Lire et écrire au Moyen Age
Et si ce n’était pas l’imprimerie qui avait fait entrer l’Occident dans l’ère de l’écrit ? Les historiens, en tout cas, nous apprennent que quelque chose se joue dès le XIIe siècle. Partout l’écrit occupe une place grandissante : dans les transactions des marchands, sur les bancs des universités, dans le gouvernement des rois et même dans la sphère privée. Une révolution lente mais profonde qui a entraîné l’émergence de la figure de l’intellectuel et qui a fait du livre un objet à part. Avec Pierre Chastang, Claire Angotti, Étienne Anheim, Isabelle Heullant-Donat, Yann Potin, Nicolas Ruffini-Ronzani
Et si ce n’était pas l’imprimerie qui avait fait entrer l’Occident dans l’ère de l’écrit ? Les historiens, en tout cas, nous apprennent que quelque chose se joue dès le XIIe siècle.
Partout l’écrit occupe une place grandissante : dans les transactions des marchands, sur les bancs des universités, dans le gouvernement des rois et même dans la sphère privée. Une révolution lente mais profonde qui a entraîné l’émergence de la figure de l’intellectuel et qui a fait du livre un objet à part.
Avec Pierre Chastang, Claire Angotti, Étienne Anheim, Isabelle Heullant-Donat, Yann Potin, Nicolas Ruffini-Ronzani
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Événement<br />
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1936-1939<br />
LES DÉMOCRATIES<br />
FACE À HITLER<br />
Depuis quatre-vingts ans un consensus est établi : la marche à la guerre était<br />
inéluctable, sur fond de lâch<strong>et</strong>é des démocraties. Mais pour comprendre les logiques de<br />
la politique d’apaisement, il f<strong>au</strong>t se resituer dans le contexte du temps en considérant les<br />
enjeux mondi<strong>au</strong>x <strong>et</strong> le jeu trouble des « p<strong>et</strong>its » pays. Rien n’est <strong>au</strong>ssi simple que prévu…<br />
Par Pierre Grosser<br />
MEPL/BRIDGEMAN IMAGES – TALLANDIER/BRIDGEMAN IMAGES – DRFP/LEEMAGE<br />
Lors du centenaire de la<br />
crise de l’été 1914, plusieurs<br />
livres, appuyés sur<br />
de vastes dépouillements<br />
d’archives, ont été publiés pour<br />
comprendre son déroulement,<br />
<strong>et</strong> donc les c<strong>au</strong>ses de la guerre.<br />
Vieux d’un siècle, le débat sur les<br />
responsabilités des différents<br />
pays a rebondi une nouvelle fois,<br />
tandis qu’était relancé celui sur<br />
le poids respectif des « forces<br />
profondes » <strong>et</strong> des décideurs accusés<br />
d’avoir précipité le monde<br />
dans la Grande Guerre après<br />
l’attentat de Sarajevo.<br />
Les controverses ont été bien<br />
plus rares sur les origines de la<br />
Seconde Guerre mondiale. Du<br />
côté des « forces profondes »,<br />
on pointe du doigt les tr<strong>au</strong>matismes<br />
de la Première Guerre<br />
mondiale, les erreurs qui <strong>au</strong>raient<br />
été commises dans les traités<br />
d’après-guerre (<strong>au</strong>jourd’hui<br />
minimisées), l’échec de l’ordre<br />
international libéral <strong>et</strong> de la sécurité<br />
collective, la concurrence<br />
entre des empires satisfaits sur<br />
la défensive (britannique <strong>et</strong><br />
français) <strong>et</strong> des puissances assoiffées<br />
d’empire (Japon, Italie,<br />
Allemagne), l’impact de la dépression<br />
économique mondiale,<br />
née de la crise de 1929,<br />
ou plus largement, une modernité<br />
accoucheuse d’hypernationalismes,<br />
d’impérialismes,<br />
de totalitarismes <strong>et</strong> de<br />
guerre totale.<br />
En ce qui concerne les responsabilités,<br />
on constate depuis<br />
quatre-vingts ans un consensus,<br />
avec une claire division des<br />
rôles : les agresseurs (Japon,<br />
Italie, Allemagne), les lâches<br />
(Roy<strong>au</strong>me-Uni, France, voire<br />
les États-Unis), <strong>et</strong> les victimes<br />
innocentes (Tchécoslovaquie,<br />
Pologne, <strong>et</strong> parfois l’Autriche).<br />
Le seul débat très vif se rapporte<br />
à l’Union soviétique. A un<br />
extrême, celle-ci est accusée de<br />
collusion avec Hitler en 1939,<br />
afin de détourner le bellicisme<br />
nazi vers l’Europe de l’Ouest,<br />
de s’emparer des territoires de<br />
l’Empire russe perdus en 1918,<br />
ou même de profiter d’une nouvelle<br />
guerre pour faire triompher<br />
partout le communisme. A<br />
l’<strong>au</strong>tre extrême, be<strong>au</strong>coup d’historiens,<br />
<strong>et</strong> pas seulement communistes,<br />
insistent sur la volonté<br />
L’AUTEUR<br />
Pierre Grosser<br />
enseigne l’histoire<br />
des relations<br />
internationales<br />
<strong>et</strong> les enjeux<br />
mondi<strong>au</strong>x<br />
contemporains<br />
à Sciences Po.<br />
Il a notamment<br />
publié Pourquoi<br />
la 2 e Guerre<br />
mondiale ?<br />
(Complexe, 1999).<br />
La deuxième<br />
édition de son<br />
dernier ouvrage,<br />
L’histoire du<br />
monde se fait<br />
en Asie. Une<br />
<strong>au</strong>tre vision du<br />
xx e siècle (Odile<br />
Jacob, 2017),<br />
paraît en<br />
septembre 2019.<br />
de Staline de favoriser la ligne<br />
politique tracée par Litvinov de<br />
s’entendre avec les démocraties<br />
contre Hitler, sur la trahison<br />
d’élites occidentales aveuglées<br />
par l’anticommunisme <strong>et</strong> voulant<br />
faire des Soviétiques leurs mercenaires<br />
dans une guerre contre<br />
l’Allemagne, <strong>et</strong> sur l’hostilité de la<br />
Pologne à l’égard de l’Union soviétique.<br />
Moscou n’<strong>au</strong>rait donc<br />
pas eu d’<strong>au</strong>tre choix que de signer<br />
le pacte germano- soviétique<br />
d’août 1939, <strong>et</strong> de consolider son<br />
flanc occidental par des avancées<br />
territoriales pour éviter<br />
qu’il ne tombe sous influence allemande.<br />
Gagner de l’espace <strong>au</strong>rait<br />
été nécessaire pour gagner<br />
du temps. En Russie, une histoire<br />
« nationaliste-patriote » revient à<br />
c<strong>et</strong>te narration.<br />
Certes, il y a eu quelques<br />
formes de « révisionnisme ».<br />
Allemagne, Italie <strong>et</strong> Japon n’<strong>au</strong>raient<br />
fait que poursuivre des<br />
ambitions anciennes. Hitler<br />
<strong>au</strong>rait été un opportuniste plutôt<br />
qu’un idéologue réalisant<br />
ses ambitions. Les Japonais <strong>au</strong>raient<br />
été frustrés par un ordre<br />
international raciste, <strong>et</strong><br />
L’HISTOIRE / N°463 / SEPTEMBRE 2019