre pour poser leproblème............................................................................................................................................. 201.2 L’analyse stratégique pour l’ONGE......................................................................................... 271.3 Etudier l’organisation au regard <strong>de</strong> sa mission : l’apport <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>s organisations 401.4 Relier stratégie et impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : implications pour l’ONGE etpour l’analyse...................................................................................................................................... 59Compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’ONGE agit pour résoudre un problème écologique et <strong>en</strong>visager l’impact<strong>de</strong> cette action – le plus souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nature indirecte – au regard <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong> l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé, implique d’organiser la question dans un cadre qui intègre à la fois l’action<strong>de</strong> l’ONGE, le système d’acteurs concernés, et leurs li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>visagés <strong>en</strong> fonction <strong>du</strong> problème<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Le cadre conceptuel <strong>de</strong> l’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale(ASGE) réunit ces trois dim<strong>en</strong>sions, il constituera alors un cadre <strong>de</strong> problématisation, permettant<strong>de</strong> structurer notre questionnem<strong>en</strong>t. Nous comm<strong>en</strong>cerons par prés<strong>en</strong>ter ce cadre et les conceptsclés qu’il nous fournit. Par la suite, nous verrons que <strong>de</strong>s mobilisations théoriques dans ledomaine <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>s organisations sont nécessaires pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> le traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cesquestions.19


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE1.1 L’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale : uncadre pour poser le problèmeCette recherche s’inscrit dans la lignée <strong>de</strong>s travaux développés par un collectif <strong>de</strong> recherche qui, àla suite d’une réflexion initiée par L. Mermet (1992), ont choisi <strong>de</strong> porter un regard<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Dit autrem<strong>en</strong>t, l’axe directeur <strong>de</strong> cetteréflexion est l’idée que pour gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s repères dans un contexte <strong>de</strong> multiplication <strong>de</strong>s problèmes<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et <strong>de</strong> démultiplication <strong>de</strong>s efforts pour y répondre, une lecture spécifiquem<strong>en</strong>tc<strong>en</strong>trée sur l’analyse <strong>de</strong> l’efficacité et <strong>de</strong> la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> matière <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales’impose 8 . C’est dans cette perspective que le cadre analytique <strong>de</strong> l’Analyse Stratégique <strong>de</strong> laGestion Environnem<strong>en</strong>tale (ASGE) a été progressivem<strong>en</strong>t élaboré. Plusieurs ouvrages et travauxcollectifs ont posé les bases <strong>de</strong> ce cadre d’analyse, <strong>de</strong> ses principes organisateurs et <strong>de</strong> sesconcepts clé (Mermet, 2006[1998] ; Mermet et al., 2005 ; Leroy, 2006) : c’est sur eux que notrerecherche sera appuyée. Nous allons donc dès à prés<strong>en</strong>t nous consacrer à leur prés<strong>en</strong>tationdétaillée. En ce qu’il permet d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la façon dont l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est géré, l’ancragedisciplinaire <strong>de</strong> l’ASGE a lieu dans les « sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ». Dans larecherche anglo-saxonne, elle s’est développé sous le terme <strong>de</strong>s Environm<strong>en</strong>tal studies regroupantdiffér<strong>en</strong>tes approches et disciplines comme la sociologie, la sci<strong>en</strong>ce politique, l’économie et la<strong>gestion</strong> autour <strong>de</strong>s interactions <strong>en</strong>tre l’homme et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t 9 .Les quatre principes organisateurs <strong>de</strong> l’ASGEEn premier lieu, porter un regard <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal sur les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> suppose <strong>de</strong> poserun repère fondam<strong>en</strong>tal pour l’analyse : celui <strong>de</strong> « la définition au préalable, <strong>en</strong> termes écologiques,<strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte et <strong>de</strong>s objectifs poursuivis » (Mermet et al.,2005 : 129).Ce point d’ancrage <strong>de</strong> l’analyse est nécessaire, sa définition est néanmoins loin d’être simple. Eneffet, comm<strong>en</strong>t poser un objectif normatif lorsque les acteurs qui le poursuiv<strong>en</strong>t, comme lesONGE, <strong>en</strong> débatt<strong>en</strong>t ? Nous verrons au fil <strong>de</strong> la thèse que la création et l’utilisation <strong>de</strong> laréfér<strong>en</strong>ce normative comporte son propre lot <strong>de</strong> questions. Elle peut par exemple êtretemporairem<strong>en</strong>t stabilisée au niveau international ou au contraire être très instable et faire partie8 De nombreuses problématiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales ont alors été abordées dans cette perspective <strong>de</strong> recherche. Lelecteur intéressé pourra trouver <strong>de</strong>s éclairages sur les dispositifs internationaux <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t(Billé, 2004 ; Leroy, 2004) ; sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong> France (Narcy, 2000) et <strong>en</strong> Méditerranée (Treyer, 2006) ; sur <strong>de</strong>sproblématiques <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature comme la faune sauvage (B<strong>en</strong>hammou, 2007) ou la forêt amazoni<strong>en</strong>ne(Taravella, 2007) ; ou <strong>en</strong>core sur les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts types d’acteurs occupant une fonction« <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » dans les organismes publics (Emerit, 2007) et dans les <strong>en</strong>treprises privées (Leménager, 2007).9 L’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t construit : built <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t, et la nature : natural <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t.20


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’ONGE. L’acteur a « tout intérêt à poser ce choix <strong>en</strong> considération <strong>de</strong>critères aussi fortem<strong>en</strong>t déf<strong>en</strong>dables que possible, comme les <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts pris dans lesconv<strong>en</strong>tions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, ou <strong>de</strong>s points saillants dans les données sci<strong>en</strong>tifiques <strong>du</strong>problème » (Mermet, 2010b). Un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> notre étu<strong>de</strong> est d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la façon dontl’ONGE va se saisir <strong>de</strong> problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Une part <strong>de</strong> l’analyse consiste donc àdécrypter le rapport <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’ONGE à la référ<strong>en</strong>ce normative (choix, explicitation ou aucontraire conservation d’un flou, création, etc.). Mais <strong>de</strong> fait, « la définition <strong>de</strong> la préoccupation<strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>gage <strong>en</strong> <strong>de</strong>rnier ressort l’analyste, qu’il soit chercheur ou interv<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> terrain »(Mermet, 2010a), car y compris dans notre cas, c’est bi<strong>en</strong> l’analyste qui étudie les choix opérés parl’ONGE au regard d’un horizon normatif.Deuxièmem<strong>en</strong>t, c’est à partir <strong>de</strong> la préoccupation <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce sur un objet écologique (ou unproblème d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) que l’on peut appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Ce système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> compr<strong>en</strong>d toutes les actions (et leurs acteurs) ayant une influ<strong>en</strong>ce directeou indirecte sur cet objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Ce <strong>de</strong>uxième principe organisateur <strong>de</strong> l’ASGE est unprincipe <strong>de</strong> gérance et <strong>de</strong> responsabilités :« Il n’y a [<strong>en</strong> effet] pas <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> sans objectif, ni responsabilités. Voir une situation<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, c’est projeter sur un système (biologique,technique, économique et social) complexe une référ<strong>en</strong>ce simple : « conserver ou rétablirles qualités désirables <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » qui recouvre à la fois un but que la <strong>gestion</strong>vise à atteindre, et une responsabilité qui incombe, nol<strong>en</strong>s vol<strong>en</strong>s, à ceux qui ont quelquepouvoir dans le cadre <strong>de</strong> cette situation » (Mermet, 2006 : 286).Ce système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> est un construit <strong>de</strong> l’analyste qui n’a pas d’exist<strong>en</strong>ce réelle. Il l’ai<strong>de</strong>cep<strong>en</strong>dant à organiser son analyse <strong>en</strong> délimitant (au moins temporairem<strong>en</strong>t) les contours <strong>de</strong>sobjets écologiques, <strong>de</strong>s acteurs, <strong>de</strong>s dispositifs <strong>en</strong> place. A partir <strong>de</strong> la référ<strong>en</strong>ce écologique,l’analyste peut procé<strong>de</strong>r à une lecture dialectique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> territoire et <strong>de</strong>s ressourcesnaturelles, <strong>en</strong> décryptant comm<strong>en</strong>t s’oppos<strong>en</strong>t les actions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> selon l’int<strong>en</strong>tion ou non <strong>de</strong>protéger <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Cette dialectique est exprimée par les concepts <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>effective et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle :« La <strong>gestion</strong> effective, ou la <strong>gestion</strong> « <strong>de</strong> fait », c’est l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s actions anthropiquesqui, consciemm<strong>en</strong>t ou non, int<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t ou non, ont une influ<strong>en</strong>ce déterminantesur l’état <strong>de</strong> l’objet écologique (ou <strong>du</strong> problème) <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce. Son analyse comporte […]l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s mécanismes par lesquels s’exerc<strong>en</strong>t ces influ<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong>s lieux où sontdécidées les actions <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective, ainsi qu’une première approche <strong>de</strong>s21


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEmarges <strong>de</strong> manœuvres possibles pour <strong>de</strong>s décisions différ<strong>en</strong>tes qui con<strong>du</strong>irai<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>simpacts différ<strong>en</strong>ts ».« La <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle, c’est l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s actions dont le but principal estd’atteindre l’objectif <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce » (Mermet, 2010b).Ainsi, sur le plan <strong>de</strong>s faits, la responsabilité causale <strong>de</strong> l’état matériel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t revi<strong>en</strong>t àtous ceux qui par leur action ont un effet sur le système. « Qu’une pollution soit consci<strong>en</strong>te oupas, qu’une interv<strong>en</strong>tion favorable soit int<strong>en</strong>tionnelle ou pas ne change ri<strong>en</strong> à leurs effets sur lesystème naturel. […] Tous les ag<strong>en</strong>ts qui caus<strong>en</strong>t une action effective port<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce fait une partdonnée <strong>de</strong> responsabilité dans la <strong>gestion</strong> effective » (Mermet, 2006 : 294).« La <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> tout problème [d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t] se joue donc dans un rapport dialectique <strong>en</strong>tresa <strong>gestion</strong> effective et la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle mise <strong>en</strong> place pour essayer <strong>de</strong> faire évoluer celle-cidans un s<strong>en</strong>s favorable » (Mermet, 2010b).Troisièmem<strong>en</strong>t, pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t la <strong>gestion</strong> effective d’un système socio-écologiquepeut se rapprocher <strong>de</strong> l’état écologique pris <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>ce, il est opportun <strong>de</strong> s’intéresser à ceux quiont l’int<strong>en</strong>tion d’améliorer la <strong>gestion</strong> : les porteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle. Le porteur <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle a son opérateur conceptuel : l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ce concept occupe uneplace c<strong>en</strong>trale dans notre recherche, puisque nous avons choisi <strong>de</strong> nous intéresser à uneorganisation qui est fondée par une mission, une int<strong>en</strong>tion <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Nous allons yrev<strong>en</strong>ir plus <strong>en</strong> détail juste après avoir énoncé le quatrième et <strong>de</strong>rnier principe organisateur <strong>de</strong>l’ASGE.Ce <strong>de</strong>rnier mom<strong>en</strong>t conceptuel <strong>de</strong> la dialectique <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> id<strong>en</strong>tifiée par l’ASGE est le temps <strong>de</strong>l’intégration, souv<strong>en</strong>t partielle, <strong>de</strong>s préoccupations portées par les acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dansla <strong>gestion</strong> effective. Il s’agit <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte « la perspective dynamique d’un système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> qui change et se structure au fil <strong>du</strong> temps sous l’effet structurant <strong>de</strong>s conflits, par lesquelsles préoccupations portées par les interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle finiss<strong>en</strong>t par êtrepartiellem<strong>en</strong>t intégrées » (Mermet et al., 2005 : 130).Les acteurs <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Cette lecture dialectique <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> nous pousse à procé<strong>de</strong>r à une différ<strong>en</strong>ciationconceptuelle <strong>de</strong>s rôles <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs appart<strong>en</strong>ant à ces systèmes.L’acteur c<strong>en</strong>tral est l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, opérateur <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle. Il n’est pasdéfini par son statut institutionnel mais par le rôle fonctionnel qu’il joue dans le processus <strong>de</strong>22


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>gestion</strong> étudié, il est donc appréh<strong>en</strong>dé comme un ag<strong>en</strong>t <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t. Encore une fois,l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cet acteur <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> porte sur ce système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> luimême,visant à améliorer la <strong>gestion</strong> effective <strong>en</strong> faveur d’un meilleur état écologique <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Dans le cas d’une étu<strong>de</strong> d’un problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal particulier, une partie<strong>de</strong> l’analyse s’attache à déterminer qui, dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, agit int<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t etfonctionnellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la résolution <strong>du</strong> problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. « L’acteurd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t n’est [<strong>en</strong> effet] pas un donné trivial (celui qui se nomme comme tel seraitl’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t), mais au contraire un concept critique qui gui<strong>de</strong> l’analyste <strong>en</strong> luirappelant <strong>de</strong> toujours s’attacher à suivre, dans les détours et rebondissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> dossier, lesacteurs qui, dans les faits, port<strong>en</strong>t effectivem<strong>en</strong>t face aux autres acteurs la préoccupation<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce » (Mermet, 2010b). Dans notre cas, nous partirons <strong>de</strong> l’ONGEconsidérée a priori comme acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, le but étant ici <strong>de</strong> voir comm<strong>en</strong>t une ONGEse saisit <strong>de</strong> problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, comm<strong>en</strong>t elle va être porteuse d’une <strong>gestion</strong>int<strong>en</strong>tionnelle et <strong>de</strong> quelle manière elle s’y pr<strong>en</strong>d pour faire changer le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>effective.Dans ses interv<strong>en</strong>tions pour le changem<strong>en</strong>t, l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t se trouve face à <strong>de</strong>ux typesd’acteurs conceptuels :L’acteur sectoriel est celui qui agit selon <strong>de</strong>s intérêts n’étant pas c<strong>en</strong>trés sur les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce 10 . Les actions qui <strong>en</strong> résult<strong>en</strong>t sont plus ou moins compatibles 11avec les objectifs poursuivis par l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, mais il reste celui <strong>en</strong>vers lequels’adresse généralem<strong>en</strong>t la pression <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t et qui doit être am<strong>en</strong>é à intégrerl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans ses pratiques.L’acteur régulateur est celui qui a la charge <strong>de</strong> faire cohabiter les autres, régulant la dynamique« pression-intégration ». Son rôle est <strong>de</strong> « représ<strong>en</strong>ter un équilibre <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts acteurs etles différ<strong>en</strong>tes préoccupations <strong>de</strong> la Société, et <strong>de</strong> tra<strong>du</strong>ire cet équilibre dans les faits par leurmédiatisation ou leurs arbitrages » (Mermet, 1992 : 63). Généralem<strong>en</strong>t, « il n’est guère <strong>en</strong> position<strong>de</strong> faire évoluer nettem<strong>en</strong>t dans un s<strong>en</strong>s ou dans l’autre les rapports <strong>de</strong> force <strong>en</strong>tre les acteurs »(ibid.). Pour l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, cela implique non une pression <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t, maisd’intégration.10 Notons qu’il existe un secteur <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal avec ses acteurs, ses organisations et ses règles, mais nouspréciserons les termes <strong>en</strong> utilisant les expressions « acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » ou « secteur <strong>de</strong> la conservation oud’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ».11 Lorsque les activités sectorielles sont compatibles avec les objectifs écologiques, le but <strong>de</strong> l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tne sera pas <strong>de</strong> faire changer ces pratiques, mais plutôt <strong>de</strong> préconiser leur mainti<strong>en</strong>.23


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGECette différ<strong>en</strong>ciation <strong>de</strong>s rôles permet d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la complexité <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>tdans la <strong>gestion</strong> qui est rarem<strong>en</strong>t le fruit d’une dynamique d’intégration linéaire. L. Mermetreprés<strong>en</strong>te les t<strong>en</strong>sions diverses qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t ces systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par une relation« triangulaire » (Mermet, 1992 ; 2006[1998]) reliant les trois acteurs conceptuels (Figure 1.1).Cette figure 1.1 est une représ<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> cadre conceptuel <strong>de</strong> l’ASGE replaçant ces différ<strong>en</strong>tstypes d’acteurs par rapport à l’objet écologique (pouvant être un site, un habitat, une espèce, etc.).La perspective est c<strong>en</strong>trée sur l’objet écologique, à partir <strong>du</strong>quel on peut observer la t<strong>en</strong>siondialectique <strong>en</strong>tre la <strong>gestion</strong> effective et la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle, se passant par <strong>de</strong>s interrelations<strong>en</strong>tre les nombreux acteurs appart<strong>en</strong>ant au système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>ActeursRégulateursActeursd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tsActeursSectorielsGestionint<strong>en</strong>tionnelleObjetsécologiquesGestioneffectiveFigure 1.1 : Représ<strong>en</strong>tation schématique <strong>de</strong> l’ASGE – Relations <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts types d’acteursconceptuels replacées dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> fondé par l’objet écologique (source : auteur)L’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et sa stratégie au s<strong>en</strong>s fortLes acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t adapt<strong>en</strong>t leur interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s types d’acteurs qui setrouv<strong>en</strong>t face à eux lors <strong>de</strong> leurs interv<strong>en</strong>tions. Une att<strong>en</strong>tion particulière est portée au caractèrestratégique <strong>de</strong> ces actions <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t. En effet, ces actions portées par l’acteurd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t consist<strong>en</strong>t « fondam<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t à déployer <strong>de</strong>s stratégies capables <strong>de</strong> surmonter24


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleles résistances au changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s acteurs <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective » (Mermet et al., 2005 :130). Une distinction importante doit être apportée ici : le terme <strong>de</strong> stratégie a <strong>de</strong>puis longtempspénétré le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, mais il est généralem<strong>en</strong>tutilisé dans un s<strong>en</strong>s faible.« C’est par exemple le cas dans la « Stratégie Mondiale <strong>de</strong> la Conservation » publiée parl’UICN <strong>en</strong> 1980. Pour important que soit ce docum<strong>en</strong>t par maints aspects (à peu prèstoutes les doctrines d’action qui guid<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core aujourd’hui l’action sur la biodiversité ysont déjà clairem<strong>en</strong>t mises <strong>en</strong> avant), il ne constitue pas à proprem<strong>en</strong>t parler une stratégiemais une liste <strong>de</strong> bons principes, <strong>de</strong> bonnes int<strong>en</strong>tions, d’idées <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre, etc. Eneffet, il ne m<strong>en</strong>tionne aucun antagonisme, comme celui <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong>s filières très<strong>de</strong>structrices pour les écosystèmes face auxquels l’action stratégique est pourtantdécisive » (Mermet, 2010b).Concernant notre analyse <strong>de</strong> l’ONGE, l’appréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> sa stratégie ne s’arrête donc pas à laconnaissance <strong>de</strong> son domaine d’action, mais sera bi<strong>en</strong> focalisée sur la manière concrète dont elleva p<strong>en</strong>ser ses actions et les déployer au sein <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective.L’ancrage <strong>de</strong>s analyses et le travail sur <strong>de</strong>s dispositifs concretsCette série <strong>de</strong> principes et <strong>de</strong> concepts clés que nous v<strong>en</strong>ons d’exposer ne peuv<strong>en</strong>t pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>séclairages que sur <strong>de</strong>s cas concrets. « Le principe <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> est le contraire d’une source <strong>de</strong>réponse univoque. Il constitue plutôt une interpellation, qui impulse et structure <strong>en</strong> partie laréflexion. Il est aussi extrêmem<strong>en</strong>t générique et ne pr<strong>en</strong>d <strong>de</strong> signification précise qu’au contact <strong>de</strong>situations concrètes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> » (Mermet, 2006 : 283). Cet aspect a été notamm<strong>en</strong>t approfondipar le travail <strong>de</strong> M. Leroy (2006a) qui a développé un cadre d’évaluation <strong>de</strong>s dispositifs annonçantla prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, sur le cas <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> fleuve Sénégal et qui a montréque la distance <strong>en</strong>tre les annonces <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et l’état constaté ne pouvaitêtre expliquée qu’<strong>en</strong> r<strong>en</strong>trant dans une analyse fine <strong>de</strong>s dispositifs concrets <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Cetteanalyse doit t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> toutes les échelles auxquelles se jou<strong>en</strong>t ces dispositifs, même si celadoit aller <strong>du</strong> local au global comme ceux qu’elle a étudiés, ceux-ci s’inscrivant dans <strong>de</strong>sprogrammes internationaux d’ai<strong>de</strong> au développem<strong>en</strong>t. En effet, bi<strong>en</strong> que ces dispositifs <strong>de</strong> prise<strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t puiss<strong>en</strong>t afficher <strong>de</strong>s objectifs ambitieux qui peuv<strong>en</strong>t convaincre <strong>de</strong>leur utilité pour l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ce n’est que par l’analyse <strong>de</strong> leur effetconcret sur les systèmes naturels concernés que l’on peut éclairer la tra<strong>du</strong>ction pratique <strong>de</strong> cesannonces et mesurer leur apport ou non <strong>en</strong> termes écologiques. Outre la prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>sdiffér<strong>en</strong>tes échelles d’ancrage <strong>de</strong>s dispositifs, M. Leroy a montré que l’analyse doit s’opérer dansune mise <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion d’une évaluation interne et externe <strong>de</strong> ces dispositifs. Elle explique <strong>en</strong> effet25


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEque si ces dispositifs sont constitués autour d’<strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, ou ont intro<strong>du</strong>it certainscritères <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, globalem<strong>en</strong>t, « ils dérap<strong>en</strong>t » car « même si par une actionint<strong>en</strong>tionnelle, la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte est atteinte, on observe petit à petitun ré-<strong>en</strong>codage par les réseaux socio-techniques les plus puissants au sein <strong>du</strong> dispositif <strong>de</strong><strong>gestion</strong> » (Leroy, 2006a : 532) qui les détourn<strong>en</strong>t <strong>en</strong> général <strong>de</strong> la visée <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Ce n’estalors que par l’évaluation externe <strong>du</strong> dispositif que l’on peut évaluer « l’ampleur <strong>du</strong> dérapage »(ibid.)Le prés<strong>en</strong>t travail est focalisé sur un objet différ<strong>en</strong>t : la voie d’<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge nepasse pas par l’analyse <strong>de</strong> dispositifs liés à <strong>de</strong>s programmes internationaux, mais par l’anlaysed’une ONGE. Pourtant, ces articulations dans les échelles d’analyse et <strong>en</strong>tre l’interne et l’externeapportées par M. Leroy (2006a) au cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesont tout autant nécessaires. Dans notre cas, l’ « interne » concerne l’organisation et l’externe lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> où elle intervi<strong>en</strong>t. Au niveau <strong>de</strong> l’interne <strong>de</strong> l’organisation, l’analyse <strong>de</strong>vraappréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r l’échelle organisationnelle mais aussi l’échelle opérationnelle (niveau <strong>de</strong>s projets) ;au niveau <strong>de</strong> ses actions externes, l’analyse <strong>de</strong>vra t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong>s échelles d’interv<strong>en</strong>tions (<strong>du</strong>territoire d’implantation <strong>de</strong> l’organisation jusqu’à l’action au niveau politique) (Tableau 1.1).Tableau 1.1 : Articulation dans les échelles d’analyse <strong>de</strong> l’ONGEInterne à l’organisationExterne à l’organisationArticulation <strong>de</strong>s échelles dans l’organisation, dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Echelle organisationelle / échelle opérationnelle <strong>de</strong>s projets : <strong>de</strong>l’organisation dans son <strong>en</strong>semble aux actions qu’elle met <strong>en</strong> œuvreEchelles d’interv<strong>en</strong>tions, <strong>du</strong> plus local (domaine dont l’ONGE estpropriétaire jusqu’à la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) : les actionsconsidérées à leurs différ<strong>en</strong>ts niveaux d’ancrage dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ceCette articulation <strong>de</strong>s échelles d’analyse – dont le fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t rési<strong>de</strong> dans le cadrage théorique <strong>de</strong>cette recherche – sera largem<strong>en</strong>t développée dans l’exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> que l’on trouvera dansle chapitre suivant. A ce sta<strong>de</strong>, nous ret<strong>en</strong>ons qu’abor<strong>de</strong>r une ONGE <strong>en</strong> tant qu’acteurd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t implique un cadrage qui permette à la fois <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre les logiques, lescontraintes, les ressources internes qui vont déterminer ses interv<strong>en</strong>tions et à la fois comm<strong>en</strong>t cesactions vont s’ancrer dans le système plus large que constitue la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce. Cela ne peut être <strong>en</strong>visagé que dans la mise <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>trel’interne et l’externe, et aux échelles d’analyse pertin<strong>en</strong>tes selon les actions <strong>en</strong> question. Pourmieux percevoir les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> ces articulations d’échelle d’analyse, il est maint<strong>en</strong>ant tempsd’expliquer comm<strong>en</strong>t nous pouvons c<strong>en</strong>trer notre cadre théorique <strong>de</strong> l’ASGE sur l’ONGE, pour26


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>en</strong>suite nous intéresser plus précisém<strong>en</strong>t à ce que recouvre la notion <strong>de</strong> stratégie pour ce typed’organisation.1.2 L’analyse stratégique pour l’ONGELe cadre <strong>de</strong> l’ASGE permet d’abor<strong>de</strong>r les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> partant <strong>de</strong> l’objet écologique et<strong>de</strong> la référ<strong>en</strong>ce à atteindre, <strong>en</strong> termes d’état écologique. Partant <strong>de</strong> là, le cadre théorique fournitles concepts pour gui<strong>de</strong>r la lecture dialectique <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, <strong>en</strong> différ<strong>en</strong>ciant les acteursselon leur fonction dans le système, pour alors compr<strong>en</strong>dre les rapports <strong>de</strong> force, et comm<strong>en</strong>t les<strong>en</strong>jeux écologiques peuv<strong>en</strong>t être intégrés à la <strong>gestion</strong> effective (voir Figure 1.2, c<strong>en</strong>trée sur l’objetécologique).Il est possible <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er la démarche inverse, comme celle que nous allons suivre puisque nousvoulons partir <strong>de</strong> l’ONGE pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t elle se saisit <strong>de</strong> problèmes écologiques,comm<strong>en</strong>t elle construit et met <strong>en</strong> œuvre une action pour atteindre les objectifs écologiques qu’ellese fixe, et <strong>en</strong>fin, comm<strong>en</strong>t elle parvi<strong>en</strong>t à provoquer un changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur d’un meilleur étatécologique <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Autrem<strong>en</strong>t dit, nous c<strong>en</strong>trons l’analyse sur l’ONGE abordéecomme un acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et c’est <strong>en</strong> adoptant son point <strong>de</strong> vue 12 que nous étudions lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : l’objet écologique à travers les objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qu’elle poursuit,les t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre la <strong>gestion</strong> effective et la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle à partir <strong>de</strong>s stratégies qu’elle vamettre <strong>en</strong> œuvre pour faire changer les pratiques et faire intégrer les <strong>en</strong>jeux écologiques par lesautres acteurs <strong>du</strong> système.Dès lors que l’on s’intéresse <strong>de</strong> plus près à l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et à sa stratégie, nous <strong>de</strong>vonst<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> ses caractères propres. Pour compr<strong>en</strong>dre la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, nous <strong>de</strong>vonsaussi l’abor<strong>de</strong>r comme une organisation qui doit assurer son développem<strong>en</strong>t pour la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong> ses actions. Depuis son origine, le terme <strong>de</strong> stratégie compr<strong>en</strong>d <strong>en</strong> effet l’idée d’un butdont l’importance est suffisante aux yeux <strong>de</strong> certains pour susciter une mobilisation <strong>de</strong> plus oumoins gran<strong>de</strong> ampleur ; <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s rassemblés et organisés pour atteindre ce but, et uneintellig<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la situation, impliquant <strong>de</strong>s choix « <strong>de</strong> l’adversaire et <strong>de</strong>s alliés, <strong>du</strong> lieu et <strong>du</strong>mom<strong>en</strong>t <strong>du</strong> combat, <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s à <strong>en</strong>gager » (Lorino &Taron<strong>de</strong>au, 2006 : 309). Pour rec<strong>en</strong>trer notre cadre <strong>de</strong> l’ASGE sur l’ONGE, nous gardons la12 Adopter le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’ONGE sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ne signifie pas que l’on va se restreindre à uneanalyse interne <strong>de</strong> l’organisation, comme nous l’avons expliqué à la fin <strong>de</strong> la section précéd<strong>en</strong>te et comme nous leverrons dans l’exposé <strong>de</strong> le démarche <strong>de</strong> recherche dans le prochain chapitre.27


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEréfér<strong>en</strong>ce écologique à atteindre au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s actions dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>,mais la dim<strong>en</strong>sion stratégique <strong>du</strong> portage <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle par l’organisation acteurd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t un champ à examiner dans le détail. Ce travail <strong>de</strong> recadrage a déjà étéréalisé à travers l’étu<strong>de</strong> empirique <strong>de</strong> la stratégie d’une ONGE effectuée dans une perspectived’ASGE (De Mombynes, 2002 ; De Mombynes & Mermet, 2003) et appuyée sur la littératureissue <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique (Porter, 1986 ; Gervais, 1995 ; Mintzberg et al., 1999). A partir<strong>de</strong> cette r<strong>en</strong>contre <strong>en</strong>tre le cadre théorique <strong>de</strong> l’ASGE, la littérature <strong>en</strong> stratégie <strong>de</strong>s organisationset le cas <strong>de</strong> l’ONG américaine Conservation International, les auteurs ont posé les bases <strong>du</strong> cadred’analyse, que nous adoptons pour notre recherche, puisqu’il consiste à rec<strong>en</strong>trer l’ASGE surl’ONGE tout <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ant compte <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> l’organisation. Ce cadre propose <strong>de</strong> suivre quatreperspectives irré<strong>du</strong>ctibles qui associ<strong>en</strong>t l’analyse stratégique <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> oùl’organisation intervi<strong>en</strong>t (1) et (2) ; et l’analyse <strong>de</strong> l’organisation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale elle-même (3)et (4) :1. celle <strong>de</strong> l’objet écologique visé, la dynamique <strong>de</strong>s systèmes écologiques et techniques et l’étatécologique à atteindre ;2. celle <strong>de</strong> l’action publique, les mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> l’ONGE sur la scène publique, c’est-àdiredans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle veut changer <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ;3. celle <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'organisation (l'ONG considérée sous l'angle <strong>de</strong> sa dynamiqueinterne <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t) ;4. celle <strong>de</strong> ses relations <strong>de</strong> coopération/concurr<strong>en</strong>ce, <strong>de</strong> son positionnem<strong>en</strong>t au sein <strong>de</strong> sonsecteur d’activité (les ONG <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, et plus largem<strong>en</strong>t, les interv<strong>en</strong>ants<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux) (ibid.).Pour compr<strong>en</strong>dre d’où vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ces quatre perspectives qui vont organiser notre analyse, lemieux est <strong>de</strong> repartir <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas qui a permis <strong>de</strong> les id<strong>en</strong>tifier (Encadré 1.1). Commeindiqué plus haut, les auteurs se sont intéressés à Conservation International (CI), une organisationconnue pour sa stratégie <strong>de</strong>s Hotspots. Ils se sont interrogés sur la capacité <strong>de</strong> ce concept à gui<strong>de</strong>r<strong>de</strong>s actions efficaces <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> sa propre finalité qui est la protection et le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> labiodiversité. Par un travail d’<strong>en</strong>quête auprès <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’organisation, ils ont pu id<strong>en</strong>tifierles significations et les implications que pouvait cont<strong>en</strong>ir le concept <strong>de</strong> Hotspot. Ils <strong>en</strong> ont dégagéles quatre registres composant la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE que nous adoptons comme cadred’analyse. Pour exposer cette étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas, nous citerons directem<strong>en</strong>t l’article où celle-ci estprés<strong>en</strong>tée dans le détail : « la stratégie d’une ONG internationale d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Articuler biologie etmanagem<strong>en</strong>t, action publique et concurr<strong>en</strong>ce » (De Mombynes & Mermet 2003).28


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleEncadré 1.1 : Les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE. Le cas <strong>de</strong> Conservation International (DeMombynes & Mermet 2003)Première perspective : définir les zones prioritaires d’action, un problème <strong>de</strong> biologie <strong>de</strong> laconservationLe concept <strong>de</strong> hotspots, proposé par le biologiste N. Myers (1988), est d’abord issu <strong>de</strong> la biologie <strong>de</strong>la conservation. Il répond à la question <strong>de</strong> la prioritarisation <strong>de</strong> l’action : une partie <strong>de</strong> labiodiversité est <strong>en</strong>démique, c’est-à-dire ayant une aire <strong>de</strong> répartition limitée. Il faut donc agir là oùelle se trouve. A ce critère d’<strong>en</strong>démisme, le biologiste ajoute un critère « rationnel » : « la raisoncomman<strong>de</strong>, parmi les zones à forte biodiversité, <strong>de</strong> focaliser les efforts <strong>de</strong> conservation sur cellesoù la flore, la faune et les habitats sont les plus m<strong>en</strong>acés par l’évolution <strong>de</strong>s activités humaines ».La construction <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale s’appuie d’abord sur <strong>de</strong>s donnéesbiologiques, mais aussi sur d’autres critères : « le poids donné à la notion <strong>de</strong> m<strong>en</strong>ace dansl’approche <strong>de</strong>s hotspots n’a pas seulem<strong>en</strong>t une portée et <strong>de</strong>s justifications biologiques. Il connoteaussi une urg<strong>en</strong>ce face à la crise, qui fait écho à la perception par le public et les médias <strong>de</strong>sproblèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux (Lascoumes, 1994) », et qui révèle que la stratégie d’action estconstruite pour pénétrer aussi la sphère sociale, politique, économique.Deuxième perspective : choisir <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action sur la scène publique, un problème <strong>de</strong>stratégie <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLes auteurs se sont <strong>en</strong>suite attachés à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t CI s’appuyait sur ce concept <strong>de</strong> hotspotsune fois qu’elle avait défini les zones d’interv<strong>en</strong>tion prioritaires.A partir d’un exemple d’action dans un hotspot d’Asir <strong>du</strong> sud-est, ils montr<strong>en</strong>t que sous l’idée <strong>de</strong>hotspot qui gui<strong>de</strong> l’action, l’ONGE doit se donner les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser et <strong>de</strong> surmonter lesoppositions à la protection <strong>de</strong> la biodiversité. L’action stratégique « repose sur une combinaison d<strong>en</strong>égociations, d’alliances, <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s d’action détournés, ne recourant aux oppositions frontales quele moins souv<strong>en</strong>t possible et seulem<strong>en</strong>t après <strong>en</strong> avoir au préalable ré<strong>du</strong>it la portée pour les r<strong>en</strong>dregérables ». Cet exemple révèle donc que le concept <strong>de</strong> hotspot ne donne pas <strong>de</strong> recette simple etmiraculeuse pour interv<strong>en</strong>ir dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et que l’ONGE doit assumer le fait que« chaque dossier appelle une stratégie particulière, conçue au regard <strong>de</strong> la configuration spécifique<strong>de</strong> la situation d’interv<strong>en</strong>tion ».Troisième perspective : construire une capacité d’action, un problème <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>torganisationnelSi la stratégie <strong>de</strong>s hotspots ne donne pas d’emblée toutes les clés pour agir dans <strong>de</strong>s situationscomplexes, les auteurs ont cep<strong>en</strong>dant découvert qu’elle avait <strong>de</strong>s implications très importante <strong>en</strong>termes <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong> l’organisation, ce qui est une <strong>de</strong>s dim<strong>en</strong>sions cruciales pourporter et développer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.En 2002, CI a moins <strong>de</strong> 15 ans mais emploie 1300 personnes (dont 350 à Washington) et travailledans plus <strong>de</strong> tr<strong>en</strong>te pays sur quatre contin<strong>en</strong>ts. Les hotspots ont impulsé un réel développem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>favorisant : la mobilisation et l’organisation. Ils « offr<strong>en</strong>t un concept simple, facile à expliquer, facileà compr<strong>en</strong>dre », et font preuve d’un pot<strong>en</strong>tiel sé<strong>du</strong>cteur capable d’attirer et <strong>de</strong> motiver les équipeset les financeurs : « son utilisation perman<strong>en</strong>te dans l’activité quotidi<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> CI reflète son pouvoir<strong>de</strong> mobilisation interne, confirmant l’analyse <strong>de</strong> Collins et Porras (1996), qui soulign<strong>en</strong>t à quel pointla foi <strong>de</strong>s équipes d’une <strong>en</strong>treprise <strong>en</strong> son idéologie est une variable cruciale pour son succès ».Les auteurs ont égalem<strong>en</strong>t montré que les hotspots étai<strong>en</strong>t aussi un levier stratégique pour lastructure et la dynamique <strong>de</strong> l’organisation, ayant à la fois permis <strong>de</strong> « sceller l’alliance et lelea<strong>de</strong>rship <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux dirigeants, le biologiste et le passionné <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u fundraiser »autour <strong>de</strong> cette vision <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>euriale ; <strong>de</strong> coordonner les changem<strong>en</strong>ts organisationnelsnécessaires au vue <strong>de</strong> la croissance rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’organisation.Si la stratégie <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t interne ne se résume pas à la mobilisation <strong>de</strong>s hotspots commeélém<strong>en</strong>t structurant et fédérateur, les auteurs ont montré, par l’analyse <strong>du</strong> rôle <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers dansles stratégies <strong>de</strong> CI, la nécessité <strong>de</strong> se p<strong>en</strong>cher sur leurs stratégies <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t organisationnelpour compr<strong>en</strong>dre l’action <strong>de</strong>s ONG.29


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEQuatrième perspective : percer dans un secteur d’activité difficile, un problème <strong>de</strong>positionnem<strong>en</strong>t concurr<strong>en</strong>tielEn s’appuyant notamm<strong>en</strong>t sur les travaux <strong>de</strong> M. Porter (1986), les auteurs ont dégagé un <strong>de</strong>rnierregistre stratégique crucial pour l’ONGE : le positionnem<strong>en</strong>t dans le secteur d’activité qui est lesi<strong>en</strong>. La stratégie <strong>de</strong>s hotspots s’est avérée être <strong>en</strong> cela très efficace à la fois parce que le concept estfacilem<strong>en</strong>t communicable (voir le troisième point), mais aussi parce qu’il apporte <strong>de</strong>s réponses surla question <strong>de</strong>s priorités d’action pour la biodiversité (voir le premier point). « Comme le formuleun responsable extérieur à CI: « la concurr<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les ONG se joue <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus sur la stratégie à suivrepour la fixation <strong>de</strong>s priorités d’action ». Les hotspots ont projeté CI au cœur <strong>du</strong> débat d’idées sur laconservation à l’échelle mondiale. Or être l’un <strong>de</strong>s interlocuteurs <strong>de</strong> ces controverses était une <strong>de</strong>sconditions à remplir pour <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir crédible comme acteur sur la scène internationale <strong>de</strong> laconservation, dont la culture est <strong>en</strong> prise directe sur le champ académique <strong>de</strong> la biologie <strong>de</strong> laconservation ». En quelques années, CI s’est hissé dans le cercle restreint <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s ONGEinternationales.De plus, la stratégie <strong>de</strong>s hotspots affiche un positionnem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> id<strong>en</strong>tifiable qui permet àl’organisation <strong>de</strong> se faire sa place <strong>en</strong> se différ<strong>en</strong>ciant <strong>de</strong>s autres ONGE, y compris pour larecherche <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t.Il est apparu que se positionner dans le secteur ne signifie pas seulem<strong>en</strong>t pour l’ONGE <strong>de</strong> gagnerdans le jeu <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce, mais aussi <strong>de</strong> créer les alliances qui lui permettront <strong>de</strong> développer sapropre action. « A partir <strong>de</strong> 1999, CI a cherché à nouer <strong>de</strong>s alliances avec d’autres ONG, <strong>en</strong> <strong>en</strong>faisant une priorité nouvelle. Par exemple, au cours <strong>de</strong>s trois <strong>de</strong>rnières années CI Afrique etBirdlife Afrique ont coordonné leur planification stratégique et collabor<strong>en</strong>t activem<strong>en</strong>t surplusieurs zones <strong>du</strong> contin<strong>en</strong>t africain. Là <strong>en</strong>core, les hotspots jou<strong>en</strong>t un rôle organisateur. La carte<strong>de</strong>s hotspots clarifie et facilite la coopération <strong>en</strong> affichant clairem<strong>en</strong>t et dès le départ la zoned’interv<strong>en</strong>tion relativem<strong>en</strong>t restreinte <strong>de</strong> l’organisation. Dans les hotspots, les autres ONG aurontsans doute souv<strong>en</strong>t intérêt à collaborer avec CI et, <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors, elles craindront moins saconcurr<strong>en</strong>ce ».Nous avons choisi <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre ces quatre registres stratégiques comme autant <strong>de</strong> perspectiveconstitutive <strong>de</strong> notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE – que nous appellerons le cadred’Analyse Stratégique pour l’Organisation à Finalité Environnem<strong>en</strong>tale (ASOFE) (Figure 1.2).Nous allons à prés<strong>en</strong>t nous attacher à prés<strong>en</strong>ter plus <strong>en</strong> détail ce que recouvre chacun <strong>de</strong> cesregistres et à leur donner les noms que nous utiliserons désormais dans le texte.1.Construction <strong>de</strong> l’objetécologique à conserver2.Mo<strong>de</strong> d’actionEnvironnem<strong>en</strong>tale4.Place dans le secteur<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t3.Développem<strong>en</strong>tinterneFigure 1.2 : Cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et ses quatre registres(source : auteur)30


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale1. La construction <strong>de</strong> l’objet écologique, ou le but ultime <strong>de</strong> l’organisation. Comme nous l’avonsobservé dans le cas <strong>de</strong> CI, si la mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale est fondatrice <strong>de</strong> l’ONGE, sa définitionet son expression sont loin d’être triviales et constitu<strong>en</strong>t une part non négligeable <strong>de</strong> son travail.Face à l’ampleur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et la multiplicité <strong>de</strong>s problèmes, elle doitinexorablem<strong>en</strong>t faire <strong>de</strong>s choix et délimiter <strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux sur lesquelsconc<strong>en</strong>trer ses efforts. En théorie militaire et selon les trois grands principes 13 formulés par Foch,on parlerait <strong>de</strong> conc<strong>en</strong>tration <strong>de</strong>s forces (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006). T. De Mombynes et L.Mermet (2003) nous ont montré que ces objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux sont formulés à partir <strong>de</strong>l’état <strong>de</strong>s connaissances <strong>de</strong>s phénomènes biologiques et techniques, mais s’inscriv<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>tdans un contexte politique qui influ<strong>en</strong>ce la manière dont l’ONGE fixe les priorités écologiques,exprime, et publicise ses choix. Elle peut choisir <strong>de</strong> se conc<strong>en</strong>trer sur <strong>de</strong>s problèmes « admis », ouau contraire s’<strong>en</strong>gager dans le portage d’<strong>en</strong>jeux dont certaines catégories d’acteurs s’évertu<strong>en</strong>t àdémontrer l’inconsistance. Ses objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux sont donc stratégiques « dans le s<strong>en</strong>soù tout ag<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances biologiques dans une optique <strong>de</strong> recherche finalisée sur laconservation s’effectue sur la base <strong>de</strong> schèmes qui r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t aussi à <strong>de</strong>s choix, même implicites,<strong>de</strong> stratégies d’action dans la sphère sociale, politique, économique » (ibid.). La construction <strong>de</strong>l’objet écologique à conserver est c<strong>en</strong>trale dans la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, tout <strong>en</strong> étantinterdép<strong>en</strong>dante <strong>de</strong>s trois perspectives stratégiques suivantes.2. Les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Les mo<strong>de</strong>s d’action publique pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t aux interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans l’espace public, dans un système <strong>de</strong><strong>gestion</strong>, telles que nous les avons prés<strong>en</strong>tées dans l’exposé <strong>de</strong> notre cadre théorique <strong>de</strong> l’ASGE. Ils’agit <strong>de</strong> suivre la façon dont l’ONGE qui se serait saisie d’un problème d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tintervi<strong>en</strong>t « pour faire changer <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>t à certains acteurs, sachant que ses efforts vontt<strong>en</strong>dre à in<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s résistances délibérées et rationnelles au changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » (ibid. : 18). Ses interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle sont <strong>de</strong> naturestratégique, au s<strong>en</strong>s fort, si l’ONGE réfléchit « ses actions <strong>en</strong> pleine consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s forces qu’ellea l’ambition d’infléchir et <strong>de</strong>s résistances actives, réfléchies elles aussi, qu’elles sont susceptiblesd’opposer à la mise <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » (ibid. : 18). Cette lecture dialectique ne doitpas être perçue comme l’adoption d’une posture d’opposition systématique et frontale <strong>de</strong> l’acteurd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans toute situation. Encore une fois, les actions <strong>de</strong> l’ONGE sont au contraireune combinaison <strong>de</strong> négociations, d’alliances et d’oppositions qui dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s situations13 Conc<strong>en</strong>tration <strong>de</strong>s forces, économie <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s, mobilité.31


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEspécifiques d’interv<strong>en</strong>tion, pour chacune <strong>de</strong>squelles l’ONGE aura conçu une action stratégiqueparticulière, et c’est ce qu’il nous faudra découvrir. La spécificité <strong>de</strong> chaque situation n’empêchecep<strong>en</strong>dant pas que certains élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> configuration <strong>du</strong> système soi<strong>en</strong>t récurr<strong>en</strong>ts, similaires ouconstants, face auxquels l’ONGE développe <strong>de</strong>s savoirs, que l’on peut trouver sous le nomd’appr<strong>en</strong>tissage par l’expéri<strong>en</strong>ce dans les travaux relatifs aux stratégies <strong>de</strong>s organisations (e.g.Weick, 1979 ; Quinn, 1980 ; Argyris, 2000). Outre la nécessité pour elle <strong>de</strong> réagir <strong>de</strong> façonadaptée aux situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle r<strong>en</strong>contre, indiquant que la stratégie d’action se construitaussi à l’échelle <strong>de</strong>s activités (Johnson et al., 2003 ; Golsorkhi, 2006), elle ne peut – <strong>en</strong> tantqu’organisation – se cont<strong>en</strong>ter d’actions spécifiques et localisées « <strong>en</strong> pointillisme », mais doit sedoter d’une stratégie d’action d’<strong>en</strong>semble. Nous serons att<strong>en</strong>tive à cette articulation <strong>en</strong>tre lastratégie d’<strong>en</strong>semble et sa mise <strong>en</strong> œuvre à l’échelle opérationnelle. Ajoutons que dans la mesureoù nous étudierons les actions à différ<strong>en</strong>ts sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> leur développem<strong>en</strong>t (<strong>en</strong> projet, <strong>en</strong>construction ou dans leur mise <strong>en</strong> œuvre même), nous aurons souv<strong>en</strong>t recours à ce que nousappelerons les théories d’action pour désigner les voies que l’ONGE <strong>en</strong>visage pour son action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> sa lecture <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> a priori.3. Le développem<strong>en</strong>t organisationnel. Pour développer et mettre <strong>en</strong> oeuvre la stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui vi<strong>en</strong>t d’être explicitée, l’ONGE travaille égalem<strong>en</strong>t à rassembler etdévelopper ses capacités d’action. Il s’agit notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s humains (masse critique etcompét<strong>en</strong>ces), <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s financiers (salaires et budget <strong>de</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t), <strong>de</strong> ressourcesinformationnelles, d’une gouvernance (instances d’ori<strong>en</strong>tation et <strong>de</strong> décision), etc. Les capacitésd’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’ONGE dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce qui est appelé les « ressources etcompét<strong>en</strong>ces » par l’école <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée stratégique <strong>de</strong> ce nom (Wernerfelt, 1984, 1995 ; Hamel &Prahalad, 1989). A l’époque, ces auteurs se démarquai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> courants théoriques <strong>en</strong> stratégie oùl’analyse externe (l’organisation dans son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) était prépondérante. Ils suggérai<strong>en</strong>td’investir davantage l’analyse interne <strong>de</strong>s organisations pour être au cœur <strong>de</strong> ce qui constituaitpour eux la source <strong>de</strong> l’avantage concurr<strong>en</strong>tiel – ces fameuses ressources et compét<strong>en</strong>ces propresà l’organisation – et donc <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser la stratégie non plus <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> découpage organisationneladapté au managem<strong>en</strong>t, mais <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> construction et <strong>de</strong> valorisation <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces-clés.L’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t que nous <strong>en</strong> tirons pour notre recherche est l’importance <strong>de</strong> l’analyse internepour saisir la part explicative <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> (souv<strong>en</strong>t appelée « managem<strong>en</strong>t ») <strong>de</strong>s ressources et<strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces dans le déploiem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions – <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales dans notre cas. Pourl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’ONGE, il faudra veiller à différ<strong>en</strong>cier la part <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> l’ONGE qui visespécifiquem<strong>en</strong>t à augm<strong>en</strong>ter et gérer ses capacités <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> mission. En effet, certaines <strong>de</strong>32


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleces activités que nous appelerons actions d’augm<strong>en</strong>tation 14 <strong>de</strong>s capacités sont distinctes <strong>de</strong>sactivités se rapportant à sa mission. D’autres sont difficilem<strong>en</strong>t dissociables <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong>mission <strong>de</strong> l’ONGE. Ses ressources peuv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet se développer dans le déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sactions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales : les opérations <strong>de</strong> communication pour la s<strong>en</strong>sibilisation<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale profit<strong>en</strong>t par exemple à l’image <strong>de</strong> l’ONGE, la mise <strong>en</strong> oeuvre d’actionspermet d’accroître les informations utiles pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, elle peut déboucher surl’obt<strong>en</strong>tion d’autres financem<strong>en</strong>ts, sur la création <strong>de</strong> nouvelles relations (expansion <strong>du</strong> réseau) oubi<strong>en</strong> <strong>en</strong>core sur le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats <strong>de</strong> confiance. Ce <strong>de</strong>rnier exemple nous con<strong>du</strong>it ànotre quatrième perspective stratégique, marquant, à l’instar <strong>de</strong> l’intrication <strong>en</strong>tre les actions pouraugm<strong>en</strong>ter les capacités et les actions <strong>de</strong> mission, l’interdép<strong>en</strong>dance <strong>en</strong>tre la <strong>gestion</strong> interne <strong>de</strong>smoy<strong>en</strong>s et la <strong>gestion</strong> externe <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s relations.4. La place <strong>de</strong> l’ONGE dans le secteur <strong>de</strong> la conservation. Comme pour d’autres typesd’organisation, on ne pourrait véritablem<strong>en</strong>t compr<strong>en</strong>dre les stratégies <strong>de</strong>s ONGE et la façondont elles intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t si nous omettions la perspective stratégique <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t au sein<strong>de</strong> son secteur d'activité. Pour exister et agir, l’organisation doit faire sa place. « Pour les ONGEdont l’id<strong>en</strong>tité est fondée sur la déf<strong>en</strong>se d’un intérêt commun, voire universel, la « concurr<strong>en</strong>ce »constitue un point s<strong>en</strong>sible qui n’est <strong>en</strong> général évoqué qu’avec rétic<strong>en</strong>ce » (De Mombynes &Mermet, 2003 : 23) ou indirectem<strong>en</strong>t. Mais chacune <strong>de</strong>s organisations <strong>du</strong> secteur <strong>de</strong> la protection<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t se soucie aussi <strong>de</strong> ses intérêts propres. On n’échappe donc pas aux t<strong>en</strong>sionsqui préval<strong>en</strong>t lors <strong>de</strong> l’arrivée d’un nouvel <strong>en</strong>trant dans tout secteur d’activités concurr<strong>en</strong>tiel(Porter, 1986). Parallèlem<strong>en</strong>t, la montée <strong>en</strong> puissance <strong>du</strong> secteur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t peut, <strong>de</strong>manière générale, ouvrir <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> manœuvre pour l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s acteurs parties pr<strong>en</strong>antes.L’exemple <strong>de</strong> CI (voir Encadré 1.1) nous indique qu’il nous faut être att<strong>en</strong>tif à la <strong>du</strong>alité <strong>de</strong>srelations <strong>en</strong>tre les acteurs <strong>du</strong> champ <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (ou plus précisem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> laconservation) : ce sont <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> concurr<strong>en</strong>ce ou d’alliances, parfois – voire souv<strong>en</strong>t – les<strong>de</strong>ux simultaném<strong>en</strong>t 15 . Elles peuv<strong>en</strong>t se jouer sur plusieurs plans comme celui <strong>de</strong>s ressourceshumaines et financières, <strong>de</strong>s réseaux et <strong>de</strong>s fonctions.14 Le terme <strong>de</strong> « r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t » <strong>de</strong>s capacités pourrait paraître plus intuitif. Nous évitons pourtant <strong>de</strong> l’employerdans ce s<strong>en</strong>s car il a déjà une signification dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s ONG. Il r<strong>en</strong>voie <strong>en</strong> effet « au r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>scapacités » <strong>de</strong>s populations visées par <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t et d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dont les ONG(E) sontsouv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s opérateurs.15 Ce phénomène fait l’objet d’un champ <strong>de</strong> littérature <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui utilise le terme <strong>de</strong> « coopétition »pour désigner le paradoxe qui est répan<strong>du</strong> dans les pratiques <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises qui mani<strong>en</strong>t à la fois <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong>concurr<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> coopération (Yami & Le Roy, 2007 ; 2010).33


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGELes ONGE se trouv<strong>en</strong>t fatalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> situation <strong>de</strong> concurr<strong>en</strong>ce vis-à-vis <strong>de</strong>s ressources. Qu’ilss’agiss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s humains (capacité à attirer un personnel qualifié), financiers (répondre auxappels d’offre <strong>de</strong>s bailleurs institutionnels et être sélectionné), ou <strong>de</strong> leur positionnem<strong>en</strong>t dansleur secteur (faire reconnaître son expertise <strong>en</strong> comparaison à d’autres ONGE ou d’autres typesd’organisations), elles ne peuv<strong>en</strong>t négliger ces aspects pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> leur propre mission<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Parallèlem<strong>en</strong>t, quel que soit le problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal dont elles sepréoccup<strong>en</strong>t, elles sont rarem<strong>en</strong>t – pour ne pas dire jamais – <strong>en</strong> capacité <strong>de</strong> le résoudre seules.Les actions qu’elles cherch<strong>en</strong>t à mettre <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s humainset financiers importants, « rassembler les moy<strong>en</strong>s » peut être une motivation triviale maiscourante favorisant la coopération.Lorsquelle veul<strong>en</strong>t pénétrer les sphères politiques aux différ<strong>en</strong>tes échelles (locales àinternationales) pour influ<strong>en</strong>cer les décisions publiques, les organisations <strong>du</strong> secteur<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal se prêt<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s jeux d’alliances et <strong>de</strong> coalitions. Une part non négligeable <strong>de</strong> lalittérature traitant <strong>de</strong>s ONGE se focalise sur cette dim<strong>en</strong>sion, ce qui reflète son importance. Cestravaux principalem<strong>en</strong>t issus <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces politiques se sont <strong>en</strong> effet rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>chés sur cesaspects, constatant la t<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>s ONG à se mettre <strong>en</strong> réseau et se coaliser, d’échelles locales à<strong>de</strong>s échelles transnationales (Transnational Advocacy Network), pour porter les causes qui lespréoccup<strong>en</strong>t sur la scène publique (e.g. Jordan & Van Tuijl, 2000 ; Hudson, 2001 ; Berny, 2005,2008 ; Yanacopulos, 2005). Dans ce domaine, la concurr<strong>en</strong>ce porte notamm<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>s aspectsidéologiques, différ<strong>en</strong>ts groupes d’organisation pouvant se confronter aux niveaux <strong>de</strong>s visions et<strong>de</strong>s approches qu’elles déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t.Les phénomènes <strong>de</strong> concurr<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> coopération se situ<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong>s fonctionsrespectives <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs dans le jeu.« Souv<strong>en</strong>t ce ne sont pas les mêmes organisations qui mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> œuvre les différ<strong>en</strong>tesstratégies. Cette différ<strong>en</strong>tiation est tout à fait fonctionnelle au s<strong>en</strong>s ou la combinaisond’organisations poursuivant <strong>de</strong>s actions différ<strong>en</strong>tes pour le changem<strong>en</strong>t est bi<strong>en</strong> plusefficace que chaque organisation prise séparém<strong>en</strong>t. Par exemple, l’impulsion donnée parune ONG vouée à la dénonciation, peut être reprise par le Ministère <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>tpour sout<strong>en</strong>ir sa négociation avec d’autres secteurs <strong>de</strong> l’administration, puis lesprogrammes qui <strong>en</strong> découl<strong>en</strong>t être gérés par une organisation para-publique plus proche<strong>de</strong>s professionnels responsables <strong>du</strong> problème initial » […]« le paradoxe qui veut que,pour fonctionnel que soit ce cycle qui va <strong>de</strong> la remise <strong>en</strong> cause au nom <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, à un changem<strong>en</strong>t partiel <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective, les différ<strong>en</strong>tsinterv<strong>en</strong>ants qui se pass<strong>en</strong>t le relais se r<strong>en</strong>i<strong>en</strong>t les uns les autres, s’accusant mutuellem<strong>en</strong>td’extrémisme, <strong>de</strong> mollesse ou <strong>de</strong> trahison ». (Mermet, 2006[1998] : 227).34


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleNous r<strong>en</strong>contrerons <strong>de</strong>s situations où cette différ<strong>en</strong>tiation <strong>de</strong>s rôles apparaît comme un facteur<strong>de</strong> coopération <strong>en</strong>tre les acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Pour étudier les types <strong>de</strong> li<strong>en</strong>s et négociationsqui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t ces rapprochem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>tre acteurs, nous intro<strong>du</strong>isons le concept d’Ensembleagissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t que nous définissons comme le regroupem<strong>en</strong>t formel ouinformel, direct ou indirect d’Acteurs d’Environnem<strong>en</strong>t rassemblés autour <strong>du</strong> même objectifnormatif d’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s écosystèmes.Ces différ<strong>en</strong>ts aspects – concurr<strong>en</strong>ce ou mutualisation <strong>de</strong>s ressources, réseaux et fonctionsrespectives <strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les relations que les différ<strong>en</strong>ts acteursagissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t vont tisser (ou éviter) dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> leurs actions. Cettedim<strong>en</strong>sion doit nécessairem<strong>en</strong>t être intégrée à une analyse stratégique <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong>sONGE.Un cadre d’analyse mettant <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion quatre registres interdép<strong>en</strong>dants <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ONGELa stratégie <strong>de</strong> l’ONGE se compose <strong>de</strong> quatre perspectives, dont chacune possè<strong>de</strong> une logiquepropre et pose <strong>de</strong>s problèmes spécifiques. Malgré leur caractère distinct, ces perspectives nepeuv<strong>en</strong>t être <strong>en</strong>visagées séparém<strong>en</strong>t et s’impos<strong>en</strong>t conjointem<strong>en</strong>t à l’ONGE. Cela signifie pourelle qu’ « il ne lui suffit pas <strong>de</strong> trouver pour chacun <strong>de</strong>s registres une stratégie viable (ou mêmeexcell<strong>en</strong>te) : elle doit définir et mettre <strong>en</strong> œuvre une seule stratégie, qui soit viable dans chacune<strong>de</strong>s quatre perspectives. Cette stratégie repose donc sur un travail <strong>de</strong> composition qui ajoute auxdifficultés propres <strong>de</strong> chaque perspective le défi <strong>de</strong> les faire fonctionner <strong>en</strong>semble » (DeMombynes & Mermet, 2003 : 23). De la même manière, l’analyste ne pourrait se cont<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>« s’installer au carrefour <strong>en</strong>tre les quatre perspectives et y puiser <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts épars pour lescombiner à sa guise » (ibid. : 23). La stratégie <strong>de</strong> l’ONGE sera ainsi appréh<strong>en</strong>dée dansl’articulation <strong>de</strong> ces quatre registres stratégiques définies <strong>de</strong> manières suffisamm<strong>en</strong>t génériquespour accueillir <strong>de</strong>s situations stratégiques spécifiques dans lesquelles se trouv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ONGE. Lecorollaire <strong>de</strong> ces espaces ouverts par le cadre d’analyse est qu’il faut l’alim<strong>en</strong>ter à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>sthéories et <strong>de</strong>s outils d’analyse choisis <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la situation étudiée. La section suivante(section 1.3) sera consacrée à l’exposé <strong>de</strong>s mobilisations théoriques que nous allons faire dans lechamp <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> la stratégie.Ici, retrouvons notre représ<strong>en</strong>tation schématique <strong>de</strong> notre cadre <strong>de</strong> l’ASGE <strong>en</strong> le c<strong>en</strong>trant cettefois sur l’ONGE que nous appréh<strong>en</strong>dons comme un acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t porteur <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle et faisant figurer les quatre registres qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t sa stratégie (Figure1.3).35


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGESystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>ActeurRégulateurAEONGE32Gestionint<strong>en</strong>tionnelle2ActeursSectorielsAEAE4AE1ObjetsécologiquesGestioneffective1. Construction <strong>de</strong> l’objet écologique àconserver2. Mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale3. Développem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong> l’organisation4. Place dans le secteur <strong>de</strong> la conservationFigure 1.3 : Cadre d’analyse stratégique pour l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur)La flèche qui relie l’ONGE à l’objet écologique (1) conti<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux élém<strong>en</strong>ts : d’abord, il s’agit <strong>de</strong> la façondont l’ONGE va déterminer, argum<strong>en</strong>ter la formulation <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver ; mais il s’agitaussi <strong>de</strong> faire apparaître la finalité <strong>de</strong> son action qui se situe bi<strong>en</strong> sur cet objet écologique. Le style pointillé<strong>de</strong> cette flèche (1) symbolise le caractère indirect <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions qui sont le plus souv<strong>en</strong>tciblées vers les acteurs sectoriels et régulateurs (flèches (2)) dont les décisions et les actions ont uneinflu<strong>en</strong>ce sur l’état <strong>de</strong> l’objet écologique. L’ONGE est ici considérée comme un acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tporteur <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle, mais aussi comme une organisation que nous abordons égalem<strong>en</strong>tdans sa dim<strong>en</strong>sion interne (3). Dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ses actions, l’ONGE interagit avec d’autresacteurs porteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelles (flèches vertes (4)).Les actions développées par l’ONGE sont <strong>de</strong>stinées au mainti<strong>en</strong> ou à l’amélioration <strong>de</strong>l’objetécologique. Ce <strong>de</strong>rnier angle <strong>de</strong> notre cadre d’analyse n’a pas <strong>en</strong>core été prés<strong>en</strong>té. C’est ce à quoinous allons maint<strong>en</strong>ant nous attacher.L’analyse <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> l’ONGE au regard <strong>de</strong> ses impacts sur l’objetécologiqueLorsque l’on c<strong>en</strong>tre le cadre <strong>de</strong> l’ASGE sur l’ONGE et que l’on adopte son point <strong>de</strong> vue pourétudier le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Figure 1.3), que <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t le référ<strong>en</strong>tiel fondam<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> l’analyse,c’est-à-dire celui <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t à atteindre ?36


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talePour l’ONGE qui est fondée par sa mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, cette référ<strong>en</strong>ce d’état écologiqueà rétablir n’est pas une référ<strong>en</strong>ce externe, mais bi<strong>en</strong> son <strong>en</strong>jeu principal. C’est <strong>en</strong> outre surl’atteinte <strong>de</strong> cette mission qu’elle doit r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes. Pour porter un regard<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal sur la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, nous pouvons choisir <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qu’elle a choisi <strong>de</strong> poursuivre comme référ<strong>en</strong>ce analytique. C’est la postureque nous adoptons, tout <strong>en</strong> s’autorisant à la discuter dans le temps <strong>de</strong> l’analyse.Pour une ONGE, comme pour d’autres types d’organisations, l’atteinte <strong>de</strong>s objectifs r<strong>en</strong>voie à<strong>de</strong>s notions d’ « efficacité », <strong>de</strong> « performance », qui sont généralem<strong>en</strong>t utilisées dans le mon<strong>de</strong><strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises. Une discussion sur ces notions semble être le meilleur moy<strong>en</strong> d’abor<strong>de</strong>r cet angle<strong>de</strong> notre cadre d’analyse et d’expliquer le choix <strong>de</strong>s termes qui nous utiliserons dans la suite <strong>du</strong>texte.Le terme <strong>de</strong> performance est répan<strong>du</strong> dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises et <strong>de</strong>s organisations. Bi<strong>en</strong>que sa définition ne soit pas bi<strong>en</strong> délimitée et que le mot apparti<strong>en</strong>ne « à la famille <strong>de</strong>s termespolysémiques parfois appelés « mots-valises » (Bourguignon, 1997), il désigne <strong>de</strong> manière générale« la réalisation <strong>de</strong>s objectifs organisationnels, quelles que soi<strong>en</strong>t la nature et la variété <strong>de</strong> cesobjectifs. Cette réalisation peut se compr<strong>en</strong>dre au s<strong>en</strong>s strict (résultat, aboutissem<strong>en</strong>t) ou au s<strong>en</strong>slarge <strong>du</strong> processus qui mène au résultat (action) » (ibid. : 91). Dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises, laperformance exprime la capacité <strong>de</strong> l’organisation à créer <strong>de</strong> la valeur économique (Lusthaus etal., 2003 : 29). On lui attribue le plus souv<strong>en</strong>t plusieurs dim<strong>en</strong>sions irré<strong>du</strong>ctibles qui doiv<strong>en</strong>t êtret<strong>en</strong>ues <strong>en</strong>semble : « une organisation est performante lorsqu’elle parvi<strong>en</strong>t à un équilibre <strong>en</strong>treefficacité, effici<strong>en</strong>ce et pertin<strong>en</strong>ce tout <strong>en</strong> étant viable financièrem<strong>en</strong>t » (ibid. : 29). L’efficacitér<strong>en</strong>voie au niveau <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong>s objectifs ; l’effici<strong>en</strong>ce r<strong>en</strong>voie à l’optimisation <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>smatériels et immatériels investis pour la réalisation <strong>de</strong>s objectifs (ibid.) ; la pertin<strong>en</strong>ce r<strong>en</strong>voie àl’adéquation <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s investis et <strong>de</strong>s actions réalisées au regard <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>tion (Bessire, 1999).Ces notions aurai<strong>en</strong>t pu mobilisées pour étudier la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE <strong>en</strong> articulant laperformance-processus (les actions) à la performance-résultat. M. Leroy (2006a) a utilisé lesnotions d’efficacité, d’effici<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> pertin<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> montrant que cette grille appliquée à uneperformance <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pouvait pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s éclairages déterminants pour évaluer lesdispositifs internationaux annonçant la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Lusthaus et al. (2003 :29) considèr<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t que ces notions ne sont pas réservées aux organisations dont l’objetest <strong>de</strong> générer <strong>du</strong> profit : « les organisations sans but lucratif <strong>en</strong>visag<strong>en</strong>t leur performance <strong>en</strong>termes <strong>de</strong> mesure dans laquelle elles se conform<strong>en</strong>t à leur mission, à leur raison d’être ou aux butsqui ont été définis pour elles ». Dans ce cas, on pourrait transposer la notion <strong>de</strong> profit ou <strong>de</strong>37


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEbénéfice financier <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise commerciale à un bénéfice écologique généré par l’ONGE. Cebénéfice écologique ne s’exprimerait donc pas <strong>en</strong> montant financier, mais <strong>en</strong> nombre d’indivi<strong>du</strong>s<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes populations animales et végétales, <strong>en</strong> surface <strong>de</strong> forêt <strong>en</strong> bon état, <strong>en</strong> surface <strong>de</strong>zones humi<strong>de</strong>s fonctionnelles, etc. Pour étudier la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, nous aurions donc puam<strong>en</strong><strong>de</strong>r notre cadre d’analyse <strong>de</strong> l’ONGE <strong>en</strong> articulant ces notions <strong>de</strong> performance <strong>de</strong> l’action,<strong>de</strong> résultats et <strong>de</strong> bénéfice pour les objets écologiques visés.Après les avoir travaillés, délimités, testés, nous avons finalem<strong>en</strong>t abandonné ces termes liés à laperformance. Ce choix est lié à <strong>de</strong>ux raisons : la première raison ti<strong>en</strong>t au fait que la mobilisation<strong>de</strong> ces termes posait <strong>de</strong>s problèmes au niveau <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche que nous avons mis<strong>en</strong> œuvre. Comme nous l’expliquerons dans le chapitre suivant, nous avons travaillé <strong>en</strong>interaction avec les membres <strong>de</strong> l’ONGE sur laquelle nous avons focalisé l’étu<strong>de</strong>. Ce vocabulairecomplexe n’étant pas familier <strong>de</strong> l’organisation, cela in<strong>du</strong>isait une rupture <strong>en</strong>tre le terrain etl’analyse (voir le Chapitre 2). La secon<strong>de</strong> raison est égalem<strong>en</strong>t un problème <strong>de</strong> vocabulairespécialisé. Le terme plus généralem<strong>en</strong>t utilisé dans le secteur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ou <strong>de</strong> laconservation, y compris par notre ONGE, est celui d’impact. C’est finalem<strong>en</strong>t celui que nousavons ret<strong>en</strong>u.Le terme d’impact est généralem<strong>en</strong>t utilisé dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t pour désigner laconséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> toute action sur l’état <strong>de</strong>s milieux. Son s<strong>en</strong>s peut néanmoins varier selon que l’onse trouve dans le domaine <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises et <strong>de</strong>s organisations, ou <strong>de</strong>s politiques et programmesd’actions pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Se trouvant à l’interface <strong>en</strong>tre ces <strong>de</strong>ux champs d’étu<strong>de</strong>, uneprécision <strong>de</strong> la façon dont nous mobilisons le terme d’impact s’impose.Dans le domaine <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises, l’impact r<strong>en</strong>voie généralem<strong>en</strong>t aux conséqu<strong>en</strong>ces nonint<strong>en</strong>tionnelles (et souv<strong>en</strong>t négatives) <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ses activités sur l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ils’agit par exemple <strong>de</strong>s rejets <strong>de</strong> substances polluantes dans l’air et dans l’eau, <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>déchets (év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t non recyclables), <strong>de</strong> la consommation d’énergie et le rejet <strong>de</strong> gaz à effet<strong>de</strong> serre. Les politiques réglem<strong>en</strong>taires et incitatrices pour la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> ces rejets et leschangem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> pratiques cons<strong>en</strong>tis par les <strong>en</strong>treprises sont étudiées par le champ <strong>de</strong>l’Environm<strong>en</strong>tal managem<strong>en</strong>t 16 (e.g. Clarkson, 2008 ; H<strong>en</strong>ri & Journeault, 2010). L’ONGE sur laquell<strong>en</strong>ous avons focalisé notre recherche est soucieuse <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire sa consommation d’énergie, son16 L’Environm<strong>en</strong>tal managem<strong>en</strong>t est un sous-champ <strong>de</strong>s Environm<strong>en</strong>tal studies. Il pr<strong>en</strong>d le nom <strong>de</strong> managem<strong>en</strong>t<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>en</strong> français. Son développem<strong>en</strong>t a été rapi<strong>de</strong> et il compte déjà un grand nombre <strong>de</strong> revues traitantnotamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s secteurs et <strong>de</strong>s techniques à fort impact sur l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, comme le domaine hydraulique etminier, mais aussi <strong>de</strong> systèmes <strong>de</strong> normes (comme ISO 14000) dans un vaste év<strong>en</strong>tail <strong>de</strong> secteurs. Environm<strong>en</strong>talmanagem<strong>en</strong>t, Journal of <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal planning and managem<strong>en</strong>t, Journal of <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>al managem<strong>en</strong>t, Environm<strong>en</strong>tal qualitymanagem<strong>en</strong>t sont <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> revues étant apparues dans les dix <strong>de</strong>rnières années.38


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleutilisation <strong>de</strong> papier, <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>its polluants, et <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ses déchets (papier, cartouchesd’<strong>en</strong>cre, etc.). Elle a donc installé une chaudière à bois, un tri sélectif <strong>de</strong>s déchets et mis <strong>en</strong> placeune « politique d’achat responsable ». C’est ce qu’elle appelle sa « politique <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t<strong>du</strong>rable ». Il serait possible d’étudier le managem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal dans les ONGE, <strong>en</strong>observant par exemple leur caractère innovant ou non <strong>en</strong> la matière. Ce n’est pas à cette partie<strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> l’organisation que notre thèse s’intéresse. Notre recherche se situe plusspécifiquem<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong>s actions int<strong>en</strong>tionnelles <strong>de</strong> l’ONGE pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, celles quirelèv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa mission.En cela, notre acception <strong>de</strong> l’impact est plus proche <strong>de</strong> celle qui est utilisée dans le domaine <strong>de</strong>spolitiques et <strong>de</strong>s programmes d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Ce champ technique et pratiquediffuse <strong>de</strong>s standards pour l’évaluation <strong>de</strong>s programmes ou projets, incitant à distinguer plusieursniveaux : les moy<strong>en</strong>s, les intrants (input), les résultats directs (output), les résultats au regard <strong>de</strong>sobjectifs (outcome) et les impacts. Dans ce cas, les impacts r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t aux conséqu<strong>en</strong>ces directes etindirectes, év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t différées dans le temps sur l’objet ciblé. Bi<strong>en</strong> que nous ne mobiliseronspas les standards <strong>de</strong> la planification et l’évaluation <strong>de</strong> programme dans notre recherche, notreutilisation <strong>du</strong> terme « impact » sera s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tique. Les impacts dont nous parleronsdésignerons les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>s actions directes et indirectes <strong>de</strong> l’ONGE sur les objetsécologiques qu’elle s’est donnée pour objectif <strong>de</strong> protéger. Les impacts, qui comme nous leverrons ne sont pas toujours évaluables, se tra<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t par <strong>de</strong>s améliorations <strong>de</strong> l’état écologiquematériel <strong>de</strong>s milieux, <strong>de</strong>s populations, etc.Si nous avons ré<strong>du</strong>it l’ambiguïté que pouvait cont<strong>en</strong>ir le terme d’impact, nous n’avons pas <strong>en</strong>coretout à fait tous les élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> cadrage pour articuler la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et son impact sur lesobjets écologiques visés. Nous avons évoqué le fait que les actions mises <strong>en</strong> œuvre par lesONGE étai<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t indirectes et visai<strong>en</strong>t les acteurs qui, par leurs pratiques, ont uneinflu<strong>en</strong>ce sur l’objet écologique. Par ailleurs, ces ONGE agiss<strong>en</strong>t rarem<strong>en</strong>t seules et les impactspositifs sur l’état écologique <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sont le plus souv<strong>en</strong>t le fruit d’une <strong>gestion</strong>int<strong>en</strong>tionnelle compr<strong>en</strong>ant une conjonction d’actions et <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>ts. Il serait vain <strong>de</strong> vouloirisoler les impacts propres <strong>de</strong> l’ONGE : il y a <strong>en</strong> cela un irré<strong>du</strong>ctible problème d’attribution. Ilnous faut alors intro<strong>du</strong>ire un nouveau terme qui sera celui <strong>de</strong> la contribution à l’amélioration <strong>de</strong>l’état écologique <strong>de</strong>s objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Ce terme <strong>de</strong> contribution nous permettra <strong>de</strong>parler <strong>de</strong> l’apport <strong>de</strong> l’ONGE étudiée tout <strong>en</strong> analysant sa place et son rôle dans la <strong>gestion</strong>int<strong>en</strong>tionnelle et dans le secteur <strong>de</strong> la conservation.39


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGENotre cadre d’analyse pour étudier la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE v<strong>en</strong>ant d’un rec<strong>en</strong>trage <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong>l’ASGE sur l’organisation est maint<strong>en</strong>ant établi. Nous pouvons alors poursuivre l’exposé parl’intro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s théories mobilisées qui éclaireront <strong>de</strong>s parties plus ou moins ét<strong>en</strong><strong>du</strong>es <strong>de</strong> notreobjet <strong>de</strong> recherche. Celles-ci sont nécessaires pour saisir les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> capacité d’action, <strong>de</strong>construction et <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> l’ONGE, dans l’articulation <strong>de</strong>s quatreperspectives sa stratégie.1.3 Etudier l’organisation au regard <strong>de</strong> sa mission : l’apport <strong>de</strong>sthéories <strong>de</strong>s organisationsNous v<strong>en</strong>ons d’exposer notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s registres <strong>de</strong>la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE ainsi que leurs concepts clé. Avant <strong>de</strong> les articuler avec <strong>de</strong>s théoriessuffisamm<strong>en</strong>t proches pour employer les mêmes grammaires, nous jugeons nécessaire <strong>de</strong> donnerici quelques élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la position théorique <strong>de</strong> ce travail <strong>de</strong> recherche.Comme nous l’avons expliqué, notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASGE)apparti<strong>en</strong>t aux sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, tout <strong>en</strong> s’inscrivant dans le champ <strong>de</strong>s Environm<strong>en</strong>tal studies parles objets qu’il traite. Dans ce s<strong>en</strong>s, les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sont auxécosystèmes, aux territoires et aux objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ce que la majeure partie <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> sont aux <strong>en</strong>treprises : les sci<strong>en</strong>ces qui s’intéress<strong>en</strong>t à qui gère ces objets, comm<strong>en</strong>t ilssont gérés, et comm<strong>en</strong>t ils doiv<strong>en</strong>t être gérés pour être efficaces selon <strong>de</strong>s critères propres auxdomaines auxquels ils apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t. Ici, la <strong>gestion</strong> est jugée efficace lorsqu’elle permet un bonétat écologique matériel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Ensuite, la stratégie <strong>de</strong> l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – vue comme la position, les discours et lesactions (fonctions) <strong>de</strong> l’acteur dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> – constitue l’objet c<strong>en</strong>trale <strong>de</strong> notreanalyse. Or notre acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est une ONGE, c’est-à-dire une organisation formelle.Nous pouvons donc ancrer notre recherche dans les sci<strong>en</strong>ces qui trait<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong>sorganisations : notamm<strong>en</strong>t le « managem<strong>en</strong>t stratégique », discipline appart<strong>en</strong>ant aux sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong><strong>gestion</strong> (Figure 3.1). Cette discipline s’intéresse <strong>en</strong> effet aux stratégies <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises, à la manièredont elles sont élaborées et mises <strong>en</strong> œuvre pour aboutir à l’accomplissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s objectifsprédéfinis. Le managem<strong>en</strong>t stratégique a émergé dans les années 1960 comme un champ <strong>de</strong>ssci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, dont « la visée est ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t prescriptive concernant les modèles ettechniques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> permettant d’accroître les performances économiques et financières <strong>de</strong>s40


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleorganisations » (Palpacuer et al., 2010 : 18). Son objectif normatif sous-jac<strong>en</strong>t rési<strong>de</strong> ainsi dans lacréation <strong>de</strong> valeur économique et le développem<strong>en</strong>t d’avantages concurr<strong>en</strong>tiels <strong>de</strong> l’organisation.Les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> performance « sociale et surtout <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable » (Plane, 2003 : 199)sont désormais souv<strong>en</strong>t ajoutés aux objectifs <strong>de</strong> performance dans la littérature, mais <strong>en</strong>s’appuyant sur <strong>de</strong>s analyses bibliométriques (Adler & Jermier, 2005) et sur <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas(Palpacuer et al., 2010), les auteurs <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s critiques <strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t rappell<strong>en</strong>t que les progrèssont <strong>en</strong>core à faire. La performance économique est <strong>en</strong> effet <strong>en</strong>core aujourd’hui l’implicite <strong>de</strong> lamajorité <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> ce champ qui s’est largem<strong>en</strong>t développé dans un contexte d’augm<strong>en</strong>tationet <strong>de</strong> diversification <strong>de</strong>s formes organisationnelles <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises privées et <strong>de</strong> complexification<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans lequel celles-ci évolu<strong>en</strong>t. Les apports <strong>de</strong> ces travaux dépass<strong>en</strong>t le mon<strong>de</strong><strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise et <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> valeur économique. Depuis quelques années, la disciplines’intéresse à <strong>de</strong> nouveaux objets comme les instituts publics ou les organisations d’intérêt public,<strong>en</strong> raison <strong>du</strong> contexte <strong>de</strong> généralisation <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> et <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique.C’est aussi lié au simple fait que beaucoup <strong>de</strong>s éclairages fournis ne sont pas spécifiques aux<strong>en</strong>treprises commerciales, mais relèv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> phénomènes et <strong>de</strong> caractères plus larges dans lesorganisations, et <strong>en</strong>core plus généralem<strong>en</strong>t « d’une classe <strong>de</strong> problématiques constitutives <strong>de</strong>toute action collective » servant l’éclairage <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> l’ « agir <strong>en</strong>semble » (David et al.,2000 : 2). Cet exposé <strong>de</strong> notre position théorique gagne à être synthétisée sous forme visuelle(Figure 1.4). Notons cep<strong>en</strong>dant que cette représ<strong>en</strong>tation schématique <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et<strong>de</strong> la stratégie est très simplifiée et ne r<strong>en</strong>d pas compte <strong>de</strong>s débats sur les contours <strong>de</strong> cesdisciplines (David et al., 2000) et <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong> classification <strong>de</strong>s théories (Mintzberg et al., 1999 ;Martinet, 2000 ; Déry, 2001) qui sont régulièrem<strong>en</strong>t fournis par leurs auteurs.Sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Champ <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise et <strong>de</strong>sorganisationsChamp <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t…Politiques publiques…RH…Stratégie <strong>de</strong>sorganisationsStratégie <strong>de</strong>s acteursd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tFigure 1.4 : Ancrage théorique <strong>de</strong> cette recherche doctorale sur la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (zones grisées)(source : auteur)41


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEParmi les nombreuses écoles <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée que compte aujourd’hui le champ <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>tstratégique, certaines sont particulièrem<strong>en</strong>t intéressantes pour <strong>en</strong>visager et analyser la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE sous l’angle qui est le nôtre : étudier sa capacité (<strong>de</strong> quelle façon et pour quel résultat ?)à provoquer <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts dans la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Dans lesparagraphes suivants, nous nous attachons à prés<strong>en</strong>ter succinctem<strong>en</strong>t ces théories et à expliciterl’usage qui nous paraît opportun <strong>de</strong> s’autoriser au regard <strong>de</strong> notre problématique.En guise d’intro<strong>du</strong>ction à l’exposé <strong>de</strong> ces emprunts théoriques, abandonnons un instant levocabulaire <strong>de</strong> notre cadre d’analyse pour adopter le leur. En réaction à une certaine dilution <strong>du</strong>terme dans les domaines les plus divers, P. Lorino et J-C. Taron<strong>de</strong>au (2006) propos<strong>en</strong>t uneredéfinition <strong>de</strong> la stratégie, <strong>en</strong> tant qu’objet <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conceptualisation. Plutôt que <strong>de</strong> lefaire <strong>en</strong> énonçant une formule péremptoire <strong>de</strong> ce qu’est la stratégie et évitant ainsi le risqued’ajouter une nouvelle définition aux nombreuses existantes (Marchesnay, 2004), les auteurspr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t le parti <strong>de</strong> la voir par ses frontières (Encadré 1.2).Encadré 1.2 : Définition <strong>de</strong> la stratégie par ses frontières (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006 : 317)Première propositionLa stratégie est un <strong>en</strong>semble d’actions ou d’int<strong>en</strong>tions finalisées, autrem<strong>en</strong>t dit la stratégie définitou est définie par un <strong>en</strong>semble d’objectifs ou <strong>de</strong> politiques selon la terminologie militaire. Enrevanche, n’est pas stratégique ce qui ne résulte que <strong>du</strong> hasard, <strong>de</strong> la chance, <strong>de</strong> processus ou <strong>de</strong>conditions internes ou externes non contrôlées. Cela n’exclut pas que l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> cesconditions non contrôlées amorce <strong>de</strong>s processus ou in<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s décisions stratégiques.Deuxième propositionLa stratégie est un <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> décisions ou d’int<strong>en</strong>tions qui vis<strong>en</strong>t à agir sur les conditions d’insertion<strong>de</strong> la firme dans l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Il <strong>en</strong> résulte que la stratégie concerne l’<strong>en</strong>treprise dans sa globalité etque les décisions stratégiques ont nécessairem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s effets ou <strong>de</strong>s ambitions externes.Troisième propositionLa stratégie est une théorie <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t hostile, dynamique, complexe et incertaindont les résultats ne peuv<strong>en</strong>t pas être calculés, ni prévus avec certitu<strong>de</strong>.Quatrième propositionLa stratégie s’appuie sur et exploite les ressources ou capacités disponibles y compris dans letemps.Cinquième propositionLa stratégie offre un cadre d’analyse <strong>de</strong>s ressources et capacités à développer pour modifier à sonprofit les conditions <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce et améliorer les performances <strong>de</strong> la firme.Notons que cette définition <strong>de</strong> la stratégie par les frontières, exprimée avec <strong>de</strong>s termes plusgénériques, correspond à la plupart <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts fournis auparavant sur la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE,42


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talemême si quelques élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> ces propositions pourrai<strong>en</strong>t être équivoques sans une explicationun peu précise <strong>de</strong> leur signification dans la configuration <strong>du</strong> problème qui est le nôtre. Cesélém<strong>en</strong>ts figur<strong>en</strong>t <strong>en</strong> italique dans l’<strong>en</strong>cadré. Dans la <strong>de</strong>uxième proposition, « l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » 17<strong>de</strong> l’organisation r<strong>en</strong>voie pour nous à <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions : 1) comme l’indique cette définition, ils’agit <strong>de</strong> l’insertion <strong>de</strong> l’organisation dans son secteur d’activités ou <strong>de</strong>s secteurs d’activitésconnexes. Cela correspond au quatrième registre <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, celle <strong>du</strong>positionnem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> la coopération et <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce. 2) Il s’agit égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son insertiondans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à travers son projet <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce système (registre <strong>de</strong> l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal) et <strong>de</strong> son action dans le système (registre <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale). Demême, dans la cinquième proposition, l’<strong>en</strong>jeu n’est pas tant d’agir sur le secteur mais d’impulserun changem<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Le rapport <strong>de</strong> l’organisation à l’externe s’exprime différemm<strong>en</strong>t dans la proposition <strong>de</strong> P. Lorinoet J-C Taron<strong>de</strong>au (2006), mais les auteurs insist<strong>en</strong>t sur un principe <strong>de</strong> la stratégie qui nous est toutaussi crucial : « les décisions stratégiques [et les actions qui <strong>en</strong> résult<strong>en</strong>t] ont nécessairem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>seffets ou <strong>de</strong>s ambitions externes » (voir la <strong>de</strong>uxième proposition <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>cadré 1.1), c’est-à-dire,dans notre cas, sur la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.Un autre élém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> converg<strong>en</strong>ce mérite d’être signalé, car l’articulation avec notre cadred’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE (ASOFE) <strong>en</strong> est r<strong>en</strong><strong>du</strong> aisée : « la stratégie concernel’ « organisation » dans sa globalité », ce qui appuie l’interdép<strong>en</strong>dance <strong>en</strong>tre les quatre registresstratégiques id<strong>en</strong>tifiées pour l’ONGE. Sa stratégie est constituée <strong>de</strong> ces quatre perspectives prises<strong>en</strong>semble. Pour H. Mintzberg et al. (1999), cette cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong>l’organisation est fondam<strong>en</strong>tale, à tel point que c’est le fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t d’une école <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée <strong>en</strong>stratégie, celle <strong>de</strong> la « configuration » 18 à laquelle Mintzberg a lui-même contribué (Miller &Mintzberg, 1983) :« Dans sa thèse <strong>de</strong> doctorat […], Khandwalla (1970) avait découvert ce qui équivaut àune justification empirique <strong>de</strong> cette approche. Dans les <strong>en</strong>treprises qu’il avait étudiées,l’efficacité résultait non tant <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> tel attribut particulier, comme ladéc<strong>en</strong>tralisation <strong>du</strong> pouvoir ou une conception particulière <strong>de</strong> la planification, qued’intercorrélations <strong>en</strong>tre attributs divers. Autrem<strong>en</strong>t dit, ces <strong>en</strong>treprises fonctionnai<strong>en</strong>tefficacem<strong>en</strong>t parce qu’elles réunissai<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>tes caractéristiques <strong>de</strong> façon17 Soulignons que dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise et dans le champ <strong>de</strong> la stratégie, le terme d’ « <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » estégalem<strong>en</strong>t très familier, mais désigne l’ « <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » socio-politique, ou sectoriel dans lequel se meutl’organisation focale, et non l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui signifie avant tout pour nous le support matériel <strong>de</strong> la vie et labiocénose. Nous éviterons tant que possible l’emploi <strong>de</strong> l’ « <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » au s<strong>en</strong>s socio-politique.18 L’école <strong>de</strong> la « configuration » qui se conc<strong>en</strong>tre notamm<strong>en</strong>t sur les phénomènes <strong>de</strong> transformation (ou <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>t interne) <strong>de</strong>s organisations et <strong>de</strong>s évolutions <strong>de</strong> la stratégie. Cette approche ne sera pas directem<strong>en</strong>tmobilisée dans le prés<strong>en</strong>t travail, bi<strong>en</strong> que la prise <strong>de</strong> connaissance <strong>de</strong> cette école <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée n’ait pas été sans intérêt.43


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEcomplém<strong>en</strong>taire – par exemple une certaine formule <strong>de</strong> planification avec une certaineforme <strong>de</strong> structure et un certain style <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t » (Mintzberg et al., 1999 : 310).Nous disposons à prés<strong>en</strong>t <strong>de</strong> suffisamm<strong>en</strong>t d’élém<strong>en</strong>ts conceptuels pour analyser la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE : ses quatre registres stratégiques, les échelles où elle existe (échelle organisationnelle<strong>en</strong>globante <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion avec l’échelle <strong>de</strong>s activités), et l’idée que sa construction et sondéploiem<strong>en</strong>t se passe dans la t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre l’interne et l’externe <strong>de</strong> l’organisation. Nous sommesalors prête à discuter <strong>de</strong> la manière dont nous allons observer cette stratégie. En effet, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>sconcepts, comm<strong>en</strong>t la stratégie se manifeste-t-elle dans la vie <strong>de</strong> l’organisation ? Quels élém<strong>en</strong>tsdonn<strong>en</strong>t prise à l’analyse ? Par quels signes formels ou matériels peut-on la saisir ? Quelsprocessus pouvons-nous observer pour la compr<strong>en</strong>dre ? Les réponses à ces questions ne sont pasunivoques mais dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à la fois <strong>de</strong> la problématique <strong>de</strong> recherche, <strong>de</strong> la définition <strong>de</strong> lastratégie, <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes théories <strong>du</strong> champ <strong>de</strong> la stratégie. C’estpourquoi nous allons maint<strong>en</strong>ant nous consacrer à l’explicitation <strong>de</strong>s choix théoriques.1.3.1 La stratégie <strong>de</strong> l’ONGE à travers la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces dans l’actionComm<strong>en</strong>t l’ONGE met-elle <strong>en</strong> œuvre sa stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ? Comme nousl’avons suggéré plus haut, le « comm<strong>en</strong>t » conti<strong>en</strong>t l’idée <strong>de</strong> la manière – quel type d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, avec quelle position dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et le secteur <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>la nature ? – , mais aussi <strong>de</strong> la capacité – avec quels moy<strong>en</strong>s gérés et mis au service <strong>de</strong> l’action ?Ces li<strong>en</strong>s fondam<strong>en</strong>taux <strong>en</strong>tre les ressources <strong>de</strong> l’organisation et sa stratégie correspond<strong>en</strong>t audomaine dont s’est saisi le courant théorique <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces, nous aurions donctort <strong>de</strong> ne pas t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> ses éclairages, même si pour notre problématique cette dim<strong>en</strong>sionne constitue qu’un aspect d’un <strong>en</strong>semble plus large.Les apports <strong>du</strong> modèle <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces apparaiss<strong>en</strong>t plus clairem<strong>en</strong>t lorsqu’on lesreplace dans l’évolution <strong>de</strong> la p<strong>en</strong>sée stratégique <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Au cours <strong>de</strong> ses premiersdéveloppem<strong>en</strong>ts dans les années 1960, la stratégie d’<strong>en</strong>treprise s’inspire largem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sonprédécesseur, la stratégie militaire. Les décisions stratégiques port<strong>en</strong>t sur le choix <strong>de</strong>s domainesd’activités. Pour aboutir à ces décisions, les processus d’analyse stratégique consist<strong>en</strong>t à id<strong>en</strong>tifier,évaluer et comparer ses forces et faiblesses par rapport à celles <strong>de</strong>s adversaires, à analyser lesévolutions probables <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t pour y déceler <strong>de</strong>s conditions propices ou défavorablesà l’action (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006). Les courants <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée stratégique qui <strong>en</strong> ont émergé44


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesont <strong>de</strong>s écoles normatives (Mintzberg et al., 1999 ; Laroche, 1997), qui s’intéress<strong>en</strong>t à la façondont les <strong>en</strong>treprises doiv<strong>en</strong>t développer, se maint<strong>en</strong>ir ou se retirer <strong>de</strong> « domaines d’activitésstratégiques », la stratégie relevant ainsi <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t sur un marché et par rapport à <strong>de</strong>sconcurr<strong>en</strong>ts. Les apports principaux <strong>de</strong> ces théories résid<strong>en</strong>t dans la conceptualisation <strong>de</strong>smarchés et les mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises : domination dans un segm<strong>en</strong>t stratégique,différ<strong>en</strong>ciation et création d’avantages concurr<strong>en</strong>tiels inter-segm<strong>en</strong>ts, etc. (Porter, 1986). Danscette perspective, l’analyse externe ti<strong>en</strong>t une place prépondérante et d’après Chandler (1962), c’estmême le positionnem<strong>en</strong>t sur un marché qui modèle l’organisation interne <strong>en</strong> cherchant lameilleure adéquation <strong>en</strong>tre l’interne et l’externe.Au début <strong>de</strong>s années 1990, le contexte concurr<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises se transformestructurellem<strong>en</strong>t. Marqué <strong>en</strong> particulier par la récession économique, par l’acc<strong>en</strong>tuation <strong>de</strong>l’int<strong>en</strong>sité concurr<strong>en</strong>tielle et l’accélération <strong>de</strong> tous les cycles <strong>de</strong> vie, l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>plus <strong>en</strong> plus insaisissable, <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> compréh<strong>en</strong>sion comme <strong>de</strong> prévision. Ce nouveaucontexte révèle les insuffisances <strong>de</strong> l’approche classique c<strong>en</strong>trée sur l’adaptation et lepositionnem<strong>en</strong>t (Saïas & Metais, 2001). Le champ connaît alors un changem<strong>en</strong>t profond dont« l’effet Honda » est un <strong>de</strong>s principal marqueur (Pascale, 1984). Avec sa célèbre analyse <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> Honda sur le marché américain <strong>de</strong>s motocyclettes, R. Pascale a montré que lesthéories <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t ne permett<strong>en</strong>t pas d’expliquer le succès fulgurant <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprisejaponaise. Dès lors, on s’est intéressé davantage aux travaux portant sur l’interne <strong>de</strong>s <strong>en</strong>trepriseset sur leur spécificité, comme pouvant expliquer la pertin<strong>en</strong>ce et le succès <strong>de</strong> leur stratégie versl’externe. Le modèle <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces s’est prés<strong>en</strong>té comme prét<strong>en</strong>dant sérieux à lasuccession <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce et <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t (Marsch<strong>en</strong>ay, 2002). Ce sontnotamm<strong>en</strong>t les travaux <strong>de</strong> Wernerfelt (1984, 1995) et Rumelt (1984) qui ont lancé cettedynamique <strong>en</strong> revisitant les origines <strong>de</strong> l’approche <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces (P<strong>en</strong>rose,1959). Les principes <strong>de</strong> cette théorie sont expliqués très simplem<strong>en</strong>t par P. Lorino & J-C.Taron<strong>de</strong>au (2006) :« Pour les théorici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la ressource, chaque firme dispose d’un portefeuille spécifique<strong>de</strong> ressources qui lui fourniss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s avantages dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> certainesstratégies. Si, pour les théorici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce, l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s firmes prés<strong>en</strong>tesdans une in<strong>du</strong>strie (ou dans un groupe stratégique) était considéré comme homogène carsoumis aux mêmes facteurs structurels, ceux-ci dictant les mêmes comportem<strong>en</strong>ts, lesthéorici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la ressource considèr<strong>en</strong>t les in<strong>du</strong>stries comme hétérogènes car composées<strong>de</strong> firmes possédant <strong>de</strong>s combinaisons <strong>de</strong> ressources et compét<strong>en</strong>ces spécifiques. Dansce contexte, développer une stratégie consiste, pour une firme donnée, à choisir un<strong>en</strong>semble d’actions qui exploite le mieux les spécificités <strong>de</strong> son portefeuille <strong>de</strong> ressourceset compét<strong>en</strong>ces, pour autant que ce portefeuille soit valorisé sur le marché choisi. La45


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEconcurr<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre firmes <strong>de</strong> l’in<strong>du</strong>strie s’exerce dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s ressources etcompét<strong>en</strong>ces communes ou accessibles à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s firmes. Mais chaque firme estprotégée <strong>de</strong> la concurr<strong>en</strong>ce par l’originalité <strong>de</strong> son portefeuille <strong>de</strong> ressources et par sacapacité à la préserver au cours <strong>du</strong> temps. »A partir <strong>de</strong> là, il fallait caractériser ces fameuses ressources et compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise.Beaucoup <strong>de</strong> travaux 19 se sont consacrés à définir <strong>de</strong>s principes pour catégoriser ces« ressources », « compét<strong>en</strong>ces » voire « ressources et compét<strong>en</strong>ces stratégiques ». Pour Hamel etPrahalad (1989) faisant autorité dans le domaine, les « core compet<strong>en</strong>cies » sont celles qui procur<strong>en</strong>tl’accès à un grand nombre <strong>de</strong> marchés, apport<strong>en</strong>t un bénéfice significatif au consommateur finalet doiv<strong>en</strong>t être difficiles à imiter. Lorino et Taron<strong>de</strong>au (2006) fourniss<strong>en</strong>t d’autres définitions <strong>de</strong>sressources stratégiques qui conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à quelques nuances près les mêmes idées : « l’<strong>en</strong>semble<strong>de</strong>s ressources et capacités difficiles à échanger et à imiter, rares, appropriables et spécialisées, [etdifficilem<strong>en</strong>t substituables] qui fourniss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s avantages concurr<strong>en</strong>tiels à la firme ».Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’importance désormais reconnue <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à l’analyse interne <strong>de</strong>s organisationspour compr<strong>en</strong>dre leur insertion sur le marché ou dans leur secteur, le tournant connu dans lechamp <strong>de</strong> la stratégie dans les années 1980 est fondam<strong>en</strong>tal : « la stratégie s’établit comme unobjet <strong>de</strong> recherche, <strong>en</strong> sus <strong>de</strong>s pratiques qualifiées comme stratégiques, et indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t d’unsouci normatif » porté par les approches dites <strong>du</strong> « cont<strong>en</strong>u ». « La stratégie n’est plus seulem<strong>en</strong>tconsidérée comme une pratique concrète, mais aussi comme un objet à expliquer » (Laroche,1997 : 3), ce qui va provoquer une nouvelle donne <strong>en</strong>tre les approches dites <strong>du</strong> « cont<strong>en</strong>u » etcelles <strong>du</strong> « processus », la première ne dominant désormais plus la secon<strong>de</strong>. La théorie <strong>de</strong>sressources et compét<strong>en</strong>ces se prés<strong>en</strong>te comme une approche capable <strong>de</strong> dépasser l’opposition<strong>en</strong>tre les théories <strong>du</strong> ‘cont<strong>en</strong>u’ et celles <strong>de</strong>s ‘processus’ stratégiques, réconciliation que les auteurs<strong>du</strong> domaine appell<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs vœux (Laroche 20 , 1997 ; Laroche & Nioche, 1998 ; Saïas & Metais,2001). En effet, si certains courants <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces se situ<strong>en</strong>t dans la droite ligne<strong>de</strong>s approches concurr<strong>en</strong>tielles, d’autres se sont attachés à l’exploration approfondie <strong>de</strong>sorganisations avec une approche davantage c<strong>en</strong>trée sur les « processus ».19 Le lecteur intéressé trouvera une bibliographie dans l’article <strong>de</strong> Lorino & Taron<strong>de</strong>au (2006), ou dans le chapitre <strong>de</strong>Tywoniak (1998) : Le modèle <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces : un nouveau paradigme pour le managem<strong>en</strong>t stratégique ?, dans Rep<strong>en</strong>serla stratégie, fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts et perspectives, Paris, Vuibert.20 « Même si la stratégie se veut un objet <strong>de</strong> recherche et pas seulem<strong>en</strong>t une pratique concrète, il reste que, commetoute discipline <strong>de</strong> managem<strong>en</strong>t, une part importante <strong>de</strong> sa légitimité procè<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa « mise <strong>en</strong> correspondance » avec<strong>de</strong>s pratiques concrètes, ou pour le moins, avec <strong>de</strong>s problèmes et préoccupations managériales. Or, sur ce point, lastratégie fournit un discours peu cohér<strong>en</strong>t. D’un côté elle affirme avec un succès raisonnable que la con<strong>du</strong>ite d’unestratégie doit articuler <strong>en</strong> profon<strong>de</strong>ur formulation et mise <strong>en</strong> œuvre, délibéré et émerg<strong>en</strong>t, cont<strong>en</strong>u et processus. Etd’un autre côté la discipline se révèle incapable <strong>de</strong> fournir une théorie générale intégrant ces élém<strong>en</strong>ts. »46


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleP. Lorino et J-C. Taron<strong>de</strong>au (2006) s’inscriv<strong>en</strong>t dans cette dynamique et propos<strong>en</strong>t d’abor<strong>de</strong>r lesressources à travers les processus dans lesquels elles sont utilisées. La démarche que nous avonsdéveloppée est analogue, c’est pourquoi nous pr<strong>en</strong>ons le temps <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter leur proposition, quinous permet <strong>de</strong> mobiliser la théorie <strong>de</strong>s ressources, non <strong>de</strong> façon c<strong>en</strong>trale, mais néanmoinscruciale pour alim<strong>en</strong>ter notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE.Les auteurs part<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’idée selon laquelle « les ressources ne sont pas stratégiques <strong>en</strong> ellesmêmes.Elles le <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t lorsqu’elles sont exploitées dans <strong>de</strong>s processus qui rempliss<strong>en</strong>t lesconditions nécessaires pour être qualifiés <strong>de</strong> stratégiques » (ibid. : 324). Le concept <strong>de</strong> processusaurait été défini par <strong>de</strong> nombreux auteurs et serait « un <strong>en</strong>semble d’activités organisées <strong>en</strong> réseau,<strong>de</strong> manière séqu<strong>en</strong>tielle ou parallèle, combinant et mettant <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> multiples ressources, <strong>de</strong>scapacités et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces, pour pro<strong>du</strong>ire un résultat ou output ayant <strong>de</strong> la valeur pour un cli<strong>en</strong>texterne » (ibid. : 318). Dans leur référ<strong>en</strong>tiel, le processus est stratégique quand il permet àl’organisation <strong>de</strong> se procurer <strong>de</strong>s avantages stratégiques <strong>du</strong>rables <strong>en</strong> « combin[ant] <strong>de</strong>s ressourcestangibles et codifiées ou tacites et peu transmissibles, [<strong>en</strong>] mobilis[ant] et pro<strong>du</strong>i[sant] <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces propres et <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>tissages collectifs » (ibid. : 321). Dans notre situation, le« résultat » ou la « valeur » r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à l’atteinte <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la nature quis’exprime <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux visés.Un processus qui confère un « avantage stratégique <strong>du</strong>rable » serait pour l’organisation lamobilisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces pour construire et faire évoluer l’action conjointe à la mobilisation<strong>de</strong>s ressources pour la mettre <strong>en</strong> oeuvre <strong>de</strong> façon pertin<strong>en</strong>te au regard <strong>du</strong> problème<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal et <strong>de</strong> la configuration <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visé.Selon les auteurs, la façon dont l’organisation mobilise et gère ses ressources pour atteindre sesobjectifs doit alors être observée à travers les processus, c’est-à-dire dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>sactivités. Dans notre cas, les processus mis <strong>en</strong> œuvre par les ONGE sont principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sactions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales qui s’inscriv<strong>en</strong>t dans une stratégie plus générale visant <strong>de</strong>s objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Nous analyserons <strong>en</strong> particulier trois champs d’actions mis <strong>en</strong> œuvre parnotre ONGE. On les trouvera dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse.L’id<strong>en</strong>tification et l’analyse <strong>de</strong> processus stratégiques sont prés<strong>en</strong>tées par les auteurs comme unedémarche permettant <strong>de</strong> rapprocher stratégie et résultat au regard <strong>de</strong>s objectifs stratégiques par laré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> l’ambiguïté causale <strong>en</strong>tre ressources et création <strong>de</strong> valeur (Figure 1.5).47


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGERessourceProcessusstratégiquesContributionValeurObjectifsstratégiquesFigure 1.5 : Chaîne <strong>de</strong> causalité dans l’explication <strong>de</strong>s performances stratégiques (Lorino & Taron<strong>de</strong>au,2006)Notre démarche est très proche : nous nous conc<strong>en</strong>trons sur quelques actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales(<strong>en</strong> tant que processus stratégiques) et nous prêtons att<strong>en</strong>tion à la façon dont sont mobilisées lesressources, déployées et créées les compét<strong>en</strong>ces dans ces actions, pour pro<strong>du</strong>ire un changem<strong>en</strong>tdans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (création <strong>de</strong> valeur dans notre référ<strong>en</strong>tiel). Ce li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre ressource –processus et stratégie est un li<strong>en</strong> dynamique. Les ressources <strong>de</strong> l’organisation peuv<strong>en</strong>t être audépart explicatives <strong>de</strong>s choix d’action, elles <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t stratégiques quand elles permett<strong>en</strong>td’atteindre le but <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. A travers la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>de</strong> ces actions, <strong>de</strong> nouvelles ressources et compét<strong>en</strong>ces peuv<strong>en</strong>t être acquises ou les existantesconsolidées.La stratégie <strong>de</strong> l’ONGE peut ainsi être <strong>en</strong>visagée à travers l’adéquation <strong>en</strong>tre ses ressources et sesobjectifs externes, dont la relation s’exprime notamm<strong>en</strong>t dans les processus – l’élaborationstratégique, les actions, etc. – qu’elle met <strong>en</strong> œuvre. Mais dans cette grille <strong>de</strong> lecture, les « objectifsstratégiques » rest<strong>en</strong>t peu explicités. Or, au-<strong>de</strong>là <strong>du</strong> li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre ressources internes et action, notreacception <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE 21 compr<strong>en</strong>d d’autres dim<strong>en</strong>sions stratégiques cruciales quel’organisation doit gérer <strong>en</strong>semble. Nous avons donc besoin d’éclairer cette perspectived’<strong>en</strong>semble et la formulation <strong>de</strong>s objectifs stratégiques : comm<strong>en</strong>t sont-ils définis ? Comm<strong>en</strong>t cesactions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales (processus) sont-elles articulées <strong>en</strong>tre elles et au regard <strong>de</strong> ces objectifsstratégiques ? La section suivante est consacrée à l’exposé <strong>de</strong> cette dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> cadre d’analyse,appuyée sur le courant pratique <strong>de</strong> la stratégie.21 Pour rappel, celle-ci compte quatre perspectives stratégiques détaillées plus haut : celle <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talqui fon<strong>de</strong> le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> focal, <strong>de</strong> l’action publique dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et<strong>de</strong> la dynamique externe <strong>de</strong> l’organisation dans son secteur d’activité.48


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale1.3.2 De l’élaboration stratégique à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions : l’éclairage <strong>du</strong>courant <strong>de</strong> la stratégie comme pratiqueComm<strong>en</strong>t l’ONGE peut-elle agir pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ? Plus haut, la question a été prés<strong>en</strong>téecomme double : le « comm<strong>en</strong>t » suggère la manière, mais aussi la capacité (<strong>en</strong> termes <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s).Chacune <strong>de</strong> ces dim<strong>en</strong>sions comporte ses propres questions. Juste avant, nous avons expliquécomm<strong>en</strong>t seront intégrées à l’analyse les implications <strong>de</strong> la capacité (moy<strong>en</strong>s) d’actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales au niveau interne <strong>de</strong> l’organisation. A prés<strong>en</strong>t, nous exposons la manière dontces actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales sont articulées <strong>en</strong>tre elles, <strong>en</strong> tant que processus – ou sous-unités– d’une stratégie d’<strong>en</strong>semble.Les principes fondateurs <strong>de</strong> la perspective pratique <strong>de</strong> la stratégie sembl<strong>en</strong>t pouvoir être un appuiintéressant à notre démarche. La perspective <strong>de</strong> la pratique <strong>en</strong> stratégie n’est pas une théorieunifiée, mais un courant <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée ayant émergé dans les années 2000 autour <strong>de</strong> ce que sesporteurs appell<strong>en</strong>t le faire stratégique (Figure 1.6) (Rouleau et al., 2007a). Jarzabkowski et al. (2007)considèr<strong>en</strong>t que la spécificité <strong>de</strong> la perspective <strong>de</strong> la pratique se trouve à l’intersection <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s<strong>en</strong>tre ce qui constitue la pratique (la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie), les pratiques stratégiques(divers types <strong>de</strong> ressources qui se combin<strong>en</strong>t et sont mises <strong>en</strong> action à travers les pratiques) et lespratici<strong>en</strong>s (acteurs qui influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t la constitution <strong>de</strong> la pratique).Faire stratégiquePratiqueLa stratégie <strong>en</strong> tant que flux d’activités <strong>en</strong>situation et accomplies socialem<strong>en</strong>t ayant<strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces sur les ori<strong>en</strong>tations et lasurvie <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprisePratiquesRessources cognitives,comportem<strong>en</strong>tales, procé<strong>du</strong>rales,discursives, motivationnelles etphysiques qui sont combinées,coordonnées et adaptées pourconstruire la pratiquePratici<strong>en</strong>Acteurs qui influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t la construction<strong>de</strong> la pratique à travers qui ils sont,comm<strong>en</strong>t ils agiss<strong>en</strong>t et les ressourcesqu’ils utilis<strong>en</strong>t (quoi)Figure 1.6 : Articulation <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts registres d’expression <strong>de</strong> la stratégie selon le courant pratique etdéfinition <strong>de</strong>s concepts (Seidl, Balogun et Jarzabkowski (2006 : 5) : « Cadre conceptuel <strong>de</strong> la Stratégiecomme Pratique »)Les travaux <strong>du</strong> courant pratique sont donc ceux qui cherch<strong>en</strong>t à articuler ces différ<strong>en</strong>ts registresd’expression <strong>de</strong> la stratégie. Les auteurs sub-cités <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet abor<strong>de</strong>r la stratégie dans la49


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEmise <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s échelles micro et macro. Il s’agit <strong>en</strong> effet <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir compte <strong>du</strong> fait que lesacteurs, dans leurs microsituations, n’agiss<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> manière isolée mais utilis<strong>en</strong>t les mo<strong>de</strong>sd’action ordinaires, définis au niveau social, qui se dégag<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s multiples institutions socialesauxquelles ils apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t (Whittington, 2006). Il s’agit ainsi <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à la contextualisation<strong>de</strong>s microactions (ibid.). Pour cela, il convi<strong>en</strong>t d’étudier les articulations <strong>en</strong>tre les trois dim<strong>en</strong>sions<strong>de</strong> la stratégie telle qu’elle est définie dans la perspective pratique (Figure 1.6) :1) les pratiques : la pratique stratégique comme activité sociale. « Tout comme la sci<strong>en</strong>ce peutêtre définie par les activités qui font appel à <strong>de</strong>s pratiques sci<strong>en</strong>tifiques (par exemple <strong>de</strong>smétho<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s outils, un jargon sci<strong>en</strong>tifique) (voir Latour, 1987), la stratégie peut l’être par lesactivités qui font appel à <strong>de</strong>s pratiques stratégiques spécifiques (la planification stratégique, lesévaluations annuelles, les ateliers stratégiques et les discours associés) » (Seidl et al., 2006 : 2).2) la pratique : une activité est considérée comme stratégique « si elle a un effet sur les résultatsstratégiques, les ori<strong>en</strong>tations, la survie et les avantages concurr<strong>en</strong>tiels <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise » (ibid. : 3). Lastratégie est un « flux d’activités <strong>en</strong> situation et accomplies socialem<strong>en</strong>t ayant <strong>de</strong>s résultatsinflu<strong>en</strong>ts sur l’ori<strong>en</strong>tation et/ou la survie <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise » ;3) Les pratici<strong>en</strong>s : « ce sont les acteurs, c’est-à-dire ces personnes qui utilis<strong>en</strong>t les pratiques eteffectu<strong>en</strong>t les actions ». Ils combin<strong>en</strong>t les pratiques, les coordonn<strong>en</strong>t pour agir. « Les pratici<strong>en</strong>sinflu<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t l’activité stratégique <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> qui ils sont [dans l’organisation et vis-à-vis <strong>de</strong>l’externe], comm<strong>en</strong>t ils agiss<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s ressources qu’ils utilis<strong>en</strong>t pour cela » (ibid. : 4)« Le faire stratégique est [alors] la construction <strong>de</strong> ce flux d’activités <strong>de</strong> manière à ce qu’il pro<strong>du</strong>ise<strong>de</strong>s résultats pour l’<strong>en</strong>treprise à travers les actions, les interactions et les pratiques qu’ils utilis<strong>en</strong>t »(ibid. : 4).Il <strong>en</strong> découle quelques principes relativem<strong>en</strong>t stabilisés qui rassembl<strong>en</strong>t les auteurs serev<strong>en</strong>diquant <strong>de</strong> ce courant pratique : la stratégie est dynamique et est fabriquée par ceux qui lapratiqu<strong>en</strong>t. C’est la raison pour laquelle, selon D. Golsorkhi (2006 : 12), « les recherchespermettant d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r le managem<strong>en</strong>t stratégique <strong>en</strong> tant qu’activité sociale sontincontournables si l’on veut compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les organisations fabriqu<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie,agiss<strong>en</strong>t « dans » et réagiss<strong>en</strong>t « à » leur <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ». Ensuite, si la stratégie est fabriquée parles pratici<strong>en</strong>s, elle n’est « plus uniquem<strong>en</strong>t l’affaire <strong>du</strong> top managem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> la direction ou <strong>de</strong>l’organisation comme <strong>en</strong>tité distincte <strong>de</strong>s hommes » (ibid. : 13), mais évolue égalem<strong>en</strong>t avec lesvisions et les pratiques <strong>de</strong>s managés.50


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleL’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s processus d’élaboration stratégique est loin d’être nouvelle – le développem<strong>en</strong>timportant <strong>de</strong>s théories <strong>du</strong> processus dès les années 1980 a déjà été évoqué plus haut. H.Mintzberg, B. Ahlstrand et J. Lampel (1999) qui ont fait l’exercice <strong>du</strong> « tour d’horizon » <strong>de</strong> ladiscipline stratégique, compt<strong>en</strong>t au moins six écoles <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sées c<strong>en</strong>trées sur les processusd’élaboration stratégique 22 . Chacune <strong>de</strong> ces écoles apporte <strong>de</strong>s éclairages sur les différ<strong>en</strong>ts facteursqui concour<strong>en</strong>t à l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie. L’école <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>euriale fait l’hypothèse que lastratégie provi<strong>en</strong>t d’une vision <strong>du</strong> dirigeant. L’école cognitive a t<strong>en</strong>té d’aller au fond <strong>de</strong> cette idée<strong>en</strong> cherchant à conceptualiser les schémas <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée <strong>de</strong> ces « stratèges ». D’autres courantsstratégiques se sont éloignés d’une élaboration stratégique indivi<strong>du</strong>elle c<strong>en</strong>trée sur le dirigeantpour travailler sur <strong>de</strong>s phénomènes ayant lieu <strong>de</strong> façon plus générale dans les organisations. Parexemple, selon les préceptes <strong>de</strong> l’ « appr<strong>en</strong>tissage organisationnel », les stratégies se dégag<strong>en</strong>t aufur et à mesure que les membres <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise, agissant parfois indivi<strong>du</strong>ellem<strong>en</strong>t mais le plussouv<strong>en</strong>t collectivem<strong>en</strong>t, assimil<strong>en</strong>t progressivem<strong>en</strong>t les données <strong>de</strong> la situation, <strong>en</strong> même tempsque les moy<strong>en</strong>s dont dispose leur <strong>en</strong>treprise pour les traiter. L’école <strong>du</strong> pouvoir s’intéresse auxphénomènes politiques <strong>de</strong>s organisations, qui ont lieu au niveau interne comme dans leur rapportà l’externe. Le courant « culturel » voit l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie comme un processusprofondém<strong>en</strong>t ancré dans l’histoire commune <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’organisation. La stratégie pr<strong>en</strong>dla forme <strong>de</strong> perspective pr<strong>en</strong>ant racines dans <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions collectives (pas forcém<strong>en</strong>t explicites)et apporte <strong>de</strong>s éclairages sur l’importance que peut avoir l’histoire et le poids <strong>du</strong> collectif danscertains types d’organisations (ibid.).La perspective pratique incite <strong>de</strong> son côté à rechercher l’élaboration stratégique qui gui<strong>de</strong>ra lapratique au niveau <strong>de</strong>s pratici<strong>en</strong>s : comm<strong>en</strong>t chacun <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> l’organisation p<strong>en</strong>se la stratégiepour agir – dans notre cas <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – , comm<strong>en</strong>t l’exprim<strong>en</strong>t-ils ? Mais aussiau niveau <strong>de</strong>s pratiques : quelles sont les pratiques spécifiquem<strong>en</strong>t dédiées à l’élaborationstratégique, comm<strong>en</strong>t les pratici<strong>en</strong>s combin<strong>en</strong>t ces pratiques pour construire collectivem<strong>en</strong>t lastratégie ? Les auteurs <strong>du</strong> courant pratique ne préjug<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> la prédominance d’un facteurculturel ou politique dans la fabrication <strong>de</strong> la stratégie. Ils ne désign<strong>en</strong>t pas d’emblée le dirigeantcomme stratège, et ne tranch<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>tre l’analyse interne – et l’analyse <strong>de</strong>s microphénomènes –,et l’analyse externe – le micro ne pr<strong>en</strong>ant s<strong>en</strong>s qu’<strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion avec le macro. Cette perspectivelaisse une certaine latitu<strong>de</strong> à la démarche in<strong>du</strong>ctive que nous avons adoptée, et invite à repérer <strong>en</strong>situation, dans la pratique, les déterminants <strong>de</strong>s choix opérés par l’organisation et ainsi22 Selon leur proposition <strong>de</strong> découpage, les théories « <strong>du</strong> processus » sont celles déf<strong>en</strong><strong>du</strong>es par les écoles<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>euriale, cognitive, culturelle, celle <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage, <strong>du</strong> pouvoir, et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.51


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEcompr<strong>en</strong>dre sa stratégie effective – la stratégie formalisée et affichée par l’organisation n’étantqu’une composante <strong>de</strong> cette stratégie.Notre choix d’adopter la perspective pratique ti<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t au fait que les actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales concrètes 23 sont les objets que nous <strong>de</strong>vons analyser pour avancer dans laproblématique <strong>du</strong> li<strong>en</strong> causal <strong>en</strong>tre stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et impact sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> danslequel elle intervi<strong>en</strong>t. Abor<strong>de</strong>r l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie par les actions et les pratiques permetd’analyser ce processus dynamique, sans le déconnecter <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre sous différ<strong>en</strong>tesformes d’actions. Cela permet <strong>en</strong> effet <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> ses réajustem<strong>en</strong>ts, <strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong>stratégies émerg<strong>en</strong>tes 24 (au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> Mintzberg et al., 1999), <strong>de</strong> ses évolutions dans le temps court<strong>de</strong> l’action au temps long <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> l’organisation. Cette perspective pratique ouvre ainsi unespace pour p<strong>en</strong>ser l’articulation <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>tes actions mises <strong>en</strong> œuvre par l’organisation :leur complém<strong>en</strong>tarité, leur interdép<strong>en</strong>dance, les contraintes pro<strong>du</strong>ites par leur co-exist<strong>en</strong>ce, ainsique leur cohér<strong>en</strong>ce ou non dans la stratégie effective qu’elles nourriss<strong>en</strong>t à l’échelle <strong>de</strong>l’organisation. Le choix <strong>de</strong>s objets analysés (actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et pratiques internes) ainsique les métho<strong>de</strong>s employées seront plus précisém<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tées dans le chapitre suivant. Ce seral’occasion <strong>de</strong> rediscuter la compatibilité <strong>de</strong> certains élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> notre approche avec ceux <strong>du</strong>courant pratique dont les auteurs rev<strong>en</strong>diqu<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s méthodologies particulières pour pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>main son ag<strong>en</strong>da <strong>de</strong> recherche ambitieux 25 (Johnson et al., 2003).Néanmoins, nous faisons dès à prés<strong>en</strong>t le li<strong>en</strong> avec les échelles d’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE prés<strong>en</strong>tées au début <strong>de</strong> ce chapitre : la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE se compose d’élém<strong>en</strong>tsappart<strong>en</strong>ant à quatre registres stratégiques – la construction <strong>de</strong> l’objet écologique, le mo<strong>de</strong>d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, le développem<strong>en</strong>t interne et la place dans le secteur <strong>de</strong> laconservation. Ce cadre d’analyse in<strong>du</strong>it l’explicitation <strong>du</strong> cont<strong>en</strong>u stratégique, <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>l’ONGE sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Mais la compréh<strong>en</strong>sion fine <strong>de</strong> la manière dont elle va s’ypr<strong>en</strong>dre pour pousser au changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce système implique d’explorer la façon dont elle déploieet gère ses capacités d’action. Sa stratégie doit ainsi être abordée à travers les processus à la fois23 Dans le vocabulaire <strong>de</strong> ce courant <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée, les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales serai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sous-<strong>en</strong>sembles <strong>de</strong> lapratique existant par le truchem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s pratiques.24 Les stratégies émerg<strong>en</strong>tes désign<strong>en</strong>t ce qui est réalisé sans avoir été expressém<strong>en</strong>t prévu, par opposition auxstratégies délibérées qui sont la réalisation <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions. Selon les auteurs, les <strong>de</strong>ux fonctionn<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble, ontrouve peu <strong>de</strong> stratégies <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t délibérées et aussi peu qui soi<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t émerg<strong>en</strong>tes. « Dans un cas, il n’y apas d’appr<strong>en</strong>tissage, dans l’autre, pas <strong>de</strong> contrôle. » (Mintzberg et al., 1999 : 22).25 « Lier les différ<strong>en</strong>ts niveaux organisationnels (micro, meso et macro). Connecter le processus stratégique aucont<strong>en</strong>u stratégique, les activités au résultat stratégique, le comm<strong>en</strong>t au pourquoi. Id<strong>en</strong>tifier les acteurs <strong>de</strong> l’agirstratégique et expliciter comm<strong>en</strong>t ces acteurs interagiss<strong>en</strong>t au quotidi<strong>en</strong> dans la fabrique. Appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les activitésquotidi<strong>en</strong>nes qui contribu<strong>en</strong>t à la fabrique <strong>de</strong> la stratégie dans une organisation. Comm<strong>en</strong>t contribu<strong>en</strong>t-elles auxrésultats stratégiques dans les faits ? Configurer <strong>de</strong>s architectures <strong>de</strong> recherche nous permettant d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r lesdiffér<strong>en</strong>ts niveaux d’actions et <strong>de</strong> « réalités », ainsi que leurs interactions. Construire <strong>de</strong>s théories <strong>en</strong> relation avec lapratique stratégique » (Johnson et al. 2003 cités par Seidl et al., 2006).52


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleau niveau <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions et au niveau <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources à l’échelleorganisationnelle. Les articulations <strong>en</strong>tre les échelles sont égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s lieux que l’analyse doitinvestir, notamm<strong>en</strong>t dans le but <strong>de</strong> saisir la cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les pratiques et la stratégieint<strong>en</strong>tionnelle globale.Si la perspective pratique nous conforte dans l’att<strong>en</strong>tion à porter à ces différ<strong>en</strong>tes échelles et àleur articulation, les théories <strong>de</strong> l’action, et notamm<strong>en</strong>t l’analyse stratégique que M. Crozier et E.Friedberg (1977) 26 , sont un appui plus direct dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s actions concrètes mises <strong>en</strong> œuvrepar l’ONGE et sont pour cette raison celles choisies pour l’analyse.1.3.3 L’action <strong>de</strong> l’ONGE dans l’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t :l’éclairage <strong>de</strong> l’analyse croziéri<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l’action organiséeLes travaux <strong>de</strong> M. Crozier et E. Friedberg ont marqué un tournant dans la sociologie <strong>de</strong>sorganisations et <strong>de</strong> l’action collective dans les années 1970-1980 : une organisation – formelle ounon – n’est pas seulem<strong>en</strong>t une structure qui s’imposerait totalem<strong>en</strong>t à ses membres assujettis 27 , niun construit qui fonctionnerait selon un modèle purem<strong>en</strong>t rationnel. Une organisation (ou uneaction organisée) ne peut être comprise « <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s con<strong>du</strong>ites et <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong>s acteurs quilui donn<strong>en</strong>t vie et à travers lesquelles ses contraintes structurelles sont actualisées » (Friedberg,1997[1993] : 28). « L'organisation <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t les interactions et les processus sociaux d'échanges<strong>en</strong>tre ses membres » (ibid.). Ce regard porté à l’organisation (ou au système) intro<strong>du</strong>it unindivi<strong>du</strong>alisme méthodologique où les acteurs et leurs interactions <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les objets c<strong>en</strong>traux.L’analyse stratégique <strong>de</strong> l’action organisée est fondée sur au moins quatre principes (Amblard etal., 2005[1996]) qui particip<strong>en</strong>t tous <strong>du</strong> tournant normatif, théorique et méthodologique dont lathéorie croziéri<strong>en</strong>ne a été porteuse.1. Une organisation ne fonctionne jamais exactem<strong>en</strong>t comme le prévoit le modèle rationnel carses acteurs n’agiss<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> manière totalem<strong>en</strong>t prévisible dans la mesure où ils « gard<strong>en</strong>ttoujours un minimum <strong>de</strong> liberté » (mais jamais une <strong>en</strong>tière liberté). Cette marge d’action (ou zoned’autonomie), l’acteur l’obti<strong>en</strong>t par la maîtrise d’une zone d’incertitu<strong>de</strong> face à laquelle se trouv<strong>en</strong>tles personnes avec qui il est <strong>en</strong> relation. Il exploite cette zone d’incertitu<strong>de</strong>, « s’adapte et inv<strong>en</strong>te26 Les travaux <strong>de</strong> sociologie <strong>de</strong>s organisations <strong>de</strong> M. Crozier et E. Friedberg sont d’ailleurs <strong>de</strong>s référ<strong>en</strong>cesimportantes dans la littérature <strong>du</strong> courant pratique <strong>de</strong> la stratégie (Golsorkhi, 2006), bi<strong>en</strong> que certains auteurs seréfèr<strong>en</strong>t davantage à un « continuum ag<strong>en</strong>t-habitus-structure » issu <strong>de</strong> la sociologie bourdieusi<strong>en</strong>ne qu’à la figure <strong>de</strong>l’acteur stratégique (Rouleau et al., 2007b : 200).27 « Quel que soit le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> contrainte qu'un système fait peser sur ses membres, ceux-ci le transform<strong>en</strong>tconstamm<strong>en</strong>t par leur con<strong>du</strong>ite, même si ces <strong>de</strong>rnières pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t appui sur <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts structurels <strong>de</strong> ce système et,ce faisant, <strong>en</strong> repro<strong>du</strong>isant certaines caractéristiques et certaines dim<strong>en</strong>sions » (Friedberg, 1997[1993] : 28).53


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE<strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s circonstances et <strong>de</strong>s mouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> ses part<strong>en</strong>aires » (Crozier & Friedberg,1977 : 45) selon ses intérêts propres.2. Le comportem<strong>en</strong>t et les choix <strong>de</strong> l’acteur sont toujours rationnels, mais sa rationalité esttoujours limitée. Ici les auteurs s’appui<strong>en</strong>t sur les célèbres travaux <strong>de</strong> J.G. March et H.A. Simon(1965[1958]) qui ont démontré que l’homme n’est pas capable d’optimiser ses solutions(contrairem<strong>en</strong>t à cette hypothèse forte qui sous-t<strong>en</strong>d l’économie néo-classique). Sa prise <strong>de</strong>décision se fait sur le mo<strong>de</strong> séqu<strong>en</strong>tiel, et non synoptique : pour chaque problème à résoudre,l’acteur adopte une <strong>de</strong>s premières solutions ou opportunités qu’il aura perçues et qui répondra àun seuil minimal <strong>de</strong> satisfaction. Ainsi, la solution ret<strong>en</strong>ue n’est ni la meilleure dans l’absolue nimême à l’intérieur <strong>de</strong> ses propres critères <strong>de</strong> satisfaction ; c’est « seulem<strong>en</strong>t » une solution« satisfaisante » parmi toutes celles examinées (Friedberg, 1997[1993] : 55). Elargissant etcomplétant la notion simoni<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> rationalité limitée, Crozier et Friedberg point<strong>en</strong>t le caractèreess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t conting<strong>en</strong>t et opportuniste, c'est-à-dire pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t instable et changeant <strong>du</strong>comportem<strong>en</strong>t humain : « étant toujours le pro<strong>du</strong>it d'un effet <strong>de</strong> position et <strong>de</strong> disposition 28(Boudon 1986), celui-ci ne peut-être p<strong>en</strong>sé <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s contraintes et opportunités que fournitaux indivi<strong>du</strong>s leur contexte d'action » (ibid. : 62). Depuis ces <strong>de</strong>ux postulats – celui <strong>de</strong> la zoned’autonomie et celui <strong>de</strong> la rationalité limitée <strong>de</strong> l’acteur – M. Crozier et E. Friedberg (1977 : 55)ouvrai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1977 une perspective <strong>de</strong> recherche nouvelle selon laquelle pour compr<strong>en</strong>drel’organisation ou les systèmes d’action organisée, il fallait « découvrir les conditions matérielles,structurelles, humaines <strong>du</strong> contexte qui limit<strong>en</strong>t et définiss<strong>en</strong>t cette liberté et rationalité, etpartant, le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s comportem<strong>en</strong>ts empiriquem<strong>en</strong>t observables » (ibid. : 55). Cette perspective <strong>de</strong>recherche s’organise autour <strong>du</strong> concept <strong>de</strong> stratégie (mis <strong>en</strong> œuvre par les acteurs). Ce conceptémane d’observations empiriques : les acteurs ont <strong>de</strong>s objectifs « multiples, plus ou moinsambigus, plus ou moins explicites, plus ou moins contradictoires ». Leurs objectifs évolu<strong>en</strong>t dansl’action. Les acteurs sont néanmoins « actifs », et leur comportem<strong>en</strong>t est toujours rationnel, <strong>en</strong>dépit <strong>de</strong> la possibilité <strong>de</strong> l’associer à <strong>de</strong>s objectifs clairs : il est rationnel par rapport à <strong>de</strong>sopportunités et par rapport au comportem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s autres acteurs et au jeu qui s’établit <strong>en</strong>tre eux.La stratégie <strong>de</strong> l’acteur « est le fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t inféré ex-post <strong>de</strong>s régularités <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>tsobservées empiriquem<strong>en</strong>t » (ibid. : 57) et vise à améliorer sa situation, à maint<strong>en</strong>ir et élargir samarge <strong>de</strong> liberté, <strong>de</strong> sa capacité à agir (ibid : 56). Ce concept <strong>de</strong> stratégie <strong>en</strong>gage le chercheur àabor<strong>de</strong>r le contexte d’action à travers la perception même qu’<strong>en</strong> ont les acteurs qui le compos<strong>en</strong>t.28 « La décision est le pro<strong>du</strong>it conjoint <strong>de</strong> ce que Boudon (1986) a appelé un effet <strong>de</strong> position (elle dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> laposition d'un déci<strong>de</strong>ur ou d’un acteurdans un contexte d'action donné et qui conditionne son accès aux informationspertin<strong>en</strong>tes) et d'un effet <strong>de</strong> disposition (elle dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s dispositions m<strong>en</strong>tales, cognitives, affectives <strong>de</strong> ce mêmedéci<strong>de</strong>ur qui sont toujours, <strong>en</strong> partie, préformées par une socialisation passée). » (Friedberg, 1997[1993] : 56)54


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleC’est un outil heuristique pour découvrir les processus qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t et constitu<strong>en</strong>t le systèmed’action organisé.3. Les relations <strong>en</strong>tre acteurs sont appréh<strong>en</strong>dées <strong>en</strong> termes d’interdép<strong>en</strong>dance et <strong>de</strong> pouvoir.Dans un système d’action organisée, ou plus largem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> société, chaque acteur a besoin <strong>de</strong>l’interv<strong>en</strong>tion d’autrui dans la poursuite <strong>de</strong> ses propres intérêts. Le « pouvoir », indissociable <strong>de</strong>l’interdép<strong>en</strong>dance, est « la capacité d’une personne A d’obt<strong>en</strong>ir qu’une personne B fasse quelquechose qu’elle n’aurait pas fait sans l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> A ». M. Crozier et E. Friedberg (1977 : 65)s’appui<strong>en</strong>t sur cette définition <strong>de</strong> R. Dahl (1957) qui instaure le caractère relationnel <strong>du</strong> pouvoir(le pouvoir n’existe pas <strong>en</strong> soi mais toujours dans la relation) sans préjuger ni <strong>de</strong> l’ess<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cepouvoir, ni <strong>du</strong> caractère conflictuel ou coopératif <strong>de</strong> cette relation. Ce pouvoir est le médiumd’échange <strong>de</strong> ces relations négociées <strong>en</strong>tre acteurs d’un système. Le comportem<strong>en</strong>t stratégique <strong>de</strong>l’acteur consiste à utiliser au mieux son pouvoir au regard <strong>de</strong> ses intérêts. Pour cela, sa marge <strong>de</strong>liberté lui permet <strong>de</strong> négocier sa participation <strong>en</strong> contraignant les autres membres <strong>de</strong>l’organisation à satisfaire ses exig<strong>en</strong>ces (stratégie off<strong>en</strong>sive). Elle lui permet égalem<strong>en</strong>t d’échapperà la contrainte d’autrui par la protection <strong>de</strong> cette marge <strong>de</strong> liberté (stratégie déf<strong>en</strong>sive). Dans cetteperspective, l’analyse doit s’attacher à déterminer « quelles sont les ressources qu’un acteur peuteffectivem<strong>en</strong>t mobiliser dans une relation <strong>de</strong> pouvoir et quel est leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> pertin<strong>en</strong>ce » (ibid. :77).4. L’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> ces relations et interactions <strong>en</strong>tre acteurs constitu<strong>en</strong>t l’organisation ou lesystème d’action organisée. Les stratégies <strong>de</strong>s acteurs comme le système d’action organisé qui <strong>en</strong>résulte sont donc conting<strong>en</strong>ts. Ces stratégies apport<strong>en</strong>t peu à la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s systèmesd’action organisée si elles sont <strong>en</strong>visagées indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t les unes <strong>de</strong>s autres, la démarche <strong>de</strong>recherche doit au contraire s’appliquer à déterminer comm<strong>en</strong>t les stratégies <strong>de</strong>s acteurs et leursarticulations con<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t au mainti<strong>en</strong> <strong>du</strong> système d’action et à sa modification constante. Lesauteurs pass<strong>en</strong>t par la notion <strong>de</strong> jeu, avec ses règles et les modifications <strong>de</strong> ses règles par lesparticipants. Ils définiss<strong>en</strong>t le jeu comme le « mécanisme concret grâce auquel les hommesstructur<strong>en</strong>t leurs relations <strong>de</strong> pouvoir et les régularis<strong>en</strong>t tout <strong>en</strong> leur faisant – <strong>en</strong> se laissant – leurliberté. » (ibid.: 113).La stratégie croziéri<strong>en</strong>ne ne revêt pas la même signification que celle que nous avons développéejusqu’ici. Une discussion sur le terme est un moy<strong>en</strong> d’expliciter la manière dont nous mobilisonsla sociologie <strong>de</strong> l’action collective <strong>de</strong> Crozier et Friedberg pour notre travail sur les ONGE etl’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.55


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGENous avons donné à la stratégie <strong>de</strong>s contours bi<strong>en</strong> plus larges que celle <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux sociologues.« LA » stratégie <strong>de</strong> l’ONGE est sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>e par la mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> quatre registresstratégiques 29 . Elle est portée, développée et modifiée par l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong>l’organisation. La stratégie croziéri<strong>en</strong>ne est celle <strong>de</strong> l’acteur (et non <strong>de</strong> l’organisation avecl’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> ses acteurs) pour lequel il s’agit non pas d’élaborer un plan d’action pour atteindreun objectif prédéterminé et qui constitue la finalité <strong>de</strong> cette action, mais « <strong>de</strong> déterminer sonmeilleur choix <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s réactions possibles <strong>de</strong> l’adversaire » (Gazier & Lallem<strong>en</strong>t, 1998 :167). Précisons la façon dont nous <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dons opérer cette articulation <strong>en</strong>tre « LA » stratégie <strong>de</strong>l’ONGE et la stratégie croziéri<strong>en</strong>ne.Il y a <strong>en</strong> effet un <strong>de</strong>uxième point <strong>de</strong> discussion relatif à l’int<strong>en</strong>tionnalité <strong>de</strong> la stratégie. Lastratégie croziéri<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l’acteur vise à améliorer sa situation, à maint<strong>en</strong>ir et élargir sa marge <strong>de</strong>liberté. L’acteur aurait donc une int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa position dans le système maisnon une int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> système lui-même (qui pourrait être indép<strong>en</strong>dant <strong>de</strong> sapropre situation). Cette perspective ne convi<strong>en</strong>t pas vraim<strong>en</strong>t pour la problématique qui nousoccupe, puisque notre <strong>en</strong>jeu est justem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les acteurs ayant uneambition <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> système <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t vont s’y pr<strong>en</strong>dre. Dans lamesure où l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> système est forcém<strong>en</strong>t internalisée par l’acteur porteur<strong>de</strong> cette ambition, et d’ailleurs, les auteurs ne préjug<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong> l’acteur (sice sont ses intérêts particuliers ou si celui-ci est mû par la poursuite <strong>du</strong> bi<strong>en</strong> commun), onresterait alors dans le domaine <strong>de</strong> la stratégie croziéri<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l’acteur. Mais c’est un flou que l’onne peut s’autoriser. L’int<strong>en</strong>tionnalité <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est un principefondam<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> notre cadre d’analyse. Ce sont ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t les stratégies <strong>de</strong>s acteurs ayantcette int<strong>en</strong>tion qui nous intéress<strong>en</strong>t. C’est la raison pour laquelle l’analyse stratégique croziéri<strong>en</strong>n<strong>en</strong>’est pas mobilisée ici pour l’analyse interne <strong>de</strong> l’ONGE. Si nous portons une att<strong>en</strong>tion s<strong>en</strong>sible àla façon dont les membres <strong>de</strong> l’ONGE élabor<strong>en</strong>t et font vivre « LA » stratégie pour l’atteinte <strong>de</strong>la mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous ne voulons pas ouvrir l’observation empirique aux stratégiesindivi<strong>du</strong>elles (croziéri<strong>en</strong>ne) <strong>de</strong> ces acteurs, <strong>de</strong>stinées à l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> <strong>de</strong> leurs marges <strong>de</strong> libertérespectives dans cet <strong>en</strong>semble qui forme l’organisation. Notre question n’est pas <strong>de</strong> savoircomm<strong>en</strong>t fonctionne l’ONGE <strong>en</strong> soi (ou par rapport au fonctionnem<strong>en</strong>t théorique att<strong>en</strong><strong>du</strong>) <strong>en</strong><strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la façon dont ce fonctionnem<strong>en</strong>t permet le portage et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégieet <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. C’est <strong>en</strong> revanche dans l’analyse <strong>de</strong> ces actions29 Pour rappel : l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, le développem<strong>en</strong>t interne et ladynamique externe <strong>de</strong> l’organisation.56


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales concrètes que l’analyse stratégique croziéri<strong>en</strong>ne nous est indisp<strong>en</strong>sable. A cetégard, nous profitons <strong>de</strong> l’évolution même <strong>de</strong> la théorie. Le lecteur familier avec l’analysestratégique <strong>de</strong> Crozier et Friedberg sait <strong>en</strong> effet que c’est une théorie <strong>de</strong> l’organisation qui s’estélargie à l’action organisée (organisation formelle ou informelle) 30 par sa force et les perspectivesqu’elle a elle-même ouvertes. Des travaux <strong>de</strong> recherche s’inscrivant dans <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong><strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ont déjà mobilisé cette approche stratégique <strong>de</strong>s systèmes d’actionorganisés, pour analyser d’une part, <strong>de</strong>s dispositifs internationaux <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Leroy, 2004), et d’autre part, <strong>de</strong>s dynamiques territoriales <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> forestière(Taravella, 2007). Dans la suite <strong>du</strong> texte, nous pr<strong>en</strong>drons gar<strong>de</strong> à minimiser la confusion <strong>en</strong>signalant lorsque le terme <strong>de</strong> stratégie est utilisé dans un s<strong>en</strong>s croziéri<strong>en</strong> r<strong>en</strong>voyant aux rapportsd’interdép<strong>en</strong>dance et <strong>de</strong> pouvoir qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les relations négociées <strong>de</strong>s acteurs. Et nousnous autoriserons à ne l’utiliser qu’<strong>en</strong> considération <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’acteur sur le systèmecomme fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette stratégie <strong>de</strong> l’acteur. Ce système est pour nous le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong><strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal 31 , constitué <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s acteurs ayant directem<strong>en</strong>t ou indirectem<strong>en</strong>t uneinflu<strong>en</strong>ce sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé. Cette notion <strong>de</strong> jeu – qui permet d’établir les li<strong>en</strong>s<strong>en</strong>tre les stratégies indivi<strong>du</strong>elles <strong>de</strong>s acteurs appart<strong>en</strong>ant au système – amène à découvrir lestermes <strong>de</strong> leur interdép<strong>en</strong>dance. En le replaçant dans le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t,on se pose la question suivante : sur quel acteur <strong>du</strong> système et comm<strong>en</strong>t l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tpeut-il et doit-il exercer son pouvoir pour pousser le premier à faire ce qu’il estime pertin<strong>en</strong>t pourune <strong>gestion</strong> favorable <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ?Bi<strong>en</strong> que notre travail s’inscrive dans la même perspective que celle <strong>de</strong> M. Leroy (2004) et R.Taravella (2007) cités plus haut, notre mobilisation <strong>de</strong> l’analyse organisationnelle croziéri<strong>en</strong>ne estdiffér<strong>en</strong>te. De leur côté, elle est utilisée pour démêler les fils <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong>s systèmes<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> étudiés, et dans la dialectique <strong>gestion</strong> effective / <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle. Dans notre cas,c’est pour analyser la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle que nous allons nous <strong>en</strong> saisir. En effet, notreproblématique c<strong>en</strong>trée sur l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’ONGE dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> nouspousse à porter une att<strong>en</strong>tion particulière à la construction souv<strong>en</strong>t collective <strong>de</strong> ces actions. LesONGE agiss<strong>en</strong>t rarem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> manière isolée : dans le jeu auquel elles particip<strong>en</strong>t, elles cherch<strong>en</strong>t àassocier d’autres acteurs pour r<strong>en</strong>forcer leurs capacités et l’impact <strong>de</strong> ces actions. L’actioncollective n’est cep<strong>en</strong>dant pas appréh<strong>en</strong>dée comme un travail d’équipe naturel dont chaqueparticipant poursuit exactem<strong>en</strong>t le même but. « L'action collective ou organisée n'est pas un30 Les fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts théoriques <strong>de</strong> l’approche ont été précisés par E. Friedberg dans les <strong>de</strong>ux premières parties <strong>du</strong>Pouvoir et la règle (1997[1993]).31 Le « système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal » est expliqué dans la partie 1.1 <strong>de</strong> ce chapitre.57


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEexercice gratuit. C'est toujours une coalition d'hommes contre la nature, face à <strong>de</strong>s problèmesmatériels pour la solution <strong>de</strong>squels ils sont obligés (ou ont décidé) <strong>de</strong> coopérer » (Friedberg,1997[1993] : 259), et ces relations rest<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s échanges négociés dans <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> pouvoir :« Les rapports <strong>de</strong>s acteurs (indivi<strong>du</strong>els et collectifs) <strong>en</strong>tre eux et aux problèmes qui lesconcern<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble, s'inscriv<strong>en</strong>t donc dans un champ inégalitaire, structuré par <strong>de</strong>srelations <strong>de</strong> pouvoir et <strong>de</strong> dép<strong>en</strong>dance. En effet, les acteurs sont fondam<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>tinégaux <strong>de</strong>vant les incertitu<strong>de</strong>s pertin<strong>en</strong>tes qui conditionn<strong>en</strong>t la solution d'un problème.Et domineront ceux <strong>de</strong>s acteurs qui, pour <strong>de</strong>s raisons à analyser dans chaque cas, ont étécapables à la fois d'imposer une certaine définition <strong>de</strong>s problèmes à résoudre (et donc<strong>de</strong>s incertitu<strong>de</strong>s pertin<strong>en</strong>tes) et d'affirmer leur maîtrise au moins partielle sur cesincertitu<strong>de</strong>s. » (ibid. : 260)Sur le terrain <strong>de</strong> la forêt amazoni<strong>en</strong>ne étudié, R. Taravella (2007 : 423) a montré que la <strong>gestion</strong>int<strong>en</strong>tionnelle était portée à travers une « action coalisée » qui était le fruit d’un rapprochem<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s acteurs poursuivant <strong>de</strong>s objectifs différ<strong>en</strong>ts (certains plus <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, certainsplus sociaux), mais trouvant un intérêt à se rassembler avec un assez fort <strong>de</strong>gré d’organisation.Nous n’adoptons pas le concept d’action coalisée <strong>de</strong> l’auteur, car dans notre cas, il s’agit d’étudierce que nous avons appelé l’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, qui est un <strong>en</strong>semble d’acteurpoursuivant un même objectif normatif (bi<strong>en</strong> que ses termes plus précis soi<strong>en</strong>t à négocier), etavec un <strong>de</strong>gré d’organisation pouvant être très faible (le niveau d’organisation étant un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeuxà étudier). Il s’agira alors d’étudier les relations à l’intérieur <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>semble et les phénomènesorganisationnels qui le sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t. A travers l’étu<strong>de</strong> empirique d’actions concrètes, nousavancerons ainsi sur les dim<strong>en</strong>sions interdép<strong>en</strong>dantes <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE que sont lesmo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et les coalitions, le positionnem<strong>en</strong>t dans le secteur <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Cette perspective <strong>de</strong> recherche ouverte par l’analyse stratégique croziéri<strong>en</strong>ne a <strong>de</strong>s implicationsméthodologiques que les auteurs ont veillé à expliciter. L’exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> qui se situe dansle chapitre suivant sera l’occasion <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ir sur la manière dont est mobilisée cette approchepour nourrir notre analyse <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.58


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale1.4 Relier stratégie et impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale :implications pour l’ONGE et pour l’analyseEn posant la question <strong>de</strong> « qui peut agir pour améliorer l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et comm<strong>en</strong>t »,l’objectif implicite est <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire les ambiguïtés causales <strong>en</strong>tre les actions et les impacts sur l’étatécologique <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t à l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> cadre d’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale quipermet d’organiser le problème comme nous l’avons expliqué au début <strong>de</strong> ce chapitre. Sousl’angle choisi pour traiter la question, le « qui » est une ONGE, et le « comm<strong>en</strong>t » <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t la façon(les mo<strong>de</strong>s d’action) dont cette ONGE s’y pr<strong>en</strong>d pour atteindre (ses impacts) les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qu’elle se serait fixés.A cet angle <strong>de</strong> la question se r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t la problématique sci<strong>en</strong>tifique traitant <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et la problématique pratique vécue par l’ONGE qui exprime le besoin<strong>de</strong> faire le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre les objectifs qu’elle se donne, les mo<strong>de</strong>s d’action qu’elle élabore et met <strong>en</strong>œuvre et leurs impacts au regard <strong>de</strong> leur mission. Comme l’indique J-M. Plane (2003 : 203), dansles recherches-interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> <strong>gestion</strong>, il doit exister une certaine converg<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre « les intérêtsthéoriques <strong>de</strong>s chercheurs et les préoccupations légitimem<strong>en</strong>t opérationnelles <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises ».Comme nous l’expliquerons <strong>en</strong> détail dans le chapitre 2, nous avons choisi <strong>de</strong> nous focaliser surune ONGE pour laquelle cette préoccupation est tangible. L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> relier les stratégies d’actionà ses impacts sur les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ne constitue donc pas une hypothèse, mais un postulat<strong>de</strong> départ pour l’analyse <strong>de</strong> l’ONGE. Le souhait <strong>de</strong> connaître le niveau d’atteinte <strong>de</strong> ses objectifsdépasse le domaine <strong>du</strong> seul désir et <strong>du</strong> s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’action vécus par les membres investis dansl’ONGE : ses implications sont d’ordre stratégique et organisationnelle et se déclin<strong>en</strong>t selon aumoins <strong>de</strong>ux registres importants <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> l’organisation.1. En premier lieu cela relève <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’action selon la logiqueprocé<strong>du</strong>rale liée à la rationalité limitée <strong>de</strong> l’acteur déjà évoquée plus haut (March & Simon,1965[1958]). C’est l’idée que l’acteur procè<strong>de</strong> par essai-erreur et imagine <strong>de</strong>s solutions les unesaprès les autres. Transposé à la stratégie <strong>de</strong> l’organisation, cela r<strong>en</strong>voie à ce que nous <strong>en</strong>seigne lalittérature <strong>en</strong> stratégie selon laquelle l’organisation fait le bilan <strong>de</strong> son activité pour évoluer,r<strong>en</strong>forcer ou réviser cette stratégie 32 . Il s’agit d’un processus interne qui peut être difficilem<strong>en</strong>tdistinguable <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions elles-mêmes. Il peut avoir lieu au niveau indivi<strong>du</strong>el(dirigeant et membres opérationnels) comme au niveau collectif. Il peut égalem<strong>en</strong>t être implicitecomme rythmé par <strong>de</strong>s processus plus formels. Cette pratique <strong>de</strong> la réflexivité <strong>de</strong> l’action par les32 Certaines écoles <strong>en</strong> particulier se sont conc<strong>en</strong>trées sur ces questions comme celle <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage.59


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEmembres <strong>de</strong> l’organisation eux-mêmes r<strong>en</strong>voie à l’élaboration et à la pratique <strong>de</strong> la stratégie qu<strong>en</strong>ous avons prés<strong>en</strong>tées plus haut comme partie <strong>de</strong> notre cadre d’analyse. Il s’agira ainsi <strong>de</strong> porterune att<strong>en</strong>tion particulière à la façon dont est convoquée et gérée l’évaluation <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong>l’action – ou la difficulté d’évaluer ces résultats – dans la pratique stratégique <strong>de</strong> l’ONGE.2. Par ailleurs, la nécessité d’exprimer les résultats <strong>de</strong> l’action relève d’un phénomène commun àtoutes les organisations qui doiv<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes (accountability) sur la mission fondant leurexist<strong>en</strong>ce. Ce phénomène est d’autant plus visible dans un contexte <strong>de</strong> montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong> la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Avec ce r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> lalégitimité sociale et politique <strong>du</strong> traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux (Salles, 2006) et uncontexte <strong>de</strong> généralisation <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats public-privés dans <strong>de</strong>s domaines relevant <strong>de</strong> l’actionpublique (Duran, 1999), les ONGE bénéfici<strong>en</strong>t d’un espace d’action plus large. Ce contexte ajoué <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> leur développem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> leur professionnalisation. Le corollaire <strong>de</strong> cetteprofessionnalisation est l’affirmation <strong>de</strong> l’accountability évoquée : l’ONGE doit montrer qu’ellerépond à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale par l’action elle-même, mais aussi par <strong>de</strong>s bilans <strong>de</strong> ses résultatsdressés auprès <strong>de</strong> ses mandants (membres <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance, adhér<strong>en</strong>ts, bailleursinstitutionnels, mécènes, donneurs particuliers). En retour, c’est un <strong>de</strong>s mécanismes qui procure àl’ONGE la légitimité 33 et la notoriété 34 indisp<strong>en</strong>sables à sa pér<strong>en</strong>nité et à son développem<strong>en</strong>t(Guillet & Leroy, 2010). Ce phénomène est institutionnalisé sous forme <strong>de</strong> pratiques ouprocé<strong>du</strong>res formelles qui permett<strong>en</strong>t aux mandants d’exercer un certain contrôle sur lefonctionnem<strong>en</strong>t et l’évolution <strong>de</strong> l’organisation, notamm<strong>en</strong>t explorés par les théories <strong>de</strong> lagouvernance <strong>de</strong>s organisations <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Charreaux, 1997 ; Trébucq, 2005 ;Martinet, 2008 ; Courpasson & Golsorkhi, 2009), un champ d’étu<strong>de</strong> qui s’intéresse <strong>de</strong> plus <strong>en</strong>plus aux ONG (Busson-Villa, 1999 ; Valéau, 2003 ; Colloque CNAM, 2009).Dans les <strong>en</strong>treprises commerciales, la lecture <strong>de</strong>s résultats peut être assez simple : le critèregénéral est le niveau <strong>de</strong> création <strong>de</strong> valeur économique, basé sur les comptes <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise. Cesbilans peuv<strong>en</strong>t être accompagnés d’évaluations, servant <strong>en</strong>tre autres à expliquer les résultatsobt<strong>en</strong>us. Les ONGE, au contraire, ne dispos<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> critère simple et universel permettant <strong>de</strong>33 La légitimité est une ressource qui permet à l’organisation <strong>de</strong> capter d’autres ressources et d’augm<strong>en</strong>ter ainsi sescapacités d’action. Cette question sera traitée <strong>en</strong> plusieurs étapes dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la thèse. la légitimitér<strong>en</strong>voie à « une hypothèse ou perception générale que les actions d'une <strong>en</strong>tité sont désirables, adaptées, ouappropriées dans un système socialem<strong>en</strong>t construit <strong>de</strong> normes, valeurs, croyances et définitions » (« a g<strong>en</strong>eralizedperception or assumption that the actions of an <strong>en</strong>tity are <strong>de</strong>sirable, proper, or appropriate within some socially constructed system ofnorms, values, beliefs, and <strong>de</strong>finitions ») (Suchman, 1995 cité par Bréchet et al., 2008).34 En effet, dans un contexte <strong>de</strong> compétition accrue, les ONGE sont poussées à préciser leurs spécificités et leurplus-value pour l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s d’action (Archambault, 2006). Leur notoriété est à ce titre une ressourcer<strong>en</strong>forçant capacité et opportunité d’action.60


Chapitre 1 – Le cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taletra<strong>du</strong>ire les résultats <strong>de</strong> leur activité et leur impact sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé. En effet, lanature <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux complexes et souv<strong>en</strong>t multifactoriels d’une part, et lanature souv<strong>en</strong>t indirecte par rapport à l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvrepar les ONGE d’autre part r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t l’exercice délicat. Il leur revi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong>mise <strong>en</strong> lisibilité et visibilité accessibles à leurs mandants, afin <strong>de</strong> favoriser leur légitimation et parsuite leur capacité d’action. Différ<strong>en</strong>tes pratiques peuv<strong>en</strong>t être associées à cette mise <strong>en</strong> visibilité,<strong>de</strong>s plus informelles (comme une visite, un exposé <strong>de</strong>s actions) aux plus formelles (comme lesévaluations). En somme, att<strong>en</strong>tive à toutes les dim<strong>en</strong>sions stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE, y compriscelle <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> ses capacités d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous prêtons unecertaine att<strong>en</strong>tion au processus <strong>de</strong> légitimation <strong>de</strong> l’organisation. Plus précisém<strong>en</strong>t, nous voulonsdéterminer le statut <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans cesprocessus <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités d’action <strong>de</strong> l’ONGE : comm<strong>en</strong>t l’ONGE met <strong>en</strong> forme sesrésultats ? Comm<strong>en</strong>t elle les mobilise ? Dans quelle mesure et par quel mécanisme une plusgran<strong>de</strong> aptitu<strong>de</strong> à évaluer et mettre <strong>en</strong> forme son impact lui serait favorable ?Etant donné la difficulté méthodologique évoquée concernant l’évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action<strong>de</strong>s ONGE, le lecteur aurait pu s’att<strong>en</strong>dre à ce que l’on conc<strong>en</strong>tre notre travail sur les techniquesd’évaluation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ou d’évaluation <strong>de</strong>s organisations <strong>en</strong> s’appuyant sur le champdisciplinaire consacré à l’évaluation dont la pro<strong>du</strong>ction pléthorique manie les articulations <strong>en</strong>trethéorie et pratique (Alkin, 2004a). L’explication <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> cette posture nous permettra <strong>de</strong>clore la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> notre cadre d’analyse pour traiter notre problématique <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE et <strong>de</strong> son r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t pour augm<strong>en</strong>ter l’impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre.Si l’impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’ONGE est ainsi bi<strong>en</strong> au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> notreproblématique, nous ne préjugeons pas que l’évaluation (<strong>en</strong> tant que processus formel) est unfacteur d’amélioration <strong>de</strong>s impacts <strong>en</strong> soi. Nous proposons une démarche in<strong>du</strong>ctive dont le point<strong>de</strong> départ se situerait <strong>en</strong> amont <strong>en</strong> interrogeant le statut <strong>de</strong> l’évaluation et la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>simpacts dans l’élaboration stratégique et le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation : <strong>en</strong> quoi etcomm<strong>en</strong>t (sous quelle forme) l’évaluation <strong>de</strong>s impacts contribue-t-elle à r<strong>en</strong>forcer l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ? Deux pistes ont été relevées et seront explorées : 1) l’évaluation <strong>de</strong>s impactsfavoriserait le bon déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s processus d’élaboration et <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre stratégique, dansl’hypothèse que la prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>s résultats est une base d’amélioration selon la logiqueprocé<strong>du</strong>rale <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’action. 2) L’évaluation et la mise <strong>en</strong> forme <strong>de</strong>s impactspermettrai<strong>en</strong>t indirectem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> favorisant l’augm<strong>en</strong>tation<strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> l’ONGE. Si l’on revi<strong>en</strong>t maint<strong>en</strong>ant à la remarque d’un membre <strong>de</strong> l’ONGE CI61


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEcitée <strong>en</strong> intro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> cette thèse : « Si vous ne savez pas quel impact a votre action, ne la faites pas »,nous nous r<strong>en</strong>dons compte qu’elle suggère d’analyser l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>en</strong> tant queprocessus. Et l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> cette analyse est <strong>de</strong> saisir l’articulation <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts à lastratégie pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Nous aurions pu compr<strong>en</strong>dre le propos <strong>du</strong> membre <strong>de</strong>CI comme une mise <strong>en</strong> gar<strong>de</strong>, indiquant que tout impact ne pouvant être calculé serait nul et nonav<strong>en</strong>u, et qu’il vaudrait mieux ne ri<strong>en</strong> faire dans ce cas. Au contraire, il semble qu’on peut y voirune invitation à réfléchir sur le statut <strong>de</strong> ce « savoir ». « Savoir quel impact écologique provoquel’action » : que l’organisation doit-elle savoir sur ses impacts ? En quoi consiste ce savoir ?Comm<strong>en</strong>t peut-on le construire ? Quand l’organisation peut-elle estimer savoir quelque chose <strong>de</strong>ses impacts ? Que cela change-t-il dans la construction et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie ? C’est àcet <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> questions qu’il nous faudra répondre.Dans cette perspective, l’évaluation <strong>en</strong> tant que processus formel <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t une pratique parmid’autres pratiques assimilables à la réflexivité <strong>de</strong> l’action. C’est seulem<strong>en</strong>t dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’évaluation <strong>en</strong> tant que pratique que le champ disciplinaire <strong>de</strong> l’évaluation – abordé ici <strong>de</strong> façonsuperficielle – nous apporte <strong>de</strong>s éclairages. Cette littérature nous conforte <strong>en</strong> outre dans l’idée quel’évaluation ne peut constituer une approche pour abor<strong>de</strong>r la question <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, étant donné les contraintes et phénomènes inhér<strong>en</strong>ts à cette pratique (Duran,1999 : 167-196) – et dont les termes seront discutés au mom<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>u – qui ferai<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre lerisque <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire drastiquem<strong>en</strong>t la portée <strong>de</strong> la p<strong>en</strong>sée stratégique.62


Chapitre 2Une recherche in<strong>du</strong>ctive et interv<strong>en</strong>ante sur uneONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2.1 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’ONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>........................................................................... 642.2 Abor<strong>de</strong>r la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par une recherche-interv<strong>en</strong>tion............. 742.3 L’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain : les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données...................................... 822.4 La secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> terrain : <strong>en</strong>tre constructivisme et normativité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.. 912.5 Prémisses sur le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites et la restitution à l’ONGE .............. 98Pour aller dans le détail <strong>de</strong> la façon dont les ONGE construis<strong>en</strong>t et mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, il nous faut toucher aux détails <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> l’organisation. Nous noussommes pour cela focalisée sur une organisation ayant manifesté un intérêt à l’idée <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er uneréflexion sur ses impacts <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Notre posture, dont on verra plus loin le caractère àla fois critique et <strong>en</strong>gagé auprès <strong>de</strong> l’organisation, n’est pas sans conséqu<strong>en</strong>ce sur la méthodologieadoptée. Avant <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter les élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> métho<strong>de</strong> et les implications <strong>de</strong> la posture <strong>de</strong>recherche, donnons au lecteur l’occasion <strong>de</strong> faire connaissance avec l’organisation étudiée : la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Cette « pause », consistant à faire la prés<strong>en</strong>tation factuelle <strong>de</strong> l’organisation, <strong>de</strong>vraitpermettre <strong>de</strong> donner une tournure plus concrète à l’exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> qui lui succè<strong>de</strong>.63


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE2.1 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’ONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes situé au cœur <strong>de</strong> la Camargue, sur la commune d’Arles (Bouches-<strong>du</strong>-Rhône).Sa création remonte à 1954, quand Luc Hoffmann, son fondateur, mécène, visionnaire, passionnépar l’ornithologie, épris <strong>de</strong> la Camargue, achète le domaine et déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> créer la StationBiologique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> 35 . Elle a la forme juridique d’une fondation à but non lucratif,reconnue d’utilité publique <strong>de</strong>puis 1978. « Cette institution est d’abord née <strong>de</strong> la volonté d’un seulhomme. Il a fait <strong>en</strong>suite s’y r<strong>en</strong>contrer et travailler d’autres hommes pour se mesurer auxinnombrables problèmes et défis que pos<strong>en</strong>t l’étu<strong>de</strong> et la protection d’un espace original, laCamargue » (Is<strong>en</strong>mann, 2003 : 86). Progressivem<strong>en</strong>t, il a ori<strong>en</strong>té le travail <strong>de</strong> ses équipes au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong>s problématiques camarguaises pour s’occuper plus largem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes.2.1.1 Emerg<strong>en</strong>ce d’une mission c<strong>en</strong>trée les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesA l’époque où Luc Hoffmann créait la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, la dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s était unproblème mal connu – voire non perçu comme un problème. Passionné par les oiseaux, il ainitialem<strong>en</strong>t créé une station <strong>de</strong> bagage ornithologique où s’est très vite développée une activité<strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique <strong>en</strong> sus <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> son domaine (<strong>de</strong> 2600 hectares aujourd’hui).Consci<strong>en</strong>t que la protection <strong>de</strong> l’avifaune dép<strong>en</strong>dait <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> leur habitat, il faitévoluer dès 1958 les problématiques étudiées à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> qui <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t officiellem<strong>en</strong>t unc<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche sur les « zones humi<strong>de</strong>s » <strong>en</strong> 1972. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> a d’ailleurs activem<strong>en</strong>tparticipé à la reconnaissance <strong>du</strong> problème <strong>de</strong> la dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, notamm<strong>en</strong>t grâceà l’influ<strong>en</strong>ce et l’investissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son fondateur qui est aujourd’hui considéré comme unegran<strong>de</strong> figure <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature 36 . L’exemple le plus notable est ladirection <strong>du</strong> programme MAR (pour “MARécages”, “MARshes”, “MARismas”) (voir Encadré35 L’organisation a été baptisée <strong>du</strong> nom <strong>du</strong> domaine sur lequel elle a été développée. La recherche historique réaliséepar P. Is<strong>en</strong>mann (2003) – pour son livre sur la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> écrit <strong>en</strong> hommage à Luc Hoffmann à l’occasion <strong>de</strong> son80 ième anniversaire – m<strong>en</strong>tionne une première apparition <strong>de</strong> ce nom au début <strong>du</strong> 13è siècle.36 Luc Hoffmann a été directeur <strong>du</strong> BIREO (Bureau International <strong>de</strong> Recherche sur les Oiseaux d’Eau, <strong>de</strong>v<strong>en</strong>uWetlands International) à partir <strong>de</strong> 1962, l’année même où il accepte d’occuper la vice-présid<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> WWFInternational (World Wildlife Fund <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u World Wi<strong>de</strong> Fund for Nature) dont il participe à la création <strong>en</strong> 1961,statut qu’il occupera jusqu’<strong>en</strong> 1988. Dès 1958, il collabore avec l’Union Internationale pour la Conservation <strong>de</strong> laNature <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue <strong>de</strong>puis l’Union Mondiale pour la Nature (UICN) dont il sera Vice-Présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> 1966 à 1969(Curriculum Vitae <strong>de</strong> Luc Hoffmann, tour<strong>du</strong>valat.org).64


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexive2.1), dont la confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1962 à Sainte-Marie <strong>de</strong> la Mer <strong>en</strong> Camargue a ouvert lavoie vers la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (1971).Encadré 2.1 : Action <strong>du</strong> fondateur <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> à l’international. Extrait <strong>du</strong> recueil d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avecLuc Hoffmann, par J. Silberstein (2010 : 94-95).Jil Silberstein : A l’évid<strong>en</strong>ce, cette confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s Saintes-Maries <strong>de</strong> la mer constitue un tournant décisif dans ladéf<strong>en</strong>se <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, qui vous sont d’autant plus chères que vous <strong>en</strong> mesurer toute l’importance stratégique auniveau mondial. Vous y prônez la promotion active d’une politique <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s espaces marécageux, àl’époque <strong>en</strong>core considérés comme insalubres et provoquant crainte et répulsion. Autrem<strong>en</strong>t dit, il s’agit d’opérer unvaste travail <strong>de</strong> s<strong>en</strong>sibilisation visant à r<strong>en</strong>verser dans les esprits la répulsion qu’inspir<strong>en</strong>t les marécages et à ysubstituer ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> moins qu’une reconnaissance légale <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, assortie d’une obligation <strong>de</strong> protection« pour services r<strong>en</strong><strong>du</strong>s ». Question retournem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’opinion, on ne peut imaginer plus difficile !Cette confér<strong>en</strong>ce, vous souv<strong>en</strong>ez-vous dans quelle circonstance vous l’avez provoqué ?Luc Hoffmann : Par rapport à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s jusqu’alors consacrées à la nature, les zoneshumi<strong>de</strong>s jouai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core un peu le rôle <strong>de</strong> par<strong>en</strong>ts pauvres. En outre, nous avons déjà évoqué ceproblème : dans l’esprit <strong>du</strong> public, ces zones n’avai<strong>en</strong>t pas bonne réputation. Au contraire !beaucoup estimai<strong>en</strong>t que le plus utile c’était <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> débarrasser. Donc <strong>de</strong> les assécher afin <strong>de</strong> lesrecycler…au grand bénéfice <strong>de</strong>s agriculteurs. Au cours <strong>de</strong>s années 50 seulem<strong>en</strong>t, les recherchessci<strong>en</strong>tifiques ont démontré que, au contraire <strong>de</strong> ce que l’on p<strong>en</strong>sait, ces zones humi<strong>de</strong>sremplissai<strong>en</strong>t une fonction primordiale dans le bon fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la nature.Pour ce qui me concerne, cela faisait un mom<strong>en</strong>t déjà que je souhaitais voir <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre uneaction <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> ces zones humi<strong>de</strong>s. En cela, je me s<strong>en</strong>tais très sout<strong>en</strong>u par Max Nicholson, queje connaissais <strong>de</strong>puis longtemps, mais aussi par le WWF et par François Bourlière, qui était plus oumoins le père <strong>de</strong> l’écologie française. Ensemble, nous avons eux l’idée <strong>de</strong> développer ceprogramme MAR. En outre, j’ai pu m’assurer <strong>de</strong> la collaboration <strong>de</strong> l’Union internationale pour laconservation <strong>de</strong> la nature. Cette UICN a tout <strong>de</strong> suite pris une part extrêmem<strong>en</strong>t active dans leprojet <strong>en</strong> court – avec le Bureau international <strong>de</strong> recherches sur les oiseaux d’eau [<strong>de</strong>v<strong>en</strong>u <strong>de</strong>puisWetlands international], dont j’étais le directeur, et le Conseil international pour la protection <strong>de</strong>soiseaux [<strong>de</strong>v<strong>en</strong>u <strong>de</strong>puis Birdlife International].Parv<strong>en</strong>us à ce sta<strong>de</strong>, nous avons p<strong>en</strong>sé que si nous voulions vraim<strong>en</strong>t développer une actiond’<strong>en</strong>vergure, il fallait frapper un grand coup et provoquer la t<strong>en</strong>ue d’une confér<strong>en</strong>ce internationaleoù serai<strong>en</strong>t consultés les personnes et les organismes les plus importants et les plus influ<strong>en</strong>ts dansce domaine. C’est ce que nous avons fait. Je dois dire que la confér<strong>en</strong>ce a suscité un très bon écho.Pas mal <strong>de</strong> recommandations sont nées <strong>de</strong> là, qui allait nous permettre <strong>de</strong> développer ceprogramme. Parmi ces recommandations, l’une concernait l’élaboration d’un traité internationalpour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Ce traité, il se concrétiserait dans la Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>Ramsar.Aujourd’hui, les zones humi<strong>de</strong>s sont considérées comme <strong>de</strong>s écosystèmes d’importanceinternationale pour leur biodiversité, particulièrem<strong>en</strong>t comme habitat <strong>de</strong>s oiseaux d’eau(Conv<strong>en</strong>tion Ramsar, 1971) et comme <strong>de</strong>s puits <strong>de</strong> ressources indisp<strong>en</strong>sables pour l’homme,comptant souv<strong>en</strong>t parmi les milieux les plus fertiles. On leur reconnaît <strong>de</strong> nombreuses fonctionsécologiques, notamm<strong>en</strong>t dans le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s réseaux hydrographiques (contrôle <strong>de</strong> lasédim<strong>en</strong>tation et <strong>de</strong> l’érosion, régulation <strong>de</strong>s inondations, approvisionnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> eau souterraineet <strong>de</strong> surface, etc.) et dans la capacité d’épuration <strong>de</strong> l’eau (MEA, 2005). Telles que définies dans65


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEles textes <strong>de</strong> la conv<strong>en</strong>tion RAMSAR, « les zones humi<strong>de</strong>s sont <strong>de</strong>s ét<strong>en</strong><strong>du</strong>es <strong>de</strong> marais, <strong>de</strong>fagnes, <strong>de</strong> tourbières ou d'eaux naturelles ou artificielles, perman<strong>en</strong>tes ou temporaires, où l'eau eststatique, ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris <strong>de</strong>s ét<strong>en</strong><strong>du</strong>es d'eau marine dont laprofon<strong>de</strong>ur à marée basse n'excè<strong>de</strong> pas six mètres ». Si cette définition est large, c'est qu'elle seveut regrouper une gran<strong>de</strong> diversité typologique d'espaces qui a pour trait commun la prés<strong>en</strong>ced'eau. En Méditerranée, on trouve <strong>en</strong> particulier les marais temporaires ou pér<strong>en</strong>nes, lesréservoirs, cours d’eau, <strong>de</strong>lta ou lagunes (Bonnet et al., 2005), ces zones rest<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>tsimportants <strong>du</strong> paysage méditerrané<strong>en</strong> et d’une riche diversité biologique, bi<strong>en</strong> qu « à l’heure oùnous pr<strong>en</strong>ons consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la valeur d’exist<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> la valeur d’usage <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, lamoitié a disparu <strong>en</strong> Méditerranée, <strong>en</strong> certains <strong>en</strong>droits 90% ou davantage » (Papayannis & Salathé,1999).En effet, <strong>en</strong> dépit <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong>s valeurs intrinsèques et <strong>de</strong>s fonctions ess<strong>en</strong>tielles <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce grandissante <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> les protéger et <strong>de</strong> lamobilisation plus substantielle d’instances internationales mais aussi locales pour leur protection,leur dégradation se poursuit <strong>en</strong> Méditerranée comme à l’échelle mondiale. Les zones humi<strong>de</strong>sconstitu<strong>en</strong>t l’écosystème le plus m<strong>en</strong>acé selon le rapport <strong>du</strong> Mill<strong>en</strong>ium Ecosystem Assesm<strong>en</strong>t(2005). En méditerranée, on observe <strong>en</strong> particulier une perte <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> surfaces, notamm<strong>en</strong>tdans les parties sud et est <strong>de</strong> la région méditerrané<strong>en</strong>ne, liée aux choix politiques <strong>de</strong>développem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> particulier agricole, in<strong>du</strong>striel et touristique qui impliqu<strong>en</strong>t leur drainage etleur conversion souv<strong>en</strong>t irréversible. Ces activités sont <strong>en</strong> outre fortem<strong>en</strong>t consommatrices <strong>en</strong>eau, <strong>en</strong>traînant une surexploitation <strong>de</strong> la ressource dans <strong>de</strong> nombreux cas (construction <strong>de</strong>barrages <strong>en</strong> amont <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s pour l’énergie, accroissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s forages pour l’irrigationou l’eau potable, etc.). Les choix d’aménagem<strong>en</strong>t et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces activités <strong>en</strong>traîn<strong>en</strong>tégalem<strong>en</strong>t la fragm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s milieux isolant la biodiversité dans <strong>de</strong>s espaces <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> pluspetits au sein d’un réseau d’infrastructures et d’urbanisation, particulièrem<strong>en</strong>t sur la ban<strong>de</strong>littorale. Le dérèglem<strong>en</strong>t climatique vi<strong>en</strong>t s’ajouter aux nombres <strong>de</strong>s m<strong>en</strong>aces auxquelles sontconfrontées les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes.Ces m<strong>en</strong>aces exercées sur les zones humi<strong>de</strong>s sont autant <strong>de</strong> défis pour les acteurs se saisissant <strong>de</strong>ce problème. Parmi les initiatives ayant marqué l’histoire <strong>de</strong> la mobilisation <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée, mais aussi la mission <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, il faut noter le Symposium<strong>de</strong> Grado sur la « <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes (ZHM) et <strong>de</strong> leur avifaune pour letroisième millénaire » ayant eu lieu <strong>en</strong> Italie, <strong>en</strong> février 1991. Ce symposium a rassemblé 280experts, délégués par <strong>de</strong>s gouvernem<strong>en</strong>ts, les organismes universitaires et <strong>de</strong> recherche. Lesnombreux exposés prés<strong>en</strong>tés par <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>ants v<strong>en</strong>us <strong>de</strong> toute la région ont démontré, cas66


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveaprès cas, la dégradation dramatique <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (Papayannis, 2002). Réagissant à ceconstat alarmant, un groupe d’experts s’est formé pour rédiger la stratégie (au s<strong>en</strong>s faible, i.e. unprogramme d’actions) et formuler la mission à laquelle <strong>de</strong>vront s’atteler les groupes impliquésdans la conservation <strong>de</strong>s ZHM : « arrêter la perte et la dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes et inverser les t<strong>en</strong>dances ». Le docum<strong>en</strong>t qui <strong>en</strong> est ressorti a été <strong>en</strong>tériné parles participants au Symposium et est à l’origine <strong>de</strong> l’initiative Medwet (Encadré 2.2)Encadré 2.2 : Création et mission <strong>de</strong> l’initiative MedWetL’initiative MedWet a été crée <strong>en</strong> 1991 au terme <strong>du</strong> Symposium <strong>de</strong> Grado, Italie. MedWet est unforum regroupant <strong>de</strong>s gouvernem<strong>en</strong>ts méditerrané<strong>en</strong>s, <strong>de</strong>s organismes intergouvernem<strong>en</strong>taux etnon-gouvernem<strong>en</strong>taux. Un <strong>de</strong>s principes fondateurs (termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce, 2006) préconise laparticipation volontaire <strong>de</strong> ses membres, la confiance réciproque et le bénéfice mutuel. L’initiativea été placée sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar pour les zones humi<strong>de</strong>s. C’est cette Conv<strong>en</strong>tionqui donne à MedWet sa légitimité et son autorité légale conformém<strong>en</strong>t aux Résolutions VII.22 etVIII.30 et aux Décisions SC19-19 et SC25-31 <strong>du</strong> Comité perman<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Ramsar.Sa mission est ainsi formulée : ‘Garantir et sout<strong>en</strong>ir la conservation efficace <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s etl’utilisation rationnelle <strong>de</strong> leurs ressources, valeurs et services, au moy<strong>en</strong> d’une collaboration etd’une mise <strong>en</strong> œuvre d’activités dans la région méditerrané<strong>en</strong>ne à un niveau local, national,régional et international dans le cadre <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Ramsar’ (termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce,approuvés lors <strong>de</strong> la réunion MedWet/Com à Tirana le 12 juin 2006).Les participants à l’initiative Medwet sont : les gouvernem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s 27 pays méditerrané<strong>en</strong>s et <strong>de</strong>l’Autorité Palestini<strong>en</strong>ne. Cinq c<strong>en</strong>tres techniques spécialisés dans les zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (France), le C<strong>en</strong>tre pour les biotopes et les zones humi<strong>de</strong>sEKBY (Grèce), le C<strong>en</strong>tre pour l’Etu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Zones Humi<strong>de</strong>s Méditerrané<strong>en</strong>nes SEHUMED(Espagne), l’Institut <strong>de</strong> la Conservation <strong>de</strong> la Nature ICN (Portugal) et l’Ag<strong>en</strong>ce régionale pour laProtection <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Toscane ARPAT (Italie). Les ONG part<strong>en</strong>aires sont l’UICN,Wetlands International, Birdlife International et WWF International. Enfin, les organismesintergouvernem<strong>en</strong>taux sont les Conv<strong>en</strong>tions Ramsar, Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Barcelone, Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>Berne, le PNUE et le PNUD, <strong>en</strong>fin l’Union Europé<strong>en</strong>ne.Selon les termes <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’initiative, ces organismes se r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t pour discuter <strong>de</strong>sproblèmes et lancer <strong>de</strong>s actions pour protéger les zones humi<strong>de</strong>s, pour l’homme et pour labiodiversité. Medwet ai<strong>de</strong> les pays méditerrané<strong>en</strong>s à évaluer les valeurs économiques, sociales etbiologiques <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, elle fournit égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s outils pour une meilleure <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s. Depuis 2002, Medwet est formellem<strong>en</strong>t reconnu comme une initiative régionalesous la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar (medwet.org, 2005).La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (TdV) est très investie dans l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> Grado et la création<strong>de</strong> MedWet a affirmé son ambition méditerrané<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> adoptant la mission formulée pourl’initiative régionale : « arrêter la perte et la dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et<strong>de</strong> leurs ressources naturelles, les restaurer et promouvoir leur utilisation rationnelle 37 ».37 L’« utilisation rationnelle » est la tra<strong>du</strong>ction française officielle <strong>du</strong> principe normatif <strong>de</strong> Wise use <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tionRamsar pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (1971). Le terme a évolué au fil <strong>du</strong> temps. En 1987, le Wise use étaitdéfini <strong>de</strong> la manière suivante : « l’utilisation <strong>du</strong>rable au bénéfice <strong>de</strong> l’humanité, d’une manière qui soit compatible67


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE2.1.2 Evolution <strong>de</strong> ses mo<strong>de</strong>s d’action pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nesL’idée <strong>du</strong> fondateur était <strong>de</strong> mettre la recherche sur les zones humi<strong>de</strong>s au service d’une <strong>gestion</strong>favorable à leur conservation. Ce paragraphe tiré d’un texte <strong>de</strong> Luc Hoffmann (Papayannis &Salathé, 1999) résume le mo<strong>de</strong> d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> :« [Les zones humi<strong>de</strong>s] ne pourront remplir pleinem<strong>en</strong>t leur rôle écologique etéconomique que si elles sont bi<strong>en</strong> gérées. Une bonne <strong>gestion</strong> doit s’appuyer sur unerecherche sci<strong>en</strong>tifique rigoureuse pr<strong>en</strong>ant <strong>en</strong> considération aussi bi<strong>en</strong> la biodiversité <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s que leur richesse économique, sociale et récréative, et leur importancepour l’économie <strong>de</strong> l’eau. Seules <strong>de</strong> telles recherches permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre lesstructures et les interactions souv<strong>en</strong>t complexes qui se pro<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t dans un<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> qualité. Sans cette manière <strong>de</strong> voir, une <strong>gestion</strong> n’atteindra passes objectifs ». « Les sci<strong>en</strong>tifiques et les conservateurs <strong>de</strong> la nature à la recherche <strong>de</strong>solutions pour l’utilisation <strong>du</strong>rable et la sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes » doiv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faire part « aux politiques, gouvernem<strong>en</strong>ts locaux,<strong>gestion</strong>naires » et usagers <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s.Selon ses statuts révisés <strong>en</strong> 2008, « la Fondation dite ‘<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>’ a pour but (1) La rechercheet l’accueil <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiques afin d’améliorer la compréh<strong>en</strong>sion interdisciplinaire <strong>de</strong>s écosystèmes<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong> leurs espèces. (2) Le transfert et la valorisation <strong>de</strong>s résultats<strong>de</strong> la recherche vers toute organisation ou personne impliquée dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces milieux, afin<strong>de</strong> promouvoir leur conservation et leur utilisation rationnelle. (3) La <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, propriété <strong>de</strong> la Fondation sus nommée <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> conserver sa flore, sa faune etses habitats et <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir voire d’augm<strong>en</strong>ter sa biodiversité » (Statuts <strong>de</strong> la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong>, docum<strong>en</strong>t interne, 2008).Station <strong>de</strong> bagage ornithologique au départ, c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche sur les zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> 1972, laTdV affirme le caractère impliqué <strong>de</strong> sa recherche et l’ét<strong>en</strong><strong>du</strong>e méditerrané<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> son aired’action <strong>en</strong> 1992 <strong>en</strong> développant <strong>de</strong> nouvelles activités pour la protection <strong>de</strong>s ZHM. Ces activitésavec le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s propriétés naturelles <strong>de</strong> l’écosystème » (Définition <strong>de</strong> la COP3 Ramsar, 1987 ; Leroy, 2006a :35). Depuis, le cont<strong>en</strong>u a été am<strong>en</strong>dé <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>ce aux principes d’utilisation <strong>du</strong>rable et d’approche écosystémique <strong>de</strong>la Conv<strong>en</strong>tion pour la Diversité Biologique : « Une stratégie <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s terres, <strong>de</strong>s eaux et <strong>de</strong>s ressourcesvivantes qui favoris<strong>en</strong>t la conservation et l’utilisation <strong>du</strong>rable d’une manière équitable. Ainsi l’application d’une telleapproche ai<strong>de</strong>ra à assurer l’équilibre <strong>en</strong>tre les trois objectifs <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion que sont la conservation, l’utilisation<strong>du</strong>rable et le partage juste et équitable <strong>de</strong>s avantages découlant <strong>de</strong> l’exploitation <strong>de</strong>s ressources génétiques »(Secrétariat Ramsar Manuel 1, 2007 : 16). Ce principe <strong>de</strong> Wise use aurait pu être tra<strong>du</strong>it par les termes d’ « utilisationavisée » pour gar<strong>de</strong>r les idées <strong>de</strong> prud<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> sagesse <strong>de</strong>s termes anglo-saxons, plutôt que d’intro<strong>du</strong>ire une idée <strong>de</strong>« rationalisation » <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Ce principe ayant été adopté par l’initiative MedWet, comme parla <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, qui ont intérêt à s’inscrire dans le référ<strong>en</strong>tiel normatif international <strong>en</strong> matière <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s,nous serons donc am<strong>en</strong>ée à y faire référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> manière récurr<strong>en</strong>te au fil <strong>du</strong> texte. Bi<strong>en</strong> que nous utiliserons latra<strong>du</strong>ction officielle d’ « utilisation rationnelle », ce sera dans le s<strong>en</strong>s plus large d’ « utilisation avisée » que l’on vi<strong>en</strong>t<strong>de</strong> décrire.68


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveont été regroupées sur le nom <strong>de</strong> « conservation ». Le terme est d’abord utilisé dans son s<strong>en</strong>sanglo-saxon dans lequel l’idée déf<strong>en</strong><strong>du</strong>e est que l’usage <strong>de</strong> la terre et <strong>de</strong>s ressources naturelles doitêtre compatible avec le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> ces ressources et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> la nature et sa biodiversité 38 .Le terme <strong>de</strong> conservation comporte égalem<strong>en</strong>t un s<strong>en</strong>s propre et à usage interne à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong>. Il a <strong>en</strong> effet été choisi pour distinguer les nouvelles activités plus techniques <strong>de</strong> l’activitétraditionnelle <strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique. Deux équipes ont alors été formées : « l’équiperecherche » et « l’équipe conservation ». Cette <strong>de</strong>uxième équipe « conservation » étaitprincipalem<strong>en</strong>t chargée <strong>de</strong> développer un travail <strong>de</strong> transfert – par <strong>de</strong>s échanges directs ou àtravers différ<strong>en</strong>ts moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> communication – <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHacquis ou développés par la TdV auprès <strong>de</strong>s acteurs locaux (<strong>en</strong> Camargue ou sur différ<strong>en</strong>ts sites<strong>en</strong> méditerranée) ayant un impact direct ou indirect sur les ZHM, ainsi que le portage <strong>de</strong> la cause<strong>de</strong>s ZHM auprès <strong>de</strong>s instances <strong>de</strong> gouvernance internationale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Nous verronsplus loin qu’au bout <strong>de</strong> 15 années p<strong>en</strong>dant lesquelles un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux interne a été <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer lesli<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique et les actions plus techniques pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s, les <strong>de</strong>ux équipes ont été décloisonnées <strong>en</strong> 2006 et réorganisées autour <strong>de</strong>différ<strong>en</strong>tes problématiques écologiques. Nous pr<strong>en</strong>drons le temps d’expliquer les implications <strong>de</strong>ces changem<strong>en</strong>ts internes. Pour l’instant, ret<strong>en</strong>ons que si la répartition <strong>de</strong>s rôles a évolué, lesactivités <strong>de</strong> « conservation » sont toujours celles que nous décrivons ici.L’action <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la TdV consiste égalem<strong>en</strong>t à élaborer <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s pour lesquels l’expertise sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV est mise à contribution. Etablir le plan <strong>de</strong><strong>gestion</strong> a pour but <strong>de</strong> planifier les interv<strong>en</strong>tions et non-interv<strong>en</strong>tions nécessaires à la conservationd’un espace. Cette conservation implique la prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> l’écosystème quel’on cherche à conserver 39 . Ainsi les zones <strong>de</strong> conservation peuv<strong>en</strong>t être <strong>de</strong>s zones où la prés<strong>en</strong>cehumaine et les activités humaines exist<strong>en</strong>t, mais où l’<strong>en</strong>jeu est d’interv<strong>en</strong>ir pour que la qualitéécologique <strong>de</strong> ces zones soit préservée ou restaurée. La TdV a acquis un savoir-faire particulierdans cet exercice <strong>en</strong> élaborant le premier plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zone humi<strong>de</strong> sur son propredomaine qui s’ét<strong>en</strong>d sur plus <strong>de</strong> 2 600 hectares et dont 1 844 sont classés sous le statut <strong>de</strong>Réserve Naturelle Régionale <strong>de</strong>puis juillet 2008. Notons qu’au total, elle agit <strong>de</strong> l’échelle la pluslocale à l’échelle <strong>de</strong> la région méditerrané<strong>en</strong>ne : elle gère son propre domaine, elle élabore <strong>de</strong>sprojets <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation <strong>en</strong> Camargue ou <strong>en</strong> région méditerrané<strong>en</strong>ne française,38 Par opposition aux mouvem<strong>en</strong>ts préservationnistes qui déf<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t un idéal <strong>de</strong> nature sauvage avec une prés<strong>en</strong>ceminimale <strong>de</strong> l’homme (Larrère, Les Philosophes <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, Puf, 1997).39 Il ne s’agit donc pas d’une conservation « muséographique », qui relèverait d’une « mise sous cloche », mais d’unesauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s fonctions et <strong>en</strong>jeux écologiques <strong>de</strong> l’espace considéré.69


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEelle s’implique dans les problématiques <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s à l’échelle <strong>du</strong> bassin méditerrané<strong>en</strong>,sur <strong>de</strong>s sites précis d’une part, mais aussi par <strong>de</strong>s actions régionales.Depuis 1981, le programme d’action est établi pour <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> 5 ans. En plus <strong>du</strong>programme <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation, les stratégies <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat, <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>communication sont rep<strong>en</strong>sés à l’occasion <strong>de</strong> l’élaboration d’un plan quinqu<strong>en</strong>nal. L’élaboration<strong>du</strong> « plan stratégique » 2011-2015 est étudiée dans la thèse, pour les processus <strong>de</strong> réflexionstratégique qu’elle donne à voir. Les cas d’étu<strong>de</strong> qui seront développés dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong>la thèse s’inscriv<strong>en</strong>t dans le plan 2006-2010. Celui-ci est composé <strong>de</strong> trois sous-programmes : (1)Changem<strong>en</strong>ts globaux et dynamiques <strong>de</strong>s espèces ; (2) Gestion intégrée et dynamiques <strong>de</strong>sécosystèmes ; (3) Suivi et évaluation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes. Chacun <strong>de</strong> ces sousprogrammesest constitué <strong>de</strong> plusieurs projets. Le premier compr<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s projets sur ladynamique <strong>de</strong>s oiseaux notamm<strong>en</strong>t, mais aussi <strong>de</strong>s poissons, mis <strong>en</strong> relation avec leschangem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s milieux ou <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces milieux. Les étu<strong>de</strong>s port<strong>en</strong>t par exemplesur les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’intro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> canards d’élevage (pour la chasse) sur la sauvagine. Le<strong>de</strong>uxième thème s’applique à rechercher et promouvoir <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>sles plus favorables au mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> leur biodiversité, <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la TdVjusqu’à d’autres sites <strong>en</strong> Méditerranée. Le programme <strong>de</strong> suivi-évaluation <strong>de</strong>s ZHM vise ànotamm<strong>en</strong>t à mettre au point et rassembler <strong>de</strong>s indicateurs pour faire l’état <strong>de</strong>s ZH et expliquerles mécanismes <strong>de</strong> dégradation pour porter les ZHM dans l’arène politique.2.1.3 Quelques données internes sur une organisation professionnelle1. Le personnel. La TdV compte une cinquantaine d’employés perman<strong>en</strong>ts (45 équival<strong>en</strong>t tempsplein <strong>en</strong> 2009) dont la moitié est constituée <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiques et technici<strong>en</strong>s spécialisés dans laconservation <strong>de</strong> la nature 40 au nombre <strong>de</strong>squels s’ajout<strong>en</strong>t une vingtaine <strong>de</strong> doctorants dont lesli<strong>en</strong>s à la TdV sont fonctions <strong>de</strong> plusieurs variables (co-direction, laboratoires part<strong>en</strong>aires,localisation <strong>du</strong> doctorant, types <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t) (Tableau 2.1). La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> accueilleégalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre 20 et 30 stagiaires 41 chaque année. La secon<strong>de</strong> moitié <strong>du</strong> personnel perman<strong>en</strong>test répartie <strong>en</strong>tre les services administratifs (comptabilité, secrétariat, assistance à la direction),l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> <strong>du</strong> matériel et <strong>de</strong>s bâtim<strong>en</strong>ts, le service <strong>de</strong> cantine, la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine.40 Les statuts <strong>du</strong> personnel impliqué dans le programme sont très variables. Certains sont titulaires <strong>de</strong> doctorats maisn’ont pas une activité <strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique. D’autres sont technici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> recherche, etc.41 Les stagiaires provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> formations variées et <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts niveaux : <strong>de</strong> formations techniques <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sespaces protégés à différ<strong>en</strong>ts master 1 ou 2 <strong>en</strong> biologie, écologie, géomatique,… voire <strong>en</strong> communication oudocum<strong>en</strong>tation.70


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveTableau 2.1 : Catégories et nombre d’employés <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> 2009 (source : rapport annuel 2009)Catégories <strong>de</strong> personnel NombreDirection 4Programme 26Domaine <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> 8Services administratifs 18Total personnel perman<strong>en</strong>t 58Doctorants 212. Le budget et les sources <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t. En plus <strong>du</strong> domaine foncier, le fondateur a doté lafondation d’un capital dont le rev<strong>en</strong>u lui procure <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 15% <strong>de</strong> son budget annuel(Encadré 2.3). Parallèlem<strong>en</strong>t (et indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t), Luc Hoffmann a créé une fondation agissantdans le mécénat <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, la Fondation MAVA. Cette <strong>de</strong>rnière apporte à la TdV plus <strong>de</strong>50% <strong>de</strong> son budget annuel, sous contrat r<strong>en</strong>ouvelé annuellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis une dizaine d’années. LaTdV est t<strong>en</strong>ue <strong>de</strong> trouver le complém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son budget (25%) auprès d’autres sources <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>t, objectifs qu’elle respecte <strong>en</strong> répondant à <strong>de</strong>s appels à projet ou <strong>en</strong> montant <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats financiers avec d’autres mécènes. A ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre exposé, la synthèse <strong>du</strong> budget2009 suffit à illustrer la nature <strong>de</strong>s recettes et dép<strong>en</strong>ses <strong>de</strong> la TdV (Encadré 2.3). Notons que lesordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur indiqué dans cet <strong>en</strong>cadré sont représ<strong>en</strong>tatifs <strong>de</strong>s budgets <strong>de</strong> l’organisationpour l’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> plan quinqu<strong>en</strong>nal 2006-2010 et le resteront pour le futur plan 2011-2015.Encadré 2.3 : Exemple <strong>de</strong> budget annuel <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (Extrait <strong>du</strong> rapport annuel 2009)71


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE3. La gouvernance. La Fondation TdV est dotée d’un Conseil d’Administration, d’un Bureau,d’un Conseil Sci<strong>en</strong>tifique et d’une Direction qui sont les quatre organes principaux <strong>de</strong>gouvernance <strong>de</strong> l’organisation.Le Conseil d’Administration (CA), organe décisionnaire, est <strong>de</strong>puis 2008 composé <strong>de</strong> 3 collègescomptant chacun 4 membres. (1) Le collège <strong>de</strong>s fondateurs regroupe les trois <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> LucHoffmann. Le présid<strong>en</strong>t y a été intégré <strong>de</strong>puis l’adoption <strong>de</strong>s nouveaux statuts fin 2008. (2) Lecollège <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> droit se compose d’un représ<strong>en</strong>tant <strong>de</strong>s 4 institutions suivantes : leMinistère <strong>de</strong> l’Intérieur, le Ministère <strong>de</strong> l’Ecologie, <strong>du</strong> Développem<strong>en</strong>t Durable et <strong>de</strong> la Mer, leMinistère <strong>de</strong> l’Enseignem<strong>en</strong>t supérieur et <strong>de</strong> la Recherche, et le maire <strong>de</strong> la Commune d’Arles. (3)Enfin, le collège <strong>de</strong>s personnalités qualifiées compte 4 experts <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ou <strong>de</strong>s ZHM.Seuls les membres <strong>de</strong> ce collège ont un mandat limité à 4 ans r<strong>en</strong>ouvelable une fois directem<strong>en</strong>t.La Direction assiste <strong>de</strong> plein droit au CA avec voix consultative. Enfin le CA est assisté d’uncommissaire aux comptes, un audit financier ayant lieu annuellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> respect <strong>de</strong> la loi. Selonles statuts <strong>de</strong> la fondation, la première attribution <strong>du</strong> CA est « d’arrêter le programme d’action <strong>de</strong>la Fondation », mais le CA est égalem<strong>en</strong>t statutairem<strong>en</strong>t responsable <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> financière et<strong>de</strong>s ressources humaines et dans une moindre mesure <strong>de</strong>s aspects réglem<strong>en</strong>taires et légaux <strong>de</strong> lafondation (Termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> CA, docum<strong>en</strong>t interne, 2008).Le Bureau est constitué <strong>de</strong> quatre membres <strong>du</strong> CA : le présid<strong>en</strong>t, le vice-présid<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>uxpersonnalités qualifiées. Il est élu par le CA, pour <strong>de</strong>s mandats r<strong>en</strong>ouvelables indéfinim<strong>en</strong>t, surproposition <strong>du</strong> collège <strong>de</strong>s fondateurs. En pratique, les propositions n’ayant jamais été rejetées <strong>en</strong>CA, la constitution <strong>du</strong> Bureau revi<strong>en</strong>t donc au collège <strong>de</strong>s fondateurs.Le Conseil Sci<strong>en</strong>tifique (CS) est un organe consultatif, son présid<strong>en</strong>t siège au CA, mais sans voixdélibérative. Depuis 2008, il compte 4 autres sci<strong>en</strong>tifiques et 6 experts thématiques. Les mandatssont limités à 4 ans r<strong>en</strong>ouvelables une fois. Il a pour attribution le conseil stratégique au CA et au72


