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Kristin Scott Thomas Sergi Lopez Yvan Attal un film de CATHERINE CORSINI

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FABIENNE VONIER présente<br />

<strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong><br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong><br />

<strong>Yvan</strong> <strong>Attal</strong><br />

<strong>un</strong> <strong>film</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>CATHERINE</strong> <strong>CORSINI</strong>


<strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong><br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> <strong>Yvan</strong> <strong>Attal</strong><br />

PARTIR<br />

<strong>un</strong> <strong>film</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>CATHERINE</strong> <strong>CORSINI</strong><br />

PRODUIT PAR FABIENNE VONIER<br />

PRODUCTEUR ASSOCIÉ MICHEL SEYDOUX<br />

COPRODUCTEURS OLIVIER LEGRAIN ET VINCENT MALLE<br />

AVEC LA PARTICIPATION DE CANAL+ ET CINÉCINÉMA<br />

AVEC LE SOUTIEN DE LA RÉGION LANGUEDOC-ROUSSILLON<br />

EN PARTENARIAT AVEC LE CENTRE NATIONAL DE LA CINÉMATOGRAPHIE<br />

EN ASSOCIATION AVEC COFINOVA<br />

PRESSE<br />

André-Paul Ricci, Tony Arnoux<br />

Rachel Bouillon<br />

6, place <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine - 75008 PARIS<br />

Tél. 01 49 53 04 20<br />

apricci@wanadoo.fr<br />

durée 1h25<br />

AU CINÉMA LE 12 AOÛT<br />

PHOTOS ET DOSSIER DE PRESSE TÉLÉCHARGEABLES SUR WWW.PYRAMIDEFILMS.COM<br />

5, rue du Chevalier <strong>de</strong> Saint George - 75008 PARIS<br />

Tél. 01 42 96 01 01 - Fax 01 40 20 02 21<br />

www.pyrami<strong>de</strong><strong>film</strong>s.com


SYNOPSIS<br />

Suzanne a la quarantaine. Femme<br />

<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin et mère <strong>de</strong> famille,<br />

elle habite dans le sud <strong>de</strong> la France,<br />

mais l’oisiveté bourgeoise <strong>de</strong> cette vie<br />

lui pèse. Elle déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> reprendre son<br />

travail <strong>de</strong> kinésithérapeute qu’elle avait<br />

abandonné pour élever ses enfants et<br />

convainc son mari <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>r à installer<br />

<strong>un</strong> cabinet. A l’occasion <strong>de</strong>s travaux,<br />

elle fait la rencontre d’Ivan, <strong>un</strong> ouvrier<br />

en charge du chantier qui a toujours<br />

vécu <strong>de</strong> petits boulots et qui a fait<br />

<strong>de</strong> la prison. Leur attraction mutuelle<br />

est immédiate et violente et Suzanne<br />

déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> tout quitter pour vivre<br />

cette passion dévorante.


ENTRETIEN AVEC<br />

<strong>CATHERINE</strong> <strong>CORSINI</strong><br />

Même si le schéma <strong>de</strong> PARTIR est assez classique - la femme,<br />

le mari et l’amant - il y a, notamment dans le comportement<br />

<strong>de</strong> l’épouse qui quitte absolument tout du jour au len<strong>de</strong>main<br />

pour vivre sa passion, <strong>un</strong> aspect radical qui en fait la singularité.<br />

Est-ce cela justement qui vous a donné envie <strong>de</strong> raconter cette<br />

histoire ?<br />

Je crois - c’est d’ailleurs ce que j’ai dit dès le départ à ma productrice,<br />

Fabienne Vonier - que chaque réalisateur, à <strong>un</strong> moment <strong>de</strong> sa carrière,<br />

a besoin et envie <strong>de</strong> se confronter à <strong>film</strong>er <strong>un</strong>e vraie histoire d’amour.<br />

J’avais envie <strong>de</strong> raconter <strong>un</strong>e histoire très classique, très simple,<br />

qui me permettrait aussi <strong>de</strong> suivre la trajectoire d’<strong>un</strong>e femme dans<br />

la lignée <strong>de</strong>s héroïnes qui m’ont fait rêver : d’Anna Karénine<br />

à Madame Bovary… C’est parti <strong>de</strong> là, effectivement, dans ce contexte<br />

classique, <strong>de</strong> faire le portrait d’<strong>un</strong>e femme qui ose l’aventure, qui choisit<br />

<strong>de</strong> ne transiger avec rien, peut-être parce qu’elle est à <strong>un</strong> moment<br />

<strong>de</strong> sa vie où elle sait qu’elle ne peut plus se permettre <strong>de</strong> passer à côté<br />

<strong>de</strong> ce qui lui arrive. Même ses enfants ne la retiennent pas. J’ai essayé<br />

<strong>de</strong> montrer ce qu’était le désir, son irruption dans <strong>un</strong>e vie ordinaire<br />

et rangée, sa puissance, son côté inéluctable… J’ai souhaité faire<br />

<strong>un</strong>e mise en scène épurée, pour accor<strong>de</strong>r <strong>un</strong>e gran<strong>de</strong> place<br />

à la sensualité, à la nature… Au sens où l’amour débarrasse<br />

le <strong>film</strong> <strong>de</strong> toute psychologie et lui donne <strong>un</strong>e impulsion pure,<br />

celle <strong>de</strong>s corps qui cherchent à se rejoindre ou s’enfuir et donc<br />

lui imprime <strong>un</strong> mouvement.<br />

Le <strong>film</strong> commence quasiment par la fin <strong>de</strong> l’histoire. Dès le début,<br />

vous tenez donc à montrer qu’on va assister en fait à <strong>un</strong>e tragédie…<br />

La vraie passion est toujours <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> la tragédie,<br />

parce qu’elle porte aussi en elle <strong>un</strong>e part d’égoïsme voire <strong>de</strong> cruauté<br />

et d’aveuglement et qu’elle nie le mon<strong>de</strong> - qui parfois le lui fait<br />

payer. Très vite à l’écriture, j’ai ressenti le besoin d’ouvrir le <strong>film</strong> avec<br />

ce coup <strong>de</strong> feu qui laisse présager le drame. Je voulais créer <strong>un</strong>e tension,<br />

pour qu’immédiatement on sente qu’on irait au bout <strong>de</strong> la passion,<br />

avec tout ce que ça sous-entend <strong>de</strong> fort, <strong>de</strong> beau, d’inéluctable,<br />

<strong>de</strong> tragique. Dès le début, on sait donc qu’il va y avoir <strong>un</strong> drame,<br />

sans savoir pourtant s’il s’agit d’<strong>un</strong> meurtre ou d’<strong>un</strong> suici<strong>de</strong>.<br />

Le suspense reste entier. On sait qu’on va être spectateur <strong>de</strong> ce drame.<br />

Cette conscience du drame à venir fait peser sur les scènes <strong>de</strong> désir et d’amour<br />

<strong>un</strong>e ombre qui leur donne encore plus <strong>de</strong> poids, plus d’intensité. Il y a comme<br />

<strong>un</strong>e menace qui plane… Cela oblige aussi à accentuer et assumer le drame.<br />

On perçoit que les personnages sont condamnés d’avance et ce qui fascine,<br />

malgré tout, c’est comment ils vont s’y rendre, s’y abandonner, s’y précipiter.<br />

En ce sens le <strong>film</strong> est presque solidaire <strong>de</strong> ses héros qui vont consciemment<br />

vers leur fin, envers et contre tout. C’est presque comme s’il les approuvait,<br />

les accompagnait là où ils doivent aller.<br />

Commencer par la fin, la « donner » dés le départ, c’est aussi assez<br />

stimulant pour <strong>un</strong> cinéaste car c’est se condamner à n’exister que par<br />

la mise en scène, le récit et les personnages, puisqu’on attend moins<br />

le dénouement.<br />

Il y a <strong>un</strong> autre élément important, c’est le contexte social :<br />

elle, femme <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin, prête à recommencer son travail<br />

<strong>de</strong> kiné, qui quitte mari et enfants, confort et maison, pour<br />

<strong>un</strong> ouvrier espagnol…<br />

Je tenais à cette dimension sociale, politique qui dénonce la place <strong>de</strong><br />

la femme dans ce couple. Il y a <strong>un</strong> point <strong>de</strong> vue féministe revendiqué<br />

dans le <strong>film</strong>. Suzanne est piégée, elle n’a pas d’indépendance financière,<br />

elle est totalement entre les mains <strong>de</strong> son mari qui, lorsqu’elle<br />

s’en va, essaie par tous les moyens, même les plus vils, <strong>de</strong> la retenir,<br />

y compris en lui coupant les vivres. C’est l’histoire d’<strong>un</strong>e femme qui<br />

s’arrache à son milieu, qui s’émancipe, quel que soit le prix à payer…<br />

Sa maison, que nous avons voulue assez froi<strong>de</strong> et austère, est


<strong>un</strong>e prison dorée. C’est comme si elle avait vécu en semi dépression,<br />

