M - Notes du mont Royal

Notes du mont Royal 

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Royal » dans le cadre d’un exposé 

gratuit sur la littérature. 

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Bibliothèque nationale de France

y 

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V 

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i 

JLi \j JL/ A 

9 

HOM 

TRADUITE EN F 

AVEC 

REMARQU 

1 * 

Par MADAME D A C J E R 

Aux D A 

epens 

de r 

TOME COND 

K P A 

de RlGAUD, Directeur 

mpnmcnc iiovae. 

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't |WI •,» «* -,-*-, '•' i -liMin^»#. n , , 

•AVJIC PRIVILEGE DU RoT. 

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p-— - — - m iMi^mP^^HV^VP-^Bita^^BiMi^' 

Argument du Livre VIII 

Lcinûûs affembk le cenfeil dis Phea** 

eiens fur le pûrt près des mijjeaux s 

pûur délibérer fwr la demande de l'eftranw 

qui eft arrivé chez % r - On éqtàpe ur& 

faiffèaii pûur fin départ, ù* les principaux 

des Pheaeiens font imitei à wifejtin dans 

k Palais ; ils jouent enfaîte au palet avec 

Utyjfe* à" on fait y mit k chantre Demadûcus, 

qui chante les amours de Mars ir 

de Vernis s if e?fuite l'hifioire du cheval 

de bois qui fut introduit dans la ville de 

Tîfûye* A ce récit, Ulyffe fimd en farmes ; 

Afcffîû&s, qui s J en apperçûii, luy demande* 

iefejet défis larmes, è? le prie de luy dts? 

qui il eji, gr d'eu il e

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I/GDYSSF

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LIVRE VIII 

!,*• i ^ •M' 1 " 11 ! 11111 ! 1 ' 1 ' 1 

? ÀUROîlE avoit à peine 

annoncé le jour 3 que fe 

Roy Àïcînoiis fe leva. 

XJIyfle ne fut pas moins diligent* 

Le Roy le mena au lieu où H avoit 

convoqué FaiTeniMée pour leConfeil, 

& c'eiloit fur le port devant 

* 

A mesure que les PHeaciens arrl-* 

voient, ils fe plaçoient fur des pier* 

res polies. La Décile Minerve, qui 

vouloit affeurer un heureux retour 

à Ulyfle ^ ayant pris la figure

% UOBYSStt 

d'un héraut d'A Ici nous, eftoît allée 

par toute la ville avant le Jour» 

&: a voit exhorté en ces termes tous 

les principaux des Pheaciens qu'el- 

^ le avoit rencontrez : Princes & 

JJ Chefs des peuples qui habitent cette 

* ifïe f rendez-vous promptement au 

Confeil pour entendre les demandes 

d*un eftrangcr, qui après avoir 

s» 

erré long-temps fur la vafte nier f 

eil arrivé au Palais d'Àkiiioib, & 

qu'on prendra t pour un des Im- 

Par ces paroles elle înfpira de ïa 

curiofité à tous ces Princes, L ? af« 

femblée fut bientoït formée & tous 

les fieges remplis. On regardoît 

avec admiration le prudent fils de 

jLaèrtc» Àuflî la Déelîe Minerve 

ïuy avoit infpiré une grâce toute 

divine, elle le faîibit paroillre plus 

rand & plus fort, afin que par cette 

taille avantageufe &: par cet air 

majefté il attirail Peïlime & Faifec 

îion des Pheaciens, Se qull fe tira

I I 

: 

^HOMERE- Lfarâ VÏÏL 

avec avantage de tous les combat 

que ces Princes dévoient propofer 

pour efprouver (es forces, 

Lorfque tout le monde fut placé, 

Àïcinoiis prit la parole, SL dit : « 

Princes & Chefs des Pheaeîens. ef- c 

5 

coûtez ce que | ay a vous propoier. m 

Je ne eonnois point cet eilranger, œ 

qui après avoir perdu fa route fur m 

la mer, eïi arrivé dans mon Paîaïs. m 

e me fçay d*oà iï vient, fi c'eft des 

contrées du couchant ou des cli- « 

mais de Faurore ; mais il ji ou s prie « 

de luy fournir promptement les * 

moyens de retourner dans fa patrie» « 

e nous démentons point en cette ^ 

occafion. Jamais eflranger, qui 

ordé dans noftre ifîe, n'a deoian- e: 

é inutilement les fecours dont il

4 I/OBYSSé'ë 

» & quand tout fera preft* qu*ifs 

» viennent manger chez moy ? pour 

& fe difpofer à partir , on leur fourm 

KÎra tout ce qui eft jieceflaireP Et 

2» pour vous f Princes , rendes-vous 

& tous dans mon Palais, vous m'ai 

» derez à faire les honneurs à mon 

ofte. Qii'aucun ne manque de 

» s*y trouver-» & qu'on faffe venir ïe 

si chantre Demodocus, à qui Dieu a 

** donné Part de chanter > & qui par 

» fes chants divins charme tous ceux 

* qui Pentendent 

En fini fiant ces mots il fe levé 

& marche ïe premier. Les Princes 

îe fui vent, & un héraut va avertir 

le chantre Demodocus- On choifit 

cinquante-deux rameurs qui ïerendent 

aufiï-tofl fnr ïe rivage, met ** 

tent en mer ïe meilleur vaiïïcau 9 

«IrciTent le maft, attachent les voiles 

& placent les avirons» Quand 

ïe v aï fléau fiât preft à partir, ils fq 

rendirent ions an Palais d'ÀIci* 

Sous* iês portiques ? les eonrSj le&

B f HOME RE- Livre 

(aies furent bxentoft remplies. Le 

oy leur fit donner douze moutons 

? huit cochons engraiffez 

deux bœufs. Us les dépouillèrent 

ies prcparèrent, & fc mirent à 

tabïe. 

Le héraut amené cependant ïe 

antre divin 5 que les Mufes avoient 

comme de leurs laveurs % 

mais à ces faveurs elles a voient 

méfié beaucoup d'amertume 5 car 

Î f î^ * I. p - ^ JT ? A ** 

Iuy donnant l'art de chanter. L 

lieraut iront onous le place au nu* 

lieu des conviez fur un fie» tout 

parienie de cloud$ d argent 9 qu'iï 

appuyé contre une colomne à la* 

quelle il pend fa lyre, en f avertit 

faut de Pendroit où il Fa mife, a 

u'il la ^puîffe prendre quand il en 

aura Bcfoîn, II met devant Iuy une 

petite table fur laquelle on fert des 

vîaitdess une coupe 6c du vin. On 

• Tf M» _,, ^^ 

ait bonne chère, & le repas efïant 

;nli la Mufe infpire à Démo do eus 

À îii

*» 

m 

I/OBYSSE'ê 

e chanter les avant lires des héros* 

H commença par un chant fort 

connu, &dont la réputation avoit 

volé jufqu*aux deux; il contenoit 

îa célèbre difpute qu'UIyiTe & Achîllc 

a voient eue devant les remparts 

de Troye au milieu du feftîn 

d'un facrifice , & dans laquelle ils 

€n eftoîent venus aux grolles pajroîes 

s ce qui avoit fait un très 

rand plaîfir à Àgamemnon ; car ce 

Prince voyort avec une extrefmc 

joye les premiers des Grecs dïfpiLter 

enfemblc , parce que c'eïloit là 

l'accompli ITement d'un oracle qu'il 

avoit receu autrefois à Pythof oii 

il eHoit allé confuher Apollon, 

ïorfqu'un long enchaifnemenî de 

malheurs commençoit desja à menacer 

îesTroyens & les Grecs par 

ïes décrets de Jupiter. Ce chant 

eftofc fi admirable & fi divin qu'il 

charma tout le monde. Uly fTe, qui 

on doit en larmes, eut toujours la 

telle couverte de fonmanteau pour

B*HoMlRfc. Livre VIIt 7 

cacher fon vifage, car il a voit quelque 

forte de honte que les Pheaciens 

ïe vi fient pleurer. Toutes les 

fois que Demodocus ceflbit de 

chanter, Uhfie eïîiiyoît fes îarmes 

& rabaîffoit fon manteau , & prenant 

nne coupe il faifoït des libations 

aux Dteox. Mak dés que les 

Princes le preflbîent de reprendre 

fa lyre

^4 

UODYSS 

» trangcr fera de retour dans fa pa 

* trie, il ptiiiTe dire à fes amis com 

* bien nous fommes au defus de 

* tous les autres hommes aux com- 

50 

bats du Ce/îe & de la Lutte , à 

& courir & à fauter* 

II fe levé en mefme temps ; les 

Princes le Tuîvent 9 & le héraut 

ayant pendu à la colomne la lyre s 

îl prend Demodqcus par la maïnf 

ïe conduit hors de la fale du feflin, 

& îe mené par le mefme chemin 

que tenoient tous les autres pour 

aller voir & admirer les combats. 

Quand ils arrivèrent au lieu de 

'emblée , ils y trouvèrent une 

foule innombrable de peuple qui 

s'y eftoït desya rendu ; plufîeurs 

s gens des mieux faits 

plus difpos fe prcfbnterent pour 

combattre, Âcronée, Ocyale, Elatrée» 

Nautes, Prumnes, Ânchiale 

f * M. « 1 * U 1 V ^ 

fils' du charpentier Polynée, Eret 

mes , Pontes , Prores , 

•* * ^**vw*» 3 

Aiiabeimée, Àmphîaie ferablable 

*« 

^

OMEHE. LmeVIIL 

a l'homicide Mars, & Naubolide 

qui par fa grande taille & par fa 

bonne mine eftoît au deflus de tous 

les Pheacîens après le Prince Lao~ 

damas» Trois nïsd'Àïcinoiis fe prefenterent 

auffi, Laodamas . Àlius 

ïc divin Oytonéc. Voilà tous 

ceux qui fe levèrent pour le combat 

de la Courfe* On leur marqua 

OBC la carrière» Ils partent tous 

en mefrne temps ëc excitent des 

tourbillons de potdïtere qui les dé «* 

ïobent aux yeux des fpeélateurs ai 

Hais ClÈtonée furpafTa tous les 

concurrents, & les laifla tous aufîi 

ÏOïïI derrière lay que de fortes mules 

, traçant des filions dans un 

champ, laifFent derrière elles de* 

œufs pelants & tardifs. 

Âpres la Courfe ils s'attachèrent 

u pénible combat de la Lutte. Et 

uryale fut vainqueur. Àmphiale 

lit admirer à fes rivaux me fin es fa 

légèreté à fauter. Eiatrée remporta 

ie prix du Difquel & le brave Lno- 

Air

10 I/0E>YSSÉ'E 

damas fils d*ÀIcinoiis fut viAo-^ 

rîeux au combat du Cefte, 

Cette jeunefîe sêftant affex dî* 

sertie à tous ces combats, le Prince 

Laodamas prît la parole, ëc dît ; 

% Mes amis, demandons à cet eftran- 

» ger s'il n*a point appris à s'exercer 

& à quelque combat * car il eft très 

s bien fait & d'une t aï Ile très propre à 

3& fournir à toutes fortes d'exercices* 

» Quelles jambes ! quelles efpauîes î 

m quels bras ! Il eH melme encore 

» jeune* Mais peut-eftre eft-ïJ affbia 

bll par les grandes fatigues qu'il a 

a> fouffertes3 car Je ne croy pas qu'il 

a y ait rien de plus terrible que la 

& mer, & de plus propre à efpuifer 

^ & anéantir ffiomme le plus ro~ 

B Vous avez raifon 9 Laodamas ^ 

» répond Euryaîe, & vous nous re 

a montrez fort bien noftre devoir ** 

» Allez donc, provoquez vous-mef » 

» sne voftre hofte. 

À C€s mots îe brave fils d*Àkî 

a* 

&&"

S>* H o M E R E. Livre VÎIL 11 

nous s'avançant au milieu de l'affembïëe, 

dit à Ulyffe : Généreux « 

eftranger t venez faire preuve de « 

voftre force & de voftre adrciTe, « 

car il y a de l'apparence que vous « 

avez appris tous les exercices 3 & ^ 

que vous eftes très adroit à toutes « 

fortes de combats, &il n'y a point * 

de plus grande gloire pour un ïiom- * 

me, qne de paroîftre avec tfclat « 

aux combats de la Courfe & de la es 

Lutte, Venez donc, entrez eti fifce « 

avec nous 9 & banni ffez de voftre « 

cfprit tout ces noirs chagrins qui « 

vous dévorent ; voftre départ ne m 

fera pas Ion g-temps différé ; Je vaîf- ce 

feau qui doit vous porter n'attend m 

u'un vent favorable & vos ra- « 

meurs font tons prefts, , * 

Àfors Ulyfle prenant la paîoïe? 

srepcmd ; Laodamas, pourquoy me « 

uez-vous en me piquant & oc 

en aiguiiionant mon courage î Mes «* 

chagrins me tiennent plus au cœur «c 

m les combats. Jufqu'ky j'ay 

À v]

ii L'ODïSSé' 

& effuyé àcs peines extrefînes & fou- 

» tenu des travaux Infinis ; prefen* 

» tement Je ne parois dans cette af- 

*> feiiibiée que pour obtenir du Roy 

* & de tout le peuple les moyens 

3& de m'en retourner au pluftofl dans 

s» ma patrie, 

Le fougueux Euryale ne gardant 

plus de mefures , s'emporta 

-» jufqu'aux invedives, & dit : Ef- 

*> franger^ je ne vous a y jamais pris * 

m pour un homme qui ait efte drefle à 

» tous les combats qu'on voit efîabiis 

» parmi les peuples les plus célèbres, 

:» vous rcffemblcz bien mieux à quelas 

que patron de navire, qui paffcfa 

3e vie à courir les mers pour trafiquer, 

£> ou pour piller ; ou niefmc à quel- 

» que eferivain de vaiffeau qui tient 

n regiftre des provifions & des pri- 

» fes ; vous n'avez nullement l'air 

5» d'un guerrier* 

Dlyiïc le regardant avec des 

yeux pleins de colère, luy dît : 

m Jeune homme, vous ne parlez pas

B 9 HOMèRE. Livre VIIL i 

Bien $ & vous avez tout l'air d'un * 

éccrvclé* Certainement les DieuiL «e 

ne donnent pas à tous les hommes « 

toutes leurs faveurs enfembïe, &Ie « 

mcfme ïiomnie n'a pas toujours en « 

"Pcirtjgc la bonne mine , le bon ef- ** 

A rit & Fart de bien parler* L'un ejft «: 

mal fait &de mauvaife mine; mais «: 

Dieu réparc ce défaut, en luydon- * 

nant l'éloquence comme une cou- ** 

ronne qui le fait regarder a\ec ad- « 

miration. Il parle avec retenue, il

14 I/O0YS5 

» jouter à cette bonne mme* mm 

» vous manquez de fens^ Vos paro- 

» les eftourdies ont excité ma colère* 

^ Je ne fuis pas fi novice dans les 

* combats que vous penfezr Pendant 

» que j'ay eflé dans la fleur de la jeu- 

» neffe , & que nies forces ont elle 

s* entières, |*ay toujours paru parmi 

» les premiers. Présentement je fuit 

» accablé de malheurs & de miferes, 

» Car j'ay pa/Fé par de grandes cfpr eu 

a* ves, & fouffert bien des maux 

a» bien des peines dans les diverfe^ 

a* guerres où je me fuis trouvé > 

» dans mes voyages fur mer. Cepen- 

» dant quelque aioibli que fe fois 

» par tant de travaux & de faiïguesy 

JI je ne ïaifleray pas d*entrer dans ies 

» combats que vous me propofez, 

» Vos paroles m'ont piqué juiqu'au 

# vif, & ont réveil ïé mon courage. 

II d*t f Si s avançant brufqueiftent 

fans quitter fon manteau 5 il 

prend un dîfque plus grand , plus 

efpais Si beaucoup plus pelant que

Ï^HOMERE. Livre VItL i^ 

eeluy dont les Pheaeiens fe fer 

voient. Et après luy avoir fait faii 

êmx ou trois tonis avec le feras P 

M le poulie avec tant de force, que 

la pierre fendant rapidement ie$ 

airs, rend un CfHement horrible*. 

Les Pheadens? ces excellents hommes 

de mer f ces grands ramena 

eflonnez &c effrayez de cette rapine, 

fe baiffent lufqu'à terre^ Le 

uc poufie par un bras i robuf- 

te, païTe de beaucoup les marques 

c fes rivaux. Minerve^ fous la fire 

d'un homme 5 met la marque 

du difqnc d'U [y ffe, & luy ad reliant 

îa parole» elle luy dit : Effranger, m 

un aveugle raefme dîfiïngu croit à m 

talion s voilre marque cfe celte de m 

ions les autres, car eHe n'efl point « 

snefléc ni comfondue avec les leurs, m 

maïs elle eft bien au delà. Ayez m 

on ne efperance du fueeés de ce « 

combat, aucun des Pheaciei $ n'ira m 

|iafques4à, bien-loi» de v©u$ fur- m

ïS L'ODYSSE'E 

La Déeïîb paria ainfi- D lyïTe Icn- 

tït une joye fecrefe de voir dans 

Faffemblée un homme qui Icfivorîfoit. 

Et encouragé par ce fecours^ 

» il dît avec plus dehardieiTe, Jeunes 

*> gens, atteignez ce but, fi vous pou- 

» vcz; tout k l'heure, je vais pouffer 

» un autre difque beaucoup plus loin 

» que le premier. Et pour ce qui cft 

» des autres combats, que celuy qui 

s> fe fentira affez de courage, vienne 

» s'efprouver contre moy , puîfque 

a> vous m'avez offenfé* Au Ceil'j, à 

» la Lutte, à la Courfe, je ne cède 

* à aucun des Pheaciens qu ? au feuï 

5& Laodamas ? car il m*a reccu dans 

5w ïbn Paiais, Qui eft-ce qui voudrait 

m combattre contre un Prince dont 

» îi auroit receu des faveurs fi gran- 

* des l II n'y a qu'un homme de 

^ néant & un înfenfé qui puiffe defs> 

lier au combat fon hôftc dans un 

» pais cftraiiger ; ce feroit connoifai 

îre Bien mal (es înterefls. Mais de 

9» tous ks Pheaciens} je n'en refuie 

w* '•«

B*HOMEEE. Livre VIIL \J 

îiï n'en méprife aucun. Me voilà « 

pfeft d'entrer en lice contre tous « 

ceux qui le présenteront. Je puis « 

ire que je ne fuis pas tout à fait «< 

mal adroit à toutes fortes de corn- « 

bats. Je fçay affez tien manier l'arc, * 

& je me vante de frapper au milieu « 

d'un nombre d'ennemis celuy que «c 

je choifiray, quoyque tous fes corn- « 

pagnons qui l'environnent ayent « 

Farc tendu & preft à tirer iur moy. « 

PhiloAete efiok le feuî qui me fur- «* 

paifoit quand nous nous exercions «c 

fous les remparts de Troye. Mais * 

de tous les autres hommes, qui font « 

aujourtPhuy fur la terre 3 & qui fe « 

nourrirent des dons de Ccrës f iï « 

iy en a point Iur lefquels je ne «r 

remporte le prix. Car je ne vou- ce 

droîs pas m'égaler aux héros qui « 

ont efté ayant nous, à Hercule & « 

a fcurytus d'Oedbaïie, qui fur Fa- « 

dreffe à tirer de Farc, ofoient entrer ce 

en lice mefme contre les Dieux, m 

pourquoy te grand Eury tus ** 

Hfc

18 V O ï> * s s t 

* \ _ __.. _ r _ __ * 

» ne parvint pas a une grande vieil- 

3& Icfle» îl mourut jeune, car Apollon 

30 irrité de ce au'il avoit eu I 

» de le dcffier, luy ofta la vie- Je 

» lance ïa pique comme un autre 

» lance le javelot* îl n'y a que Ja 

» eourfe où je craindrois que quel- 

» qu'un des Phcaeiens ne me vain- 

» qnift Car je fuis bien affoibli par 

39 toutes les fatigues & par la faim 

» mcfme que fa y fouffertes fur la 

a> mer, mon vaiïïeau ayant efté brîfé 

a> après une furieufe tempefte, & les 

» vivres m ayant manque, ce qui m a 

2> caufé une foïblefTe dont je ne fuis 

3& pas encore revenu. 