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivedirecteur général sur les ori<strong>en</strong>tations <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> la Fondation à moy<strong>en</strong> et long terme et surl’allocation budgétaire.Les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> direction <strong>de</strong> la TdV ont évolué <strong>de</strong>puis 1954, notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis 1974 lorsque lefondateur a quitté la double fonction <strong>de</strong> présid<strong>en</strong>t et directeur, pour ne gar<strong>de</strong>r que la présid<strong>en</strong>cejusqu’<strong>en</strong> 2003 – <strong>de</strong>puis, il est présid<strong>en</strong>t d’honneur <strong>de</strong> la TdV. Lorsqu’il est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u présid<strong>en</strong>t, ladirection a connu <strong>de</strong>s tâtonnem<strong>en</strong>ts, elle a été temporairem<strong>en</strong>t divisée <strong>en</strong> direction sci<strong>en</strong>tifique,direction administrative, sans direction générale. Elle s’est stabilisée <strong>en</strong> 1997 pour être constituéed’un directeur général, assisté d’un directeur <strong>du</strong> programmes (<strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation),un directeur administratif et financier et un directeur <strong>de</strong> domaine.2.1.4 Une ONGE appart<strong>en</strong>ant à <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s : la recherche sci<strong>en</strong>tifique et laconservation <strong>de</strong> la natureLa quatrième dim<strong>en</strong>sion constitutive <strong>de</strong> la stratégie rési<strong>de</strong> dans les relations qu’elle <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t avecd’autres organismes : les réseaux qu’elle cherche à pénétrer, les part<strong>en</strong>ariats opérationnels qu’ell<strong>en</strong>oues, les situations <strong>de</strong> concurr<strong>en</strong>ce (politique ou financier) dans lesquelles elle se trouve parfois.Les acteurs et les organismes qu’elle côtoie dans le déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son activité constitu<strong>en</strong>t aussitout simplem<strong>en</strong>t une dim<strong>en</strong>sion nécessaire à la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> cette organisation.Depuis son origine, et notamm<strong>en</strong>t par l’action <strong>de</strong> son fondateur, la TdV apparti<strong>en</strong>t au mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>la recherche sci<strong>en</strong>tifique et au secteur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature. Comme nous l’avonsévoqué plus haut, Luc Hoffmann s’est approché <strong>de</strong> l’UICN dès <strong>de</strong> sa création <strong>en</strong> 1948 et a luimêmeparticipé à la création <strong>du</strong> WWF 42 ; dans les années 60 il a accueilli et dirigé le BIROE(aujourd’hui Wetlands International). A cette pério<strong>de</strong>, le secteur n’était pas si développé. Leréseau était tissé <strong>de</strong> relations interpersonnelles : ces pionniers se sollicitai<strong>en</strong>t les uns les autrespour agir sur <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qu’ils découvrai<strong>en</strong>t 43 . La TdV a historiquem<strong>en</strong>t saplace dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature. Elle apparti<strong>en</strong>t au réseau lié à MedWet danslequel elle est <strong>de</strong>puis l’origine un membre très actif (Papayannis, com.pers., 2007) et notamm<strong>en</strong>tavec toutes les ONGE internationales investies sur le bassin méditerrané<strong>en</strong>, elle noue <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats avec différ<strong>en</strong>ts organismes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et protection <strong>de</strong> la nature <strong>en</strong> méditerranée.De la même manière, la TdV a su faire sa place dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique dès lespremières années <strong>de</strong> son exist<strong>en</strong>ce. Luc Hoffmann a rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t collaboré avec le CNRS <strong>en</strong>accueillant <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques qui trouvai<strong>en</strong>t le terrain parfait pour développer <strong>de</strong>s recherches <strong>en</strong>42 Au départ considéré comme une branche opérationnelle <strong>de</strong> l’UICN.43 Ceci est bi<strong>en</strong> illustré par les nombreux exemples donnés par Luc Hoffmann dans le recueil d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s(Silberstein, 2010).73


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEécologie à la TdV, mais aussi <strong>en</strong> recommandant au CNRS <strong>de</strong>s personnes dont les projetscorrespondai<strong>en</strong>t au programme <strong>de</strong> la TdV (Silberstein, 2010 : 55). Il a même réussi à convaincrel’institut d’ouvrir une ant<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> Camargue pour développer l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce milieu. Cette ant<strong>en</strong>ne aété installée sur un terrain qu’il a mis à disposition, tout proche <strong>de</strong>s locaux <strong>de</strong> la TdV, <strong>en</strong>tre 1970et 1986. Depuis, si le CNRS n’est plus physiquem<strong>en</strong>t au cœur <strong>de</strong> la Camargue, les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre lessci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV et les laboratoires (CNRS, IRD, Universités, etc.) <strong>de</strong>s villes al<strong>en</strong>tour(Montpellier et Aix-Marseille notamm<strong>en</strong>t) n’ont fait que se développer. Rares sont les projets <strong>de</strong>recherche m<strong>en</strong>és sans part<strong>en</strong>aires issus d’autres institutions sci<strong>en</strong>tifiques, et cela est d’autant plusvrai avec le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’ANR, qui incite au part<strong>en</strong>ariat <strong>en</strong>tre laboratoires.2.2 Abor<strong>de</strong>r la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par unerecherche-interv<strong>en</strong>tionS’attacher à la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale parles ONGE et la façon dont elles sont mises <strong>en</strong> œuvre dans la perspective d’id<strong>en</strong>tifier <strong>de</strong>s leviers<strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie guidant ces actions nous <strong>en</strong>gage dans une démarche <strong>de</strong> rechercheinterv<strong>en</strong>tion<strong>en</strong> organisation. Selon Friedberg, cela fait appel à une « approche clinique ». Pour lesauteurs <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>en</strong> stratégie s’étant intéressés à la problématique <strong>de</strong> lapro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissance par la recherche-interv<strong>en</strong>tion (pour un état <strong>de</strong> l’art, voir Plane, 2000),l’approche clinique r<strong>en</strong>voie au rôle <strong>de</strong> « mé<strong>de</strong>cin » <strong>du</strong> chercheur interv<strong>en</strong>ant, dont « l'objectif est<strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s dysfonctionnem<strong>en</strong>ts, <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s solutions et met <strong>en</strong> oeuvre les solutionsproposées » (Plane, 2003 citant Schein, 1969 : 199). Cep<strong>en</strong>dant, la posture clinique <strong>de</strong> Friedbergest plus large et peut être assimilée à un <strong>de</strong>uxième rôle id<strong>en</strong>tifié par E. Schein : celui <strong>du</strong> chercheur« catalisateur » dont la recherche est ori<strong>en</strong>tée sur les processus et ai<strong>de</strong> l’organisation à percevoir,analyser et corriger <strong>de</strong>s situations problématiques (ibid. : 199). C’est cette acception que nousret<strong>en</strong>ons, adoptant ainsi une démarche constructiviste selon les auteurs <strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t et uneposture clinique selon Friedberg. Pour le sociologue, ce n’est qu’à partir d’une « une connaissancefine <strong>du</strong> terrain et <strong>de</strong> ses configurations chaque fois spécifiques » (Friedberg, 1997[1993] : 303) quel’on peut dresser un diagnostic soli<strong>de</strong>. Cette « posture générale » suppose <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre unedémarche <strong>de</strong> recherche rythmée par le passage dans l’intériorité <strong>de</strong>s acteurs pour <strong>en</strong>suiteretrouver une extériorité permettant alors <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s procédés <strong>de</strong> restitution <strong>de</strong>sdiagnostics auprès <strong>de</strong> ces acteurs. C’est à la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> cette démarche <strong>de</strong> recherche att<strong>en</strong><strong>du</strong>epar « la posture générale d’étu<strong>de</strong> clinique » (ibid.) que nous allons dès à prés<strong>en</strong>t nous consacrer.74


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveL’approche clinique a pris <strong>de</strong> l’importance dans les théories <strong>de</strong> l’organisation dans les années1970-1980, dans un mouvem<strong>en</strong>t qui, <strong>en</strong> cherchant à dépasser les limites <strong>de</strong>s modèles rationnels,visai<strong>en</strong>t à compr<strong>en</strong>dre davantage la réalité <strong>de</strong>s processus organisationnels <strong>en</strong> travaillant plus près<strong>de</strong>s acteurs qui les compos<strong>en</strong>t. La sociologie <strong>de</strong> Crozier et Friedberg (1977) a largem<strong>en</strong>t contribuéà cette ori<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la recherche sur les organisations <strong>en</strong> p<strong>en</strong>sant les structures et les règlesrégissant le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s organisations d’abord par les stratégies <strong>de</strong> ses membres et <strong>en</strong>développant une pratique <strong>de</strong> recherche idoine dont les métho<strong>de</strong>s vont chercher au plus près <strong>de</strong> laspécificité <strong>de</strong>s terrains « et généralise[nt] seulem<strong>en</strong>t à partir d’une compréh<strong>en</strong>sion intime <strong>de</strong> cescas » (Crozier, 1963 : 17). Cette démarche <strong>de</strong> recherche est précisém<strong>en</strong>t exposée dans l’annexeméthodologique <strong>de</strong> L’acteur et le système (Crozier & Friedberg, 1977 : 449) et dans la quatrièmepartie <strong>du</strong> Pouvoir et la règle (Friedberg, 1997[1993] : 297). Notons qu’<strong>en</strong> cela, les <strong>de</strong>ux sociologuess’inscriv<strong>en</strong>t dans la perspective <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissances ouverte par B. Glaser et A.Strauss (1967) plaidant pour la création <strong>de</strong> catégories conceptuelles et <strong>en</strong>suite <strong>de</strong> théories à partir<strong>de</strong>s données <strong>de</strong> terrain (groun<strong>de</strong>d theory). Nous avions promis <strong>de</strong> retrouver l’approche croziéri<strong>en</strong>neau mom<strong>en</strong>t d’abor<strong>de</strong>r notre démarche <strong>de</strong> recherche, leur proposition a indéniablem<strong>en</strong>t influ<strong>en</strong>cénotre travail. Pour analyser et parv<strong>en</strong>ir à r<strong>en</strong>dre compréh<strong>en</strong>sibles et appréh<strong>en</strong>dables la« structuration / restructuration <strong>de</strong>s champs à travers l'action collective <strong>de</strong>s hommes et lesprocessus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> ces ordres locaux » (ibid. : 299), le cheminem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> chercheur doitrespecter trois temps. Ces trois temps r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à la notion <strong>de</strong> distance <strong>en</strong>tre l’analyste et lesystème d’action organisé qu’il étudie qui est une notion importante dans un contexte <strong>de</strong>recherche-interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Plane, 2000 : 49). D’abord, il doit rompre avec lesévid<strong>en</strong>ces, « avec la réalité s<strong>en</strong>sible, avec les catégories <strong>du</strong> s<strong>en</strong>s commun (<strong>de</strong>s acteurs comme <strong>de</strong>ssi<strong>en</strong>nes propres) » et il doit mettre le système qu’il observe <strong>en</strong> question. Ensuite, « le chercheurdoit délaisser un temps toute posture critique, toute volonté d'évaluation ou <strong>de</strong> jugem<strong>en</strong>t, tout<strong>en</strong>ormativité extérieure, tout « ethnoc<strong>en</strong>trisme » à l'égard <strong>de</strong>s pratiques qu'il observe » (ibid. : 305).C’est-à-dire qu’il doit pour cela « travailler à pr<strong>en</strong>dre consci<strong>en</strong>ce, autant que faire se peut, <strong>de</strong>sregistres sur lesquels il p<strong>en</strong>se et perçoit » (Foucault, 1966 cité par Arnaud, 1996). « Si aberrants,contradictoires et dépourvus <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s qu’ils lui paraiss<strong>en</strong>t <strong>de</strong> prime abord, il sait – c’est là lepostulat heuristique <strong>de</strong> base qui comman<strong>de</strong> toute la démarche – que tous les phénomènes qu’ilobserve ont un s<strong>en</strong>s et correspond<strong>en</strong>t à une rationalité à partir <strong>du</strong> mom<strong>en</strong>t où ils exist<strong>en</strong>t » etc’est l’objet <strong>de</strong> son travail que <strong>de</strong> retrouver le s<strong>en</strong>s profond <strong>de</strong>rrière les s<strong>en</strong>s et non-s<strong>en</strong>s appar<strong>en</strong>t(Crozier & Friedberg, 1977 : 456). En effet, « ça n’est qu’<strong>en</strong> reconstruisant <strong>de</strong> l’intérieur la logiquepropre <strong>de</strong>s situations telle qu’elle est perçue et vécue par les acteurs eux-mêmes qu’il pourradécouvrir les données implicites par rapport auxquelles seules leurs con<strong>du</strong>ites, apparemm<strong>en</strong>t75


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEaberrantes, pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>s et signification. » (ibid. : 456). Dans un troisième et <strong>de</strong>rnier temps, « lechercheur doit reconquérir son extériorité <strong>en</strong> confrontant et comparant les unes aux autres lesmultiples rationalités ou stratégies conting<strong>en</strong>tes qu’il aura observées, pour remonter ainsi peu àpeu aux caractéristiques et règles <strong>de</strong> jeux implicites qui structur<strong>en</strong>t le champ considéré. » (ibid. :457).La démarche <strong>de</strong> recherche que nous avons mis <strong>en</strong> œuvre pour notre étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> laTdV est proche <strong>de</strong> celle que nous v<strong>en</strong>ons <strong>de</strong> décrire, tant pour l’analyse <strong>de</strong>s pratiques internes –<strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce avec les implications méthodologiques <strong>de</strong> la perspective pratique (Golsorkhi, 2006 :16) – que pour l’analyse <strong>de</strong> ses actions concrètes. Cep<strong>en</strong>dant nous ne pouvons pas dire que notrepropre démarche soit une application fidèle <strong>de</strong> l’approche organisationnelle <strong>de</strong> Crozier etFriedberg. En effet, la façon dont nous articulons la théorie <strong>de</strong> l’action collective à notre cadred’analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (prés<strong>en</strong>tée dans le chapitre 1) se retrouve auniveau <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche. Rappelons <strong>en</strong> effet que notre objectif n’est pas tant <strong>de</strong>compr<strong>en</strong>dre la « structuration / restructuration <strong>de</strong>s champs à travers l'action collective <strong>de</strong>shommes et les processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> ces ordres locaux » <strong>en</strong> soi, mais <strong>de</strong> déceler lesint<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> système par certains <strong>de</strong> ses acteurs et découvrir ce que les actionsdéployées vont pro<strong>du</strong>ire sur ce système. Il n’est pas question <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire les jeux <strong>de</strong> pouvoirs et lesstratégies <strong>de</strong>s acteurs au rang <strong>de</strong> constante – que l’on pourrait donc éliminer dans l’analyse –puisque c’est l’apport majeur <strong>de</strong> l’approche croziéri<strong>en</strong>ne. Mais il s’agit <strong>de</strong> capter les subjectivités<strong>de</strong>s acteurs, non pas dans les manœuvres visant à l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> leur liberté, mais dans leurrapport à l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. En cela, nous n’ignorons pasl’une <strong>de</strong>s prémisses croziéri<strong>en</strong>nes selon laquelle l’acteur n’aurait pas d’objectif clair à long terme etnon indép<strong>en</strong>dant <strong>de</strong> son intérêt. P<strong>en</strong>dant le travail <strong>de</strong> terrain, nous avons <strong>en</strong> effet recueilli <strong>de</strong>smatériaux considérables sur différ<strong>en</strong>ts aspects <strong>de</strong> l’organisation, révélant l’omniprés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s jeuxstratégiques internes. Mais nous posons le postulat selon lequel l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t peutêtre mu par <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions définies (bi<strong>en</strong> qu’évolutives) et externe, qui pourront être à l’origine<strong>de</strong>s négociations et <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> pouvoirs auxquels il va se prêter. Ce cadrage nous ai<strong>de</strong> alors àfaire le tri et à ret<strong>en</strong>ir ceux <strong>de</strong>s aspects qui sont éclairants vis-à-vis <strong>de</strong> l’objectif partagé qui estcelui d’améliorer l’état écologique <strong>de</strong>s objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux visés.En somme, la démarche mise <strong>en</strong> œuvre pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’ONGE s’inspire largem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’approche croziéri<strong>en</strong>ne mais pour l’utiliser dans un autre cadre qui est l’ASGE, celui qui organis<strong>en</strong>otre questionnem<strong>en</strong>t.Comme le souligne E. Friedberg (1997[1993] : 305), l’approche in<strong>du</strong>ctive que nous adoptonsn’obéit pas à un empirisme simple, « elle est au contraire instruite par une problématique et un76


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivemo<strong>de</strong> <strong>de</strong> raisonnem<strong>en</strong>t, c’est-à-dire par les prémisses d'une série <strong>de</strong> notions théoriques » 44 liée ànotre cadre d’analyse – l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui porte et met <strong>en</strong> œuvre (sa stratégie) une int<strong>en</strong>tion<strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t, qui se tra<strong>du</strong>it par la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle, pour faire changer le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>effective <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – et « dont l'articulation fournit une métho<strong>de</strong> d'analyse ou<strong>de</strong> grille <strong>de</strong> lecture <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> structuration <strong>de</strong>s rapports d'échange […] »et <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.2.2.1 Déployer une recherche in<strong>du</strong>ctive <strong>de</strong>puis l’interne <strong>de</strong> l’organisation jusqu’auxsituations concrètes d’actionCette approche hypothético-in<strong>du</strong>ctive est, pour notre recherche, ori<strong>en</strong>tée <strong>de</strong> la manière suivante :l’hypothèse est que l’ONGE pourrait r<strong>en</strong>forcer son action <strong>en</strong> connaissant mieux l’impact<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> celles-ci. C’est à partir <strong>du</strong> vécu et <strong>de</strong> la vision <strong>de</strong>s acteurs (<strong>de</strong> l’ONGE et <strong>de</strong>sexternes impliquées dans les situations observées) que l’on cherche à saisir la structuration <strong>de</strong>sconditions <strong>de</strong> construction et <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par l’ONGE.La subjectivité <strong>de</strong>s acteurs ne peut être saisie « <strong>en</strong> vol », sans un ancrage fort à un espace d’action.Nous nous retrouvons <strong>en</strong> cela proche <strong>de</strong> la démarche proposée par la sociologie <strong>de</strong> Crozier etFriedberg, qui est souv<strong>en</strong>t rapprochée <strong>de</strong>s pratiques ethnographiques et anthropologiques, ycompris par eux-mêmes (pour <strong>de</strong>s exemples et <strong>de</strong>s citations, voir le texte <strong>de</strong> R. Taravella, 2007 :107). C’est la raison méthodologique – qui découle d’une problématique et d’un cadre théorique –pour laquelle choisir une organisation pour y m<strong>en</strong>er un travail approfondi est indisp<strong>en</strong>sable, cequi est rapellé par les auteurs <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>en</strong> stratégie (David et al., 2000 ; Martinet,2000) se référant <strong>en</strong> cela à Glaser et Strauss (1967) qui ont « théorisé » l’importance <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r lesanalyses et les théories à partir <strong>du</strong> terrain. Comme nous l’avons avancé dans le premier chapitre,la TdV est appréh<strong>en</strong>dée à plusieurs échelles (<strong>de</strong> l’organisation dans son <strong>en</strong>semble aux actions) etdans une articulation <strong>de</strong> l’interne et l’externe <strong>de</strong> l’organisation. Ces allers-retours dans les échellesd’analyse ont été répétés à plusieurs reprises au cours <strong>du</strong> travail <strong>de</strong> terrain dans lequel on peutdistinguer <strong>de</strong>ux phases 45 , dont chacune représ<strong>en</strong>te <strong>en</strong>viron la moitié <strong>du</strong> temps consacré au terrain44 Bi<strong>en</strong> que le raisonnem<strong>en</strong>t in<strong>du</strong>ctif parte <strong>de</strong> cas <strong>de</strong> terrain pour aboutir à <strong>de</strong>s catégories conceptuelles ou <strong>de</strong>s règleslocales, il est guidé par <strong>de</strong>s cadres et <strong>de</strong>s repères préalablem<strong>en</strong>t (et temporairem<strong>en</strong>t) stabilisés, év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t grâce àd’autres types <strong>de</strong> raisonnem<strong>en</strong>t. A. David invite à cet égard à dépasser l’appar<strong>en</strong>te opposition <strong>en</strong>tre les raisonnem<strong>en</strong>tsdé<strong>du</strong>ctif, in<strong>du</strong>ctif et ab<strong>du</strong>ctif, indiquant que « la plupart <strong>de</strong>s raisonnem<strong>en</strong>ts sci<strong>en</strong>tifiques combin<strong>en</strong>t les trois formes<strong>de</strong> raisonnem<strong>en</strong>t », même si cette boucle n’est pas réalisée indivi<strong>du</strong>ellem<strong>en</strong>t par chaque chercheur, maiscollectivem<strong>en</strong>t par la communauté sci<strong>en</strong>tifique (2000 : 86).45 Ces <strong>de</strong>ux phases correspond<strong>en</strong>t approximativem<strong>en</strong>t au <strong>de</strong>uxième et troisième temps dans le cheminem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>chercheur <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> Crozier et Friedberg prés<strong>en</strong>té juste avant : l’immersion dans la subjectivité<strong>de</strong>s acteurs pour <strong>en</strong>suite recouvrer une extériorité et une distance critique par rapport aux données.77


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE(soit <strong>en</strong>viron 9 mois chacun). Dans la première phase, les différ<strong>en</strong>tes échelles ont été parcourues<strong>en</strong> plusieurs étapes m<strong>en</strong>ées plus ou moins successivem<strong>en</strong>t :- L’organisation vue dans son <strong>en</strong>semble. Ceci recouvre la découverte <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE, <strong>en</strong> s’appuyant sur notre cadre d’analyse stratégique compr<strong>en</strong>ant quatre registres,l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s déterminants <strong>de</strong>s choix stratégiques pour chacune <strong>de</strong> ces dim<strong>en</strong>sions et leursli<strong>en</strong>s avec l’action. Il s’agit égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la familiarisation avec les processus stratégiques formelset informels (la vie <strong>de</strong> l’organisation) liés à l’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie.- Les actions mises <strong>en</strong> œuvre par la TdV. Il ne suffit pas <strong>de</strong> se focaliser sur une organisation pourcapter toutes les subtilités <strong>de</strong> la construction et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales,il faut <strong>en</strong>core aller chercher dans <strong>de</strong>s situations réelles, dans la pratique <strong>de</strong>s acteurs, dans leurress<strong>en</strong>ti dans le temps <strong>de</strong> l’action et a posteriori – quand il a été possible <strong>de</strong> le faire <strong>en</strong> fonction <strong>du</strong>cal<strong>en</strong>drier <strong>de</strong>s projets étudiés. Le choix <strong>de</strong>s actions a été guidé par plusieurs préoccupations : (1)couvrir les mo<strong>de</strong>s d’action les plus représ<strong>en</strong>tatifs <strong>de</strong> la TdV, mais veiller à ce qu’ils soi<strong>en</strong>t aussiparmi les mo<strong>de</strong>s d’action généralem<strong>en</strong>t répan<strong>du</strong>s dans le secteur <strong>de</strong>s ONGE ; (2) couvrir lesdiffér<strong>en</strong>tes échelles d’action <strong>de</strong> la TdV : acteur territorial, sci<strong>en</strong>tifique et écologiste <strong>en</strong> Camargue,expert <strong>de</strong>s ZHM interv<strong>en</strong>ant sur <strong>de</strong>s sites <strong>en</strong> Méditerranée, porteur <strong>de</strong> la cause <strong>de</strong>s ZHM àl’échelle <strong>du</strong> bassin méditerrané<strong>en</strong> ; (3) <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action « traditionnels » ou ceux dont lesdéveloppem<strong>en</strong>ts sont plus réc<strong>en</strong>ts ; (4) différ<strong>en</strong>ts sta<strong>de</strong>s dans le cal<strong>en</strong>drier <strong>de</strong>s actions : <strong>de</strong>sactions sur le long terme, un projet achevé dans le temps <strong>de</strong> la thèse, un projet démarrant dans letemps <strong>de</strong> la thèse.Trois mo<strong>de</strong>s d’action ont été choisis :1. La recherche sur les ZH comme action pour la conservation <strong>en</strong> Camargue. Parmi lesnombreux projets <strong>de</strong> recherche développés par la TdV, beaucoup sont réalisés <strong>en</strong> Camargue, sontlieu d’implantation. Ces recherches peuv<strong>en</strong>t avoir divers effets directs et indirects sur la <strong>gestion</strong><strong>du</strong> territoire, mais aussi dans une arène plus large (on retrouvera l’analyse <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> d’action auchapitre 3).2. Un projet coordonné par la TdV, inscrit dans un programme international et visant à mettre <strong>en</strong>place la « <strong>gestion</strong> intégrée d’une zone côtière » sur la côte nord <strong>du</strong> Maroc (estuaire <strong>de</strong> laMoulouya), pour une <strong>du</strong>rée <strong>de</strong> trois ans et achevé <strong>en</strong> juin 2009 (voir le chapitre 4).3. Un dispositif à l’interface sci<strong>en</strong>ce et politique, l’Observatoire <strong>de</strong>s ZHM, qui a pour but <strong>de</strong> créeret rassembler <strong>de</strong>s informations sur l’état et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM afin d’influ<strong>en</strong>cer certainsprogrammes <strong>en</strong> leur faveur, programmes qui sont souv<strong>en</strong>t décidés dans les arènes <strong>de</strong> lagouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ce projet connaît un développem<strong>en</strong>t substantiel <strong>de</strong>puis janvier2009 (voir le chapitre 5).78


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveLes analyses <strong>de</strong> ces trois mo<strong>de</strong>s d’action constitu<strong>en</strong>t la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse. Avant d’allerplus avant dans l’exposé <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche, restons <strong>en</strong>core un instant sur cettepremière phase <strong>de</strong> terrain et sur ses implications.2.2.2 Premières implications <strong>de</strong> la posture <strong>de</strong> rechercheLa première implication que nous voulons souligner ici est une évid<strong>en</strong>ce pour la démarche <strong>de</strong>recherche répondant aux besoins <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> clinique au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> Friedberg, mais pas toujours uneévid<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> terme pratique : la nécessité d’une prés<strong>en</strong>ce physique <strong>de</strong> l’analyste sur le terrain etune certaine proximité aux acteurs. Dans notre cas, il s’agit notamm<strong>en</strong>t d’une prés<strong>en</strong>ce dansl’organisation sur le long terme. En raison <strong>de</strong> la relative proximité géographique <strong>de</strong>s locaux <strong>de</strong> laTdV 46 <strong>en</strong> Camargue au laboratoire d’accueil à Montpellier (distants <strong>de</strong> 90 km), nous avons pu êtreprés<strong>en</strong>te <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>ux jours par semaine 47 . Pour J-M. Plane (2000 : 53), « une rechercheinterv<strong>en</strong>tion<strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> longue <strong>du</strong>rée dans une organisation prés<strong>en</strong>te plusieurs avantagesdécisifs » : elle est d’abord nécessaire pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> le travail, qui pour être approfondinécessite <strong>de</strong> mutliples r<strong>en</strong>contres avec les acteurs. Elle permet <strong>de</strong> développer une collaborationétroite avec les acteurs, nécessaire pour avancer sur les problématiques prises <strong>en</strong> charge, relevantla plupart <strong>du</strong> temps d’<strong>en</strong>jeux stratégiques forts pour l’organisation. Enfin, l’immersion <strong>de</strong>l’analyste lui permettra d’analyser la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissance issues <strong>de</strong> ses interactions avec lesacteurs.Cette proximité à l’organisation a son p<strong>en</strong>dant, et c’est la secon<strong>de</strong> implication que noussouhaitons relever dès maint<strong>en</strong>ant : l’instauration d’une dissymétrie dans la quantité et qualité <strong>de</strong>sdonnées internes et externes <strong>en</strong> raison d’une dissymétrie d’accès, le large accès à l’interne ayantparfois joué au détrim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’externe. Cette dissymétrie pose problème pour la préparation <strong>de</strong> laphase <strong>de</strong> recherche suivante qui consiste à retrouver une extériorité par rapport au systèmeétudié, <strong>en</strong> procédant à la « comparaison <strong>en</strong>tre les données d’observation […] ainsi [qu’une]réflexion sur les incohér<strong>en</strong>ces, les écarts que cette comparaison et ces regroupem<strong>en</strong>ts fontapparaître » à l’intérieur même <strong>de</strong> l’espace étudié 48 (Friedberg, 1997[1993] : 313). Pour celal’analyste doit veiller à la multiplicité <strong>de</strong>s témoignages, qui d’une part accumule ceux qui « d’un46 Rappelons que la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est localisée au cœur <strong>de</strong> la Camargue, sur la commune d’Arles, près <strong>du</strong> hameau LeSambuc.47 C’est évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t une moy<strong>en</strong>ne, puisque certaines pério<strong>de</strong>s ont été complètem<strong>en</strong>t consacrées au terrain et l<strong>en</strong>ombre <strong>de</strong> jours <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ce pouvait s’élever à 4 dans la semaine. Certaine pério<strong>de</strong> ont au contraire été <strong>de</strong>s abs<strong>en</strong>cesprolongées vouées à une prise <strong>de</strong> recul ou lié aux missions pour le terrain <strong>du</strong> cas d’étu<strong>de</strong> « Maroc ».48 Car « sous peine <strong>de</strong> trahir l’esprit <strong>de</strong> sa démarche clinique et in<strong>du</strong>ctive, il ne peut fon<strong>de</strong>r cette extériorité sur unsavoir ou <strong>de</strong>s données extérieures à cet espace (Friedberg, 1997[1993] : 313).79


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEpoint <strong>de</strong> vue formel […] se trouv<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>s situations distinctes et <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t donc avoir unevision différ<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la réalité », et d’autre part « les interviews d’acteurs qui selon les mêmescritères se trouv<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>s situations très semblables et qui <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t avoir une perceptioncomparable <strong>de</strong> la réalité » (ibid. : 314).Etant donné la conting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d'organisation <strong>de</strong>s contextes d'action,le lecteur aura <strong>de</strong>viné que pour chacun <strong>de</strong> nos trois cas d’étu<strong>de</strong>, les situations ont été spécifiques(avec <strong>de</strong>s niveaux d’accès à l’externe plus ou moins larges), <strong>de</strong> même que les solutions trouvéespour palier cette difficulté.1. Pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong> Camargue, il n’a pas été possible <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contrer lesautres acteurs <strong>du</strong> territoire sans être id<strong>en</strong>tifiée comme « faisant partie » <strong>de</strong> la TdV. Même si nousavions voulu nous prêter à <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> mystification pour une approche dissimulée auterrain (Arnaud, 1996), il aurait été inopportun <strong>de</strong> le faire car nombre <strong>de</strong>s événem<strong>en</strong>tsrassemblant ces acteurs – que l’on recroise régulièrem<strong>en</strong>t – auxquels nous avons cherché àassister nous étai<strong>en</strong>t accessibles qu’<strong>en</strong> tant que « doctorante sur la TdV » 49 . Deux opportunités sesont néanmoins prés<strong>en</strong>tées pour r<strong>en</strong>contrer <strong>de</strong>s acteurs <strong>en</strong>core méconnus <strong>en</strong> échappant à ladissimulation active <strong>de</strong> la position : d’une part, l’accompagnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étudiantsd’AgroParisTech-GEEFT 50 sur le terrain pour leur mo<strong>du</strong>le sur les métho<strong>de</strong>s d’<strong>en</strong>quêtequalitative. Il a alors été possible et surtout à propos, <strong>de</strong> se prés<strong>en</strong>ter sous la casquette« doctorante AgroParisTech et accompagnatrice pour le mo<strong>du</strong>le d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t ». D’autre part,l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t d’une étudiante <strong>en</strong> stage à la TdV dans le cadre <strong>de</strong> son master GEEFT nous apermi <strong>de</strong> compléter le terrain <strong>en</strong> Camargue sans être confrontée au problème <strong>de</strong> posture.2. En revanche, l’approche <strong>du</strong> terrain a été plus facile au Maroc, loin <strong>du</strong> lieu d’implantation <strong>de</strong>l’organisation. Bi<strong>en</strong> que l’accès au terrain impliquait un courrier officiel signé <strong>de</strong> la main <strong>du</strong>directeur <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> la responsable <strong>du</strong> projet, l’id<strong>en</strong>tité <strong>de</strong> « doctorante sur la TdV » nesemblait pas évoquer grand chose aux interlocuteurs auprès <strong>de</strong> qui il fallait ajouter l’attachem<strong>en</strong>t àAgroParisTech pour obt<strong>en</strong>ir une « validation » <strong>de</strong> notre statut et l’acceptation <strong>du</strong> r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vouspour l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>. Ces acteurs – directem<strong>en</strong>t ou indirectem<strong>en</strong>t concerné par le projet <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>la ZH – n’étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> outre pas tous <strong>en</strong> contact direct avec la TdV.3. Finalem<strong>en</strong>t, la configuration <strong>du</strong> contexte d’action qui s’est avérée le plus difficile d’accès sur ladim<strong>en</strong>sion externe est le cas <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes (OZHM).Au sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> construction où <strong>en</strong> était le dispositif, il était délicat <strong>de</strong> s’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir avec les acteurs49 Ce qui pour ces acteurs ne fait pas <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ce – et ils ont <strong>en</strong> partie raison, nous le verrons plus loin – avec« doctorante à la TdV » ou « pour la TdV ».50 Les étudiants suivant la formation <strong>en</strong> Gestion <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la forêt tropicale àAgroParisTech, c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Montpellier.80


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveexternes alors que leur participation et l’officialisation <strong>de</strong> leur part<strong>en</strong>ariat étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core auxpremiers sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> négociation. Ce à quoi il faut ajouter la difficulté pratique <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contrer cesnombreux acteurs disséminés sur le bassin méditerrané<strong>en</strong>. Notons tout <strong>de</strong> même que nous avonspu r<strong>en</strong>contrer certains d’<strong>en</strong>tre eux lors <strong>de</strong> nos pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> terrain au Maroc (voir ci-<strong>de</strong>ssus) et <strong>en</strong>Espagne (détaillé dans la section suivante). Pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce dispositif OZHM, les mom<strong>en</strong>ts lesplus importants <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête externe ont été <strong>de</strong>ux r<strong>en</strong>contres rassemblant une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>sacteurs (<strong>en</strong> plus <strong>de</strong>s échanges sur docum<strong>en</strong>t). Ces <strong>de</strong>ux ateliers (<strong>de</strong> 3 et 5 jours) <strong>de</strong> construction<strong>du</strong> dispositif, ayant eu lieu à la TdV (<strong>en</strong> mars 2009 et <strong>en</strong> janvier 2010) ont <strong>en</strong> effet été suivis etétudiés dans le détail.2.2.3 Pour clore la première phase <strong>de</strong> terrain : asseoir le questionnem<strong>en</strong>t par lacomparaisonEn parallèle <strong>du</strong> travail <strong>de</strong> terrain approfondi sur la TdV, nous avons cherché à pénétrer le mon<strong>de</strong><strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature et plus particulièrem<strong>en</strong>t celui <strong>de</strong> la région méditerrané<strong>en</strong>ne afin <strong>de</strong>pr<strong>en</strong>dre connaissance <strong>de</strong>s débats actuels et surtout <strong>de</strong> rechercher le questionnem<strong>en</strong>t qui seraitcommun aux organisations <strong>de</strong> ce secteur. Pour E. Friedberg, la « comparaison » évoquée plushaut comme étant l’opération <strong>de</strong> rétablissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’extériorité <strong>de</strong> l’analyste peut être <strong>en</strong>richied’une comparaison cette fois <strong>en</strong> externe <strong>de</strong> l’espace d’action étudié :« L’idée <strong>de</strong> comparaison est égalem<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>te dans le souci <strong>de</strong> ne pas se cont<strong>en</strong>terd’une seule monographie, <strong>de</strong> manière à pouvoir interroger et <strong>en</strong>richir les résultats d’unemonographie au moins par ceux d’une autre. A la manière <strong>de</strong>s « écarts » <strong>en</strong>tre lesinterviewés d’un même espace d’action, l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s converg<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong>s diverg<strong>en</strong>cesque fait apparaître une comparaison <strong>en</strong>tre différ<strong>en</strong>tes monographies portant sur <strong>de</strong>scontextes d’action a priori comparables permet à la fois <strong>de</strong> « déconstruire » les évid<strong>en</strong>cesappar<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> chacune et <strong>de</strong> sélectionner progressivem<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> faits à lasignification plus large que le seul cadre monographique. Sur la base <strong>de</strong> ces faits pourraalors se bâtir un modèle interprétatif qui, sans avoir valeur universelle, dépasse la seuleconting<strong>en</strong>ce locale pour se situer à un premier niveau <strong>de</strong> généralisation » (Friedberg,1997[1993] : 314).J-P. Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995b) invite à la même précaution. Dans les termes <strong>de</strong> sa « politique <strong>du</strong>terrain », il souligne la nécessité d’appuyer la recherche sur <strong>de</strong>s « groupes témoins » – que lesauteurs <strong>du</strong> courant pratique <strong>de</strong> la stratégie appell<strong>en</strong>t la « nécessaire étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas » (Golsorkhi(2006) – mais invite néanmoins à la compléter par une « <strong>en</strong>quête ext<strong>en</strong>sive » afin <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire lerisque d’une trop gran<strong>de</strong> conting<strong>en</strong>ce interprétative. Le travail <strong>de</strong> comparaison externe aévi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t porté sur les choix d’action <strong>de</strong>s autres ONGE ou organisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales81


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEr<strong>en</strong>contrées, et surtout sur la façon dont elles appréh<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t l’impact écologique <strong>de</strong> leur action.Ce travail a été réalisé par principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux moy<strong>en</strong>s :1. Un terrain au sein d’une autre organisation. Deux semaines ont été passées au C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>Coopération pour la Méditerranée <strong>de</strong> l’UICN (organisation intergouvernem<strong>en</strong>tale) à Malaga(Espagne) où il a été possible <strong>de</strong> faire un travail <strong>de</strong> terrain comparable à celui effectué sur laTdV 51 si on accepte <strong>de</strong> le transposer dans un temps très conc<strong>en</strong>tré.2. L’observation d’événem<strong>en</strong>ts liées au mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature et aux ONGE :forum, colloque, journées-débat, etc. L’événem<strong>en</strong>t le plus notable est le Congrès Mondial <strong>de</strong> laNature organisé tous les 4 ans par l’UICN. Ce congrès rassemble tous les membres UICN (plus<strong>de</strong> 1000 gouvernem<strong>en</strong>ts, différ<strong>en</strong>ts types d’institutions et ONGE) pour échanger, débattre, etsurtout voter le programme quadri<strong>en</strong>nal <strong>de</strong> l’UICN. Nous avons pu intégrer l’équipe d’évaluation<strong>du</strong> Congrès, composée <strong>de</strong> chargés <strong>de</strong> mission <strong>de</strong> divers bureaux régionaux <strong>de</strong> l’UICN et t<strong>en</strong>ue <strong>de</strong>recueillir l’opinion <strong>de</strong>s participants sur l’utilité <strong>du</strong> Congrès pour r<strong>en</strong>forcer l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> par le mon<strong>de</strong> 52 . Ce fut l’opportunité <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contrer d’autres employés <strong>de</strong>l’UICN et d’autres ONGE. Ces r<strong>en</strong>contres nous ont offert la possibilité, par la suite, <strong>de</strong> r<strong>en</strong>drevisite au chef <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t chargé <strong>de</strong> développer le système d’évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’UICNau siège, à Gland (Suisse). Nous avons par ailleurs assisté, dès qu’il a été possible <strong>de</strong> le faire, àd’autres événem<strong>en</strong>ts, la démarche visant à recueillir le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong>s débats <strong>en</strong> étant att<strong>en</strong>tif à larécurr<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s questions.3. D’autres <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s ont été réalisés auprès <strong>de</strong> membres d’organisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, parexemple avec certains chargés <strong>de</strong> mission au Comité français <strong>de</strong> l’UICN ou <strong>de</strong>s membres <strong>du</strong>WWF France.2.3 L’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain : les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>sdonnéesPour expliquer l’évolution <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche vers la secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> terrain et allerplus avant dans les implications <strong>de</strong> notre posture, il nous faut au préalable marquer un tempsd’arrêt sur les mo<strong>de</strong>s exploratoires et les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recueil et la nature <strong>de</strong>s données.51 Consultation <strong>de</strong> la docum<strong>en</strong>tation pro<strong>du</strong>ite, interne et externe, <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec tout le personnel, participation à lavie interne <strong>de</strong> l’organisation. Les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recueil <strong>de</strong> données sont prés<strong>en</strong>tées plus bas dans le chapitre.52 L’UICN s’intéresse à la légitimité d’un tel événem<strong>en</strong>t qui fait déplacer 8000 personnes <strong>de</strong>s quatre coins <strong>de</strong> laplanète, à un mom<strong>en</strong>t où l’on parle <strong>de</strong>s surconsommations énergétiques et <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> responsabilité <strong>de</strong>s transportsdans le changem<strong>en</strong>t climatique.82


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveLes différ<strong>en</strong>tes métho<strong>de</strong>s mobilisées doiv<strong>en</strong>t nous permettre <strong>de</strong> :1. Compr<strong>en</strong>dre ce qu’il se passe dans chacun <strong>de</strong>s quatre registres <strong>de</strong> notre cadre d’analysestratégique <strong>de</strong> l’organisation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Les métho<strong>de</strong>s utilisées doiv<strong>en</strong>t nous permettre,dans une t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre l’échelle <strong>de</strong> l’organisation et l’échelle <strong>de</strong>s actions, <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>drecomm<strong>en</strong>t la TdV construit ses objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, comme elle construit et met <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour pousser à la conservation <strong>de</strong>s objetsécologiques visés au regard <strong>de</strong>s mécanismes néfastes qu’elle ambitionne d’infléchir. Ces métho<strong>de</strong>sseront égalem<strong>en</strong>t mobilisées pour déterminer les moy<strong>en</strong>s dont l’ONGE a besoin pour mettre <strong>en</strong>pratique sa stratégie d’action, <strong>en</strong> portant att<strong>en</strong>tion à la façon dont elle s’y pr<strong>en</strong>d pour développerses capacités d’action. Ces métho<strong>de</strong>s sont par ailleurs choisies pour nous ai<strong>de</strong>r à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r lafaçon dont la TdV se positionne dans le secteur <strong>de</strong> la conservation et les li<strong>en</strong>s qu’elle tisse avecd’autres acteurs <strong>en</strong> vue d’atteindre ses propres objectifs. En somme, ces métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>vront nouspermettre <strong>de</strong> décrire la stratégie « effective » <strong>de</strong> la TdV, celle qui est mise <strong>en</strong> œuvre, pourid<strong>en</strong>tifier les points <strong>de</strong> t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts registres stratégiques et <strong>en</strong>visager les forces etles faiblesses <strong>de</strong>s actions mises <strong>en</strong> œuvre au regard <strong>de</strong>s objectifs qu’elles doiv<strong>en</strong>t permettred’atteindre.2. Saisir les processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie. Les métho<strong>de</strong>s mobilisées <strong>de</strong>vront nouspermettre <strong>de</strong> suivre les processus d’élaboration et <strong>de</strong> réflexion stratégique <strong>en</strong> portant uneatt<strong>en</strong>tion à la nature <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux qui sont débattus et aux déterminants <strong>de</strong>s choix et <strong>de</strong>s décisionsadoptés. L’analyse <strong>de</strong> ces processus d’élaboration stratégique sont indisp<strong>en</strong>sables dans notreposture d’étu<strong>de</strong> clinique visant à id<strong>en</strong>tifier les leviers <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie pour l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Dans cette même démarche, les métho<strong>de</strong>s mobilisées <strong>de</strong>vront nous permettre<strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre le rôle <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> l’action dans la construction <strong>de</strong> la stratégie,comme un raisonnem<strong>en</strong>t rétrospectif faisant partie <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> réflexion stratégique, ounon.L’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s données nécessaires à l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> ces résultats sont récoltées dans ce que J-P.Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995b) appelle l’ « <strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain » et qui compr<strong>en</strong>d nécessairem<strong>en</strong>tplusieurs métho<strong>de</strong>s complém<strong>en</strong>taires. C’est le cas non seulem<strong>en</strong>t pour l’épaisseur <strong>de</strong>s terrainsqu’il étudie – notamm<strong>en</strong>t les dispositifs <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Afrique – mais aussi pour uneorganisation dont on voudrait compr<strong>en</strong>dre les choix et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie. C’estd’ailleurs un <strong>de</strong>s points sur lequel s’accord<strong>en</strong>t les t<strong>en</strong>ants <strong>du</strong> courant pratique <strong>de</strong> la stratégie.S’intéresser à la fabrication et à la pratique <strong>de</strong> la stratégie, c’est abor<strong>de</strong>r « un objet polymorphe qui83


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEnécessite une approche multidim<strong>en</strong>sionnelle et multi-niveaux <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s et d’outilsd’investigation » (Golsorkhi, 2006 : 16).2.3.1 L’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> qualitatif : <strong>de</strong> la conversation à la discussionLa recherche <strong>de</strong> la façon dont les acteurs p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t, choisiss<strong>en</strong>t, construis<strong>en</strong>t la stratégie et donn<strong>en</strong>ts<strong>en</strong>s aux actions qu’ils mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> œuvre, <strong>en</strong> somme « cette priorité accordée à la découverte »s’accommo<strong>de</strong> mal <strong>de</strong> techniques quantitatives, et repose comme annoncé sur <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>scliniques et qualitatives 53 dans laquelle l'<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> déti<strong>en</strong>t une place privilégiée (Friedberg,1997[1993] : 310). C’est <strong>en</strong> effet par cette technique que l’on peut obt<strong>en</strong>ir un certain nombred’explications sur <strong>de</strong>s événem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la vie quotidi<strong>en</strong>ne d’une organisation <strong>en</strong> faisant appel à unsavoir commun, mais c’est aussi – et surtout – par cette métho<strong>de</strong> que l’on cherche à recueillir lesvisions indivi<strong>du</strong>elles <strong>de</strong>s acteurs sur toutes les questions qui découl<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la problématique et quiévolu<strong>en</strong>t à leur contact. Le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> ces <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s, <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t ou partiellem<strong>en</strong>t retranscrits,constitu<strong>en</strong>t le matériau principal sur lequel est bâtie l’analyse.« Les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s sont qualitatifs, ouverts et approfondis. Ils relèv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> typeanthropologique, près <strong>de</strong>s situations naturelles <strong>de</strong>s sujets 54 et dans une interaction prolongée »(Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995b : 2). De nombreux <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s ont <strong>en</strong> effet été réalisés au cours <strong>de</strong> lapério<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain <strong>en</strong>tre mai 2008 et septembre 2010, et la façon dont ils ont été con<strong>du</strong>its a évoluédans le temps <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>. Dans la première phase <strong>de</strong> terrain, les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s ont été m<strong>en</strong>éssur un mo<strong>de</strong> exploratoire et sous forme <strong>de</strong> conversation. A partir d’un canevas d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> – quirelève <strong>du</strong> « p<strong>en</strong>se-bête » personnel, qui permet, tout <strong>en</strong> respectant la dynamique propre d’uneconversation, <strong>de</strong> ne pas oublier les thèmes importants (ibid.) – les membres <strong>de</strong> la TdV sont invitésà parler <strong>de</strong> leurs idées sur les divers aspects <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE ou sur <strong>de</strong>s actions plusprécises, <strong>de</strong> leurs expéri<strong>en</strong>ces propres. Pour les cas d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> la TdV dans le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, les acteurs externes ont été sollicités <strong>de</strong> la même manière : leur rôle dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong>, leurs objectifs, leurs visions <strong>du</strong> système et leur expéri<strong>en</strong>ce, leurs relations avec la TdV,etc. Cette première phase <strong>de</strong> terrain nous a permis dresser les premières analyses et <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire53 L’auteur précise que les techniques quantitatives ne sont pas à proscrire systématiquem<strong>en</strong>t et que l’on peut « seservir <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s quantifiées à condition <strong>de</strong> les utiliser comme <strong>de</strong>s instrum<strong>en</strong>ts heuristiques permettant <strong>de</strong> formuler<strong>de</strong>s questions et <strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts pertin<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la structuration d’un champ » (Friedberg, 1997[1993] : 310).Le rôle à faire jouer aux métho<strong>de</strong>s quantitatives ne situe pas seulem<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recherche. Eneffet, les métho<strong>de</strong>s quantitatives peuv<strong>en</strong>t être utilisées dans la pratique, notamm<strong>en</strong>t celle <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts,et les précautions émises par E. Friedberg peuv<strong>en</strong>t s’appliquer comme nous le verrons dans le chapitre 7.54 L’idée <strong>de</strong> « situation naturelle <strong>du</strong> sujet » est tout aussi vraie pour le membre d’une ONGE dans son bureau quepour le chef d’un village <strong>en</strong> brousse sous son arbre. La différ<strong>en</strong>ce est surtout <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> chercheur qui s’adapterasans doute plus vite à son terrain dans les bâtim<strong>en</strong>ts d’une ONGE, dans son propre pays.84


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveun nouveau questionnem<strong>en</strong>t. L’évolution <strong>du</strong> questionnem<strong>en</strong>t n’est <strong>en</strong> réalité pas si séqu<strong>en</strong>tielle,mais au contraire très progressive, J-P. Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995b) parle pour cela <strong>de</strong> récursivité <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>, <strong>en</strong> ce qu’il s’agit <strong>de</strong> s’appuyer sur ce qui a été dit pour pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong> nouvelles questions.« Ces questions in<strong>du</strong>ites par <strong>de</strong>s réponses sont aussi bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s « questions qu’on se pose » (niveaustratégique <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> la problématique) que <strong>de</strong>s « questions qu’on pose » (niveau tactique<strong>de</strong> l’évolution <strong>du</strong> canevas d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>) ». Cette récursivité <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> s’inscrit <strong>en</strong> outre dans unedynamique itérative <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain (compr<strong>en</strong>ant non seulem<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s, mais aussiles autres métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recueil d’information). L’auteur parle « d'itération concrète (l'<strong>en</strong>quêteprogresse <strong>de</strong> façon non linéaire <strong>en</strong>tre les informateurs et les informations), ou d'itération abstraite(la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> données modifie la problématique qui modifie la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> données quimodifie la problématique) » (ibid. : 15).Cette première phase <strong>de</strong> terrain prépare donc peu à peu à une secon<strong>de</strong> phase qui est plusréflexive. Les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s sont con<strong>du</strong>its sur le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> la discussion, <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong>e dans le s<strong>en</strong>s <strong>du</strong>débat, <strong>de</strong> l’échange d’argum<strong>en</strong>ts év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t contradictoires <strong>en</strong>tre l’analyste et l’interviewés.La prés<strong>en</strong>ce longue dans l’organisation et la possibilité <strong>de</strong> s’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir plusieurs fois avec lesmêmes personnes a facilité la réalisation <strong>de</strong> cette secon<strong>de</strong> phase p<strong>en</strong>dant laquelle les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>sont été c<strong>en</strong>trés sur une ou <strong>de</strong>ux questions. L’interlocuteur est invité à « épuiser » cette questionavec l’analyste, d’une certaine manière comme si les <strong>de</strong>ux personnes étai<strong>en</strong>t chargées <strong>de</strong> résoudreun problème <strong>en</strong> un temps limité. Les principales questions abordées par cette métho<strong>de</strong> ont été lessuivantes :- Le choix <strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux (les préoccupations, la connaissance <strong>de</strong>s problèmesécologiques, plus généralem<strong>en</strong>t l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s facteurs influ<strong>en</strong>çant ces choix)- Les mo<strong>de</strong>s d’action (les doctrines auxquelles on se réfère comme la <strong>gestion</strong> intégrée, l’actiondans ou <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s espaces protégés, etc.) ;- L’évaluation <strong>de</strong>s impacts (notamm<strong>en</strong>t sous l’angle <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res d’évaluation).Ces « <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s-discussions » ont quelques fois pris la forme <strong>de</strong> séances <strong>de</strong> réflexion réunissantun groupe restreint d’acteurs <strong>de</strong> la TdV. Nous les rapprochons plus <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> que <strong>de</strong> ce quel’on appelle « l’observation participante » quand ces séances nous permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> suivre « notreprogramme » ou notre canevas <strong>de</strong> la même manière qu’au cours d’un <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> bilatéral, même sices réunions n’ont pas toujours la caractéristique propre à l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> qui est d’être sollicité parl’analyste, mais par les acteurs eux-mêmes. Notons à ce propos qu’il est difficile pour l’analyste,qui t<strong>en</strong>te d’observer la réaction <strong>de</strong>s acteurs à la sollicitation <strong>de</strong> réflexivité qu’il exerce sur eux, <strong>de</strong>distinguer la réaction aux « stimuli » qu’il a lui-même <strong>en</strong>voyés par rapport à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s85


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE« stimuli » auxquels sont soumis les acteurs. Si on file la métaphore <strong>de</strong>s signaux nerveux, onimagine qu’il faut, <strong>de</strong> la même manière, que la somme <strong>de</strong>s signaux unitaires atteigne un seuil pourque le pot<strong>en</strong>tiel d’action soit créé. C’est sans doute l’accumulation <strong>de</strong> signaux auquel participel’analyste qui va am<strong>en</strong>er l’interlocuteur à lui-même solliciter une séance <strong>de</strong> réflexion.Nous laissons là temporairem<strong>en</strong>t cette discussion qui sera poursuivie à la fin <strong>de</strong> ce chapitrelorsque nous <strong>en</strong> vi<strong>en</strong>drons aux formes <strong>de</strong> restitution <strong>de</strong>s analyses. Le chercheur connaît d’autresdifficultés dans la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête qualitative, notamm<strong>en</strong>t lié à sa posture. « Dans une<strong>en</strong>quête par questionnaire ou par <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>, ou <strong>en</strong>core dans un docum<strong>en</strong>t soumis à analyse, cesont effectivem<strong>en</strong>t les acteurs <strong>de</strong> terrain eux-mêmes qui rapport<strong>en</strong>t ce qu’ils ont vu ou voi<strong>en</strong>thabituellem<strong>en</strong>t à telle occasion qui intéresse l’étu<strong>de</strong>. Or un phénomène ne saurait se laisserré<strong>du</strong>ire à ce que les « participants » peuv<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> dire » (Arnaud, 1996). L’interviewé peut avoirt<strong>en</strong>dance, <strong>de</strong> façon consci<strong>en</strong>te ou non, à mettre <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s tactiques pour gar<strong>de</strong>r un contrôlesur les données informatives pro<strong>du</strong>ites. Cela peut se manifester par <strong>de</strong> la non-information(r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous annulés, retards…), <strong>de</strong> la surinformation ou <strong>de</strong> la désinformation (bluff,comportem<strong>en</strong>ts « sé<strong>du</strong>cteurs », aiguillage <strong>du</strong> chercheur vers <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> garage ou sur <strong>de</strong>s faussespistes, etc.) (Arnaud, 1996 citant Riveline & Maheu, 1983 ; Girin, 1987). Ce phénomène r<strong>en</strong>dcrucial l’effort que l’analyste doit investir dans le recoupem<strong>en</strong>t et dans la triangulation qui est unprincipe clé pour l’analyse <strong>du</strong> matériau constitué par l’exercice <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> (Olivier <strong>de</strong> Sardan,1995b).S’efforcer <strong>de</strong> trianguler est égalem<strong>en</strong>t une façon d’éviter <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> remettre démesurém<strong>en</strong>t à un« informateur privilégié ». D’après J-P Olivier <strong>de</strong> Sardan (ibid.), « il est impossible <strong>de</strong> se passerd’informateurs privilégiés, et pour <strong>de</strong> multiples raisons. Parce que les affinités personnelles jou<strong>en</strong>tun rôle important dans la recherche <strong>de</strong> terrain. Parce que d’un thème <strong>de</strong> recherche à l’autre, d’un« problème » à l’autre, les compét<strong>en</strong>ces locales vari<strong>en</strong>t et sont inégales. Parce que les capacités <strong>de</strong>communication <strong>du</strong> chercheur avec chacun, et vice versa, sont très variables. Parce que tous lesconsultants et tous les récitants ne se val<strong>en</strong>t pas, <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> qualité ou <strong>de</strong> quantitéd’information » (ibid. : 18). Pour s’<strong>en</strong> émanciper, la « tactique » mise <strong>en</strong> œuvre a été <strong>de</strong> lesmultiplier. Au début <strong>de</strong> la recherche, l’informateur privilégié était le directeur général <strong>de</strong> la TdVavec qui l’accord sur ce travail <strong>de</strong> thèse avait été passé. Rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t, nous avons cherché àinstaurer ce que l’on pourrait appeler un dialogue perman<strong>en</strong>t avec plusieurs autres membres <strong>de</strong> laTdV. Ceci a été facilité par <strong>de</strong>s opportunités pratiques – par exemple le co-voiturage, le partaged’un bureau – qui permett<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s discussions dans la <strong>du</strong>rée. Avec d’autres, cesrelations ont pu se tisser sur le simple fait que nous étions considérée comme la personne86


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivedisposée, ouverte et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>use <strong>de</strong> discussions relatives à la stratégie, l’action, et tous ces objetsqui préoccup<strong>en</strong>t les acteurs qui <strong>en</strong> sont responsables.Si le meilleur moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> surmonter ces biais inhér<strong>en</strong>ts à la démarche <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> consiste à lespr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte dans l’analyse, un moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> les minimiser rési<strong>de</strong> dans la multiplication <strong>de</strong>smétho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> « pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s données », pour repr<strong>en</strong>dre l’expression <strong>de</strong> J-L. Le Moigne (1990)par opposition à l’idée d’un recueil objectif <strong>de</strong>s informations qui serai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s « morceaux <strong>de</strong> réel »cueillis et conservés tels quels par le chercheur (l’illusion positiviste) (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995b ;Arnaud, 1996).2.3.2 L’observation in situL’observation est un moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> minimiser les biais <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>, dans la mesureoù il permet <strong>de</strong> ne pas se limiter à ce que l’interviewé veut bi<strong>en</strong> dire d’un objet sur lequel onl’interroge. En cela, Gilles Arnaud (1996) indique que « l’observation in situ mérite mieux que cestatut <strong>de</strong> simple préliminaire à une expérim<strong>en</strong>tation, car elle a une spécificité épistémologique qu<strong>en</strong>e possèd<strong>en</strong>t pas les métho<strong>de</strong>s concurr<strong>en</strong>tes » et qui rési<strong>de</strong> principalem<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sionsinterdép<strong>en</strong>dantes : (1) ce que l’observateur va voir et transformer <strong>en</strong> données, (2) ce que laprés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’observateur in<strong>du</strong>it par son influ<strong>en</strong>ce sur les situations qu’il observe.La pratique <strong>de</strong> l’observation mise <strong>en</strong> œuvre dans notre recherche peut être prés<strong>en</strong>tée comme undéplacem<strong>en</strong>t sur un gradi<strong>en</strong>t qui irait <strong>de</strong> l’« observation participante sans participation int<strong>en</strong>tionnelle » àune « participation int<strong>en</strong>tionnelle avec observation <strong>de</strong> cette participation ». Le lecteur aura remarqué que l’onévite l’expression pourtant <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus répan<strong>du</strong>e « <strong>de</strong> l’observation participante à laparticipation observante ». Nous p<strong>en</strong>sons, à la manière <strong>de</strong> B. Soulé (2007 : 10) que « le recours auterme <strong>de</strong> participation observante semble parfois résulter d’une acception rétrécie <strong>de</strong> la notiond’observation participante ». Dans une approche clinique, voire ethnographique <strong>du</strong> terrain,l’observation est indissociable <strong>de</strong> la participation, et l’inversion <strong>de</strong>s termes ne remplaceraitd’aucune manière les implications méthodologiques que le chercheur se doit d’expliciter. C’est ceà quoi nous allons donc maint<strong>en</strong>ant nous employer à partir <strong>de</strong> nos expressions peut-être pluslour<strong>de</strong>s et moins <strong>en</strong> vogue, mais dont la connotation est peut-être plus claire.1. Par cette idée d’« observation participante sans participation int<strong>en</strong>tionnelle », nous voulons souligner lefait que l’analyste ne peut « observer objectivem<strong>en</strong>t » <strong>de</strong>s acteurs sans que sa prés<strong>en</strong>ce ait uneinflu<strong>en</strong>ce plus ou moins gran<strong>de</strong> sur eux, et une att<strong>en</strong>tion doit y être portée pour l’analyse <strong>de</strong> cesobservations. Nous reportons cette discussion sur la posture <strong>de</strong> l’analyste à la section 2.4 relative87


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEà la secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> recherche, car ses implications concern<strong>en</strong>t la démarche <strong>de</strong> recherche dansson <strong>en</strong>semble, et non pas seulem<strong>en</strong>t la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’observation. Nous nous cont<strong>en</strong>tons <strong>de</strong> noterici que cette influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’analyste sur les situations aura t<strong>en</strong>dance à être plus importante lorsqueles participants prés<strong>en</strong>ts sont peu nombreux et connaiss<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> l’analyste (par exemple uneréunion interne portant sur un objet sur lequel les acteurs ont été interrogés par l’analyste) etmoins importante lorsque l’analyste est plus « anonyme » et que les événem<strong>en</strong>ts sont ou serapproch<strong>en</strong>t <strong>de</strong> procé<strong>du</strong>res formelles (par exemple un conseil d’administration).J-P Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995b) propose une distinction à un autre niveau, et c’est sur elle que nousnous appuyons ici pour expliquer la façon dont est m<strong>en</strong>ée l’observation participante sans participationint<strong>en</strong>tionnelle. D’un côté, le chercheur consigne les observations et interactions : elles setransform<strong>en</strong>t alors <strong>en</strong> données et corpus. D’autres observations rest<strong>en</strong>t informelles et lat<strong>en</strong>tes, ellessont <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> l’imprégnation.Nous percevons les signes <strong>de</strong> cette imprégnation <strong>de</strong> manière différée, lorsqu’on se surpr<strong>en</strong>d parexemple à utiliser le vocabulaire <strong>de</strong>s acteurs ou lorsque le réflexe est pris <strong>de</strong> tourner le regard versles recoins où l’on est susceptible <strong>de</strong> voir <strong>de</strong>s oiseaux, <strong>en</strong> imitant les ornithologues que nouscôtoyons.Concernant les données construites par l’observation, elles constitu<strong>en</strong>t une part non négligeable<strong>de</strong> notre corpus qui vi<strong>en</strong>t compléter les cont<strong>en</strong>us <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s puisque nous cherchions àid<strong>en</strong>tifier et compr<strong>en</strong>dre les processus d’élaboration stratégique, sa mise <strong>en</strong> œuvre, <strong>en</strong> sommetoutes les pratiques associées à la construction et la réalisation <strong>de</strong>s actions. Nous avons recherchépour cela toutes les occasions d’assister aux « interactions discursives locales dans lesquelles lechercheur n’est que peu ou pas <strong>en</strong>gagé, c’est-à-dire ce qui se donne à <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre » (Olivier <strong>de</strong>Sardan, 1995b : 5). Comme le dit l’auteur, « le chercheur est un voyeur, mais c’est aussi un «écouteur ». « Les dialogues <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre eux val<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> ceux qu’il a avec eux ». Ceci r<strong>en</strong>voie à« l’opportunisme méthodique » proposé par J. Girin (1987), idée selon laquelle, <strong>en</strong> rechercheinteractive, l’analyste doit adopter un comportem<strong>en</strong>t opportuniste visant à saisir <strong>de</strong> manièreintellig<strong>en</strong>te les possibilités d'observation qu'offr<strong>en</strong>t les circonstances, même si cela doit modifierle programme <strong>de</strong> terrain et év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t faire évoluer le questionnem<strong>en</strong>t. La consignation <strong>de</strong>ces observations a été effectuée sur <strong>de</strong>s situations informelles saisies fortuitem<strong>en</strong>t, mais surtoutsur <strong>de</strong>s processus formels comme les comités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ou d’autres réunions internes. Pour lescas d’étu<strong>de</strong>, ces données ont été notamm<strong>en</strong>t construites p<strong>en</strong>dant les réunions « atelier avec lespart<strong>en</strong>aires », « atelier <strong>de</strong> clôture », <strong>en</strong> somme les événem<strong>en</strong>ts au cours <strong>du</strong> déroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet.L’événem<strong>en</strong>t suivi avec le plus d’assi<strong>du</strong>ité à été, comme indiqué, la planification stratégique initiée88


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveau début <strong>de</strong> l’année 2009 et ayant été rythmée par <strong>de</strong> nombreuses séances <strong>de</strong> travail, réunions,etc. <strong>du</strong>rant tout le reste <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain.2. La planification stratégique <strong>de</strong> la TdV (pour le programme 2011-2015) a marqué dans notredémarche le passage à notre secon<strong>de</strong> phase, p<strong>en</strong>dant laquelle la participation est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ueint<strong>en</strong>tionnelle (sans pour autant que l’observation prés<strong>en</strong>tée ci-<strong>de</strong>ssus n’ait plus été exercée).Cette participation int<strong>en</strong>tionnelle avec observation <strong>de</strong> cette participation est la métho<strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre pourtransmettre et confronter les résultats d’une première analyse aux acteurs observés afin <strong>de</strong>solliciter leur réflexivité et aller plus avant dans l’analyse. Cette participation int<strong>en</strong>tionnelle seconcrétise par <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions réfléchies dans <strong>de</strong>s situations d’échange informelles ou formelles<strong>en</strong>tre les acteurs : par exemple <strong>de</strong>s discussions fortuites ou <strong>de</strong>s réunions concernant <strong>de</strong>s aspects<strong>de</strong> la stratégie générale ou les projets et actions que nous avons analysés <strong>en</strong> détail. Nous avons pusur certaines questions (ou projets étudiés) acquérir le statut <strong>de</strong> « personne supplém<strong>en</strong>taire pourai<strong>de</strong>r à la réflexion ». Une autre forme <strong>de</strong> participation active est l’échange sur docum<strong>en</strong>t, autresource <strong>de</strong> d’information qu’il est maint<strong>en</strong>ant temps <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter.2.3.3 L’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>tsL’analyse <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts est la troisième et indisp<strong>en</strong>sable métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s données.Comm<strong>en</strong>çons par distinguer les <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>tation explorés dès le début <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête<strong>de</strong> terrain.L’une est la docum<strong>en</strong>tation pro<strong>du</strong>ite par les ONGE, <strong>en</strong> recherchant <strong>en</strong> particulier celle qui traite<strong>de</strong> leur stratégie, <strong>de</strong> leur programme d’action et <strong>de</strong>s évaluations <strong>de</strong> ces actions. Cette opérationvisait à se familiariser davantage avec le secteur – autrem<strong>en</strong>t dit développer sa culture sur l’objetd’étu<strong>de</strong> – et à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les questions étai<strong>en</strong>t traitées par ces différ<strong>en</strong>tesorganisations : construction <strong>du</strong> problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal traité, justification et explication <strong>de</strong>schoix d’action, évaluation et mo<strong>de</strong>s d’expression <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’action. Nous avons puconstater que ces explications ou justifications avai<strong>en</strong>t largem<strong>en</strong>t recours aux mêmes doctrinescontemporaines (comme le développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable, les services écosystémiques, etc.) quifourniss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> général la formulation <strong>du</strong> problème, les métho<strong>de</strong>s et les justifications <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>sd’action. Il n’est pas question <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser que ces gran<strong>de</strong>s ONGE n’ont pas beaucoupd’imagination et pas davantage <strong>de</strong> savoir-faire <strong>de</strong> terrain. La seule conclusion (provisoire pourl’analyse) que nous pouvons <strong>en</strong> tirer est qu’il n’est pas aisé – ou pas voulu – d’exprimer ainsiprécisém<strong>en</strong>t les stratégies d’action construites et réellem<strong>en</strong>t mise <strong>en</strong> œuvre. Il y a probablem<strong>en</strong>t89


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE<strong>de</strong>s raisons à cela qu’il nous faudra alors compr<strong>en</strong>dre et éclairer. Ceci nous conforte dans l’idéeque l’action et les stratégies <strong>de</strong>s ONGE ne peuv<strong>en</strong>t être comprises que dans une étu<strong>de</strong> fine <strong>de</strong>sespaces d’action où elles intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t et dans une approche qui va chercher la stratégie là où ellese construit et s’exprime.Cela débouche sur le <strong>de</strong>uxième type <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>t : les docum<strong>en</strong>ts pro<strong>du</strong>its et utilisés par lesmembres <strong>de</strong> la TdV. Dans un premier temps, il s’agit <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre connaissance <strong>de</strong>s « donnéesobjectives » existantes sur l’organisation pour faire sa connaissance et être préparée à converseravec ses membres. L’att<strong>en</strong>tion portée aux docum<strong>en</strong>ts utilisés par les acteurs <strong>de</strong> la TdV euxmêmesvise à connaître et compr<strong>en</strong>dre leurs référ<strong>en</strong>ces. Il ne s’agit évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t pas d’uninv<strong>en</strong>taire exhaustif <strong>de</strong> la littérature utilisée par une tr<strong>en</strong>taine <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiques et <strong>de</strong> spécialistes <strong>de</strong>la conservation. Ceci est vrai surtout dans le cas <strong>de</strong>s projets et <strong>de</strong>s actions étudiées. Cettelittérature mobilisée par les acteurs est très large : la littérature sci<strong>en</strong>tifique, la littérature grisepro<strong>du</strong>ite par d’autres ONGE, celle ayant trait ou à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires d’espacesnaturels, la littérature technique sur les indicateurs <strong>de</strong> biodiversité, etc.Une analyse <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts supplém<strong>en</strong>taire – et <strong>de</strong> première importance – a été réalisée sur ceuxrelatifs à l’élaboration stratégique, la stratégie formalisée, l’évaluation <strong>de</strong>s programmes d’actionmis <strong>en</strong> œuvre. Il s’agit notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Plans stratégiques (le plan quinqu<strong>en</strong>nal 2001-2005 et 2006-2010), les comptes-r<strong>en</strong><strong>du</strong>s <strong>de</strong> réunions réalisées dans le cadre <strong>de</strong> la planification stratégique 2011-2015 voire <strong>de</strong> certaines réunions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> courante, les comptes-r<strong>en</strong><strong>du</strong>s <strong>de</strong> conseilsd’administrations et conseils sci<strong>en</strong>tifiques, la synthèse <strong>de</strong> l’évaluation <strong>du</strong> programme 2006-2010.Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> connaissance « objective » et <strong>de</strong> l’évolution <strong>du</strong> questionnem<strong>en</strong>t, l’analyse<strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts pro<strong>du</strong>its par la TdV revêt <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux fondam<strong>en</strong>taux au regard <strong>de</strong> l’adéquation d<strong>en</strong>otre démarche <strong>de</strong> recherche à notre problématique. Nous <strong>en</strong> relevons trois.1. Comme le souligne M. Leroy (2006a : 60), « l’<strong>en</strong>quête sociologique ne peut pas à elle seulepermettre une analyse <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ». Ce qu’elle explique – dans le cas <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>sdispositifs créés pour la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> d’un fleuve (mais l’objet géré pourrait êtreautre) – c’est que l’analyse <strong>de</strong> ces dispositifs ne peut se faire que dans le croisem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sinformations obt<strong>en</strong>ues par les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec les « traces objectives » <strong>de</strong> l’action qui marqu<strong>en</strong>t etcristallis<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étapes <strong>du</strong> processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> ces dispositifs. Notre <strong>en</strong>trée estdiffér<strong>en</strong>te : nous étudions l’élaboration d’une stratégie et la construction <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par une ONGE. Le principe est néanmoins id<strong>en</strong>tique : les visions <strong>de</strong>s acteursdoiv<strong>en</strong>t être croisées avec les décisions et les choix stratégiques formalisés, c’est-à-dire au moinstemporairem<strong>en</strong>t arrêtés, les configurations qui ont donné lieu à <strong>de</strong>s inscriptions, marquantl’évolution <strong>de</strong> la stratégie (compr<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>s continuations et <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts). Ceci permet90


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexived’obt<strong>en</strong>ir une vue générale (pour ne pas dire les marques d’une dynamique collective) <strong>de</strong> laconstruction <strong>de</strong> l’action.2. L’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts est égalem<strong>en</strong>t cruciale pour notre <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> recherche résidant dansl’articulation <strong>de</strong> la stratégie aux impacts <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions. Il est évid<strong>en</strong>t qu<strong>en</strong>ous ne sommes pas <strong>en</strong> mesure, <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces, <strong>de</strong> faire nous-mêmes l’évaluation <strong>de</strong>l’état matériel <strong>de</strong>s ZH que la TdV s’est donné pour mission <strong>de</strong> conserver. Nous ne sommes pasdavantage <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> juger la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux concrets queformul<strong>en</strong>t les experts <strong>de</strong>s ZHM que sont les acteurs <strong>de</strong> la TdV. L’attachem<strong>en</strong>t à ces objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux annoncés – que l’on trouve dans les docum<strong>en</strong>ts stratégiques – nous permetnéanmoins <strong>de</strong> « retrouver une extériorité » ou une distance critique après une immersion dans lasubjectivité <strong>de</strong>s acteurs pour repr<strong>en</strong>dre les mots <strong>de</strong> Friedberg (1997[1993]), mais surtout <strong>de</strong>trouver un ancrage, une référ<strong>en</strong>ce pour l’analyse <strong>de</strong> la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la stratégie (i.e. la cohér<strong>en</strong>ce<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’actions au regard <strong>de</strong>s objectifs et la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s choix stratégiques au regard <strong>de</strong>scapacités humaines et matérielles).3. Enfin, le <strong>de</strong>rnier <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données relève <strong>de</strong> la « politiquegénéral <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain » (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995b) et <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> trianguler lesinformations. Comme nous l’avons évoqué plus haut, il faut d’une part trianguler les donnéesobt<strong>en</strong>ues par une même métho<strong>de</strong> – comparer les regards <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts informateurs pourl’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>. D’autre part, il convi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> multiplier et, comme nous l’avons dit, <strong>de</strong> croiser lesdonnées construites par les différ<strong>en</strong>tes métho<strong>de</strong>s utilisées.2.4 La secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> terrain : <strong>en</strong>tre constructivisme etnormativité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLe démarrage <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>du</strong> futur programme quinqu<strong>en</strong>nal <strong>de</strong> la TdV (2011-2015) au début <strong>de</strong> l’année 2009 a été l’opportunité <strong>de</strong> quitter la phase exploratoire et <strong>de</strong>scriptive<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain et <strong>de</strong> basculer dans une phase réflexive.2.4.1 Construction <strong>de</strong> la connaissance : solliciter la réflexivité <strong>de</strong>s acteursLa première phase a consisté à compr<strong>en</strong>dre la manière dont se pose le problème, à affiner lequestionnem<strong>en</strong>t et pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s analyses provisoires. Aller plus loin dans l’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain et91


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEdans la construction <strong>de</strong>s données nécessite d’aller chercher plus loin dans la logique <strong>de</strong>s acteurs<strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> solliciter plus fortem<strong>en</strong>t leur réflexivité sur leur action, leur appropriation <strong>de</strong> lastratégie, leur désir et leurs idées face aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation qui sont les leurs. Le procédé <strong>de</strong>recherche mis <strong>en</strong> œuvre à cet effet est celui <strong>de</strong> la restitution. Erhard Friedberg est <strong>de</strong> ceux quiconçoiv<strong>en</strong>t la restitution d’abord comme un instrum<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>quête supplém<strong>en</strong>taire avant d’être uninstrum<strong>en</strong>t d’interv<strong>en</strong>tion (ce que l’on abor<strong>de</strong>ra à la fin <strong>de</strong> ce chapitre) : « loin <strong>de</strong> ne constituerqu’une formalité <strong>de</strong> fin d’<strong>en</strong>quête, comme c’est souv<strong>en</strong>t le cas, elle est un dispositif <strong>de</strong> rechercheess<strong>en</strong>tiel qui permet une itération supplém<strong>en</strong>taire et souv<strong>en</strong>t ess<strong>en</strong>tielle <strong>en</strong>tre le terrain etl’interprétation » (Friedberg, 1997[1993] : 322). Ce n’est pas tant une validation que cherchel’analyste dans la restitution, mais « l'observation <strong>de</strong> la confrontation <strong>de</strong>s intéressés autour <strong>de</strong>sdonnées que son travail a pro<strong>du</strong>ites », pour susciter une discussion plus aboutie sur lesphénomènes soulevés. C’est donc l’exercice auquel nous nous sommes livrée par une progression<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données vers une interaction plus forte : la« conversation exploratoire » a évolué <strong>en</strong> discussion argum<strong>en</strong>tée, la participation int<strong>en</strong>tionnelle apris le <strong>de</strong>ssus sur l’observation avec participation passive, les docum<strong>en</strong>ts relatifs à la planificationstratégique sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>us un support d’échange.Par ailleurs le procédé <strong>de</strong> la restitution est un moy<strong>en</strong> pour le chercheur <strong>de</strong> contrôler son« irré<strong>du</strong>ctible subjectivité ». La restitution n’est <strong>en</strong> cela qu’un moy<strong>en</strong> qui doit s’inscrire dans uneffort <strong>de</strong> formalisation et d’explicitation <strong>de</strong> la démarche globale <strong>de</strong> recherche (ibid. : 322) 55 . J-POlivier <strong>de</strong> Sardan ne dit pas autre chose quant à cette subjectivité <strong>du</strong> chercheur : « ce biais estinévitable : il ne doit être ni nié (attitu<strong>de</strong> positiviste) ni exalté (attitu<strong>de</strong> subjectiviste). Il ne peutqu’être contrôlé, parfois utilisé, parfois minimisé. [...] Il s’agit <strong>en</strong> l’occurr<strong>en</strong>ce non seulem<strong>en</strong>td’expliquer « d’où l’on parle », mais aussi « d’où l’on a pro<strong>du</strong>it ses données », et comm<strong>en</strong>t. Niplus, ni moins » (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995b : 20). Cette formalisation et explicitation <strong>de</strong> ladémarche <strong>de</strong> recherche relèv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> validité sci<strong>en</strong>tifique <strong>du</strong> travail <strong>de</strong> rechercheaccompli, mais elles ont égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s implications vis-à-vis <strong>de</strong> processus <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong> luimême.En effet, solliciter davantage la réflexivité <strong>de</strong>s sujets étudiés implique <strong>de</strong> se livrer soimêmeà une réflexivité sur sa propre posture, afin d’être <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> poursuivre la négociationtacite qui nous lie à l’interlocuteur : « si tu veux que je t’<strong>en</strong> dise plus, tu dois m’<strong>en</strong> dire plus toi-55 « La prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la subjectivité <strong>du</strong> chercheur est irré<strong>du</strong>ctible. Il n’<strong>en</strong> reste pas moins qu’<strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>du</strong> respect <strong>de</strong>srègles élém<strong>en</strong>taires <strong>de</strong> la logique et <strong>de</strong> l’argum<strong>en</strong>tation rationnelle qui constitu<strong>en</strong>t la condition d’exist<strong>en</strong>ce d’undiscours sci<strong>en</strong>tifique, c’est dans le respect d’une démarche aussi formalisée que possible que rési<strong>de</strong> la garantieprincipale, voire unique, face à l’exercice débridé et totalem<strong>en</strong>t hors <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> la subjectivité <strong>du</strong> chercheur »(Friedberg, 1998[1993] : 322).92


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivemême sur ce que tu veux et ce que tu comptes <strong>en</strong> faire ». Nous allons donc à prés<strong>en</strong>t nousattacher à expliciter notre visée axiologique qui est d’abord liée à la subjectivité <strong>du</strong> chercheurqu’elle canalise dans un choix et une posture théoriques, pour <strong>en</strong>suite discuter <strong>de</strong> ses implicationsau regard <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain c<strong>en</strong>trée sur une ONGE.2.4.2 Clarifier la posture normative : l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tAucune démarche <strong>de</strong> recherche ne peut objectivem<strong>en</strong>t se proclamer libre <strong>de</strong> toute normativité. A.Caillé (1992 : 33) l’explique très clairem<strong>en</strong>t dans ces propos relevés par M. Leroy (2006a : 30) :« Il est clair que si la connaissance n’est pas aussi connaissance <strong>de</strong>s critères à partir<strong>de</strong>squels nous décidons ce qui est souhaitable et ce qui ne l’est pas, ce qui nous paraîthumain ou inhumain, alors cette connaissance est nulle et non av<strong>en</strong>ue ». Car lesexig<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la connaissance sont <strong>de</strong> décrire. Ce qui revi<strong>en</strong>t à faire <strong>de</strong>s classifications,expliquer, chercher les causes et les effets (les causalités pouvant être multiples et <strong>en</strong>particulier symboliques), compr<strong>en</strong>dre, <strong>en</strong> interrogeant le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’action, et normer,évaluer. « Toute <strong>de</strong>scription est par nature infinie si elle n’est pas soumise à <strong>de</strong>s critères<strong>de</strong> sélection. Et quel autre critère <strong>de</strong> sélection est-il concevable, <strong>en</strong> <strong>de</strong>rnière instance, quecelui <strong>du</strong> jugem<strong>en</strong>t normatif, aussi longtemps que l'on accepte ou déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> susp<strong>en</strong>drecelui-ci ? » (ibid. : 34).Choisir <strong>de</strong> travailler sur les stratégies <strong>de</strong>s ONGE – pour éclairer les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre l’action et sonimpact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal et chercher à développer le raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour r<strong>en</strong>forcercette action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale – est évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’analyste dans une recherchequi a pour finalité d’améliorer l’état matériel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ainsi, il s’agit <strong>en</strong> premier lieud’un <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t. Pour G. Arnaud (1996 : 240), « le chercheur observe et « parle » nécessairem<strong>en</strong>td’un certain « lieu épistémique », fait <strong>en</strong>tre autres <strong>de</strong> désirs, jugem<strong>en</strong>ts et hypothèses. S’il veutfaire œuvre sci<strong>en</strong>tifique et ne pas se condamner au préjugé, il a donc intérêt à connaître et reconnaîtrece « lieu » subjectif, le questionner, pour <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ir et <strong>en</strong> r<strong>en</strong>dre compte ; il doit pr<strong>en</strong>dre lamesure et <strong>en</strong> même temps témoigner <strong>de</strong> son cadre théorique sous-jac<strong>en</strong>t, ainsi que <strong>de</strong>s valeurs quis’y rattach<strong>en</strong>t […] ».Une fois le rejet d’une supposée neutralité axiologique exprimé, nous pouvons alors saisir larigueur <strong>de</strong> notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, qui pose comme premierprincipe la nécessité d’« appuyer l’analyse <strong>du</strong> système d’action lié à un problème d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tsur une définition préalable, <strong>en</strong> termes écologiques, <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>compte et <strong>de</strong>s objectifs poursuivis » (Mermet et al. 2005 : 129). Ce principe pose d’emblée et trèsclairem<strong>en</strong>t le plan normatif au regard <strong>du</strong>quel nous interrogeons la société, les actions, les systèmes<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Dit autrem<strong>en</strong>t, « la formule un peu provocatrice « buts dans la nature, moy<strong>en</strong>s dans la93


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEsociété » insiste sur la ponctuation 56 très spécifique qu’opère, dans le continuum socio-écologique,l’opération particulière qui consiste à répondre à une question précise <strong>de</strong> responsabilité sur l’état<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » (ibid. : 129). C’est seulem<strong>en</strong>t par cette posture normative que nous pouvonsm<strong>en</strong>er une analyse critique fondée sur <strong>de</strong>s critères explicites, situés, mais non subjectifs.Lorsqu’on travaille comme M. Leroy (2006a : 29) sur <strong>de</strong>s dispositifs nationaux ou internationaux<strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ou comme dans notre cas sur une organisation fondée parsa mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, cela implique <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre au sérieux les annonces sur lesquelles peutêtre déployée l’analyse critique – qui passe par la mise <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion d’un état <strong>de</strong> chose désirableavec un état <strong>de</strong> choses réel (Boltanski & Chiapello, 1999 : 69).M<strong>en</strong>er une recherche clinique, c’est-à-dire au plus près <strong>de</strong> l’ONGE pour pro<strong>du</strong>ire un diagnostic<strong>de</strong> sa stratégie et id<strong>en</strong>tifier les leviers pour son r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> replaçant les données construitesdans une analyse critique pourrait <strong>de</strong> prime abord paraître incommo<strong>de</strong>. Mais cette impression nerésiste pas à la mise <strong>en</strong> pratique <strong>de</strong> cette démarche <strong>de</strong> recherche qui pro<strong>du</strong>it au contraire <strong>de</strong>séclairages à partir <strong>de</strong> cette t<strong>en</strong>sion liée à la <strong>du</strong>alité <strong>de</strong> notre posture d’étu<strong>de</strong> clinique et critique.L’intérêt <strong>de</strong> cette t<strong>en</strong>sion apparaît à <strong>de</strong>ux niveaux.1. D’une part, l’ONGE souhaite atteindre les objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qu’elle s’est fixés.Notre démarche critique nous incite à pr<strong>en</strong>dre les objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux – état écologique<strong>de</strong>s objets à rétablir – comme la référ<strong>en</strong>ce pour l’analyse <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre. Cerepère critique s’avère nécessaire pour ai<strong>de</strong>r l’organisation dans le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son action et<strong>de</strong> ses impacts au regard <strong>de</strong>s objectifs annoncés qui, comme nous l’avons expliqué, est unepréoccupation exprimée par la TdV elle-même comme par d’autres ONGE. Le repère critiquevi<strong>en</strong>t donc r<strong>en</strong>forcer le cadrage pour une approche clinique. Ensuite, l’ONGE est jugée, par sesorganes <strong>de</strong> gouvernance, par la société, sur l’atteinte <strong>de</strong> cette mission. Notre approche critiquepourrait alors être perçue comme une pratique <strong>du</strong> jugem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’ONGE. Au contraire, notredémarche clinique <strong>de</strong>vant ai<strong>de</strong>r l’organisation à se r<strong>en</strong>forcer pour atteindre sa mission est aussiune ai<strong>de</strong> visant à la préparer à l’épreuve <strong>de</strong> jugem<strong>en</strong>t.2. D’autre part, l’ONGE n’a pas le pouvoir suffisant pour que l’état écologique <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong><strong>gestion</strong> où elle intervi<strong>en</strong>t ne repose que sur elle. On ne peut donc pas, <strong>de</strong> manière juste, la jugersur le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> résolution <strong>de</strong>s problèmes et l’état final <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong>s espèces qui font56 « Ce concept ess<strong>en</strong>tiel, emprunté aux travaux <strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> Palo Alto (Watzlawick et al., 1977), désigne le choix parlequel un observateur, <strong>de</strong>vant un <strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t continu d’événem<strong>en</strong>ts (causalité circulaire ou <strong>en</strong>chevêtrée, parexemple), fon<strong>de</strong> une ligne particulière d’analyse <strong>en</strong> désignant l’un <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t commepremier » (Mermet et al., 2005).94


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivel’objet son action. Notre approche critique ne consiste pas à dé<strong>du</strong>ire l’inefficacité <strong>de</strong> la TdV <strong>de</strong>l’état <strong>de</strong>s ZHM qui continu<strong>en</strong>t à se dégra<strong>de</strong>r. L’analyse <strong>de</strong> sa stratégie et <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions est àreplacer dans la <strong>gestion</strong> telle qu’on la conçoit :« Il n'y a pas <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> sans objectifs, ni responsabilités. Voir une situation<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, c'est projeter sur un système (biologique,technique, économique, social) complexe une référ<strong>en</strong>ce simple « conserver ou rétablir lesqualités désirables » <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, qui recouvre à la fois un but que la <strong>gestion</strong> viseà atteindre, et une responsabilité qui incombe, nol<strong>en</strong>s vol<strong>en</strong>s, à ceux qui ont quelquepouvoir dans le cadre <strong>de</strong> cette situation » (Mermet, 2006[1998] : 247).C’est dire que l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> la TdV est analysée au regard <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts,mais sa responsabilité quant à l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est observée par rapport auxresponsabilités causales <strong>de</strong> tous les acteurs appart<strong>en</strong>ant au système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. L’étu<strong>de</strong> cliniqueréalisée au regard <strong>du</strong> repère critique <strong>de</strong>s objectifs écologiques à atteindre nous ai<strong>de</strong>ra alors àdéterminer la contribution <strong>de</strong> la TdV à l’amélioration <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong>s objets visés.Cep<strong>en</strong>dant, bi<strong>en</strong> que l’analyste partage la visée normative <strong>de</strong> l’ONGE (ici, l’amélioration <strong>de</strong> l’état<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) et qu’il s’attache à résoudre avec elle <strong>de</strong>s problèmes auxquels elle estconfrontée, il doit négocier la réalisation <strong>du</strong> travail <strong>de</strong> recherche avec les membres <strong>de</strong> cetteorganisation. Romain Taravella (2007) a pu son<strong>de</strong>r les difficultés <strong>de</strong> cette négociation pour <strong>en</strong>avoir fait l’expéri<strong>en</strong>ce sur le dossier épineux <strong>de</strong>s fronts <strong>de</strong> déforestation <strong>de</strong> la forêt amazoni<strong>en</strong>neau Brésil. Dans sa thèse, il fait un récit épique <strong>de</strong> son approche <strong>du</strong> terrain (ibid. : 106-160) qu’il at<strong>en</strong>té d’abor<strong>de</strong>r directem<strong>en</strong>t par le côté <strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui s’occupai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cesquestions <strong>de</strong> déforestation. Il a pu constater que les portes n’étai<strong>en</strong>t pas aisém<strong>en</strong>t ouvertes. C’estaprès plusieurs mois passés sur une zone <strong>de</strong> déforestation et la réalisation d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s auprès <strong>de</strong>sacteurs <strong>du</strong> terrain jusque-là peu <strong>en</strong>quêtés, ayant alors <strong>en</strong>grangé une connaissance fine <strong>de</strong>sprocessus à l’œuvre, qu’il a pu rev<strong>en</strong>ir échanger avec les ONGE.Cela nous invite à exposer les implications <strong>de</strong> la posture dans la pratique <strong>de</strong> recherche vis-à-vis <strong>de</strong>l’ONGE étudiée.2.4.3 Négocier la réalisation <strong>de</strong> la recherche avec l’ONGE : la nécessaireréflexivité <strong>de</strong> l’analysteDe notre côté, nous avons fait le choix initial <strong>de</strong> réaliser un travail approfondi sur une ONGE –plutôt que sur plusieurs – et d’investir l’interne <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong> façon détaillée. Comme nousl’avons dit plus haut, J-M. Plane souligne que la recherche-interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> organisation doit être95


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE<strong>en</strong>visagée dans une préoccupation qui « consiste à s'assurer <strong>de</strong> la converg<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les intérêtsthéoriques <strong>de</strong>s chercheurs et les préoccupations légitimem<strong>en</strong>t opérationnelles <strong>de</strong>s[organisations] » (Plane, 2003 : 203), car comme l’indique J. Girin, « une prés<strong>en</strong>ce prolongée [<strong>de</strong>schercheurs] sur le terrain n’est jamais autorisée si l’organisation n’a aucun intérêt à ce qui va <strong>en</strong>sortir » (Girin, 1990 : 162). Nous avons été accueillie par la TdV, dont le directeur général étaitouvert à la démarche. Plus précisém<strong>en</strong>t, il avait échangé avec notre <strong>en</strong>cadrante au sujet <strong>de</strong> ladifficulté, mais <strong>en</strong> même temps <strong>de</strong> la nécessité d’évaluer les impacts <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.Leur discussion a aboutie à la proposition d’un sujet <strong>de</strong> stage <strong>de</strong> master, auquel nous avonsrépon<strong>du</strong>. Une fois le master sout<strong>en</strong>u et l’allocation <strong>de</strong> recherche obt<strong>en</strong>ue pour la thèse, nousavons proposé au directeur <strong>de</strong> poursuivre le travail sur la TdV. Cette <strong>de</strong>rnière phrase peutparaître <strong>de</strong> l’ordre <strong>du</strong> détail, il y a pourtant <strong>de</strong>ux informations importantes à relever pour saisirnotre posture vis-à-vis <strong>de</strong> l’organisation : 1) nous avons proposé la poursuite <strong>du</strong> travail, ce n’estpas une comman<strong>de</strong> financière v<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> l’organisation (la TdV a cep<strong>en</strong>dant pourvu au frais <strong>de</strong>mission 57 ), et 2) il n’y a pas eu d’accord sur la forme <strong>de</strong>s résultats. Le projet <strong>de</strong> thèse a été validépar le comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la TdV (procé<strong>du</strong>re usuelle) compr<strong>en</strong>ant la direction et lescoordinateurs <strong>de</strong> programme, à la seule condition que le directeur général participe aux comités<strong>de</strong> thèse.Si la possibilité <strong>de</strong> réaliser ce travail <strong>de</strong> recherche était acquise, il fallait <strong>en</strong>core faire sa place dansl’organisation et négocier sa mise <strong>en</strong> œuvre avec ses membres. Les rapports observateur –observés ne sont <strong>en</strong> effet ni simples, ni innés. G. Arnaud (1996) explique les implications <strong>de</strong> lapratique <strong>de</strong> l’observation in situ <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.« Un chercheur <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> pénétrant dans une organisation peut être effectivem<strong>en</strong>taccepté et regardé pour ce qu’il est, à savoir un « sci<strong>en</strong>tifique désintéressé », dontl’insertion dans les rapports internes <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise n’est pas déterminée par <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux<strong>de</strong> pouvoir (au s<strong>en</strong>s large <strong>du</strong> terme). Cela ne signifie pas pour autant que les observésjoueront cartes sur table. En effet, même s’il n’est pas considéré comme « un espion à lasol<strong>de</strong> <strong>de</strong> la hiérarchie » le chercheur n’<strong>en</strong> est pas moins généralem<strong>en</strong>t appelé ou intro<strong>du</strong>itdans l’<strong>en</strong>treprise par la direction ou un cadre <strong>de</strong> haut niveau ; ce qui fait, au moinspot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t, un interlocuteur privilégié <strong>de</strong> cette catégorie <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>urs (Matheu,1986). […] Puisque l’observateur ne partage pas les mêmes risques que les acteursinternes qu’il observe, et qu’il peut se retirer <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise à moindres frais quand ill’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d, les observés ont effectivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bonnes et légitimes raisons <strong>de</strong> se méfier <strong>de</strong> lui[…] » (Arnaud, 1996 : 240).Méfiance, att<strong>en</strong>te, désintérêt, les réactions peuv<strong>en</strong>t être très variables, mais l’important est <strong>de</strong>ret<strong>en</strong>ir que les observés réagiss<strong>en</strong>t à la prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’observateur, parfois même <strong>de</strong> manière57 Sur la ligne budgétaire « direction ».96


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexivetactique <strong>en</strong> t<strong>en</strong>tant d’ori<strong>en</strong>ter le chercheur dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> leurs propres intérêts et projets (ne pasdivulguer certains faits <strong>en</strong> interne ou <strong>en</strong> externe, bloquer un changem<strong>en</strong>t organisationnel nondésiré, etc.) (ibid.). Ces réactions tra<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t le fait que les observés ne perçoiv<strong>en</strong>t pas l’observateurcomme neutre, mais qu’ils lui affect<strong>en</strong>t nécessairem<strong>en</strong>t « une place », ce qui a été expliqué par lesanthropologues G. Devereux (1980) et J. Favret-Saada (1977) sous le terme <strong>de</strong> « transfert », ettransposé aux sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par J. Girin (1990). Ces rapports observateur – observésinflu<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t inexorablem<strong>en</strong>t la construction <strong>de</strong>s données.L’analyste doit « donc compr<strong>en</strong>dre au plus vite quelle est cette place (ou cet <strong>en</strong>semble <strong>de</strong> places),afin <strong>de</strong> lui référer l’observation réalisée et <strong>de</strong> « déco<strong>de</strong>r » ainsi ce qu’on lui donne à voir »(Arnaud, 1996 : 249). Il peut év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t ne pas s’<strong>en</strong> cont<strong>en</strong>ter et essayer d’<strong>en</strong> proposer uneautre aux sujets observés, et « d’<strong>en</strong> assumer la portée » ajoute J. Favret-Saada (1977) qui pourétudier la sorcellerie dans le bocage normand a compris qu’ « il n’y a pas <strong>de</strong> place pour unobservateur non <strong>en</strong>gagé » et qui a dû se laisser pr<strong>en</strong>dre elle-même dans le phénomène qu’ellevoulait étudier.L’approche <strong>du</strong> terrain a été au début plutôt facile à la TdV. L’accueil par ses membres a semble-tilété une « juste mesure » <strong>en</strong>tre un a priori favorable <strong>en</strong>vers une nouvelle doctorante lié à laculture sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV, et une certaine indiffér<strong>en</strong>ce face à un doctorant <strong>de</strong> plus, parmi lesnombreux doctorants et étudiants qui travaill<strong>en</strong>t <strong>en</strong> li<strong>en</strong> plus ou moins fort avec l’organisation.P<strong>en</strong>dant la phase exploratoire <strong>du</strong> terrain, cette posture était assez confortable : les membres <strong>de</strong> laTdV accueillai<strong>en</strong>t plutôt ouvertem<strong>en</strong>t cet interlocuteur qui s’intéressait à leur travail, à leurscontraintes, etc. Toute la docum<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>mandée à toujours été mise à notre disposition etnous pouvions égalem<strong>en</strong>t accé<strong>de</strong>r aux réunions internes <strong>en</strong> tant qu’observateur – avecparticipation passive, <strong>en</strong> tout cas sil<strong>en</strong>cieuse. A cette pério<strong>de</strong>, la « place » que nous dét<strong>en</strong>ions dansl’organisation conv<strong>en</strong>ait et semblait laisser assez d’espace pour bâtir le questionnem<strong>en</strong>t, lesdonnées et les premières analyses.C’est plutôt au cours <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> terrain que le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> cette notion <strong>de</strong> « place »accordée à l’observateur est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u pat<strong>en</strong>t. Paradoxalem<strong>en</strong>t, nous constatons d’un côté uncertain processus d’ « internalisation », pour repr<strong>en</strong>dre le terme <strong>de</strong> J-M. Plane (2000 : 53) à propos<strong>du</strong> chercheur interv<strong>en</strong>ant : notre nom est apparu sur l’organigramme, la prés<strong>en</strong>ce aux réunionsest presque naturelle - « Ah ? tu n’y étais pas ? » -, nous sommes parfois nous-même informateursur les connaissances générales <strong>de</strong> la TdV. D’un autre côté, le passage d’observateur à participationpassive à observateur à participation int<strong>en</strong>tionnelle n’est pas simple. Il y a certes eu une discussiond’ajustem<strong>en</strong>t avec le directeur général où il a été <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> que nous <strong>de</strong>vions interv<strong>en</strong>ir et ne pas97


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEatt<strong>en</strong>dre la restitution finale <strong>du</strong> manuscrit pour faire part <strong>de</strong>s observations. Mais les conditionspratiques <strong>de</strong> cette interv<strong>en</strong>tion restai<strong>en</strong>t à notre propre appréciation – et sans doute parfois notremaladresse – pour le dire simplem<strong>en</strong>t : « nous y sommes allé à tâtons ». Dans cette phase, il<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait nécessaire, comme nous l’avons déjà souligné, d’expliquer davantage ce que nouscherchions, par exemple <strong>en</strong> saisissant toutes les opportunités <strong>de</strong> replacer les problèmes dontpouvai<strong>en</strong>t nous faire part les membres <strong>de</strong> la TdV dans celui qui était le nôtre : les conséqu<strong>en</strong>cesnégatives, ou parfois positives, <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts évoqués au regard <strong>du</strong> portage <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Le moy<strong>en</strong> le plus sûr <strong>de</strong> retrouver une « place » favorable à la poursuite <strong>de</strong> laconstruction <strong>de</strong>s données a été l’échange régulier (voire les séances <strong>de</strong> travail) avec les membresresponsables <strong>de</strong>s projets étudiés.Expliquer, répéter les termes <strong>de</strong> notre problématique est une chose. L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la restitution –autant comme instrum<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>quête que comme instrum<strong>en</strong>t d’interv<strong>en</strong>tion, les <strong>de</strong>ux n’étant pastoujours bi<strong>en</strong> dissociables – <strong>en</strong> est un autre. Comm<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> effet, mesurer le bon <strong>de</strong>gré <strong>de</strong>participation int<strong>en</strong>tionnelle, dans un contexte où l’on est autorisé à participer « sur le principe »,mais rarem<strong>en</strong>t invité à le faire <strong>en</strong> pratique ? Comm<strong>en</strong>t juger <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong> la restitution <strong>de</strong> cesanalyses, dans la mesure où celles-ci ne sont que <strong>de</strong>s étapes d’une démarche itérative (et dont lecaractère non abouti est parfois difficile à assumer) et dans <strong>de</strong>s situations réelles où les acteurstravaill<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>s contraintes <strong>de</strong> temps importantes.Cette restitution <strong>de</strong>s analyses, surtout pour la dim<strong>en</strong>sion « interv<strong>en</strong>tion », marque l’aboutissem<strong>en</strong>t– au moins temporaire – <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche. Ce point mérite d’être développé <strong>en</strong>considération <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s résultats et <strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites.2.5 Prémisses sur le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites et larestitution à l’ONGE2.5.1 Développer et restituer un raisonnem<strong>en</strong>t stratégiqueIl va <strong>de</strong> soi que les résultats <strong>de</strong> cette recherche doctorale seront plus concrètem<strong>en</strong>t discutés dansla <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> la thèse. Quelques prémisses peuv<strong>en</strong>t néanmoins être prés<strong>en</strong>tées ici <strong>de</strong>manière à exposer la démarche <strong>de</strong> recherche jusqu’au bout.Une ONGE qui doit m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s actions, gérer un budget, préparer <strong>de</strong>s actions futures,trouver les bons part<strong>en</strong>aires, etc. se trouve indéniablem<strong>en</strong>t dans un souci d’opérationnalité98


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveconstant. Pour sout<strong>en</strong>ir son action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par notre travail, nous aurions pu êtret<strong>en</strong>tée d’outiller la rationalisation <strong>de</strong> l’élaboration stratégique et <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s actions. Ilnous est très vite apparu que cette direction nous ori<strong>en</strong>tait sur <strong>de</strong>s questions nombreuses etcomplexes, comme l’illustr<strong>en</strong>t les différ<strong>en</strong>ts aspects <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Moisdon,1997) relatives aux conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place d’outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> dans une organisation.S’il doiv<strong>en</strong>t ai<strong>de</strong>r le pilotage <strong>de</strong> l’action collective (Hatchuel, 2000), ils peuv<strong>en</strong>t aussi instaurer <strong>de</strong>st<strong>en</strong>sions <strong>en</strong> interne <strong>de</strong>s organisations (Maugeri, 2001, Bourguignon, 2010), voir <strong>de</strong> l’inefficacité(Riveline, 1991) quand la démarche <strong>de</strong> rationnalisation dont ils sont porteurs est inadéquate.Voulant étudier l’élaboration et la déploiem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE dans une perspective<strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcerm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ses impacts écologiques, cette approche par les outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> aurait étépour nous une voix trompeuse.C’est <strong>en</strong>core la pratique <strong>de</strong> l’approche organisationnelle d’E. Friedberg (1997[1993]) qui nous afourni le plus d’élém<strong>en</strong>ts, qu’il nous faut exposer et discuter.Si nous sommes soucieuse d’élaborer non pas <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, mais <strong>de</strong>s grilles et <strong>de</strong>sconcepts mobilisables pour l’ONGE, l’apport principal pr<strong>en</strong>d avant tout la forme <strong>du</strong>raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Partons <strong>de</strong> la manière dont E.Friedberg formule l’apport <strong>du</strong> raisonnem<strong>en</strong>t stratégique :« L'utilisation <strong>de</strong> l'approche organisationnelle dans un processus <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t reposesur un pari concernant l'impact d'un raisonnem<strong>en</strong>t sur la perception que les intéresséspeuv<strong>en</strong>t avoir <strong>de</strong> leur champ d'action et <strong>de</strong>s problèmes qui s'y pos<strong>en</strong>t, et à partir <strong>de</strong> cetteperception, sur leurs comportem<strong>en</strong>ts. Ce sont le raisonnem<strong>en</strong>t et les analyses que celui-cipermet <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire et d'interpréter qui constitu<strong>en</strong>t ici le levier ess<strong>en</strong>tiel […]. C'est leraisonnem<strong>en</strong>t qui est ici la contribution ess<strong>en</strong>tielle <strong>de</strong> l'approche organisationnelle auchangem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> tant qu'il permet, d'une part, <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire une connaissance globale etconcrète et d'autre part, <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>r une réflexion approfondie sur la signification <strong>de</strong>squestions et problèmes ainsi mis <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce » (Friedberg, 1997[1993] : 358).Il y aurait dans cette démarche <strong>de</strong>ux opérations à accomplir : d’une part, pro<strong>du</strong>ire cetteconnaissance globale et concrète sur la structuration <strong>du</strong> système qu'il s'agit <strong>de</strong> transformer ; etd’autre part créer les conditions <strong>de</strong> communication et <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> cette connaissance et ceraisonnem<strong>en</strong>t pour <strong>en</strong>cl<strong>en</strong>cher un « processus collectif et participatif d'autodiagnostic etd'autocorrection » (ibid. : 359).Avant <strong>de</strong> poursuivre, marquons une pause sur le terme <strong>de</strong> « changem<strong>en</strong>t ». Nous n’avons pasabordé notre problématique comme un problème <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t organisationnel. Ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale est un processus constant, sur lelong terme. Il ne s’agit pas <strong>de</strong> nier l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> pério<strong>de</strong>s d’accélération ou <strong>de</strong> stagnation dans99


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEleur évolution, voire même <strong>de</strong> ruptures, mais il s’agit d’accompagner temporairem<strong>en</strong>t un chantier<strong>de</strong> long terme. Par ailleurs, abor<strong>de</strong>r la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t aurait pu,ou dû nous m<strong>en</strong>er à <strong>de</strong>s théories c<strong>en</strong>trées sur cette question, nous p<strong>en</strong>sons <strong>en</strong> particulier auxconfigurations <strong>de</strong> Mintzberg qui appréh<strong>en</strong><strong>de</strong> la stratégie comme un processus dans lequel sesuccèd<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s phases transformations et <strong>de</strong>s phases <strong>de</strong> stabilisation (configurations) (Mintzberg etal., 1999 : 305). Enfin, notre acception <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t rési<strong>de</strong> dans l’évolution <strong>du</strong> socioécosystèmeaboutissant à un progrès <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal.Il n’<strong>en</strong> reste pas moins que nous <strong>de</strong>vons trouver le moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> « communiquer et <strong>de</strong> diffuser cetteconnaissance et ce raisonnem<strong>en</strong>t », ce qui nous ramène à la restitution dans sa dim<strong>en</strong>siond’instrum<strong>en</strong>t d’interv<strong>en</strong>tion déjà esquissée.Sans le dire d’une manière aussi catégorique, E. Friedberg (1997[1993] : 345-356) suggère quel’analyste aura tout intérêt à s’appuyer sur l’ « <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>eur social » porteur <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t dansl’organisation. Il n’est pas là pour fixer les objectifs finaux <strong>de</strong> ce changem<strong>en</strong>t, mais pour donnerl’impulsion à un mouvem<strong>en</strong>t qui sera nécessairem<strong>en</strong>t collectif. Friedberg explique quel’ « <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>eur social » n’est pas obligatoirem<strong>en</strong>t un responsable hiérarchique, mais lechangem<strong>en</strong>t ne pourra avoir lieu que s’il est sout<strong>en</strong>u voire porter par un (ou <strong>de</strong>s) membre(s) <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t opérationnel.Dans notre situation – non <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t mais <strong>de</strong> dynamique <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie –nous nous sommes dans un premier temps appuyée vers les animateurs <strong>de</strong> l’élaborationstratégique qui, comme le prévoit Friedberg, sont <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t opérationnel,<strong>en</strong> particulier la direction 58 . En pratique, cette « restitution – interv<strong>en</strong>tion » est comme nousl’avons dit difficilem<strong>en</strong>t dissociable <strong>de</strong> la restitution comme instrum<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>quête, d’autant queles métho<strong>de</strong>s mobilisées sont id<strong>en</strong>tiques. Soulignons néanmoins que le mo<strong>de</strong> privilégié a été <strong>de</strong>loin l’échange sur les docum<strong>en</strong>ts relatifs à la planification stratégique et que si la « restitution –construction <strong>de</strong>s données » pr<strong>en</strong>d la forme <strong>de</strong> questions, <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>tation d’analysesintermédiaires, la « restitution – interv<strong>en</strong>tion » pr<strong>en</strong>d davantage la forme <strong>de</strong> proposition <strong>de</strong> grillesrelatives à la stratégie.Un autre point est à noter sur le côté pratique <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche : puisque les temps <strong>de</strong>la construction <strong>de</strong>s données et celui <strong>de</strong> l’interv<strong>en</strong>tion se chevauch<strong>en</strong>t, cela implique que nous<strong>de</strong>vions simultaném<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> la distance par rapport à la direction (informateurs privilégiés)pour l’<strong>en</strong>quête, mais s’<strong>en</strong> rapprocher pour restituer – et faire diffuser – le raisonnem<strong>en</strong>tstratégique. Ceci nous rappelle les mises <strong>en</strong> gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gilles Arnaud (1996) quant à la méfiance58 compr<strong>en</strong>ant <strong>en</strong> particulier le directeur général et le directeur <strong>de</strong>s programmes.100


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveque peuv<strong>en</strong>t développer les observés vis-à-vis <strong>de</strong> l’observateur <strong>en</strong> raison <strong>du</strong> li<strong>en</strong> presqueinévitable à la direction <strong>de</strong> l’organisation étudiée. C’est une autre raison pratique qui s’ajoute àcelle déjà évoquée quant à la nécessité <strong>de</strong> clarifier la posture <strong>de</strong> recherche, et qui a égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>simplications aussi sur un plan normatif comme le suggère D. Courpasson (1999) dans son articlesur la question l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> sociologue dans le champ <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s organisations :« Il me semble personnellem<strong>en</strong>t que la sociologie perd la tête lorsque ses représ<strong>en</strong>tantsdébatt<strong>en</strong>t <strong>de</strong> critères <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctivité, d’efficacité comparée <strong>de</strong> telle ou telle métho<strong>de</strong>d’organisation ou <strong>de</strong> managem<strong>en</strong>t ou <strong>du</strong> choix <strong>de</strong> tel ou tel outil. Elle n’a pas à gagnernon plus à se diffuser dans tous les interstices <strong>de</strong>s organisations, ni à être <strong>en</strong>seignée àtous les managers si au bout <strong>du</strong> compte, elle ne sert qu’à l’analyse localisée <strong>de</strong>s jeux et<strong>de</strong>s stratégies. Au contraire, elle ne <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>drait <strong>de</strong> cette façon qu’une nouvelleinstrum<strong>en</strong>tation managériale, certes soli<strong>de</strong> théoriquem<strong>en</strong>t, ce qui n’est pas mince, maisdéconnectée <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux politiques <strong>de</strong> l’organisation, ceux qui <strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t sa survie. Il merevi<strong>en</strong>t d’ailleurs <strong>en</strong> mémoire les remarques ironiques <strong>de</strong> certains dirigeants constatant lapuissance <strong>de</strong> l’analyse sociologique et le moy<strong>en</strong> efficace que pouvai<strong>en</strong>t leur fournir lesthèses croziéri<strong>en</strong>nes pour déjouer <strong>de</strong>s stratégies d’acteurs ou id<strong>en</strong>tifier <strong>de</strong>s poches <strong>de</strong>résistance « à faire sauter » ».Ces remarques implacables ne nous font pas douter <strong>de</strong> notre démarche, mais nous incit<strong>en</strong>t aucontraire à répéter les diverg<strong>en</strong>ces fondam<strong>en</strong>tales qui nous sépar<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s perspectives théoriquescroziéri<strong>en</strong>nes, malgré les emprunts indéniables que nous <strong>de</strong>vons à leur théorie et leur pratique <strong>de</strong>recherche. Pour Friedberg (1997[1993] : 335), le changem<strong>en</strong>t est un processus ouvert qui« cherche à faire évoluer un système d’acteurs, malgré les blocages qui le paralys<strong>en</strong>t, dans le s<strong>en</strong>sd’une plus gran<strong>de</strong> ouverture et d’une plus gran<strong>de</strong> capacité ». Dans une note <strong>de</strong> bas <strong>de</strong> page, il ditassumer « la normativité cachée » qu’on peut y voir <strong>en</strong> la reliant à son souci <strong>de</strong> « démocratie etd’autonomie <strong>de</strong>s acteurs ». C’est au nom <strong>de</strong> ces valeurs que les objectifs <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t nedoiv<strong>en</strong>t pas être suggérés par le chercheur, mais c’est au risque pour lui <strong>de</strong> s’<strong>en</strong>gager dans <strong>de</strong>schangem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> faveur d’un managem<strong>en</strong>t mieux contrôlé par le manager, indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> lafinalité <strong>de</strong> ce contrôle comme l’explique D. Courpasson.Notre démarche ne se situe ni dans le souci démocratique <strong>de</strong> Friedberg, ni dans la crainte <strong>de</strong> larécupération managériale <strong>de</strong> Courpasson. Elle vise à pro<strong>du</strong>ire un éclairage sur les mouvem<strong>en</strong>tsinternes (et externes) <strong>de</strong> l’organisation <strong>en</strong> tant qu’ils poursuiv<strong>en</strong>t le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son impact<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Dans ce <strong>de</strong>ssein, nous avons bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> dû analyser les processusorganisationnels internes et nous avons consci<strong>en</strong>ce que les éclairages pro<strong>du</strong>its peuv<strong>en</strong>t êtreutilisés à d’autres fins que le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. C’est pourquoi il a fallus’exercer à la plus haute vigilance tout au long <strong>de</strong> la recherche, pour comme nous l’avons expliquéplus haut, faire le tri dans les matériaux recueillis et ne faire apparaître que ceux qui nous101


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEsemblai<strong>en</strong>t apporter <strong>de</strong>s éclairages utiles pour la stratégie <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Il <strong>en</strong> découle que laconnaissance pro<strong>du</strong>ite n’alim<strong>en</strong>te aucun autre « changem<strong>en</strong>t » ou plutôt aucune autre dynamiqueque le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action. Et les risques <strong>de</strong> récupération <strong>de</strong> la connaissance par lesmembres <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t opérationnel afin d’augm<strong>en</strong>ter leur contrôle sont alors limités par lesimple fait qu’elle ne r<strong>en</strong>seigne pas sur les zones d’incertitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> pouvoir au sein <strong>de</strong>l’organisation, mais sur la façon dont on peut appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre la stratégie, les actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et leurs impacts sur l’état matériel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.2.5.2 Le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>itesLes critères <strong>de</strong> validité et le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites sont – et doiv<strong>en</strong>t être – liés auparadigme dans lequel s’inscrit le travail <strong>de</strong> recherche et à la pratique associée. La sci<strong>en</strong>tificité <strong>de</strong>sapproches se réclamant <strong>du</strong> – ou dans notre cas, proches 59 <strong>du</strong> – constructivisme suscite le débat<strong>de</strong>puis sa montée <strong>en</strong> puissance dans les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, champ disciplinaire longtempsdominé par le positivisme (Le Moigne, 1990, 1995 ; Blanchot, 1999 ; David, 2000 ; Charreire &Huault, 2001). Ce débat ti<strong>en</strong>t <strong>en</strong> partie au fait que les critères <strong>de</strong> validation <strong>de</strong> la perspectiveconstructiviste sont « diamétralem<strong>en</strong>t opposés à la démarche vérificationniste issue <strong>du</strong> paradigmepositiviste » (Charreire & Huault, 2001). Les auteures indiqu<strong>en</strong>t que parmi les critères <strong>de</strong> validitérev<strong>en</strong>diqués dans cette perspective, celui <strong>de</strong> l’adéquation – à forte ori<strong>en</strong>tation pragmatique –serai<strong>en</strong>t stabilisés 60 . Dans cette logique où la connaissance serait « une clé qui ouvre <strong>de</strong>s voiespossibles <strong>de</strong> compréh<strong>en</strong>sion, […][cette] connaissance est « adéquate » si elle suffit, à un mom<strong>en</strong>tdonné, à expliquer ou à maîtriser suffisamm<strong>en</strong>t finem<strong>en</strong>t une situation. Le <strong>de</strong>gré d’adéquationreste à l’appréciation <strong>du</strong> chercheur, seul véritable expert sur le terrain » (ibid. : 37).Ce que S. Charreire et I. Huault semble percevoir comme une limite dans la capacité <strong>de</strong> cettesci<strong>en</strong>ce à faire preuve <strong>de</strong> sa validité, J-P. Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995b), s’exprimant au sujet <strong>de</strong>l’ethnographie et <strong>de</strong> la sociologie qualitative sur laquelle nous nous sommes appuyée, semble aucontraire s’<strong>en</strong> accommo<strong>de</strong>r, <strong>en</strong> se conc<strong>en</strong>trant plutôt sur la nécessaire « rigueur <strong>du</strong> qualitatif ».C’est selon lui par l’explicitation <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche et sur les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> constructionque l’on s’est attaché à fournir dans ce chapitre que la connaissance pro<strong>du</strong>ite peut prét<strong>en</strong>dre à la59 Le premier principe <strong>de</strong> notre cadre théorique <strong>de</strong> l’ASGE est la référ<strong>en</strong>ce à un référ<strong>en</strong>tiel bio-physico-chimique, unétat désirable <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui permet un ancrage critique. La construction <strong>de</strong>s questions, <strong>de</strong>s données et <strong>de</strong>ssolutions émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette base, et les résultats n’ont <strong>de</strong> valeur, <strong>en</strong> <strong>de</strong>rnière analyse, qu’au regard <strong>de</strong> cette référ<strong>en</strong>ce.60« Aussi diverses soi<strong>en</strong>t-elles, les recherches constructivistes affich<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> validité communs tels quel’adéquation, c’est-à-dire une forte ori<strong>en</strong>tation pragmatique, et l’<strong>en</strong>seignabilité (Girod-Séville & Perret 1999) »(Charreire & Huault, 2001).102


Chapitre 2 – Une approche in<strong>du</strong>ctive et réflexiveplausibilité 61 . Cette validation <strong>de</strong> la connaissance pro<strong>du</strong>ite passe égalem<strong>en</strong>t par le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong>restitution (académique cette fois), il souligne ainsi que « la plausibilité est pour une bonne partassurée par ce qu’on pourrait appeler une « prés<strong>en</strong>ce finale <strong>de</strong>s données » dans le pro<strong>du</strong>it écrit <strong>du</strong>chercheur, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> leur usage comme support interprétatif ».Friedberg (1997[1993]) rejoint cette position sur l’explicitation <strong>de</strong> la démarche comme fondatricepour la plausibilité <strong>de</strong> la connaissance – il propose pour cela le terme <strong>de</strong> « sci<strong>en</strong>ceprocé<strong>du</strong>rale » 62 : la valeur pragmatique <strong>de</strong> la connaissance que peut pro<strong>du</strong>ire l’approcheorganisationnelle fon<strong>de</strong> son intérêt et sa validité. Notre position rejoint celle <strong>du</strong> sociologue, maisc’est <strong>en</strong> la reportant dans notre plan normatif <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talequ’elle pr<strong>en</strong>d tout son s<strong>en</strong>s et qu’elle peut être replacée dans la dim<strong>en</strong>sion critique <strong>de</strong> notredémarche. C’est <strong>en</strong> considération <strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites que nous allons pouvoirle compr<strong>en</strong>dre.La posture clinique adoptée vise à analyser la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE dans la perspective <strong>du</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s impacts écologiques. La démarche mise <strong>en</strong> œuvre pour appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r l’ONGE,dans une articulation <strong>de</strong> son fonctionnem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong>s actions qu’elle déploie dans le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> auquel elle apparti<strong>en</strong>t, est une recherche-interv<strong>en</strong>tion m<strong>en</strong>ée dans une logiqueconstructiviste <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissances. Cette démarche permet <strong>de</strong> r<strong>en</strong>drecompréh<strong>en</strong>sible et appréh<strong>en</strong>dable les déterminants <strong>de</strong> cette action et l’int<strong>en</strong>tion portée parl’organisation par rapport à d’autres logiques qui s’exerc<strong>en</strong>t dans ce système. Cettecontextualisation <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s connaissances fon<strong>de</strong> notre démarche critique : c’est par ledécryptage <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> que l’on peut rétablir les responsabilités <strong>de</strong>s acteurs qui lecompos<strong>en</strong>t. Mais à l’instar <strong>de</strong> l’approche organisationnelle croziéri<strong>en</strong>ne, cette démarche (et cettethéorie) « ne cherche pas à développer une vision substantive <strong>de</strong> [ces situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t], ni à formuler <strong>de</strong>s lois générales sur leurs propriétés structurelles, leurs règles etleur articulation les unes aux autres » (Friedberg, 1997[1993] : 299). En effet, « la mise <strong>en</strong>évid<strong>en</strong>ce décisive <strong>de</strong>s contextes d'action et <strong>du</strong> caractère socialem<strong>en</strong>t construit <strong>de</strong> son ordre localr<strong>en</strong>d <strong>en</strong> effet extrêmem<strong>en</strong>t difficile l'établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> préceptes normatifs, même restreints. Laconting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d'organisation ou <strong>de</strong> régulation d'un contexte d'action61 C’est aussi l’idée <strong>de</strong> Passeron (1991) qui voit les sci<strong>en</strong>ces sociales comme relevant d’une logique <strong>du</strong> plausible et <strong>du</strong>registre <strong>du</strong> raisonnem<strong>en</strong>t naturel. Passeron J-C (1991) Le raisonnem<strong>en</strong>t sociologique : l’espace non-poppéri<strong>en</strong> <strong>du</strong> raisonnem<strong>en</strong>tnaturel, Paris, Nathan.62 « Pour éviter <strong>de</strong> vi<strong>de</strong>r le « bébé » <strong>du</strong> caractère sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la recherche organisationnelle avec le bain <strong>de</strong> la vision positivisteclassique <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces naturelles, il me semble que, par analogie avec la rationalité procé<strong>du</strong>rale <strong>de</strong> Simon (1976), on pourrait parlerd'une sci<strong>en</strong>ce procé<strong>du</strong>rale. Le caractère plus ou moins sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong>s analyses et <strong>de</strong>s résultats pro<strong>du</strong>its par l'approcheorganisationnelle <strong>de</strong> l'action sociale ne dép<strong>en</strong>d pas <strong>du</strong> caractère repro<strong>du</strong>ctible <strong>de</strong> ces résultats, ni <strong>de</strong> leur confirmation dans <strong>de</strong>stests statistiques sophistiqués. Il est fonction <strong>du</strong> respect d'une procé<strong>du</strong>re d'<strong>en</strong>quête qui doit garantir un recueil et un traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sdonnées aussi ouverts, systématiques et honnêtes que possible ». (Friedberg, 1997[1993] : 321)103


Partie 1 – Cadre théorique et métho<strong>de</strong> pour l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGEimpose la reconnaissance <strong>de</strong> la conting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s solutions que l'on peutproposer, <strong>en</strong> même temps qu'elle r<strong>en</strong>d impossible toute technicisation <strong>de</strong>s problèmes ou touteoptimisation <strong>de</strong>s solutions » (ibid. : 301). De retour vers les utilisateurs <strong>de</strong> cette connaissance, laposture <strong>de</strong> l’analyste doit être claire : « il ne peut prédire ce que va arriver, ni à dire le bi<strong>en</strong> ou lemal ni <strong>en</strong>core moins à élaborer, sur la base <strong>de</strong> sa « sci<strong>en</strong>ce », le « bon » modèle <strong>de</strong>fonctionnem<strong>en</strong>t » (ibid. : 301). La nature <strong>de</strong> la connaissance pro<strong>du</strong>ite, outre <strong>de</strong>s éclairages sur lesespaces d’action concrets sur lesquelles elle a été développée, ne peut que pr<strong>en</strong>dre la forme <strong>du</strong>raisonnem<strong>en</strong>t stratégique déjà évoqué comme élém<strong>en</strong>t principal <strong>de</strong> restitution.104


Conclusion <strong>de</strong> la première partieCette première partie a été consacrée à la formulation <strong>de</strong> la problématique <strong>de</strong> recherche exposée àtravers la prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> cadrage théorique <strong>de</strong> l’ASGE qui la fon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> notre cadre d’analysestratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE) qui nous permet <strong>de</strong> mettrel’ONGE au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> l’analyse. Nous avons précisé les contours <strong>de</strong> l’architecture théorique qui vanous permettre d’analyser la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et sa contribution à l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, avant <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter la démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre. Les choix <strong>de</strong>théories et <strong>de</strong> modalités <strong>de</strong> pratique <strong>de</strong> recherche sont bi<strong>en</strong> sûr interdép<strong>en</strong>dants, aussi leurarticulation mérite d’être redite au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> clore cette première partie.Les ONGE sont soucieuses <strong>de</strong> l’impact écologique <strong>de</strong> leur action, parce que c’est là que rési<strong>de</strong> les<strong>en</strong>s <strong>de</strong> leur action et parce que c’est sur ce point qu’elles doiv<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes.Cep<strong>en</strong>dant, le li<strong>en</strong> causal <strong>en</strong>tre la stratégie, les actions mises <strong>en</strong> œuvre et leurs impactsécologiques ne peuv<strong>en</strong>t être facilem<strong>en</strong>t appréh<strong>en</strong>dé et évalué. Pour se saisir <strong>de</strong> ce problème à lafois pratique et sci<strong>en</strong>tifique, nous avons choisi <strong>de</strong> ne pas nous focaliser sur les modalitésd’évaluation <strong>de</strong> cet impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, mais <strong>de</strong> repartir plus <strong>en</strong> amont pour découvrir laformation <strong>de</strong> la stratégie et les conditions <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre. Ce n’est qu’in fine que nouspourrons considérer la façon dont on peut appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la contribution <strong>de</strong> l’organisation àl’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et la manière dont cet exercice peut ai<strong>de</strong>r àl’amélioration <strong>de</strong> la stratégie. Ainsi, ce travail ne sera pas complètem<strong>en</strong>t évaluatif : nous n’allonspas fixer <strong>de</strong> critères qui nous permettrai<strong>en</strong>t d’évaluer les impacts écologique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.Notre contribution sera autre et se situera dans la réflexion stratégique. C’est dans cetteperspective que nous proposerons d’abord un cadre pour ai<strong>de</strong>r la construction <strong>de</strong> la stratégied’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, pour <strong>en</strong>suite élaborer un cadre d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie, reliant tantque possible les actions à leurs impacts écologiques (tout ceci sera développé dans la partie 3).Sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique implique <strong>de</strong> réaliser une analyse fine <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et<strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> cette stratégie. C’est <strong>en</strong> adoptant une posture clinique que nous105


Conclusion <strong>de</strong> la première partiepourrons aller assez loin dans la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> ses préoccupations et <strong>de</strong>s problèmes qui sepos<strong>en</strong>t à elle, <strong>en</strong> passant par une immersion totale dans l’organisation et l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sonfonctionnem<strong>en</strong>t. La difficulté est <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir dans l’immersion sans glisser vers la submersion sous laprofusion <strong>de</strong> questions et <strong>de</strong> problèmes internes. C’est ici que l’on compr<strong>en</strong>d que la <strong>du</strong>alité d<strong>en</strong>otre posture clinique et simulténam<strong>en</strong>t critique est nécessaire. Loin d’être contradictoire, cettet<strong>en</strong>sion fon<strong>de</strong> notre démarche <strong>de</strong> recherche. La posture critique fixée sur l’état matériel <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est au cœur <strong>de</strong> notre cadre d’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la GestionEnvironnem<strong>en</strong>tale et est <strong>en</strong> effet celle qui nous permet <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r les repères sans quoi nous nepourrions t<strong>en</strong>ir le cap <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> la stratégie vers le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’impact<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Ce n’est que dans l’analyse <strong>de</strong> situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> concrètes que nouspourrons appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la contribution <strong>de</strong> l’ONGE par rapport aux autres influ<strong>en</strong>ces quis’exerc<strong>en</strong>t dans ce système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, au regard <strong>du</strong> repère critique <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> l’ONGE <strong>en</strong>terme d’état écologique <strong>de</strong>s écosystèmes à atteindre. La démarche <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong>vra associerprocessus d’élaboration stratégique interne et analyses d’interv<strong>en</strong>tions concrètes dans le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé. Ce sont ces actions concrètes qui vont nous intéresser dans la<strong>de</strong>uxième partie que nous pouvons maint<strong>en</strong>ant abor<strong>de</strong>r.106


Deuxième partieEtudier l’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>la stratégie dans <strong>de</strong>s situations d’actionsconcrètesComm<strong>en</strong>t l’ONGE peut-elle agir pour améliorer l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ? A quelle analyse<strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> procè<strong>de</strong>-t-elle et comm<strong>en</strong>t organise-t-elle ses capacités pour agir ?Autrem<strong>en</strong>t dit, comm<strong>en</strong>t élabore-t-elle sa stratégie et comm<strong>en</strong>t parvi<strong>en</strong>t-elle à la mettre <strong>en</strong>pratique ? Ce n’est que par l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> situations concrètes que l’on peut le compr<strong>en</strong>dre et que l’onpeut appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la complexité <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale que l’ONGEambitionne <strong>de</strong> changer par son action stratégique. Ce n’est égalem<strong>en</strong>t qu’<strong>en</strong> allant au plus près <strong>de</strong>la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie que l’on peut évaluer la contribution <strong>de</strong> l’organisation<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale au changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, qui correspond pour elle àl’atteinte <strong>de</strong> sa mission. L’analyse d’actions concrètes est <strong>en</strong> outre un préalable pour plus loin –dans la troisième partie – <strong>en</strong>visager plus généralem<strong>en</strong>t la façon dont l’ONGE peut raisonner sastratégie pour r<strong>en</strong>forcer son action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.Pour répondre à ces questions, cette <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse sera consacrée à l’analyse <strong>de</strong> troiscas, qui correspond<strong>en</strong>t chacun à un <strong>de</strong>s trois principaux mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre par notreONGE, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Notre cadre d’analyse stratégique pour l’ONGE (ASOFE) compr<strong>en</strong>antquatre registres – l’objet écologique à conserver, le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, ledéveloppem<strong>en</strong>t interne et la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation – sera à ce sta<strong>de</strong> un cadreheuristique nous guidant dans l’exploration <strong>de</strong> la façon dont l’ONGE p<strong>en</strong>se et met <strong>en</strong> œuvre sastratégie. Il nous permettra <strong>en</strong> outre d’organiser l’analyse <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>sions qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t ces quatreregistres stratégiques. Etudiant ces actions concrètes <strong>de</strong>puis l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie jusqu’à la107


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesmise <strong>en</strong> œuvre pratique, nous poserons les premières pierres pour relier la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE àses impacts sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé.Nous verrons que chacun <strong>de</strong>s trois mo<strong>de</strong>s d’action prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux et <strong>de</strong>s contraintes qui leursont propres.Nous comm<strong>en</strong>cerons, dans le chapitre 3, par étudier comm<strong>en</strong>t ce « c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour laconservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes » agit par le développem<strong>en</strong>t d’une activité <strong>de</strong>recherche sci<strong>en</strong>tifique. La recherche est <strong>en</strong> général att<strong>en</strong><strong>du</strong>e sur sa qualité académique et sur sonutilité sociale. Pour la TdV, ce double <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la recherche est celui qui a été au cœur <strong>de</strong> sondéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis son origine : elle doit répondre autant à la qualité sci<strong>en</strong>tifique qu’à samission <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM. Nous verrons qu’<strong>en</strong> plus <strong>de</strong> l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s connaissancespermettant la compréh<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong>dégradation auxquelles elles sont soumises, la recherche sci<strong>en</strong>tifique permet à l’organisation <strong>de</strong>développer certaines formes d’action connexes, qui repos<strong>en</strong>t sur ses compét<strong>en</strong>ces et sa légitimitésci<strong>en</strong>tifiques. Nous étudierons plusieurs <strong>de</strong> ces formes d’action toutes développées sur son terraind’implantation, la Camargue. A travers elles, nous verrons comm<strong>en</strong>t, au-<strong>de</strong>là <strong>du</strong> domaine dontelle est <strong>gestion</strong>naire, l’organisation s’insère dans l’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> système camarguais, parv<strong>en</strong>ant àinflu<strong>en</strong>cer sa <strong>gestion</strong>.Dans le chapitre suivant (Chapitre 4), nous verrons comm<strong>en</strong>t la TdV s’y pr<strong>en</strong>d pour interv<strong>en</strong>irdans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée. A travers notre cas d’étu<strong>de</strong>, nous irons auplus près <strong>de</strong>s conditions dans lesquelles agiss<strong>en</strong>t les ONGE lorsqu’elles bénéfici<strong>en</strong>t <strong>du</strong>financem<strong>en</strong>t distribué par les bailleurs institutionnels dans le cadre <strong>de</strong> leurs programmes souv<strong>en</strong>tliés à <strong>de</strong>s accords internationaux. Le projet que nous étudierons ici s’inscrit dans un programmeeuro-méditerrané<strong>en</strong> <strong>de</strong> Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières (GIZC). Financée par laCommission Europé<strong>en</strong>ne, la TdV a m<strong>en</strong>é ce projet <strong>en</strong>tre 2007 et 2009 visant à développer cetteapproche sur une zone humi<strong>de</strong> côtière au Maroc. L’<strong>en</strong>jeu sera donc d’analyser la façon dont ellepeut et va agir dans les contraintes <strong>du</strong> cadre imposé (programme et doctrine). Nous analyseronsdans le détail la façon dont la TdV a monté et con<strong>du</strong>it ce projet au regard <strong>de</strong> ses propres objectifs<strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong> concernée, <strong>de</strong> façon à découvrir l’apport spécifique <strong>de</strong>l’organisation dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> où s’insère le projet, et quel est l’apport <strong>de</strong> ce projetpour le programme et la mission <strong>de</strong> la TdV.108


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesEnfin, le <strong>de</strong>rnier cas étudié (Chapitre 5) sera le plus éloigné <strong>du</strong> terrain et <strong>de</strong> la zone d’ancragecamarguaise <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. En effet, le chapitre sera consacré à l’analyse <strong>de</strong> la constructiond’un dispositif <strong>de</strong> suivi et d’évaluation <strong>de</strong> l’état et <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s à l’échelle <strong>du</strong>bassin méditerrané<strong>en</strong>. Ce type <strong>de</strong> dispositif à l’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et politique est le plussouv<strong>en</strong>t mis <strong>en</strong> place sous l’égi<strong>de</strong> d’une instance gouvernem<strong>en</strong>tale ou intergouvernem<strong>en</strong>tale etdéveloppé par <strong>de</strong>s c<strong>en</strong>tres techniques ad hoc. Nous chercherons alors à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t uneONGE parvi<strong>en</strong>t à mettre <strong>en</strong> place un tel dispositif, et comm<strong>en</strong>t l’outil va répondre aux objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux dont elle l’a doté. Nous étudierons les conditions et les ressources qu’il luifallait rassembler pour y parv<strong>en</strong>ir, ainsi que les logiques d’action qui sont <strong>en</strong>visagées pour que ledispositif joue son rôle att<strong>en</strong><strong>du</strong>, celui d’influ<strong>en</strong>cer les décisions pour une meilleure prise <strong>en</strong> charge<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes. Nous verrons que la légitimité sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV, sareconnaissance au niveau <strong>de</strong> la gouvernance méditerrané<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, ainsi que sonréseau sont autant <strong>de</strong> ressources stratégiques lui permettant <strong>de</strong> déployer une action à largeéchelle. S’il n’est pas possible d’évaluer l’impact tangible <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tion sur l’étatmatériel <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, l’analyse fine <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s logiques d’action peut cep<strong>en</strong>dantdonner <strong>de</strong>s repères pour cerner la contribution <strong>de</strong> la TdV à la résolution <strong>de</strong>s problèmes affectantles zones humi<strong>de</strong>s qui sont d’une extrême complexité à cette échelle.109


Chapitre 3La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong> faveur<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes3.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique sur les zones humi<strong>de</strong>s : quelles formes d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ? ......................................................................................................................... 1113.2 Le statut <strong>de</strong> c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacitésd’action.............................................................................................................................................. 1143.3 La recherche comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s problèmes<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux à la diversité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion...................................................... 1283.4 Typologie, <strong>en</strong>jeux et évaluation <strong>de</strong>s formes d’action par la recherche sci<strong>en</strong>tifique........ 1723.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique sur les zones humi<strong>de</strong>s : quellesformes d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ?3.1.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : <strong>de</strong> la validationacadémique à l’impact sur les zones humi<strong>de</strong>sAu 4 ième Congrès Mondial <strong>de</strong> la Nature, <strong>en</strong> 2008 à Barcelone, la directrice <strong>du</strong> c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> rechercheappliquée pour la biodiversité 63 <strong>de</strong> Conservation International (CI) animait l’atelier « sci<strong>en</strong>ce to action »,dont l’objectif était <strong>de</strong> réfléchir et partager les expéri<strong>en</strong>ces sur les voies d’amélioration <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s63 L’animatrice était S<strong>en</strong>ior Director, pour le Marine managem<strong>en</strong>t area sci<strong>en</strong>ce, au C<strong>en</strong>ter for applied biodiversity sci<strong>en</strong>ce, àArlington, aux Etats-Unis.111


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales<strong>en</strong>tre les résultats <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces naturelles et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et leur utilisation pour laconservation <strong>de</strong> la nature. Les participants, principalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques travaillant dans <strong>de</strong>sONGE, ont témoigné d’un certain nombre <strong>de</strong> difficultés. Tout d’abord, celui <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> larecherche : « parfois, on peut répondre à <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> conservation par <strong>de</strong> petites étu<strong>de</strong>s, mais le plus souv<strong>en</strong>t,il faut <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s bi<strong>en</strong> plus longues, mais qui peuv<strong>en</strong>t impati<strong>en</strong>ter les <strong>gestion</strong>naires ou les personnes concernées ».« Il y a aussi le problème que les personnes att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t trop <strong>de</strong> la recherche, mais elles ne donn<strong>en</strong>t qu’une petitecontribution à la recherche générale » (directrice <strong>de</strong> recherche, CI). D’autant que ces sci<strong>en</strong>tifiquesdoiv<strong>en</strong>t d’abord être reconnus dans la sphère académique avant <strong>de</strong> s’adresser aux <strong>de</strong>stinatairespratiques <strong>de</strong> cette sci<strong>en</strong>ce : « il faut que je m’adresse d’abord à une audi<strong>en</strong>ce académique, donc mon travaildoit être académique, ce qui r<strong>en</strong>d plus difficile l’échange avec les <strong>gestion</strong>naires » (une doctorante, CI). On sepose alors la question <strong>de</strong> confier le transfert <strong>de</strong> ces connaissances à <strong>de</strong>s personnes spécialisées <strong>en</strong>communication, mais cette solution ne semble pas totalem<strong>en</strong>t satisfaisante selon les participants àcet atelier : « 15% <strong>du</strong> budget <strong>de</strong> chaque programme est alloué à la communication et au transfert et nous avonsun responsable <strong>de</strong> communication pour chaque thème <strong>de</strong> conservation, mais cela reste assez général » (directrice<strong>de</strong> recherche, CI). La difficulté sur laquelle l’assistance s’est arrêtée est celle posée par lesspécificités (et différ<strong>en</strong>ces) <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces requises d’un côté pour la recherche sci<strong>en</strong>tifique et<strong>de</strong> l’autre pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la conservation : « nous travaillons souv<strong>en</strong>t avec <strong>de</strong> très grandssci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong>s universités. Mais il faut que la recherche contribue à la conservation et lorsque qu’on leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong><strong>de</strong> tirer les conséqu<strong>en</strong>ces pour la <strong>gestion</strong> et la mise <strong>en</strong> œuvre, cela <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t difficile » (directrice <strong>de</strong> recherche, CI).En effet, « souv<strong>en</strong>t la sci<strong>en</strong>ce ne permet pas <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre les blocages qui sont d’ordre social ou politique pour lamise <strong>en</strong> oeuvre pratique <strong>de</strong> la conservation » (Membre <strong>de</strong> la commission biodiversité <strong>de</strong> l’UICN). « Etceci est exacerbé par la t<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>s laboratoires à re<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus disciplinaires. La sci<strong>en</strong>ce pro<strong>du</strong>ite neconsidère qu’une petite partie <strong>de</strong>s problèmes et a <strong>de</strong>s difficultés à répondre et à aller jusqu'au bout <strong>de</strong> la chaîne »(consultant pour l’UICN).Les ONGE, parfois considérées comme <strong>de</strong> « simples exécutants » <strong>de</strong> politiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sressources naturelles ou <strong>de</strong> doctrines <strong>de</strong> conservation, travaill<strong>en</strong>t <strong>en</strong> collaboration étroite, voirepratiqu<strong>en</strong>t elles-mêmes une activité <strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique à l’instar <strong>de</strong> CI qui a son proprec<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche appliquée pour la biodiversité. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, « c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pourla conservation <strong>de</strong>s ZHM », est elle aussi familière <strong>de</strong>s questions soulevées lors <strong>de</strong> cet ateliersci<strong>en</strong>ce to action. La TdV est officiellem<strong>en</strong>t un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche sur les zones humi<strong>de</strong>s <strong>de</strong>puis1974, mais pour exercer et développer cette activité sci<strong>en</strong>tifique elle doit être reconnue <strong>en</strong> tantque tel. Le secteur <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique a aujourd’hui ses standards d’évaluation quipass<strong>en</strong>t par le classem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s revues dans lesquelles les sci<strong>en</strong>tifiques publi<strong>en</strong>t les résultats <strong>de</strong> leurrecherche (Blay, 2009 ; Matzkin, 2009). C’est <strong>en</strong>tre autres à partir <strong>de</strong> ce référ<strong>en</strong>tiel « universel » <strong>de</strong>112


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talela recherche sci<strong>en</strong>tifique que la TdV peut rev<strong>en</strong>diquer son insertion dans la communautésci<strong>en</strong>tifique. Mais sa mission se situe dans le domaine <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature ; et larecherche qu’elle développe est comme l’indique son nom « pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM ». Parconséqu<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> la légitimité sci<strong>en</strong>tifique, la recherche <strong>de</strong> la TdV doit être reconnue pourson utilité pour la conservation <strong>de</strong> ces milieux m<strong>en</strong>acés, bi<strong>en</strong> qu’il soit difficile a priori <strong>de</strong>connaître l’impact écologique matériel d’une action qui se situe tout d’abord dans ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la connaissance. L’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t causal <strong>en</strong>tre l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> connaissances,leur tra<strong>du</strong>ction <strong>en</strong> actions et la réalisation <strong>de</strong> l’effet escompté est indéniablem<strong>en</strong>t très indirecte.Mais <strong>en</strong> <strong>de</strong>rnière analyse, c’est bi<strong>en</strong> dans ce registre – l’utilité pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM –que ces connaissances pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>s et sur lesquelles la TdV doit r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes.Pour étudier le rôle et la contribution <strong>de</strong> la recherche réalisée par la TdV pour la conservation <strong>de</strong>sZH, nous cherchons à mettre <strong>en</strong> visibilité toutes les formes d’action qui sont inhér<strong>en</strong>tes ouconnexes à la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissances sci<strong>en</strong>tifiques. L’éclairage <strong>de</strong> ces formes d’action<strong>de</strong>vrait faciliter la prise <strong>de</strong> recul sur la façon dont la recherche peut provoquer le changem<strong>en</strong>tdans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, <strong>en</strong> partie <strong>en</strong> s’appuyant sur la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong> leur impactsur les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et pour une amélioration <strong>de</strong> l’état écologique <strong>de</strong>s objets étudiés. Cetteréflexion m<strong>en</strong>ée (et surtout mise <strong>en</strong> pratique) à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> sur les interfaces « sci<strong>en</strong>ce etaction », « sci<strong>en</strong>ce et <strong>gestion</strong> », « lui donne une longueur d’avance sur les laboratoires publics » quicherch<strong>en</strong>t, quant à eux, <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus « à sortir <strong>de</strong> leur tour d’ivoire », à r<strong>en</strong>ouer avec la société etqui sont <strong>en</strong> outre poussés à <strong>en</strong> augm<strong>en</strong>ter les li<strong>en</strong>s visibles pour justifier <strong>de</strong> leur utilité (Membrereprés<strong>en</strong>tant <strong>du</strong> Ministère <strong>de</strong> la Recherche au CA, com.pers., 2009).Pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t la TdV agit par la recherche sci<strong>en</strong>tifique, l’analyse ne peut être<strong>en</strong>visagée que dans la considération <strong>de</strong> toutes les dim<strong>en</strong>sions stratégiques. En effet, compr<strong>en</strong>drecomm<strong>en</strong>t la TdV agit implique <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre quels sont ses capacités à le faire, tout <strong>en</strong> t<strong>en</strong>antcompte <strong>du</strong> fait que les capacités d’action évolu<strong>en</strong>t dans leur mise <strong>en</strong> œuvre. Etudier la « rechercheTdV » dans cette t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre les capacités d’action et sa mise <strong>en</strong> œuvre nous con<strong>du</strong>it àl’interdép<strong>en</strong>dance <strong>en</strong>tre les quatre registres stratégiques <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, <strong>du</strong>mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la place dans le secteur.3.1.2 Enquête <strong>de</strong> terrain et méthodologieDans l’objectif <strong>de</strong> saisir la multiplicité <strong>de</strong>s formes d’action liées et permises par la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>recherches sci<strong>en</strong>tifiques pour la conservation <strong>de</strong>s ZH, nous avons choisi <strong>de</strong> balayer un certainnombre <strong>de</strong> projets sci<strong>en</strong>tifiques mis <strong>en</strong> œuvre par la TdV plutôt que <strong>de</strong> décrypter <strong>de</strong> façon113


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesexhaustive un unique projet. Cep<strong>en</strong>dant, l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ne peut être analysée quedans le système dans lequel elle vise à interv<strong>en</strong>ir, c’est la raison pour laquelle nous avons tout <strong>de</strong>même dû nous limiter à quelques exemples (7 types d’actions liés à la recherche portant sur 6thématiques sci<strong>en</strong>tifiques parmi une vingtaine développée à la TdV) sur lesquels approfondirl’<strong>en</strong>quête – sans, <strong>en</strong>core une fois, prét<strong>en</strong>dre à l’épuisem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cas. Ces exemples sont développésdans la section 3.3 <strong>de</strong> ce chapitre.Pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la recherche comme action, la consultation et l’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts pro<strong>du</strong>itspar les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV ti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t une place non négligeable parmi nos métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recueil<strong>de</strong> données. En effet, les projets <strong>de</strong> recherche sont par ess<strong>en</strong>ce assez lourds à expliquer si l’oncherche un certain niveau <strong>de</strong> détail et la prise <strong>de</strong> connaissance préalable par l’analyste estnécessaire pour un dialogue plus avancé lors <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s qualitatifs et une meilleurecompréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux lors <strong>de</strong> l’observation. L’analyse <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts permet <strong>en</strong> outre <strong>de</strong>saisir l’évolution « objective » <strong>de</strong> cette activité <strong>de</strong> recherche : les objets sur lesquels elle seconc<strong>en</strong>tre, les objectifs qu’elle se donne, la formulation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux, la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s contraintes, etc.L’observation <strong>de</strong>s pratiques, notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> pilotage<strong>de</strong> l’activité sci<strong>en</strong>tifique, est la métho<strong>de</strong> privilégiée pour saisir les <strong>en</strong>jeux internes <strong>de</strong> mainti<strong>en</strong> d’unbon niveau <strong>de</strong> recherche et les <strong>en</strong>jeux politiques <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> recherche sur un territoire.C’est souv<strong>en</strong>t dans ces réunions internes que les t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre les quatre registres stratégiques sedévoil<strong>en</strong>t au grand jour.L’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> qualitatif permet alors d’approfondir les points <strong>de</strong> t<strong>en</strong>sion id<strong>en</strong>tifiés à partir <strong>de</strong>l’observation. C’est égalem<strong>en</strong>t la métho<strong>de</strong> utilisée pour aller plus loin sur quelques projets <strong>de</strong>recherche : avec les responsables <strong>de</strong> ces projets comme avec quelques part<strong>en</strong>aires externes ouutilisateurs <strong>de</strong> ces recherches.3.2 Le statut <strong>de</strong> c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation et ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités d’actionComme nous l’avons annoncé au début <strong>de</strong> ce chapitre, nous allons très vite nous conc<strong>en</strong>trer surles formes d’action inhér<strong>en</strong>tes ou connexes à l’activité <strong>de</strong> recherche sur les zones humi<strong>de</strong>s mises<strong>en</strong> œuvre à la TdV (section 3.3). Il convi<strong>en</strong>t auparavant <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre le temps d’examiner les <strong>en</strong>jeuxqui se pos<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> l’organisation à exercer cette activité : quelles sont sescapacités et quelle est sa stratégie pour développer ses capacités dans la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> recherchessur les ZHM ?114


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLes capacités d’action dont dispose l’organisation n’ont pas <strong>de</strong> signification dans l’absolu : il nes’agit pas d’une quantité <strong>de</strong> ressources mesurables objectivem<strong>en</strong>t, mais d’une combinaison <strong>de</strong>ressources humaines, financières, politiques, informationnelles, mobilisées toutes <strong>en</strong>semble pourmettre <strong>en</strong> œuvre une action, comme nous l’indiqu<strong>en</strong>t les t<strong>en</strong>ants <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s ressources etcompét<strong>en</strong>ces (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006). Elles n’ont pas davantage <strong>de</strong> stabilité dans le temps :les capacités <strong>de</strong> l’organisation peuv<strong>en</strong>t varier <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> facteurs conjoncturels (t<strong>en</strong>dance à laré<strong>du</strong>ction ou l’augm<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> mécénat ou <strong>du</strong> financem<strong>en</strong>t dans le domaine <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ; politique locale, etc.), internes (changem<strong>en</strong>ts organisationnels afin d’optimiserles compét<strong>en</strong>ces ; turn-over dans les ressources humaines, etc.) et <strong>du</strong> déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions(nouvelles opportunités, r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t ou acquisition <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces, etc.). Le caractèredynamique <strong>de</strong>s capacités d’action apparaîtra dans l’exposé <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action liés à la recherchequi va suivre. Pour pouvoir <strong>en</strong> faire cette lecture, il est opportun <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter au préalable lesprincipales ressources requises pour la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> cette activité <strong>de</strong> recherche pour laconservation. Nous nous conc<strong>en</strong>trons pour cela sur quatre ressources qui apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t auxregistres stratégiques 64 <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la dynamique externe <strong>de</strong> l’organisation(ici, l’insertion dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la recherche). Ces aspects – les compét<strong>en</strong>ces, les financem<strong>en</strong>ts,la légitimité, le réseau – sont développés ici sous l’angle <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux qui se pos<strong>en</strong>t à l’ONGE vis-àvis<strong>de</strong> l’acquisition et <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ses capacités, ainsi que les choix stratégiques opérésdans ce s<strong>en</strong>s.3.2.1 Acquérir et cultiver les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques pertin<strong>en</strong>tes pour laconservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesDans la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (Chapitre 2), il est indiqué que l’organisation estofficiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation <strong>de</strong> la nature <strong>en</strong> 1974. Maisc’est <strong>en</strong> réalité presque <strong>de</strong>puis sa création <strong>en</strong> 1954 que les recherches sur différ<strong>en</strong>tes espèces ethabitats <strong>de</strong>s milieux humi<strong>de</strong>s ont comm<strong>en</strong>cé. A cette époque cep<strong>en</strong>dant, le statut <strong>de</strong>ssci<strong>en</strong>tifiques était beaucoup moins formel : <strong>de</strong>s technici<strong>en</strong>s, <strong>de</strong>s doctorants, <strong>de</strong>s chercheursv<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t travailler avec la TdV, tout <strong>en</strong> appart<strong>en</strong>ant ou non à différ<strong>en</strong>tes institutions sci<strong>en</strong>tifiques.Les collaborations <strong>de</strong> la TdV avec le CNRS ont déjà été évoquées : Luc Hoffmann a suggéré ungrand nombre <strong>de</strong> sujets <strong>de</strong> recherche, influ<strong>en</strong>cé <strong>de</strong>s recrutem<strong>en</strong>ts et même poussé à l’installation64 Parmi nos quatre registres stratégiques : objet écologique à conserver, mo<strong>de</strong> d’action publique, développem<strong>en</strong>tinterne, place dans le secteur. Bi<strong>en</strong> que les quatre dim<strong>en</strong>sions soi<strong>en</strong>t interdép<strong>en</strong>dantes, les <strong>de</strong>ux premières serontétudiées <strong>de</strong> façon plus directe dans la section 3.3. Dans cette section 3.2, nous nous conc<strong>en</strong>trons sur les <strong>de</strong>ux<strong>de</strong>rnières dim<strong>en</strong>sions stratégiques.115


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talestemporaire d’une station écologique <strong>du</strong> CNRS <strong>en</strong> Camargue. A partir <strong>de</strong> 1974 <strong>en</strong> revanche, lafondation TdV 65 est née officiellem<strong>en</strong>t et recrute plusieurs sci<strong>en</strong>tifiques avec <strong>de</strong>s statuts plusformels, tout <strong>en</strong> continuant à jouer le rôle <strong>de</strong> « laboratoire d’accueil pour <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong>recherches con<strong>du</strong>its par d’autres institutions ou chercheurs » (Is<strong>en</strong>mann, 2003 : 62). Selon P.Is<strong>en</strong>mann (2003) qui a retracé l’histoire <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> la TdV, cette pério<strong>de</strong> était la transitionvers ce qu’est la TdV aujourd’hui (et <strong>de</strong>puis 1981) : une organisation dotée <strong>de</strong> plansquinqu<strong>en</strong>naux, qui met <strong>en</strong> œuvre ses propres programmes <strong>de</strong> recherche autour <strong>de</strong>s écosystèmeshumi<strong>de</strong>s. Si la TdV n’a jamais eu <strong>de</strong> mal à attirer <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques passionnés par l’écologie dansles <strong>de</strong>ux premières déc<strong>en</strong>nies <strong>de</strong> son exist<strong>en</strong>ce, son statut <strong>de</strong> fondation acquis <strong>en</strong> 1974 requéraitplus : il lui fallait égalem<strong>en</strong>t faire preuve d’excell<strong>en</strong>ce 66 . Nous pr<strong>en</strong>drons le temps d’examiner lesimplications <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> tant qu’organisme <strong>de</strong> recherche. Pour l’instant,nous jugeons utile <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> relief l’articulation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV(ressource majeure <strong>de</strong> l’organisation) aux différ<strong>en</strong>ts registres stratégiques.Les compét<strong>en</strong>ces et l’objet écologique. Pour élargir progressivem<strong>en</strong>t les champs <strong>de</strong> recherche et aller versune compréh<strong>en</strong>sion plus globale <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, il a fallu recruter <strong>de</strong>s doctorants et <strong>de</strong>schercheurs <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes spécialités <strong>de</strong> l’écologie animale et végétale. Dans les années 1990,l’hydrologie et la géomatique sont intégrées au nombre <strong>de</strong>s disciplines sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV etla géographie <strong>en</strong> 2000. Cette progression marque le passage d’une recherche « découverte » –quand Luc Hoffmann et tout le groupe dont il s’était <strong>en</strong>touré, découvr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s espèces, <strong>de</strong>shabitats et <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux – à une recherche « appliquée » qui doitnécessairem<strong>en</strong>t se rapprocher <strong>de</strong>s pratiques et <strong>de</strong>s usages humains <strong>de</strong> ces habitats pour être <strong>en</strong>mesure <strong>de</strong> prescrire une meilleure <strong>gestion</strong>. L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques est ainsi d’abordlié à l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Cette stricte nécessité <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> certaines compét<strong>en</strong>ces, <strong>en</strong>qualité et <strong>en</strong> quantité, peut s’exprimer par l’abandon <strong>de</strong> certains objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ouproblématiques <strong>de</strong> conservation, <strong>en</strong> raison <strong>du</strong> manque <strong>de</strong> ressources humaines. Ce défaut <strong>de</strong>ressources humaines est autant que possible comp<strong>en</strong>sé par l’accueil <strong>de</strong> doctorants et <strong>de</strong> stagiaires,ainsi que par la création <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats actifs (chercheurs, com.pers., 2010 ; Evaluation finale2006-2010 ; docum<strong>en</strong>t interne, 2010).65 Cette fondation était <strong>de</strong> droit suisse. Ensuite, une fondation <strong>de</strong> droit français a été crée, la Fondation Sansouire <strong>en</strong>1978. Une simplification <strong>de</strong>s statuts a été effectuée <strong>en</strong> 2008, la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est désormais une fondation<strong>de</strong> droit français.66 P. Is<strong>en</strong>mann indique que ses efforts dans ce s<strong>en</strong>s sont probant : « treize thèses au total ont été sout<strong>en</strong>ues <strong>de</strong> 1981 à1990, à partir <strong>de</strong> travaux réalisés tout ou <strong>en</strong> partie à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Ce joli palmarès confirme le nouveaudynamisme sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> ce laboratoire qui peut être jugé, comme c’est l’usage dans les laboratoires publics, aunombre <strong>de</strong> ses publications. On peut <strong>en</strong> effet répertorier, pour cette même déc<strong>en</strong>nie : 93 publications dans <strong>de</strong>srevues d’audi<strong>en</strong>ce internationale, 23 dans <strong>de</strong>s revues d’audi<strong>en</strong>ce nationale ainsi que 20 chapitres <strong>de</strong> livres ou d’actes<strong>de</strong> congrès internationaux » (2003 : 67).116


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLes compét<strong>en</strong>ces et l’insertion dans le secteur <strong>de</strong> la recherche. L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques estainsi lié à l’insertion dans le secteur d’activité <strong>de</strong> la recherche, aux réseaux et aux part<strong>en</strong>ariats dontl’organisation estime avoir besoin. La TdV a fait le choix d’un recrutem<strong>en</strong>t privilégiant ladiversité 67 disciplinaire – par opposition à une spécialisation forte dans un nombre ré<strong>du</strong>itd’approches disciplinaires et théoriques – pour favoriser la création <strong>de</strong> li<strong>en</strong>s dans chacune <strong>de</strong> cesdisciplines, suivant le constat selon lequel le réseau se fait plus facilem<strong>en</strong>t et plus naturellem<strong>en</strong>tlorsqu’une « personne-ressource » est là pour le créer et le faire vivre <strong>en</strong> interne.Les compét<strong>en</strong>ces, le modèle organisationnel et les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> la TdV. La recherchedéveloppée à la TdV est soumise à la double exig<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’excell<strong>en</strong>ce sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong>l’application pratique pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM. La progression <strong>de</strong> la TdV dans ce s<strong>en</strong>s apris plusieurs formes au cours <strong>de</strong> son histoire. Les plus notables sont le développem<strong>en</strong>t d’uneactivité d’application <strong>de</strong> la conservation <strong>en</strong> 1992 impliquant le recrutem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> spécialistes ettechnici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la conservation (voir la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la TdV au chapitre 2) et ledécloisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation <strong>en</strong> 2006, qui étai<strong>en</strong>t jusqu’alorsorganisées <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux équipes distinctes. Ce changem<strong>en</strong>t organisationnel correspond à uneformalisation <strong>de</strong> la logique d’action <strong>de</strong> la TdV : l’id<strong>en</strong>tification et l’étu<strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong>problèmes <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s écosystèmes humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité doit aboutir à <strong>de</strong>ssolutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, qui doiv<strong>en</strong>t être mises <strong>en</strong> œuvre ou promues auprès <strong>de</strong>s acteurs concernés.Les équipes sont alors recomposées autour d’un problème ou d’un projet et non plus autour <strong>du</strong>type d’activité. Concernant l’activité <strong>de</strong> recherche et les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques qui nousintéress<strong>en</strong>t ici, cette évolution implique une plus gran<strong>de</strong> capacité <strong>de</strong>s chercheurs à travailler avecd’autres métiers <strong>en</strong> interne 68 .En outre, la capacité <strong>de</strong>s chercheurs à travailler vers l’application n’est pas qu’un problèmed’intégration <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> interne, il s’agit égalem<strong>en</strong>t pour eux d’aller à la r<strong>en</strong>contre <strong>de</strong>sacteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective pertin<strong>en</strong>ts au regard <strong>de</strong> leurs travaux. Cette exig<strong>en</strong>ce régulièrem<strong>en</strong>trappelée aux chercheurs par les organes <strong>de</strong> gouvernance et la direction est unanimem<strong>en</strong>t 69exprimée comme une contrainte par ces chercheurs qui doiv<strong>en</strong>t faire leurs preuves à la fois sur laqualité sci<strong>en</strong>tifique et sur la portée pratique <strong>de</strong> leurs travaux. Cette contrainte est comp<strong>en</strong>sée parle s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la recherche que ces sci<strong>en</strong>tifiques peuv<strong>en</strong>t exercer à la TdV et qui est tout aussi67 Le nombre <strong>de</strong> chargés <strong>de</strong> recherche reste inférieur à 10 personnes. Les champs disciplinaires sont ceux <strong>de</strong>l’écologie végétale, l’écologie animale, l’hydrologie, la géomatique, les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sespaces, outils <strong>de</strong> suivi et d’inv<strong>en</strong>taires <strong>de</strong>s écosystèmes).68 L’articulation <strong>en</strong>tre les mo<strong>de</strong>s d’action et les différ<strong>en</strong>tes compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’organisation est un problème à part<strong>en</strong>tière que l’on considérera dans la troisième partie <strong>de</strong> la thèse.69 Cette contrainte est exprimée <strong>en</strong> termes différ<strong>en</strong>ts mais converg<strong>en</strong>ts par les 9 chercheurs <strong>de</strong> la TdV.117


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesunanimem<strong>en</strong>t exprimée : la sci<strong>en</strong>ce doit servir un projet social qui est celui <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> lanature.Nous proposons ici une lecture selon laquelle l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale est inhér<strong>en</strong>te à unerecherche int<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t construite sur une problématique <strong>de</strong> clarification ou <strong>de</strong> résolutiond’un problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, et peut être <strong>en</strong>richie d’autres formes d’actions connexes (i.e. quisoi<strong>en</strong>t dép<strong>en</strong>dantes <strong>de</strong> la recherche sans laquelle elles ne pourrai<strong>en</strong>t être mises <strong>en</strong> oeuvre). Cetteapproche peut à la fois favoriser un apaisem<strong>en</strong>t vis-à-vis <strong>de</strong> la contrainte légitimem<strong>en</strong>t perçue parles chercheurs et surtout éclairer les dim<strong>en</strong>sions stratégiques <strong>de</strong> cette recherche TdV, c’est-à-direformaliser une réflexivité sur les formes d’action qu’elle met <strong>en</strong> œuvre et qu’elle peut jugerpertin<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer. C’est l’exercice auquel nous nous attacherons dans la section suivante.3.2.2 Acquérir <strong>de</strong>s ressources financières pour financer <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> longtermeL’aspect financier <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> recherche soulève <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>jeux principaux pour l’ONGE : (1) lapér<strong>en</strong>nité <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t pour <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche qui cour<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t sur le longterme, et (2) la liberté que ces sources <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t laiss<strong>en</strong>t quant à l’allocation <strong>de</strong>s fonds.Pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t s’exprim<strong>en</strong>t ces <strong>de</strong>ux contraintes, il faut distinguer les différ<strong>en</strong>tessources <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t. Rappelons que la TdV dispose d’un budget d’un peu plus <strong>de</strong> 4 millionsd’euros (voir le détail <strong>du</strong> budget dans l’<strong>en</strong>cadré 2.3 <strong>du</strong> chapitre 2) dont 15% provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> soncapital propre et la moitié est pourvue par la Fondation MAVA 70 pour la nature, qui agit dans lemécénat <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Par ailleurs, elle acquiert <strong>en</strong>viron 30% par l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>tsexternes.Le financem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la MAVA est accordé chaque année au cours <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> gouvernance<strong>de</strong> la TdV (bureaux et conseils d’administration), mais surtout l’accord est passé sur unprogramme quinqu<strong>en</strong>nal. On ne peut pas dire <strong>de</strong> cette source <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t qu’elle soit pér<strong>en</strong>nedans la mesure où ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> formel n’a été notifié, elle offre néanmoins un cadre souple <strong>en</strong> termes<strong>de</strong> cont<strong>en</strong>u et <strong>de</strong> long terme : « la MAVA financera la TdV tant qu’elle prés<strong>en</strong>tera <strong>de</strong> bons programmes »dit le présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Fondation suisse, André Hoffmann 71 (CA, séance, 2010). Le cont<strong>en</strong>u est <strong>en</strong>effet à l’initiative <strong>de</strong> l’organisation qui soumet son programme <strong>de</strong> recherche et d’action. Plus70 Rappelons que la MAVA est une fondation <strong>de</strong> droit suisse créée par Luc Hoffmann <strong>en</strong> 1994, pour financer <strong>de</strong>sactions dans le domaine <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature dans trois zones : le bassin méditerrané<strong>en</strong>, la Suisse et l’arcalpin, la zone côtière d’Afrique <strong>de</strong> l’Ouest.71 André Hoffmann est le fils <strong>de</strong> Luc Hoffmann, il pér<strong>en</strong>nise le travail <strong>de</strong> son père <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant part à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sfondations qu’il a créé. André Hoffmann est vice-présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Fondation MAVA.118


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleprécisém<strong>en</strong>t, les fonds MAVA vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t compléter les fonds propres (15% <strong>en</strong> 2009)pour le financem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation.De façon schématique, les financem<strong>en</strong>ts externes <strong>en</strong>doss<strong>en</strong>t les caractères opposés : limités dansle temps (<strong>de</strong> 1 à 4 ans maximum) et le plus souv<strong>en</strong>t contraignants <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>u. Bi<strong>en</strong>qu’ils ne représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t qu’<strong>en</strong>tre 25 et 30% <strong>du</strong> budget, ils <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s efforts importantsauxquels chacun doit pr<strong>en</strong>dre part (les membres sci<strong>en</strong>tifiques et techniques et la direction) ; etl’on peut mesurer l’importance <strong>de</strong> cet objet à la place qu’il occupe dans les réunions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>interne. L’acquisition <strong>de</strong> fonds externes est une composante <strong>de</strong> la stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacitésqui donne à voir les t<strong>en</strong>sions qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les différ<strong>en</strong>ts registres stratégiques. Pouraugm<strong>en</strong>ter ses capacités financières, le levier organisationnel est mis à contribution sous <strong>de</strong>uxangles : restructurer l’équipe autour d’une « organisation par projets » et compter surl’appr<strong>en</strong>tissage organisationnel. « Tous les chefs <strong>de</strong> projets ont bi<strong>en</strong> intégré la recherche <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>tsexternes et on a <strong>de</strong> bons résultats à ce niveau » (Directeur administratif et financier, com.pers., 2010).L’idée d’acquérir <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces spécifiques a été plusieurs fois discutée mais finalem<strong>en</strong>trejetée, car cela ne correspond pas aux besoins <strong>de</strong> cette organisation « atypique » (Comité <strong>de</strong><strong>gestion</strong>, séance, 2009), ce qui n’empêche pas <strong>de</strong> ponctuellem<strong>en</strong>t solliciter un souti<strong>en</strong> auprèsd’organisations spécialisées 72 . Le levier « part<strong>en</strong>ariat » n’est pas <strong>de</strong>s moindres : un travail <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>st réalisé pour formaliser <strong>de</strong>s conv<strong>en</strong>tions-cadres. Le part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique – nécessaire audéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action – peut égalem<strong>en</strong>t faciliter l’accès <strong>de</strong> la TdV au nouveau système <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche par l’Ag<strong>en</strong>ce nationale <strong>de</strong> la recherche, qui constitue un avantagestructurel <strong>en</strong>core sous-valorisé par l’organisation : « ces appels d’offre peuv<strong>en</strong>t être trèsintéressants pour la TdV et il est regrettable que nous soumettions si peu <strong>de</strong> projets, d’autant plusque l’obt<strong>en</strong>tion d’une subv<strong>en</strong>tion ANR est une réelle reconnaissance, à la fois aux yeux <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>sci<strong>en</strong>tifique, mais aussi <strong>de</strong> nos part<strong>en</strong>aires financiers. Il faut que nous développions une positionplus stratégique et proactive. Le directeur <strong>du</strong> programme, aidé par le chef <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>tEspèces, est chargé <strong>de</strong> faire une analyse globale <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> la TdV susceptibles <strong>de</strong> s’inscriredans un appel d’offre ANR et <strong>de</strong> pousser <strong>en</strong>suite les chargés <strong>de</strong> recherche id<strong>en</strong>tifiés à répondre àcet appel. Ce point <strong>de</strong>vra être repris et suivi régulièrem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> réunion d’animation sci<strong>en</strong>tifique »(Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> Comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, docum<strong>en</strong>t interne, 2010).72 En 2009, la TdV a sollicité l’association Enviropea spécialisé dans le montage <strong>de</strong> projet candidat à <strong>de</strong>sfinancem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la commission europé<strong>en</strong>ne, pour être assistée dans le montage d’un dossier LIFE après <strong>de</strong>ux refus.Le montage <strong>de</strong> projet constitue une réelle compét<strong>en</strong>ce dont un <strong>de</strong>s aspects est <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre le fonctionnem<strong>en</strong>t etles exig<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts bailleurs. Certaines ONGE se spécialis<strong>en</strong>t <strong>en</strong> se restreignant à certains guichets, d’autresévit<strong>en</strong>t certains bailleurs, comme la commission europé<strong>en</strong>ne qui propose <strong>de</strong>s cadres complexes (Direction <strong>de</strong>programme, C<strong>en</strong>tre Méditerrané<strong>en</strong> UICN, com.pers., 2008)119


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesConcernant la t<strong>en</strong>sion avec le registre stratégique <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : lacontrainte d’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> fonds externes peut inciter à poursuivre certains mo<strong>de</strong>s d’action bi<strong>en</strong>qu’ils soi<strong>en</strong>t jugés moins fondam<strong>en</strong>taux. C’est souv<strong>en</strong>t la participation à l’élaboration <strong>de</strong> plans <strong>de</strong><strong>gestion</strong> qui est discutée <strong>en</strong> ces termes : « tout le mon<strong>de</strong> sait que le principal apport <strong>de</strong> l’élaboration ouexpertise pour plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, c’est d’apporter presque 100% <strong>de</strong> fond externe, mais si on ne fait pas att<strong>en</strong>tion, onva <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un bureau d’étu<strong>de</strong> ». « La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> a été innovante sur les plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>s années.Aujourd’hui c’est une pratique courante et il y a plein <strong>de</strong> bureau d’étu<strong>de</strong> pour faire ce travail. La TdV doitcontinuer à interv<strong>en</strong>ir quand elle a une vraie plus-value sci<strong>en</strong>tifique, ou parce que le site prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation forts. Notre participation doit être considérée avec soin » (Direction, chercheurs, com.pers.,2008).Nous avons ici parcouru les contraintes liées à la ressource financière car elles s’impos<strong>en</strong>t à tousles niveaux d’action <strong>de</strong> l’organisation et l’analyse <strong>de</strong> la recherche comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleserait biaisée si nous ne formulions pas ces <strong>en</strong>jeux au préalable. Cep<strong>en</strong>dant, c’est lorsque nousétudierons l’organisation dans son <strong>en</strong>semble, dans la troisième partie <strong>du</strong> texte, que nous irons aubout <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>jeu financier et <strong>de</strong> son articulation aux autres registres stratégiques.3.2.3 La légitimité et la notoriété sci<strong>en</strong>tifiques comme ressourcesMark Suchman (1995 : 3) donne à la notion <strong>de</strong> légitimité la définition suivante : « une hypothèseou perception générale que les actions d'une <strong>en</strong>tité sont désirables, adaptées, ou appropriées dansun système socialem<strong>en</strong>t construit <strong>de</strong> normes, valeurs, croyances et définitions ». La légitimité estun concept multidim<strong>en</strong>sionnel et la littérature <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> fournit différ<strong>en</strong>tes catégorisations.Selon M-L. Buisson (2005 : 154), « la plus usitée est celle développée par Scott (1995), quidécompose la légitimité <strong>en</strong> trois catégories : normative, réglem<strong>en</strong>taire et cognitive ». La définition<strong>de</strong> Suchman est néanmoins largem<strong>en</strong>t plébiscitée dans le domaine <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t et conti<strong>en</strong>t les<strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> la légitimité : celle <strong>de</strong> la régulation <strong>de</strong>s actions d'une <strong>en</strong>titécollective et celle <strong>de</strong> la nature socialem<strong>en</strong>t construite <strong>du</strong> système (Bréchet et al., 2008). Autrem<strong>en</strong>tdit, « cette définition reconnaît la nature sociale, cognitive et évaluative <strong>du</strong> construit » qui sontcommuném<strong>en</strong>t associés à la notion <strong>de</strong> légitimité (Buisson, 2005).La légitimité est une notion chère aux t<strong>en</strong>ants <strong>de</strong>s théories néo-institutionnelles qui cherch<strong>en</strong>t àéclairer la façon dont « les forces culturelles, cognitives et sociales exercées par l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tsur les <strong>en</strong>treprises […] con<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t à une homogénéisation <strong>de</strong>s pratiques et formes au sein <strong>de</strong>schamps organisationnels » (ibid.), selon le phénomène d’homogénéisation montré par DiMaggioet Powell (1983). La notion <strong>de</strong> légitimité est une clé <strong>de</strong> lecture qui ne se limite pas à120


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talel’institutionnalisation <strong>de</strong> formes et <strong>de</strong> pratiques organisationnelles, mais qui peut être utilem<strong>en</strong>tprise <strong>en</strong> compte dans les ressources dont l’organisation a besoin pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ses missions.En effet, dans la perspective stratégique qui est la nôtre, la légitimité est considérée comme uneressource à part <strong>en</strong>tière, participant à l'attraction d'autres ressources (Tywoniak, 1998 ; Bessire,1999 ; Zimmerman & Zeitz, 2002) « nécessaires à la survie et à la croissance <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>treprise(capital, technologie, managers, employés compét<strong>en</strong>ts, cli<strong>en</strong>ts, réseaux) » (Buisson, 2005). Danscette perspective, la nature contextuelle <strong>de</strong> la légitimité <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t cruciale. En effet, commel’explique M-L. Buisson (2005), la « légitimité est d'abord un jugem<strong>en</strong>t social (Zimmerman &Zeitz, 2002), une validation externe (Stone & Brush, 1996), accordée à l'organisation par sesparties pr<strong>en</strong>antes (Ashforth & Gibbs, 1990) ». Il s'agit donc d'obt<strong>en</strong>ir un cons<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>smultiples acteurs prés<strong>en</strong>ts dans le système social <strong>de</strong> l'organisation, qui désigne « l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tdans lequel [elle] exerce ses activités et auquel elle a besoin <strong>de</strong> démontrer sa cohér<strong>en</strong>ce »(Zimmerman & Zeitz, 2002). La légitimité n’est donc pas un absolu, mais une ressource quel’organisation veillera à préserver et développer à travers les différ<strong>en</strong>tes voies relationnelles qui lareli<strong>en</strong>t à l’externe.La nécessité d’être reconnu <strong>en</strong> tant que c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche a été rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t perçue par lefondateur dont le souci a été <strong>de</strong> constituer un conseil sci<strong>en</strong>tifique qui puisse formaliser ce statut(Guillet & Leroy, 2010). Dans les années 70, Luc Hoffmann s’est <strong>en</strong>touré d’un conseilsci<strong>en</strong>tifique composé <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiques reconnus, occupant <strong>de</strong>s postes à responsabilités dans lesplus importants organismes <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong> écologie <strong>en</strong> France ou à l’étranger. Ceci r<strong>en</strong>voie à ladim<strong>en</strong>sion réglem<strong>en</strong>taire <strong>de</strong> la légitimité (Scott, 1995 : 151-152, cité par Buisson, 2005) selonlaquelle les organisations vont établir <strong>de</strong>s structures formelles <strong>de</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t (ici le conseilsci<strong>en</strong>tifique) et <strong>en</strong> respecter les règles (contrôle et ori<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> recherche). Si cerapprochem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la structure <strong>de</strong> la TdV à celle <strong>de</strong>s instituts <strong>de</strong> recherche publics français esthistorique, la volonté <strong>en</strong> est toujours tangible, par exemple dans l’adoption réc<strong>en</strong>te (<strong>en</strong> 2009) <strong>de</strong>stitres <strong>de</strong> postes utilisés dans les structures publiques (« chargé <strong>de</strong> recherche », « chef <strong>de</strong>départem<strong>en</strong>t »).Si l’on poursuit dans les catégories <strong>de</strong> légitimité proposées par Scott (1995), on s’aperçoit que ladim<strong>en</strong>sion normative – qui sont les « opinions favorables données par une organisation au sujetd’une autre constituant un vote <strong>de</strong> confiance dans l’organisation » au regard d’un système d<strong>en</strong>ormes et <strong>de</strong> valeurs (Zimmerman & Zeitz, 2002) – résonne assez fortem<strong>en</strong>t au contact <strong>de</strong>l’histoire <strong>de</strong> la TdV. Quand la TdV a été fondée <strong>en</strong> 1954, les zones humi<strong>de</strong>s n’étai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>coreperçues comme <strong>de</strong>s écosystèmes m<strong>en</strong>acés. Luc Hoffmann, le fondateur, a lui-même participé à laconstruction <strong>du</strong> problème avec les biologistes et les naturalistes dont il s’était rapproché, <strong>en</strong> allant121


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesà la r<strong>en</strong>contre <strong>de</strong>s instituts sci<strong>en</strong>tifiques qu’il a su, comme nous l’avons évoqué, attirer sur leterrain <strong>de</strong> la Camargue. Depuis, la TdV agit dans un contexte où la reconnaissance <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s ne fait plus débat – les zones humi<strong>de</strong>s exist<strong>en</strong>t dans les cadres<strong>de</strong> la gouvernance internationale – , elle participe néanmoins au mainti<strong>en</strong> <strong>du</strong> problème dansl’arène publique. Aujourd’hui, l’<strong>en</strong>jeu pour sa légitimité « normative » n’est donc plus tant dans ladémonstration <strong>du</strong> bi<strong>en</strong> fondé <strong>de</strong> son objet, mais dans l’exposition <strong>de</strong> sa capacité à remplir samission. La légitimité « <strong>du</strong> résultat » a <strong>en</strong> effet investi le domaine <strong>de</strong> l’action publique qui alongtemps été fondée sur « le principe » ou « les valeurs ». Cette t<strong>en</strong>dance est matérialisée par lagénéralisation d’une forme <strong>de</strong> contrôle basée sur l’évaluation (Duran, 1999 : 16, 168 ; Busson-Villa, 1999 ; Guillaume, 2009). Dans le domaine <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique, l’évaluationsci<strong>en</strong>tifique est inhér<strong>en</strong>te à l’organisation même <strong>du</strong> secteur et pr<strong>en</strong>d plusieurs formes, comme lesprocé<strong>du</strong>res d’exam<strong>en</strong> par les pairs pour la soumission d’un article à une revue sci<strong>en</strong>tifique, lesprocé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> recrutem<strong>en</strong>t et d’affectation thématique d’un chercheur, ou <strong>en</strong>core <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> programmes <strong>de</strong> recherche (Matzkin, 2009). Ces formes <strong>de</strong> légitimation par lesquelles la TdVpénètre la communauté sci<strong>en</strong>tifique conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t un double <strong>en</strong>jeu pour l’organisation : celui, bi<strong>en</strong>sûr, <strong>de</strong> la reconnaissance lui donnant les capacités d’exercer et <strong>de</strong> développer cette activitésci<strong>en</strong>tifique (capacité d’action), mais aussi celui <strong>de</strong> l’espace qui lui est ouvert pour exprimer lesproblèmes et les résultats sci<strong>en</strong>tifiques relatifs aux ZH qu’elle porte (action). L’évaluation pr<strong>en</strong>dégalem<strong>en</strong>t la forme d’une procé<strong>du</strong>re instituée dans l’organisation p<strong>en</strong>dant laquelle un comitéd’évaluation étudie la pertin<strong>en</strong>ce et l’avancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> recherche d’un laboratoire. LaTdV met beaucoup d’application dans le respect <strong>de</strong> ces procé<strong>du</strong>res, y compris à l’heure oùl’évaluation sci<strong>en</strong>tifique t<strong>en</strong>d à se ré<strong>du</strong>ire aux indices bibliométriques (classem<strong>en</strong>t international<strong>de</strong>s revues) (Matzkin, 2009). La TdV organise <strong>en</strong> effet <strong>de</strong>s évaluations <strong>de</strong> son programme à mi etfin <strong>de</strong> parcours <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> ses plans quinqu<strong>en</strong>naux, qui sont jugées par les évaluateurs externeseux-mêmes « d’une pertin<strong>en</strong>ce et d’une qualité que l’on ne trouve plus toujours dans les instituts publics »(Evaluateur, Evaluation juin 2008). Le choix <strong>de</strong>s évaluateurs et <strong>de</strong>s membres <strong>du</strong> conseilsci<strong>en</strong>tifique revêt une importance majeure si l’on se souvi<strong>en</strong>t que la légitimité n’a <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s quedans la relation qu’elle favorise <strong>en</strong>tre l’organisation et le système social dont elle est dép<strong>en</strong>dante.Un grand soin est <strong>en</strong> effet porté à la composition <strong>de</strong> ces comités qui rassembl<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiquesv<strong>en</strong>ant d’instituts <strong>de</strong> recherche publics (directeurs <strong>de</strong> laboratoire d’écologie, chercheursspécialistes <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes approches) ou <strong>de</strong>s experts internationaux dans le domaine <strong>de</strong>s ZH,c’est-à-dire <strong>de</strong>s spécialistes habillés d’une certaine notoriété dont la TdV <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d à raison profiter.On perçoit alors que le choix <strong>de</strong> s’imposer <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res lour<strong>de</strong>s et coûteuses n’est pas anodin<strong>en</strong> termes <strong>de</strong> légitimité et d’ancrage <strong>de</strong> l’organisation dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique. L’indice122


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talebibliométrique reste cep<strong>en</strong>dant le critère <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce tant pour les évaluateurs et les membres <strong>du</strong>conseil sci<strong>en</strong>tifique que pour les chercheurs <strong>en</strong> interne. S’il octroie à la TdV une certaine visibilité<strong>de</strong> sa place dans le secteur <strong>de</strong> la recherche, il n’ai<strong>de</strong> cep<strong>en</strong>dant pas à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la contribution<strong>de</strong> cette activité <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s 73 . On retrouve ici, sous un autreangle, notre problème <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>s dim<strong>en</strong>sions d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale inhér<strong>en</strong>tesou liées à la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> la recherche sur les ZH.Notons <strong>en</strong>fin que « la légitimité n'est pas statique, mais résulte d'un processus continu <strong>de</strong>légitimation » (Buisson 2005 ; citant Beaulieu et al., 2002) qui passe par la répétition <strong>de</strong>sprocé<strong>du</strong>res exposées, mais aussi par l’exercice même <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> recherche qui seradéveloppée juste après la section suivante portant sur une <strong>de</strong>rnière ressource fondam<strong>en</strong>tale elleaussi liée à la légitimité acquise par l’organisation : le réseau.3.2.4 Le réseau, le part<strong>en</strong>ariat : <strong>de</strong>s ressources aux <strong>en</strong>jeux stratégiques multiplesLa TdV a toujours développé son activité <strong>de</strong> recherche <strong>en</strong> interaction avec différ<strong>en</strong>ts sci<strong>en</strong>tifiquesappart<strong>en</strong>ant aux instituts publics <strong>de</strong> la région ou aux relations personnelles <strong>du</strong> fondateur, commel’illustr<strong>en</strong>t les élém<strong>en</strong>ts historiques évoqués au fil <strong>du</strong> texte. L’absolue nécessité <strong>de</strong> travailler <strong>en</strong>part<strong>en</strong>ariat était vraie à cette époque où les connaissances <strong>en</strong> écologie étai<strong>en</strong>t embryonnaires, où« tout était à faire ». C’est tout aussi vrai aujourd’hui à un mom<strong>en</strong>t où <strong>de</strong> nombreux problèmessont connus mais rest<strong>en</strong>t à expliquer plus précisém<strong>en</strong>t afin <strong>de</strong> leur trouver <strong>de</strong>s solutions. On peutmesurer l’importance <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat pour la TdV dans l’expression claire et pragmatique <strong>de</strong> ces<strong>en</strong>jeux dans son plan stratégique 74 :« Le part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique est un élém<strong>en</strong>t clé dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme2011-2015 et plus généralem<strong>en</strong>t dans le mainti<strong>en</strong> ou l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> nosrecherches. En effet, les ambitions <strong>du</strong> programme 2011-2015 sont largem<strong>en</strong>t au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>scapacités <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong> l’équipe, tant <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces que d’effectifs. Lepart<strong>en</strong>ariat est donc un moy<strong>en</strong> privilégié pour atteindre nos objectifs. Dans cetteperspective, chaque chercheur a une double mission, m<strong>en</strong>er <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> recherche etattirer <strong>de</strong>s équipes <strong>de</strong> sa discipline ou <strong>de</strong> discipline complém<strong>en</strong>taires pour contribuer auprogramme. D’autre part la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est une structure <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> petite taille,relativem<strong>en</strong>t isolée pour laquelle le part<strong>en</strong>ariat et les échanges sci<strong>en</strong>tifiques favoris<strong>en</strong>t lesflux d’idées et l’amélioration continue <strong>de</strong> l’expertise. De plus l’association dans le73 Cette discussion sera poursuivie au chapitre 7 qui t<strong>en</strong>tera d’apporter quelques élém<strong>en</strong>ts conclusifs sur la place <strong>de</strong>l’évaluation par rapport à sa stratégie <strong>de</strong> capacitation, et plus généralem<strong>en</strong>t par rapport à la réflexion stratégique pourl’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.74 Les discours <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts chercheurs <strong>de</strong> la TdV (recueillis <strong>en</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong> ou lors <strong>de</strong> l’observation) et les <strong>en</strong>jeuxsoulevés dans ce texte sont particulièrem<strong>en</strong>t converg<strong>en</strong>ts. Ces <strong>en</strong>jeux apparaiss<strong>en</strong>t comme étant partagés <strong>en</strong> interne.123


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesmontage <strong>de</strong> projets avec ces part<strong>en</strong>aires nous permet <strong>de</strong> participer à <strong>de</strong>s projets auxquelsnous ne pourrions répondre seuls » (Plan stratégique <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> 2011-2015, 2010).Ce paragraphe est sans équivoque : le part<strong>en</strong>ariat est une ressource indisp<strong>en</strong>sable à la fois pouraugm<strong>en</strong>ter les capacités d’action <strong>de</strong> l’organisation (favorise l’acquisition d’autres ressources, voirla colonne c<strong>en</strong>trale <strong>du</strong> tableau 3.1) et pour sout<strong>en</strong>ir la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> l’action elle-même (voirla troisième colonne). Le tableau 3.1 organise les différ<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>jeux cités selon cette dichotomie(capacité d’action / action) et selon les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE.Tableau 3.1 : Enjeux stratégiques <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>EnjeuxObjet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talAction<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleDéveloppem<strong>en</strong>tinterneDynamiqueexterneAugm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> recherche etd’actionApport d’autres disciplines et compét<strong>en</strong>ces <strong>en</strong>fonction <strong>du</strong> problème écologique focal Augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s effectifs pour un projet Contact avec <strong>de</strong>s laboratoires méditerrané<strong>en</strong>s Echanges avec d’autreslaboratoires Possibilité <strong>de</strong> répondreà <strong>de</strong>s appels d’offrepour gros projets R<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’ancrage <strong>de</strong> la TdVdans le secteur Stimulation,augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces internesObt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>tsAugm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> lareconnaissance et <strong>de</strong> lalégitimitéMise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>sprojets <strong>de</strong> rechercheApproche écosystémique<strong>de</strong>s problèmesécologiquesMise <strong>en</strong> œuvre avec« équipe » plus gran<strong>de</strong>R<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>capacité d’autres acteursAccès à terrains médit.Les situations sont très diverses et les part<strong>en</strong>ariats ont tous <strong>de</strong>s modalités spécifiques (conv<strong>en</strong>tionou contrat, nombres <strong>de</strong> personnes impliquées dans les organismes part<strong>en</strong>aires, anci<strong>en</strong>neté etfréqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s relations, etc.), mais ils se rejoign<strong>en</strong>t autour <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux prés<strong>en</strong>tés dans le tableau,auxquels ils vont plus ou moins contribuer.Les objectifs sous-jac<strong>en</strong>t au développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique maint<strong>en</strong>ant prés<strong>en</strong>tés,nous allons pouvoir examiner les choix et les pratiques mises <strong>en</strong> œuvre par les membres <strong>de</strong> laTdV pour conforter voire développer cette ressource stratégique. Pour cela, il convi<strong>en</strong>t d’exposerau préalable les types <strong>de</strong> relations que la TdV <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t avec les organismes sci<strong>en</strong>tifiques. Cesrelations sont prés<strong>en</strong>tées à travers une typologie que l’on a pu élaborer sur la base <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>set <strong>de</strong>s analyses <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>t. Faisant le constat que le terme <strong>de</strong> « part<strong>en</strong>ariat » recouvrait un124


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleév<strong>en</strong>tail <strong>de</strong> relations hétérogènes, nous avons choisi <strong>de</strong> les examiner à partir d’un critère simple :le part<strong>en</strong>aire est celui qui intervi<strong>en</strong>t dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s recherches (et actions) faisantpartie <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> la TdV. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> travaille pourtant dans l’interaction avec unréseau bi<strong>en</strong> plus large que ces « part<strong>en</strong>aires opérationnels ». Dans la plupart <strong>de</strong>s cas, unpart<strong>en</strong>ariat opérationnel est monté <strong>en</strong>tre structures ou personnes appart<strong>en</strong>ant à un même réseau.Le réseau est un vivier <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat pot<strong>en</strong>tiel, souv<strong>en</strong>t débloqué par <strong>de</strong>s opportunitésfinancières. Quatre niveaux ont ainsi pu être id<strong>en</strong>tifiés :1. Le réseau « naturel impersonnel » - la communauté sci<strong>en</strong>tifique : par les disciplines qu’ils développ<strong>en</strong>t,les chercheurs <strong>de</strong> la TdV sont am<strong>en</strong>és à faire partie <strong>de</strong> communautés disciplinaires ouinterdisciplinaires. Ces réseaux peuv<strong>en</strong>t se matérialiser par <strong>de</strong>s colloques, <strong>de</strong>s associationssci<strong>en</strong>tifiques disciplinaires, <strong>de</strong>s revues.2. Le réseau « personnel » : dans leur travail, les chercheurs <strong>de</strong> la TdV développ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s réseauxpersonnels, souv<strong>en</strong>t dans leur domaine d’expertise – un carnet d’adresse se constitue au fur et àmesure <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s et <strong>de</strong>s relations interpersonnelles tissées.3. Le réseau organisationnel : on distingue le réseau « organisationnel » <strong>du</strong> réseau « personnel » pourdiffér<strong>en</strong>cier certains organismes avec lesquels les relations sont multiples, dans le cas où plusieursmembres <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux organismes respectifs sont <strong>en</strong> contact. Il s’agit égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cas où il y a une« reconnaissance » d’organisation à organisation, qui peut par exemple être matérialisée dans lesinvitations à différ<strong>en</strong>ts événem<strong>en</strong>ts où l’on att<strong>en</strong>d un représ<strong>en</strong>tant 75 <strong>de</strong> l’organisme invité.4. Le part<strong>en</strong>ariat : nous le restreignons, comme indiqué plus haut, aux aspects opérationnels m<strong>en</strong>ésconjointem<strong>en</strong>t (quel que soit le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> participation <strong>de</strong>s parties) par les <strong>de</strong>ux acteurs /organismes. Le part<strong>en</strong>ariat est donc une configuration temporaire, le plus souv<strong>en</strong>t formalisée parune conv<strong>en</strong>tion ou un contrat. Il faut cep<strong>en</strong>dant noter qu’un certain nombre <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariatsexistants à la TdV peuv<strong>en</strong>t être qualifiés <strong>de</strong> perman<strong>en</strong>ts dans la mesure où les projetscorrespondants sont con<strong>du</strong>its sur le long terme. Avec certains organismes, les part<strong>en</strong>ariats sonttellem<strong>en</strong>t nombreux qu’un travail commun est toujours <strong>en</strong> cours.Bi<strong>en</strong> que nous ayons circonscrit le part<strong>en</strong>ariat à sa forme opérationnelle, il n’<strong>en</strong> reste pas moinslarge, puisque aucun projet sci<strong>en</strong>tifique n’est m<strong>en</strong>é sans collaboration avec <strong>de</strong>s chercheursexternes ou <strong>de</strong>s instituts sci<strong>en</strong>tifiques. Les programmes financés par l’Ag<strong>en</strong>ce national <strong>de</strong> larecherche sont un exemple <strong>de</strong> cadre <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat qui peut am<strong>en</strong>er la TdV à collaborer avec d<strong>en</strong>ouveaux laboratoires. Les « part<strong>en</strong>aires perman<strong>en</strong>ts », quant à eux, sont par exemple l’Universitéd’Aix-Marseille et l’Institut Méditerrané<strong>en</strong> d’Ecologie et <strong>de</strong> Paléoécologie (IMEP) où <strong>de</strong>ux75 Le choix <strong>du</strong> participant peut avoir une importance stratégique, <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s att<strong>en</strong>tes mutuelles <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> cesorganismes vis-à-vis <strong>de</strong> l’autre.125


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleschercheurs <strong>de</strong> la TdV exerc<strong>en</strong>t un temps partiel <strong>en</strong> tant qu’<strong>en</strong>seignants-chercheurs. La TdV estégalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat sur le long terme avec plusieurs institutions à travers l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>doctorants, comme l’Office National <strong>de</strong> la Chasse et <strong>de</strong> la Faune Sauvage (ONCFS) dont lacollaboration est favorisée par la localisation <strong>de</strong> leurs bureaux dans les locaux <strong>de</strong> la TdV, maisaussi le pôle universitaire <strong>de</strong> Montpellier (dont l’IRD) et l’Université <strong>de</strong> Prov<strong>en</strong>ce d’Aix-Marseille,l’Université <strong>de</strong> Bourgogne, l’Université <strong>de</strong> Leuv<strong>en</strong> (Belgique) et l’Université <strong>de</strong> Casablanca(Maroc). Des conv<strong>en</strong>tions cadre ont été signées avec le CEFE/CNRS, l’IMEP, la EstacionBiologica <strong>de</strong> Doñana, ou <strong>en</strong>core l’Edward Grey Institute.Cette prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s réseaux et <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat donne une image <strong>de</strong> la connexion <strong>de</strong> la TdV aumon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la recherche, <strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> écologie et <strong>en</strong> biologie <strong>de</strong> la conservation. Nouspouvons maint<strong>en</strong>ant nous intéresser à la réflexion qu’elle mène et aux pratiques qu’elle met <strong>en</strong>œuvre pour r<strong>en</strong>forcer (au regard <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>jeux développés plus haut) ce part<strong>en</strong>ariatsci<strong>en</strong>tifique. La nature <strong>de</strong> cette ressource implique la connaissance <strong>de</strong>s réseaux et une att<strong>en</strong>tionportée aux opportunités qui peuv<strong>en</strong>t se prés<strong>en</strong>ter. C’est ce que l’on peut observer à travers laplace que pr<strong>en</strong>d ce sujet dans les réunions internes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et d’animation sci<strong>en</strong>tifique. Ladirection et les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t y échang<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s informations sur les travaux réalisés avecles collaborateurs, sur les opportunités <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes natures, décid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la participation – <strong>en</strong>fonction <strong>de</strong>s personnes à y r<strong>en</strong>contrer, <strong>de</strong> l’affichage dans un domaine, etc. – à un événem<strong>en</strong>tsci<strong>en</strong>tifique et désign<strong>en</strong>t le participant <strong>en</strong>tre eux ou <strong>en</strong> interne. Il n’y a donc pas un « planstratégique » <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat à mettre <strong>en</strong> œuvre, mais plutôt une <strong>gestion</strong> courante <strong>de</strong> cetteressource <strong>en</strong> interne impliquant une att<strong>en</strong>tion continue.Pour la préparation <strong>du</strong> plan 2011-2015 (que nous étudierons dans le détail au chapitre 6), uneversion provisoire <strong>du</strong> plan stratégique a été <strong>en</strong>voyée aux part<strong>en</strong>aires sci<strong>en</strong>tifiques « perman<strong>en</strong>ts »<strong>en</strong> sollicitant à la fois tout comm<strong>en</strong>taire sur le cont<strong>en</strong>u et <strong>de</strong>s pistes <strong>de</strong> collaboration <strong>en</strong> fonction<strong>de</strong> la résonance avec leurs propres programmes. On observe que la TdV donne beaucoupd’information sur son programme <strong>de</strong> recherche et d’action dans l’objectif d’attirer <strong>de</strong>s membres<strong>de</strong> son réseau et <strong>de</strong> favoriser la création <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats opérationnels 76 . Sur les 7 organismes76 Ce souci d’attirer <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> qualité transparaît dans les docum<strong>en</strong>ts internes. A l’occasion <strong>de</strong> la planificationstratégique, une réflexion a <strong>en</strong> effet été m<strong>en</strong>ée pour les qualités qu’elle pouvait rev<strong>en</strong>diquer : « La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>possè<strong>de</strong> égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s atouts pour que nos part<strong>en</strong>aires soi<strong>en</strong>t intéressés à maint<strong>en</strong>ir ou développer le part<strong>en</strong>ariat,parmi lesquelles une forte id<strong>en</strong>tité et originalité qui s’exprime par l’expertise pluridisciplinaire, l’expéri<strong>en</strong>ce sur leszones humi<strong>de</strong>s et la qualité <strong>de</strong>s chercheurs, le domaine comme terrain <strong>de</strong> recherche, la capacité à maint<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>sprojets et <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> données à long terme non dép<strong>en</strong>dants <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts à court terme. » (Plan stratégique<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> 2011-2015, 2010).126


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talecontactés 77 dont 4 sont <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires récurr<strong>en</strong>ts, seulem<strong>en</strong>t 2 ont répon<strong>du</strong>, dont un part<strong>en</strong>aire« perman<strong>en</strong>t » et le British Trust for Ornithology (BTO) id<strong>en</strong>tifié comme un organisme aveclequel le développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat était souhaitable 78 . Dans le court terme 79 , cette pratique nepeut pas <strong>en</strong>core être qualifiée <strong>de</strong> totalem<strong>en</strong>t efficace ; elle a néanmoins attiré l’att<strong>en</strong>tion d’unnouveau part<strong>en</strong>aire pot<strong>en</strong>tiel avec qui l’organisation d’une réunion permettra d’avancer dans ces<strong>en</strong>s dans le moy<strong>en</strong> ou le long terme – les étapes pouvant être rapi<strong>de</strong>s ou l<strong>en</strong>tes <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>sopportunités qui se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, l’important étant <strong>de</strong> se t<strong>en</strong>ir prêt.Enfin les conv<strong>en</strong>tions-cadres ont déjà été évoquées comme une formalisation d’une relationorganisationnelle (réseau organisationnel) favorisant le prolongem<strong>en</strong>t ou la succession <strong>de</strong> travauxcommuns, ce qui n’est pas sans importance pour <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche et qui d’un point <strong>de</strong>vue pratique t<strong>en</strong>d à ré<strong>du</strong>ire les efforts et donc les coûts. En pratique, ces cadres facilit<strong>en</strong>t la t<strong>en</strong>ue<strong>de</strong> réunions régulières ou même l’échange d’information hors réunion. La signature <strong>de</strong>conv<strong>en</strong>tions-cadres indique égalem<strong>en</strong>t une reconnaissance réciproque <strong>de</strong>s parties qui n’est passans importance par rapport à l’ancrage <strong>de</strong> la TdV dans la communauté sci<strong>en</strong>tifique 80 et quifavorise une sollicitation mutuelle pour différ<strong>en</strong>tes opportunités (appels d’offre, colloques,recommandation d’un chercheur pour <strong>de</strong>s comités sci<strong>en</strong>tifiques, etc.).En somme, les principales pratiques visant à maint<strong>en</strong>ir et r<strong>en</strong>forcer le réseau et le part<strong>en</strong>ariat sontl’échange d’informations internes, externes, et la formalisation <strong>de</strong>s relations organisationnellesdans un certain nombre <strong>de</strong> cas. Cep<strong>en</strong>dant, l’ess<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong>s pratiques permettant la création <strong>de</strong>part<strong>en</strong>ariats ne sont pas spécifiques comme celles que l’on vi<strong>en</strong>t d’examiner, mais résid<strong>en</strong>t aucontraire dans l’activité <strong>de</strong> recherche même. Dans la pratique sci<strong>en</strong>tifique et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>leur projet, les chercheurs sont am<strong>en</strong>és à <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir et créer <strong>de</strong>s relations plus ou moinsformelles : la création <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat au mom<strong>en</strong>t <strong>du</strong> montage d’un projet, <strong>de</strong>s r<strong>en</strong>contres avec lespairs dans les différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> restitution académique, etc. Il convi<strong>en</strong>t d’ailleurs <strong>de</strong> noter quedans la mise <strong>en</strong> œuvre réelle <strong>de</strong>s projets, le part<strong>en</strong>ariat est loin <strong>de</strong> se limiter aux organismessci<strong>en</strong>tifiques. En effet, les recherches développées à la TdV concern<strong>en</strong>t pour la plupart lesécosystèmes humi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Camargue et leur biodiversité. La Camargue est un espace anthropisé etmo<strong>de</strong>lé par les activités humaines. Les chercheurs sont am<strong>en</strong>és à collaborer avec les acteurs <strong>du</strong>77 Le C<strong>en</strong>tre d’écologie Fonctionnelle et Evolutive (CEFE/CNRS) <strong>de</strong> Montpellier, La Fondation pour la Recherchesur la Biodiversité (FRB), l’IMEP, la Estacion Biologica <strong>de</strong> Doñana, l’Université <strong>de</strong> Bourgogne, le LaboratoireMontpelliérain d’Economie Mathématique et Appliqué (INRA/Lameta) et le British Trut for Ornithology (BTO).78 Notamm<strong>en</strong>t pour l’écologie <strong>de</strong>s oiseaux d’eau et l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s dynamiques <strong>de</strong> populations <strong>de</strong> vertébrés, ainsi que ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> modèle et <strong>de</strong> base <strong>de</strong> données dans le domaine (Plan stratégique 2011-2015 <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, 2010).79 Au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la rédaction <strong>de</strong> cette thèse, le plan stratégique 2011-2015 est <strong>en</strong> phase <strong>de</strong> finalisation, et lasollicitation <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires sci<strong>en</strong>tifiques est très réc<strong>en</strong>te.80 Voir la partie 3.2.3 sur la légitimité.127


