LA SAGA CONTINUE - 1
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Apéro<br />
de la farce<br />
au scandale<br />
d'etat<br />
Jusqu’à l’emballement de ces derniers jours, l’affaire Bettencourt<br />
ressemblait à une tragédie œdipienne. Les extraits<br />
des conversations entre l’actionnaire de L’Oréal et son<br />
avocat, Georges Kiejman (lire page 5), telles qu’elles ont été<br />
enregistrées par le fameux maître d’hôtel, témoignent du climat qui<br />
régnait dans le « nœud de vipères » des Bettencourt. Les appréciations<br />
portées sur la présidente du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez,<br />
préoccupée par son « brushing », et ses « débiles » d’assesseurs,<br />
ne devraient pas contribuer à la sérénité des débats qui devaient<br />
débuter le 1 er juillet, avant un probable renvoi.<br />
Mais voici qu’avec les révélations sur l’évasion fiscale de Liliane<br />
Bettencourt, la farce devient affaire d’État. Ministre du Budget,<br />
Éric Woerth prétendait rapatrier l’argent des riches, quitte à faire<br />
imploser le système bancaire suisse. Ce qui ne lui vaut pas que des<br />
amis au sein de l’UMP helvète (lire notre dossier pages 6 et 7, « Les<br />
petits Suisses ne se sucrent plus »).<br />
Le scandale, le voici : Florence Woerth entre au service de Liliane<br />
Bettencourt à la fin 2007, au moment même où, comme l’a révélé<br />
Bakchich, le fisc apprend l’existence, au Liechtenstein, d’un compte<br />
appartenant au photographe François-Marie Banier alimenté par<br />
les comptes suisses de Mme Bettencourt.<br />
Comment Éric Woerth peut-il prétendre avoir découvert le compte<br />
Banier seulement « courant 2009 » ? Pourquoi ses services n’ont-ils<br />
pas, en trente mois d’enquête, déposé plainte ? Par quel hasard le<br />
gestionnaire de fortune Patrice de Maistre est-il l’invité des chasses<br />
présidentielles (lire page 3) ? Voici un joli teasing pour le feuilleton<br />
de l’été, « la milliardaire, sa fille et le ministre » ✹<br />
NICoLaS BEau<br />
“ „<br />
Mon rêve est de faire aimer la TVA aux Français<br />
alain Juppé, dans une interview pour Lexpress.fr, le 28 juin.<br />
CouP dE BouLE<br />
SuPER SaRKo (S’)ÉPaRgNE<br />
Un œil rivé sur les médias, un<br />
autre sur les sondages, Super<br />
Sarko s’est rendu compte que<br />
les libertés prises par certains<br />
ministres (les cigares de Blanc,<br />
l’hôtel de luxe sud-africain de<br />
Yade, les appartements de fonction<br />
d’Amara et d’Estrosi…) commençaient<br />
à agacer les Français.<br />
Pour quelqu’un qui est associé au<br />
bling-bling et qui ne pense qu’à sa<br />
réélection en 2012, il y a urgence à<br />
communiquer sur le sujet.<br />
Super Sarko, donc, qui ne recule<br />
jamais devant les grandes envolées,<br />
évoque, dans une lettre à<br />
Fillon, un devoir « d’exemplarité »,<br />
et même un « impératif moral »,<br />
pour exiger des coupes (pas trop)<br />
claires dans les dépenses des<br />
ministères.<br />
« Ceux qui incarnent l’intérêt<br />
général ne peuvent être exonérés<br />
de l’effort demandé à la nation »,<br />
écrit-il. Ben, justement, celui qui<br />
est au sommet de l’État oublie<br />
de mentionner ce qu’il pourrait<br />
faire pour réduire ses dépenses.<br />
Il supprime, certes, la gardenparty<br />
du 14 Juillet, mais il oublie<br />
de revenir sur l’augmentation de<br />
170 % de son salaire (20 000 euros<br />
mensuels), et il oublie de restituer<br />
la carte de crédit qui lui permet<br />
de rincer ses amis au restaurant<br />
du Bristol.<br />
un avion à 176 miLLions<br />