<strong>un</strong> peu comme sous <strong>un</strong> couvercle pendant <strong>de</strong>s années et puis tout d’<strong>un</strong><br />

coup, le désir, l’amour, la passion, font qu’elle laisse tout, qu’elle se lance<br />

entièrement dans cette relation sachant qu’elle ne pourra plus revenir en<br />

arrière. Avec son mari, il y a quelque chose qui tient <strong>de</strong> l’enfermement,<br />

alors qu’avec son amant, elle réapprend à être elle-même. Tout d’<strong>un</strong><br />

coup, elle est <strong>de</strong>vant quelqu’<strong>un</strong> qui est là, qui la regar<strong>de</strong>, qui l’écoute,<br />

qui la désire. Elle apprend même le détachement. Elle avait certes<br />

tout le confort, son amant lui apporte <strong>de</strong>s choses bien plus simples,<br />

mais essentielles ; le désir, le plaisir, la promesse d’<strong>un</strong> bonheur…<br />

D’où l’importance accordée à la nature, à <strong>un</strong>e certaine douceur,<br />

comme dans cette scène en Espagne au bord <strong>de</strong> la mer avec la fille<br />

<strong>de</strong> son amant, ou comme dans cette ruine qui leur sert <strong>de</strong> refuge.<br />

Elle ne quitte pas <strong>un</strong> enfer, mais tout simplement elle découvre<br />

quelque chose <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> l’absolu qui empêche tout retour en arrière.<br />

Lorsque son mari lui interdit <strong>de</strong> le quitter, elle se révèle d’<strong>un</strong> coup.<br />

Comme on s’improvise soudain militant ou résistant - alors que rien<br />

ne nous y prédisposait, et parfois même à notre grand étonnement -<br />

parce qu’on est soudain témoin ou victime <strong>de</strong> quelque chose d’injuste<br />

et d’insupportable. Je pense qu’elle est elle-même surprise par la force<br />

<strong>de</strong> son désir puis par sa propre détermination et sa résistance.<br />

Qu’est-ce qui était le plus dur dans l’écriture ?<br />

Sans doute d’arriver à tout imbriquer : le désir, la passion, le suspense<br />

et le contexte social. D’être toujours dans le trait radical sans tomber<br />

dans la caricature, d’essayer d’avancer en finesse tout en inscrivant<br />

la rupture <strong>de</strong> cette femme avec son mari notable pour <strong>un</strong> ouvrier<br />

espagnol. De gar<strong>de</strong>r cette justesse <strong>de</strong>s sentiments, <strong>de</strong>s émotions…<br />

C’est <strong>un</strong> <strong>film</strong> que vous avez à la fois écrit seule et<br />

avec d’autres…<br />

En effet. Au départ, j’ai travaillé pendant <strong>un</strong> mois avec Gaëlle Macé,<br />

puis j’ai travaillé longtemps toute seule et j’ai fini par <strong>de</strong>ux consultations<br />

avec Antoine Jaccoud, qui a écrit HOME avec Ursula Meier<br />

et qui est très fort en structure puis avec Emmanuelle Bernheim.<br />

Emmanuelle, par sa sensibilité, m’a apporté pas mal <strong>de</strong> petites<br />

choses délicates, <strong>de</strong> détails, sur la justesse <strong>de</strong>s sentiments.<br />

L’avez-vous écrit en sachant que ce serait <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong> qui<br />

serait Suzanne ?<br />

Oui. J’avais dit à Fabienne que, pour <strong>un</strong>e fois, je voulais écrire<br />

pour quelqu’<strong>un</strong> <strong>de</strong> précis. Et tout <strong>de</strong> suite, j’ai pensé à <strong>Kristin</strong>.<br />

J’ai d’abord écrit huit ou dix pages et j’ai <strong>de</strong>mandé à la rencontrer.<br />

Elle m’a dit que le personnage et le sujet l’intéressaient. Je me suis<br />

mise alors au travail avec <strong>Kristin</strong> en tête. Il y a vingt ans, j’avais pensé<br />

à elle pour <strong>un</strong> télé<strong>film</strong> mais à mon grand regret, ça n’avait pas pu<br />

se faire !<br />

Pourquoi aviez-vous envie <strong>de</strong> travailler avec elle ?<br />

Parce qu’elle me fascine. Il y a chez elle quelque chose d’assez<br />

mystérieux, <strong>un</strong>e sorte <strong>de</strong> beauté glacée, <strong>de</strong> dureté apparente mais<br />

teintée d’<strong>un</strong>e certaine mélancolie qui la rend fragile et vulnérable.<br />

Elle était l’idéal pour cette bourgeoise d’apparence assez froi<strong>de</strong><br />

qui porte <strong>un</strong>e fêlure, quelque chose <strong>de</strong> désespéré... C’est ça que j’avais<br />

envie <strong>de</strong> trouver avec elle. D’autant que je sais qu’elle est capable<br />

<strong>de</strong> susciter le trouble, l’émotion, <strong>de</strong> manière vraiment incroyable.<br />

Il y a aussi ce lent glissement, imperceptible, avec ce visage d’abord<br />

passif, presque résolu, jusqu’à cette incroyable détermination qu’on lit<br />

sur son visage à la fin, quand elle tire.<br />

<strong>Sergi</strong> (<strong>Lopez</strong>), j’y ai pensé aussi comme <strong>un</strong>e évi<strong>de</strong>nce pour le rôle<br />

<strong>de</strong> l’amant. J’avais déjà travaillé avec lui et ça faisait longtemps que<br />

je voulais recommencer. C’est <strong>un</strong> acteur agréable, facile, à l’écoute.<br />

J’aime bien sa présence rassurante, son côté charnel, physique…<br />

Son rôle est tout en finesse, c’est celui d’<strong>un</strong> homme qui ne se plaint pas<br />

même s’il sait qu’il est du mauvais côté, du côté <strong>de</strong>s perdants.<br />

Pour le rôle du mari, j’ai hésité davantage avant <strong>de</strong> penser à<br />

<strong>Yvan</strong> (<strong>Attal</strong>). Bien sûr, je le connaissais bien comme acteur mais <strong>de</strong><br />

le voir dans LE SERPENT, m’a fait penser à lui. Et je me suis souvenue<br />

que, déjà, il y a vingt ans, j’avais rêvé le mettre en couple avec <strong>Kristin</strong>.<br />

C’est jubilatoire <strong>de</strong> travailler avec lui. Il est vif, il a su rendre toute<br />

la complexité <strong>de</strong> ce bourgeois <strong>de</strong> province, avec sa belle voiture,<br />

sa belle maison, sa belle femme, ses beaux enfants et qui, tout d’<strong>un</strong><br />

coup, montre sa vraie nature. Cette femme lui appartient et ce n’est<br />

pas possible qu’elle le quitte. Il a <strong>un</strong> côté quasi archaïque. Il interdit<br />

à sa femme <strong>de</strong> ne plus l’aimer ! Il est tout à la fois fragile et monstrueux.


Comme <strong>un</strong> enfant narcissique qui ne supporte pas <strong>de</strong> perdre, il en<br />

fait presque <strong>un</strong>e question d’orgueil. C’est encore plus humiliant pour<br />

lui, petit notable, qu’elle parte avec <strong>un</strong> type comme ça - <strong>un</strong> ouvrier<br />

qui a fait <strong>de</strong> la prison. D’<strong>un</strong> personnage civilisé bourgeois, il <strong>de</strong>vient<br />

<strong>un</strong> monstre manipulateur, <strong>un</strong> homme abusif. Il prend soudain conscience<br />

<strong>de</strong> son pouvoir, d’<strong>un</strong> pouvoir en sommeil, inhérent à sa classe, et n’hésite<br />

pas à s’en servir.<br />

Le fait que Suzanne et Ivan soient étrangers tous les <strong>de</strong>ux<br />

participait-il au désir que vous aviez d’eux pour interpréter<br />

ces amoureux, comme si cela donnait <strong>un</strong> sens supplémentaire<br />

à leur rencontre, à leur histoire ?<br />

Oui, ce n’est pas étonnant qu’ils se rencontrent. Cette ville<br />

<strong>de</strong> province où ils vivent n’est pas la leur, ils sont déracinés.<br />

Ils participent d’<strong>un</strong> ailleurs. Le désir est toujours mystérieux, mais le fait<br />

qu’ils se retrouvent, qu’ils s’accrochent comme ça l’<strong>un</strong> à l’autre,<br />

a forcément à voir avec leur origine, avec leur qualité d’étranger.<br />

S’ils avaient eu <strong>de</strong> l’argent, ils s’en seraient sortis.<br />

L’histoire est vraiment vue à travers les yeux <strong>de</strong> cette femme.<br />