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesterritoire (acteurs sectoriels et <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels) pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> leur rechercheet leur objectif <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites. Ces types <strong>de</strong> collaboration ontcep<strong>en</strong>dant davantage trait à la dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qu’à une ressource <strong>en</strong>part<strong>en</strong>ariat nécessaire à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s projets. Cet aspect sera donc traité à travers l’analyse<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes formes d’action inhér<strong>en</strong>tes et connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique que nouspouvons maint<strong>en</strong>ant abor<strong>de</strong>r.3.3 La recherche comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : <strong>de</strong> laconstruction <strong>de</strong>s problèmes écologiques à la diversité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>sd’interv<strong>en</strong>tionLes ressources nécessaires au développem<strong>en</strong>t d’une activité <strong>de</strong> recherche sci<strong>en</strong>tifique ont étéabordées <strong>en</strong> tachant <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> perspective la façon dont la TdV s’y pr<strong>en</strong>d pour les maint<strong>en</strong>iret les r<strong>en</strong>forcer au regard <strong>de</strong>s quatre registres stratégiques <strong>de</strong> notre cadre d’analyse. Nouspouvons à prés<strong>en</strong>t nous consacrer plus précisém<strong>en</strong>t aux projets <strong>de</strong> recherche m<strong>en</strong>és par la TdVet aux formes d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales sous-jac<strong>en</strong>tes.Nous avons vu que les premiers travaux sci<strong>en</strong>tifiques développés par l’organisation dat<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sonorigine, <strong>en</strong> 1954, et que l’activité a pris une tournure formelle <strong>en</strong> 1974. Les projets aujourd’hui <strong>en</strong>cours sont le fruit d’une évolution inscrite dans le long terme – <strong>en</strong> termes d’objets <strong>de</strong> recherche etd’approches. Comme m<strong>en</strong>tionné plus haut, les premières années <strong>de</strong> travail ont été consacrées àl’avifaune, mais la nécessité <strong>de</strong> connaître et compr<strong>en</strong>dre les habitats <strong>de</strong>s oiseaux d’eau a très vitepoussé à l’élargissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> champ d’investigation. La recherche sur les habitats a am<strong>en</strong>é lessci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV à s’intéresser à la biodiversité animale et végétale <strong>de</strong> la Camargue qui estloin <strong>de</strong> se résumer aux oiseaux d’eau. Puis dans les années 1990, c’est le souhait <strong>de</strong> parv<strong>en</strong>ir à unecompréh<strong>en</strong>sion systémique <strong>de</strong> cette vaste zone humi<strong>de</strong> camarguaise qui a incité la TdV à intégrerplus fermem<strong>en</strong>t l’hydrologie et <strong>de</strong> la géographie (géomatique et paysage). Nous ne pourronsabor<strong>de</strong>r tous les projets <strong>de</strong> recherche mis <strong>en</strong> œuvre par la TdV, ni aller dans l’exhaustivité <strong>de</strong>sévolutions et <strong>de</strong>s résultats apportés au cours <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> ceux que nous allons traiter. Enoutre, s’il y a déjà lieu <strong>de</strong> « dresser un bilan <strong>de</strong>s recherches et <strong>de</strong>s grands résultats <strong>en</strong> écologie apportés par laTdV » (membre <strong>du</strong> CS, CS 2009), ce n’est pas là que se situe notre objectif. Pour compr<strong>en</strong>dre etéclairer les formes d’action inhér<strong>en</strong>tes et connexes à l’activité <strong>de</strong> recherche, nous avons étéatt<strong>en</strong>tifs à toutes les activités impliquant les chercheurs <strong>de</strong> la TdV. Nous avons cherché à d’abordcompr<strong>en</strong>dre ces actions pour <strong>en</strong>suite les relier aux programmes <strong>de</strong> recherches – dont nous avions128


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepréalablem<strong>en</strong>t pris connaissance par la consultation <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec leschercheurs. L’analyse <strong>de</strong> ces observations a permis d’id<strong>en</strong>tifier plusieurs formes d’actionrécurr<strong>en</strong>tes liées aux projets <strong>de</strong> recherche mis <strong>en</strong> œuvre, ou plus généralem<strong>en</strong>t aux compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques dont dispose la TdV. Parmi les innombrables actions opérées par ces sci<strong>en</strong>tifiquesp<strong>en</strong>dant la pério<strong>de</strong> 2006-2010 81 , nous <strong>en</strong> avons choisi quelques-unes qui à notre s<strong>en</strong>s illustr<strong>en</strong>t lesdiffér<strong>en</strong>tes formes d’action repérées. Elles témoign<strong>en</strong>t <strong>en</strong> outre <strong>de</strong> la délicatesse stratégiqueinhér<strong>en</strong>te aux choix d’objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et d’actions (négociations internes) et audéploiem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (négociations externes).Pour chacun <strong>de</strong>s 7 exemples abordés, la problématique ou l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation sont d’abor<strong>de</strong>xpliqués. Les places et les rôles <strong>en</strong>dossés par la TdV sont <strong>en</strong>suite analysés au regard <strong>de</strong>scapacités pour l’action (ressources) et <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> positionnem<strong>en</strong>t et d’action dans le jeu.Précisons cep<strong>en</strong>dant que ces <strong>de</strong>ux aspects ne sont pas développés <strong>de</strong> façon égale pour chaqueexemple dans la mesure où nous avons au contraire cherché à saisir leur diversité et celles <strong>de</strong>squestions qui se pos<strong>en</strong>t autour <strong>du</strong> li<strong>en</strong> recherche et action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Ces formes d’actionliées à la recherche sont abordées <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux temps (Tableau 3.2). D’abord (Section 3.3.1), nousétudierons la façon dont les recherches et les actions soulèv<strong>en</strong>t et font exister les objets ou lesproblèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Ensuite (Section 3.3.2), nous abor<strong>de</strong>rons les formes d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et les leviers sur lesquels les sci<strong>en</strong>tifiques s’appui<strong>en</strong>t pour apporter <strong>de</strong>schangem<strong>en</strong>ts dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH.Tableau 3.2 : Les 7 exemples d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>3.3.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique pour publiciser les objets et les problèmes écologiques1) Recherche sur l’anguille : une espèce <strong>en</strong> voie d’extinction2) Les suivis à long terme <strong>de</strong>s oiseaux d’eau : les « cartes au trésor » <strong>de</strong> la Camargue3) L’expertise sci<strong>en</strong>tifique prise dans la controverse autour <strong>de</strong> la démoustication3.3.2 La recherche comme levier pour différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action4) Expertise sci<strong>en</strong>tifique et <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong> Camargue5) Participation aux procé<strong>du</strong>res pour l’application <strong>de</strong>s politiques publiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales6) Le rôle <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces dans les choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : exemple <strong>de</strong>s Salins <strong>du</strong> Sud-Est <strong>de</strong> laCamargue7) Négociations avec les chasseurs pour pousser à l’amélioration <strong>de</strong> leurs pratiques81 Sachant, <strong>en</strong>core une fois, que certaines ne sont que la continuité d’actions déjà <strong>en</strong>gagées antérieurem<strong>en</strong>t, certainessont plus réc<strong>en</strong>tes, certaines <strong>en</strong>core sont ponctuelles, etc. Les cas sont très divers.129


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales3.3.1 Publiciser <strong>de</strong>s objets et <strong>de</strong>s problèmes écologiques1) Recherche sur une espèce <strong>en</strong> voie d’extinction, l’anguilleLe problème <strong>du</strong> déclin <strong>de</strong> la population d’anguilles peut être vu comme un cas d’école <strong>de</strong>sproblèmes <strong>de</strong> conservation auquel se confront<strong>en</strong>t ceux qui veul<strong>en</strong>t agir pour la nature : le stockaurait chuté <strong>de</strong> 99% <strong>de</strong>puis 1980, la population est mondiale. On est donc face à un problème <strong>de</strong>conservation critique – l’anguille est <strong>en</strong> danger d’extinction –le problème se joue à l’échelleinternationale. Que peut faire une organisation comme la TdV face à un tel problème ? Quelleplace occupe-t-elle face à un problème <strong>de</strong> cette ampleur et quelle contribution peut-elle apporterà sa prise <strong>en</strong> charge ? Les caractéristiques <strong>de</strong> l’espèce et les facteurs supposés <strong>de</strong> son déclin sontdétaillés dans l’<strong>en</strong>cadré 3.1Encadré 3.1 : Caractéristiques et facteurs <strong>du</strong> déclin <strong>de</strong> la population d’Anguilla anguilla (Abdallah et al.,2009 ; Plan stratégique TdV 2006-2010)L’espèce Anguilla anguillaL'anguille europé<strong>en</strong>ne (Anguilla anguilla) fraye dans la mer <strong>de</strong>s Sargasses située dans la partiec<strong>en</strong>tre-ouest <strong>de</strong> l’océan Atlantique. Les larves migr<strong>en</strong>t passivem<strong>en</strong>t grâce au Gulf Stream et arriv<strong>en</strong>tsur les côtes europé<strong>en</strong>nes, <strong>de</strong> la Finlan<strong>de</strong> au sud <strong>du</strong> Maroc, y compris sur le pourtourméditerrané<strong>en</strong>. A l’approche <strong>de</strong>s côtes, les larves évolu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> anguilles transpar<strong>en</strong>tes appeléescivelles. Après s’être pigm<strong>en</strong>tées, ces <strong>de</strong>rnières se métamorphos<strong>en</strong>t <strong>en</strong> anguilles jaunes (printempsété)dans les eaux contin<strong>en</strong>tales ou littorales où elles vont croître p<strong>en</strong>dant plusieurs années pouratteindre le sta<strong>de</strong> d’anguille a<strong>du</strong>lte (anguille arg<strong>en</strong>tée). La maturité sexuelle est plus précoce <strong>en</strong> eauxplus chau<strong>de</strong>, elle peut être <strong>de</strong> 3 à 5 ans <strong>en</strong> Méditerranée, tandis qu’elle peut pr<strong>en</strong>dre jusqu’à 15 ans<strong>en</strong> zone scandinave. Ces anguilles matures migr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis les bassins versants jusque dans la mer<strong>de</strong>s Sargasses (voyage <strong>de</strong> 5-6 mois).Déclin <strong>de</strong> la population d’Anguilla anguillaL’anguille europé<strong>en</strong>ne a connu un brusque déclin (99%) (Plan stratégique TdV 2006-2010) <strong>de</strong>puisles années 80, si bi<strong>en</strong> qu’elle est <strong>de</strong>puis 2007 inscrite à l’app<strong>en</strong>dice II <strong>de</strong> la CITES 82 et figure parmiles espèces <strong>en</strong> « danger critique d’extinction » <strong>de</strong> la Liste Rouge <strong>de</strong> l’UICN.Les causes <strong>du</strong> déclin généralisé <strong>de</strong> la population d’anguille ne sont pas <strong>en</strong>core bi<strong>en</strong> connues(Crivelli, Plan Stratégique TdV 2006-2010), mais la communauté sci<strong>en</strong>tifique l’attribue à uneconjonction <strong>de</strong> facteurs :- les changem<strong>en</strong>ts dans les circulations océaniques,- la disparition <strong>de</strong>s habitats favorables à l'espèce, notamm<strong>en</strong>t les marais côtiers,- les mauvaises conditions <strong>de</strong> migration : inaccessibilité <strong>de</strong> certains cours d'eau suite à l'édification<strong>de</strong> barrages, mortalités <strong>du</strong>es à l'<strong>en</strong>traînem<strong>en</strong>t dans les turbines lors <strong>du</strong> retour vers l’océan,canalisation <strong>de</strong>s cours d’eau, drainage <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s...- la gran<strong>de</strong> s<strong>en</strong>sibilité <strong>de</strong> l'espèce aux contaminants toxiques et aux pro<strong>du</strong>its phyto-sanitaires,- une forte exploitation par la pêche, à tous les sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie,- l'intro<strong>du</strong>ction (liée à l’aquaculture) d'un parasite (Anguillicola crassus) qui perturbe la migrationmarine <strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes par la déformation <strong>de</strong> la vessie natatoire.82 Conv<strong>en</strong>tion sur le commerce international <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong> faune et <strong>de</strong> flore sauvages m<strong>en</strong>acées d'extinction.130


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLa TdV a comm<strong>en</strong>cé à travailler sur la faune aquatique dans les années 1970. En 1983, leschercheurs travaillant sur ces thématiques ont découvert la prés<strong>en</strong>ce d’un parasite (Anguillicolacrassus) pour la première fois <strong>en</strong> France (Chercheurs TdV, com.pers., 2009), peu après la premièredétection au nord <strong>de</strong> l’Europe <strong>en</strong> 1981. Depuis sa place dans la communauté sci<strong>en</strong>tifique, la TdVa contribué à l’avancée <strong>de</strong>s découvertes sur les facteurs pot<strong>en</strong>tiels <strong>du</strong> déclin <strong>de</strong> la populationd’anguilles. Elle a <strong>en</strong> effet poursuivi les recherches sur les effets <strong>du</strong> parasitisme : dans les années90, ses chercheurs ont pu montrer que les anguilles atteintes d’Anguillicola crassus connaissai<strong>en</strong>tune atrophie <strong>de</strong> leur vessie natatoire et un taux <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong> plus faible (<strong>de</strong> 15 à 20% contre 30%pour une anguille a<strong>du</strong>lte saine) (Chercheurs TdV, com.pers., 2009). Ces connaissances vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tcompléter d’autres recherches europé<strong>en</strong>nes ayant montré que ces modifications physiquesr<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t les anguilles trop faibles pour le parcours <strong>de</strong>s 5000 km jusqu’au lieu <strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ctiondans la mer <strong>de</strong>s Sargasses. Face à un problème aussi insaisissable tant au niveau <strong>de</strong> sa gravité que<strong>de</strong> l’ampleur géographique à laquelle il se joue, la TdV a participé à l’effort <strong>de</strong> recherche qui apermis la mise à jour <strong>de</strong> ce problème et l’avancée <strong>de</strong> premiers élém<strong>en</strong>ts d’explication.Cette recherche « d’avant-gar<strong>de</strong> » a pu égalem<strong>en</strong>t montrer son utilité au mom<strong>en</strong>t où le problème aété pris <strong>en</strong> charge au niveau politique. En effet, le déclin <strong>de</strong> la population d’anguilles a fait l’objetd’un règlem<strong>en</strong>t 83 europé<strong>en</strong> <strong>en</strong> 2007 afin <strong>de</strong> reconstituer le stock. Les Etats europé<strong>en</strong>s <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>tmettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguille nationaux pour fin 2008, dont l’objectif est un tauxd’échappem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> 40% <strong>de</strong> la biomasse d’anguilles arg<strong>en</strong>tées 84 . Le Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguill<strong>en</strong>ational et le Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguille Rhône-Méditerranée consultés nous <strong>en</strong>seign<strong>en</strong>t que lespremières contraintes sont d’ordre sci<strong>en</strong>tifique : un <strong>de</strong>s principaux problèmes rési<strong>de</strong> dans lemanque <strong>de</strong> connaissance sur la biomasse et l’échappem<strong>en</strong>t effectifs <strong>de</strong>s anguilles arg<strong>en</strong>tées. Orc’est ce taux d’échappem<strong>en</strong>t (<strong>de</strong> 40%) qui est l’objectif <strong>de</strong>s mesures indiquées dans les plans <strong>de</strong><strong>gestion</strong>. Il n’y a alors ri<strong>en</strong> d’étonnant à ce que la plupart <strong>de</strong>s travaux et actions prévus soi<strong>en</strong>t d<strong>en</strong>ature sci<strong>en</strong>tifique et technique, mais si les étu<strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques sont un préalable nécessaire àl’action, elles doiv<strong>en</strong>t avancer le plus rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t possible pour espérer voir la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>mesures <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pertin<strong>en</strong>tes, dès la première phase d’application <strong>du</strong> plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, ou dans la83 Règlem<strong>en</strong>t R(CE) n°1100/2007 <strong>du</strong> Conseil <strong>de</strong>s ministres <strong>du</strong> 18 septembre 2007, publié au Journal Officiel <strong>de</strong>l’Union Europé<strong>en</strong>ne <strong>du</strong> 22 septembre 2007. Le règlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong> est une « loi communautaire » applicabledirectem<strong>en</strong>t dans tous les états membres sans que ces <strong>de</strong>rniers ai<strong>en</strong>t besoin <strong>de</strong> la tra<strong>du</strong>ire dans les textes nationaux. Ila la particularité <strong>de</strong> créer un même droit dans toute la Communauté sans t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong>s frontières et d’être valableuniformém<strong>en</strong>t et intégralem<strong>en</strong>t dans tous les états membres. Son applicabilité est directe.84 L’article 2.4 <strong>de</strong> ce règlem<strong>en</strong>t stipule que « l’objectif <strong>de</strong> chaque plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> est <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire la mortalité d’origineanthropique afin d’assurer avec une gran<strong>de</strong> probabilité un taux d’échappem<strong>en</strong>t vers la mer d’au moins 40 % <strong>de</strong> labiomasse d’anguilles arg<strong>en</strong>tées correspondant à la meilleure estimation possible <strong>du</strong> taux d’échappem<strong>en</strong>t qui aurait étéobservé si le stock n’avait subi aucune influ<strong>en</strong>ce anthropique » (Valadou et al., 2008 : Sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’anguille, unrèglem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong>).131


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesperspective <strong>de</strong> son évolution <strong>en</strong> <strong>de</strong>uxième pério<strong>de</strong>. « La TdV [qui] n’a pas att<strong>en</strong><strong>du</strong> les plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>pour travailler sur l’anguille a déjà <strong>du</strong> recul » (membre association Migrateurs Rhône Méditerranée(MRM), 2009) et fait partie <strong>de</strong>s rares organisations <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> faire avancer rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t la prise<strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> l’anguille au niveau <strong>de</strong> la région. En effet, malgré une structuretechnico-administrative mise <strong>en</strong> place dans les années 1990 85 regroupant les organes étatiques etles représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>s filières pêche, dont l’exist<strong>en</strong>ce a été capitale pour rassembler lesconnaissances et se fixer <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, les acteurs jouant les « rôles sci<strong>en</strong>tifiques ettechniques » rest<strong>en</strong>t peu nombreux, au moins pour le bassin versant Rhône Méditerranée 86 . Dansce contexte, la TdV peut jouer un rôle significatif malgré la complexité <strong>du</strong> phénomène dont il estquestion dans ces plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Après 20 ans <strong>de</strong> recueil <strong>de</strong> données sur les poissons <strong>de</strong>Camargue, le chercheur <strong>de</strong> la TdV chargé <strong>de</strong> ce programme a estimé qu’« il y avait tout ce qui fallaitpour modéliser la dynamique <strong>de</strong>s anguilles et construire un modèle pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s lagunes ». Pour cela, ils’est associé à une université itali<strong>en</strong>ne dont certains membres travaill<strong>en</strong>t sur l’espèce (Bevacqua etal., 2009 ; De Leo et al., 2009). Ce modèle pourrait permettre un changem<strong>en</strong>t vers une meilleure<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s lagunes méditerrané<strong>en</strong>nes dans un temps moindre et pour un coût ré<strong>du</strong>it commel’indique ce passage <strong>du</strong> Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguille Rhône Méditerranée :« Les informations permettant <strong>de</strong> calculer sur une lagune le pourc<strong>en</strong>tage d’échappem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s anguilles arg<strong>en</strong>tées sont les suivantes :• évaluation <strong>du</strong> recrutem<strong>en</strong>t, c’est-à-dire <strong>de</strong> la population <strong>en</strong>trante <strong>de</strong> civelle (alevind’anguille)• quantités pêchées + effort <strong>de</strong> pêche (nombre d’<strong>en</strong>gins et temps <strong>de</strong> pose) lorsque lalagune est exploitée• évaluation <strong>de</strong> la taille <strong>de</strong> la population (capture/marquage/re-capture)• détermination <strong>de</strong> l’indicateur « structure <strong>en</strong> taille » d’une population d’anguilles »Un seul outil <strong>de</strong> modélisation est disponible sur ces milieux. Il a été développé par la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (A. Crivelli) à partir d’un suivi <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 10 ans <strong>de</strong> la populationd’anguilles <strong>de</strong> l’étang <strong>du</strong> Vaccarès, <strong>en</strong> collaboration avec une équipe <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiquesitali<strong>en</strong>s. Ce modèle nécessite <strong>en</strong>core une phase <strong>de</strong> validation à partir <strong>de</strong>s donnéesrecueillies sur un autre étang » (Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguille Rhône Méditerranée Corse,approuvé par la Commission Europé<strong>en</strong>ne le 15 février 2010 : 17).85Le ministère <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et l’ONEMA, le Groupem<strong>en</strong>t d’Intérêt Sci<strong>en</strong>tifique sur les EspècesAmphihalines (GRISAM) au niveau national, ainsi que les Ag<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’eau, l’ONEMA, les DIREN (maint<strong>en</strong>antDREAL), et les Comités <strong>de</strong> Gestion <strong>de</strong>s Poissons Migrateurs (COGEPOMI, instance consultative créée dans 8bassins versants <strong>en</strong> 1994, ayant contribué à la rédaction <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>).86 Nous tirons cette observation <strong>de</strong> la consultation <strong>du</strong> Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> anguille Rhône Méditerranée et <strong>de</strong> la liste <strong>de</strong>sinvités au colloque « journées poissons migrateurs » (organisé par MRM <strong>en</strong> novembre 2009, à Marseille) : il s’agitprincipalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’ONEMA et <strong>de</strong> MRM, concernant les instituts sci<strong>en</strong>tifiques, il y a un groupe <strong>de</strong> recherche àl’Université <strong>de</strong> Perpignan et la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.132


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleCette capacité à répondre rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t sur le plan sci<strong>en</strong>tifique et technique peut favoriserl’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t : avec le règlem<strong>en</strong>t europé<strong>en</strong>, <strong>de</strong>s fonds sont alloués au plan national<strong>de</strong> l’anguille. Dans ce cadre, la TdV reçoit un financem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Ag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’eau RMC pourterminer la construction <strong>de</strong> son modèle pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s lagunes <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’anguille. Nousretrouverons ce mécanisme dans le paragraphe suivant avec les suivis ornithologiques à longterme : la TdV fait le choix <strong>de</strong> financer <strong>de</strong>s recherches p<strong>en</strong>dant plusieurs années jusqu’à ce quel’avancée prise dans le domaine lui permette d’accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts au mom<strong>en</strong>t oùs’ouvr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s opportunités. Ici, nous voyons que le registre <strong>de</strong> la construction et <strong>de</strong> la focalisationsur un objet écologique, le registre <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s capacités d’action (registre <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t interne) et le registre <strong>de</strong> la place dans le secteur se nou<strong>en</strong>t : « investir » à longterme sur un objet écologique n’apporte pas simplem<strong>en</strong>t une meilleure connaissance <strong>de</strong> cet objet,mais peut aussi contribuer au r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la place <strong>de</strong> le TdV dans le secteur et <strong>de</strong> sescapacités. Ceci illustre les li<strong>en</strong>s forts qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les différ<strong>en</strong>ts registres stratégiques <strong>de</strong> notrecadre d’ASOFE.En guise <strong>de</strong> conclusion sur la recherche sur la population d’anguilles (bi<strong>en</strong> que nous n’<strong>en</strong> ayonsaperçu ici qu’une part minime <strong>de</strong> ses évolutions et implications sur 30 ans), nous pouvonssimplem<strong>en</strong>t nous intéresser aux raisons aujourd’hui évoquées par les chercheurs <strong>de</strong> la TdV pourcontinuer à s’investir sur ce problème à la fois démesuré et ne pouvant offrir beaucoup d’espoirsur un impact significatif à la TdV : « le travail sur une espèce <strong>en</strong> danger est un excell<strong>en</strong>t moy<strong>en</strong> pour mettresur la table toute une série <strong>de</strong> problèmes qui affect<strong>en</strong>t l’écosystème. C’est une sorte <strong>de</strong> véhicule ». « Cela permetd’insister sur le problème <strong>de</strong>s PCB 87 dans le Rhône, sur le fonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique <strong>de</strong> la Camargue, car unfonctionnem<strong>en</strong>t favorable aux anguilles l’est aussi à bi<strong>en</strong> d’autres espèces » (Chercheur TdV, com.pers.,2009). La TdV a intérêt à continuer à travailler sur l’anguille qui fait aujourd’hui l’objet d’un cadred’action où la TdV peut se positionner tout <strong>en</strong> travaillant sur l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’écosystème : « Là jevais avoir un projet dans le cadre <strong>du</strong> Plan Rhône pour les espèces <strong>en</strong> danger. Mais on travaille bi<strong>en</strong> sûr au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>l’espèce, aujourd’hui l’approche que tout le mon<strong>de</strong> privilégie est une approche écosystémique » (Chercheur TdV,com.pers., 2009). On retrouve cette logique dans d’autres programmes <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> la TdV.Le programme historique portant sur le flamant rose est un <strong>de</strong> ceux-là : si la population ne suscitepas aujourd’hui d’inquiétu<strong>de</strong> forte quant à sa conservation, son caractère emblématique permet<strong>de</strong> l’ériger <strong>en</strong> porte-parole pour communiquer sur l’importance <strong>du</strong> mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s habitats(Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2009). L’anguille et le flamant rose sont <strong>de</strong>ux exemples qui révèl<strong>en</strong>t87 Les polychlorobiphényles (PCB) sont <strong>de</strong>s contaminants <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux liés à l'activité humaine. Ces moléculesont été utilisées massivem<strong>en</strong>t jusque dans les années soixante-dix pour la fabrication <strong>de</strong>s transformateurs électriquesdans la vallée <strong>du</strong> Rhône. La contamination <strong>du</strong> fleuve a <strong>en</strong>traîné l'interdiction <strong>de</strong> consommation <strong>de</strong>s poissons adoptée<strong>en</strong> septembre 2006.133


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesle caractère stratégique sous-jac<strong>en</strong>t à la construction et la focalisation sur <strong>de</strong>s objets écologiques àconserver, qui doiv<strong>en</strong>t être <strong>en</strong> eux-mêmes un levier pour le portage d’<strong>en</strong>jeux plus fins et pluscomplexes.2) Les suivis d’espèces sur le long terme : un patrimoine sci<strong>en</strong>tifique, une placesur le territoireDepuis sa création, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV accumul<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s données sur les différ<strong>en</strong>tes espècesanimales prés<strong>en</strong>tes <strong>en</strong> Camargue (voire dans d’autres sites méditerrané<strong>en</strong>s). Luc Hoffmann avaitl’ambition <strong>de</strong> faire l’inv<strong>en</strong>taire exhaustif <strong>de</strong> la faune et <strong>de</strong> la flore <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>lta mystérieux dont il<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dait <strong>de</strong> naturalistes plus âgés « le portrait <strong>de</strong>s plus éloqu<strong>en</strong>ts » (Silberstein, 2010 : 33). « Lastation s’est imposé <strong>de</strong>s missions sci<strong>en</strong>tifiques parmi lesquelles la préparation d’un catalogue <strong>de</strong> lafaune et <strong>de</strong> la flore <strong>de</strong> Camargue, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’évolution dans le temps <strong>de</strong> la biocénosecamarguaise, la réalisation <strong>de</strong> la carte <strong>de</strong> la végétation <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ainsi que le baguage etl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s oiseaux » (Is<strong>en</strong>mann, 2003 : 38). Des suivis réguliers et élaborés ont rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t étémis <strong>en</strong> place :« Quatre ans après son inauguration, un premier bilan permet <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> faire une meilleureidée. La recherche avance bon train et se diversifie. Le baguage <strong>de</strong>s oiseaux, qui constitue<strong>en</strong>core la gran<strong>de</strong> mission <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, s’y est int<strong>en</strong>sifié. Deux mille neuf c<strong>en</strong>tsoixante-huit oiseaux bagués pour cette seule année 1958 – soit un bon nombre <strong>de</strong>passereaux migrateurs, mais égalem<strong>en</strong>t, p<strong>en</strong>dant l’hiver, <strong>de</strong> canards. On mesure chaqueoiseau. On le pèse. On observe l’état <strong>de</strong> son plumage. Autant <strong>de</strong> données que l’onreporte sur une « carte <strong>de</strong> baguage » propre à chaque indivi<strong>du</strong> » (Silberstein, 2010 : 57).La TdV possè<strong>de</strong> ainsi 60 ans <strong>de</strong> données sur les flamants roses et sur les canards, 30 sur les larolimicoles,40 sur les poissons…Au mom<strong>en</strong>t où le fondateur <strong>de</strong> la TdV a organisé le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces suivis d’espèces,l’<strong>en</strong>jeu principal était <strong>de</strong> faire l’inv<strong>en</strong>taire et <strong>de</strong> porter à la connaissance le riche patrimoine naturelqui était celui <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône. Aujourd’hui, un <strong>de</strong>s principaux <strong>en</strong>jeux est <strong>de</strong> faire l’état <strong>de</strong> cespopulations dans un contexte <strong>de</strong> forte érosion <strong>de</strong> la biodiversité. La première contribution <strong>de</strong> cessuivis à long terme dans la protection <strong>de</strong>s écosystèmes humi<strong>de</strong>s résid<strong>en</strong>t dans l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>sespèces et dans l’évaluation <strong>de</strong> leurs statuts. La TdV participe ainsi – avec ses part<strong>en</strong>aires <strong>en</strong>Camargue – à l’effort porté à l’échelle mondiale par les acteurs se saisissant <strong>de</strong> cette cause, pourdonner un cont<strong>en</strong>u et <strong>de</strong>s prises à cette « biodiversité » à laquelle l’objectif <strong>de</strong> protection a étéaccordé dans les cadres nationaux et internationaux. C’est par exemple grâce à ce g<strong>en</strong>red’initiatives locales que l’UICN peut dresser la liste rouge <strong>de</strong>s espèces.134


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleAu-<strong>de</strong>là <strong>du</strong> statut <strong>de</strong> ces populations, ces suivis fourniss<strong>en</strong>t les données ess<strong>en</strong>tielles pour lediagnostic <strong>de</strong>s « problèmes <strong>de</strong> conservation, <strong>en</strong> détectant <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>dances défavorables et <strong>en</strong> <strong>en</strong>id<strong>en</strong>tifiant les causes » (Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 41) par la confrontation <strong>de</strong>s donnéessur les différ<strong>en</strong>tes espèces et sur leurs habitats (modification <strong>de</strong>s habitats, variables abiotiqueseau, climat, etc.) et sur la <strong>gestion</strong> (niveau d’exploitation <strong>de</strong> certaines espèces, contrôle ou non <strong>de</strong>certaines espèces <strong>en</strong>vahissantes, etc.). L’historicité <strong>de</strong>s données pr<strong>en</strong>d toute sa valeur dans ce typed’exploitation, car ce n’est que par un tel diagnostic que la TdV peut élaborer <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><strong>gestion</strong> plus favorables à la faune et la flore <strong>de</strong>s milieux humi<strong>de</strong>s. Ainsi, la TdV a besoin <strong>de</strong>réaliser ces suivis pour « faire une veille, savoir ce qu’il se passe sur la Camargue <strong>en</strong> termes d’espèce <strong>en</strong> fonction<strong>de</strong> ses mutations, pour alerter et agir » (chercheur TdV, com.pers., 2010) et tra<strong>du</strong>ire cette connaissance<strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. « Par exemple pour les hérons, on ne fait plus <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong>ssus, mais on suit ce qui sepasse, on informe, on alerte et on voit s’il faut interv<strong>en</strong>ir pour leur mainti<strong>en</strong> ».Or, peu <strong>de</strong> données <strong>de</strong> ce type sont disponibles <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> celles que la TdV pro<strong>du</strong>it au niveau<strong>de</strong> la Camargue. Ses sci<strong>en</strong>tifiques déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t l’idée qu’elle a intérêt à les pro<strong>du</strong>ire elle-même. Eneffet, les organismes fourniss<strong>en</strong>t rarem<strong>en</strong>t leurs données brutes à d’autres, au mieux ils se leséchang<strong>en</strong>t et les négoci<strong>en</strong>t. Ces données représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t un coût important ou une source <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>upour les organismes pro<strong>du</strong>cteurs qui souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t (Réserve Nationale <strong>de</strong> Camargue,com.pers., 2009), elles sont aussi <strong>de</strong>s ressources pouvant attirer d’autres ressources (comme <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>aires). La mutualisation <strong>de</strong>s données et <strong>du</strong> travail peut être absolue comme le montr<strong>en</strong>tplusieurs projets communs à la TdV et l’ONCFS ; ou au contraire être un facteur <strong>de</strong> blocagecomme dans le cas <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong> Camargue qui <strong>de</strong>vait réunir 7 structures sci<strong>en</strong>tifiques et<strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels <strong>de</strong> Camargue (Lebreton, 2008 : 31). Loin d’être uniquem<strong>en</strong>t uneaffaire <strong>de</strong> ressources financières et part<strong>en</strong>ariales, la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s données se négocie surtoutparce que c’est à partir d’elles que les sci<strong>en</strong>tifiques peuv<strong>en</strong>t développer leur recherche et l’action<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZH. L’exemple <strong>de</strong>s laro-limicoles, dont plusieurs espèces sont <strong>en</strong> déclin <strong>en</strong>Camargue 88 , est éloqu<strong>en</strong>t. Dans le docum<strong>en</strong>t d’évaluation <strong>de</strong> fin <strong>de</strong> programme 2006-2010 (2010),on peut lire l’explication suivante : « Le suivi et l’action sur les laro-limicoles <strong>en</strong> Camargue restecep<strong>en</strong>dant difficile, <strong>en</strong> dépit <strong>du</strong> grand intérêt <strong>de</strong> conservation qu’ils représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> raison d’une88 L’avifaune se porte plutôt bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> Camargue <strong>de</strong>puis les années 1990, même <strong>de</strong>puis les années 1980 pour certainesespèces. « Les laro-limicoles regroup<strong>en</strong>t les espèces d’oiseaux appart<strong>en</strong>ant aux Laridés (goélands et mouettes), auxSternidés (sternes et guifettes) et aux Limicoles (petits échassiers dont l'huîtrier, l'échasse, l'avocette, les gravelots etles chevaliers) tous inféodés, <strong>en</strong> Méditerranée, au littoral ou à ses proches habitats (milieux lagunaires, côtesrocheuses) » (pole-lagunes.org). Ils sont presque les seuls à prés<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>s baisses d’effectifs pour plusieurs espèces <strong>de</strong>ce groupe (sternes, etc.). Les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV l’expliqu<strong>en</strong>t par un manque <strong>de</strong> disponibilité <strong>de</strong>s habitats, <strong>du</strong>dérangem<strong>en</strong>t et possiblem<strong>en</strong>t par un problème <strong>de</strong> ressource alim<strong>en</strong>taire pour ces espèces <strong>en</strong> baisse (com.pers., 2010).135


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talescollaboration technique et financière non satisfaisante avec l’Association <strong>de</strong>s Amis <strong>du</strong> Vigueirat.[…] Les données laro-limicoles n’ont toujours pas été valorisées par [la personne chargée <strong>de</strong> cevolet, anci<strong>en</strong> <strong>de</strong> la TdV], maint<strong>en</strong>ant aux Amis <strong>du</strong> Vigueirat ». Pour compr<strong>en</strong>dre, il faut serappeler que la TdV a connu une grave crise financière <strong>en</strong> 2003 et a dû inciter à <strong>de</strong>s départsvolontaires <strong>de</strong> ses employés. Cette personne a trouvé un poste dans l’association toute proche 89<strong>de</strong>s Amis <strong>du</strong> Vigueirat et a négocié avec la TdV <strong>de</strong> continuer elle-même le suivi <strong>de</strong>s laro-limicolessur lesquels elle avait fait sa thèse <strong>de</strong> doctorat. Pour la TdV, ne plus avoir à supporter le coût <strong>du</strong>suivi <strong>de</strong>s laro-limicoles aurait pu être un avantage si les données avai<strong>en</strong>t effectivem<strong>en</strong>t étéexploitées et publiées, faisant état <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> ces espèces (Chercheur TdV,com.pers., 2010). La collaboration att<strong>en</strong><strong>du</strong>e n’a pas fonctionné, les rapports se pass<strong>en</strong>t aucontraire dans une concurr<strong>en</strong>ce très forte, malgré <strong>de</strong>s réunions régulières pour organiser le travailcommun. La TdV essaie <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre la main sur ces suivis mais « perd <strong>du</strong> terrain sur le terrain ».Cette formule exprimée par un chercheur <strong>de</strong> la TdV fait référ<strong>en</strong>ce à la fois à l’accès aux terrainsqui sont majoritairem<strong>en</strong>t privés <strong>en</strong> Camargue, mais aussi à la place dans la communauté <strong>de</strong> laconservation au niveau local, « les Amis <strong>du</strong> Vigueirat sont id<strong>en</strong>tifiés laro-limicoles », ce qui freine la TdVdans l’action pour ce groupe d’espèces.Ainsi, les suivis ont été mis <strong>en</strong> place par la TdV pour porter à la connaissance la biodiversitécamarguaise. Aujourd’hui, ils permett<strong>en</strong>t aux sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV <strong>de</strong> suivre l’état <strong>de</strong>spopulations qu’ils ont pour mission <strong>de</strong> conserver. Les résultats <strong>de</strong> ces suivis font aussi unexcell<strong>en</strong>t outil <strong>de</strong> communication et <strong>de</strong> s<strong>en</strong>sibilisation. « Avec les suivis d’espèces, il y a toujours <strong>de</strong>schoses intéressantes et faciles à montrer, <strong>de</strong>s choses simples qui marqu<strong>en</strong>t les esprits » (Chargée <strong>de</strong>communication TdV, com.pers., 2010). Ils peuv<strong>en</strong>t être communiqués au grand public à traversles médias 90 . Surtout, au niveau local, les <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels ou les administrationschargées <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (DREAL) y sont très s<strong>en</strong>sibles, c’est comme « le bilan » <strong>de</strong> leur<strong>gestion</strong> (Chercheur TdV, com.pers., 2010). C’est aussi un moy<strong>en</strong> d’établir <strong>de</strong>s relationscoopératives avec <strong>de</strong>s acteurs sectoriels comme dans le cas <strong>de</strong> la communication <strong>de</strong>s suivis <strong>de</strong>89 Cette proximité à la TdV est autant géographique que par le domaine d’activité et <strong>en</strong>core plus par la filiation. Eneffet, les amis <strong>du</strong> Viguerat sont <strong>gestion</strong>naires d’un espace limitrophe au <strong>de</strong>lta <strong>de</strong> Camargue à l’est. Ces terrains ont étéacquis par le Conservatoire <strong>du</strong> Littoral et la TdV y a élaboré le premier plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. « Le Conservatoire <strong>du</strong> littorala délégué à plusieurs services qui se charg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son bon fonctionnem<strong>en</strong>t. Parmi ceux-ci, on retrouve la communed’Arles, le conseil régional, l’ONF, l’ONCFS, l’association pour la protection <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, l’association <strong>de</strong>samis <strong>du</strong> Vigueirat et le WWF France » (Directeur <strong>de</strong>s Amis <strong>du</strong> Vigueirat, com.pers., 2008).90 Les communications dans les médias <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong>s suivis long terme sont régulières. Par exemple, p<strong>en</strong>dant leprogramme 2006-2010, on compte <strong>de</strong>ux journaux télévisés (France 2 et 3), <strong>de</strong>ux émissions <strong>de</strong> radio (Delta FM etFrance Inter), une douzaine d’articles dans la presse (France Soir, La Marseillaise, Le Mon<strong>de</strong>, Terre Sauvage…)(Evaluation <strong>du</strong> programme 2006-2010, 2010).136


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talecanards aux chasseurs. Ces relations sont nécessaires à la fois pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ses projets <strong>de</strong>recherche, mais aussi pour se faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> ces acteurs quant à <strong>de</strong>srecommandations dans les pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (voir l’exemple 7).Comme nous l’évoquions plus haut, les suivis à long terme représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t néanmoins <strong>de</strong>s coûtsimportants pour l’organisme pro<strong>du</strong>cteur <strong>de</strong> ces données, comme <strong>en</strong> témoigne la récurr<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>sdiscussions sur le mainti<strong>en</strong> ou le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts suivis dans les réunionssci<strong>en</strong>tifiques et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> interne. Les coûts matériels sont relativem<strong>en</strong>t faibles, il s’agitprincipalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> survols et <strong>de</strong>s coûts <strong>de</strong> déplacem<strong>en</strong>t sur le terrain. C’est <strong>en</strong>revanche le temps nécessaire au terrain, puis à la saisie <strong>de</strong>s données qui nécessit<strong>en</strong>t un voire <strong>de</strong>uxpostes à plein temps. Le coût est une <strong>de</strong>s raisons pour laquelle un tel patrimoine (jusqu’à 40 ans<strong>de</strong> données pour certaines espèces) est relativem<strong>en</strong>t rare, vu la difficulté <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>sfinancem<strong>en</strong>ts pour <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> long terme. La TdV a récemm<strong>en</strong>t fait le choix – aprèsnégociations <strong>en</strong> interne – <strong>de</strong> réaffirmer son <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans les suivis à long terme <strong>en</strong>pér<strong>en</strong>nisant (sur fonds propres) le poste d’un technici<strong>en</strong> recruté sur fonds externes. Leschercheurs responsables <strong>de</strong>s suivis à long terme agiss<strong>en</strong>t néanmoins sur <strong>de</strong>ux leviers pouraugm<strong>en</strong>ter la qualité et la quantité <strong>de</strong>s données et pour ré<strong>du</strong>ire les coûts : leurs compét<strong>en</strong>cestechniques pour améliorer les protocoles et la fonctionnalité <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> données et capitaliserles données <strong>de</strong>s réseaux naturalistes qu’ils ont mis <strong>en</strong> place 91 .L’investissem<strong>en</strong>t financier que représ<strong>en</strong>te les suivis à long terme (que ce soit <strong>en</strong> fonds externes oupropres) reste raisonnable au regard <strong>de</strong> la connaissance et <strong>de</strong> l’action qu’ils permett<strong>en</strong>t à la TdV<strong>de</strong> poursuivre, mais aussi au regard <strong>de</strong> leur influ<strong>en</strong>ce sur la place que la TdV occupe dans lacommunauté sci<strong>en</strong>tifique. La TdV est <strong>en</strong> effet reconnue pour son travail <strong>de</strong> terrain, la quantité etla qualité <strong>de</strong> ses données et pour son expertise poussée sur les écosystèmes humi<strong>de</strong>s (chercheursCEFE-CNRS, com.pers., 2008). Elle est même presque vue comme innovante dans un contexteoù certains laboratoires publics cherch<strong>en</strong>t à r<strong>en</strong>ouer avec le terrain (Evaluateur, Evaluation <strong>de</strong> laTdV à mi-programme, juin 2008). Les chercheurs <strong>en</strong> font une stratégie qui s’avère très probanteau vu <strong>de</strong> la qualité et <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV : se faire reconnaître parla communauté sci<strong>en</strong>tifique à travers ses propres co<strong>de</strong>s (publications) et faire valoir ses atouts (le91 « Deux axes complém<strong>en</strong>taires seront développés : 1. Faciliter la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> jeux <strong>de</strong> données importants, quirequièr<strong>en</strong>t standardisation et uniformisation <strong>de</strong>s données ; l'archivage et sécurisation <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> données ; lerecoupem<strong>en</strong>t et analyses <strong>de</strong> bases <strong>de</strong> données issues <strong>de</strong> disciplines et <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes. 2. Pot<strong>en</strong>tialiser lacollecte <strong>de</strong> données naturalistes <strong>en</strong> développant <strong>de</strong>s interfaces sur internet permettant la saisie <strong>de</strong> données, proposant<strong>de</strong>s protocoles <strong>de</strong> suivis standardisés d'espèces et <strong>de</strong> communautés et restituant les résultats <strong>de</strong> ces étu<strong>de</strong>s » (Planstratégique 2011-2015, 2010).137


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesterrain et les données). Un paragraphe extrait <strong>du</strong> Plan Stratégique 2011-2015 (2010) <strong>en</strong> est unebonne illustration :« Le départem<strong>en</strong>t s’appuie <strong>en</strong> premier lieu sur la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique (la publicationétant le pro<strong>du</strong>it <strong>de</strong> base) et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nouveaux outils (interface internet,<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> bases <strong>de</strong> données) pour obt<strong>en</strong>ir une légitimité, une crédibilité et unevisibilité. Les résultats seront <strong>en</strong> priorité publiés dans <strong>de</strong>s revues sci<strong>en</strong>tifiquesinternationales. Il s’agira <strong>de</strong> rester compétitif dans le domaine <strong>de</strong> la recherche garant d<strong>en</strong>otre crédibilité et <strong>de</strong> notre possibilité à postuler à <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> recherche. Lapublication sci<strong>en</strong>tifique sera égalem<strong>en</strong>t le garant <strong>de</strong> la validité <strong>de</strong>s résultats et leurcrédibilité à les appliquer sur le terrain.Le départem<strong>en</strong>t aura égalem<strong>en</strong>t la responsabilité <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir et développer le capital <strong>de</strong>la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> sur les suivis à long terme. Il s’agira notamm<strong>en</strong>t d’anticiper les futuresinnovations techniques et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s d’autres laboratoires qui n’ont plus accès au terrainet au long terme (plumothèques, sérothéques...) » (Plan Stratégique 2011-2015, 2010 : 36– mise <strong>en</strong> forme d’origine).Pour conclure, soulignons les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts registres <strong>de</strong> notre cadre <strong>de</strong> l’ASOFE quisont apparus particulièrem<strong>en</strong>t forts dans cet exemple <strong>de</strong>s suivis à long terme <strong>de</strong>s oiseaux d’eau(Figure 3.1).Construction <strong>de</strong> l’objet écologique« les cartes <strong>de</strong> la Camargue »Mo<strong>de</strong> d’action publiqueSavoir sur quoi quand et où agirAdapter les recommandations<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Place dans le secteurTdV incontournable pourinstituts publics sci<strong>en</strong>tifiques et<strong>gestion</strong>naires. Niche (concurr<strong>en</strong>ce)Développem<strong>en</strong>t interneInvestissem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> RH à longtermeFigure 3.1 : L’exemple <strong>de</strong>s suivis à long terme <strong>de</strong>s oiseaux d’eau replacés dans les quatre registres <strong>de</strong> notrecadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur)Ici, la construction <strong>de</strong> l’objet écologique « oiseaux d’eau » <strong>en</strong> « cartes » donnant la taille <strong>de</strong>spopulations et leur localisation sur le territoire camarguais fourni tout d’abord <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>tstangibles pour prioritariser l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. A partir <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> ces suivis, lessci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV sont capables <strong>de</strong> savoir s’il faut réagir, sur quelle espèce et sur quelhabitat. Comme nous l’avons vu, ces suivis contribu<strong>en</strong>t fortem<strong>en</strong>t à donner une placeincontournable à la TdV sur le territoire autant pour les <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels quiveul<strong>en</strong>t savoir ce qui se passe sur les terrains étant sous leurs responsabilités, que pour les138


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong>s laboratoires publics qui sont souv<strong>en</strong>t à la recherche <strong>de</strong> données <strong>de</strong> terrain. Cetexemple a égalem<strong>en</strong>t révélé les relations <strong>de</strong> concurr<strong>en</strong>ce qui pouvai<strong>en</strong>t être fortes <strong>en</strong>tre lesorganismes à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui veul<strong>en</strong>t parfois agir sur les mêmes objets. Enfin, nousavons vu que ces suivis sont coûteux <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> ressource humaines et financières, mais la TdVprivilégie néanmoins la poursuite <strong>de</strong> ces investissem<strong>en</strong>ts qui sont comp<strong>en</strong>sés par le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> ses capacités d’action (connaissance fine <strong>de</strong> ce qui se passe sur le terrain) et par le caractèreincontournable <strong>de</strong> sa place sur le territoire et dans le secteur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s oiseaux d’eau.3) Alim<strong>en</strong>ter les débats publics : le cas <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>du</strong> Bti sur l’avifaunecamarguaiseLe <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône est resté longtemps <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s zones d’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’Ent<strong>en</strong>teInterdépartem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> Démoustication (EID) créée <strong>en</strong> 1956 pour démoustiquer les zonesdévolues au développem<strong>en</strong>t économique 92 . Les sociologues l’expliqu<strong>en</strong>t par la spécialisation <strong>de</strong>l’espace comm<strong>en</strong>cée il y a un <strong>de</strong>mi-siècle sans avoir changé <strong>de</strong> trajectoire jusqu’à aujourd’hui :« L'île <strong>de</strong> Camargue, issue <strong>de</strong> plusieurs siècles d'anthropisation, est néanmoins considéréecomme l'écrin d'une « nature sauvage », à ce titre internationalem<strong>en</strong>t reconnue (Picon,1978). Elle échappa d'abord aux politiques <strong>de</strong> drainage à visée agricole et sanitaire <strong>du</strong>XIXe siècle, puis à l'emballem<strong>en</strong>t économique et aux aménagem<strong>en</strong>ts territoriaux <strong>de</strong>sTr<strong>en</strong>tes Glorieuses. Ses étangs c<strong>en</strong>traux acquir<strong>en</strong>t le statut <strong>de</strong> réserve naturelle nationaledès 1927. L'<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l'île fut constitué <strong>en</strong> parc naturel régional <strong>en</strong> 1972 [PNRC],p<strong>en</strong>sé par Malraux, alors ministre d'État chargé <strong>de</strong>s Affaires culturelles, comme unecoupure verte <strong>en</strong>tre la zone pétrochimique <strong>de</strong> l'étang <strong>de</strong> Berre à l'est et le tourisme <strong>de</strong>masse <strong>du</strong> Languedoc-Roussillon (Picon, 1988). Cette spécialisation territoriale fut àl'origine <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> application différ<strong>en</strong>ciée <strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> démousticationnaissantes » (Claeys-Mekda<strong>de</strong> & Nicolas, 2009).Etre <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la zone démoustiquée, c’est être dans une zone qui pourrait pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t le<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir, c’est être dans une zone <strong>de</strong> controverse 93 . Le débat a été assez calme pour maint<strong>en</strong>ir unstatu quo jusqu’à la fin <strong>de</strong>s années 1990. Jusqu’à cette date, le PNRC, sout<strong>en</strong>u par les organismes<strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature, s’était prononcé contre l’usage <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its organochloré et organophosporéutilisés par l’EID dans un espace au statut <strong>de</strong> parc naturel régional. Les élus locaux ontprofité <strong>de</strong> cette opposition <strong>de</strong>s protecteurs <strong>de</strong> la nature pour justifier leur non décision, jusqu’à la92 La « Mission Racine » visait à organiser le développem<strong>en</strong>t touristique <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> l’Hérault et le développem<strong>en</strong>tin<strong>du</strong>striel <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> Fos-sur-Mer – Etang <strong>de</strong> Berre.93 Par opposition aux zones démoustiquées <strong>de</strong>puis longtemps où la question n’est plus prés<strong>en</strong>te au sein <strong>du</strong> débatpublic. D’après l’<strong>en</strong>quête m<strong>en</strong>ée par C. Claeys-Mekda<strong>de</strong>, la population vivant <strong>en</strong> zone démoustiquée, l’acte <strong>de</strong>démoustication ne lui pose plus question et elle n’est pas favorable à un arrêt <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions (Claeys-Mekda<strong>de</strong> &Sérandour, 2009).139


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesfin <strong>de</strong>s années 1990. Puis, ils se sont déclarés, à travers le PNRC, a priori non opposés à unedémoustication effectuée à l’ai<strong>de</strong> d’un pro<strong>du</strong>it sélectif (TdV, com.pers., 2010). Suite à cela, un<strong>de</strong>vis pour un plan <strong>de</strong> démoustication au Bti a été proposé par l’EID <strong>en</strong> 2000 et une étu<strong>de</strong>d’impact peu concluante (com.pers., 2010) a été réalisée par l’Université <strong>de</strong> Prov<strong>en</strong>ce. En 2002, leconseil d’administration et le conseil sci<strong>en</strong>tifique <strong>du</strong> Parc ont acté le fait qu’il (le PNRC) n’étaitpas opposé à une démoustication partielle <strong>de</strong> la Camargue 94 . Ces étapes marqu<strong>en</strong>t une rupturefondam<strong>en</strong>tale dans le système : d’une opposition nette à la démoustication permettant audéci<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> ne pas déci<strong>de</strong>r, on passe à une non opposition <strong>de</strong> la part <strong>du</strong> PNRC et <strong>de</strong>s organismes<strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature dans les conditions évoquées et à la remise officielle <strong>de</strong> la décision dansles mains <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs locaux. Le dossier est resté <strong>en</strong> susp<strong>en</strong>s p<strong>en</strong>dant 3 ans, mais une barrièreavait été franchie à ce mom<strong>en</strong>t-là – ce qui se tra<strong>du</strong>it pour les acteurs qui veul<strong>en</strong>t éviter ladémoustication par la nécessité <strong>de</strong> développer une stratégie d’action au s<strong>en</strong>s fort pour comp<strong>en</strong>serla « sécurité » qui avait été supprimée – et l’événem<strong>en</strong>t qui allait le matérialiser n’a pas tardé àsurv<strong>en</strong>ir. L’automne 2005 a été particulièrem<strong>en</strong>t difficile pour les habitants <strong>en</strong> raison <strong>de</strong>conditions météorologiques favorables à une très forte éclosion <strong>de</strong> ces insectes occasionnant uncertain émoi chez les habitants. Les élus locaux ont réagi rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant la crise à la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la population : le Présid<strong>en</strong>t <strong>du</strong> CG <strong>de</strong>s Bouches-<strong>du</strong>-Rhône (CG 13) a annoncé ledéblocage d’un budget d’un million d’euros pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la démoustication,immédiatem<strong>en</strong>t suivi <strong>du</strong> Présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Région qui annonçait la même somme. « C’est dans ce contextequ’a été mise <strong>en</strong> place la démoustication et nous, tout ce qu’on [le PNRC et ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t la TdV à travers sonmandat à la commission sci<strong>en</strong>tifique <strong>du</strong> PNRC] a réussi à faire, c’est <strong>de</strong> faire que les choses se fass<strong>en</strong>t dansl’ordre. Il y avait 4 étapes dans le plan <strong>de</strong> l’EID, donc on comm<strong>en</strong>ce par la première étape [démoustication d’unezone : Plan <strong>du</strong> Bourg et Salin <strong>de</strong> Giraud], assorti d’un suivi sci<strong>en</strong>tifique. Et ce sera sur la base <strong>de</strong>s résultatssci<strong>en</strong>tifiques que la décision <strong>de</strong>vra être prise par le CG 13 <strong>de</strong> poursuivre, ou pas, et d’ét<strong>en</strong>dre, ou pas, ladémoustication » (direction TdV, com.pers., 2010). Le CG 13 a mandaté le PNRC pourl’organisation et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> suivi sci<strong>en</strong>tifique, pour lequel ce <strong>de</strong>rnier a fait appel auxorganismes techniques et sci<strong>en</strong>tifiques locaux. Pour la TdV, la participation au suivi sci<strong>en</strong>tifiqueétait une vraie question qui a suscité le débat jusqu’à son propre conseil sci<strong>en</strong>tifique qui a expriméquelques réserves au vu <strong>de</strong> la s<strong>en</strong>sibilité <strong>du</strong> dossier : « on se disait à la fois : « on ne peut pas ne pas yêtre », mais on était à la fois très peu confiants sur le fait qu’on soit capable <strong>de</strong> démontrer quelque chose <strong>en</strong> milieuréel. Et si on n’est pas capable <strong>de</strong> démontrer quelque chose, on se met <strong>en</strong> position <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r l’ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la94 Le cahier <strong>de</strong>s charges indiquant les critères à respecter suivants : la démoustication au Bti ne concerne que <strong>de</strong>szones hors <strong>de</strong>s espaces protégés, pour une dose <strong>de</strong> 3L/ha dans les 3 jours suivant la mise <strong>en</strong> eau d’un site (TdV,com.pers., 2010).140


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taledémoustication. Oui, mais si c’est l’inverse, est-ce qu’on sera mieux armé pour s’opposer à la démoustication si onne participe pas au suivi sci<strong>en</strong>tifique et qu’on se dit nous-mêmes experts <strong>de</strong>s milieux naturels camarguais ? Il mesemblait que notre posture d’experts reconnus <strong>en</strong> Camargue nous imposait d’y être, on ne peut pas refuser <strong>de</strong> jouernotre rôle d’experts que l’on rev<strong>en</strong>dique et ne pas être <strong>en</strong> critique dogmatique » (direction TdV, com.pers.,2010). La TdV a décidé <strong>de</strong> se joindre au nombre <strong>de</strong>s organismes 95 investis dans le suivisci<strong>en</strong>tifique, pour le compartim<strong>en</strong>t oiseau (paludicoles et hiron<strong>de</strong>lles <strong>de</strong>s f<strong>en</strong>êtres – égalem<strong>en</strong>tamphibi<strong>en</strong>, abandonné après une année pour manque <strong>de</strong> robustesse sci<strong>en</strong>tifique).En somme, <strong>en</strong> 2005 la TdV a plaidé auprès <strong>du</strong> PNRC pour que les décisions <strong>du</strong> CG 13concernant la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la démoustication soi<strong>en</strong>t prises sur la base d’un suivi sci<strong>en</strong>tifique,dans l’objectif <strong>de</strong> contrôler les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>du</strong> « cliquet qui a été franchi lorsque le PNRC et lesnaturalistes sont passés <strong>de</strong> l’opposition nette à la ‘non opposition si’ » (direction TdV, com.pers., 2010).Pour continuer à peser dans ce débat, la TdV ne peut faire autrem<strong>en</strong>t que d’assumer son statut <strong>de</strong>spécialiste <strong>de</strong> ces milieux humi<strong>de</strong>s. Elle se retrouve alors face à un double défi dont les <strong>de</strong>uxdim<strong>en</strong>sions sont interdép<strong>en</strong>dantes : (1) elle doit se saisir <strong>de</strong> la question sci<strong>en</strong>tifique qui est celle <strong>de</strong>l’impact <strong>du</strong> Bti sur l’avifaune camarguaise ; (2) elle doit jouer au mieux son rôle d’expert dansl’évolution <strong>de</strong> ce dossier politique <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> locale – cela implique autant la qualité sci<strong>en</strong>tifique<strong>de</strong> l’expertise que son portage politique pour faire <strong>en</strong> sorte qu’elle soit prise <strong>en</strong> compte. Dans lasuite, nous verrons qu’<strong>en</strong>dosser ce double rôle <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique et d’expert peut être délicat àcertains égards. Mais bi<strong>en</strong> manié, cela peut conférer à la TdV un certain pouvoir pour affirmer saposture d’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.D’abord, le principe d’action <strong>de</strong> l’expertise est parfois à l’opposé <strong>du</strong> cheminem<strong>en</strong>t sci<strong>en</strong>tifique etceci est particulièrem<strong>en</strong>t vrai dans le cas <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qui sont le plussouv<strong>en</strong>t d’une gran<strong>de</strong> complexité. Or les déci<strong>de</strong>urs qui doiv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus justifier leursdécisions sur les métho<strong>de</strong>s et les résultats (Duran, 1999 ; Busson-Villa, 1999) vont d’autant plusrechercher <strong>de</strong>s réponses simples pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qui sont <strong>de</strong>splus complexes. J. Theys (1991) repr<strong>en</strong>d les mots <strong>du</strong> philosophe <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces J. Ravetz pourexpliquer qu’avec la complexité <strong>de</strong>s problèmes d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t que nous avons à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>charge, les relations <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et décisions se complexifi<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t. Le philosophe (Ravetz,1988) « avance ainsi l’hypothèse d’une inversion <strong>de</strong>s rapports traditionnels <strong>en</strong>tre les faitssci<strong>en</strong>tifiques « <strong>du</strong>r » et les opinions subjectives « molles » <strong>de</strong>s responsables politiques <strong>en</strong>affirmant : « désormais nous aurons <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus besoin <strong>de</strong> décisions « <strong>du</strong>res » prises par <strong>de</strong>s95 Le laboratoire CNRS-DESMID à Arles pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s représ<strong>en</strong>tations et <strong>de</strong> l’opinion <strong>de</strong> la population,l’association Groupe <strong>de</strong>s chiroptères <strong>de</strong> Prov<strong>en</strong>ce pour l’impact sur les chauves-souris, et l’Université <strong>de</strong> Prov<strong>en</strong>ce.141


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleshommes politiques pour lesquelles nous ne disposerons que d’évid<strong>en</strong>ces « molles » ou sujettes àcontroverses » (Theys, 1991 : 12). Or, « <strong>en</strong> diffusant leurs résultats dans la sphère publique, leschercheurs sort<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la communauté sci<strong>en</strong>tifique pour <strong>en</strong>trer dans un nouvel espace <strong>de</strong>discussion qui leur imposera parfois <strong>de</strong> transformer <strong>de</strong>s résultats provisoires <strong>en</strong> faits simples etsans nuances. Ils <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t alors, contre leur volonté, <strong>de</strong>s ‘experts formels’ » (Lefeuvre, 1991 :39), ce qui peut les <strong>de</strong>sservir tant au niveau <strong>de</strong> leur crédibilité au sein <strong>de</strong> la communautésci<strong>en</strong>tifique qu’au regard <strong>de</strong> leur <strong>en</strong>jeu politique. Les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV ont ainsi refusé <strong>de</strong>sexpertises comme celle <strong>de</strong> l’impact sur les populations <strong>de</strong> chauves-souris <strong>de</strong>s traitem<strong>en</strong>tsantiparasitaires utilisés chez les bovins 96 , car la validité sci<strong>en</strong>tifique ne leur semblait pas suffisanteet ils ne voulai<strong>en</strong>t pas pr<strong>en</strong>dre le risque <strong>de</strong> travailler sur un projet sans garantie d’avancéesci<strong>en</strong>tifique au risque <strong>de</strong> ternir leur légitimité (chercheur TdV, com.pers., 2009).Dans le cas <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>du</strong> Bti, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV doiv<strong>en</strong>t d’abord relever un<strong>en</strong>jeu sci<strong>en</strong>tifique : ils perçoiv<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> la difficulté <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place un tel suivi <strong>en</strong>conditions non contrôlées (conditions réelles <strong>du</strong> terrain), sachant que la littérature sur le Btis’accor<strong>de</strong> sur sa non-toxicité, ils doiv<strong>en</strong>t comm<strong>en</strong>cer par mettre au point le protocole pour m<strong>en</strong>erà bi<strong>en</strong> ce suivi. La démoustication a longtemps été réalisée avec <strong>de</strong>s insectici<strong>de</strong>s organophosphorésnon sélectifs – jusqu'<strong>en</strong> 2006 <strong>en</strong> Méditerranée (Claeys-Mekda<strong>de</strong> & Sérandour, 2009)– mais a connu <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s évolutions avec <strong>de</strong>s efforts portés davantage sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones<strong>de</strong> prolifération (action sur la végétation et sur la prés<strong>en</strong>ce d’eau), mais aussi par le remplacem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s insectici<strong>de</strong>s chimiques par la lutte biologique à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la bactérie Bacillus thuringi<strong>en</strong>sis var.israël<strong>en</strong>sis (Bti), qui est aujourd’hui la plus utilisée dans le mon<strong>de</strong> pour contrôler les populations <strong>de</strong>moustiques et <strong>de</strong> mouches noires (Rowe et al., 2008 ; cité par Poulin et al., 2010a). Jusqu’ici, le Bti,sélectif, « est considéré [comme étant] non toxique pour les humains, les mammifères, lesoiseaux, les plantes et la plupart <strong>de</strong>s organismes aquatiques » (Boisvert & Boisvert, 2000 ; Lacey& Merritt, 2004, cité par Poulin et al., 2010b), hormis <strong>de</strong>s effets sur les chironomes, insectesappart<strong>en</strong>ant au même sous-ordre que les moustiques (nématocères) non-cibles constituant uneressource alim<strong>en</strong>taire (directe ou indirecte) importante pour les oiseaux, les chauves-souris etcertains rongeurs. La TdV se trouve donc face à l’<strong>en</strong>jeu sci<strong>en</strong>tifique d’améliorer les protocolespour pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t apporter un nouveau résultat sur un év<strong>en</strong>tuel impact négatif <strong>du</strong> Bti sur lafaune non-cible. Ses sci<strong>en</strong>tifiques ont alors <strong>en</strong>trepris d’évaluer l’impact <strong>du</strong> Bti « via le réseautrophique <strong>en</strong> étudiant l’abondance <strong>de</strong>s organismes non-cibles prédateurs <strong>de</strong> nématocères, […] les96 Les rési<strong>du</strong>s <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its utilisés peuv<strong>en</strong>t se retrouver dans les bouses et tu<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite les insectes qui constitu<strong>en</strong>tune ressource alim<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>s chauves-souris (Chercheur TdV, com.pers., 2010).142


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talemacro-invertébrés (insectes, araignées et gastéropo<strong>de</strong>s) associés à la végétation <strong>de</strong>s roselières quiserv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nourriture aux passereaux paludicoles et les hiron<strong>de</strong>lles <strong>de</strong>s f<strong>en</strong>êtres qui nich<strong>en</strong>t ets’alim<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t d’insectes à la volée dans les mas et hameaux <strong>de</strong> Camargue » (Poulin et al., 2010b).Bi<strong>en</strong> que la recherche mérite d’être poursuivie, les résultats obt<strong>en</strong>us <strong>en</strong> 2009 après 4 annéesd’étu<strong>de</strong> prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t déjà <strong>de</strong>s effets significatifs <strong>du</strong> Bti sur les nématocères non cibles et sur lesuccès repro<strong>du</strong>cteur <strong>de</strong>s hiron<strong>de</strong>lles <strong>de</strong> f<strong>en</strong>êtres 97 (Poulin et al., 2010a ; Poulin et al. 2010b).De retour dans la dim<strong>en</strong>sion politique <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>du</strong> Bti, on peut observer la façondont la qualité et la légitimité sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV sont mises <strong>en</strong> avant pour maint<strong>en</strong>ir le cap<strong>de</strong> l’expertise : le sci<strong>en</strong>tifique souti<strong>en</strong>t l’expert dans son action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. En effet,consci<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la délicatesse <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong>, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV ont fait le maximum pourassurer la robustesse statistique <strong>de</strong> leur métho<strong>de</strong>, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> consultant <strong>de</strong>s membres –statistici<strong>en</strong>s chevronnés (direction TdV, com.pers., 2010) – <strong>de</strong> son propre conseil sci<strong>en</strong>tifique,« sans quoi la porte est ouverte aux contestations sur la validité même <strong>de</strong>s résultats ». Les résultats ont parailleurs été publiés dans une revue sci<strong>en</strong>tifique – Journal of Applied Ecology (Poulin et al., 2010a) –qui consacre la validation par la communauté sci<strong>en</strong>tifique et r<strong>en</strong>force cette assise sci<strong>en</strong>tifique quis’est rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t montrée cruciale.La conv<strong>en</strong>tion liant la TdV au PNRC concernant le suivi sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> l’impact <strong>du</strong> Bti stipuleque les résultats ne peuv<strong>en</strong>t être publiés qu’après une prés<strong>en</strong>tation annuelle au CS <strong>du</strong> PNRC puisau déci<strong>de</strong>ur (et bailleur), le CG 13. Suite à la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s résultats significatifs <strong>de</strong> 2009, laTdV a voulu s’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre avec le PNRC sur le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> communication local approprié pour éviterque le débat public ne tourne <strong>en</strong> polémique incontrôlable (TdV, com.pers., 2010). Le PNRC quiest chargé <strong>de</strong> restituer les résultats <strong>de</strong>s suivis sci<strong>en</strong>tifiques (PNRC, Charte, 2009 : 101) a exprimé<strong>de</strong>s réserves par rapport à la communication (par voie <strong>de</strong> presse et autres médias). Le PNRCsemble craindre que la publication <strong>de</strong> ces résultats ré-ouvre trop brutalem<strong>en</strong>t le débat et ne luiporte préjudice. Il semblerait que les responsables <strong>du</strong> syndicat mixte <strong>du</strong> PNRC ne serai<strong>en</strong>t pasprêts à assumer qu’une décision contre la démoustication soit prise par le CG 13 suite auxrésultats sci<strong>en</strong>tifiques dont le PNRC est le porteur. Autrem<strong>en</strong>t dit, ils sembl<strong>en</strong>t craindre <strong>de</strong> seretrouver les porteurs d’une opposition à la démoustication, contre l’opinion <strong>de</strong>s habitants que lePNRC représ<strong>en</strong>te aussi, et cela dans un contexte difficile pour le PNRC lié au r<strong>en</strong>ouvellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>97 En résumé, la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> disponibilité <strong>de</strong>s nématocères affect<strong>en</strong>t principalem<strong>en</strong>t les jeunes dont le régimealim<strong>en</strong>taire dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> ces insectes. En raison <strong>de</strong> leur cont<strong>en</strong>ance trop élevée <strong>en</strong> chitine, ils ne peuv<strong>en</strong>t pas assimilerles fourmis volantes qui constistu<strong>en</strong>t le principal insecte <strong>de</strong> substitution pour les a<strong>du</strong>ltes.143


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talessa charte 98 . Dans cet exemple, le PNRC <strong>en</strong>dosse le rôle <strong>de</strong> notre acteur régulateur conceptuel quidoit arbitrer <strong>en</strong>vers les différ<strong>en</strong>tes att<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> la société. Face à lui l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, laTdV, développe une stratégie fine visant à mettre l’acteur régulateur <strong>de</strong>vant ses <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux.Après les débats internes sur les <strong>en</strong>jeux sci<strong>en</strong>tifiques et politiques <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV dansce suivi sci<strong>en</strong>tifique, le blocage <strong>de</strong> la communication imposé par le PNRC a nécessité un nouvelajustem<strong>en</strong>t à la TdV sur la position à t<strong>en</strong>ir, impliquant bi<strong>en</strong> sûr les chercheurs, mais aussi ladirection (générale et direction <strong>de</strong>s programmes), la chargée <strong>de</strong> communication et les chercheurs(coordinateurs <strong>de</strong> programme). Ici, nous apercevons le caractère émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie d’actionqui doit s’adapter <strong>en</strong> perman<strong>en</strong>ce lorsque la situation évolue ; nous <strong>en</strong> discuterons plusamplem<strong>en</strong>t dans le chapitre 6. La TdV a fait valoir son statut d’institution <strong>de</strong> recherche et sonindép<strong>en</strong>dance sci<strong>en</strong>tifique et a sollicité l’avis <strong>du</strong> Conseil sci<strong>en</strong>tifique <strong>du</strong> PNRC dont le présid<strong>en</strong>t asout<strong>en</strong>u sa position. Elle a diffusé ses résultats par les voies usuelles dans le mon<strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique àtravers la publication <strong>de</strong> l’article dans Journal of Applied Ecology, <strong>en</strong>suite signalé dans les news <strong>de</strong> larevue Nature. Un reportage télévisé est passé sur la chaîne Arte et a été signalé dans le quotidi<strong>en</strong>Le Mon<strong>de</strong>. Enfin la TdV a consacré une rubrique aux résultats <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> dans sa <strong>de</strong>uxièmeNewsletter. Cette communication à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> la communauté sci<strong>en</strong>tifique et <strong>du</strong> grand publicpeut avoir un effet sur le long terme. Au mieux, on peut imaginer que ces résultats vont susciter<strong>de</strong> nouvelles recherches sur l’impact <strong>du</strong> Bti, permettant une remise <strong>en</strong> cause <strong>de</strong> son abs<strong>en</strong>ced’impact sur la faune non-cible. Du côté <strong>du</strong> grand public, ces communications particip<strong>en</strong>t àl’accumulation d’information sur les questions que pos<strong>en</strong>t ces interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> démoustication,pouvant à terme le s<strong>en</strong>sibiliser et l’intéresser aux choix publics <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui le concerne <strong>en</strong> tantqu’habitant et citoy<strong>en</strong>. Elles peuv<strong>en</strong>t aussi être appropriées par les autres acteurs <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong> la nature qui sont nombreux <strong>en</strong> Camargue et qui pès<strong>en</strong>t dans le débat publiclocal.Car c’est aussi – voire surtout – la <strong>gestion</strong> locale <strong>de</strong> la démoustication sur le <strong>de</strong>lta que la TdVvisait <strong>en</strong> s’investissant dans ce travail. Son objectif n’est pas tant d’apporter <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts« contre » la démoustication, mais davantage <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> – qu’elle adéjà pu élaborer forte <strong>de</strong> son expertise dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s habitats <strong>de</strong>s ZH – visant à minimiserau maximum l’usage <strong>du</strong> Bti dans la lutte contre le « nuisible ». Elle cherche à proposer et faireadopter ces solutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par le CS <strong>du</strong> PNRC et par le CG 13, par une prés<strong>en</strong>tation98 En effet, le PNRC traversait une pério<strong>de</strong> délicate par rapport à la signature <strong>de</strong> sa charte (pour la pério<strong>de</strong> 2010-2022) : le maire <strong>de</strong>s Saintes-Maries <strong>de</strong> la Mer refuse <strong>de</strong> signer, ce qui mettait l’exist<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> Parc <strong>en</strong> péril.144


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleconvaincante <strong>de</strong>s résultats <strong>du</strong> suivi, mais aussi par une prés<strong>en</strong>ce active dans les commissions <strong>du</strong>PNRC et <strong>de</strong> ses représ<strong>en</strong>tants – l’assise sci<strong>en</strong>tifique donne le pouvoir à la TdV <strong>de</strong> soulever cedossier – et cela le plus <strong>en</strong> amont possible <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> crises « où là on est dans l’irrationnel et onne peut plus se faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre » (direction TdV, com.pers., 2010). En effet, les argum<strong>en</strong>ts écologiquessont recevables <strong>en</strong> Camargue où la population, elle-même favorable à la démoustication, estégalem<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>sible au mainti<strong>en</strong> <strong>du</strong> patrimoine naturel qui caractérise leur lieu <strong>de</strong> vie, commel’indiqu<strong>en</strong>t C. Claeys-Mekda<strong>de</strong> et L. Nicolas (2009) qui par cette formule montr<strong>en</strong>t que le débatest loin d’être épuisé : « En somme, le biologiste avance que les traitem<strong>en</strong>ts expérim<strong>en</strong>tés (Bti)affect<strong>en</strong>t perceptiblem<strong>en</strong>t la faune non ciblée, mais que cette <strong>de</strong>rnière se régénèresignificativem<strong>en</strong>t, et le sociologue relève que la population camarguaise t<strong>en</strong>d à être favorable à ladémoustication... si cette <strong>de</strong>rnière n’est pas néfaste à l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ». La TdV changecep<strong>en</strong>dant les termes <strong>du</strong> débat <strong>en</strong> montrant que l’effet est significatif et peut être <strong>du</strong>rable.Mais la TdV sait égalem<strong>en</strong>t qu’<strong>en</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> crise, comme celle connue <strong>en</strong> 2005, c’est la nuisanceet les craintes vis-à-vis <strong>de</strong>s maladies transmises par le moustique qui domin<strong>en</strong>t et qui <strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t lesélus à agir vite et préfér<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> manière visible, « les solutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> raisonnablessci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t ne sont généralem<strong>en</strong>t pas très porteuses politiquem<strong>en</strong>t ». « C’est pour ça qu’il faut qu’on se fasse<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> amont et qu’on n’att<strong>en</strong><strong>de</strong> pas le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la crise, car là on ne sera pas <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong>. Ce n’est paspossible, même si on crie dans tous les médias, on ne sera pas <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong>. C’est vraim<strong>en</strong>t <strong>en</strong> amont et au sein <strong>de</strong> cesinstances pilotées par ces élus qu’il faut que ce soit validé. C’est vraim<strong>en</strong>t au sein <strong>du</strong> parc, la commissionsci<strong>en</strong>tifique dans un premier temps et dans le comité syndical <strong>en</strong>suite, que ces choses pass<strong>en</strong>t, que ces messages soi<strong>en</strong>tdits et <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong>s dans une pério<strong>de</strong> où les oreilles sont ouvertes, pour que le jour où on est dans la crise, que les g<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>rrière l’occiput le souv<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s choses qui ont été dites le jour où on pouvait <strong>en</strong>core parler » (directionTdV, com.pers., 2010).Au mom<strong>en</strong>t où cette thèse est écrite, le CS <strong>du</strong> PNRC et le CG 13 pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t note <strong>de</strong> ces nouveauxrésultats sci<strong>en</strong>tifiques, ils décid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> poursuivre le suivi sci<strong>en</strong>tifique, <strong>de</strong> rester au premier site etne pas ét<strong>en</strong>dre la démoustication aux quatre sites prévus dans le plan <strong>de</strong> l’EID. La TdV poursuitle suivi sci<strong>en</strong>tifique tant que le CG lui donne les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> le faire et t<strong>en</strong>te <strong>de</strong> lui faire adopter<strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> minimisant l’usage <strong>du</strong> Bti. Elle participe à la fois à l’alim<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> cedébat public et veille à maint<strong>en</strong>ir les conditions <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> cette expertise <strong>en</strong>s’exprimant <strong>de</strong> manière active auprès <strong>du</strong> PNRC et <strong>du</strong> CG.Cet exemple montre que l’expertise sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV sont <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces stratégiques àpartir <strong>de</strong>squelles l’organisation peut déployer <strong>de</strong>s stratégies d’action au s<strong>en</strong>s fort (Figure 3.2).145


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesNaturalistes : craintes<strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> ladémousticationPopulation :crainte <strong>de</strong>s crisesCG - PNRC<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>EIDFigure 3.2 : Stratégie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour bloquer l’ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la démoustication à laCamargue (source : auteur)Suite au changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> posture politique vis-à-vis <strong>de</strong> la démoustication <strong>en</strong> Camargue au début<strong>de</strong>s années 2000 (retrait <strong>de</strong> la « barrière <strong>de</strong> sécurité »), l’EID a vu l’opportunité d’ét<strong>en</strong>dre seszones d’interv<strong>en</strong>tion et <strong>de</strong> développer son activité sur la Camargue. La TdV a agit indirectem<strong>en</strong>tvis-à-vis <strong>de</strong> cet acteur sectoriel <strong>en</strong> passant par les acteurs régulateurs, PNRC et CG, <strong>en</strong> les<strong>en</strong>gageant à respecter leurs responsabilités sur ce dossier.3.3.2 Les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale liés à la recherche sci<strong>en</strong>tifiqueNous avons vu que la recherche m<strong>en</strong>ée par la TdV sur les ZH participe à l’effort pour connaîtreet donner prise sur la biodiversité dont la conservation est aujourd’hui un objectif normatif validéà l’échelle internationale, sur la découverte <strong>de</strong> problèmes écologiques (comme l’extinction <strong>de</strong>l’anguille) ou sur l’apport <strong>de</strong> résultats sci<strong>en</strong>tifiques visant à ré<strong>du</strong>ire l’incertitu<strong>de</strong> et apporter <strong>de</strong>sréponses <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à <strong>de</strong>s questions prés<strong>en</strong>tes dans le débat public (Bti). Comme leremarque P. Roqueplo (1991 : 56), la nature même <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux <strong>en</strong>gage lessci<strong>en</strong>tifiques qui s’<strong>en</strong> occup<strong>en</strong>t dans le débat public : « même si elles relèv<strong>en</strong>t d'une approchesci<strong>en</strong>tifique « objective », les questions [relatives à l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t] ne sont pas <strong>de</strong> l'ordre <strong>de</strong> lacuriosité à satisfaire mais <strong>de</strong> l'action à <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre ; l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t n'a pas d'abord à êtreconnu, mais à être protégé. Il constitue d'emblée un concept politique. Il <strong>en</strong> résulte que lorsqu'unsci<strong>en</strong>tifique s'exprime publiquem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> matière d'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ce qu'il dit est – qu'il le veuilleou non – interprété comme une expertise ». La TdV a vocation à agir et à sortir <strong>de</strong> lacommunauté sci<strong>en</strong>tifique pour faire intégrer le fruit <strong>de</strong> ses recherches aux systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>concrets. Cette expertise dont parle P. Roqueplo r<strong>en</strong>voie à nos mo<strong>de</strong>s d’actions publiques146


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleconnexes à la recherche. Dans cette partie, nous allons donc nous consacrer plus directem<strong>en</strong>t àl’exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> ces différ<strong>en</strong>tes formes d’actions publiques, <strong>en</strong> étant att<strong>en</strong>tif à la façon dont cessci<strong>en</strong>tifiques s’y pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour formuler <strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et à leur manière <strong>de</strong> sepositionner dans les systèmes pour pousser à leur mise <strong>en</strong> œuvre. Parallèlem<strong>en</strong>t, nouscontinuerons à t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong>s capacités (compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques, réseau,légitimité) <strong>de</strong> la TdV au fil <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions.4) Sci<strong>en</strong>ce appliquée et <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> territoire : l’exemple <strong>du</strong> modèle hydrologique et<strong>de</strong> la participation aux commissions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eauNous comm<strong>en</strong>cerons par une explication sommaire <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>du</strong>Rhône <strong>de</strong> manière à compr<strong>en</strong>dre pourquoi une compréh<strong>en</strong>sion et une <strong>gestion</strong> partagées <strong>du</strong>système sont nécessaires. Nous abor<strong>de</strong>rons alors les recherches sci<strong>en</strong>tifiques réalisées par la TdVdans ce domaine pour <strong>en</strong>suite appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r le rôle qu’elle joue dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau sur ceterritoire.Le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône s’est formé au fil <strong>de</strong>s siècles par <strong>de</strong>s <strong>en</strong>traînem<strong>en</strong>ts d’élém<strong>en</strong>ts grossiers et <strong>de</strong>sédim<strong>en</strong>ts par le fleuve et le recouvrem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sédim<strong>en</strong>ts marins. Son fonctionnem<strong>en</strong>t naturel étaitrythmé d’une pério<strong>de</strong> d’inondation <strong>de</strong> septembre à mai, puis d’un assèchem<strong>en</strong>t estivalcaractéristique <strong>de</strong>s milieux méditerrané<strong>en</strong>s. Le <strong>de</strong>lta est aujourd’hui fortem<strong>en</strong>t artificialisé <strong>de</strong>puisla construction <strong>de</strong> digues et <strong>de</strong> canaux à la fin <strong>du</strong> 19 e siècle. En 1869, les <strong>de</strong>ux bras <strong>du</strong> Rhône – lepetit Rhône et le grand Rhône – sont <strong>en</strong>digués et le sud <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta est séparé <strong>de</strong> la mer par unedigue (digue à la mer) (Figure 3.3).La circulation <strong>de</strong> l’eau dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions humaines, le plus souv<strong>en</strong>t liées auxactivités qui ont alors pu se développer sur le territoire (Dervieux, 2005). En effet, ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la riziculture <strong>en</strong> Camargue après la secon<strong>de</strong> guerre mondiale s’est accompagné<strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> service d'une forte capacité <strong>de</strong> pompage dans les bras <strong>du</strong> Rhône (Chauvelon et al.,2003). Cette eau douce intro<strong>du</strong>ite pour la culture est <strong>en</strong>suite r<strong>en</strong>voyée vers le fleuve et la mergrâce à l’installation <strong>de</strong> stations <strong>de</strong> pompage pour le drainage <strong>de</strong>s terres agricoles. Cet équipem<strong>en</strong>test nécessaire car « les forts volumes <strong>de</strong> drainage <strong>de</strong> la riziculture par submersion, associés le caséchéant à d'importantes pluies automnales, font qu'il n'est plus possible d'assurer le drainagegravitaire <strong>du</strong> système vers les étangs c<strong>en</strong>traux <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta (Vaccarès et étangs inférieurs) sans risquerl'inondation <strong>de</strong>s terres riveraines, car les ouvrages existants au niveau <strong>de</strong> la digue maritime(permettant la vidange vers la mer) ont une capacité souv<strong>en</strong>t insuffisante et leur fonctionnem<strong>en</strong>test <strong>de</strong> toute façon tributaire <strong>du</strong> niveau marin » (Rossechi et al., 2003). Cep<strong>en</strong>dant, la zone est <strong>de</strong>147


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesl’étang <strong>du</strong> Vaccarès (Fumemorte et Roquemaure : Figure 3.2) n’a pas été équipée « <strong>de</strong> sorte queles étangs continu<strong>en</strong>t <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> l'eau douce, non pas directem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Rhône, mais <strong>de</strong>s eauxd’écoulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s terres agricoles », ce qui, avec l’eau pluviale (600 mm par an <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>ne), élèvel’apport à une moy<strong>en</strong>ne d’1 million <strong>de</strong> m 3 annuel dans le Vaccarès qui communique avec les« étangs inférieurs ». Cette eau circule par gravité jusqu’à la mer et doit sortir par les pertuisinstallés dans la digue à la mer, afin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s niveaux d’eau satisfaisants à l’intérieur <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta.Ce système est cep<strong>en</strong>dant très complexe à gérer, <strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> raison <strong>de</strong> la sous-capacité <strong>de</strong>spertuis dont seulem<strong>en</strong>t un sur trois est fonctionnel et le drainage <strong>du</strong> système vers la mer esttoujours tributaire <strong>de</strong>s conditions éolio-marines (s<strong>en</strong>s <strong>du</strong> v<strong>en</strong>t et niveau <strong>de</strong>s étangs par rapport àla mer) qui font que le pertuis ne peut être ouvert que quand les conditions sont favorables, c’està-direuniquem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant un nombre <strong>de</strong> jours limités.Figure 3.3 : L’île <strong>de</strong> Camargue : les étangs <strong>du</strong> système Vaccarès et les bassins <strong>de</strong> drainage (source :Rossechi, et al., 2003)148


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleRappelons aussi que l’<strong>en</strong>trée d’eau douce dans le <strong>de</strong>lta confère aux étangs une salinité qui est celle<strong>de</strong> ces écosystèmes particuliers <strong>en</strong>tre fleuve et mer, où se développ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s espèces typiques <strong>de</strong> cesmilieux. La salinité est alors influ<strong>en</strong>cée <strong>de</strong> même par la <strong>gestion</strong> anthropique et les précipitations.De ce fait, la salinité varie <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>sité <strong>de</strong> l’activité rizicole et <strong>de</strong>s conditionsclimatiques. Ainsi, « p<strong>en</strong>dant l’automne hiver 1993-1994, <strong>de</strong>ux crues <strong>du</strong> Rhône (<strong>de</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>retour estimée à 50 et 70 ans) ont occasionné <strong>de</strong>s ruptures <strong>de</strong> digues <strong>en</strong> plusieurs points sur lepetit Rhône. Le drainage <strong>de</strong> la zone inondée a <strong>en</strong>traîné <strong>de</strong>s arrivées d’eau douce massives dans leVaccarès, dont la salinité a brusquem<strong>en</strong>t chuté <strong>de</strong> 15 à 5 g/l suite aux volumes importants d’eauet donc <strong>de</strong> sel évacués vers la mer (gravitairem<strong>en</strong>t et par pompage). Entre 1994 et 1997, la salinitéest restée basse (<strong>en</strong>viron 5 g/l) et a <strong>en</strong>core diminué suite à d’importantes pluies <strong>du</strong>rant les hivers95-96 et 96-97. A partir <strong>de</strong> 1998, à la faveur d’années plus sèches et d’une volonté <strong>de</strong>s<strong>gestion</strong>naires et <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> l’eau, <strong>de</strong> gérer <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s la connexion <strong>en</strong>tre le système d’étang etla mer, la salinité a augm<strong>en</strong>té à nouveau : 12 g/l (hiver) à 15g/l (été) » (Rossechi et al., 2003).Le fonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône est donc très complexe et sa <strong>gestion</strong>délicate : il s’agit <strong>de</strong> gérer <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ant compte <strong>de</strong>s conditions hydro-climatiques, c’est-à-dire gérerl’imprévisible ; et <strong>de</strong> gérer les flux hydro-salins <strong>de</strong> manière à satisfaire les besoins <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tescatégories d’utilisateurs <strong>du</strong> territoire. Le premier <strong>en</strong>jeu concerne l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la population :c’est celui <strong>du</strong> niveau bas <strong>de</strong>s étangs <strong>en</strong> automne pour maint<strong>en</strong>ir une capacité d’accueil <strong>de</strong> volumesd’eau importants et ainsi prév<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s inondations <strong>en</strong> cas <strong>de</strong> pluies automnales et hivernalesabondantes – sachant que la capacité d’évacuation est trop faible <strong>en</strong> cas d’événem<strong>en</strong>t majeur avecun seul pertuis fonctionnel. Il faut donc éviter que le drainage gravitaire <strong>de</strong>s rizières dans l’étang<strong>en</strong>traîne un niveau trop haut avant l’automne. Cep<strong>en</strong>dant, si l’automne et l’hiver sont secs, unniveau trop bas <strong>en</strong>traînerait une trop forte augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la salinité <strong>de</strong>s étangs <strong>en</strong>travant lacirculation <strong>de</strong> certaines espèces halieutiques (Poizat et al., 2004) et la biodiversité méditerrané<strong>en</strong>ne<strong>en</strong> général (différ<strong>en</strong>ts herbiers, etc.). Les pêcheurs souhait<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant que le niveau ne soit nitrop bas ni trop haut et désormais (cela n’a pas toujours été le cas : voir plus bas) que leséchanges <strong>en</strong>tre le milieu marin et lagunaire (ouverture <strong>du</strong> pertuis) soi<strong>en</strong>t plus fréqu<strong>en</strong>ts pourfavoriser le recrutem<strong>en</strong>t 99 <strong>de</strong>s poissons. Ces échanges <strong>en</strong>tre milieu marin et lagunaire estégalem<strong>en</strong>t une préoccupation pour les acteurs investis dans la conservation <strong>de</strong>s poissonsmigrateurs (MRM 100 , TdV et d’autres instituts sci<strong>en</strong>tifiques), et les acteurs <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong>s99 Ce terme apparti<strong>en</strong>t au domaine <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>s populations. Il exprime le gain net <strong>en</strong> nouvel indivi<strong>du</strong> quisera actif et participera à la repro<strong>du</strong>ction l’année d’après – c’est-à-dire <strong>en</strong> <strong>en</strong>levant la mortalité juvénile.100 L’association Migrateurs Rhône Méditerranée.149


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesespaces naturels qui plaid<strong>en</strong>t <strong>en</strong> outre pour un fonctionnem<strong>en</strong>t le plus proche <strong>du</strong> naturel (TdV,Réserve Nationale <strong>de</strong> Camargue, PNRC, com.pers. 2009).L’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s dynamiques hydro-salines sur la faune et la flore spécifiques <strong>de</strong>s milieuxméditerrané<strong>en</strong>s a am<strong>en</strong>é la TdV à développer plus fermem<strong>en</strong>t une recherche dans le domaine <strong>de</strong>l’hydrologie dans les années 1990. P<strong>en</strong>dant plusieurs années, le travail a consisté à compr<strong>en</strong>dre cequi se passait sur ce <strong>de</strong>lta où la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau est longtemps restée opaque : les quantités d’eau,les circulations <strong>de</strong>s eaux <strong>de</strong> surface, etc 101 . Comme le montre l’aperçu <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>thydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône, la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau est un point <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contre <strong>en</strong>tre différ<strong>en</strong>ts<strong>en</strong>jeux qui ne sont pas <strong>de</strong>s moindres, comme celui <strong>de</strong>s risques d’inondations et plus généralem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> l’exercice <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes activités. Ces problématiques bénéfici<strong>en</strong>t d’un cadre au niveaunational dans lequel la TdV a su se positionner. Au cours <strong>de</strong>s années 2000, ses sci<strong>en</strong>tifiques ontparticipé, voire coordonné, <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> recherche initiés par le Ministère <strong>de</strong>l’Environnem<strong>en</strong>t (programme Liteau I, II et maint<strong>en</strong>ant III, pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s dynamiques et la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’espace littoral ; programme Gestion et impact <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t climatique) au cours<strong>de</strong>squels ils ont développé un modèle hydrologique pour ai<strong>de</strong>r à la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône(Chauvelon & Pichaud, 2007 ; Chauvelon, 2009).Ces connaissances développées et cette place acquise dans la communauté sci<strong>en</strong>tifiquehydrologique confèr<strong>en</strong>t aux sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV la légitimité leur permettant <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre placeau sein <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> locaux sous le statut <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique. Dans le cas <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’eau, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV jou<strong>en</strong>t ce rôle au sein <strong>de</strong> la commission « <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong>smilieux aquatiques, chasse et pêche » <strong>du</strong> PNRC, mais surtout au sein <strong>de</strong> la commissions’occupant <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> « courante » <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong> Camargue : la Commission exécutive <strong>de</strong> l’eau(CEDE), sur laquelle nous allons focaliser le propos.La CEDE a été créée <strong>en</strong> 1996 par le regroupem<strong>en</strong>t spontané <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts acteurs <strong>du</strong> territoire àla suite d’événem<strong>en</strong>ts climatiques exceptionnels <strong>en</strong> Camargue. « En 1993 il y a eu <strong>de</strong>s inondations, <strong>en</strong>janvier 94 il y a eu la rebelote. Et il n’y avait pas <strong>de</strong> coordination <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong> Camargue et ons’est retrouvé avec 180 000 m3 d’eau dans le <strong>de</strong>lta. De plus, 95 et 96 ont été <strong>de</strong>s années à très forte pluviométrieet on s’est retrouvé avec le <strong>de</strong>lta complètem<strong>en</strong>t saturé. Le <strong>gestion</strong>naire <strong>de</strong> la réserve nationale s’est retrouvé avec <strong>de</strong>smilieux qui n’étai<strong>en</strong>t plus <strong>du</strong> tout <strong>de</strong>s milieux lagunaires méditerrané<strong>en</strong>s typiques. Donc son objectif, c’était <strong>de</strong>101 Chauvelon P. (1996) Hydrologie quantitative d'une zone humi<strong>de</strong> méditerrané<strong>en</strong>ne aménagée : le Bassin <strong>du</strong>Fumemorte <strong>en</strong> Gran<strong>de</strong> Camargue, <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône, Thèse <strong>de</strong> doctorat : mécanique, génie mécanique, génie civil :USTL Montpellier (FRA) 275p.150


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleretrouver <strong>de</strong>s milieux un peu plus salés et les objectifs <strong>de</strong>s exploitants, c’était <strong>de</strong> vi<strong>de</strong>r le système le plus vite possible.Donc les g<strong>en</strong>s se sont réunis » (Chargé <strong>de</strong> mission eau PNRC, com.pers., 2009). Elle n’a pas <strong>de</strong> statutofficiel, elle est néanmoins signalée dans la charte <strong>du</strong> PNRC <strong>de</strong>puis 1998 102 . Elle est présidée parun représ<strong>en</strong>tant <strong>de</strong> la Direction départem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong> l’agriculture et animée par lesyndicat mixte <strong>du</strong> PNRC. Elle compte <strong>en</strong>viron 20 participants représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>s collectivités, <strong>de</strong>sassociations syndicales <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> réseaux hydrauliques, <strong>de</strong> la Réserve naturelle nationale,<strong>de</strong>s socioprofessionnels, <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques, qui se réuniss<strong>en</strong>t ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t pour déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong>smanœuvres à opérer sur le pertuis où ont lieu les échanges étangs-mer.Le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette commission où s’échang<strong>en</strong>t savoirs sci<strong>en</strong>tifiques et information surles pratiques a permis d’augm<strong>en</strong>ter la compréh<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> système par ses <strong>gestion</strong>naires (d’espacesnaturels et socioprofessionnels) et ainsi d’augm<strong>en</strong>ter la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s décisions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. « Aufur et à mesure c’est une commission qui a pris <strong>de</strong> l’ampleur, <strong>de</strong> la légitimité et qui fonctionne bi<strong>en</strong>. Tout le mond<strong>en</strong>’est pas toujours cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> toutes les discussions, mais on arrive à trouver un cons<strong>en</strong>sus grâce à un dialogueperman<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre <strong>gestion</strong>naires, utilisateurs <strong>de</strong>s milieux et sci<strong>en</strong>tifiques. On a <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques : <strong>du</strong> sci<strong>en</strong>tifique trèspointu et très spécialisé dans un domaine qu’on fait interv<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> façon ponctuelle <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> l’actualité, au<strong>gestion</strong>naire lambda, à l’acteur <strong>de</strong> base, qui n’a pas forcém<strong>en</strong>t la formation adéquate pour <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre tous les discoursmais qui va s’instruire, qui va compr<strong>en</strong>dre le système et qui va s’<strong>en</strong>richir <strong>de</strong>s discussions <strong>de</strong> chacun. Donc c’est vraiqu’on est dans un cadre où les g<strong>en</strong>s sont intéressés par le sujet et intéressés <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre aussi ce que veut direl’autre, comm<strong>en</strong>t ça fonctionne et qui s’<strong>en</strong>richiss<strong>en</strong>t mutuellem<strong>en</strong>t. […] Il y a une auto-formation, une autoconstruction» (Chargé <strong>de</strong> mission eau PNRC, com.pers., 2009).L’apport <strong>de</strong> connaissances par les sci<strong>en</strong>tifiques, auquel la TdV contribue <strong>de</strong> façon substantielle, adéjà permis <strong>de</strong> faire changer certaines pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par le dém<strong>en</strong>ti <strong>de</strong> quelques idéesreçues. Dans leur article portant sur les évolutions <strong>de</strong> la CEDE, A. Dervieux et al. (2006)fourniss<strong>en</strong>t un exemple d’intégration tacite <strong>de</strong> la connaissance sci<strong>en</strong>tifique : « le réflexe <strong>du</strong>pêcheur est <strong>de</strong> fermer les vannes pour empêcher le poisson <strong>de</strong> retourner à la mer, ce qui estdiscutable <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la ressource halieutique, les lagunes étant <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong>102 « La commission exécutive <strong>de</strong> l’eau compr<strong>en</strong>d actuellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>s collectivités, <strong>de</strong>s associationssyndicales <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> réseaux hydrauliques, <strong>de</strong> la Réserve naturelle nationale, <strong>de</strong>s socioprofessionnels, <strong>de</strong>ssci<strong>en</strong>tifiques. L’animation et le secrétariat sont assurés par le Parc naturel régional <strong>de</strong> Camargue. Cette commissioninformelle est placée sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> l’Etat (DDEA) qui assur<strong>en</strong>t la police <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong> Camargue. Outre la<strong>gestion</strong> courante <strong>de</strong>s étangs notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> salinité et niveau d’eau, la commission exécutive <strong>de</strong> l’eau a pourmission <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s solutions prév<strong>en</strong>tives, d’urg<strong>en</strong>ce ou <strong>de</strong> post-crise, pour gérer les situations critiques pouvantporter préjudice à la sécurité <strong>de</strong>s bi<strong>en</strong>s et <strong>de</strong>s personnes, ou aux usages locaux. Depuis sa création <strong>en</strong> 1996, lesdécisions ont toutes été prises <strong>en</strong> concertation et à l’unanimité. Elles concern<strong>en</strong>t ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t la problématique<strong>de</strong>s échanges <strong>en</strong>tre l’intérieur <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta et la mer, via l’ouverture ou la fermeture <strong>du</strong> pertuis <strong>de</strong> la Fourca<strong>de</strong> aux Saintes-Maries-<strong>de</strong>-la-Mer. La commission exécutive se réunit <strong>de</strong> façon régulière (au moins 3 à 5 fois par an) » (Charte PNRC2010-2022 : 40).151


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesgrossissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> poisson plutôt que <strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ction ». Les sci<strong>en</strong>tifiques ont démontrél’importance <strong>de</strong>s échanges pour la dynamique <strong>de</strong>s espèces halieutiques, et « ont <strong>de</strong>mandé, etobt<strong>en</strong>u, une ouverture minimale continue <strong>de</strong> 2 vannes (hors crise climatique) pour favoriser lesmouvem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong> poissons et qui sont à l’origine <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> réouverture <strong>de</strong>sanci<strong>en</strong>s pertuis » (ibid.). Cet apport <strong>de</strong>s connaissances sci<strong>en</strong>tifiques est incontesté comme lesouligne égalem<strong>en</strong>t le représ<strong>en</strong>tant <strong>de</strong>s pêcheurs (com.pers., 2009) : « On appr<strong>en</strong>d beaucoup <strong>de</strong> chosesmais bon… Moi c’est ce que je regrette aujourd’hui c’est que sur le terrain on ne met pas <strong>en</strong> application ce qu’onappr<strong>en</strong>d ».En effet, si la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau a été beaucoup améliorée dans le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône ces <strong>de</strong>rnièresannées, le système reste extrêmem<strong>en</strong>t complexe et surtout très vulnérable <strong>en</strong> cas d’événem<strong>en</strong>tclimatique. Cet extrait <strong>du</strong> rapport final <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> recherche « Gestion intégrée <strong>de</strong> l’îleCamargue » (Liteau II GIZCAM, 2009) qui a été l’opportunité <strong>de</strong> soulever <strong>de</strong> nouveauxproblèmes relatifs à l’érosion côtière pose la question sans équivoque : « Concernant lesperspectives <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> gouvernance <strong>de</strong> l’eau et <strong>du</strong> littoral, va-t-on vers toujours plusd’aménagem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> <strong>du</strong>r et la poursuite <strong>de</strong> la logique <strong>de</strong> poldérisation, ou pourra-t-on aussi t<strong>en</strong>ter<strong>de</strong> favoriser, où cela est possible, une adaptation « plus douce » à l’élévation <strong>du</strong> niveau <strong>de</strong> la meret l’érosion côtière ? Il semble que l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s acteurs camarguais ne soit pas prêt à combinerces mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tions dès maint<strong>en</strong>ant » (Chauvelon, 2009). C’est l’<strong>en</strong>jeu majeur dont la TdVs’est saisie et sur lequel elle développe ses recherches, notamm<strong>en</strong>t par la construction évoquéed’un modèle hydrologique pour la <strong>gestion</strong>. Pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ce travail sci<strong>en</strong>tifique (obt<strong>en</strong>ir lesdonnées) et <strong>de</strong> transfert vers les <strong>gestion</strong>naires et les déci<strong>de</strong>urs (transférer la connaissance et sefaire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre), l’hydrologue <strong>de</strong> la TdV s’appuie sur son statut <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique légitime : « pourpro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong> la recherche j'ai besoin d'avoir <strong>de</strong>s interactions avec ces acteurs. Par exemple, ce qu'il faut que je sacheavec la mairie <strong>de</strong>s Saintes-Maries, et bi<strong>en</strong> je leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> directem<strong>en</strong>t les infos. Ils m'ont id<strong>en</strong>tifié commequelqu'un d'impartial et qui est prêt à mettre les pieds dans le plat, prêt à dire ce que je p<strong>en</strong>se ». « C’est comme çaque je fais le transfert <strong>en</strong> flux t<strong>en</strong><strong>du</strong> <strong>de</strong>s connaissances <strong>en</strong> hydrologie camarguaise. Et puis je pose les questions surl’av<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> la Camargue face aux changem<strong>en</strong>ts globaux, climatiques, et aux évolutions <strong>de</strong> la politique agricolecommune » (hydrologue TdV, com.pers., 2009). Ce travail <strong>de</strong> transfert pour faire changer lespostures et les décisions concernant l’aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta et sa <strong>gestion</strong> future dans un contexteoù les événem<strong>en</strong>ts climatiques majeurs <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t augm<strong>en</strong>ter est un travail <strong>de</strong> longue haleine.Dans leurs <strong>en</strong>quêtes effectuées auprès <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires et <strong>de</strong>s élus, A. Dervieux et al. (2006)constatai<strong>en</strong>t « une confiance – au moins affichée – dans les techniques d'interv<strong>en</strong>tions lour<strong>de</strong>shéritées <strong>de</strong>s déc<strong>en</strong>nies écoulées (épis, <strong>en</strong>rochem<strong>en</strong>ts), mais remises aujourd'hui <strong>en</strong> question » :152


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale« Seul le risque fleuve est réellem<strong>en</strong>t admis par les camarguais. Celui <strong>de</strong>s surcotes marineset d’une rupture possible (probable ?) <strong>de</strong> la digue à la mer n’est pas vraim<strong>en</strong>t pris <strong>en</strong>compte. Il n’est pas considéré comme pouvant <strong>en</strong>traîner une catastrophe. On peut y voird’abord la force avec laquelle les évènem<strong>en</strong>ts surv<strong>en</strong>us (inondations par le fleuve <strong>en</strong> 1993et 2003) s’impos<strong>en</strong>t dans le champ <strong>de</strong>s représ<strong>en</strong>tations alors même qu’ils n’ont pasvraim<strong>en</strong>t été, <strong>en</strong> Camargue, <strong>de</strong>s catastrophes, face à <strong>de</strong>s risques pot<strong>en</strong>tiels maisprobables, susceptibles <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> danger un village côtier où pourtant le littoral necesse <strong>de</strong> reculer <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s déc<strong>en</strong>nies » (ibid.).La nouvelle charte <strong>du</strong> PNRC (2010-2022) a officialisé l’objectif <strong>de</strong> faire évoluer lefonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta vers un fonctionnem<strong>en</strong>t plus naturel. Cela va offrir à laTdV et à ses part<strong>en</strong>aires <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels un cadre favorable à l’accueil <strong>de</strong>srecommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, mais « ceci implique pas mal <strong>de</strong> négociations » (chargé <strong>de</strong> mission eauPNRC, com.pers., 2009). Cela signifie que la prés<strong>en</strong>ce assi<strong>du</strong>e dans les commissions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong><strong>de</strong>vra être poursuivie, qu’il leur faudra inlassablem<strong>en</strong>t remettre sur la table les problèmesdécouverts et les voies d’amélioration id<strong>en</strong>tifiées grâce à la recherche sci<strong>en</strong>tifique. On peutcep<strong>en</strong>dant craindre que ces commissions placées sous l’égi<strong>de</strong> <strong>du</strong> PNRC ne parvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t jamais àdécl<strong>en</strong>cher <strong>de</strong>s décisions plus courageuses pour la <strong>gestion</strong> hydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta et <strong>de</strong>s risqueslittoraux.C’est d’ailleurs la conclusion <strong>de</strong> V. Andreu-Boussut et C. Choblet (2006) qui ont étudié les rôles<strong>de</strong> PNR littoraux (Narbonaise et Golfe <strong>du</strong> Morbihan) dans la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s questions <strong>du</strong>contrôle <strong>de</strong> l’urbanisation et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s risques littoraux. Selon les auteurs, « soit lefonctionnem<strong>en</strong>t basé sur l'<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t trop mou <strong>de</strong>s acteurs sur une charte paraît se passerdifficilem<strong>en</strong>t d'outils réglem<strong>en</strong>taires plus contraignants, soit la difficulté <strong>de</strong> l'acteur Parc à coconstruire<strong>de</strong>s mesures partagées sur ces <strong>de</strong>ux thèmes complexes le con<strong>du</strong>it à les ignorer ou à lesexclure pour ne pas remettre <strong>en</strong> cause la construction déjà délicate d'un projet cons<strong>en</strong>suel <strong>de</strong>territoire » 103 . Dans le cas <strong>du</strong> PNR Camargue, la question est régulièrem<strong>en</strong>t soulevée et a bi<strong>en</strong> étéintégrée à la charte, mais la mise <strong>en</strong> œuvre reste à initier.Pour la TdV, nous observons ici que la légitimité et le savoir spécialisé lui permet <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dreplace dans la <strong>gestion</strong> locale dans le s<strong>en</strong>s plus <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, sous le statut <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique, pourainsi contribuer à l’amélioration <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Notons qu’elle dispose <strong>en</strong> cela d’unsiège <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique spécialiste <strong>de</strong> l’hydrologie <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta non concurr<strong>en</strong>cé <strong>en</strong> Camargue. Dans leregistre <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous voyons ici que cette reconnaissance <strong>du</strong> statutsci<strong>en</strong>tifique (registre <strong>de</strong> la place dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique) n’est pas anodine, elle permet d’agir103 Les auteurs nous mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> gar<strong>de</strong> par rapport à l’affrontem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s objectifs procé<strong>du</strong>raux (la logiqueparticipative) et <strong>de</strong>s objectifs substantiels pour la <strong>gestion</strong> que l’on retrouvera dans le cas <strong>du</strong> projet GIZC au Maroc(Chapitre 4).153


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleset notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir sa position et ne pas être complètem<strong>en</strong>t balayé <strong>en</strong> étant « taxé d’écolopartial » dans les pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> conflit où les polarités se réactiv<strong>en</strong>t (Chercheurs TdV, com.pers.,2009).5) L’expertise et l’interv<strong>en</strong>tion dans les cadres <strong>de</strong>s politiques publiques<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesCette reconnaissance <strong>du</strong> savoir spécialisé <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV leur permet <strong>en</strong> outred’<strong>en</strong>dosser le rôle d’expert dans différ<strong>en</strong>ts cadres visant généralem<strong>en</strong>t à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>spolitiques publiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, et cela à plusieurs échelles. L’expertise est souv<strong>en</strong>tsollicitée au niveau <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong>s outils d’application <strong>de</strong> ces politiques, c’est-à-dire <strong>en</strong>amont <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> qui <strong>de</strong>vra être guidée par ces plans. On peut considérer que la contributionrelative <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> sur le terrain estmineure par rapport aux opérateurs qui seront <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ces plans. Al’inverse, on peut s’attacher à la portée <strong>de</strong> ces plans au niveau local, régional, voire national et lesvoir comme <strong>de</strong>s outils influ<strong>en</strong>ts constituant une voie <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> l’expertise sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong>smessages <strong>de</strong> la TdV.Le développem<strong>en</strong>t d’exemples concrets trop nombreux nous ferait perdre le fil <strong>de</strong> notre étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>la multiplicité <strong>de</strong>s actions m<strong>en</strong>ées par la TdV liée à son activité sci<strong>en</strong>tifique. Nous nouscont<strong>en</strong>tons ici d’illustrer le propos par quelques exemples <strong>de</strong> cadres dans lesquels la TdV estimpliquée.Au niveau régional, la TdV siège au Conseil Sci<strong>en</strong>tifique Régional <strong>du</strong> Patrimoine Naturel(CSRPN) <strong>de</strong>puis 1992 (sauf p<strong>en</strong>dant la pério<strong>de</strong> 1998-2003) (Encadré 3.2). Le directeur <strong>du</strong>programme <strong>de</strong> la TdV a été désigné <strong>en</strong> tant que spécialiste <strong>en</strong> biologie <strong>de</strong> la conservation.Encadré 3.2 : Le CSRPN (source : www.paca.ecologie.gouv.fr/Le-CSRPN ; Décret n° 2004-292 <strong>du</strong> 26mars 2004 relatif au conseil sci<strong>en</strong>tifique régional <strong>du</strong> patrimoine naturel)Le Conseil Sci<strong>en</strong>tifique Régional <strong>du</strong> Patrimoine Naturel est une instance <strong>de</strong> spécialistes, placée auprès<strong>du</strong> préfet <strong>de</strong> région et <strong>du</strong> présid<strong>en</strong>t <strong>du</strong> conseil régional, qui peut être consultée pour <strong>de</strong>s questionsrelatives à la connaissance, la conservation et la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> patrimoine naturel régional.Définition et textes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce :- Le CSRPN est défini par la loi n° 2002-276 <strong>du</strong> 27 février 2002, relative à la démocratie <strong>de</strong> proximité,dans son article 109-III, (modifiant larticle L. 411-5 <strong>du</strong> Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t).- Texte <strong>de</strong> larticle <strong>de</strong> loi :- « III. - Il est institué dans chaque région un conseil sci<strong>en</strong>tifique régional <strong>du</strong> patrimoine naturel. Ceconseil est constitué <strong>de</strong> spécialistes désignés intuitu personae pour leur compét<strong>en</strong>ce sci<strong>en</strong>tifique, <strong>en</strong>particulier dans les universités, les organismes <strong>de</strong> recherche, les sociétés savantes, les muséumsrégionaux. Il couvre toutes les disciplines <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la vie et <strong>de</strong> la terre pour les milieuxterrestres, fluviaux et marins.154


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale- Ses membres sont nommés par arrêté <strong>du</strong> préfet <strong>de</strong> région après avis <strong>du</strong> présid<strong>en</strong>t <strong>du</strong> conseil régional.Ses domaines dinterv<strong>en</strong>tion (Décret dapplication) :1° La valeur sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong>s inv<strong>en</strong>taires <strong>du</strong> patrimoine naturel lors <strong>de</strong> leur élaboration ou <strong>de</strong> leur mise àjour ;2° Les propositions <strong>de</strong> listes régionales <strong>de</strong>spèces protégées ;3° La délivrance dautorisations portant sur <strong>de</strong>s espèces protégées ;4° Les ori<strong>en</strong>tations régionales <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la faune sauvage et damélioration <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> seshabitats ;5° Toute question relative au réseau Natura 2000.Pour le directeur <strong>du</strong> programme, sa désignation ti<strong>en</strong>t au fait que la TdV est suffisamm<strong>en</strong>t visiblecomme experte dans le champ <strong>de</strong> la biologie <strong>de</strong> la conservation et cette participation au CSRPNr<strong>en</strong>force <strong>en</strong> retour cette visibilité (TdV, com.pers., 2010). La TdV <strong>en</strong> retire égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sressources relationnelles et informationnelles notamm<strong>en</strong>t auprès <strong>de</strong> la DREAL qui prési<strong>de</strong> leCSRPN. En somme, la reconnaissance <strong>de</strong> son expertise qui permet à la TdV <strong>de</strong> siéger au CSRPNest un exemple <strong>de</strong> ressource qui attire d’autres ressources permettant <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir oud’augm<strong>en</strong>ter ses capacités internes.En termes d’actions publiques, le CSRPN peut être un levier intéressant selon les dossiers qui ysont traités (TdV, com.pers., 2010), notamm<strong>en</strong>t par la formulation d’avis défavorables à certainsprojets d’aménagem<strong>en</strong>t ou d’urbanisation et par la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mesures comp<strong>en</strong>satoires. LeCSRPN n’est pas le déci<strong>de</strong>ur final, mais ses avis sont considérés par le préfet qui arbitre. Bi<strong>en</strong> quele CSRPN ne maîtrise pas les décisions ni même les dossiers qui lui sont fournis, pour la TdVcela représ<strong>en</strong>te un levier pour au mieux éviter une perte nette d’habitat. Sa contribution consistedonc à mettre son expertise à disposition pour participer au fonctionnem<strong>en</strong>t d’un systèmesci<strong>en</strong>tifico-administratif dont l’impact est pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t fort. Le CSRPN a égalem<strong>en</strong>t pour rôle<strong>de</strong> s’assurer <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us <strong>de</strong>s outils d’application <strong>de</strong>s politiques publiques (mesures<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s DOCOB, méthodologie <strong>de</strong>s inv<strong>en</strong>taires, etc.). En tant que responsable <strong>de</strong>l’application <strong>de</strong>s politiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, la DREAL est très attachée aux objectifsnormatifs à respecter (comme la protection <strong>de</strong>s espèces et les habitats <strong>de</strong> la directiveeuropé<strong>en</strong>ne). Selon le directeur <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> la TdV, la contribution <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiquesrési<strong>de</strong> notamm<strong>en</strong>t dans une réflexion plus réaliste sur les objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux pouvantêtre relevés par ces outils et une évaluation locale et contextualisée <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> àmettre <strong>en</strong> œuvre. « A quels objectifs <strong>de</strong> conservation doit-on se t<strong>en</strong>ir et quelle <strong>gestion</strong> pour yparv<strong>en</strong>ir ? » : voici la question pragmatique qui se pose à tous sci<strong>en</strong>tifiques et <strong>gestion</strong>nairesd’espaces naturels. En cela, le directeur sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV apporte au CSRPN le fruit d’uneréflexion interne sur cette question dont l’importance inspire un paragraphe spécifique que nousdévelopperons dans la section suivante (Section 6).155


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesAu niveau national, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV peuv<strong>en</strong>t être sollicités pour participer aux comités<strong>de</strong> pilotage constitués pour l’élaboration <strong>de</strong>s plans nationaux d’action ou <strong>de</strong> restauration (Encadré3.3).Encadré 3.3 : Les plans nationaux d’action et <strong>de</strong> restauration (source : <strong>de</strong>veloppem<strong>en</strong>t-<strong>du</strong>rable.gouv.fr 104 ).Contexte et objectifs <strong>de</strong>s plans nationauxLa France s’est <strong>en</strong>gagée à « stopper la perte <strong>de</strong> la biodiversité à l’horizon 2010 » <strong>en</strong> signant laConv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> la diversité biologique <strong>en</strong> 1992 lors <strong>du</strong> Sommet <strong>de</strong> la Terre <strong>de</strong> Rio. Elle adéveloppé une stratégie nationale pour la biodiversité adoptée <strong>en</strong> 2004. Les plans nationauxd’action (ou <strong>de</strong> restauration) figur<strong>en</strong>t parmi les outils d’application <strong>de</strong> cette politique, concernantles espèces dont l’état <strong>de</strong> conservation est défavorable. Les premiers travaux ont été effectués dès1996, mais l’outil a notamm<strong>en</strong>t été confirmé par <strong>de</strong>s objectifs plus ambitieux lors <strong>du</strong> Gr<strong>en</strong>elle <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 2007 : la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> conservation et <strong>de</strong> restauration dans les 5ans pour les 131 espèces prés<strong>en</strong>tes sur le territoire français (métropole et outre-mer) et classées <strong>en</strong>danger critique d’extinction sur la liste rouge mondiale <strong>de</strong> l’UICN. Le MNHN a eu la charge <strong>du</strong>travail visant à établir les priorités d’interv<strong>en</strong>tion et à déci<strong>de</strong>r, avec l’avis <strong>de</strong>s experts <strong>du</strong> ConseilNational <strong>de</strong> la Protection Naturel (CNPN) les premiers plans d’action à mettre <strong>en</strong> œuvre.Les acteurs <strong>de</strong>s plans nationauxL’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ces plans nationaux requièr<strong>en</strong>t l’implication <strong>de</strong> nombreuxacteurs. La Direction <strong>du</strong> ministère <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la Protection <strong>de</strong> la Nature désigne une DREAL(anci<strong>en</strong>ne DIREN) coordinatrice ; <strong>en</strong>semble, les <strong>de</strong>ux institutions choisiss<strong>en</strong>t un opérateur <strong>du</strong> plan(mise <strong>en</strong> œuvre) et <strong>de</strong>s représ<strong>en</strong>tants sci<strong>en</strong>tifiques qui sièg<strong>en</strong>t au comité <strong>de</strong> pilotage. Lesreprés<strong>en</strong>tants sci<strong>en</strong>tifiques « conseill<strong>en</strong>t et éclair<strong>en</strong>t le comité <strong>de</strong> pilotage sur les actions àpromouvoir <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations sci<strong>en</strong>tifiques relatives à la conservation <strong>de</strong> l’espèce ».Ainsi, une ornithologue <strong>de</strong> la TdV a été sollicitée pour siéger <strong>en</strong> tant que représ<strong>en</strong>tant sci<strong>en</strong>tifiqueau comité <strong>de</strong> pilotage <strong>du</strong> plan <strong>de</strong> restauration <strong>du</strong> butor étoilé (2008-2012, 2007 : 85). Sonid<strong>en</strong>tification ti<strong>en</strong>t à sa participation active au projet LIFE Nature sur la restauration et la <strong>gestion</strong><strong>de</strong>s habitats <strong>du</strong> butor étoilé qui avait précédé le lancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> plan <strong>de</strong> restauration. Elle a <strong>en</strong>suitecontribué à l’amélioration <strong>du</strong> Plan d’action pour le phragmite aquatique (2010-2014, 2009) pour larelecture <strong>du</strong>quel elle avait été sollicitée, car certaines mesures <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>trai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> concurr<strong>en</strong>ceavec celles préconisées pour le butor étoilé (Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2010).L’expertise sci<strong>en</strong>tifique pour les outils d’application <strong>de</strong>s politiques publiques n’est pas un mo<strong>de</strong>d’action purem<strong>en</strong>t construit par la TdV dans le s<strong>en</strong>s où il est fortem<strong>en</strong>t dép<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>sopportunités qui se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t. Les m<strong>en</strong>tions faites à ces interv<strong>en</strong>tions dans les bilans d’activitéset les évaluations montr<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant qu’il s’agit d’un levier d’action id<strong>en</strong>tifié par l’organisationpour la diffusion <strong>de</strong> son expertise, opportunités qu’elle ne manque pas <strong>de</strong> saisir.104 http://www.<strong>de</strong>veloppem<strong>en</strong>t-<strong>du</strong>rable.gouv.fr/1-Qu-est-ce-qu-un-plan-national-d.html, consulté <strong>en</strong> septembre2010.156


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleEn revanche, exercer l’expertise sci<strong>en</strong>tifique dans le cas <strong>de</strong> projets <strong>en</strong> Méditerranée est clairem<strong>en</strong>tinscrit dans la logique d’action <strong>de</strong> la TdV : les connaissances pro<strong>du</strong>ites et les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>favorables à la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité doit servir à d’autres sitesque la Camargue où est principalem<strong>en</strong>t réalisée sa recherche sci<strong>en</strong>tifique. Les questions poséespar ce type d’interv<strong>en</strong>tion sont développées dans le chapitre suivant (Chapitre 4).6) Le rôle <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces dans les choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : le cas <strong>de</strong>s salins <strong>du</strong> sud-est <strong>de</strong> laCamargueRev<strong>en</strong>ons à prés<strong>en</strong>t à cette question qui hante les naturalistes, qu’ils soi<strong>en</strong>t sci<strong>en</strong>tifiques ou<strong>gestion</strong>naires : « à quels objectifs <strong>de</strong> conservation doit-on se t<strong>en</strong>ir et quelle <strong>gestion</strong> pour yparv<strong>en</strong>ir ? ». Concernant les objectifs <strong>de</strong> conservation, les référ<strong>en</strong>ces normatives exist<strong>en</strong>t. Pour laFrance, il s’agit notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s listes d’espèces et d’habitats issues <strong>de</strong>s Directives europé<strong>en</strong>nesOiseaux (1979) et Habitats (1992) 105 . Mais pour le <strong>gestion</strong>naire d’espace naturel, ces référ<strong>en</strong>ces nesont que <strong>de</strong>s repères vagues qui ne dis<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> précis sur les objectifs qu’il doit se fixer sur lesite dont il a la charge et <strong>en</strong>core moins <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’il doit mettre <strong>en</strong> œuvre pour yparv<strong>en</strong>ir. C’est tout l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique réalisée à la TdV. C’est aussi un <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong><strong>gestion</strong> concrète sur son domaine <strong>de</strong> 2600 hectares, pour laquelle la question a été prise <strong>en</strong> chargeau cours <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières années. En effet, si l’élaboration <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s estun savoir-faire pour lequel la TdV s’est démarquée dès les premières années <strong>de</strong> sondéveloppem<strong>en</strong>t, elle continue à évoluer dans la matière, notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis les 5 <strong>de</strong>rnières années.Cette réflexion collective (impliquant les <strong>gestion</strong>naires <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la TdV et les sci<strong>en</strong>tifiques)l’a am<strong>en</strong>ée à se donner pour objectif <strong>de</strong> désint<strong>en</strong>sifier la <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> rétablir au maximum lesprocessus naturels (ou comp<strong>en</strong>ser au minimum les processus climatiques notamm<strong>en</strong>t). Le fait que<strong>de</strong>s naturalistes soi<strong>en</strong>t innovants <strong>en</strong> se donnant pour objectif <strong>de</strong> laisser le milieu fonctionner leplus naturellem<strong>en</strong>t possible peut sembler paradoxal. Pourtant cela ne l’est pas. Pour qu’un espaceprotégé assure <strong>en</strong>core la protection <strong>de</strong>s espèces et <strong>de</strong>s habitats, ses <strong>gestion</strong>naires peuv<strong>en</strong>t êtrecon<strong>du</strong>its à comp<strong>en</strong>ser – plus ou moins int<strong>en</strong>sivem<strong>en</strong>t – les perturbations subies par cet espacequi n’est, <strong>de</strong> fait, pas un système fermé et sous cloche. Ceci est d’autant plus perceptible <strong>en</strong>gran<strong>de</strong> Camargue qui est, souv<strong>en</strong>ons-nous, un espace poldérisé. L’eau qui circulait <strong>de</strong> façonirrégulière dans le <strong>de</strong>lta n’y <strong>en</strong>tre presque plus que par l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’homme, qui a le pouvoir<strong>de</strong> la réguler. Afin <strong>de</strong> « gérer <strong>de</strong> manière à laisser place aux processus naturels », les sci<strong>en</strong>tifiqueset <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> la TdV cherch<strong>en</strong>t à <strong>en</strong>cadrer l’élaboration <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par une105 www.natura2000.fr, consultation septembre 2010.157


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesdémarche méthodologique consistant à « pr<strong>en</strong>dre <strong>du</strong> recul par rapport aux textes nationaux et europé<strong>en</strong>s etêtre plus réactifs, se docum<strong>en</strong>ter dans d’autres expertises et dans la littérature sci<strong>en</strong>tifique, utiliser d’autres critèrescomme ceux <strong>de</strong> la liste rouge <strong>de</strong> l’UICN » (direction TdV, com.pers., 2010).Ainsi, la <strong>gestion</strong> d’un espace naturel est complexe par les questions écologiques qu’elle pose. Elleest <strong>en</strong>core davantage lorsqu’il faut composer avec d’autres acteurs, aux objectifs <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t – voire le plus souv<strong>en</strong>t – diverg<strong>en</strong>ts. En effet, la TdV déci<strong>de</strong> unilatéralem<strong>en</strong>tquant à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> son domaine, où elle peut d’ailleurs continuer à développer son savoir-fairesci<strong>en</strong>tifique et technique pour la <strong>gestion</strong>. Mais son objectif est <strong>de</strong> participer à l’amélioration <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> d’autres espaces protégés (cas <strong>de</strong>s salins développé ici) et d’espaces non protégés (cas <strong>de</strong>la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse développé à la section 7).Le cas <strong>de</strong>s salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c est très intéressant, à la fois par l’historique <strong>de</strong> l’investissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> laTdV sur ce site et par les événem<strong>en</strong>ts actuels qui donn<strong>en</strong>t lieu à une recomposition <strong>du</strong> jeud’acteurs sur ce territoire. Dans ce système d’action, nous allons voir que la TdV se sertnotamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son assise sci<strong>en</strong>tifique pour conforter sa place et se donner le maximum <strong>de</strong> marge<strong>de</strong> manœuvre dans l’objectif d’ori<strong>en</strong>ter la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ce site.Les salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c couvr<strong>en</strong>t une zone <strong>de</strong> 6000 hectares au sud-est <strong>de</strong> la Camargue (Figure3.4). C’est à travers son travail sur les oiseaux d’eau, et notamm<strong>en</strong>t les flamants roses(Pho<strong>en</strong>icopterus roseus), que la TdV s’est intéressée à ce site dans les années 70. Plus précisém<strong>en</strong>t, laTdV a comm<strong>en</strong>cé à baguer <strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s <strong>de</strong> cette espèce emblématique <strong>en</strong> 1950 dans l’objectif <strong>de</strong>décrire la dynamique <strong>de</strong> ces populations (Is<strong>en</strong>mann, 2003 : 44). A cette époque, les flamants n<strong>en</strong>ichai<strong>en</strong>t qu’irrégulièrem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Camargue et le succès repro<strong>du</strong>cteur était faible, faute d’îlotsadaptés aux besoins <strong>de</strong> leur repro<strong>du</strong>ction. Les flamants colonis<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étangs saumâtres, le plussouv<strong>en</strong>t littoraux (lagunes), où ils trouv<strong>en</strong>t la crevette Artemia salina (qui leur donn<strong>en</strong>t leur couleurrose). Pour la repro<strong>du</strong>ction, ils ont besoin d’espace à proximité <strong>de</strong> ces étangs où ils pourrontédifier leurs nids. S<strong>en</strong>sibles au dérangem<strong>en</strong>t, et notamm<strong>en</strong>t à celui <strong>de</strong>s prédateurs, les flamantsvont préférer <strong>de</strong>s espaces isolés : <strong>de</strong>s îlots. Par son suivi <strong>de</strong> l’espèce, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdVont pu mesurer l’impact <strong>de</strong> la disparition <strong>de</strong>s habitats sur la dynamique <strong>de</strong> la population. Elle a<strong>en</strong>trepris, dans le cadre <strong>de</strong> son travail sur les habitats <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, d’œuvrer pour la recréationet la <strong>gestion</strong> d’un site <strong>de</strong> nidification pour les flamants. Cet îlot, qui est <strong>de</strong>puis l’uniquesite <strong>de</strong> nidification <strong>de</strong> flamants <strong>en</strong> France 106 , a été aménagé sur les salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. L’activité106 La compagnie <strong>de</strong>s Salins <strong>du</strong> Midi, s<strong>en</strong>sibilisée à la conservation <strong>de</strong>s oiseaux d’eau, et <strong>en</strong> réponse à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>sociale <strong>de</strong> l’implication <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises commerciales dans le « développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable », est <strong>en</strong> train <strong>de</strong> travailler àl’aménagem<strong>en</strong>t d’îlot <strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ction pour les oiseaux d’eau (sternes, flamants), mais la capacité d’accueil reste faiblepar rapport à l’étang <strong>du</strong> Fangassier.158


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesalinière s’y développait <strong>de</strong>puis le 19e siècle, donnant lieu à un aménagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s étangs <strong>en</strong>bor<strong>du</strong>re littorale, isolés <strong>de</strong> la mer, mais mis <strong>en</strong> eau artificiellem<strong>en</strong>t par pompage d’eau <strong>de</strong> mer. Cesmilieux sont tout à fait intéressants pour les besoins <strong>de</strong>s flamants. La TdV a dû travailler avec les<strong>en</strong>treprises exploitantes (dont la <strong>de</strong>rnière a été la société <strong>de</strong>s Salins <strong>du</strong> Midi) pour aménager l’îlot<strong>de</strong> nidification dans « l’étang <strong>du</strong> fangassier ». Bi<strong>en</strong> que ponctuée <strong>de</strong> quelques crises au cours <strong>de</strong> 30ans <strong>de</strong> collaboration, celle-ci a été bonne, et l’<strong>en</strong>treprise <strong>de</strong> la TdV a très vite montré ses effetspositifs avec l’augm<strong>en</strong>tation rapi<strong>de</strong> <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> couples et <strong>du</strong> succès repro<strong>du</strong>cteur <strong>de</strong>s flamantsroses – espèce <strong>de</strong>puis classée <strong>en</strong> préoccupation mineure sur la liste rouge <strong>de</strong> l’UICN. Notonségalem<strong>en</strong>t que les étangs <strong>de</strong>s salins accueill<strong>en</strong>t aussi d’importantes populations <strong>de</strong> laro-limicoles,sur lesquels la TdV a développé <strong>de</strong>s travaux similaires (suivi <strong>de</strong>s populations, <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s habitats<strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ction).Cette longue intro<strong>du</strong>ction au changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c nous permet <strong>de</strong>mesurer l’attachem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV à ce site à fort <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation. Elle permet <strong>en</strong> outre <strong>de</strong>découvrir un mo<strong>de</strong> d’action liée à la recherche non évoqué jusqu’ici qui est celui <strong>de</strong> l’interv<strong>en</strong>tiondirecte sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Pour ces mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion, l’impact est plus aisém<strong>en</strong>tévaluable. La TdV a ainsi pu m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion avec succèssur la dynamique <strong>de</strong>s populations d’autres espèces comme le pélican frisé (Grèce, Bulgarie,Turquie) ou <strong>en</strong>core la truite marbrée <strong>en</strong> Slovénie.C’est maint<strong>en</strong>ant aux changem<strong>en</strong>ts dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c et à la recomposition <strong>du</strong>système d’acteurs que nous allons nous attacher. L’activité salinière s’est peu à peu ré<strong>du</strong>ite aucours <strong>de</strong>s dix <strong>de</strong>rnières années, jusqu’à l’arrêt <strong>de</strong> l’activité et la v<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s terrains par la sociétéSalins <strong>du</strong> Midi. Cette opération a été, et reste, très complexe, rythmée par <strong>de</strong> nombreuxrevirem<strong>en</strong>ts, <strong>de</strong>s annonces officielles diverg<strong>en</strong>tes <strong>de</strong>s informations souterraines que la TdV a puobt<strong>en</strong>ir (ou non) par son réseau. Les acteurs <strong>du</strong> territoire n’ont eu aucune prise sur ce processusqui s’est passé <strong>en</strong> haut lieu (<strong>en</strong>tre la direction <strong>de</strong> la société salinière et l’état, Ministère <strong>de</strong>l’Economie et Conservatoire <strong>du</strong> Littoral). La société salinière a fait <strong>en</strong> sorte <strong>de</strong> préserver uneposition <strong>de</strong> force <strong>en</strong> morcelant le site et <strong>en</strong> mettant les différ<strong>en</strong>tes zones à la v<strong>en</strong>te <strong>en</strong> plusieursactes. Depuis 2008, 6000 hectares ont été acquis par le Conservatoire <strong>du</strong> Littoral (CdL) <strong>en</strong> 3 acteset confiés <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> au PNRC (Figure 3.4).159


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesFigure 3.4 : Carte <strong>de</strong>s zones d’acquisition <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c par le Conservatoire <strong>du</strong> Littoral (source :Parc naturel régional <strong>de</strong> Camargue & Conservatoire <strong>du</strong> Littoral)La société <strong>de</strong>s salins possè<strong>de</strong> aujourd’hui <strong>en</strong>core <strong>de</strong>ux zones coupant le territoire acquis <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux,compliquant fortem<strong>en</strong>t sa <strong>gestion</strong>. L’<strong>en</strong>treprise est donc <strong>en</strong> position <strong>de</strong> force pour la négociation<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux zones, alors que le CdL n’a plus <strong>de</strong> budget pour l’acquisition et ne peut compter surl’Etat qui a déjà largem<strong>en</strong>t participé à l’achat <strong>de</strong>s premières zones acquises. De plus, le CdL et lePNRC se trouv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fait responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> 107 d’un espace sans avoir <strong>en</strong>core acquis lesmoy<strong>en</strong>s financiers et humains <strong>de</strong> le faire. Néanmoins, la question majeure qui occupe lesnouveaux propriétaire et <strong>gestion</strong>naire est celle <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> à mettre <strong>en</strong> œuvre sur ce site oùl’apport d’eau <strong>de</strong> mer n’est plus financé par l’activité commerciale salicole (et <strong>en</strong> outre pluspossible techniquem<strong>en</strong>t, la pompe étant <strong>de</strong>puis hors <strong>de</strong> service).107 La responsabilité <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> dont nous parlons ici est statutaire et se situe dans le domaine <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>d’espaces naturels. L’organisme responsable <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> d’un site est chargé <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> manière pertin<strong>en</strong>te <strong>du</strong>point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et <strong>de</strong> le surveiller. Cette responsabilité sur la <strong>gestion</strong> (d’espaces naturels)ne doit pas être confon<strong>du</strong>e avec les responsabilités fonctionnelles et causales qui s’exerc<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> plus large auquel apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t ces espaces naturelles.160


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLa TdV surveille <strong>de</strong> près l’évolution <strong>du</strong> dossier et a anticipé ce changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong>notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> préparant dès 2009 un programme <strong>de</strong> recherche à l’occasion <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong>son plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015. Cette problématique est abordée sous plusieurs angles dans leprogramme, <strong>de</strong> façon transversale aux départem<strong>en</strong>ts Espèces et Ecosystèmes 108 et <strong>en</strong> impliquantla participation <strong>de</strong> plusieurs sci<strong>en</strong>tifiques. Parmi ces projets <strong>de</strong> recherche, une thèse débute àl’automne 2010 pour étudier les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s salins sur la population <strong>de</strong>flamants (départem<strong>en</strong>t Espèces, Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010). Les salins serontégalem<strong>en</strong>t intégrés au programme <strong>de</strong> modélisation développé <strong>de</strong>puis plusieurs années à la TdV(modélisation <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta évoqué plus haut et modélisation <strong>de</strong>l’évolution <strong>de</strong>s habitats), afin <strong>de</strong> prévoir les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>s modifications <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>thydrologique (incluant <strong>gestion</strong> hydraulique et forçage climatique, donc la salinité et leshydropério<strong>de</strong>s) sur les habitats et les espèces qui y sont inféodés. Pour influ<strong>en</strong>cer cesmodifications dans un s<strong>en</strong>s favorable <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation, un projet <strong>de</strong> restauration <strong>du</strong> siteest <strong>en</strong> outre prévu (départem<strong>en</strong>t Ecosystèmes, ibid.).La construction d’un tel programme <strong>de</strong> recherche n’est pas sans provoquer un débat interne. Eneffet, nous avons pu observer plusieurs temps dans la prise <strong>en</strong> charge <strong>du</strong> problème <strong>de</strong> lareconversion <strong>de</strong>s salins au sein <strong>de</strong> la TdV. Dans un premier temps et comme nous l’avons ditplus haut, les membres <strong>de</strong> la TdV se sont attachés à acquérir <strong>de</strong>s informations sur l’évolution <strong>de</strong>sprojets <strong>de</strong> v<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la société salinière et sur les acteurs impliqués. Ces informations – obt<strong>en</strong>uespar la direction, mais aussi par d’autres opérationnels – étai<strong>en</strong>t échangées notamm<strong>en</strong>t au sein <strong>du</strong>comité interne. Les débats ont émergé dans un <strong>de</strong>uxième temps, au mom<strong>en</strong>t où le CdL a acquisles premiers terrains et le PNRC a été désigné <strong>gestion</strong>naire : c’est-à-dire au mom<strong>en</strong>t où la TdV<strong>de</strong>vait se positionner dans le nouveau système d’acteurs constitué. Deux niveaux ont été repérésdans ce débat interne.Le premier nous amène à nouveau à la question <strong>de</strong>s relations <strong>en</strong>tre la sci<strong>en</strong>ce et les choix publics<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. En effet, dans la précipitation <strong>du</strong> transfert <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s salinsau PNRC, la TdV <strong>de</strong>vait se positionner par rapport à la mise <strong>en</strong> eau <strong>de</strong> l’étang <strong>du</strong> Fangassier – cequi signifie : îlot <strong>de</strong> nidification pour les flamants ou pas. Les sci<strong>en</strong>tifiques estimai<strong>en</strong>t que ce n’estpas le rôle d’un sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> trancher sur <strong>de</strong>s choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, c’était au PNRC <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>drecette décision. La direction estimait quant à elle que la TdV était impliquée <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 30 ans108 Rappelons que le programme d’action <strong>de</strong> la TdV est organisé <strong>en</strong> 3 départem<strong>en</strong>ts, chacun responsable <strong>de</strong> plusieursprojets : Espèces, Ecosystèmes et Suivi-évaluation <strong>de</strong>s ZHM. Les sci<strong>en</strong>tifiques et spécialistes <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>sZH responsables <strong>de</strong>s projets travaill<strong>en</strong>t majoritairem<strong>en</strong>t « dans » leur départem<strong>en</strong>t, mais « l’intégration transversale<strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces » recherchée les invit<strong>en</strong>t à travailler <strong>en</strong> inter-départem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces requises.161


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesdans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’étang <strong>du</strong> Fangassier pour sa recherche-interv<strong>en</strong>tion et qu’elle <strong>de</strong>vait suggérerune solution au PNRC et assumer les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> cette sug<strong>gestion</strong>. Des recommandationsont finalem<strong>en</strong>t été formulées à l’att<strong>en</strong>tion <strong>du</strong> PNRC, au nom <strong>de</strong> la TdV qui n’est pas seulem<strong>en</strong>tun organisme sci<strong>en</strong>tifique aux yeux <strong>du</strong> PNRC, mais aussi un acteur spécialiste <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s, et donc légitime pour le faire 109 .L’av<strong>en</strong>ir <strong>du</strong> site et le mainti<strong>en</strong> (ou la reconstitution) d’habitats était néanmoins un <strong>en</strong>jeu reconnupar tous, mais s’y impliquer fortem<strong>en</strong>t – par un programme <strong>de</strong> recherche – n’était pas unedécision anodine pour les sci<strong>en</strong>tifiques qui aurai<strong>en</strong>t à s’investir sur ce nouveau terrain.Cela a <strong>en</strong>traîné un <strong>de</strong>uxième point <strong>de</strong> débat repéré <strong>en</strong> interne. L’organisation <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> siteétait – et est – <strong>en</strong>core très incertaine. Une problématique <strong>de</strong> conversion brutale et <strong>de</strong> restaurationest nouvelle pour ces chercheurs : bâtir un programme <strong>de</strong> recherche dans ces conditions n’est passans difficulté. Pour certains d’<strong>en</strong>tre eux, cela impliquait égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> travailler sur <strong>de</strong>s habitatsmoins bi<strong>en</strong> maîtrisés. La direction a néanmoins impulsé la dynamique, considérant qu’il n’était« pas p<strong>en</strong>sable que la TdV ne s’investisse pas sur ces 6000 hectares aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation non négligeables »(com.pers., 2010) et invitant les sci<strong>en</strong>tifiques à intégrer ce volet « Salins » dans le programme <strong>de</strong>recherche qu’ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t construire. Cette décision mêle ainsi le registre stratégique <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t interne – défi <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces pour abor<strong>de</strong>r une nouvelleproblématique – et celui <strong>de</strong> la focalisation sur l’objet écologique – faire le choix d’uninvestissem<strong>en</strong>t sci<strong>en</strong>tifique important sur les salins implique <strong>de</strong> laisser <strong>de</strong> côté d’autres objets<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, d’autres problématiques sur lesquelles le travail a déjà été plus ou moins<strong>en</strong>gagé.Dans un <strong>de</strong>rnier temps, nous avons observé une appropriation <strong>de</strong> la décision <strong>de</strong> s’investirfortem<strong>en</strong>t sur les salins <strong>en</strong> interne et une participation plus symétrique <strong>en</strong>tre la direction et lessci<strong>en</strong>tifiques. Les futurs programmes <strong>de</strong> recherche ont été bâtis dans ce s<strong>en</strong>s, un « groupe salins »interne s’est constitué pour favoriser l’échange <strong>de</strong>s informations et mettre <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce lesdiffér<strong>en</strong>ts projets relatifs aux salins, mais égalem<strong>en</strong>t pour suivre le dossier et conforter la place <strong>de</strong>la TdV dans ce jeu <strong>en</strong>core très instable.A l’ai<strong>de</strong> d’une schématisation croziéri<strong>en</strong>ne <strong>du</strong> système d’action qui s’organise autour <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong><strong>de</strong>s salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c, nous observons que le positionnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> tant que sci<strong>en</strong>tifique eststratégique <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>du</strong> portage <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation, mais aussi <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> placeau sein <strong>de</strong> ce système d’acteurs. Avant d’abor<strong>de</strong>r la grille <strong>du</strong> jeu d’acteurs (Tableau 3.2) sur lequels’appuie cette démonstration, il faut expliquer comm<strong>en</strong>t les difficultés financières que connaiss<strong>en</strong>t109 Nous retrouverons cette question <strong>de</strong> l’articulation sci<strong>en</strong>ce – choix politiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> laTdV vis-à-vis <strong>de</strong> l’externe dans la troisième partie <strong>de</strong> la thèse.162


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talele CdL et le PNRC pour l’acquisition <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers terrains et pour le financem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>rejailliss<strong>en</strong>t sur la TdV. Les <strong>de</strong>ux organismes ont adressé une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t à laFondation MAVA, la fondation <strong>de</strong> mécénat qui alim<strong>en</strong>te le budget <strong>de</strong> la TdV à hauteur <strong>de</strong> 50%.Or, les membres <strong>de</strong> son bureau sont att<strong>en</strong>tifs <strong>de</strong>puis quelques temps à ce que la TdV ré<strong>du</strong>isecette dép<strong>en</strong>dance à une seule et même source <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t. Le risque pour la TdV serait que sila MAVA accepte <strong>de</strong> financer le CdL et le PNRC pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s salins, elle considère que laTdV ne serait pas bénéficiaire <strong>de</strong> ces budgets spécifiques et qu’elle <strong>de</strong>vrait pr<strong>en</strong>dre sur sa propredotation MAVA. Ce scénario mettrait la TdV <strong>en</strong> difficulté financière par rapport au programmequ’elle a prévu <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre.Tableau 3.3 : Organisation <strong>du</strong> système d’action pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>cCdLPNRCTdVObjectif Ressources Contraintes StratégieAvoir un site d’un Propriété <strong>du</strong> site Manque <strong>de</strong> budget Pro-activité (repriseseul t<strong>en</strong>ant et unpour les <strong>de</strong>rnières <strong>en</strong> main <strong>du</strong> dossierresponsableacquisitions et pour d’abord géré au<strong>gestion</strong>naire (avecla <strong>gestion</strong>niveau <strong>de</strong> l’Etat)une équipe)Obt<strong>en</strong>ir les moy<strong>en</strong>s<strong>de</strong> gérer le site.Asseoir son statut<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>naire <strong>en</strong>Camargue (hydro /biodiversité, <strong>gestion</strong><strong>de</strong> site)Reconversion <strong>du</strong>site : <strong>gestion</strong>écologique établiesur <strong>de</strong>s basessci<strong>en</strong>tifiquesImplication dans la<strong>gestion</strong> sur leterrain, et ne pasêtre simple membre<strong>du</strong> comité <strong>de</strong><strong>gestion</strong>.Continuer sesprogrammes <strong>en</strong>cours (flamants,etc.)Délégation <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> par le CdL.Accès à un nouveauterrain à <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong>conservationCompét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques,techniques etconnaissances <strong>du</strong>terrain reconnuesLégitimité pour<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r unegouvernancetranspar<strong>en</strong>te etindép<strong>en</strong>dante <strong>du</strong>comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong><strong>du</strong> siteSe retrouveresponsable <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong>, maismanque <strong>de</strong>ressourceshumaines (<strong>en</strong>quantité et qualité :n’a pas lescompét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques ettechniques) etfinancières.Forte sujétion à lapolitique localeConfusion <strong>de</strong>srelations avec laMAVA. Risque <strong>de</strong>ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> sonbudget interneAmbitionssci<strong>en</strong>tifique et<strong>gestion</strong>naire au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong>s capacitésactuelles <strong>du</strong> CdL et<strong>du</strong> PNRCSuit le CdL, mais<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>sgarantiesPro-activité(Expertisesci<strong>en</strong>tifique etconnaissance <strong>du</strong>terrain : « longueurd’avance parrapport au PNRC »,qui favorisel’adoption <strong>de</strong>spropositions etrecommandations)163


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesLe comm<strong>en</strong>taire <strong>de</strong> ce tableau (Tableau 3.3) nous permettra <strong>de</strong> conclure cet exemple <strong>de</strong>l’évolution <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. Pour cela, rappelons au préalable que l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> laTdV, qui négociait auparavant directem<strong>en</strong>t avec l’<strong>en</strong>treprise exploitante pour le travail sur leterrain, est <strong>de</strong> ne pas y perdre, voire d’y gagner dans le changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> propriété et <strong>de</strong>configuration <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. Ne pas y perdre, cela signifie pour elle <strong>de</strong>conserver le même niveau d’accès au terrain et la même liberté <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s travauxsci<strong>en</strong>tifiques et techniques. Y gagner signifierait déployer <strong>de</strong>s travaux sci<strong>en</strong>tifiques et techniquessur une problématique nouvelle, celle <strong>de</strong> la reconversion d’un espace, où les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation sont forts : les salins constitu<strong>en</strong>t un vaste espace propice à une avifauneemblématique (flamants roses, plusieurs espèces <strong>de</strong> laro-limicoles) et à une flore typique <strong>de</strong>smilieux méditerrané<strong>en</strong>s. Y gagner signifie <strong>en</strong> outre bénéficier <strong>de</strong> ressources supplém<strong>en</strong>taires(financières, ce qui se tra<strong>du</strong>it <strong>en</strong> « équival<strong>en</strong>t temps plein » <strong>de</strong> personnel) pour mettre <strong>en</strong> œuvreces programmes sci<strong>en</strong>tifiques et techniques.Cet exemple donne donc à voir non pas le déploiem<strong>en</strong>t d’une stratégie d’action au s<strong>en</strong>s fort faceà l’exploitant qui a une stratégie <strong>de</strong> blocage sur le terrain – la TdV n’a aucune prise pas rapport àcet « acteur sectoriel » – mais un jeu stratégique au sein <strong>de</strong> l’Ensemble agissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t 110(EAE).Pour négocier le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> sa place dans la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> site (décision <strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>et accès au terrain), la TdV met <strong>en</strong> avant un positionnem<strong>en</strong>t sci<strong>en</strong>tifique, à travers la propositiond’un programme <strong>de</strong> recherche à m<strong>en</strong>er. Cette posture vise pour la TdV à gérer ce qui est vucomme étant <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> « coopétition » dans la littérature <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises (Yami& Le Roy, 2007), lorsque les parties ont besoin <strong>de</strong> coopérer malgré la concurr<strong>en</strong>ce qui existe<strong>en</strong>tre eux sur d’autres plans. Ici, le PNRC cherche à asseoir son statut <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>naire <strong>en</strong>Camargue 111 et donc à « marquer son territoire » vis-à-vis <strong>de</strong> la TdV qui était prés<strong>en</strong>te avant luisur le site <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. Parallèlem<strong>en</strong>t, le PNRC a besoin <strong>de</strong> l’expertise <strong>de</strong> la TdV,n’ayant que peu d’expéri<strong>en</strong>ce dans le domaine et reconnaît sa légitimité sur ce plan : « la TdV estspécialiste <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH », « ce sont <strong>de</strong>s naturalistes très pointus » (chargés <strong>de</strong> mission PNRC, com.,pers., 2008, 2009). L’assise sci<strong>en</strong>tifique dont dispose la TdV et son anticipation sur les recherches110 Cette notion d’Ensemble agissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t que nous retrouverons au chapitre 5 désigne les acteursqui agiss<strong>en</strong>t int<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble sur un même dossier. Cela nous permet <strong>de</strong> désigner plus spécifiquem<strong>en</strong>tles situations où la coordination <strong>en</strong>tre ces Acteurs d’Environnem<strong>en</strong>t est un <strong>en</strong>jeu (ce qui ajoute un niveau d’analysesupplém<strong>en</strong>taire par rapport aux relations (plus ou moins directes) qui exist<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fait au sein <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>int<strong>en</strong>tionnelle <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> considérés). Notons cep<strong>en</strong>dant que pour l’une comme pour l’autre <strong>de</strong>ssituations, une analyse <strong>de</strong>s jeux stratégiques <strong>en</strong>tre acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t s’impose pour compr<strong>en</strong>dre l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’ONGE comme le montre l’exemple <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c.111 Conclusion d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec <strong>de</strong>s chargés <strong>de</strong> mission <strong>du</strong> PNRC <strong>en</strong> 2008 et 2009.164


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleà m<strong>en</strong>er lui permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> faire adopter <strong>de</strong>s ambitions et <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation forts pourle site dans un contexte où le CdL et le PNRC accueill<strong>en</strong>t favorablem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s propositions 112(l’<strong>en</strong>jeu étant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à une restauration exemplaire <strong>du</strong> site, i.e. <strong>de</strong> très gran<strong>de</strong> qualitéécologique), étant donné la lour<strong>de</strong>ur <strong>du</strong> dossier qu’ils ont à gérer. Même si aucun <strong>de</strong> ces acteursn’est pour l’instant <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre les actions pour atteindre ces objectifs, ilsfourniss<strong>en</strong>t néanmoins une perspective <strong>de</strong> travail d’ores et déjà inscrite dans le projet <strong>de</strong>conv<strong>en</strong>tion quadripartite 113 .7) Négocier avec les utilisateurs pour améliorer les pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : le cas <strong>de</strong>la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasseL’objectif <strong>de</strong> la TdV est <strong>de</strong> faire évoluer les pratiques <strong>de</strong> manière à ce que la <strong>gestion</strong> soit favorableà la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. On a vu qu’elle y travaille <strong>en</strong> s’associant largem<strong>en</strong>t àd’autres <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels qu’elle prés<strong>en</strong>te effectivem<strong>en</strong>t comme <strong>de</strong>s ciblesprioritaires <strong>de</strong> son expertise dans ses docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> programme. Elle cherche égalem<strong>en</strong>t àinflu<strong>en</strong>cer les pratiques <strong>de</strong>s utilisateurs <strong>de</strong> ces zones humi<strong>de</strong>s dans <strong>de</strong>s espaces peu ou pasprotégés. En Camargue, parmi ces utilisateurs, il y a les chasseurs, notamm<strong>en</strong>t parce que lamajorité <strong>de</strong>s marais existant <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s réserves camarguaises sont <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse, etparce que l’activité cynégétique locale est principalem<strong>en</strong>t portée sur les oiseaux d’eau.On distingue <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> chasse dans le <strong>de</strong>lta : la chasse communale, pratiquée par <strong>en</strong>viron<strong>de</strong>ux milliers <strong>de</strong> chasseurs sur les terrains communaux (chemins et quelques marais) et la chasseprivée qui a lieu dans <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s propriétés gérées spécialem<strong>en</strong>t pour cette activité (<strong>en</strong>viron 150chasses privées) (Mondain-Monval et al., 2009). La chasse privée est une activité très lucrative <strong>en</strong>Camargue, les propriétaires lou<strong>en</strong>t la chasse à <strong>de</strong>s « actionnaires » (<strong>en</strong> général <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5 à 15)le plus souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s citadins qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour y passer quelques week-<strong>en</strong>ds au cours d’une saison.Cep<strong>en</strong>dant, les propriétaires ne peuv<strong>en</strong>t pas se permettre <strong>de</strong> décevoir les actionnaires qui pay<strong>en</strong>t112 « - le rétablissem<strong>en</strong>t d’un fonctionnem<strong>en</strong>t hydrologique plus naturel notamm<strong>en</strong>t par la mise <strong>en</strong> connexion <strong>du</strong> site avecl’hydro-système <strong>du</strong> Vaccarès et la mer,- la reconstitution <strong>de</strong>s écosystèmes littoraux proches <strong>de</strong> l’état avant le développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> salin, notamm<strong>en</strong>t les habitatsprioritaires ou d’intérêt communautaire: lagunes littorales, systèmes <strong>du</strong>naires (<strong>du</strong>nes grises <strong>en</strong> particulier), steppessalées et pelouses,- le mainti<strong>en</strong> ou l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la capacité d’accueil pour les oiseaux d’eau coloniaux (voir plus haut l’exemple <strong>de</strong>s Salins),- la mise <strong>en</strong> place d’une <strong>gestion</strong> adaptative à l’élévation <strong>du</strong> niveau <strong>de</strong> la mer, notamm<strong>en</strong>t au travers d’un retrait maîtrisé<strong>du</strong> trait <strong>de</strong> côte <strong>en</strong> certains <strong>en</strong>droits » (Ambition pour les anci<strong>en</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c, proposition TdV au CdL etPNRC, 2010).113 La conv<strong>en</strong>tion est quadripartite car la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s salins implique égalem<strong>en</strong>t la Réserve nationale <strong>de</strong> Camargue.Nous n’avons pas évoqué cet acteur qui influ<strong>en</strong>ce peu l’évolution <strong>du</strong> dossier <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> sa capacité à ral<strong>en</strong>tir leprocessus (une conv<strong>en</strong>tion transitoire <strong>de</strong>vait être signée pour la <strong>gestion</strong> dès 2008, le directeur a refusé <strong>de</strong> signer, cequi a <strong>en</strong>terré cette conv<strong>en</strong>tion).165


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talestrès cher (les actions <strong>de</strong> chasse peuv<strong>en</strong>t s’eléver à 10000 euros), ce qui les incite à gérer leursmarais « au r<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>t » – cela signifie avoir le maximum <strong>de</strong> canards au mom<strong>en</strong>t voulu. Cespratiques consist<strong>en</strong>t à intro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong> l’eau dans les marais p<strong>en</strong>dant l’été afin que l’herbe y pousse etque les canards y soi<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ts le jour <strong>de</strong> l’ouverture <strong>de</strong> la chasse fin août, et parfois mêmed’intro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s canards colverts d’élevage quand les marais ne sont plus d’assez bonne qualitépour attirer la faune sauvage. La mise <strong>en</strong> eau <strong>de</strong>s marais n’est pas mauvaise <strong>en</strong> soi, elle est mêm<strong>en</strong>écessaire dans le cas <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta poldérisé <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> Camargue. Mais la <strong>gestion</strong> « au r<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>t »est néfaste à long terme, à la fois <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la biodiversité caractéristique <strong>de</strong>s milieuxméditerrané<strong>en</strong>s – la mise <strong>en</strong> eau trop régulière favorise la colonisation par <strong>de</strong>s espèces végétalesaquatiques moins typiques et intéressantes au regard <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation – mais aussi <strong>du</strong>point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’activité cynégétique – car les marais finiss<strong>en</strong>t par subir <strong>de</strong>s phénomènesd’eutrophisation et <strong>de</strong> fermeture par la colonisation d’espèces <strong>en</strong>vahissantes (Tamisier & Grillas,1994 ; Mathevet & Mesléard, 2002). A l’échelle <strong>de</strong> la Camargue, ces pratiques particip<strong>en</strong>t à labanalisation <strong>de</strong>s milieux qui perd<strong>en</strong>t leur id<strong>en</strong>tité méditerrané<strong>en</strong>ne, comme le montre l’étu<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ée par J-C. Aznar, A. Dervieux et P. Grillas (2009) 114 expliquant la subtilité <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>smarais qui peut se résumer ainsi : un apport raisonnable d’eau douce augm<strong>en</strong>te la biomasse <strong>de</strong>splantes aquatiques, ressource alim<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>s oiseaux d’eau (Mesléard et al., 1995), tandis que laperman<strong>en</strong>ce – ou quasi-perman<strong>en</strong>ce – <strong>de</strong> l’eau <strong>en</strong>traîne une banalisation, voire une dégradation<strong>de</strong>s milieux qui affecte d’abord la flore puis les oiseaux d’eau <strong>en</strong> perdant son caractère attractif.La TdV a comm<strong>en</strong>cé à travailler sur le gibier d’eau (canards) et sur l’écologie <strong>de</strong>s marais dès lespremières années <strong>de</strong> son exist<strong>en</strong>ce (avec la très anci<strong>en</strong>ne activité <strong>de</strong> baguage) et <strong>de</strong> laformalisation <strong>de</strong> son activité <strong>de</strong> recherche (écologie <strong>de</strong>s habitats). Depuis, le travail est réalisé <strong>en</strong>collaboration étroite avec l’Office Nationale <strong>de</strong> la Chasse et <strong>de</strong> la Fauve Sauvage (ONCFS) qui ainstallé ses bureaux dans les locaux <strong>de</strong> la TdV dans les années 80 115 . Les ingénieurs <strong>de</strong> recherche<strong>de</strong> l’ONCFS qui travaill<strong>en</strong>t sur la dynamique <strong>de</strong>s canards ont ainsi disposé <strong>de</strong> l’important jeu <strong>de</strong>114 « Sans apport d'eau douce, les communautés végétales terrestres serai<strong>en</strong>t composées principalem<strong>en</strong>t d'espèceshalophytes comme les salicornes (Arthrocnemum spp.). Les marais peu profonds serai<strong>en</strong>t temporaires et marqués par<strong>de</strong>s assèchem<strong>en</strong>ts estivaux prolongés. L'apport d'eau douce intro<strong>du</strong>it <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong> milieux saumâtres ou doux, ilaugm<strong>en</strong>te la biomasse <strong>de</strong>s plantes aquatiques qui constitu<strong>en</strong>t, avec leur faune inféodée, une ressource alim<strong>en</strong>taireess<strong>en</strong>tielle pour les oiseaux d'eau. Favoriser la perman<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l'eau douce permet ainsi <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir ou d'augm<strong>en</strong>ter,sur les territoires, la prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s oiseaux d'eau, et notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s espèces gibiers, <strong>en</strong> leur fournissant un habitatadéquat et <strong>de</strong>s ressources trophiques plus abondantes. Cep<strong>en</strong>dant, la perman<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l'eau favorise l'apparition <strong>de</strong>plantes exogènes dites "<strong>en</strong>vahissantes" et plus généralem<strong>en</strong>t, une modification <strong>de</strong>s cortèges floristiques (Tamisier &Grillas, 1994 ; Aznar et al., 2003). Les plantes aquatiques sont parmi les premières communautés à réagir à ceschangem<strong>en</strong>ts, mais l'<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l'écosystème s'<strong>en</strong> trouve affecté ».115 « L’office a toujours cherché à avoir un pied-à-terre <strong>en</strong> Camargue pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s oiseaux d’eau et le gardi<strong>en</strong>nage. Au début, c’estseulem<strong>en</strong>t un technici<strong>en</strong> qui a été <strong>en</strong>voyé, puis petit à petit, l’équipe s’est agrandie » (Ingénieur ONCFS, com.pers., 2010).166


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taledonnées constitué par la TdV 116 . Les données sont échangées, les suivis à long terme sonttoujours réalisés par la TdV, mais ce sont les ingénieurs <strong>de</strong> l’office qui vont le plus souv<strong>en</strong>t sur leterrain. Plusieurs thèses sont co-financées par les <strong>de</strong>ux organismes et co-<strong>en</strong>cadrés par leurssci<strong>en</strong>tifiques respectifs. En somme, tout le travail réalisé dans le domaine est commun. Lepart<strong>en</strong>ariat avec l’ONCFS est un <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats les plus étroits et <strong>du</strong>rables <strong>de</strong> la TdV. Sastabilité est telle que les acteurs procèd<strong>en</strong>t à la mise <strong>en</strong> commun <strong>de</strong> leurs moy<strong>en</strong>s et utilis<strong>en</strong>t leurspositions complém<strong>en</strong>taires pour agir dans le système plus large <strong>de</strong>s acteurs concernés par la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse. Nous n’allons pas tar<strong>de</strong>r à trouver <strong>de</strong>s illustrations <strong>de</strong> ce couplagestratégique.Avant cela, nous voudrions exposer les différ<strong>en</strong>tes visions <strong>de</strong> la problématique cynégétique quiexist<strong>en</strong>t <strong>en</strong> interne à la TdV, dont la prés<strong>en</strong>tation nous permettra plus loin <strong>de</strong> percevoir lecaractère stratégique <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre. Comme nous l’avons expliqué, lesspécialistes <strong>de</strong> l’écologie végétale ou <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH sont très s<strong>en</strong>sibles à l’objectif <strong>de</strong>redonner <strong>de</strong> la place aux processus naturels dans le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta. Face aux chasseursqui inond<strong>en</strong>t leurs marais <strong>en</strong> été pour que les canards soi<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ts le jour <strong>de</strong> l’ouverture <strong>de</strong> lachasse, certains se s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t « face à un mur ». Différ<strong>en</strong>tes interv<strong>en</strong>tions ont été réalisées, parmilesquelles une réunion rassemblant les chasseurs (ou <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> propriété) pour less<strong>en</strong>sibiliser à la <strong>gestion</strong> « plus naturelle » <strong>de</strong>s marais et <strong>de</strong> la richesse écologique qui s’y trouvepot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t. « C’était une manière <strong>de</strong> r<strong>en</strong>trer <strong>en</strong> discussion avec les chasseurs, comme quoi on n’est pascontre leur activité » (Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2010). Un autre projet est celui <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>participative et démonstrative d’un marais <strong>de</strong> chasse. La TdV a confié la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniersterrains acquis à une association <strong>de</strong> village fondée dans cette optique (village <strong>du</strong> Sambuc proche<strong>de</strong> ces terrains). Un spécialiste <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH <strong>de</strong> la TdV reste très impliqué pourl’animation <strong>de</strong> cette zone appelé les marais <strong>du</strong> Verdier. Parmi les activités développées, une partie<strong>de</strong>s marais est dédiée à la chasse, mais selon un règlem<strong>en</strong>t et une <strong>gestion</strong> qui respect<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>jeux<strong>de</strong> conservation (respect <strong>de</strong>s lois concernant l’interdiction <strong>du</strong> plomb, assec estival, ouverture <strong>de</strong> lachasse <strong>en</strong> septembre). Les chasseurs adhér<strong>en</strong>ts sont associés aux interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et ontpu constater <strong>en</strong> quelques années que « cette <strong>gestion</strong> qui ne coûte ri<strong>en</strong> – car ce qui coûte c’est l’apport d’eau <strong>en</strong>été – permet <strong>de</strong> contrôler les espèces <strong>en</strong>vahissantes (roseau, typha, jussie) et cela pour <strong>de</strong>s tableaux <strong>de</strong> chassecomparables à d’autres propriétés » (Spécialiste <strong>gestion</strong> TdV, com.pers., 2010). Mais « les chasseurs ont untruc <strong>en</strong> tête : quand il n’y a pas d’eau, il n’y a pas <strong>de</strong> canards. Et chaque année, ils <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t à mettre <strong>de</strong> l’eau116 « En Europe, le baguage <strong>de</strong>s canards a connu son apogée dans les années 60, quand par exemple la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong><strong>en</strong> France et le Wildfowl & Wetlands Trust <strong>en</strong> Gran<strong>de</strong>-Bretagne baguai<strong>en</strong>t plusieurs milliers <strong>de</strong> canards chaqueannée. Ceci a permis <strong>de</strong> constituer <strong>de</strong> très importantes bases <strong>de</strong> données, utilisées dès cette époque pour établir lespremières cartes <strong>de</strong> distribution » (Guillemain et al., 2010).167


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales<strong>en</strong> juillet ». D’autres travaux ont été réalisés, notamm<strong>en</strong>t une thèse dont le pro<strong>du</strong>it est un outil <strong>de</strong>suivi <strong>de</strong>s marais par télédétection (Davranche, 2008). Par ailleurs, la TdV a initié une démarche <strong>en</strong>sollicitant l’association <strong>de</strong>s autres <strong>gestion</strong>naires d’espaces protégés <strong>de</strong> Camargue suite auxproblèmes répétés d’infractions à la réglem<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la chasse. Une lettre a été adressée par ces<strong>gestion</strong>naires à la direction <strong>de</strong> l’ONCFS qui leur a r<strong>en</strong><strong>du</strong> visite et a prés<strong>en</strong>té un plan <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>rieplus strict qui semble avoir déjà pris effet.Ces projets et ces interv<strong>en</strong>tions « sont faites au coup par coup » (TdV, com.pers, 2010) et pourrai<strong>en</strong>tparaître décousues si on ne les replaçait dans la perspective plus large <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s travauxréalisés autour <strong>de</strong> cette problématique, notamm<strong>en</strong>t ceux portant directem<strong>en</strong>t sur les espèceschassées et les pratiques cynégétiques.Bi<strong>en</strong> qu’il concè<strong>de</strong> que « pour les changem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> pratiques concrets, on est <strong>en</strong>core <strong>en</strong> amont <strong>de</strong> ça, ou auxprémisses » (com.pers., 2010), le sci<strong>en</strong>tifique TdV responsable <strong>de</strong> ce programme a une approchediffér<strong>en</strong>te qui est c<strong>en</strong>trée sur un objectif <strong>de</strong> relation avec ces acteurs préalable à un objectif <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>t : « si on veut faire changer les pratiques, vraim<strong>en</strong>t concrètes, il faut pouvoir parler aux g<strong>en</strong>s. Il fautpouvoir être d’accord sur le fait qu’on n’est pas d’accord sur tous les objectifs sans faire blocage ». Il fautexpliquer que dans les années 1990, il y avait une rupture forte <strong>en</strong>tre le mon<strong>de</strong> cynégétique et lemon<strong>de</strong> naturaliste <strong>en</strong> Camargue, « il y avait <strong>de</strong>s bruits qui courai<strong>en</strong>t comme quoi il n’y avait plus <strong>de</strong> canardset que c’était <strong>de</strong> la faute <strong>de</strong>s chasseurs qui prélevai<strong>en</strong>t trop » (Ingénieur ONCFS, com.pers., 2010). Unchercheur <strong>du</strong> laboratoire CEFE-CNRS t<strong>en</strong>ait <strong>de</strong>s propos « justes, mais virul<strong>en</strong>ts sur les pratiques <strong>de</strong>chasse, la banalisation <strong>de</strong>s milieux, etc. Et pour les chasseurs, les instituts sci<strong>en</strong>tifiques, la TdV, les <strong>gestion</strong>nairesd’espaces naturels, c’était pareil ». Depuis, les ingénieurs <strong>de</strong> l’ONCFS ont beaucoup contribué à fairechanger les idées <strong>de</strong>s chasseurs sur la TdV, <strong>en</strong> r<strong>en</strong>contrant les g<strong>en</strong>s sur le terrain, répétant que laTdV n’était pas opposée à la chasse mais plutôt att<strong>en</strong>tive à certaines pratiques.Ainsi, l’objectif <strong>de</strong>puis les années 2000 était <strong>de</strong> rétablir le dialogue. C’est donc ce que lessci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> l’ONCFS et <strong>de</strong> la TdV s’emploi<strong>en</strong>t à faire, notamm<strong>en</strong>t par la prés<strong>en</strong>ce sur leterrain évoquée plus haut. La TdV se sert égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s suivis <strong>en</strong> survol pour formaliser cesli<strong>en</strong>s : une lettre m<strong>en</strong>suelle est <strong>en</strong>voyée à plus <strong>de</strong> 150 chasseurs et représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong> chasseurs et<strong>de</strong>puis 2005, le logo <strong>de</strong> la Fédération <strong>de</strong> chasse <strong>de</strong>s Bouches-<strong>du</strong>-Rhône figure <strong>en</strong> <strong>en</strong>-tête <strong>de</strong> cettelettre à côté <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> tous les <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels. « Symboliquem<strong>en</strong>t, cet affichage <strong>du</strong>« travailler <strong>en</strong>semble » est une avancée importante » (ONCFS, TdV, com.pers., 2010). Cet effort pourimpliquer les chasseurs dans les comptages (leur donner les résultats <strong>de</strong>s comptages <strong>en</strong> survolpeut les inciter à donner leur tableau <strong>de</strong> chasse et leurs propres observations <strong>de</strong> terrain) consisteégalem<strong>en</strong>t à les réunir annuellem<strong>en</strong>t. « Dans un premier temps, il s’agissait <strong>de</strong> recréer les li<strong>en</strong>s et faire que lesdénombrem<strong>en</strong>ts ne soi<strong>en</strong>t plus un sujet fâcheux, que cela <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> la routine et qu’on puisse parler d’autres168


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talechoses » (TdV, com.pers., 2010). Il s’agit <strong>en</strong> somme d’un travail relationnel considérable à <strong>en</strong>visagersur le long terme : les r<strong>en</strong>contrer, « rester à l’apéritif après les interv<strong>en</strong>tions sci<strong>en</strong>tifiques » (lorsque lessci<strong>en</strong>tifiques accompagn<strong>en</strong>t les chasseurs pour faire <strong>de</strong>s prélèvem<strong>en</strong>ts), <strong>en</strong>voyer <strong>de</strong>s photos <strong>de</strong>survol et <strong>de</strong>s courriers aux propriétaires, « pour obt<strong>en</strong>ir les infos, les tableaux <strong>de</strong> chasse, il faut la confiance,<strong>de</strong>s années et <strong>de</strong>s années ».« Rétablir les relations » peut paraître comme un objectif trop simple pour être stratégique. Enréalité, plusieurs objectifs stratégiques sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t ces efforts relationnels. Trois objectifs sousjac<strong>en</strong>tspeuv<strong>en</strong>t être distingués, bi<strong>en</strong> qu’ils soi<strong>en</strong>t tous très liés et ne puiss<strong>en</strong>t être hiérarchisés. Lepremier est d’obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s informations sur les pratiques et sur ce « qu’il se passe plus généralem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>Camargue ». Compr<strong>en</strong>dre ce qui se passe est nécessaire à la fois pour la recherche sci<strong>en</strong>tifique etpour développer une action adaptée à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> ces acteurs. Le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la chasse estobscur et complexe comme le confirme ce chargé <strong>de</strong> mission <strong>du</strong> PNRC (com.pers., 2008) : « Lemon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la chasse est un peu particulier, c’est le <strong>de</strong>rnier volet sur lequel on a <strong>du</strong> mal à intégrer les acteurs locaux.Même quand on parle avec <strong>de</strong>s chasseurs [au sein <strong>de</strong>s commissions <strong>du</strong> PNRC], ils vont facilem<strong>en</strong>t parlerd’eau ou <strong>de</strong> pêche, mais dès qu’on parle <strong>de</strong> chasse, ils nous dis<strong>en</strong>t « ah non moi je suis pas représ<strong>en</strong>tatif c’est tropcompliqué ». On leur dit « donnez-nous <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s représ<strong>en</strong>tatifs », car pour pouvoir discuter avec les g<strong>en</strong>s, il fautqu’ils soi<strong>en</strong>t représ<strong>en</strong>tatifs. Et là, même <strong>en</strong>tre eux, ils ont <strong>du</strong> mal à savoir qui peut les représ<strong>en</strong>ter, et comm<strong>en</strong>t çapeut se faire ».L’idée <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> l’ONCFS porteur <strong>de</strong> ce programme sur les gibiers d’eauet <strong>de</strong> chasse est justem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> s’appuyer sur ces différ<strong>en</strong>ts profils <strong>de</strong> chasseurs pour recréer <strong>de</strong>sli<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la chasse et le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature. « Les chasseurs ne sontpas un bloc. On ne peut pas parler <strong>de</strong> LA chasse. Parmi les chasseurs, il y <strong>en</strong> a qui sont idéologiquem<strong>en</strong>t etpratiquem<strong>en</strong>t plus proches <strong>de</strong> la TdV que d’autres chasseurs ». « Il faut casser cette image <strong>de</strong>s blocs, bloc chasseurs,bloc naturalistes. C’est ça que j’essaie <strong>de</strong> faire ». Car si les chasseurs et les naturalistes ne s’accord<strong>en</strong>t passur les quantités et les dates <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> eau, ils sont <strong>de</strong>s alliés objectifs sur la mise à dispositiond’habitat pour les oiseaux d’eau. « La chasse, c’est mieux que ce qui se passe autour [urbanisation àl’ouest et au nord, in<strong>du</strong>strialisation à l’est]. Et <strong>en</strong> même temps, ça <strong>en</strong> fait une protection <strong>en</strong> occupant l’espace.C’est « moins pire » que s’il y avait <strong>de</strong> l’agriculture, ou pas <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> tout » (Sci<strong>en</strong>tifique TdV,com.pers., 2010). « Les naturalistes et les chasseurs sont face à face par rapport à <strong>de</strong>s questions qui sontimportantes mais qui rest<strong>en</strong>t presque anecdotiques par rapport à <strong>de</strong>s phénomènes beaucoup plus lourds. Tu peuxprélever ou ne pas prélever. Mais là il y aurait une alliance forte pour protéger les espaces ». Les naturalistes etles chasseurs se trouv<strong>en</strong>t à se battre pour ce qu’il reste 117 . En effet, bi<strong>en</strong> que la Camargue117 « Un chercheur <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Bourgogne disait comme ça : « p<strong>en</strong>dant que le chasseur et le naturaliste se batt<strong>en</strong>t, l’agriculteur est <strong>en</strong>train <strong>de</strong> labourer la parcelle pour laquelle ils sont <strong>en</strong> train <strong>de</strong> se chamailler » » (Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2010).169


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesbénéficie <strong>de</strong> mesures <strong>de</strong> protection importantes, ses espaces naturels ont t<strong>en</strong>dance à diminuercomme le montrait déjà A. Tamisier <strong>en</strong> 1991 (Tamisier, 1991). Les prélèvem<strong>en</strong>ts par la chass<strong>en</strong>’ont pas d’effet significatif sur la dynamique d’une population. Si elles <strong>en</strong> ont, c’est que lapopulation a déjà chuté sous la pression d’autres facteurs (perte d’habitats notamm<strong>en</strong>t)(Sci<strong>en</strong>tifiques ONCFS et TdV, com.pers., 2010). Ce n’est <strong>en</strong> outre pas le cas <strong>en</strong> Camargue, lesespèces chassables se portant bi<strong>en</strong>. La t<strong>en</strong>dance préoccupante se situe plutôt dans lafragm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s espaces à travers les successions ou les v<strong>en</strong>tes <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s propriétéscamarguaises <strong>en</strong> plusieurs morceaux (com.pers., 2010 ; Mathevet & Tamisier, 2002).Le troisième est bi<strong>en</strong> sûr celui qui nous a am<strong>en</strong>é à abor<strong>de</strong>r le travail <strong>de</strong> la TdV autour la chasse :influ<strong>en</strong>cer les pratiques pour une bonne <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>s pratiquescynégétiques. L’idée <strong>de</strong> ce sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV est que le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la conservation doit s’allieravec les chasseurs, les pêcheurs, « qui sont tous face au rouleau compresseur <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts globaux »,<strong>en</strong>suite « qu’il y ait <strong>en</strong> interne <strong>de</strong>s débats pour faire changer les pratiques » (com.pers., 2010). C’est ce àquoi s’emploi<strong>en</strong>t les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> l’ONCFS à l’échelle carmaguaise : créer les li<strong>en</strong>set faire <strong>en</strong> sorte qu’ils résist<strong>en</strong>t aux crises 118 , répéter les messages, porter <strong>de</strong>s discours <strong>de</strong> plus <strong>en</strong>plus <strong>en</strong>gagés vers une bonne <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> ce que la maturité <strong>de</strong>s relations avec leschasseurs permet <strong>de</strong> dire. Une fois que le contact est établi, « on se r<strong>en</strong>d compte qu’ils sont très<strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> conseils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ». Par exemple, quelques assecs sont observés sur <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>spropriétés ou sur <strong>de</strong>s marais dont l’état est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u trop dégradé (Ingénieur ONCFS, com.pers.,2010), ou <strong>en</strong>core, <strong>de</strong>s chasseurs communaux vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t spontaném<strong>en</strong>t parler <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong>leurs pratiques (Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2010).En conclusion <strong>de</strong> cet exemple <strong>de</strong> l’action pour l’amélioration <strong>de</strong>s pratiques cynégétiques et <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse, nous relèverons plusieurs <strong>de</strong>s aspects découverts qui donn<strong>en</strong>t à voir<strong>de</strong> nouveaux li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre les quatre registres <strong>de</strong> la stratégies <strong>de</strong> l’ONGE.D’abord, nous avons ici affaire à une action dont la cible est <strong>en</strong> premier lieu l’acteur sectoriel – lechasseur (Figure 3.5).118 Lors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière réunion organisée par ces sci<strong>en</strong>tifiques TdV et ONCFS, la Fédération <strong>de</strong>s Bouches-<strong>du</strong>-Rhônea boycotté la réunion <strong>en</strong> raison d’un accord-cadre passé <strong>en</strong>tre la LPO et l’ONFCS, « ce qui est très bi<strong>en</strong> car cela casse cettedichotomie chasse-naturaliste ». A la fin <strong>de</strong> la réunion, un <strong>gestion</strong>naire <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> propriété est v<strong>en</strong>u à la r<strong>en</strong>contre <strong>du</strong>sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV pour lui dire : « nous on boycotte l’ONCFS, mais on est prés<strong>en</strong>t par l’invitation <strong>de</strong> la TdV. Vous la TdV,on ne vous reprochera jamais <strong>de</strong> vous lier avec la LPO, parce que c’est votre truc, mais l’office… ». Les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong>l’ONCFS jou<strong>en</strong>t sur cette double posture pour avancer selon les situations.170


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleONCFSDirection régionaleStratégie au s<strong>en</strong>s fort :pression pour fairechanger les pratiquesTdV - ONCFSStratégie au s<strong>en</strong>s fort :stratégie « coopérative »ChasseursFigure 3.5 : Stratégie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>spratiques cynégétiques (source : auteur)Cet exemple montre que la stratégie mise <strong>en</strong> œuvre vis-à-vis <strong>de</strong> cet acteur sectoriel peut êtrecoopérative et viser à promouvoir les pratiques compatibles avec les int<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> l’EAE (coupleTdV-ONCFS bureau Camargue). Parallèlem<strong>en</strong>t, nous pouvons voir que l’EAE ne r<strong>en</strong>tre pas <strong>en</strong>confrontation directe avec les chasseurs, mais passe par l’acteur régulateur pour faire pression <strong>en</strong>faveur d’une amélioration <strong>de</strong>s pratiques cynégétiques.Cet exemple montre par ailleurs que cette stratégie d’action peut être le fruit d’une coconstruction<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires qui recherch<strong>en</strong>t la complém<strong>en</strong>tarité <strong>de</strong> leur rôle (Figure 3.6).Cette différ<strong>en</strong>ciation <strong>de</strong>s rôles, que L. Mermet (2006[1998] : 227) qualifiait <strong>de</strong> fonctionnelle etd’efficace, permet d’aller plus vite dans le rétablissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s avec les chasseurs. Enrevanche, les multiples mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre pour avancer sur cet <strong>en</strong>jeu écologique sontcoordonnés <strong>de</strong> manière très souple et informelle <strong>en</strong> interne <strong>de</strong> la TdV. La structurationorganisationnelle et l’articulation <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action seront développées dans lechapitre 6.Construction <strong>de</strong> l’objet écologiqueGestion <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse etpratiques cynégétiquescompatibles avec l’objectifécologiqueMo<strong>de</strong> d’action publiquemultiples : suivi long terme,recherches, démonstration <strong>de</strong><strong>gestion</strong>, pression pourapplication <strong>de</strong>s réglem<strong>en</strong>tationsPlace dans le secteurTdV – ONCFS (Camargue) :mis <strong>en</strong> commun <strong>de</strong>s ressources,stratégie communeDéveloppem<strong>en</strong>t interneCoordination informelle <strong>de</strong>sdiffér<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>interneFigure 3.6 : L’exemple <strong>de</strong> l’action pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>s pratiquescynégétiques (source : auteur)171


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales3.4 Typologie, <strong>en</strong>jeux et évaluation <strong>de</strong>s formes d’action par larecherche sci<strong>en</strong>tifiqueLa TdV est un « c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s ». Par ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces cas, nous avons cherché à déterminer <strong>en</strong> quoi la recherche sur les ZH estune action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> soi et comm<strong>en</strong>t cette activité <strong>de</strong> recherche permet ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> formes d’action grâce aux compét<strong>en</strong>ces stratégiques que constitu<strong>en</strong>t lescapacités sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV. Dans un premier temps, nous allons considérer toutes lesformes d’action et activités r<strong>en</strong>contrées au regard <strong>de</strong>s ressources stratégiques que l’activitésci<strong>en</strong>tifique octroie à l’organisation. Dans un second temps, nous tâcherons <strong>de</strong> dégager la façondont la TdV manie ces ressources <strong>en</strong> situation pour se positionner (place) et agir sur le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (rôle).3.4.1 Ressources et typologie <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action liés à la recherche sci<strong>en</strong>tifiqueL’exam<strong>en</strong> <strong>de</strong> cette série d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique nous a permis d’apprécierune multiplicité <strong>de</strong> formes et d’échelles d’action. Cette vue d’<strong>en</strong>semble (bi<strong>en</strong> que non exhaustivepar rapport à tous les projets <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> la TdV), inspire plusieurs comm<strong>en</strong>taires.Premièrem<strong>en</strong>t, les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques elles-mêmes sont apparues comme déterminantespour l’action dans les cas développés. Elles permett<strong>en</strong>t à la TdV <strong>de</strong> se saisir <strong>de</strong> problèmescomplexes comme la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau dans le <strong>de</strong>lta ou l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> la démoustication auBti. L’accumulation <strong>de</strong>s exemples nous donne à voir trois caractères qui érig<strong>en</strong>t ces compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques <strong>en</strong> ressource stratégique pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. En effet, il ne s’agit passeulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces indivi<strong>du</strong>elles <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV, mais (1) <strong>de</strong> l’apport <strong>de</strong> lapluridisciplinarité <strong>de</strong> ces compét<strong>en</strong>ces, (2) <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> et l’<strong>en</strong>richissem<strong>en</strong>t d’un patrimoinesci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> long terme et (3) <strong>de</strong> l’ancrage au terrain <strong>de</strong> ces recherches.1. Rappelons que les disciplines se sont multipliées progressivem<strong>en</strong>t à la TdV, c’est un choixstratégique pour permettre d’abor<strong>de</strong>r la problématique <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> façon globale. Ceciest tout à fait cohér<strong>en</strong>t, voire nécessaire aux yeux <strong>de</strong> P. Leroy (2004) qui travaille sur laproblématique <strong>de</strong> l’interdisciplinarité et les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t :« Il apparaît que l’analyse <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et l’élaboration d’uneréponse possible à ces problèmes nécessit<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>cesissues <strong>de</strong> nombreuses disciplines sci<strong>en</strong>tifiques que l’interdisciplinarité, définieprovisoirem<strong>en</strong>t comme l’intégration <strong>de</strong> connaissances d’une multiplicité <strong>de</strong> disciplines,apparaît comme étant une condition préalable ess<strong>en</strong>tielle aux sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>172


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talel’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » (O’Riordan, 1995 ; Zanoni, 1997, cités par Leroy 2004 : 275). « Cepoint mérite d’être souligné : c’est bi<strong>en</strong> parce qu’il s’agit pour les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> traiter un problème appelant une action, et <strong>de</strong> la faire dans laperspective <strong>de</strong> lui trouver une solution, que l’interdisciplinarité est vue comme un<strong>en</strong>écessité pour elle » (ibid. : 275).2. Le suivi <strong>de</strong> l’évolution <strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s espèces et <strong>de</strong>s habitats sur le long terme est ess<strong>en</strong>tiel pourle sci<strong>en</strong>tifique qui veut améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces milieux, mais ce patrimoine <strong>de</strong> donnéesreprés<strong>en</strong>te égalem<strong>en</strong>t « une ressource capable d’attirer d’autres ressources », notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats avec <strong>de</strong>s chercheurs qui n’ont pas un accès à une telle source <strong>de</strong> données <strong>de</strong> terrain.3. Cet ancrage au terrain donne à la TdV les capacités <strong>de</strong> développer une recherche appliquéepour la conservation. A travers l’exercice <strong>de</strong> leurs recherches, ses sci<strong>en</strong>tifiques acquièr<strong>en</strong>t uneconnaissance <strong>du</strong> terrain matériel, écologique, mais aussi une connaissance socio-politique qui leurest utile dans l’interaction avec les acteurs <strong>de</strong> ce terrain – c’est-à-dire dans l’action pour laconservation.Ensuite, nous avons pu constater la portée <strong>de</strong> la légitimité sci<strong>en</strong>tifique. Cette ressource donneaccès à <strong>de</strong>s formes d’action comme le CSRPN ou les cadres d’élaboration d’outils d’application<strong>de</strong>s politiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales (Plans nationaux, DOCOB). La contribution propre <strong>de</strong> la TdVy est relative étant donné la quantité d’acteurs impliqués au long <strong>de</strong> ces processus, mais l’impactsur la <strong>gestion</strong> est pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t fort. Enfin, cette légitimité sci<strong>en</strong>tifique favorise la création et lapoursuite <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats sci<strong>en</strong>tifiques, qui est indisp<strong>en</strong>sable et qui augm<strong>en</strong>te significativem<strong>en</strong>t lescapacités <strong>de</strong> la TdV à se saisir d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation, comme l’illustre le cas <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>smarais <strong>de</strong> chasse avec la collaboration avec l’ONCFS.Finalem<strong>en</strong>t, nous voyons que les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> l’organisation lui permet <strong>de</strong>développer : d’une part, <strong>de</strong>s connaissances sci<strong>en</strong>tifiques qui s’inscriv<strong>en</strong>t dans l’explication <strong>de</strong>sproblèmes écologiques et dans les solutions <strong>de</strong> ces problèmes, et d’autre part, <strong>de</strong>s actionsconnexes à cette recherche sous différ<strong>en</strong>tes formes (Figure 3.7)Compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques(disciplines)Rôle <strong>de</strong> la recherche,<strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>sproblèmes à l’application <strong>de</strong>solutionsActionsDiffér<strong>en</strong>ts rôle joués etformes d’interv<strong>en</strong>tions dansles systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Figure 3.7 : développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances et d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique à partir <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong> l’expertise sci<strong>en</strong>tifique173


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesEn repr<strong>en</strong>ant les exemples traités dans ce chapitre, nous pouvons dresser une série <strong>de</strong>compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques, <strong>de</strong> types <strong>de</strong> rôle <strong>de</strong> la recherche et <strong>de</strong> formes d’action déployées dansles systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Tableau 3.4).Tableau 3.4 : Typologie <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action par la recherche ou connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifiqueExemples <strong>de</strong>problématiques /<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservationCompét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques(disciplines)Recherche<strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion àl’applicationFormes et lieuxd'applicationConservation <strong>de</strong>l'anguille et <strong>de</strong>s espèceshalieutiquesImpact <strong>de</strong> ladémoustication au BtiGestion hydraulique <strong>du</strong><strong>de</strong>lta <strong>du</strong> RhôneReconversion <strong>de</strong>sSalins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c etconservation d<strong>en</strong>icheurs (flamants,laro-limicoles)Gestion <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong>chasse et amélioration<strong>de</strong>s pratiquescynégétiquesBiologie et écologie <strong>de</strong>svertébrés :Espèces halieutiquesOrnithologieBiologie et écologie <strong>de</strong>splantesGéomatique et paysageHydrologie <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>sGestion <strong>de</strong>s espacesnaturelsCompréh<strong>en</strong>sion/Explication biocénose/écosystèmesDécouverte <strong>de</strong>problèmesSuivi <strong>de</strong> l'état <strong>de</strong>sespèces/habitatsId<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>spratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>favorablesOutils pour la <strong>gestion</strong>Interv<strong>en</strong>tion directe(Domaine TdV, autreszones)Comités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>locauxRelation directe avecles acteurs sectoriels(principalem<strong>en</strong>t terrainCamargue)Comités et plansrégionauxComités et plansnationauxDéveloppem<strong>en</strong>t/animation <strong>de</strong> réseauxR<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>capacités (<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>tétudiants pays sud /formations)Il n’y a pas <strong>de</strong> relation exclusive <strong>en</strong>tre une discipline, son apport <strong>en</strong> termes sci<strong>en</strong>tifiques(explication <strong>de</strong>s problèmes ou solutions) et un type d’action dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Pourchaque <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation, ce sont souv<strong>en</strong>t au contraire plusieurs compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiquesqui s’articule por expliquer les problèmes et agir. Pour illustrer ce modèle conceptuel <strong>de</strong> la façondont la recherche sci<strong>en</strong>tifique contribue et permet d’agir <strong>en</strong> faveur d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation,pr<strong>en</strong>ons l’exemple <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c (Tableau 3.5) : les expertises <strong>de</strong>sornithologues, <strong>de</strong>s écologues végétales, <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s milieux, permett<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble <strong>de</strong>développer un diagnostic <strong>du</strong> site et d’interv<strong>en</strong>ir auprès <strong>de</strong>s acteurs responsables <strong>de</strong> sa <strong>gestion</strong>.174


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleTableau 3.5 : Compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et rôle <strong>de</strong> la recherche pour interv<strong>en</strong>ir dans la reconversion <strong>de</strong>sSalins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>cExemples <strong>de</strong>problématiques /<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservationReconversion <strong>de</strong>sSalins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c etconservation d<strong>en</strong>icheurs (flamants,laro-limicoles)Compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques(disciplines)Recherche<strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion àl’applicationOrnithologie • Compréh<strong>en</strong>sion/• Explicationbiocénose/écosystèmesBiologie et écologie <strong>de</strong>splantes • Découverte <strong>de</strong>Gestion <strong>de</strong>s espacesnaturelsproblèmes• Suivi <strong>de</strong> l'état <strong>de</strong>sespèces/habitatsFormes et lieuxd'application• Interv<strong>en</strong>tiondirecte sur lessalins• Relation directeavec les acteurssectoriels• Développem<strong>en</strong>t/animation <strong>de</strong> réseaux3.4.2 Système d’acteurs, place, rôle et contribution <strong>de</strong> la TdVNous avons pu voir la diversité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action que la TdV est <strong>en</strong> capacité <strong>de</strong> développer etdans quels cadres elle parvi<strong>en</strong>t à s’insérer. Pour aller plus loin sur l’apport <strong>de</strong> ces actions au regard<strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZH ou la résolution <strong>de</strong> problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, il fautcompr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t elle mobilise ses ressources <strong>en</strong> situation. Pour cela, nous avons cherché àretracer l’action propre <strong>de</strong> la TdV dans plusieurs <strong>de</strong>s exemples détaillés. La démarche utilisée estsynthétisée dans le tableau 3.5 à partir <strong>de</strong> trois <strong>de</strong>s cas développés : l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> ladémoustication au Bti, la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau dans le <strong>de</strong>lta et le changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s Salins<strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. Cette synthèse vise à mettre <strong>en</strong> visibilité, dans un cadre très simple, l’articulation<strong>en</strong>tre la stratégie d’insertion <strong>de</strong> la TdV dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et sa contribution auchangem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation. Elle compr<strong>en</strong>d plusieurs étapes : à partir <strong>de</strong>s objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> la TdV, nous pouvons id<strong>en</strong>tifier les responsabilités respectives <strong>de</strong>s acteurs<strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective. La place <strong>de</strong> la TdV r<strong>en</strong>voie à l’exist<strong>en</strong>ce objective <strong>de</strong> la TdV dansle système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et à la façon dont elle est perçue par les autres acteurs <strong>du</strong> système. Enfonction <strong>de</strong> cette place, elle doit adapter son positionnem<strong>en</strong>t. Par exemple : pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’eau dans le <strong>de</strong>lta, l’hydrologue peut s’appuyer sur son statut <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique reconnu au sein <strong>du</strong>comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> local ; au contraire, pour les Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c, le PNRC perçoit la TdVcomme sci<strong>en</strong>tifique mais aussi comme un <strong>gestion</strong>naire concurr<strong>en</strong>t, la TdV met donc <strong>en</strong> avant sonstatut <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique pour avancer sans provoquer la méfiance <strong>du</strong> PNRC (Tableau 3.6). Le rôle<strong>de</strong> la TdV r<strong>en</strong>voie au mo<strong>de</strong> d’action qu’elle met <strong>en</strong> œuvre au sein <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pouravancer au regard <strong>de</strong> ses objectifs. Ce rôle dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> ses capacités, comme nous l’avons vu dansla section précéd<strong>en</strong>te. Le positionnem<strong>en</strong>t, c’est-à-dire la stratégie <strong>de</strong> la TdV dans le jeu d’acteurs,175


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesrésulte d’une réflexion considérant à la fois sa place et ses capacités à jouer certains rôles. Cettemise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> nous permet alors d’évaluer sacontribution au changem<strong>en</strong>t dans ce système <strong>en</strong> fonction <strong>du</strong> rôle effectif qu’elle y joue.Tableau 3.6 : Evaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> la TdV à la conservation et l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> àpartir <strong>de</strong> l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> la place et <strong>du</strong> rôle et <strong>de</strong> stratégie <strong>de</strong> la TdV au sein <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Impact <strong>de</strong> ladémoustication au BtiHydrologie <strong>du</strong> <strong>de</strong>ltaReconversion <strong>de</strong>s Salins<strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>cObjectifs TdVResponsables(<strong>gestion</strong>effective)Limiter l’ét<strong>en</strong><strong>du</strong>e <strong>de</strong> ladémoustication et favoriser<strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>alternativesElus, Conseil général <strong>de</strong>sBouches-<strong>du</strong>-RhônePlace TdV Organisme sci<strong>en</strong>tifique –expert / conservationRôleExpertise sci<strong>en</strong>tifique surdossiers où les organismes<strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la naturesont prises à partie :délicatesse <strong>de</strong> la posture etnécessité <strong>de</strong> la soliditésci<strong>en</strong>tifiquePositionnem<strong>en</strong>tTdV(stratégie dans lejeu)ContributionConsolidation <strong>de</strong> la fiabilitésci<strong>en</strong>tifique.Position <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique pourconforter la légitimité <strong>de</strong>l’expertise- Démonstration <strong>de</strong> l’impact<strong>du</strong> Bti sur la faune non-cible/ recommandation <strong>de</strong>solutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>alternatives à <strong>de</strong>stination <strong>du</strong>déci<strong>de</strong>ur- A ce jour : pas <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>t dans la décisionRétablir un fonctionnem<strong>en</strong>thydrologique « plus naturel »et prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>l’élévation <strong>du</strong> niveau <strong>de</strong> lamer dans les aménagem<strong>en</strong>tsActeurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’eau (Elus, <strong>gestion</strong>naires)Organisme sci<strong>en</strong>tifiqueApport <strong>de</strong> l'expertisesci<strong>en</strong>tifique / explication,s<strong>en</strong>sibilisation, signalem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s problèmesSci<strong>en</strong>tifique qui soulève lesproblèmes et lesincompatibilités dans lesmo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>- Amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>hydraulique <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta- A ce jour : pas <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>t majeur dans lesaménagem<strong>en</strong>ts pour prévoirl’élévation <strong>du</strong> niveau <strong>de</strong> lamerRestaurer le site : recréationd’habitats typiques etmainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s espaces <strong>de</strong>repro<strong>du</strong>ction (flamants, larolimicoles)Société <strong>de</strong>s salins <strong>du</strong> midi /propriétaire CdL /Gestionnaire PNRC /Comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (TdV,RNC, Collectivités locales)Organisme sci<strong>en</strong>tifique et<strong>gestion</strong>naire <strong>en</strong> CamargueExpert dans la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>site et développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>programme sci<strong>en</strong>tifiquepour la restaurationFaire valoir le statut <strong>de</strong>sci<strong>en</strong>tifique (plutôt que <strong>de</strong><strong>gestion</strong>naire) : éviter laconcurr<strong>en</strong>ce, êtreindisp<strong>en</strong>sable (compét<strong>en</strong>cesmanquantes au <strong>gestion</strong>naire)- Proposition d’ambitions etd’objectifs pour la <strong>gestion</strong><strong>de</strong>s Salins validés par lespartis.- A ce jour : mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>sites <strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ction, maispas <strong>de</strong> ressources pourmettre <strong>en</strong> œuvre unprogramme <strong>de</strong> restaurationambitieuxCes trois situations montr<strong>en</strong>t que les capacités acquises sur le long terme à travers l’activitésci<strong>en</strong>tifique (compét<strong>en</strong>ces, connaissance <strong>du</strong> terrain, légitimité) ne sont pas <strong>de</strong> simples ressourcesobjectives, mais aussi <strong>de</strong>s ressources stratégiques permettant à la TdV <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>diquer son statutsci<strong>en</strong>tifique pour agir dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Si dans certaines situations ce statut donne <strong>du</strong>pouvoir (au s<strong>en</strong>s croziéri<strong>en</strong>) à la TdV, il n’<strong>en</strong> reste pas moins délicat à manipuler comme l’illustre176


