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Les derniers jours. - Éditions Jean Voltaire

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À mes parents,c'est grâce à euxque j'existe etque vous pouvezlire cet oeuvre.


mystérieux frappant les astronomes et scientifiques travaillant au sujetd'Arcturus, une comète qui a une tendance à venir un peu tropprès de la Terre. Ce que les deux amis n'ont pas prévu, c'est qu'ilstombent amoureux de cette fille et son frère. Vont-ils se trouverphysiquement ?Je vous souhaite, en espérant que vous arrivez quand même lirece texte, bonne lecture.Wolter SMIT


ELe rêve d'Angélique.lle court, court. Hors de souffle elle ralentit un peu son allurepour regarder derrière elle. Elle constate avec soulagementqu'elle n'a pas été poursuivie. Mais le temps presse et il y a le derniertrain en direction du port à prendre. Il y a peu de véhicules qui circulentà cette heure tardive et elle se sent bien seule et mal à l'aise surcette route quasiment déserte qui rejoint la gare. Au loin elle voitvenir un véhicule en sa direction qui passe pour s'arrêter plus loin etfaire demi-tour. Son coeur lui cogne à la poitrine et elle se dit :« Merde, ils reviennent et il n'y a pas endroit pour me cacher ! »— Mademoiselle, Mademoiselle ! S'écrie l'homme. Arrêtez-vous,ne craignez rien et montez !C'est alors qu'elle reconnaît le détective qui avait déjà travaillépour son père.— Bonsoir à vous et merci d'être venu. Vous vous trouvez parhasard sur cette route, ou y a-t-il une raison ?— Bonsoir, je venais justement à votre secours, mais je suis ravide vous voir libérée.— Mais ce ne sont pas eux qui m'ont libérée, je me suis enfuie.Je suis parvenue à ouvrir la serrure, vous savez un modèle assez ancien,avec une épingle à cheveux. Heureusement que j'étais déjà venuvisiter l'endroit avec mon père et je me souvenais qu'il y avait unesortie secrète réalisée par les moines dans les temps reculés. C'estpar là que j'ai pu sortir sur la route par une chapelle dédiée à Zeus.Mais comment saviez-vous qu'ils me retenaient par ici.— C'est trop long pour vous l'expliquer maintenant, il faut se dépêcheret rejoindre la gare.— Il est peut-être déjà trop tard, le train est sûrement parti. <strong>Les</strong>places ? Reste-t-il nous en avec ce plan d'évacuation ?— Ne craignez rien, j'ai fait le nécessaire. J'ai fait les démarches àla gare et le train vous attendra. Puis, en ce qui concerne la place,9


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.qu'ils n'aient pas eu la délicatesse de s'occuper des bagages de mademoiselle.Je n'accompagne d'ailleurs pas mademoiselle, car j'ai encoredes choses à terminer. J'attends que la police vient pour aller àl'endroit où elle était retenue, en espérant qu'ils n'ont pas encoreconstaté l'absence de mademoiselle. Merci beaucoup.Elle regarde autour d'elle et constate qu'ils ont mis de la lecture àson intention, ainsi que quelques boissons et des choses à mangerdans l'armoire prévue à cet effet. Elle s'assoit dans un fauteuil en directiondu voyage et demande :— Vous ne m'accompagnez donc pas ?— Hélas, comme je le disais, j'ai encore à faire ici. J'informeraivotre père que vous êtes en route pour le port d'Amaki. Votre pèren'est d'ailleurs plus au palais, mais a déjà gagné son vaisseau. <strong>Les</strong>marins vous attendront pour vous prendre en navette rapide servantde transbordeur dès que vous arriverez à la gare maritime.— Vous ne figurez pas au plan d'évacuation ? Vous n'allez pasjoindre le continent Européen ?— Peut-être, si je parviens à joindre la barge de pêche avecl'équipe de Leith et Pénélope qui m'attendront jusqu'au petit matin.— Prenez bien soin de vous et bonne chance.— Faites un bon voyage.— Vous aussi.Elle a dû s'assoupir, car elle n'a pas remarqué le départ du convoi,puis c'est l'arrêt du train dans cette gare de campagne qui l'a réveillée.Sur le quai il y a des femmes qui jacassent, des enfants qui pleurent,des hommes qui se disputent, des cris d'animaux qui refusent demonter à bord, le bruit des chariots de bagages, tout cela mélangéavec les bruits de manoeuvre de wagons et le crissement des rouessur les rails. Elle voit un employé des chemins de fer. Elle l'interpelleet demande :— Que ce passe-t-il ? Pourquoi s'arrête-t-on ici aussi longtemps?L'employé, visiblement pressé et sans se rendre compte de l'identitéde la jeune voyageuse, lui répond :— Il y a plus de gens que prévu et on ajoute des wagons auconvoi, puis il continue sans attendre de réponse.11


Le rêve d'Angélique.Elle prend une des revues qu'on lui a offerte à la gare de départ,mais elle n'arrive pas à se concentrer sur le texte. <strong>Les</strong> lettres, lesmots et les phrases commencent à danser et s'entremêler. Elle neparvient pas à lire longtemps. Bien calfeutré dans son fauteuil devoyage elle ne se rend pas compte qu'elle s'endort avec sa lecturedans les mains.Quelque chose lui l'a réveillé, sans qu'elle puisse en donner la raison.Le voyage a duré plus longtemps que prévu. Le jourcommence à se lever et on voit au loin les premiers rayons du soleilpercer l'horizon. Elle commence à apercevoir la zone portuaire de laville qu'on approche rapidement. Tandis que le train longe le porten direction de la gare maritime, elle voit par-ci les bateaux à quaipour être chargés ou déchargés, par là des bateaux en état avancéd'épave qui n'attendent que le coup de grâce d'un chalumeau et plusloin des rangées des bateaux de pêche et de plaisance. Soudainementelle sent une secousse sismique, puis une autre plus violente. Le mécaniciende train tente de freiner le convoi, mais le sol semble se déroberdessous et malgré ses tentatives désespérées de le stopper, leconvoi accélère et déraille. La jeune fille se cramponne auxstructures de la cabine pendant le déraillement et crie désespérémentaux secours. La dernière chose qu'elle voit avant de perdreconscience, c'est que l'eau monte et quelqu'un la prend par le braspour tenter de la tirer hors de là.Julien, qui a du mal à dormir et s'apprête à aller boire quelquechose à la cuisine, entend des cris et des appels au secours en provenancede la chambre de sa soeur Angélique. Croyant qu'elle ait faitun malaise, il entre dans sa chambre où elle continue de crier et d'appelerau secours comme une naufragée. Il la prend par le bras et lasecoue pour la réveiller.— Angélique, que se passe-t-il ? Tu as fait un cauchemar ? Angélique,incapable de lui répondre de suite, essoufflée comme si elleavait fait un marathon, reprend son souffle et se frotte les yeux.— C'est affreux, je rêvais que je me noyais dans un compartimentde train qui s'abîmait dans la mer lors d'un tremblement de terre.12


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Elle raconte ensuite toute l'histoire, sa prise en otage, l'ouverturede la porte avec une épingle à cheveux, la fuite, la rencontre sur laroute avec le détective, le voyage en train dans un compartimentmuni de barreaux, jusqu'au déraillement. Puis elle finit son récitavec :— Dans ce rêve j'étais une princesse de l'Atlantide, mais j'ignorecomment je m'appelais.— Viens, on va boire quelque chose à la cuisine, je voulais justementy aller. J'ai du mal à dormir ces temps-ci.— Oui je sais. Depuis que la petite Mélissa t'as quitté ; tu fais desnuits blanches, tu noies ton chagrin dans l'alcool et tu te réveillesavec du mal aux cheveux. Mais mon pauvre frère, il y d'autres filles ;oublie la !— C'est plus facile à dire qu'à faire. Bon bref ce n'est pas tonproblème. Pas encore en tout cas.Le matin, un matin comme tous les autres, quand le soleil se lèvesur la ville d'Osuo, la porte de l'atelier du Maître Amilius s'ouvre etson élève fait son entrée pour ses leçons habituelles.— Bonjour maître.— Bonjour Leith, comment allez-vous ? Bien dormi ? Pas decauchemars ?— Non maître. Avez-vous prévu quelque chose de spécial pouraujourd'hui ?— Non mon enfant, je n'ai rien prévu de spécial, mais il se pourraitque vous ayez un sujet qui vous tient à coeur. Ou est-ce que jeme trompe ?— En effet maître. On parle ces <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong> beaucoup d'Arcturusqui semble revenir dix-sept ans trop tôt. Vous savez, beaucoupde gens voient dans cette apparence des signes précurseurs dela fin du monde, comme il est annoncé dans les rouleaux sacrés.— Vous faites ici peut-être allusion à la partie décrivant ladestruction de la Terre par une étoile tombant sur celle-ci, suivie detrès grosses pluies inondant le tout jusqu'aux sommets des plushautes montagnes, n'est-ce pas ?13


Le rêve d'Angélique.— Oui maître, si j'ai bien retenu mes leçons, la prédiction de cetteétoile tombant sur la Terre fait partie des sept fléaux, n'est-ce pas ?— Je vais vous lire une partie de cette prédiction, mais savezvouscomment se compose-t-elle.— Certainement maître, ce sont les sept signes suivis des septfléaux. Ce sont les sept fléaux qui contiennent la prédiction del'étoile qui tombera sur la Terre.— Bon, je ne vais pas vous demander de me les énumérer, maisje vais vous lire la première strophe de la prédiction. Savez-vous ladifférence entre la partie contenant la prédiction et le reste des textessacrés ?— Oui maître, je crois le savoir. <strong>Les</strong> prédictions ont été écritesau futur simple tandis le reste des textes le sont pour la plupart aupassé simple.— Bien, mais connaissez-vous d'autres passages de texte écrits aufutur simple ?Leith, gêné, regarde timidement ses chaussures et n'ose pas répondrequ'il ignore la réponse à cette question. Son maître, Amilius,faisant mine de ne pas voir sa gêne, continu :— Allons mon cher Leith, je ne vous en veux pas de ne pasconnaître la réponse à cette question. C'est en effet une petitequestion piège. Vous n'avez peut-être pas dû vous en rendrecompte, mais ce sont les sept interdictions qui sont des injonctionsécrits au futur simple dont une des plus importantes est : « Tu ne tueraspoint ».Amilius se lève et va vers l'étagère-bibliothèque remplie jusqu'àras-bord des livres anciens en reliure de cuir pour en prendre un. Ils'assoit, l'ouvre, met ses lunettes et commence à feuilleter lentementles pages de vieux papier avec une infime précaution pour s'arrêter àla section contenant le mythe de la fin du monde.— Écoutez-moi bien Leith, je vais vous lire la première strophe.Amilius lève la tête et regarde Leith droit dans les yeux, commes'il voulait accentuer le contenu de ses propos par ce geste, ajustemachinalement ses lunettes, puis continu avec la lecture de la premièrestrophe en lisant lentement et donnant ainsi le poids sur lesmots les plus importants.14


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Pendant de nombreuses générations, les rois écouteront leslois et demeureront attachés au principe divin auquel ils sontapparentés. Quand l'élément divin viendra à diminuer en eux, parl'effet du croisement avec de nombreux mortels, ils tomberont dansl'indécence.— Ne trouvez-vous pas que ce récit correspond assez bien à la situationtelle qu'elle est actuellement dans l'état d'Alta et sa capitalePoseidia 1 où le roi Ra-Ta règne en maître absolu. Je n'approuved'aucune manière son dogme : « La loi ? c'est moi ! » 2 . Cet ignoblepersonnage ne pense qu'à la richesse et le pouvoir, il est pire que leplus mauvais des usuriers et plus méchant que son dieu de guerre,Arès. Si quelqu'un est tombé dans l'indécence, c'est bien lui. Deplus, il paraît que son service secret, la BSI, torture des gens lors decertains interrogatoires 3 .Amilius, pensif, regarde attentivement son élève, surpris par sa réactioninattendue et sa réflexion assez dure, et réfléchit un momentavant de répondre :— Vous avez parfaitement raison mon ami, par contre, méfiezvous,même des murs ici dedans pourraient bien avoir des oreilles.Vous devez vous retenir, car il suffit de le critiquer pour passer dansles mains de la BSI. Connaissez-vous d'ailleurs la signification de cetacronyme ?— Oui maître, c'est la Brigade de la Sécurité Intérieure. Ce sonteux qui interviennent quand il y a des émeutes et des soulèvementspopulaires. Je crois qu'ils s'occupent également de l'espionnage etdu contre-espionnage.— C'est juste, mais parlerons politique un autre jour. Je vais vouslire la strophe suivante du mythe, celle qui contient la raison pour laquelleZeus, elle parle de Zeus même si notre divinité est Ra, voudraitdétruire le monde actuel.1 C'est ainsi que, selon le médium Edgar Cayce, s'appelait la capitale de l'Atlantide.2 Vient en réalité du Roi Louis XIV.3 Comme le service d’état d’un dictateur moustachu pendant la deuxième guerre mondiale l’afait.15


Le rêve d'Angélique.— Oui je sais, ce sont les Bélials 4 qui l'ont comme divinité suprême,tandis que le nôtre est le dieu soleil, Ra, qui est notre uniquedivinité. Je crois savoir qu'ils ont également un dieu soleil, qu'ils appellentHélios.Amilius cherche ses repères dans le vieux livre à la reliure de cuir,ajuste machinalement ses lunettes et continue de lire comme il a l'habitudede faire ; lentement en mettant l'accent sur les mots les plusimportants :— Quand la portion divine qui est en eux s'altérera par son fréquentmélange avec un élément mortel considérable et que le caractèrehumain prédominera, incapables dès lors de supporter la prospérité,ils se conduiront indécemment, et à ceux qui savent voir, ilsapparaîtront laids, parce qu'ils perdront les plus beaux de leurs biensles plus précieux, tandis que ceux qui ne savent pas discerner cequ'est la vraie vie heureuse les trouveront justement alors parfaitementbeaux et heureux, tout infectés qu'ils sont d'injustes convoitiseset d'orgueil de dominer. Alors, le dieu des dieux, Zeus, qui règnesuivant les lois et qui peut discerner ces sortes de choses, s'apercevantdu malheureux état d'une race qui avait été vertueuse, déciderade les châtier pour les rendre plus modérés et plus sages. À cet effet,il réunira tous les dieux dans leur demeure, la plus précieuse, cellequi, située au centre de tout l'univers, voit tout ce qui participe à lagénération, et, les ayant rassemblés.....Il lève la tête, regarde son élève, qui ne semble pas remarquer qu'ilmanque une page dans le prestigieux livre et que c'est pour cette raisonque son maître arrête de lire. Constatant que Leith écoute tou<strong>jours</strong>et attend ce qui va suivre, il lui dit :— Désolé mon garçon, le reste a été perdu il y a déjà très longtemps.Je ne m'y fait tou<strong>jours</strong> pas, car j'aimerais, comme vous, biensavoir la suite. Il est cependant possible que la bibliothèque ait encorede vieilles archives qui contiennent le reste de ce récit, mais ilfaudra investir du temps et de la volonté pour les chercher. Vous revenezcet après-midi pour continuer ? On pourrait discuter un petitpeu de ce qu'on a lu et lire les sept signes, n'est-ce pas ?4 Le groupement polythéiste “<strong>Les</strong> fils de Bélial” de l'Atlantide.16


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Désolé maître, cet après-midi je comptais réviser mes leçonsde mathématique, mais je vais d'abord dîner chez Abdubu, à l'estaminet“<strong>Les</strong> Jardines”, tout près d'ici.— Vous mangez les plats Perse à présent ?— Non maître, pas spécialement, il a aussi des mets d'ici, on y estbien et mes copains s'y trouvent pour discuter un petit peu.— Bon appétit et à demain mon enfant.— Vous de même et à demain maître.La ville d'Osuo est nommée d'après la rivière alimentant le lacParfa et rejoignant depuis l'autre côté du lac le Saad, le fleuve qui, venantdepuis les montagnes, rejoint la mer près de la ville et le portd'Amaki. La ville elle-même se situe au bord du lac là où la rivière lequitte pour joindre la Saad. La rivière Osuo coupe, en sortant dulac, la partie basse de la ville du même nom en deux, laissant ainsi lesquartiers les plus modestes à sa droite dont les habitations s'espacentde plus en plus en direction de la mer pour graduellement se transformeren campagne avec des fermes de tailles diverses et maisonsd'artisans. Sur la berge rive gauche il y a un boulevard qui prend, venantprès du lac, une courbe pour longer le petit port de pêche et deplaisance. On pourrait s'étonner de trouver un port de pêche dansun pays où la majorité de la population est végétarienne par conviction5 , mais ce n'est pas tout le monde qui est strictement pratiquantet il ne faut pas oublier les autres croyances n'ayant pas la restrictionde respect pour tout ce qui vit. Entre la rive gauche de l'embouchurede l'Osuo et le port en demi cercle, il y a un parc d'une dizainede stades 6 de long sur une demie douzaine de stades de large, enprincipe réservé pour les promenades. On peut également y trouverdes vendeurs à la sauvette, tolérés à condition qu'ils restent discrets.On y a dressé des statuts des différents héros locaux, des musiciens,deux écrivains, un compositeur, des rois, des reines et mêmequelques militaires. On trouve de l'autre côté du boulevard, c'est-à5 <strong>Les</strong> auteurs du livre “<strong>Les</strong> Autres Vies et la Réincarnation” de Bernard et Duboy,(<strong>Éditions</strong> du Rocher) affirment à la page 204, que les Atalntes étaient végétariens.6 Mesure utilisée par les grecs anciens, à peu près un sixième d'un kilomètre.17


Le rêve d'Angélique.dire la partie de la ville entre le port et la ville-haute, la partiecommerçante en forte pente. C'est là qu'on trouve les boutiques detout genre, cordonniers, fleuristes, épiceries, boulangeries, quincailleries,coiffeurs, boutiques de meubles, des petits bistros de toute provenanceet même un salon d'esthétique appartenant à une jeunefemme dénommée Pénélope. Mais les bâtiments n'hébergent pasque des commerces, il y a également des ateliers d'artistes, des avocatset autres représentants. C'est dans cette partie de la ville qu'onpeut trouver la résidence d'Amilius, astrologue, astronome et enseignanten physique. La plupart des bâtiments ont au moins un étagesinon plusieurs et c'est dans un de ces appartements qu'habite Leith,l'élève d'Amilius. C'est au coin d'une de ces ruelles que se trouvel'estaminet de Abdubu, “<strong>Les</strong> Jardines”, qui tient son nom du précédantpropriétaire, originaire de l'état du même nom. Même qu'Abdubua voulu en faire un petit restaurant Perse, comme il a eu dansson pays d'origine, il a dû tenir compte de la clientèle existante etsurtout des habitués qui n'ont pas tous les mêmes goûts. C'est icique se trouvent régulièrement Leith, les deux Macs, Celtes du nordet fidèles à leurs habitudes, un client que tout le monde connaît dunom de Jou-el dont personne ne le connaît par son vrai patronyme,Pénélope l'esthéticienne, et puis les commerçants du quartier. <strong>Les</strong>deux Celtes, Macdonald 7 et Macintosh 8 , dont personne ne connaît leprénom et qu'on appelle en conséquence Macdo et Maci ou simplementles Macs, car on n'a jamais vu l'un sans l'autre, sont originairesdu nord de l'île. Beaucoup de clients pensent d'ailleurs qu'ils sontfrères ou même frères-jumeaux et ignorent qu'ils n'appartiennentmême pas au même clan. (<strong>Les</strong> Celtes préfèrent utiliser le mot clan àla place de tribu, comme les gens de Mayra le font.) Quand Pénélopeentre avec le journal sous le bras, les Macs ont déjà commandéleurs plats et consomment leurs premières chopes en les attendant.Pénélope les rejoint à leur table et écrie à Abdubu :7 Petit clin d'oeil à Amy MacDonald, dont une chansonnette passe en boucle à la radio aumoment de la rédaction de ces lignes.8 À Eric, le seul et unique Mac qui marchait à la bière et jouait de la cornemuse sans avoirbesoin d'une carte-son cinq-point-machin-truc. (Il était chef de service Software au CERNquand j'y travaillais.)18


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Dubu, Dubu, un thé avec des glaçons en vitesse s'il te plaît, j'aiencore deux vieilles sous le masque.Abdubu, habitué à ce comportement, car il sait qu'elle a à peuprès vingt minutes devant elle, cherche quelque chose dans la glacièreet le lui sert de suite.— Salut ma grande, voilà ton Thé-Machin et fait attention de nepas geler tes lèvres.— Eh ! S'écrie-t-elle, t'as oublié les glaçons !— Bois seulement, tu verras, ce thé n'est plus très chaud.— Bèèh ! S'écrie-t-elle, il est tout froid, même gelé ! Que est-ceque tu as fait ?— Simple, je savais que tu allais venir et j'ai préparé ton thé cematin, que j'ai laissé à la glacière pour refroidir. Tu viens tous lesmidis comme un courant d'air boire ton thé en vitesse en réclamantdes glaçons pour le refroidir. Veux-tu tes thés dans l'avenir commeça ou les préfère-tu comme d'habitude ?— Non ça va. Je le prends comme d'habitude.Elle commence à ouvrir son journal, le replier dans un autre senstel, qu'un article, qu'elle avait entouré d'un trait rouge, apparaissebien visiblement et continue :— Eh ! Vous avez vu ça ! Ils ont trouvé l'astronome-physicienAr-Arart assassiné chez lui à son domicile à Poseidia.— Ce n'était pas celui qui dirigeait les recherches sur l'anomalied'Arcturus qui semble revenir avec une avance de dix-sept ans, demandeAbdubu.— Je ne m'occupe pas trop d'étoiles et leurs consorts, répondMacdo, mais je crois bien qu'elle ne soit pas la première disparitionsuspecte. La semaine passée, il y avait déjà une disparition du mêmegenre et si mes souvenirs sont bons, il en avait d'autres auparavant.— Je ne me souviens pas de détails, dit Maci, mais je crois bienqu'ils aient tous un point commun : ils travaillèrent tous de près oude loin au même projet. Il me semble qu'il y a un truc qui ne tournepas rond.— Oui, dit Pénélope, c'est ce que je crois, mais il faudrait peutêtredemander à Leith, s'il vient tout à l'heure.— Tu sais ce qu'il fait, demande Maci.19


Le rêve d'Angélique.— Non, dit Macdo, il est gentil, discret et on le voit rarement lesoir dans les estaminets, mais je ne sais pas exactement ce qu'il fait.Il me semble qu'il fait des études chez Maître Amilius, mais de quoi.C'est le mystère !— Mais il n'a que seize ans, dit Pénélope. L'enseignement qu'ilsuit chez le maître est de l'ordre général, mais je ne connais pas nonplus ses projets d'avenir. Dubu, Dubu, s'écrie-t-elle en direction del'arrière salle.— Eh ! Dubu, s'écrie-t-elle encore, est-ce que tu sais ce qu'il faitle Leith ?Abdubu, qui a autre chose à faire que d'écouter les clients, se retourneétonné, car il n'a compris que partiellement la question et demandeà son tour :— Qu'est-ce qu'il y a avec Leith.— On aimerait savoir ce qu'il fait ou plutôt ce qu'il voudrait devenir,demande Pénélope.— Il m'a dit qu'il voudrait devenir enseignant-accompagnateuragréé chez les sauvages du continent Européen.— Agréé, agréé, comment agréé demande Macdo.— Tu sais bien, que l'éducation des Européens est un programmeà long terme et n'est autorisé que les contacts par des personnesqualifiées 9 , dit Abdubu.C'est pendant qu'ils continuent la discussion que Leith entre et semet à table avec les Macs et Pénélope.— Salut tout le monde, ça va ?— Salut, dit Maci, on parlait justement de toi, tu prends tes leçonschez le Maître Amilius ?— Oui c'est juste, on parlait aujourd'hui du mythe de la fin dumonde. Je me demandais justement si l'apparence dix-sept ans avantson calendrier de l'Arcturus n'a pas un lien avec lui.— Tu n'as pas lu le journal, demande Pénélope.— Non, dit Leith, est-ce qu'il y a quelque chose de grave ?— Ils ont tué l'astronome Ar-Arart, lui dit Macdo.9 Ce sont les auteurs du livre “<strong>Les</strong> Autres Vies et la Réincarnation” de Bernard et Duboy,(<strong>Éditions</strong> du Rocher) qui l’affirment dans les pages traitant le sujet de l’Atlantide.20


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Bon sang, dit Leith, il travaillait justement à ce projet, je crainsqu'il faille tout recommencer à présent. Il me semble qu'il y aquelque chose de bizarre, un centre de recherche et un observatoireastronomique ont été incendié et plusieurs physiciens et astronomesont été tués ou disparus. Il se cache décidément quelque chose làdessous.— Recommencer, demande Pénélope, recommencer ? Commentrecommencer ?— Eh bien ! Dit Leith, il avait la tendance à travailler seul et il està craindre que ces notes aient été détruites. Tu as le journal sur toi.Regarde le bien. Je parie que son atelier a été mis en sac. C'est sûrqu'ils aient voulu faire croire à un cambriolage qui a mal tourné.Pénélope commence à lire l'article un peu plus attentivement quesoudainement elle lève la tête et s'écrie :— Merde, j'oublie l'heure, j'ai encore mes deux vieilles à débarbouiller.Leith, je crois que tu as raison, lis le reste du journal, je lelaisse ici, je reviendrai plus tard le reprendre.Poseidia, avec ses deux millions d'habitants, à la fois la capitale dupays d'Alta et de la fédération et nommée d'après la divinité Poséidon,est une ville qui a su conserver ses remparts et fossés de défensed'antan. Même si la légende de sa création et celle de l'Atlantidedit que c'était Poséidon qui l'avait créé en même temps que lepays et l'île, la réalité est toute autre. On pourrait se douter que sesdéfenses soient conçues pour repousser les attaques de l'extérieur,car avant de l'attaquer, il faudra d'abord réussir à passer le fjord largeà peine d'une soixantaine de stades, donnant accès à la mer intérieureau bord de laquelle la ville se trouve. Non, ces défenses ont étéconçues, comme toutes les villes importantes dans le lointain passé,pour repousser les attaques des bandes de brigands. Dans le passé,la ville grandissante, plusieurs fossés et remparts ont été construits.Mais la ville avait, contrairement aux autres villes qui les avaient pourla plupart nivelées pour réutiliser l'espace devenu libre, conservés sesanciens fossés pour les convertir en ports maritimes.21


Le rêve d'Angélique.Du mur de défense extérieur ne subsiste que des morceaux çà etlà où ils ont pu trouver leur intégration dans les constructions etruelles assez denses. Seules restent visibles de ce mur les structuresde la porte maritime 10 , laquelle servait jadis à bloquer l'accès de villepar le canal aux bateaux et nageurs. En ce qui concerne le centreville,là il n'y a plus d'habitants depuis longtemps. Le centre luimêmene sert que de résidence royale, les services du roi, les bâtimentsreligieux ainsi que l'arène servant au combat de taureaux destinésaux sacrifices rituels. Ensuite on y trouve quelques résidences denobles, les champs de course, les services d'état, la police d'état et fédéraleet le commandement de l'armée. Le troisième anneau ne sertessentiellement que d'espace abritant des bureaux et surfacescommerciales. C'est dans le deuxième anneau, la zone où résidentles services d'état, qu'on trouve entre autres cette redoutable BSI ainsique la BOS, la Brigade des Opérations Secrètes.L'homme, connu uniquement par son nom de code “Ach”,grimpe les ruelles étroites de la cité administrative et s'arrête devantun bâtiment qui a été jadis le palais du consul. Une porte immense,vert-de-gris, se dresse devant lui, haute d'au moins douze pieds etlarge de plus de dix. <strong>Les</strong> battants semblent très lourds, en métalsemblant de l'airain, dans lesquels sont enfoncés d'énormes clous. Ilsonne. <strong>Les</strong> vantaux s'ouvrent de l'intérieur et il entre dans la cour ensuivant les colonnades d'un pas vif. Parvenu à l'autre côté de lacour, il monte l'escalier qui se trouve là et pénètre dans une pièce auxdimensions démesurées. Le sol de marbre est légèrement veiné derose. Il fait très doux ce troisième jour Lion 11 , presque chaud. Unsilence épais l'enveloppe, parfois coupé par des pas feutrés d'autresemployés sous les arcades du palais. Ses pas résonnent dans lagrande salle. Il passe entre les rangées des trente et un piédestaux,colonnes coupées à trois pieds de hauteur, sur lesquels reposent desbustes de la dynastie Ra-Ta qui règne depuis les quarante <strong>derniers</strong>siècles. Il prend une chaise et s'assoit, sans le demander, à une table10 La ville hollandaise Sneek a conservé une telle porte, passage touristique obligée ! S'il yavait un mur de défense, il y avait forcément une telle porte s'intégrant dans l'ensemble !11 Le mois d'août, les noms romains n'existaient pas à l'époque.22


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.mariant parfaitement le décor fastueux exprimant une richesse excessiveet salue son interlocuteur.— Bonjour Aker.— Bonjour Ach, vous allez bien ? Vous vous êtes assuré de nepas être suivi ?— Non, seul le portier m'a vu, mais il est des nôtres.— Avez-vous du nouveau ? Votre part de l'opération “Silence” sedéroule comme prévu ?— Bien sûr, cher collège, il est bien attendu que je n'ai pas effectuéles démarches moi-même, mais j'ai dû les déléguer à un membrede la BOS.— En effet, je viens de m'en apercevoir en lisant le journal envous attendant. Y a-t-il d'autres personnes dans votre secteur à s'enoccuper ?— Non, il n'y a pas de danger tout de suite, Alpha avait bien desélèves, mais j'ai pris des dispositions de surveillance pour ces <strong>derniers</strong>.— Bon, passons au sujet suivant. La ville d'Osuo, capitale dupays de Mayra, vous la connaissez ?— Oui et non, c'est à l'est, mais je ne suis jamais allé par là.— Bon, vous le savez donc bien et si vous ne le savez pas encore,vous le saurez maintenant. L'opération “Silence” a été mis au pointpour faciliter l'évacuation d'une part des habitants choisi par notreroi. Le but est d'évacuer le maximum de gens sans créer de mouvementde panique au sein de la population. La nouvelle de ce qui vaarriver, telle qu'elle avait été calculée par Alpha, ne doit sous aucunprétexte être divulguée. Est-ce clair ?— Oui !— Comptez-vous aller vous-même à Osuo, ou est-ce que vousavez des contacts là-bas ?— Non, je vais me servir des agents placés là-bas, ils sauront menerl'opération. Vous avez des suspects, mise à part Zeta, dans cetteville ?— Il convient peut-être de surveiller ses élèves, dont parmi eux ily a un garçon de seize ans qui est très doué. Une autre chose qu'ilfaut s'occuper c'est la bibliothèque là-bas. Ils ont, à ce qui paraît, en-23


Le rêve d'Angélique.core une très impressionnante archive d'anciens textes en sous-sol.Vous ne prendrez pas d'action dans l'immédiat, surveille-la et si unsuspect y entre pour les consulter, n'hésitez pas à faire le nécessaire.— Il me semble que je connais le garçon. Il est venu ici à Poseidiaprendre des leçons chez Alpha. On l'a signalé accompagné d'unefille d'à peu près son âge. Une fort jolie fille d'ailleurs avec des cheveuxjais luisant et des yeux bruns en amande, tout comme la fille duroi Bel-Ra.— C'est ça. Mais ce n'était pas une ressemblance. C'était bienelle ! Nous ne savons pratiquement rien sur elle, à part qu'elle à dixhuitans, qu'elle s'appelle Ussa et des sottises que les journaux racontent.Ils ont d'ailleurs bien noirci des pages pendant qu'elle s'affichaitici avec un garçon de son pays ! <strong>Les</strong> sbires de Bel-Ra ont faitun bon boulot, impossible de rapprocher ces deux-là à moins d'unstade. Ne la touchez surtout pas, notre roi, aussi dominant qu'il soit,ne connaît aucun pardon et ce sera le châtiment suprême : une mortlente s'étalant sur cinq ans et excessivement douloureuse ! 12— Mais, ça pourrait être un accident. C'est vite arrivé un accident,n'est-ce pas ?— Vous n'avez pas ma bénédiction et en cas de problème.... Jene vous connaîtrais plus. En ce qui concerne le garçon ; je ne croispas qu'il soit dangereux, mais je ne vais pas pleurer sur son cadavres'il lui arrive quelque chose. Puis, la fille, oubliez la. Je ne pourraiplus vous protéger avec un nom de code. Je serai obligé de vous dénoncer.La mort lente et douloureuse ne m'intéresse pas ! J'espèreavoir été clair, n'est-ce pas !— Une dernière chose, le temple. Qu'est-ce qu'on fait ?— Vous faites allusion au temple d'Ozin, qu'on utilise pour communiqueravec des morts et les ancêtres ?— Oui c'est ça.— C'est une bonne idée, mais on ne pourrait enregistrer que lespropos exprimés dans ce temple. Comme vous devez le savoir, lescommunications télépathiques utilisées par ce procédé ne peuventjamais être interceptées et ce sont justement celles là qui nous intéressentle plus. Mais je crois que l'enregistrement des paroles ex-12 Mode de torture pratiquée par les Atlantes.24


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.primées sera suffisant. Ça nous donnera une idée de quoi dont ilsparlent et il suffit ensuite d'intervenir ou de suivre les suspects si lesujet de leur conversation entre dans le cadre de l'opération “Silence”.— Je vous tiendrai au courant de la suite des opérations.— Vous pouvez disposer.L'homme portant le nom de code “Ach” sort lentement de l'immensesalle de réunion, marche pensivement, passant sous les arcs,descend l'escalier, traverse la cour et se fait accompagner par le gardienjusqu'à la grande porte d'entrée.25


ALe mythe de la fin du monde.milius, qui se levait de bonne heure ce matin du quatrièmejour Lion pour observer le ciel avant qu'il ne devienne tropclair, descend l'escalier, menant à son observatoire en forme dedôme aménagé dans une partie du grenier, pour rejoindre son atelierpour y attendre son élève. Il pose ses notes sur la table faisant à lafois office de bureau et de table à dessin. Dans la pièce on trouveégalement des tables de rangement long de certains murs avec desobjets divers et hétéroclites, un astrolabe par ci, un télescope à moitiédémonté attendant la réparation par là, un globe représentant laTerre, un livre avec des tables logarithmiques, ouvert à une page dechiffres allant de 10 000 à 10 200, une carte du ciel et même un dictionnairede formules mathématiques. Il se rend, après avoir déposéses observations de ce matin sur la table, à l'étagère-bibliothèque del'autre côté de la pièce et y prend un livre de référence d'objetscélestes. Il commence à le feuilleter et se rend compte que les référencesqu'il cherche ne s'y trouvent pas. Il se lève de nouveaupour prendre un autre livre et c'est à ce moment que son élève,Leith, fait son entrée.— Bonjour maître, je vous surprends en plein travail ?— Non mon garçon, je venais justement vérifier les coordonnéesdes étoiles que j'ai pu observer ce matin.— Vous avez fait à nouveau des calculs concernant Arcturus ?— Oui, c'était bien mon intention en tout cas, mais je n'ai pas puvoir tout ce que je voulais.— Sans être indiscret, qu'est-ce que vous comptez voir exactement?— Il n'y a rien d'indiscret dans votre question, mon garçon. Jevoulais prendre les coordonnées exactes de grandes planètes pourpouvoir calculer la trajectoire d'Arcturus, mais j'aurais dû veillertoute la nuit pour les avoir. Je me suis donc levé trop tard ce matin.27


Le mythe de la fin du monde.Certaines d'entre elles n'étaient déjà plus visibles à l'heure où je gagnaisl'observatoire.— Est-ce que Ar-Arart ne les avait pas déjà calculées ?— C'est juste mon garçon, mais comme vous devez l'avoir apprisdans les journaux, son atelier-bureau a été entièrement mis à sac etles documents les plus précieux ont disparus. Malheureusement ilne me les avait pas encore fait parvenir.— J'ai confiance en vous, maître, que vous arriviez à refaire sescalculs. Vous allez certainement faire d'autres observations cettenuit n'est-ce pas ?— Bien sûr mon enfant, j'espère bien avoir tous les renseignementsdès demain et pouvoir compléter mes calculs. À propos devos leçons de mathématiques, vous avancez bien ?— Oui maître. J'apprends comment me servir des tables logarithmiqueset des tables de conversion d'angle pour pouvoir calculerles positions et distances d'objets célestes.— C'est bien, mais sachez qu'il vous faudra beaucoup d'expérienceet d'exercices avant de maîtriser parfaitement cette matière.En ce qui concerne les leçons d'hier, avez-vous encore des questionsles concernant ?— Oui maître, une toute petite. La phrase : « Quand la portion divinequi est en eux s'altéra par son fréquent mélange avec un élément mortel. »S'adresse-t-elle aux fréquents mélanges de sang royal avec la population?— De toute évidence ! Même s'il y a des rumeurs persistantesconcernant des mariages frère-soeur dans le passé, la vérité là-dessusn'a jamais pu être prouvée. C'est sûr que les mariages nièce-neveu,cousine-cousin étaient et sont tou<strong>jours</strong> fréquents. Mais depuis les<strong>derniers</strong> siècles, les mariages entre les familles royales et des enfantsdu peuple sont devenus de plus en plus fréquents. Vous pouvezd'ailleurs prendre comme exemple la dynastie de Ra-Ta, ces ancêtresrégnèrent presque millénaire, mais à l'heure qu'il est, ils n'atteignentun âge à peine plus que les mortels.— Ne trouvez-vous pas que ça correspond bien à la prédictiondes textes sacrés maître ?28


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Malheureusement oui, mon garçon. C'est pour cette raisonque je me suis intéressé à la trajectoire d'Arcturus. Je crains, commevous l'avez déjà dit pendant vos leçons d'hier, que c'est bien ellel'étoile tombant de la prédiction.— Ce n'est pas seulement ça maître, mais il y a d'autres signes quisemblent correspondre.— Je vais vous lire d'abord les sept signes avant que nous continuionsà discuter. Il y a d'abord les deux premiers qui parlent tousles deux d'un chevalier barbu. Avez-vous une idée de quoi il s'agit ?— C'est certainement une comète, parce que c'est ainsi qu'on lesappelait depuis la nuit des temps. Il signifiait pour les gens jadis,maintenant pour des superstitieux, le messager de malheur.— Oui c'est ça. Continuons avec la lecture des sept signes.Amilius se lève, va vers l'étagère-bibliothèque, mais constate quele livre qu'il cherche se trouve tou<strong>jours</strong> sur la table avec une marquepageà l'endroit où il avait arrêté la lecture la veille. Il prend le livre,l'ouvre à la page marquée, ajuste avec un geste machinal ses lunetteset poursuit la lecture en faisant une petite pause entre chaque signe :— Premier signe : quand les petites se partageront Poissons etBélier et leurs grandes soeurs la Vierge et Balance, le chevalier barburejoindra Arès 13 en Verseau. Deuxième signe : le chevalier barbu reviendraplutôt que prévu dans le signe du Bélier. Troisième signe :une étoile bleue apparaîtra et deviendra visible pendant la journée.Quatrième signe : les gens se révolteront et s'opposeront aux classesdirigeantes. Cinquième signe : la population se détournera des vertusdivines et commencera à vénérer le veau d'or et les jeux. Sixièmesigne : on découpera le pays des rubans de la pierre coulée 14 , telleune toile d'araignée. Septième signe : l'eau des rivières tournera ensang.— Maître, puis-je conclure, si j'ai bien suivi la lecture, que le chevalierbarbu n'est d'autre que l'Arcturus ? Il me semble bien qu'il nesoit attendu que dans dix-sept ans ?13 La planète Mars.14 Béton : on a effectivement trouvé certains de ce type de matériel dans les zones inondées par lamontée des mers il y a plus de 12 000 ans.29


Le mythe de la fin du monde.— Oui, c'est bien ça que je comptais vérifier mon garçon. C'estpour cela que j'ai besoin des coordonnées exactes des étoiles et d'établirune position astrologique il y a cent-trois ans. C'est ainsi que jepeux comparer la carte astrologique de l'époque avec le premiersigne de la prédiction. En ce qui concerne le deuxième signe, Arcturusest bien apparue dans le signe du Bélier.— Le troisième signe, maître, l'étoile bleue, l'avez-vous repérée ?— Oui, je le crois. Ce n'est sûrement pas une planète qui devientvisible le jour, tel que Aphrodite 15 qu'on peut parfois observer tôt lematin ou juste avant le coucher du soleil, mais une étoile qui explose16 . Vous devez savoir, si vous avez bien retenu vos leçons précédentes,que certaines étoiles très brillantes explosent parfois etdisparaissent ensuite. Une telle étoile devient visible le jour pendantune semaine environ, parfois plus, parfois moins. Il y a, en effet, ence moment une étoile qui devient de plus en plus brillante de jour enjour dans la constellation de la Lyre.— Bien compris maître, en ce qui concerne le quatrième et le cinquièmesigne, l'observation du comportement populaire suffit à meconvaincre que c'est bien ça qu'elles aient voulu dire. Pour les révoltes,ce sont surtout les jeunes qui s'opposent aux guerres que lepays mène aux quatre coins du globe, car ils n'acceptent plus l'attitudedominante de la classe dirigeante. Pour les jeux, pas decommentaire, il suffit de voir comment les joueurs de pelote 17 de ladernière compétition ont été vénérés. En ce qui concerne le veaud'or, c'est bien le matérialisme de la population, son attitude d'accumulerdes objets divers, représentant la richesse qui symbolise à mesyeux le veau d'or. Le sixième signe, ce sont peut-être les routes,qu'on ait construites à tort et à travers dans tout le pays, ou est-ceque je me trompe ?— Je suis tout à fait d'accord avec vous, mon enfant. En ce quiconcerne les rivières tournant en sang, il faut peut-être dire qu'ellesse colorent en rouge. Il arrive en fait que des mouvements telluriqueset des petits tremblements libèrent certaines matières qui15 La planète Vénus.16 Ce qu'on appelle une supernova de nos <strong>jours</strong>.17 La Pelote Basque, ancêtre du tennis, à ne pas confondre avec le jeu de cartes “Belote”30


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.pourraient bien provoquer cette coloration des sources et de ce faitl'eau des rivières. Ce n'est pas nouveau, c'est déjà arrivé, mais n'estabsolument pas prévisible. Vous pouvez, en ce qui concerne la vénérationdu veau d'or, d'ailleurs constater, si vous vous souvenezbien, que les Hébreux vénèrent effectivement un veau d'or et mêmesi cela est contraire à leur dogme religieux.Angélique, Julien, leurs copains et copines se sont retrouvés sur laplage d'Étretat devant leur cabane de location des planches 18 à voileprofitant des quelques rayons de soleil de ce mois d'août. Angéliquene participe pas aux babillages, elle a mis son baladeur et écoute de lamusique. Soudainement une des filles, Alice, la secoue et lui demande:— Que est-ce que tu écoutes ? Encore un de tes vieux trucs ringards,je parie !— Oui, c'est sûrement Miles machin ou Sidney truc, dit André.— Ce machin s'appelle Miles Davis, un trompettiste de jazz et letruc s'appelle Sidney Bechet, que tu devrais sûrement connaître, sinontu manques sérieusement d'éducation culturelle, lui répond Julien.— Angélique, dit Alice, Angélique passe-moi tes écouteurs, jeveux savoir ce que tu écoutes.Angélique, qui avait enlevé les écouteurs entre temps, remet l'albumqu'elle venait d'écouter au début et les lui passe. Alice met lesécouteurs à son tour et entend les Pogues entamant justement le premiernuméro de l'album, également le titre, “If I Should Fall FromGrace With God”. Elle se lève en esquissant des petits pas de dansesur la plage de galets en se tordant presque une cheville et crie :— C'EST QUOI, CETTE MUSIQUE ?— Arrête de crier, on n'est pas sourd !— QUOI ?— Arrête de crier et enlève tes écouteurs avant de répondre, ditJulien.18 Même s’il y a une location de petits bateaux à Étretat, ne cherchez pas cette cabane, ellen’existe que dans cette histoire.31


Le mythe de la fin du monde.— QUOI ?Alice qui continue à écouter, n'entend pas ce que ces amis luidisent et continue ses pas de danse pendant que les Pogues continuentavec “Turkish Song Of The Damned”. Elle demande de nouveau:— C'EST PAS MAL, C'EST QUI ?C'est alors André qui se lève et lui arrache les écouteurs et lui dit :— Mais enlève ces trucs quand tu parles, tu ne comprends rien dece qu'on te dit et tu gueules.— Meunon, je ne gueulais pas. C’est qui ce groupe ?— Mais si tu gueulais, c'est tou<strong>jours</strong> comme ça si on parle avecun baladeur en marche, lui dit Julien.— Ce sont les Pogues, un groupe irlandais des années quatrevingts,répond Angélique. J'ai trouvé ce disque dans la collection demon père. Je lui ai piqué ses deux CD de ce groupe ainsi qu'un deCeltica 19 . Il ne doit pas souvent les écouter, parce que ça fait un anque je les ai. Je ne me souviens plus du titre, il y a quelque choseavec Grace et God, mais c'est tout ce que je me souviens.— Angélique, ton frère m'a dit que tu as fait un rêve assez bizarre,demande André qui a visiblement envie de changer de sujet.Tu étais, à ce qui paraît, une princesse de l'Atlantide qui se noyaitn'est-ce pas ?C'est ainsi qu'Angélique ira narrer son rêve, précisant qu'elle n'apas retenu tous les détails, à ses amis. Son frère, Julien, lui assiste. Ilse souvient mieux de certains détails de ce qu'elle lui ait raconté pendantla nuit.— Tu crois que l'Atlantide a vraiment existé, demande Alice.— Je ne sais pas, répond Angélique, mais certains détails étaienttrop nets. Il y avait par exemple les bateaux dans le port. Ils avaienttous des ailes en guise de voiles, tel que le deuxième bateau deCousteau les avait. <strong>Les</strong> seuls bateaux avec voiles ordinaires étaientdes petites embarcations de pêche. Il y avait aussi la voiturette dudétective, il n'y en a pas de semblable en France en ce moment. Elleressemblait un peu à ces tricycles d'après-guerre fabriqués par les Ita-19 Un groupe d’ici, jouant de la musique d’Irlande et de Bretagne. (Voir : www.celtica.fr)32


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.liens et les Allemands, mais je ne les ai jamais vus en réalité, seulementdans un livre traitant de l'après-guerre.— Mais l'Atlantide, n'était-elle pas une île grecque, demandeAlice.— Je n'en sais rien, répond Julien à la place d'Angélique, mais jecrois que c'était Platon qui l'avait mentionné.— Je me doute un petit peu que ce soit une île qui tient dans laMéditerranée, dit Angélique, car dans mon rêve il fallait faire unvoyage assez long pour arriver au port. Quelque chose comme d'icià Paris et une île d'une telle taille prend tout de même de la place !— Tu m'avais raconté cette nuit qu'il y avait un plan d’évacuationvers le continent de l'Europe. On peut donc supposer qu'il s'agitd'une île dans l'atlantique, dit Julien.— Tu devrais peut-être aller à la bibliothèque, lui dit Alice, pourconsulter de la documentation ou voir sur Internet.— C'est une bonne idée, répond Angélique, j'y vais cet après-midi.Je crois bien, que c'est ouvert.— Il y avait un type au salon du livre d'Andé, lui dit Alice, quivendait des posters et des livres sur l'Atlantide, mais je n'ai aucuneidée d'où il vient ni où il habite. Tu pourrais peut-être contacter lesorganisateurs ou la mairie de là-bas pour le savoir.— C'est où, Andé ?— Dans le département de l'Eure, au bord de la Seine, pas loin dela cité nouvelle de Val de Reuil et Louviers, sinon prends une carteroutière et regardes !— Mais, c'est loin !— Tu ne sais pas te servir d'un téléphone ou quoi ?André, las d'écouter la discussion, saisit le baladeur numériqued'Angélique, met les écouteurs, les enlève aussitôt et s'écrie écoeuré :— Bèèèh, tu écoutes des trucs pareils ? C'est vieux, c'est pour papys,c'est ringard, c'est nul, comment peut-on écouter ça ?— Tu parles de musique, répond Angélique, les trucs que tuécoutes sont comme tu vides un conteneur de recyclage de verre enbas par l'escalier. Moi, je n'aime pas tes trucs à toi, chacun ses goûtsmon pote. Et rends moi mon baladeur s'il te plaît.33


Le mythe de la fin du monde.— C’est ça dit Alice, et puis n’oublie pas les gueulés du conciergeun bas de l'escalier qui ramasse la marchandise à la figure.— Elle n'aime pas trop le RAP non plus, dit Julien, un ou deuxnuméros ça va, mais après....— Oui, dit Angélique, ce n'est pas de la musique, c'est de la lecturede journaux évoquant les problèmes de banlieue en accéléré surun fond sonore.— Ou des insultes, du sexe et de la violence, si tu écoutes cetaméricain M ou N quelque chose, ajoute Alice.— On s'en va, demande Julien en regardant sa montre. Est-ceque quelqu'un vient avec nous se taper une petite bouffe ? On pourraitse revoir cet après-midi.— Sans moi, répond Angélique, je prends quelque chose à la maisonet je vais ensuite à la bibliothèque comme t'avais suggéré pourvérifier les trucs que j'ai rêvés cette nuit.Leith, qui vient de terminer ces leçons du matin chez Maître Amilius,remonte la rue en passant devant la petite boutique de Pénélope,qu'il salue en passant, pour se rendre à l'estaminet d'Abdubu. “ <strong>Les</strong>Jardines ” n'est pas très grand et se trouve à l'angle de la rue. Sa ported'entrée a comme curiosité qu'elle fait l'angle de l'immeuble. Cet édifice,dont l'angle est arrondi, a également des appartements à l'étageayant des fenêtres avec un petit balcon dans l'angle, comme la portejuste au-dessous d'elles. L'exploitant y habite, ainsi qu'un étudiant etun employé de commerce. Leith entre, jette un regard circulaire etconstate, sans pour autant remarquer ce client banal, même trop banal,assis à une table bien discrète faisant le coin de la salle, qu'il y aencore peu de clients et se dirige vers la table où ils se trouvent Abdubuet Jou-el en discussion. Il s'assoit et leur demande :— Bonjour, ça va ? Je suis un peu tôt pour le casse-croûte, n'estcepas ?— Ça va, lui répond Abdubu, ce n'est pas toi qui es trop tôt, maisce sont les gens qui ont un peu de retard aujourd'hui. Tu prendsquoi ? Comme d'habitude ?— Ça t'arrive de prendre autre chose, lui demande Jou-el.34


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, lui répond Abdubu à la place de Leith, mais mes plats dujour lui conviennent rarement. Il est végétarien et tient à sesprincipes. 20— C'est ça, lui dit Leith, la religion d'ici interdit en principe laconsommation de la chair, mais la plupart des gens ne la pratiquequ'aux occasions spéciales telles que naissances, mariages et enterrements.— Y a-t-il des exceptions, lui demande Jou-el, qui n'est pas pratiquant.— Il y en a, lui répond Leith, c'est en cas de nécessité, mais ondoit une prière à l'intention de l'âme de la bête tuée pour s'excuser delui avoir pris sa chair 21 .Leith, qui venait de terminer ses leçons, a visiblement envie dechanger de sujet et demande :— A-t-on des nouvelles concernant d'Arcturus et l'assassinat deAr-Arart ? Car, il me semble, continue-t-il, qu'elle se rapproche dejour en jour. Elle viendra bientôt visible de jour et il sera trop tardpour faire quelque chose en cas de problèmes.C'est Jou-el qui lui donne un coup de pied sous la table et désignediscrètement l'étranger assis à la table dans le coin en mettant sondoigt sur les lèvres. C'est en ce moment que les deux faux jumeauxet vrai Celtes font leur entrée. Ils s'assoient à la même table queLeith et Jou-el et c'est Maci qui demande :— Salut Leith, salut Jou-el. Eh ! Abdubu porte nous une tournée,et continue en s'adressant à Leith, alors, tombera-t-elle ou tombera-t-ellepas ?.C'est alors que Jou-el se voit obligé de répéter le même geste detout à l'heure aux deux Macs pour désigner l'étrange visiteur assisseul à la table du coin pour leur signaler de changer le sujet de laconversation.— Alors, dit Macdo qui a compris le geste Jou-el, elle vient, laPénélope ?20 <strong>Les</strong> auteurs du livre “<strong>Les</strong> Autres Vies et la Réincarnation” de Bernard et Duboy,(<strong>Éditions</strong> du Rocher) affirment à la page 204, que les Atalntes étaient végétariens.21 <strong>Les</strong> indiens de l'Amérique du Nord le faisaient pour la plupart.35


Le mythe de la fin du monde.— Je ne sais pas, dit Leith, je suis passé devant sa boutique tout àl'heure et elle avait une cliente, mais je pense qu'elle ne tardera pas àvenir.<strong>Les</strong> hommes continuent la discussion sur les fréquentations dePénélope, une fille célibataire qui ne semble pas trouver chaussure àses pieds, et ils ne remarquent pas que l'homme, l'étranger un peutrop banal, s’est levé de sa chaise et a demandé une communicationdans la cabine d'où vient un monologue à peine audible :— Allo ?— Bonjour, c'est Ach, passez-moi Aker s'il vous plaît.— Oui.— Oui.— Non.— Oui, suspect IV en sait déjà trop et le mot commence à se répandreparmi la population.— Oui.— Non.— Certainement, je prendrai les démarches de suite.— Non.— Bien sûr, je ne l'exécuterai pas moi-même. Je prendrai égalementdes mesures de surveillance pour son élève, il ne sais pas encoretrop, mais une surveillance ne sera pas un luxe.— Oui bien sûr.— Bien sûr, s'il va fouiner dans le sous-sol, je ferai le nécessaire.— Pardon ?— Non, je serai prudent, ici personne ne me connaît de toute façon.— Oui, je vous contacterai dès que j'ai du nouveau.— Oui, à bientôt.L'homme sort de la cabine, paye la communication ainsi sesconsommations, puis sort de l'établissement en butant sur Pénélopequi vient d'entrer. Elle suit des yeux l'homme qui vient de sortir sanss'excuser d'un regard interrogatif et lance à ses copains pendantqu'elle s'assoit :— C'est qui, ce type-là ? Il traîne dans la rue devant chez moi àlongueur de journée.36


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Poseidia, au siège de la BSI, l'homme connu par son nom de codeAker passe sous les arcades, descend le grand escalier au fond de lacour et longe les colonnades pour entrer dans le bureau du chef desopérations des groups “A” et “B” nommé ainsi à cause de la premièrelettre des noms de code des agents. L'homme, d'un gradeéquivalant d'un colonel et uniquement connu du nom de code Seth,lui jette un regard froid et attend qu'il le salut dignement comme sonrang l'impose.— Bonjour monsieur, brigadier Aker pour vous servir, dit-il enfaisant un salut militaire.— Asseyez-vous Aker. Avez-vous des nouvelles d'Osuo. Avezvouspu convaincre un de nos agents de s'y rendre lui-même pourmener les opérations ?— Oui monsieur.— Quel agent avez-vous envoyé là-bas ?— Ach, monsieur. C'est tout ce qu'on avait de disponible en cemoment.— Vous n'avez pas pu libérer un autre et l'envoyer à sa place ?Cet homme est capable de commettre les pires bêtises. Je ne veuxpas être méchant avec lui, mais une balle, qu'on lui tire dans la tête,va mettre au moins trois mois pour trouver la moindre trace d'uncerveau ! Tout ce qu'il sait faire est de tuer et flinguer.— Oui monsieur. L'opération “Silence” demande beaucoup deressources en hommes et matériel et nous ne pouvons pas nouspermettre de les retirer de leur poste. L'état de Mayra ne pose pas derisque majeur, même si la population semble soupçonner quelquechose. <strong>Les</strong> jeunes de cet état sont plutôt préoccupés par les guerresen cours en ce moment. En ce qui concerne Zeta, mon agent vientde me communiquer qu'il avait réussi à recalculer les données d'Alphaet d'en tirer la même conclusion. Nous ne pouvons pas nouspermettre de conserver cet homme en vie. Son élimination a étédécidé et va être exécuté dès aujourd'hui ou demain au plus tard.— Bien ! Avez-vous autre chose ? Zeta avait, ou a tou<strong>jours</strong>, unélève assez doué n'est-ce pas ?37


Le mythe de la fin du monde.— Oui monsieur. Il n'est pas dangereux pour l'instant, il ne saitguère plus que la population et ses compétences ne suffisent pas àrecalculer les données de Zeta.— N'est-il pas la même jeune personne qu'on avait signalé encompagnie de la fille unique du roi Bel-Ra ?— Oui monsieur. C'est bien lui.— Alors, faites attention. D'après nos informations, cette fille,elle s'appelle Ussa je crois, serait amoureuse de lui. Ce qui pourraitsignifier qu'il est sous discrète surveillance des sbires de Bel-Ra.— Oui monsieur. Je crois que Ach, avec son cerveau d'oiseau, adécidé des les éliminer en faisant croire à un accident. Il estime quecette fille en sait, selon lui, beaucoup trop.— Oh malheur. On ne peut le rappeler et lui confier une autretâche ?— Non monsieur. Il ne communiquera qu'une fois ses démarchesterminées.— Faites tout ce que vous pouvez, vous savez bien, que vous êtesresponsable de ce qui arrivera à cette fille. Vous savez très bien,qu'uniquement une réunion extraordinaire des dix rois peut décidersur le sort d'un membre d'une famille royale. En cas de problèmes,notre peau ne vaudra pas très cher. Bel-Ra et ses sbires sont parfaitementau courant de nos agissements. S'il arrive la moindre chose àsa fille unique, nous ne ferons plus partie du plan d'évacuation, carnous serons morts avant. Est-ce que je me fais bien comprendre ?— Oui monsieur.— Vous pouvez disposer. Et rappelle cet andouille avant qu'il nefasse trop de dégâts.L'agent Aker sort du bureau et se demande comment-il peut éviterles dégâts. Il remonte la cour en suivant les colonnades, remontel'escalier et rentre dans son spacieux bureau à côté de la salle deréunion. Il prend la liste de ses agents sur le terrain et constate à sonregret qu'il n'y a aucun agent dans l'état de Mayra qu'il peut contacterà moins de deux <strong>jours</strong>. Il ne peut même pas contacter ses propresagents, qui n'ont pas de moyen de communication personnelle parmesure de sécurité, mis en place pour éviter d’éventuels repérages.Une décision qui s'avère être conta-productif dans cette situation de38


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.crise. Il prend alors la seule décision qui lui paraisse la bonne à cetinstant : il retire un agent actif dans la ville et l'envoie par express àOsuo en espérant qu'il trouve le dénommé Ach avant que celui-ci necommette l'irréparable.39


LAttention !eith, Pénélope, Jou-el, les Macs et Abdubu se trouvent tou<strong>jours</strong>à table en plein discussion. <strong>Les</strong> clients, habitués à venirmanger le plat du jour à midi, commencent à venir un à un ou à plusieurs.Abdubu se lève et s'excuse auprès de ces amis et commenceà servir les apéritifs à ceux qui le désirent. <strong>Les</strong> cinq amis continuentleur babillage habituel en passant en revu les différents personnagesdu quartier, quand soudainement, Pénélope, se rappelant le client quivenait de sortir, demande :— Éh ! Vous avez vu ce type de tout à l'heure ? Je suis sûr quec'est un espion. Il ne fait d'autre que des allers retours dans la ruedevant chez moi et la rue à côté, là où il habite Maître Amilius. Jesuis sûr qu'il le surveille. Qu'est-ce que t’en pense Jou-el, toi quiconnaît tout et qui sait tout sur tout le monde ?— Oui, dit Maci qui répond à la place de Jou-el, j'ai remarquéd'autres comme lui par ailleurs, on dirait qu'il se trame quelquechose. Ce ne sont peut-être pas d'espions, mais sûrement des agentsde la BSI.— Je suis d'accord avec toi, lui dit Macdo, il me semble bienqu'ils tiennent Amilius à l'oeil.— Désolé pour le coup de pied de tout à l'heure, dit Jou-el àLeith, mais je ne pouvais pas le faire autrement. C'est Abdubu qui l'areconnu en premier. C'est probablement un agent de la BSI. Il mesemble que je le connais. Puis, il n'est pas un de leurs meilleursagents, si c'est bien lui.— Oui, dit Abdubu qui venait tout juste remettre une autre tournée,il a bien pris une communication avec Poseidia. Ce qu'il est ensoi déjà suspect, mais il me semble l'avoir entendu parler de suspectet d'exécuter ou d'une exécution.— Mais tu voulais parler de quoi tout à l'heure, demande Jou-el àLeith.41


Attention !— Oh ! C'est juste à propos de l'assassinat d'Ar-Arart. J'ai voulusavoir si quelqu'un d'entre vous a des nouvelles entre temps.— Non, dit Pénélope, mais je crois avoir entendu parler de cettecomète qui s'approche de jour en jour. Mais l'observatoire de Poseidiaaffirme qu'il n'y a aucun danger. Elle, cette comète donc, passeracomme d'habitude très loin de la Terre. Regarde le journal de ce matin,il y a une demi-page sur cet événement.— Je sais, lui dit Leith, j'ai entendu parler. Mais je ne suis pastrop sûr que ces articles parus dernièrement dans les journauxviennent vraiment de l'observatoire. Normalement cette comète, elles'appelle Arcturus, a une trajectoire telle qu'elle vient entre Verseauet Poissons et repart entre Scorpion et Sagittaire et ne croise pascelle de la Terre. Mais le problème suivant se pose ; elle est revenuetrop tôt et on ne sait pas pourquoi.— Mais, dit Maci, n'est-elle censé revenir que dans dix-sept ans ?— C’est ça, lui répond Leith, Maître Amilius m'a affirmé égalementqu'elle n'est devenue visible qu'en Bélier.— Il me semble, dit Pénélope, qu'on ne peut observer Verseau ence moment et on ne peut en conséquence pas pu observer l'arrivéed'une comète par là.— Tu as peut-être raison, lui dit Leith, c'est pour cela qu'on l'a vupour la première fois en Bélier. Ce qui m'inquiète par contre, c'est lefait que sa première apparence en Bélier correspond bien aux prédictionsfaites dans les textes sacrés.— <strong>Les</strong> textes ne disent-ils pas que le pays sera détruite en uneseule funeste jour et une terrible nuit, demande Abdubu, revenupour prendre la commande et continue sans attendre une réponse :— Tout le monde prend le plat du jour ? Il te convient aussiLeith, c'est un plat traditionnel du peuple Ibérique qui ne contientque des oeufs, du fromage râpé, des pommes de terre et des champignons,accompagné des légumes. Ça te va ?— Oui, lui répond Leith, je l'en fais parfois moi-même, c'est unesorte d'omelette, n'est-ce pas.— Cinq plats du jour, demande Abdubu, sans répondre à laquestion de Leith.— Non, dit Maci, j'aimerais la même chose qu'hier.42


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Désolé, je n'ai plus, je te passe la carte ?— Non laisse, je prends le plat du jour.— Boisson ? Une bière pour vous deux, dit-il en désignant detête les deux Macs et continue :— Péléope, un thé avec des glaçons, peut-être, lui demande-t-il etcontinue sans attendre la réponse de sa part : Leith, vin, cidre, unverre d'eau peut-être ?— De l'eau, dit Leith, j'ai encore des leçons cet après-midi etj'aimerais rester sérieux.— Jou-el ? Comme d'habitude ?— Non, dit Jou-el, je prendrai une carafe de vin.<strong>Les</strong> cinq amis continuent leur babillage et ragots qu'on racontesur les habitants et commerçants du quartier jusqu'au momentqu'Abdubu revient avec les boissons. Il dit sans s'adresser à quelqu'unparticulier :— Il me semble que vos textes ne parlent pas seulement d'unedestruction totale par une étoile tombant sur la Terre, mais égalementdes tremblements de terre ainsi qu'un déluge.— Oui, dit Leith, mais aussi qu'il y a des survivants.— Tous ceux qui ont fui dans les montagnes, me semble-t-il, luirépond Pénélope.— Tu es drôlement bien informé, dit Leith, comment sais-tu toutcela ?— Eh bien ! Je discute avec mes clientes, il faut savoir parler detout si on fait mon métier, mon grand !— Chez nous il y a une légende similaire, dit Abdubu, mais il dit àla fin : « Après l'inondation, une nouvelle race, moins pêcheuse émergera pourrepeupler la Terre ».— Eh ! S'écrie Pénélope, visiblement désireuse de changer le sujeten s'adressant à Leith ; c'est quand, que tu te maries ?— Me marier ? Moi ? Comment me marier ? Avec qui ?— Mais avec notre petite Ussa ! La belle princesse de notre roi !T'as la chance l'avoir comme copine.— Mais, lui répond Leith un peu gêné par cette intrusion dans savie privée, tu crois vraiment ce que racontent les journaux à ragots ?43


Attention !— On te verra bien comme futur prince, dit Macdo, un beaujeune homme comme toi, tu aurais autant de succès que ta belle copine.— Non, nous sommes amis, sans plus. Je l'aime bien, mais pourme faire prince ? Je ne sais pas, répond Leith.— Mais elle, lui dit Pénélope, elle est amoureuse de toi et n'a pasun caractère à laisser filer un beau jeune homme comme toi.Pendant ses amis continuent à lui taquiner encore un moment,c'est Abdubu qui revient avec les plats et le silence s'installe petit àpetit pour ne laisser place qu'à des bruits de couteaux et fourchettessur les plats.Angélique, seule à la maison, regarde un peu incrédule, pendantqu'elle mange son sandwich qu'elle venait se faire, l'écran de son ordinateur.« Merde, 286 591 réponses ! » dit-elle pour elle-même, « J'enai pour une année comme ça. » Elle commence à regarder les sites, d'abordune à une, puis d'autres en les prenant çà et là suivant les textesaffichés. « Merde, et encore merde, » dit-elle de nouveau pour ellemême,« ce sont des sites à ragot, rien avoir avec ce que j'ai rêvé. » C'est alorsqu'elle tombe sur un site relatant les discours de Platon concernantl'Atlantide. « Voyons, » dit elle pour elle-même, « il y a les dialogues deTimée et d'autres de Critias », puis elle note les références sur une feuillede papier. Elle commence à dresser la liste des éléments à vérifier,notamment les dates, car elle tombe entre temps sur un site relatantla date d'un déluge, a priori indiqué par un zodiaque dans le templede Dendérah en Égypte, qui aurait eu lieu en 9792 ans avant JésusChrist. « Voyons, » murmure-t-elle pour elle-même, « d'après ce site,Solon vivait à peu près trois cents ans avant Platon et l'histoire qu'il narraitétait neuf mille ans avant cela. Ce qui nous amène à trois cents plus neuf milleplus la vie de Platon, qui était de quatre cents vingt-sept à trois cents quarantehuitavant Jésus Christ, ce qui me donne une plage de neuf mille six cents quarante-huità neuf mille sept cents vingt-sept ans avant Jésus Christ. » Elle lesnote, souligne la date du zodiaque de Dendérah et y apporte une remarque: “à vérifier”. Elle continue encore un moment à fouiner lesdifférents sites d'Internet, note les renseignements et compose le nu-44


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.méro de la bibliothèque, dont on pouvait entendre le monologuesuivant :— Bonjour madame. Angélique Leblanc à l'appareil. La bibliothèque,est-elle ouvert cet après-midi ?— À quinze heures trente ? 22 Bien sûr. Avez-vous de la documentationconcernant l'Atlantide ?— Quoi ?— Oui, je connais Charles Berliz, mais Otto H Muck, je n'aijamais entendu parler de lui. Oui, mettez-le de côté également. Nonje ne les emprunte pas, je comptais les consulter sur place.— Pardon ?— Un livre sur la mythologie grecque ? Oui mettez-le de côtéégalement.— Quoi ? Un atlas des légendes et de l'astrologie ? Oui ce serapeut-être bien de l'avoir sous la main.— Oui merci et à tout à l'heure.Puis elle ferme le clapet de son téléphone mobile. Elle reste encoreun moment songeur et commence à noter d'autres rêves dontelle se souvient encore. Pendant qu'elle passe un revu les rêves dontelle se rappelle le mieux, elle constate que certains d'entre eux ont unpoint commun. Ce n'est même pas un point commun, mais despoints, car les rêves semblent avoir lieu dans la même ville, au bordd'un lac avec des rues étroites ayant des commerces de tout genre.Au milieu de ce qui lui ressemble à un bazar de moyen orient, il yavait un petit bistro fort sympathique au coin d'une ruelle en pente.Elle se souvient surtout de clients, car le soir, elle se souvient quec'était le soir, il y avait deux types à l'allure d'écossais qui jouaient dela musique. Parmi les clients il y avait aussi une fille d'une trentained'années, un homme d'un âge indéterminé, un homme d'origine demoyen orient qui était visiblement le patron du bistro et surtout, leplus important, un beau jeune homme de son âge. Elle prend un airsongeur en pensant à ce jeune homme, dont elle ne se souvient pasbien de nom, Le, Li ou quelque chose de ce genre. Elle l'aimait bien,22 Ne correspond pas aux heures réelles d'ouverture, veuillez consulter l'office de tourisme ou lesite internet d'Étretat pour les connaître !45


Attention !il était comme son frère, qui a deux ans de plus qu'elle, mais plusmince et une allure moins athlétique.Angélique continue alors à prendre les notes de ces choses qu'ellejuge important et se réalise qu'elle avait fait un autre rêve deux ansauparavant où il y avait également ce jeune homme, cette fois accompagnéed'une noiraude, chevelure jais luisant mi-long et aux yeuxbruns en amande, dont elle se souvenait le nom, Ussa. Cette fillesuivait, tout comme le jeune homme, un stage chez un type auxallures du sage dans la tourelle d'un jeu télévisé : Fort Boyard.C'est maintenant qu'elle commence à noter sur une autre feuilleles éléments clef du rêve de la veille, puis elle se demande si cette Ussaet la princesse, car Ussa en était une, qu'elle était dans son rêve,n'étaient pas une et la même personne. Pendant qu'elle note de cequ'elle se souvient de son rêve, elle se dit pour elle-même : « Merde,comment s'appelait-il, ce garçon. Ils se tutoyaient tout de même et c'étaitquelque chose avec “Li” ou “Le”. Ah oui, j'y suis, c'était Leith, il s'appelaitLeith et il suivait le stage pour devenir une sorte de sage. » Pensif, elle continue: « Cette Ussa plairait bien à mon frère. Elle était, est, peut-être, commeMélissa, mais mieux foutu, mieux proportionné, sais ce qu'elle veut et ne souffrevisiblement pas d'anorexie. » C'est ainsi qu'elle se rend, en prenant unepetite sacoche avec ses notes, à la bibliothèque pendant qu'elle continuede rêvasser sur ce jeune homme, Leith, qu'elle aimerait bien rencontreren chair et en os. En rentrant dans la bibliothèque, elle salutla dame faisant l'accueil :— Bonjour madame.— Bonjour, c'est vous la jeune fille qui me vient de téléphonertout à l'heure ?— Oui madame, c'est bien moi. Vous avez pu trouver les livres ?— Je vous les ai mis sur la table là-bas. Consultez-les tranquillement,ce genre de lecture n'est pas très courant pour un jour d'été.Pourquoi faites-vous ces recherches ? À votre place, je profiterai dubeau temps d'aujourd'hui et je resterai à la plage.— Je suis curieuse, répond-elle, et continue à raconter son rêvede la veille et les autres qu'elle avait eus auparavant en mettant bienl'accent sur les étranges similitudes entre les différents rêves. Elle raconteainsi le voyage en train, la soirée à l'estaminet, la formation46


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.chez le vieux maître et le fait que la princesse du stage et celle qu'elleétait dans son rêve pourrait bien être la même personne.— Il ne me semble pas qu'ils avaient une technologie aussi avancéeque le nôtre, lui répond la bibliothécaire. Quoi que. Quoi que.J'ai un beau-frère qui est très porté sur les voyants et la voyance et ilm'a parlé une fois de ce sujet si mes souvenirs sont bons. Il y avaitun médium qui, à ce qui parait, fait mention de l'Atlantide pendantqu'il était en transe. Je crois qu'il était, il ne vit plus en ce moment,américain.Elle se retourne vers son ordinateur, met le moteur de recherchele plus populaire en marche et entre : « medium american atlantis ».— Vous avez oublié l'accent sur médium et américain, lui dit Angélique,et on écrit Atlantide non ?— Non, lui dit-elle, « medium », « american » et « atlantis » sont desmots anglais. Lui était américain et il vaut mieux chercher les sitesde langue anglaise.— Mais mon anglais n'est pas aussi bon, dit elle, même qu'elle aiteu envie de répondre : je ne comprends que dalle.— On se débrouille, sinon il y aura bien de sites en français.Après quelques minutes de navigation et de visite de nombreusespages internet, elles viennent de tomber sur un site avec des résuméssans baratin inutile.— Vous avez peut-être raison, ils prétendent sur ce site que, selonce médium, les atlantes étaient techniquement aussi avancés quenous le sommes aujourd'hui. Qu'ils avaient de la télévision, de laradio et même des transports publics et privés. Votre rêve avaitpeut-être raison, quand il faisait mention d'un voyage en train.Angélique note le nom du site et s'assoie à la table avec ses livres.Elle restera là jusqu'au moment que la bibliothécaire lui demande :— Vous revenez demain ? Il est l'heure je ferme.— Non ça va, je viendrai un autre jour, lui répond Angélique,merci beaucoup quand même.Maître Amilius entend le bruit de la porte de son bureau-atelier etdescend l'escalier menant à son observatoire aménagé dans une par-47


Attention !tie de son grenier où il a voulu voir si on pouvait observer cetteétoile bleue de la journée, une qui explose comme ses observationsde nuit lui avaient confirmé. Mais il avait constaté qu'elle n'est pasencore devenue visible à l'oeil nu à l'heure qu'il est. Quand il entredans son bureau, il voit que Leith est déjà assis et lis un livre qui setrouvait par là. Il salue son jeune élève :— Bonjour Leith, bien mangé mon garçon ?— Bonjour maître, j'ai bien mangé, merci. Pour une fois le platdu jour me convenait, ce qui est rare. Vous savez, je tiens à lacroyance de nos ancêtres et je ne mange pas de la chair.— C'est très sage de votre part mon garçon.— Vous venez juste de descendre de votre observatoire, maître,est-ce que vous avez pu observer quelque chose ?— Non mon enfant, je comptais vérifier si cette étoile brillanteétait déjà visible de la journée, mais je n'ai pas pu l'observer. Unequestion d'une journée ou deux, je pense.— Une autre chose, maître. Une question. Rien avoir avec les leçons.Avez-vous vu cette étrange personne qui traîne dans les rues,ici, près de chez vous ?— Oui mon garçon, il nous observe. Faites attention et ne parlepas trop en public de ce que nous faisons ici.— Mais, maître, ce sont des leçons tout à fait ordinaires. Pourquois'intéresserait-il à nous donc ?— Je soupçonne qu'il soit un agent de la redoutable BSI. Ils surveillenttous ceux qui travaillent de loin ou de près sur l'apparenced'Arcturus. Ce sont peut-être eux qui ont tué Ar-Arart.— Notre vie sera-t-il donc en danger ? C'est peut-être que vousavez été un des meilleurs élèves d'Ar-Arart, n'est-ce pas ?— Je ne veux pas être prétentieux mon garçon, mais il y avait unbon nombre d'autres élèves et parmi eux des très bons.— Il me semble, maître, que la plupart d'entre eux ont disparu ence moment ou ont été tuées par des voyous ou dans des accidentssuspects.— Oui, malheureusement mon enfant. Puis le fait qu'ils travaillèrenttous au projet Arcturus n'est sûrement pas un hasard.48


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Le grand maître se lève et cherche le livre avec les textes sacrés,qui se trouve depuis ce matin sur la table de travail parmi des différentsobjets hétéroclites, ouvert à la page où ils avaient arrêté lalecture, et dit à son élève :— Continuons avec la lecture des cinq premiers des sept fléaux.Nous faisons une lecture séparée des deux <strong>derniers</strong>.Le maître prend son livre, ajuste machinalement ses lunettes, etcommence à lire comme il fait d'habitude ; lentement en s'appuyantsur les mots les plus importants et faisant une petite pause entre lesphrases :— Premier fléau : les récoltes seront dévorées par des millions decriquets. Deuxième fléau : une nouvelle maladie apparaîtra et ferades milliers de victimes. Troisième fléau : il aura la soif, la faim, leSoleil et de la chaleur. Quatrième fléau : l'homme s'opposera àl'homme, la région à l'autre région, la religion à l'autre religion et lanation à l'autre nation. Cinquième fléau : Une étoile tombera sur laterre. Avez-vous de commentaires, ou même des questions, mongarçon ?— Oui et non, maître. Je trouve qu'avec un peu de fantaisie onpourrait appliquer les quatre premiers aux événements tels qu'ils seproduisent régulièrement partout sur la Terre.— Mais on ne devrait pas les interpréter une à une et çà et là,mon garçon. Il faudra les voir en tant qu'une série d'événementsconsécutifs. Est-ce que vous vous souvenez d'une invasion d'insectesdévastateurs dans le pays ?— Oui maître. Il me semble bien qu'il y en ait eu un particulièrementdévastateur il y a quelques années dans l'état d'Alta. Ils avaientla chance que ce n'était pas le pays en entier qui avait été envahie decriquets. Et si mes souvenirs sont bons, leurs récoltes avaient étéperdues entièrement, pour les neuf dixièmes en tout cas. On peutdonc considérer que ceci pourrait être le premier fléau.— Très bien mon enfant, bien réfléchi. Avez-vous une idée pourle deuxième fléau ?— Oui maître. Le deuxième n'est pas très difficile à deviner. Ils'agit de cette maladie d'oiseaux, transmissible à l'homme et qui res-49


Attention !semble à une grippe. C'est une maladie en provenance du pays dudragon, n'est-ce pas maître ?— Oui mon enfant. Elle, la maladie donc, a été emmenée aupays par les soldats en permission de cette terrible guerre contre lesSaneids 23 , faisant des millions de morts il y a quelques années.— Auriez-vous une idée pour le troisième fléau, mon enfant.— Vous faites, peut-être, allusion au fait que le climat semble dese réchauffer, n'est-ce pas maître.— Oui mon garçon. Il y a certains qui attribuent ce réchauffementà l'utilisation intensive et excessive de l'énergie des étoiles, maisil pourrait que, se soit autre chose. <strong>Les</strong> sages et scientifiques ne lesavent pas exactement. <strong>Les</strong> émeutes qui se déroulent de temps àautre ayant ce sujet comme raison, n'ont pas grande chose à voiravec ça, mais ils sont organisés pour des raisons politiques, pourfaire opposition à la classe dirigeante.— Oui maître. Il me semble que vous avez déjà répondu en cequi concerne le quatrième fléau. Je crois d'ailleurs qu'il y a cet aprèsmidiune démonstration de jeunes contre la guerre des Saneids.— C'est cela, mon garçon. Cette guerre inutilement menée, faitbien trop de victimes parmi ces pauvres jeunes qui ont tiré le mauvaislot et qui n'ont pas assez de moyens pour acheter leur liberté.— Oui maître, c'est bien cet ignoble individu de Ra-Ta qui veutmontrer au monde entier que c'est lui qui commande. Mais cetteguerre n'a à mes yeux aucun intérêt, ni militaire, ni commercial.— Vous avez fait une bonne analyse, mon enfant. Vous vousmontrez très sage pour votre jeune âge, je suis content de vous.Amilius jette un regard circulaire autour de lui et voit qu'il avaitmis le livre qu'il cherche juste devant lui. Il le prend, tou<strong>jours</strong> ouvertà la page avec les sept fléaux, et en ajustant ses lunettes avec un gestemachinale il continue la lecture :— Sixième fléau : il y aura des tremblements d'une intensité tellequ'ils changeront le cours du soleil dans le ciel, des inondationsextraordinaires, et, dans l'espace d'un seul jour et d'une seule nuit néfastes,tout ce que vous aviez de combattants, de richesses, de mor-23 Le pays et peuple d'Inde. L'Atlantide était en guerre avec l'Inde au moment de sadisparition. Le nom “Saneid” vient des lectures d'Edgar Cayce.50


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.tels tombés dans l'indécence, sera englouti d'un seul coup dans laterre, et l'île s'abîmera dans la mer, disparaîtra de même.— Eh bien, maître. Je crois que l'étoile du cinquième fléau de laprédiction, n'est rien d'autre que Arcturus. Concernant le sixièmefléau, il n'est pas très difficile à imaginer qu'une étoile, notre comètedans ce cas, provoquera des terribles tremblements de terre et desgrosses pluies si elle tombe dans un océan. Il m'est, par contre, difficileà croire qu'une aussi grande île, comme la nôtre, peut s'enfoncerdans l'océan. Toute cette terre et tous les montages prennenttout de même la place. Comment sera-t-il cela possible ?— Bien mon garçon. Vous avez raison de penser que tout ce quenous voyons aujourd'hui ne peut pas disparaître dans le neant, maisje dois encore vérifier des choses. Non seulement la position de certainesplanètes et la dernière position de Arcturus, mais égalementvoir ce que je possède en livres géologiques. Demain je vais vous remettrele double de certains de mes documents et les résultats demes calculs que vous devez mettre en lieu sûr. Vous rentrez tout desuite chez vous maintenant ?— Non maître. Je vais chez Abdubu, les Macs font une soirée demusique. Mais je ne comptais pas rentrer tard, rassurez-vous.— Bonsoir mon enfant et à demain.— À demain maître.Le long boulevard qui longe la rivière Osuo et continue, aprèsavoir suivi une courbe, de longer le port et ensuite le lac Parfa, estnormalement une artère plutôt tranquille. Pendant la saison sèche,les mois de Sagittaire, Capricorne et Verseau, on y trouve surtout despromeneurs et des gens en vacances. La circulation n'y est plus trèsdense depuis que la route de contournement avait été construite.Seules les livraisons, les transports publics et les voiturettes des citadinsy circulent encore, qui donne un air de lieu touristique à la ville.Cet après-midi, par contre, il y a de l'agitation. <strong>Les</strong> jeunes de la villecommencent à se révolter contre les différentes guerres que la fédérationmène principalement contre le peuple Hellénique et surtoutcelui, particulièrement meurtrière, contre le peuple Saneid. Même si51


Attention !la démonstration avait commencé pacifiquement sur la partie de l'artèrelongeant la rivière, des éléments perturbateurs commencent às'introduire parmi les protestataires. <strong>Les</strong> unités anti-émeute de laBSI les attendent déjà à l'endroit où le boulevard prend une courbe,là où il se trouve l'embouchure de l'Osuo, le parc et l'entrée du port.Lorsque les premiers arrivent en face des policiers en tenu de combat,d'autres essayent de traverser la vieille ville, là où se trouvent lescommerces, pour rejoindre le boulevard derrière les policiers. C'esten les voyant passer que les commerçants commencent à paniquer.Ils se souviennent très bien les dernières échauffourées, là où beaucoupde boutiques avaient dû laisser leur vitre ou pire. Même si laplupart d'entre eux ont mis des stores métalliques ou au moins unegrille, il y a d'autres moins fortunés. On a parmi eux beaucoup degens déjà âgés qui continuent à faire marcher leur boutique, pluspour meubler leur temps que gagner leur vie, mais aussi ceux quiavaient tout juste réussi à ouvrir leur commerce. La boutique de Pénélopeest entre les deux situations. À cause des importantes réparationsnécessaires depuis le dernier tremblement de terre, elle n'a pasencore pu se payer un store de protection. Elle a bien des panneauxde protection en bois, construit par les deux Macs, en cas de problèmes,mais elle ne peut les mettre seule. Sa dernière cliente partie,elle cherche désespérément dans la rue une personne pouvant l'aider.Malheureusement, tout le monde est occupé à protéger ses propresbiens et elle commence à paniquer. Surtout quand elle voit passerles agitateurs de plus en plus nombreux dans sa rue. C'est alorsqu'elle voit son copain de bistro, Leith, et l'interpelle avec une voixanxieuse :— Oh Leith, tu tombes bien. Aide moi, s'il te plaît. Je n'arrivepas à accrocher mes panneaux de protection, ils sont trop lourdspour moi toute seule.— Qu'est-ce qu'il t'arrive Pénélope ? Je ne t'ai jamais vu commeça, et t'a des larmes aux yeux.— Oh Leith, j'ai tellement peur, continue-elle avec la même voixanxieuse. Il y a, à ce qu'il paraît, des casseurs et racketteurs des Belzebubsparmi eux. Ils ont déjà mis, il y a quatre ans, toutes lesboutiques en sac de ceux qui n'ont pas voulu payer une somme de52