Surtout, il ne renonce pas à son<br />
« Sarko One », l’Airbus A330 qu’il<br />
a réclamé dès son élection pour<br />
faire la nique au président américain<br />
et à son Air Force One. L’A319<br />
qui trimballait les précédents<br />
présidents était jugé indigne de<br />
sa personne. Allons donc pour<br />
un nouvel appareil doté d’une<br />
chambre, de salles de réunion, et<br />
permettant de transporter une<br />
soixantaine d’invités. Certains<br />
font remarquer que l’achat et le<br />
réaménagement de ce coucou ont<br />
coûté 176 millions d’euros. Ces<br />
manants ne comprennent rien<br />
à la grandeur de Super Sarko.<br />
Lui sait que, contrairement à ce<br />
que disent la Commission européenne<br />
et le FMI, la France n’a<br />
pas de problèmes financiers et<br />
n’a pas à réduire le train de vie<br />
de son chef ✹<br />
aLCESTE<br />
2 BaKCHICH HEBdo N°31 | du SaMEdI 3 au VENdREdI 9 JuILLET 2010<br />
Le retour de la semaine<br />
Nous n’avions pas eu le plaisir d’entendre Frédéric Lefebvre depuis des semaines.<br />
Le frétillant porte-parole de l’uMP n’a rien trouvé de plus important que de<br />
lancer une pétition pour l’arbitrage vidéo dans le football. Et « ce n’est pas<br />
une diversion par rapport à l’affaire Bettencourt », a-t-il osé préciser. Lancé, il a<br />
ensuite justifié les dépenses du gouvernement. « Le Président, il est exigeant<br />
avec (...) lui-même. Quand il fait un voyage avec l’avion de la République française,<br />
il paye lui-même son dentifrice ! » Pour la brosse à reluire, c’est gratuit.<br />
La règle de la semaine<br />
L’an dernier, Mirko Fischer s’était fait traiter tel un pédophile en puissance par<br />
la compagnie British airways lors d’un vol. Ce trentenaire luxembourgeois avait<br />
changé de place avec sa femme enceinte, qui désirait s’asseoir côté couloir.<br />
Fischer s’est retrouvé à côté d’un garçon de 12 ans, ce qui a fait accourir le personnel.<br />
Sur British airways, il est en effet interdit aux adultes masculins de s’asseoir<br />
à côté d’un enfant voyageant seul. une règle qui pourrait changer puisque<br />
Fischer vient de se faire verser 3 000 euros pour « discrimination sexuelle ». En<br />
2006, le maire de Londres, Boris Johnson, avait même dû prouver devant les<br />
autres passagers de British airways que les gamins assis à côté de lui étaient…<br />
ses propres enfants !<br />
La promesse de la semaine<br />
La baisse de la TVa à 5,5 % pour les restaurateurs est très critiquée par les<br />
consommateurs, qui n’ont pas vu les prix diminuer. didier Chenet, président<br />
de Synhorcat, le deuxième syndicat de la profession, n’imagine pourtant pas<br />
« qu’on puisse changer les règles » et explique cette désillusion « dans la mesure<br />
où nous avons mal expliqué les limites de la baisse des prix ». Les amateurs de<br />
farce peuvent consulter sur le Web une archive du Parisien (28 avril 2009) où<br />
le même Chenet s’enflammait : « Nous allons renvoyer du pouvoir d’achat aux<br />
Français », qui signait à l’occasion un « contrat d’avenir ». aucune sanction pour<br />
ceux qui ne le respectaient pas. Ce n’était certainement pas assez expliqué ✹<br />
Mot à Mot<br />
Il y a eu un style pour chaque Louis<br />
après Louis XIII, un style Empire, un<br />
style Second Empire, un modern style,<br />
et presque un style Pompidou, à cause<br />
des tuyaux du Centre. Mais pas de style<br />
Mitterrand ou Chirac : la République,<br />
même monarchique, ne mange pas de<br />
ce pain-là.<br />
Hélas, il risque de rester un style Sarkozy,<br />
voire plusieurs. La première année fut<br />