Chapitre 3 – La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talele cas <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> la démoustication au Bti. Les rapports <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et expertise sepos<strong>en</strong>t <strong>de</strong> façon constante à une telle organisation, nous retrouverons cette question dans latroisième partie <strong>de</strong> la thèse.L’évaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> la TdV au changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur d’un meilleur état <strong>de</strong>s ZH estplus facile lorsqu’il est possible d’id<strong>en</strong>tifier précisém<strong>en</strong>t les acteurs et les responsabilitésorganisant le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Mais la TdV met aussi <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action dont lacontribution propre est minime au regard <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s micro-actions et <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong>sacteurs qui pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t part à ces processus <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t – c’est par exemple le cas <strong>de</strong> laparticipation d’un sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV au CSRPN. La plupart <strong>du</strong> temps, la TdV met <strong>en</strong> œuvreplusieurs mo<strong>de</strong>s d’action complém<strong>en</strong>taires pour agir sur une problématique donnée comme nousl’avons vu dans la synthèse <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action (Tableau 3.4 et 3.5) et comme l’illustre le cas <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse (Tableau 3.7).Enfin, les contributions <strong>de</strong> la TdV peuv<strong>en</strong>t être <strong>en</strong>visagées à plusieurs échelles. En effet, lavalorisation sci<strong>en</strong>tifique <strong>en</strong> particulier permet d’atteindre d’autres niveaux, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s systèmes<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> où elle intervi<strong>en</strong>t : la communauté sci<strong>en</strong>tifique, les réseaux personnels. Ces résultatslocaux peuv<strong>en</strong>t être d’une importance majeure pour la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> phénomènes ayant lieusur <strong>de</strong>s échelles beaucoup plus vastes. En revanche, l’évaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> la TdV auregard <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal est impossible pour cette voie <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> la connaissanceet <strong>de</strong>s messages. Le tableau 3.6 illustre cette dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action par la recherche sci<strong>en</strong>tifique àpartir <strong>de</strong> l’exemple <strong>du</strong> travail sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse.Tableau 3.7 : Contribution <strong>de</strong> la TdV dans l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>spratiques cynégétiques. Contribution locale, internationaleGestion <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et amélioration <strong>de</strong>s pratiquescynégétiquesObjectifs TdVGestion effectivePlace TdVRôles TdVPositionnem<strong>en</strong>tDelta <strong>du</strong> RhôneMaint<strong>en</strong>ir les marais <strong>de</strong> chasse, favoriser une bonne <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces marais(mise <strong>en</strong> eau la plus proche possible <strong>de</strong>s processus naturels <strong>en</strong> régionméditerrané<strong>en</strong>ne) et <strong>de</strong>s pratiques cynégétiques respectueuses <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (prélèvem<strong>en</strong>t, usage <strong>du</strong> plomb, etc.)Chasseurs (les pratiques sont très différ<strong>en</strong>tes d'un chasseur à l'autre)Organisme sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong> conservation / territoire classé <strong>en</strong> réserveRecherche sur les espèces chassables, dénombrem<strong>en</strong>tAction pour application <strong>de</strong> la loiExpertise dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s maraisMise <strong>en</strong> avant <strong>du</strong> statut sci<strong>en</strong>tifique et conservation. Travail à unecollaboration chasse-conservation177


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesContributionPlaceRôleContributionDialogue instauré avec <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> chasseurs / quelques changem<strong>en</strong>tsconstatés dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s maraisEchelle méditerrané<strong>en</strong>ne / internationaleOrganisme sci<strong>en</strong>tifique et suivi <strong>de</strong> l'avifaunePro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique / données sur les populationsId<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s phénomènes migratoires / <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> repro<strong>du</strong>ction, etc.3.4.3 Conclusions sur la recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action pour la conservationLa recherche sci<strong>en</strong>tifique qui est développée à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> doit répondre à la doubleexig<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’excell<strong>en</strong>ce sci<strong>en</strong>tifique, mais aussi <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité. Dans ce chapitre, nous avons pudécouvrir plusieurs formes d’action qui étai<strong>en</strong>t déployées grâce au statut, aux compét<strong>en</strong>ces et à lalégitimité sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> l’organisation. Ces ressources stratégiques permett<strong>en</strong>t à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong> d’occuper une place souv<strong>en</strong>t incontournable dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Notons que cetteplace est à considérer au niveau <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts dossiers sur lesquels elle intervi<strong>en</strong>t. L’élaboration<strong>de</strong> la stratégie d’action par les membres <strong>de</strong> la TdV est <strong>en</strong> quelque sorte une réflexion fondée surl’analyse <strong>de</strong> sa place – qui détermine le rôle qu’elle peut jouer – mise <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion avec le rôle qu’elleveut jouer.Nous avons pu constater que les rôles que la TdV joue, au niveau camarguais étudié dans cechapitre, sont divers. Les principaux types d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale r<strong>en</strong>contrés à travers nos 7exemples se situ<strong>en</strong>t dans : l’alerte et le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> problèmes <strong>de</strong> conservation dans l’espacepublic, l’interv<strong>en</strong>tion directe (<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> site plus ou moins protégé), la participation aux décisionspour la <strong>gestion</strong>, l’expertise sci<strong>en</strong>tifique et technique à différ<strong>en</strong>tes échelles.Enfin, la connaissance très fine <strong>du</strong> terrain et la poursuite d’actions sur le long terme peuv<strong>en</strong>t êtrerécomp<strong>en</strong>sés par <strong>de</strong>s apports significatifs que l’analyse stratégique donne à voir. La contribution<strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> à une évolution <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la Camargue favorable au mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> sabiodiversité peut, pour les mo<strong>de</strong>s d’action les plus proches <strong>du</strong> terrain, être évaluée à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’analyse <strong>de</strong> sa place et <strong>de</strong> son rôle effectif.178


Chapitre 4Le cas <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya « zone humi<strong>de</strong>s<strong>en</strong>sible associée à une approche <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée<strong>de</strong>s zones côtières »4.1 Démarche <strong>de</strong> recherche : analyser le projet pour le remettre <strong>en</strong> perspective dans leprogramme d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>..................................................................................... 1804.2 Raisons <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> projet SMAP IIIembouchure <strong>de</strong> la Moulouya ......................................................................................................... 1824.3 La mise <strong>en</strong> œuvre et les résultats <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya : le but <strong>du</strong> projet est undéroulem<strong>en</strong>t réussi <strong>du</strong> projet......................................................................................................... 2004.4 Discussion <strong>de</strong> la GIZC comme « mo<strong>de</strong> d’action projet » et évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>................................................................................................................................... 216La forme organisationnelle <strong>du</strong> projet est largem<strong>en</strong>t répan<strong>du</strong>e dans les ONGE, <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> partieparce que c’est le format financé par les bailleurs institutionnels, notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> programmes d’ai<strong>de</strong> publique au développem<strong>en</strong>t. Le projet, « organisationtemporaire » est classiquem<strong>en</strong>t défini <strong>de</strong> la façon suivante :« Effort dans lequel <strong>de</strong>s ressources humaines, matérielles et financières sont organisées<strong>de</strong> manière nouvelle pour <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre un type <strong>de</strong> travail particulier, aux spécificationsdonnées, dans le cadre <strong>de</strong> contraintes <strong>de</strong> coût et <strong>de</strong> temps, <strong>de</strong> façon à apporter unchangem<strong>en</strong>t avantageux défini par <strong>de</strong>s objectifs quantitatifs et qualitatifs » (Turner,1993). Il est <strong>en</strong>suite communém<strong>en</strong>t – mais pas universellem<strong>en</strong>t – admis <strong>de</strong> désigner parprogramme un <strong>en</strong>semble dont les composantes sont <strong>de</strong>s projets : « Un programme <strong>de</strong>179


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesprojets est une organisation temporaire dans laquelle un groupe <strong>de</strong> projets sont gérés<strong>en</strong>semble pour atteindre <strong>de</strong>s objectifs d’ordre plus stratégique qui ne serai<strong>en</strong>t pas atteintspar aucun <strong>de</strong> ces projets pris séparém<strong>en</strong>t » (Turner et Müller, 2003) » (référ<strong>en</strong>ces citéespar Billé, 2004).Les financem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> ces projets s’inscriv<strong>en</strong>t dans les politiques générales <strong>de</strong>s bailleursinstitutionnels ou dans <strong>de</strong>s programmes spécifiques sout<strong>en</strong>us par ces mêmes bailleurs. Cespolitiques et programmes comport<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations, <strong>de</strong>s normes voire <strong>de</strong>smétho<strong>de</strong>s (gui<strong>de</strong>lines) très précises prédéterminant les projets qui seront financés. Les ONGEpréfèr<strong>en</strong>t parfois chercher d’autres sources <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t moins contraignantes, qu’ellestrouv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus dans le mécénat <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Elles ont <strong>en</strong> effet leur propreprogramme, qui ne correspond pas toujours aux priorités <strong>de</strong>s bailleurs institutionnels. La TdVdép<strong>en</strong>d <strong>du</strong> financem<strong>en</strong>t externe à hauteur <strong>de</strong> 30% <strong>de</strong> son budget annuel. Tout l’<strong>en</strong>jeu est alors <strong>de</strong>trouver les financem<strong>en</strong>ts – le plus souv<strong>en</strong>t alloués à <strong>de</strong>s projets et <strong>de</strong>s activités – pour <strong>de</strong>s projetsqui s’inscriv<strong>en</strong>t dans son propre programme. Cet <strong>en</strong>jeu est d’autant plus crucial dans les ONGEdont le financem<strong>en</strong>t est ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t externe.Le cas d’étu<strong>de</strong> qui nous intéresse ici est un projet m<strong>en</strong>é par la TdV <strong>en</strong>tre 2007 et 2009, financépar la Commission Europé<strong>en</strong>ne pour un programme euro-méditerrané<strong>en</strong> <strong>de</strong> Gestion Intégrée <strong>de</strong>sZones Côtières (GIZC) et concernant une zone humi<strong>de</strong> côtière au Maroc 119 . Il s’agit d’analyser lafaçon dont une ONGE peut et va agir 1) dans une zone qui est loin <strong>de</strong> son lieu d’implantationgéographique 120 , 2) dans un temps limité et 3) dans un cadre (<strong>de</strong> programme et <strong>de</strong> doctrine)donné : trois élém<strong>en</strong>ts qui constitu<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong> très nombreux cas les conditions <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong>sONGE. Cette étu<strong>de</strong> doit permettre <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre pourquoi et comm<strong>en</strong>t la TdV a développé etm<strong>en</strong>é le projet dans ce cadre, <strong>de</strong> voir quel est l’apport spécifique <strong>de</strong> l’organisation dans le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> où s’insère le projet, et quel est l’apport <strong>de</strong> ce projet pour le programme et la mission<strong>de</strong> la TdV, qui est <strong>de</strong> conserver les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes.4.1 Démarche <strong>de</strong> recherche : analyser le projet pour le remettre <strong>en</strong>perspective dans le programme d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>L’analyse <strong>de</strong> ce cas d’étu<strong>de</strong> va être un emboîtem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux niveaux. Pour <strong>en</strong> faciliter la lecture,nous pouvons comm<strong>en</strong>cer par le prés<strong>en</strong>ter sous forme schématique (Figure 4.1).119 Ainsi qu’une zone humi<strong>de</strong> côtière <strong>en</strong> Algérie dont on ne parlera pas. Le projet cont<strong>en</strong>ait <strong>en</strong> effet un volet Algérieet un volet Maroc. Nous nous sommes focalisé uniquem<strong>en</strong>t sur le volet Maroc.120 Sachant que la plupart <strong>de</strong>s ONGE n’ont pour ancrage territorial que le bâtim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur siège social. Celles quisont acteurs <strong>du</strong> territoire, par la propriété ou la responsabilité <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> d’un site sont minoritaires.180


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalLa <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> a pour objectif <strong>de</strong> conserver les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes. Leprogramme <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC, issu <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat euro-méditerrané<strong>en</strong>, lui a offert uneopportunité <strong>de</strong> travailler sur <strong>de</strong>s sites sur la rive sud <strong>de</strong> la Méditerranée. Le projet développé parla TdV et ses part<strong>en</strong>aires marocains a adopté les principes et la démarche GIZC, vu comme un<strong>en</strong>jeu d’intégration <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la ZH à la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone. Pour nous, il y adonc <strong>de</strong>ux niveaux d’analyse :- l’analyse <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV (<strong>en</strong> gris dans la figure 4.1) : ses objectifs écologiques, sesint<strong>en</strong>tions, les raisons qui l’ont m<strong>en</strong>ée à s’<strong>en</strong>gager poser sa candidature pour la coordination <strong>du</strong>projet, la façon dont le projet lui permet d’atteindre ses propres objectifs,- pour cela, nous avons besoin d’étudier le projet lui-même, sa construction, son organisation etson déroulem<strong>en</strong>t (<strong>en</strong> blanc dans la figure 4.1). En tant que coordinateur régional <strong>du</strong> projet, laTdV est un acteur important <strong>du</strong> dispositif, mais étudier « le projet » dépasse la seule interv<strong>en</strong>tion<strong>de</strong> la TdV. Il s’agit <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les opérateurs <strong>du</strong> projet (TdV et part<strong>en</strong>airesmarocains) s’y pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour mettre <strong>en</strong> place la GIZC sur la zone, c’est-à-dire comm<strong>en</strong>t ils s’ypr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pour pousser à l’intégration <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>effective <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya.Analyse <strong>du</strong> cas : cadrage ASGEAnalyse <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV auregard <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation<strong>de</strong>s ZHMCas d’étu<strong>de</strong> : projet <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place<strong>de</strong> la GIZC pour conserver l’estuaire<strong>de</strong> la MoulouyaObjectifs <strong>de</strong> la TdV :Conservation <strong>de</strong>s ZHMLa GIZC est-elle un bon moy<strong>en</strong>pour les objectifs TdV ?Analyse <strong>du</strong> projet <strong>de</strong> GIZCMoulouyaProjet SMAP : mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> laGIZCCoordination <strong>du</strong> projet par la TdVAdoption <strong>de</strong>s objectifs et <strong>de</strong> la« démarche » GIZCEtu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’action <strong>du</strong> projet dans lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Evaluation <strong>du</strong> projet au regard <strong>de</strong>ses objectifs GIZCEvaluation au regard <strong>de</strong>s objectifsTdV <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHMAgir sur la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> lazone pour une intégration <strong>de</strong> laconservationConserver l’embouchure <strong>de</strong> laMoulouyaFigure 4.1 : Déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans le cas <strong>du</strong> projetSMAP pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC dans le zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya au Maroc181


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesLa prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> notre analyse sera déroulée <strong>de</strong> la manière suivante : nous allons partir <strong>de</strong>sraisons <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans ce projet SMAP III (section 4.2, dans cettemême section, nous prés<strong>en</strong>terons le projet et le site visé), pour nous conc<strong>en</strong>trer dans un<strong>de</strong>uxième temps sur le déroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet et ses résultats au regard <strong>de</strong> ses « objectifs GIZC »(section 4.3). Pour finir, nous remettrons ces élém<strong>en</strong>ts tirés <strong>de</strong> l’analyse <strong>du</strong> projet <strong>en</strong> perspectivepar rapport aux objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> ses mo<strong>de</strong>s d’action pour laconservation.Les données utilisées sont d’une part, la littérature grise pro<strong>du</strong>ite dans le cadre <strong>du</strong> projet étudié oupar d’autres projets concernant la zone ; d’autre part, les données recueillies à travers unequarantaine d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s qualitatifs réalisés au cours <strong>de</strong> trois déplacem<strong>en</strong>ts sur la zone (octobre2008, février – mars 2009 et juin 2009). P<strong>en</strong>dant ces pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ce sur le terrain,l’observation <strong>de</strong>s ateliers <strong>du</strong> projet étudié ou d’autres projets, ainsi que la participation à <strong>de</strong>sréunions <strong>de</strong> l’équipe <strong>du</strong> projet a favorablem<strong>en</strong>t augm<strong>en</strong>té le corpus <strong>de</strong> données.4.2 Raisons <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et prés<strong>en</strong>tation<strong>du</strong> projet SMAP III embouchure <strong>de</strong> la MoulouyaLa TdV a choisi <strong>de</strong> répondre à ce troisième appel à projet « Short and Medium-Term PriorityEnvironm<strong>en</strong>tal Action Programme » (SMAP) publié par la Commission Europé<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> avril 2005 etfocalisé sur la GIZC, pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> trois natures (com.pers. 2008, 2009) :1) Une raison financière : <strong>en</strong> 2005, la TdV se trouvait dans une pério<strong>de</strong> transitoire et était à larecherche <strong>de</strong> nouveaux projets sur lesquels s’investir. De plus elle vivait à ce mom<strong>en</strong>t unecrise financière et organisationnelle importante. Comme indiqué plus haut, le SMAPs’accompagne d’un mécanisme <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t lié au Part<strong>en</strong>ariat Euro-Méditerrané<strong>en</strong>, quifinance les projets <strong>du</strong> SMAP à 80%, ce qui a motivé sa candidature. Pour ce projet, le registrestratégique <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t organisationnel a beaucoup pesé dans la décision.2) La <strong>de</strong>uxième motivation est liée aux compét<strong>en</strong>ces et à la logique d’action que la TdV chercheà développer. En effet, un booklet sur la Gestion Intégrée <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s a été rédigé parun travail collectif <strong>en</strong> interne et publié cette même année, <strong>en</strong> 2005. S’investir sur un projet <strong>de</strong>GIZC <strong>de</strong>vait confirmer cette « spécialité » comme « compét<strong>en</strong>ce » <strong>en</strong> interne. La TdV testepar ce projet la pertin<strong>en</strong>ce et l’efficacité <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> d’action pour le portage <strong>de</strong> la182


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalconservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée (com.pers., 2008), ce qui relève <strong>du</strong> registrestratégique <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les ZH. Selon cette logique, la TdV doitparticiper au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la GIZC pour que la conservation soit intégrée à la <strong>gestion</strong>effective <strong>de</strong>s sites visés.3) La prise <strong>en</strong> main d’un projet GIZC <strong>de</strong>vait <strong>en</strong> outre contribuer à l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong>tant que porteuse <strong>de</strong> cette logique <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. On est ici dans le registre stratégique <strong>du</strong>positionnem<strong>en</strong>t : la TdV cherche à développer sa place dans l’arène <strong>de</strong> la GIZC, qui sembleporteuse au vu <strong>de</strong> la multiplication <strong>de</strong>s programmes et <strong>de</strong>s protocoles à l’échelle mondiale, et<strong>en</strong> particulier méditerrané<strong>en</strong>ne. D’autre part, la perspective euro-méditerrané<strong>en</strong>necorrespondait aux ambitions géographiques <strong>de</strong> la TdV. Elle cherchait <strong>en</strong> effet à développerson action <strong>en</strong> méditerranée, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> rive sud, dans la perspective <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s « sitesatelier » (voir Chapitre 6) où focaliser son action. Parallèlem<strong>en</strong>t, le projet MedWetCoast(MWC) auquel la TdV avait participé, concernant plusieurs sites <strong>en</strong> Méditerranée, arrivait àson terme. Soucieuse <strong>de</strong> poursuivre le travail initié, la TdV a ori<strong>en</strong>té le choix <strong>de</strong>s zonesfocales pour le projet SMAP III parmi ces sites MWC.La conjonction <strong>de</strong> ces motivations (notamm<strong>en</strong>t le financem<strong>en</strong>t externe et l’action <strong>en</strong> zone sud <strong>de</strong>la Méditerranée) pousse la TdV vers le mo<strong>de</strong> « projet », qui est le paradigme <strong>de</strong> l’action pour lesbailleurs internationaux, et a fortiori dans le contexte <strong>de</strong> pays <strong>en</strong> voie <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t.Dans cette section, le contexte et le montage <strong>du</strong> projet SMAP III sont retracés <strong>de</strong> façon détailléecar cette phase est déterminante pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projet, comme on le verra dans lessections suivantes.4.2.1 Positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> comme opérateur <strong>de</strong> la GIZCa) Le cadre politique et institutionnel <strong>du</strong> projetLes ONG – <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t notamm<strong>en</strong>t mais égalem<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – « intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<strong>de</strong> façon massive <strong>en</strong> « sous-traitants » <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>ces d’ai<strong>de</strong> au développem<strong>en</strong>t, pour <strong>de</strong>sactions plus locales ou pour <strong>de</strong>s projets nécessitant <strong>de</strong>s travaux aux investissem<strong>en</strong>ts matérielsmoins lourds que ceux habituellem<strong>en</strong>t pris <strong>en</strong> charge par les OIG 121 » (Leroy, 2008). La TdV estatt<strong>en</strong>tive au développem<strong>en</strong>t et évolution <strong>de</strong>s politiques méditerrané<strong>en</strong>nes, qui lui fourniss<strong>en</strong>tpot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts et un cadre dans lequel développer ses actions.121 Organisation Intergouvernem<strong>en</strong>tale.183


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesLe cadre <strong>de</strong> ce projet SMAP est le Part<strong>en</strong>ariat Euro-Méditerrané<strong>en</strong>, établi suite à la Déclaration<strong>de</strong> Barcelone <strong>de</strong> 1995. Cette confér<strong>en</strong>ce a posé les fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts d'un processus <strong>de</strong>vant con<strong>du</strong>ire àl'édification d'un cadre multilatéral <strong>de</strong> dialogue et <strong>de</strong> coopération <strong>en</strong>tre l'UE (l’Europe <strong>de</strong>s 15) etles douze pays tiers méditerrané<strong>en</strong>s 122 . Ce cadre multilatéral Euro-Méditerrané<strong>en</strong> s’articule autour<strong>de</strong> trois volets 123 : un volet politique et sécuritaire, un volet économique et financier, un voletsocial et culturel.Dans le cadre <strong>de</strong> ce part<strong>en</strong>ariat Euro-Méditerrané<strong>en</strong>, la Confér<strong>en</strong>ce ministérielle surl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t d’Helsinki <strong>de</strong> novembre 1997 a donné lieu à l’adoption <strong>du</strong> « Programmed'Actions Prioritaires à Court et Moy<strong>en</strong> Termes pour l'Environnem<strong>en</strong>t » (Short and Medium-TermPriority Environm<strong>en</strong>tal Action Programme, SMAP) qui vise à conjuguer les activités au niveau politiqueavec les actions pratiques sur le terrain. « Les actions sont fondam<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong>l'assistance technique, <strong>de</strong> projets pilotes ou <strong>de</strong> démonstration dans les domaines prioritairesdéterminés par le Programme et financés par la Commission à travers le MEDA 124 , l'instrum<strong>en</strong>tfinancier <strong>du</strong> Part<strong>en</strong>ariat Euro-méditerrané<strong>en</strong> » (smap.eu, 2008).Le SMAP a fixé cinq priorités pour <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions nationales et celles <strong>de</strong>s bailleurs <strong>de</strong> fonds :<strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong> l'eau, <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s déchets, sites critiques (y compris les zones polluéeset les zones <strong>de</strong> biodiversité m<strong>en</strong>acée), <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s zones côtières et lutte contre ladésertification. Le projet ici étudié s’inscrit dans la troisième phase <strong>du</strong> SMAP (2004-2007)focalisée sur la Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières (Integrated Coastal Zone Managem<strong>en</strong>t Plans ofAction).b) Le part<strong>en</strong>ariat nécessaire pour développer le projet au MarocLe développem<strong>en</strong>t d’un projet dont un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux est une meilleure coordination <strong>en</strong>tre lesinstitutions r<strong>en</strong>d indisp<strong>en</strong>sable le part<strong>en</strong>ariat avec une structure institutionnelle. Pour ce projetSMAP III Moulouya, le part<strong>en</strong>ariat a été établi avec la Cellule Nationale Littoral appart<strong>en</strong>ant auMinistère <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Maroc. Notons dès maint<strong>en</strong>ant que suite à un changem<strong>en</strong>tministériel, les part<strong>en</strong>aires <strong>du</strong> projet étai<strong>en</strong>t à partir <strong>de</strong> fin 2007 à la Direction <strong>de</strong> la réglem<strong>en</strong>tation122 Algérie, Chypre, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Malte, Maroc, Syrie, Tunisie, Turquie et Autorité palestini<strong>en</strong>ne.123 (1) Le volet politique et sécurité a pour objectif la définition d'un espace commun <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> stabilité ; (2) levolet économique et financier doit permettre la construction d'une zone <strong>de</strong> prospérité partagée ; (3) le volet social,culturel et humain vise à développer les ressources humaines, favoriser la compréh<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre les cultures et leséchanges <strong>en</strong>tre les sociétés civiles (europa.eu, 2010).124 Le règlem<strong>en</strong>t MEDA constitue le principal instrum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la coopération économique et financière <strong>du</strong> Part<strong>en</strong>ariatEuro-Méditerrané<strong>en</strong>. Il est lancé <strong>en</strong> 1996 (MEDA I) et modifié <strong>en</strong> 2000 (MEDA II). Il permet à l'Union europé<strong>en</strong>ne(UE) d'apporter une ai<strong>de</strong> financière et technique aux pays <strong>du</strong> sud <strong>de</strong> la Méditerranée. Dans sa secon<strong>de</strong> pério<strong>de</strong> phase<strong>de</strong> programme (2000-2006), le MEDA était doté d’un budget <strong>de</strong> 5,350 milliards d'euros (europa.eu).184


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalet <strong>du</strong> contrôle <strong>du</strong> Secrétariat d’Etat chargé <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Ministère chargé <strong>de</strong>l’Energie, <strong>de</strong>s Mines, <strong>de</strong> l’Eau et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t (MATEE). Ce part<strong>en</strong>ariat relève à la fois <strong>de</strong>l’opportunité et <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> capitaliser sur <strong>de</strong>s actions antérieures (ce qui est un critère pourles bailleurs).En effet, pour le montage <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya, la TdV a été largem<strong>en</strong>t assistée par lacoordinatrice <strong>de</strong> la composante régionale <strong>du</strong> projet MedWetCoast 125 (MWC) qui concernait <strong>en</strong>particulier la Moulouya. Dans le cadre <strong>de</strong> ce précéd<strong>en</strong>t projet, une Cellule Littoral a été créée ausein <strong>du</strong> Ministère chargé <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t pour promouvoir la GIZC au Maroc. Lacoordinatrice régionale <strong>du</strong> MWC a donc pu solliciter ce contact au sein <strong>du</strong> Ministère, la CelluleLittoral ayant d’ailleurs besoin <strong>de</strong> se développer.« En 2004, le gouvernem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Maroc a créé la Cellule Littoral au sein <strong>du</strong> Ministère <strong>de</strong>l’Aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Territoire, <strong>de</strong> l’Eau et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t (MATEE). Récemm<strong>en</strong>t etsous l’impulsion <strong>du</strong> projet PNUD/FEM MedWetCoast (1999-2006), un processus <strong>de</strong>préparation d’une stratégie nationale GIZC a été lancé, et la première analyse soumise <strong>en</strong>février 2005. Ce rapport, ‘Elém<strong>en</strong>ts pour une Stratégie <strong>de</strong> Protection et <strong>de</strong> GestionIntégrée <strong>du</strong> Littoral’, souligne la nécessité <strong>de</strong> : a) mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s instrum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong><strong>gestion</strong> côtière aux niveaux national, régional et local, b) la création d’une ag<strong>en</strong>cespécifique <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> côtière et c) la promulgation d’une loi littoral. Lastratégie prévoit la préparation et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> plans d’action GIZC locaux. Leprojet répond ainsi à cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, par la préparation d’un plan d’action GIZC pour lazone Moulouya/Saidia 126 . Le site protégé <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya, un <strong>de</strong>s sites<strong>du</strong> projet MedWetCoast égalem<strong>en</strong>t proposé au statut <strong>de</strong> ‘parc national’ <strong>en</strong> octobre 2004,aura été doté, à fin 2005, d’un plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et sera muni d’une équipe opérationnellesur place. » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP III Moulouya, 2005).Précisons dès à prés<strong>en</strong>t que le projet MWC Moulouya n’a pas atteint ses objectifs : aucun plan <strong>de</strong><strong>gestion</strong> n’a pu être élaboré, ni <strong>de</strong> structure <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> créée, le projet SMAP n’a alors pas pus’appuyer sur ces acquis.Le part<strong>en</strong>ariat établi au niveau c<strong>en</strong>tral est justifié par l’inscription <strong>du</strong> projet dans une dynamiqu<strong>en</strong>ationale <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la GIZC : ce que J-P. Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995a) nomme la« cohér<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> projet ».L’auteur a <strong>en</strong> effet déterminé quatre registres dans lesquels les projets invoqu<strong>en</strong>t une cohér<strong>en</strong>cequi les légitime : 1) la cohér<strong>en</strong>ce technique, 2) la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> politique économique ou <strong>de</strong>planification nationale, 3) La cohér<strong>en</strong>ce liée au rôle financier <strong>de</strong>s bailleurs <strong>de</strong> fonds, 4) la125 Le projet MedWetCoast était un projet financé et exécuté par le PNUD. Il s’est déroulé <strong>de</strong> 1999 à fin 2006. Ilcomportait 1 composante régionale et 6 composantes nationales dans 6 pays méditerrané<strong>en</strong>s : le Maroc, la Tunisie,l’Egypte, l’Albanie, la Palestine et le Liban. L’objectif était d’élaborer <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s dansplusieurs sites <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s 6 pays. La TdV a participé ponctuellem<strong>en</strong>t à ce projet, d’une part <strong>en</strong> apportant <strong>de</strong>sexpertises techniques et d’autre part <strong>en</strong> hébergeant la coordinatrice <strong>de</strong> la composante régionale <strong>du</strong> projet.126 La délimitation exacte <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong>vra être établie au cours <strong>du</strong> le processus <strong>du</strong> projet lui-même.185


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesdynamique propre <strong>de</strong> l’organisation projet. Nous r<strong>en</strong>contrerons ces différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> lacohér<strong>en</strong>ce et ses implications au fil <strong>du</strong> texte.Ici, le niveau <strong>de</strong> cohér<strong>en</strong>ce invoqué par le projet est celui <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la GIZC qui doits’appliquer au niveau local (<strong>de</strong>uxième niveau <strong>de</strong> cohér<strong>en</strong>ce invoqué, selon l’auteur). Pour cela, lalogique aurait voulu que la structure exécutive <strong>du</strong> projet soit plus proche <strong>de</strong> la zone sur laquelleelle travaille. Mais l’administration <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t au niveau régional (à l’époque,l’IRATEO) a refusé <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge le projet (et notamm<strong>en</strong>t sa <strong>gestion</strong> financière) ; etinversem<strong>en</strong>t, les part<strong>en</strong>aires responsables <strong>du</strong> projet ont refusé <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r la responsabilitéfinancière à la Province <strong>de</strong> Berkane, administration déc<strong>en</strong>tralisée sous l’égi<strong>de</strong> <strong>du</strong> Ministère <strong>de</strong>l’Intérieur (sur laquelle se situe la zone humi<strong>de</strong>). Le part<strong>en</strong>ariat a donc été établi avec la CelluleLittoral Nationale.4.2.2 Stratégie d’action contextualisée ou simple exécution d’un programmeGIZC ?Le <strong>de</strong>uxième élém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la motivation <strong>de</strong> la TdV à développer ce projet est l’affirmation <strong>de</strong> laGestion Intégrée comme doctrine fondatrice pour son action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM. Nouscherchons donc ici à clarifier la façon dont la TdV s’est saisie <strong>du</strong> cadrage SMAP III GIZC pourdévelopper son action dans ce s<strong>en</strong>s.a) Réponse à l’appel d’offre SMAP III et montage <strong>du</strong> projetPour répondre à l’appel à projet <strong>de</strong> la commission europé<strong>en</strong>ne, la TdV a dû conformer saproposition <strong>de</strong> projet aux termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce. Une fois validée, la proposition ne peut plus êtremodifiée et seules les activités prévues peuv<strong>en</strong>t être financées par le bailleurs institutionnel. Lecadre imposé par le bailleur est la contrainte la plus forte <strong>du</strong> projet (TdV, com.pers., 2009).Ces faibles marges <strong>de</strong> manœuvre pour réajuster le projet p<strong>en</strong>dant sa mise <strong>en</strong> oeuvre implique quecelui-ci doit être le mieux préparer possible. Dans le cas <strong>du</strong> SMAP III, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> n’a paspu réaliser <strong>de</strong> diagnostic préalable. Cela revi<strong>en</strong>t à monter un projet GIZC conformém<strong>en</strong>t auxtermes <strong>de</strong> l’appel à projet sans pouvoir s’appuyer sur <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts indiquant la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ladémarche GIZC pour la zone ciblée.En effet, la coordinatrice <strong>de</strong> la composante régionale <strong>du</strong> projet MWC qui a assisté la TdV pour cemontage, explique qu’elle a peu travaillé sur la composante Maroc p<strong>en</strong>dant le déroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>MWC et s’est inspirée d’un cas français, celui <strong>du</strong> Contrat <strong>de</strong> Baie <strong>de</strong> la Ra<strong>de</strong> <strong>de</strong> Brest. Le projet186


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalest donc monté non sur un diagnostic contextualisé concluant sur le fait que l’approche GIZCétait adaptée, ni sur une stratégie d’action élaborée spécifiquem<strong>en</strong>t pour la zone <strong>de</strong> la Moulouya,mais sur : 1) le choix d’un site au Maroc, car la TdV a vocation à travailler dans ce pays quicompte plusieurs zones humi<strong>de</strong>s intéressantes d’un point <strong>de</strong> vue écologique ; 2) le présupposéque l’approche GIZC est à développer. Le projet a donc été bâtit <strong>en</strong> adoptant fidèlem<strong>en</strong>t ladémarche GIZC.b) La problématique et les objectifs opérationnels <strong>du</strong> projetPour la coordinatrice <strong>de</strong> la composante régionale <strong>du</strong> projet MWC, une <strong>de</strong>s limites <strong>du</strong> MCW estqu’il se focalise sur <strong>de</strong>s sites protégés et donc <strong>de</strong>s sites restreints. Or, selon elle, pour une bonne<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces sites et plus largem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> territoire, il faut qu’un <strong>en</strong>semble plus large d’acteurssoi<strong>en</strong>t impliqués et qu’ils soi<strong>en</strong>t plus intégrés dans la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> territoire. Cette vision rejointcelle <strong>de</strong> la TdV qui voit dans la Gestion Intégrée un moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s sitesprotégés insuffisante pour la conservation effective <strong>de</strong>s ZHM : « On est arrivé à ça aussi par l’analyse<strong>de</strong> nos actions passées, et par le manque d’efficacité <strong>de</strong> ça. Il est beaucoup plus simple, efficace et motivant pour leséquipes ici <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s projets sur <strong>de</strong>s sites naturalistes, et sur lequel on a le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d’avoir fait quelque chose,d’avoir compris. Sauf que <strong>de</strong>rrière, ce n’est pas porté, une fois qu’on est parti, tout s’arrête. C’est satisfaisant àcourt terme mais inefficace à long terme » (direction TdV, com.pers., 2009). Nous verrons au fil <strong>du</strong> texteque cette préoccupation <strong>de</strong> voir la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir favorable à laconservation <strong>de</strong>s ZHM ne mène pas <strong>de</strong> façon logique et automatique à un « processus » <strong>de</strong>Gestion Intégrée. A ce sta<strong>de</strong>, on note le fait que la GIZC est posée comme postulat pour laconservation <strong>de</strong>s ZHM :« L’objectif <strong>du</strong> projet est d’<strong>en</strong>tamer un processus <strong>de</strong> concertation et <strong>de</strong> planificationcôtière sur une zone définie, <strong>en</strong> capitalisant sur l’approche participative <strong>en</strong>tamée pour laplanification <strong>de</strong>s aires protégées au cours <strong>de</strong>s projets MedWetCoast (dont Moulouya) et<strong>en</strong> fédérant les acteurs locaux autour <strong>de</strong> la thématique <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong>s ZH, au vue <strong>de</strong> larichesse biologique <strong>de</strong> l’aire protégée que la zone abrite. Ce projet, à valeurdémonstrative, veut sout<strong>en</strong>ir les initiatives <strong>du</strong> gouvernem<strong>en</strong>t marocain dans la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>du</strong> littoral, par le biais <strong>de</strong> la Cellule Littoral et <strong>de</strong>la protection <strong>de</strong> leurs ZH et s<strong>en</strong>sibles. Ainsi, <strong>en</strong> se basant sur les efforts et lamobilisation déjà <strong>en</strong>gagés, ce projet vise plus spécifiquem<strong>en</strong>t à :a) Analyser les <strong>en</strong>jeux et problématiques sur les zones ;b) Préparer, <strong>de</strong> façon participative, <strong>de</strong>s plans d’actions GIZC pour les zones/régionsconcernées, tout <strong>en</strong> les tra<strong>du</strong>isant sous forme <strong>de</strong> ‘Contrat d’Espace Littoral’, et ;c) Mettre <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s activités spécifiques prescrites dans les plans d’actions quialim<strong>en</strong>teront un processus <strong>de</strong> partage d’expéri<strong>en</strong>ces et d’acquis tout <strong>en</strong> valorisantlocalem<strong>en</strong>t l’approche intégrée et consultative. » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP IIIMoulouya, 2005).187


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesLe but <strong>du</strong> projet est donc : l’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre d’un plan d’action GIZC, qui sontsupposés r<strong>en</strong>dre la <strong>gestion</strong> effective <strong>du</strong> site « intégrée », et par voie <strong>de</strong> conséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>tpermettre la protection <strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong> concernée. Le passage d’un plan d’action GIZC à une<strong>gestion</strong> effective réellem<strong>en</strong>t intégrée, puis le <strong>de</strong>uxième pas qui doit déboucher sur la conservation<strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong> sembl<strong>en</strong>t complexes et hypothétiques. Pourtant, aucun élém<strong>en</strong>t d’explicitation<strong>de</strong>s mécanismes qui sont s<strong>en</strong>sés s’opérer pour passer <strong>de</strong> l’un à l’autre n’est fourni dans ledocum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, ni dans aucun docum<strong>en</strong>t pro<strong>du</strong>it dans le cadre <strong>du</strong> SMAP III Moulouya. Une<strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> cette abs<strong>en</strong>ce d’explicitation <strong>de</strong> la logique d’action est le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la doctrine GIZC qui est suffisamm<strong>en</strong>t admise pour être mobilisée sans justification précise etcontextualisée. « Le schéma ‘stratégie nationale / actions locales pilotes / <strong>du</strong>plication etgénéralisation’ est le squelette d’une majorité <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>du</strong> littoral.Essayer d’<strong>en</strong> sortir, ou même <strong>de</strong> le questionner, l’abor<strong>de</strong>r avec prud<strong>en</strong>ce, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la part d’unconcepteur <strong>de</strong> programme davantage d’efforts <strong>de</strong> justification que <strong>de</strong> s’y t<strong>en</strong>ir à la lettre – tout <strong>en</strong><strong>en</strong> connaissant év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> les limites » (Billé, 2004 : 257). C’est ce que J-P Olivier <strong>de</strong>Sardan (1995a) appelle la cohér<strong>en</strong>ce technique <strong>du</strong> projet, dont la rationalité est confrontée à <strong>de</strong>sregistres <strong>de</strong> cohér<strong>en</strong>ce sci<strong>en</strong>tifico-technique à l’intérieur même <strong>de</strong> la configuration <strong>du</strong>Développem<strong>en</strong>t Durable et <strong>de</strong> la Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières, et donc avant même touteinteraction avec les populations locales et tout diagnostic écologique <strong>de</strong> la zones, c’est-à-dire <strong>de</strong> lamise <strong>en</strong> situation <strong>du</strong> projet.c) La Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières comme modèle <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> admisLa Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières est <strong>en</strong> effet un concept qui a émergé dans les années1970 et s’est développé dans les années 1980. Son nom a été fixé <strong>en</strong> 1989 par un groupe <strong>de</strong> 28spécialistes <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> littoral v<strong>en</strong>us <strong>de</strong> 13 pays, s’étant réuni 5 jours à Charleston (USA)pour faire un bilan <strong>de</strong>s progrès <strong>de</strong> la GIZC, stabiliser un vocabulaire et quelques principes <strong>de</strong>base. Le passage <strong>de</strong> la sphère sci<strong>en</strong>tifique à la sphère <strong>de</strong>s politiques publiques est consacré par laConfér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Rio <strong>en</strong> 1992, suite à laquelle la GIZC est largem<strong>en</strong>t adoptée et intégrée à d<strong>en</strong>ombreuses initiatives internationales 127 (Kalaora & Charles, 2000 ; Billé, 2004 : 45-47). La GIZC<strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t le paradigme dominant comme application <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s127 « Elle <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t ainsi une notion <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour le pôle « <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones côtières » <strong>du</strong> GroupeIntergouvernem<strong>en</strong>tal d’Experts sur l’Evolution <strong>du</strong> Climat (IPCC, 1992), pour les Conv<strong>en</strong>tions sur le Changem<strong>en</strong>tClimatique (1992-1994) et sur la Biodiversité (1992-1994), pour le Programme d’Action pour le Développem<strong>en</strong>tDurable <strong>de</strong>s Petits Etats Insulaires <strong>en</strong> Développem<strong>en</strong>t (1994), le Programme Global d’Action pour la Protection <strong>de</strong>l’Environnem<strong>en</strong>t Marin contre les Activités Terrestres (UNEP, 1995), l’Initiative Internationale <strong>en</strong> Faveur <strong>de</strong>s RécifsCoralli<strong>en</strong>s (1995), ou <strong>en</strong>core la version révisée <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Barcelone, adoptée <strong>en</strong> 1995 » (Billé, 2004 : 47).188


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationallittoraux. Les pro<strong>du</strong>ctions relatives à la GIZC sont rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t pléthoriques : « les gui<strong>de</strong>sméthodologiques, gui<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bonnes pratiques (gui<strong>de</strong>lines) et autres retours d’expéri<strong>en</strong>ces publiéspar ou avec le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes organisations internationales, et généralem<strong>en</strong>t rédigés par<strong>de</strong>s chercheurs-consultants mondialem<strong>en</strong>t reconnus » (Billé, 2004 : 48) se multipli<strong>en</strong>t, autant queles programmes <strong>de</strong> mises <strong>en</strong> œuvre (les <strong>de</strong>ux allant <strong>de</strong> pair) et les formations allant <strong>de</strong> la lic<strong>en</strong>ceau doctorat, <strong>en</strong> passant par la formation à l’expertise (Kalaora & Charles, 2000). On peut dès lorsfacilem<strong>en</strong>t trouver <strong>de</strong>s définitions <strong>de</strong> la GIZC, mais elles sont <strong>en</strong> grand nombre et utilis<strong>en</strong>t unvocabulaire spécialisé avec <strong>de</strong>s mots pas toujours dans le même emploi. Quelle est la bonne ?- Celle <strong>de</strong> Cicin-Sain et Knecht (1998), les auteurs <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce dans le domaine <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>littoral ? « La GIZC est un processus continu et dynamique par lequel les décisions sont prisespour l'utilisation, le développem<strong>en</strong>t et la protection <strong>du</strong>rables <strong>de</strong>s zones et <strong>de</strong>s ressources marineset côtières. Le processus est avant tout conçu pour surmonter la fragm<strong>en</strong>tation inhér<strong>en</strong>te à la foisà l'approche sectorielle et aux failles <strong>en</strong>tre niveaux <strong>de</strong> gouvernem<strong>en</strong>t à l'interface terre-mer. Celaest fait <strong>en</strong> s'assurant que les décisions <strong>de</strong> chaque secteur (par exemple la pêche, la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>pétrole et <strong>de</strong> gaz naturel, la qualité <strong>de</strong> l'eau) et <strong>de</strong> chaque niveau <strong>de</strong> gouvernem<strong>en</strong>t sontharmonisées et cohér<strong>en</strong>tes avec les politiques côtières <strong>de</strong> la nation <strong>en</strong> question. Un point clé <strong>de</strong> laGIZC est la conception <strong>de</strong> processus institutionnels pour réaliser cette harmonisation <strong>de</strong> façonpolitiquem<strong>en</strong>t acceptable » (Cicin-Sain et Knecht, 1998 : 39, cité par Billé, 2004 : 50).- Celle que l’on trouve dans un gui<strong>de</strong> méthodologique SMAP III ? « La GIZC est un instrum<strong>en</strong>t<strong>de</strong> planification spatial stratégique pour le développem<strong>en</strong>t d'activités multiples et <strong>du</strong>rables sur lazone côtière. Ce n'est pas un outil <strong>de</strong> type « recette » où un <strong>en</strong>semble d'étapes prédéterminéessont suivies pour parv<strong>en</strong>ir à la résolution d'un problème. C'est un processus ou une structurationqui intègre et construit sur une vaste gamme d'initiatives <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources (par exemplel'agriculture <strong>du</strong>rable, le tourisme, la conservation, le développem<strong>en</strong>t économique) l'utilisationd'une variété d'outils selon le problème pris <strong>en</strong> charge (par exemple <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> démonstration,<strong>de</strong> zonage pour un multi-usage <strong>de</strong>s secteurs protégés marins). Le but <strong>de</strong> la GIZC est finalem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> faciliter les modèles d'utilisation <strong>de</strong>s ressources qui amélior<strong>en</strong>t et protèg<strong>en</strong>t les rev<strong>en</strong>us <strong>de</strong>sutilisateurs <strong>de</strong>s ressources côtières et <strong>de</strong>s habitants <strong>en</strong> conservant les processus naturels et lesfonctions <strong>de</strong> système <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Plus les processus naturels et les fonctions peuv<strong>en</strong>t êtremaint<strong>en</strong>us, plus le besoin d’interv<strong>en</strong>tions (supposant le plus souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s aménagem<strong>en</strong>t chers àconstruire et <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir) est ré<strong>du</strong>it. » (SMAP Technical Assistance, GIZC, Booklet, 2008).Notons ici que nous ne choisissons pas – à <strong>de</strong>ssein – <strong>de</strong> « définition <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce ». Le prés<strong>en</strong>ttravail ne consiste pas à vérifier la fidélité <strong>de</strong> la construction et <strong>du</strong> déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce projet par189


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesrapport à une définition <strong>de</strong> la GIZC, ce qui nous mènerait sans doute à <strong>de</strong>s débats stériles,déplacés ici, sur les innombrables formulations <strong>de</strong> la GIZC existantes. L’angle d’analyse que nousinvestissons à partir <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong> l’ASGE est la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action et <strong>de</strong> sa mise au regard<strong>de</strong>s objectifs écologiques poursuivis. Dans cette perspective, nous appréh<strong>en</strong>dons d’une part laGIZC au regard <strong>de</strong> sa capacité à m<strong>en</strong>er à un état intégré <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> d’une zone, c’est-à-dire oùtoutes les activités sectorielles serai<strong>en</strong>t m<strong>en</strong>ées <strong>de</strong> façon à être compatibles <strong>en</strong>tre elles ; et puisqu<strong>en</strong>ous sommes dans le cadre <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale d’une ONGE, où toutes les activitésserai<strong>en</strong>t compatibles avec un état désirable <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. D’autre part, nous sommesatt<strong>en</strong>tive au fait que cette doctrine comporte une série d’« outils » et une logique <strong>de</strong> mise <strong>en</strong>œuvre. Compr<strong>en</strong>dre la façon dont ces élém<strong>en</strong>ts sont organisés, mis <strong>en</strong> « dispositif » (Maugeri,2001), influ<strong>en</strong>ce la manière dont ils peuv<strong>en</strong>t pro<strong>du</strong>ire les effets escomptés. C’est donc ess<strong>en</strong>tielpour saisir leur pertin<strong>en</strong>ce et leur efficacité au regard <strong>de</strong>s objectifs écologiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> lazone. Rappelons <strong>en</strong>fin que c’est la façon dont l’ONGE va se saisir <strong>de</strong> ce cadre, <strong>de</strong> cette doctrineet <strong>de</strong> ses outils que l’on cherche à éclairer. Cette analyse passe nécessairem<strong>en</strong>t par unedéconstruction <strong>de</strong> la logique GIZC à partir <strong>de</strong>s écueils observés sur le cas <strong>du</strong> SMAP IIIMoulouya.Poursuivons alors sur cette prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la doctrine et <strong>de</strong> ses outils. Le gui<strong>de</strong> méthodologiqueélaboré par l’assistance technique <strong>du</strong> programme SMAP III, comme bi<strong>en</strong> d’autres docum<strong>en</strong>tsrelatifs à la GIZC, pr<strong>en</strong>d le soin <strong>de</strong> souligner que la GIZC n’est pas une recette avec <strong>de</strong>s étapesprédéterminées. Cette littérature sci<strong>en</strong>tifique ou technique <strong>de</strong> la GIZC propose néanmoins <strong>de</strong>soutils et <strong>de</strong>s principes directeurs id<strong>en</strong>tiques, mais toujours <strong>en</strong> soulignant le fait que le pratici<strong>en</strong><strong>de</strong>vra les utiliser à bon esci<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s spécificités <strong>de</strong> la zone où il travaille. Ces mêmesprincipes figur<strong>en</strong>t dans le gui<strong>de</strong> méthodologique réalisé par <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la TdV (Bonnet et al.,2005) (Encadré 4.1).Encadré 4.1 : Les principes pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC (Bonnet et al., 2005 : 93)Les principes clés d’une démarche <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée• Initier et accompagner <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> rassemblant déci<strong>de</strong>urs, usagers etassociations locales.• Favoriser l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> structures <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> légitimes aux yeux <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts usagers etacteurs concernés et capables <strong>de</strong> porter le processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée. Il s’agit ici <strong>de</strong>r<strong>en</strong>forcer les capacités locales à s’organiser pour la conservation et <strong>de</strong> permettre lareconnaissance par l’Etat <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> ces structures.• Surmonter les contraintes liées aux clivages institutionnels et politiques (particulièrem<strong>en</strong>t<strong>en</strong> rive nord). Il faut notamm<strong>en</strong>t mettre <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce au niveau <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s lespolitiques locales, nationales et internationales et faire <strong>en</strong> sorte qu’elles soi<strong>en</strong>t reconnues eteffectivem<strong>en</strong>t appliquées.190


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international• Changer la relation <strong>en</strong>tre les communautés locales et les structures <strong>de</strong> l’Etat <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dantes,résistantes à la déc<strong>en</strong>tralisation (plus particulièrem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> rive sud).• Créer <strong>de</strong>s capacités au niveau <strong>de</strong>s Etats à faire <strong>de</strong> l’intersectoriel et à reconnaître les zoneshumi<strong>de</strong>s comme objet <strong>de</strong> conservation.• Créer les conditions d’un nouveau mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> partage <strong>de</strong> la connaissance, <strong>de</strong>vantl’incertitu<strong>de</strong> actuelle <strong>de</strong>s connaissances <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s écosystèmes <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s. Dans ce cadre, il s’agit <strong>en</strong> particulier <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place un système <strong>de</strong> suivi etd’évaluation reconnu et utile aux usagers et aux déci<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s.Il est communém<strong>en</strong>t admis que la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC passe par une meilleurecommunication <strong>en</strong>tre les secteurs et par la participation <strong>de</strong>s usagers (ou populations ou acteurslocaux). Notons sur ce point que malgré la prop<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s approches participatives – les « projetsparticipatifs », la « <strong>gestion</strong> participative », le « capacity building », etc. – à se prés<strong>en</strong>ter comm<strong>en</strong>ovatrices, elles sont <strong>en</strong> réalité bi<strong>en</strong> moins réc<strong>en</strong>tes qu’elles ne le proclam<strong>en</strong>t, comme le montreM. Leroy à propos <strong>de</strong>s premières doctrines d’interv<strong>en</strong>tions à l’ère coloniale (Leroy, 2006a ; 2008 :45). L’auteur montre <strong>en</strong> outre que plutôt que <strong>de</strong> la voir comme une solution nouvelle pour <strong>de</strong>sproblèmes que l’on n’avait jamais su résoudre, il faut, pour la compr<strong>en</strong>dre, considérer cetteparticipation au regard <strong>de</strong> ses objectifs et ses contextes d’application. Depuis quelques déc<strong>en</strong>nies,la participation est liée aux conditions <strong>de</strong> distribution <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> publique au développem<strong>en</strong>t dansun contexte d’ajustem<strong>en</strong>t structurel et <strong>de</strong> processus <strong>de</strong> déc<strong>en</strong>tralisation dans les pays <strong>en</strong> voie <strong>de</strong>développem<strong>en</strong>t (Leroy, 2008 : 70).4.2.3 Prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> site, <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux écologiques et <strong>de</strong> la structureorganisationnelle <strong>du</strong> projet SMAPa) Les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> la MoulouyaLa zone humi<strong>de</strong> dont il est question dans ce cas d’étu<strong>de</strong> est l’estuaire <strong>de</strong> la Moulouya, le plus longfleuve <strong>du</strong> Maroc qui pr<strong>en</strong>d sa source 550 km <strong>en</strong> amont dans le Haut Atlas et se jette dans la merMéditerranée. La Moulouya traverse la région <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal, au nord-est <strong>du</strong> Maroc. L’embouchure<strong>de</strong> la Moulouya (3000 ha) a fait l’objet d’un classem<strong>en</strong>t sur la Liste <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sd’importance internationale <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar <strong>en</strong> 2005 pour ses habitats (systèmeestuari<strong>en</strong>, sansouires, etc.) ; sa faune et sa flore – notamm<strong>en</strong>t les Rougequeues <strong>de</strong> Moussier(Pho<strong>en</strong>icurus moussieri), la Sarcelle Marbrée (Marmaronetta angustirostris) et la Mouette d'Audouin(Larus audouinii), qui comme d’autres espèces migratrices trouv<strong>en</strong>t refuge dans le système <strong>de</strong>végétation dominé par le tamaris ; sa fonctionnalité (régulation <strong>de</strong>s crues, régulation <strong>de</strong> la salinité)191


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales(Ramsar.org, 2009). Par ailleurs, un diagnostic écologique a été réalisé dans le cadre <strong>du</strong> projetMedWetCoast (1999-2007) qui a concerné ce Site d’Intérêt Biologique (SIBE). Ce diagnosticsouligne la richesse <strong>de</strong> la faune et la flore, où l’on trouve <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong> l’avifaune <strong>du</strong> Maroc, uncinquième <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>tomofaune, et un fort taux d’<strong>en</strong>démisme pour la majorité <strong>de</strong>s groupes étudiés.La zone comptait – à l’époque <strong>de</strong> la réalisation <strong>de</strong> ce diagnostic – la sansouire la plus larged’Afrique <strong>du</strong> Nord et la forêt alluviale <strong>de</strong> tamaris la plus ét<strong>en</strong><strong>du</strong>e <strong>du</strong> Maroc (Dakki, Diagnosticécologique MWC, 1999). Notons ici que le SIBE ne recouvre que la zone stricte <strong>de</strong>l’embouchure, bi<strong>en</strong> que le diagnostic écologique ainsi que la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la zone dans la ListeRamsar pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>en</strong> compte les milieux connexes (forêt alluviale et sansouires) qui font partieintégrante <strong>de</strong> l’écosystème.La TdV a monté le projet SMAP III dans la suite <strong>du</strong> projet MedWetCoast, et <strong>en</strong> faisant référ<strong>en</strong>ceà l’inscription <strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong> sur la liste Ramsar, mais nous avons vu que cet horizonnormatif est davantage donné comme un élém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> contexte que comme un objectif clairem<strong>en</strong>taffiché. Notons que le diagnostic écologique sub-cité (que nous avons consulté pour l’analyse) aété peu mobilisé dans le cadre <strong>du</strong> projet SMAP Moulouya.De notre côté et comme nous l’avons annoncé dans l’exposé <strong>de</strong> notre démarche pour abor<strong>de</strong>r cecas, nous analysons le projet dans l’objectif <strong>de</strong> le remettre <strong>en</strong> perspective dans le programmed’action <strong>de</strong> la TdV pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Pour faire l’analyse stratégique <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong>la TdV, nous adoptons donc comme référ<strong>en</strong>ce l’objectif ultime <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> laMoulouya, bi<strong>en</strong> que dans le cadre <strong>de</strong> ce projet SMAP, l’ONGE n’a pas ost<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t affiché cetobjectif écologique. Pour cela, nous nous référons plus explicitem<strong>en</strong>t aux élém<strong>en</strong>ts tirés <strong>du</strong>diagnostic écologique réalisé dans le cadre <strong>de</strong> MedWetCoast. La conservation <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> laMoulouya pris <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>ce implique ainsi : le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s surfaces <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts habitats, lemainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s populations, le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la fonctionnalité <strong>de</strong> l’hydrosystème.b) Gestion effective et évolution <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> la Moulouya <strong>de</strong>puis lemontage <strong>du</strong> projetLa <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya est caractérisée par un fortdéveloppem<strong>en</strong>t peu soumis à <strong>de</strong>s contraintes réglem<strong>en</strong>taires, et une diversité d’activités assezfaible mais néanmoins consommatrices <strong>en</strong> espace et <strong>en</strong> ressources.- La région <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal connaît <strong>de</strong>puis moins <strong>de</strong> 10 ans une dynamique <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>téconomique massive : Plan d’aménagem<strong>en</strong>t routier (route reliant Alger-Tanger, traversant le192


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalSIBE), Plan Maroc Vert (Plan <strong>de</strong> relance agricole), Plan Azur (développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> tourisme <strong>de</strong>masse).- Le cadre légal relatif à l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t au Maroc se résume à la loi 2003 sur les étu<strong>de</strong>s d’impact.Celle-ci doit normalem<strong>en</strong>t être appliquée pour chaque projet d’aménagem<strong>en</strong>t. Une étu<strong>de</strong> doit êtreréalisée par <strong>de</strong>s spécialistes et un comité doit être réuni pour pr<strong>en</strong>dre les décisions suite à l’étu<strong>de</strong>d’impact. Sur la zone qui nous préoccupe et qui a été le lieu <strong>de</strong> construction d’un vaste complexetouristique, les personnes interviewées nous ont systématiquem<strong>en</strong>t parlé <strong>de</strong> l’abs<strong>en</strong>ce d’étu<strong>de</strong>d’impact et <strong>de</strong> procé<strong>du</strong>re sérieuse pour ce projet d’aménagem<strong>en</strong>t. Par ailleurs, une loi littorale aété rédigée suite à l’impulsion <strong>du</strong> projet MedWetCoast, mais elle est bloquée dans les négociationsinterministérielles <strong>de</strong>puis plusieurs années.- Les activités socio-économiques <strong>de</strong> la zone sont principalem<strong>en</strong>t l’agriculture, la pêche ayantpresque disparu dans les années 1980 avec l’effondrem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la ressource halieutique, et surtoutle tourisme. La commune urbaine <strong>de</strong> Saïdïa sur laquelle se trouve le SIBE compte <strong>en</strong>viron 4000habitants p<strong>en</strong>dant l’hiver. L’été, sa fréqu<strong>en</strong>tation s’échelonne <strong>en</strong>tre 100 000 et 150 000 visiteurs(Ezzaher et al., 2008).Concernant la qualité <strong>de</strong> l’eau à l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya : bi<strong>en</strong> que les étu<strong>de</strong>s m<strong>en</strong>ées parl’Office régional <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> valeur agricole <strong>de</strong> la Moulouya montr<strong>en</strong>t qu’il n’y a pas <strong>de</strong> rési<strong>du</strong>schimiques d’origine agricole dans les nappes et dans la Moulouya (grâce à une forteévapotranspiration, ORMVAM, com.pers., 2009), <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s m<strong>en</strong>ées à l’Université d’Oujda ontmontré le contraire (Bouhaba, 2007 ; El Oualiti, 2007).Concernant la quantité d’eau qui arrive jusqu’à l’estuaire : les personnes interrogées indiqu<strong>en</strong>t quejusqu’à prés<strong>en</strong>t, il y a toujours eu <strong>de</strong> l’eau à l’embouchure, bi<strong>en</strong> que lors <strong>de</strong> quelques annéessèches, le débit était extrêmem<strong>en</strong>t faible (com.pers., 2009). En r<strong>en</strong>contrant un responsable <strong>de</strong>l’Ag<strong>en</strong>ce hydraulique <strong>de</strong> Bassin <strong>de</strong> la Moulouya, nous avons appris que l’agriculture absorbait80% <strong>de</strong> la ressource <strong>en</strong> eau dans la région <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal (bassin <strong>de</strong> la Moulouya). Par ailleurs, leschercheurs <strong>de</strong> l’Université d’Oujda signal<strong>en</strong>t que selon les chiffres annoncés par la Direction <strong>du</strong>tourisme, la station touristique <strong>de</strong>vrait utiliser 40% <strong>de</strong>s quantités d’eau actuellem<strong>en</strong>t disponibles.Il y a donc une incompatibilité <strong>en</strong>tre l’activité agricole et l’activité touristique, sans compter ledébit écologique minimum dans la Moulouya (qui est estimé à 2 mètres cube pas secon<strong>de</strong>, maisqui n’est pas réglem<strong>en</strong>té).Concernant la qualité <strong>de</strong>s habitats : dans l’embouchure elle-même, une voie <strong>de</strong> contournem<strong>en</strong>t(route à 4 voies) <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Saïdia était <strong>en</strong> construction p<strong>en</strong>dant le temps <strong>du</strong> projet SMAP,193


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesrompant la continuité écologique <strong>de</strong> l’estuaire. En marge <strong>de</strong> l’embouchure, mais dans le SIBEclassé sur la liste Ramsar, <strong>de</strong>s habitats ont été intégralem<strong>en</strong>t détruits et totalem<strong>en</strong>t urbanisés.Pour affiner ces élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> diagnostic et id<strong>en</strong>tifier <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t, il faudrait réaliserl’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> cette zone, ce que nous n’avons pas pu faire dans le temps d<strong>en</strong>otre terrain. Cette analyse a été partiellem<strong>en</strong>t réalisée dans le cadre <strong>du</strong> projet, mais est arrivéetrop tard pour <strong>en</strong> structurer les actions comme nous le verrons. Nos <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s réalisés auprès <strong>de</strong>sacteurs <strong>de</strong> la zone nous ont tout <strong>de</strong> même permis <strong>de</strong> dégager un élém<strong>en</strong>t fort <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>effective : la construction <strong>de</strong> la station touristique est l’élém<strong>en</strong>t qui dégra<strong>de</strong> le plus l’état <strong>du</strong>milieu. Il émane d’une décision royale et l’administration <strong>du</strong> tourisme chargée <strong>de</strong> suivre etsout<strong>en</strong>ir le développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet touristique n’est soumise à aucune obligation <strong>de</strong> négocieravec les autres administrations sectorielles ou c<strong>en</strong>trale (Direction <strong>du</strong> tourisme, com.pers., 2009).Les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective sont : toutes les administrations sectorielles, directions <strong>de</strong>l’agriculture, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t, <strong>du</strong> tourisme, <strong>de</strong> l’urbanisme, l’ag<strong>en</strong>ce hydraulique et l’office <strong>de</strong>l’eau potable. Les administrations déconc<strong>en</strong>trées sont la Province et les communes. Les acteursprivés sont : les promoteurs immobiliers qui ont construit la station touristique, les agriculteurs,les habitants <strong>de</strong>s communes <strong>de</strong> la zone, les habitants <strong>de</strong> la Province et les touristes locaux etétrangers, les associations locales <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et sociales. Ces différ<strong>en</strong>ts acteurs ont <strong>de</strong>sresponsabilités et leurs différ<strong>en</strong>tes activités <strong>de</strong>s impacts plus ou moins forts sur l’état écologique<strong>de</strong> l’embouchure. C’est l’analyse <strong>de</strong>s acteurs prévue dans le cadre <strong>du</strong> projet qui <strong>de</strong>vait définir les« acteurs pertin<strong>en</strong>ts » pour la démarche GIZC.Nous avons prés<strong>en</strong>té les objectifs <strong>de</strong> ce projet GIZC qui vise à r<strong>en</strong>dre la <strong>gestion</strong> plus intégrée,mais l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’intégration est resté flou. Le positionnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya visà-vis<strong>de</strong> la référ<strong>en</strong>ce normative <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> cette ZH d’importance internationale estimprécis : d’une part, <strong>en</strong> raison <strong>de</strong>s objectifs <strong>du</strong> projet qui vise à faire émerger <strong>de</strong>s objectifscons<strong>en</strong>suels pour le territoire ; d’autre part, parce que <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts constituant <strong>en</strong> partie lajustification <strong>de</strong> l’inscription sur la Liste Ramsar (à laquelle elle fait référ<strong>en</strong>ce) ont été détruits <strong>en</strong>trele montage et le début <strong>du</strong> projet.En effet, nous avons évoqué plus haut la politique <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t touristique nommé PlanAzur lancée <strong>en</strong> 2001, dont l’objectif était d’accueillir 10 millions <strong>de</strong> touristes à l’horizon 2010.Pour cela, 6 zones côtières étai<strong>en</strong>t visées pour la construction <strong>de</strong> stations touristiques. La station<strong>de</strong> Saïdia (appelée Méditerranea Saïdia) est la première à avoir ouvert ses portes le 19 juin 2009.C’est une zone urbaine, totalem<strong>en</strong>t nouvelle qui s’ét<strong>en</strong>d sur 7km le long <strong>de</strong> la côte, <strong>en</strong>tre le c<strong>en</strong>tre194


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international<strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Saïdia et l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya (Figure 4.2). Sa construction a <strong>en</strong>traîné, <strong>de</strong> lacôte vers l’intérieur : la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> la <strong>du</strong>ne secondaire, la disparition <strong>de</strong> la forêt <strong>de</strong> tamaris et<strong>de</strong>s sansouires sur 700 hectares.Figure 4.2 : Carte <strong>de</strong> l’occupation <strong>du</strong> sol <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya (Snoussi, 2006)L’objet écologique visé par le projet reste vague dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet égalem<strong>en</strong>t parce quele périmètre concerné fait partie <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts soumis au débat participatif, la zone à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>compte pour la démarche GIZC <strong>de</strong>vant être décidée au début <strong>du</strong> projet. L’idée étant que lechamp d’action <strong>du</strong> plan local GIZC doit dépasser le périmètre <strong>de</strong> l’espace protégé (si tant est quel’inscription sur la Liste Ramsar puisse être considérée comme une protection), selon « la portée<strong>de</strong> la politique GIZC [qui] transc<strong>en</strong><strong>de</strong> la responsabilité et le rôle <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong>s airesprotégées » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP III Moulouya, 2005).c) Les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective, les cibles <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya« Le principal bénéficiaire <strong>du</strong> projet est la Cellule Littoral <strong>du</strong> MATEE qui aura ainsi puexpérim<strong>en</strong>ter une approche <strong>de</strong> plan d’action local GIZC, et sera alors à même d’<strong>en</strong> analyserl’expéri<strong>en</strong>ce, d’<strong>en</strong> tirer <strong>de</strong>s leçons et <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre les mesures nécessaires <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> politique195


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesgénérale, d’outils régulateurs et législatifs, et <strong>de</strong> projets pilotes » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP IIIMoulouya, 2005). Le projet est d’abord tourné vers le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organe institutionnel <strong>en</strong>charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s côtières au Maroc. Le mo<strong>de</strong> d’interaction avec cette cible principale estdonc le part<strong>en</strong>ariat. Ce r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Cellule Littoral nationale passerait par un souti<strong>en</strong> pourle développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> démarches GIZC au niveau local : « dans le cadre <strong>de</strong> son programmed’activité, la Cellule Littoral marocaine <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d […] développer <strong>de</strong>s approches qui privilégi<strong>en</strong>t la<strong>gestion</strong> au niveau <strong>du</strong> régional, provincial et local, là où le front <strong>de</strong> mer subit <strong>de</strong>s agressionsmultiples, pour s<strong>en</strong>sibiliser, former et r<strong>en</strong>forcer les capacités <strong>de</strong>s acteurs locaux pour les habiliterà pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> leur propre patrimoine <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal » (ibid.).Pour cela, « les autorités locales et les acteurs locaux sont aussi considérés comme bénéficiaires<strong>du</strong> projet ». Ainsi, les acteurs locaux <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective sont visés par le projet et l’approche<strong>en</strong>visagée pour les atteindre est la participation. « Le projet aura à cœur <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer leur capacité,leur information et leur intérêt pour la GIZC » (ibid.). Selon les principes <strong>de</strong> la GIZC, ces acteursdoiv<strong>en</strong>t participer au projet, sans quoi la mise <strong>en</strong> place d’un comité GIZC ne pourra aboutir.Ainsi, ils pourront <strong>en</strong> retirer un bénéfice… la GIZC. C’est d’ailleurs <strong>en</strong> partie pour cette raisonqu’une <strong>de</strong>s activités prévues consiste <strong>en</strong> la « communication et la s<strong>en</strong>sibilisation <strong>de</strong>s acteurslocaux à la démarche GIZC pour une plus gran<strong>de</strong> participation », « cette activité [étant] ess<strong>en</strong>tiellepour mobiliser les acteurs locaux et attirer leur intérêt dans la démarche GIZC » (ibid.).T<strong>en</strong>tons d’expliciter davantage l’ambiguïté <strong>de</strong> cette logique d’action. Les cibles – c’est-à-dire lesacteurs sectoriels ou acteurs locaux <strong>de</strong>vant changer <strong>en</strong> partie leurs pratiques pour r<strong>en</strong>dre la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière intégrée et <strong>du</strong>rable – sont d’abord convoqués par la Province <strong>en</strong> début<strong>de</strong> projet. Là, les « bénéfices <strong>de</strong> la GIZC » leur sont prés<strong>en</strong>tés et doiv<strong>en</strong>t susciter leur implicationdans le projet (à travers les comités que nous détaillons juste après). Mais cette logique nie lefonctionnem<strong>en</strong>t sectoriel <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>, ce qui est pourtant le problème qu’elle cherche à résoudre.Si pour les secteurs les plus puissants, l’intégration <strong>de</strong> <strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales n’est pas unbénéfice, ri<strong>en</strong> ne laisse p<strong>en</strong>ser a priori qu’ils vont s’<strong>en</strong> contraindre. Malgré les formulationsemployées (« bénéfices »), ceci n’est pas ignoré dans les principes d’application même <strong>de</strong> la GIZCqui prévoi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s formations sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s conflits, bi<strong>en</strong> que les formations ne puiss<strong>en</strong>tcomp<strong>en</strong>ser les défauts <strong>de</strong> conception <strong>du</strong> projet. Dans le cas <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya, cettepréoccupation est prés<strong>en</strong>te égalem<strong>en</strong>t : la seule garantie <strong>de</strong> l’implication <strong>de</strong> ces acteurs passe parla Province qui doit convoquer les comités, ce qui suppose qu’elle soit elle-même très impliquéedans le projet.196


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalLe mo<strong>de</strong> d’approche <strong>de</strong> ces cibles passe principalem<strong>en</strong>t par la constitution <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux comités dontles membres respectifs sont <strong>en</strong> réalité confon<strong>du</strong>s (Tableau 4.1) :- Un comité intersectoriel ad hoc est mis <strong>en</strong> place dans le cadre <strong>du</strong> projet, réunissant les différ<strong>en</strong>tesag<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’Etat et les délégations sectorielles. « Sa mission est d’ori<strong>en</strong>ter et d’approuver lesactivités et les résultats <strong>du</strong> projet, et suivre et approuver les travaux <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail »(Intermediary report, 2008). La volonté d’impliquer ces acteurs apparaît clairem<strong>en</strong>t dans tous lesdocum<strong>en</strong>ts <strong>du</strong> projet, mais les moy<strong>en</strong>s pour y parv<strong>en</strong>ir ne sont pas explicités au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’intérêtsupposé que les acteurs vont manifester pour la GIZC. Le projet « saura accor<strong>de</strong>r un rôle et uneresponsabilité précise aux part<strong>en</strong>aires <strong>du</strong> comité consultatif, <strong>de</strong> par la constitution <strong>de</strong> groupes <strong>de</strong>travail, et ainsi cherchera à les impliquer concrètem<strong>en</strong>t dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projet, lesresponsabilisant et mandatant pour <strong>de</strong>s tâches particulières » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP IIIMoulouya, 2005).- Ces groupes <strong>de</strong> travail sont constitués au sein d’un Comité consultatif local, réunissant lesreprés<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs locaux (privé, public, non-gouvernem<strong>en</strong>tal, académique)(Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP III Moulouya, 2005). Les groupes <strong>de</strong> travail étai<strong>en</strong>t les suivants : ungroupe pour l’élaboration <strong>du</strong> tableau <strong>de</strong> bord (groupe « Indicateur ») et un groupe pour larédaction <strong>du</strong> plan local GIZC ou Contrat d’Espace Littoral, lui-même séparé <strong>en</strong> plusieurs sousgroupesselon les thèmes d’étu<strong>de</strong> pour le PGIZC.Tableau 4.1 : Composition <strong>de</strong>s comités inter-sectoriel et consultatif pour le projet SMAP III Moulouya,constitués lors <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> mars 2007 (Intermediary report 2, 2008)Comité inter-sectorielSous la Présid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> laProvinceMunicipalitésLes services déc<strong>en</strong>tralisés<strong>de</strong> lEtatONG localesUniversitéComité consultatif localProvince <strong>de</strong> BerkaneCommune urbaine <strong>de</strong> Saidia, communes rurales <strong>de</strong> Madagh et LaaTamnaDélégation <strong>de</strong>s Eaux et Forets et <strong>de</strong> la lutte contre la Désertification,OujdaDirection Régionale <strong>de</strong> lÉquipem<strong>en</strong>tDirection Régionale <strong>du</strong> <strong>Tour</strong>ismeAg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Bassin Hydraulique <strong>de</strong> la MoulouyaAg<strong>en</strong>ce Urbaine dOujdaOffice Régionale <strong>de</strong> Mise <strong>en</strong> Valeur Agricole <strong>de</strong> la Moulouya InspectionRégionale <strong>de</strong> lAménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Territoire et <strong>de</strong> lEnvironnem<strong>en</strong>tECOLOMAN, dont Homme et Environnem<strong>en</strong>t / Cigogne blancheUniversité Mohammed VI dOujda• Des communes concernées et <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> Berkane• De quelques services déc<strong>en</strong>tralisés <strong>de</strong> lÉtat• ONGs• Des organisations professionnelles• Des universitaires et <strong>de</strong>s chercheurs• Des privés197


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesd) La structure organisationnelle <strong>du</strong> projetLa structure <strong>du</strong> projet était formée par les <strong>en</strong>tités suivantes (Figure 4.3) :France<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Coordinateur régionalRabat(600 km)Cellule littoral nationaleMATEEOujda(80 km)Direction régionale<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t(opérateur local)Equipe locale recrutée(1 coordinateur, 1 animateur,1 chargé comm°)Berkane(30 km)Province (MinistèreFigure 4.3 : Structure organisationnelle <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (<strong>en</strong>tre par<strong>en</strong>thèse : distance jusqu’àl’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya) (source : auteur)- Une coordination régionale assurée par la TdV. Elle est contractée par la commissioneuropé<strong>en</strong>ne, assure « le reporting, l’analyse <strong>de</strong>s résultats et le suivi <strong>du</strong> projet » (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong>projet SMAP III Moulouya, 2005), ainsi qu’un souti<strong>en</strong> technique pour les différ<strong>en</strong>tes activités <strong>du</strong>projet.- Une coordination nationale responsable <strong>de</strong> l’exécution <strong>du</strong> projet 128 , assurée par la CelluleLittoral nationale, appart<strong>en</strong>ant (à partir <strong>de</strong> fin 2007) à la Direction <strong>de</strong> la réglem<strong>en</strong>tation et <strong>du</strong>contrôle <strong>du</strong> Secrétariat <strong>de</strong> l’Eau et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t auprès <strong>du</strong> Ministère <strong>de</strong> l’Aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>Territoire, <strong>de</strong> l’Eau et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t marocain (MATEE) à Rabat. Cette coordinationnationale était composée <strong>de</strong> 3 personnes 129 dont les prérogatives étai<strong>en</strong>t les suivantes : lerecrutem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’équipe <strong>du</strong> projet et <strong>de</strong>s consultants 130 contractés pour <strong>de</strong>s activités spécifiques,128 Un contrat (daté <strong>du</strong> 20 décembre 2006) passé <strong>en</strong>tre la Fondation Sansouire (ex Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>) et leMATEE indique qu’il est chargé <strong>de</strong> superviser, ori<strong>en</strong>ter, conseiller et arbitrer le projet au niveau national etresponsable <strong>du</strong> volet financier (25,38% <strong>du</strong> montant <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya, soit 284,427 ).129Le directeur <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> la réglem<strong>en</strong>tation et <strong>du</strong> contrôle, et <strong>de</strong> la cellule littorale nationale, le chef <strong>de</strong>division <strong>de</strong> la réglem<strong>en</strong>tation, une assistante pour la <strong>gestion</strong> administrative et financière <strong>du</strong> SMAP III.130 Deux experts <strong>du</strong> GRET pour une pré-analyse <strong>de</strong>s acteurs et <strong>du</strong> zonage pertin<strong>en</strong>t pour l’application <strong>de</strong> la GIZC ;<strong>de</strong>ux <strong>en</strong>seignants-chercheurs <strong>de</strong> l’Université d’Oujda : diagnostic socio-économique ; Un <strong>en</strong>seingant <strong>de</strong> l’Université198


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalpuis la validation <strong>de</strong> toutes les activités réalisées dans le cadre <strong>du</strong> projet. Soulignons le fait que laTdV n’a donc pas <strong>de</strong> li<strong>en</strong> contractuel direct avec l’équipe locale chargée <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre lesactivités.- Une coordination locale. Le MATEE était représ<strong>en</strong>té au niveau local par le Départem<strong>en</strong>tRégional <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t 131 , structure déconc<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> l’Etat, composée d’une personnebasée à Oujda (à 50 km <strong>de</strong> Berkane et 80 km <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> la Moulouya). Cette personne assurele li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre la Cellule Littoral Nationale et l’équipe locale recrutée spécifiquem<strong>en</strong>t pour le projet.Cette équipe compte un coordinateur local, consultant retraité par anticipation <strong>du</strong> HautCommissariat <strong>de</strong>s Eaux et Forêts, accompagné d’un animateur et pour la <strong>de</strong>rnière année d’unchargé <strong>de</strong> communication, tous <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>seignants-chercheurs (respectivem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> écotoxicologieet hydrologie) à l’Université d’Oujda. L’équipe locale était chargée <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projet :organisation et animation <strong>de</strong>s réunions, activités <strong>de</strong> communication, coordination <strong>de</strong>s consultantsrecrutés pour la réalisation <strong>de</strong>s diagnostics et <strong>de</strong> l’élaboration <strong>du</strong> Plan <strong>de</strong> GIZC <strong>de</strong> la Moulouya.Ces trois <strong>en</strong>tités sont donc réunies <strong>en</strong>tre elle par <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s contractuels. Mais jusqu’ici, elles nesont pas reliées au terrain ciblé pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projet. Or les principes GIZCrequièr<strong>en</strong>t l’implication <strong>de</strong>s institutions locales, c’est-à-dire <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes administrationsterritoriales et sectorielles. L’implication d’au moins une institution ayant les capacités et lalégitimité pour solliciter les autres est indisp<strong>en</strong>sable. Ces relations avec les administrations localesn’ont pas pu être établies lors <strong>du</strong> montage et la TdV a bâti le projet <strong>en</strong> bilatéral avec la CelluleLittoral nationale. En effet, la Province <strong>de</strong> Berkane, ciblée pour être l’institution locale porteuse<strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC, a dans un premier temps refusé le projet SMAP III. A cemom<strong>en</strong>t, le projet MWC – qui a été un projet compliqué <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s budget, <strong>de</strong>sactivités, et qui est au final très mal perçu par les acteurs locaux - n’était pas achevé et leSecrétaire général <strong>de</strong> la Province était davantage intéressé par <strong>de</strong>s projets d’infrastructure(Coordinatrice régionale, com.pers. 2010). Les part<strong>en</strong>aires <strong>du</strong> SMAP ont déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> reporter ledémarrage <strong>du</strong> projet ; le chef <strong>de</strong> projet TdV s’est cont<strong>en</strong>té <strong>de</strong> le préparer par quelques visites surplace <strong>en</strong> att<strong>en</strong>dant la fin <strong>du</strong> MCW (9 mois après le déblocage <strong>du</strong> financem<strong>en</strong>t SMAP III) avant <strong>de</strong>rev<strong>en</strong>ir vers la Province. Celle-ci a finalem<strong>en</strong>t accepté le projet SMAP III sans conviction, mais<strong>en</strong> accueillant tout <strong>de</strong> même l’atelier <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet <strong>en</strong> mars 2007, <strong>en</strong> mettant à<strong>de</strong> Rabat : étu<strong>de</strong> sur l’écotourime et la capacité touristique <strong>de</strong> Saïdïa ; Un <strong>en</strong>seingant-chercheur <strong>de</strong> l’Univsersité d’ElJadida : Plan <strong>de</strong> GIZC.131 Jusqu’<strong>en</strong> 2008, <strong>en</strong> tant que structure déconc<strong>en</strong>trée <strong>du</strong> MATEE, l’Inspection Régionale <strong>de</strong> l’Aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>Territoire et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Région <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal (IRATEO) était le part<strong>en</strong>aire technique privilégié <strong>de</strong> la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s actions techniques sur le terrain. Depuis 2008, le départem<strong>en</strong>t d’état àl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est passé dans le Ministère <strong>de</strong>s Mines, <strong>de</strong> l’Energie et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t, les structuresdéconc<strong>en</strong>trées <strong>du</strong> secrétariat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sont <strong>de</strong>s Départem<strong>en</strong>ts Régionaux <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t. L’IRATEOn’intervi<strong>en</strong>t donc plus dans la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> projet.199


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesdisposition <strong>de</strong> l’équipe <strong>du</strong> projet un local dans l’<strong>en</strong>ceinte <strong>de</strong> la Province et <strong>en</strong> désignant <strong>de</strong>sréfér<strong>en</strong>ts à la Province (les <strong>de</strong>ux fonctionnaires <strong>du</strong> service « <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t »).4.3 La mise <strong>en</strong> œuvre et les résultats <strong>du</strong> projet SMAP IIIMoulouya : le but <strong>du</strong> projet est un déroulem<strong>en</strong>t réussi <strong>du</strong> projetDans la section précéd<strong>en</strong>te, nous avons vu que l’objectif normatif général <strong>de</strong> la TdV, laconservation <strong>de</strong> la ZH, est absorbé par les objectifs procé<strong>du</strong>raux <strong>de</strong> la GIZC (cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre lesactivités et la configuration institutionnelle d’un zone pour un équilibre <strong>en</strong>tre l’économie, le socialet l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t). Ces objectifs GIZC sont tra<strong>du</strong>its <strong>en</strong> objectifs opérationnels communs, dansles gran<strong>de</strong>s lignes, à tous les projets GIZC : mise <strong>en</strong> place d’une structure <strong>de</strong> GIZC dotée d’unPlan GIZC.L’objet <strong>de</strong> cette partie est d’analyser comm<strong>en</strong>t se déploie le projet dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya et ce qu’il apporte au regard <strong>de</strong> ses objectifs d’intégration, commemise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s activités et intégration <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans les différ<strong>en</strong>ts secteurs.Nous allons pour cela nous intéresser aux activités <strong>du</strong> projet SMAP III, à leur déroulem<strong>en</strong>t etleurs résultats. Les activités <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya sont les suivantes (Encadré 4.2) :Encadré 4.2 : Activités <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, 2005 ; Intermediary report 2,2008).Résultat 1 : Mobilisation et état <strong>de</strong>s lieuxActivité 1.1. Constituer léquipe locale exécutive <strong>du</strong> projetActivité 1.2. Définition <strong>de</strong>s limites <strong>de</strong> la zone et <strong>du</strong> niveau administratif dinterv<strong>en</strong>tion les plus appropriéespour un plan daction GIZCActivité 1.3. Analyse <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> la zoneActivité 1.4. Diagnostic <strong>de</strong> la zone et rapport GIZCActivité 1.5. Communication et s<strong>en</strong>sibilisation <strong>de</strong>s acteurs locaux à la démarche GIZC pour une plusgran<strong>de</strong> participationRésultat 2 : Gestion <strong>de</strong> la dynamique côtière par le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités institutionnelles etla préparation <strong>du</strong>n plan local GIZCActivité 2.1. Collaboration : comité intersectoriel opérationnel sur la zone côtière.Activité 2.2. Participation : responsabilisation <strong>du</strong> comité consultatif local <strong>de</strong> zoneActivité 2.3. R<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail et institutions représ<strong>en</strong>tées (formations)Activité 2.4. Tableau <strong>de</strong> bord (suivis et indicateurs)Activité 2.5. Stratégie ou plan local GIZC : un contrat d'espace littoralRésultat 3 : Interv<strong>en</strong>tions spécifiquesActivité 3.1. Plan d'action touristique MoulouyaActivité 3.2. Activités pilotes génératrices d'intérêt et <strong>de</strong> partage <strong>de</strong>s bénéfices200


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalCertaines <strong>de</strong> ces activités ont déjà été évoquées ci-<strong>de</strong>ssus, dans la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la structureorganisationnelle <strong>du</strong> projet (activité 1.1) et le mo<strong>de</strong> d’interaction avec les cibles (activités 1.5, 2.1et 2.2). La logique d’action était la suivante : (Activités 1) une équipe pluridisciplinaire <strong>de</strong>vait êtrecontractée pour réaliser une analyse <strong>de</strong>s acteurs et un diagnostic <strong>de</strong> la zone permettant 1) <strong>de</strong>déterminer les acteurs qu’il était pertin<strong>en</strong>t d’impliquer à la démarche et 2) <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière et <strong>de</strong> déterminer <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>ts pour améliorer la <strong>gestion</strong>.Forte <strong>de</strong> ces élém<strong>en</strong>ts (Activités 2), l’équipe locale <strong>du</strong> projet <strong>de</strong>vait convoquer les acteursid<strong>en</strong>tifiés, avec le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’administration locale (la Province), pour les r<strong>en</strong>dre « responsables »<strong>de</strong> la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong>s activités et <strong>de</strong>s résultats <strong>du</strong> projet. Ces acteurs, membres <strong>de</strong>s comités créésdans le cadre <strong>du</strong> projet, <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t alors participer à l’élaboration d’un Plan <strong>de</strong> GIZC, à l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong>diagnostic GIZC (activité 1.4) réalisé <strong>en</strong> amont et à travers la réunion <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> travail :celui attaché à l’élaboration d’un tableau <strong>de</strong> bord, et le second travaillant sur le Plan <strong>de</strong> GIZC(PGIZC). Le comité (c’est-à-dire les différ<strong>en</strong>ts acteurs) <strong>de</strong>vait alors vali<strong>de</strong>r et adopter le PGIZC,c’est-à-dire s’<strong>en</strong>gager à mettre <strong>en</strong> œuvre les mesures concernant respectivem<strong>en</strong>t les différ<strong>en</strong>tsacteurs ; et par ailleurs, vali<strong>de</strong>r la création d’un comité GIZC qui assurerait le suivi <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong> ces mesures, ainsi que le suivi <strong>de</strong> la zone à l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> tableau <strong>de</strong> bord. Parallèlem<strong>en</strong>t, cesacteurs <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t bénéficier <strong>de</strong> « r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs capacités » (activité 2.3) à travers lesformations prévues à cet effet (Tableau 4.2). Les activités 3 <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être consacrées à la mise <strong>en</strong>place <strong>de</strong>s premières mesures <strong>du</strong> PGIZC, notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s « activités génératrices <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ues ».Tableau 4.2 : Formations disp<strong>en</strong>sées dans le cadre <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (Intermediary report 2,2008)Thème Formateur CiblesNb <strong>de</strong>participantsLieuDate et nb<strong>de</strong> joursGIZCGestion <strong>de</strong>s conflitsAtelier GIZCEchange <strong>de</strong>xpéri<strong>en</strong>ceTunisieEnquête socioéconomiqueActivités génératrices<strong>de</strong> rev<strong>en</strong>us (2sessions)Coordinateur régional <strong>du</strong>SMAP III Moulouya (chef<strong>de</strong> projet TdV) etcoordinateur SMAP TAMembre TdV, consultantsociologue indép<strong>en</strong>dant,consultant <strong>du</strong> GRETPartiespr<strong>en</strong>anteslocales50 Berkane mars 2007(1 jr)ONG locales 28 Berkane novembre2007 (2 jrs)WWF Tunisie Equipe locale 9 El Kala novembre2007 (2 jrs)Coordinatrice régionale<strong>du</strong> SMAP III (chef <strong>de</strong>projet TdV)Etudiantsuniversitaires8 Oujda mars 2008(1 jr)IFAID ONG locales 36 Berkane avril 2008(5 jrs)201


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesSIG Membre TdV Technici<strong>en</strong>s ( ?) 4 <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong>Systèmes dindicateurset <strong>de</strong> suivisGouvernanceCoastal MoralAgreem<strong>en</strong>t (CEL)Ecologues TdVSMAP Nador etMoulouya, Conservatoire,Coordinateur SMAP TAMembre TdV, chargé <strong>de</strong>sPlans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Autorités localeset groupes <strong>de</strong>travailAutorités localeset provincialesEquipe locale <strong>du</strong>projet etautorités localesavril 2008(3 jrs)30 Berkane mai 2008(3 jrs)40 Berkane juin 2008(1 jr)3 Camargue juillet 2008(3 jrs)Systèmes dindicateurset <strong>de</strong> suivisEcologueEquipe locale <strong>du</strong>projet2 Camargue octobre 2008(1 jr)SMAP TA : SMAP technical assistance (coordination <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> programme SMAP III) ; IFAID : Institut <strong>de</strong>Formation et d'Appui aux initiatives <strong>de</strong> Développem<strong>en</strong>tNous avons annoncé dès le début <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> que le projet n’avait pas atteint ses objectifsopérationnels qui étai<strong>en</strong>t la signature d’une Charte Espace Littoral par les acteurs, la constructiond’un comité GIZC (cellule littoral locale), dotée d’un Plan GIZC. Dans la suite <strong>du</strong> texte, nousallons analyser les difficultés conjoncturelles et celles inhér<strong>en</strong>tes à la démarche GIZC qui l’<strong>en</strong> ontempêché, et l’incapacité <strong>du</strong> projet à pro<strong>du</strong>ire un changem<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur<strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> l’estuaire.4.3.1 Les diagnostics GIZC : l’impossibilité <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire les élém<strong>en</strong>ts éclairant lesleviers pour r<strong>en</strong>dre la <strong>gestion</strong> « intégrée »L’analyse <strong>de</strong>s acteurs et le diagnostic socio-économique prévus dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet<strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être les étapes cruciales, réalisées <strong>en</strong> début <strong>de</strong> projet pour <strong>en</strong>suite cibler lesincompatibilités dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière, id<strong>en</strong>tifier et solliciter les acteurs pertin<strong>en</strong>tspour la démarche GIZC. La mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ces activités se heurte à <strong>de</strong>s facteursorganisationnels, financiers et structurels.a) Organisation <strong>de</strong>s activités et insuffisance structurelle <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces requisesL’analyse <strong>de</strong>s acteurs et le diagnostic socio-économique ont d’abord posé <strong>de</strong>s problèmes d’offre<strong>de</strong>s consultants à même <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge ce travail. Selon l’assistante financière au MATEE,l’offre n’intéressait pas car la rémunération proposée était trop faible (assistante administrative,com.pers., 2009). L’équipe locale parle plutôt d’un problème <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong> l’offre qui étaitpeu active, comme pour tous les appels d’offre réalisés par le MATEE (Coordinateur local,com.pers., 2009). Ce n’est qu’après un <strong>de</strong>uxième appel d’offre lancé au début <strong>de</strong> l’année 2008 que202


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalles consultants ont été trouvés, ce qui signifie un retard important par rapport au cal<strong>en</strong>drier et à lalogique <strong>du</strong> projet. Ainsi, l’étu<strong>de</strong> n’a pas pu être utilisée comme base <strong>de</strong> réflexion pour les ateliersparticipatifs, ce qui aurait eu pour effet d’affaiblir la pro<strong>du</strong>ction que les groupes <strong>de</strong> travail ont puréaliser (Final report, 2009). La particularité <strong>de</strong> ce retard connu pour l’analyse <strong>de</strong>s acteurs et lediagnostic socio-économique doit cep<strong>en</strong>dant être relativisé pour <strong>de</strong>ux raisons : 1) le retard estpresque une constante dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> projet, si l’on <strong>en</strong> croit le déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s activités <strong>du</strong>SMAP III. On ne peut donc pas attribuer l’échec d’un projet à un retard conjoncturel, maisplutôt voir ces retards qui concerne généralem<strong>en</strong>t toutes les étapes comme une dim<strong>en</strong>sioninhér<strong>en</strong>te à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> projet. 2) Surtout, la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> temps dans le projet est davantagec<strong>en</strong>trée sur la réalisation <strong>de</strong> toutes les activités comme si elles étai<strong>en</strong>t indép<strong>en</strong>dantes plutôtqu’organisées <strong>de</strong> façon à respecter la logique <strong>de</strong> succession <strong>de</strong>s actions <strong>du</strong> projet. Par exemple, lalogique GIZC voulait que l’analyse <strong>de</strong>s acteurs et le diagnostic socio-économique soi<strong>en</strong>t à la base<strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s comités inter-sectoriels, et puiss<strong>en</strong>t ori<strong>en</strong>ter les problèmes à traiter. Enpratique, les comités ont été constitués à travers les invitations à l’atelier <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t listées parla Cellule Littoral et l’équipe locale <strong>du</strong> projet – ayant certes une connaissance <strong>du</strong> terrain – maisindép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t <strong>du</strong> diagnostic. Dès lors, les acteurs « impliqués » dans le projet sont lesvolontaires parmi les prés<strong>en</strong>ts à l’atelier, et non <strong>de</strong>s acteurs spécifiquem<strong>en</strong>t visés pour uneint<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t pré-déterminé. La constitution <strong>de</strong>s comités sur cette base volontaireaurait pu avoir <strong>du</strong> s<strong>en</strong>s si à côté, un espace était laissé à d’autres mo<strong>de</strong>s d’action ad hoc pouratteindre les « acteurs pertin<strong>en</strong>ts ». Mais cela n’était pas prévu dans le cadre <strong>du</strong> projet SMAP IIIMoulouya, ni dans la plupart <strong>de</strong>s démarches GIZC, selon B. Kalaora (com.pers., 2009) pour qui« il y a une application stricte <strong>du</strong> cadre logique GIZC, mais décontextualisée et sans prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>s aspérités<strong>du</strong> terrain ».De plus, les termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’appel d’offre prévoyai<strong>en</strong>t une équipe pluridisciplinaire.Finalem<strong>en</strong>t ce sont <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>seignants-chercheurs <strong>de</strong> l’Université Mohammed VI d’Oujda qui ontété contractés. L’équipe pluridisciplinaire nationale ou la consultance internationale dépassait lesbudgets 132 et ne répondait pas à la volonté <strong>de</strong> confier la tâche à <strong>de</strong>s experts locaux, connaissant leterrain (Coordinatrice régionale, com.pers., 2009).A ces contraintes organisationnelles et budgétaires doit être ajouté le facteur structurel <strong>de</strong>l’insuffisance <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> profil dans le pays. L’offre <strong>de</strong> consultants est <strong>en</strong> effet très faible.« C’est un vrai marché <strong>de</strong> l’expertise qui fonctionne notamm<strong>en</strong>t par le réseau et le bouche à oreille dans les <strong>de</strong>ux132 La part <strong>de</strong> budget « pays » ayant été confié au part<strong>en</strong>aire marocain, il était dans tous les cas impossible <strong>de</strong>contracter un consultant étranger car les <strong>de</strong>vises marocaines ne sont pas échangeables.203


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taless<strong>en</strong>s, mais <strong>en</strong> général, ce sont toujours les mêmes » (Kalaora, com.pers., 2009 ; Kalaora, 1999), comme onpeut le voir dans le Tableau 4.3 où l’on retrouve les mêmes experts pour les 4 projets ayantrécemm<strong>en</strong>t été développés sur cette zone. Sur ces 4 projets, les consultants contractés pour lesétu<strong>de</strong>s et les diagnostics sont <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignants chercheurs ou <strong>de</strong>s retraités <strong>de</strong> l’administration pourla coordination <strong>de</strong> projet.Tableau 4.3 : Les quatre projets réc<strong>en</strong>ts concernant la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya (Docum<strong>en</strong>t<strong>de</strong> projet MWC, docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP III Moulouya, Brochure et sites web pour les projets DéLIOet ACCMA)Pério<strong>de</strong> 1999-2004Prolongation 2006BailleursBudget totalMedWetCoast SMAP III DéLIO ACCMAMaroc <strong>en</strong> FFEM : 607 471 GEF : 2 190 000 Etat : 1 985 755 Autre :700 000 6 millions d(6 sites)2006 – 2008,Prolongé mars 2009Budget <strong>du</strong> VoletMaroc : 284,427 (Budget total: 1,2 M Contribution CE :971,468)1,2 millions d(2 sites)Coordination PNUD Maroc <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> –Cellule Littoral,Secrétariat détat àl<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t,MATEEExperts –consultantsObjectifs- Enseignantchercheur(EC)écologie (3) ISR(diagnosticécologique),- EC ENFI (2)(diagnostic socioéconomique),- Consultant (1),coord. Moulouya,- EC Oujda (4)1. Développem<strong>en</strong>t etmise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>politique <strong>de</strong>managem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable<strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong>s ZC2. Protection et arrêt<strong>de</strong>s mécanismescausant la perte <strong>de</strong> labiodiversité dans lessites clé.3. Création <strong>de</strong> réseauxet <strong>de</strong> formation pourcontribuer aurapprochem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>smouvem<strong>en</strong>tsméditerrané<strong>en</strong>s pour laBD et les ZH- Consultant (1),coordination locale,- 2 EC GIZC (4)(Université dOujda),- EC (Université dElJadida)Mise <strong>en</strong> place <strong>du</strong>nprocessus <strong>de</strong>concertation et <strong>de</strong>planification côtière <strong>en</strong>fédérant les acteurslocaux. Constitution<strong>du</strong>ne cellule littorallocale dotée <strong>du</strong>n PGIZC2008-2011 2007-2010Gouvernem<strong>en</strong>tmarocain : 690 217US$,PNUD : 270 000 US$960 217 US$(3 sites)PNUD Maroc /Ag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>lOri<strong>en</strong>tal- EC écologie (3) ISR(Institut Sci<strong>en</strong>tifique<strong>de</strong> Rabat)Programme <strong>de</strong>Développem<strong>en</strong>t LocalIntégré, dans lobjectifglobal <strong>de</strong> contribuer auDD <strong>de</strong>s territoires <strong>de</strong> larégion <strong>de</strong> lOri<strong>en</strong>tal.3 sous-objectifs :1. Ré<strong>du</strong>ire la pauvreté<strong>en</strong> créant <strong>de</strong> lemploi et<strong>de</strong>s activitésgénératrices <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>us2. R<strong>en</strong>forcer lagouvernance locale3. Valoriser lesressources naturelles etsauvegar<strong>de</strong>rl<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherchespour le développem<strong>en</strong>tinternational (CRDI,Canada)Departm<strong>en</strong>t forInternationalDevelopm<strong>en</strong>t (DFID,Royaume-Uni).Ecole NationaleForestièredIngénieurs (ENFI)- EC ENFI (2) (EcoleNationale ForestièredIngénieurs)Amélioration <strong>de</strong>sconnaissances et <strong>de</strong> laprise <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>matière <strong>de</strong> CC (zonescôtières <strong>de</strong>s provinces<strong>de</strong> Berkane et Nador)afin <strong>de</strong> :1. Développer larecherche2. R<strong>en</strong>forcer lescapacités d'adaptationau CC <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs3. R<strong>en</strong>forcer lescapacités d'interactiondans le processus <strong>de</strong>prise <strong>de</strong> décisionDéLIO : Programme <strong>de</strong> Développem<strong>en</strong>t Local Intégré <strong>de</strong> l'Ori<strong>en</strong>tal (pnud.org.ma), ACCMA : Adaptationau changem<strong>en</strong>t climatique au Maroc (accma-maroc.com)204


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalCe marché <strong>de</strong> l’expertise est très appar<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant le déroulem<strong>en</strong>t même <strong>de</strong>s projets. P<strong>en</strong>dant lesréunions SMAP III Moulouya, les universitaires d’Oudja veul<strong>en</strong>t être au nombre <strong>de</strong>s expertsreconnus, rev<strong>en</strong>diqu<strong>en</strong>t leur propre expertise et déplor<strong>en</strong>t le fait <strong>de</strong> ne pas être plus sollicités pourles diagnostics. Ce phénomène n’a ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> spécifique au projet SMAP III, <strong>en</strong> effet la mêmeattitu<strong>de</strong> a pu être observée lors <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong>s projets DéLIO et ACCMA auxquelles nousavons eu l’opportunité d’assister. Une certaine énergie est dép<strong>en</strong>sée par ces pot<strong>en</strong>tiels consultantspour décrocher les contrats : les universitaires sont prêts à se déplacer pour assister aux réunions,les coordinateurs sont prêts à jouer les gui<strong>de</strong>s touristiques pour « faire <strong>du</strong> réseau » avec les<strong>gestion</strong>naires <strong>du</strong> PNUD Maroc. C’est ce que J-P. Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995a : 133-134) nomme leprincipe <strong>de</strong> détournem<strong>en</strong>t, qui est l’un « <strong>de</strong>ux principes 133 très généraux [qui] peuv<strong>en</strong>t être dégagésà partir <strong>de</strong> l’infinie variété <strong>de</strong>s comportem<strong>en</strong>ts concrets <strong>de</strong>s cibles face au projet ». La bonneparticipation <strong>de</strong>s universitaires au SMAP III Moulouya louée par les porteurs <strong>du</strong> projet n’est pasuniquem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>e à leur dévouem<strong>en</strong>t à la cause, mais à leur <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> réseau et <strong>de</strong> contrat. « Lesraisons qui font que telles ou telles mesures proposées par les ag<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t sontadoptées par les utilisateurs pot<strong>en</strong>tiels sont plus souv<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> celles invoquées par lesexperts ». Les acteurs utilis<strong>en</strong>t les opportunités fournies par un programme pour les mettre auservice <strong>de</strong> leurs propres objectifs. Ces principes sont selon l’auteur « les formes <strong>de</strong>l’ « appropriation » d’un projet par ses <strong>de</strong>stinataires » (ibid. : 134) que les opérateurs <strong>de</strong> projetappell<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur vœu. « Le paradoxe est que cette appropriation, souhaitée <strong>en</strong> son principe partout opérateur <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t, pr<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s formes qui se retourn<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t contre lesobjectifs et métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s projets… » (ibid. : 134). Dans notre cas, si les acteurs peuv<strong>en</strong>t avoir <strong>de</strong>sobjectifs propres, certains peuv<strong>en</strong>t converger vers ceux <strong>du</strong> projet. En effet, la conservation <strong>du</strong>SIBE <strong>de</strong> la Moulouya fait partie <strong>de</strong>s préoccupations <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> l’Université d’Oujda,selon la manière dont ces personnes interviewées expliqu<strong>en</strong>t volontiers ce problème. De plus,quelle que soit la motivation <strong>de</strong> ces universitaires (ou anci<strong>en</strong>s administratifs), leur volonté <strong>de</strong>participer et d’offrir leur expertise est objectivem<strong>en</strong>t une dynamique positive au regard <strong>de</strong>l’insuffisance <strong>de</strong> l’offre structurelle évoquée.b) Qualité et pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites par les étu<strong>de</strong>s diagnosticsL’analyse <strong>de</strong>s acteurs et le diagnostic socio-économique (rassemblés dans la même étu<strong>de</strong>) n’ontpas donné satisfaction. Le rapport a été retravaillé par la coordinatrice régionale TdV et a été133 Ces <strong>de</strong>ux principes généraux sont l’adoption sélective et le détournem<strong>en</strong>t dont il est question ici.205


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesr<strong>en</strong>voyé aux auteurs pour une amélioration qui aurait été peu substantielle. Il a néanmoins fini parêtre validé <strong>en</strong> juin 2008. Le rapport est <strong>de</strong>scriptif et n’apporte pas d’éclairage sur la compatibilitéou non <strong>de</strong>s activités qui exist<strong>en</strong>t sur la zone <strong>en</strong> question, au regard <strong>de</strong> l’horizon normatif <strong>de</strong><strong>du</strong>rabilité <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> et n’apporte ainsi pas d’élém<strong>en</strong>t au regard <strong>de</strong>s objectifs normatifs <strong>de</strong> laGIZC. Les acteurs concernés par la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière sont bi<strong>en</strong> listés, mais aucun li<strong>en</strong>n’est établi <strong>en</strong>tre eux, les activités et les politiques dont ils sont responsables et les mo<strong>de</strong>sd’interactions <strong>en</strong>tre ces acteurs – qui aurai<strong>en</strong>t pu / dû constituer les voies d’appui <strong>du</strong> projet.Le diagnostic est élaboré à partir <strong>de</strong> données secondaires, il apporte quelques élém<strong>en</strong>tssupplém<strong>en</strong>taires au regard <strong>du</strong> rapport socio-économique réalisé dans le cadre <strong>de</strong> MCW leur ayantété fourni pour capitaliser les travaux existants et aller plus loin. Le travail <strong>de</strong> terrain a été réalisésous la forme d’un travail collectif avec <strong>de</strong>s étudiants emm<strong>en</strong>és sur la zone (Consultants,com.pers., 2009). Mais la qualité <strong>du</strong> rapport est restée insuffisante au regard <strong>de</strong>s termes <strong>de</strong>référ<strong>en</strong>ce, ce qui peut être attribué à d’une part un manque <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>, et d’autre part à unmanque <strong>de</strong> moy<strong>en</strong> (Coordinatrice régionale, coordinateur local, com.pers., 2009). En effet, cesuniversitaires peuv<strong>en</strong>t être <strong>en</strong>seignants dans <strong>de</strong>s formations « GIZC » (ici, le master GIZC àl’Université d’Oujda), ils n’ont jamais été formés eux-mêmes à l’analyse <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Par ailleurs, ils n’ont ni les moy<strong>en</strong>s ni la légitimité pour accé<strong>de</strong>r aux données et informations surla logique <strong>de</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t précise <strong>de</strong>s administrations concernées <strong>de</strong> fait par la zone côtière(Enseignants <strong>de</strong> l’Université d’Oujda, com.pers., 2009).Ne fournissant pas les éclairages pertin<strong>en</strong>ts pour l’action, ces étu<strong>de</strong>s rest<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s « résultats » <strong>du</strong>projet déconnectés <strong>du</strong> système d’action sur lequel ils doiv<strong>en</strong>t agir. C’est <strong>en</strong>core davantage le cas<strong>du</strong> diagnostic touristique qui a été r<strong>en</strong><strong>du</strong> <strong>en</strong> fin <strong>de</strong> projet, sans qu’on n’ait presque jamaisr<strong>en</strong>contré le consultant sur la zone (Acteurs concernés par le projet, com.pers., 2009). « Pourl’étu<strong>de</strong> éco-touristique, le gars n’a pas fait d’analyse, il n’a pas su quoi faire, alors il a fait <strong>du</strong> ‘copier coller’. »(Coordinateur local, com.pers., février 2009). Ce manque <strong>de</strong> connexion <strong>du</strong> consultant avecl’équipe porteuse <strong>du</strong> projet doit cep<strong>en</strong>dant être replacé dans le contexte organisationnel et <strong>de</strong>sdifficultés connues <strong>en</strong>tre l’équipe locale et la cellule nationale (qui s’occupe <strong>de</strong>s contrats avec lesconsultants) (Coordinatrice régionale, com.pers., 2010).Enfin, une autre lacune <strong>de</strong> la connaissance pro<strong>du</strong>ite par les étu<strong>de</strong>s réalisées dans le cadre <strong>du</strong>projet concerne les aspects écologiques et bio-physico-chimiques <strong>du</strong> SIBE. Ici, le problème n’estpas lié à la compét<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s consultants, mais au montage même <strong>du</strong> projet. En effet, un diagnosticécologique ayant été réalisé dans le cadre <strong>du</strong> projet MWC, la coordination régionale TdV aconsidéré qu’il ne fallait pas refaire le travail déjà acquis. Or, <strong>en</strong>tre la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong> ce206


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationaldiagnostic MWC et le montage <strong>du</strong> projet SMAP III, l’écosystème côtier a per<strong>du</strong> 700 ha d’habitats<strong>de</strong> forêt alluviale et <strong>de</strong> sansouires associés aux habitats plus restreints <strong>du</strong> SIBE. Une étu<strong>de</strong>d’impact (dans le cadre <strong>du</strong> projet) aurait dû être réalisée pour déterminer les conditions <strong>de</strong>conservation <strong>de</strong>s zones <strong>en</strong>core non détruites, <strong>en</strong> li<strong>en</strong> avec l’analyse <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.c) Rôle <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans l’analyse <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zonecôtièreLe premier rôle <strong>de</strong> la TdV dans la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s connaissances pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> laGIZC est tout d’abord une responsabilité liée au montage <strong>du</strong> projet et à la rédaction <strong>de</strong>s termes<strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour le recrutem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s consultants réalisée conjointem<strong>en</strong>t avec le part<strong>en</strong>airemarocain (Cellule littoral).Ensuite, il s’agit d’un souti<strong>en</strong> technique. La TdV a proposé une assistance sous la forme d’unstage <strong>de</strong> master 1 réalisé avec le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s chercheurs <strong>de</strong> la TdV (Fabre, 2007). Ce travail a pufournir un cadrage, c’est-à-dire un modèle conceptuel DPSIR 134 pour l’élaboration <strong>du</strong> systèmed’indicateur, <strong>en</strong>suite réalisé par le groupe <strong>de</strong> travail « indicateurs ». La TdV développe ici le mo<strong>de</strong>d’action qu’elle <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d m<strong>en</strong>er <strong>en</strong> région sud <strong>de</strong> la Méditerranée. En outre, une formation sur lesindicateurs a été disp<strong>en</strong>sée par <strong>de</strong>s chercheurs <strong>de</strong> la TdV, parmi d’autres formations (Tableau 4.2)qui constitu<strong>en</strong>t une autre voie par laquelle la TdV apporte son souti<strong>en</strong> technique. Ces formationssont plus ou moins ciblées sur <strong>de</strong>s acteurs particuliers, pour un double objectif d’augm<strong>en</strong>ter lescapacités au regard <strong>du</strong> processus <strong>du</strong> projet (sout<strong>en</strong>ir les acteurs dans la prise <strong>en</strong> main <strong>du</strong> projet) et<strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> réelle (sout<strong>en</strong>ir les acteurs dans une meilleure <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière).Le diagnostic socio-économique fournit un bon cas pour aller plus loin dans la compréh<strong>en</strong>sion<strong>de</strong>s implications <strong>du</strong> rôle « souti<strong>en</strong> technique » <strong>de</strong> la TdV. Au mom<strong>en</strong>t <strong>du</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cetteactivité, la TdV n’avait pas les compét<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> interne 135 par rapport à ces « savoirs technicosci<strong>en</strong>tifiques» (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995a : 141-152) dont elle était pourtant l’ambassa<strong>de</strong>ur.Consci<strong>en</strong>te <strong>du</strong> manque <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s consultants contractés, elle a sollicité <strong>de</strong>s experts <strong>du</strong>Groupe <strong>de</strong> recherche et d’échange technologique (GRET) pour leur apporter un souti<strong>en</strong>méthodologique. Ce souti<strong>en</strong> n’a pas été valorisé par les consultants locaux qui l’ont mal perçu,134 Le modèle « Driver, Pression, State, Impact, Responses » est proposé par l’Ag<strong>en</strong>ce Europé<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>l’Environnem<strong>en</strong>t qui a ét<strong>en</strong><strong>du</strong> le modèle Pression-Etat-Réponse <strong>de</strong> l’OCDE. C’est un modèle visant à évaluer lesinteractions causales <strong>en</strong>tre la société et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (http://glossary.eea.europa.eu/EEAGlossary/D/DPSIR).135 Dans le précéd<strong>en</strong>t chapitre (Chapitre 3), nous avons vu que les sci<strong>en</strong>tifiques et technici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la TdV développeune connaissance <strong>du</strong> système socio-politique au fil <strong>de</strong> leurs expéri<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> Camargue, mais au mom<strong>en</strong>t <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet SMAP, aucun d’<strong>en</strong>tre eux n’avait les compét<strong>en</strong>ces « disciplinaires » pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> uneanalyse <strong>de</strong>s acteurs et <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> cette zone où ils n’étai<strong>en</strong>t jamais interv<strong>en</strong>us auparavant. Le statut <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces disponibles <strong>en</strong> interne à la TdV sera plus amplem<strong>en</strong>t étudié dans le chapitre 6.207


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesalors qu’ils ont à coeur <strong>de</strong> prouver qu’ils sont <strong>de</strong>s consultants nationaux fiables et disponiblespour d’autres expertises. Comme indiqué plus haut, la TdV qui avait <strong>en</strong>tre temps recruté lanouvelle coordinatrice régionale qualifiée <strong>en</strong> socio-économie, n’a pu que corriger <strong>de</strong> façonmarginale le rapport r<strong>en</strong><strong>du</strong>. Ainsi, la TdV a prévu une activité c<strong>en</strong>trale dans la logique <strong>du</strong> projet,qui se confronte à un manque <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce, aussi bi<strong>en</strong> au niveau <strong>de</strong>s consultants s’étantprés<strong>en</strong>tés qu’à son propre niveau (<strong>du</strong> moins lors <strong>du</strong> démarrage <strong>du</strong> projet). Pour B. Kalaora(com.pers., 2009), cette configuration n’est pas rare : « c’est la première fois que la TdV fait un projetGIZC. Mais quelle est sa capacité à décrypter les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre les acteurs, le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’administration,etc ?! C’est là que le bât blesse, on met <strong>de</strong>s organisations qui début<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>s projets aussi importants. Pour leSMAP Nador, c’est pareil, c’est une ONG espagnole avec <strong>de</strong>s biologistes. »Notons surtout que la logique théorique qui r<strong>en</strong>dait ce diagnostic pertin<strong>en</strong>t pour ori<strong>en</strong>ter <strong>en</strong>suitel’action afin <strong>de</strong> changer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière a été vite oubliée sous les contraintesorganisationnelles évoquées plus haut. Or, la TdV aurait pu choisir <strong>de</strong> s’investir davantage dansce travail dans le s<strong>en</strong>s où c’était l’opportunité <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à l’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective pourobt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> réflexion pour les voies d’action à mettre <strong>en</strong> œuvre dans le cadre <strong>de</strong> ceprojet ou plus largem<strong>en</strong>t pour son action au Maroc.Cette vision stratégique <strong>du</strong> diagnostic n’est pas celle qui prédomine dans les préoccupationsexprimées par la coordinatrice régionale TdV. En effet, le premier <strong>en</strong>jeu était <strong>de</strong> s’appuyer sur <strong>de</strong>sexperts marocains, qui connaiss<strong>en</strong>t le système administratif et le fonctionnem<strong>en</strong>t général <strong>de</strong> leurpays, et locaux, « car lors <strong>du</strong> projet MWC, les locaux se sont plaints que les consultants v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t toujours <strong>de</strong>Rabat » (Coordinatrice régionale, com.pers., 2010). La TdV se trouve donc dans une postureambiguë que J-P Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995a) a bi<strong>en</strong> expliqué à travers ses recherches sur lesrelations <strong>en</strong>tre les pratici<strong>en</strong>s porteurs <strong>de</strong> projets <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t et les <strong>de</strong>stinataires <strong>de</strong> cesprojets.Ces pratici<strong>en</strong>s sont mus par <strong>de</strong>ux idéologies complém<strong>en</strong>taires mais contradictoires : 1)L’idéologie populiste mettant au-<strong>de</strong>vant les capacités <strong>de</strong>s « pauvres » et qui prône un appui sur lesressources, les capacités créatrices et adaptatives <strong>du</strong> peuple. 2) L’idéologie misérabiliste qui sefocalise sur les manques <strong>du</strong> peuple, sous-estime son autonomie et le voit comme victime, mettantfinalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> avant la sujétion <strong>de</strong>s « pauvres » (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995a).On retrouve cette contradiction dans le cas <strong>de</strong> notre problématique <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> d’un territoirecôtier. Cet objectif <strong>de</strong> participation <strong>de</strong>s acteurs locaux vi<strong>en</strong>t <strong>du</strong> souci porté à leur appropriation<strong>de</strong>s savoirs techniques apportés par le projet pour qu’ils puiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge euxmêmesles changem<strong>en</strong>ts visés par le projet. Ceci est l’objectif procé<strong>du</strong>ral sous-jac<strong>en</strong>t à la GIZC,selon lequel la procé<strong>du</strong>re (participative) doit être respectée, car c’est elle qui mène aux résultats208


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalescomptés. Et cela dans le souci <strong>de</strong> ne pas imposer la vision occid<strong>en</strong>tale : « avant, on faisait lesprojets <strong>en</strong> décidant pour eux. Là, on n’est plus dans cette logique. On les accompagne et on les souti<strong>en</strong>t au niveautechnique » (Coordinatrice régionale, com.pers., 2010). Pourtant, l’interv<strong>en</strong>tion même à travers leprojet met ses porteurs inexorablem<strong>en</strong>t dans la posture selon laquelle le changem<strong>en</strong>t « impliqu<strong>en</strong>écessairem<strong>en</strong>t une interv<strong>en</strong>tion extérieure, et suppose un transfert <strong>de</strong> savoirs et <strong>de</strong> ressources »(Coordinatrice régionale, com.pers., 2010).4.3.2 L’autonomisation <strong>du</strong> projet contre une vraie participation, l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prisecontre une vraie insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Le déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s premières étapes <strong>de</strong> diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone v<strong>en</strong>ant d’être expliquénous a révélé l’exist<strong>en</strong>ce d’une t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s problèmes organisationnels et structurels (offre<strong>de</strong> consultant, recrutem<strong>en</strong>t, etc.) et <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> capacité d’insertion dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> (incapacité <strong>de</strong>s consultants à obt<strong>en</strong>ir les informations et <strong>de</strong> réaliser un travail auprès <strong>de</strong>sadministrations responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>). Nous allons pouvoir expliquer ce double problèmed’autonomisation <strong>du</strong> projet et d’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> abordant les étapessuivantes <strong>de</strong> la consultation <strong>de</strong>s acteurs et <strong>de</strong> la rédaction d’un plan GIZC.a) L’autonomisation <strong>du</strong> projet pour surmonter les difficultés organisationnellesLe projet est une organisation qui a un fonctionnem<strong>en</strong>t et une dynamique propres constituantune <strong>de</strong>s dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> sa cohér<strong>en</strong>ce (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995a). Nous observons cet état <strong>de</strong> faitsur le projet SMAP III Moulouya, où pour t<strong>en</strong>ir cette cohér<strong>en</strong>ce, les porteurs <strong>du</strong> projet ontt<strong>en</strong>dance à conc<strong>en</strong>trer leurs efforts sur les aspects organisationnels.Comme toute organisation, le projet s’accompagne d’effets <strong>de</strong> système intrinsèques (Crozier &Friedberg, 1977) qui r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t la réalisation fidèle <strong>du</strong> projet tel que prévu « sur le papier »impossible. Les relations <strong>en</strong>tre le part<strong>en</strong>aire marocain (la Cellule littoral nationale) et l’équiperecrutée pour exécuter le projet ont été difficiles (selon l’équipe), ce qui a eu <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ceslour<strong>de</strong>s sur la réalisation <strong>de</strong>s activités (qui nécessit<strong>en</strong>t la validation <strong>de</strong> la Cellule littoral) et lamotivation <strong>de</strong> l’équipe locale. « Moi je ne sais pas pourquoi j’ai été recruté pour ce projet, je n’ai ri<strong>en</strong> fait surce projet ! La coordination locale est presque anéantie. Je peux citer <strong>de</strong>s c<strong>en</strong>taines d’exemples : chaque fois qu’onveut pr<strong>en</strong>dre un r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous, il faut une autorisation qui met un mois à arriver. J’ai <strong>de</strong>mandé noir sur blanc ladélégation <strong>de</strong> cette tâche, au moins pour régler les r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous avec la Province. Et il y a beaucoup d’autres209


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesproblèmes avec l’administration c<strong>en</strong>trale avec toujours <strong>de</strong>s retards flagrants. Par exemple, pour le recrutem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>consultant pour le Plan GIZC, on a <strong>en</strong>voyé les termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> avril 2008, l’annonce a été publiée <strong>en</strong> août !Je ne sais pas pourquoi ils agiss<strong>en</strong>t comme ça, c’est <strong>du</strong> laisser-aller, ils s’<strong>en</strong> fout<strong>en</strong>t carrém<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet. Et quandils font, ils font les choses à la va-vite. Au niveau <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, tu ne trouveras jamais <strong>de</strong>s spécialistes : [Ledirecteur] est juriste, [l’assistante administrative] (chargée <strong>du</strong> volet financier <strong>du</strong> SMAP III Moulouya) est uneanci<strong>en</strong>ne prof d’anglais. Elle fait <strong>de</strong>s blocages par manque <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce. Vraim<strong>en</strong>t, la TdV est tombée sur undépartem<strong>en</strong>t !... » (Coordinateur local, com.pers., février 2009). Si les responsables <strong>du</strong> projet auniveau <strong>de</strong> la Cellule littoral ne reconnaiss<strong>en</strong>t pas ces difficultés (com.pers. 2009), la coordinatricerégionale conclut néanmoins que « le projet a souffert d’un manque <strong>de</strong> clarté dans les attributionsrespectives <strong>du</strong> part<strong>en</strong>aire contracté (le MATEE) et <strong>de</strong> l’équipe locale chargée <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>du</strong> projet, qui s’est avéré très problématique dans la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong>s activités et les <strong>de</strong>ux parties s’<strong>en</strong>r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t la responsabilité. » (Final report, 2010). Les opérateurs <strong>en</strong>grang<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’expéri<strong>en</strong>ce au fil<strong>de</strong> leur carrière et <strong>de</strong> telles améliorations peuv<strong>en</strong>t sans doute limiter les effets <strong>de</strong> système négatifs(au s<strong>en</strong>s croziéri<strong>en</strong>). Mais la plupart reste contextuelle et particulière à chaque situation et doncincompressible. Il n’<strong>en</strong> reste pas moins que dans le cas qui nous occupe, les difficultés inhér<strong>en</strong>tesà la dynamique <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre organisationnelle <strong>du</strong> projet incit<strong>en</strong>t l’équipe locale à seconc<strong>en</strong>trer sur cette dynamique interne, au détrim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’interaction avec les acteurs <strong>du</strong> système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière, qui est pourtant l’ess<strong>en</strong>ce même <strong>du</strong> projet. C’est le paradoxe <strong>de</strong>l’autonomisation <strong>du</strong> projet : pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> le projet, ses aspects organisationnels pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t le<strong>de</strong>ssus et le projet s’autonomise. Mais si le projet s’autonomise, il ne s’intègre plus dans lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> dans lequel il doit agir.b) L’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la MoulouyaParallèlem<strong>en</strong>t, l’équipe <strong>du</strong> projet n’a pas les capacités statutaires pour mobiliser les acteursresponsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone et pour obt<strong>en</strong>ir les informations nécessaires à laconstruction <strong>de</strong>s actions. Ils se confront<strong>en</strong>t à une abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>effective.L’incapacité <strong>de</strong> l’équipe à obt<strong>en</strong>ir les données nécessaires à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projetOutre le fait que le part<strong>en</strong>aire responsable <strong>du</strong> projet (Cellule littoral nationale) sout<strong>en</strong>ait peul’équipe locale, sa capacité <strong>de</strong> la légitimer était insuffisante au regard <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res quis’impos<strong>en</strong>t pour toute action dans le système bureaucratique marocain. Le coordinateur <strong>de</strong>210


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationall’équipe locale, retraité <strong>du</strong> Haut Commissariat aux Eaux et Forêts, connaît bi<strong>en</strong> (voire est familieravec) les responsables <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes administrations 136 . Il n’est pourtant pas <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong>surmonter la difficulté d’obt<strong>en</strong>ir les données requises pour alim<strong>en</strong>ter le tableau <strong>de</strong> bord (lesystème d’indicateurs pour le suivi <strong>de</strong> la zone côtière) auprès <strong>de</strong>s administrations. Seulem<strong>en</strong>t 5indicateurs sur 21 étai<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>seignés à la fin <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>du</strong> projet.L’incapacité <strong>de</strong> l’équipe à impliquer les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effectiveL’exemple <strong>de</strong>s données pour le suivi <strong>de</strong> la zone est problématique, mais reste <strong>de</strong> moindreimportance par rapport à l’incapacité structurelle <strong>du</strong> projet à convoquer les acteurs pertin<strong>en</strong>ts auregard <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone côtière. Ainsi, on note l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> responsables privésimpliqués dans la construction et l’aménagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la station touristique dans les événem<strong>en</strong>tsparticipatifs (réunions et groupes <strong>de</strong> travail). L’implantation <strong>de</strong> la station touristique étantl’élém<strong>en</strong>t modifiant le plus la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone et ayant <strong>de</strong> loin le plus d’impacts <strong>en</strong> termesd’utilisation <strong>du</strong> sol, <strong>de</strong> modifications <strong>de</strong> l’hydrosystème, <strong>de</strong> pollution et d’utilisation <strong>de</strong>sressources : son abs<strong>en</strong>ce met le projet <strong>en</strong> contradiction par rapport à ses principes fondateurs. Lecoordinateur leur a bi<strong>en</strong> r<strong>en</strong><strong>du</strong> visite accompagné d’un présid<strong>en</strong>t d’une association locale <strong>en</strong>début <strong>de</strong> projet, et le promoteur a bi<strong>en</strong> reçu <strong>de</strong>s invitations au début <strong>du</strong> projet (jusqu’à uncourrier à ses représ<strong>en</strong>tants nationaux) mais la démarche est restée sans suite. Les acteurs locaux(notamm<strong>en</strong>t les ONG locales agissant dans le domaine <strong>de</strong> la s<strong>en</strong>sibilisation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale)ont d’ailleurs bi<strong>en</strong> noté cette contradiction vu l’impact avéré et d’autres impacts prévus <strong>de</strong> lastation touristique sur la zone. Mais « l’équipe locale avait peut-être raison d’être prud<strong>en</strong>te par rapport à lazone <strong>de</strong> construction car au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> la forêt, le conflit était très chaud » (Coordinatricerégionale, com.pers., 2010). Il est néanmoins intéressant <strong>de</strong> noter que les porteurs <strong>du</strong> projetdéplorai<strong>en</strong>t cette « cristallisation » <strong>du</strong> débat sur la station touristique, « ce qui <strong>en</strong>travait le bondéroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s activités », alors que ces rev<strong>en</strong>dications <strong>de</strong>s participants r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t justem<strong>en</strong>t auxprincipes <strong>de</strong> la GIZC selon lesquels toutes les activités sectorielles doiv<strong>en</strong>t être impliquées, et àplus forte raison les activités dominantes <strong>en</strong> terme d’influ<strong>en</strong>ce sur l’état écologique <strong>de</strong> la zone <strong>en</strong>question.La capacité <strong>de</strong> l’équipe locale à impliquer les autres acteurs (notamm<strong>en</strong>t les administrationslocales) à la démarche n’était pas beaucoup plus forte. Nous avons expliqué que la Province estl’administration locale qui prési<strong>de</strong> le comité sectoriel constitué pour le projet et que dans les <strong>de</strong>uxpremières années <strong>du</strong> projet, le Secrétaire général n’était lui-même pas intéressé par le projet, ce136 Comme l’indique la facilité avec laquelle il a pu obt<strong>en</strong>ir pour nous <strong>de</strong>s r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous avec <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong>sdiffér<strong>en</strong>tes administrations pour la réalisation <strong>de</strong> nos <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s.211


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesqui explique sa faible implication. Mais malgré l’intérêt manifesté par le nouveau Secrétairegénéral arrivé au début <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière année, son autorité reste insuffisante pour convoquer lesacteurs réellem<strong>en</strong>t responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone côtière. Les représ<strong>en</strong>tants <strong>de</strong>sadministrations – quand ils étai<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>ts aux réunions – étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s subordonnés n’ayantaucun pouvoir <strong>de</strong> parole ni <strong>de</strong> décision. Ils v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t pour « être informés » <strong>de</strong>s projets ayant lieudans la région et non pour participer activem<strong>en</strong>t à une démarche <strong>de</strong> co-construction d’unprogramme d’action (Administrations, com.pers. 2009). Ainsi, le comité intersectoriel créé dans lecadre <strong>du</strong> projet ne fonctionne pas p<strong>en</strong>dant le projet ; et par voie <strong>de</strong> conséqu<strong>en</strong>ce, il n’a aucunechance <strong>de</strong> per<strong>du</strong>rer au-<strong>de</strong>là <strong>du</strong> projet (ce qui est pourtant un <strong>de</strong>s objectifs <strong>du</strong> projet : mettre <strong>en</strong>place une « structure GIZC » pér<strong>en</strong>ne).c) R<strong>en</strong>forcer l’autonomisation <strong>du</strong> projet pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> toutes les activitésmalgré l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>Les comités participatifs exist<strong>en</strong>t donc – les séances ont bi<strong>en</strong> lieu - , mais ne fonctionn<strong>en</strong>t pas.Cette abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective pousse le projet à s’autonomiser<strong>en</strong>core davantage pour, coûte que coûte, m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> toutes les étapes prévues. Ainsi, toutesactivités <strong>du</strong> projet sont réalisées, mais se pass<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute intégration par lesadministrations sectorielles. Il y a un décrochage <strong>en</strong>tre le projet qui fonctionne sur lui-même et lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’il cherche à pénétrer qui va se poursuivre jusqu’à la rédaction <strong>du</strong> PlanGIZC qui <strong>de</strong>vait déterminer l’av<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone.En effet, les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la non-implication <strong>de</strong>s acteurs et administrations localesresponsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière sont particulièrem<strong>en</strong>t visibles dans l’élaboration etl’accueil <strong>du</strong> Plan GIZC. Selon le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, le plan GIZC <strong>de</strong>vait être issu <strong>du</strong> travail <strong>de</strong>sgroupes (groupe « indicateur » et groupes 137 « Plan local GIZC ») constitués lors <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong>lancem<strong>en</strong>t, ce travail <strong>de</strong>vant s’appuyer sur l’analyse <strong>de</strong>s acteurs et le diagnostic socio-économique.L’équipe locale <strong>de</strong>vait alors rédiger le Plan GIZC et la Charte Espace Littoral à partir <strong>de</strong>s mesuresproposées par les différ<strong>en</strong>ts groupes <strong>de</strong> travail. Le dysfonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travailsurtout dû à l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s acteurs sectoriels, mais aussi à un manque d’animation (<strong>du</strong>e àl’incompét<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’animateur <strong>de</strong> l’équipe locale) et un manque <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> pouvoir <strong>de</strong>spersonnes prés<strong>en</strong>tes <strong>en</strong>traîn<strong>en</strong>t un échec <strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> Plan GIZC au regard <strong>de</strong>s objectifs137 Le groupe « Plan local GIZC » a été subdivisé <strong>en</strong> sous-groupes selon les 6 thèmes suivants : utilisation <strong>du</strong> sol etinfrastructures, <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’eau et pollution, tourisme, socio-économie et activités génératrices <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ues,biodiversité et aires protégées.212


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international<strong>de</strong> la doctrine. En effet, le Plan GIZC n’a pas pu être élaboré à partir <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>ctions <strong>de</strong>sgroupes <strong>de</strong> travail (bi<strong>en</strong> qu’elles y ai<strong>en</strong>t été intégrées), mais est surtout basé sur le diagnosticsocio-économique et la métho<strong>de</strong> <strong>du</strong> consultant national chargé <strong>de</strong> ce travail. En effet, l’équipelocale a proposé d’utiliser le budget restant pour contracter un consultant pour la rédaction <strong>du</strong>Plan GIZC (Coordinatrice régionale, com.pers. 2010). Un <strong>en</strong>seignant-chercheur <strong>de</strong> l’Universitéd’El Jadida a été recruté par le MATEE parce qu’il avait déjà réalisé le Plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>d’Essaouira et <strong>de</strong> M’diq <strong>en</strong> li<strong>en</strong> avec la Cellule Littoral nationale et qu’il était externe à la zone,son indép<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>vant favoriser la validation par les acteurs locaux (Cellule littoral nationale,com.pers., 2009). Lors <strong>de</strong> la prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> Plan GIZC, les acteurs prés<strong>en</strong>ts ont reproché auconsultant <strong>de</strong> n’avoir r<strong>en</strong>contré aucun acteur susceptible d’être concerné par les mesures qu’ilcont<strong>en</strong>ait. Il s’est déf<strong>en</strong><strong>du</strong> d’avoir élaboré « un rapport dans un bureau » puisque 3 réunionsspécifiques avai<strong>en</strong>t eu lieu (<strong>en</strong>tre novembre 2008 et janvier 2009) pour la rédaction et la validationpar les acteurs locaux <strong>de</strong> ce rapport.En somme les acteurs qui ont passivem<strong>en</strong>t (par leur abs<strong>en</strong>ce ou par le fonctionnem<strong>en</strong>t cloisonné<strong>de</strong> leurs institutions) résisté au projet reproch<strong>en</strong>t à l’équipe locale et au consultant <strong>de</strong> s’êtreautonomisés pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> toutes les étapes <strong>du</strong> projet. « Les plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, c'est fait dans lebureau. On nous a collé <strong>de</strong>s actions qui ne correspond<strong>en</strong>t pas à nos prérogatives. Elles ne seront pas réalisées »(Chargé <strong>de</strong>s ZH au Haut Commissariat aux Eaux et Forêts <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal, com.pers., mars 2009).« Ce n’est pas un plan <strong>de</strong> direction pour nous, on ne peut pas les suivre, et quand on voit les montants que celareprés<strong>en</strong>te ! » [l’interviewé évoque ici les montants élevés que coûterait la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s mesuresproposées dans le plan GIZC]. « De toute façon, il n’y a pas d’action prévue pour nous dans le Plan GIZC,alors qu’on gère <strong>du</strong> territoire, le consultant aurait pu v<strong>en</strong>ir nous voir ! » (Chargé <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>l’Ag<strong>en</strong>da 21, IRATEO, com.pers., mars 2009). Au final, le Plan GIZC a été élaboré presque sansla participation <strong>de</strong>s administrations et <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs sectoriels. Les personnes interrogéesdans les différ<strong>en</strong>tes administrations expliqu<strong>en</strong>t ainsi l’impossibilité pour elles <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>compte les mesures proposées dans le Plan GIZC car il est élaboré <strong>de</strong> façon externe etcomplètem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> planification propres à ces administrations. Comm<strong>en</strong>ous l’avons vu, le projet n’a <strong>en</strong> effet pas accès à ces administrations et pas <strong>de</strong> prise sur leursprocé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> planification interne.Un autre phénomène vi<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>forcer cette abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise sur les administrations : elles peuv<strong>en</strong>têtre elles-mêmes part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> projets internationaux <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t ou <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t<strong>du</strong>rable. Leur prop<strong>en</strong>sion à participer à d’autres projets <strong>en</strong> est d’autant plus ré<strong>du</strong>ite. « Dans le PlanGIZC, on trouve <strong>de</strong>s actions pour l’Ag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal. Mais c’est l’ADO qui développe le213


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesprojet DéLIO, donc on la met dans les actions [pour le SMAP], mais elle a déjà un projet à financer [pour leDéLIO] ! » (Chargé <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> l’Ag<strong>en</strong>da 21, IRATEO, com.pers., mars 2009).d) L’ajournem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la signature <strong>de</strong> la Charte Espace Littoral et le dévoilem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s stratégies d’usage par les différ<strong>en</strong>ts acteursLors <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> signature <strong>de</strong> la Charte Espace Littoral (CEL, qui compr<strong>en</strong>d la constitutiond’une cellule littoral locale), seulem<strong>en</strong>t 31 personnes étai<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tes 138 (ce qui est faible parrapport aux 120 prés<strong>en</strong>ts à l’atelier <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t) : 12 opérateurs <strong>du</strong> projet (part<strong>en</strong>aires, équipelocale), 3 <strong>en</strong>seignants chercheurs consultants pour le projet, 5 membres d’ONG locales, 3étudiants ; sur les 7 personnes restantes, il y avait un employé <strong>de</strong> l’ORMVAM 139 et un <strong>de</strong>l’IRATEO 140 , sans attribution suffisante pour pouvoir signer. Le Plan GIZC et la CEL aurai<strong>en</strong>tpu être validés et signés lors <strong>de</strong> cet atelier, mais l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> signature avait per<strong>du</strong> sa substance étantdonnée la composition <strong>de</strong> l’assemblée, sans prise sur les activités sectorielles composant la<strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone côtière.Cet atelier <strong>de</strong> signature <strong>du</strong> 2 mars 2009 a été rythmé par une série <strong>de</strong> rebondissem<strong>en</strong>ts. Avantd’<strong>en</strong>trer <strong>en</strong> salle, les ONG locales m<strong>en</strong>açai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ne pas signer la CEL car le texte était trop peuambitieux sur le plan <strong>de</strong> la conservation <strong>du</strong> SIBE au regard <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux liés à la stationtouristique : le plan ne prévoyait pas <strong>de</strong> mesure ferme <strong>de</strong> régulation <strong>de</strong> la fréqu<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> SIBEet <strong>du</strong> passage d’<strong>en</strong>gins motorisés. Ils dénonçai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> garantie sur les mesuresprévues pour maîtriser la qualité <strong>de</strong> l’eau rejetée dans la Moulouya (pestici<strong>de</strong>s dans les golfs,polémique sur le sous dim<strong>en</strong>sionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la station d’épuration <strong>de</strong> la zone touristique) et <strong>du</strong>débit minimum laissé à l’estuaire. Les acteurs et administrations sectorielles étai<strong>en</strong>t abs<strong>en</strong>ts, et lecomble : le Secrétaire général <strong>de</strong> la Province – <strong>de</strong>vant prési<strong>de</strong>r les réunions SMAP III – étaitempêché par une réunion imprévue pour l’inauguration <strong>de</strong> la station touristique. Son arrivée à12h15 et son opposition inatt<strong>en</strong><strong>du</strong>e à la signature <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts ont décl<strong>en</strong>ché une discussionautour <strong>de</strong> l’intérêt d’un tel Plan GIZC et <strong>de</strong> la CEL. Les différ<strong>en</strong>ts acteurs se sont exprimés surleurs visions respectives <strong>du</strong> projet et sur ce qu’on peut appeler leurs théories d’usage. Nousintro<strong>du</strong>isons ce terme pour désigner la façon dont les acteurs (porteurs <strong>du</strong> projet ou non)peuv<strong>en</strong>t se saisir <strong>du</strong> projet dans l’idée que : 1) pour que le projet soit utile, il faut que les acteurs138 Certaines administrations ont reçu le PGIZC et l’invitation plusieurs jours après la date <strong>de</strong> l’atelier, dû à unemauvaise <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> cal<strong>en</strong>drier <strong>de</strong> la part <strong>du</strong> service <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Province chargé <strong>de</strong>s <strong>en</strong>vois, ou <strong>de</strong>sdélais <strong>de</strong>s services postaux. Ces responsables <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes administrations expliqu<strong>en</strong>t qu’ils n’aurai<strong>en</strong>t « <strong>de</strong> toutefaçon pas signé car ces mesures ne r<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t pas dans leurs procé<strong>du</strong>res propres » (com.pers., 2009)139 Office régional <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> valeur agricole <strong>de</strong> la Moulouya.140 Inspection Régionale <strong>de</strong> l’Aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Territoire et <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Ori<strong>en</strong>tal.214


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationals’<strong>en</strong> saisiss<strong>en</strong>t. 2) Pour qu’ils s’<strong>en</strong> saisiss<strong>en</strong>t, ils doiv<strong>en</strong>t avoir eux-mêmes une idée <strong>de</strong> comm<strong>en</strong>t leprojet peut (leur) servir. Ces idées sont les théories d’usage <strong>de</strong>s acteurs. Dans le cas qui nousoccupe, nous avons constaté que plusieurs acteurs clé ont exprimé <strong>de</strong>s théories d’usage trèsdiffér<strong>en</strong>tes.1. Le Secrétaire général <strong>de</strong> la Province invoque une logique réglem<strong>en</strong>taire, qu’il aurait voulu voirappliquée : « La CEL telle qu’elle est prés<strong>en</strong>tée, c’est bi<strong>en</strong>, mais on pourrait l’<strong>en</strong>richir avec <strong>de</strong>s actions, <strong>de</strong>s<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts effectifs pour les différ<strong>en</strong>ts acteurs. Les acteurs doiv<strong>en</strong>t s’<strong>en</strong>gager. Il y a <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires très importantsqui doiv<strong>en</strong>t signer : le Haut Commissariat aux eaux et forêts, la Direction régionale <strong>du</strong> tourisme, l’administration<strong>de</strong> l’équipem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la zone maritime… C’est là une nouvelle lecture <strong>de</strong> la CEL, j’<strong>en</strong> convi<strong>en</strong>s, mais ilfaut la r<strong>en</strong>dre opposable. Car si on signe un projet avec <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> faire, on va se retrouver <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>scontraintes juridiques. Donc il faut que ce soit opposable pour que la Cellule littoral locale ait la capacité <strong>de</strong> faireles choses. Nous voulons faire signer la Charte le plus rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t possible, dès la semaine prochaine, nous allonspr<strong>en</strong>dre contact avec les autres part<strong>en</strong>aires pour qu’ils s’<strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t, car il faut que la Cellule littoral soit viable. On aune responsabilité commune et partagée, il faut que tous les acteurs voi<strong>en</strong>t que les autres se sont <strong>en</strong>gagés. »(Secrétaire général <strong>de</strong> la Province <strong>de</strong> Berkane, interv<strong>en</strong>tion publique, 2009). Le secrétaire généralindique ainsi que s’il n’y a pas d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t valable d’un point <strong>de</strong> vue juridique, il ne peut pasagir. Toutefois, on ne sait pas jusqu’où le Secrétaire général croyait à ce qu’il disait lorsqu’ils’<strong>en</strong>gageait à contacter et convoquer les administrations, les communes et tous les acteursresponsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone, cela dans l’espace d’une semaine.2. Le directeur <strong>de</strong> la Direction <strong>de</strong> la réglem<strong>en</strong>tation et <strong>du</strong> contrôle <strong>du</strong> Secrétariat <strong>de</strong>l’Environnem<strong>en</strong>t (part<strong>en</strong>aire <strong>de</strong> la Cellule littoral nationale) n’a pas manqué <strong>de</strong> saluer cette« initiative et cette façon <strong>de</strong> voir les choses », « la Province met la barre beaucoup plus haut et c’est un changem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> cap. Cette démarche implique une concertation beaucoup plus importante et un réel comité <strong>de</strong> rédaction pour leCEL ». Pour lui, la charte sert à « afficher <strong>de</strong>s objectifs, ce qui est une façon <strong>de</strong> faire partout dans le mon<strong>de</strong>, <strong>en</strong>France, même au Maroc », « nous avons la chance <strong>de</strong> pouvoir afficher une volonté collective <strong>en</strong>tre l’administration,la société civile et les ONG qui ont été <strong>de</strong>man<strong>de</strong>use <strong>de</strong> ça. Certes, la CEL ne fait pas force <strong>de</strong> loi, ce n’est pas undocum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce, mais c’est une proposition. De même, la charte <strong>de</strong> l’aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> territoire n’a pas <strong>de</strong>valeur juridique, pourtant, les ministres l’ont signée et s’y sont référés » (Interv<strong>en</strong>tion publique, mars 2009).Selon le directeur <strong>de</strong> la Cellule littoral national, l’<strong>en</strong>jeu est donc <strong>de</strong> mettre ce PGIZC et la CEL àdisposition <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes administrations responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière (direction<strong>de</strong> l’urbanisme, <strong>du</strong> tourisme, ag<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t, office <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> valeur agricole etag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> bassin), et libre à eux <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> saisir. Cette théorie d’usage <strong>du</strong> PGIZC est égalem<strong>en</strong>t celle<strong>du</strong> coordinateur <strong>de</strong> l’équipe locale : l’avantage <strong>de</strong> la proposition d’un programme, c’est que« parfois les administrations sont prises <strong>de</strong> court pour proposer leur programme ou leur plan, elles se serv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce215


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesqui leur tombe sous la main, c’est comme ça que le PGIZC peut être intégré ». Cette logique n’est pasins<strong>en</strong>sée, mais les activités mises <strong>en</strong> œuvre p<strong>en</strong>dant le projet n’ont pas été ori<strong>en</strong>tées <strong>de</strong> façon àid<strong>en</strong>tifier et à saisir ces opportunités (par exemple, s’assurer que le rapport va bi<strong>en</strong> dans les mains<strong>du</strong> responsable chargé <strong>de</strong> la planification). On repère une autre théorie d’usage exprimée par ledirecteur <strong>de</strong> la Cellule littoral nationale qui r<strong>en</strong>voie à son <strong>en</strong>jeu propre <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r cette <strong>en</strong>titéréc<strong>en</strong>te au sein <strong>du</strong> Ministère : « étant donné qu’au Maroc, nous n’avons pas <strong>de</strong> loi littoral… On est assezavancés par rapport à la loi [qui se trouve bloquée dans <strong>de</strong>s négociations interministérielles], mais aulieu d’att<strong>en</strong>dre, nous p<strong>en</strong>sons qu’il faut impulser une dynamique par le bas avec les cellules littoral locales »(Interv<strong>en</strong>tion publique, mars 2009). C’est la « stratégie <strong>de</strong> consolidation <strong>du</strong> courtier » (responsabl<strong>en</strong>ational ou local <strong>de</strong>s projets) expliquée par J-P Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995a : 164), qui <strong>en</strong> s’appuyantsur le projet, cherche à asseoir sa place au niveau politique et institutionnel.3. La troisième théorie d’usage est celle <strong>du</strong> <strong>de</strong>uxième responsable <strong>de</strong> la Cellule littoral nationalepour qui l’adoption <strong>de</strong> la Charte constitue « un programme d’action pour lever <strong>de</strong>s fonds <strong>de</strong> la commissioneuropé<strong>en</strong>ne ou <strong>de</strong>s autres bailleurs » (Responsable <strong>du</strong> projet, cellule nationale, com.pers., 2009). Ledirecteur <strong>de</strong> la Cellule littoral nationale explique <strong>en</strong> effet que les lois favoris<strong>en</strong>t les levées <strong>de</strong> fondspar les bailleurs institutionnels : « quand la loi sort, cela ouvre <strong>de</strong>s perspectives incroyables. Depuis que la loisur les déchets est sortie, la Banque Mondiale finance plusieurs projets <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s déchets. Pour le littoral, lesbailleurs att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t que la loi sorte » (Directeur cellule nationale, com.pers., 2009). On peut cep<strong>en</strong>dantdouter que ce principe s’applique aux programmes issus <strong>de</strong> projets et que les bailleurs vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tfinancer la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s mesures qu’ils propos<strong>en</strong>t. En effet, les opérateurs <strong>de</strong> projetr<strong>en</strong>contrés au cours <strong>de</strong> nos différ<strong>en</strong>ts terrains (com.pers., 2009, 2010) s’accord<strong>en</strong>t surl’observation suivante : les bailleurs préfèr<strong>en</strong>t financer <strong>de</strong>s projets qui consist<strong>en</strong>t davantage àdévelopper leur propre programme d’action que <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s actions proposées pard’autres (même si le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet doit comporter un paragraphe « capitalisation <strong>de</strong>stravaux antérieurs »).4.4 Discussion <strong>de</strong> la GIZC comme « mo<strong>de</strong> d’action projet » etévaluation <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>A prés<strong>en</strong>t, nous pouvons rev<strong>en</strong>ir à l’action propre <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et faire le bilan <strong>du</strong> projetSMAP III Moulouya comme un mo<strong>de</strong> d’action qu’elle doit poursuivre ou non au regard <strong>de</strong> sonobjectif général <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM.216


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international4.4.1 Discussion autour <strong>de</strong> la GIZC comme mo<strong>de</strong> d’action pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Comme indiqué plus haut, <strong>en</strong> tant qu’organisation, un projet comporte ses effets <strong>de</strong> système(Crozier & Friedberg, 1977) qui sont souv<strong>en</strong>t assez visibles et par conséqu<strong>en</strong>t sur lesquels lesacteurs concernés s’exprim<strong>en</strong>t facilem<strong>en</strong>t. Les opérateurs <strong>du</strong> projet doiv<strong>en</strong>t capitaliser sur ces« défauts » <strong>du</strong> projet comme les y incite la partie « lessons learned » <strong>du</strong> rapport final qui est <strong>en</strong>voyéau bailleur institutionnel (Final report, 2010). On peut trouver suffisamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> raisons pourexpliquer l’échec ou les limites d’un projet dans ces effets <strong>de</strong> système. Mais chaque projet ayantses effets propres et contextuels, la réflexion m<strong>en</strong>ée risque <strong>de</strong> ne pas permettre l’appr<strong>en</strong>tissage etla capitalisation att<strong>en</strong><strong>du</strong>e. Bi<strong>en</strong> que les bailleurs n’<strong>en</strong> att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t pas tant, nous avons néanmoinsvoulu montrer dans ce chapitre que l’analyse ex post d’un projet doit passer par une remise <strong>en</strong>question <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action employé au regard <strong>de</strong>s principes qui le sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t, remise <strong>en</strong>question qui serait d’ailleurs bi<strong>en</strong> utile ex ante. M. Leroy (2004 : 303) a d’ailleurs proposé un cadred’évaluation <strong>de</strong>s dispositifs <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui permet d’évaluer la pertin<strong>en</strong>ce etl’efficacité <strong>du</strong> projet <strong>de</strong> façon dynamique, <strong>de</strong>puis sa construction jusqu’à son terme, à l’ai<strong>de</strong> d’une« système embarqué d’ai<strong>de</strong> au pilotage ».Les contradictions repérées ici dans le montage et le déroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet SMAP III sontconfortées par leur converg<strong>en</strong>ce avec les travaux <strong>de</strong> R. Billé (2004) sur la GIZC. Sa thèse est uneanalyse stratégique <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la doctrine appuyée sur une large analyse <strong>de</strong> lalittérature (académique et technique) <strong>de</strong> la GIZC et sur trois étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas (<strong>de</strong>ux à Madagascar etune <strong>en</strong> France, le cas <strong>du</strong> contrat <strong>de</strong> baie <strong>de</strong> la ra<strong>de</strong> <strong>de</strong> Brest). L’auteur a montré que sous plusieursaspects, la GIZC ne résiste pas au passage <strong>de</strong> la théorie à la pratique. Nous allons retrouverplusieurs <strong>de</strong> ses conclusions dans le bilan <strong>de</strong>s limites observées sur le projet SMAP III Moulouya.a) Le glissem<strong>en</strong>t normatif et l’approche projetEn pr<strong>en</strong>ant la coordination d’un projet <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> opère <strong>de</strong>uxglissem<strong>en</strong>ts très fréqu<strong>en</strong>ts selon R. Billé (2004). D’une part, elle participe à la modalité dominante<strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC à travers une approche projet. D’autre part, elle adopte les objectifsGIZC <strong>en</strong> mettant <strong>en</strong> arrière plan ses propres objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong>.1. Pour les membres <strong>de</strong> la TdV, la GIZC est un processus qui doit courir sur le long terme, pourobt<strong>en</strong>ir, pas à pas, <strong>de</strong>s améliorations <strong>de</strong>s pratiques, d’une mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tesactivités <strong>de</strong> la zone, qui doiv<strong>en</strong>t tous aller vers la possibilité <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir ou <strong>de</strong> rétablir un bon217


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesétat <strong>de</strong> l’écosystème visé. Cette vision <strong>de</strong>s choses nous rappelle le travail int<strong>en</strong>sif et <strong>de</strong> long termeque la TdV développe sur la Camargue, visant une amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective. Pourtant,comme nous l’avons vu dans le cas <strong>du</strong> SMAP et comme R. Billé l’indique, la GIZC suitgénéralem<strong>en</strong>t le schéma séqu<strong>en</strong>tiel qui n’est pas réservé à la GIZC mais qui est général dans ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> programmes et <strong>de</strong> projets : id<strong>en</strong>tification <strong>du</strong> problème / montage <strong>du</strong>programme / adoption formelle et financem<strong>en</strong>t / mise <strong>en</strong> œuvre / évaluation ; cinq étapes quis’inscriv<strong>en</strong>t dans un cycle. C’est <strong>en</strong> effet « une approche programme ou projet qui est privilégiée[pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC], quoique rarem<strong>en</strong>t voire jamais justifiée » (ibid. : 81). Le projetest développé comme s’il était possible d’interv<strong>en</strong>ir et <strong>de</strong> changer, <strong>en</strong> trois ans, l’organisation <strong>du</strong>système d’acteurs et la <strong>gestion</strong> effective d’une zone. Tout a <strong>en</strong>traîné la TdV dans ce glissem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>puis l’intégration comme objectif vers le projet <strong>de</strong> « mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC » <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ant sonpropre but : le manque <strong>de</strong> solidité <strong>de</strong> sa connaissance <strong>du</strong> terrain, le cadre proposé par lacommission europé<strong>en</strong>ne, tant sur le plan budgétaire que sur le plan <strong>de</strong> la doctrine <strong>du</strong> programmeSMAP. L’objectif <strong>du</strong> projet était donc la mise <strong>en</strong> place <strong>du</strong> processus GIZC « par <strong>de</strong>ssus leterrain ».2. Bi<strong>en</strong> que la TdV développe <strong>de</strong>s projets pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM, <strong>en</strong> répondant auprogramme SMAP <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC, elle adopte les objectifs <strong>de</strong> la doctrine. Cefaisant, elle fait l’hypothèse qu’une meilleure intégration <strong>de</strong>s activités et <strong>de</strong>s politiques sectorielleset que l’intégration <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux dans chaque secteur vont m<strong>en</strong>er à laconservation <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya. La TdV passe ainsi d’objectifs écologiques sur lazone humi<strong>de</strong> à <strong>de</strong>s objectifs d’intégration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> dans le cadre d’un projet. R. Billé (2004 :89) parle pour cela <strong>du</strong> « biais <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal » <strong>de</strong> la GIZC. En effet, si la doctrine GIZCcomporte les valeurs <strong>du</strong> DD, <strong>de</strong>vant donc apporter une amélioration et une harmonie sur lestrois dim<strong>en</strong>sions économique, sociale et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, les projets GIZC sont généralem<strong>en</strong>tmis <strong>en</strong> place pour répondre au souci <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ressources naturelles et <strong>de</strong>s écosystèmescôtiers. Le fait que ce soit <strong>de</strong>s ONG <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui ai<strong>en</strong>t répon<strong>du</strong> à l’appeld’offre <strong>du</strong> programme SMAP III illustre le propos <strong>de</strong> l’auteur. Dans le cas <strong>du</strong> SMAP IIIMoulouya, on a pu voir que ce positionnem<strong>en</strong>t est int<strong>en</strong>able pour la TdV et son part<strong>en</strong>airemarocain (le MATEE) qui leur ôte tous moy<strong>en</strong>s <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> l’intégration comme <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong> la zone côtière : d’un côté, ils ne sont pas légitimes pour être le chef d’orchestre<strong>de</strong> l’intégration, l’acteur intégrateur <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t économique et social, ou le coastal managerpour utiliser le vocabulaire <strong>de</strong> la GIZC. De l’autre côté, il n’y a pas d’action clairem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>sée etori<strong>en</strong>tée vers la conservation <strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong> la Moulouya capable <strong>de</strong> se confronter aux acteurs <strong>du</strong>218


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationaldéveloppem<strong>en</strong>t dont les projets ont <strong>de</strong>s effets négatifs majeurs sur l’écosystème littoral,puisqu’une telle confrontation serait contradictoire à la logique GIZC s<strong>en</strong>sée m<strong>en</strong>er à une <strong>gestion</strong>idéale <strong>de</strong> la zone côtière. Or, R. Billé démontre que « l’action n’est pas symétrique, et peut doncdifficilem<strong>en</strong>t être <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drée par <strong>de</strong>s préconisations symétriques » (2004 : 377-379) et on ne peutpas raisonnablem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>ser que les différ<strong>en</strong>ts acteurs responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> se rassembl<strong>en</strong>t àl’annonce <strong>de</strong> la GIZC. Ce troisième glissem<strong>en</strong>t qui établit la GIZC comme le seul mo<strong>de</strong> d’actionpour répondre à l’objectif <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la zone côtière est à notre s<strong>en</strong>s le principalproblème <strong>du</strong> projet SMAP III monté par la TdV.b) Participation et structure GIZC : mo<strong>de</strong> d’action ou objectif ?Pour la coordinatrice régionale TdV et les responsables <strong>de</strong> la Cellule littoral nationale, le projetn’a pas atteint les objectifs <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place d’une structure <strong>de</strong> GIZC dotée d’un plan GIZC,mais il n’a pas totalem<strong>en</strong>t échoué car il a permis <strong>de</strong> réunir les acteurs locaux (notamm<strong>en</strong>t lesONG locales, les universitaires, c’est-à-dire pas uniquem<strong>en</strong>t les chefs qui ont le pouvoir) qui ontpu discuter <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière et <strong>en</strong> partager une vision (com.pers., 2009, 2010). LesONG locales, elles, déplor<strong>en</strong>t plutôt le fait que ce sont toujours les mêmes qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t discuteraux réunions <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts projets (voir Tableau 4.1) et que les responsables, <strong>en</strong> revanche, nepr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas la peine <strong>de</strong> s’y investir (com.pers., 2009). Dans le cas <strong>de</strong> ce projet, nous observonsque la participation : 1) n’est pas un apport spécifique <strong>du</strong> projet SMAP III mais un processus quis’institutionnalise avec le passage <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts projets sur la zone, 2) n’a pas <strong>de</strong> li<strong>en</strong> avec la<strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone côtière.Le statut <strong>de</strong> la participation dans la GIZC accélère <strong>en</strong>core le glissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis l’horizon normatifd’une <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone plus harmonieuse vers un mo<strong>de</strong> d’action qui s’érige lui-même <strong>en</strong>objectif. Les trois programmes étudiés par R. Billé (2004 : 258) affich<strong>en</strong>t la concertation et laparticipation <strong>de</strong>s acteurs comme étant au cœur <strong>de</strong> l’approche <strong>de</strong> la GIZC. Dans ces trois cas,concertation et participation sont à la fois les principes d’interv<strong>en</strong>tion et les objectifs à atteindre.Dans tous les cas, et pour diverses raisons qu’il explique, « la concertation – à considérer qu’elleait existé – ne survit pas au passage <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s à l’action. […] Les docum<strong>en</strong>ts issus <strong>de</strong> laconcertation n’<strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t aucunem<strong>en</strong>t les acteurs <strong>de</strong> façon formelle, ce qui est un point communfrappant aux trois programmes. » L’auteur explique que la concertation « apparaît comme ladénégation <strong>de</strong>s désaccords, voire <strong>de</strong> leur ritualisation – consistant à affirmer l’accord <strong>de</strong> façonincantatoire afin <strong>de</strong> réconcilier les acteurs autour <strong>de</strong> problèmes non réglés ». Dans le cas <strong>du</strong>SMAP III Moulouya, les responsables <strong>du</strong> projet n’avai<strong>en</strong>t ni les moy<strong>en</strong>s ni la légitimité pour219


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesréellem<strong>en</strong>t solliciter les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la zone côtière. Au regard <strong>de</strong> cette difficulté <strong>de</strong>faire <strong>en</strong> sorte que la participation ait lieu, on compr<strong>en</strong>d qu’elle puisse être portée comme unvéritable objectif <strong>du</strong> projet : c’est ce que l’on observe <strong>du</strong> docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet au rapport final, <strong>en</strong>passant par les discours t<strong>en</strong>us par les personnes interrogées.Mais R. Billé montre que ce biais « participatif » est bi<strong>en</strong> plus ancré <strong>en</strong>core puisqu’il provi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sfon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts même <strong>de</strong> la doctrine. En effet, la GIZC repose sur l’ « illusion <strong>du</strong> tour <strong>de</strong> la table »,qui suit un raisonnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> trois temps : « d’abord, la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est perçuecomme un problème <strong>de</strong> coordination <strong>en</strong>tre acteurs ; <strong>en</strong>suite, la concertation paraît être la solutionau manque <strong>de</strong> coordination ; <strong>en</strong>fin, la concertation est considérée comme indissociable <strong>du</strong>cons<strong>en</strong>sus » (ibid. : 380). Or sur la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya où vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> s’implanterune station touristique sur 700 ha, on peut au contraire constater une certaine coordination <strong>en</strong>trela Willaya, la délégation régionale <strong>du</strong> tourisme, et celle <strong>de</strong> l’aménagem<strong>en</strong>t par exemple qui aaccéléré les travaux <strong>de</strong> la voie rapi<strong>de</strong> Tanger-Tunis dans cette zone, ainsi qu’une voie <strong>de</strong>contournem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Saïdia. La coordination <strong>en</strong> tant que telle – sans parler <strong>de</strong> sa qualité et <strong>de</strong>l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>s aspects <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux – a égalem<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> fonctionnéaussi avec l’Ag<strong>en</strong>ce Hydraulique <strong>de</strong> Bassin <strong>de</strong> la Moulouya qui a lancé au pied levé <strong>en</strong> 2009l’installation <strong>de</strong> canaux <strong>de</strong> contournem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la station touristique après un hiver pluvieuxcausant d’importantes inondations <strong>en</strong> 2008. Le problème n’est donc pas ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t unproblème <strong>de</strong> coordination, et l’intégration (sans l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) se passe bi<strong>en</strong>, <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>sdispositifs <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC.Ensuite, on retrouve cette posture qui consiste à se convaincre – ou plutôt faire comme si onétait convaincu – que l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> passait par une « vision partagée » quicorrespondrait à celle <strong>de</strong>s porteurs <strong>de</strong> la GIZC préoccupés par la protection <strong>de</strong> la zone côtière.Or, ni réussir à réunir les acteurs autour <strong>de</strong> la table, ni même obt<strong>en</strong>ir l’expression d’une « visionpartagée » n’est le signe d’un progrès vers une meilleure <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zone, comme lecas <strong>du</strong> SMAP nous le montre.Pour R. Billé (2004 : 384), la conclusion <strong>de</strong> cela est que « conflits, rapports <strong>de</strong> force, pouvoirs,influ<strong>en</strong>ce, asymétrie [sont] autant <strong>de</strong> notions que les acteurs <strong>de</strong> la configuration gizci<strong>en</strong>negagnerai<strong>en</strong>t gran<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t à réintégrer à leur vision <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> ». Pour la TdV, cela impliquerait<strong>de</strong> replacer la participation (ainsi que les autres processus mobilisés sans stratégie définie) dans unév<strong>en</strong>tail <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s ou <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>s d’action possibles, mais surtout non systématiques, pourremettre au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> la réflexion stratégique l’objectif normatif <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>effective <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> l’estuaire.220


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international4.4.2 Evaluation <strong>du</strong> projet et <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>L’analyse <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya nous a permis <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre que l’incapacité <strong>du</strong> projetà in<strong>du</strong>ire un changem<strong>en</strong>t favorable dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> rési<strong>de</strong> <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> partie dans <strong>de</strong>scontradictions inhér<strong>en</strong>tes à la doctrine GIZC puis à la façon dont elle est tra<strong>du</strong>ite <strong>en</strong> pratique.Quel bilan la TdV peut-elle tirer <strong>de</strong> cette expéri<strong>en</strong>ce ? Dans un premier temps, nous discutonsl’évaluation <strong>du</strong> projet liée au contrat avec le bailleur institutionnel, puis l’appréh<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> projetdans le processus d’évaluation interne <strong>de</strong> la TdV, pour <strong>en</strong>fin proposer une évaluation ori<strong>en</strong>téed’une part sur les objectifs stratégiques réels <strong>de</strong> la TdV et d’autre part sur l’objectif normatif <strong>de</strong>conservation <strong>de</strong> la ZH.a) L’évaluation <strong>du</strong> projet SMAP III MoulouyaUne évaluation <strong>du</strong> projet a été réalisée <strong>en</strong> fin d’année 2008 par un bureau d’étu<strong>de</strong> français pour lecompte <strong>de</strong> la commission europé<strong>en</strong>ne. Le consultant a passé une journée avec chacune <strong>de</strong>sparties : la Cellule littoral nationale, l’équipe locale <strong>du</strong> projet au Maroc, puis avec la coordinatricerégionale à la TdV. Selon cette <strong>de</strong>rnière et les informations recueillies auprès <strong>de</strong> l’équipe locale, ladiscussion avec ce consultant s’est focalisée sur les problèmes <strong>de</strong> coordination <strong>en</strong>tre l’équipelocale et la Cellule nationale, et sur le manque <strong>de</strong> dynamisme <strong>de</strong> la participation. Les opérateursr<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s comptes au bailleur égalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fin <strong>de</strong> projet, par le truchem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> bilan financieret <strong>du</strong> rapport final. Ce <strong>de</strong>rnier fait le bilan <strong>de</strong> toutes les activités réalisées dans un formatid<strong>en</strong>tique à celui prévu dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet. Nous avons déjà évoqué la focalisation <strong>de</strong> lapartie « leçons apprises » <strong>du</strong> rapport final sur les effets <strong>de</strong> système <strong>de</strong> l’organisation projet. PourJ-P Olivier <strong>de</strong> Sardan (1995a), ce phénomène est contre-pro<strong>du</strong>ctif dans le s<strong>en</strong>s où ces effets <strong>de</strong>système sont inhér<strong>en</strong>ts aux projets. « La « dérive » est un phénomène normal, qu’il serait illusoire<strong>de</strong> vouloir éliminer. C’est le pro<strong>du</strong>it nécessaire et in-int<strong>en</strong>tionnel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>trecroisem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> lacomplexité <strong>de</strong>s variables <strong>en</strong> jeu dans les réactions d’un milieu social face à une interv<strong>en</strong>tionvolontariste extérieure. » (Olivier <strong>de</strong> Sardan, 1995a : 189-202)B. Kalaora, sociologue, lui-même consultant pour le programme SMAP (sur un autre site),explique ce que tous les opérateurs impliqués dans ces projets sav<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> : « l’évaluateurregar<strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> et si on a bi<strong>en</strong> suivi la métho<strong>de</strong> GIZC ». « Le fonctionnem<strong>en</strong>t avec les bailleurs fonctionne avec<strong>de</strong>s règles très strictes. Ces règles serv<strong>en</strong>t à faciliter le travail à <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong> programme comme E. Baijot[SMAP Technical Assistance, responsable <strong>de</strong> la partie mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme SMAP] qui doit r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>scomptes à la commission europé<strong>en</strong>ne qui l’emploie ». « Le cadre <strong>de</strong> l’appel d’offre est très contraignant : car pour221


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesêtre financé, il faut écrire <strong>de</strong>s choses simples et pas vraim<strong>en</strong>t une stratégie <strong>de</strong> fond. Et <strong>en</strong>suite, le cadre est bloquant,car le bailleur finance uniquem<strong>en</strong>t les activités écrites. Ca ne choque pas un bailleur <strong>de</strong> recevoir un texte sansexplicitation <strong>de</strong> la stratégie, puisque eux veul<strong>en</strong>t juste <strong>de</strong>s choses simples et le respect <strong>de</strong> leurs cases. » (Kalaora,com.pers. 2009).Cette prop<strong>en</strong>sion à évaluer la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s davantage que l’atteinte <strong>de</strong>s objectifs quidépasse sans doute le champ <strong>de</strong> la GIZC n’<strong>en</strong> est pas moins reconnue par ses porteurs euxmêmes(Sor<strong>en</strong>s<strong>en</strong>, 1993, cité par Billé, 2004). « Ce problème, déjà id<strong>en</strong>tifié très clairem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>1993, n’a toujours pas été résolu. Ainsi dans la plupart <strong>de</strong>s cas les moy<strong>en</strong>s continu<strong>en</strong>t à se muerins<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> objectifs […] » (Billé, 2004 : 270), comme nous l’avons nous-même observésur le cas <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya <strong>en</strong> 2010. Elaborer un plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, mettre <strong>en</strong> œuvrele projet pilote, obt<strong>en</strong>ir la participation <strong>de</strong>s acteurs locaux, etc. est « inhér<strong>en</strong>t à la logique <strong>de</strong>l’action et <strong>du</strong> travail, mais cela <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t un glissem<strong>en</strong>t incontrôlé lorsque l’objet principal <strong>de</strong>l’évaluation s’avère être la bonne mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s prévus […] ».En somme, ces évaluations pos<strong>en</strong>t le paradoxe suivant : elles montr<strong>en</strong>t que les activités ont étébi<strong>en</strong> m<strong>en</strong>ées, même si c’est avec certaines nuances, et que les opérateurs ont bi<strong>en</strong> travaillé pourm<strong>en</strong>er le projet à son terme. A la suite <strong>de</strong> R. Billé (2007), nous constatons qu’elle n’apport<strong>en</strong>t niéclairage sur l’évolution <strong>de</strong> l’état <strong>du</strong> milieu visé et <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts opérés dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong>, ni recul sur les mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre. Ce type d’évaluation est adapté à son objet,c’est-à-dire la justification formelle <strong>de</strong>s fonds alloués par le bailleur, mais n’apporte pasd’élém<strong>en</strong>ts substantiels pour une réflexion stratégique ni sur l’action à poursuivre sur la zone niplus généralem<strong>en</strong>t sur le mo<strong>de</strong> d’action mis <strong>en</strong> œuvre. Ces remarques r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à un champ <strong>de</strong>questions cruciales pour les ONGE (Christ<strong>en</strong>s<strong>en</strong>, 2003) mais qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait un travailapprofondi non réalisé dans le cadre <strong>de</strong> cette thèse, qui est celui <strong>de</strong>s systèmes actuels <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet. Cet aspect ne concerne d’ailleurs pas seulem<strong>en</strong>t le projet SMAP III maisl’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> la TdV, nous serons am<strong>en</strong>ée à y faire <strong>de</strong> nouveau référ<strong>en</strong>ce.b) Evaluer le projet au regard <strong>de</strong>s objectifs stratégiques <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Nous avons prés<strong>en</strong>té ce cas d’étu<strong>de</strong> <strong>en</strong> indiquant qu’il y avait un emboîtem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre un niveau «objectifs écologiques et stratégiques <strong>de</strong> la TdV » et « objectifs <strong>du</strong> projet GIZC ». L’évaluation<strong>de</strong>mandée par le bailleur r<strong>en</strong>voie aux objectifs <strong>du</strong> projet. Ici, nous discutons donc les objectifspropres <strong>de</strong> la TdV, la manière dont ils sont perçus par ses membres a posteriori et <strong>en</strong> particulier lafaçon dont ils sont abordés dans les docum<strong>en</strong>ts relatifs à l’évaluation <strong>de</strong> programme (procé<strong>du</strong>reinterne) <strong>de</strong> la TdV. Outre la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la façon dont l’organisation évalue un tel projet,222


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationalcette démarche vise surtout à intro<strong>du</strong>ire une logique d’évaluation ori<strong>en</strong>tée sur les objectifsstratégiques <strong>de</strong> la TdV. Les trois objectifs implicites qui ont poussé la TdV à répondre à l’appel àprojet <strong>du</strong> programme SMAP III sont pour rappel : (1) l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> fonds externes, (2) le testd’un mo<strong>de</strong> d’action « GIZC », (3) le positionnem<strong>en</strong>t dans le champ GIZC méditerrané<strong>en</strong> et (4) lapoursuite d’une démarche <strong>de</strong> conservation d’un site initiée dans le cadre d’un projet précéd<strong>en</strong>t (leMWC). Dans le paragraphe suivant, nous comm<strong>en</strong>terons l’objectif <strong>en</strong>core davantage implicitemais néanmoins prés<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM.1. L’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts externes est prés<strong>en</strong>tée comme un succès dans le docum<strong>en</strong>td’évaluation 141 : comme le montre le titre d’un <strong>de</strong>s paragraphes : « <strong>de</strong> nombreux financem<strong>en</strong>ts etune part importante <strong>du</strong> programme sur <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts extérieurs », dont le financem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>SMAP III, ce qui permet <strong>de</strong> « financer une part substantielle <strong>de</strong>s salaires <strong>de</strong>s personnesimpliquées dans les projets et <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t » (Evaluation mi-programme 2006-2010 TdV,2008). Le projet SMAP III a ainsi permis d’atteindre cet objectif d’ordre organisationnel – ce quicorrespond pour nous au registre stratégique <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation issu <strong>de</strong> notrecadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE).2. La <strong>de</strong>uxième motivation est relative au registre stratégique <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. L’objectif pour la TdV est <strong>de</strong> tester le « mo<strong>de</strong> d’action » GIZC et <strong>de</strong>confirmer cette « spécialité » comme « compét<strong>en</strong>ce » <strong>en</strong> interne. Dans le docum<strong>en</strong>t d’évaluation àmi-programme, les quelques élém<strong>en</strong>ts développés confirm<strong>en</strong>t la vision <strong>de</strong> J-P Olivier <strong>de</strong> Sardan(1995a) par rapport à la focalisation <strong>de</strong>s opérateurs sur les « dérives » inhér<strong>en</strong>tes aux projets,comme l’illustre le paragraphe suivant :« Un projet (un au moins) visant l’intégration <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t économique et la conservation <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s dans le Sud et/ou l’Est <strong>de</strong> la région méditerrané<strong>en</strong>neLe projet SMAP (El Kala, la Moulouya) avait cette ambition. C’est moins la capacité àmettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s projets (la chose a été faite dès le début <strong>du</strong> programme) que lesmodalités <strong>de</strong> leur construction (participation <strong>de</strong>s locaux à la construction etappropriation) et le choix <strong>de</strong>s sites qui doiv<strong>en</strong>t être reconsidérés) » (Evaluation à miparcours2006-2010, 2008).La limite <strong>du</strong> projet soulevée dans cette évaluation porte sur l’objectif procé<strong>du</strong>ral : les membres <strong>de</strong>la TdV déplor<strong>en</strong>t le manque <strong>de</strong> participation <strong>de</strong>s acteurs locaux. Le processus <strong>de</strong> montage <strong>du</strong>projet est évoqué à travers l’évocation <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> région sud <strong>de</strong> la Méditerranée (ce quiconstitue égalem<strong>en</strong>t un objectif dans cette dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale) :141 Ce docum<strong>en</strong>t est une auto-évaluation <strong>de</strong>s projets par les chefs <strong>de</strong> projet revues par le directeur <strong>de</strong>s programmes.Ce docum<strong>en</strong>t est fourni aux évaluateurs externes qui remettront leur rapport d’évaluation au Conseil Sci<strong>en</strong>tifique et àla direction.223


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales« Implication au sud <strong>de</strong> la MéditerranéeLe développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projets <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>en</strong> rive sud <strong>de</strong> la Méditerranée […] estun <strong>de</strong>s objectifs majeurs <strong>du</strong> programme. Néanmoins les difficultés r<strong>en</strong>contrées dans lamise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s projets ou dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats fiables, lescontextes sociopolitiques instables, doiv<strong>en</strong>t nous inciter à : (1) être vigilant sur notre<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t possible (évaluations plus strictes <strong>de</strong>s contraintes et limites, <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s àmettre <strong>en</strong> œuvre) ; (2) chercher, autant que possible, à co-construire les projets dès ledébut avec les personnes ressources et populations locales plutôt que <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>sprojets clé-<strong>en</strong>-main (même si souv<strong>en</strong>t la construction est dictée par la nature <strong>de</strong> l’appeld’offre – cf. SMAP) » (Evaluation à mi-parcours 2006-2010).La TdV a donc bi<strong>en</strong> rempli l’objectif <strong>de</strong> « test » <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action GIZC. Mais le mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong> lui-même n’est pas questionné, y compris par le CS qui laisse l’organisation poursuivre danscette direction : « le CS a pris acte <strong>de</strong> l’avis <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> conserver les activités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>intégrée et <strong>de</strong> transfert et <strong>de</strong> leur int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> les r<strong>en</strong>dre plus efficaces <strong>en</strong> 2009 » (rapport <strong>du</strong> CS,novembre 2008). Cette non-remise <strong>en</strong> question <strong>de</strong> la GIZC par le CS n’est pas surpr<strong>en</strong>ante auvue <strong>de</strong> la prédominance <strong>de</strong> la doctrine dans le champ <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> zone côtière. Enrevanche, c’est l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> discussion au regard <strong>de</strong>s objectifs écologiques qui est surpr<strong>en</strong>ante. Laréflexion sur le mo<strong>de</strong> d’action et la façon <strong>de</strong> le mettre <strong>en</strong> œuvre est sans doute plus à la portée<strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la TdV responsables <strong>du</strong> projet. Notons ici que leur relativem<strong>en</strong>t faible réflexivitésur le projet (écrite dans l’évaluation) est <strong>en</strong> partie <strong>du</strong>e aux changem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> personnesresponsables <strong>du</strong> projet à la TdV : la nouvelle chef <strong>de</strong> projet pr<strong>en</strong>ait à peine ses fonctions qu’elle<strong>de</strong>vait écrire cette évaluation. Si la remise <strong>en</strong> question <strong>du</strong> « projet GIZC » n’a pas eu lieu aumom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette évaluation, une réflexion a eu lieu au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>du</strong>futur programme, comme nous le verrons dans le chapitre 6.3. Enfin, le troisième objectif repéré relève <strong>du</strong> registre stratégique <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t et <strong>du</strong>part<strong>en</strong>ariat : la TdV <strong>de</strong>vait intégrer la « communauté méditerrané<strong>en</strong>ne GIZC ». Cettecommunauté compr<strong>en</strong>d les bailleurs institutionnels, qui, avant <strong>de</strong> les financer adopt<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sprogrammes, et les opérateurs chargés <strong>de</strong> leur mise <strong>en</strong> œuvre. Depuis la fin <strong>du</strong> projet SMAP III,la chef <strong>de</strong> projet TdV (coordinatrice régionale) a été sollicitée pour une implication dans d’autresprogrammes comme le projet PEGASO (piloté par le C<strong>en</strong>tre technique europé<strong>en</strong> Land use andspatial information ETC-LUSI).4. Le pari <strong>de</strong> poursuivre sur les acquis <strong>du</strong> projet MWC s’est avéré décevant. En effet, le « passage<strong>de</strong> relais » avec l’opérateur qui était chargé <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> la Moulouya dans le cadre <strong>du</strong> MWC (leConservatoire <strong>du</strong> Littoral français) a été minime, et la dynamique observée 142 à la fin <strong>de</strong> ce projet142 Plusieurs installations avai<strong>en</strong>t été mises <strong>en</strong> place à la fin <strong>du</strong> projet : <strong>de</strong>s ganivelles pour la protection <strong>de</strong>s <strong>du</strong>nes,une signalétique visant à la s<strong>en</strong>sibilisation, la prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s…224


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme internationals’est transformée <strong>en</strong> obstacle pour le lancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet SMAP III. En effet, l’accueil réservé aunouvel opérateur a plutôt été <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> la défiance <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s administrations et <strong>de</strong>s acteurslocaux. Ceci n’est pas sans poser <strong>de</strong>s questions sur les conditions dans lesquelles la succession <strong>de</strong>projets sur un même site est pertin<strong>en</strong>te et souhaitable. Nous retrouverons ce questionnem<strong>en</strong>tdans la troisième partie <strong>de</strong> la thèse où l’on abor<strong>de</strong>ra l’idée <strong>de</strong> la TdV <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce sesmo<strong>de</strong>s d’action sur <strong>de</strong>s « sites atelier ».c) Retrouver l’horizon normatif <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZH et évaluer lacontribution <strong>de</strong> la TdVLa TdV développe <strong>de</strong>s projets pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Si pour elle, la « démarche GIZC »<strong>de</strong>vait contribuer à la conservation <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya, la réflexion rétrospectivedoit bi<strong>en</strong> appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r le projet au regard <strong>de</strong> ces <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation.L’évaluation liée au contrat avec le bailleur, et dans une certaine mesure l’évaluation interne <strong>de</strong>sprojets à la TdV relèv<strong>en</strong>t <strong>du</strong> contrôle, <strong>du</strong> bon usage <strong>de</strong>s fonds pour la première, <strong>du</strong> bonaccomplissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> programme pour la secon<strong>de</strong>. Ici, nous cherchons davantage à alim<strong>en</strong>ter ladim<strong>en</strong>sion réflexive <strong>de</strong> l’évaluation : quelles conclusions pour l’action future <strong>en</strong> méditerranée tirer<strong>de</strong> cette expéri<strong>en</strong>ce ?Pour évaluer la contribution <strong>du</strong> projet et <strong>de</strong> la TdV au regard <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> l’embouchure<strong>de</strong> la Moulouya, il faudrait connaître les élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective qui doiv<strong>en</strong>t changer, lastratégie mise <strong>en</strong> œuvre à travers le projet pour pousser à ces changem<strong>en</strong>ts et les changem<strong>en</strong>tseffectivem<strong>en</strong>t constatés. Seulem<strong>en</strong>t, la formulation <strong>du</strong> projet, la posture <strong>de</strong> la TdV, ledéroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> projet et ses résultats r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t l’exercice difficile. Nous allons alors <strong>en</strong> souleverplusieurs implications.1. La formulation <strong>du</strong> projet. Expliciter la stratégie d’action.Si l’ONGE doit respecter une certaine rhétorique adaptée aux <strong>de</strong>stinataires – les bailleursinstitutionnels – dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, elle ne peut cep<strong>en</strong>dant fon<strong>de</strong>r son action sur <strong>de</strong> telsprincipes et métho<strong>de</strong>s toutes faites. S’il est évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t impossible <strong>de</strong> prévoir à l’avance ledéroulem<strong>en</strong>t exact d’un projet, il n’est pas non plus possible <strong>de</strong> tout miser sur l’idée que lesacteurs sectoriels vont s’impliquer quand ils auront perçus les « bénéfices <strong>de</strong> la GIZC ». Nous <strong>en</strong>tirons <strong>de</strong>ux conséqu<strong>en</strong>ces : 1) pour la rédaction <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> projet, l’ONG doit trouver unmo<strong>de</strong> rhétorique respectant la règle implicite <strong>de</strong>s mots clés (presque obligatoire pour obt<strong>en</strong>ir lesfinancem<strong>en</strong>ts), tout <strong>en</strong> se dégageant le maximum <strong>de</strong> marges <strong>de</strong> manœuvre dans les actions. Pour225


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talescela, il semble opportun d’être plus clair sur les objectifs à atteindre et moins catégorique sur lesactivités. 2) L’ONGE peut très bi<strong>en</strong> p<strong>en</strong>ser une stratégie d’action sans l’expliciter <strong>de</strong> façonprécise dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet si elle estime que cela ré<strong>du</strong>it ses chances d’obt<strong>en</strong>ir lefinancem<strong>en</strong>t. Mais c’est bi<strong>en</strong> cette stratégie d’action qu’elle <strong>de</strong>vra évaluer pour avancer etr<strong>en</strong>forcer son action. Ici, la TdV n’avait pas <strong>de</strong> stratégie précise <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la démarche GIZCqui lui semblait prometteuse. Nous <strong>en</strong> avons vu les conséqu<strong>en</strong>ces plus haut dans ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas.2. La posture <strong>de</strong> la TdV. Assumer le rôle d’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.1) Le mo<strong>de</strong> d’action <strong>de</strong> la TdV se situe dans le souti<strong>en</strong> technique, mais elle a aussi occupé le rôle<strong>de</strong> coordination. 2) La TdV agit pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM, mais a <strong>en</strong>dossé le rôle <strong>de</strong> l’acteurchargé <strong>de</strong> l’intégration. Ces glissem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> posture doiv<strong>en</strong>t être considérés avec plus <strong>de</strong> sérieux :1) Dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, la TdV annonce être coordinatrice régionale avec <strong>de</strong>uxattributions : le suivi (reporting) <strong>du</strong> projet et le souti<strong>en</strong> technique. La coordination est <strong>de</strong> fait bi<strong>en</strong>plus que cela. En formulant le projet, la TdV a adopté et transposé un cadre (programme SMAPIII) à un terrain. Ce cadre est à la fois celui qui lui donne les moy<strong>en</strong>s d’agir, mais égalem<strong>en</strong>t celuiqui contraint son action. C’est dans ce cadre qu’elle exerce son expertise technique. Mais si cecadre ne permet pas d’avancer sur ses objectifs <strong>de</strong> conservation, la contribution <strong>de</strong> son souti<strong>en</strong>technique risque d’être très faible 143 . La TdV doit donc reconsidérer la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s cadres queconstitu<strong>en</strong>t pour elles les programmes GIZC.2) Sans compter le fait que la TdV n’ait aucune légitimité et aucun moy<strong>en</strong> d’orchestrer une« intégration » <strong>en</strong> tant que simple processus participatif tel que préconisé par la démarche GIZC.La TdV ne peut donc adopter une posture pour l’action qui est hors <strong>de</strong> sa portée et <strong>en</strong>visager laGIZC comme un objectif intermédiaire pour atteindre son propre objectif normatif <strong>de</strong>conservation <strong>de</strong> la ZH. Elle ne peut que mieux exercer son rôle d’accompagnem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> souti<strong>en</strong>technique vers <strong>de</strong> meilleures pratiques si elle id<strong>en</strong>tifie et ori<strong>en</strong>te son action plus précisém<strong>en</strong>t versles acteurs dont les pratiques impact<strong>en</strong>t les ZH. Ceci implique d’autant plus <strong>de</strong> réflexionstratégique pour atteindre ces acteurs sectoriels qui ne sont généralem<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>clins à changerleurs pratiques.143 Au regard <strong>de</strong> l’objet écologique, ce souti<strong>en</strong> technique a principalem<strong>en</strong>t consisté à conseiller l’équipe locale <strong>du</strong>projet sur le plan <strong>de</strong>s indicateurs d’état <strong>de</strong> la ZH et <strong>de</strong> sa biodiversité à suivre et à ajouter <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts relatif à labiodiversité dans le plan GIZC.226


Chapitre 4 – Le projet <strong>de</strong> conservation d’une zone humi<strong>de</strong> dans un programme international3. Le déroulem<strong>en</strong>t et les résultats. Compr<strong>en</strong>dre le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective et développerune action pertin<strong>en</strong>te auprès <strong>de</strong> cibles mieux id<strong>en</strong>tifiées.La TdV n’avait qu’une faible connaissance <strong>du</strong> terrain où le projet a été développé. Elle n’étaitdonc pas <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> mettre au point une stratégie et développer une action pertin<strong>en</strong>te pour lesobjectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya. L’adoption <strong>de</strong> la doctrine GIZC lui apermis <strong>de</strong> développer le projet sans connaissance approfondie <strong>du</strong> terrain. Le bilan que l’on peuttirer <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya est que pour avancer sur <strong>de</strong>s objectifs écologiques, la doctrineGIZC ne peut pas remplacer le diagnostic d’un terrain et la construction d’une stratégiecontextualisée. Développer cette stratégie, cela signifie id<strong>en</strong>tifier <strong>de</strong>s priorités <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la <strong>gestion</strong> effective et <strong>de</strong>s acteurs responsables, développer <strong>de</strong>s actions adaptées à ces acteurscibles. Ce sont ces changem<strong>en</strong>ts att<strong>en</strong><strong>du</strong>s dans la <strong>gestion</strong> effective qui constitu<strong>en</strong>t les résultats <strong>du</strong>projet pour la TdV et qui peuv<strong>en</strong>t être utilem<strong>en</strong>t évalués pour faire le bilan <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action mis<strong>en</strong> œuvre.Finalem<strong>en</strong>t, si l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans un programme <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC permet à la TdVd’acquérir <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong> conforter sa place parmi les opérateurs <strong>de</strong> la GIZC <strong>en</strong>Méditerranée, le cadre <strong>du</strong> projet ne lui permet pas d’avancer sur ses objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>sZH (Figure 4.4).Construction <strong>de</strong> l’objet écologiqueObjectifs écologiques passés <strong>en</strong>arrière-plan. Non précisé, nontravaillé p<strong>en</strong>dant le projet.Mo<strong>de</strong> d’action publiqueMise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC –cadre « projet » <strong>de</strong> 3 ansApplication décontextualiséed’une doctrinePlace dans le secteurPlace dans l’arène GIZC <strong>en</strong>MéditerranéeDéveloppem<strong>en</strong>t interneAcquisition <strong>de</strong> fonds externes.Manque <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong>ssystèmes d’actions <strong>en</strong> zone sudFigure 4.4 : Bilan <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya replacé dans les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ONGE (source : auteur)Pour R. Billé qui a étudié plusieurs projets <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC, « il faut adapter dès ledépart (i.e. lors <strong>de</strong> la rédaction <strong>du</strong> docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet) les objectifs à ce que l’on peut227


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesraisonnablem<strong>en</strong>t espérer obt<strong>en</strong>ir compte t<strong>en</strong>u <strong>du</strong> temps et <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s dont on dispose ». Ceciest vrai pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Il lui faut surtout développer une stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale adaptée à la configuration <strong>du</strong> système sociopolitique et écologique.228


Chapitre 5Construction d’un dispositif pour évaluer l’état et lest<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes5.1 Des dispositifs d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique pour influ<strong>en</strong>cer les décisions publiques :problématique spécifique et métho<strong>de</strong> .......................................................................................... 2295.2 L’OZHM : t<strong>en</strong>sion et interdép<strong>en</strong>dances <strong>de</strong> quatre registres stratégiques pour construirel’objet « zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes » ............................................................................... 2375.3 Evaluer la contribution <strong>de</strong> l’OZHM à une meilleure prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerranné<strong>en</strong>nes ..........................................................................................................................2795.1 Des dispositifs d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique pour influ<strong>en</strong>cer lesdécisions publiques : problématique spécifique et métho<strong>de</strong>5.1.1 L’OZHM : un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politiqueLe développem<strong>en</strong>t et la diffusion <strong>de</strong>s connaissances relatives à la nature et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tconstitu<strong>en</strong>t une part importante <strong>du</strong> travail <strong>de</strong>s ONGE. Les mo<strong>de</strong>s d’action mis au point à ceteffet sont multiples : <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s données à leur diffusion, <strong>en</strong> passant par leur recueil ou<strong>en</strong>core leur utilisation. Ces connaissances exist<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’échelle la plus locale jusqu’à l’échelleglobale. Plusieurs ONGE se sont données les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> répondre à la nécessité <strong>de</strong> disposer d’unétat <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> la nature à travers notamm<strong>en</strong>t l’élaboration et le r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>td’indicateurs <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la biodiversité. CI a créé le concept <strong>de</strong> Hot Spots et229


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesid<strong>en</strong>tifie les zones correspondant à ces critères, le WWF a créé le Living Planet In<strong>de</strong>x qui mesureles t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong> vertébrés vivant dans les écosystèmes terrestres, d’eau douce etmarins. D’autres systèmes d’inv<strong>en</strong>taires s’intéress<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s objets plus spécifiques, commel’Important Bird Area développé par BirdLife International. Dans la même logique, l’UICN 144 adéveloppé un inv<strong>en</strong>taire mondial <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> conservation global <strong>de</strong>s espèces végétales etanimales, appelé <strong>de</strong>puis 1994 la Liste Rouge <strong>de</strong>s Espèces. Cet inv<strong>en</strong>taire – faisant aujourd’huiréfér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> matière <strong>de</strong> biodiversité – s’appuie sur un vaste réseau d’experts et sur uneméthodologie spécifique pour évaluer le risque d’extinction <strong>de</strong> milliers d’espèces et <strong>de</strong> sousespècesà l’échelle <strong>de</strong> la planète.Les dispositifs <strong>de</strong> suivi et d’évaluation <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t exist<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t dans lasphère <strong>de</strong>s instances intergouvernem<strong>en</strong>tales (souv<strong>en</strong>t liés aux Conv<strong>en</strong>tios internationales) et sontdéveloppés <strong>en</strong> accompagnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s programmes arrêtés par les pays. Ils serv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> amont àori<strong>en</strong>ter les programmes (sci<strong>en</strong>ce-based programme) et <strong>en</strong>suite à suivre et évaluer les résultats <strong>du</strong>programme. Ainsi, le World Conservation Monitoring C<strong>en</strong>tre (UNEP-WCMC) est mandaté parle Programme <strong>de</strong>s Nations Unis pour l’Environnem<strong>en</strong>t (PNUE) pour développer et suivrel’évolution <strong>de</strong> la Biodiversité, au regard <strong>de</strong>s objectifs relevés par la Conv<strong>en</strong>tion Biodiversité(CBD). De même, la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar s’appuie sur un groupe sci<strong>en</strong>tifique et technique(STRP 145 ) pour le développem<strong>en</strong>t d’indicateurs relatifs aux zones humi<strong>de</strong>s, ce groupe travaille <strong>en</strong>relation étroite avec le UNEP-WCMC, à travers le 2010 Biodiversity International Patnership, qui estun regroupem<strong>en</strong>t d’instituts sci<strong>en</strong>tifiques et techniques visant à améliorer les systèmesd’indicateurs dans le champ <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong>s services écosystémiques.Loin d’être imperméables, ces <strong>de</strong>ux sphères <strong>de</strong>s programmes internationaux et <strong>de</strong>s ONGE ontvu leurs li<strong>en</strong>s s’int<strong>en</strong>sifier dans une t<strong>en</strong>dance générale <strong>de</strong> décloisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sphères publiqueset privées (Duran, 1999) particulièrem<strong>en</strong>t remarquable dans la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t(Le Preste & Taravella, 2009). En effet, le caractère global <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tauxexplique l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> réseaux d’expertise internationaux, qui se constitu<strong>en</strong>t sous l’injonction<strong>de</strong>s Conv<strong>en</strong>tions ou d’autres instances politiques <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, pouréclairer les incertitu<strong>de</strong>s, déterminer les changem<strong>en</strong>ts ou les actions à <strong>en</strong>gager. La façon dont cesréseaux d’expertise agiss<strong>en</strong>t et amélior<strong>en</strong>t la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t pose <strong>de</strong>s questionscomplexes qui font d’ailleurs l’objet d’un champ <strong>de</strong> recherche fécond auquel P. Haas (1992) a144 L’UICN est une Organisation Intergouvernem<strong>en</strong>tale145 Ramsar’s Sci<strong>en</strong>tific and Technical Review Panel230


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquedonné un nouveau souffle avec le concept <strong>de</strong>s communautés épistémiques 146 . Nous n’investironspas les échelles interétatiques et la façon dont évolu<strong>en</strong>t les cadres et les politiques relatives auxzones humi<strong>de</strong>s dans la gouvernance méditerrané<strong>en</strong>ne pour nous conc<strong>en</strong>trer sur la façon dont lesdispositifs d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique peuv<strong>en</strong>t s’ancrer dans les systèmes <strong>de</strong> décision et <strong>de</strong><strong>gestion</strong>. Cep<strong>en</strong>dant, la complexité <strong>de</strong>s relations <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et politiques se retrouve à toutes leséchelles – nous <strong>en</strong> avons eu quelques exemples « locaux » dans le chapitre 3, concernant la<strong>gestion</strong> ou <strong>en</strong>core la controverse autour <strong>de</strong> la démoustication <strong>en</strong> Camargue. Comme nousl’avions écrit à la suite <strong>de</strong> J. Theys, P. Roqueplo et J-C. Lefeuvre (1991), les sci<strong>en</strong>ces ré<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t lesincertitu<strong>de</strong>s et propos<strong>en</strong>t diverses solutions, mais elles pro<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t simultaném<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nouvellesincertitu<strong>de</strong>s, appelant <strong>en</strong> partie <strong>de</strong>s réponses <strong>de</strong> nature sci<strong>en</strong>tifique et technique. Parallèlem<strong>en</strong>t, lespolitiques <strong>de</strong>mand<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>s pour justifier leurs décisions, comme si cellescipouvai<strong>en</strong>t être prise uniquem<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>s critères sci<strong>en</strong>tifiques et techniques <strong>du</strong>rs et necomportai<strong>en</strong>t pas une irré<strong>du</strong>ctible dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> nature socio-politique, éman<strong>en</strong>t d’un projet <strong>de</strong>société. Ainsi, d’un côté, les sci<strong>en</strong>tifiques t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t d’apporter <strong>de</strong>s réponses dont les politiquespourrai<strong>en</strong>t mieux se saisir et où <strong>de</strong> l’autre (Cortner, 2000), les politiques repouss<strong>en</strong>t le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’arbitrage et <strong>du</strong> choix politique car toutes les incertitu<strong>de</strong>s ne peuv<strong>en</strong>t être résolues. Pr<strong>en</strong>onsl’exemple <strong>du</strong> concept <strong>de</strong>s « services écosystémiques » qui ont été érigés <strong>en</strong> nouveau problème clépour la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t par l’Evaluation <strong>de</strong>s écosystèmespour le Millénaire (MEA) (2005). Depuis, les sci<strong>en</strong>tifiques et les experts appell<strong>en</strong>t à travailler surce concept qui « là va vraim<strong>en</strong>t intéresser les déci<strong>de</strong>urs » 147 , et permettre <strong>de</strong> vraim<strong>en</strong>t faire avancerl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans les ag<strong>en</strong>das politiques. De leur côté, les déci<strong>de</strong>urs s’<strong>en</strong> saisiss<strong>en</strong>t mais <strong>en</strong>continuant <strong>de</strong> déplorer l’incertitu<strong>de</strong> 148 qui <strong>en</strong>toure ces nouveaux concepts et <strong>en</strong> repoussant lemom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la décision et <strong>de</strong> l’adoption <strong>de</strong> mesures.146 Coalitions intellectuelles transnationales qui sont reconnues pour leur expertise dans un domaine précis quipartag<strong>en</strong>t la même intersubjective un<strong>de</strong>rstandings (compréh<strong>en</strong>sion collective <strong>du</strong> problème), qui porte une mêmeconviction normative et un même s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> responsabilité quant à l’action sociale et politique qui leur incombe(Haas, 1992).147 Interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> D. Coates – CBD Environm<strong>en</strong>tal Affairs Officer, Inland Waters – lors <strong>du</strong> 3ième atelierinternational <strong>de</strong> l’OZHM le 7-10 février 2010 à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, Arles. Interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> L. Tubiana, directrice <strong>de</strong>l’IDDRI : Intro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> la confér<strong>en</strong>ce Iddri – Fondation Hermes « Biodiversité 2010, et après ? », , le 16 février2010 au Musée <strong>du</strong> quai Branly, Paris.148 la Secrétaire d’état chargée <strong>de</strong> l’écologie Chantal Juanno a exprimé <strong>en</strong> février 2010 <strong>de</strong>vant l’académie <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces:« Quand j'interroge sur les espèces clés <strong>de</strong> voûte (celles sur lesquelles repos<strong>en</strong>t les écosystèmes), on ne sait pasexactem<strong>en</strong>t me répondre. Quand il s'agit d'évaluer les services économiques r<strong>en</strong><strong>du</strong>s par la nature, on ne dispose que<strong>de</strong> vagues approximations. Comm<strong>en</strong>t notre propre ministère peut-il déci<strong>de</strong>r sans plus <strong>de</strong> lumière ? » (Le Mon<strong>de</strong>, 26février 2010 148 ). http://www.lemon<strong>de</strong>.fr/planete/article/2010/02/26/face-a-l-erosion-<strong>de</strong>-la-biodiversite-la-francetatonne_1311674_3244.html231