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.protection. Oh, j'ai tellement peur Leith, j'ai tout refait depuis ledernier tremblement de terre et ne pourrais pas me payer d'autres réparations.Qu'est-ce que je ferai sans ma boutique, c'est tout ce quej'ai mon grand ? Je n'ai rien d'autre !C'est alors que ses émotions viennent trop forte, elle lui prenddans ses bras, met sa tête sur son épaule et commence à pleurer.Leith, un peu gêné par la réaction spontanée de cette jeune femme àpeine plus jeune que sa mère, la laisse pleurer, la tient à son tour etpréfère ne dire que des petits mots de réconfort. C'est ainsi que lesdeux Macs les trouvent quand ils remontent la rue pour se rendre àl'estaminet d'Abdubu. C'est Macdo qui les voit en premier et exclame:— Hé, Leith. Tu fricotes la Pénélope maintenant ?— Non, dit Leith un peu gêné, elle a peur et elle craint pour saboutique. Elle n'arrive pas à accrocher ses panneaux de protectionelle-même et elle a craqué.— Amène la chez Abdubu, nous occuperons de sa boutique, luidit Maci et continue s'adressant à Pénélope : les clefs de taboutique ? Ils sont sur la porte ?— Hé, as-tu un problème mec, s'écrie Macdo à un jeune hommequi s'apprêtait à entrer dans la boutique, et puis le saisit par le collier,le porte à bout de bras dehors comme s'il s'agissait d'un chiffon salleet le jette dans la rue en disant : va voir une porte plus loin, mec, situ ne veux pas avoir des problèmes avec nous.<strong>Les</strong> deux jeunes préfèrent ensuite rejoindre trois de leurs copainsqui se trouvent devant une boutique asiatique. <strong>Les</strong> Macs entrentdans la boutique sans attendre la réponse de Pénélope et cherchentles panneaux dans l'arrière boutique pour les accrocher.— Va, Pénélope, nous attendrons la fin de la démonstration et tesuivrons après, lui dit Macdo.— Tu vas mieux ? Tu n'as plus de clientes, demande Leith aprèsun moment.— Oui, ça va, lui répond Pénélope, j'ai encore des clientes, maisje m'en doute qu'elles viennent avec ce bordel qu'ils font en ce momentdans le boulevard en dessous.53


Attention !— Si elles viennent, elles sauraient où te trouver de toute façon.Elles savent très bien que tu passes souvent chez Abndubu et ellesviendront te chercher là, ne t'inquiètes pas, lui dit Leith. <strong>Les</strong> Macsfont faire une soirée de la musique et tu pourrais rester un momentavec nous. Tu habites là et personne ne t'attend de toute façon.— Malheureusement, non, dit-elle avec une petite voix, pourquoin'as-tu pas dix ans de plus, tu me plais. Mais as-tu vu ça, dit-elle enretournant la tête vers l'autre bout de la rue. Des choses pareilles !— Quoi donc, demande Leith.— L'asiatique, celui du pays du Dragon, celui qui a des yeux bridés,la petite boutique là-bas. Il se balade avec un truc bizarre, deuxbâtons attachés l'un à l'autre avec une chaîne, dont il vient de se servirpour assommer cinq types dans un temps d'éclair. Ils n'ont rienvu venir.— Moi non plus, dit Leith, je ne vois que cinq corps par terreavec les gardes royales autour. En tout cas ce qu'ils verront maintenant,c'est une cellule de prison de l'intérieur.— Allons chez Abdubu, dit Pénélope, les affaires sont foutuespour aujourd'hui.— Tu dois sûrement une tournée aux Macs quand ils reviennent.— Ils le méritent bien. Ce sont des gars sur lesquels on peutcompter.— Oui, lui dit Leith, et avec la carrure qu'ils ont, il ne vaut mieuxpas chercher une dispute avec eux, comme les deux jeunes l’ont faittout à l'heure.Ils grimpent la petite rue jusqu'à l'estaminet, où elle oubli vite sesémotions de tout à l'heure, pour continuer, en attendant les deuxMacs, les babillages habituels avec Abdubu et Jou-el qui vient égalementd'entrer.54


JLe message.ulien qui s'est levé plus tôt ce matin pour se rendre au club nautiqueoù il joue le rôle de moniteur, non pas seulement pour meublerson temps, mais surtout améliorer l'état de son compte enbanque, entend des petits bruits en provenance de la chambre de sasoeur. Il pousse la porte, met la tête dans entrebâillement etconstate avec étonnement que sa frangine, d'ordinaire pas très lèvetôt,est déjà en plein travail.— Salut mon ange, tu es tombé du lit ?— Non, dit-elle, je me suis réveillé après avoir eu un nouveaurêve où il se trouvait ce garçon de mon âge. C'est sûrement sur l'Atlantide,puisque lui, il est un atlante et il était chez lui.— Tu as fait un nouveau cauchemar alors ?— Non, mais c'était tellement réel qu'on s'y croyait. Il habite, habitaitpeut-être, dans une sorte de studio aménagé dans le grenierd'une maison de ville.— Comment sais-tu qu'il est atlante alors ?— Il m'a dit. Je ne t'ai peut-être pas dit, mais j'ai rêvé auparavantde ce garçon. Je l'ai vu ensemble avec une fille un peu plus âgée quelui, à peu près ton âge donc, qui est, était peut-être, la fille unique duroi de son pays et suivait le même stage chez un vieux sage. Tu sais,un type comme celui du jeu télévisé Fort Boyard dans sa tourelle.— Tu as parlé de quoi alors ? D'après que je te connais, tu as essayéde le séduire.— Séduire ? Non. On a surtout parlé des dates et repères, carnotre calendrier se base sur la naissance de Jésus et cette référencen'existait pas encore de leurs <strong>jours</strong>. <strong>Les</strong> noms de la semaine et lesnoms des mois non plus d'ailleurs. Il n'avait rien compris quand jelui disais qu'on était en mois d'août. Alors, il m'a demandé le signezodiaque, le Lion donc, ce qu'il avait compris. Il me disait qu'ils, euxdonc, étaient au cinquième jour Lion et qu'ils aient fêté leur solsticed'hiver il y a un peu plus de deux semaines.55


Le message.— Ils étaient le 26 juillet donc.— Le 27 peut-être, car je crois que Lion commençait le 22 decette année, mais je ne suis pas sûr et il faut que je le vérifie. Regardantl'heure, elle continue : allons prendre le petit-déjeuner, sinon tuseras en retard pour le club.Une fois seule dans la petite cuisine, car les parents, travaillanttous les deux, sont déjà partis, ils continuent leur discussion de toutà l'heure.— Alors, dit Julien, trempant son craquotte 24 dans son chocolatchaud, le mangeant et continuant avec la bouche pleine : tu croisqu'ils utilisent des dates bases sur l'astrologie ?— Non, je n'ai pas dit ça. C'est ta conclusion, quoi que, ce n'estpas bête comme idée.— En ce qui concerne nos noms de <strong>jours</strong> de la semaine et nosnoms des mois, il ne faut pas t'étonner qu'ils ne les connaissaientpas, ils sont romains. C'est plus que probable qu'il va de même pourles noms des planètes, car elles aussi, ont été nommées d'après desdivinités romaines. Il est par exemple fort probable que Vénus s'appelleAphrodite chez eux.— Mais, Julien, t'en sais des choses, comment fais-tu ?— Tu sais, petite frangine, je lis aussi et pas seulement des journauxsportifs. Le reste c'est de la pure logique, l'empire romainn'existait pas encore à neuf mille ans avant notre ère.— Il faut que j'essaye de repérer le moment à lequel qu'ils viventet si ce moment correspond à la date de Platon ou celle du zodiaquede Dendérah.— Zodiaque de Dendérah ? Où étais-tu chercher cela, demandeJulien, je n'ai jamais entendu parler autrement que c'était un templeégyptien.— Je l'ai trouvé sur un site internet qui parlait des déluges 25 , carils, les mecs de ce site donc, étaient persuadés qu'il y en avait eu plusieurs.Ce zodiaque avait, à ce qui paraît, un lion dans une barque,dont la date a été estimée en 9792 ans avant notre ère.24 Nom inventé par l'auteur, représentant des petits pains grillés.25 C’est en fait Platon qui parle en pluriel, il dit des déluges.56


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Julien, désireux de changer le sujet, regarde l'heure et dit à sasoeur :— Alors, ma petite soeur, je vais au club. Est-ce que tu viens aujourd'hui?— C'est probable mon grand frère, dit elle en mettant l'accent surgrand, je suis presque aussi grande que toi.— C'est ça. Mais sais-tu où il y a le détail qui dérange ?— Non ? Répond-elle faisant une mine étonnée.— C'est dans le “presque”, ma petite soeur. À tout à l'heure.Pendant qu'il se prépare, son gilet devenu obligatoire depuisquelques années, sa combinaison de natation, son sac d'ustensiles etdes sandwiches qu'il avait préparés, sa soeur lui lance :— Fais attention Julien, contre la noyade dans le bleu profonddes yeux d'une suédoise, aucun gilet te sera utile !— Tu ne risques pas grand-chose à ce point, ce sont surtout desAnglaises qui viennent chez nous. Mis à part que je préfère, tu lesais bien, des brunes et noiraudes. Mais toi, ne plonges pas trop versles eaux profondes de ton Atlantide, depuis que tu nous rabattes lesoreilles avec ton Leith.— Meunon, mon grand. De toute façon le pauvre croit durcomme fer que je suis un ange blanc. En voyant que Julien a misdes sandwiches dans son sac, elle continue : tu ne reviens pas à midi? Je vois que tu as préparé de la bouffe.— Non, je mange sur place. Il risque de faire beau et on attenddu monde aujourd'hui. Julien s'apprête à fermer la porte derrière lui,puis se retourne une dernière fois et dit : si ton Leith te croit ange,laisse le lui croire, il trouvera la vérité assez vite.Angélique lui tire la langue pendant qu'il ferme la porte derrièrelui. Elle regagne, une fois son frère parti, sa chambre et se remet àchercher et créer les documents qu'elle avait commencé ce matin à lapremière heure. « Voyons, » dit-elle pour elle-même, « le printempscommence d'après ce site tous les deux mille cent soixante ans dans un autresigne et, si je me le rappelle bien, Leith avait fêté le solstice d'hiver au beau milieude Gémeaux. » Elle note ce fait et constate qu'il y a une différencede cinq mois et demi. « Bon sang, » dit-elle pour elle-même, « ça faitune différence de onze mille huit cents ans et de la poussière et correspond à peu57


Le message.près à la date de Dendérah. Bon sang, comment puis-je l'avertir ? » Ellecontinue, sans faire attention au temps qui passe, à noter, pour sepréparer à toute éventualité, l'équivalence des noms Romains etGrecs. Au bout d'un moment, c'est en regardant l'heure qu'elle sedit : « Héé Angélique dépêche-toi, sinon ta matinée au soleil s'en va sans toi. »Elle prend ses besoins de plage et quitte la maison pour rejoindreson frère au club. Une fois arrivé au club, sa copine Alice, qui y estégalement, lui lance :— Salut Angélique. Ton amoureux t'a laissé partir ?— Mon amoureux ? Demande Angélique un peu étonné, tuparles de qui ?— Mais ne fais pas l'innocente, ton frère m'a tout dit. D'aprèslui, tu es amoureuse d'un garçon que tu ne vois que dans tes rêves.Il est comment ? Prince charmant sur un cheval blanc ?— Non pas à ce point-là, mais tu sais bien si je prends un sujet àcoeur, c'est complet. J'ai l'impression qu'il se trame quelque chosepas trop nette dans son pays. Ils, ses compatriotes donc, zigouillentfur à mesure les mecs qui en savent trop sur un certain sujet, une comètedans ce cas.— Et comment comptes-tu aider ton Leith, car c'est comme çaqu'il s'appelle, n'est-ce pas ?— Justement, je ne sais pas. C'est clair qu'on ne peut pas lui téléphoner.— Faudra essayer un médium ou un « OuiJa board », dit Julien, venusur le lieu entre temps.— C'est quoi un « OuiJa board ? » Demande Alice.— Une sorte de planche avec des lettres et chiffres et qu'on sesert pour parler avec des défunts, répond Julien. Mais c'est tout ceque je sais, mis à part qu'on doit être plusieurs pour s'en servir.Vous venez avec moi faire de la planche, demande-t-il aux deuxfilles.— Non, vais seulement avec Alice, lui répond sa soeur, je reste iciprofiter du soleil qu'il fait en ce moment.58


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Maître Amilius n'est pas dans son assiette ce matin. Une sorted'un profond malaise, un mal-être, s'est emparé de lui. Un pressentimentindéfini mobilise son esprit quand il observait le ciel du matinpour voir si l'étoile bleue était visible, ce qui est le cas. Il descend deson observatoire et essaye, après avoir noté ces observations du matin,de se concentrer sur les calculs qu'il comptait faire. C'est à cemoment-là que son jeune élève, Leith, entre dans son bureau-atelier.— Bonjour Maître. Comment allez-vous ? Vous avez l'air devous inquiéter de quelque chose. Que se passe-t-il maître ?— Bonjour jeune ami. Ce n'est rien mon enfant, j'ai juste une impressiond'être en danger.Leith, étonné d'entendre pour la première fois le terme “jeuneami”, le regarde d'un oeil interrogatif et lui dit :— C'est vrai qu'il y a de drôles d'individus dans les rues d'Osuoces <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>. Je ne sais pas si cela a quelque chose à voir avecla polémique autour de la comète Arcturus, mais il conviendra peutêtre à rester discret pendant une semaine ou deux pour laisser tasserles choses.— Vous êtes et vous restez optimiste mon enfant. C'est bien ça.Mais j'espère comme vous, que nous, mon maître à moi, Ar-Arart, etmoi-même, sommes trompés dans les calculs.— Vous avez du nouveau, maître ?— Oui mon garçon, l'étoile devenue brillante pendant ces dernièresnuits, est bel et bien devenue visible de la journée.— Ce qui correspond à la prédiction, lui répond Leith.— Malheureusement oui, mon garçon, mais avant de continuer ladiscussion, je vais vous lire la septième fléau.Amilius lève la tête et jette un regard circulaire comme s'il cherchaitquelque chose et voit que le livre cherché se trouve dessous entas de papiers de calculs. Il range les papiers, prend le livre, tou<strong>jours</strong>ouvert à la même page où ils avaient arrêté la lecture la veille, etcontinue, ajustant avec un geste machinal ses lunettes, la lecture :— Pendant sept <strong>jours</strong> et sept nuits, des pluies extraordinaires, diluerontle sol qui couvre les montagnes et les plaines, les laisserontdénudée. Des tremblements de terre se produiront en même temps59


Le message.que cette chute d'eau prodigieuse, qui sera la troisième après ladestruction qui eut lieu au temps de la bataille des dragons 26 .— La bataille des dragons, interroge Leith, ce n'est sûrement pasla guerre en cours depuis les nombreuses années avec les Saneids,car ce sont les asiatiques qu'on désigne avec le nom de peuple dragon,n'est pas ?— Non, effectivement c’est ni un, ni l'autre, mon garçon, il s'agitd'une bataille contre ces très gros animaux que le pays a dû mener ily a quarante mille ans, juste avant la première destruction.— Le deuxième, c'est celui qui a eu lieu il y a douze mille ans,n'est-ce pas ?— Effectivement mon garçon. Douze mille deux cents huit anspour être précis, car il nous sert actuellement de référence pournotre système de datation.Amilius lève la tête vers son élève, le regarde et trouve qu'il resteun peu trop songeur et se demande s'il est bien attentif au sujet abordéet continue :— Que se passe-t-il Leith. Avez-vous quelque chose qui vouspréoccupe ? Une fille peut-être ? Sachez que cela est normal pourvotre âge.C'est alors que Leith raconte son rêve à son maître, puis tousceux qu'il ait eu auparavant. Il lui décrit la fille qu'il croit d'être unange blanc, ainsi que le lieu où elle habite, une petite ville au bord dela mer entre les falaises. Il raconte surtout certains détails que cettefille lui ait pu communiquer. Maître Amilius regarde son jeune amiet se doute bien qu'une partie manque à la conversation, mais ne ditrien à ce sujet et préfère continuer celui en cours :— Votre admiratrice de vos songes Leith, car c'est bien une, a faitun travail remarquable. Elle, une analyse rapide de ma part, est unepersonne bien vivante en chair et en os, comme nous, qui vitquelque part ailleurs. Dans temps ? Ailleurs sur Terre ? Je ne le saispas, il faut que j'analyse davantage vos données géographiques. Jeconnais quelques lieux comme celui que vous avez décrit, mais aucund'entre eux n'est au bord de la mer. Vous ne l'avez pas encoreappris, mais d'après la texture, les falaises de vos songes sont de la26 Guerre contre les gros animaux. (À 50 000 Avant JC selon une lecture de Cayce)60


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.craie. La première chose, très préoccupante, qui découle desinformations fournies par votre amie des songes, c'est que notrepays n'existe plus chez elle. Deuxième point, aussi préoccupant quele premier, c'est que l'année chez elle compte neufs <strong>jours</strong> de plus.Troisième point, ça devient de plus en plus préoccupant, c'est le faitqu'ils ne peuvent plus se permettre deux récoltes par année. En cequi concerne le quatrième point, il faut dire que ses données, qu'ellevous a fourni par rêve interposé, manquent de précision. Ce qui estcependant préoccupant, c'est le fait que leur solstice d'hiver soit audébut du Capricorne. Une différence de cinq mois et demi avec lenôtre ! Il faudra que je vérifie les données tout à l'heure, pendantque vous prendriez votre repas.Pendant qu'il commence à mettre des documents dans une portedocumentde transport, il continue :— J'aimerais que vous portiez un certain nombre de mes dossiersimportants chez une de mes confidentes. Vous la connaissez sûrement,c'est l'esthéticienne, je m'occupe du côté administratif de saboutique. Ainsi un document que vous lui apportez ne sera passuspect en cas de surveillance. Je l'ai déjà mis au courant et elle vousexpliquera le reste.Amilius regarde pensivement Leith qui ne répond pas et réfléchitsur ce qu'il vient d'entendre. Puis il continue :— Vous allez rejoindre vos amis chez Abdubu dans son estaminet?— Oui maître, mais d'abord je passerai voir Pénélope pour luiapporter vos dossiers, comme vous l'avez demandé. C'est d'ailleursplus que probable qu'elle vient manger là aussi.— Allez, bon appétit mon garçon, je vais, en vous attendant, vérifierles données que votre admiratrice de vos songes nous a fourni.À plus tard mon enfant.— À plus tard, maître.Pénélope, venant à terminer sa dernière cliente de la matinée, voità sa surprise que Leith l'attend dans le coin aménagé en tant que salled'attente. Elle ne l'a ni vu ni entendu entrer. Leith, lui, assis là en at-61


Le message.tendant qu'elle finisse sa cliente, s'est mis à lire, ou plutôt feuilleter,les journaux, pour la plupart féminines et ce qui n'est pas de coutume: à jour. Il ne remarque pas que Pénélope s'approche de lui etl'interpelle :— Salut toi ! C'est pour un masque de beauté ?— Salut Pénélope, lui répond Leith comme si on venait le réveiller,c'est Maître Amilius qui m'envoie pour déposer tes dossiers.— Oui je le sais, il m'a dit hier qu'il allait les faire. Je te voyais liremes magazines féminins. Tu t'intéresses à la presse féminine à présent?— Non, pas vraiment, mais tu n'as, mis à part le journal d'aujourd'huique j'ai d'ailleurs déjà lu, rien d'autre à lire.— Ce n'est pas vrai Leith, regarde là, il y a des magazines de sportnautique, puis là, celui avec les photos de chevaux, c'est un journaléquestre. Qu'est-ce que tu crois, nous, les filles, on fait aussi dusport, ce n'est pas uniquement réservé aux hommes.— Je crois que tu joues de la pelote 27 , n'est-ce pas ?— Oui un petit peu, mais je ne suis pas très forte. La plupart desmembres du club sont masculins et trop bons joueurs pour moi.Est-ce que toi tu le joues ? On pourrait faire une partie si tu as letemps.— Bien sûr, mais je t'avertis que je ne suis pas une vedette sportiveet je n'ai pas l'intention d'en venir une. Je ne joue pas pour gagnernon plus, juste pour passer un bon moment.— Eh ! Dit-elle en regardant l'heure, n'oublions pas l'heure. Abdubudoit nous attendre pour les apéritifs. Viens, on pose ces dossiersdans mon bureau et on file.Quand ils entrent dans leur estaminet de quartier, ils ne trouventà table que les Macs qui sont déjà à leur deuxième tournée. Maci, lespercevant en premier, leur lance :— Salut les amoureux ! On fricote tou<strong>jours</strong>, faisant ainsi allusionà la scène de la veille au soir.Leith, commençant à rougir cherche désespérément une réponse,mais Pélélope ne lui laisse pas le temps de réfléchir et répond à saplace :27 Pelote Basque, rien à voir avec le jeu de carte au nom similaire, le “Belote”.62


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui je le sais, Maci, t'aimerais bien être à sa place, hé ! Leithest un gars formidable, le seul inconvénient qu'il a, c'est qu'il luimanquent quinze ans au compteur. Oui je le sais, j'ai bien desclientes qui aimeraient bien être à ma place et qui ne se gêneraientpas pour la différence d'âge. Je devrais peut-être remercier la belleUssa qu'elle m'a bien voulu céder sa place pour quelques instants.N'est-ce pas Leith ?— En fait, Leith, demande Macdo qui finissait sa bière on s'essuyantla bouche avec la manche de son veston, c'est depuis combiende temps que tu la connais ?— Je ne sais pas exactement, mais on se connaît depuis notre enfanceet on fait souvent les mêmes stages. On est comme frère etsoeur.— Alors, c'est pour quand votre mariage, demande Maci.— Arrête de nous rabattre les oreilles avec ce sujet, lui dit Pénélope,tu ne vois pas qu'ils ne sont pas encore prêts ? Ni lui, nielle !Leith, lasse d'entendre le même sujet à répétition, demande siquelqu'un sait où se trouve une ville nommée Étretat. Apparemmentniché dans une falaise de craie. On voyant les visages interrogatifs,il continue avec ses récits qu'il venait de raconter à son maîtredeux heures plus tôt. C'est Pénélope la première à réagir :— T'es sûr que tu parles d'un ange, car je pensais que te necroyais pas aux anges.— Non, dit Leith, j'estime effectivement que les anges ne sont àleur place que dans le polythéisme. Elle a quelque chose avec angeet blanc dans son nom et elle est tellement réelle et en même tempsétrange. Déjà ses habits, si elle porte une sorte de toge, c'est pour allerdormir. Elle porte essentiellement des pantalons, comme sonfrère, façonnés à partir d'une sorte toile pour tentes ou voiles decouleur bleue pour la plupart, mais aussi brun, noir et même rouge,renforcés de clous çà et là. Une très belle fille et gentil surtout. Maisne me demandez pas où elle habite, ni où elle est. En ce quiconcerne l'ange et le blanc, c'est elle qui me l'a dit.63


Le message.— Mais, dit Macdo, “Blanc” est peut-être son nom de tribu.Comme il en a des tribus d'ici qui s'appellent Boulanger, Leboucher,Chevalier et j'en passe.— Sûrement, dit Pénélope, et Ange ou peut-être Angélique estson nom.— C'est son truc de falaise qui me chiffonne, dit Maci, notre terrede nos ancêtres a effectivement ce genre de falaises un peu partoutet il va de même pour une bonne partie de la Gaule, la partie ouestde l'Europe donc. Mais je ne connais, par contre, aucun endroit oùles falaises descendent jusqu'au niveau de la mer. En plus, je necrois pas qu'il y ait des villes là-bas, pas celle-là que tu venais nousdécrire en tout cas.— Alors, dit Macdo, l'admiratrice de tes songes est à coup sûrune celte ou une gauloise. Mais comment es-tu tombé sur elle ?— Je ne sais pas, j'ai commencé à rêver d'elle il y a quelque tempsdéjà. Je sais également qu'elle rêve de moi, ou qu'elle me voit dansses songes et elle m'a beaucoup aidé ces <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong> pour complétermes données de stage chez Maître Amilius. Elle a pu accéder auxinformations qui sont normalement réservées aux prêtres confirmés,le roi et la princesse héritière. Ce qui me chiffonne, c'est qu'elle neconnaît notre pays qu'en tant de mythe. Elle n'a pas la moindre idéeoù se trouve notre pays, ni son aspect géographique.Abdubu venu entre temps sur le lieu pour prendre la commande,lance sans se soucier du sujet en cours :— Leith, menu spécial je présume, n'est pas. Trois plats du jour ?Et boisson ? Un petit carafe de vin pour tout le monde ?— Ça va pour moi, dit Leith.— Moi aussi, dit Pénélope.— Alors, Macdo, Maci, vous prenez une autre chope ?<strong>Les</strong> Macs lui font signe de tête pour le confirmer et la conversationcommence, comme d'habitude, à tourner autour des gens duquartier et la démonstration de la veille. C'est surtout la prouesse del'asiatique qui est passée longuement en revu. C'est quand Abduburevient avec les plats et boissons que la tablé porte un toast à l'admiratricedes songes de Leith.64


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Ussa, d'ordinaire ponctuelle, tarde à rejoindre ses parents au petitdéjeuner.Quand elle fait enfin son entrée, les serviteurs accourentpour lui servir, mais elle les jette un regard froid en gardant pourelle-même ce qu'elle aurait voulu leur dire : « Foutez-moi la paix ! »Mais arrive à murmurer :— Merci, Ra m'a donné deux pieds et deux mains pour m'en servir! Bonjour Maman, bonjour papa, avez-vous bien dormi.— Merci ma fille, lui répond sa mère, avez-vous eu une nuit agitée? Y a-t-il quelque chose qui vous préoccupe ?Voyant qu'elle ne répond pas, son père lui demande :— Est-ce le jeune homme, votre ami d'enfance qui vous préoccupe,ma fille.— Non père.Elle reste un moment silencieux, chipotant son petit-déjeuner, cequi inquiète sa mère, regardant les mets, dont elle se raffole autrement,avec des yeux vides, et poursuit :— C'est ignoble ! Il a osé ! Cet enfoiré tuera son fils si c'est pourconserver son pouvoir. Mais comment peut-on être aussi ignoble ?Ar-Arart n'a fait mal à personne et faire croire à un cambriolage quiaurait mal tourné est quand-même le comble de la stupidité.— Vous avez des mots durs pour le chef de notre fédération, luidit son père.— Désolé papa, mais on ne tue pas ! Si Maître Ar-Arart avait dûrester discret sur un sujet, il l'aurait fait, inutile de lui tuer, voyons.Ce sont des méthodes de voyous.— Que comptez vous faire aujourd'hui, lui demande sa mère quivoulait changer le courant de la discussion.— Je n'avais pas une idée précise maman, mais je pourrais aller autemple d'Ozin. J'aimerais aller parler aux âmes de mémé et pépé, ilsme manquent. Ils parviennent peut-être à m'enlever la pierre qui mepèse le coeur depuis la disparition de mon ami, mentor et maître.Elle se retourne vers les serviteurs et interpelle un d'entre eux :— Faites-moi une réservation d'un compartiment dans la prochainerapide en direction d'Ozin, je serai prête dans une demieheure. Oh oui, faites-moi avertir un quart d'heure avant le départ.65


Le message.Je n'aime pas faire attendre des gens, je dois, comme eux, être àl'heure pour le départ du train.— Soyez prudent ma fille, lui dit sa mère.— Oui maman, je vais me préparer à présent. Bonne journée papa,dit-elle à son père qui venait de se lever pour poursuivre ses activitésde la journée.Confortablement installé dans son compartiment, avec de la lecturegracieusement fournie par la compagnie des chemins de fer, ellecontemple le paysage qui se déroule devant ses yeux. La banlieueouest d'Ouso et le lac de Parfa avaient déjà rapidement cédé la placeaux champs et cultures. Elle commence au loin à distinguer les premièrescollines et la vallée de Saad. Mais le train ne suit pas la valléede la Saad, car il prend la direction d'un de ses nombreux affluents,l'Ozin. La ville et le temple du même nom se trouvent plus hautdans la vallée, là où on peut trouver de nombreuses sources thermales,toutes de très bonne réputation. Une fois arrivée à destination,elle sent monter en elle une sorte de bonheur, bien-être. Estce,l'effet du voyage ? L'ambiance dégagée par ce lieu spirituel ? Ellemarche sur le dallage transparent du chemin en direction du templesous lequel cour un ruisseau. Une musique douce et mélodieuse l'accompagneet semble s'échapper du temple. Elle traverse, parvenu àl'entrée du temple avec ses colonnes blanches et une frise tout autour,la cascade qui glisse sans bruit, tel qu'un rideau. Ce temple est,mis à part un lieu de prière aussi une place de régénérateur spirituel.C'est ainsi que le rideau d'énergie à l'entrée sert à purifier symboliquementl'âme. Ussa est, comme chaque fois quand elle entre dansce lieu, saisi par la beauté du cristal. La pierre lui parle. « Sois la bienvenue,nous t'attendions... » entend-elle. C'est un esprit, une très sageâme, celui de son Maître Ar-Arart qui accompagne sa mémé et sonpépé. Une fois arrivée au centre du temple elle se trouve devant lemiroir à la surface en perpétuel mouvement, à couleur indécise, à lafois transparente et bleutée. De l'autre côté se trouvent les êtresqu'elle aime et qui sont morts. Ce sont justement trois d'entre euxqui veulent lui parler : sa mémé, son pépé et son maître.— Bonjour mémé. Bonjour pépé. Bonjour maître. Commentallez-vous ?66


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Bonjour mon enfant, dit Maître Ar-Arart, le premier à répondre.Je vois que vous êtes très peiné par ma mort brutale.— Bonjour ma petite, lui répondent ses grands-parents enchoeur, tu as bien fait de venir. Nous réjouissons de ta venu, chaquevisite que tu nous fais est pour nous une fête. Comment va tonjeune ami ? Il est comme un vrai frère pour toi. Tu as besoin de luiet lui a besoin de toi. Amène le la prochaine fois, nous le connaissonsbien.— Cette prochaine fois sera demain à la fin de la matinée, icimême, dit Maître Ar-Arart. Pouvez-vous vous déplacer mon enfant?— Oui maître, et en ce qui concerne Leith, dois-je l'avertir qu'ilvient avec moi ?— Non mon enfant, le destin a prévu que vous venez tous lesdeux. Car j'ai un message pour vous deux, mais je ne peux que le divulguerquand Leith sera présent également. Ne pleurez pas mamort mon enfant, rassurez-vous, les coupables ne s'écharperont pasà leur terrible punition.C'est après à avoir exprimé ses mots que Maître Ar-Arart disparaîtde l'écran.— Tu sais, ma petite, lui dit son grand-père, tu dois être très fortel'année qui suit. Mais avant que je continue, n'avais-tu pas consultépar amusement une gauloise qui a dit à Leith et toi l'avenir à partirdes cartes de jeu gaulois ?— Oui pépé, elle nous avait dit que nous nous ne quitterons plusjusqu'à la mort, mais qu'on ne sera jamais mari et femme. Je mesouviens bien, elle nous avait dit que nous marions un frère et unesoeur de même âge que nous. La seule chose que je n'ai pas compriseest le voyage sans aucune possibilité de retour. Mis à part lamort, on peut revenir de tout voyage n'est-ce pas ?— Oui ma petite, lui répond sa mémé, c'est bien cela. Ce voyageest d'ailleurs pour bientôt. Nous aimerions t'avertir, même qu'ilnous est interdit de dire l'avenir aux mortels, que demain, entre la finde l'après-midi et début du soir, t'aura besoin de tout ton courage.Ne panique surtout pas devant le danger.67


Le message.Ils, Ussa et ses grands-parents, continuent leur conversation encoreun bon moment en parlant de tout et n'importe quoi avantqu'elle regagne la gare. Pensif, elle s'installe dans son compartimentréservé et passe en revu la conversation avec Ar-Arart et ses grandsparents.Surtout le fait, que sa mémé et son pépé donnent raison àla gauloise, l'intrigue. Elle se souvient bien de sa peur, qu'elle a euequand celle-ci avait tiré une carte représentant un squelette. Car elle,la voyante donc, voyait là dedans un changement sans possibilité deretour et non pas la mort que la carte représentait. L'autre carte, représentantune roue, signifiant pour elle que les changements avaientdéjà commencés et montrait que le cours des événements ne pouvaitplus être changée. Le destin est cours et la roue tourne elle avait dit.L'unique chose que cette femme n'avait pas réussi à expliquer, c'étaitle chiffre onze mille huit cents. Ce chiffre faisait part de la prédiction,mais elle ne connaissait pas la nature exacte. Une distance,peut-être ? Ussa, détend ses jambes, prend un magazine fémininprésent dans le compartiment et commence à le lire jusqu'à l'arrivéedu train à la gare d'Osuo où deux membres de la garde royale l'attendentau quai.68


Réunion de crise.Le grand palais sis dans le deuxième anneau de Poseidia avait jadisabrité un consul ou un dignitaire religieux de haut rang etest un des rares à s'offrir une spacieuse cour interne. Ce superbe bâtimentsert actuellement à des fins moins pacifiques, car c'est làqu'on trouve le centre décisionnel de la BSI. Même la direction de laredoutable BOS, la brigade des opérations secrètes, y a ses quartiersdans une aile séparée du reste des bureaux. Il fait beau, aucune tacheau ciel fait présager de ce qui trame à intérieur. Surtout que ce beauciel cache un terrible et dangereux secret qu'on tente de cacher coûtque coût à la population. C'est pour cette raison que le programme“silence” a été mis au pied. Ce programme consiste à convaincre, degré ou de force, toute personne ayant une connaissance astronomiqueet astrologique suffisant à pouvoir calculer la trajectoire del'objet céleste, de garder le silence et de ne pas divulguer les informationsque sur ordre du roi au moment voulu. Malheureusement, il ya des récalcitrants et des employés de bas niveau zélés. Ce sont surtoutces <strong>derniers</strong> qui sont les plus dangereux, car le nombre de mortsviolentes dont l'auteur n'a pas pu être identifié se multiplient. Unaccident par ci, un cambriolage qui a mal tourné par là, un centre derecherche incendié et même des observatoires saccagés par des inconnus.Parmi les <strong>derniers</strong> crimes, il y a celui qui a été de trop, lemeurtre déguisé en cambriolage du Maître Ar-Arart. L'erreur commisepar les malfrats était tout simple, lors un cambriolage on dérobeles objets de valeur, or, il ne manquait chez lui que les documentsde travail et des calculs concernant une comète. C'est vrai quela presse locale de Poseidia n'avait pas fait grand écho de cet événement,car sous strict contrôle des organes d'état. Même la presse nationaled'Alta, l'état principal de la fédération et plus grand que lesneuf autres ensemble, n'a fait de cette affaire qu'un petit entre-filetsous la rubrique des faits-divers. La presse des autres états, parcontre, avaient fait grand bruit de ce fait et avaient mis la nouvelle à69


Réunion de crise.la Une. <strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>, une certaine nervosité s'est installé parmila population de l'état principal et justement à cause de l'absence deréaction de la presse locale et nationale. Ils estiment, à juste titre,être floués par leur gouvernement local obéissant aveuglement aupouvoir central de l'état d’Alta. C'est dans ce climat de révolte couvantqu'une réunion de crise a lieu dans la grande salle de ce lieu mythiqueavec ses trente et un statues de la dynastie Ra-Ta. Le roi n'amalheureusement pas jugé utile d'inviter les autres rois et encoremoins leurs délégués et ministres. Il n'est d'ailleurs pas venu luimêmemais s'est contenté à envoyer ses directives à la direction de laBSI en précisant au directeur de lui représenter. <strong>Les</strong> seuls représentantsde la fédération présents sont le chef de l'armée de terre et l'amirautéainsi que quelques invités des autres états. La grande tableest garnie d'une grande carte mondiale avec des bateaux miniaturesreprésentant chacun la position d'un ou des navires de la marine. Enplus de ces navires miniatures, on trouve çà et là des figurines, représentantles différents groupes ethniques et leur destination. <strong>Les</strong>eul groupe qui n'y est pas représenté est celui des Saneid, avec lesquelsla fédération mène depuis des années une guerre meurtrière.<strong>Les</strong> seuls qui brillent par leur absence sont l'armée de l'air et les autoritésde l'aviation civile. <strong>Les</strong> mauvaises langues veulent qu'eux soientdéjà réquisitionnés par Ra-Ta lui-même pour se servir d'abord luimêmeet les nobles et nantis ensuite. C'est le directeur des opérations“silence”, connue au nom de code Ptah, qui ouvre la réunion :— Bonjour messieurs, je vous remercie d'être venu. Vousconnaissez toutes la raison de cette réunion et celle de votre convocationici. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui voudrait ajouter unpoint sur l'agenda ?— Oui, lui répond le chef des armées de terre, j'aimerais discuterde la répartition du nombre de personnes par état et ethnie. Il ne mesemble pas juste, qu'un quart de la population se voit attribuer qu'undixième des moyens de transport.— Y a-t-il d'autres points, demande Ptah.— Ne faut-il pas mieux exclure les hébreux de la sélection, demandele préfet de Poseidia.70


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Pouvez-vous me donner la raison de votre proposition ? DemandePtah, en connaissant son opinion personnelle. Je sais quevous ne les aimez pas particulièrement. Mais sachez que nous nousne sommes pas réunis ici pour discuter des rancunes de chacun,mais pour élaborer un plan de crise.— La raison de ma demande, monsieur le directeur, c'est lasuivante : les hébreux de ma ville ont mis au pied depuis de nombreusesannées déjà eux-mêmes un plan d'évacuation. Il faudrad'ailleurs mieux parler d'un exode, car une légende de leurs rouleauxsacrés parle de l'arrivée d'un guide spirituel qui naîtra au sein de leurcommunauté en Égypte. Depuis que la rumeur s'est répandu quel'événement sera pour bientôt, ils s'expatrient tous vers là-bas en tantque travailleur immigré.— Avez-vous des chiffres, lui demande Ptah.— Hélas, je ne peux pas fournir des chiffres exacts, mais d'aprèsmes estimations il pourrait s'agir de plus que la moitié de la populationhébreux locale.— Alors, avez-vous pu les compter ?— Non monsieur. Ils viennent fur à mesure de tous contés pourremplacer les partants en attendant le départ à leur tour.— Vous estimez donc qu'ils sont parfaitement capables d'organiserleur propre départ ?— Oui monsieur.— Faites-moi donc parvenir une estimation des capacités detransport terrestres et maritimes dont ils ont besoin.Le directeur des opérations “silence” jette un regard circulaire enfixant chaque membre de la réunion un à un et poursuit :— Messieurs, le point abordé précédemment était le premierpoint de l'agenda. Nous allons donc poursuivre ce qui avait été prévuil y a de longue date et les modifications que nous devrons y porter.Nous avons donc vu qu'une des douze communautés de notrefédération se charge elle-même de l'organisation. Je charge le préfetde Poseidia de leur accorder les moyens de transport qui leur reviennentdans le cadre de l'opération. En ce qui concerne les Celtes,je crois savoir qu'ils désirent presque tous regagner la terre de leurs71


Réunion de crise.ancêtres. Est-ce que quelqu'un présent dans l'assemblée peut me leconfirmer ?— En ce qui me concerne, dit le chef des polices de Poseidia, ilsont commencé à déserter leurs places de travail et leurs domicilespour gagner leurs terres au nord.— Y a-t-il un représentant des états celtes dans la salle, demandePtah en jetant un regard circulaire et constatant que personne ne répond.— Monsieur le directeur, demande le représentant de l'état Mayra,l'attribution des moyens de transport reste-t-il tel que prévu ou a-t-il été modifiée ?— Bonne question, notre roi a en effet décidé que les capacitésde transport seront distribuées selon la quantité de population etnon pas à cent vingts navires par état et les dix personnes par communautéet navire, comme le plan d'origine le prévoyait. De ce fait,monsieur le ministre, votre état aura ces cent vingts navires, car il représenteun dixième de la population. De plus, notre roi a décrété laréquisition de tout navire pouvant transporter cinquante personnesou plus et invite ces confrères des autres états à faire de même.— Par quel moyen sélectionnons-nous les candidats à l'exil, demandele chef de police.— Le même que la sélection des recrues de l'armée, répond Ptah,par tirage au sort.— J'imagine que c'est à nous d'assurer la bonne démarche, lui demandele chef des armées de terre.— C'est exact, vous allez vous mettre à la disposition des forcesde police, car les échauffourées sont à craindre. On ne peut malheureusementévacuer qu'une personne sur vingt tout au plus. Pour lesautres, nous n'avons tout simplement pas la capacité de transportsuffisant.C'est en invitant chacun présent à étudier la maquette représentantle plan d'évacuation, que son élaboration détaillée peutcommencer.72


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Triple six et pour la deuxième fois. Tu triches, s'écrie Jou-el.Es-tu un joueur professionnel ou quoi ?— Mais-non, lui dit Abdubu, tu as bien fait une suite tout àl'heure. C'est un jeu de hasard quand même. Il se lève la tête et jetteun regard à la table du coin, puis continue :— Tu vois ce que je vois ?— Quoi donc, lui demande Jou-el sans se retourner, notre zoroest revenu ?— Oui, c'est ça. Il s'est assis à la même table qu'hier matin.— Je crains bien, que notre maître va avoir des problèmes une deces quatre. Leith devrait faire attention à lui de ne pas se faireprendre aussi.— Tu crois que Maître Amilius a pu trouver quelque chose, luidemande Abdubu.— Sûrement ! Mais où va-t-il le cacher, car il sait très bien qu'ilsmettent son atelier et son appart en dessus dessous pour le retrouver.Il va donc forcement cacher l'information ailleurs que chez lui.Je pense que c'est improbable qu'il met la vie de Leith en danger. Ilcache le résultat de son étude donc forcement ailleurs, mais où, je nesais pas plus que toi.— Tu as vu Ajax dernièrement, lui demande Abdubu.— Non, mais je vais faire un saut chez Pénélope, elle le sait peutêtre.— Pénélope ?— Oui, ils sortent souvent ensemble et elle semble savoir où letrouver, s'il le faut. Il faudra lui avertir de la présence de notre clientici.— Tu comptes surveiller la demeure du maître ?— J'ai effectivement commencé à le surveiller, mais seul je nepourrais pas faire grande chose. Je ne peux pas me permettre defaire la planque la nuit et de travailler de la journée, dit Jou-el.— Tu ne pourrais pas informer tes amis chez la police, lui demandeAbdubu.— Non, pour autant qu'il n'y ait pas crime, ils n'interviendrontpas. Je pense d'ailleurs qu'il y a quelque chose de louche, car dansles autres cas similaires, la police est bien restée trop silencieuse. Je73


Réunion de crise.n'ai pas attendu parlé de suite ou d'enquête complémentaire et nonplus l'ouverture d'un cas judiciaire. Je crois que tous les cas étaientclos avec mention : « Homicide par personne ou personnes inconnue ».— Ce qu'on appelle étouffer une affaire, lui dit Abdubu.C'est à ce moment que la porte s'ouvre avec éclat et c'est Pénélopequi entre comme un coup de vent en s'écriant :— Dubu, Dubu. Prépare-moi trois thés à emporter. Je te ramèneles tasses tout à l'heure.C’est en regardant discrètement vers la table au coin qu’elle se dirigevers le buffet de service où se trouvent déjà Abdubu et Jou-el etcontinue en parlant tout basse :— Il est encore là. Je ne l'ai pas vu ce matin, mais il est revenudans la rue vers midi. Faut-il que j'avertisse Ajax ? On avait prévuune soirée théâtre, je le verrai tout à l'heure de toute façon. Mais,continue-t-elle en parlant tou<strong>jours</strong> à voix basse, mes clientes ont repéréd'autres comme lui. Il y en a deux qui ne sont pas du tout de lagarde royale et qui suivent la petite Ussa partout. J'ai peur pour elleet Leith.— Ne te tracasse pas pour les tasses, lui dit Jou-el, je viendrai leschercher dans un moment. On pourrait bavarder un petit peu à taboutique.— C'est gentil, merci.— Voilà tes thés, lui dit Abdubu, revenu après avoir servi d'autresclients.— Alors à tout à l'heure Jou-el, dit Pénélope.— Attends, lui dit Abdubu, que je t'ouvre la porte.— Tu me donnes une communication, lui demande Jou-el, jeveux demander un copain s'il peut venir ici et faire quelques portraits.— De, en pointant le pouce vers la table du coin, lui demandeAbdubu. Ce que lui affirme Jou-el par un mouvement de tête.— On était où, demande Jou-el en regardant le jeu de dés traînantsur le buffet de service. C'était à qui de jouer ?— À toi, je crois. J'avais fait un triple six.— Mince, nada.74


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Mais si, lui dit Abdubu, si tu rejoues le cinq là, t'aurais unechance de faire une suite.— C'est ça, mais apporte-nous d’abord à boire.— Tu veux quoi ? Un autre pichet de vin ?— T'en prends un avec moi ?Pénélope vient tout juste ranger les tasses de thé qu'elle venaitboire avec ses deux clientes, quand Jou-el accompagné d'une personnequ'elle ne connaît pas fait son entrée dans sa boutique. <strong>Les</strong>dames présentes, surprises à voir des hommes s'asseoir dans le coinaménagé en tant que salle d'attente, s'écrient en choeur :— Tu coiffes des hommes à présent ?Pénélope va vers eux pour leur dire bonjour et passe la main dansles cheveux de Jou-el et lui dit :— Alors, c'est depuis quand que tu as lavé tes cheveux. Tu les aslavés au moins une fois depuis ta naissance n'est-ce pas. Présentemoi ton ami, car je n'imagine pas que tu est venu me dire bonjour.C'est plutôt pour ce qui se trame en ce moment concernant MaîtreAmilius et Leith, n'est-ce pas ?— Oui, dit une des clientes, on était en pleine discussion. J'ai uneamie qui m'a signalé la présence des drôles de types çà et là.— C'est exactement la raison de notre présence, lui dit Jou-el. Lemonsieur qui m'accompagne n'est pas seulement un bon copain,mais est aussi portraitiste de la police. Nous souhaitons que vousrestiez un petit moment pour nous aider à élaborer des portraits deces hommes.— Ajax va également venir, dit Pénélope. On a prévu une sortiethéâtre pour ce soir, vous aurez, pendant le temps que je me prépare,largement le temps d’en parler.— Mesdames, dit Jou-el, sera-t-il possible d'obtenir les adressesde vos amies. Nous aimerons leur rendre une discrète visite et établirdes portraits de ces personnes que vous avez signalées.— Tu te connais un petit peu en astronomie, Jou-el, lui demandePénélope. Nous avons, mes clientes et moi donc, vu une étoile75


Réunion de crise.visible de la journée, mais nous ne sommes pas sûr qu'elle soit la comèteou une autre étoile.— Moi non plus, répond Jou-el, mais d'après Leith, la comète nesera pas encore visible pendant la journée. Selon lui, l'étoile qu'onvoit en ce moment est une qui explose et restera très brillante pendantune semaine. Il nous avait dit que celle-ci pourrait être une dessept signes annonciateurs de la fin du monde.— Il y a déjà beaucoup gens, à ce paraît, qui prévoient leur départces prochains <strong>jours</strong>, dit une des clientes. Mais moi je ne pars pas,que voulez-vous que je fasse ? Aller vire comme une sauvageonnesur le continent avec un mari chasseur et moi faisant le feu à l'ancienne.Vivre sans moindre confort, sans rien ? Non, si le payssombre, je sombre avec et j'ai beaucoup d'amis et amies qui pensentpareils.— Oui, lui dit Pénélope, mes parents parlent pareils. Ils trouventque la jeunesse peut essayer un nouveau départ, mais qu'on ne déplacepas de vieux arbres.— Je crains, dit le dessinateur, que cette fois ci soit identique auxdeux cas précédent. Vous savez celui qui a eu lieu il y a douze milleans, puis l'autre à quarante mille ans. Ils, les scientifiques de l'époquedonc, avaient également annoncé la destruction totale, créant ainsiune vague de panique. Pourtant, même si le pays a subi des dégâtsimportants, la majorité des gens ont survécu et le pays a été rapidementreconstruit. Notre pays ou plutôt notre confédération représentequand même un sacré morceau de terre et de montagnes etj'ai du mal à m'imaginer une disparition totale de ceci.— Moi non plus, dit Pénélope, mais je crois que Leith est d'unautre avis. Il a essayé de m'expliquer la situation. Je n'ai pas toutcompris, mais le sol de l'océan qui entoure notre pays semble trèsfragile et instable. Il prétend que notre pays a été pendant très longtempsque des montagnes sous-marines. Il pense, c'est ce que sonmaître lui avait expliqué, qu'en cas de collision entre Arcturus et laTerre dans l'océan Atlantique, le sol ne résistera pas.— C'est pour quand, que l'Arcturus croise l'orbite terrestre, luidemande sa cliente.76


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Dans une semaine environ, répond Pénélope. Assez tôt lematin je crois.— Tu te souviens ce que Leith prétendait, demande Jou-el.— Quoi donc ?— Ce qu'il avait dit ce matin concernant sa petite gauloise.— Ah ! La fille qu'il voit régulièrement en rêve. Oui, il n'a pas lamoindre idée d'où elle est, ni où elle habite. <strong>Les</strong> lieux qu'il décrit necorrespondent à rien de semblable. Ce que lui inquiet le plus est lefait qu'elle ne connaît notre pays qu'en tant de mythe. Elle semblede n'avoir qu'une vague idée de son aspect géographique et de sonemplacement.— Il prétend donc que notre île sombra au plus profond del'océan ?— Non mon cher, il n'a jamais prétendu cela, c'est ta propreconclusion. Il n'a prétendu que sa copine des rêves ne connaît notreîle qu'en tant de mythe.— Je persiste et signe, dit une des clientes, je suis d'accord avecmonsieur là que le pays peut difficilement disparaître dans le néant.On va peut-être perdre les plaines les plus basses ou on va avoir destremblements de terre assez destructrices, mais cela ne va pas mechanger d'avis. Je reste.— Moi aussi, dit l'autre cliente.— Je crois que la famille de Leith ne désire pas partir non plus,dit Pénélope. Ils sont, comme les miens, très attachés à leur terre etne partent sous aucun prétexte. Ce sont des gens de terroir, plutôtmourir avec leur terre que partir vers un avenir incertain. Vous lesimaginez tout reconstruire en Gaule ou chez des Celtes ? Non ceuxqui partent doivent être des gens capables de reconstruire un pays,comme les conquérants et scientifiques l'ont fait dans le passé.— Alors, est-ce que ça lui ressemble, demande le dessinateur à lacliente en lui montrant le dessin qu'il venait de faire selon sesinstructions.— Oui, dit-elle en désignant en endroit sur le papier de croquis,je dirais qu'il manque une cicatrice par là.— Avez-vous vu d'autres suspects, lui demande le dessinateur.— Oui dit-elle, mais je ne les ai pas bien vus.77


Réunion de crise.— Concentrez-vous, quels yeux avait-il, demande-t-il en luimontrant des dessins de différents yeux.Elle en choisit un et le dessinateur continua ainsi avec les autreséléments de visage. Une fois terminée l'interrogatoire de la cliente, ilcontinue de même avec l'autre cliente présente. Il se rend assez vitecompte qu'elles ont vu différents types suspects et décide de fairequelques esquisses globales.— Est-ce que ce sont eux que vous avez vu, demande-t-il auxdeux clientes.— Ça lui ressemble bien, dit-elle en montrant un des dessins dedoigt, mais l'autre, il y avait quelque chose que je ne sais plus ou quela nature m'échappe en ce moment.— Ça y est, dit l'autre cliente, celui avait un vilain bouton sur lenez. Vous savez un bouton ici, montrant d'abord le dessin et ensuitepointant le doigt sur son propre nez pour indiquer l'endroit exacte.— Il me semble, dit Pénélope, que j'ai vu celui-là et qu'il étaitcoiffé dans l'autre sens. Il avait la raie de l'autre côté et des cheveuxaussi mal soignés que Jou-el.C'est à peine que les dernières deux clientes de la journée s'apprêtentà partir, que Ajax entre à son tour dans la boutique. Il jetteun regard interrogatif aux personnes déjà présents et demande :— Réunion générale ?— Non, dit Pénélope, mais tu tombes bien, pendant que je meprépare, tu pourrais bavarder avec Jou-el et son copain qui sont venusinterroger mes clientes et moi concernant ces types suspects quise baladent ses <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong> dans notre ville. Regarde bien, Ajax, jesuis sûr que j'ai vu un d'entre eux rôder autour de la bibliothèque.Pénélope lance, une fois ses deux clientes parties après avoir régléleur service, à ses copains :— Je vais me préparer. Vous pouvez en attendant passer en revules dessins que le copain de Jou-el a pu faire. Je suis sûr que tu lesconnais, lance-t-elle à Ajax. À tout de suite, on va tout prendre unpot chez Abdubu avant d'aller au théâtre, n'est-ce pas Ajax ?78


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Quand Leith pousse la porte du bureau-atelier du Maître Amiliusau début de cet après-midi du cinquième jour Lion, il trouve sonmentor en plein calcul. Ceci range ses quelques papiers qu'il vientd'utiliser pour ses calculs, lève la tête et salut son élève :— Bonjour Leith. Vous allez bien ? Bien mangé mon garçon ?— Merci maître. Avez-vous pu voir quelque chose d'intéressant ?J'ai pu discuter de ce sujet avec mes amis tout à l'heure. <strong>Les</strong> deuxceltes connaissent bien la terre de leurs ancêtres, mais ils neconnaissent pas un endroit où les falaises descendent jusqu'à la mer.— J'ai réfléchi à propos de cette énigme, mon garçon. Il pourraits'agir du réchauffement de la planète en cours. Bien sûr qu'il y a desvoix çà et là qui nous accusent à avoir abusé des sources énergiques,mais rien ne la prouve.— <strong>Les</strong> Macs, c'est ainsi qu'on les appelle, me disaient que cesfalaises se trouvent entre deux cents et trois cents pieds au-dessus leniveau de la mer. Faudra-t-il cela dire que le niveau montera aussihaut ?— Ce n'est pas impossible mon garçon. On a déjà constaté uneaugmentation moyenne d'un pied les deux dernières années. Lafonte de deux tiers des glaces sur la terre entière pourrait bien avoircomme conséquence une telle augmentation.— Vous n'êtes donc pas du tout convaincu que ce soit l'utilisationdes sources énergétiques qui est à l'origine de cette augmentation.— Non mon garçon, même si certains attribuent cette augmentationaux gaz produits par l'élevage intensif de vaches et de porcs,rien ne la prouve. Car la terre connaît une augmentation climatiqueà intervalle régulier et lors des <strong>derniers</strong>, l'activité humaine ne généraitpas encore ces gaz. Pourtant, l'augmentation a été bel et bien au rendez-vous.— Cela arrive-t-il souvent ?— Non mon garçon une fois les cent mille ans en moyenne avecquelques augmentations intermédiaires çà et là.— Alors, maître, le lieu où habite mon ange blanc pourrait biense trouver trois cents pieds au-dessus le niveau de la mer actuel ?— Oui mon garçon.79


Réunion de crise.— Je n'ai pas suivi l'évolution de cette augmentation, maître. Ilest de combien à l'heure actuelle ?— C'est une évolution déjà en marche depuis quelques centainesd'années maintenant et il va se poursuivre encore quelques centainesd'années. <strong>Les</strong> fontes des glaces vont s'accélérer pendant ce temps etle niveau de la mer pourrait monter jusqu'à trois pieds par année.— Le temps, quand la cité de mon ange sera au bord de la mer,est encore éloigné et se situe en conséquence dans l'avenir, n'est-cepas, maître ?— Oui mon garçon. La cité où elle, car c'est une fille n'est-cepas, habite n'existe certainement pas encore. En ce qui concerne lesanges, ils n'ont pas leur place dans notre spiritualité mon garçon. Jepensais que vous ne croyez pas à l'existence des anges.— Oui maître, mais c'est elle qui me l'a dit.— Vous l'avez peut-être mal compris, mon enfant.— C'est ce que Pénélope m'a dit, maître. Elle est d'avis qu'il s'agitde son nom. Elle, esthéticienne de quartier donc, est d'avis, qu'angeest son nom et blanc sera en conséquence le nom de sa tribu.— Oui mon garçon, elle a parfaitement raison. De plus, si je reprendsvos descriptions de ce matin, la fille de vos songes n'est querarement habillée en blanc. Vous m'avez décrit une personne devotre âge préférant porter, comme des garçons, des pantalons decouleurs divers avec des chemises associées. Puis, en ce quiconcerne le nom, il est peut-être Angélique, qui veut dire comme unange. Il est aussi fort probable que son nom de tribu, une couleurdans ce cas, ne soit pas seul, mais précédé d'un pronom personnel.Est-ce que vous vous souvenez si elle avait fait mention d'une dateou d'autres références, astrologiques par exemple.— Oui maître, ils avaient la deux mille huitième année de la naissancede leur prophète. Mais je suis incapable de situer cette date.— Vous voyez mon garçon, vous vous souvenez beaucoup plusde choses que vous croyez. Réfléchissez bien. Qu'est-ce qu'ellevous a dit sur la légende de notre pays ? Je suis sûr qu'il y avait unedate.— Non maître, mais elle parlait d'un philosophe hellénique qui aeu narré la légende à quatre cents ans avant son ère et le détenait de80


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.son arrière grand-père qui avait fait un voyage en Égypte. La légendelui-même disait que neuf mille ans avaient écoulé depuis. PuisAngélique, il est peut-être préférable de l'appeler par son nom, ne sesouvenait pas très bien les termes exacts employés. Elle comptait serenseigner davantage, mais il semble que leur légende reprenne engros une partie les textes du sixième et septième fléau.— Bien mon enfant, considérant que l'événement prédit par lestextes sacrés n'a pas encore eu lieu, la fille de vos rêves vit à, une additionvite fait, onze mille sept cents ou peut être onze mille huitcents ans dans l'avenir.— Oh ! Notre voyage sans retour, dit Leith tout étonné.— Comment voyage sans retour mon enfant, expliquez-vous.— Ce n'est peut-être rien maître, mais Ussa et moi ont visité unevieille gauloise sur une foire à Poseidia. C'était elle qui nous avaitprédit que nous nous ne quitterons jamais et que nous irons faire unvoyage sans retour qui avait un rapport avec le chiffre onze millehuit cents.— Voyager dans, et voir autre que le présent n'est normalementpas possible mon enfant. Quoi que, certains textes anciens parlentde tels voyages involontaires. Il y a par exemple celui du vieux bergerqui mène paître son troupeau et croise en descendant un vieilhomme, qui, surpris de le voir, avère être son petit fils. Mais racontez-moi,votre Angélique, dans quel genre de monde vit-elle ?C'est ainsi que Leith continue encore un moment à discuter avecson mentor au sujet du monde où vit Angélique. Ces objets qui luisont à la fois étranges et familiers. Surtout le fait qu'elle se déplaceavec un dispositif à deux roues placées l'une derrière l'autre et mupar un pédalier. Ils discutent un moment par quel phénomène physiquece dispositif tient debout et permet le déplacement sans tomber.Ils passent un grand nombre de possibilités en revu, croquis àl'appui, sans pour autant trouver une explication satisfaisante.Quand Leith quitte son maître à la fin de l'après-midi, l'énigme estrestée entière.81


Crimes et raisons d'état.Elle grimpe lentement la rue en pente pour se diriger vers lecarrefour où la rue croise un grand boulevard. Elle continueensuite de l'autre côté jusqu'à la petite place arborisé à gauche. Elle aun serrement de coeur une fois qu'elle s'approche de la bibliothèque.Il y a une foule de gens, des policiers et des pompiers. <strong>Les</strong> premièresflammèches commencent à sortir des fenêtres de l'entre-sol.<strong>Les</strong> larmes lui viennent aux yeux et elle dit pour elle-même : « Oh !Bon sang, notre belle bibliothèque. Toutes ces belles oeuvres plusieurs fois millénaires.Quel drame. Comment va-t-on reconstruire tout ça ? » À sa droite,une vieille femme s'est effondrée en pleurs, le choc a été trop grandpour elle. Sa fille et sa petite fille se trouvent encore à l'intérieur. Cesont elles qui ont repris la gestion de la bibliothèque depuis qu'elleles a passé la main. Sa famille s'en occupait depuis sa arrière-arrièregrand-mère. Tout au coup elle entend dans la foule des voix quidisent qu'il y a encore des gens dans le sous-sol. Une deuxième voixderrière elle répond au premier et est certain que ce sont la princesseUssa et son ami de tou<strong>jours</strong> Leith. Elle avance vers l'entrée etcherche à descendre dans le sous-sol, mais un policier cherche àl'empêcher d'y entrer. C'est là, qu'elle se perçoit qu'elle n'est pasvraiment de ce monde, car elle parvient, à l'étonnement de tous, àtraverser le policier de part en part. Elle commence à chercher àgauche, à droite, monte un escalier, redescend, descend un autre etavance dans cet entre-sol enfumé et en feu en tâtonnant autourd'elle. Elle tombe sur une porte blindée, qu'elle traverse comme ellel'a fait avec le policier et entend des voix au fond de la salle. Ellesemble reconnaître les voix d'Ussa et Leith qui ne se sont pas encorerendu compte du danger. Elle vérifie si la porte blindée est bien ferméeet espère qu'elle tient le coup. Elle les appelle, mais ils nesemblent pas l'entendre. C’est alors qu’elle va vers eux et les faitsigne de le suivre. Ussa et Leith, étonné de voir entrer quelqu'un enpassant en travers d'une porte fermée, le regardent un peu sidéré.83


Crimes et raisons d'état.C'est Leith qui la reconnaît en premier et la salut. Elle les salue à sontour et les fait signe de sortir vers la porte de secours. Malheureusement,cette porte s'avère être bloquée de l'extérieur. Entre temps, lelocal où se trouvent les oeuvres les plus précieux est, malgré le faitqu'elle est censée être ignifuge, petit à petit envahi de la fumée. Ellese souvient d'un stage, fait au lycée par les pompiers, qu'il faut ramperau sol en cas d'incendie. Elle montre donc l'exemple à suivreaux deux amis enfermés. Elle rampe vers le fond de la salle où setrouve une armoire remplie d'objets divers et elle fait signe de l'ouvriret de la vider. Ussa pousse un grand cri, car dans un des placardsse trouvent des squelettes d'étude. Une fois l'armoire vidée etles placards enlevés, une trappe devient visible. Quand Leith l'ouvre,un air humide malodorante remonte du couloir étroite, sombre etsalle où on voit un escalier descendant. Elle y descend et voit qu'Ussala suit. Leith cependant est retourné dans la salle enfumée en tentantd'y chercher des oeuvres qu'il compte sauver à tout prix. Ussa,pris de panique, l'appelle et lui dit de se presser, mais Leith fait à sontour signe à son ami d'enfance de faire pareil et prendre un maximumde livres avec elle. La porte blindée semble tenir, mais pourcombien de temps ? Il est à espérer que les dégâts d'eau et de la fuméene seront pas trop importants et que les oeuvres entreposésdans ce sous-sol pourraient être restaures. Leith, qui ne veut pasprendre de risque, amène les livres les plus précieux avec lui. C'estlui qui ferme la trappe derrière lui et le verrouille de l'intérieur. Ilsavancent tous les trois à petits pas dans ce couloir salubre où il faitnuit en tâtonnant les murs. Soudainement, à l'étonnement des deuxamis, elle sort son téléphone mobile et appuie sur un bouton quelconque.Ussa et Leith se regardent d'abord et le regardent un peuétonné pour le voir s’amuser avec un gadget dont ils ne connaissentni le fonctionnement ni l'utilisation, avant de se rendre comptequ'elle l'utilise, faut de mieux, en tant que lampe de poche. Ladescente semble être interminable. <strong>Les</strong> deux amis la suivent docilementdans ce dédale de couloirs et d'escaliers. Soudainement elles'assoit et attend devant une autre trappe. Ni Ussa, ni Leith sesouviennent combien de temps qu'ils ont attendu là dans le noir assissur un escalier dans ce couloir humide, salubre et puant, mais84


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.c'est en entendant des petits bruits au-dessus de la trappe qu'ilscommencent à appeler au secours. La trappe s'ouvre et aveuglé parla lumière elle s'écrie :— Enfin ! Sauvé.— Comment sauvé, lui dit Julien, ma petite soeur fait encore uncauchemar ?— Mais non.— Si ! Tu gesticulais, gueulais des trucs du genre « par ici », « attention», « à gauche », « à droite » et encore. Tu rêvais de quoi cettefois ? Encore de ton Leith, je parie.— Je rêvais cette fois qu'il y avait un incendie dans leur bibliothèqueet que Leith était coincé dans le sous-sol avec son ami d'enfance,la princesse Ussa.— Mais comment as-tu fait pour les sortir ?— Je n'en sais rien. Je le savais simplement. Ce qui était bizarre,c'est que je pouvais traverser des portes fermées. Il y avait même unflic qui essayait de m'empêcher à entrer dans la bibliothèque, mais jele traversais sans résistance de sa part.— Tu étais un fantôme alors, ou tout comme.— Oui, à peu près.— Mais comment savais-tu où aller ?— Comme je te disais, je n'en sais rien. Je le savais, c'est tout.— Tu les as emmenés où alors ?— Je ne le sais pas, car au moment que la trappe de sortie s'ouvrait,c'est toi qui as allumé la lumière et je me suis réveillé.— Tu n'as pas pu voir le visage de celui qui l'a ouvert alors ?— Non, quand elle s'était ouvert, un visage apparut, mais pourmoi c'était le tien que j'ai vu.— Sais-tu quelque chose sur l'origine de l'incendie ?— Non, mais en s'approchant de la bibliothèque, j'ai entendu degens dire que certains avaient vu un homme suspect sortir d'uneporte de secours.— Viens, on va prendre quelque chose à la cuisine pendant quetu me racontes ce que tu avais rêvé. Tu retournes au lit après ?— Je ne sais pas. On a quelle heure ? Elle regarde sa penduletteet s'écrie : six heures et demie ! Il m'est trop tard pour aller recou-85


Crimes et raisons d'état.cher après. Je reste debout. Je crois que je vais prendre un petit dèjet je continue mon dossier après. Comme ça je serai bien avancé etje peux te rejoindre au club.— Tu m'étonnes, d'ordinaire on te voit rarement avant dix heureset à présent tu te mets au travail à des heures pareilles. Qu'est-cequ’il t'arrives ?— Je ne sais pas. J'aimerais finir cette énigme. J'aime bien ceLeith et je serai très fâché s'il lui arrive quelque chose.— Mais comment penses-tu de l'aider alors.— Je cherche les textes de Platon, une traduction raisonnable etnon pas ce baratin qu'on trouve çà et là sur Internet.— Puis ensuite ? Que comptes-tu faire ?— Sais pas. <strong>Les</strong> lire à haute voix en espérant qu'il me voit et entenddans ses rêves. Comme ça, il pourrait noter l'essentiel dès qu'ilse réveille. Mais je dois encore voir comment s'y prendre.— Tu as pensé aller chez Monique, la voyante qui travaille avecune boule de cristal ?— Sais pas. Tu crois que ça marcherait ?— On peut tou<strong>jours</strong> essayer. Surtout la convaincre de te faire unprix d'ami.— Peut-être. Mais j'ai envie de boire mon café au lait maintenantet après je verrais ce que je pourrais faire.— Alors, viens prendre le petit dèj. Ensuite je ferai un petit joggingavant d'aller au club.Leith s'est levé de bonne heure ce matin du sixième jour Lion. Ilconstate, en regardant dehors, qu'il ait plu pendant la nuit et que lesoleil commence à faire son apparition. Leith prend quand mêmesoin d'apporter, contrairement à ses habitudes, ses dossiers avec lui,même si son maître n'eut rien, mis à part quelques vérifications géographiques,prévu de spécial. Il descend lentement l'escalier, enpensant à tout et rien. Il a la fâcheuse impression qu'il est arrivéquelque chose et que la journée ne sera pas comme une autre, sanspouvoir mettre le doigt sur la nature exacte des événements à venir.C'est quand il ferme la porte d'entrée derrière lui, qu'il constate une86


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.animation inhabituelle dans la rue. Il y a un nombre inhabituel depoliciers aussi bien en uniforme que civil. Dès qu'il s'approche de lamaison de son maître, c'est le détective Ajax qui vient à sa rencontreet lui prend à part et lui dit :— Bonjour Leith, je crains que les nouvelles ne soient pasbonnes ce matin.— Qu'y a-t-il donc, lui demande Leith anxieusement.— Tiens, assieds-toi là, sur l'escalier.— Mais, qu'est-ce qu'il y a ? Demande-t-il d'une petite voix.— On a trouvé Maître Amilius poignardé dans son bureau. C'estle même scénario que l'assassinat de Maître Ar-Arart. Ils, les faussescambrioleurs donc, ont mis en sac son bureau et sa bibliothèque etaucun objet de valeur semble manquer. Ils n'ont pas touché la cassetteavec son argent non plus. D'après les premières investigationsils manquent des livres et des documents que le maître préparait.Leith regarde le détective avec les larmes aux yeux et ne sait querépondre. Il observe avec beaucoup de tristesse la maison de sonmaître où les policiers viennent sortir le dépouille mortel sur unbrancard couvert d'un drap blanc. C'est alors qu'il se lève et dit àAjax :— C'est trop pénible pour moi de rester ici à regarder ces policiers.J'imagine que tu t'occupes de cette affaire, n'est-ce pas ?— Oui, j'avais prévu de m'investir davantage. Il y a quelquechose de louche dans tout ça. Tu sais, ce n'est pas le premier casdans notre pays. Je ne sais pas si tu t'en souviens, mais il avait ce casdans le sud où deux physiciens ont été brûlés vifs dans leur laboratoire.Là aussi, ils ont voulu faire croire à un accident, mais, selonles pompiers, le feu avait pris trop rapidement. De plus, il semblequ'il y ait eu plusieurs foyers avec les issus de secours bloqués del'extérieur.— Je crois que je vais au temple pour voir si je peux prendrecontact avec lui. Si je me presse, je pourrais y être avec l'express quiarrive là-bas à midi et retourner ici la soirée. Est-ce que tu peux remettrecette sacoche chez Pénélope en attendant, elle sait où cacherles documents de Maître Amilius. Il faut peut-être savoir que Maître87


Crimes et raisons d'état.Amilius a pris des précautions et mis les documents les plus importantsailleurs.— Est-ce que quelqu'un t'a pu voir avec ses documents ?— Non, ils sont cachés dans les classeurs de la comptabilité dePénélope qu'il faisait pour elle. Puis en ce qui me concerne, je mebalade tout le temps avec une sacoche d'écolier plein de bouquins dechez lui.— D’accord, je vais voir Pénélope tout à l’heure.— Tu t'en occupes alors ? Je file à la gare, le train part dans unedemi-heure.Ussa, qui ne sait pas que son ami d'enfance part également pourla gare, se prépare et prend cette fois particulièrement soin de sonapparence. Elle a des sentiments confus, c'est comme si quelquechose, une rencontre peut-être, se prépare. Elle aime Leith, mais pascomme une fille aime un garçon, il est pour elle surtout le frère tantdésiré qu'elle n'a jamais eu. Sa femme de chambre lui avait bien ditce qu'on raconte sur son ami au salon de beauté qu'elle fréquente.Elle lui avait dit qu'il serait très entiché d'une gauloise qu'il ne voitqu'en rêve. Ça lui chagrine un petit peu, mais elle doit quand mêmeadmettre, pour elle-même, que de plus en plus quand elle pense àLeith, une autre image se superpose sans pourvoir l'identifier. Cegarçon est comme lui, blond, des cheveux plus courts, plus muscléet plus athlétique. Elle songe maintenant à la réaction de sa femmede chambre, d'origine paysanne, quand elle lui raconta ce que lavoyante à la foire de Poseidia leur avait prédit : « Mais, c'est sûr, vousallez marier un frère et une soeur. Comme ça vous serez beau-frère et bellesoeur». « Alors, » dit-elle pour elle-même : « ce beau jeune homme que jeperçois de temps à autre d'une façon indéfini, sera-t-il le frère de cette gauloise àLeith ? Non, » continue-t-elle, « ça n'existe que dans les contes pour enfantsqui commencent avec ; il était une fois... Arrête de rêver Ussa, » pense-t-elle,« c'est ridicule ! » C'est en voyant de nouveau l'image de ce jeunehomme se superposer à celui de Leith qu'elle quitte sa chambre pouraller à gare, mais pas sans avoir dit au-revoir à ses parents. Arrivé àla gare, avec un serrement de coeur elle perçoit Leith sur le quai.88


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Elle l'interpelle et en s'approchant, elle voit une grande tristesse dansses yeux.— Que se passe-t-il, demande-t-elle.— Ils ont assassiné Maître Amilius, répond-il, et raconte tout cequ'il avait vu et entendu ce matin. Ussa, voyant qu'il est très peinépar la disparition de son maître, lui met le bras sur son épaule et luidit :— Viens avec moi, on pourrait bavarder un petit peu pendant levoyage. En voyant le chef de gare elle prend le billet de Leith et lelui donne en disant :— Remboursez-le ! Ce jeune homme voyage avec moi !— Mais mademoiselle je.... Mais le chef de gare n'arrive pas plusloin dans sa phrase, car Ussa lui dit sèchement sur un ton qui nesouffre d'aucune contestation :— Faites ce que je vous ordonne ! Elle se retourne alors avec ungrand sourire vers son ami de tou<strong>jours</strong> et le demande : Leith, raconte-moitout sur ta belle gauloise. Elle est comment ? A-t-elle unfrère aussi beau que toi ?— Mais comment sais-tu, s'étonne Leith.— Ah ! Si tu savais ! Je suis informé vois-tu, dit-elle en faisantune petite pause et continue : c'est ma femme de chambre qui m'adit. Elle va régulièrement chez une esthéticienne dans ton quartier.Alors, raconte-moi.Pendant qu'ils montent en voiture, il lui raconte tout ce qu'il saitsur Angélique, le lieu où elle habite, son mode de vie étrange, la curieusefaçon de s'habiller, l'étrange dispositif à deux roues dont ellese sert pour se déplacer, les falaises et beaucoup d'autres choses.Ussa, heureuse avoir réussi à détourner l'attention de Leith sur autrechose, lui pose pleine de questions, auxquelles il ne sait pas tou<strong>jours</strong>répondre. Pour finir, ils arrivent à la gare d'Ozin avant qu'Ussa aitpu satisfaire sa curiosité.Abdubu, très étonné de voir entrer Ajax accompagné de Jou-el àune heure aussi matinale, se demande s'il ne se passe pas quelquechose de grave et questionne ses deux habitués :89


Crimes et raisons d'état.— Que se passe-t-il ? Vous êtes tombés du lit ? Je n'ai pas d'habitudede vous voir si tôt. Vous prenez quelque chose pour le petitdéjeuner?— Oui volontiers, lui répond Jou-el.— Moi aussi, dit Ajax. Tu n'as pas encore appris ce qu'il est arrivéà Maître Amilius, demande-t-il à Abdubu.— Non. Qu'est-ce qu'il y a avec Amilius ?— Ils, des inconnus donc, l'ont assassiné.— QUOI ?— Mais oui. On a trouvé son appartement ouvert tôt ce matin,l'intérieur en dessus dessous et le corps sans vie ensanglanté dumaître gisant au milieu de tout ça.— Mais qui a pu avoir intérêt à faire ça, lui demande Abdubu, ilne faisait du mal à personne.— Je ne sais pas, dit Jou-el, ce fait est sûrement à classer dans lasérie des meurtres inexpliqués survenus ces <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— C'est quand même curieux que ces crimes touchent surtout lessavants, dit Ajax.— Eh Jou-el ! Exclame Abdubu, ton copain n'a-il pas fait desportraits des clients suspects ?— Oui, lui répond-il, il les a emportés à la police.— Tu n'as pas conservé une copie par hasard, lui demande Ajax.Si ces meurtres sont une affaire d'état, surtout une affaire d'état d'Alta,on ne risque pas avoir une enquête.— Pourquoi donc, lui demande Abdubu.— Parce qu'ils cherchent à étouffer certains de ces crimes, lui répondAjax.— C’est bien ça, dit Jou-el, car ils travaillèrent tous sur le mêmesujet : celui de la comète Arcturus.— Je crois qu'ils cherchent à faire taire toute personne qui en saittrop à ce sujet, dit Abdubu. Je ne sais pas si vous avez fait le rapportentre cette comète et les textes sacrés, mais Leith et son maître l'ontet ils ne sont sûrement pas les seuls à l'avoir fait. On pourrait imaginerque le pouvoir central de Ra-Ta cherche à éviter un mouvementde panique pour évacuer en douceur sa famille, les nobles et desriches.90


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Et oublier le reste de la population, ajoute Jou-el.— Eh bien ! C'est ça, répond Ajax.C'est à ce moment-là que Pénélope entre comme un courant d'airet écrie à Abdubu :— Prépare-moi deux thés et un chocolat à emporter s'il te plaît,je te rapporte les tasses vides tout à l'heure et continue s'adressant àses copains : affreux n'est-ce pas. J'ai peur pour notre Leith. S'il nefait pas très attention, il va avoir le même traitement que son maître.— Salut Pénélope, lui lance Jou-el, tu es matinale aujourd'hui.— Mais non. J'ai deux clientes et je les offre quelque chose àboire, c'est normal non ? À propos, vous saviez que Leith a pris letrain avec sa petite amie tout à l'heure ? Je suis sûr qu'ils se rendentau temple d'Ozin pour parler à son maître.— Comment sais-tu ça, lui demande Ajax avec un certain étonnement,tu n'as pas quitté ta boutique depuis que je viens de passerchez toi.— Eh ! Dis-donc, j'ai de la clientèle quand même. Une d'entreelles est servante au palais et c'est elle qui a accompagné Ussa à lagare. C'est là que les deux se sont vus et ont pris le même wagon endirection d'Ozin. Tu as d'ailleurs dû voir la façon dont elle avait envoyébalader le chef de gare. Elle avait exigé qu'il rembourse le billetà Leith. Mais j'espère que ces mecs de la BSI n'ont pas mis le templesur écoute, car dans ce cas Leith et même Ussa courent un granddanger. Qu'en penses-tu Ajax ?— Alors, tu penses que ce sont eux qui zigouillent tout cemonde ?— Mais bien sûr ! Qui d'autre ? Tu n'as pas vu qu'il manquaitnulle part des objets de valeur et uniquement les documents scientifiques?— Oui, lui répond Jou-el, c'est la même chose chez Maître Amilius.Chez lui ils manquent des livres, d'autres ont été éventrés, sonobservatoire a été mis en sac et sa cassette avec son argent et valeursest tou<strong>jours</strong> là, ils n'ont même pas touchée.— C'était pareil chez Ar-Arart à Poseidia, le même mode opératoire,dit Ajax.91


Crimes et raisons d'état.Abdubu qui vient de servir entre temps remet un petit plateau deservice à Pénélope et lui dit :— Tu n'en fais pas pour les tasses, tu peux les rapporter à midi situ viens manger ici.— Alors, tout à l'heure, dit-elle, je vais rejoindre mes clientes, sinonelles vont penser que je passe la journée au bistro.— Alors, Abdubu, tu n'as pas revu notre zigouilleur de servicepar hasard, lui demande Jou-el.— Tu parles de qui ? Ce drôle de client de l'autre jour ?— Mais oui. Qui d'autre ?— Tu penses vraiment que c'est lui qui a fait le coup ?— Je ne sais pas, répond Jou-el, mais il y a une forte chance quece sera lui. Eh ! Ajax, lui demande Jou-el, on pourrait peut-être surveillerdiscrètement Ussa et Leith quand ils reviennent d'Ozin ?— C'est ce que je prévoyais faire.— D'accord, moi je vais contacter quelques amis que j'ai chez lagarde royale et voir ce qu'ils peuvent faire.— Pourquoi la garde royale ?— Premièrement, ce n'est pas suspect qu'Ussa soit surveillé pareux et deuxièmement on peut avoir entièrement confiance en eux.En grimpant la rue qui passe devant l'estaminet d'Abdubu, “<strong>Les</strong>Jardines”, on croise la Grande Rue qui traverse la partie haute de laville. Cette rue commence à l'ouest, où elle rejoigne le boulevard deParfa et finit de l'autre coté à la Place Royale. La rue, qu'on vient degrimper, continue de l'autre côté en passant devant la bibliothèque,qui est la fierté de la ville, et la petite place arborisé à côté d'elle pourpasser au-dessus les voies du chemin de fer pour finir dans la partienord d'Osuo. Une fois arrivée à la Grande Rue, on peut tourner àdroite où on passe devant la grande salle des fêtes qui est en mêmetemps théâtre. Plus au loin on a le grand temple de la ville avec sescolonnes semblant de soutenir le ciel juxtaposé au bâtiment du gouvernementau toit ayant une allure d'une coque de bateau retourné etcouvert d'ardoises bleuâtres. À côté et au-dessus les anciens rempartsde la ville, on trouve le palais royal d'une construction plutôt92


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.classique et sobre. À l'autre côté de la place aboutit une rue qui, enpassant au-dessus les voies du chemin de fer, vient depuis la partienord de la ville. <strong>Les</strong> voies du chemin de fer, eux, continuent versl'est en passant au-dessus le boulevard de Parfa et la rivière au mêmenom que la ville, l'Osuo. Ce chemin de fer divise la rive droite enquartier d'habitations modestes et zone industrielle. Cette ligne rejoignela grande ligne nord-sud en direction de la ville portuaireAmaki. De l'autre côté de la Grande Rue, à hauteur de la salle desfêtes, il y a la gare avec ses commerces typiques orienté pour la clientèlevoyageuse, tels qu'on trouve dans toutes les gares et aéroports.Mais on y trouve d'autres choses, d'autres bâtiments, dont un abritela préfecture de la région et la police. C'est là, aujourd'hui, ce matindu sixième jour Lion, que le préfet Assen-Ni a convoqué le chef depolice de la région, Ax-Tell, dans son bureau.— Bonjour monsieur le préfet, que désirez-vous ?— Bonjour mon colonel, asseyez-vous.— C'est à propos des événements de ces <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong> et en particulierce meurtre de ce matin que vous m'avez convoqué ?— C'est exact, mon colonel. Vous avez pu identifier les responsablesde ces crimes ? Où en êtes-vous ?— Pour l'instant, nous ne possédons que quelques croquis recueillisparmi la population, mais nous ne possédons pas le moindreindice supplémentaire.— Bon, je viens de recevoir un communiqué du bureau fédéralde Posseidia nous demandant de rester très discret sur certainscrimes.— Comment ça, ils nous demandent d'étouffer les affaires ?— Oui c'est bien ça. Je crois bien, si nous tenons à notre carrière,qu'on est obligé d'en tenir compte.— Comment faire alors ? Si on refuse, c'est fini la carrière et aucontraire, si le roi l'apprend..... et il ne finit pas sa phrase en laissantdeviner le préfet de ce qui pourrait arriver.— Classez-les en tant qu'un homicide commis par personne oupersonnes inconnues.93


Crimes et raisons d'état.— Vous pouvez mettre un peu de pression sur la presse, car il està craindre qu'ils s'emparent de l'affaire et nous serons obligés decontinuer dans ce cas.— Je verrai ce que je peux faire mon colonel.— Au-revoir monsieur le préfet.— Au-revoir mon colonel.94


ÀLa bibliothèque incendiée.la fin de ce mardi matin, Angélique et Julien retrouvent leursamis, les uns, comme eux, partent bientôt en vacances d'août,tandis les autres, Rodolphe, Philippe et Audrey, sont déjà de retour.Angélique, en train de ranger sa planche à voile, lance à son frère :— Je rentre me doucher et bouffer un petit truc, est-ce que tuviens avec moi ?— Attends, il faut que quelqu'un garde la baraque. Il y a encoreces deux anglaises qui rentrent à midi.— Je reste ici avec Philippe et Audrey, lui répond Rodolphe, onmange sur place. Je peux garder la baraque si tu veux.— Merci, je reviens vers une heure et demie.— Eh ! S'écrie Alice, venu sur les lieux entre temps, c'est quand,que vous partez ?— Samedi, lui dit Julien, mon père a pris un jour RTT et va chercherle voilier la veille à Chérbourg et l'amène à Fécamp.— Voilier ? Qu'est-ce que allez-vous foutre avec un voilier, demandeRodolphe.— Eh bien, c'est un peu la faute à Angélique, dit Julien, elle nousa tellement cassé les oreilles avec son Leith, l'Alantide et les Açores,qu'on s'est décidé de faire un aller-retour là-bas en voilier. Seulemaman n'était pas très chaude pour ce voyage, elle préfère le B-B.Mais papa est ravi, ça fait des années qu'il n'a pas navigué et il veutnous l'apprendre. Nous, Angélique, papa et moi donc, devront tenirla barre à tour de rôle.— B-B, demande Rodolphe, c'est quoi ?— Oh ! Dit julien, on dit Bronzer Bête. Maman est adepte defaire la saucisse à griller sur une plage méditerranéenne. On a réussià la convaincre qu'elle pourrait faire le bronzage intégral sur pontd'avant sans que personne ne la voit.— Ce ne coûte pas trop cher, la location d'un voilier, lui demandeAlice.95


