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franchement déloyale à son groupe. Elle pourrait<br />
aussi s’abstenir de voter. Dans ce cas, elle resterait<br />
indirectement loyale à son groupe puisqu’elle ne<br />
donnerait pas sa voix au candidat adverse. C’est<br />
ici que sa loyauté à son groupe serait devenue<br />
invisible, mais il ne s’agirait pas d’une loyauté<br />
inconsciente puisque sa décision serait délibérée.<br />
Dans nos familles, la loyauté invisible résulte le plus<br />
souvent de deux mouvements contradictoires, le<br />
refus de nous montrer loyaux envers des parents qui<br />
n’ont pas mérité notre engagement, et l’impossibilité<br />
de leur être entièrement déloyaux pour des raisons<br />
qui peuvent parfois nous échapper.<br />
Les cinq dimensions de la loyauté<br />
familiale<br />
La loyauté nous amène à privilégier la relation que<br />
nous avons avec notre famille par rapport aux autres<br />
relations, mais ni la dette, ni l’obéissance aux lois<br />
établies ou aux traditions ne suffisent entièrement à<br />
expliquer ce comportement. D’autres facteurs sont<br />
en jeu. Il s’agit donc de les examiner.<br />
Nos comportements à l’égard des autres dépendent<br />
de cinq types de déterminants. Il s’agit d’abord de<br />
déterminants individuels d’ordre socio-historique ou<br />
biologique (dimension des faits), de déterminants<br />
individuels d’ordre psychologique (dimension de<br />
la psychologie), de déterminants supra-individuels<br />
d’ordre systémique (dimension systémique), de<br />
déterminants interpersonnels relatifs à notre attente<br />
d’équité et de réciprocité dans nos relations (dimension<br />
de l’éthique relationnelle) et enfin d’un besoin<br />
fondamental d’être en lien avec les autres pour<br />
exister (dimension ontique).<br />
Je me propose donc d’analyser les déterminants de<br />
la loyauté familiale selon ces cinq dimensions, non<br />
pas dans l’ordre décrit ici, mais par ordre d’importance<br />
pour ce qui concerne la discussion de la loyauté.<br />
Loyauté et éthique relationnelle<br />
Pour les thérapeutes contextuels, la loyauté familiale<br />
est d’abord basée sur notre attente d’équité et de<br />
justice dans les relations que nous avons avec nos<br />
proches. Nous offrons notre loyauté à ceux qui se<br />
sont montrés disponibles pour nous et ils attendent<br />
la nôtre parce qu’ils savent qu’ils la méritent. Ici la<br />
loyauté est basée sur un engagement. La loyauté<br />
se situe donc avant tout dans la dimension définie<br />
comme éthique relationnelle.<br />
Parler d’éthique relationnelle ne veut pas dire parler<br />
de comportements éthiques au sens habituel du<br />
terme, mais signifie que nous traitons les autres en<br />
réponse à la manière dont ils nous traitent. Nous faisons<br />
tous la comptabilité de ce que nous donnons<br />
aux autres et de ce que nous recevons d’eux. Nous<br />
attendons tous que la relation que nous avons avec<br />
les autres soit équitable. Il s’agit d’une caractéristique<br />
que l’on retrouve chez tous les humains, quelles<br />
que soient les cultures ou les époques.<br />
La dimension ontique de la loyauté<br />
Notre besoin fondamental d’être en lien avec les<br />
autres est une des sources importantes de la loyauté<br />
familiale. La vision adoptée est celle des philosophes<br />
existentiels qui proposent que le Soi est fondamentalement<br />
dépendant de la présence d’un non-Soi<br />
pour exister en tant que Soi. Cette dépendance est<br />
nommée dépendance “ontique”, terme emprunté à<br />
Heidegger (Ducommun-Nagy, 008).<br />
Tout comme la figure dépend du fond dont elle<br />
se détache pour exister en tant que figure, nous<br />
dépendons de la présence des autres pour exister<br />
en tant que Soi autonome. Ceci aboutit donc à<br />
une définition paradoxale de l’autonomie puisque<br />
généralement l’autonomie est définie comme une<br />
absence de dépendance.<br />
Dans cette perspective, ce qui compte avant tout<br />
pour l’homme est de pouvoir être en relation avec<br />
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