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Sur la couv :<br />
NO ONE IS INNOCENT<br />
THERAPY?<br />
DIRTY SHIRT<br />
WHEELFALL<br />
SOLAR FLARE RECORDS<br />
DOUR<br />
XTREME FEST<br />
MOTOCULTOR FEST<br />
SHIKO SHIKO<br />
REFUSED<br />
LA MALTERIE
TEXTE<br />
EDITOEDITO<br />
Je suis arrivé à Lille en 2009 pour raisons professionnelles (bosser chez un disquaire-arnaqueur d’occasions qui porte un nom<br />
quasi-similaire à une marque de feuille à rouler) et évidemment aussi pour des motivations extra-professionnelles. Et parmi<br />
celle-ci : voir des concerts, voir des concerts, voir des concerts... j’avais soif, vraiment soif de concerts. Mais aussi de bières et de<br />
rencontres. Et de rencontres autour d’une bière... En plus de son nom houblonné, de par sa programmation, La Malterie s’est tout<br />
de suite imposée comme une évidence. Pour 7 euros, je pouvais voir Masters Musicians Of Bukkake ou Joe Lally (Fugazi), profiter<br />
de cet incroyable vivier de groupes locaux talentueux (Ed Wood Jr, Cercueil, Shiko Shiko, Berline0.33...) et m’enivrer de bières<br />
à prix raisonnables avec des personnes qui partageaient des goûts musicaux, une esthétique commune, des envies, un projet<br />
de vie... Bref, un lieu carrefour : de rencontre, de confrontation artistique, d’extase éphémère... L’extase, même éphémère, c’est<br />
toujours bon à prendre pour une génération comme la nôtre qui a appris à vivre dans le marasme ambiant et cela, constamment.<br />
Tu te souviens d’une époque où on ne parlait pas de crise ? Personnellement, non.<br />
Après quelques années de fréquentations assidues de La Malterie, une des associations programmatrices de ce lieu fini par<br />
me demander si j’aimerais occuper un poste (ça reste du bénévolat et de l’activisme hein...) de programmateur parce qu’on<br />
partageait des goûts musicaux et que je leur semblais correspondre à la philosophie du lieu. Mon infiniment petite notoriété de<br />
Fenec m’offrait également une pseudo-crédibilité pour y être. Ce à quoi j’ai répondu par la positive tout en étant bien incertain<br />
de pouvoir mériter pleinement cette fonction. S’ensuit 4 ans d’organisation de concerts. Et putain, remplir cette foutue jauge<br />
de 120 personnes avec des groupes que j’adore a été l’un des trucs les plus stimulants de ma vie. Je me suis bien sûr parfois<br />
lamentablement planté mais j’ai aussi eu quelques belles réussites qui m’ont galvanisées et confortées comme jamais dans<br />
mes activités aussi bien à la malterie qu’avec le W-raton laveur. En 4 ans de participation à La Malterie, des trucs géniaux, j’en ai<br />
vécus... En plus de la symbiose intellectuelle et humaine que l’on peut parfois rencontrer dans un fonctionnement associatif, j’ai<br />
été humainement séduit par des musiciens que j’aimais modérément. J’ai aussi eu d’énormes déceptions humaines avec des<br />
gens que j’estimais (les Peter Kernel ne sont que des grosses merdes imbues d’eux-même, voila, ça c’est fait...). Un lieu de ce<br />
type cristallise aussi des fractures sociétales (la solitude, la pauvreté...) et il faut négocier avec ces abominables aspects. Mais<br />
au final, tout ce que l’on retient, c’est le positif, l’endorphine, le frisson, le partage, le sentiment palpable de faire parti d’un projet<br />
pas anodin...<br />
Jusqu’à il y a quelques années, Lille a vraiment été une ville où il faisait bon vivre lorsque tu étais amateur de musique et d’arts.<br />
C’était simple, ça foisonnait de partout. Sauf que depuis quelques-mois, Martine A. (j’ai bien envie de me faire une Bedos vs.<br />
Morano sauf que j’ai pas les fonds nécessaires...) fait la nique aux bars concerts et lieux alternatifs, source de nuisances sonores<br />
et d’alcoolisme sur la voie publique selon la municipalité. Sauf (bis) que La Malterie fait face à des problèmes qui semblent insolubles<br />
sans le concours de cette municipalité qui souhaite concentrer et proposer une conception de la culture bien à elle. Visible,<br />
spectaculaire et tant qu’à faire facilement digérable. Il paraît qu’en temps de crise, c’est toujours la culture qui morfle. La Malterie<br />
n’est pas un cas isolé et des lieux de culture qui en bavent, il y en a plein. Sauf que non. De la thune il y en a et des caisses. Et on<br />
te parle pas des grands crus viticoles qui se cachent dans les caves des hôtels de ville des plus grandes municipalités de France.<br />
Sauf que c’est tellement plus simple de filer 200.000 boules à un imposteur-contentpourien-connard comme Jeff Koons pour<br />
une soi-disant oeuvre d’art en forme de bite ou de névrose œdipienne qui offre une visibilité médiatique à la municipalité que de<br />
sauver un lieu qui a un véritable rôle social, économique et culturel dans un territoire bien précis.<br />
Le Dans l’ombre consacré à Aurélien de La Malterie te donnera de plus amples informations concernant les missions et les difficultés<br />
de ce lieu INCONTOURNABLE à Lille.<br />
Et votre serviteur dans quelques mois sera orphelin de cette stimulation culturelle, intellectuelle, relationnelle et plus<br />
encore mais peu importe au final... Je suis en colère mais imagine le public qui afflue régulièrement pour voir les événements<br />
qui va se retrouver orphelin d’une certaine conception de la culture. Imagine la colère des 100 artistes résidents<br />
à la malterie qui vont perdre leur lieu d’émulation et de travail. Imagine les 6 salariés qui vont perdre un métierpassion<br />
mais également une source de revenu. Monde de merde. Mais profite de La Malterie et de tous ces endroits<br />
qui ont vocation à défricher la culture, il est bien encore temps de montrer ton soutien et de célébrer une autre culture.<br />
David<br />
2
SOMMAIRE<br />
[04] [NO ONE IS INNOCENT]<br />
[08] HANGMAN’S CHAIR<br />
[10] THE ARRS<br />
[12] VESPERINE<br />
[13] REVOK<br />
[14] THERAPY?<br />
[19] DIRTY SHIRT<br />
[24] GENERAL LEE<br />
[26] ZUUL FX<br />
[28] SOLAR FLARE RECORDS<br />
[32] MEMBRANE<br />
[35] WHEELFALL<br />
[41] REFUSED<br />
[44] DOUR FESTIVAL<br />
[58] XTREME FEST<br />
[64] MOTOCULTOR FEST<br />
[74] SHIKO SHIKO<br />
[76] EN BREF<br />
[84] IL Y A 10 ANS<br />
[85] CONCOURS<br />
[86] DANS L’OMBRE<br />
SOMMAIRE<br />
3
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVIEW><br />
NO ONE IS INNOCENT<br />
Avec un retour en fanfare de No One Is Innocent, il nous fallait poser des questions à sa tête pensante Kémar, alors<br />
forcément ça parle de l’évolution depuis Drugstore mais surtout de Propaganda et un peu de politique...<br />
Avant de parler du nouvel album, revenons sur Drugstore,<br />
à froid, quel est ton sentiment sur cet album ?<br />
Drugstore est un album qui nous a permis de nous<br />
échapper de la routine. Depuis le début du groupe, on a<br />
toujours cherché à ne jamais faire le même album. Sans<br />
la direction musicale de Drugstore on n’aurait jamais<br />
composé des morceaux comme «Drugs» et «Johnny<br />
Rotten» qui font toujours partie de la setlist live...<br />
Est-ce que les critiques qu’il a subies ont influencé les<br />
choix pour Propaganda ?<br />
Pas du tout.<br />
Comment avez-vous géré le départ de Camille qui avait<br />
pris beaucoup d’importance au sein du groupe ?<br />
Camille est le réalisateur de trois albums de No One. Il<br />
a beaucoup compté pour nous pendant ces périodes.<br />
Après tout ce qu’on a vécu ensemble, il était temps pour<br />
No One de brancher un autre réalisateur.<br />
Propaganda est certainement l’album le plus proche<br />
de ce que faisait le No One des tout débuts, c’était une<br />
volonté de revenir à quelque chose de plus direct ?<br />
Pour composer Propaganda, on a décidé de lâcher les<br />
ordis et de rester tous ensemble en répét pour faire<br />
naître les titres. C’est pourquoi on a eu l’impression de<br />
se replonger 20 ans en arrière pour donner naissance à<br />
l’énergie brute de l’album.<br />
C’est Fred Duquesne qui a enregistré l’album, pourquoi<br />
l’avoir choisi lui ?<br />
Fred Duquesne fait partie de notre bande de potes, on<br />
connaît son travail depuis longtemps. On a tout de suite<br />
pensé à lui pour la réalisation. Au départ il nous a proposé<br />
de se retrouver 5 jours dans son studio pour maquetter<br />
5 titres, et en sortant on n’avait plus aucun doute...<br />
c’était le mec de la situation.<br />
Vous avez enregistré «live» comme peut le laisser<br />
croire le clip de «Silencio» ?<br />
Beaucoup de morceaux ont été enregistrés live ...<br />
comme «Djihad propaganda», «Massoud», «Silencio»,<br />
«Charlie».<br />
Au rayon des changements, il y a également l’arrivée<br />
chez VeryCords, pourquoi ce choix ?<br />
Parce que le boss de VeryCords connaît No One depuis<br />
des années et on parle le même langage.<br />
4
Plus de 20 ans après, les problèmes dénoncés avec<br />
l’éponyme sont toujours présents, les messages transmis<br />
par les artistes ne servent donc à rien ?<br />
Ce n’est pas le message des artistes qui va changer<br />
quoique ce soit... Sauf si tu t’appelles Bob Marley.<br />
Avant de balancer des messages faut pas oublier qu’on<br />
fait de la musique et que ça reste le plus important. Ceci<br />
dit, l’ADN de No One a toujours été d’utiliser nos morceaux<br />
pour dire des choses. Libre à chacun d’adhérer ou<br />
pas.<br />
Vous allez partir faire du bruit dans l’hexagone en novembre<br />
/ décembre, vous allez préparer une set-list<br />
identique pour chaque date ou vous avez bosser plein<br />
de titres et ferez une sélection en fonction de l’état<br />
d’esprit ?<br />
On joue chaque concert de No One comme si c’était le<br />
dernier, c’est pour ça qu’on ne vit jamais la même chose.<br />
Merci Karen chez VeryCords, merci aux No One Is Innocent<br />
et à Kémar en particulier.<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
Le racisme s’est banalisé, la xénophobie gagne des<br />
élections, la belle France unie et républicaine de Charlie<br />
n’était qu’une illusion ?<br />
Qu’on arrête de nous casser les couilles avec l’esprit du<br />
11 janvier. La France qui est sortie dans la<br />
rue, et dont on fait partie, n’avait à notre<br />
avis qu’un seul but, rendre hommage à<br />
ceux de Charlie qui sont tombés. En ce<br />
qui nous concerne, on a écrit ce morceau<br />
parce qu’on a toujours été en phase avec<br />
les idées défendues par Charlie Hebdo.<br />
Qui est le plus responsable de cette ambiance<br />
générale pourrie ? Les politiques ?<br />
Les médias ? Les parents qui n’ont pas su<br />
éduqué leurs enfants ?<br />
La pire chose que l’on constate depuis des<br />
années c’est la Lepenisation des esprits.<br />
Mais malheureusement c’est les politiques<br />
de droite et de gauche qui sont les<br />
plus responsables. Ce sont ceux-là qui ont<br />
laissé faire.<br />
Les sujets chauds et politiques sont toujours plus inspirants,<br />
tu n’as pas de lassitude à les traiter ?<br />
Aucune lassitude tant que notre musique reste à la hauteur.<br />
Avec la montée en puissance de la hyène, vous allez<br />
avoir du boulot dans les années à venir, le No One résistant<br />
pourrait aller jouer dans des villes où le FN est aux<br />
commandes ? Jouer dans des conditions «hardcore»<br />
pour défendre une cause ?<br />
On n’a pas attendu la montée du FN pour aller dénoncer<br />
les sales idées de ce parti. On a été à l’initiative du<br />
mouvement des groupes qui ont défendu les gens de<br />
Vitrolles. A l’avenir on répondra présent dans les villes<br />
qui nous appelleront pour résister aux sales idées. Les<br />
conditions Hardcore ne nous font pas peur.<br />
Oli<br />
Crédit photo : DR<br />
5
INTERVIEW<br />
6
NO ONE IS INNOCENT<br />
Propaganda (Verycords)<br />
No One Is Innocent est un groupe réactif et c’est quand<br />
les sujets sont les plus graves que Kémar excelle. On<br />
avait pu s’en rendre compte avec «La peau» ou sur<br />
Utopia, et au travers de Gazoline avec la nouvelle mouture<br />
du combo qui m’avait passablement ennuyé avec<br />
Drugstore. En 2015, le climat mondial est au terrorisme<br />
et à la résurgence de masses fascisantes qui pensent<br />
que leurs problèmes sont causés par les autres... On<br />
sent un No One Is Innocent impliqué, prêt à en découdre<br />
avec les idées comme avec les riffs, Propaganda renoue<br />
avec leur glorieux passé au propre («20 ans») comme<br />
au figuré. Welcome back.<br />
«Nous sommes tous Charlie» clame Paris et le Monde<br />
entier début janvier, «des cartouches d’encre contre les<br />
munitions (...) face à eux faut faire front», les slogans<br />
claquent, les mots de Zapata repris par Charb servent de<br />
texte pour que le message passe et repasse «je préfère<br />
mourir debout que vivre à genoux». Comme les textes,<br />
les guitares sont ciselées et la rythmique tabasse, aux<br />
oubliettes les sons électro surproduits du Drugstore, on<br />
laisse la place à la basse («Silencio»), aux distos, aux<br />
frappes sèches et à un Kemar qui reprend les rènes pour<br />
traiter des sujets chauds du moment : peur globale et<br />
embrigadement explosif sur «Djihad Propaganda», les<br />
idées brunes de la sirène/hyène «Putain si ça revient»,<br />
surveillance et destruction à distance avec «Drones».<br />
Et quand, le leader charismatique du groupe se fait<br />
davantage poète («Silencio»), c’est pour tacler une présidence<br />
inopérante malgré les beaux discours... Même<br />
si c’est très agréable à écouter, son rayon, ça reste<br />
l’action et rien de tel qu’une punchline en anglais pour<br />
faire bouger même si l’essentiel reste compréhensible<br />
par tous les francophones («Barricades», «Kids are<br />
on the run»). Pour ceux qui ne sont pas attentifs aux<br />
textes (sérieusement ?), pour bouger, il suffit de suivre<br />
les coups de baguette et de médiator parce que ça ne<br />
rigole pas et ça enquille les riffs saturés sans perdre le<br />
groove qui est aussi une de leur marque de fabrique.<br />
Quand ça se calme, comme sur «Massoud» (encore un<br />
révolutionnaire à l’honneur), on se rapproche musicalement<br />
d’un «Autobähn babies» et donc mon Graal Utopia...<br />
C’est d’ailleurs un titre («Nomenklatura») de mon<br />
album fétiche que No One Is Innocent était venu jouer à<br />
Nulle Part Ailleurs, on retrouve le lancement d’Antoine de<br />
Caunes qui bouffe un peu leur nom pour célébrer leurs<br />
«20 ans» (un peu plus même). Dans ce titre, le groupe<br />
se met en scène (comme le faisait Silmarils ou le fait<br />
encore Mass Hysteria), se rappelant son histoire pour<br />
constater que les thèmes du début des années 90 n’ont<br />
pas forcément changé, le racisme ambiant fait toujours<br />
des ravages (de «La peau» à «Un nouveau Scottsboro»)<br />
et il reste donc des chansons à écrire pour les<br />
générations qui n’ont pas encore compris qu’on habitait<br />
la même planète...<br />
Un dernier titre punk-défouloir en anglais (chanté par<br />
Shanka entre deux alarmes) qui dénote un peu et No<br />
One Is Innocent range les guitares et le micro... Pour<br />
mieux les ressortir dans tous les coins de l’hexagone où<br />
ils mettront le feu. Putain que ça fait du bien.<br />
Oli<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
7
LES DISQUES DU MOMENT<br />
HANGMAN’S CHAIR<br />
This is not supposed to be positive (Music Fear Satan)<br />
Hangman’s Chair fête ses 10 ans cette année avec un<br />
quatrième album intitulé This is not supposed to be<br />
positive, on savait le groupe peu optimiste dans sa musique<br />
et son imagerie, le split avec Acid Deathtrip de l’an<br />
dernier n’a pas vraiment coloré leurs idées, la guillotine<br />
ensanglantée n’est en effet pas un truc très positif... Et<br />
le mec au chapeau (Anatole Deibler, le plus célèbre bourreau<br />
de France) n’inspire pas confiance non plus même<br />
si les couleurs ambiance pastel nuancent le tout et rajoutent<br />
davantage de tension. Et si je passe autant de<br />
temps à disserter sur ce très réussi artwork (signé Dave<br />
Decat à l’origine, le même illustrateur que pour Hope//<br />
Dope//Rope), c’est qu’il est vraiment raccord avec la<br />
musique proposée par les Parisiens : un sludge toujours<br />
plus inquiétant que chaleureux malgré des teintes ultra<br />
agréables.<br />
sonore. Une ambiance qui vire au sublime quand ils calment<br />
peu ou prou le rythme, on obtient alors des morceaux<br />
de la trempe de «Your stone» ou «Flashback»<br />
qui sont juste «beaux». Et c’est déjà pas mal. Entre les<br />
éternelles références sludge (Down) et stoner (Kyuss),<br />
on peut ajouter une pincée de grunge plaintif à la Alice<br />
in Chains (pour le chant de «Requiem» ou les grattes<br />
hâchées et métalliquement plus claires de «No one<br />
says goodbye like me»). Si la voix (et ses nombreuses<br />
facettes) semble être un des éléments les plus accrocheurs<br />
de ce This is not supposed to be positive, les<br />
Parisiens démontrent avec «Les enfants des monstres<br />
pleurent leur désespoir» (tout un programme) qu’elle<br />
n’est pas indispensable pour composer un titre réussi<br />
d’Hangman’s Chair. Ceci dit, quand ils répondent tous<br />
présents et jouent sur tous les tableaux, on a le droit à<br />
des morceaux d’exception comme ce «Cut up kids» de<br />
grande classe.<br />
This is not supposed to be positive se révèle être un<br />
nouveau chef d’oeuvre. Peut-être plus mais pas moins.<br />
Oli<br />
L’alternance de riffs ultra lourds et gras et de passages<br />
aussi lumineux que le soleil du désert (coucou Mars Red<br />
Sky) est toujours la règle de base pour construire des<br />
titres lancinants qui lézardent sur les rochers avant de,<br />
parfois, s’exciter quelque peu pour rejoindre une mare<br />
de vase. Entre le Nevada et la Louisianne, il y a quelques<br />
kilomètres mais les Hangman’s Chair connaissent des<br />
raccourcis pour relier les deux et créer leur paysage<br />
8
LES OGRES DE BARBACK<br />
20 ans ! (Irfan)<br />
riche carrière du groupe, et le mélange d’un répertoire<br />
axé « musique du monde » et des morceaux pur « Ogres<br />
» agrémentés des percussions et cuivres chaleureux<br />
de la fanfare fonctionne à merveille. La magie opère dès<br />
les premières notes, son paroxysme étant atteint avec<br />
le fabuleux « Rue de Panam » chanté en chœur par un<br />
public bouleversé et conquis.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
20 ans. Dieu que le temps passe vite. Alors que la scène<br />
alternative sous toutes ses formes (fusion, puis ska<br />
reggae) prenait tout son sens au milieu des années<br />
90, Alice, Mathilde, Sam et Fred, quatre jeunes frères et<br />
sœurs multi instrumentistes et déjà ouverts d’esprit, se<br />
lancent dans la grande aventure en formant Les Ogres<br />
de Barback pour proposer un répertoire aussi diversifié<br />
que touchant. Le quatuor, au fil des ans et dans la<br />
grande tradition indépendante, structurera ses activités<br />
pour ainsi créer son label et même ses propres structures<br />
de tournée (et notamment son fameux chapiteau<br />
itinérant Latcho Drom). Le groupe, en deux décennies,<br />
passera des performances de rue aux grandes salles<br />
sans que les mass médias traditionnels ne s’en préoccupent.<br />
Mais même sans cela, les Ogres, en vingt piges,<br />
gagneront le respect tant du public que des groupes de<br />
tous styles confondus.<br />
La deuxième galette réserve également de belles surprises<br />
avec une multitude d’invités croisant le fer avec<br />
« nos » Ogres. Des vieux compagnons de route, des<br />
vrais amis croisés ci et là, bref, des moments de vie partagés<br />
avec des artistes qui leur sont chers. On retrouve<br />
ainsi des membres de Tryo, La Rue Kétanou, Les Fils de<br />
Teuhpu, Les Têtes Raides, et j’en passe. Preuve en est<br />
que la qualité et l’extrême sympathie des quatre frères<br />
et sœurs n’est plus à prouver. Et la musique dans tout<br />
ça ? C’est un joyeux bordel organisé, une fête pendant la<br />
fête, une alchimie presque évidente entre des amoureux<br />
de la chanson au sens large du terme. Des chansons populaires,<br />
qui parlent à chacun de nous, et qui resteront<br />
pour la plupart des classiques du groupe.<br />
Sans accès aux grosses radios et aux chaines de télé,<br />
Les Ogres de Barback, au line-up inchangé depuis leurs<br />
débuts, ont su, en deux décennies, conquérir un public<br />
fidèle et loyal. La popularité et la crédibilité du groupe<br />
est incontestable, et rester actifs vingt ans durant, aussi<br />
bien en studio que sur scène, révèle la force qui les<br />
pousse à perdurer dans ce droit chemin : la passion. Et<br />
l’amour de la Musique. Chapeau bas, et merci pour tout.<br />
À dans vingt ans !<br />
Gui de Champi<br />
Alors, quand on a vingt ans, ça se fête, et la fratrie Bruguière<br />
n’a, une nouvelle fois, pas fait les choses à moitié<br />
en proposant un double album live, dense et riche.<br />
Comme eux ! Sur la première galette, le groupe est<br />
accompagné de l’excellente fanfare Eyo’nlé rencontrée<br />
au Bénin et avec laquelle les Ogres ont tourné pendant<br />
un an. Cette magnifique collaboration fera date dans la<br />
9
LES DISQUES DU MOMENT<br />
THE ARRS<br />
Khrónos (Verycords)<br />
Si Soleil noir était un album de transition et de renouveau,<br />
Khronos est celui qui enfonce le clou du retour<br />
«aux sources», à savoir un album de métal hardcore<br />
sans concession où les mélodies et les moments de<br />
calme se comptent sur les cordes d’une guitare (à<br />
part l’interlude «Les rives du temps», il y a toujours de<br />
la vitesse, de la tension ou de la hargne). Certes, avec<br />
cette nouvelle galette, The ARRS ne fait pas que dans le<br />
bourrinage intensif mais ce n’est pas loin d’y ressembler<br />
quand même car les parties qu’on repère le plus facilement<br />
lors des premières écoutes sont celles les plus violentes<br />
et notamment l’apport de Ju (Benighted) sur le<br />
titre éponyme placé au coeur de l’opus. Ca (sur)growle<br />
sur des grattes stridentes et une rythmique ultra puissante<br />
et ça défonce les tympans. Ca tombe plutôt bien<br />
car si tu t’es procuré cet album, ce n’est pas non plus<br />
pour te bercer avant de dormir.<br />
mots les plus forts de Badinter lors d’un discours sur le<br />
Vel d’Hiv (Je ne demande rien, aucun applaudissement,<br />
je ne demande que le silence, que les morts appellent :<br />
«Taisez-vous !» Ou quittez à l’instant ce lieu de recueillement,<br />
vous déshonorez la cause que vous croyez<br />
servir) enchaînant sur la «marche funèbre» de Moulin<br />
par Malraux devant le Panthéon qui explose dans nos<br />
oreilles avec le final haut perché de Poun (Black Bomb<br />
A), et tout ça en 3’30». Et tout est mesuré, amalgamé,<br />
ciselé pour que ça sonne «Juste». Rarement un travail<br />
de mémoire d’une telle qualité n’aura été mené aussi<br />
loin par un groupe de métal en France, j’apporte donc les<br />
félicitations du jury. Difficile de mettre un autre morceau<br />
derrière cette superbe «Prophétie» mais «Le journal de<br />
ma haine» tente le coup et le réussit grâce, entre autre,<br />
à l’intervention de la voix de Kubi échappé un instant des<br />
Hangman’s Chair pour donner, lui aussi, un coup de main<br />
et du relief à un titre de ses potes. D’ailleurs, avec l’éviction<br />
du chant clair, les différents guest sont les bienvenus<br />
(il y a également Alex d’Obey the Brave) pour sortir<br />
un peu du bloc monolithique qu’est devenu un album de<br />
The ARRS.<br />
Retour aux sources musicales, brutales, violentes pour<br />
les Parisiens qui traitent de leurs thèmes favoris (Condition<br />
humaine était déjà un clin d’oeil à Malraux, je te<br />
conseille d’ailleurs fortement la lecture de tout ce qu’il<br />
a écrit...) avec l’aide de leurs amis et de leur producteur<br />
fétiche Francis Caste (Heros assassin, Trinité...). Alors<br />
certes, c’est pas franchement «nouveau» mais putain<br />
qu’est-ce que c’est bien branlé.<br />
Oli<br />
Alors, oui, ça blaste et ça hurle quasiment tout le temps<br />
et l’étiquette «metalcore» oubliée mais ce n’est pas<br />
pour autant que The ARRS a perdu en qualité, en écriture<br />
et en intelligence (s’il suffisait de passer en chant<br />
clair pour être moins con, ça se saurait). La preuve en<br />
un seul titre, «Prophétie», où le groupe incorpore des<br />
samples de discours historiques, avant de reprendre les<br />
10
ENABLERS<br />
The rightful pivot (Exile On Mainstream Records/Atypeek Music)<br />
la guitare cristalline et éthérée, les arrangements parcimonieux<br />
de cordes, ces chœurs très surprenants à la<br />
David Bowie ... Si en plus, le groupe se renouvelle dans<br />
le propos, il y a de quoi être subjugué... Le dernier morceau<br />
«Enopolis» étonne et détonne positivement : cela<br />
commence comme du Enablers tout craché puis Sam<br />
Ospovat, le batteur, s’illustre par un jeu free désarticulé,<br />
l’onirisme qui se dégage des arrangements tandis que<br />
Pete vient jouer les troubles fêtes au sein d’un titre atypique<br />
et foutrement beau... Bref, une fort belle manière<br />
de clouer le bec aux sceptiques. Il y en a ?<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Enablers vient d’annoncer une tournée européenne et<br />
vu la qualité de leur live, tu aurais bien tort de t’en priver.<br />
Tu louperais un groupe qui en plus d’exceller sur disque,<br />
excelle aussi dans cette exercice.<br />
Quasi 4 ans après Blown realms and stalled explosions,<br />
Enablers revient avec un album intitulé The rightful pivot.<br />
La pochette est classe, le contenu va s’avérer l’être<br />
aussi mais comment en douter avec un groupe de cette<br />
trempe. Un disque d’Enablers, ça commence souvent<br />
par un titre dantesque (remember «Patton») puis la<br />
musique à tendance à se faire oublier pour rechoper périodiquement<br />
l’attention grâce à la prose vindicative de<br />
leur frontman et des instrumentations toujours méticuleuses.<br />
Et titre d’ouverture génial il y a avec «Went right»<br />
et ses «what the fuck white boy» animés par le toujours<br />
aussi sur-habité Pete Simonelli et des motifs musicaux<br />
en mode montagne-russe, assez agressif mais pas trop<br />
quand même. Sur cette première piste, le Enablers qui<br />
allait chercher l’auditeur par la peau du dos semble être<br />
toujours présent. Le deuxième titre, «She calls after<br />
you», est aussi une belle réussite, une mise en (haute)<br />
tension qui n’éclate finalement jamais. En allant plus<br />
loin dans les écoutes, on s’aperçoit bien vite que The<br />
rightful pivot est un excellent cru, dans la lignée qualitative<br />
du précédent et même quelques crans au dessus.<br />
La maîtrise des musiciens a déjà été largement prouvé,<br />
les 6 pistes suivantes ne vont qu’enfoncer le clou. Comment<br />
en effet ne pas céder aux 9 minutes de «Look»<br />
qui cumule bien des atouts : cette voix charismatique,<br />
David<br />
11
LES DISQUES DU MOMENT<br />
VESPERINE<br />
Parmi les autres (Send the Wood Music)<br />
s’il ose se délivrer des vertiges de la pensée close).<br />
Ces paroles ne sont pas assez souvent mélodieuses<br />
(dommage car le chant clair semble plus naturel que<br />
sa version lourde), elles servent surtout à tendre et<br />
alourdir une atmosphère pourtant déjà bien saturée en<br />
stress métallique. Parce qu’avec des morceaux étendus<br />
entre 7 et 12 minutes, les Lyonnais ont le temps de<br />
faire monter la pression et ainsi de faire honneur à un<br />
de leurs groupes favoris (Cult of Luna). Les ambiances<br />
inquiétantes passent aussi par un riffing entêtant (celui<br />
au coeur de «Le métamorphe») et la menace omniprésente<br />
de se prendre un mur de son sur la tronche. Tel un<br />
ciel noirci par un orage en formation, Vesperine installe<br />
un sentiment permanent d’anxiété puisque l’on sait que<br />
cela va finir par craquer sous le poids de ce climat lourd<br />
et malsain.<br />
Dans les années 2000, Rémi (chanteur), Pierre (guitariste)<br />
et Aurélien (batteur) jouent ensemble au sein de<br />
Capsule ODC, leur rap métal fait du bruit dans la région<br />
lyonnaise mais ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est<br />
la suite qu’ils donnent à cette aventure à partir de 2011<br />
et qui prend le nom de Vesperine. Ils sortent une première<br />
démo (2 titres) en 2013, changent quelque peu<br />
leur line-up avec les arrivées de Jéremy (bassiste) en<br />
2013 puis de Loïc (guitariste) en 2014. Aguerris sur<br />
scène aux côtés d’Asidefromaday ou Impure Wilhelmina,<br />
c’est avec l’aide de ses fans que le quintet enregistre<br />
les trois titres de Parmi les autres qui n’est pas vraiment<br />
un EP puisqu’il atteint presque la demie-heure de musique...<br />
Produit par Fabrice Boy (Stereotypical Working<br />
Class, Young Cardinals, Lodz...) au printemps 2015, cet<br />
album à l’artwork lumineux (vraiment très classe) sort<br />
le 21 septembre chez Send The Wood Music.<br />
La vague de couleur du superbe artwork (signé Corto<br />
Rudant) et ce sublime bleu du disque risquent de t’emporter<br />
si tu te lances dans l’écoute de Parmi les autres,<br />
le noir si présent n’est pas une fatalité, la lutte avec la<br />
lumière risque d’être sauvage et peu importe qui sort<br />