La bibliothèque incendiée.— En effet, oui, lui répond Julien, mais on a repoussé l'achatd'une autre voiture à l'année prochaine. Une bagnole neuve n'est pasindispensable pour le peu qu'on l'utilise.— Il est grand ce voilier, lui demande Alice.— Oui assez. On a trois cabines, un coin cuisine et assezd'espace pour être à l'aise tous les quatre. On a même prévu une télépar satellite. On a, par contre, pas de téléphone, mais juste une liaisonradio par ondes courtes ou VHF.— Vous partez combien de temps, lui demande Rodolphe.— Deux semaines. On a loué ce voilier pour deux semaines entout cas, lui répond Julien. Puis en regardant sa montre il leur dit :zut, il faut qu'on aille à la maison. À tout à l'heure.— À tout à l'heure, dit Angélique.— Bon appétit et à tout à l'heure, répondent-ils.C'est alors qu'Angélique et son frère Julien se mettent en routepour la maison. Une fois arrivée à la maison, Julien va à la cuisine etmet en route une casserole d'eau pour cuire des spaghettis. Ilcommence à préparer une salade et fait chauffer le contenue d'uneboîte de sauce à spaghetti. Angélique, qui n'aime pas trop le sel del'eau de mer sur sa peau, va en attendant la préparation du repas et lavenue des parents, prendre une douche dans la salle de bain.Cette fin de la matinée du sixième jour Lion, Ussa et Leith quiont fait le voyage ensemble et ont profité le temps du voyage pourmanger une petite chose remontent l'allée en direction du temple.Arrivé au temple, Ussa fait usage de son autorité pour réserver l'exclusivitédu temps d'accès à l'écran de dialogue. Ils se rendent, letemps d'attendre que l'accès leur soit accordé, dans une partie réservéeaux prières. Même si Leith respecte les dispositions de sa religion,il n'est pas trop pieux. Ussa, elle, beaucoup plus pieuse, désirefaire des prières, principalement destiné à ses grands-parents. Leithla suit, plus pour faire plaisir à elle que pour la prière elle-même. <strong>Les</strong>prières terminées et l'écran de dialogue disponible, ils se rendentdans la partie centrale du temple et voient que les grands-parentsd'Ussa les attendent déjà.96


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Bonjour Ussa. Bonjour Leith. Ça nous fait plaisir que vousêtes venue tous les deux. Comment vas-tu Leith, tu es très peiné parce horrible assassinat du Maître Amilius, n'est-ce pas, demande legrand-père ?— Oui, lui répond Leith, je devrais être un grand garçon et ne paspleurer, mais c'est difficile de me retenir.— Ce n'est pas bien de se retenir, mon garçon, lui dit le grandpère,ça rend la peine encore plus pénible. <strong>Les</strong> maîtres Amilius etAr-Arart viennent dans un instant vous parler.— Mais Leith, dit la grand-mère désireuse de changer le sujet envoyant la peine du garçon, tu n'as même pas remarqué qu'Ussa s'estfait belle pour toi. Tu lui n'as rien dit ? Une fille aime bien entendreça, surtout de son meilleur copain.Leith, très gêné par cette remarque, commence à rougir et ne saitplus où regarder. Puis il répond :— Bien sûr que je l'ai vu, mais je n'ai pas osé le lui dire. J'ai faitune fois la remarque « t'est belle aujourd'hui » à Pénélope et elle m'a répondu« merci pour les autres <strong>jours</strong>. » Ensuite, je n'ai plus lui osé direque je la trouve belle.— Ça ne fait rien, grand-mère, lui répond Ussa, Leith parle avecses yeux. La façon dont il m'a regardé en arrivant à la gare se passede toute parole. Mais je ne sais pas trop moi-même pourquoi je l'aifait. J'avais une sorte de pressentiment que quelque chose allait arriver.— Oui mon ange, dit sa grand-mère, c'est pour tout à l'heure,mais je ne veux pas te le dire maintenant.C'est ensuite qu'Ussa prend le relais et s'entretient avec sesgrands-parents où Leith reste plutôt spectateur. Ses grands-parentsrestent, par contre, assez flou sur les rencontres que les deux jeunesgens vont avoir et terminent avec ces mots :— Au-revoir mes enfants, on se verra dans cinq <strong>jours</strong> pour unedernière fois.C'est là que les grands-parents d'Ussa vont faire place pour leursmaîtres-éducateurs, Ar-Arart et Amilius qui saluent leurs anciensélèves :97


La bibliothèque incendiée.— Bonjour Ussa. Bonjour Leith. Ça nous fait plaisir de vousvoir ensemble.— Bonjour Maître Ar-Arart. Bonjour Maître Amilius, dit Leith.— Bonjour à vous, dit Ussa.— Ne pleure pas ma disparition mon enfant, dit Amilius ens'adressant à Leith. Ma mort est plus pénible pour ceux qui restenten arrière que pour moi. Je suis très navré de vous voir aussi peiné,mon enfant. Ce qu'il arrive doit arriver mon enfant, on ne peutchanger le cours de l'histoire, on doit l'accepter tel quel.— Merci maître, répond Leith, mais est-ce que vous avez pu calculerde nouveaux paramètres concernant la comète.— Oui mon enfant, c'est dans sept <strong>jours</strong> entre six heures et sixheures et demie et la probabilité d'une collision avec la terre est dequatre vingts-treize pour cent. Je n'ai, par contre, pas pu calculerl'endroit exact de la collision. Nous possédons ni les mesures, ni lesinstruments d'une précision suffisante pour pouvoir le calculer.C'est là que votre belle gauloise peut vous aider. Elle a besoin devos données, les positions précises de toutes les planètes d'ici sept<strong>jours</strong> et celles il y a cent trois ans. Vous pouvez trouver ces donnéesdans les livres dans le sous-sol de la bibliothèque. C'est là qu'Ussapeut vous aider, car c'est elle, sa famille ou des prêtres confirmés quipeuvent y accéder.— Y a-t-il autre chose maître, lui demande Leith.— Pense lui fournir des détails en apparence insignifiantes, lui ditMaître Ar-Arart. Tels que l'inclinaison de l'axe de la rotation terrestre,la position du pôle nord et l'équinoxe de printemps par rapportaux signes astrologiques. Ou encore mieux la vraie positionvis-à-vis de la constellation.Leith et Ussa continuent encore un moment à discuter avec leursmaîtres d'antan qui s'empressent à dire à Leith de se servir de la technologiedont Angélique dispose, car elle peut, selon Maître Ar-Arart,rechercher des informations sur le monde entier avec sa machine àcalculer.98


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Angélique, qui ne se doute de rien, prend à ce même moment dela journée sa douche dans la salle de bain. Soudainement elle entenddes petits bruits et ne regarde pas ce qu'il se passe et s'écrie :— Eh ! Julien, qu'est-ce que tu fous dans la salle de bains ?Passe moi en serviette, puisque tu y est.En n'obtenant pas de réponse, elle répète son appel sans plus desuccès. Agacé, elle sorte du bain où un coin douche a été aménagéet s'apprête à prendre sa serviette elle-même. C'est à ce momentqu'elle voit, que celui qu'elle avait pris pour Julien et une copine,sont en réalité Ussa et Leith. Gêné, elle réfléchit à cent à l'heure quefaire. Elle décide alors d'adopter la stratégie de “l'attaque est lameilleure défense” et dit à Leith en faisant une petite pirouette devantlui :— Salut mon amour, je te plais ?Ussa regarde, amusé, son copain d'enfance, qui ne sait, gêné, plusoù regarder. Ce dernier reste embarrassé sans pouvoir dire quelquechose et ne sait pas détacher son regard de certaines parties du corpsd'Angélique. Julien, qui avait entendu appeler sa soeur entre à sontour dans la salle de bain. C'est là que les regards d'Ussa et de Juliense croisent. <strong>Les</strong> deux jeunes restent là comme s'ils étaient touchéspar le foudre, momentanément hors circuit, sur autre planète. Angéliquequi a eu le temps de se sécher et d'enfiler son slip, son jean etun tee-shirt, dit à Leith :— Viens mon amour, tu es certainement venu me voir pour savoirce que j'ai pu trouver n'est-ce pas ? Laissons les deux amoureuxse faire connaissance.Leith, lui, ne se remet que difficilement du traitement subi, la suitjusqu'à sa chambre et regarde avec un grand étonnement les objetsqui s'y trouvent. C'est en pointant le doigt vers la télévision au boutdu lit qu'il demande :— Ta bioscope ?— Bioscope ? Enquête Angélique. Tu veux dire télévision peutêtre.C'est comme ça qu'on l'appelle chez nous. On dit Bioscopechez toi ?— Oui, lui répond Leith et continue en pointant le doigt vers unappareil sur son bureau, ça c'est aussi une télévision ?99


La bibliothèque incendiée.— Non c'est un ordinateur, une machine à calculer si tu veux,avec de la mémoire et reliée à d'autres au moyen d'un réseau quenous appelons Internet.— Ah ! C'est Ar-Arart qui m'a parlé de ça tout à l’heure. D’aprèslui ça sert à échanger les informations, n’est-ce pas ?— Oui, c’est ça.Angélique se met aussitôt au travail. Elle saisisse les donnéesfournies par Leith et cherche à les coordonner avec les siens. C'estpendant ces travaux qu'elle remarque le regard bizarre que son copainatlante jette sur un globe faisant office de lampe de bureau.— Qu'y a-t-il, demande-t-elle ? Est-ce que quelque chose qui neva pas ?— Oui, même deux choses. Mon pays n'est pas là et les pôles nesont pas au bon endroit non plus. Ils devraient être là dit-il en pointantquelque part sur le continent de Groenland. Il est combien, l'inclinaisonterrestre ?— Vingt-trois, répond-elle, pourquoi ?— Eh ! Bien. Il n'est que de dix chez nous. Ça fait une différencede treize degrés, qui est énorme. Tu m'as bien dit que tuavais neuf <strong>jours</strong> en plus dans l'année, n'est-ce pas ?— Peut-être, nous avons trois cents soixante-cinq <strong>jours</strong> et unquart par année.— Alors, c'est juste, ça fait neuf de plus que chez nous. Tu devaisavoir des <strong>jours</strong> plus courts je pense. Ton engin, sait-il calculerles dates astrologiques à partir des positions des planètes ?— Pas le mien, mais il y a des sites sur Internet où on peut lefaire. Donne-moi tes données et on va voir ce qu'on peut faire.En faisant les calculs, qui confirment malheureusement les pirescraintes de Leith, Angélique sent une petite odeur se répandre. Elles'écrie s'adressant à son frère :— Eh ! <strong>Les</strong> amoureux ! Surveillez la cuisine quand même, çacrame.En continuant à chercher des informations pour Leith et à noterles siens dans un dossier, ils ne voient pas le temps passer et c'est Julienqui l'appelle si elle ne désire pas manger. C'est à ce moment100


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.qu'Angélique prend congé de son copain et ne manque pas à luidire :— Tu es vraiment canon Leith, j'aimerais bien te revoir, mais envrai ! Tu reviens me voir n'est-ce pas ?— J'espère. J'espère que cette voyante de Poseidia avait raisonavec sa prédiction du voyage sans retour et le chiffre onze mille huitcents.— Onze mille huit cents, lui demande Angélique, mais attends unpeu, nous sommes ici en deux mille huit et toi tu es en neuf millesept cents quatre-vingt-douze avant Jésus Christ, notre guide spiritueltu vois, qui fait un total d'onze mille huit cents. Mais ils sont làtes onze mille huit cents. Et ton voyage sans retour possible sera sûrementdans le temps, qui est juste, car on ne peut pas revenir surses pas. Alors, dit-moi tout sur cette voyante, ce qu'elle t'a dit, tout.C'est pendant qu’elle prend la direction de la cuisine pour y mangerquelque chose avec son frère et leurs parents qui peuvent venird’un moment à l’autre que Leith lui narre leur séjour en Poseidia, lavoyante de la foire, l'étrange voyage qu'elle ait prévu, le fait qu'ils allaientdevenir frère et soeur et ce qu'Ussa croyait comprendre.— Tu vois, mon amour, je suis, comme Ussa, ton ami d'enfance,persuadé que nous allons nous revoir, en chair et en os. Je te nepeux malheureusement pas embrasser avec ton dispositif qui t'apermis le déplacement, mais je le fais en pensée. Alors, grossesbisses, au-revoir et prend bien soin d'Ussa.Sur le chemin de retour, ils marchent silencieusement côte à côte,chacun plongé dans ses pensées. C'est Ussa la première à rompe lesilence :— Alors, tu es aussi impressionné que moi. Elle est vraimentbelle ta gauloise et plutôt musclé pour une fille. Elle doit avoir uneactivité physique comme son frère.Voyant que Leith ne lui répond pas, elle continue :— T'en fais pas Leith. Je suis sûr que sa réaction de tout à l'heureétait sa manière de cacher sa gêne. Je suis certaine qu'elle était aussi101


La bibliothèque incendiée.gênée que toi. Elle était d'ailleurs assez gênée par ta réaction, elle venaittout rouge en tout cas.— Ma réaction, lui répond-il, mais je n'ai rien dit.— Mais si, tu n'as peut-être rien dit, mais t'avais une réaction bienvisible pour nous, les filles. Je suis sûr que tu l'aimes et elle t'aimeaussi.— Oui, lui répond Leith qui n'a pas envie de discuter de sa réactionen ce moment et continue : j'ai tou<strong>jours</strong> son image devant moi,je n'arrive pas m'en détacher. Mais dit-moi, toi, tu étais aussi trèsimpressionnée par son frère. Tu étais sur un nuage quand il te regardait.Tu as mis en tout cas un sacré moment pour revenir sur Terre.Tu as fait quoi. On te n'a pas vue pendant qu'Angélique tripotait samachine à calculer.— Machine à calculer ? J'ai cru que c'était une bioscope, maisquand j'y pense, Julien en avait déjà une qui marchait, ce qu'ils appellentd'ailleurs télévision, et où on pouvait voir un jeu qui ressembleà la pelote, sauf que les joueurs sont de face et non pascontre un mur. Il m'a dit qu'ils disent tennis. L'autre appareil était,comme tu le dis, muni d'une planche avec plein de touches, mais ilne marchait pas, car l'écran été noir.— Oui, c'est une machine à calculer, ils disent ordinateur, commecelle d'Angélique et elle s'en sert pour en tas de choses. Elle l'utilisepour faire des documents, rechercher des informations sur le mondeentier, car, ce qu'elle m'a dit en tout cas, ces machines sont reliéesentre elles au moyen d'un réseau qu'ils appellent Internet.— Est-ce que tu as pu voir quelque chose d'intéressant.— Oui. Il semble que les maîtres Amilius et Ar-Arart ont malheureusementraison. Notre pays n'existe plus à leur époque. Puisles théories les plus folles y circulent. Il y en a tellement qu'il devientdifficile de différencier le vrai du faux. Mais la chose qui m'inquiète,c'est qu'ils ont neuf <strong>jours</strong> de plus dans l'année. Ce qu'il veut dire :une Terre qui tourne plus vite et des <strong>jours</strong> plus courts. Cela ne peutmalheureusement qu'être le résultat d'une collision avec très groscorps céleste, Arcturus par exemple.— C'est pour quand est-ce qu'elle croise l'orbite terrestre ?— Dans une semaine, le matin heure local.102


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Arrivés à la gare entre temps, ils montent ensemble dans le wagon-restaurantoù ils demandent un menu léger. Après avoir mangéun moment, c'est Ussa qui rompe le silence et demande :— Il y a quelque chose que je ne comprends pas. D'après ce quetu dis, ils vivent onze mille huit cents ans dans le futur. Je le veuxbien, mais j'ai tou<strong>jours</strong> cru que l'avenir n'existe pas encore, or commenta-t-on pu communiquer avec des gens qui n'existent pas encore?— C'est, si tu te souviens bien, une théorie de Maître Ar-Arart,celle qui dit qu'il n'y a ni passé, ni futur, mais seulement le présent,séparée d'une distance qu'on appelle temps. Lui voyait le tempscomme c'était une distance, une longueur ou une hauteur. Il disaitqu'il y a de nombreuses récits 28 témoignant d'un voyage dans letemps. Ce qui veut dire passé, présent et futur existent simultanément.On ne vit tous que dans le présent, vois-tu ! Ils vivent dansleur présent et nous dans le nôtre, vois-tu!— Tu veux dire, dit-elle en regardant rêveusement le plafond, queJulien existe pour vrai et n'est pas le fruit de mon imagination ?— Oui ma chère, dit Leith, tout comme Angélique.— Oh ! Que c'est joli, dit-elle en regardant en dehors, ta familleest en train de tailler les arbres. C'est si joli, tous les arbres bien alignéset taillés en boule. Ils doivent faire la pause de l’après-midi, carje n’y vois personne. Il y a l'échelle contre un des arbres, mais à partça, personne. Tu ne voudrais pas rependre le domaine plus tard ?— Non, même si je suis enfant unique, on est assez nombreuxavec mes oncles, tantes, cousins et cousines. Parfois même de trop.Le domaine appartient d'ailleurs à mes grands-parents. C'est peutêtrepour ça que mes parents préfèrent me voir éducateur et peutêtremaître beaucoup plus tard. Mais dit-moi, dit-il pour changer lesujet, tu as discuté de quoi avec Julien ?C'est alors qu'Ussa raconte sa causerie avec Julien, sa déceptionque ni lui ni sa soeur étaient végétariens, les drôles de fils en pâtes28 Le plus célèbre est le récit des deux anglaises qui se trouvaient au début du XX ème siècle dansle jardin du château de Versailles momentanément en compagnie de Marie-Antoinette.Un deuxième récit nous vient des années trente d'un journaliste allemand qui assistait aubombardement de Hambourg par des Anglais et qui aura lieu dix ans plus tard.103


La bibliothèque incendiée.qu'ils appelaient spaghetti, la sauce brûlée, la planche à voile, le véloet beaucoup d'autres choses.— On va tout de suite à la bibliothèque, demande Leith.— Non, répond Ussa, je dois passer au palais chercher les clefsdu sous-sol. Comme ça, on pourrait dire bonjour à papa et maman,ça leur fera plaisir de te revoir.L'homme, discret, même trop discret, entre dans la bibliothèque,monte l'escalier vers la salle de lecture et se met à chercher des livresà consulter. C'est ce qu'il veut faire croire, car en réalité il surveille lasalle de lecture et l'accès à la salle d'emprunt. Après un moment, ilva de rangé à rangé prenant un livre par ci par là, les remettant àleurs places une fois consultée et continue ainsi jusqu'à la porte desecours, où il se trouve un plan d'évacuation. Sur ce plan figurenttoutes les salles, y compris celles de l'entre-sol et du sous-sol. Iltente de bien mémoriser les salles, leurs accès, leurs emplacements etles sorties de secours. Ensuite il va au guichet d'accueil et demandeà la personne présente, ce qu'il devrait savoir en ce moment, où setrouvent les toilettes. Il veut s'assurer, que sa présence dans entresolne soit pas suspecte. On a droit de se tromper de porte dans unbâtiment inconnu, n'est-ce pas ? Il descend le grand escalier et setrouve devant une série de portes. En faisant semblant de se tromper,il en ouvre une. Hélas, c'était une armoire à balais. Soudainementil voit deux jeunes gens entrer dans une salle réservée en utilisantleurs clefs. Il va, pour faire diversion, d'abord aux toilettes etattend que les deux soient entrés dans la salle, car il sait que ce sonteux qu'il faut éliminer. Il sait que c'est contre les ordres reçus de Poseidia,mais il ne veut prendre aucun risque et se dit : « Un accident estvite arrivé ! » Quand il entend une deuxième porte se fermer danscette salle, il décide d'y entrer. Hélas, les jeunes ont refermé la portederrière eux. Il essaie de l'ouvrir avec ses outils du parfait petit cambrioleurqu'il a tou<strong>jours</strong> sur lui. Succès ! La deuxième porte lui poseplus de problèmes, car équipée d'un système de sécurité plus récentdont seul les prêtres, le personnel de la bibliothèque et la familleroyale ont les clefs. Il a beau à s'acharner sur la serrure, mais elle104


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.résiste et la porte blindée reste fermé. C'est alors qu'une idée luivient. La salle en dessous n'a pas ventilation vers l'extérieur et la fuméed'un incendie va fatalement se répandre en travers des minusculesouvertures de la porte blindée et les conduites de la ventilation.<strong>Les</strong> deux jeunes se sont en ce moment enfermés dans cette salle ensous-sol et ne peuvent en sortir que par la sortie de secours. Il vérifieque la sortie de secours de la salle où il se trouve fonctionne bienet qu'elle n'est pas équipé d'une alarme. Il vérifie l'extérieur etconstate qu'il y a un petit escalier qui monte et plus bas il voit uneautre porte de secours, celle de la salle où se trouvent les deuxjeunes. Il revient secrètement dans l'entre-sol où sont les toilettes, vavers l'armoire à balais et prend là quelques outils au hasard. Il rentreensuite de nouveau dans la salle d'archives, ferme la porte, met untorchon imbibé d'un produit inflammable dans une rangée de livres,vide deux bouteilles de rhum sur le plancher et y met le feu. Il sortde la salle par la porte de secours, la ferme, descend l'escalier jusqu'àl'autre porte de secours et coince le mécanisme d'ouverture avec lamanche du balai, qu'il venait tailler à la bonne mesure. Il laisse lereste des matériels volés sur place, remonte tranquillement l'escalieret s'imagine de ne pas être repéré, qu'il n’est, hélas pour lui, pas lecas.La ville d'Osuo a, comme toute ville d'une certaine importance,une bibliothèque d'un prestige nationale et d'une réputation connuede toute la fédération. C'est surtout l'entre-sol et le sous-sol qui abritedes documents les plus prestigieux, dont certains sont plusieursfois millénaires. Le bâtiment lui-même n'a pas tou<strong>jours</strong> été une bibliothèque,mais hébergeait jadis un haut dignitaire d'état. <strong>Les</strong> entresolset sous-sols servaient comme maintenant d'entrepôt d'archiveset de documents rares. Toutefois, même si la sécurité a été renforcée,un scandale a été déclenché par un journaliste. Il avait réussi àentrer dans les locaux censés sécurisés en utilisant des outils de cambrioleurrudimentaires acheté dans une quincaillerie. Le fait que leslocaux communiquent ensemble par le biais des conduites de ventilationest lui aussi une source de critique. L'argument est : si un105


La bibliothèque incendiée.incendie se déclare, le feu pourrait se propager par ces conduits etcela en dépit du fait que les salles devraient être ignifuges, dont beaucoupse doutent de l'efficacité. C'est donc à la fin de cet après-mididu sixième jour Lion que les premiers passants s'alarment, il y a de lafumée qui sort de l'entre-sol. Certains courent avertir la police et despompiers, tandis quelques-uns entrent pour faire sortir les gens quise trouvent tou<strong>jours</strong> à l'intérieur. Le système qui est censé rendre lessalles ignifuge s'avère effectivement inefficace. <strong>Les</strong> premières flammèchessortent par les fenêtres de l'entre-sol et le fumé devient visibledans la salle de lecture au-dessus. Pendant que les pompiers etpoliciers sécurisent le secteur, la rumeur se répand qu'Ussa et sonami de tou<strong>jours</strong> se trouvent justement dans ce sous-sol où il y a lefeu. Une vieille femme pleure et s'effondre, elle ne supporte plus lespectacle de désolation. Elle venait en fait de passer la main à sa filleet sa petite-fille. C'est sa famille qui gérait la bibliothèque depuisplusieurs générations.Enfermés au sous-sol, Ussa et Leith ne remarquent d'abord rienet continuent leurs recherches en prenant les livres les plus anciensun à un. C'est Leith qui remarque l'étrange odeur de fumée et dit àsa compagne :— Tu ne sens rien toi ?— Quoi donc ?— Il me semble que quelque chose brûle.— Oui, je le sens moi aussi.C'est alors que Leith va vers la porte blindée, mais quand ill'ouvre, c'est de la fumée qui entre dans la pièce et il dit :— Il y a un incendie Ussa. On doit partir par la porte de secours.Ussa court vers la porte de secours mais n'arrive pas à l'ouvrir etcrie à Leith :— Verrouille cette porte et viens m'aider à ouvrir celle-ci, c'esttrop dur pour moi. Je n'arrive pas à l'ouvrir.Leith vient lui secourir, mais il n'arrive pas plus qu'elle et dit :106


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Ils l'ont bloquée de l'extérieur. On ne peut plus sortir d'ici Ussa.Même si la porte blindée tient, on va mourir étouffé par la fumée.Pour Ussa les émotions viennent trop fortes, elle met sa tête surl'épaule de Leith et commence à pleurer. Leith cherche à la consolerqu'il y a tou<strong>jours</strong> de l'espoir, mais elle refuse d'y croire. Tout à coupil voit un spectacle assez insolite, une fille vient de traverser la porteblindée comme elle n'existait pas et vient à leur rencontre. C'estmaintenant qu'il la reconnaît, c'est Angélique. Angélique bouge leslèvres pour leur dire quelque chose, mais ils n'entendent rien. Angélique,par contre, semble pouvoir entendre leurs paroles, elle réagiten tout cas sur ce qu'on lui dit. La fumée, qui vient par les fentes deventilation, commence à venir assez épaisse dans la salle et c'est Angéliquequi leur montre comment avancer à quatre pattes pour nepas être incommodé par la fumée. Elle les guide vers l'arrière de lasalle et fait signe d'ouvrir un placard.— Iiiiih, s'écrie Ussa, quand deux squelettes tombent dès l'ouverturede la porte.Leith les transporte aussitôt en rampant vers la porte blindée.Ouvre celle-ci, pendant qu'Ussa lui crie d'arrêter et de revenir, etcherche à mettre les deux squelettes, malgré la chaleur et la fumée,de l'autre côté de la porte. Ce qu'il arrive finalement, avec un peu demal, à faire. Revenu vers les filles, restées à l'arrière de la salled'archives, il voit qu'Ussa ait entre temps vidé l'armoire et tente d'ouvrirune trappe. Pendant qu'il l'ouvre, elle se retourne et demandelui :— Mais tu es complètement fou, qu'est-ce que tu cherches àfaire ?— Mais c'est la logique même... Mais Leith n'arrive pas plus loin,Ussa l'interrompe et lui dit :— Logique ? Quelle logique ? Celle de nous faire cramer ?— Mais non, tu n'as pas compris que cet incendie ne soit pasnormal et qu'il y a quelqu'un qui veut nous tuer. Alors, je lui donnesatisfaction en mettant ces deux squelettes, ceux d'un homme etd'une femme, de l'autre côté de la porte. Ils font croire que c'estnous une fois l'incendie éteint et les quelques restes d'os trouvés.107


La bibliothèque incendiée.Et il repart au grand désespoir d'Ussa et d'Angélique quicommence à s'inquiéter aussi. En se retournant il dit à Ussa :— Viens, viens chercher les livres le plus précieux et prends enun maximum avec toi. Je fais pareil. Comme ça, on pourrait lesconsulter et ils seront peut-être sauvés.— Mais dépêche toi, Angelique est mort d'inquiétude, lui dit Ussa.Alors, viens, prend ce que tu as déjà et ne cherches pas d'autres,on a plus le temps. Je veux un Leith vivant sans livres plutôt qu'unLeith mort avec livres. Alors, tu viens ? Ne joue pas le héros s'il teplaît, Angélique t'attends impatiemment. Elle à aussi droit à unLeith vivant. Alors, viens !Une fois la trappe refermée, ils voient qu'Angélique possède,comme eux, un communicateur, ce qu'elle appelle téléphone mobileet dont elle se sert de la lumière de l'écran pour s'éclairer. Ils lasuivent dans ce couloir étroit, malodorant et lugubre sans qu'ilssavent où ils se trouvent. À droite, à gauche, descendre un escalier,remonter un autre jusqu'à ce qu'elle s'assoie sur un petit escalier justeen dessous d'une trappe et attend. L'attente semble interminable etau moment qu'ils entendent des petits bruits, ils appellent au secours.Après un moment la trappe s'ouvre et la surprise est totale.Non seulement qu'Angélique se dissipe dans l'air, mais ils voient unetête bien connue d’eux dans l'embrasure de la trappe, elle, aussi surprisequ'eux.Quand Pénélope entre, comme elle a l'habitude, comme un courantd'air dans l'estaminet d'Abdubu, elle voit les tristes mines desgens présents. En s'adressant à Abdubu, parce qu'elle est venuechercher des boissons pour sa dernière cliente et elle-même, elle demande:— Eh ! <strong>Les</strong> mecs, qu'est-ce qu'il y a ? Est-ce que l'incendie de labibliothèque vous met dans un tel état ? À propos, si vous voyezAjax, dit-lui de me venir voir. J'ai vu un type bizarre sortir de l'escaliermenant vers les sorties de secours tout à l'heure quand je passaisdevant la bibliothèque. Mais, dit-moi, qu'est-ce qu'il y a ? Pourquoivos tristes mines ?108


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Abdubu, qui a cherché un thé avec une double ration de rhumpour elle, lui dit :— Assieds-toi. Tu dois être très forte maintenant.— Mais, s'écrie-t-elle, tu es fou ? Je n'ai pas commandé un thérhum.Mais qu'est-ce que tu fous ?— Assieds-toi et sois très forte.— Mais, qu'est-ce qu'il y a ?— C'est l'incendie de la bibliothèque, lui dit Abdubu, c'est terrible.— Oui, lui répond-elle, c'est un véritable drame. Toutes cesbelles oeuvres brûlés. Parti en fumé. Pffft. Loin. Terrible.— C'est pire que tu penses, lui dit Abdubu, tu sais qui se trouvaientà l'intérieur ?— Non, dit-elle très inquiète, qui donc ?— Ussa et Leith, lui répond Abdubu, le sinistre a été circonscrittout à l'heure et d'après les premières investigations, des os calcinésd'une femme et d'un homme ont été trouvés devant une porte ferméeà clefs. Ils ont été pris au piège. De plus qu'à l'entrée, d'après lapolice, les restes d'un produit inflammable ont été trouvés.Pénélope n'arrive plus à retenir ses larmes et commence gémirdes petits mots incompréhensibles. Abdubu s'assoit à côté d'elle,pousse le thé-rhum vers elle et lui dit :— Bois cela ! Ils ont sûrement pu rejoindre le royaume de sabelle gauloise et son frère dont ils rêvaient tellement. Même s'ilsn'imaginaient pas que ce sera de cette façon.— Oui, dit Jou-el, demain ou après-demain on va tous au templed'Ozin pour leur parler.— Tiens, lui dit Abdubu, je t'offre les boissons pour ta cliente ettoi, tu peux me ramener les tasses demain si tu veux. Eh ! Dit-il ens'adressant à Jou-el, accompagne-la à sa boutique et reste un momentavec elle en attendant Ajax.Ils marchent silencieusement vers sa boutique. Pénélope n'arrivetou<strong>jours</strong> pas à maîtriser sa peine et commence à s'inquiéter au sujetde sa cliente. Comment le dire sans que Mélia, elle aussi, une trèsfervente admiratrice d'Ussa et son compagnon, s'effondre en pleurs.109


La bibliothèque incendiée.Une fois dans la boutique, Mélia se doute déjà qu'il y est arrivéquelque chose de terrible et regarde Pénélope d'une mine inquiète.— Que se passe-t-il ma chère, demande-t-elle.— Oh ! Mélia, c'est terrible, la bibliothèque a été incendié, qui estdéjà terrible en soit, mais ils ont trouvé des squelettes calcinés d'unhomme et d'une femme devant une porte. On pense, puisque Ussaet Leith se trouvaient en sous-sol pour consulter des oeuvres anciens,que ce sont les leurs.C'est en ce moment que Ajax entre dans la boutique et voit ce petitspectacle des deux dames en pleurs et demande :— Eh ! Tu n'as pas de rhum chez toi, Pénélope ? Vous en avezdrôlement besoin. Reste à côté de ta cliente, je vais le chercher.Quand il revient avec la bouteille, il verse une bonne rasade dansleurs tasses de thé et leur dit :— Dit-moi Pénélope, qu'est-ce que tu as vu exactement quandt'es passé devant la bibliothèque cet après-midi ?C'est là qu'elle se ressaisit et commence à raconter tout ce qu'elleavait vu, l'homme qui semble être le “client”, les deux autres faisant leguet. C'est en ce moment que Ajax demande à Jou-el d'aller chercherles copies des dessins faits l'autre jour. Le temps que Jou-elmets pour revenir, elle raconte les détails de l'après-midi. La clientede Pénélope, Mélia, se mêle de la conversation et c'est elle qui a égalementvu des types suspects dans les alentours de la bibliothèque.Jou-el, revenu entre temps, montre les dessins à Pénélope et Mélia,où les deux reconnaissent le “client” et également les deux autres faisantle guet. Pendant que Pénélope se remet doucement de ses émotions,elle recommence le masque de sa cliente et demande à Ajax debien vouloir chercher d'autres thés chez Abdubu, mais sans extracette fois.110


AUssa est bien vivante.ngélique et son frère Julien ont encore discuté jusqu'à tard lanuit. Tous les deux ont été très impressionné par l'arrivéeintempestive de leurs deux amis atlantes. Angélique, elle, est très inquiète,car elle se souvient très clairement son rêve de la nuit précédente.Puis, elle se rappelle trop bien ce qu'Ussa et Leith luiavaient dit à midi ; qu’ils comptaient aller à la bibliothèque après leurrencontre pour y consulter des livres anciens dans un local dontseule Ussa et sa famille ont les clefs. Son frère, plus pragmatiquecette fois, essaye de lui conforter un petit peu en disant :— Mais tu m'as bien dit, que dans ton rêve de la nuit passée,c'était toi qui a pu les sortir. Non ?— Oui, dit elle avec une petite voix, mais j'ai peur, très peur qu'illeur arrive quelque chose de terrible.— Garde espoir, ma petite soeur, la nuit te portera conseil.Bonne nuit et essaie de dormir. Ne te tourmentes pas. Ça va aller.Tu verras demain matin ce que te disent tes rêves. N'oublie surtoutpas à mettre un bout de papier et un crayon à côté de ton lit.Comme ça tu pourrais noter tes rêves dès que tu te réveilles. Maisessaye de penser maintenant à autre chose et dors.— Et toi, tu ne penses pas à ta petite Ussa. Tu n'inquiètes paspour elle ?— Oui. Bien sûr. Mais je ne suis pour rien. Je ne peux rien yfaire. Bien sûr que ça me chagrine, surtout le fait qu'ils vivent derrièreune barrière de onze mille huit cents ans. J'aimerais bien croire,comme tu le fais, que nous allons nous voir en chair et en os commecette tzigane de foire leur avait dit. Mais pour l'instant j'ignore parquel miracle qu'ils comptent franchir cette barrière de temps. Mais,ma petite soeur, concentre-toi peut-être sur les faits et des élémentsimportants, car ils semblent pourvoir te voir d'une façon ou uneautre. Mais cherche à dormir maintenant et ne te tracasses pas, sinontu vas encore passer une nuit blanche et faire des cauchemars.111


Ussa est bien vivante.— Bonne nuit, mon grand frère, dit-elle en mettant l'accent sur lemot “grand”.— Bonne nuit, ma petite soeur. Dors bien et à demain.Mais bien dormir ne sera pas pour tout de suite, pas pour Angéliqueen tout cas. Tourner à gauche, tourner à droite, coucher surdos, sur le ventre, de nouveau sur dos, de côté droit, de côté gauche,puis elle finit avec beaucoup de peine à s'endormir en position “chiende chasse”. Aussitôt endormi, elle commence un nouveau rêve. Angéliquese trouve soudainement dans une pièce joliment décorée, visiblementle travail d'une femme avec goût, où se trouvent Ussa etLeith assis autour d'une table en attendant un repas. C'est Ussa quila voit en premier et la salue. Mais c'est pour elle pareil comme lanuit précédente, elle ne peut rien dire. Ce qu'elle tente de dire, n'estpas perçu par les autres. C'est à nouveau Ussa qui parle et dit à Leithqui n'a pas encore perçu la présence d'Angélique :— Tiens Leith. C'est Angélique qui nous rend une petite visite.— Ah. Bon, dit-il en regardant autour de lui pour voir où elle estet lui dit : salut mon amour. C'est gentil d'être venu nous voir. Estceque tu nous entends ? Nous t'entendons pas.— Eh, dit Ussa, je vais prévenir Pénélope, sinon elle va croirequ'il y a des fantômes dans sa maison.Seul avec Angélique, Leith continue :— C'est super que tu peux venir nous voir, mais comment faistu? Tu n'as pas de dispositifs de communication comme nousavons le temple d'Ozin.Il n'obtient comme réponse qu'un haussement d'épaules et deslèvres qui se remuent, mais sans le son. C'est là qu'il comprend quela présence de sa copine n'est pas complète et qu'il doit poser desquestions sur lesquels elle peut répondre avec des gestes. Quand illui demande si elle l'entend, elle fait oui de la tête.— Merci de nous avoir sauvé la vie la nuit dernière, comment astufait cela ?Elle répond avec un haussement d'épaules pour lui dire qu'elle nele sait pas.— Tu ne le sais pas toi-même, lui demande Leith.Elle fait oui de la tête.112


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Alors, je t'explique ce que je crois. <strong>Les</strong> sbires de Ra-Ta, le BSIdonc, cherchent à museler toute personne qui sait quelque chose surles événements à venir. Pour l'instant, nous ignorons comment ilsont su qu'Ussa et moi allions visiter la bibliothèque. Mais c'est clairqu'ils ne reculent même pas quand il s'agit d'éliminer un membre dela famille royale. Ils craignent sûrement de la panique quand la nouvelled'une catastrophe mondiale se répand. Je ne sais pas si tu avaisremarqué, mais les meurtres des maîtres Ar-Arart et Amilius fontpartie de leurs plans. Puis c'est maintenant nous qui savons trop seloneux et c'est pour cela qu'ils ont essayé de nous brûler vifs. Jedois te dire que mettre ces deux squelettes de l'autre côté de la porten'était pas une partie de plaisir et il me fallait beaucoup de couragepour le faire. Mais je crois que c'était une bonne idée, car tout lemonde croit maintenant, à cause de ces quelques os calcinés, quec'était nous. Je suis navré pour la peine que j'ai causée au peuple,mais nous n'avons pas d'autre solution. Ce ne sont que Pénélope etAjax, qui va venir dans un instant, à être au courant. Maintenant jevais te demander quelque chose, Ussa, même si cela lui fait de lapeine, est entièrement d'accord. Tu ne dois rien dire à personne,même pas au papa d'Ussa, le roi Bel-Ra donc. Dit-lui que noussommes en sécurité, puis c'est tout. Tu ne dis rien d'autre à personne.J'espère que tu as compris. Je suis d'ailleurs navré pour cequ'il est passé cette nuit, surtout que toi, et Ussa encore plus, très inquiètes,craignaient pour ma vie. Tiens voilà, Ussa et Pénélope quireviennent avec les plats. Je ne peux malheureusement pas t’en offrir,car tu n'es pas physiquement là.Pendant que les trois amis s'installent autour de la table dans lecoin à manger, Pénélope dit à Leith :— Elle est belle ta gauloise, Leith. Elle a le même âge que toi jecrois, non ?— Oui, dit-il, un peu plus, car elle est du mois du Taureau et moije suis celui du Gémeaux.— Et toi Ussa, lui demande Pénélope, ton Julien, car c'estcomme ça qu'il s'appelle, n'est-ce pas. Il a quel âge ?113


Ussa est bien vivante.— Dix-huit ans comme moi et pas seulement ça, il est du mois deBalance tout comme moi. Deux Balances ensemble, tu te rendscompte ?— Et toi, tu t'appelles Angélique, n'est-ce pas, dit-elle en s'adressantà une Angélique translucide.Qu’elle confirme en faisant oui de la tête.— Tu n'as pas un beau copain dans la trentaine pour moi ?Non ? Si t'en connais un, je viendrai volontiers avec eux dans tonpays, même si je ne sais pas trop comment-on peut y aller.C'est alors qu'elle commence à questionner Angélique sur lesfréquentations de ses parents, les parents de ses copains et copinesen posant les questions telles, qu'Angélique peut tou<strong>jours</strong> répondreavec oui, non ou je ne sais pas. C'est au même moment que la sonneriede la porte tonne, que l'image d'Angélique commence à se dissoudrepour disparaître complètement. Pénélope descend ouvrir etrevient dans la pièce avec Ajax, car c'était lui qui a sonné. Il ne peutque croire ses trois amis à la parole qu'il y eut la belle gauloise là,juste avant qu'il entre.Angélique, réveillé par un bruit de sonnerie, cherche fébrilement ànoter ce qu'elle ait rêvé et constate qu'elle a été réveillée par la sonneriede son téléphone mobile qui lui avertit de l'arrivée d'un messagetexto. « Merde, » dit-elle pour elle-même, « un faux numéro ! » et effacele message. Elle regarde furieusement son réveil, montrant le chiffre“03:32”, et essaie de se ré-endormir.C'est au début de ce matin du septième jour Lion que l'homme,connu par son nom de code “Aker”, vient de poser sur son bureaule message reçu plus tôt ce matin en provenance de l'état de Mayra etle range avec les journaux en provenance de ce même état, car lesnouvelles ne sont pas bonnes. C'est en ce moment qu'une employée,sa secrétaire, vient de poser les journaux d'origine Muri, l'étatdes Celtes du nord de la fédération. Là, les titres sont sans ambiguïtés.Ils y figurent les dessins de tous leurs agents présents dans lesétats de Muri et Mayra avec la mention dans leur langue et en rougesur deux lignes : “WANTED, dead or alive” et en dessous, en gras et114


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.souligné “PREFERABLY DEAD.” Il relit le petit message de ce matinoù il est marque avec une simplicité déconcertante : « Troissuspects éliminés. » Il regrette de ne pas été plus clair en donnant lesinstructions à l'agent censé intercepter le dénommé Ach. Il saitmaintenant, qu'il aurait dû lui accorder la possibilité, ou plutôt luidonner l'ordre, de fabriquer un accident mortel à cet agent, si cela serala seule façon de l'arrêter. Il craint avant tout, la réaction de sonchef, Seth, qui n'est pas un exemple de compassion et de tendresse,mais plutôt le contraire. Puis, il n'y a pas seulement Seth, mais aussile roi Ra-Ta lui-même qui ne tolère pas qu'on s’en prend aux famillesroyales. C'est surtout le fait que ce dénommé Ach a réussi à fairebrûler vifs deux adolescents : la très populaire princesse Ussa et soncompagnon et ami d'enfance, Leith. Il range les journaux et quitteson bureau pour la réunion avec son chef, Seth, qui doit être au bureauentre temps. Il craint, avant tout, cette réunion, car Seth, toutcomme le roi Ra-Ta lui-même, ne va pas apprécier ce qu'ils écriventles journaux. Surtout les journaux des états Mayra et Muri qui nesont pas sous contrôle d'état et libre d'écrire ce qu'ils veulent pourautant que ce soit la vérité. Il sait qu'en cas de problèmes, c'est lui lefusible et c'est pour lui la cour martiale avec son verdict prévisible.Il sort de son bureau, descend le grand escalier, traverse la cour intérieureen suivant les colonnades et frappe à la porte du bureau deson chef.— Entrez !Il entre dans la pièce et en voyant qui est présent, son coeur seserre. Mis à part son chef, il y a le roi en personne qui s'y trouve etl'attend avec les journaux devant lui au bureau de Seth. Le roi Ra-Ta, en grand uniforme, qui est resté debout derrière Seth, ne luilaisse pas le temps de se présenter dignement et lui dit manifestementtrès mécontent :— À genoux ! Là ! Taisez-vous, attendez et ne répondez que surles questions que l'on vous pose. Le roi saisisse un des journauxprésents sur le bureau et continue :— Nous avons tout reçu ce matin un petit message disant :« Trois suspects éliminés. » Vous appelez ça des suspects ! La futurereine de Mayra avec son ami ! Deux adolescents qui plus est ! Et115


Ussa est bien vivante.par comble de malheur, cela ne vous suffit pas ! Il faut que monsieurfasse brûler des oeuvres anciens de plusieurs fois millénaires,dont certains exemplaires étaient uniques et irremplaçables.— Mais..... Le roi ne lui laisse pas finir sa phase et lui lance :— Je vous avais dit de ne parler qu'en cas d'une question posée etpas autrement. Taisez-vous. Vous n'êtes qu'un incapable. Au lieude me monter une section d'un service secret digne de ce nom, vouscollectionnez des malfrats organisés en bande qui ne savent que voler,escroquer, détruire et tuer juste pour le plaisir de tuer. Il mesemble que l'opération “silence” a bien pris de l'eau. Toute la populations'interroge à présent sur les événements curieux survenus ces<strong>derniers</strong> mois. L'opération a fait beaucoup trop de bruit ces <strong>derniers</strong><strong>jours</strong> et ce sont vos malfrats qui sont les principaux coupables.Vous savez ce qu'on fait dans l'état de Mayra avec ces genres de personnes?— Non sire, répond-il.— Eh ! Bien, je vais vous le dire. Comme vous devez le savoir,les gens du “La loi d'une” ne peuvent pas tuer eux-mêmes, leur religionle leur interdit. Or les fourmis par exemple n'ont pas cettecontrainte. En particulier les rousses, qui sont organisées en fédérationsde plusieurs citées, tout comme nous. Il n'est pas plus simpleque d'attacher un condamné sur une fourmilière. <strong>Les</strong> fourmis vontavertir toute leur fédération et se régaler de sa chair en ne laissantque les os et des tendons. <strong>Les</strong> agents, vos malfrats donc, dont onpeut voir les dessins dans ce journal, vont tous subir ce traitement etje peux vous garantir que leur mort sera lente et douloureuse. J'aienvoyé un ordre très strict à toutes les polices et fonctionnaires del'ordre public de ne pas s'y opposer. <strong>Les</strong> Celtes réservent, eux aussi,un traitement particulier à ce genre d'individu ; ils l'attachent aux poteauxet laissent le travail aux corbeaux et autres rapaces. Alors, levez-vouset venez ici, dit-il en désignant le bureau où il se trouve unefeuille de mise en examen pour la cour martiale à côté d'une petitearme à feu avec une seule balle.— Alors, dit le roi au dénomme Aker, prenez un de ces deux.Vous pouvez vous retirer dans la pièce à côté, là derrière cette porte.Si vous choisissez la cour martiale, ce sera le déshonneur de votre116


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.famille, sinon il y a eu un petit accident regrettable et l'honneur devotre famille restera sauvé. Est-ce que je me suis fait bien comprendre?— Oui sire, répond-il, saisisse l'arme et va dans la pièce désignéepar le roi un instant plus tôt où on pouvait entendre un claquementet un bruit sourd d'un corps tombant par terre.— Seth, dit le roi, faites-moi évacuer ce corps dans la pièce à côtéet organisez-lui un bel enterrement avec tout le tralala et honneurs.Puis en ce qui concerne l'opération “silence” cherchez à éviter les dégâts,communiquez à la population que ce sera comme les deux casprécédents. Dites-les qu'il n'y a pas grand danger, mais que lestemps vont être durs. Il en reste assez de scientifiques avaresd'argent pour confirmer cette thèse, surtout que l'on leur dit l'importancede devoir éviter une vague de panique. Suis-je assez clair ?— Oui sire. À votre service.— Gardes, nous allons rentrer, préparez-moi la voiture.Ce n'est pas la joie, ce matin au palais royal. L'atmosphère y estplutôt pesante. Dans les appartements privés du couple royal, Sélénéet Pâris de Bel-Ra prennent seuls leur petit-déjeuner, en silence,sans la présence des serviteurs, qu'ils ont congédié. La reine, Séléné,doit régulièrement sécher ses larmes avec un mouchoir, qu'elle a misà côté de son assiette. Elle mâche sans trop de goût sa tartine confiture,un met dont elle se raffole autrement. Le roi, Pâris, n'est pasmieux loti, il n'a fini son assiette qu'à moitié. Il le repousse et en regardantson épouse, il dit :— Qu'est-ce que nous avons fait pour offenser Ra d'une telle façonqu'il nous prend notre fille et son compagnon ?— C'est terrible, gémit-elle, d'être brûlé vif. J'espère qu'ils n'ontpas trop souffert et qu'ils soient morts étouffé par la fumée avantd'être brûlé.— Êtes-vous d'accord, chère épouse, d'accorder à son compagnonLeith un enterrement royal. Je préfère les enterrer ensemble.Ils étaient inséparables de leur vie, les laissons-nous rester ensembledans la mort.117


Ussa est bien vivante.— Comptez-vous, cher époux, leur faire un mariage posthume ?— Ce sera une bonne idée, je la discuterai avec les dignitaires religieux.C'est en ce moment qu'un serviteur entre avec un message, dontle roi ne reconnaîtra pas tout de suite l'émissaire.— Un message urgent sire, dit-il.— Allez-vous en ! Je ne suis là pour personne.— Mais... Le roi ne lui laisse pas finir sa phrase et dit :— Partez et laisse-moi ce message, je le regarderai plus tard.C'est quand le serviteur pose le rouleau avec le sceau royal de Ra-Ta sur la table à côté de son assiette, terminé à moitié, que le roicomprend qu'il faille mieux le lire tout de suite et ne pas attendre. Ilbrise le sceau, déroule le parchemin royal et lis :Cher confrère,Je suis aussi peiné que vous et je vous présente mes sincèrescondoléances pour la perte de votre fille, la future reine, et sonami.J'ai donné l'ordre à tous les services d'ordre, les polices de sécuritéd'état et de l'armée de ne pas s'opposer à la colère populaire.Je vous encourage à identifier les responsables de cet ignoble attentat,tels qu'ils ont apparus dans vos journaux, et de laisserfaire la population. Mais faites attention, la plupart de ces soidisantagents secrets avèrent être des anciens malfrats issus desBelzebubs et sont très dangereux. En connaissant la qualité devos services, n'hésitez surtout pas à les poursuivre, y comprisdans mon état, je vous donne carte blanche.En ce qui concerne votre enfant et son compagnon, j'imagineque vous allez les enterrer ensemble. Acceptez­vous ma présenceà l'enterrement ? Si oui, communiquez­moi la date, je viendraiassister en personne à la cérémonie.Recevez, cher confrère, l'expression de ma respectueuse amitié.Au nom de mon peuple, Ra­Ta.118


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Pâris de Bel-Ra lève la tête et regarde son épouse qui n'arrête pasà s'essuyer ses larmes et lui dit :— Je vais annuler tous mes rendez-vous de la journée et jecompte me rendre au temple d'Ozin, est-ce que vous venez avecmoi, Séléné. On pourrait parler à nos chers disparus. Ce sont peutêtreeux qui savent le mieux ce qu'on doit faire maintenant.— Je ne sais pas si j'ai la force mon cher, dit-elle entre deux sanglots.Quand il regarde vers la porte, Pâris de Bel-Ra voit qu'unmembre de la garde royale attend patiemment avec une personne, visiblementun responsable de la police scientifique, que l'on leur accordele droit d'enter dans la pièce.— Avancez, quelle nouvelle me portez-vous ?— Un sujet difficile sire, dit l'homme, il s'agit les os que l'on atrouvés dans l'entre-sol.— Je ne veux rien savoir. Mettez-les chacun dans un cercueil etlaissez-nous tranquille.— Mais sire ce n'est pas possible, parce que... Mais le roi ne luilaisse pas finir sa phrase et lui répond :— Allez-vous en ! Notre peine est trop grande en ce momentpour discuter de ces genres de choses.— Mais sire écoutez-moi s'il vous plaît.— Je n'ai pas envie de discuter du sujet maintenant, s'il vous tientà coeur, faites-moi un rapport écrit et je le lirai plus tard.— Oui sire.Une fois l'employé de la police scientifique partie, le roi rappelleson garde et lui dit :— Préparez-nous une voiture, nous allons au temple d'Ozin.Faites-nous une réservation exclusive de la salle centrale où il y al'écran de communication.— Oui sire, quand voulez-vous partir ?— Dans un demi-heure.— Séléné s'il vous plaît, venez avec moi parler à nos enfants, c'esttrès important.Ce que le couple ne sait pas encore, c'est qu'une petite surpriseleur attend au temple.119


Ussa est bien vivante.Angélique, fâché à être réveillé en plein nuit par un texto bidon,essaie de mettre de l'ordre, pas seulement dans ses notes, mais aussidans sa tête. L'endroit dont elle avait rêvé était sûrement le salon del'appartement de Pénélope, qu'elle connaît maintenant. Elle entendsoudainement des bruits derrière elle dans sa chambre. Elle se retourneet est aussi surpris que le couple royal Bel-Ra qui s'y trouve.— Bonjour, dit-elle en regardant les deux visiteurs un peu plus attentivementet poursuit : vous êtes le papa d'Ussa, son portrait craché.Et en s'adressant à la dame : dans ce cas, c'est vous la maman,n'est-ce pas.— Oui en effet, lui répond Pâris de Bel-Ra, nous sommes sesparents et nous comptons à lui parler. Nous ne comprenons paspourquoi c'est vous qui soit venu nous parler.— Moi ? Venir ? Mais c'est vous qui venez de débarquer dansma chambre. Je commençais justement à trier mes notes, car j'étaisen contact avec Ussa et Leith tout à l'heure. La seule chose que jesuis autorisé à vous dire, c'est bien la célèbre phrase normande, la régionoù j'habite donc, « bien que oui, que non, » ou le « ni oui, ni non. »— Vous voulez nous dire que nos enfants ne sont pas morts, luidemande Séléné.— C'est justement ça que je voulais dire, lui répond Angélique.Julien, en entendant parler dans la chambre de sa soeur, y entresans frapper, reste surpris devant le spectacle et lui demande :— Tu as encore de la visite ? Mais les présente-moi.— Monsieur de Bel-Ra, madame, voici mon frère Julien, l'amoureuxde votre fille. Julien je te présente monsieur et madame de Bel-Ra, tes futurs beaux-parents.— Enchanté, leur dit Julien.— Je suis ravi de faire votre connaissance, Julien, lui dit Séléné.— Moi également, dit Pâris.— Je suis désolé Pâris, lui dit Angélique, je peux utiliser votreprénom n'est-ce pas, mais je ne peux rien vous dire de plus, pourvotre propre sécurité, celle de votre fille et son compagnon. Letemple où vous vous trouvez en ce moment est peut-être surveillépar des gens pas trop honnêtes. Je suis certaine que mes paroles nepeuvent, contrairement aux vôtres, pas être écoutés. Faites donc120


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.semblant d'être très peiné par la disparition de votre fille et armezvos gardes. C'est pour votre propre sécurité. Ne sortez pas de cetemple avant vos gardes seront revenues avec les armes et ne rentrezqu'après chez vous.Julien, après avoir écouté encore un moment passivement pendantque sa soeur continue à discuter avec un couple royal commeils étaient des copains de lycée, regarde sa montre et dit :— Je peux vous laisser ? Je dois aller au club nautique. On m'attendlà-bas. Au-revoir à vous, au-revoir ma petite soeur.— À tout à l'heure mon grand frère, dit Angélique en mettantl'accent sur “grand”.— Au-revoir Julien, lui dit Séléné, vous devez beaucoup plaire àUssa. Elle aime des garçons comme vous.— Au-revoir Julien, lui dit Pâris, vous ressemblez beaucoup àLeith. Ussa nous a cassé les oreilles avec son voyage sans retourvers un royaume inconnu où elle et Leith allaient se marier avec unfrère et sa soeur. Je suis très enchanté de vous connaître, même si jen'ai pas la moindre idée où vous vous trouvez.— Onze mille huit cents ans dans votre futur, dans un pays quevous appelez la Gaulle, lui répond Angélique.Elle continue à lui narrer ce qu'elle sait sur l'avenir de leur pays etles événements à venir, mais elle ne se montre pas trop optimiste ence qui concerne les conséquences de la collision de la comète avec laterre.— Voulez-vous dire par cela que cette théorie avancée par lesmaîtres Ar-Arart et Amilius n'est pas une invention de leur part etqu'une réelle catastrophe va se produire ?— Oui mon cher Pâris, dans cinq à six <strong>jours</strong> tout au plus.C'est en ce moment que le roi jette en regard sur le globe-lampesur le bureau d'Angélique et lui demande en désignant sa lampe debureau :— Je perçois qu'un changement important a eu lieu entre temps.Je ne vois plus notre pays sur ce globe-là et les pôles ne sont pas aubon endroit non plus.— Tiens, dit-elle, Leith m'a fait le même réflexe. Vous devez demanderle contact avec les maîtres, ils seront en mesure de vous121


Ussa est bien vivante.communiquer plus de détails. Mais dites, par précaution, vousmêmele minimum, laissez-les parler. Nous, mes copains, copines,mon frère et moi, allons demain chez une voyante qui travaille avecune boule de cristal pour prendre contact avec vous et les vôtres.— À demain, lui dit Pâris.— À demain Pâris, au-revoir Séléné, leur dit Angélique. Oh oui,avant que je l'oublie, faites bien analyser les os calcinés par des expertsde la police scientifique, vous allez avoir une surprise. Puis ence qui concerne votre peine, jouez la comédie encore quelques <strong>jours</strong>et ne parlez surtout pas ici dans le temple au sujet de votre fille ni deLeith. Attendez être chez vous ou dans un lieu sûr. Dehors entouréde vos gardes par exemple.Le couple royal a, après avoir envoyé des gardes chercher lesarmes, une longue conversation avec les maîtres Ar-Arart et Amiliusconcernant les événements à venir et les éventuels mesures àprendre. Une fois dehors et suffisamment éloigné du temple, Sélénélance à son époux :— Je suis très attristé que nous n'avons pas pu voir Ussa et soncompagnon. Normalement, on peut dans ce temple communiqueravec ceux qui sont morts, non ?— Ce temple permet uniquement la communication avec desmorts. Ce qui pourrait signifier qu'Ussa et son compagnon ne sontpas morts. Je constate d'ailleurs, que ce temple permet apparemmentaussi la communication avec des êtres vivant ailleurs, dansd'autres, comment le dire, présents, peut-être.— Angélique, pourquoi n'a-t-elle pas dit où se trouvent les enfants?— Je crois, lui répond le roi, qu'Angélique a raison. Elle, Angéliquedonc, ne peut nous communiquer l'endroit où se cachent lesenfants et cela pour leur et notre sécurité. J'ai dû écouter le fonctionnairede la police ce tout à l'heure. J'espère qui m'a fait un rapportconfidentiel, sinon je le convoquerai. Rappelle-moi que jeconvoquerai le préfet Assen-Ni pour l'après-midi. Je lui donne carteblanche pour nettoyer notre pays de ces malfrats.— N'oubliez surtout pas à contacter Ajax. Lui est l'homme de lasituation, lui dit Séléné.122


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Pénélope, très mal à l'aise ce matin, chipote son petit-déjeunerqu'elle mange sans trop de goût. Elle mange parce qu'elle doit avoirmangé le matin pour pouvoir travailler. Elle espère avoir un peu desoutien, de compassion de part de ses clientes, qui, comme elle, ontde la peine à cause de la disparition de la princesse héritière et soncompagnon. Elle laisse une partie de son assiette là et descend unétage pour aller ouvrir sa boutique. Elle commence, comme toutesles autres matinées, à sortir ses ustensiles de l'armoire, quand soudainementelle entend des appels “au secours” en dessous d'une autre armoire.Elle se souvient qu'il y a une trappe et un escalier vers descaves en sous-sol, mais pour dégager cet accès, il lui faut vider l'armoireet ouvrir la trappe qui se trouve là au fond. Elle commence àla vider, pendant que les cris d'au secours continuent, et arrive finalementà ouvrir la trappe. C'est le choc. Là-dessous il y a trois personnes,Leith et deux filles dont elle reconnaît une, Ussa, maisl'autre, une grande fille blonde aux allures athlétiques et encorejeune, à peu près l'âge à Leith, elle ne la connaît pas. Le comble estque cette fille commence à se dissiper lentement en air pour disparaîtrecomplètement. Leith et Ussa arrivent avec son aide que difficilementà sortir de la trappe, qui est assez étroite. C'est Leith qui luiparle en premier.— Salut Pénélope, il y a quelque chose qui ne va pas ? Tu as unetriste mine. Que arrive-t-il ?— Mais, lui répond Pénélope, on est tout convaincu que vousétiez morts. On a trouvé vos squelettes calcinés. Mais commentest-il possible que vous soyez là. Raconte-moi.Leith et Ussa lui racontent ce qu'il leur est arrivé. Le feu, la portede secours bloquée, l'apparence d'Angélique leur guidant vers unesortie secrète, l'idée farfelue de Leith de poser ces deux squelettesd'étude de l'autre côté de la porte et de laisser cette porte fermée àclef, le périple dans les couloirs sous-terrains et finalement l'attentesous la trappe. Leith finit avec les mots :— Ne dis surtout rien à personne, joue la comédie de la femmeen peine et appelle d'urgence Ajax.— Tu peux, je peux te tutoyer n'est-ce pas, lui dit Ussa, nous cacherquelques <strong>jours</strong> j'espère. Pour l'instant seuls Angélique, toi et123


Ussa est bien vivante.Ajax peuvent savoir où nous sommes. Laisse le reste du mondecroire que nous sommes mortes. C'est mieux pour notre sécurité.Je suis certaine que mes parents après les premiers moments depeine vont essayer de communiquer avec nous au temple d'Ozin.C'est là qu'Angélique leur expliquera la situation.— Aides nous à remonter les livres, lui dit Leith, on a ramenéquelques-uns. <strong>Les</strong> plus anciens et les plus précieux.— Quelques-uns ? Dit Ussa, des tonnes ! J'ai encore mal aubras. Tu aurais dû voir le spectacle. Nous, Angélique et moi,mortes d'inquiétude et monsieur, ici présent, se balade tranquillementdans la fumée à chercher des livres, comme s'il était en baladede santé à la campagne.— Le plus difficile, dit Leith, c'était de mettre ces deux squelettesde l'autre côté de la porte blindé. Il y avait déjà un brasier infernalavec énormément de fumée, mais il fallait faire une mise en scène. Ilne suffisait pas de juste mettre les squelettes, il fallait les mettre telque ça ressemble à deux personnes qui cherchaient à fuir le feu.— Alors, là, dit Pénélope, tu as réussi. On n'entend parler dansla ville que de vous et de votre mort. Puis, il paraît, la rumeur circuleen tout cas, que Ra-Ta ne s'oppose pas à la colère populaire, qui signifieen texte clair que les agents dont les dessins ont paru dans lesjournaux ont été déclarés hors la loi.— On peut rester ici pendant quelque temps alors ? Tu peuxnous cacher, lui demande Ussa.— Bien sûr, mais aidez-moi d'abord à remettre tout ça à sa place.Je ne veux pas que mes clientes soupçonnent quelque chose. Ahoui. On doit monter vos bouquins d'abord. Montez-les au grenier.C'est là que vous allez vous installer pour l'instant et après on verra.Vous verrez, ce n'est pas le palais royal, mais il y a tout le confortnécessaire. J'y loge ma visite quand la famille de la campagne tropéloignée pour rentrer le même jour vient me voir. Je viens vousavertir quand vous pouvez descendre pour le dîner. Je vais essayerde contacter Ajax et à l'inviter pour le dîner, comme ça, on pourraitdiscuter un peu. Vous pouvez rester ici, dans mon appartement, àcondition de ne pas faire du bruit, sinon montez au grenier, là vousserez tranquille.124


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Ussa et Leith montent ensuite avec les livres et la sacoche d'étudiantde Leith au grenier où ils restent à fouiner dans livres et continuentainsi le travail commencé la veille au soir dans le sous-sol de labibliothèque. Leith est, même si les recherches restent vaines jusqu'àlors, de l'avis que les soi-disant mythes ne le sont pas et sont le résultatdes calculs basés sur les observations à long terme faits par lesanciens antérieurement à la date de la dernière destruction. C'estprécisément la raison pour laquelle il a ramené les oeuvres les plusanciens. Ils ne voient pas le temps passer et c'est Pénélope qui lesappelle pour le dîner.— Alors, vous vous n'ennuyiez pas trop là haut ?— Non, lui répond Leith, on n'a pas vu le temps passer. La lecturede ces livres anciens prend du temps, tu sais.— Alors, tu as trouvé ce que tu cherchais, demande-elle à Leith.— Non, pas encore, mais on garde l'espoir.— Mais, qu'est-ce que tu cherches exactement.— Des références et des calculs faits par les anciens, répond Ussa,car Leith est d'avis qu'ils avaient des connaissances astronomiqueset mathématiques supérieurs aux nôtres. Il pense notammentque ces soi-disant mythes ne sont rien d'autre que leurs avertissementsà leurs descendants.— Des avertissements déguisés en mythes, demande Pénélope.— Oui, répond Leith.Pénélope va ensuite à la cuisine pour préparer le repas et entendles deux discuter dans sa salon comme il y avait une troisième personne.C'est Ussa qui vient soudainement à la cuisine et lui dit :— Tu peux venir une minute, tu dois faire connaissance à unepersonne.— Qui donc ?— Ce n'est pas un fantôme qui est dans ton salon, mais c'est Angéliquequi a répété son exploit d'hier soir, elle est revenue nous direbonjour.— Prends ces deux plats là, le dîner est prêt, dit-elle à Ussa.Quand Pénélope entre accompagné d'Ussa dans le salon, les platsde la nourriture dans les mains, pour s'installer à table avec les autres,125


Ussa est bien vivante.elle y voit une fille blonde et assez grande, presque aussi grande queLeith. Elle et lui discutent, c'est à dire c'est lui qui parle et c'est ellequi répond avec des gestes sans qu'elle parvient à parler. Elle lui ditbonjour, puis Angélique lui répond avec des gestes. C'est alors quePénélope commence à lui questionner de telle sorte, qu'elle peut répondreen faisant oui ou non de la tête. Pénélope est surtout ravis,qu'elle répond affirmativement la question si elle ne connaît pas uncopain pour lui dans la trentaine, voire la quarantaine. La conversationse termine sur la sonnerie de la porte d'entrée, car Angélique finit,comme elle a fait sous la trappe, par venir de plus en plus transparentpour se dissiper complètement. Pénélope, qui descendait ouvrirla porte, revient avec Ajax.— Salut tout le monde, lance-t-il, vous allez bien ?— Oui, répond Ussa, ça va, mais il y a mieux.— C'est qui de vous deux qui a eu l'idée de mettre ces deux squelettesderrière la porte blindée ? Le pays entier croit que vous étiezbrûlé vifs.— Oh ! C'est moi, lui dit Leith, je me suis aperçus qu'il y avaitdes gens, tu sais lesquelles, qui voulaient nous tuer à tout prix. J'aivoulu donc leur faire croire que leur combine avait marché pendantle temps nécessaire de les identifier et de les neutraliser.— Alors, là, tu as réussi, lui répond Ajax, mais le coup était unpeu dur pour les parents d'Ussa, ils ont beaucoup de peine et necroient tou<strong>jours</strong> pas que vous êtes bien vivant.— Je ne suis pas seulement navré, lui dit Ussa, mais très peiné deleur faire subir un tel traitement, mais je crois que Leith a raison.C'est mieux pour notre sécurité et celle de mes parents.— C'est ce qu'Angélique leur avait dit, répond Ajax.— Angélique ? Lui demande Ussa, comment ça ?— Eh bien, ils se sont rendus au temple d'Ozin pour prendrecontact avec vous et c'est elle qui est venue leur parler. Elle n'a cependantpas voulu leur dire si vous étiez vivants ou morts ni où vousvous trouvez. Elle a également dit à votre père qu'il doit armer sesgardes et de ne parler des événements qu'en lieu sûr.126


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, on vient de parler à Angélique nous-mêmes il y a un moment,lui répond Ussa. Elle est d'avis qu'on doit éteindre nos communicateurspour éviter qu'ils peuvent nous localiser par ce biais.— Je vais prendre les mesures nécessaires et j'essayerai deconvaincre vos parents que vous êtes en sécurité.C'est en ce moment que Pénélope les appelle depuis la cuisine, oùelle était partie pour y chercher quelque chose, pour demander siquelqu'un d'entre eux ne peut pas mettre un plat de plus à table pourAjax. Ils discutent pendant le repas des différentes choses et surtoutl'événement de tout à l'heure, le fait qu'Angélique soit venu leur parler.C'est Ussa qui se sent plutôt mal à l'aise et devient tout rougequand ils commencent à lui questionner sur Julien, le frère d'Angélique.Ça lui fait par contre vraiment plaisir que ses parents ont pufaire sa connaissance au temple pendant qu'ils ont parlé à sa soeur.Ce qu'il lui fait sourire, c'est le fait qu'Angélique se soit moqué duprotocole et a parlé à un couple royal comme elle le fait à ses profs,copains et copines d'école.127


Le “client”Lorsqu'il arrive au Jardines, Ajax voit qu'il y a déjà son compliceJou-el en grande discussion avec Abdubu. Il se met à la mêmetable qu'eux, devine le sujet de leur conversation et demande :— C'est au sujet de l'incendie de la bibliothèque ?— Oui, lui dit Jou-el, il y a plusieurs personnes qui ont vu notre“client” à proximité quand l'incendie s'est déclaré.— Oui, dit Ajax, c'est cela que Pénélope m'a dit il y a juste unmoment. Je viens de chez elle, elle m'a offert le dîner. On a mangétous les deux et discuté de cet ignoble attentat. C'est elle qui a égalementvu ce même individu qui traînait dans les rues, juste avant lemeurtre de Maître Amilius.— Ce n'était pas elle qui avait vu sortir notre bonhomme del'escalier menant aux portes de secours, lui demande Abdubu.— Je crois, lui dit Jou-el, qu'elle nous avait parlé de ça hier aprèsmidi,quand on dut l'amener chez elle.— J'ai entendu dire, dit Abdubu, que la sortie de secours du soussola été bloqué avec un manche à balai coupé à la bonne taille.— C'est possible, lui répond Ajax, mais je n'ai aucune confirmationde cette rumeur.— Il n'y avait plus, lui demande Jou-el.— Non, quand la police est venue inspecter les locaux et les environnements,ils n'ont rien trouvé de suspect.— C'est quand même curieux qu'ils n'ont pas pu sortir par lessorties de secours. Ussa avait les clefs du sous-sol et ils auraient pudescendre là et attendre les secours, que pensez-vous ?— C'est là le problème, lui répond Ajax, la salle du sous-sol,même considéré à être ignifuge, était envahie de la fumée. Puis il y aquelque chose d'autre qui ne colle pas. C'est que l'armoire au fond aété vidée, comme si quelqu'un y cherchait quelque chose.— La serrure de la porte de secours du sous-sol, a-t-elle étéinspecté, lui demande Jou-el.129


Le “client”— Non, je ne crois pas, mais il faut que je le vérifie auprès de lapolice scientifique.— <strong>Les</strong> empreintes digitales, ont-ils été pris dans le sous-sol ?— Oui, mais ce sont ceux d'Ussa, Leith et le personnel spécialiséde la bibliothèque, qui est normal, car ce sont eux qui y ont accès ets'y rendent régulièrement.— Mais, je ne comprends pas pourquoi Ussa et Leith ne se sontpas rendus au sous-sol s'ils avaient les clefs, lui demande Jou-el.— C'est là le problème, lui répond Ajax, la porte a été fermée del'intérieur de telle sorte, qu'on ne pouvait pas l'ouvrir de l'autre côté.— Maintenant autre chose, que ferons-nous de notre zozo flinguer?— Tu as vu les journaux de Muri, lui demande Ajax.— Non.— Alors, lis, dit Ajax en jetant un journal de provenance des étatsCeltes. Pas mal comme titre, non ?— On pourrait faire des affiches et les distribuer sous la main, lapopulation fera le reste.— Oui, c'est ça, dit Ajax, je souhaite les fourmis rousses bon appétitet qu'ils ne se pressent pas trop les bouffer.— Que comtes-tu faire d'autre à présent, lui demande Abdubu,qui écoutait silencieusement la conversation.— Ce sera peut-être une bonne chose si on se mettait à la chasse,répond Ajax. Tu peux nous rejoindre Jou-el ?— Bien sûr, mais il faut que j'aille d'abord voir mes copains de lagarde royale, si tu vois ce que je veux dire.— Alors, Abdubu, porte-nous une autre tournée.— La même chose ?— Oui, ça va, dit Jou-el.— Moi je prends une bière, répond Ajax à Abdubu.Quand Abdubu revient avec les consommations, il demande, sanss'adresser à quelqu'un de particulier :— J'ai entendu dire que plusieurs personnes ont vu une apparitiond'une fille blonde, dont la description pourrait correspondre àcelui que Leith a fait de sa gauloise.130


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Je l’ai entendu aussi, lui dit Jou-el, on m'a dit qu'elle ait traverséun policier, voulant l'arrêter, de part en part.— Un pompier l'a vu également traverser la porte de l'entre-solen feu sans l'ouvrir, dit Ajax.— Je sais que ni Leith ni Ussa croient aux anges, mais ce phénomèney ressemble beaucoup, dit Abdubu. C'est peut-être qu'elle quiétait venue les chercher. Non ?— Je ne sais pas, lui répond Jou-el, mais c'est l'air d'être son ectoplasmequi était venu les secourir.— Ectoplasme ? C'est quoi ça, lui demande Abdubu.— Son âme, si tu veux, lui répond Jou-el, mais ce sont seuls lesgens ayant un don de médium qui en sont capables. La gauloise deLeith en est peut-être une. C'est même possible, qu'elle ne le saitmême pas.— Comment ? Elle ne le sait pas ? Comment l'est-il possible,demande Ajax ?— C'est pour elle comme pour la plupart d'entre nous, lui répondJou-el, ça se passe dans les rêves, c'est là que l'âme part pour aller sebalader ailleurs. Tu n'as jamais entendu parler de ce vieil homme quivenait chaque jour s'asseoir sur un banc devant la salle des fêtes ?— Oui, vaguement, lui répond Ajax, pourquoi.— Alors, dit Jou-el, il avait déclaré une fois à un gamin, qu'il venaiten rêve depuis une autre planète dont la lumière mettait quatrecents-ans à venir vers nous. Un beau jour il est parti plus tôt et onn'a plus revu depuis. Il est peut-être mort.— Mais, lui demande Abdubu, il venait et partait comment ?— On ne l'a jamais vu venir, mais quand il partait, il se dissolvaiten air. Pffft, comme ça, lui répond Jou-el en faisant un geste de samain en air.Une fois leurs boissons consommées, les deux amis partent chacundans une direction pour s'en occuper du “client” et ses comparses.Quand le roi monte le grand escalier double de son palais pourrejoindre les appartements royaux, il ne trouve d'abord pas sa131


Le “client”femme, Séléné. Il la trouve finalement dans une des chambres aufond, joliment décoré de tapis orientaux là où leur fille Ussa a sesquartiers. Elle est assise là sur le lit d'Ussa et pleure avec une robede petite fille dans ses mains. Le roi, navré par la peine de sa femme,s'assoit à côté d'elle et essaie de la consoler.— Séléné, chère épouse, pourquoi pleures-tu ? Garde l'espoir !Elle n'est sûrement pas morte.Séléné de Bel-Ra, surpris par le fait que son mari lui tutoie, le regardeet lui répond de la même manière :— Comment peux-tu rester insensible à la peine, mon cher ? Jen'arrive pas à croire qu'elle sera encore vivante. Tu vois cette robe ?Elle était transmise de grand-mère à petite fille et de mère en fille,chaque fois pour l'aîné. J'ai beaucoup de peine à accepter qu'Ussasoit la dernière a été baptisée dans cette robe.— Chère épouse, j'ai rendez-vous tout à l'heure avec les fonctionnairesde police et le préfet et je reviendrai de te voir et dire ce quel'institut médio-légal a pu trouver.— Mais comment peux-tu être aussi dur, mon cher époux ?— Je commence à croire que cette gauloise qu'on a vu ce matinexiste pour vrai et qu'elle essaie de nous protéger. Faisons doncconfiance en elle. Si Ussa et Leith sont encore en vie et tou<strong>jours</strong>avec nous, ils finiront bien par refaire surface au moment voulu. Essaie-toite calmer un peu. Veux-tu que j'appelle un médecin ?— Non, ça va.— Je crois qu'il sera mieux si tu puisses dormir un petit peu cetaprès-midi. J'appelle un médecin et je reviens à la fin de l'après-midipour voir si ça va mieux.Le roi descend le grand escalier et tourne à droite vers son bureau.La convocation de cet après-midi ne nécessite pas d'énormesespaces de réunion, qui ont normalement lieu de l'autre côté du rezde-chaussée.Il pourrait donc recevoir le préfet et les quelques fonctionnairesde police dans son spacieux bureau. En attendant les invités,il ouvre le document que le fonctionnaire de la police scientifiquevoulut lui remettre ce matin et le lit. « Bon sang, » dit-il pourlui-même, « j'ai dû l'écouter ce matin. Ça nous l'aurait épargné bien de lapeine. » Le document est en fait formel, les os calcinés retrouvés132


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.devant la porte ne pouvaient dans aucun cas être ceux d'Ussa etLeith. Ils étaient, premièrement beaucoup trop vieux, à la premièrevue plusieurs siècles. Deuxièmement, ils s'y trouvaient des petitstrous, faites pour attacher des os les uns aux autres, comme on le faitpour un squelette d'études. Quand il se lève la tête, il voit qu'unmembre de la garde attend avec le préfet l'autorisation d'entrer.— Entrez et asseyez-vous.— Bonjour votre excellence.— Je ne vais pas vous cacher mon mécontentement en ce quiconcerne les événements des <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Je regrette, votre excellence, mais les crimes sont difficiles àélucider et demandent beaucoup de patience.— Je regrette, répond-il d'un ton sec, mon cher préfet, mais làvous me mentez ! En fait, j'ai été informé par mes sources secrètes,que vous avez demandé à la police de classer certaines affaires. Celuidu meurtre de Maître Amilius par exemple, qui a beaucoup affectéma fille et son compagnon. Vous savez bien, que vous n'avez pasd'ordres à recevoir de part de Poseidia. Tout ce que la fédérationdécide passe d'abord par moi et c'est moi qui prends les dispositionsdans notre pays. Il y a donc ni police ni préfet ni autre personne àrecevoir des ordres de part de Ra-Ta et sa police secrète. Est-ce queje me fais bien comprendre ?— Oui votre excellence.— Bon ! Je ne vous fais pas subir les vices chers à Ra-Ta, car ilvous aurait posé devant vous une feuille de mise en examen pour lacour martiale et une arme à feu charge d'une seule balle. La seulechose que je vous demande, c'est de chasser les individus déjà identifiéset d'identifier les autres. Je viens de recevoir carte blanche depart de mon confrère Ra-Ta. Vous pouvez chasser sur son territoire,car il a plus confiance à nos forces qu'aux siens. Je vousdonne donc également carte blanche et concentrez-vous surtout surles Belzebubs, car ce sont eux les plus dangereux.— Oui sire, à vos ordres.— Vous pouvez disposer et fait entrer ces deux policiers qui attendentlà dehors.133


Le “client”Le préfet s'incline et part, comme il se doit, du bureau en reculant.— Entrez et asseyez-vous, lance-t-il aux deux policiers qui attendentpatiemment d'être reçus. Quelle bonne nouvelle me portezvous?— Est-ce que votre excellence a pu lire mon rapport, lui demandele fonctionnaire de la police scientifique.— Oui, je viens de le lire. Acceptez-vous mes regrets de ne pasavoir écouté ce matin ?— Ce n'est rien votre excellence, je comprends votre peine. J'auraisréagi de la même manière.— Laisse tomber ce “votre excellence” s'il vous plaît et expliquezmoiplutôt ce qu'il est arrivé. Avez-vous une idée où ma fille et soncompagnon se cachent ?— Non sire, pas le moindre. Ils étaient sûrement au sous-solquand ces voyous ont mis le feu. Mais nous ignorons comment etpar où ils ont pu y sortir.— Par la porte de secours. Non ?— Non, c'est justement là où il y a un problème. Le mécanismeétait déverrouillé, mais on a trouvé des traces de bois sur la serrure àl'extérieur, ainsi sur la paroi de l'autre côté. La porte a été bloquée etquelqu'un a enlevé le dispositif de blocage juste après l'incendie. Oninterroge en ce moment tous ceux qui ont assisté au spectacle désolantpour voir qui aurait pu enlever ce dispositif. C'est sûr que votrefille et son compagnon n'ont pas pu sortir par là. Avec le nombrede spectateurs qu'il y avait, il aurait sûrement eu un qui les aurait vus.L'énigme qui nous reste à résoudre, c'est de savoir où se trouve lasortie secrète, car jusqu'à présent, personne n'est parvenu à la trouver.— Continuez vos recherches et restez très discret. Ne communiquezsurtout rien à la presse. Pour eux Ussa et son compagnondoivent rester morts pour autant de temps que vous n'avez pas misla main sur les malfrats de Ra-Ta et Co.— Merci sire, nous ferons notre mieux.— C'est bon, vous pouvez disposer.134


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Le roi sort de son bureau en même temps qu'eux et il les accompagnejusqu'à l'escalier. Il remonte ensuite aux appartements royauxpour dire la bonne nouvelle à son épouse, qui se trouve tou<strong>jours</strong>dans la partie réservée à Ussa et regarde avec des larmes aux yeux sesvêtements de petite fille.— Séléné, chère épouse, ne pleures pas, dit-il en s'asseyant à côtéd'elle. La police scientifique a pu identifier les os calcinés.Séléné s'effondre de nouveau en pleurs en gardant une petite robeappartenant à Ussa dans les mains et dit :— Ne me parles plus de ces pauvres enfants, je ne peux plus.— Mais écoute-moi, lui dit son époux qui commence à s'énerver,c'est justement ce que je voulais te dire. Ces os ont plusieurs sièclesd'âge et ne peuvent être ni ceux d'Ussa ni ceux de Leith. C'est sûrementune idée farfelue de Leith de faire croire à tout le monde qu'ilsétaient brûlés vifs. Il a voulu se cacher avec Ussa le temps nécessairede neutraliser les voyous qui circulent en ce moment dans notrepays. Rappelle toi, ce que cette gauloise nous avait dit : jouez la comédiependant encore quelques <strong>jours</strong> et vous verrez.— Mais. Ils se cachent où donc et pourquoi se cachent-ils ?— Où ? Je ne sais ni plus que toi ni plus que la police. Pourqui ? Oui je le sais. Ils se cachent des sbires de la BSI, des anciensvoyous du groupe Belzebubs. J'ai d'ailleurs prévu de me rendre ànouveau au temple pour parler à cette gauloise, si elle le veut bien,pour en savoir plus.— Elle s'appelle Angélique n'est-ce pas, lui demande-t-elle.— Oui. Puis l'amoureux d'Ussa, Julien, qui est un nom romain jecrois. Un beau garçon. Si jamais elle va le trouver là où il se trouve,nous ne pourrons plus parler, ni à elle, ni à lui, ou avec difficulté, carelle se trouvera, comme lui, onze mille huit cents ans dans l'avenirdans un pays qui n'est actuellement que toundra et couvert de glaceet neige.— Je crains pour Ussa, elle a tellement vite mal du pays. J'espèreque Julien et Leith parviennent à lui soutenir dans ses moments difficiles.Je ne crains rien pour Leith, il s'adapte à tout. Il garde cesdeux pieds par terre et essaye de faire le mieux.135


