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LA SAGA CONTINUE - 1

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écoutes Bakchich publie des enregistrements inédits de Liliane Bettencourt, de son avocat, Georges Kiejman, et de Patrice de Maistre, son<br />

gestionnaire de fortune, datés de juillet 2009. La conversation porte sur le futur procès de François-Marie Banier. Instructif.<br />

Le procès de François-<br />

Marie Banier, accusé<br />

« d’abus de faiblesse »<br />

par Françoise Bettencourt,<br />

la fille de<br />

Liliane Bettencourt,<br />

devait s’ouvrir jeudi au tribunal<br />

correctionnel de Nanterre. Au<br />

moment où nous mettons sous<br />

presse, il paraît fort probable,<br />

compte tenu du climat explosif<br />

autour des écoutes pirates de la<br />

femme la plus riche de France,<br />

que cette audience soit reportée.<br />

Aujourd’hui, Bakchich publie<br />

des enre gis-<br />

trementsinédits, datés du<br />

21 juillet 2009,<br />

qui révèlent une<br />

certaine fébrilité<br />

du côté des<br />

défenseurs de Mme Bettencourt.<br />

L’avocat de celle-ci, Georges<br />

Kiejman, ancien ministre de la<br />

Justice de François Mitterrand,<br />

dévoile à sa cliente et à Patrice<br />

de Maistre, son gestionnaire de<br />

fortune, les enjeux du procès<br />

qui s’annonce. Cinq jours avant<br />

cet entretien, la fille de Liliane<br />

Bettencourt a assigné en correctionnelle<br />

François-Marie Banier,<br />

sans attendre les conclusions de<br />

l’enquête préliminaire lancée<br />

quelques mois plus tôt par le<br />

parquet.<br />

Georges Kiejman : Mme Bettencourt<br />

me demandait ce qu’elle<br />

pourrait faire, elle [Françoise, sa<br />

fille, ndlr]. Ben, elle, elle pourrait<br />

se retirer, purement et simplement.<br />

Il y a peu de chance qu’elle<br />

le fasse. (…) Et puis, elle a un<br />

avocat qui ne l’y incitera pas.<br />

Liliane Bettencourt : Vous<br />

connaissez son avocat ?<br />

G.K. : Oui, je le connais très bien.<br />

(…) C’était mon adversaire dans<br />

une affaire qui s’est plaidée en<br />

Lituanie [l’affaire Marie Trintignant,<br />

où Olivier Metzner défendait<br />

Bertrand Cantat, et Kiejman,<br />

la famille Trintignant, ndlr].<br />

(…) J’en ai encore parlé avec Mme<br />

Daubigney ce matin, qui est le<br />

procureur adjoint de Nanterre,<br />

et qui est, elle, à l’audience. Parce<br />

que je voulais me faire confirmer<br />

la date de classement de l’affaire.<br />

Elle m’a dit le 22 septembre.<br />

(…) J’ai eu une conversation<br />

très libre avec elle. Je lui ai dit :<br />

« Écoutez, vous<br />

savez bien que<br />

ce qui complique<br />

cette histoire,<br />

hein, on est entre<br />

nous deux, on ne<br />

peut pas dire<br />

ça à la presse, (…) c’est que Mme<br />

Prevost-Desprez [présidente du tribunal,<br />

ndlr] ne veut pas renoncer<br />

parce qu’elle considère cela comme<br />

un beau procès, parce que c’est<br />

beau pour son ego, sa vanité et son<br />

brushing. »<br />

Plus tard, dans la conversation,<br />

Georges Kiejman revient sur le<br />

cas de Mme Daubigney. Mme Bettencourt<br />

ne se souvient plus de qui<br />

il parle.<br />

L.B. : Qui c’est, elle ?<br />

P. de M. : Elle, c’est la femme qui<br />

est le procureur adjoint de Nanterre.<br />

G.K. : C’est le numéro deux du<br />

parquet de Nanterre. C’est une<br />

femme très bien, très pondérée,<br />

avec beaucoup d’autorité, très<br />

calme. Ce n’est pas toujours le cas<br />

– il y a certaines femmes un peu<br />

hystériques, mais ce n’est pas son<br />

cas. (…) Elle n’a pas l’intention<br />

d’aborder le fond. (…) Quand j’en<br />

parlais avec [Mme Daubigney],<br />

je lui disais : « Mais, enfin, vous<br />

savez bien, Mme le procureur,<br />

c’est quelque chose qui devrait se<br />

discuter, non pas devant un tribunal,<br />

mais uniquement comme<br />

un cas entre psychanalystes », et<br />

elle riait ! Et elle disait : « C’est<br />

exactement ça. »<br />

Si, durant tout l’entretien, Liliane<br />

Bettencourt s’exprime peu et<br />

semble dépassée par la conversation<br />

entre son avocat et son gestionnaire<br />

de fortune, elle semble plus<br />

présente dès lors que le cas de sa<br />

fille est évoqué. Comme si elle cherchait<br />

à comprendre les intentions<br />

de sa fille dans ce procès. Évacuant<br />

les questions financières gênantes,<br />

Kiejman et de Maistre ne lésinent<br />

pas sur les longues digressions<br />

d’ordre psychologique. Quitte à<br />

manier la brosse à reluire.<br />