Après qu J ii euft cefTé de parler * 

un profond fiîence régna parmi ces 

Princes, Akinoûs feul prenant h 

s> parole» îuy répondit: Etranger, 

a» tout ce que vous venez de dire 

» nous eil très agréable , & nous 

» voyons avec pïaifir que vous vouai 

tez bien faire preuve de voftre form 

ce & de voJlfe adreffe, piqué det

HOMIRE- LhnVîlL 1$ 

reproches qu'Euryale a ofé vous m 

MïQ au milieu de nous- II eft eertaîn 

qu'il n'y a point d'homme , m 

pour peu qu'il ait de prudence & c* 

e fens, qui ne rende juftîee à vof- « 

tre mérite. Mais efeoutez-moy, je « 

vous prie , afin que quand vous « 

ferez de retour chez vous & que « 

vous ferez à table avec voftre fem- m 

me & vos enfants, vous puiffiez « 

raconter aux héros qui vous feront m 

la cour, fheureufe vie que nous u 

menons f & les exercices dont Ju- *c 

pitcr veut bien que nous îa pana- u 

ions fans difcontîmiation depuis « 

nos premiers pères- Nous ne foui- « 

mes bons aux combats ni duCefte « 

m de ia Lutte ; noftre fort eft la «r 

Courfe ëc iart de conduire des « 

Vai fléaux ; nos divertifTcments de a 

tous les jours ce font les feftins, la « 

mufique & la danfe; nous aimons « 

ïa magnificence en habits, les baîns « 

chauds & ia galanterie. Allons donc « 

que nos plus excellents daafewjrs m

%B UODYSSE'I 

m viennent tout pre fente ment faire 

» voir leur adreffe, afin que cet îlluf* 

>j tre ertraoger pui/fe dire à fes amis 

» combien les Pheaeiens font au def M 

» fus des autres hommes à îa Cour -* 

» fe, à la danfe & dans la mufique* 

» auilî-bïen que dans Fart de cotniui- 

^ re des v ai (féaux. Que quelqu'un 

» aille prompiement prendre la lyre 

a> qui eu dans mon Palais SL qu'il 

& l'apporte a Demodocus. 

Aïnfi par fa ïe divin Àlcinoiis, 

lïii héraut partit pour aller chercher 

la lyre dans le Palais ; & neuf 

juges choiiîs par ïe peuple > pour 

régler & préparer tout ce qui 

nece flaire pour les jeux, fe lèvent 

en mefine temps- Ils appïaniflenî 

d ? abord le lieu où l'on de voit dan- 

, Se marquent un aflez grand 

efpace libre. 

Cependant le héraut apporte la 

lyre à Dcmodocus qui s avance au 

milieu, & les jeunes gens* qui dévoient 

danfer, fe rangent autour de 

# 

X V 

9- *•

B f HoMERE. Livre VIIL a» 

ïuy 9 Se commencent leur danfe 

avec une légèreté merveilîenfe. 

XJIylïe regardoït attentivement les 

vifs &L brillants mouvements de 

ïenrs pieds & la jLificfle de leurs 

cadences » ëc ne pouvoit le la 

de les admirer- Le chantre chantoit 

iur fa lyre les amours de Mars & 

i Venus * comment ce Dieu avoît 

eu pour la première fois les faveurs 

de cette DéejfTe dans Fapparlement 

mefme de Vulcain, &c comment il 

Fa voit comblée de prefenis pour 

fouiller la couche de fon mary. Le 

oleil qui les vit, en alla d'abord 

avertir ce JJieu , qui apprenant 

cette fafcheufe nouvelle, entre d'à- 

Bord dans fa forge, Fefprit plein 

de grands deffems de vengeance ; il 

met ion énorme enclume fur fon 

pied, & commence à forger des liens 

indifîblubles pour arrelier les cou 

pables. Quand il eut trouvé CQS 

liens en eïkt de fervïr fon reïTen- 

tinienij il alla dans la chambre oà

i L'ODYSS 

clioït fou lit f que Ton avoit desîionnoxé* 

II eftendit ces liens en bas 

tout autour & en haut, il en couvrit 

le dedans du cîei du lit &: des 

antes, & les difpofa de manière, 

que par un fecret merveilleux ils 

dévoient envelopper ces deux ainants 

dés qu'ils feraient couchez. 

C'eftoïenl; comme des toiles d'araignée 

f niais d'une fi grande fincITe, 

[*ills ne pouvoîent eftre apperceûs 

d'aucun homme, non pas mefrae 

d\m Dieu, tant ils eftoient imperceptibles, 

& fe déroboient aux yeux 

ïcs plus fins. 

Qjiand ce piège fecret fut bien 

«ârefTc* il & femblant de partir pour 

Lemnos, qu'il aime plus que toutes 

les autres terres qui ïuy font 

jconiaerées. Son départ n'efehappa 

as au Dieu Mars, que fon amour 

tenoît fort éveillé. II ne le vit pas 

uftoft parti » qu'il fe rendit ehe^ 

ce Dieu , dans l'impatience de revoir 

fa belle Gytherée» Elle ne yç*

? HoMERE. LifriVIIl 2 

ïioit que d'arriver du Palais de Ju 

piter ion père, & elle s*eftoit affife 

toute brillante de beauté- Le Dieu 

de la guerre en tre dans fa chambre, 

luy prend la main, & luy parle en 

ces termes : Belle Déeffe, profitons € 

d'un temps fi favorable f les mo- * 

ments font précieux aux amants, c 

Vukain n'eft point iey, iï vient de * 

partir pour Lemnos, & il cft allé * 

voir fes Sintîens au langage bar- c 

Il dit, & Venus fe lai0a perfuaît. 

Ils ne furent pas pluftofl couchez, 

que Jes liens de TinduArieux 

Vulcaîn fe répaHdïrent fur eux 

ïes enveloppèrent de manière* qu'ils 

ne pouvoient ni fe dégager nî 

remiler. Alors ils connurent qu'il 

e leur eftoit pas poffibie d'éviter 

d*eftre furprîs. Vulcaîn de retour 

de ce voyage f qull n'avoît pas 

achevé, entre dans ce moment, car 

le Soleil, qui eftoit en fentinelfe 

©ur ïuy, l'avertit du fuccés de fe$

's-f L'ODYSSé'E 

pièges. Il s'avance fur le ibûil de fa 

porte; à cette vue il cil faïfi de fu- 

tçur$ & le met à crier avec tant de 

rce, qu*ii eft entendu de tous les 

a» Dieux de l'Olympe* PereJupîierf 

m s'efcria-t-il, & vous , Dieux imj> 

mortels, accourez tous pour voir 

» des chofes très infâmes, SL qu'on 

s> ne peut fupporter. Lafiiïe de Ju« 

5> pîter. Venus me méprife parce que 

i* te fuis boiteux, 6c elle cft amoureu- 

» fe de Mars, de ce Dieu pernicieux 

s» qui devroît eftre l'horreur des 

*> Dieux & des hommes. Elle Faillie 

V 

^ parce qu'il eft beau 6c bien fait 

» que je fuis incommodé. Mais eft- 

» ce moy qui fuis caufe de mon maï- 

»hcur, ne font-ce pas ceux qui 

s» m'ont donné la naiffanec l hé pour- 

» quoy me [a don noient Us î Venez, 

* venez voir comme ils dorment 

» tranquillement dans ma couche ? 

» eny vrez d'amour. Qiicl fpcélaclç 

^ pour un mary l Maïs quelqu'amou* 

? reux qu'ils pujffent eftre 5 Je fuis 

leur

15'HGMERë- LbwVHL 15 

fcur que bïentoft ils voudraient «e 

bien n'eÛre pas fi unis ? & qu'ils m 

maudiront l'heure de ces rendez- « 

vous , car ces iîens, que fay ima- « 

ne#, vont les retenir jufqu'à ce « 

que le Père de cette débauchée * 

'ait rendu la dot & tous les pre- * 

lents que |e luyay faits pour elle. « 

Sa fille eft affeurément fort belle, «t 

maïs les mœurs deshonnorent ïa « 

beauté. *t 

A ces cris tous les Dieux fe ren 

1 

dent dans fou appartement. Ne 

tune qui es bran Ile la terre, Mer 

cure fi utile aux hommes, & Âpoi- 

Ion dont les traits font inévitables, 

s'y rendirent comme les autres. Les 

DéeiTes par pudeur & par bien» 

féatice demeurèrent dans leur Palais. 

Les Dieux eftant arriver, s'arréitèrent 

fur le feïiiï de la porte, 8c 

fe mirent à rire de tout leur cœur 

en voyant I artifice de Vulcain. Et 

Ion entendait qu'ils fe difoient les 

uns au* autres, Les niauvaïfesac* 

Tûme IL 

«^ 

-^

sS I/ODYSSé'S 

? lions îte profperem pas , ïe pcfatit 

A a furpris le léger. Car nous voyons 

* que Vulcain, qui marche pefam- 

» ment & lentement parce qu'il cil 

* Boiteux, a attrapé Mars qui eft le 

» plus léger & îe plus vifte de tous 

i» les Immortels. L f art afuppléé àï 

» nature. Mars ne peut s'empefchei? 

*> de payer fa rançon que doivent les 

» adultères pris fur le fait. 

Voilà ce qu'ils fe difoîent les 

11 m aux autres. Mais Apollon 

adreilant la parole à Mercure, lu 

» dit i Fils de Jupiter* Mercure^ qui 

*» portez les ordres des Dieux, & qui 

m faites de fi utiles prefents aux homm 

mes* ne voudriez- vous pas bien 

a tenir la place de Mars, ik eftre furm 

pris dans ces pièges avec la belle 

n Venus ? 

Le Meiïager des Immortels Iuy 

m répondit : Apollon, je m'eftimerois 

» très heureux d'avoir une pareille 

m avanture, ces liens dufTent-iïs en- 

» core dire pïus ibrts ? & duffies-

otoEBE. Livre VIII, Vf 

Vous tous, tant que vous eftes de et 

icux & dcDée-flesdans ï'OIym- * 

e , citre fpc

aS L'OD YSSE'ê 

* partit Neptune, fi Mars délivré dfi 

m fes liens /enfuît fans vous fatis 

3» Je vous alïeure que |e vous fatis- 

» feray. 

» Cela eftant f reprit Vuîcaïn, Js 

» ne puis m ne dois ïîen refufer à 

• vos prières. 

En mefme temps il délie ces 

merveilleux liens. Les captifs ne 

fe ïentent pas plufîoft libres, qu'ils 

fe lèvent & s'envoient, Mars prend 

ïe chemin de Tlirace % & la Mère 

des jeux & des ris eeïuy de Cypret 

& fe rend à Paphos ou elle a un 

temple ik un auiel, où les parfums 

exhalent continuellement une fumée 

odoriférante. 

Dés qu'elle y eft arrivée, les 

Grâces la déshabillent, la baignent, 

k parfument d'une effence immortelle 

qui eft refervée pour les 

feux , & rhabillent d'une robe 

charmante, qui relevé fa beauté 

£L qu'on ne peut voir fans admiration 

•

^HOMëRE. Livre VM .2 

Voilà quelle efîoit la chanfoti 

ne chantoit Demodocus. Ulyffe 

entendoit avec un merveilleux 

-plaifir, & tous les Pbeaciens eftoient 

charmez. Akinoiis appelle 

fes deux fils H ali us & Laodamas, 

& voyant que perfonnene vouloit 

leur dîfputer le prix de la danfe, il 

îeur ordonne de danfer leuïs. Ces 

deux Princes, pour montrer leur 

, prennent un balon rouge 

que Poïybe leur avoit fait. lAm 

d'eux fe pliant & fe renversant en 

arrière, le pouffe jufqu*auxîiuës; & 

l'autre s*eïïançant en l'air avec une 

4 

admirable agiîité , le reçoit Se le 

repoufle avant qu'il tombe à leurs 

pieds. Après qu'ils fe furent allez 

exercez à le pouffer &Ie repouffer 

plufieurs fois, ils finirent cette danfe 

haute 8c en commencèrent une 

baffe. Ils firent pïofieurs tours & 

retours avec une jufteffe nierveilleufe. 

Tous ïcs autres jeunes gens, 

qui efioient debout tout autour, 

* * m 

"J

O L'ODYSStE 

iattoient des mains, & tout retentiffoit 

du bruit des acclamations & 

des loîianges. 

Alors Ulyffe dit à Àlcinous , 

s Grand Prince, qui pr voftre bon- 

» ne mine eifacez tout ce que je voy 

» ky, vous m'aviez bien promis que 

m vous me feriez voir les plus habiles 

» danfeurs qui foient fur la terre, 

» Vous m'avez tenu parole, êc Je ne 

» puis vous exprimer toute mon a 

» miration. 

Ce difeours fut très agréable à 

Àlcînoûs 5 qui prenant aufil-tofl la 

% parole , dit ; Princes & Chefs des 

» Pheaciens, efeoutez-moy. Cet ef- 

» tranger me paroifl homme fage 

» d'une rare prudence ; faifons-luy* 

:» félon la coutume, un prefent» mais 

m un prefent aui loit proportionné à 

» fou mcrïic. Vous efles îcy douze 

» riiiices qui gouvernez JOUS mu y, 

30 & qui rendez la juflice au peuple; 

» portons icy chacun un manteau , 

* une tunique & un talent d'or,

D'HOMERI. Lime VIIL 31 

que cet eflrangcr ïes recevant de « 

îiollrc main, fe mette à table ce foir

^2 L'O DYSSE'I 

* dit quelque parole trop dure, fowf- 

» frez-que les vents Fem portent f aye2 

» la bonté de l'oublier, & Je prie les 

:» Dieux qu*ik vous fa fient la grâce 

» de revoir voftre fempie & voftrc 

» patrie, & qu*ïk finirent les maux 

» que vous fouffrez depuis long- 

» temps, elïoîgné de vos amis &: de 

%> voilre famille. 

» Mon cher Euryafe, repart Ulyf- 

» fe, puifliez-vous n'avoir jamais que 

» des fujets de joye, &quc les Dieux 

» vous comblent de profperitez & 

39 fafient que vous n'ayez jamais be- 

» foin de cette cîpce dont vous me 

» faites prefent , après m'avoir ap- 

» paife par vos paroles pleines de 

» douceur & de poliieJTe. En achevant 

ces mots f ii met à fon cofté 

celte riche efpée* 

Comme le foleil efloit prés de 

fe coucher , les magnifiques prefents 

arrivent , & les hérauts les 

portent au Palais d'ÀIcinoiis ? ou 

ies fils du Roy les prennent eux-

I> f HoMERl* thrêVIJL 3 

ïîiefmes des mains des hérauts & 

ïes portent chez la Reyne leur mo 

re. Le Roy marchoit à leur telle. 

Dés qu'ils furent arrivez dans 

Fappartement de la Reyne f ils $ ? af~ 

firent, & Àlcinoîis dît à Àreté; 

a femme f faites apporter îcy le « 

plus heair coffire que vous ayez, « 

après y avoir mis un riche man~ « 

teau & une belle tunique, 6L or- « 

donnez à vos femmes d'aller tout « 

à l'heure faire chauffer de feati ; m 

ïioilre hofte, après sêftre baigné « 

& après avoir vu ces préfets btea m 

jaugez dans ce coffre, en fbupera m 

trafteta niteux m 

e plaîftr de m muuque. Je iuy m 

onneray ma belle coupe d'or, afin m 

que quand H fera de retour chez m 

ïuy, il s'en ferve à faire des iîba- * 

tions à Jupiter 5c aux autres Dreux m 

en fe fou venant î au jouis de moy* 

La Reyne en mcfme temps don 

lie ordre à fes femmes d aller p

4 rODYSSEt 

Iles obëïflent* & mettent fur ïe 

feu un grand vaifîcau d'airain, elles 

îe remplirent d'eau ôc elles met 

tent *ieffous beaucoup de bois 

dans un moment le v ai fie au eft environné 

de flammes & Feau commence 

à frémir. 

Cependant Areté ayant fait tirer 

defon cabinet Ion plus beau coffre, 

le prefente à Ulyiîe^ & devant luy 

elle y met l'or* les manteaux 

tuniques dont les Pheaciens luy 

avaient fait prefent 9 & elfe y ad- 

|oute mi beau manteau & une tu- 

- nique magnifique. Qjiand elle eut 

» tout bien rangé, elle luy dit ; Ef- 

» tranger 7 voyez ce coffre, it lermc 

3, fort bien f vous n 

a> 

J avez qu'à y faire 

vollre nœud ? de peur que dans 

» voftre voyage quelqu'un ne vous 

* vole pendant que vous dormirez 

* tranquillement dans voflre vaif- 

s kaiu 

jbc divin UîyfTe m'eut pas pîuf- 

toit entendu la Reyne parier ainfi f 

4P 

J>

B*!ÎOMERE. Livre V1IL 35 

u'il jet la les yeux fur ces riches 

prefents, les enferma 6c les feella du 

ïiceud merveilleux dont Tingenieu^ 

fe Circé luy avoit donné le fecret* 

Dans le moment fa maiftrefle de 

Toffice le prefle de s'ailer mettre au 

aîn. Ils vont dan* fa chanabredes 

î>aïns. Ulyfle eft ravi de voir dei 

abs chauds, car depuk qu'il avoit 

quitté le Pakïs de la belle Calypfo5 

il il a voit pas eu la commodité 

d*cn 11 fer. Mais alors iï a voit tout 

à fbuhait comme un Dieu, 

Quand il fut baigné & parfumé 

5 & que les femmes luy eurent 

mh des habits magnifiques, il forth 

de ïa chambre des bains & aïïsi 

à la fa[e du fefïîn. 