Le “client”— Oui, il a bien gardé son sang froid si c'est lui qui a mis lessquelettes de l'autre côté de la porte.— Bien sûr que c'est lui. Ce n'est sûrement pas Ussa, elle n'osepas faire ces genres de choses. Elle craint le feu avant tout.— Ce qui me chagrine le plus, c'est que dans une semaine tout serafini ici, plus de villes, plus personne et un pays qui se trouvera àdouze mille pieds au-dessous le niveau de la mer. C'est ce que m'adit l'amie de Leith, sa gauloise. Elle ne le dit pas directement, maisdans son présent, notre futur donc, notre pays n'y est plus.— C'est navrant de savoir cela d'avance.— C'est peut-être mieux, comme ça nous pouvons nous organiseret élaborer un plan d'évacuation.Angélique, qui n'est pas revenu au club après le dîner, car la météolaisse à désirer, se trouve à la maison avec sa copine Alice etfouillent sur Internet pour trouver des informations concernant l'Atlantide.Pendant Alice continue un dialogue sur MSN, Angéliquetéléphone la bibliothèque pour savoir si elle est ouverte cet après-midi.La gérante lui dit : « En principe non, mais qu'elle pouvait venir quinzeheures trente. » Angélique ferme le clapet de son téléphone mobile etlance à Alice :— C'est bon, on a la bib pour nous toute seule.— On y va tout de suite ?— Non, dans une heure, elle, la gérante donc, n'est pas encore là,elle vient à quinze heures trente.— Puis, lui demande Alice, une fois que tu as les textes, quecomptes-tu en faire ?— Je sais que mon gars rêve souvent de moi. Je vais lui donc lireles passages les plus importantes des textes de Platon en espérantqu'il m'écoute.— Tu dis “mon gars”, t'es déjà sûr de lui ? Tu es sûr que tu vas levoir en chair et en os ?— Mais, je t'avais bien raconté ce matin ce qui m'était arrivé hieraprès-midi non ?136


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, le pauvre. Je parie qu'il n'avait encore jamais vu une nanaà poil et toi tu ne trouves rien de mieux que de lui faire un striptease.— Je dois t'avouer que j'étais aussi gêné que lui. Il venait de débarquerdans la salle de bain pendant que je prenais une douche.Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Je ne savais pas que faire, alorsj'ai choisi l'attaque frontale. Je me sentis venir tout rouge quand jeme suis aperçu de sa réaction. Il ne disait rien, mais il avait réagid'une manière bien visible, tu sais ce que je veux dire. Puis, je mesuis pressé de me sécher et d'enfiler mes fringues. Tu as dû voirmon frère et Ussa, quand leurs regards se sont croisés. Ce n'était pasun coup de foudre, mais un court circuit d'une centrale nucléaire. Ilsont mis un sacré moment pour revenir sur la terre ferme en tout cas.— Puis toi, lui demande Alice, tu n'étais pas aussi impressionnéqu'eux par ton mec.Mais Angélique se sent rougi et ne répond pas, puis se contentede regarder rêveusement le plafond de sa chambre. Alice, voyantqu'elle n'obtenait pas réponse, change le sujet et revient sur cequ'elles cherchaient et lui dit :— Concernant ton Atlantide, ne cherchais-tu pas autre chose ?— Oui, j'avais oublié, les endroits où ils ont pu fuir, ou plutôt cequ'il en reste comme traces. Telles que Basques, Berbères parexemple. Puis pas seulement ça, il faudra trouver l'endroit où esttombée leur fichue comète. Leith semble penser que ça doit êtrequelque part dans le triangle des Bermudes.— Je le demanderai à mon père, lui dit Alice, il joue parfois aubillard.— Billard ? Où es-tu allé chercher ça ? Lui demande Angélique,qu'est-ce que le billard a à voir avec un déplacement de pôles?— Je ne sais pas si tu as déjà vu jouer quelqu'un au billard, lui répondAlice, mais pour faire un coup tordu, ils font tourner la billesur elle-même, ce qu'ils appellent un effet.— Je ne vois tou<strong>jours</strong> pas où tu veux en venir, lui dit Angélique.— Or, pour obtenir cet effet, lui dit Alice, ils tapent la bouledécalée par rapport au centre et ça fait tourner la boule sur luimême.C'est cela qui est sûrement arrivé à la terre, à mon avis. Elle137


Le “client”a reçu ce gros caillou, cette comète donc, dans la gueule et c'est celaqui lui a fait changer l'angle de la rotation. Je ne le vois pas autrement.Par contre, pour obtenir cet effet, elle, cette comète donc, auraitdû frapper la Terre en angle et décalé par rapport au centre,comme on le fait avec une boule de billard.— Mais, comment vois-tu ça ?— Eh bien, pour déplacer les pôles, il faut déplacer l'angle de larotation terrestre.— Bien ma prof de math, merci pour la leçon. On cherche doncun trou ou un cratère sous-marin et on demande mon gars de vérifiersi ce trou existe à son époque et ils risquent être dans la merde sice trou n'y existe pas encore.— Dis-donc, tu ne me disais pas quelque chose sur le triangle desBermudes, là où ils disparaissent des bateaux et des avions. Moi, jesuis persuadé que ton gars et son ami d'enfance, Ussa, viennent versnous de cette façon, mais dans l'autre sens.— Mais comment vois-tu ça.— Mais, c'est simple, lui dit Alice, au moment que tout sombredans l'eau, leurs centrales énergétiques explosent à cause des courtscircuits et les propulsent vers notre époque. T'en fais Angélique, ilsvont finir par arriver. Restes optimiste. On va faire une petite fêtequand ils sont là, qu’en penses-tu ?— Je ne sais pas. Je verrais. Alors, en y va, dit Angélique en regardantsa montre. Enregistre-moi tout ce que tu as trouvé etéteins-moi cet ordinateur. Je lirai les textes ce soir et chaque soiravant d'aller dormir, comme ça, il pourrait les noter quand il rêve demoi.Pénélope, qui se rend souvent chez Abdubu après avoir fermé saboutique, est aujourd'hui trop pressée à monter chez elle. Elle neveut pas laisser ses invités d'infortune seules et tient à leur tenir compagnie.Quand elle monte l'escalier vers son grenier, elle les voittou<strong>jours</strong> plongé dans leurs livres, les épluchant minutieusement enprenant des notes çà et là.138


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Alors, les amoureux, vous avez trouvé quelque chose ? Je voisque vous avez pris des notes.— Comment amoureux, lui demande Ussa.— Bien ! Vous êtes bien amoureux tous les deux d'un frère et sasoeur ? Non ?— Ah bon, si tu le vois comme ça. Oui, lui répond Leith.— Alors, vous serez beau-frère et belle-soeur après. Mais je nevois pas très bien comment vous allez faire le voyage.— Nous non plus, lui répond Ussa, mais ça ne risque pas êtreune promenade de santé en campagne.— À propos vous bouquins et ces notes que vous semblezprendre, qu'est-ce que vous avez trouvé.— C'est navrant, mais même si certains détails ne sont pas là, Angéliquesemble avoir raison. Eh, Ussa passe-moi ce livre là, il y a unecarte du monde là dedans. Tu vois, dit-il à Pénélope en ouvrant lelivre à une page où il figure une carte de la zone polaire ; notre pôlenord est ici, mais Angélique avait sur son bureau une lampe enforme de globe et son pôle nord était là, dit-il en pointant le doigtquelque part au milieu d'une mer entre le Groenland et la Sibérie.Cela fait une différence de treize degrés. L'Arctique et notre pays s'ytrouvent donc treize degrés plus au sud et le déplacement a été faitsur cette longitude, dit-il en faisant une ligne avec son doigt sur unecarte de l'Atlantique avec le pays. Maintenant nous cherchons l'endroitd'impact le plus probable dans cette zone, dit-il en faisant uncercle avec son doigt sur le triangle des Bermudes et les côtes del'Amérique du Nord.— Comment veux-tu chercher l'endroit, alors, lui demande Pénélope?— Bien, répond-il, Angélique doit avoir un cratère d'impactquelque part dans cette zone, là où nous ne l'avons pas.— Tu penses qu'il tombe dans la mer, lui demande Ussa.— Bien sûr, répond Leith, un impact sur le continent aurait lemême effet que celui qui a tué tous les dragons 29 il y a soixante-cinqmillions d'années. Le fait qu'Angélique existe à onze mille huit centsans signifie à mes yeux que la comète tombera forcément dans la29 Ce que nous connaissons mieux en tant que Dinosaures !139


Le “client”mer, créant ainsi un déluge. Puis, si elle tombe dans la mer des Bermudes,la croûte terrestre ne tiendra pas, trop fragile et trop mince.L'impact de la comète va pousser la croûte terrestre aux endroits lesplus fragiles vers le bas et amène notre pays avec.— Bon, dit Pénélope désireuse de changer le sujet, vous venezpour le souper dans un instant. Je vais fermer les rideaux, ça faitplus discret.Pendant que Pénélope descend mettre la table et commence àpréparer le souper, les deux amis continuent à chercher et feuilleterles livres anciens jusqu'à ce qu'elle les appelle que la table les attend.Une fois à table elle leur demande :— Vous comptez rester ici, ou désirez-vous partir ailleurs ?— Je pense qu'il vaut mieux, qu'on part ailleurs, lui dit Ussa.— Oui je le crois, dit Leith, que c'est mieux pour ta sécurité et lenôtre. Je sais que Maître Amilius a fait construire une pièce augrenier, comme le tien. Cette pièce à une entrée secrète, mais onpeut y accéder depuis les toits. Il y a tout confort et je suis sûr queles sbires de Ra-Ta n'ont pas pu trouver l'accès.— C'est bon, tu peux y aller en passant par les toits depuis mongrenier, je laisserai la fenêtre ouverte. Comme ça tu pourrais venirme voir, si nécessaire. Mais il faudra mieux que Ajax vérifie si la voieest bonne.— C’est ça, dit Ussa, je ne crois pas que quelqu'un nous chercheradans une maison supposée vide.— On verra ça demain, n'est-ce pas, dit Pénélope.— Oui, dit Ussa, on peut rester là pour cette nuit et même pourdemain. Nous serons discrets, mais nous ne pourrons pas faire de lalumière là haut. Ça sera trop voyant.140


CLe temple trafiquée beau matin du huitième jour Lion, nos deux comparses, Ajaxet Jou-el, se trouvent dans l’arrière salle de l'estaminet “<strong>Les</strong> Jardines”en attendant d'autres clients. Ils ont en effet préféré donnerrendez-vous ici, plutôt que dans un endroit plus voyant. Surtoutmaintenant, que la chasse au voyous est ouverte. Un va-et-vient inhabitueld'un commissariat sera forcément suspect, mais dans untroquet comme celui de Abdubu, de telles allées et venues sont plutôtnormales. Sur une table se trouve une carte de la ville, marquéede petits points comme des chiures de mouche. Ce sont des endroitsoù les individus ont été vus par la population, qui se montretrès coopérative. Certains n'hésitent pas à contacter Abdubu dansson café pour lui laisser un message ou un indice, qu'il pose ensuitesur la table de la salle de réunion improvisée.— Salut vous deux, dit Abdubu, vous prenez quelque chose ?— Moi un café avec du lait chaud et quelques tartines-confiture sit'en as, lui dit Ajax, je n'ai rien mangé ce matin.— Comment peux-tu avaler cette saloperie abyssinienne, lui demandeJou-el.— Rien de mieux pour prendre la forme le matin, lui répondAjax.— Et toi, demande Abdubu à Jou-el, comme d'habitude ?— Oui, ça va, lui répond-il.Pendant qu'il cherche les boissons et quelques petites choses àmanger, les deux amis commencent à faire un plan de stratégie. Ildevient clair que certains de ces individus qu'ils cherchent, se cachenten allant d'hôtel en hôtel, où ils restent rarement plus que de deux àtrois <strong>jours</strong>. Ils ont décidé de prendre contact avec des confrères àAjax dans d'autres villes. Ajax est persuadé qu'ils ne demandentmême pas à être énumérés si le travail est pour l'intérêt du pays. Enattendant que les contacts de la garde royale et de la police scientifiqueviennent les rejoindre, ils dressent une liste d'hôtels et auberges141


Le temple trafiquéà surveiller, quitte de les payer une petite prime de la caisse royale,car Ajax est persuadé que le roi est tellement furieux qu'il n'hésiterapas à payer des primes et des dessous la table. C'est à ce moment-làque Abdubu revient avec les boissons et quelques petits trucs à mangeret s'assoit en moment avec eux.— Si tu vois Pénélope, lui dit Ajax, peux-tu lui dire de venir ici.— Bien sûr, lui répond Abdubu, elle va certainement venircomme elle le fait habituellement ; comme un courant d'air.— On veut lui demander quelque chose, dit Jou-el, elle voit beaucoupde monde, vois-tu.— J'aimerais vous signaler, dit Abdubu, que je ferme cet aprèsmidi.Demain, je suis de garde sur le “Phénix 30 ” et je tiens à faire cedevoir.— Tu as besoin d'aide pour transporter le bois, lui demande Ajax,sinon on vient te donner un coup de main.— Non ça va aller, répond Abdubu, il y a tou<strong>jours</strong> assez de volontairespour apporter le bois. C'est le monter au sommet de latour qui est le plus dur.— Tu dois le porter à bras, lui demande Jou-el.— Non, on a un treuil manuel au centre de la tour.Pendant qu'ils discutent encore un moment, ils n'ont pas remarquéque Pénélope venait d'entrer. En ne voyant personne, elle appelle:— Alors, les mecs, vous dormez dans l'arrière salle ?— Viens nous voir une minute, lui dit Jou-el, on a quelque chosed'important à te demander. Puis il continue en s'adressant à Abdubu:— Apporte-lui à boire et ferme la porte s'il te plaît.— Mais, dit-elle étonné, je ne voulais que chercher quelque chosepour moi et mes deux clientes.Abdubu, revenu entre temps avec un thé-glaçons, lui demande :30 Nom inventé pour une tour-temple avec un feu éternel au sommet. Edgar Cayce nous arapporté que les adeptes de “la loi d'une”, une religion monothéiste de l'Atlantide, utilisaientde tels temples, dont ils entretenaient au sommet un feu éternel. Ces genres de tours-templesétaient également utilisés par la première religion monothéiste Perse, à environ 900 ans avantJésus Christ. Ce sont peut-être les ancêtres de nos phares.142


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Je te prépare quelque chose à emporter ?— Oui, dit-elle, un chocolat et deux thés.Pendant que Abdubu part préparer les boissons demandé par Pénélopeen fermant la porte derrière lui, elle demande ces deux amis :— Qu'est-ce que vous voulez, c'est au sujet d'Ussa et Leith ?— Oui, lui répond Ajax, entre autres. Tu peux parler ici, Jou-elest de notre côté. Il sait également où se cachent les deux.— Tu l'as dit, lui demande Pénélope.— Non. Il l'a deviné. Il n'est pas né de la dernière pluie tu sais.— C'est grave, lui répond Pénélope, cela veut dire qu'il y ad'autres qui ont pu tirer la même conclusion. En fait, continue-telle,Leith est d'avis qu'ils pourraient se cacher dans le grenier deAmilius. Pour cela c'est vous qui devez vérifier si la voie est libre.Leith m'a dit que personne ne chercherait quelqu'un dans une maisonsupposée vide.— Ce n'est pas aussi grave que tu crois, lui répond Ajax, nousavons des informations que la presse et des gens ordinaires n'ontpas. Nous savons par exemple que des os calcinés retrouvés nepouvaient dans aucun cas être ceux d'Ussa et Leith. Nous savonségalement qu'ils n'ont pas pu fuir par la porte de secours. Par où ilssont passés, nous l'ignorons. En ce qui concerne le lieu où ils secachent, c'est un léger changement dans ton attitude qui nous a misla puce à l'oreille. Le jour de l'incendie tu étais vraiment peiné, puisle lendemain, tu ne faisais que semblant. Ce n'est pas visible pourd'autres, mais nous te connaissons bien et nous l'avons bien vu. Tute n'en fais pas, l'idée de Leith est bonne et on va vérifier ça.— J'ai des contacts avec la garde royale, lui dit Jou-el, ils s'en occuperont.Viens nous trouver demain au début de l'après-midi dansla maison du thé dans le parc.— Le parc, comment le parc, lui demande Pénélope.— Eh bien ! Abdubu ferme dans l'après-midi et n'ouvre qu'après-demainà midi.Le préfet, Assen-Ni, attend dans son bureau Ax-Tell, le chef de lapolice de la région, qu'il a convoqué sur l'ordre du roi. Ax-Tell n'a143


Le temple trafiquépas besoin de venir de loin, car l'hôtel de la police est dans le mêmebâtiment que la préfecture de la région. Le préfet a étalé devant luides différents journaux où ils figurent la plupart des suspects. Surtoutles journaux de l'état voisin, Muri, l'état des Celtes, ne laissentaucun doute du sort qu'ils attendent là-bas. L'ordre de fermer lesfrontières, surtout celles avec l'état d'Alta, a déjà été donné. Tous lestrains, routes et aéronefs sont contrôlés. C'est pendant qu'il lit lerapport de la police scientifique, que le chef de la police fait son entréeet le salut :— Bonjour monsieur le préfet, vous voulez me voir ?— Bonjour Ax-Tell, asseyez-vous. Vous devinez probablementle sujet de notre conversation, n'est-ce pas ?— En effet, mon cher Assen-Ni, on a pris beaucoup trop derisques en écoutant les ordres de Poseidia sans aller consulter le roi.— Est-ce que vous avez lu le rapport de la police scientifiqueconcernant l'incendie de la bibliothèque ?— Oui, mon cher. Ce qu'il faut encore ajouter, c'est que lesrestes de bouteilles indiquent qu'elles ont contenu du rhum à fortdegré alcoolique. De plus, mais cela a été marqué dans le rapport,des traces d'un produit inflammable ont été trouvées.— Sait-on comment il, ou ils ont pu entrer, je crois que la porteest censée être sécurisée, non ?— Je ne sais pas, si vous vous le rappelez, mais il y a eu un journalistequi avait réussi à ouvrir cette porte avec des outils achetéschez une quincaillerie. Alors, des voleurs et des agents de la BSI, quine sont que voyous recyclés, n'auront aucun problème à y entrer.— <strong>Les</strong> os calcinés, comment ont-ils pu arriver là où ils étaient.— Nous supposons que c'est le compagnon de la princesse quil'a fait. Lui avait probablement compris que ce sont eux qui étaientvisés par cet attentat.— On peut donc supposer qu'Ussa et lui se trouvaient dans lesous-sol, puis enfermé, car si je lis le rapport, la sortie de secoursavait été bloqué. Je constate également que personne ne les a vussortir par là. Ce que je sais, qu'il y a plusieurs personnes qui ont vudes individus suspects correspondant aux dessins sortir par l'escalierde secours.144


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Savez-vous où se cachent Ussa et son compagnon en ce moment?— Non je n'ai pas la moindre idée. Nous ne savons d'ailleurs pascomment et par où ils ont pu sortir de cette salle en sous-sol. Laseule curieuse chose que m'a rapporté un policier, c'est qu'il a vu unefille entrer dans la bibliothèque et en voulant l'arrêter, elle lui traversaitde part en part comme elle n'existait pas physiquement. Unpompier m'a d'ailleurs rapporté que cette même fille traversait laporte de l'entre-sol en feu sans l'ouvrir. C'est sûr qu'elle était venuesecourir Ussa et son compagnon, mais par où et comment, nul ne lesait. On soupçonne qu'il y ait une sortie secrète en sous-sol datantde l'époque féodale, mais personne n'est encore parvenu à la trouver.Puis il y a aussi dessous notre ville un dédale de couloirs, d'escalierset d'autres accès, telle que seulement une personne s'y connaissantpeut y entrer sans se perdre.— Mettez vous en chasse et trouvez-moi ces individus envoyéspar Ra-Ta. Le roi nous donne carte blanche. Essayez peut-être àcontacter la garde royale. Eux ont un service secret interne qui travaillesurtout avec les détectives privés. Vous pouvez peut-êtremettre des agents en civil sur le coup, que pensez-vous ?— Carte blanche me disiez-vous ? Ce ne vaut pas la peine de lesemprisonner dans ce cas, nous connaissons quelques indiques quisavent s'en occuper. Nous éviterons ainsi des problèmes diplomatiquesavec Ra-Ta.— Il n'y a pas problème avec lui, la suggestion de faire ce quevous dites vient aussi de lui. C'est dans ces termes, qu'il avait donnéecarte blanche à notre roi, y compris sur son territoire. J'ai uneinformation non confirmé selon laquelle le responsable de la sectionopérations secrètes avait eu un accident d'arme à feu.— Oui, je l'ai entendu aussi. Il a eu le choix entre suicide et courmartiale.— Mis à part ces individus, les anciens agents de la BSI, il fauts'occuper des Belzebubs. Ce sont eux les plus dangereux. Ils pourraientextorquer un sauf conduit pour figurer sur le plan d'évacuation,puisque ni argent ni autre aura encore valeur dans une semaine.145


Le temple trafiqué— Dans une semaine ? C'est donc vrai, cette histoire d'étoiletombant sur la terre ?— Hélas, oui.— Mais ce plan d'évacuation ? Qui s'en occupe ?— Cela se passe sur l'ordre direct du roi et c'est l'armée qui s'enoccupe. Le gros des troupes est d'ailleurs déjà rentrés au pays.Nous avons une centaine de navires de guerre à notre disposition.Je suis aussi certaine que le roi va réquisitionner les navirescommerciaux. Mais revenons sur notre sujet, contactez dès maintenantles détectives et journalistes qui ont travaillé sur notre sujet. Ilssont bien informés et vous pouvez vous économiser du travail et desforces pour les concentrer sur l'essentiel.— Avez-vous autre chose, mon cher Assen-Ni ?— Non, c'est tout pour aujourd'hui.Angélique tourne en rond dans sa chambre. Elle ne sait trop parquoi commencer ni où ni comment. Elle a bien lu les textes de Platonla veille avant qu'elle aille dormir, mais elle aimera bien savoir siLeith, son gars comme elle l'appelle maintenant, a entendu sa lecture.Elle a pris rendez-vous avec la vieille Monique et attend maintenantAlice et son frère qui voulait venir aussi. Elle est un peu fâchéecontre elle-même, car elle aurait eu le temps hier pour faire un allerretourau Havre, chercher une carte maritime dans une boutiquespécialisée. Elle a passé toute cette matinée à chercher sur la toile,mais sans trop de succès. Toutes les informations qu'elle a pu trouver,manquent de précision. C'est tout comme si les connaissancesgéographiques s'arrêtent au-delà des quelques kilomètres des côtes.C'est au moment qu'elle voulut se remettre à la recherche sur Internet,qu'elle entend entrer son frère accompagné d'Alice et Audreyqui a voulu venir également.— Salut ma belle, lui dit Julien.— Salut Angélique, disent Alice et Audrey en choeur.— Salut, dit-elle sans s'adresser à quelqu'un de particulier, qu'estceque vous avez fait ce matin ?— Bof. Rien de spécial, lui dit Julien, c'est assez calme.146


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— On a rendez-vous à quelle heure, lui demande Alice.— Dans une demi-heure, dit-elle en regardant sa montre. Nousdevrons y aller maintenant, si on ne veut pas être en retard.Ils discutent, pendant qu'ils remontent à vélo la rue menant aupetit immeuble où habite Monique, de tout et de rien, même si le sujetprincipal c'est ce qu'ils vont aller voir. Une fois arrivée, c'est Moniquequi les attend déjà sur le pas de sa porte et salut les :— Salut les jeunes, quel bon vent vous amène.— Salut Monique, lui dit Angélique, c'est sympa de nous aider.— J'ai plutôt l'impression que tu veux aider ton ami atlante, n'estcepas ?— Oui, lui répond-elle en rougissant un petit peu, c'est pour aidermon gars. Mais la communication est plutôt difficile. Tu crois queça marchera avec ta boule ?— Je ne sais pas, lui répond Monique, on ne m'a jamais posé desquestions pareilles. Ces <strong>jours</strong> c'est, dans l'ordre, le fric, le boulot,l'amour et parfois ils veulent savoir si leur partenaire les a faits cocu,mais ceux-là je les envoie chez un copain qui a un bureau de détectiveprivé. Je ne fais pas son boulot et lui, il ne fait pas le mien, chacunson truc, n'est-ce pas ? Mais on parle, entrez et essayons-nousde prendre contact avec le gars d'Angélique.Pendant que les jeunes entrent, Monique prend ces ustensilespour les poser sur la table du salon, car son bureau qui se trouvedans une ancienne chambre à coucher est trop petite pour recevoirtout ce monde. Elle met quelques fauteuils et des chaises en demicercleautour de la table basse sur laquelle elle a mis un tapis de tablepourpre. Elle place soigneusement la boule de cristal au milieu etdeux chandeliers, qu'elle allume. Une fois les stores baissés, elle inviteles jeunes à prendre place :— Angélique, tu te mets là, à côté de moi. Julien toi tu te mets del'autre côté. Alice et Audrey vous pouvez choisir de vous mettre àcôté de Julien ou d'Angélique, c'est comme vous voulez. Vous devezchoisir votre position telle que vous ne voyez pas les bougiesdans la boule, mais uniquement leur lueur. Puis elle continue ens'adressant à Angélique : as-tu les expliqué comment il faut fairepour la concentration.147


Le temple trafiqué— Oui Monique, c'est fait. On peut commencer ?— Alors, concentrez-vous sur l'endroit où se trouvent vos amis.Ils sont tou<strong>jours</strong> dans cette maison où il habite l'esthéticienne, n'estcepas ?— Je crois, lui dit Angélique, qu'ils avaient prévu aller ailleurs,mais ce n'est pas encore fait.— Bien, dit Monique, on y va.Après avoir effectué quelques tentatives infructueuses, une imaged'un grenier joliment arrangé, où on peut observer deux jeunes gensen train de feuilleter des livres anciens, devient visible. Après unmoment tous les membres du groupe ne peuvent pas seulement lesvoir, mais aussi les entendre. C'est Angélique, la première à tenterles appeler :— Leith, m'entends-tu, c'est Angélique qui te parle.Leith, entendant Angélique, regarde autour de lui pour voir oùelle est, mais c'est sa compagne qui répond en première :— Tiens j'entends la voix d'Angélique qui t'appelle.— Oui, j'ai entendu, lui répond Leith, mais je ne vois rien.— Nous te voyons, lui dit Angélique, tu ne nous vois pas ?— Je te vois nulle part, lui répond-il, mais que signifie-t-il doncnous ?— Eh bien ! Moi, mon frère Julien et deux copines, Alice et Audrey.Zut, j'oublie de mentionner Monique, notre médium. Mais j'aiune question à te poser Leith. As-tu pu m'entendre cette nuit quandje t'ai lu les textes que tu m'as demandés. Je les lirai cette nuit denouveau, concentre-toi de telle sorte que tu ne manques pas la lecture.— Oui, lui répond Leith, je n'ai entendu qu'une partie, je m'efforceraide t'écouter à nouveau cette nuit. Une question, si tu tesouviens bien les textes, est-il marqué « un jour et une nuit » ou « unenuit et un jour » ? Je ne me le souviens pas bien.— Non, lui répond Angélique, c'est d'abord le jour et ensuite lanuit, pourquoi demandes-tu cela.— Parce que la comète croise l'orbite terrestre tôt le matin. Mais,as-tu pu trouver une cratère quelque part ?148


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Non, lui répond Angélique, je me suis cassé la tête toute lamatinée là-dessus, mais en vain. Ce sont les détails qui memanquent. J'aurais besoin d'une bonne carte maritime, telles que lesmarins les utilisent, car ils y figurent toutes les profondeurs.— Mais on les aura après-demain, lui dit Julien, quand on prendle voilier au port de Fécamp.— Salut Julien, dit Ussa qui entend sa voix, je ne te vois pas, maisça fait tellement bien de t'entendre. J'ai hâte d'être près de toi, de tetenir dans mes bras et de me sentir dans les tiens.— Angélique, lui dit Leith, ne dit encore rien aux parents d'Ussaet à personne d'autre, dit les que nous sommes en sécurité, entrebonnes mains et qu'on rentre demain ou après-demain. D'accord.— Oui mon amour, répond-elle.C'est alors que les jeunes discutent encore un moment ensemble,mais soudainement c'est l'image dans la boule de cristal quicommence à changer. Ils voient l'intérieur d'un temple et ce qui estplus inquiétant, c'est qu'un technicien semble tripoter les circuitsd'un écran. Ce qu'il tripote semble plutôt à un mouchard qu'à uncircuit qui doit s'y trouver. Après un moment ils voient entrer uncouple que reconnaissent Angélique et Julien à être Séléné et Pâris deBel-Ra.— Bonjour Séléné, bonjour Pâris, dit Angélique, comment allezvous.— Comment avez-vous pu nous voir, dit Pâris de Bel-Ra, nousne vous voyons pas encore, l'écran ne marche pas encore ?— Nous vous voyons dans une boule de cristal, dit Julien.— Oui, ajoute Angélique, ce n'est pas seulement vous que nousvoyons, il y a aussi un technicien qui enregistre tout ce que vousdites et faites. Il se trouve en sous-sol, dessous vos pieds. Ditesalors le minimum, il ne semble pas pouvoir nous entendre. Répondez,si possible, uniquement avec oui ou non et essayez de ne pasmontrer vos émotions. On a eu tout à l'heure contact avec Ussa etLeith et ils nous ont demandé de ne communiquer qu'une seule nouvelle; celle que vous allez avoir demain ou après-demain un signe devie d'eux, le temps nécessaire d'éliminer les individus dangereux.149


Le temple trafiqué— Merci Angélique, dit Séléné, nous vous voyons en ce momentet vous devez nous voir sans cette boule.— Mais ça alors, exclame Monique, je n'ai jamais vu pareil. Regarde-moiça. Ils se trouvent dans mon salon. Ce sont qui Angélique? Présente-nous les !— Je vous présente, dit Angélique, ses excellences madame etmonsieur de Bal-Ra, Séléné et Pâris pour les intimes. Madame,monsieur, ici à ma gauche Alice, à ma droite madame Monique,notre médium, mon frère que vous le connaissez déjà, puis à droitede mon frère, Audrey. Notre bande n'est pas au complet, car ilmanque André, Rodolphe et Philippe, qui sont restés au club nautique.Pâris et Séléné de Bel-Ra préparent leur voyage en voiture pour serende au temple d'Ozin. Le roi, Pâris de Bel-Ra, a su convaincre safemme de lui accompagner. Même s'il sait qu'ils ne peuvent pascommuniquer avec leur fille, ils le peuvent avec Angélique et sonfrère, qui ont promis d'être au rendez-vous. Il espère qu'elle peut luidonner quelques indications ou au moins de nouvelles de sa fille etson compagnon. Soudainement il se rappelle son rêve de cette nuit,car il a vu cette gauloise qui lui disait d'emmener des gardes avec luipour pouvoir inspecter le temple, mais elle n'a pas su dire davantage.Puisque, visiblement important pour elle, il prend la précaution d'inviterun responsable de la police accompagné des agents et muni desdessins d'identification.— Séléné, êtes-vous prête, demande-il à son épouse.— Oui mon cher époux, on peut y aller ?En route, ils passent devant le haras et le centre d'équestre de lafamille à Pénélope, les Axarz, surchargé d'histoire, car c'est là qu'Ussaet Leith ont fait connaissance. Sa maman venait souvent avec luien voisin depuis l'immense propriété des Ajahel, producteurs depommes, poires, cerises, prunes, cidre et des différentes eaux-de-vie.Pour l'instant Séléné préfère oublier les circonstances qui lui ontamené à se reposer en campagne accompagnée d'Ussa qui n'avaitque six ans à l'époque. C'est là qu'Ussa a pris un petit garçon pour150


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.son petit frère qu'elle venait de perdre. Une amitié de deux personnesdevenues inséparables et qui dure jusqu'à aujourd'hui. Arrivésau temple, le couple y entre en passant les immenses colonnadeset en traversant le rideau purificateur à l'entrée. C'est à peine qu'ilssont entrés au centre du temple et même avant l'écran de communicationa pu être activé, qu'ils entendent la voix d'Angélique qui leuraccueille. Une fois l'écran activé, ils voient qu'Angélique est accompagnéd'amis et se trouve chez une dame se servant d'une boule decristal pour communiquer. C'est après les premières présentationsinformelles des personnes présentes que le roi lui demande :— Angélique, je peux vous appeler par votre prénom, n'est-cepas, est-ce que vous avez de bonnes nouvelles pour nous ou est-ilencore trop dangereux d'en parler ?— En ce qui concerne Ussa et Leith, vous allez avoir des nouvellesdans deux <strong>jours</strong> tout au plus. Ils m'ont fait d’ailleurs promettrede ne rien dire, car les suspects ne sont tou<strong>jours</strong> pas identifiés.Mais avant que je continue de vous parler, j'aimerais vous signalerque ce temple est sur écoute et tout ce que vous dites et faitesest enregistré. Ne répondez donc que par non, oui ou dites le minimum.D'autre part, nous, mes amis et moi, venons voir en utilisantcette boule là, des individus qui se trouvent en sous-sol de ce templeet ce sont ceux que vous cherchez. Avez-vous pris avec vous suffisammentde gardes et des agents de police pour mener une action ?— Oui.— Alors ne brochez pas, ce qui prévaut aussi pour vous, Séléné.Faites comme si vous ne sachez rien. Je vous suggère, une fois àl'extérieur, que vous fouillez le bâtiment de haut en bas. Il sera peutêtrebien si vous pouvez débrancher tout les liens vers l'extérieur, ycompris celui qui fournit l'énergie de fonctionnement. Branchez-le àune source autonome, comme celles qui fournissent l'énergie pourvos bateaux.— Oui, ce sera une bonne idée, dit Paris, concernant l'événement,c’est pour quand ?— Là c'est Leith qui a plus d'informations, car les miens sonttrop vagues, trop reculés dans le temps pour pouvoir calculer au151


Le temple trafiquéjour près. Il m'a dit que ce sera dans six <strong>jours</strong>, tôt le matin, vousavez donc encore cinq <strong>jours</strong> pour vous préparer.Pendant qu'Angélique lui donne encore quelques précisions, c'estSéléne qui commence une bavardage avec Julien et les deux autresfilles présentes, tandis le roi continu à bavarder avec Angélique ausujet des événements à venir. C'est soudainement Monique quiintervient, car elle venait à tirer, sous les regards incrédules du coupleBel-Ra, des cartes de tarot en leur disant :— Je vois dans les cartes que vous allez avoir une séparation douloureuse,préparez-vous. Ni votre fille ni son compagnon sont endanger, même si elle va avoir une expérience effrayante. Préparez-luides valises étanches, capables de flotter avec toutes ses affaires depetite fille et celles dont elle a besoin dans sa nouvelle vie et confiezlesà son compagnon. Faites-le, c'est très important et n'oubliez surtoutrien, comme pour un voyage important. Je vois pour elle desproblèmes du mal de pays.— Elle avait ce genre de problèmes dans le passé, lui répondSéléné, je sais ce dont elle a besoin.— C'est curieux ce que vous faites, lui dit Pâris, Ussa m'a parléd'une personne sur une foire qui faisait pareil comme vous et a utiliséles mêmes genres de cartes. Que voyez-vous d'autre ?— Elle va venir, désolé Julien, très vieille. Bien au-delà des centsans. Son compagnon, Leith va avoir, comme Angélique dans lesquatre vingt-dix ans et meurent avec un écart de six mois seulement.Votre fille aura plusieurs enfants, mais je ne veux pas dire quand etcombien, car ce n'est pas bon de le savoir d'avance, n'est-ce pas Julien.Il vaut mieux garder la surprise, car la première sera une surpriseet viendra par surprise.— Tu parles au féminin, lui demande Julien, est-ce sera une fille ?— Oui mon cher, mais quand, tu le verras quand ce sera le moment.Puis en regardant le couple Bel-Ra, elle continue : même si lacommunication est difficile, vous restez en contact régulier. C'estmoi qui vous le garantie, si ce ne marche pas autrement, j'en suis capableet je vous porterai les nouvelles d'ici de temps à autre.C'est après quelques modalités que le couple royal prend congédes amis présents chez Monique. Ils se promettent de reprendre152


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.contact d'aussitôt possible. Dès que le couple royal est sorti dutemple, il lance à ses gardes :— Fouillez-moi le tout. Fermez toutes les accès et amenez toutepersonne avec vous qu'on ne connaît et surtout ceux qui figurentaux dessins.153


POn se cache.enelope connaît bien le salon de thé du parc, un bâtiment octogonalvitré avec une terrasse sur le devant avec des tables etchaises en fer, peint, comme l’édifice lui-même, en blanc, tenu parMélia, la fille d'une de ses clientes. Elle ne s'y rend pas souvent, carun peu trop loin de sa boutique. Mais pour aujourd'hui elle a prévuun peu de temps. Elle y va avec sa cliente, la mère de Mélia. Quandelles y arrivent, elles voient que Ajax, Jou-el ainsi que deux autreshommes s'y trouvent autour d'une table et discutent, penchés surune carte de la région, une autre de la ville où les points en chiuresde mouche se sont multipliés et également un tas de fiches muniesde dessins. En se dirigeant vers leur table, Pénélope dit à sa cliente :— Va dire bonjour à ta fille et commande un thé avec des glaçonspour moi. J'ai deux mots à leur dire.Pendant sa cliente va voir sa fille, Pénélope s'assoit à table avecles autres et les salut :— Bonjour, tout va bien ? Ce sont des copains à toi, Jou-el, ditelleen désignant les deux hommes qu'elle ne connaît que vaguement?— Oui, lui répond-il, ce sont Midas et Laïos, deux membres de lagarde royale. Le seul qu'on attend encore est Jason, un confrère àAjax. Il doit venir de l'autre côté du lac.— Tiens, dit Pénélope, il y a un bateau qui vient d'arriver au port,c'est peut-être lui.— Ça se pourrait, lui répond Ajax, il possède un bateau qu'il partageavec d'autres. Il sait faire la traversée aussi vite que le contourdu lac en train ou voiture.— Il y a du nouveau concernant nos “clients”, lui demande Pénélope?155


On se cache.— Oui, lui répond Jou-el, on a repéré notre “client”. Il loge au“Soleil Levant.” 31— Eh ! Bien ! Il ne s'emmerde pas, lui dit Pénélope. Ce n'est pasparticulièrement bon marché. Il a dû toucher une bonne prime jepense. Il y reste depuis longtemps ?— Non, lui répond Jou-el, depuis une semaine. Mais c'est déjàtrop long pour quelqu’un qui cherche à se cacher.— Qu'est-ce qu'allez-vous faire maintenant, lui demande Pénélope?— C'est nous qui s'en occuperons, lui dit un des hommes présents,mais ne dis rien à d'autres personnes. Demain il ne sera plusde ce monde. Nous connaissons assez de volontaires pour s'en occuper.C'est même possible qu'il ait déjà le cul sur une fourmilière àl'heure qu'il est.— Mais c'est dégueulasse de mourir comme ça, dit Pénélope.— Alors, lui répond Ajax, tenter de faire mourir une princesse etson compagnon dans un incendie ne l'est pas ? Poignarder et mutilerun vieux savant qui n s'intéresse qu'aux étoiles, ne l'est pas ? Cesdeux physiciens brûlés vifs dans leur laboratoire, ne l'est pas. Ne faispas sentiments pour ces voyous ! S'il te plaît.— Bon, si tu le vois comme ça, d'accord, lui répond Pénélope.Mais, une question, peut-on cacher nos deux jeunes amis au grenierde Amilius, ou doivent-ils rester encore un jour chez moi ?— Nous allons visiter la maison du maître tout à l'heure, lui ditAjax. Nous allons faire semblant de chercher des indices, pendantd'autres sécurisent le bâtiment. On peut aller au grenier de Amiliuspar les toits depuis ton grenier, je crois. Non ?— Oui c'est ça, dit-elle. C'est cela qu'on avait prévu faire à latombée de la nuit. Si c'est bon, viens faire un petit saut pour me ledire.C'est en ce moment que Mélia vient avec les boissons et sa mèreet ils s'assoient en moment à table avec eux. Le sujet de la conversationdérive vite au sujet brûlant ; les événements à venir. Il s'avère,31 Un petit clin d’oeil à une chanson des années 60-70, “The house of the rising sun !”,décrivant une maison de passe et de jeux. Mieux connue en France en tant que “Lepénitencier.”156


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.en effet, qu'il y a beaucoup plus de gens qui le savent et pensentcomme les familles à Leith et Pénélope. Ils voient en cette catastropheannoncée une punition divine et ne veulent pas partir. Lamère de Mèlia fait comme le reste de sa famille, elle ne part pas.Mélia elle-même a prévu, tout comme Pénélope, de prendre un bateauet de rejoindre des amis au nord dans deux <strong>jours</strong>. Pénélope,elle, veut bien partir avec ses cousins, cousines et Ajax, mais ils nepeuvent partir qu'en quatre <strong>jours</strong>, qui est, elle le sait, très risqué.Leith lui a bien dit de ne pas trop attendre et que la comète va heurterla terre le treizième jour Lion au petit matin, soit en cinq <strong>jours</strong>.C'est en ce moment que Pénélope voit venir un homme qu'elleconnaît vaguement et le salut :— Salut ça fait une paye que je te n'ai pas vu. Tu vas bien ?— Oui, lui répond l'homme répondant au nom de Jason, ça va,mais il y a mieux.— Tu pourrais venir un peu plus souvent, on te voit plus depuisque tu habites de l'autre côté du lac, lui répond Ajax.— Eh, les filles, dit Pénélope, s'adressant à Mélia et sa mère, ons'en va et laissons-nous ces messieurs entre eux. Ils ont des chosesimportantes à discuter et n'ont pas besoin de nos oreilles. Alors, ditelleen s'adressant à Ajax, tu viens tout à l'heure ?— Oui, dit-il, tout à l'heure.— Alors, dit Ajax à Jason, tu as progressé dans tes filatures ?— Oui, je crois. J'ai pu prendre des images de ce type-là, lui répondJason en désignant un dessin sur la table, il logeait au “Bel Horizon32 » avec ceux là et sort deux clichés de sa poche.— Tiens, tu as un de ces nouveaux appareils qui permettent defaire des clichés instantanés ?— Oui, la dépense fallait la chandelle, répond Jason à Ajax, çanous évite de devoir faire des dessins.— Mais ! Je connais celui là, dit Jou-el, c'est le parrain de la régiondes Belzebubs. L'autre m'est familier, mais je n'arrive pas àmettre un nom dessus.— Je crois le connaître, dit Laïos, je l'ai déjà vu, mais pas par ici,c'était dans la région portuaire de Amaki.32 Un endroit bien connu parmi ceux qui ont, comme l’auteur de ce récit, travaillé au CERN.157


On se cache.— Oui, ajoute Midas, il pourrait être le parrain local de là-bas. Ilme semble bien, que je l'ai vu là-bas aussi.— Bien messieurs, dit Jou-el, il faut s'en occuper. On a donc lapreuve que ces soi-disant agents secrets travaillent avec la pègre localeet ne sont rien d'autre que d'anciens voyous.— C’est ça, dit Ajax, le préfet craint en effet qu'ils pouvaient essayerà extorquer un sauf-conduit pour le plan d'évacuation en capturantla princesse Ussa ou un autre membre de la famille royale.Ils discutent encore un moment pour peaufiner le plan d'identificationet de la recherche des anciens agents de la BSI avant de sequitter.Ajax, après avoir réglé sa note, quitte le parc, traverse le boulevardde Parfa et remonte, accompagné de Laïos et Midas, la petiterue avec plein de petits commerces jusqu'à croisement où ils setrouvent la boutique de Pénélope et le bureau du Maître Amilius. Ilvoit que les policiers et le serrurier qu'il avait demandé de venir, l'attendentdéjà. Il les salut en disant :— Bonjour, avez vous dû attendre longtemps ?— Non, lui répond un des policiers, nous venons d'arriver.— Ça va, dit le serrurier, je craignais déjà de vous faire attendre.— Alors, dit Ajax, vous-avez emmené une nouvelle serrure sécuriséeavec vous ? Celle qu'il y a maintenant, s'ouvre avec une épingleà cheveux.— Qu'est-ce que devrons nous chercher, lui demande un autrepolicier ?— Des empreintes digitales, des traces telles que cheveux etautres petites poussières permettant d'identifier le ou les coupables.— Ce n'était pas déjà fait par l'autre équipe, lui demande, un policier?— Non, lui répond Midas, cela a été délibérément négligé surl'ordre de Poseidia.— Comment, ordre de Poseidia, lui répond Laïos, depuis quandobéit-on aux ordres de là-bas ?158


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— C'est justement là, qu'il y a un problème, lui répond Ajax, lepréfet a réagi après avoir reçu des ordres très stricts depuis la capitalefédérale. Il a cru que le roi était au courant sans le vérifier et ilavait donné l'ordre à Ax-Tell, le chef de police, de se taire et classercertaines affaires. Il n'y a donc pas eu de recherches sérieuses. Ilnous faut tout recommencer depuis zéro et sécuriser ce bâtimentpour une raison qu'on ne peut vous révéler en ce moment sansmettre certaines personnes en danger.— Ah oui, dit Laïos aux policiers, essayez de cataloguer les livreset surtout ceux qui semblent manquer. Totalisez le poids manquant,car il se pourrait que Amilius eut caché des livres. D'après les rapports,il n'y a pas eu circulation de voitures le matin de meurtre. <strong>Les</strong>malfrats sont donc venus à pied qui signifie qu'ils n'ont pas pu emmenerbeaucoup de livres avec eux.— Devrons-nous inspecter toutes les pièces ici, lui demande unpolicier.— Oui, y compris l'observatoire au grenier, lui répond Ajax, puiscontinue en s'adressant à un des policiers : c'est vous qui allezcommencer avec l'observatoire. Prenez tous les indices habituels etavertissez-moi quand vous avez fini là-haut. Allons-nous commenceravec la cuisine et continuer avec son salon, dit-il en s'adressant àLaïos.Il s'avère rapidement que tous les livres importants manquent,ainsi que certains carnets de notes que le maître avait par dizaines.Un petit calcul apprend à Ajax que c'était virtuellement impossible,même pour deux ou trois hommes, de porter un tel poids, pour nepas parler du volume que ça représente. En même temps un des policierschargés d'inspecter le bureau, lui rapporte que des objets plutôtvolumineux et lourd semblent manquer. Parmi ces objets figureun globe d'une taille de deux pieds. Un des policiers se souvient del'avoir vu chez le maître. Impossible donc de l'avoir emporté sans sefaire remarquer. Mais les surprises n'arrêtent pas là, le télescopetrouvé en pièces à l'observatoire, s'avère avoir été démonté et nonpas cassé. De plus que certaines petites pièces détachées indéfinissablestrouvées au bureau s'avèrent appartenir au télescope de l'observatoire,où ils semblent manquer. La question “où” reste entier.159


On se cache.Où a-t-il pu cacher tout ce matériel et livres ? Pour les livres, Ajax aune petite idée, qu'il ne communique pas aux autres, car il va voirPénélope tout à l'heure et c'est elle qui en sait sûrement quelquechose. Il aime bien chercher l'accès à la soi-disant cache que lemaître avait fait construire, mais il faut que les policiers aient fini leurinvestigation et partent avec Laïos et Midas, car pour le reste, seulJou-el, dont il attend l'arrivée, a été mis dans la confidence et ilsaimeraient chercher l'accès à cette pièce cachée, que le maître avaitfait construire au grenier, pour vérifier sa sécurité.Pénélope, finissant sa dernière cliente de la journée, est peu surprisede voir entrer Ajax. Elle l'attendait en fait pour savoir cequ'elle allait faire de ses deux invités. Pendant qu'elle met sa clientesous un casque sèche-cheveux, car elle lui n'avait fait que sa coiffure,elle lance à Ajax :— Assois-toi là, en lui désignant un fauteuil de coiffure.— Mais, lui répond Ajax, je ne suis pas venu pour me faire coifferni me faire une beauté.— Tu as vu tes cheveux, lui dit Pénélope, c'est carrément des nidsd'oiseaux. T'appelles ça se soigner ? Je ne sors pas avec un mec quine sait se soigner. Alors, continue-t-elle en faisant sourire sa cliente,laisse-toi faire, je t'arrange ça.Pendant qu’Ajax s'assoit dans un fauteuil pour se faire laver etcoiffer ses cheveux, la conversation reprend assez vite le sujetcommencé dans le parc quelques heures plutôt. La cliente présentesemble avoir vu des individus suspects, qui pourraient, d'après sesdescriptions, être les mêmes qu'aux clichés de Jason. Elle les avaitvus aux alentours de la gare et conclut qu'ils étaient venus par là.Elle ne sait pas par où ils sont partis. La seule chose qu'elle sesouvient, c'est qu'ils partaient à pied en suivant la rue centrale en directionouest. Ajax décide de prendre ses coordonnées et de reveniravec son confrère Jason pour une identification formelle. Pénélopequi a fini sa cliente entre temps, demande à Ajax pendant qu'elle finitla coupe de ses cheveux :160


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— C'est bon Ajax, j'ai fermé la porte. Tu peux parler maintenant.Tu as pu sécuriser la pièce au grenier de Amilius ?— Oui, il n'y a pas danger. <strong>Les</strong> sbires de Ra-Ta n'ont pas trouvél'accès. Ils s'y trouvent d'ailleurs le télescope, le globe, deux astrolabes,la plupart des livres manquantes et ses notes. Il me semblequ'il doit y avoir un testament certifiant que Leith est son héritieruniversel.— Regarde tout à l'heure dans mon bureau, il m'a donné destrucs importants à garder. Ils sont cachés dans des classeurs decomptes et se trouvent mêlés avec les miens.— Ah bon ? C'est toi qui les as ?— Oui, lui répond-elle, il les a donnés à Leith dans un classeur decomptes, qui me les a apporté. Mais montons à l'étage, je vais préparerun petit souper pour nous quatre et ensuite, une fois la nuittombée, on peut les accompagner à la demeure de Amilius.— Veux-tu que je viens avec toi, demande-t-il.— Oui, ce sera mieux. Comme ça tu peux les assurer un peu. Ilscraignent tou<strong>jours</strong> être vu et démasqués.Pendant que Pénélope part dans sa cuisine pour préparer un légersouper pour elle et ses trois invités, Ajax se rend au grenier et jetteun regard surpris autour de lui. Il ne s'attendait pas à y trouver unepièce aussi joliment arrangé. <strong>Les</strong> deux jeunes n'ont même pas entendul'entrer et sont surpris de le voir si soudainement apparaître devanteux. C'est Leith qui le salut en premier :— Salut Ajax, comment vas-tu ?— Ça va, répond-il, tou<strong>jours</strong> dans vos bouquins, n'est-ce pas ?Que cherchez-vous, tou<strong>jours</strong> cette fichue étoile ?— Non, lui répond Ussa, nous sommes seulement curieux commentun voyage en travers de onze mille huit cents ans peut se produire.On cherche en ce moment dans les textes anciens s'il y en aeu d'autres du même genre dans le passé.— En avez-vous trouvé ?— Oui, lui répond Leith, au moins une histoire dans les textes sacrésd'un vieux berger montant paître ses moutons ; il aurait retrouvéen descendant son petit-fils âgé de quatre-vingts ans, qui lui narraitque tout le monde le croyait mort, disparu.161


On se cache.— N'oublie surtout pas ce fait divers qui avait apparu dans lesjournaux il y a quelques années, dit Ussa. Il y avait un type qui étaitvenu voir un journal de Amaki en leur racontant qu'il avait vu la villeet le port sombrer dans la mer. Il disait que c'était affreux à voir,tous ces gens en train de se noyer. Il y avait également en train quidéraillait à ce moment-là, dont seul les quelques passagers du premierwagon ont été sauvés, grâce au fait qu'il se désintégrait pendantle déraillement. Il a vu les passagers flotter sur des pans de wagonvers le large. Ce qu'il lui restait en mémoire est le fait qu'un des naufragésa été secouru par un voilier venu de nulle part, qui en plus,partait dans le nulle part peu après avoir secouru d'autres passagersd'un bateau apparemment en difficulté.— Oui je m'en souviens vaguement, lui répond Ajax, on a toutcru qu'il s'agissait d'un farfelu voulant faire l'intéressant.— Ce n'est peut-être pas aussi farfelu qu'on croit, lui répondLeith, on sait maintenant que c'est bien cela qui risque nous arriverdans cinq <strong>jours</strong> au petit matin.Soudainement ils entendent quelqu'un qui monte l'escalier. C'estPénélope qui vient les chercher pour le souper. Elle n'avait pas enviede les appeler en bas de l'escalier, car trop indiscret. En mettantsa tête dans l'entrebâillement de la porte, elle les dit :— Alors, vous venez souper ou quoi. Vous ne vous nourrissezpas de vieux livres. Non ? Ne pressez-vous pas pour partir, car ondoit attendre la tombée de la nuit avant qu'on puisse passer chezAmilius par les toits.<strong>Les</strong> quatre amis ne parlent pendant le souper que des banalités etles faits évoqués par le confrère de Ajax, Jason. <strong>Les</strong> discussions dériventassez vite sur la nouveauté qu'il ait utilisée, son appareil à clichésutilisant des petites plaques avec une émulsion sensible à la lumière.Soudainement, c'est Leith qui se souvient qu'Angélique a unappareil semblable, sauf qu'elle utilise ni plaque ni autre support.C'est, selon Leith, que l'appareil mémorise lui-même les images, quel'on peut ensuite imprimer, utilisant un dispositif approprié. La discussioncontinue ensuite sur l'étrange dispositif à deux roues muepar un pédalier qu'Angélique et son frère utilisent pour se déplacer.Ussa, qui se mêle de la conversation, déclare qu'elle et Leith ne com-162


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.prennent pas comment on peut rester debout sur une telle mécanique.Ajax, lui, est d'avis qu'il y a sûrement truc, comme avec lestours de magie. Pénélope, qui avait débarrassé la table entre temps,revient avec quatre verres et des différentes bouteilles. Après avoirdégusté en silence des produits dont une partie vient du domaine desAjahel, la famille de Leith, Pénélope leur dit :— C'est l'heure les enfants, il faut y aller.— J'ai peur, dit Ussa.— Ne regarde pas en bas, lui dit Ajax, Leith va te tenir.— Ce n'est pas si grave, leur dit Pénélope, on ne passe pas aubord des toits. Ajax, as-tu bien déverrouillée la fenêtre du grenier àAmilius tout à l'heure ?— Oui, on peut l'ouvrir de l'extérieur.— <strong>Les</strong> gens qui habitent entre les deux maisons, ne risquent-ilspas nous entendre, lui demande Ussa ?— Non, lui répond Pénélope, ils sont partis dans le nord chezleur famille pour quelques semaines.— Ils ne risquent pas revenir dans ce cas, lui dit Leith.— C'est ce que je pense, dit Pénélope, c'est comme les deuxMacs, ils ne vont pas tarder à partir aussi. Ceux qui restent mettent,comme ma famille et celle de Leith, leur destin aux mains de Ra.Après avoir terminé leur périple par toits, les quatre amis setrouvent au grenier au-dessus l'appartement de Amilius, juste à côtéde l'observatoire. La pièce n'est pas aussi confortable que celle dePénélope, mais est, comme la sienne, équipée d'une salle d'eau, unetoilette et un petit coin cuisine. Pénélope a d'ailleurs emporté de lanourriture pour quelques <strong>jours</strong>, telle qu'ils n'ont pas besoin de sortir.Ussa et Leith constatent que Amilius ait pris conscience du danger eta mis plusieurs objets de, à ses yeux, valeur dans cette pièce. C'estAjax qui voit qu’il s'y trouve le grand télescope, le globe de son bureau,les astrolabes et apparemment ses carnets de notes. Leithcommence à inspecter le contenu des armoires où ils se trouvent lesdifférents livres dont un que le maître ait utilisé pour lui lire le mythede la fin du monde. Ajax inspecte la porte donnant accès à l'obser-163


On se cache.vatoire, pour voir s'il n'a pas été violé et que le mécanisme de verrouillagemarche bien. Il montre ensuite les espions par lesquels onpeut observer la pièce en dessous et l'observatoire.— Vous n'allez pas vous ennuyer, leur demande Pénélope ?— Non, c'est pour cela qu'on a emmené les livres, puis Amilius alaissé assez d'autres. Nous allons continuer nos études ici et nous nerisquons pas de nous ennuyer.— Ussa, tu crois pouvoir venir toute seule chez moi par lestoits ?— Je ne suis pas sûr, mais je vais l'essayer quand il le faut, répond-elle.— Pour moi, pas de problème, lui répond Leith à Pénélope.— Alors, je laisse la fenêtre du toit ouvert, comme ça tu peuxvenir me voir s'il y a un problème, dit Pénélope sans s'adresser àquelqu'un de précis.— Alors, Ajax, lui demande Leith, les sbires de la BSI ont-ils putrouver cet endroit. Y a-t-il des microphones, d'espions ou autrestrucs ici ?— C'est cela que je suis en train de vérifier, lui répond Ajax.— Eh ! Dit Pénélope à Leith, le maître m'a laissé une lettre pourtoi, il fallait l'ouvrir s'il lui arrivait quelque chose. Je pense qu'il asenti quelque chose venir, car il m'a fait cette lettre il y a quelquetemps déjà.Leith ouvre la lettre plutôt épaisse, voit qu'il contient une feuilleressemblant à un testament et des listes d'objets, ainsi qu'une lettreadressée à Ussa à lui remettre à l'occasion de son dix-neuvième anniversaire.Cher Leith,quand vous lisez ces lignes, c'est que je ne suis plus de ce monde.J'ignore comment je vais quitter ce bas monde mais assurez­vous que,où je serai, je serai bien. N'ayant plus de famille ; je n'ai pas d'autrehéritier que vous. Vous êtes la personne capable de continuer mesoeuvres, de s'occuper de mes clients, faire leurs courriers et démarchesofficiels, guider les gens du quartier dans leurs vies et leur apporter lesoutien nécessaire dans la peine. Ils ont autant confiance en vous164


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.qu'en moi. Mis à part un héritage, ce document vous élève officiellementau rang de compagnon, qui signifie que vous êtes désormais autoriséà effectuer un baptême, à effectuer un mariage religieux et àconduire un culte d'enterrement. Inutile de vous rappeler que vousavez déjà conquis le droit de guider les gens dans leur chemin vers lasagesse. Voulez­vous bien lire cette lettre à haute voix devant deuxtémoins au moins ; c'est ainsi qu'il prend effet officiellement.Je, soussigné Maître Amilius Axis, donne et lègue à Leith Ajaheltous les biens mobiliers et immobiliers, tous les droits et obligationsliées à ma fonction, qui composeront ma succession sans exception niréserve. Je déclare en outre révoquer tout autres testaments et dispositionsque j'aurais pu prendre antérieurement.Fait et écrit entièrement de ma main à Osuo le 12'206 quinzièmejour Gémeaux.Amilius AxisQuand Leith a fini à lire la lettre, il explique à ses compagnons ceque c'est et recommence à le lire, mais à haute voix cette fois. Puis ilfinit par déclarer :— Cette lettre a donc à peu près deux ans, puisque nous avons lehuitième jour Lion, 12 208.C'est Ussa la première à réagir en disant :— Tu peux célébrer mon mariage alors ! Tu le fais, n'est-ce pasLeith ? Tu me dois ça !— Je te rappelle, répond-il, qu'on a les mêmes droits à présent.Tu pourrais donc célébrer le lien en retour.— Eh bien ! Dit Pénélope, le beau-frère marie sa belle-soeur et labelle-soeur marie son beau-frère.— Comment ça, lui demande Ajax, qui n'est visiblement pas à lamême page.— Tu ne le savais pas encore ? Lui demande Pénélope, ils sonttous les deux amoureux, mais d'un frère et sa soeur.— Alors, dit Ajax à Leith, ta belle gauloise à donc un frère.Mais c'est une Ussa rougissante qui lui répond :165


On se cache.— Oui, c'est au temple d'Ozin que j'ai fait sa connaissance, plutôtfoudroyante. J'étais complètement perdu quand je le voyais pour lapremière fois. Je ne m'attendais pas à cela. Je savais de part de Leithqu'Angélique, sa gauloise donc, avait un frère, mais qu'il produisaitcet effet sur moi, non je l'ignorais.— Tu es visiblement très amoureuse, ça se voit, lui répond Pénélope,cette couleur rouge sur tes joues te va bien.— Ne le taquine pas davantage, lui dit Ajax, tu ne sais jamais cequ'il va t'arriver.— Tu aurais dû voir Leith, dit Ussa, quand on se trouvait dans sasalle d'eau. Angélique se lavait sous un robinet qui versait de l'eau enpluie, elle était toute nue. Elle sortit cette petite cabine en croyantqu'il y avait son frère. Quand elle s'est aperçue que c'étaient Leith etmoi, elle se sentit très gêné, mais ne le montrait pas et a effectué unepirouette devant Leith en lui demandant : « Alors, je te plais ?»— Alors, lui demande Pénélope, elle était vraiment belle ? Elle tepaît ?Mais c'est Ussa qui répond : il n'a certes rien dit, mais il a bien réagicomme un homme sain de corps et d'esprit devrait réagir en présencede la fille de ses rêves quand elle se montre tout nu devant lui.Après, elle s'est habillée et nous sommes partis chacun dans unechambre. Lui a suivi Angélique, tendis moi je suivais Julien, c'estcomme ça qu'il s'appelle, dans sa chambre.— Tu as parlé de quoi alors lui, demande Pénélope ?— De tout et de rien, je m'en souviens plus. Tout ce que je mesouviens, c'est qu'il s'en occupait d'un club nautique au bord de lamer. Ils avaient là des petits bateaux à voile, mais aussi des trucsqu'on ne connaît pas, une sorte de planche long de six à sept pieds,capable de porter homme avec une voile dessus.— De quel bois était-il fait, lui demande Ajax.— J'ignore, car celui-la que julien avait dans sa chambre, étaitpeint en blanc. Je pense que cela doit être du balsa ou une autre matièretrès légère. Il arrivait à le lever avec une seule main, or uneplanche en bois ordinaire sera trop lourde pour pouvoir le faire.Pendant qu'ils discutent encore un moment des différents sujetsqui leur passent par la tête, ils ne voient pas le temps passer. C'est166


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.bien passé minuit que Ajax et Pénélope prennent congé des deuxjeunes, qui ne tardent pas à aller se coucher.167


ULe texte de Platon.ssa, à moitié réveillée, ne se réalise pas où elle se trouve cematin très tôt du neuvième jour Lion. Le jour commence àpeine à se percer et ce sont une lumière et des petits bruit qui l'ontréveillé. En se croyant chez elle, elle appelle sa mère :— Maman ! Puisqu'elle n'obtient pas de réponse, elle l'appelle ànouveau, mais plus fort : MAMAN !Elle se retourne dans son lit et essaye, sans succès, de se ré-endormir.Mais elle n'arrive plus à s'endormir et fâché de ne pas avoirobtenu une réponse, elle s'écrie à nouveau :— MAMAN, qu'est-ce que vous faites dans ma chambre, vousfouillez dans mes affaires à présent, vous n'avez plus confiance enmoi ?C'est à cet instant-là que Leith, surpris par les appels d'Ussa, seréalise que sa compagne se croit chez elle et lui dit :— Ussa ! Ussa, tu n'es pas chez toi ! Réveille-toi !Ussa, qui n'est pas encore revenue du pays de ses rêves, se frotteles yeux et regarde son compagnon et lui demande :— Qu'est-ce que tu fous si tôt le matin ? Tu n'as pas pu me laisserdormir un petit peu ? Je n'ai pas d'habitude de me réveiller sitôt !— Désole Ussa, lui répond Leith, mais je dois absolument écrirece qu'Angélique m'a lu tout à l'heure, avant que mes souvenirs de cerêve s'évaporent.Ussa, comprenant qu'elle ne faille absolument pas déranger sonami pendant qu'il écrit, se lève et va dans la salle d'eau pour se laveret s'habiller. Leith continue entre temps à écrire et à compléter lesinformations fournies par la copine de ses rêves. Il ne se soucieguère de ce qu'il se passe autour de lui, car il faut avoir écrit tout cequ'il eut rêvé dans les minutes qui suivent son réveil. Quand Ussa afini de se laver et de s'habiller, elle vient vers son compagnon et lit cequ'il écrit. Surprise par le contexte du récit, elle va vers l'étagère avec169


Le texte de Platon.les vieux livres de Amilius et commence à chercher en prenant un, lefeuilleter, le remettre et ré-commerce avec un autre. Leith qui voit sacompagne fouiner dans les vieux livres, le demande :— Ussa, que cherches-tu ?— Eh bien ! Ce que tu as écrit m'est familier. Même si une partiede ce que tu as écrit figure dans les sept fléaux, il y a une qui m'estfamilier. Je ne sais pas si tu as bien regardé, mais ton récit parled'une armée équipée de chevaux, de chevaliers, des frondeurs etautres, tandis celle de maintenant a bien d'autres armes. Il mesemble que les anciens avaient déjà enterré dans les temples desinformations concernant notre société, comme les scientifiques etsages l'ont fait il y a quelques années.— Oui, lui répond Leith, je m'en souviens. Il me semble qu'ilsont fait pareil que les anciens : dans les pays de Yuk, dans un templed'Égypte et dans la pyramide de Sus.— C’est ça, dit Ussa, la situation décrite dans les récits que tuviens d'écrire correspondent à la vie de quelques centaines d'annéesen arrière. Je dirais de trois à cinq cents ans, car l'évolution techniquea été assez fulgurante ces deux <strong>derniers</strong> siècles.— Je pense, lui dit Leith, que le récit de la fin du monde dû êtretransmis oralement, car il fait mention d'une guerre avec le peupleHellénique, que l'on aurait perdu, mais pas celui avec le peupleSaneid, qui mobilise pourtant tous nos efforts en ce moment.— Tu as peut-être raison, car nous avons à répétition des problèmesavec les Helléniques et spécialement avec ceux du conté deAthènes. <strong>Les</strong> survivants ont sûrement dû transmettre le récit de ladisparition oralement et ont fait un plus un égal deux quand ils ontretrouvé les écrits des anciens dans le temple Égyptien.— Oui, lui répond Leith, cela signifie également que les informationset objets cachés il y a quelques années, n'ont pas encore été retrouvéspar les contemporains d’Angélique.— Ce que je trouve bizarre, lui dit Ussa, que la société, dans laquelleAngélique et Julien vivent, n'a pas pu trouver nos informationsni nos traces. Ce que je ne comprends pas, c'est que le peuplede Yuk n'ait pas pu transmettre le moindre indice. Ne l'ont-ils pastrouvés ? L'ont-ils été détruits, peut-être.170


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Je crois, lui répond Leith, que tu as raison de croire que certainestraces et indices ont été détruits. Tu sais, toute nouvelle religionconsidère les anciens qu'il remplace comme hérétique et lesrécits les concernant sont souvent détruits. C'est ce qui est probablementarrivé aux textes anciens cachés au pays de Yuk. Il est à espérerque la pyramide de Sus a résisté et que les informations là dedanssont restées intactes.— Pourquoi dis-tu ça ? Lui demande Ussa.— Parce qu'une société capable de plonger et chercher à une profondeurau-delà mille cinq cents pieds, est forcément aussi avancéeque la nôtre actuellement et a sûrement la sagesse de ne pas piller etdétruire le savoir des anciens.— J'espère que tu as raison.— Comment ?— Une société techniquement avancée n'a pas forcément développéson niveau culturel et spirituel. Il est même possible que ledéveloppement technique et industriel les a conduits à un appauvrissementde celle-ci.— Sais-tu, lui demande Leith, quel genre de religion Angélique etJulien ont ? Angélique ne m'a pas parlé de cela quand on a discutéensemble, mais elle ne me semble pas très pieuse. Ce qui me chagrineun peu, c'est qu'elle n'est pas végétarienne. Son frère non plusje crois.— Je crois, lui répond Ussa, qu'ils vénèrent un seul dieu et queleur religion est issue de celle des Hébreux.— Je crois que tu as raison, dit Leith. Ils ont un calendrier dontils comptent les années depuis la naissance de leur guide spirituel.Puis ce qui est curieux, c'est qu'ils utilisent l'astrologie non pascomme calendrier, comme nous le font, mais comme moyen de prédirel'avenir. De plus, ils n'ont plus adapté depuis longtemps les positionsdes signes de sorte qu'ils ont un décalage de deux mille centsoixante ans à l'heure qui vivent. Je m'en suis aperçu quand j'ai essayéde ré-calculer des données. <strong>Les</strong> données qu'Angélique a déjà pufournir sont par contre bonnes. Ce sont positions astrologiques quine collent pas. Elle a donc dû se servir d'une autre base que l'astrologie.171


Le texte de Platon.— Comment, décalage ? Lui demande Ussa.— Tu devrais te souvenir que le rapport entre l'équinoxe deprintemps et le calendrier astrologique décale un jour toutes lessoixante et onze années. Chez Angélique, ils n'ont plus fait cedécalage depuis deux millénaires et ils se trouvent ainsi avec un peumoins qu'un mois de différence. De sorte que le signe Cancer setrouve à leur position Lion, Lion à Vierge, Vierge à Balance, ainsi desuite. Ce qui veut dire qu'une personne née sous le signe de Balance,comme toi, est en réalité Vierge.— Mais ce n'est pas sérieux, dit Ussa, ils ne se sont pas aperçusde l'erreur ?— Sûrement, mais cela n'a plus aucune importance depuis qu'ilsne l'utilisent plus en tant que calendrier, mais seulement pour raconterdes babars.Pendant que Leith continue à étudier ses notes qu'il venait defaire, Ussa se met à fouiner dans les armoires de Amilius sans chercherquelque chose de spécifique. Elle désire seulement satisfaire sacuriosité.Ajax qui est venu assez tôt à la boutique de Pénélope, la trouveencore fermé et surprend sa propriétaire à son petit-déjeuner. Pénélopeest, elle aussi, surpris de le voir débarquer chez elle à uneheure aussi matinale. Surtout qu'ils ont fini assez tard la veille ausoir, ou plutôt tôt le matin, car après avoir quitté les deux jeunes, ilsont encore pris quelques boissons chez elle, avant qu'il partit chezlui. Pendant qu'ils montent l'escalier montant à l'appartement de Pénélope,elle lui demande :— Alors ? Tu n'es pas trop fatigué ? Je ne t'ai jamais vu aussi tôtchez moi. Que arrive-t-il ?— Oh, ça va. J'ai eu pire que ça. Il m'est assez souvent arrivé dedevoir veiller plusieurs nuits de suite. Notre boulot n'est pas de toutrepos, tu sais. Et toi ? Ne risques-tu pas de mélanger peigne et ciseaux?— Tu parles, tu sais bien que je supporte encore des nuits en raccourci,ou faut-il que je te fasse un dessin ?172


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Effectivement, mais les fois qu'on était sorti, le lendemain tune travaillais pas et tu pouvais rester au lit le matin.— Tu sais, quand on a l'habitude de se lever tôt le matin, on seréveille quand même. Je me pique une petite sieste au début del'après-midi dans ces cas là.— As-tu des nouvelles de nos amis ? Ont-ils bien dormi ? Quefont-ils en ce moment ?— Mais ! On vient de les quitter hier soir sur le tard, ils ne sontpeut-être même pas levé. On ne peut pas y aller de toute façon, cartrop voyant pendant la journée. Tu devrais revenir ce soir quand ilcommence à venir nuit.Arrivé chez elle dans son appartement à l'étage, elle met son petit-déjeuner,qu'elle prenait dans la cuisine, sur la table de salon etajoute une assiette et demande :— Tu prends quoi ? Du thé ? Ou préfères-tu autre chose ?— T'en as du café, demande-t-il.— Oui, j'en ai cette saloperie Abyssinienne, j'en prends parfoismoi-même. Rien de mieux pour couper le sommeil. Tu le prendsavec du lait chaud, n'est-ce pas. C'est ce que je me souviens en toutcas.— Oui, c'est ça.— Je fais griller des petits pains ? Je crois que t'adores cela avecde la confiture. Non ?— Oui, merci.— Tu sais, lui dit Pénélope, je ne m'en fais tou<strong>jours</strong> pas que toutici soit fini dans une semaine. Je viens de parler tout à l'heure avecmaman, puis elle pense, comme la famille à Leith qui habite à côtéd'eux, qu'on aurait une bonne chance de s'en tirer. Que penses-tu ?— Nul ne le sait, mis à part Ra. Maître Amilius avait bien calculéque cette comète croise l'orbite terrestre dans cinq <strong>jours</strong> au petit matinet que la chance de s'en tirer était de sept pour-cent. D'autrepart, les officiels de Poseidia n'ont pas tout à fait tort quand ilsdisent que ce soit comme les deux dernières fois et que l'île va certainementsubir des dégâts importants, mais que la majorité de la populationsurvivra.173


Le texte de Platon.— C'est ce que ma famille pense. Ils veulent aller en compagniedes Ajahel au temple pour prier Ra de les épargner ou de les accorderune faveur pour la prochaine ré-naissance.— Tu crois à ça, lui demande Ajax.— Je ne sais pas, je ne suis personnellement pas pratiquante, maismes parents et surtout ma mère sont très croyants et pieux, toutcomme ceux de Leith.— Moi non plus, mais je garde espoir de m'en sortir. Tes cousins,ne veulent-ils pas aller vers le nord ? Tu ne pars pas avec eux ?— Oui, c'est bien ce que j'ai prévu. On va rejoindre les Macs, euxont encore des terres de l'autre côté où on peut faire paître des moutonspendant l'été. Puis la zone est très bonne pour la pêche. On nerisque pas d'y mourir de faim. Tu pourrais venir avec nous, si tuveux. Mais il faut que tu sois au port le matin au plus tard. On part,sauf imprévu, dans quatre <strong>jours</strong>. C'est certes un peu tard, mais pasencore trop tard.— Ça pourrait se faire, lui répond Ajax, mais j'ai éventuellementune alternative. Tu connais Jason, peut-être ? Il a avec deux autresamis un grand bateau sur le lac et il voulait faire de même. Son bateaupossède un engin acheté chez les Saneid qui fonctionne avec del'huile et a une autonomie de deux mille miles nautiques au moins. Ilvoulut tout simplement attendre au milieu du lac que le pays sombreet filer ensuite au nord. Je sais que c'est risqué, mais il y a unechance de réussir.— Je ne sais pas, lui dit-elle, mais j'ai fait il y a quelque temps unrêve qui m'intrigue. Dans ce rêve je me suis réveillé un piteux étatdans un hôpital très sophistiqué. Il y avait des appareils partout,j'étais attaché à un tas d'appareils divers avec des fils, des tuyaux etautres. Une technologie que je n'ai jamais vue par ici. Je suis persuadéque c'était le pays de la gauloise où j'étais. Tu crois que je vaisfaire le voyage avec eux ?— Je ne sais pas ma chère, on ne sait jamais. Garde espoir !— Eh ! S'écrie-t-elle en regardant l'heure, il faut qu'on se dépêche.J'ai des clients ! Moi ! Je travaille aujourd'hui tu vois. Fin dumonde ou pas fin du monde, il faut servir des clients. Beaucoupignorent encore ce qui va arriver ou ne veulent tout simplement pas174


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.le savoir. Il faut bien les servir. Non ? Alors, tu viens ce soir, voirnos deux invités ?— Oui, à ce soir à la fermeture.— Salut Ajax, à ce soir et merci pour ta visite.C'est quand il quitte la boutique de Pénélope, qu'il voit Jou-el partiren direction de l'estaminet de Abdubu et décide de faire de même.Quand Jou-el entre chez Abdubu, il voit qu'il n'y a pas encoregrand monde à cette heure matinale. Il y a quelques commerçantsqui y prennent leur petit-déjeuner à défaut de l'avoir pris chez eux.Puis quelques clients réguliers, retraités depuis un certain temps déjà,qui cherchent à meubler leur temps libre en jouant au domino oudés. Jou-el s'assoit à la table habituelle et attend que Abdubu a letemps de lui servir. À peine assise, c'est Abdubu qui l'appelle, car ilavait déjà reçu une communication demandant à parler à Jou-el ouAjax et leur laisser un message d'appeler le commissariat dès qu'ilsarrivent, car, à ce qu'il paraît, ils ont tous les deux éteint leur communicateurpersonnel pour ne pas être repéré par le BSI. C'est Ajaxqui vient d'entrer pendant que Jou-el prend une communication avecle commissariat. Abdubu le salut :— Salut Ajax, comment vas-tu ? Tu as l'air à être un peu fatigué,tu as dû veiller ?— Salut Abdubu, lui répond Ajax, j'ai effectivement veillé, maispas là où tu crois. J'ai fini la soirée chez Pénélope, on a discuté jusqu'àtard la nuit.— Tu finis par la marier, ne crois-tu pas ?— Tu sais très bien, que personne, même pas Pénélope, ne replacerafeu ma femme. J'ai eu trop de peine quand elle est partie rejoindrele royaume de Ra. Une peine qui perdure. Peut-être que letemps me guérit, mais pour l'instant, il faut que je cherche à vivreavec.— Désolé, je ne voulais pas te blesser, lui répond Abdubu.— Ce n’est pas grave. Tu me portes un café avec du lait chaud,s'il te plaît ?— Des petits pains, pains-grillés-confiture ?175


Le texte de Platon.— Non, ça va, je viens en manger chez Pénélope. Je viens de luidire bonjour en passant et elle était à son petit-déjeuner.— Tiens, salut Ajax, lui dit Jou-el qui revient à table, on a du nouveau.Il faut qu'on aille identifier quelqu'un. La police a repêché cematin très tôt un corps gravement mutilé du port de plaisance.— Ils ne savent pas qu'il est, lui demande Ajax.— Oui, ils ont bien une petite idée, mais ils aiment une identificationformelle, car il se peut qu'il s'agisse de notre client. De plus, ilsont chopé quatre autres, que nous devrons aussi identifier.— Puis a-t-on du nouveau de Jason ?— Non, lui répond Jou-el, et toi ?— Non plus, mais on s'est quitté hier après-midi. Je sais qu'il travaillevite, mais aussi vite que ça. Puis, nos deux voyous suprêmesdes Belzebubs, a-t-on du nouveau ?— Oui, lui répond Jou-el, ils logent effectivement dans “Bel Horizon”et sont surveillés par des agents de la garde royale.— Mais, dis-donc, ils ne s'emmerdent pas, ils volent et extorquentde l'argent pour mener la belle vie.— Je pense plutôt qu'ils se cachent. Ils semblent penser que cespalaces comme le “Bel Horizon” sont des lieux sûrs.— Sûrement, lui dit Ajax, mais c'était sans compter sur la curiositéd'une cliente à Pénélope.— À propos de ces clientes, viennent-elles à l'identification ?— Je ne sais pas, lui dit Ajax, ce n'est pas sûr qu'elles oserontvenir. Je sais que les suspects nous ne voient pas mais est-ce suffisantpour les assurer.— On pourrait le leur demander, lui répond Jou-el, qu’en pensestu?— Abdubu ! Hé ! Abdubu où es-tu ? S'écrie Ajax, viens nousporter une autre tournée, ensuite on part.C'est un peu plus tard que Pénélope voit, surprise, entrer ses deuxcopains de bistro et les salue :— Salut les mecs, c'est pour un masque ou une coupe ?— Salut la belle, lui dit Jou-el, on a une question à te poser.— Pose-le seulement, je ne suis pas sûr de pouvoir répondre,mais tu peux tou<strong>jours</strong> le poser.176


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Alors, dit Jou-el, il s'agit d'identifier des suspects au commissariat.C'est sûr que les suspects ne peuvent pas voir les personnesde l'autre côté du miroir, mais nous ne sommes pas sûr si tes clientesoseront venir. Tu crois qu'on peut le leur demander ? Il sera mieuxqu'elles viennent de leur propre gré, au lieu de les convoquer. Nousserons avec elles pour les assurer pendant l'identification. Ce serapeut-être bien si tu pourras aller toi-même au commissariat, tu les aségalement vus aux alentours de la bibliothèque, n'est-ce pas ?— Oui, lui répond-elle, j'irai là-bas vers la fin de la matinée,quand j'ai un moment de libre. Il faut que je fasse mes courses detoute façon. En ce qui concerne mes clientes, je crois qu'elles seraientd'accord à condition que vous y soyez également.C'est en ce moment qu'une des clientes présentes se mêle de laconversation et demande :— Voulez-vous que je vienne avec vous pour identifier l'individuqu'ils ont repêché ce matin ?— Ils ont repêché quelqu'un ce matin, lui demande Pénélope.— Oui, lui dit Ajax, c'est probablement notre “Cient” et il n'estpas beau à voir. Âmes sensibles s'abstenir. Vous pouvez madame,mais on vous prévient que ce sera pénible à voir. Si vous avez vud'autres suspects, n'hésitez pas à venir avec nous. On peut attendreun petit moment pour laisser Pénélope finir son travail.— Oui je viendrai, il me semble bien, que j'ai vu d'autres zozosqui n'ont rien à chercher ici dans notre ville. Mais si ce type qu'ilsviennent de repêcher ce matin est vraiment horrible à voir, je préféraide ne pas devoir l’identifier.— Non, lui dit Jou-el, il n'y a pas de problème.— Nous le ferons, ajoute Ajax.Pendant que Pénélope finie sa cliente, elle, Jou-el, Ajax et lacliente présente discutent un peu de tout et de rien où le sujet quifâche est tou<strong>jours</strong> les événements à venir. C'est étonnant que certainsont les mêmes idées, la cliente a, elle aussi, de la famille dans lenord et compte y aller dans les <strong>jours</strong> qui suivent. Elle affirme quecette lointaine famille a, comme celle des deux Macs, des terres sur lecontinent. Elle sait, que survivre comme le font les sauvages, n'est177


Le texte de Platon.peut-être pas très gaie, mais il faut que quelqu'un le fasse pour que lasociété puisse se reconstruire.— Alors, dit-elle, je suis prête, je viens avec vous ?— On y va donc, lui dit Ajax et continue en s’adressant à Pénélope,tu viens tout à l'heure ?— Oui, lui répond-elle, mais ne m'attend pas, je viens plus tarddans la matinée, j'ai une cliente qui peut venir d'un moment à l'autre.Quand ils montent la rue vers la haute-ville, tous plongés dansleurs pensées, ils échangent peu de paroles. En passant devant lasalle des fêtes, ils regardent tous pour voir si le vieil homme serapeut-être revenu, ce qu'il n'est pas le cas. Quand ils entrent dans lecommissariat, ils font signe à la dame de les attendre pendant qu'ilsvont vers la morgue où est entreposé le corps du “client”. C'est Ajaxqui le reconnaît en premier.— Oui, dit-il, c'est bien lui. Je le reconnais à cicatrice laissé au visage.C'est une marque et non pas une blessure.— Mais il n'en reste pas grande chose de lui, s'exclame Jou-el, etce ne sont pas seulement les fourmis qui ont fait cela.— Ça va, dit Ajax, on va identifier les autres pour voir si onconnaît quelques-uns d'entre eux ?En passant par la réception, où la dame les attend patiemment, ilsvont vers la salle d'identification où il faut choisir le suspect parmides faux suspects en travers un miroir à sens unique. Sur les quatresuspects, trois ont été formellement identifiés par les trois personnes.— Vous m'accompagnez, demande la dame aux deux amis.— Oui, pourquoi pas. Vous venez en moment avec nous ?Nous allons chez Abdubu.— Abdubu ? Leur demande la dame, qui est-ce ?— Ah, lui répond Jou-el, c'est l'estaminet “<strong>Les</strong> Jardines”, c'estcomme ça que nous l'appelons.— C'est le nom du propriétaire, ajoute Ajax, il est d'origine Perse.On mange très bien chez lui.— C’est ça, dit Jou-el, même Leith, l'élève de Maître Amilius, quiest végétarien, y trouve son compte.178


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Alors, je viens avec vous, je n'ai pas encore pris mon petit-déjeuner.— Ah bon ? Lui dit Ajax, mais même si c'est un peu tard, Abdubus'arrange, il a tou<strong>jours</strong> quelque chose pour ses clients.La conversation, en descendant vers le café de Abdubu, se portetrès vite sur les habitants du quartier où on passe en revu tous les petitsragots que l'on raconte sur eux.Ussa, en fouinant systématiquement les armoires de Amilius,vient de tomber sur un dispositif qu'elle reconnaît vaguement. Ils'agit d'un petit piédestal munis de différents boutons et réglagesavec une boule de cristal monté dessus. Elle se rappelle maintenantque ses grands-parents en avaient un. Ils se servaient jadis pourcommuniquer et recevoir des nouvelles. Elle sort le vieil appareil del'armoire, le pose sur la table et commence à le tripoter. Maisl'appareil, n'ayant plus servi depuis longtemps, n'a plus d'alimentationélectrique et les cartouches d'alimentation, contenant une électrodeen zinc et une en graphite dans une solution acide, n'existentplus depuis un certain temps.— Eh ! Leith ! Tu sais comment faire marcher ce truc ?Leith très concentré sur ses textes, se retourne surpris par l'appelde sa compagne et lui demande :— Quel truc ? En voyant ce qu'Ussa fait, il ajoute : Ah ! Unvieux Biovox, ça marche avec des cartouches qu'on appelait jadispiles, ils n'existent plus.— On ne peut pas en fabriquer ?— Oh ! C'est simple, deux métaux différents dans un récipientcontenant un acide ou de l'eau salée. Mais regarde bien, Amilius apeut-être des vieux appareils qui s'alimentent de la lumière solaire.Tu pourrais démonter la cellule pour l'utiliser sur le Biovox.— Je regarderai.Pendant qu'Ussa continue de faire systématiquement les armoirespour voir s'il y a quelque chose, une bricole ou d'autres ustensilesutilisables jusqu'à Leith l'interpelle et dit :179