On est sans cesse avec elle. Comme souvent dans vos <strong>film</strong>s,<br />

c’est ce personnage <strong>de</strong> femme déterminée, radicale qui en est<br />

le moteur…<br />

Je sais ! A chaque fois, je me dis que j’aimerais bien faire ça avec<br />

le personnage masculin et c’est toujours le personnage féminin<br />

qui l’emporte ! Peut-être parce que ce sont les héroïnes qui m’ont<br />

donné envie <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s <strong>film</strong>s, toutes ces héroïnes <strong>un</strong> peu cassées,<br />

<strong>un</strong> peu fêlées qui foncent vers leur <strong>de</strong>stin… Chez Suzanne, j’aime<br />

son courage. Elle n’est pas double, elle n’est jamais dans le mensonge.<br />

Très vite, elle dit à son mari : « Voilà, je suis amoureuse », puis<br />

elle essaie <strong>de</strong> se convaincre qu’elle va pouvoir renoncer à son amour,<br />

mais elle n’y arrive pas. Donc, elle s’en va, en laissant tout <strong>de</strong>rrière.<br />

Le fait même <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir aller travailler comme caissière pour gagner<br />

sa vie ne l’humilie pas. Elle est prête à tout, parce qu’elle sait que,<br />

désormais, sa place est là, avec son amant, avec ce que cela implique.<br />

Elle a <strong>un</strong> côté très entier. C’est peut-être en ça que mes personnages<br />

féminins se ressemblent, ils sont entiers, directs et ils vont là<br />

où leur désir les appelle. Ce qui peut d’ailleurs créer soit <strong>de</strong> la comédie<br />

comme dans LA NOUVELLE EVE soit du drame, comme ici.<br />

Le <strong>film</strong> se déroule l’été dans le Midi, la lumière est belle.<br />

Tout cela souligne la sensualité <strong>de</strong> la passion et les instants<br />

<strong>de</strong> bonheur mais rend le drame encore plus profond…<br />

C’est pour cette lumière, cette chaleur que j’ai choisi Nîmes.<br />

On y a tourné l’été <strong>de</strong>rnier, en plein mois d’Août, il y avait <strong>de</strong>s pics<br />

<strong>de</strong> chaleur, c’était vraiment étouffant. Un <strong>de</strong>s acteurs m’a même dit<br />

que si je suis arrivée à leur faire faire certaines choses c’est parce qu’il<br />

faisait tellement chaud que ça leur faisait perdre la tête ! Moi, j’étais<br />

comblée parce que j’avais cherché <strong>un</strong> climat qui alimente ce désir<br />

ar<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s personnages. Je recherchais aussi <strong>un</strong> endroit où il puisse<br />

y avoir ce déplacement - l’amant <strong>de</strong>vait aller voir sa fille en Espagne,<br />

<strong>un</strong> endroit proche d’<strong>un</strong>e frontière. En plus à Nîmes, comme dans<br />

beaucoup <strong>de</strong> villes, il y a ces quartiers bourgeois, <strong>un</strong> peu excentrés,<br />

presque protégés, et puis <strong>de</strong> l’autre côté <strong>de</strong> la ville, les cités.<br />

Deux mon<strong>de</strong>s qui ne se mêlent pas.<br />

C’est votre quatrième collaboration avec Agnès Godard au cadre<br />

et à la lumière. En quoi vous complétez-vous ?<br />

Je sais qu’elle <strong>film</strong>e très bien les femmes, qu’elle est très délicate<br />

aussi dans les scènes d’amour que je voulais à la fois crues et belles…<br />

Tout ça compte, et puis je savais qu’elle donnerait au <strong>film</strong> <strong>un</strong>e lumière<br />

qui justement apporterait <strong>de</strong> la sensualité, qui alimenterait le trouble.<br />

Cette histoire d’amour, il fallait la sublimer, lui donner <strong>de</strong> la grâce et<br />

<strong>de</strong> la beauté. I<strong>de</strong>m pour les paysages. Agnès est passionnée.<br />

Comme on se connaît bien, on a <strong>un</strong>e gran<strong>de</strong> complicité même si on<br />

est différentes et parfois en désaccord. On a <strong>un</strong>e manière <strong>de</strong> sourire<br />

<strong>de</strong>s mêmes choses, d’avoir tout d’<strong>un</strong> coup la même envie du même<br />

plan. Sur le tournage, ça se passe souvent <strong>de</strong> mots. On parle beaucoup<br />

en amont, on réfléchit beaucoup, sur le choix <strong>de</strong>s décors, <strong>de</strong>s cadres,<br />

<strong>de</strong> la façon dont on va <strong>film</strong>er…<br />

Comment définiriez-vous vos partis pris <strong>de</strong> mise en scène ?<br />

Filmer simplement et en plan large afin <strong>de</strong> donner <strong>un</strong> sentiment<br />

<strong>de</strong> liberté, donner les choses à voir, à observer, laisser aux situations


le temps <strong>de</strong> s’installer, <strong>de</strong> vivre, d’évoluer - dans l’ensemble les scènes<br />

sont peu découpées, je voulais laisser les amants exister pleinement<br />

dans le cadre à l’inverse entre elle et son mari, tout d’<strong>un</strong> coup,<br />

il y a <strong>un</strong>e pression et là les plans sont plus courts. Entre elle et <strong>Sergi</strong><br />

je laissais tourner, j’étais à l’affût, je cherchais à leur voler <strong>de</strong>s petites<br />

choses. Ce n’était pas toujours simple, parce que <strong>Kristin</strong>, par exemple,<br />

n’a pas l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> travailler comme ça. Elle veut savoir exactement<br />

ce qu’elle a à faire, alors que moi, j’aime bien dans certaines scènes<br />

brouiller les repères, essayer <strong>de</strong> faire perdre pied aux acteurs,<br />

les déstabiliser <strong>un</strong> peu.<br />

Qu’est-ce que vous atten<strong>de</strong>z <strong>de</strong>s acteurs ?<br />

Qu’ils acceptent d’être dérangés, qu’ils ne s’installent pas dans<br />

<strong>un</strong> savoir-faire, qu’ils soient aux aguets. J’essaie <strong>de</strong> trouver <strong>un</strong> petit<br />

peu leur faille, leur mystère. J’essaie <strong>de</strong> les emmener, <strong>de</strong> casser leur<br />

système s’ils en ont <strong>un</strong>, <strong>de</strong> les mettre en danger. On espère toujours<br />

qu’ils vont nous donner quelque chose qu’ils n’ont jamais donné<br />

à personne, qu’entre eux et le personnage quelque chose se passe,<br />

qui soit <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> la vérité. Rivette dit qu’<strong>un</strong> <strong>film</strong> c’est aussi<br />

<strong>un</strong> reportage sur <strong>un</strong>e personnalité. Il y a <strong>de</strong> ça. C’est souvent<br />

au montage qu’on s’en rend compte. En montant PARTIR, je me suis<br />

ainsi rendue compte qu’on entendait battre le cœur <strong>de</strong> <strong>Kristin</strong><br />

dans certaines prises.<br />

Vous avez utilisé <strong>de</strong>s musiques que Georges Delerue et<br />

Antoine Duhamel avaient composées pour <strong>de</strong>s <strong>film</strong>s <strong>de</strong> Truffaut.<br />

C’était <strong>un</strong> clin d’œil ?<br />

Plus que ça. J’en suis dingue, j’allais les enregistrer dans les salles<br />

avec mon magnétophone avant les cd. Simon Jacquet le monteur a fait<br />

<strong>de</strong>s essais avec principalement les musiques <strong>de</strong> Delerue, sur <strong>un</strong>e scène,<br />

puis sur <strong>de</strong>ux, puis sur trois… Et c’était magique, ça fonctionnait<br />

tellement bien que je ne pouvais plus m’en passer ! Et ça donnait<br />

au <strong>film</strong> <strong>un</strong>e dimension romanesque supplémentaire. On a décidé <strong>de</strong><br />

les conserver, et j’étais émue <strong>de</strong> pouvoir les obtenir.<br />

La fin est <strong>un</strong>e vraie fin <strong>de</strong> cinéma…<br />

La fin donne le sens. Elle appartient au metteur en scène.<br />

J’aime les fins où, malgré toutes les épreuves, l’amour triomphe,<br />

même si c’est pour mourir aussitôt ! On sait que c’est perdu<br />

et pourtant !… C’est encore plus déchirant. C’est <strong>un</strong> schéma<br />

assez classique, mais l’avantage avec ce type d’histoires,<br />

c’est que, justement, ce sont <strong>de</strong>s <strong>film</strong>s qu’on peut faire, refaire,<br />

revisiter éternellement et qui reste en cela <strong>de</strong>s vrais défis <strong>de</strong> mise<br />

en scène. On rêve tous <strong>de</strong> vivre <strong>de</strong>s histoires <strong>de</strong> passion, le cinéma<br />

nous permet <strong>de</strong> vivre ce qu’on ne s’autorise pas toujours dans la vie.<br />