La Princelfe Nauficaa, dont fa 

î>eauté eitoît égale à celles dm 

Déefles, cftoît à Feutrée de ïa fale *m 

Dés qu'elle vit Ulyffe elle fut frap 

pée d'admiration, ëc luy adreffaiit 

îa parole, die luy dit : Eft ranger, * 

fe vous fouhaite toute forte de « 

Vï 

i i *

3& 1/ODYSSE'ë 

h bonheur, mais quand vous fereX 

a» de retour dans vofire patrie , ne 

» meubliez pas ; fou venez-vous que 

m c f eft à moy que vous avez Tobligaa» 

tion de h vie- 

B Le fageU iyffe ïuy répond, Belle 

J> Princeffe , fi lie du magnanime Àl- 

» emoiis» que le mary de fa venera- 

» ble Junon, le grand Jupiter* me 

s* conduîfe feulement dans ma patrie 

» Se me fafle la grâce de revoir ma 

* femme & mes amis, je vous pro- 

» mets que tous les jours je vous 

* adreiferav mes vœux comme à une 

B DeefTe, car je ne tiens la vie que 

» de vous. 

Après avoir parlé de la fbrte3 il 

s'affied prés du Roy- Cependant on 

ît fes portions pour le feflîn, 

on méfie le virr dans les urnes. Un 

iieraut s'avance, conduifant par la 

Hiaîn le divin chantre Oemodocus^ 

il le place au milieu de la table 

ï'appuye contre une colomne. À 

ïoars U Iyffe sâdreflant m héraut

RE. Lhre VIIl |7 

luy mettant entre les mains la meîl- # 

ïcure partie du dos d'un cochon * 

qu*on luy avoît fervi, il luy dît : ** 

Héraut, prenez cette partie de lac 

ortion dont on m'a honnoré, & « 

donitez4à de ma part à Demodo- m 

eus, L'a fleurant que quelque affligé « 

que je foisf je L'admire & je l'honore « 

arfaîtemeiît; Les chautres comme * 

uy doivent eftre honnorez & xef~ m 

peeftez de tous les hommes f parce «• 

que c'ell la JVÎufe elle-mefme qui « 

leur a appris lenrs chanfons , & « 

qu'elle Les aime & les favori feP # 

II dit, & le héraut prefente de 

fa part cette portion au héros 

joye, On mange, on faix gran 

chère ; & quand l'abondance eut 

chaflé la faim , Ulyffe prenant La . 

parole, dit à Deraodocus : Divin m 

, je vous admire 3 & je «s 

Tons Loîie plus que tons les antres * 

mortels > car ce font les Mufes

L'ODYSSE'E 

m ont cnfeigné , ou pïuftoft c*e 

* Apollon luy-mefme ; vous chan* 

» tez avec une fuite qui marque une 

* eonnoifiance protonde 9 les inaî- 

» beors des Grecs, tout ce qu'ils ont 

» fait ik foufteri % & tous les travaux 

a§ qu'ils ont efiuyez, comme Ji vous 

» aviez efié prefent* ou que vous 

ai Feu fiiez appris d'eu x-mcfmes. Mais 

m continuez, je vous prie, &chantez- 

» nous le firatagefme du cheval de 

m bob qu'Epée conftruifit par le fe~ 

m cours de Minerve t ëi qu'Ulyffe 

m par un artifice allez heureux fit 

m entrer dans la citadelle 3 après Pa- 

» voir rempli de guerriers qui faccaa» 

gèrent Troye» Sî vous me chanter 

i» bien en détail toute cette avanîurCj 

m fe rendray témoignage à tous les 

>J hommes que c'eft Apollon luyx 

mefnie qui vous a didté une fi nierai 

veilleufe ehanfon. 

Il dit, & le chantre rempïî de 

Fefprit du Dieu, commença à chan 

ter, &expofa parfaitement toute 

*

B'HOMEEL Livre VIII 

Flîîfloire, comme fort bien Infor 

mé, commençant au moment que 

les Grecs s faifant fcmblant de fe 

retirer, moulèrent fur leurs vaifféaux, 

après avoir raïs le feu à leurs 

tentes. Ulyffe & tous les officiers 

d'élite, enfermez dans ce cheval P 

eftoient au milieu de fa place, car 

ïes Troyens cux-mcfmes Fa voient 

traîfné jufq ues dans la citadelle. Ce 

cheval eftoit là au milieu, & les 

Troyens aflcmblez tout autour, 

difcouroîent & propofoiem plusieurs 

chofes fans pouvoir conveîr. 

lî y a voit trois a\ is principaux* 

Les uns vouloîent que l'on mi 

en pièces cette énorme machine : 

les autres conJeiiloient qu'on la 

îraîfnafî au haut de fa citadelle 

qu'on îa précipitait des murailles; 

& le troifiéme parti eftoit de ceux: 

qui, frappez de ia Religion, fbutenoïent 

qu'elle devoît eilre inviolable, 

&: qu'il falloit la laiffer comme 

une offrande agréable aux Dieux

4» L'ODYSSê 

& capable de les appaifer, & ce der* 

nier avis l'emporta , car c'eftoiï: 

Fordre des Defthiées que Troyc 

perïft t puifqu'eîlc avoh receu dans 

fe$ murs cette grande machine * 

rofle de tant de braves capitaines, 

qui portoient auxTroyens îa ruine 

& la mort* II chanta enfuitc comment 

les Grecs fonts du ventre du 

cheval, comme d'une vafle caverne 

? faccagerent la ville ; H repre-* 

fenta ces braves chefs répandus dans 

tons fes quartiers & portant par 

tout k fer & la flamme. Il raconta 

comment UtyiTe accompagné de 

Meneïas & ferablabie au Dieu 

Mars* aîla dans îe Palais de Dcïphobus, 

& fouflint là un grand 

, qui fut Ion g-temps douteux, 

& dont la vïétoîre leur demeura 

enfin par îe fecours de Miner 

v e. 

Voilà ce qite chanta ce chantre 

ïvin. Ulyffe fondoit en larmes , 

?ifage en efioit couvert. Ii

D'HOMERE. Livre VIII 41 

pïeuroit auflï amèrement qu'un #• 

V 

femme, qui voyant tomber fon 

cfpoux combattant devant les murailles 

de fa ville pour la deffenfe 

de fa patrie & de (es enfants, fort 

efperdue & fe jette fur ce cher mary 

palpitant encore, remplit fair 

de fes ffemiffements £c le tient em- 

pendant que ces barbares 

ennemis f'achèvent à coups de pi 

ques ùL préparent a cette 

née une dure iervitude & des maux 

infinis. Elle gémit • elle crie . eïlc 

f * , * * W ^ * 1 ~ $ 

pleure, pénétrée de la plus vive 

dooleur. Ainfî pïeuroit Uîyffe, Ses 

larmes ne furent apperceuës que du 

feui Àlcinoîis 7 qui efloit afïîs prés, 

de luy & qui entendit (es fanglots. 

Touché de fa douleur, il dit aux 

Pheaciens ; Princes & Chefs de * 

mon peuple, efeoutez ce que j'ay * 

à vous dire. QiieDemodocus celfe * 

de chanter & de foiier de la Iyre3 « 

car ce qu'il chante ne pkîft pas éga~ « 

lemeiit à tous ceux qui i'entcii- «5

42 L f O DYSSE'ê 

B dent. Depuis que nous fornmes à 

n table Si qu'il a commence à chan- 

» ter, cet étranger n a celf é de pieu- 

» rer & de gcmtr f & une noire trif- 

» tefle s'eft emparée de fon efprit, 

» Qiie Demodocus celTe donc, afin 

» que noflre holïe ne (oïl pas le feuï 

» affligé 9 doivent eftre regardez comme un 

a» frère par tout homme qui a tant 

» foît peu de fens. Maïs auiîî, mon 

m hotte, ne nous cachez point par 

» une nnene intereuee ce que je vais 

* vous demander ; vous nous devez 

n les mefmes égards. Apprenez-nous 

s quel eft le nom que voftre père 

é voûte mère vous ont donné ,

D'HOMèRE. Livre VIÎl 4 

f bus lequel vous elles connu de vos « 

voyliïis ; car tout homme en ce

44 L'OîJYSSI'è 

* les efeiieiïs* Je me fouviens fêuïe-» 

a» ment d'avoir oiiî autrefois Natifi* 

» thoits nion père , qui nous difoît 

» que le Dieu Neptune eftok irrite 

36 contre nous, de ce que nous nous 

3& chargions de reconduire tous les 

* hommes fans dîftin

^HOMèRE, LhmVIIL 4f 

quelles terres vous ave£ efté jette ; # 

quelles villes , quels hommes vous « 

avez vus ; quels font les peuples «c 

que vous avez trouvé cruels, fau-

RE MARQUES 

SUR 

I/ODYSSEE D'HOMER 

m^^^î^^^^^^^p^^^^P^^^^î^^^-—^^pp^îigp 

LIVRE VIIL 

ï* 3 ^ T7T' c*efiûk fur le pûrt devant les 

i - JQj vmffeaux ] C eftort dans la place 

-qui eftoît entre les deux ports, & au milieu 

de laquelle on a voit bafli un temple à Neptune, 

comme nous l'avons vu à la fin du 

fixiéme LSvre- 

La Déeffe Minerve , &c. ayant prh la 

-figure d'un héraut d'Akînûih 1 Homère 

feint que le héraut, qu'A Ici nous envoyé 

appeller les Princes & les chefi auConfeif, 

cft Minerve efie-mefme, parce que cet envoyée 

1 effet de la fagefïe du Prince, & que 

par confequent eeft Minerve qui iuy a ïnC 

pire ce confâL 

Page 2* Pcir ces pœrûks elfe infpim ds 

la turiûfitê à tm$ les Ptwcts\ Il n'y a point 

die peuple fi curieux qu'un peuple riche f 

ui na d'autre occupation que les feux & les 

iveniflemcntSj car ïl cherche avidemeni 

tout ce qui peut luy fournir de nom eau£

HEMAtQ.sîm L*Om$s* Lfa V7IL 4/ 

pïaifïm Kien neftoît donc plus capable 

d'exciter fa curiofué êm Pbezàem que de 

leur annoncer un eltranger fi extraordinaire* 

qui avoït erréfî long-temps far la mer, & 

qm devoil faire des demandes à f affemblée* 

Page 3 * Mes 41 neus prie de hy fournît 

$remptemenz\ II dit nous, paiceqiae, comme 

fe J'ay desjâ dît ailleurs % le gouvernement 

des Pàeacrens neftok pas despotique, non 

|>fus que tous les gouvernements de ces 

temps-là ; le peuple avoit fes droits t & il 

eiloit leprefenté par ces perfonnages qui 

font appeliez Princes & Chefs, C'eft ce 

qu'Àriftote a fort bien efbhlî, quand il a dit ; 

ÉamhÊiGLÇ f£p ou? ëiih wiu&t *mleLÇ$L W 

dç/fifAêv- fui* fiêp 4 me* *nt4 H'ptovuwç ^wvç» 

mm 4* lm îwrmv /LS^ iwî mm ^ éetç/utÂriit, 

$P&mypç x yb lui %$% *h*M*

4& REMAïIQ Iî" E S 

deflre baftî & qui va faîre fon premîet 

voyage, maïs un vaifleau plus léger que les 

autres* qui va toujours devant la autres. 

Page 4. A qui £>ku a dûtrné Fart de 

ehanter] Homère rafiîiuë par tout que toutes 

1rs Sonnes & grandes qualités font de$ 

dons de Dieu, On ne peut paJ douter que 

îa mufique^ qui cm braflè h Poe/ie, 11 en fok 

un confiderable. Il y avoït

tnefme fous le nom de Demodocus. JI elï 

way que touies fes grandes chofès f qui 

I font dites icy de Demodocus» contiennent 

i à Homère. U eft un chantre divin comme 

Defhodocus . comme luy il charme tous 

ceux qui lentendent; comme Juy lia chanté 

les a\antures des Grecs de\antTroye* En 

un moi, pour me feivîr de ce qu'Euftathe 

a dit fort ïngenreufement» comme Hecube 

dit à fa filfe dans Euripide , Malheur eufe » 

car en te dûmiam ce nom w je me h dûnne à 

môy-mefme* Homère peut dire avec autant 

de raifbn à Demodocus, Chantre divin, 

chantre merveilleux, chantre qui charme^ 

les Dieux i? Us hommes, car m wus dûn~ 

nom ces lûiiangesje me les dûnne a m$y~ 

me fine* Mais )J ne faut pas pouifer cette 

re/fcmbLincc plus loin* 

Page 6. Il cântemk la cekkre difpuiê 

gi/Ulyfe ir Achille awtenf eut devant les 

remparts de Ttûye au milieu du feftin d'un 

Jkcrifîce j Dîdyme 9 & après ky Ewfîatbe, 

nous ont onuervé une ancienne tradition, 

qui portoit qu'après la mort d'Heiftor Icê 

Princes Grecs eftant aflemblez chez Agawamtnon 

à un feftin après un ïâcrjfïoe > oit 

agita quel moyen on prendrok pçur le ren +* 

die marftrçf de Troye, qui v^noit de per 

dre fon plus fort rempart f & que fur cela 

UJyife & Achille eurent une grande difputç* 

TûWU IL . Q 

**

• 

SUR L'ODYSSE'E. Lme V1ÎL 4s 

menti, îis ne iaïtfbïenr pas d'avoir toujours 

quelque chofe de ces temps héroïques. Ces 

exercices efl oient tm jeu pour eux. 

Page 8, Cembien mus femmes mdeffus 

de tous les autres hommes ] ÀJrinous dit 

mus femmes , en fe mettant de la partie 

parce que la gloire du peuple eft h gloire 

du Roy. 

Et te mené par k me/me chemin que temienc 

wus les autres ] On meneDemodo 

eus a cette aiiemoiee, parce qujl y 

queflioti de cfanfes & de mufïque* 

Tous ces 

noms» excepté celuy de Leodamas , font tirez 

de k marine. 

Page p. Et les îaîjfa tâus miffi km derrière 

iuy que de fertes muks] Ceft fa rae£ 

me comparaîfon dont iï selt fem dans ïe 

x. Liv. de FJlîade y où il fait voir l'avantage 

quWe charrue de mules a fur une charme 

de bœufk On peut voir tes Remarques, 

lom. 2- page 4 91. Les comparaîfonft qu'on 

tire de l'agriculture font toujours agréables* 

- A ^ oirtere pafle 

rapidement fur ces jeux, & ne s'amnfe pis 

à les defcrire comme M a fait ceux du xxm. 

ïiv. de l'Iliade. La raifort de cela eft qifky 

ib ne font pas du fajet, ils ne font amener 

G îï

I 

jffc ÏEMAlQÏÏSI 

que par occafion, & le Poète a écê çhoteà 

plus preflees qui 1 appellent > aa lieu qoe 

clans l'Iliade ils font neceCaïres & entrant 

dans le fujet, car il fafîûît bien hûîmorer let 

funérailles de Patrock. 

Page t 3» £f v^w tfV^; ftwl fait d'tm 

iterveié] Ûîyfle répond dans Itê meûnes 

termes dont Éuryafe seft fcrvL Euryâfe Juy 

a dît par la négative» VMS nuvei nullement 

fait d'un guerrier. Et Ul)ïïe iuy répond 

par l'affirmative » i^ *w*j vous awz tcui 

fmr d'un kûmms pm f&gë* Quand on trs* 

duit, il Eut s'attacher à rendi e ces tours & 

ces fi nèfles, parce qu'elle* fervent à h ]u£* 

ttzife des exprefîlons. 

llpmU mee rtttnue, Une hayirde run 

qui ftxp&fe eu repentir, ir tantes JêS pœ~ 

tûles fûiit pleines de douceur fr demedcjKe] 

Homère dit tout cela en quatre mots : S J%' 

quatre mots renferment tout ce que j'ay dit, 

AïipeLKmç dy>pâSw% parler feuremem, figm- 

Ce» parler avec reunmjhm brancher, c'efî 

à dire, fans faire aucune faute contre h pra* 

dente- Il y a un pioyerbe Grec qui dit ; 

II vaut mieux brmeher des pieds que de la 

langue* 

A pdm les Dieux mefmes pûurrûknt-ih 

0djûuur à mt$ bnime mine] Je fuiï eïtoi*?

SUR I/OBYSSE'E. ZiVrtf W/A $ 

née cîe l'explication qu'Euflatlie a donnée 

à ce vers» *&ff mv £M&ç tvM &*ç 'né^mîg 

qu'il explique t Dieu mefme m peut pas 

changer ee qui ejffait* Rien n eft plus hor* 

de propos ni plus éloigné de fa penfée 

d'Homère » qui donne icy un grand éloge 

I fa beau te & à la bonne mine d'Euryale, 

en luy difant » un Dieu me/me ne VûUS ferait 

pas autrement* ceft à dire» voui ne feriez 

pas mieux fait fi vous fortiez de h main 

dan Dieu , & qu'un Dieu luy-mefine vous 

euft formé. Et la fuite prouve que e'eft là 

la véritable explication, mais yens m&nque^ 

de (eus* 

Rige 14. Vos pamles ejlûwdies ûM 

excité ma cefere'J II dit cela pour exeufer la 

dureté de fa reponfe,&pour en demander 

mm clpece de pardon à toute f Semblée* 

Sansquitter Jim manteau] Homère veal 

laire en rendre que Jes Pheacîens effoîent k 

demi mds$ ce qui eft oit tin grand avantage* 

Page 1 5. Les Pheaciens, ces excellents 

mer3 ces grands rameurs ] Ce* 

épithetes ne font pas adjoutées icy inutilement. 

Ce font autant de rai fleries pour iaire 

| entendre que ce peuple P fi appliqué à la 

| manne , ne devoît rien dïfpuEer aux autres 

m les {eux & fe$ combats auxqmk 

on è exerce fur terre.