Le texte de Platon.— Eh ! Ussa ! Regarde dans cette armoire, là, Amilius y a sesbouquins et ustensiles pour ses leçons de physique dedans, je les aivus tout à l'heure quand tu fouinais dedans.— Je n'aime pas trop les leçons de physique, dit-elle.— Regarde bien, il y a sûrement de quoi fabriquer une alimentationpour ton Biovox. Mais qu'est-ce que tu comtes faire avec ?— Je n'en sais rien. Mais si mes souvenirs sont bons, cet appareilutilisait la télépathie et c'est justement cette technologie qui est utiliséepar le temple de Ozin où on a communiqué avec Angélique etJulien. On peut tou<strong>jours</strong> essayer. On ne peut que gagner. On n'arien à perdre, essayons-nous donc.Pendant que Leith continue à écrire de ce qu'il se souvient, Ussa àsortie une vieille malle de l'armoire et parvient à l'ouvrir malgré lefait qu'elle n'a pas la clef. Il s'avère que cette malle contient d'objetsdont le maître s'est servi pour les leçons de physique et, commeLeith a soupçonné, ils s’y trouvent des récipients divers, plaquettesde zinc et cuivre, tous très corrodées, des fils divers et aussi un petitinstrument pour constater la présence de l'électricité. Un appareilnormalement utilisé lors des cours de physique pour constater laprésence de courant si on trempe deux métaux différents dans unesolution acide ou dans de l'eau salée. Ussa a entre temps démonté lecompartiment prévu pour les cartouches et vérifie qu'il y a bien lesbornes de fixation pour les fils, puis demande à son compagnon :— Eh ! Leith, il faut combien d'unités zinc-cuivre pour remplacerquatre cartouches ?— La moitié en plus, je crois. Mais vérifie-le, tu as un bouquinde physique juste à côté de toi. C'est sûrement marqué, cherchesdans la section “éléments galvaniques”, c'est comme ça qu'on les appelle.— Il faut brancher quel fil sur la borne rouge, lui demande Ussaqui entre temps a rempli six récipients, faut de mieux, de l'eau saléeet y a mis les plaquettes de zinc et cuivre.— Celui du cuivre et le bleu sur le zinc, puis les éléments tubranches chaque fois une plaquette de zinc à une de cuivre.— C'est ce que j'ai fait, c'était juste pour savoir comment brancherce machin.180


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Notes peut-être exactement tout ce que tu fais et dans l'ordre,on ne sait jamais à quoi ça peut servir, lui dit Leith.— Oui maître, lui répond Ussa avec un grand sourire.Leith continue à faire ses notes et cherche çà et là des informationsdans les vieux livres de son maître, pendant qu'Ussa s'acharnesur son bricolage. Elle l'avait complètement démonté pour y ôter uncircuit qui servait pour l'identification d'autres appareils et cela sansoublier de noter soigneusement ses gestes. Soudainement, après ungrand nombre d'essais infructueux la rendant de plus en plus nerveuse,elle exclame soulagée :— Leith ! Ça marche ! Viens voir, on voit Angélique et Juliensur une plage de galets. Ils sont en train de s'occuper des clients quiveulent utiliser ces planches avec une voile dessus. Angélique dort,elle est allongée devant la cabane de son frère sur une sorte de matelasde plage.— Appelle-les, peut-être entendent-ils nous, lui dit Leith.— Julien ! Julien, m'entends-tu ? C'est Ussa qui te parle.Julien, surpris, jette en regard circulaire, mais en ne voyant personne,il demande :— Où es-tu ? Je ne te vois pas.— Il me semble avoir entendu sa voix, lui dit Leith, tu ne pourraispas demander quelque chose à Angélique.— Mais viens la demander toi-même, lui dit Ussa, elle seracontente d'entendre ta voix.Quand Leith perçoit dans la boule qu'Angélique dort, il lui dit :Angélique, ne te réveilles pas tout de suite. J'ai quelque chose à tedemander. M'écoutes bien et notes mes questions dès que tu te réveilles.La première chose est très simple ; dis-moi, utilisez-voustou<strong>jours</strong> les degrés de latitude et de longitude ? Si oui, comment estla terre divisée en degrés ? Deuxième chose, d'après ce que tu m'aslu, les plus hautes montagnes de notre pays sont tou<strong>jours</strong> au-dessusle niveau de la mer. Peux-tu me chercher les cordonnées du plushaut montage qui devrait se situer au milieu de l'atlantique. La troisièmechose, ce sont les cordonnées des colonnes de Héraclès, quine s'appelle certainement pas ainsi chez toi. C'est comme ça quenous appelons le détroit entre la péninsule Ibérique et l'Afrique.181


Le texte de Platon.Une fois trouvée, rends-toi chez ta voyante, comme ça on pourraitbavarder un petit peu.— Julien vite ! Apporte-moi un stylo et un bout de papier. C'estLeith qui me demande de vérifier des trucs et d'aller chez Moniquepour lui donner la réponse, exclame Angélique.— Mais, lui dit Julien, il t'entend et il te voit, tu peux lui dire bonjourquand même. Ah oui ! J'allais l'oublier, bonjour Ussa, grossebise ma belle. Je te ne vois pas, mais tu sembles pouvoir nous voir.Tu es où ? Dans ciel ?— Oui, au-dessus toi, lui dit Ussa.— Grosse bise mon amour, dit Angélique, répondant à son copainatlante.— Toi aussi Angélique, grosse bise, répond-il.Julien et Angélique regardent, pendant qu'ils parlent à leurs amisatlantes, un peu incrédule dans ciel sans pour autant y voir quelquechose. C'est après un moment qu'Ussa leur dit : « Oui, c'est par ici,vous regardez dans la bonne direction maintenant. » Alice, arrivant sur leslieux avec sa planche, dit : « Tiens Angélique, j'ai entendu ton beau copain.Où est-il ? Je ne le vois pas ! » Ussa, bonne observatrice, les regarde unmoment et pense pour elle-même : « Oh la la, Angélique est jalousecomme une tigresse et Alice aimerait bien lui piquer son copain. Ça promet ! »Et éteint l'appareil.— J'ai faim et envie d'un thé ou un café avec du lait, dit Ussa, t'enveut aussi ? Je vais regarder ce qu'il y a dans ce placard.— Placard ? Lui demande Leith.— Oui ce petit coin là-bas, qui sert de cuisine. C'est à peine plusgrand qu'un placard, tu ne trouves pas ?— Bof ! Ce n'est pas un palace, juste un coin pour dépanner. Lamienne n'est guère plus grande.— Je nous prépare un petit-déjeuner. Je t'appellerai quand c'estprêt.182


AOn a flairé le danger.jax et Jou-el se trouvent, après avoir quitté leur compagniechez Abdubu et avoir fait le voyage jusqu'à la ville de Ozin, au“Au Bon Accueil” où ils attendent les techniciens et autres membresde la garde royale. Ils viennent de terminer un plat léger, car ils n'ontpas pu manger avant qu'ils partent en voyage. Ils sont accompagnésde deux prêtres du temple qui ont pris le soin de le fermer au publicavec la mention : “Fermé pour entretien technique.” <strong>Les</strong> deux dignitairesreligieux n'ont pas du tout compris pourquoi cette inspection soitnécessaire, ni pourquoi quelqu'un souhaitera connaître les propos etgestes des visiteurs. Pour eux c'est clair ; Ra a décidé de détruire lepays et la population, car devenu trop pêcheuse. Ils pensent qu'onn'échappe pas à son destin, inutile de paniquer, il fallait y penser plutôtet continuer de respecter l'ordre divin. C'est quand ils finirentleurs boissons que les personnes attendues viennent entrer et semettent à leur table.— Vous prenez quelque chose, leur demande Ajax.— Oui, lui répond Laïos, la même chose que vous.— Quel même chose, lui demande Jou-el, une bière, un pichet devin ou un thé ?— Non pas du thé, on prend une bière, lui dit Laïos, et continue :mais que cherchons-nous là-bas ?— Il y a, semble-t-il, des équipements d'écoute installés par lessbires de Ra-Ta, et puis pour des raisons de sécurité du roi, il fautdébrancher l'alimentation électrique et le mettre sur un générateurautonome. Vous avez pris un avec vous ?— Ah ! C'était pour ça ! On n'avait pas compris pourquoi ondevait prendre un avec nous.— On y va maintenant ? Dit Ajax après avoir fini la tournée qu'ilavait commandé et sans avoir oublié de faire le point sur les démarchesà suivre.183


On a flairé le danger.En entrant dans l'ensemble du terrain entourant le temple, Laïosdit aux prêtres : « Regardez très bien autour de vous et signalez-nous tout cequi vous parait in-habituel. » C'est un des prêtres, intrigué par unepierre d'allure bizarre, qui les appelle :— Dit-moi, c'est normal ce truc-là ? Je ne l'ai pas vu auparavant.— Non, ce n'est pas normal, lui répond Ajax, il faudra mieux voircela de près. Vous pouvez-vous en occuper ? Dit-il à un des techniciensprésents et continue en direction du temple sans attendre uneréponse de sa part.— Par où peut-on amener le générateur, demande un technicien,il est peut-être trop lourd pour le passer sur ces dalles de verre.— Vous prenez la première à gauche et ensuite la deuxième, luidit le prêtre, ainsi vous tombez sur une grille de service. On va làbaspour vous l'ouvrir.— Laïos, Midas, dit Ajax, vous pouvez accompagner monsieur leprêtre et faire un tour dans le jardin, car j'aperçois encore un de cesboîtiers, là-bas. Regardez, il y a sûrement des fils qui mènent dans lesous-sol du temple.— Je viens avec vous pour inspecter le temple, lui demande Jouel.— Oui. On va d'abord inspecter la salle de contact et ensuite oncontinue dans les sous-sols et au local technique.Après une inspection laborieuse, ils trouvaient une douzaine depoints de prise de son et deux points de prise d'image, le tout relié àun boîtier dans le sous-sol. Ce boîtier se trouve connecté au systèmed'alimentation électrique en provenance directe de Poseidia. Le boîtiera été débranché et enlevé, puis l'alimentation électrique a été déconnectéedu réseau et branché au dispositif autonome.— Ça marche avec quoi cet engin, demande un des prêtres auxquelleson fait un petit stage de manipulation : comment le démarrer,l'arrêter et l'alimenter en carburant.— C'est de l'huile, lui répond Jou-el, la plupart des bateaux ensont équipés. La majorité de ces machines viennent du pays desSaneids, ce sont eux qui ont inventé cette technologie. Il fonctionnetou<strong>jours</strong>, partout, à condition d'y mettre de l'huile bien sûr, et ne dépendpas de la proximité d'une centrale énergétique.184


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— On peut rouvrir à présent, lui demande l'autre prêtre, il y a desgens à l'entrée qui veulent venir prier et parler à leurs ancêtres.— Pour moi c'est bon, lui dit Ajax, que penses-tu Jou-el ?— Pour moi aussi, on va finir à éliminer tous ces fils et après onrentre. <strong>Les</strong> techniciens peuvent s'occuper du reste. Ils ont nullementbesoin de nous ni de vous. Je pense qu'on doit peut-être passerau palais pour informer le roi. Qu'en crois-tu Ajax ?— Oui, c'est peut-être mieux de lui informer personnellement,mais il faut qu'on parte tout de suite. On ne peut pas se présentertrop tard là-bas. Puis continue en s'adressant au chef d'équipe destechniciens : « Il faut qu'on parte, vous pouvez vous en occuper tout seuls,n'est-ce pas. Déposez les équipements enlevés peut-être chez la police scientifiquepour qu'ils les analysent. »— Alors, Ajax, on y va ?— Oui, c'est comme si on était déjà parti.C'est en saluant les prêtres et les techniciens qu'ils partent endirection de leur voiture pour prendre le chemin de retour.<strong>Les</strong> deux Macs finissent leur journée comme d'habitude ; chezAbdubu. C'est là où ils attendent leurs amis à leur table habituelle enconsommant leur première tournée de chopes. À la surprise générale,c'est Pénélope qui, in-habituellement tôt pour un après-midi ordinaireet le visage encore un peu pâle, vient d'entrer et s'assoit à leurtable et exclame :— La vache ! Vous aurez dû voir cette charcuterie !— Quoi donc, lui dit Macdo, tu as encore pâle. Que t’arrive-t-il ?Qu'est-ce que t’as fait pour être si ému ?— Eh bien ! Je viens du commissariat de police pour identifierdes individus suspects, dont un à la morgue. Ils m'ont bien dit de nepas y aller, mais j'ai insisté et ce n'est pas beau à voir.— Ils ont chopé notre “client”, ou quoi ?— Oui, répond-elle à Macdo, ils l'ont repêche au port de plaisancedans un état épouvantable. Une boucherie. Même s'il l'a bienmérité, ils auront pu l'épargner un peu. C'est tout juste qu'ils n'ontpas taillé en pièces.185


On a flairé le danger.— Ne fais pas de sentiments, s'il te plaît, lui dit Maci. Il a bienfait brûler deux adolescents vifs, a tué sauvagement un savant etd'autres j'en passe. Non pour moi c'est bien comme ça. Chez nouson l'aurait attaché à un poteau et laissé faire les corbeaux et autres oiseauxde proie.— Mais c'est dégueulasse aussi, lui dit Pénélope.— Qu'est-ce que tu aurais fait donc, lui demande Macdo.— Sais pas ? Le laissé enfermé peut-être ? Dans une semaine ilaurait fini noyé dans une cellule de prison.— C'est ce qu'on va faire avec les autres, je pense, lui dit Maci, carils ont chopé encore d'autres à ce qui paraît.— Oui, c'est ça, lui répond Pénélope, j'ai dû les identifier. Ils enavaient quatre d'entre eux, mais je pense qu'il y a encore des individustrès dangereux dans la nature. Une cliente à moi a perçu deuxtypes que Jason, un confrère à Ajax, connaît et qui sont des parrainsdes Bezlebubs de la région.— On ne peut pas les enfermer, ceux-là, lui demande Macdo.— Je ne pense pas qu'ils ont suffisamment de preuves contre eux,lui répond Maci.— Dit donc, leur dit Pénélope faisant le coq à l'âne, c'est quandest-ce que vous partez au nord.— Demain, lui répond Macdo, on part à la fin de l'après-midiavec l'expresse de nuit. Comme ça nous serons chez nous après-demainau petit matin. Nos épouses nous attendront au bateau.— Épouses ? Vous êtes mariés ? Tous les deux ? Leur demandePénélope.— Mais oui, lui répond Maci, qu'est-ce que tu crois. Nous nesommes ici que pour le travail. Tu ne t'es jamais aperçu qu'on partparfois chez nous les fins de semaine.— Oui, lui dit-elle, maintenant que tu le dis, je n'ai jamais fait attention,surtout que je suis souvent moi-même chez ma famille lesfins de semaine. Mais tu connais le haras de mes parents, c'est à côtédu domaine de la famille à Leith.— Mais oui ! Bien sûr qu'on le connaît, lui répond Maci, on a faitdes travaux chez vous. Tu t'en souviens plus ?186


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Est-ce que tu bois quelque chose, demande Abdubu, venuvers leur table entre temps en s'adressant à Pénélope.— Oui, lui répond-elle, un thé comme d'habitude.— Il t'arrive à boire autre chose que ton Thé-Machin, lui demandeMaci.— Oui, bien sûr, ça dépend de l'heure de la journée.C'est à ce moment-là que la porte de l'estaminet s'ouvre pour laisserpasser Ajax et Jou-el, revenant de l'intervention au templed'Ozin, qui se dirigent vers la table où les autres sont déjà assis ets'assoient également. Jou-el jette un journal sur la table où il figureun cliché d'un homme sauvagement mutilé à la Une. Le titre de l'articleassocié, lui aussi, est sans ambiguïté : « Enfin ! ». Dessous l'articlefigurent les clichés des personnes recherchées et lesquelles n'ontpas encore été trouvées. Abdubu qui attend qu'on lui commandedes boissons, demande :— Que prenez-vous ? Une bière, peut-être ?— Oui c'est bon pour moi, lui répond Ajax.— Un pichet de vin pour moi, lui dit Jou-el.— Tu pars, demande Pénélope à Jou-el.— Partir ? Où ça ?— Tu ne rejoins pas le continent, lui demande-t-elle ?Jou-el lui fait de grands yeux et n'a pas l'air comprendre de quoiqu'elle parle et demande encore une fois :— Mais où veux-tu que je parte et pourquoi ?— Mais d'après Leith et Amilius, tout sera fini ici dans une semaine,lui dit Pénélope. <strong>Les</strong> Macs partent demain à la fin de l'aprèsmidi.Nous, mes cousins, quelques cousines, nièces et neveux, partonsdans trois <strong>jours</strong>. Je ne sais pas encore où, mais on part.— Mais, dit Macdo, on avait prévu que vous venez nous rejoindre,non ?— Tu as encore beaucoup de travail à finir tout à l'heure, lui demande-t-elle?— Non ça va, pourquoi ?— Comme ça tu pourrais faire un saut chez ma famille, ils sontdéjà tous là. Tu les expliqueras, comment et où vous rejoindre. Jepense que ce sera le mieux si nous irons directement à l'endroit de187


On a flairé le danger.vos terres. Mais dis-moi, avez-vous prévu de cacher vos bêtes pendantla tempête qui va suivre la collision de la comète avec la terre,car si mes souvenirs sont bons, la gauloise à Leith a dit qu'un délugela suivra. Puis votre bateau, est-il grand ?— C'est un ancien bateau militaire, lui dit Maci, assez robuste etassez de place pour hommes et bêtes. On a, en effet, bien prévud'attendre la fin de la tempête, mais il se pourrait qu'on monte letout aux hauteurs et de nous cacher dans les grottes qui s'y trouvent.Mais toi tu devrais partir plus tôt, ça fait trois <strong>jours</strong> de mer depuis iciavant d'arriver chez nous et tu vas te trouver en plein tempête. Puis,n'oubliez surtout pas prendre vos communicateurs personnels etmettez les en mode peer-to-peer 33 . Comme ça, on pourrait se causeret se repérer. Mais vous avez quoi comme bateau et où est-il ?— Oh ! On a un bateau de pêche conçu pour supporter des tempêtes,il marche avec un engin des Saneids ou à la voile.Jou-el qui avait écouté la conversation silencieusement ajoute :— J'avais prévu de rejoindre Jason, le confrère à Ajax. Lui aussi,a un grand bateau, anciennement militaire, mais il est sur le lac. Ilavait prévu de se mettre au milieu du lac et attendre là que la terres'enfonce. Il lui suffit ensuite de partir.— Tu pars où, lui demande Pénélope.— On va suivre le vaisseau royal, mais il se peut qu'on aille vers lenord, comme vous.— Si tu vas vers le nord, lance-nous un appel, on te dira où il fautaller.— Toi, tu viens avec nous, n'est-ce pas Ajax, lui demande Pénélope.— Oui, c'est que j'avais prévu, mais il se peut que je n'arrive pas àl'heure au port. Je partirai avec Jou-el dans ce cas-là.<strong>Les</strong> amis discutent encore un moment de qui fait quoi et comment,puis les Macs donnent à tous ceux qui s'y intéressent les cordonnéesdu port aménagé dans un fjord de leurs terres. Ils disent yêtre à l'abri des tempêtes et qu'on n'y risque rien. C'est après queAjax et Pénélope partent pour soi-disant prendre encore un verre33 Un terme venant de l’informatique ; signifiant la communication d’un appareil à un autresans passer par un service central ou serveur.188


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.chez elle et de sortir après. Ce qu'ils ne disent pas, c'est qu'ilscomptent visiter les deux amis cachés au grenier de Amilius.Angélique, qui a encore appelé Leith quelques fois sans obtenirune réponse, en conclut qu'ils ont probablement éteint leur dispositifde communication. Elle commence à s'habiller et s'apprête à allerchez elle pour y chercher ce que son ami lui a demandé. Alice aimerait,elle aussi, venir avec Angélique chez Monique pour bavarder,mais elle n'ose plus le demander. Elle a commencé à comprendre,que cette fois c'est du sérieux pour Angélique et qu'elle n'a aucuneintention de lui filer son amourette. Angélique prend son téléphoneet essaie d'obtenir un rendez-vous avec Monique en lui expliquant lasituation. Elle ferme le clapait de son téléphone et se retourne versson frère et lui dit :— Je viens te chercher d'ici une heure et demie ?— Non, je n'ai pas le temps, lui dit son frère.— Mais tu es salaud !Son frère incrédule, la regarde, surpris par ses mots et sans comprendresa réaction, lui demande :— Salaud ? Tu me traites de salaud devant tout le monde à présent? Qu'est-ce que je t'ai fait pour que tu me traites ainsi ?— Pour Ussa, bien sûr ! Elle meurt d'envie de te voir et de teparler ! Elle sera terriblement déçue si tu ne viens pas. Tu n'as pasdroit de la décevoir. Tu ne peux pas la mettre de côté pour quelquesmalheureuses planches à voile ! Tu crois que le roi de la cabane deplage ne peut laisser son royaume pendant une heure à quelqu'und'autre pendant qu'il va voir sa princesse préférée ! Philippe ou Rodolphepeuvent très bien la garder pendant un moment. Tiens ilsvientent par ici, demande-les donc !— Oui, lui dit Alice, je trouve qu'elle a raison. Il faudra mieuxque tu viennes avec nous.Même si la petite phrase “avec nous” ait échappé à Julien, Angéliquel'a bien enregistré, mais préfère ne rien dire en ce moment.Elle se sent déjà très nerveuse, tendue et, très inquiète pour son amiatlante, ne veut pas jeter de l'huile sur le feu.189


On a flairé le danger.— Alors, je vais à la maison pour chercher ces quelques combinesque Leith m'a demandé et je reviens après.Elle saute sur son vélo et va en direction du quartier où ils habitent.C'est Julien qui se retourne vers Alice et lui dit :— Ce n'est peut-être pas une bonne idée de venir avec nous. Astuvu comment Angélique a réagi quand tu as dit la petite phrase“avec nous”. Je trouve qu'Angélique a raison. Je ne veux pas que tu tesentes offensée, mais j'aimerais moi-même parler à Ussa seul avecAngélique. J'espère que tu le comprends.— Désolé, lui répond Alice, je n'avais pas pensé. Mais, dit-moi,tu crois que c'est sérieux, cette fois. Elle réagit comme une tigressechaque fois que je parle de son copain. Elle a peur que je le lui vole,ou quoi ?— Oui, lui dit Julien, je la trouve changée ces dernières semainesdepuis qu'elle se défonce pour lui. Figure-toi qu'elle a payé la moitiéde la location du voilier. Elle est tellement convainque qu'on va lesrencontrer qu'elle voulut absolument y aller, faisant le bonheur demon père qui n'a plus navigué depuis des lustres.— Moi aussi, je le trouve changée, lui dit Alice, c'est comme, sielle est devenue adulte.— Alors, tu attends quoi, lui dit Julien.— Attendre ? Quoi ? Tu parles de quoi maintenant, lui demandeAlice étonnée.— Eh bien ! Devenir adulte. Tu ne trouves pas qu'il faudra devenirun peu plus sérieux. Si tu continues comme maintenant, tu vasfinir comme ta mère. Laisse tomber tes amourettes et cherchesquelque chose de plus sérieux.— Oui papa, lui dit Alice, tu parles comme mon père, il n'arrêtepas de répéter la même chose.Mais avant qu'elle ait encore pu dire quelque chose, c'est Rodolphequi vient d'arriver et les salut :— Salut la bande, que se passe-t-il, vous avez l'air tout sérieux.Vous vous ne disputez pas j'espère. Angélique, elle n'est pas là ?— Non, lui répond Alice, elle a des choses à vérifier pour son copain.Tu sais, son ami atlante qui est presque aussi beau que Julien.190


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Elle va sûrement revenir dans une heure, car elle et Julien vont chezMonique pour parler à leurs amours.— Alors, répond Rodolphe, veux-tu que Philippe et moi gardonsla baraque jusque tu reviens ?— Merci beaucoup, ma soeur sera soulagée.— Et surtout ta petite princesse, lui dit Alice, car c'est bien pourelle que tu vas chez Monique, n'est-ce pas ?La bande commence à s'en occuper des quelques clients venusentre temps en attendant qu'Angélique revient. C'est après un momentque Julien reçoit un SMS de sa soeur qui lui dit de ne pas l'attendreet d'aller directement chez Monique.Quand Julien vient à l'adresse de Monique à l'heure prévue, il voitqu'Angélique n'est pas encore là, mais que Monique lui attend déjà etlui dit :— Alors l'amoureux, tu fais attendre ta petite princesse ?— Comment attendre, demande-t-il, je suis même avant l'heure ?— Oh, ce n'est rien, lui répond Monique pendant qu'ils montentdans son appartement, ce sont eux qui sont venus me parler en premier.Ils, ou plutôt elle, ont bricolé un dispositif similaire au mien etm'ont contacté en premier, juste pour bavarder. J'ai entre tempsréussi à les voir et il me semble qu'ils sont tou<strong>jours</strong> cachés, maisdans un autre grenier cette fois.— Tu as parlé de quoi avec eux ?— Oh ! De tout et de rien. Ils ont surtout besoin d'être rassurés.Et puis, elle est tellement impatiente de te parler, elle t'aime vraiment.Son compagnon est tou<strong>jours</strong> dans ses livres, il meuble sontemps en continuant ses études. Ah ! J'entends la sonnette, ça doitêtreAngélique.— Salut la belle, lui dit Monique, entre, tes amis t'attendent déjà.— Comment déjà ?— Ils m'ont contacté il y a une demi heure, on a bavardé un petitpeu de tout et rien. Tu sais, comme des ragots de quartier et autres.— Salut mon amour, gosse bise, dit Leith à Angélique.— Toi aussi, grosse bise Julien, dit Ussa, tu vas bien ?191


On a flairé le danger.C’est après cette introduction qu'Angélique préfère commenceravec le sujet pour lequel cette rencontre a lieu.— Alors, mon amour, en ce qui concerne ta première question, ladivision de la terre ; elle est divisée en trois cent soixante degrés àl'Équateur, puis quatre-vingts au sud et au nord. Je parie que c'estpareil chez toi, n'est-ce pas ?— Oui, c'est juste, lui dit Leith, mais je pense que vous n'avezcertainement pas le méridien zéro au même endroit. Mais cela n'aaucune importance si tu me donnes les cordonnées des deux endroitsque je t'ai demandés.— Alors, m'écoutes bien, dit Angélique, la montagne s'appelle“Mont Pino 34 ” et se trouve à 28 degrés 13 minutes Ouest et à 38 degrés25 minutes Nord. Le détroit, que nous appelons “Détroit deGibraltar”, se trouve 6 degrés 20 minutes Est et à 35 degrés 55 minutesNord. Mais dit-moi comment peux-tu tout calculer avec cesseules deux informations ?— Mais, lui répond Julien, c'est de la triangulation, tu as oubliétes leçons de math, ou quoi ?C'est après quelques explications et l'étonnement des amis atlantesqu'on apprend les mêmes leçons aux filles et garçons, que laconversation devient plus intime. <strong>Les</strong> amoureux sont de plus enplus convaincues qu'ils vont se trouver en chair et en os, même s'ilsignorent tous les quatre comment.Pâris de Bel-Ra se trouve encore dans son bureau quand on luiannonce l'arrivée des détectives. Il n'est pas d'un très bonne humeuret a beaucoup de travail. La planification et la mise au point d'uneévacuation ne s'improvise pas à la dernière minute. Il demande defaire entrer les deux détectives, qu'il connaît bien.— Bonjour votre excellence, dit Ajax.— Bonjour votre excellence, dit Jou-el.— Bonjour messiers, laissez tomber vos “votre excellence” s'ilvous plaît et asseyez-vous. Quelle bonne nouvelle me portez-vous ?34 Angélique se trompe de nom, c'est la montagne la plus haute des Açores, qui est une île ets'appelle “Pico”.192


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Eh bien ! Sire, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne nouvelle.On vient du temple d'Ozin et il nous semble, d'après les premièresinvestigations, que ce temple a bien été mis sur écoute. Nousavons trouvé une douzaine d'appareils à prise de son et deux prisesd'image à l'intérieur du temple, dans la salle de communication etailleurs. Toutes les personnes qui venaient y prier ou parler avec lesanciens ont été enregistrées. C'est de cette façon qu'ils ont su qu'Ussaet Leith comptaient se rendre à la bibliothèque. C'est visiblementun acte des sbires de la BSI, le service secrèt de Ra-Ta, lui dit Jou-el.Le roi ne dit rien, mais devient tout rouge et explose :— Cet ignoble individu a osé s'attaquer à ma fille. Un acte dontma femme ne s'est tou<strong>jours</strong> pas remit. Je sais, même si c'est difficileà croire, de part de l'amie de Leith qu'ils sont vivants et en sécurité,mais ma femme ne le croit pas. Elle les croit morts. Elle se refugedans la chambre d'Ussa et passe et repasse ses vêtements de petitefille dans les mains. Elle à beaucoup de peine voyez-vous !— Je peux vous assurer, dit Ajax, et Jou-el en est témoin, qu'ilssont bien vivants et vous saluent bien.— Comment ça, vous saviez où ils sont ?— Oui sire, il n'y a que trois personnes qui le savent, ce sontnous deux et l'esthéticienne qui les a accueillis.— Pourquoi de ne pas avoir dit quelque chose, lui répond le roi,n'ai-je pas droit de savoir que devient ma fille ?— On a dû le promettre à votre fille elle-même, sire, lui dit Ajax,main sur le coeur. Elle craignait pour sa vie, celle de Leith et lavôtre, puis je crois qu'elle avait raison de croire cela. Vous avez vu lejournal ? L'individu qui y figure était un des principaux suspects.C'était lui qui avait tout organisé. Quatre de ses proches collaborateurssont aux mains de la police. On les laisse pour l'instant dans laprison, ils se noieront bien avec le pays. En ce qui concerne lesautres, on les cherche, mais le risque que la population les trouveavant la police est très grand.— Quand pouvez-vous m'emmener mes enfants ici, lui demandele roi ?— Demain, ou après-demain au plus tard, lui répond Ajax.193


On a flairé le danger.— Bon, je vais le dire à Séléné, elle sera heureuse de le savoir.Pouvez-vous me tenir au courant personnellement ? Oh oui, avantque vous partiez, envoyez-moi mon secrétaire. Je vais convoquerune réunion extraordinaire des dix rois pour discuter des démarchesà suivre.— Vous allez partir à la ville de Sus pour cela, lui demande Jou-el,c'est quand-même un peu loin, ne croyez-vous pas.— Non, lui répond le roi, pour une réunion informelle on est autoriséà utiliser un écran de communication. Un écran comme celuidu temple d'Ozin, voyez-vous. Toutes les résidences royales en sontéquipées. Je vais envoyer la convocation dès maintenant et ainsi onpourrait tenir la réunion demain.— En ce qui concerne Ussa et Leith, leur dit le roi, vous me donnezles nouvelles aussi tôt que possible, n'est-ce pas ?— Oui, lui dit Jou-el, bien sûr, mais il y a un mais. On a repéréles deux parrains des Bezlebubs ici dans la ville et nous craignons,comme le préfet le fait, qu'ils pouvaient essayer de prendre Ussa etou Leith en otage pour extorquer un sauf-conduit pour le plan d'évacuationque vous êtes en train de faire en ce moment.— Ne peut-on pas les enfermer par précaution, lui demande leroi ?— Ce n'est peut-être pas très prudent sire, ils ne se doutent pasqu'ils sont surveillés par vos gardes. On a pu placer quelques-uns devos agents parmi le personnel du palace où ils logent. Je crois si onles enferme, que les lieutenants vont prendre le relais et ça rend la situationencore plus dangereuse. Non il vaut mieux les surveiller. Ilsont d'ailleurs un repère non loin du temple et les prêtres sont d'accordde nous informer de tous leurs faits et gestes.— Alors, bonne soirée, puis à demain si vous avez du nouveau.— Vous aussi, sire, bonne soirée, lui dit Jou-el.— Bonne soirée sire et bon courage à votre femme, lui dit Ajax,je saluerai Ussa et Leith de votre part, car je vais les voir tout àl'heure.— Alors, salut-les bien de part de ma femme et de ma part, lui ditle roi.194


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Le roi se lève et les accompagne jusqu'à la grande porte d'entrée.En se retournant, il appelle son secrétaire de le suivre dans son bureau,car Pâris de Bel-Ra considère qu'il vaut mieux discuter des démarchesà suivre concernant les événements qui auront lieu dans lesquatre <strong>jours</strong> suivants. Surtout celui qui aura lieu dans quatre <strong>jours</strong> aupetit matin.195


LDéjà parti !e jour est à peine levé quand Pénélope entend déjà la sonnetted'entrée. Elle n'a même pas commencé son petit-déjeuner etsort tout juste de la salle de bains. Quand elle descend ouvrir, surprise,elle voit qu'il y a Ajax avec un membre de la garde royale devantsa porte. Elle les salut et les demande :— Eh les mecs, vous avez dormi devant ma porte ? Quel bonvent vous amène chez moi ?— C'est pour nos deux amis, là-haut chez Amilius, lui répondAjax. Tu crois qu'on peut les déranger ou faut-il attendre un petitpeu.— C'est encore un peu tôt, lui répond-elle, je crois savoir qu'Ussane se lève pas si tôt. Venez prendre le petit-déjeuner avec moi, je venaisde m'installer. Comme ça j'ai un prétexte de ne pas manger deboutdans la cuisine. Il paraît qu'il faut prendre son temps le matinet ne surtout pas se presser. Ce n'est pas bon pour le moral à cequ'il paraît. Mais présente-moi ton copain. Il me semble que je l'aidéjà vu, mais je ne sais plus où.— Alors, dit Ajax à Pénélope, je te présente Midas, il est membrede la garde royale. Tu as dû le voir l'autre jour dans le Salon du Thédu parc, mais je ne te l'ai pas présenté. Midas, continu-t-il en s'adressantà l'homme qui l'accompagne, je te présente Pénélope.— Enchanté, dit-il.— Enchanté, dit-elle et continue : vous montez avec moi, car jene crois pas que vous pouvez aller chez eux en passant par la maisonde Amilius. Je crois même qu'ils ont fermé l'accès au grenier depuisl'intérieur. Vous serez ainsi obligée de passer par les toits depuismon grenier.Arrivés chez elle au salon, elle installe son petit-déjeuner sur latable et y ajoute deux assiettes et les demande :— Ajax, du café avec du lait chaud, je parie. Vous monsieur,vous désirez du thé ou, comme Ajax, du café ?197


Déjà parti !— Appelez-moi Midas et laisse tomber ce “monsieur”. J'aimeraisdu thé si vous en avez.— Bien sûr que j'ai du thé, j'en bois moi-même. Pour le reste,pains grillés, beurre et confiture ?— C'est bon pour moi, lui dit Ajax.— Moi aussi, dit Midas.— Prenez votre temps, je n'ai qu'une cliente dans une heure etdemie. On a donc assez de temps pour manger et de faire un sautchez nos amis là-haut. Mais pourquoi voulez-vous aller les voir ?— On croit que le danger s'éloigne, il est peut-être préférable,qu'ils, surtout Ussa, rentrent au palais. De plus, on voulait que Leithvienne avec nous à la bibliothèque pour voir quels documents qu'ilfaut absolument sauver et emporter avec nous lors le plan d'évacuation.— Alors, c'est sérieux, demande-t-elle sans s'adresser à quelqu'unen particulier, on met en exécution un plan d'évacuation ?— Oui, c'est cela, lui répond Midas, le roi travaille en ce momentavec d'autres rois et leurs services à la mise au point.— Mais ce n'est pas trop dangereux pour Leith, demande-t-elle àMidas, revenant au sujet précédant.— C'est justement là qu'on a besoin de toi, lui dit Ajax à la placede Midas, tu dois le transformer en ouvrier au service de la garderoyale. Tu sais faire ça, non ?— Pas de problème, je le ferai.C'est à peine qu'Ussa s'est levée, quand elle entend le bruit de lafenêtre du toit qui s'ouvre. Elle regarde par la porte entrouverte dela salle d'eau et voit que Ajax, Pénélope et un homme qu'elle connaîtvaguement entrent. Elle dit à Leith qui est déjà debout depuis enmoment :— Hé, Leith. Sers-les quelque chose pendant que je m'habille.— Ça va, dit Ajax, on vient de prendre un petit-déjeuner chez Pénélope.Ne te dérange pas Leith.Mais Leith est déjà parti dans le placard, comme sa compagne appellela cuisinette, et commence à préparer le petit-déjeuner.198


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— On n'a pas encore pris de petit-déjeuner, j'en fais pour nous ettrois tasses de plus ne font pas de différence. Vous prenez quoi,monsieur, continue-t-il en s'adressant à Midas, c'est du thé pour Pénélopeet du café avec du lait chaud pour Ajax, mais vous ? Café outhé ?— Un thé, lui dit Midas, je n'oserai pas demander autre chose, carvous avez à coup sur ni bière ni vin ici.Ussa, ayant fini sa toilette entre temps, sort de la salle d'eau et lessalue avant de s'asseoir avec eux à table.— Alors, dit-elle, c'est une visite de politesse ?— Oui et non, lui dit Ajax, on voulait voir si vous allez bien et sic'était convenable si vous allez vous rendre au palais aujourd'hui.— OUI, dit elle, quand y va-t-on ?— On vient vous chercher cet après-midi, mais, il y a un mais.On aimerait bien que Leith vienne avec nous. On va à la bibliothèqueet il faut identifier des livres à emporter. C'est lui seul quipeut faire cela, il est le seul à les connaître.— Mais ce n'est pas trop dangereux, demande Ussa ?— Je vais lui déguiser en ouvrir de la garde royale, lui répond Pénélope.Ussa regarde très anxieusement Leith et lui demande :— Tu oses faire ça ? Pense à Angélique ! Moi je ne le ferai pas.— Je suis sûr qu'elle le fera, lui dit Leith. C'est toi qui es et étaitvisé, moi tout seul, je n'ai pas de valeur à leurs yeux.— Mais, dit-elle, j'ai quand même peur pour toi Leith. Et ne melaisse pas seule ici, j'ai peur.— Alors, lui dit Pénélope, viens chez moi, je suis toute la matinéeà la boutique et à midi on peut manger ensemble. Qu'en penses-tu ?— Alors, je viens avec vous, nos affaires, nous les récupéronsplus tard.Séléné de Bel-Ra contemple la vue sur la rive gauche de l'Osuo, larivière du même nom que la ville, et regrette de ne pas avoir unebonne vue sur le lac, car partiellement bouchée par les toits du parlementet le grand temple de la ville. Elle sait de part d'Ussa que199


Déjà parti !même le petit studio de Leith a une meilleure vue que son appartementqui fait l'angle sud-est du palais. Elle est contente de revoir safille qui va venir cet après-midi. Séléné compte juste aller inspecterl'aile où se trouvent les chambres d'Ussa et Leith. Il vient, même s'iln'est pas membre de la famille royale, tellement souvent au palaisvisiter Ussa qu'il y a sa propre chambre. Soudainement Séléné entendson mari jurer comme un chiffonnier. Étonné, mais surtoutindigné, elle descend au rez-de-chaussée où se trouve le bureau deson mari et lui demande :— PÂRIS ! Je t'interdis de jurer ainsi ! Que se passe-t-il ?Pâris de Bel-Ra, lui, très en colère, n'entend pas ou ne veut pasentendre ce que lui dit sa femme et continue :— Le fumier ! Le salaud ! L'ordure. Tonnerre de Ra, l'emmerdeurnous a tous fait marcher. Il nous emmerde tous avec son servicesoi-disant secret et maintenant qu'on a besoin de tout le monde,il se barre. Pfft ! Comme ça.— Mais, lui demande Séléne, tu parles de qui ?— Mais de cet enfoiré de Ra-Ta bien sûr, lui répond Pâris sans serendre compte que Séléné le tutoie, une chose qu'elle ne fait presquejamais. Qui d'autre ?— Parti ? Comment parti ? Où ? Calme-toi un petit peu et explique-toi.— Alors, quand je voulais réunir les dix rois pour discuter desévénements à venir et mettre quelques points au clair, il s'avérait quece monsieur avait déjà mis au point son propre plan d'évacuation.Tous les vaisseaux aériens civils et militaires ont été réquisitionnéspar lui, pour servir lui-même et les nantis de l'état d’Alta. Il est partilui-même il y a trois <strong>jours</strong> déjà, quand ça a commencé à barder chezlui. Et puis, à ce qui paraît, il sera parti avec tous les vaisseaux aérienscapables de voyager dans l'espace en direction d'une planète del'étoile Véga. C'est dégueulasse de laisser tomber les gens de cettefaçon là. On est là pour eux et non pas le contraire. C'est maintenantqu'ils ont besoin de nous.— <strong>Les</strong> autres vaisseaux aériens, ceux qui n'ont pas l'aptitude d'allerdans l'espace, ils sont partis où alors.200


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Ils évacuent les riches et des nantis vers les montagnes noiresdu pays de Om 35 et chez les Dragons 36 où ils croient être en sécurité.— Alors, qu'est-ce que vous avez décidé ?— Pour l'instant, nous avons désigné un prince volontaire quiveut bien essayer de prendre les choses en main et lui envoyer à Poseidiaen tant que gouverneur. <strong>Les</strong> gens là-bas appartiennent pour laplupart au mouvement des Bélials et sont très matérialistes. Ils ontpour la plupart perdus foi en leur religion qui n'est pour eux plus unrefuge. Ils craignent de ne pas être sur la liste d'évacuation et lespremières échauffourées commencent à pointer le nez. Il faut chercherà les calmer un peu, car l'armée et la police ont vraiment autrechose à faire en ce moment que s'en occuper des révoltes.— Ne faut-il pas mieux que ce prince soit de la même religionqu'eux ?— Oui, effectivement ma chère, c'est ce qu'on a décidé. On a envoyéun prince de la même religion en tant que gouverneur.— Avez-vous pu discuter quand même un peu et élaborer vosplans d'évacuation.— Oui, ma chère, je suis content que les autres avaient égalementcommencé à y penser et on pourrait à la première vue évacuer plusde monde que prévu. Il convient, par contre, à inciter les gens de secordonner et de ne pas partir n'importe où et n'importe comment.— Comment ça ?— Eh bien ! Beaucoup ont leur propre bateau et autres vaisseauxet peuvent partir de leurs propres moyens. Ce qui faut prévoir c'estde la nourriture en conserves pour une très longue durée, de la semencepour ensemencer les sols à nouveau après le déluge et ausside petits animaux tels que poules, chèvres et autres. Et puis, pour neles pas oublier : outillages.— On part où alors, tu as une idée, peut-être.— Non, pas encore. Je pensais aller vers le nord. Vers les montagnesséparant la péninsule Ibérique et la Gaule. Mais il convientpeut-être à attendre que le déluge finisse avant d'accoster.35 <strong>Les</strong> États Unis.36 La Chine, où certains situent le pays de Mu là où il y a maintenant le désert de Gobi.201


Déjà parti !— Tu crois que les bateaux seraient assez solides pour supporterdu gros temps ?— J'ai une petite idée. Je ne sais pas si tu te souviens de lachambre d'Angélique, car là il y avait au mur une image d'une sortede double bateau. Il y avait deux coques reliés entre eux lui offrantune grande stabilité. Je pesais, même si je ne sais pas ce qu'ils enpensent mes ingénieurs navales, de relier mes bateaux de cette façon.<strong>Les</strong> grands bâtiments militaires à l'extérieur en tant que brise-lameset les plus fragiles à l'intérieur. D'après Angélique, la gauloise donc,il faudra prévoir plusieurs semaines de mer avant de pouvoir accosteren sécurité.— Pourquoi donc ?— Elle ne le sait pas exactement, car trop loin dans le passé pourelle. Son récit parle d'un déluge tel qu'il noiera toutes les terresn'épargnant que ceux qui vivaient en montagne. De plus, le niveaude la mer va, semble-t-il, monter de quatre cents pieds sur une centained'années. Nous devrons en tenir compte quand on construitdes nouvelles cités.— Pourquoi va-t-on pas là où vont les autres ?— Sur le continent africain ? Comment veux-tu faire survivre autantde gens dans une région désertique ?— Il y en a beaucoup de gens à évacuer ?— <strong>Les</strong> textes sacrés avaient initialement prévu d'évacuer 144 000,mais si on ajoute tous ceux qui partent de leurs propres moyens, onobtiendront facilement le double. Mais n'oublie surtout pas que celane représente que demi pour-cent de la population. Aussi navrantque c'est, il n'y a pas d'issue pour ceux qui restent en arrière, le grosde la population donc. C'est pour cela que j’ai convoqué tous leschefs religieux pour demain-matin.— Ça doit être assez pénible pour les familles appartenant aumouvement des Bélials, car si mes souvenirs sont bons, ils necroient pas à la ré-naissance. Ils croient qu'ils ne vivent qu'une seulefois et qu'on rejoigne après soit le ciel, soit le monde des morts.— Hélas oui. Mais pour l'instant, ce sont les hébreux à avoir misau point un plan d'évacuation depuis assez longtemps.— Eux ? Pourquoi donc ?202


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Ils attendent, à ce qu'il paraît, un guide spirituel qui va naîtreau sein de leur communauté en Égypte. C'est pour cela qu'il partenttous là-bas en tant que travailleur immigré.— Tu ne trouves pas qu'on devait parler de nouveau à l'amie deLeith.— C'est ce que j'avais prévu pour demain, au début de l'après-midi.Tu viens avec ?— Oui, bien sûr ! En espérant pouvoir dire bonjour à Julien,l'ami d'Ussa et pour ne pas l'oublier : Angélique. On lui doit beaucoup.— Oui, c'est vrai. En plus, depuis qu'on fait la connaissance decette fille avec sa spontanéité, on se tutoie.La famille Leblanc s'est levé tôt ce samedi, car ils, à l'exceptiond'Angélique qui tripote un vieil ordinateur portable qu'elle a empruntéà une copine, doivent faire leurs valises, charger la nourriture etautres ustensiles nécessaires pour un séjour en mer. La veille, Armand,le papa à Angélique et Julien, a été chercher le voilier à Cherbourgpour l'amener à Fécamp. La place doit en effet être libéréeavant dix heures, onze au plus tard. Ce que Cécile, la maman, necomprend pas, c'est qu'Angélique a voulu absolument prendre de lanourriture et de l’eau pour plusieurs semaines ou plusieurs personnesen plus. En ce qui concerne le carburant, le voilier a été livréavec les réservoirs pleins et doit être rendu ainsi. Cécile est en cemoment fâché contre Angélique qui, au lieu de charger des valises,tripote son ordinateur. C'est Julien qui est parvenu à calmer samaman, car il sait que sa soeur prend tout ce qu'elle a collectionné dedonnées avec elle. Il connaît sa soeur assez bien pour savoir qu'elleparvient à prévoir l'imprévisible. D'où l'étonnement de sa mère, quiest infirmière, quand Angélique lui eut demandé de prendre le maximumde matériel de secours avec. Son argument était tout simple :qu'il faudra bien être capable de soigner quelqu'un jusqu'à secoursarrive, si par exemple un d'entre eux tombe et cogne la tête d'unetelle façon qu'il reste dans le coma pendant une période prolongée.— Angélique, qu'est-ce que tu fous, lui demande encore Cécile.203


Déjà parti !— J'ai besoin de mes documents et je ne peux pas prendre monordi. Je charge le tout sur ce vieux portable. J'y mets également desjeux, si jamais en risque de s'ennuyer.— Tu pourrais nous aider quand même ! Ne trouves-tu pas ?— Tout ce dont j'ai besoin est déjà dans la voiture et vous êtestrois à vous marcher sur les pieds. Reste cool maman, le bateau neva pas couler pour dix minutes de retard et s'il y a d'autres pourprendre la place, ils attendront.La route de Étretat à Fécamp n'est certainement pas long, maisquelqu'un doit les conduire au port, car impossible d'y laisser la voiturependant les quinze <strong>jours</strong> qu'ils partent en mer. C'est BernardMercier, le papa de Alice, qui les conduit au port et ramène leur voitureà Étretat après. C'est également lui qui veille sur la maison pendantleur absence, un service qu'ils se rendent mutuellement pendantles vacances. Vider le pub de la boîte aux lettres, ouvrir les volets lematin, les refermer le soir et déplacer la voiture de temps à autre.Charger le bateau, une fois arrivé à Fécamp, ne s'avère pas aussifacile que prévu, car le bateau se trouve un peu éloigné d'où ils ontpu garer leur voiture. Heureusement qu'il y a des chariots prévuspour transporter les bagages et autres choses jusqu'aux quais.L'installation prend moins de temps qu'on a pu imaginer initialementet Bernard a donc le temps pour visiter le bateau avant qu'ils aillentpartir.— Mais, dit-il, c'est assez grand, je croyais que tu voulais prendreun plus petit.— Oui, lui répond Armand, c'est ce qu'on avait prévu, mais celuiqu'on avait réservé avait une avarie et est en réparation. Du coup ona pu prendre un modèle plus grand pour le même prix. Celui-ci aquatre cabines et est prévu pour huit personnes à la place de sixcomme l'autre. De plus je crois qu'il a une plus grande autonomieen carburant, si jamais on manque du vent.— Armand, lui dit Cécile, je vais vite acheter des magazines demots croisés. Tu ne m'en veux pas j'espère ?Angélique, qui a entre temps réussi à trouver comment brancherson ordinateur, l'allume et cherche un document qu'elle avait fait laveille. Elle l'ouvre et un ckeck-list apparaît sur l'écran. Ce sont elle204


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.et son frère qui commencent, sous les regards étonnés des adultes, àvérifier systématiquement tous les points de la liste, un à un.— Tu parles de l'efficacité, leur dit Bernard, c'est bien signé Angélique,elle ne va jamais par demi-mesures. Personne d'entre nousn'a pensé de faire cela, car une fois en mer tu ne pourrais plus viterevenir en arrière pour chercher quelque chose.— En effet, dit Armand, je crains qu'il n'y ait pas de boutiquesflottantes sur le chemin.— L'antenne satellite portable, demande Angélique à son père, ilest où, puis fonctionne-t-il ?— Il est là, lui dit-il, mais je ne l'ai pas essayé, branche le et regarde.— La carte d'abonnement satellite, lui demande Angélique quis'affaire à déballer l'antenne et de le brancher à la télé, c'est toi qui l'a,papa ? Sinon on ne pourrait que regarder des trucs gratuits et desbulletins météo.— Non chérie, je l'ai pris avec moi. Tu imagines ta maman sanstélé pendant deux semaines ?— Tiens, dit Angélique, la voilà, il me semble qu'elle a acheté laboutique entièrement. Elle a pour au moins un mois de lecture avecelle. Elle ne risque pas de s'ennuyer.— Tu hisses les voiles ici dans le port, lui demande Bernard.— Non, lui répond Armand, on ne peut le faire qu'une fois dehors.Tu as vu comment c'est port ? Non on part en moteur etnous ne hisserons les voiles qu'une fois bien dehors. C'est une affaired'hommes. N'est-ce pas Julien ?— Tiens, dit Cécile revenue entre temps, tu connais ce vieux bonhommelà.— Oui, répond Armand, on l'appelait “le capitaine” à l'époque. Ilvient peut-être me dire bonjour. Ça fait des années, qu'on ne s'estpas vu.— Salut vieux pote, dit-il, tu repars en mer, mais c'est bien. Çame fait plaisir de te voir partir et avec la famille qui plus est. Tu parsoù ? D'après que je te connais, tu vas faire un tour aux Açores aveceux. Non ?205


Déjà parti !— Oui c'est ça, lui répond Armand, mais je dois avouer que je ledois à ma fille. C'est elle qui nous a convaincu de faire ce voyage.— Tu pars quand alors ?— Maintenant. Notre ami Bernard Mercier, ici présent, nous adéposé et ramène la voiture à Étretat. Nous ne pouvons pas la laisserici pendant deux semaines.— Vous partez deux semaines ?— Oui, il faut un peu cela pour cet aller-retour, je ne fais pas lacourse tu vois, juste une balade en famille.Pendant que Bernard descend du bateau, “le capitaine” largue lesamarres, que Julien ramasse. Armand, qui a déjà démarré le moteur,enclenche la marche arrière pendant les autres se saluent. Ceux restésau quai souhaitent aux marins de dimanche un bon vent. <strong>Les</strong>amis s'envoient les <strong>derniers</strong> saluts pendant que Armand pilote le voiliervers la sortie du port en direction de la Manche. Angélique sentun petit serrement au coeur quand elle voit la côte d'Albatre s'éloigner.« <strong>Les</strong> choses sérieuses commencent ! », dit-elle pour elle-même.— Angélique, dit son papa, tiens la barre pour un moment pendantque nous hissons les voiles. Après on coupera le moteur. Tupeux garder le cap je pense ? Non ?— Oui, capitaine, répond-t-elle avec un grand sourire en lui faisantun salut militaire.Leith, après que Pénélope lui a bien barbouillé, comme elle le dit,et transformé en ouvrir, a joint en compagnie de Midas une équipede nettoyage chargé à débarrasser l'entre-sol de la bibliothèque. Cesont eux qui prennent en charge l'évaluation des dégâts et éventuellementd'en sortir ces oeuvres qui peuvent encore être sauvés. Parmiles autres ouvriers se trouvent des agents de la police scientifique,qui ont d'habitude de travailler dans des conditions pareilles. Ils ontreçu en charge la tâche de mettre de côté tous les éléments depreuve, même si un procès n'est plus dans les probabilités. Pour lasimple raison que le suspect numéro un a été repêché du port deplaisance et qu'un procès ne peut pas avoir lieu que dans quelquessemaines. Or, les policiers présents savent tout ce qui va arriver206


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.dans quatre <strong>jours</strong> au petit matin, car mis au courant pour des différentesraisons. Pour les autres ouvriers, il s'agisse simplement d'unnettoyage comme un autre.— Ulysse, avez-vous les clefs du sous-sol avec vous? DemandeMidas à Leith qui a tou<strong>jours</strong> les clefs sur lui.— Oui, je vais vous l'ouvrir.Après quelques tentatives infructueuses à ouvrir cette porte, carapparemment bloquée de l'intérieur, ils parviennent à l'ouvrir. C'estLeith, travaillant sous le faux nom de Ulysse, qui fait signe à Midasde refermer la porte.— Tu as des dessins de suspects sur toi, lui demande Leith ?— Pourquoi donc ?— Mais, as-tu bien regardé ? Il y a parmi les ouvriers deux typesqui figurent sur tes dessins. Regarde bien ! Tu verras !— Que fait-on ?— Contacte peut-être Ajax. On devait les suivre et voir où ils ontleur nid.— Ce n'est pas bête comme idée, j'avais l'intention de les faire arrêter,mais il faut effectivement mieux les suivre et laisser faire lapopulation.Midas prend son communicateur et prend contact avec Ajax etlui explique la situation. Ajax juge qu'il faut effectivement mieux lessuivre pour savoir où ils logent et surveiller cet endroit ensuite pourvoir s'il y en a d'autres dans la nature. Après avoir terminé la communicationavec Ajax, Midas prend contact avec Laïos et lui communiqueles zozos à suivre, mais de ne pas prendre action dans l'immédiat.Il lui dit que ce sera mieux qu'il contacte Ajax d'abord.Leith, ne faisant pas trop attention à la conversation, commence àfaire le tour du sous-sol pour inspecter les oeuvres qui y sont entreposées.Il constate, en prenant un par ci par là, que, malgré de la saletéépouvantable, la plupart des oeuvres ont bien résisté à la fumée.<strong>Les</strong> dégâts d'eau sont aussi limités, car il semble que l'eau des lancess'est écoulée dans le même labyrinthe qu'ils ont pris le jour de l'incendie.— Eh ! Midas, tu ne pourrais pas demander au transporteur dese garer devant l'escalier de secours ? On pourrait charger les livres207


Déjà parti !plus vite. On n'aurait pas besoin de faire le tour dans l'entre-sol etl'entrée de la bibliothèque.— Je m'en occupe. Y a-t-il autre chose ?— Oui, il faudra peut-être mieux faire travailler ces deux suspectsici pendant que moi je fais l'inventaire de ce qu'il reste à l'entre-sol,qu'en penses-tu ?— Je le voulais justement te proposer.Leith a commencé entre temps à faire le tour des étagères contenantles précieux rouleaux sacrés. Il constate que l'idée de les mettredans des tubes en carton s'avère inestimable. Ces tubes ont relativementbien résisté et la totalité des textes sacrés ont été épargnés.L'étagère à côté contient des vieux livres en reliure de cuir qui ont visiblementsouffert et nécessitent un bon nettoyage.— Alors, dit Leith, tu peux commencer à faire évacuer cette rangéede rouleaux, ils n'ont pas souffert et peuvent être entreposésdans l'état qu'ils sont. <strong>Les</strong> livres de cette rangée-là, doivent êtretransportés à un endroit de nettoyage. Le papier n'a pas souffert,mais les livres se trouvent dans un état épouvantable.— Je commence toute de suite, ou faut-il faire autre chosed'abord ?— Non viens m'aider par ici, ces livres ne sont peut-être pas aussiprécieux que les autres, mais ils ont eu des dégâts d'eau et nécessitentune réparation. Il faut les mettre avec beaucoup de précautions decôté et il sera peut-être mieux de les transporter à part.— Mais dit-moi, par où êtes-vous sorti d'ici. Je ne vois aucuntrappe, ni autre moyen de sortir de ce sous-sol autre que la porte desecours.— Par là, dans cette armoire s'ouvre une trappe si on y appliqueune manipulation spécifique. C'est Angélique qui l'a su comment,mais je ne me rappelle plus exactement la manipulation à faire. Puis,dans le dédale là-dessous, tu t'y perds à coup sûr. J'ignore commentelle est parvenue à s'y trouver, et puis je crois qu'elle ne le sait paselle-même. Alors, si tu pouvais aller chercher nos zozos pour fairele boulot, je sors par la porte de secours et si tu m'ouvres l'autre, jepourrais entrer dans l'entre-sol sans que ces types me voient.208


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Une fois arrivée dans l'entre-sol, Leith commence le travail pourlequel il est venu. Il constate qu'ils restent, même si les la plupart desoeuvres ont brûlé presque entièrement, des exemplaires dont seul lacouverture ou la reliure a brûlé par ci par là. C'est un des agents depolice scientifique qui lui explique pourquoi. Le travail prend beaucoupde précaution et il ne remarque pas que l'heure du repas esttrès vire arrivé.— Alors, monsieur Ulysse, lui dit Midas, vous venez manger avecmoi chez Pénélope, l'esthéticienne, elle nous a invité à venir mangerchez elle.— Oui je viens, lui répond Leith, on peut reprendre le travail cetaprès-midi, n'est-ce pas ?209


C<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.omme convenu, Leith et Midas descendent à midi la ruecommerciale, passent devant l'estaminet de Abdubu et entrentdans le salon de Pénélope qui les attend pour débarbouiller Leith.Midas monte l'escalier menant vers l'appartement de Pénélope etvoit qu'Ussa s'affaire à mettre la table pour le dîner. Midas, trèsétonné de la voir occupée ainsi, lui demande :— Eh ! La belle, c'est vous qui fait à manger à présent ?— Mais oui, pourquoi pas ? Je sais faire la cuisine voyez-vous.J'aime bien m'occuper des tâches manuelles, la cuisine, coudre, bricolage,dessins et même peinture. J'ignore si vous l'avez remarqué,mais je sais habile de mes mains.— Oui, je sais. Déjà au palais aucune serrure était sûre pourvous, si on avait perdu les clefs, il fallait appeler Ussa. Qui a vousappris cela ?— Oh ! Pour les serrures ? Un vieil homme à tout faire quandj'étais encore une petite fille très curieuse. C'est lui qui m'a donné lever du bricolage.Pénélope qui a fini à démaquiller Leith entre temps monte accompagnéede lui l'escalier vers son appartement et lance à Midas :— Notre Ussa se défend comme une grande en cuisine, tu netrouves pas ? Je ne m'attendais pas à ce qu'elle est capable de faire.De plus, elle a eu le temps de me réparer deux serrures de placardsqui fermaient mal. Mais, continue-t-elle en s'adressant à Ussa : quit'appris à faire la cuisine comme ça. Tu connais non pas plus quemoi, mais tu le fais comme un vrai chef.— Notre cuisinière personnelle, lui répond-elle. Je lui assistaissouvent, contre l'avis de ma mère qui trouvait que ce n'est pas unetâche pour une princesse héritière, dans notre cuisine de l'appartement.On a une cuisine à part pour nous tu vois. Même si on prendla plupart du temps les repas préparés par la cuisine du palais, on aune cuisinière personnelle pour préparer nos repas séparément.211


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.C'est elle qui m'appris à cuisinier. J'ai heureusement une bonne mémoirepour les recettes et je n'ai pas besoin de les noter.— Je vous prépare des boissons, demande Pénélope. Y a-t-ilquelqu'un qui prend un apéritif ? Ussa, toi tu prends un vin cuit jecrois ? Non ? Leith, je ne te demande pas, je sais que tu ne bois pasde l'alcool si tu travailles après. Midas, un vin cuit également ?— Oui, ça va, lui répond Midas.— Oui, un vin cuit, ajoute Ussa.Pendant le repas, les deux hommes narrent leur matinée, les dégâtsd'eau, les livres couverts de saletés, les rouleaux sacrés restés intactesdans leurs tubes en carton, les livres miraculeusement échappésaux flammes, les deux suspects parmi les ouvriers faisant frissonnerUssa qui craigne pour la vie de son ami, et autres. C'est surtoutLeith qui est content que les dégâts en sous-sol s'avèrent êtremoins grave qu'on avait imaginé.— Ton père va prendre tous ces livres avec lui pendant l'évacuation,demande Pénélope à Ussa ?— Je ne sais pas, demande-le à Leith, lui répond-elle. Il est certainementmieux renseigné que moi.— Personnellement, dit Leith, j'ai pensé aux sous-sols du templed'Ozin. Il est construit sur du basalte, lui très résistant. Tous ce quiest important et fait référence à notre société actuelle, peut y êtreentreposé pendant des millénaires. Le seul problème qu'il reste à résoudreest l'étanchéité des caisses, car, si je dois croire les renseignementsd'Angélique, la zone où on vit va se trouver à des dizaines demilliers de pieds sous l'eau. J'avais pensé à remplir les caisses d'uneliquide conservateur, de sorte que l'eau de mer ne peut pas y pénétrer.Une comme celle qu'on utilise pour réparer et conserver desvieux livres.C'est alors que les discussions se portent sur les événements àvenir et pourquoi de ne pas cacher les livres en surface. Leith estd'avis qu'il vaut mieux les cacher à un endroit sûr jusqu'à une nouvellesociété soit à nouveau capable d'apprécier les anciens textesd'une autre société sans vouloir les détruire.212


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Assen-Ni, en chemin au bureau après avoir pris son dîner chezlui, décide de changer son programme de l'après-midi et ne va pas,comme d'habitude, directement à la préfecture, mais entre d'abordau bureau de police où il demande à l'homme à l'accueil d'avertir Ax-Tell. Le chef de police, déjà présent, ne s'étonne pas, car il attendaitune convocation de sa part.— Bonjour monsieur le préfet, dit-il quand Assen-Ni entre dansson bureau.— Bonjour monsieur, vous avez peut-être deviné que j'allais vousvoir, n'est-ce pas ?— Non monsieur, je m'attendais à une convocation de votre part.C'est au sujet des individus qu'on a trouvés, que vous êtes venu mevoir si je ne me trompe pas.— Vous en êtes où, en ce moment ?— Pour commencer, je n'ai pas besoin de vous présenter lesuspect numéro un. On l'a tout vu à la Une des journaux. Il aformellement été identifié par trois personnes au moins, dont une l'avue sortir de la bibliothèque par l'escalier de secours, juste avant l'incendie.Nous avons quatre autres, identifiés eux aussi, en garde àvue, dont on attend les résultats des recherches de la police scientifiqueen matière de traces et des communications fait au même numéroà Poseidia.— Même numéro vous dites ?— Oui, on soupçonne que ce soit un numéro de la BSI.— Sait-on si le suspect numéro un a fait des communications àce numéro ?— Oui, c'est ça. Il a fait la plupart de ses communications àl'estaminet “<strong>Les</strong> Jardines” tenu par un perse au nom de Abdubu. Làaussi, il a contacté le même numéro que les autres. Il s'agit doncbien des agents de la BSI.— Qu'est-ce qu'on va faire d'eux maintenant ? Un procès ?— Officiellement, oui. On les a mis en examen et on a dit queleur instruction judiciaire va commencer le vingt de ce mois.— Mais c'est après la date fatal, on les a en réalité condamnée àune mort par noyade. Savent-ils ce qui va arriver ?213


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— Je ne sais pas. Probablement. Mais ce n'est pas sûr qu'ilssavent la date exacte, car je crois savoir que même au sein de la BSI,le nombre de gens connaissant la date est restreint.— C'est le cas chez nous je crois, dit le préfet. La plupart de lapopulation ignore l'ampleur et la date de la catastrophe. C'est peutêtremieux ainsi. Puis je crois que seulement une toute petite partie,la princesse Ussa, ses parents et ses amis, connaissent les détails.Maître Amilius n'a pas eu le temps de les communiquer aux autresou à la presse.— On sait où est-elle ? Parce que les agents de la police scientifiquesont formels, les os trouvés ne sont en aucun cas ceux desdeux jeunes.— Ce sont les deux détectives travaillant pour le roi qui sont aucourant et personne d'autre. C'est mieux ainsi, comme ça ils sont ensécurité. Personne ne l'aurait l'idée à chercher des personnes supposéesmortes. Ce qui est intéressant, c'est que Ajax a identifié deuxautres agents de la BSI qui travaillent en ce moment comme ouvrieraux sous-sols de la bibliothèque.— Dois-je, lui demande Ax-Tell, les interpeller ?— Non, lui dit le préfet, vous allez mettre quelques agents en civilà disposition de la garde royale. Ils veulent surveiller leur nid poursavoir s'il y en a d'autres dans la nature. La démarche est intéressante,car on peut de cette façon savoir où ils se rendent et interpellerle tout d'ici deux <strong>jours</strong>.— Et leur offrir un simple cours en direction du royaume de Ra,n'est-ce pas ?— Non, je pensais plutôt à celui de Hadés.Pénélope, qui a fini de maquiller Leith de nouveau, lui demande :— Tu viens ce soir chez Abdubu ?— Non, lui dit Leith, probablement pas. Je suis sûr que lamaman d'Ussa sera très déçue si je ne viens pas avec elle ce soir. Jesuis navré pour les deux Macs, ils sont très sympathiques, mais jecrois qu'ils ignorent encore qu'on ne soit pas morts. Mais tu peuxleur dire au-revoir de ma part, n'est-ce pas ?214


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, je crois que c'est mieux. Je les dirai bonjour et bonvoyage de ta part, ils comprendront. C'est effectivement mieux derester avec ta belle compagne et ses parents, car ils n'ignorent pasqu'il ne reste que quelques <strong>jours</strong> de répit avant le grand événement.— Mais, dit-moi, lui demande Leith, les Macs, ils partent asseztôt, non ? Je croyais qu'ils partaient à la fin de l'après-midi ?— Oui c'est ça, lui répond Pénélope, je me suis gouré quand je tedisais ce soir, car ils payent une tournée générale vers quinze heures.Ce sera sympa si tu peux venir. Tu viens ? Finis ton travail un peuplus tôt, ceux qui sont là-bas peuvent très bien se débrouiller sanstoi. Alors, viens vers deux heures et demie ou trois heures moinsquart chez moi et je te démaquille.— Hé Midas, lance Leith à son compagnon de travail, nos deuxzozos, reviennent-ils cet après-midi ? Si oui, il faudra les faire travaillerpour nettoyer l'entre-sol, comme ça je pourrais finir les classementsdes livres en sous-sol. Qu’en penses-tu ?— Oui, en effet, car si je te comprends bien, tu voudrais partirplus tôt n'est-ce pas ?— C'est ça. Je n'ai plus que pour une petite heure de classementsà faire et ensuite c'est le travail aux vrais ouvriers. Ussa, dit-il en s'adressantà sa compagne, tu peux peut-être chercher le Biovox augrenier avant que les gardes viennent te chercher. Il y a des cartonspou mettre le matériel et je suis sûr que Pénélope te donne un coupde main, n'est-ce pas Pénélope ?— Mais, dit Pénélope, que comptes-tu faire avec ce bricolage. Ilte sert à quoi ?— Mais, lui dit Ussa, c'est clair, on aimerait bavarder un petit peuavec Angélique et Julien.— Ah oui, je l'avais oublié, lui répond Pénélope, alors on va chercherce machin avant l'arrivée des gardes ?— Alors, Pénélope, lui dit Leith, tout à l'heure. Et en s'adressantà Ussa : à ce soir ma belle et dit déjà bonjour à tes parents de mapart.C'est en route que Leith constate que Pénélope a fait un bon travail,car beaucoup de gens qu'il connaisse bien le saluent en disant :« Bonjour monsieur. » Arrivé à la bibliothèque, Midas envoie d'abord215


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.les deux agents de la BSI travailler à l'entre-sol et fait signe à Leithqu'il peut entrer par la sorti de secours. C'est en travaillant que Midasremarque l'absence de certains livres et demande à Leith aprèsavoir vérifié que la porte est bien fermée et en désignant des placesvides dans les rayons :— Sais-tu où sont passés ces livres ?— Ah oui, j'allais les oublier. Il faut faire le tour chez Amilius.Lui a aussi des choses très importantes qu'il faut entreposer en lieusûr. Tu pourrais demander Laïos de venir avec l'équipe qui vientchercher Ussa et sécuriser le bureau de Amilius ? J'y ferai un sautavant de passer chez Pénélope tout à l'heure.— Pourquoi donc ?— Parce que c'est moi qui a pris ces livres quand on s'est enfui lesoir de l'incendie. Puis il y a certains livres chez lui qui sont des copiesou des duplicata que je veux prendre avec moi. On ne saitjamais. Si ce voyage vers le royaume d'Angélique ce fait vraiment, jerisquerai d'en avoir besoin.— Tu y crois vraiment ?— Oui tous les quatre.— Quatre ?— Oui bien sûr, Ussa, Julien, son amour, Angélique et moi.— Tu comptes voyager comment ? Avec quoi ? Jusqu'à présentaucun de nos scientifiques n'ont pas pu trouver comment voyagerdans le temps.— Oui et non, lui dit Leith. Il ne faut cependant pas perdre devu ce qu'il est apparu dans les journaux il y a quelques années. Tu tesouviens de ce type qui a vu sombrer le port de Amaki dans la mer.— Oui, lui dit Midas, je m'en souviens. Tu crois qu'il a fait un aller-retourde quelques années dans le futur.— Oui, c'est ça. J'ai vérifié des anciens récits et archives à ce sujetet il y en a eu d'autres. Ce qu'il est curieux, qu'ils ont tout eu lieuaux mêmes endroits : la proximité du port de Amaki et au beau milieudu lac. Je ne sais pas si t'en souviens, mais il y a eu des bateauxqui ont disparu. Comme par magie.216


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Pendant qu'ils bavardent encore un moment, ils continuent à ytravailler jusqu'au moment qu'il est temps pour Leith de se rendrechez Pénélope en passant par le bureau de Amilius.Pénélope, qui vient de finir sa dernière cliente de la journée, voitque Leith vient, tou<strong>jours</strong> déguisé en ouvrier, dans sa direction pourse faire débarbouiller. Elle lui fait signe de s'asseoir pendant qu'elleaccompagne sa cliente vers la porte qui lui demande un peu étonné :— Vous coiffez des hommes à présent ?— Juste des amis, je n'en fais pas une habitude, mais ça m'arrivede coiffer mes amis. Bonne journée madame et à la prochaine fois,lui dit-elle, même si elles savent tous les deux qu'il n'y aurait pas deprochaine fois.Laïos, qui ne connaît Leith que vaguement, revient de l'étage avecUssa et salut Leith :— Bonjour monsieur, on se connaît ?Ussa qui se retient toute juste pour ne pas pouffer de rire dit àson compagnon :— Salut Leith, ça me fait rire de te voir ainsi. On te prend pourun ouvrir si on ne le sait pas. Pénélope a fait un bon travail de maquillage,c'est vraiment réussi.Laïos, qui regarde les deux d'un oeil interrogatif, ne reconnaîttou<strong>jours</strong> pas Leith et cherche dans ses souvenirs où il a pu voir cethomme. Son trouble est complet quand Leith salut Ussa et le tutoieen plus. Il lui semble bien, qu'il connaît la voix, mais ne sait tou<strong>jours</strong>pas où la mettre. Tout à coup son visage s'éclaire et dit :— Mais oui, j'y suis. Tu es Leith, le compagnon d'Ussa. Maisc'est qui, qui tu as maquillé de cette façon ? On ne te reconnaît pasdu tout.— C'est Pénélope, lui répond Ussa et continue en s'adressant àLeith : tu dois peut-être garder le maquillage pendant que tu finissesavec le demeure à Amilius. On doit passer par les toits pour ouvrirla porte du grenier, car elle est tou<strong>jours</strong> fermée de l'intérieur.— Eh, Ussa ! On devrait prendre le Biovox trafiqué avec nousau palais, on pourrait s'en servir ce soir.217


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— Oui Leith, c'est ce qu'on avait prévu.— Comment vas-tu au palais ? Lui demande Pénélope, tu ne vaspas à pied, j'espère. Ce sera trop voyant.— Elle s'installera dans la voiture du transporteur qui est garé devantla maison du maître pendant que nous allons déménager leslivres les plus importants, lui répond Laïos. Ensuite ils reviennentdemain ou après-demain pour chercher le reste. On a mis la plupartdes individus dangereux à garde à vue. Entre temps on va, avec labénédiction de Leith, utiliser le bureau du maître en tant que bureaude la garde royale pour pouvoir organiser l'évacuation.— Alors ? On y va ? Demande Ussa et continue en s'adressant àLeith : tu viens plus tard me rejoindre au palais, n'est-ce pas.— Oui, dit Pénélope, répondant à la place de Leith, on va tousaccompagner les Macs à la gare et Leith peut te rejoindre après.Quand Macdo et Maci voient entrer Pénéope accompagné deLeith dans l'arrière salle, qu'ils avaient réservée pour l'occasion, ilsexclament en choeur :— Mais, on te croyait mort. Voilà le retour d'une mort-vivant.— Bonjour à tous, vous allez bien ?— Nous ? Oui ! Tu t'étais caché où avec ta princesse ? DemandeMacdo.C'est ainsi que Leith leur narre leur mésaventure de la bibliothèque.L'incendie, la porte de secours bloquée, l'apparence d'Angéliquequi leur a permis de sortir du sous-sol par des couloirsexistants sous la ville, la trappe dans une armoire à Pénélope et les<strong>jours</strong> passés au grenier.— Oui, lui répond Maci, nous avons participé aux travaux, quandle maître a fait aménager son grenier.Abdubu, venu dans l'arrière salle entre temps pour savoir si les invitésdésirent quelque chose, est soulagé de voir Leith vivant. Il leurdemande néanmoins ce qu'ils désirent :— Buvez quelque chose ? Un peu d'amuse-gueule peut-être ?— T'en as, lui demande Macdo ?218


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, j'en avais préparé. Je savais que vous allez donner unepetite fête. Y a-t-il encore beaucoup de monde qui va venir ?— On attend encore Ajax, Jason, Jou-el, Midas et Laïos. Et puis,si tu vois d'autres qu'on aurait oubliés, envoie-les également. Maisdit-moi Abdubu, tu ne pars pas ?— Partir ? Où ça ? Non, je fais comme la plupart des gens ici, jedonne mon destin aux mains du seigneur. À lui de voir ce qu'il veutfaire de moi. Je suis seul et je n'ai plus de famille, ni ici ni chez moi.Je verrais ce qui arrive. Le roi a besoin des gens capables deconstruire une nouvelle société. Un gérant d'un estaminet n'est sûrementpas une priorité et c'est tout ce que je sais faire. Je ne suis pas,dit-il en s'adressant aux deux Macs, un touche-à-tout comme vousdeux.— Et toi Leith ? Tu pars où, lui demande Maci.— Oh, je vais sûrement rejoindre le vaisseau royal avec Ussa,même si on croit tous les quatre qu'on va se voir en chair et en os.D'après Angélique, c'est nous deux qui vont finir chez eux et nonpas l'inverse. Mais pour te dire si cela se fait vraiment et si oui, comment,ça reste un mystère.— Tu y crois dur comme fer, n'est-ce pas, lui dit Pénélope ?— Oui, lui répond Leith, tout ce que je sais, c'est que, d’aprèsAngélique, toi qui joue un rôle très important la dedans sans qu'ellepuisse dire pourquoi.— Moi ? Pourquoi moi ? Je vais rejoindre mes deux copains iciprésents dans deux <strong>jours</strong>. Tu pourrais venir avec nous si jamais tune réussisses pas à rejoindre Ussa et ses parents. On a assez de placesur le bateau tu sais. Un de plus ou en moins.— Mais amène Abdubu avec, dit Macdo, si Leith s'en va avec Ussa.Abdubu qui revient entre temps mettre quelques boissons dont ilsait que tout le monde en consomme, demande :— Y a-t-il des personnes qui boivent autre chose ?— Oui, dit Pénélope, un vin cuit, s'il te plaît.— QUOI, dit Ajax, qui vient à entrer entre temps, tu bois autrechose que ton Thé-Machin ?219


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— Mais oui, répond-elle, j'ai fini ma journée et on fête le départde nos amis. Je ne veux pas rester à boire du thé pendant vous vousamusez. Mais dit-moi, où sont-ils les autres ? Ils ne viennent pas ?— Mais si, dit Ajax, ils sont encore au palais à déballer de lamarchandise et trier ce qui doit être transporté au temple d'Ozin, etpuis Jason doit venir de l’autre côté du lac.— Temple d'Ozin, lui demande Maci, pourquoi là-bas ?— Je ne sais pas exactement, mais c'est Leith qui a eu l'idée d'ycacher tout dans les sous-terrains du temple construits par les anciens.— Oui c'est ça, dit Leith, c'est du basalte là-bas, la région eststable et peut supporter les grands tremblements de terre de sorteque les objets qui y sont entreposés restent à l'abri. La seule chosequ'il reste à faire est d'enfermer le tout dans les caisses étanches remplisd'une liquide conservateur pour les protéger.— Ne vaut-il pas mieux les transporter au continent, lui demandeMaci ?— Ça a déjà été fait il y a quelques années par des scientifiques.De plus, au temps d'Angélique ses caches n'ont pas encore été découvertes; ce qui est peut-être mieux.— Comment ça ? Pourquoi cacher le savoir et des textes anciens,lui demande Maci.— Mais, lui répond Macdo à la place de Leith, pas toutes les religionsrespectent la sagesse des autres. Il est même probable qu'ils yen ont qui imposent leur point de vue par les armes, comme Ra-Tale fait.— L'a fait, ajoute Pénélope, il est, à ce qui paraît, parti vers uneétoile où une base scientifique existe. Mais, continue-t-elle ens'adressant aux deux amis partant, vous êtes les seuls à partir ou a-t-ild'autres qui vont avec vous ?<strong>Les</strong> discussions qui suivent portent d'abord sur l'organisation, lelieu et autres détails de leur fuite, mais elle dérive vite sur d'autres sujets.Entre autres le voyage tant attendu de Leith et Ussa, ce qui intriguemanifestement Pénélope, car elle ne cache pas son désir àvenir avec eux. Mais aussi les événements à venir et les éventuellesconséquences, car personne ose s'imaginer que le pays va sombrer220


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.entièrement. Le moment venu, tout le monde se lève et partent endirection de la gare. Chacun prend une part de bagage des deuxamis en charge, car il y en a. Arrivés sur la place devant la gare,Leith les tape sur l'épaule et désigne une fenêtre du palais où Ussa lessalut. Arrivés au quai, ils aident les Macs à s’installer et les font undernier salut quand le chef de gare siffle le départ. <strong>Les</strong> Macs lancentalors un dernier mot à Pénélope, en voyant qu'elle s'essuie ses yeuxavec un mouchoir, avant le train se met en branle :— Alors, Pénélope, tu viens n'est-ce pas ? On t'attend sur lecontinent !— J'espère, dit elle, mais j'ai, comme Leith, un étrange pressentimentqui ne me quitte pas, que je vais ailleurs, peut-être même aveceux. Bon voyage et bonne chance dans vos nouvelles vies.— Vous aussi, disent-ils tous avec des larmes aux yeux.Tout le monde quitte silencieusement la gare. Certains, dont Pénélope,avec des larmes aux yeux, car ils savent tous, qu'ils ne se verrontplus jamais. C'est avec cette grosse pierre, appelant tristesse, aucoeur que Leith va en direction du palais où il compte passer cesquelques <strong>jours</strong> qui lui restent avant l'événement final. Soudainementune fenêtre du palais s'ouvre et c'est Ussa qui lui crie :— Eh ! Leith, invite donc Pénélope à venir avec toi, mes parentsaimeront lui parler et remercier.Pénélope, en entendant ce qu'Ussa criait à son compagnon, se retourne,quitte le groupe et va vers Leith en lui demandant :— Tu es sûr, que je peux venir avec toi ?— Oui, viens, lui répond-il, ils ne vont pas te manger.Ce qu'ils n’ont pas remarqué, c'est qu'il y a deux hommes qui, endépit de toutes les précautions et surveillance par la garde royale, ontpris note du fait qu'Ussa et Leith sont bien en vie et se dirigent versrue où il se trouve “Bel Horizon”, pour y informer leurs patrons.Quand ils montent l'escalier du palais, c'est Ussa qui les attend déjàà la porte. Elle vient à leur rencontre et voit que Pénélope a desyeux mouillés. Intrigué, elle lui demande :221


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— Mais qu'est-ce qu'il y a ma belle ? Tu pleures ? Pourquoidonc ? Pourquoi cette tristesse ?— Oh, lui dit Pénélope, je suis très triste, on vient tous de la gare.On a dit adieu à deux de nos amis qui sont rentrés chez eux. C'estcomme un enterrement je suis sûr que je ne les verrais plus jamais etça me rend très triste.— Alors, lui dit Ussa en le mettant son bras sur son épaule,monte, mes parents aimeront faire ta connaissance. Je leur ai dittout ce qu'il est arrivé. Mais pourquoi es-tu triste, tu ne prévoyaispas de partir chez eux dans les <strong>jours</strong> qui suivent ?— C'est là le problème, je crois à mes rêves, car je fais parfois desrêves prémonitoires qui ont la fâcheuse tendance à se réaliser.C'est alors qu'elle narre, pendant qu'ils montent vers les appartementsroyaux, son rêve à ses deux amis et n'oublie pas de mentionnerl'hôpital, la sophistication des soins, son réveil avec cet affreuxmal à la tête, la visite que lui ont fait ses quatre amis accompagnésd'un bel homme qui est apparemment le père d'une copine à Angélique.<strong>Les</strong> trois amis sont entre temps arrivés à l'étage où setrouvent les appartements du couple royal et d'Ussa. C'est Pâris deBel-Ra qui les attend et souhaite bienvenu.— Bonjour mes amis, merci d'être venu. C'est vous qu'on appellePénélope, demande-t-il à elle.— Oui votre excellence, Pénélope Axarz pour vous servir, lui répond-elleen faisant une petite courbure.— Laisse ces formalités s'il vous plaît, vous êtes ici chez lesparents d'Ussa, le roi a son bureau un étage plus bas et c'est là qu'ilreçoit des gens en audition. Vous êtes notre invité et on vous doitnos remerciements pour ce que vous avez fait pour notre fille et soncompagnon. Vous restez avec nous pour le souper ? Vous avezquelqu'un qui vous attend ?— Merci beaucoup, lui répond Pénélope, je resterai volontiers unmoment, car je n'ai, hélas, personne qui m'attend.Séléné, qui a remarqué la tristesse exprimée par ces propos,décide de se familiariser un peu avec et lui dit :222