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesEn restant à ce niveau général <strong>du</strong> mouvem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s concepts <strong>en</strong>tre les arènes sci<strong>en</strong>tifique etpolitique, nous pouvons avoir l’impression d’assister à une fuite <strong>en</strong> avant dans la recherche d<strong>en</strong>ouveaux concepts, mais dont le pot<strong>en</strong>tiel mobilisateur semble être toujours décevant. Pour nepas tirer <strong>de</strong> conclusions hâtives, il paraît intéressant <strong>de</strong> se conc<strong>en</strong>trer sur <strong>de</strong>s cas concrets et nousdisposons justem<strong>en</strong>t d’un cas d’étu<strong>de</strong> à l’échelle <strong>du</strong>quel il est possible <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre laformation et les modalités <strong>de</strong> l’action visant à influ<strong>en</strong>cer les décisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s. L’Observatoire <strong>de</strong>s Zones Humi<strong>de</strong>s Méditerrané<strong>en</strong>nes (OZHM) est donc un <strong>de</strong> cesdispositifs complexes, s’inscrivant dans un cadre régional, la Méditerranée, agissant sous lemandat d’une instance intergouvernem<strong>en</strong>tale (l’initiative MedWet) et porté par une ONGE, laTdV.Notre analyse vise à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t une ONGE parvi<strong>en</strong>t à mettre <strong>en</strong> place un teldispositif, et comm<strong>en</strong>t l’outil va répondre aux objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux dont elle l’a doté. Plusprécisém<strong>en</strong>t, nous nous attacherons à répondre aux questions suivantes :- Quelle est la réflexion stratégique développée par la TdV pour créer cet OZHM ?- Quelles ressources doit-elle rassembler et investir pour sa concrétisation ?- Quelles stratégies d’action sont mises <strong>en</strong> œuvre ?- Et surtout, comm<strong>en</strong>t l’OZHM peut-il contribuer à une meilleure prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZHM ?5.1.2 MéthodologieAprès l’analyse <strong>de</strong> l’action par la recherche exercée à la TdV (Chapitre 3) et l’analyse d’un projet<strong>de</strong> court terme aujourd’hui terminé (Chapitre 4), nous nous trouvons ici face à un dispositifrégional étant au sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> construction et <strong>de</strong>s premières mises <strong>en</strong> œuvre. L’avantage majeurd’étudier le dispositif à ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t rési<strong>de</strong> dans la réflexion et le débat stratégiquequ’il permet d’observer. L’inconvéni<strong>en</strong>t est qu’il r<strong>en</strong>d difficile l’analyse externe – c’est-à-direl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t que l’OZHM cherche à investir – à un mom<strong>en</strong>t où les relations externes ne sont<strong>en</strong>core pas bi<strong>en</strong> développées et au moins <strong>en</strong> partie stabilisées.L’analyse stratégique m<strong>en</strong>ée sur ce cas <strong>de</strong> l’OZHM s’appuie sur l’observation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux familles <strong>de</strong>processus stratégiques :1) La construction <strong>de</strong>s théories d’action, que nous avons définies 149 comme étant une action ouun <strong>en</strong>semble d’actions <strong>en</strong>visagées <strong>de</strong>vant pro<strong>du</strong>ire un certain effet permettant d’atteinte unobjectif écologique. Nous parlons <strong>de</strong> théorie pour souligner le fait qu’il s’agit <strong>de</strong> la stratégie149 Voir la section 1.2 <strong>du</strong> chapitre 1.232


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqued’action telle qu’elle est imaginée avant d’être confrontée aux conditions réelles <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvrepratique. Pour saisir ces théories d’action, nous nous appuierons sur les processus <strong>de</strong> réflexionstratégique – <strong>de</strong> la réflexion ayant m<strong>en</strong>é à l’idée <strong>de</strong> l’OZHM, à l’élaboration <strong>de</strong> son cadre d’actionet <strong>de</strong> son mo<strong>de</strong> d’action ;2) et les pratiques, les activités mises <strong>en</strong> place pour construire l’OZHM et le faire fonctionner.Le recueil <strong>de</strong> données se situe à plusieurs niveaux :- l’observation <strong>de</strong>s pratiques et <strong>de</strong>s discussions formelles et informelles ayant lieu au sein <strong>de</strong>l’équipe <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM notamm<strong>en</strong>t pour déceler les théories d’action <strong>en</strong> débat ;- l’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts internes et externes <strong>de</strong> l’OZHM dans lesquelles apparaiss<strong>en</strong>tnotamm<strong>en</strong>t les choix stratégiques adoptés. Les docum<strong>en</strong>ts sont égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong>formalisation « <strong>de</strong> ce qui pose problème ou ce qui est le résultat d’une négociation, d’un accordimplicite ou d’un travail <strong>de</strong> qualification <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’expéri<strong>en</strong>ce » (Barbier, 1998 : 86) quipermett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> suivre la stabilisation temporaire <strong>de</strong>s débats internes. Notons que la distanciationpar rapport aux écrits a été particulièrem<strong>en</strong>t importante sur ce cas, dans la mesure où ils seserv<strong>en</strong>t largem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> vocabulaires codés et <strong>de</strong> « concepts opératoires » très génériques dontl’explicitation est un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> l’analyse stratégique.Ces sources <strong>de</strong> données sont complétées par :- la consultation <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts techniques et <strong>de</strong>s sites web pro<strong>du</strong>its ou utilisés par l’équipe <strong>de</strong>coordination TdV ;- et surtout par la réalisation d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s réguliers, semi-directifs ou informels avec l’équipe <strong>de</strong>coordination et d’autres membres <strong>de</strong> la TdV.Le recueil <strong>de</strong> données <strong>en</strong> externe s’est avéré plus délicat. Réaliser <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec lespart<strong>en</strong>aires et utilisateurs pot<strong>en</strong>tiels n’était pas <strong>en</strong>visageable dans le cal<strong>en</strong>drier <strong>de</strong> la thèse, vul’éloignem<strong>en</strong>t géographique et dans le contexte et la s<strong>en</strong>sibilité politique <strong>du</strong> dispositif p<strong>en</strong>dant lapério<strong>de</strong> d’étu<strong>de</strong>. L’OZHM a malgré tout été abordé dans sa relation avec l’externe parl’observation et l’étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ateliers <strong>de</strong> mars 2009 et février 2010. Ces ateliersregroupai<strong>en</strong>t les part<strong>en</strong>aires et quelques acteurs visés comme utilisateurs <strong>de</strong> l’OZHM.L’analyse <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s informations recueillies et <strong>de</strong>s jeux d’acteurs permet au final, uneévaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> l’OZHM dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHM.233


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales5.1.3 Prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> dispositif OZHMa) Naissance <strong>de</strong> l’OZHML’idée <strong>de</strong> créer un Observatoire <strong>de</strong>s Zones Humi<strong>de</strong>s Méditerrané<strong>en</strong>nes a été évoquée pour lapremière fois lors <strong>du</strong> Comité MedWet 150 <strong>en</strong> 2004. Le suivi et l’évaluation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes est un souci <strong>de</strong>puis longtemps partagé par la communauté qui s’est développéeautour <strong>de</strong> cet objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal important dans la région méditerrané<strong>en</strong>ne. Le suiviévaluationest <strong>en</strong> partie à l’origine <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> l’initiative MedWet suite à la Confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>Grado <strong>en</strong> 1992. Un <strong>de</strong>s principaux projets portés par MedWet a d’ailleurs été le développem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s d’inv<strong>en</strong>taires <strong>de</strong>s ZHM. La naissance <strong>de</strong> l’OZHM a été rythmée par trois étapesprincipales :• L’OZHM a été prés<strong>en</strong>té par le directeur <strong>de</strong> la TdV – sout<strong>en</strong>u par le présid<strong>en</strong>t et le fondateur<strong>de</strong> la TdV – pour la première fois au Comité MedWet 6 (Tipaza, 2004), qui avait pour thème« The status of Mediterranean wetlands : curr<strong>en</strong>t assesm<strong>en</strong>ts and future priorities ». « Malgré quelquesréserves voilées <strong>de</strong> pays contractants <strong>en</strong>registrant d’importantes <strong>de</strong>structions <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s (la Grèce) »(Direction TdV, com.pers. 2009), la TdV est <strong>en</strong>couragée à poursuivre.• En juin 2007, l’avancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM est prés<strong>en</strong>té au Comité MedWet par le directeur <strong>de</strong> laTdV et le membre <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> ce projet. « Le projet est apparu trop ficelé pour lesreprés<strong>en</strong>tants gouvernem<strong>en</strong>taux alors qu’ils s’att<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t à la proposition d’un concept ». « Contractants <strong>de</strong>Ramsar, ils sont habitués à être consultés avant décision et surtout pas à se faire imposer quoique ce soit parune ONG » (Direction TdV, com.pers., 2007). Le comité (notamm<strong>en</strong>t la Grèce) jugel’acceptation politique <strong>de</strong> l’OZHM prématurée. Il est proposé <strong>de</strong> continuer à travailler sur laproposition <strong>de</strong> l’OZHM qui <strong>de</strong>vra être prés<strong>en</strong>té au Comité MedWet <strong>en</strong> 2008.• Le souti<strong>en</strong> <strong>du</strong> Comité <strong>de</strong> MedWet est obt<strong>en</strong>u <strong>en</strong> octobre 2008, lors <strong>de</strong> la 9 ème réunion <strong>du</strong>groupe (<strong>en</strong> parallèle <strong>de</strong> la 10 ème Confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s Parties <strong>de</strong> Ramsar à Changwon, Corée), avecl’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> Ministère français <strong>de</strong> l’écologie (MEEDDAT). Le Comité MedWet assure unportage politique <strong>de</strong> cet Observatoire. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est mandatée pour initier le montageet la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes.L’OZHM est officiellem<strong>en</strong>t né quand sa construction a été validée au sein <strong>du</strong> Comité MedWet,c’est-à-dire avec tous les pays méditerrané<strong>en</strong>s. Cinq années ont passé <strong>en</strong>tre l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’idéeet le lancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> dispositif, p<strong>en</strong>dant lesquelles la TdV a dû continuer àtravailler pour sa réalisation.150 L’initiative MedWet est prés<strong>en</strong>tée dans l’<strong>en</strong>cadré 2.2 dans le chapitre 2.234


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueb) Objectifs <strong>de</strong> l’OZHML’OZHM se prés<strong>en</strong>te comme un dispositif valorisant les connaissances relatives aux ZHM pourai<strong>de</strong>r les déci<strong>de</strong>urs à pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s décisions favorables à leur conservation et à leur <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>rableet à leur restauration. Le mandat et les objectifs <strong>de</strong> l’OZHM sont formulés <strong>de</strong> la manière suivante(Encadré 5.1) :Encadré 5.1 : Objectifs <strong>de</strong> l’OZHM (Working paper for the second international workshop, 2009 ;Working docum<strong>en</strong>t for the third international workshop, 2010)Mandate :Initially, it is <strong>en</strong>visaged that the main value that the Observatory will add to the sci<strong>en</strong>tific, policymakingbodies and other users will be the following outcomes:• To catalyze, c<strong>en</strong>tralize, consolidate, assess and share knowledge on the conservation status andtr<strong>en</strong>ds of Mediterranean wetlands• To raise awar<strong>en</strong>ess among users and to help <strong>de</strong>cision-making towards wetland conservation andsustainable managem<strong>en</strong>t and use.• To assess the status and tr<strong>en</strong>ds of ecological functions, values and services of Mediterraneanwetlands in the context of sustainable <strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t.Mediterranean Wetlands Observatory has three inter-related objectives:1. Provi<strong>de</strong> timely and quality information on Mediterranean wetlands status and tr<strong>en</strong>ds.2. Track threats to Mediterranean wetlands and id<strong>en</strong>tify actions to promote their protection andwise use and restoration.3. Assess Mediterranean wetlands dim<strong>en</strong>sion in the Mediterranean context of sustainable<strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t.These three objectives are inter-related with the following logic: the first objective is linked to theknowledge on status and tr<strong>en</strong>ds of Mediterranean Wetlands. This objective informs on a status that is aconsequ<strong>en</strong>ce of internal and external drivers and pressures on wetlands. The second objective tries tomobilize research and analyze the causes of these internal and external drivers and pressures impactingon the status and tr<strong>en</strong>ds of wetlands. It aims also at facilitating to reverse the <strong>de</strong>gradation tr<strong>en</strong>d and toinitiate positive actions, i.e. to restore some of the rec<strong>en</strong>tly <strong>de</strong>gra<strong>de</strong>d wetlands. The third objective seeksto inform on the analysis of the weight giv<strong>en</strong> to Mediterranean wetlands in the context of sustainable<strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t, including with policy, strategic and sci<strong>en</strong>tific dim<strong>en</strong>sions (responses).Cet affichage d’ai<strong>de</strong> à la décision et les objectifs définis seront largem<strong>en</strong>t analysés dans la suite <strong>du</strong>texte, aussi, nous nous cont<strong>en</strong>tons à ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette prise <strong>de</strong> connaissance.c) Organisation <strong>de</strong> l’OZHMPour compr<strong>en</strong>dre les <strong>en</strong>jeux et les t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t lastratégie <strong>de</strong> l’OZHM, nous <strong>de</strong>vrons souv<strong>en</strong>t rev<strong>en</strong>ir aux étapes <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> dispositif.Pour faciliter la lecture, il semble opportun <strong>de</strong> donner au préalable une image complète <strong>de</strong>sélém<strong>en</strong>ts qui le constitu<strong>en</strong>t.235


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesL’OZHM existe donc dans le cadre <strong>de</strong> l’initiative MedWet 151 , qui a officiellem<strong>en</strong>t mandaté la TdVpour porter son développem<strong>en</strong>t. Forte <strong>de</strong> cette légitimité politique, la TdV a pu constituer uneéquipe <strong>en</strong> interne chargée <strong>de</strong> ce programme. Celle-ci est composée <strong>de</strong> cinq personnes. Cetteéquipe restera l’unité <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM tant que celui-ci est considéré <strong>en</strong> phase <strong>de</strong>construction, et jusqu’à ce que la décision d’un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> localisation <strong>de</strong> cette équipe soitdécidée au niveau <strong>de</strong> l’institution mandataire (MedWet).L’OZHM vise à développer et valoriser la connaissance <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s à l’échelleméditerrané<strong>en</strong>ne pour promouvoir l’amélioration <strong>de</strong> leur <strong>gestion</strong>. Pour répondre à cette missiondéclinée <strong>en</strong> trois objectifs (que l’on détaillera plus loin) un cadre a été défini : il comporte cinqthèmes relatifs aux ZHM ont été déterminés et plusieurs indicateurs associés à un <strong>de</strong> ces thèmes.Certains suivis et étu<strong>de</strong>s relatifs aux ZHM et à leur biodiversité peuv<strong>en</strong>t être pro<strong>du</strong>its pour lesbesoins spécifiques <strong>de</strong> l’OZHM, mais la logique dominante est plutôt inverse : l’OZHM constitueun cadre permettant <strong>de</strong> porter à une échelle plus large un certain nombre <strong>de</strong> suivis et étu<strong>de</strong>sréalisés à échelle locale. Il constitue égalem<strong>en</strong>t une voie <strong>de</strong> diffusion supplém<strong>en</strong>taire pour d’autresétu<strong>de</strong>s réalisées à échelle nationale ou régionale. Les étu<strong>de</strong>s et suivis mobilisés par l’OZHM ontplusieurs origines : pour l’instant, il s’agit <strong>de</strong> suivis historiques <strong>de</strong> la TdV notamm<strong>en</strong>t pour ce quiconcerne les données Camargue, ou d’autres projets réalisés par l’équipe <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong>l’OZHM basé à la TdV. L’idée est que d’autres suivis et d’autres étu<strong>de</strong>s, portés par <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t alim<strong>en</strong>ter le dispositif. Le part<strong>en</strong>ariat est un <strong>en</strong>jeu important <strong>de</strong>l’OZHM car le dispositif ne peut être pleinem<strong>en</strong>t développé seulem<strong>en</strong>t par les efforts <strong>de</strong> la TdV.Ces données sont donc utilisées dans le cadre établi – mais évolutif – (3 objectifs, 5 thèmes, 22indicateurs) permettant d’évaluer le statut et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM. Les résultats <strong>de</strong> cetteanalyse – qui a vocation à être révisée régulièrem<strong>en</strong>t – seront diffusés.Cette rapi<strong>de</strong> prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> dispositif nous donne déjà à voir une nouvelle configuration dans lafaçon dont vont s’articuler les différ<strong>en</strong>ts registres <strong>de</strong> notre cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’ONGE(ASOFE). Ici, les ressources et les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et techniques sont mobilisées(registre <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne), <strong>de</strong>s efforts sont employés à trouver <strong>de</strong>s ressourcessupplém<strong>en</strong>taires dans le réseau et le part<strong>en</strong>ariat (registre <strong>de</strong> la place dans le secteur), et lesdonnées et les analyses sci<strong>en</strong>tifiques sont rassemblées (registre <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action public). Lestrois registres stratégiques converg<strong>en</strong>t vers le même but <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’objet « zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes » comme objet écologique à conserver. Nous pouvons à prés<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>trer dans le détail <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces dim<strong>en</strong>sions.151 Voir l’<strong>en</strong>cadré 2.2 <strong>du</strong> chapitre 2.236


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politique5.2 L’OZHM : t<strong>en</strong>sion et interdép<strong>en</strong>dances <strong>de</strong> quatre registresstratégiques pour construire l’objet « zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes »Cette section (5.2) sera consacrée à la construction <strong>de</strong> l’OZHM et sera donc la plus longue <strong>du</strong>chapitre. Pour <strong>en</strong> faciliter la lecture, indiquons dès à prés<strong>en</strong>t la logique que nous allons suivre. Lasection sera organisée <strong>en</strong> quatre temps qui correspond<strong>en</strong>t aux quatre registres stratégiques d<strong>en</strong>otre cadre d’analyse. Premièrem<strong>en</strong>t, nous abor<strong>de</strong>rons les ressources critiques et stratégiques sanslesquelles l’Observatoire n’aura pu voir le jour (Section 5.2.1). Dans un <strong>de</strong>uxième temps, nousallons nous intéresser à la dim<strong>en</strong>sion c<strong>en</strong>trale <strong>de</strong> ce cas d’étu<strong>de</strong> qui est celle <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>sZHM comme objet à conserver, et étudierons les <strong>en</strong>jeux et implications <strong>de</strong> la stratégiesci<strong>en</strong>tifique qui est déployée par la TdV à cette fin (Section 5.2.2). Dans un troisième temps, nousnous attacherons à la stratégie part<strong>en</strong>ariale mise <strong>en</strong> œuvre par la TdV pour rassembler etimpliquer les acteurs <strong>de</strong> son réseau autour <strong>de</strong> l’OZHM, la TdV ne pouvant assumer seule lacharge <strong>de</strong> travail requise (Section 5.2.3). Enfin, nous nous attacherons à repérer les théoriesd’action qui se <strong>de</strong>ssin<strong>en</strong>t et qui doiv<strong>en</strong>t faire <strong>de</strong> l’OZHM un véritable levier pour agir <strong>en</strong> faveur<strong>de</strong>s ZHM <strong>en</strong> échappant à un scénario redouté : « construire une usine à gaz » (Section 5.2.4).5.2.1 La stratégie <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t : les ressources critiques pour la construction<strong>de</strong> l’OZHML’abs<strong>en</strong>ce d’observatoire <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et l’échec <strong>de</strong> nombred’<strong>en</strong>tre eux indiqu<strong>en</strong>t la difficulté <strong>du</strong> montage et <strong>du</strong> mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> tels dispositifs. L’observatoire estune action collective qui émerge <strong>du</strong> rapprochem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre différ<strong>en</strong>ts types d’acteurs autour d’unproblème à résoudre. Mais ni le cons<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t à participer, ni même l’effort collectif investi nesuffis<strong>en</strong>t à la réussite <strong>de</strong> l’action et la résolution <strong>du</strong> problème. Elles dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t aussi <strong>de</strong> lastructuration <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> elle-même. En effet, l’action organisée génère <strong>en</strong> elle-même sespropres problèmes, que Crozier et Friedberg (1977 : 18) appell<strong>en</strong>t les effets d’organisation, ou leseffets <strong>de</strong> système. L’Observatoire Camargue, qui rassemblait sept organismes <strong>en</strong> Camargue dont laTdV, est un parfait exemple d’action collective <strong>en</strong>gloutie par ses propres effets <strong>de</strong> système. Cessept organismes se sont rapprochés autour <strong>du</strong> constat selon lequel la Camargue faisait l’objet d<strong>en</strong>ombreux suivis et étu<strong>de</strong>s, mais dont les données et résultats restai<strong>en</strong>t dispersés et souv<strong>en</strong>tincompatibles interdisant leur utilisation dans une analyse plus globale <strong>du</strong> territoire. Cespart<strong>en</strong>aires ambitionnai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> voir leurs travaux mobilisés comme outils d’ai<strong>de</strong> à la237


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesdécision et d’évaluation <strong>de</strong>s politiques publiques. C. Lebreton (2008) a réalisé une analyseorganisationnelle <strong>de</strong> l’Observatoire Camargue. Cette étu<strong>de</strong> montre que l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> mandatpolitique a eu au moins <strong>de</strong>ux effets : l’Observatoire Camargue est ré<strong>du</strong>it à un statut faible sur unebase volontaire dans lequel les objectifs à poursuivre sont sans cesse remis <strong>en</strong> question par lespart<strong>en</strong>aires. Le dispositif <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t une arène où s’exprim<strong>en</strong>t les jeux politiques et stratégiques ayantlieu plus largem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre ces organismes investis sur ce même territoire camarguais, r<strong>en</strong>dant ladésignation d’un coordinateur légitime impossible et freinant toute prise d’initiative, laissantl’Observatoire sans but et sans moy<strong>en</strong>, livré à une l<strong>en</strong>te agonie qui aura <strong>du</strong>ré près <strong>de</strong> 10 ans.Le cas <strong>de</strong> l’OZHM corrobore les résultats <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> C. Lebreton. En effet, l’OZHM aréellem<strong>en</strong>t vu le jour lorsque que trois conditions ont été réunies :- le mandat politique : la validation par le comité MedWet <strong>en</strong> novembre 2008 permet <strong>de</strong> fixerles objectifs qui seront poursuivi par l’OZHM, <strong>de</strong> légitimer la TdV comme porteur(coordinateur) <strong>de</strong> son développem<strong>en</strong>t. Ce mandat politique augm<strong>en</strong>te les capacités <strong>de</strong>l’organisation à capter <strong>de</strong>s ressources (financem<strong>en</strong>t, part<strong>en</strong>ariat) et l’<strong>en</strong>courage à investir dans unclimat <strong>de</strong> risques moindres.- Des ressources humaines suffisantes : la TdV a recruté un nouveau chef <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>janvier 2009 affecté <strong>en</strong> particulier au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM (il sera désigné par le terme <strong>de</strong>« coordinateur <strong>de</strong> l’OZHM » dans le texte). Une équipe – appelé Unité <strong>de</strong> Coordination (CU) <strong>de</strong>l’OZHM – s’est constituée <strong>en</strong> interne, réunissant rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t cinq personnes autour <strong>de</strong> ce projet.Cette équipe intervi<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>ux niveaux : la structuration et le montage <strong>de</strong> l’OZHM d’une part ; lacon<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> leurs projets respectifs d’autre part. Ces projets étant valorisés (<strong>en</strong> plus) par l’OZHM.Cette équipe est légitime (mandat politique) pour solliciter les part<strong>en</strong>aires autour <strong>de</strong> l’OZHM etpour m<strong>en</strong>er les premières actions.- Des moy<strong>en</strong>s financiers minimums : Pour disposer <strong>de</strong> ces ressources humaines suffisantes, il afallu obt<strong>en</strong>ir les fonds nécessaires à leur recrutem<strong>en</strong>t. Les <strong>de</strong>ux chefs <strong>de</strong> projet ont été recrutéssur projets financés <strong>en</strong> 2008, le coordinateur a été recruté sur un déblocage <strong>de</strong> fonds spécial <strong>de</strong> lafondation MAVA.Le mandat politique ainsi que l’allocation <strong>de</strong> ressources humaines et financières s’avèr<strong>en</strong>t doncavoir été les ressources critiques ayant permis le démarrage <strong>de</strong> l’OZHM. Mais aussiindisp<strong>en</strong>sables qu’elles soi<strong>en</strong>t, ces ressources ne constitu<strong>en</strong>t qu’une partie <strong>de</strong> celles qui ont permisà la TdV <strong>de</strong> développer un dispositif <strong>de</strong> cette ampleur. L’OZHM bénéficie <strong>en</strong> effet dautresressources acquises <strong>de</strong> l’organisation. Repr<strong>en</strong>ons ici notre concept <strong>de</strong> place qui nous ai<strong>de</strong> àmesurer l’effort <strong>de</strong> long terme sans lequel l’OZHM n’aurait sans doute pas pu voir le jour. Cette238


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueplace occupée aujourd’hui par la TdV au sein <strong>de</strong> la communauté sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong> la conservation<strong>de</strong>s ZHM a été acquises au fil <strong>de</strong>s années :- Une place importante au sein <strong>de</strong> l’initiative MedWet : la TdV est très proche <strong>de</strong> MedWet<strong>de</strong>puis sa création à laquelle elle a largem<strong>en</strong>t participé. La TdV est perçue comme étant le c<strong>en</strong>tretechnique le plus actif <strong>de</strong> MedWet (Membre secrétariat MedWet 152 , com.pers., 2007). Elle estdonc légitime pour proposer <strong>de</strong>s actions : la proposition <strong>de</strong> l’OZHM a été bi<strong>en</strong> reçue <strong>en</strong> 2004(même s’il a fallu att<strong>en</strong>dre plusieurs années pour obt<strong>en</strong>ir un mandat politique clair). En retour,cette légitimité acquise au sein <strong>de</strong> l’initiative MedWet offre à la TdV un accès à l’échelleméditerrané<strong>en</strong>ne.- Une place dans le réseau sci<strong>en</strong>tifique et technique : l’OZHM bénéficie <strong>du</strong> large réseau <strong>de</strong> laTdV. Si un <strong>de</strong>s apports fondam<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> l’OZHM <strong>de</strong>vrait être le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> réseau – <strong>en</strong>terme d’int<strong>en</strong>sité <strong>de</strong>s contacts et <strong>de</strong> ressources partagées – il aurait sans doute eu peine à voir lejour sans cet atout.- La notoriété et la crédibilité sci<strong>en</strong>tifique acquises par la TdV (notamm<strong>en</strong>t lors <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariatou r<strong>en</strong>contres antérieures) a joué dans sa capacité à rassembler les membres <strong>de</strong> son réseau autour<strong>de</strong> ce projet.Après avoir id<strong>en</strong>tifié les ressources initiales ayant permis la création <strong>de</strong> l’OZHM, il faut <strong>en</strong>visagercelles qui sont et seront nécessaires à son développem<strong>en</strong>t. Ceci nous r<strong>en</strong>voie au registrestratégique <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne qui nous gui<strong>de</strong> dans l’analyse <strong>de</strong> ces ressources dontdép<strong>en</strong>d aussi la réussite <strong>du</strong> dispositif.- Les ressources financières : l’OZHM, dispositif <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> l’état et <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM,pr<strong>en</strong>d son s<strong>en</strong>s dans le long terme. Quelle sera la capacité <strong>de</strong> la TdV à faire valoir cette nécessité<strong>du</strong> long terme dans l’acquisition <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts, à l’heure où les fonds sont alloués à <strong>de</strong>s projetsne dépassant pas <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> 4 ans (sachant que la plupart <strong>de</strong>s bailleurs financ<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>scycles <strong>de</strong> 1 ou 2 ans) ? La structuration <strong>de</strong> l’OZHM lève <strong>en</strong> partie cette contrainte dans la mesureoù il se nourrit <strong>de</strong> projets plus restreints (dans l’objet, le temps, l’espace) mais qui peuv<strong>en</strong>t trouverune valorisation sur le long terme à travers l’OZHM. Cep<strong>en</strong>dant, ces projets ne peuv<strong>en</strong>t suffire àfournir l’analyse globale méditerrané<strong>en</strong>ne que l’OZHM <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d réaliser. Une voie <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>tcomplém<strong>en</strong>taire concerne les travaux développés spécifiquem<strong>en</strong>t pour les besoins <strong>de</strong> l’OZHM.Ici, la TdV doit chercher les fonds <strong>de</strong> manière active au titre <strong>de</strong> l’OZHM. Mais selon l’équipe <strong>de</strong>coordination et la direction <strong>de</strong> la TdV, cela ne signifie pas systématiquem<strong>en</strong>t un affichage <strong>de</strong>l’OZHM, mais plutôt d’actions innovantes, dans la mesure où certains bailleurs sont rétic<strong>en</strong>ts à ce152 Tobias Salathé est membre <strong>du</strong> secrétariat MedWet <strong>en</strong> tant que MedWet s<strong>en</strong>ior advisor.239


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesg<strong>en</strong>re <strong>de</strong> dispositifs. Toutefois, cela ne concerne pas directem<strong>en</strong>t le financem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM : les ressources humaines, le matériel, les déplacem<strong>en</strong>ts et ladiffusion <strong>de</strong>s résultats et <strong>de</strong>s messages <strong>de</strong> l’OZHM. La TdV et l’équipe <strong>en</strong>visag<strong>en</strong>t pour cela <strong>de</strong>uxautres sources <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t. La première est la plus sûre : internaliser le « projet OZHM » aubudget global <strong>de</strong> la TdV pour le prochain plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015, l’OZHM ayant étéaccepté comme programme fondam<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> la TdV par ses organes <strong>de</strong> gouvernance. A ce titre, ledépartem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> l’OZHM bénéficiera d’une dotation <strong>de</strong> 300 K, soit <strong>en</strong>viron les <strong>de</strong>uxtiers <strong>de</strong> son budget annuel. La secon<strong>de</strong> source n’est pour l’instant qu’une perspective : « sil’OZHM <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t LE projet-phare <strong>de</strong> MedWet, il semblerait logique qu’à terme une part nonnégligeable <strong>du</strong> souti<strong>en</strong> institutionnel régulier <strong>de</strong>s états-membres à MedWet aille aufonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> routine <strong>de</strong> l’OZHM » (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> réunion brainstorming <strong>de</strong> l’OZHM,mars 2010).- Un part<strong>en</strong>ariat opérationnel : pour développer son cont<strong>en</strong>u, l’OZHM a besoin <strong>de</strong> part<strong>en</strong>aireslui apportant <strong>de</strong>s données et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces complém<strong>en</strong>taires. Quelle sera la capacité <strong>de</strong> la TdVà transformer le part<strong>en</strong>ariat pot<strong>en</strong>tiel <strong>en</strong> un part<strong>en</strong>ariat actif ? Cet aspect relève égalem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>registre <strong>de</strong> la stratégie relative à l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et sera traité dans la suite <strong>du</strong> texte.- La notoriété et légitimité propres <strong>du</strong> dispositif : ce sont <strong>de</strong>s ressources stratégiques (registre<strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t organisationnel) dans le s<strong>en</strong>s où elles augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t les capacités à capterd’autres ressources (Zimmerman & Zeitz, 2002). Un dispositif reconnu aura t<strong>en</strong>dance à attirerd’autres acteurs. Cette notoriété acquise profiterait égalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> retour à la TdV.5.2.2 Stratégie <strong>de</strong> qualification et <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’objet « zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes »a) Les normes adoptées par l’OZHM : une stratégie d’inscription dans lagouvernance <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sDéfinir l’objet ZHM porté par l’OZHM est une opération complexe et stratégique, dans lamesure où cette définition constitue la base sur laquelle est développé le système <strong>de</strong> suiviévaluationet détermine l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t social et politique dans lequel il doit s’inscrire. Ce travail<strong>de</strong> définition, qui implique <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong>s dim<strong>en</strong>sions politiques et techniques qui serontdiscutées dans cette partie, représ<strong>en</strong>te un travail implicite, mais important pour l’unité <strong>de</strong>coordination. La première étape <strong>de</strong> formalisation <strong>de</strong> l’objet a été un travail <strong>de</strong> revue <strong>de</strong>sConv<strong>en</strong>tions internationales et <strong>de</strong>s programmes dans le champ <strong>de</strong> la Biodiversité, <strong>de</strong>s ZH et <strong>du</strong>240


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueDéveloppem<strong>en</strong>t Durable 153 (DD). Cette revue est la métho<strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre par un membre <strong>de</strong>l’équipe pour définir les thèmes et les indicateurs qui constitu<strong>en</strong>t le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> l’OZHM. Elle aété mise au point <strong>de</strong> façon à inscrire l’OZHM dans le cadre international <strong>de</strong> la biodiversité, <strong>de</strong>sZH et <strong>du</strong> DD. La formalisation <strong>de</strong> l’objet ZHM passe donc par une mobilisation choisie – <strong>en</strong>fonction <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> l’OZHM – <strong>de</strong> normes existantes et reconnues à l’échelle internationale,par les sphères politiques (Conv<strong>en</strong>tions) et technico-sci<strong>en</strong>tifiques (programmes). La Conv<strong>en</strong>tionsur la Diversité Biologique (CBD) apparaît comme structurante à l’échelle internationale et lesprogrammes sub-régionaux ont t<strong>en</strong>dance à se développer <strong>de</strong> manière à être cohér<strong>en</strong>ts etcompatibles avec cette Conv<strong>en</strong>tion. Pour l’OZHM, l’adoption <strong>de</strong> ces normes est complétée parcelles plus spécifiques <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar pour les zones humi<strong>de</strong>s. Les normes <strong>en</strong>dosséespar ces conv<strong>en</strong>tions ont évolué suite au changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> paradigme que constitue le DD à partir<strong>du</strong> Sommet <strong>de</strong> la Terre <strong>de</strong> 1992. Depuis, « notre compréh<strong>en</strong>sion et conceptualisation <strong>de</strong> labiodiversité sont passées d’une approche focalisée tout d’abord sur les espèces, les habitats et leurconservation à une approche holistique, focalisée sur la conservation et l’utilisation <strong>du</strong>rable <strong>de</strong> labiodiversité et <strong>de</strong>s services écosystémiques » (van d<strong>en</strong> Hove & Chabason, 2009 : 3 - tra<strong>du</strong>ction).L’évolution <strong>de</strong> ces critères normatifs a <strong>en</strong>traîné un élargissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> conservation quicompr<strong>en</strong>d désormais la <strong>gestion</strong> avisée <strong>de</strong>s écosystèmes, et par suite, une évolution <strong>de</strong>s principesd’action et <strong>de</strong>s objectifs normatifs portés par la gouvernance internationale <strong>de</strong> la biodiversité et<strong>de</strong>s ZH. Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la préservation <strong>de</strong> la faune et <strong>de</strong> la flore (1) et <strong>de</strong> la préservation <strong>de</strong>s habitats(2), ces objectifs normatifs compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la conservation <strong>de</strong> la biodiversité (3), et <strong>de</strong> lafonctionnalité écologique <strong>de</strong>s écosystèmes (4) (Leroy, 2006a : 177).Les cinq thèmes ret<strong>en</strong>us pour l’OZHM sont empreints <strong>de</strong> cette approche large <strong>de</strong> la nature etcorrespond<strong>en</strong>t au positionnem<strong>en</strong>t normatif général <strong>de</strong> la TdV (Encadré 5.2) :153 Sur la biodiversité : au niveau international, la Conv<strong>en</strong>tion sur la Diversité Biologique (CBD), la Conv<strong>en</strong>tion sur laConservation <strong>de</strong>s Espèces Migratrices (CMS), La Conv<strong>en</strong>tion sur le commerce international <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong> faune et<strong>de</strong> flore sauvages m<strong>en</strong>acées d'extinction (CITES). Au niveau europé<strong>en</strong>, Streamlining European 2010 BiodiversityIndicators (dans le cadre <strong>de</strong> la CBD), la conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Berne a pour but d'assurer la conservation <strong>de</strong> la vie sauvage et<strong>du</strong> milieu naturel <strong>de</strong> l'Europe (dans le cadre <strong>de</strong> la CMS). Au niveau français: la stratégie nationale pour la biodiversité.Sur les zones humi<strong>de</strong>s : au niveau international, la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Auniveau europé<strong>en</strong>, la directive sur l’eau 2000/60/EC. Au niveau français, L’observatoire <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s.Sur le Développem<strong>en</strong>t Durable : au niveau international, les objectifs <strong>du</strong> millénaire (MDGs), Mill<strong>en</strong>ium ecosystemassessm<strong>en</strong>t (MEA), la liste <strong>du</strong> patrimoine mondial ou patrimoine <strong>de</strong> l'humanité, le programme Man and Biosphere,Indicateur <strong>du</strong> l’organisation <strong>de</strong> coopération et <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t économique (OCDE). Au niveau méditerrané<strong>en</strong>, laConv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Barcelone et le Plan Bleu / Plan d’Action pour la Méditerranée. Au niveau europé<strong>en</strong>, le Programme<strong>de</strong> Gestion Intégrée <strong>de</strong>s zones côtières / DEDUCE – Développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable <strong>de</strong>s Côtes Europé<strong>en</strong>nes, lesindicateurs <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable, développé par Eurostat, Core Set of Indicators for sustainable <strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t<strong>de</strong> l’Ag<strong>en</strong>ce europé<strong>en</strong>ne pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Au niveau français, l’observatoire <strong>du</strong> littoral, Les indicateurs <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, Indicateurs clés pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (MEDDM), Suivi français <strong>de</strong>s <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts europé<strong>en</strong>s(MEDDM).241


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesEncadré 5.2 : Thèmes suivis par l’OZHM (Working docum<strong>en</strong>t for the third international workshop,février 2010)Monitoring of wetlands status and tr<strong>en</strong>ds will be done through the calculation of indicator values related tofive themes:Themes providing monitoring and evaluation results mostly towards objective 1 of MWO:1. Biodiversity compon<strong>en</strong>t: Assess the status and tr<strong>en</strong>ds of biodiversity by the appraisal of threeinter-related core levels (g<strong>en</strong>etic diversity, species and land cover) with an overarching goal ofmeasuring progress towards the Conv<strong>en</strong>tion on Biological Diversity (CBD)'s target to re<strong>du</strong>ce therate of biodiversity loss by 2010 and beyond.2. Ecosystem integrity and health (water regime, chemical state, spatial structure, ecosystemprocess): Determine the state of wetland ecosystems both in abiotic (especially water quantityand quality) and biotic processes, as well as their interactions. Conceptual frameworks will be<strong>de</strong>veloped for assessing the impact of human activity on biological systems, in or<strong>de</strong>r tocomplem<strong>en</strong>t the first theme <strong>de</strong>aling with compon<strong>en</strong>ts of the biological diversity and to assess themain pressures and drivers of changes in ecosystem integrity (theme 3).Theme providing monitoring and evaluation results mostly towards objective 2 of MWO:3. Drivers and pressure on wetlands (Policies with <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal impacts socio-economic driversand pressure): Monitor the main pressures and drivers which can affect, negatively or positively,the <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal status of Mediterranean Wetlands. In this theme, new relevant policies, laws,gui<strong>de</strong>lines and plans will be reported. Their implem<strong>en</strong>tation and real impacts on land, water andother natural resources managem<strong>en</strong>t, especially through socio-economic activities, will bemonitored in the wetlands.Themes providing monitoring and evaluation results mostly towards objective 3 of MWO:4. Integration of <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t in the <strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t process : To assess if and how wetlandconservation and/or protection have – or have not – be<strong>en</strong> tak<strong>en</strong> into account in <strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>tpolicies, strategies and plans at regional, national and local levels. European policies andgui<strong>de</strong>lines, Barcelona conv<strong>en</strong>tion, CBD, MDGs and other international commitm<strong>en</strong>ts will betak<strong>en</strong> into account in this theme.5. Ecological services (provisioning, regulating and cultural services): Monitor and assess theecosystem services in Mediterranean wetlands as well as their states and tr<strong>en</strong>ds, in or<strong>de</strong>r tomeasure their evolution as well as the consequ<strong>en</strong>ces of ecosystem change for human wellbeingLes <strong>de</strong>ux premiers thèmes sont focalisés sur l’intégrité <strong>de</strong>s écosystèmes et leur biodiversité, leurstatut et leur t<strong>en</strong>dance. Il s’agit d’alim<strong>en</strong>ter les connaissances sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, et donc<strong>de</strong> donner corps aux normes établies.Le troisième thème (forces et pressions sur les ZH) vise à fournir les élém<strong>en</strong>ts nécessaires àl’analyse <strong>de</strong> l’état et <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM au regard <strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> dégradation, notamm<strong>en</strong>tanthropiques. Il s’agit d’augm<strong>en</strong>ter les connaissances permettant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r au diagnostic <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> effective. Cet aspect est tout à fait déterminant pour l’OZHM : d’une part dans le registrestratégique <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, l’OZHM ne jouera un rôlesignificatif que s’il permet d’expliquer plus précisém<strong>en</strong>t ces mécanismes néfastes aboutissant à ladégradation <strong>de</strong>s ZH que l’on connaît déjà (même s’il faut <strong>en</strong>core <strong>en</strong> évaluer l’ampleur) etd’éclairer les responsabilités <strong>de</strong> ces mécanismes. D’autre part, dans le registre <strong>de</strong> l’action242


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politique<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, seuls ces éclairages peuv<strong>en</strong>t donner prise et gui<strong>de</strong>r l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale,mue par une stratégie au s<strong>en</strong>s fort contre ces forces qui exerc<strong>en</strong>t cette pression sur les ZHM.Les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers thèmes (4 et 5) vis<strong>en</strong>t à évaluer la prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s dans les programmes <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable, <strong>en</strong> analysant les dispositifs qui s’<strong>en</strong>réclam<strong>en</strong>t. Les thèmes choisis ont été soumis aux part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM lors <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ateliers<strong>de</strong> mars 2009 et <strong>de</strong> février 2010. Suite à ces échanges, un thème a été supprimé (capacitéd’adaptation aux changem<strong>en</strong>ts globaux) car jugé impossible à suivre et les thèmes ont étéstabilisés à la suite <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010.La formalisation biogéographique <strong>de</strong> l’objet ZHM est complexe et implique la compréh<strong>en</strong>sion<strong>de</strong>s phénomènes qui se pass<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s échelles plus larges et multiples. L’option choisie parl’OZHM est d’articuler les échelles géographiques <strong>de</strong> manière à ce que le système d’indicateurssoit pertin<strong>en</strong>t et faisable. « Les échelles géographiques couvertes par l’OZHM ont été discutées etvalidées par les participants à l’atelier <strong>de</strong> février 2010 :- La couverture globale <strong>de</strong> l’OZHM concerne les pays inclus dans l’initiative Medwet.- Des couvertures spécifiques seront adoptées <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s thèmes et <strong>de</strong>s indicateurs : lesbassins versants méditerrané<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s pays MedWet, les régions administratives, les zones côtièreset les régions bio-géographiques méditerrané<strong>en</strong>nes. » (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010 –tra<strong>du</strong>ction).b) La « vision naïve » <strong>de</strong>s dispositifs à l’interface sci<strong>en</strong>ce-politiqueAvant d’aller plus loin dans la stratégie <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> forme <strong>de</strong>s ZH mise <strong>en</strong> œuvre par l’OZHM,nous jugeons nécessaire <strong>de</strong> discuter ici <strong>de</strong> la posture conv<strong>en</strong>ue et communém<strong>en</strong>t affichée par lesdispositifs à l’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et politique. La justification donnée à la création <strong>de</strong> l’OZHMdans la proposition soumise au Comité MedWet <strong>en</strong> novembre 2008 part d’un constat et d’unpostulat. Le constat est que <strong>de</strong>puis la création <strong>de</strong> l’Initiative MedWet <strong>en</strong> 1992, <strong>de</strong> nombreusesdonnées relatives aux ZHM ont été collectées, <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s outils développés, mais lesdonnées sont dispersées et pas toujours accessibles. En conséqu<strong>en</strong>ce, il n’y a pas vision régionale<strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes disponible aujourd’hui. Le postulat est que« l’analyse <strong>de</strong>s ressources <strong>de</strong>s ZH, leur statut et leurs t<strong>en</strong>dances, ainsi que la diffusion <strong>de</strong> cesrésultats sont fondam<strong>en</strong>taux pour mobiliser les déci<strong>de</strong>urs autour <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> conserver,gérer et utiliser <strong>de</strong> façon rationnelle les écosystèmes aquatiques » (Jalbert, 9 th Meeting of theMediterranean Wetlands Committee, 2008). L’OZHM se prés<strong>en</strong>te comme un dispositif valorisantles connaissances relatives aux ZHM pour ai<strong>de</strong>r les déci<strong>de</strong>urs à pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s décisions favorables à243


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesleur conservation et à leur <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>rable (cf. mandat Encadré 5.1). Ce positionnem<strong>en</strong>t estcommun aux dispositifs <strong>de</strong> suivis et d’évaluation <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, basé sur le postulatsuivant : les déci<strong>de</strong>urs ont besoin <strong>de</strong> plus d’informations concernant l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, lesmécanismes <strong>de</strong> dégradation ou les pot<strong>en</strong>tiels <strong>de</strong> protection, pour pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> meilleures décisions.Cette justification est celle <strong>de</strong> la Liste Rouge <strong>de</strong> l’UICN : « Governm<strong>en</strong>ts, the private sector, multilateralag<strong>en</strong>cies responsible for natural resource use, and <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal treaties all need access to the latest information onbiodiversity wh<strong>en</strong> making <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>t-related <strong>de</strong>cisions. Information about species and ecosystems is ess<strong>en</strong>tial formoving towards more sustainable use of our natural resources » (iucn.org, 2010 154 ). De même, la mission <strong>du</strong>UNEP-WCMC est <strong>de</strong> mettre les connaissances sur la biodiversité au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s décisions : « Toevaluate and highlight the many values of biodiversity and put authoritative biodiversity knowledge at the c<strong>en</strong>tre of<strong>de</strong>cision-making » (unep-wcmc.org, 2010 155 ). Les exemples sont si nombreux qu’ils pourrai<strong>en</strong>t faireforce <strong>de</strong> loi. Mais au regard <strong>de</strong>s échecs comme celui <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge réelle <strong>de</strong> la biodiversitéà la hauteur <strong>de</strong>s objectifs 2010 fixés <strong>en</strong> 2002 à Johannesburg 156 , l’apport <strong>de</strong> connaissances poursatisfaire les besoins <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs semble être un fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action quelque peu hasar<strong>de</strong>uxet il est peu probable que les porteurs <strong>de</strong>s dispositifs à l’interface sci<strong>en</strong>ce-politique le pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tpour arg<strong>en</strong>t comptant. Mais alors pourquoi particip<strong>en</strong>t-ils à la diffusion <strong>de</strong> ce discours ?Cherch<strong>en</strong>t-ils à s’<strong>en</strong> convaincre parce que cela justifie leur action, ou parce qu’ils espèr<strong>en</strong>tprofondém<strong>en</strong>t que cela le <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>ne ? Utilis<strong>en</strong>t-ils ce raisonnem<strong>en</strong>t pour son pouvoir d’évocation :une formule simple qui résume ces actions souv<strong>en</strong>t très complexes et qui permet d’être id<strong>en</strong>tifiédans une communauté <strong>du</strong> suivi-évaluation <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ? Ou <strong>en</strong>core, celarelève-t-il simplem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> la négociation internationale sur les questionsd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, dans lesquelles les organisations qui cherch<strong>en</strong>t à influ<strong>en</strong>cer les ag<strong>en</strong>daspolitiques ont un intérêt à se prés<strong>en</strong>ter comme coopératives avec les déci<strong>de</strong>urs, et à ne passystématiquem<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre lisible leur véritable mo<strong>de</strong> d’action ?Ce discours conv<strong>en</strong>u selon lequel plus d’informations <strong>en</strong>traînerai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> meilleures décisions esttrès bi<strong>en</strong> connu <strong>de</strong>s auteurs s’intéressant aux relations <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et politiques dans le champ<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature. Ils l’appell<strong>en</strong>t la vision naïve, « naive vision »(van d<strong>en</strong> Hove, 2007 ; Sarewitz & Pielke, 2007 ; Jorstad & Skog<strong>en</strong>, 2010). Sarewitz et Pielkeexpliqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet que plus d’informations ne mèn<strong>en</strong>t pas spontaném<strong>en</strong>t à <strong>de</strong> meilleuresdécisions pour plusieurs raisons pot<strong>en</strong>tielles : le manque d’adéquation <strong>en</strong>tre les informations et154 http://iucn.org/about/work/programmes/species/red_list/about_the_red_list/, Page last updated: August 27,2009.155 http://www.unep-wcmc.org/aboutWCMC/, site web visité <strong>en</strong> mars 2010.156 Les « objectifs 2010 » sont les objectifs par lesquels, <strong>en</strong> 2002, la plupart <strong>de</strong>s États <strong>de</strong> la planète réunis au sommetmondial sur le développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable à Johannesburg s’étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>gagés à ré<strong>du</strong>ire significativem<strong>en</strong>t le rythme globald’érosion <strong>de</strong> la biodiversité d’ici 2010.244


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueles besoins <strong>de</strong>s utilisateurs ; leurs marges <strong>de</strong> manœuvre limitées dans les contextes <strong>de</strong> décisions etla résistance naturelle <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> décision bureaucratiques aux changem<strong>en</strong>ts ; leur manque<strong>de</strong> fiabilité ; leur confrontation avec d’autres valeurs et intérêts ; le manque <strong>de</strong> communication.Sans compter qu’elles pro<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t autant <strong>de</strong> nouvelles incertitu<strong>de</strong>s qu’elles n’<strong>en</strong> résolv<strong>en</strong>t (LePrestre & Taravella, 2009). Surtout, cette vision naïve dissimule le fait que les « meilleuresdécisions » r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à un système <strong>de</strong> valeurs – correspondant dans notre cas à un objectifnormatif <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la nature – qui ne peut être éludé pour compr<strong>en</strong>dre les mécanismesqui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t les relations sci<strong>en</strong>ce-politique. Dans ce s<strong>en</strong>s, S. van d<strong>en</strong> Hove (2007) et E.Jorstad et K. Skog<strong>en</strong> (2010) s’accord<strong>en</strong>t à dire que la vision naïve ne permet pas d’éclairer lesinteractions <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et politiques ni les stratégies mises <strong>en</strong> œuvre par les acteurs <strong>en</strong> jeu.Derrière cette formule qui fait croire l’exist<strong>en</strong>ce d’un processus naturel <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> ladécision, c’est tout une série <strong>de</strong> stratégies pour mettre <strong>en</strong> forme les informations, les porter et lesadresser, que les acteurs responsables <strong>de</strong> ces dispositifs mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> œuvre. La clarification <strong>de</strong> cesobjectifs et théories d’action implicites <strong>de</strong> l’OZHM est au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> notre analyse. C’est <strong>en</strong> outreun préalable pour <strong>en</strong>suite d’<strong>en</strong>visager les impacts pot<strong>en</strong>tiels <strong>du</strong> dispositif et sa contribution à laconservation <strong>de</strong>s ZHM.Rev<strong>en</strong>ons alors <strong>en</strong> premier lieu au contexte d’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’OZMH. La création <strong>de</strong> l’initiativeMedWet <strong>en</strong> 1992 <strong>de</strong>vait structurer et amplifier l’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM, <strong>en</strong> lui donnant uncadre institutionnel et <strong>en</strong> favorisant l’activation d’un réseau. L’initiative a joué ce rôle, mais s’estaffaiblie au fil <strong>de</strong>s années et n’a bi<strong>en</strong>tôt plus été capable d’apporter une structuration et unsouti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM. Quand le directeur <strong>de</strong> la TdV justifie le besoin d’unOZHM par l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> vision commune et la déplorable sous valorisation <strong>de</strong>s travaux, sapréoccupation est <strong>de</strong> redonner <strong>de</strong> la substance à l’initiative méditerrané<strong>en</strong>ne (com.pers., 2009).Pour cela, il p<strong>en</strong>se à un observatoire comme outil pour dresser un bilan <strong>de</strong>s ZHM, <strong>de</strong> leur état, <strong>de</strong>leurs t<strong>en</strong>dances et <strong>de</strong>s actions réalisées <strong>en</strong> leur faveur, permettant d’alim<strong>en</strong>ter la réflexion et lesori<strong>en</strong>tations portées par MedWet. Selon cette théorie d’action méditerrané<strong>en</strong>ne, l’initiativepourrait se r<strong>en</strong>ouveler dans son rôle <strong>de</strong> cadrage, d’animation et <strong>de</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action pour lesZHM (stratégie ori<strong>en</strong>té vers le haut) grâce au cont<strong>en</strong>u que l’observatoire lui apporterait.Parallèlem<strong>en</strong>t, le fait même <strong>de</strong> construire l’OZHM relance le réseau par le bas. L’<strong>en</strong>jeu majeur <strong>de</strong>l’OZHM – dispositif à l’interface sci<strong>en</strong>ce-politique – est donc <strong>de</strong> réalim<strong>en</strong>ter et r<strong>en</strong>forcer lagouvernance <strong>de</strong>s ZH <strong>en</strong> Méditerranée, à travers la mise à disposition d’informations tangibles surl’état et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong> ces écosystèmes et par l’analyse <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> dégradation.245


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesFinalem<strong>en</strong>t, il apparaît que la construction <strong>de</strong> l’OZHM ne s’inscrit pas dans la « vision naïve », carelle est la tra<strong>du</strong>ction pratique d’une théorie d’action qui vise <strong>en</strong> premier lieu à r<strong>en</strong>forcer le cadre<strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s au niveau méditerrané<strong>en</strong>.c) Stratégie <strong>de</strong> construction et <strong>de</strong> qualification <strong>de</strong>s ZHM : mise <strong>en</strong> forme par unsystème <strong>de</strong> suivi-évaluationPour fabriquer ces ressources informationnelles mobilisables pour la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZHM,l’OZHM pro<strong>du</strong>it ce que Jasanoff (1990 ; 1995) appelle la sci<strong>en</strong>ce régulatrice, (regulatory sci<strong>en</strong>ce).L’auteur a développé ce concept pour décrire le champ <strong>de</strong>s activités sci<strong>en</strong>tifiques qui mèn<strong>en</strong>t à lapro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissances et d’informations mobilisables dans la régulation et la formation <strong>de</strong>spolitiques. Ces activités <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissances à l’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et politiquesont guidées par l’objectif <strong>de</strong> combler les manques existants pour la formation et la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong>s politiques, et surtout, s’inscriv<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>s contextes et champs d’applicationdéterminés, ici la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Ce li<strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ce – politique passepar l’implication d’acteurs d’interface qui développ<strong>en</strong>t un « travail frontière » par la constructiond’ « objet frontière » ou « boundary object » (Star & Griesemer, 1989), qui sont <strong>de</strong>s formessimplifiées <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce la r<strong>en</strong>dant communicable à d’autres groupes sociaux, <strong>de</strong>vant répondreaux règles et normes <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes communautés qu’ils vis<strong>en</strong>t à relier. L’OZHM élabore unmodèle conceptuel pour analyser l’état et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM basé sur une série d’indicateurspermettant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s analyses. Cette sci<strong>en</strong>ce d’interface et les objets frontières qu’ellepro<strong>du</strong>it doiv<strong>en</strong>t être crédibles, légitimes, communicables et visibles (Cash et al., 2003). Ces critèresont une série d’implications (prés<strong>en</strong>tée ci-<strong>de</strong>ssous) qui constitu<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux fondam<strong>en</strong>taux pourl’OZHM. Notre étu<strong>de</strong> vise à éclairer les stratégies mises <strong>en</strong> œuvre par les porteurs <strong>de</strong> l’OZHMpour relever ces <strong>en</strong>jeux afin d’occuper cette interface <strong>en</strong>tre la sci<strong>en</strong>ce et la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>sZHM.La légitimité <strong>de</strong>s informations pro<strong>du</strong>ites par l’OZHMUn indicateur est un construit social sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong> par <strong>de</strong>s normes qu’il internalise. G. Bouleau(2007 : 118) rappelle que « plusieurs auteurs se sont intéressés à l'effet social <strong>de</strong> l'usage <strong>de</strong> laquantification et ont montré la viol<strong>en</strong>ce symbolique qui s'exerce à travers <strong>de</strong>s catégories porteuses<strong>de</strong> s<strong>en</strong>s et d'équival<strong>en</strong>ce sur <strong>de</strong>s acteurs qui ne partag<strong>en</strong>t pas les visions imposées par cescatégories. Un indicateur est donc porteur d'un référ<strong>en</strong>tiel ou d'un compromis <strong>en</strong>tre référ<strong>en</strong>tiels ».Il est donc, <strong>de</strong> façon inhér<strong>en</strong>te, pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t sujet au débat voire à la controverse. En cela, la246


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politique« transpar<strong>en</strong>ce » sci<strong>en</strong>tifique et leur validation par une communauté sont <strong>de</strong>s conditions sine quanon <strong>de</strong> leur mobilisation. Ce sont les fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> sa légitimité, définie comme l’ « hypothèse ouperception générale que les actions d'une <strong>en</strong>tité sont désirables, adaptées, ou appropriées dans unsystème socialem<strong>en</strong>t construit <strong>de</strong> normes, valeurs, croyances » (Bréchet et al., 2008, citantSuchman, 1995). Nous nous intéressons ici à la stratégie mise <strong>en</strong> œuvre par les acteurs <strong>de</strong>l’OZHM pour acquérir cette ressource fondam<strong>en</strong>tale qu’est la légitimité pour <strong>en</strong>suite mettre <strong>en</strong>œuvre leur action.Le choix <strong>de</strong>s indicateurs suivis par l’OZHM a fait l’objet d’un travail important <strong>de</strong> revue <strong>de</strong>sprincipaux programmes et conv<strong>en</strong>tions évoqué plus haut. L’int<strong>en</strong>tion est clairem<strong>en</strong>t d’utiliser lesressources existantes à la TdV ou <strong>en</strong> externe, mais surtout <strong>de</strong> mobiliser <strong>de</strong>s indicateurs existantdéjà dans un cadre reconnu, ce qui permet <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong> leur légitimité acquise et <strong>de</strong> dégager<strong>de</strong>s capacités d’action. Ceci est ce que P. Jepson (2005) nomme la légitimité réglem<strong>en</strong>taire(regulatory legitimacy) qui est une <strong>de</strong>s quatre dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> la légitimité <strong>de</strong> l’ONGE 157« De nombreux programmes « Développem<strong>en</strong>t Durable » se réfèr<strong>en</strong>t explicitem<strong>en</strong>t à laConv<strong>en</strong>tion sur la Diversité Biologique (CBD) et utilis<strong>en</strong>t ses indicateurs, ou <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong>sprogramme Objectifs <strong>du</strong> Millénaire pour le Développem<strong>en</strong>t (MDG) ou <strong>du</strong> Man andBiosphere (MAB). Pour les aspects techniques, la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar travaille avec legroupe d’experts sur les indicateurs <strong>de</strong> la CBD (2010 Biodiversity InternationalPatnership) pour définir le jeu d’indicateurs <strong>de</strong>s objectifs 2010. Le programme europé<strong>en</strong>sur les indicateurs <strong>de</strong> biodiversité (SEBI) travaille clairem<strong>en</strong>t à les r<strong>en</strong>dre compatiblesavec la CBD, <strong>en</strong> utilisant quand c’est possible les mêmes thèmes et indicateurs. […].Finalem<strong>en</strong>t, bi<strong>en</strong> que cela pr<strong>en</strong>ne <strong>du</strong> temps, la CBD <strong>de</strong>vrait dans le futur jouer le mêmerôle <strong>de</strong> lea<strong>de</strong>r et d’unification pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t que celui <strong>de</strong>s MDG pour lesprogrammes <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t socio-économique. L’OZHM <strong>de</strong>vrait alors clairem<strong>en</strong>têtre <strong>en</strong> adéquation avec cette Conv<strong>en</strong>tion. » (Beltrame, 2009 – tra<strong>du</strong>ction).Les premiers signes présageant <strong>de</strong>s effets positifs <strong>de</strong> cette stratégie sont apparus à travers lasollicitation <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM à la réunion <strong>du</strong> groupe d’experts <strong>de</strong> février2010 (STRP, Sci<strong>en</strong>tific and Technical Review Panel ou Groupe d’Evaluation Sci<strong>en</strong>tifique et Technique)pour les indicateurs <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar. « La Conv<strong>en</strong>tion Ramsar a reçu mandat <strong>de</strong> la CBDpour traiter tous les indicateurs ZH après 2010, et au cours <strong>de</strong> cette session <strong>de</strong> travail, l’OZHM aété remarqué et perçu comme une initiative intéressante au niveau régional susceptible157 Pour l’auteur, les types <strong>de</strong> légitimité dont les ONGE ont besoin et doiv<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre le soin <strong>de</strong> développer sont lalégimité normative (faire référ<strong>en</strong>ce à <strong>de</strong>s normes reconnues), cognitive (convaincre <strong>de</strong> la bonne volonté et <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t dans l’action), réglem<strong>en</strong>taire (appliquer les règles et programmes <strong>de</strong>s instances régulatrices dans lesecteur) et pragmatique (la capacité à créer <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s ou avoir une audi<strong>en</strong>ce auprès d’acteurs importants) (Jepson,2005). Cette typologie est spécifique aux ONGE mais correspond à la typologie que nous avons donné précéd<strong>en</strong>t(voir la section 3.2.3, chapitre 3).247


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesd’alim<strong>en</strong>ter le travail qui doit se faire au niveau global » (Compte r<strong>en</strong><strong>du</strong> <strong>de</strong> réunion interne TdV,mars 2010).On le voit, les efforts visant à inscrire le système <strong>de</strong> l’OZHM dans la gouvernance <strong>de</strong> labiodiversité facilit<strong>en</strong>t sa reconnaissance par ce cadre. Mais la légitimité nécessaire à l’OZHM nese situe pas seulem<strong>en</strong>t au niveau macro, mais égalem<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong> ses différ<strong>en</strong>tes partiespr<strong>en</strong>antes. Cette légitimation passe par <strong>de</strong>s processus plus ou moins directs, parfois implicites ouau contraire formels. L’équipe <strong>de</strong> l’OZHM a proposé aux participants (pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>tpart<strong>en</strong>aires) <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ateliers <strong>de</strong> mars 2009 et <strong>de</strong> février 2010, un jeu d’indicateurs défini sur labase <strong>de</strong> la revue (Beltrame, 2009) et <strong>de</strong> réunions <strong>en</strong> interne. Des séances <strong>de</strong> travail ont étéconsacrées à la discussion autour <strong>de</strong> ce jeu d’indicateurs et il n’a comm<strong>en</strong>cé à se stabiliser qu’aubout <strong>du</strong> second atelier. Ce travail commun permettant la validation voire l’appropriation par lesparticipants constitue un premier <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> légitimation qui est fondam<strong>en</strong>tal dans la perspective <strong>de</strong>construire un part<strong>en</strong>ariat. H. Levrel (2006 : 88) a étudié <strong>en</strong> détail les processus <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong>ssystèmes <strong>de</strong> suivi-évaluation et les processus <strong>de</strong> qualification d’un problème. La mise <strong>en</strong> commund’opinions et <strong>de</strong> représ<strong>en</strong>tations sur un objet fait t<strong>en</strong>dre vers une « réalité » construite <strong>du</strong>phénomène, sur laquelle on peut <strong>en</strong>suite s’appuyer pour agir. Pour l’auteur, les discussions quiont lieu au sein d'un comité d'experts font partie <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> confrontation intersubjectivepour définir cette « réalité » <strong>du</strong> problème, mais constitu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> même temps une limite dans les<strong>en</strong>s où « ces discussions sont créatrices d'unanimité <strong>en</strong> faisant converger les opinions » (ibid. :89). L’auteur ajoute que « le processus <strong>de</strong> converg<strong>en</strong>ce peut avoir lieu à partir d'un élém<strong>en</strong>t nonsci<strong>en</strong>tifique tel que le statut <strong>de</strong> certains experts, leur autorité ou leur capacité à s'exprimer dans uncadre collectif » (ibid. : 89). Dans le cas <strong>de</strong> la construction d’un dispositif tel que l’OZHM, laconverg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s opinions ou <strong>du</strong> moins la validation <strong>de</strong> l’objet par les participants est non unproblème, mais un objectif dans la perspective d’un part<strong>en</strong>ariat effectif. Le problème soulevé parH. Levrel (2006) appuie le fait que ce processus <strong>de</strong> légitimation, que l’on peut qualifier d’interneau dispositif, n’est alors pas suffisant.D’autres processus <strong>de</strong> légitimation impliqu<strong>en</strong>t un comité plus large. L’OZHM étant un projetstructurel <strong>du</strong> programme 2006-2010 et 2011-2015 <strong>de</strong> la TdV, il bénéficie d’une légitimationmoins ciblée sur les indicateurs, mais plus formelle, à travers d’une part, le mandat <strong>de</strong> MedWet etd’autre part l’exercice <strong>de</strong> la gouvernance interne <strong>de</strong> l’organisation (Guillet & Leroy, 2010). Lemandat <strong>de</strong> MedWet implique la validation <strong>de</strong> l’OZHM par les pays à chaque Comité Medwet quia lieu tous les 18 mois. Cet aspect sera développé dans la partie suivante. A la TdV, il est soumisaux processus internes <strong>de</strong> contrôle, constitués d’une évaluation à mi-programme et d’uneévaluation à fin <strong>de</strong> programme sous la responsabilité d’un Conseil Sci<strong>en</strong>tifique (CS). Notons que248


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquesièg<strong>en</strong>t au CS <strong>de</strong> la TdV un membre <strong>du</strong> Groupe d’Evaluation Sci<strong>en</strong>tifique et Technique pour laConv<strong>en</strong>tion Ramsar et <strong>de</strong>ux experts thématiques <strong>du</strong> CS ayant participé aux ateliers <strong>de</strong> l’OZHM.Avec les autres membres <strong>du</strong> CS, ils particip<strong>en</strong>t à garantir la qualité sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> laTdV. Lors <strong>du</strong> <strong>de</strong>rnier CS <strong>du</strong> 22 octobre 2009, les membres ont été s<strong>en</strong>sibles au bondéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM et ont exprimé leur att<strong>en</strong>te pour la poursuite <strong>de</strong> cette construction.Notamm<strong>en</strong>t, « <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r les bases <strong>de</strong> données existantes afin d’assurer l’accès à l’informationet la compatibilité avec les programmes régionaux ou internationaux pertin<strong>en</strong>ts » et surtout « <strong>de</strong>développer la base sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la sélection <strong>de</strong>s indicateurs, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> s’appuyant sur unmodèle conceptuel <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s concernées » (CS, Conclusions <strong>du</strong> CS d’octobre 2009,docum<strong>en</strong>t interne). Ces recommandations <strong>du</strong> CS sont relayées <strong>en</strong> interne notamm<strong>en</strong>t par ladirection (directeur général et directeur <strong>de</strong>s programmes) <strong>de</strong> la TdV qui est très soucieuse <strong>du</strong>mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la crédibilité sci<strong>en</strong>tifique et par suite <strong>de</strong> la légitimité <strong>de</strong> l’organisation.La validité et la crédibilitéCe souci <strong>du</strong> CS et <strong>de</strong> la direction ti<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t au fait que la qualité <strong>du</strong> jeu d’indicateurs inscritdans un modèle conceptuel <strong>de</strong>s ZH est déterminante pour la capacité d’<strong>en</strong> tirer <strong>de</strong>s analysesfiables et pouvoir délivrer <strong>de</strong>s messages crédibles. En effet, la construction <strong>du</strong> modèle conceptuelconstitue elle aussi un processus stratégique d’inscription dans un cadre préexistant, sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>par au moins <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions (sci<strong>en</strong>tifico-technique et politique).1. Dans le registre sci<strong>en</strong>tifico-technique, les systèmes d’indicateurs sont assez développés pourque certaines métho<strong>de</strong>s se soi<strong>en</strong>t institutionnalisées. Dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tnotamm<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s modèles conceptuels ont émergé suite au Sommet <strong>de</strong> la Terre <strong>de</strong> Rio <strong>en</strong> 1992 etl’adoption <strong>du</strong> Développem<strong>en</strong>t Durable, qui ont mis <strong>en</strong> exergue le besoins d’indicateurs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux pour évaluer les politiques économiques, sociales et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales qui<strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t désormais être compatibles aux normes <strong>du</strong> DD. L’OCDE a <strong>en</strong> premier proposé unmodèle <strong>de</strong> Pression – Etat – Réponse permettant d’évaluer les pressions que les activitéshumaines génèr<strong>en</strong>t sur l’état <strong>de</strong> la biodiversité et d’id<strong>en</strong>tifier les réponses sociales qui permettront<strong>de</strong> comp<strong>en</strong>ser les effets négatifs <strong>de</strong>s pressions (OCDE, 1994) et ainsi <strong>de</strong> structurer les indicateurspour évaluer la <strong>du</strong>rabilité <strong>de</strong> l’économie au regard <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. D’autres instancesinternationales ont <strong>en</strong>suite travaillé à améliorer ce modèle, notamm<strong>en</strong>t le PNUE pour la CBD(indicateurs usage – pression – état – réponse) (UNEP, 2003) et l’Ag<strong>en</strong>ce Europé<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>l’Environnem<strong>en</strong>t (EEA, 2003) dont le modèle DPSIR (Driving force, Pressure, State, Impact,Response) est aujourd’hui répan<strong>du</strong>. C’est ce <strong>de</strong>rnier modèle, reconnu au niveau méthodologiqueet technique, qui est mobilisé par l’équipe <strong>de</strong> l’OZHM pour élaborer son système d’indicateurs.249


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales2. Dans le registre politique, l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ces modèles est cruciale au regard <strong>de</strong> la s<strong>en</strong>sibilité querevêt l’exercice <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s politiques publiques, qu’elle soit directe ou indirecte. En effet,nous avons expliqué plus haut que les systèmes <strong>de</strong> suivi-évaluation sont sujets à controverses.Dans ce contexte, les modèles admis octroi<strong>en</strong>t une crédibilité et une légitimité nécessaires àl’<strong>en</strong>treprise. L’OZHM n’est <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s pas un dispositif qui s’autorise cette évaluation, mais undispositif qui respecte les règles instituées pour le faire. Le recours à ces modèles conceptuelsoffre donc une base stabilisée pour une discussion autour <strong>de</strong> l’élaboration <strong>du</strong> systèmed’indicateurs. Le modèle DPSIR <strong>de</strong>s ZHM a été proposé lors <strong>de</strong> l’atelier 2010 (Figure 5.1).Notons que ce modèle conceptuel visant à évaluer l’état <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s résonne fortem<strong>en</strong>tavec notre cadre <strong>de</strong> l’ASGE <strong>en</strong> ce qu’il est un outil d’évaluation <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes. Les catégories « Etat » et « Impact » doiv<strong>en</strong>t évaluer l’état écologiqueréel <strong>de</strong> l’écosystème au regard <strong>de</strong>s référ<strong>en</strong>ces normatives ; les catégories « Driving forces » et« Pression » serv<strong>en</strong>t à évaluer la <strong>gestion</strong> effective et la catégorie « Réponses » doit évaluer la<strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle visant le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée.Figure 5.1 : Modèle conceptuel DPSIR pour les indicateurs <strong>de</strong> l’OZHM proposé à l’atelier <strong>de</strong> février 2010(Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010)250


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueUne fois le modèle proposé aux participants <strong>de</strong> l’atelier, ces <strong>de</strong>rniers ont discuté <strong>de</strong> laconstruction <strong>du</strong> système d’indicateurs. Ce cadrage n’est <strong>en</strong> effet qu’une base qui est loin <strong>de</strong>résoudre les nombreux problèmes posés par l’élaboration <strong>de</strong> modèles conceptuels pour le suiviévaluation<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ici <strong>de</strong>s ZHM. Ces indicateurs, que H. Levrel appelle les« indicateurs <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s interactions société-nature » (2006 : 65), vis<strong>en</strong>t à r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong>façon concise <strong>de</strong> phénomènes complexes. Un indicateur prés<strong>en</strong>te toujours un modèle <strong>de</strong> laréalité, non la réalité elle-même. Cette mise <strong>en</strong> forme par l’indicateur internalise <strong>de</strong> façoninhér<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s débats d’ordre sci<strong>en</strong>tifique et technique, mais aussi politique et social. Ces questionsont été très étudiées tant sur le plan sci<strong>en</strong>tifique et technique où elles sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ues un véritablechamp disciplinaire 158 , que sur le plan social et politique par la sociologie <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces etnotamm<strong>en</strong>t à la suite <strong>de</strong> l’ouvrage séminal d’A. Desrosières (2000). Ici, notre préoccupationrési<strong>de</strong> plutôt <strong>en</strong> aval, dans les démarches mises <strong>en</strong> œuvre par les porteurs <strong>du</strong> dispositif, pour leconsoli<strong>de</strong>r face aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> légitimité et <strong>de</strong> crédibilité qui sont les si<strong>en</strong>s, et ainsi pouvoir <strong>en</strong> faireun outil d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Dit autrem<strong>en</strong>t, les experts participants doiv<strong>en</strong>t élaborer unsystème d’indicateurs permettant d’éclairer les responsabilités qui s’exerc<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong>effective <strong>de</strong>s ZHM et qui mèn<strong>en</strong>t à la dégradation voire la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> ces écosystèmes. Cetéclairage est la condition pour donner <strong>de</strong>s prises et sout<strong>en</strong>ir une action stratégique <strong>de</strong>stinée àinfléchir ces forces allant à l’<strong>en</strong>contre <strong>du</strong> mainti<strong>en</strong> d’un bon état <strong>de</strong>s ZHM. Mais pour réellem<strong>en</strong>tdonner <strong>de</strong>s prises soli<strong>de</strong>s à cette action, il faut <strong>en</strong> aucun cas que l’OZHM prête le flanc à <strong>de</strong>sréactions d’opposition qui ne manqueront pas <strong>de</strong> remettre <strong>en</strong> question la fiabilité et la validité <strong>de</strong>sinformations qu’il délivrera. Nous compr<strong>en</strong>ons alors tout le caractère stratégique <strong>de</strong> cet effortinvesti afin <strong>de</strong> construire un système d’indicateurs <strong>de</strong> la plus gran<strong>de</strong> qualité sci<strong>en</strong>tifique possible.Les experts participants à la construction <strong>de</strong> l’OZHM <strong>en</strong> général, et l’équipe <strong>de</strong> coordination <strong>en</strong>particulier, travaill<strong>en</strong>t <strong>en</strong> pleine consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cet état <strong>de</strong> fait. Les échanges ayant eu lieu lors <strong>de</strong>l’atelier <strong>de</strong> février 2010 sur le modèle conceptuel <strong>de</strong> l’OZHM le montr<strong>en</strong>t et on trouve unebibliographie sur le sujet dans le rapport sur la revue <strong>de</strong>s conv<strong>en</strong>tions et programmes <strong>de</strong> C.Beltrame (2009). (1) Les participants sont vigilants sur le fait que les termes doiv<strong>en</strong>t être choisisavec une gran<strong>de</strong> att<strong>en</strong>tion dans la mesure où les indicateurs que l’on y associe peuv<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>voyer à<strong>de</strong>s pressions, <strong>de</strong>s impacts ou <strong>de</strong>s états <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. (2) De plus, les cinq thèmes(comportant chacun plusieurs indicateurs, voir Tableau 5.1) doiv<strong>en</strong>t conserver une certainesouplesse dans le s<strong>en</strong>s où ces indicateurs peuv<strong>en</strong>t parfois apporter <strong>de</strong>s informations à plusieursniveaux simultaném<strong>en</strong>t. (3) La dim<strong>en</strong>sion géographique <strong>de</strong>s suivis sur lesquels sont fondés les158 Comme l’indique l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> plusieurs revues spécialisées comme Ecological indicators.251


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesindicateurs est égalem<strong>en</strong>t déterminante dans le s<strong>en</strong>s où ils doiv<strong>en</strong>t être basés sur <strong>de</strong>s donnéesfiables. En cela, les indicateurs <strong>de</strong>vront être fixés autant que possible sur <strong>de</strong>s données désagrégéesau niveau <strong>de</strong> la ZH. (4) Il est rappelé que le système d’indicateurs <strong>de</strong> l’OZHM doit être relié àceux <strong>de</strong> la CBD et <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar, condition déterminante pour sa crédibilité. (5)Enfin, les indicateurs doiv<strong>en</strong>t être choisis <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s cibles que l’OZHM cherche à atteindreet <strong>de</strong>s messages qu’il souhaite communiquer (OZHM Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010). Cetaspect est traité dans le paragraphe suivant.Les indicateurs <strong>de</strong> l’OZHM dont le suivi comm<strong>en</strong>ce dès 2010 sont prés<strong>en</strong>tés dans le tableau 5.1.Tableau 5.1 : Thèmes et indicateurs pour l’OZHM, Conclusions of the working session on indicators(Beltrame, docum<strong>en</strong>t interne, version 26 mars 2010)Thèmes <strong>de</strong> lOZHM Indicateurs validés Données disponibles Part<strong>en</strong>airesComposante <strong>de</strong> labiodiversitéIntégrité <strong>de</strong>sécosystèmesT<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>s espèces (plusieurssous-indicateurs possibles)Surface <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s% <strong>de</strong> gain et perteBase <strong>de</strong> données biodiversité<strong>de</strong>s ZH développée par la TdVGW2 et ETC-LUSI (Land usemaps)WWF-ZSLETC-LUSI (NordMed), ESA-GW 2(Sud Med)Surface inondée dans lécosystème GW2 ESA-GW 2 (SudMed)Indice <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong> leau pour labiodiversité (basé sur Température<strong>de</strong> leau, Salinité <strong>de</strong> leau, Charge <strong>en</strong>matière organique dans leau,Conc<strong>en</strong>tration <strong>en</strong> phosphore etazote dans leau) (2010 pour 20sites – travail sur dautres sites <strong>en</strong>2011)Ag<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> leau / GEMSTATFacteurs <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>pression sur les zoneshumi<strong>de</strong>sDéveloppem<strong>en</strong>t<strong>du</strong>rableIndice <strong>de</strong> spécialisation <strong>de</strong>scommunautésIndice <strong>de</strong> température <strong>de</strong>scommunautés (lié au changem<strong>en</strong>tclimatique)Connectivité <strong>de</strong>s rivièresChangem<strong>en</strong>ts sur les ZH provoquéspar lagricultureChangem<strong>en</strong>ts sur les ZH provoquéspar lurbanisationIndice <strong>de</strong>xploitation <strong>de</strong>s ressourcesr<strong>en</strong>ouvelables <strong>en</strong> eauChangem<strong>en</strong>t dans le nombredhabitants <strong>de</strong>s communes danslesquelles sont situées les ZH (auniveau local pour 20 sites <strong>en</strong> 2010 +indicateur au niveau régional –niveau local <strong>en</strong> 2011)Taux <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong>s objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux sous l objectifn°7 <strong>de</strong>s OMDs (<strong>en</strong> particulier ZH)Base <strong>de</strong> données biodiversité<strong>de</strong>s ZH développée par la TdVBase <strong>de</strong> données biodiversité<strong>de</strong>s ZH développée par la TdVGW2 et ETC-LUSI (Land usemaps)GW2 et ETC-LUSI (Land usemaps)Plan Bleu (niveau national etbasin versant)Base <strong>de</strong> données développéepar le Plan Bleu au niveaurégional. Ces données doiv<strong>en</strong>têtre mises à jour pour les ZH(avec le concours <strong>de</strong>s autoritéslocales).Université <strong>de</strong>MontpellierUniversité <strong>de</strong>MontpellierETC-LUSI, ESA-GW 2 (Sud Med)ETC-LUSI, ESA-GW 2 (Sud Med)Plan BleuPlan BleuPlan Bleu252


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueGestion <strong>de</strong>s bassins versants(Collecte <strong>de</strong>s informations <strong>en</strong> 2010)Proportion <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>stotalem<strong>en</strong>t /partiellem<strong>en</strong>t protégées(basée sur les catégories IUCN)WWF-ZSL ?WCMCServicesReviewécosystémiquesGW2 : programme GlobWetlands 2 par l’Ag<strong>en</strong>ce Spatiale Europé<strong>en</strong>ne (ESA) ; ETC-LUSI : C<strong>en</strong>tre thématique Europé<strong>en</strong> surl’occupation <strong>du</strong> sol (European Topic C<strong>en</strong>tre on Land Use and Spatial Information) ; WWF-ZSL : Institute of Zoology of London.Notons que le modèle conceptuel <strong>de</strong> l’OZHM et le système d’indicateurs sont p<strong>en</strong>sés <strong>de</strong> façon àpouvoir évoluer <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s avancées dans le domaine <strong>de</strong>s indicateurs et <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong>l’OZHM à développer son activité.Le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> précision <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> l’OZHM reflète celui plus général <strong>de</strong>s dispositifs àl’interface sci<strong>en</strong>ce-politique <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans le paradigme <strong>du</strong> DD. Lesthèmes « composante <strong>de</strong> la biodiversité », « intégrité <strong>de</strong>s écosystèmes » et « facteur <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>tet <strong>de</strong> pression sur les ZH » sont dotés <strong>de</strong> plusieurs indicateurs pour partie déjà construits etutilisés par ailleurs, champs dans lesquels la TdV a sa place. Elle a <strong>en</strong> effet un savoir-faire acquissur le long terme <strong>de</strong> son histoire et une crédibilité sur laquelle l’OZHM peut s’appuyer. Cettecrédibilité n’est pas seulem<strong>en</strong>t un acquis, mais aussi le fruit d’un effort constant à fournir dans letravail sci<strong>en</strong>tifique mis <strong>en</strong> œuvre par l’équipe. Par exemple, un membre <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong>coordination TdV travaille, dans le cadre d’un projet, à l’analyse <strong>de</strong> la pertin<strong>en</strong>ce et les conditionsd’utilisation <strong>de</strong>s jeux d’indicateurs dans différ<strong>en</strong>tes situations et int<strong>en</strong>sités <strong>de</strong> suivis. Pour cesthèmes, l’OZHM s’appuie sur la base <strong>de</strong> données Biodiversité développée par l’équipe (pourl’OZHM, mais plus généralem<strong>en</strong>t pour la TdV), et sur d’autres ressources <strong>en</strong> externe. L’<strong>en</strong>jeu estplutôt <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s choix pertin<strong>en</strong>ts parmi les nombreux indicateurs existants, <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>sobjectifs propres <strong>de</strong> l’OZHM et <strong>de</strong>s apports pot<strong>en</strong>tiels <strong>de</strong>s participants prêts à s’investir, aspectqui sera largem<strong>en</strong>t développé par la suite. Le travail sur ces thèmes n’est évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t pas sansposer <strong>de</strong>s problèmes techniques importants, notamm<strong>en</strong>t liés à l’hétérogénéité <strong>de</strong>s suivis, qui sontplus int<strong>en</strong>sifs dans les pays <strong>du</strong> nord <strong>de</strong> la Méditerranée, plus développés sur certains taxons(notamm<strong>en</strong>t les oiseaux). Ce travail sci<strong>en</strong>tifique et technique revêt un caractère stratégique dans les<strong>en</strong>s où il doit permettre <strong>de</strong> donner prise, dans cette construction <strong>de</strong> l’objet ZHM, à unmaximum d’<strong>en</strong>jeux écologiques. L’exist<strong>en</strong>ce, l’accès et la fiabilité <strong>de</strong>s données sont <strong>de</strong>s questionsmajeures que l’OZHM travaille à résoudre dans un cadre pré-établi.En revanche, l’imprécision ou l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s indicateurs dans les thèmes « développem<strong>en</strong>t<strong>du</strong>rable » et « services écosystémiques » révèl<strong>en</strong>t l’immaturité <strong>de</strong>s conv<strong>en</strong>tions et <strong>de</strong>s programmesdans le champ <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong>s ZH qui appell<strong>en</strong>t pourtant à leur développem<strong>en</strong>t. Les253


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesnouveaux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t cré<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s besoins au niveau <strong>de</strong>l’interface sci<strong>en</strong>ce-société, dont le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces indicateurs, ce qui n’est pas sans poser<strong>de</strong>s questions et difficultés nouvelles comme le montr<strong>en</strong>t les travaux qui se développ<strong>en</strong>t sur lesujet (van dan Hove & Chabason, 2009 ; Levrel, 2006). Cette abs<strong>en</strong>ce d’indicateurs reconnus etstabilisés offre à l’OZHM une f<strong>en</strong>être pour l’innovation, mais dont le corollaire est l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>crédibilité « acquise ». Pour résoudre ce problème, l’équipe <strong>de</strong> coordination et les participants àl’atelier <strong>de</strong> février 2010 ont décidé <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er un travail plus approfondi sur ces thèmes. Une revue<strong>de</strong>s indicateurs dans le champ <strong>de</strong>s services écosystémiques a été réalisée <strong>en</strong> 2010 par un membre<strong>de</strong> l’équipe appuyé par un groupe <strong>de</strong> travail constitué au cours <strong>de</strong> l’atelier. Les participants ont làaussi insisté sur le fait que dans ce domaine, le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre l’utilisation <strong>de</strong>s indicateurs et lesmessages que l’on souhaite prononcer sont <strong>en</strong>core plus s<strong>en</strong>sibles. Les indicateurs <strong>de</strong>vront êtrechoisis avec précaution et explicitation.La communicabilité <strong>de</strong> l’objet mis <strong>en</strong> formeLa préoccupation que l’équipe <strong>de</strong> coordination et les participants aux ateliers <strong>de</strong> l’OZHM ontmanifestée au sujet <strong>de</strong> la clarification <strong>de</strong>s messages et <strong>de</strong>s indicateurs pertin<strong>en</strong>ts pour le porter,soulève un problème inhér<strong>en</strong>t à ces dispositifs d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique et qui est <strong>de</strong> la plushaute importance. Rappelons que selon les auteurs travaillant sur ces interfaces (Star &Griesemer, 1989 ; Cash et al., 2003 ; Jorstad & Skog<strong>en</strong>, 2010 ; Holmes & Clark, 2008), les critèresfondam<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> ces dispositifs sont, outre la légitimité et la crédibilité discutées ci-<strong>de</strong>ssus,égalem<strong>en</strong>t la communicabilité. Ces travaux, et spécifiquem<strong>en</strong>t ceux portant sur le champ <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et <strong>du</strong> DD, indiqu<strong>en</strong>t que la capacité <strong>de</strong>s informations à passer <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce à lapolitique dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>s contextes <strong>de</strong> décision et <strong>de</strong>s configurations sociales qui lesaccueill<strong>en</strong>t (Sarewitz & Pielke, 2007). Cette communicabilité doit donc être p<strong>en</strong>sée <strong>en</strong> fonction<strong>de</strong>s groupes sociopolitiques et <strong>de</strong>s sphères décisionnelles que l’on chercher à pénétrer. Pourcertains (e.g. Garnett & Lind<strong>en</strong>mayer, 2011), les éclairages apportés par les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> laconservation doiv<strong>en</strong>t être communiquées avec optimisme et <strong>en</strong> mettant <strong>en</strong> avant les bénéficespour la société <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la biodiversité, pour <strong>en</strong>courager les déci<strong>de</strong>urs à s’<strong>en</strong>gagerdans <strong>de</strong>s politiques et <strong>de</strong>s mesures adéquates. D’autres auteurs plaid<strong>en</strong>t au contraire pourcommuniquer sur le caractère alarmant <strong>de</strong>s problématiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales (e.g. Orr, 2007).Dans ce s<strong>en</strong>s et <strong>en</strong> parlant <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion Ramsar pour les ZH, G. Barnaud (2005) indique quebi<strong>en</strong> que les Conv<strong>en</strong>tions internationales (et les dispositifs sci<strong>en</strong>ces-politiques liés) n’ai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong>pouvoir contraignant, la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> la biodiversité (ou <strong>de</strong>s ZH) <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>spays peut faire bouger les lignes. Les Etats « bons élèves » peuv<strong>en</strong>t faire pression sur les Etats254


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquerécalcitrants à la prise <strong>de</strong> mesures ; l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t moral peut alors se tra<strong>du</strong>ire par <strong>de</strong>s<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts politiques voire légaux.Ainsi, la mise <strong>en</strong> forme <strong>de</strong> l’information est un processus actif et ciblé. Mais si cela ne fait plus <strong>de</strong>doute pour ces auteurs, pour les pratici<strong>en</strong>s (sci<strong>en</strong>tifiques et technici<strong>en</strong>s porteurs <strong>de</strong> cesdispositifs), la manière <strong>de</strong> s’y pr<strong>en</strong>dre pose <strong>en</strong>core beaucoup <strong>de</strong> problèmes. Il n’y a ri<strong>en</strong>d’étonnant à ce que cette dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> travail soit difficile pour <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques qui ont déjà – et<strong>en</strong> premier lieu – l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> crédibilité <strong>de</strong> leur sci<strong>en</strong>ce à t<strong>en</strong>ir. Donc ces formes simplifiées <strong>de</strong> lasci<strong>en</strong>ce doiv<strong>en</strong>t – <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> conserver leur validité sci<strong>en</strong>tifique, ce qui est déjà un défi – êtreadaptées aux cibles et aux contextes <strong>de</strong> leur diffusion. En pratique, il faut p<strong>en</strong>ser la mise <strong>en</strong> forme<strong>de</strong>s informations, autrem<strong>en</strong>t dit choisir les indicateurs pertin<strong>en</strong>ts par rapport aux messages quel’on souhaite délivrer, mais ces messages dép<strong>en</strong>dront <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong>s analyses faites sur la base<strong>de</strong>s indicateurs. On ne peut que remarquer la complexité <strong>de</strong> l’exercice. Le débat qui <strong>en</strong> a émergé<strong>en</strong> interne <strong>de</strong>ssine les contours <strong>de</strong>s théories d’action qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t l’OZHM et que l’onexplorera plus profondém<strong>en</strong>t dans la suite <strong>du</strong> texte.Deux visions co-exist<strong>en</strong>t dans ce débat. Notons que même si certains membres <strong>de</strong> l’équipe (et <strong>de</strong>la direction <strong>de</strong> la TdV impliquée dans le projet) p<strong>en</strong>ch<strong>en</strong>t plus pour l’une ou l’autre <strong>de</strong>s visions,chacun les <strong>en</strong>visage et les questionne <strong>en</strong>semble. La première, que l’on appellera la théoriesci<strong>en</strong>tifico-militante, est soucieuse d’assurer la crédibilité sci<strong>en</strong>tifique et s’<strong>en</strong> remet aux voiesdéjà tracées par <strong>de</strong>s indicateurs reconnus et ayant accès à un portage médiatique. Par exemple,cette communication peut passer par la médiatisation <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’Indice Planète Vivante 159dont la TdV a la charge pour la région méditerrané<strong>en</strong>ne. Pour la secon<strong>de</strong>, que l’on appellera lathéorie politico-administrative, le mouvem<strong>en</strong>t est inverse : il faut partir <strong>de</strong>s cibles (<strong>de</strong> leursproblèmes, <strong>de</strong> leur compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s choses) pour adapter les messages. La question est alors<strong>de</strong> savoir « comm<strong>en</strong>t construire l’outil pour qu’il soit facilem<strong>en</strong>t utilisable » pour ces cibles spécifiques. Cesproblèmes <strong>en</strong>core non résolus par l’équipe <strong>de</strong> l’OZHM nous pouss<strong>en</strong>t vers ses <strong>de</strong>ux registresstratégiques qui nous rest<strong>en</strong>t à analyser : le part<strong>en</strong>ariat et les mo<strong>de</strong>s d’action pour atteindre lescibles.159 Le LPI – Living Planet In<strong>de</strong>x, ou Indice Planète Vivante est un indicateur mis au point par le WWF et leZoological Institut of London, dont les résultats sont publiés tous les 4 ans au niveau mondial.255


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales5.2.3 Stratégie <strong>de</strong> coopération et <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat : pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s informationsreconnues politiquem<strong>en</strong>t et sci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t et activer le réseau <strong>de</strong> portage <strong>de</strong>sZHMa) Recadrage : l’Ensemble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tJusqu’ici, nous avons parlé <strong>de</strong> « part<strong>en</strong>aires » et <strong>de</strong> « cibles » sans caractériser ni ces catégoriesfloues d’acteurs, ni les relations concrètes qu’elles <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre elles. Cette caractérisationest un exercice complexe, que ce soit d’un point <strong>de</strong> vue pratique ou analytique. Les relations <strong>de</strong>part<strong>en</strong>ariat peuv<strong>en</strong>t être <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes natures, et les moy<strong>en</strong>s d’atteindre les cibles peuv<strong>en</strong>tégalem<strong>en</strong>t passer par différ<strong>en</strong>tes stratégies d’action. La complexité augm<strong>en</strong>te <strong>en</strong>core alors que lespart<strong>en</strong>aires sont souv<strong>en</strong>t simultaném<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cibles. Enfin la dénomination « diplomatique » quel’on emploie pour certains acteurs concernés par le dispositif – qu’on appelle « part<strong>en</strong>aire » dansle souci <strong>de</strong> les accueillir dans une posture d’égal à égal – achève d’opacifier le paysage. Lespratici<strong>en</strong>s habitués s’<strong>en</strong> accommod<strong>en</strong>t, et travaill<strong>en</strong>t <strong>en</strong> toute consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la perméabilité etl’interdép<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> ces catégories et <strong>de</strong> ces relations. En revanche, une analyse stratégique <strong>du</strong>dispositif ne serait pas rigoureuse si elle laissait cet espace <strong>de</strong> réflexion et d’action stratégique dansl’implicite. Pour cela, repr<strong>en</strong>ons notre concept d’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (EAE) 160 .Rappelons que l’Acteur d’Environnem<strong>en</strong>t est un acteur dont le discours et les pratiques sontint<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t tournés vers un changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Mermet, 1998[2006] ; Mermet et al., 2005). L’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t est le regroupem<strong>en</strong>tformel ou informel, direct ou indirect d’Acteurs d’Environnem<strong>en</strong>t rassemblés autour d’un mêmeobjectif normatif. Les contours <strong>de</strong> l’EAE, qu’on pourrait égalem<strong>en</strong>t nommer « communauté <strong>de</strong>valeurs », sont difficiles à délimiter dans la mesure où il est multiscalaire et où les formes qu’il vapr<strong>en</strong>dre et les mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’échelle d’analyse. Cette complexité est<strong>en</strong>core accrue par l’interdép<strong>en</strong>dance <strong>en</strong>tre les échelles d’action. Ce sont pourtant tous cesélém<strong>en</strong>ts qui vont fournir les critères nécessaires à la clarification <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> coopération –part<strong>en</strong>ariat qui vise à développer les capacités <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> cont<strong>en</strong>u et <strong>de</strong> portage <strong>de</strong> l’OZHM(traitée dans cette section) <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale mise <strong>en</strong> œuvre par l’OZHM(Section suivante 5.2.4) :- le caractère direct ou indirect <strong>de</strong>s relations <strong>en</strong>tre les membres <strong>de</strong> l’EAE : l’OZHMconstitue un EAE dont les membres sont liés par <strong>de</strong>s relations directes, mais son action160 Ce concept est intro<strong>du</strong>it dans la section 1.2 <strong>du</strong> chapitre 1.256


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquevise à ce que les ressources qu’il pro<strong>du</strong>it soi<strong>en</strong>t appropriées par une communauté pluslarge, où les relations sont moins directes et moins formelles.- le caractère multiscalaire <strong>de</strong>s relations <strong>en</strong>tre les membres et <strong>de</strong>s actions mises <strong>en</strong> œuvre :l’OZHM noue <strong>de</strong>s relations à plusieurs niveaux, et développe plusieurs stratégies d’action.- le partage d’une visée normative, qui est dans notre cas la conservation <strong>de</strong>s écosystèmeshumi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité.Ce concept éclaire donc comm<strong>en</strong>t l’unité <strong>de</strong> coordination et la TdV travaill<strong>en</strong>t à la constructiond’un EAE porteur <strong>de</strong> l’OZHM, pour agir au sein <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble agissant plus largem<strong>en</strong>t pour <strong>de</strong>sZHM, mais aussi au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la communauté <strong>de</strong>s ZH. A travers la construction <strong>de</strong> l’OZHM, laTdV crée une nouvelle configuration <strong>de</strong> l’EAE. Ce rôle <strong>de</strong> la TdV est implicite mais majeur etrelève <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> nos registres stratégiques : dans le registre <strong>de</strong> la place dans le secteur, car laTdV conforte sa place d’organisme incontournable sur la problématique <strong>de</strong>s ZHM ; et dans leregistre <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, car son rôle sera significatif s’il influ<strong>en</strong>ce le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle visant la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée.b) Stratégie <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariatAinsi, L’OZHM étant une initiative <strong>de</strong> la TdV, la création <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat lui revi<strong>en</strong>t. La stratégie<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat – coopération qu’elle met <strong>en</strong> œuvre vise à relever <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>jeux majeurs : (1)rassembler les données et les ressources nécessaires pour fournir le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> l’OZHM ; (2)créer un réseau porteur et diffuseur <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>ctions <strong>de</strong> l’OZHM à différ<strong>en</strong>tes échelles. Il s’agitdonc d’id<strong>en</strong>tifier et <strong>de</strong> créer les part<strong>en</strong>ariats susceptibles <strong>de</strong> fournir les données et indicateurspertin<strong>en</strong>ts, mais aussi <strong>de</strong> nouer <strong>de</strong>s relations avec <strong>de</strong>s acteurs dont les réseaux respectifs sontstratégiques pour l’objectif <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM.Pour compr<strong>en</strong>dre la stratégie <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat, passons par l’historique <strong>de</strong>l’OZHM. Suite à l’approbation par MedWet <strong>de</strong> l’idée <strong>de</strong> créer un OZHM, la TdV a pu organiserun premier atelier (mars 2007), où ont été invités les organismes id<strong>en</strong>tifiés comme pouvantalim<strong>en</strong>ter son système <strong>de</strong> suivi-évaluation. Le but <strong>de</strong> cet atelier était donc <strong>de</strong> faire un état <strong>de</strong>sactivités <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> ces différ<strong>en</strong>ts organismes sur la Méditerranée, et <strong>de</strong> voir comm<strong>en</strong>t pouvai<strong>en</strong>têtre mutualisés et développés ces travaux pour former l’OZHM. La place <strong>de</strong> la TdV dans lacommunauté <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature <strong>en</strong> Méditerranée est reconnue, ce qui lui donne lacapacité <strong>de</strong> solliciter les organismes qu’elle a id<strong>en</strong>tifiés dans son réseau ou <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors. Mais lamarge existant <strong>en</strong>tre le réseau et le part<strong>en</strong>ariat est non négligeable. Le passage <strong>de</strong> l’un à l’autreimplique l’exist<strong>en</strong>ce d’un cadre et d’intérêts partagés <strong>en</strong>tre les part<strong>en</strong>aires. En 2007, ce n’était pas257


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesle cas, et le premier atelier s’est soldé par <strong>de</strong> bonnes int<strong>en</strong>tions peu opératoires. Le seulpart<strong>en</strong>ariat significatif a été le recrutem<strong>en</strong>t d’un post-doc (aujourd’hui membre <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong>coordination) commun <strong>en</strong>tre la TdV et l’Institut Zoologique <strong>de</strong> Londres pour développer le LPIsur la région méditerrané<strong>en</strong>ne. Une fois obt<strong>en</strong>u ce mandat politique <strong>de</strong> MedWet, la TdV a puorganiser le <strong>de</strong>uxième atelier <strong>en</strong> mars 2009, <strong>en</strong> réinvitant la vingtaine <strong>de</strong> participants au premieratelier dans un cadre plus formel. Nous avons déjà parlé <strong>du</strong> mandat politique comme étant uneressource critique pour l’OZHM car c’est une condition pour le part<strong>en</strong>ariat avec certainsorganismes, notamm<strong>en</strong>t les institutions intergouvernem<strong>en</strong>tales. Le mandat politique est <strong>en</strong> outreune ressource stratégique dans le s<strong>en</strong>s où il permet d’asseoir les objectifs <strong>de</strong> l’OZHM dans uncadre méditerrané<strong>en</strong> plus attractif pour les part<strong>en</strong>aires que les objectifs propres <strong>de</strong> la TdV. Fixerces objectifs permet d’avancer et ainsi <strong>de</strong> pouvoir t<strong>en</strong>ir les premières échéances <strong>de</strong> l’OZHM vis-àvis<strong>de</strong> MedWet (rapport <strong>en</strong> 2011), dont dép<strong>en</strong>d sa crédibilité au niveau politique. « Il faut que ce soitparticipatif pour susciter l’intérêt <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires, mais pas trop, car il faut que l’OZHM avance et ti<strong>en</strong>ne seséchéances. » (membre TdV-OZHM, com.pers., 2009). Ce <strong>de</strong>uxième atelier (mars 2009) a montréque l’appropriation <strong>de</strong> ces objectifs par les participants n’était pas simple. Cet atelier a été m<strong>en</strong>éd’une manière différ<strong>en</strong>te : il s’agissait <strong>de</strong> montrer que cette fois la construction <strong>de</strong> l’OZHM étaitpassée à un rythme supérieur, dans l’espoir d’obt<strong>en</strong>ir les premiers part<strong>en</strong>ariats concrets. Unequantité <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts sur les différ<strong>en</strong>ts aspects <strong>de</strong> l’OZHM (objectifs, thèmes et indicateurs,cibles et structure, plan <strong>de</strong> travail pour trois ans) a été distribuée aux participants et soumis à leurvalidation. Les sug<strong>gestion</strong>s <strong>de</strong>s participants ont été prises <strong>en</strong> compte, mais la validation a étépassive dans la mesure où l’OZHM est apparu comme un projet <strong>de</strong> la TdV et que ces participantspouvai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> vali<strong>de</strong>r dans la mesure où ils n’étai<strong>en</strong>t pas formellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>gagés. Ils étai<strong>en</strong>t invitésà retourner une conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat dans le mois suivant, mais aucun part<strong>en</strong>ariat n’a étésigné à ce mom<strong>en</strong>t 161 . Suite à cet atelier, l’équipe a alors adopté une stratégie active dans le but <strong>de</strong>gar<strong>de</strong>r l’att<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>s participants pour créer les part<strong>en</strong>ariats opérationnels dont l’OZHM dép<strong>en</strong>d.Dans ce s<strong>en</strong>s, une lettre m<strong>en</strong>suelle <strong>de</strong> l’OZHM a été <strong>en</strong>voyée aux participants, r<strong>en</strong>dant compte<strong>de</strong>s activités et avancées <strong>de</strong> l’OZHM. Un questionnaire a été <strong>en</strong>voyé aux participants pour savoirquel intérêt ils pouvai<strong>en</strong>t trouver à participer à l’OZHM et quelle contribution ils pouvai<strong>en</strong>tapporter et à quelles conditions. L’équipe a r<strong>en</strong><strong>du</strong> visite aux organisations prometteuses (<strong>en</strong>termes <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat) et dont la TdV a besoin pour <strong>de</strong>s données qu’elle ne peut acquérir ellemême.Ainsi, <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> travail, notamm<strong>en</strong>t sur les données et indicateurs à l’échelle161 Excepté le part<strong>en</strong>ariat avec l’Ag<strong>en</strong>ce Spatiale Europé<strong>en</strong>ne pour le programme GlobWetlands II qui cherchait <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>aires pour mettre <strong>en</strong> œuvre ce second programme <strong>de</strong> couverture satellite <strong>de</strong>s ZH qui <strong>de</strong>vait cette fois êtretourné vers les utilisateurs, suite au programme GWI qui visait davantage à mettre au point la technique.258


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquerégionale, ont eu lieu dans les bureaux <strong>du</strong> Plan Bleu à Antibes (données et indicateurs <strong>de</strong>pression : démographie, connectivité <strong>de</strong>s cours d’eau, etc.) et <strong>de</strong> Wetlands International àWag<strong>en</strong>ing<strong>en</strong> (Pays-Bas) (notamm<strong>en</strong>t pour les indicateurs <strong>de</strong> réponses : services écosystémiques,etc.). L’unité <strong>de</strong> coordination bénéficie égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s ou part<strong>en</strong>ariats étant actifs pard’autres projets dans lesquels la TdV est impliquée et qu’il est ainsi plus facile d’associer àl’OZHM. C’est le cas d’un projet piloté par Wetlands International sur la <strong>gestion</strong> participative <strong>de</strong>l’eau dans trois pays sud et est méditerrané<strong>en</strong>, ou <strong>en</strong>core <strong>du</strong> système <strong>de</strong> suivis <strong>du</strong> lac <strong>de</strong> Prespaavec la société <strong>de</strong> Protection <strong>de</strong> Prespa. D’autres prises <strong>de</strong> contact ont eu lieu avec <strong>de</strong>sorganismes ne faisant pas partie <strong>du</strong> réseau historique <strong>de</strong> la TdV : il s’agit notamm<strong>en</strong>td’organisations c<strong>en</strong>trées sur le développem<strong>en</strong>t, ne partageant pas l’objectif normatif <strong>de</strong> l’OZHMmais pouvant l’alim<strong>en</strong>ter sur les aspects <strong>du</strong> DD autres que la biodiversité. Des déplacem<strong>en</strong>ts danssix pays méditerrané<strong>en</strong>s (Liban, Turquie, Egypte, Israël, Tunisie, Maroc) ont été effectués parl’équipe <strong>en</strong> 2009, au cours <strong>de</strong>squels les membres ont créé ou resserré les li<strong>en</strong>s existants avec <strong>de</strong>sONGE, <strong>de</strong>s c<strong>en</strong>tres sci<strong>en</strong>tifiques et techniques et <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> d’espaces protégés. Cescontacts sont importants notamm<strong>en</strong>t pour l’ancrage local <strong>de</strong>s suivis et <strong>de</strong>s données dontl’OZHM doit se nourrir. Ces contacts sont plus facilem<strong>en</strong>t établis quand les organismes ciblésont déjà été ou sont part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> la TdV pour d’autres projets. C’est le cas <strong>de</strong>s organismesconcernés par le projet « sites » 162 coordonné par un membre <strong>de</strong> l’équipe, qui est directem<strong>en</strong>tassocié à l’OZHM et dont les conv<strong>en</strong>tions passées sont alors directem<strong>en</strong>t intégrées le cadre <strong>de</strong>l’OZHM. Les membres <strong>de</strong> l’équipe ont égalem<strong>en</strong>t participé à <strong>de</strong>s colloques ou réunions <strong>de</strong>travail, dont l’<strong>en</strong>jeu est pour les participants autant la création <strong>de</strong> li<strong>en</strong>s que la problématiquetraitée par l’événem<strong>en</strong>t. Par exemple, le coordinateur <strong>de</strong> l’OZHM a participé à la sessiond’échange intergouvernem<strong>en</strong>tal pour la création <strong>de</strong> l’IPBES à Nairobi <strong>en</strong> octobre 2009, ce quidébouchera plus tard sur une conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat avec le 2010 Biodiversity InternationalPart<strong>en</strong>ship (qui regroupe les organismes chargés <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place <strong>du</strong> système d’indicateurs pourla CBD). Cette activation <strong>du</strong> réseau suscite réciproquem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sollicitations <strong>de</strong> la TdV pourd’autres projets. C’est le cas <strong>de</strong> l’implication <strong>de</strong> la TdV dans le projet PEGASO porté par ETC-162 Le projet « site » s’inscrit dans la poursuite <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Indice Planète Vivante (LPI) sur la régionméditerrané<strong>en</strong>ne, suite à une première phase (2007-2008) qui a mis <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce le besoin d’efforts supplém<strong>en</strong>tairesur la zone Sud et Est. Ce projet vise donc à poursuivre la constitution d’une base <strong>de</strong> données <strong>de</strong> suivis <strong>de</strong>biodiversité <strong>en</strong> conc<strong>en</strong>trant les efforts <strong>de</strong> recherche sur les ZH rives sud et est <strong>de</strong> la Méditerranée. Elle vise <strong>en</strong> outreà tester la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s indicateurs et <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s d’analyse <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>sité <strong>du</strong> suivi et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>sdonnées. Le projet, coordonné par la TdV et financé par un mécénat <strong>de</strong>s Fondations Total et Albert II, concerne 5sites et 4 part<strong>en</strong>aires : la Camargue, le lac transfrontalier <strong>de</strong> Prespa (Grèce, Albanie, Macédoine) avec la Société <strong>de</strong>Prespa ; le lac d’Ichkeul (Tunisie) avec l’Ag<strong>en</strong>ce Nationale Pour l’Environnem<strong>en</strong>t ; le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Gediz avec DoaDernei (Birdlife Turquie) ; la zone humi<strong>de</strong> d’Aammiq (Jordanie) avec l’ONGE A Rocha.259


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesLUSI 163 , qui installe ainsi un li<strong>en</strong> réciproque <strong>en</strong>tre les <strong>de</strong>ux organisations. Enfin, si peu <strong>de</strong>part<strong>en</strong>ariats ont été conv<strong>en</strong>tionnés suite à l’atelier <strong>de</strong> mars 2009, l’équipe a néanmoins consolidéles relations par <strong>de</strong>s contacts informels sur différ<strong>en</strong>ts aspects <strong>de</strong> l’OZHM.Nous repérons ainsi trois pério<strong>de</strong>s dans la stratégie <strong>de</strong> coopération-part<strong>en</strong>ariat mise <strong>en</strong> œuvre parla TdV, qui correspond<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s niveaux croissants <strong>de</strong> ressources mobilisées et investies.- La première, jusqu’à l’atelier <strong>de</strong> mars 2009, a consisté à cibler et mobiliser les organismes <strong>en</strong>fonction <strong>de</strong> leur apport pot<strong>en</strong>tiel à l’OZHM.- La <strong>de</strong>uxième pério<strong>de</strong>, <strong>en</strong>tre l’atelier <strong>de</strong> mars 2009 et l’atelier <strong>de</strong> février 2010, a consisté à ét<strong>en</strong>drele réseau et le r<strong>en</strong>dre actif. Cette phase d’accumulation – activation comporte <strong>de</strong>ux niveaux : 1)une posture opportuniste, laissant la porte ouverte à toute personne intéressée ; 2) une postureplus active <strong>en</strong>vers les acteurs repérés comme stratégiques pour l’OZHM, impliquant uninvestissem<strong>en</strong>t important <strong>en</strong> ressources humaines et financières, pour susciter leur intérêt vis-àvis<strong>de</strong> l’OZHM, et pour parv<strong>en</strong>ir à la création effective <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat.- La troisième pério<strong>de</strong>, marquée notamm<strong>en</strong>t par l’atelier <strong>de</strong> février 2010, est celle <strong>du</strong> resserrem<strong>en</strong>tet <strong>de</strong> la formalisation <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat <strong>de</strong> l’OZHM, dont les implications sont multiples et mérit<strong>en</strong>tun développem<strong>en</strong>t dans un paragraphe spécifique.c) Formalisation <strong>de</strong> la coopération : structuration et gouvernance <strong>de</strong> l’OZHMPour bi<strong>en</strong> compr<strong>en</strong>dre les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> cette troisième pério<strong>de</strong>, nous <strong>de</strong>vons préciser les caractères<strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième qui ont poussé à son émerg<strong>en</strong>ce. Cette phase d’accumulation – activation n’a pasété spécifique au montage <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat, mais un mouvem<strong>en</strong>t global <strong>de</strong>stiné à rassembler lemaximum d’acteurs autour <strong>du</strong> projet d’OZHM : <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires et <strong>de</strong>s utilisateurs pot<strong>en</strong>tiels.Précisons <strong>en</strong>core que ces catégories n’étai<strong>en</strong>t pas claires dans l’esprit <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> coordination :les administrations <strong>de</strong>s pays, ciblées comme utilisateurs <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’OZHM, <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t-ellesaussi être pourvoyeuses <strong>de</strong> données ? Cette solution a l’avantage d’impliquer ces administrationset donc <strong>de</strong> favoriser leur appropriation <strong>de</strong> l’OZHM et <strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ir sa légitimité politique. Maiselle pose égalem<strong>en</strong>t tous les problèmes <strong>de</strong> l’accès à ces données souv<strong>en</strong>t difficile notamm<strong>en</strong>t dansla région sud Méditerranée, <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> ces données et <strong>de</strong>s autorisations nécessaires à leurutilisation qui sont souv<strong>en</strong>t synonymes <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>urs voire <strong>de</strong> blocages. Cette solution correspondà la théorie d’action politico-administrative, selon laquelle l’OZHM est un outil au service <strong>de</strong>s163 European Topics C<strong>en</strong>ter for Land Use and Spatial Information (ETC-LUSI) est un <strong>de</strong>s 5 c<strong>en</strong>tres techniques <strong>de</strong>l’Ag<strong>en</strong>ce Europé<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> L’Environnem<strong>en</strong>t relié à l’Université autonome <strong>de</strong> Barcelone. Le projet PEGASO vise àsout<strong>en</strong>ir la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> protocole <strong>de</strong> Gestion Intégrée <strong>de</strong>s Zones Côtières sur la Méditerranée et la Mer Noire.260


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueadministrations. Elle est portée notamm<strong>en</strong>t par le chef <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> coordination, malgré sesréserves liées aux efforts que cette voie d’acquisitions <strong>de</strong>s données requiert dans l’établissem<strong>en</strong>t etle mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s contacts. Les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> l’équipe sont plus sceptiques par rapport à cettethéorie d’action <strong>de</strong> l’OZHM : « je ne veux pas que l’observatoire <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>ne une machine politique qui ne ditri<strong>en</strong> ». « On n’est pas dép<strong>en</strong>dants <strong>de</strong> ces données, pour l’instant les données pays que va fournir le Plan Bleu sontsuffisantes, même si on ne sait pas… A long terme, si les capacités <strong>de</strong> l’OZHM augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, on sera peut-êtrebi<strong>en</strong> cont<strong>en</strong>ts d’avoir les données pays pour l’échelle locale » (membre TdV-OZHM, com.pers., 2009). S’ilest pour eux important <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser aux administrations <strong>en</strong> tant qu’utilisateurs, ils privilégi<strong>en</strong>t unethéorie sci<strong>en</strong>tifico-militante <strong>de</strong> la fabrication <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us <strong>de</strong> l’OZHM, s’appuyant donc sur lesdonnées ou les analyses d’instituts sci<strong>en</strong>tifiques et techniques. Si cette théorie favorise le mainti<strong>en</strong><strong>de</strong> la légitimité sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong>s travaux réalisés dans ce cadre, elle implique que d’autres élém<strong>en</strong>ts<strong>de</strong> structuration <strong>de</strong> l’OZHM vont assurer le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> son portage et <strong>de</strong> sa légitimité politique.Après une année d’accumulation-activation <strong>du</strong> réseau, le mom<strong>en</strong>t est v<strong>en</strong>u <strong>de</strong> trancher <strong>en</strong>tre ces<strong>de</strong>ux théories (pour la dim<strong>en</strong>sion coopération-part<strong>en</strong>ariat) au moins pour la première phase <strong>de</strong>mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> l’OZHM. C’est l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> ces questions prés<strong>en</strong>tes dans lesdébats internes ayant eu lieu autour <strong>de</strong> la structuration et la gouvernance « définitives » <strong>de</strong>l’OZHM qui <strong>de</strong>vait être soumis aux participants à l’atelier <strong>de</strong> février 2010.La structuration et la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> l’OZHM ont <strong>en</strong> effet été p<strong>en</strong>sées ettravaillées <strong>en</strong> interne à la TdV, bi<strong>en</strong> que le secrétaire intérimaire <strong>de</strong> MedWet ait été associé à cetravail. Ceci constitue une spécificité <strong>de</strong> l’OZHM parmi les formes d’interfaces sci<strong>en</strong>ce-politiqueexistant dans le domaine <strong>de</strong> la biodiversité. S. van d<strong>en</strong> Hove et L. Chabason expliqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effetque :« Tous les traités, conv<strong>en</strong>tions, programmes et institutions composant la gouvernance <strong>de</strong>la biodiversité repos<strong>en</strong>t sur différ<strong>en</strong>tes formes d’interfaces sci<strong>en</strong>ce-politique, mais dont laplupart compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t une <strong>en</strong>tité sci<strong>en</strong>tifique spécifique ou un comité <strong>de</strong> pilotage (parexemple, l’organe subsidiaire <strong>de</strong> conseil sci<strong>en</strong>tifique, technique et technologique <strong>de</strong> laCBD). Ces <strong>en</strong>tités sont <strong>en</strong> général constituées <strong>de</strong> manière à répondre à, <strong>en</strong> particulier, uncli<strong>en</strong>t institutionnel. Elles ont ainsi le mandat v<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> cetteinstitution qui s’accompagne souv<strong>en</strong>t d’un mo<strong>du</strong>s operandi pré-établi » (van d<strong>en</strong> Hove &Chabason, 2009 : 8 - tra<strong>du</strong>ction).A l’inverse, la TdV a dû travailler pour l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> ce mandat politique et doit travailler à lastructuration <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong> l’OZHM qui lui permette <strong>de</strong> le maint<strong>en</strong>ir – par la validation àcourt terme, c’est-à-dire lors <strong>du</strong> comité MedWet <strong>de</strong> juin 2010 – et <strong>de</strong> favoriser un portagepolitique <strong>du</strong> dispositif dans le long terme (premier <strong>en</strong>jeu). Le <strong>de</strong>uxième <strong>en</strong>jeu majeur <strong>de</strong> lastructuration est d’offrir un cadre fonctionnel, suffisem<strong>en</strong>t formalisé pour construire le261


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talespart<strong>en</strong>ariat dont il a besoin mais souple (pour ne pas freiner les évolutions <strong>de</strong> l’OZHM). Letroisième <strong>en</strong>jeu concerne plus spécifiquem<strong>en</strong>t la TdV, <strong>en</strong> tant que récipi<strong>en</strong>daire <strong>du</strong> mandatpolitique et chargée <strong>de</strong> développer l’OZHM : la structuration <strong>de</strong> l’OZHM doit lui octroyer unelatitu<strong>de</strong> suffisante dans l’ori<strong>en</strong>tation – <strong>de</strong> manière à ce qu’elle soit cohér<strong>en</strong>te avec celle <strong>de</strong> la TdV– et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s activités – <strong>de</strong> manière à ce que la structure <strong>de</strong> gouvernance soit unsouti<strong>en</strong> et non une source <strong>de</strong> dysfonctionnem<strong>en</strong>t.La structure proposée et validée par les participants <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010 – validée <strong>en</strong> amontpar le secrétaire intérimaire <strong>de</strong> MedWet – se prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la manière suivante (Figure 5.2) :GovernanceAdvisory Group (MW/ Com)Incl. some Partners & UsersSteeringCommitteeExecutivemanagem<strong>en</strong>tCoordinationUnit(<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>)MoUConv<strong>en</strong>tionsPartnershipTechnical &Institut.PartnersFeed-backFinancialPartnersUSERSFigure 5.2 : Structure <strong>de</strong> l’OZHM validée à l’atelier <strong>de</strong> février 2010 (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010)- Un Groupe Conseil (Advisory Group) : dans l’objectif <strong>de</strong> favoriser le portage politique <strong>de</strong>l’OZHM, la TdV a proposé <strong>de</strong> le placer directem<strong>en</strong>t sous l’<strong>en</strong>tité qui lui octroie son mandatpolitique, c’est-à-dire le Comité MedWet qui compr<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s institutions (Représ<strong>en</strong>tants Ramsar<strong>de</strong>s pays méditerrané<strong>en</strong>s et le secrétariat <strong>de</strong> MedWet) et <strong>de</strong>s organismes techniques (<strong>en</strong> outrepart<strong>en</strong>aires pot<strong>en</strong>tiels <strong>de</strong> l’OZHM). Sa fonction <strong>en</strong> tant que Groupe Conseil consiste à « fournir<strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations stratégiques à l’unité <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM ; faciliter les contacts <strong>en</strong>tre262


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueleurs réseaux respectifs et les projets <strong>de</strong> l’OZHM ; diffuser les résultats <strong>de</strong> l’OZHM dans les payset leurs réseaux ; vali<strong>de</strong>r les plans <strong>de</strong> travail annuel <strong>de</strong> l’OZHM ; assister l’équipe <strong>de</strong> coordinationdans la recherche <strong>de</strong> fonds » (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010 - tra<strong>du</strong>ction).- Un comité <strong>de</strong> pilotage (Steering Committee) : il s’agit d’un groupe <strong>de</strong> cinq ou six part<strong>en</strong>airestechniques et institutionnels <strong>de</strong> l’OZHM, chargé <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir l’équipe <strong>de</strong> coordination dansl’activité <strong>de</strong> l’OZHM (développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projets, part<strong>en</strong>ariats, etc.), dans le long terme et <strong>en</strong>cohér<strong>en</strong>ce avec les recommandations <strong>de</strong> Ramsar et <strong>de</strong> MedWet. Dans le but <strong>de</strong> sélectionner lesmembres <strong>du</strong> comité <strong>de</strong> pilotage, une série <strong>de</strong> critères a été soumise à la discussion lors <strong>de</strong> l’atelier<strong>de</strong> février 2010. La constitution <strong>de</strong> ce comité a suscité davantage <strong>de</strong> débat car la légitimité <strong>de</strong> sesmembres n’est pas instituée a priori. Pour la TdV et d’autres organismes techniques, les critèresess<strong>en</strong>tiels sont l’expertise et le réseau <strong>de</strong>s membres, <strong>de</strong> façon à sout<strong>en</strong>ir au mieux l’avancem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> l’OZHM. Ils aurai<strong>en</strong>t donc t<strong>en</strong>dance à pousser pour un comité <strong>de</strong> pilotagecomposé <strong>de</strong> représ<strong>en</strong>tants d’organisations ayant une certaine assise institutionnelle (donc plutôt<strong>de</strong> la rive nord), ayant l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> coopérer. Après ce souci d’efficacité vi<strong>en</strong>t la préoccupation<strong>de</strong> la représ<strong>en</strong>tativité sur toute la région méditerrané<strong>en</strong>ne et toutes les familles d’organisationsimpliquées comme part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM (donc aussi les systèmes <strong>de</strong> suivi locaux et lesanimateurs <strong>de</strong> réseaux). Suite à la validation par les participants, un premier comité a été composépour la pério<strong>de</strong> 2010-2012 (les organismes <strong>en</strong> question sont indiqués <strong>en</strong>tre par<strong>en</strong>thèses). Ilcompr<strong>en</strong>d : le secrétariat MedWet (tant que l’OZHM est sous mandat <strong>de</strong> MedWet), unreprés<strong>en</strong>tant <strong>du</strong> PNUE/ Plan d’Action pour la Méditerranée (Plan Bleu), un représ<strong>en</strong>tanttechnique <strong>de</strong> MedWet (EKBY), un représ<strong>en</strong>tant reconnu pour son expertise technique dans ledomaine d’activité <strong>de</strong> l’OZHM (Wetlands International), un représ<strong>en</strong>tant d’observatoire locaux<strong>de</strong>s ZH ou <strong>de</strong> système <strong>de</strong> suivis (ANPE – Ichkeul monitoring system) et un représ<strong>en</strong>tant actif dans ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> réseau MedWet (réseau d’ONG ou réseau nord africain pour les ZH, nondéterminé).- Pour formaliser <strong>en</strong>core davantage les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre ces <strong>en</strong>tités et s’assurer d’un <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>tresponsabilisé, l’équipe <strong>de</strong> coordination TdV propose un appui sur les points focaux Ramsarmembres <strong>du</strong> Comité MedWet et <strong>de</strong>s points focaux qui doiv<strong>en</strong>t être désignés au sein <strong>de</strong>sorganisations membres <strong>du</strong> comité <strong>de</strong> pilotage, et plus largem<strong>en</strong>t dans toutes les organisationspart<strong>en</strong>aires. Ils doiv<strong>en</strong>t être aptes à « représ<strong>en</strong>ter leurs organisations lors <strong>de</strong>s comités ; informerl’équipe <strong>de</strong> coordination et les part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM sur les élém<strong>en</strong>ts relatifs aux ZHM(nouvelles lois et politiques, programmes, sites Ramsar, suivis <strong>de</strong>s ZH, etc.) ; faire le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>trel’équipe <strong>de</strong> coordination et le personnel pertin<strong>en</strong>t dans leurs organisations respectives » (ibid.).263


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales- L’unité <strong>de</strong> coordination est l’équipe technique dédiée à l’OZHM, dont la TdV fournit lepersonnel pour la première phase. Ses attributions sont <strong>de</strong> : « construire l’OZHM ; coordonner letravail technique réalisé par les part<strong>en</strong>aires ; s’assurer <strong>de</strong> l’exécution <strong>du</strong> plan <strong>de</strong> travail ; gérer lesaspects administratifs ; préparer les comités <strong>de</strong> pilotage ; participer à la recherche <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>ts, coopérer avec le secrétariat MedWet <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> faciliter le travail <strong>du</strong> GroupeConseil ; assurer le secrétariat <strong>du</strong> comité <strong>de</strong> pilotage » (ibid.).- Enfin, pour asseoir une première base <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat, l’unité <strong>de</strong> coordination TdV a prévu uncadre sous forme <strong>de</strong> conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat (Memoran<strong>du</strong>m of Un<strong>de</strong>rstanding), officialisant un<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t mutuel <strong>en</strong>tre la TdV et chaque organisation part<strong>en</strong>aire pour le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’OZHM, et apposant ainsi une clarification <strong>du</strong> terme <strong>de</strong> « part<strong>en</strong>aire » qui a pu être utilisé <strong>de</strong>manière large et floue p<strong>en</strong>dant la phase d’accumulation-activation. « Les part<strong>en</strong>aires techniques etsci<strong>en</strong>tifiques pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>en</strong> charge, au moins partiellem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s activités validées par le GroupeConseil ou le Comité <strong>de</strong> pilotage, sur leurs propres ressources ou <strong>de</strong>s ressources qu’ils aurontcontribué (avec l’unité <strong>de</strong> coordination) à obt<strong>en</strong>ir pour l’OZHM ».Les contributions <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires sci<strong>en</strong>tifiques et techniques peuv<strong>en</strong>t être <strong>de</strong> : « fournir <strong>de</strong>sdonnées à l’unité <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM <strong>de</strong> façon régulière ; participer <strong>en</strong> routine au calculd’indicateurs ; analyser et d’interpréter <strong>de</strong>s données / indicateurs ; contribuer à la pro<strong>du</strong>ctiond’outils <strong>de</strong> communication et à leur diffusion » (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010). Ces relations<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat soulèv<strong>en</strong>t plusieurs problèmes. Notons qu’ils sont gérés dans une relation bilatérale<strong>en</strong>tre chaque part<strong>en</strong>aire et la TdV, dont la responsabilité est <strong>en</strong>gagée comme l’indique le fait quele signataire <strong>de</strong>s conv<strong>en</strong>tions soit le directeur général. L’équipe <strong>de</strong> coordination, qui comme sonnom l’indique coordonne les activités <strong>de</strong> l’OZHM, continue donc à avoir un rôle prépondérantdans la dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat et <strong>de</strong> la coopération.Un <strong>de</strong>s problèmes inhér<strong>en</strong>ts à ce type <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat est celui <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s données : leurtransfert, puis leur utilisation. Pour cela, les <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la TdV sont formalisés dans laconv<strong>en</strong>tion : « utiliser les données transmises par le part<strong>en</strong>aires à l’OZHM uniquem<strong>en</strong>t dans cecadre ; informer régulièrem<strong>en</strong>t le part<strong>en</strong>aire sur l’utilisation <strong>de</strong>s données et l’associer à l’analyses’il le souhaite ; ne jamais transmettre les données à un tiers sans accord écrit <strong>du</strong> part<strong>en</strong>aire ;pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte les besoins <strong>du</strong> part<strong>en</strong>aires <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> suivis, voire <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> fondspour le calcul d’indicateurs pertin<strong>en</strong>ts ; fournir une ai<strong>de</strong> technique au part<strong>en</strong>aire dans la collecte<strong>de</strong> données, l’interprétation et l’analyse, etc. » (Memoran<strong>du</strong>m of Un<strong>de</strong>rstanding OZHM, 2010).Ces différ<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts révèl<strong>en</strong>t l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> plusieurs cas <strong>de</strong> figure. Dans le cas <strong>de</strong>part<strong>en</strong>ariat avec les instituts techniques et sci<strong>en</strong>tifiques spécialisés comme le Plan Bleu (PNUE/PAM) ou l’ETC-LUSI (EEA), il est peu probable qu’ils fourniss<strong>en</strong>t les données à l’OZHM <strong>en</strong>264


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquelui laissant l’analyse et l’interprétation, ce qui <strong>en</strong> outre représ<strong>en</strong>terait une quantité <strong>de</strong> travailinfaisable pour l’équipe <strong>de</strong> coordination. Son intérêt est justem<strong>en</strong>t d’avoir <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires quicomplèt<strong>en</strong>t ses compét<strong>en</strong>ces et r<strong>en</strong>forc<strong>en</strong>t les capacités <strong>de</strong> l’OZHM. Dans le cas d’organisationslocales notamm<strong>en</strong>t, les capacités sont plus faibles, les systèmes <strong>de</strong> suivi pas toujours trèsopérationnels et les données sous-exploitées. La TdV se propose donc <strong>de</strong> valoriser ces donnéeset <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> ces organisations. Dans le cas <strong>de</strong>s ONGE commeBirdLife ou Wetlands International, mais aussi <strong>de</strong>s organismes locaux, l’<strong>en</strong>jeu est plutôt <strong>de</strong>débloquer <strong>de</strong>s fonds pour développer <strong>de</strong>s projets pertin<strong>en</strong>ts pour l’OZHM. Les ONGEdéti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les compét<strong>en</strong>ces requises, mais ont <strong>de</strong>s formes organisationnelles ne permettant passouv<strong>en</strong>t d’allouer <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> travail <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> projets.Cette conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat prévoit <strong>de</strong>s garanties par rapport aux problèmes <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong>données. En revanche, elle n’indique pas la tra<strong>du</strong>ction pratique <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat <strong>en</strong> termes <strong>de</strong>portage et l’OZHM : les part<strong>en</strong>aires peuv<strong>en</strong>t-il s’exprimer au nom <strong>de</strong> l’OZHM ? Voudront-ils lefaire ?La stratégie <strong>de</strong> la TdV a été d’ouvrir cette conv<strong>en</strong>tion à tout volontaire, ce qui lui offre une base<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat pot<strong>en</strong>tielle, qu’elle sollicitera ou non <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> l’OZHM et <strong>de</strong> sescapacités à les exploiter. L’unité <strong>de</strong> coordination a d’ailleurs eu la surprise d’avoir plus <strong>de</strong>conv<strong>en</strong>tions signées rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t après l’atelier par <strong>de</strong>s organismes non perçus comme <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>aires « naturels » <strong>de</strong> l’OZHM, comme l’Autorité <strong>de</strong> l’Environnem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>Palestine ou l’Autorité <strong>de</strong>s Parcs et Réserves d’Israël (membre TdV-OZHM, com.pers., 2010).Mais la conv<strong>en</strong>tion reste un cadre pour un part<strong>en</strong>ariat opérationnel que l’unité <strong>de</strong> coordinationdoit activer. La stratégie <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat – coopération <strong>de</strong> l’OZHM ne s’arrête donc pas à lastructuration <strong>du</strong> dispositif et la signature <strong>de</strong> la conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat. Ses efforts vont seconc<strong>en</strong>trer sur les part<strong>en</strong>ariats dont elle dép<strong>en</strong>d pour pro<strong>du</strong>ire le cont<strong>en</strong>u pertin<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHMet dont les contraintes sont assez ré<strong>du</strong>ites pour 1) ne pas <strong>en</strong>traver la fonctionnalité <strong>du</strong> dispositif et2) ne pas limiter sa capacité <strong>de</strong> portage d’un cont<strong>en</strong>u sci<strong>en</strong>tifico-militant. Ce sont finalem<strong>en</strong>t cescontraintes opérationnelles et stratégiques qui l’ont poussée à trancher <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> part<strong>en</strong>airessci<strong>en</strong>tifiques et techniques plutôt que <strong>de</strong>s administrations.La question fondam<strong>en</strong>tale qui se pose alors est celle <strong>de</strong> la volonté et l’intérêt <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>airesciblés à coopérer avec l’OZHM. Des élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> réponse ont déjà été donnés dans ce quiprécè<strong>de</strong> : leurs intérêts résid<strong>en</strong>t dans la valorisation <strong>de</strong> leurs propres travaux et l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scapacités pour les organismes locaux, ainsi que dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projets pour les ONG.L’OZHM est <strong>en</strong> outre un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique qui offre une nouvelle arène265


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talespour construire et porter <strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux partagés par la plupart <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires,ce qui permet l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale autour <strong>de</strong>s ZHM.d) Bilan sur la stratégie <strong>de</strong> coopération – part<strong>en</strong>ariat <strong>de</strong> l’OZHML’OZHM étant un dispositif <strong>en</strong> construction et <strong>de</strong>stiné à évoluer, il n’y a pas lieu <strong>de</strong> tirer <strong>de</strong>sconclusions sur l’efficacité <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> coopération-part<strong>en</strong>ariat mise <strong>en</strong> œuvre par l’unité <strong>de</strong>coordination et la TdV. Nous pouvons malgré tout constater à ce sta<strong>de</strong> que la TdV a réussi àrassembler les ressources nécessaires pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> l’élaboration d’un premier rapport pour2011. En revanche, nous pouvons <strong>en</strong> tirer un bilan qui repr<strong>en</strong>ne les élém<strong>en</strong>ts découverts au fil <strong>du</strong>texte <strong>en</strong> s’appuyant sur l’analyse stratégique <strong>de</strong> M. Crozier et E. Friedberg (1977) (grille <strong>du</strong>tableau 5.2).Cette stratégie <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat est tout d’abord une stratégie <strong>de</strong> ciblage. Il s’agit pour l’unité <strong>de</strong>coordination <strong>de</strong> s’informer pour trouver les organisations aptes à fournir à l’OZHM <strong>de</strong>s donnéesfiables au niveau régional et au niveau local, les compét<strong>en</strong>ces manquantes à la TdV et la capacité<strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge certains indicateurs. Une att<strong>en</strong>tion est égalem<strong>en</strong>t portée aux réseauxrespectifs <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires dans la perspective d’une diffusion la plus large et pertin<strong>en</strong>te <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>its <strong>de</strong> l’OZHM. Ce ciblage concerne tout d’abord les organisations partageant l’objectifnormatif <strong>de</strong> l’OZHM, mais s’élargit hors <strong>de</strong> ce que l’on a appelé l’Ensemble agissant pourl’Environnem<strong>en</strong>t, dans la perspective d’une intégration <strong>de</strong> la partie plus substantielle <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans les programmes <strong>de</strong> DD et pour l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> certaines données etindicateurs (notamm<strong>en</strong>t dans la partie pression et réponse <strong>du</strong> modèle conceptuel). Cette stratégie<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat est passée par un processus d’accumulation-activation <strong>en</strong> suscitant l’intérêt pourl’OZHM, et une ouverture à tous les volontaires. Mais les efforts les plus importants sont fournis<strong>en</strong>vers les organismes dont le part<strong>en</strong>ariat est indisp<strong>en</strong>sable à l’OZHM. Le processus <strong>de</strong>formalisation <strong>de</strong> la structure <strong>de</strong> gouvernance <strong>de</strong> l’OZHM a été p<strong>en</strong>sé <strong>de</strong> manière à r<strong>en</strong>dre ledispositif fonctionnel et à laisser <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> manœuvres importantes à l’unité <strong>de</strong> coordinationqui est responsable <strong>de</strong> l’avancée et <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>ctions <strong>de</strong> l’OZHM sous le mandat <strong>de</strong> MedWet.Le tableau 5.2 synthétise les <strong>en</strong>jeux stratégiques auxquels l’unité <strong>de</strong> coordination est confrontée<strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts types d’organisation avec lesquelles elle développe les part<strong>en</strong>ariats.Cette grille permet <strong>de</strong> visualiser les contributions et les réseaux <strong>de</strong> diffusion pertin<strong>en</strong>ts etstratégiques pour l’OZHM, et par ailleurs les contraintes et les intérêts <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires quipeuv<strong>en</strong>t requérir <strong>de</strong>s stratégies spécifiques <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> l’unité <strong>de</strong> coordination pour réussir àformaliser la coopération.266


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface scieConfiguration stratégique <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat <strong>de</strong> l’OZHM, synthèse à partir <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats effectifs ou pot<strong>en</strong>tiel <strong>en</strong> mars 2010.ObjectifnormatifEAEEchelled’actionRessources /contribution pourl’OZHMContraintes (etconditions pourêtre part<strong>en</strong>aire)Intérêt pour lepart<strong>en</strong>ariat avecl’OZHMStratégiespécifique TdV –CU OZHMStratégie <strong>du</strong>part<strong>en</strong>aireRédiffprol’oui Med. Mandat politiqueExpertise sci<strong>en</strong>tifique ettechnique dans lesdonnées et indicateurs ZHRéseau développé (etpart<strong>en</strong>ariat opérationnelavec un certain nombred’organisation)Dép<strong>en</strong>dance vis-àvis<strong>de</strong>s autresorganismes pour lecont<strong>en</strong>u et leportage <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>ctions <strong>de</strong>l’OZHMStructuration <strong>de</strong>l’OZHM avecpart<strong>en</strong>ariatformalisé <strong>de</strong>manière bilatérale,sollicitation, prise<strong>de</strong> contact, effortsactifs pourconcrétiser lepart<strong>en</strong>ariatoui Med. Portage <strong>de</strong> l’OZHM ausein <strong>de</strong> MedWetProjet quifonctionne etredonne <strong>de</strong> lasubstance àl’initiative qui est <strong>en</strong>situation <strong>de</strong> criseMainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s effortspour redresserl’initiative, dontl’OZHM dép<strong>en</strong>d.Exercer lemaximumd’autorité surl’OZHM, mise <strong>en</strong>valeur <strong>de</strong> soncadrage sousMedwetSphèreMéditeréseauxONGoui Int. Données régionalesméditerrané<strong>en</strong>nes.Compét<strong>en</strong>ces et capacitéscomplém<strong>en</strong>taires pour lesystème d’indicateurs <strong>de</strong>l’OZHM.Mandat politique.Garanties sur lapropriété etl’utilisation <strong>de</strong>sdonnées.Validité et légitimitésci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong>scont<strong>en</strong>us <strong>de</strong>l’OZHM.Valorisation <strong>de</strong>leurs données etindicateurs auniveauMéditerrané<strong>en</strong>.Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>réseau et pot<strong>en</strong>tiel<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat pourd’autres projetsStratégie active :sollicitations,association autravail <strong>de</strong> l’OZHMAtt<strong>en</strong>tion portée àl’aspect <strong>de</strong> lavalidité sci<strong>en</strong>tifique<strong>de</strong> l’OZHM.Posture légèrem<strong>en</strong>tatt<strong>en</strong>tiste : sedéclare part<strong>en</strong>aire,mais ne se précipitepas sur laformalisation <strong>du</strong>part<strong>en</strong>ariat.ArènetechniqGouvebiodiveoui Int. Données oiseaux,indicateur Key Bird Area,Inv<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>s oiseauxd’eau,Animation <strong>de</strong> réseaux <strong>en</strong>Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>projets spécifiqueset communs(financés).Garanties sur laProjet financés etvalorisation àl’échelleméditerrané<strong>en</strong>neConsci<strong>en</strong>ce d’unproblème àrésoudre : si à longterme, lespart<strong>en</strong>aires doiv<strong>en</strong>tAtt<strong>en</strong>tisteArènetecnhiqgouverbiodive(pour c267


crage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesMéditerranée.propriété etl’utilisation <strong>de</strong>sdonnées.participer àl’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>l’OZHM, l’unité <strong>de</strong>coordination <strong>de</strong>vrasans doute <strong>en</strong>assumer une largepart, surtout audébut.indicatréseaupropretechniqsci<strong>en</strong>tifONG)ouipaysmed.Données nationales etlocales, notamm<strong>en</strong>t dansle domaine Biodiversité etécosystèmes.Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>projets spécifiqueset communs(financés).Garanties sur lapropriété etl’utilisation <strong>de</strong>sdonnées.Valorisation <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>ctionspropres,augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> lavisibilité etlégitimité, souti<strong>en</strong>technique voirefinancier pour leurprogramme <strong>de</strong>suivi.Capitalisation <strong>de</strong>sréseaux etpart<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> laTdVAttitu<strong>de</strong> volontaire<strong>en</strong> atelier, maisatt<strong>en</strong>tiste pour <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats formelsRéseauouipaysmed.Données nationales etlocales, notamm<strong>en</strong>t dansle domaine Biodiversité etécosystèmes.Mais données pastoujours suffisanteset fiables.Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>projets spécifiqueset communs(financés).Valorisation <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>ctionspropres. Souti<strong>en</strong>technique voirefinancier pour leurprogramme <strong>de</strong>suivi.Ouverts, att<strong>en</strong>tistesActeurnonDonnées dans le domainesocio-économique, auniveau <strong>de</strong>s pressions etréponses <strong>du</strong> systèmed’indicateurs.tional ; Med. = Méditerranée ou méditerrané<strong>en</strong>Formesorganisationnellespermettant parfoisle part<strong>en</strong>ariat avec<strong>de</strong>s organisations<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales?Intégration <strong>de</strong> lapartie biodiversité /écosystèmes dansleur proprestravaux, dans uncontexte d’appel à<strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong>DD intégrant ladim<strong>en</strong>sion<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.Prospection –élargissem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>réseau, étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>spossibilités et <strong>de</strong> lapertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cettevoie d’action.Pas <strong>de</strong> refus,ouverts auxperspectives <strong>de</strong>coopération.Valorispro<strong>du</strong>il’OZHd’autre


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquePour les organismes sci<strong>en</strong>tifiques et techniques intergouvernem<strong>en</strong>taux, la condition sine qua non àla formalisation <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat est le mandat politique <strong>de</strong> l’OZHM. Comme les ONGE, cesorganismes se sont aussi montrés très att<strong>en</strong>tifs à la propriété et à l’utilisation <strong>de</strong>s données.L’intérêt <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts types d’acteurs pour l’OZHM varie <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la valorisation <strong>de</strong> leurspropres données et indicateurs : certains organismes sci<strong>en</strong>tifiques intergouvernem<strong>en</strong>taux y voi<strong>en</strong>tl’accès à une nouveau réseau qui peut leur être utile pour d’autres projets, les ONGE et lesorganismes <strong>gestion</strong>naires locaux y perçoiv<strong>en</strong>t un souti<strong>en</strong> technique et financier pour leurprogramme <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong>s écosystèmes. P<strong>en</strong>dant les ateliers <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’OZHM, lespart<strong>en</strong>aires pot<strong>en</strong>tiels se sont globalem<strong>en</strong>t montrés att<strong>en</strong>tistes (pas d’intérêts à se mobiliser <strong>de</strong>façon substantielle tant que l’OZHM semble être un dispositif « <strong>de</strong> la TdV » et « <strong>en</strong> projet »), cequi incite l’équipe <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> la TdV à développer une attitu<strong>de</strong> pro-active à la fois pourmobiliser son réseau autour <strong>de</strong> l’OZHM et pour formaliser <strong>de</strong> nouveaux li<strong>en</strong>s. Enfin, nous avonsfait apparaître dans ce tableau 5.2 les réseaux <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its <strong>de</strong> l’OZHM ouverts parl’implication <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs : les arènes sci<strong>en</strong>tifico-techniques et politique <strong>de</strong> lagouvernance <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong>s ZH sont aussi cruciales que l’accès aux réseaux locaux dansles pays.5.2.4 Stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’OZHM : quelles théories d’action ?Jusqu’ici, nous avons étudié comm<strong>en</strong>t la TdV et l’unité <strong>de</strong> coordination agiss<strong>en</strong>t pour rassembler<strong>de</strong>s ressources politiques, humaines et financières (partie 5.2.1) et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong>scont<strong>en</strong>us déjà existants pour pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong> nouvelles ressources : 1) une sci<strong>en</strong>ce d’interfacelégitime, vali<strong>de</strong> et mise <strong>en</strong> forme (partie 5.2.2) et 2) un réseau pro<strong>du</strong>cteur et porteur <strong>de</strong> cettesci<strong>en</strong>ce d’interface (partie 5.2.3). Il s’agit à prés<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t le portage vas’opérationnaliser pour atteindre l’objectif normatif <strong>de</strong> l’OZHM qui est la conservation <strong>de</strong>sZHM. Les auteurs travaillant sur les interfaces sci<strong>en</strong>ce-politique indiqu<strong>en</strong>t que leur capacité àinflu<strong>en</strong>cer les décisions dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la configuration sociale et <strong>du</strong> contexte <strong>de</strong> décision (Sarewitz &Pielke, 2007). Pour nous, cela révèle l’exist<strong>en</strong>ce d’une dim<strong>en</strong>sion stratégique fondam<strong>en</strong>tale qui estcelle <strong>du</strong> choix <strong>de</strong>s canaux que le dispositif cherche à pénétrer, <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce avec les cont<strong>en</strong>uspro<strong>du</strong>its et mis <strong>en</strong> forme avec le réseau <strong>de</strong> portage constitué. Toute la difficulté vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’interdép<strong>en</strong>dance <strong>en</strong>tre ces élém<strong>en</strong>ts : les capacités à agir et les canaux <strong>de</strong> diffusion pertin<strong>en</strong>ts. Lapro<strong>du</strong>ction d’un cont<strong>en</strong>u et d’un réseau porteur doit être adaptée aux canaux <strong>de</strong> transfert etd’utilisation <strong>de</strong> ces cont<strong>en</strong>us. Mais ces canaux doiv<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t être déterminés <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>scont<strong>en</strong>us et <strong>de</strong>s réseaux que le dispositif est <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire. Plus complexes <strong>en</strong>core, les269


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesréseaux porteurs <strong>de</strong> ces cont<strong>en</strong>us doiv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> être égalem<strong>en</strong>t les premiers utilisateurs. On ress<strong>en</strong>talors un besoin <strong>de</strong> clarification sur ces réseaux <strong>de</strong> portage, les canaux <strong>de</strong> diffusion et les typesd’utilisation <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us pro<strong>du</strong>its. C’est dans l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’OZHM m<strong>en</strong>ée par l’unité <strong>de</strong> coordination que l’on va trouver cesréponses. Comme nous l’avons dit, ce registre stratégique n’est pas traitée <strong>de</strong> manièreindép<strong>en</strong>dante, mais au contraire dans une t<strong>en</strong>sion très forte avec les autres registres stratégiques(construction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, développem<strong>en</strong>t interne et place dans le secteur).Au départ, l’<strong>en</strong>jeu était formulé <strong>de</strong> la manière suivante par le coordinateur : l’OZHM doit êtreutile et répondre aux besoins et aux att<strong>en</strong>tes <strong>de</strong>s utilisateurs, sachant que les <strong>de</strong>stinataires finauxsont les déci<strong>de</strong>urs dont les décisions impact<strong>en</strong>t les ZH. Les déci<strong>de</strong>urs visés sont donc ceuxappart<strong>en</strong>ant au champ <strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, mais surtout dans aux autres secteursimpactant négativem<strong>en</strong>t les ZH (agriculture, urbanisation et aménagem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> territoire, tourisme,etc.). Or l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> cours montre que la questionse pose autrem<strong>en</strong>t : l’<strong>en</strong>jeu est plutôt <strong>de</strong> déterminer qui, <strong>en</strong> utilisant les ressources pro<strong>du</strong>ites parl’OZHM verrait ses capacités d’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la décision <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZHr<strong>en</strong>forcées, et par quelles voies d’action cela peut effectivem<strong>en</strong>t m<strong>en</strong>er à une meilleure prise <strong>en</strong>charge <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM. C’est bi<strong>en</strong> l’<strong>en</strong>jeu stratégique qui est au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> la réflexionque nous avons observée.L’élaboration <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale a démarré dès le début <strong>de</strong> la construction<strong>de</strong> l’OZHM. Elle se précise au fur et à mesure <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la structure et <strong>de</strong>s activités<strong>de</strong> l’OZHM et continuera à se préciser avec l’avancée <strong>du</strong> dispositif. Les processus qui soust<strong>en</strong>d<strong>en</strong>tl’élaboration <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale sont complém<strong>en</strong>taires et <strong>de</strong>différ<strong>en</strong>tes natures : la réflexion commune et les débats au sein <strong>de</strong> l’unité <strong>de</strong> coordination ; lesdébats avec les participants aux ateliers ; la formalisation d’un cadre à travers la rédaction d’unestratégie <strong>de</strong> communication <strong>de</strong> l’OZHM ; la mise <strong>en</strong> œuvre d’une <strong>en</strong>quête sur la base d’unquestionnaire sur « les att<strong>en</strong>tes et besoins <strong>de</strong>s utilisateurs » visant à faire le diagnostic <strong>du</strong> contexte<strong>de</strong> décision et l’état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’utilisation <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> suivi-évaluation. L’analyse<strong>de</strong> ces processus fait apparaître les <strong>de</strong>ux théories d’action qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t la stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’OZHM déjà évoquées plus haut dans le texte : une théorie d’actionsci<strong>en</strong>tifico-militante et une théorie d’action politico-administrative. Ces théories secaractéris<strong>en</strong>t par <strong>de</strong>s objectifs implicites, pour lesquelles sont imaginées <strong>de</strong>s voies d’action parl’unité <strong>de</strong> coordination. Comme toute théorie, elles ont un pot<strong>en</strong>tiel performatif. Signalons alorsque cette analyse vise à éclairer les logiques stratégiques mais ne doit pas avoir pour conséqu<strong>en</strong>cepratique <strong>de</strong> les restreindre à celles que nous avons pu id<strong>en</strong>tifier à ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>270


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquel’OZHM. Nous allons t<strong>en</strong>ter d’expliciter ces <strong>de</strong>ux théories d’action, mais il semble opportun <strong>de</strong>donner pour comm<strong>en</strong>cer une vue d’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s cibles qu’elles vis<strong>en</strong>t à atteindre :- Gouvernem<strong>en</strong>t, élus et autorités locales traitant <strong>de</strong>s affaires liées à la conservation,protection, <strong>gestion</strong> et utilisation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, agriculture, eau,forêt, tourisme, infrastructure, pêche, chasse, etc.) ;- Organisations, conv<strong>en</strong>tions et protocoles internationaux et régionaux (Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> laBiodiversité, Objectifs <strong>de</strong> Développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Millénaire, Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Ramsar,Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Barcelone, Union europé<strong>en</strong>ne, Union pour la Méditerranée, MedWet, Manand Biosphere, etc.) ;- Part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’observatoire <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et les fournisseurs <strong>de</strong>données ;- ONGs, associations, organisations communautaires (CBOs), projets et autresorganisations actives dans la protection et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s ;- Universités, instituts, c<strong>en</strong>tres <strong>de</strong> recherche travaillant dans le cadre <strong>de</strong> la conservation et <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t ;- Grand public et médias (Stratégie <strong>de</strong> communication <strong>de</strong> l’OZHM, 2009).Pour faciliter la lecture, précisons dès à prés<strong>en</strong>t qu’il ne s’agit pas <strong>de</strong> catégoriser les cibles <strong>en</strong>fonction <strong>de</strong>s théories d’action. Au contraire, même si certaines cibles vont s’inscrire davantagedans l’une ou l’autre <strong>de</strong>s logiques, elles sont souv<strong>en</strong>t visées par plusieurs voies d’action.a) La théorie d’action sci<strong>en</strong>tifique – militanteCette théorie d’action porte <strong>de</strong>ux objectifs majeurs : la précision et le portage <strong>de</strong> la norme <strong>en</strong>matière <strong>de</strong> ZH pour pousser à l’adoption <strong>de</strong> nouvelles mesures et l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacitésd’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZH. Les valeurs dominantes sont la légitimité et lavalidité sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us pro<strong>du</strong>its. La théorie <strong>de</strong> la décision sous-jac<strong>en</strong>te, partagée ausein <strong>de</strong> l’équipe et <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> la TdV, mais exprimée <strong>de</strong> façon plus explicite par lessci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> ce groupe, est l’idée selon laquelle l’apport d’informations tangibles et reconnues,mises <strong>en</strong> forme pour pro<strong>du</strong>ire un éclairage nouveau (ici le problème <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZH),augm<strong>en</strong>te la capacité <strong>de</strong> portage <strong>de</strong> cet objectif normatif. On repère ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t trois voiesd’action correspondant aux <strong>de</strong>ux objectifs implicites <strong>de</strong> cette théorie d’action <strong>de</strong> l’OZHM.Améliorer le référ<strong>en</strong>tiel normatif et pousser à l’adoption <strong>de</strong> mesures. Nous avons vu quel’OZHM est un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique qui s’inscrit dans la gouvernance <strong>de</strong>s ZHet <strong>de</strong> la biodiversité méditerrané<strong>en</strong>nes. A l’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne, voire internationale, l’actionconsiste, <strong>en</strong> s’appuyant sur les référ<strong>en</strong>tiels et outils existants (notamm<strong>en</strong>t dans le domaine <strong>de</strong> labiodiversité), à développer la partie spécifique relative aux ZH. L’exemple déjà évoqué <strong>de</strong> la271


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talessollicitation <strong>de</strong> l’unité <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> l’OZHM par le groupe d’experts <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tionRamsar, qui est mandaté par la CBD pour le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s indicateurs ZH, montre qu’il aun besoin et que l’OZHM peut participer à sa satisfaction. La stratégie d’action est double : elleest opportuniste – l’OZHM se met tant que possible <strong>en</strong> capacité <strong>de</strong> répondre à ce type <strong>de</strong>sollicitation dont la portée est significative. Elle est avant tout planifiée – d’une part, lastructuration <strong>de</strong> l’OZHM formalise un li<strong>en</strong> fort avec le Comité MedWet, groupem<strong>en</strong>t majeurdans la gouvernance <strong>de</strong>s ZHM, et d’autre part, les efforts d’activation <strong>du</strong> réseau voire la création<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat vis<strong>en</strong>t <strong>en</strong> partie à accé<strong>de</strong>r aux ancrages respectifs <strong>de</strong> ces organismes dans lagouvernance <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>du</strong> DD. Les voies <strong>de</strong> transfert s’opèr<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>ux niveaux : 1) lesinformations transférées sont techniques (les indicateurs, le modèle conceptuel pour le suiviévaluation<strong>de</strong>s ZH) et sont <strong>de</strong>stinées notamm<strong>en</strong>t aux autres dispositifs ou interfaces sci<strong>en</strong>cepolitiquechargés <strong>de</strong> développer les systèmes <strong>de</strong> suivi-évaluation pour une meilleure prise <strong>en</strong>compte <strong>de</strong>s ZH dans ces systèmes. 2) Les résultats sont analysés, mis <strong>en</strong> forme(conceptuellem<strong>en</strong>t et matériellem<strong>en</strong>t) et communiqués aux structures institutionnelles etpolitiques mandataires. Pour MedWet, le transfert est direct : il s’agit <strong>de</strong> rapports, comptesr<strong>en</strong><strong>du</strong>s,etc. prés<strong>en</strong>tés au comité MedWet, ou à divers événem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l’initiative régionale. Pourles autres conv<strong>en</strong>tions et protocoles internationaux et régionaux, le relais <strong>de</strong>vrait être assuré parles part<strong>en</strong>aires sous mandat <strong>de</strong> ces conv<strong>en</strong>tions et protocoles, au moins jusqu’à ce que l’OZHMait (peut-être à l’av<strong>en</strong>ir) un accès direct à ces sphères. C’est ce que le coordinateur appelle la« coordination institutionnelle » (Stratégie <strong>de</strong> communication <strong>de</strong> l’OZHM, 2009). La mise <strong>en</strong>forme précise <strong>de</strong>s résultats qui seront communiqués aux instances <strong>de</strong> la gouvernance reste unpoint non résolu à ce sta<strong>de</strong> d’avancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM. Cette question est inhér<strong>en</strong>te aux interfacessci<strong>en</strong>ce-politique, dont une dim<strong>en</strong>sion plus ou moins directe est l’évaluation <strong>de</strong> l’action et <strong>de</strong>spolitiques publiques. Jusqu’où les membres <strong>de</strong> MedWet / Com par exemple sont prêts à <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dreles résultats sur les ZH <strong>de</strong> leur pays ? Et on peut craindre <strong>de</strong> mauvaises réactions, étant donné leblocage <strong>de</strong> la Grèce à la première prés<strong>en</strong>tation formelle <strong>de</strong> l’OZHM <strong>en</strong> juin 2007. Les acteurspolitiques, ayant un rôle régulateur sont soumis à d’autres pressions que celle <strong>de</strong>s acteursd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Figure 5.3). Face à eux, il y a aussi les acteurs sectoriels qui sont rétifs à la mise<strong>en</strong> place <strong>de</strong>s contraintes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales plus fortes que pourrai<strong>en</strong>t être am<strong>en</strong>és à proposer lesacteurs régulateurs <strong>de</strong>vant les constats apportés par l’OZHM. Ceci révèle le fait que même <strong>en</strong>s’adressant à l’acteur régulateur <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s ou <strong>de</strong>s questions d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t,l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t doit développer une stratégie assez fine (et non frontale si cela doitprovoquer <strong>de</strong>s blocages) pour favoriser la prise <strong>en</strong> charge réelle <strong>de</strong>s ZHM (Figure 5.3).272


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueOZHMActeursRégulateurs chargésd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tVersl’intégration <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tPression pour éviterles contraintes<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesActeursSectorielsFigure 5.3 : Théorie d’action sci<strong>en</strong>tifico-militante <strong>de</strong> l’OZHM – Pousser à l’adoption <strong>de</strong> mesures <strong>en</strong> faveur<strong>de</strong>s ZHM (source : auteur)P. Le Preste et R. Taravella (2009) cit<strong>en</strong>t l’exemple <strong>de</strong>s expertises techniques pour le Plan pour laMéditerranée, dont les données nationales sur les pollutions telluriques ont été « fusionnées afind’obscurcir la responsabilité <strong>de</strong> chacun et d’éviter que certains pays méditerrané<strong>en</strong>s ne soi<strong>en</strong>tclairem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tifiés comme <strong>de</strong> gros pollueurs ». Ceci souligne le caractère stratégique <strong>de</strong> l’actionque la TdV, ou ici l’EAE porteur <strong>de</strong> l’OZHM, va développer pour toucher l’acteur régulateur.Mais si l’OZHM ne sert plus à éclairer les responsabilités, il court à la perte <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s. L’arbitrageest plus que délicat et mérite une profon<strong>de</strong> réflexion stratégique.Augm<strong>en</strong>ter les capacités d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZH. Il s’agit ici <strong>de</strong>transmettre l’expertise technique acquise et rassemblée par l’OZHM et les informations légitimessci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t et politiquem<strong>en</strong>t validées. Cette voie d’action concerne <strong>en</strong> particulier lesorganismes nationaux ou locaux : les organismes <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> sites, les ONGE locales, lesuniversités.Cette voie d’action vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> particulier <strong>de</strong> l’expéri<strong>en</strong>ce pratique <strong>de</strong> la TdV dans le part<strong>en</strong>ariat avec<strong>de</strong>s organismes locaux, dans la zone sud et est <strong>de</strong> la Méditerranée. Le rôle que la TdV doit y jouerest souv<strong>en</strong>t un transfert d’expertise et un souti<strong>en</strong> technique. Elle vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> outre <strong>de</strong>s besoinsexprimés par les participants aux ateliers <strong>de</strong> l’OZHM allant dans ce s<strong>en</strong>s. Ce besoin a étéconfirmé par les personnes interviewées par l’équipe sur la base <strong>du</strong> questionnaire <strong>de</strong> l’att<strong>en</strong>te et<strong>de</strong>s besoins. « Globalem<strong>en</strong>t, les personnes <strong>en</strong>quêtées sont unanimes pour reconnaîtrel’insuffisance <strong>de</strong> diagnostic et d’analyse <strong>de</strong>s données collectées <strong>en</strong> raison <strong>du</strong> mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> systèmesconv<strong>en</strong>tionnels <strong>de</strong> suivi, <strong>du</strong> manque <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> capacité. Elles reconnaiss<strong>en</strong>t aussi la difficultéd’analyser les données par rapport aux élém<strong>en</strong>ts <strong>du</strong> contexte (développem<strong>en</strong>t socio-économique,politique, etc.) » (Evaluation <strong>de</strong> la situation et <strong>de</strong>s besoins, 2010). Or, ces organismes spécialisésrest<strong>en</strong>t tout <strong>de</strong> même les mieux reconnus dans leur domaine : « parmi les huit catégories <strong>de</strong>273


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talespersonnes travaillant sur les diagnostics et les analyses, les ONG, les universités ou les institutssont les mieux reconnus pour leur expertise (67% <strong>de</strong>s ressources utilisées pour le diagnostic etl’analyse) » (ibid.). Agir par le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> canaux déjà existants pourrait s’avérer stratégique,dans la mesure où comme l’indique cette étu<strong>de</strong>, les ONG sont celles qui mett<strong>en</strong>t le plus <strong>de</strong>données à disposition, contrairem<strong>en</strong>t aux administrations publiques. Par voie <strong>de</strong> conséqu<strong>en</strong>ce,elles apparaiss<strong>en</strong>t comme étant une source <strong>de</strong> données, y compris pour <strong>de</strong>s administrations ouorganismes <strong>gestion</strong>naires publics.La stratégie d’action principale se joue à <strong>de</strong>ux niveaux : une stratégie <strong>de</strong> coopération directe, unestratégie <strong>de</strong> multiplication. Dans la partie précéd<strong>en</strong>te, nous avons pu voir que ce typed’organismes était invité à être part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM. Sans rev<strong>en</strong>ir dans le détail <strong>de</strong> cespart<strong>en</strong>ariats, soulignons ici qu’ils comport<strong>en</strong>t la double fonction <strong>de</strong> fournisseur <strong>de</strong> donnéeslocales et <strong>de</strong> création <strong>de</strong> canaux d’action pour augm<strong>en</strong>ter les capacités <strong>de</strong> portages <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s ZH. Cette voie d’action (coopération et souti<strong>en</strong> technique) implique cep<strong>en</strong>dantun rapport direct aux organismes, et donc un investissem<strong>en</strong>t important <strong>en</strong> ressources humaines etfinancières. Si ce travail <strong>de</strong>vait être con<strong>du</strong>it uniquem<strong>en</strong>t par l’unité <strong>de</strong> coordination, sa portée <strong>en</strong>serait limitée. Dans ce s<strong>en</strong>s, la stratégie <strong>de</strong> coopération se situe à un autre niveau, qu’on appellestratégie <strong>de</strong> coopération-multiplication : elle concerne les part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM étant <strong>en</strong>mesure (<strong>en</strong> termes <strong>de</strong> structure et <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces) d’assurer ce souti<strong>en</strong> dans leur propre réseau.Par exemple, le WWF MedPo anime un réseau dans les régions sud et est <strong>de</strong> la Méditerranée. Il aexprimé la volonté <strong>de</strong> faire bénéficier les organismes <strong>de</strong> ce réseau <strong>de</strong>s informations et ressourcestechniques <strong>de</strong> l’OZHM (OZHM, questionnaire aux part<strong>en</strong>aires, 2010). La figure 5.4 illustre cesstratégies <strong>de</strong> coopération et <strong>de</strong> multiplication visant à r<strong>en</strong>forcer les acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>timpliqués dans les ZH <strong>en</strong> Méditerranée, l’OZHM étant <strong>en</strong> outre un réseau rapprochant cesdiffér<strong>en</strong>ts acteurs (Figure 5.4).ActeursRégulateurs (chargésd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t)AEAEOZHMAEActeursSectorielsFigure 5.4 : Théorie d’action sci<strong>en</strong>tifico-militante <strong>de</strong> l’OZHM – Augm<strong>en</strong>ter les capacités d’action <strong>en</strong>faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée (source : auteur)274


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueR<strong>en</strong>dre public le problème <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Cette stratégie d’action est simplemais non négligeable : il s’agit d’exprimer le problème et <strong>de</strong> multiplier les expressions <strong>du</strong>problème <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Cette stratégie d’action est transversale aux autres, ellepeut toucher tous types <strong>de</strong> cibles. Elle peut être active : par exemple, par la publication <strong>de</strong>srésultats <strong>de</strong> certains indicateurs médiatiques comme le LPI, les communiqués <strong>de</strong> presse, lesannonces spécifiques, mais aussi les animations telles que <strong>de</strong>s portes ouvertes, etc. Elle peut être« passive » : par la mise à disposition <strong>de</strong> l’information, à travers le site web <strong>de</strong> l’OZHM oud’autres supports. Ce sont les activités d’ « information » et <strong>de</strong> « s<strong>en</strong>sibilisation » prévues dans lastratégie <strong>de</strong> communication <strong>de</strong> l’OZHM.b) La théorie d’action politico-administrativeCette théorie d’action repose sur l’idée que la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZH dans la<strong>gestion</strong> effective a lieu avec l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’acteur administratif intégrateur – ou l’acteurrégulateur conceptuel <strong>de</strong> l’ASGE. La théorie <strong>de</strong> décision sous-jac<strong>en</strong>te est la théorie <strong>de</strong> laplanification, qui s’appuierait sur <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> suivi-évaluation. L’OZHM serait alors un outilpour les acteurs <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la planification et <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s territoires. Cette théorie d’actionconcerne notamm<strong>en</strong>t les niveaux nationaux (c<strong>en</strong>traux) et locaux <strong>de</strong>s pays.On repère trois composantes à cette théorie d’action, <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s cibles.1. La première concerne les organismes <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> ZH. L’idée est que l’OZHM peutfournir <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts (données et analyses) pour une meilleure <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ces sites. Cela passe<strong>en</strong>tre autres par l’élaboration <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Les voies d’action possibles sont <strong>de</strong> naturepassive : les organismes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> s’appropri<strong>en</strong>t les ressources mises à disposition par l’OZHM ;ou active : la TdV ou <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM (et non plus seulem<strong>en</strong>t l’OZHM qui n’<strong>en</strong> a pasles capacités directem<strong>en</strong>t) intervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t dans l’élaboration <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.2. La <strong>de</strong>uxième concerne les administrations. L’<strong>en</strong>quête m<strong>en</strong>ée par l’unité <strong>de</strong> coordination visait àid<strong>en</strong>tifier les voies possibles <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us <strong>de</strong> l’OZHM dans les administrations etinstitutions publiques <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZH voire d’autres administrations concernés <strong>de</strong> fait par lesZH. Par exemple, un <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts qui ressort <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s est que « les ministèresou les autorités <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (Environnem<strong>en</strong>t, Agriculture, ParcsNationaux) ne font pas toujours partis <strong>de</strong>s cercles <strong>de</strong> décision sur les sujets d’utilisation et <strong>de</strong><strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s terres et <strong>de</strong>s territoires qui sont <strong>en</strong> général sous l’autorité politique et administrative<strong>du</strong> bureau <strong>du</strong> premier ministre ou sous le ministère <strong>de</strong> l’intérieur. Néanmoins, dans <strong>en</strong>viron 25%<strong>de</strong>s pays, les personnes <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s y sont <strong>en</strong>gagées à travers leur participation à275


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales<strong>de</strong>s comités interministériels » (Evaluation <strong>de</strong> la situation et <strong>de</strong>s besoins, 2010). La stratégied’action serait alors <strong>de</strong> s’appuyer sur ces personnes <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZH ayant accès aux comitésintersectoriels <strong>en</strong> leur donnant les élém<strong>en</strong>ts et les ressources à faire valoir dans le processus <strong>de</strong>planification. Cette voie d’action passe donc par l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> ces personnes et l’<strong>en</strong>void’informations (sous formes <strong>de</strong> rapport ou autres) dans une fréqu<strong>en</strong>ce adaptée au cal<strong>en</strong>drier <strong>du</strong>processus <strong>de</strong> planification. On imagine la quantité <strong>de</strong> travail que requiert cette stratégie d’action.L’unité <strong>de</strong> coordination (et à la direction <strong>de</strong> la TdV) ne pourrait pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge complètem<strong>en</strong>tcette action, et le concours <strong>de</strong> MedWet apparaît à ce sta<strong>de</strong> comme une solution très hypothétique(<strong>en</strong> raison <strong>de</strong> la difficulté que connaît l’initiative) mais pourtant la plus <strong>en</strong>visageable. Remarquonsaussi que les acteurs visés ici sont <strong>en</strong> quelques sortes les acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’appareilpolitico-administratif. Ceci révèle un recouvrem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les théories politico-administrative etsci<strong>en</strong>tifico-militante qui ne peuv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> réalité pas fonctionner <strong>de</strong> manière pure. Nous nousretrouvons à nouveau dans la configuration représ<strong>en</strong>tée par la figure 5.3. La stratégie ne vise plusà faire adopter <strong>de</strong>s mesures dans les arènes politiques où sont élaborés les programmes d’actionnationaux ou internationaux, mais à influ<strong>en</strong>cer les plans sectoriels et intersectoriels élaborés dansles niveaux politico-administratifs déc<strong>en</strong>tralisés <strong>de</strong>s pays.3. Une troisième voie d’action <strong>en</strong>visagée concerne les acteurs impliqués dans les programmes <strong>de</strong>développem<strong>en</strong>t. La stratégie d’action serait <strong>de</strong> déterminer les programmes <strong>de</strong> DD qui concern<strong>en</strong>tles ZH, d’évaluer la prise <strong>en</strong> compte effective <strong>de</strong> leur conservation et <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>rable <strong>de</strong> sesressources (c’est d’ailleurs le troisième objectif <strong>de</strong> l’OZHM), afin <strong>de</strong> déterminer les programmes<strong>de</strong> DD dans lesquels l’OZHM pourrait fournir les ressources pour une meilleure prise <strong>en</strong> charge<strong>de</strong> la partie <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale souv<strong>en</strong>t insuffisante. Cette voie d’action reste cep<strong>en</strong>dantproblématique, et l’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions reste à construire. L’équipe OZHM <strong>de</strong> la TdVétudie les possibilités <strong>de</strong> développer cette stratégie d’action, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> r<strong>en</strong>contrant lesacteurs dans les pays (missions dans les pays sud et est <strong>de</strong> la Méditerranée) et <strong>en</strong> proposant <strong>de</strong>ssujets <strong>de</strong> stage <strong>de</strong> master (Gully, 2010).A ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t, il est difficile <strong>de</strong> voir comm<strong>en</strong>t l’OZHM va pouvoir véritablem<strong>en</strong>tmettre <strong>en</strong> œuvre ces stratégies d’action.c) Bilan sur les théories d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’OZHMUne figure (Figure 5.5) et un tableau synthétique (Tableau 5.3) <strong>de</strong>s théories d’action <strong>de</strong> l’OZHM<strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s cibles (qu’elles soi<strong>en</strong>t aussi part<strong>en</strong>aires ou non) font apparaître <strong>de</strong>ux niveauxd’action selon notre critère d’appart<strong>en</strong>ance ou non à l’Ensemble agissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t.276


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiqueD’une part, il s’agit <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer l’EAE, d’autre part, l’<strong>en</strong>jeu est <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s stratégiesd’action <strong>de</strong>stinées à changer la <strong>gestion</strong> effective visant indirectem<strong>en</strong>t les acteurs sectoriels <strong>en</strong>ciblant d’abord les acteurs régulateurs.Tableau 5.3 : Synthèse <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la position <strong>de</strong>s cibles par rapport àl’Ensemble Agissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t.EAEHorsEAEThéorie sci<strong>en</strong>tifico-militante- Gouvernance <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong>s ZHM(Précision <strong>de</strong>s normes)- Organisations locales : instituts, organismes<strong>gestion</strong>naires, ONG, etc. (augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scapacités daction <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale)- ONG, instituts, etc. ZH (s<strong>en</strong>sibilisation,information)- Gouvernance <strong>du</strong> Développem<strong>en</strong>t Durable- Médias, grand public (s<strong>en</strong>sibilisation,information)Théorie politico-administrative- Organismes <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> sites(amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH)- Administrations <strong>en</strong> charges <strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong>l<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (planification)- Autres administrations (planification)- Organisations et administration <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>programmes <strong>de</strong> Développem<strong>en</strong>t Durable(r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la partie <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t)ActeursRégulateurs (chargésd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t)AEAEOZHMAEActeursSectorielsFigure 5.5 : Théories d’action <strong>de</strong> l’OZHM – R<strong>en</strong>forcer les capacités <strong>de</strong>s AE, Agir auprès <strong>de</strong>s acteursrégulateurs pour l’adoption <strong>de</strong> mesures et l’intégration <strong>de</strong>s ZH dans les plans sectoriels et intersectoriels(source : auteur)Le lecteur doit mieux percevoir à prés<strong>en</strong>t pourquoi il n’est pas possible <strong>de</strong> parler <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aireset <strong>de</strong>s cibles simplem<strong>en</strong>t et à quel point les stratégies <strong>de</strong> coopération-part<strong>en</strong>ariat et d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale sont interreliées dans dispositif tel que l’OZHM. Les part<strong>en</strong>aires sontindisp<strong>en</strong>sables pour la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us (partie 5.2.3) et pour la légitimité et validité <strong>de</strong>ces cont<strong>en</strong>us (partie 5.2.2), mais ils sont souv<strong>en</strong>t simultaném<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cibles directes (<strong>en</strong> plus <strong>de</strong>s277


Partie 2 – Ancrage dans <strong>de</strong>s cas concrets d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesautres cibles non-part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong> l’OZHM), et <strong>de</strong>s canaux <strong>de</strong> transfert <strong>en</strong> tant que relais pour unemultiplication <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’OZHM.De nombreuses questions rest<strong>en</strong>t irrésolues, certaines parce que l’OZHM était jusqu’ici <strong>en</strong> phase<strong>de</strong> construction, et d’autres, parce qu’elles sont inhér<strong>en</strong>tes à un dispositif d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui doit sans cesse adapter et améliorer sa stratégie. On peut néanmoins d’oreset déjà conclure que ce dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique est bi<strong>en</strong> loin <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> remettre à lavision naïve <strong>de</strong> la relation <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et décision. Il y a bi<strong>en</strong> un important travail <strong>de</strong> réflexionstratégique, <strong>de</strong> diagnostic, d’expérim<strong>en</strong>tation et d’adaptation pour élaborer et mettre <strong>en</strong> place unestratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (la même remarque étant valable pour l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>sdim<strong>en</strong>sions stratégiques), rôle qui est porté par l’unité <strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> la TdV.d) Bilan sur l’articulation <strong>de</strong>s registres stratégiques dans la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>l’OZHML’OZHM apparaît comme un dispositif d’action <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ampleur comparé aux autres projets<strong>de</strong> la TdV. Il est relativem<strong>en</strong>t rare que <strong>de</strong>s ONGE soi<strong>en</strong>t mandatées par <strong>de</strong>s comitésintergourv<strong>en</strong>em<strong>en</strong>taux pour réaliser un travail <strong>de</strong> suivi et d’évaluation <strong>de</strong>s politiques générales <strong>de</strong>spays concernés dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. La place d’expert <strong>de</strong>s ZH et soninvestissem<strong>en</strong>t dans l’initiative MedWet ont permi à la TdV d’obt<strong>en</strong>ir son mandat politique(Figure 5.6). Le dispositif requiert néanmoins un investissem<strong>en</strong>t lourd <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> ressourceshumaines (temps <strong>de</strong> travail) et financières ainsi que <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces diverses pour récolter etanalyser les données <strong>du</strong> système <strong>de</strong> suivi-évaluation mis <strong>en</strong> place. Ces ressources et compét<strong>en</strong>cesont été d’abord rassemblées <strong>en</strong> interne <strong>de</strong> la TdV. L’équipe constituée a alors <strong>en</strong>trepris un travail<strong>de</strong> réseau parallèle à la construction <strong>de</strong> l’outil sci<strong>en</strong>tifique et technique basé sur <strong>de</strong>s indicateursd’état et <strong>de</strong> t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZHM. Ces premières étapes ont pu être m<strong>en</strong>ées à bi<strong>en</strong>, mais ledispositif reste très dép<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>s ressources et compét<strong>en</strong>ces externes pour le développem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Ainsi, pour la voie d’action sci<strong>en</strong>tifico-militante, ces ressources etcompét<strong>en</strong>ces sont nécessaires à pour alim<strong>en</strong>ter le système <strong>de</strong> suivi-évaluation avec <strong>de</strong>s donnéesfiables pour les mettre <strong>en</strong> forme <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s cibles visée, ce qui nécessite <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>cesdans le domaine <strong>de</strong> l’action à l’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et politique. Cette théorie d’action ne seconcrétisera que si les relais <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong>s informations fournies par l’OZHM et si les acteursd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Méditerranée s’<strong>en</strong> saissis<strong>en</strong>t. Les floues qui persist<strong>en</strong>t sur la voie d’actionpolitico-administrative nous rappelle d’une part que la construction <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action<strong>en</strong>vironnemnetale <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s efforts d’analyse <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s acteurs qui les élabor<strong>en</strong>t et d’autre278


Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce - politiquepart que la modalité d’action est plus difficile à construire lorsqu’elle ne s’inscrit pas dans lessavoir-faire « traditionnel » <strong>de</strong> l’organisation.Construction <strong>de</strong> l’objet écologiqueConservation, restauration <strong>de</strong>sZHMMise <strong>en</strong> forme <strong>de</strong>s données pour« parler » <strong>de</strong>s ZHMMo<strong>de</strong> d’action publiqueOutils <strong>de</strong> suivi-évaluation <strong>de</strong>s ZHM(système d’indicateurs)Théories d’action : sci<strong>en</strong>tificomilitante/ politico-administrativePlace dans le secteurMandat politique MedWet (TdVreconnue au niveau méditerrané<strong>en</strong>)Augm<strong>en</strong>tation rapi<strong>de</strong> <strong>du</strong> réseau(légitimité sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV)Développem<strong>en</strong>t interneInvestissem<strong>en</strong>t (RH, financier)important pour la construction etpour les actions <strong>de</strong> l’OZHMFigure 5.6 : Le dispositif OZHM replacé dans les quatre registres stratégiques (source : auteur)5.3 Evaluer la contribution <strong>de</strong> l’OZHM à une meilleure prise <strong>en</strong>charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesDans la perspective <strong>de</strong> répondre plus loin dans la thèse à la façon dont on peut évaluer l’impact<strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale sur l’état écologique <strong>de</strong>s écosystèmes visés et <strong>de</strong> déterminer le rôleque peut jouer l’exercice <strong>de</strong> l’évaluation dans l’amélioration <strong>de</strong> l’action, nous examinons ici ce quesignifie évaluer un dispositif agissant à l’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et politique.L’OZHM n’est pas un dispositif d’action directe sur les ZHM. On ne peut alors pas évaluer sonimpact sur l’état matériel <strong>de</strong>s ZH. Une autre façon d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r son impact est d’évaluer sacontribution dans une prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM dans les décisions et dans la<strong>gestion</strong>. Si les interfaces sci<strong>en</strong>ce-politique constitu<strong>en</strong>t un sujet qui intéresse tant les chercheurs,c’est justem<strong>en</strong>t parce ce sont <strong>de</strong>s zones extrêmem<strong>en</strong>t complexes, dans leur définition et dans leurfonctionnem<strong>en</strong>t. Il est rarem<strong>en</strong>t possible d’avoir une traçabilité totale <strong>de</strong> l’information à la prise<strong>de</strong> décision, puis à l’intégration <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts (Haas, 1992 ; Le Prestre & Taravella, 2009).Cep<strong>en</strong>dant, le dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique n’avance pas à l’aveugle mais au contrairedans une réflexion stratégique sout<strong>en</strong>ue, qui vise d’une part à augm<strong>en</strong>ter ses capacités propres etd’autre part à agir pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM, <strong>en</strong> passant par les canaux jugés stratégiques.Pour évaluer la contribution <strong>de</strong> l’OZHM à cette meilleure prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s ZH, nous pouvonsrepartir <strong>de</strong>s stratégies d’action repérées <strong>en</strong> essayant <strong>de</strong> distinguer les résultats directs que l’on279


Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partieNous avons consacré cette <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse à l’exploration <strong>de</strong> la façon dont lesONGE peuv<strong>en</strong>t agir et agiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> situation réelle, à travers l’analyse fine d’actions et <strong>de</strong> projetsm<strong>en</strong>és par notre organisation focale, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ce travail, notre cadred’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE) comportant quatreregistres stratégiques – la construction <strong>de</strong> l’objet écologique, la mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale,le développem<strong>en</strong>t interne et la place dans le secteur – a été mobilisée d’abord comme un cadreheuristique pour découvrir les contraintes et les questions stratégiques concrètes qui se pos<strong>en</strong>t àl’ONGE lorsqu’elle est <strong>en</strong> situation. Ce cadre nous a <strong>en</strong>suite permis d’organiser l’analyse <strong>en</strong> cequ’il permet <strong>de</strong> saisir les articulations <strong>en</strong>tre ces quatre registres stratégiques que l’organisation doitfaire t<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>semble. Ces t<strong>en</strong>sions se situ<strong>en</strong>t elles-mêmes à <strong>de</strong>ux niveaux : 1) la façon dontl’ONGE acquiert, rassemble et organise ses ressources, autrem<strong>en</strong>t dit ses capacités pour agir ; 2)l’analyse <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle réalise elle-même pour développer ses actions. Par cettelecture stratégique <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> organisée par notre cadrage <strong>de</strong>l’Analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASGE), nous allons plus loin dans lacompréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> ce que font véritablem<strong>en</strong>t ces ONGE qui veul<strong>en</strong>t agir pour la conservation <strong>de</strong>la nature. Nous posons simultaném<strong>en</strong>t les prémisses d’un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique articulantl’élaboration <strong>de</strong> la stratégie, sa mise <strong>en</strong> œuvre et sa contribution au regard <strong>de</strong> l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé, dont la formalisation fera l’objet <strong>de</strong> la troisième partie <strong>de</strong> la thèse.Nous avions choisi <strong>de</strong> nous intéresser à plusieurs <strong>de</strong>s projets m<strong>en</strong>és par la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pourconnaître la diversité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action mis <strong>en</strong> œuvre par une seule et même organisation. Cechoix nous a <strong>en</strong> outre permis d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les problématiques stratégiques spécifiques qui soust<strong>en</strong>d<strong>en</strong>tchacun <strong>de</strong> ces mo<strong>de</strong>s d’action.Dans le chapitre 3, nous avons étudié l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale fondée sur le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la recherche sci<strong>en</strong>tifique pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Il apparaît que si la recherchesur les zones humi<strong>de</strong>s constitue déjà une action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> soi dans la mesure où ellepermet <strong>de</strong> connaître et <strong>de</strong> r<strong>en</strong>dre public cet objet écologique et les m<strong>en</strong>aces qui pès<strong>en</strong>t sur lui, elle283


Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partieconfère à l’organisation les capacités <strong>de</strong> développer une variété <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion connexesà l’activité sci<strong>en</strong>tifique. Son ancrage sci<strong>en</strong>tifique et territorial sont <strong>en</strong> effet <strong>de</strong>s ressourcesstratégiques primordiales lui permettant d’interv<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> façon continue et int<strong>en</strong>sive dans lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> camarguais, mais aussi à une échelle bi<strong>en</strong> plus large. Si la recherchesci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV doit répondre au double <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la qualité sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong>conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, l’analyse réalisée au plus près <strong>de</strong> l’activité sci<strong>en</strong>tifique nouspermet d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la façon dont celle-ci contribue à l’amélioration <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> etparfois même son impact sur les milieux et les espèces qui y sont inféodées. Cep<strong>en</strong>dant, le double<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’activité sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> reste une contrainte forte que l’organisationdoit toujours gérer au mieux, mais qui constitue <strong>en</strong> réalité <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> manœuvre quel’organisation peut exploiter stratégiquem<strong>en</strong>t. En effet, ces actions connexes à la recherche nedoiv<strong>en</strong>t pas être m<strong>en</strong>ées au détrim<strong>en</strong>t <strong>du</strong> support sci<strong>en</strong>tifique qui les a permis, même s’il existeune t<strong>en</strong>sion forte <strong>en</strong>tre la logique académique à laquelle l’activité sci<strong>en</strong>tifique doit se conformerpour être reconnue et l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t pour la conservation qui relève <strong>en</strong> partie <strong>de</strong> choix <strong>de</strong> sociétépas toujours fondés sur une démonstration sci<strong>en</strong>tifique qui serait à même <strong>de</strong> rallier tous lesacteurs à une même vision <strong>de</strong>s choses. En fonction <strong>de</strong>s situations, nous avons vu que la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong> adapte son positionnem<strong>en</strong>t dans le jeu pour poursuivre ses objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s.Dans le chapitre 4, nous avons au contraire eu affaire à une action limitée dans le temps et<strong>en</strong>gagée hors <strong>du</strong> territoire d’implantation <strong>de</strong> l’organisation. Nous avons pu mesurer à quel pointle cadre <strong>du</strong> projet – un programme euro-méditerrané<strong>en</strong> visant à promouvoir la <strong>gestion</strong> intégrée<strong>de</strong>s zones côtières (GIZC) sur le pourtour méditerrané<strong>en</strong> – qui a permis à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>de</strong>déployer son action sur cette zone humi<strong>de</strong> marocaine, constitue simultaném<strong>en</strong>t la principalecontrainte <strong>de</strong> projet, <strong>de</strong>puis l’élaboration <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action jusqu’à sa mise <strong>en</strong> œuvre. En effet,pour être éligible, la TdV <strong>de</strong>vait se conformer aux termes <strong>de</strong> l’appel d’offre <strong>du</strong> bailleurinstitutionnel, la commission europé<strong>en</strong>ne. Mais l’étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> projet nous a permis d’observer quel’adoption <strong>de</strong> la doctrine GIZC s’est substituée à l’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> cette zone humi<strong>de</strong>, etl’action développée a échoué à pénétrer ce système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle avait pourtant pour but <strong>de</strong>faire changer. Par opposition, ce piètre apport <strong>du</strong> projet conforte nos observations tirées <strong>de</strong>l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> plusieurs exemples d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>Camargue : la connaissance fine <strong>du</strong> terrain – écologique et socio-politique – , l’analyse <strong>du</strong> système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et l’analyse <strong>de</strong> la place <strong>de</strong> l’ONGE sont autant d’élém<strong>en</strong>ts indisp<strong>en</strong>sables pour quel’organisation puisse effectivem<strong>en</strong>t jouer le rôle qu’elle <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d se donner pour faire avancer la284


Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partieproblématique <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Bi<strong>en</strong> que ces conditions soi<strong>en</strong>t moinsfacilem<strong>en</strong>t réunies <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> son lieu d’implantation, le projet étudié semble montrer que c’estpourtant un préalable absolu pour agir. L’<strong>en</strong>jeu stratégique <strong>de</strong> l’ONGE est alors <strong>de</strong> trouver lesmoy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> les surmonter pour agir <strong>en</strong> Méditerranée. Cette question préoccupe les membres <strong>de</strong>l’organisation comme nous le verrons dans la troisième partie <strong>de</strong> la thèse.Enfin, la construction <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong>s Zones Humi<strong>de</strong>s Méditerrané<strong>en</strong>nes (Chapitre 5)initiée à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>de</strong>puis 2004 et plus concrètem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis 2009 nous a donnél’opportunité <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’organisation pouvait parv<strong>en</strong>ir à mettre <strong>en</strong> place undispositif se <strong>de</strong>vant d’être <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ampleur. La TdV s’appuie pour cela sur ses ressourcesacquises et r<strong>en</strong>forcées sur le long terme : sa crédibilité sci<strong>en</strong>tifique et technique, son réseau et sareconnaissance au niveau <strong>de</strong> la gouvernance méditerrané<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s liée à soninvestissem<strong>en</strong>t dans l’initiative MedWet. La mise <strong>en</strong> place d’un dispositif d’interface <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ceet politique à cette échelle régionale reste cep<strong>en</strong>dant un mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tion relativem<strong>en</strong>tnouveau pour l’organisation, et la façon dont on peut lui faire jouer pleinem<strong>en</strong>t son rôle qui estd’influ<strong>en</strong>cer les décisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM reste le difficile questionnem<strong>en</strong>tque l’organisation doit m<strong>en</strong>er <strong>en</strong> même temps qu’elle construit le dispositif. L’analyse stratégiqueincite à expliciter au maximum les théories d’action et à ré<strong>du</strong>ire les ambiguïtés causalespermettant <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s repères pour ancrer l’action malgré la complexité <strong>du</strong> système danslequel le dispositif doit agir (la gouvernance <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s à l’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne).Nous avons id<strong>en</strong>tifié <strong>de</strong>ux théories d’action que l’équipe construit <strong>de</strong> front : une logiquesci<strong>en</strong>tifico-militante, qui consiste à apporter <strong>de</strong> l’information tangible – dont la fiabilitésci<strong>en</strong>tifique serait reconnue – et mise <strong>en</strong> forme pour pro<strong>du</strong>ire un éclairage nouveau sur leproblème <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM. Dans cette perspective, l’<strong>en</strong>jeu est d’améliorer le référ<strong>en</strong>tielnormatif, les cadres internationaux autour <strong>de</strong>s ZHM et mettre les données mises <strong>en</strong> forme àdisposition <strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> manière à augm<strong>en</strong>ter leur capacité <strong>de</strong> portage <strong>de</strong> cesobjectifs normatifs. La secon<strong>de</strong> logique est politico-administrative, visant à ce que les ZH soi<strong>en</strong>tintégrées dans les planifications <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts compartim<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l’appareil administratif. Au sta<strong>de</strong><strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t où était le dispositif lorsque nous l’avons étudié, nous n’avons déjà pu repérerces théories d’action montrant que l’OZHM pourrait jouer sur les interfaces sci<strong>en</strong>ces et politiquesau niveau <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong>s ZHM, mais aussi à <strong>de</strong>s échelles plus locales pour pénétrer lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. La tra<strong>du</strong>ction pratique <strong>de</strong> ces théories reste cep<strong>en</strong>dant à réaliser, maisl’analyse <strong>de</strong>s capacités nous a révélé leur insuffisance. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> se met alors dans une285


Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partieperspective <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> long terme dans laquelle la priorité est d’asseoir la légitimitésci<strong>en</strong>tifique et technique <strong>de</strong> l’OZHM qui va déterminer sa crédibilité future.A travers ces cas d’étu<strong>de</strong>, nous avons pu voir que les ressources dont dispose l’organisation sontdéterminantes <strong>de</strong> la place et <strong>du</strong> rôle qu’elle peut jouer dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elleambitionne d’infiltrer et <strong>de</strong> transformer. La réflexion stratégique m<strong>en</strong>ée par l’ONGE peut êtrevue comme une analyse mettant <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion l’analyse interne <strong>de</strong> ses capacités (place et rôle qu’ellepeut jouer) et l’analyse externe <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> la façon dont elle doit déployer sonaction (place et rôle qu’elle veut jouer), dans une cohér<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble <strong>en</strong>tre les quatre registresstratégiques. A titre illustratif, le tableau (Tableau conclusion partie 2) prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong> façonsynthétique les cas d’étu<strong>de</strong> abordés dans cette partie <strong>en</strong> faisant apparaître les articulationsnécessaires <strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions (« veut ») et les capacités (« peut ») pour les quatre registresstratégiques.Tableau conclusion partie 2 : Articulation <strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions (« veut ») et les capacités (« peut ») pour lesquatre registres stratégiques pour la recherche comme action pour la conservation <strong>de</strong>s ZH, le projetMoulouya au Maroc et la construction <strong>de</strong> l’OZHMObjetécologiqueMo<strong>de</strong>d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLogiquesci<strong>en</strong>tificomilitanteDéveloppem<strong>en</strong>tinternePlace dansle secteurRecherches Projet Estuaire MoulouyaOZHMCamargue(SMAP Maroc)« Veut » « Peut » « Veut » « Peut » « Veut » « Peut »Conservation <strong>de</strong>sfonctionnalités etbiodiversité <strong>du</strong> Delta<strong>du</strong> RhôneExpertises, influ<strong>en</strong>ce<strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>territoire,Gestion directe ZHCompét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques etconnaissance <strong>du</strong>système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>CamargueActeur territorial,expertise sci<strong>en</strong>tifiquereconnueConservation<strong>de</strong> l’estuaire <strong>de</strong>la Moulouya(fonctionnalité,biodiversité)Améliorer la<strong>gestion</strong>Développer<strong>de</strong>s expéri<strong>en</strong>cessur <strong>de</strong>s sitesméditerrané<strong>en</strong>sActeurd’ « accompagnem<strong>en</strong>t» <strong>de</strong>changem<strong>en</strong>ts<strong>en</strong> faveur d’unemeilleure<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>ssites ZHEchecApplicationd’une« démarcheGIZC)Connaissances<strong>de</strong>s systèmes<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>superficiellesNiveau médit :spécialiste ZHreconnueNiveau local :inconnueConservationZHM : prise <strong>en</strong>charge <strong>de</strong>sZHM dans lesdécisions et la<strong>gestion</strong>Logique sc. -militante /politicoadministrativeProjet etéquipe OZHMbi<strong>en</strong> connectésavec les autreséquipesPart<strong>en</strong>ariatlarge et actif,porteur <strong>de</strong>l’OZHMMise <strong>en</strong> forme<strong>de</strong> l’objet ZHMpar undispositif <strong>de</strong>suivi-évaluationCréation d’uneéquipe OZHMqui développeune expertisedans lessystèmes <strong>de</strong>suivi-évaluationZHMElargissem<strong>en</strong>t<strong>du</strong> réseau(organismessci<strong>en</strong>tificotechniques)Difficulté àmonter unpart<strong>en</strong>ariat actif286


Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partieCette réflexion doit donc nécessairem<strong>en</strong>t être m<strong>en</strong>ée pour chacune <strong>de</strong>s actions concrètes qu’elleva mettre <strong>en</strong> œuvre. Mais l’organisation doit égalem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>ser et développer sa stratégie <strong>de</strong> façoncohér<strong>en</strong>te et qui articule <strong>de</strong> manière optimale les différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion. Comm<strong>en</strong>t s’ypr<strong>en</strong>d-t-elle et quel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique peut sout<strong>en</strong>ir cet exercice ? L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’articulationglobal / opérationnel <strong>de</strong> la stratégie sera l’objet <strong>de</strong> la troisième partie où nous retrouverons cettet<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions et les capacités <strong>de</strong> l’ONGE vis-à-vis <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.287


Troisième partieVers un cadrage pour sout<strong>en</strong>ir la réflexionstratégique, <strong>de</strong>s actions à leurs impactsécologiquesPour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t agiss<strong>en</strong>t et peuv<strong>en</strong>t agir les ONGE, il faut impérativem<strong>en</strong>tancrer l’analyse là où l’action est déployée, c’est-à-dire dans <strong>de</strong>s situations concrètes. C’est letravail que nous avons exposé dans la partie précéd<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la thèse. Cep<strong>en</strong>dant, comme touteorganisation, l’ONGE ne peut raisonner et mettre <strong>en</strong> œuvre ses actions <strong>de</strong> manière indép<strong>en</strong>danteles unes <strong>de</strong>s autres et sans cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre elles. Sa réflexion et sa pratique <strong>de</strong> la stratégie sejou<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t à l’échelle globale <strong>de</strong> l’organisation qu’il nous faut maint<strong>en</strong>ant étudier, <strong>de</strong>manière à la sout<strong>en</strong>ir face à ce perpétuel questionnem<strong>en</strong>t qui se pose à elle : comm<strong>en</strong>t agir pourl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t – pour obt<strong>en</strong>ir que les ZHM soi<strong>en</strong>t conservées – et comm<strong>en</strong>t cette action peutelleêtre r<strong>en</strong>forcée ? Pour cela, cette partie visera à aller au bout <strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> ce qu’estla stratégie <strong>de</strong> l’ONGE – <strong>de</strong> quelle façon est-elle élaborée et mise <strong>en</strong> pratique ? – tout <strong>en</strong>intro<strong>du</strong>isant <strong>de</strong>s cadrages susceptibles <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir son r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t.La façon dont la stratégie est construite à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation fait l’objet <strong>du</strong> chapitre 6.Nous nous appuyons <strong>en</strong> cela sur la planification stratégique pour le programme quinqu<strong>en</strong>nal2011-2015 qui a eu lieu à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>en</strong> 2009 et 2010. Etant un mom<strong>en</strong>t spécifiquem<strong>en</strong>tconsacré à l’élaboration stratégique, elle constitue à la fois un processus délimité facilitantl’ancrage <strong>de</strong> l’analyse et un mom<strong>en</strong>t propice à la restitution comme procédé <strong>de</strong> recherche etd’interv<strong>en</strong>tion. A cette échelle globale <strong>de</strong> l’organisation, nous retrouverons les quatre registresstratégiques <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation : les289


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleréflexions plus ou moins collectives qui ont eu lieu p<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong> se situ<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> dans l’unou l’autre <strong>de</strong> ces registres et souv<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre plusieurs <strong>de</strong> ces registres. Nousobserverons égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux visées implicites : l’élaboration stratégique pour r<strong>en</strong>forcer lescapacités d’action et l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie pour r<strong>en</strong>forcer l’action elle-même. L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>sprocessus d’élaboration stratégique sera donc organisée selon ce cadrage et nous pourrons fairel’état <strong>de</strong>s questions qui se pos<strong>en</strong>t à l’organisation sous chacun <strong>de</strong> ces angles. Nous pourrons alorscompr<strong>en</strong>dre les réponses qu’elle se donne et égalem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tifier les zones d’ombre qui persist<strong>en</strong>tau terme <strong>de</strong> la planification, que l’organisation <strong>de</strong>vra veiller à maint<strong>en</strong>ir au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> laconstruction collective p<strong>en</strong>dant la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme. Nous verrons <strong>en</strong> effet quel’élaboration stratégique est un processus continu qui ne se passe pas uniquem<strong>en</strong>t dans l’espace<strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> planification, mais qui se poursuit au contraire dans le temps <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong>œuvre.Ce n’est que forte <strong>de</strong> la compréh<strong>en</strong>sion plus fine <strong>de</strong>s composantes <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la TdV, <strong>de</strong> lafaçon dont elle la construit et la met <strong>en</strong> œuvre, que nous pourrons <strong>en</strong>visager <strong>de</strong> la relier à sesimpacts sur les ZHM, qui sont au cœur <strong>de</strong>s préoccupations <strong>de</strong> l’organisation. Dans le chapitre 7,nous analysons les implications <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> l’évaluation dans l’ONGE. A travers l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>cette pratique à la TdV, nous retrouverons les <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> l’évaluation :celle <strong>du</strong> contrôle <strong>de</strong> la bonne <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> l’activité sci<strong>en</strong>tifique et technique pour la conservation<strong>de</strong>s ZHM ; celle <strong>de</strong> l’analyse rétrospective <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie dans une dynamique<strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action. Cette pratique constitue un <strong>en</strong>jeu à la TdV dans la mesure où celle-cicherche à aller plus loin dans l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> son action, au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> sa recherche sci<strong>en</strong>tifique qui était le principal critère d’évaluation jusqu’ici. Nousnous attacherons ainsi à démêler les fils <strong>de</strong> cette double dim<strong>en</strong>sion fondatrice <strong>de</strong> l’évaluation dansun contexte d’évolution <strong>de</strong> la pratique évaluative. Nous verrons que les organes <strong>de</strong> gouvernancequi ont pour rôle <strong>de</strong> contrôler l’activité <strong>de</strong> la TdV, mais aussi <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir son développem<strong>en</strong>t,sont favorables aux évolutions sans att<strong>en</strong>dre que les membres <strong>de</strong> l’équipe dépass<strong>en</strong>t lesirré<strong>du</strong>ctibles difficultés méthodologiques <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts tangibles sur les ZHM. Cesdifficultés méthodologiques nous inciterons plutôt à nous rec<strong>en</strong>trer sur la façon dont la pratique<strong>de</strong> l’évaluation peut s’offrir comme un espace-temps particulier <strong>du</strong> processus continu <strong>de</strong> réflexionstratégique. C’est dans cette perspective que nous terminerons ce chapitre 7, proposant un cadred’évaluation capable d’accueillir les stratégies d’action dans toute la complexité que nous luiaurons trouvée tout au long <strong>de</strong> la thèse.290