On est tous avi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> connaître ces moments <strong>de</strong> vertige…


BIOGRAPHIE<br />

FILMOGRAPHIE<br />

Catherine Corsini suit l’enseignement d’Antoine Vitez et Michel Bouquet<br />

au Conservatoire d’art dramatique <strong>de</strong> Paris pendant trois ans.<br />

Après quelques rôles et assistanats au théâtre, elle se tourne vers l’écriture et<br />

la réalisation, grâce notamment à sa rencontre avec <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> l’IDHEC.<br />

Elle réalise plusieurs courts-métrages, tous primés. POKER est son premier<br />

long-métrage. Puis, en 1991, son <strong>film</strong> INTERDIT D’AMOUR avec Nathalie Richard<br />

et Maxime Leroux remporte les suffrages <strong>de</strong>s téléspectateurs. En 1998, avec<br />

LA NOUVELLE EVE, <strong>un</strong>e comédie générationnelle, elle rompt avec le ton<br />

plus dramatique <strong>de</strong> ses premières oeuvres. Deux ans plus tard, elle réalise<br />

LA RÉPÉTITION avec Emmanuelle Béart et Pascale Bussières. Le <strong>film</strong> est<br />

en compétition officielle au Festival <strong>de</strong> Cannes. En 2006, pour son septième<br />

long-métrage, LES AMBITIEUX, la réalisatrice retrouve Karin Viard aux<br />

côtés <strong>de</strong> laquelle Eric Caravaca interprète le rôle titre masculin. En 2008,<br />

elle a tourné son nouveau long-métrage, PARTIR, avec <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong>,<br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> et <strong>Yvan</strong> <strong>Attal</strong>.<br />

LONGS-MÉTRAGES<br />

2008 PARTIR avec <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong>,<br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> et <strong>Yvan</strong> <strong>Attal</strong><br />

2006 LES AMBITIEUX avec Karin Viard,<br />

Eric Caravaca, Jacques Weber, Gilles Cohen<br />

Sélection officielle Festival International <strong>de</strong> Rome<br />

2003 MARIEES MAIS PAS TROP<br />

avec Jane Birkin et Emilie Dequenne<br />

2000 LA REPETITION<br />

avec Emmanuelle Béart et Pascale Bussières<br />

Sélection officielle au Festival <strong>de</strong> Cannes 2001<br />

1998 LA NOUVELLE EVE<br />

avec Karin Viard, Pierre-Loup Rajot, Catherine Frot,<br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong><br />

Sélection au Festival <strong>de</strong> Berlin<br />

1995 JEUNESSE SANS DIEU<br />

avec Marc Barbé, Roland Amstutz, Samuel Dupuy<br />

Sélection au Festival <strong>de</strong> Cannes 1996<br />

« Cinéma en France »<br />

1993 LES AMOUREUX<br />

avec Nathalie Richard, Pascal Cervo<br />

Sélection au Festival <strong>de</strong> Cannes 1994<br />

« Cinéma en France »<br />

1987 POKER avec Caroline Cellier, Pierre Arditi<br />

COURTS-MÉTRAGES<br />

1999 MOHAMMED<br />

1985 NUIT DE CHINE<br />

Prix <strong>de</strong> la mise en scène à Grenoble<br />

1984 BALLADE<br />

Grand Prix Cinéma en France, Cannes 1985<br />

1983 LA MESANGE<br />

TÉLÉVISION<br />

1997 DENIS (Arte) avec Pascal Cervo,<br />

Dominique Reymond<br />

1991 INTERDIT D’AMOUR<br />

avec Maxime Leroux, Nathalie Richard<br />

Sélection au FIPA et au Festival <strong>de</strong> Créteil<br />

1989 FATALE OBSESSION<br />

avec Simon <strong>de</strong> la Brosse, Anne Roussel,<br />

Catherine Frot<br />

THÉÂTRE<br />

1992 LE LIT Mise en espace au Théâtre ouvert<br />

par Nelly Borgeaud et Hervé Petit<br />

COLLABORATION À<br />

L’ÉCRITURE<br />

1996 A TOUTE VITESSE<br />

(Gaël Morel)<br />

COMÉDIENNE<br />

1999 A MORT LA MORT<br />

(Romain Goupil)<br />

1993 L’EXPOSÉ<br />

(Ismaël Ferroukhi)


ENTRETIEN AVEC<br />

KRISTIN SCOTT THOMAS<br />

Qu’est-ce qui vous a séduit quand Catherine Corsini vous<br />

a parlé du projet <strong>de</strong> PARTIR ?<br />

Elle. Tout <strong>de</strong> suite, j’ai été séduite par Catherine qui est <strong>un</strong> personnage<br />

singulier, <strong>un</strong> peu extrême. J’aime beaucoup ses <strong>film</strong>s parce que, même<br />

lorsqu’ils ne sont pas totalement aboutis, il y a toujours quelque chose<br />

<strong>de</strong> fort et <strong>de</strong> lyrique qui les traverse. Elle ose plein <strong>de</strong> choses.<br />

Elle est venue me voir et a commencé à me parler d’<strong>un</strong>e idée qu’elle<br />

avait pour <strong>un</strong> <strong>film</strong> qu’elle voulait faire avec moi. L’histoire d’<strong>un</strong>e femme<br />

<strong>de</strong> mon âge qui vit <strong>un</strong> truc que plein <strong>de</strong> femmes vivent aujourd’hui -<br />

c’est incroyable tous ces couples qui se cassent la figure ! On arrive<br />

à la quarantaine et là, tout pète ! Ça m’intéressait, et… pas seulement<br />

parce que ça m’est arrivé à moi aussi ! Donc, je lui ai dit « Pourquoi<br />

pas ? » Et elle s’est mise à écrire. En plus, toute cette entreprise<br />

avec cette équipe me plaisait : Catherine, donc, Fabienne Vonier,<br />

productrice que j’aime beaucoup et qui a fait <strong>de</strong> très belles choses,<br />

Agnès Godard à la lumière… J’avais envie <strong>de</strong> partir avec ces femmes-là,<br />

<strong>de</strong> raconter avec elles cette histoire d’<strong>un</strong>e femme qui a été étouffée<br />

pendant très longtemps et qui pense qu’elle va pouvoir réinventer<br />

la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> sa vie… J’en connais <strong>de</strong> ces épouses dont<br />

le mari estime que ce n’est pas la peine qu’elles aient <strong>un</strong>e carte<br />

<strong>de</strong> crédit, ni qu’elles travaillent et qui se retrouvent piégées, quand<br />

elles ne sont pas confrontées à la violence conjuguale… Trois ou<br />

quatre mois après ce premier ren<strong>de</strong>z-vous, Catherine est revenue avec<br />

son scénario, qui, d’ailleurs entre temps, a pas mal évolué et voilà…<br />

Comment définiriez-vous le personnage <strong>de</strong> Suzanne ?<br />

Comme je vous le disais, c’est <strong>un</strong>e femme qui, à <strong>un</strong> moment donné<br />

<strong>de</strong> sa vie, fait le bilan et n’aime pas ce qu’elle voit. Elle a été empêchée<br />

<strong>de</strong> travailler parce qu’elle a élevé ses enfants pendant longtemps.<br />

Aujourd’hui que ce sont <strong>de</strong> grands adolescents, Suzanne veut reprendre<br />

son métier <strong>de</strong> kiné. Un peu con<strong>de</strong>scendant, Samuel, son mari, déci<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>r à s’installer mais… au fond <strong>de</strong> leur jardin quand même !<br />

Des fois qu’elle irait trop loin ! On voit bien qu’il considère ça comme<br />

<strong>un</strong>e lubie. Elle aime son mari, il lui donne tout ce qu’elle veut -<br />

elle est bien habillée, elle a <strong>un</strong>e belle maison, <strong>un</strong>e belle voiture, elle va<br />

partir en vacances… - mais il la rabaisse tout le temps. Cette femme<br />

est SA femme, elle lui appartient, elle fait partie <strong>de</strong> son statut social.<br />

Elle se rend compte <strong>de</strong> tout ça, et soudain, elle rencontre cet homme<br />

qui est tout le contraire <strong>de</strong> son mari. Gentil, attentif, simple. Un maçon,<br />

<strong>un</strong> Espagnol, <strong>un</strong> rien escroc sur les bords. Il vient d’<strong>un</strong> milieu totalement<br />

différent, il vit dans <strong>un</strong> endroit épouvantable. Elle a alors comme<br />