vainqueur car c’est ce combat infini qu’on écoute avec<br />
délice.<br />
Oli<br />
Vesperine commence par la «Fin» et donc avec un petit<br />
peu d’humour, alors que ces textes sont assez sérieux<br />
et pessimistes, en français (et plutôt audibles pour du<br />
post hardcore), ils sont bien écrits et valent la lecture<br />
(en voilà d’ailleurs quelques lignes Se ranger derrière la<br />
même cause / Se ranger dans la même case / Et perdre<br />
l’envie / De connaître autre chose / Ainsi l’esprit s’élève<br />
12
REVOK<br />
Bunt of grau (Music Fear Satan)<br />
néanmoins excellent. «Dear worker», c’est l’inverse, le<br />
titre défonceur de portes par excellence, à la limite du<br />
grindcore, étonne et fait figure de perle noir dans un<br />
ensemble extrême mais toujours assez finement tourné<br />
vers la mélodie. C’est d’ailleurs une des clés de la réussite<br />
de cet album : un savant équilibre entre le clair et<br />
l’obscur, entre la virulence et la mélodie, entre le chant<br />
clair et le chant à gorge déployée.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
4 ans d’attente pour un nouvel album, c’est foutrement<br />
long. Surtout qu’à l’époque, les Revok avaient mis tout<br />
son petit monde O.K et K.O avec Grief is my moniker. Le<br />
groupe re-débarque avec Bunt of grau via notamment<br />
Music fear Satan. Verdict après 10 écoutes ? Mouais,<br />
Revok, c’était mieux avant, il y un air de déjà vu dans c’t<br />
affaire et on peut comprendre les commentaires un peu<br />
acerbes et définitifs à l’égard de cette sortie sur la blogosphère.<br />
Verdict après 20 écoutes ? On valide haut la<br />
main et on ne comprend plus les commentaires un peu<br />
acerbes et définitifs sur la blogosphère. Bref, il va falloir<br />
le mériter ce Bunt auf grau pour en saisir toutes les subtilités<br />
et l’essence. Enfin, la dynamite plutôt parce c’est<br />
bien de hard dont il s’agit.<br />
Le premier titre, «Old marrow», fait figure de rouleaucompresseur<br />
et de carte de visite classe, une belle alternance<br />
et cohabitation de fureur/moments mélodiques.<br />
Trois minutes 58 suffisent pour que le «your anger dissipate»<br />
raisonne, Revok règle ton cas et te rappelle que<br />
s’il y a un patron du genre en France, c’est vers eux qu’il<br />
faut regarder... La suite n’est pas en reste avec «Polluted<br />
ideas» dont le chant clair ressemble à du Mastodon<br />
tandis que le mid-tempo «Eroded mind» caresse l’auditeur<br />
dans le sens du poil avec du Revok tout craché mais<br />
Revok arrive facilement à choper et renouveler l’attention,<br />
à varier les surprises pour ne pas lasser. A titre<br />
d’exemple, l’ambiant «Equilaterra» ou l’intro de «Perfection<br />
is a sin» peuvent paraître des pistes/phases assez<br />
anodines au départ mais prise dans la globalité de Bunt<br />
of grau, elles permettent à l’auditeur de ne pas définitivement<br />
se noyer dans la monotonie du ‘core.<br />
David<br />
13
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVIEW>THERAPY?<br />
En pleine promo de son nouvel album Disquiet, c’est Andy Cairns himself qui répond à nos questions qui porte sur<br />
ce nouvel album du trio. Le frontman inusable répond comme il est dans la vie ou sur scène, avec simplicité et honnêteté<br />
!<br />
Therapy? a connu le succès dans les années 90 et n’a<br />
jamais cessé de composer et de sortir des disques.<br />
Comment analysez-vous l’évolution du rock en 20<br />
ans et le fait que, sans être devenu confidentiel, votre<br />
groupe n’a plus la popularité qu’il a connue en 94 avec<br />
Troublegum ?<br />
Je n’analyse pas ces choses-là. Je suis trop occupé à<br />
écrire des chansons, à jouer de la guitare, à écouter de<br />
nouveaux morceaux, à lire des livres et à apprécier l’instant<br />
présent pour m’attarder sur le passé et sur l’état<br />
du rock. Dans le groupe, nous écoutons de la musique<br />
qu’elle soit d’hier ou d’aujourd’hui et dans tous les<br />
genres. Concernant notre succès dans les années 90,<br />
nous nous estimons déjà chanceux d’avoir eu du succès,<br />
surtout qu’étant originaires d’Irlande du Nord, qui est un<br />
coin tout petit, on a dû batailler pour se faire entendre au<br />
départ. Nous avons appris il y a bien longtemps à rester<br />
fidèles à nous-mêmes et à ne pas suivre les tendances.<br />
Je pense que c’est pour ça que nous aimons toujours<br />
faire de la musique.<br />
En plus, nous n’avons jamais ressenti le besoin d’être<br />
des « Rock Stars », donc ça ne nous tracasse pas trop<br />
de ne pas traîner avec des stars du cinéma ou des mannequins.<br />
Vous avez toujours mis en avant, dans vos enregistrements,<br />
la paire basse/batterie plutôt que les guitares,<br />
ce qui est assez rare pour un groupe de rock. C’est ça le<br />
secret de votre son ?<br />
Oui, sinon nous ressemblerions à tous les autres groupes<br />
de rock. Nous sommes fans de rythme, de toute façon.<br />
Depuis toujours, nous aimons James Brown, NWA, Public<br />
Enemy, Can et bien d’autres... Tout comme Fugazi,<br />
Big Black et le punk.<br />
10 ans sans changer de batteur, ça rend les choses<br />
plus faciles ?<br />
Oui, Neil est un batteur fantastique mais c’est aussi une<br />
personne très ouverte et honnête. Nous avons de meilleures<br />
discussions au sein du groupe, depuis 10 ans.<br />
Les mensonges et les subterfuges peuvent ronger un<br />
groupe de l’intérieur. Nous avons tous changé depuis<br />
1990 et nous en sommes arrivés à la conviction que<br />
le groupe dans son ensemble ne se résumait pas aux<br />
besoins d’un ou deux égoïstes.<br />
Disquiet, Anxiety, Suicide-Pact, Trouble... Ce thème du<br />
malaise revient très souvent dans les titres d’album,<br />
pourtant sur le plan personnel, vous allez bien, c’est<br />
facile de faire du rock quand tout va bien ?<br />
14
Je pense que ceux qui vivent au 21ème siècle et qui ne<br />
se mettent jamais en rogne méritent une médaille. Ceux<br />
qui sont heureux, vraiment heureux à notre époque sont<br />
des exceptions. Moi, je me réconforte comme je peux.<br />
Écrire et chanter des chansons m’évite de payer un psy.<br />
Je suis honnête au sujet de mes problèmes. C’est le fait<br />
de les garder pour soi qui crée toute la détresse.<br />
Quelle est la signification de la pochette de Disquiet,<br />
sale et dérangeante au demeurant ? Vous avez laissé<br />
travailler Nigel Rolfe ou vous lui avez fait des demandes<br />
précises ?<br />
Comme toujours avec Nigel, nous lui envoyons un exemplaire<br />
de l’album, il l’écoute et il nous envoie une photo.<br />
Nous décidons de l’utiliser ou non. Jusqu’à présent, pour<br />
tous les albums qu’il a créés pour nous, nous sommes<br />
très contents du résultat. Si tu me demandes quelle est<br />
la signification de la photo, je ne sais pas. Je ne sais<br />
jamais. Tout ce que je peux te dire, c’est que nous lui faisons<br />
confiance pour interpréter nos sons comme il veut.<br />
Le clip de «Still hurts» est dans la lignée de l’artwork,<br />
c’est aussi une sorte de «lyric vidéo» mais en très travaillée,<br />
comment est venue l’idée ?<br />
«Still hurts» a été réalisé par une boîte de prod’ vidéo de<br />
Manchester appelée Sitcom Soldiers. C’est la troisième<br />
vidéo qu’ils nous font et comme Nigel Rolfe, nous leur<br />
faisons entièrement confiance. Notre seule demande<br />
pour celle-ci était que le groupe n’y apparaisse pas. C’est<br />
comme ça qu’ils ont eu l’idée de faire écrire les paroles<br />
par des individus de générations différentes. Ça nous a<br />
plu et je pense que ça complète le morceau.<br />
Avec «Vulgar display of powder», vous faites un clin<br />
d’œil à Pantera, avec un son très lourd au passage,<br />
vous pourriez faire une reprise de Pantera ?<br />
Oui mais sans solo à la Pantera, parce que ce style n’est<br />
pas le mien. Mais les riffs sont très bons.<br />
Vous avez donné des concerts spéciaux pour l’anniversaire<br />
de Troublegum. Est-ce difficile d’abandonner la<br />
plupart de ces chansons maintenant ?<br />
Certains des morceaux les plus connus de l’album sont<br />
tellement connus par le public qu’un concert sans eux<br />
semble bizarre. Ça vaut vraiment le coup de voir la foule<br />
réagir comme elle le fait quand on les joue.<br />
Avec 14 albums différents, ça peut être difficile. On doit<br />
toujours laisser de côté un truc que quelqu’un veut entendre.<br />
Parle-nous de ce label Amazing Record Co., comment<br />
s’est fait ce choix ?<br />
C’est un jeune label du Nord-Est de l’Angleterre avec de<br />
gros projets et plein d’idées. Leur enthousiasme pour la<br />
musique nous a attiré vers eux et jusqu’à présent, c’est<br />
un plaisir de travailler avec eux. L’un de nos patrons de<br />
chez Blast Records travaille maintenant chez Amazing<br />
Record Co., alors c’était plus facile de changer pour une<br />
boîte où nous avions déjà un ami.<br />
Vous aviez d’autres possibilités après la fermeture de<br />
Blast Records ?<br />
Deux autres labels étaient intéressés pour nous signer<br />
mais après les avoir rencontrés, nous avons décidé<br />
qu’Amazing Record Co. était celui qu’il nous fallait.<br />
Avoir des problèmes avec un label, c’est obligatoire<br />
aujourd’hui ?<br />
Je pense que c’est plus difficile d’avoir un label à long<br />
terme. Comme les artistes peuvent assurer une bonne<br />
partie des relations publiques eux-mêmes, les labels<br />
n’investissent plus autant d’argent qu’avant. Sauf bien<br />
sûr s’il s’agit d’une bande de jolis minets pop et qu’ils<br />
pensent qu’ils vont leur rapporter un paquet, ou encore<br />
d’un phénomène rap, métal ou punk pour ados, avec une<br />
forte présence sur les réseaux sociaux qu’ils pensent<br />
pouvoir exploiter.<br />
Peu de groupes font carrière avec le même label comme<br />
par le passé ?<br />
Je ne sais pas trop... Manic Street Preachers ont le<br />
même label depuis vingt-cinq ans et ils marchent toujours<br />
bien, après tout.<br />
Merci Andy, merci Therapy et merci à Elodie et au staff<br />
Him Media pour le relais.<br />
Oli<br />
Crédit photo : DR<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
Comment faites-vous vos set lists ?<br />
On essaye de jouer la majeure partie du dernier disque<br />
avec quelques chansons des anciens albums autour<br />
pour que le set sonne bien.<br />
15
LES DISQUES DU MOMENT<br />
KID FRANCESCOLI<br />
With Julia (Yotanka Records)<br />
Ce nom gravite autour de moi depuis plusieurs années,<br />
à travers les newsletters pro, les magazines spécialisés<br />
print et web, les flyers... Et pourtant, il aura fallu attendre<br />
2015 pour que votre serviteur daigne remarquer enfin<br />
ce phénomène electro-pop dont tout le monde parle à<br />
droite et à gauche, j’ai nommé Mathieu Hocine aka Kid<br />
Francescoli. Découvert de façon hasardeuse lors d’une<br />
soirée à travers le titre «Does she ?», le troisième<br />
disque du Kid, With Julia, est né de sa rencontre faite à<br />
New York en 2009 avec une ravissante américaine nommée<br />
Julia Minkin. D’où ce titre d’album.<br />
Pour vous la faire courte, les deux sont présentés par<br />
des amis communs, s’entendent à merveille, se découvrent<br />
une passion commune pour la musique et certains<br />
artistes comme Air. Lui, a déjà deux albums à son<br />
actif, elle, chante comme ça, pour le plaisir. Ils finissent<br />
par se mettre ensemble tout en commençant à composer<br />
des morceaux en commun. L’idée de faire un album<br />
à deux fait surface, les échanges d’idées ainsi que les<br />
enregistrements se font à distance (certaines voix ont<br />
même été capturées par Skype !) car Mathieu est reparti<br />
en France et puis, pouf, ils se séparent. Une année difficile<br />
pour Kid Francescoli, qui va pas mal jouer sur la tournure<br />
finale que prendra With Julia. Le Marseillais décide<br />
de terminer ce disque suite à un échange encourageant<br />
avec Julia, et fait appel à ses potes Simon Henner de<br />
Nasser et Mathieu d’Oh! Tiger Mountain pour produire<br />
ces romances pleines de mélancolies qui seront rendues<br />
publiques au cours de l’année 2014.<br />
J’en conviens, et ce n’est pas les intéressés qui me<br />
contrediront (prenons l’exemple de Björk qui récemment<br />
fut dans l’incapacité de jouer en live son Vulnicura,<br />
évoquant pour expliquer ses annulations, l’intensité<br />
émotionnelle qu’il lui procure), il n’est pas évident du<br />
tout de sortir des morceaux très personnels, surtout<br />
dans ce cas présent. Il y a toujours cette part de naïveté<br />
à l’eau de rose liée aux sentiments forts qu’on reproche<br />
à l’artiste, et là, difficile d’y échapper avec ce With Julia.<br />
Il y a évidemment beaucoup de tendresse dans cette<br />
musique, forcément de la complicité avec les deux<br />
chants («Boom boom», «Mr Knowitall»), une honnêteté<br />
résistante à toute épreuve mais ce sont bel et bien<br />
les quelques hits qui font (sauvent ?) ce disque : des<br />
petits bijoux de la trempe de «My baby», démontrant le<br />
talent de chanteuse de Julia, ou l’excellente et sensuelle<br />
«Does she», voire l’introductive «Blow up» qui pourtant<br />
n’est pas mise en valeur par l’accent anglais défaillant<br />
du Marseillais. Cela peut être «cute» pour les anglophones<br />
si l’album s’exporte, mais assez vite affreux pour<br />
les Français sensibles à la langue de Shakespeare. Pour<br />
le reste, certaines chansons déséquilibrent méchamment<br />
le disque et font tâche tels que la paresseuse et<br />
soporifique «I don’t know how», l’agaçante et déjà-vu<br />
«Discoqueen» ou même «Dirty blonde» qui coule dans<br />
la mignardise.<br />
Si on touche du doigt l’influence évidente d’Air (surtout<br />
sur «Italia 90» où là c’est carrément la main), With Julia<br />
est surtout un album electro-pop de notre temps, une<br />
musique languissante relatant une expérience humaine<br />
forte, avec ses bons et mauvais côtés. Loin d’être l’album<br />
de l’année, tout en ayant de bons arguments à<br />
faire valoir, With Julia aura surement le mérite de parler<br />
davantage à ceux qui ont vécu pareille histoire qu’à des<br />
mélomanes en manque de trouvailles électro-pop.<br />
Ted<br />
16
THE PRESTIGE<br />
Amer (Basement Apes Industries)<br />
larsen qui traîne a été étudié pour être utile à l’oeuvre de<br />
destruction totale orchestrée par The Prestige. Au cours<br />
du cataclysme ambiant, on récupère quelque peu avec<br />
des morceaux qui connaissent des moments de calme<br />
tout à fait relatif car pour certains, la pression ne fait<br />
que monter («Léger de main»), et pour les autres, le<br />
couperet finit plus ou moins vite par tomber sur le titre<br />
qui passe alors en mode «côté obscur» («Négligée»,<br />
«Marquee»). Dans tous les cas, c’est réussi et les Franciliens<br />
arrivent aisément à nous plonger dans leur univers,<br />
si sombre et décadent soit-il. Et le pire, c’est qu’on<br />
y prend du plaisir.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Alors qu’il n’était qu’assistant pour Black mouths, Amaury<br />
Sauvé (Birds in Row, As We Draw...) a géré en chef<br />
la nouvelle prod’ de The Prestige qui enquille les noms<br />
qui ont du sens en confiant le mastering à Bob Weston<br />
(Nirvana, Shellac...) et en continuant de travailler avec<br />
(entre autres) Basement Apes industries (Membrane,<br />
General Lee, Plevre, Morgue...).<br />
Pour finir, un petit détail qui montre que The Prestige<br />
t’aime, ils ont sorti l’album dans diverses éditions collector<br />
avec 2 pochettes différentes mais toutes aussi<br />
classes l’une que l’autre. C’est peut-être un «détail»<br />
mais ça montre à quel point les gars ont réfléchi à leur<br />
album comme un tout où rien n’est négligé, c’est à ce<br />
prix qu’on obtient le prestige...<br />
Oli<br />
Si ce terrible Amer est excellent et surpasse (question<br />
de goût) son prédécesseur, c’est peut-être parce que<br />
la langue de Voltaire (qu’Aurelio n’imaginait pas s’intégrer<br />
à la noirceur musicale du combo il y a 3 ans) fait<br />
des incursions fracassantes et réussies. Les textes<br />
oscillent entre cadavres exquis et poésie surréaliste<br />
mais plus qu’un message clair, c’est l’ambiance qu’ils<br />
apportent par leurs sonorités qui compte, et que ce soit<br />
dans la douceur (toute relative) ou le chaos, ça colle. The<br />
Prestige préfère largement amener la guerre dans nos<br />
oreilles qu’y accrocher des fleurs... Au rang des compos<br />
chaotiques au possible, tu trouves une belle liste avec<br />
entre autres «Bête noire», «Enfants terribles», «Voir<br />
dire» ou «Apaches», c’est alors un déluge de riffs et de<br />
coups qu’on prend en travers de la tête et si on a l’impression<br />
de vivre l’apocalypse, le groupe ne frappe pas au<br />
hasard, tout cela est savamment construit, le moindre<br />
17
LES DISQUES DU MOMENT<br />
BLACK REBEL MOTORCYCLE CLUB<br />
Live In Paris (Abstract Dragons)<br />
‘’Beat the devil’s tatoo’’ a ‘’Spread your love’’ en passant<br />
par d’autres titres un peu plus rares mais tout aussi<br />
jouissifs.<br />
Un peu plus de deux heures de rock’n’roll qui puent la<br />
classe et la maîtrise jusqu’au bout et qu’on retrouve sur<br />
le DVD de ce même concert. La réalisation est superbe,<br />
le montage hypnotisant, la lumière lysergique et le cadrage<br />
digne d’un grand western. Sans compter la prod<br />
sonore, tout aussi propre que fidèle, qui laisse apprécier<br />
toutes les subtilités du son vaporeux et lourd du trio des<br />
Californiens. Deux heures intenses et donc pas forcément<br />
digestes pour tout le monde mais qui rassasieront<br />
plus qu’assez les die hard du Club.<br />
Black Rebel Motorcycle Club fait partie de ces groupes<br />
qui pourraient allègrement servir de définition à une<br />
certaine idée du rock. Un look blouson noir absolument<br />
démodé mais qui tient bon, des membres charismatiques,<br />
dont un sosie de James Dean, des cordes<br />
implacables capables de déclencher une émeute avant<br />
d’appeler à la transcendance, des voix charismatiques,<br />
sensibles et furieuses, et enfin une attitude aussi authentique<br />
que rugueuse. En 15 ans de carrière le gang<br />
n’a jamais démérité, rejoignant la catégorie de ces formations<br />
n’ayant jamais été propulsée dans la stratosphère<br />
médiatique mais qui malgré tout résistent à toute<br />
les tempêtes et continuent de naviguer sur une fan-base<br />
fidèle et solide.<br />
Cette fan-base sera comblée par la sortie de ce superbe<br />
CD/DVD Live in Paris qui prend place dans le décor incroyable<br />
du Trianon. Grosse surprise de cette sortie,<br />
c’est la performance spéciale livrée par le groupe pour<br />
l’occasion. En effet, il n’y a pas un mais deux CDs live,<br />
dont le premier n’est rien de moins que l’interprétation<br />
en intégral de leur dernier album en date, Specter at the<br />
feast (2013). Le deuxième CD lui renferme la seconde<br />
partie du concert, une setlist ‘’best-of’’ des plus croustillantes<br />
avec les plus grands classiques du groupe, de<br />
Et comme les fans, c’est bien connu, n’en ont jamais<br />
assez, ils trouveront également un sympathique documentaire<br />
sur la vie en tournée du groupe, à condition<br />
d’être anglophone. Un documentaire dans la même<br />
veine que ceux qu’on a l’habitude de voir sur ce genre de<br />
DVD mais qui s’avère toujours intéressant tout en révélant<br />
quelques petites anecdotes classiques de la vie sur<br />
la route.<br />
Bref, si tu es client du BRMC, fonce sur ce CD/DVD Live<br />
in Paris et son artwork bien léché. Par contre si tout ce<br />
que BRMC t’évoque c’est la chanson que tu as entendu<br />
dans une pub avec Robert Patinson, alors commence<br />
par écouter le second CD du concert qui sera pour toi<br />
une excellente porte d’entrée dans l’univers du groupe<br />
de Frisco.<br />
Elie<br />
18
DIRTY SHIRT<br />
Dirtylicious (Promusic Prod)<br />
speed-folk locale et qui ouvrent et ferment l’album) ou<br />
les différents textes dans leur langue maternelle (je n’y<br />
comprends absolument rien, même avec les textes dans<br />
le livret), bref, même quand on se retrouve au fin fond<br />
d’une fête roumaine distordue, et alors que ce n’est pas<br />
du tout notre culture, ces violons, ces sons, cette énergie<br />
nous ravissent... Si tu as kiffé les quelques passages<br />
bien «arméniens» de SOAD, tu risques d’A-DO-RER cet<br />
album salement délicieux.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Dirty Shirt nous a écrit un paquet de titres qui s’écoutent<br />
et se réécoutent indéfiniment sans jamais perdre en<br />
saveur et en plaisir. Dirtylicious n’est pas seulement un<br />
prétendant au titre de meilleur album de métal roumain<br />
ou du meilleur album de métal mais tout simplement un<br />
des meilleurs albums de l’année. FELICITARI !!!<br />
Dirty Shirt nous a habitué à de bons albums mais alors<br />
celui-là... Il est vraiment exceptionnel !!! Dirtylicious,<br />
c’est la somme de tout ce que les Roumains ont fait<br />
de mieux jusqu’à maintenant. En prouvant une fois de<br />
plus que l’on pouvait tout mélanger et tout amalgamer,<br />
le combo prend le meilleur de ce qu’il aime ailleurs pour<br />
l’intégrer dans son métal balkanique folklorique avec<br />
délice.<br />
Oli<br />
Un groupe roumain, un producteur français, un mixeur<br />
américain, un artwork plutôt mexicain (en fait non, c’est<br />
également une tradition roumaine -locale- de décorer les<br />
sépultures avec des cranes multicolores), secoue bien<br />
fort et tu obtiens un putain d’album métal, une bombe<br />
qui pourrait être mondiale tant les sensations ressenties<br />
peuvent toucher qui que ce soit où que ce soit car<br />
qu’est-ce que ce Dirtylicious est organique ! Impossible<br />
de résister à ces rythmiques, à ces riffs, à ces chaloupages,<br />
à ces orientalités, à ces coups de gueule comme<br />
à ces mélodies, tout est ciselé pour nous percuter le<br />
corps et l’esprit.<br />
Et même quand le groupe va chercher au plus profond de<br />
ses racines avec «Ciocarlia» ou «Calusarii» (les pistes<br />
instrumentales qui nous plongent dans une ambiance<br />
19
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVIEW>DIRTY SHIRT<br />
Si c’est au guitariste (et chargé des samples) qu’on a posé des questions à propos du nouvel excellent album de<br />
Dirty Shirt, c’est que Mihai vit en France depuis une dizaine d’années et manie notre langue bien mieux que la<br />
plupart de nos concitoyens ! Du coup, des réponses directes, sans le filtre de la traduction pour en savoir plus sur<br />
Dirtylicious, le Wacken et la Roumanie...<br />
Vos albums précédents étaient très bons mais celui-là<br />
est juste exceptionnel ! Vous en avez conscience ?<br />
Merci pour ce compliment. Sans fausse modestie, nous<br />
sommes fiers de ce qu’on fait, parce que nous sommes<br />
sincères dans notre musique et on fait tout cela avec<br />
beaucoup de passion et sacrifices.<br />
Vous avez senti que vous enregistriez un album encore<br />
meilleur ?<br />
Dès le début on a senti qu’on avait un très beau projet<br />
sous la main et j’ai quasiment été tout le temps très<br />
confiant. C’est vrai qu’il y a eu des moments de pression<br />
après Freak show, un album qui a eu un succès<br />
considérable avec des critiques quasiment unanimes et<br />
très positives, un feedback exceptionnel en concert et<br />
un public de plus en plus large. Même moi, je considère<br />
qu’il y a quelques titres de cet album qui ressemblent à<br />
des «tubes», je pense à «Bad apples», «Freak show»,<br />
«Ride», «Saraca inima me». Et puis, surtout après<br />
notre réussite à Wacken, il y avait une attente de la part<br />
du public et de la presse. Mais ces moments étaient<br />
éphémères, et comme je le disais, j’ai été confiant dans<br />
ce projet, un peu fou. Le fait de travailler avec des gens<br />
très talentueux et impliqués, ça te met forcement en<br />
confiance.<br />
Le groupe a l’habitude de jouer en France, il y a d’autres<br />
pays où vous jouez régulièrement ?<br />
Après la Roumanie, la France c’est le deuxième pays du<br />
groupe, le fait que j’habite ici depuis 14 ans n’y est pas<br />
pour rien. C’est aussi le pays où on a le plus de public et<br />
des retours positifs de la presse. C’est donc tout à fait<br />
naturel de jouer très souvent en France, et déjà je peux<br />
t’annoncer que l’année prochaine on prépare des dates<br />
ici. Sinon, lors de nos tournées européennes et de nos<br />
quelques petites «sorties» du pays, nous avons joué en<br />
Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas, en Autriche et en<br />
Hongrie.<br />
Vous pouvez plaire au monde entier, il y a des pays en<br />
particulier où vous avez vraiment envie d’aller jouer ?<br />
Parmi les pays où on n’a pas encore joué, personnellement<br />
j’aimerais qu’on joue en Angleterre et aux Etats-<br />
Unis... Le truc classique !<br />
Vous préparez une tournée européenne, il y a des lieux<br />
où vous avez hâte de retourner ?<br />
En France en premier lieu, c’est évident. On prépare déjà<br />
un bon truc pour le printemps 2016. De bonnes nouvelles<br />
sont en train de prendre forme...<br />
20
L’artwork s’inspire du folklore mexicain ? Pourquoi ce<br />
choix ? C’est loin de la Roumanie...<br />
Non, ce n’est pas du folklore mexicain, mais bien du folklore<br />
roumain, de la région de Maramures, c’est là d’où on<br />
est originaire, une des régions où les traditions ont été le<br />
mieux préservées en Roumanie. Ce sont des couleurs et<br />
des motifs spécifiques de Maramures, qui par je ne sais<br />
quelle coïncidence, sont semblables à celles du Mexique.<br />
Il y a même un cimetière à Sapanta, appelé le «Cimetière<br />
joyeux» où les tombes sont ornées de stèles en bois,<br />
peintes avec des couleurs vives, des gravures de type<br />
naïf, des poèmes, tout ça dédié à la mémoire du mort.<br />
Votre musique traditionnelle est encore très présente,<br />
vous faites écouter vos versions à des gens qui<br />
n’écoutent pas de métal ?<br />
Oui, bien sûr, et ça plaît. Ca permet même à des gens<br />
d’accepter le son métal après plusieurs écoutes. Et surtout,<br />
en live, il nous est arrivé de jouer dans des festivals<br />
avec un public très différent de ce qu’on fait, mais<br />
chaque fois on a réussi à conquérir les gens. Après des<br />
années de musique, comme musicien ou spectateur,<br />
je pense qu’en concert, le style de musique est moins<br />
important que la façon dont tu la joues, si tu es sincère<br />
ou non sur scène et si tu transmets quelque chose aux<br />
gens. Il m’est arrivé plus d’une fois d’adorer des concerts<br />
de groupes que je n’écoute jamais.<br />
Quelle est l’importance de Charles dans l’enregistrement<br />
de l’album, les morceaux sont beaucoup modifiés<br />
quand vous êtes en studio ?<br />
Notre collaboration avec Charles a commencé en 2009<br />
avec l’enregistrement de Same shirt different day.<br />
Charles a un grand rôle dans le son de Dirty Shirt, et<br />
depuis on a fait tous les albums ensemble. Au fur et à<br />
mesure, j’ai progressé aussi dans la production et donc<br />
on l’a fait en partie nous-mêmes désormais même si<br />
c’est toujours Charles qui donne la touche finale. Concernant<br />
l’enregistrement, nous sommes très ouverts, et<br />
on enregistre énormément de choses. On travaille très<br />
librement dans ce sens. Puis lors des arrangements, on<br />
fait des choix...<br />
En France, les Roumains sont très mal perçus, caricaturés<br />
comme des mendiants ou des voleurs, vous souffrez<br />
de cette xénophobie quand vous êtes chez nous ?<br />
Pas du tout. Sans être hypocrite, le public rock/métal<br />
est beaucoup plus instruit que la moyenne, et surtout<br />
il est formé par des gens ouverts d’esprit. Vraiment, on<br />
ne nous a jamais traité de telle sorte, ni en France, ni ailleurs<br />
en Europe.<br />
Au contraire, nous sommes très bien accueillis par<br />
l’équipe des salles et par le public.<br />
Vous vous êtes fait remarquer au Wacken, vous avez eu<br />
le soutien de la Wacken Foundation pour votre tournée<br />
en Roumanie, ça correspond à quoi ?<br />
C’est assez simple. Wacken Foundation est liée au festival<br />
juste par le fait qu’elle est soutenue financièrement<br />
par Wacken Open Air et elle bénéficie de sa tutelle. La<br />
fondation soutient financièrement beaucoup de projets<br />
métal en Europe. On a tenté notre chance, on a fait un<br />
dossier et on a reçu une réponse positive. Nous avons<br />
demandé de l’argent pour pouvoir louer de l’équipement<br />
comme une table de mix digitale et quelques accessoires<br />
et avoir les techniciens nécessaires pour faire<br />
une tournée avec 9 musiciens sur scène et avec des<br />
dates très proches.<br />
Ca a changé quelque chose pour vous en Allemagne ?<br />
Bien sûr, avec la réussite à Wacken on a coupé quelques<br />
bonnes étapes et on a pris un raccourci dans la «carrière»<br />
du groupe. Après un prix à Wacken tu ne deviens<br />
pas une «star» internationale, mais tu commences<br />
à avoir un nom dans ton pays et puis un petit nom au<br />
niveau international. Egalement, je reconnais que le<br />
prix est venu vraiment au bon moment de la carrière<br />
du groupe, juste avant d’enregistrer Dirtylicious. Ainsi,<br />