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Appelle-moi Séléné, dit-elle puis continue en faisant mined'ignorer les gros yeux qu'Ussa lui fait, je peux te tutoyer n'est-cepas ?— Tu te rends compte, lui dit Ussa avant que sa mère puisse répondre,mes parents se tutoient depuis ils ont fait connaissanced'Angélique. J'étais moi-même très surprise quand je les entendaisfaire cela. Mais on ne le fait qu'entre nous. Quand il n'y a pas depersonnel de service à l'étage.— Pénélope, lui dit Pâris, tu peux m'appeler Pâris. On est actuellemententre nous, on a donné congé au personnel et c'est Ussa quinous a préparé quelque chose.— Oui je sais, qu'elle se défend très bien à la cuisine, lui répondPénélope, et non seulement à la cuisine. Depuis qu'elle a passéquelques <strong>jours</strong> chez moi et dans le grenier de Amiluis, je n'ai plus deproblèmes de serrures.— Nous en sait quelque chose, lui dit-il, c'est pareil ici. Elle esttrès habile de ses mains et elle fait beaucoup de ses vêtements ellemême.— Elle m'a même fait un toge de cérémonie, dit Leith, qui aécouté silencieusement la conversation. Moi je suis le contraire, siquelque chose ne marche pas ; j'appelle un spécialiste. Je sais fairedes petites choses, mais comme Ussa le fait ? Non !— Alors toi, lui dit Ussa, ne te minimise pas. Tu lis dix pagesune fois et tu es capable des ré-écrire tel quel. Angélique, parexemple, t'a dicté une douzaine de pages en rêve que tu as fidèlementrecopié une fois réveillée. Si moi je m'en souviens d'un rêve j'écristout juste une dizaine de lignes et toi tu noircis facilement dix pagespleins de détails.— Alors Ussa, lui demande son père, tu nous laisses sans boirequelque chose ? Et les amuse-gueule ? Ils sont où ?— Laisse Ussa, lui dit sa mère, va chercher les amuse-gueule quetu as faite à la cuisine, je m'en occupe de madame Pénélope.— C'est encore mademoiselle, Séléne. Ce n'est pas grave, mesclientes me disent aussi madame.— T'aimes quoi ? Un apéritif je suppose.223


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— J'ai d'habitude de ne boire que du thé pendant la journée, maisje ne travaille plus après et je peux donc boire autre chose. Vous...Tu as du vin cuit peut-être, car je l'aime bien.— Bon, dit elle, je n'ai pas besoin de demander les autres, aumoins si un a changé d'avis.— Eh ! T'appelles ça des amuse-gueule, dit Pénélope à Ussa quivient mettre ses créations sur la table de salon, on aura plus besoind'un souper si on a fini tout ça !— C'est ce que je voulais faire. C'est bien plus sympa non ? J'aiencore des bols de soupe aux champignons pour ceux qui en veulentet des beignets que je garde encore au chaud pour le temps que vousfinissez les entrées. Ah ! Oui, j'aimerais bien prendre contact avecJulien et Angélique après, qu'en dites-vous ?— Oui, c'est une bonne idée, dit Leith.Tout le monde est d'accord, qu'une tentative de contact sera faiteaprès le repas. Le sujet de la conversation pendant le repas-amusegueuledevient, après que Pénélope a narré encore une fois son rêve,très vite le passé commun. La première fois qu'ils ont fait connaissancede Pénélope qui venait alors ouvrir son commerce quand Sélénéa passé ses <strong>jours</strong> de repos en campagne chez ses parents. Le faitqu'Ussa avait ramené un petit garçon qu'elle prenait pour son petitfrère. Ils discutent ainsi jusqu'au milieu de la soirée où Ussa débarrasse,aidé par Pénélope, la table et y installent le vieux Biovoix trafiqué.Ussa montre toutes les manipulations à ses parents et leurmontre le document, décrivant le mode d'emploi, qu'elle avait fait.Elle supplie ses parents de traiter cet appareil mieux que tout or etdiamants, car d'une valeur inestimable.Armand, qui a laissé barrer Angélique un moment, prend contactradio avec un poste de pilotage de Cornouailles, car il doit leur annoncersa position et se renseigner sur la présence d'autres naviresdans le secteur, ainsi leur communiquer la direction qu'il compteprendre. Il monte sur le pont et modifie légèrement le cap suivantles indications reçues par radio. D'après le poste de pilotage de Cornouailles,ils seront ainsi tranquilles jusqu'au petit matin. Une fois224


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.enclenchée le dispositif électronique prévu pour garder le cap, ildescend avec Angélique dans la cabine où ils comptent encore discuterun moment ensemble et enseigner à Angélique et Julien l'essentielde la navigation. Là, c'est Angélique qui est un peu navré de constaterqu'ils n'ont avancé, sur cette carte maritime portant le numéro6561S 37 , que de quatre centimètres et demi, tandis que son pèreestime qu'ils ont bien avancé. Cécile jette parfois un regard interrogatifà sa petite famille, mais ne participe pas, elle est plongée dansune autre sorte de matière : ses bouquins de mots croisés. Elle est,en effet, contente que personne n'a le mal de mer, c'est déjà ça quiest gagné. De ce qu'elle s'étonne le plus, c'est l'effet du soleil. Mêmesi elle ne l'a pas vu de la journée, elle sent très bien son effet. Armandlui a bien averti de mettre de la crème, mais comme il n'y a paseu de soleil, elle ne l'a pas mis et les effets commencent à se fairesentir. Soudainement, Cécile lève, surprise, la tête et regarde autourd'elle, car elle a l'impression d'entendre d'autres voix et des petitsbruits. C'est Angélique qui les entend également et réagit, à la surprisede ses parents, tout de suite :— Salut mon amour, gosse bise, c'est toi et Ussa qui sont là ?Sa mère lui lance un regard étonné et avant qu'elle puisse direquelque chose, c'est la voix de Leith qui répond à Angélique :— Grosse bise mon amour, oui c'est nous. On n'est pas seuls,on est cinq en ce moment. Il y a à part Ussa aussi ses parents et Pénélope.— Bonjour tout le monde, répond elle.— Bonjour mon amour, grosse bise, dit Ussa, tu fais quoi là.— Bonjour mon amour, grosse bise à toi aussi. Notre père essayede nous apprendre un peu de navigation marine. Ah ! Oui,avant que je l'oublie, bonjour tout le monde.— Eh ! Leith, lui demande Angélique, dit-moi, où vous trouvezvous?— Il va regarder une carte, patiente un petit peu pendant mesparents se présentent, dit Ussa.37 Carte maritime officielle “Route du Rhum” émis par : Établissement principal du ServiceHydrographique et Océanique de la Marine – B.P.426 – 29275 BREST cedex225


<strong>Les</strong> celtes partent, eux aussi.— Alors, me laissez-moi présenter, dit une voix d'homme, jem'appelle Pâris de Bel-Ra et je suis, pour les quelques <strong>jours</strong> qui nousrestent, un des dix rois de notre fédération, mieux connue par vousen tant qu’Atlantide et le papa d'Ussa.— Moi, dit une voix de femme, je m'appelle Séléné de Bel-Ra,l'épouse de Pâris et maman d'Ussa.— Enchanté, dit Cécile, continuant à regarder autour d'elle pourvoir d'où viennent les voix qu'elle entend et poursuit : je suis,comme vous avez certainement deviné, la maman d'Angélique et Julien.— Enchanté, dit Armand, je suis le papa de ses navigateurs enherbe.— Mais, dit Ussa, où vous êtes en ce moment n'est pas votre salon.C'est maman qui vient de faire le réflexe que votre habitat n'estpas très grand.— Non, lui dit Armand, en effet. Nous sommes en route versl'endroit où vous avez habité. Nous nous trouvons ici dans l'habitacled'un voilier que nous avons loué pour la circonstance.— Tu es là Angélique, lui demande Leith, notes peut-être ce quej'ai pu trouver. Cherches sur ta carte la montagne la plus haute, celleque t'appelles Pino.— Non, lui dit Armand, elle s'est trompée de nom. C'est sûrementla montagne la plus haute des Açores, qui est une île et s'appelle“Pico”.— Bon, je veux bien “Pino” ou “Pico”, chez nous c'est un volcanet une montagne sacré et nous nous trouvons, note le bien Angélique,deux degrés quarante minutes à l'est et quatre degrés cinquanteminutes au sud de celle-ci. Tu saurais le trouver de cette façon,n'est-ce pas. Je ne peux pas te donner nos références, car jecrains qu’ils ne te soient pas très utiles.Après cette brève introduction, les deux familles continuent leurbavardage pendant un moment jusqu'au moment qu'ils décident dese revoir le lendemain dans l'après-midi par le temple d'Ozin interposéoù la famille royale comptait se rendre de toute façon. Angéliquepromet à Leith de chercher un endroit à allure de cratère dedeux cents à trois cents miles nautiques, car ils ont découvert que le226


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.mile nautique est resté pareil, une minute d'arc à l'Équateur. Leithest d'avis, puisqu'un cratère est habituellement dix fois plus grandque l'objet céleste qui l'a fait, qu'il devrait, vu de la dimension deArcturus, avoir cette taille. Il leur dit que la comète viendra demaincertainement visible de la journée. Leith leur dit qu'on peut déjà levoir grossir d'heure en heure pendant la nuit. <strong>Les</strong> deux famillesprennent ensuite congé les uns des autres après avoir souhaité bonnenuit et quelques salutations d'usage. Angélique, qui a entre temps repérél'endroit où se trouvent leurs amis, constate avec l'aide de sonpère que c'est plus loin que prévu et qu'il faut mettre les bouchéesdoubles pour y être dans le temps prévu.— Mais pourquoi veux-tu absolument y être dans un aussi brefdélai, lui demande son père ?— C'est important, je ne sais pas moi-même pourquoi, mais c'estimportant qu'on y soit dans les temps.— Mais, lui dit Armand, tu sais que dans ce cas on ne peut pas yaller avec une allure de promenade. Ça signifie : tout le monde sur lepont et on fait la course, comme dans mes bons vieux temps. Ceme plaira bien, mais je ne sais pas si maman est d'accord.— Bof, si cela vous faites plaisir, faites-le.— Alors, c'est moi qui barre jusqu'à minuit. Qui prend la relève ?Toi Angélique ?— Oui c'est bon pour moi, je réveille Julien à quatre heures alors.— D'accord, lui dit son frère.— On garde le même cap, demande Angélique à son père.— Oui, jusqu'à quatre heures, je me lèverai aussi pour modifier lecap légèrement. Nous pouvons ainsi mieux avancer. Et gardez bienl'oeil partout, les cargos ne font pas de sentiments. En principe il yen a pas, mais gardez l'oeil bien ouvert quand même. Il vaut mieuxles éviter.227


LLe cauchemar d'Ussa.eith se lève, se prépare dans la salle de bains et va, comme il ad'habitude de faire quand il est invité chez Ussa, dans la pièceaménagée en tant que salle à manger pour y prendre le petit-déjeuner.La maman d'Ussa, Séléné, y est encore et a déjà fini son petitdéjeuner.Tous les deux s'étonnent qu'Ussa n'est pas encore arrivé,de plus qu'aucun bruit a été entendu en provenance de sa chambrequi aurait pu leur indiquer qu'elle s'est levée. Séléné décide d'aller lavoir, s'il n'y a pas de problème. Quand elle va vers les appartementsoù logent les deux jeunes gens, elle entend des petits bruits en provenancede la salle de bains et demande :— C'est toi, Ussa ?Mais Ussa ne répond pas et gémit des mots incompréhensibles.Sa maman, très inquiète, entre dans la salle de bains pour voir cequ'il est arrivé à sa fille et la voit se mouiller le front et la tête de l'eaufroide. Ussa, en entendant sa mère entrer, se retourne et le regarded'une tête d'enterrement. Sa maman, tou<strong>jours</strong> très inquiète, lui demande:— Que t'arrive-t-il ma chérie. Pourquoi cette tête d'enterrement.peut-être trop mélangé le vin cuit et l'eau-de-vie de cidre vieilli 38 ?— Non maman, c'est cet affreux rêve que j'ai fait. Je te le raconteraitout à l'heure. J'ai l'impression avoir heurté la tête violemmentcontre le chevet de mon lit. J'ai dû m'agiter pendant mon rêve.— J'appellerai le médecin ma chérie. Il vaut mieux qu'il regarde situ n'as pas quelque chose. Alors, je te laisse t'habiller et on t'attendpour le petit-déjeuner.Quand Ussa entre dans la salle à manger, le médecin l'attend déjà.Leith, surpris par la mine qu'elle fait, le regarde d'un air interrogatifet lui demande :38 Mieux connue parmi les Normands en tant que Calvados.229


Le cauchemar d'Ussa.— Mais que t'arrive-t-il ? La tête que tu fais, qu'est-ce qu'il y a machère ? Ce ne sont sûrement pas les quelques boissons d'hier soir, tuas fait les fêtes avant et tu n'as jamais eu le mal de tête après.— C'est sans doute cet affreux rêve que j'ai fait. J'ai peut-être cognéma tête contre le chevet de mon lit.— Tenez-vous tranquille un moment, mademoiselle, que jepuisse vous examiner.Le médecin procède à toutes les vérifications d'usage sans pourautant trouver l'origine du mal de tête. C'est quand il examine sa têteun peu plus attentivement, qu'il trouve une écorchure qui confirmela supposition d'Ussa. Il lui prescrit un léger médicament et luidonne le consigne de se reposer pendant la journée. Il estime que cen'est sûrement pas grave et qu'il y a un côté émotionnel très important.Il lui suggère de raconter son rêve, ce qu'elle fait.— Alors, dit-elle, le début de mon rêve reste un peu flou. Je n'ai,hélas, pas une aussi bonne mémoire pour ces genres de choses queLeith, mais je m'en souviens que nous nous trouvons sur un bateauavec d'autres gens. Lors ce rêve, je n'étais sûrement pas la personneque je suis maintenant, car il y avait un grand nombre de neveux,nièces cousins et cousines ainsi qu'un homme qui tenait un bistro.C'est soudainement qu'un des membres croyait entendre quelqu'unappeler Leith de loin. Leith, qui était avec nous, et moi sommesmontés sur le pont et on voyait un beau voilier blanc, tel que l'on nevoit plus de nos <strong>jours</strong>. Sur la proue il y avait Angélique qui criait detout son désespoir le nom de Leith en regardant vers la côte où leszones côtières disparurent sous les eaux de la mer. C'est là qu'Angéliquecherchait Leith. Elle le croyait noyé et elle criait comme sion l'écorchait vive. Leith, qui avait entre temps déjà cherché toutesles valises, l'appelait sans succès. Moi je me sentais heureuse de voirqu'Angélique et sa famille étaient réellement venue nous chercher.C'est quand on était qu'à une dizaine de pieds de leur bateau, qu'Angéliquenous a vu. C'est elle qui a aidé Leith de monter à bord etavait commencé à ranger ses valises. Ce qui est curieux et qui mefait penser que j'étais sûrement quelqu'un d'autre, c'est que je mevoyais dans les bras de Julien. Mais. Quand je voulais monter àbord à mon tour, j'ai dû glisser et la dernière chose que je me230


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.rappelle, c'est que je cognais ma tête contre le bord du bateau. Inutilede dire que je me suis réveillé un sursaut, et puis c'est là que j'aidû heurter ma tête contre le chevet de mon lit. Je me souviensseulement que je me trouvais à côté de mon lit avec un affreux mal àla tête. Je me suis ensuite allongé sans pouvoir m'endormir à nouveau.— Vous êtes resté combien de temps ainsi, lui demande le médecin?— Oh ! Une heure tout au plus. Le mal a diminué un petit peudepuis. Vous avez peut-être raison que ça doit-être l'émotion.— Reposez-vous aujourd'hui, lui dit le médecin, on verra demaincomment vous vous sentez.— Puis-je quand même aller avec mes parents et Leith au temple,lui dit Ussa, n'est-ce pas. C'est ce qu'on a prévu et promis à nosamis. Ils seront trop déçus si je ne venais pas.— Mais bien sûr. Prenez peut-être une pastille contre le mal detête avant de partir.— Moi, dit Leith, j'ai fait il y a quelque temps déjà aussi un rêveoù il figurait un bateau blanc. C'est peut-être le même. Je rêvais quej'étais à bord d'un bateau blanc avec une jeune fille de mon âge.Soudainement, quand je ne regardais pas, elle est tombée à l'eau etdisparaissait sous les flots. J'étais choqué, car je croyais qu'elle allaitse noyer. Un autre homme qui se trouvait à bord, en ta compagnieUssa, sautait à l'eau à son tour pour le sauver, c'est ce que je croyaisen tout cas. Je m'en souviens plus les détails, car il y a déjà un certaintemps et c'était avant que j'aie fait la connaissance d'Angélique.Mais il y a sûrement une relation entre nos rêves.— C'est ça, dit Séléné qui avait écouté silencieusement les récits, ilest fort probable que ton rêve, Ussa, c'est ce qui risque arriver à Pénélope,la pauvre.Le médecin les promet, avant qu'il parte voir d'autres patients, derevenir à la fin de l'après-midi, après qu'ils sont revenus du temple,vérifier l'état de santé d'Ussa. <strong>Les</strong> autres continuent leur discussion àsavoir si un rêve peut être prémonitoire ou non. Séléné est d'avisque la partie qu’Ussa a rêvé correspond à un accident mettant231


Le cauchemar d'Ussa.Pénélope dans le coma jusqu'à son réveil à l'hôpital tel qu'elle l'avaitdécrite la vieille.Pendant que sa femme, sa fille et Leith babillent à la salle à mangersur un petit-déjeuner tardif, Pâris de Bel-Ra à déjà fait ranger deschaises et une table de réunion dans la salle au rez-de-chaussée prévueà cet usage. Le roi qui attend les dignitaires religieux sur le perrondu palais, les salut et les accompagne personnellement un à un etune à une, car il y en a des prêtresses parmi eux, à leurs places. Laplupart connaissent déjà le sujet, car la comète peut être observée dela journée à l'aide d'une longe vue. Ce qu'ignorent les gens, c'estl'ampleur et le moment exact de la catastrophe. <strong>Les</strong> dignitaires religieuxse doutent déjà quelle dure tâche leur attend, parce qu'évacuertout le monde n'est pas envisageable en raison des capacités detransport disponibles. Cette réunion doit éclaircir comment répartirceux qui partent et ceux qui restent. Il convient en ce moment derassurer les gens et surtout ramener les non-pratiquants au berceauet les convaincre qu'il y a bien une autre vie après la vie actuelle.C'est, selon le roi Pâris de Bel-Ra, la seule façon d'éviter des mouvementsde panique.— Bonjour à tous et toutes, dit Pâris, j'imagine que vous n'ignorezpas la raison pour laquelle vous êtes ici. Vous trouvez sur latable devant vous un document détaillé fait il y a quelque temps parle compagnon de ma fille et son maître. Vous allez voir que l'étoile,devenu visible depuis ce matin au moyen d'une longe vue, foncedroit sur nous et l'espoir qu'elle passe à côté de notre planète est minime.Je sais que de tels accidents ont eu lieu dans le passé et que lepays s'en est sortie. Je ne peux, pour l'instant, pas relever messources sans me ridiculiser, mais c'est devenu une certitude que cequ'il va arriver à notre pays est bien ce que les sept fléaux ont prédit.Je dois, aussi navrant que c'est, ajouter que ce n'est pas comme lepays Lémuria qui a disparu il y a soixante-dix mille ans, une lentedescente permettant l'évacuation de la population, mais un péril rapide.232


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Sait-on la date et l'heure, demande David Levy, représentantdes hébreux ?— Je vais en venir, dit Pâris, le moment a été calculé par troispersonnes différentes et c'est pour après-demain tôt le matin avecune certitude de quatre vingts-treize pour cent.— Sur quels critères devons-nous sélectionner les candidats àl'exile, demande un représentant du mouvement des Bélials.— Vous le verrez assez bien vous-même, lui répond le roi, on abesoin de tout le monde, mais surtout ceux qui savent travailler laterre et nourrir ceux qui établissent les nouveaux cités. N'oubliezsurtout pas que les ressources vont manquer dans l'avenir et qu'uneadaptation de la société sera nécessaire. <strong>Les</strong> savants qui savent toutfaire et enseigner la sagesse et le savoir-faire des anciens doivent impérativementfigurer sur la liste. Ne ramenez surtout pas de richesseset des appareils servant le confort personnelle avec, ils ne serontd'aucune utilité.— Ne faut-il pas mieux mettre l'accent sur ceux qui restent et lesvolontaires à aider ceux qui ne peuvent pas partir, lui demande leresponsable du temple d'Ozin, représentant des adeptes de “La Loid'Une” ?— C'est exactement la raison pour laquelle je vous ai convoquéici, lui dit le roi. Y a-t-il parmi vous ceux qui craignent des problèmes? Il faut éviter que les gens qui ne peuvent pas partir encombrentles routes en direction des ports pour ne pas empêcherdes autres à y accéder. Il continue en s'adressant au responsable deshébreux : il paraît que vous avez votre propre plan d'évacuation. Ilvous reste beaucoup de membres de votre communauté à évacuer ?— La plupart des nôtres ont déjà gagné Poseidia pour l'embarquementsur la flotte que l'on a mis à notre disposition. Ceux quirestent se porteront volontaires pour assister ceux dans leur peinequi ne peuvent pas ou ne veulent pas partir.— Cette organisation, que vous avez fait, est-il une évacuation oua-t-il une autre raison, lui demande Pâris ?— C'est plutôt un exil, lui répond David, notre communauté attenden effet un guide qui va naître parmi les nôtres en Égypte pournous conduire au pays promis par notre dieu.233


Le cauchemar d'Ussa.— On peut donc considérer que votre communauté se trouvedéjà en sécurité, n'est-ce pas ?— Oui, c'est cela sire.— Communiquez les donc quand même que le danger d'un délugeest très grand, même en Égypte, et qu'il faut mettre hommes etbétail à l'abri pendant quelques semaines.— Vous avez peut-être raison, une de nos rouleaux sacrés lementionne en effet. Je vais contacter mon neveu Noah Levy, qui setrouve déjà en Égypte, et lui dire qu'il doit prendre les mesuresnécessaires, s'il les n'ait pas déjà pris. Il comptait, en effet, construireune arche.— Dit-lui de se dépêcher, il ne lui reste que quelques <strong>jours</strong>, lui ditPâris et continue en s’adressant à la communauté Celte : vous, ilvous en reste beaucoup de vos citoyens qui doivent encore partir,car je crois savoir qu'ils sont pour la plupart déjà partie gagner lecontinent de leurs propres moyens, n'est-ce pas ?— Il nous en reste quelques-uns qui sont mariés à des gens d'iciou ceux qui ne veulent plus partir. On a beaucoup qui disent : sinotre pays meurt, nous mourons avec.— C'est le cas de beaucoup d'entre nous, lui dit Hélène, une belleprêtresse local, ils ne veulent pas partir. Certains se sentent tropâgés, d'autres inaptes à ré-commencer à partir de zéro et encore ceuxqui sont simplement attachés à leur terre et veulent, comme le ditmon confrère, mourir avec le pays.— Le grand problème, dit Djen, un représentant du mouvementBélial, c'est que beaucoup des nôtres ont perdu leur foi et qu'ils necroient plus rien. C'est assez dramatique pour eux de ne pas pouvoirpartir et d'aller vers une mort certaine. On essaye de mettre le maximumde gens ayant encore la foi sur le coup pour les assister à trouverle chemin vers leur destin.La discussion s'engage ensuite sur les modalités de qui et comment,mais surtout sur le mode d'accompagnement de ceux qui restent.Tous les invités sont bien d'accord qu'il faut éviter la paniqueet des mouvements populaires insensés qui ne profitent à personne.La décision est prise de réglementer la circulation dès le lendemainmatin. L'ordre du jour continu ensuite sur l'organisation des points234


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.de rendez-vous et il y a même certains qui veulent faire un tirage ausort comme cela se fait déjà dans l'état d’Alta et sa capitale Poseidia.La plupart estiment cependant qu'il faut trier les gens selon leurnécessité. Il convient d'expliquer aux désireux à l'exode que repartiret reconstruire une société à zéro n'est pas une affaire de tout lemonde. L'assemblée considère qu'il est fort probable que la sociétédoit revenir aux silex et outils en bois faute d'autres ressources,spécialement des minéraux, métaux, le charbon pour extraire le ferdu minerai et autres.Leith est surpris de voir Hector, l'astrologue et astronome du roi,entrer dans leur appartement privé. L'homme, que Leith connaît devue, lui affirme que c'est le roi lui-même qui lui avait dit d'aller levoir dans l'appartement au premier étage. L'homme au nom deHector est en effet curieux comment Leith a pu savoir le déplacementde l'axe de la rotation terrestre. Lui et ses confrères ont putout juste déterminer qu'une rencontre fatal Terre-Arcturus est plusque probable et aurait de toute vraisemblance lieu au petit matin endeux <strong>jours</strong>, mais la précision de leurs calculs s'arrêtent là. D'autrepart Leith aimerait bien calculer le nouvel emplacement du pôlenord, mais n'y arrive pas, car les calculs envisagés marchent seulementpour une surface plane et ne sont pas valables pour unesphère, ce qu'il explique à Hector.— Vous voyez, j'ai bien essayé de calculer le nouvel emplacementdes pôles, mais mes formules ne marchent pas pour le système deslatitudes et longitudes telles que l'on utilise pour la navigation et lacartographie.— Mais comment avez-vous voulu les recalculer ? Il fautconnaître pour cela au moins deux positions sur la terre dont on saitles anciens et les nouveaux cordonnées. Or, pour en avoir les nouveaux,il faudra pouvoir regarder et mesurer dans l'avenir. Et c'estjustement là où on a un problème. Jusqu'à maintenant, il n'y a personnequi est parvenue à le faire.— C'est peut-être curieux et va sûrement à l'encontre de nosconnaissances scientifiques, mais Ussa et moi sommes en contact ré-235


Le cauchemar d'Ussa.gulier, devenu plus qu'amicale, avec deux jeunes gens, un frère et sasoeur, de notre âge vivant de toute vraisemblance à onze mille huitcents ans dans l'avenir.Il lui raconte ensuite en quelques brèves lignes leur histoire, lespremiers contacts par rêve interposé et l'entrevue dans la salle debain d'Angélique. Le contact au moyen du Biovox trafiqué, laséance d'Angélique et ses amis chez une voyante et autres.— Donc, si je résume, c'est elle qui vous a fourni les renseignementsnécessaires ?— Oui, c'est ça, cependant, j'ai dû laisser mes notes au grenier duMaître Amilius. Voulez-vous que je viens avec vous pour les chercher? Le lieu est sécurisé par la garde royale en ce moment.Pendant qu'ils descendent la rue vers le bureau du maître, Leithlui raconte ce qu'il se souvient. Ce que Hector étonne le plus, c'est lefait qu'Angélique, l'amie de Leith, a neufs <strong>jours</strong> de plus au calendrierannuel. Ce qui est énorme et suppose un impact d'une violence inouïe.Il est tout à fait d'accord avec son jeune ami que le pays n'a aucunechance de s'en sortir si la comète heurte la terre de côté ouestde l'océan Atlantique. Arrivés au logement de Amilius et en avoirsalué Pénélope au passage, ils montent l'escalier jusqu'au grenier.— C'est là, où était le pôle sur un globe qui trônait sur le bureaud'Angélique, lui dit Leith en pointant un doigt sur le globe de Amilius.Et continue en pointant le doigt sur leur pays : puis tout çan'était plus là. <strong>Les</strong> régions côtières ici et là avaient aussi disparuessous l'eau, dit-il en désignant les zones concernées.— Vous avez où, vos chiffres, lui demande Hector ?— Ah ! Oui, j'allais les oublier. <strong>Les</strong> voici, dit-il en lui remettantun cahier d'écolier où il avait griffonné ses notes.— Je peux prendre vos notes jusqu'à ce soir ? J'aimerais les copier,vérifier vos observations et les renseignements de votre amieavec les miens. À propos, sait-elle où la comète a heurté la terre ? Ildoit y avoir un cratère de, vu de la taille de Arcturus, plusieurs centainesmiles nautiques.236


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Non, elle ne l'a pas trouvé, elle a promis de bien regarder sacarte maritime pendant qu'ils viennent par ici. C'est-à-dire qu'ilscomptent venir à l'endroit où devait se trouver notre pays. Dans sasociété ils ont une période annuel de repos qu'ils appellent vacances,et puis c'est justement pendant leurs vacances qu'ils vont symboliquementnous faire une visite. On, Ussa ses parents et moi donc,comptait leur parler cet après-midi au temple d'Ozin.— Mais, qu'est-ce que vous faites dire que la comète tombe forcémentdans la mer et non pas sur le continent ?— Mais, pour moi c'est clair, car, d'après Maître Amilius, un telimpact sur le continent créa une boule de feu brûlant tout sur sonpassage. Le simple fait qu'Angélique existe à onze mille huit centsans, me signifie que tout n’a pas été détruite. Sinon elle aurait existébeaucoup plus tard, des millions d’années peut-être, ou même pasdu tout.— Comme celui qui a fait brûler la plupart des dragons il y asoixante-cinq millions d'années, ajoute Hector. On suppose qu'il y aeu une comète ou astéroïde qui est tombé sur le pays de Yuk àl'époque.— Croyez-vous que le déluge annoncé soit le résultat du fait quela boule de feu de l'impact sera absorbé par l'eau de mer, faisant ainsiévaporer une grande quantité d'eau tombant ainsi ailleurs en tant quepluie diluvienne ?— C'est probable. On n'a, hélas, pas de récits assez précis desdéluges précédents pour savoir ce qu'il était arrivé. On sait tout justequ'il y a eu d'autres déluges auparavant.— Vous pensez sûrement, lui dit Leith, à ceux qui ont eu lieu il ya douze mille deux cent huit ans et quarante mille ans. Beaucoup degens croient que le pays va survivre comme les deux cas précédents.— Est-ce que votre amie sait combien de temps nous reste pendantla journée ?— Non, rien de précis, lui dit Leith, elle parle cependant d'un terriblejour et une terrible nuit.— C'est bien dans cet ordre là ? Non pas l'inverse ?— Non, c'est bien ça, c'est moi qui ai fait le même réflexe et ellel'a dû vérifier.237


Le cauchemar d'Ussa.— Je vois que vous avez noté que la plus haute montagne denotre pays, s'appelle “Pino” chez elle, une chose que vous avezchangée en “Pico” et qu'il fait deux mille trois cents mètres. C'estquoi un mètre ?— Oh ! C'est leur mesure, ça fait un dix millionième de ladistance du pôle à l'Équateur.— À peu près sept mille pieds donc, dit-il après un moment decalcul mental. Cela veut dire que notre pays se trouve à leur époqueà plus de douze mille pieds sous l'eau. À croire leur récit, on n'adonc que de quarante-huit à soixante heures pour nous organiser,après, il faut être loin des côtes. Il vaut mieux rentrer au palaismaintenant et informer le roi qu'il y a urgence. L'endroit exact del'impact va déterminer de combien de temps nous reste pendant lajournée, appelons le : “Jour-J”.— Comment ça ?— Eh bien ! S'il tombe près de nos côtes, on n'aurait guère detemps. S'il tombe de l'autre côté, sur les côtes du pays de Om, onaurait encore un petit peu de temps pendant la journée.Le préfet Assen-Ni, qui a assisté à la réunion du roi et les dignitairesreligieux, entre, avant d'aller vers son bureau, dans le commissariatde police et se fait annoncer au chef de police, Ax-Tell, qui lereçoit aussitôt. Ce dernier le salut :— Monsieur le préfet, je vous salue bien. Y a-t-il quelque choseque je peux faire pour vous ?— Oui, mon cher, il y a quelques petites choses qu'il vaut exécutertout de suite sur l'ordre du roi. La première chose est qu'il faudraréquisitionner tous les bateaux commerciaux pouvant transporterplus que cinquante personnes et ou cent tonnes de marchandises.Deuxièmement vous avez dès cet instant l'habileté de disposer desforces militaires et de la marine. Leurs bâtiments attendent déjà desordres. Il ne vous reste qu'appliquer le plan d'évacuation dèsmaintenant. Ce qui nous amène à notre troisième point, c'est la réglementationde la circulation. <strong>Les</strong> personnes ne seront plus autoriséesà circuler librement. Chacun peut aller visiter sa famille et re-238


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.venir, mais ne peut plus aller vers les zones portuaires sans qu'il aitune autorisation ou dans le cas échéant se rendre à son propre bateau.Chacun qui possède un bateau, voilier, barque de pêche ouautre est invitée à prendre le maximum de gens et de marchandisesavec lui. <strong>Les</strong> modalités seront disponibles dès le début de l'après-midi.— La compagnie des chemins de fer, est-elle informée ?— Oui, ils vont mettre tout en oeuvre pour faciliter les gens devoyager vers les ports.— Que fait-on de ceux qui se trouvent en prison en ce moment ?— On les laisse là, on leur offre un simple cours vers le royaumede Ra ou de Hadès suivant les cas.— Que fait-on des émeutiers, s'il y en a ?— Ce sont les militaires qui s'en occuperont. Tout émeutier tomberaautomatiquement sous la loi martiale. On n'a vraiment pas letemps à perdre à cause d'eux. <strong>Les</strong> militaires en font ce que bon leursemble, il ne faut pas s'en occuper.— Ce sont qui, qui vont sélectionner ceux qui partent et ceux quirestent ?— <strong>Les</strong> dignitaires religieux se sont mis d'accord sur les modalités.Mais il me semble qu'ils veulent sélectionner ceux qui sont capablesde vivre dans des conditions près de l'âge de pierre. Ceux qui sontcapables de se débrouiller.— Ne me dis pas que c'est aussi dramatique que ça !— À ce qui paraît. Oui ! Le roi a pu obtenir cette informationdes amis d'Ussa, qui vivent apparemment dans le lointain avenir.Leurs récits de notre pays et sa destruction dépasse toute imagination.C'est pire que ce que vous pouvez vous imaginer.— Est-ce que la population sait ce qui va arriver ou sont-ils dansle floue comme nous l'étaient ?— Je crois que l'ampleur du désastre n'a pas été communiquée.Pas chez nous en tout cas. Soit les journaux se taisent, soit ils nesavent rien non plus. Et puis, c'est peut-être mieux ainsi. De cettefaçon, l'évacuation paraisse être une simple précaution. C'estd'ailleurs ainsi que les dignitaires religieux veulent le présenter, cartout le monde connaît les récits des deux cas précédents. Là aussi il239


Le cauchemar d'Ussa.y avait des dégâts importants, même des déluges, mais le gros de lapopulation a pu survivre.240


CLe plan d'évacuation.'est déjà un moment que Pénélope est assise à la table habituelleen conversation avec le gérant de l'estaminet, Abdubu.Elle essaye le convaincre de fermer son établissement dès ce soirpour des, soi-disant, raisons familiales, car elle vient de découvrirque son copain a fait le marin et connaît de la navigation, sait se repéreren mer au moyen des étoiles en utilisant les outils appropriés.Elle vient tout juste de commander son Thé-Machin, que Ajax entreaccompagné de Jou-el.— Salut les mecs, vous allez bien ? Leur lance-t-elle.— Salut la belle, lui disent-ils en choeur, encore au travail ?— Mais oui, j'ai encore de la clientèle, même si ça diminue considérablement.Vous pouvez d'ailleurs le constater en regardant lesclients qui viennent encore ici. J'essaye de convaincre Abdubu qu'ilvient avec moi chez ma famille. On aurait de tout façon besoin d'unbon marin pour aller rejoindre les Macs.— Bon marin ? Abdubu ? Tu étais marin autrefois ? Je n'y revienspas, lui dit Ajax.— Mais oui, j'ai fait de la navigation. J'ai commencé matelot, jusqu'àvenir navigateur. C'était avant que j'aie repris un petit restaurantdans mon pays. Il y a eu une révolution chez moi, qui m'a obligé àpartir. C'est ainsi que j'ai pu reprendre ce bistro. Mais il y a longtempsde cela, vous le savez bien.— Alors, lui dit Jou-el, tu pars quand même, n'est-ce pas. Tu necomptes pas rester ici quand il y a des gens qui ont besoin de toiailleurs. Non ?— Je ne sais pas, il faut voir. Je crois cependant qu'il vaut mieuxfermer. J'offre dans ce cas un petit verré ce soir. Vous revenez cesoir ? Je préparerai quelque chose. C'est sûr eh, Pénélope, je peuxvenir avec toi et ta famille ? Non ?241


Le plan d'évacuation.— Mais bien sûr, qu'est-ce que tu crois. Je te présenterai Félicité,ma cousine, elle te plaira. On aurait besoin de tout le monde où onva dans deux <strong>jours</strong> au petit matin.— Dans deux <strong>jours</strong>, lui demande Ajax, mais c'est le jour même dela catastrophe annoncée.— On n'a pas pu partir avant, on a trop de choses à organiser.Soudainement c'est Laïos qui entre leur dire bonjour avec unjournal sous le bras. Il salue les et jette le journal sur la table et dit :— Vous avez vu ça ? Ils ont trouvé une demie douzaine detypes, tous mutilés comme l'autre qu'on a repêche du port il y aquelques <strong>jours</strong>. As-tu les dessins sur toi, Ajax. J'aimerais comparerles clichés du journal avec les tiennes.Pénélope, en jetant un coup d'oeil dans le journal, y perçoit uncliché qui pourrait, selon elle, correspondre à une des personnes quilogeaient au “Bel Horizon”.— Tu as vu ça, dit-elle, ils ont zigouillé un chef des Bezlebubs.Ça promet ! Je suis sûr que les lieutenants vont se fâcher et essayerde faire quelque chose.— Tu crois, lui demande Laïos, qu'ils vont accuser la garde royaleet essayer de se venger en capturant la princesse Ussa ?— Je ne sais pas, dit Pénélope, mais c'est juste une hypothèse.Mais, continue-t-elle en s'adressant à Ajax : tu les connais n'est-cepas ?— Je pense qu'ils vont essayer d'extorquer un sauf-conduit pourle plan d'évacuation. Il convient d'être prudent en ce moment. Jecrains moins pour Leith que pour Ussa. Il vaut mieux qu'elle nesorte pas seule. Tu peux assurer qu'elle ne sort qu'accompagnée desgardes de corps, demande-t-il à Laïos ?— Ça nous complique les choses, ils, Ussa et Leith donc, avaientprévu de venir récupérer leurs affaires chez lui et chez Amilius demainmatin. Il faut que nous soyons sur nos gardes. Ajax, on peutte demander d'intervenir s'il y a problème ?— Demande les moines du temple d'Ozin, ils ont promis de surveillerun ancien monastère où les Bezlebubs ont un repère. S'ilscachent quelqu'un, ce sera probablement là, car ils savent la ville trop242


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.surveillée par les militaires et ceux-là ont reçu l'ordre de tirer sanssommation sur tous les voyous, pilleurs et voleurs.Tout le monde prend ensuite une petite chose à manger dans lebistro quasiment désert. Même Abdubu est triste de voir si peu demonde et se rend compte qu'il vaut mieux fermer et partir avec Pénélopedès le soir venu.Le roi a, après avoir dîné chez lui, convoqué les dirigeants militaires,le préfet Assen-Ni et le chef de la police Ax-Tell dans la sallede réunion ayant déjà servi le matin pour la réunion des chefs religieux.Il a mis sur chaque place un document préparé par lui les<strong>jours</strong> précédents et y ajoute le document que Leith et son maître ontpréparé il y a quelque temps déjà. La réunion ne devrait pas prendretrès longtemps, car il doit encore rejoindre sa femme, sa fille et Leithau temple d'Ozin. <strong>Les</strong> militaires n'ont pas beaucoup de temps nonplus, même si le pays reste, contrairement au pays d’Altla, tranquille,il convient de surveiller la ville pour éviter les pillages. Car beaucoupde gens ont, à ce qui paraît, déjà rejoint leur famille vivante à la campagne,laissant ainsi leurs demeures vides. Le bureau mis en placedans l'ancienne demeure de Amilius attire moins de monde que prévu.On s'attendait à une ruée de demandes à l'exil, mais la plupartdes habitants vivant au centre-ville sont soit partie à la campagne soitne désirent pas partir. Ils se sentent, pour une raison ou une autre,plus en sécurité chez eux, chez la famille qu'en ville. <strong>Les</strong> seuls à restersont des personnes âgées, les étranges n'ayant pas de famille aupays et encore ceux dont la famille vit depuis des générations à Osuoet refusent de la quitter. C'est dans ce contexte que la réunion peutcommencer.— Soyez bienvenu, leur dit Pâris de Bel-Ra, vous savez sans lemoindre doute la raison de cette réunion. Je vous laisse consulter lesdocuments qui se trouvent devant vous et nous pouvons discuter lespoints ensuite. J'ai mis des rafraîchissements à votre disposition surce buffet-là, prenez-en. N'hésitez pas à poser des questions. Si voustrouvez qu'il vaut mieux modifier un point, dites-le moi. Personne243


Le plan d'évacuation.n'est infaillible et il se peut que j'aie oublié quelque chose d'important.— Laquelle est notre rôle, demande un membre de l'armée deterre ?— Avant tout la surveillance ! Lui dit le roi, puis continue : etéventuellement assister les gens, ainsi que la logistique. Placez lessoldats là où ils sont familiers avec le terrain et connaissent la population.Cela évitera des complications avec des badges et des laissezpasser.Rien de mieux que les gens qui se connaissent entre eux.— Qui va avoir le rôle de coordination, demande un capitaine dela marine.— J'ai nommé notre chef de la police, Ax-Tell, ici présent,comme coordinateur et commandant en chef. C'est le préfet, il l'apprendlui-même à cet instant, qui va prendre la coordination du suivide la sélection des personnes à l'exil. Cette sélection est essentiellementconduite par les chefs religieux. Ce sont eux les mieux placéspour pouvoir sélectionner des gens destinés à l'exil. Ils sont pour laplupart également volontaire pour accompagner dans leur peineceux qui ne peuvent pas partir.— Devrons-nous faire une sélection parmi nos soldats, si jamaisil y en a qui préfèrent rester au pays. Il me semble qu'il y a beaucoupqui croient que nous allons nous en sortir comme les deux cas précédents,lui demande le chef des armées de terre.— Vous êtes vous-même le mieux placé pour le savoir, lui dit leroi. Nous n'avons effectivement pas besoin d'autant de soldats dansnotre lieu d'exil. S'il y a des volontaires pour accompagner ceux quirestent, laissez-les.— Que ferons-nous de membres du mouvement des Bélials, demandeun membre de la police. Ils ne croient plus rien pour la plupart.C'est assez dramatique pour eux. Ne vaut-il pas mieux les surveiller?— Leurs dignitaires religieux ont déjà évoqué ce problème etvont mettre le maximum de leurs volontaires sur le coup, lui répondle roi. Mais gardez un oeil sur eux, on ne sait jamais.— Ne vaut-il pas mettre toutes les capacités de transport de l'arméeà disposition, demande le chef de l'armée de terre.244


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Je voulais en revenir, lui dit le roi. L'essentiel sera transportépar la compagnie des chemins de fer. Vous, l'armée de terre, vousfournissez la logistique locale et aux zones portuaires.— Sans être indiscret, demande le chef des armées, où avez-vouspu obtenir les détails figurant dans ce document ? Ce que vous prétendezn'a pas pu être calculé par nos scientifiques, vous avez doncune autre source d'informations.— Vous avez parfaitement raison, lui répond le roi, mais j'hésiteun petit peu de le relever. Il se peut, en effet, que je me couvre de ridicule.Comme vous le savez, j'ai une fille et elle et son compagnond'enfance sont rentrés en contact avec des jeunes gens, une fille etson frère, de leur âge vivant dans le lointain avenir. Leur contact aeu lieu au temple d'Ozin, où Leith, c'est comme ça qu'il s'appelle lecompagnon de ma fille, a voulu chercher contact avec la fille de sesrêves, qui savait apparemment beaucoup de choses sur notre pays etce qui va arriver. <strong>Les</strong> informations qu'il a obtenues concordent hélasavec les nôtres et c'est mon astrologue et astronome personnel quil'a validé. Je peux vous garantir que l'événement va se déroulercomme décrit dans les sept fléaux. Vous voyez que l'essentiel del'opération doit se dérouler dans les trente-six heures qui précèdentla collision, prévu pour après demain au petit matin. Nous possédonspeut-être encore quelques heures le matin même de l'événement,mais cela n'est pas une garantie.— Avez-vous pu savoir en combien de temps le pays va sombrer,demande un capitaine d'un vaisseau ?— Le récit de la gauloise, car l'amie de Leith en est une, parled'un terrible jour et une terrible nuit, ce qui laisse guère le tempspendant la journée. Pour vous donner une idée de la force de lacollision, ils, chez la gauloise donc, ont neuf <strong>jours</strong> de plus sur leurcalendrier annuel. L'impact causant cette accélération de la rotationterrestre correspond, selon mon astronome, à quarante milliards denotre bombe la plus puissante 39 .39 Comme la bombe “Little Boy”, larguée le 6 août 1945 par un B-29, Enola Gay, surHiroshima, faisant 17 000 tonnes de TNT ! <strong>Les</strong> mythes en provenance de l'Inde nousdécrivent en fait l'utilisation de telles armes de 12 000 à 15 000 ans Avant Jésus Crist.245


Le plan d'évacuation.— Mais cela détruit la terre complètement, lui dit chef de sectiondes polices. Comment a-t-il pu calculer cela ?— C'est simple, lui dit le roi, vous multipliez la masse de Arcturusavec le carré de sa vitesse et à l'aide de quelques tables de conversionvous y êtes.— La collision va avoir lieu où, demande le préfet, le sait-on ?— Non, lui répond le roi, sûrement quelque part dans l'océan Atlantique,entre la côte ouest de notre pays et la côte est du paysd’Om. Mais ne perdons pas le temps avec les théories de scientifiques,examinons le document pour voir si un d'entre vous a encoredes questions. Je possède encore une demie heure avant que jedoive partir. Je reviens au début de la soirée, si quelqu'un a encoredes choses à voir. N'hésitez surtout pas à me déranger, même pas cesoir. Il y a urgence. Monsieur Ax-Tell, pouvez-vous faire remettreun libre-conduit à mademoiselle Pénélope Axarz ? Elle en aura besoin.Le roi Pâris de Bel-Ra s'est mis en route au moyen d'un véhiculeindividuel vers le temple en compagnie de son astronome, astrologueet homme de science à tout faire, car sa femme Séléné, sa filleUssa et Leith s'y trouvent, en principe, déjà. Pâris ne s'attend pas àde grands découvertes, car il sait qu'Angélique n'a pas pu avoir beaucoupplus de renseignements utiles. Pour lui, le fait de savoir où lacomète tombe n'a guère l'importance, surtout qu'il est devenu pratiquementclair que le pays n'a, contrairement aux deux cas précédents,aucune chance de s'en sortir cette fois. Il est déjà très peinépar le fait qu'il doit laisser derrière lui le gros de ses citoyens. C'estpour lui très pénible de savoir que la capacité de transport d'à peuplus de deux cents bateaux ne représentent guère un demi pour-centde la population. En passant devant le domaine des Ajahel, la famillede Leith, qu'il se promet d'y s’arrêter sur le chemin de retour.Il compte en fait prendre un voyage de jeunes arbres et autresplantes avec lui, y compris les gens qui savent les soigner. Il sait quela famille de Leith est très pieuse et qu'ils refusent de quitter leurterre, quitte d'y mourir. Il sait que ce sera dur de convaincre246


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.quelques-uns à venir avec lui en exil. Quand il arrive au temple, lesautres se trouvent déjà dans la salle centrale, où il se trouve l'écran decommunication, et bavardent là avec ses beaux parents, les grandsparents d'Ussa. Ces <strong>derniers</strong> essayent de convaincre Ussa et Leith dene surtout pas perdre l'espoir quand tout semble être perdu, car unetrès dure épreuve les attend le lendemain.— Bonjour Pâris, disent-ils quand le roi fait son entré au saint dessaints du temple.— Bonjour tout le monde, dit-il, en grande conversation je vois.Mais je crains, que ce sera la dernière fois, n'est-ce pas.— Oui mon cher Pâris, dit son beau-père, car là où vous allez, iln'y aurait plus de temple comme ceci. Nous n'aurons plus que vosrêves pour vous parler, faites donc très attention à ce que vous rêvez.<strong>Les</strong> seules personnes à qui vous pourrez encore parler, c'est àUssa et ses amis, car son dispositif bricolé, que vous devez impérativementprendre avec vous, communiquera avec l'endroit où elle,Leith et encore une autre amie s'en vont.— C'est où, cet endroit, lui demande Séléné, êtes-vous autoriséede le communiquer ?— Non, nous ne sommes pas autorisés de le communiquer.Nous le savons, bien sûr, et nous veillerons sur notre petite chérie etses amis, mais nous ne pouvons vous communiquer que des indicationssur le chemin de la vie à suivre. C'est pour cela que nous insisteronssur le fait de ne pas perdre espoir. Un point à ne pas oublier,c'est qu'il faut impérativement confier le bagage d'Ussa à Leith,qui ne doit sous aucun prétexte le quitter. Oui Leith, mon enfant,cela te semble bizarre, surtout que ton bagage et celui d'Ussa pèselourd. Tu aurais de l'aide. Te n'en fais pas ! Tu l'as promis à Angéliquede toute façon, n'est-ce pas ?— Oui, c'est ça, lui répond Leith.— Alors, mes enfants, disent-ils, nous allons vous quitter, car jevois qu'il y a des impatients qui vous vous attendent. Alors, au-revoirmes chers, faites attention à vos rêves, nous reviendrons vousrevoir.Après que les grands parents d'Ussa disparaissent de l'écran, l'intérieurdu voilier, loué par la famille Leblanc, devient lentement247


Le plan d'évacuation.visible. La seule personne manquante est Armand, le papa d'Angéliqueet Julien, qui tient la barre en ce moment. Angélique et Juliensont penchés sur une carte de navigation et cherchent visiblementquelque chose de l'autre côté de l'atlantique. Cécile, leur mère,est comme d'habitude plongé dans sa lecture et ses mots croisés.C'est Angélique la première à entendre les quelques petits bruits derrièreelle qui lui indiquent que la famille d'Ussa et Leith ont tenu leurpromesse. Elle se retourne et dit :— Salut Pâris, salut Séléné, salut Ussa et continue en s'adressant àLeith : grosse bise mon amour. Bonjour monsieur, dit-elle à l'astrologueet astronome. Merci d'être venu nous voir.— Bonjour et grosse bise mon amour, dit Julien à Ussa, Saluttout le monde et un grand merci de ma part d'être venu nous voir.— Maman ! Tiens maman, Pâris et Séléné de Bel-Ra, leur filleUssa et Leith, dis les bonjour quand même ! Je te présente, continue-t-elleà sa maman qui, surpris, interrompe sa lecture, Séléne etPâris de Bel-Ra et leur fille Ussa, l'amour de Julien. L'autre fois tun'as pu qu'entendre leur voix, maintenant tu peux les voir. Ce garçon-là,c'est mon amour, Leith Ajahel. Par contre, l'autre monsieur,je ne le connais pas.— Bonjour, dit Cécile un peu gêné, ça me surprend comme ladernière fois, que ma fille ose vous traiter comme des copains de lycée.— Vous n'en faites pas ma chère dame, lui dit Pâris, nous aimonsbien sa spontanéité. Nous sommes ici au titre de parents d'Ussa, j'ailaissé le roi au palais, c'est là qu'il reçoit ses citoyens en audition.Laissez-moi vous présenter ce monsieur. Il est mon astrologue, astronomeet homme de science à tout faire. Je crois qu'il aimeraitbien poser quelques questions à Angélique qui semble justement étudierune carte concernant cette question.— Bonjour madame, mademoiselle, monsieur, avez-vous putrouver l'endroit que votre ami vous a demandé il y a quelques<strong>jours</strong> ?— Je crois. Est-ce que vous pouvez voir notre carte ? Ici ? Julienet moi avons trouvé un endroit susceptible à être un cratère etqui se situe par rapport à votre plus haute montagne, notre “Mont248


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Pico”, à onze degrés sud et à quarante degrés ouest. La taille approximativeest de deux cent quarante miles nautiques. Ça vous va ?Est-ce que cela correspond à ce que vous attendiez.— Hélas, oui ! Lui dit l'astrologue, nous attendions à peu prèscette valeur, vu de la taille de Arcturus. Ça va faire un trou de troismille six-cents stades au fond de l'océan, dit-il au roi, c'est énorme.Notre pays n’aura aucune chance de s’en sortir. La distance, parcontre, nous laisse à peu près vingt minutes de répit entre l’impact etles premiers tremblements chez nous.C'est en ce moment que Armand, curieux à entendre des voixqu'il ne connaît pas, entre dans l'habitacle et reste bouche-bée devantla scène qui se présente à lui.— Que se passe-t-il ici ? Demande-t-il sans s'adresser à quelqu'unen particulier.— Papa, lui dit Angélique, je te présente les amours de Julien etmoi : Ussa de Bel-Ra et Leith Ajahel, et puis les parents d'Ussa, leroi Pâris de Bel-Ra et sa femme Séléné, l'autre homme est un savant,un astronome et physicien. Tu n'as pu qu'entendre leur voix il y aquelques <strong>jours</strong>, maintenant tu vois à quoi qu'ils ressemblent physiquement.— Bonjour à vous, leur dit Armand.— <strong>Les</strong> zones blues là sur votre carte, dit l'homme, ils représententquoi ?— Ce sont les zones à moins de deux cents mètres, lui répondArmand. Ce sont ces zones qui ont été au-dessus le niveau de la merà votre époque.— C'est quoi un mètre, demande le roi ?— Un peu plus que trois pieds, lui répond le physicien, j'ai fait lemême réflexe quand Leith me parlait de mètres. Ce sont leurs mesures,ils ont ramené le tout en unités de dix.— Votre niveau de la mer est à peu près cent vingts mètres plusbas que le nôtre, ajoute Angélique, la mer va donc forcément monterd'autant. On croit que c'est sur une centaine d'années, mais je n'ensuis pas sûre. Tenez-en compte si vous construisez vos nouveauxcités.— Comment sais-tu ça, lui demande son père ?249


Le plan d'évacuation.— Mais, c'est simple, lui dit sa fille, tu te souviens de l'accident del'Erika ? Toutes les plages pollué par le pétrole ? Alors pour remettredu sable neuf sur la plage, ils l'ont cherché entre cent et centtrente mètres de profondeur. S'il y en a du sable de plage là en dessous,signifie automatiquement qu'il y a eu une plage et donc unecôte. La différence correspond donc à la montée des mers. Cequ'on ne sait pas, c'est en combien de temps. Ce monsieur Otto HMuck parle dans son bouquin d'une centaine d'années, mais il n'y aaucune preuve de cela. C'est une estimation raisonnable de sa part,mais c'est tout.— Tu es encore loin de chez nous, demande Ussa à Angélique ?— Non, ça va, on est là et vous êtes là, dit-elle en désignant lesendroits sur la carte de navigation.— Un jour et demi, deux tout au plus, dit Armand, on a bienavancé. On sera symboliquement chez vous à l'heure “J”, même sij'ignore comment Angélique compte faire le reste. Elle est convaincueque ce sont nous qui viendrons chercher Ussa et Leith. J'ignorecomment, mais je connais ma fille assez bien pour savoir si elle ditque quelque chose va arriver, ça arrivera à coup sûr. N'est-ce pas machérie ?Mais Angélique s'est éclipsé pour aller chercher quelque chosedans sa cabine et revient avec une carte d'identité. Avant que quelqu'una pu lui demander la raison, c'est elle qui s'adresse à Pâris et luidemande :— Eh ! Pâris, ceci s'appelle une carte d'identité. En faites unpour Leith, Ussa et Pénélope. Ils en auront besoin.— Quelle langue veux-tu qu'on y met ? Car je crains que notrelangue ne soit pas comprise par les autorités de ton pays, car c'estbien pour eux que tu veux cette carte, n'est-ce pas ?— Oui, c'est ça, lui répond Angélique, il vaut mieux avoir despapiers d'identification avec soi par ici.— D'après que j'ai pu comprendre les récits de ma fille, lui répondCécile tou<strong>jours</strong> surprise que le tutoiement est mutuel, ce sontprobablement l'hébreu, les hiéroglyphes égyptiens et le grec.— Le grec, interroge Pâris, vous voulez dire la langue des helléniquespeut-être.250


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, c'est ça, lui répond Cécile, nous disons les grecs.<strong>Les</strong> discussions deviennent ensuite, malgré les hésitations desparents d'Angélique et Julien, un peu plus familier. <strong>Les</strong> jeunes discutententre eux, pendant leurs parents échangent des informationsconcernant leurs sociétés respectives, leurs activités professionnelleset autres. L'astrologue a, surpris que l'astrologie n'est utilisée qu'entant art divinatoire, commencé à prendre de renseignements auprèsAngélique, qui a allumé son ordinateur entre temps. Leurs dialoguescontinuent ainsi jusqu'au moment qu'il est temps de quitter letemple. C'est Angélique qui leur lance un dernier au-revoir en disant:— À après-demain-matin, c'est là qu'on se verra une dernièrefois. N'oubliez pas de préparer une valise pour Ussa ! Elle ne pourraitpas le faire elle-même. Dès que vous nous voyez, venez versnous et amenez tout ce qu'elle à besoin dans sa nouvelle vie. ÀPlus !C'est sur ces mots que l'apparence d'Ussa, Leith, le couple royalet l'astrologue disparaît, laissant la place aux parois du voilier.— Eh bien ! Dit Angélique, la prochaine fois la rencontre serasûrement en chair et en os, et puis la compréhension sera probablementplus difficile.— C'est navrant, mais ce sera la dernière fois qu'Ussa verra sesparents vivants, ajoute Julien.Abdubu a bien pris soin d'afficher un panneau qu'il fermera pourune période indéterminée et qu'un pot d'adieu sera offert à tout lemonde dès le soir venu. À sa surprise et malgré le fait qu'il n'y a euque peu de clients durant l'après-midi, son estaminet commence à seremplir. Beaucoup font triste mine, car la plupart d'entre eux saventtrès bien ce qui risque arriver et le sujet du jour est évidemment lapossible collision de la comète avec la terre. Même si beaucouppensent qu'ils vont s'en sortir, ils commencent à le douter. <strong>Les</strong> journauxont bien publié une analyse des faits, mais ignorent ce qu'unpetit groupe d'initiés sait. Beaucoup d'entre eux pensent, comme lesjournaux l'affirment, que ce soit comme les deux dernières fois et251


Le plan d'évacuation.qu'il suffit de chercher les hauteurs. D'autres pensent que partir nesert à rien, car, selon eux, toute la terre sera détruite. <strong>Les</strong> commerçantsdu quartier, clients réguliers de Abdubu, sont pour la majoritévenue avec un petit cadeau et insistent à payer un tourné générale deleur part. Beaucoup de ces boutiquiers font comme Abdubu et Pénélopele font : ils ferment dès ce soir. Abdubu voit soudainementun transporteur, servant d'ordinaire au transport des chevaux, s'arrêterdevant son bistro et y descendre Pénélope. C'est ce qu'il croit entout cas.— Bonjour mesdames, bonjour messieurs, dit-elle et jette un regardcirculaire pour s'adresser à Abdubu : c'est toi Abdubu, n'est-cepas ? Ma cousine t’a bien décrit, on ne peut pas se tromper. Pourdécrire des beaux mecs, elle ne se goure jamais. Oh ! Avant que jel'oublie, je m'appelle Félicité. Je suis sa cousine et je viens te chercheraprès ce verré. Tu peux charger ton fourbi dans le transporteuret ne crains rien, je l'ai nettoyé. Elle n'est pas encore là ? Ma cousine?— Bonjour, lui dit Abdubu le regardant attentivement de la têteaux pieds et répond : Pénélope peut venir d'un moment à l'autre.Elle vient de fermer sa boutique, car je l'ai aidé à mettre ses panneauxde protection.— Je n'ai rien vu, quand je passais tout à l'heure chez elle. C'étaitfermé et elle ne répondait pas à la sonnette.— Elle est peut-être dans l'appartement de Leith, dit Abdudu, ilva aussi déménager. Je crois qu'ils ont prévu de revenir chercher sestrucs demain matin.— Oui c'est ça, lui répond Félicité. Elle veut tout mettre en sécuritéchez nous. Elle a raison, on ne sait jamais. On partage avecquatre familles un ancien bunker militaire, c'est là qu'on entreposenos matériels. Ce soir on va prendre chez toi tout ce que tu veuxprendre avec. Car j'imagine que t'en as des choses à prendre. Tu neveux quand même pas laisser tes bonnes choses ici. On risque d'enavoir cruellement besoin.Ils entendent la porte qui s'ouvre, regardent et voient Pénélopeentrer accompagné de Leith.— Salut tout le monde, dit Pénélope.252


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Salut à tous et toutes, ajoute Leith.— T'étais où, demande Félicité à Pénélope, je t'ai cherché à laboutique, mais tu n'étais plus là. On te croyait chez Leith pour rangerses affaires.— Non, lui répond-elle, je suis parti le chercher au palais. Il faitpartie de l'équipe et voulut bien venir prendre un pot avec nous.— Et Ussa, tu ne l'as pas pris avec toi, demande Abdubu àLeith ?— Non, elle serait venue si j'insistais, mais c'est peut-être tropdangereux. Il y encore des zozos appartenant au Bezlebubs dans lanature et on ne sait qu'ils sont capables. Déjà pour demain elle a insistéà venir chercher nos affaires. Moi je ne suis pas d'accord qu'ellevient, même avec la protection de la garde royale, mais elle y tient.— Tu pars où, lui demande Pénélope, est-ce que tu viens avecnous, ou pars-tu avec la famille royale. Tu es apparemment tou<strong>jours</strong>convaincu que tu vas rejoindre ta belle gauloise, n’est-ce pas?.— Oui, lui répond-il, même si j'ignore comment. Je vais sûrementrejoindre le vaisseau royal avec Ussa si le voyage ne se fait pas,je lui dois ça.— Tu as de la chance, toi. D'en plus qu'Ussa semble très entichéde son frère, n'est-ce pas ? Mais dit-moi, si ce voyage ne se fait pasou s'il y a un raté, tu t'en occuperas d'Ussa ?— Mais bien sûr. C'est d'ailleurs ce que j'ai dû promettre à Angélique,lui répond Leith.— C'est quoi cette histoire de voyage, lui demande Félicité ?C'est alors que Leith lui narre ce qu'il est arrivé. Le contact initialpar rêve interposé, puis l'entrevue dans le temple d'Ozin, jusqu'aucelui de tout à l'heure. Pénélope juge utile d'y ajouter des commentaireset de narrer son rêve où elle se réveillait en piteux état dans unhôpital ayant des appareils inconnus. Elle est sûre que ce rêve se situaitau pays de la gauloise, mais est beaucoup moins sûr que ce rêvese réalise vraiment. Ce qu'il lui enchante moins, c'est le fait que cettehospitalisation est sûrement précédée d'un accident grave. Elle espèreque ce rêve ne signifie rien, comme d'habitude. Elle garde cependanten arrière tête la description d'un bel homme, le papa d'unecopine à Angélique, faite par elle, mais se garde bien de le dire.253


Le plan d'évacuation.Pénélope et Leith vont ensuite dire, chacun de son côté, bonjour auxdifférents habitants et commerçants du quartier, qu'ils connaissentbien. Beaucoup de gens se souhaitent bonne chance et bon voyage.Il s'avère que beaucoup d'artisans figurent sur le plan d'évacuation.<strong>Les</strong> personnes âgées, par contre, ne veulent plus partir. Pour la plupartattachée à leur ville. D'autres vont rejoindre leur famille à lacampagne. Leith et Pénélope ne se sont pas aperçus que Félicité acommencé entre temps à donner un coup de main à Abdubu. C'estLeith qui remarque tout à coup que Abdubu à une aide qui ressembleà méprendre à Pénélope et dit à voix basse :— Tiens Pénélope, regarde, ta cousine a réussi à séduire Abdubu.Elle l'aide à faire le service.— T'en mieux pour les deux, répond-elle.Plus tard, quand la salle commence à se vider, Leith et Pénélopeproposent à Abdubu de l'aider à charger le transporteur. Pendantque Félicité continue de s'occuper des <strong>derniers</strong> clients, Leith et Pénélopecommencent à charger les biens de Abdudbu dans le transporteurà chevaux des Axarz. Un peu plus tard, c'est Leith qui, nevoulant pas trop tarder, car il compte rejoindre Ussa et ses parentspour passer la soirée avec eux, prend congé de Pénélope, sa cousineFélicité et Abdubu en donnant rendez-vous pour le lendemain devantla maison de Amilius.254


ULa nouvelle disparition d'Ussa.ssa et Leith se sont levés plus tôt et se trouvent seuls dans lasalle à manger. Séléné, la maman d'Ussa, est déjà partie rejoindreune association caritative qui a voulu s'occuper dans le cadredu plan d'évacuation des cas difficiles. Spécifiquement ceux qui nepeuvent pas partir. Elles, car cette association est composée presqueuniquement de femmes, se chargent du suivi de ceux qui ne croientplus rien et ont perdu confiance en leur religion, ainsi que ceux quin'appartiennent à aucune religion. Ussa est assez contente de setrouver avec son faux frère et vrai compagnon de tou<strong>jours</strong>. Ils ontprojeté d'aller chercher les affaires de Leith et ceux qui restent augrenier de la demeure de Amilius, appartenant maintenant à Leith.Ils attendent en fait l'arrivée du transporteur avec chauffeur, pour serendre ensuite accompagnés de deux gardes au bureau de Amilius.C'est Leith le premier à rompre le silence qui s'est installé pendantqu'ils prennent leur petit-déjeuner.— Je ne suis tou<strong>jours</strong> pas d'accord que tu viennes avec. C'esttrop dangereux. On ne sait jamais. Je suis d'accord avec le préfet,qui croit que tu cours un danger de rapt. Ils peuvent essayer de tecapturer pour extorquer un sauf-conduit. Tu devrais rester ici.— Mais Leith, l'homme courageux de l'autre jour, a-t-il tout àcoup peur ? On ne risque rien ! Il y a des gardes avec nous et il y ena au bureau.— Je ne sais pas, mais j'ai un étrange pressentiment. Je n'oseraiplus me présenter devant tes parents s'il t'arrive quelque chose. Jevais sûrement mettre tout en oeuvre pour te libérer, mais je t'avoueque je n'oserai plus me présenter au palais en pareil cas.— Ne me dis pas ça ! Tu n'as pas droit de faire cela. Ils ont d'autantbesoin de toi, que toi d'eux. Promets moi que tu ne fuis pas.Contacte au moins Ajax ou Pénélope si tu es dans la peine. Ils s'enoccuperont et s'occuperont de toi.255


La nouvelle disparition d'Ussa.— Prends au moins un micro-espion avec toi et met le là, dit-ilen désignant ses seins. Ça permet le repérage à Ajax. C'est commeça qu'on peut te repérer en cas de rapt. Tu ne seras sûrement pas enmesure d'appeler au moyen de ton communicateur. Cache-le aussi.— Prends-en toi-même également, on ne sait jamais. Je vais demanderla garde d'en chercher deux.Pendant qu'un membre de la garde va chercher les deux appareilsde surveillance, les deux amis descendent l'escalier jusqu'au rez-dechausséeoù ils attendent le transporteur avec chauffeur. <strong>Les</strong> deuxgardes censés les accompagner sont déjà là et ont rangé les différentesmalles de transport sur le perron du palais. Tout à coupUssa perçoit que Leith a commencé à trimballer une relatif grossevalise avec lui, qu'elle reconnaît à être le sien.— Que fais-tu avec ma valise ? Je ne pars pas encore !— Mais, dit-il, je respecte les consignes, fait aussi bien par tesgrands-parents que par Angélique. J'ignore moi-même pourquoi,mais il semble que ce soit important. Tu te ne souviens plus ce qu'ilsnous ont dit ?— Oui, bien sûr. Mais je n'ai pas compris pourquoi.La discussion ne va pas plus loin, car le transporteur est venuentre temps. Leith trouve le fait, que la garde royale ait loué un véhiculeavec chauffeur plutôt qu'utiliser un des leurs, un peu suspect,mais ne veut pas inquiéter Ussa davantage. <strong>Les</strong> malles, qui contiendrontdu matériel à être transporté plus tard au port de Amaki, ontdéjà été chargées. Ussa et Leith prennent place dans le véhicule, ainsique les deux gardes. Leith est, en descendant vers le bureau deAmilius, un peu peiné de voir tant de boutiques fermées. Passantdevant l'estaminet “<strong>Les</strong> Jardines”, Leith est envahie d'un étrange sentimentde tristesse en voyant les stores baissés et la grille de protectiondevant la porte. <strong>Les</strong> stores de l'appartement de Abdubu sont égalementbaissés, signifiant qu'il est bel et bien parti avec Pénélope etFélicité en direction du haras des Axarz. La boutique de Pénélope,qui se trouve non loin du bureau, a aussi les panneaux de protectionconfectionnés autrefois par les Macs. <strong>Les</strong> gardes ont entre tempsdéchargés les malles et veulent commencer à les charger, car il y aencore du matériel du maître à être transporté au palais et ramené256


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.plus tard au port. Leith et Ussa descendent avec leurs valises et vontd'abord dans l'appartement de Leith.— Qu'est-ce que tu veux prendre, lui demande Ussa, tesfringues ?— Oui, répond-il à elle, mais aussi ces livres-là. Ce sont mesbouquins d'étude et j'y tiens.Leith commence entre temps à remplir sa valise à lui et ajouteaussi quelques effets personnels dedans. Des souvenirs surtout.— Mais qu'est-ce que tu fous avec ses bibelots sans valeur, lui demandeUssa ?— Laisse-les moi, ils ont une grande valeur sentimentale pourmoi. Tu devrais en prendre avec aussi. On ne sait jamais. Si on vavraiment chez Angélique, ce seront les seuls souvenirs que nous aurons.Une fois terminée à charger les valises, ils descendent vers le bureaud'Amilius, où ils entrent sans soupçonner les changements quiont eu lieu entre temps. Leith, respectant la consigne de ne jamaisquitter les valises, les pose à l'entrée et ce sera la dernière chose qu'ilse souvient.Quand Leith se réveille, la première chose qu'il voit c'est Pénélopequi est penché sut lui et demande :— Mais qu'est-ce que tu fous là à dormir devant la porte du bureaude Amilius. À propos, où sont-ils, les gardes ? Je ne les voispas !Leith, qui a la tête lourde, ne répond pas. Il regarde tristementautour de lui et commence à pleurer. Pénélope, peiné de voir ungrand garçon, presque un homme, pleurer ainsi, se met à côté de lui,met son bras sur son épaule et cherche à le consoler.— Ne pleures pas mon gars. Je devine, ils ont capturé Ussa,n'est-ce pas. Tu te sens terriblement coupable, n'est-ce pas. Je parieque c'est Ussa qui voulait absolument venir avec. J'en suis sûr que tuas essayé de l'en dissuader. Mais attends, je vais appeler tout de suiteAjax. Il sait peut-être où ils vont avec elle.257


La nouvelle disparition d'Ussa.Elle monte dans l'ancienne boutique de Amilius et constate queles gardes royales présentes ont tout été neutralisées au moyen duchloroforme. L'odeur y est encore assez forte qu'elle doit sortir desuite pour ne pas sombrer aussi. Elle décide de prendre Leith avecelle et lui demande :— Ce sont ces valises que tu dois prendre avec toi ?— Oui, dit-il avec une petite voix.— Alors, aide-moi à charger ton fourbi de ton appartement et lemien. Ça tombe bien que j'aie un homme pour m'aider. C'est aprèsqu'on part chez nous au haras. Tu pourrais passer la dernière journéeavec notre famille et la tienne. On a décidé de la passer ensemble.C'est sûr, hé. Tu viens avec nous ? Non ?— Je ne sais pas, j'ai dû promettre à Ussa d'aller avec sa famille.Elle est persuadée qu'ils auront besoin de moi, si lui arrive quelquechose de terrible.— Tu sais Leith, on verra ça demain matin. On les contacte ets'ils y tiennent on va te transborder au vaisseau royal. En attendant,tu viens avec nous passer une dernière journée avec ma famille et latienne. Tu les dois ça aussi. Ussa a beau te prendre pour son demifrère,mais toi, tu as encore une famille qui t'aime. Tu as tes parents,tes grands-parents et tous tes neveux, nièces, cousins et cousines.On va faire une fête d'adieu et après on se rend au bateau à cheval enpassant à travers champs. Il vaut mieux, car tu verras, toutes lesroutes seront bloquées dès l'après-midi. Tu sais, je me suis déjà levétrès tôt ce matin, car je viens du port où j'ai chargé notre bateau.Tes valises et celles d’Ussa, on les prend avec nous dès minuit. C'està minuit qu'on va en direction du port. On prend un ou deux chevauxavec pour porter les bagages. Ensuite les animaux rentronttout seuls, ils connaissent le chemin. Alors, tu viens m'aider ? Viensmon garçon, ne regardes pas tes pieds, regarde le ciel. Où il y a de lavie, il y a de l'espoir.— Oui, dit-il encore avec une petite voix, il faut que je m'y fais.Je l'ai promis.— Mais, qu'est-ce que tu as foutu avec ces valises ? Ellessemblent lourdes, mais ne le sont pas.258


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oh ! Elles contiennent que des vêtements et quelques bibelots.Puis, j'ai reparti les livres les plus lourds sur les trois valises detelle sorte qu'elles flottent une fois tombée à l'eau. C'est ce qu'Angéliquenous a demandé, t'en souviens ?— Ah oui, j'aurai presque oublié. Je m'en souviens maintenant.Mais, demande-t-elle, ce n'était pas la voyante qui disait ça ? Tu sais,comment s'appelle-t-elle déjà. Quelque chose avec Mo.. ou ..ique..— Monique, lui dit Leith, c'était quand on était chez toi augrenier. Elle travaille avec une boule de cristal, comme celle qu'a bricoléUssa.— Bon, tu viens maintenant, j'ai besoin les bras forts d'unhomme !Ils mettent quand même du temps pour tout charger de l'appartementde Leith, car il a pu cumuler, malgré qu'il n'ait eu qu'un appartementmeublé, un tas de choses pendant les années qu'il y habitait.Ils montent ensuite à l'appartement de Pénélope où ils déménagentses objets qui lui tiennent à coeur, ces vêtements, quelques livres et,pour ne surtout pas les oublier, ses échantillons des herbes, de terreet autres nécessaire pour son travail. Elle les met dans une valisespécialement conçue à cet usage, mais, comme elle le dit, cette valisene flotte pas. C'est après avoir pris ces principaux outils de travail,qu'elle a mis également dans une valise, qu'ils se mettent en routevers le domaine des Axarz, où toute la famille de Pénélope et Leithles attendent déjà. C'est sa mère qui le salut en premier :— Bonjour mon garçon, merci d'être venu passer la dernièrejournée avec nous. Nous craignions déjà que tu ailles la passer aupalais royal avec Ussa. Où est-elle en fait ? Tu ne l'as pas emmenéavec toi ?En voyant que Leith a de nouveau des larmes aux yeux, elle sedoute qu'il s'est passé quelque chose de grave. C'est Pénélope, finissanttout juste une conversation avec Ajax, qui répond à sa place :— Hélas Hélène, on vient de la ville et c'est là que j'ai trouvéLeith inconscient sur le pas de porte du bureau du Maître Amilius.Il était venu là avec Ussa pour récupérer leurs affaires et je n'ai trouvéque Leith. <strong>Les</strong> gardes ont été neutralisées. Je viens de parler ànotre détective, il va s'en charger. Il informera également le roi.259


La nouvelle disparition d'Ussa.— Alors, tu passes le dernier jour avec nous, lui demande sonpère. C'est sympa mon garçon. Mais ? Dit-moi ! Ce voyage, tu ycrois tou<strong>jours</strong> ? Tu comptes tou<strong>jours</strong> rejoindre ta gauloise ?— Oui, lui répond Leith, ce sont trois personnes différentes quim'ont affirmé que ce voyage se fera.— J'espère pour toi mon garçon, lui dit sa mère. Tu trouverassûrement une meilleure condition de vie que ceux qui tenteront deconstruire une nouvelle société sur le continent.— Qui sait, dit Félicité, elle est peut-être une lointaine descendantede nous, car c'est bien par là qu'on y va. Abdubu m'a tout expliqué,tenté en tout cas, car je ne me connais pas en navigation. Parcontre, ce qu'il ne comprend pas, c'est que l'endroit que tu as décritexiste, tu sais, les falaises de la Gaule tout près d'une grande rivière.Le hic, c'est qu'il est à quatre cents miles nautiques à l'intérieur desterres. D'en plus tu as bien dit qu'elle fait de la natation et de la voilesur une sorte de planche au bord de la mer là où elle habite.— Ce n'est peut-être pas aussi compliqué, lui dit Ilos, le père deLeith, le climat se chauffe rapidement et dans une centaine d'annéesle niveau de la mer augmentera de trois cents à quatre cents pieds. Ilne fallait pas tout foutre en air, comme l'on a fait ce dernier demisiècle.Il fallait continuer à vivre en harmonie avec la nature, la respecteret ce réchauffement ne sera pas arrivé.<strong>Les</strong> familles commencent alors à organiser leur petite fête d'adieu,car, à ce qu'il paraît, il y a aussi des membres de la famille à Leith quijoindront les vaisseaux d'évacuation. Ils ont d'ailleurs déjà fait plusieursvoyages de jeunes arbres prêts à planter. Ils attendent maintenantqu'on vient les chercher. Ils partent, si tout se déroule tel queprévu, avec un convoi de l'armée entre minuit et une heure du matin.Ce sont les membres de la famille à Pénélope, les Axarz, qui partenten même temps, mais à cheval et en travers champs. Jusqu'à là, lesdeux familles fêtent le départ de leurs enfants et il y a même certainsvoisins qui sont venus leur dire bonne chance. <strong>Les</strong> membres desdeux familles qui ne partent pas affirment de vouloir finir leurs viesen prière au temple d'Ozin.260


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Pâris de Bel-Ra a, contrairement à ce qu'on aurait pu croire, beaucoupde travail avec le plan d'évacuation. Assen-Ni, le préfet, et Ax-Tell, le chef de la police, font ce qu'ils peuvent, mais le rôle centralreste quand même lui. C'est vers la deuxième moité de la matinéequ'il regarde l'heure et s'étonne de ne pas avoir vu rentrer sa fille etLeith accompagnés de leurs deux gardes. Il tente de les appeler auxcommunicateurs, mais ces <strong>derniers</strong> semblent être éteint. Inquiet, ilappelle ses gardes et décide de se rendre à l'endroit où elle et soncompagnon se sont rendus. En attendant le venu de son véhiculepersonnel, il fait vite un tour dans les appartements, juste pour voirsi les deux jeunes sont rentrés sans qu'il ait remarqué. Ce qu'il n'estpas le cas. Soudainement un étrange pressentiment lui prend et ilcraint non seulement pour sa fille, mais surtout pour la pauvre Sélénéqui s'est à peine remis de la précédente épreuve. Il décide doncd'aller voir son médecin et lui informer qu'il doit se préparer à unsuivi psychologique. En descendant la rue avec son véhicule, il regardele spectacle désolant et peu enviable de la vieille ville où il y anormalement de l'animation avec ses petits commerces. Plus dedeux tiers des stores sont baissés. Il voit que même le petit café oùLeith avait ses habitudes n'est plus ouvert, ainsi que la boutique del'esthéticienne. Arrivé devant l'ancien bureau du maître, il constatequ'il y a quelque chose d'anormal. Le transporteur, loué ce matinpar la garde royale, n'est plus là. Il voit à l'intérieur quatre gardes allongéspar terre, dont certains ont des ecchymoses sur la tête etailleurs. Il demande à ses gardes, car sortie du bureau en se sentantbizarre, d'appeler immédiatement les services de santé et de la policescientifique. <strong>Les</strong> malles censées être remplies, ne le sont qu'à moitéet tou<strong>jours</strong> là. <strong>Les</strong> valises à Ussa sont comme elle et Leith ; disparus.Ce qu'il craint surtout, c'est que les ravisseurs ignorent combien detemps qu’il leur reste jusqu'à la catastrophe. Il sait très bien, qu'ilsveulent extorquer un sauf-conduit et que l'armée est très bien capablede libérer sa fille. Mais le facteur temps joue contre eux etc'est cela qu'il craint le plus. Il espère que les deux jeunes nepaniquent pas et ne se laissent pas faire. En attendant le venu desservices de santé et la police, il commence, aidé par les gardes, deservir les gens venus présenter leurs dossiers pour le plan d'évacua-261


La nouvelle disparition d'Ussa.tion. C'est là qu'il se rend compte du désarroi de ses citoyens. Beaucoups'interrogent sur pourquoi et se sentent être lâché par Ra. Puisil y a ceux qui accusent les Sanieds d'avoir modifié la trajectoire deArcturus et cela pour se venger de la guerre menée par la fédération.Pour le roi, cependant, cet argument ne tient pas debout, car il fallaitmodifier la trajectoire il y a cent trois ans. Or, à cette époque la fédérationavait de bonnes relations avec eux. La guerre date depuis laprise de pouvoir par Ra-Ta et son ambition de vouloir contrôler lemonde entier ; militairement et économiquement. C'est pendantqu'il sert ses citoyens, qu'il reçoit une communication de son détectivepréféré ; Ajax.— Bonjour votre excellence, je crains avoir une mauvaise et unebonne nouvelle pour vous.— Dit-moi d'abord la mauvaise, je crois le deviner.— En effet, sire. Il s'agit d'Ussa, elle a été capturée et se trouveen ce moment non loin du temple d'Ozin.— Comment le savez-vous ?— Elle a pris, par précaution, un micro-espion sur elle et c'est luiqui nous a indiqué l'endroit. Mais nous ne pouvons intervenir quesoirée venue. C'est un endroit isolé et trop voyant pendant la journée.Ce ne sont que les moines du temple qui l'ont pu visiter. <strong>Les</strong>ravisseurs ignorent qu'ils travaillent pour nous.— Et Leith, son compagnon, il est où, lui ?— Il est en état de choc chez sa famille et celle de Pénélope, l'esthéticienne.Il se fait beaucoup de soucis. Il a de la peine pour vouset se fait pleins de reproches. Je vais le visiter un peu plus tard. Il aprévu de passer une dernière soirée avec sa parenté et celle desAxarz. Ils vont ensuite rejoindre leur bateau. Ils conduisent Leith, sipossible à votre vaisseau, avant de partir vers le nord.— Vous croyez qu'on, ma femme et moi donc, doit les faire unevisite ? Je crois qu'on doit ça à Leith. Ça me fait du baume au coeurqu'il se soucie de notre peine à cause d'Ussa et il n'y a aucun reprocheà se faire. Il est son ami et non pas garde de corps.— Sûrement ! Il a lui-même besoin de votre soutien sire, c'estmutuellement.— À tout à l'heure devant le haras des Axarz.262


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— À tout à l'heure sire.Pâris se souvient soudainement de ce qu'Angélique lui a demandéla veille. Il décide d'envoyer un membre de la garde au palais avec lamission de s'en occuper. Il pourra ainsi remettre ces pièces d'identificationà Leith et Pénélope, ainsi une pour leur fille. Il se souvienten effet, qu'il fallait remettre tout ce qui est important pour Ussa àLeith, même s'il ne comprend pas la raison. Ce n'est pas seulementAngélique qui a insisté sur ce fait, mais aussi ces beaux-parents. <strong>Les</strong>ervice de santé, venu entre temps, a commencé à ventiler les locauxet à transporter les victimes de l'agression à infirmerie du palais. Iln'attend que la relève des gardes qui continuent de prendre en chargeles gens venus avec leurs dossiers. Après, il doit aller au palais pourcommencer une très dure tâche : informer sa femme Séléné. Il espèrequ'elle sera courageuse, ne perd, comme ses parents le lui ontsuggéré, pas l'espoir et que tout ira bien en dépit des apparences.Ajax a, comme il a promis à Pénélope, rejoint sa famille au haras.Ce n'a pas été simple pour lui de trouver l'endroit. Il s'est trompéplusieurs fois, malgré les explications détaillées de Pénélope et lamention du domaine des Ajahel. Quand il entre au domaine desAxarz, rien ne laisse présager qu'ici les gens se préparent à l'exode.Même si Arcturus n'est qu'une toute petite étoile visible à l'oeil nu,nul se pourra, si on ne le sait pas, se douter que ce petit point dans leciel, s'avère être une étoile tueuse qui a fixé son rendez-vous pour lelendemain tôt le matin. Ajax regarde autour de lui et voit les différentsboxes où on continue de s'occuper des chevaux comme sirien n'était. Il cherche en fait l'endroit où la réunion a lieu, car Pénélopelui a bien dit qu'il y a beaucoup de monde. C'est quand ilveut s'adresser à une des personnes qui soigne un cheval dans sonbox en ce moment-là, que Pénélope vient à son encontre et lui dit :— Salut mon pot, tu as pu nous trouver ?— Alors, tes explications ! Je me suis gouré plusieurs fois. J'aidû demander à des personnes et ils m'ont envoyé en arrière. J'étaisbeaucoup trop loin. Tu n'habites pas si loin de la ville.263