<strong>un</strong>e sorte <strong>de</strong> révélation, liée aussi bien sûr à <strong>un</strong> désir et à <strong>un</strong> plaisir<br />

sexuels comme elle n’en a pas connus <strong>de</strong>puis longtemps.<br />

Qu’est-ce qui vous touche le plus chez elle ?<br />

Son espérance et sa naïveté. Elle croit qu’elle peut changer <strong>de</strong> vie,<br />

qu’elle peut retrouver l’amour, qu’elle peut recommencer à zéro.<br />

Elle est même prête à <strong>de</strong>venir caissière. Sa fierté pèse moins que<br />

son désir et son amour. Elle vit cette rencontre comme <strong>un</strong> nouvel envol.<br />

Evi<strong>de</strong>mment, tout cela est voué à l’échec. C’est ça qui est touchant.<br />

Ce qui me touche aussi, c’est que, dès qu’elle a décidé <strong>de</strong> partir, rien<br />

ne l’arrête. Même pas ses enfants. Elle éprouve le minimum<br />

<strong>de</strong> culpabilité et après, elle passe à autre chose, elle avance sur<br />

son propre chemin. J’aime bien cette liberté…<br />

Comprenez-vous la réaction du mari, cette espèce <strong>de</strong> chantage<br />

économique ?<br />

Oui, parce que c’est la seule arme dont il dispose. Il y a <strong>un</strong>e scène<br />

qui est très émouvante, quand il l’accuse. Il est très ému, très troublé,<br />

déstabilisé et elle le réconforte : « Je ne le verrai plus, je te promets,<br />

je ne le verrai plus ». On y croit vraiment, elle le materne, mais bien<br />

sûr elle n’arrive pas à tenir sa promesse. On comprend aussi qu’il est<br />

désespéré et qu’il est prêt vraiment à tout pour la gar<strong>de</strong>r. Je comprends<br />

sa manipulation même si je la juge intolérable. Mais <strong>Yvan</strong> (<strong>Attal</strong>) joue<br />

tout ça avec <strong>un</strong>e telle justesse qu’on est presque <strong>de</strong> son côté quand


on regar<strong>de</strong> le <strong>film</strong>. On se dit qu’il va réussir à la gar<strong>de</strong>r…<br />

En même temps, c’est vain <strong>de</strong> croire qu’on peut acheter l’amour.<br />

J’aime bien l’idée que Suzanne comme Samuel soient l’<strong>un</strong> kiné et<br />

l’autre mé<strong>de</strong>cin : ce sont ceux qui sont censés soigner qui blessent…<br />

Le <strong>film</strong> <strong>de</strong> Catherine raconte aussi la douleur dans l’amour, le mal<br />

qu’on se fait lorsqu’on aime…<br />

Et la réaction finale <strong>de</strong> Suzanne, vous la comprenez ?<br />

Oui, j’aurais fait pareil ! (rires). Cette histoire ne pouvait se terminer<br />

que dans le drame. D’autant que Suzanne est handicapée par<br />

son aveuglement, par son désir <strong>de</strong> tout recommencer. Il y a <strong>un</strong> moment<br />

où elle perd complètement pied, où elle n’est pas loin <strong>de</strong> la folie.<br />

La violence qu’elle a subie est littéralement insupportable. A la fin,<br />

elle a <strong>un</strong> sentiment <strong>de</strong> frustration poussé à bout, <strong>un</strong> sentiment<br />

d’enfermement oppressant. La scène d’amour entre le mari et la femme<br />

lorsqu’il réussit à la faire revenir, c’est épouvantable ! Elle ne peut<br />

que vouloir s’en échapper coûte que coûte, quel que soit le prix à<br />

payer.<br />

Pensez-vous que le fait qu’elle et le personnage <strong>de</strong> <strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong><br />

soient d’origine étrangère a <strong>un</strong>e inci<strong>de</strong>nce sur leur histoire ?<br />

Oui bien sûr. Ils ont tous les <strong>de</strong>ux ce sentiment d’être déplacé.<br />

D’ailleurs, quand on vit pendant longtemps dans <strong>un</strong> pays étranger,<br />

il y a toujours <strong>un</strong> moment où on a envie <strong>de</strong> s’en échapper, soit pour<br />

rentrer chez soi, soit pour aller ailleurs - même, comme ici, l’ailleurs est<br />

symbolique. Quand Catherine m’a parlé du personnage, elle m’a dit que<br />

Suzanne venait d’<strong>un</strong>e famille mo<strong>de</strong>ste et qu’elle avait été parachutée<br />

dans ce milieu bourgeois, très aisé, et que, finalement, la relation<br />

qu’elle a avec cet ouvrier, c’est comme <strong>un</strong> retour aux sources.<br />

D’ailleurs, quand le mari dit à sa femme : « C’est ça, c’est le fantasme<br />

<strong>de</strong> la bourgeoise pour l’ouvrier ? », elle est encore plus blessée…<br />

Est-ce qu’il y a <strong>de</strong>s scènes que vous redoutiez<br />

particulièrement ?<br />

Forcément comme toujours toutes les scènes physiques. Que ce soit<br />

les scènes <strong>de</strong> violence ou les scènes d’amour. C’est toujours<br />

compliqué… Ce qui était amusant sur ce <strong>film</strong>, comme il y avait beaucoup<br />

<strong>de</strong> femmes sur le plateau, c’est que chac<strong>un</strong>e donnait son avis pendant<br />

les scènes d’amour : « Tu <strong>de</strong>vrais faire ça comme ça et pas comme ça ! »<br />

Il y avait <strong>un</strong>e sorte <strong>de</strong> solidarité, chac<strong>un</strong> se projettait dans<br />

les personnages. C’était <strong>un</strong> vrai travail <strong>de</strong> groupe, c’était assez rigolo !<br />

Même si ce sont <strong>de</strong>s scènes que je n’aime pas plus faire que regar<strong>de</strong>r<br />

<strong>un</strong>e fois le <strong>film</strong> terminé, j’ai beaucoup aimé ce qu’elles dégagent ici.<br />

L’histoire est classique mais pas la manière dont Catherine l’a tournée.<br />

Chaque fois que Suzanne voit son amant, <strong>un</strong>e fois que leur relation<br />

est consommée, tout ce qu’on voit, ce sont <strong>de</strong>s bras qui se croisent,<br />

qui s’attrapent… J’ai trouvé ça très beau… C’est <strong>un</strong> <strong>film</strong> très sensuel.<br />

Il n’y a qu’à voir la manière dont elle <strong>film</strong>e la nature, la campagne,<br />

le bord <strong>de</strong> la mer… J’aime bien aussi le travail qui a été fait<br />

sur le son. D’<strong>un</strong> côté, ces crissements <strong>de</strong>s criquets et <strong>de</strong>s cigales,<br />

et <strong>de</strong> l’autre, dans la cité où habite le personnage <strong>de</strong> <strong>Sergi</strong>, le bruit<br />

<strong>de</strong>s motos, les hurlements <strong>de</strong>s enfants… Comme les <strong>de</strong>ux visages<br />

<strong>de</strong> la même ville.<br />

Comment qualifieriez-vous Catherine comme metteur en<br />

scène ?<br />

Elle est à la fois très instinctive et très directive, et aussi… assez<br />

brutale ! (rires) Frontale, directe, passionnelle. Mais je recommencerai<br />

<strong>de</strong>main avec elle ! Elle n’a pas peur, elle est exigeante et rigoureuse.<br />

Si elle n’obtient pas ce qu’elle veut, elle le décrit exactement et…<br />

il faut s’exécuter ! Finalement, ça tombait bien car moi j’attends d’être<br />

poussée dans mes retranchements, j’attends d’être provoquée…<br />

Plutôt ça que quelqu’<strong>un</strong> qui est toujours content dès la première<br />

prise !<br />

En quoi diriez-vous que Catherine Corsini et Agnès Godard se<br />

complètent ?<br />

Agnès, c’est <strong>un</strong>e vraie intellectuelle, en tout cas quelqu’<strong>un</strong><br />

qui réfléchit beaucoup, qui peut décrire très précisément le plan qu’elle<br />

va faire. J’ai beaucoup aimé travailler avec elle. Elle est fascinante<br />

sur <strong>un</strong> plateau parce que c’est <strong>un</strong>e mine <strong>de</strong> références et d’informations<br />

et, en même temps, elle a <strong>un</strong> regard parfois enfantin qui est très touchant.<br />

Elle est très enthousiaste et très douce. Elle est petite et très forte -<br />

il le faut pour porter la caméra sur son épaule ! Elles se complètent


très bien. Agnès est posée, très méthodique, très réfléchie et Catherine<br />

est là qui cherche, qui doute, qui fonce, qui bouillonne… C’était drôle<br />

<strong>de</strong> les voir ensemble. Il y avait d’ailleurs <strong>un</strong>e bonne ambiance sur ce<br />

<strong>film</strong>. C’était l’été, on était à Nîmes, il faisait beau, trop chaud même,<br />

c’en était étourdissant ! L’équipe était très soudée et très joyeuse.<br />

C’était <strong>un</strong>e aventure assez particulière. On a tourné énormément<br />

dans cette superbe maison, on a tourné <strong>de</strong>s scènes à l’aube,<br />

on a tourné dans cette ruine - il fallait <strong>un</strong>e heure pour monter là-haut…<br />