l’argent, l’équipement et les contrats d’endorsement de<br />
Randall et Washburn qui ont suivis, ont été une d’une<br />
aide extraordinaire. Mais au-dessus de tout cela, ce<br />
qu’on a vécu à Wacken ça restera pour toujours une expérience<br />
personnelle et musicale unique.<br />
Vous avez fait une tournée en Roumanie, des salles de<br />
concert se construisent ou c’est toujours très difficile<br />
d’avoir de bonnes conditions pour jouer ?<br />
Pour cette tournée, on a eu la plus grosse prod’ de toutes<br />
les tournées de Dirty Shirt. Avec 9 musiciens sur scène<br />
et beaucoup d’équipements, tu peux imaginer le bordel<br />
et la logistique nécessaire... On a été «obligés « de jouer<br />
dans des salles avec des vraies scènes. Et aujourd’hui<br />
la scène roumaine est incomparable par rapport à il y a<br />
10 ans. La Roumanie a aujourd’hui de très bons groupes<br />
de plus en plus «pros» au niveau de leur son, leur image<br />
et leurs concerts. Et la Roumanie est bien présente<br />
dans les tournées des groupes internationaux de tous<br />
niveaux. Heureusement, tu peux jouer dans de bonnes<br />
conditions à peu près partout.<br />
Ce n’est pas encore comme en France, mais ça va !!!<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
21
INTERVIEW<br />
Vous arrivez à vivre de votre musique ou vous avez des<br />
jobs à côté ?<br />
Sauf Dan Petean, le petit dernier arrivé dans le groupe, et<br />
les collaborateurs et techniciens qu’on rémunère, tous<br />
les membres du groupe ont un job, certains ont des familles<br />
et des enfants. On fait tout cela par pure passion<br />
et tout ce qu’on gagne avec la musique et réinvesti dans<br />
le groupe. C’est la seule façon de progresser pour un<br />
groupe, et sans cette attitude, nous ne serions jamais<br />
arrivés où on est aujourd’hui...<br />
Merci Mihai, merci Dirty Shirt, fonce écouter leur dernier<br />
album et les voir en concert car ça vaut vraiment<br />
le détour !<br />
Oli<br />
Crédit photo : DR
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04—29 NOV. 2015<br />
HINT - ALB<br />
- HYPHEN HYPHEN<br />
TALIB KWELI - ZAZA FOURNIER<br />
ESTER RADA - ORANGE BLOSSOM<br />
LIESA VAN DER AA - SHIKO SHIKO<br />
FOREVER PAVOT - WE ARE MATCH<br />
PERFECT HAND CREW - JESSICA93<br />
UNNO - SYCAMORE AGE<br />
- UNIK UBIK<br />
MEGAMOTO - SENDAK - BATHERNAY<br />
CAYMAN KINGS - MANIC MAYA<br />
- EVRST<br />
LOW BATS - MOHDD - FLAT SCREEN RADIO<br />
LIAM KI & ONCL'PHIL - LE FOND ET LA FORME<br />
JELLY BEAN - HERE'S TO THE LION<br />
- SPERWER<br />
KIDS FROM ATLAS<br />
5€/Concert !<br />
www.tourdechauffe.fr
LES DISQUES DU MOMENT<br />
GENERAL LEE<br />
Knives out, everybody ! (Basement Apes Industries)<br />
sauterie quelques amis comme Manon (petite cerise sur<br />
le gâteau «Night chaser», dont la voix douce hante régulièrement<br />
le studio Boss Hog), Alex de The Prestige tout<br />
à fait dans le moule pour «The beast inside» et Vincent<br />
(AqME, The Butcher’s Rodeo) qui, par sa clarté fugitive,<br />
allège quelque peu le tourbillonnant «Hellbound on<br />
VHS».<br />
Le General Lee nouveau est arrivé et il n’a pas fait les<br />
choses à moitié ! La mue amorcée avec Raiders of the evil<br />
eye est désormais achevée, au placard les longues séquences<br />
de riffs pesantes et les inspirations lunesques,<br />
le hardcore n’ roll prend désormais toute la place. Si à<br />
leurs formidables débuts, les Nordistes faisaient traîner<br />
leurs idées, elles vont désormais à 100.000 à l’heure,<br />
en exagérant (à peine), il doit y avoir autant de coups<br />
de médiators dans «Fuel injected suicide machine»<br />
que dans l’intégralité de leur premier album. Ca mouline<br />
dans tous les sens, c’est du rock n’ roll gesticulatoire<br />
version très véner et c’est juste jouissif.<br />
Alors, les petits plats dans les grands, c’est quoi exactement<br />
? Déjà, c’est un artwork de classe internationale<br />
puisqu’ils nous ont déniché l’illustrateur canadien Matt<br />
Ryan, un passionné de cinéma (comme eux), qui a<br />
déjà travaillé avec du beau monde (Cancer Bats, Every<br />
Time I Die et pas mal d’autres...) pour pondre un dessin<br />
ultra personnalisé (entre bagnole star, bikini, cascade,<br />
santiags, flingues, extra-terrestres et zombies).<br />
Côté son, c’est encore à Clément Decrock, le boss du<br />
Boss Hog (Tang, As We Bleed, L’oeuf, Kill me this Monday,<br />
Errata...) qu’ils ont confié leur destin, et ça sonne<br />
méchamment bien (encore). Enfin, ils ont convié à leur<br />
Et tout ça, ce n’est que du détail à côté du ressenti général<br />
: littéralement une grande claque dans la gueule.<br />
Même les trucs sur lesquels je suis plutôt réticent d’habitude<br />
deviennent excellents, le meilleur exemple sont<br />
les choeurs (j’ai vraiment beaucoup de mal avec ce procédé),<br />
ceux qui terminent «The conqueror worm» sont<br />
bouleversants d’utilité, impossible d’imaginer le titre<br />
sans eux. Si musicalement, la transformation est enfin<br />
aboutie, General Lee n’a pas changé d’humeur et allie<br />
souvent déconnade à références historico-cinématographico-musicales<br />
(je crois que c’est comme ça qu’il<br />
faut dire !), en témoignent des titres comme «Sergio<br />
Leone built my hotrod» (ou comment le maître du western<br />
spaghetti remplace le Jesus de Ministry) ou «Letter<br />
of Aaron Kominski from Hell» (ou comment l’un des<br />
potentiels «Jack l’Éventreur» se retrouve à écrire une<br />
lettre depuis l’enfer ... ou un film traitant de ladite histoire).<br />
Les jeux avec les mots sont aussi poussés que<br />
ceux avec les riffs, ça chauffe donc à tous les étages et<br />
devant la complexité des constructions, la façade est<br />
clairement kiffante. Plutôt que de sortir les couteaux,<br />
sortez les cartes bleues ou les biftons et chopez-moi cet<br />
album !<br />
Oli<br />
24
ROPOPOROSE<br />
Elephant love (Yotanka Records)<br />
Le premier contact que j’ai eu avec Ropoporose a été<br />
scénique. Ca remonte à la dernière édition du festival<br />
de La Ferme Électrique cet été et la prestation fut pour<br />
le moins laborieuse, du moins au départ, pour se terminer<br />
comme elle aurait dû commencer, à savoir de belle<br />
manière. Pas super convaincu dans la façon de l’exprimer<br />
(avec des réglages urgents à effectuer sur la justesse<br />
vocale de la miss), la musique me plaisait tout<br />
de même. L’idée de jouer à deux avec des boucles de<br />
guitares enregistrées en direct pour pallier l’absence<br />
d’instrument supplémentaire, le truc qui peut se révéler<br />
assez vite casse-gueule sans maîtrise ; ces effluves<br />
d’indie-pop juvéniles et bricolées qui laissent un sourire<br />
bête et émerveillé quand elles traversent les oreilles...<br />
Bref, il ne me manquait plus que d’écouter leur premier<br />
album Elephant love pour asseoir mon opinion sur ce<br />
groupe qui mérite tout de même que l’on s’y intéresse<br />
un tant soit peu. Pourquoi ? Parce qu’ils ont été approchés<br />
puis signés sur la sérieuse écurie Yotanka Productions<br />
(Kid Francescoli, Zenzile, Von Pariahs) et que les<br />
relais effectués dans la presse ont globalement été très<br />
encourageants.<br />
rien, Ropoporose se défend super bien, son style à la<br />
fois furibond et fragile, est accrocheur. Difficile donc de<br />
passer son chemin. De plus, les dix titres d’Elephant love<br />
sont des appels constants à la nostalgie - l’influence de<br />
Sonic Youth étant très présente - et les mélodies pleines<br />
de mélancolie qui en découlent constituent le moteur<br />
créatif de ce disque. Dès lors, comment ne pas succomber<br />
à «Day of may» ou la sublime «Whu-whu» ?<br />
Deuxièmement, parce qu’il y a une exigence musicale<br />
déjà très présente pour des artistes aussi jeunes qui<br />
tentent, comme leurs grands frères et sœurs de Peter<br />
Kernel, de jouer la carte des guitares saillantes et de réveiller<br />
les foules (la suite «Empty-headed»/»Elephant<br />
love»). Certains arrangements sonores et utilisations<br />
d’instruments, comme le mélodica et le xylophone sur<br />
«40 slates», corroborent cette exigence envers euxmêmes<br />
et cette volonté de proposer du contenu varié et<br />
de qualité.<br />
Il y a bien d’autres raisons d’écouter ce disque, mais cela<br />
prendrait surement plus de lignes, alors on vous laisse<br />
découvrir et faire vos propres avis sur cette petite féerie<br />
pop qu’est Elephant love, qui démontre qu’avec du boulot<br />
et sans complexe, on peut vraiment faire les choses<br />
bien, surtout quand l’adolescence n’est qu’un récent<br />
souvenir. A bon entendeur.<br />
Ted<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Le webzine aux longues oreilles va se ranger aussi du<br />
côté des avis positifs. Premièrement parce que, l’air de<br />
25
LES DISQUES DU MOMENT<br />
ZUUL FX<br />
Live in Japan (Okult Records)<br />
Vraiment sympa que cette nouvelle sortie de Zuul Fx<br />
parce que dans ce digipak se cache un DVD pas vraiment<br />
comme les autres. Parce que ce n’est pas tout à<br />
fait un documentaire sur leur tournée au Japon, ce n’est<br />
pas vraiment non plus l’intégralité d’un concert enregistré<br />
au pays du soleil levant, non, c’est plutôt l’histoire de<br />
Zuul Fx racontée face caméra par son fondateur, frontman<br />
et seul membre originel encore présent : Zuul. A<br />
travers différents chapitres (sept au total) qui retracent<br />
la discographie du groupe jusqu’à aujourd’hui, on (re)<br />
découvre l’évolution du combo (et quelques anecdotes)<br />
avec Zuul mais aussi des photos, des petites vignettes<br />
vidéo d’archives et des coupures de presse. Chaque<br />
partie est accompagnée d’un morceau live capté au<br />
Japon. Les clubs ne sont pas grands, le public n’est pas<br />
franchement bouillant mais le quatuor se démène et<br />
balance ses compos avec un son énorme. Du point de<br />
vue de la vidéo, les salles étant assez petites, c’est filmé<br />
«près des corps» donc les cadrages sont approximatifs<br />
et ça bouge pas mal, il y a toujours au moins 2 caméras<br />
ce qui donne un rendu plus correct que la simple<br />
vidéo souvenir. Le monteur a fait ce qu’il a pu avec les<br />
rushes (ça n’a pas toujours du être facile, en témoigne<br />
ce qui est gardé sur le «Beat the crap out» de Nagoya).<br />
Les lieux dans lesquels le groupe a joué n’étant pas les<br />
plus belles salles du Japon, les éclairages sont à l’avenant,<br />
très decevants, et limitent le light-show à ... quasi<br />
rien... même à Tokyo sur cette scène à damier magique.<br />
Mais peu importe, ce DVD n’est pas là pour graver pour<br />
l’éternité un concert de folie mais bien pour permettre<br />
à Zuul Fx de faire le point après une dizaine d’années<br />
d’existence et, surtout, de se faire plaisir en compulsant<br />
l’album photos de sa vie comme de ses dernières<br />
vacances.<br />
Euh, un DVD live avec uniquement 6 titres et du blabla,<br />
y’a moquage non ? Non. Parce que dans le digipak se<br />
cache aussi un CD (bon, «se cache» c’est vite dit vu<br />
qu’on le trouve tout de suite aussi) et au final, on se<br />
demande si le DVD ce n’est que le bonus du CD. A moins<br />
que ce ne soit l’inverse... En tout cas, les deux réunis, ça<br />
devient un must have de Zuul Fx.<br />
Alors, dis, c’est quoi ce CD ? Ce CD, c’est pour commencer<br />
les fameux 6 titres mastocs captés au pays<br />
du soleil levant («rising sun» en anglais pour ceux qui<br />
s’intéressent aux sous-titres, d’ailleurs, ils sont dispos<br />
en anglais si ton correspondant ne parle pas bien le<br />
français). Six morceaux, ok, c’est juste bon pour un EP<br />
alors les gars ont envoyé du bonus sur le bonus avec les<br />
trois titres de Ass music, la toute première démo (quasi<br />
introuvable aujourd’hui). Le son a beau être signé Francis<br />
Caste, on est loin de la qualité des dernières prods<br />
du groupe mais toute leur rage et leur puissance sont<br />
déjà bien là (les trois morceaux dont l’inusable «Behind<br />
the light» seront retravaillés pour le premier album). Et<br />
si tes oreilles ne saignent pas encore, monte un peu le<br />
son, il te reste 9 plages pour arranger ça car tu as le droit<br />
aux versions démos de 9 titres de By the cross. Live in<br />
Japan c’était donc «hier» (septembre 2014) mais c’est<br />
un véritable bond dans le passé qu’on s’offre avec cette<br />
double rondelle puisque tous les premiers enregistrements<br />
du groupe s’y trouvent et même si, là encore, le<br />
son des démos n’est pas énormissime, ça s’écoute très<br />
bien et démontre, s’il le fallait, que le groupe n’a pas<br />
attendu longtemps avant d’être au taquet pour envoyer<br />
son bon gras métal-indus.<br />
Oli<br />
26
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LES DISQUES DU MOMENT<br />
27
28EN BREF<br />
SOFY MAJOR<br />
Waste<br />
(Solar Flare Records)<br />
Deux ans après Idolize, Sofy Major<br />
remet le couvert avec Waste et encore<br />
une fois, on n’aura strictement rien à<br />
dire de négatif de ce nouveau cru. Le<br />
trio aborde cette nouvelle mouture<br />
le décapsuleur entre les dents avec<br />
«Waste», un titre massue, très Unsane,<br />
une basse qui percute, une voix<br />
qui prend les tripes, un songwriting de<br />
haute tenue et une sacrée entrée en<br />
matière. Le reste, c’est l’oktoberfest<br />
du noiseux avec une série de titres<br />
tout aussi bandants les uns que les<br />
autres, une accumulation de moments<br />
de bravoures, de riffs qui te percutent<br />
la tronche et un groupe dont il est difficile<br />
de remettre en cause la conviction.<br />
Seule la reprise des Les Thugs m’a<br />
un peu surpris au départ mais il<br />
est ardu de ne pas admettre que le<br />
groupe a remarquablement réussi à<br />
se la réapproprier. Encore un sacré<br />
parpaing (dans la gueule) à l’édifice<br />
Sofy Major. Et la pochette superbe,<br />
totalement en adéquation avec l’esprit<br />
du groupe, va rendre l’édition<br />
vinyle totalement indispensable.<br />
David<br />
PIGS<br />
Wronger<br />
(Solar Flare Records)<br />
Pour les cancres au fond de la classe,<br />
Pigs, c’est Dave Curran (Unsane),<br />
Andrew Schneider (ingé-son au CV<br />
long comme l’instrument de travail de<br />
Rocco...) et Jim Paradise (Ex-Player’s<br />
Club). Après un premier album intitulé<br />
You ruin everything, le groupe revient<br />
aux affaires les crocs encore plus acérés<br />
avec Wronger. 9 titres dont une<br />
intro’ indus-noise plombante («A great<br />
blight») et un intermède red-neck<br />
(«Mouth dump») qui en fera marrer<br />
plus d’un. Inutile de tergiverser sur ce<br />
retour du trio, c’est une baffe monumentale<br />
et on y retrouve tout ce que<br />
l’on attend d’un projet avec Dave Curran<br />
: riff en acier trempé, voix papier<br />
de verre, compositions turgescentes et<br />
songwriting millimétré. Ce texte pourrait<br />
amplement s’arrêter là mais on<br />
oublierait de te dire qu’il y a même un<br />
featuring cinglant de Julie Christmas<br />
(Spylacopa, Made Out Of Babies...) sur<br />
«Bug boy» qui devrait rappeler le meilleur<br />
de son ancien groupe. Au final et<br />
même en multipliant les écoutes, un album<br />
qualitativement aussi monstrueux<br />
que le Visqueen d’Unsane, c’est dire si<br />
c’est un indispensable pour les fans<br />
du père Curran et pour les amateurs<br />
de noise-core qui ne débande jamais.<br />
David<br />
FASHION WEEK<br />
Prêt-à-porter<br />
(Solar Flare Records)<br />
Après American Heritage et The Great<br />
Sabatini, encore un groupe que Solar<br />
Flare Records a eu la brillante idée<br />
de placer sous les projecteurs des<br />
amateurs du label. Car en plus d’être<br />
doté d’un certain humour (la bio parodique<br />
de Nirvana, les références au<br />
monde...), Fashion Week évolue dans<br />
un noise-hardcore qui fait du bien aux<br />
oreilles et ce dès le premier titre «Fendi<br />
bender» : l’alternance jouissif de chant<br />
clair et de passages hardcore-heavy<br />
à la Will Haven trouveront immédiatement<br />
un écho chez les amateurs du<br />
genre. Un album qui enchaîne les titres<br />
excellents et vindicatifs («Chorusace»,<br />
«Fur Free Friday») mais pas dénué<br />
de prise de risques comme sur le à la<br />
fois beau et épique «Klosstrophobia»<br />
ou l’on voit apparaître un clavier doucereux,<br />
une incartade positive que<br />
Fashion Week ne tardera pas à saloper<br />
à grands coup de décibels et de râles<br />
coreux. Seule la piste «Haute topic»<br />
et ses inclinaisons très émo-rock à<br />
la Thursday me laisseront froid mais<br />
votre serviteur a toujours eu une sainte<br />
horreur des jeudis. Ce groupe n’a donc<br />
strictement rien à voir avec l’univers<br />
musical du film de Robert Altman (ni<br />
le tube dégueulasse d’Ini Kamoze...).<br />
On valide et plutôt deux fois qu’une.<br />
David
EN BREF<br />
BIG BUSINESS<br />
Battlefields forever<br />
(Solar Flare Records)<br />
Big Business : Hello Mathieu, salut,<br />
on est Big Business, tu sais, la section<br />
rythmique des (The) Melvins, tu<br />
nous connais ? ça nous brancherait<br />
vachement que tu ressortes notre album<br />
Battlefileds forever via ton label.<br />
Mathieu (boss de Solar Flare Records)<br />
: Hein ? Ouais, ouais c’est ça... Les<br />
gars, vous êtes vraiment pas drôles<br />
mais je dois avouer que votre accent<br />
est pas mal. Et au passage, moi je suis<br />
Henry Rollins. Enchanté les mecs.<br />
Big Business : Ah non Mathieu, ce<br />
n’est pas une blague, on nous a vraiment<br />
vanté les mérites de ton travail,<br />
on aimerait que tu ressortes<br />
cet album pour nous et si tu es ok,<br />
on se rencontre prochainement.<br />
Mathieu (boss de Solar Flare Records)<br />
: Ah ouaaaaaaais ! Putaindebordeldemerde<br />
!<br />
Cette conversation est totalement<br />
fictive et imaginée, Mathieu te racontera<br />
mieux que nous (un de ces<br />
jours) comment la connexion s’est<br />
faite. L’album initialement sorti en<br />
2013 reste une perle pour les fans<br />
de heavy-warrior-rock à tendance<br />
sludge. A se procurer d’urgence.<br />
David<br />
PORD<br />
Wild<br />
(Solar Flare Records)<br />
Dès le premier titre, «Staring into<br />
space», c’est la boucherie noise sous<br />
influences Amphetamine Reptile : la<br />
basse entame les «noise-stilités»<br />
puis la batterie et la guitare viennent<br />
se tailler la part du cake pour incontestablement<br />
asseoir la domination<br />
sonore. Une entame d’album carnassière<br />
et jouissive qui place d’emblée le<br />
niveau très haut. Sauf que la seconde<br />
piste, «I’m swimming home», surpasse<br />
encore la précédente : une intro’<br />
quasi classic-rock (j’ai presque envie<br />
de citer Led Zep’...) et un morceau qui<br />
joue avec les nerfs, multipliant les<br />
cassures rythmiques jusqu’à ce break<br />
cinglant et ce final explosif. Mortel de<br />
chez mortel. Le reste, c’est aussi de la<br />
balle : Pord étire son propos, multiplie<br />
les coups de butoir sans pour autant<br />
faiblir ni laisser entrevoir ne serait-ce<br />
que l’ombre d’un ventre-mou. A ce titre,<br />
«On the couch», le dernier morceau,<br />
fait figure d’expérience paroxystique<br />
avec ses 11 minutes qui commencent<br />
le couteau entre les dents puis après<br />
une subite coupure, change nettement<br />
de tonalité et t’emmène très loin, très<br />
très loin avec une digression quasi<br />
post-noise-rock : ou comment pervertir<br />
sa propre formule pour mieux<br />
la sublimer. La classe encore une fois.<br />
David<br />
WATERTANK<br />
Destination unknown<br />
(Solar Flare Records)<br />
Probablement l’un des groupes les plus<br />
attachants du label dans la démarche,<br />
il suffit de lire les interviews en mode<br />
total nonchalance et zéro ambition,<br />
mais aussi grâce à la musique qu’ils<br />
développent, Watertank revient enfoncer<br />
le clou avec un second album intitulé<br />
Destination unknown. 9 titres pour<br />
une durée de 35 minutes où le groupe<br />
à géométrie variable semble parfaitement<br />
quelle direction prendre lorsqu’il<br />
s’agit de faire du heavy-rock sludgisant<br />
avec des mélodies catchy et un chant<br />
qui invite à l’accompagner dans ce trekking<br />
émotionnel. On pense toujours à<br />
Torche mais il est nettement palpable<br />
que Watertank cherche à s’en éloigner<br />
notamment avec ces ambiances lumineuses<br />
très pop light. Le disque commence<br />
sur un puissant et très Helmet<br />
«Automatic reset» et se termine sur<br />
un «Destination unknown» justement<br />
symbolique de cette évolution pop.<br />
Entre ces deux pistes, il y a 7 pépites<br />
qui n’attendent qu’à être découvertes<br />
et le doux glissement stylistique<br />
qu’opère Watertank est d’autant plus<br />
évident. L’auditeur joliment déstabilisé<br />
ne peut qu’être pressé d’entendre<br />
la suite. Si ‘il y en a une bien sûr.<br />
David<br />
29
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVIEW>WATERTANK<br />
Nouveau fleuron de la scène noise française, les Nantais de Watertank signent un deuxième album et l’emportent<br />
avec les honneurs. Plus varié et aboutit que son prédécesseur, Destination unknown vient rejoindre la liste des jolis<br />
cadeaux de rentrée offert par Solar Flare Records aux cotés de Pigs et Sofy Major. Entretien avec Thomas, le chanteur<br />
du groupe, un entretien que l’on qualifiera de... « concis ».<br />
Vous êtes un groupe aux influences immédiatement<br />
reconnaissables, quand on parle de vous on cite systématiquement<br />
Torche, Helmet, Quicksand, etc...<br />
Malgré cela et contrairement aux autres groupes aux<br />
influences trop évidentes, vous réussissez à percer<br />
et à créer un univers musical unique. Comment vous<br />
faites ?<br />
Le name-dropping sert surtout à nous situer dans le<br />
paysage musical global, mais bien entendu ça ne nous<br />
définit pas totalement, heureusement nos références<br />
sont bien plus larges. On a les éléments pour s’en détacher<br />
et définir au fur et à mesure notre identité.<br />
Ces influences sont souvent des formations américaines<br />
des années 90. C’est une époque qui revient<br />
un peu en force en ce moment. D’après vous, qu’est-ce<br />
qu’il y a de si spécial avec le rock des années 90 ?<br />
Dur d’être objectif vu que notre culture rock s’est<br />
construite à cette époque, on peut dire qu’elle nous semblait<br />
avoir une plus grande importance qu’aujourd’hui<br />
car plus médiatisée.<br />
Est-ce que ça vous gonfle pas un peu d’être toujours<br />
ramené à vos influences, comme je suis exactement en<br />
train de le faire par exemple ?<br />
Non, on assume à fond, aucun souci. Sans être des fanboys,<br />
on a évidemment beaucoup de respect pour ces<br />
groupes grâce auxquels on a construit les bases de<br />
Watertank.<br />
Quand on se ballade sur le net pour regarder un peu<br />
ce qu’il se dit sur vous, on trouve beaucoup de chroniqueurs<br />
qui ressentent un peu de nostalgie à l’égard des<br />
90’s en vous écoutant. Watertank c’est quand même<br />
pas juste un revival-band pour ceux qui font leur crise<br />
de la quarantaine, si ?<br />
Si on veut surfer sur un quelconque revival, on devrait<br />
plutôt monter un cover band de Metallica ou Rage<br />
Against The Machine, on remplirait bien mieux les clubs.<br />
Vous êtes chez Solar Flare Records, un label français<br />
qui se revendique du DIY et qui mise sur le physique de<br />
qualité, avec un catalogue assez noisy/post hardcore.<br />
Est-ce que ça aussi c’est pas une éthique très 90’s au<br />
fond ?<br />
C’est plutôt ancré dans les 80’s, et galvaudé depuis. Tu<br />
retrouves du DIY partout, même dans les magazines<br />
spécialisés seniors. De notre point de vue, c’est surtout<br />
un instinct de survie face à l’uniformisation générale,<br />
plutôt qu’une revendication.<br />
30
Solar Flare Records abrite quelques uns des meilleurs<br />
groupes noise hexagonaux : vous, Sofy Major, Pord et<br />
j’en passe. La scène noise française n’est pas forcément<br />
la scène qui a eu la reconnaissance qu’elle méritait<br />
jusqu’à présent. Est-ce que vous n’avez pas le sentiment<br />
que c’est un peu en train de changer ?<br />
À l’échelle nationale, la scène noise est plutôt réputée<br />
pour ses groupes 90’s, l’âge d’or des Bastärd, Condense,<br />
Tantrum, Portobello Bones, Hint et bien d’autres.<br />
C’est la fin, à vous le mot de la fin.<br />
Merci, Gloire à Jésus !<br />
Merci Thomas, merci Watertank !<br />
Elie<br />
Crédit photo : DR<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
D’après vous, comment se porte la scène rock indépendante<br />
en France et quel avenir vous lui prédisez ?<br />
Aucune idée, je pense que chacun fait son petit bout de<br />
chemin, de manière isolée, mais je ne me retrouve pas<br />
dans une scène rock indépendante globale, ça reste<br />
du copinage à petite échelle, chacun dans son cercle<br />
restreint. Et vu la galère<br />
grandissante pour trouver<br />
des dates et l’argent<br />
perdu quand on est un petit<br />
groupe ou un label indépendant,<br />
je reste un peu<br />
sceptique sur ce que nous<br />
réserve le futur.<br />
Y a-t-il des choses un peu<br />
spéciales de prévues au niveau<br />
physique pour la sortie<br />
de Destination unknown<br />
comme une édition vinyle<br />
particulière...<br />
L’album est sorti en LP, CD<br />
et digital, rien de bien foufou<br />
donc pas d’édition spéciale<br />
sous forme de jokari<br />
ou terrine de canard Watertank, désolé.<br />
L’artwork de Destination unknown fait un peu penser<br />
à celui d’ ‘’Idolize’’ de vos collègues de Sofy Major. On y<br />
retrouve notamment le concept de la tête sans visage.<br />
C’est un simple hasard ?<br />
Dans la forme, il y a des similitudes, en effet. Il s’agit de<br />
mon arrière grand-père sur des rails, la photo originale<br />
est très graphique et collait complètement aux thèmes<br />
de Destination unknown.<br />
Votre musique oscille entre petits passages mélancoliques<br />
et gros passages à tabac, particulièrement sur<br />
ce nouvel album. C’est quelque chose de conscient ou<br />
c’est simplement une recherche mélodique ?<br />
C’est notre credo, virils mais corrects.<br />
31
LES DISQUES DU MOMENT<br />
MEMBRANE<br />
Reflect your pain (Basement Apes Industries)<br />
qu’ils étaient pressés de revenir aux affaires, non pas<br />
que les morceaux soient bâclés (bien au contraire, si tu<br />
as compris le travail réalisé sur l’artwork, tu sais qu’ils<br />
ne laissent rien au hasard) mais les idées semblent<br />
simples, directes, le combo a cherché l’efficacité dans<br />
des schémas qui ont fait son identité et sa marque de<br />
fabrique. L’aventure aurait pu se terminer mais il en<br />
est tout autrement, le changement c’est maintenant et<br />
comme c’est dans la continuité, c’est réussi.<br />
Oli<br />
Du split avec Sofy Major, on a failli passer au split tout<br />
court mais après un court passage dans les limbes,<br />
Membrane a refait surface. Inspiré par les tréfonds des<br />
remaniements de personnel, le trio a joué aux chaises<br />
musicales, Nico prenant le chant en plus de la guitare<br />
et trouvant en Max (batteur de Run of Lava et Feet in<br />
the Air) puis Alban (bassiste mais aussi chanteur), les<br />
pièces manquantes à la survie du projet.<br />
Pour autant l’âme tourmentée de Membrane est toujours<br />
là : les riffs noisy tombent comme des grêles, la saturation<br />
est lugubre, la rythmique étouffante, les chants de<br />
Nico et Alban fidèles à la tradition noise/presque claire<br />
ou filtrée juste ce qu’il faut pour hérisser les poils. Dans<br />
cet océan de noirceur les gars ont pensé à, de temps<br />
à autres, calmer le jeu histoire d’appesantir encore davantage<br />
le propos jusqu’à l’étouffement mais aussi à<br />
convier Floriane qui oeuvre pour le label Impure muzik<br />
(et a joué avec Joss (de Gantz et Hiro au sein de You Witches))<br />
sur deux titres («Breath» et «Lonesome») où sa<br />
voix limpide éclaire un ensemble que le trio rend encore<br />
plus sombre pour la mettre en valeur.<br />
Avec Yann Marchadour, Membrane n’a enregistré que 6<br />
titres mais on sent à travers cette grosse demie-heure<br />
32
DIMONÉ<br />
Bien hommé mal femmé (Estampe)<br />
promesses non abouties ; la pochette est pourtant intrigante,<br />
le dossier de presse alléchant.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Reste une voix, entre Mickaël Furnon (« Chutt chutt shut<br />
up », « Maquille-moi ») et Alain Bashung (« Un homme<br />
libre »), qui, malgré toutes les tentatives de nous happer<br />
en incarnant le propos (« Venise ») finit par lentement<br />
lasser. Même chose pour les textes, un peu trop - systématiquement<br />
- imagés, qui achèvent souvent de nous<br />
perdre en route (sans les paroles sous les yeux). Mais<br />
si l’écriture de Dimoné peut laisser de marbre, l’artiste<br />
a au moins le mérite d’essayer là où une grande partie<br />
de la scène pop-rock française a soit échoué, soit abandonné.<br />
Derrière Dimoné (« Démon » en catalan) se cache un<br />
vieux briscard. Dominique Terrieu, de son vrai nom, navigue<br />
en effet en marge de la scène punk et rock française<br />