La nouvelle disparition d'Ussa.— Mais toi alors, il n'y avait pas plus simple. On est ici sur laroute principale en direction de Ozin et il suffit de s'arrêter justeavant le domaine arboricole des Ajahel, ce sont les seuls à tailler lesarbres ainsi. Mais viens, ce n'est pas grave. Tu as pu trouver et c'estça le principal. Viens conforter Leith. Le pauvre se fait des reprochesinimaginables. Je suis sûr que tu arrives à libérer Ussa,n'est-ce pas ?— Oui, c'est bien pour ça que je suis venu. Je compte y aller dèsque le soir commence à tomber. Tu sais, l'endroit où elle est, est assezbien dégagé et facile à surveiller. Seul les moines du temple ontpu y entrer sans être suspects. Ils ont pu parler à Ussa et heureusementqu'elle parle l'égyptien. De sorte ils l'ont pu suggérer d'attendrequ'il commence à faire nuit avant d'essayer à s'évader. Cet ancienmonastère a, elle le sait, une sortie secrète. Mais elle ne pourraitpas tenter de sortir avant la nuit, sinon elle se fera repérer. La policeet l'armée sont dans les environs et dès qu'elle est sortie et en sécurité,l'ordre d'assaut sera fait. Je te garantis qu'il y aura quelquesvoyages d'un simple-cours vers le royaume de Ra. On sait égalementqu'ils ont substitué le chauffeur du transporteur que la garde avaitloué ce matin. Le véhicule a été d'ailleurs déclaré volé.— <strong>Les</strong> types qui logent au “Bel Horizon”, qu'en fait-on ?— Bon, un est mort et l'autre on vient de l'arrêter avec ses lieutenants.On les a mis au frais pour une période indéterminée, si tuvois ce que je veux dire.Ils viennent entre temps à l'endroit ou la fête se déroule. C'estune grange qui a été nettoyée et aménagé pour l'occasion. Quand ilsentrent par les grandes portes, Ajax voit Leith en compagnie de deuxpersonnes qui sont visiblement ses parents, car la ressemblance estfrappante. Il va vers eux et s'assoit à côté de sa mère sur le banc etse présente. <strong>Les</strong> parents de Leith se présentent à leur tour et déclarentêtre peiné par ce qu'il est arrivé à Ussa. Ils sont, contrairementà leur fils, plus optimiste et croient à une issue favorable, ceque confirme Ajax. Il continue à bavarder un moment avec Leith etses parents, qu'une excitation soudaine se répand parmi les personnesprésentes et pour cause. Dehors viennent s'arrêter deux véhiculesde transport et d'un sort le roi lui-même. Il se dirige d'abord264


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.vers la maison d'habitation, mais voit que Pénélope vient à sa rencontrequi le salut :— Bonjour votre excellence, soyez bienvenue. Votre épousen'est pas venue avec vous ?— Bonjour ma chère, répond-il, la voilà.— Bonjour Pénélope, lui dit elle, comment allez-vous ?— Moi ça va, c'est Leith qui ne va pas bien. Il se fait en sangd'encre. Il n'a même pas osé vous contacter. Il se sent coupable etresponsable de ce qu'il est arrivé.Ils se dirigent silencieusement en direction de la grange où lesconvives se trouvent. Une fois entrée, le roi et sa femme saluenttout le monde présent et vont vers l'endroit où il se trouve Leith etses parents. Il fait signe à Pénélope de les rejoindre et sort de sa sacochetrois documents plastifiés comme Angélique l'a demandé. Illeur dit :— Voilà les documents indispensables pour rejoindre vosamours. Ma chère Pénélope, ne vous étonnez pas, vous en aurez besoin.Même si j'ignore, comme vous, de la manière dont vous deuxallez rejoindre, accompagné de ma fille, le royaume où vit Angélique,ces documents vous y seront indispensables. Cette exemplaire estcelle d'Ussa et doit lui être remis par Leith. Ne me demandez paspourquoi, tout ce que je sais, c'est que cela apparaisse très importantaux yeux d'Angélique et de mes beaux-parents qui ne sont, commeles miens, plus de ce monde comme vous le savez.— Mais, lui répond Pénélope, je n'ai pas la moindre intention deles suivre, même si je meurs d'envie.— Hélas ma chère, j'ai une information confidentielle, fourni parmes beaux-parents, que vous y allez également.— Oh ! Ce sera mon rêve qui se réalise, demande-t-elle ?Ce qu'elle ne voit pas, c'est que Leith change la couleur de son visageet devient tout blanc, car lui, il se rappelle trop bien ce qu'Ussaleur avait narré la veille et se doute d'un accident grave. C'est Sélénéqui sauve la situation :— Mais tu trouverais sûrement un bel homme là-bas. Si Ra t'envoielà-bas, c'est que quelqu'un t'attend. Je suis sûre que tu vas rencontrerquelqu'un, comme Leith et Ussa l'ont fait.265


La nouvelle disparition d'Ussa.Pénélope voit que certains de ses voisins sont partis avec lesgardes venues avec le deuxième véhicule et demande :— Vous cherchez encore des choses ?— Oui, lui dit Pâris, on a voulu prendre des semences en sacsétanches. J'ai donné l'ordre aux gardes de faire le tour des paysans etd'en prendre le maximum. <strong>Les</strong> semences ne seront plus d'aucuneutilité ici et les gens le savent bien. J'ignore comment et combien detemps qu'on doit tenir, mais je prends la précaution d'en prendre lemaximum avec. On risque avoir plusieurs années très très très difficilesà vivre. Tout sera à recommencer. Je me doute même si notredescendance soit en mesure de transmettre notre savoir et notre sagesseà leurs enfants.C'est après que le roi va s'entretenir un peu partout et avec tout lemonde avant de revenir à table avec les parents de Leith. Il se félicitequ'il n'y a pas trop de problèmes dans son pays, comme c'est lecas dans l'état voisin, Alta. Là il y a des échauffourées un peu partoutet la capitale a été, d'après ses informations, complètement misen sac par des pilleurs. Il a un petit pincé au coeur pour ce princebrave qui fait, envoyé là-bas, ce qu'il peut depuis Ra-Ta a mis lestubes. La preuve ; on a plus d'émissions en provenance de Poseidiaau Bioscope. <strong>Les</strong> émissions de quatre autres sur les dix états ontcessé aussi depuis quelques <strong>jours</strong> déjà. C'est après avoir discuté unmoment, qu'ils se perçoivent que Ajax a disparu. C'est Pénélope quiexclame :— Ça alors, Ajax s'en va sans dire au-revoir.— Mais non ma belle, lui dit Ajax, qu'est-ce que tu crois. J'étaisdehors avec Félicité et Abdubu pour voir par où on doit se rendre.Je ne suis pas sûr que je puisse venir avec toi. Je vais donc rejoindreJason avec son yacht et on se met, je sais que c'est très risqué, au milieudu lac et on attend là que le pays sombre. Il suffit de partiraprès.— C'est ça, lui dit le roi, j'ai fait circuler un document allant dansce sens. J'ai invité tous ceux qui ont un bateau de faire cela et devenir rejoindre notre armada après. On aura ensuite à peine unejournée pour se protéger contre le gros temps. Selon mon homme266


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.de science attitré, on va avoir une quantité de pluie millénaire pendantune à deux semaines seulement.— C'est aussi grave que cela, lui demande Hélène, c'est inimaginable.Il ne restera rien que de la boue après.— Hélas oui, chère dame, lui dit Pâris, c'est pour cela qu'onprend des jeunes arbres prêts à planter et des semences avec.— Alors, dit-elle, les sept fléaux n'ont pas menti.— Non maman, lui dit Leith, c'est bien ça. D'ailleurs, Angéliquele confirme. Tous ces récits en parlent. Elle nous a dit qu'il faudraéviter le bassin méditerranéen et aller plus au nord ou plus au sud.— Ou en Égypte comme les hébreux l'ont fait, ajoute Séléné.— Alors, lui dit Pâris, s'ils attendent là leur guide, ils risquent devoirattendre longtemps.— Comment ça, lui dit Ilos qui avait écouté silencieusement laconversation, ils attendent bien le venu prochain d'un guide qui vales guider vers les terres promises, non ?— Je crois, lui répond Leith à la place de Pâris, qu'ils doivent attendrehuit mille cinq cents ans.— Comment ça, dit son père, comment sais-tu ça ?— C'est Angélique qui m'a parlé de ça. Je lui ai narré le récit deshébreux et elle a pu mettre un nom dessus. Il s'appelle, selon elle,Moïse et naîtra mille trois cents ans avant son ère. Puisque noussommes grosso-modo à neuf mille huit cents ans avant son ère,faites alors la différence.— Alors, dit Ajax à Pénélope et Leith, je m'en vais et je ne suispas sûr si je vous reverrai. Je vous souhaite une bonne chance etbon voyage.<strong>Les</strong> amis se font de longues accolades et ont des larmes aux yeuxpendant qu'ils se saluent et l'accompagnent jusqu'à la sortie. Le roi,lui aussi, doit partir accompagné de sa femme et fait le salut à tout lemonde. Il dit un dernier mot à Leith et Pénélope :— Si vous n'allez pas partir avec Angélique, assurez-moi quevous allez me rejoindre au vaisseau, n'est-ce pas. Je suis sûr qu'Ussasera libérée d'ici demain. Ne t'inquiète pas Leith, ce n'est pas tafaute. Tu as bien essayé de lui convaincre de ne pas venir. Alors,fais-moi plaisir et viens nous rejoindre. Pénélope, tu t'en occupes267


La nouvelle disparition d'Ussa.n'est-ce pas. Tu viens avec ton bateau vers le mien et on transbordetoi et Leith, ainsi vos bagages et ceux d'Ussa. Allez, à demain.— À demain Pâris disent-ils en choeur.Ils accompagnent le couple royal jusqu'à leur véhicule où ils lessaluent longuement en les voir partir en direction d'Osuo. Tout lemonde entre ensuite d'un coeur lourd, car ils savent qu'ils ne se verrontpeut-être plus jamais de cette vie 40 . Ils comptent profiter encoreles quelques moments qu'ils peuvent rester ensemble, avant queles partants se mettent en route pour le port et les autres pour letemple d'Ozin où ils veulent finir leurs vies en prière.40 Une partie des habitants de l'Atlantide, les “Loi d'Une”, croyaient à la ré-incarnation !268


La dernière soirée.Ussa a la tête lourde. Elle pense que ça vient du produit aveclequel ils l'ont endormi. Si on peut l'appeler endormir, c'estplutôt assommer. Ussa ne se souvient pas du tout comment c'est arrivé.Elle se souvient seulement qu'elle est entrée avec Leith dans lebureau de Amilius, mais c'est tout. Quand elle s’est réveillée, elle setrouvait déjà dans cette petite pièce en entre-sol du monastère. Ellea reçu un peu plus tard la visite de deux prêtres du temple d'Ozin.Ces deux prêtres, revenus la visiter il y a juste un moment avec leprétexte d’apporter quelque chose à boire et manger, l'ont promis derester en discussion avec les ravisseurs pour faire diversion, de tellequ'elle pourrait ouvrir la serrure. Ils l'ont indiqué où se trouve latrappe et quel chemin qu’elle doit prendre une fois dans les soussols.Elle voit que la nuit est tombée entre temps et elle est auxaguets. Elle scrute le moindre bruit en provenance des pièces aurez-de-chausse. Heureusement que les cellules de l'ancien monastèreà l'entre-sol sont tou<strong>jours</strong> munies des serrures du même ancien typeque la plupart au palais. Elle les connaît par coeur. Puisqu'elle n'entendplus de bruit venant d'en haut, elle se met au travail. Elle sefélicite que ses épingles à cheveux sont des modèles solides etconviennent parfaitement pour la délicate tâche qu'elle entreprend.« Merde, » se dit-elle, « ils ont laissé la clef dans la serrure. » Elle tourne laclef délicatement en position verticale et la pousse légèrement dehorsla serrure, sans la faire tomber qui pourrait alerter les ravisseurs.« Alors, » se dit-elle « si je lève ce loquet, je pourrais libérer celui en dessous. »Après quelques tentatives infructueuses, à cause d'une serrure un peurouillée, elle parvient à libérer le mécanisme de verrouillage. Après,il lui faut la force des deux épingles pour pousser le loquet dehorsl'assise. Une fois dehors la cellule elle écoute attentivement pour savoirs'il y a danger, mais l'ensemble des ravisseurs semblent dormir.Elle est sûre que les prêtres, qui ont emmené du vin et de la nourriture,y ont mis quelque chose pour les faire dormir un peu. Mainte-269


La dernière soirée.nant elle cherche la trappe, caché dans un placard, comme à la bibliothèqueet chez Pénélope. Le mécanisme semble fonctionner dela même manière. Tout à coup, elle revint sur ses pas et ferme laporte de sa cellule à clef, car elle se dit : « C'est ainsi comme une disparitionmiraculeuse. » En revenant sur le lieu, elle croyait que son coeurallait s'arrêter. Elle entendait un bruit. « Merde, » se dit-elle pour ellemême,« je me suis fait piéger ! » Mais au moment même qu'elle lepensait, elle doit se retenir de toutes ses forces pour pas crier fort,car elle vient de croiser un gros rat. Elle reste là, collé au mur avecun visage virant de rouge au pourpre, ayant de plus en plus de malde se retenir pour ne pas hurler, en attendant que cette bestioleveuille bien continuer son chemin. Mais sa peine ne s’arrête pas là.C’est surtout quand il a eu la mauvaise idée de venir renifler seschaussures. Qui est cependant sûr, c’est qu’elle sait maintenant d’oùvenait cette odeur de vêtements mal lavés. Quand ce gros rat,presque aussi grand qu’un chat, se décide enfin de poursuivre sonchemin, elle se dit : « Ouf ! » Arrivé finalement de nouveau sur le lieuoù se trouve la trappe, elle actionne le mécanisme et libère l'entréedu couloir en sous-sol. Une fois la trappe refermée, faisant quandmême assez de bruit, elle se trouve dans le noir complet. Non seulementelle se sent mal à l'aise, mais a, depuis qu'elle était enfant, unepeur insensé de se trouver dans le noir. Elle se rend maintenantcompte le courage que démontrent Angélique et Leith. Elle se dit :« S'ils n'auront pas peur, pourquoi moi ? » Elle commence alors à suivrela paroi droite, comme les religieux lui l'ont dit. Elle sait qu'elle n'apas droit à l'erreur, c'est la deuxième à droite. Ensuite il faut suivrela paroi gauche et derrière la troisième porte se trouve un escalier quifinit derrière l'autel d'une chapelle dédiée à Zeus. Mais pourl'instant, elle n'est pas encore là. Le couloir semble interminable jusqu'aupremier couloir partant à droite. Elle se dit : « Ceci était le premier,je dois prendre le suivant. » Elle a l'impression que le couloir, quin'est pas aussi salle, humide et puant que l'autre, celui qu'ils avaientpris en fuyant la bibliothèque en flammes, tourne légèrement àdroite. Elle perd à nouveau contact avec la paroi droite et sait qu'elledoit entrer dans ce couloir. Elle suit, comme les hommes de foil'ont dit, la paroi gauche, jusqu'à la troisième porte. Elle ouvre la270


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.porte et sent l'air frais qui vient à sa rencontre. Au-dessus d'elle il y aune autre trappe, elle l'ouvre. Elle se trouve, comme ils l'ont indiqué,derrière l'autel d'une petite chapelle ouverte aux quatre vents.Elle voit, en sortant de la chapelle, qu'elle se trouve sur la routeprincipale qui va du temple à la gare. Il y a, par contre, un bout dechemin à courir jusqu'aux premières maisons et jusqu'à là, elle risqueêtre vu par ses ravisseurs. Elle commence à courir pour autantqu'elle peut. Elle regrette maintenant de ne pas avoir fait ce qu'Angéliquea visiblement fait : maintenir une activité physique pour garderla forme. Ussa a bien du mal à avancer. Soudainement elle perçoitun véhicule, qui vient de lui dépasser, revenir sur elle et s'arrêterà côté d'elle. Elle dit pour elle-même : « Merde, ils sont revenus et il n'ya aucun endroit pour me cacher ! »Ajax se félicite que les véhicules sont équipés de la navigation automatique.C'est ce que ne lui permet pas seulement de saluer longuementles convives de la réunion chez les Axarz, mais aussi de sereposer de l'effet que des cafés accompagnés de cette excellente eaude-vievieillie des Ajahel l'ont fait, car il n'est pas resté à la fête sansrien manger ni boire. Une fois en route il sort son appareil de détectionpour voir si Ussa est tou<strong>jours</strong> au même endroit, ce qui n'est plusle cas. Son appareil lui indique un signal très faible, signifiant qu'elleest dans les couloirs du sous-sol. Mais avant d'aller appeler Ax-Tell,il décide d'aller voir la gare de Ozin pour réserver une cabine pourUssa et de leur dire d'y mettre la lecture et de la nourriture, ainsi quequelques boissons. Il essaye à plusieurs reprises de contacter le roisur son communicateur, mais ce dernier ne répond pas, et pourcause, car tou<strong>jours</strong> occupé. Il ne veut, cependant, pas laisser unmessage au standard du palais, on ne sait jamais. Cette affaire derapt et l'éventuelle libération d'Ussa doit impérativement rester secret.Il essaye entre temps de rejoindre Ussa au communicateur,mais l'appareil affiche bien qu'elle n'est plus au monastère, maisl'appareil semble tou<strong>jours</strong> en position “stand-by”. Tout ce qu'ilindique, c'est qu'elle n'est pas loin de l'endroit où Ajax se trouve àl'instant. Le signal du micro-espion reste faible, mais se déplace.271


La dernière soirée.Ajax à beau à chercher, il ne voit rien. Il se rend donc d'abord à lagare de Ozin pour y effectuer les démarches nécessaires pour la réservationde la cabine pour Ussa. Il retourne ensuite en direction dusignal, mais tou<strong>jours</strong> sans résultat. Il voit bien une petite chapelle aubord de la route et au milieu de nulle part, mais le signal reste faible,même si l'appareil lui indique un point au milieu des champs. Il regardela distance entre ce point et le monastère et constate que lafille du roi avance rapidement. Tout à coup il voit qu'elle change ladirection. Elle a pris un angle droit, qui semble aller en direction decette petite chapelle. Il doit, par contre, faire le tour des champspour rejoindre la route principale et c'est une fois sur la route qu'ilvient de croiser Ussa qui court comme si elle est poursuivie parlions. Il fait demi-tour et s'arrête à côté d'elle, sort du véhicule etl'appelle :— Mademoiselle, Mademoiselle ! Arrêtez-vous, ne craignez rienet montez !Il doit l'appeler plusieurs fois, car elle semble être affolé, mortede peur. C'est alors qu'elle reconnaît le détective qui avait déjà travaillépour son père.— Bonsoir à vous, dit-elle, et merci d'être venu.Elle monte dans son véhicule et ils vont ensemble à la gare, où letrain pour la ville portuaire Amaki l'attend. Là, elle à tout le tempss'installer, car le train n'est pas prêt à partir. De nombreuses gensavec bagages doivent encore être embarqués. Dès que le train s'estmis en branle, il salue bien la princesse et le souhait bon voyage etbonne chance, car il est presque certain qu'ils ne se verront plusjamais. Le voyage lui-même se déroulera telle qu'Angélique l'ait rêvéil y a dix <strong>jours</strong>, qui s'est d'ailleurs bien gardé de lui le dire. C'estquand Ajax est remonté dans son véhicule, qu'il prend une communicationavec Ax-Tell.— Bonjour mon cher, comment allez-vous à cette heure tardive ?— Comme vous, je travaille, mais je ne pense pas que vous m'appelezpour un petit bavardage, n'est-ce pas ?— Non, en effet. J'aimerais vous signaler qu'Ussa vient de partiravec le train en direction du port de Amaki. Je constate que le trainà malheureusement beaucoup de retard. J'aurais aimé lui conduire272


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.au port moi-même, mais je sais que les routes sont impraticables parlà.— Vous aurez pu la conduire chez la famille de cette Pénélope,les Axarz, je crois qu'ils vont à leur bateau à cheval en traversant leschamps.— J'y avais pensé, mais le temps que je mets pour y aller, lesAxarz seront déjà partis depuis une heure.— J'espère que le train arrivera à l'heure au quai, c'est-à-dire avantque les premiers tremblements commencent. Sinon il risque un déraillementet ce n'est pas cela qu'on a besoin.— <strong>Les</strong> zozos, lui dit Ajax, que fait-on d'eux ?— Je donne ordre d'assaut à l'armée, ils ne risquent pas de partiravec le plan d'évacuation.C'est sur ces mots que Ax-Tell ferme la conversation. Ajax, essayeà nouveau d'obtenir une communication avec le roi, qui répondcette fois.Pénélope est contente que Leith reste avec elle. Ils ont, pour nepas trop charger ces pauvres bêtes, pris deux chevaux pour leurs bagageset ceux d'Ussa. La réunion solennelle aux allures de fête acontinué jusqu'à minuit et c'est à ce moment-là que les convives ontcommencé à prendre les longs et émouvantes accolades d'adieu. Ilssavent tous qu'ils ne se verront plus jamais, pas de cette vie en toutcas pour les croyants d'entre eux. <strong>Les</strong> uns se mettent en route pourle temple d'Ozin, tandis que les autres commencent à préparer leurschevaux. Certains sont déjà partis avec un convoi militaire qui estvenu les chercher il y a juste un moment. C'est Pénélope qui prendson vieux cheval préféré, Phébus, et Leith prend son frère, de lamême jument et du même étalon, Éphèbes, qui a un an de moins.Leith aide Pénélope pour se mettre en selle, car bu un peu plus qued'habitude, elle a du mal à s'y mettre toute seule.— Ça va ? Demande Leith. Tu n'as pas trop de mal à rester enselle ? Je n'aimerais pas que tu tombes, car il n'y aura plus d'hôpitaldemain.273


La dernière soirée.— Non, répond-elle, ça va aller. As-tu vérifié si on a tous les bagages.Il ne faut surtout pas oublier ceux d'Ussa. Elle est où en cemoment ?— Je ne sais pas, son communicateur indique un déplacement rapidequi signifie qu'elle a pris le train. J'espère que le train ne prendpas trop de retard, car il faut être au quai avant que les tremblementscommencent.— Tu sais l'heure exacte, demande-t-elle ?— Non, je sais que c'est au petit matin, mais c'est tout. Le roim'a dit qu'il surveillera les communications avec les pays à l'ouest,Oz, Yuk et Om. 41 Il a forte chance qu'elles seront coupées au momentde l'impact et l'onde de choc vient chez nous à peu près vingtminutes après.— Nous devons donc être loin des côtes à partir de six heures,sept au plus tard, si je t'ai bien compris, non ?— Oui, c'est ça. Alors, ils sont près ? <strong>Les</strong> autres ? DemandeLeith.— Oui, je crois. Alors, on y va ? Il faut bien que ce soyons nousqui précédons, car c'est toi et moi qui ont les laissez-passer.— Laissez-passer ? Pourquoi donc, lui demande Leith ?— Mais, lui répond Pénélope, depuis ici, il faut passer au nord dela ville et traverser l'Osuo. <strong>Les</strong> ponts sont gardés par les militaires etseuls toi et moi avons un sauf-conduit pour nous tous, signé par leroi.— Oui, c'est vrai, je n'y avais plus pensé, lui dit Leith.Ils vont silencieusement jusqu'à l'entrée de la ville d'Osuo. Enconstatant que la circulation n'est pas aussi terrible que prévue, ilss'arrêtent et c'est Pénélope qui demande à Leith et aux autres :— Qu'en dites-vous ? J'ai envie de dire en dernier au-revoir ànotre ville. Depuis ici on peut prendre la Grande Rue jusqu'au palaiset la gare, descendre par la vieille ville jusqu'au boulevard et traverserle pont à côté du parc. Ça doit être faisable, car il me semble bienque ceux qui ont une voiture ont déjà quitté la ville.— Moi je suis d'accord, lui dit Leith, qu’en disent les autres ?41 C'est ainsi que les Atlantes appelaient, selon Edgar Cayce, l'Amérique du Sud,L'Amérique Centrale et l'Amérique du Nord.274


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.C'est après quelques palabres que tout le monde se met d'accord.Ils continuent la route pour rejoindre le centre-ville par la GrandeRue Leith est le premier à se sentir peiné. Il voit, quand ils remontentla Grande Rue en direction de la place royale, à sa gauchedans une rue latérale devant une la place arborisé et joliment arrangée,la bibliothèque en partie détruite par l'incendie volontaire. LaGrande Rue elle-même n'est plus aussi accueillante qu'autrefois, carla plupart des stores sont baissés. Devant la salle des fêtes et legrand temple il y a de l'animation. Même si les autorités n'ont pascommuniqué le jour et l'heure de la catastrophe, Arcturus est devenuénorme et on peut voir son déplacement vers l'ouest à l'oeil nu. Laplupart de la population se doute déjà si jamais le lendemain ne viendra.C'est pour cela que les gens font comme ils l'ont fait les Axarzet les Ajahel, certains finissent la nuit en prière au temple tandis qued'autres sont en réunion solennelle et fêtent un peu tristement le départdes leurs vers un futur plus qu'incertain. La petite rue commerçante,où Pénélope a sa boutique, offre le même spectacle ; storesfermés et çà et là de l'animation. Aussi bien Pénélope que Leith,mais surtout Abdubu qui est aussi du voyage, ont des larmes auxyeux quand ils passent devant l'estaminet “<strong>Les</strong> Jardines”. Beaucoupde gens et de commerçants qui ne sont pas partis, les saluent, surprisde les voir voyager ainsi, au passage. La boutique de Pénélope offrele même triste spectacle avec ses panneaux de protection devant lesfenêtres et les volets fermés à l'étage. La seule autre endroit où il y adu monde est le bureau du Maître Amilius. Là aussi c'est Leith qui aà nouveau des larmes aux yeux, car normalement c'est lui qui auraitcontinué son travail. Arrivés au boulevard et en passant devant leparc, ils voient que même Mélia a préféré de rester, car il y a de la lumièreet de la musique. Seul Pénélope a un doute que ce soit Méliaelle-même, car il se pourrait que ce soit sa mère, elle non-partante.Traverser le grand pont de la rivière Osuo ne pose pas problèmenon plus. Malgré la présence des militaires, comme ailleurs dans laville, il n'y a plus d'aucun contrôle, ni circulation d'ailleurs.— Alors, dit Leith, tout le monde a dit adieu à sa ville ? Je doisavouer que j'ai de la peine, beaucoup de peine. Et toi, Pénélope, quedis-tu ?275


La dernière soirée.— Ce n'est pas de la peine que j'ai, dit elle entre deux sanglots,c'est du chagrin et je n'arrive pas à m'en défaire. Je commence àcroire que ceux qui ne veulent pas partir ont raison, mais je suis tropjeune pour mourir sans tenter de m'en sortir. Je suis d'ailleurs tou<strong>jours</strong>persuadé que je viens avec toi. J'ignore pourquoi, mais j'yteins.— Tiens toi bien, dit Leith à elle et aux autres, le plus dur reste àfaire. Il nous reste encore six heures de chemin à faire.Le reste du chemin se déroule comme n'importe quelle randonnée,sauf que celle-ci est la dernière et de nuit. Quand ils quittent lesfaubourgs où les maisons s'espacent de plus en plus, ils prennent leschemins des paysans et passent en travers champs. C'est ainsi qu'ilsarrivent au petit port où leur bateau est amarré. Tout le mondedescend de son cheval et range ses <strong>derniers</strong> bagages dans la soute dubateau. Pénélope et Leith, par contre, laissent, à l'étonnement detous, leurs bagages dans la cabine. Une fois finie, ils enlèvent lesharnais des chevaux et les laissent libre. <strong>Les</strong> pauvres bêtes ne comprennentd'abord rien et restent au quai en regardant leurs maîtresembarquer avant qu'ils commencent à rentrer. <strong>Les</strong> marins, car il yen a, entre eux vérifient une dernière fois le tout et larguent lesamarres. Pénélope et Leith, qui sont restés à l'arrière du bateau, regardentun peu tristement le quai s'éloigner pendant que Abdubu faitmonter la machine en puissance. Ils se réalisent tous les deux queleur voyage sans retour a commencé et qu'ils ne verront leur paysplus jamais. Abdubu est aussi triste, mais pas pour la même raison,car c'est la deuxième fois pour lui qu'il perd tout et doit fuir vers undestin inconnu. Il sait comment les autres se sentent, mais pour luic'est du déjà-vu, sauf que cette fois-ci les conditions de survie serontsûrement plus dures.— Tu as entendu ça, lui demande Pénélope ? Il me semble avoirentendu un grondement.— Tu as peut-être raison, lui dit Abdudbu, les chevaux sont affolés,ils ne savent plus où aller. <strong>Les</strong> pauvres.— Qu'est-ce que tu regardes, lui demande Pénélope au bout d'unmoment, c'est comme si quelque chose t'intrigue ?276


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Ça ! Là-bas ! Ce banc de brouillard, il n'est pas normal. Il y aune étrange lueur dedans, je n'ai jamais vu ça. Gardons-le à l'oeil !— Mais, demande Leith à Abdubu, pourquoi mets-tu le cap àl'est ? Je croyais qu'on allait au nord, non ?— L'impact va sûrement générer un tsunami, lui dit Abdubu,mieux vaut-il être loin des côtes.Pâris de Bel-Ra se félicite qu'il n'y a pas plus de problèmes avecl'évacuation. C'est même le contraire à ce qu'il a craint. La seulechose qu'il craint maintenant, c'est que l'impact de Arcturus va sûrement,selon son astrologue, astronome et physicien, créer une grossevague inondant tout sur la côte. Sa femme Sénléné a pris des calmantset est en ce moment dans sa cabine pour se reposer. Ils sonttous les deux très anxieux pour la vie de leur fille. Ils attendent impatiemmentl'appel de leur détective. C’est soudainement qu'il reçoitla communication tant attendue sur son communicateur.— Bonjour Ajax, lui dit le roi, comment allez-vous ?— Bonjour votre excellence, excusez-moi pour l'heure aussi tardif,mais j'ai une importante communication pour vous. Votre filleUssa vient de partir avec le dernier convoi vers le port de Amaki. Cequi est moins bien, c'est que le convoi a pris du retard et il est àcraindre que ce retard s'aggravera. Votre fille se trouve dans uncompartiment réservé, juste derrière la locomotive. <strong>Les</strong> employés dela compagnie des chemins de fer m'ont indiqué que l'arrivée, tenantcompte des retards en route, sera entre six heures et demie et septheures.— Merci, lui dit le roi, que comptez-vous faire vous-même. Arrivez-vousà me rejoindre, ou est-il trop tard ?— Non, je n'arriverai plus, je dois encore aller avec un comitéd'accueil vers les ravisseurs et ensuite je vais rejoindre Jason et Laïossur leur yacht. Je ne pourrais même plus aller avec la famille Axarz,voyez-vous. Ils seront partis quand j'arriverai au haras.— Alors, bonne chance et bon voyage. Mais où allez-vous vousrendre ?277


La dernière soirée.— On avait prévu de rejoindre les familles de Macdonald et Macintoshau nord, ils ont des terres sur le continent. Le grand nordest sûrement inhospitalier, mais plus sûr en ce moment que la partiesud de la Gaulle. Il ne faut pas non plus oublier, sire, que nous allonsnous trouver treize degrés plus au sud et nous serons plus auchaud après. Mais avant que je l'oublie, vous et votre épouse, bonnechance et faites un bon voyage.— Merci beaucoup.— Encore une chose, sire. Pouvez-vous me faire parvenir desnouvelles d'Ussa et Leith, je suis curieux s'ils s'en sortent et surtoutsi leur voyage se fait vraiment.Angélique, qui tient la barre depuis une heure et demie aprèsavoir été réveillé par son frère, se concentre sur la carte. Elle perçoitqu'ils ne sont qu'à une petite heure de navigation de l'endroit indiquépar Leith. Elle mémorise toutes les manipulations d'urgence queson père leur a appris durant le voyage. Surtout comment faire undemi-tour, s'approcher d'un autre navire et autres. De temps à autreelle scrute l'horizon avec les jumelles, car même convaincu que c'estleur bateau qui va vers eux, elle n'exclue pas de les voir en tant quenaufragés. De temps à autre elle pense à, comme elle le dit, son mecet se demande ce qu'il fait en ce moment. Elle le sait très bien quece “en ce moment” se trouve onze mille huit cents ans dans le passé,mais elle se n'en fait pas. Pour elle dans sa tête c'est comme s'ilsétaient à côté et qu'il suffit d'y aller. Elle ne peut pas non plus se défairede cet étrange sentiment de danger. Elle sent un danger pourun des quatre, probablement Ussa. Elle se décide de se concentrersur la navigation et de ne pas rêvasser, car l'heure et l'endroit du rendez-vousse rapprochent. Il ne lui reste qu'une dizaine de minutesde chemin à faire pour qu'ils soient là. Elle bloque la barre etdescend réveiller son père et son frère, puis remonte. Revenu à labarre, elle voit qu'ils entrent dans une nappe de brouillard. Elle sedit : « Angélique ne t'affoles pas, il y a pire. » C'est en jetant un coupd'oeil sur le GPS, qu'elle constate que quelque chose ne tourne pasrond, l'appareil affiche un endroit correspondant au pôle nord, des278


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.zéros partout, et une petite lumière rouge lui indique qu'il n'y a plusde signal satellite. Un autre coup d'oeil sur le compas magnétique luiapprend que ce dernier est aussi affolé qu'elle.— PAPA ! JULIEN ! À L'AIDE !Soudainement le brouillard se lève et un spectacle désolant seprésente. Elle voit une zoné côtière où il se trouve un train qui a déraillé,des gens en train de se noyer dans les eaux d'un port où despetits bateaux essayent de récupérer ces pauvres gens au milieu desdifférents débris qui ont été portés au large par un tsunami. C'est enregardant une grande paroi d'un wagon en bois, pas loin à tribord,qu'elle reconnaît la silhouette de la jeune femme, ayant une chevelurenoire jais, allongé inconscient dessus. Et elle crie à nouveau :— PAPA ! JULIEN ! À L'AIDE ! Il y a Ussa à tribord. Elle esten train de se noyer ! Viens vite !Elle entame entre temps la procédure d'urgence pour retourner lebateau et l'immobiliser, comme son père lui a appris et qu'il fautexécuter quand quelqu'un est tombé à l'eau.279


Rien ne va plus !Le jour commence à se lever ce matin du treizième jour Lion, ladate fatidique. Le vaisseau royal se trouve encore à quai, oùPâris, le roi, semble très occupé avec les <strong>derniers</strong> partants. Il aimeêtre présent, il se sent responsable de la bonne démarche. Il est, parcontre, comme sa femme Séléné, très inquiet. Il craint que sa fillen'arrive pas à les rejoindre avant qu'ils doivent libérer le quai. <strong>Les</strong>capitaines de vaisseaux ont en fait décidé de se mettre au large aumoment de l'impact ou juste après. Pour surveiller ce moment fatidique,les opérateurs radio du vaisseau royal vérifient les communicationsen permanence, car ils savent, grâce aux informations fourniespar Angélique, que les communications avec les pays amis àl'ouest seront les premiers à être coupées à ce moment-là. Pâris estallé voir un responsable de la gare maritime, pour savoir s'il y a unechance que le train arrivera bientôt. L'employé fait ce qu'il peut etl'informe que le train vient de quitter la gare d'Osuo. Le roi sait quele trajet fait, même si les employés font ce qu'ils peuvent, une bonnedemie heure jusqu'à la zone portuaire de Amaki. Il est, commed'autres l’ont fait entre temps, remonté à bord de son bateau oùSéléne l'attend. Elle est très anxieuse, beaucoup plus que son mari.Le médecin lui a bien prescrit des calmants et a voulu même lui donnerde quoi dormir. Elle n'était cependant pas d'accord, se mémorisantce que la belle gauloise leur a dit : de venir vers eux avec les bagages,dès qu'ils auront vu leur voilier. Elle décide de se ressaisir etfaire ce qu'Angélique lui ait demandé : préparer les bagages de safille. Elle est remontée sur le pont entre temps voir son mari, carelle veut y ajouter des cadeaux, non pas seulement pour Angélique,mais aussi pour toute sa famille. Elle pourrait de toute façon garderces bagages et les cadeaux si jamais Ussa arrive à rejoindre leur bateauou si Angélique et sa famille ne viennent pas les chercher. Dansle cas qu'elle joindra Angélique et sa famille, elle pourrait lui remettrece dont elle aura besoin dans sa nouvelle vie. Séléné sait que les281


Rien ne va plus !adieux seront sûrement émouvants et qu'il ne faut pas se laisser aller.Tout à coup elle se demande ce qui pourrait bien faire Leith. Elleregrette qu'ils soient restés sans nouvelle de sa part. Elle met les valisesbien en évidence sur le lit et monte sur le pont où se trouve déjàPâris, son mari, lui aussi anxieux qu'elle, même s'il ne le montre pas.— Pâris, mon cher, a-t-on des nouvelles de Leith ? Je croyaisqu'il comptait nous rejoindre ?— Non, ma chère, il avait cependant prévu de venir vers nousavec la barque de pêche à Pénélope.— On va les emmener avec nous, n'est-ce pas. Pénélope aussi,non ?— Bien sûr ma chère, mais il faut bien qu'ils arrivent d'abord. Jene les vois nulle part. Je ne sais même pas où est leur port d'attache.Je crois que c'est plus au sud et qu'ils voulaient faire le chemin à chevalpour ne pas être embêtés par la circulation. Ils avaient prévu departir entre six et sept heures. Ils peuvent donc logiquement passerà n'importe quel moment.— Sire ! Sire ! Lui dit une employée radio, on a perdu contactavec les pays d'Oz, Yuk et Om. On vient d'informer le capitaine et ilveut probablement quitter le port dans les dix minutes qui suivent.— Bon sang, ne me dit pas ça. Où est ma fille ? Où est le train ?— PÂRIS ! Dit Séléné qui voit que son mari s'apprêtait àdescendre la passerelle, tu ne descends pas. Laisse-le à eux s'occuperde l'arrivée d'Ussa. Elle pourrait venir à bord en utilisant un transbordeur.C'est ce qu'on avait prévu initialement de toute façon.— Je vais voir le capitaine. On doit décider ce qu'on va fairemaintenant. C'est bien de continuer à évacuer un maximum de gens,mais on ne peut pas mettre en danger ceux qui se trouvent déjà surles bateaux. De plus, il faut avertir la capitainerie qu'ils envoient unmessage aux navires de rester éloigné de la côte pendant le choc initial.Après on peut voir et évaluer les dégâts.— Ne faut-il pas envoyer un message aux gens à quai d'aller versl'intérieur des terres, lui demande Séléné, on pourrait les secourirplus tard, n'est-ce pas ?282


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Hector, le mécanicien du train, est fâché contre lui-même et l'estsurtout contre les responsables des gares. Ils ont en effet tous reçusune communication qu'il ne fallait surtout pas retarder le dernierconvoi, aussi douloureux que c'est pour ceux qui restent derrière.Maintenant il se trouve avec un retard tellement dangereux, qu'en casde problèmes, les passagers ne pourront plus être secourus. Il saitque depuis le départ de la gare d’Ozin, qu'il a la princesse Ussa àbord et qu'il faut impérativement la sauver et coût que coût, il doitcela au roi. De devoir attendre l'ajout des wagons à cette gare decampagne pas loin de la ville Osuo a été agaçant. Le convoi est devenuinutilement long et difficile à conduire maintenant, car les vieuxwagons ajoutés ne supportent pas une vitesse élevée. Il se trouve dece fait avec un retard de trente minutes, ce qui est vingt minutes troptard pour arriver en sécurité à la gare maritime de Amaki. Il sait queles militaires et les vaisseaux d'évacuation n'attendront pas au-delà dece délai, car la collision de la terre avec la comète est attendu d'uneminute à l'autre. <strong>Les</strong> spécialistes l'ont dit qu'il y aurait à peu près devingt minutes entre le moment de l'impact et les premiers tremblementsde terre ici. Il commence entre temps à percevoir la zoneportuaire de la ville qui se rapproche rapidement, tandis le trainlonge le port en direction de la gare maritime, avec sa cohue de genset leurs bagages attendant leur embarquement. Soudainement il sentune secousse sismique, puis une autre plus violente. La locomotivevient de tanguer dangereusement. Hector tente de freiner sonconvoie, mais le sol semble se dérober dessous et malgré ses tentativesdésespérées de le stopper, le train accélère et déraille. Pendantle déraillement, il court vers l'arrière et entre dans le compartimentoù se trouve la princesse. Cette dernière se cramponne déjà auxstructures du wagon. Il la prend par le bras et tente la sortir de là.C'est à ce moment-là que le wagon se désintègre. Hector a juste letemps de hisser la princesse sur une des parois du premier wagondésintégré, qui est rapidement emporté par un courant marin vers lelarge. Hector tente lui-même d'aller vers l'arrière du train en se tenantaux structures restantes, pour essayer de sauver un maximumd'autres personnes. Il est sûr que les militaires feront le maximumpour les évacuer. Même si les grands navires ont déjà quitté le port283


Rien ne va plus !par précaution, il y a de nombreux petites embarcations qui font lanavette entre la zone sinistrée et les vaisseaux d'évacuation. Hectorlui-même ne se pose même pas la question s'il sera sauvé ou non, ilmet, comme beaucoup d'autres croyants le font, son destin auxmains de Ra.Leith, tenant Pénélope par l'épaule, regarde le triste spectacle de lacôte de son cher pays s'éloigner. Abdubu, qui pilote le bateau, lui aexpliqué le chemin à prendre et pourquoi s'éloigner d'abord de lacôte. Pénélope a tou<strong>jours</strong> des larmes aux yeux. Elle se sent terriblementdésolé et craint qu'elle ait bien du mal de pays, comme Ussa.Séléné l'avait dit comment Ussa se sentait lors de son séjour d'étudesen Égypte. Le dépaysement, le sentiment d'être abandonné, sespériodes de nostalgie et encore d'autres maux moins bien définis.— Viens dit-elle à Leith, on va dans la cabine. Je prendrais volontairementun rafraîchissement, puis toi ?— Oui, c'est une bonne idée. Je dois de toute façon préparer unetable de conversion pour les marins.— Table de conversion ? Pourquoi donc ?— Eh bien ! D'ici un jour tout au plus, ils vont se trouver avecnotre pôle déplacé de treize degrés plus au sud sur l'axe du vingt etunième longitude ouest 42 . Il faut bien que Abdubu et tes cousinspuissent corriger leur position, non ? Tu ne veux quand même pasqu'ils se trouvent à six cents miles nautiques à côté de leur positionvoulue, n'est-ce pas ?— Tu as raison, lui dit Pénélope, je n'en avais plus pensé.Félicité, qui est montée un moment au pont, descend après unmoment et leur dit que le vaisseau royal a quitté le port. Soudainementle grondement de tout à l'heure s'amplifie. Ils sentent touscomment leur bateau est pris par une grosse vague. Ils doivent setenir aux parois. Une fois finie, c'est Félicité qui remonte au pontpour voir ce qu'il se passe. Leith et Pénélope montent également et42 Ancienne emplacement du pôle nord, 77° Nord, 50° Ouest. Pour en savoir plus ; lisez“Était-elle l'Atlantide” du même auteur. (On pourrait s'imaginer que leur méridienne“Zéro” était sur leur montagne sacré, notre mont “Pico”).284


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.ils voient tous ce horrible spectacle. De loin, au port de Amaki, il ya un train qui a déraillé lors ce tremblement, et pas seulement, il y aeu un tsunami balayant tout sur son passage. De l'avant du train, ilne reste plus qu'un tas de débris porté au large par la vague. Ilsconstatent que les gros navires ont déjà quitté le port et qu'il n'y aque des petites embarcations qui essayent de faire le mieux. C'est unspectacle de désolation et beaucoup de gens sont emportés au large,criant au secours. <strong>Les</strong> animaux qui se trouvaient à l'arrière du train,se sont libérés et cherchent à se sauver vers l'intérieur des terres.C'est Abdubu, ayant gardé un oeil sur l'étrange banc de brouillard,qui voit en premier le voilier blanc. Félicité, qui le voit également,les dit :— Écoutes bien ! Il y a quelqu'un qui appelle Leith désespérément.Je crois que ça vient de là, dit-elle en montrant le voilier dudoigt.— Oui, je l'entends aussi, lui dit Abdubu. Où est-il notre Leith ?Je suis sûr que c'est sa copine là sur la proue du voilier. Elle regardedans la mauvaise direction. Elle le croit en train de se noyer.— Tu as où ta longue vue, lui demande Pénélope ? J'ai l'impressionqu'ils ont repêchée notre Ussa.— Tiens, la voilà.— Mais oui, c'est elle, dit Pénélope en regardant avec la longuevue. Elle est dans les bras de son fiancé. Abdubu, mets le cap sureux, on va les rejoindre. N'est-ce pas Leith ? Dit-elle en se retournantvers lui.Ce qui est curieux, qu'il n'y a personne du voilier qui voit le bateaudes Axarz se rapprocher. C'est Cécile, la maman d'Angéliquequi les voit en premier et essaye en vain d'appeler sa fille qui continueà crier comme écorchée vive sur la proue. Seulement quand lebateau de pêche, aux allures d'un Terre-Neuve en plus petit, est déjàtrès proche, qu'Angélique, intrigué par le bruit, se retourne et voitson Leith sur ce bateau. Elle saute d'un bateau à l'autre sans sesoucier de la relatif grande distance qui les sépare encore et courtvers Leith, l'embrasse en lui murmurant des, pour lui incompréhensibles,petits mots. Tout ce qu'il comprend, c'est qu'elle est follementamoureuse. Elle procède ensuite avec sa présentation à l'équi-285


Rien ne va plus !page en serrant la main à chacun et chacune. Une fois les bateauxabordés, Leith et Angélique transbordent avec ses valises sur le voilieret c'est Pénélope qui veut les suivre avec les dernières valisesappartenant à Ussa pour leur dire bonjour à son tour. C'est Angéliquequi réagit, comme elle a la coutume de faire, avec un réflexed'une chatte sauvage, car elle a entendu, comme tout le monde ; un“boum”. C'est Pénélope qui vient de glisser sur bord et est tombée àl'eau en heurtant violemment sa tête contre le bord et disparaît sousles flots avec une des valises.— MERDE ! MERDE, dit-elle. JULIEN, VIENS VITE.Leith, qui n'a rien remarqué, se retourne et voit Angélique disparaîtresous les flots à son tour. Il se précipite vers le bord en criantson nom et regarde catastrophé les bulles qui remontent. C'est Ussa,encore un peu abasourdi par l'accident du train, qui lui met la mainsur son épaule et lui dit :— Ne crains rien Leith ; elle sait nager. Ils essayent de sauver Pénélope.Tu vois, sa mère a déjà sorti sa trousse de secours.C'est maintenant que Armand, le papa d'Angélique, leur fait signede s'éloigner du bord, car ses deux enfants viennent de remonter Pénélopeavec la tête ensanglantée. Tandis les deux montent à bord,Cécile fait du bouche-à-bouche à Pénélope pendant que Armand luifait en alternance avec sa femme du massage cardiaque. Soudainement,Ussa gémit quelque chose. Elle voit sa valise s'éloigner du bateau,car Pénélope venait avec les siens. Elle essaye d'expliquer àAngélique que cette valise est le sien. Angélique, qui ne comprendque dalle de ce qu'Ussa lui dit, a pigé que le contenue est très importantpour elle. Elle fait donc un nouveau plongeon et laisse commeune torpille sa trace de bulles en direction de la valise en remontanten surface juste derrière celle-ci et revient au voilier avec elle, en lapoussant devant elle, créant ainsi des regards admiratifs de toutepart. C'est Ussa qui dit à Leith :— Quelle bonne idée que tu as eue pour faire en sorte qu'elleflotte, sinon j'aurais tout perdu.— Ce n'est pas une idée à moi, mais celle d'Angélique.— Dit donc, dit Abdubu à Leith, venu à bord pour dire bonjourà l'assemblée, ta copine réagit comme une chatte sauvage. Je n'avais286


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.pas encore compris ce qu'il se passait, qu'elle plongeait déjà pour larécupérer.— Sauf, dit Ussa, que les chats craignent en principe l'eau et neplongent pas comme elle l'a fait tout à l'heure.Ussa regarde vers le large, voit une navette qui rapproche rapidementle voilier et ajoute :— Oh ! Mes parents accompagnés du médecin de bord.— Maman, dit Angélique, revenue à bord avec la valise, on peutla sauver n'est-ce pas ? Ne me dis pas que la pauvre Pénélope vamourir.— Non ma chérie, elle respire de nouveau, mais elle a un traumatismecrânien assez grave. Elle devrait être transportée à un hôpitaldès que possible. Je vais, en attendant, faire ce que je peux, mais jecrains qu'ils n'aient plus hôpitaux par ici. Je m'en doute même que lenavire là-bas, celui du roi, a un service sanitaire assez sophistiqué àbord pour une telle intervention.— Regarde ! Maman, ce sont Pâris et Séléné qui arrivent avec unautre homme. Il a une sacoche comme toi, c'est sûrement le toubibperso du roi. Peut-être qu'il parle un peu l'ancien grec. Comme çatu pourrais lui parler un peu. Je suis sûr qu'ils ont vu ce qui est arrivéet ont emmené leur toubib avec eux.Pâris de Bel-Ra est très peiné par le fait que le capitaine a refuséd'attendre davantage. <strong>Les</strong> matelots s'apprêtent à larguer les amarres.Selon le capitaine, qui reste, comme tout le monde le sait, seul maîtreà bord, l'onde de choc pourrait venir chez eux dans les dix minutesqui suivent. La capitainerie a envoyé un message à tous les bateauxde quitter le port et d'attendre au large. <strong>Les</strong> spécialistes craignent enfait une grosse vague déferlant sur les côtes et c'est pour cette raisonqu'ils préfèrent que tous les bateaux quittent temporairement le port.Pâris et Séléné se sentent lasse quand le vaisseau royal quitte le quaipour aller au large. Ils savent bien que ce soit pour le bien des gensdéjà embarqués. Il ne faut pas les mettre davantage en danger. Il estd'ailleurs temps de commencer à rassembler les différentes embarcationsen armada de telle sorte que les plus petits se trouveront à287


Rien ne va plus !l'intérieur et les gros navires de l'armée à l'extérieur, car apte à protégerles autres du gros temps qui va sûrement suivre. Le couple royalscrute l'horizon avec une longue vue pour voir si le train avec leurfille arriva en temps. L'armée a laissée une vedette rapide à proximitédu quai pour pouvoir la transborder. Leur vaisseau vient entretemps de s'immobiliser là où les eaux sont déjà plus profondes etmoins risquées.— Là, dit Séléné, je vois le train qui arrive.— Où ça, dit Pâris, je ne vois rien.— Là, au loin, dit-elle, prend la longue vue et tu verras.— Mais il est encore loin, lui dit-il, il n'arrive jamais en temps.C'est très risqué ce qu'il fait. Il devrait attendre là où il est maintenant.<strong>Les</strong> tremblements peuvent commencer d'un moment à l'autre.— Sire, lui dit une opératrice radio en lui remettant une feuille depapier, j'ai un message pour vous en provenance de l'ouest.Il l'ouvre et lit en diagonale que les tremblements ont commencéde ce côté-là. Le message parle d'une vague montant jusqu'au ciel.Le message disait aussi que l'eau de mer s'est retiré avant de formerune grosse vague. Seul ceux qui habitent aux hauteurs ont été épargnés,ainsi que les vaisseaux déjà au large ayant cherché les profondeurs.— Mon cher, lui demande Pâris à son homme de science en luimontrant le message reçu, combien de temps nous reste-t-il.— Cinq minutes tout au plus, sire.— Mais c'est horrible, dit Séléné, le train n'est pas encore à la gareet je crains pour la vie de notre fille.— N'oublie surtout pas celle de tous ces autres pauvres gens dansle même train, lui dit le roi, ils ont aussi droit de vivre. Mais le malest fait et il faut maintenant essayer de faire le mieux possible.— Là, dit Séléne, il arrive. Il entre dans la zone portuaire. Avecun peu de chance il arrivera peut-être à la gare en temps.Mais elle n'a à peine exprimée ses souhaits que la locomotivecommence à tanguer dangereusement. On peut facilement entendrele crissement des freins. Le mécanicien a bien essayé d'effectuer unfreinage d'urgence, mais une nouvelle secousse le fait dérailler. Enmême temps le sol semble se dérober dessous le convoi et la loco-288


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.motive, ainsi que les premiers wagons se fracassent dans l'eau demer. Pâris doit tenir sa femme, choquée par aspect du désastre.— Oh ! Pâris que fait-on sans notre fille, dit elle entre deux sanglots? Regarde, son wagon est totalement détruit. Ils ne restent quedes parois.— Calme toi ma chérie, il y a un homme courageux, je suis sûrque c'est le mécanicien, qui a sauvé des gens du premier wagon et lesa mis sur les parois. Passe moi la longue vue, je crois voir notre fillesur une d'entre elles.Le reflux précédant la grosse vague n'a pas eu lieu. L'eau a montétrès haut, comme une vague, sur le pays et s'est aussitôt retiré, emportantavec elle les débris divers. C'est sur un de ces débris, une paroide wagon, que se trouve effectivement Ussa. Il y a parmi ces débrisaussi des gens, dont certains sont morts, d'autres accrochés àune poutre et certains à leurs bagages. Ce sont des petits bateaux,épargnés par ce mouvement d'eau, qui essayent de les sauver et lesemmener vers les gros navires en dehors attendant au large. C'estSéléné, en regardant avec la longue vue en direction d'un banc debrouillard, qui dit :— Pâris, regarde là. Tu as vu ce beau voilier ? Je crois bien, qu'ilfait demi-tour.— Oui, je le vois, répond-il, je suis sûr que c'est la gauloise et safamille qui sont venues. Je ne les ai pas vu venir d'ailleurs. Ils sontvenus de nulle part.— Non, dit sa femme, ils sont sortis de ce banc de brouillard bizarre,là-bas. Je les ai vu sortir de là. Mais, ils ont repêché notrefille ! Vite, qu'on prépare une navette rapide, on va les rejoindreavec ses bagages. N'oublie pas de prendre le médecin de bord avecnous, car je crois qu'elle est inconsciente.— Tu as encore fait des bagages pour elle, lui demande Pâris ?— Oui, surtout des petites choses auxquelles elle tient terriblement,ces vêtements de petite fille, des bijoux, bibelots et autressouvenirs. J'en ai gardé quelques-uns pour nous, pour garder unsouvenir d'elle. Mais c'est elle qui aura besoin dans sa nouvelle vie.Et pour ne les pas oublier, les cadeaux que je t’ai parlés tout àl'heure.289


Rien ne va plus !— Ah ! Oui, j'allais l'oublier, dit le roi. Tiens, continue-t-il, il y aun autre bateau va vers eux et je crois bien que c'est celui de la familleà Pénélope avec Leith à bord.Pendant qu'ils s'approchent le voilier de la famille Leblanc, ils assistentimpuissant à l'accident de Pénélope et la réaction courageused'Angélique, surtout quand elle a remis ça pour repêcher une valiseque Séléné reconnaît à être celle d'Ussa.— Tu as vu comme elle nage cette fille, dit Séléné ?— Oui, j'ai vu. Le pauvre Leith croyait qu'elle allait se noyer aussi.Mais, remarque qu'ils nagent très bien tous les deux. De plus sonfrère et son père connaissent les gestes qui sauvent. Ils passent sûrementle gros de leur temps libre au bord de la mer et sont habitués àces types de tâches.Angélique et Cécile, sa mère, ont porté Pénélope délicatementdans la cabine où Cécile, qui est infirmière, effectue les premierssoins. Pénélope, seulement inconsciente et non pas en comacomme ils ont d'abord craint, gémit de temps à autre des petits motsincompréhensibles. Cécilé profite de ce fait pour essayer ses réflexes.— Pourquoi tu fais ça, maman ?— Pour voir si la colonne vertébrale n'est pas cassée, elle n'auraitpas réagi sur une piqûre aux pieds si cela était le cas.— Je vois, heureusement pour elle. Mais la tête, elle doit avoirune fracture crânienne, n'est-ce pas.— Oui, c'est ça, ce n'est pas cassé complètement, mais une interventionchirurgicale doit intervenir très rapidement. Pendant qu'onest en mer, on doit le maintenir dans cette position et laisser dormir.Je vais la mettre sur perfusion. Une fois à terre, on doit la transporterd'urgence dans un hôpital.Leith, qui a suivi, essaye, en faisant des signes avec ses mains, deles demander si c'est grave. Il s'approche de sa copine de bistro et lecaresse délicatement les cheveux. Il montre du doigt l'endroit ensanglantéet fait avec un regard interrogatif; AI ? Cécile essaye de luifaire comprendre, que c'est délicat. Ils sortent ensuite de la cabine,290


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.intrigué par un bruit de moteur, suivi des éclats de voix. C'est Cécilequi réagit en premier :— Encore des valises ? C'est un déménagement !— Voilà maman, lui dit Julien, je te présente Pâris et Séléné deBel-Ra, les parents d'Ussa en chair et en os. Ce monsieur-là est toubib,essaye-lui parler en ancien grec, peut-être te comprend-il. Àpropos déménagement, ces valises-là contiennent apparemment dessouvenirs d'Ussa auxquelles elle tient, et puis ceux-là ce sont ceux dePénélope, car je crois qu'ils ne peuvent pas l'emmener dans l'étatqu'elle est. On a assez de place pour les caser, ne t'inquiètes pas.— Alors, Ussa, Leith, leur dit Pâris, vous ne venez pas avec nousj'imagine ?— Non papa, lui dit Ussa, je vous aime et je ne vous oubliejamais, mais ma place est à côté de Julien. Pour se parler on se débrouillabien. Utilisez le Biovoix si vous voulez nous parler. Je croisque Julien et Angélique ont prévu d'aller de temps à autre chez cetteMonique pour pouvoir vous parler.— Bonjour, leur dit Leith, je pense rester avec Angélique. Jepense qu'on ne va pas tarder à essayer de retourner chez elle. Ilsvont sûrement vers l'endroit où ils sont venus tout à l'heure. J'aihâte de découvrir leur pays, même si j'ai de la peine à quitter le mien.Je pense toutefois, en regardant l'allure que la terre descend, qu'il nereste qu'une demie journée avant que le tout soit en dessous le niveaude la mer.Julien, venu entre temps, jette un regard interrogatif, car il necomprend rien aux paroles exprimées, même si la langue lui semblefamilière. Il commence à tendre la main à Pâris et lui demandequelque chose, que le roi ne comprend pas. Ensuite il répète lemême geste envers Séléné et faisant des gestes en direction d'Ussa.— Pâris, dit Séléné, j'ai compris ce qu'il veut dire ; il demande lamain d'Ussa !— C'est bien Séléné, acceptons-le. A-t-on quelque chose surnous pour le lui offrir ?— Donne-lui ta bague de nos fiançailles.— Mais tu n'y penses pas quand même, lui dit Pâris !291


Rien ne va plus !— Si ! Tu l'as eu toi-même de mon père. C'est à toi maintenantde la retransmettre. Ussa l'expliquera bien, que ce geste veut dire.Le roi enlève la bague de son doigt, prend la main de Julien et lelui met, en ajoutant des paroles que Julien ne comprend pas, mais sedoute de la signification. C'est Ussa qui remercie ses parents à saplace :— Merci papa, merci maman, je vais faire de même avec sesparents, mais je me doute qu'ils pourront m'offrir une bague maintenant.Il suit ensuite de longues accolades d'adieu entre fille et parents.C'est Séléné qui prend l'initiative de prendre Julien dans ses bras etlui souhaiter bonne chance. Pâris suit son exemple.— Attention, dit Leith revenu les voir, les gaulois ont l'habitudede s'embrasser entre amis, à l'exception des garçons, donc seulementfille-fille et fille-garçon. Une bise sur chaque joue, deux fois entrebons amis.C'est en ce moment que le médecin sort de la cabine, accompagnéde Cécile, et exprime des réserves sur le sort de Pénélope :— Ussa, Leith, vous êtes les deux seuls à me comprendre. Cettefemme ne peut pas venir avec nous, on n'a pas des instruments chirurgicauxnécessaires pour une opération. Si elle va avec sa famille,ce sera pour son enterrement. La maman d'Angélique est très capableet on a pu se comprendre. Elle saurait la maintenir en vie durantles cinq <strong>jours</strong> de mer. Il sera mieux si on pouvait le transporterrapidement à un hôpital, mais elle a une chance de survie si on lesoigne bien durant le voyage. Il faudra cependant que ceux quinaviguent veillent en permanence sur elle.— Leith, mon garçon, veille bien sur Ussa et ta petite tigresse, luidit Séléné. Bonne chance dans ta nouvelle vie. Je crois, en regardantl'anxiété d'Angélique, qu'il est temps pour eux de partir. Et ellecontinue en s'adressant à sa fille : Ussa, mon enfant, veille bien surles tiens et bonne chance dans ta nouvelle vie. Ne te cache pas dansun placard quand ça va mal, ils t'aideront.Armand, Cécile, lance-t-elle en direction des parents d'Angéliqueet Julien en leur faisant signe de la main de venir vers elle et son mari.Il suit des accolades timides entre les parents et c'est Séléné qui292


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.ose faire la bise en premier. Pâris suit timidement son exemple. <strong>Les</strong>paroles, par contre, échangées par les quatre ne sont pas très biencompris, mais ça reste sans importance. De l'autre côté du voilier,les mêmes cérémonies ont lieu entre les amis de jadis. Leith et Ussapromettent de garder contact par Monique interposé. Ils promettentde donner des nouvelles concernant Pénélope, car c'est surtout Félicitéqui a beaucoup de peine à cause de l'accident de sa cousine. Abdubu,car plus optimiste, cherche à lui consoler en lui disant qu'elleva à coup sûr vers un monde meilleur, mais se garde, par contre,bien de dire ce qu'il entend par “monde meilleur”. C'est Angéliquequi met fin à ce rendez-vous pas comme un autre en mettant le focet la grande voile en position. Elle semble bien pressée, car en plusde voiles elle a démarré, à l'étonnement de tous, le moteur et s'apprêteà le mettre sur la position “avant-tout”.— Eh ! <strong>Les</strong> mecs, c'est l'heure du départ. Larguez les amarres.— Mais qu'est-ce que tu fous, dit son père, pressé tout à coup ?— OUI ! Regarde là, dit elle en pointant de la main le banc debrouillard, notre fenêtre c'est en train de se fermer. J'aime bien cepays, j'aime bien ces gens, mais je veux rentrer chez moi.Elle n'attend pas le reste, ni que ça plaise aux autres et met le moteuren pleine puissance, faisant frémir Ussa, inquiète par l'étrangebruit venant du ventre du voilier. <strong>Les</strong> deux autres embarcations essayenten vain de les accompagner jusqu'au banc de brouillard, maisdoivent reconnaître que ce bel oiseau blanc prend bien une vitesseau-delà la capacité de leurs moyens de propulsion. C'est surtout Abduduqui est plein d'admiration. Il dit aux autres et au roi tout prèsd'eux dans son embarcation, dont les matelots essayent en vain,comme Abdubu, de suivre le voilier :— Ça alors ! Vous avez vu ça ? Il fait au moins vingt noeuds, sipas plus. Je suis au maximum de la puissance et pas moyen de faireplus que la moitié de sa vitesse. Ce n'est pas un voilier ordinaire.C'est sûrement un avec lequel qu'on peut faire la course.— Je pense que cette fille a raison, dit Pâris, elle ne compte pasrester ici. Elle veut rentrer chez elle par là où ils sont venus.C'est après les dernières salutations de tout le monde que le voilierdisparaisse dans le banc de brouillard tel qu'il est venu une heure293


Rien ne va plus !et demie plus tôt. Quoique personne n'ait prêté attention aux éclairssortant d'un petit boîtier de Julien, c'est Ussa qui a finalement comprisce que Cécile et Julien ont fait et elle le dit à Leith en désignantCécile de doigt :— Tu vois Leith, elle fait comme Julien, elle prend des imagesavec ce boîtier. Nous aurons de souvenirs des nôtres.Quand ils regardent à nouveau derrière eux, leur pays a disparu,ne laissant la place qu'à l'océan et de l'eau à perte de vu. Tout à coupc'est le silence, Angélique vient de couper le moteur et seuls lesvagues contre la coque demeurent audibles.294


A11 800 Ans plus tard.ngélique, qui tient tou<strong>jours</strong> la barre, regarde un peu incrédulel'affichage les instruments de navigation. Elle essaye à, en faisantles gestes accompagnés de petits mots, expliquer à Leith commentgarder le cap. Elle descend, pendant Leith fait, un peu crispé,ce qu'il peut, pour chercher la carte maritime dans la cabine. Sonpère, surpris de la voir descendre, lui demande :— Tu ne barres pas ?— Non, mon gars se débrouille très bien. Il est encore un peucrispé, mais il parvient à tenir le cap.— Qu'est-ce que tu veux ?— Il y a un truc qui cloche. Tu sais vérifier une position à l'aidedu sextant ?— Pourquoi ?— J'ai impression que le GPS déconne. Il affiche une autre positionet quatre <strong>jours</strong> plus tard qu'on est censé être.— Je le vérifierai, je dois de toute façon prendre contact avec lesnavires dans les alentours. Je me demande d'ailleurs qu'il ne vaut pasmieux appeler au secours à cause de Pénélope.Pendant qu'Angélique remonte avec la carte, son père cherchecontact avec les navires dans le voisinage en utilisant le VHF sur lescanaux six, huit, soixante-douze et soixante-dix-sept, prévus à cetusage. Leith, qui tient stoïquement la barre, suit d'un regard amoureuxtous ce sa copine fait. Il comprend soudainement qu'ellecherche à se repérer sur une carte maritime à l'aide de ce petitappareil affichant des chiffres 43 ressemblant à ceux que les Saniedsutilisent. Tout à coup Leith comprend, même s'il n'arrive pas à lireles hiéroglyphes gaulois, ce que signifient les deux noms à côté d'unepetite croix. Il la demande :— Leith ? Ussa ?43 Nos chiffres '0' à '9' viennent des arabes, qui l'ont à leur tour hérité des indiens.295


11 800 Ans plus tard.Elle lui fait oui de la tête et voit que son ami a des larmes auxyeux, car la petite croix est au milieu de nulle part. Pendant qu'elleexplique aux mieux où ils se trouvent et où ils doivent se rendre, lacarte à l'appui, son père monte pour voir le système de navigation.— Alors ma fille, ton GPS ne déconne pas. On est bel et bien àla position indiquée. De plus, l'appareil s'est mis à jour avec l'heureet la date. Nous sommes décalés de quatre <strong>jours</strong>. C'est le capitainedu Charles de Gaulle qui me l'a dit. On est à notre recherche depuisce temps, car déclaré disparu en mer. C'est un de leur avions enexercice qui nous a vus disparaître et c'est lui qui a donné l'alerte, depuisils sont restés sur zone pour nous rechercher. En ce quiconcerne Pénélope, ils envoient un hélico avec un toubib, car ilscomptent la récupérer et la mettre sur une navette en direction deParis-Villacoublay et depuis là au centre hospitalière de La Pitié Salpétrière.Avec un peu de chance elle sera sur le billard avant ce soir.— Ils viennent en combien de temps, lui demande Angélique.— Dans une demie heure, à peu près. Ils se trouvent plus nordet c'est cela le temps de vol. Je crois bien, qu'ils veulent retarder lanavette pour Paris en attendant le retour de l'hélico avec Pénélope.— Mais papa, s'il manque quatre <strong>jours</strong>, on va venir quatre <strong>jours</strong>plus tard chez nous. A-t-on encore le temps ? Il faut bien rendre cebateau non ?— Ça va, on avait prévu de rester quelques <strong>jours</strong> sur zone,souviens-tu. On aura assez de temps pour renter mollo, si on rentretout de suite. Sais-tu si nos deux enfants supplémentaires ont le malde mer ?— Pas la moindre idée papa. J'ai par contre un autre truc à tedire ; Julien a reçu une bague de fiançailles de son beau-père. Jecrains que ce soit à maman maintenant de remettre une à Ussa et àtoi de remettre une à Leith au moment venu. Je suis d'ailleurs sûreque la maman de Leith a chargé soit Ussa soit Pénélope de remettrela sienne à moi. Il me semble que c'est une habitude chez eux de lefaire ainsi.— Tu ne veux quand même pas te fiancer à seize ans ?— Je l'aime et il m'aime aussi.296


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Tu es quand même un peu jeune, mais je te connais assez bienpour savoir que je ne peux pas t'empêcher de faire ce que tu as misen tête. Je crois bien, que je dois me préparer à un temps orageux.Je prévois déjà la réaction de Cécile. Va mollo ma fille.Pendant qu'ils se concentrent sur la navigation et la route àprendre sous le regard de Leith qui cherche à comprendre, un bruitd'hélicoptère se fait entendre. Ils s'apprêtent alors à manoeuvrer leurbateau en position neutre et d'écarter les voiles de sorte que l'hélicoptèrepeut hélitreuiller un brancard avec le médecin. Ussa, catastrophéepar le bruit, vient sortir de la cabine, où elle avait veillé surPénélope, pour voir de ce qu'il se passe. Elle demande, en regardantanxieusement l'hélicoptère, à Leith : « Machine de guerre des Saneids ? »— Non, ne t'inquiètes pas, lui dit Leith, ce sont les leurs. Ilsviennent chercher Pénélope pour l'emmener à un hôpital. C'est ceque j'ai pu comprendre en tout cas.Pendant qu'un des hommes, le médecin, soigne Pénélope et lemet, aidé par Cécile, Armand et Julien, sur le brancard, l'autrehomme écoute attentivement Angélique qui lui narre toute l'aventurequ'ils ont vécue. Elle lui demande aussi si c'est possible de prendreune prise de sang chez les deux autres pour une recherche d'appartenanceethnique et de transmettre le résultat à la douane de Fécamp.Son père intervient dans la conversation et lui dit : « Si ma fille dit quec'est important, croyez-moi, ce sera important. Elle ne se goure jamais avec cesgenres de trucs. » Ce que l'homme ne comprend pas tout de suite c'estqu'elle demande d'inclure les ossement de huit à dix mille ans avantJésus Christ, trouvés dans les Pyrénées, dans la comparaison, mais ilpromet de faire quand même la démarche.— Alors, dit Armand, dit au-revoir à Pénélope. On va la remonterà bord du Charles de Gaulle et depuis là on l'amène à un hôpitalparisien. Ils nous contacteront dès qu'on est revenu de notrevoyage. Je crois que les diagnostics sont réservés. Je sais maintenant,qu'elle n'aurait pas survécu le voyage sans séquelles durables.Soyons heureux que notre porte-avions se soit trouvé à proximité.297


11 800 Ans plus tard.Cécile, qui est dehors, n'a pas remarqué que sa fille Angélique acommencé, aidé par Ussa, à ranger les différentes valises. Ussa quin'a d'abord rien soupçonné, comprend tout à coup les intentions desa belle-soeur et devient tout rouge quand elle se réalise qu'Angéliqueveut qu'elle partage la cabine avec Julien. C'est quand Angéliquecommence à ranger les affaires de Leith dans la sienne, quesa maman, Cécilé, vient dans l'habitacle et s'y oppose :— Tu n'y penses quand même pas ! Dès que tu vois un garçon,tu couches avec lui. T'es trop jeune ! Range moi ça ailleurs !— NON !— Comment NON ? OUI !— Maman arrête de me.....— Tu dois....— MAMAN ! Arrête tes “il faut” et impératifs !Ussa, qui est resté là sans rien dire, les regarde se disputer etpense pour elle-même : « Eh! Bien ! Deux tigresses qui s'affrontent.Elles ne prennent même pas le temps de s'écouter ». Armand qui se trouveavec Julien et Leith au poste de pilotage, dit, en entendant les éclatsde voix, à son fils :— Je crois qu'on a un temps orageux en bas. Je n'arrive pas àfaire comprendre à Cécile qu'elle ne doit plus parler à Angéliquecomme à un enfant et ne surtout pas lui parler à l'impératif. Elle réagitau quart de tour quand on le fait.Leith a rejoint Ussa entre temps pour essayer de comprendrepourquoi elles se disputent. Ussa lui explique ce qu'elle a comprisconcernant la partage des cabines et ajoute :— Elle veut s'assurer de ton amour. Elle craint sa copine Alice.Elle croit de te perdre et veut au moins passer les <strong>jours</strong> de mer avectoi. Rassure la ! Elle a besoin de toi.Rien le fait qu'Ussa ait prononcé le mot “Alice” suffira pour déclencherune crise d'hystérie chez Angélique. Ussa juge que ce dialoguede sourds a assez duré et vient en charge.— Tiens, dit Armand à Julien, regarde la tienne. Elle a fini d'êtreune jolie jeune fille gentille. Elle s'est transformée en lionne quicharge.298


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.Ussa se place devant elles, en se mettant droit, le regard dur et enleur parlant comme un sergent de l'armée le fait aux nouveaux recrusayant baissé le timbre de sa voix en homme. Elle fait d'abord comprendreà Cécile, en mettant le doigt sur la bouche suivie du geste enle pointant vers l'oreille, d'écouter et de ne pas parler. Elle fait ensuitecomprendre à Angélique de parler.— Je ne suis plus une petite fille maman. Ta petite fille est mortemaman. Morte ! Morte ! Morte !— Mai... Cécile n'arrive pas plus loin, elle se fait couper à nouveaula parole par un regard furieux d'Ussa, qui fait signe à Angéliquede continuer.— Je suis devenue une jeune femme maman, pourquoi n'as-turien vu ? Tu n'as pas vu grandir ta petite fille ? Elle est mortemaman ! Elle n'existe que dans tes souvenirs ! Eh ! Je te montrequelque chose qui vas t'étonner.À l'étonnement de tous, elle va dans la cabine de Julien et revientavec une valise d'Ussa qui fait des gros yeux, mais ne dit rien. Ellel'ouvre et l'y sort une robe de petite fille et continue en disant :— Tu vois maman, la maman à Ussa, elle a tout gardé ! Tu voiscomme elle est mignonne sa robe de petite fille ? Pourquoi n'as-tupas fait ça ? J'aurais tant aimé en avoir quelques souvenirs de monenfance, mais j'en ai que quelques photos.— Mais.... Célcile se fait à nouveau couper la parole par Ussa,qui veut qu'Angélique continue.— C'est vrai, maman, que j'ai filé toutes mes amourettes à Alice.Elle ne fait pas le cas. Elle les prend et les jettes après usage, commedes mouchoirs en papier. Moi je ne peux pas. J'ai tou<strong>jours</strong> cherchéquelqu'un qui m'aime. Il y a un peu moins de deux ans, j'ai cédé à lademande d'un pour coucher avec lui. Ça m'a fait horriblement mal.Je me suis senti sali et j'ai eu une peur bleue d'être enceinte. D'enplus il était assez brutal. Le tout ne m'a pas servi quand même, car ilest reparti le lendemain avec quelqu'un d'autre. Ils sont dégueulassesces petits mecs, dès qu'ils ont eu ce qu'ils veulent ; ils te jettentcomme un vulgaire papier grasse. J'ai ensuite largué tous les garçonsqui ne voulaient que coucher. Il n'y avait point qui m'aimaient vraiment.Tu te souviens bien de ma déprime, mais tu n'as jamais voulu299


11 800 Ans plus tard.savoir pourquoi. C'était comme d'habitude, te ne m'écoutes pas. Teme coupe la parole et tu commences avec tes ‘il faut’ et impératifs.De plus, tu ne trouves pas mieux, que m'envoyer chez ce con de psy.Maman, pourquoi tu te ne comprends pas que je suis aussi unefemme qui a besoin de parler à une autre dans laquelle elle aconfiance. Il y a des choses que je peux ni discuter avec Papa niavec Julien ni avec ce psy, car lui aussi est un homme. Je ne veuxsurtout pas les discuter avec Alice ou d'autres filles. Je n'ai que toimaman, alors écoute-moi quand j'ai besoin de toi. Maintenant j'aiLeith et je ne le partage pas. Si Alice ose le toucher, JE LA TUE !Laisse-le moi maintenant. Quelle importance si je passe la nuit aveclui ici ou ailleurs. Alors maman, traites moi comme une jeunefemme et non pas comme une petite fille.— Viens, dit Ussa à Leith et Julien, on va sur le pont et on leslaisse entre eux. Elles ont besoin de se parler.Ussa doit répéter ce qu'elle a dit en utilisant les gestes pour fairecomprendre à Julien qu'il doit laisser ses parents et sa soeur seuls unmoment entre eux. Elle a saisi la carte maritime, prend Julien par lebras et va vers le poste de pilotage. Elle fait un cercle avec son doigten air, pour le pointer ensuite sur la carte d'un regard interrogatif.Leith a voulu intervenir, mais comprend soudainement qu'Ussa veutque ce soit Julien qui l'explique et il se tait. Elle est étonnée de voirque le chemin parcouru n'est à peine que quelques doigts, leur centimètre.— Leith, dit-elle en se retournant vers lui, ces hiéroglyphes, signifient-ilsnos noms ?— Hélas oui, on aura des choses à apprendre. Ce signe-là, lacroix là, n'est pas une de leurs lettres, c'est là où notre pays était. Onest ici en ce moment, continue-t-il en désignant un endroit au milieude nulle part sur la carte. Cet appareil là indique notre position, tuvois.Julien, en essayant de suivre les paroles, voit que sa belle a deslarmes aux yeux et comprend qu'elle à du chagrin à cause de soncher pays disparu. Il cherche à la réconforter en lui murmurant desmots doux à son oreille. Il lui montre ensuite, pour faire diversion,comment tenir le cap et lui montre l'itinéraire qu'ils comptent300


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.prendre. Armand qui vient de remonter, fait signe de sa tête à Ussade descende dans la cabine pour rejoindre les deux autres femmes,car elles ont commencé à regarder sa garde robe et ses souvenirs depetite fille et ont besoin de sa présence. Armand va vers l'avant dubateau et fait signe à Leith de lui suivre. Il veut lui monter commentajuster le foc et la grande voile par rapport au vent, car il a vu que legarçon s'y intéresse.Le soir venu presque tout le monde, sauf Cécile qui est restée enbas pour regarder la télé, voit apparaître une image qui semble flotteren air à côté d'eux. C'est Leith qui la reconnaît en premier et pourcause, c'est sa maman.— Bonjour Leith, bonjour tout le monde, me laissez-moi présenter.Je m'appelle Hélène Ajahel et je suis la maman de ce garçon-là.— Bonjour maman, gentil d'être venu nous voir. Dit-moi, où tetrouves-tu en ce moment ? J'ai cru que vous vouliez tous aller autemple finir vos vies en prière ?— Oui, c'est ça, mais les prêtres ont déménagé une partie del'écran qui n'était pas endommagé par le premier tremblement et legénérateur en sous-sol en dessous le temple. On se trouve donctou<strong>jours</strong> enfermés dans ses catacombes. Je crois bien, car les tremblementsont cessé, que nous nous trouvons au fond de l'océan ence moment. On a, par contre, encore assez à manger et on nemanque étrangement pas de l'air frais. Il y a ici un véritable labyrinthe44 qui parcourt, à ce qu'on dit, tout le pays. Leith mon cher,mais dit-moi, où tu es maintenant, n'est pas le pays des morts, n'estcepas ?— Non maman, je te présente : voici Angélique, ta belle-fille. Julienson frère, le fiancé d'Ussa. Voilà Armand Leblanc, le père d'Angéliqueet Julien. Mais maman, dit-moi, comment a-tu pu nousvoir ? Y a-t-il quelque chose de spécial ?44 C'est le cas pour les Andes en l'Amérique du Sud, ainsi qu'une partie des États unis. Nulne le sait pourquoi et quand ces galeries ont été construite. Une partie de cette infrastructureest utilisée par le CIA et est mieux connue sous le non “Zone 51”301


11 800 Ans plus tard.— Oui mon garçon, j'ai voulu voir ma prochaine ré-naissance,car la fille que t'aimes tant et tu tiens à côté de toi, mon garçon, n'estd'autre que moi !— Ça alors, dit Angélique. Bonjour moi-même, tu vas bien ?— Oui, ça va, répond-elle et continue avec son sujet précédant :je finirai cette vie ici en bas comme le font des moines. Prends le relaisAngélique et prends bien soin de mon fils. Leith mon garçon,prends bien soin d'elle.Entre temps un autre visage se présente et compte aussi direquelque chose :— Bonjour tout le monde, bonjour Leith. Je me présente ; jem'appelle Ilos Ajahel et je suis le papa de Leith. On n'a malheureusementpas l'occasion de faire connaissance en chair et en os,comme les parents d'Ussa l'ont pu faire, mais je pense que cette présentationfait aussi l'affaire.— MAMAN ! VIENS VITE ! Ce sont les parents de Leith quisont là pour un moment, crie Angélique. Voici Cécile Leblanc,notre maman, ajoute-t-elle une fois que sa maman est remontée aupont et continue : Voilà maman, Hélène et Ilos Ajahel, les parentsde Leith.— Enchanté, dit Cécile.— Enchanté, répondent les parents de Leith.— Puisqu'on est tous là, dit Angélique et continue en s'adressantaux deux personnes flottant en air à côté de leur voilier, puis-je vousdemander officiellement la main de Leith ?— Avec notre bénédiction et celle de Ra mon enfant, lui répondIlos.— Ussa, dit Hélène, où est Pénélope ? Je lui avais confié la baguepour Angélique.— On a pris son bagage avec nous, répond-elle, mais Pénélopeelle-même a dû être transporté dans un hôpital spécialisé avec unegrave blessure à la tête. On va regarder dans ses valises. Elle seracertainement d'accord, n'est-ce pas Leith.Ils passent ainsi encore un moment à bavarder ensemble. C'estsurtout le fait que Hélène et Angélique ne soient qu'une et mêmepersonne qui n'est pas bien compris par tout le monde. C'est avant302


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.tout Armand avec son esprit cartésien qui a du mal à l’accepter. Desavoir, qu'il a existé avant et existera après, ailleurs et dans la peau dequelqu'un d'autre, a sur lui un effet bizarre qu'il a du mal à admettre.— Ussa mon enfant, lui dit Hélène, veux-tu bien passer la bagueau doigt d'Angélique à ma place au moment voulu ? Je te remercie.Vous voyez, continue-t-elle en s'adressant à l'assemblée, nous avonschez nous cette coutume. Cette bague m'était transmise ainsi, debelle-mère en belle-fille.— Vous ne trouvez pas qu'ils sont encore un peu jeunes pour sefiancer, leur demande Cécile.— Non, lui répond Ilos, nous avions nous-même cet âge làquand nous sommes nous fiancés.— Je crains, qu'on doit s'y mettre aussi, dit Armand à Cécile, on aencore des bagues de nos parents. Ne t'y oppose pas, dit-il à safemme qui a voulu protester, on leur doit ça. Tu ne vois pas commentils sont heureux ?— Excusez-nous, leur disent les Ajahels, on doit céder notreplace à d'autres. On vous souhaite une bonne chance et bon voyage.C'est sur ces mots que leur image disparaît, mais pas sans avoirfait les dernières salutations de la main.— Tu te rends compte ce que tu as fait en acceptant qu'Ussa teremet cette bague, demande Cécile à sa fille ?— Oui maman ! Je suis heureuse. Je comprends maintenantpourquoi on se sentait tellement attiré l'un vers l'autre.Ussa s'est à moitié réveillé et sente qu'elle n'est pas toute seule.Elle ne se réalise pas tout de suite où elle est et croit que c'est Leithqui dort à côté d'elle. C'est quand elle s'apprête à lui demander :« Mais qu'est-ce que tu fous dans mon lit ? », qu'elle se réalise, quel'homme à côté d'elle, qui la tient dans ses bras, dans cette petitecouchette serrée de la cabine du voilier, est Julien et non pas Leith.Elle se souvient tout à coup la soirée qu'ils ont passé ensemble sur lepont sous le ciel étoilé. C'est Armand qui a barré jusqu'à minuit etce sont Angélique et Leith qui ont pris le relève. Ils auraient dû réveillerJulien vers trois heures, mais l'ont visiblement oublié. Quand303