C’était sublimement beau. C’était joyeux mais aussi… très intense !<br />

Tous les jours c’était <strong>un</strong> feu d’artifice <strong>de</strong> crises <strong>de</strong> nerf, <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

engueula<strong>de</strong>s, mais tout le mon<strong>de</strong> se retrouvait le soir pour <strong>de</strong> jolies<br />

fêtes !<br />

Aviez-vous revu <strong>Yvan</strong> <strong>Attal</strong> <strong>de</strong>puis le <strong>film</strong> que vous aviez tourné<br />

ensemble pour Eric Rochant (AUX YEUX DU MONDE en 1990) ?<br />

On s’était croisés comme ça mais on n’avait pas retravaillé<br />

ensemble. J’espère qu’on va recommencer car c’est <strong>un</strong> acteur que<br />

j’aime beaucoup. J’aimerais bien aussi tourner avec lui comme metteur<br />

en scène. Il n’a pas changé, il a juste mûri et a acquis en plus <strong>un</strong><br />

regard <strong>de</strong> cinéaste. Son jeu est tout aussi nerveux, vif, concentré, à fleur<br />

<strong>de</strong> peau, sensible…<br />

Comment définiriez-vous votre plaisir <strong>de</strong> tourner avec<br />

<strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> ?<br />

J’aime beaucoup jouer avec cet homme parce que c’est <strong>un</strong> acteur<br />

qui accomplit vraiment <strong>un</strong> travail physique. Tout ce qu’il fait, tout<br />

ce qu’il exprime passe par le corps. C’est rare… Je ne sais pas<br />

si ça vient <strong>de</strong> sa formation à Paris chez Jacques Lecoq, mais c’est par<br />

le corps qu’il <strong>de</strong>vient le personnage. J’aime bien jouer avec <strong>un</strong> acteur qui,<br />

plutôt que d’analyser tout le temps son personnage, le fait ! J’aime bien<br />

ça, c’est peut-être mon côté anglais ! Nous, on a davantage tendance<br />

à nous éloigner <strong>de</strong> nos véritables personnalités et à en adopter d’autres,<br />

alors qu’en France, ce qui compte le plus, c’est l’intimité <strong>de</strong> celui qui est<br />

à l’écran - c’est d’ailleurs parfois intéressant <strong>de</strong> fouiller ça…<br />

Après le <strong>film</strong> <strong>de</strong> Philippe Clau<strong>de</strong>l, IL Y A LONGTEMPS QUE<br />

JE T’AIME, vous voilà à nouveau à interpréter <strong>un</strong>e femme qui<br />

cherche à réinventer sa vie. Pensez-vous que c’est comme ça<br />

que le cinéma français vous voit ?<br />

Non je crois que ce sont juste <strong>de</strong>s personnages qui illustrent ma<br />

tranche d’âge ! Qui évoquent, chac<strong>un</strong> à sa manière, et elle est très<br />

différente, cette fameuse crise <strong>de</strong> la quarantaine…


ENTRETIEN AVEC<br />

SERGI LOPEZ<br />

Quelle a été votre réaction lorsque Catherine Corsini vous a<br />

donné à lire le scénario <strong>de</strong> PARTIR ?<br />

Dès que je l’ai lu, j’ai eu envie <strong>de</strong> faire le <strong>film</strong>. Je n’ai pas <strong>de</strong> stratégie<br />

précise - quel rôle je dois faire, quels <strong>film</strong>s je dois enchaîner…<br />

mais j’ai toujours besoin d’être pris par l’histoire, d’avoir envie <strong>de</strong><br />

la raconter et là, ça a été le cas immédiatement. Il y a<br />

dans cette histoire quelque chose d’essentiel et à la fois <strong>de</strong> très<br />

simple, qui tourne autour <strong>de</strong> questions fondamentales. Qu’est-ce que<br />

l’amour ? Qu’est-ce que la passion ? Qu’est-ce qui fait qu’on tombe<br />

amoureux ? Comment vit-on cette dichotomie éternelle entre la douleur<br />

et l’amour, car on rêve tous <strong>de</strong> tomber amoureux même si l’on sait<br />

que cela peut nous faire du mal ? Jusqu’où aller trop loin quand on est<br />

fou amoureux ? Qu’est-ce qui peut nous faire perdre la tête ? Quelle est<br />

cette énergie très forte qui pousse <strong>un</strong> homme et <strong>un</strong>e femme à s’aimer ?<br />

Il y avait tout ça et aussi cette course folle du personnage <strong>de</strong> <strong>Kristin</strong>.<br />

Une course éperdue qui à la fois fascine et terrifie…<br />

Comment définiriez-vous votre personnage ?<br />

C’est quelqu’<strong>un</strong> qui a déjà eu pas mal d’expériences mais qui est<br />

encore prêt à perdre la tête et à tomber amoureux. Je crois qu’au fond<br />

<strong>de</strong> lui, c’est quelqu’<strong>un</strong> qui aime aimer. C’est quelqu’<strong>un</strong> <strong>de</strong> généreux.<br />

Et même s’il sent bien à <strong>un</strong> moment donné que tout ça va trop loin,<br />

il n’hésite pas pour autant et il fonce, il se donne à fond.<br />

Dans sa relation avec Suzanne, c’est lui qui reste le plus luci<strong>de</strong>,<br />

mais même quand il réalise que c’est perdu, il ne recule pas d’<strong>un</strong> pas.<br />

Il est prêt à mourir pour elle. C’est la plus belle preuve d’amour qu’il<br />

peut lui donner. Il va tout risquer pour suivre cette femme qui est folle<br />

<strong>de</strong> lui - presque au sens propre !<br />

Le fait qu’ils soient <strong>de</strong>ux étrangers, est-ce que c’est, d’après<br />

vous, <strong>un</strong> élément important <strong>de</strong> leur histoire ?<br />

Je crois simplement que ça renforce l’idée qu’en face <strong>de</strong><br />

l’amour, on est tous <strong>de</strong>s étrangers, qu’on vient tous d’ailleurs,<br />

quelle que soit notre origine, notre nationalité, notre expérience,<br />

notre culture, notre milieu social. Quand on est face à l’amour, on est<br />

<strong>de</strong> toute manière obligé <strong>de</strong> se trouver <strong>un</strong> espace comm<strong>un</strong>, <strong>un</strong>e langue<br />

comm<strong>un</strong>e. Là, c’est encore plus évi<strong>de</strong>nt puisqu’elle est Anglaise,<br />

moi, Catalan et qu’on se parle en français… Lorsque l’amour est<br />

si fort, si partagé, les différences s’effacent, les accents disparaissent,<br />

il n’y a plus que <strong>de</strong>ux êtres en fusion… De la même manière,<br />

le fait qu’ils soient <strong>de</strong> classes sociales très éloignées, c’est quelque<br />

chose qui nourrit l’histoire, qui sert à montrer que la folie d’amour<br />

est capable <strong>de</strong> surmonter tous les obstacles, <strong>de</strong> venir à bout <strong>de</strong> toutes<br />

les différences, <strong>de</strong> toutes les frontières… Même si l’on sait que<br />

ça ne finit pas toujours bien, surtout quand on est dans <strong>de</strong>s sentiments<br />

aussi extrêmes…<br />

Y avait-il <strong>de</strong>s scènes que vous appréhendiez particulièrement ?<br />

Comme toujours les scènes d’amour, surtout dans <strong>un</strong>e histoire<br />

comme celle-là où le désir et le plaisir sont aussi importants, où il est<br />

essentiel qu’on soit près <strong>de</strong>s corps, près <strong>de</strong> la chair, près <strong>de</strong> la peau…<br />

La peur est à la mesure <strong>de</strong> cette importance-là ! Il y a toujours <strong>un</strong> peu<br />

d’appréhension parce qu’il faut que ces scènes soient très crédibles<br />

et qu’on a sa pu<strong>de</strong>ur, sa timidité… D’autant que moi, comme je suis<br />

<strong>un</strong> garçon sympathique, apparemment extraverti, on ne me donne<br />

jamais le crédit <strong>de</strong> croire que je suis timi<strong>de</strong> et pudique ! Je vous assure<br />

pourtant que je n’aime pas du tout montrer mon corps, que je ne suis<br />

pas très à l’aise avec ça…<br />

En même temps, c’est <strong>un</strong> emploi qui vous est <strong>un</strong> peu familier.<br />