depuis bientôt 30 ans. Musicien au sein de formations<br />
au succès relatif comme Les Sulfateurs Espagnols<br />
ou Les Faunes, le Montpelliérain a entamé une carrière<br />
solo depuis la fin des années 90 (son premier album,<br />
Effets pervers, est paru en 1999). Réalisé par son ami<br />
musicien de toujours, Jean-Christophe Sirven, Dimoné<br />
nous revient en 2015 pour son quatrième disque en<br />
quinze ans : Bien hommé mal femmé.<br />
Évidemment tout n’est pas à jeter : « Chanson d’amour<br />
», « Encore une année » sont des titres marquants car<br />
bien dosés. Tout comme certains détails de production,<br />
concernant les choeurs notamment, qui s’avèrent<br />
rafraîchissants (« Maquille-moi »). C’est malheureusement<br />
trop peu pour maintenir complètement l’attention<br />
pendant les 47 minutes du disque.<br />
Une sortie finalement bien sage.<br />
Antonin<br />
Envisagé comme l’album d’une certaine « confirmation<br />
» (on ne peut pas dire que son nom soit sur toutes les<br />
lèvres), l’esprit se veut rebelle, baroudeur et défricheur.<br />
Jouant beaucoup sur son expérience, le - bientôt - cinquantenaire<br />
cherche avant tout à raconter des histoires,<br />
à montrer qu’il a vu, vécu, appris, parfois.<br />
Le souci c’est que l’album ne fait pas beaucoup avancer<br />
le schmilblick, n’évitant pas la plupart des travers de la<br />
chanson française d’aujourd’hui et d’hier, en terme de<br />
production notamment. Pas si rock, malgré l’attitude, les<br />
musiques offrent souvent un faible soutien au propos<br />
(le gentillet « Les triples axel »), nourrissant son lot de<br />
33
LES DISQUES DU MOMENT<br />
FRANCK CARTER<br />
& THE RATTLESNAKES<br />
Blossom (International Death Cult)<br />
était un modèle à suivre... Mais comme le surexcité de<br />
service est un excellent vocaliste, il varie rapidement<br />
les tons et les degrés d’éraflure, se laissant même aller<br />
jusqu’à de très beaux passages en chant clair donnant<br />
du relief à des titres qui, du coup, sortent davantage du<br />
lot («Devil inside me», «Beautiful Death»). Du côté des<br />
serpents à sonnettes, ils ont de quoi s’exprimer car si<br />
Frank Carter est bien entendu la tête de proue et le principal<br />
compositeur, les gaillards qui l’entourent y vont de<br />
leur grain de sel, apportant ici un petit solo bien rock n’<br />
roll («Trouble»), là une rythmique plombée («Fangs»),<br />
et déborde parfois du cadre pour surfer sur le chaos<br />
(«Rotten blossom»).<br />
En 2011, on pouvait être sceptique sur l’avenir de Frank<br />
Carter ailleurs que dans Gallows, mais après tout, pourquoi<br />
pas. En 2013, on le croyait bel et bien perdu pour la<br />
cause HxC, s’étant lui-même enterré dans la mièvrerie<br />
pop rock Pure Love. En 2015, il revient avec un nouveau<br />
projet dénommé Frank Carter & The Rattlesnakes, pourquoi<br />
pas, jetons donc une oreille...<br />
Bref, alors qu’on n’y croyait pas trop, Blossom signe le<br />
retour en fanfare de Frank Carter, avec ses Rattlesnakes,<br />
il a repris du poil de la bête, va pouvoir en découdre avec<br />
son public sur scène (au sens propre comme au figuré,<br />
attention à ne pas trop t’y frotter si tu le découvres en<br />
live) et tout ça, c’est plutôt une bonne nouvelle parce<br />
que du côté de Gallows, le talent est désormais aux<br />
abonnés absents...<br />
Oli<br />
On comprend tout de suite que la mésaventure Pure<br />
Love appartient au passé. Si le titre pouvait laisser songeur<br />
(Blossom, c’est un truc de fillettes ça !), l’artwork<br />
était un peu plus engageant (encore que la ritournelle<br />
sur les amplis qui crament avec le placement de produit<br />
qui va bien puisse être largement critiquée) et le son<br />
bien brut de décoffrage a mis les points sur les «i», enfin<br />
surtout les barres sur les «t» vu le nombre de «i»...<br />
Ca sonne «live», ce n’est pas du pur punk HardCore old<br />
school à la Gallows parce que ça semble plus construit,<br />
plus rock à la base et donc plus facile à écouter tout en<br />
gardant une sévère dose de testostérone et de nervosité/<br />
Bref, pour moi, c’est plus agréable à prendre dans<br />
la tronche que Gallows...<br />
Sur l’introductif «Juggernaut», Frank use de sa voix<br />
éraillée comme si le chant du Kurt Cobain de Bleach<br />
34
WHEELFALL<br />
Glasrew point (Sunruin Records)<br />
cinématographiques et électroniques, qui rappellent<br />
FWF, le projet solo de Fabien, (Chaos Echoes, Phazm),<br />
viennent calmer le jeu par moment pour prendre le<br />
temps d’installer une atmosphère prenante, rappelant<br />
même les sonorités d’un Vangelis sur «A night of dark<br />
trees». Chaque titre trouve aisément sa place, sa durée,<br />
et regorge de surprises sonores et d’idées brillantes, que<br />
ce soit dans la variété du chant, les rythmes, l’approche<br />
des guitares ou les nappes électroniques qui habillent<br />
l’album ici et là. Car la tracklist elle non plus n’est pas<br />
conçue au hasard, l’enchaînement de certains titres permettant<br />
de leur donner un sens différent, nous offrant<br />
même quelques triplettes absolument parfaites.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Les tripodes sont les seuls à avoir survécu à Interzone,<br />
sorti il y a déjà trois ans. Et ils règnent désormais en<br />
maîtres sur ce Glasrew point, colossal double album qui<br />
voit les Nancéiens sortir du carcan parfois étriqué du<br />
stoner/doom. Difficile d’y coller une étiquette précise,<br />
mais cet opus s’adresse définitivement aux fans de métal<br />
extrême, de l’Indus de Trent Reznor au Post-Hardcore<br />
de Cult Of Luna en passant par l’ambiance inclassable<br />
du Monotheist de Celtic Frost ou d’un album de Neurosis.<br />
Un virage stylistique à 190° où Wheelfall défonce<br />
absolument toutes les portes qui s’ouvrent à lui sans jamais<br />
s’y perdre ou devenir pompeux. En nous trimbalant<br />
de paysages lunaires en ambiances païennes, Glasrew<br />
point nous fait revivre la descente de Dante aux enfers<br />
avec inventivité et style.<br />
Inutile de préciser que l’ambiance général donne clairement<br />
dans le genre lugubre, mécanique, froid et violent<br />
(l’excellentissime «Vanishing point») voire carrément<br />
torturé («Sound of salvation») même si quelques<br />
rayons percent les nuages par endroit («Pilgrimage» notamment,<br />
qui invite l’auditeur à ne pas se suicider juste à<br />
la fin du premier CD). Malgré cela, Glasrew point possède<br />
une véritable atmosphère plus attirante et cathartique<br />
que repoussante, en plus d’une concision dans le propos<br />
qui donne envie d’y revenir régulièrement.<br />
A noter que l’album sera vendu avec un roman écrit par<br />
Blandine Bruyère qui relate le récit de ce double album,<br />
même si l’album lui-même possède déjà une force<br />
d’évocation suffisante pour vous faire faire votre propre<br />
récit.<br />
Elie<br />
Glasrew point n’est pas conceptuel qu’a moitié puisque<br />
ce sont un peu plus de 80 minutes de musique sombre,<br />
anxiogènes et épiques qui nous sont proposées cette<br />
fois. Et pourtant Wheelfall évite l’écueil quasi systématique<br />
du double album indigeste et finalement inécoutable.<br />
Tout en gardant la cohérence nécessaire,<br />
l’album varie les ambiances, les styles et les nuances<br />
sonores grâce entre autre à un énorme travail de<br />
recherche en studio. Quelques superbes interludes<br />
35
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVIEW>WHEELFALL<br />
Rencontre avec Fabien, chanteur, guitariste et tête pensante de Wheelfall à l’occasion de la sortie de Glasrew Point.<br />
Un double album implacable débarrassé du carcan stoner qui promet de mettre Nancy à genoux, et plus si affinités.<br />
Votre nouvel album est un concept album accompagné<br />
d’un roman. Est-ce que tu peux nous en dire plus sur le<br />
scénario et sur la conception de ce roman ?<br />
Tout notre concept repose sur des constats. Le roman<br />
de Glasrew point prend place dans la société actuelle,<br />
c’est ni plus, ni moins, qu’une observation des interactions<br />
humaines, sociologiques et technologiques. C’est<br />
plus nécessairement de la SF comme auparavant sur Interzone,<br />
plus quelque chose dans le genre de ce qu’a fait<br />
James Graham Ballard avec Crash. C’est un peu comme<br />
si tu étais un scientifique qui regarde le monde d’en haut<br />
et qui s’amuse à créer des situations diverses pour voir<br />
ce qu’il va se produire.<br />
On a commencé à écrire le roman en se basant sur ces<br />
thèmes-là. On s’est vite retrouvé avec une trentaine de<br />
pages de concept et d’idées et c’est là qu’on s’est dit<br />
qu’on pouvait carrément essayer d’en faire une vraie<br />
histoire qui prendrait place dans ce contexte. On s’est<br />
dit qu’on allait confier ça à quelqu’un qui non seulement<br />
avait le sens de l’écriture, mais surtout qui était<br />
extérieur au groupe, pour avoir un autre point de vue sur<br />
l’ensemble. C’est Blandine Bruyère, une amie à nous, qui<br />
s’est chargé d’adapter nos idées en créant des personnages<br />
et tout ce qui va avec.<br />
Et je vais quand même te résumer vite fait le synopsis.<br />
C’est quatre personnages qui se rencontrent par hasard<br />
dans une station service, dans un pays du type Europe<br />
du Nord avec une ambiance assez urbaine. Ils vont être<br />
pris à parti par une masse de gens sans vraiment savoir<br />
pourquoi et sont contraints de fuir le continent sur un<br />
petit rafiot. Ils finissent par se retrouver sur une île qui<br />
de prime abord semble coupée de toute ces mauvaises<br />
choses, une sorte d’utopie. Mais en fait c’est pas forcément<br />
un abri. [rires]<br />
C’est d’actualité ça un peu, non ? Des gens qui sont<br />
contraints de fuir un continent sur un petit rafiot !<br />
Pourquoi pas ! Mais on avait conçu l’histoire avant tout<br />
ça quand même. On n’a pas fait exprès ! [rires]<br />
Pourquoi un changement de style aussi radical ? Razle-bol<br />
du stoner ?<br />
Pour plusieurs raisons. Premièrement, pendant la composition<br />
de cet album j’ai eu une très grosse remise en<br />
question personnelle. C’est d’ailleurs pour ça que cet album<br />
est peut être plus dirigé par moi. Même si les autres<br />
ont suivi et ont amené des tas de bonnes idées, l’impulsion<br />
vient quand même de moi. Donc j’ai fait le point sur<br />
ce que je voulais et sur ce que j’étais musicalement,<br />
et j’ai aussi voulu faire la paix avec toute l’éducation<br />
36
classique que j’ai reçue. J’ai passé plus de 15 ans en<br />
conservatoire avant de faire du rock, en partie pour être<br />
en contradiction avec tout ça. Là j’ai pu marier les deux.<br />
Pour faire simple je ne me suis imposé aucun cadre. Ce<br />
qui est sorti là était purement naturel, c’était le retour<br />
aux vraies envies, aux vraies influences.<br />
Et ce changement de style, il impose quoi pour<br />
la suite ?<br />
La seule chose que ça impose c’est... c’est qu’il n’y ait<br />
rien d’imposé en fait ! [rires] Là comme ça, je ne sais pas<br />
du tout comment ça va évoluer. Par contre, je sais que<br />
je n’ai pas envie qu’on attende autant de temps avant<br />
de refaire quelque chose (NDLR : Trois ans ont séparé<br />
la sortie d’Interzone et celle de Glasrew point). Après, au<br />
niveau du style, mes groupes préférés ont toujours fait<br />
quelque chose d’un peu différent à chaque album, que<br />
ce soit NIN, Swans ou même Morbid Angel ! Je ne m’en<br />
fais pas trop pour ça, par contre, ça ne sera peut être pas<br />
aussi radical. Parce que là j’ai l’impression qu’en lâchant<br />
un peu le cadre, on a trouvé quelque chose de plus profondément<br />
enfoui en nous donc c’est peut être moins<br />
sujet à changement. Mais peut-être pas.<br />
Et pourquoi un double album ? A cause du concept ou<br />
parce que vous aviez énormément de choses à dire<br />
musicalement ?<br />
Je pense que oui, ça ne pouvait que sortir sur un double.<br />
Déjà, il y avait la problématique d’illustrer le roman mais<br />
on avait aussi beaucoup de choses à dire. Parce que tu<br />
vois, mine de rien, au niveau de la durée des morceaux<br />
on est sur un format plus court qu’auparavant, ce qui<br />
n’empêche pas que ça soit vachement plus long [rires].<br />
Moi le principe doom/stoner du truc hypnotique et répétitif,<br />
j’ai effectivement fini par en avoir un peu marre. Là,<br />
le but c’était qu’on ne se fasse jamais chier. Qu’il n’y ait<br />
pas de redite. Donc, quand on trouvait que c’était assez<br />
on coupait et on passait à un autre morceau. Au regard<br />
de ça et de la durée de l’album, je pense que oui, on avait<br />
beaucoup de choses à dire.<br />
C’est votre deuxième concept-album. Pourquoi vous ne<br />
faites pas comme tout le monde, en enchaînant juste<br />
les bons riffs et les bons morceaux ?<br />
En ce qui me concerne, j’aime beaucoup les œuvres<br />
conceptuelles. D’ailleurs, c’est là que je me rends compte<br />
de l’importance que mon éducation classique a eu sur<br />
moi. Et effectivement pour moi le format ‘’chanson’’ c’est<br />
trop restrictif. J’ai eu l’habitude d’écouter des grandes<br />
symphonies ou des grands mouvements, des trucs où<br />
il se passe des choses sur la durée. Après ça ne veut<br />
pas dire qu’il faut être pompeux. Mais là dans le double<br />
album, il y a des thèmes qui reviennent régulièrement,<br />
au début, au milieu, à la fin, des leitmotivs. Comme des<br />
personnages qui évoluent et se déplacent. Et Interzone<br />
par exemple, même si c’était un concept-album avec<br />
une histoire et une trame, on pouvait découper ça en<br />
morceaux indépendants. Là, il y a des alliances qui se<br />
font et des enchaînements qui ont vraiment du sens.<br />
Certains morceaux ne peuvent pas être compris sans le<br />
suivant ou le précédent.<br />
Comment on compose un concept album ? C’est le<br />
schéma classique de la jam ou c’est plus calculé en<br />
fonction de ce que raconte l’histoire ?<br />
C’est un gros mélange des deux. Quand je compose, j’ai<br />
toujours des images et des couleurs en tête, et forcément<br />
ça m’amène à faire quelque chose de narratif. Parfois<br />
je joue un riff et ça m’évoque telle partie de l’histoire,<br />
à l’inverse il y a des passages du roman dont on essaye<br />
de trouver comment illustrer l’émotion et l’ambiance en<br />
musique. Des fois même une simple note peut t’évoquer<br />
quelque chose, du stress, une couleur. Et du coup après,<br />
on jam autour de cette note par exemple. Là aussi il y a<br />
une idée de liberté, que ça soit dans la façon de composer<br />
ou d’enregistrer. On a raisonné comme si on avait<br />
acheté une boîte à outils en fait : pour tel morceau j’ai<br />
besoin de cette méthode de composition, sinon je n’arriverais<br />
pas à mes fins, donc je la prends ; pour un autre,<br />
une autre méthode etc... Donc il y a des choses écrites<br />
et d’autres qui viennent d’une improvisation.<br />
Thibaut vous a rejoint au synthé. C’était une nécessité<br />
pour faire tout ce que vous vouliez faire ?<br />
Il fait les guitares additionnelles aussi. C’était vraiment<br />
une nécessité. Si on voulait faire ce qu’on voulait, on<br />
ne pouvait pas lésiner sur les moyens, ni sur les personnes.<br />
Et surtout pour défendre ce genre de musique<br />
en live on avait besoin d’un zicos de plus. Là en répétition,<br />
ça marche très bien, mais si un jour on se rend<br />
compte qu’on a besoin de plus, il y aura plus. En plus Thibaut<br />
est un très bon ami à nous. Il venait même jouer sur<br />
scène avec nous avant sur des rappels (NDLR- Thibaut<br />
venait chanter ‘’July’’, un morceau de Slo Burn repris par<br />
Wheelfall). Il était dispo et c’est un très bon instrumentiste.<br />
Il était hyper motivé donc ça s’est fait tout seul.<br />
On entend un peu de tes projets parallèles dans ce nouvel<br />
album. Des riffs blacks qui rappellent Phazm et des<br />
ambiances qui rappellent ton projet solo, FWF...<br />
Il y a aussi pas mal de Chaos Echoes. Pendant ma remise<br />
en question, le premier album de Chaos Echoes a<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
37
INTERVIEW TEXTE<br />
quand même joué un grand rôle, parce qu’en l’écoutant<br />
j’avais l’impression de retrouver des choses très intellectualisées<br />
mais qui passent très simplement. Ça m’a<br />
permis d’intégrer tout ce que je voulais dans un format<br />
de musique ‘’populaire’’ pour parler grossièrement. C’est<br />
d’ailleurs après avoir écouté cet album que je les ai rejoints<br />
! FWF a été créé durant cette même période, ça<br />
m’a beaucoup aidé. Et pour Phazm, j’ai aussi intégré le<br />
groupe au même moment donc j’ai été exposé à pas mal<br />
de nouveaux horizons en même temps. En fait, j’ai composé<br />
l’intégralité de Glasrew point pour faire simple. Les<br />
autres ont eu un grand rôle pour tout ce qui touche aux<br />
arrangements et aux idées. Par exemple, Niko (NDLR : le<br />
batteur) m’avait signalé qu’il aimerait avoir quelque moments<br />
de lumière dans un ensemble qu’il trouvait quand<br />
même vachement lugubre et impénétrable, sans respirations.<br />
C’est pour ça qu’il y a «Pilgrimage» à la fin du<br />
premier disque, par exemple. Et finalement il s’intègre<br />
très bien entre «The drift» et «Shelter». Une super triplette<br />
d’après moi ! [rires]<br />
groupes-là, et je n’ai pas envie qu’on tombe là dedans.<br />
Et en dehors de Nancy ?<br />
Oui ! En fait, on est en train de préparer une tournée de<br />
deux semaines qui se déroulera d’ici fin octobre. Pour<br />
l’instant, il n’y a que quelques dates de confirmées,<br />
Le Mans avec Presumption, un groupe Doom du coin,<br />
Rennes, avec Fange, des bons potes à nous, avec un<br />
mec d’Huata dedans, puis Lille, Paris... et on cherche<br />
dans l’Est en Suisse, en Allemagne, Belgique, pour la<br />
deuxième semaine, avec Haut&Court, un groupe de<br />
grind strasbourgeois. Ça va être rigolo [rires]<br />
A toi le mot de la fin !<br />
Eh bien, merci beaucoup !<br />
Merci Fabien, merci Wheelfall.<br />
Elie<br />
Crédit photo : DR<br />
Comment ça va se passer en live ? On aura la version<br />
intégrale de l’album ? Et est-ce que vous allez intégrer<br />
d’anciens morceaux du registre stoner à la setlist ?<br />
Déjà, on ne jouera pas l’album en entier. Pas dans l’immédiat<br />
du moins. Il nous faudrait vraiment plus de zicos<br />
pour pouvoir tout interpréter sur scène. Il y a des morceaux<br />
avec plein de claviers, 8/9 guitares. ce n’est pas<br />
possible sur scène pour le moment. Donc on centre sur<br />
certains morceaux, et déjà en faisant ça, rien qu’avec<br />
les nouveaux morceaux, on a une très grosse setlist.<br />
On jouera forcément d’anciens morceaux, mais pas<br />
beaucoup et probablement en rappel. A terme, on aimerait<br />
bien les réarranger, les remettre au goût du jour.<br />
Mais pour le moment je ne pense pas qu’on puisse se<br />
permettre de faire des setlists d’1H30, pour ça il faut<br />
attendre que l’album ait fait un peu plus de chemin je<br />
pense. Il faut rester modeste et creuser le sillon.<br />
Des dates justement ?<br />
Il y a la release party au Hublot à Nancy le 18 septembre,<br />
avec Joy Disaster et Dog n’ Style. Un moment<br />
familial étant donné que notre batteur joue pour Joy<br />
Disaster et a aussi joué dans Dog n’ Style ! Normalement<br />
on a une deuxième date à Nancy en octobre, on<br />
sera avec Thot, un groupe belge que j’aime beaucoup,<br />
ça devrait être à la Machine à Vapeur je crois... c’est à<br />
confirmer... [rires]. Après les deux là, on ne reverra<br />
pas Nancy avant un moment. Je n’aime pas voir le<br />
même groupe tout les mois au même endroit, ça me<br />
gave rapidement et je finis par perdre l’intérêt pour ces<br />
38
INTERVIEW TEXTE<br />
39
LES DISQUES DU MOMENT<br />
EYO NLE BRASS BAND<br />
Empreinte du père (Irfan)<br />
Soyons sincères. Sans les Ogres de Barback, peu d’entre<br />
nous auraient entendu parler de la fanfare Eyo’nlé Brass<br />
Band. Et quand bien même les initiés auraient eu vent de<br />
cette formation, il n’aurait pas été forcément évident de<br />
trouver des disques sur le marché français. Mais grâce<br />
à Irfan le Label (structure auto gérée par les Ogres), la<br />
fanfare béninoise va pouvoir inonder le marché, et je<br />
peux te dire que c’est une excellente nouvelle.<br />
Eyo’nlé Brass Band dans le W-Fenec mag peut semble<br />
saugrenu, voir complètement hors sujet. Oui, c’est vrai.<br />
Mais pas tant que ça, car notre but premier, c’est de parler<br />
de groupes qu’on aime. Punk, rock, métal, reggae.<br />
Tant que ça fonctionne, on en parle. Et la world music ne<br />
déroge pas à la règle. Alors autant poser les bases tout<br />
de suite, je n’ai que très très peu de références dans ce<br />
domaine. J’ai bien pu croiser ce genre de groupe dans<br />
des festivals, mais ça s’arrête là. Et je trouve personnellement<br />
très enrichissant de s’ouvrir à de nouveaux<br />
mondes musicaux.<br />
repères. Alors, j’ai enfourné la galette dans ma platine, et<br />
je ne me suis pas posé de questions. J’ai juste écouté. Et<br />
savouré. Car oui, j’aime Eyo’nlé Brass Band. Je n’écouterai<br />
pas ce disque tous les jours, c’est certain, mais voilà<br />
le genre d’album qui détend et qui te fait explorer des<br />
univers méconnus pour des rockeurs comme je le suis.<br />
Eyo’nlé Brass Band, véritable fanfare mêlant musique<br />
traditionnelle africaine, jazz et blues, est divertissant et<br />
entraînant. Les percussions africaines se mélangent aux<br />
multiples cuivres pour un melting pot riche en couleurs<br />
et en diversité. Le chant est parfois en béninois (ça doit<br />
être ça la langue du Bénin, hein ?) et en français. Entre<br />
les compositions qui donnent frénétiquement l’envie de<br />
danser, le groupe rend hommage à Georges Brassens («<br />
Le temps ne fait rien à l’affaire »), à Serge Gainsbourg («<br />
Le poinçonneur des Lilas »), aux Ogres de Barback («<br />
Ces tonnes de gens ») et même à Fela Kuti ( « Water no<br />
get enemy »). Finalement, tout ça est logique : le brassage<br />
musical de Eyo’nlé se veut festif et universel, et les<br />
seize titres composant cet Empreinte du père sont une<br />
ode au voyage et au mélange des genres dans la béninolexicomatisation<br />
de cet arc-en-ciel musical.<br />
Avec son artwork coloré mêlant simplicité et efficacité,<br />
Empreinte du père m’a fait faire le tour du monde en<br />
70 minutes. Eyo’nlé Brass Band m’a fait découvrir son<br />
univers uposmique, riche et varié, et je ne suis maintenant<br />
pas étonné que Les Ogres de Barback aient craqué<br />
sur cette fanfare au point de tourner massivement sur<br />
toutes les routes de France et de lui proposer de sortir ce<br />
bel album. Une sincère et touchante aventure humaine,<br />
tout simplement.<br />
Gui de Champi<br />
Je ne savais pas exactement comment appréhender la<br />
chronique d’Empreinte du père, album des huit musiciens<br />
du Bénin. Car oui, j’ai mes codes quand je dois<br />
disséquer un disque de rock. Sauf que là, je n’ai pas de<br />
40
REFUSED<br />
Freedom (Epitaph)<br />
Groupe culte de chez culte, cité en référence par à peu<br />
près tout le monde, qu’on soit indé, hardcore ou punk,<br />
voire emo ou simplement rock saturé, Refused avait<br />
marqué de son empreinte la décennie 90, montrant aux<br />
ricains qu’on pouvait sortir de nulle part et imposer sa<br />
marque. En 2012, le groupe était remonté sur scène,<br />
après une dizaine d’années de décès clinique et de<br />
désespoir (c’était bien sympa The (International) Noise<br />
Conspiracy mais incomparable). Mais aussitôt reformé,<br />
aussitôt re-mort, mais quand Jon Brännström annonce<br />
s’être fait viré, on se dit que le combo existe toujours... Et<br />
il retourne en studio (avec Magnus Flagge leur bassiste<br />
d’origine) sous la houlette de Nick Launay (allez, pour le<br />
plaisir, une short list des groupes qu’il a produit : Girls<br />
Against Boys, Deckard, Killing Joke, Midnight Oil, Supergrass...),<br />
pas forcément habitué au HxC mais respecté<br />
pour la qualité et le tranchant du son qu’il capte. A noter<br />
que leur compatriote Shellback a produit deux titres (les<br />
meilleurs), ce qui a dû bien le changer de Britney Spears,<br />
Usher, Avril Lavigne ou Taylor Swift !<br />
leur style a tellement été pillé que leurs attaques frontales,<br />
tant rythmiques que mélodiques, sont aujourd’hui<br />
la norme et il est difficilement envisageable d’avoir un<br />
opus aussi marquant en 2015. Il nous faut donc rester<br />
calme et prendre cet album comme celui d’un groupe qui<br />
avait envie de rejouer ensemble et d’envoyer quelques<br />
messages toujours d’actualité. On doute que les responsables<br />
de la «Françafrique» et du système post-colonial<br />
installé au Congo ne soient des fans de Refused et<br />
reviennent sur leurs erreurs mais le combo y va de ses<br />
idées et ouvrira peut-être certains esprits en mettant de<br />
la lumière sur des sujets peu médiatiques. Soyons honnête,<br />
ce n’est pas uniquement pour leur engagement<br />
politique qu’on apprécie Refused (même si cela n’enlève<br />
rien, bien au contraire), non, c’est surtout pour leur capacité<br />
à écrire des compos qui font «bing dans ta face»<br />
et de côté-là, pas de souci, dès l’inaugural «Elektra»,<br />
on est rassuré, les gars ont gardé les recettes et le sens<br />
du rythme qui fracasse («Dawkins Christ», «Destroy<br />
the man» dont les bruitages de l’arrière plan semblent<br />
ressusciter Michael Jackson !!!) ou décontenancé car si<br />
c’est trop facile, c’est pas du jeu... («Old friends / New<br />
war», «Thought is blood», l’excellentissime «366»).<br />
Refused est donc bel et bien de retour, pas pour donner<br />
une nouvelle leçon mais pour se réapproprier le territoire<br />
incandescent d’une scène hardcore punk qui lui<br />
doit beaucoup et semblait naviguer à vue depuis plusieurs<br />
années. Faites donc gaffe à vos fesses, les bottes<br />
de Refused ne sont pas loin...<br />
Oli<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Et il en fallait du tranchant parce que l’hibernation n’a<br />
pas ankylosé les Suédois, alors, fatalement, ce Freedom<br />
n’est pas au niveau de The shape of punk to come<br />
mais l’époque est différente, l’attente a été longue et<br />
41
LES DISQUES DU MOMENT<br />
PUB<br />
42
TALIA<br />
Thugs they look like angels (Send The Wood Music)<br />
puisqu’elle y va de quelques petits choeurs. Elle apporte<br />
un peu de douceur par sa voix, d’autres morceaux sont<br />
eux aussi plus doux même sans son renfort vocal, c’est<br />
le cas de «Self induced fever» cool et sympatoche ou<br />
«The flood» dont la tonalité est davantage grunge FM<br />
(on pense aux mauvais côtés de Nickelback... parce que<br />
oui, ils en ont eu de bons mais ça, c’était avant).<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Dans l’ensemble, Thugs they look like angels n’est peutêtre<br />
pas aussi marquant que son prédécesseur mais il<br />
faut dire qu’on a pu s’habituer au ton de Talia et que l’effet<br />
de surprise joue un peu moins, il n’en reste pas moins<br />
un album agréable à écouter et qui démontre qu’on peut<br />
faire du rock ailleurs que dans les bars le samedi soir...<br />
Oli<br />
Depuis Permanent midlife crisis, Talia a surtout joué<br />
dans la capitale, ouvrant aussi bien pour Lonely the<br />
Brave que pour Reverend Horton Heat pendant que<br />
son clip de «Every minute every hour» enchaînait les<br />
vues sur Youtube (50.000, ce n’est pas rien !!!). Le trio<br />
ne s’est pas reposé sur ses lauriers et a composé puis<br />
enregistré une dizaine de nouveaux titres qui sortent via<br />
Send the wood music à la mi-octobre. Le joli dessin de la<br />
pochette donne moins dans la crise de la quarantaine,<br />
l’ado attardé ou le rocker sur le retour, place cette fois-ci<br />
au monde de l’enfance avec le manège et l’insouciance<br />
d’un petit bisou échangé entre deux petits anges. Pour<br />
autant, on navigue toujours dans les mêmes eaux pour<br />
la musique : du rock un peu crade et bien envoyé.<br />
Si l’album est très homogène, quelques titres se dégagent<br />
comme ce «American bride» qui pose de très<br />
bonnes bases, parce qu’avoir un très bon premier morceau<br />
est un truc très important, tout comme en avoir<br />
un bon dernier («Bounty killers» remplit parfaitement<br />
son rôle). «It’s been oh so long» avec son intro explosive<br />
est plus rock, plus rugueux, plus accrocheur avec<br />
ce petit côté Therapy? dans le chant qui ne me déplaît<br />
pas du tout... Tout comme ce «Play dead» où Alice se<br />
met en valeur, et pas uniquement avec son jeu de basse<br />
43
TEXTE LIVE<br />
> DOUR 2015<br />
Dour, mon amour. Le slogan est connu des habitués, mais son sens prend toujours plus de poids au fil des années.<br />
2015 est celle des records, c’est à peine croyable lorsque les chiffres apparaissent devant nos yeux : 5 jours, 270<br />
artistes, 8 scènes pour une fréquentation exceptionnelle de 228 000 festivaliers en cette 27ème édition. Une édition<br />
pas dégueulasse du tout dont le duo magique Cactus/Ted vous en relate toutes ses festivités.<br />