54 REMARQUES 

Page i 6. Fuifqui vous mW*£ ofmfé\ 

Uijfl^ adjoutc cette parenthefè, pour adoucir 

em quelque forte l'audace de Ton deffî* 

Page 17. Qiioy-qm tûusfes compagnons 

qui fenvironnent ayent tare tendu irpreji 

à ttrer jnr moy ] Jufqu icy on a fort mal 

expliqué ce paffage : Euftathe mefm€ s'y e 

trompe. Il a cru qu'UJyfTe ne loue icy que 

fa promptitude à tirer, & qu'il dit que quand 

lïiefme il auroît autour de Juy pîufîeurs 

compagnons avec Farc tendu & preft à tirerp 

il îes préviendrait tous & frapperoit fou ennemi 

avant qu'ils euflent feulement penfe h 

décocher leur flèche. Ce neft point-là le 

lems. Ulyffe dît une chofe beaucoup plus 

forte. Il dit qu'au milieu d'une foule d'en-* 

nernîs il frapperoit ceïuy qui! auroil choiiïj 

quand rnefme tous cesgens-îà auroient Tare 

bandé, & qu'ils fcroient prefts à tirer fur luy » 

ce qui marque en mefme temps & J'afîeu •» 

rance de ia main & l'intrépidité du courage 

Car fay toujours ouï dire, & cette raiibn eii 

bien naturelle, que ce qui lait très fou vent 

que ceux qui tirent le mieux à la chaffe, tirent 

mal au combat, c efl qu'à la cha/Te il* 

ïi'bnfc rien à craindre, & quau combat ils 

voyent des hommes prefls à tirer fur eux* 

Voilà ce qui rend tant de coups inutiles 1 en 

un mot» il y a plus d'adfefie & de fermeté à 

fiappei un ennemi eiïvteoBfîc de gens qui 

»-

sum L*ODYSSE'E* Lère V2IL $$ 

iirent» que s'ils ne tiroïent point Le danger 

tend h main moins feure. 

QpîfûM aujûurdhuy fur la terre if qui 

fe nourriffent desdûns de Cerés ] x7%v \£bi?~ 

ns, & par-là Ulyfle veut marquer les nations 

ci viiifees, policées , & non pas des nations 

barbares qui neconnoiflënt pas î'ufitge 

du bled. 

Ni à Efirylus d'Oechalief qui fur fadrejfk 

à tirer de tare, ûfûiem entrer en lice mefme 

cûTitre k$Dkux\ II failbit bien'que cet Eu* 

ijtus Roy d'Oechalie fe fentift bien adroit 

à tirer de lare,poifquepour marier faille 

loîe H fit propofer un combat, promettant^ 

de la donner à celuy qui le vaincroii a cet 

exercice» An refte 3 im Anciens ne s'accopéenî 

point fat cette ville d'Oechalie don& 

Eurytus eftoît Roy. Les ans la mettent en 

Theflafie 3 les aulres en Eubée, les autres 

dans laMcfifcnie , & Paufanias croît que les 

derniers ont raifon. Je m'en eftonne » car 

Homère dans le IL Liv, de l'Iliade lamefc 

parmi les vîlfes de Thcfîalie. Cetvt, dit-îf, 

qui habitoknt Trkûœ, tefmrpée frheme &* 

OechaUe qui eftoient de la dû minutie w d'Eu •m 

rytus* Car toutes ces villes efloient deThef#* 

fahe 

Page i 8» lin y a que h ûmrje] Il zdes* 

ja déifié ics Pheaciens à ïa courfe, emporté 

par la colère 5 icy il rabat ur> peu de cette 

C *,* m n 

lljj

5

s tri L'ODYSSE'E. Livre VHL 3; 7 

çz>mnie un exemple à fûivfe- Au contraire 

' iï le propofe comme un exemple à fuir j» & 

ceft ce que l'on verra dans la fuite- 

Qta nos plus excellents danfeurs] Il y a 

dans ie G rec f *f/ib/î5 îc j nos plus txcelfants 

datifmrs* m&imzm* Et on difpute fur 

ce mot pour fçavoir slJ vient de wfoi^w^ 

ludere, diinfer, ou de m&ieivïïfmref frttpper* 

J-'un & ! autre peuvent fe fcutenir* S'il vient 

de amiW, fefivâj il faut foufcntendre j*jy la 

* * rrc, & frapper la terre eft le fynonyme de 

^j/Sr, Vcff ainfi qu'Horace a dit qumium 

terrain, Od- 6* du liv* i » Et pqtmjpt ter- 

T&M* Od, 1 8, Iîv- 3* 

Page zi. Et tmmencem leurs danfhs 

$$êc une légèreté merveïtleufe ] Ce pafuge 

eli remarquaMe f non ea ce qu'il dît qite 

ces danfeurs danfoïent au fon de la lyre & 

aux dianfon* dumuficten, car il n'y a rie» 

là d extraordinaire , nous Pavons vu dané 

f îfîade, Livre svi 1 1 - Maïs en ce qu'il fait 

voir que dés ce temps4à on danfoudes)* 

des hiitoires» s'il m eft permis de parier aïnïL 

c'dt à dire, queksdanfeurspar Jeurs geft* 

& par leurs mouvements, exprimoîent fJii£to£e 

que chantoït le chantre, & que leur 

danfe eftoit limitation des avantures exprimées 

dans la chanfon. On fe rendit enfuîte 

1 nantie dans cette forte o imitation quoi* 

ïmitoit ce| avantures fans chant & fans p**

*< 

EMÀRQUE3 

le chantre chantait fur fa iyredes afnûUff 

d$ Mars ir de Venus] Scaiîger a fait ml 

crime à Homère de cette thanfon,& pai 

cette raîfbn il luy préfère Vïrglk. Demûdv* 

ctts t dît if, chante ks faùtei des Dieux 

dans k fefiin d'Akhwiis , ir f/ûpas de 

Virgile chante des chofes dignes d'un R$y 

dans le feflln de Didûn, Cette critique eft 

mauvaîfe de toutes manières. Scaliger ne 

$eft pas ïbiiveïïu de ïa belle règle qu'Àrîftote 

a donnée pour juger û une chofe eÛ 

bonne ou mauvaîfe, c'eft d*œwir égard à 

celuy qui parle§ ir à certx a fm il /adrefe* 

Fcëtîq, chap* 2 tefï un mufîcien 

qui fe& chante pendant le feftîn à un 

peuple mou & efféminé- Ainli fans aôrr recours 

à l'allégorie phyfique & morale que 

«ette fable peut renfermer,comme Ta fort 

bien remarque FÀuteur du Traité du Poë* 

me épique, fiv, 5. chap. 1 1. on fait voii 

que ce fafet eft très convenable aux mcelirs 

«les Phcadens, gens mous & effeminez, qui 

ne penfdîent tous les fours de leur vfe 

qu'aux jeux, aux pîaifirs & à l'amour > Se 

qu'Homère Jçart parfaitement accommoder 

les récits aux génies des peupîes dont if 

parle* Il en feigne par* là que la vie mofle & 

oyfne efl îa fource des voluptez criminelles, 

qm te$ hommes qui vivent de cette ma«

nier* uniquement occupez de leurs plaifirs, 

n aiment que ces contes d amour libres & 

licencieux t qui ne feroîent pas efcoutez a la 

table des fegef, & qu'ils fê plaîfent i enten^ 

dre ces récits honteux, & à faire les DîeuX 

aufïi vicieux & auffî corrompus qu'eux-mefmes. 

L'on peut donc conclure que ce *ecîl 

d'Homère eft bien moins un exemple pernicieux 

d'adultère & d'impiété» qiùin avîa 

très utile qu'il donne à ceuK qui veulent eCtre 

honneftei gens f en ieuï infinuant que 

pour éviter ces crimes, il faut fuir les am& 

les yojes qui y conduîfen t, & en méfiant à 

ce recît des termes infamants, qui font connaître 

le jugement quon doit porter dé 

cette aftion honteuïe, & qui font les préfet 

vatîfe contre le poîfon de la fidiou. Ccft ce 

que Plutatque a bien reconnu* car dans fou 

Traité cûrmmM il faut Bre ks Fuites, d 

nom avertit que dans cette foèh des ammrs 

d* Mars ir de Venus9 Vintetutûtt d i JH&mere 

ejï de faire entendre à ceux qm font eœpœ» 

*fes de refiâxiûM, que la miifiqm laftm®% les 

chanfons tiiffûluës &* les ditcâuts fur les fw* 

jets licencieux, rendent tes mafias

ëo REMARQUES 

gereux que ceux-là 3 s 7/ veut faire plus dar eiie-mefme des înftruftkm* qui la cor

fe 

SUR L'ODYSSE'E* Lhre Vîlt € 

Et eûmment il tavait comblée tie prefens 

13 y a donc long-tempi que les prefenrs ont 

un grand pouvoir f & fur les Dédies mcfiîies, 

% 

Entre d'abord dans fa forge, l'efprit plein 

de grands de feins de vengeance; il met fin 

énorme enclume fur fin pied f éfcemmeme à 

forger des tiens indifâlubks ] L'Auteur du 

Parallèle n'a pas mieux réuiTi à critique* Homère 

fur les artsp que fur (es idées & for fci 

ex profilons. On vrit, dît fou Abbé, que 

Vukahi forge for une gr#$fo enclume des 

Mens auffi menus qu% des tulles d'araignée* 

Le Chemîier fe recrie fur cek & dît fort 

doélement ; Le père de tmts les arts peut-il 

parler ainfi ! EfoU befoin d'une graffe enclu* 

me pûm faire des liens auffi menus que de g 

iûiles d'araignées I Le bm hûmme fçœvmt 

que ks orfèvres fr* hs forgerûMs uni de 

greffes enelumes, il ne faut pas lity en dt~ 

.mander davantage. Voilà une ridicule critique. 

Homère a grande rai (on de dire que 

Vulcain eut recours à fon enclume ; car 

quoy-que cc5 ïiens fuffent auffi déliez que 

des toiles d'araignée & imperceptibles p ils 

ne pouvoient eâre forgez que fur i enclume, 

parce que tout déliez qu'ils eftoientjf fdlmt 

encore qu'Us enflent beaucoup de force, 

afin qoeceux qu'ils dévoient retenir ne puÉ 

fmt les rompre. L'enclume a efté maîheu* 

reufe a ce Critique, car elle hy a fait dcsja

£% REMARQUES 

commettre une faute très groffiere, commit 

nous J avons vu ïur le ni. Livre. 

Page 2.2.. Qu'il'aimeplus qm imites ks 

autres (erres qui luy fmt cûfijacréés^ On 

a dit que Velcaîn aimoït particulièrement 

Lemnos, à caufe des feuK foufïerrains qui 

(orient de cette ïiïe, car ie feu eft Pâme des 

forges. Et ceît poutquoy aufTi on a feint 

qu il cftoît tombé dans cette iJtïe quand il 

fut précipité du ciel. 

Page zy Et ilefi allé voir [es Simiens 

Les Sintiens eftoient les peuplci de Lcm 

nos, &iJs eftoient sentis deThrace s'eflablir 

éms cette iile* il dît qu'ils partaient un langage 

barbare, parce que leur langue eiîoït 

lin compote de la langue des Thraces , de 

celfe des Âfîatîques & de h Grecque fort 

altérée & corrompue. Quand Mari dit* // 

tji allé wirfis Simims au langage barbare, 

îi y a dans ces paroles une forte de raillerie 

& de mépris; il yeut faire fcntit à Venus la 

jfctife d'un homme qui quitte une fi belle 

femme pour aller voir des peuples fi g*of» 

fiers. 

Page 2 4. Accûurei uns peur v&tr deê 

chûfes infâme s'y H y a dans le texte, tel que 

pous Pavons au |ourd*huyf^r^^r^^î/r voir 

des ehûfes rifibles* A w%* tu a îpyci yt. KOLSW^ &C. 

Or d n 5 eft ni wayfemblsble ni poffibleque 

[Vulcain appelle cettr avanmre riféfe, car 1

$UR CODYSSE'E. Une VHL 6% 

elfe eft très peu rîfible pour un mary; jay 

donc cra àmoir fuîvrç 1 ancienne Jeçors 

qu'Euftathe a rapportée, fî*>Uixçi&\

4 REMARQUES 

Les Dêeffes par pudeur érpat tienfèantâ 

demeurèrent dans leur Palais] Ces Dédie* 

lie dévoient ni ne ponvoîent afllfter a un tel 

ipeétacle* Homère donne toujours des marques 

de fitgefTe dans îes fictions mefmes ks 

plus JicenciGufes. 

Les mauvajfes afimts nepwfpermt pœsj 

Voîcj de cei inRmélîons cachées qu'Homère 

meile adroitement dans fes narrations 

pour former les mœurs & pour empefeher 

les jeunes gens d avaler le poïfon que la 

Ûîon prefente. Cette fafaîe cil d'un pemideux 

exemple, maïs Homère en corrige 

autant qu'il peut le venin par cette reflexioi* 

tfeâ Age qu'il fait faire aux Dieux, & qui en* 

feigne aux hç>m m cs? mefme aux plus puïffents 

, quifs ne doivent pas h ffatter que 

leurs mauvaifes allions feront toufoursTieureufes 

t que ce que Ton croît le plua caché t 

vient enfin en évidence, & que rien ne de^ 

meure impuni 

Page 2 6* Jfdars ne peut s*empefeher de 

p^yer ta rançon que doivent ks adultères 

pris fut le fait ] II y a VOIE donc dans ces 

anciens temps des peines pécuniaires pour 

îes adultères qui avoient efté forpru. 

, je mifthmrms très heur MM 

Jtmôïr une pareille avmture] On ne potivoït 

pas attendre d'autre réponfe de Mercure> 

qui avoit fervi à tant de commerces

SUR I/ODTSSR'E, Lbu VÏÏL é$ 

firrew. D'ordinaire les confidertis ne font 

pas pftis fagea qtie ceux quils fervent. 

Page 27. M&is prtftani fen fer feux, il 

ffwit înflamment Vukam

M U ÎM AR Q tJE S 

ïomon a dît : Sinhus k?mûplaudet manièus 

mfnfpopwîderkprû œmkâ, Proverb, 17,1 8* 

Mais comme il y auroît de la dureté à refufer 

en certaines occafions d eftre caution3 

par exemple, pour un père, pour un frère, 

pour un neveu, &c. Homère corrige cette 

fententea en di&nt que c'ejl une mauvmfc 

affaire que de je rendre cmuwi pour les 

ffiéekmts, car il eft indubitable qu'on fera 

obligé de payer pour eux- CTeft pourquoy 

Saïoraon a dit suffi 1 Empûrtâi ies mcuhles 

if les haèks de eeluy fui a eautiûnné pmr 

Fejtranger* Tuile vejîimentum ejus qui [pa~ 

pvnderttprû extrme-û, Proverb. 20. iè* & 

Page 28. ^f^rj* prend le chemin? de la 

Thrate, if (a trœre des jeux ir des ris ce* 

luy de Cypté\ Homère peint par-ïà le génie 

& le naturel de ces deux peuples, Mars va 

cnThrace , parce que îesTbmces font beiïîqueux, 

& Venus va en Cypre* dont les hah 

liants font mous & effeniinez, & adonnez 

à famour. 

Page 29* IMyffb Fentendûk avec m mer~ 

yeillmxpfaifir] Homère enfeigne par-là que 

Jes fages peuvent quelquefois entendre avec 

plaifir ces fortes de chanfcns, mm le plaîfif 

«ju'elies leur donnent eft bien différent de 

teluy qu'elfes font aux fous. Le /âge* diE 

fort bien Eufla&e, ejî charmé de la beauté 

df la Pûëfw if de la majifue, Hfent a quii

SûR VODYSSè% Lhre V1IL 6? 

y & d'utile èr etinflruéiîf, ir il démefle mef* 

me par Jon intelligence ks tnyfleres cachet 

pus une fiélwn ingenieufe ; au lieu que les 

mires ne gonflent que ce qui favwtfe leur 

cûrmftwn, 

L'un d*eu# fe pliant iffe reiwerfam en 

tarière, k peuffe jufqu'aux nuis ] CefloïÊ 

une /orte de danfe où Futi poufïbit un ka* 

Ion en fair, Fautre le repoufïbif, & Ms fc le 

renvoyoîem énf% plufîeurs foîi, fans le Jaï£ 

îet tomber à terre, & cela fe faifoît en cadence. 

C eftoît une efpcce de émît hante* 

c efl pourguoy elle eftoît appelfee d%î&, ffe 

tvçpLvU, etërieneSi ceîejle* 1-e médecin He* 

rophife avoît compris parmi les exercices dç 

h Gymnafticjue cette danfe au èalen, G'cfl 

pourcjuoy l'on avoit adpûté un baîon à toit 

les Inftruments de fa gymnaflique dont 00 

avoit or Hé fa flatuë. 

Jls f Tarent cette danfe limite? &* en eëMmencerent 

une kaffej ÛcÛ le wi table fent 

de ce vers, éo^lSnv *ft| J m& m-n ^%KJ* Ils 

commencerait à danjer a terres 11 oppofe 

manifestement la danfe à terre à la danfe 

au baïon, dont ii vient de parler, cjni tÛ I# 

danfe haute ; & comme celle-cy eltoît ap-* 

pelée ûù^L'JCL, ceUJte ; Faûtre, comme dit 

Euftathe » poevoit eftre appellée %$wmt 

ceft à dire, îerrep*e* 

Page 30. Vous m 1 ami bien promis] Le 

xecdù - Vbm ut'atiei menacé, dmfà&fa

êU RlMAlQUtS 

Les Grecs ont dit menacer pour promettre* 

Et Ici Latîjis Jes ont imitez ; c f eft aînfi 

qu'Horace a dit » imrfbi ifpreelara mtnan* 

VQUS ejfes icy d&uqc Princes } Tï y a dans 

le Grec : Il y a ky dûtqe Roys qui régnent 

fur te peuple, à* je fuh te treizième* Ces 

mots» irje fais, ne marquent pas l'égalité» 

TOâîs au contraire la fuperiorité % car on ôît 

que ceû Juy-mefme qui donne les ordres* 

Ces douxe Ro}«s ou Princes eitoîcnt le* 

principaux qui gouvernoient fom Iuyt cart 

comme je fay desp remarqué P ceftoît ui* 

cftst meflé de Royauté d'oJsgarchre & de 

démocratie. Cet douze Roys ou Princes eP 

loient à peu prés ce qu'efloîent autrefois le* 

douz€ Pairs en France» 

Page 3 i. Jlprefente cette efpêe à Uiy0l 

ÏI paroîH par ce paffiige que les Pheadens 

porloîcîit l'efpée, car quoy-qu'Àicinous ait 

«fît qu'ifs ne manioïent ni Tare m le carquoisy 

Us ne Jaifîoient pas de porter des armes 

rfeffenfivcs# 

Page j 2. £/ ffifettt que vmis n'oyei jm+ 

wdsbefmn de cette tjpée] Euibthc a dotmê 

wn /e«5 tout contraire ; p^jfay-je n*ûWÎT 

jamais èefbln de cette ejpèt* Car comme 

on croyoït que les prefens des ennemis 

cfioîcm funefles, Uiyflc pour détourner 

l'augure > fouhaste de n'avoir jamais héoin 

et 1 recourir à celle efpée, mais de U garder

Comme un déport. Je croy qifluftathe fc 

trompe, fe fouhzlnïXJiyffk ne doit pas elïrcs 

en faveur de ïuy-mefme» if doit eflre en fVveurde 

ceîuy qu'il remercie & dont il reçoit 

Jç.prefeirtj c'eft auflfi le (cm naturel que I« 

vers d'Homerc prelente ; MnJi *t mt %i* 

ffijf y* 33V ffflimJfc j*ro#ia. Nique tlbl im 

pûfîervm defiderium enfis evea^t. Ce îtèi 

eft clccïiî£ FaJJ'ens les Dieux qm wus nayeg 

jamais èefûin de cette efpée* Ceft à dire, 

faiTent les D/eux que vos jours coulent en 

paix» & que jamais ni guerre cftrangere ni 

éémtHé domeftique rrc vous oblige à la 

tirer, SL à regreter ceiïe éont vous m'ho* 

îlorez* 

33. Faites tfppûrter ky kplus èeœu 

€$ffre que wus ayti ] Une des grandes 

fomptuofitez des femmes de ces tempêta 

conflit oit m de beaux coffres, & eefl de 

ces coffres qu 00 a voulu expliquer

_*-*_ •"•"• *-* J.,J. 