Chapitre 6La planification stratégique : mom<strong>en</strong>t pour laréflexion et le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions futures6.1 Démarche pour analyser et sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>............ 2926.2 Stratégie d'augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités : r<strong>en</strong>forcer les ressources et les capacités pouratteindre les objectifs ...................................................................................................................... 3036.3 Stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : vers une stratégie au s<strong>en</strong>s fort .............................. 3316.4 Conclusions sur la planification stratégique comme mom<strong>en</strong>t clé pour bâtir la stratégied’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale............................................................................................................. 376Dans la partie précéd<strong>en</strong>te, nous avons pu voir que chaque projet mis <strong>en</strong> œuvre par la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong> requérait une analyse stratégique spécifique, visant à la fois à rassembler les ressourcesnécessaires à ses actions et à id<strong>en</strong>tifier le mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tion à m<strong>en</strong>er selon la problématique etl’organisation <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. La stratégie <strong>de</strong> la TdV ne peut cep<strong>en</strong>dant se ré<strong>du</strong>ire àl’addition <strong>de</strong> ces stratégies spécifiques qui sont <strong>en</strong> outre interdép<strong>en</strong>dantes comme le montr<strong>en</strong>t lesexemples d’actions développés plus haut. Nous avons <strong>en</strong> effet pu observer que dans chacune <strong>de</strong>ses interv<strong>en</strong>tions, l’organisation <strong>de</strong>vait faire t<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>semble les quatre dim<strong>en</strong>sions stratégiques quisont la construction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, maisaussi le développem<strong>en</strong>t interne et la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation. Pour saisir lacohér<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> ces stratégies spécifiques, le mom<strong>en</strong>t est v<strong>en</strong>u d’ét<strong>en</strong>dre l’analyse àl’organisation comme <strong>en</strong>tité unifiée. Comm<strong>en</strong>t la TdV définit-elle ses objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ? Comm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>visage-t-elle l’articulation <strong>de</strong> ses différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action pour291


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleles atteindre ? Comm<strong>en</strong>t gère-t-elle les arbitrages <strong>en</strong>tre les actions <strong>en</strong>visagées et les ressourcesdont elle dispose pour les mettre <strong>en</strong> œuvre ? Quel raisonnem<strong>en</strong>t peut sout<strong>en</strong>ir cette réflexionstratégique pour r<strong>en</strong>forcer sa mise <strong>en</strong> œuvre ?Ce sont les questions auxquelles ce chapitre s’attachera à répondre, à partir <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> laréflexion stratégique m<strong>en</strong>ée dans l’organisation, tout <strong>en</strong> confrontant cette réflexion à la réalité <strong>de</strong>sa mise <strong>en</strong> œuvre étudiée dans la partie précéd<strong>en</strong>te.6.1 Démarche pour analyser et sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique <strong>de</strong>la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>6.1.1 Démarche <strong>de</strong> recherche : la planification stratégique comme « espacetemps» pour la réflexion stratégiqueLa démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ce travail est ancrée dans la mise <strong>en</strong>regard <strong>de</strong>s processus et <strong>du</strong> cont<strong>en</strong>u stratégiques.Les plans stratégiques <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> sont pris comme référ<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> cont<strong>en</strong>u stratégique.Nous nous focalisons principalem<strong>en</strong>t sur le plan quinqu<strong>en</strong>nal 2006-2010 – dans lequels’inscriv<strong>en</strong>t les actions étudiées dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse – et sur le plan 2011-2015 –dont l’élaboration est ici étudiée dans le détail. Les objectifs notifiés dans ces plans serv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>repères considérés comme la stabilisation temporaire d’une négociation interne sur plusieursdim<strong>en</strong>sions stratégiques. Ces objectifs sont <strong>en</strong> effet <strong>de</strong> natures diverses : les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, les objectifs d’action, <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces, <strong>de</strong>s ressources financières et part<strong>en</strong>ariales. L’analyse approfondie <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux plansquinqu<strong>en</strong>naux successifs permet <strong>de</strong> saisir l’évolution formelle <strong>du</strong> cont<strong>en</strong>u stratégique.Pour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les évolutions <strong>en</strong>tre les <strong>de</strong>ux plans quinqu<strong>en</strong>naux ont pu avoir lieu,l’analyse <strong>de</strong>s processus stratégiques est indisp<strong>en</strong>sable. La perspective pratique <strong>de</strong> la stratégie(Golsorkhi, 2006 ; Rouleau et al., 2007a) nous ai<strong>de</strong> à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les processus stratégiquescomme l’articulation <strong>de</strong> la pratique 164 et <strong>de</strong>s pratiques 165 . La pratique <strong>de</strong> la TdV a été amplem<strong>en</strong>tdéveloppée à travers l’analyse <strong>de</strong> ses différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action dans la partie 2. Les pratiques ontégalem<strong>en</strong>t été abordées dans ces cas d’étu<strong>de</strong>, notamm<strong>en</strong>t pour compr<strong>en</strong>dre quelles questions se164 La pratique : la stratégie <strong>en</strong> tant que flux d’activité <strong>en</strong> situation et accompli socialem<strong>en</strong>t ayant <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>cessur les ori<strong>en</strong>tations et la survie <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise (Seidl et al., 2006).165 Les pratiques : ressources cognitives, comportem<strong>en</strong>tales, procé<strong>du</strong>rales, discursives, motivationnelles et physiquesqui sont combinées, coordonnées et adaptées pour construire la pratique (ibid.).292


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerpos<strong>en</strong>t et comm<strong>en</strong>t elles sont résolues par les acteurs dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions. Dans cechapitre, les pratiques seront plus que prises <strong>en</strong> compte : elles constitueront la voie d’<strong>en</strong>trée pourl’analyse <strong>de</strong>s processus stratégiques. Et parmi les pratiques, il s’agira d’observer <strong>en</strong> particulier ceque les auteurs <strong>de</strong> la perspective pratique appell<strong>en</strong>t les pratiques stratégiques spécifiques (etformelles : la planification stratégique, les évaluations annuelles, les ateliers stratégiques, lesdiscours associés) (Whittington, 2006), notamm<strong>en</strong>t la planification stratégique qui a eu lieu <strong>en</strong>2009-2010 pour l’élaboration <strong>du</strong> plan 2011-2015.Dans le domaine <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique, la « planification » conti<strong>en</strong>t une significationparticulière qui ne peut être ignorée car ce s<strong>en</strong>s ti<strong>en</strong>t justem<strong>en</strong>t au fait que « la planificationstratégique » est une <strong>de</strong>s premières écoles <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée qui ont participé à l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cettediscipline, dont H. Ansoff est souv<strong>en</strong>t cité comme un <strong>de</strong>s principaux fondateurs avec sonouvrage qui a fait date : Corporate strategy (1965). Cette école <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée <strong>en</strong>visageait la stratégie tellequ’elle se manifestait à l’époque dans les <strong>en</strong>treprises où les modèles rationnels connaissai<strong>en</strong>t leurapogée. La stratégie était construite par un escadron <strong>de</strong> planificateurs à la formation très poussée,travaillant selon <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res et analyses formelles complétées par <strong>de</strong>s kyrielles <strong>de</strong> chiffres. Lesstratégies construites par ces processus <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite être appliquées avec une att<strong>en</strong>tionminutieuse aux objectifs, aux budgets, aux programmes et aux divers plans opérationnels. Cesapproches ont cep<strong>en</strong>dant été délaissées dans les années 1980, tant par les pratici<strong>en</strong>s que par leschercheurs <strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique. H. Mintzberg s’est porté tête <strong>de</strong> file <strong>de</strong> ce courantcritique <strong>de</strong> la planification <strong>en</strong> synthétisant et formalisant les argum<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> sa défaveur dans sonouvrage The rise and fall of strategic planning (1994). Il associe cette sénesc<strong>en</strong>ce à plusieurs illusionsinhér<strong>en</strong>tes au raisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la planification qui ne ti<strong>en</strong>t plus dans un contexte d’imprévisibilitéet <strong>de</strong> complexification <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises, comme l’illusion <strong>de</strong> laprédétermination qui fera p<strong>en</strong>ser que la stratégie pourrait être stable <strong>en</strong>tre la planification et lamise <strong>en</strong> œuvre, ou l’illusion mécaniste qui ignore l'intuition, la créativité, et les processusspontanés d’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> stratégies (Mintzberg, 1994 ; Mintzberg et al., 1999).Depuis, les écoles <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sée focalisées sur le caractère émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie ayant égalem<strong>en</strong>tmontré leurs limites, la critique <strong>de</strong> la planification t<strong>en</strong>d à s’épuiser dans la recherche d’un équilibre<strong>en</strong>tre le plan et l’émerg<strong>en</strong>ce. Certains auteurs propos<strong>en</strong>t simplem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> s’<strong>en</strong> remettre auxpratiques effectives <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises : elles font – toujours – <strong>de</strong> la planification stratégique(Martinet, 2001 ; Whittington & Cailluet, 2008 ; Cailluet, 2008). Cep<strong>en</strong>dant les pratiques désignéespar ce terme n’ont bi<strong>en</strong>tôt plus ri<strong>en</strong> <strong>en</strong> commun avec celles décrites par Ansoff. Ces auteursindiqu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet que « les ‘planificateurs’, d'un rôle d'analyse et <strong>de</strong> contrôle souv<strong>en</strong>t hérité <strong>de</strong>sorigines budgétaires <strong>de</strong> la planification, se sont véritablem<strong>en</strong>t transformés <strong>en</strong> animateurs <strong>de</strong>s293


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleéquipes chargées <strong>de</strong> la formulation <strong>de</strong> la stratégie par le biais <strong>de</strong>s plans » (Cailluet, 2008). Ces« planificateurs » peuv<strong>en</strong>t même simplem<strong>en</strong>t avoir disparu, la pratique <strong>de</strong> la planification rev<strong>en</strong>antaux directions ou unités opérationnelles (Martinet, 2001 : 185). Ainsi, « la planification n'est pasmorte, elle s'est transformée, par les mots, les outils et les pratiques » (Cailluet, 2008). C’est <strong>en</strong>effet davantage une transformation <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> la planification qu’une disparition qui estobservée par ces auteurs que nous rejoignons par nos propres observations : avec l’abandon <strong>de</strong> la« fonction planification » dans les <strong>en</strong>treprises, les matrices disparaiss<strong>en</strong>t et « les outils sontdavantage pris pour ce qu'ils sont : c'est-à-dire <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s au raisonnem<strong>en</strong>t, à l'analyse, voire àl'imagination, qui ne sont pas révérés <strong>de</strong> façon dogmatique » (Martinet, 2001 : 185). Laplanification stratégique pr<strong>en</strong>d la forme <strong>de</strong> support <strong>de</strong> la réflexion stratégique au bénéfice d’unereconnexion <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong> l’action. Sans imposer <strong>de</strong> définition catégorique <strong>de</strong> la réflexionstratégique, J.M. Liedtka (1998) <strong>en</strong> propose néanmoins quelques caractéristiques fondam<strong>en</strong>tales :une modélisation systémique pour (re)construire les schémas m<strong>en</strong>taux <strong>de</strong> pot<strong>en</strong>tialisation <strong>de</strong>l'<strong>en</strong>treprise ; une focalisation persévérante sur la création <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s et sur l'int<strong>en</strong>tion stratégique ;l'activation d'une intellig<strong>en</strong>ce opportuniste et souple ; l'aptitu<strong>de</strong> à composer les temps <strong>de</strong> l'action,<strong>de</strong> la réaction et <strong>de</strong> la stratégie ; une attitu<strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> génération et <strong>de</strong> test d'hypothèses.Selon A-C. Martinet (2001), pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> cet exercice difficile, « les indivi<strong>du</strong>s gagn<strong>en</strong>t à être<strong>en</strong>cadrés, stimulés, mis <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion par un contexte et <strong>de</strong>s dispositifs adéquats » :La réalité <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong>s organisations montre que les « tâches opérationnelles repouss<strong>en</strong>t<strong>en</strong> perman<strong>en</strong>ce la réflexion stratégique et une certaine urg<strong>en</strong>ce semble nécessaire à ladécision ». « La procé<strong>du</strong>re <strong>de</strong> planification joue à cet égard un rôle relativem<strong>en</strong>tirremplaçable. En instituant <strong>de</strong>s « espaces-temps », un cal<strong>en</strong>drier et <strong>de</strong>s échéances précis,<strong>de</strong>s épreuves auxquelles doiv<strong>en</strong>t se soumettre différ<strong>en</strong>ts niveaux hiérarchiques –prés<strong>en</strong>ter et déf<strong>en</strong>dre le plan pour le niveau n-1, le compr<strong>en</strong>dre et le discuter pour l<strong>en</strong>iveau n –, la procé<strong>du</strong>re peut stimuler incontestablem<strong>en</strong>t la réflexion stratégique » (ibid. :188).Pour notre problématique c<strong>en</strong>trée sur la façon dont peuv<strong>en</strong>t agir les ONGE pour améliorer l’étatécologique <strong>de</strong>s écosystèmes, nous avons adopté le cadre <strong>de</strong> l’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la GestionEnvironnem<strong>en</strong>tale qui permet d’organiser l’analyse <strong>de</strong> façon à faire t<strong>en</strong>ir l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la stratégie etson apport au regard <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation. Ce cadre nous ai<strong>de</strong> donc à repérer et gar<strong>de</strong>rparmi tous les matériaux que nous avons recueilli ceux qui font s<strong>en</strong>s vis-à-vis <strong>de</strong> notreproblématique. Ce cadre nous sert simultaném<strong>en</strong>t à pro<strong>du</strong>ire une lecture d’accompagnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’organisation dans sa réflexion stratégique pour le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son impact sur l’état <strong>de</strong>sécosystèmes. Pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> cette démarche, nous avons adopté une approche constructivisteaxée sur le raisonnem<strong>en</strong>t stratégique – raisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation focale comme matière à294


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerpartir <strong>de</strong> laquelle le chercheur construit le raisonnem<strong>en</strong>t stratégique à restituer. Cherchant alors àsaisir la réflexion stratégique à la TdV, nous nous appuyons largem<strong>en</strong>t sur cette pratiquespécifique <strong>de</strong> la planification stratégique, dans sa perspective <strong>de</strong> support à la réflexion que nousv<strong>en</strong>ons d’esquisser.Ainsi, l’analyse visant à retracer le cheminem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la réflexion ayant m<strong>en</strong>é aux choix formalisésdans le plan quinqu<strong>en</strong>nal doit articuler les processus stratégiques et le cont<strong>en</strong>u stratégique. Ladémarche mise <strong>en</strong> œuvre à cet effet peut être schématisée par un tableau à <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>trées (Tableau6.1) : les processus stratégiques (les pratiques et la pratique) et le niveau d’analyse <strong>de</strong>s croisem<strong>en</strong>ts<strong>en</strong>tre les processus et le cont<strong>en</strong>u (<strong>de</strong>scription et interprétation).Tableau 6.1 : Schéma d’analyse <strong>de</strong> la réflexion et <strong>de</strong> l’élaboration stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Cont<strong>en</strong>uProcessusLes pratiques(Planification stratégique 2011-2015)Description • Observation <strong>de</strong>s débats, discours,réflexions formelles m<strong>en</strong>ant auxchoix stratégiques• Observation <strong>de</strong>s questionssoulevées <strong>en</strong> interne pourcompr<strong>en</strong>dre l’évolution <strong>en</strong>tre lesplans stratégiques 2006-2010 et2001-2015Interprétation • Les questions (problèmes) ret<strong>en</strong>uespour l’analyse sont celles qui fontl’objet d’une prise <strong>en</strong> mainspécifique par l’organisation et s<strong>en</strong>sau regard <strong>de</strong> notre problématique<strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale• Le cadre <strong>de</strong>s 4 registresstratégiques <strong>de</strong> l’ONGE permet lamise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>sions quiles reli<strong>en</strong>tLa pratique(Actions mises <strong>en</strong> œuvre par la TdV)• Analyse <strong>de</strong> la façon dont estconvoquée l’expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> lapratique (<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> 2006-2010)dans la réflexion stratégique :comm<strong>en</strong>t elle influ<strong>en</strong>ce laformulation <strong>de</strong>s nouveauxobjectifs• Analyse appuyée sur notre propreanalyse <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> lapério<strong>de</strong> 2006-2010 (Partie 2) :cohér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre les échelles(objectifs globaux et capacitésd’action <strong>en</strong> pratique)Notre schéma interprétatif est à prés<strong>en</strong>t outillé, il se compose <strong>de</strong> trois approches indiquées dansla <strong>de</strong>rnière ligne <strong>du</strong> tableau 6.1 :- La construction <strong>de</strong>s données par l’observation et la <strong>de</strong>scription <strong>du</strong> processus <strong>de</strong> planificationstratégique nous permet d’id<strong>en</strong>tifier les questions principales et les problèmes considérés commetels par l’organisation. Ces questions et problèmes sont ceux apparus <strong>de</strong> façon récurr<strong>en</strong>te dans lesprocessus, voire ayant fait l’objet d’une démarche spécifique pour leur résolution (réunionspécifique, pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts) par l’organisation.295


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale- Notre cadre d’analyse t<strong>en</strong>ant les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE utilisée comme cadreheuristique pour l’analyse <strong>de</strong>s actions a montré sa conv<strong>en</strong>ance au contact <strong>de</strong> ces cas concrets. Ellepeut à prés<strong>en</strong>t être mobilisée pour expliciter la stratégie <strong>de</strong> l’organisation, <strong>en</strong> mettant <strong>en</strong> visibilitéà la fois ses dim<strong>en</strong>sions critiques (dans le s<strong>en</strong>s indisp<strong>en</strong>sable) et surtout les t<strong>en</strong>sions existant dansleur articulation.- Les objectifs et les choix stratégiques <strong>de</strong> l’organisation doiv<strong>en</strong>t être cohér<strong>en</strong>ts au regard <strong>de</strong>squatre registres stratégiques, mais aussi au regard <strong>de</strong> la réalité <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions.L’analyse <strong>de</strong> la stratégie d’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la TdV est pour cela appuyée sur notre analyse <strong>de</strong> casconcrets (Partie 2).Cette partie <strong>de</strong> la thèse est construite par la méthodologie que nous avons qualifiée <strong>de</strong> phaseréflexive dans notre prés<strong>en</strong>tation générale <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s au chapitre 2. Nous avons <strong>en</strong> effetexpliqué que le processus <strong>de</strong> planification stratégique était pour nous une opportunité <strong>de</strong> passer àun échange plus symétrique avec les acteurs <strong>de</strong> la TdV, dans un premier temps pour approfondirl’analyse (restitution comme instrum<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>quête 166 ) pour dans un second temps pouvoir <strong>en</strong>restituer les conclusions aux intéressés (restitution comme mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tion). L’« espacetemps» ouvert à la réflexion stratégique par le processus <strong>de</strong> planification l’est égalem<strong>en</strong>t pour laconstruction <strong>de</strong>s données et l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’analyste.Dans cette prés<strong>en</strong>tation générale <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche (Chapitre 2), nous avons parléd’une observation assi<strong>du</strong>e <strong>de</strong> tous les événem<strong>en</strong>ts liés à la planification stratégique (réunionscollectives ou à comité restreint, exercices collectifs pour la construction <strong>du</strong> programme 2011-2015) afin d’id<strong>en</strong>tifier les questions et les problèmes. Cette observation a rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t pris latournure <strong>de</strong> ce que nous avons appelé la participation avec observation <strong>de</strong> cette participation. Cetteparticipation visait notamm<strong>en</strong>t à suivre le fil <strong>de</strong> la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s problèmes id<strong>en</strong>tifiés parl’organisation, év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> les rappelant aux acteurs dans l’int<strong>en</strong>tion d’obt<strong>en</strong>ir les réponsesles plus abouties possible et <strong>en</strong> participant à la réflexion collective.De même, les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s qualitatifs ont été conc<strong>en</strong>trés sur les questions ou problèmes id<strong>en</strong>tifiésafin <strong>de</strong> saisir les visions propres <strong>de</strong>s acteurs concernés pour <strong>en</strong>suite les confronter dans l’analyse.Des discussions « continues » ont été établies avec les animateurs <strong>de</strong> la réflexion stratégique,notamm<strong>en</strong>t la direction mais aussi les chefs <strong>de</strong>s trois départem<strong>en</strong>ts.Enfin, l’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts a été mobilisée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux manières. La première est celle évoquéeplus haut concernant le cont<strong>en</strong>u pris <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>ce : il s’agit simplem<strong>en</strong>t d’extraire les objectifs166 Les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> restitution sont détaillés à la section 2.4 et 2.5 <strong>du</strong> chapitre 2, sur le modèle <strong>de</strong> la démarche d’analysestratégique <strong>de</strong> M. Crozier et E. Friedberg (Friedberg, 1997[1993] : 322).296


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forceraffichés (dans les différ<strong>en</strong>ts registres) dans les plans stratégiques. Mais il s’agit surtout <strong>de</strong> s’<strong>en</strong>servir comme ancrage pour la discussion avec les acteurs. Le travail sur docum<strong>en</strong>t a <strong>en</strong> effet étéun moy<strong>en</strong> privilégié pour la restitution tant dans sa dim<strong>en</strong>sion d’<strong>en</strong>quête que d’interv<strong>en</strong>tion, àtravers la proposition <strong>de</strong> notes <strong>de</strong> notre propre initiative ou d’am<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts apportés sur lesdocum<strong>en</strong>ts pro<strong>du</strong>its par les acteurs. Cette métho<strong>de</strong> nous a notamm<strong>en</strong>t permis, comme nous leverrons dans ce chapitre, <strong>de</strong> proposer un cadre d’élaboration <strong>de</strong> la stratégie au s<strong>en</strong>s fort pour laconstruction <strong>du</strong> programme d’actions, c’est-à-dire un cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets incitant àexpliciter les forces qui sont responsables <strong>de</strong>s mécanismes à l’origine <strong>de</strong>s dégradations <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s que l’organisation se donne pour objectif d’infléchir (précision <strong>de</strong>s cibles, <strong>de</strong>schangem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> pratiques att<strong>en</strong><strong>du</strong>s et <strong>de</strong>s actions pour y parv<strong>en</strong>ir).6.1.2 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et <strong>de</strong>sobjectifs à l’échelle <strong>de</strong> l’organisationLa <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> organise son activité à partir <strong>de</strong> plans quinqu<strong>en</strong>naux <strong>de</strong>puis 1981, les plansstratégiques 2006-2010 et 2011-2015 étant respectivem<strong>en</strong>t les 6 e et 7 e plans. La planificationstratégique comm<strong>en</strong>ce 2 ans avant sa date <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre. L’échéancier (Tableau 6.2) offre unevue d’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la planification stratégique (<strong>de</strong> 2009 et 2010).Tableau 6.2 : Echéancier <strong>de</strong> la planification stratégique pour le plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015 (source :docum<strong>en</strong>ts internes <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, 2009)2009 2010JanvFevMarsAvrilMaiJuinJuilAoutSeptActualisation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeuxet révision cadrestratégiqueStructuration équipes etprogrammeTdR et 1ère proposition<strong>de</strong> programmeProposition cadrestratégique etprogramme CS et CARédaction projets etbudget 2011-2015Stratégie part<strong>en</strong>ariat etcommunicationTdR et évaluation fin <strong>de</strong>programmeDiscussion programme &budget CS et CATdR : Termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour les thèmes et les projets composant le programme (programme = 3 thèmes – oudépartem<strong>en</strong>ts – compr<strong>en</strong>ant chacun <strong>de</strong> 2 à 4 projets). Termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour l’évaluation <strong>du</strong> programme 2006-2010 qui est notée ici car elle est solidaire <strong>de</strong>s TdR <strong>du</strong> programme.OctNovDécJanvFevMarsAvrilMaiJuinJuilAoutSeptOctNovDéc297


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleNous ne r<strong>en</strong>trons donc pas ici dans le détail <strong>de</strong> la manière dont sont résolues les questions quiont occupé les débats internes, cep<strong>en</strong>dant nous allons relever les cont<strong>en</strong>us stratégiques surlesquels nous avons promis d’appuyer l’analyse. Concernant l’implication <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts membres<strong>de</strong> la TdV dans les étapes <strong>du</strong> processus, indiquons simplem<strong>en</strong>t que, <strong>de</strong> manière générale, leprocessus est animé par la direction <strong>de</strong> la TdV (directeur général et directeur <strong>du</strong> programme) quidonne le cadrage et joue le chef d’orchestre pour t<strong>en</strong>ir les délais <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes étapes. Lecont<strong>en</strong>u vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> revanche <strong>de</strong>s équipes et <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>ts. Enfin, soulignons le faitque, s’étalant sur les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années <strong>du</strong> programme 2006-2010, la planification stratégiquea eu lieu <strong>en</strong> parallèle <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre, mais <strong>de</strong> façon évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t solidaire. D’une part, leprocessus <strong>de</strong> planification stratégique et la <strong>gestion</strong> courante <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong>s actions nesont pas déconnectés. Si le processus <strong>de</strong> planification implique <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res spécifiques, laréflexion stratégique ne s’arrête pas à la fin <strong>de</strong>s séances <strong>de</strong> travail ad hoc. Les discussions sepoursuiv<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant la <strong>gestion</strong> courante et le futur plan est nourri <strong>de</strong>s acquis <strong>du</strong> précéd<strong>en</strong>t.D’autre part, il n’y a pas <strong>de</strong> rupture dans le passage d’un plan quinqu<strong>en</strong>nal à un autre. Certainsprojets début<strong>en</strong>t au cours <strong>du</strong> premier et pr<strong>en</strong>dront fin au cours <strong>du</strong> second, plus généralem<strong>en</strong>t,une bonne partie <strong>de</strong>s composantes <strong>du</strong> programme sont <strong>de</strong>s activités historiques <strong>de</strong> la TdV et laconstruction d’un nouveau programme ne vise surtout pas à « tout réinv<strong>en</strong>ter ».Dans le plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015, les cont<strong>en</strong>us stratégiques se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t d’une manière quipeut être très facilem<strong>en</strong>t replacée dans notre cadre à quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE(Tableau 6.3).Tableau 6.3 : Rubriques <strong>du</strong> Plan stratégique 2011-2015 <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> replacées dans notre cadre àquatre registres stratégiquesQuatre registres stratégiques<strong>de</strong> l’ONGEConstruction <strong>de</strong> l’objetécologiqueChapitres <strong>du</strong> Plan stratégique <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2011-2015Chapitre 1- Le contexte <strong>de</strong>s ZHM : l’état <strong>de</strong>s lieux, les m<strong>en</strong>aces, lesopportunités- Le positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV dans ce cadre : acquis <strong>de</strong>l’organisation au cours <strong>de</strong> son histoire, « atouts faiblessesopportunités et m<strong>en</strong>aces »- Position <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> : objectif <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal (samission)Mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale Chapitre 2- Objectif opérationnel à l’échelle <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>- Programme détaillé : 3 départem<strong>en</strong>ts cont<strong>en</strong>ant chacun <strong>de</strong> 2à 4 projets298


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerDéveloppem<strong>en</strong>t internePlace dans le secteur <strong>de</strong> laconservationChapitre 3- Budget et objectifs <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts externes- Organisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces- Gouvernance <strong>de</strong> la TdV- Objectifs et stratégie <strong>de</strong> communication- Objectifs pour le part<strong>en</strong>ariatSans r<strong>en</strong>trer dans l’explication précise <strong>de</strong> la façon dont ont été définis les objectifs pour chacun<strong>de</strong> ces registres stratégiques – ce qui sera l’objet <strong>de</strong>s sections suivantes (Section 6.2 et 6.3) – ,indiquons dès à prés<strong>en</strong>t les cont<strong>en</strong>us stratégiques qui seront les repères <strong>de</strong> l’organisation lors <strong>de</strong> lamise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> plan p<strong>en</strong>dant la pério<strong>de</strong> 2011-2015. Voyons d’abord l’objectif <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal(la mission <strong>de</strong> la TdV) et les objectifs spécifiques pour ce programme quinqu<strong>en</strong>nal, pour <strong>en</strong>suitepr<strong>en</strong>dre connaissance <strong>de</strong>s objectifs qu’elle se donne <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et d’acquisition <strong>de</strong>sressources et <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation.Réviser les <strong>en</strong>jeux relatifs à la conservation <strong>de</strong>s ZHM et reformuler les objectifs écologiqueset opérationnelsLa planification stratégique a été initiée par un travail collectif visant à réviser les <strong>en</strong>jeux pour lesZHM au regard <strong>de</strong>squels la TdV <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d construire son action : face à quels problèmes se trouvet-onlorsqu’on veut voir les ZHM conservées ? Ces <strong>en</strong>jeux 167 résumés <strong>en</strong> termes génériques – onpourrait retrouver le même texte dans les docum<strong>en</strong>ts d’une autre ONGE – serv<strong>en</strong>td’intro<strong>du</strong>ction au plan stratégique 2011-2015, mais rest<strong>en</strong>t un cadre très général dans lequels’inscrit son positionnem<strong>en</strong>t propre prés<strong>en</strong>té juste après dans le texte. Le cadre général a été luiaussi révisé, notamm<strong>en</strong>t à l’ai<strong>de</strong> d’un exercice Forces – Faiblesses – Opportunités – M<strong>en</strong>aces(SWOT 168 ).Ce modèle d’analyse stratégique a été développé dans les années 1970 par les chercheurs <strong>de</strong> laHarvard Bussiness School et a fait date dans le domaine <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique. On trouve<strong>en</strong>core <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>tes référ<strong>en</strong>ces au « modèle <strong>de</strong> Harvard » dont le SWOT est une tra<strong>du</strong>ctionsimplifiée, adaptée à l’usage <strong>de</strong>s pratici<strong>en</strong>s et répan<strong>du</strong>e par l’intermédiaire <strong>de</strong>s cabinets <strong>de</strong> conseilsqui se sont développés <strong>de</strong>puis cette époque. H. Mintzberg et al. (1999) indiqu<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant que le167 On y trouve les facteurs <strong>de</strong> dégradation et <strong>de</strong> <strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s ZHM dans un tableau permettant <strong>de</strong> visualiser lespressions subies par les ZHM, puis <strong>de</strong>s paragraphes <strong>de</strong> texte expliquant les principaux phénomènes à l’œuvre : lechangem<strong>en</strong>t climatique, les impacts directs et immédiats <strong>de</strong>s activités humaines et les impacts à long terme (comme lechangem<strong>en</strong>t climatique). On y trouve égalem<strong>en</strong>t les concepts contemporains liés au domaine <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> lanature ou au développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable, prés<strong>en</strong>tés comme <strong>de</strong>s « opportunités » : l’approche économique <strong>de</strong> labiodiversité et <strong>de</strong>s services écosystémiques, les concepts écologiques <strong>de</strong> résili<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> adaptative, lagouvernance et les politiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales (Plan stratégique 2011-2015 TdV, 2010 : 9-17).168SWOT : Str<strong>en</strong>gths, Weaknesses, Opportunities, Threats.299


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talemodèle n’a pas été révolutionnaire pour les <strong>en</strong>treprises. Ils cit<strong>en</strong>t l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Hill et Westbrook(1997) qui ont montré que sur 50 <strong>en</strong>treprises, la moitié avait utilisé le modèle SWOT <strong>en</strong> faisantappel à <strong>de</strong>s consultants mais « aucune <strong>de</strong> ces firmes ne s’est servie <strong>de</strong>s résultats au cours <strong>de</strong>sétapes suivantes <strong>de</strong> l’élaboration stratégique » (Hill & Westbrook, 1997 : 46). Ce modèle a <strong>en</strong> effetété critiqué pour plusieurs <strong>de</strong>s effets que son usage <strong>en</strong>traîne : la dissociation <strong>de</strong> la conception <strong>de</strong>la stratégie <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre – alors que les forces et faiblesses ne peuv<strong>en</strong>t qu’êtreappréh<strong>en</strong>dées <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’action –, la simplification <strong>de</strong> la stratégie niant les processusd’appr<strong>en</strong>tissage longs et subtils, et surtout la fixation d’une stratégie trop formalisée niant lecaractère complexe, instable et imprévisible <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans lequel se trouv<strong>en</strong>t les<strong>en</strong>treprises (Mintzberg, 1994 ; Mintzberg et al., 1999).A la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, nous avons pu constater que ce modèle n’était pas tant mobilisé pour uneremise <strong>en</strong> question profon<strong>de</strong> <strong>du</strong> positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation, mais davantage comme unoutil <strong>de</strong> communication interne. Cet exercice, m<strong>en</strong>é <strong>de</strong> façon collective dans l’espace d’uneséance <strong>de</strong> travail, permet <strong>en</strong> effet d’augm<strong>en</strong>ter la reconnaissance commune <strong>de</strong>s atouts dont laTdV dispose – et que ses membres <strong>de</strong>vront conforter – et <strong>de</strong> formuler ses points faibles d’unefaçon si non cons<strong>en</strong>suelle, <strong>du</strong> moins connue <strong>de</strong> tous. Suite à ce travail, la mission et l’objectifgénéral <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ont simplem<strong>en</strong>t été reconfirmés tels qu’ils apparaiss<strong>en</strong>t dans letableau 6.4.Ensuite, le « programme », c’est-à-dire le plan d’action, est annoncé comme la réponse pouratteindre l’objectif opérationnel formulé et contribuer à la mission (voir Tableau 6.4). Lesobjectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et opérationnels plus précis sont définis au niveau <strong>de</strong>s projets. Al’échelle <strong>du</strong> programme, c’est seulem<strong>en</strong>t une théorie d’action qui est formulée (Tableau 6.4).Tableau 6.4 : Cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> concernant la construction et la focalisation surl’objet écologique à conserver et le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale général <strong>de</strong> l’organisation (Planstratégique 2011-2015, 2010 : 21-24)Quatre registresstratégiques <strong>de</strong> l’ONGEConstruction et focalisationsur l’objet écologiqueCont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> Plan stratégique <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2011-2015 (ce que veut la TdV)MissionArrêter la perte et la dégradation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes et <strong>de</strong> leurs ressources naturelles, les restaurer etpromouvoir leur utilisation rationnelle.Mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleObjectif spécifiqueAméliorer la compréh<strong>en</strong>sion interdisciplinaire <strong>de</strong>s écosystèmes <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et <strong>de</strong> lécologie <strong>de</strong> leurs espèces,transférer ces connaissances et les utiliser pour promouvoir leurconservation et leur utilisation rationnelle300


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerObjectifs <strong>du</strong> programme 2011-20151. Améliorer et partager la connaissance sur les zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes, leurs valeurs, fonctions et services, ainsi que leurdynamique face aux usages et aux changem<strong>en</strong>ts globaux2. Tester et capitaliser <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> adaptative permettant <strong>de</strong>mieux conserver, utiliser et gérer les fonctions et valeurs <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes dans un <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t changeant3. R<strong>en</strong>forcer les capacités <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires et <strong>de</strong>s utilisateurs <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> sassurant <strong>du</strong> changem<strong>en</strong>t effectif dattitu<strong>de</strong> ; fournirles bons argum<strong>en</strong>ts et outils aux déci<strong>de</strong>urs4. Catalyser lémerg<strong>en</strong>ce déquipes, <strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> rive sud ;augm<strong>en</strong>ter la capacité <strong>de</strong>s équipes sci<strong>en</strong>tifiques et plus généralem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la société civile à répondre aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes5. Faire connaître et valoriser le travail <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>6. Faire partager la vision et les valeurs <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>La figure 6.1 replace les 6 points <strong>de</strong> cette théorie d’action générale dans les quatre registres <strong>de</strong> lastratégie <strong>de</strong> l’ONGE. Les points 1 et 2 concern<strong>en</strong>t surtout le travail sur l’objet écologique(développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances et sur la <strong>gestion</strong> favorable à la conservation. Les points 3 à 6concern<strong>en</strong>t la façon dont l’organisation <strong>en</strong>visage la façon dont elle va interv<strong>en</strong>ir auprès <strong>de</strong>sacteurs <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> camarguais son lieu d’implantation, mais aussi plus largem<strong>en</strong>tdans d’autres systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes. Dans l’analyse<strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> futur plan stratégique et <strong>de</strong> son programme d’action qui va suivre, nousétudierons la façon dont la TdV construit son programme et structure son organisation internepour mettre <strong>en</strong> œuvre cette théorie d’action générale.Construction <strong>de</strong> l’objet écologique àconserver1. Pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>connaissance surfonctionnem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s écosystèmes2. Pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>connaissance et<strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s pourla <strong>gestion</strong>Mo<strong>de</strong> d’action publique3. Transfert <strong>de</strong>sconnaissances auxutilisateurs5 et 6. Valorisationtravail/ diffusionvaleursPlace dans le secteurDéveloppem<strong>en</strong>t interne4. Réseau etr<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s capacités <strong>en</strong>MéditerranéeFigure 6.1 : Théorie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> replacée dans notre schéma <strong>de</strong> l’Analyse stratégique <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur)301


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleFinaliser le programme et formaliser l’organisation et les ressources pour le mettre <strong>en</strong> œuvreL’année 2010 a été consacrée à la finalisation <strong>du</strong> programme, ce qui a <strong>de</strong>mandé un travailconséqu<strong>en</strong>t pour les équipes et <strong>de</strong> nombreux échanges <strong>en</strong>tre les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>ts et ledirecteur <strong>du</strong> programme pour construire les projets. Cette pério<strong>de</strong> a égalem<strong>en</strong>t été consacrée à laformulation <strong>de</strong> certains objectifs quant aux ressources nécessaires à la réalisation <strong>de</strong> ceprogramme : « le programme […] ne pourra porter ses fruits que moy<strong>en</strong>nant la mise <strong>en</strong> placed’une gouvernance et d’une organisation interne appropriées et la mobilisation <strong>de</strong> ressources –tant humaines que financières – <strong>en</strong> adéquation avec nos ambitions, ceci à travers une saine<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> nos actifs et un développem<strong>en</strong>t ciblé <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats » (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 103). La planification stratégique est un mom<strong>en</strong>t pour reformuler les contraintesauxquelles est confrontée la TdV et les objectifs qu’elle se donne vis-à-vis <strong>de</strong> l’acquisition, <strong>du</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> l’articulation <strong>de</strong> ces ressources pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme. Lesobjectifs que la TdV s’est donnés quant à son organisation interne, son budget, sa gouvernance,sa communication et ses li<strong>en</strong>s <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats sont prés<strong>en</strong>tés dans le tableau 6.5.Tableau 6.5 : Cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> concernant le développem<strong>en</strong>t interne et la placedans le secteur (Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 107-120)Quatre registresstratégiques <strong>de</strong> l’ONGEDéveloppem<strong>en</strong>t interneChapitres <strong>du</strong> Plan stratégique <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2011-2015Objectifs pour la <strong>gestion</strong> financière• « une planification et un suivi financier calés sur le programmeopérationnel et facilitant le travail <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> projet ;• un meilleur contrôle <strong>de</strong>s <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts par <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res internesr<strong>en</strong>forcées »Objectifs pour lobt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t« Conformém<strong>en</strong>t aux recommandations <strong>du</strong> Conseil Sci<strong>en</strong>tifique,nous avons ret<strong>en</strong>u un niveau <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t externe correspondantà 28 à 30% <strong>du</strong> total <strong>de</strong>s recettes. Cet objectif (1,3 à 1,4 million<strong>de</strong>uros par an), considéré comme un optimum au-<strong>de</strong>là <strong>du</strong>quel nousrisquons <strong>de</strong> perdre la maîtrise <strong>de</strong> nos choix stratégiques »Place dans le secteur <strong>de</strong> laconservationGouvernance r<strong>en</strong>forcée par <strong>de</strong> nouveaux statuts <strong>de</strong>puis 2008Stratégie <strong>de</strong> communication• augm<strong>en</strong>ter la notoriété <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, acteur majeur <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes• accompagner le transfert <strong>de</strong> connaissances et <strong>de</strong>xpéri<strong>en</strong>cesautour <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes pour <strong>en</strong> promouvoir laconservation et lutilisation rationnelle• faire <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>de</strong>s acteurs porteurs <strong>de</strong>s<strong>en</strong>s et <strong>de</strong>s relais dimage »Enjeux <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique• Mainti<strong>en</strong> ou augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s recherches (lesambitions <strong>du</strong> programme 2011-2015 sont largem<strong>en</strong>t au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>scapacités <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong> léquipe, tant <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>cesque <strong>de</strong>ffectifs)302


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer• Apport <strong>de</strong> flux didées et amélioration continue <strong>de</strong> lexpertise (TdV :organisation <strong>de</strong> petite taille. Enjeu déviter <strong>en</strong>fermem<strong>en</strong>t)• Participation à <strong>de</strong>s projets auxquels les chercheurs <strong>de</strong> la TdV nepourrai<strong>en</strong>t répondre seulsObjectifs <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique• Répartition <strong>de</strong> leffort : « Dans cette perspective, chaque chercheura une double mission, m<strong>en</strong>er <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> recherche et attirer <strong>de</strong>séquipes <strong>de</strong> sa discipline ou <strong>de</strong> disciplines complém<strong>en</strong>taires pourcontribuer au programme »Objectifs <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat dans le secteur <strong>de</strong> la conservation• Assistance à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong>ne <strong>gestion</strong> intégrée et adaptative• Dissémination ciblée dinformation <strong>en</strong> direction <strong>de</strong>s acteurs clés• Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plateforme sci<strong>en</strong>ce-politiques / Observatoire<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes• Appui au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> politiques et stratégies <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s• Relais dinflu<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong> plaidoyerAu fil <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> la stratégie que nous allons maint<strong>en</strong>ant développer, nouscompr<strong>en</strong>drons mieux d’où vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t les int<strong>en</strong>tions pour les différ<strong>en</strong>ts registres stratégiquesprés<strong>en</strong>tés dans les tableau 6.4 et 6.5 et nous verrons comm<strong>en</strong>t l’organisation bâtit son planstratégique <strong>de</strong> façon à les atteindre à travers sa mise <strong>en</strong> oeuvre.Dans un premier temps, nous allons nous focaliser sur la stratégie mise <strong>en</strong> place pour atteindreles objectifs <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> laconservation (Section 6.2). Nous abor<strong>de</strong>rons <strong>en</strong>suite toutes les questions relatives à laconstruction <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver et à la construction <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales.6.2 Stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités : r<strong>en</strong>forcer lesressources et les capacités pour atteindre les objectifsDans les cas d’étu<strong>de</strong> développés dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse, nous avons vu que lesprincipales ressources mobilisées par l’organisation pour mettre <strong>en</strong> œuvre ses actions étai<strong>en</strong>t lescompét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> ses membres, la légitimité qui leur donne les capacités d’interv<strong>en</strong>ir dansdiffér<strong>en</strong>tes arènes, le réseau <strong>de</strong> ces membres et le réseau général <strong>de</strong> l’organisation et <strong>en</strong>fin lefinancem<strong>en</strong>t. La préoccupation d’asseoir ou <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer ces ressources stratégiques 169 se retrouvedans les processus d’élaboration stratégique, le plus souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion avec les objectifs d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Cette section vise à r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> la façon dont sont prises <strong>en</strong> charge cesquestions au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la planification stratégique et à quels choix cela aboutit.169 Capables d’attirer d’autres ressources (Zimmerman & Zeitz, 2002) ou indisp<strong>en</strong>sables à l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.303


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleNous comm<strong>en</strong>cerons par nous intéresser à la façon dont la TdV acquiert ses ressourcesfinancières et comm<strong>en</strong>t la planification stratégique est utilisée comme un mom<strong>en</strong>t pourformaliser la stratégie d’acquisition <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts (Section 6.2.1). Dans la section suivante(Section 6.2.2), nous verrons que la structuration <strong>de</strong> l’équipe et l’organisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>cesinternes ont été perçues comme un levier fondam<strong>en</strong>tal pour r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.La section 6.2.3 sera consacrée à la problématique <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat appréh<strong>en</strong>dée par l’organisationcomme une voie pour acquérir <strong>de</strong>s ressources supplém<strong>en</strong>taires. Nous veillerons à ce mom<strong>en</strong>t-là àmieux caractériser cette notion <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat qui recouvre une diversité <strong>de</strong> relations sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>espar différ<strong>en</strong>ts objectifs liés à l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Enfin, nous abor<strong>de</strong>rons la gouvernance<strong>de</strong> la TdV qui est égalem<strong>en</strong>t perçue par l’organisation comme une voie d’acquisition <strong>de</strong>ressources. Nous détaillerons la nature <strong>de</strong> ces ressources et les processus d’exercice <strong>de</strong> lagouvernance qui permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> les obt<strong>en</strong>ir (Section 6.2.4).6.2.1 Etablir un budget et rassembler les ressources pour financer le programmeLes questions financières sont principalem<strong>en</strong>t l’affaire <strong>de</strong> la direction et <strong>de</strong>s autres organes <strong>de</strong>gouvernance (CA, CS et Bureau). Nous verrons plus tard que les équipes assum<strong>en</strong>t une partsignificative <strong>de</strong>s efforts pour acquérir <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts extérieurs. Néanmoins, 48% <strong>du</strong> budget<strong>de</strong> la Fondation TdV est pourvu par la Fondation MAVA et la relation <strong>en</strong>tre les <strong>de</strong>ux fondationsdépasse les salariés. Pour compr<strong>en</strong>dre, il faut se souv<strong>en</strong>ir que la Fondation MAVA est unefondation <strong>de</strong> mécénat dans le domaine <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature créée par Luc Hoffmann(fondateur <strong>de</strong> la TdV) et gérée jusqu’à cette année 2010 par son fils André Hoffmann 170 et par leprésid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV, qui travaille <strong>de</strong>puis 30 ans avec le fondateur. La proximité « filiale » <strong>en</strong>tre laMAVA et la TdV offre à cette <strong>de</strong>rnière une position privilégiée qui reste cep<strong>en</strong>dant délicate. Lespropos contradictoires prononcés au cours d’un même conseil d’administration par le fils <strong>du</strong>fondateur montr<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> cette ambiguïté : « La MAVA continuera à financer la TdV tant que celle-cilui prés<strong>en</strong>tera <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> qualité » ; « Il est inadmissible qu’une organisation dép<strong>en</strong><strong>de</strong> d’une même source<strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t pour 50% <strong>de</strong> son budget » (Conseil d’administration, novembre 2009). L’inconfort lié àcette forte dép<strong>en</strong>dance se ress<strong>en</strong>t d’autant mieux dans un contexte où la MAVA formalise sapropre gouvernance interne. En effet, <strong>en</strong> 2010, la MAVA a recruté une directrice générale à laplace d’André Hoffmann et <strong>du</strong> présid<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV qui occupai<strong>en</strong>t cette fonction <strong>de</strong> façon170 André Hoffmann siège au conseil d’administration <strong>de</strong> la Fondation MAVA. Il est <strong>en</strong> outre « membre fondateur »au CA <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et membre <strong>de</strong> son bureau qui « instruit les affaires soumises au CA et supervisel’exécution <strong>de</strong> ses décisions » (Statuts <strong>de</strong> la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, 2008).304


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerintérimaire. En cela les <strong>de</strong>ux fondations (TdV et MAVA) sembl<strong>en</strong>t poursuivre la mêmetrajectoire : elles ont été fondées par la même personnalité qui disposait à la fois d’une vision,mais aussi <strong>de</strong> ressources financières considérables. A mesure que ces fondations se développ<strong>en</strong>tet que le fondateur se retire <strong>du</strong> rôle <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>ur principal, elles s’institutionnalis<strong>en</strong>t – dans le s<strong>en</strong>soù elles r<strong>en</strong>forc<strong>en</strong>t leurs statuts et leur gouvernance, clarifi<strong>en</strong>t leurs objectifs et resserr<strong>en</strong>t leur<strong>gestion</strong> financière. Cette <strong>gestion</strong> plus stricte <strong>de</strong> la MAVA pourrait être défavorable à la TdV, dontla moitié <strong>du</strong> budget est octroyée par la MAVA <strong>de</strong>puis 1994. La TdV reste cep<strong>en</strong>dant uneorganisation <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce au niveau méditerrané<strong>en</strong>, que la MAVA consulte d’ailleurs pourl’élaborer <strong>de</strong> son propre programme <strong>de</strong> mécénat pour la méditerranée.Concernant la planification stratégique 2011-2015, la TdV n’a pas pu être fixée sur la contributionfinancière <strong>de</strong> la MAVA pour son programme quinqu<strong>en</strong>nal tant que ses restructurations étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>cours. De plus, dans le souci <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire la dép<strong>en</strong>dance <strong>de</strong> la TdV vis-à-vis <strong>de</strong> la MAVA, un <strong>de</strong>smembres <strong>de</strong> son bureau (non lié à la Fondation MAVA) a exigé que la TdV prés<strong>en</strong>te plusieursscénarios <strong>de</strong> budget et revoie à la baisse sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à la MAVA. Ainsi, l’élaboration <strong>du</strong> budgetprovisoire a été une question qui a beaucoup occupé la direction et son bureau au cours <strong>de</strong> cettesecon<strong>de</strong> année <strong>de</strong> planification stratégique. Parallèlem<strong>en</strong>t, les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t construis<strong>en</strong>tleur budget <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s indications fournies par la direction.Par ailleurs, comme nous l’avons vu dans le tableau 6.5, le budget <strong>de</strong> la TdV est établi <strong>de</strong>puis2005 <strong>en</strong> comptant sur l’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> 20 à 30% <strong>de</strong> son budget <strong>en</strong> externe (objectif 28 à 30% pour2011-2015, soit 1,3 à 1,4 million d’euros). Depuis cette date, la TdV est toujours parv<strong>en</strong>ue àrassembler le montant nécessaire. Ce fut cep<strong>en</strong>dant au prix d’une multiplication <strong>de</strong> petitsfinancem<strong>en</strong>ts ayant un effet d’éparpillem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’équipe et <strong>de</strong> détournem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurinvestissem<strong>en</strong>t au détrim<strong>en</strong>t <strong>du</strong> « cœur <strong>de</strong> programme ». Ce phénomène a été exprimé <strong>de</strong> façontrès claire au début <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>en</strong> 2009 par les membres <strong>de</strong> l’équipe qui ses<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t dans l’impasse. « Financer le cœur <strong>de</strong> programme » a donc été l’<strong>en</strong>jeu qui a guidé laréflexion stratégique. Les voies d’amélioration adoptées se situ<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>ux niveaux : (1) un<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> pratiques – déjà mises <strong>en</strong> œuvre et à poursuivre – pour l’obt<strong>en</strong>tion et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>ts externes ; (2) une restructuration <strong>du</strong> programme et <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> manière à faciliterle financem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> « cœur <strong>de</strong> programme » (Section 6.2.2).La stratégie pour r<strong>en</strong>forcer l’acquisition et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts externes est peu discutéecollectivem<strong>en</strong>t, mais apparaît <strong>de</strong> façon relativem<strong>en</strong>t précise dans le plan stratégique. Ceci semblelié au fait qu’elle est élaborée au niveau <strong>de</strong> la direction et n’est mise <strong>en</strong> discussion avec l’équipeque <strong>de</strong> façon partielle. Il s’agit d’une part d’id<strong>en</strong>tifier les thématiques attractives et <strong>de</strong> se donner<strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> leur pot<strong>en</strong>tiel :305


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale« Tous les projets doiv<strong>en</strong>t mobiliser <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts externes, à hauteur <strong>de</strong> 20 à 50% <strong>de</strong>leur budget, taux fixé <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> leur attractivité pour <strong>de</strong>s bailleurs év<strong>en</strong>tuels, et <strong>de</strong>leur adéquation avec les thématiques <strong>de</strong>s principaux appels à projets. Ainsi, lesthématiques telles que la modélisation, la santé, les risques, la <strong>gestion</strong> adaptative ou larestauration doiv<strong>en</strong>t permettre <strong>de</strong> bénéficier d’un bon taux <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t externe ». Lesfinancem<strong>en</strong>ts externes visés ici sont <strong>en</strong> particulier ceux liés aux appels lancés par « <strong>de</strong>sbailleurs (Union Europé<strong>en</strong>ne, Ag<strong>en</strong>ce nationale <strong>de</strong> la recherche, Fondation <strong>de</strong> recherchepour la biodiversité...), <strong>de</strong>s soumissions <strong>de</strong> projets à <strong>de</strong>s bailleurs bi ou multilatéraux(FFEM, FEM...) et par <strong>de</strong>s <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>ts conclus avec <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires financiers ciblés »(Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 115).Il revi<strong>en</strong>t aux chefs <strong>de</strong> projet (équipe <strong>du</strong> programme) <strong>de</strong> soumettre <strong>de</strong>s dossiers et <strong>de</strong> trouver cesfinancem<strong>en</strong>ts externes. Les fonds obt<strong>en</strong>us lors <strong>du</strong> précéd<strong>en</strong>t programme montr<strong>en</strong>t que cetobjectif a été très bi<strong>en</strong> approprié par l’équipe 171 .D’autre part, il s’agit d’établir <strong>de</strong>s relations à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation avec différ<strong>en</strong>ts typesd’organismes afin <strong>de</strong> favoriser <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> long terme. Pour cela, la TdV vise <strong>de</strong>ux types<strong>de</strong> bailleurs : elle travaille à la signature <strong>de</strong> conv<strong>en</strong>tions-cadres avec <strong>de</strong>s bailleurs institutionnelscomme le ministère <strong>de</strong> l’Ecologie ou l’Ag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’eau RMC. Parallèlem<strong>en</strong>t, elle cherche à établir<strong>de</strong>s relations avec <strong>de</strong>s bailleurs privés comme les Fondations d’<strong>en</strong>treprise agissant dans lemécénat <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. Ce travail <strong>de</strong> fond est réalisé <strong>en</strong> particulier par le directeur général et ledirecteur administratif et financier <strong>de</strong>puis le précéd<strong>en</strong>t plan quinqu<strong>en</strong>nal. La planificationstratégique est seulem<strong>en</strong>t un mom<strong>en</strong>t pour réaffirmer ces ori<strong>en</strong>tations et formaliser le travailrelationnel avec les financeurs pot<strong>en</strong>tiels comme une vraie tâche à accomplir. Cette pratique estpar ailleurs inscrite dans le plan <strong>de</strong> communication et <strong>en</strong> constitue un <strong>de</strong>s trois axes : « valoriser etmettre <strong>en</strong> visibilité les actions <strong>de</strong> la TdV, accueillir et s<strong>en</strong>sibiliser les bailleurs et les mécènes »(Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 121).Les arbitrages financiers que l’organisation doit obligatoirem<strong>en</strong>t faire – ayant plus d’idéesd’actions que <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s financiers pour les mettre <strong>en</strong> œuvre – seront comm<strong>en</strong>tés plus loinlorsque nous nous conc<strong>en</strong>trerons sur la construction <strong>de</strong>s actions.6.2.2 Structurer l’organisation pour optimiser les compét<strong>en</strong>cesAvant d’abor<strong>de</strong>r la structuration <strong>de</strong> l’organisation, voyons quelles sont les compét<strong>en</strong>ces qu’il s’agitd’optimiser et <strong>de</strong> valoriser dans une bonne articulation pour développer le programme d’action.171 La crise financière que les salariés ont connue <strong>en</strong>tre 2003 et 2005 est sans doute un facteur important pouvantexpliquer la vitesse <strong>de</strong> l’appropriation <strong>de</strong> l’objectif d’acquisition <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t externe. Le suivi régulier par ledirecteur administratif et financier et le bilan bisannuel au mom<strong>en</strong>t <strong>du</strong> CA <strong>en</strong> est un autre. Comme nous l’avons écritau point 6.1, l’objectif est <strong>de</strong> mettre au point un pilotage <strong>du</strong> budget <strong>en</strong>core amélioré <strong>en</strong> 2011-2015.306


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerCes compét<strong>en</strong>ces peuv<strong>en</strong>t être distinguées selon leur place par rapport au programme (Figure6.2) : (1) les compét<strong>en</strong>ces nécessaires à l’acquisition <strong>de</strong> capacités d’action ; (2) les compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques et techniques pour pro<strong>du</strong>ire le cont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> programme ; (3) les compét<strong>en</strong>cesnécessaires pour le portage <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us <strong>du</strong> programme dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pour laconservation <strong>de</strong>s ZHM.Compét<strong>en</strong>ces « capacités »Compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et techniquesCompét<strong>en</strong>ces « insertion dansle système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> »Montage <strong>de</strong>projetDéveloppem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariatsManagem<strong>en</strong>tAnimationéquipeSci<strong>en</strong>ce etexpertise dans 9disciplinesThéories,métho<strong>de</strong>s etconnaissances <strong>de</strong>terrainGestion d’espaceprotégé(domaine TdV2600ha)Elaboration <strong>de</strong>systèmes <strong>de</strong> suivi<strong>de</strong>s ZHMElaboration <strong>de</strong>plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>ZH (<strong>en</strong> réserve ethors réserve)Relationsinstitutionnelles,connaissancesfonctionnem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s politiquespubliques<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesTransfert <strong>de</strong>sconnaissances etmétho<strong>de</strong>s (direct etindirect)Relations directesavec les acteurssectorielsFigure 6.2 : Trois catégories <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces nécessaires au développem<strong>en</strong>t et à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong>programme d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (source : auteur)Les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et techniques sont c<strong>en</strong>trales puisqu’elles permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire laconnaissance et les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> favorables à la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Ce sont lesressources fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> la TdV comme l’indique cette remarque <strong>de</strong> la direction <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>ceau choix <strong>de</strong>vant lequel elle était confrontée lors <strong>de</strong> la crise financière <strong>de</strong> 2003 (ré<strong>du</strong>ire la massesalariale ou acquérir plus <strong>de</strong> fonds externes) : « notre force, c’est le personnel, les compét<strong>en</strong>ces, donc plus onle ré<strong>du</strong>it, plus on ré<strong>du</strong>it notre impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal » (Direction TdV, com.pers., 2009). Le mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>cette capacité sci<strong>en</strong>tifique et technique fait néanmoins débat au sein <strong>de</strong> l’organisation notamm<strong>en</strong>tparce que le nombre <strong>de</strong> postes <strong>de</strong> chercheurs qui a tout <strong>de</strong> même été ré<strong>du</strong>it <strong>en</strong> 2003 n’a pasaugm<strong>en</strong>té <strong>de</strong>puis, tandis que <strong>de</strong>s recrutem<strong>en</strong>ts ont été effectués dans <strong>de</strong>s champs plus techniques(système <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong>s ZHM, communication). Dans ce débat, les chercheurs font alors valoir lalégitimité et la crédibilité qu’apporte la visibilité sci<strong>en</strong>tifique à la TdV (Chercheur TdV, com.pers.,docum<strong>en</strong>t interne, 2009). La direction partage cette vision, mais dans l’impossibilité actuelle307


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taled’augm<strong>en</strong>ter la masse salariale, elle <strong>en</strong>visage seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> veiller au mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la qualitésci<strong>en</strong>tifique par l’optimisation <strong>de</strong>s capacités internes.Les profils recrutés constitu<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s choix d’expertise stratégique et correspond<strong>en</strong>t à l’évolutionque la TdV a connue au cours <strong>de</strong> son histoire. La <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine est une <strong>de</strong>s premièresactivités à avoir été mise <strong>en</strong> place dès lors que le site a été acquis par le fondateur. La TdV ad’ailleurs été pionnière dans l’élaboration <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle a d’abord travaillés sur sonpropre terrain (premier plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> 1980). Depuis, l’organisation a maint<strong>en</strong>u ses capacitéset les compét<strong>en</strong>ces pour la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine. Les compét<strong>en</strong>ces et capacités sci<strong>en</strong>tifiques sesont développées <strong>de</strong> façon formelle à partir <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>en</strong> 1974.Jusqu’<strong>en</strong> 1992, la seule activité <strong>de</strong> la TdV, <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine, était la recherchesci<strong>en</strong>tifique. A partir <strong>de</strong> 1992, l’organisation a cherché à se donner les moy<strong>en</strong>s d’agir plusdirectem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHM. A cet effet, elle a diversifié les profils <strong>de</strong> ses salariés <strong>en</strong>recrutant un personnel plus technique, pour développer les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> plan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, <strong>de</strong> suivi<strong>de</strong>s ZHM et pour développer une action tournée vers les utilisateurs <strong>de</strong>s ZHM. Depuis, larecherche a évolué et est elle aussi davantage tournée vers les utilisateurs et les déci<strong>de</strong>urs. Leschoix <strong>de</strong>s profils à intégrer ou développer correspond<strong>en</strong>t alors à <strong>de</strong>s choix <strong>de</strong> mo<strong>de</strong> d’action etc’est ce débat-là qui se joue <strong>en</strong> toile <strong>de</strong> fond dans celui que nous avons évoqué plus haut. Les<strong>de</strong>rniers recrutem<strong>en</strong>ts correspond<strong>en</strong>t à la volonté <strong>de</strong> concrétiser le projet d’une action visant àporter la conservation <strong>de</strong>s ZH à l’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne, dont la tra<strong>du</strong>ction pratique estl’Observatoire <strong>de</strong>s ZHM que nous avons détaillé au chapitre 5. Ce dispositif, qui requiert uninvestissem<strong>en</strong>t important, pousse vers <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions beaucoup moins proches <strong>du</strong> terrain queles actions liées à la recherche, que nous avons découvertes au chapitre 3. Nous pouvons alorsobserver <strong>de</strong>ux positions <strong>en</strong> interne (pouvant être portées par une même personne) : la TdV doitse donner les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> porter la conservation <strong>de</strong>s ZHM très haut dans l’espace méditerrané<strong>en</strong>pour une avancée significative à cette échelle (l’OZHM), mais l’action doit passer par <strong>de</strong>sinterv<strong>en</strong>tions concrètes que la recherche-action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM est mieux à même <strong>de</strong> servir.Le pari <strong>de</strong> la TdV est <strong>de</strong> faire t<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>semble ces <strong>de</strong>ux logiques. Pour cela, la structureorganisationnelle est perçue comme un levier important pour optimiser les ressources <strong>en</strong> interne,si l’on <strong>en</strong> croit la place que cette question a prise dans les réunions ou séances <strong>de</strong> travail p<strong>en</strong>dantla première année <strong>de</strong> la planification stratégique. Une amélioration <strong>de</strong> la structureorganisationnelle est <strong>en</strong> effet vue comme étant une solution à <strong>de</strong>s problèmes soulevés dèsl’évaluation à mi-programme (2006-2010) <strong>en</strong> 2008 et répétés dès les premières séances <strong>de</strong> travaildans le cadre <strong>de</strong> la planification stratégique. Ces problèmes sont : d’une part l’éparpillem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s308


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcersci<strong>en</strong>tifiques et <strong>de</strong>s technici<strong>en</strong>s sur <strong>de</strong>s petits projets sans cohér<strong>en</strong>ce forte à l’échelle <strong>de</strong>l’organisation, t<strong>en</strong>dance exacerbée par la recherche <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts externes ; d’autre part unesous-valorisation <strong>de</strong> la multiplicité <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces existant <strong>en</strong> interne. L’idée sous-jac<strong>en</strong>te à cesfaiblesses organisationnelles id<strong>en</strong>tifiées est que les problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ou les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation nécessit<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t une approche pluridisciplinaire qui peut déjà être <strong>en</strong>partie comblée <strong>en</strong> interne et complétée par la création <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats. Les chefs <strong>de</strong> projet,travaillant chacun dans l’urg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> leurs échéances et organisation propres, ne rassembl<strong>en</strong>t leurexpertise que <strong>de</strong> façon très marginale (échanges ponctuels et informels perman<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> interne,mais peu <strong>de</strong> travail commun formel <strong>en</strong> 2006-2010). D’autre part, l’équipe étant petite au regard<strong>du</strong> programme d’action qu’elle prévoit <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre, l’intégration doit concerner nonseulem<strong>en</strong>t les savoirs sci<strong>en</strong>tifiques et techniques, mais aussi les compét<strong>en</strong>ces pour ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités et pour les interv<strong>en</strong>tions dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Figure 6.2).Deux solutions ont été <strong>en</strong>visagées et ont tissé la toile <strong>de</strong> fond sout<strong>en</strong>ant la construction <strong>du</strong>programme. La première – changer significativem<strong>en</strong>t la structure organisationnelle – a étélonguem<strong>en</strong>t discutée <strong>en</strong> interne, mais a été abandonnée. La secon<strong>de</strong> – élaborer un programmeconstitué <strong>de</strong> projets plus gros mais moins nombreux et moins éclatés – a <strong>en</strong> revanche porté sesfruits (au moins au niveau <strong>du</strong> docum<strong>en</strong>t stratégique).1. Le changem<strong>en</strong>t organisationnel <strong>en</strong>visagé consistait à favoriser l’optimisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces<strong>en</strong> les organisant dans une structure hiérarchique. L’idée était d’organiser les équipes(organisation hiérarchique) <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces (par exemple, une équipe écologie <strong>de</strong>spopulations) et <strong>de</strong> développer les projets <strong>de</strong> façon transversale (Structuration TdV, docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong>travail, avril 2009).Cette logique avait égalem<strong>en</strong>t pour but d’intégrer plus formellem<strong>en</strong>t les services <strong>de</strong> la TdV qui nesont pas directem<strong>en</strong>t impliqués dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme (comme les finances ou lesbâtim<strong>en</strong>ts). Ces services indisp<strong>en</strong>sables au fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation étai<strong>en</strong>t jusqu’<strong>en</strong> 2009appelés « fonctions support ». Depuis le début <strong>de</strong> la planification stratégique, <strong>de</strong>s efforts sontfournis <strong>en</strong> faveur d’un r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la cohésion interne : <strong>de</strong>s réunions spéciales pour lessalariés « hors programme » et la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s premières activités d’échange avec lessci<strong>en</strong>tifiques p<strong>en</strong>dant la planification stratégique, et d’autres activités prévues dans le plan <strong>de</strong>communication.Cette restructuration a cep<strong>en</strong>dant été abandonnée <strong>en</strong> raison <strong>de</strong> l’impossibilité <strong>de</strong> la r<strong>en</strong>dreréellem<strong>en</strong>t fonctionnelle. Découpler la hiérarchie <strong>de</strong> l’opérationnel prés<strong>en</strong>tait <strong>de</strong> gros risques <strong>de</strong>dysfonctionnem<strong>en</strong>t qui ont été unanimem<strong>en</strong>t reconnus par la direction et les chefs <strong>de</strong>départem<strong>en</strong>t qui ont travaillé à cette question, ainsi que les organes <strong>de</strong> gouvernance à qui la309


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talestructuration a été soumise fin 2009. Abandonner cette restructuration revi<strong>en</strong>t à conserver lemodèle mis <strong>en</strong> place <strong>en</strong> 2005, dans lequel la hiérarchie et la structure <strong>du</strong> programme sontparallèles (trois départem<strong>en</strong>ts sous la responsabilité <strong>de</strong> trois chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>ts). Les voies<strong>en</strong>visagées pour tout <strong>de</strong> même sout<strong>en</strong>ir la transversalité <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces à travers les troisdépartem<strong>en</strong>ts sont <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ordres : une incitation à prévoir <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> l’équipe d’undépartem<strong>en</strong>t pour les autres composantes <strong>du</strong> programme (ce qui reste difficile vu le peu <strong>de</strong>disponibilité <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe pris par leurs projets respectifs) ; la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> quatre« pôles <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces » 172 pour favoriser l’échange dans certains domaines. Deux <strong>de</strong> ces « pôles<strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces » existai<strong>en</strong>t déjà sous un autre nom p<strong>en</strong>dant le programme 2006-2010, maisn’ont pas fonctionné. Les pôles <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces ont été mis <strong>en</strong> place <strong>en</strong> tâchant <strong>de</strong>responsabiliser davantage les animateurs qui sont <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe.2. Le second levier id<strong>en</strong>tifié par la direction et appuyé par le conseil sci<strong>en</strong>tifique (Minutes <strong>du</strong> CS2008, docum<strong>en</strong>t interne TdV, 2008) concerne cette fois non plus l’intégration transversale auxtrois départem<strong>en</strong>ts, mais l’intégration verticale au sein d’un même départem<strong>en</strong>t. L’objectif <strong>de</strong>construire le nouveau programme avec <strong>de</strong>s projets plus importants et moins nombreux comporteégalem<strong>en</strong>t son lot d’écueils à éviter comme le suggère cette synthèse d’une discussion à ce sujet :« La diminution <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> projets ne doit pas être seulem<strong>en</strong>t structurelle (voircosmétique) par une agrégation simple <strong>de</strong> projets existants mais doit correspondre à uneréelle logique opérationnelle et un gain <strong>de</strong> synergie. Cela supposerait <strong>de</strong>s fusions <strong>en</strong>treprojets existants, voire l’abandon <strong>de</strong> certains projets » (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> <strong>de</strong> l’atelierstructuration <strong>du</strong> programme TdV, mars 2009).Au niveau <strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> programme, la ré<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> projets s’est avéréerelativem<strong>en</strong>t simple pour <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>s trois départem<strong>en</strong>ts. En effet, le départem<strong>en</strong>t « Suivi-Evaluation <strong>de</strong>s ZHM » réunissait toutes les conditions pour répondre à cet <strong>en</strong>jeu : il partaitpresque ex nihilo dans la mesure où tous les projets 2006-2010 (Plan stratégique TdV 2006-2010,2005) <strong>de</strong> ce départem<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t achevés. Son objet c<strong>en</strong>tral était alors la construction et le portaged’un important dispositif, l’OZHM, qu’il aurait été artificiel <strong>de</strong> découper. Pour le départem<strong>en</strong>tEspèces, la ré<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> projets semble avoir été intuitive dès lors que laproblématique sci<strong>en</strong>tifique et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale est l’élém<strong>en</strong>t structurant <strong>du</strong> projet (logique selonlaquelle a été bâti ce programme, voir la section 6.3). En effet, dans le programme 2006-2010, onremarque que plusieurs <strong>de</strong>s projets prévus n’avai<strong>en</strong>t pas réellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> finalités propres, maisv<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t alim<strong>en</strong>ter un ou plusieurs autres projets <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t. Ce découpage est lié au172 Les pôles « Gestion Intégrée », « transfert », « Bases <strong>de</strong> données », « Géomatique ».310


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcercontexte dans lequel avait été construit ce programme : la sortie d’une importante crise financièrea abouti à la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s effectifs. Ce programme 2006-2010, très morcelé et aux projetsinégaux, résulte <strong>en</strong> partie <strong>de</strong> la priorité donnée à ce que chacun se retrouve dans le programme etsoit év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t responsabilisé <strong>en</strong> étant « chef <strong>de</strong> projet » (Membres TdV, com.pers., 2008).Concrètem<strong>en</strong>t, parmi les onze projets que comptait ce départem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 2006-2010, <strong>de</strong>ux ont étéabandonnés 173 et un arrêté 174 . La poursuite <strong>de</strong>s autres est réorganisée <strong>en</strong> quatre projets (Tableau6.6) :Tableau 6.6 : Evolution <strong>de</strong>s projets dans le départem<strong>en</strong>t « Espèces » <strong>en</strong>tre 2006-2010 et 2011-2015(source : Plan stratégique TdV 2006-2010, 2005 ; Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010)Départem<strong>en</strong>t EspècesProjets 2011-2015 Projets 2006-2010Projet 1. Dynamique <strong>de</strong>spopulations <strong>en</strong> réponseaux activités humainesProjet 2. Ecologie <strong>de</strong> lasanté et conservationProjet 3. Espècesintro<strong>du</strong>ites et interactionsavec les espèces localesProjet 4. Prédiction <strong>de</strong>répartition et <strong>de</strong>ffectifsC.2.2.C.3.C.6.C.8.C.4.C.1.2.C.2.1.C.7.Canards et foulques hivernantsDispersion <strong>du</strong>ne espèce phare, le flamant roseProgrammes <strong>de</strong> suivi à long terme pour les vertébrésGestion et disponibilité <strong>en</strong> ligne (intranet et/ou Internet) <strong>de</strong>sdonnées biologiques, socio-économiques et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesspatialisées pour les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesParasites aviaires dans les zones humi<strong>de</strong>s. Risques pot<strong>en</strong>tielspour la dynamique <strong>de</strong>s populations hôtes, utilisation économique<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et santé humaineRéhabilitation <strong>du</strong>ne espèce m<strong>en</strong>acée, la truite marbrée <strong>en</strong>SlovénieModélisation <strong>de</strong> la population danguilles et son application à la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> la conservationEtu<strong>de</strong> et modélisation <strong>de</strong> la dynamique paysagère <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes : une approche <strong>de</strong> l<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tre géographie et écologieLe tableau 6.6 montre que le cont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> thème « espèces » s’inscrit dans la continuité <strong>du</strong>précéd<strong>en</strong>t programme. L’organisation <strong>de</strong> l’équipe (<strong>du</strong> moins pour les responsables <strong>de</strong> projet) ests<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tique. L’ « intégration » <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces au sein <strong>de</strong> ce départem<strong>en</strong>t dépr<strong>en</strong>draalors <strong>de</strong>s besoins, <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t ou <strong>de</strong> la motivation <strong>de</strong> l’équipe.L’opération a été plus complexe pour le départem<strong>en</strong>t « écosystèmes » notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> raison d’unchangem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> coordination <strong>en</strong> cours <strong>du</strong> processus <strong>de</strong> planification stratégique, mais aussisimplem<strong>en</strong>t parce que ce départem<strong>en</strong>t est le plus hétérogène <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> thématique et <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>d’action. Le plan stratégique 2011-2015 prés<strong>en</strong>te néanmoins un départem<strong>en</strong>t comptant quatreprojets ambitieux et impliquant une bonne coordination au sein <strong>de</strong> l’équipe, résultat obt<strong>en</strong>u au173 Par manque <strong>de</strong> ressources humaines pour le projet concernant « le contrôle d’une espèce exotique <strong>en</strong>vahissante(Baccharis halimifolia) dans le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Rhône ».174 Le travail sci<strong>en</strong>tifique est arrivé à son terme sur la problématique <strong>de</strong> l’ « Ecologie et conservation <strong>du</strong> pélican friséet <strong>du</strong> pélican blanc <strong>en</strong> Europe <strong>du</strong> sud-est ».311


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleterme d’un an <strong>de</strong> travail animé par le directeur <strong>du</strong> programme <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux phases : une phasecollective, impliquant l’équipe dans son <strong>en</strong>semble, puis une phase <strong>de</strong> formalisation prise <strong>en</strong> mainpar la chef <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> li<strong>en</strong> avec le directeur <strong>du</strong> programme.Les <strong>de</strong>ux premiers projets sont <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche (Tableau 6.7). Le projet 1 s’inscrit dans lacontinuité <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux projets comm<strong>en</strong>cés p<strong>en</strong>dant le précéd<strong>en</strong>t programme ou avant, le but <strong>de</strong> cecycle quinqu<strong>en</strong>nal étant <strong>de</strong> les mutualiser. Le <strong>de</strong>uxième projet correspond à une nouvellethématique sci<strong>en</strong>tifique. Le troisième rassemble toutes les activités plus techniques ayant trait à la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH (<strong>du</strong> domaine jusqu’aux sites <strong>en</strong> Méditerranée). Il est fort probable que ces « sousprojets» resteront <strong>de</strong>s <strong>en</strong>tités fortes, peut-être au détrim<strong>en</strong>t d’une vraie cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ce projet 3,ri<strong>en</strong> que par le fait qu’il concerne différ<strong>en</strong>ts sites, dont le propre est <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>s fortesspécificités. Enfin le quatrième reste dans la stricte continuité <strong>de</strong> la coordination <strong>du</strong> Pôle relaislagunes méditerrané<strong>en</strong>nes qui est accueilli à la TdV <strong>de</strong>puis sa création <strong>en</strong> 2001.Tableau 6.7 : Evolution <strong>de</strong>s projets dans le départem<strong>en</strong>t « Ecosystèmes » <strong>en</strong>tre 2006-2010 et 2011-2015(source : Plan stratégique TdV 2006-2010, 2005 ; Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010)Départem<strong>en</strong>t EcosystèmesProjets 2011-2015 Projets 2006-2010Projet 1 : Modélisation <strong>de</strong> ladynamique <strong>de</strong>s écosystèmesProjet 2 : Restauration <strong>de</strong>sécosystèmesProjet 3 : Gestion <strong>de</strong>sécosystèmesB.2.1.B.2.2.B.3.1.B.3.2.B.3.3.Prévision et <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts globauxsur les régimes hydrologiques naturels et modifiés <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes : application à la CamargueBiodiversité, <strong>gestion</strong> et usages <strong>de</strong>s marais CamarguePlan <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable et activités <strong>de</strong> restauration sur ledomaineGestion participative et multi-usages <strong>du</strong> VerdierProjet 4 : Pôle relais lagunes B.4. Pôle relais lagunes méditerrané<strong>en</strong>nesEn somme, la planification stratégique a été utilisée comme un mom<strong>en</strong>t pour rep<strong>en</strong>ser lastructuration <strong>de</strong> l’organisation. Plutôt que d’<strong>en</strong>gager <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts importants après un seulplan quinqu<strong>en</strong>nal – certainem<strong>en</strong>t trop court pour ajuster et optimiser son fonctionnem<strong>en</strong>t – lemainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> la structure adoptée <strong>en</strong> 2006 a été préféré. L’aménagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s conditions favorablesà l’optimisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces prévoit, <strong>de</strong> façon verticale, la ré<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> projets,et <strong>de</strong> façon transversale aux départem<strong>en</strong>ts, la création <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces. Dans le cadre<strong>de</strong> la planification stratégique, il n’est cep<strong>en</strong>dant ni possible, ni peut-être souhaitable, <strong>de</strong>formaliser davantage les échanges intra et inter-départem<strong>en</strong>ts, car c’est dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>sactions que les nécessités vont apparaître. Cep<strong>en</strong>dant, on peut craindre que p<strong>en</strong>dant cette mise <strong>en</strong>œuvre, c’est-à-dire le plus souv<strong>en</strong>t dans l’urg<strong>en</strong>ce et les contraintes respectives <strong>de</strong> chacun, les312


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerresponsables <strong>de</strong>s projets ne pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas le temps <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser aux synergies pot<strong>en</strong>tielles quipourrai<strong>en</strong>t émerger d’un travail plus collectif <strong>en</strong> interne, ce qui peut <strong>en</strong> outre être exacerbé parl’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la taille <strong>de</strong>s projets ré<strong>du</strong>isant la capacité <strong>de</strong> leurs responsables respectifs àdépasser la logique <strong>de</strong> leur projet.6.2.3 Acquérir <strong>de</strong>s ressources complém<strong>en</strong>taires à travers le réseau et le part<strong>en</strong>ariatLe part<strong>en</strong>ariat est d’abord prés<strong>en</strong>té comme une ressource nécessaire à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong>programme d’action (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 107). Ce que l’organisation nommele « part<strong>en</strong>ariat » r<strong>en</strong>voie à notre <strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, au sein <strong>du</strong>quel les relations<strong>en</strong>tre les acteurs sont plus ou moins formelles (<strong>de</strong> l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> relation directe jusqu’aupart<strong>en</strong>ariat opérationnel). En s’appuyant sur la sociologie <strong>de</strong> l’action organisée <strong>de</strong> Crozier etFriedberg (1977), nous avons été att<strong>en</strong>tive à la façon dont la TdV se positionne pour augm<strong>en</strong>terses marges <strong>de</strong> manœuvres et ses ressources dans l’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Cettelecture peut être <strong>en</strong>richie <strong>en</strong> abordant ces relations <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> ressource. Le part<strong>en</strong>ariatconstitue une ressource <strong>en</strong> soi – ressource primaire – qui peut être stratégique lorsqu’il permetl’acquisition d’autres ressources – ressources secondaires. La TdV <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d <strong>en</strong> effet acquérir cesdiffér<strong>en</strong>ts types <strong>de</strong> ressources primaires (1. et 2.) et secondaires (3. et 4.) liées au part<strong>en</strong>ariat :1. Des ressources supplém<strong>en</strong>taires à celles existant <strong>en</strong> interne. Il s’agit <strong>en</strong> particulier <strong>de</strong> la force <strong>de</strong>travail et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et techniques. En effet, les salariés portant le programmed’action rest<strong>en</strong>t peu nombreux au regard <strong>de</strong> l’ampleur <strong>du</strong> programme. Celui-ci est <strong>en</strong> effetsurdim<strong>en</strong>sionné <strong>en</strong> comptant sur le fait qu’aucun <strong>de</strong>s projets prévus ne sera réalisé sanspart<strong>en</strong>ariat. Cela peut paraître un pari osé. Cela ne l’est pas tant si l’on considère l’histoire <strong>de</strong> laTdV qui a toujours su s’associer à différ<strong>en</strong>ts organismes pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ses travaux <strong>de</strong>recherche et <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM. D’autre part, ce pari est cohér<strong>en</strong>t avec un autre type <strong>de</strong>ressources recherchées dans le part<strong>en</strong>ariat (voir le point 3).2. Le <strong>de</strong>uxième type <strong>de</strong> ressources recherché apparaît comme le plus crucial dans le discours <strong>de</strong>smembres <strong>de</strong> la TdV et dans le plan stratégique : il s’agit <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces complém<strong>en</strong>taires <strong>de</strong>celles qui exist<strong>en</strong>t à la TdV, aussi bi<strong>en</strong> dans les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques que dans les modalitésd’actions que ces part<strong>en</strong>aires sav<strong>en</strong>t mettre <strong>en</strong> œuvre.3. Le troisième type <strong>de</strong> ressources peut être qualifié <strong>de</strong> « processuelles » : il s’agit <strong>de</strong> ressourcespro<strong>du</strong>ites par la pratique <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat lui-même. La théorie <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>cesnous suggère <strong>de</strong> porter une att<strong>en</strong>tion à ces créations <strong>de</strong> ressources dans les processus (Teece et al.,1997 ; Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006) et l’approche pratique <strong>de</strong> la stratégie nous y ai<strong>de</strong> (Musca,313


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale2007). Le part<strong>en</strong>ariat est vu comme un moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> décloisonner l’équipe sci<strong>en</strong>tifique et techniquequi reste <strong>de</strong> petite taille, <strong>de</strong> manière à alim<strong>en</strong>ter et à permettre le mainti<strong>en</strong> d’un bon niveau <strong>de</strong>qualité sci<strong>en</strong>tifique à la TdV. De la même manière, l’établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> certains part<strong>en</strong>ariats peutr<strong>en</strong>forcer la notoriété <strong>de</strong> la TdV.4. Enfin, le part<strong>en</strong>ariat peut être lui-même un moy<strong>en</strong> d’acquérir <strong>de</strong>s ressources nouvelles oumanquantes : l’accès à <strong>de</strong> nouveaux réseaux et forums, à <strong>de</strong>s données, <strong>de</strong>s terrains.Les secteurs dans lesquels les part<strong>en</strong>ariats sont recherchés peuv<strong>en</strong>t alors être reliés aux domaines<strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la TdV. A cet effet, repartons <strong>de</strong> notre figure 6.2 qui nous permet à prés<strong>en</strong>t<strong>de</strong> visualiser les principaux secteurs et types d’organismes avec lesquels la TdV établit ou souhaitedévelopper ses part<strong>en</strong>ariats (Figure 6.3).Instituts <strong>de</strong>recherche(objet /disciplines)Institutionsintergouv.sci<strong>en</strong>ces etpolitique<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Sci<strong>en</strong>ce etexpertise dans 9disciplinesThéories,métho<strong>de</strong>s etconnaissances <strong>de</strong>terrainGestion d’espaceprotégé(domaine TdV2600ha)Elaboration <strong>de</strong>systèmes <strong>de</strong> suivi<strong>de</strong>s ZHMElaboration <strong>de</strong>plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>ZH (<strong>en</strong> réserve ethors réserve)Relationsinstitutionnelles,connaissancesfonctionnem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s politiquespubliques<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesTransfert <strong>de</strong>sconnaissances etmétho<strong>de</strong>s (direct etindirect)Relations directesavec les acteurssectorielsInstitutionspubliquesFrance,MéditerranéeONGconservationRéseauxGestionnairesEPOrganismesGestionnairesCamargueOrganismesGestionnaireslocaux Médit.Figure 6.3 : Principaux secteurs dans lesquels la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> possè<strong>de</strong> et développe ses part<strong>en</strong>ariats(source : à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)314


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerDurant la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> planification stratégique, un travail a été effectué par la direction <strong>de</strong> la TdVpour id<strong>en</strong>tifier les organismes avec lesquels r<strong>en</strong>forcer ou développer <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s et les att<strong>en</strong>tes vis-àvis<strong>de</strong> ces part<strong>en</strong>aires pot<strong>en</strong>tiels. Concernant la recherche sci<strong>en</strong>tifique, les part<strong>en</strong>aires id<strong>en</strong>tifiéssont <strong>de</strong>s institutions <strong>de</strong> recherche et les domaines sont nombreux 175 . Pour les multiples autresdim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV, les types d’organismes sont évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t plus variés, <strong>en</strong> étantplus ou moins liés à l’activité sci<strong>en</strong>tifique, au domaine <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> sites, ou à la scènepolitique. De même, les att<strong>en</strong>tes sont diverses, cep<strong>en</strong>dant sans li<strong>en</strong> exclusif <strong>en</strong>tre un typed’organismes et la fonction recherchée <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat (Tableau 6.8) :Tableau 6.8 : Att<strong>en</strong>tes vis-à-vis <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat et types d’organismes visés dans le domaine <strong>de</strong> laconservation (source : à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)Institutionsintergouvernem<strong>en</strong>talessci<strong>en</strong>cespolitiquesInstitutionspubliquesnationalesONGConservationRéseaux<strong>gestion</strong>nairesespacesprotégésGestionnaireslocauxAppui au développem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> politiques et stratégies<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>sDéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>plateforme sci<strong>en</strong>cepolitiques/OZHMAssistance à la mise <strong>en</strong>œuvre d’une <strong>gestion</strong>intégrée et adaptativeTransfert <strong>de</strong> savoirs etd’information <strong>en</strong> direction<strong>de</strong>s acteurs clésRelais d’influ<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong>plaidoyerSelon les champs d’action ou les projets développés par la TdV, les relations <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat sontdiverses tant dans la modalité et l’int<strong>en</strong>sité que dans la temporalité. Nous pouvons à prés<strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre la grille esquissée au chapitre 3 176 à propos <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique. Nous ydistinguions les relations selon leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> formalisation. Il serait <strong>en</strong> effet ré<strong>du</strong>cteur <strong>de</strong> ne t<strong>en</strong>ircompte que <strong>de</strong>s relations qui pr<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t la forme d’un part<strong>en</strong>ariat formalisé par un contrat ou unautre type d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t. Dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> ses activités, la TdV <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t et développe<strong>de</strong> multiples formes <strong>de</strong> relations qui peuv<strong>en</strong>t aboutir ou non à un part<strong>en</strong>ariat opérationnel et175 Il s’agit <strong>de</strong> disciplines issues <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’écologie et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t : dynamique <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong>vertébrés, modélisation spatiale <strong>de</strong> la distribution <strong>de</strong>s espèces et <strong>de</strong>s écosystèmes, écologie <strong>de</strong>s oiseaux d’eau, <strong>de</strong>sinvertébrés, <strong>de</strong> la végétation, <strong>de</strong> la santé, <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s données, analyses <strong>de</strong>s données temporelles, indicateurs,changem<strong>en</strong>ts globaux et restauration écologique (Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 107).176 Voir la section 3.2.4 <strong>du</strong> Chapitre 3.315


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleformel. Repartons alors <strong>de</strong>s quatre niveaux <strong>de</strong> formalisation <strong>de</strong>s relations proposés au chapitre 3et complétons les.1. Le réseau « naturel impersonnel » : comme indiqué au chapitre 3, la TdV intègre lescommunautés sci<strong>en</strong>tifiques disciplinaires ou interdisciplinaires autour <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHet <strong>de</strong> la biodiversité grâce à son activité <strong>de</strong> recherche. Elle a égalem<strong>en</strong>t sa place dans les réseauxd’ONG <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la nature.2. Le réseau « personnel » : dans leur domaine d’expertise et d’activité (<strong>de</strong>s activités sci<strong>en</strong>tifiquesjusqu’aux relations institutionnelles), les membres <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> la TdV développ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s relationspersonnelles – ou conserv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s relations établies antérieurem<strong>en</strong>t – avec <strong>de</strong>s membres d’autresorganisations à travers <strong>de</strong> simples r<strong>en</strong>contres ou <strong>de</strong>s premiers travaux communs. Ces relationssont <strong>en</strong>suite <strong>de</strong>s ressources importantes dans lesquelles puiser lorsque les opportunités d’actionsou <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t. Dans le même s<strong>en</strong>s, ce type <strong>de</strong> relations est crucial pourl’échange d’information. Au niveau <strong>de</strong> la Camargue, permettons-nous cette simple formule :« tout le mon<strong>de</strong> se connaît ». Nous avons étudié <strong>en</strong> détail les relations locales <strong>de</strong> la TdV à partird’un inv<strong>en</strong>taire exhaustif <strong>de</strong>s relations <strong>en</strong> Camargue <strong>de</strong> toute l’équipe « programme » et <strong>de</strong> ladirection <strong>de</strong> l’organisation. Si « tout le mon<strong>de</strong> se connaît », les relations fonctionnelles sont, sanssurprise, fidèles : (1) à la hiérarchie, par exemple, les relations institutionnelles se pass<strong>en</strong>t auniveau <strong>de</strong>s directions ; (2) aux domaines <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces, par exemple, les <strong>gestion</strong>naires <strong>du</strong>domaine <strong>de</strong> la TdV connaiss<strong>en</strong>t les technici<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s autres organismes <strong>gestion</strong>naires d’espacesprotégés ; et (3) aux objets <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe, par exemple, l’ornithologueconnaît les chasseurs, tandis que l’hydrologue connaît les responsables et les technici<strong>en</strong>s <strong>de</strong>sorganismes <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong>s équipem<strong>en</strong>ts.Le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s relations dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique peut se lire dans l’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> laparticipation <strong>de</strong>s chercheurs à divers comités sci<strong>en</strong>tifiques et dans l’augm<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong>collaborations formelles dont nous parlerons au point 4. Le développem<strong>en</strong>t substantiel <strong>de</strong>l’OZHM a <strong>en</strong>traîné le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> relations personnelles avec plusieurs organismessci<strong>en</strong>tifiques et techniques intergouvernem<strong>en</strong>taux (comme les C<strong>en</strong>tres techniques europé<strong>en</strong>s <strong>de</strong>l’Ag<strong>en</strong>ce europé<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ou les c<strong>en</strong>tres techniques <strong>de</strong> la Conv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>Barcelone : Plan Bleu, etc.).3. Le réseau organisationnel : au chapitre 3, nous avons indiqué qu’il est intéressant <strong>de</strong>distinguer le réseau « organisationnel » <strong>du</strong> réseau « personnel » pour différ<strong>en</strong>cier les organismesavec lesquels il y a une « reconnaissance » d’organisation à organisation. Dans ce « réseauorganisationnel », plusieurs niveaux peuv<strong>en</strong>t être distingués. D’une part, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s relationspersonnelles, la TdV a ce que l’on pourrait qualifier <strong>de</strong> fort « réseau organisationnel d’ancrage316


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerterritorial » dans son lieu d’implantation <strong>en</strong> Camargue où elle est incontournable, <strong>en</strong> tantqu’organisme sci<strong>en</strong>tifique, technique et <strong>gestion</strong>naire.D’autre part, la TdV possè<strong>de</strong> un « réseau historique » légué par son fondateur. Il confèr<strong>en</strong>otamm<strong>en</strong>t à la TdV la possibilité d’avoir <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s directs avec les directions <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tesONGE (com.pers., 2008), pouvant être intéressants sur le plan <strong>de</strong> l’information notamm<strong>en</strong>t.Certaines <strong>de</strong> ces relations sont faibles : elles sont <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ues mais peu exploitées par la direction(com.pers., 2008) et t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à s’épuiser d’elles-mêmes avec les permutations générationnelles.D’autres sont au contraire restées assez actives dans le temps pour former aujourd’hui le réseauorganisationnel privilégié <strong>de</strong> la TdV. Dans le domaine <strong>de</strong> la recherche, il s’agit <strong>en</strong> particulierd’institutions comme l’Edward Grey Institute <strong>en</strong> Gran<strong>de</strong>-Bretagne et la station biologique <strong>de</strong>Doñana <strong>en</strong> Espagne. Dans le secteur <strong>de</strong>s ONG <strong>de</strong> conservation, Wetlands International, WWFMedPo et l’UICN Med sont les relations organisationnelles fixes, bi<strong>en</strong> qu’elles puiss<strong>en</strong>t rester nonopérationnelles p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong> longues pério<strong>de</strong>s comme p<strong>en</strong>dant le plan 2006-2010.4. Le part<strong>en</strong>ariat : rappelons que nous restreignons le part<strong>en</strong>ariat aux aspects opérationnelsm<strong>en</strong>és conjointem<strong>en</strong>t (peu importe le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> participation <strong>de</strong>s parties) par les <strong>de</strong>ux acteurs /organismes. Dans les cas d’étu<strong>de</strong> prés<strong>en</strong>tés dans la partie 2, nous avons r<strong>en</strong>contré plusieursexemples <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats opérationnels que nous avons nommé l’<strong>en</strong>semble agissant pourl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Le part<strong>en</strong>ariat est une configuration temporaire, le plus souv<strong>en</strong>t formalisée parune conv<strong>en</strong>tion ou un contrat ; certains sont poursuivis dans le long terme et peuv<strong>en</strong>t êtrequalifié <strong>de</strong> perman<strong>en</strong>ts. Dans le domaine <strong>de</strong> la recherche, le part<strong>en</strong>ariat pr<strong>en</strong>d principalem<strong>en</strong>t laforme <strong>de</strong> co-<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> doctorants, mais aussi <strong>de</strong> projets financés dans le cadre <strong>de</strong>programmes nationaux (ANR) ou régionaux. Les activités <strong>de</strong> recherche impliqu<strong>en</strong>t néanmoins lepart<strong>en</strong>ariat avec <strong>de</strong>s organismes <strong>gestion</strong>naires comme nous avons pu le constater dans lesexemples <strong>du</strong> chapitre 3. Le lecteur se souvi<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> chapitre 5 où un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux forts <strong>de</strong>la construction <strong>de</strong> l’OZHM est justem<strong>en</strong>t l’établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> collaborations tangibles. Lespart<strong>en</strong>ariats qui sont créés à travers ce dispositif s’ét<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s organismes sci<strong>en</strong>tifiques ettechniques (spécialisés dans les systèmes <strong>de</strong> suivis, indicateurs) aux organismes <strong>gestion</strong>naires <strong>de</strong>sites.Cette grille <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>sité <strong>de</strong>s relations, issue <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s relations externes <strong>de</strong> la TdV, nouspermet d’id<strong>en</strong>tifier plus précisém<strong>en</strong>t les pratiques visant à conforter ces ressources. Nousdistinguons 3 types <strong>de</strong> pratiques ayant lieu aux échelles institutionnelles (mainti<strong>en</strong>, r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la visibilité et reconnaissance <strong>de</strong> la TdV pour augm<strong>en</strong>ter ses capacités) et opérationnelle(mainti<strong>en</strong> et utilisation <strong>de</strong>s capacités supplém<strong>en</strong>taires) (Tableau 6.9) : (1) maint<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s réseaux317


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepersonnels et organisationnels (d’ancrage territorial et historique) ; (2) intégrer <strong>de</strong> nouveauxréseaux et développer <strong>de</strong> nouvelles relations dans les champs d’action à r<strong>en</strong>forcer ; (3) à partir <strong>de</strong>ces réseaux et relations, formaliser les part<strong>en</strong>ariats nécessaires à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme.Tableau 6.9 : Pratiques pour le mainti<strong>en</strong> et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s réseaux et <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariatPratiques Niveau institutionnel Niveau opérationnelMainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s réseaux Organisationnels PersonnelsIntégration <strong>de</strong> nouveauxréseauxPart<strong>en</strong>ariatReconnaissance et id<strong>en</strong>tificationTdV dans nouveaux réseauxDéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nouvellesrelationsFormalisation <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariatsnécessaires à la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>du</strong> programmeA partir <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>uxième grille <strong>de</strong>s pratiques visant à r<strong>en</strong>forcer les ressources « réseaux etpart<strong>en</strong>ariat », nous pouvons examiner plus précisém<strong>en</strong>t les objectifs stratégiques annoncés dans leplan stratégique 2011-2015 (Plan stratégique TdV 2011-2015 : 107-113). Rappelons que cesobjectifs éman<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s relations et <strong>de</strong>s domaines nécessitant le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>part<strong>en</strong>ariat réalisé par la direction au cours <strong>de</strong> la planification stratégique. Dans cette analyse <strong>de</strong> ladirection, les part<strong>en</strong>aires pot<strong>en</strong>tiels sont classés <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s att<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> la TdV (domainessci<strong>en</strong>tifiques et champs d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale), <strong>de</strong> l’int<strong>en</strong>sité <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat existant et <strong>de</strong>sobjectifs <strong>de</strong> mainti<strong>en</strong> ou r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces relations. Nous retravaillons ici cette analyse à l’ai<strong>de</strong><strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux grilles fondées à partir <strong>de</strong> nos étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas – types <strong>de</strong> relations (réseauximpersonnels jusqu’au part<strong>en</strong>ariat) et pratiques id<strong>en</strong>tifiées – d’où nous tirons 3 situations : (1) leréseau et le part<strong>en</strong>ariat exist<strong>en</strong>t et sont à maint<strong>en</strong>ir [<strong>en</strong> gris] ; (2) le réseau est développé, mais laformalisation <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat reste à opérer [<strong>en</strong> vert clair] ; (3) le réseau et le part<strong>en</strong>ariat sont àdévelopper [<strong>en</strong> vert foncé]. Les objectifs visant à augm<strong>en</strong>ter les capacités sont prés<strong>en</strong>tés auxtableaux 6.10 (recherche sci<strong>en</strong>tifique) et 6.11 (autres champs d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale).Tableau 6.10 : Réseaux et part<strong>en</strong>ariat à maint<strong>en</strong>ir et développer dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique (source :auteur, à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)Domaine sci<strong>en</strong>tifiqueChamps <strong>de</strong> recherche historique "cœur <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces TdV"Dynamique <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong> vertébrésModélisation spatiale <strong>de</strong> la distribution <strong>de</strong>s espèces et <strong>de</strong>sécosystèmesEcologie <strong>de</strong>s oiseaux d’eauEcologie <strong>de</strong>s invertébrésEcologie <strong>de</strong> la végétation/ conservation <strong>de</strong>s plantesEcologie <strong>de</strong> la santéRessources réseaux etpart<strong>en</strong>ariat318


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerGestion <strong>de</strong>s données, analyses <strong>de</strong>s données temporelles,indicateurs, changem<strong>en</strong>ts globauxChamps <strong>en</strong> développem<strong>en</strong>t à la TdVRestauration écologique.Services écosystémiquesRelations Homme-NatureR<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> capacités dans la région méditerrané<strong>en</strong>neDéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projets dans le bassin méditerrané<strong>en</strong>hors UETableau 6.11 : Réseaux et part<strong>en</strong>ariat à maint<strong>en</strong>ir et développer dans les différ<strong>en</strong>ts champs d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur, à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)Institutionsintergouvernem<strong>en</strong>talessci<strong>en</strong>cespolitiquesInstitutionspubliquesnationalesONGConservationRéseaux<strong>gestion</strong>nairesespacesprotégésGestionnaireslocauxAppui au développem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> politiques et stratégies<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>sDéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>plateforme sci<strong>en</strong>cepolitiques/OZHMAssistance à la mise <strong>en</strong>œuvre d’une <strong>gestion</strong>intégrée et adaptativeTransfert <strong>de</strong> savoirs etd’information <strong>en</strong> direction<strong>de</strong>s acteurs clésRelais d’influ<strong>en</strong>ce et <strong>de</strong>plaidoyerRéseau et part<strong>en</strong>ariat à maint<strong>en</strong>irRéseau établi et part<strong>en</strong>ariat à développerRéseau et part<strong>en</strong>ariat à développerCette grille met <strong>en</strong> visibilité plusieurs phénomènes. Dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique, l’organisationcherche à développer <strong>de</strong>s relations nouvelles dans les domaines où elle a déjà une certaine assise(domaines « cœur <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce » où elle a déjà un bon réseau), tandis que pour les domainesplus récemm<strong>en</strong>t investis, elle <strong>en</strong>visage plutôt <strong>de</strong> chercher <strong>de</strong>s appuis opérationnels dans sonréseau existant. Ceci peut s’expliquer par le fait que dans ses domaines « cœur <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces »,la TdV connaît assez bi<strong>en</strong> le secteur pour id<strong>en</strong>tifier les organismes pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t intéressantspour son programme. Elle a <strong>en</strong> outre une certaine légitimité qui lui permet d’être proactive pourcréer <strong>de</strong> nouveaux li<strong>en</strong>s dans ces communautés sci<strong>en</strong>tifiques. Dans les champs qu’elle cherche àdévelopper, la situation est inverse : l’organisation a une moins bonne connaissance <strong>de</strong>slaboratoires spécialisés dans ces domaines dans lesquels elle est <strong>en</strong>core peu visible et a justem<strong>en</strong>t319


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taled’autant plus besoin <strong>de</strong> formaliser <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats à même <strong>de</strong> lui octroyer un véritable appuiopérationnel. Elle t<strong>en</strong>te alors <strong>de</strong> l’acquérir dans son réseau où elle profite déjà d’une certainereconnaissance.Dans les autres champs d’action pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM (Tableau 6.11), nous observonsune bonne intégration <strong>de</strong> la TdV dans les réseaux <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels et <strong>de</strong>srelations déjà opérationnelles au niveau local. La nature <strong>de</strong>s relations que la TdV <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t avecles autres ONG <strong>de</strong> conservation agissant <strong>en</strong> Méditerranée est ici notable : les relations exist<strong>en</strong>t,c’est un réseau (personnel et organisationnel) qui fonctionne <strong>en</strong> terme d’échanges d’informationsnotamm<strong>en</strong>t, mais la formalisation <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariats plus opérationnels n’est pas si simple avec cesorganisations. En ce qui concerne l’action aux échelles nationales ou méditerrané<strong>en</strong>ne, la grillepermet d’observer que le réseau et les relations fonctionnelles rest<strong>en</strong>t à développer. Cecis’explique par le sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’OZHM, <strong>en</strong>core <strong>en</strong> construction (Chapitre 5). Sondéveloppem<strong>en</strong>t nécessite l’acquisition <strong>de</strong> ces ressources <strong>en</strong> réseaux et part<strong>en</strong>ariat, apparaissant<strong>en</strong>core comme <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux à relever.Ces objectifs pour r<strong>en</strong>forcer le part<strong>en</strong>ariat ont été p<strong>en</strong>sés à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation. Plutôt que<strong>de</strong> réels objectifs à atteindre au cours <strong>de</strong>s 5 années <strong>du</strong> plan, ils constitu<strong>en</strong>t seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s repèresdonnant une image à l’organisation <strong>de</strong> sa propre place dans le secteur <strong>de</strong> la recherche et <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s ZHM (Direction TdV, com.pers., 2010). Les objectifs réels <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sesitu<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s projets, dans la mesure où leur mise <strong>en</strong> œuvre <strong>en</strong> dép<strong>en</strong>d.6.2.4 Entre développem<strong>en</strong>t interne et li<strong>en</strong> à l’externe : l’évolution <strong>de</strong> lagouvernance pour le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités d’actionAvant <strong>de</strong> clore cette section concernant la stratégique d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> la TdV, ilconvi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> m<strong>en</strong>tionner un <strong>de</strong>rnier élém<strong>en</strong>t qui est apparu au cours <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux années <strong>de</strong>planification stratégique et id<strong>en</strong>tifié par la direction <strong>de</strong> la TdV comme faisant partie <strong>de</strong>s levierspouvant favoriser le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> l’organisation. Il s’agit <strong>de</strong> la gouvernance etsurtout <strong>de</strong> son évolution 177 . Précisons que l’évolution <strong>de</strong> la gouvernance n’est pas strictem<strong>en</strong>t liéeà la planification stratégique pour le programme 2011-2015, mais davantage à la clarification <strong>de</strong>sstatuts <strong>de</strong> la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> opérée <strong>en</strong> 2008. En effet, les statuts d’origine <strong>de</strong> la TdVétai<strong>en</strong>t complexes. Le fondateur avait d’abord créé la Fondation suisse <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Pour <strong>de</strong>squestions légales liées aux contrats <strong>de</strong>s salariés, il avait dû créer une fondation française, laFondation Sansouire, qui puisse employer le personnel. La Fondation suisse <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> avait177 La gouvernance <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> est détaillée dans la prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’organisation (Chapitre 2, section 2.1).320


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forceralors gardé les fonctions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> financière et <strong>de</strong> la gouvernance et les activités étai<strong>en</strong>t réaliséessous la fondation française. Depuis 2005, et « dans un souci <strong>de</strong> simplification, d’efficacité et <strong>de</strong>transpar<strong>en</strong>ce » (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 105), ces statuts ont été révisés et validéspar le Conseil d’Etat français <strong>en</strong> 2008 : la Fondation Sansouire est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong>, française, et gère désormais toutes les activités <strong>de</strong> la TdV, son budget, avec <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong>gouvernance propres. La fondation suisse est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue la Fondation Pro-<strong>Valat</strong> et ne gère plus quele capital dont les divid<strong>en</strong><strong>de</strong>s sont alloués à la Fondation <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (<strong>en</strong> tant que « fondspropres »). La réflexion stratégique que nous avons pu observer à propos <strong>de</strong> la gouvernance n’estdonc que la continuité d’une int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> la TdV <strong>de</strong> saisir cette évolution pourr<strong>en</strong>dre plus fonctionnelles les relations <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance(Direction TdV, com.pers., 2008). La gouvernance est <strong>en</strong> effet une <strong>en</strong>tité d’interface <strong>en</strong>trel’interne et l’externe <strong>de</strong> l’organisation jouant <strong>de</strong>s rôles spécifiques et pouvant être pourvoyeuse <strong>de</strong>ressources.Pour saisir les att<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> la direction vis-à-vis <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance et les rôles que ces<strong>de</strong>rniers peuv<strong>en</strong>t jouer, une remise <strong>en</strong> perspective historique – tant <strong>de</strong> l’organisation que <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans lequel elle évolue – s’impose. Ceci a fait l’objet d’une étu<strong>de</strong> et d’une analysespécifiques (Guillet & Leroy, 2010).Le lecteur se doute que la gouvernance <strong>de</strong> l’organisation a évolué au cours <strong>de</strong> son <strong>de</strong>mi-siècled’exist<strong>en</strong>ce, et cela, <strong>en</strong> parallèle <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong> ses activités. Trois pério<strong>de</strong>s ont été id<strong>en</strong>tifiées :1. De la création <strong>de</strong> la TdV à 1992 : l’<strong>en</strong>jeu principal était d’asseoir l’expertise sci<strong>en</strong>tifique. A cetteépoque, la TdV était déjà dotée d’un conseil d’administration, mais l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> celui-ci étaitsurtout liée à <strong>de</strong>s exig<strong>en</strong>ces statutaires et légales. Le fondateur était le principal déci<strong>de</strong>ur, tantpour les actions que pour la <strong>gestion</strong> budgétaire. En revanche, sa préoccupation était <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> laTdV un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche reconnu, il a pour cela prêté une att<strong>en</strong>tion particulière à laconstitution d’un conseil sci<strong>en</strong>tifique à même <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r et <strong>de</strong> légitimer son activité sci<strong>en</strong>tifique <strong>en</strong>développem<strong>en</strong>t. Depuis, le conseil sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV est composé d’émin<strong>en</strong>ts sci<strong>en</strong>tifiques <strong>en</strong>écologie et experts <strong>de</strong>s ZH, très att<strong>en</strong>tifs à la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la fondation. Cessci<strong>en</strong>tifiques véhiculai<strong>en</strong>t une vision où la recherche est à la fois une finalité et est suffisante <strong>en</strong>termes d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, dans une logique positiviste où l’efficacité <strong>de</strong> l’action pourraitse résumer à l’efficacité <strong>de</strong> la connaissance ou <strong>de</strong>s techniques mobilisées (dans la même logique,voir le dispositif <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> décrit par Doré et al., 2008).2. En 1992 : la décision est prise d’intégrer la conservation comme nouveau mo<strong>de</strong> d’action,complém<strong>en</strong>taire <strong>de</strong> la recherche. Cette décision comportait <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux très forts d’évolutionorganisationnelle, y compris au sein <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance. Or, le principal changem<strong>en</strong>t mis321


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>en</strong> œuvre a été la modification <strong>de</strong> la composition <strong>du</strong> CA : <strong>de</strong>ux experts internationaux <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s ZHM ont remplacé <strong>de</strong>ux sci<strong>en</strong>tifiques 178 <strong>du</strong> CA dès 1992-1993. Mais le CAjouant surtout le rôle <strong>de</strong> ratification <strong>de</strong>s décisions <strong>du</strong> directeur (le fondateur), ce changem<strong>en</strong>ts’avère mineur dans le contrôle <strong>de</strong> l’action, et ne suffit pas à <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer un nouvel équilibre <strong>en</strong>treles activités <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation. Le manque <strong>de</strong> portage <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> conservationpar le CS fait qu’elle peine à se définir une ligne claire au sein <strong>de</strong> l’organisation. D’autant plus quel’activité <strong>de</strong> conservation est plus technique, plus difficilem<strong>en</strong>t définissable et interfère plusdirectem<strong>en</strong>t avec les <strong>en</strong>jeux socio-économiques <strong>de</strong>s zones d’interv<strong>en</strong>tion. Elle fait donc appel à<strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong>s expertises où la dim<strong>en</strong>sion sociale est stratégique, aussi bi<strong>en</strong> dansl’analyse <strong>de</strong>s problèmes que dans la façon d’<strong>en</strong>visager leur résolution, <strong>en</strong> particulier par un travailavec et sur les différ<strong>en</strong>ts acteurs <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui ont un impact négatif sur les ZH.L’<strong>en</strong>jeu était donc <strong>de</strong> faire évoluer les organes <strong>de</strong> gouvernance pour un souti<strong>en</strong> plus fort <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV, <strong>de</strong> la recherche à la conservation. C’est au cours <strong>de</strong> la troisièmepério<strong>de</strong> id<strong>en</strong>tifiée – sur laquelle nous pouvons à prés<strong>en</strong>t nous conc<strong>en</strong>trer - qu’une évolution plussubstantielle va avoir lieu.3. En réalité, les prémisses <strong>de</strong> cette évolution sont apparus <strong>en</strong> 2003, avant le changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>statut qui est <strong>en</strong> partie une <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> cette date cruciale pour l’organisation. En effet,2003 est l’année <strong>de</strong> la crise financière qu’a connue la TdV suite à une baisse <strong>de</strong> rémunération <strong>du</strong>capital liée à <strong>de</strong>s facteurs conjoncturels affectant les marchés. Elle met la nouvelle – actuelle –Direction et son Bureau face à l’alternative suivante : ré<strong>du</strong>ire les effectifs, et par conséqu<strong>en</strong>tl’activité, pour t<strong>en</strong>ir dans un budget désormais plus bas ; ou trouver <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts externespour rester dans le même budget annuel 179 et supprimer le minimum <strong>de</strong> postes – c’est <strong>de</strong> là quedate l’exig<strong>en</strong>ce d’acquérir 25 à 30% <strong>du</strong> budget par <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts externes. C’est <strong>en</strong> effet la<strong>de</strong>uxième option qui a été ret<strong>en</strong>ue – par la direction <strong>en</strong> accord avec le Bureau – d’une part parsolidarité avec le personnel, mais aussi pour ne pas r<strong>en</strong>oncer aux capacités d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale acquises avant tout par les compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> l’organisation, comme nous l’avonsévoqué : « notre force, c’est le personnel, donc plus on le ré<strong>du</strong>it, plus on ré<strong>du</strong>it notre impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal »(Direction TdV, com.pers., 2009). Par ce choix, les dirigeants <strong>de</strong> la TdV ont accepté quel’organisation soit plus dép<strong>en</strong>dante <strong>de</strong> son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t extérieur, mais paradoxalem<strong>en</strong>t, cetterupture a égalem<strong>en</strong>t marqué le début d’un processus d’autonomisation <strong>de</strong> l’organisation vis-à-vis<strong>de</strong> son fondateur 180 . Parallèlem<strong>en</strong>t, le développem<strong>en</strong>t souhaité <strong>de</strong> l’organisation passe178 A cette époque les experts <strong>du</strong> CA étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques.179 Environ 4 millions d’euros180 Celui-ci se retirant progressivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la décision et <strong>de</strong> l’action, cette prise d’autonomie est, <strong>en</strong> tout état <strong>de</strong> cause,nécessaire.322


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcernécessairem<strong>en</strong>t par une plus gran<strong>de</strong> connexion et confrontation à son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t extérieur.Ainsi, même si la TdV ne doit acquérir qu’un quart <strong>de</strong> son budget annuel par financem<strong>en</strong>tsexternes, l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la Fondation doit inexorablem<strong>en</strong>t adopter un modèle organisationnel luipermettant <strong>de</strong> répondre aux appels d’offre. Pour cela, elle a adopté une approche projet, « qui[lui] semble être l’unité pertin<strong>en</strong>te, <strong>en</strong> termes d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale mais aussi <strong>en</strong> termes d’intégration et <strong>de</strong>valorisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> interne » (Direction TdV, com.pers. 2009). En affirmant cefonctionnem<strong>en</strong>t – et <strong>en</strong> cherchant à le r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus fonctionnel avec le travail sur laré<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> nombre <strong>de</strong> projets pour le programme 2011-2015 – la TdV ne fait qu’<strong>en</strong>tériner uneévolution générale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t politique et institutionnel qui constitue la toile <strong>de</strong> fond <strong>de</strong>son action. Le fonctionnem<strong>en</strong>t par programme ou projet, et les modèles organisationnelsinhér<strong>en</strong>ts à ce fonctionnem<strong>en</strong>t, se sont largem<strong>en</strong>t imposés à l’international (Leroy, 2008), et parleur flexibilité dans un contexte <strong>de</strong> mélange <strong>en</strong>tre les sphères publiques et privées (Duran, 1999).Ces formes d’action « projet » qui émerg<strong>en</strong>t dans ce contexte t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à se généraliser <strong>de</strong>puis lesannées 1990 au point <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir, selon L. Boltanski et E. Chiapello (1999), une dim<strong>en</strong>sionorganisatrice <strong>de</strong> nos sociétés.Ainsi, pour consacrer cette prise d’autonomie, les organes <strong>de</strong> gouvernance doiv<strong>en</strong>t jouerpleinem<strong>en</strong>t leur rôle – notamm<strong>en</strong>t légitimer et garantir la transpar<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’organisation – et sontvus comme <strong>de</strong>s <strong>en</strong>tités susceptibles <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir l’organisation dans sa nécessaire intégration à son<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t politique et institutionnel. Si les décisions se prépar<strong>en</strong>t toujours <strong>en</strong>tre la Directionet le Bureau, il y a une att<strong>en</strong>te plus gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Direction vis-à-vis <strong>du</strong> CA et <strong>du</strong> CS.Rôle dans la dim<strong>en</strong>sion stratégique <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleL’urg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s questions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, la structuration <strong>de</strong> ce champ et la normalisation <strong>de</strong>scadres dans lesquelles les ONGE peuv<strong>en</strong>t agir (liée à la logique programme – appels d’offre –projets) sont autant <strong>de</strong> facteurs qui pouss<strong>en</strong>t les organisations à s’adapter plus vite, mais qui ner<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t que plus délicat l’exercice <strong>de</strong> réflexion stratégique auquel elles doiv<strong>en</strong>t procé<strong>de</strong>r. Le souci<strong>du</strong> CS d’être garant d’une recherche <strong>de</strong> haut niveau constitue certes une ressource stratégique à laTdV, qui profite à la fois à son action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et à sa légitimité. Mais les att<strong>en</strong>tes <strong>de</strong> laDirection vis-à-vis <strong>de</strong> son CS sont maint<strong>en</strong>ant plus pressantes, notamm<strong>en</strong>t pour les questionsactuellem<strong>en</strong>t cruciales d’articulations « sci<strong>en</strong>ces – actions », et « sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la conservation –sci<strong>en</strong>ces sociales » tant pour la valorisation <strong>de</strong> la recherche sur les ZH, que pour ses projets <strong>de</strong>conservation. La TdV se trouve, <strong>en</strong> effet, au carrefour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s <strong>en</strong> évolution :- celui <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique qui est aujourd’hui poussée à être plus appliquée. Cettequestion est <strong>de</strong> première importance pour la TdV qui est mixte <strong>de</strong>puis 1992, ce qui l’a con<strong>du</strong>it à323


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepr<strong>en</strong>dre une certaine avance volontiers reconnue par son CS notamm<strong>en</strong>t. La TdV a intérêt àrester bi<strong>en</strong> positionnée sur cette niche d’interface <strong>en</strong>tre la sci<strong>en</strong>ce et les pratiques sur laquelle elleest à ce jour sans concurr<strong>en</strong>ce forte dans ses zones d’interv<strong>en</strong>tions, et parce que sa recherche trèsancrée au terrain attire les part<strong>en</strong>aires <strong>de</strong>s instituts sci<strong>en</strong>tifiques qui aurai<strong>en</strong>t pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>tmoins besoin d’elle s’ils v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t à développer eux-mêmes ces ancrages ;- celui <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la nature, qui <strong>en</strong> constante quête <strong>de</strong> légitimité, se trouve soumise àune gran<strong>de</strong> instabilité <strong>de</strong>s doctrines d’action et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’évaluation, véhiculésnotamm<strong>en</strong>t par les conv<strong>en</strong>tions internationales et par les bailleurs institutionnels.La question <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, déclinée sous différ<strong>en</strong>tes formes, va alors constituerl’ess<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong>s discussions qui auront lieu au CS et au CA. Le débat <strong>en</strong>tre la poursuite <strong>de</strong> certainesactions <strong>de</strong> long terme et le développem<strong>en</strong>t d’innovations va s’équilibrer au sein <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong>gouvernance parce qu’y sièg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s experts patrimoniaux, connaissant la TdV <strong>de</strong> longue date, et<strong>de</strong>s membres plus récemm<strong>en</strong>t intégrés et porteurs <strong>de</strong> visions nouvelles. Le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’activité <strong>de</strong> conservation n’est donc <strong>en</strong> aucun cas opposé à celui <strong>de</strong> la recherche, l’<strong>en</strong>jeu est aucontraire <strong>de</strong> l’<strong>en</strong> rapprocher puisque la recherche doit égalem<strong>en</strong>t évoluer vers plus <strong>de</strong> li<strong>en</strong>s avecles pratici<strong>en</strong>s.Rôle dans la dim<strong>en</strong>sion stratégique <strong>de</strong> li<strong>en</strong> à la communauté épistémique <strong>de</strong>s ZHMSi une gran<strong>de</strong> partie <strong>du</strong> réseau <strong>de</strong> la TdV repose sur les membres opérationnels <strong>de</strong> l’équipe qu’ilsconstitu<strong>en</strong>t au fil <strong>de</strong> leurs différ<strong>en</strong>ts projets, l’organisation att<strong>en</strong>d néanmoins <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong>gouvernance qu’elle joue un rôle dans la connexion à l’arène <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong>s ZHM et <strong>de</strong> leurbiodiversité, et dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> réseaux stratégiques. Les organes <strong>de</strong> gouvernance sontune source d’information pour l’organisation, dans le domaine <strong>de</strong>s opportunités financières, maisaussi beaucoup plus largem<strong>en</strong>t sur toutes les actualités <strong>du</strong> secteur, notamm<strong>en</strong>t les évolutions dansles doctrines, les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et les part<strong>en</strong>ariats pot<strong>en</strong>tiels. Dans cetteperspective, le CA est vu comme un instrum<strong>en</strong>t facilitant le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces etaidant à la construction <strong>de</strong> nouvelles options stratégiques (Charreaux, 2000). L’att<strong>en</strong>tion portéeaux choix <strong>de</strong>s experts qui intègr<strong>en</strong>t les organes <strong>de</strong> gouvernance s’est effectivem<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>forcée<strong>du</strong>rant cette pério<strong>de</strong>, leur propre réseau et expertise sont <strong>de</strong>s ressources dont la TdV <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dbénéficier.Rôle stratégique et transversal <strong>de</strong> légitimation <strong>de</strong> l’organisationCette nécessité d’assurer une part <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t externe et <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer sa position dans lesecteur <strong>de</strong> la conservation et dans le cadre institutionnel autour <strong>de</strong>s ZHM soulève la question <strong>de</strong>324


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerla légitimité <strong>de</strong> l’organisation. L’organisation doit gérer cette ressource stratégique auprès <strong>de</strong> tousles compartim<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t social qui constitu<strong>en</strong>t pour elle <strong>de</strong>s fins (les cibles <strong>de</strong> sonaction) ou <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s (ses part<strong>en</strong>aires réels et pot<strong>en</strong>tiels). Elle influ<strong>en</strong>ce les capacités d’action <strong>de</strong>l’organisation, elle détermine largem<strong>en</strong>t l’éligibilité <strong>de</strong> l’organisation aux appels à projets, laconfiance <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires pour monter les projets et m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s actions. La légitimité estégalem<strong>en</strong>t cruciale vis-à-vis <strong>de</strong>s acteurs cibles : capacité <strong>de</strong> l’ONGE à se faire <strong>en</strong>t<strong>en</strong>drepolitiquem<strong>en</strong>t et auprès <strong>de</strong>s acteurs cibles, à être sollicitée pour l’élaboration <strong>de</strong> plans nationauxZH, etc.« La légitimité n'est pas statique, mais résulte d'un processus continu <strong>de</strong> légitimation » (Buisson2005 ; citant Beaulieu et al., 2002), processus dans lequel les organes <strong>de</strong> gouvernance jou<strong>en</strong>t unrôle ess<strong>en</strong>tiel. Ils sont à la fois les messagers <strong>de</strong> cette pression accrue <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t social etpolitique <strong>de</strong>s ONGE à démontrer leur efficacité au regard <strong>de</strong> leur mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale,mais <strong>en</strong> sont simultaném<strong>en</strong>t les garants dans la mesure où ils supervis<strong>en</strong>t ou valid<strong>en</strong>t lesévaluations et les programmes d’action. Il convi<strong>en</strong>t d’ajouter que leur notoriété propre peutprofiter à cette légitimation <strong>de</strong> l’ONGE. Cette expertise sci<strong>en</strong>tifique « certifiée » <strong>de</strong> la TdVrayonne au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la sphère sci<strong>en</strong>tifique, puisque la TdV est perçue par d’autres ONGE commel’ « organisme incontournable » <strong>en</strong> matière <strong>de</strong> ZHM. Des représ<strong>en</strong>tants <strong>du</strong> secteur <strong>de</strong> laprotection <strong>de</strong>s ZHM et <strong>de</strong>s experts internationaux <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sièg<strong>en</strong>t au CA et ont étéintégrés au CS. Leur regard sur le travail <strong>de</strong> la TdV vi<strong>en</strong>t consoli<strong>de</strong>r sa légitimité à être l’instituttechnique <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour les ZHM. Le choix <strong>de</strong>s experts est <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s stratégique pourl’organisation. Ces experts sont néanmoins <strong>en</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’une formalisation <strong>du</strong> processus <strong>de</strong>légitimation non plus seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche, mais aussi <strong>de</strong> la conservation. En effet, le CA<strong>de</strong>man<strong>de</strong> au CS d’évaluer la conservation (CA <strong>de</strong> novembre 2009). Ce point est plus précisém<strong>en</strong>texpliqué dans le chapitre 7.Ainsi, <strong>du</strong>rant la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain, nous avons observé une prise <strong>en</strong> main <strong>de</strong> cette fonctionnalité<strong>de</strong> la gouvernance par la direction <strong>de</strong> la TdV. Il s’agit pour elle <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer les organes <strong>de</strong>gouvernance <strong>de</strong> manière à ce qu’ils soi<strong>en</strong>t le mieux adaptés à l’organisation, ou pour repr<strong>en</strong>dre lestermes d’An<strong>de</strong>rs<strong>en</strong> & Burns (1996) à la suite <strong>de</strong> G. Hermet (2005), il s’agit bi<strong>en</strong> d’« ungouvernem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s organisations, par les organisations, pour les organisations », non seulem<strong>en</strong>tpour bénéficier d’un espace <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> discussion <strong>de</strong> leurs int<strong>en</strong>tions et leurs actions, mais aussi<strong>de</strong>s multiples ressources évoquées que cette gouvernance contribue à octroyer à l’organisation.Dans ce qui précè<strong>de</strong>, nous avons vu que pour cela, la direction porte une att<strong>en</strong>tion r<strong>en</strong>forcéedans le choix <strong>de</strong>s membres et élargit les propositions <strong>de</strong> questions à discuter <strong>en</strong> séances. Elle325


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taletravaille – <strong>en</strong> proposant et soumettant à la validation <strong>de</strong> sa gouvernance – égalem<strong>en</strong>t àl’institutionnalisation d’un fonctionnem<strong>en</strong>t moins cloisonné <strong>en</strong>tre ses différ<strong>en</strong>ts organes(augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s échanges réciproques CA et CS). Et surtout, elle s’attache à la mise <strong>en</strong> placed’une grille d’évaluation <strong>du</strong> programme – qui est un <strong>de</strong>s supports pour les échanges <strong>en</strong>trel’organisation et sa gouvernance – favorisant l’évaluation et la réflexion non plus seulem<strong>en</strong>t sur lapro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique, mais aussi sur les autres aspects <strong>de</strong> l’action pour la conservation <strong>de</strong>sZHM.Les <strong>en</strong>jeux et implications <strong>de</strong> cette évolution sont donc loin <strong>de</strong> se restreindre à la fonctionnalité<strong>de</strong>s relations organisation-gouvernance et c’est d’ailleurs une question c<strong>en</strong>trale <strong>du</strong> prés<strong>en</strong>t travailque nous aurons tout le loisir <strong>de</strong> d’explorer <strong>en</strong> détail dans la suite <strong>de</strong> ce chapitre et dans celui quiva suivre (Chapitre 7). Avant cela, nous nous <strong>de</strong>vons <strong>de</strong> tirer quelques élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> conclusion àpropos <strong>de</strong> la stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> la TdV.6.2.5 Bilan <strong>de</strong> la stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Rappelons que notre ambition est <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’ONGE peut agir pourl’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, et plus précisém<strong>en</strong>t dans ce chapitre, <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t elle met <strong>en</strong>cohér<strong>en</strong>ce ses capacités et les différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion découverts dans la partieprécéd<strong>en</strong>te (Partie 2). La mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ses capacités est l’objet auquel nous nous sommesattachée dans cette section et l’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sera l’objet<strong>de</strong> la section suivante (Section 6.3). Pour cette section, nous nous sommes comme promisappuyée sur les théories <strong>de</strong>s ressources (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006) et sur la perspective pratique<strong>de</strong> la stratégique (Golsorkhi, 2006) dans l’objectif <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre la façon dont l’organisation lesmanipule. L'approche basée sur les ressources est souv<strong>en</strong>t résumée dans l’idée que « l'objectif <strong>de</strong>la stratégie met <strong>en</strong> jeu l'id<strong>en</strong>tification et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s caractéristiques internes àl'<strong>en</strong>treprise difficiles à imiter qui génèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s rev<strong>en</strong>us sur le marché » (Wernerflet, 1984, 1995 ;Jacobs & Statler, 2006). Rappelons <strong>en</strong>core que notre usage <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s ressources ne se situepas dans la recherche d’un avantage concurr<strong>en</strong>tiel sur le marché qui serait un but quel’organisation poursuivrait. Elle nous permet plutôt <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’organisationcherche à conforter les ressources qui lui permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> poursuivre les actions qu’elle jugepertin<strong>en</strong>tes pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM, et d’acquérir et développer d’autres ressources <strong>en</strong>fonction <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions nouvelles qu’elle souhaite mettre <strong>en</strong> œuvre au fil <strong>de</strong> ses avancées dansla compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux.326


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerLes ressources à prés<strong>en</strong>t désignées comme « critiques » sont celles qui sont considérées commetelles par l’organisation et celles qui ont fait l’objet d’une prise <strong>en</strong> main particulière, que ce soitsous la forme d’un travail <strong>de</strong> réflexion collective <strong>en</strong> interne ou <strong>en</strong>tre la direction et les autresorganes <strong>de</strong> gouvernance. Le tableau 6.12 offre une synthèse <strong>de</strong>s principales ressources dont laTdV a besoin pour mettre <strong>en</strong> œuvre son programme d’action.Tableau 6.12 : Synthèse <strong>de</strong>s ressources critiques <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> sonprogramme d’action pour la conservation <strong>de</strong>s ZHMChampsd’actionGestiondomaine(Camargue)Gestion <strong>de</strong> ZH(EP/ hors EP)Recherchesci<strong>en</strong>tifiqueInterfacessci<strong>en</strong>ces/politiquegouvernanceZHMAtouts etcontraintesCompét<strong>en</strong>cesPratique <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong>Métho<strong>de</strong> <strong>de</strong><strong>gestion</strong> /diagnostic <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong>Expertise,connaissanceapprofondie <strong>du</strong>terrain, <strong>de</strong>smécanismesdégradantsMétho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>suivi-évaluation<strong>de</strong>s ZHMRelationsinstitutionnelles- Différ<strong>en</strong>teslogiquesd’actions etcompét<strong>en</strong>ces àarticuler (« quandc’est pertin<strong>en</strong>t » :id<strong>en</strong>tifier quandc’est pertin<strong>en</strong>t)Choixbudgétaireset fondsexternesPrioritaireRev<strong>en</strong>us par lapro<strong>du</strong>ctionagricole 181Pas <strong>en</strong>core <strong>de</strong>projet longterme/Programmeinternationaux(bailleursinstitutionnels) etmécénatProjets longterme /ANR,programm<strong>en</strong>ationaux,régionauxProjet nouveaupour long terme/Bailleursinstitutionnels(Ministère,région) etmécénat+ Multiplessources <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>tsexternes- peut cloisonnerles mo<strong>de</strong>sd’actionRéseaux etpart<strong>en</strong>ariatAncrageterritorialRéseaux etpart<strong>en</strong>aireshistoriques / àdévelopper selonles sitesAncrageterritorial /communautésci<strong>en</strong>tifiqueRéseaux etpart<strong>en</strong>aireshistoriques / sondéveloppem<strong>en</strong>treste un <strong>en</strong>jeumajeur pour lefonctionnem<strong>en</strong>t<strong>du</strong> principaldispositif(OZHM)+Communication:r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la visibilité etcrédibilité TdV+ TdV id<strong>en</strong>tifiéedans plusieurssecteurs- Difficulté <strong>de</strong>formaliser <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariatsopérationnelsGouvernancePeu <strong>de</strong> rôlePatrimoinehistorique <strong>de</strong> laTdVDeman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ladirection pourun souti<strong>en</strong> plusfortAtt<strong>en</strong>tion trèsforte portée à laqualité <strong>de</strong> larecherchesci<strong>en</strong>tifique :légitimationDeman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ladirection pourun souti<strong>en</strong> plusfort+ Evolution <strong>de</strong>la gouvernance(apportressources)181 La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> développe une activité d’élevage et <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction rizicole sur une partie <strong>de</strong> son propre domaine,à la fois pour une int<strong>en</strong>tion démonstrative <strong>de</strong> la possibilité <strong>de</strong> lier activités économique et conservation <strong>de</strong>s ZH etpour pro<strong>du</strong>ire un rev<strong>en</strong>u pour la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> domaine.327


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleIl s’agit d’abord <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces qui sont les ressources c<strong>en</strong>trales et l’<strong>en</strong>jeu est <strong>de</strong> les articuler et<strong>de</strong> les valoriser au mieux pour l’action. Le budget et les financem<strong>en</strong>ts externes doiv<strong>en</strong>t être acquisdans un effort partagé <strong>en</strong>tre toute l’équipe et la direction. Les compét<strong>en</strong>ces manquantes sont àrechercher <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’organisation, <strong>en</strong> essayant <strong>de</strong> formaliser <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat.Enfin, ses organes <strong>de</strong> gouvernance peuv<strong>en</strong>t participer à l’intégration <strong>de</strong> la TdV dans son<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t socio-politique notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> apportant une légitimité institutionnelle,complém<strong>en</strong>taire à celle acquise dans la mise <strong>en</strong> œuvre opérationnelle.Comme nous l’avons noté plusieurs fois, les ressources n’ont pas <strong>de</strong> valeur <strong>en</strong> elles-mêmes, maisdans l’usage que l’ONGE va <strong>en</strong> faire. Et c’est notamm<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> sonprogramme d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qu’elle travaille à les r<strong>en</strong>forcer. Cep<strong>en</strong>dant la planificationstratégique apparaît comme un mom<strong>en</strong>t spécifique dont la TdV se sert pour redéfinir lesressources et id<strong>en</strong>tifier les besoins nouveaux, <strong>en</strong>visager la marche à suivre pour les maint<strong>en</strong>ir etles consoli<strong>de</strong>r. La planification n’est pas un mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ressources <strong>en</strong> soi, maisun <strong>de</strong>s processus à travers lequel l’organisation « pose <strong>de</strong>s balises », crée les conditions favorablesà cette augm<strong>en</strong>tation et optimisation <strong>de</strong>s ressources, ce qui est <strong>en</strong> partie le rôle à att<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> ceprocessus <strong>de</strong> planification (Martinet, 2001).Ces « balises » peuv<strong>en</strong>t être synthétisées <strong>en</strong> repr<strong>en</strong>ant le tableau <strong>de</strong>s objectifs stratégiques(cont<strong>en</strong>us stratégiques, voir le tableau 6.4) et <strong>en</strong> y faisant à prés<strong>en</strong>t apparaître les analyses et lesdémarches mises <strong>en</strong> place au cours <strong>de</strong> la planification stratégique pour pouvoir atteindre cesobjectifs dans le registre <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> laconservation (Tableau 6.13).Tableau 6.13 : Cont<strong>en</strong>us stratégiques (ce que veut la TdV) et démarche mise <strong>en</strong> place p<strong>en</strong>dant laplanification stratégique (2009-2010) pour pouvoir atteindre ces objectifs dans la mise <strong>en</strong> œuvre qui vasuivreQuatre registresstratégiques <strong>de</strong>l’ONGEDéveloppem<strong>en</strong>tinterneCont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> Plan stratégique<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2011-2015 (ce que veut la TdV)Objectifs pour la <strong>gestion</strong> financière« une planification et un suivifinancier calés sur le programmeopérationnel et facilitant le travail <strong>de</strong>schefs <strong>de</strong> projet »Objectifs pour lobt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>tFinancem<strong>en</strong>t externe : 28 à 30% <strong>du</strong>total <strong>de</strong>s recettesProcessus <strong>de</strong> planificationstratégique (pour pouvoir)- Gérer la relation avec la FondationMAVA- Mise <strong>en</strong> place d’un meilleur outil <strong>de</strong>suivi <strong>de</strong>s financem<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong>s tempséquipes(non traités dans la thèse)- Id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes pistes <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>t pour financer leprogramme TdV328


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerPlace dans le secteur<strong>de</strong> la conservationCompét<strong>en</strong>cesMobilisation <strong>de</strong>s ressourceshumaines <strong>en</strong> adéquation avec nosambitions (mission)Gouvernance r<strong>en</strong>forcée par d<strong>en</strong>ouveaux statuts <strong>de</strong>puis 2008Objectifs <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariatsci<strong>en</strong>tifique• Attirer <strong>de</strong>s équipes <strong>de</strong> sa disciplineou <strong>de</strong> disciplines complém<strong>en</strong>tairespour contribuer au programmeObjectifs <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat dans lesecteur <strong>de</strong> la conservation• Assistance à la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>du</strong>ne GI et adaptative• Dissémination ciblée dinformation<strong>en</strong> direction <strong>de</strong>s acteurs clés• Développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plateformesci<strong>en</strong>ce-politiques / OZHM• Appui au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>politiques ZHLes compét<strong>en</strong>ces :- « capacités »- cœur <strong>de</strong> métier- « insertion dans le système »Organisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces :- Projets plus gros : équipes mieuxstructurées- Mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> 4 pôles <strong>de</strong>compét<strong>en</strong>ces (cœur <strong>de</strong> métier, maissurtout insertion dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong>)Choix <strong>de</strong>s experts et <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong>sorganes <strong>de</strong> gouvernance pour qu’ilsapport<strong>en</strong>t le plus <strong>de</strong> ressources possibleà l’organisationAnalyse <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat :- Pour les domaines nouveaux :s’appuyer sur les contacts bi<strong>en</strong> établispour accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong> nouvellescompét<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong> nouveaux réseaux- Pour les domaines « cœur » <strong>de</strong> laTdV : chercher à développer <strong>de</strong>scontacts nouveaux ou resserrer les li<strong>en</strong>speu actifs pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t intéressantsPlusieurs élém<strong>en</strong>ts relatifs à la manière dont les ressources sont appréh<strong>en</strong>dées dans la réflexionstratégique se dégag<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce qui vi<strong>en</strong>t d’être exposé. D’une part, nous constatons que l’int<strong>en</strong>tion<strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale précè<strong>de</strong> et donc régit la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources. En effet, c’est àpartir <strong>de</strong> la logique d’action que la TdV cherche à mettre <strong>en</strong> œuvre qu’elle p<strong>en</strong>se sa stratégied’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités, d’acquisition et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> ses ressources. Ceci transparaîtnotamm<strong>en</strong>t dans son travail d’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s ressources manquantes à acquérir <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>l’organisation, à travers les relations <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat, ou <strong>en</strong>core dans le souti<strong>en</strong> plus fort <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s ZHM qu’elle <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance. Pour mieux saisirl’articulation <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> synthèse prés<strong>en</strong>tés dans le tableau 6.13, il est utile <strong>de</strong> les prés<strong>en</strong>tersous forme schématique : la figure 6.4 replace la stratégie <strong>de</strong> capacité <strong>de</strong> la TdV dans les quatreregistres stratégiques, ce qui permet <strong>de</strong> visualiser la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s efforts qui sont faits au niveau<strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la connexion avec l’externe pour <strong>en</strong>suite développer l’action(Figure 6.4).329


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleD’autre part, nous remarquons que la TdV travaille à créer les conditions favorables àl’optimisation <strong>de</strong>s ressources <strong>en</strong> recherchant tous les leviers pouvant y contribuer au niveauinterne, <strong>en</strong> s’efforçant <strong>de</strong> les mettre <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce. Encore une fois, elle s’est donné pour objectif<strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s projets plus volumineux et moins nombreux pour favoriser l’articulation <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces pluridisciplinaires nécessaires à la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tauxpar ess<strong>en</strong>ce complexes. Ce travail sur la structuration <strong>du</strong> programme est égalem<strong>en</strong>t vu comme unlevier pour limiter la dispersion <strong>de</strong> l’équipe et mieux organiser l’effort pour l’indisp<strong>en</strong>sableacquisition <strong>de</strong> fonds externes. Les différ<strong>en</strong>ts leviers que l’organisation tâche d’actionner pourr<strong>en</strong>forcer ses capacités apparaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> gras dans la figure ci-<strong>de</strong>ssous (Figure 6.4).1. Objetécologique ZHM2. Mo<strong>de</strong> d’action publiqueCompét<strong>en</strong>cespluridisciplinairespour ZHMIntégrationcompét<strong>en</strong>ces (grosprojets, pôles compét<strong>en</strong>ces)Arbitrages,choix d’actions4. Réseaux etpart<strong>en</strong>ariat3. Développem<strong>en</strong>t interne3. Structuration /Augm<strong>en</strong>tation<strong>gestion</strong> <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces,compét<strong>en</strong>cesforce <strong>de</strong> travail*Opportunitésprojets financés3. Gestionfinancière*Ré<strong>du</strong>ction nombre /Augm<strong>en</strong>tation taille <strong>de</strong>sprojetsLégitimation / Souti<strong>en</strong>recherche conservation3. Gouvernance<strong>de</strong> la TdVFigure 6.4 : Stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme d’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>sZHM, replacée dans les quatre registres stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)Enfin, si <strong>de</strong>s objectifs ont été formulés, <strong>de</strong>s leviers id<strong>en</strong>tifiés et même <strong>de</strong>s conditions mises <strong>en</strong>place pour le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités, « cela doit rester à mon s<strong>en</strong>s une politique générale qui« accompagne » <strong>de</strong>s besoins mais pas une règle qui s’applique sans considération <strong>de</strong>s besoins spécifiques à chaqueprojet » (Direction TdV, com.pers., 2010), comme l’exprimait la direction au sujet d’un <strong>de</strong>s pointsd’amélioration apporté à la structuration <strong>du</strong> programme. Ainsi, <strong>de</strong>s repères ont été fixés au cours<strong>de</strong> la planification stratégique, mais la façon dont ces améliorations vont être assurées dans la330


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcermise <strong>en</strong> œuvre reste incertaine <strong>en</strong> plusieurs aspects. Par exemple, le travail d’inv<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>srelations et <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat acquis et à développer a certes permis d’id<strong>en</strong>tifier les organismes<strong>en</strong>vers lesquels <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong>vront être fournis, mais sans considérer à ce sta<strong>de</strong> la façon <strong>de</strong> s’ypr<strong>en</strong>dre pour y parv<strong>en</strong>ir. Ceci est cohér<strong>en</strong>t avec la logique selon laquelle les efforts pour r<strong>en</strong>forcerles compét<strong>en</strong>ces doiv<strong>en</strong>t servir l’action, et ne peuv<strong>en</strong>t donc peut-être pas être davantage anticipés.Ceci explique que l’organisation ne peut pas élaborer une stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités globaleavec <strong>de</strong>s objectifs très formels, car cette stratégie doit au contraire être adaptée à l’évolution <strong>de</strong>sbesoins au cours <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Nous touchons ici à lat<strong>en</strong>sion qui sous-t<strong>en</strong>d la stratégie et qui se situe à <strong>de</strong>ux niveaux : globale / opérationnelle (échelleprojet) ; int<strong>en</strong>tionnelle / émerg<strong>en</strong>te. L’organisation ne peut faire autrem<strong>en</strong>t que <strong>de</strong> réfléchir sastratégie au niveau global, mais c’est au niveau opérationnel qu’elle s’avérera ou non structurante.Cette <strong>de</strong>rnière remarque nous annonce que cette t<strong>en</strong>sion ne sera pas moins vive dans la réflexionstratégique relative à la construction <strong>de</strong> l’action qui est l’objet sur lequel nous pouvons à prés<strong>en</strong>tnous conc<strong>en</strong>trer.6.3 Stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : vers une stratégie au s<strong>en</strong>sfortDans cette section, nous allons ét<strong>en</strong>dre la démarche suivie pour la stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scapacités à la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong> procédant <strong>de</strong> la même manière, c’est-à-dire<strong>en</strong> articulant le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie et les processus abordés à travers les pratiques. Après avoirsondé l’importance <strong>de</strong> l’ancrage <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> laCamargue (Chapitre 3) et d’un site au nord <strong>du</strong> Maroc (Chapitre 4) à travers nos analyses <strong>de</strong> casdans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse, nous voulons à prés<strong>en</strong>t compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’organisations’y pr<strong>en</strong>d pour leur donner une cohér<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble qui servirait les objectifs qu’elle se donne àl’échelle globale.Repartons <strong>de</strong> nos points <strong>de</strong> t<strong>en</strong>sion stratégie int<strong>en</strong>tionnelle / émerg<strong>en</strong>te, stratégie globale /opérationnelle pour préciser le problème.Stratégie globale / opérationnelle. Comme l’explique A-C. Martinet (2001) :« l'élaboration <strong>de</strong> plans stratégiques et les diagnostics préalables qu'elle suppose relèv<strong>en</strong>tplutôt <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> problèmes ainsi que <strong>de</strong> la formulation et <strong>de</strong> la prés<strong>en</strong>tation<strong>de</strong>s situations. Ces processus m<strong>en</strong>taux, indivi<strong>du</strong>els et collectifs, compos<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>tsregistres et formes <strong>de</strong> rationalités substantielles (économique, technologique, sociale,331


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepolitique, etc.) au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> Simon. Sauf exception, ces situations sont trop complexespour être ré<strong>du</strong>ites à un critère a priori et une délibération apparaît nécessaire (Martinet1997). Cette rationalité procé<strong>du</strong>rale est aujourd'hui nécessairem<strong>en</strong>t collective dans lesorganisations déc<strong>en</strong>tralisées où la connaissance, l'information, la capacité <strong>de</strong> réflexion, lescompét<strong>en</strong>ces sont distribuées et non plus conc<strong>en</strong>trées au sommet stratégique ».La stratégie d’action globale ne peut être élaborée sans le cont<strong>en</strong>u apporté par le retourd’expéri<strong>en</strong>ce et les int<strong>en</strong>tions opérationnelles. Cela signifie que le travail d’élaboration stratégiquese situe certainem<strong>en</strong>t dans un aller-retour <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s propositions fondées sur <strong>de</strong>s basesopérationnelles et <strong>de</strong>s objectifs formulés à l’échelle globale visant d’une part à bâtir unearticulation synergique <strong>de</strong> ces différ<strong>en</strong>ts cont<strong>en</strong>us opérationnels et év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t à pousser plusloin les ambitions qui ne pourrai<strong>en</strong>t être relevées isolém<strong>en</strong>t par les différ<strong>en</strong>ts projets.Stratégie int<strong>en</strong>tionnelle / émerg<strong>en</strong>te. Si C. Jacobs & M. Statler (2006) plaid<strong>en</strong>t pour que cettet<strong>en</strong>sion soit reconnue et prise <strong>en</strong> compte dans l’analyse <strong>de</strong>s stratégies d’<strong>en</strong>treprise, pour l’étu<strong>de</strong><strong>de</strong>s ONGE, il est difficile <strong>de</strong> faire autrem<strong>en</strong>t tant elle ressort distinctem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> terrain. En effet,l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale n’est pas une activité <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>s, qui <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t relativem<strong>en</strong>tprévisible dès lors que les procédés <strong>de</strong> fabrication sont approximativem<strong>en</strong>t mis au point et que lemarché est id<strong>en</strong>tifié. S’agissant <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous avons vu que l’insertion dansle système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la configuration <strong>de</strong> celui-ci qui est instable, mais aussi <strong>de</strong>srésultats que la recherche va apporter à la compréh<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> problème, <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s quel’organisation aura réussi à nouer, etc. Quand un objectif est adopté, même si c’est sur la based’une analyse <strong>de</strong>s capacités existantes, l’action concrète reste à préciser et à construire à mesure<strong>de</strong> son avancem<strong>en</strong>t. C. Jacobs & M. Statler (2006 : 83) pos<strong>en</strong>t la question <strong>de</strong> la manière suivante :« bi<strong>en</strong> que nous souhaitions garantir que la création <strong>de</strong> la stratégie puisse impliquer unacte délibéré consci<strong>en</strong>t, ou même une série d'actes <strong>de</strong> ce type, nous ne présupposons pasqu'il y ait, ou qu'il doive y avoir une relation causale directe <strong>en</strong>tre ces actionsint<strong>en</strong>tionnelles et les résultats <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>treprise. En effet, nous supposons qu'unemultiplicité irré<strong>du</strong>ctible d'autres facteurs exerce aussi une pression systémique etcontribue à la dynamique <strong>de</strong> la création stratégique d'une manière qui r<strong>en</strong>d les effets <strong>de</strong>toute action particulière imprédictibles. Dans ce s<strong>en</strong>s, la notion <strong>de</strong> « créationstratégique » est, d'une certaine manière, paradoxale : l'émerg<strong>en</strong>ce peut-elle être prévue ?Comm<strong>en</strong>t peut-on se lancer dans la tâche paradoxale <strong>de</strong> créer int<strong>en</strong>tionnellem<strong>en</strong>t unphénomène qui est émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> manière inhér<strong>en</strong>te ? ».Ce sont ces questions qui se sont imposées à notre recherche visant ici à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>tl’ONGE pouvait développer une stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale unifiée. Et c’est parl’analyse <strong>de</strong>s pratiques et <strong>de</strong> la façon dont ces questions se pos<strong>en</strong>t et se déclin<strong>en</strong>t dans332


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerl’organisation que nous les avons abordées. Précisons ici que c’est dans cette démarche que notreinterv<strong>en</strong>tion auprès <strong>de</strong> l’ONGE a certainem<strong>en</strong>t été la plus significative. Dans l’exposé <strong>de</strong> notredémarche <strong>de</strong> recherche (Chapitre 2), nous avons <strong>en</strong> effet expliqué que le procédé <strong>de</strong> la restitutionpermettait une interaction forte avec les acteurs étudiés. En nous appuyant sur notre analysemulti-échelle (analyse globale <strong>de</strong> l’organisation / ancrage <strong>de</strong> l’analyse dans <strong>de</strong>s cas concrets), nousavons cherché à accompagner les porteurs <strong>de</strong> la réflexion stratégique. Nous verrons que p<strong>en</strong>dantce processus <strong>de</strong> planification stratégique, la réflexion stratégique a pris la forme d’un« aménagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> fond » <strong>de</strong>vant être le support <strong>de</strong> conditions propices à une émerg<strong>en</strong>ce canalisée <strong>de</strong>la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.Ces questions se pos<strong>en</strong>t tant au niveau <strong>de</strong> la formulation <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong>s ZHque <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Nos registres stratégiques <strong>de</strong> la constructionet <strong>de</strong> la focalisation sur l’objet écologique à conserver (Section 6.3.1) et <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (Section 6.3.2) nous permett<strong>en</strong>t d’organiser leur analyse.6.3.1 Les objets écologiques et la focalisation sur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservationLes objets <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux sont nombreux et les mécanismes <strong>de</strong> dégradation le sont toutautant. Comm<strong>en</strong>t les ONGE choisiss<strong>en</strong>t-elles les objets, les zones, les échelles sur lesquellesdéployer leur action ? C’est certainem<strong>en</strong>t toujours un assemblage <strong>de</strong> facteurs et il y a sans douteautant <strong>de</strong> combinaison que d’ONGE. Nous nous cont<strong>en</strong>terons d’<strong>en</strong> donner trois exemples dansnotre premier point (Section a), dont celui <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> qui nous intéresse <strong>en</strong> particulier.Dans notre <strong>de</strong>uxième point (Section b), nous verrons que la focalisation et la spécialisation sur leszones humi<strong>de</strong>s ne résout pas toutes les questions que pose la nécessité <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s choix surlesquels ori<strong>en</strong>ter l’action.a) Un objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal : les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nesLa TdV fait partie <strong>de</strong>s ONGE dont l’action est focalisée sur un objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal 182 bi<strong>en</strong>particulier. Son champ d’action n’est pas remis <strong>en</strong> question à chaque cycle programmatique,contrairem<strong>en</strong>t à d’autres ONGE plus généralistes qui peuv<strong>en</strong>t être t<strong>en</strong>tées d’investir <strong>de</strong> nouveauxchamps d’action <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la médiatisation et <strong>de</strong> la montée <strong>en</strong> puissance dans l’arène182 Dans le domaine <strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong> leur biodiversité, d’autres ONGE internationale sont égalem<strong>en</strong>t focalisées sur unobjet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal précis, comme Wetlands International et Birdlife International.333


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepublique <strong>de</strong> problèmes nouveaux. Le choix <strong>de</strong>s domaines d’action est <strong>en</strong> réalité un caractèrespécifique à chaque ONGE et semble être le pro<strong>du</strong>it d’une combinaison d’élém<strong>en</strong>ts internes – latrajectoire historique, les statuts et la gouvernance <strong>de</strong> l’organisation – et externes – l’avancée <strong>de</strong>certains problèmes sur la scène publique, un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> configuration permettant <strong>de</strong>s actionsnouvelles (adoption <strong>de</strong> loi, etc.).Par exemple, le programme quadri<strong>en</strong>nal <strong>de</strong> l’organisation intergouvernem<strong>en</strong>tale UICN 183 est votépar ses membres gouvernem<strong>en</strong>taux et non gouvernem<strong>en</strong>taux. Les champs d’action peuv<strong>en</strong>t alorsévoluer fortem<strong>en</strong>t d’un cycle à un autre, étant donné son modèle <strong>de</strong> gouvernance. Le secrétariat<strong>de</strong> l’UICN (<strong>en</strong>viron 1000 salariés) s’attache néanmoins à ori<strong>en</strong>ter et organiser ses choix <strong>de</strong>domaines d’action, il s’agit d’ailleurs d’une part importante <strong>de</strong> son travail et <strong>de</strong> son mo<strong>de</strong> d’action.En effet, les formes d’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’UICN sont clairem<strong>en</strong>t construites sur cette particularité<strong>de</strong> sa structuration : une organisation <strong>de</strong> membres. Ces membres influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t ses champs d’action– elle travaille « au service <strong>de</strong>s gouvernem<strong>en</strong>ts et <strong>de</strong> ses membres » (UICN Med, com.pers., 2008) – mais ils<strong>en</strong> sont eux-mêmes les cibles. Sa stratégie <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t « part <strong>du</strong> principe que lesgouvernem<strong>en</strong>ts convi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s priorités d’action par le biais <strong>de</strong> négociationsinternationales (passant souv<strong>en</strong>t par <strong>de</strong>s accords multilatéraux et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux). L’UICNpeut influ<strong>en</strong>cer ces priorités <strong>en</strong> participant à ces négociations. Les gran<strong>de</strong>s priorités ainsiconv<strong>en</strong>ues doiv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite être adaptées aux réalités nationales et locales » (Programmeintersessionnel UICN 2009-2012, 2008). Plus synthétiquem<strong>en</strong>t, le premier directeur <strong>du</strong> bureauméditerrané<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’UICN indique que les choix <strong>de</strong>s thèmes sont raisonnés selon une série <strong>de</strong>critères : « 1) est-ce que l’UICN apporte une plus-value ? ; 2) Y-a-t-il une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s membres ? ;3) Le thème est-il porteur dans le contexte et <strong>en</strong> insertion dans le cadre (Conv<strong>en</strong>tion, Plans régionaux, etc.) ? ; 4)Existe-t-il <strong>de</strong>s bailleurs <strong>de</strong> fond prêts à payer ? » (Ex-directeur UICN Med, com.pers., 2008).Un <strong>de</strong>uxième exemple peut être apporté pour illustrer la spécificité <strong>de</strong> la façon dont sontraisonnés les domaines d’action dans les ONGE. Voyons le cas <strong>de</strong> Conservation International étudiépar T. De Mombynes et L. Mermet (2003). Dans cette organisation, c’est la construction d’unconcept <strong>de</strong> biologie <strong>de</strong> la conservation qui détermine les domaines d’action : le concept <strong>de</strong>shotspots qui a d’ailleurs beaucoup participé à la notoriété internationale <strong>de</strong> l’ONGE.La stratégie <strong>de</strong>s hotspots a été proposée pour la première fois par le biologiste N. Myers (1988) etadopté par CI <strong>en</strong> 1990, trois ans après sa création, fondée sur <strong>de</strong>ux critères permettant d’id<strong>en</strong>tifier183 L’Union Mondiale pour la Nature (UICN) est une organisation intergouvernem<strong>en</strong>tale établie par la Déclarationqui fut signée à Fontainebleau, le 4 octobre 1948. Elle compte actuellem<strong>en</strong>t 1056 membres <strong>de</strong> 84 Etats, 108organismes gouvernem<strong>en</strong>taux, 831 ONG nationales et internationales et 33 membres affiliés (Programmeintersessionnel UICN 2009-2012, 2008, p 7). Bi<strong>en</strong> que cette organisation ne soit pas une ONGE, l’analyse <strong>de</strong> l’actionet <strong>du</strong> rôle <strong>de</strong> son secrétariat alim<strong>en</strong>te notre étu<strong>de</strong>.334


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerles priorités d’action : le fort <strong>en</strong>démisme et les fortes m<strong>en</strong>aces auxquelles est soumise labiodiversité.« Si l’on considère (outre les <strong>en</strong>démiques qui y sont prés<strong>en</strong>tes) les espèces non<strong>en</strong>démiques[...], ils abrit<strong>en</strong>t le chiffre phénoménal <strong>de</strong> 60%, voire plus, <strong>de</strong> la biodiversitéterrestre. Compte t<strong>en</strong>u <strong>de</strong> cette extrême conc<strong>en</strong>tration <strong>de</strong> la biodiversité sur une surfacesi ré<strong>du</strong>ite et si m<strong>en</strong>acée <strong>de</strong> notre mon<strong>de</strong>, il est évid<strong>en</strong>t que ces régions exig<strong>en</strong>t uneatt<strong>en</strong>tion très particulière <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> la communauté internationale. Si nous neparv<strong>en</strong>ons pas à agir avec efficacité dans les hotspots, nous perdrons la majeure partie <strong>de</strong>la vie sur Terre au cours <strong>de</strong> la première moitié <strong>du</strong> XXI e siècle, quels que soi<strong>en</strong>t nossuccès dans d’autres régions. Il est clair qu’il faut que nous conc<strong>en</strong>trions nos efforts surces hotspots » 184 .Tels sont les termes inscrits <strong>en</strong> lég<strong>en</strong><strong>de</strong> <strong>de</strong> la carte <strong>de</strong>s Hotspots sur le site web <strong>de</strong> l’ONGE, etl’application <strong>du</strong> concept n’a pas tardé à régir le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s champs d’action <strong>de</strong> CI 185 .Concernant la TdV, la focalisation sur les ZHM est égalem<strong>en</strong>t fondée sur une logique biologiquequi a guidé le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> l’organisation. En effet, nous avons expliqué que laTdV 186 , qui était au tout début une station <strong>de</strong> bagage ornithologique, a vite élargi ses champsd’interv<strong>en</strong>tion aux habitats <strong>de</strong> ces oiseaux d’eau et plus largem<strong>en</strong>t à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité. Bi<strong>en</strong> installée dans le réseau d’acteurs porteurs <strong>de</strong> laconservation <strong>de</strong>s ZHM et dans la création <strong>de</strong> l’initiative MedWet, elle affirme son aire d’actionméditerrané<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> 1992, région riche <strong>en</strong> ZH et prés<strong>en</strong>tant une certaine cohér<strong>en</strong>ce biologique.Dans les premières années <strong>de</strong> l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la TdV, un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux était <strong>de</strong> porter la conservation<strong>de</strong>s ZH comme un problème à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge – démarche à laquelle elle a participé. Même siune part <strong>de</strong> son travail consiste à pousser plus haut les ZH dans les ag<strong>en</strong>das politiques, la TdVagit aujourd’hui dans un cadre où la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s est aux nombres <strong>de</strong>sobjectifs normatifs <strong>de</strong> la gouvernance internationale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Cette focalisation sur unobjet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal a favorisé le développem<strong>en</strong>t d’une expertise dans le domaine etl’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> la TdV au niveau méditerrané<strong>en</strong>, malgré la petite taille relative <strong>de</strong> cette ONGE.Cep<strong>en</strong>dant, si l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal focal ne fait pas question à la TdV, et même si la« conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes » est un domaine bi<strong>en</strong> circonscrit dans184 Lég<strong>en</strong><strong>de</strong> <strong>de</strong> la carte « Biodiversity Hotspots », Conservation International, www.conservation.org, 2003, (cité parG. <strong>de</strong> Mombynes & Mermet, 2003).185 « Ses premières activités <strong>de</strong> conservation concern<strong>en</strong>t la Bolivie, le Mexique et le Costa Rica. En 1990, après avoirquitté le WWF, le biologiste Russel Mittermeier rejoint CI et <strong>en</strong> <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t le présid<strong>en</strong>t. CI adopte la même année leconcept <strong>de</strong>s hotspots et comm<strong>en</strong>ce à travailler <strong>en</strong> Afrique et <strong>en</strong> Asie. Son action couvre alors plus vingt pays. Moins <strong>de</strong>quinze ans plus tard, <strong>en</strong> 2002, CI emploie mille trois c<strong>en</strong>ts personnes (dont trois c<strong>en</strong>t cinquante à Washington) ettravaille dans plus <strong>de</strong> tr<strong>en</strong>te pays sur quatre contin<strong>en</strong>ts » (G. <strong>de</strong> Mombynes & Mermet, 2003).186 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, Chapitre 2, section 2.1.335


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talel’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la problématique <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, elle reste un domaine extrêmem<strong>en</strong>t vaste danslequel l’organisation doit se repérer et se positionner. Comm<strong>en</strong>t raisonne-t-elle soninvestissem<strong>en</strong>t : sur quels <strong>en</strong>jeux plus précis <strong>de</strong> conservation ? Sur quels mécanismes néfastes auxZHM ?b) La nécessaire clarification <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation et le débat sci<strong>en</strong>ce,expertise et choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>La précision <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation pour lesquels la TdV va interv<strong>en</strong>ir par la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>de</strong> son programme 2011-2015 a été un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux majeurs <strong>de</strong> cette planification stratégique,comme nous l’avons annoncé et répété au cours <strong>de</strong> ce chapitre. C’est le mom<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong> donner uneexplication : cet <strong>en</strong>jeu est lié à une série <strong>de</strong> facteurs que nous avons déjà détaillés à un mom<strong>en</strong>t ouun autre <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t. Les membres <strong>de</strong> la TdV ayant quelques années d’anci<strong>en</strong>netés’accord<strong>en</strong>t à dire que le managem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’organisation a beaucoup changé : « Le programme étaitconstitué <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong>s désirs <strong>de</strong>s uns et <strong>de</strong>s autres » (TdV, com.pers., 2008) ; « Quand on avait une idéequi paraissait un peu sympa, un peu nouvelle, on y allait. Cette <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> budget et <strong>de</strong>s choix plus pondérés <strong>de</strong>sprojets est finalem<strong>en</strong>t assez réc<strong>en</strong>te » (TdV, com.pers., 2010). Les activités <strong>de</strong> la TdV n’étai<strong>en</strong>tévi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t pas totalem<strong>en</strong>t déstructurées ni sans cohér<strong>en</strong>ce, et l’organisation avait déjà acquisune reconnaissance <strong>de</strong> son expertise. Mais le lecteur sa rappelle <strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong> 2003 qui aaccéléré la mutation <strong>de</strong> l’organisation : si la culture familiale « <strong>de</strong> liberté » et l’histoire <strong>de</strong>l’organisation rest<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> cohésion et d’attachem<strong>en</strong>t pour les salariés, c’est aujourd’huiun managem<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>forcé, une culture d’excell<strong>en</strong>ce sci<strong>en</strong>tifique et d’efficacité au regard <strong>de</strong> lamission qui régiss<strong>en</strong>t son fonctionnem<strong>en</strong>t. L’anci<strong>en</strong>ne version peut apparaître plus confortable etplus épanouissante pour les salariés. Ce n’est pourtant pas comme cela qu’ils viv<strong>en</strong>t la chose :plusieurs sci<strong>en</strong>tifiques ne regrett<strong>en</strong>t pas l’époque où « les chercheurs <strong>du</strong> CNRS nous pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t quandmême un peu pour <strong>de</strong>s rigolos, mais v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t profiter <strong>de</strong> nos données <strong>de</strong> terrain » (Chercheur TdV, com.pers.,2008). Certains ont une ambition telle qu’ils contribu<strong>en</strong>t à r<strong>en</strong>dre le managem<strong>en</strong>t plus exigeant.Plus globalem<strong>en</strong>t, si la plupart <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe travaill<strong>en</strong>t à la TdV parce que qu’ils sontattachés à sa mission <strong>de</strong> conservation pour laquelle ils exprim<strong>en</strong>t le besoin d’être utiles, ils ontégalem<strong>en</strong>t besoin <strong>de</strong> s<strong>en</strong>tir que l’organisation à laquelle ils apparti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t est crédible et reconnue(Chercheurs TdV, com.pers., 2010).Malgré cette adhésion – progressive – <strong>en</strong> interne, la canalisation plus formelle <strong>de</strong>s activités restaità orchestrer. Dans le climat <strong>de</strong> crise, p<strong>en</strong>dant lequel a été bâti le programme 2006-2010 (<strong>en</strong> 2005),il était difficile d’aller plus loin dans les changem<strong>en</strong>ts, qui étai<strong>en</strong>t déjà substantiels. Deux logiques336


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer<strong>de</strong> construction <strong>du</strong> programme se sont plus ou moins bi<strong>en</strong> croisées : « une logique top-down visant àdonner une cohér<strong>en</strong>ce et une pertin<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble à l’action <strong>de</strong> la TdV, et une logique bottom-up selon laquelle lesprojets <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>ir nourrir cette logique d’<strong>en</strong>semble » (Direction, com.pers, 2008). Mais ces projetsémanant <strong>de</strong>s choix indép<strong>en</strong>dants <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> projet, la greffe n’a été que partielle, le nombre <strong>de</strong>projets trop important, et le programme plus un recueil d’idées qu’un véritable docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong>référ<strong>en</strong>ce (Direction, com.pers, 2008). Il <strong>en</strong> a résulté un manque <strong>de</strong> clarté dans les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation et dans la logique d’articulation <strong>en</strong>tre les objectifs globaux et opérationnels (Guillet,2007 ; Conclusions CS, 2008) :« Le CS a exprimé sa préoccupation suite aux prés<strong>en</strong>tations faites au cours <strong>de</strong> la premièrejournée <strong>de</strong> réunion et au cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la docum<strong>en</strong>tation qui manquai<strong>en</strong>t d’un ciblageprécis <strong>de</strong>s thèmes <strong>de</strong> recherche prés<strong>en</strong>tés. Il a souligné <strong>en</strong> particulier le fait que lesquestions ou les hypothèses <strong>de</strong> recherche traitées ne transparaissai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> manièreévid<strong>en</strong>te, r<strong>en</strong>dant une bonne évaluation difficile [...]. Le CS recomman<strong>de</strong> donc que lesquestions <strong>de</strong> recherche à traiter soi<strong>en</strong>t soigneusem<strong>en</strong>t précisées dans le cadre <strong>de</strong> lapréparation <strong>du</strong> programme 2011-2015. Pour ai<strong>de</strong>r les équipes à acquérir cette manière <strong>de</strong>p<strong>en</strong>ser, le CS recomman<strong>de</strong> égalem<strong>en</strong>t que la direction travaille avec les coordinateurs <strong>de</strong>programmes et d’autres membres clefs <strong>de</strong> l’équipe pour id<strong>en</strong>tifier les questions <strong>de</strong>recherche majeures sur lesquelles ils se conc<strong>en</strong>treront <strong>en</strong> 2009 ».Cette faiblesse a alors été portée au rang <strong>de</strong>s améliorations prioritaires à apporter au programmesuivant (2011-2015) et observée <strong>de</strong> très près par la direction. Son rôle a <strong>en</strong> effet été d’organiser etd’animer cette précision <strong>du</strong> niveau n-1 pour alim<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> façon cohér<strong>en</strong>te le niveau n. Pour d<strong>en</strong>ouveau repr<strong>en</strong>dre les mots d’A-C. Martinet, leur <strong>en</strong>jeu était <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre cette démarche<strong>de</strong> réflexion sur les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation pour laquelle la planification stratégique était unmom<strong>en</strong>t choisi :« En instaurant un lieu <strong>de</strong> prise <strong>de</strong> parole, <strong>de</strong> confrontation, d'argum<strong>en</strong>tation, <strong>de</strong>recoupem<strong>en</strong>t d'informations, d’analyses et <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue, bref une délibérationeffective et une véritable communication, le processus d'élaboration <strong>du</strong> plan peut fournirun support privilégié à la mise <strong>en</strong> oeuvre <strong>de</strong> [la] rationalité procé<strong>du</strong>rale collective(Lacroux, 1994) pour peu que certaines conditions soi<strong>en</strong>t réunies afin <strong>de</strong> ne pas tomberdans le simulacre ou l'exercice <strong>de</strong> style : temps suffisant <strong>de</strong> délibération […], privilègeaccordé aux discussions <strong>de</strong> fond plutôt qu'au respect d'une forme a priori, etc » (Martinet,2001 : 189).Ce travail a été animé <strong>en</strong> particulier par le directeur <strong>du</strong> programme qui a travaillé avec lescoordinateurs <strong>de</strong> chaque départem<strong>en</strong>t, lesquels <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t travailler avec leur équipe. En accordavec les précautions évoquées par A-C. Martinet (ibid.), la forme <strong>de</strong>s échanges a été adaptée auxbesoins et avancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> chaque départem<strong>en</strong>t. Voyons donc comm<strong>en</strong>t le processus s’est déroulé337


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepour chacun d’<strong>en</strong>tre eux. Nous ne ferons qu’évoquer les départem<strong>en</strong>ts « Suivi-évaluation <strong>de</strong>sZHM » et « Espèces » pour nous arrêter plus longuem<strong>en</strong>t sur les questions qui se sont posées ausein <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t « Ecosystèmes » au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> choisir et d’expliciter les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation prioritaires que l’équipe <strong>de</strong>vrait porter.En réalité, la question ne s’est pas posée <strong>de</strong> cette façon pour le départem<strong>en</strong>t « Suivi-évaluation<strong>de</strong>s ZHM » chargé <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong>s ZHM. En effet, le dispositif n’a pasvocation à se focaliser sur un problème précis relatif à l’état <strong>de</strong>s ZH, mais au contraire à <strong>en</strong> offrirle panorama le plus large, ainsi qu’une idée plus détaillée et chiffrée <strong>de</strong> l’ampleur <strong>de</strong>s phénomènesaffectant les ZH à l’échelle régionale. Pour ce départem<strong>en</strong>t, les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation ne sontautres que les objectifs <strong>de</strong> conservation globaux <strong>de</strong> la TdV : « Arrêter la perte et la dégradation<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et <strong>de</strong> leurs ressources naturelles » (Mission <strong>de</strong> la TdV, Planstratégique TdV 2006-2010 / 2011-2015).Les <strong>de</strong>ux autres départem<strong>en</strong>ts ont <strong>en</strong> revanche vocation à développer <strong>de</strong>s actions plus ciblées etplus localisées, qui suppos<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s arbitrages <strong>en</strong> termes d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation, ne pouvantinvestir tous les aspects concernant les ZH, que ce soit au niveau <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>mécanismes dégradants ou <strong>de</strong> la recherche <strong>de</strong> solutions pour freiner l’impact <strong>de</strong>s problèmes dontelle a connaissance.Pour le programme « Espèces », la démarche a davantage consisté à l’explicitation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeuxappuyée sur <strong>de</strong>s critères écologiques (Tableau 6.14) <strong>de</strong>s travaux déjà <strong>en</strong>gagés qu’à une refonte <strong>du</strong>programme <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> nouvelles priorités que l’organisation se serait donnée.Tableau 6.14 : Enjeux <strong>de</strong> conservation et critères <strong>de</strong> choix pour les communautés, les espèces et lespopulations (à partir <strong>de</strong> l’intro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> Plan stratégique TdV, 2011-2015)Critère <strong>de</strong> choix pour les communautés, espèces et populationsStatut défavorableEspèces clés (/ou <strong>en</strong>conflit) pour activitéshumainesEspèces ombrellesEspèces modèlesEspèces indicatricespar une diminution <strong>de</strong> leurs populations ou par une perte<strong>de</strong> leurs caractéristiques génétiques, à <strong>de</strong>s seuils justifiant<strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> conservationgénérant <strong>de</strong>s flux économiques par leur exploitation ouleur observation et contribuant ainsi indirectem<strong>en</strong>t aumainti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s ou <strong>en</strong> conflit avec les activitéshumaines (in<strong>du</strong>isant <strong>de</strong>s risques divers, <strong>de</strong>s nuisances,etc.)porteuses <strong>de</strong> symboliques, <strong>de</strong> représ<strong>en</strong>tations <strong>de</strong>s ZHM oupermettant plus généralem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> conserver les ZHM et <strong>de</strong>s<strong>en</strong>sibiliser le publicmoins rares mais dans <strong>de</strong>s projets permettant d'extrapolerles résultats aux espèces méditerrané<strong>en</strong>nes rares<strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s ZHM (banalisation, eutrophisation <strong>de</strong>smilieux..)Espèces faisantl’objet <strong>de</strong> travauxTruite méditerrané<strong>en</strong>neAnguilleCistu<strong>de</strong>AnguilleCanard / sarcelleFlamant roseCanardOiseauxAmphibi<strong>en</strong>s338


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerLa TdV ne peut évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t travailler sur l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s espèces inféodées aux ZHM et ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances sur certaines espèces contribue à la compréh<strong>en</strong>sion <strong>du</strong>fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> communautés d’espèces plus larges. En ce s<strong>en</strong>s, beaucoup <strong>de</strong> travauxfocalisés sur une espèce sont justifiables et ont leur pertin<strong>en</strong>ce, surtout quand on les replace dansla trajectoire <strong>de</strong> la TdV (histoire et expertise, accès au terrain, etc.). Les membres <strong>de</strong> la TdVpr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t l’exemple <strong>du</strong> flamant rose pour parler <strong>de</strong> cette problématique : « l’investissem<strong>en</strong>tsur les colonies <strong>de</strong>s flamants roses ne se justifie plus par l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation. Les populations ne sont pas <strong>en</strong>danger. Mais le flamant est un oiseau visible, symbolique qui peut être un porte-parole efficace pour les ZH »(Chercheur TdV, com.pers., 2008). A cela, il faut ajouter que le travail sur le flamant est aussipour la TdV un ancrage et une occupation <strong>du</strong> terrain <strong>en</strong> Camargue, lui permettant aujourd’hui <strong>de</strong>peser dans la reconversion <strong>de</strong>s Salins (Chapitre 3). Ce travail historique permet <strong>en</strong> outre <strong>de</strong>développer le « réseau <strong>de</strong>s flamants » dont le développem<strong>en</strong>t a déjà permis le mise <strong>en</strong> placed’actions significatives pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’espèce <strong>en</strong> différ<strong>en</strong>ts lieux <strong>du</strong> bassinméditerrané<strong>en</strong>.En somme l’arbitrage dans les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation a plus été un travail <strong>de</strong> clarification <strong>de</strong>sproblématiques déjà prises <strong>en</strong> charge que <strong>de</strong> prioritisation et <strong>de</strong> choix nouveaux. L’ori<strong>en</strong>tation etl’évolution <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us sci<strong>en</strong>tifiques est un processus continu qui ne permet pas <strong>de</strong>s rupturesfortes d’un plan à un autre. Ceci n’empêche pas une certaine programmation qui reste souple. Parexemple, le domaine <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong> la santé (interaction activités humaines - santé <strong>de</strong> la faunesauvage) n’apparaît pas dans le programme 2006-2010. Ce domaine a été investi par la TdV – quia d’ailleurs rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t occupé une place visible dans ce domaine émerg<strong>en</strong>t – au cours <strong>du</strong>programme 2006-2010. Pour le programme 2011-2015, la problématique écologie <strong>de</strong> la santé estintégrée et constitue un <strong>de</strong>s 4 projets <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t « Espèces ».C’est finalem<strong>en</strong>t pour l’élaboration <strong>du</strong> programme « Ecosystèmes » que les questions sontapparues, notamm<strong>en</strong>t pour <strong>de</strong>s raisons conjoncturelles. Ce départem<strong>en</strong>t nécessitait unerestructuration plus importante. En effet, plusieurs <strong>de</strong>s anci<strong>en</strong>s projets étai<strong>en</strong>t arrivés à leur termeet les projets <strong>de</strong> ce départem<strong>en</strong>t étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> outre relativem<strong>en</strong>t désordonnés <strong>en</strong> 2006-2010, avec unmanque <strong>de</strong> clarté dans les problèmes <strong>de</strong> conservation sur lesquels ils se proposai<strong>en</strong>t d’interv<strong>en</strong>ir(et dans l’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action que nous étudierons dans la section suivante).Des efforts particuliers ont été fournis pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> cette construction <strong>du</strong> programme« Ecosystèmes », ponctués <strong>de</strong> réunions spécifiques animées par le directeur <strong>du</strong> programme,d’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s plus restreints <strong>en</strong>tre le directeur et les chefs <strong>de</strong> projets et <strong>de</strong> nombreux allers-retourssur les docum<strong>en</strong>ts (docum<strong>en</strong>ts préparatoires pour le plan stratégique 2011-2015). Les échanges339


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleobservés au cours <strong>de</strong>s séances organisées à cette fin permettai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> saisir les difficultés <strong>de</strong> choixet <strong>de</strong> clarification <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation. Ils donnai<strong>en</strong>t à voir les t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>tshétérogènes (désir <strong>de</strong> l’équipe, jeu d’acteurs <strong>en</strong> interne, …) qui semblai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> être l’origine. Pourle compr<strong>en</strong>dre, il faut répéter que le directeur <strong>du</strong> programme, responsable et animateur <strong>de</strong> cetteréflexion, avait pour objectif <strong>de</strong> voir émerger <strong>de</strong>s projets fédérateurs aux objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux explicites. Parallèlem<strong>en</strong>t, il <strong>de</strong>vait aussi obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> cette équipe uneappropriation <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c (que nous avons étudié dans lechapitre 3), pour laquelle l’organisation avait l’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> s’investir. En effet, il était clair que laTdV ne pouvait pas ignorer les changem<strong>en</strong>ts drastiques ayant lieu sur cette zone <strong>de</strong> la Camarguereprés<strong>en</strong>tant plus <strong>de</strong> 6000 hectares, là où elle mène à bi<strong>en</strong> un programme <strong>de</strong> rechercheinterv<strong>en</strong>tion<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>puis un <strong>de</strong>mi-siècle (programme flamants roses). Son ambition –participer activem<strong>en</strong>t à la reconversion vers un espace au fonctionnem<strong>en</strong>t le plus naturel possible– implique la participation non seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’équipe travaillant sur les flamants, mais beaucoupplus largem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la TdV sur le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s écosystèmes humi<strong>de</strong>s.Pour les chercheurs <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t « Ecosystèmes », le travail sur les Salins reste cep<strong>en</strong>dantquelque chose <strong>de</strong> nouveau <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> milieu, cette zone <strong>de</strong> la Camargue étant restée <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors<strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> recherche sur les écosystèmes m<strong>en</strong>és jusqu’ici. Le développem<strong>en</strong>t d’unprogramme <strong>de</strong> recherche sur un nouveau type d’espace, motivé par <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservationémergeants, voire urg<strong>en</strong>ts, pose plusieurs questions quant au choix <strong>de</strong>s actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales à construire. Nous pouvons <strong>en</strong> distinguer trois aspects : (1) le choix etl’expression <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation pose la question <strong>de</strong> la motivation et <strong>du</strong> désir <strong>du</strong> membre<strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> la TdV dans le portage <strong>de</strong> l’action ; (2) mais c’est aussi la complexité <strong>de</strong>s problèmes<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux qui r<strong>en</strong>d l’exercice difficile ; (3) <strong>en</strong>fin, nous avons retrouvé cette t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>trela recherche sci<strong>en</strong>tifique att<strong>en</strong><strong>du</strong>e sur son « objectivité » et l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui partinexorablem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> choix et <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> certains acteurs d’atteindre un but.1. « Je p<strong>en</strong>se que pour se démarquer un chercheur doit évoluer au cours <strong>de</strong> sa carrière, mais ne doit pas repartir àzéro tous les cinq ans. Depuis mon arrivée à la TdV, mes recherches ont plutôt été axées écologie passereaux(1996-2000), puis écologie butor (2001-2005), puis télédétection/modélisation et je p<strong>en</strong>se que cette évolution futbénéfique car elle s’appuyait sur un fil con<strong>du</strong>cteur (<strong>gestion</strong>/conservation <strong>de</strong>s marais) et capitalisait sur <strong>de</strong>s acquisqui permettai<strong>en</strong>t d’approfondir nos connaissances et d’id<strong>en</strong>tifier/répondre clairem<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s objectifs pertin<strong>en</strong>tsconcernant la <strong>gestion</strong> conservatoire et l’exploitation rationnelle <strong>de</strong> cet écosystème. Honnêtem<strong>en</strong>t, je ne vois pas <strong>de</strong> filcon<strong>du</strong>cteur qui puisse m’am<strong>en</strong>er à travailler dans les salins. Les oiseaux qui les fréqu<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t se prêt<strong>en</strong>t surtout àl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>s populations, domaine qui n’est pas le mi<strong>en</strong>, et sont par ailleurs déjà étudiés par mescollègues et ex-collègues. Cep<strong>en</strong>dant, si projet salin il y a, je veux bi<strong>en</strong> mettre à profit certaines <strong>de</strong> mes compét<strong>en</strong>ces à340


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerqui le juge utiles » (Chercheur TdV, séance planification stratégique, 2010). Ces propos rappell<strong>en</strong>tque le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche a ses logiques propres. Il ne permet pas <strong>de</strong> répondre àtout, à tout mom<strong>en</strong>t, ni <strong>de</strong> répondre aux urg<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la conservation. On peut <strong>en</strong> outre y lirel’expression d’une certaine volonté <strong>de</strong> ne pas abandonner <strong>de</strong>s thèmes <strong>en</strong>gagés, ce qui nous amèneà considérer la dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> désir <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’ONGE dans les choix pour l’action. Lesurg<strong>en</strong>ces, les priorités qui sont établies <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> critères spécifiques et qui constitu<strong>en</strong>t lesnormes internationales <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature ne sont pas toujours celles <strong>de</strong>s membres quiont un parcours, <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s s<strong>en</strong>sibilités propres. La diversité et la multiplicité <strong>de</strong> cesvisions indivi<strong>du</strong>elles contribu<strong>en</strong>t sans doute plus à l’évolution et à l’<strong>en</strong>richissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ambitionspour l’action qu’à un éparpillem<strong>en</strong>t stérile, et il serait dommage d’exclure cette dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> désir<strong>de</strong> la réflexion stratégique qui ne t<strong>en</strong>drait alors que vers l’analyse froi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s opportunités.Pour <strong>en</strong> rev<strong>en</strong>ir à la construction <strong>du</strong> programme « Ecosystèmes », les parties pr<strong>en</strong>antes <strong>de</strong> ceprocessus (directeur <strong>du</strong> programme et chercheurs <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Ecosystèmes) interrogées surleurs visions respectives expliqu<strong>en</strong>t les « difficultés » 187 <strong>en</strong> partie par <strong>de</strong>s problèmes d’ajustem<strong>en</strong>tset <strong>de</strong> jeux d’acteurs <strong>en</strong> interne. Les uns dis<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s autres qu’ils veul<strong>en</strong>t imposer leur ag<strong>en</strong>dad’action à tout le groupe et les autres parl<strong>en</strong>t d’une résistance au changem<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> stratégies <strong>de</strong>blocages dans l’expression <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation visant à retar<strong>de</strong>r la prise d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>tqu’il faudrait <strong>en</strong>suite mettre <strong>en</strong> œuvre. Etudié dans la <strong>du</strong>rée, ce processus montre que cespostures d’acteurs peuv<strong>en</strong>t évoluer rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t, et plus qu’une résistance au changem<strong>en</strong>t, il s’agitd’une adaptation, d’une maturation progressive <strong>de</strong>s idées. Voici un exemple qui illustre le tri dansles matériaux récoltés qu’il nous était important <strong>de</strong> faire pour rester à un niveau d’analyse c<strong>en</strong>trésur l’intérêt stratégique qui est le nôtre, c’est-à-dire la capacité <strong>de</strong> l’organisation à mettre <strong>en</strong>synergie les dynamiques internes avec les intérêts d’action stratégique sur le jeu public pour faireavancer la conservation. Pour cela, il n’était pas intéressant <strong>de</strong> r<strong>en</strong>trer dans le détail <strong>de</strong> la manièredont le jeu interne crée <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>sions organisationnelles, mais il nous fallait veiller à <strong>en</strong> retirer cequi influ<strong>en</strong>ce les choix stratégiques pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.2. Les débats observés p<strong>en</strong>dant le déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces réunions spécifiques se sont cristallisésautour <strong>de</strong> l’impossibilité <strong>de</strong> définir <strong>de</strong>s « <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservations précis » pour le systèmecomplexe que constitue la Camargue. Pour ces chercheurs – et quelle que soit leur discipline – lesproblèmes qui affect<strong>en</strong>t l’état et la qualité <strong>de</strong> la zone humi<strong>de</strong> sont inexorablem<strong>en</strong>t systémiques, etles impacts négatifs affect<strong>en</strong>t forcém<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>semble d’espèces et d’habitats. « La problématique187 Ent<strong>en</strong>dre « difficulté » comme une comparaison par rapport aux autres départem<strong>en</strong>ts <strong>du</strong> programme. Leprogramme Ecosystèmes était plus compliqué à construire, cela a pris beaucoup plus <strong>de</strong> temps que pour les <strong>de</strong>uxautres départem<strong>en</strong>ts.341


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talegénérale et incontournable pour la Camargue est celle d’un milieu d’interface que constitue par ess<strong>en</strong>ce même un<strong>de</strong>lta, <strong>en</strong>tre mer et contin<strong>en</strong>t. Je ne peux que répéter qu’à mon s<strong>en</strong>s, la notion <strong>de</strong> conservation (au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>dynamique <strong>de</strong>s écosystèmes) dans ce cadre, ne peut être considérée <strong>en</strong> isolant le dit écosystème <strong>de</strong>s processusconditionnant son évolution à court, moy<strong>en</strong> ou long terme » (Chercheur TdV, séance planificationstratégique, 2009).3. Enfin, la question <strong>de</strong> l’articulation <strong>en</strong>tre la recherche sci<strong>en</strong>tifique « objective » et « les choix <strong>de</strong><strong>gestion</strong> qui sont <strong>de</strong>s choix socio-politiques » (Chercheurs TdV, com.pers., 2009, 2010) est apparue <strong>de</strong>façon récurr<strong>en</strong>te et désordonnée dans les débats relatifs à la construction d’une stratégie pourl’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> la TdV dans la reconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c. Depuis le début <strong>de</strong>smouvem<strong>en</strong>ts dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> cette zone et surtout <strong>du</strong>rant le processus <strong>de</strong> planificationstratégique <strong>en</strong> 2009-2010, <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> discours s’oppos<strong>en</strong>t : « la TdV doit se positionner et faire <strong>de</strong>srecommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pour les différ<strong>en</strong>ts espaces » contre « la TdV peut et doit donner <strong>de</strong>s éclairages pouraméliorer la <strong>gestion</strong>, mais elle ne peut pas s’imposer dans les choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui sont <strong>de</strong>s choix <strong>de</strong> société ». Lepositionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> tant qu’organisme sci<strong>en</strong>tifique, expert (interface sci<strong>en</strong>ce – politique)ou acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t porteur d’une cause contre d’autres intérêts, dépasse évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t lecas <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c : la question est omniprés<strong>en</strong>te, jusqu’aux séances <strong>de</strong>conseil d’administration où nous avons noté cet échange qui mérite d’être retranscrit dans sonintégralité :« Chercheur TdV : Une <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> la « recherche pour la conservation » est que lesconnaissances apportées ne sont pas toujours abouties et facilem<strong>en</strong>t manipulables par les utilisateurs.Coordinateur (non sci<strong>en</strong>tifique) : Le temps <strong>de</strong> la recherche n’est pas une faiblesse aujourd’hui, maiscela risque <strong>de</strong> l’être <strong>de</strong>main. L’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> réagir rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t pour ne pasarriver après la bataille. Sinon on risque d’apporter les élém<strong>en</strong>ts après que tout le mon<strong>de</strong> le sache. Doncil faudrait parfois se cont<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s informations même si elles ne sont validées qu’à 99%.Chercheur TdV : Au contraire, c’est la logique inverse qui se passe. La création <strong>du</strong> GIEC, et peutêtrebi<strong>en</strong>tôt <strong>de</strong> l’IPBES, c’est pour dire « on met les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>en</strong>semble, avec <strong>de</strong>s controversessci<strong>en</strong>tifiques, pour justem<strong>en</strong>t essayer <strong>de</strong> gérer les incertitu<strong>de</strong>s ».Membre <strong>du</strong> CA : Il y a là un vrai débat sur l’expertise. Je p<strong>en</strong>se que la TdV a toujours fait ladiffér<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre l’état <strong>de</strong> l’art et l’expertise que peuv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r les déci<strong>de</strong>urs. La TdV est bi<strong>en</strong> placéepour faire les <strong>de</strong>ux, mais il faut les distinguer.Directeur <strong>du</strong> programme TdV : Oui, cette distinction <strong>en</strong>tre « sci<strong>en</strong>ce » et « expertise » est ess<strong>en</strong>tielle,car si la TdV est <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s expertises dans plusieurs champs disciplinaires, cela ne doitpas être confon<strong>du</strong> avec la véritable pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique qui est un travail beaucoup plus approfondi sepassant sur <strong>de</strong>s temps plus longs. Cette articulation recherche / expertise, c’est d’ailleurs plusgénéralem<strong>en</strong>t le problème <strong>de</strong> la recherche / conservation qui ont <strong>de</strong>s temporalités différ<strong>en</strong>tes.Chercheurs TdV : Le travail <strong>du</strong> chercheur, c’est aussi <strong>de</strong> mobiliser et <strong>de</strong> valoriser le patrimoinesci<strong>en</strong>tifique disponible. Ce qu’il apporte lui-même n’est qu’une goutte d’eau à son champ <strong>de</strong> recherche.342


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerMais, selon les cas, il peut y avoir <strong>de</strong>s dizaines d’années <strong>de</strong> littérature, quand la construction <strong>de</strong> Fos 188repr<strong>en</strong>d, ce n’est pas une question sci<strong>en</strong>tifique » (Séminaire stratégique CA TdV, novembre2009).Cet échange lors d’un CA, et plus généralem<strong>en</strong>t les débats internes relatifs à la t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre« recherche objective » et « choix <strong>de</strong> société » font écho aux travaux <strong>de</strong> C. Bonneuil (2004 ;2006a ; 2006b) sur l’évolution <strong>de</strong>s rapports <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ces et société et les formes d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s chercheurs dans la <strong>de</strong>uxième moitié <strong>du</strong> 20 e siècle. Il montre, <strong>en</strong>tre autres à travers le cas <strong>de</strong> lacontroverse sur les OGM (Bonneuil, 2006b), qu’une auto-critique interne au secteur <strong>de</strong> larecherche et une politisation <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce existait dans les années 1970. Parallèlem<strong>en</strong>t leschercheurs avai<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>dance à s’<strong>en</strong>gager dans la vie publique au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la stricte pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>connaissances sci<strong>en</strong>tifiques. Selon l’auteur, la situation a changé dès les années 1980, passant àune pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> « prise <strong>de</strong> responsabilités institutionnelles » (remplaçant le « chercheurresponsable »), accompagnée par l’institutionnalisation <strong>de</strong> la sociologie <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>ces. La mutationa eu lieu sur le plan <strong>de</strong> la critique <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce : « la mise <strong>en</strong> critique <strong>de</strong> la sci<strong>en</strong>ce, qui étaitminoritaire, mais active, <strong>en</strong>tre 1968 et 1981 au sein <strong>de</strong>s milieux sci<strong>en</strong>tifiques, émaneess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>puis la fin <strong>de</strong>s années 1980, <strong>de</strong> l'extérieur <strong>de</strong> celle-ci [v<strong>en</strong>ant d’autres groupessociaux] » (Bonneuil, 2006a). Mais aussi sur le plan <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s chercheurs : cet<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>drait moins la forme <strong>de</strong> la déf<strong>en</strong>se <strong>de</strong> valeur ou la critique <strong>de</strong> modèles politiqueset sociaux, mais évoluerait vers un rôle <strong>de</strong> « lanceur d’alerte » (surtout avec l’accumulation <strong>de</strong>problèmes liés à la santé et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t) pour ai<strong>de</strong>r la société à faire <strong>de</strong>s choix. A la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong><strong>Valat</strong>, nous observons un certain questionnem<strong>en</strong>t vis-à-vis <strong>de</strong> la façon <strong>de</strong> se positionner dans lesdébats publics. L’organisation pro<strong>du</strong>it, <strong>de</strong> fait, une recherche <strong>de</strong>stinée à la conservation <strong>de</strong>s ZH,mais reste à savoir si les membres <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t être les premiers utilisateurs <strong>de</strong> leurpropre sci<strong>en</strong>ce pour agir <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZH ou s’ils estim<strong>en</strong>t pro<strong>du</strong>ire cette connaissance pour quiveut s’<strong>en</strong> servir. Les exemples développés dans le chapitre 3 montr<strong>en</strong>t que la TdV se situe plutôtdans le premier scénario, mais ceci n’est pas sans provoquer le débat <strong>en</strong> interne.Pour rev<strong>en</strong>ir à la construction <strong>du</strong> programme et l’investissem<strong>en</strong>t sur les Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c, nousavons retrouvé ces différ<strong>en</strong>tes positions évoluant avec une appropriation <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus large <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s salins et <strong>de</strong> l’intérêt pour cette problématique sci<strong>en</strong>tifique et<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Avant la planification stratégique, les sci<strong>en</strong>tifiques travaillant sur la zone dans188 Fos-sur-Mer se situe <strong>en</strong>tre la Camargue et la ville <strong>de</strong> Marseille, au bord <strong>de</strong> l’Etang <strong>de</strong> Berre et à proximitéd’espaces naturels d’importance biologique. Sur cette commune, il existe une vaste zone in<strong>du</strong>strielle – raffineries,port <strong>de</strong> commerce et autres in<strong>du</strong>stries – qui continue à se développer, mettant <strong>en</strong> péril les espaces naturels.343


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talele domaine <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong>s oiseaux d’eau avai<strong>en</strong>t peine à se positionner sur la façon <strong>de</strong> fairepasser les recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> au nouveau <strong>gestion</strong>naire <strong>du</strong> site : « il y a la pro<strong>du</strong>ctionsci<strong>en</strong>tifique, certes, et après il y a un second niveau : la TdV <strong>en</strong> tant qu’acteur. Et là il faut qu’on sache pr<strong>en</strong>dreposition et qu’on assume cette position. Il y a une grosse question au niveau <strong>du</strong> programme flamants : mise <strong>en</strong> eauou pas. Je trouve le positionnem<strong>en</strong>t au niveau <strong>de</strong> la recherche trop lâche : ce n’est pas au parc <strong>de</strong> dire s’il faut mettre<strong>de</strong> l’eau ou pas, pomper ou pas. Je dis mais att<strong>en</strong>d : ok, le parc pr<strong>en</strong>d la décision in fine, mais il faut qu’onpr<strong>en</strong>ne une position pour savoir si on recomman<strong>de</strong> au parc <strong>de</strong> le faire ou pas, et s’il faut qu’on assume le coûtfinancier <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong>… » (Direction TdV, com.pers., 2010). Au début <strong>de</strong> l’année suivante,d’autres sci<strong>en</strong>tifiques exprimai<strong>en</strong>t quelques rétic<strong>en</strong>ces à s’investir <strong>en</strong> recherche sur ce site sachantque sa <strong>gestion</strong> dép<strong>en</strong>dait <strong>de</strong>s manœuvres politiques et restait très incertaine : « la reconversion <strong>de</strong>ssalins est égalem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> classée avec une urg<strong>en</strong>ce reconnue et l’avis assez largem<strong>en</strong>t partagé que la TdV peut avoirun impact positif avec une bonne effici<strong>en</strong>ce. Cette thématique est perçue comme <strong>de</strong>vant faire appel d’abord aulobbying puis dans une moindre mesure à la recherche, la <strong>gestion</strong> et l’expertise » (Synthèse <strong>de</strong>s priorités <strong>de</strong>l’équipe Camargue, janvier 2010). Comme indiqué plus haut, ces sci<strong>en</strong>tifiques ont, dans unpremier temps, freiné la construction <strong>du</strong> programme, le temps <strong>de</strong> « mieux pr<strong>en</strong>dre leursmarques » sans véritablem<strong>en</strong>t opposer d’autres <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation forts à celui <strong>de</strong>s salinsporté par la direction. Peu <strong>de</strong> temps après, nous avons pu observer une appropriation <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu<strong>de</strong>s salins par les sci<strong>en</strong>tifiques et experts <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH, visible à la fois dans les docum<strong>en</strong>tspréparatoires <strong>du</strong> Plan stratégique 2011-2015, mais aussi dans l’animation <strong>de</strong>s réunions ayant eulieu sur le sujet <strong>en</strong> ce début <strong>de</strong> printemps 2010 : « Il se passe beaucoup <strong>de</strong> choses à Salin-<strong>de</strong>-Giraud,notamm<strong>en</strong>t autour <strong>de</strong>s terrains nouvellem<strong>en</strong>t acquis ou <strong>en</strong> cours d’acquisition ; nous avons nous-mêmes plusieursprojets <strong>en</strong> cours ou <strong>en</strong> préparation. Il est important <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> faire circuler l’information <strong>en</strong>tre tous les membrespress<strong>en</strong>tis (auxquels peuv<strong>en</strong>t se joindre ceux qui veul<strong>en</strong>t) pour avancer <strong>de</strong> manière concertée et <strong>en</strong> connaissance <strong>de</strong>cause » (Réunion « groupe Salins », avril 2010). Finalem<strong>en</strong>t, la TdV s’est positionnée comme unacteur sci<strong>en</strong>tifique dans le jeu <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s Salins. En effet, comme nous l’avonsexpliqué dans le chapitre 3, la posture <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique est à la fois la logique d’action (lapro<strong>du</strong>ction d’un cont<strong>en</strong>u, <strong>de</strong> connaissance pour la restauration <strong>du</strong> site), mais aussi une stratégie<strong>de</strong> positionnem<strong>en</strong>t dans le système d’acteurs (plutôt que <strong>de</strong> se prés<strong>en</strong>ter <strong>en</strong> acteur territorial tropdirectem<strong>en</strong>t concurr<strong>en</strong>t <strong>du</strong> PNRC qui cherche à asseoir son statut <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>naire d’espacesnaturels). Si les t<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre la recherche sci<strong>en</strong>tifique et les choix d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation,l’expertise et les recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> sont inhér<strong>en</strong>tes à l’action <strong>de</strong> la TdV et occuperonttoujours un espace dans les débats internes, le cas <strong>de</strong>s Salins nous montre qu’aussi délicates àgérer soi<strong>en</strong>t-elles, ces t<strong>en</strong>sions peuv<strong>en</strong>t être synergiques.344