Jour 1 - MERCREDI 15 JUILLET<br />
Le premier jour, soit mercredi et non jeudi comme à<br />
l’accoutumée, c’est déjà 35 000 campeurs qui ont plantés<br />
leurs tentes. Quelque part, on s’en doutait au vu de<br />
l’attente interminable dans les bouchons avant d’arriver<br />
à l’entrée de la plaine de la machine à feu. La motivation<br />
est au maximum, et il y en faut car nous ne sommes pas<br />
au bout de nos peines : on se confronte quelques heures<br />
plus tard à une longue et lente queue devant l’accès du<br />
festival, puis, une fois rentrés avec nos pass, on fait face<br />
à un camping quasi complet, obligé de trainer nos fesses<br />
(et nos bagages) au bout du camping D.<br />
Résultat des comptes, nous arrivons à 23h sur le site<br />
du festival alors que débute le show du londonien masqué<br />
SBTRKT. N’ayant pas compris l’engouement autour<br />
de cet artiste électronique depuis quelques années, on<br />
reste toujours incrédule face à ce show aux ambiances<br />
lumineuses agréables mais qui ne décollera jamais.<br />
La faute à des vocalises qui desservent le propos instrumental<br />
déjà pas très excitant au départ, comme ce<br />
chanteur rappelant par moment Youssou N’Dour... Bon,<br />
OK, celle-là, elle était facile. S’en suit le truc qui va nous<br />
motiver à repartir fissa à notre campement : 2 Many<br />
DJ’s. Les deux frangins Dewaele, membre de Soulwax,<br />
présentent un DJ set rythmé de mash-ups plus ou moins<br />
«grand public» mais pas assez subtil pour nous emporter.<br />
Même lorsque retentit «Girls» des Beastie Boys,<br />
cela ne permet pas de remonter le niveau d’un set qui<br />
peinera à convaincre. Même l’accueil du public semble<br />
tiède. Décidément, on en est certain, les deux quadras<br />
auraient pu largement se faire détrôner par la mère de<br />
Cactus aux platines. Et on ne vous permet pas de douter<br />
des goûts musicaux de la mère de Cactus.<br />
Jour 2 - JEUDI 16 JUILLET<br />
Première «vraie» journée de cette édition. On se lève<br />
au son des «Bon Dour !», accent asiatique oblige, de<br />
nos voisins de campement. On retrouvera cette pauvre<br />
blague tout au long de notre séjour en Belgique, sans<br />
parler du fameux «Dourrreeeeuh !», marque emblématique<br />
du festival qui l’utilisera d’ailleurs pour sa com’<br />
(panneaux, teeshs...). Notez quand même que ce cri<br />
de ralliement sempiternellement exhibé à toutes les<br />
sauces deviendra assez vite rébarbatif à la longue, surtout<br />
pendant cinq jours.<br />
On débute la journée en passant devant Soviet Suprem,<br />
44
le nouveau groupe d’ R.Wan de Java et de Toma de La<br />
Caravane Passe, confirmant notre impression sur ce rap<br />
balkanique comique, à savoir que ça ne nous touche pas<br />
du tout. La scène chanson franco-française n’est pas<br />
souvent du pain béni, ça se saurait. A éviter donc, sauf<br />
si on se perd sur le site ou qu’il n’y a rien à côté. Sauf<br />
qu’à Dour, il y a toujours plein de choses à voir. Trop de<br />
choses à voir.<br />
Et cela nous amène aux fameux dilemmes, aux choix<br />
parfois cornéliens à faire. On a décidé volontairement<br />
cette année de ne pas courir comme des fous de scène<br />
en scène mais plutôt d’apprécier du mieux qu’on pouvait<br />
chaque univers que proposaient les artistes. En ce sens,<br />
nous avons pas mal squatté la Cannibal Stage (la scène<br />
relevée en décibels rock voire electro) en ce jeudi pour<br />
découvrir Krokodil, du hardcore velu comptant dans ses<br />
membres des gars de Gallows, Sikth, Cry For Silence,<br />
Hexes. Un univers qu’on connaît bien, pas surprenant<br />
mais plaisant et énergique pour débuter la journée. Que<br />
dire d’Orange Goblin si ce n’est qu’ils ont déroulé leur<br />
stoner rustre avec une certaine maîtrise. Jouissif. Mais<br />
pas trop longtemps. Dans le même pedigree, Blue Pills<br />
nous a agréablement plongé dans un rock bluesy 70’s<br />
avec une rage vocale émanant de Miss Elin Larsson, annoncée<br />
par certains comme la nouvelle<br />
Janis Joplin. Ils n’en étaient<br />
pas loin ! Juste avant cela, on est<br />
allé découvrir l’univers psych-funk<br />
d’Unknown Mortal Orchestra. Nos<br />
oreilles répondent positivement<br />
aux couleurs et aux mélodies proposées<br />
par le groupe. Une appréciation<br />
qui est toutefois à confirmer<br />
hors du rush qui fait face à nous à<br />
ce moment précis de la journée.<br />
saturé, sombre et puissant est un bouillon sonore sensationnel<br />
qui frise le mur du son et percute le thorax. En<br />
terme d’impact sonore, c’est un peu notre Neurosis de<br />
2011 en quelque sorte, même si le style est totalement<br />
différent. Et quand le groupe finit son set dans le public,<br />
tu te dis que c’est quand même la grosse classe.<br />
Changement de décor sous la Petite Maison Dans La Prairie<br />
avec le syrien Omar Souleyman, adepte d’une techno<br />
orientale tellement kitch et monotone qu’on en devient<br />
assez vite amusé (ou pas, c’est selon). Cette prestation<br />
reste hallucinante tant ce style musicale est en marge<br />
avec le reste de la programmation. C’est ce qu’on appelle<br />
les joies de Dour ! Malheureusement, le tant attendu<br />
Squarepusher ne nous a pas beaucoup vus, un petit<br />
quart d’heure tout au plus. Car entre les passages en<br />
presse, les obligations diverses et les fameux dilemmes,<br />
il est assez difficile de tout voir. Surtout quand passe un<br />
MC-Hero quasiment en même temps et qu’on ne veut<br />
vraiment pas le louper du tout, genre «premier rang».<br />
Le britannique touche à tout nous laisse donc un souvenir<br />
périssable avec du bon et du moins bon. A revoir.<br />
A revoir aussi la prestation du fameux MC-Hero qu’est le<br />
mythique KRS-One. Une tuerie ! Il est difficile de rendre<br />
TEXTE LIVE<br />
Histoire de se rincer les oreilles de<br />
tous ces riffs endiablés, nous partons<br />
voir l’instant funk-soul habituel<br />
de Dour. Après Charles Bradley<br />
il y a quelques années, c’est au<br />
tour d’un autre descendant musical de James Brown<br />
de prendre le relais avec Lee Fields & The Expressions.<br />
Sensualité cuivrée et énergie avec sueur incluse étaient<br />
donc prévues au programme en cette journée ensoleillée.<br />
Un show propre et respectable qui s’avère être un<br />
must pour serrer de la gueuse à Dour, quoique bien trop<br />
court. Retour à la Cannibal Stage pour ce qui reste l’un<br />
des meilleurs moments de la journée, à savoir le concert<br />
du trio A Place To Bury Strangers, venu défendre son dernier<br />
album Transfixiation. Son rock post-punk-shoegaze<br />
un hommage correcte à cet acteur majeur de la scène<br />
«rap conscient» tant sa prestation a été généreuse,<br />
ponctuée de quelques moments forts et de l’approbation<br />
‘finger in ze nose’ du public qui montera sur scène à<br />
la fin du show. Avec œuf corse un «Sound of the police»<br />
d’anthologie. La Boombox is «on fire». Un des grands<br />
moments de Dour 2015.<br />
Cette deuxième journée a été «dour dour» et nous laisse<br />
un peu KO, la chaleur et la marche y sont pour beaucoup.<br />
45
TEXTE LIVE<br />
Nous vaguons et flânons sur quelques scènes avant de<br />
partir nous reposer car le vendredi s’annonce géantissime,<br />
avec quelques trucs immanquables.<br />
On a loupé : Igorrr, Solstafir, Kvelertak, Electric Wizard,<br />
Modeselektor, Mark Ronson.<br />
Jour 3 - VENDREDI 17 JUILLET<br />
Ce jour débute par un passage hasardeux devant la tente<br />
de la Petite Maison Dans La Prairie, attirés par la prestation<br />
tout en finesse du trio electro bruxellois Vuurwerk.<br />
C’est onirique, parfait pour un réveil en douceur surtout<br />
que la suite du programme fait place à des phénomènes<br />
électriques.<br />
Les Liégeois de IT IT Anita, malgré un second guitariste<br />
diminué, vont délivrer un set noise-rock inspiré et vivant.<br />
On savait que le groupe était très bon sur disque, c’est<br />
aussi le cas en live et les présents au Labo ne le regretteront<br />
pas. Une confirmation pour ceux les connaissant<br />
Vos deux serviteurs étant très fan du rappeur versaillais<br />
Fuzati, inutile de dire que nous étions impatient d’assister<br />
à ce show anniversaire de l’album le plus marquant<br />
du Klub Des Loosers, Vive la vie. Et le flowman accompagné<br />
de musiciens délivrera un excellent show. Si les<br />
disques se révèlent souvent purement «strictly hiphop,<br />
voir un peu plus...», en live, c’est tout l’éclectisme<br />
de celui qui dit ne plus écouter de rap depuis quelquesannées<br />
qui émerge. Les érudits de la plume numérique<br />
utiliseraient l’expression «syncrétisme de bon aloi»<br />
pour ces morceaux subtilement et intelligemment réarrangés<br />
pour l’occasion. Moment fort : La Boombox qui<br />
scande «Baiser ! baiser ! baiser ! Ouh ! Ouh !».<br />
C’est toujours un plaisir non dissimulé de retrouver nos<br />
Lofofora sur scène. Les Parisiens nous ont offert sur<br />
un plateau un show comme il ont l’habitude de nous en<br />
concocter : une énergie contagieuse pleine de sincérité<br />
avec la grande gueule de Reuno en sus, qui n’hésite<br />
pas à lancer quelques blagues au public quand bon lui<br />
semble. On les a retrouvés par la suite en presse pour<br />
une interview collective pleine de décontraction et de<br />
rigolade. Lofo, quoi !<br />
Même si nous n’avons<br />
pas pu nous délecter<br />
de tout leur show,<br />
problème de planning<br />
oblige, Deerhoof garde<br />
un standing de haute<br />
qualité sur les planches.<br />
Son batteur, Greg Saunier,<br />
est toujours un<br />
atout considérable<br />
pour faire pulser cette<br />
machine expé-noiserock<br />
et la voix de Satumi<br />
embellit à merveille<br />
ce package faussement<br />
pop abasourdissant<br />
de sa douceur et de sa<br />
cocasserie.<br />
déjà, probablement une excellente découverte pour les<br />
autres.<br />
Moment drôle de la journée<br />
: alors qu’on pensait<br />
avoir l’excellente Chelsea<br />
Wolfe face à nous<br />
sous la Jupiler Dance<br />
Hall, on se rend compte en partant qu’il s’agit en fait de<br />
Zola Jesus ! L’américaine nous lâche une prestation relativement<br />
mollassonne, une electro-pop mélodique mais<br />
lassante malgré la jolie voix qui l’habille. Le charisme<br />
n’est pas présent et la nana peine à convaincre. Dommage.<br />
Que dire du live de Tony Allen Review, exclu mondiale,<br />
si ce n’est que la musique n’était pas bien mar-<br />
46
quante, plate et<br />
easy-listening,<br />
malgré la présence<br />
d’Oxmo<br />
Puccino, rappeur<br />
qui était acclamé<br />
par la critique il y a<br />
quelques années.<br />
Ah oui, et le père<br />
Tony est pote avec<br />
un certain Damon<br />
Albarn (ils ont collaboré<br />
ensemble<br />
sur le tout aussi<br />
plat projet The<br />
Good, The Bad & The Queen...) qui est venu lui faire un<br />
coucou pour lui souhaiter bon anniversaire, le chanteur<br />
de Blur participant à deux titres pour l’occasion, certainement<br />
l’un des événements majeurs et le plus attendu<br />
du festival... On aurait aimé beaucoup plus mais ce cher<br />
Damon avait d’autres obligations le soir-même au Portugal.<br />
Mine de rien, c’est pratique un jet privé.<br />
Sunn O))) était l’une de nos attentes, une expérience<br />
cosmique à ne pas rater selon certains. Ce fut un fiasco,<br />
un gros foutage de gueule. En une demi-heure (on a<br />
réussi à tenir jusque-là...), il s’est produit grosso merdo<br />
la résonance d’une seule et même note fragile et plaintive<br />
par sa lancinante basse. Une mélasse sonore dont<br />
on ressort plein de questionnements, est-ce que le<br />
drone c’est mieux en live ou sur disque ? Est-ce qu’il faut<br />
prendre un stupéfiant pour faire passer la pilule ? Cela<br />
nous conforte à l’idée d’aller oublier ça devant un truc<br />
tout aussi extrême pour nos oreilles : du rap game avec<br />
Kaaris. Quitte à le faire, hein, autant être jusqu’au-boutiste.<br />
Le mec au corps musculeux de Sevran n’en avait<br />
déjà pas assez de la canicule de la journée qu’il en remet<br />
une couche et brûle, par ses punchlines assassines, la<br />
Boombox qui porte bien son nom pour le coup. Conquis<br />
? Pas surpris, en tout cas. On connaît IZI les codes de ce<br />
milieu mais ce qu’on savait moins, c’est que le rappeur a<br />
pas mal fans en Belgique.<br />
On est toujours un peu perplexe concernant un live de<br />
Fear Factory. Faut dire que la formation de cyber-métal<br />
a bien bougé, ce qui fait qu’on ne sait plus vraiment qui<br />
sera devant nous à chaque fois qu’ils jouent. On sait juste<br />
qu’ils vont sortir Genexus. C’est finalement deux titres<br />
qui sortiront du show («Photomech», «Soul hacker»),<br />
assez peu pour en avoir un aperçu. Burton a toujours<br />
un peu de mal à tenir la justesse de ses chants clairs.<br />
Set list de festival<br />
type avec majoritairement<br />
des<br />
vieux morceaux<br />
pour faire plaisir<br />
à tous.<br />
De mémoire, cela<br />
devait bien faire<br />
3-4 ans que les<br />
Landais de Gojira<br />
n’avaient pas<br />
fait de passage à<br />
Dour. Ils offriront<br />
un show comme<br />
d’habitude très<br />
habité, une set-list variée et puissante qui a ravi les<br />
nombreux présents. Après cette rasade de sons globalement<br />
agressifs, on profite de l’électro planant de Kid<br />
Francescoli pour se remettre de nos émotions. En plus,<br />
la blonde qui chante est très jolie, sa voix doucereuse<br />
et timide passe nickel sur l’instru. Non, franchement,<br />
ce couple marseillais nous a fait du bien. Contempler<br />
sereinement la mélodique drum & bass de DJ Fresh sur<br />
la Last Arena après une journée aussi chaude et éprouvante,<br />
c’est. chaud ! Dans tous les sens du terme. Son<br />
set part un peu dans tous les sens avec son MC, s’en est<br />
trop, nous nous éclipsons en pensant déjà à demain et<br />
en cochant quelques troubadours à ne pas louper.<br />
On a loupé : C2C, The Wombats, Joy Wellboy, Pendulum<br />
(DJ Set), Danny Brown, Cannibal Ox, CocoRosie, Anti-<br />
Flag, The Black Dahlia Murder, Dope D.O.D, Nina Kraviz,<br />
Great Mountain Fire.<br />
Jour 4 - SAMEDI 18 JUILLET<br />
C’est samedi, le début du week-end, les premiers signes<br />
de fatigue commencent sérieusement à se faire sentir<br />
dans tout le corps. Les festivaliers les plus téméraires<br />
sont devant la révélation hardcore Deez Nuts. Enfin, «révélation»,<br />
pas tant que ça en fait. Les Australiens pratiquent<br />
ce qu’une partie de la scène NYHC faisant dans<br />
les 90’s, soit une musique métal-punk hargneuse teintée<br />
de hip-hop. Gros riffs et énergie sont au programme,<br />
les fans sont au taquet. Changement de décor avec un<br />
groupe qu’on avait déjà vu à Dour en 2013 : BRNS. Le<br />
quatuor belge reste irrésistible sur les planches quand il<br />
dévoile son accrocheuse formule sonore : une pop-rock<br />
alambiquée, aérienne et expérimentale. On retiendra ce<br />
magique «My head is into you» qui nous a fait le plein<br />
TEXTE LIVE<br />
47
TEXTE LIVE<br />
sensationnel. A ne pas rater s’ils passent près de chez<br />
vous.<br />
On est passé devant le vétéran Horace Andy en formule<br />
reggae. On le préfère dans ses collaborations, plus ambitieuses<br />
artistiquement, tel que l’évident Mezzanine de<br />
Massive Attack. Cependant, il n’a pas démérité du tout,<br />
Sleepy reste Sleepy. Et comme on dit dans les milieux<br />
autorisés : «Grâce à Sleepy, j’ai trouvé une totale liberté<br />
d’esprit vers un nouvel âge réminiscent». Acid Baby<br />
Jesus était noté en priorité sur notre liste, longtemps<br />
à l’avance. Et pour cause, à l’image de leurs quelques<br />
disques, les Grecs nous livrent un set totalement psyché<br />
et sombrement décomplexé. Forcément, on adore.<br />
Direction la Cannibal Stage : trois ans après leur première<br />
inoubliable venue, les Suicide Silence font une<br />
harangue à la foule, l’invite à se lâcher sous les décibels<br />
métal du combo. Ca reste carré mais d’un niveau en-dessous<br />
par rapport à la première fois, effet de surprise en<br />
moins. Même remarque plus tard pour Agnostic Front<br />
dans un autre registre. Notez que c’était d’ailleurs foncièrement<br />
le contraire pour Terror, toujours sur la même<br />
scène quelques instants après. On les avait déjà vus à<br />
maintes reprises dans le passé, mais sur ce show-là, les<br />
ricains ont été impériaux.<br />
Entre temps, Mars Red Sky proposait un stoner-rock psyché<br />
plaisant sous le Labo : la voix de Julien, très éthéré<br />
et atypique pour le genre, ajoute un supplément de singularité<br />
à une formule qui a déjà fait ses preuves. Les<br />
titres s’enchaînent sans déplaisir et lassitude, ce qui<br />
n’est déjà pas si mal. Le groupe du guitariste des Libertines,<br />
Carl Barât And The Jackals a fait plutôt bonne impression<br />
avec son rock typique aux forts accents british.<br />
Les compositions, fleur bleue par-ci, frondeuses par-là,<br />
n’ont pas toujours très bonnes, mais on ne va non plus<br />
apprendre à un anglais à faire du rock. On se dirige sous<br />
le Labo pour apprécier la prestation de Laetitia Sheriff,<br />
et autant vous dire que c’est du tout bon. Quelle volupté<br />
dans son rock qui me rappelle à la fois celui de Shannon<br />
Wright et Serena Maneesh. Un très bon moment qui sera<br />
encore plus intense avec le Parisien Jessica93. La force<br />
tranquille, c’est seul au commande qu’il égrène d’ondes<br />
darkwave la populace venue le voir. La sauce a pris indéniablement,<br />
envoûtant davantage les premiers rangs.<br />
Son show impeccable et implacable nous laisse l’impression<br />
d’un type qui n’a plus rien à prouver en live à l’heure<br />
actuelle. «Vivement le prochain album !».<br />
Sur l’affiche, c’était la «star» du samedi. Lauryn Hill l’a<br />
joué : arrivée une bonne demi-heure de retard, relation<br />
froide avec le public de Dour après l’avoir confondu avec<br />
celui de Bruxelles, show qui met du temps à se mettre en<br />
place. C’en est trop ! Le festivalier de la plaine de la machine<br />
à feu n’a pas de temps à perdre avec ces conneries,<br />
on ratera visiblement «la meilleure partie» du<br />
show. Tant pis pour elle, Autechre joue en même temps,<br />
48
et ça c’est immanquable vu le peu de concert qu’ils font.<br />
Rob Brown et Sean Booth nous plongent dans un noir<br />
profond pour mieux nous immerger dans leur électro<br />
IDM expérimentale et déshumanisée. Un final parfait<br />
avant de penser à partir dans les bras de Morphée. Une<br />
réflexion assez fugace dès lors que la pluie commence à<br />
bien tomber sur Dour.<br />
On a loupé : Defeater, Hatebreed, Roni Size, The Drums,<br />
The Bloody Beetroots (DJ Set).<br />
Jour 5 - DIMANCHE 19 JUILLET<br />
C’est souvent avec tristesse que l’on aborde la dernière<br />
étape de notre séjour à Dour. Ce fut tellement intense<br />
que le dimanche rime avec indolence, tout en essayant<br />
quand même de profiter au maximum du temps qu’il<br />
nous reste et des festivités qui s’opèrent à l’intérieur.<br />
Pourtant le début fait mal aux oreilles. Nothing But<br />
Thieves fait fuir tant la voix aiguë et mielleuse de son<br />
chanteur est insupportable, et puis leur musique l’est<br />
tout autant. Mais pourquoi donc ces Anglais étaientils<br />
programmés ? Et sur la Cannibal Stage de surcroit<br />
? On passe ensuite à la nouvelle scène du Labo pour<br />
voir Spagguetta Orghasmmond, un groupe parodique<br />
belge œuvrant dans le ridicule<br />
assumé : musique kitchissime<br />
à souhait genre<br />
Frédéric François/Franck<br />
Mickaël mais version Jupiler<br />
et moustache foisonnante,<br />
costumes en adéquation<br />
tout droit sorti des placards<br />
de mamie mais une mamie<br />
qui a pris ses habitudes vestimentaires<br />
dans les clips<br />
de Village People et certains<br />
films de John Travolta...<br />
Rigolo deux titres et on est<br />
passé à autre chose...<br />
Le niveau est vite rattrapé<br />
par la formation qui suit, à<br />
savoir Raketkanon qui développe<br />
un univers propre<br />
confectionné sur disque par<br />
Sir Albini. Belle publicité pour<br />
les Gantois qui méritent<br />
que leur math-noise-rock<br />
bidouillée de bout en bout<br />
soient largement diffusé à la populace. Retour sur terre<br />
en passant devant le set de Tiken Jah Fakoly, présent<br />
sur la Last Arena avec ses nombreux musiciens. L’ivoirien<br />
est venu présenter son Dernier appel, un reggae<br />
pacificateur plein de conscience sociale et politique. Pas<br />
franchement fan depuis de nombreuses années, nous<br />
constatons simplement que Tiken a fait le job, comme<br />
d’habitude, devant un parterre de fans inconditionnels.<br />
Au final, ça passe toujours bien le reggae en festival en<br />
buvant un bon Jack.<br />
Ce qui a suivi est resté dans les bonnes mémoires de ce<br />
Dour 2015. GoGo Penguin ne se fait pas prier pour faire<br />
jaillir son arsenal jazzy avec une pointe électro pour le<br />
rendre, disons, un peu plus moderne. C’est très mélancolique,<br />
le soleil a du mal à sortir, pas de doute, on est<br />
vraiment dimanche. Et quoi de mieux que du post-punk<br />
pour se remettre de tout ça ? Eagulls fait forte impression<br />
avec son post-punk à la fois mélancolique et rageur.<br />
Le petit charisme du chanteur, ressemblant vaguement<br />
à un Macaulay Culkin version perfide Albion, y est pour<br />
beaucoup. La qualité de la musique entre bruine et lumière<br />
aussi hein...<br />
On avait entendu beaucoup de bien de Rejjie Snow<br />
(après enquête, aucun lien de parenté avec Jon Snow...<br />
désolé...), le petit prodige hip-hop made in Ireland. Et sa<br />
prestation ne fera pas mentir<br />
sa réputation à la limite de la<br />
hype : le bonhomme se démène<br />
comme un beau diable pour défendre<br />
sa version des faits. Le<br />
public de la Boombox est ravi,<br />
nous aussi.<br />
Encore une belle découverte<br />
électro avec Débruit. Le Français,<br />
roi de l’échantillonnage,<br />
nous fait voyager à travers ses<br />
trouvailles et son tricotage<br />
sonore, le tout savamment<br />
rythmée. Ça plaît au public qui<br />
semble avoir lui aussi trouver<br />
chaussure à son pied en ce<br />
dimanche après-midi qui file à<br />
une vitesse folle. Nous avions<br />
vu And So I Watch You From Afar<br />
au même endroit il y a deux<br />
ans. Cette fois-ci, le quatuor de<br />
Belfast compte un album de<br />
plus à son actif avec le récent<br />
Heirs. Pas de changements<br />
majeurs entre les deux shows, c’est toujours aussi<br />
TEXTE LIVE<br />
49
TEXTE<br />
50
51<br />
TEXTE
LIVE<br />
puissant, dansant mais également hypnagogique entre<br />
deux balafres données par ses rythmiques math-rock.<br />
Après, faut aimer le style, c’est comme tout.<br />
Les têtes d’affiche ne sont souvent pas ce qu’il y a de<br />
plus intéressant à Dour et ce sera le cas avec Santigold,<br />
La prestation ridicule de la soirée. Musique sans intérêt<br />
et interprétation au même niveau. Les autorités douriennes<br />
invoqueront même un soupçon de playback<br />
pour seconder la pseudo-diva, c’est un comble . Et la<br />
chanteuse arbore un nœud papillon jaune tout aussi<br />
ridicule. A jeter.<br />
Snoop Dogg à Dour ? Ca peut paraître bizarre quand<br />
on sait que le rappeur préfère en général la proximité<br />
des petites salles et des aftershows. C’est d’ailleurs là<br />
qu’il excelle l’ayant vu par le passé. Devant 20 000 personnes<br />
présentes devant la scène de la Last Arena, le<br />
Doggfather a joué 40 minutes au lieu d’1h15. Mauvais<br />
point, d’autant plus qu’il quitte la scène au milieu d’un<br />
morceau. Et la prestation ? Le minimum syndical avec<br />
un son qui n’arrive pas vraiment jusqu’à nos oreilles. Pas<br />
une escroquerie, mais presque malgré quelques oldies<br />
et des reprises de classiques (dont le «I love rock n’ roll<br />
de Joan Jett façon playback, youhou...). Ouais, si, une<br />
escroquerie en fait. La fin de festival rêvée, on l’a eu :<br />
contempler Jon Hopkins derrière ses machines pour un<br />
voyage électro interstellaire avec un super travail vidéo<br />
dont le passage du clip de la magistrale «Open eye signal».<br />
Un show béton tout en maîtrise propice à l’introspection.<br />
Que demande le peuple ?<br />
On a loupé : Chinese Man, Al’Tarba, Infected Mushroom,<br />
Clap! Clap!.<br />
> CONCLUSION<br />
Dour c’est (pêle-mêle) :<br />
- Dourrreeeeuh ! (T’as beau l’oublier, ça revient assez<br />
vite en général)<br />
- de la bière<br />
- de la bière..<br />
- de la bière... (changez de marque s’il vous plait !)<br />
- des pauses bières sur le parking parce que, c’est pas<br />
qu’on n’aime pas vos bières, mais bon... Si en fait, on<br />
ne les aime pas. Un comble au pays du houblon et des<br />
bières de dégustation<br />
- la galère pour retrouver ta bagnole sur le parking,<br />
même à deux<br />
- un marathon (à vérifier car j’ai pas pris mon podomètre)<br />
- un soin faciale 100% à la bière parce que la boue, ça<br />
rend la marche à pied avec un verre dans la main sacrément<br />
périlleuse. Soin visage à l’efficacité éprouvée par<br />
Ted.<br />
- du Jack (quand même, merde, on est à Dour)<br />
- des serveuses méga canons triées sur le volet (dédicace<br />
à celles du stand JD et celui de Jupi en presse)<br />
- des rencontres fortuites, intéressantes ou non<br />
- essayer parfois de communiquer avec des gens dans<br />
des langues incompréhensibles et indéfinies<br />
- des retrouvailles (un coucou spécial aux Lillois)<br />
- un gars de la sécu qui porte un t-shirt «quenelle épaulée»<br />
-> Antisémite !<br />
- des Flamandes...<br />
- des Flamands qui font semblant de ne pas comprendre<br />
le français<br />
52
- de la chaleur (un peu partout)<br />
- donc plein de transpiration (un peu partout)<br />
- de la boue (ben oui, quand même, c’est normal après 4<br />
jours de canicule)<br />
- des calemdours<br />
- «Tu cherches quelque chose ?»<br />
- «T’aurais pas une clope steup ?»<br />
- «T’aurais pas vu ma copine ? Elle est blonde aux yeux<br />
bleues.»<br />
- plein de courage pour aller aux toilettes (mais vraiment<br />
plein)<br />
- un transit intestinal capricieux<br />
- une passerelle d’accès qu’on aimerait ne plus jamais<br />
prendre<br />
- des sardines de tente qui ne se plantent pas<br />
- des huttes de sudation le matin (mais sans le rituel<br />
spirituel)<br />
- des vivres qui partent en couilles au bout de deux jours<br />
- du bricolage<br />
- des inventions stupéfiantes comme le lance-pierre<br />
géant mais avec des chaussures à la place<br />
- payer une douche 2 euros et attendre une heure<br />
- de la sauce aux frites<br />
- de l’eau du robinet qui t’oblige de manière foudroyante<br />
à retourner aux toilettes<br />
- des glissades inattendues, tu sais, juste après la fin<br />
des planches en sortant d’une tente...<br />
- ne pas trouver de cure-dent chez les «restaurateurs»<br />
- de l’herbe (du gazon quoi, pour se poser dessus) qui<br />
sent fort par moment<br />
- des siestes pas prévues du tout, mais pas du tout, du<br />
tout<br />
- des copains/copines qui ne viennent pas (qu’est-ce<br />
que vous foutez bordel !)<br />
- Dourman et l’homme des bois, les habitués qu’on<br />
croise à chaque fois<br />
- un dournoi de foot<br />
- «baiser, baiser, baiser, baaaaaaaiiiiiser !»<br />
- une attente pour arriver et une autre pour repartir,<br />
genre 3h. Cool !<br />
- des auto-stoppeurs agressifs qui s’agrippent à ta<br />
caisse en sortant du festival. Ben ouais, faut bien rentrer<br />
bordel !<br />
- surtout de la super musique et de belles découvertes à<br />
faire : ceci est un rappel pour ceux qui ne viennent pas<br />
pour ça<br />
Crédits Photos :<br />
Page 44 : Sunno © Mathieu Drouet<br />
Page 45 : Krokodil © Laurence Guenoun<br />
Page 46 : Le Klub des Loosers ©NicolasDebacker<br />
Page 47 : It it Anita © Romain S. Donadio<br />
Page 48 : KRS-One @ Laurence Guenoun<br />
Page 49 : Eagulls © Romain S. Donadio<br />
Page 50 : SBTRKT © Laurence Guenoun<br />
Page 52 : Snoop-Dogg © DR<br />
Merci à la Dour Team<br />
http://www.dourfestival.eu<br />
LIVE<br />
Tu viens avec nous l’année prochaine ?<br />
Ted & David<br />
53
LES DISQUES DU MOMENT<br />
WARSAWWASRAW<br />
Sensitizer (Music fear Satan)<br />
pour te procurer Sensitizer, «Hells angles» devrait parachever<br />
le boulot de séduction et te convaincre de la maîtrise<br />
du groupe quand il s’agit de doser subtilement un<br />
album qui pourrait assez vite être redondant.<br />
Bref, si t’es en manque de sensation forte, Sensitizer<br />
remplira parfaitement son office. WARSAWWASRAW a<br />
beau avoir perdu quelques membres dans son histo<br />
rique, cela ne l’empêche pas de sonner aussi heavy<br />
qu’une armée de 1000 musiciens avides de musique<br />
carnassière.<br />
David<br />
Derrière ce violent palindrome WARSAWWASRAW se<br />
cache un duo parisien (guitare/batterie) tout aussi<br />
violent. Sans écouter le disque, la parution de l’album<br />
sur Three One G (Zeus !, Rextox...), le label de Justin<br />
Pearson de The Locust indique déjà la correction punkhardcore-noise<br />
qui va pointer. Et le nombre de titres<br />