paillettes-bling-bling, avec yachts et<br />
Rolex, conférences de presse olé-olé<br />
LES TRoPHÉES<br />
et intermittences du cœur qui faisaient<br />
de Closer un supplément illustré du<br />
Journal officiel. L’an II fut plus sévère :<br />
passant du Fouquet’s au Salon de l’agriculture,<br />
le boss découvrit que le peuple<br />
ne l’aimait pas forcément, et décida<br />
de le rabrouer. « Casse-toi, pov’ con ! »<br />
restera dans les annales comme le crachat<br />
d’un ex-hussard chahuté dans les<br />
ports bretons et les usines où des paltoquets<br />
avaient l’audace de le dominer de<br />
20 centimètres sans finir pendus à des<br />
crocs de boucher.<br />
L’an III sera défensif : et d’une, aidé par<br />
deux laquais obséquieux, dont l’un se<br />
flattait jadis d’être l’impertinent apôtre<br />
de l’esprit bête et méchant, l’Élysée a<br />
balayé deux comiques pas assez troupiers<br />
pour marcher au pas. Secundo, la<br />
justice a flingué en vol et en comparu-<br />
sommaire<br />
apéro<br />
Les Faits saiLLants<br />
de L’actuaLité<br />
P.3 Le parcours d’un enfant (pourri)<br />
gâté nommé éric Woerth.<br />
P.3 alain Finkielkraut tape sur les<br />
Bleus et vos nerfs ? Bakchich le tacle.<br />
P.3 chuuut, Jean-marie !<br />
Quand Le Pen perturbe les débats<br />
de la région Paca… en ronflant.<br />
P.4 Bandits. Les relations troubles<br />
entre le roi des yachts de luxe et trois<br />
caïds marseillais.<br />
fiLouteries<br />
nos enquêtes<br />
et nos dossiers<br />
P.5 affaire Bettencourt. Bakchich<br />
publie des enregistrements inédits<br />
des écoutes réalisées à l’insu du<br />
plein gré de l’actionnaire principal<br />
de L’oréal. où son avocat,<br />
M e georges Kiejman, se lâche…<br />
P.6-7 Le dossier de la semaine.<br />
Pauvres Suisses : c’est la fin de<br />
leur si cher secret bancaire, et leurs<br />
établissements financiers vivent de<br />
bien sombres heures. Y a pas le feu<br />
au lac, mais presque.<br />
P.8 Le secrétariat d’État aux<br />
transports est au point mort.<br />
Bazar<br />
environnement, médias,<br />
conso, sPort, PiPoLes…<br />
P.9 afrique du sud. Rien que pour la<br />
Coupe du monde, une « fast justice »<br />
a été instaurée. Bonjour les dégâts.<br />
P.10-11 Petit tour en bédéreportage<br />
sur les îles caïmans où il fait bon<br />
s’évader.<br />
P.12 mondanités. C’est moche, une<br />
soirée rien que pour les beaux.<br />
CuLture<br />
Bouquin, cinéma,<br />
musique, Bédé…<br />
P.14 Jean-Jacques Bourdin fait honneur<br />
au métier de journaliste. Si, si !<br />
P.15 une autre garden-party est<br />
possible, nous dit alain Riou.<br />
P.16 après le fiasco des Bleus<br />
au Mondial, Jean-Pierre escalettes,<br />
le boss de la FFF, rentre au vestiaire.<br />
tion quasi immédiate un gus qui avait<br />
mal parlé de not’ Président, si bien que<br />
tout le monde a su qu’il était venu incognito<br />
visiter la banlieue en pleine nuit.<br />
Normal, les mots anodins « Sarkozy, je<br />
te vois ! » avaient déjà causé des pépins<br />
à un naïf. Notez que Bernadette Soubirous<br />
avait dit la même chose à une<br />
dame sans être inquiétée. Comme quoi,<br />
n’est pas vierge qui veut.<br />
Finalement, les Bleus donnent le ton<br />
du jour : bling-blingueurs mijotant<br />
dans des rumeurs de débauche, caïds<br />
plutôt mégalos qui font vibrer Bachelot,<br />
massacreurs de syntaxe n’ayant jamais<br />
lu la Princesse de Clèves, cracheurs d’insanités<br />
à l’occasion, ils se sont ramassés<br />
comme de vrais bouffons au premier<br />
tour. Qui a dit : « Eux aussi » ? ✹<br />
JaCQuES gaILLaRd