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerCe qui est sûr, c’est que ce positionnem<strong>en</strong>t « objectif » ou « <strong>en</strong>gagé » par rapport à l’objetécologique et aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation est, comme cela apparaît dans ce qui précè<strong>de</strong>,complètem<strong>en</strong>t lié au mo<strong>de</strong> d’action <strong>de</strong> la TdV, ou plus généralem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s ONGE qui articul<strong>en</strong>t larecherche sci<strong>en</strong>tifique avec d’autres formes d’action pour la conservation. Explorons maint<strong>en</strong>antplus précisém<strong>en</strong>t les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>de</strong> notre organisation dans la scène publique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong><strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, qui amèn<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t leur lot <strong>de</strong> questions.6.3.2 La théorie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> articulant différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>sd’interv<strong>en</strong>tionIl ressort <strong>de</strong> nos observations et <strong>de</strong> notre analyse que le processus <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> programmeest sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong> par au moins trois <strong>en</strong>jeux. Ces <strong>en</strong>jeux ne sont pas spécifiques au registrestratégique <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui nous occupe à prés<strong>en</strong>t, ils ont <strong>de</strong> ce fait déjàété évoqués au cours <strong>de</strong> ce chapitre. Il semble cep<strong>en</strong>dant opportun <strong>de</strong> les pr<strong>en</strong>dre comme point<strong>de</strong> départ et comme fil con<strong>du</strong>cteur pour organiser cette section. Ces <strong>en</strong>jeux sont : (1) la définitionplus précise <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation et <strong>de</strong>s objectifs opérationnels « atteignables » (TdV,com.pers., 2009), impliquant d’aller plus loin dans l’explicitation <strong>de</strong> la stratégie d’action (Sectiona) ; (2) la construction d’une action tournée vers les mécanismes responsables <strong>de</strong> la dégradation<strong>de</strong>s ZHM, nous verrons que la réflexion stratégique pr<strong>en</strong>d appui sur <strong>de</strong>s doctrines (GestionIntégrée) et <strong>de</strong>s concepts (transfert) dont nous discuterons les implications au regard <strong>de</strong> l’action(Section b) ; (3) une articulation optimale <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action à même <strong>de</strong> tra<strong>du</strong>ire <strong>en</strong> pratique lathéorie d’action <strong>de</strong> la TdV (Section c).Pour chacun <strong>de</strong> ces <strong>en</strong>jeux, nous continuerons à appuyer l’analyse sur les pratiques <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong>la TdV donnant prise aux processus <strong>de</strong> réflexion stratégique et sur les questions qui sont(ré)apparues au cours <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>.a) Elaborer une stratégie d’action plus précise tournée vers les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux clarifiésNous avons déjà comm<strong>en</strong>té ce premier point qui était l’un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux majeurs pour cetteplanification stratégique <strong>du</strong> programme 2011-2015 : la clarification <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservationet <strong>de</strong>s actions qui seront véritablem<strong>en</strong>t mises <strong>en</strong> œuvre – exprimée notamm<strong>en</strong>t par le CS puis parles membres <strong>de</strong> l’organisation interne – comme une amélioration à apporter à la suite <strong>du</strong>programme précéd<strong>en</strong>t. Ce point mérite une discussion donnant d’abord <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>345


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleclarification <strong>de</strong> cette faible explicitation <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, pour <strong>en</strong>dégager les implications d’une plus forte explicitation pour l’ONGE et <strong>en</strong>fin abor<strong>de</strong>r la façondont la question a été prise <strong>en</strong> charge par l’organisation p<strong>en</strong>dant sa planification stratégique.Guidée par notre cadre d’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale, nous avonscherché à compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t se construisait la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale au s<strong>en</strong>sfort, c’est-à-dire visant explicitem<strong>en</strong>t à infléchir les forces qui sont à l’origine <strong>de</strong> la dégradation <strong>de</strong>l’état <strong>de</strong>s écosystèmes. Ce faisant, nous avons cherché à compr<strong>en</strong>dre d’une part, quel objetécologique et quel <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation étai<strong>en</strong>t visés par les actions (mises <strong>en</strong> œuvre et <strong>en</strong>construction) <strong>de</strong> la TdV. Nous avons d’autre part cherché à repérer les acteurs ciblés parl’ONGE, dans l’objectif d’impulser un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> pratiques ou une meilleure intégration <strong>de</strong>s<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation dans les décisions publiques. Cette démarche nous a rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t permis<strong>de</strong> repérer la faiblesse <strong>de</strong> l’explicitation <strong>de</strong> ces stratégies au s<strong>en</strong>s fort dans les docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>programme <strong>de</strong> l’organisation (Guillet, 2007). Les informations recueillies par les <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>seffectués auprès <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la TdV nous ont pourtant permis <strong>de</strong> constater que cetteabs<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>jeux et <strong>de</strong> stratégies d’action précises dans les textes n’était pas liée à un manqued’analyse stratégique <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s acteurs. Ils connaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet très bi<strong>en</strong> les mécanismesnéfastes <strong>en</strong> jeu et les cibles directes ou indirectes <strong>de</strong> leurs actions. C’est <strong>en</strong> partie dans l’analyse<strong>de</strong>s actions concrètes que nous trouvons <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts d’explication <strong>de</strong> cette faible explicitation<strong>de</strong>s stratégies dans les docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> programme. Nous <strong>en</strong> percevons trois.1. Un premier élém<strong>en</strong>t d’explication ti<strong>en</strong>t au fait que si la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s écosystèmes peut être le lieu<strong>de</strong> conflits, <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> comme <strong>de</strong>s incompatibilités <strong>en</strong>tre les activités <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts acteurs et lesint<strong>en</strong>tions <strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> terme d’état écologique <strong>de</strong>s milieux, ri<strong>en</strong> n’indique queles relations <strong>en</strong>tre ces acteurs doiv<strong>en</strong>t être conflictuelles. Les pratici<strong>en</strong>s peuv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce fait avoir <strong>du</strong>mal à raisonner leurs stratégies <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> pression <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t exercée sur un acteursectoriel. D’une part, bi<strong>en</strong> que les acteurs sectoriels ciblés peuv<strong>en</strong>t avoir une influ<strong>en</strong>ce positivesur les objets écologiques <strong>en</strong> question 189 , comme les chasseurs qui par leur activité contribu<strong>en</strong>t àmaint<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s espaces naturels (voir Chapitre 3), ou les éleveurs qui contribu<strong>en</strong>t à <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>smilieux typiques méditerrané<strong>en</strong>s comme les sansouires où les troupeaux sont souv<strong>en</strong>t placés <strong>en</strong>Camargue par exemple. D’autre part, les membres <strong>de</strong> la TdV cherch<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s prises pour interv<strong>en</strong>irdans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s où ils travaill<strong>en</strong>t. En cela, les stratégies vont189 S’ils ont une influ<strong>en</strong>ce positive vis-à-vis <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s écosystèmes, ils se rapproch<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tconceptuel. Cep<strong>en</strong>dant ils ne sont pas <strong>de</strong>s AE dans la mesure où ils n’agiss<strong>en</strong>t pas directem<strong>en</strong>t selon une int<strong>en</strong>tion<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.346


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerplutôt être exprimées dans une int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> coopération que dans la dim<strong>en</strong>sion adversative <strong>de</strong>spratiques vis-à-vis <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s écosystèmes. Ceci nous con<strong>du</strong>it à <strong>de</strong>ux autres élém<strong>en</strong>tsd’explication.2. Nous voyons une autre conséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la complexité <strong>de</strong>s systèmes d’acteurs dans lesquels lesmembres <strong>de</strong> l’ONGE cherch<strong>en</strong>t à pr<strong>en</strong>dre prise : c’est le plus souv<strong>en</strong>t dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong>projet que les membres précis<strong>en</strong>t leurs stratégies d’action, au fil <strong>de</strong> leur analyse – plus ou moinsconsci<strong>en</strong>te – <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, <strong>de</strong>s opportunités qui se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>s blocages qu’il leurfaut détourner. Le caractère émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale est un facteurimportant con<strong>du</strong>isant à cette faible explicitation <strong>de</strong>s stratégies <strong>en</strong> amont dans les docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>programme.3. Enfin, nous y voyons une dim<strong>en</strong>sion tactique. Comme nous l’avons dit juste avant, lesmembres <strong>de</strong> la TdV cherch<strong>en</strong>t à pr<strong>en</strong>dre prise dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par une stratégieplutôt coopérative, <strong>de</strong> manière à trouver un espace pour jouer leur rôle d’experts <strong>en</strong> vued’influ<strong>en</strong>cer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH et les décisions les concernant. La stratégie coopérative est sastratégie au s<strong>en</strong>s fort, fondée sur une démarche collaborative (y compris avec les acteurssectoriels) pour <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer un changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver. Dans lesactions concrètes que nous avons étudiées (Chapitre 3), nous avons vu <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> résultatssignificatifs que cette stratégie coopérative apporte. Nous avons <strong>en</strong> outre vu que la TdV adaptaitsa position dans le système <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, et n’hésitait pas à développer<strong>de</strong>s actions plus adversatives lorsqu’elle les jugeait pertin<strong>en</strong>te (comme la sollicitation <strong>de</strong> ladirection <strong>de</strong> l’ONCFS pour pousser au respect <strong>de</strong> loi concernant les pratiques cynégétiques <strong>en</strong>Camargue). Pourtant, lorsque l’on revi<strong>en</strong>t au plan stratégique (2006-2010) où ces projets d’actionsont décrits, nous trouvons <strong>de</strong>s « stratégies » dans une forme affaiblie, (sans connotationpéjorative), telle qu’on la retrouve dans la « stratégie mondiale pour la conservation » publiée parl’UICN (1980) (Mermet, 2006), c’est-à-dire davantage comme un programme que comme <strong>de</strong>sactions précises et ciblées. Comme le souligne L. Mermet (2006), dans le recours à la stratégie aus<strong>en</strong>s faible « tout se passe comme s’il n’y avait pas d’adversaires actifs et intellig<strong>en</strong>ts, maisseulem<strong>en</strong>t ceux, inertes et abstraits, que sont l’ignorance, l’inatt<strong>en</strong>tion, la routine. Il s’agit <strong>de</strong>protéger l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, mais on ne voit pas très bi<strong>en</strong> contre qui ». Or, l’exemple <strong>de</strong> la TdVmontre que les ONGE peuv<strong>en</strong>t être con<strong>du</strong>ites à développer <strong>de</strong>s formulations <strong>de</strong> leur action dansune forme « faible » pour <strong>de</strong>s raisons tactiques : pour développer sa stratégie coopérative, la TdVn’a pas intérêt à désigner ses adversaires <strong>en</strong> tant que tels. Mettre <strong>en</strong> avant la dim<strong>en</strong>sioncoopérative et taire la dim<strong>en</strong>sion adversative dans l’explicitation <strong>de</strong>s stratégies d’action apparaît347


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talecomme une dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> sa stratégie même, visant à préserver les plus gran<strong>de</strong>s marges <strong>de</strong>manœuvres vis-à-vis <strong>de</strong> ses cibles.Ce troisième élém<strong>en</strong>t d’explication <strong>de</strong> la faible explicitation <strong>de</strong>s stratégies d’action dans lesdocum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> programme pose alors la question <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong> ces docum<strong>en</strong>ts (notamm<strong>en</strong>t leplan stratégique) <strong>en</strong> externe <strong>de</strong> l’organisation. Le plan stratégique est d’abord un docum<strong>en</strong>tinterne, mais nous avons vu que la TdV l’avait utilisé comme un outil pour r<strong>en</strong>forcer sespart<strong>en</strong>ariats <strong>en</strong> le transmettant à plusieurs instituts sci<strong>en</strong>tifiques et organismes <strong>de</strong> conservation.Parallèlem<strong>en</strong>t, certains sci<strong>en</strong>tifiques nous ont clairem<strong>en</strong>t dit qu’ils n’écrivai<strong>en</strong>t pas tout dans ceplan stratégique, sous-<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dant que certains angles <strong>de</strong> leur stratégie ne pouvai<strong>en</strong>t apparaîtreformellem<strong>en</strong>t dans ce docum<strong>en</strong>t qui pouvait être lu (Sci<strong>en</strong>tifique TdV, com.pers., 2010). Lalisibilité <strong>de</strong>s stratégies et <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong>s organisations est un aspect que l’on peuttrouver dans ceux <strong>de</strong>s nombreux travaux <strong>de</strong> R. Laufer c<strong>en</strong>trés sur les notions <strong>de</strong> légitimité et <strong>de</strong>rhétorique. Il montre que dans la pério<strong>de</strong> <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>puis le début <strong>du</strong>20 e siècle jusqu’aux années 1960, les organisations sont « hermétiques, elles dissimul<strong>en</strong>tintégralem<strong>en</strong>t aux regards situés à l’extérieur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise ce qui se passe à l’intérieur » (Laufer,2000 : 67), la légitimité v<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> critères très généraux (il cite l’exemple <strong>du</strong> respect <strong>de</strong> la loi antitrust).Désormais, dans un mon<strong>de</strong> complexe et incertain, la légitimité <strong>de</strong>s organisations estdavantage sujette à l’opinion externe. La communication, et surtout le cont<strong>en</strong>u communiqué, <strong>de</strong>sorganisations vers l’externe est un aspect qu’elles ont intérêt à maîtriser. « C’est à ce niveau que sepose la question <strong>de</strong> la part privée (intérêt <strong>de</strong> l’organisation) et la part publique (fonction sociale etparticipation à l’intérêt général) <strong>de</strong> l’organisation, définition qui constitue désormais unecomposante intégrante <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises » (ibid. : 78). Ainsi, si la lisibilité interne <strong>de</strong> lastratégie <strong>de</strong> la TdV est accrue, elle ne doit pas systématiquem<strong>en</strong>t s’accompagner d’uneaugm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> sa lisibilité <strong>en</strong> externe, sauf sur les aspects qu’elle juge pertin<strong>en</strong>t <strong>de</strong> partager pourr<strong>en</strong>forcer sa légitimité (par exemple, son expertise sur certains objets écologiques) et attirer <strong>de</strong>sressources (par exemple, communiquer son programme d’actions à <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires pot<strong>en</strong>tiels).Plusieurs implications découl<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ces élém<strong>en</strong>ts d’explication vis-à-vis d’une démarche pourexpliciter davantage les stratégies d’action. D’une part, expliciter davantage les stratégies d’actionau mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s projets et <strong>de</strong> la rédaction <strong>du</strong> plan stratégique doit permettre <strong>de</strong>mieux circoncrire les problématiques écologiques prises <strong>en</strong> charge et mieux gui<strong>de</strong>r l’action lors <strong>de</strong>sa mise <strong>en</strong> œuvre. Même si les stratégies d’action ne sont pas toujours précises au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> larédaction <strong>du</strong> projet, leur formalisation doit fixer <strong>de</strong>s repères qui seront <strong>en</strong>suite utiles dans leur348


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerprogression. D’autre part, il semble que leur explicitation plus poussée implique pour l’ONGEune plus gran<strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong> l’accès aux docum<strong>en</strong>ts où elles sont formalisées.Nous avons dit plus haut que cette question avait été c<strong>en</strong>trale au cours <strong>de</strong> la planificationstratégique pour le programme 2011-2015. Rappelons que pour mieux construire les projetsautour d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation clarifiés, un travail avait été effectué au niveau <strong>de</strong> la structuration<strong>du</strong> programme avec <strong>de</strong>s projets plus importants et surtout moins nombreux pour limiterl’éparpillem<strong>en</strong>t et une réflexion collective avait été organisée autour <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation(détaillé à la section précéd<strong>en</strong>te). Pour organiser la construction <strong>de</strong>s projets et <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong>vantrelever ces <strong>en</strong>jeux, un travail préalable (<strong>en</strong> mars 2009) <strong>de</strong> révision <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong>s projets a étéfourni par la direction. Cette étape a été, pour notre démarche <strong>de</strong> recherche, un mom<strong>en</strong>t propiceà l’interaction et la restitution. Nous sommes donc interv<strong>en</strong>ue pour construire, avec la direction,un cadrage pour faciliter l’explicitation <strong>de</strong>s objets écologiques à conserver, <strong>de</strong>s mécanismes àl’origine <strong>de</strong>s problèmes écologiques visés et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>concerné. Le recadrage proposé incite donc à aller plus loin dans l’expression <strong>de</strong>s cibles et <strong>de</strong>sstratégies d’action <strong>en</strong>visagés pour chacun <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation ret<strong>en</strong>us dans le souci d’avoirun docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce à même <strong>de</strong> mieux gui<strong>de</strong>r le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s stratégies, bi<strong>en</strong> que celaimplique peut-être <strong>de</strong> le restreindre à un usage interne. L’<strong>en</strong>cadré 6.1 fait apparaître lesam<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts apportés aux termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s projets <strong>en</strong>suite utilisés par les chefs <strong>de</strong>projets <strong>de</strong> la TdV pour élaborer le programme. Notons que dans la suite <strong>du</strong> texte, nous nousréférerons souv<strong>en</strong>t à ce cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets.Encadré 6.1 : Evolution <strong>de</strong>s termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s projets <strong>en</strong>tre le programme 2006-2010 et 2011-2015(source : Plans stratégiques TdV 2006-2010 et 2011-2015)TitreAuteur(s) et date :Plan stratégique 2006-2010Enjeux <strong>de</strong> conservation :Locaux / méditerrané<strong>en</strong>sEspèces, habitatsEnjeux économiques / activités humainesEnjeux sci<strong>en</strong>tifiquesRéponses att<strong>en</strong><strong>du</strong>es <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservationRésultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> recherche (<strong>en</strong> biologie <strong>de</strong> la conservation)Cibles et mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transfertSites détu<strong>de</strong>sFinancem<strong>en</strong>t possible (pistes):349


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleTitreAuteur(s) et date :Plan stratégique 2011-2015Enjeux <strong>de</strong> conservation : caractériser le problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal• Quel est le problème <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal ?• Doù vi<strong>en</strong>t-il? quels sont les mécanismes impactants ? quels sont les acteursresponsables (<strong>en</strong>jeux économiques/activités impliquées)?• Quel est le pot<strong>en</strong>tiel pour généralisationObjectifs (<strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation)• Quel est lobjectif <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal ultime <strong>du</strong> projet (pas forcém<strong>en</strong>t atteignable dans le cadre <strong>du</strong>projet mis <strong>en</strong> œuvre)?• Quelles pratiques, mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ou élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> contexte doiv<strong>en</strong>t changer pour latteinte <strong>de</strong>ces objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ?• Objectifs opérationnels <strong>du</strong> projet (doiv<strong>en</strong>t être cohér<strong>en</strong>ts avec les leviers id<strong>en</strong>tifiés) ; cesobjectifs peuv<strong>en</strong>t couvrir une partie seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ultimes maisdoiv<strong>en</strong>t y contribuerStratégie et cibles• Quels sont les leviers (quels facteurs x acteurs x moy<strong>en</strong>s,…) visés pour permettre lechangem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> nécessaire à latteinte <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation?• Quelles sont les cibles visées pour le transfert (plusieurs niveaux <strong>de</strong> valorisation et doncplusieurs cibles possibles) ?• Quelle question sci<strong>en</strong>tifique générale est posée ?• Quel est le pot<strong>en</strong>tiel pour généralisation ?Résultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s• Résultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s <strong>en</strong> terme <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal, <strong>en</strong> terme <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> (oudans les pratiques)• Résultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> recherche• Indicateurs <strong>de</strong> résultatsSites détu<strong>de</strong>sFinancem<strong>en</strong>t possible (pistes préliminaires)Ce recadrage <strong>de</strong>s termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce, qui a été travaillé au niveau <strong>de</strong> la direction, n’a pas connu<strong>de</strong> résistance notable lors <strong>de</strong> sa communication aux chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>ts. Ceci mérite d’êtresouligné car c’est un indicateur d’une évolution réc<strong>en</strong>te <strong>de</strong> l’ « esprit ambiant » dansl’organisation. En effet, <strong>en</strong> 2007 et 2008, on pouvait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre que « la recherche sci<strong>en</strong>tifique ne peut pasapporter <strong>de</strong>s résultats concrets pour la conservation. On se situe <strong>en</strong> amont. Mais on doit être plus att<strong>en</strong>tifs auxrésultats <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> conservation ». « La recherche ne peut pas répondre rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Ce ne sont souv<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> recherche et cela ne correspond pas au fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche »(Chercheurs TdV, com.pers., 2008). Nous aurions donc pu nous att<strong>en</strong>dre à ce que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>clarification <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> conservation soulève quelques oppositions. Nous pouvons proposer<strong>de</strong>ux élém<strong>en</strong>ts d’explication à cet accueil positif <strong>de</strong>s termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce : (1) après <strong>de</strong>s années <strong>de</strong>distinction <strong>en</strong>tre la « recherche » et la « conservation » (activités plus techniques), nous avonsobservé une appropriation <strong>de</strong> la dim<strong>en</strong>sion « conservation » par les chercheurs, se r<strong>en</strong>dantcompte que l’exercice <strong>de</strong> la recherche était égalem<strong>en</strong>t « activités <strong>de</strong> conservation ». Nousrevi<strong>en</strong>drons sur cet aspect qui, nous le verrons, est une évolution notable <strong>de</strong> l’organisation interne(Section c). (2) Les termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce proposés invit<strong>en</strong>t effectivem<strong>en</strong>t à clarifier les objectifs350


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, mais <strong>en</strong> offrant un cadre permettant <strong>de</strong> positionner l’action par rapport à cesobjectifs. Finalem<strong>en</strong>t – après les questions et débats exposés dans la section précéd<strong>en</strong>te – lerecadrage a été à juste titre perçu comme une perspective plus ou moins éloignée <strong>de</strong>vant gui<strong>de</strong>rl’action, plutôt que comme une pression managériale pour obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s résultats immédiats.L’apport <strong>de</strong> ce cadre <strong>de</strong>s projets ne peut cep<strong>en</strong>dant être complètem<strong>en</strong>t évalué que par l’analyse <strong>de</strong>la façon dont les acteurs <strong>de</strong> la TdV s’<strong>en</strong> sont saisis pour construire leurs projets et <strong>de</strong> la façondont il sera ou non un repère plus soli<strong>de</strong> pour mettre <strong>en</strong> œuvre les actions au cours <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong>quinqu<strong>en</strong>nale. Concernant la manière dont les équipes s’<strong>en</strong> sont saisis, nous avons montré plushaut que <strong>de</strong>s efforts avai<strong>en</strong>t été fournis pour construire <strong>de</strong>s projets plus volumineux, pluscohér<strong>en</strong>ts et mieux c<strong>en</strong>trés sur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation, ce qui a été accueilli favorablem<strong>en</strong>tpar les organes <strong>de</strong> gouvernance. En revanche, la façon dont l’explicitation <strong>de</strong>s stratégies d’action,au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s projets, peut contribuer au r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions est unequestion que nous sommes condamnée à laisser ouverte dans la mesure où le temps <strong>de</strong> notrerecherche s’achève au mom<strong>en</strong>t où les projets démarr<strong>en</strong>t.b) Développer <strong>de</strong>s actions tournées vers l’infléchissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s processus quidégrad<strong>en</strong>t les ZHMR<strong>en</strong>forcer l’ancrage <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> où intervi<strong>en</strong>t la TdVest évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t un <strong>en</strong>jeu majeur dans la mesure où cela r<strong>en</strong>voie à la finalité même <strong>de</strong>l’organisation. Au cours <strong>de</strong> la planification stratégique, la réflexion autour <strong>de</strong> cette question a étéappuyée sur notamm<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux concepts que nous étudierons l’un après l’autre : le concept <strong>de</strong>« Gestion Intégrée » (GI) et le concept <strong>de</strong> « transfert ».La <strong>gestion</strong> intégrée pour interv<strong>en</strong>ir dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sPour compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t cet <strong>en</strong>jeu est porté et formulé par l’organisation, une mise <strong>en</strong>perspective historique s’impose ici <strong>en</strong>core.A cette étape <strong>du</strong> texte, nous n’avons plus besoin <strong>de</strong> dire que les premiers travaux <strong>de</strong> la TdV, dansles premières déc<strong>en</strong>nies, consistai<strong>en</strong>t à découvrir l’avifaune, puis la faune et la flore <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes (avec un travail approfondi <strong>en</strong> Camargue), puis d’<strong>en</strong> saisir lefonctionnem<strong>en</strong>t. Au fil <strong>de</strong>s années, les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV, poussés par le fondateur, ontcherché à davantage intégrer les facteurs anthropiques nécessaires à la compréh<strong>en</strong>sionapprofondie <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s écosystèmes humi<strong>de</strong>s, à l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s m<strong>en</strong>aces et àcelles <strong>de</strong>s actions à <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre pour les ré<strong>du</strong>ire ou les éliminer. Ceci est <strong>en</strong>core rappelé dans le351


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal<strong>en</strong>ouveau plan stratégique : « Les priorités <strong>de</strong> la recherche à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ont évolué au cours<strong>du</strong> temps. Ancrées dès son origine sur la conservation <strong>de</strong>s populations d’oiseaux d’eau qui <strong>en</strong><strong>de</strong>meure un axe c<strong>en</strong>tral, les priorités <strong>de</strong> recherche se sont élargies vers l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s interactions<strong>en</strong>tre niveaux trophiques puis vers celle <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong>s écosystèmes. Plus récemm<strong>en</strong>t l’Hommey a été intégré explicitem<strong>en</strong>t comme un élém<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>tral […] » (Plan stratégique TdV 2011-2015,2010 : 27).Ainsi, la question a d’abord émergé au niveau <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong> recherche « c<strong>en</strong>trée[s] sur larecherche <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> protéger et restaurer la biodiversité » (ibid.). Avec le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’activité <strong>de</strong> conservation <strong>en</strong> 1992, la question <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissance et l’atteinte <strong>de</strong>scibles pour pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts favorables aux ZHM dans la <strong>gestion</strong> s’est rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>tcristallisée autour <strong>du</strong> concept <strong>de</strong> Gestion Intégrée. Le lecteur familier <strong>de</strong> la doctrine 190 aura notéque 1992 est justem<strong>en</strong>t l’année <strong>de</strong> sa montée <strong>en</strong> puissance avec une adoption politique mondiale<strong>du</strong> concept lors <strong>du</strong> Sommet <strong>de</strong> la Terre <strong>de</strong> Rio. C’est par sa participation à la confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>Grado qui a marqué la création <strong>de</strong> l’initiative MedWet que la TdV a été initiée à ce concept 191qu’elle a aussitôt adopté (avec sa mission qui, rappelons-le, est proche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> MedWet).La TdV s’est approprié le concept <strong>de</strong> GI <strong>en</strong> l’utilisant d’abord dans un objectif – plus ou moinsconsci<strong>en</strong>t – d’évolution interne <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> ses mo<strong>de</strong>s d’action. La GI a <strong>en</strong> effet étéassociée, au cours <strong>de</strong>s programmes quinqu<strong>en</strong>naux <strong>de</strong> la TdV (Plans stratégiques TdV, <strong>de</strong> 1992 à2010), à la volonté <strong>de</strong> progresser sur les aspects suivants :- d’une recherche trop disciplinaire et fondam<strong>en</strong>tale vers une recherche interdisciplinaire etappliquée pr<strong>en</strong>ant davantage <strong>en</strong> compte les facteurs socio-économiques dans la problématisationet dans le transfert <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s / outils / techniques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ;- <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> recherche et <strong>de</strong> conservation m<strong>en</strong>ées <strong>en</strong> parallèle vers une intégration optimale<strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces (cette conception « interne » <strong>de</strong> la GI a été mobilisée au cours <strong>du</strong> programme2006-2010 mais abandonnée <strong>de</strong>puis) ;- <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s sous statut fort <strong>de</strong> protection vers<strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions sur <strong>de</strong>s zones peu ou pas protégées.190 dont la GIZC est une déclinaison typique r<strong>en</strong>contrée plus haut dans le cas <strong>du</strong> projet « SMAP III Moulouya »(Chapitre 4).191 La <strong>gestion</strong> intégrée apparaît dans la déclaration <strong>de</strong> Grado (1992). En effet, la stratégie pour les ZH est déroulée <strong>en</strong>9 points. Le huitième est ainsi formulé : « que soit réalisée une <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong> toutes les activités concernant leszones humi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s systèmes qui les support<strong>en</strong>t et <strong>de</strong> leurs <strong>en</strong>virons, par <strong>de</strong>s ag<strong>en</strong>ces pluridisciplinaires correctem<strong>en</strong>tfinancées et au personnel compét<strong>en</strong>t, avec la communauté sci<strong>en</strong>tifique, <strong>de</strong>s associations ou / et <strong>de</strong>s ONG ». (Planstratégique TdV 1992-1996, 1992 : 45-46)352


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerNotons que la GI est associée (à travers les discours et les docum<strong>en</strong>ts) à ces dynamiquesd’évolution <strong>de</strong> la TdV, mais la progression <strong>de</strong> la TdV sur les trois aspects sub-cités passe pard’autres dim<strong>en</strong>sions déjà évoquées au fil <strong>du</strong> texte (recrutem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> chercheurs ou spécialistes d<strong>en</strong>ouvelles disciplines, changem<strong>en</strong>t organisationnel pour décloisonner la recherche et laconservation, effort pour la construction <strong>de</strong> projets plus amples…). Remarquons <strong>en</strong>core que leterme « Gestion Intégrée » a plus ou moins toujours été utilisé pour qualifier « ce qu’on ne sait pasbi<strong>en</strong> faire » ou « ce qu’il faut qu’on fasse mieux » (TdV, com.pers., 2009). En conséqu<strong>en</strong>ce, le conceptqui <strong>de</strong>vait favoriser <strong>de</strong>s progrès sur les aspects sub-cités a paradoxalem<strong>en</strong>t été sans cesse porteur<strong>de</strong> questions suscitant un besoin récurr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> le redéfinir au fil <strong>de</strong>s avancées <strong>de</strong> la TdV. Ce besoin<strong>de</strong> clarification a <strong>en</strong>core été une <strong>de</strong>s conclusions d’un <strong>de</strong>s ateliers <strong>de</strong> réflexion au début <strong>de</strong> laplanification stratégique pour le programme 2011-2015 (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> Atelier, docum<strong>en</strong>tinterne, 2009). A partir <strong>de</strong> la discussion m<strong>en</strong>ée lors <strong>de</strong> cet atelier, le directeur <strong>du</strong> programme aretravaillé le positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV par rapport à la Gestion Intégrée ; une formulation <strong>de</strong> laGI et <strong>de</strong> la mobilisation <strong>de</strong> la GI par la TdV a été proposée, figurant dans le chapitred’intro<strong>du</strong>ction au programme dans le plan stratégique (Encadré 6.2). La préparation <strong>de</strong> cedocum<strong>en</strong>t nous a donner l’opportunité d’interagir avec les membres <strong>de</strong> la TdV sur cettemobilisation <strong>de</strong> la GI. En effet, au cours <strong>de</strong> notre recherche, nous avons un temps p<strong>en</strong>sé nousfocaliser sur les doctrines <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, vues comme un élém<strong>en</strong>t structurant <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong>sONGE. Puis nous avons préféré partir <strong>de</strong>s actions concrètes, qui peuv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> réalité se référer ounon à <strong>de</strong>s cadres et <strong>de</strong>s doctrines. C’est alors, <strong>en</strong> repartant <strong>de</strong> l’action concrète, notamm<strong>en</strong>t àtravers le projet SMAP (Chapitre 4) que nous avons été ram<strong>en</strong>ée, <strong>de</strong> façon in<strong>du</strong>ctive, à l’analyse<strong>de</strong> la mobilisation <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> doctrine par l’organisation. L’étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> projet SMAP III nous aalors permis d’approfondir cette question avec les porteurs <strong>du</strong> projet et la direction dans le cadre<strong>de</strong> la planification stratégique.Encadré 6.2 : la Gestion Intégrée pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (extrait <strong>du</strong> Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 28)La <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sLa <strong>gestion</strong> intégrée est ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t un processus dynamique qui rassemble les usagers, acteurs,sci<strong>en</strong>tifiques et déci<strong>de</strong>urs émanant <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>ts secteurs concernés, pour une <strong>gestion</strong> plus efficace etbasée sur <strong>de</strong>s principes <strong>du</strong>rables. Elle implique :• la coopération <strong>en</strong>tre acteurs et institutions, la co-construction <strong>du</strong>n système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressourcesnaturelles ;• un processus continu, proactif et adaptable <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources naturelles pour undéveloppem<strong>en</strong>t écologiquem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable ;• lintégration <strong>de</strong> multiples dynamiques et préoccupations concurr<strong>en</strong>tes ou diverg<strong>en</strong>tes dans une stratégie<strong>de</strong> conservation, notamm<strong>en</strong>t selon quatre dim<strong>en</strong>sions : sociale, économique, politique et<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.La place <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans le processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée353


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleDans un s<strong>en</strong>s strict, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> na ni les moy<strong>en</strong>s, ni la légitimité pour assurer « la coopération <strong>en</strong>treacteurs et institutions, la co-construction <strong>du</strong>n système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> » (cf. ci- <strong>de</strong>ssus). Au mieux, elle peutpromouvoir cette approche et r<strong>en</strong>forcer sa place dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ne peutpas assurer une <strong>gestion</strong> intégrée unilatéralem<strong>en</strong>t car elle dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong>s parties pr<strong>en</strong>antes àcoopérer pour co-construire un système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> efficace <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue politique, socio-économiqueet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal. En revanche, lintégration <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s dans les systèmes<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> place ne peut exister que si certains acteurs, dont la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, la port<strong>en</strong>t <strong>de</strong> façonproactive et stratégique.Dans un s<strong>en</strong>s large, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> contribue à la <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> travaillant à laprise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> leur conservation dans la <strong>gestion</strong>, <strong>en</strong> impulsant effectivem<strong>en</strong>t un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>pratique <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. La méthodologie <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée n'apas vocation à s'imposer pour tous les projets <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, mais lorsqu'elle est id<strong>en</strong>tifiéecomme un levier stratégique <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t.La place <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans la <strong>gestion</strong> intégrée est celle <strong>du</strong>n acteur <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>en</strong>gagéporteur <strong>de</strong> valeurs <strong>de</strong> conservation, promoteur <strong>de</strong> ce concept dans différ<strong>en</strong>ts sites <strong>en</strong> régionméditerrané<strong>en</strong>ne. En Camargue, elle assume égalem<strong>en</strong>t la position <strong>du</strong>n acteur <strong>du</strong> territoire, propriétaire,<strong>gestion</strong>naire et employeur.La <strong>gestion</strong> intégrée dans les projets <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Dans le programme 2011-2015, la <strong>gestion</strong> intégrée est utilisée comme cadre <strong>de</strong> travail pour les projets<strong>de</strong> conservation et <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rable permettant <strong>en</strong> premier lieu d'établir un diagnostic et<strong>en</strong>suite <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s projets stratégiques <strong>en</strong> :• posant explicitem<strong>en</strong>t les questions <strong>de</strong> conservation dans leur contexte socio-économique et par rapportà la <strong>gestion</strong> effective (id<strong>en</strong>tifier les problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, les pratiques impactantes, les acteursresponsables) ;• <strong>en</strong>gageant <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> recherche c<strong>en</strong>trés sur <strong>de</strong>s solutions pratiques et acceptables par les acteurslocaux et/ou déci<strong>de</strong>urs à ces problèmes ;• impliquant les acteurs locaux dès lid<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s problèmes jusquà la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> solutions.Un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> l'approche <strong>gestion</strong> intégrée hors <strong>de</strong> la Camargue (loin <strong>de</strong> notre base perman<strong>en</strong>te et oùnous ne sommes pas un acteur <strong>du</strong> territoire, mais un expert <strong>de</strong> passage) est la pér<strong>en</strong>nité <strong>de</strong>s résultatsacquis et le mainti<strong>en</strong> <strong>du</strong> processus après la fin d'un projet. Il s'agit <strong>de</strong> s'assurer qu'un porteur légitime auregard <strong>de</strong> la politique locale et <strong>du</strong> système socio-économique s'approprie l'animation <strong>de</strong> cette <strong>gestion</strong>intégrée.Bi<strong>en</strong> que le concept <strong>de</strong> GI et la position <strong>de</strong> la TdV par rapport à cette GI arriv<strong>en</strong>t à un niveau <strong>de</strong>formalisation jamais atteint jusqu’alors, le flou persiste <strong>en</strong> plusieurs points <strong>de</strong> la logique proposée(Encadré 6.2). D’abord, il est expliqué que la TdV est bi<strong>en</strong> un acteur parmi d’autres dans lesystème, et est un acteur porteur d’objectifs <strong>de</strong> conservation. Il semble clair que la TdV participeà un processus sur lequel elle n’a pas une maîtrise totale et qu’elle y porte <strong>de</strong>s objectifs qui ne sontpas ceux <strong>de</strong> tous. Mais cette asymétrie semble <strong>en</strong>suite ignorée dans l’idée que « la méthodologie<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée n'a pas vocation à s'imposer pour tous les projets <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, maislorsqu'elle est id<strong>en</strong>tifiée comme un levier stratégique <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t ». Que recouvre cette« méthodologie GI comme levier <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>t » par rapport au processus d’évolution <strong>du</strong>système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (qu’elle appelle processus d’intégration) ? Quelle est la différ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre uneaction stratégique portée par l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et laméthodologie GI portée par le même acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ? « Lepositionnem<strong>en</strong>t est, me semble-t-il, le suivant : (1) la TdV promeut le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> intégrée commeun moy<strong>en</strong> pot<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong> mieux faire véhiculer la nécessité <strong>de</strong> conserver la biodiversité. (2) Dans le processus354


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerd’intégration la légitimité <strong>de</strong> la TdV est <strong>de</strong> déf<strong>en</strong>dre les positions <strong>de</strong> la conservation » (Direction TdV,com.pers., 2010).Dans cette logique, on fait comme si la TdV pouvait d’un côté promouvoir la doctrine <strong>de</strong> laGestion Intégrée, c’est-à-dire susciter la prise <strong>en</strong> charge d’élém<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux par lesautres acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>, et d’un autre côté déf<strong>en</strong>dre elle-même les aspects relatifs à laconservation. Une fois le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ayant évolué dans une dynamique d’intégration, laTdV pourrait alors jouer son rôle sci<strong>en</strong>tifique et technique pour la mise <strong>en</strong> œuvre d’une <strong>gestion</strong>intégrant les objectifs <strong>de</strong> conservation. Mais on ne sait toujours pas bi<strong>en</strong> comm<strong>en</strong>t la TdV s’ypr<strong>en</strong>drait pour promouvoir et provoquer la GI qui mènerait à une configuration <strong>du</strong> système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> favorable à son action sci<strong>en</strong>tifique et technique pour conserver les ZHM. Or, tout l’<strong>en</strong>jeu<strong>de</strong> l’action se situe justem<strong>en</strong>t à ce niveau : comm<strong>en</strong>t agir dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, auprès <strong>de</strong>quelles cibles, pour provoquer un changem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s pratiques <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZH ? Si la TdV n’avaitqu’à apporter <strong>de</strong>s réponses techniques aux acteurs politiques et sociaux qui serai<strong>en</strong>t avi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> lesobt<strong>en</strong>ir, il n’y aurait pas d’actions stratégiques et pas besoin <strong>de</strong> « faire intégrer » les objectifs <strong>de</strong>conservation. Mettre <strong>en</strong> œuvre une « méthodologie <strong>de</strong> GI » 192 basée sur la recherche d’unemeilleure coordination <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective et sur l’idée <strong>de</strong> construire avec eux lessolutions pour améliorer l’état <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s dès lors qu’il y a <strong>de</strong>s logiques socioéconomiqueset politiques qui s’oppos<strong>en</strong>t à la conservation <strong>de</strong>s ZH (comme on l’a vu dans lechapitre 4) ne peut donc <strong>en</strong> aucun cas constituer une réponse prédéterminée, quand justem<strong>en</strong>t laconfiguration <strong>du</strong> problème fait appel à la construction d’une stratégie ciblée, adaptée à la situationr<strong>en</strong>contrée.Il semble que ce positionnem<strong>en</strong>t confus est à rapprocher <strong>du</strong> problème <strong>de</strong> l’explicitation <strong>de</strong>sstratégies d’action adversatives, lié à l’approche coopérative développée par la TdV évoquée plushaut. D’un côté, la TdV reconnaît la dim<strong>en</strong>sion proprem<strong>en</strong>t conflictuelle <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, dans le s<strong>en</strong>s où dès lors que l’on porte <strong>de</strong>s objectifs d’amélioration ou <strong>de</strong>mainti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, on se trouve dans un conflit objectif avec toutes les forceset les activités qui par leur exercice ont une influ<strong>en</strong>ce négative sur l’état <strong>de</strong> l’objet écologique visé.Comme elle l’indique dans ses textes : elle se donne comme ligne le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projetpermettant d’id<strong>en</strong>tifier les « m<strong>en</strong>aces qui pès<strong>en</strong>t sur la biodiversité et quelles actions peuv<strong>en</strong>t être<strong>en</strong>treprises pour ré<strong>du</strong>ire ou éliminer ces m<strong>en</strong>aces et, lorsque possible, pour restaurer la diversitébiologique et le bon état <strong>de</strong>s écosystèmes » (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010) et <strong>de</strong>s projets192dont on ne sait pas bi<strong>en</strong> ce qu’elle recouvre : les « métho<strong>de</strong>s GI » sont floues pour les acteurs <strong>de</strong> la TdV euxmêmes,y compris ceux travaillant avec ce concept : « La GI c’est comme une boîte à outils qu’on peut utiliser si c’est utile ».« De la concertation, mais pas nécessairem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la concertation ». « Des plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et leur mise <strong>en</strong> œuvre, où tout le mon<strong>de</strong> seraitd’accord » (Membres TdV, com.pers., 2010).355


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale« posant explicitem<strong>en</strong>t les questions <strong>de</strong> conservation dans leur contexte socio-économique et parrapport à la <strong>gestion</strong> effective (id<strong>en</strong>tifier les problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux, les pratiquesimpactantes, les acteurs responsables) » (Encadré 6.12).Parallèlem<strong>en</strong>t, elle cherche à développer une stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale coopérativepour interv<strong>en</strong>ir dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, ce qui la pousse à adopter <strong>de</strong>sdiscours allant dans ce s<strong>en</strong>s et dont la mobilisation <strong>de</strong> la Gestion Intégrée est le meilleur exemple.Seulem<strong>en</strong>t la confusion s’installe lorsque la GI est formulée comme la logique unique selonlaquelle doit être déployée la stratégie coopérative, partant <strong>de</strong> l’idée selon laquelle l’action <strong>de</strong>l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t n’était possible que si tous les autres acteurs <strong>du</strong> système étai<strong>en</strong>t d’accordpour participer à un processus d’intégration. Or « d’une part, placer un problème dans un cadrecollectif ne suffit pas à <strong>en</strong> faire une préoccupation <strong>de</strong> tous (Mermet, 1992) ; d’autre part, lesmo<strong>de</strong>s cons<strong>en</strong>suels (i.e. faire d’un problème une préoccupation <strong>de</strong> tous) ne sont pas les seulsdisponibles pour placer un problème dans un cadre collectif » (Billé, 2006).Repr<strong>en</strong>ons ces <strong>de</strong>ux remarques à notre compte. D’un côté, il y aurait une t<strong>en</strong>dance à seconvaincre que la GI, avec « la participation » qu’elle susciterait et « la coordination <strong>en</strong>tre lesacteurs » qu’elle améliorerait, va permettre <strong>de</strong> conserver les ZHM. Cela revi<strong>en</strong>drait alors à ré<strong>du</strong>irela force et la subtilité <strong>de</strong> la stratégie d’action collaborative, qui certes peut justifier la mobilisationd’une rhétorique cons<strong>en</strong>suelle, mais qui n’<strong>en</strong> implique pas moins le développem<strong>en</strong>t d’une actionqui cible stratégiquem<strong>en</strong>t les acteurs avec lesquels établir les coopérations et la construction <strong>de</strong>mo<strong>de</strong>s d’action pertin<strong>en</strong>ts. Ainsi, le mo<strong>de</strong> cons<strong>en</strong>suel n’est pas indisp<strong>en</strong>sable pour déployer unestratégie d’action coopérative.D’un autre côté, une stratégie d’action coopérative peut être une stratégie au s<strong>en</strong>s fort dès lorsqu’elle ti<strong>en</strong>t compte <strong>du</strong> fait que les problèmes écologiques visés ne sont pas la préoccupation <strong>de</strong>tous. En effet, l’assomption <strong>du</strong> caractère conflictuel <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ne mènepas systématiquem<strong>en</strong>t à l’action dans le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’affrontem<strong>en</strong>t que la TdV a sans doute raison<strong>de</strong> refuser étant donné les rôles sci<strong>en</strong>tifiques et techniques qu’elle cherche à jouer. Au contraire,dans leur essai philosophique sur le conflit, M. B<strong>en</strong>asayag et A. Del Rey (ibid. : 211) 193 expliqu<strong>en</strong>tque la résistance/affrontem<strong>en</strong>t peut faire perdre <strong>de</strong> vue les changem<strong>en</strong>ts auxquels on aspire.L’assomption <strong>du</strong> conflit n’est pas l’id<strong>en</strong>tification et la focalisation sur un <strong>en</strong>nemi, mais l’exig<strong>en</strong>ce193 « L'avantage <strong>de</strong> l'affrontem<strong>en</strong>t, c'est qu'il donne le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> clarifier le conflit. Mais on l’a vu, ce faux savoirocculte le fait que le conflit est une situation complexe dans laquelle aucune <strong>de</strong>s « parties » <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce ne possè<strong>de</strong> àelle seule la « bonne solution ». Et c'est pour cette raison même qu'il y a à créer, à <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir. Un conflit est faitd'asymétries ? Ce sont les asymétries qui permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> créer ! Un conflit signifie qu'il n'y a pas <strong>de</strong> solutionsdéfinitives ? C'est cette abs<strong>en</strong>ce qui nous pousse à inv<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>s solutions locales. Croire que le conflit rési<strong>de</strong> dansl'affrontem<strong>en</strong>t, c'est croire qu'<strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant le pouvoir et <strong>en</strong> éliminant l'<strong>en</strong>nemi, on va changer les choses, sanscompr<strong>en</strong>dre que le problème que l'on cherche ainsi à résoudre <strong>en</strong>globe la situation dans laquelle nous combattons ».356


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerd’une vigilance et d’une inv<strong>en</strong>tivité pour agir dans les systèmes dont on fait partie 194 . Pour notreorganisation, cela revi<strong>en</strong>t à ne pas compter sur <strong>de</strong>s « bonnes solutions » (ibid. : 211) comme estsouv<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tée la GI, mais exercer une lecture stratégique <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à partir <strong>de</strong>laquelle elle peut bâtir son action.Cela signifie-t-il que la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>de</strong>vrait abandonner le concept <strong>de</strong> la GI ? Probablem<strong>en</strong>tpas. En effet, comme nous l’avons remarqué plus haut, la doctrine sert d’abord <strong>de</strong> pointd’ancrage, <strong>de</strong> support à une réflexion sur l’action <strong>en</strong> interne. Elle est mobilisée <strong>en</strong> interne commeun outil <strong>de</strong> réflexion stratégique, un outil flexible (les cont<strong>en</strong>us évolu<strong>en</strong>t <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s progrès<strong>de</strong> la TdV) et capable <strong>de</strong> se maint<strong>en</strong>ir sur le long terme (évolution <strong>de</strong> la GI <strong>de</strong>puis 1992 à la TdV),même si cela doit être perçu par les acteurs comme la part <strong>de</strong> ce que « l’organisation ne sait pasbi<strong>en</strong> faire ». Cette volonté <strong>de</strong> progression peut susciter <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> formalisation <strong>de</strong> laréflexion stratégique comme le travail collectif <strong>de</strong> rédaction d’un ouvrage sur la GI <strong>de</strong>s zoneshumi<strong>de</strong>s au début <strong>de</strong>s années 2000 (Bonnet et al., 2005). « Face au constat <strong>de</strong> l’exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ce concept flou<strong>de</strong> GI <strong>en</strong> « fond d’écran » <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> la TdV et que ce concept n’était pas clarifié, donc pas approprié <strong>en</strong> interne,on a décidé <strong>en</strong> 1997 <strong>de</strong> faire un booklet là-<strong>de</strong>ssus. L’idée : sur la base d’une analyse large <strong>de</strong>s expéri<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> GI(et notamm<strong>en</strong>t GIZC), <strong>en</strong> tirer les leçons et formaliser l’application <strong>du</strong> processus GI tel qu’il nous semble pertin<strong>en</strong>tà être appliqué aux ZHM. Après une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> flottem<strong>en</strong>t, on a alors décidé <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre la chose sous unemodalité qui <strong>de</strong>vait garantir la pertin<strong>en</strong>ce et l’appropriation <strong>en</strong> interne : un groupe <strong>de</strong> personne TdV + un scribespécialiste <strong>de</strong>s démarches <strong>de</strong> concertation <strong>en</strong> développem<strong>en</strong>t (IRAM 195 ) ont rédigé ce booklet, dans une démarcheitérative. Personnellem<strong>en</strong>t, j’ai trouvé cette démarche <strong>de</strong> co-réflexion / pro<strong>du</strong>ction très riche et je trouve que cebooklet est un bon pro<strong>du</strong>it. Pourtant le constat aujourd’hui est que personne <strong>en</strong> interne ne semble se l’êtreapproprié. Plusieurs hypothèses pour l’expliquer : tous les co-auteurs sont partis <strong>de</strong> la TdV ; on ne propose pas unemétho<strong>de</strong>, une recette à appliquer <strong>de</strong> façon linéaire, mais « seulem<strong>en</strong>t » un processus et <strong>de</strong>s principes » (DirectionTdV, com.pers., 2010).L’adoption <strong>de</strong> la doctrine peut ainsi être bénéfique aux acteurs <strong>en</strong> suscitant la réflexionstratégique, mais elle perdrait son principal apport si elle <strong>de</strong>vait être perçue comme un conceptdéfini, à s’approprier et à « appliquer <strong>de</strong> façon linéaire », car elle serait dans ce cas le contraire <strong>de</strong>194 « Il n'y a pas <strong>de</strong> commun préexistant dans l'abstrait aux situations dans lesquelles nous sommes <strong>en</strong>gagés. Lecommun est à construire, et il est cont<strong>en</strong>u dans le conflit : il est à assumer et à développer. C'est pourquoi éviter,comme nous le conseille Kant, d'assumer le conflit propre à la situation <strong>en</strong> disposant d'un principe applicable danstous les cas, c'est faire preuve d'une véritable lâcheté exist<strong>en</strong>tielle : c'est croire au commun pour mieux se détourner<strong>de</strong> le construire. Dans chaque conflit, le défi est <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ter <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre dans quelle t<strong>en</strong>dance (bifurcation) et àpartir <strong>de</strong> quelle asymétrie nous pouvons développer <strong>du</strong> commun » (B<strong>en</strong>asayag & Del Rey, 2007 : 162).195 Institut <strong>de</strong> Recherches et d’Applications <strong>de</strong>s Métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t, Montpellier.357


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talela réflexion stratégique. L’abandon <strong>de</strong> la doctrine n’est peut-être pas nécessaire, mais le mainti<strong>en</strong>d’une certaine distance critique l’est assurém<strong>en</strong>t.Dans le même s<strong>en</strong>s, on peut p<strong>en</strong>ser qu’il serait vain <strong>de</strong> changer sans arrêt <strong>de</strong> doctrines <strong>de</strong>référ<strong>en</strong>ce, à mesure que celles-ci se répand<strong>en</strong>t dans le secteur <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la nature ou <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> essayant <strong>de</strong> chercher la meilleure – la plus applicable directem<strong>en</strong>t sur leterrain – car chaque nouvelle adoption nécessite le même processus d’appropriation et le mêmeexercice <strong>de</strong> recul critique, processus qui constitue d’ailleurs un <strong>de</strong>s principaux bénéfices <strong>de</strong> cesdoctrines.Faudrait-il alors p<strong>en</strong>ser à se départir <strong>de</strong> toute doctrine et développer son propre schémaconceptuel pour gui<strong>de</strong>r l’action ? La réalité pratique observée à la TdV et dans les autres ONGEque nous avons pu approcher montre que les <strong>de</strong>ux composantes <strong>de</strong> cette question ne sont nicontradictoires, ni exclusives. En effet, il semble que toutes les ONGE s’appui<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>sdoctrines, prov<strong>en</strong>ant souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la tra<strong>du</strong>ction politique <strong>de</strong> concepts d’origine sci<strong>en</strong>tifique – àl’instar <strong>de</strong> la GI – qui leur permett<strong>en</strong>t d’une part <strong>de</strong> porter un discours faisant écho à un s<strong>en</strong>scommun et d’autre part <strong>de</strong> manifester leur appart<strong>en</strong>ance à une communauté, à un secteur dont lejargon constitue un <strong>de</strong>s points d’ancrage. Cela ne les empêche cep<strong>en</strong>dant pas <strong>de</strong> développer leurpropre approche qui fait vivre et évoluer ces doctrines <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce. Il nous semble néanmoinsimportant <strong>de</strong> noter que si cette id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> la TdV comme étant porteuse <strong>de</strong> la GI lui ouvre<strong>de</strong>s opportunités pour développer <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, la réalité pratique faitapparaître <strong>de</strong>s contraintes qui peuv<strong>en</strong>t aller jusqu’à <strong>en</strong>traver la pertin<strong>en</strong>ce même <strong>de</strong> l’action. Il estprécisé dans le plan stratégique que la GI ne sera employée que dans les situations où il eststratégique <strong>de</strong> le faire. Mais dans l’urg<strong>en</strong>ce <strong>du</strong> montage <strong>de</strong>s projets (<strong>en</strong> réponse à <strong>de</strong>s appelsd’offre), dans les cadres et les contraintes budgétaires imposés par les bailleurs, le recours auxstandards <strong>de</strong> la doctrine peut rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t remplacer la réflexion stratégique et « la prise <strong>en</strong> compte<strong>de</strong>s facteurs socio-économiques dans la problématisation <strong>de</strong>s projets, et les contraintes <strong>de</strong> cesacteurs dans les techniques et mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> proposé » (Plan stratégique TdV 2011-2015,2010 : 28) qu’on se promettait <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong>. Le projet SMAP III Moulouya que nous avonsétudié dans le détail (Chapitre 4) <strong>en</strong> est une illustration montrant comm<strong>en</strong>t l’application « brute »<strong>de</strong> ces standards – comportant <strong>en</strong> eux-mêmes les germes <strong>de</strong> leur inefficacité (Billé, 2004, 2006) –peut con<strong>du</strong>ire à l’impossibilité pour l’ONGE <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre prise sur le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’ellechercher à changer.358


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerLe transfert pour toucher les acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sCe long développem<strong>en</strong>t sur la mobilisation <strong>de</strong> la Gestion Intégrée par la TdV était nécessaire carelle canalise <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> partie la réflexion <strong>de</strong> la TdV sur la façon dont elle va interv<strong>en</strong>ir dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Camargue, mais aussi pour <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong> Méditerranée). « GestionIntégrée » n’est cep<strong>en</strong>dant pas la seule expression <strong>du</strong> vocabulaire interne associé à cette volonté<strong>de</strong> développer une action tournée vers les utilisateurs, les acteurs responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sZHM ou <strong>de</strong> leur dégradation. L’autre expression incontournable <strong>en</strong> la matière est celle <strong>du</strong>« transfert ». Le terme a même un statut supérieur à la « GI » puisqu’il apparaît dans laformulation même <strong>de</strong> l’action générale <strong>de</strong> la TdV sous la mission (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 21) 196 : il s’agit <strong>de</strong> « transférer les connaissances et les recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>aux utilisateurs et aux déci<strong>de</strong>urs ». Le terme est omniprés<strong>en</strong>t dans les pratiques <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> laTdV et fait partie <strong>du</strong> vocabulaire commun presque avec un statut <strong>de</strong> leitmotiv : « il faut faire plus <strong>de</strong>transfert », « il faut améliorer le transfert », <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> par tous comme la nécessité <strong>de</strong> ne pas se cont<strong>en</strong>ter<strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s outils, mais <strong>de</strong> leur donner tout leur s<strong>en</strong>s <strong>en</strong> lesmobilisant dans <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>ts dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (ou arène politique) oùelle intervi<strong>en</strong>t.Bi<strong>en</strong> que l’organisation se soit appropriée le concept, le terme « tranfert » n’est pas propre à laTdV, mais est très utilisé dans les secteurs auxquels elle apparti<strong>en</strong>t, c’est-à-dire aussi bi<strong>en</strong> dans lemon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique que dans le secteur <strong>de</strong> la conservation et <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnemnetale à l’international. Dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique, et particulièrem<strong>en</strong>t dans ledomaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t où la recherche ne peut être dissociée <strong>de</strong> sa finalité d’application(Theys, 1991), le « transfert <strong>de</strong>s connaissances » à la société occupe une bonne place dans lesdébats, les colloques et les confér<strong>en</strong>ces où sont d’ailleurs souv<strong>en</strong>t invités les <strong>gestion</strong>naires et lespratici<strong>en</strong>s (e.g. Hazard, 2009 ; Arlettaz & Mathevet, 2010). Le transfert <strong>de</strong>s connaissances dans lechamp <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>viornnem<strong>en</strong>t étant toujours <strong>en</strong> <strong>de</strong>çà <strong>de</strong>s att<strong>en</strong>tes, à la fois <strong>de</strong>s chercheurs et <strong>de</strong>spratici<strong>en</strong>s, il <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t le thème c<strong>en</strong>tral <strong>de</strong> nombreux programmes <strong>de</strong> recherche (Jollivet, 2010) etoccupe une place importante dans la problématique plus générale <strong>de</strong>s rapports <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce etsociété (Bonneuil, 2004). Dans le secteur <strong>de</strong> la conservation (cette fois dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<strong>gestion</strong>naires et <strong>de</strong>s porteurs <strong>de</strong> projets), le « transfert » r<strong>en</strong>voie à la problématique <strong>de</strong> la légimité<strong>de</strong> l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>s organisations, souv<strong>en</strong>t occid<strong>en</strong>tales, dans les pays <strong>en</strong> voie <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t(Bouquet, 2007). Notons que nous parlons ici <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, mais ces196 « Afin d’offrir un cadre structurant à notre action, notre mission a été déclinée <strong>en</strong> un objectif spécifique quiprécise notre cadre d’interv<strong>en</strong>tion, et affirme notre cœur <strong>de</strong> métier : Améliorer la compréh<strong>en</strong>sion interdisciplinaire<strong>de</strong>s écosystèmes <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et <strong>de</strong> l’écologie <strong>de</strong> leurs espèces, transférer ces connaissanceset les utiliser pour promouvoir leur conservation et leur utilisation rationnelle ».359


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talequestions sont <strong>en</strong>core plus abondamm<strong>en</strong>t traitées dans la littérature <strong>du</strong> champ <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t. Les questions soulevées port<strong>en</strong>t sur les problèmes <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong> ressources <strong>de</strong>sONGE auprès <strong>de</strong>s bénéficiaires (Dumoulin, 2003), et surtout sur les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (Froger& Andriamahefazafy, 2003) et leur capacité à <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer une meilleure prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>sproblèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux dans les lieux visés par les projets (e.g. Froger 2006 ; Ridha, 2008).La TdV est concernée par toutes ces problématiques liées au transfert <strong>de</strong>s connaissancessci<strong>en</strong>tifiques pour interv<strong>en</strong>ir dans la <strong>gestion</strong> concrète <strong>de</strong>s systèmes. Mais elle l’abor<strong>de</strong> comme un<strong>en</strong>jeu pratique, d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, et <strong>en</strong>core peu <strong>en</strong> tant qu’objet <strong>de</strong> recherche (quipourrait être l’analyse <strong>de</strong> ses propres actions <strong>de</strong> transfert). Si cet objectif général est porté commeun <strong>en</strong>jeu majeur intégré par toute l’équipe, nous avons pu observer qu’il n’a paradoxalem<strong>en</strong>toccupé qu’une place marginale dans les séances <strong>de</strong> réflexion collective qui ont eu lieu au cours <strong>de</strong>cette planification stratégique. Contrairem<strong>en</strong>t à la GI qui suscite beaucoup <strong>de</strong> questions <strong>en</strong>interne, cette notion admise <strong>de</strong> tous peine à faire émerger <strong>de</strong>s discussions <strong>de</strong> fond. Le sujet aprincipalem<strong>en</strong>t été traité lors d’un atelier <strong>de</strong> réflexion au début <strong>de</strong> la planification <strong>en</strong> 2009 et lesdébats se sont cantonnés à <strong>de</strong>s considérations générales et superficielles – mais néanmoinsimportantes – quant aux compét<strong>en</strong>ces et aux ressources (temps) nécessaires pour aller plus loindans cette voie (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> Atelier, docum<strong>en</strong>t interne TdV, 2009). La problématique <strong>du</strong>transfert apparaît égalem<strong>en</strong>t dans le plan <strong>de</strong> communication élaboré par la responsable <strong>de</strong> lacommunication avec la direction p<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong>. De même, nous pouvons observer unecertaine difficulté à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les actions concrètes qui <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t être la tra<strong>du</strong>ction pratique <strong>de</strong>cet objectif <strong>de</strong> transfert et les opérations prévues rest<strong>en</strong>t vagues. En voici <strong>de</strong>ux exemples à titreillustratif : « définir et réaliser <strong>de</strong>s outils adaptés au public méditerrané<strong>en</strong> préalablem<strong>en</strong>t défini »ou <strong>en</strong>core « rassembler dans un même pôle <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces les personnes chargées <strong>du</strong> voletcommunication et transfert pour accompagner les équipes » (Plan stratégique TdV 2011-2015,2010 : 124).Si l’organisation a <strong>en</strong>core <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> progrès sur cette dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action, comme <strong>en</strong>témoign<strong>en</strong>t certains sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV rappelant que « les connaissances acquises et développées icisont sous-valorisées, il y a plein <strong>de</strong> choses très simples qu’on peut déjà dire sur les ZH » (sci<strong>en</strong>tifiques TdV,com.pers., 2009), les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas exposées dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce texte montr<strong>en</strong>t que « letransfert » est bi<strong>en</strong> à l’œuvre et pr<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s formes diverses. La TdV intervi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet <strong>de</strong> façoncontinue dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> camarguais, jouant les rôles <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifique, d’expert, <strong>de</strong><strong>gestion</strong>naires et d’acteur porteur <strong>de</strong> la conservation (Chapitre 3) ou dans la communautésci<strong>en</strong>tifico-politique nationale et méditerrané<strong>en</strong>ne (Chapitre 3 et 5) (participation ou souti<strong>en</strong> aux360


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerdéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> politiques publiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, construction d’un dispositif <strong>de</strong> suiviévaluation<strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s ZHM et efforts consacrés à l’obt<strong>en</strong>tion <strong>du</strong> mandat politique <strong>de</strong> MedWet).Mais ces expéri<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> terrain, ces pratiques concrètes sont rarem<strong>en</strong>t mobilisées dans lesdiscussions relatives au transfert au cours <strong>de</strong> la planification stratégique. Nous y voyons uneexplication simple : le transfert r<strong>en</strong>voie à <strong>de</strong>s micro-actions, pas toujours prévisibles, <strong>de</strong>vant aucontraire se saisir <strong>de</strong>s opportunités, et nécessitant une certaine analyse <strong>du</strong> système d’acteur. Ilsemble difficile <strong>de</strong> r<strong>en</strong>trer dans ces niveaux <strong>de</strong> détail dans les séances <strong>de</strong> réflexion collective.D’autre part, le « transfert » fait appel à toutes ces compét<strong>en</strong>ces que l’on a prés<strong>en</strong>tées à la figure6.2 (voir à la section 6.2.2) sous l’appellation <strong>de</strong> « compét<strong>en</strong>ces insertion dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> ». Ce sont les compét<strong>en</strong>ces que les membres <strong>de</strong> l’équipe acquièr<strong>en</strong>t davantage au fil <strong>de</strong>leur expéri<strong>en</strong>ce que par leur formation respective – qui leur a <strong>en</strong> partie octroyé leurs compét<strong>en</strong>cessci<strong>en</strong>tifiques et techniques, les compét<strong>en</strong>ces « cœur <strong>de</strong> métier » (vocabulaire commun TdV). Ilss’exprim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce fait moins aisém<strong>en</strong>t sur cette partie <strong>de</strong> l’action, bi<strong>en</strong> que ces compét<strong>en</strong>cesacquises dans l’action soi<strong>en</strong>t cruciales, d’autant plus qu’elles sont provisoires, étant liées à <strong>de</strong>sindivi<strong>du</strong>s et à <strong>de</strong>s contextes particuliers (Musca, 2007). La réflexion stratégique autour <strong>du</strong>transfert a néanmoins lieu à d’autres niveaux : certains points traités dans les comités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>interne (direction et chef <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t) relèv<strong>en</strong>t <strong>du</strong> transfert ; les équipes <strong>en</strong>gag<strong>en</strong>t uneréflexion lors <strong>de</strong> la définition <strong>de</strong> leurs objectifs opérationnels et <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> leur projet.La conclusion que nous pouvons <strong>en</strong> tirer est alors que les séances <strong>de</strong> travail très ouvertes etcollectives, telles qu’elles ont été m<strong>en</strong>ées p<strong>en</strong>dant la planification stratégique, ne constitu<strong>en</strong>t pas lebon format pour favoriser une réflexion sur les voies d’amélioration <strong>du</strong> transfert. Le transfert estun angle <strong>de</strong> l’action sur lequel la stratégie globale TdV reste très générale et ne <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t concretque dans les stratégies opérationnelles <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts projets. Rappelons qu’un « pôle <strong>de</strong>compét<strong>en</strong>ce transfert » a été mis <strong>en</strong> place dans le but <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir les progrès dans ce s<strong>en</strong>s. Leschargées <strong>de</strong> communication doiv<strong>en</strong>t pour cela animer une réflexion avec les équipes ayant besoin<strong>de</strong> développer la dim<strong>en</strong>sion « transfert » <strong>de</strong> leurs projets. Les séances <strong>de</strong> travail qui vont avoir lieudans le cadre <strong>de</strong> ce pôle <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce peuv<strong>en</strong>t constituer un espace pour avancer sur letransfert <strong>en</strong> travaillant à partir <strong>de</strong> projets concrets et <strong>de</strong> système d’acteur plus ciblés.La nécessité <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer le transfert pour aller plus loin dans l’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM est uneproblématique qui a été longtemps mêlée à celle <strong>de</strong> l’articulation <strong>en</strong>tre les activités <strong>de</strong> recherche et<strong>de</strong> conservation. L’articulation <strong>de</strong>s métiers est une problématique à part <strong>en</strong>tière qui s’exprimesous plusieurs angles au sein <strong>de</strong>s discussions internes. Son analyse va nous permettre <strong>de</strong>poursuivre le questionnem<strong>en</strong>t sur la façon dont l’organisation <strong>en</strong>visage ses interv<strong>en</strong>tions dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, ou « le transfert sous toutes ses formes ».361


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talec) Articuler les mo<strong>de</strong>s d’action pour r<strong>en</strong>forcer leur efficacité à l’échelle <strong>de</strong>l’organisationArticuler recherche sci<strong>en</strong>tifique et <strong>gestion</strong>, développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>spour la <strong>gestion</strong>, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> le fait <strong>de</strong>puis les premières années <strong>de</strong> son exist<strong>en</strong>ce. Mais <strong>de</strong>puistoujours, l’<strong>en</strong>jeu – porté au départ par le fondateur, les organes <strong>de</strong> gouvernance et plusrécemm<strong>en</strong>t par l’équipe elle-même – est <strong>de</strong> progresser sans cesse dans cette direction. Après unerapi<strong>de</strong> mise <strong>en</strong> perspective historique, nous allons pouvoir compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t s’est expriméecette question p<strong>en</strong>dant la planification stratégique pour le programme 2011-2015 et comm<strong>en</strong>t lesacteurs <strong>de</strong> la TdV p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t avancer sur cet aspect.L’intégration <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> « conservation », compr<strong>en</strong>ant <strong>de</strong>s actions plus techniques (métho<strong>de</strong>set outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, etc.), mais aussi <strong>de</strong>s actions aux niveaux institutionnels (comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>territoire camarguais, politiques nationales zones humi<strong>de</strong>s, etc.) <strong>en</strong> 1992 marque une accélération<strong>de</strong> cette dynamique. Les personnes recrutées <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t se consacrer à mobiliser les connaissancesdéveloppées par la recherche sci<strong>en</strong>tifique à la TdV pour élaborer et diffuser <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. La TdV a <strong>en</strong> effet rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t développé une expertise reconnue auniveau méditerrané<strong>en</strong> (Membre MedWet, com.pers., 2008) dans l’élaboration <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>qu’elle réalisait pour différ<strong>en</strong>ts sites <strong>en</strong> Camargue ou plus largem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Méditerranée à traversune implication directe ou <strong>de</strong>s formations à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires. Plus généralem<strong>en</strong>t,l’équipe conservation <strong>de</strong>vait valoriser les connaissances pour la <strong>gestion</strong>, « r<strong>en</strong>forcer le transfertvers les cibles » à travers une implication dans la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> territoire (li<strong>en</strong> aux acteurscamarguais), <strong>de</strong>s communications dans différ<strong>en</strong>tes arènes (<strong>gestion</strong>naires d’espaces naturels etutilisateurs), l’élaboration <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>s méthodologiques à partir <strong>de</strong>s travaux sci<strong>en</strong>tifiques. Dans lapratique, l’articulation <strong>en</strong>tre les activités <strong>de</strong> « recherche » et <strong>de</strong> « conservation » a été bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> <strong>de</strong>çà<strong>de</strong> la logique d’action imaginée. Les <strong>de</strong>ux équipes, distinctes à l’époque, fonctionnai<strong>en</strong>t presqueindép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t. L’équipe recherche poursuivait son évolution après déjà 20 ou 30 ans <strong>de</strong>développem<strong>en</strong>t. L’équipe conservation naissait avec l’initiative MedWet (que la TdV avaitcontribué à construire) et était accrochée à cette dynamique méditerrané<strong>en</strong>ne (diffusion <strong>de</strong>s plans<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et métho<strong>de</strong> d’inv<strong>en</strong>taire <strong>de</strong>s ZHM). P<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong>, l’équipe recherche étaitpoussée à conforter sa place dans la communauté sci<strong>en</strong>tifique, tout <strong>en</strong> étant incitée à pro<strong>du</strong>ireune recherche appliquée, utile pour la conservation. Parallèlem<strong>en</strong>t, l’équipe conservation – qui neparv<strong>en</strong>ait pas à se placer dans la continuité <strong>de</strong> la recherche – <strong>de</strong>vait elle aussi progresser, maissans avoir la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique à assumer. De là, quelques crispations sont nées et ladissociation <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action s’est faite <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus nette. Ces t<strong>en</strong>sions ont362


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerété exacerbées par la baisse <strong>de</strong>s effectifs <strong>de</strong> chercheurs lors <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> 2003. Nous <strong>de</strong>vons direici qu’à notre arrivée dans l’organisation <strong>en</strong> 2007, et jusqu’au début <strong>de</strong> l’année 2009, ledépassem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette dichotomie « recherche / conservation » constituait un <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux majeurspour l’organisation interne qui n’était pas sans provoquer <strong>de</strong> vifs débats. Comme nous le verrons,cette question qui était au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> l’att<strong>en</strong>tion à notre arrivée <strong>en</strong> 2007 avait disparu <strong>de</strong>s séances<strong>de</strong> réflexion collective à la fin <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre recherche doctorale <strong>en</strong> 2010. Nous allonsvoir ici comm<strong>en</strong>t cette évolution a pu se pro<strong>du</strong>ire.Pour corriger cette t<strong>en</strong>dance allant à l’<strong>en</strong>contre <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions qui étai<strong>en</strong>t à l’origine <strong>de</strong>l’intégration <strong>de</strong> ces nouveaux mo<strong>de</strong>s d’action, la direction a décidé <strong>de</strong> décloisonner les équipes àpartir <strong>du</strong> plan quinqu<strong>en</strong>nal 2006-2010 et <strong>de</strong> restructurer l’organisation autour <strong>de</strong>s problématiques<strong>de</strong> conservation : affirmer une organisation par projet. P<strong>en</strong>dant les premières années <strong>de</strong> ce planquinqu<strong>en</strong>nal, les sci<strong>en</strong>tifiques avai<strong>en</strong>t à cœur <strong>de</strong> montrer qu’ils faisai<strong>en</strong>t non seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> larecherche sci<strong>en</strong>tifique, mais qu’ils faisai<strong>en</strong>t aussi <strong>de</strong> la conservation à travers cette recherche ou àtravers <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> « transfert », indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’équipe conservation « qui ne les aidaitpas » (Chercheurs TdV, com.pers., 2008). La construction <strong>de</strong> projets mixtes était <strong>en</strong> effet trèsdifficile, <strong>en</strong> raison <strong>de</strong>s diverg<strong>en</strong>ces dans les logiques <strong>de</strong> travail – « le problème rési<strong>de</strong> dans le fait qu’on aun héritage <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces qui fait qu’ils n’ont pas été recrutés pour être articulées <strong>en</strong>tre elles » (Direction,com.pers., 2009) – dans la temporalité <strong>de</strong> la recherche qui n’est pas celle <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong><strong>gestion</strong> qui peuv<strong>en</strong>t être ponctuelles (Guillet, 2007 : 69-79). Cette prise <strong>de</strong> position <strong>de</strong>ssci<strong>en</strong>tifiques, qui avait <strong>de</strong>s airs <strong>de</strong> contestation au début <strong>du</strong> plan quinqu<strong>en</strong>nal <strong>en</strong> 2006, a pris unetournure positive au cours <strong>de</strong> la quatrième et cinquième année (2009 et 2010) dans une(ré)appropriation <strong>de</strong> la dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action pour la conservation dans l’exercice <strong>de</strong> la recherche.De son côté, « l’ex-équipe conservation » alors dépourvue <strong>de</strong> directeur peinait à définir une ligned’action dans cette nouvelle configuration. Plusieurs facteurs ont joué <strong>en</strong> faveur d’uneamélioration tangible à la fin <strong>du</strong> plan 2006-2010 permettant d’<strong>en</strong>visager la planification <strong>du</strong>programme 2011-2015 avec <strong>de</strong> nouvelles perspectives :- Le recrutem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> profils mixtes travaillant à l’interface <strong>en</strong>tre recherche et activités plustechniques pour la conservation.- Le r<strong>en</strong>oncem<strong>en</strong>t à une articulation « coûte que coûte » et l’acceptation <strong>du</strong> fait que les métiers nesont pas totalem<strong>en</strong>t articulables dans <strong>de</strong>s projets co-construits : « il y a <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s que larestructuration profile : le faire savoir et le politique, qui n’est pas absolum<strong>en</strong>t pas articulable <strong>de</strong> façon systématiqueavec la recherche et il y a la recherche qui essaie <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s solutions à <strong>de</strong>s problèmes concrets. Ce n’est pas <strong>du</strong>tout articulable naturellem<strong>en</strong>t ». « Ca peut se parler, et puis <strong>de</strong> temps <strong>en</strong> temps il y a <strong>de</strong>s choses qui sont saillanteset qui peuv<strong>en</strong>t être reprises, mais tu ne peux pas dire que ce sont eux, <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> projets qui vont être dans une363


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taledynamique d’<strong>en</strong>richissem<strong>en</strong>t mutuel perman<strong>en</strong>t. De temps <strong>en</strong> temps ça arrive, il faut savoir les saisir, être vigilants.Mais au quotidi<strong>en</strong> non ». (Direction, com.pers., 2009). Cette prise <strong>de</strong> recul sur l’expéri<strong>en</strong>ce <strong>du</strong>décloisonnem<strong>en</strong>t s’accompagne égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong>sdiffér<strong>en</strong>tes compét<strong>en</strong>ces <strong>en</strong> interne, même si cela ne passe pas par <strong>de</strong>s collaborations formellesdans <strong>de</strong>s projets. Les échanges informels sont <strong>en</strong> effet très courants et plus indirectem<strong>en</strong>t, lareconnaissance acquise par la TdV grâce à certains mo<strong>de</strong>s d’action profite à d’autres. Parexemple, sa légitimité sci<strong>en</strong>tifique profite à ses actions plus techniques.- L’accélération dans la construction <strong>de</strong> l’Observatoire <strong>de</strong>s ZHM à partir <strong>de</strong> 2009 a été unélém<strong>en</strong>t structurant redonnant une dynamique nouvelle et une direction à « l’ex-conservation ».Ces t<strong>en</strong>sions internes relatives aux relations recherche – conservation se sont apaisées au début<strong>de</strong> la planification stratégique <strong>en</strong> 2009, ce qui a permis <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre la problématique <strong>de</strong>l’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action dans un mo<strong>de</strong> plus constructif et sous un angle davantagefonctionnel qu’organisationnel. En effet, le déblocage <strong>de</strong> l’OZHM <strong>en</strong> 2009 a <strong>en</strong> quelque sorte étél’élém<strong>en</strong>t clé permettant la restructuration <strong>de</strong>s activités – et avec, le début d’un dépassem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>cette dichotomie recherche / conservation dans les esprits <strong>de</strong>s acteurs <strong>en</strong> interne – après lapério<strong>de</strong> <strong>de</strong> désorganisation provoquée par le décloisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s équipes 197 . Nous avonsremarqué que le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ce projet agissant dans le domaine politique – visant àinflu<strong>en</strong>cer les déci<strong>de</strong>urs et à pousser à l’adoption <strong>de</strong> politiques publiques <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM –donne un s<strong>en</strong>s nouveau et une cohér<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble à toutes les actions que la TdV pouvait déjàréaliser dans le domaine à différ<strong>en</strong>tes échelles d’interv<strong>en</strong>tions. Nous allons explorer cephénomène plus <strong>en</strong> détail un peu plus loin. Pour le mom<strong>en</strong>t, nous <strong>en</strong> ret<strong>en</strong>ons que le démarrage<strong>de</strong> l’OZHM a permis à la TdV <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>diquer une activité dans le domaine « sci<strong>en</strong>ces – politiquepublique », v<strong>en</strong>ant s’ajouter au domaine historique <strong>de</strong>s « sci<strong>en</strong>ces – <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH ». Ces <strong>de</strong>uxpôles ont l’avantage d’effacer les lignes <strong>de</strong> séparation m<strong>en</strong>tales qui survivai<strong>en</strong>t audécloisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s équipes « recherche » et « conservation ». Schématiquem<strong>en</strong>t, on est passéd’une vision par type d’activité à une vision plus fonctionnelle, par rôles dans le système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> (Figure 6.5).197 Le déblocage <strong>de</strong> l’OZHM (dont l’idée remontait à 2004) n’a pas eu lieu avant 2009 aussi parce que la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>flottem<strong>en</strong>t qui a eu lieu suite au décloisonnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s équipes « recherche » et « conservation » était sans douteirré<strong>du</strong>ctible.364


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerVision paractivitésrecherche /conservationRecherchesci<strong>en</strong>tifiqueGestion <strong>de</strong>sZHMTransfert<strong>gestion</strong> / décisionEvolution verspôles <strong>gestion</strong> /politiquesRecherchesci<strong>en</strong>tifiqueAction<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale(sci<strong>en</strong>ce et différ<strong>en</strong>tesformes <strong>de</strong> transfert)Gestion <strong>de</strong>sZHMNiveau décisionnelpolitique publiques,institutionsFigure 6.5 : Evolution d’une vision <strong>de</strong> l’organisation par activité recherche / conservation à unearticulation <strong>de</strong>s activités <strong>en</strong> fonction <strong>du</strong> rôle dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : vers la <strong>gestion</strong> directe, vers lesniveaux décisionnels (source : auteur)Dans cette vision fonctionnelle, les différ<strong>en</strong>tes activités <strong>de</strong> recherche, les actions connexes à larecherche et les actions plus techniques ou plus politiques doiv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble agir : 1) directem<strong>en</strong>tdans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHM, <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> la Camargue et jusqu’à<strong>de</strong>s sites <strong>en</strong> Méditerranée (flèches pleines, Figure 6.5) ; 2) indirectem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> influ<strong>en</strong>çant lesdécisions qui vont avoir <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces sur la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>puis la Camargue(comités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, etc.) à la gouvernance <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée (MedWet, etc.)(flèches <strong>en</strong> pointillés, Figure 6.5).Cette évolution <strong>de</strong>s visions internes se manifeste notamm<strong>en</strong>t dans la façon dont a été reformulél’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action. (1) Pour les interv<strong>en</strong>tions vers une meilleure <strong>gestion</strong><strong>de</strong>s ZHM, c’est le concept <strong>de</strong> « site atelier » qui a canalisé la réflexion stratégique. (2) La réflexionportant sur l’action plus indirecte visant à influ<strong>en</strong>cer les décisions à différ<strong>en</strong>tes échelles (<strong>de</strong> laCamargue au bassin méditerrané<strong>en</strong>) n’a pas été portée par l’organisation comme uneproblématique d’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action. Cep<strong>en</strong>dant, notre analyse générale <strong>de</strong> laplanification stratégique nous permet <strong>de</strong> rapprocher et <strong>de</strong> revisiter utilem<strong>en</strong>t certains élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong>débat sous cet angle. Pr<strong>en</strong>ons le temps <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> ces réflexions stratégiquesm<strong>en</strong>ées <strong>en</strong> interne <strong>de</strong> l’organisation, dont l’<strong>en</strong>jeu est, rappelons-le, <strong>de</strong> créer les conditionsfavorables à l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> stratégies d’action (niveau opérationnel) <strong>de</strong>vant rester <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce365


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleavec les int<strong>en</strong>tions à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation (niveau global <strong>de</strong> la stratégie) et avec le cœur <strong>de</strong>métier (pour lequel elle dispose <strong>de</strong> ressources et <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces) qui est la recherche et l’actionconnexe à la recherche.(1) Articuler les disciplines et les mo<strong>de</strong>s d’action pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> sites : le concept <strong>de</strong>« site atelier »Le concept <strong>de</strong> « site atelier » a <strong>en</strong> réalité émergé lors <strong>de</strong> la précéd<strong>en</strong>te planification stratégique, <strong>en</strong>2005. Ayant <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s limités mais la volonté d’interv<strong>en</strong>ir pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zoneshumi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes, l’idée <strong>de</strong> « site atelier » <strong>de</strong>vait <strong>en</strong>cadrer la sélection d’un nombre limité<strong>de</strong> sites d’interv<strong>en</strong>tion où développer une démarche <strong>de</strong> long terme (Plan stratégique TdV 2006-2010, 2009 : 31). Ce concept rappelle celui <strong>de</strong> « zone atelier » développé par le CNRS dans lesannées 1990. Ces zones ateliers ont été développées pour pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge les problématiques<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et appuyées sur les concepts <strong>de</strong> socio-écosystèmes (ou anthropoécosystème).Le champ qui s’est développé autour <strong>de</strong> ce concept plai<strong>de</strong> pour une approche qui pr<strong>en</strong>neexplicitem<strong>en</strong>t l’homme comme composante active <strong>de</strong>s systèmes, cette intégration étant vuecomme nécessaire à la progression <strong>de</strong>s connaissances sur les écosystèmes et l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Selon Y. Laga<strong>de</strong>ux et R. Chernokian (2009), ceci ne fait pas obligatoirem<strong>en</strong>t appel à la création d<strong>en</strong>ouvelles disciplines, mais plutôt à la recherche <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> rassembler les sci<strong>en</strong>ces sociales etles sci<strong>en</strong>ces <strong>du</strong> vivant. Le dispositif mis <strong>en</strong> place par le CNRS, dans le cadre <strong>de</strong> sa politiqueinterdisciplinaire, a donc été <strong>en</strong>tre autres la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s zones ateliers, prés<strong>en</strong>tées commeune innovation <strong>de</strong> la recherche dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Lévêque et al., 2000 ;Muxart, 2004). Elles sont « conçues comme un vaste réseau interorganismes <strong>de</strong> recherchesinterdisciplinaires coordonnées et organisées territorialem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> prise directe avec lesquestionnem<strong>en</strong>ts émanant <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>naire, associatif et politique au niveau régional »(Laga<strong>de</strong>ux & Chernokian, 2009 : 195).Les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV ne se sont pas directem<strong>en</strong>t inspirés <strong>de</strong>s zones ateliers <strong>du</strong> CNRS, maisleur exist<strong>en</strong>ce les a conforté dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s sites ateliers (Direction, com.pers., 2010),dont l’<strong>en</strong>jeu est, <strong>en</strong> plus <strong>de</strong> l’approche systémique d’un site, <strong>de</strong> conc<strong>en</strong>trer les moy<strong>en</strong>s pour actionplus cohér<strong>en</strong>te sur le long terme.Pour le programme 2006-2010 <strong>de</strong> la TdV, les actions m<strong>en</strong>ées sur les sites press<strong>en</strong>tis n’ont pas étéconcluantes 198 et le concept n’a pas vécu. Il a cep<strong>en</strong>dant été repris dès le début <strong>de</strong> la planificationstratégique <strong>en</strong> 2009 et d’abord <strong>en</strong>visagé, à raison, comme un concept <strong>de</strong>vant ai<strong>de</strong>r à la198 parmi eux, les sites <strong>du</strong> projets SMAP III (Chapitre 4).366


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerconstruction <strong>de</strong>s projets (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> Atelier planification stratégique, docum<strong>en</strong>t interne,2009). Pour que le concept joue pleinem<strong>en</strong>t ce rôle, le travail <strong>de</strong> (re)définition était prioritaire ; il aété pris <strong>en</strong> charge par la direction. La formulation proposée <strong>en</strong> mars 2009 est à peu <strong>de</strong> chose prèscelle qui figure dans le docum<strong>en</strong>t final <strong>du</strong> plan 2011-2015 (Encadré 6.3).Encadré 6.3 : Définition <strong>de</strong>s « sites ateliers » pour organiser les actions <strong>en</strong> faveur d’une meilleure <strong>gestion</strong><strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes (Extrait Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 26)Les sites ateliersDans le programme 2006-2010, le concept <strong>de</strong> « sites ateliers » a été développé afin <strong>de</strong> favoriser uneapproche concrète à léchelle locale et <strong>de</strong> lier étroitem<strong>en</strong>t les activités <strong>de</strong> recherche aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation. Ces sites avai<strong>en</strong>t aussi pour vocation <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre et <strong>de</strong> tester <strong>en</strong> gran<strong>de</strong>ur réelle lamise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes <strong>en</strong> s<strong>en</strong>gageantsur le moy<strong>en</strong> terme (au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> 5 ans) et <strong>en</strong> privilégiant le caractère démonstratif et réplicable. Au moins<strong>de</strong>ux sites ateliers étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>visagés, lun situé <strong>en</strong> rive nord, c<strong>en</strong>tré sur la Camargue, avec un focusimportant sur le domaine <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et au moins un autre <strong>en</strong> rive sud et/ou est.Ce concept na pas été mis <strong>en</strong> œuvre avec succès y compris <strong>en</strong> Camargue. Malgré cet échec, le concept<strong>de</strong>s sites ateliers ne doit pas être abandonné et les difficultés doiv<strong>en</strong>t être surmontées. Le programme<strong>de</strong>vrait ainsi :• développer un site atelier sur la Camargue <strong>en</strong> liant explicitem<strong>en</strong>t les questions <strong>de</strong> recherche auxprincipaux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation et <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta et <strong>en</strong> mettant <strong>en</strong> place un projet fédérateur ;• mettre <strong>en</strong> place un ou <strong>de</strong>ux autres sites ateliers, <strong>de</strong> préfér<strong>en</strong>ce au sud ou à lest <strong>du</strong> bassinméditerrané<strong>en</strong>, sur la base <strong>de</strong> critères <strong>de</strong> sélection précis.Le site atelier est défini comme un espace géographique sur lequel <strong>de</strong>s équipes <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, <strong>en</strong>étroite concertation avec les acteurs locaux <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>, collabor<strong>en</strong>t pour apporter <strong>de</strong>s réponses à <strong>de</strong>s<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation à une échelle au moins micro-régionale. Notre rôle et nos modalités dactionseront différ<strong>en</strong>ts selon le site atelier considéré : au sud et à lest <strong>du</strong> bassin méditerrané<strong>en</strong>, il sagira <strong>de</strong>m<strong>en</strong>er <strong>de</strong>s recherches sur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation clés, <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat avec <strong>de</strong>s universitaireslocaux, dapporter une expertise technique et méthodologique et <strong>de</strong> promouvoir <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>intégrée, adaptative, impliquant les principaux acteurs locaux/nationaux. En Camargue, où nous sommesun acteur historique, pleinem<strong>en</strong>t impliqué dans les dim<strong>en</strong>sions sci<strong>en</strong>tifique mais égalem<strong>en</strong>tinstitutionnelle et politique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>rable <strong>du</strong> territoire, il sagira <strong>de</strong> développer et mobiliser nosconnaissances pour développer <strong>en</strong> part<strong>en</strong>ariat <strong>de</strong>s scénarios prospectifs sur lévolution <strong>du</strong> territoire et <strong>de</strong>son patrimoine naturel face aux changem<strong>en</strong>ts globaux et <strong>de</strong> les faire valoir via les instances etdémarches appropriées (PNRC, Réserve MAB, Schéma régional <strong>de</strong> cohér<strong>en</strong>ce écologique...).Les principaux critères <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>s sites ateliers tels que définis dans le programme 2006-2010 sontles <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation, la représ<strong>en</strong>tativité <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> problématiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong>conservation, <strong>de</strong>s contextes socio-économiques et politiques favorables et <strong>en</strong>fin lexist<strong>en</strong>ce <strong>du</strong>npart<strong>en</strong>ariat local. Une approche pluridisciplinaire avec un large part<strong>en</strong>ariat sera mise <strong>en</strong> œuvre dans <strong>de</strong>sprojets visant à avoir un caractère démonstratif et réplicable.Dans tous les cas, notre interv<strong>en</strong>tion doit se concevoir à léchelle géographique à laquelle se pose leproblème (« problemshed », espace <strong>de</strong> fonctionnalité, connectivité). Cette échelle est généralem<strong>en</strong>tsupérieure à la seule zone humi<strong>de</strong> considérée et impose souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte le bassinversant.La mobilisation <strong>du</strong> concept lors <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> réflexion collective a permis son appropriation –théorique – par l’équipe. Cep<strong>en</strong>dant, plus qu’un concept structurant la réflexion stratégique, l’idée<strong>de</strong> « site atelier » est <strong>en</strong>visagée comme <strong>de</strong>vant être un mo<strong>de</strong> opératoire favorisant l’articulation<strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action que la TdV est <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre sur un site.367


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talePour la Camargue, l’objectif – qui est surtout un souci <strong>de</strong> la direction – est d’atteindre un niveau<strong>de</strong> cohér<strong>en</strong>ce supérieur <strong>en</strong>tre toutes les actions m<strong>en</strong>ées par les différ<strong>en</strong>ts membres <strong>de</strong> l’équipe.Nous nous rappelons <strong>en</strong> effet que la TdV intervi<strong>en</strong>t sous <strong>de</strong>s formes variées <strong>en</strong> Camargue(Chapitre 3) : <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> son domaine, mais aussi appui à la <strong>gestion</strong> d’autres sites, suivi <strong>de</strong> labiodiversité et expertises sci<strong>en</strong>tifiques, ai<strong>de</strong> à la décision pour la <strong>gestion</strong> hydraulique, contributionmajeure pour la rédaction <strong>de</strong> la charte <strong>du</strong> PNRC, etc. Plus précisém<strong>en</strong>t, les approches sontpluridisciplinaires et multiples pour une même problématique <strong>de</strong> conservation. Souv<strong>en</strong>ons-nous<strong>de</strong> l’exemple <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse : l’ornithologue travaille à créer <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s avec les chasseurs,l’activité cynégétique profitant globalem<strong>en</strong>t à l’avifaune. Parallèlem<strong>en</strong>t, l’écologue spécialiste <strong>de</strong> laflore <strong>de</strong>s marais temporaires formule <strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à l’<strong>en</strong>droit <strong>de</strong> ces mêmeschasseurs, mais sans avoir un li<strong>en</strong> direct avec eux. Ces recommandations sont communiquées<strong>en</strong>tre autres par un membre <strong>de</strong> la TdV responsable d’un projet <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> participatif <strong>de</strong> maraisoù une tr<strong>en</strong>taine <strong>de</strong> chasseurs adhér<strong>en</strong>ts vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t chasser <strong>en</strong> respectant les règles <strong>de</strong> bonnespratiques 199 . Enfin, la direction <strong>de</strong> la TdV sollicite l’ONCFS pour le respect <strong>de</strong>s lois relatives àl’activité cynégétique <strong>en</strong> Camargue. La mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> toutes ces actions ne signifi<strong>en</strong>ullem<strong>en</strong>t qu’il faudrait r<strong>en</strong>oncer à ces places et rôles respectifs <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipetravaillant autour <strong>de</strong> la chasse et <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais. Cela consisterait <strong>en</strong> une int<strong>en</strong>sification<strong>de</strong>s échanges <strong>en</strong> interne autour <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes problématiques <strong>de</strong> conservation prise <strong>en</strong> chargepar l’organisation. Il s’agit égalem<strong>en</strong>t d’une cohér<strong>en</strong>ce plus forte <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong>l’organisation au niveau institutionnel. Par exemple, plusieurs spécialistes <strong>de</strong> la TdV sièg<strong>en</strong>t dansles commissions 200 <strong>du</strong> PNRC correspondant à leur domaine <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ce. La participation àces commissions qui peuv<strong>en</strong>t avoir une influ<strong>en</strong>ce sur la <strong>gestion</strong> à l’échelle <strong>du</strong> <strong>de</strong>lta <strong>de</strong>vrait fairel’objet d’une mise <strong>en</strong> commun <strong>de</strong>s informations et <strong>de</strong>s postures à adopter (Direction TdV,com.pers., 2010).Concernant les sites ateliers <strong>en</strong> Méditerranée, un travail collectif a été réalisé au cours <strong>de</strong> laplanification stratégique pour redéfinir les critères <strong>de</strong> sélection <strong>de</strong>s sites (Encadré 6.3) et faire uneanalyse <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts sites id<strong>en</strong>tifiés à la lumière <strong>de</strong> ces critères. Le choix a porté sur le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong>Gediz (Turquie) et sur les lacs d’Ichkeul (Tunisie) comme sites ateliers prioritaires, tout <strong>en</strong> sepromettant <strong>de</strong> veiller à ce qu’il se passe sur les autres sites. La volonté <strong>de</strong> développer ce conceptdépasse amplem<strong>en</strong>t les précautions dans la sélection <strong>de</strong>s sites où s’investir sur le moy<strong>en</strong> ou le long199 visant à démontrer que le respect <strong>de</strong>s règles leur octroie <strong>de</strong>s tableaux <strong>de</strong> chasse d’une qualité au moins égale à cequi se pratique par ailleurs.200 Le PNRC compte 8 commissions thématiques dont plusieurs port<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> territoire et<strong>de</strong>s espaces naturels : Commission 2 « Protection <strong>de</strong> la nature, étu<strong>de</strong>s et recherches sci<strong>en</strong>tifiques » ; Commission 3 «Gestion <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong>s milieux aquatiques, pêche et chasse » ; Commission 4 « Activités agricoles, développem<strong>en</strong>t etpromotion <strong>de</strong> l’élevage » ; Commission 5 « <strong>Tour</strong>isme <strong>du</strong>rable ».368


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerterme. Il s’agit <strong>de</strong> développer un mo<strong>de</strong> d’action spécifique pour les interv<strong>en</strong>tions <strong>en</strong> Méditerranéequi serait la transposition <strong>de</strong> l’approche multidisciplinaire et multimodale mise <strong>en</strong> œuvre <strong>en</strong>Camargue. Il est évid<strong>en</strong>t que la transposition fidèle <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> Camargue n’est pas possible,puisque l’organisation ne pourra pas compter sur les plus grands atouts dont elle dispose sur sonsite d’implantation (acteur territorial, patrimoine sci<strong>en</strong>tifique historique, capacité à développerune recherche <strong>de</strong> terrain). C’est pourquoi le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette action <strong>de</strong> long terme estassujetti à la possibilité d’établir un part<strong>en</strong>ariat local fort (Encadré 6.3) garantissant une <strong>en</strong>trée surle terrain et un suivi <strong>de</strong>s actions. Le seul site où la TdV a pu m<strong>en</strong>er un travail significatif sur lelong terme est le parc transfrontalier <strong>de</strong> Prespa. La <strong>gestion</strong> est assurée par la Société <strong>de</strong> protection<strong>de</strong> Prespa, association avec laquelle la TdV a <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s privilégiés, liés à l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> LucHoffmann, le fondateur <strong>de</strong> la TdV, qui a aidé à sa création <strong>en</strong> 1960 201 . L’état <strong>de</strong>s relations avec lesorganismes locaux <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature a <strong>de</strong> ce fait constitué un critère aussiimportant que les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation dans la réflexion collective – animée non plus par ladirection, mais par la chef <strong>du</strong> projet « Gestion <strong>de</strong> sites » – qui a eu lieu autour <strong>de</strong> la sélection <strong>de</strong>ssites. En se rec<strong>en</strong>trant sur un rôle sci<strong>en</strong>tifique et technique à jouer sur le long terme, la TdVsemble poser <strong>de</strong>s conditions strictes à son action <strong>en</strong> Méditerranée et r<strong>en</strong>oncer à <strong>de</strong>s formesd’interv<strong>en</strong>tions peu concluantes expérim<strong>en</strong>tées dans le cadre <strong>du</strong> SMAP III (Chapitre 4).Cep<strong>en</strong>dant, pour repro<strong>du</strong>ire l’approche mise <strong>en</strong> œuvre <strong>en</strong> Camargue, il ne suffit pas <strong>de</strong> comptersur les compét<strong>en</strong>ces multidisciplinaires <strong>de</strong> la TdV, il faudrait pouvoir développer une mêmeconnaissance fine <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : les institutions et les jeuxpolitiques, les acteurs responsables <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>, autrem<strong>en</strong>t dit faire l’analyse <strong>du</strong> système <strong>de</strong><strong>gestion</strong> effective. L’investissem<strong>en</strong>t sur le long terme ne peut que favoriser la progression sur cettedim<strong>en</strong>sion nécessaire à la construction <strong>de</strong> stratégies d’action opérationnelles, mais cela reste un<strong>en</strong>jeu à relever au cours <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme 2011-2015. Pour l’heure, un travaild’analyse <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> d’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sites visés (le <strong>de</strong>lta <strong>du</strong> Gediz) va être pris <strong>en</strong> main par la chef<strong>de</strong> projet « Gestion <strong>de</strong> sites », mais pour les autres, et notamm<strong>en</strong>t la Camargue, le concept restepour la direction (com.pers., 2010) « peu opérant faute d’animation et d’objectifs clairem<strong>en</strong>t définis ». Ilapparaît que l’intérêt majeur <strong>de</strong> ce concept constitue simultaném<strong>en</strong>t sa principale difficulté poursa tra<strong>du</strong>ction pratique : l’idée <strong>de</strong> site atelier vise à déployer sur un même territoire les multiples201 « The first coordinated effort to protect the area took place in 1990 with the foundation of the Society for theProtection of Prespa (SPP). Some of the people who played a <strong>de</strong>cisive role in its formation were the<strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>talist and architect-planner, Thymios Papayannis, the internationally r<strong>en</strong>owned zoologist, Dr. LucHoffmann, and the biologist, Dr. Giorgos Catsadorakis. Together they laid the foundation for the establishm<strong>en</strong>t ofthe SPP, with the help and support of a series of <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal non-profit organisations. The formal initiative wasun<strong>de</strong>rtak<strong>en</strong> by the « Fri<strong>en</strong>ds of Prespa » and WWF International and so, in 1991, the Society SPP was created withthe participation of t<strong>en</strong> <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal organisations » (www.spp.gr, visite 2010).369


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleexpertises et actions que la TdV est capable <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre. Le site atelier est donctransversal aux projets qui sont c<strong>en</strong>trés non sur un site mais sur un <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation. L’idéeest alors que chacun <strong>de</strong>s projets (selon la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> leur apport vis-à-vis <strong>de</strong> la problématique<strong>du</strong> site atelier) contribue au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action sur le site visé. La logique théorique <strong>du</strong>concept est très intéressante : le travail réalisé au sein <strong>de</strong>s projets c<strong>en</strong>trés sur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>conservation (la plupart <strong>en</strong> Camargue) peut être valorisé <strong>en</strong> mobilisant les expertises dans uneaction Camargue mieux coordonnée (site atelier Camargue) et sur d’autres sites (les <strong>de</strong>ux sitesateliers Méditerranée). Seulem<strong>en</strong>t, la réelle mise <strong>en</strong> pratique <strong>du</strong> concept dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> la capacité quel’équipe a, d’une part, à développer <strong>de</strong>s actions sur ces sites et, d’autre part, à animer etcoordonner les actions. Ce point illustre la t<strong>en</strong>sion forte qui existe <strong>en</strong>tre le registre stratégique <strong>du</strong>mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (approche site atelier) et celui <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne(structuration <strong>de</strong>s équipes autour d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation / autour <strong>de</strong> sites). Si la réflexionstratégique <strong>de</strong> long terme à la TdV l’a con<strong>du</strong>it à développer ce mo<strong>de</strong> d’action, il apparaît que leconcept ne sera opérant que si les questions qu’il soulève dans d’autres registres stratégiques sontréglées. Ceci nous rappelle la t<strong>en</strong>sion bi<strong>en</strong> réelle qui existe <strong>en</strong>tre la structuration <strong>de</strong>s équipes et lesmo<strong>de</strong>s d’action que l’on cherche à construire, évoquée au début <strong>de</strong> ce chapitre sous l’angle <strong>du</strong>développem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong> l’organisation. La difficulté à trouver <strong>de</strong>s « responsables <strong>de</strong> site »chargés <strong>de</strong> l’animation <strong>du</strong> travail autour d’un site semble bi<strong>en</strong> v<strong>en</strong>ir <strong>du</strong> caractère transversal <strong>du</strong>site atelier, ce qui <strong>en</strong> terme organisationnel se superpose à la logique hiérarchique dominante. Lespersonnes pouvant pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge cette animation sont souv<strong>en</strong>t déjàresponsables d’un projet et manifest<strong>en</strong>t peu <strong>de</strong> velléité à m<strong>en</strong>er les <strong>de</strong>ux logiques <strong>de</strong> front. Enforçant le trait, on pourrait imaginer que l’organisation choisisse plus tard <strong>de</strong> restructurer leséquipes autour <strong>de</strong>s sites pour s’assurer que les actions puiss<strong>en</strong>t s’y déployer réellem<strong>en</strong>t. Cescénario semble peu probable car il ne résoudrait pas le problème <strong>de</strong> transversalité et poserait<strong>en</strong>core davantage <strong>de</strong> problèmes <strong>de</strong> structuration <strong>de</strong> l’équipe : l’ess<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong> l’expertise estdéveloppé sur la base <strong>de</strong> recherches <strong>de</strong> terrain qu’il est seulem<strong>en</strong>t possible <strong>de</strong> développer sur laCamargue. On se retrouverait alors avec un site Camargue bi<strong>en</strong> pourvu et <strong>de</strong>s équipes « siteMéditerranée » qui serai<strong>en</strong>t tout autant dép<strong>en</strong>dantes <strong>de</strong> la capacité <strong>de</strong> l’équipe Camargue àcontribuer à l’action sur les sites <strong>en</strong> Méditerranée. D’une manière ou d’une autre, l’organisation setrouve <strong>de</strong>vant le défi <strong>de</strong> provoquer une réelle transversalité. La concrétisation <strong>de</strong> l’approche « siteatelier » <strong>en</strong>g<strong>en</strong>drera sans doute la formalisation <strong>de</strong> nouveaux processus internes comme <strong>de</strong>sgroupes <strong>de</strong> travail, qui permettrait <strong>en</strong>suite que le concept ne retombe pas dans un oublitemporaire comme ce fut le cas <strong>en</strong> 2006-2010.370


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer(2) Influ<strong>en</strong>cer les décisions pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHM : un nouvel <strong>en</strong>jeu pris <strong>en</strong>charge par la TdVNous avons promis <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ir à l’effet <strong>du</strong> déblocage <strong>de</strong> l’OZHM au début <strong>de</strong> l’année 2009, sur lafaçon dont la TdV appréh<strong>en</strong>dait la partie « influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs » <strong>de</strong> son action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Les premières interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> la TdV ayant pour finalité d’influ<strong>en</strong>cer lesdécisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM sont aussi anci<strong>en</strong>nes que l’organisation ellemême,et les actions dans ce s<strong>en</strong>s se sont multipliées tant <strong>en</strong> quantité qu’<strong>en</strong> qualité. Cep<strong>en</strong>dant,nous avons observé que le démarrage <strong>de</strong> l’OZHM semblait constituer pour l’organisation unebase assez concrète lui permettant <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>diquer ses compét<strong>en</strong>ces et sa légitimité à interv<strong>en</strong>irdans ce domaine d’action, ce qui est visible <strong>en</strong> différ<strong>en</strong>ts lieux <strong>du</strong> plan quinqu<strong>en</strong>nal. Lephénomène auquel nous assistons est la maturation d’actions ayant émergé au niveauopérationnel qui finiss<strong>en</strong>t par pr<strong>en</strong>dre un s<strong>en</strong>s int<strong>en</strong>tionnel et global (décl<strong>en</strong>ché par ce projetstructurant).Quels mo<strong>de</strong>s d’action la TdV doit-elle poursuivre ou développer pour influ<strong>en</strong>cer directem<strong>en</strong>t lesdécisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM ? Cette question n’a pas émergé comme point <strong>de</strong>départ structurant la réflexion, comme les « sites ateliers » ont pu l’être, pour abor<strong>de</strong>r lesinterv<strong>en</strong>tions pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> sites. Cep<strong>en</strong>dant, au moins <strong>de</strong>ux élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> débat peuv<strong>en</strong>t êtrerapprochés <strong>de</strong> cette problématique.1. D’une part, il y a celui déjà évoqué <strong>de</strong> l’articulation <strong>en</strong>tre les savoirs multidisciplinaires acquis<strong>en</strong> interne, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> modélisation hydrologique et écosystémique étant suffisantpour se donner comme objectif <strong>de</strong> développer un modèle intégré <strong>de</strong> la Camargue. Cesdiscussions ont abouti à la construction d’un vaste projet <strong>de</strong> « modélisation <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>sécosystèmes » (Programme Ecosystèmes, Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 65), dontl’objectif serait la mise à disposition <strong>de</strong> l’outil <strong>de</strong>stiné aux déci<strong>de</strong>urs et <strong>gestion</strong>naires locaux. Ladémarche <strong>en</strong>visagée pour provoquer la prise <strong>en</strong> main <strong>de</strong> l’outil par ses <strong>de</strong>stinataires restecep<strong>en</strong>dant <strong>en</strong>core peu explicitée et nous <strong>de</strong>vons noter ici la mobilisation très partielle <strong>de</strong> la placeet <strong>de</strong>s rôles que joue déjà la TdV qui permettrait d’<strong>en</strong>visager <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> transfert plus tangibles.En effet, les différ<strong>en</strong>tes formes d’interv<strong>en</strong>tions très concrètes r<strong>en</strong>contrées au chapitre 3 ne sontévoquées que sporadiquem<strong>en</strong>t dans les réflexions stratégiques. Par exemple, les participations à<strong>de</strong>s comités locaux ou nationaux sont <strong>en</strong>registrées comme <strong>de</strong>s résultats significatifs <strong>du</strong>programme (Inv<strong>en</strong>taire <strong>du</strong> transfert « Tableau <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its », docum<strong>en</strong>t interne, 2009), mais neconstitu<strong>en</strong>t pas toujours explicitem<strong>en</strong>t une base <strong>de</strong> travail pour l’élaboration <strong>de</strong>s projets quis’inscriv<strong>en</strong>t pourtant le plus souv<strong>en</strong>t dans la continuité <strong>de</strong>s précéd<strong>en</strong>ts. Autrem<strong>en</strong>t dit, sa place et371


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleses rôles sont <strong>en</strong>core davantage perçus comme <strong>de</strong>s résultats (que l’on pourrait évaluer, ce que l’onétudiera dans le chapitre suivant) que comme un élém<strong>en</strong>t structurant <strong>de</strong> la réflexion stratégique.Ceci mérite un comm<strong>en</strong>taire qui nous r<strong>en</strong>voie à <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts que nous avons déjà évoqués sousun autre angle. Comme nous l’indiqu<strong>en</strong>t les auteurs <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces, les ressources se développ<strong>en</strong>t et <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t stratégiques dans les processus d’action(Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006). Ainsi, lorsque nous avons évoqué les processus <strong>de</strong> légitimation parles organes <strong>de</strong> gouvernance, nous avons pris soin <strong>de</strong> préciser que la gouvernance était une voieparticulière apportant cette ressource à l’organisation parallèle à la légitimité que la TdV acquiertdans l’exercice même <strong>de</strong> ses activités. La participation <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV à <strong>de</strong>s comitéslocaux et nationaux peut <strong>en</strong> être un bon exemple : ils dispos<strong>en</strong>t d’une légitimité suffisante pouraccé<strong>de</strong>r à ces arènes, mais plus loin, il faut noter le fait que cette participation contribue aur<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette légitimité et peut alors favoriser l’acquisition <strong>de</strong> nouvelles ressources pourl’action (nouveaux réseaux, nouveaux accès à différ<strong>en</strong>tes arènes). Nous voyons ici que pour êtrestratégiques, les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales doiv<strong>en</strong>t avoir une double conséqu<strong>en</strong>ce : 1) sa finalité :un changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong> et une amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s écosystèmes ; 2) <strong>de</strong>s nouvellesressources pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’organisation. En effet, ce qui est stratégique, c’estd’agir <strong>en</strong> augm<strong>en</strong>tant son pouvoir d’action.Cette auto-analyse <strong>de</strong> sa place et <strong>de</strong> son rôle a été réalisée d’une part par un travail collectif audébut <strong>de</strong> la planification stratégique et d’autre part par les équipes au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction<strong>de</strong> leurs projets. Il apparaît cep<strong>en</strong>dant que cette analyse est peu approfondie pour le niveau <strong>de</strong>l’action visant à influ<strong>en</strong>cer les décisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s. Le <strong>de</strong>uxième élém<strong>en</strong>t qu<strong>en</strong>ous voulions abor<strong>de</strong>r se situe dans le prolongem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette remarque.2. D’autre part, la direction <strong>de</strong> la TdV a soulevé le manque <strong>de</strong> visibilité <strong>de</strong> sa propre action à lafois dans le plan stratégique où l’action prés<strong>en</strong>tée dans le programme ne fait pas apparaître sesinterv<strong>en</strong>tions transversales et dans les processus <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> interne qui n’offr<strong>en</strong>t pas un espacesuffisant à <strong>de</strong>s discussions favorisant l’articulation <strong>de</strong> l’action m<strong>en</strong>ée par la direction (directeurgénéral et directeur <strong>du</strong> programme notamm<strong>en</strong>t ) au programme d’actions m<strong>en</strong>é par les équipes.Ceci est surtout vrai lorsqu’il s’agit d’interv<strong>en</strong>tions au niveau <strong>de</strong>s institutions nationales ouméditerrané<strong>en</strong>nes – les interv<strong>en</strong>tions locales <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts membres <strong>de</strong> la TdV font l’objet <strong>de</strong>suivi et d’échange <strong>en</strong>tre les membres <strong>du</strong> comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (direction et chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t).L’action spécifique <strong>de</strong> la direction consiste notamm<strong>en</strong>t à augm<strong>en</strong>ter la visibilité <strong>de</strong> la TdV dansles cadres nationaux et méditerrané<strong>en</strong>s pour se frayer un espace d’expression plus large etprovoquer <strong>de</strong>s ouvertures pour le développem<strong>en</strong>t d’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM. « Ma stratégie c’est<strong>de</strong> vraim<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre la TdV visible, lisible pour ce qu’elle est, dans différ<strong>en</strong>tes instances et à différ<strong>en</strong>ts niveaux.372


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerAvec plusieurs objectifs : bi<strong>en</strong> sûr l’objectif ultime, c’est <strong>de</strong> pousser pour la conservation <strong>de</strong>s ZH. Mais il y a <strong>de</strong>sproxi-objectifs plus prosaïques : développer, sécuriser <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>ariats stratégiques, soit parce qu’ils sont financiers,soit parce qu’ils sont institutionnels. C’est le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> mon action <strong>de</strong>puis quelques années sur cette partie externe <strong>de</strong>la TdV, non pour la visibilité sci<strong>en</strong>tifique qui est déjà bonne grâce au travail <strong>du</strong> directeur <strong>du</strong> programme etd’autres chercheurs, mais pour d’autres institutions » (Direction, com.pers., 2010). Ce manqued’articulation <strong>en</strong>tre les actions au niveau institutionnel et les projets pro<strong>du</strong>isant les cont<strong>en</strong>us(savoirs et recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZHM) peut alors être vu comme une sousexploitation<strong>de</strong>s cadres dans lesquels l’organisation serait <strong>en</strong> mesure d’agir. Le directeur donnel’exemple <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s avec MedWet : « Il me semble qu’avoir rédigé et fait vali<strong>de</strong>r la stratégie et le plan <strong>de</strong>travail MedWet pour les 4 ans qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t par tous les pays méditerrané<strong>en</strong>s, c’est pas mal. Et surtout, ce qui estpas mal, c’est que cela nous légitime nous TdV, – je n’ai pas fait un copier-coller <strong>de</strong> notre propre stratégie, j’ai écrit<strong>de</strong>s choses qui me sembl<strong>en</strong>t honnêtes, qui t<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t compte <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> l’initiative (2004) etc. – mais c’est uneplateforme qui nous apporte à nous TdV un cadre, une légitimation, une validation politique ». « Et au niveau <strong>du</strong>MEDDM, j’ai essayé <strong>de</strong> faire <strong>en</strong> sorte que la France, qui voyait MedWet d’un œil assez critique, s’implique.Bon, cela ti<strong>en</strong>t beaucoup aux personnes, mais j’ai travaillé avec la direction <strong>de</strong> l’eau et <strong>de</strong> la Biodiversité (<strong>du</strong>MEDDM) pour que la France pr<strong>en</strong>ne la présid<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> MedWet. Du coup, ils s’intéress<strong>en</strong>t aux li<strong>en</strong>s avec laconv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> Barcelone, et ça <strong>de</strong>vrait nous ai<strong>de</strong>r s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t » (ibid.). Ces relations institutionnelles rest<strong>en</strong>td’obscures « usines à gaz » pour beaucoup <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe qui travaill<strong>en</strong>t sur <strong>de</strong>sproblématiques beaucoup plus ancrées au terrain. Il est vrai qu’il est difficile d’attribuer <strong>de</strong>saméliorations matérielles <strong>de</strong>s ZHM aux efforts déployés dans les relations institutionnelles etdans l’action politique et ils ne remplac<strong>en</strong>t <strong>en</strong> ri<strong>en</strong> les actions <strong>de</strong> terrain m<strong>en</strong>ées par lesopérationnels, simplem<strong>en</strong>t, ils les favoris<strong>en</strong>t. Si l’OZHM parvi<strong>en</strong>t à davantage convaincre <strong>en</strong>interne, il pourrait être une première étape dans une articulation plus forte <strong>en</strong>tre les pro<strong>du</strong>ctions<strong>de</strong> connaissance <strong>de</strong> terrain et leur valorisation à une échelle plus large.6.3.3 Bilan sur la construction <strong>de</strong>s objets écologiques à conserver et sur la théoried’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Cette partie 6.3 était consacrée à l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la manière dont la TdV construit sa stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, <strong>en</strong> considérant les registres <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’objet écologique àconserver et <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Le tableau 6.15 est une synthèse <strong>de</strong>s réflexionsinternes qui ont eu lieu p<strong>en</strong>dant la planification stratégique dans ces <strong>de</strong>ux registres, prés<strong>en</strong>tées <strong>en</strong>parallèle <strong>de</strong>s objectifs que l’organisation se donne pour chacun d’eux, que l’on a pris <strong>en</strong> référ<strong>en</strong>cepour l’analyse (voir le tableau 6.4).373


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleTableau 6.15 : Cont<strong>en</strong>us stratégiques (ce que veut la TdV) et démarche mise <strong>en</strong> place p<strong>en</strong>dant laplanification stratégique (2009-2010) pour pouvoir atteindre ces objectifs dans la mise <strong>en</strong> œuvre qui vasuivreQuatre registresstratégiques <strong>de</strong>l’ONGEConstruction etfocalisation surl’objet écologiqueCont<strong>en</strong>u <strong>du</strong> Plan stratégique<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>2011-2015 (ce que veut la TdV)MissionArrêter la perte et la dégradation <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et<strong>de</strong> leurs ressources naturelles, lesrestaurer et promouvoir leur utilisationrationnelleProcessus <strong>de</strong> planificationstratégique (pour pouvoir)Dim<strong>en</strong>sions stratégiques influ<strong>en</strong>çant leschoix d’objets écologiques à conserver- Caractère stratégique <strong>de</strong> l’objet- Capacités <strong>de</strong> la TdV : expertises etmo<strong>de</strong>s d’action- Désir <strong>de</strong>s membres- Place dans le secteur <strong>de</strong>s ZH etlégitimitéChoix d’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation mieuxclarifiés :- Des espèces emblématiques ou clés- Choix <strong>de</strong> sites : Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c, sites<strong>en</strong> MéditerranéeMo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleObjectif spécifiqueAméliorer la compréh<strong>en</strong>sioninterdisciplinaire <strong>de</strong>s ZHM et <strong>de</strong>lécologie <strong>de</strong> leurs espèces, transférerces connaissances et les utiliser pourpromouvoir leur conservationObjectifs <strong>du</strong> programme 2011-20151. Améliorer et partager laconnaissance sur les ZHM2. Tester et capitaliser <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><strong>gestion</strong> pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM3. R<strong>en</strong>forcer les capacités <strong>de</strong>s<strong>gestion</strong>naires et <strong>de</strong>s utilisateurs <strong>de</strong>sZH4. Catalyser lémerg<strong>en</strong>ce déquipes,pour répondre aux <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong>s ZHM5. Faire connaître et valoriser letravail <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>6. Faire partager la vision et lesvaleurs <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Multiples mo<strong>de</strong>s d’actionrecherche sci<strong>en</strong>tifique, actions connexesà la recherche, actions techniques et« politiques »pour <strong>de</strong>ux théories d’action :- Terrain : vers une meilleure <strong>gestion</strong> (<strong>du</strong>domaine TdV jusqu’à <strong>de</strong>s sites <strong>en</strong>Méditerranée)- Arènes <strong>de</strong> décision : influ<strong>en</strong>cer lesdécisions <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM (<strong>de</strong>scomités <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong> Camargue jusqu’àla gouvernance <strong>de</strong>s ZHM)Comm<strong>en</strong>t : Aller plus vers les acteurs<strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH :GI / transfert / influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s décisionsEt valoriser la complém<strong>en</strong>tarité <strong>de</strong>smo<strong>de</strong>s d’action :- Projets plus gros construits autour <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation- Sites ateliersNous avons pu voir que le choix et la précision <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation résulte d’unecombinaison faite <strong>du</strong> caractère stratégique <strong>de</strong> l’objet écologique lui-même (par exemple le flamantrose comme porte-parole <strong>de</strong>s ZH, les Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c comme opportunité <strong>de</strong> recréer unespace naturel), <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> la TdV (notamm<strong>en</strong>t les compét<strong>en</strong>ces « cœur <strong>de</strong> métier »), <strong>de</strong>smo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qu’elle est <strong>en</strong> mesure <strong>de</strong> développer, <strong>du</strong> désir <strong>de</strong>s membres quivont porter l’action, et <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation (par exemple la légitimitésci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV lui permettant d’agir sur la question <strong>de</strong> la démoustication <strong>en</strong> Camargue). Le374


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcernombre <strong>de</strong> dim<strong>en</strong>sions stratégiques à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte dans les choix <strong>de</strong> focalisation sur <strong>de</strong>sobjets écologiques et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation explique la place non négligeable que ces choixont pris dans les réflexions collectives que nous avons observées.Concernant les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, les questions sur lesquelles s’est arrêtéel’organisation p<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> construction <strong>du</strong> programme d’action 2011-2015 se situ<strong>en</strong>tainsi dans les aspects les plus complexes et les moins maîtrisés <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale mise<strong>en</strong> œuvre par la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> : aller toujours plus loin dans l’interv<strong>en</strong>tion dans les systèmes <strong>de</strong><strong>gestion</strong> (Gestion intégrée et transfert), mutualiser, rassembler les compét<strong>en</strong>ces pour développerune approche plus cohér<strong>en</strong>te sur le long terme (sites ateliers). Au cours <strong>de</strong> cette planification,<strong>de</strong>ux logiques d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale se sont précisées. Une logique tire vers le terrain :interv<strong>en</strong>tion pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> directe sur le domaine àl’interv<strong>en</strong>tion sur d’autres sites, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> connaissance <strong>de</strong>s fonctionnem<strong>en</strong>ts naturelsau développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s et d’outils <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. L’autre tire vers l’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s décisions<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>du</strong> local (Camargue) jusqu’à l’échelle méditerrané<strong>en</strong>ne. Chacun <strong>de</strong>sprojets construits pour le plan 2011-2015 s’inscrit dans ces <strong>de</strong>ux logiques interdép<strong>en</strong>dantes, avecselon les projets une val<strong>en</strong>ce plus forte côté « <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> terrain » ou côté « insertion dans lesarènes <strong>de</strong> décisions ».A ce sta<strong>de</strong>, nous ne pouvons aller plus loin dans l’analyse <strong>de</strong> ces nouveaux projets, la mise <strong>en</strong>œuvre n’ayant pas <strong>en</strong>core comm<strong>en</strong>cé 202 , notre approche ne vise <strong>en</strong> outre pas à juger <strong>de</strong> la qualité<strong>de</strong>s stratégies <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur contexte <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> œuvre. Cep<strong>en</strong>dant, partant <strong>de</strong> l’idée que laclarification <strong>de</strong>s objectifs écologiques et <strong>de</strong>s théories d’action étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s leviers pour r<strong>en</strong>forcerl’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous avons analysé les processus <strong>de</strong> planification stratégique, lesquestions qui ont émergé et la façon dont elles ont été traitées, <strong>en</strong> nous appuyant sur les repèresque nous avions acquis dans les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas. L’analyse préalable <strong>de</strong> situations d’action concrètes(Partie 2) et notre cadrage <strong>de</strong> l’ASGE nous ont alors permis d’id<strong>en</strong>tifier les zones d’ombre quipersist<strong>en</strong>t dans la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> la TdV (<strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> ce quiconcerne le transfert et l’influ<strong>en</strong>ce sur les décisions). Cette analyse a été restituée aux membres <strong>de</strong>l’organisation (direction, chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t et chargé <strong>de</strong> communication) dans le cadre d’unséminaire interne organisé à l’occasion <strong>du</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> nouveau programme 2011-2015. Nosconclusions (tableau 6.15) ont contribuée à construire les thématiques <strong>de</strong> réflexion pour lesséances <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> ce séminaire.202 Même si nous avons <strong>en</strong> réalité déjà abordé la plupart d’<strong>en</strong>tre eux dans notre <strong>de</strong>uxième partie, puisque beaucoup<strong>de</strong>s nouveaux projets s’inscriv<strong>en</strong>t dans la continuité <strong>du</strong> précéd<strong>en</strong>t programme.375


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale6.4 Conclusions sur la planification stratégique comme mom<strong>en</strong>tclé pour r<strong>en</strong>forcer la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talePour conclure ce chapitre, replaçons-le dans l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> notre démarche (Figure 6.6).Rappelons que notre <strong>en</strong>jeu est <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t les ONGE construis<strong>en</strong>t et mett<strong>en</strong>t <strong>en</strong>pratique leur stratégie pour agir <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s objets écologiques qu’elles se sont donnés pourobjectif <strong>de</strong> conserver et comm<strong>en</strong>t elles pouvai<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>forcer leur impact <strong>en</strong> termes écologiques.Nous avons comm<strong>en</strong>cé, dans la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> la thèse, par étudier la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> lastratégie dans <strong>de</strong>s situations d’action concrètes m<strong>en</strong>ées par la TdV. Nous avons dégagé <strong>de</strong> cesétu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> compréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE. Mais pour déterminerquel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pouvait être utile à la TdV dans la perspective <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer sonaction, il nous fallait d’une part raisonner à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation et, d’autre part, saisir lesprocessus internes <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie pour m<strong>en</strong>er nos analyses, dans une démarcheconstructiviste mobilisant le procédé <strong>de</strong> la restitution. C’est ce à quoi nous nous sommes attachéedans ce chapitre <strong>en</strong> étudiant la planification stratégique appréh<strong>en</strong>dée comme un mom<strong>en</strong>tparticulier <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> la stratégie. L’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> cette démarche (visant à compr<strong>en</strong>drela construction et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM) nous permettraalors d’abor<strong>de</strong>r la question <strong>de</strong> la façon dont on peut établir les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégie, l’action etses impacts sur les objets écologiques visés, ce qui sera étudié dans le chapitre 7.[Partie 2][Partie 3]Action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale portée parla TdVMise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie dans <strong>de</strong>ssituations d’action concrètesConstruction <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la TdVAnalyse <strong>de</strong>s processus au regard <strong>de</strong>s objectifs dansles 4 registres stratégiquesImpact sur les objets écologiquesvisésRésultat <strong>de</strong>s actions, contribution <strong>de</strong>la TdV à l’amélioration ou le mainti<strong>en</strong><strong>de</strong>s ZHMRaisonnem<strong>en</strong>t stratégique pourr<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleDémarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tionFigure 6.6 : Représ<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre pour étudier la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong><strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans la perspective <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> ses actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talesCette conclusion est organisée <strong>en</strong> <strong>de</strong>ux temps. D’abord, nous allons repr<strong>en</strong>dre et articuler<strong>en</strong>semble tous les caractéristiques <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE formalisées dans ce chapitre 6. Cesrésultats concernant les cont<strong>en</strong>us et les processus stratégiques <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> sontintéressants pour le champ <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>s ONGE. Ils constitu<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s résultats376


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerintermédiaires pour abor<strong>de</strong>r le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et ses impacts sur les objetsécologiques visés, qui seront étudiés à partir d’une discussion sur la pratique <strong>de</strong> l’évaluation dansle chapitre 7. Ces élém<strong>en</strong>ts ont par ailleurs été utilisés dans la démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tionque nous avons m<strong>en</strong>é auprès <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Ce sera le second point <strong>de</strong> cette conclusion <strong>de</strong>chapitre.Caractérisation <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGENous avons donc étudié la planification stratégique pour le programme 2011-2015 qui a eu lieup<strong>en</strong>dant le temps <strong>de</strong> notre recherche <strong>en</strong> 2009 et 2010, ce qui nous a utilem<strong>en</strong>t donné à voircomm<strong>en</strong>t se posai<strong>en</strong>t les questions et comm<strong>en</strong>t l’organisation les pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> charge pourélaborer sa stratégie. La planification stratégique est apparue, comme nous l’annonçait A-C.Martinet (2001), comme un « espace-temps » pour rediscuter les voies <strong>de</strong> progrès quel’organisation perçoit pour r<strong>en</strong>forcer son action et, vue à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre cadre d’analyse, pourformaliser <strong>de</strong>s objectifs dans les quatre registres stratégiques (construction <strong>de</strong> l’objet écologique,mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, organisation <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces dans unedynamique <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t interne et conforter sa place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation).Pour pr<strong>en</strong>dre à nouveau les mots <strong>de</strong> l’auteur, « elle pousse les dirigeants et les cadres à pro<strong>du</strong>irecet effort dans une relative urg<strong>en</strong>ce sans pouvoir tirer prétexte <strong>de</strong>s tâches opérationnelles pourdifférer ou se cont<strong>en</strong>ter d'une réflexion stratégique superficielle. Elle peut ainsi permettre que seréalis<strong>en</strong>t les compromis et les arbitrages <strong>en</strong>tre le temps <strong>de</strong> l'action et le temps <strong>de</strong> la stratégie »(Martinet, 2001 : 188), le « temps <strong>de</strong> la stratégie » étant ici <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> comme le temps <strong>de</strong> laréflexion et <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie. Pourtant, dans son ouvrage critique sur la planificationstratégique, H. Mintzberg (1994) indique qu’un <strong>de</strong>s défauts <strong>de</strong> la planification rési<strong>de</strong> dans sesprocé<strong>du</strong>res lour<strong>de</strong>s. Elles domin<strong>en</strong>t le personnel qui se consacre à « l’analyse et trop peu auxidées stratégiques » (citant Wilson, 1994 : 13) et restreign<strong>en</strong>t la capacité à faire <strong>de</strong>s choixstratégiques. L’auteur parle <strong>en</strong> effet d’une certaine pratique <strong>de</strong> la planification basée sur <strong>de</strong>scalculs <strong>de</strong> budget d’investissem<strong>en</strong>t, sur <strong>de</strong>s jeux <strong>de</strong> cessions / acquisitions, négligeant souv<strong>en</strong>t ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s métiers, les aspects organisationnels et culturels : « la planification stratégiques’est vue ré<strong>du</strong>ite à la quantification <strong>de</strong>s objectifs comme moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> contrôle » (Mintzberg et al.,1999 : 61). Cep<strong>en</strong>dant, I. Wilson montre, déjà <strong>en</strong> 1994, par une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> 50 <strong>en</strong>treprises, que lapratique <strong>de</strong> la planification évolue vers <strong>de</strong>s approches intégrant les aspects organisationnels etculturels et étant moins détachées <strong>de</strong>s activités concrètes <strong>de</strong> la firme. Dans notre cas, nouspouvons ajouter que le faible formalisme <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res est <strong>en</strong> faveur d’une plus gran<strong>de</strong>réflexion stratégique. Nous suivons néanmoins Mintzberg (1994) lorsqu’il indique que la stratégie377


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal<strong>en</strong>e peut pas être créée que dans la planification, sans quoi il n’y aurait ni émerg<strong>en</strong>ce et niadaptation <strong>de</strong> la stratégie à <strong>de</strong>s situations d’action concrète.L’observation et l’analyse <strong>de</strong> la planification nous ont ainsi permis d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r plusprécisém<strong>en</strong>t (1) les processus qui s’y jou<strong>en</strong>t, (2) l’articulation <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts registres etdim<strong>en</strong>sions qui sous-t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t la stratégie générale <strong>de</strong> l’ONGE.1. Tout au long <strong>de</strong> ce chapitre, nous avons pu constater que nombre <strong>de</strong>s questions qui ont faitl’objet d’une prise <strong>en</strong> charge particulière p<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> planification n’étai<strong>en</strong>t pasnouvelles pour l’organisation, mais au contraire étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s « problèmes » <strong>de</strong> longue date. Laplanification stratégique est apparue comme étant un mom<strong>en</strong>t pour se conc<strong>en</strong>trer (à nouveau) sur<strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts non aboutis ou <strong>en</strong> susp<strong>en</strong>s, <strong>de</strong>vant être améliorés, dans le s<strong>en</strong>s où ils sont perçuscomme <strong>de</strong>s levier <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action. C’est globalem<strong>en</strong>t vrai pour la stratégied’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités, l’objectif étant <strong>de</strong> toujours progresser sur l’acquisition <strong>de</strong>sressources externes (financières, part<strong>en</strong>ariales). Mais c’est surtout dans la construction <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale que nous avons observé ce phénomène, avec le concept <strong>de</strong> « Gestionintégrée » dont la signification évolue <strong>en</strong> interne avec les progressions que l’organisation se fixe.En cela, la planification stratégique jalonne un processus d’amélioration qui court sur le longterme. Elle marque un temps d’arrêt réflexif où les membres <strong>de</strong> l’organisation, dirigeants etéquipes, se prêt<strong>en</strong>t à un bilan informel <strong>de</strong> l’avancée <strong>de</strong> l’organisation sur les questions <strong>de</strong> longterme évoquées. Ceci nous indique que les bilans réflexifs ne sont pas réservés aux procé<strong>du</strong>resd’évaluation. Cette discussion sera développée dans le prochain chapitre.2. L’analyse <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> nous a permis <strong>de</strong> repérer lesélém<strong>en</strong>ts et les dim<strong>en</strong>sions dont l’articulation fon<strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE. Ces t<strong>en</strong>sions sejou<strong>en</strong>t sur quatre axes.Dans les cas d’étu<strong>de</strong> développés dans la partie 2, nous avons montré que chaque action était lefruit d’une articulation <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions et <strong>de</strong>s capacités relevant <strong>de</strong>s quatre registres <strong>de</strong> notrecadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE) : laconstruction et la focalisation sur l’objet écologique à conserver, le mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, le développem<strong>en</strong>t interne et la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation. Nousavons retrouvé ces articulations dans les questions prises <strong>en</strong> charge par les membres <strong>de</strong> la TdV,dans les réflexions collectives, dans les critères <strong>de</strong> choix et les objectifs que l’organisation s’estdonnés au cours <strong>de</strong> cette planification stratégique.378


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcerDeuxièmem<strong>en</strong>t, nous avons pu observer que l’élaboration stratégique a une double finalitérévélant une t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE : une stratégied’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités, donc la finalité rési<strong>de</strong> dans le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t et la mise àdisposition <strong>de</strong> moy<strong>en</strong>s pour l’action pour laquelle la théorie <strong>de</strong>s ressources (Lorino & Taron<strong>de</strong>au,2006) nous a donné <strong>de</strong>s clés <strong>de</strong> lecture. Une stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, dont la finalitéest bi<strong>en</strong> la construction <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. C’est l’analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong><strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (Mermet et al., 2005) qui nous a permis d’<strong>en</strong> faire l’analyse. Ces <strong>de</strong>uxdim<strong>en</strong>sions augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités / action doiv<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> être cohér<strong>en</strong>tes pour fairet<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>semble les quatre registres stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE. La stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scapacités est notamm<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>sée par l’organisation dans le registre <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne,mais aussi au niveau <strong>de</strong> sa place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation dans la mesure où ses relationspeuv<strong>en</strong>t lui octroyer <strong>de</strong>s ressources supplém<strong>en</strong>taires dont elle a besoin dans la poursuite <strong>de</strong> sespropres objectifs (ressources informationnelles, compét<strong>en</strong>ces manquantes <strong>en</strong> interne à rechercherdans le part<strong>en</strong>ariat, etc.). La stratégie d’action est <strong>en</strong> revanche p<strong>en</strong>sée dans une t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre leregistre <strong>de</strong> la focalisation sur l’objet écologique à conserver et le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale(Figure 6.7).1. Objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talZHM2. Mo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleStratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale4. Réseaux etpart<strong>en</strong>ariat3.Développem<strong>en</strong>tinterneStratégied’augm<strong>en</strong>tations<strong>de</strong>s capacitésFigure 6.7 : Quatre registres et <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)Troisièmem<strong>en</strong>t, nous avons que vu que l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie se déroulait dans une t<strong>en</strong>sion<strong>en</strong>tre les échelles organisationnelles : celle <strong>de</strong>s actions et <strong>de</strong>s projets (échelle opérationnelle) etcelle l’organisation dans son <strong>en</strong>semble (Figure 6.8). Les problématiques sci<strong>en</strong>tifiques abordées etles actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales construites doiv<strong>en</strong>t être adaptées à un contexte bi<strong>en</strong> id<strong>en</strong>tifié et àune situation <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui doit être analysée. En cela, la construction <strong>de</strong> l’action ne peut se fairequ’au niveau opérationnel. Cep<strong>en</strong>dant, l’organisation est une <strong>en</strong>tité qui est égalem<strong>en</strong>t porteuse <strong>de</strong>379


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales<strong>en</strong>s dans son <strong>en</strong>semble. Ses responsables ont donc <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> s’assurer <strong>de</strong> la cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>sdiffér<strong>en</strong>ts compartim<strong>en</strong>ts opérationnels et <strong>de</strong> leur bonne articulation.Int<strong>en</strong>tionStratégie int<strong>en</strong>tionnelle /générale TdV(Plan stratégique)Stratégie int<strong>en</strong>tionnelle /opérationnelle (docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong>projet)NiveauorganisationNiveauopérationnelStratégie émerg<strong>en</strong>te/ générale TdV(Evolution <strong>du</strong> rôleet <strong>de</strong> la place <strong>de</strong> laTdV)Stratégie émerg<strong>en</strong>te /opérationnelle(mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>sprojets)Emerg<strong>en</strong>ceFigure 6.8 : Axes mis <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion dans l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)Dans cette même représ<strong>en</strong>tation schématique (Figure 6.8), nous observons un <strong>de</strong>uxième axe quisous-t<strong>en</strong>d l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie : l’axe int<strong>en</strong>tion – émerg<strong>en</strong>ce, qui est notre quatrième et<strong>de</strong>rnier point concernant la caractérisation <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et qui est sous-jac<strong>en</strong>t à sonélaboration. Rappelons que l’articulation <strong>en</strong>tre int<strong>en</strong>tion et émerg<strong>en</strong>ce est ce que l’organisationdoit assumer dans la mesure où elle est porteuse d’une mission, par rapport à laquelle elle doit sepositionner <strong>en</strong> formulant <strong>de</strong>s objectifs généraux pour l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong>s objectifsopérationnels à atteindre par la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s projets. Elle doit expliciter son int<strong>en</strong>tion. Plusprécisém<strong>en</strong>t, la planification stratégique est un mom<strong>en</strong>t particulier dans la construction <strong>de</strong> lastratégie qui est distinct <strong>de</strong> l’action, avec <strong>de</strong>s processus et <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res spécifiques (ce que nousavons vu dans ce chapitre). C’est le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction et <strong>de</strong> la fixation <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions.Mais la construction <strong>de</strong> la stratégie se poursuit dans la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions et <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t alorsun processus totalem<strong>en</strong>t mêlé à l’action (ce que nous avons vu dans la partie 2). En effet, lanature complexe <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong> conservation, la part d’imprévisibilité <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong>380


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer<strong>gestion</strong> influ<strong>en</strong>cées par <strong>de</strong> nombreux acteurs, les opportunités d’acquisitions <strong>de</strong> ressourcesstratégiques (déblocage <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>t, nouveaux part<strong>en</strong>aires stratégiques, accès à certainesinformations, etc.) sont autant d’élém<strong>en</strong>ts instables avec lesquels l’équipe doit composer dans laconstruction et la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s actions. Dans ce contexte, l’organisation a tout intérêt àlaisser un espace à l’émerg<strong>en</strong>ce. C’est ce que nous avons observé : la planification stratégique s’estappar<strong>en</strong>tée <strong>en</strong> plusieurs points à la création <strong>de</strong> conditions d’une émerg<strong>en</strong>ce stratégiquecanalisée.A partir <strong>de</strong> ce schéma (Figure 6.8), nous pouvons suivre la façon dont les actions ou lesproblématiques sci<strong>en</strong>tifiques et techniques investies se déplac<strong>en</strong>t sur les <strong>de</strong>ux axes. Ce cycle necorrespond pas strictem<strong>en</strong>t à la trajectoire <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> la TdV, mais il est cep<strong>en</strong>dantadapté aux thématiques les plus réc<strong>en</strong>tes comme le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la recherche sur l’<strong>en</strong>jeu« santé et conservation » au sein <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces qui était émerg<strong>en</strong>t dans le programme2006-2010 est aujourd’hui un projet au sta<strong>de</strong> « int<strong>en</strong>tionnel / opérationnel » sur notre figure.Autre exemple : le développem<strong>en</strong>t substantiel <strong>de</strong> l’OZHM (int<strong>en</strong>tionnel / opérationnel) se tra<strong>du</strong>itpar une rev<strong>en</strong>dication <strong>de</strong> ce champ d’action au niveau (int<strong>en</strong>tionnel / organisation TdV). Lat<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre l’int<strong>en</strong>tion et l’émerg<strong>en</strong>ce est inhér<strong>en</strong>te à la stratégie et a été largem<strong>en</strong>t traitée dansla littérature <strong>en</strong> stratégie (Jacobs & Statler, 2006). La perspective pratique <strong>de</strong> la stratégie(Golsorkhi, 2006 ; Rouleau et al., 2007a) nous a aidé à articuler l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pratiques au niveau <strong>de</strong>l’organisation dans son <strong>en</strong>semble et au niveau <strong>de</strong>s projets. Elle nous a égalem<strong>en</strong>t permis <strong>de</strong>contextualiser cette t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre int<strong>en</strong>tion et émerg<strong>en</strong>ce stratégique dans l’organisation, et <strong>de</strong>montrer que l’émerg<strong>en</strong>ce peut v<strong>en</strong>ir <strong>du</strong> niveau « organisation » comme <strong>du</strong> niveau opérationnel.L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>de</strong> l’ONGE dans une démarche <strong>de</strong> rechercheinterv<strong>en</strong>tionCette recherche doctorale ayant pour objectif <strong>de</strong> déterminer quel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique peutsout<strong>en</strong>ir le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans l’ONGE, fait clairem<strong>en</strong>tappel à une approche constructiviste <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction et <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s données. En effet, unraisonnem<strong>en</strong>t stratégique ne peut être p<strong>en</strong>sé <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> réelles. C’est pourrépondre à cet <strong>en</strong>jeu que nous avons fait le choix <strong>de</strong> m<strong>en</strong>er une recherche-interv<strong>en</strong>tion. Notreétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>de</strong> la TdV ayant eu lieu <strong>en</strong> 2009 et 2010, et la façon dontnous l’avons m<strong>en</strong>ée rappelle le « dispositif <strong>de</strong> recherche » <strong>de</strong> Girin (1990 : 166) dans le s<strong>en</strong>s oùnous nous sommes <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong>e avec le directeur <strong>de</strong> la TdV pour interv<strong>en</strong>ir dans un lieu et un cadre.381


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleNotre interv<strong>en</strong>tion ne se situe pas dans la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s cont<strong>en</strong>us stratégiques. Ce sont lesexperts <strong>de</strong> l’organisation qui, forts <strong>de</strong> leurs compét<strong>en</strong>ces que nous avons appelées « capacités »,« sci<strong>en</strong>tifiques et techniques » et « insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> » (voir la section 6.2.2),définiss<strong>en</strong>t le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie. Notre apport se situe plutôt au niveau <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong>réflexion stratégique, par une incitation à une plus gran<strong>de</strong> réflexivité et par la proposition <strong>de</strong>cadres sout<strong>en</strong>ant cette réflexion stratégique. Cette invitation à la réflexion se passe dans lesprocessus d’interaction même qui nous ont permis <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire ce que J. Girin appelle les« données chau<strong>de</strong>s » (Girin, 1987 : 170-171) : « <strong>de</strong>scriptions, témoignages, récits, jugem<strong>en</strong>ts, etc.,matériaux que l'on appelle parfois « élicités », c'est-à-dire dont la pro<strong>du</strong>ction a été provoquée parla recherche, et non pas objectivem<strong>en</strong>t disponibles » (Girin, 1990 : 164). Au cours <strong>de</strong> laplanification stratégique, les membres <strong>de</strong> l’organisation ont soulevé <strong>de</strong> nombreuses questions qu<strong>en</strong>ous avons consignées et adoptées comme notre questionnem<strong>en</strong>t propre. Pour pro<strong>du</strong>ire notreanalyse, nous avons suivi l’évolution <strong>de</strong> la réflexion sur chacune <strong>de</strong> ces questions ou sollicité lesmembres <strong>de</strong> manière à ce qu’ils aill<strong>en</strong>t le plus loin possible dans les réponses. Pour r<strong>en</strong>trer dans ladiscussion avec les membres <strong>de</strong> l’organisation, l’analyse <strong>de</strong>s actions concrètes était <strong>en</strong> outre unpréalable absolu. C’est par exemple <strong>en</strong> étudiant le cas <strong>du</strong> projet <strong>de</strong> GIZC au Maroc que nousavons <strong>en</strong>suite pu accompagner les membres <strong>de</strong> l’organisation dans la réflexion sur la <strong>gestion</strong>intégrée et sur les conditions selon lesquelles le concept pouvait être levier pour aller plus au<strong>de</strong>vant<strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective (voir la section 6.3.2, b). La proposition <strong>de</strong> cadres pouraccompagner la création <strong>de</strong> condition d’émerg<strong>en</strong>ce canalisée <strong>de</strong> la stratégie pour sa mise <strong>en</strong> œuvre se passedans la restitution <strong>de</strong>s analyses comme procédé <strong>de</strong> recherche et d’interv<strong>en</strong>tion. Il s’agitprincipalem<strong>en</strong>t d’échange avec la direction sur la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> cadrage <strong>du</strong>programme d’action quinqu<strong>en</strong>nal.Pour l’organisation, les principaux apports <strong>de</strong> la démarche se situ<strong>en</strong>t ainsi à <strong>de</strong>ux niveaux. D’unepart, dans le cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets (termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s projets utilisés par lesmembres <strong>de</strong> l’organisation, voir l’<strong>en</strong>cadré 6.1 à la section 6.3.2), nous avons intro<strong>du</strong>it unraisonnem<strong>en</strong>t stratégique qui incite à l’explicitation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation et <strong>de</strong> la stratégied’action (mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion pour pousser aux changem<strong>en</strong>ts nécessaires) construite à partird’un diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective (explicitation <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong>s ZH).L’explicitation <strong>de</strong>s stratégies ré<strong>du</strong>it les ambiguïtés causales, ce qui permettra plus tard <strong>de</strong> vérifierl’effectivité <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s établis, pour corriger ou poursuivre selon la logique d’essai-erreur que nousimposerait notre rationalité limitée.Plus près dans le temps, notre analyse <strong>de</strong> situations concrètes (Partie 2) et <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong>planification nous ont permis <strong>de</strong> repérer les zones d’ombre qui persist<strong>en</strong>t malgré les cadrages mis382


Chapitre 6 – Clarifier les stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale pour les r<strong>en</strong>forcer<strong>en</strong> place par l’organisation et l’avancem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa réflexion <strong>en</strong> différ<strong>en</strong>ts points. Il ne faut <strong>en</strong> effetpas confondre les espaces d’émerg<strong>en</strong>ce canalisée où les membres <strong>de</strong> l’équipe ont bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> tête lesincertitu<strong>de</strong>s qu’ils <strong>de</strong>vront gérer ou ré<strong>du</strong>ire, et les zones d’ombre qui peuv<strong>en</strong>t retomber dansl’oubli après avoir été repérées p<strong>en</strong>dant la planification stratégique. Ceci nous rappelle, à la suite<strong>de</strong> Mintzberg (1994), que la réflexion stratégique doit résolum<strong>en</strong>t se poursuivre après laplanification et r<strong>en</strong>voie une nouvelle fois à l’idée qu’elle a bi<strong>en</strong>, ou doit avoir, les traits d’unprocessus continu. Ces élém<strong>en</strong>ts ont été restitués aux membres <strong>du</strong> comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>l’organisation (direction et chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t), dans le cadre <strong>de</strong> séances <strong>de</strong> travail à l’occasion<strong>du</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> nouveau programme quinqu<strong>en</strong>nal.383


Chapitre 7Relier stratégie et impact écologique <strong>de</strong>s actions :l’évaluation comme mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la réflexionstratégique7.1 L’évaluation dans les pratiques à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> .............................................................. 3867.2 L’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques <strong>de</strong> l’action : <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong> l'organisation etréflexion stratégique........................................................................................................................ 3917.3 L’évaluation, autre « espace-temps » pour la réflexion stratégique ................................... 408« Il est plus que jamais ess<strong>en</strong>tiel et <strong>en</strong> même temps plus que jamais impossibleà l'indivi<strong>du</strong> d'aujourd'hui, au mom<strong>en</strong>t où il agit, <strong>de</strong> savoir ce qu'il fait et àquoi il contribue. Le s<strong>en</strong>s et la valeur <strong>de</strong> son action lui sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>usinaccessibles et impénétrables, puisqu'ils n'apparaiss<strong>en</strong>t, dans le meilleur <strong>de</strong>scas, que <strong>de</strong> façon différée et lointaine et seulem<strong>en</strong>t à un niveau qui ne peut êtreque celui <strong>de</strong> l'<strong>en</strong>semble dont il fait partie, sous une forme dans laquelle il lui estgénéralem<strong>en</strong>t impossible <strong>de</strong> reconnaître son apport personnel. »L'homme improbable, Bouveresse, 1993Pour abor<strong>de</strong>r cet ultime chapitre, pr<strong>en</strong>ons le temps <strong>de</strong> rappeler la position adoptée vis-à-vis <strong>de</strong> laproblématique <strong>du</strong> li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre la stratégie développée par l’ONGE et l’impact <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tionssur l’objet écologique visé. Plutôt que <strong>de</strong> s’attaquer directem<strong>en</strong>t au défi méthodologique <strong>de</strong>l’évaluation – aux difficultés pour évaluer les résultats <strong>de</strong>s actions d’un acteur lambda (l’ONGE)sur <strong>de</strong>s problèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux complexes dans un système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> complexe – nous385


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleavons choisi <strong>de</strong> nous conc<strong>en</strong>trer sur sa dim<strong>en</strong>sion stratégique. Il s’agissait alors <strong>de</strong> répondre à laquestion suivante : comm<strong>en</strong>t la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s causaux <strong>en</strong>tre la stratégie mise <strong>en</strong> œuvre et lesimpacts sur le terrain peut ai<strong>de</strong>r l’organisation dans sa réflexion stratégique pour r<strong>en</strong>forcer sesactions ? Pour cela, il nous fallait repartir plus <strong>en</strong> amont et étudier la façon dont l’organisationconstruit sa stratégie et met <strong>en</strong> œuvre ses actions. Ce n’est qu’après avoir découvert la stratégie etsa tra<strong>du</strong>ction <strong>en</strong> actions à travers <strong>de</strong>s situations concrètes (Partie 2) et étudié la construction <strong>de</strong> lastratégie (Partie 2 et Chapitre 6), que nous pouvons replacer l’évaluation <strong>de</strong>s impacts dans leprocessus continu <strong>de</strong> la réflexion stratégique à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation.Le terme d’évaluation ne r<strong>en</strong>voie pas seulem<strong>en</strong>t à la dim<strong>en</strong>sion réflexive <strong>de</strong>s processusstratégiques, loin s’<strong>en</strong> faut. L’évaluation est égalem<strong>en</strong>t une procé<strong>du</strong>re spécifique qui se généralisedans tous les types d’organisations et qui représ<strong>en</strong>te une forme <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> l’organisation parses mandants. A partir <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pratiques d’évaluation à la TdV, nous allons maint<strong>en</strong>antnous attacher à dénouer les fils <strong>de</strong> ces interrelations pour poursuivre notre cheminem<strong>en</strong>t attachéà la découverte et au développem<strong>en</strong>t d’un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique utile aux ONGE.7.1 L’évaluation dans les pratiques à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>L’évaluation est aujourd’hui omniprés<strong>en</strong>te dans les pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> tout typed’organisations, qu’elles soi<strong>en</strong>t publiques ou privées et à toutes les échelles d’organisation etd’action. Ses formes et ses fonctions sont aussi variées que les champs ou secteurs d’activité danslesquels elle est pratiquée. M. Hurteau et S. Houle (2005) propos<strong>en</strong>t une définition <strong>de</strong> l’évaluation<strong>en</strong> synthétisant celles que l’on trouve chez les pères <strong>de</strong> la discipline (Patton, 2001 ; Scriv<strong>en</strong>, 2001 ;Stake, 2004 ; Weiss, 1997) : « l'évaluation <strong>de</strong> programme s'inscrit dans une perspective <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Elle consiste <strong>en</strong> une cueillette systématique <strong>de</strong> données ayant pour objet d'étu<strong>de</strong> le programme(système <strong>de</strong> rétroactions) <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> porter un jugem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> valeur qui con<strong>du</strong>ira à <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong>décisions concernant sa programmation future. La notion <strong>de</strong> jugem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> valeur (juger <strong>de</strong> lavaleur <strong>de</strong> – évaluer) s'avère particulièrem<strong>en</strong>t importante parce qu'elle caractérise l'évaluation et luipermet <strong>de</strong> se distinguer <strong>de</strong> toute autre forme d'<strong>en</strong>quête <strong>en</strong> adoptant un schème <strong>de</strong> raisonnem<strong>en</strong>tqui lui est propre » (Hurteau & Houle, 2005).La TdV est, comme la plupart <strong>de</strong>s ONGE, soumise à <strong>de</strong>s évaluations externes lorsqu’ellebénéficie <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts gérés par <strong>de</strong>s bailleurs institutionnels. Ces évaluations vis<strong>en</strong>tprincipalem<strong>en</strong>t à vérifier le respect <strong>de</strong>s allocations budgétaires prévues et <strong>du</strong> cal<strong>en</strong>drier <strong>de</strong> mise <strong>en</strong>386


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueœuvre <strong>de</strong>s activités indiquées dans le docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet (TdV, com.pers., 2009 ; voir Chapitre4). Il s’agit d’une forme <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> exercée par le bailleur institutionnel mais l’apport<strong>de</strong> ces procé<strong>du</strong>res – <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> réflexion, <strong>de</strong> recul pour la con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> projet – pourl’organisation porteuse <strong>du</strong> projet reste faible (TdV, com.pers., 2009) <strong>en</strong> raison <strong>de</strong> leur fortestandardisation ne t<strong>en</strong>ant pas compte <strong>de</strong> la spécificité <strong>de</strong> chaque organisation (Jepson, 2005). Lapauvreté <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts apportés par ces évaluations <strong>en</strong> termes d’analyse <strong>du</strong> projet etd’appréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> ses impacts réels sont soulevés par les bailleurs institutionnels eux-mêmes(Vaess<strong>en</strong> & Todd, 2008 203 ) qui sembl<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre timi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la nécessitéd’améliorer ces procé<strong>du</strong>res (Journée débat FFEM-CI, 2009).Par son activité sci<strong>en</strong>tifique, la TdV est égalem<strong>en</strong>t soumise aux évaluations qui régiss<strong>en</strong>t lefonctionnem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> secteur <strong>de</strong> la recherche. La diffusion <strong>de</strong>s savoirs pro<strong>du</strong>its passe <strong>en</strong> effetprincipalem<strong>en</strong>t par la publication d’articles sci<strong>en</strong>tifiques dans <strong>de</strong>s revues à comité <strong>de</strong> lecture –chaque pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique est donc évaluée par les pairs. Ces revues sont elles-mêmesclassées, ce classem<strong>en</strong>t constitue les « standards » (Scriv<strong>en</strong>, 1980 204 ) qui est aujourd’hui un <strong>de</strong>scritères <strong>de</strong> jugem<strong>en</strong>t prépondérant <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique (Matzkin, 2009). Ces formesd’évaluation externes particip<strong>en</strong>t à l’insertion <strong>de</strong> l’organisation dans le secteur <strong>de</strong> la recherche – cequi est important dans le modèle français où les organismes <strong>de</strong> recherche reconnus sontprincipalem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s institutions publiques – et plus spécifiquem<strong>en</strong>t dans les communautéssci<strong>en</strong>tifiques que la TdV cherche à investir.Nous t<strong>en</strong>ons à évoquer ici ces formes d’évaluation seulem<strong>en</strong>t pour rappeler que la pratique <strong>de</strong>l’évaluation est loin d’être une affaire interne <strong>de</strong> l’organisation, mais que cette <strong>de</strong>rnière se meut aucontraire dans un espace sociopolitique imprégné <strong>de</strong> cette « idéologie » (Zarka 205 , 2009 ; Busson-Villa, 1999 ; Duran, 1999). Dans ce chapitre, c’est avant tout sur la pratique interne <strong>de</strong>203 « Rec<strong>en</strong>t studies have pointed out the lack of information on impact in existing <strong>en</strong>d-of-project evaluations (GEF,2004, 2005). In addition, the same studies have reported that in g<strong>en</strong>eral projects do not have a<strong>de</strong>quate (standardized)reporting systems on biodiversity impact data ».204 Scriv<strong>en</strong> (1980) définit l'acte spécifique d'évaluer selon une logique compr<strong>en</strong>ant quatre opérations : 1. Établir lescritères (les élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l'objet qui seront évalués) ; 2. Élaborer les standards (le point <strong>de</strong> coupure <strong>en</strong>tre un jugem<strong>en</strong>tfavorable et un jugem<strong>en</strong>t défavorable) ; 3. Mesurer la performance et la mettre <strong>en</strong> relation avec les standards ; 4.Synthétiser et intégrer les données pour <strong>en</strong>suite porter un jugem<strong>en</strong>t.205 « Le terme « idéologie » est à pr<strong>en</strong>dre au s<strong>en</strong>s qu'il a acquis <strong>de</strong>puis Marx : une vision <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> ou, plusmo<strong>de</strong>stem<strong>en</strong>t, une représ<strong>en</strong>tation illusoire qui transforme et même inverse la réalité et qui, pourtant, suscite lacroyance ou l'adhésion. La réalité n'est pas ici simplem<strong>en</strong>t locale. Elle concerne l'<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s pratiques et <strong>de</strong>sactivités qui s'inscriv<strong>en</strong>t dans les institutions, les organismes, les établissem<strong>en</strong>ts publics ou privés. L'idéologie <strong>de</strong>l'évaluation se répand comme une traînée <strong>de</strong> poudre. Elle se déploie partout, aussi loin qu'il est possible d'aller. Ell<strong>en</strong>e connaît pas <strong>de</strong> limite, ni d'âge (on évalue les <strong>en</strong>fants <strong>en</strong> maternelle), ni <strong>de</strong> secteur (l'<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t, la recherche, laculture, l'art, etc., y sont soumis), pas même les dim<strong>en</strong>sions les plus retirées <strong>de</strong> la personnalité, voire <strong>de</strong> l'intimité, <strong>de</strong>sacteurs n'y échapp<strong>en</strong>t. Ainsi l'hôpital, la justice, l'école, les universités, les institutions <strong>de</strong> recherche, les pro<strong>du</strong>ctionsculturelles, l'accréditation <strong>de</strong> formes d'art, les politiques publiques sont investies par l'idéologie <strong>de</strong> l'évaluation »(Zarka, 2009 : 3).387


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talel’évaluation que nous allons nous focaliser, pour poursuivre notre analyse <strong>de</strong> la réflexionstratégique.La <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> a mis <strong>en</strong> place une procé<strong>du</strong>re d’évaluation dans le courant <strong>de</strong>s années 1990.Rappelons que le souci <strong>du</strong> fondateur Luc Hoffmann était <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> l’organisation un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong>recherche reconnu pour sa qualité sci<strong>en</strong>tifique (Chapitre 6), c’est une <strong>de</strong>s raisons pour laquelle ils’était <strong>en</strong>touré d’un conseil sci<strong>en</strong>tifique composé <strong>de</strong> grands noms <strong>de</strong> l’écologie et <strong>du</strong> domaine <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s. P<strong>en</strong>dant cette déc<strong>en</strong>nie, l’influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t sociopolitique et lagénéralisation <strong>de</strong> la logique évaluative notamm<strong>en</strong>t véhiculée par les membres anglo-saxons <strong>de</strong> sonconseil sci<strong>en</strong>tifique, « le goût <strong>de</strong> l’innovation <strong>du</strong> fondateur » et « sa volonté <strong>de</strong> formaliser les processus <strong>de</strong>décision dans la perspective <strong>de</strong> son retrait progressif » sont les principaux facteurs qui ont conjointem<strong>en</strong>taboutis à la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> l’évaluation à la TdV (Direction, com.pers., 2010). La procé<strong>du</strong>re estréajustée à chaque cycle, mais la formule actuelle, adossée à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s plansquinqu<strong>en</strong>naux, a été rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t mise au point dès le plan 2001-2005. Elle est composée <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxétapes :1. « L’évaluation à mi-parcours est stratégique et prospective. Elle doit permettre uneréori<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> programme <strong>en</strong> cours, et le cas échéant, ai<strong>de</strong>r à préparer le programmequinqu<strong>en</strong>nal à v<strong>en</strong>ir ». Cette évaluation a principalem<strong>en</strong>t 4 objectifs : « 1. évaluer la mise <strong>en</strong>oeuvre et les résultats <strong>du</strong> programme <strong>en</strong> cours au regard <strong>de</strong>s att<strong>en</strong>tes, <strong>de</strong> la mission et <strong>de</strong>sobjectifs fixés ; 2. évaluer qualitativem<strong>en</strong>t et quantitativem<strong>en</strong>t la pro<strong>du</strong>ction (notamm<strong>en</strong>tsci<strong>en</strong>tifique) au regard <strong>de</strong>s investissem<strong>en</strong>ts (budget), <strong>de</strong> l’organisation interne et <strong>du</strong> temps allouésau projet ; 3. faire <strong>de</strong>s propositions pour abor<strong>de</strong>r le plan quinqu<strong>en</strong>nal suivant <strong>en</strong> termes <strong>de</strong>cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> projets, <strong>de</strong> structuration générale <strong>du</strong> programme et <strong>de</strong>s domaines à investir ; 4.évaluer la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la structure et <strong>du</strong> mo<strong>de</strong> d’organisation actuels par rapport à nos objectifset les changem<strong>en</strong>ts à <strong>en</strong>visager » (Termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’évaluation à mi-parcours, docum<strong>en</strong>tinterne, 2008).2. « L’évaluation finale a pour but <strong>de</strong> faire le bilan <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> programme ».Elle doit égalem<strong>en</strong>t remplir 4 objectifs dont les <strong>de</strong>ux premiers sont id<strong>en</strong>tiques à ceux <strong>de</strong>l’évaluation à mi-parcours. Le troisième objectif <strong>de</strong> cette évaluation finale est d’ « évaluer l’impact<strong>du</strong> programme sur la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et la <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>rable <strong>de</strong>sa biodiversité [objectif que nous discuterons amplem<strong>en</strong>t dans ce chapitre] ; et le quatrièmeconsiste à « évaluer la politique <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> fonds extérieurs et ses résultats » (Terme <strong>de</strong>référ<strong>en</strong>ce Evaluation finale, docum<strong>en</strong>t interne, 2010).388


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueLes évaluations ont pour rôle <strong>de</strong> mettre à disposition <strong>du</strong> conseil sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>tstangibles pour que celui-ci puisse suivre, juger et sout<strong>en</strong>ir l’activité <strong>de</strong> la TdV, notamm<strong>en</strong>t larecherche sci<strong>en</strong>tifique. On remarque aussi ue les évaluations s’inscriv<strong>en</strong>t dans le cycle <strong>du</strong> planquinqu<strong>en</strong>nal, t<strong>en</strong>ant alors un rôle dans le registre <strong>de</strong> la programmation. Etant donnée la naturetrès spécialisée <strong>de</strong> l’activité sci<strong>en</strong>tifique, on compr<strong>en</strong>d que tout ce qui a trait à la programmationne peut être p<strong>en</strong>sé sans la participation <strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques eux-mêmes. En cela, la procé<strong>du</strong>red’évaluation est d’abord une pratique qui concerne l’équipe elle-même 206 . La mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>l’évaluation se déroule selon une procé<strong>du</strong>re hiérarchique : toute l’équipe reçoit les termes <strong>de</strong>référ<strong>en</strong>ce qui lui parvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la direction (ils sont préalablem<strong>en</strong>t validés <strong>en</strong> comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>,i.e. avec les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>ts). Chaque chef <strong>de</strong> projet doit se livrer à l’auto-évaluation <strong>de</strong> sonprojet, év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faisant appel aux personnes qui y ont contribué (nous avons puobserver que les évaluations suscitai<strong>en</strong>t peu le travail collectif). Les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>tcoordonn<strong>en</strong>t ces auto-évaluations et dress<strong>en</strong>t le bilan pour leur départem<strong>en</strong>t respectif. Ceciimplique <strong>de</strong>s échanges avec leurs subordonnés d’un côté, et avec la direction (Directeur <strong>du</strong>programme) <strong>de</strong> l’autre côté. La direction est <strong>en</strong>fin responsable <strong>de</strong> l’analyse globale <strong>de</strong>s autoévaluationset <strong>de</strong> la réalisation d’un bilan à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation. Une fois ce travail réalisé, laprocé<strong>du</strong>re passe dans sa phase externe : la synthèse <strong>de</strong> l’auto-évaluation (un rapport d’unec<strong>en</strong>taine <strong>de</strong> pages) est adressée à un panel d’évaluateurs qui auditionne égalem<strong>en</strong>t les chefs <strong>de</strong>projet avant d’élaborer son rapport d’évaluation <strong>de</strong>stiné au Conseil sci<strong>en</strong>tifique. Le panel estconstitué <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>tifiques et experts <strong>de</strong>s ZHM, choisis préalablem<strong>en</strong>t sur proposition <strong>de</strong> ladirection et <strong>du</strong> CS et suite à la validation <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance (CS, Bureau et CA).Cette <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s pratiques spécifiques <strong>de</strong> l’évaluation suivies par la TdV nous permettrad’ancrer l’analyse <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>jeux dans une situationconcrète, avec <strong>de</strong>s implications concrètes, qui sont celles <strong>de</strong> la TdV. La situation que nous avonsobservée est justem<strong>en</strong>t sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>e par l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM : c’est lavolonté <strong>de</strong> progresser dans l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui <strong>en</strong>traîne l’évolution <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong>l’évaluation. Repr<strong>en</strong>ons la perspective historique amorcée plus haut : le conseil sci<strong>en</strong>tifique et lamise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s évaluations émanai<strong>en</strong>t tout d’abord <strong>de</strong> la volonté d’asseoir la qualité sci<strong>en</strong>tifique206 Cette pratique <strong>de</strong> l’évaluation par les équipes elles-mêmes se distingue <strong>de</strong>s évaluations ponctuelles qui peuv<strong>en</strong>têtre sollicitées par les organisations pour s’<strong>en</strong>gager dans un changem<strong>en</strong>t majeur ou pour trouver <strong>de</strong>s solutions à unesituation <strong>de</strong> crise. Ces évaluations sont généralem<strong>en</strong>t réalisées par <strong>de</strong>s bureaux d’étu<strong>de</strong>s spécialisés. Le statut externe<strong>de</strong>s évaluateurs est un caractère recherché dans ces situations <strong>de</strong> blocage interne (Directrice UICN Med, com.pers.,2008 ; TdV, com.pers., 2008). Les différ<strong>en</strong>tes métho<strong>de</strong>s d’évaluation <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s att<strong>en</strong>tes sont très étudiées (e.g.Bickman, 1997 ; Fetterman, 1996) et constitu<strong>en</strong>t la branche <strong>de</strong> l’ « utilisation » <strong>de</strong> la classification <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>l’évaluation <strong>de</strong> Alkin (2004) (les trois branches sont : use, valuing, method).389


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>de</strong> la recherche <strong>de</strong> la TdV. La procé<strong>du</strong>re d’évaluation développée est proche <strong>de</strong> celle qui était 207pratiquée dans les institutions <strong>de</strong> recherche publiques françaises, et se focalisait principalem<strong>en</strong>tsur la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique. Or, la mission <strong>de</strong> la TdV étant l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s ZHM,ses acteurs – notamm<strong>en</strong>t la direction – att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance un souti<strong>en</strong> plusfort dans l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> ses actions : <strong>de</strong> la recherche sci<strong>en</strong>tifique à toutes les autres formesd’action pour la conservation. Pour que le CS se focalise moins strictem<strong>en</strong>t sur la pro<strong>du</strong>ctionsci<strong>en</strong>tifique, l’idée a été <strong>de</strong> lui fournir davantage d’élém<strong>en</strong>ts sur lesquels il peut réagir et <strong>de</strong>substance à laquelle il peut apporter son appui.Dans le même temps, le retrait progressif <strong>du</strong> fondateur Luc Hoffmann était comp<strong>en</strong>sé par uneparticipation <strong>de</strong> plus <strong>en</strong> plus importante et ferme <strong>de</strong> son fils André Hoffmann, <strong>en</strong> tant quemembre fondateur <strong>du</strong> conseil d’administration, membre <strong>du</strong> Bureau (et par ailleurs, membre <strong>du</strong>Conseil d’administration <strong>de</strong> la Fondation MAVA). D’un fondateur, naturaliste, visionnaire etultime déci<strong>de</strong>ur au sein <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance, qui a lui-même bâti son organisation au fil<strong>du</strong> temps, à son fils, <strong>gestion</strong>naire <strong>de</strong> fortunes et d’<strong>en</strong>treprises, qui veut faire per<strong>du</strong>rer l’œuvre <strong>de</strong>son père, mais avec une idée plus précise <strong>de</strong> l’efficacité et <strong>de</strong> la bonne <strong>gestion</strong>, les rapports <strong>de</strong>l’organisation interne à sa gouvernance se sont modifiées. Désormais, la TdV est dansl’incertitu<strong>de</strong> quant à la façon dont les héritiers Hoffmann continueront à sout<strong>en</strong>ir l’organisation(ainsi que l’approvisionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s fonds MAVA). Dans ce contexte, les procé<strong>du</strong>res parlesquelles l’organisation r<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s comptes à ses administrateurs, qui ont longtemps été <strong>de</strong> simplesformalités statutaires, peuv<strong>en</strong>t parfois pr<strong>en</strong>dre un aspect plus décisif (Direction TdV, com.pers.,2008-2010).C’est dans ce contexte que l’organisation interne a fait <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>termes d’état écologique <strong>de</strong>s ZH un <strong>en</strong>jeu à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge.« La mission <strong>de</strong> la TdV est une mission <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM. Même si cela passe par le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sconnaissances – c’est le positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV et c’est un domaine d’action que nous jugeons utile – on ne peutpas se cont<strong>en</strong>ter d’évaluer la recherche. Il faut évaluer l’apport <strong>de</strong> notre action pour les ZH et leur biodiversité.Mais comm<strong>en</strong>t faire ? Car la plupart <strong>de</strong> nos actions ne sont pas directes sur les ZH » (TdV, com.pers., 2008).Evaluer l’impact écologique sur les ZHM <strong>de</strong> ses actions indirectes dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>complexes où elle intervi<strong>en</strong>t apparaissait comme un problème insoluble. Le directeur <strong>de</strong> la TdV aaccueilli favorablem<strong>en</strong>t l’idée d’<strong>en</strong> faire l’objet d’un travail académique pouvant – nous l’espérons207 Les procé<strong>du</strong>res d’évaluation ont évolué <strong>de</strong>puis la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> l’Ag<strong>en</strong>ce nationale <strong>de</strong> la recherche (ANR) et <strong>de</strong>l’Ag<strong>en</strong>ce d’évaluation <strong>de</strong> la recherche et <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t supérieur (AERES) (Matzkin, 2009 ; Evaluateurs TdV,com.pers., 2008).390


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégique– apporter <strong>de</strong>s éclairages susceptibles d’ai<strong>de</strong>r l’organisation à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les implications <strong>de</strong>l’évaluation <strong>de</strong> ses actions et à avancer dans cette direction. Pour contourner l’appar<strong>en</strong>teinsolubilité <strong>du</strong> problème <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques <strong>de</strong> l’action, nous nous sommesattachée à interroger la finalité <strong>de</strong> cet exercice. Ce faisant, nous avons replacé le problème <strong>de</strong> larelation <strong>de</strong> cause à effet « stratégie / action / impact » dans le problème plus large <strong>de</strong> la façondont on peut r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Comme nous l’avonsannoncé, c’est <strong>en</strong> la considérant comme une pratique spécifique qui jalonne le processus continu<strong>de</strong> réflexion stratégique que nous abordons ici l’évaluation.Cette partie <strong>du</strong> terrain relative à l’évaluation n’a pas été <strong>en</strong>visagée <strong>de</strong> façon indép<strong>en</strong>dante, mais aucontraire <strong>en</strong> complém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> la planification stratégique, dans une seule et mêmedémarche <strong>de</strong> recherche à l’échelle <strong>de</strong> l’organisation. Les métho<strong>de</strong>s d’<strong>en</strong>quête et d’analyse ancréedans les pratiques, les questionnem<strong>en</strong>ts propres <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> la façon dont elle lespr<strong>en</strong>d <strong>en</strong> charge (ce à quoi nous avons participé par le procédé <strong>de</strong> la restitution) ont été détailléesdans la première section <strong>du</strong> précéd<strong>en</strong>t chapitre 208 .7.2 L’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques <strong>de</strong> l’action : <strong>en</strong>trecontrôle <strong>de</strong> l’organisation et réflexion stratégiqueNous avons intro<strong>du</strong>it ce chapitre <strong>en</strong> soulevant la nature double <strong>de</strong> l’évaluation : un exerciceréflexif qui concerne avant tout les pratici<strong>en</strong>s eux-mêmes, pouvant <strong>en</strong> cela être sout<strong>en</strong>us par uneprocé<strong>du</strong>re d’évaluation externe ; et une procé<strong>du</strong>re managériale, visant à contrôler la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong>s actions et l’atteinte <strong>de</strong>s objectifs. Dans cette section, nous allons exposer l’articulation<strong>en</strong>tre ces <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions dans la pratiques <strong>de</strong> l’évaluation et nous conc<strong>en</strong>trer plus largem<strong>en</strong>t sursa dim<strong>en</strong>sion réflexive.7.2.1 Un nouveau cadre d’évaluation pour évaluer les actions au regard <strong>de</strong>sobjectifs écologiquesDans l’objectif <strong>de</strong> progresser sur l’évaluation <strong>de</strong> ses impacts sur les ZH, la direction a jugéopportun <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> la dynamique initiée par la planification pour proposer ce cadred’évaluation am<strong>en</strong>dé, dans la suite logique <strong>du</strong> nouveau cadre <strong>de</strong> construction que l’équipe v<strong>en</strong>ait208 Section 6.1 <strong>du</strong> chapitre 6 : Démarche et métho<strong>de</strong> pour <strong>en</strong>visager la réflexion stratégique à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.391


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>de</strong> s’approprier. De plus, ce travail n’est pas une opération particulière et indép<strong>en</strong>dante, mais bi<strong>en</strong>au contraire une <strong>de</strong>s questions à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> main <strong>en</strong> parallèle <strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> programmepour élaborer un cadre d’évaluation adapté. Il doit aussi être relié à l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s démarchesvisant à clarifier les <strong>en</strong>jeux <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et à construire <strong>de</strong>s projets dont les objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et la stratégie d’action serai<strong>en</strong>t plus explicites 209 . Ainsi, le cadre d’évaluation <strong>du</strong>programme a été rep<strong>en</strong>sé dans une dynamique solidaire <strong>de</strong> la révision <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong>s projets <strong>en</strong>2009 et 2010 210 : le travail, auquel nous avons participé, a été piloté au niveau <strong>de</strong> la direction qui aétabli le cadrage avant <strong>de</strong> le soumettre à la discussion au sein <strong>de</strong> son comité <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (avec leschefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t).Les termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s évaluations <strong>de</strong> programme (mi-parcours et finale) comport<strong>en</strong>tdiffér<strong>en</strong>tes rubriques qui r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à l’action mise <strong>en</strong> œuvre (évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action :résultats, pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique, etc.), mais aussi à l’utilisation <strong>de</strong>s ressources (évaluation <strong>de</strong> lastratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités : développem<strong>en</strong>t et mobilisation <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat, <strong>gestion</strong> <strong>du</strong>budget, etc.). A la suite <strong>de</strong> la réflexion sur ce sujet à laquelle nous avons pris part, le principalam<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>t porté au cadre <strong>de</strong> l’évaluation est celui <strong>de</strong> la rubrique <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’action. Elleest désormais déclinée <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact partant <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal qui constituel’objectif ultime <strong>de</strong> l’action et le repère pour analyser les projets (état matériel <strong>de</strong>s espèces ouécosystèmes visés), à la dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’action qui est la plus éloignée <strong>du</strong> terrain (la pro<strong>du</strong>ctionsci<strong>en</strong>tifique et technique <strong>en</strong> interne), <strong>en</strong> passant par les changem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> pratiques att<strong>en</strong><strong>du</strong>s dans la<strong>gestion</strong>. Tout au long <strong>du</strong> texte, nous ferons souv<strong>en</strong>t référ<strong>en</strong>ce à ces cinq niveaux d’impacts dontle détail est prés<strong>en</strong>té dans l’<strong>en</strong>cadré 7.1 ci-<strong>de</strong>ssous.Encadré 7.1 : Evolution <strong>du</strong> cadre d’évaluation <strong>du</strong> programme (Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010 : 30)Suivi et évaluation <strong>du</strong> programmeCritères dévaluationLévaluation <strong>de</strong> notre impact se fera sur la base <strong>de</strong> cinq critères principaux, dans lordre décroissantsuivant :1. Statut <strong>de</strong>s populations/communautés/écosystèmes ciblés dans le programme ;2. Changem<strong>en</strong>ts dattitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> pratiques constatés (suite à une action directe <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>ou via <strong>de</strong>s groupes/part<strong>en</strong>aires cibles) ;3. Intérêt, prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> nos résultats par les cibles (par exemple politiques favorables auxzones humi<strong>de</strong>s adoptées avec une contribution <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, sollicitations <strong>de</strong> lexpertise <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong><strong>du</strong> <strong>Valat</strong>...) ;4. Transfert <strong>de</strong>s résultats réalisés (formation, vulgarisation, diffusion) :• vulgarisation <strong>de</strong> docum<strong>en</strong>ts sci<strong>en</strong>tifiques,• activités <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités et résultats (formation – assistance à <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong>prise <strong>de</strong> décision) à différ<strong>en</strong>tes échelles spatiales, notamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Camargue et dans la région209 Voir la section 6.3.1 sur les efforts pour expliciter davantage les choix d’objectif écologique, Chapitre 6.210 Voir l’Encadré 6.1 concernant les nouveaux termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s projets, Chapitre 6.392


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueméditerrané<strong>en</strong>ne,• caractère innovant, expérim<strong>en</strong>tal, résolum<strong>en</strong>t mo<strong>de</strong>rne <strong>de</strong>s approches mises <strong>en</strong> œuvre,• formation <strong>de</strong>s jeunes chercheurs (Masters, thésards et post-doctorats) ;5. Pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique ou technique :• nombre et qualité <strong>de</strong>s publications (facteur dimpact).Lévaluation <strong>de</strong> leffort se fera quant à lui sur base <strong>de</strong>s critères suivants :6. Part<strong>en</strong>ariats et réseaux : Evaluation <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s établis par le projet/programme avec <strong>de</strong>s personnes,institutions ou réseaux travaillant sur <strong>de</strong>s thèmes similaires <strong>en</strong> Méditerranée ou ailleurs, ainsi que <strong>de</strong> lavaleur ajoutée <strong>de</strong> ces collaborations ;7. Participation à <strong>de</strong>s projets nationaux et internationaux ;8. Ressources <strong>en</strong> personnels et <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>s financiers : le budget initial (personnels, investissem<strong>en</strong>ts) a-tilété respecté, <strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> matière <strong>de</strong> dép<strong>en</strong>ses et <strong>de</strong> collecte <strong>de</strong> fonds extérieurs ?[Motivations et explications <strong>de</strong> cette évolution]Jusquà prés<strong>en</strong>t, le plus souv<strong>en</strong>t, lévaluation <strong>de</strong> nos résultats a été limitée aux niveaux 5 ou 4(pro<strong>du</strong>ction) ; dans la perspective <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, cest le niveau 1 qui doit être visé <strong>en</strong>priorité.Leffort doit donc principalem<strong>en</strong>t porter sur le développem<strong>en</strong>t dindicateurs attachés aux impacts <strong>de</strong>sprojets sur la biodiversité ou les pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (niveaux 1 et 2 ci-<strong>de</strong>ssus). Des indicateurs à <strong>de</strong>sniveaux inférieurs seront égalem<strong>en</strong>t ret<strong>en</strong>us mais <strong>en</strong> nombre limité <strong>en</strong> veillant à la plus gran<strong>de</strong>pertin<strong>en</strong>ce.Lévaluation <strong>de</strong> limpact doit se faire <strong>en</strong> priorité au niveau <strong>de</strong>s projets. Elle implique davoir très clairem<strong>en</strong>tid<strong>en</strong>tifié pour chaque projet les causes <strong>de</strong> dégradation, les processus <strong>en</strong> cours et les facteurs <strong>de</strong>blocage, les acteurs clés, ainsi que les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> les atteindre et <strong>de</strong> faire changer leurs pratiques.Enfin <strong>de</strong>s indicateurs dimpact seront égalem<strong>en</strong>t recherchés au niveau <strong>du</strong> programme – <strong>en</strong> complém<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction suivis jusquà prés<strong>en</strong>t – afin <strong>de</strong> mesurer latteinte <strong>de</strong>s cinq objectifs ret<strong>en</strong>uspour le programme 2011-2015.Ce nouveau cadre d’évaluation a déjà été testé. Il a <strong>en</strong> effet été utilisé par l’équipe et la direction,puis par les organes <strong>de</strong> gouvernance <strong>de</strong> la TdV, pour l’évaluation <strong>du</strong> programme 2006-2010 qui aeu lieu <strong>en</strong> 2010. Il a reçu un bon accueil, autant <strong>du</strong> côté <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance que <strong>de</strong>séquipes.Du côté <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance, cette évaluation a donné satisfaction tant dans les cont<strong>en</strong>usqu’elle a permis <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> perspective :« The Sci<strong>en</strong>tific Council [CS] conclu<strong>de</strong>d that <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> had ma<strong>de</strong> very good progressover the course of the five year programme and congratulated managem<strong>en</strong>t and staff fortheir significant achievem<strong>en</strong>ts » ;que dans les efforts porté à l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation :« The [CS] <strong>de</strong>bated at l<strong>en</strong>gth the importance of building on this impressive sci<strong>en</strong>ceperformance to explore how <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>’s impact on conservation issues can beincreased. In doing so the [CS] complem<strong>en</strong>ted managem<strong>en</strong>t and staff for the impactanalysis that had be<strong>en</strong> con<strong>du</strong>cted and inclu<strong>de</strong>d in the final evaluation » (Rapport <strong>du</strong>Conseil sci<strong>en</strong>tifique 2010, docum<strong>en</strong>t interne, 2010).De tels comm<strong>en</strong>taires <strong>de</strong> la part <strong>du</strong> CS confort<strong>en</strong>t l’organisation auprès <strong>de</strong> son CA, à travers lerapport qui lui est communiqué : « L’évaluation positive par le CS est franchem<strong>en</strong>t une bonne nouvelle et393


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal<strong>en</strong>ous donne une très bonne position vis-à-vis <strong>du</strong> CA mais aussi <strong>de</strong> la Fondation MAVA et <strong>de</strong> la familleHoffmann » (Direction TdV, com.pers., 2010).Du côté <strong>de</strong> l’organisation interne, l’utilisation d’un cadre nouveau n’a pas été un obstacle. Aucontraire, les évaluations qui suscit<strong>en</strong>t d’ordinaire <strong>de</strong>s remarques <strong>du</strong>bitatives – « on fait beaucouptrop d’évaluation, cela représ<strong>en</strong>te un travail énorme, et on ne les valorise pas ». Et <strong>en</strong>core, « je m <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si c<strong>en</strong>’est pas juste <strong>de</strong> la perte <strong>de</strong> temps. On n’<strong>en</strong> fait ri<strong>en</strong> pour la suite » (Chercheurs TdV, com.pers., 2008) – ,ont cette fois pu susciter <strong>de</strong>s comm<strong>en</strong>taires positifs – « c’était difficile, mais c’était un exerciceintéressant. Ca m’a posé beaucoup <strong>de</strong> questions ». Et <strong>en</strong>core, « ça me va. Je trouve ça bi<strong>en</strong> sur le fond et je suiscurieux <strong>de</strong> savoir ce qui va être fait par rapport à ça. D’expéri<strong>en</strong>ce, ça vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s [<strong>de</strong> la conservation quiutilis<strong>en</strong>t tous ces concepts]. Alors je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ce qui va être fait, si c’est juste faire <strong>du</strong> blabla et faire <strong>du</strong>réseaux dans le mon<strong>de</strong> qu’on connaît déjà, ou si ça va nous faire progresser nous. Mais ça me dérange pas, ça m’a<strong>de</strong>mandé <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> faire ce travail, mais c’est intéressant. Ça évolue dans le bon s<strong>en</strong>s » (Chercheurs TdV,com.pers., 2010).Nous remarquons ici que l’espace <strong>de</strong> réflexion offert par l’exercice <strong>de</strong> l’évaluation avec c<strong>en</strong>ouveau cadre a été exprimé spontaném<strong>en</strong>t par les membres <strong>de</strong> l’équipe interrogés à ce sujet.Ceci nous a incité à poursuivre l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la façon dont la pratique <strong>de</strong> l’évaluation peut être unmom<strong>en</strong>t réflexif utile à l’organisation pour r<strong>en</strong>forcer sa stratégie et ses actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Dans cette perspective, pr<strong>en</strong>ons le temps d’expliciter davantage les questionsqui se pos<strong>en</strong>t à l’organisation lorsqu’elle cherche à évaluer l’impact <strong>de</strong> son action sur l’état <strong>de</strong>szones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> leur biodiversité.7.2.2 T<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’évaluationC’est <strong>en</strong>core la mise <strong>en</strong> perspective historique qui nous permet <strong>de</strong> retranscrire le mieux la façondont la question <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> l’action a été portée <strong>en</strong> interne et a été prise <strong>en</strong>charge comme un problème à résoudre. Dans un premier temps, nous évoquerons surtout ler<strong>en</strong>ouvellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s relations organisation interne – organes <strong>de</strong> gouvernance (Section a). Aprèsavoir pris connaissance <strong>de</strong>s problèmes qui se pos<strong>en</strong>t lorsque l’on cherche à mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s« indicateurs » pour outiller le nouveau cadre d’évaluation (Encadré 7.1) (Section b), nousabor<strong>de</strong>rons <strong>en</strong>fin les implications d’un tel outillage vis-à-vis <strong>de</strong> la relation avec les organes <strong>de</strong>gouvernance et <strong>de</strong> la réflexion stratégique (Section c).394


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiquea) Evaluation <strong>de</strong> l’impact écologique <strong>de</strong>s actions et relations avec les organes <strong>de</strong>gouvernanceLes observations réalisées p<strong>en</strong>dant le temps <strong>de</strong> notre prés<strong>en</strong>ce dans l’organisation nous ontdonné à voir <strong>de</strong>s processus concernant l’évolution <strong>de</strong> la question <strong>de</strong> l’évaluation dans leséchanges <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts acteurs <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> sa gouvernance.En interne, les membres <strong>de</strong> l’équipe « voudrai[<strong>en</strong>t] bi<strong>en</strong> savoir quel est [leur] impact, surtout quand ça faitlongtemps qu’on travaille à la cause, on se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ce qu’on a apporté » (com.pers., 2008). Mais ils sontpartagés <strong>de</strong>vant la façon d’abor<strong>de</strong>r ces évaluations : d’un côté, « on ne peut évaluer l’impact <strong>de</strong> lapro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique ». Mais <strong>de</strong> l’autre : « l’objectif <strong>de</strong> notre recherche est l’application. Si on ne <strong>de</strong>vait faire que<strong>de</strong> la recherche, on pro<strong>du</strong>irait davantage. Mais on passe beaucoup <strong>de</strong> temps pour le transfert, pour la <strong>gestion</strong> locale.Cela doit aussi être valorisé par le CS » (Chercheurs TdV, com.pers., 2008).Pour la direction, évaluer les impacts <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZH revêt notamm<strong>en</strong>t troisdim<strong>en</strong>sions. La première est managériale : « j’ai besoin <strong>de</strong> repères pour m’assurer qu’on a bi<strong>en</strong> positionnénotre action, et qu’on va dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> notre objectif » (Direction, com.pers., 2009). La <strong>de</strong>uxième émaned’un souci <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir visible pour <strong>de</strong>s actions jusqu’à prés<strong>en</strong>t peu évaluées. Le troisième rési<strong>de</strong>dans l’exercice réflexif <strong>de</strong> l’évaluation, avec l’idée selon laquelle les membres <strong>de</strong> l’équipe vontchercher à progresser davantage sur les dim<strong>en</strong>sions que l’organisation affirme comme étant lesaxes à développer et qui seront soumis à l’évaluation. « Il y a <strong>de</strong>s parties <strong>en</strong>tières <strong>de</strong> ce qu’on fait quin’apparaiss<strong>en</strong>t pas et qui ne sont pas valorisées. Par exemple, je p<strong>en</strong>se que pour la dynamique interne, c’estimportant <strong>de</strong> voir aussi que la réputation <strong>de</strong> la TdV fait qu’on est invité dans <strong>de</strong>s arènes. Et ça c’est pour moi unélém<strong>en</strong>t important, qu’on ne s’est pas donné pour objet <strong>de</strong> mesurer. Et tant qu’on ne met pas l’éclairage <strong>de</strong>ssus, pasétonnant qu’on n’<strong>en</strong> fasse pas une priorité » (ibid.). Ret<strong>en</strong>ons ici que l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impactsécologique n’est pas tant <strong>de</strong> relever ce défi méthodologique que <strong>de</strong> consci<strong>en</strong>tiser, affirmer et àtermes r<strong>en</strong>forcer les différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale – au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> lapro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique.Cette volonté d’évaluer davantage les impacts écologiques <strong>de</strong>s actions provi<strong>en</strong>t d’abord <strong>du</strong> souci<strong>de</strong> l’équipe et <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> valoriser l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> leurs activités et <strong>de</strong> progresser au regard<strong>de</strong> leurs objectifs écologiques. Cette question donne égalem<strong>en</strong>t à voir le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>srelations <strong>en</strong>tre l’organisation interne et les organes <strong>de</strong> gouvernance rythmés par <strong>de</strong>s allers-retours<strong>en</strong>tre ces <strong>de</strong>ux niveaux. Lorsque la direction – qui s’exprime au nom <strong>de</strong> l’équipe – annonce <strong>de</strong>sefforts plus importants pour évaluer l’impact <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s ZHM, les organes <strong>de</strong>gouvernance répond<strong>en</strong>t à <strong>de</strong>ux niveaux :1. S’ils jug<strong>en</strong>t les propositions pertin<strong>en</strong>tes, comme c’est le cas pour la question qui nous occupe,ils souti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la direction, ce qui conforte sa position au sein <strong>de</strong> l’organisation nécessaire pour395


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleprovoquer et animer les changem<strong>en</strong>ts. On retrouve alors dans les docum<strong>en</strong>ts officiels lesrecommandations <strong>du</strong> CS et <strong>du</strong> CA qui s’appar<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t aux propositions faites par la direction ellemême.2. Ils att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t alors <strong>de</strong> la direction qu’elle prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong>s progrès dans le domaine. Une fois que ladirection a proposé et a obt<strong>en</strong>u le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance, elle est <strong>en</strong> effetresponsable <strong>de</strong>vant eux <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s propositions. La question <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>simpacts a donc été discutée <strong>de</strong> façon récurr<strong>en</strong>te au sein <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance <strong>en</strong>tre 2008 et2010.Les membres <strong>du</strong> CA le voi<strong>en</strong>t globalem<strong>en</strong>t comme un outil pouvant ai<strong>de</strong>r l’organisation às’améliorer sur son programme et ses actions, mais sont loin d’être <strong>de</strong>s promoteursinconditionnels <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s impacts : « on va passer à un sujet qui personnellem<strong>en</strong>t me fait bouillir.On est évalué tout le temps […], c’est à peine si on a <strong>en</strong>core le temps <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s choses avant d’être déjà évalué » ;« Il y a un risque que ces évaluations soi<strong>en</strong>t prises au pied <strong>de</strong> la lettre » ; « Evaluer les impacts, c’est aussi uneprise <strong>de</strong> risque pour les ONG étant donné la pression sur l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t » (Membres CA TdV, CAnovembre 2009). Certains d’<strong>en</strong>tre eux associ<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant ces efforts pour évaluer les impacts àun travail nécessaire <strong>de</strong> hiérarchisation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux et <strong>de</strong>s actions : « Il faut que les priorités <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique soi<strong>en</strong>t plus lisibles » ; « Je p<strong>en</strong>se qu’à la TdV, on a fait <strong>de</strong> super grands progrès, mais ilmanque toujours une priorisation. On <strong>de</strong>vrait voir là où on met l’arg<strong>en</strong>t, pour voir l’impact <strong>de</strong> là où on met l’arg<strong>en</strong>tet où il faut le mettre. Même si att<strong>en</strong>tion, la hiérarchisation <strong>de</strong>s objectifs n’est pas strictem<strong>en</strong>t superposable auxfonds qu’il faut allouer » ; « Ce qu’on trouve dans ce programme, c’est vraim<strong>en</strong>t très bon, mais ce sont surtout <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>its sci<strong>en</strong>tifiques. Il manque d’autres pro<strong>du</strong>its, tout ce qui est lié à l’implém<strong>en</strong>tation, toutes ces choses qui sontappliquées et qui sont les <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> la TdV aussi ; comme le nombre <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> développés, la gouvernancequi a changé, les politiques que l’on a influ<strong>en</strong>cé, etc. » (ibid.). Il est ici suggéré à la direction et son équipe<strong>de</strong> faire un travail plus approfondi pour la sélection <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation sur lesquels seconc<strong>en</strong>trer à travers l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s projets. Certains membres <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernancerapproch<strong>en</strong>t ce travail <strong>de</strong> priorisation <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> la question <strong>de</strong>s modalitésd’évaluation <strong>de</strong>s actions.L’évaluation et la valorisation <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> la TdV r<strong>en</strong>voie égalem<strong>en</strong>t à la dép<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>l’organisation vis-à-vis <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance. Bi<strong>en</strong> que, comme le dit la direction, <strong>de</strong>sévaluations positives <strong>du</strong> programme, approuvées par le CS lui donne une « une bonne position auprès<strong>du</strong> CA et <strong>de</strong> la famille Hoffmann », mais ne suffit pas à ré<strong>du</strong>ire « l’incertitu<strong>de</strong> à moy<strong>en</strong> et long termeconcernant le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’organisation par les membres fondateurs » (Direction, com.pers., 2010). Pour cela,il faudra poursuivre les efforts pour fournir <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts lisibles aux administrateurs : « Cela sert à396


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiquerassurer nos administrateurs et c’est très important pour certains, ceux qui sont loin <strong>de</strong>s problématiques qu’on suit,qui ne connaiss<strong>en</strong>t pas notre boulot. Ils ont une responsabilité <strong>de</strong> pilotage <strong>de</strong> la structure et il faut qu’ils sach<strong>en</strong>t sion fait bi<strong>en</strong> notre boulot ou pas. C’est un sujet particulièrem<strong>en</strong>t important pour A. Hoffmann, qui se s<strong>en</strong>t, je crois,investi, impliqué, mais qui ne se s<strong>en</strong>t pas compét<strong>en</strong>t sur les cont<strong>en</strong>us. Il a besoin d’être rassuré sur le fait quel’investissem<strong>en</strong>t [financier] est « r<strong>en</strong>table » [au regard <strong>de</strong>s résultats par rapport à la mission <strong>de</strong>conservation <strong>de</strong>s ZHM]. Les comm<strong>en</strong>taires <strong>du</strong> CS qui nous font un bi<strong>en</strong> énorme, c’est quand [le directeur <strong>du</strong>laboratoire CEFE-CNRS 211 ] nous dit que le coût moy<strong>en</strong> d’une publication à la TdV est équival<strong>en</strong>t à celui d’unlaboratoire académique. Là, tu vois que A. Hoffmann réagit immédiatem<strong>en</strong>t… Je crois qu’il n’a pas <strong>en</strong>vied’investir <strong>du</strong> temps et beaucoup d’arg<strong>en</strong>t dans une structure qui ne serait pas à la hauteur » (Direction,com.pers., 2010).D’autre part, « les appréciations [<strong>du</strong> CS] ont un côté aléatoire », une bonne évaluation confortel’organisation, « cela nous permet <strong>de</strong> continuer dans ce que l’on a <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> faire. Si on prés<strong>en</strong>te <strong>de</strong> bons résultats,cela permet que nos programmes soi<strong>en</strong>t acceptés sans avoir à guerroyer. Pour le mom<strong>en</strong>t c’est ce qui se passe et onespère que cela va continuer » (ibid.). Ces évaluations externes et ces appréciations <strong>du</strong> CS apport<strong>en</strong>t leregard externe et la prise <strong>de</strong> recul profitables, mais le pilotage et la concrétisation <strong>de</strong> voies <strong>de</strong>progrès id<strong>en</strong>tifiées rest<strong>en</strong>t évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t à l’<strong>en</strong>tière charge <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong> l’organisation(direction et chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t). En cela, l’évaluation vise d’un côté à mettre <strong>en</strong> visibilité lesactions pour maint<strong>en</strong>ir autant que possible le souti<strong>en</strong> soli<strong>de</strong> <strong>de</strong>s administrateurs et, d’un autrecôté, à piloter l’organisation et assurer un r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale selon lesmarges <strong>de</strong> progrès id<strong>en</strong>tifiées. Ces <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>jeux pouss<strong>en</strong>t l’organisation à poursuivre les effortspour l’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques <strong>de</strong> programme, parallèlem<strong>en</strong>t à son évolution sur leplan <strong>de</strong> son action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale elle-même : « l’<strong>en</strong>semble évaluation – construction <strong>du</strong> programmeétant vu comme un tout et dans une perspective d’amélioration continue » (Direction TdV, com.pers., 2010).Cette remarque <strong>du</strong> directeur <strong>de</strong> la TdV nous invite à préciser que l’évaluation et la construction<strong>du</strong> programme peuv<strong>en</strong>t être vu à juste titre comme <strong>de</strong>s processus liés, mais sont <strong>en</strong> revanche un<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> processus spécifiques qui n’est pas l’action et qui se passe sur un autre plan quel’action <strong>en</strong> elle-même. L’action peut être r<strong>en</strong>forcée sans amélioration <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong>l’évaluation. La réciproque, si « la pratique <strong>de</strong> l’évaluation est améliorée sans que l’action soitaméliorée », n’a pas <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s au regard <strong>de</strong> la remarque <strong>du</strong> directeur <strong>de</strong> la TdV qui rapprochel’amélioration <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> l’amélioration générale <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s actions. Nousplaçant dans cette perspective, nous nous rapprochons <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> l’évaluation(« use », Patton, 2004 ; Alkin, 2004b) dont la préoccupation c<strong>en</strong>trale est l’utilité pour les parties211 C<strong>en</strong>tre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive, laboratoire CNRS <strong>de</strong> Montpellier. Son directeur est membre <strong>du</strong>Conseil Sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.397