-P-^- -. »• "l*-m -HUM, 

pas d'un fi grand pofds que cefuy que nofii 

connoifîbnsf car k Roy ne doit pas donner 

moins que les autres f ou que le travail 

rendïft cetle confie plus prédeufe, ou que 

ïc Roy h donnai* de lurcroift, quoy-qai! 

n'en parie point » ou enfin quelle 

plui d'un latent 

Page 3 5. Et ksfcetk dnn nœud mer* 

milieux dam tingentettfe Circé luy avûit 

donné le f cet et ] Dans ces anciens temps A 

avant i ufege dea defs, on avoît accoutumé 

de fermer avec des nœuds que cliacun fai* 

fok k Ja fantaisie, H y en avott de fi merveilleux 

& de fi difficiles, que celuy qui ïei 

a\o\t faits, & qui en fçavok le fecret, eftoii 

ïe feu! qui puft les deilier* Tei efîoit par 

exemple le nœud Gordien. 

Page j 6, Je VûUS promets que tous les 

jours fe vous adr effetay mes vœux comme à 

ttne Dceffel II ne fe peut rien adjouteràla 

polîtefTe d'UJytfe ~s la Princefle le prie de fe 

fbuvenir d elle, & de ne pas oubiïer les fe 

cours qa elle iuy a donnez, & Ulyfîé faiy 

promet de l'invoquer comme une Dé 

Alors Ufyfe sadreffam au héraut, iràty 

mettant entra les mams la meilleure partie 

du dûs d*vn cochon quon luy ctwit fervi^ 

Il fàuc cflre entièrement effranger dans 

fÀntiquhé pour avoir tiré de cee endrois

stjK L'ODYSSE'E. Lhrê VIII yî 

•un fbfet de nwquerîe, cQmme a fait TÀuleur 

du Parallèle. Ufyjp?, dit-il, cmipe un 

tiWYceau dé cûchûft, qu il dûtiw a manger au 

muficien, qui ejtoit derrière Ivy, lequel en fut 

èïen aijc* Rien n'eft plus mû expofé que 

le ûit 3 & rien n'eft plus ridicule que ccitç 

critique. Le dos du cochon efloît îa partie h 

plus honoiâhfej OBI fa feit à Ulyfle, & Ulyfïe 

pe donne pas un morceau de cochon à Domodocus, 

maïs il îuy donne une partie de 

cette portion, & Demodocu» la reçoit avec 

}oye comme une marque de Qittmction ce 

d'honneur. 

Page 37* Car ce faut hs Muf€$3 filles du 

grand Jupiter* qui VûUS eut ififtmit, mpkj* 

toji c*efi Apollon luy-mejme^ Ulyfïe ne dit 

S 

I /* ï i_ 1 *• I i *• j 

cela leeîement pour louer Ja pcaute des 

chants de Vcmodocus, mais ppr faire voir 

qu'ils font l'effet de ïînfpîration & de fenthoufïafroe. 

Car ce chantre habitant one 

ïile fi éioï&nce de tout commerce, félon ta 

luppoïjtion des Pheaciens, il n'eftoit pas 

poflibk qa'J euft eftéinftiiiit pr quelqu'un 

des avamuies des Grecs, H faut donc que 

ce foît Apollon qui les ïuy ait reveîées. C7eft 

pourquoy it dit enfuite qu'il les chante comme 

s'jï avoit efté prefênt f ou qiui Jes eiift 

Itpprîfes des Cjrecs mcfhies. Ce paflage eft 

|brt beau & d'une adreflê merveiiïeufe 9 car 

en loiiant parfaitement les Poètes, il fond^ 

ïi vérité de toutes les aventures avec tani

m. 

7* REMARQUES 

cle Cmretê & il évidence, qu'il eft impoflîhîe 

5tJ* t*Ot)rsÊ r E. Livre VIIl 7j 

ées u&ions dm hommes fages êc tempérants 

les fufets de leurs chaiifcn5& de toutes 

icups PoëfiesômmePbtarque Ta fort bien 

remarque. 

Avec me fuke ftd -masque me *

1^4 REMARQUES 

s\l h chante tdk qu die cil» on ne peut pîtti 

douter que ce ne fok Apollon qui i'inflruït, 

en luy révélant les chofcs pa(féest & en ïuy 

disant Joy-mefine la chanfcri. Encore une 

fois quelfe adreiïë merveiileufe pour nom 

forcer à regarder toutes ces avantnres de II 

guerre de Troye, non comme des fables, 

mais comme des hifîoires dont H n'eft pas 

permis de révoquer en doute la certitude 

& la écrite. Homère eft donc \erïtablemenl 

ce Poëte inftruk par Apollon mefme » & ce 

*|wiïï chante eft auïïi vray que s'il lavoit vû# 

JEl &• chantre rempli de fefpm du Dieu 

Homère ne veut pas que nous perdions un 

moment de vue cette vérité * que ce que 

chanteDemodocus fyy eft révèle par Apollon 

mefme. 

Page 3 5?. Commençant an mûment J La 

cïianfon qu'a chanté Demodocus fur les 

amours de Mars & de Venus eft rapportée 

leile qu'il fa chantée , mais il n'en eft pai 

de mefine de celJe-eyi Homère nen rapporte 

que Fabregc, & comme le canevas, &; 

ceîa paroift manifeftement par la fuite* com* 

me lorfqu'i! dit, il chanta cûmment Us Grecs 

faccagerem la ville* Ce qui n eft point détaillé 

icy. Et il reprefema ees èraves chefs 

répandus dans tous les quartiers* ce qui n'y 

cil point reprefenté, non plus que le combat 

u'Utyffe §L Menelas fouiinrem dm% le F%z

suit L'ODYSSE'E* Livre VIÏL 7 y 

îîiis cfeDcïphobus- Homère en feigne Jcy farla 

item en t fart de faire des Abrégez, comme 

Eufîathe fa remarqué* Cette hîftoîre et 

toit trop longue pour la rapporter entière* 

Et les Ttâyens a§embkfv îâut autour] Vk* 

gile, qui a û bien profité de cet endroit, a 

changé le temps, car il feint que tout cecy 

fe paffa avant qaon ewft receu ce cheval 

dans la ville. 

Cûmme une ûffrande agréable aux Dieux 

if capable de les appaifer\ Homère ne drc 

point que cette machine efloit coiîfâerée à 

Minerve, il dit feulement qu'après que les 

Grecs I eurent confirait*, Ulyfle par un 

artifice digne de ïay, porta les Troyensà fa 

faire entrer dam ïcur ville, & que îa phiïpaiif 

furent d'avis qulï fàltoït la relpeéler & h 

regarder comme inviolable, & la laitier comme 

uneoffiande agréable aux Dieux & capable 

de les jppaïfer. De-là les Poëte&> qui 

font venus dans h fuitef ont tiré tout ce 

a ïï$ ont dit du vœuiak à Minerve- àCCïUA 

avoit tratté ce fujet dans 6 pièce intitulés 

Deiphûèus, & je ne doute pas que Virgiîe 

ïùut profité des idées de ce Poète dans Fadjsiirable 

récit qui! fait de cette avanture m 

11 • liv- de fon Eneïde. 

Page 41. // pleurmt auffi ameretmng 

fu'wze femme qui veà tûmber fin efpmix ] 

Ceux qui voudraient critiquer cette eompa^ 

D \\

yé REMARQUE! 

taifon, pourraient dîrequ*die n'eft pas |uftc, 

en ce que la iemine a grand fujet de verfer 

des larmes» puisqu'elle tombe dans fe plus 

grand de tous les malheurs, & qu'Ulyfle, 

tfa aucun fûjet de pleurer f car de quoy 

pleure t-ïl ? P!eure-t-M de ce que fon artifice 

a eu tout le fucces qu'il a voit defiré ! 

mais ce feroit-Ià une fàufle critique* Homère 

ïie compare nullement la fortune d*UIyfic 

à celle de cette femme fi malheureufe j il 

compare Seulement les larmes de l'un aux 

krmes de l'autre > & fait une image très 

couchante. Et quant au fujet des larmes 

d'UIyfie » ceft bien ma! connoîflre la nature 

que de demander ce qui Jobligeoit k 

'eirrer. 

Page 42* Un fuppilant if un hûfla dm- 

Wfii efirû regarde^ cûtnme un frère J Voili 

une maxime digne d'un Chieilien- 

A^rcne^nûus quel ejl k nom que wfirê 

pereîfvûfite mère wus ênt dûimê, éfjûus 

lequel VûUS ejies cûimu ] A Ici nous (pecific 

cria en détail t pour Fobliger à dire fon véritable 

nom, & non pas un nom fuppofé, un 

nom de guerre qu'il pourrait avoir pris pour 

fe cacher & scmpelcher d'eftre connu- Cela 

eft donc très fenfc* Cependant I*Auteur du 

Parallèle relevé cet endroit comme unç 

jrandç folûfe d'Homère Aicuwds, dit-il*

» 

su* L*Oï>Vasift. Livïe Vïïl 7? 

mite b* (es vûyjtns l'appellent* car, adjom e* 

t ilt il n'y a peint d'homme qui n'ait m m ?îcn^È 

Jûk quil ait du mer ht, eu quU tfen mt 

pûim* A quoy le Chevalier aciîoute cette 

/âge Rcff^xîon : Ce fait dire a Ulyfe que 

quand mefme il fit fît le plus grand fetijlfe 

du mon de, cemme il en œyûit mi peu la mine* 

il m taiffereit pas d'avûîr un namf$fc* Voilà 

comment cet Auteur juanioït te fine critï*» 

que- 

( 

Page 4 3 * Car tout homme en ce mûnde. 

eu mèchant\ Cela eft vray en gêner*! 

jnais il peut y avoi& quelque exception, fes 

Anritns

78 REMARQUES 

elfe ne i eft point du tout pour ce Iîecïe4à, 

Ne d?fbit-on pas que le chefnede Dodone 

par bit ? Et 11 Vt'-on pa$ dit la mefme chûfe 

4e la navire Ârgo ! 

Page 44, Que le Dieu Ntptwtê ejfûit ir* 

rnê centre mus de ce qm ncus nous chargiâns 

de reconduire, ^#] Cela eft fondé fur 

ce qu'il efl naturel qu'un Prince ne veuille 

point que dam fon empire H y ait quelqu'un 

qui ne foit pus fournis à fon pouvoir, 

& qui fe tire de fa dépendance. Les Phcaciens 

ne le contentoient pas d'avoir le pri* 

viiege de courir les mers lins danger f iî$ 

aflbcioientice privilège tous ceux qu'ifs reconduisent. 

Aïnfi c'eïioient autant de gen* 

contre Jelqueïs Neptune ne pouvoit rien çn* 

treprendre ,ee qui Meffoît beaucoup fois 

autorité. Mais toutes ces fictions fi poétiques 

& û exagérées, ne font que pour ioiier 

fadrefib & i'habdetc des Pheaciens dans Fart 

de h marine, & leur gênerofité pour tous 

les étrangers, & on ne Jçauroit imaginer d'éloge 

plus parfait & plus magnifique. 

Et qu'il fiâtis menûÇûk qu'un JûUT un dt 

nûs vaiffeanx revenant de conduire un ef* 

tranger fhei luy\ Euftatfie Bous avertit que 

dans ki anciens manu faits, cet endroit 

effort marqué d'une pointe & d'une eftoife. 

JDe la pointe > pour maïquer que tout cet 

endiort, qui regarde cet mskn ccade, eft

0R L'ODYSSéE £/WV VIJL f$ 

déplacé îcy j & de Teftoife, pour marqueï 

qu'il cft fort beau. On pi étend que fa verp 

table place eft dans le x 11 i. Livre. Car f 

dïfbitôn, îi n'y a pas dapparence que f* 

Àfcïnous sfeftoit fouvcnu dans cette occasion 

de l'andea oracle & de Ja menace de 

t^pLUliVp ** UUU CHC cilii,£i Jldftii CL «LJlCiu 1111 

prudent pour remener l'ennemi de ce Dieu # 

Mars cette critique me paroîït très mal fondée 

, & il me fembfe qu'on en doit fugèr 

tout autrement t & que cet oracle tÛ très 

bien pïacé icy. Cet endroit renferme une 

leçon très importante. Les Phcariens font 

éivciLUi pur un dsiLieri or*tnc uw maux QUI 

leur doivent arriver un jour pour avoir remette 

chez luy un eft ranger. Us ne laï 

nas dr foire cette irTinn dp rfi3tïtr & il* 

faille rit aux Dieux Je foin d effectuer leurs 

menaces, ou de tes chaoger, perfiiadez que 

cLiï du\ nornmes a zaïrc leur devoir , VL 3. 

iaifler aux Dieux le foin du refte. Et que ce 

fuft-là leur efprit f ce qu'AïcinoiU adjoute 

ïe marque certainement, Et ce Dieu peut 

mcûtnpBr [es menaces* ûU les rendre vames, 

En effet Dieu peut changer fes décrets, & 

on peut efperer qu'il ies changera toujours 

en faveur de ceux qui font le bien. 

c 

Qfi J U périr mi au milieu de la mer\ Cette 

première partie de ï i oracle s'accomplit dans 

le %\ 1 1. Liv, ce vaifleau efl changé en 10+ 

un 

1 c+# 

-Jf

cher- Mais il ii'eft rien dit de h montagne* 

Et qu'une gramfe mmmgm wmhewhfur 

h vrlfe des Pheackns ] On prétend qu'Homère 

a rmsgîoé h chute de cette montagne, 

pour empefcfter h pofterite de rechercher 

où eftoît cette Mite des Flieadens, & pour ta 

mettre par-Ii hors d'eftat de le convaincre 

êe m en fort ge i car qui eft-ce qui ira chercher 

une îlîe cjuî n exifte peut-elîre plus, & 

qui ïi efl qu*un efcueiî, & an milieu de b 

jner ï Homère iâit tomber cette montagne 

fur cette ifie f comme il a fait ruiner par Ie§ 

Heures, par les vagues de la mer, & par le* 

eaux des cïeux îa muraiîfe qu'il a feint que 

îes Grées avoient baille au devant de leurs 

Page 4 $. Afin que la Pûëfie en tire des 

ghams utiles à ceux qui vimdtûM Après 

mx] Car v&îià la deftmatïon de fa Poeficj 

des ehofes qui font arrivées, & dont Dieu 

s*eft fervi pour punir le crimç & pour recom* 

penser la vertu, la Poe fie en tire des fujeîsutiles 

pour fcs chants qui inftîuifênt ia postérité. 

Celle qui neft propre qua corramre 

les hommes n eft pas digne du nom de 

% ûèji€* Et voilà pourquoy Bom*re mérita 

fur tous les autres le nom de Poète & de 

Poète divin t parce que des mafheqrs des 

Grec* & de$ Troyens il en a tiré des chants 

utile» à tous les fiedes* 

V

aux. L'ODYSSK'E. Livre VIIL %t 

Avez - wus perdu devant tes murs de 

cette place un imupsre, m gmdre] Homère 

raflemble icy les trois différents liens 

qui attachent les hommes les uns aux au «* 

très, & marque les degrés de préférence * 

le fangle premier, Ialliance le fécond,& 

l'amitié le troifîéme. Et ce neft quaprès 

ïuy que les Philofophes ont diflîngué ce* 

trois différentes fiailbns. 

Car un emû qm a ces bêtims qualité^ ] 

Je fuis charmée de voir qu'Home re» apré* 

avoir placé l'amitié dans le rang que la na 

ture luy donne, la rele?e & Icgate au 

me fine 

Dv

^^ggffffm^^gf^^ 1 •*• • mwmwmwtmmw* i • • i • t 

Argument du Livre IX. 

TT TLyjfe tbïïgé de fe déclarer, raconts 

%~s aux Pheacîens tûmes fes œyantwres 9 

fes cûmèats centre ks Cicûnims^fm arri 

I 

vée chei les Lûtûphages, ir de-là chc% le 

Çychpe Pdypheme* 11 leur raûcnte mifft 

êûmment ce Cycbpe dey&ra fix de fes 

Cûtnpagnms, la vengeance qu'il en draP 

ir la ruje dont il fe fervît peur fçrtir d§ 

la eawrne ûU il efoit enfermé*

-Jfr* '••• 

LODYSS 

D'HOMER 

.jpmnHIUKppfta 

LIVRE IX 

rudent Ulyïfe , ne pouvant 

refiftcr aux prières d'Aïcînoiis, 

lu y répond : Grand Roy, c 

qui efïaecz tous les autres Prlmcesj « 

c'efl afleurément une ibelle diofe « 

que d'entendre un chantre comme ce 

celuy que nous avons entendu ? c 

dont ïes chants égalent par leur * 

beauté les chants des Dieux mef- c 

mes. Et je fuis perfuadé que la c *-. 

n la plus agreabïe que l'homme « 

puiffe fe prôpofer, c'eft de voir c 

tout un peuple en joye » & dans *; 

toutes les maifons des feftim où * 

D vj 

«] 

Â

§4 17 O D Y S S F/E 

* Ton entende de belle mu fi que , les 

» tables bien couvertes Se tes urne^ 

» bien pleines de bon vin, d'où um 

*> efchanfon en verfe dans toutes les 

a* coupes pour en donner à tous ïes 

a> conviez. Voilà ce qui me paroift 

» très beau. Mais pourquoy m'orm 

donnez-vous de vous raconter tous 

» mes malheurs, dont le récit ne peut 

& que m'aftîîger encore d'avantage 

» & troubler voire plaillr ? Par ou 

*> doisje commencer ces trilles re- 

» cits ? par om dois-Je les finir ? car 

*> je fuis l'homme du monde que les 

a» Dieux ont le plus efprouvé par 

s> toutes fortes de traverfes. Il faut 

» d'abord vous dire mon nom, afin 

» que vous me connoiliiez tous, 

» qu'après que je feray efchappé de 

s> tous les malheurs qui me mena- 

» cent encore, Je fois lié avec vous 

a» par les fïens de Fhofpitalhé, quoy- 

» que j'habite une contrée fort éloi- 

» gnée. Je fuis Ulyïïe, M$ de Laërte» 

» Ulyffe fi connu de tous les hom-

D'HoMEftE. Livre IX 

mes par fes ru fes & par fes fbaia- ir 

efmes de fftierre & dont la fffoire «r 

Vole jufqu'au ciel ; je demeure * 

dans fille d'Ithaque, dont Fa#r eil * 

fort tempéré, & qui eil célèbre par c 

le mont Nerke tout couvert dis * 

Bois. Elle eft environnée d'ilïes «t 

toutes habitées* Elle a prés d'elle * 

Dulrchium, Samé & plus bas Zk- te 

eynthe qui n'eft prefque qu'une «c 

foreil, & elle eiî la. plus prochaine « 

du continent

6 V û D Y s s 

» mais clic n'a pâ me perfuader, caf 

» nous n'avons rien de plus doux ni 

» de plus cher que noftre patrie 

» nos parents , & pour les revoir 

» nous quittons volontiers le pays 

» le plus abondant & les eftabliffe- 

» ments les plus avantageux êc îc$ 

» plus folides. Mais il faut commciî* 

» cer à vous dire tous les malheurs 

*> qu'il a plu à Jupiter de m'envoyer 

i» dejûîs mon départ de Troyc. 