ainsi que la durée moyenne des pistes en question,<br />
entre 30 secondes et deux minutes, semble afficher un<br />
disque cinglant de chez cinglant. Et ce sera foutrement<br />
cinglant.<br />
Le premier titre, «Nipplesin», fait l’effet d’un véritable<br />
coup de poing dans la tronche : dynamique d’enfer, le<br />
propos est pas très loin d’un Nostromo qui aurait bouffé<br />
du lion. Oui, c’est possible. Les pistes s’enchaînent,<br />
se ressemblent en mode monomaniaque «exutwar»,<br />
sans pour autant lasser. Grâce à des pistes où le groupe<br />
s’éloigne de cette ligne éditoriale de la terre brûlée.<br />
Enfin pas trop quand même, faut pas déconner. «Hells<br />
angles» fait figure de sommet avec ses 8 minutes qui<br />
emmènent le groupe sur le terrain d’un Cortez : il commence<br />
comme du WARSAWWASRAW pur-jus puis le tempo<br />
subit un sévère coup de frein, le duo se fait épique<br />
et tremblement post-harcdore, le riff ralentit et un chant<br />
clair arraché apparaît... S’il fallait un argument massue<br />
54
T.A.N.K<br />
des instruments qui se complètent parfaitement, des<br />
chants maîtrisés dans chaque registre, vraiment, c’est<br />
du sacrément bon boulot à tous les niveaux. Et pour<br />
un tel résultat, il y a forcément derrière un énorme travail<br />
préparatoire pour que chaque plan, chaque frappe,<br />
chaque note soit à sa place. Bravo donc au combo pour<br />
avoir réussi à ciseler un tel album. Un boulot d’autant<br />
plus complexe que Björn « Speed » Strid de Soilwork<br />
(dont ils sont fans) à répondu favorablement à leur invitation,<br />
il a donc fallu penser «Blood relation» avec un<br />
membre de plus, et pas des moindres... C’est réussi tout<br />
comme l’apparition de Jessy Christ (chanteuse qu’on a<br />
pu entendre chez Herrschaft) sur «The edge of time».<br />
Des titres qu’on sort de la track-list à contre-coeur tant<br />
l’ensemble est cohérent et forme un tout à prendre forcément<br />
dans son intégralité.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Malédiction ? On peut se poser la question... Parce que<br />
juste après avoir enregistré Spasms of upheaval (leur<br />
deuxième album qui, va savoir pourquoi, a évité la case<br />
W-Fenec) T.A.N.K se séparait de son guitariste Eddy et le<br />
remplaçait par Nils (de Lyr Drowning) et deux ans plus<br />
tard, juste après avoir enregistré Symbiosis, T.A.N.K annonçait<br />
le départ de son guitariste de toujours Symheris<br />
(remplacé depuis par Charly). Certes, le groupe sait<br />
désormais réagir et assurer des concerts sans tous les<br />
acteurs de la composition mais on peut connaître situations<br />
plus simples pour sortir et promouvoir un album.<br />
Surtout que si celui-ci est aussi bon, c’est en bonne<br />
partie grâce aux guitares... Au passage, note combien je<br />
reste circonspect au vu du nombre de zicos qui quittent<br />
leur groupe juste après l’enregistrement, comme si ils<br />
ne savaient pas avant que ça ne marcherait plus (mais<br />
que peut-être il y a un peu d’oseille à se faire ?), ce n’est<br />
pas forcément le cas présent mais je tenais à partager<br />
ce sentiment désagréable.<br />
Là, on a du mal à penser que la symbiose n’était pas<br />
totale car le groupe apparaît encore uni et capable<br />
d’envoyer dans tous les sens, du plus clair au plus<br />
obscur, du plus rapide au plus lourd, du plus saturé au<br />
plus tranchant, avec des samples, des parties épurées,<br />
Bravo également à David Potvin (guitariste de One-<br />
Way Mirror) qui réalise une grosse production (avec<br />
quelques parties enregistrées par Symheris) mais aussi<br />
un mixage et un mastering de grande qualité (et en plus<br />
il fait des choeurs !), le tout chez Lyzanxia (au Dome<br />
studio donc), studio bien connu d’Abysse, Beyond The<br />
Styx, Holding Sand) où Think of A New Kind a désormais<br />
ses habitudes. Bravo aussi à Rusalkadesign qui réalise<br />
un très bel artwork dans le style de ceux du Strychneen<br />
studio (Stomb, Hacride, Noein, Trepalium, Straight on<br />
Target...) même si l’image choisit pour être sur la couverture<br />
de l’album n’est pas, à mon goût, la plus réussie<br />
de la série.<br />
Avec cette nouvelle oeuvre métallique résolument<br />
moderne, T.A.N.K enfonce le clou encore plus profondément,<br />
on leur souhaite juste de pouvoir maintenir un tel<br />
niveau de créativité et d’exigence artistique pour continuer<br />
leur aventure perpétuellement relancée... à moins<br />
de briser la malédiction ?<br />
Oli<br />
55
LES DISQUES DU MOMENT<br />
ACOD<br />
II the Maelstrom (Autoproduction)<br />
plus sombres (avec des parties growlées du plus bel<br />
effet) comme les plus aériens (grâce à quelques petites<br />
mélodies bien senties). Pour varier les ambiances, ACOD<br />
est allé chercher du côté de quelques instrumentations<br />
au moment d’arranger ses titres, comme ce violon sur<br />
«Cold», ou a demandé à leur producteur de participer à<br />
«Unleash the fools», il se trouve que l’homme derrière<br />
les manettes est Shawter (Dagoba), c’était donc assez<br />
«facile» de l’intégrer dans ce titre. Ce n’était peut-être<br />
pas la même mayonnaise pour Bjorn Strid (Soilwork) qui<br />
apporte un peu plus de relief à «Ghost memories» avec<br />
des chants alors très tranchés qui se répondent sur une<br />
rythmique lourde et un peu simpliste en apparences.<br />
Le résultat risque de ne pas plaire à tout le monde tant<br />
ce morceau dévie un peu de la ligne tracée le reste du<br />
temps par ACOD.<br />
Avec son entrée en matière gojiresque, ACOD se rappelle<br />
à notre bon (et frais) souvenir puisque peu de temps<br />
nous sépare de l’EP qui avait titillé nos oreilles voilà<br />
quelques mois (Another path...). Si tu ne te l’étais pas<br />
procuré, rien de grave puisque l’intégralité de ses titres<br />
se retrouvent ici, l’ordre n’est pas le même mais leur<br />
intégration avec les autres morceaux est bien réussie,<br />
l’excellente qualité des 5 titres s’étend et s’entend sur<br />
les 13 d’II the Maelstrom.<br />
J’ai déjà pas mal de bien d’Another path..., tu peux aller<br />
relire l’article et il va falloir ajouter quelques bonnes<br />
choses encore. Déjà, côté artwork, le groupe a progressé,<br />
le choix est moins malheureux même si on est encore<br />
très loin de la qualité des pochettes du moment (surtout<br />
dans le death et le métal qui tabasse où certains rivalisent<br />
de classe). Comme quoi, avoir un artiste de renom<br />
(Vasco a bossé pour Keep of Kalessin, Slayer, Dark Funeral,<br />
Dimmu Borgir...) ne fait pas tout, m’enfin, chacun<br />
ses goûts. Côté musique, et encore une fois, c’est ce qui<br />
prime largement sur tout le reste, faut vraiment être du<br />
côté des éternels grincheux pour trouver à redire sur cet<br />
album qui allie puissance et efficacité, savamment dosé<br />
pour être aussi homogène que diversifié. Le groupe en<br />
lui-même est capable de jouer dans les registres les<br />
Amateur de death ouvert, il est temps de plonger dans<br />
le Maelstrom des Marseillais qui sont aujourd’hui au<br />
meilleur de leur forme. C’était attendu mais ce troisième<br />
album d’ACOD est bel et bien l’une des sensations métal<br />
de l’année. A savourer.<br />
Oli<br />
56
AND SO I WATCH YOU FROM AFAR<br />
Heirs (Sargent House / Differ-Ant)<br />
mélodiquement la composition. Mais le groupe doit également<br />
se prémunir d’un excès d’orgueil sur ce point là,<br />
car au fil de la lecture du disque, les vocalises à base de<br />
«oh oh, oh oh oh, oh oh» peuvent vite devenir un cauchemar<br />
pour l’auditeur. Ce n’est évidemment pas le cas<br />
de tous les morceaux, même si on ressent cette facilité<br />
à toujours vouloir meubler de voix des parties de pistes<br />
qui n’en ont pas toujours besoin. Je pense par exemple à<br />
«Animal ghosts», qui en plus de cela intègre des bouts<br />
de trompettes qui n’apportent vraiment pas grand chose<br />
au morceau.<br />
LES DISQUES DU MOMENT<br />
Petite polyphonie introductive, le tempo féroce se lance,<br />
les guitares s’entrelacent, les chœurs suivent, silence...<br />
La machine And So I Watch You From Afar est lancée<br />
avec «Run home», morceau introductif, autant énergique<br />
que planant. Ce titre sous tension marque l’empreinte<br />
d’un groupe déjà bien installé confortablement<br />
sur le territoire des musiques rock qui se veulent alambiquées,<br />
tout en dévoilant ses côtés chaleureux et un brin<br />
fédérateurs. Heirs, soit les héritiers en VF, est la dernière<br />
salve sonore des gars de Belfast. Un cocktail détonant<br />
de math-rock et de post-rock (pour faire court), une formule<br />
modulable faussement pop au sein de laquelle le<br />
groupe a déjà fait ses preuves, notamment avec All hail<br />
bright futures, dont la filiation pour le coup est plus que<br />
stupéfiante.<br />
La volonté d’And So I Watch You From Afar de rendre ce<br />
Heirs le plus éclatant possible n’est pas un mal en soit.<br />
On aime son brin de folie totalement domptée, ses moments<br />
de quiétude tutoyant les cieux et sa «coolitude»<br />
assumée, mais certains morceaux un peu longs, dont<br />
«Heirs», fonctionnent beaucoup plus sur scène que sur<br />
disque. «Tryer, you», titre qui suit et sonne le glas d’une<br />
manière tendant vers quelque chose d’épique et censé<br />
être le bouquet final éblouissant comme dans un feu<br />
d’artifice, n’apporte déjà plus grand chose à ce stade de<br />
l’écoute car le cadeau est déjà ouvert depuis plusieurs<br />
dizaines de minutes. Peut-être aurait-il fallu revoir l’ordre<br />
d’apparition des chansons ? Dommage, mais cela n’enlève<br />
en rien la qualité relativement excellente de ce quatrième<br />
album.<br />
Ted<br />
Les Nord-Irlandais sont toujours habiles quand il s’agit<br />
de rendre leur musique facile à l’écoute sans que leur<br />
maîtrise technique en devienne indigeste et prenne<br />
le pas sur le reste (un problème récurrent de pas mal<br />
de formations de nos jours). Bien au contraire, elle est<br />
même de plus en plus atténuée par un élément important<br />
dans l’évolution du quatuor : la présence du chant.<br />
«These secret kings I know» en est un bel exemple, tout<br />
en chœurs contrôlés, ce titre en sort bonifié car il sert<br />
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TEXTE LIVE<br />
XTREME FEST 2015<br />
Décibel, canicule & explosion de nuques<br />
Certains migrent en juillettiste vers le sud pour se dorer la cacahuète comme un beignet des plages saturé de<br />
graisse, alors que d’autres vont se fracturer au plus géant et extrême festival de tout le grand sud : l’Xtreme Fest.<br />
L’année d’avant le festival avait profané les terres<br />
épiscopales d’Albi, pour sa troisième édition il revient<br />
comme lors de sa première dans l’enceinte du site de<br />
Cap Découverte, ancien bassin minier devenu base<br />
de loisir avec plage et lac, skate park, et encore plus<br />
encore... Pour ce jeune festival à l’ambiance zouké et à<br />
la convivialité sudiste, il dispose d’une salle de concert<br />
climatisée en plus d’une scène extérieure, l’ensemble<br />
étant à taille humaine pour une union oldschool entre<br />
les groupes et un public de furies et de furieux venus se<br />
récurer les cages à miel, et se tuméfier les genoux avec<br />
Death, HxC et Punk.<br />
JOUR 1 - Wake the dead<br />
Le festival est à trois quart d’heures de chez moi, elle est<br />
pas belle la life quand même hein ?<br />
Ok vous êtes prêt ? Extra-balle d’entrée car c’est le trio<br />
Sticky Boys qui a fait le baptême du feu sur la scène extérieure<br />
de la EMP Stage. J’ai déjà vu ce groupe à plusieurs<br />
reprises, le seul changement pour moi réside dans le fait<br />
qu’il a dû jouer face au soleil. Les gars luisaient en deux<br />
minutes tellement ils suaient, mais ils ont labouré le pit<br />
avec ce bon vieux hard rock des familles qui fait remuer<br />
le corps, même quand celui-ci ne ventile plus assez. Le<br />
groupe a dégagé un show millimétré comme lors de<br />
son passage au Hellfest de cette année. C’est garanti en<br />
testostérone et autres riffs piqués à AC/DC, avec la vitalité<br />
et les riffs d’Airbourne. Oui c’est vrai si ce n’est pas<br />
original à cause du duplicata entendu avec les groupes<br />
précités, mais ça le fait direct. Car franchement cela fait<br />
un bien fou dans un festival où tu sais qu’il va te tonner<br />
du death et du punk HxC sans discontinue.<br />
Envers de décor à la X Stage, la grande salle intérieure,<br />
avec le groupe Cobra.<br />
Ce groupe a inventé le hard rock alternatif sous le courant<br />
subversif et corrosif du mensuel Hara Kiri (ancêtre<br />
de Charlie Hebdo). Dans le milieu underground du rock<br />
moderne, la hype a fait sortir le venin de Cobra par une<br />
éjaculation malicieuse de folie urbaine. De la sorte que<br />
l’esbroufe côtoie la provocation sans encombre. Originaires<br />
des Alpes Maritimes, lieu de villégiature people<br />
par excellence et de fonds de pension pour retraités<br />
confits, ces punks rappeurs apparaissent à contresens<br />
en tant que géniaux affabulateurs ou peut-être même<br />
en prétentieux connards opportunistes. Nul ne le sait, et<br />
il ne vaut mieux peut-être pas le savoir pour ne pas en<br />
briser la magie noire.<br />
Pourtant, au firmament des joies providentielles que la<br />
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navigation de plaisance apporte aux jeunes loup de la<br />
finance pendant le jeter de l’ancre dans une crique du<br />
sud-est, avec la tentation de forniquer avec des eurasiennes<br />
mineures, Cobra en prolonge la frustration par<br />
des lyrics outranciers, avec un heavy punk caustique<br />
comme bande-son. Car aussi saugrenu que cela puisse<br />
paraître, il y a des mélodies chez ce groupe, et il ne<br />
faut pas s’arrêter comme un con devant son incitation<br />
au chaos, à la crudité de la misère sociale sous l’égide<br />
d’une rhétorique réactionnaire.<br />
Avec l’attitude hardcore d’un Stupeflip crew sous le fer<br />
heavy de Trust, le groupe a posé son happening de NTM<br />
sous coke, en tapant du pied avec les rangers des Béruriers<br />
Noirs. Ça fonctionnait parce que le groupe a joué le<br />
jeu à fond, avec son jeu de dupe, son jeu de pute, sans<br />
jamais usurper la société du spectacle.<br />
Comme toujours, plus c’est gros, plus ça passe, et ce<br />
groupe est aussi énorme qu’un Congolais dans une Tonkinoise.<br />
Cobra a du venin, son set fut donc mortel, un<br />
très bon show !<br />
Les suivants m’ont retourné une fois encore, et ce pour<br />
la seconde fois d’affilée et en un mois d’intervalle. Birds<br />
In Row est capable avec son rock bruitiste d’une dramatisation<br />
de certains éléments profonds, provoquant la<br />
caresse d’un coup avec le choc de leur noisy abrasive/<br />
post-hardcore. Jouant à l’extérieur et plein sud/sun, le<br />
jeune trio s’est défoncé à rendre avec alternance une<br />
maturité musicale explosive, brûlante, ainsi qu’une<br />
part d’ombre mystérieuse à leur excellent set. Je vous<br />
conseille leur dernier album You, me and the violence<br />
tout aussi révélateur.<br />
C’est donc avec la moiteur des corps baignant dans leur<br />
jus de sueur, que l’on est rentré dans la salle climatisée<br />
pour se tempérer, sauf que dans les arènes du défoulement<br />
nous y attendait Black Bomb A. Par conséquent le<br />
combo a électrocuté le public par des appels à l’émeute,<br />
oui carrément. Et ceci jusqu’au sacrifice de sa santé<br />
physique et mentale. Leur métalcore a fourni de quoi<br />
enhardir les hardcoreux jamais à bout de souffle, même<br />
après une prestation agressive, qu’à la fin de cette<br />
joyeuse lutte avec Black Bomb A, les jeunes trépignaient<br />
encore d’impatience de se refoutre des mornifles en<br />
bombant leur torse herculéen pour certains, et encore<br />
trop chétif pour résister à l’étau des autres. Mais qu’importe,<br />
dehors sur la EMP Stage, Strung Out a fait au punk<br />
mélodique ce que Strung Out exécute en haranguant la<br />
foule en répétition, et avec un chant faux s’il vous plaît.<br />
Le groupe a fait de son mieux pour réveiller la génération<br />
mercurochrome, mais leur punk à roulette n’a pas bousculé<br />
les souvenirs. Ce style étant jugé trop adolescent<br />
pour les métalleux très certainement.<br />
Ce qui ne fut pas le cas pour les prêcheurs sanguinaires<br />
de Carniflex qui avaient posé leur hameçon respectif sur<br />
la X Stage, et surtout sur la première préoccupation des<br />
pêcheurs de l’extrême : la peur d’affronter un groupe de<br />
cet acabit. Car ce groupe de death moderne, à la technicité<br />
abrutissante, a vilipendé sa musique à un croc<br />
de boucher, avec l’apport de vociférations inhumaines,<br />
et un tourbillon de notes deathaliques terriblement efficaces<br />
sur des rythmiques froides. Les gars n’ont pas<br />
fait semblant pour abattre un set monolithique et exténuant.<br />
Je ne sais pas si vous le savez mais la calvitie du quadragénaire<br />
se repère moins bien dans un pit dévolu aux<br />
groupes de HxC. Là-bas, la coupe militaire y est légion<br />
et n’est pas étrangère à la confrontation d’une danse<br />
belliqueuse. C’est devant un bataillon de cranes courts<br />
que Comeback Kid est revenu mettre sa surdose de HxC<br />
mélo, et a soumis même les chevelus à sa démence sonique.<br />
Avec la main sur le cœur et le poing levé, le groupe<br />
a rasséréné, offrant pour sa seconde venu à l’Xtreme<br />
Fest un concert maousse costaud. Aussi puissant que la<br />
dimension de sa renommée en sculpte l’effervescence.<br />
Tu peux les voir 200 fois, c’est ce genre de combo à la<br />
Sick Of It All qui te met à la régulière une claque monumentale<br />
à chaque fois.<br />
Les quadriceps et les dorsaux ayant bien travaillé, nous<br />
étions repus, baignant dans la béatitude d’après l’effort.<br />
Je me suis confortablement assis dans les hauteurs de<br />
la grande salle, et oui c’est magnifique il y a des fauteuils<br />
comme au cinoche.<br />
Alors que de faux amplis tapissaient le fond de scène,<br />
présageant le fait que l’on allait avoir un volume sonore<br />
aussi importante que la tête dans un pot échappement<br />
d’un avion A380, la foule en frissonnait d’excitation, pendant<br />
que je ricanais bêtement à l’avance du set de Black<br />
Label Society.<br />
L’entrée de scène fut aussi pathétique que l’ascension<br />
du Tourmalet par un cadre supérieur en trottinette. Le<br />
leader de la bande, le sieur Zakk Wylde s’est pointé avec<br />
la barbe de Dusty Hill (MDR si j’avais écris Frank Beard<br />
quand même nan ?). Bon dès le début sa guitare pointait<br />
mais à côté du cochonnet, là c’est con ! N’empêche<br />
pas que le salaud n’arrêtait pas de se masturber avec,<br />
c’était dégoûtant en plus qu’insupportable. Du si bécare<br />
en passant par les gammes ioniens, l’infatigable Wylde<br />
fut exténuant de supposer que son solo interminable<br />
TEXTE LIVE<br />
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TEXTE LIVE<br />
était le nec plus ultra de la musique, surtout dans un<br />
festival de punk/HxC/métAl. Le problème de son hard<br />
rock-grungy-indus c’est qu’il a mis de côté le côté punk<br />
pour épouser les attitudes princières des divas consensuelles<br />
des stades. Contre toute attente Zakk ne nous a<br />
malheureusement pas sorti sa double guitare, on aurait<br />
au moins pu rire. Finalement Black Label Society a produit<br />
un set grand public pour divertir les fans des émissions<br />
Pimp My Ride et Turbo, c’était donc chiant pour les<br />
fans de 30 millions d’amis.<br />
Le dernier set de la soirée fut interprété par les espagnols<br />
de Toundra. Je ne connaissais pas du tout ce<br />
groupe, donc en toute simplicité je me suis recueilli à<br />
JOUR 2 - Ex tenebris lux<br />
Pour cette deuxième journée, il faisait toujours aussi<br />
chaud, et comme l’Xtreme Fest a réduit l’espace entre la<br />
scène et le public cette année, il y a juste une barrière de<br />
sécurité d’à peine un mètre de large, je vous laisse imaginer<br />
le côté oldschool et l’interaction évidente qu’il peut<br />
y avoir comme résonance entre les groupes et le public.<br />
Du coup en une demi-heure à peine, les basques d’Adrenalized<br />
ont toré leur punk rock mélodique en plantant<br />
les banderilles de Strike Anywhere, No Fun At All, Less<br />
Than Jake, jusqu’à ce que d’un riff de muleta, et la mort<br />
dans l’âme, le groupe quitte l’arène en nage. Le groupe<br />
pourtant habitué de la canicule espagnole a joué face<br />
contre face devant un public atrophié par<br />
le soleil, et la chaleur était accablante, mais<br />
elle n’aura réduit en rien leur énergique set.<br />
Une partie du public profane a découvert<br />
les gestuelles mélodiques et la hardiesse<br />
produite par les ibères. Les connaisseurs<br />
plus sensibles à la beauté des passes techniques<br />
du combo, qu’au combat dans le pit,<br />
ont apprécié la valeureuse lutte du groupe,<br />
notamment par sa technique et sa rapidité<br />
d’exécution. Adrenalized en matador punk<br />
assénera tous ses coups avec passion, par<br />
de multiples estocades portées dans les<br />
règles de l’art de la rue et des rampes de<br />
sk8.<br />
leur joli climat délétère, à cette mélancolie douceâtre<br />
pour une musique instrumentale agitant les sens, afin<br />
d’extrapoler vers une explosion de quiétude post stoner.<br />
Au point d’y être complètement réceptif, comme attiré et<br />
bercé par la même délicatesse nacrée des Allemands de<br />
Colour Haze, des spasmes évanescents des Ecossais de<br />
Mogwaï, et des consonances progressistes de Tool. Très<br />
agréablement surpris au point d’en être ému, la magie<br />
a opéré sur un public en quasi transe, où la reconnaissance<br />
n’était plus fictive mais réelle. Le groupe en ressentait<br />
l’admiration en détendant sa beauté claire obscure,<br />
dans le spectre envoûtant de sa musique céleste.<br />
Plaisir d’offrir joie de recevoir, Toundra a su mettre en<br />
évidence des qualités d’interprétation dans ses compositions<br />
instrumentales de la plus belle des façons.<br />
Le festivalier s’est donc retiré vers son couchage avec<br />
les yeux couvert d’une poussière de nuit d’étoiles, et la<br />
caresse musicale de Toundra comme élixir de rêver en<br />
toute aise.<br />
Ce qui va à l’inverse des dadaïstes de Psykup, qui ont<br />
fluidifié les cortex avec de quoi se badigeonner la tête<br />
pour les vingts prochaines années dans un asile. C’était<br />
aussi dément que génialement absurde, ce groupe<br />
n’ayant aucun comparatif tant il décloisonne de tout<br />
style, car ce groupe indéfinissable est possédé par et<br />
pour un style unique qu’il nomme ‘’d’autruche-core»???<br />
(entre Alice In Chains et Faith No More versus Primus),<br />
et surtout qu’il intensifie en live de la plus exorbitante<br />
manière.<br />
Sans compromission, on est retourné dans la bouffée<br />
de chaleur extérieur où D.R.I a fait ce que Dirty Rotten<br />
Imbeciles exécute en trois temps, trois mouvements<br />
avec son punk thrashy, et la même setlist que depuis<br />
trois plombes. C’était bien fun, les coudes ont valdingué,<br />
les pieds sont montés jusqu’au menton, les torgnolles<br />
ont sifflé, les filles ont éclaté les mâles du pit, et tout le<br />
monde a fini trempé comme des serpillières, avec une<br />
température corporelle de 42°Celsius.<br />
D.R.I c’est la base du crossover en matière de sk8board<br />
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pour moi. Tu ne peux pas prétendre te fracasser la clavicule<br />
sur du David Guetta, ni même du Slipknot. Il n’y a<br />
que D.R.I qui te fournira l’adrénaline adéquate pour te relever<br />
après, en affichant le sourire béa de circonstance<br />
une fois que tu seras plâtré au urgence.<br />
Fin du set, la foule compacte se déplaçait comme une<br />
houle d’une scène à l’autre. L’individu n’était plus. Même<br />
celui qui pensait être au dessus des autres n’était rien.<br />
Comme ce jeune mâle bombant son torse par pure animalité,<br />
dont le visage émacié de rigueur par le duvet d’un<br />
bouc ne masquait pas le désarroi de suivre le troupeau<br />
comme une simple chèvre. Il retrouvera son audace devant<br />
le set efficace d’Iron Reagan. Le combo a permis à<br />
de nombreux moshers de se péter une rupture des vertèbres<br />
dans un pit saturé de secousses dansantes.<br />
Pour rappel, le gentleman Gui De Champi avait le zizi<br />
tout dur quand il les a vus au Hellfest cette année. Pour<br />
ma part je mets un bémol a ce all star band (avec des<br />
membres de Municipal Waste et de Darkest Hour), parce<br />
que la resucée de leur tambouille musicale est plus<br />
que redondante. Donc ok les gars jouent très bien, ils<br />
sont dans le truc à donf, mais ils ne font rien avancer<br />
du tout. Il manque le petit truc en plus pour se démarquer.<br />
Là c’est calibré, filtré pour demeurer figé dans une<br />
esthétique, des codes dévolus en un style bien distinct.<br />
Niveau loyauté ils sont à 100%, et niveau intégrité je<br />
me pose encore la question, même si la finalité c’est<br />
que l’on en a rien à foutre, le tout c’est que Iron Reagan<br />
balance sa purée de riffs comme D.R.I l’effectue depuis<br />
ses débuts, et que cela ne va pas plus loin.<br />
Après cette douche, oui ça commence à sentir salement<br />
la chaussette du vestiaire à force de bouger dans tous<br />
les sens, je me pose de façon à admirer le prochain carnage.<br />
Pour faire suite à l’abattoir du Hellfest, c’était un<br />
camp d’extermination que nous a conté les charcutiers<br />
de Floride de Cannibal Corpse. Leur set fut à la hauteur<br />
de leur charnier : aussi terrifiant que gigantesque. Je<br />
vous passe les détails techniques puisque la finalité<br />
c’est que Cannibal a dévoré tout cru. Si tu ne captes rien<br />
à cette débauche d’hémoglobine sonore, c’est que tu es<br />
transsexuel et apprécie plus la musique de Kanye West.<br />
Il faut de tout pour faire un monde, celui de Cannibal<br />
Corpse est à base de tripes chaudes, de vésicules<br />
biliaires, et de tout un tas d’abats soniques salement<br />
jouissif pour obtenir une descende d’organes chez les<br />
filles, et un simple malaise vagal pour les durs à cuire.<br />
Forcément il y a de la perversion à apprécier un tel band,<br />
je ne vais pas vous le cacher.<br />
Comme par un fait paradoxal, la suite de la programmation<br />
m’a fait froid dans le dos, avec la danse des canards<br />
de The Exploited, qui s’est déroulée comme convenu<br />
pour les punks à chien, puisqu’ils n’étaient pas là, étant<br />
TEXTE<br />
Bon sinon, j’ai à peine 7 Seconds pour vous dire que<br />
c’était de la dynamite. Groupe culte de hardcore des<br />
80’s le groupe a joué rang serré autour de son aura, de<br />
son culte, de son intégrité, de sa loyauté en un style musical,<br />
LE HXC, à une culture de l’esprit et une discipline<br />
du corps, et tout ceci pour le bonheur des connaisseurs<br />
de l’Xtreme Fest.<br />
Le combo a enchaîné les hits comme Rocky a sulfaté<br />
ses coups de poings sur Apollo Creed dans Rocky 2. Avec<br />
une maturité de plus de trente ans d’age, 7 Seconds a<br />
secoué les puces sans apparaître comme de vieux croûtons.<br />
D’autant plus que si tu veux mettre la jeunesse<br />
dans la poche, il te suffit de leur jouer la cover «If the kids<br />
are united» de Sham 69 et et le tour est joué pour fédérer<br />
un max. C’est ce qu’a accompli le groupe, et pour les<br />
vieux il leur a balancé le hit de Nena « 99 luftballons». 7<br />
Seconds a joué vite, fort comme un bon vieux HxC qui te<br />
regonfle tes vies et ton énergie pour poursuivre l’aventure<br />
de la grande life, trop bon dude !<br />
toujours en train d’essayer de glaner un truc à boire<br />
autour de leur toilette sèche qui leur sert de moyen de<br />
locomotion. Du coup on s’est retrouvés comme des cons<br />
a tapoté du pied sur les titres ras de caniveau des Ecos-<br />
61
TEXTE LIVE<br />
sais, parce que nous sommes des gens polis et bien<br />
éduqués. Toutefois, on doit à cette médiocrité musicale<br />
une rage que le punk de 77 s’en souvient comme de<br />
sa première vérole. Car sur l’empreinte de cette fougue<br />
anarchiste, allant à contre-sens de son époque pour en<br />
révolutionner à tout jamais la culture populaire, de nombreux<br />
groupes ont bâtis leur fondation dessus, comme<br />
les millionnaires de Metallica par exemple.<br />
Voilà après cela je<br />
pensais avoir passer<br />
le pire, mais non, est<br />
arrivé Ensiferum,<br />
sorte de Boney M du<br />
métOl versus pagan<br />
épique. Le groupe a<br />
fait appel à l’époque<br />
de l’inquisition, où<br />
la torture ne se limitait<br />
pas à écouter<br />
l’album de Justin<br />
Bieber en boucle,<br />
puisque nous avons<br />
eu droit aux instruments<br />
de tortures<br />
médiévales (biniou,<br />
etc...) que le groupe<br />
a cru utile d’en imposer<br />
la tourmente.<br />
Mais comme d’habitude<br />
avec ce style<br />
festif, les suppliciés<br />
étaient heureux<br />
comme tout d’être<br />
mutilés de la sorte.<br />
Chemin faisant, un orage s’est abattu. Ah ! et bien pour<br />