11 800 Ans plus tard.elle lève la tête, elle voit Angélique qui se tient dans l'encadrement dela porte avec un grand sourire et les demande :— Alors les amoureux ? Bien dormi ? Vous venez pour un petit-déjeuner?— Qu'est-ce qu'il se passe, demande Julien encore à moitié endormi,tu t'es endormi à la barre ? Tu as oublié de nous réveiller ?— Non, pas du tout. C'était tellement mignon de te voir avecUssa dans la même couchette, qu'on t'a laissé dormir. Tu méritaisbien ces quelques heures de bonheur. Tu dormais si bien que tu n'asmême pas remarqué qu'on t'a pris en photo.— Tu as pris une photo de nous ? Quand on dormait ? Tu n'ypenses quand même pas !— Si, tu peux venir la voir. Ce sera un bon souvenir tu sais. Tuviens alors, on t'attend au petit-déjeuner.Cécile, qui vient de se lever aussi, regarde les petits yeux d'Angéliqueet Leith d'un air interrogatif et s'apprête à dire quelque chose,mais c'est Angélique qui est plus vite et lui dit :— NON MAMAN ! Ce n'est pas ce que tu penses ! Leith et moiavons veillé toute la nuit. On a laissé dormir Julien et Ussa, ilsétaient tellement mignons les deux. Tout heureux ensemble. Leithm'a montré, l'a essayé en tout cas, les étoiles et même son astrolabe.Il l'utilise comme un sextant.— Il faut qu'il me le montre aussi, dit Armand. Il n'existe plus unau complet et ceux des musées sont tous en miettes dont personnene sait comment s'en servir. On sait maintenant que les marins d'antans'en servaient pour se repérer avant l'invention du sextant.— Et l'heure précise, ajoute Angélique, car je crois savoir qu'unsextant ne vaut pas grande chose si on n'a pas l'heure GMT correcte.On pourrait déterminer la latitude, mais jamais la longitude sansheure précise. C'est ce que tu nous as appris en tout cas.Ils continuent encore à discuter ainsi pendant le petit-déjeuner etmontent ensuite au pont. Il n'y a pas grande chose à faire pour lanavigation, car ils peuvent maintenir le même cap pendant au moinsune journée. Ce qui laisse le temps pour d'autres occupations. Angéliqueredescend dans la cabine où Cécile essaye d'expliquer à Ussa304


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.ce qu'elle fait. Qu'il ne faut avoir qu'une seule fois la même chiffredans une case, dans une colonne et dans un rangé.— Maman ? As-tu un moment ?Elle fait signe à Ussa qui voulait partir, qu'elle peut rester et continue:— Ussa veut sûrement demander à toi et à papa officiellement lamain de Julien. Tu devrais peut-être chercher une bague pour elle.T'en as encore des bagues de grand-mère et tu les as pris avec toi.— Tu veux que je cherche une pour Leith en même temps peutêtre?— Non, on peut attendre un petit peu. Ça ne presse pas, il saitattendre. J'ai de toute façon besoin de te parler et tu sais maintenantpourquoi.— Oui, répond Cécile, la première fois n'était pas la bonne et tuas peur maintenant. Reste un moment avec Ussa, je vais regarder ceque j'ai pour elle.Ussa rougit quand elle voit Cécile revenir avec sa boîte à bijoux etelle a tout à coup compris le contenue de la conversation d'Angéliqueet sa mère. Angélique lui fait oui de la tête et va chercher Julienet son père.— Papa, Julien, il faut descendre, car Ussa veut vous demanderquelque chose de très important. Leith et moi tiendront la barre enattendant.La nuit suivante, c'était le tour à Julien et Ussa d'oublier de réveillerAngélique et Leith. Ussa, ravi de la bague reçue de sa bellemère,a réussi à expliquer à Julien et Armand que Leith n'avait pasdormi deux nuits de suite et qu'il vaudra mieux le laisser tranquillejusqu'au lendemain. Ils dormaient, à l'étonnement de Julien et Ussa,qui voulaient les réveiller comme ils l'ont fait à eux le jour d'avant,chacun sagement dans une couchette. Ils ont donc refermé la porteet les laissé dormir.— Leith et Angélique, ne viennent-ils pas pour le petit-déjeuner,demande Cécile ?305


11 800 Ans plus tard.— Laisse-les dormir, dit Julien, ils ont l'air fatigués tous les deux.Ils n'ont d'ailleurs même pas osé dormir ensemble. Ils dorment chacunsagement dans une couchette.Le chemin de retour ne se fait pas aussi vite que l'aller. Ils nesont pas pressés et même Cécile a, malgré les nuages, pu se bronzer.Surtout qu'un tempo plus mollo permet-la de regarder la télé, mêmesi la réception laisse, à cause des mouvements du bateau, à désirer.Durant le voyage aller, le voilier bougeait trop pour une bonneréception satellite et Cécile a dû se rabattre sur ses mots croisés.C'est donc ce matin qu'une Angélique et son Leith, venant pour lepetit-déjeuner, constatent très étonnés que les autres sont déjà prêtspour le dîner.— Alors, bien récupéré, leur demande Armand ? On vous a laissédormir. Faim ? Il reste un peu de café dans le thermos, si t'enveux. Il faut, par contre, mettre une croix sur les croissants frais, onn'a pas eu le temps d'aller à la boulangerie.— Il nous reste assez de craquottes et de la confiture, non ? Luidemande Angélique. J'en avais prévu pour plusieurs.Ussa, qui ne voit pas remonter ses deux amis, descend dans cabineet voit à son étonnement un mélange de choses hétéroclites surla table. Angélique a sorti en fait son ordinateur portable et saisissefur à mesure les données de Leith dans un tableur, dont elle tente delui expliquer le fonctionnement.— Tiens Ussa, dit Leith, on met mes coordonnées dans son engin.Cette machine sait faire des millions de calculs avant que nousayons le temps de faire un clin d'oeil. L'impact a modifié la précessionet j'ai des erreurs si j'utilise mon astrolabe. Viens voir, elle a uneimage superbement nette d'Andromède.— Eh ! Leith, dit elle en regardant l'image et sans y prêter davantaged'attention, as-tu essayé d'apprendre des mots de leur langue.Moi, je commence à connaître quelques-uns.— Oui, on s'est amusé à désigner les parties du corps. Du visageet d'autres si tu comprends ce que je veux dire.306


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Oui, dit Ussa avec un sourire, c'est pareil pour nous deux.Mais, dit-moi, tu n'as pas partagé la couchette avec elle, pourquoidonc.— Je n'ai pas osé lui demander et elle a, je crois, peur. Je penseque je dois avoir un peu de patience. Je n'ai pas compris pourquoi,mais elle a besoin de temps. Elle sait maintenant qu'elle n'a rien àcraindre de sa copine Alice. Le reste viendra quand ça viendra.<strong>Les</strong> <strong>jours</strong> se suivent et ne se ressemblent pas. La veille à la barrevient par contre plus délicat, car ils se rapprochent la zone de LaManche avec son trafic maritime intense. <strong>Les</strong> Leblanc ont décidéd'avoir de quarts plus courts de sorte qu'il y ait un qui tient la barreet l'autre qui veille. Armand et Cécile se sentent heureux que leursenfants s'occupent de la veille de la nuit. Ils sont jeunes et supportentmieux les nuits blanches, mais c'est surtout Cécile qui ne sesente ni assez bon marin pour tenir la barre ni pour faire la veille.Pendant la journée, ça va. On voit les bateaux de loin. C'est unesoudaine excitation de Leith qui attire l'attention de Julien. Il vienten fait avec la carte maritime qu'il montre à Ussa et lui explique qu'ilsne sont pas loin d'où la famille à Pénélope voulut se rendre.— Mais mon cher Leith, dit Ussa en faisant un geste circulaireautour d'elle, il n'y a pas ombre d'une terre par ici. Il y a de l'eau, del'eau et encore de l'eau. Où veux-tu chercher une terre par là ?Julien, qui commence à comprendre un petit peu, saisisse la carteet le montre à sa copine. Il essaie lui expliquer que cette zone bleuesur la carte est là où a été jadis le continent.— Papa, dit-il en se tournant vers Armand, je crois comprendrece que Leith veut nous dire. Nous sommes à l'endroit où la famillede Pénélope voulait se rendre.— Oui terre, dit Leith et désigne des zones en pleine mer ainsiqu'à côté de Cornailles.— J'ai pu comprendre, que ces terres appartenaient à deux deleurs amis, des celtes, dit Angélique. Ils croyaient avoir une plusgrande chance de survie là que plus au sud, à cause du déluge qui allaitsuivre à coup sûr.307


11 800 Ans plus tard.— Nos irlandais et écossais sont des descendants de leurs amis etleur concitoyens alors, lui demande Armand.— Oui, sûrement, lui répond Angélique, et nos basques sont sûrementles descendants du plan d'évacuation de Pâris et Séléné, carc'est bien dans les Pyrénées qu'ils voulaient se rendre.Armand les explique qu'il compte aller au nord jusqu'aux Îles deScilly et prendre ensuite la direction est en suivant la côte sud del'Angleterre. Il commence à changer le cap, pour le mettre en directionnord-est. Il leur dit que ça ferra encore neuf heures avant qu'ilfaille mettre le cap sur l'est. Il leur dit que cette route n'est, à causedu vent, pas aussi vite que celui de maintenant, mais plus sûr.— Si tout va bien, dit-il aux autres, nous serons à Fécamp demainà la fin de l'après-midi.Ussa qui a passé l'essentiel de son temps à regarder la côte anglaiseavec les jumelles d'Angélique, descend dans sa cabine et ouvrepar hasard une autre de ses valises que sa mère lui a confiée. À sasurprise, elle y voit un paquet cadeau avec la remarque « Pour lesparents d'Angélique ». Elle remonte avec ce paquet et le montre àLeith et lui dit :— Mes parents m’ont mis un paquet cadeau pour mes beauxparents.J'ai honte de ne pas l'avoir trouvé tout de suite il y a cinq<strong>jours</strong>. Tu crois qu'ils m'en veulent de l'avoir gardé si longtemps ?— Non, lui dit Leith, donne le les tout de suite. Ça leur fera plaisir.Mais regarde bien s'il n'y a pas un pour Angélique et Julien. Çam'étonnerait s'ils les ont oubliés. Il y a sûrement d'autres paquetspour eux.Pendant que Armand et Cécile déballent le paquet, Ussa redescendà nouveau et trouve effectivement deux autres pour Angéliqueet Julien. Quand elle revient avec les deux autres paquets, lesparents ont déjà déballé les leurs et regardent un peu incrédule lesdeux appareils ressemblant à un téléphone mobile, mais presque dépourvude boutons et ayant un large écran scintillant comme ducristal. Le paquet de Julien contient également un même dispositif,dont il s'imagine l'usage. Angélique, en déballant le sien, constate308


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.qu'il y a deux boîtes à l'intérieur. L'un d'eux deux contient égalementce qu'Ussa appelle un communicateur, mais l'autre contient uneboîte avec un superbe collier de perles à trois rangées et une lettre deremerciements, muni du cachet officiel du roi Bel-Ra.— Alors, que dis-tu maintenant, lui dit Cécile. Son père a été généreuxavec toi.Angélique regarde, en devenant tout rouge, abasourdi par le cadeau,un moment silencieusement l'assemblée, se lève, va vers Ussaet lui donne une bise sur chaque joue en lui disant que c'est pour sonpère. Julien, monté voir au pont si tout va bien, vient de redescendredans la cabine et voit le collier et lui dit :— Pâris a été généreux avec toi, tu dois maintenant t'acheter unebelle robe qui va avec ce collier. Tu ne comptes tout de même pas leporter avec un jean et un T-shirt, n'est-ce pas ?— Ce boîtier, comment fonctionne-t-il, demande Armand ? Iln'y point de boutons pour faire un numéro, car c'est visiblement unesorte de téléphone.— Ça marche avec les pensées, lui dit Angélique, il suffit demettre les pouces sur ces boutons-là et penser à celui à qui on veutparler. Essaye-le entre toi en celui de maman. Je crois savoir qu'ilsmarchent partout, même ici en pleine mer. Ce truc n'utilise aucunréseau, il marche à la télépathie.Pendant que les quatre Lebanc s'amusent à se téléphoner, Ussafait signe à son compagnon de tou<strong>jours</strong> de la suivre à la cabine videoù se trouvent les autres bagages. Elle ferme la porte et lui demande:— Pourquoi attends-tu pour demander la main d'Angélique àCécile et Armand ?— Elle voulut attendre, non ?— Écoutes Leith, c'est bien d'essayer d'être sage, mais Angéliqueattend que tu prends l'initiative. C'est à toi maintenant d'agir. Tuverras, elle sera toute heureuse. Elle à besoin de toi. Elle a besoinde pouvoir s'appuyer sur toi. C'est toi l'homme de sa vie. Je sais quetu n'as jamais eu quelque chose avec une fille et tu ne te sens pas assezassuré, mais n'oublies pas qu'elle n'a qu'une seule expérience quine s'est pas bien passé. Alors, ne le fais pas attendre davantage. Elle309


11 800 Ans plus tard.a confiance en toi. Aide-moi maintenant, je veux chercher la baguede ta maman, car je dois la remettre à Angélique, rappelles-tu ?Ils fouillent un moment les valises de Pénélope et tombent effectivementsur un paquet sur lequel Leith reconnaît l'écriture de samère : « À remettre à la gauloise de Leith, offert par sa maman. » Ussaremonte avec la petite boîte contenant la bague destinée à Angélique,l'appelle et lui dit, même si elle sait que ses paroles ne sont pas toutescomprises :— Angélique, je te remets cette bague de la maman de Leith. Çasignifie qu'elle a accepté ta demande et te considère comme sa bellefille.Ussa prend la main d'Angélique et la bague lui va, à son étonnement,très bien. Ni trop grande ni trop petite. Elle donne un petitcoup de coude à son compagnon pour lui signifier que c'est à lui dejouer maintenant. Armand, qui est monté voir Julien à la poste depilotage, est surpris qu'Ussa l'appelle pour venir dans la cabine. Ussaelle-même reste avec Julien à la barre pendant Leith prend tout soncourage et demande solennellement la main d'Angélique à sesparents comme la coutume de son pays le veut. C'est Julien qui voiten premier que sa mère a donné une bague de son papa à elle àLeith. Angélique, qui le suit, est visiblement aux anges, une chosequi n'est pas échappée à Ussa.— Tu vois, dit-elle à Leith, comme elle est heureuse ? Elle n'attendaitque ça !310


IlÀ Terre.règne une certaine excitation à bord du voilier. Ussa et Leith,en se partageant les jumelles d'Angélique, ont constaté que lacôte anglaise s'éloigne après avoir changé le cap et qu'ils croisent denombreux navires divers. C'est surtout Leith qui cherche à se repérersur la carte maritime pendant Angélique tient la barre. Il a prissur lui la tâche de veiller sur le trafic maritime. Il est en faitconscient que les gros bateaux ne peuvent pas s'arrêter facilement etqu'il vaut mieux les éviter. Il a compris maintenant pourquoi Angéliqueet son père n'ont pas voulu traverser La Marche en ligne directe.C'est ce qu'il tente d'expliquer à Ussa.— Tu vois, dit-il en désignant un endroit sur la carte côtière à uneUssa moyennement intéressée, on a évité ce secteur ici. Tu vois toimêmemaintenant que la circulation des navires est particulièrementélevée par ici. On a quitté cette côte ici et on va par là. On va tantôtprendre la direction sud-est. Tu vois que Armand et Julien sont entrain de changer l'orientation des voiles. On traverse pendant lesquatre heures qui suivent ce secteur avec un trafic maritime assezintense. C'est pour cela je garde cette double longue vue avec moipour veiller sur les bateaux qu'on croise.— Ces falaises de la côte qu'on a vues là au nord, lui demandeUssa, ce sont-ils les falaises du pays des celtes ?— Oui ma chère, lui dit Leith, ils appellent ce pays l'Angleterre,dont on vient de quitter la côte D'après ce que j'ai pu comprendre,on met le cap sur la ville qu'ils ont quittée deux semaines plus tôt.— Nous serons donc là-bas à la fin de l'après-midi alors, puisqu'onvient de manger.— Oui, Armand a déjà contacté un copain, c'est lui qui vientnous récupérer au port. C'est le père de Alice, il viendra avec un véhiculeassez grand pour nous tous.— Il l'a contacté comment. Avec ce petit boîtier à eux ?311


À Terre.— Oui, lui dit Leith, ce sont leurs communicateurs qu'ils appellenttéléphone mobile. Ils ne peuvent, par contre, que l'utiliser àcondition à être assez près d'une station relais. Armand était tout àl'heure assez près de la côte pour pourvoir utiliser le sien et c'est làqu'il a pu contacter son copain.— J'ai vu, lui dit Ussa, qu’Angélique trafiquait aussi son appareil.Il me semble qu'elle a pris un cliché de toi. Ils peuvent, d'après ceque j'ai compris, non seulement se parler, mais aussi s'envoyer destextes et des images. Je soupçonne que toutes ses copines saventmaintenant qu'elle s'est fiancée avec toi.— J'ai pu comprendre aussi, lui répond Leith, que ce ne sont passeulement les amis d'Angélique et Julien qui sont au courant, maisaussi la presse. Le fait de leur disparition pendant quatre <strong>jours</strong> enplein mer n'est pas passé inaperçu. D'après Angélique, qui a parlé àsa copine Alice, nous serons attendus par la presse. Tu as intérêtmettre ta plus belle robe de gala tout à l'heure avant d'accoster, parcequ'ils savent déjà que la famille Lebanc a repêché une reine d'Atlantideen chair et en os.— Comment sais-tu tout ça ? Tu as pu parler avec Angélique ?— Mais oui, dit Leith, c'est tout bête. J'ai voulu lui montrer lefonctionnement du communicateur et c'est en mettant nos poucessimultanément sur les touches, qu'on c'est aperçu qu'on pouvait separler normalement.— Tiens, lui répond-elle surprise, je n'y avais pas pensé de le faireainsi. Mais dit-moi, continue-t-elle, j'ai un truc à te demander. Tun'as pas impression que les <strong>jours</strong> sont plus courts ? J'ai envie de mecoucher plus tard et de me lever plus tard.— C'est normal, lui dit Leith, ils ont, souviens-tu, neuf <strong>jours</strong> deplus sur leur calendrier, qui fait à peu près de trente-cinq minutes enmoins par jour. C'est pour cela que tu es perturbé dans ton rythmejournalier. Je l'ai remarqué aussi, mais on doit s'y faire. Ce n'est pasénorme et on s'habituera.Ussa est descendu et remonte avec un deuxième paire de jumelles,ceux de Armand. Elle se met à scruter l'horizon où une fineligne commence à se dessiner. Elle devine là, tout excitée, son nouveaupays. Armand a dit à Angélique de modifier légèrement le cap,312


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.telle qu'ils passent devant Étretat. Ils peuvent, de cette façon,commencer à ranger les voiles pendant que Leith et Ussa peuventadmirer la Côte d'Albâtre et voir leur nouvelle ville depuis la mer.Ussa commence à distinguer à sa droite, Leith lui à dit que les marinsd'ici disent tribord, l'embouchure d'une grande rivière et s'étonnequ'on ne se dirige pas en cette direction, car elle a bien vu de grandsnavires aller par là et en déduit qu'il s'y trouve un port maritime.Leith, par contre, qui essaye de suivre ce que fait sa copine, s'est bienrendu compte de la modification de la direction. Il va avec la cartecôtière vers Ussa et lui dit :— Tu vois ! Ils vont par là, dit-il en désignant un endroit sur lacarte côtière, il n'y a pas de port par là, mais c'est la ville où on va habiter.Puisque tu as les longues vues sur toi, regardes bien droit-devant,on commence à la voir. Le port où on va amarrer est un peuplus sur la gauche.— Je crois savoir, dit-elle à Leith, qu'ils disent ici bâbord à laplace de gauche. C'est ce que tu m'as dit en tout cas. Mais dit-moi,comment appelle-t-elle cette ville où on va habiter ? Je n'arrive pasencore à lire leurs hiéroglyphes.— Elle s'appelle Étretat, si je prononce bien son nom.Armand et Julien ont entre temps commencé à descendre lesvoiles pour les ranger, tandis Angélique a démarré le moteur pourprendre le relais. Ils sont à présent tout près de la côte et leur villeest bien visible, même sans jumelles. Ussa est particulièrement enchantépar le charme de cette petite ville avec sa plage en forme dediadème, renfermé entre ses hautes falaises mêlant le vert des landesavec le blanc de la craie. Elle y distingue nettement les petits bateauxde location et ces planches munies de voiles, l'occupation principaled'Angélique et Julien en période estivale. Elle continue à admirer lacôte jusqu'à une plus grande ville ayant un port devient visible. Ellese doute que c'est bien dans ce port de cette ville qu'ils vont amarrer.Leith, qui porte tou<strong>jours</strong> le vieux jean coupé au ras des genoux et unT-shirt d'Angélique, fait signe à sa compatriote qu'ils doivent s'habillerpour l'accueil.— Ussa, dit-il, il est temps de nous préparer. J'ignore commentles services officiels de ce pays vont réagir, mais une chose est sûre ;313


À Terre.ils te croient reine, alors habilles et comportes toi en tant que telle.As-tu vérifié, si tu as assez de moyens de payement si jamais ils te réclamentun droit d'entrée, comme certains pays de notre époque lefont ?— Je vais regarder ce que j'ai, dit-elle à Leith, je n'ai même pas vérifiétoutes mes valises, car j'en ai un voyage. Celles que tu as emmenéesen plus de celles que mes parents m'ont remis.C'est quand ils entrent dans le port de pêche et plaisance de Fécamp,qu'Ussa remonte, accompagné de Leith, habillée en robe degala ressemblant ainsi à méprendre à la dernière reine d'Égypte. Laréaction d'Angélique ne se fait pas attendre :— Tiens, dit-elle, César et Cléopatre.— Non, dit son père, César n’a jamais porté un toge, il avait lecoutume de porter des habits militaires romains. Leith ressembleplutôt à Socrates ou Platon.— Il me semble, dit Cécile en regardant Ussa attentivement, quenotre petite reine est bien nerveuse. Elle a peut-être peur de débarquerchez nous ? Craint-elle les douanes ?— C'est sûrement la première fois qu'elle doit représenter sonpays, lui dit Armand.Armand, à la barre depuis un certain temps, dirige le voilier versla place qui leur été attribué jusqu'à demain. Au quai se trouve déjàtout un comité d'accueil, y compris ce vieux bonhomme mieuxconnu en tant que “le capitaine”. C'est lui qui attache les amarres duvoilier et salut l'ensemble.— Salut mon pote, tu as emmené deux enfants supplémentairesavec toi ? On a parlé de long en large de toi. Ta disparition mystérieusen'est nous pas échappé. La troisième personne que tu as repêchée,où est-elle ?— Salut capitaine, tout ça est une longue histoire, mais je croisqu'on doit rendre une petite visite chez ces messieurs-là, dit il en désignantles douaniers. De plus je crois bien que ces messieurs de lapresse aimeront aussi nous poser quelques questions. Tu peux aiderBernard de tout mettre dans la voiture ? Je te remercie. Je viendraiplus tard te payer un pot, on pourrait discuter de ce que nous est ar-314


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.rivé. Je crois que Julien et Angélique ont pris des photos et ont filméune partie avec le camescope.L'interrogatoire au bureau des services des douanes n'a pas étéaussi terrible que craint. L'employé d'accueil s'est comporté certainementd'une façon un peu désagréable, mais rapidement remplacépar un de ses collègues qui, à la surprise de tous, a compris partiellementles paroles des deux rescapés. Leith, n'a eu d'autre chose à déclarerque ses vêtements, ses bouquins, et puis un peu de bric etbraque consistant ses souvenirs. Le bagage d'Ussa, qui a pris unvoyage de valises avec elle, est déclaré courrier diplomatique, carappartenant à une souveraine d'un pays, même disparu. À la surprisegénérale, un autre employé vient entre temps avec un documentattestant leur appartenance ethnique.— Bonjour monsieur, bonjour votre altesse ; vous avez demandéune recherche d'appartenance ethnique le jour où l'hélicoptère de lamarine a récupéré une personne blessée à la tête.— Non, l'interrompe Angélique, c'était moi qui l'avait demandéça.— Bon, continu-t-il, peu importe qui l'a fait. C'est le résultat quicompte. Il atteste en fait que vous êtes tous d’origine européenne,même très ancienne. Le dénommé Pénélope Axarz a un code ADNtrès proche des Irlandais. En ce qui concerne mademoiselle Ussa deBel-Ra, on a pu trouver les ossements de ses parents. Elle estapparentée à des basques, de pur sang, ainsi est le dénommé LeithAjahel. Ce qui est important, c'est que cette teste confirme que vousêtes bien ceux que vous prétendez être. Ceci me confirme égalementce que j'ai tou<strong>jours</strong> cru savoir ; c'est que mon peuple est de provenancede l'Atlantide.Angélique qui a traduit les paroles au mieux en utilisant son communicateur,regarde sa future belle-soeur qui reste planté là et prendun moment avant de réagir.— Mes parents, balbutie-t-elle ? Vous avez trouvé leurs ossements?315


À Terre.C'est à nouveau Angélique qui doit faire l'interprète, avant quel'homme puisse répondre.— Oui votre altesse, c'est un musée qui les a. Ils seront ravis defaire votre connaissance. Voulez-vous bien nous excuser avoir dérangéle sépulcre de vos parents. On ne le savait pas, on ne savaitpas plus que c'était une tombe d'un couple de gens très importantsâgés de quatre-vingts à quatre-vingt-dix ans enterrés quelque partdans les Pyrénées. C'est tout ce qu'on savait.— Êtes-vous sûr que ce soient mes parents, demande-t-elle parAngélique interposée ?— Oui, votre altesse, avec une marge d'erreur d'un sur unmilliard. C'est bien pour cela que ça me fait un effet bizarre de vousvoir ici en chair et en os. Pouvez-vous nous communiquer les nomscomplets de vos parents ? Le musée aimerait les avoir. Je croisqu'ils ont prévu quelque chose de spécial, mais il vaudra mieux quece soit vous qui va vers eux pour le discuter.L'employé se lève et prend congé de ses invités en leur souhaitantbienvenue au nom de la République. C'est en sortant du bureau desdouanes qu'Ussa, Angélique et Cécile voient tout ce comité qui se retourneaussitôt vers eux. Mais avant que sa belle-soeur et sa bellemaman aient pu dire quelque chose, c'est Ussa qui leur dit :— Ne crains rien, je suis habituée à ça. Angélique, dit-elle à sabelle-soeur, tu peux leur dire que je leur accorde cinq minutes. Parla suite, ils doivent demander une audience par écrit.Armand, en les attendant dehors, est en grande discussion avecles gens de la presse et le capitaine qui les attend aussi, car il a chargé,aidés par Julien et Leith, toutes les valises dans sa vieille 4L. Il avaitdit à Armand qu'il n'arrivera jamais caser le tout dans la voiture deBernard. Ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il compte boire un pot chez Armandet Cécile et discuter un peu. Il est curieux comment le voyages'est déroulé. Soudainement c'est le téléphone d'Armand qui se metà sonner.— Bonjour, Armand Leblanc à l'appareil, je vous écoute.— Pardon ?316


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Réveillé dites-vous ? Mais bien sûr, quand ?— D'accord, chambre 689 45 . Oui, j'imagine que vous avez besoind'un interprète. Elle parle une langue qui n'est pas très courante parici. Ce sont les basques qui arrivent à les comprendre, je crois.Vous avez peut-être un qui a appris la langue de sa grande-mère,non ? Ça vaut le coup d'essayer en tout cas. Vous en avez bien un,non ?— Ok, je vous rappelle sur ce numéro, d'accord ?— Oui, vous aussi, au-revoir.Le capitaine, ayant essayé de suivre la conversation, lui demande :— Qu'est-ce qu'il y a ? Une malade dans la famille ?— Non, lui dit Armand, c'est notre troisième passagère. Elles'était blessée gravement à la tête et on l'a transporté dans un hôpitalparisien. Ils viennent nous téléphoner qu'elle s'est réveillée et réclameses amis.— On peut la visiter, lui demande Bernard ? J'ai congé demain etje pourrais aller à Paris avec la bande. Ça va être juste avec six danscette voiture, mais c'est faisable.— Tu oses conduire à Paris, lui demande le capitaine, tu vas tefaire tuer là-bas. Ils conduisent comme des sauvages.— Le problème de Paris, dit Bernard, n'est pas conduire. Tonproblème commence quand t'arrêtes de conduite et commences àchercher une place de stationnement. À Paris tu as deux possibilités: interdit et indisponible. Mais restons sérieux, où est-elle, ta Pénélope? À La Pitié Salpétrière ? Si c'est là, on n'aura pas de problème.Comme ça, on pourrait faire une petite balade pour lesmontrer Paris.Armand monte ensuite dans le 4L du capitaine, tandis que lesautres vont à Étretat avec la voiture de Bernard. Le capitaine est ravique Armand vient avec lui. C'est ainsi qu'ils peuvent discuter de l'aventurevécue par la famille Leblanc. Arrivé à leur domicile, Ussafait comprendre à Julien qu'il fallait ranger ses valises dans “Notre”chambre. Elle fera le rangement final plus tard, laissant le temps à45 Ne cherchez pas à comprendre, ce numéro ne correspond probablement pas à une chambreexistant, mais est choisi pour son symétrie. Écrivez le sur une feuille de papier et retournezle. Vous allez comprendre.317


À Terre.Julien de faire le rangement de ses affaires et faire la place. Leith etAngélique font de même dans “Leur” chambre. Cécile a voulu protester,mais voit qu'ils n'ont pas de chambre supplémentaire et qu'ilfaudra vire ainsi pendant un moment. Ussa sort de la chambre,cherche Angélique dans la sienne et va dans la cuisine en faisantsigne à Cécile de s'occuper des apéritifs et ses invités. <strong>Les</strong> deux fillesviennent de temps à autre rejoindre les autres, pour autant les préparatifsle permettent. C'est Julien qui réagit en premier en voyant sasoeur s'affairer dans la cuisine :— Je savais qu'Ussa, quoique végétarienne, est un véritable cordonbleu, mais Angélique, je ne l'ai jamais vu faire autre chose que deréchauffer une pizza aux micro-ondes.— Heureusement qu'elles s'entendent bien, dit Cécile.<strong>Les</strong> deux filles ont, avant de continuer avec d’autres préparations,commencé à faire le tour des bouteilles dans le buffet. Tout à coupc'est Ussa, affairé d'ouvrir les bouteilles une à une pour sentir lecontenu et goûter un peu avec le bout de son doigt, qui appelle Leithen brandissant une bouteille de Calvados : « Eh ! Leith, viens voir !Quelque chose que tu connais ! » Il vient vers elle et saisisse un verre,verse un petit peu et déguste en connaisseur. « Mmm, c'est du bon ».— Dit donc, dit le capitaine, un connaisseur ! Ils en avaient ducalva chez eux ?— Oui, dit Angélique revenue dans le salon entre deux préparations,sa famille avait une arboriculture. Ils avaient toutes sortes defruits, jus de fruits, du cidre et ça. C'est son arrière grand-père qui l'ainventé ; il avait en fait oublié de l'eau de vie de cidre dans un tonneau,qu'ils ont retrouvé cinq ans plus tard.— Angélique, viens, appelle Ussa qui veut servir les mets, suiviquelques mots incompréhensibles pour tous sauf les deux filles.La soirée continue en mangeant les amuses gueules, façon Ussa,jusqu'à une heure tardive, tel que Armand et Cécile craignent pour lasécurité du capitaine qui insiste de vouloir renter. Il a même voulurevenir le lendemain chercher Armand qui doit rendre le voilier àChérbourg. C'est Cécile qui l'assure que c'est elle qui vient avec lui,car ils doivent encore nettoyer leur voilier. Surtout que c'est elle quiva récupérer ensuite Armand à Chérbourg en voiture. Ce sont sur-318


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.tout Ussa et Leith qui sont excités pour ce qui va suivre le lendemain,car ils vont, accompagné d'Angélique, Julien, Alice et son père,non seulement voir Pénélope, mais aussi la capitale de leur pays d'accueil.Leith et Angélique se sentent aussi anxieux, heureux et excitésà la fois et pour une tout autre raison, car même s'ils ont partagé lamême cabine pendant le voyage de retour, ils n'ont pas partagé lamême couchette et cette nuit sera la première qu'ils partageront égalementle même lit.Comme convenu la veille au soir, toute la famille s'est levée tôt etaprès un petit-déjeuner vite fait, les parents se rendent à Fécamppour nettoyer le voilier avant que Armand puisse l'amener à Chérbourg,là où il se trouve la société de location. <strong>Les</strong> quatre jeunesn'ont pas besoin d'attendre longtemps, car Bernard vient, accompagnéde sa fille Alice, déjà assez vite les chercher. Ils décident de partirtout de suite et de faire une halte café-croissants juste avant la stationde péage du pont de Normandie à cause de sa splendide vue surla baie de Seine. Après, cependant, il faudra se dépêcher pour être àtemps pour les heures de visite à l'hôpital. Leith et Ussa passent l'essentielde leur temps de voyage en essayant de se repérer sur la carteroutière de Bernard qui connaît le chemin et peut s’en passer. <strong>Les</strong>deux amis déduisent, vu l'augmentation progressive des habitationset de la circulation, qu'ils s'approchent la capitale de leur pays d'accueil.C'est Leith qui demande un moment donné aux filles où setrouve cette route portant le sigle A14, car il ne le trouve pas. C'estUssa lui fait le réflexe :— C'est sûrement une vieille carte, la route est probablement plusrécente que la carte.Fur à mesure qu'ils se rapprochent la cité de La Défense, les hautsbâtiments viennent de plus en plus visibles. Là, c'est surtout Leithqui est intrigué. Il se rappelle bien les conversations qu'il ait eue avecles Macs. Il sait qu'à partir d'une certaine hauteur, les murs d'un bâtimentdeviennent trop lourd pour pouvoir bâtir plus haut. Il sepromet de se renseigner, car demander une des trois filles ne sert à319


À Terre.rien ; elles s'y n'intéressent pas. C'est aussi Ussa qui, en regardant lesimmeubles, demande sans s'adresser à quelqu'un de particulier :— Y a-t-il des gens qui habitent là dedans ?— Non, lui répond Angélique, ce sont des bureaux. <strong>Les</strong> immeublesoù habitent les gens sont bien plus vilains que ceux-ci. Tudois avoir vu quelques-uns, car on est passé devant tout à l'heure.Malheureusement pour eux ils entrent dans un tunnel qui passedessous l'esplanade de La Défense, leur coupant ainsi la vu. Là aussi,c'est Ussa qui ait préféré passer ailleurs, les odeurs et le bruit de lacirculation l'incommodent. En sortant ce tunnel ils passent sur unpont d'un grand fleuve et c'est Leith qui demande par communicateurinterposé :— Ceci, est-il le même fleuve qu'on a traversé il y a quelquesheures plus tôt ?C'est Angélique qui lui fait oui de la tête et ajoute : « Il s'appelle LaSeine. On va traverser dans un moment ce qu'on appelle la plus célèbre avenuedu monde ; <strong>Les</strong> Champs Élysées. Regardes à ta droite, tu peux y voir au loinune tour de mille pieds, tout en fer. On l'appelle la Tour Eiffel. C'est le symbolede notre capitale. » Elle continue en désignant un monumentdroit-devant, devenu visible entre temps : « Tu vois droit devant ce qu'onappelle l'Arc de Triomphe, il fut construit par un empereur il y a deux centsans. »C'est avant tout Ussa qui est enchanté par aspect de la grandeavenue avec ses boutiques de tout genre. Leith, en la voyant regarderpartout à la fois, lance :— Si on fait descendre Ussa par ici, on ne la verra plus pendantdeux semaines.— Oh ! Dit Angélique, ce n'est rien, tu n'as pas encore vue leboulevard Haussmann avec ces grands magasins.— Eh ! Papa, lui demande Alice qui utilise entre temps le communicateurd'Angélique, on va s'arrêter aux Champs Élysées quandon rentre, non ?— Bien sûr, dit-il, à condition de trouver une place de parc.— Là habite notre président, dit Angélique en désignant un palaisà leur gauche.— C'est quoi, lui demande Ussa ?320


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Un roi élu par le peuple, lui répond Leith, comme certainsétats chez nous le font.— Le faisaient, lui corrige Ussa, n'oublie pas qu'on est onze millehuit cents ans plus tard. Elle continue en désignant l'obélisque droitdevant sur la place de la Concorde : tiens, un monument Égyptien !Entre temps ils sont arrivés aux berges de la seine en direction dela garde de Lyon où Barnard comptait garer sa voiture. Il veut allervisiter Pénélope durant la visite du matin, aller manger quelquechose au quartier latin, revenir pour la visite de l'après-midi et s'arrêteraux Champs Élysées après, sur le chemin de retour. Mais avanttout ça, il faut d'abord garer sa voiture et prendre le métro, une premièreexpérience d'un dispositif que ne connaissent nos rescapés del'Atlantide. C'est surtout Leith qui s'est étonné, contrairement à Ussaqui est anxieuse dans ses couloirs souterrains. Il exclame :— Un train souterrain, il fallait y penser !Bernard a dû leur expliquer qu'ils ont pu aller à pied, mais onn'est pas chaque jour à Paris et il n'y a pas de métro à Étretat, profitonsdonc. La cohue des gens courant dans tous les sens leur impressionne,ils se demandent où ils peuvent bien aller. Ussa semontre un peu craintive la première fois qu'elle a dû mettre sonbillet dans le portail automatique donnant accès aux quais.Après avoir suivi un dédale de couloirs, ils sont quand même parvenuesà trouver la chambre 689, celle où est Pénélope. Déjà avantd'ouvrir la porte, ils entendent le cri de joie de Pénélope qui n'entendpas seulement la langue de son pays, mais surtout les voix de sesdeux amis.— Entre ! Entre, s'écrie-t-elle, enfin des gens avec lesquelles jepeux parler !— Salut toi, dit Leith.— Bonjour ma chère, lui dit Ussa, comment vas-tu ?— Moi, ça va ! C'est ma tête qui va moins bien. J'ai manqué, à cequi paraît, tout juste de passer l'âme à gauche. Tu sais, je me suis réveilléici comme c'était annoncé dans mon rêve, sauf que je n'avais321


À Terre.pas la moindre idée où j'étais. Ils ont essayé de me parler, mais notrelangue ne correspond à aucune des leurs.— Tu te souviens de ce que t'est arrivé, lui demande Leith ?— Non, je me souviens qu'on avait quitté le port avec notre bateau,et puis c'est tout, mais parlons d'autres choses, présente-moites amis.— Avant cela, Pénélope, lui dit Leith, prends peut-être ton communicateur,car on peut se parler par ce dispositif interposé.— Julien, dit Angélique, passe le tien à Bernard. J'ai déjà prêté lemien à Alice et je partage celui de Leith. Toi tu peux très bien partagercelui d'Ussa.— Alors, continue Leith, ce monsieur-là est Bernard Mercier,notre chauffeur et le papa de cette demoiselle, Alice, une copined'Angélique, ici à côté de moi. Le jeune homme que tu vois avecUssa est son fiancé, Julien, le frère d'Angélique.— Alors Pénélope, lui dit Angélique, enchanté de faire taconnaissance en chair et en os. Ce jeune homme à côté de moi quetu, à ce qui paraît, connais bien, est mon fiancé.C'est après le tour à Julien, Alice et Bernard de se présenter. Unefois les présentations finies, ils échangent leurs nouvelles et racontentà Pénélope leur périple en mer, mais surtout l'angoisse deson accident. Pénélope raconte à son tour son séjour dans l'hôpital,la rencontre avec une femme de quatre-vingts et quelques ans etqu'elles comprennent un mot sur trois de ce qu'elles se disent. C'estce qui leur permettent de bavarder un peu. Pénélope les demande detout raconter sur cette ville où elle se trouve. C'est Bernard qui s'encharge, car le seul à connaître Paris assez bien. Ussa et Leith déclarentêtre navré de ne pas pouvoir dire plus sur leur nouvelle vie,car arrivés la veille à la fin de l'après-midi. Le temps passe ainsi tellementvite qu'il est déjà temps pour le dîner. <strong>Les</strong> infirmières font lescomprendre qu'il faille revenir cet l'après-midi. Leith a déjà étudié lepetit dépliant du RATP Parisien et déclare qu'il faut prendre cetteligne et remonter au quatrième arrêt.— On dit : descendre, si on sort d'un train dit Ussa.— Moi je dis remonter, car ces trains circulent tous en sous-sol etil faut ensuite remonter en surface avec ces escaliers automatiques.322


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Tu parles de quoi, lui demande Pénélope ? Des trains qui circulenten sous-sol ? Des escaliers qui montent tout seuls ?— Oui, j'aurais préféré rester en surface, lui dit Ussa, ces couloirsmalfamés m'effraient un peu, mais ça vaut la peine de voir cela.Mais on parlera de ça tout à l'heure, les soignantes s'empressent denous voir partir. On va faire une petite balade dans leur capitale,manger et on revient après te voir et te parler. Tout à l'heure machère.Ils ont décidé de prendre le métro à la station St Marcel et dechanger à la Gare Austerlitz au lieu de prendre la ligne dix en allant àpied jusqu'à la gare. C'est ainsi que les jeunes ont pu s'entraîner unpeu comment s'y trouver dans ce dédale de couloirs sous-terrains.En route, Bernard leur explique que la Sorbonne, le nom de la stationoù ils vont, est une université de Paris et que le quartier où ilsvont manger est la partie de la ville où ils se trouvent beaucoupd'étudiants. Quand ils sortent la bouche de métro, c'est surtout Ussaqui attire les regards. En partant ce matin, elle avait mis la mêmerobe que la veille, celle qui renforce son allure de reine. Nos deuxamis se sentent tous les deux un peu nostalgique quand ils déambulentdans les petites rues à la recherche d'une pizzeria. C'est àLeith de réagir en premier.— Tiens Ussa, j'ai l'impression qu'on va tomber sur la boutiquede Pénélope ou l'estaminet de Abdubu au tournant d'une rue.— Oui, répond-elle, ça me fait bien de la peine. Mais. Quecherche-t-on ?— Je crois qu'ils cherchent un endroit qui fait des plats pournous.Barnard et Alice ont en fait dit à leurs copains qu'il faille mieux allermanger une pizza, si on veut trouver quelque chose de végétarienpour Leith et Ussa. Ce n'a pas été très difficile d'en trouver un et ilsse trouvent rapidement à table. Quand le serveur vient les demanders'ils désirent un apéritif, c'est Ussa qui réclame, comme elle a d'habitude,un vin cuit. Leith suit rapidement son exemple, suivi d'Angélique.Julien et Alice, qui n'ont pas voulu en boire un apéritif, finissentpar craquer également. Seul Bernard renonce, la route estencore longue et il veut rester sobre.323


À Terre.— Mademoiselle ressemble beaucoup à la dernière reine de l'Atlantidequi a débarqué hier, leur dit le serveur.— Non, dit Angélique, ce n'est pas une ressemblance ; c'est ellemême.— Que votre altesse soit bienvenue dans notre établissement, ditil en faisant une petite courbure, c'est un honneur pour nous de vousrecevoir. Il continue en s'adressant à Angélique : comprend-elle lefrançais ?— Non, pas encore, mais elle a deviné vos propos.Leith et Ussa ont suivi la recommandation de leurs amis et sontun peu étonnés de voir le serveur venir avec une sorte de galette auxsauce tomates et fromages, visiblement cuit au four. Angélique a dûpromettre de rechercher les recettes pour Ussa qui veut évidemmentles essayer et sûrement pas du réchauffé aux micro-ondes. Le repasest suivi des glaces, un met dont surtout Ussa se raffole. À sonétonnement, certains sont accompagnés de chocolat chaud. C'estpour elle du jamais vu, mais apparemment bon. Elle se promet d'enprendre la prochaine fois, car la sienne est composée la moitié d'unepêche, de la glace et du chantilly. Quant aux cafés à la fin du repas,Ussa et Lilth créent la surprise en réclamant tous les deux que leurcafé soit accompagné d'un calva, une des seules boissons d'ici qu'ilsconnaissent. La balade de retour jusqu'à la station de métro se faitpar le Boulevard Saint Michel où Ussa se plaint du bruit et de l'odeurde la circulation. Leith fait remarquer que Poseidia n'était pas mieuxet que les grandes villes ne dorment jamais.De retour dans la chambre de Pénélope, qui les attend impatiemment,ils lui racontent comment ce quartier d'étudiants et de touristesse présente. Leith fait remarquer qu'il ressemble au leur àOsuo, sauf que celui d'ici est à plat. Le lit d'à côté de Pélélope estoccupé à présent par une autre patiente. Elle déclare de comprendreun petit peu de ce qu'elle lui dit. Même Leith et Ussa parviennent,comme Pénélope l'a fait, à dialoguer avec elle. Elle les expliquequ'elle est d'origine du sud-ouest de la France et qu'elle est ravied'entendre parler deux jeunes comme sa grand-mère.— Je m'appelle Armelle, dit elle aux autres. Ils m'ont aussi opéréà la tête, comme elle, sauf que j'avais une tumeur. Veuillez bien324


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.m'excuser que je parle à sa place, mais le docteur l'a dit qu'elle pouvaitsortir la semaine prochaine, si tout va bien. Il faudra peut-êtrerevenir la chercher, n'est-ce pas.— Vous venez me chercher alors, leur demande Pénélope qui adeviné ce qu'elle disait, on pourra faire une viré en ville avant derentrer. J'ai hâte de voir cette ville. Je n'ai qu'un petit bouquin pourtouristes avec des images. Je n'arrive même pas à lire leurs hiéroglyphes.Tu me les apprends, n'est-ce pas Leith, car si un est capabled'apprendre n'importe quoi, c'est bien toi.<strong>Les</strong> discussions durent encore jusqu'à la fin de l'heure de visite oùils prennent congé de Pénélope et de sa compagne de chambre et lapromettent de lui parler au communicateur, puisque Pénélope a lesien avec elle.Si on fait une promesse, on le tient. C'est la même chose pourBernard. Même si ce n'est pas facile pour Bernard de trouver uneplace de stationnement, il a fini d'en trouver une et pas trop loin dela plus célèbre avenue en plus. C'est Ussa qui exprime son étonnementqu'il y a plus de magasins d'un côté que de l'autre. Le tempsd'arrêt dans une célèbre boutique de parfums a été long, beaucouptrop long pour Bernard et Julien. Leith, quant à lui, n'a pas pu cachersa curiosité et est resté avec les filles. Après cela ils sont égalementarrêtés chez un célèbre disquaire où ils n'ont pas seulementpris un café à la première étage donnant une bonne vue sur l'avenue,mais aussi fait le tour les bacs en écoutant les disques exposés et présentésdans ce but. Hélas pour les cinq jeunes, il commence à venirtard et l'heure de retour a sonnée. Ils regagnent leur voiture après undernier tour des Champs Élysées. Leith regrette bien qu'ils n'ont paspu visiter le grand temple qu'il a vu de loin à midi et, pour ne pasl'oublier, la grande tour en fer. Décidément, il faudra revenir et faireun tour touristique entre jeunes. Il veut en parler à Angélique. Il aun pris ses économies avec et même si cette monnaie n'a plus cour,ils risquent être des objets de collection, comme lui en a eu. Le cheminde retour n'est, mis à part l'arrêt à Heudebouville pour se restaurer,pas très excitant. Arrivés chez les Leblanc, ils découvrent que325


À Terre.les parents viennent tout juste de renter accompagné du “capitaine”qui a fait le voyage en mer avec Armand. Alice, qui est resté un peuen arrière avec Angélique, lui dit :— Tu as vu comment mon père et Pénélope se sont regardés ?Je suis contente pour lui. Il est temps qu'il fait à nouveau confianceà quelqu'un. Elle est sympa, je l'aimerais bien comme belle-mère.Mais tu ne parles surtout pas à papa, n'est-ce pas ?— Ne t'en fais pas, je l'ai vu aussi et il y en a eu d'autres qui l'ontvu.— Tu sais quel métier qu'elle fait ?— Le même que toi, mais je crois qu'elle est en plus esthéticienne.Leith m'a dit qu'elle se connaît très bien en produits naturels.Elle sait faire les produits pour ses masques elle-même. Elle aen tout cas toute une valise avec des échantillons avec elle.— Mais c'est super !— De plus, sa famille avait un haras, tu pourrais faire du chevalavec elle.— Était-elle marié ?— Non, célibataire sans attaches.326


L'anniversaire d'Ussa.Leith a bien voulu vendre quelques-uns de sa collection de monnaie,mais c'est Angélique qui s'y est opposée. Pas questionnon plus pour elle de toucher à l'héritage d'Amilius que Leith a prisavec lui. Le marchand leur avait dit en toute honnêteté, qu'une collectioncomplète rapportera beaucoup plus. Leith et Ussa, regrettantde dépendre de leurs amis et de ne pas avoir leurs propres moyensde paiements, ont donc fait le tour de ce qu'ils possèdent en monnaiede leur pays pour voir s'ils peuvent faire une douzaine deplanches avec certificat d'origine et de les vendre aux collectionneurs.Une vente qu'il vaudrait mieux laisser, selon Angélique, à unemaison d’enchères publique spécialisée. C'est donc Angélique qui a,une fois de plus, puisé dans son compte épargne pour se payer cetteoffre promotionnelle d'un séjour à Paris, qu'elle a trouvé dans unepublicité. Ussa et son Julien, comme elle le dit, l'ont fait de même.Pour instant, ce sont Angélique et Julien qui avancent donc l'argentnécessaire pour le voyage. Ils ont voulu que Alice vient avec eux,mais ils ont eu du mal à la convaincre, car la pauvre se sent terriblementseule. Le fait que ses proches amis se sont fiancés à l'ancienne,comme au siècle dernier, lui a fait l'effet d'un choc. Elle qui a vu sameilleure copine se métamorphoser durant les vacances d'été d'uneadolescente en jeune femme qui sait ce qu'elle veut. Elle se rendmaintenant compte qu'Angélique a bien rangé ses souvenirs d'enfanceet d'adolescence dans un carton au grenier de sa vie. Elle n'acependant pas voulu faire bande à part et a, suggestion d'Ussa, invitéAndré à venir avec elle. L'offre promotionnelle comprend le voyageen train et une nuit d'hôtel à Paris. Ils se sont donc levés tôt ce matinpour se rendre au Havre en car et de prendre le train depuis là.Bernard, le papa de Alice, viendra le lendemain, car il doit chercherPénélope à hôpital, but ultime de ce voyage. Il a même, la voyantmalheureuse, payé le voyage pour sa fille et son copain. André est, àla surprise de tous, venu les voir la veille au soir, car un peu anxieux327


L'anniversaire d'Ussa.pour les fringues. Il a voulu demander si Julien n'avait pas par hasardquelque chose pour lui, car il avait vu le nom de l'hôtel et acraint de faire mauvaise impression s'il vient habillé comme il le faithabituellement. À présent ils sont en route. Le train vient de quitterla gare de Rouen et ils étudient le plan du métro Parisien. Cette foisil n'y a pas le père d'Alice pour les guider. Ils savent bien que setromper est facile. C'est pour cela qu'ils établissent un plan commentaller de la gare Saint Lazare à l'hôtel pour y déposer lesquelques bagages, les nécessaires de toilette et quelques vêtements derechange, qu'ils ont pris avec eux. Bernard leur a averti avant qu'ilspartent : « Veillez bien sur vos portes-monnaies et portefeuilles. » Là, c'estUssa qui lui a fait le réflexe : « Autant de voleurs ici qu'à Poseidia alors ! »Lors l'accueil à l'hôtel, c'est encore l'apparence d'Ussa qui fait miracle.L'agent d'accueil a voulu refuser des adolescents tout seuls,mais un seul regard furieux d'Ussa a été suffisant, car reconnu entant que la dernière reine de l'Atlantide.Une fois les bagages déposés et les clefs rendus à la réception, ilsprennent à nouveau le métro, où même Ussa commence à surmonterses craintes concernant les portails automatiques et le fait d'êtreen sous-sol. Ils vont, comme ils l'ont planifié, aux Champs Élyséeset depuis là ils prennent un circuit touristique en bus. Un circuit bateaux-mouchesest également prévu, mais le soir, car il y en a eu plusieursde leurs amis qui leur ont dit que ça vaut la peine. Le circuittouristique a comme avantage qu'on peut en descendre et le reprendreplus tard. C'est ainsi qu'ils ont attiré au boulevard Haussmann,dans les grands magasins. Quand ils ont poussé les grandesportes, c'est Ussa qui lance un regard furieux à Leith quand elle luientend dire :— J'ai cru qu’on allait rentrer demain, pas l'année prochaine !— Ne t'en fait pas Leith, lui dit Angélique, ils nous mettent bienà la porte, quand ils ferment à huit heures ce soir.C'est ainsi que le soir vient beaucoup trop vite à leur goût. Ils ontmême renoncé à entrer dans le Louvre et au Tour Eiffel, car l’attenteaurait été beaucoup trop longue et il y a tellement de choses à voir àParis. Il devient temps de gagner les bateaux mouches pour un circuitsur la Seine. Même s'ils ont initialement prévu de prendre le dî-328


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.ner sur le bateau, c'est Angélique qui s'est opposée. Une vérificationvite fait sut Internet avant de partir, l'a appris que les tarifs sont bienau-delà de leur budget, mise à part qu'il n'y avait pas de menu végétarien.Ils ont donc décidé de remettre le dîner au plus tard et de chercheréventuellement une pizzeria. Après le tour en bateau-mouche,dont Ussa a été particulièrement enchanté, ils sont, comme beaucoupde jeunes ayant un budget limité, allé dans une grande enseigneaméricaine, déclenchant chez Leith le réflexe : « Tiens, le même nomqu'un de nos copains Celtes, sûrement un de ses descendants ! » Plus tard lesoir, les six jeunes qui ont initialement voulu finir le soir, comme ilsdisent, en boîte, l'ont fini sur une terrasse d'un café aux Champs Élyséesen regardant les passants. Après, ils se sont rendus à l'hôtel àpied, car c'est Ussa qui a absolument voulu voir la ville le soir, mêmesi elle n'a pas été tout à fait à l'aise sur le chemin de retour. Au barde l'hôtel, Ussa et Leith ont créé à nouveau la surprise quand ils ontréclamé un café-calva, un exemple aussitôt suivi d'Angélique qui a ditau barman : « La même chose, mais sans le café. » <strong>Les</strong> autres se sontcontentés d'un jus de fruits. Le lendemain, ils se trouvent tous aupetit-déjeuner et ce sont Alice et André, ayant visiblement peudormi, à venir en dernier. Ils décident d'amener d'abord les bagagesaux consignes de la gare et d'aller depuis là visiter La Notre Dame deParis. Leith a hâte de pouvoir visiter ce temple. C'est son architecturequi l'intrigue. Après, ils ont prévu de faire une petite balade aumême quartier que la première visite il y a un peu plus qu'une semaine.Ensuite, il faut déjà assez rapidement gagner la salle d'attentede l'hôpital où le rendez-vous s'est donné. Quand ils sortent labouche du métro de la station “Cité”, c'est Ussa qui demande enpointant vers le Palais de Justice :— Ce sont qui, qui habitent là ?— <strong>Les</strong> voyous et leurs juges, lui répond André qui partage lecommunicateur d'Angélique avec Alice, c'est le palais de justice.C'est là où il y a la police. Il ne vaut mieux pas y être invité.— C'est quoi ce sigle-là, demande Ussa en désignant une camionnettedes CRS.— Je crois deviner, lui répond Leith, c'est sûrement leur BSI. J'aivu des mecs y descendre et ils ont la même allure que ceux de Ra-Ta.329


L'anniversaire d'Ussa.— Sauf que les nôtres ne font pas d’opérations secrètes, lui ditAngélique.— Moi je crois, dit André, qu'il vaut mieux comparer leur BSI etleur BOS avec les SS et la Gestapo des Allemands de la deuxièmeguerre mondiale.— Oui, c’est ça, lui dit Alice, et ce Ra-Ta avec Hitler.— Le temple qu'on va visiter, demande Leith qui n’a pas envie decontinuer ce sujet, est-il encore loin ?— Non, lui dit Angélique, c'est juste à côté, mais on ne dit pastemple par ici, on dit église. Celle-ci en occurrence, on l'appelle unecathédrale.Quand ils entrent au Parvis Notre Dame au tournant d'une rue,ils regardent tous le spectacle de l'énormité de ce bâtiment. La cathédraleest déjà impressionnante sur photo, mais la voir en réalitéest quand même autre chose. Ils décident de la visiter et entrent parune porte lui-même dans un des battants de l'énorme portail. En cequi concerne nos deux atlantes, l'un est aussi impressionné quel'autre, sauf qu'Ussa a plutôt peur et elle sert très fort la main de Julien.— Ça doit être une puissante armure à l'intérieur des murs pourtenir tout ça en place, dit Ussa en regardant la hauteur de l'édificedonnant le vertige.— Non, lui dit André qui a écouté Ussa par communicateurinterposé, il n'y a aucune armure. La construction se tient touteseule. <strong>Les</strong> arcs ne sont pas là pour la décoration, mais pour la solidité.— Je veux sortir d'ici, balbutie-t-elle anxieusement en regardant leplafond et les colonnes comme ils sont prêts à s'effondrer à toutmoment. Ce bâtiment fait au moins un stade de long sur un demistadede large. Comment veux-tu que ça tienne ?Il faut tout le tact et persuasion de Leith et Julien pour le reteniret éviter qu'elle coure en dehors en hurlant. Ce petit ménage nemanque évidemment pas à attirer l'attention d'un prêtre passant parlà, curieux de savoir pourquoi Ussa a eu peur.330


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Que se passe-t-il, demande-t-il. Mademoiselle à peur ? Mais,dit-moi, dit-il en la regardant un peu plus près, il me semble quevotre photo était à la Une des journaux il y a une semaine.— En effet, lui dit Julien, je vous présente; Ussa de Bel-Ra, filled'un des <strong>derniers</strong> rois de l'Atlantide.— Que votre altesse veut bien m'excuser, mais que craignezvous.Il s'installe alors un petit dialogue, par Julien interposé, où leprêtre lui explique de ce qu'il sait de la cathédrale. Sa construction,son architecture et autres. Un récit que suivent attentivement Angéliqueet Leith qui regarde un peu incrédule les colonnes et arcstout en haut. Une hauteur qui lui donne le vertige, rien en la regardant.Ils font ensuite le tour du bâtiment accompagné du prêtre, carce n'est pas chaque jour qu'on reçoit un haut dignitaire à l'improviste.Ussa ne peut, comme à l'hôtel, pas se dérober à signer le livred'or, qu'elle fait, à la surprise du prêtre, en écrivant en hiéroglyphesÉgyptiens. Elle demande ensuite à Julien de mettre la traduction,qu'elle lui dicte, en dessous. En sortant, ils constatent qu'il n'y a plusbeaucoup de temps pour s'arrêter dans le quartier des étudiants, maisils peuvent le traverser pour prendre le métro jusqu'à l'hôpital.Quand ils arrivent finalement à l'hôpital, Bernard et Pénélope attendentdéjà au point de rendez-vous. Ils ont pris, comme eux, unecarte journalière de RATP et laissent la voiture là où elle est garée.<strong>Les</strong> six leur racontent ce qu'ils ont fait la veille et ce matin même.Surtout la peur d'Ussa dans le grand temple, qu'ils appellent cathédrale.Arrivés au métro, c'est Pénélope qui hésite devant le portail automatique.Elle a bien vu que les autres y introduisent leur billet,mais elle continue à regarder alternativement son billet et la machine.C'est soudainement Leith qui comprend son hésitation et lui dit :— Ne te tracasse pas Pénélope, ce machin prend le billet danstoutes les sens. Je l'ai essayé. En dessus dessous, en envers, çamarche tou<strong>jours</strong>. Ne cherches surtout pas à comprendre. Si le billetn'est pas bon, il n'ouvre pas la porte, mais le rend. Ne perds surtoutpas celui-ci, car c'est un billet pour la journée et on peut l'utiliser autantde fois qu'on veut.331


L'anniversaire d'Ussa.Ensuite ils prennent la même ligne qu'une semaine plus tôt jusqu'auquartier où ils ont mangé. Cette fois ils ont un peu de tempsdevant eux et en profitent pour déambuler dans les petites ruelles.Pénélope a la même réaction qu'Ussa et Leith il y a une semaine, elleest sûre de tomber sur le bistro d’Abdubu au tournant d'une ruelle.Pour manger, ils se rendent au même pizzeria que la semaine d'avantoù le serveur est très ravi de revoir sa célèbre cliente et ses amis.— Bonjour votre altesse, vous allez bien ? Bienvenue dans notreétablissement, lui dit-il.Après avoir mangé, ils décident d'aller visiter le quartier de Montmartre.Bernard a leur expliqué que c'est le quartier des artistes,peintres surtout. Quand ils remontent à la surface à la station “Anvers”,sur le boulevard de Rochechouart, il a du expliquer qu'ici, justeen dessous le quartier des artistes et peintres, se trouve le quartier duplus vieux métier du monde. Arrivés en haut, c'est Ussa qui ne peutpas s'empêcher d'exclamer que ce temple est bien plus beau quel'autre. Quand ils finissent enfin de déambuler dans petites rues, ilest déjà temps pour les six de prendre le train et laisser Pénélopeseule à découvrir Paris accompagnée de son nouvel ami. Ils serendent ensemble à la gare Saint Lazare, cherchent leurs bagages à laconsigne 46 et prennent un café en attendant le train en directionRouen-Le Havre. Bernard sait que c'est un peu juste pour le bus,mais sait aussi que les jeunes se débrouilleront bien.— Leith, tu peux me lâcher maintenant, je veux essayer de faire letrajet toute seule.— Mais, lui dit-il, ça fait la quatrième fois que tu vas toute seule.Je n'ai fait que semblant.— QUOI ! Tu m'as fait pédaler toute seule sans que je le sache,lui dit-elle en descendant du vélo d'Angélique.— Oui, ma chère. Tu vois, ce n'est pas aussi compliqué que ça.Ces trucs vont tout droit pour autant qu'on continue de pédaler. Ilssont auto-stabilisant, même si j'ignore pourquoi.46 Veuillez noter que la gare Saint Lazare est, au moment que se déroule ce récit, en travauxest qu’il y a ni consigne ni restaurant à ce moment-là. Ils n’existent que pour cette histoire.332


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Tu y arrives ? As-tu déjà fait un trajet ici dans le jardin ?— Oui, mais j'ai encore du mal à garder l'équilibre. Je pense quec'est une question d'entraînement, lui répond-il.— Tu ne crois pas, qu'on devrait acheter un casque comme lesenfants le portent. Ça nous évite une mésaventure comme la pauvrePénélope l'a vécu.— Et ses trucs aux coudes, lui dit Leith. À propos Pénélope,comment va-t-elle ? Ça fait un moment que l'on n'a plus vue.— Elle donne un coup de main à une association. Elle coiffe despersonnes âgées à domicile. Ça lui permet le contact avec des gens.Elle aime bien bavarder, comme tu dois le savoir. Julien m'a ditqu'elle se débrouille déjà pas mal.— Tiens, lui dit Leith, Julien, le voilà. Va à sa rencontre avec levélo, ça lui fera plaisir.— Ussa ! Ça alors, lui dit Julien quand il la voit venir, ça me faitplaisir que tu as réussi à te mettre en selle. Ce n'est pas aussi compliquéque tu croyais, n'est-ce pas ? Tu oseras venir avec moi à la plagecet après-midi ? Tu pourrais faire un peu de planche, car là aussi tute débrouilles déjà pas mal. Puis il continue en s'adressant à Leithsans attendre une réponse de sa copine : tu pourrais venir avec Angéliqueà pied, n'est-ce pas ? Comme ça Ussa pourrait utiliser le vélod’Angélique.— Je crois bien, répond-il, qu'Angélique veut que je m'entraînepour la nage. Elle me dit ce que je fais ne s'appelle pas nager, maispatauger. Elle trouve que je nage comme des chiens.— Tu as déjà fait un bout seul sur la planche ? Lui demande Ussa.— Non, répond Leith, elle trouve que je ne nage pas assez bien,on n'a fait que des trajets à deux. J'aime bien le faire ainsi. Je me demanded'ailleurs qu'elle ne l'utilise qu'en tant de prétexte pour pouvoirme tenir dans ses bras.— Qui, c'est peut-être bien ça, lui dit Julien, car Ussa nagecomme toi. C'est ainsi que l'on l'apprend chez vous ?— Oui, c'est ça, dit Ussa.— Nous appelons cela du Crawl, répond Julien. Toi aussi Ussa,tu dois améliorer ta technique, car tu te fatigues trop comme tu le333


L'anniversaire d'Ussa.fais maintenant. Je vais toucher un mot à Angélique, dit-il à Leith, ilfaudra peut-être mieux que tu améliores ce que tu connaisses.— C'est ça, leur dit Ussa, il faut, à ce qui paraît, mieux chercher àaméliorer ce qu'on connaît bien au lieu de chercher à combler ses lacunes.— Je suis, ajoute Leith, de toute façon pas un grand sportif et jen'ai aucune intention d'en devenir un. Mais, continue-t-il, c'est tellementagréable à être deux, que je préfère presque continuer à faire laplanche à deux. On a bien fait du cheval à deux l'autre jour.— QUOI ? Du cheval ? Angélique et des chevaux, c'est aussicompatible que l'eau et le feu, lui répond Julien. Comment y es-tuparvenue.— Oh ! Je n'étais pas seul. Il y avait aussi Pénélope et Alice avecnous. Mais je dois t'avouer que ce n'était pas facile. Il fallait noustrois pour la convaincre. Alors, elle ne voulait pas faire bande à partet elle a fini à monter avec moi sur le même cheval. La pauvre lescraint comme s'ils étaient des lions. Qu'est-ce qu'il lui est arrivépour avoir aussi peur, un accident peut-être ?— Je ne me souviens plus les détails, lui dit Julien, mais je croisbien qu'elle ait assisté à un accident grave quand elle n'avait pas encorecinq ans. Il y a eu, si mes souvenirs sont bons, un cheval qui atapé en arrière, blessant quelqu'un très gravement. Ce sont deschoses qu'il ne vaut mieux pas voir quand on a que cinq ans. Ah !Tiens la voilà. Va à sa rencontre avec le vélo Ussa, ça lui fera plaisir.— Alors Ussa, lui dit Angélique en voyant Ussa venir vers elle, ons'entraîne pour le Tour de France maintenant ? Mais c'est super. Ilnous manque juste deux vélos pour faire des balades ensemble.Ussa se sente un peu nerveuse ce matin du huit octobre, oucomme elle préfère le dire : le quinzième jour Balance, le jour de sondix-neuvième anniversaire. Elle sait de Leith que ce n'est pas tout àfait juste, à cause de la précession et l'erreur induit par la collisionActurus-Terre. Elle sait que le vrai signe Balance est un mois plustard, mais elle préfère fêter son anniversaire au moment de leur“Balance”. De même que la transition des onze mille huit cents ans a334


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.eu lieu le même jour, celui du treizième jour Lion. Non pas seulementleur “Lion”, mais aussi leur treizième jour. Elle a cependantd'autres préoccupations en ce moment que de se soucier des signesastrologiques. Elle a pris sur elle de préparer le repas qu'il aura lieuplus tard l'après-midi. Ils n'ont pas voulu commencer le repas troptard, car il y a parmi les convives ceux qui travaillent le lendemain,ainsi d'autres qui doivent, comme Angélique et Julien, reprendreleurs études. Tout le monde pouvait par contre venir plus tôt, versquatre heures de l'après-midi. Julien est resté un peu plus long à midipour ranger le salon de telle sorte, qu'on a pu y ajouter une tableempruntée à Bernard. Elle essaye de compter et de se mémoriser lespersonnes invitées : Armand et Cécile, Julien et Angélique, Leith,Bernard, Pénélope et Alice ainsi que le copain de Alice ; André.« Oui, » dit-elle pour elle-même, « je m'oublie moi-même. Ça fait dix entout. » Elle attend le venu d'Angélique qui a décidé de sécher uncours. Elle a dit que son mec l'explique aussi bien que son prof, sipas mieux. En l'attendant, elle commence à ranger les chaises tellesqu'on peut quand même faire le tour des tables, car il faut bien pouvoirservir les invités. Angélique a voulu faire un buffet froid pourles salades et légumes, mais il manque un peu de place avec dix dansle salon. Ils auraient bien pu louer une tente et faire la fête dans lejardin, mais on est quand même octobre et le temps commence àvenir assez frais, surtout vers le soir. Ce sont Cécile et Pénélope quise chargeront de servir les gens pendant le repas. Elles n'ont pasvoulu qu'Ussa fasse en plus de la cuisine encore le service. C'est toutde même son anniversaire. Il faut qu'elles s'assoient près de la cuisine,de sorte de ne gêner personne. Entre temps elle a sorti ses <strong>derniers</strong>gâteaux du four. Ils ne seront pas servis chaud de toute façonet peuvent être mis sur un plateau de service en attendant l'heure descafés. Elle regarde à nouveau l'heure et commence à préparer le gratinde pommes de terre en gardant le four au chaud. Pendant que legratin cuit, elle peut préparer ensuite ses beignets spécial Ussa, dontelle détient le secret de la fabrication, consistant, avec d'autres petitsbiscuits fait la veille et celles de tout à l'heure, les amuse-gueulespour l'apéritif. C'est Angélique, quand elle vient tout à l'heure, quis'en occupera des légumes.335


L'anniversaire d'Ussa.— Salut la belle, lance Angélique quand elle entre, déjà en pleinepréparation je vois.— Salut Angélique, tu comptes encore une fois rattraper tescours de math avec Leith ?— Oui, il m'explique mieux que ce vieux con de prof. Je ne comprendsrien de ce qu'il dit, donc autant demander Leith. C'est lerésultat qui compte et non pas l'enseignant. Mais parlons des chosessérieuses, où en es-tu avec les préparations ?— Je commence à préparer mes beignets pour l'apéro pendant legratin cuit. Peux-tu commencer avec les légumes ?— Bien sûr, en ce qui concerne tes galettes aux légumes que tu asfaits hier, faut-il les chauffer tout de suite ?— Non, juste avant de les servir. On les met pendant huit minutesau four quand on a sorti le gratin.Il ne faut pas attendre longtemps avant que Julien montre sonnez également. Il n'entre cependant pas tout de suite, mais attendBernard qui vient avec Pénélope et Alice. <strong>Les</strong> quatre, une fois arrivés,déchargent quelque chose emballé de papier cadeau, qu'ilsmettent dans le garage. C'est visiblement une surprise pour Ussa quine se doute de rien. Après avoir range l'objet, ils entrent dans lamaison où rien que l'odeur de la cuisine donne déjà faim. Julien metsa tête par le chambranle de la porte de la cuisine et demande lesfilles :— Peut-on faire quelque chose ?— Bien sûr, lui dit Angélique, mets les verres et les bouteilles del'apéro. Eh ! Pénélope, viens prendre les biscuits et mets-les sur latable.— Mais ! Est-ce que je peux quand même venir dire bon anniversaireà notre belle princesse, lui dit Pénélope.— Fait vite alors, lui répond Ussa, je ne peux pas laisser cramermes beignets. Tu peux prendre en même temps les premiers pourles mettre sur la table. Je serai prête avec les autres en vingt minutes,après, je n'ai qu'à surveiller mon gratin. Le reste est prêt à être servi.C’est après Pénélope que Bernard et Alice viennent à leur tourvite fait dans la cuisine où ils donnent la bise à Ussa en lui souhaitantbon anniversaire. Julien a commencé, aide par Leith qui vient aussi336


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.de rentrer, à mettre les bouteilles et les verres de l'apéritif sur la table.Ils ne restent que Armand, Cécile et André à les rejoindre.— Tiens, dit Alice, ce bruit-là ne peut être qu'André. Il semblepenser que ça va plus vite quand ça fait plus de bruit.— Ça m'étonne, dit Bernard, qu'il ne s'est pas encore fait arrêterpar les flics. Il risque même de se faire confisquer son engin trafiqué.— Salut la bande, dit André qui vient d'entrer avant de continueren s'adressant à Angélique : tu as bien fait de ne pas venir, ce prof estvraiment nulle. Tu ne peux pas demander ton mec qu'il m'expliqueaussi.— Mais ! Demande lui toi-même.— Je ne parle pas assez bien sa langue.— Alors, comment veux-tu qu'il t'explique alors ?— On ne pourrait pas réviser le cours ensemble ? Toi tu dois leréviser aussi, je pourrais venir aussi donc, non ?— Pour aujourd'hui c'est foutu, mais tu pourrais venir demain àla fin de l'après-midi. Je te traduit ce que tu ne comprends pas.Mais, continua-t-elle, n'oublie pas Ussa, c'est tout de même son anniversaire.— Merde, dit-il avant de se rendre à la cuisine pour donner labise à Ussu, tu as raison, j'allais l'oublier.— Bonjour tout le monde, dit Cécile qui vient d'entrer, déjà àl'apéro je vois.— Bonjour maman, lui dit Ussa qui vient de mettre les <strong>derniers</strong>beignets sur la table accompagnés d'autres petites choses préparés laveille. Tu me verses un verre de vin cuit, demande-t-elle à Julien.— Oui ma belle, c'est déjà fait. Il t'attend là.— Alors, dit Cécile, il ne manque qu’Armand. Il ne va pas tarderà renter de son boulot aussi. C'est son assistant qui ferme laboutique aujourd'hui.Pendant que les invités s'installent à table, Cécile et Pénélope serendent à la cuisine, car ce sont elles qui prennent le relais d'Ussa àl'instant. Angélique fait comprendre à Ussa que sa place est à la têtede la table et Julien de l'autre côté. <strong>Les</strong> autres places, elle les attribuetelle qu'il y a homme et femme en alternance. C'est Armand qui337


L'anniversaire d'Ussa.exclame, en entrant, quand il voit que les autres ont déjà commencél'apéro :— Alors, vous n'avez pas pu m'attendre ? C'est moi le <strong>derniers</strong>ervi maintenant ?— Meunon papa, on n'a pas encore commencé, lui dit Angélique.Je viens de placer les invites et leur verser le premier verre. Prendsplace et déguste les créations de ta belle-fille.Après que tout le monde est assis, l'assemblée chante la chansontraditionnelle de « joyeux anniversaire Ussa », suivi d'un « santé. » Ensuite,Julien se lève et demande tout le monde de le suive au garage.Ils sortent de la maison et accompagnent Ussa jusqu'au garage oùelle voit un gros paquet difforme avec son nom dessus.— Déballe-le, lui dit Julien, c'est un cadeau de nous tous.Elle jette un regard circulaire sur les gens présents sans pouvoirdire un mot. Plein d'émotions elle commence à délicatement enleverle papier. C'est quand les premières structures métalliques deviennentvisibles, qu'elle pousse un crie de joie.— Mais, c'est trop ! Un vélo ! Merci à tous ! Je ne sais que dire.Je n'aurais plus besoin d'emprunter celui d'Angélique. On pourraitmême faire des balades ensemble. C'est trop, j'y ne reviens pas, ditelleavec les larmes aux yeux.De nouveau à table, elle y trouve un autre cadeau. Un tube encarton, mais elle n'est pas la seule a en l'avoir reçu un. Pénélope en aeu un aussi. Elles l'ouvrent et celui d'Ussa contient un postermontrant ses parents debout sur leur navette. C'est un agrandissementd'une des photos qu'Angélique et Julien ont pris. Le tube dePénélope contient un où on voit sa cousine Félicité avec Abdubu etun peu plus en arrière sur leur bateau, les autres membres de sa famille.<strong>Les</strong> deux femmes contemplent silencieusement les énormesphotos, puis c'est Ussa qui a de nouveau des larmes aux yeux.— Merci pour tout, balbutie-t-elle. Je suis très ému par ce geste.On va l'accrocher dans notre chambre, n'est-ce pas Julien ?Mais avant que Julien puisse répondre, une voix d’homme semblantvenir de nulle part, créant la surprise chez Bernard, Alice etAndré, leur dit :338


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.— Bon anniversaire ma fille. Je suis heureux que tu vas bien.Pour ceux ici présent qui ne me connaissent pas encore, je m'appellePâris de Bel-Ra, un des <strong>derniers</strong> rois de la fédération Atlantique,mieux connue chez vous en tant que l'Atlantide.— Bon anniversaire ma fille, dit une voix de femme. Pour lesautres, je m'appelle Séléné de Bel-Ra et je suis sa maman. Noussommes également heureux que Pénélope s'en est sortie indemne deson accident.C'est ensuite que chacun se présente à son tour avant un dialogues'installe. C'est pendant ces dialogues que Pénélope et Cécilecommencent à servir les entrées. Le couple Bel-Ra raconte ce qu'ilsont vécu et que c'est assez bien déroulé malgré la perte de nombreusesembarcations. Il décrit l'endroit où ils se trouvent actuellementet qui s'avère être les Pyrénées, juste dans le coin entre l'actuelleEspagne et la France. Pendant que les conversations continuent,le plat principal est servi de telle que chacun peut se servir dece qu'il désire. Cécile qui a d'abord craint qu'Ussa ait un peu tropforce sur la dose voit qu'il n'y a pas de trop. Décidément, un repaspour dix personnes ne s'improvise pas, mais avant qu'elle ait pu demanderà Ussa d'où elle tient ce savoir faire, c'est sa maman quil'éclaire.— Oui Cécile, je vois que tu t'étonnes d'où ma fille a ce savoirfaire. C'est de chez nous, de notre cuisinière personnelle. Je n'aijamais pu l'empêcher de faire la cuisine. Pour moi ce n'était pas unetâche pour une princesse, mais Ussa une fois qu'elle a quelque choseen tête, elle ne l'a pas ailleurs.— Oui, j'en sais quelque chose ma chère, j'en ai aussi une fillecomme ça.— Pâris, lui dit Angélique, encore merci pour le cadeau. C'esttrop beau.C'est avant Pâris a pu dire quelque chose, que Julien lui dit :— Tu l'aurais pu mettre pour l'occasion de ce soir. Mets-le,montre ce que Pâris tu as offert !— Oui, Angélique, lui dit Ussa. Je viens avec toi, je te prête unebelle robe qui va avec ce collier. T'en as point toi-même.339


L'anniversaire d'Ussa.Quand les filles reviennent enfin, des petits sifflements font s'entendre,car Ussa s'est également changé et a mis sa robe de gala.— Ne sont-elles pas belles, n'est-ce pas, leur dit Pâris. Angélique,en ce qui concerne ton cadeau, le service que tu nous as rendu apour nous une valeur inestimable et tu le mérites bien. Tes informations,aussi maigres que soient-ils, m'ont permis à sauver de nombreusesvies. Leith, mon garçon, tu as dû recevoir avec l'héritage duMaître Amilius une lettre pour Ussa, à lui remettre à l'occasion deson dix-neuvième anniversaire. Cette lettre, c'est à toi Ussa quej'adresse la parole, contient une attestation, consigné de tous les roisde l'Atlantide, te déclarant reine survivante. Une telle lettre a été préparéepour tous les princes et princesses héritières il y a déjà trèslongtemps et elle est à ouvrir par le dernier survivant ou la dernièresurvivante. Or, ma fille, la dernière survivante, c'est toi. Ouvre la etlise-la à haute voix devant deux témoins.— Ussa, lui dit Séléné, on doit te laisser, car ici la vie n'est pas detout repos et nous mettons nous-même la main à la pâte. On secontactera plus tard. Alors, bonne fête ma fille.— Bonne fête ma fille, lui dit son père, et à plus tard.L'assemblée a commencé entre temps avec les glaces. Ussa a bienobtenu ce qu'elle a voulu l'autre jour à Paris ; une glace avec du chocolatchaud et de la chantilly. Mais ce que tout le monde ignore,c'est qu'ils les attend une surprise pendant la prise des cafés. Ussa etLeith, ne varient pas leurs habitudes. Ils ont compris que le caféexiste bel et bien dans leur nouvelle existence ainsi que la boissondécouverte par hasard par l'arrière grand-père de Leith, qui se demanded'ailleurs si cette boisson n'a pas été ré-inventée de la mêmefaçon. C'est Angélique que fait remarquer qu'il faudra profiter jusqu'àl'année prochaine, car l'alcool sera interdit aux moins de dix-huitans. C'est André qui lui fait la remarque qu'on peut tou<strong>jours</strong> boirechez soi, ça n'empêche rien du tout. Selon lui, si quelqu'un veut resterraisonnable, il n'a pas besoin de lois. D'autre part les autres trouveronttou<strong>jours</strong> ce qu'ils veulent. La drogue est une preuve ; ce n'estpas une interdiction qui arrête la consommation, mais c'est le suivide ceux qui ne savent pas se contrôler. Pendant que les discussionscontinuent à ce sujet, une petite sonnerie se fait entendre. Surpris,340


<strong>Les</strong> <strong>derniers</strong> <strong>jours</strong>.certains regardent leur téléphone mobile, mais le signal est assezspécial et semble venir du côté de Pénélope, qui regarde un peu incréduleson communicateur affichant une demande de communication.Elle le prend, lance le mode “répondre” et exclame :— AJAX ! Qu'est-ce que tu fous. Où es-tu ? J'ai cru que tu allaisrejoindre les Macs ?— Oui, c'est ça, mais il n'y a rien à l'endroit où on est, mais tu esoù ?— Chez les beaux parents d'Ussa et Leith voyons, on fête le dixneuvièmeanniversaire d'Ussa.— TU ES CHEZ DES GAULOIS ?— OUI !— Merde !— Comment ? Merde ?— C'est pour ça qu'on ne trouve pas terre à l'endroit indiqué. Onest censé avoir terre par où on est, mais il n'y a que de la flotte parici.— Eh ! Je te passe un marin, il t'explique par où tu dois aller.Mais. Dit moi, tu es combien et avec quel bateau tu es venu. Ne medis pas que tu es venu avec cette coquille de noix appartenant à Jason.— Mais oui, ma belle c'est ça, mais dit moi comment vas-tu ?— Tiens toi bien.— Quoi ?— Tu te tiens bien solidement à quelque chose ?— D'accord, mais je ne comprends pas.— Tu vas comprendre maintenant. J'ai trouvé par ici un hommegentil avec une fille de dix-sept ans ayant le même métier que moi.Puis ce n'est pas tout, on va se marier !— QUOI ? J'ai impression que le ciel m'est tombé sur la tête.Tu m'invites à ta fête ?— Oui bien sûr, ça ne presse pas, mais tu m'as tou<strong>jours</strong> pas ditcombien vous êtes dans ce bateau.— Il y a donc moi, Jason avec sa femme et ses deux fillettes desix et sept ans, puis Laïos avec sa femme et son garçon de huit ans.— Et Jou-el ?341


L'anniversaire d'Ussa.— Je ne l’ai plus revu, il est resté avec la garde royale. Il a sûrementpu rejoindre l’armada du Roi.— Tiens, je te passe notre marin de service.Pénélope se lève et passe son communicateur à Armand qui lesexplique le cap à prendre. Leith, en comprenant de ce qu'il se passe,a déjà cherché la carte maritime et la donne à Armand. Ce dernierles explique l'itinéraire à prendre et les promet d'envoyer quelqu'unpour les guider jusqu'au port. Armand passe ensuite le communicateurà Leith, qui continue à bavarder avec ses anciens copains, pendantArmand prend le bon vieux téléphone filaire et fait le numérodu “capitaine”.— Capitaine ? Ici Armand, ON A UN PROBLÈME !342


REMERCIEMENTSL'auteur voudrait exprimer ses remerciements les plus profondsaux auteurs <strong>Jean</strong> Louis Bernard et Bernard Duboy et aux <strong>Éditions</strong>du Rocher, qui ont mis à disposition des informations précieuseslors des préparatifs précédant la rédaction de ce livre. Cesremerciements ne comprennent ni consentement ni refus de la partdes auteurs <strong>Jean</strong> Louis Bernard et Bernard Duboy et des <strong>Éditions</strong> duRocher, concernant les théories avancées par l'auteur.<strong>Éditions</strong> du Rocher101, Boulevard Murat75116 PARISOeuvre : “<strong>Les</strong> Autres Vies et la Réincarnation”de <strong>Jean</strong> Louis Bernard et Bernard DuboyISBN : 2 268 0130 642L'auteur voudrait également exprimer ses remerciements les plusprofonds à :NASA Headquarters, Public Communication OfficeSuite 5K39WASHINGTON DC20546-0001Pour la mise à disposition de l’image figurant sur la couverture.Ainsi à :La Médiathèque de Gaillon pour la mise à disposition du matérielinformatique et Internet, et puis en particulier Céline et Arnaud de lasection Multimédia pour leur soutien et leur patience en répondant àmes questions incessantes du style : “Comment écrit-on .... ?”


Impression à la demande par :SprintOO230 rue de l'Arbrisseau59043 Lille Cedex<strong>Éditions</strong> <strong>Jean</strong> <strong>Voltaire</strong>15 rue du 13 Août 194427940 Courcelles sur SeineISBN : Aucune demande n'a été fait.Dépôt : 1-7-2009 / 1A 025 693 0913 6N° d'édition : 2009-01

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