» Je n'eus pas pïufïoft mis à ïz 

m voile avec toute ma flotte, que je 

» fus battu d'un vent orageux qui 

» me pouffa fur les colles des Cieo- 

» niens vis-à-vis de ïa ville d'If marc* 

*> Là je fis une defeente ; je battis 

» les Ciconiens ; je faccageay leur 

» vîlïe & j'emmenay un grand butin. 

* Nous partageafmes noftre proyc 

» avec le plus d'égalité qu'il fut pof- 

» fible, & je prefîbis mes Compa- 

*> gnons de fc rembarquer fans perï> 

dre temps; mais les infenfez refit* 

m ïarent de me croire, & s'amufe*

B*HOMèRE, Livre IX. 87* 

rent à faire bonne chère fur le ri- c 

vage ; le vin ne fui pas efpargnë, « 

Ils égorgèrent quantité de moutons * 

fk de Bœufs. Cependant les Cico- « 

ni en s appelèrent à leurs fecours « 

d'autres Ciconiens leurs voyfins , * 

qui habitoient dans les terres, & « 

qui eftoient en plus grand nombre, ^ 

plus aguerris qu'eux, mieux difei- « 

plinez & mieux drelïe* à bien com-

I/O DYSSE'E 

» font*, quoy-qu'ib fuffcnt très fo 

m peikwra en nombre; maïs quan 

si le foleit commença à pancher verâ 

* fon* couchant, lis nous enfoncèrent 

i» & nous tuèrent Beaucoup de monde*. 

* Je perdis fix hommes par chacun 

» de mes vaiïFeaux, le relie fe fauvajr 

B & nous nous éloigna/mes avec joyc 

B d'une plage qui nous avoit efté fî 

» fimefte. Mais quelque preïTez que 

» nous fuffionsj mes navires ne parti- 

» rent point que nous n'eu fiions apm 

pelle trois fois à haine voix les 

m âmes de nos Compagnons qui 

» avoient elîé tuez. Àiors le fouve- 

* rain niaîftre du tonnerre nous enta 

voya un vent de nord très violent 

» avec une furïeufe tempcfte ; la 

» terre 6c la mer furent en un mo- 

» ment couvertes d cfpaïs nuages, & 

» une nuit obfcure tomba tout d'un 

* coup des deux. Mes vaïfieaux ef- 

* toient pouffez par le travers fans 

m tenif de route certaine ; leurs voi- 

n les furent fcien-toït en pièces pai;

B"HOMèRE. Livre IX. 

îa violence du vent; nous les î>aiF- * 

fafmes & les pliafmes pour éviter « 

la mort qui nous menaçoît, & à « 

force de rames nous gagnafines * 

une rade on nous fufmes à cou- « 

vert. Nous demeurafmcs-Ià deux « 

jours & deux nuits accables de ira- * 

vail Se dévorez par le chagrin. Le « 

troifiénie jour , dés que l'aurore «t 

eut paru, nous relevafmes nos maïs, « 

déployait nos voiles, que nous « 

avions raccommodées, nous nous « 

remifmes en mer. Nos pilotes, fe- « 

coudez par un vent favorable,nous « 

mcnoicni par le plus droit chemin', « 

êc je rnc fiât lois d'arriver heareufe- « 

ment dans ma patrie ; mais COîïï- m 

me je doublois le cap de Malée3 «i 

k violent Borée & les courants de m 

j . . - _ _ ^ ^ __*/" _ .

£ô U O B ï S S E'£ 

li rïflent du fruit d'une fleur. Non 

m defcendifmes, nous fifincs de l'eau 

, uw%*%> #»-*JI^ **i- * ^«*^#y 

a> & mes Compagnons fe mirent à 

» préparer leur difher, Après le re- 

» pas je choifïs deux des plus hardis 

m de la troupe, & je les envoyay avec 

» un héraut reconnoifire ie pays 

» s'informer quels peuples Fhabi- 

» toient. Us marchent bien délibes» 

rez & fe méfient parmi ces peuples, 

» qui ne leur firent aucun mauvais 

m traitement; iïs leur donnèrent feu- 

» îement à gonfler de leur fruit de 

m lotos. Tous^ceux qui mangèrent 

* de ce fruit ne vouloient ni s'en 

» retourner, ni donner de leurs non- 

* veïtes , ils nWoieiït d'autre envie 

•-^ 

» que de demeurer-là avec ces peu- 

» pies, & de vivre de lotos dans un 

» entier oubli de leur patrie. Mais 

» Je les envoyay prendre , SL malgré 

fleurs larmes je les fis monter fur 

*> leurs vaifléaux, je les attachay aux 

» bancs, & je comnianday à tous mes 

» autres Compaeiions de fe rcmbar-

B'HOMEIE, Lhn IX. 91 

quer» de peur que quelqu'un d'en- «t 

tre eux venant à goûter de ce lo- * 

tos, n'ouMiaii fon retour. Ils fe «t 

rembarquent tous fans différer Se

% L'OJïY $$tt 

m & fe tiennent dans des antres. Clia 

m enn gouverne fa famille & règne 

m fur fa femme

B*HoMERE. Livre IX ff 

Hroyfiïis n'ont point de vaîfTeaujc, * 

que parmi eux il ny a point de « 

charpentier qui puîffent en baftîr « 

pour aller commercer dans les au- * 

très villes, comme celafe pratique

4 IJODYSS 

€> tendre tranqailicineiii que les pî- 

* fotes &: les vents appellent. À la 

m tefte du port eft une belle fourca 

» d'une eau excellente fous une s^ro- 

» te toute cotiverte d'aulnes. Nou 9 

B aooraaimcs a cette nie par une 

M nuit fort obfcure , un Dieu fans 

» doute iious conduifant f car nous 

» ne l'avions pas apperceuë ; ma 

m flotte efloît enveloppée d'une pro- 

» fonde obfcurîté Se h lune n elclai» 

;» roit point, car les nuages la cou- 

M vroient toute entière. Aucun de 

m nous nVvoit donc découvert rifïef 

» Se nous ne nous apperceumes que 

J» les flots fe brifoient contre les ter- 

JP res que quand nous fuîmes entrer 

» dani, le» port. Dés que nous y fuf- 

» mes, nous pliaiincs les voiles, nous 

p defcendifmes fur le rivage, ëc nous 

m abandonnant au fommeil, nous at- 

* tendîfme^ le jour. Le lendemain 

» l'aurore n'eut pas pluïiofc ramené 

m h lumière que nous commençai"m 

mes à JîOUS promener dans cette

'HOMERE. Lhré iX 95 

c, dont lajîeauté nous raviffbit. m 

Les Nymphes f filles de Jupiter , u 

rent lever devant nous des trou- « 

peaux de chèvres fan v âges , afin m 

que nous eu fiions de quoy nous * 

nourrir. Auffi - toft nous allons m 

prendre dans nos vaiffeaux des «e 

dards attachez à des courroyes^ ôc * 

nous estant partagez en trois ban- « 

des, nous nous mettons à chafler. « 

Dieu nous eut bien-toft envoyé « 

une chafle aiïez abondante. Jâvois «1 

douze vaiffeaux, il y eut pour cha* ^ 

uc vaiiieau neuf chèvres f fk mes ce 

Compagnons en clioifirent dix m 

our le mien. Nous paffafmes tout c 

le refte du jour à tabie jufqu'au « 

coucher du foieil ; nous avions de c 

la viande en abondance & le vin « 

ne nous manquoît point, car à la ^ 

prife de la ville des Ckonîens, mes m 

Compagnons avoient eu foin de « 

s'en fournir & d'en remplir de « 

randes urnes. Nous découvrions « 

A terre des Cyçlopes^ qui a'eitoit %

UOnrsstz 

m iepaïée de nous que par UK petit 

m trajet # nous voyions la îunice qiv 

* fortoit de leurs cavernes f & nous 

» entendions les tris de ïeiars trou- 

« peaux. 

» Dés que le folcrf fe futcctuchjé 

j* & que la nuit eut répandu fes tene* 

m farcs fur la terre, nous JIQUS mif- 

*> mes à dorpiïr fur le rivage, ik ip 

p lendemain à la pointe du jour j*a£* 

n Icmblay mes Compagnons , & je 

a leur dis f Mes amis» attendez-moy 

*> icy ; avee un ieul de mes vailîeaux 

J> fe vais reconnoiftre moy - inefme 

» quels hommes hajbkent cette terre 

» que nous voyons près ce nous, 

j© m'eiclaircir s*ils font inlolents f 

» erueïs Si injuiîes, ou s'ils font huit» 

mains, hofpiialiers & touchez de 

;» ïa crainte des Dieux. Edi achevant 

# ces mots je niosuay fur un de mes 

^ vaifleaux, Se je comgianday à im 

m certain nombre de mes Compa- 

» gnous de me Ai ivre Se de délier les 

* cables; ils obéïffcnt, ik s'eftant aifis 

fut

D g HOMfctl* Livre JX £7 

fur les bancs ils firent force de ra~ * 

mes. En abordant à cette îfïe, qui « 

n'eftoit pas éloignée, nous apper- * 

ceumes dan* l'en droit le plus reculé * 

rés de la mer un antre fort ex- * 

aiiiTé tout couvert de lauriers* ou * 

des troupeaux de moutons & de • 

chèvres faifoient entendre leurs * 

cris. Tout autour eftoit une baffe- «t 

Cour fpacieufe baïlie de greffes * 

îerres non taillées ; elle eltoit om- «t 

ragée d'une fuflaye de grands pins 

& de hauts ehefnes. C7eftoit-Ià m 

l'habitation d'un homme d'une tait- m 

îe prodigieuie, qui paifîbitfeul fes * 

troupeaux fort loin de tous les au- m 

très Cy dopes, car jamais il ne fe « 

meiîoît avec eux, maïs fe tenant * 

toujours à I écart f il menoit une « 

vie brutale & fauvage. C*eftoit un « 

monftrc eïtoimant ; il ne reffem- « 

bïoît point à un homme , mais à m 

une haute montagne dont le fom- « 

met $*étevc au deflus de toutes les m 

montagnes voyfines. J brdounay à « 

Tçam If*

m mes Compagnons de m*attencfr« 

J» & de bien garder mon vaiiïcau 

» après en ^voir choilî feulement 

j» douze des pïus déterminez, je m V 

& vançay, portant avec moy un ou- 

» tre d'excellent vin rouge, que m*aj» 

voit donné Maron, fils d'Evanthes 

and Pr.eftrc d'Apollon , qui 

» 

j» elloit adoré a Ifmare. lï m'avoît 

B fait ce prefent par reconnoîïïance 

& de ce que touchez de Ion earadlere, 

m nous l'avions fauve avec fa femme 

j» & fes enfants & garanti du pîllage# 

>a c&r il demeurait dans ie bois facré 

» d'Apollon, Il nie donna encore 

» fept talents d'or & une belle coupe 

» d'argent » & après avoir rempli 

m douze grandes urnes de cet excella 

ient vin, il fit boire tous mesConi- 

» pagnons* C'efioit un vin délicieux 

» ians aucun mellange, une boitibu 

» divine. Il ne la laîfïoit k la difpo- 

* ûûon d'aucun de (es efckves, pas 

» mefme de les enfants ; Il n'y avok 

uc fa femiçe ik luy & la xnaifire

'HOMèRE* Livre IX. 

e l'office qui en eufTent la clef, m 

Qtiand on en beuvoît chez luy, il m 

TOefloit dans la coupe vingt fois c 

autant d'eau que de vin, & malgré « 

ce méfiante il en fort oit une odeur « 

celefte qui parfum oit toute fa mai- « 

fon. ÎI n'y a voit ni fagelïe ni tem-

* parées ; il y en avoit de différentes 

* pour les différents âges. Les plus 

* vieux eftoient d un coilé , ceux 

m tfun âge moyen d'un autre p SL les 

ii plus jeunes cftoient auffi à part. Il 

* y avoit quantité de vaiffeaux pleine 

m de kit caiïlé, & on en voyoit d'au- 

* très tous prefts pour traire fes bre- 

* bis ÔL Çç$ chèvres quand elles rc- 

* viendroïent du parturage. Tous 

m mm Compagnons me prioient in- 

* Aammcnt de nous en retourner 

m fur l'heure niefme t de prendre fes 

» fromages , d'emmener fes agneaux 

m & fes chèvres , & de regagner 

n promptement noftre vaiffeau. Je 

* ne voulus jamais les croire; cêlioit 

» pourtant le meilleur parti - mais 

» à quelque prix que ce fuft je voua» 

lois voir ïe Cyclope » 

* s'il ne me fcroît pas les prefens 

» d'hofpiulhé f quo y-que je cru 

m bien que fa vue ne f croit pas fort 

* agréable à mes Compagnons* Nous

HOMERE. Livré IX. ïOï 

mïiumoïis du feu pour offrir aux € 

Dieux uo ïcger facriftce »

Ï02 U O I>Y sst 

* des paniers pour en faire du fro* 

» mage , & referva l'autre rnonié 

» dans des vaîlfcaux pour ïe boire à 

i& fou foiipcr. Tout ce ménage ef* 

» tant fini, il alluma du feu, Se nou§> 

^ ayant apperceus à la clarté du feu? 

» il nous cria ? Etrangers* qui eftes 

» vous ? d f où vcnez;-vous eu traver» 

faut les flots? Eft-ee pour le négoce» 

ce ï ou errez.-vous à l'avanturc 

^ comme des pirates qui efeument 

!» les mers, en exposant leur vie pour 

» pilfer tous ceuic qui tombent entre 

:» leurs iBaîns l 

Iû II dit. Nous tuf m es faifis de 

i> frayeur en entendant fa voix ef- 

» pouvantable & eu voyant cette 

» taille prodigieufe. Cependant je ne 

* laiflày pas de ïuy répondre: Nous 

s? fournies âes Grecs qui après le 

m fiege de Troye avons efte ion 

» temps ie joiiet des vents & des 

si tempeftes- En tafchant de regagner 

i> noftrc patrie nous avons eflé ef- 

» cartez de noflre route , & nous 

ï

OMÉRE- Livré ÏX. 10 

avons efté portez en divers pays* * 

€7efl ahifî que Ta ordonné le grand ce 

Jupiter, maiftre de la deHinée des & 

hommes. Nous fommes fuîets du «r 

°7 Agamcirmon, dont ïa gloire & 

remplit aujourd'huy la terre en tic- m 

re , car il \icnt de faceager une « 

viïle célèbre & de ruiner un Em- ospire 

floriflant. Nous venons em- «r 

braiïer vos genoux ; traitez -no us ** 

comme vos hoftes, & faites-nous

t©4 L'ODYSSE'I 

* avoir de l'humanité. Sçaehc que lès 

s> Cyclopcs ne fe fondent point de 

» Jupiter ni de tous les autres Dieux, 

t» car nous fommes plus foru & plus 

*> pui fiants qu'eux ; & ne le flatte 

m point que pour me mettre à cou* 

s? vert de fa coîere, j auray compaf* 

» fron de toy & de tes Compagnons 

» fi mon cœur de ïuy-mefine ne 

& tourne a ïa pitié. AI aïs dis-moy oh 

» tu as laîiTé ton vaiffeau ? Eft-te prés 

*» d'iev „ où à rextremité de l'ilîe ï 

j » 

2» que je fçache ou II efL 

» II parla ainfi pour me tendre 

» des pièges, maïs j*avols trop d'ex^ 

m perrenec pour me lai (Ter lurpren- 

* dre à fe$ ru Tes. J'ulav cle rufe 

» mon tour ce je luy répondis : jNcpaa 

lune, qui esBranile [a terre quand 

* M luy pbiil f a fracaifé mon vaif- 

» feau en ïe pouffant contre des rom 

elles à la pointe de voflre terre, les 

m vents & les flots en ont cîifperfé 

» les débris, & je fais efchappé feuï 

p avec ies Compagnons que vous 

J*

!>^HOMERE- Livre IX. ïOJ 

troyez devant vous. m 

À peine eus-je fini ces mots que m 

îe barbare fe jette fur mes Com- « 

pagnons, en empoigne deux & les « 

fioifle contre la roche comme de pe- m 

lits faons. Leur cervelle rejaillit de • 

tous coflez & le fan g inonda la terre * 

tout aux environs. 11 les met en pie- * 

ces, les préparc pour fon fouper, & * 

les dévore comme un lion qui a « 

couru les montagnes fans trouver de 4 

roye; il mange non feulement les * 

air$3 mais les entrailles & les os* m 

A la vue de cet horrible fpeélade m 

nom fondions en larmes» levant

io6 I/O orssÉE 

» mais une eonfideration très forte 

» me retint. Si je l'avois fait nous 

a> aurions tous pcri maîheureufcment 

» dans cette caverne, car jamais nous 

» n'aurions pu ofter de fa porte Fef- 

» pouvantabîe roche dont II lavoît 

w bouchée. Nous paffafmes ainfi la 

J» nuit dans îa douleur êc dans les 

» angoifïes en attendant le jour. Le 

a* lendemain âês que l'aurore eut do- 

» ré les cimes des montagnes, il allua> 

me du feu, fe met à traire les bre- 

» 

i 

» DIS les H nés après les autres raffafié iï ouvrit la porte de Pantre^ 

a» fit fortîr fes troupeaux f fortît avec 

& eux & referma la porte fur nous 

» avec cette énorme roeBe auffi fa- 

» cilement qu'on ferme un carquois 

» avec fon couvercle % Se fkîfaut re- 

» tentir toute la campagne du foiî 

» effroyable de ion chalumeau ?