une fois merci les divinités de me comprendre enfin,<br />
attends quoi c’est vrai faut pas déconner, Ensiferum,<br />
merdeeeeeeeeee. Par contre 7 Weeks n’a pas pu jouer<br />
dehors, et a été tout bonnement annulé, gâchant la fin<br />
de soirée.<br />
Jour 3 : Skate to Hell<br />
Dernier jour pour un dimanche de chaleur, et c’est sur la<br />
scène gratuite à l’extérieur du festival que le groupe Forus<br />
a déversé son punk mélodique à la vitesse du Millenium<br />
Falcon du contrebandier Han Solo et de son second<br />
Chewbacca. On s’est retrouvés propulsés avec Strike<br />
Anywhere, Face to Face et consorts dans la stratosphère<br />
de tapping, et d’une technicité à quadruple énergie. Un<br />
très bon set qui aurait largement mérité de se retrouver<br />
sur une scène plus appropriée vu les qualités du band.<br />
Surtout qu’après c’est Get Dead sur la EMP Stage en<br />
extérieur qui s’est contenté d’un punk’n’roll convivial,<br />
avec tout le fun de la Californie tout de même. C’était<br />
sympathique mais pas aussi transcendant que Forus<br />
par exemple.<br />
Suite à l’annulation de<br />
Rise Of The Northstar<br />
c’est le groupe Ta Gueule<br />
qui a obtenu une promotion<br />
canapé en passant<br />
sur la grande scène. Ta<br />
Gueule a fermé le clapet<br />
fécal à tout le monde<br />
à base d’un assourdissant<br />
punk heavy-röck<br />
bien grassouillet, d’une<br />
surdose d’humour caustique<br />
et une très bonne<br />
dose de foutre sonique,<br />
pendant tout leur show.<br />
Pointant un hommage<br />
appuyé à David Carradine<br />
avec leur titre « Strangulation<br />
masturbatoire »<br />
par ci, à la macrobiotique<br />
avec « Subutex » par là,<br />
où à la passion amoureuse<br />
avec « 666Phyllis<br />
», que je me dois de<br />
mettre une mention spéciale<br />
à cette déflagration<br />
fantaisiste et corrosive à<br />
s’en taper les couilles contre le sol, et ceci à plusieurs<br />
reprises même.<br />
Non ce n’est pas vulgaire, par contre tout aussi répréhensible<br />
en terme de percussion, le combo No Turning<br />
Back a fait frotter les nuques avec son HxC bas du front<br />
pour une embrassade avec le bitume chez les voltigeurs<br />
du pit. Dans une région d’ovalie comme le Tarn il y a une<br />
expression typique pour traduire leur set : c’était viril,<br />
mais correct.<br />
Bon je n’en garde pas un grand souvenir, même si le<br />
combo a fourni de quoi se remuer les articulations. En<br />
fait j’attendais avec impatience Toxic Holocaust. Là pour<br />
le coup le revival thrash a trouvé ses maîtres en la matière.<br />
Sur disque j’avais des érections, sur scène j’ai eu<br />
62
mon divin fluide qui a coulé. Surtout avec un set cousu<br />
de main de fer dans cette cote de maille heavy qui te<br />
montait au nez. Enfin du putain de bon thrash, épais,<br />
goulu, heavy mec. Pas de tape à l’œil, mais l’œil du tigre,<br />
de celui qui te bouffe. Après cela j’avais un mal de chien<br />
de la nuque au vertèbre, et celui qui m’a offert la vue de<br />
son dos patché au regard d’une relecture des emblèmes<br />
du thrash des 80’s, n’avait pas l’air mieux que moi.<br />
Puis c’était aux grands frères Burning Heads de nous offrir<br />
leur punk Clashien avec classe. Vu et revu en concert,<br />
et pourtant le jour où ce groupe ne sera plus on pleurera<br />
comme des cons, parce qu’il aura marqué à jamais. La<br />
preuve en est avec la sortie d’un tribute Fire walks with<br />
me en leur honneur, avec le gratin des punkers de l’hexagone<br />
pour en faire ressortir toute la splendeur.<br />
Tout aussi emblématique d’une époque où le punk mélodique<br />
avait pignon sur rue, où la jeunesse découvrait enfin<br />
autre chose que Madonna et Motley Crüe, les Suédois<br />
de Satanic Surfer ont écrit des hits qui valaient le détour,<br />
au point de venir en contracter le grand frisson fiévreux<br />
plus de 20 piges plus loin. Le band a envoyé la sauce et<br />
les quadragénaires faisaient des bonds de petits lapins<br />
sur-excités, alors que les trentenaires se charcutaient la<br />
tronche avec la jeunesse rebelle.<br />
Si musicalement Satanic Surfer a fait lustrer ses muscles<br />
comme jadis, pour l’émotion (hormis la grosse dose nostalgique)<br />
c’est le chant de Rodriguo qui a tout balayé. Il<br />
s’est concentré sur le chant désormais, il ne fait plus la<br />
batterie et le chant comme à l’époque. Du coup ce gars<br />
a un grain vocal et une précision pour le style, qu’il met<br />
tout le monde sur le cul. C’était vraiment émouvant de<br />
revoir ce groupe, de s’immerger dans cette mouvance<br />
musicale qui n’a pas fait salle comble au Xtreme Fest<br />
par ailleurs, mais un super groupe pour un super set de<br />
hits. Il y a un gars qui s’est jeté de la fosse en réalisant<br />
un plongeon de compétition, et ça je le rajoute à la prestation<br />
du groupe, et ça mérite un 10 en note artistique !!<br />
Fallait redescendre en douceur après ce set, mais les<br />
very hardcoreux de Terror ont entériné leur statut de<br />
brute épaisse avec le groove pugnace de L.A. Les gamins<br />
du pit en ont fait les frais, cul par dessus tête tout<br />
le long d’un set vindicatif, et sans la présence charismatique<br />
du leader et maître chanteur Scott Vogel. On s’est<br />
retrouvés la tête dans la mêlée au ras du sol à chercher<br />
la moindre particule de filet d’air.<br />
Juste après cela, nous tournions une page d’histoire,<br />
celle pendant laquelle Simon De Monford croisa sa haine<br />
cathartique des Albigeois en ordonnant l’inexpiable<br />
«Tuez-les tous, dieu reconnaîtra les siens». Des siècles<br />
plus tard face à la descendance cathare, c’est Behemoth<br />
qui a remis au goût du jour cette sentence, mais contre<br />
les ordres de civitas.<br />
Pourtant l’épreuve de feu pyrotechnique de Behemoth<br />
est demeurée confinée dans son aura, en jouant<br />
dans une salle ne lui permettant pas d’user d’artifices<br />
probant. Cependant le groupe maîtrise tellement les<br />
flammes par la prestance tyrannique de sa musique,<br />
qu’il a juste fallu aiguisé son jeu scénique dans l’austérité<br />
d’un monastère de religieuse. Malgré un show<br />
rôdé jusqu’à la moindre virgule, Behemoth en puissant,<br />
a reproduit un set impérial de black death métal à faire<br />
vomir tous les fans de catéchisme. Alors que Ta Gueule<br />
nous proposait d’aller se faire enculer quelques heures<br />
auparavant, Behemoth nous disposait d’aller au diable<br />
! Ce que nous fîmes dans le cœur de la sacristie X Stage.<br />
Le groupe a abattu sa loi de talion et nous a soumis à<br />
son mépris pour la race des faibles grandeur nature, et<br />
maléfice compris.<br />
Si l’Xtreme Fest a renforcé sa gageure pour le métöL avec<br />
les auxiliaires de fin de vie que sont Behemoth, il n’en<br />
oublie pas pour autant de joindre sa part de folie punk<br />
contestataire de sale gosse, en programmant à la fin du<br />
week-end l’Opium Du Peuple pour tous ses ouailles.<br />
Ce groupe est devenu le Bollywood du camping trois<br />
étoiles, avec sexe, gaudriole, punk, anarchisme libertaire<br />
à gogo ! Il a servi un répertoire digne de la tournée<br />
de Salut les copains avec l’état d’esprit de Gröland & Hara-Kiri<br />
tout à la fois. On s’est vraiment bien marré avec<br />
ce mélange de théâtre de boulevard et de pole dance<br />
punky tellement que c’était con ! Et l’Xtreme Fest c’est<br />
terminé sur ce gag en fait !<br />
En synthétisant le week-end, il s’est très bien déroulé,<br />
le festival prend encore ses marques, et s’améliore de<br />
ses erreurs. J’espère enfin qu’il va se stabiliser, et je suis<br />
persuadé qu’avec le temps il va se bonifier pour créer un<br />
festival unique et différent.<br />
Je tiens à remercier tous les bénévoles et le crew du<br />
Xtreme Fest pour s’être damnés dans cette mission et<br />
offrir un week-end extrêmement cool & fun !<br />
Sachez par ailleurs qu’en 2016 l’Xtreme Fest s’annonce<br />
comme The festival of the beast !<br />
Ciao ; ) & See you in hell !<br />
Bir<br />
Crédit photos :Denis Charmot<br />
http://denischarmot.wix.com/denis-charmot-photos<br />
TEXTE LIVE<br />
63
MOTOCULTOR FEST 2015<br />
TEXTE LIVE<br />
Cet été le Motocultor Fest a encore labouré le terrain pendant 3 jours ultra métalliques pour le plus grand plaisir des<br />
festivaliers qui ont répondu en masse... Malgré tout le festoche n’est pas encore sûr de pouvoir continuer longtemps<br />
sans subventions, traînant de vieilles dettes comme un boulet... En attendant des jours meilleurs, voilà quelques<br />
clichés pris par Ludovic Beyan, notre envoyé spécial sur place.<br />
64
TEXTE LIVE<br />
65
TEXTE<br />
70
71<br />
TEXTE
INTERVIEW TEXTE<br />
INTERVI OU : SHIKO SHIKO<br />
Notre intervi «ou» est souvent l’occasion de poser des questions «con con», les Shiko Shiko ne se sont pas fait<br />
priés pour rentrer dans le jeu et envoyer des réponses qui te parleront beaucoup ... ou pas. Mais sans trop creuser,<br />
tu peux déjà bien te marrer...<br />
Akira ou Virgile ?<br />
Arekushi Taiko : Tetsuo<br />
JC : Argile<br />
Yamaneko : Gilles 3000<br />
Gilles 3000 : Les deux en même temps<br />
Japonais ou nippon ?<br />
Y : Tiger Wok<br />
JC : Homme crabe<br />
AT : Poney nippon<br />
G : Au plus offrant<br />
Maki ou sushi ?<br />
AT : Okonomiyaki<br />
JC : Souchon<br />
Y : Souchez, une petite ville bizarre où j’allais faire du<br />
vélo<br />
G : Sauvons les océans, arrêtons de manger<br />
Moshi moshi ou pika pika ?<br />
JC : Picon Picon<br />
AT : Doki Doki<br />
Y : Pika Pika, sans aucun doute<br />
G : Le truc Jaune<br />
Hyphen Hyphen ou Jean Jean ou Zombi Zombi ?<br />
JC : Zombi Zoubi<br />
AT : Pan Pan Pan (feu super groupe de Lyon : https://<br />
www.youtube.com/watch?v=85VsEhUgXpI )<br />
Y : Duflan Duflan (feu super groupe de Belgique : https://<br />
www.youtube.com/watch?v=7feTOqglJZc )<br />
G : Clairement Hyphen Hyphen<br />
Duran Duran ou The The ?<br />
JC : The The (zut)<br />
Y : «The reflex» de Duran Duran en boucle jusqu’à la<br />
mort !<br />
AT : André Duracell<br />
G : Les homos<br />
Oui-Oui ou Mimi Cracra ?<br />
AT : Michel Gondry<br />
JC : Nissan Micra<br />
Y : Nissan Gondry (dans mes rêve les plus fous, elle<br />
existe !)<br />
G : La gosse<br />
74
Miou-Miou ou Boutros-Boutros Ghali ?<br />
JC : Mion Mion, un chat trop cool<br />
Y : Yaya, un chat trop cool<br />
AT : Tic & Tac<br />
G : Miou miou elle est super dans les valseuses<br />
Bruxelles ou Paris ?<br />
AT : Non merci, trop de touristes<br />
JC : BXL RPRSNT, PRS FDP<br />
Y : Franchement, Bruxelles<br />
G : Brussels ma belle<br />
Noise ou Electro ?<br />
JC : Jungle<br />
AT : 12 volts<br />
Y : Bruit blanc<br />
G : L’un dans l’autre<br />
Aéronef ou Malterie ?<br />
Y : Malterie, Lille, 20ans<br />
JC : Stade Pierre Mauroy<br />
AT : La malterie volante<br />
G : L’un sur l’autre<br />
Concert ou studio ?<br />
JC : T2<br />
AT : Enregistrement live<br />
Y : Concert symphonique avec écrans géants, effets pyrotechniques<br />
et des hommes baudruche gonflables aux<br />
bras ondulants !<br />
G : L’un comme l’autre<br />
FNAC ou O’CD ?<br />
AT : Rapishare<br />
Y : Quelque part records. Coucou Marc !<br />
JC : O’CD : C - cher<br />
G : Téléchargement illégal<br />
Fricadelle ou Maroilles ?<br />
JC : Fricadelle au Maroille<br />
AT : Falafel au maroille<br />
Y : Ni l’un, ni l’autre. Un bon welsh avec une Ciney et l’addition<br />
s’il vous plait. Merci.<br />
G : No comment<br />
Nord ou Nord-Pas-de-Calais-Picardie ?<br />
JC : Nord-Pas-de-Calais-Picardie-Bavière-Okinawa-<br />
Creuse<br />
Y : Juste Pas-de-Calais. Toujours dans mon coeur.<br />
AT : Wallonie<br />
G : Demande à Martine Aubry !<br />
Merci aux Shiko Shiko !<br />
Oli & David<br />
Crédit photo : DR<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
Faire le Tour de Chauffe ou se faire chauffer à Tours ?<br />
JC : T’habites Bourg-la-Reine ?<br />
AT : Tours, ville d’avenir !<br />
Y : Tour de France<br />
G : Tour à tour<br />
Licorne ou poney ?<br />
JC : Miss Rainicorne<br />
Y : The Unicorns<br />
AT : Bojack Horseman<br />
G : Celui qu’on bouffe<br />
LOSC ou RCL ?<br />
Y : J’ai grandi à Lens, donc très peu pour moi merci.<br />
JC : La New Team<br />
AT : LSD<br />
G : Connais pas ces groupes<br />
75
76EN BREF<br />
DANCE TO THE END<br />
Take it or leave it<br />
(Autoproduction)<br />
Il y a quelques petits trucs qui n’étaient<br />
pas déplaisants mais pas forcément<br />
non plus utiles sur le premier EP de<br />
Dance to the End. Et le quatuor, en<br />
réécoutant son travail, a dû avoir le<br />
même sentiment que moi puisque<br />
pour ces nouvelles compositions, ils<br />
ont enlevé ces petites choses (des<br />
influences comme celle de Joy Division<br />
ou le math-rock, des bricolages, des<br />
sons inattendus) pour se concentrer<br />
sur ce qui faisait et fait encore plus<br />
leur force : l’énergie et les mélodies.<br />
Ils n’ont pas renié tout ce qui faisait<br />
leur identité il y a 2-3 ans mais ça s’est<br />
fondu dans l’ensemble et les Bordelais<br />
apparaissent désormais plus simplement<br />
comme un excellent groupe pop<br />
rock «à l’anglaise» (même si l’accent<br />
n’y est pas toujours impeccable). Le<br />
groupe joue donc à la fois sur la dynamique<br />
(le rythme est assez élevé) et<br />
les harmonies tout au long de Take<br />
it or leave it (le titre n’apparaît qu’à<br />
l’intérieur de l’artwork, il est extrait<br />
des textes de «Prayer for rain»), y<br />
compris sur le final «Air lane», un mini<br />
instrumental aux allures post-rock. Et<br />
si dans cet océan de douceurs vives,<br />
tu dois te faire une idée en un seul<br />
morceau, écoute l’entraînant «Candle<br />
in the dark» et tâche d’y résister.<br />
Oli<br />
MONOPHONA<br />
Black on black<br />
(label)<br />
Monophona nous vient du Luxembourg<br />
et c’est assez rare pour le souligner.<br />
Fruit de la rencontre en 2011 de Claudine<br />
(voix, guitares, synthé) et Philippe<br />
‘Chook’ Schirrer (producteur et DJ<br />
reconnu), le projet a pour ambition de<br />
mélanger sons électroniques, expérimentaux,<br />
et sons acoustiques plus intimistes,<br />
se définissant même comme<br />
de la « headphone music ». Complété<br />
en live par un batteur, le trio a sorti récemment<br />
son second album, Black on<br />
black. Et à l’image de nombreuses productions<br />
électroniques actuelles (Rone<br />
notamment), on a parfois du mal à y<br />
voir plus qu’un fond sonore si l’écoute<br />
ne se fait pas dans le bon contexte -<br />
même si le début du disque possède<br />
son lot de pépites. Cependant le reste<br />
de l’album ne décolle volontairement<br />
pas, préférant développer son registre<br />
: planant, sombre et minimaliste.<br />
Pour les adeptes du genre, l’ensemble<br />
est tout de même plus qu’agréable à<br />
l’écoute, à défaut de marquer durablement.<br />
Antonin<br />
BLUEBIRD SUPERNOVAE<br />
Are you real ?<br />
(Autoproduction)<br />
Ca ne m’était personnellement jamais<br />
arrivé de recevoir un CD promo trois<br />
ans après sa sortie, c’est d’autant<br />
plus plaisant lorsqu’il est bon. Bluebird<br />
Supernovae semble d’ailleurs, selon sa<br />
page Facebook, avoir déjà enregistré<br />
de nouveaux morceaux entre temps,<br />
sans pour autant évoquer une sortie.<br />
C’est de bon augure, surtout après la<br />
mise en bouche de leur dernier EP Are<br />
you real? à travers duquel une poprock<br />
incandescente se diffuse allègrement.<br />
Les petits gars de Méry-sur-Oise<br />
savent manier l’art de composer des<br />
morceaux qui nous parlent instinctivement<br />
dans un univers spacieux invoquant<br />
les plus beaux rêves. Forcément,<br />
puisque cela nous parle, les influences<br />
ressortent, citons Radiohead sur «A<br />
thousand years» ou le subtil mélange<br />
entre Air et Pink Floyd sur «The park<br />
(Under the stars)». L’œuvre de Syd<br />
Matters ou de Mogwai n’ont également<br />
pas de secret pour le quatuor qui apprécie,<br />
tout comme eux, le raffinement<br />
et l’élégance. D’un esthétisme sonore<br />
appelé «Post-pop intergalactic» par<br />
leurs géniteurs, Are you real ? souhaite<br />
donc pousser les frontières de la<br />
pop en les amenant très très haut. On<br />
leur souhaite bon courage car beaucoup<br />
tendent déjà vers ce dessein, à<br />
commencer par leurs propres références.<br />
Réponse au premier album ?<br />
Ted
EN BREF<br />
CRAZY TOWN<br />
The brimstone sluggers<br />
(Membran)<br />
The Brimstone Sluggers était le premier<br />
groupe des deux membres fondateurs<br />
de Crazy Town, on est alors en 1995 et<br />
ils changeront rapidement de nom pour<br />
l’actuel. Le succés météorique de «Butterfly»<br />
issu de leur premier album The<br />
gift of game (1999) est emblématique<br />
de l’époque, rock et métal fusionnent<br />
sur les radios et les torses tatoués<br />
brillent de mille feux. Le deuxième<br />
opus fait un flop, le groupe se sépare,<br />
leur guitariste Rust Epique décède en<br />
2004. Fin de l’histoire. Jusqu’à une<br />
reformation pour quelques concerts<br />
et quelques titres qui émergent sur le<br />
net, avec un remaniement de personnel,<br />
le groupe est vraiment de retour<br />
aux affaires en 2013 et sort donc The<br />
brimstone sluggers à la fin de l’été<br />
2015. Un titre en forme de retour aux<br />
sources mais qui aujourd’hui sonne<br />
daté, la faute à une prod’ lisse et formatée<br />
et à des compos qui n’ont rien<br />
d’alternatif. Et si je ne suis pas expert<br />
en flow hip hop, je n’ai pas l’impression<br />
que là aussi le groupe arrive à (ré)<br />
inventer quoi que ce soit. Pas dans le<br />
rythme (ça en manque énormément)<br />
et donc trop souvent à côté de la plaque,<br />
Crazy Town sort son troisième opus<br />
avec 10 ans de retard. Sans intérêt.<br />
Oli<br />
NO SHANGSA<br />
Blind-driving<br />
(Gigors Electric Records)<br />
Encore un album que l’on découvre sur<br />
le tard, une galette qui s’était perdue il<br />
y a deux ans dans une valise. C’est avec<br />
des remords de ne pas l’avoir découvert<br />
beaucoup plus tôt que j’enfile Blinddriving<br />
dans le mange-disque. Encore<br />
plus quand j’accroche spontanément<br />
à son math-rock noisy instrumental. Le<br />
trio valentinois No Shangsa donne donc<br />
priorité à une combinaison claviersguitares-batterie<br />
pour s’exprimer, faire<br />
rugir les amplis, développer des rythmiques<br />
souvent (très) agitées («La<br />
croisière abuse») tout en donnant par<br />
moments de l’espace aux instruments,<br />
notamment aux guitares («Carré<br />
russe», «Hooker with a cigar»). Le bon<br />
équilibre émotif et l’offre riche en mélodies<br />
dont fait preuve Blind-driving, sans<br />
pour autant jouer le coup des plages<br />
ambiantes creuses, inhibe les désagréments<br />
souvent liés aux musiques<br />
imprévisibles, qui plus est sans chant.<br />
Ce sont d’ailleurs des styles conçus<br />
davantage pour le live où l’expression<br />
est à vivre pleinement. Vous savez<br />
donc ce qu’il vous reste à faire. Mais<br />
avant cela, jetez vous sur ces dix titres.<br />
Ted<br />
L’OBJET<br />
Toucan<br />
(Structure Records)<br />
A l’instar de ce nuage de fumée bleue<br />
qui est amené à disparaître, le groupe<br />
L’Objet est insaisissable et reste l’un<br />
des groupes lillois les plus fascinants.<br />
Après un Plank hypnotique et motorik<br />
en diable, les voilà de retour avec<br />
Toucan via leur propre label Structure<br />
Records. Et si Plank lorgnait véritablement<br />
du coté de l’Allemagne de<br />
Can et Neu!, Toucan semble plus que<br />
jamais une belle ode au métissage<br />
mais en intégrant cette fois-ci des<br />
influences afrobeat et exotica. Le propos<br />
est beaucoup plus électronique,<br />
majoritairement instrumental, hypnotisant<br />
en diable et toujours sacrément<br />
charmeur pour les oreilles avides de<br />
musique qui décloisonne les oreilles.<br />
L’album se termine sur un «Toucan»<br />
de plus de 7 minutes vraiment beau :<br />
on croirait volontiers à une coopération<br />
décentralisé entre l’Allemagne et<br />
les musiciens issus du mouvement<br />
éthiopique. Ce qui résume parfaitement<br />
l’état d’esprit de L’Objet. Faire le<br />
pont entre des influences datant de<br />
quelques décennies et aussi une volonté<br />
de sonner moderne. La classe quoi...<br />
David<br />
77
78EN BREF<br />
FUMER TUE<br />
Dune<br />
(Autoproduction)<br />
A l’heure où j’écris ces lignes et après<br />
«Lieven», un dernier single envoyé sur<br />
la toile courant avril, le groupe strasbourgeois<br />
Fumer Tue a rendu les armes<br />
après deux ans d’aventures musicales<br />
et humaines. Il faut dire aussi que son<br />
style musical ne se prête pas forcément<br />
à de grandes évolutions, à moins<br />
d’en changer sensiblement sa formule.<br />
Car cette synthpop 80’s gorgée de new<br />
wave et d’autres joyeusetés électro<br />
punk fait un retour assez marquant<br />
en France dans le milieu underground<br />
ces dernières années, un peu comme<br />
le retro-gaming. Avec Dune, son dernier<br />
EP sorti en septembre 2014, Fumer Tue<br />
n’a d’autres ambitions que de donner<br />
du fun, comme diraient les Québécois,<br />
à des gens qui en ont besoin. Et avec<br />
sa production low cost mais propre,<br />
ses sonorités épurées mais efficace<br />
pour procurer le déhanchement le plus<br />
total, et ses mélodies entêtantes et<br />
contagieuses, Dune fait le job à la perfection.<br />
Un disque à passer en (fin de)<br />
soirée et à partager avec tes amis pour<br />
leur montrer que ta playlist, ben elle est<br />
pas si dégueulasse que ça en fait. Et<br />
te faire passer, par la même occasion,<br />
pour un défenseur du Made In France.<br />
Ted<br />
PRO-PAIN<br />
Voice of rebellion<br />
(Steamhammer)<br />
Si on n’aime pas trop les groupes qui<br />
prennent des risques en faisant évoluer<br />
leur musique, il y en a quelques uns<br />
qui apportent une sorte de garantie, un<br />
«label», ce n’est écrit nulle part mais<br />
on est certain de ne pas être trompé sur<br />
la marchandise. Pro-Pain est de ceuxlà.<br />
S’il y a eu pas mal de changements<br />
de line-up par le passé, ça n’a pas bougé<br />
depuis 2011 et le métal massif des<br />
New Yorkais ne vieillit pas (Gary Meskil<br />
envoie du gras depuis le tout début<br />
des années 90 tout de même). Chant<br />
guttural option messages scandés,<br />
rythmiques et riffing en mode repeat,<br />
décrochages du manche à l’intention<br />
des mâchoires, breaks, solos d’école et<br />
si le tout dépasse les 3 minutes 30, ça<br />
fait un titre épique qui mérite de donner<br />
son nom à l’opus («Voice of rebellion»<br />
donc). Cette quinzième distribution<br />
de pains ne demande pas beaucoup<br />
de réflexions et n’apporte pas grand<br />
chose au monument Pro-Pain mais ça<br />
permet au groupe de repartir en tournée<br />
et de donner une autre vie (bien<br />
plus intéressante) à ces compositions.<br />
Oli<br />
ALABASTERDS<br />
Dumb music for hipsters<br />
(Autoproduction)<br />
Alabasterds, à ne pas confondre avec<br />
Alabastards avec des bouts de Neige<br />
Morte, revient avec un EP 5 titres vraiment<br />
rafraîchissant. Ces mecs ont beau<br />
avoir un peu plus de la vingtaine, ils ont<br />
pourtant des références de quadra et<br />
offrent avec Dumb music for hipsters<br />
(j’en suis un, tu en es un, eux aussi,<br />
t’inquiètes, on est entre nous...) un joli<br />
pont entre Nirvana, McLusky et des références<br />
rock plus calibrées. Parcourir<br />
cet EP est d’emblée très jouissif avec<br />
le titre «Soma» : une petite décharge<br />
punk-rock avec une basse bien en<br />
avant, un chant cobainien, un sens du<br />
riff efficace et une urgence qui fait instantanément<br />
plaisir. L’urgence, c’est<br />
aussi ce que l’on retrouve chez «Hostile<br />
machine» et la plupart des titres de ce<br />
Dumb music for hipsters. En tout bon<br />
chroniqueur étroit d’esprit, j’ai évidemment<br />
tiqué sur l’introduction de «Rollercoaster»<br />
en mode ska-punk No fx<br />
mais le groupe arrive à pervertir le style<br />
pour en faire un morceau qui pourrait<br />
plaire même aux non-fans du genre et il<br />
se pourrait bien qu’avec le temps et les<br />
écoutes, le titre devienne un des sommets<br />
de cet EP sacrément bien troussé.<br />
En plus, ces petits gars sont sacrément<br />
bons en live. Tu attends quoi ?<br />
David
EN BREF<br />
HERSCHER<br />
Herscher<br />
(Autoproduction)<br />
Depuis leur premier EP en 2010, le<br />
duo auvergnat Herscher a gagné un<br />
instrument et ce n’est pas une guitare<br />
(ça aurait été trop simple) mais<br />
un petit synthé bien crado qui vient<br />
s’ajouter à la basse et la batterie. Pour<br />
être certain d’avoir un son poussiéreux<br />
titanesque, les gars sont retournés<br />
bosser avec Serge Morattel (Knut,<br />
Impure Wilhelmina, Shora, Year Of no<br />
Light... mais aussi leur deuxième EP).<br />
Le résultat est à la hauteur des espoirs<br />
placés dans le combo pour tous ceux<br />
qui aiment se faire mal au crâne avec<br />
de la musique. C’est lourd, ça sludge, ça<br />
doom, ça grésille de partout, ça pulse<br />
même parfois (le génial «Bandana»),<br />
le chant lourd (peu fréquent) semble<br />
un peu forcé (pourquoi chanter, laissez<br />
tout en instrumental ! Ou alors en mode<br />
incantation claire comme sur «Apocatastase»),<br />
le synthé n’apporte que des<br />
touches de gris foncé dans cet univers<br />
noir de crasse, c’est donc un régal pour<br />
les amateurs de métal obscur qui penseraient<br />
que Sunn O))) est trop pop. Et<br />
si l’adjectif «drone» te fait peur, laissetoi<br />
tenter puis porter par la rythmique<br />
et les saturations des Clermontois, tu<br />
risques de changer d’avis (ou de choper<br />
la migraine mais bon, faut savoir<br />
prendre des risques dans la vie !).<br />
Oli<br />
DEATH<br />
N.E.W.<br />
(Drag City)<br />
Pour resituer l’histoire de Death, le<br />
groupe de proto-punk de Détroit et non<br />
le groupe de death métal du regretté<br />
Chuck Schuldiner, il faut remonter en<br />
1974 et l’enregistrement de ...For the<br />
whole world to see, un album compilant<br />
les chansons de ce trio de frangins<br />
dont le style vacille entre celui des Who,<br />
d’Alice Cooper et des Stooges. Ayant eu<br />
des soucis avec leur maison de disque<br />
de l’époque Colombia Records, relatif<br />
à l’utilisation de leur patronyme jugé<br />
anti-commercial, le groupe splitte juste<br />
après avoir sorti un 7» sur un autre<br />
label. En 2009, soit 35 ans après, l’album<br />
sort grâce à Drag City et le public<br />
le découvre notamment à travers l’excellent<br />
morceau punk «Freakin’ out»<br />
dans un épisode de la série «How I met<br />
your mother». Le groupe qui a depuis<br />
repris vie en tournée, sort N.E.W., un<br />
nouveau disque en avril 2015 dont l’esprit<br />
n’est pas très éloigné de ses précédents,<br />
un peu moins fougueux mais<br />
avec une prod’ bien meilleure. Notre<br />
avis : Présenter une œuvre d’un genre<br />
musical qui a vécu ses grandes heures<br />
de gloires des décennies passées et<br />
ancré dans le temps, n’a pas grand<br />
intérêt aujourd’hui, si ce n’est celui<br />
de pouvoir lui rendre hommage et de<br />
faire passer à chacun un certain goût<br />
de nostalgie. Une belle preuve d’opiniâtreté<br />
de la part des frères Hackney.<br />
Ted<br />
KILL ME THIS MONDAY<br />
Kill me this monday<br />
(Klonosphere)<br />
Fort d’un Ep qui rencontrait déjà l’approbation,<br />
le groupe nordiste Kill Me<br />
This Monday revient cette fois-ci avec<br />
un album dix titres (les 3 pistes du<br />
premier EP y figurent aussi...) qui devraient<br />
également rencontrer l’approbation<br />
des oreilles averties sans trop<br />
de problème tant le groupe semble<br />
maîtriser ses influences, son identité<br />
et son songwriting. Les influences ?<br />
Une pincée de Deftones, un bout de<br />
Thrice, un poil de Queens Of The Stone<br />
Age, une cuillère à soupe d’Incubus<br />
bonne période, des gimmicks postcore<br />
également mais Il est de plus en<br />
plus difficile de les cerner tant le groupe<br />
propose une identité qui lui est propre.<br />
Il s’agit là d’une collection de morceaux<br />
très aboutis qui sentent la réflexion<br />
et les répétitions en mode stakhanovistes.<br />
A noter qu’on aime particulièrement<br />
quand le groupe salope son<br />
univers très léché et travaillé avec un<br />
chant hurlé («Fat bottom sandwich»,<br />
«Crying for help», «War») qui ajoute<br />
un peu de vinaigre dans un très bon vin.<br />
David<br />
79
80EN BREF<br />
DEFEATER<br />
Abandoned<br />
(Epitaph)<br />
Comme les Tang n’ont rien sorti depuis<br />
quelques temps, il faut bien trouver un<br />
groupe émo-hardcore de bonne facture<br />
pour combler le vide, et pourquoi pas<br />
Defeater ? Les Américains livrent effectivement<br />
un excellent quatrième opus<br />
qui mêlent des sons clairs de grande<br />
qualité à une voix écorchée des plus<br />
touchantes. Il y a peu de chances que<br />
les natifs de Boston aient déjà entendu<br />
les Lillois mais les deux groupes sont<br />
vraiment très proches. Ceux qui signent<br />