Ce n’est pas la première fois que vous êtes <strong>film</strong>é comme<br />

<strong>un</strong> objet <strong>de</strong> désir…<br />

Etre <strong>film</strong>é comme <strong>un</strong> objet <strong>de</strong> désir, bien sûr, je trouve ça super (rires)<br />

mais j’ai beaucoup <strong>de</strong> mal à le comprendre, surtout… lorsque je me<br />

vois dans la glace ! Mais bon, chac<strong>un</strong> ses goûts. Ou plus exactement -<br />

et c’est bien là aussi le propos du <strong>film</strong> - c’est la preuve supplémentaire


que le désir sexuel échappe à toute prévision, à toute régle. Ce n’est<br />

pas lié à la réflexion, ni à l’esthétique mais à quelque chose <strong>de</strong> plus<br />

profond, presque d’animal… Je me suis souvent trouvé confronté à<br />

ce type d’appréhension, pas seulement d’être nu ou <strong>de</strong> jouer <strong>de</strong>s scènes<br />

d’amour, mais aussi <strong>de</strong> pleurer ou <strong>de</strong> mentir en public. Dans la vie<br />

<strong>de</strong> tous les jours, j’en suis littéralement incapable mais au cinéma,<br />

j’ai appris à faire avec. J’ai appris à me dire que, à partir du moment<br />

où je fais ce métier, ce n’est pas moi qui compte mais l’histoire<br />

à raconter, le <strong>film</strong> à faire. En plus sur PARTIR, je dois avouer que c’était<br />

<strong>un</strong> peu plus facile pour les scènes d’amour grâce à toutes ces présences<br />

féminines autour <strong>de</strong> <strong>Kristin</strong> et moi : Catherine, Agnès (Godard)…<br />

Il me semble en effet qu’il y avait quelque chose <strong>de</strong> féminin dans<br />

<strong>de</strong>s scènes où l’on cherchait le grain <strong>de</strong> la peau, la douceur, la sueur,<br />

la tendresse, l’harmonie…<br />

Quel est le meilleur atout <strong>de</strong> Catherine Corsini comme metteur<br />

en scène ?<br />

Elle est passionnée et passionnelle… Moi qui aime quand je tourne<br />

que le metteur en scène soit totalement habité par l’histoire qu’il veut<br />

raconter, que ce ne soit pas pour lui qu’<strong>un</strong> <strong>film</strong> <strong>de</strong> plus, avec Catherine,<br />

je ne pouvais pas mieux tomber. Je m’entends très bien avec elle.<br />

Je l’aime beaucoup comme femme, je l’aime beaucoup comme metteur<br />

en scène. C’est quelqu’<strong>un</strong> <strong>de</strong> sensuel, et ça rejoint ce que je disais<br />

tout à l’heure : cela a plus à voir avec l’instinct qu’avec la réflexion.<br />

Elle écoute beaucoup. Quand on joue, on essaie tous <strong>de</strong> trouver<br />

quelque chose qui nous parle profondément, et elle est très sensible<br />

à ça, avec <strong>un</strong> côté même presque enfantin. Elle est très en attente<br />

<strong>de</strong> quelque chose qui la surprenne, que quelque chose se passe,<br />

et si ça ne se passe pas, elle le sent tout <strong>de</strong> suite et elle fait tout pour<br />

que cela arrive. Au fond, je trouve qu’elle est très romantique mais<br />

avec… <strong>un</strong> côté p<strong>un</strong>k !<br />

Et le meilleur atout <strong>de</strong> <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong> ?<br />

C’est <strong>un</strong>e actrice profon<strong>de</strong>. Elle vibre. Littéralement. On la sent même<br />

parfois trembler, c’est extrêmement troublant. Elle est totalement<br />

possédée par le rôle tout en étant <strong>un</strong> formidable ministre <strong>de</strong> l’intérieur<br />

<strong>de</strong> son personnage. Elle n’a pas <strong>de</strong> barrière, elle se donne à fond,<br />

toujours. C’est quelqu’<strong>un</strong> avec qui l’on joue vraiment. Il y a <strong>un</strong> échange,<br />

<strong>un</strong> partage… Comme avec <strong>Yvan</strong> (<strong>Attal</strong>) d’ailleurs. Je ne le connaissais<br />

pas mais cela a été <strong>un</strong> grand plaisir <strong>de</strong> jouer avec lui, même si<br />

on n’a eu qu’<strong>un</strong>e scène ensemble. Aussi bien pendant le tournage<br />

qu’en <strong>de</strong>hors du plateau, on a beaucoup beaucoup ri, vraiment beaucoup !<br />

Il est si français et j’adore la manière incroyable qu’il a <strong>de</strong> prendre<br />

son personnage à bras le corps…<br />

C’est <strong>un</strong> <strong>film</strong> français mais vous y jouez <strong>un</strong> Catalan qui, d’ailleurs,<br />

revient chez lui à <strong>un</strong> moment donné…<br />

Ça participe, je crois, à la vérité <strong>de</strong> l’histoire, à la profon<strong>de</strong>ur<br />

du <strong>film</strong>… Bien sûr j’ai aimé ça. Renouer ce lien avec cette langue,<br />

avec ces paysages, avec la mer…


ENTRETIEN AVEC<br />

YVAN ATTAL<br />

Qu’est-ce qui vous a décidé à faire PARTIR ?<br />

L’histoire. J’aimais profondément le thème du <strong>film</strong>. On voit beaucoup<br />

d’histoires d’amour et je trouvais intéressant <strong>de</strong> ramener cette histoire-là<br />

à <strong>un</strong>e sorte <strong>de</strong> constat social. Qu’<strong>un</strong>e femme, pour suivre son amant,<br />

ait le courage, dans le mon<strong>de</strong> dans lequel on vit, <strong>de</strong> passer outre<br />

tout ce qui fait sa vie <strong>de</strong> tous les jours - le confort, le statut social,<br />

les enfants… je trouvais ça très fort. J’aimais le côté radical<br />

<strong>de</strong> point <strong>de</strong> vue. Je le voyais comme l’opposé du <strong>film</strong> <strong>de</strong> Woody Allen,<br />

MATCH POINT. Autant MATCH POINT, c’est l’Amérique : <strong>un</strong> type<br />

sacrifie sa passion amoureuse pour son statut social et il s’en sort ;<br />

autant PARTIR est très français : elle sacrifie tout pour sa passion<br />

amoureuse et, en plus, elle ne s’en sort pas ! C’est en ça que je trouvais<br />

l’histoire du <strong>film</strong> très intéressante parce qu’il y avait évi<strong>de</strong>mment<br />

<strong>un</strong> discours sur le mon<strong>de</strong> aujourd’hui, sur l’amour aujourd’hui…<br />

La première version du scénario que j’ai lue ne m’a pourtant pas<br />

vraiment convaincu. Mais Catherine est revenue me voir quinze jours<br />

après et elle avait fait <strong>un</strong> travail incroyable, renforçant les personnages<br />

et approfondissant les situations. Du coup, ça <strong>de</strong>venait intéressant.<br />

Du coup, j’ai cru en elle. Je me suis dit « Quelqu’<strong>un</strong> qui est capable<br />

en quinze jours <strong>de</strong> faire ce travail-là, ça veut dire quelque chose ! »<br />

En plus, il y avait <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong> que j’avais envie <strong>de</strong> retrouver<br />

près <strong>de</strong> vingt ans après le <strong>film</strong> <strong>de</strong> Rochant AUX YEUX DU MONDE,<br />

et <strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> que j’avais envie <strong>de</strong> rencontrer…<br />

Qu’est-ce qui vous touche dans ce personnage du mari ?<br />

Il est amoureux <strong>de</strong> sa femme et il use <strong>de</strong> tout son pouvoir, <strong>de</strong> toutes<br />

ses possibilités, pour la gar<strong>de</strong>r. Il ne recule <strong>de</strong>vant rien, ni l’humiliation,<br />

ni le chantage financier. C’est <strong>un</strong> petit bourgeois <strong>de</strong> province qui<br />

a trois connections avec les notables du coin et s’en sert. Evi<strong>de</strong>mment,<br />

c’est pas joli-joli mais je ne le vois pas comme <strong>un</strong> « méchant » plutôt<br />

comme <strong>un</strong> type désespéré. Dans sa naïveté, il pense que c’est comme<br />

ça qu’il va pouvoir la retenir. D’autant qu’avec la vision du mon<strong>de</strong><br />

qui est la sienne, il estime que sa femme n’a auc<strong>un</strong> avenir avec ce<br />

type-là, il est persuadé qu’elle se trompe. Il sous estime totalement<br />

l’amour qu’elle lui porte. Sa naïveté me touche, ce que j’aime moins,<br />

c’est cette incapacité <strong>de</strong> voir <strong>un</strong> peu plus loin que le bout <strong>de</strong> son<br />

milieu social… Il pense qu’il a <strong>de</strong> l’importance parce qu’il a réussi<br />

socialement, il pense qu’il peut tout acheter, même les sentiments,<br />

même le désir…<br />

Qu’est-ce que vous appréhendiez le plus en abordant ce<br />

personnage qui est le « méchant » <strong>de</strong> l’histoire ?<br />

Ma seule appréhension au début, c’était… <strong>de</strong> ne pas être crédible<br />

en père <strong>de</strong> famille avec pour enfants <strong>de</strong> grands adolescents <strong>de</strong> 16 ou<br />