lïicna fes troupeaux vers k monta- m 

ne. Je demeuray donc enfermé ® 

dans cet autre , méditant fur les » 

snoyens de me venger, fi MinerVc « 

von Soit m'accorder la gloire de « 

punir ce monftre. Plufieiïrs peiifées * 

me payèrent dans la tefte ? mais en- & 

n voicy ïe parti qui me parut le « 

meilleur, Dam la caverne il f avoit « 

une grande xnaffuë .e bois d'oli-

toS L'ODY sst 

h Je la cachay dans du fumier dont 

* M y avoh grande quantité dans 

* cette caverne, tnluitc je lis tirer 

* tous mes Compagnons au fort, 

* afin que la fortune choîfill ceux 

* qui dévoient avoir ïa réfolution 

* de m'ayder à enfoncer ce pieu dans 

» l'œil du Cyelope quand il feroït 

m enfeveli dans un profond fbmmeiL 

& Mes Compagnons tirèrent, &heu' 

» reufement le fort tomba fur les 

m quatre que j'au roi s moy - mefme 

» choifis à emie de leur intrépidité 

m Si de leur audace* Je me mis vois 

lontairemcot à icur telle pour con* 

*> duire cette entreprife fi periileufe, 

m Sur le foir le Cyclope revint des 

* partu rages à îa telle de fes trou- 

> peaux , il les fait tous entrer» 

» contre fa coutume il ne ïaîlFa au~ 

» cune befte à fa porte $ fok qu'il 

& craignîfl quelque furprife, ou que 

» Dieu Fordonnaft ainfî pour nos* 

» fâuver du plus grand de tous les 

angers. Âpres qu'il eut

OMÏRI- Lîvn IX. tû$ 

la porte avec cet horrible rocher» * 

il suffit & fe mit à traire fes brebis m 

& fes chèvres à fon ordinalre> leur » 

donna à chacune leurs petits, & * 

quand tout fut fait, il prit encore e 

deux de mes Compagnons, dont il m 

fit fon fouper. Dans ce moment * 

je m'approchay de ce monftre f & * 

îuy prefentant de ce vin 5 que j'avois « 

apporté, |eiuy dis, Cycïope, tenez, * 

beuyez de ce vin, vous avez aïTez 41 

mangé de chair humaine ; vous m 

verrez quelle eft cette hoiflon, dont « 

j'avois une bonne provifion dans m 

mon vaifTcau ; ie peu que j'en ay « 

uvé, ]e i'ay apporté avec moy m 

pour vous faire des libations corn- m 

me à un Dieu > fi touché de corn* « 

paffion vous avez la borné de me m 

renvoyer dans ma patrie. Mais vous * 

Vous cfles porté à des excès de * 

cruauté indignes de vous. Eh qui m 

penfez-vous deshormais qui vou- m 

dra venir dans voflre îfïe, quand m 

on fçaura avec quelle Inhumanité a

ne L'ODYSSE'E 

* irons traitez les étrangers I 

* II prit fa coupe de mes mah 

* fans me répondre & but. II trouva 

* cette boiflbn fi délicieufe 3 qu'il 

» m'en demanda encore» Donne-moy 

* un fécond coup de ce vin fans l*ef- 

* pargner, me dii>îî, & dis-moy tout 

» présentement ton nom, afin que je 

» te faffe un prefent d*hofpitaiîté 

*> dont tu fois content. Cette terre 

» fournit aux Cydopes d'excellent 

*» vrn que ïcspïuyes de Jupiter nour- 

*> rifTent , imis iî n approthe pas de 

» celuy-cy; ce vin que tu me donnes* 

» ce n'eft pas du vin, c'eft la mere 

» goutte du Neétar & de f ambrofie 

* mefme des Dieux- Je lu y en pre- 

» fentay une troifïéme coupe 9 Se iî 

» eut l'imprudence de la boire. 

» Quand fe vis que le vin commet 

» çoit à faire fon effet & à ïuy por m 

» ter à la tefte, je luy dis avec beau m 

* coup de douceur f C y dope, vous 

» me demandez mon nom, iî eft afTez 

* connu dans le monde, je vais ven» 

1

D'HOMEHE- Lhn JX nr 

Fapprendre puifque vous Figno-

**•- 

11 % yoi>t&&t 

** pignonsF |e leur éh tout ce que |t 

» crus le plus capable de fortifier leur 

m courage , afin qu'aucun d'eux ne 

& fufl (mû de frayeur & ne reeulafi 

* dans îe moment de l'exécution. 

s Bicn-tofi le pieu fut û chaud que 

m quoy-qu'encore vert, il alïok s'en 

& flammer, êc il eiioit desja tout route 

ge. Je le tire donc du feu, mes 

m Compagnons tout prefts autour 

m de moy. Alors Dieu nVnifpîra une 

» audace /urnaturelle. Mes Compare 

gnons prenant le pieu , qui eftoit 

m pointu par le bout ? Pappuyent fur 

» 1 œil du C y dope, & moy m'efle* 

m vaut par deïfus 3 je le faifols tour* 

s* ner» Comme quand un charpentier 

erce avec un vireb requin une 

* planche de bois pour l'employer à 

a» la conftrudlloji d'un vaîfTeau * il 

* appuyé Fînftrument par deffus f 

m les garçons au deïïbus le font tour» 

m ner avec h courxoye qui va & vient 

j» des deux coiïez êc le vîrebrequin 

tourne fans ceCe ;*de jaefme «ou»

D'HOME*^ Zmv/X *ï| 

iïfîons tourner ce pieu dans l'œil • 

de ce monflrc. Le fang rejaillit au* « 

tour du pieu tout ardent- La va- * 

peur, qui s'élève de fa prunelle, luy n 

Brufîe les paupières & îes fournis* » 

les racines de ion œil embrafees

i^ I/ODYSSE'ë 

?I très des montacrnes vovfines. Ce; 

» Cyeïopes entendant fa voix, arri 

* vent en foule de tous coftez 

» environnant l'antre ib luy demana> 

dent la caufe de fa douîeur: Po- 

» lypheme, que vous eft-il arrivé l 

30 QM* c ^~ ce q 11 ! vous oMîge à nous 

» icveiller au ras lieu de la nuit, 

î> à nous appel 1er à voftre ayde 

% Quelqu'un emmene-i-il vos trou 

» peaux l Quelqu'un attente-1- II 

» \ oûre vie à force ouverte ou par 

;» la rufe ? Le terrible Polypheme 

» répond du fond de fon antre, He- 

» las î mes amis, Perfonnc. Plus iï 

» leur dit ce nom, plus ils font trora 

» pez par cette équivoque. 

» ce ncû personne qui vous a mis en 

» cet eflat, ïuy diient-îïs, que poua> 

vons - nous faire ? Pouvons - nous 

» vous délivrer des maux qu'il pîai 

» à Jupiter de vous envoyer * Âyc: 

» donc recours à voftre père Neptus> 

ne ^ 6c ïuy adreflez vos vœux pour 

» le prier de vous fecourir.

HOMèRE* Livre IX. n j 

Apres luy avoir donné cette bel- « 

îc confolation ils fe retirent» Je ne

ttS UODYSSÉ'E 

* des béliers fort grands & foft 

an beaux f & dont la laine de couleur 

a de violette efîoit fort longue 

aa fort efpaîffc. Je m'avifay d'en lier 

» trois ensemble, & pour cet effet je 

w pris les branches d'ozier qui fer- 

^ voient de Ift à ce monflre abomi- 

» nahle en toutes fortes dlnjufïiccs 

» Se de cruautez» Avec ces branches 

& f'afTembie ces béliers ôL les lie trois 

& à trois; celuy du milieu porioit un 

3? de mes Compagnons , éc les deux 

*> des collez Iuy fervoient comme de 

» rempart. Les voilà donc chacun 

& d'eux porté par trois bcUers. If 

s* a voit un bélier d'une grandeur & 

» d'une force extraordinaire 5 qui 

% mirchoii toujours à la icfte du 

j* troupeau, Je le reïcrvay pour mo) r 

a M eitendaiit donc fous luy & cm-* 

% poignant fa laine à pleines mains, 

% je me ténors collé fortement à fou 

» ventre avec beaucoup de réfolu- 

* tion. Nous paflbns la nuit en cet 

§ ciifiEj XIQïX fans beaucoup de craint©

J*" 

B f H0MIâl. Livré IX, îîj 

dlnqui étude. Le lendemain dés * 

que Fâurore eut ramené le jour, le c 

Cyciopc fit fcnir (es troupeaux « 

pour le pafturagc. Les brebis n'ef- « 

tant point trait tes à leur ordinaire, ^ 

fe fentant trop chargées de lait, c 

remplirent de leurs bcllenients la * 

bergerie. Leur berger, qui fentoit c 

es douleurs très algues , tafloït 

avec fes mains le dos de fes mou- « 

tons qui lortoicnt, ùL Jamais f m- c 

ienfé qu J ite(îoit, iï ne foubçonna m 

que mes Compagnons cftoient ef- © 

tendus fous le ventre de ceux du * 

milieu, Le bélier, fous lequel j'ei- « 

tois.fortit le dernier, chargé d'une m 

toifon fort efpaiffc & de moy qui c 

iDitois fort agite ôc rort inquiet. ^ 

Le terrible Polypheme le tafie avec « 

fes mains & Iny parle en ces termes ; es 

on cher bélier, ponrquoyfors-tu

nB I/ODYSSé'E 

» marchois le premier à la telle dit 

s» troupeau. Tu eftoîs toujours le 

j> remier clans les vertes prairies 9 

sa toujours le premier dans les eaux 

» dm fleuves $ & tous les foïrs tu re- 

# venois le premier dans ma caverne,» 

*> Aujourd'hui tu fors ie dernier* 

* Qji'cft-ce qui peut eau fer ce chana 

eremeiît î Eft-ce la douleur de voir 

B que tu n'es plus conduit par l'œil 

» de ton maiftrel Un méchant» nom- 

B mé Perfonne, afTiflé de fes Corn- 

M pagnons auffi feelerats que luyj m'a 

*» rendu aveugle, après avoir lié mes 

» forces par le vin, Ah, je ne croy 

® pas qu'il lu y fufl pofïîble d'éviter 

» la mort, fi tu a vois de ïa connoif- 

M fan ce & que tu pu/Tes parler & me 

» dire ou fe cache ce malheureux 

» pour le dérober à ma fureur * bien- 

» toit écrafé contre cette roche s ri 

>* rempliroït ma caverne de fon fan 

5* & de fa cervelle difperfée de tous 

» collez, Se alors mon cœur fentîroit 

# quelque foulagem en t dans les maux

OMERE. Lîwe IX, îï 

affireux que m'a fait ce miferable, m 

ce icelerat de Perfbnne. « 

En ftniïFant ces mots H laifle «* 

paiTer fon bellen Quand nous nous

k Qjiand Je me vis éloigné de fa 

* caverne de la portée de la voix, j'a- 

» dreffay ces par oies piquantes am 

* Cycïope » & je hiy ariay de toute 

» ma force, Cyefope f tu as eu grand 

* tort d'abufer de tes forces pour dévorer 

les Compagnons d'un hom- 

* me fans deffenfe » & ces maux ven^ 

* geurs ne pouvoîent pas manquer 

* de t'arriver* Malheureux f tu as 

» dévoré dans ton antre tes fuppliants 

* & tes hoftes, c'eftpourquoy Jupi- 

* ter & les autres Dieux t'ont puni 

m de ton inhumanité. 

Ces paroles augmentèrent fa fu- 

P rcur. Il détacha la cime d'une haute 

m montagne & fa jetia avec tant de 

* force-, qu'elfe tomba devant nofire 

* yaiïïeau* I-ja chute de cette ma 

m énorme excita un mouvement û 

0 violent dans la mer, que le fîot en 

* reculant repouffa noitre vaîfTeau 

* contre fa terre, comme auroit pu 

* faire ïe ffux de I océan, 6c penfa 

% ic f>rifer contre le rivage ; mais 

roov

^HOMERE. Livré IX. ï2t 

n*oy prenant auffi-tofl: un iongavi- « 

fon ? je le repoulfay &: Pélorgnay, c 

Et exhortant mes Compagnons je c 

leur ordonnay d*mi figue de tefte « 

e faire force de rames pour nous K 

mettre à couvert du danger qui c 

nous menaçait, ils rament en mef- «t 

nie temps fans fe ménager. Quand « 

nous Jxtfnics une fois miû loin , « 

jfadrefTay encore la parole au Cy~ «: 

dope, quoy-que tous mes Coni- K 

pagnons taicliafîent de m'en em- « 

pefchcr. Cruels que vous elles, me « 

difoieiit-ils, pourquoy voulez-vous *c 

irriter davantage cet homme bar- «c 

« 

i>are, qui en lançant contre nous «c 

cette énorme irtaïïe comme un * 

trait, a ramené noftre vaîfTeau con- « 

ire ïe rivage. Nous avons cru n'en « 

pas revenir* S'il entend encore vos^ 

mfultcs,0u feulement voAre voix3 * 

il nous écrafera & Lrifera noilre 

vaifieau avec quelque mafle de rocher 

encore plus grande, qu'il Unitéra 

contre nous.

*2fc I/ODYSSE'E 

T* Leurs remon fixantes furent ffî*» 

** utiles, j'eftois trop irrité contre ce 

*> monftre, pour me retenirP Je Iuy 

*> criay donc, Cydope » û \m jour 

*> quelque voyageur te demande qui 

*> t'a caufé cet horrible aveuglement, 

» tu poux répondre que c'eftUIyffe 

fc le deftruéieur de villes f fils 4c 

*> Laârte, qui habite à Ithaque» *" 

» À ces mots fes hourlcments re^ 

*> doublent & il fe'met à crier : Helas ! 

» voilà doue ^'accompliITement des 

.«> anciens oracles* Il y avoif autre- 

.> fois ïey un celcbre devin nommé 

** Telcimis fth d'Eurymus, qui a voit 

* ïe don de prédire l'avenir, 6c qui a 

T> vieilli parmi tes ^yciopes en exer- 

$ çatit & piofciliott. Il m avertit un 

i) jour que tout ce que Je fouffre 

» m'arrivepoit, & me dit en propres 

# termes que je ferais privé de I 

» vue par les BMÎnsd'Ulyfïe. Sur 

i> cette prédîtfliotî |e -m'atteudoïs à 

*> voir arriver icy quelque homme 

muj bien fait, de g*au4

% D'HOMèRE. Livre IX. 123 

une force bien au deffus de la ce 

ïioftre. Etaujourd'huy c I 

7 eû un pe- * 

trt homme, fans force, de méchante «s 

mine, qui m'a crevé l'œil après « 

m'a voir dompté par le vin. Ha F je m 

t'en prie, Ulyffe, approche que je * 

ce fane les pxefens d'hofpi taillé, Si * 

ue Je prefïe Neptune de favoriier « 

ton retour : le fuis fbn fils & il fe «c 

Ion fie d'cflrc mon pere. S'il veut * 

li a le pouvoir de me guérir* & je oc 

H attends ma suerifon ni d'aucun œ 

utrcDieu, ni d'aucun Homme, *m 

e te flatte point de la^guerifoe* «c 

lu y répandis-je, Se phift à Dieu que « 

j'euffe au0i*biea pâ te priver de la « 

vie. &,te précipiter dans le iomî>re M 

de P ut on j comme H eft « 

oyaume 

feux que Neptune ne te rendraipas « 

l'œil crue tu as peïdu. « 

Le C y dope piqué de ces ,paro- «c 

s, adreffe en mcfme 'temps fes ^ 

es à Neptune , Se luf dît en «r 

levant les mains au ciel ; « 

cand Neptune, «jui avez la 4 

if 

m

124 U O D Y S SE'E 

} force d*csbranï[er la terre jufqu ? à 

& fes fondements, efeoutez les vœux 

P que je vous adreïîe : fi je fuis verî- 

>* tablement voftre Bh » & û vous ef* 

» tes véritablement mon perc, accor- 

» de^-moy ce que je vous demande ; 

» empefebez Ulyffc » le ddlm&euï 

a> de villes, fils de LaèVte, qui ha- 

?» bite à Ithaque , de retourner fa- 

» mais dans fou Palais ; ou fi e*e 

» Tordre des Peftinées qu'il revoye 

-0 fa patrie ? fa famille & fes amis s 

» qu'il n ? y arrive qu'après longues 

» années , qu'il n'y arrive qu'après 

?» avoir perdu fes Compagnons, ea 

& méchant équipage «Se fur un vaif- 

& feau d ? emprunt, & qu'il trouve fa 

s maifon pleine de troubles. 

» II fit cette prière , ëc Neptune 

* l'exauça. En mefme temps il levé 

-0 une roche plus grande que la pre- 

*> mîere, & luy failant faire plufieuri 

* * tours avec fon bras pour luy don- 

» ner plus de force, il la lance ; h 

g mdiQ tombe derrière noïtrc vaif * 

^

* 

B ? K O M E R E* Livré ÏX. i 2 5 

u, II s'en fallut bien peu qu'elle rf 

ne tombaft fur le bout de la poup- ce 

pe & qu'elle ne fracaffafi le gou- % 

vcrnail- La chute de cette maffe « 

énorme fait reculer la mer 3 & le

5 aS UO D y s s E 1 

2> heurs , & rouloit dans fa telle îs 

>> deflein de faire périr mes vai fléaux 

» & tous mes chers Compagnons, 

» Nous paflafixics tout le relie du jour 

» jufqu'au coucher du foieil à faire 

» bonne chère & à boire de mon ex- 

*> ccllcnt vin. Quand le foleîl fut 

a> couché Se que la nuit eut répandu 

-& fës voiles fur la terre, nous nous 

5> couchafmes fur le rivage mefme, 

» ie lendemain à la pointe du jour 

>J je preiTay mes Compagnons de fe 

» rembarquer & de délier les cables* 

» Os montent tous dans leurs vaif- 

» féaux, prenait les rames & fendent 

» le fein de ia vafte mer, Nous nous 

» éloignons de cette terre fort joyeux 

» d'avoir efchanpé la mort^roais fort 

*> trilles de la perte que nous avio 

>j

* 

^ 

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*i 

V 

'**l 

ARQUES 

SUR 

E D'HOMERE. 