cet Abandoned sont plus expéditifs et<br />
ne laissent pas traîner les choses, pas<br />
question chez eux de se laisser embarquer<br />
dans des constructions plus<br />
post-quelque chose même si la partie<br />
instrumentale du «Vice & regret» final<br />
pourrait coller, il y a toujours ce timbre<br />
éraillé pour nous servir de guide. Du<br />
coup, l’ensemble tourne un peu en<br />
rond, trop homogène, les constructions<br />
se ressemblent un peu toutes et si le<br />
style est parfaitement maîtrisé, les brisures<br />
et les fêlures sont pour l’intime<br />
et les textes plus que dans la musique<br />
où les changements de rythme et les<br />
breaks ne surprennent pas. Le jugement<br />
est un peu sévère mais les gars<br />
sont capables d’envoyer un morceau<br />
acoustique ou un instrumental mortel<br />
au milieu de tout ça pour donner bien<br />
plus de relief et ne le font pas, dommage<br />
car on passe pas loin d’une perle.<br />
Oli<br />
ROME BUYCE NIGHT<br />
Indian castle of Morocco<br />
(Zero égal petit intérieur)<br />
Rome Buyce Night est un groupe précieux.<br />
Non pas parce qu’ils se font rare<br />
mais parce que tout ce qu’ils sortent<br />
trouve un écho retentissant chez votre<br />
serviteur. Et ça ne manquera pas avec<br />
The indian castle of morocco, un EP<br />
six titres qui fleure bon les envies de<br />
métissage et d’horizon lointain. Enfin,<br />
pas si loin, le Maroc, c’est à deux<br />
heures d’avion pour cinquante boules.<br />
Mais quand même. En six titres, Rome<br />
Buyce Night arrive à concrétiser en<br />
musique le voyage improvisé : tu mets<br />
les pieds dans un lieu et tu attends<br />
que des choses extraordinaires surviennent.<br />
L’attention de l’auditeur est<br />
à chaque reprise renouvelé très facilement<br />
grâce à un propos à la fois cohérent<br />
mais ouvert à toutes les sorties<br />
d’autoroute. Le groupe démarre d’une<br />
idée, souvent un riff ou une mélodie un<br />
peu crade, et la développe pour inciter à<br />
l’évasion émotionnelle, parfois via des<br />
vibes orientalisantes très diffuses et<br />
ça marche... Un titre comme «Blonde<br />
peroxydée» dénote grandement de<br />
par son spoken-word à la fois doux et<br />
acéré ainsi que par son instrumental<br />
désenchanté. Rome Buyce Night<br />
reste un des secrets les mieux cachés<br />
du post-quelque-chose en France. Et<br />
c’est particulièrement honteux tant la<br />
démarche de ces mecs pue la classe.<br />
David<br />
TAULARD<br />
Les abords du lycée<br />
(Et Mon Cul C’est Du Tofu ?)<br />
Taulard fait sans conteste partie de<br />
mes groupes de punk-rock VF préférés<br />
du moment. Je rajouterais peut-être<br />
également Pierre & Bastien, un trio parisien<br />
maniant parfaitement le second<br />
degré, contrairement à Taulard qui nous<br />
relate plutôt des anecdotes de vie, des<br />
galères et autres souvenirs délicats. Le<br />
premier album des Grenoblois intitulé<br />
Les abords du lycée, m’a littéralement<br />
mis une petite claque. Alors qu’en live<br />
c’est la sueur et la lombalgie assurée,<br />
sur disque sa musique a une saveur<br />
tout aussi particulière. Il faut dire que<br />
le quatuor est un peu à part sur cette<br />
scène étant donné qu’il joue sans guitare<br />
électrique. Elle est remplacée par<br />
un clavier cheap aux sons vintages ce<br />
qui attribue à la formation une sonorité<br />
atypique et reconnaissable parmi<br />
mille autres. La section rythmique est<br />
animée grâce à une basse tricotant<br />
des notes à cent à l’heure pour une<br />
production sonnant très brute, sans<br />
artifice et sans réelle profondeur. Ce LP<br />
de synth-punk distille douze morceaux<br />
plus ou moins rapides comprenant au<br />
passage son lot de tubes tenaces et<br />
efficaces («Ville portuaire», «Les dangers<br />
du stop», «Les abords du lycée»,<br />
«Impasse»). Un groupe attachant<br />
dont les mélodies s’imprègnent vélocement<br />
dans le cerveau tout en nous<br />
ramenant également à la dure réalité<br />
de la vie par la prose de son chanteur.<br />
Ted
EN BREF<br />
INA-ICH<br />
Ma chair et mon sang<br />
(iNH-iCH Prod)<br />
L’artiste franco-vietnamienne Kim-<br />
Thuy Nguyen, connue sous le pseudo<br />
Ina-Ich depuis 2006, est actuellement<br />
en train de finaliser en trio son troisième<br />
album avec son compagnon, le<br />
batteur Aurélien Clair, et le bassiste/<br />
guitariste Brad Thomas Ackley, un<br />
musicien de Mathieu Chédid (-M-).<br />
Entre temps, le groupe a sorti en avril<br />
dernier un EP intitulé Ma chair et mon<br />
sang sur son propre label iNH-iCH Prod,<br />
histoire de baptiser sur disque la nouvelle<br />
formation. Ces quatre titres virevoltent<br />
tel un pinceau de calligraphe,<br />
Kim lâchant ses nerfs en français sur<br />
des compositions rock ultra-énergique<br />
façonné par un arsenal électronique<br />
dont seul Brad a le secret. Punk dans<br />
l’expression mais néanmoins formaté<br />
musicalement, Ina-Ich renvoie à ce<br />
qu’était les Rita Mitsouko fut un temps,<br />
le style en moins. Quoique, quand<br />
on écoute le couplet de «Comme un<br />
garçon», la similitude est manifeste.<br />
Pourtant, le groupe parle plutôt de Nine<br />
Inch Nails, Björk ou The Prodigy quand<br />
il évoque ses maîtres de composition.<br />
On aime l’univers (très bel artwork<br />
au passage fait par Madame) un peu<br />
foldingue et décalé (excepté pour la<br />
torturé «Je t’emmène») de ce groupe<br />
francilien qui devrait encore nous<br />
réserver de belles surprises à l’avenir.<br />
Ted<br />
ASIAN DUB FOUNDATION<br />
More signal more noise<br />
(ADF Communications)<br />
Etrange idée que celle de sortir un album<br />
uniquement au Japon (The signal<br />
and the noise en 2013), étrange idée<br />
aussi que celle de le retravailler quelque<br />
peu pour une sortie européenne sous<br />
un autre nom (More signal more noise)<br />
deux ans plus tard... Avec Asian Dub<br />
Foundation, on peut s’attendre à tout<br />
tant il est difficile de suivre ce collectif<br />
qui pourrait bien prendre comme<br />
surnom le titre de ce premier morceau<br />
«Zig zag nation». S’il y a de la guitare<br />
et de la batterie sur cet opus, ce n’est<br />
pas le point central, le collectif a fait<br />
la part belle à la world music d’origine<br />
pakistano-indienne avec des instruments<br />
aux sonorités orientales, des<br />
flûtes, des percussions... le tout mixé<br />
avec du dub et de gros passages genre<br />
«teuf improvisée dans une étable de<br />
Camden». Une fois le nuage de Marie-<br />
Jeanne dissipée, il reste un album à<br />
la cool, ouvert sur une musique différente<br />
sur laquelle il n’est pas évident<br />
d’accrocher. En tout cas, chez moi,<br />
ça ne fonctionne pas ... à trop avoir<br />
ajouté de bruits, j’ai perdu le signal.<br />
Oli<br />
ONCE HUMAN<br />
The life I remember<br />
(earMUSIC)<br />
Surtout connu pour être le premier guitariste<br />
de Machine Head, Logan Mader a<br />
également joué avec Soulfly ou Medication<br />
avant de devenir un excellent producteur<br />
(Five Finger Death Punch, Cavalera<br />
Conspiracy, Gojira, Fear Factory,<br />
...). Sa rencontre avec Lauren Hart va le<br />
pousser à former un nouveau groupe :<br />
Once Human. La demoiselle est très mignonne<br />
mais c’est surtout par sa voix<br />
qu’elle va séduire bon nombre de mâles<br />
en mal de métal sombre et ultra péchu.<br />
Entre Death bien membré et Black démaquillé,<br />
il n’y a pas grand chose de<br />
féminin dans la musique du combo et<br />
ce n’est pas pour nous déplaire. Mêmes<br />
les guitares sont plus mélodiques que<br />
le chant (c’est quelque peu dommage<br />
car Lauren est également capable de<br />
charmer son petit monde en chant<br />
clair, «Demoneye» ou «I am war»),<br />
et tant pis si elles virent un peu heavy<br />
parfois (sur des solos dispensables)<br />
parce que l’ensemble ne manque pas<br />
d’efficacité. Le mélange des genres est<br />
assez réussi et compense le manque<br />
d’originalité de parties qu’on a l’impression<br />
d’avoir déjà entendues ailleurs.<br />
Quand il joue sur les contrastes tant<br />
au chant que dans la musique, Once<br />
Human est plus accrocheur («The life<br />
I remember»), pourquoi pas creuser<br />
cette voie dans le futur, si futur il y a...<br />
Oli<br />
81
82EN BREF<br />
PORN<br />
Deconstruct<br />
(Les disques Rubicon)<br />
La discographie de Porn est une sorte<br />
d’éternel recommencement, après<br />
chaque «pause», le combo repose<br />
des bases avant de redécoller, après<br />
un EP de remixes/covers et une sorte<br />
de best of, les lascars nous sortent un<br />
digipak en mode best of remixé avec<br />
des covers et de l’inédit. Une compilation<br />
hétéroclite en apparence mais qui<br />
a pour elle de sonner Porn et si Deconstruct<br />
va bien au travail de leurs potes<br />
sur les 6 derniers titres, l’ensemble est<br />
plutôt bien construit et bénéficie d’une<br />
prod uniforme et permet d’entrer facilement<br />
dans l’univers du groupe même si<br />
tu as raté l’épisode From the void to the<br />
infinite où l’on trouvait déjà la reprise<br />
de «Lullaby» de The Cure. «This is the<br />
way the world end», seule nouvelle<br />
composition est un bel instrumental<br />
mais le coeur du LP, ce sont bien ces<br />
covers, avec donc «Rain» de The Cult<br />
et «Eleanor Rigby» des Beatles qui<br />
sont totalement Pornisés, très bons<br />
dans cet exercice, les Lyonnais jouent<br />
donc en terrain conquis avant de laisser<br />
d’autres triturer leurs compos. Herrschaft,<br />
Divine Shade ou Vigilante sont<br />
de la partie et y vont de leur touche<br />
perso pour réarranger en douceur<br />
quelques vieux titres. Ma préférence<br />
va vers le travail de R-One qui bosse<br />
alors plus comme un producteur avec<br />
une vision différente qu’un «simple»<br />
remixeur.<br />
Oli<br />
BULLET FOR MY VALENTINE<br />
Venom<br />
(RCA Records)<br />
Putain de gâchis ! Voilà ma première<br />
pensée à l’écoute de ce nouvel opus<br />
de Bullet For My Valentine. Parce qu’il<br />
faut bien l’avouer, ces mecs-là ont un<br />
talent certain pour la composition,<br />
savent utiliser leurs instruments et ont<br />
plutôt tendance à gâter leurs fans (ne<br />
serait-ce que cette pochette en mode<br />
illusions 3D de la version deluxe de l’album).<br />
Mixant allégrement et sans vergogne<br />
ambiances métalcore et solos<br />
heavy old school, le groupe envoie du<br />
très lourd durant quelques beaux passages<br />
mais ne peut s’empêcher de tout<br />
foutre en l’air l’instant d’après avec des<br />
mélodies sirupeuses catastrophiques.<br />
Au hasard, balance «Worthless» :<br />
hurlement pour attaquer, rythmique<br />
plombée, petites notes pour installer<br />
la tension, et ... le drame, le chanteur<br />
se retrouve quasi tout seul pour faire<br />
le beau, avant ensuite de remettre du<br />
gras dans le miel. Virez-moi toutes ces<br />
sucreries pour ados et on a un étalon<br />
metalcore. Dégagez-moi aussi ces immondes<br />
choeurs de gamin (la convention<br />
de Genève ne l’a pas interdit après<br />
This is war de 30 Seconds To Mars ?) et<br />
tout ce qui ralentit la progression du venin.<br />
Merde les gars, plutôt que de vous<br />
peigner les poils, envoyez la purée !<br />
Oli<br />
LIMB<br />
Terminal<br />
(New Heavy Sounds)<br />
Limb rejoindra la constellation déjà<br />
bien chargée des groupes britanniques<br />
à tendance sous-accordée. Chant guttural,<br />
groove sludge, riffs façon Yob<br />
aux accents rock’n’roll bienvenus.<br />
De manière amusante, la formation<br />
anglaise me rappelle un peu le style<br />
des Lorrains d’A Very Sad Story qui officient<br />
eux aussi dans une veine stoner/<br />
sludge aux accents de Pantera. La prod’<br />
de Russ Russell fait le boulot sans faire<br />
d’éclats, à l’image de l’ensemble de cet<br />
album plus que sympathique mais trop<br />
peu original pour vraiment retenir l’attention.<br />
Difficile également de retenir<br />
un titre ou deux qui sortirait vraiment<br />
du lot dans un pavé un peu linéaire<br />
(sauf peut être «Morturay teeth»,<br />
avant tout pour ses accents plus extrêmes)<br />
que «Cocytus» finit un peu de<br />
plomber en fin de parcours avec un format<br />
plus long qui raconte globalement<br />
la même chose que le reste, et ce malgré<br />
une partie ouvertement doom bien<br />
appuyée sur un riff qui ne brille pas non<br />
plus par son originalité. La musique de<br />
Limb mérite probablement plus d’être<br />
vécue en live que sur album, les musiciens<br />
ne déméritant pas une seule<br />
seconde. Pour le reste, voilà un album<br />
qui, comme tant d’autres, n’évoque<br />
pas grand-chose de plus qu’un «pas<br />
mal, mais déjà trop entendu...» dans<br />
l’univers actuel du stoner/doom.<br />
Elie
IL Y A 10 ANS<br />
EN BREF<br />
SMASH HIT COMBO<br />
Playmore<br />
(Slam Disques)<br />
Si les Smah Hit Combo étaient Parisiens<br />
et avaient commencé à sortir leurs<br />
disques il y a 20 ans, ils auraient été<br />
les leaders d’une scène en ébullition<br />
reléguant les Pleymo ou Enhancer au<br />
rang de «petits joueurs» du nu-metal<br />
de par un son autrement plus puissant.<br />
Mais voilà, ils ont déboulé avec 10 ans<br />
de retard et sont originaires d’Alsace...<br />
Le public, plutôt jeune (toi ?), ne boude<br />
pas son plaisir de les écouter jouer un<br />
peu plus, le public plutôt vieux (moi<br />
???) trouve qu’ils sont très bons dans<br />
ce qu’ils font même si le playground a<br />
déjà été plus que visité. Textes dans<br />
l’ère du temps (et pas uniquement adulescents<br />
comme certains les résument,<br />
écoute «Le vrai du faux» pour t’en<br />
convaincre), rythmiques implacables,<br />
riffing efficace, jolis gestes techniques,<br />
temps construits pour que ça claque<br />
dans les enceintes et pour que le groupe<br />
fracasse tout sur scène (ce sont des<br />
experts à ce niveau-là)... rien à redire<br />
donc sur la qualité intrinsèque de cet<br />
album, si j’avais 20 ans de moins, j’accrocherais<br />
certainement des posters<br />
de Smah Hit Combo dans ma chambre.<br />
Mais là, j’en ai pas loin de 40 et j’en suis<br />
presque à me planquer pour écouter<br />
l’album pour ne pas être taxer de jeuniste.<br />
Tant pis, je fais mon rebelle et<br />
l’écris haut et gras : bien joué les gars !<br />
Oli<br />
OHHMS<br />
Cold<br />
(Holy Roar Records)<br />
Que les punks passent leur chemin.<br />
Cold, le nouvel EP d’Ohhms tient plus<br />
d’une demi heure avec seulement<br />
deux titres, et pas avec des patterns<br />
à 220bpm. Les Anglais officient dans<br />
un doom progressif aux accents postmetal<br />
majestueux, avec une voix à<br />
dominante claire et l’avantage de ne<br />
pas sonner exactement de la même<br />
manière que tous leurs confrères sabbathiens<br />
qui pullulent. L’EP s’ouvre<br />
sur «The anchor» qui tisse une longue<br />
litanie somptueuse avant d’écraser<br />
la tonalité six pieds sous terre tout<br />
en restant là encore au-dessus du<br />
panier. Après un solo ouvertement<br />
hard rock et un break monolithique,<br />
les revoilà qui relancent un énorme<br />
rouleau compresseur sludge accompagné<br />
d’une incantation chamanique<br />
des plus gargarisantes. Le morceau se<br />
termine en apothéose sur une douce<br />
ambiance psychédélique jam 70’s qui<br />
débouche sur un final bien épique. Un<br />
ensemble très progressif donc, lié par<br />
une atmosphère assez prenante. Le<br />
deuxième morceau continue dans le<br />
même style, avec beaucoup de changement<br />
d’ambiance également et des<br />
riffs tout aussi bons, dans une veine<br />
plus sombre et un chant plus rauque.<br />
Une formule qui fait ses preuves en<br />
format court et qui ravira tout les<br />
amateurs de musique progressive.<br />
Elie<br />
LABASHEEDA<br />
Changing lights<br />
(Presto Chango Records)<br />
Le joli nom de Labasheeda correspond<br />
à un bled en Irlande mais aussi<br />
à un groupe d’Amsterdam et c’est bien<br />
du groupe, formé en 2004, dont il va<br />
être question ici. Un combo qui sort<br />
en 2015 sont quatrième long format<br />
et donne dans le «art-punk» si on en<br />
croit sa définition. Perso, je dirais plutôt<br />
pop que art mais si tu t’attends à<br />
des mélodies à roulettes, tu fais fausse<br />
route, la base est clairement pop-rock,<br />
c’est le traitement qui est plus punk. Et<br />
«punk» dans le sens d’anarchique, un<br />
bordel plutôt organisé tout de même<br />
ou instruments divers (le violon tient<br />
une grande place) et saturations particulières<br />
sont réfléchies et prennent<br />
leur place aux bons moments pour dynamiter<br />
des compos plutôt agréables<br />
et faciles d’écoute («Changing lights»)<br />
car la voix de la frontwoman est assez<br />
délicate. Labasheeda, c’est donc davantage<br />
une An Pierlé qui aurait recruté<br />
Sonic Youth en backing band que Salvador<br />
Dali chantant avec Green Day.<br />
Tout comme l’imagerie utilisée, la production<br />
fait sonner le tout avec un côté<br />
vieillot travaillé, je soupçonne même<br />
les Hollandais de volontairement «rater»<br />
quelques passages pour rester<br />
fidèle à leur esprit punk et «live». Si tu<br />
es amateur d’aventures et de découvertes<br />
autant que d’un rock brut et différent,<br />
va fouiner sur leur bandcamp...<br />
Oli<br />
83
IL Y A 10 ANS : GOJIRA<br />
From Mars to Sirius (Mon slip)<br />
échappatoire : la lumière de Sirius, un soleil célébré par<br />
différents peuples (dont les Dogons) et à qui on donne<br />
un pouvoir de régénérescence... From Mars to Sirius<br />
serait donc un chemin initiatique, la voie (lactée) vers<br />
un nouveau cycle mais aussi vers l’inconnu (existe-t-il<br />
un Sirius C ?), cette route que construit Gojira est faite<br />
d’étapes de repos salvatrices («Unicorn», le dantesque<br />
«Flying whales», «From Mars») et de passages en<br />
vitesse lumière («Backbone», «The heaviest matter of<br />
the universe», «In the wilderness», «To Sirius»), on y<br />
croise quelques OVNIs tel ce fabuleux «Where dragon<br />
dwells» (qui est en train de supplanter dans mon coeur<br />
le «Space time»)... Et encore une fois la technique se<br />
met au service de la composition, des mélodies, de la<br />
puissance pure et sans arrière pensée («Global warning»).<br />
Retrospectivement, on peut presque penser que cet<br />
album est le dernier du «Gojira français» tant le groupe<br />
a ensuite pris une dimension internationale. C’est une<br />
aventure un peu à part dans leur discographie et c’était<br />
il y a déjà 10 ans...<br />
Chef d’oeuvre. Uniquement deux mots car on manque<br />
de superlatifs pour parler de ce nouvel opus de Gojira...<br />
On avait parlé de «monument», on les avait qualifié de<br />
«monstrueux», d’»énormes» et on les pensait lancés<br />
sur une trajectoire simple et directe, mais voilà que<br />
débarque From Mars to Sirius et Terra incognita comme<br />
The link sont renvoyés aux oubliettes, paraissent fades<br />
à côté de ce petit dernier qui pose les nouveaux jalons<br />
de notre univers métallique. Gojira sait équilibrer violence<br />
et sensations, on le savait, là, ils repoussent leurs<br />
limites et les nôtres, jamais un groupe n’avait autant<br />
réussi à faire ressentir autant de choses avec une musique<br />
réputée difficile d’accès.<br />
Intersidéral et sidérant, From Mars to Sirius est certainement<br />
l’album de la décennie... à venir ! A moins que<br />
leur prochain opus n’aille encore plus loin, ce qui semble<br />
aujourd’hui difficilement réalisable.<br />
Oli<br />
Au son hors du commun (et nettement meilleur que<br />
sur les albums précédents qui étaient loin d’être mauvais<br />
!), aux compos vives et tranchantes, Gojira ajoute<br />
la réflexion sur notre monde vu du ciel, notre planète<br />
océane se transforme et se détruit peu à peu, seule<br />
84
CONCOURS >>> VESPERINE<br />
Un gros EP et une belle claque, voilà ce que nous propose Vesperine<br />
et même si tu n’es pas du genre à avoir peur de faire<br />
une jolie découverte en suivant nos conseils, on va t’encourager<br />
à creuser cette question en t’offrant 2 packs «Vesperine»<br />
à savoir l’album Parmi les autres, le Tshirt du groupe,<br />
une affiche, un badge et pour vraiment te la péter en soirée le<br />
décapsuleur !!!<br />
Bonne chance !<br />
CONCOURS TEXTE<br />
Pour participer au concours, clique ici..<br />
CONCOURS >>> REGAL<br />
Regal sera en concert à La Clef le samedi 14 novembre lors<br />
d’une soirée Rock Garage Psyché en compagnie des Canadiens<br />
de Chocolat et de Mathi & Mathi. Forcément une soirée<br />
«Régal Chocolat», on se devait de partager !<br />
On te file donc 6 places pour ce concert !<br />
Attention, il faut participer au concours avant le 5 novembre !<br />
Bonne chance !<br />
Pour participer au concours, clique là-dessus.<br />
http://www.laclef.asso.fr<br />
next >>><br />
Mass Hysteria<br />
Chelsea Wolfe<br />
Arman Mélies<br />
Monolog<br />
Lofofora<br />
Artweg<br />
Banane Metalik<br />
Parkway Drive<br />
Melted Space<br />
The Long Escape<br />
Zeus! .......<br />
85
INTERVIEW TEXTE<br />
DANS L’OMBRE>AURELIEN<br />
Comme beaucoup de personnes travaillant dans le milieu de la culture, Aurélien est doté de plusieurs casquettes et<br />
il t’en parlera mieux que nous. Mais il est surtout chargé de communication à la Malterie, un lieu à vocation pluridisciplinaire<br />
basé à Lille qui connaît de sacrés difficultés actuellement. Et si on s’intéresse à la Malterie aujourd’hui,<br />
c’est parce que le lieu semble condamné à disparaître mais fête également ses 20 ans, c’est dire si c’est une institution<br />
dans le paysage culturel nordiste...<br />
Quelle est ta formation ?<br />
Après le bac (L), études en culture à la fac en parallèle<br />
d’activités associatives : j’ai monté un label, j’organisais<br />
des concerts, des tournées.... Je finis avec 2 maîtrises<br />
pour faire bien sur le CV, et surtout grâce à mes activités<br />
annexes plein de contacts, de petites compétences ici<br />
ou là, qui ne demandaient qu’à se développer.<br />
Quelles sont tes activités dans le monde de la<br />
musique ?<br />
Je dirige l’asso Dynamo qui mène des activités d’accompagnement<br />
de groupes, de montage de projets et de programmation<br />
autour de la scène régionale en musiques<br />
actuelles. Je m’occupe de la communication de la Malterie.<br />
Ça fait déjà beaucoup, alors j’ai un peu mis de coté<br />
mes autres activités. Je manage encore plus ou moins le<br />
groupe Tang mais on n’est plus aussi vivaces qu’avant,<br />
même si eux continuent à répéter et enregistrer, on a<br />
des emplois du temps qui permettent plus de tourner<br />
autant qu’avant.<br />
Peux-tu nous parler de la Malterie, ses multiples missions<br />
et des difficultés que traînent le lieu depuis<br />
quelques années ?<br />
La Malterie est une asso indépendante montée par des<br />
artistes il y a 20 ans, et toujours gérée par des artistes.<br />
C’est avant tout un lieu de travail pour des plasticiens et<br />
musiciens, qui y trouvent des espaces mais aussi des<br />
formes d’accompagnement et parfois des moyens pour<br />
développer leurs projets. C’est un lieu avec une énergie<br />
folle, qui fait énormément avec pas grand chose. Plein<br />
de gens, plein de beaux projets qui se croisent, ça donne<br />
quelque chose d’assez unique qu’il est plaisant de partager<br />
au quotidien. Tout ça se passe depuis le début<br />
dans un bâtiment, assez fou lui aussi, du quartier de<br />
Wazemmes à Lille.<br />
Malheureusement, la culture a peu à peu glissé d’un milieu<br />
d’initiatives citoyennes comme nous le sommes, à<br />
quelque chose de très institutionnalisée, et il n’y a plus<br />
aujourd’hui l’engouement politique pour les initiatives<br />
citoyennes. Alors après un paquet d’années à se développer<br />
et à développer plein de services innovants à destination<br />
des jeunes artistes, la Malterie se retrouve freinée<br />
par un contexte économique qui fait que les choix<br />
politiques mettent l’argent de plus en plus ailleurs que<br />
sur la culture ou sur une culture qui rayonne en apparence,<br />
ce qui n’est pas le cas d’un lieu de travail. En tout<br />
cas les moyens ont baissé depuis 2008 au regard de<br />
l’ampleur du projet.<br />
Aujourd’hui l’enjeu est double, car la location du bâti-<br />
86
ment dans lequel nous somme depuis 20 ans arrive à<br />
terme, et il y a une volonté du propriétaire de vendre ou<br />
d’augmenter massivement le loyer, ce qu’il est en droit<br />
de faire. Donc ça plus le point évoqué au dessus : aie...<br />
Il faut donc trouver soit un nouveau lieu, soit un moyen<br />
de rester dans celui-là, mais quoi qu’il arrive il faut faire<br />
évoluer le modèle économique qui ne sera plus tenable<br />
à court terme.<br />
La malterie fête ses 20 ans bientôt...<br />
Oui, c’était un peu difficile de l’envisager vu le contexte,<br />
et puis finalement, on est pas là pour tirer la tronche,<br />
c’est l’occasion de montrer tout ce qu’on sait faire, de<br />
stimuler les énergies, de les partager avec les publics,<br />
et célébrer une longévité qui en soit est déjà bien parlante.<br />
Du coup on a décidé de faire du non stop, pendant<br />
17 jours il se passe des choses, avec parfois plusieurs<br />
choses par jour... Du gros avec des concerts regroupant<br />
un paquet de musiciens, de l’intimiste avec des<br />
performances en toute petite jauge dans des ateliers<br />
d’artistes, et du lourd avec un week-end d’événements<br />
dans et aux abords de la Malterie. Je ne sais pas dans<br />
quel état on va finir ce marathon, mais j’ai hâte d’y être.<br />
Comment es-tu entré dans le monde du rock ?<br />
Ma sœur était à fond dans la musique, et ça m’a poussé<br />
dans ce sens là. J’étais ado, je cherchais de quoi ne plus<br />
m’ennuyer dans ma petite ville pas folichonne... je ne<br />
suis pas Lillois, et j’ai mis le doigt dans un engrenage en<br />
découvrant assez rapidement la scène punk hardcore,<br />
et tout un réseau d’organisation et de prise en main ...<br />
j’aime pas utiliser le terme «do it yourself». Alors vite j’ai<br />
organisé des concerts, joué dans des groupes, fait des<br />
tournées, sorti des disques. C’était un moyen de créer<br />
ce dont j’avais envie et de le partager. On était quelques<br />
potes bien impliqués, on nous prenait un peu pour des<br />
fous, mais on a fait plein de trucs très jeunes, et ça nous<br />
a donné le virus. Après de fil en aiguille je suis arrivé à<br />
Lille en connaissant déjà quelques activistes, j’ai vite<br />
organisé des trucs et fait mon label, mais je ne vais pas<br />
non plus raconter ma vie, ça ne va pas passionner grand<br />
monde...<br />
pour leur première date en France car toutes les autres<br />
étaient annulées et que personne ne croyait dans ce<br />
groupe, ou alors Red Sparowes, pareil premier show en<br />
France... 31knots aussi. En fait tout ça c’est beaucoup<br />
de rencontres humaines, de temps partagé autour de<br />
vibrations...<br />
Ton coup de coeur musical du moment ?<br />
J’avoue qu’en ce moment j’ai beaucoup de mal à écouter<br />
du rock, dans le cadre du taf j’écoute beaucoup de<br />
choses, mais du coup à la maison je coupe le son, ou alors<br />
j’écoute du rap, du classique, des choses qui m’aèrent la<br />
tête. Bref, pas de coup de cœur coup de cœur, mais je<br />
suis de plus en plus fasciné par les trucs un peu variété<br />
ou grand public qui ne se contentent pas de faire du<br />
consensuel, qui se permettent des trucs qui bousculent<br />
l’auditeur lambda, ou qui se font accompagner de gens<br />
qui donnent une âme à leur musique. Par exemple le dernier<br />
Miley Cyrus avec en réal Wayne Coyne, c’est impensable,<br />
mais le résultat est là... Certains titres de Kanye<br />
West aussi sont dingues. Et puis j’aime bien des gens qui<br />
arrivent à me donner l’impression qu’ils figent l’époque<br />
sur disque comme si ils en faisaient une photo... Jay Z<br />
est très bon à ce jeu là...<br />
Es-tu accro au web ?<br />
Oui et non, comme l’a dit je ne sais plus qui « the internet<br />
is over », internet est devenu sous-jacent à tout<br />
dans nos vies, ce n’est plus une activité en soi, un truc<br />
sur lequel tu vas, c’est maintenant contenu dans chaque<br />
activité. C’est un bon outil, mais il faut aussi arriver à<br />
s’en couper et ça je confesse c’est plus difficile, mais j’y<br />
travaille.<br />
A part le rock, tu as d’autres passions ?<br />
Courir, jardiner, et plein d’autres trucs clichés...<br />
Tu t’imagines dans 15 ans ?<br />
Oui et non, moi oui mais pas les autres ;-)<br />
Merci Aurelien ! Bon Anniversaire à La Malterie !!!<br />
INTERVIEW TEXTE<br />
Une anecdote sympa à nous raconter ?<br />
Pfff y’en a plein, dont une grande partie ne peut filtrer<br />
publiquement sans compromettre des copains. Mon dernier<br />
souvenir marquant à la Malterie, c’est le concert de<br />
David Bazan qui m’a donné des frissons que je n’avais<br />
pas eu depuis un bail. Sinon des soirées folles avec<br />
des groupes comme Daughters, Knut... Des concerts<br />
de dingue comme 65daysofstatic un dimanche aprem<br />
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