17 ans ! J’avais du mal à m’imaginer dans ce rôle-là. Mais il a bien<br />

fallu que j’admette que, désormais, ça fonctionnait ! (rires) Sinon,<br />

c’est plutôt excitant <strong>de</strong> jouer le gars antipathique <strong>de</strong> l’histoire, d’autant<br />

que ça ne m’était jamais arrivé. Même si moi, je n’arrivais pas<br />

à le voir comme ça et à le détester ! Pour la réussite <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong><br />

rôles, plus l’acteur est sincère avec son rôle, et plus ça marche. Après,<br />

c’est la mise en scène qui peut changer le regard que le spectateur<br />

a sur lui. Ce ne doit pas être le travail <strong>de</strong> l’acteur.<br />

Qu’est-ce qui vous a frappé en travaillant avec Catherine Corsini ?<br />

Son énergie et ses doutes. Sa volonté <strong>de</strong> chercher, <strong>de</strong> tirer<br />

le maximum <strong>de</strong> chac<strong>un</strong>. J’ai beaucoup aimé travailler avec elle parce<br />

qu’elle m’a réellement touché avec cette histoire. Et puis, avec elle,<br />

les rapports <strong>de</strong> séduction qui existent toujours entre <strong>un</strong> metteur<br />

en scène et ses acteurs sont particuliers. C’est amusant <strong>de</strong> voir comment<br />

elle regar<strong>de</strong> les hommes. D’aillleurs, l’émotion du <strong>film</strong> vient<br />

essentiellement du parcours du personnage <strong>de</strong> <strong>Kristin</strong>, les <strong>de</strong>ux hommes<br />

n’existent que par rapport à elle, chac<strong>un</strong> dans sa fonction : le mari<br />

et l’amant.


D’être metteur en scène, ça a changé ce que vous atten<strong>de</strong>z<br />

<strong>de</strong>s autres metteurs en scène ?<br />

Non, mais je comprends sans doute mieux ce qu’ils atten<strong>de</strong>nt et<br />

je pense que ça a simplifié ma vie d’acteur ! Aujourd’hui, je sais que<br />

dans la fabrication d’<strong>un</strong> <strong>film</strong>, tout ne passe pas par les acteurs, comme<br />

je le croyais auparavant, mais aussi par le montage, par <strong>de</strong>s tas<br />

d’autres étapes. Les acteurs ne sont, au même titre que le travelling,<br />

qu’<strong>un</strong> outil parmi d’autres pour raconter <strong>un</strong>e histoire. Ils sont<br />

certes l’outil le plus sensible mais <strong>un</strong> outil quand même… Avant,<br />

je n’avais pas conscience <strong>de</strong> ce travail qui s’effectue après le tournage,<br />

<strong>de</strong> ce que le metteur en scène et le monteur vont aller chercher dans<br />

telle prise, <strong>de</strong> ce qu’ils vont privilégier dans telle autre… Du coup, sur <strong>un</strong><br />

plateau je suis beaucoup plus détendu. Je me jette plus facilement dans<br />

les scènes, j’ai davantage confiance quand <strong>un</strong> metteur en scène me<br />

dit qu’il a ce qu’il veut, je n’insiste plus. Je pense que mes rapports<br />

avec les metteurs en scène sont beaucoup plus faciles <strong>de</strong>puis que<br />

moi-même je fais <strong>de</strong>s <strong>film</strong>s. Et puis aussi, je suis content <strong>de</strong> voir<br />

comment les autres travaillent, je n’ai fait que <strong>de</strong>ux <strong>film</strong>s, j’apprends<br />

encore. Mais c’est sûr que ça a changé totalement ma perception <strong>de</strong>s<br />

choses sur <strong>un</strong> tournage.<br />

Comment qualifieriez-vous <strong>Kristin</strong> <strong>Scott</strong> <strong>Thomas</strong> comme partenaire ?<br />

On était très contents <strong>de</strong> se retrouver parce que, sur le <strong>film</strong> <strong>de</strong><br />

Rochant, on n’avait pas le même rapport : elle, elle était maîtresse d’école<br />

et moi, presque encore <strong>un</strong> ado… Depuis, elle comme moi, on a pas<br />

mal voyagé ! Et ça me plaisait <strong>de</strong> jouer son mari. Même si on jouait <strong>un</strong><br />

mari et <strong>un</strong>e femme qui ne s’aiment plus, on a forcément été beaucoup<br />

plus proches, beaucoup plus intimes que sur le Rochant. J’ai l’impression<br />

<strong>de</strong> l’avoir vraiment rencontrée cette fois ! Et ça me ravit parce que<br />

<strong>de</strong>puis AUX YEUX DU MONDE, je l’ai trouvée formidable dans tous<br />

les <strong>film</strong>s que j’ai vus avec elle. Elle a quelque chose <strong>de</strong> magique qui est<br />

comm<strong>un</strong> avec Charlotte (Gainsbourg) même si elles ne fonctionnent pas<br />

du tout pareil. Elle fait <strong>de</strong>s choses qu’on ne voit pas sur le plateau et<br />

qu’on découvre sur l’écran. Vous avez <strong>un</strong>e certaine sensation en jouant<br />

<strong>un</strong>e scène avec elle et puis lorsque vous regar<strong>de</strong>z la même scène à<br />

l’écran, vous découvrez comme le sous-texte <strong>de</strong> la scène, quelque chose<br />

qui semble avoir échappé à l’actrice et qui est là, vivant, à l’image…<br />

Et <strong>Sergi</strong> <strong>Lopez</strong> ?<br />

<strong>Sergi</strong>, je ne le connaissais pas mais dès qu’on a tourné ensemble<br />

notre première scène - c’était même quasiment la seule - on a eu<br />

dix huit fous rires ! On a trouvé <strong>un</strong>e complicité immédiate, mais vraiment<br />

immédiate. C’était même frustrant <strong>de</strong> ne pas avoir plus <strong>de</strong> choses à jouer<br />

avec lui. Il est très vivant, <strong>Sergi</strong>, il a <strong>un</strong>e écoute formidable, par exemple<br />

si vous changez <strong>un</strong> petit détail dans votre jeu, il réagit immédiatement,<br />

ça affecte le sien… Ça m’a donné envie <strong>de</strong> le retrouver vite…


LISTE ARTISTIQUE<br />

Suzanne<br />

Ivan<br />

Samuel<br />

Rémi<br />

Dubreuil<br />

David<br />

Marion<br />

Berta<br />

Lagache<br />

LISTE TECHNIQUE<br />

Réalisation<br />

Scénario<br />

Image<br />

Montage<br />

Son<br />

Décors<br />

Costumes<br />

Casting<br />

Assistant réalisateur<br />

Directeur <strong>de</strong> production<br />

Scripte<br />

Produit par<br />

Producteur Associé<br />

Coproducteurs<br />

Producteur exécutif<br />

Une coproduction<br />

Avec la participation <strong>de</strong><br />

En association avec<br />

Avec le soutien <strong>de</strong><br />

en partenariat avec<br />

Développé avec le soutien <strong>de</strong><br />

Distribution France<br />

Ventes Internationales<br />

KRISTIN SCOTT THOMAS<br />

SERGI LOPEZ<br />

YVAN ATTAL<br />

BERNARD BLANCAN<br />

ALADIN REIBEL<br />

ALEXANDRE VIDAL<br />

DAISY BROOM<br />

BERTA ESQUIROL<br />

GERARD LARTIGAU<br />

Catherine Corsini<br />

Catherine Corsini<br />

Avec la collaboration <strong>de</strong> Gaëlle Macé<br />

Agnès Godard<br />

Simon Jacquet<br />

Yves-Marie Omnes<br />

Olivier Dô Hùu<br />

Benoît Hillebrant<br />

Laurent Ott<br />

Anne Schotte<br />

Brigitte Moidon<br />

Olivier Genet<br />

Marc Fontanel<br />

Camille Brottes-Beaulieu<br />

Fabienne Vonier<br />

Michel Seydoux<br />

Olivier Legrain<br />

Vincent Malle<br />

Stéphane Parthenay<br />

Pyrami<strong>de</strong> Productions<br />

Camera One<br />

Vmp<br />

Solaire Production<br />

Canal + et Cinécinéma<br />

Cofinova<br />

La Région Languedoc-Roussillon<br />

Le Centre National <strong>de</strong> la Cinématographie<br />

Cofinova, La Procirep et L’Angoa-Agicoa<br />

Pyrami<strong>de</strong><br />

Pyrami<strong>de</strong> International<br />

France / 2009 / 1H25 / 35 mm / 1:85<br />

Couleur / Dolby SR et Dolby SRD

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