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talepr<strong>en</strong>antes, au regard <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> progression qui est le leur, qui est dans notre cas ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong> vue d’augm<strong>en</strong>ter leur impact écologique.Progresser sur l’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation comporte, comme expliquéplus haut, <strong>de</strong>s difficultés liées à <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> méthodologie et d’attribution <strong>de</strong>s résultatsobservés.b) Outiller le cadre d’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques avec <strong>de</strong>s indicateursLa voie <strong>en</strong>visagée par les membres <strong>de</strong> la TdV pour opérationnaliser le cadre <strong>de</strong>s 5 niveauxd’impacts est la mise <strong>en</strong> place d’indicateurs qui <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t permettre l’évaluation <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tesdim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale m<strong>en</strong>ée au cours <strong>du</strong> programme.L’OCDE définit l’indicateur comme « un paramètre ou une valeur dérivée <strong>de</strong> paramètres donnant<strong>de</strong>s informations sur un phénomène » (oc<strong>de</strong>.org). Le Plan Bleu, autre c<strong>en</strong>tre techniqueintergouvernem<strong>en</strong>tal (PNUE/PAM 212 ), précise que l’indicateur « est une donnée quantitative quipermet <strong>de</strong> caractériser une situation évolutive (par exemple, l'état <strong>de</strong>s milieux), une action ou lesconséqu<strong>en</strong>ces d'une action, <strong>de</strong> façon à les évaluer et à comparer leur état à différ<strong>en</strong>tes dates ».Appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la mise <strong>en</strong> place d’indicateurs pour évaluer le programme <strong>de</strong> la TdV nous placedans une interface originale <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux grands champs où ils sont massivem<strong>en</strong>t utilisés. D’uncôté, on se trouve dans le domaine <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t, <strong>du</strong> contrôle et <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong>l’organisation, à l’instar <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treprises commerciales dans lesquelles l’usage <strong>de</strong>s indicateurs – leplus souv<strong>en</strong>t quantitatifs, voire économiques – est très répan<strong>du</strong>. Pour certains, leur utilisationapparaît comme une évid<strong>en</strong>ce pour suivre la performance <strong>de</strong> l’organisation, et c’est l’amélioration<strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mesure qui est questionnée (Gauz<strong>en</strong>te, 2000 ; Atamer & Calori, 2003 : 167 ;Lusthaus et al., 2003 : 99). Pour d’autres, c’est l’effet pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t négatif (Bourguignon &J<strong>en</strong>kins, 2004) et contre-pro<strong>du</strong>ctif (Riveline, 1991) sur le travail et les employés soumis à cesindicateurs qui est à interroger, dans la mesure où ils <strong>en</strong>doss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s règles et un certain ordresocial (Boussard, 2001). Un champ <strong>de</strong> littérature se développe donc autour <strong>de</strong> la responsabilitésociale et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (social and <strong>en</strong>vironm<strong>en</strong>tal accountability) <strong>de</strong> tous les types d’organisation(gouvernem<strong>en</strong>tales, commerciales, ONG), plaidant pour <strong>de</strong> nouveaux régimes <strong>de</strong> gouvernanceintégrant mieux les aspects sociaux et <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et <strong>en</strong> interrogant la compatibilité ounon avec la performance économique et financière (Patt<strong>en</strong>, 2002 ; Gray, 2005). Ces indicateurs sepropag<strong>en</strong>t aux secteurs publics (Guillaume, 2009) avec « le New Public Managem<strong>en</strong>t [nouveaumanagem<strong>en</strong>t public], [qui] t<strong>en</strong>d à institutionnaliser une nouvelle doxa managériale dans la <strong>gestion</strong>212 Plan d’Action pour la Méditerranée <strong>du</strong> Programme <strong>de</strong>s Nations Unies pour l’Environnem<strong>en</strong>t.398


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégique<strong>de</strong>s services publics, […] repr<strong>en</strong>ant à son compte un idéal <strong>gestion</strong>naire <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise privée,faisant <strong>de</strong> la comptabilité et plus particulièrem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> contrôle <strong>de</strong>s résultats, l’un <strong>de</strong> ses fers <strong>de</strong>lance » (Naro, 2010 : 186). Concernant la TdV, les indicateurs dont il s’agit sont <strong>de</strong>s indicateursdavantage qualitatifs, c<strong>en</strong>trés sur l’action et pas imaginés dans la perspective <strong>de</strong> les relier auxindicateurs et outils comptables qu’elle utilise par ailleurs – bi<strong>en</strong> que ceux-ci ne soi<strong>en</strong>t pas sansinflu<strong>en</strong>ce sur les programmes et les choix d’actions 213 , puisque nous avons vu que l’organisation<strong>de</strong>vait faire <strong>de</strong>s choix d’action dans la limite <strong>de</strong> ses moy<strong>en</strong>s.D’un autre côté, on se trouve dans le domaine <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qui est égalem<strong>en</strong>t un champoù les indicateurs prolifèr<strong>en</strong>t. Les auteurs s’intéressant à ces questions expliqu<strong>en</strong>t comm<strong>en</strong>t lesindicateurs se sont développés avec les politiques <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et notamm<strong>en</strong>t celle <strong>du</strong>Développem<strong>en</strong>t Durable (Boulanger, 2004 ; Levrel, 2006 ). « Les indicateurs Pression-Etat-Réponse (PER), [créés au départ par l’OCDE dans le courant <strong>de</strong>s années 90 214 ], permett<strong>en</strong>td'évaluer les pressions que les activités humaines génèr<strong>en</strong>t sur l'état <strong>de</strong> la biodiversité etd'id<strong>en</strong>tifier les réponses sociales qui permettront <strong>de</strong> comp<strong>en</strong>ser les effets négatifs <strong>de</strong>s pressions »(Levrel, 2006 : 33). « L'OCDE reconnaît cep<strong>en</strong>dant que ce cadre d'analyse a pour défaut <strong>de</strong>suggérer <strong>de</strong>s relations linéaires <strong>en</strong>tre les activités humaines et l'état <strong>de</strong> la biodiversité et <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ireainsi la dim<strong>en</strong>sion complexe <strong>de</strong>s interactions. En particulier, la biodiversité doit être caractériséepar rapport à un état dans lequel les interactions écologiques ne sont pas prises <strong>en</strong> compte »(ibid. : 33). Ceci explique que la construction <strong>de</strong> modèles conceptuels et d’indicateurs toujoursplus fiables occupe une large part <strong>de</strong>s travaux sci<strong>en</strong>tifiques et techniques dans le domaine <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (e.g. Gaucherel, 2003 ; Bowling & Sayer, 2004). L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> ces travaux estcomme l’expliqu<strong>en</strong>t H. Levrel (2006), O. Aznar et al. (2006) est d’ori<strong>en</strong>ter les politiques ou lesdécisions locales pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. La TdV pr<strong>en</strong>d elle-même part à ces travaux<strong>en</strong> suivant <strong>de</strong> nombreux paramètres écologiques <strong>en</strong> Camargue (<strong>de</strong>s espèces jusqu’àl’hydrosystème) et <strong>en</strong> développant un système <strong>de</strong> suivi-évaluation à l’échelle <strong>du</strong> bassinméditerrané<strong>en</strong> pour influ<strong>en</strong>cer les politiques régionales <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s (OZHM,Chapitre 5).En cherchant à développer <strong>de</strong>s indicateurs pour évaluer son impact sur les zones humi<strong>de</strong>s, la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> se situe au croisem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les <strong>de</strong>ux types et modalités d’usage <strong>de</strong>s indicateurs qu<strong>en</strong>ous v<strong>en</strong>ons <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter. D’un côté, il s’agit d’évaluer l’impact <strong>de</strong> son action. Cela r<strong>en</strong>voie, dansle langage <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise, à évaluer la performance <strong>de</strong> l’organisation. Pour l’ONGE, la création <strong>de</strong>213 Voir la partie portant sur l’acquisition et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources financières dans le chapitre 6.214 Ce premier modèle conceptuel a inspiré les indicateurs force motrice-pression-état-impact-réponse <strong>de</strong> l'Ag<strong>en</strong>ceEuropé<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l'Environnem<strong>en</strong>t (EEA, 2003), qui représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t aujourd’hui le cadre <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce dominant pourillustrer les interactions société-nature.399


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talevaleur étant l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s objets écologiques, cela r<strong>en</strong>voie aux indicateurs d’état <strong>de</strong>smodèles conceptuels d’évaluation <strong>du</strong> champ <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (modèle PER et sessuccesseurs). La TdV aurait pu utiliser ces modèles comme cadre pour évaluer son action, <strong>en</strong>considérant les « Pressions » comme les forces qu’elle cherche à infléchir, les « Réponses »comme ses propres interv<strong>en</strong>tions, et l’ « Etat » comme la résultante <strong>en</strong> terme écologique <strong>de</strong>spressions et <strong>de</strong>s réponses. Mais ces modèles sont généralem<strong>en</strong>t utilisés pour l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>ssystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et ne sont pas directem<strong>en</strong>t appropriés pour évaluer l’action propre d’un <strong>de</strong>sacteurs partie pr<strong>en</strong>ante. Si elle utilise ces modèles dans ses projets 215 , ce n’est pas l’outil qu’elle aret<strong>en</strong>u pour le cadre d’évaluation <strong>de</strong> son programme qui doit être beaucoup plus détaillé sur lesdiffér<strong>en</strong>ts niveaux <strong>de</strong> « Réponses », avec 5 niveaux d’impact (Ecadré 7.1).Si le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux (Encadré 7.1) a été construit <strong>de</strong> façon relativem<strong>en</strong>t intuitiveà partir <strong>de</strong> la théorie d’action générale <strong>de</strong> la TdV et <strong>de</strong>s nouveaux termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce pour laconstruction <strong>de</strong>s projets (Encadré 6.1, Chapitre 6), le pas suivant consistant à mettre <strong>en</strong> place lesindicateurs est beaucoup plus difficile à franchir. En effet, l’outillage <strong>de</strong> l’évaluation avec <strong>de</strong>sindicateurs ne résout pas <strong>en</strong> lui-même la difficulté – voire l’impossibilité – d’évaluer les impacts<strong>en</strong> terme d’état écologique <strong>de</strong>s objets visés par les actions.Les indicateurs <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t être p<strong>en</strong>sés et formalisés parallèlem<strong>en</strong>t à la construction <strong>de</strong>s projets et<strong>de</strong>s programmes 2011-2015 qui a eu lieu <strong>en</strong> 2009 et 2010. Mais la démarche n’a pas été m<strong>en</strong>ée àson terme p<strong>en</strong>dant cette pério<strong>de</strong>, elle se poursuit donc <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>du</strong> temps <strong>de</strong> la planificationstratégique <strong>en</strong> 2011. Pour mieux compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t s’est posé le problème <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place<strong>de</strong> ces indicateurs, pr<strong>en</strong>ons l’exemple <strong>de</strong> ceux – provisoires – <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces (Tableau7.1)Tableau 7.1 : Exemple d’indicateurs d’impact : les projets <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces (Plan stratégique TdV2011-2015, 2010 : 39).Niveaux dimpact Indicateur d'impact – Programme Espèces 2011-20151 Etat <strong>de</strong>spopulations/communautés/écosystèmes2 Changem<strong>en</strong>tdattitu<strong>de</strong>s et<strong>de</strong> pratiques• Effectifs et t<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes espèces considérées• Une diminution <strong>de</strong>s conflits <strong>en</strong>tre usagers <strong>de</strong> la nature et espèces sauvages• Une meilleure perception et une modification <strong>de</strong>s discours sur les espèces <strong>de</strong>sZHM (ex. : ZHM et santé)• Une diminution <strong>de</strong> l'usage <strong>de</strong> molécules <strong>de</strong> lutte et l'usage <strong>de</strong> molécules moinstoxiques• Une augm<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s déchets et <strong>de</strong>s polluants et une diminution <strong>de</strong>leurs quantités dans l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t215 Elle utilise <strong>en</strong> particulier le modèle Drivers Pressure State Impact Response pour l’OZHM (Cahpitre 5).400


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégique3 Intérêt/prise <strong>en</strong>compte parnos cibles4 Transfert <strong>de</strong>srésultats5 Pro<strong>du</strong>ctionsci<strong>en</strong>tifique &technique• Nombre <strong>de</strong> préconisations <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> issues <strong>de</strong> la recherche intégrées auxplans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>• Une prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la biodiversité dans les politiques <strong>de</strong>santé publique et vétérinaires• Une prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la biodiversité dans les politiquesd'aménagem<strong>en</strong>t• Une prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong>s scénarios futurs dans les choix <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> actuels par lescollectivités, propriétaires privés, <strong>gestion</strong>naires d'espaces protégés...• Nombre <strong>de</strong> participation à <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong> pilotage pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>spèces• Cours dans <strong>de</strong>s formations universitaires.• Encadrem<strong>en</strong>ts et formations détudiants (EU et hors EU dans le bassinméditerrané<strong>en</strong>).• Exposés (type <strong>de</strong> public : grand public, usagers, <strong>gestion</strong>naires ; nombredauditeurs).• Citations/interviews dans les medias (types <strong>de</strong> medias : TV, radio, presse ; public :local, national, international ; nombre dauditeurs/lecteurs).• Publications <strong>de</strong> vulgarisation <strong>de</strong>s connaissances sci<strong>en</strong>tifiques, <strong>de</strong> s<strong>en</strong>sibilisation et<strong>de</strong> recommandation <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> (types : brochure, livre, articles, pages web ; public :usagers, <strong>gestion</strong>naires, grand public).• Communiqués <strong>de</strong> presse.• Utilisation <strong>de</strong> linterface internet : alim<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> site <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, création<strong>de</strong> nouveaux sites ou pages.Activités <strong>de</strong> recherche• Nombre <strong>de</strong> publications dans <strong>de</strong>s revues internationales à comité <strong>de</strong> lecture etfacteurs dimpact <strong>de</strong>s publications• Citations <strong>de</strong>s articles <strong>du</strong>rant les années qui suiv<strong>en</strong>t la publication• Nombre <strong>de</strong> chercheurs titulaires <strong>de</strong> lHabilitation à Diriger <strong>de</strong>s Rercherches• Nombre <strong>de</strong> participation à <strong>de</strong>s confér<strong>en</strong>ces internationalesImplication dans le réseau national et international <strong>de</strong> la recherche et universitaire• Collaborations étroites avec <strong>de</strong>s laboratoires français et étrangers• Participation à <strong>de</strong>s commissions sci<strong>en</strong>tifiques, à <strong>de</strong>s jurys <strong>de</strong> thèse, aux travauxdinstitutions nationales (Fondation <strong>de</strong> recherche sur la biodivesité (FRB), ANR...)• Expertises : articles sci<strong>en</strong>tifiques, dossiers <strong>de</strong> financem<strong>en</strong>ts (ex. : ANR)• Dev<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s doctorants après leur thèsePlusieurs observations peuv<strong>en</strong>t être soulevées à partir <strong>de</strong> cet exemple (Tableau 7.1 – cesobservations val<strong>en</strong>t pour les indicateurs provisoires <strong>de</strong>s autres départem<strong>en</strong>ts non prés<strong>en</strong>tés ici).Niveau 4 et 5. Premièrem<strong>en</strong>t, comme le prévoit le cadre d’évaluation à 5 niveaux d’impacts, lesindicateurs <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique et technique et <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong>s résultats sont les plussimples à déterminer : « jusqu’à prés<strong>en</strong>t, le plus souv<strong>en</strong>t, l’évaluation <strong>de</strong> nos résultats a été limitéeaux niveaux 5 ou 4 (pro<strong>du</strong>ction) » (Encadré 7.1) : il s’agit pour l’équipe <strong>de</strong> faire le bilan <strong>de</strong> sesactivités. Si ces indicateurs aid<strong>en</strong>t les chefs <strong>de</strong> départem<strong>en</strong>t ou la direction à « savoir où [ils <strong>en</strong> sont]par rapport à leurs objectifs, s’ils progress<strong>en</strong>t » (TdV, com.pers., 2009), <strong>en</strong> somme à piloter et contrôlerles équipes, cela ne suffit pas <strong>en</strong> termes d’évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong>s interv<strong>en</strong>tions dans le système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : « dans la perspective <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, c’est le niveau 1 qui doit êtrevisé <strong>en</strong> priorité » (Encadré 7.1).Niveau 1. C’est surtout au « niveau 1 » que les problèmes se pos<strong>en</strong>t : « effectifs et t<strong>en</strong>dance <strong>de</strong>spopulations <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>tes espèces considérées » (Encadré 7.1), « évaluation <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>sécosystèmes grâce aux indicateurs développés, évolution <strong>de</strong>s effectifs d’espèces vulnérables401


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleassociées aux écosystèmes étudiés » (Indicateurs niveau 1 <strong>du</strong> projet « dynamique <strong>de</strong>sécosystèmes », Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010). Construire et r<strong>en</strong>seigner <strong>de</strong>s indicateurs<strong>de</strong> ce type relève d’un travail sci<strong>en</strong>tifique et technique colossal auquel la TdV contribue (parexemple les suivis à long terme <strong>de</strong>s oiseaux d’eau, voir au chapitre 3). Ce qui est <strong>en</strong>visagé par leschefs <strong>de</strong> projet est d’utiliser les indicateurs d’état et <strong>de</strong> t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong> leur biodiversitéqu’ils ont à disposition, c’est-à-dire ceux qu’ils développ<strong>en</strong>t eux-mêmes ou ceux auxquels ils ontfacilem<strong>en</strong>t accès. Par exemple, le départem<strong>en</strong>t « Suivi-évaluation <strong>de</strong>s ZHM » <strong>en</strong>visage d’utiliser unindicateur d’évolution <strong>de</strong> la surface <strong>de</strong>s ZHM qui est un <strong>de</strong>s indicateurs développé dans le cadre<strong>de</strong> l’OZHM : « évolution <strong>de</strong> la surface <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> région méditerrané<strong>en</strong>ne » (Planstratégique TdV 2011-2015, 2010). Ces indicateurs, fruit d’un travail sci<strong>en</strong>tifique et technique,sont pertin<strong>en</strong>ts pour suivre les écosystèmes humi<strong>de</strong>s. Mais le sont-ils pour évaluer lesinterv<strong>en</strong>tions propres <strong>de</strong> la TdV sur ces objets écologiques ? Comm<strong>en</strong>t faire le li<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre l’état etles t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s ZH et les interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> la TdV ? Il y a un problème d’attribution non résolu.Le directeur <strong>de</strong>s programmes (com.pers., 2010) parle pour cela <strong>de</strong> « dilution » : « Et il y a unproblème <strong>de</strong> dilution. On ne maîtrise pas l’impact qu’on a. Aujourd’hui, [un <strong>de</strong>s chercheurs] a mis commeindicateur <strong>de</strong> résultat : l’évolution <strong>de</strong>s populations d’ardéidés <strong>en</strong> Camargue. Car c’est ça qu’on nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, onsait que ça a <strong>de</strong>s limites. Mais dans quelle mesure la population dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la TdV, je n’<strong>en</strong> ai pas unegran<strong>de</strong> idée et je soupçonne qu’elle est très faible. Dans le même g<strong>en</strong>re d’idée, [un autre chercheur] travaille <strong>de</strong>puis15 ans sur l’anguille. Aujourd’hui, l’anguille est une problématique europé<strong>en</strong>ne. Il y a <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> quicomm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t à être appliqués. Dans quelle mesure ses travaux influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t les cadres europé<strong>en</strong>s et <strong>en</strong> quoi celainflu<strong>en</strong>ce les populations ?!... et pourtant je crois que son travail est totalem<strong>en</strong>t fondam<strong>en</strong>tal, <strong>en</strong> décrivant ethiérarchisant les causes <strong>de</strong> mortalités <strong>de</strong>s anguilles. Il y a trop d’acteurs. Si on veut mesurer notre impact, il fauttravailler dans <strong>de</strong>s niches où il y a très peu d’acteurs… ou alors sur <strong>de</strong>s cas où il y a très peu d’acteurs, sur larestauration <strong>de</strong>s salins. On peut estimer le rôle qu’on joue là-<strong>de</strong>dans ». Or il n’est heureusem<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>core<strong>en</strong>visagé <strong>de</strong> sélectionner les actions <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> celle que l’on peut mesurer, au contraire : « Detoute façon, avec les types <strong>de</strong> projets qu’on met <strong>en</strong> œuvre, il n’y a pas souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s impacts tangibles, mesurables surles populations ou les écosystèmes <strong>en</strong> 5 ans. C’est la difficulté d’avoir <strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations… notre cœur <strong>de</strong> métier est <strong>en</strong>amont. C’est un peu illusoire <strong>de</strong> vouloir trouver <strong>de</strong>s impacts [directs] réels » (ibid.). Il est évid<strong>en</strong>t que pourun certain nombre <strong>de</strong> ces mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion, il n’est pas possible d’établir une chaîne <strong>de</strong>causalité mesurable <strong>en</strong> tout point tant les élém<strong>en</strong>ts (humains et non-humains) interagissant <strong>en</strong>trel’action et l’objet écologique sont nombreux et complexes. Cep<strong>en</strong>dant, c’est l’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong>sindicateurs <strong>de</strong> niveaux 2 et 3 que <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire l’ambiguïté <strong>de</strong> ces li<strong>en</strong>s <strong>de</strong> causes à effet afin d’établirle rapport <strong>en</strong>tre les stratégies d’action <strong>de</strong> la TdV et leur impact <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation(établissem<strong>en</strong>t d’une chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s).402


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueNiveaux 2 et 3. La formulation d’indicateurs opérants s’avère difficile, <strong>en</strong> particulier pourévaluer les changem<strong>en</strong>ts provoqués par les interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> la TdV dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>(niveau 2). Nous laissons là ce problème tout juste évoqué car nous y revi<strong>en</strong>drons <strong>en</strong> détail dansla section suivante. Ici nous nous <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ons à cette considération : l’intérêt <strong>de</strong> ce niveau d’impactest le même que l’explicitation <strong>de</strong>s résultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s qui est imposé par le cadre <strong>de</strong> construction<strong>de</strong>s projets. Cela incite les chefs <strong>de</strong> projets à m<strong>en</strong>er plus loin la réflexion sur la façon dont ilspeuv<strong>en</strong>t mobiliser la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique et technique pour agir dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Autrem<strong>en</strong>t dit, bi<strong>en</strong> que tous les indicateurs simples et opérants n’ai<strong>en</strong>t pas été élaborés à cesta<strong>de</strong>, la réflexion stratégique m<strong>en</strong>ée jusqu’à ce point est déjà un apport notable primordial <strong>de</strong> ladémarche m<strong>en</strong>ée pour évaluer davantage les impacts <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation.c) Un cadre d’évaluation pour le contrôle par les organes <strong>de</strong> gouvernance ou pourla réflexion stratégique ?Repr<strong>en</strong>ons le fil <strong>de</strong>s processus et <strong>de</strong>s pratiques relatifs à la démarche pour évaluer les impacts <strong>de</strong>l’action observée <strong>du</strong>rant notre recherche. Pour surmonter ces difficultés méthodologiques etavancer sur ce cadre d’évaluation <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation, la direction a sollicité ses organes <strong>de</strong>gouvernance. Ce point a été mis <strong>de</strong> façon récurr<strong>en</strong>te à l’ordre <strong>du</strong> jour <strong>de</strong>s conseilsd’administration et sci<strong>en</strong>tifiques <strong>en</strong>tre 2008 et 2010. L’int<strong>en</strong>tion sous-jac<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la direction étaitdouble : 1) obt<strong>en</strong>ir, si possible, un souti<strong>en</strong> méthodologique auprès <strong>de</strong>s membres plus ou moinsexposés aux mêmes problèmes dans le cadre <strong>de</strong> leurs fonctions respectives. 2) Obt<strong>en</strong>ir les visions<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s membres pour ajuster les efforts et adapter le cadre <strong>de</strong> l’évaluation à leurs att<strong>en</strong>tes.Cette secon<strong>de</strong> att<strong>en</strong>te sous-jac<strong>en</strong>te <strong>de</strong> la direction <strong>en</strong>vers ses organes <strong>de</strong> gouvernance lorsqu’elleleur soumet ces questions nous amène à nous <strong>en</strong> poser une nouvelle : dans quelle mesure uneévaluation adaptée au contrôle <strong>de</strong>s activités et <strong>de</strong> la qualité <strong>du</strong> programme par les organes <strong>de</strong>gouvernance est-elle compatible avec une évaluation « réflexive », faite pour aviver la réflexionstratégique ? Des indicateurs simples et lisibles facilitant la prise <strong>en</strong> main <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> la TdVpar les membres <strong>du</strong> CS et <strong>du</strong> CA lors <strong>de</strong>s courtes séances <strong>de</strong> conseils peuv<strong>en</strong>t-ils servir lesmembres opérationnels qui doiv<strong>en</strong>t tirer le bilan et faire une analyse <strong>de</strong> leur projet ? Pour ladirection, la procé<strong>du</strong>re <strong>de</strong> l’évaluation permet que celle-ci joue les <strong>de</strong>ux rôles – contrôle etvalidation par les organes <strong>de</strong> gouvernance / réflexion stratégique <strong>de</strong> l’équipe – <strong>en</strong> ce qu’ellecomporte <strong>de</strong>ux phases exposées à la section 7.1 : une phase d’auto-évaluation qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> untravail réflexif <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> projet, et une phase externe avec le concours d’évaluateurs sous laresponsabilité <strong>du</strong> CS (Direction, com.pers., 2010). Il nous semble cep<strong>en</strong>dant que <strong>de</strong>s t<strong>en</strong>sions,403


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talevoire <strong>de</strong>s paradoxes, <strong>en</strong>tre la p<strong>en</strong>sée stratégique et l’élaboration d’indicateurs d’évaluation <strong>du</strong>programme, mérit<strong>en</strong>t d’être soulevés.La démarche visant à fixer <strong>de</strong>s indicateurs pour évaluer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale peut être unexercice intéressant <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la réflexion stratégique, <strong>en</strong> ce qu’il incite à se projeter plusloin, à <strong>en</strong>visager la façon dont pourront réagir les acteurs visés et quels signaux pourront nouspermettre <strong>de</strong> le compr<strong>en</strong>dre. L’effet inverse peut tout autant se pro<strong>du</strong>ire : fixer <strong>de</strong>s indicateurssimples et lisibles à l’att<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance semble s’opposer – ou plutôt ne paspouvoir s’inscrire – dans la p<strong>en</strong>sée et l’élaboration stratégique. Si les chefs <strong>de</strong> projets ont eu <strong>de</strong>sdifficultés à proposer rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t, c’est-à-dire dès la construction <strong>de</strong>s projets 2011-2015, lesindicateurs d’impact, c’est <strong>en</strong> partie parce qu’au mom<strong>en</strong>t d’écrire le projet, ils ne sont <strong>en</strong> généralpas assez avancés dans l’action pour pouvoir déjà exposer la nature <strong>de</strong> ses apports. D’ailleurs, lessituations éminemm<strong>en</strong>t complexes que sont les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> fondés autour d’un problèmed’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t empêch<strong>en</strong>t d’emblée la prévision totale, ou même avancée <strong>du</strong> déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’action. Cette complexité appelle l’action stratégique selon A-C. Martinet (2006), et cette actionstratégique ne saurait se laisser <strong>en</strong>serrer dans le carcan <strong>de</strong> l’indicateur. A la suite <strong>de</strong> l’auteur, citonsE. Morin (1990 : 178) :« La complexité appelle la stratégie. II n’y a que la stratégie pour s’avancer dansl’incertain et l’aléatoire [...] (elle) est l’art d’utiliser les informations qui survi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t dansl’action, <strong>de</strong> les intégrer, <strong>de</strong> formuler soudain <strong>de</strong>s schémas d’action et d’être apte àrassembler le maximum <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>s pour affronter l’incertain ». Il ajoute que « l’actionstratégique, les comportem<strong>en</strong>ts autonomes et auto-organisateurs ne se déploi<strong>en</strong>t pas faceà un <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t donné, câblé, parfaitem<strong>en</strong>t connaissable et prévisible » (Martinet,2006 : 32).Pour appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les implications <strong>de</strong> ce que nous dis<strong>en</strong>t ces auteurs dans le cas <strong>de</strong> la TdV,pr<strong>en</strong>ons <strong>de</strong>s exemples parmi les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales que nous avons r<strong>en</strong>contrées plus hautdans la thèse. D’abord, celui <strong>de</strong> la controverse sur la démoustication <strong>en</strong> Camargue et l’expertisem<strong>en</strong>ée par la TdV sur l’impact <strong>du</strong> traitem<strong>en</strong>t Bti sur la faune non cible. Au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> laconstruction <strong>du</strong> plan quinqu<strong>en</strong>nal 2006-2010, le dossier « Bti » comm<strong>en</strong>çait à attirer l’att<strong>en</strong>tion<strong>de</strong>s acteurs d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Camargue (dont la TdV), mais la TdV ne pouvait pas prévoirqu’elle réussirait à obt<strong>en</strong>ir que soit conditionnée la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la démoustication auxrésultats <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> d’impact <strong>du</strong> traitem<strong>en</strong>t. Elle ne pouvait pas davantage prévoir que sonexpertise allait s’avérer concluante et lui donner un pouvoir <strong>de</strong> négociation auprès <strong>de</strong>s acteursrégulateurs (PNRC et Conseil général) chargés <strong>du</strong> dossier. Etant donnée l’imprévisibilité <strong>de</strong> laprogression <strong>de</strong> l’action sur ce dossier, il y a fort à parier que ses résultats probants n’aurai<strong>en</strong>t pas404


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueété valorisés si un cadre d’évaluation sous forme d’indicateurs avai<strong>en</strong>t été mis <strong>en</strong> place sur la base<strong>de</strong>s projets prévus <strong>en</strong> 2006. Un autre exemple peut être ici considéré : celui <strong>du</strong> projet « santé etconservation » déjà évoqué dans le précéd<strong>en</strong>t chapitre. La TdV a comm<strong>en</strong>cé à travailler dans cedomaine émerg<strong>en</strong>t et s’est rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t fait une place dans cette niche. Ce domaine d’action estcomplètem<strong>en</strong>t intégré au nouveau plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015. Encore une fois, <strong>de</strong>s indicateursfixés <strong>en</strong> 2006 n’aurai<strong>en</strong>t pas permis <strong>de</strong> mesurer cette progression <strong>de</strong> l’organisation. Il semble alorsque si <strong>de</strong>s indicateurs doiv<strong>en</strong>t être mis <strong>en</strong> place pour outiller le nouveau cadre d’évaluation(Encadré 7.1), ils <strong>de</strong>vront pr<strong>en</strong>dre une forme qui laisse une place à l’incertain et à l’opportunisme.D’autre part, à l’image <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à laquelle elle s’adresse, la stratégie d’action –même lorsqu’elle sera cette fois bi<strong>en</strong> avancée – ne saurait se ré<strong>du</strong>ire à une manœuvre simple etfacilem<strong>en</strong>t explicable. L’action <strong>de</strong> la TdV est faite d’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> micro-actions, d’actionsmulti-scalaires, d’analyse <strong>de</strong>s opportunités et <strong>de</strong> tra<strong>du</strong>ctions <strong>en</strong> pratiques <strong>de</strong> stratégies émerg<strong>en</strong>tes,comme le montr<strong>en</strong>t les actions brossées notamm<strong>en</strong>t dans le chapitre 3. C’est un autre <strong>de</strong>sfacteurs que l’on peut associer à la difficulté éprouvée par les équipes pour élaborer <strong>de</strong>sindicateurs pour évaluer l’impact <strong>en</strong> termes écologiques <strong>de</strong>s projets.Au vue <strong>de</strong> ces considérations sur la nature complexe <strong>de</strong> la p<strong>en</strong>sée stratégique (comme <strong>de</strong>ssituations auxquelles elles s’attach<strong>en</strong>t – Martinet, 2006), une interrogation sur les effetspot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t contre-pro<strong>du</strong>ctifs <strong>de</strong> l’usage <strong>de</strong>s indicateurs semble indiquée. En effet, unefixation prématurée <strong>de</strong>s indicateurs pourrait freiner et restreindre la réflexion stratégique <strong>en</strong>donnant l’illusion que l’action pourrait être toute tracée. Cela pourrait con<strong>du</strong>ire à ce que le suivi<strong>de</strong> l'activité <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>ne sa norme unique, au détrim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la poursuite <strong>de</strong>s objectifs eux-mêmes. Ladirection, comme plusieurs chercheurs, évoque spontaném<strong>en</strong>t cette dérive pot<strong>en</strong>tielle, et indiqueque c’est <strong>de</strong> sa responsabilité « <strong>de</strong> veiller à ce que les indicateurs ne remplac<strong>en</strong>t pas mais alim<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t l’analyselors <strong>de</strong>s évaluations et rest<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s outils pour synthétiser et mettre <strong>en</strong> visibilité » (Direction com.pers., 2010).En somme, fixer les indicateurs simples <strong>en</strong> amont <strong>du</strong> projet peut con<strong>du</strong>ire à un effet contrepro<strong>du</strong>ctifsi cela doit nier le caractère complexe <strong>de</strong>s situations et émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s stratégies d’actionspubliques. C. Riveline (1991), qui a démontré l’ajustem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> comportem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s acteurs auxcritères selon lesquels ils sont jugés, nous indique que la fixation trop rapi<strong>de</strong> d’indicateurs, selon<strong>de</strong>s critères trop simplificateurs, peut égalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>traver la réflexion stratégique <strong>de</strong>s équipes. Al’inverse, si la difficulté à élaborer ces indicateurs repousse trop loin leur formalisation, ils seretrouv<strong>en</strong>t dépourvus <strong>de</strong> leur s<strong>en</strong>s qui est d’outiller la comparaison et l’évolution dans le temps.« Poser <strong>de</strong>s indicateurs a posteriori, justifier les choses a posteriori, c’est un exercice <strong>de</strong> style » (Direction,405


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talecom.pers., 2010). Dans ces <strong>de</strong>ux cas, l’utilisation <strong>de</strong>s indicateurs pose sérieusem<strong>en</strong>t question. Ilnous faut tout <strong>de</strong> même préciser que la difficulté à élaborer <strong>de</strong>s indicateurs, leur pot<strong>en</strong>tielémulateur ou contre-pro<strong>du</strong>ctif sont très variables <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s projets. Parexemple, d’après la direction (com.pers., 2010), la logique <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong>vraitd’elle-même favoriser l’évaluation : « Les projets doiv<strong>en</strong>t être conçus à partir <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation(parmi d’autres critères) : il doit donc y avoir une évaluation initiale <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>s populations, communautés etécosystèmes. L’évaluation a posteriori <strong>de</strong>vrait s’appuyer sur la même analyse. Or certaines populations ou espècessont assez bi<strong>en</strong> suivies ».Les membres <strong>de</strong> la TdV sont <strong>en</strong> réalité tiraillés <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux logiques d’utilisation <strong>de</strong>s indicateurs.La première serait <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s indicateurs simples et directs pour mesurer les résultats<strong>de</strong>s actions, qui aurai<strong>en</strong>t l’avantage <strong>de</strong> fournir un outil pour <strong>de</strong>s évaluations peu coûteuses <strong>en</strong>temps, <strong>de</strong> façon à ne pas démobiliser les équipes <strong>de</strong> leur projet, et lisibles, pour s’adresser auxorganes <strong>de</strong> gouvernance. Bi<strong>en</strong> que le souci <strong>de</strong> ne pas mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s procé<strong>du</strong>res lour<strong>de</strong>scontribue à maint<strong>en</strong>ir cette première logique dans les réflexions autour <strong>de</strong> l’évaluation, c’est lasecon<strong>de</strong> qui l’emporte. Cette secon<strong>de</strong> logique est celle qui vise à utiliser les indicateurs <strong>de</strong> façon àce qu’ils « ne remplac<strong>en</strong>t pas mais alim<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t l’analyse lors <strong>de</strong>s évaluations » (Direction com.pers., 2010).Dans cette perspective, l’évaluation consiste à faire une analyse rétrospective qui raconte l’histoire<strong>du</strong> projet évalué, et les indicateurs doiv<strong>en</strong>t être <strong>de</strong>s repères pour raconter cette histoire et retracerla chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s.Ces élém<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> discussion converg<strong>en</strong>t vers la nécessité d’alim<strong>en</strong>ter le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5niveaux d’impact <strong>en</strong> veillant à <strong>en</strong> conserver la souplesse et à adapter la mise <strong>en</strong> place d’indicateursaux spécificités <strong>de</strong> chaque projet, « ce qui est une évid<strong>en</strong>ce, mais pas si facile à mettre <strong>en</strong> pratique » pour ladirection (com.pers., 2009, 2010). Les réactions <strong>de</strong>s organes <strong>de</strong> gouvernance vont dans le mêmes<strong>en</strong>s. Le conseil d’administration a salué les avancées dans la réflexion <strong>de</strong> la TdV malgré lesdifficultés méthodologiques pour lesquelles il n’a pas plus <strong>de</strong> réponse, <strong>en</strong> signalant vaguem<strong>en</strong>tque les investissem<strong>en</strong>ts dans l’évaluation <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t rester raisonnables (Compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> CA,docum<strong>en</strong>t interne, 2009). A la suite <strong>de</strong> la première évaluation réalisée à partir <strong>de</strong> ce cadre <strong>en</strong> 5niveaux d’impact (évaluation fin <strong>de</strong> programme 2006-2010), le conseil sci<strong>en</strong>tifique fait savoir à ladirection et à l’équipe qu’ils ne leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai<strong>en</strong>t pas l’impossible : pour certaines <strong>de</strong>s activités<strong>de</strong> la TdV, il n’est pas possible d’évaluer l’impact alors que ces actions sont indirectes par rapportà l’objet.« Le conseil sci<strong>en</strong>tifique félicite la direction et l’équipe pour l’analyse <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong>l’action qui a été m<strong>en</strong>ée et intro<strong>du</strong>ite dans l’évaluation finale. Cep<strong>en</strong>dant, le CS note lefait que les impacts <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> conservation ne sont pas directs et simples pourbeaucoup <strong>de</strong>s domaines d’activité <strong>de</strong> la TdV et qu’il est important <strong>de</strong> le reconnaître. Il est406


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiquedonc plutôt recommandé que l’effort soit poursuivi pour développer une approche plusexplicite dans les domaines où l’impact peut être id<strong>en</strong>tifié. Plus spécifiquem<strong>en</strong>t, le CSrecomman<strong>de</strong> :i) que la direction développe un « impact pathway framework » pour gui<strong>de</strong>r lesinvestissem<strong>en</strong>ts <strong>du</strong> programme 2011-2015ii) un système <strong>de</strong> suivi et d’évaluation <strong>du</strong> programme (distinct <strong>de</strong>s suivis qui sont réalisésdans le programme) <strong>de</strong>vrait être établi, pour permettre <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> lumière les résultats(outcomes) et impacts. Ce système <strong>de</strong>vra permettre <strong>de</strong> distinguer les changem<strong>en</strong>ts obt<strong>en</strong>usgrâce à l’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> la TdV <strong>de</strong> ceux qui peuv<strong>en</strong>t avoir lieu pour d’autres raisons »(Conclusions <strong>du</strong> Conseil Sci<strong>en</strong>tifique, docum<strong>en</strong>t interne, 2010, tra<strong>du</strong>ction).Il y a donc un accord <strong>en</strong>tre le CS (puis le CA) sur le fait que la mesure <strong>de</strong> l’impact <strong>du</strong> programme<strong>de</strong> la TdV sur les ZH (<strong>en</strong> termes écologiques, niveau 1) n’est pas un objectif à poursuivre <strong>en</strong>coûte que coûte si la nature <strong>de</strong>s actions ne le permett<strong>en</strong>t pas. Dans ses recommandations, le CSreplace lui-même les indicateurs d’impact dans la perspective <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> réflexionstratégique qu’ils permett<strong>en</strong>t d’outiller, non dans une logique <strong>de</strong> mesure mais dans une logique <strong>de</strong>chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégie et les objectifs écologiques. En effet, le CS a été s<strong>en</strong>sible àl’approche <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact proposée, qui a évoqué pour certains d’<strong>en</strong>tre eux 216 le conceptd’ « impact pathway framework » (Briones et al., 2004). Ce cadre conceptuel a été développé au début<strong>de</strong>s années 2000, d’abord par l’ag<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> coopération alleman<strong>de</strong>, la GTZ, qui cherchait à évaluerl’impact <strong>de</strong>s programmes qu’elle finance. Le concept a notamm<strong>en</strong>t été am<strong>en</strong>dé par <strong>de</strong>ssci<strong>en</strong>tifiques travaillant dans les thématiques <strong>de</strong> l’agriculture et la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressourcesnaturelles, dans l’objectif d’évaluer l’impact <strong>de</strong> programme <strong>en</strong> situation complexe (Douthwaite etal., 2003 ; Springer-Heinze et al., 2003). Ce cadre conceptuel est, selon la définition <strong>de</strong> ces auteurscités, proche <strong>de</strong> la logique mise <strong>en</strong> place à la TdV dans ses cadres <strong>de</strong>s projets (Encadré 6.1,chapitre 6) et d’évaluation : l’important est <strong>de</strong> travailler la logique d’action <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> l’impactque l’on souhaite obt<strong>en</strong>ir, tout <strong>en</strong> explicitant au maximum les <strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>tre l’action, leschangem<strong>en</strong>ts et les impacts 217 . Ce cadre conceptuel conforte la TdV par rapport à son cadre <strong>de</strong>sprojets et l’inspire pour am<strong>en</strong><strong>de</strong>r son cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact. La préoccupation216 Le présid<strong>en</strong>t <strong>du</strong> Conseil Sci<strong>en</strong>tifique est lui-même sci<strong>en</strong>tifique dans un c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche spécialisé dans lemilieu aquatique et dans les espèces halieutique (WordFishC<strong>en</strong>ter). Cette organisation a développé ce cadreconceptuel d’impact pathway analysis, ou impact pathway evaluation, pour évaluer l’impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal et social <strong>de</strong> sesprogrammes <strong>de</strong> recherche. Il invite alors la TdV à pr<strong>en</strong>dre connaissance et s’inspirer <strong>de</strong>s avancées acquises dans ledomaine. C’est un exemple <strong>de</strong> ressource informationnelle transmise à la TdV par le truchem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s pratiques liées àla gouvernance.217 « A program theory is an explicit theory or mo<strong>de</strong>l of how a project will, or has, brought about impact (Rogers etal., 2000). A program theory consists of a sequ<strong>en</strong>ced hierarchy of outcomes – find other words an impact pathwaywith milestones on the route. The hierarchy begins with the project outputs, followed by a chain of intermediateoutcomes that are th<strong>en</strong> followed by the wi<strong>de</strong>r and oft<strong>en</strong> longer-term outcomes. It repres<strong>en</strong>ts a set of hypothesesabout what needs to happ<strong>en</strong> for the project output to be transformed, over time, into impact on highly aggregated<strong>de</strong>velopm<strong>en</strong>t indicators. It is the hypothetical bridge betwe<strong>en</strong> project outcomes and ev<strong>en</strong>tual impact. Program theoryevaluation (PTE) is simply an evaluation gui<strong>de</strong>d by the impact pathway » (Douthwaite et al., 2003 : 251).407


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale<strong>de</strong> la direction est <strong>en</strong> effet <strong>de</strong> poursuivre la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> façon à ce qu’ilstra<strong>du</strong>is<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> la logique d’action confortée par le cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets. Les 5niveaux d’impact ne doiv<strong>en</strong>t pas être 5 compartim<strong>en</strong>ts indép<strong>en</strong>dants, mais doiv<strong>en</strong>t au contraireai<strong>de</strong>r à expliciter l’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t causal <strong>de</strong>puis l’action jusqu’aux impacts (Direction, com.pers.,2010). Ce cadrage doit ainsi permettre d’organiser l’analyse évaluative <strong>de</strong> la stratégie d’actionconstruite sur une théorie d’action qu’il faut alors vérifier. C’est cette logique évaluative qui vanous occuper dans la section suivante où l’on va s’attacher à voir comm<strong>en</strong>t la TdV peut am<strong>en</strong><strong>de</strong>rce cadre d’évaluation pour favoriser au maximum la réflexion stratégique.7.3 L’évaluation, autre « espace-temps » pour la réflexionstratégiqueIl est prévu que le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact soit am<strong>en</strong>dé au plus tôt afin quepuiss<strong>en</strong>t être prés<strong>en</strong>tés <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> résultats aux évaluateurs dès 2013 (Evaluation à miparcours<strong>du</strong> programme 2011-2015). Pour la direction <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, la difficulté – voirel’impossibilité – d’évaluer l’impact tangible sur les zones humi<strong>de</strong>s et leur biodiversité n’invali<strong>de</strong> <strong>en</strong>ri<strong>en</strong> la démarche. « Le but <strong>de</strong> tout ça c’est bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> progresser, d’augm<strong>en</strong>ter l’efficacité <strong>de</strong> nos projets et montrer àla gouvernance que tout va bi<strong>en</strong>. [Oui, mais la réponse à cela c’est toujours : « <strong>en</strong>core faut-il pouvoir l’évaluer ou lemesurer pour savoir si on l’a augm<strong>en</strong>té ou pas » …]. Non, ce n’est quand même pas une tarte à la crème. Même situ ne sais pas le mesurer, tu peux être convaincu que tu feras mieux d’une certaine manière que ce que tu faisaisavant, <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant un peu <strong>de</strong> recul. » (Direction, com.pers., 2010). Cep<strong>en</strong>dant, l’am<strong>en</strong><strong>de</strong>m<strong>en</strong>t <strong>du</strong> cadred’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact doit respecter <strong>de</strong>ux critères : le « nombre doit rester raisonnablepour chacun <strong>de</strong>s projets » et le coût <strong>de</strong> ces indicateurs doit rester faible, « les ressources humaines etfinancières ne <strong>de</strong>vant pas être trop détournée <strong>du</strong> programme », c’est-à-dire <strong>de</strong> l’action pour la conservation(Direction, com.pers., 2010).Notre propos se situe <strong>en</strong> amont <strong>de</strong> la construction et <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place d’indicateurssynthétiques et peu coûteux. En effet, maint<strong>en</strong>ant que nous avons démêlé les différ<strong>en</strong>tesdim<strong>en</strong>sions propres à l’évaluation et leurs interdép<strong>en</strong>dances, nous pouvons à prés<strong>en</strong>t nousconsacrer à celle qui nous préoccupe directem<strong>en</strong>t dans le cadre <strong>de</strong> notre problématique <strong>de</strong>recherche qui est celle <strong>de</strong> la façon dont les ONGE peuv<strong>en</strong>t raisonner leur stratégie pourr<strong>en</strong>forcer leur action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Dans cette perspective, nous allons nous conc<strong>en</strong>trer sur408


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiquela façon dont les procé<strong>du</strong>res d’évaluation peuv<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t ouvrir un espace-temps propice à laréflexion stratégique <strong>en</strong> faveur d’une action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale r<strong>en</strong>forcée.7.3.1 Evaluer la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale avant d’évaluer l’impact surl’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talNotre démarche consistera donc à id<strong>en</strong>tifier ce qu’il semble utile d’évaluer et dans une moindremesure comm<strong>en</strong>t procé<strong>de</strong>r. Pour préciser le propos, repartons <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux élém<strong>en</strong>ts donnés dans lecadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact (Encadré 7.1).1. « Jusqu’à prés<strong>en</strong>t, le plus souv<strong>en</strong>t, l’évaluation <strong>de</strong> nos résultats a été limitée aux niveaux 5 ou 4(pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique et technique) ; dans la perspective <strong>de</strong> la mission <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, c’estle niveau 1 qui doit être visé <strong>en</strong> priorité ». D’une part, tous (équipe, direction, gouvernance)s’accord<strong>en</strong>t à dire que la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ne réussira pas l’impossible qui serait d’évaluer sesvéritables impacts sur les ZHM. Il n’<strong>en</strong> reste pas moins que ce « niveau d’impact 1 » fixé sur l’étatmatériel <strong>de</strong> l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal est le bon niveau d’ancrage, autant <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong>s projets(Encadré 6.1) que <strong>du</strong> cadre d’évaluation (Cadre <strong>de</strong> l’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact, Encadré7.1). D’autre part, les membres <strong>de</strong> la TdV sont bi<strong>en</strong> d’accord pour dire que l’évaluation n’est pasune fin <strong>en</strong> soi, mais que son but est bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> faire progresser le programme et les actions <strong>en</strong>général. Il y a donc un besoin <strong>de</strong> s’interroger sur la façon dont ces évaluations peuv<strong>en</strong>t êtreconstruites et m<strong>en</strong>ées pour jouer ce rôle. Nous allons alors réfléchir à ce qu’il semble opportund’évaluer, <strong>en</strong> nous appuyant d’une part sur nos analyses d’actions concrètes (Partie 2) et sur leszones d’ombre repérées au chapitre 6.2. « L’évaluation <strong>de</strong> l’impact doit se faire <strong>en</strong> priorité au niveau <strong>de</strong>s projets. Elle implique d’avoirtrès clairem<strong>en</strong>t id<strong>en</strong>tifié pour chaque projet les causes <strong>de</strong> dégradation, les processus <strong>en</strong> cours etles facteurs <strong>de</strong> blocage, les acteurs clés, ainsi que les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> les atteindre et <strong>de</strong> faire changerleurs pratiques » (Encadré 7.1). C’est bi<strong>en</strong> dans la logique <strong>du</strong> cadre d’évaluation mis <strong>en</strong> place aucours <strong>de</strong> la planification <strong>en</strong> 2010 que s’inscrit le propos : nous <strong>en</strong>visageons <strong>en</strong> effet l’évaluation<strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> la TdV là où elles se pass<strong>en</strong>t, à l’échelle <strong>de</strong>s projets, <strong>en</strong> considérant leur mo<strong>de</strong>d’insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.La démarche proposée s’appuie est celle que nous avons mis <strong>en</strong> place à travers nos étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> casdéveloppées dans la <strong>de</strong>uxième partie : repérer et expliciter les théories d’action sous-jac<strong>en</strong>tes auxprojets et interv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> la TdV et mettre <strong>en</strong> perspective la contribution <strong>de</strong> l’actionaprès avoir déterminer la stratégie mise <strong>en</strong> œuvre (sa place et son rôle). Le lecteur peut retrouverla grille d’évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale connexe à la recherche sci<strong>en</strong>tifique à la section409


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale3.4 (Chapitre 3), le bilan <strong>du</strong> projet m<strong>en</strong>é selon les principes et la théorie d’action <strong>de</strong> la GestionIntégrée à la section 4.4 (Chapitre 4), et la grille d’évaluation <strong>de</strong> la façon dont un Observatoire <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t à gran<strong>de</strong> échelle peut être le support d’actions <strong>en</strong> faveur d’une meilleure prise <strong>en</strong>charge <strong>de</strong>s ZHM à la section 5.3 (Chapitre 5).Nous voulons ici rassembler les idées et conclusions tirées <strong>de</strong> ces précéd<strong>en</strong>ts chapitres, et àprés<strong>en</strong>t <strong>en</strong> dégager quelques élém<strong>en</strong>ts généraux concernant l’organisation dans son <strong>en</strong>semble.Pour cela, le propos gagnerait à être illustré, c’est pourquoi nous le développons ici <strong>en</strong> nousappuyant sur l’un <strong>de</strong>s projets prévus dans le programme 2011-2015, le projet « Ecologie <strong>de</strong> lasanté et conservation » qui est développé au sein <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces. Nous allons partir <strong>du</strong>projet tel qu’il est formulé dans le plan stratégique 2011-2015 (Encadré 7.2). Nous tâcherons<strong>en</strong>suite <strong>de</strong> dégager les principales lignes <strong>de</strong> la théorie d’action proposée, pour <strong>en</strong>fin les placerdans notre grille d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action (3).Formulation <strong>du</strong> projet « Ecologie <strong>de</strong> la santé et conservation »Encadré 7.2 : Projet « Ecologie <strong>de</strong> la santé et conservation » <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces « Conservation <strong>de</strong>sespèces et <strong>de</strong> leurs populations dans le contexte <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts globaux » (Plan stratégique TdV 2011-2015 : 47)Ecologie <strong>de</strong> la santé et conservationObjectif <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal ultime• Concilier la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s avec les risques associés pour lhommeCe qui doit changer dans la <strong>gestion</strong> :- Lutilisation massive et non raisonnée <strong>de</strong> molécules <strong>de</strong> luttes (antibiotiques, antiparasitaires,antivectorielles, pestici<strong>de</strong>s....)- La <strong>de</strong>struction d'espèces ou d'habitats <strong>de</strong>s ZHM pour <strong>de</strong>s raisons sanitairesObjectifs opérationnels <strong>du</strong> projet• La conservation <strong>de</strong>s espèces au statut défavorable p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>s épizooties ou <strong>de</strong>s pollutions• Compr<strong>en</strong>dre leffet <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts globaux sur les interactions <strong>en</strong>tre les espèces sauvages, leursanté, et la santé publique et vétérinaireCes approches permettront dai<strong>de</strong>r à :• la conservation <strong>de</strong>s espèces au statut défavorable p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>s épizooties ;• lévaluation <strong>de</strong>s effets <strong>de</strong> lutilisation massive <strong>de</strong> molécules <strong>de</strong> luttes (antibiotiques, antiparasitaires,antivectorielles, pestici<strong>de</strong>s...) ;Zoonoses et rôle <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong>s ZHM dans leur épidémiologieEffets <strong>de</strong>s traitem<strong>en</strong>ts (antiparasitaires, antibiotiques, antivectoriels...) sur la faune <strong>de</strong>s ZHMEffets <strong>de</strong>s pathogènes sur la dynamique <strong>de</strong>spèce <strong>de</strong>s ZHM• concilier la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s avec les risques associés pour lhomme.Stratégie et ciblesLa stratégie consiste à établir un pont <strong>en</strong>tre le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la conservation et le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé <strong>en</strong>gagnant <strong>en</strong> crédibilité sci<strong>en</strong>tifique dans la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s problèmes sanitaires dans l'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Il s'agit<strong>en</strong> particulier <strong>de</strong> modifier le discours ou les représ<strong>en</strong>tations négatifs sur les espèces ou les ZHM <strong>en</strong>général (exemple : zones humi<strong>de</strong>s, parasites et maladies), souv<strong>en</strong>t portés par le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé ; et<strong>de</strong> faire pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte dans les stratégies <strong>de</strong> conservation les conséqu<strong>en</strong>ces sanitaires év<strong>en</strong>tuelles.Les cibles principales sont les organisations sanitaires, les <strong>gestion</strong>naires d'espaces naturels, le grandpublic (santé publique), et les acteurs locaux (éleveurs, vétérinaires, chasseurs...).410


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueProblématique sci<strong>en</strong>tifiqueLobjectif sci<strong>en</strong>tifique est <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre les interactions <strong>en</strong>tre la biodiversité et les problèmes <strong>de</strong> santépublique et vétérinaires sous l'effet <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts globaux. Le projet doit concilier la conservation <strong>de</strong>la biodiversité <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes et la prés<strong>en</strong>ce et le bi<strong>en</strong>-être <strong>de</strong>s populationshumaines ; ai<strong>de</strong>r à la conservation d'espèces au statut défavorable lors d'épizooties ou <strong>de</strong> pollutions.Résultats att<strong>en</strong><strong>du</strong>s1. Statut <strong>de</strong>s populations et communautés• Une augm<strong>en</strong>tation ou le mainti<strong>en</strong> d'effectifs <strong>de</strong> certaines populations (ex. : lapins)2. Changem<strong>en</strong>ts dattitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> pratiques constatés• Une prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong> la biodiversité dans les politiques <strong>de</strong> santé publique etvétérinaires• Une diminution <strong>de</strong>s conflits <strong>en</strong>tre usagers <strong>de</strong> la nature et espèces sauvages• Une meilleure perception et une modification <strong>de</strong>s discours sur les espèces <strong>de</strong>s ZHM (ex. : ZHM etsanté)• Une diminution <strong>de</strong> l'usage <strong>de</strong> molécules <strong>de</strong> lutte et l'usage <strong>de</strong> molécules moins toxiques• Une augm<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> traitem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s déchets et <strong>de</strong>s polluants et une diminution <strong>de</strong> leurs quantités dansl'<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t3. Intérêt, prise <strong>en</strong> compte <strong>de</strong> nos résultats par les cibles• Des préconisations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>spèces ou <strong>de</strong> leurs habitats, que cela soit pour préserver <strong>de</strong>spopulations à <strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> conservation ou pour contrôler <strong>de</strong>s populations à problèmes (nuisances, santé...)• Un r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong>s <strong>gestion</strong>naires d'espaces protégés à conserver la biodiversité <strong>de</strong>sZHM4. Transfert <strong>de</strong>s résultats réalisés (formation, r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> capacités, vulgarisation, diffusion)• modifier le discours ou les représ<strong>en</strong>tations négatifs sur les espèces ou les ZHM <strong>en</strong> général (zoneshumi<strong>de</strong>s, parasites et maladies) ;• ai<strong>de</strong>r à la prédiction et aux analyses <strong>de</strong> risque face aux changem<strong>en</strong>ts globaux ;• promouvoir la thématique « Ecologie <strong>de</strong> la santé et biodiversité », par lintermédiaire <strong>de</strong> formations,publications, media...Principales lignes <strong>de</strong> la théorie d’action proposée pour la problématique « Santé etconservation »Dans la formulation <strong>de</strong> la problématique et la stratégie proposées pour ce projet « santé etconservation », nous repérons <strong>de</strong>ux lignes d’action.1. L’approche proposée correspond à une théorie sci<strong>en</strong>tifico-militante que nous avons déjàr<strong>en</strong>contré dans le cas <strong>de</strong> l’OZHM (Chapitre 5) : l’ancrage <strong>de</strong> l’action rési<strong>de</strong> dans ledéveloppem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances dans le domaine <strong>de</strong>s relations écologiques <strong>en</strong>tre faune sauvage/ maladies (tous types) / traitem<strong>en</strong>ts (tous types). Les relations doiv<strong>en</strong>t être comprises dans les<strong>de</strong>ux s<strong>en</strong>s : d’une part, les rôles <strong>de</strong>s espèces <strong>de</strong>s ZHM dans les maladies transmissibles à l’homme(zoonoses) ou aux animaux d’élevage. Mais aussi l’impact <strong>de</strong>s pathogènes issus <strong>de</strong> l’élevage sur lafaune sauvage et surtout l’impact <strong>de</strong>s traitem<strong>en</strong>ts (antibiotiques, antiparasitaires, antivectorielles,pestici<strong>de</strong>s...). A partir <strong>de</strong> ces fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts sci<strong>en</strong>tifiques, la proposition est <strong>de</strong> faire connaître lesimpacts <strong>de</strong>s traitem<strong>en</strong>ts sur la faune sauvage et changer la perception concernant les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tremaladies et espèces <strong>de</strong>s ZHM à travers ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ux canaux :411


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale- l’insertion dans la communauté sci<strong>en</strong>tifique (pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> recherche, différ<strong>en</strong>ts types <strong>de</strong>comités), dans les sphères sci<strong>en</strong>tifico-techniques (comités vétérinaires, etc.) : les sci<strong>en</strong>tifiques etles pratici<strong>en</strong>s <strong>du</strong> secteur <strong>de</strong> la santé sont respectivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s vecteurs <strong>de</strong>s connaissances quiinflu<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t les décisions et les pratiques, mais aussi <strong>de</strong>s acteurs directs dans la façon dont sonttraités les problèmes ;- la s<strong>en</strong>sibilisation <strong>du</strong> grand public (communication) : la logique sous-jac<strong>en</strong>te est <strong>de</strong> changer lesperceptions existantes dans le grand public afin <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire la pression politique qui accompagnesouv<strong>en</strong>t les risques <strong>de</strong> zoonoses.2. La <strong>de</strong>uxième composante <strong>de</strong> la théorie d’action repérée est une approche que nous pouvonsqualifier <strong>de</strong> « sci<strong>en</strong>tifico-<strong>gestion</strong>naire », visant à pousser à l’intégration <strong>de</strong> ces problématiques dans« les stratégies <strong>de</strong> conservation » et les pratiques <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Pour influ<strong>en</strong>cer la <strong>gestion</strong> concrète,ce sont les « acteurs locaux » qui sont visés <strong>en</strong> premier lieu. Les cibles évoquées dans laformulation synthétique <strong>du</strong> projet (Encadré 7.2) sont d’une part les <strong>gestion</strong>naires d’espacesnaturels et d’autre part les usagers (chasseurs, vétérinaires).- Le travail sci<strong>en</strong>tifique doit permettre d’id<strong>en</strong>tifier la s<strong>en</strong>sibilité <strong>de</strong>s espèces aux épizooties et auxdiffér<strong>en</strong>tes molécules qui sont diffusées dans l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ces connaissances doiv<strong>en</strong>t êtreintégrées <strong>de</strong> manière à adapter les mesures à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s espaces naturels. La façon dont cesconnaissances peuv<strong>en</strong>t être tra<strong>du</strong>ites <strong>en</strong> termes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> et les interv<strong>en</strong>tions visant à associer les<strong>gestion</strong>naires à ces problématiques sont à ce sta<strong>de</strong> peu explicitées.- Ces connaissances peuv<strong>en</strong>t par ailleurs aboutir à <strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> à <strong>de</strong>stination<strong>de</strong>s autres types d’utilisateurs <strong>de</strong>s ZH. Il s’agit d’expliquer les mécanismes écologiques <strong>en</strong> li<strong>en</strong>avec les maladies, les traitem<strong>en</strong>ts et la faune sauvage pour inciter les chasseurs, les éleveurs àmettre <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> meilleures pratiques <strong>en</strong> situation normale (prophylaxie) et à bi<strong>en</strong> réagir <strong>en</strong> casd’événem<strong>en</strong>t comme les épizooties aviaires.Ces <strong>de</strong>ux théories d’action ne sont bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>du</strong> que les composantes d’une seule logique d’actionpour avancer sur la problématique espèces <strong>de</strong>s ZH / maladies / et traitem<strong>en</strong>ts. Gardonscep<strong>en</strong>dant cette distinction <strong>en</strong>tre ces <strong>de</strong>ux niveaux pour les replacer dans une grille d’évaluation<strong>de</strong> la stratégie d’action.Grille pour évaluer la stratégie d’action tournée vers l’impact sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>talPour contribuer au processus d’amélioration <strong>de</strong> la stratégie, l’évaluation doit apporter <strong>de</strong>sélém<strong>en</strong>ts sur : la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> cette stratégie, la façon dont elle a été mise <strong>en</strong> œuvre (acquisitionet mobilisation <strong>de</strong>s ressources, mo<strong>de</strong> d’insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>), les résultats <strong>de</strong> cettemise <strong>en</strong> œuvre ; et cela <strong>en</strong>core davantage lorsqu’il est difficile – voire impossible – d’évaluer412


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiquel’impact tangible d’actions indirectes sur l’objet <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal visé. Comme indiqué plus haut,la direction <strong>de</strong> la TdV prévoyait que la construction <strong>de</strong>s grilles d’évaluation <strong>de</strong>s projets soi<strong>en</strong>tréalisée par leurs responsables respectifs directem<strong>en</strong>t dans la logique <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>sprojets. Les indicateurs pour évaluer les 5 niveaux d’impact <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t donc restituer la logiqued’action, l’<strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>t causal <strong>de</strong>s actions jusqu’aux impacts sur l’objet écologique (DirectionTdV, com.pers., 2010), autrem<strong>en</strong>t dit la stratégie d’action. Cep<strong>en</strong>dant, nous avons vu que lesstratégies d’action étai<strong>en</strong>t rarem<strong>en</strong>t linéaires et regroupai<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t plusieurs mo<strong>de</strong>s d’action, cequi peut r<strong>en</strong>dre la synthèse sous forme d’indicateurs difficile, même <strong>en</strong> 5 niveaux. Pour saisir etpr<strong>en</strong>dre <strong>du</strong> recul sur la stratégie dans sa complexité, le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact(Encadré 7.1) peut être replacé dans un cadre souple et c<strong>en</strong>tré sur la construction et la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong> la stratégie qu’il s’agira, pour les membres <strong>de</strong> l’équipe, d’évaluer à la moitié et à la fin <strong>du</strong>programme quinqu<strong>en</strong>nal (Tableau 7.2). Ce cadre est volontairem<strong>en</strong>t assez large et simple pourpouvoir accueillir différ<strong>en</strong>tes théories d’action et pouvant être adapté aux configurations <strong>de</strong>chaque projet, comme nous l’avons fait nous-même dans nos étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas <strong>de</strong> la partie 2(Sections 3.4, 4.4 et 5.3). Il comporte plusieurs niveaux <strong>de</strong>puis l’évaluation <strong>de</strong> la formalisation <strong>de</strong>la théorie d’action jusqu’aux impacts <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre :• Evaluer les zones d’ombre <strong>de</strong> la théorie d’action. Comme nous l’avons vu dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>la planification stratégique 2011-2015 (Chapitre 6), et dans l’analyse <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>sactions (Partie 2), les actions ne peuv<strong>en</strong>t pas toujours être totalem<strong>en</strong>t anticipées etprédéterminées au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>du</strong> projet. C’est d’autant plus vrai lorsque laproblématique est d’abord sci<strong>en</strong>tifique, dans la mesure où l’<strong>en</strong>jeu est <strong>en</strong>core <strong>de</strong> connaître lesmécanismes dégradant les ZH et leur biodiversité. Ce n’est pas toujours possible <strong>de</strong> prévoirles recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui <strong>en</strong> découleront, ni la façon <strong>de</strong> s’y pr<strong>en</strong>dre pour pousser àleur adoption par les acteurs concernés. Cep<strong>en</strong>dant, les questions restées <strong>en</strong> susp<strong>en</strong>s aumom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>t trouver <strong>de</strong>s réponses au cours <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong>œuvre. C’est l’<strong>en</strong>jeu <strong>du</strong> premier <strong>de</strong>gré d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action, fondé sur l’idée que« pointer les connaissances manquantes est aussi utile que <strong>de</strong> rec<strong>en</strong>ser les élém<strong>en</strong>ts acquis »(Leviton, 2003).• Evaluer l’utilisation <strong>de</strong>s capacités d’action. Le déploiem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions pour laconservation dép<strong>en</strong>d <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> l’équipe. Nous avons expliqué au précéd<strong>en</strong>t chapitreque ces capacités vont déterminer la place et le rôle que la TdV va pouvoir jouer dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qu’elle vise. Ce volet <strong>de</strong> l’évaluation peut ai<strong>de</strong>r à p<strong>en</strong>ser les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre lesressources stratégiques et l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. L’équipe s’est-elle appuyée sur – et a-tellevalorisé - ses capacités pour agir ? Et comm<strong>en</strong>t a-t-elle r<strong>en</strong>forcé ses capacités, sur quels413


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleaspects ? Sur quelle dim<strong>en</strong>sion la TdV est-elle confortée et peut-elle rev<strong>en</strong>diquer l’occupationd’une place et l’exercice <strong>de</strong> certains rôles ? Ceci correspond à « l’évaluation <strong>de</strong>s efforts » quiest prévu dans le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact 218 .• Evaluer la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie d’action (place et rôle joués) / vérification <strong>de</strong> lathéorie d’action. Lorsqu’il a été possible d’aller assez loin dans l’explicitation <strong>de</strong> la théoried’action au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s projets, elle peut alors être la référ<strong>en</strong>ce pourévaluer : d’une part la vérification <strong>de</strong> sa pertin<strong>en</strong>ce au regard <strong>de</strong> la configuration <strong>du</strong> système<strong>de</strong> <strong>gestion</strong> r<strong>en</strong>contré ; d’autre part les actions concrètes mises <strong>en</strong> œuvre, la place et le rôlejoué par la TdV dans le système. C’est ici que doiv<strong>en</strong>t être replacés les niveaux 3 et 4 <strong>du</strong> cadred’évaluation <strong>de</strong>s projets (Encadré 7.1).• T<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong>s stratégies émerg<strong>en</strong>tes, <strong>de</strong> l’adaptation <strong>de</strong> l’action / Evaluer lesobstacles et contraintes non <strong>en</strong>visagés dans la théorie d’action. Comme nous l’avonsexpliqué plus haut, la part d’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s stratégies d’action est très importante dans uncontexte d’instabilité et d’imprévisibilité <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (tantdans la dim<strong>en</strong>sion écologique que socio-politique). Pour r<strong>en</strong>forcer la stratégie, l’évaluationpeut alors servir à expliciter les opportunités saisies, les changem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> cap, les nouvellesvoies explorées ou abandonnées au cours <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> projet.• Evaluer la contribution <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Enfin, après avoir retracé la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>de</strong> la stratégie d’action, la contribution <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> au changem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHet <strong>de</strong> leurs espèces peut être évaluée. Ceci correspond alors aux niveaux 1 et 2 <strong>du</strong> cadred’évaluation <strong>de</strong>s projets (Encadré 7.1).Le tableau 7.2 illustre ce cadre d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action à partir <strong>de</strong> notre exemple <strong>du</strong>projet « santé et conservation » v<strong>en</strong>ant d’être bâtit pour être mis <strong>en</strong> œuvre <strong>en</strong>tre 2011-2015.218 Ceci est indiqué <strong>de</strong> la manière suivante dans le cadre d’évaluation <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact (Encadré 7.1) :« L’évaluation <strong>de</strong> l’effort se fera quant à lui sur la base <strong>de</strong>s critères suivants : 6. Part<strong>en</strong>ariats et réseaux : Evaluation<strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s établis par le projet/programme avec <strong>de</strong>s personnes, institutions ou réseaux travaillant sur <strong>de</strong>s thèmessimilaires <strong>en</strong> Méditerranée ou ailleurs, ainsi que <strong>de</strong> la valeur ajoutée <strong>de</strong> ces collaborations ; 7. Participation à <strong>de</strong>sprojets nationaux et internationaux ; 8. Ressources <strong>en</strong> personnels et <strong>en</strong> moy<strong>en</strong>s financiers : le budget initial(personnels, investissem<strong>en</strong>ts) a-t-il été respecté, <strong>en</strong> particulier <strong>en</strong> matière <strong>de</strong> dép<strong>en</strong>ses et <strong>de</strong> collecte <strong>de</strong> fondsextérieurs ? ».414


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueTableau 7.2 : Cadre pour l’évaluation <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Avancées sur leszones d’ombre <strong>de</strong> lathéorie d’actionValorisation <strong>de</strong>scapacités dansl’action pour laconservationMise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> lastratégie d’action(place et rôle joués)Vérification <strong>de</strong> lathéorie d’actionStratégiesémerg<strong>en</strong>tesRemise (ou non) <strong>en</strong>question <strong>de</strong> la théoried’actionContribution <strong>de</strong> la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> /Changem<strong>en</strong>t dans lespratiques et l’état <strong>de</strong>l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal1. Théorie sci<strong>en</strong>tifico-militante pourchanger les perceptionsPrécurseurs dans le domaine « santéet conservation » : valorisation <strong>de</strong>l’assise sci<strong>en</strong>tifique, apportd’élém<strong>en</strong>ts tangiblesL’apport <strong>de</strong> connaissance dans lacommunauté sci<strong>en</strong>tifique et las<strong>en</strong>sibilisation <strong>du</strong> grand publicpermet <strong>de</strong> changer les perceptionset favorise une amélioration dansles décisions ?Canaux investis ? Comm<strong>en</strong>t ?[Niveaux 3 et 4]2. Théorie sci<strong>en</strong>tifico-<strong>gestion</strong>nairespour changer les pratiquesComm<strong>en</strong>t inciter à la ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>straitem<strong>en</strong>ts et à la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>sdéchets ? Quelles sont les activitésresponsables ? Quelles sont lescibles ?Ancrage territoriale, Réseaux locaux(<strong>gestion</strong>naires et autres utilisateurs<strong>de</strong> ZH) : partage <strong>de</strong>s réseauxrespectifs <strong>de</strong>s acteurs TdV <strong>en</strong>interneLes connaissances favoris<strong>en</strong>tl’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>faveur <strong>de</strong>s espèces s<strong>en</strong>sibles et pourré<strong>du</strong>ire les conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>sépizooties ? Quelles connaissancessont tra<strong>du</strong>isibles <strong>en</strong>recommandations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> ?Comm<strong>en</strong>t ont-elles été diffusées ?[Niveaux 3 et 4][Niveaux 1 et 2] Plus ou moins r<strong>en</strong>seignés <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la nature,l’avancem<strong>en</strong>t et l’antériorité <strong>de</strong>s projetsCe cadre d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale constitue cep<strong>en</strong>dant une grille <strong>de</strong>fond dans laquelle peuv<strong>en</strong>t être replacées, au mom<strong>en</strong>t d’évaluer le programme, la théorie d’actionet les pratiques mises <strong>en</strong> œuvre. Il s’agit d’une grille générique permettant d’exprimer ce que lesmembres <strong>du</strong> Conseil sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la TdV appell<strong>en</strong>t l’impact pathway analysis, <strong>de</strong>vant organiser laréflexion rétrospective sur les projets ayant été mis <strong>en</strong> œuvre. C’est dans ce schéma analytiqueque peuv<strong>en</strong>t alors être construits les indicateurs <strong>de</strong>s 5 niveaux d’impacts, étant alors le modèleconceptuel <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale vers les impacts sur l’objet écologique àconserver. Il peut donc être utilisé conformém<strong>en</strong>t à ce qui est prévu pour le cadre d’évaluation <strong>en</strong>5 niveaux d’impact : l’analyse se situe d’abord au niveau <strong>de</strong>s projets – évaluation <strong>de</strong>s stratégiesd’action concrètes – pour faire <strong>en</strong>suite l’objet d’une analyse plus globale à l’échelle <strong>de</strong>l’organisation – évaluation <strong>de</strong> la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.415


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale7.3.2 Conclusions sur les processus d’évaluation : <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> la stratégie àl’évaluation <strong>de</strong>s impactsL’évaluation est définie par les pères <strong>de</strong> ce champ disciplinaire comme la pratique consistant à« porter un jugem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> valeur qui con<strong>du</strong>ira à <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong> décisions concernant saprogrammation future » (Hurteau & Houle, 2005 : 3). Dans cette acception, on repère unet<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> l’évaluation : le contrôle et l’amélioration <strong>de</strong>l’action dans une logique procé<strong>du</strong>rale. Pour M. Alkin et C. Christie (2004 : 12), la dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong>contrôle précè<strong>de</strong> la réflexion sur l’action, dans la mesure où c’est la nécessité même <strong>de</strong> r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>scomptes par rapport à la dim<strong>en</strong>sion sociale <strong>de</strong> son activité (accountability 219 ) qui appellel’évaluation. Pour P. Duran (1999 : 170) qui s’intéresse au cas <strong>de</strong>s politiques publiques, le premier<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’évaluation est la compréh<strong>en</strong>sion : « [c’]est <strong>de</strong> r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces connues afin <strong>de</strong>fon<strong>de</strong>r <strong>en</strong> connaissance les actions futures ». En somme, quelle que soit la prédominance <strong>de</strong> ladim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> contrôle (accountability) ou <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> la réflexion sur l’action, elles sont toutes <strong>de</strong>uxprés<strong>en</strong>tes et inhér<strong>en</strong>tes à la pratique <strong>de</strong> l’évaluation, comme nous avons pu l’observer dans lecontexte d’évolution <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> l’évaluation à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.Dans cette ONGE, le contrôle est notamm<strong>en</strong>t c<strong>en</strong>tré sur la bonne <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’organisation(aspects statutaires, budget), et surtout sur le programme d’action qui doit répondre à la mission.Nous avons expliqué que c’est la qualité et la quantité <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique qui alongtemps été le critère d’évaluation principal <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> la TdV. La mission <strong>de</strong> la TdV étantcep<strong>en</strong>dant une mission <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes, l’application <strong>de</strong> larecherche sci<strong>en</strong>tifique et <strong>de</strong> toutes les autres formes d’actions visant à pousser à la conservation<strong>de</strong>s ZH doiv<strong>en</strong>t alors être soumises à l’évaluation. Il s’agit à la fois <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>ir la progression <strong>de</strong>cette approche associant différ<strong>en</strong>tes disciplines et mo<strong>de</strong>s d’action et <strong>de</strong> valoriser l’activité dans samultiplicité et sa cohér<strong>en</strong>ce d’<strong>en</strong>semble. Cep<strong>en</strong>dant, il n’y a pas, pour ces formes d’actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales complexes (souv<strong>en</strong>t sommes <strong>de</strong> micro-actions) et variées, <strong>de</strong> critères et <strong>de</strong>mo<strong>de</strong>s d’évaluation aussi normés et institutionnalisés que dans le domaine <strong>de</strong> la recherchesci<strong>en</strong>tifique. Ceci est <strong>en</strong> partie dû au fait que l’évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> cesactions pose <strong>de</strong>s problèmes méthodologiques qui ne peuv<strong>en</strong>t trouver <strong>de</strong> réponses simples et219 « Alkin (1972), in a paper <strong>de</strong>fining accountability, refers to goal accountability, process accountability, andoutcome accountability. Goal accountability examines whether reasonable and appropriate goals have be<strong>en</strong>established. Governing boards and upper of managem<strong>en</strong>t are the responsible <strong>en</strong>tities for this kind of accountability.Process accountability reflects whether reasonable and appropriate proce<strong>du</strong>res for accomplishing those goals havebe<strong>en</strong> established and implem<strong>en</strong>ted. Typically, managem<strong>en</strong>t and program operators bear responsibility for processaccountability. Outcome accountability refers to the ext<strong>en</strong>t to which established goals have be<strong>en</strong> achieved. As inprocess accountability, managem<strong>en</strong>t and program operators are to be held accountable for outcomes » (Alkin,2004a).416


Chapitre 7 – L’évaluation <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong>s activités et réflexion stratégiqueuniques. Ce questionnem<strong>en</strong>t a donc été pris <strong>en</strong> charge <strong>en</strong> interne par la TdV qui s’interroge surles objectifs d’évaluation <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> son action qu’elle doit se donner et sur les cadrages àmettre <strong>en</strong> place pour y procé<strong>de</strong>r.Concernant la dim<strong>en</strong>sion <strong>du</strong> contrôle <strong>de</strong> l’organisation par ses organes <strong>de</strong> gouvernance, ladifficulté d’évaluer les impacts tangibles <strong>de</strong> l’action ne se prés<strong>en</strong>te pas comme une <strong>en</strong>traveint<strong>en</strong>able au bon exercice <strong>de</strong> la gouvernance. En effet, les conseils sci<strong>en</strong>tifiques etd’administration att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t que leur soi<strong>en</strong>t montrées <strong>de</strong>s actions lisibles, pertin<strong>en</strong>tes et bi<strong>en</strong>m<strong>en</strong>ées. Ils ont fait savoir à l’organisation interne qu’ils n’att<strong>en</strong>drai<strong>en</strong>t pas d’elle qu’elle fournisse<strong>de</strong>s mesures précises <strong>de</strong>s impacts sur l’objet écologique pour <strong>de</strong>s actions qui se situ<strong>en</strong>t parfoistrès <strong>en</strong> amont <strong>de</strong> l’action directe et loin <strong>du</strong> terrain, mais par contre, une impact pathway analysis quir<strong>en</strong><strong>de</strong> lisible la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et le cheminem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s projets mis <strong>en</strong> oeuvre.Concernant la dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’évaluation comme amélioration procé<strong>du</strong>rale <strong>de</strong> l’action, lesdifficultés méthodologiques ont l’avantage <strong>de</strong> pousser à l’explicitation <strong>de</strong> ce qu’on att<strong>en</strong>d <strong>de</strong> cettedémarche. L’<strong>en</strong>jeu maintes fois réaffirmé par les membres <strong>de</strong> la TdV étant bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcerl’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous avons donc conc<strong>en</strong>tré notre analyse sur la façon dontl’évaluation pouvait être un mom<strong>en</strong>t spécifique et profitable au cours <strong>du</strong> processus continu <strong>de</strong>réflexion stratégique 220 . Pour que l’évaluation joue ce rôle, l’idée <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> la TdV étaitd’<strong>en</strong> faire un processus solidaire <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s stratégies d’action elles-mêmes. Le cadred’évaluation <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> la TdV (Encadré 7.1) a pour cela été am<strong>en</strong>dé directem<strong>en</strong>t dans lasuite <strong>de</strong> la révision <strong>du</strong> cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets (Encadré 6.1) qui favorise l’explicitation<strong>de</strong> la stratégie d’action. Le cadre d’évaluation <strong>de</strong>s projets <strong>en</strong> 5 niveaux d’impact a donc été élaboré<strong>de</strong> manière à pouvoir évaluer la stratégie d’action sur la base d’un petit nombre d’indicateurs parniveau d’impact.Cep<strong>en</strong>dant, au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s projets, les membres <strong>de</strong> l’équipe ne peuv<strong>en</strong>t pastoujours expliciter leur théorie d’action dans sa totalité et donc définir <strong>de</strong>s indicateurssynthétiques pour plus tard évaluer la mise <strong>en</strong> œuvre. Parce que le travail se situe dans lacompréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> dégradation <strong>en</strong> amont <strong>de</strong>s actions pour le changem<strong>en</strong>t, ouparce que les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visés sont trop complexes et instables pour pouvoir prévoir sesmodalités d’insertion sur le moy<strong>en</strong> ou long terme. De plus, c’est dans la nature même <strong>de</strong> lastratégie que <strong>de</strong> conserver une part d’émerg<strong>en</strong>ce et d’adaptabilité qui ne peut être saisie si le cadred’évaluation est trop figé (par <strong>de</strong>s indicateurs) <strong>en</strong> amont. Et l’évaluation ne saurait non plusconstituer un espace pour la réflexion rétrospective <strong>en</strong> vue <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcer les actions si elle <strong>de</strong>vait220 Qui se joue au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> l’action et <strong>en</strong>core au cours <strong>de</strong> sa mise <strong>en</strong> œuvre (voir le chapitre 6).417


Partie 3 – Réflexion stratégique et évaluation <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleimposer un cadre fixé par <strong>de</strong>s indicateurs ne permettant pas d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les actions dans leurcomplexité. C’est bi<strong>en</strong> ce souci <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s indicateurs qui ne frein<strong>en</strong>t pas, mais au contrairealim<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t l’analyse évaluative <strong>de</strong>s actions qui a été à l’origine <strong>de</strong>s difficultés à les mettre <strong>en</strong> placeau cours <strong>de</strong> cette planification stratégique p<strong>en</strong>dant laquelle le cadre d’évaluation <strong>de</strong>s projets a étérévisé (Encadré 7.1).Dans la perspective <strong>de</strong> développer une démarche d’évaluation <strong>de</strong>s impacts qui serve l’analyserétrospective pour r<strong>en</strong>forcer l’action, nous nous sommes alors attachée à l’élaboration d’un cadresouple capable d’accueillir la stratégie d’action dans son <strong>en</strong>semble et favorisant l’établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s actions m<strong>en</strong>ées. Ainsi, pour ai<strong>de</strong>r à la progression <strong>de</strong> la stratégie, l’évaluationpeut être un mom<strong>en</strong>t pour faire le bilan (temporaire) <strong>de</strong>s zones d’ombres <strong>de</strong>s théories d’actionrésolues ou non, <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s obstacles qui se sont prés<strong>en</strong>tés(révision <strong>de</strong> la théorie d’action ou non), pour <strong>en</strong>fin pouvoir évaluer la contribution <strong>de</strong> la TdV à laconservation <strong>de</strong>s ZHM et <strong>de</strong> leurs espèces <strong>en</strong> reliant la stratégie d’action aux impacts, si possiblejusqu’aux impacts sur l’objet écologique.418


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partieL’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> cette thèse est <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t agit et peut agir l’ONGE et d’apporter unraisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour la sout<strong>en</strong>ir dans sa dynamique <strong>de</strong> progression <strong>de</strong> son action. Danscette perspective, il nous fallait compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’organisation construit sa stratégie, nonseulem<strong>en</strong>t à l’échelle <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions concrètes et dans l’action, mais aussi plus généralem<strong>en</strong>tà l’échelle globale <strong>de</strong> l’organisation. C’est à une analyse clinique interne et à l’échelle <strong>de</strong>l’organisation que nous nous sommes attachée dans cette troisième partie. Pour appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r laconstruction <strong>de</strong> la stratégie dans l’ONGE, nous nous sommes appuyée sur le courant pratique <strong>de</strong>la stratégie (Golsorkhi, 2006 ; Rouleau & Allard-Poesi, 2007) qui nous a incité à ancrer l’analysedans les pratiques internes. Nous avons ainsi <strong>en</strong>visagé la planification stratégique comme unepratique spécifique servant l’élaboration stratégique (Whittington, 2006) et les pratiquesd’évaluation comme une pratique spécifique d’analyse rétrospective. Ainsi nous avons abordé laplanification stratégique <strong>du</strong> futur programme quinqu<strong>en</strong>nal (2011-2015) <strong>de</strong> la TdV dans la mise <strong>en</strong>regard <strong>de</strong> ses cont<strong>en</strong>us (objectifs pour les quatre registres stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE) et <strong>de</strong>sprocessus <strong>de</strong> construction, <strong>en</strong> étudiant la façon dont l’organisation s’y pr<strong>en</strong>ait pour r<strong>en</strong>forcer sastratégie et <strong>en</strong> s’attachant à sout<strong>en</strong>ir cette dynamique. Pour conclure cette partie, nous allonsrev<strong>en</strong>ir sur les voies <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie id<strong>en</strong>tifiées, d’abord dans la formulation <strong>de</strong>sint<strong>en</strong>tions stratégiques, dans les processus même <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie, puis dans lapratique <strong>de</strong> l’évaluation.Les objectifs <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour chacun <strong>de</strong>s quatre registres stratégiquesLorsqu’elle révise sa stratégie et construit son nouveau programme d’action, la TdV confirme ouse donne <strong>de</strong> nouveaux objectifs dans chacun <strong>de</strong>s quatre registres stratégiques <strong>de</strong> notre cadre <strong>de</strong>l’ASGE rec<strong>en</strong>tré sur l’ONGE (Figure conclusion partie 3). Ce cadre, développé à partir d’uneanalyse empirique <strong>de</strong> l’ONGE CI (De Mombynes & Mermet, 2003) s’est révélé être <strong>en</strong>adéquation avec la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, ces registres se retrouv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> effet dans uneforme très similaire jusque dans ses plans stratégiques.419


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partieConstruction <strong>de</strong> l’objet écologique àconserverSpécialisation ZHM- Précision <strong>de</strong>s objectifs écologiquesselon <strong>de</strong>s critères écologiques etorganisationnels (compét<strong>en</strong>ces, projetshistoriques) : plusieurs espèces /restauration <strong>de</strong> plusieurs sitesMo<strong>de</strong> d’action publiqueThéorie d’action générale : pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>connaissance sci<strong>en</strong>tifiqueVers le terrain : meilleure <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH(interv<strong>en</strong>tions directes ou recommandations, outils <strong>de</strong><strong>gestion</strong>)Vers les arènes <strong>de</strong> décisions : influ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s décisions(influ<strong>en</strong>ce directe, mise à dispositiond’informations mises <strong>en</strong> forme)Place dans le secteur- Objectifs <strong>de</strong> confortation <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats + développem<strong>en</strong>t d<strong>en</strong>ouveaux pour augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>scapacités (compét<strong>en</strong>cescomplém<strong>en</strong>taires, accès à réseaux,informations)Développem<strong>en</strong>t interne- Compét<strong>en</strong>ces stratégiques à optimiser : « sci<strong>en</strong>tifiques ettechniques » multidisciplinaires, « insertion dans lesystème <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> », réunies dans moins <strong>de</strong> projetsplus fédérateurs.- Ressources financières (budget 4M d’ dont 30% àacquérir <strong>en</strong> externe)- Gouvernance TdV : ressources supplém<strong>en</strong>taires,légitimité institutionnelleFigure conclusion partie 3 : Objectifs fixés au cours <strong>de</strong> la planification stratégique pour le programme2011-2015 dans chacun <strong>de</strong>s quatre registres stratégiquesSi une bonne part <strong>du</strong> plan stratégique traite <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions d’action (mo<strong>de</strong>s d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale à mettre <strong>en</strong> œuvre) pour interv<strong>en</strong>ir sur les objets écologiques, l’organisation sedonne d’autres objectifs qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action et qui relèv<strong>en</strong>t <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>tinterne (objectifs d’obt<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> fonds externes, objectifs <strong>de</strong> transversalité <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces) et<strong>de</strong> la place <strong>de</strong> l’organisation dans le secteur <strong>de</strong> la conservation (objectifs <strong>de</strong> formalisation <strong>de</strong>certains part<strong>en</strong>ariats).Dans le registre <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, nous avons vu que la mission pouvait êtrefixée, historique et se référant à <strong>de</strong>s normes internationales pour les ZH, mais les choixd’objectifs écologiques plus concrets (portant sur <strong>de</strong>s espèces, <strong>de</strong>s habitats, <strong>de</strong>s problématiques<strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, etc.) sont le fruit d’une analyse interne (compét<strong>en</strong>ces, domaine d’expertise etprogramme à long terme, etc.) et externe (configuration <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visé –opportunités d’action) m<strong>en</strong>ée par les membres <strong>de</strong> l’organisation. Cela montre que ce registrec<strong>en</strong>tral <strong>de</strong> l’objet écologique (r<strong>en</strong>voyant à la mission) est p<strong>en</strong>sé dans une articulation avec lesautres registres stratégiques. Concernant les objectifs dans le registre <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, nous avons pu voir qu’à l’échelle <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>du</strong> programme, c’estseulem<strong>en</strong>t une théorie générale <strong>de</strong> l’action qui est définie <strong>de</strong> façon à mettre <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce lesmo<strong>de</strong>s d’action plus opérationnels qui sont construits et mis <strong>en</strong> œuvre au niveau <strong>de</strong>s projets.420


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partieEn somme, le cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE apparaît comme une articulation <strong>en</strong>tre lesquatre registres stratégiques, <strong>de</strong>vant progresser tant dans le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités d’actionque dans les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales elles-mêmes. L’analyse <strong>de</strong> la planification stratégiqu<strong>en</strong>ous a permis d’observer comm<strong>en</strong>t l’organisation travaillait à la structuration <strong>de</strong>s équipes,construisait et mettai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s cadres et <strong>de</strong>s concepts pour favoriser l’atteinte <strong>de</strong> cesobjectifs au cours <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme quinqu<strong>en</strong>nal.Préparation <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions dans le temps <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie,accompagnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette dynamique par une démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tionL’ancrage <strong>de</strong> l’analyse dans les pratiques internes nous a permis <strong>de</strong> compr<strong>en</strong>dre et <strong>de</strong> contribueraux processus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie, d’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s leviers <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong> ces leviers. Cette compréh<strong>en</strong>sion fine nous a<strong>en</strong> outre permis d’adapter nos restitutions (comme procédé d’<strong>en</strong>quête et d’interv<strong>en</strong>tion) à ladynamique propre <strong>de</strong> l’organisation. En effet, cherchant à id<strong>en</strong>tifier les raisonnem<strong>en</strong>tsstratégiques utiles pour r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, notre <strong>en</strong>jeu est <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire <strong>du</strong>« savoir actionnable » au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> C. Argyris (2000[1995] : 257) qui le définit comme étant « unsavoir à la fois valable [sci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t] et pouvant être « mis <strong>en</strong> action » dans la vie quotidi<strong>en</strong>ne<strong>de</strong>s organisations ». Mais pour M-J. Av<strong>en</strong>ier et C. Schmitt, auteurs <strong>du</strong> courant pratique <strong>de</strong> lastratégie s’intéressant à la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissance dans une approche constructiviste etinteractive, le partage d’une préoccupation <strong>en</strong>tre le chercheur et le pratici<strong>en</strong> ne suffit pas :« <strong>en</strong>core faut-il que [le savoir pro<strong>du</strong>it] soit non seulem<strong>en</strong>t recevable mais aussi effectivem<strong>en</strong>t reçupar ces managers. Il ne sera recevable que si ces managers peuv<strong>en</strong>t le relier à leur expéri<strong>en</strong>ce. Ilsera reçu lorsque ces managers se le seront appropriés » (Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007 : 27). Nousnous sommes donc adaptée aux étapes <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>en</strong> appliquantl’ « opportunisme méthodique » <strong>de</strong> Girin (1987) et nous avons proposé nos analyses (sous formes<strong>de</strong> questions <strong>en</strong> <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s ou <strong>de</strong> notes) et <strong>de</strong>s cadres pour sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique au furet à mesure <strong>du</strong> processus.La planification stratégique est apparue comme un mom<strong>en</strong>t particulier d’une réflexion stratégiquequi se passe dans un processus continu. En effet, au cours <strong>de</strong> cette planification stratégique ayanteu lieu <strong>en</strong> 2009 et 2010, nous avons pu repérer les questions qui se posai<strong>en</strong>t à l’organisation, lafaçon dont elle les plaçait dans le cadre d’une réflexion collective et les débats internes qui<strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t aboutir à <strong>de</strong>s choix (ou au moins à <strong>de</strong>s ori<strong>en</strong>tations). Ces questions, loin d’être nouvellespour l’organisation, se sont révélées pour l’ess<strong>en</strong>tiel être celles-là mêmes sur lesquellesl’organisation s’était <strong>de</strong>puis longtemps donné pour objectif <strong>de</strong> progresser. Donnons un exemple421


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partiefaisant un retour <strong>de</strong>puis le terrain vers la démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre. Rappelons-nousque lorsque nous sommes arrivée à la TdV <strong>en</strong> 2007, une <strong>de</strong>s questions saillantes et animant lesdébats internes était celle <strong>de</strong> la dichotomie <strong>en</strong>tre les activités sci<strong>en</strong>tifiques et toutes les activités <strong>de</strong>conservation plus techniques et politiques. Au terme <strong>de</strong> notre pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> recherche, cettequestion avait presque disparu, pour laisser place à d’autres, lat<strong>en</strong>tes, qui ont été mises au <strong>de</strong>vantdans les débats. Ceci nous indique l’importance d’investir le terrain <strong>de</strong> manière approfondie d’unepart, et <strong>de</strong> toujours remettre les données construites dans leur contexte d’autre part.L’investissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> longue <strong>du</strong>rée, « variant <strong>de</strong> plusieurs mois à quelques années », est une <strong>de</strong>sexig<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la recherche-interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t, comme le rappelle J-M. Plane (2000 : 53)dans son ouvrage sur le sujet.Parmi ces <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> progression existant sur le long terme et traités <strong>de</strong> façon plus ou moinsprioritaire, certains ont fait l’objet d’une réelle réflexion collective (1), d’autres sont restés <strong>en</strong>creux dans les processus <strong>de</strong> planification stratégique (2).1) La réflexion autour <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>jeu d’une meilleure insertion dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visés a étécanalisé par le positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la TdV par rapport à la doctrine <strong>de</strong> la « Gestion Intégrée ».L’<strong>en</strong>jeu <strong>de</strong> l’articulation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action pour une interv<strong>en</strong>tion cohér<strong>en</strong>te et optimale <strong>de</strong> laTdV face à une problématique <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale a été guidé par le concept <strong>de</strong> « Site atelier ».Ces doctrine et concept, à s’approprier, à construire, font l’objet <strong>de</strong> questionnem<strong>en</strong>ts internes quifavoris<strong>en</strong>t la réflexion collective, notamm<strong>en</strong>t autour <strong>du</strong> besoin <strong>de</strong> déployer les actions sur la based’une meilleure analyse <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visés et <strong>en</strong> mettant à profit la complém<strong>en</strong>tarité<strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la TdV pour s’investir à long terme sur un même site. A ce niveau, notredémarche a consisté à pousser les membres <strong>de</strong> la TdV à expliciter au maximum ces conceptsappréh<strong>en</strong>dés comme <strong>de</strong>s leviers <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action, <strong>en</strong> nous appuyant <strong>en</strong> particulier surnotre analyse préalable <strong>du</strong> cas <strong>du</strong> projet GIZC au Maroc (chapitre 4).2) Au contraire, l’<strong>en</strong>jeu <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> « transfert » <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites etaccumulées par les sci<strong>en</strong>tifiques <strong>de</strong> la TdV et <strong>du</strong> portage plus général <strong>de</strong> la conservation <strong>de</strong>sZHM est resté <strong>en</strong> creux – toujours évoqué, mais rarem<strong>en</strong>t explicité et remis <strong>en</strong> question – <strong>de</strong>sréflexions collectives que nous avons pu observer. Les membres <strong>de</strong> la TdV sembl<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>contrer<strong>de</strong>s difficultés dans la mise <strong>en</strong> débat et dans l’anticipation <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>jeu <strong>du</strong> transfert qui estpourtant intégré par tous ses membres et mis <strong>en</strong> œuvre aux différ<strong>en</strong>ts niveaux <strong>de</strong> l’organisation.Cet angle <strong>de</strong> l’action est un <strong>de</strong> ceux qui sont difficiles à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r au niveau global <strong>de</strong>l’organisation et qui ne peuv<strong>en</strong>t être précisés qu’au niveau opérationnel, pour <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions plusconcrètes. Ici nous voyons que les processus <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie à l’échelle <strong>de</strong>l’organisation ne sont pro<strong>du</strong>ctifs que jusqu’à une certaine limite. Les leviers <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>422


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partiel’action id<strong>en</strong>tifiés doiv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite pr<strong>en</strong>dre s<strong>en</strong>s à l’échelle opérationnelle. Ceci r<strong>en</strong>voie à un aspectfondam<strong>en</strong>tal <strong>de</strong> la stratégie que le courant <strong>de</strong> la pratique s’est donné pour objet d’éclairer(Golsorkhi, 2006) : la « fabrication » <strong>de</strong> la stratégie n’est pas l’affaire <strong>du</strong> top managem<strong>en</strong>t, elle seconstruit aussi dans les interactions avec les nombreux acteurs, dans les pratiques <strong>en</strong> situation(Jarzabkowski, 2005). Ces postulats fédérateurs dans la perspective pratique sont vérifiés dans ledomaine <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale portée par l’ONGE.Cette id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> la stratégie nous a permis <strong>de</strong> caractériser plusprécisém<strong>en</strong>t la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE qui prés<strong>en</strong>te plusieurs lignes <strong>de</strong> t<strong>en</strong>sion. Les stratégiesd’action développées au niveau <strong>de</strong>s projets doiv<strong>en</strong>t alim<strong>en</strong>ter et être cohér<strong>en</strong>tes avec la théoried’action générale <strong>de</strong> l’organisation : c’est l’articulation <strong>en</strong>tre l’échelle <strong>de</strong> l’organisation et l’échelleopérationnelle. La stratégie construite au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la planification <strong>de</strong>vra être précisée (dans lesquatre registres et pour toutes les stratégies d’action) et r<strong>en</strong>forcée au contact <strong>de</strong>s situationsréelles : c’est la t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre le caractère int<strong>en</strong>tionnel et émerg<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la stratégie (Jacobs &Statler, 2006). Dans la t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre ces <strong>de</strong>ux niveaux, la planification stratégique s’est appar<strong>en</strong>téeà la création <strong>de</strong> conditions d’une émerg<strong>en</strong>ce stratégique canalisée.La construction <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE est ainsi apparue comme un processus continu danslequel la planification stratégique est un mom<strong>en</strong>t particulier, non indép<strong>en</strong>dant, mais se jouant surun autre plan que les actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Plus précisém<strong>en</strong>t, la planification stratégiqueapparaît comme étant le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions stratégiques et <strong>de</strong>s conditionsd’une émerg<strong>en</strong>ce stratégique canalisée, et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme apparaît comme étantle mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la précision <strong>de</strong> la stratégie dans <strong>de</strong>s processus d’adaptation et d’émerg<strong>en</strong>ce aucontact <strong>de</strong>s situations d’action concrètes.Parallèlem<strong>en</strong>t, la planification stratégique constitue un espace-temps où les membres <strong>de</strong>l’organisation, dirigeants et membres <strong>de</strong> l’équipe, vont se r<strong>en</strong>dre davantage disponibles pour laréflexion (Martinet, 2001). Elle constitue alors pour l’analyste un mom<strong>en</strong>t propice à l’interactionet à la restitution <strong>de</strong>s savoirs pro<strong>du</strong>its, qui ne serai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>visageables dans la même int<strong>en</strong>sité <strong>en</strong><strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>, vue les contraintes temporelles auxquelles sont soumis les membres <strong>de</strong> laTdV, et <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s organisations (Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007). Nous avons ainsi cherché àinsérer nos propositions dans les étapes même <strong>de</strong> la planification stratégique. Le principal apporta consisté à réviser le cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets avec le directeur <strong>du</strong> programme <strong>de</strong> laTdV (Encadré 6.1). Cette proposition est fondée : d’une part, sur l’explicitation <strong>de</strong>s objectifsécologiques et <strong>de</strong> la stratégie comme levier id<strong>en</strong>tifié pour r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale423


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partie(Guillet, 2007 ; Conseil sci<strong>en</strong>tifique 2008 ; discussions internes) ; d’autre part sur l’intro<strong>du</strong>ctiond’un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique dialectique éman<strong>en</strong>t <strong>de</strong> notre cadre <strong>de</strong> l’ASGE.Envisager l’évaluation <strong>de</strong>s impacts comme levier pour r<strong>en</strong>forcer l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale,proposer un cadre d’évaluation dans cette perspectiveDans le <strong>de</strong>rnier chapitre (Chapitre 7), nous sommes rev<strong>en</strong>ue sur la question <strong>de</strong>s impactsécologiques <strong>de</strong>s actions. L’évaluation <strong>de</strong>s impacts est une question faisant l’objet d’une réflexioninterne <strong>de</strong>puis plusieurs années à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, associée par ses membres au r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’action et à l’atteinte <strong>de</strong> la mission. Une évolution a lieu <strong>en</strong> effet dans les pratiques d’évaluation,pour ne plus limiter l’évaluation à celle <strong>de</strong> la pro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique (à partir <strong>de</strong>s critères <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> académique). Le but est <strong>de</strong> valoriser et d’avancer sur l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> la TdV quiva plus loin que la pro<strong>du</strong>ction d’articles sci<strong>en</strong>tifiques vis-à-vis <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> et <strong>de</strong> la conservation<strong>de</strong>s ZHM. Se saisissant <strong>de</strong> cette question, il nous fallait donc d’une part démêler les implications<strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> l’évaluation, qui ne se situe pas uniquem<strong>en</strong>t, ou automatiquem<strong>en</strong>t, dansl’amélioration <strong>de</strong> l’action. Et d’autre part, déterminer quelle pratique <strong>de</strong> l’évaluation peut v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>souti<strong>en</strong> <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.A l’instar <strong>de</strong> la planification stratégique, la pratique <strong>de</strong> l’évaluation se joue sur un plan différ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>celui <strong>de</strong> l’action et comporte une logique et <strong>de</strong>s processus spécifiques. Les li<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégied’action <strong>de</strong> l’organisation et l’évaluation <strong>de</strong> ses impacts ne sont pas <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s simples et directs. Lapratique <strong>de</strong> l’évaluation a sa logique propre et ses li<strong>en</strong>s à l’action sont principalem<strong>en</strong>t fait <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxdim<strong>en</strong>sions : l’évaluation est une pratique <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> l’organisation et <strong>de</strong> ses activités ;l’évaluation est un processus <strong>de</strong> réflexion fondé sur une analyse rétrospective <strong>de</strong> l’action.A partir <strong>de</strong> nos observations et <strong>de</strong>s <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s réalisés <strong>en</strong> interne, nous avons pu voir que lecontrôle <strong>de</strong> l’organisation par les organes <strong>de</strong> gouvernance, et notamm<strong>en</strong>t son conseil sci<strong>en</strong>tifique,était surtout c<strong>en</strong>tré sur <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> qualité <strong>du</strong> programme sci<strong>en</strong>tifique et technique pour laconservation. La gouvernance <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong>courage elle-même l’organisation à développer unepratique <strong>de</strong> l’évaluation consistant à établir la chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>en</strong>tre la stratégie et les impactsatt<strong>en</strong><strong>du</strong>s, sur le modèle <strong>de</strong> l’impact pathway analysis (Douthwaite et al., 2003 ; Briones et al., 2004).Nous nous sommes alors consacrée à l’élaboration d’un cadre d’évaluation reliant la stratégiemise <strong>en</strong> œuvre à ses impacts jusqu’à l’objet écologique visé. Cette proposition repose surplusieurs fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts issus <strong>de</strong> nos analyses et <strong>de</strong> la littérature <strong>en</strong> <strong>gestion</strong> :- L’impact matériel sur les objets écologiques est considéré comme la visée juste et <strong>de</strong>vant êtresystématiquem<strong>en</strong>t explicitée (appelé « impact <strong>de</strong> niveau 1 » dans la grille d’évaluation, Encadré7.1) (Mermet et al., 2010) ;424


Conclusion <strong>de</strong> la troisième partie- Pour que la pratique <strong>de</strong> l’évaluation soit égalem<strong>en</strong>t une pratique qui vi<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>du</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action, il faut qu’elle octroie aux différ<strong>en</strong>ts membres <strong>de</strong> la TdV un espace pourla réflexion sur la stratégie, et ne soit pas le vecteur d’un ordre <strong>de</strong>s choses figé (Bourguignon &J<strong>en</strong>kins, 2004) et contre-pro<strong>du</strong>ctif (Riveline, 1991).- La proposition consiste alors non pas à évaluer <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> résultats <strong>de</strong> l’action, fixés a prioripar <strong>de</strong>s indicateurs, mais à évaluer la stratégie d’action elle-même, à l’ai<strong>de</strong> d’un cadre assez souplepour accueillir les formes variées qu’elle peut pr<strong>en</strong>dre pour les différ<strong>en</strong>tes situations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>.Ce cadre est ainsi issu <strong>de</strong>s caractères <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (conclusions <strong>du</strong> chapitre 6) et <strong>de</strong>l’analyse <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> l’évaluation à la TdV (chapitre 7).425


Conclusion généraleAvec la montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong> la préoccupation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans l’espace public, lesONGE, qui sont <strong>de</strong>s acteurs visibles dans le domaine, suscit<strong>en</strong>t att<strong>en</strong>te et intérêt dans lasociété. A quoi serv<strong>en</strong>t-elles ? Qu’ont-elles à dire sur les problèmes écologiques ? Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s« petits gestes pour la planète » que chaque acteur est prêt à cons<strong>en</strong>tir, quel travail peuv<strong>en</strong>t-ellesfournir pour un changem<strong>en</strong>t plus significatif ? Dans la littérature, on leur reconnaît un rôleimportant, notamm<strong>en</strong>t dans la structuration <strong>de</strong>s cadres internationaux <strong>de</strong> prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, et ceci <strong>de</strong>puis l’origine <strong>de</strong>s mouvem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Raustiala, 1997 ; Charnovitz, 1997). Cep<strong>en</strong>dant, force est <strong>de</strong> constater que lesproblèmes <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux ne font que s’aggraver. A partir <strong>de</strong> plusieurs points <strong>de</strong> vuedisciplinaires (e.g. Le Prestre, 2005 ; Salles, 2006), <strong>de</strong>s auteurs s’accord<strong>en</strong>t désormais sur lanécessité <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s connaissances non plus seulem<strong>en</strong>t sur la montée <strong>en</strong> puissance <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans la gouvernance internationale et sa place dans la construction <strong>de</strong>s accordscollectifs, mais sur la façon dont cette préoccupation sera concrètem<strong>en</strong>t tra<strong>du</strong>ite <strong>en</strong> actes etcomm<strong>en</strong>t elle pro<strong>du</strong>ira <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts sur le terrain.Cette recherche doctorale a pour objectif <strong>de</strong> contribuer à la connaissance sur la prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t au niveau <strong>du</strong> terrain, <strong>en</strong> apportant <strong>de</strong>s éclairages sur les actions portées par cesONGE et la manière dont elles peuv<strong>en</strong>t progresser pour atteindre les objectifs écologiquesqu’elles se fix<strong>en</strong>t. Nous nous sommes donc attachée à répondre aux trois questions suivantes :comm<strong>en</strong>t agiss<strong>en</strong>t et peuv<strong>en</strong>t agir les ONGE (considérant les capacités d’action et l’action ellemême)? Quel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique peut être utile aux ONGE pour sout<strong>en</strong>ir le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> leurs actions ? Comm<strong>en</strong>t appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les impacts écologiques <strong>de</strong> leurs actions ?En posant ainsi les questions <strong>en</strong> termes d’actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et d’impacts écologiques,nous inscrivons notre recherche dans les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> qui répond<strong>en</strong>t à l’<strong>en</strong>jeu formulé parP. Le Prestre et D. Salles. En effet, <strong>en</strong> tant que sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>s « mo<strong>de</strong>s d’agir <strong>en</strong>semble » (David et427


Conclusion généraleal., 2000), les connaissances pro<strong>du</strong>ites ne pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>s que lorsqu’elles sont ancrées dans <strong>de</strong>ssituations <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> concrètes (ibid. ; Girin, 1990), ce qui est d’autant plus crucial lorsqu’il s’agitd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (Leroy, 2010 ; Mermet, 2010a) où le mot « terrain » peut s’utiliser au s<strong>en</strong>spropre.Nous avons choisi <strong>de</strong> nous focaliser sur une ONGE, la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, et d’y m<strong>en</strong>er un travail <strong>de</strong>recherche-interv<strong>en</strong>tion. Vouloir compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’ONGE agit pour résoudre un problèmeécologique, et <strong>en</strong>visager l’impact <strong>de</strong> cette action qui consiste à impulser <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts dans la<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, nous a con<strong>du</strong>it à adopter le cadre théorique <strong>de</strong> l’Analyse Stratégique<strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale (ASGE) (Mermet et al., 2005) qui nous invite à appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>rl’action <strong>de</strong> l’ONGE ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t au regard <strong>de</strong> l’objectif écologique qu’elle <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d relever et <strong>du</strong>système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t qu’elle doit faire changer pour cela. En travaillant sur lastratégie d’une ONGE, nous avons égalem<strong>en</strong>t inscrit notre recherche dans le champ <strong>de</strong>s théories<strong>de</strong>s organisations et plus particulièrem<strong>en</strong>t <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique.Après avoir rappelé la problématique <strong>de</strong> notre recherche, les champs disciplinaires dans lesquelselle s’inscrit par l’objet étudié et par le regard que nous avons choisi d’y porter, nous <strong>de</strong>vons àprés<strong>en</strong>t nous attacher à <strong>en</strong> tirer les conclusions. Dans un premier temps, nous donnerons une vued’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> notre cadre d’analyse et <strong>de</strong> l’architecture théorique <strong>de</strong> la thèse, pour <strong>en</strong>suite rev<strong>en</strong>irsur les principaux résultats <strong>de</strong> la recherche m<strong>en</strong>ée auprès <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>. Dans un secondtemps, nous abor<strong>de</strong>rons les connaissances développées dans une perspective plus large <strong>de</strong>recherche sur les organisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, ce qui nous amènera à discuter le statut <strong>de</strong>sconnaissances pro<strong>du</strong>ites dans le cadre d’une recherche-interv<strong>en</strong>tion.1. Le bilan théorique <strong>de</strong> la recherche et ses résultats pour la <strong>Tour</strong><strong>du</strong> <strong>Valat</strong>1.1 Une r<strong>en</strong>contre fructueuse <strong>en</strong>tre les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t etle champ <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>s organisationsPour articuler organisation et gouvernance interne <strong>de</strong> l’ONGE et ses actions externes dans <strong>de</strong>ssystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> par rapport à <strong>de</strong>s objectifs écologiques, nous avons mobilisé plusieursthéories. Une représ<strong>en</strong>tation schématique nous permet <strong>de</strong> résumer la manière dont nous lesavons articulées (Figure conclusion générale).Notre cadre théorique <strong>de</strong> l’ASGE gui<strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE dans les systèmes <strong>de</strong><strong>gestion</strong> où elle est déployée, posant d’emblée les jalons pour articuler stratégie et contribution428


Conclusion générale<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. C’est <strong>de</strong> ce cadre théorique que nous avons tiré, à la suite <strong>de</strong> T. De Mombyneset L. Mermet (2003), notre cadre d’Analyse stratégique pour l’organisation à finalité<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE). Ce cadre d’analyse est fondé sur les principes théoriques <strong>de</strong> l’ASGEet <strong>du</strong> champ <strong>de</strong> la stratégie, mais se range <strong>du</strong> côté <strong>de</strong> ce que Glaser et Strauss (1967) ont appelégroun<strong>de</strong>d theory, dans le s<strong>en</strong>s où les quatre catégories conceptuelles qui le compos<strong>en</strong>t éman<strong>en</strong>t <strong>de</strong><strong>de</strong>ux étu<strong>de</strong>s empiriques (celle sur CI, De Mombynes & Mermet, 2003 ; et notre propre recherchesur la TdV). Ce cadre d’analyse est représ<strong>en</strong>té par les quatre rectangles (rectangles grisés, Figureconclusion générale), correspondant à ce que nous avons appelé les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie<strong>de</strong> l’ONGE. En l’utilisant pour plusieurs situations d’actions concrètes, nous avons montré queces quatre registres sont assez précis, mais assez génériques pour accueillir <strong>de</strong>s stratégies variées.Cep<strong>en</strong>dant, il ne se suffit pas à lui-même s’il s’agit d’analyser finem<strong>en</strong>t la construction et la mise<strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> stratégies d’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Selon la question <strong>de</strong> rechercheet les caractères <strong>de</strong> l’organisation étudiée, les analystes voulant se saisir <strong>de</strong> ce cadre pourront,comme nous l’avons fait, l’alim<strong>en</strong>ter avec d’autres apports théoriques, pour peu que leursprincipes fondateurs soi<strong>en</strong>t compatibles. Nous nous sommes appuyée sur (1) le modèle <strong>de</strong>sressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces, ainsi que sur (2) la perspective <strong>de</strong> la stratégie comme pratique,<strong>de</strong>ux courants théoriques <strong>du</strong> managem<strong>en</strong>t stratégique, et <strong>en</strong>fin sur (3) l’analyse stratégique <strong>de</strong>l’action organisée <strong>de</strong> la sociologie <strong>de</strong>s organisations croziéri<strong>en</strong>ne.(2) La stratégie comme pratiqueObjet écologique àconserverMo<strong>de</strong> d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taledans l’espace public(1) Théorie <strong>de</strong>sressources et <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>cesPlace dans lesecteur <strong>de</strong> laconservationDéveloppem<strong>en</strong>tinterne(3) Analyse croziéri<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>l’ONGE dans l’EAEFigure conclusion générale : Cadre d’analyse ASOFE et architecture théorique construite pour cetteanalyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (source : auteur)429


Conclusion générale1. Premièrem<strong>en</strong>t, compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t l’ONGE peut agir et agit pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t implique<strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte ses capacités qui ont une influ<strong>en</strong>ce déterminante sur ses choix et sesactions. La théorie <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces ai<strong>de</strong> à id<strong>en</strong>tifier les ressources et compét<strong>en</strong>cesstratégiques mobilisées dans les processus (action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale) pour m<strong>en</strong>er à la création <strong>de</strong>valeur (impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong> termes écologiques).Les compét<strong>en</strong>ces clés ainsi id<strong>en</strong>tifiées se déclin<strong>en</strong>t <strong>en</strong> trois catégories : les compét<strong>en</strong>ces« capacités » sont celles qui sont nécessaires à l’acquisition <strong>de</strong>s moy<strong>en</strong>s d’action (recherche <strong>de</strong>financem<strong>en</strong>ts, montage <strong>de</strong> projets, etc.) ; les compét<strong>en</strong>ces « cœur <strong>de</strong> métier » sont lescompét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et techniques qui permett<strong>en</strong>t aux membres <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong>compr<strong>en</strong>dre et <strong>de</strong> se saisir <strong>de</strong>s problèmes écologiques ; et les compét<strong>en</strong>ces « insertion dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> » sont les compét<strong>en</strong>ces souv<strong>en</strong>t acquises par l’expéri<strong>en</strong>ce, ayant attrait à lacapacité <strong>de</strong> diagnostic que les équipes vont développer pour adapter leur mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tiondans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>. Les ressources clé <strong>de</strong> l’ONGE sont apparues comme étant lesfinancem<strong>en</strong>ts (moy<strong>en</strong>s d’action), les réseaux – part<strong>en</strong>ariats (capacités supplém<strong>en</strong>taires etressources informationnelles) et la légitimité (capacité à attirer <strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires et capacitéd’interv<strong>en</strong>tion dans les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>). En plus <strong>de</strong> l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>scompét<strong>en</strong>ces clés, cette théorie nous permet d’une part <strong>de</strong> saisir la t<strong>en</strong>sion <strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions (ceque veut faire la TdV) et les capacités (ce que peut faire la TdV), ce qui est crucial pour lacompréh<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la stratégie d’interv<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> l’acteur d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t dans les systèmes <strong>de</strong><strong>gestion</strong> ; et d’autre part d’appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r la dynamique <strong>de</strong> ces ressources et compét<strong>en</strong>ces dans lamise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s activités <strong>en</strong> s’appuyant sur l’analyse <strong>de</strong>s pratiques (Musca, 2007).2. Le courant <strong>de</strong> la stratégie comme pratique se propose <strong>de</strong> repartir <strong>du</strong> terrain, <strong>de</strong>s pratiquesconcrètes <strong>de</strong>s acteurs dans les organisations, pour réinterroger la stratégies dans les questionssuivantes : qu’est-ce que la stratégie ? Qui est un stratège ? Que font les stratèges ? (Jarzakowski etal., 2006).Dans l’objectif <strong>de</strong> construire un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique utile à l’ONGE, nous <strong>de</strong>vionscompr<strong>en</strong>dre la construction <strong>de</strong> la stratégie et <strong>de</strong>s actions. Comm<strong>en</strong>t se saisir <strong>de</strong> ces processusfoisonnants et pour partie intangibles ? La perspective pratique nous ai<strong>de</strong> à délimiter et à désignerles pratiques sur lesquels ancrer les analyses <strong>en</strong> distinguant : la pratique (l’activité fondatrice <strong>de</strong>l’organisation : l’action pour la conservation <strong>en</strong> général) ; les pratici<strong>en</strong>s porteurs <strong>de</strong> l’action dansl’ONGE et stratèges ; et les pratiques concrètes et leurs <strong>en</strong>chaînem<strong>en</strong>ts (séances <strong>de</strong> réflexioninterne, analyses pro<strong>du</strong>ites par les équipes <strong>de</strong> la TdV, interv<strong>en</strong>tions externes pr<strong>en</strong>ant différ<strong>en</strong>tesformes, etc.). Dans ces pratiques concrètes, nous avons distingué les pratiques « actions », que430


Conclusion général<strong>en</strong>ous avons suivis dans nos cas d’étu<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s « pratiques stratégiques spécifiques » (Whittington,2006), la planification stratégique et l’évaluation. Ces pratiques spécifiques internes se situ<strong>en</strong>t surun autre plan que la pratique (l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale) elle-même. Cette distinction nous apermis d’id<strong>en</strong>tifier les mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la formalisation <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions stratégiques (dans laplanification stratégique) et les mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> l’émerg<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s stratégies d’action (<strong>en</strong> situationd’action concrète).3. Enfin, nous avons choisi d’adopter le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’ONGE pour l’analyse <strong>de</strong> ses actionsexternes, au regard <strong>de</strong> ses propres objectifs écologiques. Ce point <strong>du</strong> vue nous a incité à investirun angle important <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE : la façon dont elle va tisser ou non <strong>de</strong>s relations ausein <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t.Plusieurs travaux <strong>de</strong> recherche fondés sur le cadre <strong>de</strong> l’ASGE ont mobilisé l’analyse stratégique<strong>de</strong> l’action organisée <strong>de</strong> Crozier et Friedberg (1977) pour expliquer les systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>étudiés dans la dialectique <strong>en</strong>tre la <strong>gestion</strong> int<strong>en</strong>tionnelle et la <strong>gestion</strong> effective <strong>de</strong> la zoneconcernée (Leroy, 2004 ; Taravella, 2007). Ces analyses leur ont permis d’expliquer lesphénomènes <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong>s écosystèmes à partir d’une lecture soulevant les responsabilités etles interdép<strong>en</strong>dances <strong>en</strong>tre acteurs dans la <strong>gestion</strong>. De notre côté, l’<strong>en</strong>jeu était non pas d’aller aubout <strong>de</strong> l’explication <strong>du</strong> fonctionnem<strong>en</strong>t d’un système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> d’une zone humi<strong>de</strong>, mais plutôt<strong>de</strong> saisir la façon dont l’ONGE y choisissait, construisait et mettait <strong>en</strong> œuvre ses actions. Lasociologie <strong>de</strong> l’action organisée <strong>de</strong> Friedberg nous a permis <strong>de</strong> suivre la façon dont l’ONGEconstruit sa stratégie, se positionne <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> sa « place dans le secteur », pour développerses propres marges <strong>de</strong> manœuvre pour l’ « action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans l’espace public ».1.2 Des cadres pour p<strong>en</strong>ser, expliciter et évaluer la stratégie vers la poursuited’objectifs écologiques clarifiésNous allons repr<strong>en</strong>dre une à une chacune <strong>de</strong>s trois questions rappelées ci-<strong>de</strong>ssus et donner lesprincipaux résultats <strong>de</strong> notre recherche pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.Comm<strong>en</strong>t agiss<strong>en</strong>t et peuv<strong>en</strong>t agir les ONGE ? Le cas <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>Trois cas d’étu<strong>de</strong> ont été analysés <strong>en</strong> détail <strong>de</strong> manière à découvrir tous les mo<strong>de</strong>s d’actiondéveloppés par la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et comm<strong>en</strong>t l’organisation s’y pr<strong>en</strong>ait pour développer sonaction pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM : la recherche comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleprincipalem<strong>en</strong>t sur son territoire d’implantation <strong>en</strong> Camargue, un projet <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> intégrée d’une431


Conclusion généralezone côtière au Maroc dans le cadre d’un programme international, le développem<strong>en</strong>t d’undispositif d’interface sci<strong>en</strong>ces et politique. Nous avons abordé le terrain à l’ai<strong>de</strong> d’uneméthodologie associant trois mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données (Friedberg, 1997[1993] ; Olivier<strong>de</strong> Sardan, 1995b) : l’<strong>en</strong>quête qualitative <strong>en</strong> interne et <strong>en</strong> externe <strong>de</strong> l’organisation, l’analysedocum<strong>en</strong>taire et l’observation in situ. Nous reti<strong>en</strong>drons trois résultats principaux <strong>de</strong> ces analyses.1. La TdV agit pour influ<strong>en</strong>cer directem<strong>en</strong>t ou indirectem<strong>en</strong>t la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ZH avec une stratégie collaborative.La TdV est une ONGE qui se veut jouer un rôle dans l’accompagnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s acteurs vers unemeilleure <strong>gestion</strong>, adoptant une stratégie collaborative. L. Mermet, J-M Dziedzichi et Y. Laurans(2001) ont pu constater que beaucoup d’ONGE avai<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>dance à adopter <strong>de</strong>s stratégiesconciliantes <strong>en</strong> se spécialisant dans l’expertise. C’est aussi l’évolution <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s sci<strong>en</strong>tifiques observé par C. Bonneuil (2004 ; 2006a), qui se positionn<strong>en</strong>t davantage dansl’ai<strong>de</strong> à la décision que dans le portage militant <strong>de</strong> leurs travaux. Nous avons cep<strong>en</strong>dant observéque le mo<strong>de</strong> d’action ancré dans l’expertise sci<strong>en</strong>tifique pouvait au contraire donner àl’organisation <strong>de</strong>s capacités d’interv<strong>en</strong>tions stratégiques. Depuis une analyse politique, N. Berny(2005) montre que l’expertise est une <strong>de</strong>s ressources fondam<strong>en</strong>tales pour accé<strong>de</strong>r auxnégociations, y compris lorsqu’il s’agit d’<strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong>s territoires, où lesautres acteurs vont faire valoir leurs propres savoirs relatifs aux espaces concernés. Plusgénéralem<strong>en</strong>t, l’expertise est selon T. Princ<strong>en</strong> et M. Finger (1994) un <strong>de</strong>s élém<strong>en</strong>ts d’où lesONGE tir<strong>en</strong>t la légitimité qui leur est indisp<strong>en</strong>sable pour agir.A partir d’un ancrage sci<strong>en</strong>tifique et d’une action qui ne désigne que <strong>de</strong> façon très générale lesactivités et responsabilités effectives <strong>de</strong> la dégradation <strong>de</strong>s ZH, et qui affiche l’apport d’uneexpertise pour co-construire <strong>de</strong>s solutions pour la <strong>gestion</strong>, la TdV déploie <strong>de</strong>s actions stratégiquesvisant à infléchir les logiques et les forces contraires à la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>leur biodiversité (par exemple le blocage <strong>de</strong> l’ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la démoustication à la Camargue). Pourune ONG militante comme Gre<strong>en</strong>peace, l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> pointage <strong>de</strong>s responsables pourraitapparaître comme un manque <strong>de</strong> diagnostic qui laisserait <strong>du</strong>bitatif quand à la capacité <strong>de</strong>l’organisation à se confronter au problème. Pour la TdV, ce positionnem<strong>en</strong>t dans la scènepublique, qui consiste à parler plus <strong>de</strong>s ZH et <strong>de</strong>s facteurs <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong> façon générale(exemple <strong>de</strong> l’OZHM), est cohér<strong>en</strong>t avec la place qu’elle a acquis et qu’elle veut conserver dans lesecteur <strong>de</strong> la conservation (organisme sci<strong>en</strong>tifique spécialiste), et les mo<strong>de</strong>s d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qu’elle est capable <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> œuvre. Ce rôle sci<strong>en</strong>tifique lui confèreégalem<strong>en</strong>t une ressource qu’elle utilise parfois pour négocier sa place dans l’<strong>en</strong>semble agissantpour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t (exemples <strong>de</strong> l’OZHM, <strong>de</strong> la reconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c).432


Conclusion générale2. Pour compr<strong>en</strong>dre l’action externe <strong>de</strong> l’ONGE, il faut compr<strong>en</strong>dre l’articulation <strong>de</strong>s quatre registres stratégiques.Les choix <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>s d’action pour interv<strong>en</strong>ir dans l’espace public dép<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’objet écologiquevisé, <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces internes (expertises, connaissance <strong>du</strong> terrain) et externes(part<strong>en</strong>aires, accès à <strong>de</strong>s réseaux et <strong>de</strong>s informations), <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> laconservation. Compr<strong>en</strong>dre comm<strong>en</strong>t agit et peut agir l’ONGE <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’aller voir, sur <strong>de</strong>s casprécis, comm<strong>en</strong>t elle arrête ses choix et les met <strong>en</strong> pratique, <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong>s quatre registresstratégiques qu’elle doit m<strong>en</strong>er <strong>de</strong> manière cohér<strong>en</strong>te. Les stratégies <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t interne, <strong>de</strong>positionnem<strong>en</strong>t dans le secteur <strong>de</strong> la conservation et d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale n’ont pas <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s<strong>en</strong> elles-mêmes, et ce n’est qu’à travers leur articulation, <strong>en</strong>tre elles et au regard <strong>de</strong> l’objetécologique visé, que l’on peut juger <strong>de</strong> leur légitimité et <strong>de</strong> leur pertin<strong>en</strong>ce. Cette lecturecontextualisée et articulant les quatre registres stratégiques nuance les critiques <strong>de</strong>s ONG <strong>de</strong>conservation souv<strong>en</strong>t fondées à partir <strong>de</strong> lectures c<strong>en</strong>trées sur le développem<strong>en</strong>t interne <strong>de</strong>sorganisations ou sur leurs discours (e.g. Dumoulin & Rodary, 2005 ; Chartier, 2006), sans remise<strong>en</strong> perspective avec l’action <strong>de</strong> terrain.3. Les compét<strong>en</strong>ces « insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> » et le diagnostic <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> effective sontdéterminants pour une action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale significative.Le cas <strong>du</strong> projet <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la Gestion Intégrée <strong>de</strong> la Zone Côtière (GIZC) au Marocillustre la faiblesse <strong>de</strong>s marges <strong>de</strong> manœuvre dont dispose l’organisation lorsqu’elle agit <strong>en</strong> tantqu’opérateur d’un programme international et sa difficulté à m<strong>en</strong>er le projet à bi<strong>en</strong>. Ces marges<strong>de</strong> manœuvres aurai<strong>en</strong>t dû être augm<strong>en</strong>tées par une connaissance préalable et une certaine analyse<strong>du</strong> terrain, ce à quoi s’est substituée l’application presque décontextualisée <strong>de</strong> la doctrine GIZCqui résiste mal à la r<strong>en</strong>contre <strong>de</strong>s situations réelles. Ce cas d’étu<strong>de</strong> nous a permis <strong>de</strong> dégager <strong>de</strong>uxélém<strong>en</strong>ts. D’une part, la façon dont l’ONGE réagit à un échec : la TdV travaille, dans unedynamique procé<strong>du</strong>rale, à mettre <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s modalités d’action sur <strong>de</strong>s sites <strong>en</strong> Méditerranéerespectant désormais l’exig<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la connaissance <strong>de</strong>s terrains (nombre ré<strong>du</strong>it <strong>de</strong> sites et contactslocaux fiables). D’autre part, et par comparaison avec les actions <strong>en</strong> Camargue étudiées, nousconcluons que la connaissance fine <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> concerné, la prés<strong>en</strong>ce sur le long termeet la capacité à saisir les opportunités d’action (faire émerger les stratégies <strong>de</strong>s situations d’action,comme l’indiqu<strong>en</strong>t les auteurs <strong>du</strong> courant pratique, Golsorkhi, 2006) sont déterminantes pourpro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts significatifs <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s écosystèmes et <strong>de</strong> la biodiversité.Ces conclusions fond<strong>en</strong>t les propositions que nous avons am<strong>en</strong>ées à l’ONGE dans le cadre d<strong>en</strong>otre démarche <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion visant à pro<strong>du</strong>ire un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique <strong>en</strong>souti<strong>en</strong> <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.433


Conclusion généraleQuel raisonnem<strong>en</strong>t stratégique peut être utile aux ONGE pour sout<strong>en</strong>ir ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs actions ?Dans la perspective <strong>de</strong> développer un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> au r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, il nous fallait : d’une part, compr<strong>en</strong>dre la construction <strong>de</strong> la stratégie,cette fois non plus seulem<strong>en</strong>t à l’échelle <strong>de</strong>s situations d’action concrètes, mais pour l’<strong>en</strong>semble<strong>de</strong> l’organisation ; et d’autre part, trouver un espace pour communiquer (Av<strong>en</strong>ier & Schmitt,2007), nos analyses ayant vocation à être <strong>de</strong>s « savoirs actionnables » (Argyris, 2000[1995]) dans lecadre <strong>de</strong> notre recherche-interv<strong>en</strong>tion. Nous avons pour cela ancré notre analyse dans lespratiques liées à la planification stratégique qui a eu lieu à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> <strong>en</strong> 2009 et 2010, pourl’élaboration <strong>du</strong> programme 2011-2015, et nous avons utilisé le procédé <strong>de</strong> la restitution <strong>de</strong> notreanalyse <strong>de</strong> la planification comme mo<strong>de</strong> d’interv<strong>en</strong>tion <strong>en</strong> nous adaptant au déroulem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>processus. Précisons que cette analyse s’est appuyée sur les repères acquis dans les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssituations d’action concrètes. Ces analyses préalables sont <strong>en</strong> effet nécessaires pour saisir larésistance ou l’évolution <strong>de</strong>s stratégies à la r<strong>en</strong>contre <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> concrets où ellesintervi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t.1. Les leviers <strong>de</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale id<strong>en</strong>tifiés sont l’articulation <strong>de</strong>s quatre registresstratégiques, l’explicitation <strong>de</strong>s objectifs écologiques et <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.P<strong>en</strong>dant la planification stratégique, l’ONGE reformule ses int<strong>en</strong>tions stratégiques qui se situ<strong>en</strong>td’abord dans le registre <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver mais aussi dans les trois autres registres <strong>du</strong>mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t interne et <strong>de</strong> la place dans le secteur <strong>de</strong> la conservation pourchacun <strong>de</strong>squels l’organisation se donne <strong>de</strong>s objectifs. Cette stratégie est égalem<strong>en</strong>t sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>epar <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions : dans ces processus <strong>de</strong> construction, l’organisation p<strong>en</strong>se simultaném<strong>en</strong>t àla façon <strong>de</strong> s’y pr<strong>en</strong>dre pour augm<strong>en</strong>ter ses capacités d’action (stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités) etaux actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales à mettre <strong>en</strong> œuvre pour atteindre ses objectifs <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>sZHM (stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale).L’articulation <strong>de</strong> ces quatre registres est perçue par les membres <strong>de</strong> la TdV comme un levier <strong>de</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action, exprimé par l’idée <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s projets moins nombreux et plusfédérateurs. Derrière cet <strong>en</strong>jeu pris <strong>en</strong> charge p<strong>en</strong>dant la planification stratégique, il y a bi<strong>en</strong> lamise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’action, l’organisation et le développem<strong>en</strong>t interne(optimisation <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces, <strong>gestion</strong> <strong>du</strong> budget), et le positionnem<strong>en</strong>t dans le secteur <strong>de</strong> larecherche et la conservation (attirer les part<strong>en</strong>aires et ét<strong>en</strong>dre le réseau).434


Conclusion généraleUn <strong>de</strong>uxième levier id<strong>en</strong>tifié est celui <strong>de</strong> l’explicitation <strong>de</strong>s objectifs écologiques, aspect étantapparu comme une faiblesse <strong>du</strong> précéd<strong>en</strong>t programme, et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion dans lessystèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>visagés pour atteindre ces objectifs.2. La planification stratégique est le lieu <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions stratégiques et <strong>de</strong> la création <strong>de</strong>s conditionsd’une émerg<strong>en</strong>ce stratégique canalisée.La planification stratégique est apparue comme un mom<strong>en</strong>t consacré à la mise <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>sstratégies d’actions opérationnelles (échelle <strong>de</strong>s projets) à la stratégie d’action générale <strong>de</strong>l’organisation, révélant une t<strong>en</strong>sion forte et un important travail d’articulation <strong>en</strong>tre les échellesglobales et opérationnelles. La planification stratégique est, comme nous l’avons rappelé dans leprécéd<strong>en</strong>t point, le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la formalisation <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions stratégiques, d’abord dans leregistre <strong>de</strong> l’objet écologique à conserver, mais égalem<strong>en</strong>t dans les trois autres registres. Nousavons montré que les processus spécifiques <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie (la planification)étai<strong>en</strong>t pro<strong>du</strong>ctifs jusqu’à un certain point (notamm<strong>en</strong>t à travers les exemples <strong>du</strong> transfert <strong>de</strong>sconnaissances et <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong>s sites ateliers). La construction se poursuit <strong>en</strong>suite dans lamise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions. La planification stratégique est donc apparue comme étant unprocessus <strong>de</strong> création <strong>de</strong> conditions d’une émerg<strong>en</strong>ce stratégique canalisée. Cette conclusion nous rapprocheà la fois <strong>de</strong>s auteurs <strong>du</strong> courant pratique <strong>de</strong> la stratégie, qui indiqu<strong>en</strong>t d’une part, à partir d’étu<strong>de</strong>s<strong>de</strong> cas, que la planification stratégique n’est plus la procé<strong>du</strong>re stérile décrite par Mintzberg (1994)(Cailluet, 2008), et d’autre part, que la stratégie se construit dans les situations d’action(Golsorkhi, 2006). Mais aussi <strong>de</strong>s conclusions d’A-C. Martinet (2001) sur la planificationstratégique indiquant que t<strong>en</strong>ir compte <strong>de</strong> cette pratique permet d’une part <strong>de</strong> s’ancrer dans laréalité <strong>de</strong> ce qui se passe dans les organisations et <strong>de</strong> ne pas perdre le fil <strong>de</strong>s int<strong>en</strong>tions. Pourl’auteur, « à la condition d’organiser et d’animer correctem<strong>en</strong>t le processus, l’ascèse et l’effortintellectuel collectif qu’elle stimule augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t la probabilité <strong>de</strong> concevoir et former <strong>de</strong>sstratégies ambitieuses mais réalistes, <strong>de</strong> distinguer les objectifs <strong>de</strong>s contraintes, d’expliciter les« tra<strong>de</strong>-offs » sans lesquels le concept même <strong>de</strong> stratégie se dilue » (Martinet, 2001 : 193). Ce sontces processus observés à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> que nous avons appelés la création <strong>de</strong>s conditions d’uneémerg<strong>en</strong>ce canalisée, et dans lesquels nous sommes interv<strong>en</strong>ue, considérant que la planificationstratégique était un mom<strong>en</strong>t distinct <strong>de</strong> l’action, mais v<strong>en</strong>ant <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.435


Conclusion générale3. Le raisonnem<strong>en</strong>t stratégique proposé est fondé sur l’explicitation <strong>de</strong>s objectifs écologiques et <strong>de</strong> la stratégied’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale à partir <strong>du</strong> diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective.Le diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective et la connaissance <strong>du</strong> terrain sont apparus commedéterminants dans les analyses <strong>de</strong> situations d’actions concrètes. L’explicitation <strong>de</strong>s objectifsécologiques et <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ont été perçus comme un levier <strong>de</strong>r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’action. P<strong>en</strong>dant la planification stratégique, nous avons alors co-construit, avecla direction <strong>de</strong> la TdV, un cadre pour la construction <strong>de</strong>s projets (termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce à usageinterne). Ce cadre intro<strong>du</strong>it un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique favorisant la construction <strong>de</strong>s projets àpartir <strong>de</strong> la clarification <strong>de</strong>s objectifs écologiques à atteindre, d’un diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong>effective et <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action à partir d’une analyse <strong>de</strong> la place <strong>de</strong> la TdV et<strong>de</strong>s rôles qu’elle peut jouer.Comm<strong>en</strong>t l’ONGE peut-elle appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r les impacts écologiques <strong>de</strong> ses actions ?Les impacts écologiques <strong>de</strong>s actions r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à la mission <strong>de</strong> l’ONGE. Il s’agit pour sesmembres d’une question <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s. Cep<strong>en</strong>dant, la connaissance <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> l’action n’est pasfacilem<strong>en</strong>t accessible dans le domaine <strong>de</strong> la conservation. A la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, la question <strong>de</strong>simpacts <strong>de</strong> l’action sur les zones humi<strong>de</strong>s est associée à celle <strong>de</strong> l’évaluation <strong>du</strong> programme. LaTdV a m<strong>en</strong>é une réflexion afin <strong>de</strong> faire évoluer la pratique <strong>de</strong> l’évaluation pour t<strong>en</strong>ir davantagecompte <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s actions mis <strong>en</strong> œuvre par les équipes (et non plus seulem<strong>en</strong>t lapro<strong>du</strong>ction sci<strong>en</strong>tifique). L’évaluation <strong>de</strong>s impacts sur les écosystèmes visés continue néanmoins<strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s difficultés méthodologiques liées au caractère indirect <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s actionsdéveloppées et au problème <strong>de</strong> l’attribution <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> l’état d’un écosystème lorsque<strong>de</strong> nombreux acteurs l’influ<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t. Pour contourner ces difficultés, nous avons étudié la pratique<strong>de</strong> l’évaluation à la TdV <strong>en</strong> interrogeant son rôle dans l’organisation et vis-à-vis <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> l’action.1. A la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, la dim<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> l’évaluation privilégiée est celle <strong>de</strong> l’analyse réflexive.La pratique <strong>de</strong> l’évaluation est, <strong>de</strong> façon inhér<strong>en</strong>te (Alkin, 2004a), sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>e pas <strong>de</strong>ux logiquesqui se retrouv<strong>en</strong>t à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> : l’évaluation comme espace <strong>de</strong> réflexion rétrospective pourr<strong>en</strong>forcer l’action et l’évaluation comme procé<strong>du</strong>re <strong>de</strong> contrôle par les mandants.Pour se soumettre au contrôle par ses organes <strong>de</strong> gouvernance, les membres <strong>de</strong> la TdV sontt<strong>en</strong>tés <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s indicateurs mesurables, simples, peu coûteux et efficaces pour cettefonction. C. Riveline indique ainsi que les ag<strong>en</strong>ts ont t<strong>en</strong>dance à privilégier les critèresnumériques pour leur fonction simplificatrice et leur caractère facilem<strong>en</strong>t communicable : « les436


Conclusion généralechiffres ont <strong>de</strong>s propriétés <strong>de</strong> concision, <strong>de</strong> comparabilité, <strong>de</strong>s possibilités <strong>de</strong> représ<strong>en</strong>tationgraphique qui leur confèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> grands avantages sur tous les autres mo<strong>de</strong>s d'expression »(Riveline, 1991). Nous avons montré que l’organisation n’avait pas pu aller au bout <strong>de</strong> cettelogique pour la simple raison qu’il est rarem<strong>en</strong>t possible <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s indicateurs simples pourla plupart <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> conservation qui sont une combinaison d’actions pour partieimprévisibles. Les membres <strong>de</strong> ses organes <strong>de</strong> gouvernance eux-mêmes ont <strong>en</strong>gagé l’organisationà développer une démarche qui privilégie l’explicitation <strong>de</strong>s stratégies, qui permett<strong>en</strong>t une analyseet un jugem<strong>en</strong>t qualitatif <strong>du</strong> programme. C’est dans cette perspective, qui r<strong>en</strong>voie cette fois à lafonction réflexive <strong>de</strong> l’évaluation et d’amélioration procé<strong>du</strong>rale <strong>de</strong> l’action, que nous avons alorsc<strong>en</strong>tré notre analyse et nos restitutions dans le cadre <strong>de</strong> notre recherche-interv<strong>en</strong>tion.2. La démarche proposée est un cadre d’évaluation fondé sur une logique d’établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>en</strong>trela stratégie et les impacts sur les objets écologiques.Nous avons proposé, au terme d’une démarche interactive <strong>en</strong> particulier avec le directeur <strong>du</strong>programme <strong>de</strong> l’ONGE, un cadre d’évaluation <strong>de</strong> la stratégie permettant <strong>de</strong> relier la stratégie auximpacts. Ce cadre vise à sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique <strong>en</strong> favorisant l’établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s chaînes<strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s actions. Nous avons montré que ce résultat ne pouvait être obt<strong>en</strong>u qu’au terme <strong>de</strong><strong>de</strong>ux étapes fondam<strong>en</strong>tales.- L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> situations d’actions concrètes, au cours <strong>de</strong> laquelle nous avons analysé lesdéterminants internes <strong>de</strong>s choix stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE et ses actions externes <strong>en</strong> t<strong>en</strong>tant <strong>de</strong>suivre, autant que possible, la contribution <strong>de</strong> ces interv<strong>en</strong>tions à un changem<strong>en</strong>t dans la <strong>gestion</strong>favorable aux zones humi<strong>de</strong>s concernées. Ce faisant, nous avons relié stratégie et impacts, <strong>en</strong>montrant : la nécessité d’ancrer l’analyse dans <strong>de</strong>s situations concrètes, la multiplicité <strong>de</strong>s facteursinternes et externes à pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte pour compr<strong>en</strong>dre la pertin<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’action et évaluerson apport au regard <strong>de</strong> la situation. Pour faire <strong>de</strong> cette démarche un savoir actionnable pourd’autres actions, nous <strong>de</strong>vions <strong>en</strong> tirer un cadre générique.- Pour y parv<strong>en</strong>ir, il fallait <strong>en</strong>core passer par une <strong>de</strong>uxième étape, celle <strong>de</strong> l’analyse fine <strong>de</strong>sprocessus <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> la stratégie. L’élaboration <strong>de</strong> la stratégie n’est pas une procé<strong>du</strong>reformelle, prévisible et maîtrisée. Elle est au contraire sous-t<strong>en</strong><strong>du</strong>e par ses caractères int<strong>en</strong>tionnelset émerg<strong>en</strong>ts, pour l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong> l’organisation et pour les échelles <strong>de</strong>s opérations. Pour sout<strong>en</strong>irla construction <strong>de</strong> stratégies allant plus loin vers la mission <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, l’évaluation nepeut donc pas être une procé<strong>du</strong>re figée par <strong>de</strong>s indicateurs déterminants à l’avance la forme <strong>de</strong>srésultats à atteindre. Cep<strong>en</strong>dant, l’objectif écologique à atteindre doit <strong>en</strong> revanche être explicité <strong>de</strong>façon précise.437


Conclusion généraleLa modalité <strong>de</strong> l’évaluation, permettant à la fois d’articuler la stratégie à ses impacts et <strong>de</strong> sout<strong>en</strong>irla progression procé<strong>du</strong>rale <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, suit une logique d’explicitation <strong>de</strong> lachaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’action, et <strong>de</strong> vérification <strong>de</strong> la chaîne s<strong>en</strong>sée avoir eu lieu dans la mise <strong>en</strong>œuvre <strong>de</strong> la stratégie.2. L’analyse stratégique pour les organisations à finalité<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleIl s’agit maint<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> dresser le bilan <strong>de</strong> cette recherche doctorale <strong>en</strong> <strong>en</strong>visageant les éclairagespro<strong>du</strong>its <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’organisation dans laquelle elle a été m<strong>en</strong>ée et construite. Les troisprincipaux résultats que nous proposons à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et que nous voulons à prés<strong>en</strong>tprojeter pour d’autres organisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales sont ceux que nous v<strong>en</strong>ons <strong>de</strong> rappeler :un cadre d’analyse articulant les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE, un raisonnem<strong>en</strong>tstratégique fondé sur les principes <strong>de</strong> l’ASGE (l’explicitation <strong>de</strong>s objectifs écologiques et l’ancrage<strong>de</strong> la stratégie dans le diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective), un cadre d’évaluation souple <strong>de</strong>sstratégies et <strong>de</strong>s actions <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales. Ces résultats sont tous le fruit d’un travail ancréd’une part, dans <strong>de</strong>s situations d’action concrètes et d’autre part, dans l’interaction avec lesmembres <strong>de</strong> l’organisation selon notre approche constructiviste <strong>de</strong> recherche-interv<strong>en</strong>tion.Envisager l’apport <strong>de</strong> ces connaissances à d’autres organisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales fait doncappel à une discussion sur la démarche <strong>de</strong> recherche et le statut <strong>de</strong>s résultats.2.1 La discussion <strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites et la proposition d’uncadre d’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGEEn choisissant <strong>de</strong> réfléchir sur un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour sout<strong>en</strong>ir les ONGE dans ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur impact écologique, nous avons adopté une posture clinique, pour r<strong>en</strong>forcerl’action, et critique, pour étudier la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE au regard <strong>de</strong> ses propres objectifsécologiques. Notre cadre d’ASGE rec<strong>en</strong>tré sur l’ONGE nous a guidé dans la découverte <strong>de</strong> lastratégie <strong>de</strong> l’organisation. Les analyses que nous <strong>en</strong> avons tirées ont été co-construites avec lesmembres <strong>de</strong> l’organisation à travers une démarche interactive et itérative <strong>de</strong> soumission <strong>de</strong>sanalyses intermédiaires. L’explicitation <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> force <strong>de</strong> la stratégie, la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>ses zones d’ombre, <strong>de</strong>s choix arrêtés et <strong>de</strong>s compromis internes plus ou moins anticipés, sont438


Conclusion généraleautant <strong>de</strong> résultats locaux qui serv<strong>en</strong>t presque uniquem<strong>en</strong>t l’organisation elle-même. Ils pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>ts<strong>en</strong>s dans ce que Friedberg (1997[1993] : 392) appelle « la valeur pragmatique <strong>de</strong> la connaissancepro<strong>du</strong>ite » pour désigner les connaissances pro<strong>du</strong>ites par cette démarche qui ne sont pas« applicables » <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur contexte <strong>de</strong> construction, et seulem<strong>en</strong>t « utilisables » par lesacteurs <strong>du</strong> champ concernés.Cette abs<strong>en</strong>ce d’applicabilité <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> la recherche <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur contexte <strong>de</strong>construction est à voir comme un <strong>de</strong>s intérêts majeurs <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> recherche, qui est lié à laposture et à la démarche mise <strong>en</strong> œuvre. La posture clinique adoptée (Friedberg, 1997) pourétudier l’action <strong>de</strong> l’ONGE dans <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> particuliers, fondés sur <strong>de</strong>s problèmesd’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t particuliers (Mermet et al., 2005), amène à la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> connaissancesrésolum<strong>en</strong>t contextualisées et locales qui intéress<strong>en</strong>t <strong>en</strong> premier lieu l’ONGE. Cette approche necherche pas à formuler <strong>de</strong> lois générales sur les propriétés structurelles qui offrirai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>ssolutions toutes faites et applicables par l’ONGE, que ce soit pour <strong>de</strong>s systèmes d’action fondéspar un problème d’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, ou pour tout système d’action comme l’indique E. Friedberg :« la mise <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce décisive <strong>de</strong>s contextes d'action et <strong>du</strong> caractère socialem<strong>en</strong>tconstruit <strong>de</strong> son ordre local r<strong>en</strong>d <strong>en</strong> effet extrêmem<strong>en</strong>t difficile l'établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>préceptes normatifs, même restreints. La conting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>sd'organisation ou <strong>de</strong> régulation d'un contexte d'action impose la reconnaissance <strong>de</strong> laconting<strong>en</strong>ce générale et radicale <strong>de</strong>s solutions que l'on peut proposer, <strong>en</strong> même tempsqu'elle r<strong>en</strong>d impossible toute technicisation <strong>de</strong>s problèmes ou toute optimisation <strong>de</strong>ssolutions » (ibid. : 299).Le pot<strong>en</strong>tiel <strong>de</strong> généralisation <strong>de</strong> cette recherche ne se situe ainsi pas dans les connaissanceslocales construites, mais dans la démarche et dans les cadres d’analyse et d’évaluation élaborés.Ainsi, la visée <strong>de</strong> notre recherche est explicitem<strong>en</strong>t le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong>s acteurs qui agiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> faveurd’un meilleur état écologique <strong>de</strong>s écosystèmes, mais cela ne passe pas par la proposition <strong>de</strong>solutions directes et « applicables » pour l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, qui m<strong>en</strong>erait à <strong>de</strong>s actionsdécontextualisées. Comme l’indiqu<strong>en</strong>t M-J. Av<strong>en</strong>ier et C. Schmitt (2007) qui s’interrog<strong>en</strong>t sur lapro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> savoir actionnable dans les recherches constructivistes <strong>en</strong> managem<strong>en</strong>t, l’apportprincipal <strong>de</strong> ces recherches rési<strong>de</strong> au contraire dans l’incitation et l’outillage <strong>de</strong> la réflexivité <strong>de</strong>sacteurs concernés :« La généralisation ne vise pas tant l'établissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> théories universelles que laconceptualisation <strong>de</strong> relations <strong>en</strong>tre g<strong>en</strong>res <strong>de</strong> phénomènes. Il s'agit donc plutôt <strong>de</strong>« généricisation » : les savoirs élaborés pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t alors la forme <strong>de</strong> métamodèle et/ou <strong>de</strong>propositions génériques. Ces savoirs, une fois recontextualisés <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la situationspécifique dans laquelle ils sont mobilisés, vis<strong>en</strong>t à fournir <strong>de</strong>s repères <strong>de</strong>stinés à éclairer439


Conclusion généralele manager, susciter sa réflexion et <strong>de</strong>s questionnem<strong>en</strong>ts, ainsi qu'à stimuler sonintellig<strong>en</strong>ce et son action créative » (Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007 : 27).Notre cadre d’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (ASOFE), issue<strong>de</strong> l’ASGE prov<strong>en</strong>ant d’une précéd<strong>en</strong>te étu<strong>de</strong> empirique sur l’ONGE Conservation International,constitue un modèle générique à l’usage <strong>de</strong>s analystes, chercheurs et étudiants, travaillant sur lesorganisations <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales et voulant articuler analyse <strong>de</strong> l’organisation interne et analyse<strong>de</strong> ses actions externes. Il est égalem<strong>en</strong>t à l’usage <strong>de</strong>s pratici<strong>en</strong>s qui peuv<strong>en</strong>t avoir besoin <strong>de</strong>repères simples pour outiller leur réflexion stratégique.Au niveau théorique, ce cadre d’analyse apporte égalem<strong>en</strong>t une réponse à une question souv<strong>en</strong>tposée lorsqu’on abor<strong>de</strong> les ONG (e.g. Quéinnec & Igal<strong>en</strong>s, 2004 ; Hoarau & Laville, 2008 ;Colloque CNAM, 2009) : peut-on mobiliser les théories et les outils <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise pour étudierles ONG ? Nous montrons que ce cadre permet d’organiser la mobilisation <strong>de</strong> théories issues <strong>du</strong>managem<strong>en</strong>t stratégique et <strong>de</strong>s organisations, et que ces mobilisations sont non seulem<strong>en</strong>tpossibles, mais nécessaires pour éclairer l’articulation <strong>en</strong>tre l’organisation interne et ses actionsexternes. Cep<strong>en</strong>dant, l’utilisation <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>treprise pour étudier les ONGE ne peut sefaire que dans un cadre qui permette d’ancrer l’analyse vis-à-vis d’une référ<strong>en</strong>ce écologique, priseà la fois comme finalité <strong>de</strong> l’organisation (la création <strong>de</strong> valeur n’est pas économique maisécologique) et comme repère critique à l’analyse (étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s actions au regard <strong>de</strong> la référ<strong>en</strong>ce).2.2 La discussion <strong>de</strong>s implications <strong>de</strong> la recherche sur les stratégies <strong>de</strong>s ONGE etl’intro<strong>du</strong>ction d’un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour sout<strong>en</strong>ir l’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleLe raisonnem<strong>en</strong>t stratégique proposé à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> constitue un savoir dont la logique estassez générique pour être mobilisé par <strong>de</strong>s organisations dès lors que leur but est d’agir <strong>en</strong> faveur<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t. Ce raisonnem<strong>en</strong>t stratégique est bâti sur la clarification <strong>de</strong>s objectifsécologiques et l’explicitation <strong>de</strong>s stratégies au regard d’un diagnostic <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> effective.Fondé sur les principes <strong>de</strong> l’ASGE, il est par ailleurs « valable » au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> C. Argyris, dans lamesure où « l'élaboration <strong>de</strong> ce savoir a fait l'objet d'un travail réflexif et <strong>de</strong> conceptualisationrigoureux, appelé travail épistémique » dont le chercheur r<strong>en</strong>d compte (Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007 :28).440


Conclusion généraleCe raisonnem<strong>en</strong>t stratégique n’est cep<strong>en</strong>dant pas livré comme un compte-r<strong>en</strong><strong>du</strong> aux membres <strong>de</strong>l’ONGE. Pour repr<strong>en</strong>dre les termes <strong>de</strong> E. Friedberg (1997[1993] : 302) « l’analyste apporte uneconnaissance et une ai<strong>de</strong> à l’utilisation <strong>de</strong> ces connaissances par les acteurs <strong>du</strong> champ concerné ».Plus précisém<strong>en</strong>t, pour r<strong>en</strong>dre ce savoir actionnable pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, nous l’avons construitavec ses membres et l’avons adapté aux processus internes existant dans l’organisation (les cadres<strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets, termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce utilisés au cours <strong>de</strong> la planification stratégique).Envisager <strong>de</strong> transférer ce « savoir actionnable générique » 221 au s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> Av<strong>en</strong>ier et Schmitt(2007) pose la question <strong>de</strong> la repro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> la recherche dans d’autres organisations<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales, ce qui appelle une réflexion sur les implications <strong>du</strong> développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sconnaissances sur les stratégies <strong>de</strong> ces organisations.Premièrem<strong>en</strong>t, comme c’est le cas dans d’autres recherches <strong>en</strong> sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>, il n’est pastoujours facile d’accé<strong>de</strong>r à l’interne <strong>de</strong>s organisations. J. Girin (1990) apportait <strong>en</strong> 1990 le« dispositif <strong>de</strong> recherche » pour <strong>en</strong>cadrer les recherches-interv<strong>en</strong>tions et r<strong>en</strong>dre les organisationsmoins rétives à la démarche. Dans notre cas, nous avons vu que même si l’ONGE accepted’accueillir l’analyste et se montre ouverte à l’analyse stratégique <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, il y a unréflexe naturel (plus ou moins consci<strong>en</strong>t) à ne pas donner à voir d’emblée les t<strong>en</strong>sions, lescontraintes ou les ressources fondam<strong>en</strong>tales <strong>de</strong> l’action. Il faut avancer pas à pas, les pointer soimêmeet montrer sa connaissance <strong>du</strong> sujet : la recherche se négocie avec l’organisation. Quelsrisques les ONGE peuv<strong>en</strong>t-elles percevoir lorsqu’elles sont approchées par un analyste quiannonce un positionnem<strong>en</strong>t normatif proche <strong>du</strong> leur – i.e. l’amélioration <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ? Le regard <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal porté sur l’action <strong>de</strong> l’ONGE et les cadresconstruits sont <strong>en</strong> première lecture clairem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> sa réflexion stratégique pour ler<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa contribution <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale. Mais si l’ONGE se trouve dans une difficultéimportante à faire t<strong>en</strong>ir <strong>en</strong>semble les quatre registres, et peine à t<strong>en</strong>ir le cap <strong>de</strong> la stratégie d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, il est fort probable qu’elle ne se laisse pas appréh<strong>en</strong><strong>de</strong>r pour <strong>de</strong>s analysesc<strong>en</strong>trées sur les objectifs <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux. Nous <strong>en</strong> avons nous même fait l’expéri<strong>en</strong>ce pourune ONGE que nous n’avons pas réussi à approcher malgré l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> nombreux contacts.Il faut <strong>en</strong>core examiner un autre angle <strong>de</strong> la question : si une ONGE ti<strong>en</strong>t la ligne <strong>de</strong> ses objectifs<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taux et n’a donc pas à craindre d’une recherche critique questionnant sa cohér<strong>en</strong>ceet sa contribution <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, doit-elle néanmoins se méfier d’une mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong> sa221 « Un savoir actionnable générique désigne un <strong>en</strong>semble cohér<strong>en</strong>t d'énoncés <strong>de</strong>stinés non pas à être appliqués <strong>de</strong>manière mécaniste, mais à fournir <strong>de</strong>s repères pour susciter le questionnem<strong>en</strong>t, la réflexion, l'action créative, et plusgénéralem<strong>en</strong>t faciliter l'exercice <strong>de</strong> l'intellig<strong>en</strong>ce active <strong>de</strong>s personnes auxquelles ils s'adress<strong>en</strong>t prioritairem<strong>en</strong>t »(Av<strong>en</strong>ier & Schmitt, 2007 : 28).441


Conclusion généralestratégie ? Ce type d’analyses peut-il nuire aux ONGE <strong>en</strong> donnant à voir les rouages discrets <strong>de</strong>leurs actions, dès lors que cela pourrait profiter aux forces actives, locales ou plus globales, quis’exerc<strong>en</strong>t à les déjouer ? Dans un contexte où les ONGE doiv<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s comptes sur leuraction, P. Jepson (2005) interroge <strong>de</strong> même les risques pour les ONGE <strong>de</strong> la mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong>leurs actions et leur <strong>gestion</strong> interne. Comme il l’indique, les pot<strong>en</strong>tielles faiblesses (même silégitimes) mises à jour peuv<strong>en</strong>t être utilisées négativem<strong>en</strong>t par les médias ou les acteurss’opposant aux rôles joués par les ONGE.Nous avons vu que ce point était s<strong>en</strong>sible dans le cas <strong>de</strong> la TdV : cette ONGE s’affiche être dansl’ « accompagnem<strong>en</strong>t » et dans l’apport d’une expertise pour co-construire, avec les acteurslocaux, <strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> favorables à la conservation <strong>de</strong>s ZHM. Dans cette logique, elle at<strong>en</strong>dance à porter plus haut les écosystèmes et leur biodiversité pour les mettre sur la scènepublique, mais à ne pas désigner les responsables <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong>s ZHMqu’elle cherche à infléchir. Nous avons pu voir que le cadre <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s projets incitant àl’explicitation <strong>de</strong>s stratégies d’action avait été bi<strong>en</strong> accueilli. Il apporte à la réflexion stratégique <strong>en</strong>guidant le diagnostic <strong>du</strong> système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> visé et l’auto-analyse <strong>de</strong> sa place et <strong>de</strong> son rôle.Cep<strong>en</strong>dant, la clarification <strong>de</strong>s stratégies qu’il permet implique simultaném<strong>en</strong>t une plus gran<strong>de</strong>att<strong>en</strong>tion et réflexion portées à l’accès <strong>de</strong> ces docum<strong>en</strong>ts stratégiques <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’organisation.Là non plus il n’y a sans doute pas <strong>de</strong> réponse généralisable, sauf le rappel <strong>de</strong>s implications <strong>de</strong> laconnaissance pro<strong>du</strong>ite dont l’analyste est responsable et <strong>de</strong> la nécessité pour lui <strong>de</strong> clarifier saposture <strong>de</strong> recherche. Une fois ces précautions émises, nous pouvons <strong>en</strong>visager la repro<strong>du</strong>ction<strong>de</strong> la démarche sur d’autres ONGE comme une perspective ouverte pour <strong>de</strong> nouvellesrecherches, la comparaison étant <strong>en</strong> outre un moy<strong>en</strong> recommandé par E. Friedberg, citant Glaseret Strauss, pour asseoir son modèle interprétatif et ses catégories conceptuelles (Friedberg,1997[1993] : 31).2.3 L’évaluation <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : suivre la stratégie ett<strong>en</strong>ir le cap <strong>de</strong>s impacts écologiquesLes membres <strong>de</strong>s ONGE exprim<strong>en</strong>t la préoccupation d’atteindre leur mission et d’augm<strong>en</strong>terl’impact <strong>de</strong> leurs actions sur les écosystèmes et la biodiversité. Le cadre d’évaluation construit avocation à être un savoir actionnable pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, mais aussi pour toute autreorganisation <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale qui se saisirait <strong>de</strong> la question <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> son action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> ses impacts. La logique d’évaluation proposée compr<strong>en</strong>d<strong>de</strong>ux principes fondam<strong>en</strong>taux : l’évaluation doit être c<strong>en</strong>trée sur <strong>de</strong>s objectifs écologiques442


Conclusion généraleexplicites et les critères d’évaluation sont écologiques. En revanche, elle doit être ouverte et nepas fixer a priori les moy<strong>en</strong>s et les métho<strong>de</strong>s pour arriver au résultat escompté. Elle doit permettre<strong>de</strong> retracer la chaîne <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> l’action, dès que possible, jusqu’à l’état <strong>de</strong> l’objet écologique visé.Construire un cadre d’évaluation pour répondre à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> interne d’atteinte <strong>de</strong>s objectifs et la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> externe <strong>de</strong> lisibilité sur le rôle <strong>de</strong> l’ONGE, c’est aller dans le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la t<strong>en</strong>dance lour<strong>de</strong><strong>de</strong> nos mo<strong>de</strong>s d’organisation. Aujourd’hui, la légitimité est principalem<strong>en</strong>t fondée sur ladémonstration <strong>de</strong> bonnes pratiques, <strong>de</strong> bonnes métho<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> bons résultats, aussi nomméaccountability dans le mon<strong>de</strong> anglo-saxon. La logique évaluative, souv<strong>en</strong>t limitée à <strong>de</strong>s critèressynthétiques voire d’effici<strong>en</strong>ce économique, se répand à tous les secteurs d’activités, et les travauxmontrant les limites et les effets contre-pro<strong>du</strong>ctifs <strong>de</strong> cette pratique se multipli<strong>en</strong>t. Latransformation négative <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> liée à cette évolution vi<strong>en</strong>t d’abord <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<strong>en</strong>treprises (Palpacuer et al., 2010), mais se développe dans le secteur public (Busson-Villa, 1999 ;Naro, 2010) ou <strong>en</strong>core celui <strong>de</strong> la recherche (Matzkin, 2009). Les ONGE connaiss<strong>en</strong>t les mêmescontraintes lorsqu’elles perçoiv<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’arg<strong>en</strong>t public à travers les programmes financés par lesbailleurs nationaux ou internationaux. Ces financem<strong>en</strong>ts s’accompagn<strong>en</strong>t d’un cadre <strong>de</strong> projet et<strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s standards à respecter, <strong>de</strong> procé<strong>du</strong>res d’audit et d’évaluation fondés sur <strong>de</strong>s critèreschiffrés (comme nous l’avons vu dans le cas <strong>du</strong> projet GIZC au Maroc). Selon les pratici<strong>en</strong>s, cescadres et évaluations <strong>de</strong> projet atteign<strong>en</strong>t une certaine limite, les marges <strong>de</strong> manœuvres<strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t si ré<strong>du</strong>ites qu’il est difficile <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s actions adaptées aux contextesr<strong>en</strong>contrés.Faut-il pour autant rejeter la pratique <strong>de</strong> l’évaluation sur et dans les ONGE ? P. Jepson plai<strong>de</strong>pour le développem<strong>en</strong>t d’un mo<strong>de</strong> d’évaluation et <strong>de</strong> compte r<strong>en</strong><strong>du</strong> <strong>de</strong>s actions spécifiques ausecteur <strong>de</strong>s ONGE. Ce régime d’accountability doit être adapté à « l’id<strong>en</strong>tité et au rôle <strong>de</strong> cesorganisations » (Jepson, 2005 : 218). Dans cette perspective, notre proposition est une évaluation« ferme » sur l’objectif écologique, mais « souple » sur la stratégie et les métho<strong>de</strong>s mises <strong>en</strong> œuvre.Cette voie <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> visibilité <strong>de</strong> l’action et <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à être maint<strong>en</strong>ant étudiée sursa capacité à sout<strong>en</strong>ir l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans les ONGE, à répondre à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>comptes sur l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale, et peut-être à être porteuse d’une pratique moins aveugle<strong>de</strong> l’évaluation.443


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Table <strong>de</strong>s matièresRésumé.................................................................................................................................................. 1Remerciem<strong>en</strong>ts .................................................................................................................................... 3Intro<strong>du</strong>ction générale...........................................................................................................9Partie 1Articuler la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE et l’impact <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions : cadre théorique etdémarche <strong>de</strong> recherche pour se saisir <strong>du</strong> problème .......................................................... 17Chapitre 1 - De la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE à l’impact <strong>de</strong> ses interv<strong>en</strong>tions : prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> cadre d’analyse .... 191.1 L’Analyse Stratégique <strong>de</strong> la Gestion Environnem<strong>en</strong>tale : un cadre pour poser leproblème............................................................................................................................................. 201.2 L’analyse stratégique pour l’ONGE......................................................................................... 271.3 Etudier l’organisation au regard <strong>de</strong> sa mission : l’apport <strong>de</strong>s théories <strong>de</strong>s organisations 401.3.1 La stratégie <strong>de</strong> l’ONGE à travers la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s ressources et <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces dansl’action ............................................................................................................................................ 441.3.2 De l’élaboration stratégique à la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong>s actions : l’éclairage <strong>du</strong> courant <strong>de</strong>la stratégie comme pratique......................................................................................................... 491.3.3 L’action <strong>de</strong> l’ONGE dans l’<strong>en</strong>semble agissant pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t : l’éclairage <strong>de</strong>l’analyse croziéri<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> l’action organisée............................................................................... 531.4 Relier stratégie et impact <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : implications pour l’ONGE etpour l’analyse...................................................................................................................................... 59Chapitre 2 - Une recherche in<strong>du</strong>ctive et interv<strong>en</strong>ante sur une ONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ........................... 632.1 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> l’ONGE : la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>........................................................................... 642.1.1 Emerg<strong>en</strong>ce d’une mission c<strong>en</strong>trée les zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes .................. 642.1.2 Evolution <strong>de</strong> ses mo<strong>de</strong>s d’action pour la conservation <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes.......................................................................................................................... 682.1.3 Quelques données internes sur une organisation professionnelle............................... 702.1.4 Une ONGE appart<strong>en</strong>ant à <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s : la recherche sci<strong>en</strong>tifique et laconservation <strong>de</strong> la nature............................................................................................................. 732.2 Abor<strong>de</strong>r la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale par une recherche-interv<strong>en</strong>tion............. 742.2.1 Déployer une recherche in<strong>du</strong>ctive <strong>de</strong>puis l’interne <strong>de</strong> l’organisation jusqu’auxsituations concrètes d’action ....................................................................................................... 772.2.2 Premières implications <strong>de</strong> la posture <strong>de</strong> recherche........................................................ 792.2.3 Pour clore la première phase <strong>de</strong> terrain : asseoir le questionnem<strong>en</strong>t par lacomparaison................................................................................................................................... 812.3 L’<strong>en</strong>quête <strong>de</strong> terrain : les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>s données...................................... 822.3.1 L’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> qualitatif : <strong>de</strong> la conversation à la discussion.............................................. 842.3.2 L’observation in situ ............................................................................................................ 872.3.3 L’analyse <strong>de</strong>s docum<strong>en</strong>ts.................................................................................................... 892.4 La secon<strong>de</strong> phase <strong>de</strong> terrain : <strong>en</strong>tre constructivisme et normativité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale.. 912.4.1 Construction <strong>de</strong> la connaissance : solliciter la réflexivité <strong>de</strong>s acteurs ......................... 912.4.2 Clarifier la posture normative : l’état <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t ............................................ 93468


Table <strong>de</strong>s matières2.4.3 Négocier la réalisation <strong>de</strong> la recherche avec l’ONGE : la nécessaire réflexivité <strong>de</strong>l’analyste ......................................................................................................................................... 952.5 Prémisses sur le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites et la restitution à l’ONGE .............. 982.5.1 Développer et restituer un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique.................................................... 982.5.2 Le statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites ........................................................................... 102Conclusion <strong>de</strong> la première partie................................................................................................................ 105Partie 2Etudier l’élaboration et la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> la stratégie dans <strong>de</strong>s situations d’actionsconcrètes............................................................................................................................107Chapitre 3 - La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes ............. 1113.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique sur les zones humi<strong>de</strong>s : quelles formes d’action<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale ? ......................................................................................................................... 1113.1.1 La recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : <strong>de</strong> la validationacadémique à l’impact sur les zones humi<strong>de</strong>s ........................................................................ 1113.1.2 Enquête <strong>de</strong> terrain et méthodologie............................................................................... 1133.2 Le statut <strong>de</strong> c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> recherche pour la conservation et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacitésd’action.............................................................................................................................................. 1143.2.1 Acquérir et cultiver les compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques pertin<strong>en</strong>tes pour la conservation<strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes ..................................................................................... 1153.2.2 Acquérir <strong>de</strong>s ressources financières pour financer <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> long terme....................................................................................................................................................... 1183.2.3 La légitimité et la notoriété sci<strong>en</strong>tifiques comme ressources ..................................... 1203.2.4 Le réseau, le part<strong>en</strong>ariat : <strong>de</strong>s ressources aux <strong>en</strong>jeux stratégiques multiples............ 1233.3 La recherche comme action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>s problèmesécologiques à la diversité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion .................................................................. 1283.3.1 Publiciser <strong>de</strong>s objets et <strong>de</strong>s problèmes écologiques..................................................... 1303.3.2 Les mo<strong>de</strong>s d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale liés à la recherche sci<strong>en</strong>tifique..................... 1463.4 Typologie, <strong>en</strong>jeux et évaluation <strong>de</strong>s formes d’action par la recherche sci<strong>en</strong>tifique........ 1723.4.1 Ressources et typologie <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action liés à la recherche sci<strong>en</strong>tifique............ 1723.4.2 Système d’acteurs, place, rôle et contribution <strong>de</strong> la TdV............................................ 1753.4.3 Conclusions sur la recherche sci<strong>en</strong>tifique comme action pour la conservation...... 178Chapitre 4 - Le cas <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya « zone humi<strong>de</strong> s<strong>en</strong>sible associée à une approche <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>intégrée <strong>de</strong>s zones côtières »........................................................................................................................ 1794.1 Démarche <strong>de</strong> recherche : analyser le projet pour le remettre <strong>en</strong> perspective dans leprogramme d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>..................................................................................... 1804.2 Raisons <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> projet SMAP IIIembouchure <strong>de</strong> la Moulouya ......................................................................................................... 1824.2.1 Positionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> comme opérateur <strong>de</strong> la GIZC ........................ 1834.2.2 Stratégie d’action contextualisée ou simple exécution d’un programme GIZC ?... 1864.2.3 Prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> site, <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux écologiques et <strong>de</strong> la structure organisationnelle <strong>du</strong>projet SMAP................................................................................................................................ 1914.3 La mise <strong>en</strong> œuvre et les résultats <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya : le but <strong>du</strong> projet est undéroulem<strong>en</strong>t réussi <strong>du</strong> projet......................................................................................................... 2004.3.1 Les diagnostics GIZC : l’impossibilité <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire les élém<strong>en</strong>ts éclairant les levierspour r<strong>en</strong>dre la <strong>gestion</strong> « intégrée »............................................................................................202469


Table <strong>de</strong>s matières4.3.2 L’autonomisation <strong>du</strong> projet contre une vraie participation, l’abs<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> prise contreune vraie insertion dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>....................................................................... 2094.4 Discussion <strong>de</strong> la GIZC comme « mo<strong>de</strong> d’action projet » et évaluation <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la<strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>................................................................................................................................... 2164.4.1 Discussion autour <strong>de</strong> la GIZC comme mo<strong>de</strong> d’action pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>........ 2174.4.2 Evaluation <strong>du</strong> projet et <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.............................................. 221Chapitre 5 - Construction d’un dispositif pour évaluer l’état et les t<strong>en</strong>dances <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes....................................................................................................................................... 2295.1 Des dispositifs d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique pour influ<strong>en</strong>cer les décisions publiques :problématique spécifique et métho<strong>de</strong> .......................................................................................... 2295.1.1 L’OZHM : un dispositif d’interface sci<strong>en</strong>ce-politique ................................................ 2295.1.2 Méthodologie..................................................................................................................... 2325.1.3 Prés<strong>en</strong>tation <strong>du</strong> dispositif OZHM ................................................................................. 2345.2 L’OZHM : t<strong>en</strong>sion et interdép<strong>en</strong>dances <strong>de</strong> quatre registres stratégiques pour construirel’objet « zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes » ............................................................................... 2375.2.1 La stratégie <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t : les ressources critiques pour la construction <strong>de</strong>l’OZHM ....................................................................................................................................... 2375.2.2 Stratégie <strong>de</strong> qualification et <strong>de</strong> construction <strong>de</strong> l’objet « zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes » ..................................................................................................................... 2405.2.3 Stratégie <strong>de</strong> coopération et <strong>de</strong> part<strong>en</strong>ariat : pro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s informations reconnuespolitiquem<strong>en</strong>t et sci<strong>en</strong>tifiquem<strong>en</strong>t et activer le réseau <strong>de</strong> portage <strong>de</strong>s ZHM.................... 2565.2.4 Stratégies d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale <strong>de</strong> l’OZHM : quelles théories d’action ?...... 2695.3 Evaluer la contribution <strong>de</strong> l’OZHM à une meilleure prise <strong>en</strong> charge <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>sméditerrané<strong>en</strong>nes............................................................................................................................. 279Conclusion <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partie............................................................................................................... 283Partie 3Vers un cadrage pour sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique, <strong>de</strong>s actions à leurs impactsécologiques....................................................................................................................... 289Chapitre 6 - La planification stratégique : mom<strong>en</strong>t pour la réflexion et le r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s actions futures... 2916.1 Démarche pour analyser et sout<strong>en</strong>ir la réflexion stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>.......... 2926.1.1 Démarche <strong>de</strong> recherche : la planification stratégique comme « espace-temps » pourla réflexion stratégique ............................................................................................................... 2926.1.2 Prés<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la planification stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> et <strong>de</strong>s objectifs àl’échelle <strong>de</strong> l’organisation........................................................................................................... 2976.2 Stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités : r<strong>en</strong>forcer les ressources et les capacités pouratteindre les objectifs ...................................................................................................................... 3036.2.1 Etablir un budget et rassembler les ressources pour financer le programme.......... 3046.2.2 Structurer l’organisation pour optimiser les compét<strong>en</strong>ces.......................................... 3066.2.3 Acquérir <strong>de</strong>s ressources complém<strong>en</strong>taires à travers le réseau et le part<strong>en</strong>ariat ....... 3136.2.4 Entre développem<strong>en</strong>t interne et li<strong>en</strong> à l’externe : l’évolution <strong>de</strong> la gouvernance pourle r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s capacités d’action.................................................................................... 3206.2.5 Bilan <strong>de</strong> la stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ................... 3266.3 Stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : vers une stratégie au s<strong>en</strong>s fort .............................. 3316.3.1 Les objets écologiques et la focalisation sur <strong>de</strong>s <strong>en</strong>jeux <strong>de</strong> conservation................. 333470


Table <strong>de</strong>s matières6.3.2 La théorie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> articulant différ<strong>en</strong>ts mo<strong>de</strong>s d’interv<strong>en</strong>tion....................................................................................................................................................... 3456.3.3 Bilan sur la construction <strong>de</strong>s objets écologiques à conserver et sur la théorie d’action<strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>..................................................................................................................... 3736.4 Conclusions sur la planification stratégique comme mom<strong>en</strong>t clé pour r<strong>en</strong>forcer lastratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale............................................................................................. 376Chapitre 7 - Relier stratégie et impact écologique <strong>de</strong>s actions : l’évaluation comme mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la réflexionstratégique ................................................................................................................................................ 3857.1 L’évaluation dans les pratiques à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> .............................................................. 3867.2 L’évaluation <strong>de</strong>s impacts écologiques <strong>de</strong> l’action : <strong>en</strong>tre contrôle <strong>de</strong> l’organisation etréflexion stratégique........................................................................................................................ 3917.2.1 Un nouveau cadre d’évaluation pour évaluer les actions au regard <strong>de</strong>s objectifsécologiques................................................................................................................................... 3917.2.2 T<strong>en</strong>sions <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>tes dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> l’évaluation.......................................... 3947.3 L’évaluation, autre « espace-temps » pour la réflexion stratégique ................................... 4087.3.1 Evaluer la stratégie d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale avant d’évaluer l’impact sur l’objet<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tal ......................................................................................................................... 4097.3.2 Conclusions sur les processus d’évaluation : <strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong> la stratégie àl’évaluation <strong>de</strong>s impacts ............................................................................................................. 416Conclusion <strong>de</strong> la troisième partie ............................................................................................................... 419Conclusion générale ......................................................................................................... 4271. Le bilan théorique <strong>de</strong> la recherche et ses résultats pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ......................... 4281.1 Une r<strong>en</strong>contre fructueuse <strong>en</strong>tre les sci<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> pour l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t et lechamp <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong>s organisations................................................................................... 4281.2 Des cadres pour p<strong>en</strong>ser, expliciter et évaluer la stratégie vers la poursuite d’objectifsécologiques clarifiés.................................................................................................................... 4312. L’analyse stratégique pour les organisations à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale .......................... 4382.1 La discussion <strong>du</strong> statut <strong>de</strong>s connaissances pro<strong>du</strong>ites et la proposition d’un cadred’analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE ........................................................................................ 4382.2 La discussion <strong>de</strong>s implications <strong>de</strong> la recherche sur les stratégies <strong>de</strong>s ONGE etl’intro<strong>du</strong>ction d’un raisonnem<strong>en</strong>t stratégique pour sout<strong>en</strong>ir l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et....................................................................................................................................................... 4402.3 L’évaluation <strong>en</strong> souti<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale : suivre la stratégie et t<strong>en</strong>ir le cap<strong>de</strong>s impacts écologiques............................................................................................................. 442Bibliographie......................................................................................................................................... 445Table <strong>de</strong>s matières................................................................................................................................ 468Table <strong>de</strong>s <strong>en</strong>cadrés .......................................................................................................................... 472Table <strong>de</strong>s tableaux........................................................................................................................... 472Table <strong>de</strong>s figures.............................................................................................................................. 474Liste <strong>de</strong>s abréviations...................................................................................................................... 476471


Table <strong>de</strong>s matièresTable <strong>de</strong>s <strong>en</strong>cadrésEncadré 1.1 : Les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE. Le cas <strong>de</strong> Conservation International(De Mombynes & Mermet 2003) ................................................................................................... 29Encadré 1.2 : Définition <strong>de</strong> la stratégie par ses frontières (Lorino & Taron<strong>de</strong>au, 2006 : 317) ...... 42Encadré 2.1 : Action <strong>du</strong> fondateur <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> à l’international. Extrait <strong>du</strong> recueild’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>s avec Luc Hoffmann, par J. Silberstein (2010 : 94-95)............................................ 65Encadré 2.2 : Création et mission <strong>de</strong> l’initiative MedWet.................................................................... 67Encadré 2.3 : Exemple <strong>de</strong> budget annuel <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (Extrait <strong>du</strong> rapport annuel 2009) . 71Encadré 3.1 : Caractéristiques et facteurs <strong>du</strong> déclin <strong>de</strong> la population d’Anguilla anguilla (Abdallah etal., 2009 ; Plan stratégique TdV 2006-2010)................................................................................ 130Encadré 3.2 : Le CSRPN (source : www.paca.ecologie.gouv.fr/Le-CSRPN ; Décret n° 2004-292<strong>du</strong> 26 mars 2004 relatif au conseil sci<strong>en</strong>tifique régional <strong>du</strong> patrimoine naturel) ................... 154Encadré 3.3 : Les plans nationaux d’action et <strong>de</strong> restauration (source : <strong>de</strong>veloppem<strong>en</strong>t<strong>du</strong>rable.gouv.fr)................................................................................................................................156Encadré 4.1 : Les principes pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC (Bonnet et al., 2005 : 93) ............. 190Encadré 4.2 : Activités <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet, 2005 ; Intermediaryreport 2, 2008).................................................................................................................................. 200Encadré 5.1 : Objectifs <strong>de</strong> l’OZHM (Working paper for the second international workshop,2009 ; Working docum<strong>en</strong>t for the third international workshop, 2010) ................................ 235Encadré 5.2 : Thèmes suivis par l’OZHM (Working docum<strong>en</strong>t for the third internationalworkshop, février 2010) ................................................................................................................. 242Encadré 6.1 : Evolution <strong>de</strong>s termes <strong>de</strong> référ<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>s projets <strong>en</strong>tre le programme 2006-2010 et2011-2015 (source : Plans stratégiques TdV 2006-2010 et 2011-2015).................................. 349Encadré 6.2 : la Gestion Intégrée pour la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (extrait <strong>du</strong> Plan stratégique 2011-2015,2010 : 28) .......................................................................................................................................... 353Encadré 6.3 : Définition <strong>de</strong>s « sites ateliers » pour organiser les actions <strong>en</strong> faveur d’une meilleure<strong>gestion</strong> <strong>de</strong> zones humi<strong>de</strong>s méditerrané<strong>en</strong>nes (Extrait Plan stratégique TdV 2011-2015,2010 : 26) .......................................................................................................................................... 367Encadré 7.1 : Evolution <strong>du</strong> cadre d’évaluation <strong>du</strong> programme (Plan stratégique TdV 2011-2015,2010 : 30) .......................................................................................................................................... 392Encadré 7.2 : Projet « Ecologie <strong>de</strong> la santé et conservation » <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces« Conservation <strong>de</strong>s espèces et <strong>de</strong> leurs populations dans le contexte <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>tsglobaux » (Plan stratégique TdV 2011-2015 : 47)....................................................................... 410Table <strong>de</strong>s tableauxTableau 1.1 : Articulation dans les échelles d’analyse <strong>de</strong> l’ONGE..................................................... 26Tableau 2.1 : Catégories et nombre d’employés <strong>de</strong> la TdV <strong>en</strong> 2009 (source : rapport annuel 2009).............................................................................................................................................................. 71Tableau 3.1 : Enjeux stratégiques <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat sci<strong>en</strong>tifique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> ........................ 124Tableau 3.2 : Les 7 exemples d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique à la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> 129Tableau 3.3 : Organisation <strong>du</strong> système d’action pour la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c............... 163Tableau 3.4 : Typologie <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’action par la recherche ou connexes à la recherchesci<strong>en</strong>tifique........................................................................................................................................ 174472


Table <strong>de</strong>s matièresTableau 3.5 : Compét<strong>en</strong>ces sci<strong>en</strong>tifiques et rôle <strong>de</strong> la recherche pour interv<strong>en</strong>ir dans lareconversion <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c.............................................................................................175Tableau 3.6 : Evaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> la TdV à la conservation et l’amélioration <strong>de</strong> la<strong>gestion</strong> à partir <strong>de</strong> l’id<strong>en</strong>tification <strong>de</strong> la place et <strong>du</strong> rôle et <strong>de</strong> stratégie <strong>de</strong> la TdV au sein <strong>du</strong>système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong>........................................................................................................................... 176Tableau 3.7 : Contribution <strong>de</strong> la TdV dans l’amélioration <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>spratiques cynégétiques. Contribution locale, internationale ..................................................... 177Tableau 4.1 : Composition <strong>de</strong>s comités inter-sectoriel et consultatif pour le projet SMAP IIIMoulouya, constitués lors <strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong> lancem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> mars 2007 (Intermediary report 2,2008).................................................................................................................................................. 197Tableau 4.2 : Formations disp<strong>en</strong>sées dans le cadre <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (Intermediaryreport 2, 2008).................................................................................................................................. 201Tableau 4.3 : Les quatre projets réc<strong>en</strong>ts concernant la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya(Docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet MWC, docum<strong>en</strong>t <strong>de</strong> projet SMAP III Moulouya, Brochure et sitesweb pour les projets DéLIO et ACCMA)................................................................................... 204Tableau 5.1 : Thèmes et indicateurs pour l’OZHM, Conclusions of the working session onindicators (Beltrame, docum<strong>en</strong>t interne, version 26 mars 2010) ............................................. 252Tableau 5.2 : Configuration stratégique <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat <strong>de</strong> l’OZHM, synthèse à partir <strong>de</strong>spart<strong>en</strong>ariats effectifs ou pot<strong>en</strong>tiel <strong>en</strong> mars 2010......................................................................... 267Tableau 5.3 : Synthèse <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>en</strong> fonction <strong>de</strong> la position <strong>de</strong>s cibles par rapport àl’Ensemble Agissant pour l’Environnem<strong>en</strong>t............................................................................... 277Tableau 5.4 : Evaluation <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong> l’OZHM dans la conservation <strong>de</strong>s ZHM ........... 280Tableau conclusion partie 2 : Articulation <strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions (« veut ») et les capacités (« peut »)pour les quatre registres stratégiques pour la recherche comme action pour la conservation<strong>de</strong>s ZH, le projet Moulouya au Maroc et la construction <strong>de</strong> l’OZHM................................... 286Tableau 6.1 : Schéma d’analyse <strong>de</strong> la réflexion et <strong>de</strong> l’élaboration stratégique <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>............................................................................................................................................................ 295Tableau 6.2 : Echéancier <strong>de</strong> la planification stratégique pour le plan quinqu<strong>en</strong>nal 2011-2015(source : docum<strong>en</strong>ts internes <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>, 2009)................................................................... 297Tableau 6.3 : Rubriques <strong>du</strong> Plan stratégique 2011-2015 <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> replacées dans notrecadre à quatre registres stratégiques ............................................................................................. 298Tableau 6.4 : Cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> concernant la construction et lafocalisation sur l’objet écologique à conserver et le mo<strong>de</strong> d’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale général<strong>de</strong> l’organisation (Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 21-24) ................................................... 300Tableau 6.5 : Cont<strong>en</strong>u <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> concernant le développem<strong>en</strong>t interne etla place dans le secteur (Plan stratégique 2011-2015, 2010 : 107-120).................................... 302Tableau 6.6 : Evolution <strong>de</strong>s projets dans le départem<strong>en</strong>t « Espèces » <strong>en</strong>tre 2006-2010 et 2011-2015 (source : Plan stratégique TdV 2006-2010, 2005 ; Plan stratégique TdV 2011-2015,2010).................................................................................................................................................. 311Tableau 6.7 : Evolution <strong>de</strong>s projets dans le départem<strong>en</strong>t « Ecosystèmes » <strong>en</strong>tre 2006-2010 et2011-2015 (source : Plan stratégique TdV 2006-2010, 2005 ; Plan stratégique TdV 2011-2015, 2010) ....................................................................................................................................... 312Tableau 6.8 : Att<strong>en</strong>tes vis-à-vis <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat et types d’organismes visés dans le domaine <strong>de</strong> laconservation (source : à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)............................................................................................................................................................ 315Tableau 6.9 : Pratiques pour le mainti<strong>en</strong> et le développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s réseaux et <strong>du</strong> part<strong>en</strong>ariat ...... 318Tableau 6.10 : Réseaux et part<strong>en</strong>ariat à maint<strong>en</strong>ir et développer dans le secteur sci<strong>en</strong>tifique(source : auteur, à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010) ... 318473


Table <strong>de</strong>s matièresTableau 6.11 : Réseaux et part<strong>en</strong>ariat à maint<strong>en</strong>ir et développer dans les différ<strong>en</strong>ts champsd’action <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur, à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Planstratégique 2011-2015, 2010)......................................................................................................... 319Tableau 6.12 : Synthèse <strong>de</strong>s ressources critiques <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>de</strong> sonprogramme d’action pour la conservation <strong>de</strong>s ZHM ................................................................ 327Tableau 6.13 : Cont<strong>en</strong>us stratégiques (ce que veut la TdV) et démarche mise <strong>en</strong> place p<strong>en</strong>dant laplanification stratégique (2009-2010) pour pouvoir atteindre ces objectifs dans la mise <strong>en</strong>œuvre qui va suivre ......................................................................................................................... 328Tableau 6.14 : Enjeux <strong>de</strong> conservation et critères <strong>de</strong> choix pour les communautés, les espèces etles populations (à partir <strong>de</strong> l’intro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> Plan stratégique TdV, 2011-2015) ................. 338Tableau 6.15 : Cont<strong>en</strong>us stratégiques (ce que veut la TdV) et démarche mise <strong>en</strong> place p<strong>en</strong>dant laplanification stratégique (2009-2010) pour pouvoir atteindre ces objectifs dans la mise <strong>en</strong>œuvre qui va suivre ......................................................................................................................... 374Tableau 7.1 : Exemple d’indicateurs d’impact : les projets <strong>du</strong> départem<strong>en</strong>t Espèces (Planstratégique TdV 2011-2015, 2010 : 39)........................................................................................ 400Tableau 7.2 : Cadre pour l’évaluation <strong>de</strong>s stratégies d’action <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> .... 415Table <strong>de</strong>s figuresFigure 1.1 : Représ<strong>en</strong>tation schématique <strong>de</strong> l’ASGE – Relations <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts typesd’acteurs conceptuels replacées dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> fondé par l’objet écologique(source : auteur) ................................................................................................................................. 24Figure 1.2 : Cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale et ses quatreregistres (source : auteur) ................................................................................................................. 30Figure 1.3 : Cadre d’analyse stratégique pour l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source :auteur) ................................................................................................................................................. 36Figure 1.4 : Ancrage théorique <strong>de</strong> cette recherche doctorale sur la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (zonesgrisées) (source : auteur)................................................................................................................... 41Figure 1.5 : Chaîne <strong>de</strong> causalité dans l’explication <strong>de</strong>s performances stratégiques (Lorino &Taron<strong>de</strong>au, 2006)............................................................................................................................... 48Figure 1.6 : Articulation <strong>de</strong>s différ<strong>en</strong>ts registres d’expression <strong>de</strong> la stratégie selon le courantpratique et définition <strong>de</strong>s concepts (Seidl, Balogun et Jarzabkowski (2006 : 5) : « Cadreconceptuel <strong>de</strong> la Stratégie comme Pratique »)............................................................................... 49Figure 3.1 : L’exemple <strong>de</strong>s suivis à long terme <strong>de</strong>s oiseaux d’eau replacés dans les quatre registres<strong>de</strong> notre cadre d’analyse stratégique <strong>de</strong> l’organisation à finalité <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source :auteur) ............................................................................................................................................... 138Figure 3.2 : Stratégie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour bloquer l’ext<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> la démoustication àla Camargue (source : auteur) ........................................................................................................ 146Figure 3.3 : L’île <strong>de</strong> Camargue : les étangs <strong>du</strong> système Vaccarès et les bassins <strong>de</strong> drainage (source :Rossechi, et al., 2003) ...................................................................................................................... 148Figure 3.4 : Carte <strong>de</strong>s zones d’acquisition <strong>de</strong>s Salins <strong>de</strong> Beau<strong>du</strong>c par le Conservatoire <strong>du</strong> Littoral(source : Parc naturel régional <strong>de</strong> Camargue & Conservatoire <strong>du</strong> Littoral) ........................... 160Figure 3.5 : Stratégie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasseet <strong>de</strong>s pratiques cynégétiques (source : auteur)........................................................................... 171Figure 3.6 : L’exemple <strong>de</strong> l’action pour améliorer la <strong>gestion</strong> <strong>de</strong>s marais <strong>de</strong> chasse et <strong>de</strong>s pratiquescynégétiques (source : auteur)........................................................................................................ 171474


Table <strong>de</strong>s matièresFigure 3.7 : développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s connaissances et d’actions connexes à la recherche sci<strong>en</strong>tifique àpartir <strong>de</strong>s compét<strong>en</strong>ces et <strong>de</strong> l’expertise sci<strong>en</strong>tifique ................................................................. 173Figure 4.1 : Déroulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’analyse stratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale dans le cas <strong>du</strong>projet SMAP pour la mise <strong>en</strong> place <strong>de</strong> la GIZC dans le zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> laMoulouya au Maroc ........................................................................................................................ 181Figure 4.2 : Carte <strong>de</strong> l’occupation <strong>du</strong> sol <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya (Snoussi,2006).................................................................................................................................................. 195Figure 4.3 : Structure organisationnelle <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya (<strong>en</strong>tre par<strong>en</strong>thèse : distancejusqu’à l’embouchure <strong>de</strong> la Moulouya) (source : auteur)........................................................... 198Figure 4.4 : Bilan <strong>du</strong> projet SMAP III Moulouya replacé dans les quatre registres <strong>de</strong> la stratégie<strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)......................................................................................................... 227Figure 5.1 : Modèle conceptuel DPSIR pour les indicateurs <strong>de</strong> l’OZHM proposé à l’atelier <strong>de</strong>février 2010 (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février 2010)...................................................................... 250Figure 5.2 : Structure <strong>de</strong> l’OZHM validée à l’atelier <strong>de</strong> février 2010 (Minutes <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> février2010).................................................................................................................................................. 262Figure 5.3 : Théorie d’action sci<strong>en</strong>tifico-militante <strong>de</strong> l’OZHM – Pousser à l’adoption <strong>de</strong> mesures<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s ZHM (source : auteur) ........................................................................................... 273Figure 5.4 : Théorie d’action sci<strong>en</strong>tifico-militante <strong>de</strong> l’OZHM – Augm<strong>en</strong>ter les capacités d’action<strong>en</strong> faveur <strong>de</strong>s zones humi<strong>de</strong>s <strong>en</strong> Méditerranée (source : auteur) ............................................. 274Figure 5.5 : Théories d’action <strong>de</strong> l’OZHM – R<strong>en</strong>forcer les capacités <strong>de</strong>s AE, Agir auprès <strong>de</strong>sacteurs régulateurs pour l’adoption <strong>de</strong> mesures et l’intégration <strong>de</strong>s ZH dans les planssectoriels et intersectoriels (source : auteur)................................................................................277Figure 5.6 : Le dispositif OZHM replacé dans les quatre registres stratégiques (source : auteur)............................................................................................................................................................ 279Figure 6.1 : Théorie d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> replacée dans notre schéma <strong>de</strong> l’Analysestratégique <strong>de</strong> la <strong>gestion</strong> <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tale (source : auteur)................................................... 301Figure 6.2 : Trois catégories <strong>de</strong> compét<strong>en</strong>ces nécessaires au développem<strong>en</strong>t et à la mise <strong>en</strong> œuvre<strong>du</strong> programme d’action <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (source : auteur) ................................................. 307Figure 6.3 : Principaux secteurs dans lesquels la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> possè<strong>de</strong> et développe sespart<strong>en</strong>ariats (source : à partir <strong>de</strong> la section « part<strong>en</strong>ariat », Plan stratégique 2011-2015, 2010)............................................................................................................................................................ 314Figure 6.4 : Stratégie d’augm<strong>en</strong>tation <strong>de</strong>s capacités pour la mise <strong>en</strong> œuvre <strong>du</strong> programme d’action <strong>en</strong>faveur <strong>de</strong>s ZHM, replacée dans les quatre registres stratégiques <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)............................................................................................................................................................ 330Figure 6.5 : Evolution d’une vision <strong>de</strong> l’organisation par activité recherche / conservation à unearticulation <strong>de</strong>s activités <strong>en</strong> fonction <strong>du</strong> rôle dans le système <strong>de</strong> <strong>gestion</strong> : vers la <strong>gestion</strong>directe, vers les niveaux décisionnels (source : auteur).............................................................. 365Figure 6.6 : Représ<strong>en</strong>tation <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> recherche mise <strong>en</strong> œuvre pour étudier la stratégie<strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> dans la perspective <strong>du</strong> r<strong>en</strong>forcem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> ses actions<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tales .......................................................................................................................... 376Figure 6.7 : Quatre registres et <strong>de</strong>ux dim<strong>en</strong>sions <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur) ... 379Figure 6.8 : Axes mis <strong>en</strong> t<strong>en</strong>sion dans l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> l’ONGE (source : auteur)380Figure conclusion partie 3 : Objectifs fixés au cours <strong>de</strong> la planification stratégique pour leprogramme 2011-2015 dans chacun <strong>de</strong>s quatre registres stratégiques.................................... 420Figure conclusion générale : Cadre d’analyse ASOFE et architecture théorique construite pourcette analyse <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> la <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong> (source : auteur) ........................................... 429475


Table <strong>de</strong>s matièresListe <strong>de</strong>s abréviationsANR : Ag<strong>en</strong>ce nationale <strong>de</strong> la rechercheBIP 2010 : 2010 Biodiversity International PatnershipCBD : Conv<strong>en</strong>tion on Biological Diversity (Conv<strong>en</strong>tion sur la Diversité Biologique)CEFE/CNRS : C<strong>en</strong>tre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive <strong>du</strong> C<strong>en</strong>tre national <strong>de</strong> la recherchesci<strong>en</strong>tifique.DD : Développem<strong>en</strong>t <strong>du</strong>rableDIREN : (ex) Direction régionale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>tDOCOB : Docum<strong>en</strong>t d’objectif, dans le cadre <strong>de</strong> la politique Nature 2000DREAL : Direction régionale <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t, <strong>de</strong> l’aménagem<strong>en</strong>t et <strong>du</strong> logem<strong>en</strong>tDPSIR : modèle Driving Forces, Pressures, State, Impacts, ResponseFRB : Fondation pour la recherche sur la biodiversitéGIZC : Gestion intégrée <strong>de</strong>s zones côtièresGRET : Groupe <strong>de</strong> recherche et d’échange technologiqueIMEP : Institut Méditerrané<strong>en</strong> d'Ecologie et <strong>de</strong> PaléoécologieMWC : MedWetCoastOIG : Organisation Intergouvernem<strong>en</strong>taleONCFS : Office National <strong>de</strong> la Chasse et <strong>de</strong> la Faune SauvageONGE : Organisation non gouvernem<strong>en</strong>tale <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>taleORMVAM : Office régional <strong>de</strong> mise <strong>en</strong> valeur agricole <strong>de</strong> la MoulouyaPNUE : Programme <strong>de</strong>s Nations Unies pour l’Environnem<strong>en</strong>tPNUE/PAM : Programme <strong>de</strong>s Nations Unies pour l'Environnem<strong>en</strong>t. Plan d'Action pour la MéditerranéePNUD : Programme <strong>de</strong>s Nations Unies pour le Développem<strong>en</strong>tMedWet : Mediterranean WetlandsOCDE : Organisation <strong>de</strong> coopération et <strong>de</strong> développem<strong>en</strong>t économiquesSMAP : Short and Medium-Term Priority Environm<strong>en</strong>tal Action Programme, Part<strong>en</strong>ariat Euro-Méditerrané<strong>en</strong>TdV : <strong>Tour</strong> <strong>du</strong> <strong>Valat</strong>UE : Union europé<strong>en</strong>neUICN : Union mondiale pour la natureUNESCO : Organisation <strong>de</strong>s Nations Unies pour l’E<strong>du</strong>cation, la Sci<strong>en</strong>ce et la CultureWCMC : World Conservation Monitoring C<strong>en</strong>tre (lié au PNUE)WWF International : World Wild Fund International476

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