Filouteries<br />

L’affaire Bettencourt<br />

toujours<br />

les écoutes révèlent une<br />

certaine fébrilité des<br />

défenseurs de Bettencourt.<br />

scoop raté pour « le monde » et « l’obs »<br />

L’affaire Bettencourt, devenue l’affaire Woerth,<br />

est aussi une affaire de presse. Depuis la mimai,<br />

en effet, l’entourage de la fille de Liliane<br />

Bettencourt, Françoise, en possession des fameuses<br />

écoutes, s’agite pour rendre ce document public.<br />

Selon nos informations, le Monde puis le Nouvel<br />

Observateur ont été approchés aux fins de publier<br />

les écoutes réalisées au domicile de la patronne de<br />

L’Oréal. Les documents ont été proposés aux deux<br />

publications. Et ce sont finalement Mediapart puis<br />

le Point qui en diffuseront de larges extraits.<br />

couacs et déontologie<br />

Il est pour le moins étonnant que les deux médias<br />

approchés dans un premier temps soient passés à<br />

côté d’un scoop pareil, qui, en période de crise, leur<br />

aurait assuré un regain des ventes certain (comme<br />

en témoigne le boom récent des abonnements à<br />

Mediapart).<br />

Plusieurs raisons à cela. La première, c’est que les<br />

rédactions concernées n’avaient pas conscience<br />

qu’un ministre était mis en cause de manière aussi<br />

directe dans les enregistrements. Ensuite, pour le<br />

Monde, il semblerait que l’argument juridique<br />

– c’est-à-dire une possible atteinte à la vie privée<br />

– ait pesé lourd. Quant au Nouvel Obs, des couacs<br />

de communication interne entre les différents<br />

services ont laissé échapper le scoop. Pour le plus<br />

grand plaisir de Mediapart ✹<br />

simon piel<br />

P. de M. : Françoise a été écrasée<br />

par sa mère. Parce que vous,<br />

c’est… Voilà, c’est toute la<br />

lumière.<br />

L.B. : (inaudible).<br />

P. de M. : Vous, c’est la lumière et,<br />

elle, c’est l’ombre. (…)<br />

G.K. : C’est ce que j’appelle le syndrome<br />

de la fille de Nefertiti. (…)<br />

Nefertiti était très belle, mais sa<br />

fille était un peu moins belle. Un<br />

visage intéressant, mais un peu<br />

triste. Et on voit toute la tristesse<br />

qu’il y a à avoir une mère trop<br />

lumineuse.<br />

De Maistre interroge Kiejman sur<br />

le calendrier judiciaire, sur l’éventualité<br />

que le jugement aborde le<br />

fond, ce qu’ils craignent manifestement.<br />

G.K. : (…) Ça dépend du compte<br />

rendu du jugement, parce que ce<br />

n’est pas parce que cette juge veut<br />

être devant une télévision qu’elle<br />

ne rendra pas un jugement de<br />

non-lieu.<br />

P. de M. : (...) On ne peut rien<br />

faire.<br />

G.K. : Non, d’autant plus que,<br />

vraiment, je ne les connais pas,<br />

mais les deux assesseurs que<br />

(inaudible) – un homme et une<br />

femme –, ils ont l’air de débiles<br />

légers.<br />

P. de M. : Ils feront ce qu’elle leur<br />

dira.<br />

Puis Kiejman choisit de revenir,<br />

à nouveau, sur le cas d’Olivier<br />

Metzner. Une obsession.<br />

G.K. : On parlait de Metzner. Ça<br />

aurait été Jean Veil, ça aurait été<br />

Jean-François Prat, ça aurait été<br />

Brodin, ça aurait été, enfin, les<br />

quelques grands avocats civils<br />

qui existent, j’aurais immédiatement<br />

pris mon téléphone.<br />

P. de M. : Oui, c’est ça.<br />

G.K. : Et j’aurais dit (inaudible) :<br />

« Explique-moi pourquoi ce<br />

procès idiot doit se dérouler. »<br />

P. de M. : C’est ça.<br />

G.K. : Mais, lui, c’est difficile d’expliquer…<br />

Metzner, c’est un type<br />

pas bête, qui a commencé comme<br />

avocat de voyous, en trouvant<br />

des vices de procédure qui ont<br />

permis de les mettre en liberté.<br />

(…) Il a conquis sa gloire comme<br />

ça. Comme un type assez besogneux<br />

qui traitait le problème<br />

des procédures. Et, petit à petit,<br />

les gens fortunés l’ont amené à<br />

faire du droit pénal financier. (…)<br />

C’est un type qui travaille tout le<br />

temps, qui n’a de satisfaction, lui,<br />

que narcissique.<br />

L.B. : Vous parlez de qui, là ?<br />

P. de M. : De l’avocat de votre fille,<br />

M e Metzner.<br />

L.B. : Il paraît que c’est un crac.<br />

G.K. : C’est un crac de la procédure.<br />

Non, je vous assure, ce n’est<br />

pas un vrai crac ✹ lucie delaporte<br />

www.bakchich.info<br />

les fortunées mésaventures de<br />

liliane Bettencourt, alias lady<br />

“Gaga”: http://minu.me/2lsy<br />

du samedi 3 au vendredi 9 juillet 2010 | Bakchich heBdo n°31 5

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