^ 

m*mm 

L I V R E IX 

ï'sge T^T Jû fuis perjuadé qm la fin fa, 

$$. Ali plus agréable qm tktmwe puiff* 

Je prûpûfer, cefi dû vdr îûUî m pmptë et$. 

foye] Le but d'Somcrc eft toujours de dop?* 

uer des irtflrucTtions miles, & de Élire voh 

que la volupté eft très oppose à h verfti ê% 

toujours tre* pernrcîeufe. C*eÛ ce qu'il ûâ% 

en tome ocofîon. Cependant voîcy m* pa£ m 

fage eonfideraMe cjuî » m relevant k ¥olwpté, 

fcmbic avoir pft donner lieu dan? let 

fiedes fuïvatits à Epicure d'en faire la prît!-* 

dpale fia de l'homme. Le* Anciens ouf 

ieaucoup diftouru fut cet endroit» & fe retat 

de ce qu'il* ont dît, eft quUlyÊk 

l'accommode au temps f aus coutumes 4fc 

aux moeurs de ceux à qui il parte » qu'il flate 

fe Piince dont îl a bjefoii^ & qu'il loue c$ 

que ce Prince trouve agréable & aîmabîc, 

Âicinous !uy idit dans ie Livre précèdent 

pag. 19. Nés dbertiffemms d$ îûUS 1$% 

ï 1UJ

^2,5 KE M ARQUES 

purs eefûM ksfij?pis, la mujiquc^ la danfe^ 

la galanterie, ire. Ulylïe par complaifânce 

fait iemblaflt ce trouver cela fort beau. On 

peut voir Athénée, liv- i 2. ehap. 1. Je ne 

nie pâi qu'il ne puiiîe y avoir de fa complaisance 

& cfe fa difîïjmufalion dans ces paires 

d'Ufyfife, mais je fuis peiiusdce qii'o:î 

peut les prendre à la lettre ans que ce fenîïment 

puîfîe eftre bfafmè, & fans qu'Homère 

doive craindre aucun reproche. Ulyffe 

vient d'effuyer des maux infinrs - 51 vient; 

de voir finir une guerre qui a dcfbié une 

grande partie de l'Europe & de l'Âfie, & 

apres tant de malheurs il a/iKe dans une 

Me où Fou ne connoiiï point (a guerre, & 

où le peuple eft heureux & paffe fa \ ie dans 

les platfirs. Que faïnl fur cela! il bue ce 

qu'il y a de plus hannefte, les feftins & fa 

Sîiufîque, & ne dit pas un mot de la galan •W 

terïe dont Afcinoûs a parlé, ce qui mepa 

tolû très digne d'attention ; ce neft pas une 

petite marque de la fagefîe d'Homère, De 

plus iî tourne en cfoge pour le Prince 1er 

bonheur dont fes peuples jouifTent fous luy ; 

Je fuis perfuadé f dit-il, que la fin la plus 

agréable qm Ukomme, ceft àdrre le Prince^ 

puiffe Je prûpûfer; c'efi de fuir tûut un pm~ 

pie Je divmir* Certainement on ne peut 

s'empefcher de reeonnoifire qu'un Prince 

eft très drgne de louange, quand il fe propôle 

de rendre lès peuples heureux & de 

^

siJB I/ODYSSE'ë. Lhre ÎX> 12$ 

les voir dans la joye. Et la plus grande marque 

du bonheur & de la foye d un peuple 

ce font les feftins &Ia mufiqoe, quand on 

n'en abufe point. îl faudrait dire bien Ictère 

pour bbfnftcr ces piaffes» qui n'orit 

rien de contraire srfhonneiïeté & a la vertu, 

& qui font un contraite admirable avec toutes 

les horreais qu'UljJTe vient de voir 

ïegncr à Tïoyc, & qui ont produit la roins 

de tantd'Eftats. 

La pi fa fias ûgfêaUc~] Le terme Grec 

*n\eç fignific proprement h fin, Et Je cro? 

que r'eft de ce paflage d'Homère que !d* 

Philofophes ont pris leur mot ^^^ fines9 

dont ds ïê fervent dans fa morale, pour dire 

le but auquel on rappous toutes fes pcalées 

, toiles fes allions, en un mot la fin 

où tout ie monde tend & que tout le monde 

le propose. On connoîû les beaux livres 

deOccron de Fîmèhs* 

Page 84.. Quûy que fhûMte une Cûrttrêf 

j^t thtgnée] Uljflc fait bien fs mut à cet 

Prince, en loy failant cioire par ces paroles 

qu'il cft convaincu de fa vérité de tout ce 

qu'il îuy a dît de 1 efoîgnement de fan iile. 

Pase 8 &j A« Zacvnthef$ui n'e, 

ftefque qu'une foreft ] ZacynU:e , Zanthe 

au roidy de CepJiateme ou Sam£ Ce il une 

ifïe de foÎJtanîv milles de tour, toute pleine 

et hautes montagnes couvertes de bois, 

/ 

• ¥

130 REMARQUE 

ceft ce qui iuy fit donner ce nom ; car, confine 

Bochart fa remarqué » h$ Pheaciens I* 

nommèrent aûnfi du mot Zachmh, qui fini 

ne /tumeur* 

Et elle ejl la plus prochaine du continent 

i?* la plus wyfme du pote] Strabon nous a 

avertis crue ce vers 

W* **»i -~&. * Ai 

Tlpoç Çétpêy* 

efte mal explique par quelques anciens 

4- 

Grammairiens : 

Ipfa auum humilîs èf jiihïimis in nmri 

fila cfi 

Verjus calîgînem* 

Comment peut-on appdler ba$e une iffe 

qu'Homère appelle encore icy tffwylrfW, 

êfcarpce, & qui efl comme un nidjiir des 

rockets ? pour me fêrvïï des paroles de Gceron 

l & î! nous en donne fa véritable expiicatioiî- 

Ce Mût j^flapmAn9 dît-ïJ, ne fypiiû& 

pas icy haffe, mais prochain* du comment* 

c^ wUMvwîp\gszm oc niininc pas îictutô j mais 

plus feptentrionale, plus voyfme du pôle, ce 

*|u*il détermine par ce mot wptç £opûi% 

rerfus calrgmcm: car par cette obfcurité il 

defigne le nord, comme par Y&arore & I& 

faim il marque Te eofté du monde oppofë 

au fcpientrÏQïî. On peut voir 1 endroit dans

SUR V ODTSSI'E- Lhre JX IJI 

fon liv. 9.1! eft vray que pour cet derniers 

mots,

132 REMARQUES 

cours auxTroyens, comme nous l'avons vS 

dans [e IL Livre de l'Iliade, où Homère dit 1 

EuphemiiS} fils de Trœifnus irpetit-fils ds 

€eus$ Cûmmandûk les belliqueux Ckenkns* 

De Je rembarquer fans perdre temps] Le 

Crée dît, JH/>ûT -mjj, & je ne voy pas coin-* 

ment onapâ expliquer cela d'un vaifîeaia 

JnpJ wS fignifre proprement fe pied en- 

£çre mûiullê, & c cft pour dire premptement? 

fans Je mfraifchir* 

Page 87. Et s'amuferent à faire benne 

chère] Comme cela efi fort naturel. I 

bonne chère eft le picmicr fruit que Ici 

foldats veulent lijir de ieur victoire. 

Page 8 8. Je perdu fx herrmes par chez* 

£un de m§s vaïffeœu* ] Yoïcy on des en* 

droits que limpatineni Zo'iic avoit cntî~ 

«quez* Comment cft ii poffiblc qu'il perïfi 

fuftement Sx hommes de chaque vaiJïcai:', 

& qu'aucun vajfïeau n'en peide pas datan~ 

cï Voilà, difcit-il; uii partage îkliculement 

égal Maïs cefl la critique qui efi ri» 

dicule & non pas le paLtage- Uly/fe avo% 

douze vaifteaux j dîtis ce combat il perdît 

Soixante &. douze hommes, ce n eft pas qu€ 

ia perte tuÛ égale pour chaque vaiftcAu , 

mai* ccil que prenant le total & en le réendort 

cumite fur toute la flotte % c'eftoit 

iiiuiîient U\ hmnme$ par chaque Yaiflean* 

s

stjR I/ODYSSE'E. Livre J% 13 

Que nous n'eu (fions appelle trois fois à 

hmte voix les âmes de nos Cmpagnons^ 

Ceftoit fa contume quand k$ Payens n'avoient 

pas le temps d'enterrer les morts 

dans une terre eftrangera , ils fe contera 

loîcnt d'appel!er trois fois leurs âmes à hau ^ 

te voix, comme pour déclarer qu'if ne te* 

noie pas à eux qaîis ne ies ramensfïen! 

dans leur patrie, & par-là lis croyaient wok 

facisfait à la Reiimon. C7efl aïnfi que dans 

k lîy. 6* de f Enéide, Enee dît à Deïphobus^ 

, # t » # £1 magna mânes ter voce yocavn 

Mes vaiffmux ejloicnt pouffa v&r le trrê 

yeis] Ceft ce que lignifie èmn&fmm, oblh 

qu&, de cûfie, iorfque les vaiffeaux ne vonl 

pas droit par la prouë > mail quiis fon2 

p#iiflê7 par !e cofté. * 

Page &9- Nuits ks baiffafmes if le S 

plîafmss puur éviter la mon ] Car quoy-que 

les voiles fuffent déchirées, elfes ne laiflbicnE 

pas de donner encore piifè au ¥ent 

Nous gagna fines une rad& oh nous firmes 

à tomert ] Homère ne nomme pas \i 

rade où Ulyfle aborda, car comme if ne 

s'attache pas toujours à 1 e&aâe Géographie, 

&L qinl Imagine une Géographie fàbaleufe 

pour rendre ks contes plut mer*reffieux , iï 

veut empekher quon ne le fuive3 &quoiî 

Ke découvre par-là te mciîfoiîfes dont ï

**%^ 

ïj4 REM ARQUES 

enveloppe les verriez qu'il a prifes pour fort** 

demeiiL 

De là je Vûgidity neitfjûurs entiers abandonné 

aux vents impétueux 3 èr le dixième 

jûury*t\irday a la terre iîes Lptûpkqge&] U 

y avoit fur cet endroit une grande dïiîerta— 

tion de Polybe , dont Sîrabon nous rapporte 

le précis s liv- i. Ce grand homme 

foutenoït quicy Homère n'ai oit pas placé 

cette terre des Lotophages dans l'océan Àî rm 

hr\t\qmf comme il y a placé celle de Ca 

ïypfo & ce'le de Grec * parce qu'H neftoit 

pas vrayfemblable qu'en fi peu de temps* 

en dix jourt» les vents les pfus forts euffeiït 

pourïc Uiyffe du cap deMaîce dans l'océan, 

il faut donc convenir q\*e îe Poète a fuivi 

ky 1 exade Géographie, qu'il na point dé 

placé il/le des Lotophages, & qu'il Fa lai 

où effe ell f ceft à dire» dans la médit errance, 

car un bon vent peut très bien porter 

ifu cap de Mafce à cette ifle en dix jours. 

Et quand Uiyfïe appelle tes vents qui le 

pouflent QÂOûifz imvetveux, permeieux, cçft 

parce quils lefcartoient de m route, quoyque 

d'ailleurs ils Je pouilailënt tout droit 

Cela fait voir qu'Homère fuît quelquefois 

h vérité fans ôétion , & que d'autres fois M 

adjoute la fîéîJom à la vérité. 

Et le dixième jûur j'aborday à ta terre 

des Lûtûphages ] Cette mne des Lotopha-* 

:es eft une petite iflç qui a trois cems fta- 

te

$ c R £*0 D ïs $ El:. Z/m? £f. 135; 

:s de longueur & un fen moins de far* 

CUT prés de la petite Syrte fut Ici coftes 

cfÀffiiqoe, dont elle n'eft ieparce que d'en* 

\îwn trois cents cinquante pas. Elle cft ap* 

pcltce Menix>& par lef Arabes Girfe, nom 

qui a forme eeluy qu'elle coaferve aupurd'hoy, 

car on la nomme Gtrhi ou Z*r# 

Bocnart a découvert que cette ifte eftoit ap 

peHcc Menîx du Phénicien me-fÛKs, qui 

* 

*Ê 

marque des eaux qui fe retirent, afuas de» 

feétus j parce que *Je petit bras de mer qui 

ia fepare du continent eft fcuvent à fec en 

elle- Et elîe a eu le nom de C?/rJ&, de 

l'Arabe Chirba qui frgnitre un Chamekûnf 

parce que ce petit animal abonde dans cette 

ï/ïc- Habet Lepûres item muitûs, dit M. de 

Thou, ^ Chattiézleûntes, qui (acertm magn** 

tudîne pares fvnî* 

Lûtophagses\ C'eft à dire, qui ïè noutri 

fient du fruit du Eotos, c'eft pourqaoy 

cetre ifle eftoit soffî appellée LotopkagUis* 

Il y a plufîeurs efpeces de Lotos 7 ity en s 

une qui cft proprement une herbe comme 

du Sam-foin, qui fervoh ds pafture aux 

animaux, ceft de celle-là doiat ri eft parlé 

dans le x i v- tîv- de f Iliade & dans h i r, 

Liv. de fOdyfîee. II y en a une autre appelîée 

Lûtes Mgyptia t rîeftoît une forte cfe 

Lys, qui feîon Hérodote mijfî abondant* 

ment dans les eaux du Nil quand îï a inonde 

les t&Ks._Aprés mûls tmt eSHL

S 3 ^ KîMARQU t S 

cet Hiflorien, liv. 2- lis le fent fécher au ferkit, 

ir quand il efifec, Us prennent ce qutefi 

mi milieu du Lys if qui rejfemble à un pa "tf 

Vût, te cuijènt i? en font du pain* Cette eC r$ 

pece côîiviendfoit affez au paflâgc d'Ho 

ineie* qui l'appelle k fruit d'une fient. Maïs 

les Anciens p/ttciadent que ce Poète parle 

d'une troificmeefpece appdiéeli^yr/?, dors 

Po!ybe» qiat faôît fou vent vue & examiniez 

fmt cette dc&iîptîon feîon te rapport rfÀthence 

cûi nous a conferve le patfage : L® 

Le tes eft un petit arhe rude &' e (pin eux j 

qui a ta feuille verte comme le buîffcn, mats 

un peu plus ejpaiffi & plus large- Sen fi ait 

efi d*abordf&nèlable en cculeux if en gref* 

feur mix baies de Myrtet mais e?î craiffant 

il devient de conlem de pourpre\ Il efi de ta. 

grûffettr de tûthe tende if et un noyau fin î 

petit* Qttand il efi mur on te cliente > on le 

fait hoy er avec du bied7 if en le cenferve 

dans des pets pûur la nûurriture des efela*ves. 

FûUï ksperfennes libres, ils tn fent fui T 

noyau qu 'ils gardent de me/me* Cet aliment 

a te gôtifi de la figue if des Dates, if uns 

êdeur encere plus agréable* En te faifanê 

tremper if broyer dans Veetu, en en tire tm 

Vin très agréable 9 if qui a le gjufi du vin 

méfié avec du mieL On le iâit pur, mais il 

ne fe conferve que dix jeter sM c efi pourquoi 

en n'en fait quà me jure peur le bcfûin* On 

peut voir Fiîne, liv. 13» cih. 17, Cdî cette

SUE L'ODYSSéE* Ims IX rj7 

dernière efpece qui parut fi agréable m% 

Compagnons rfUlyflfe* 

Page 9 o. Et j* &s tnv&yay avw un ke~ 

rant] ïi envoyé a\ee eux un héraut pour 

les rendre plus reipe£tables & inviolables* 

TûUS ceux qui mangèrent de ce fruit] De 

la manière dont Homère s'explique icy, iï 

paioîft quil y eut encore d'autres de (CB 

Compagnons, outre les trois qu'il a\oït en** 

cm oyez, qur mangèrent de ce fruit. Car 

en parlant de ti ois feulementT îi o'ayroîtpss 

dît, WV tfi'ifitç,. 

Page 5) i » Itsfs rembarquent tous fans 

irer] Ulyfle ne dit point combien de 

temps il fçjourna dam cette îfle des Lotopîiages. 

Il faut pourtant bien %u'il y ait fait 

quelque fejour, & il n'eft pas vrayfemblabJe 

qu'il en feît parti le jour mefrne, car un^ 

âprcfdînce ne fuffifoit pas pour foy faire juger 

û Tes Compagnons avorent perdu fax-' 

vie de l'en retourner, & s ils ne penfoient 

pas fedement à donner de leurs nouvelles* 

Et mus femmes pârtei par ks vmts 

fur ks terres Je s Cydupes] Voicy encore 

une Géographie exacfle fm$ meflange de 

fïélron, car cfel'jlle des Lotophagei on peut 

facilement eiîre porte dans un jour fur les 

tenes des C^clopes, qui habïtorentla Sîdfe 

qui eit vi6-à->i& Car les " T

1 38 REM ARQUiS 

poieiH h partie occidentale Je la Sicile ptêè 

de Lîiybéc & Je Drepatte, & c eft de-là 

mefme qu ifs ont tire leur nom, comme 

Bwhart l'a fort bien montré* Les Cycbpes^ 

dit-il » w*

gfl ky dans le dernier fem* Les Cycfopes 

navoîent point de loix 5, car ils ne vivoieni 

point en police rcgléef chacun regnoîl cheasr 

" y, comme Homère vz 1 expliquer- 

Et qui fi confiant en la prcmdense ries 

JDkux'J Quoy-que cei Cydopcs fbient ftir 

pertes f ïïuwoges & qu'il* ne reconnoUfcnt 

point de Joïx qui regtent leurs mœurs 4 

leur poîice, Homère ne kîfïe pas de feuï 

attribuer quelque fentimtm de Ja Divinîtc> 

Ifs fc repofent fur k Providence. Mais peut* 

efire vcut-îl faïrs entendre q.uc c'eftpluftaft 

par habitude que par fend oient* 

Ils ne plamsnt ni ne femnt* mais ils fi- 

Twurrifânt dés fmks qtte ta terre pmduîp 

fans efirç cultivât"] C'eO poux louer h fer A* 

iî té de h Sicife. Euftache compare à eetîô 

vie des Cyclopes cei le des Anachorètes qui 

habitent les montagnes & [es antres des 

rochers , qui ne feraetît ni ae pfanteal; f fc 

qui fe noarrîrtent des fruits que la terre 

îeur fournit d'elie-mefme, ou que 3a Provl 

dence a foin de leur envoyer. Cette corn 

paraïfbïi ma paru plaifante pour un Arche* 

vefque. 

Ils ne tiennent pû'mt

'?4 Ô R E M A R Q U é S 

«qu'après le Déluge il y eut trois formes cfe 

fie qui fuccederem l'une à l'autre. La première 

fut fimple & lauvage; îes hommes 

effrayes encore des eaux du Déluge, qui!i 

venoient d'éviter, habitèrent les fbmmets 

des montagnes Jans aucune dtépendance 6c 

chacun régnant dans fa famille. À cei!e4à 

fucteda h féconde forme , un peu moi ni 

Jâuvage j le? hommes commençant à fe guérir 

de fa psur, défendirent au pied des moRtagnes, 

& commencèrent a avoir vu plus 

[randcommei ce entre eux. De cette lêcorr* 

e \înt h troiiicme, plus polie, loifque h 

confiance elîant pleinement revenue o*î 

commença à habiter la plaine. Les Cycfû* 

pes menoient encore da temps d 1 UIyife3 la 

première vie; comme ifs n'avoient jamaii 

eu aucun commerce avec les autres peuple! 

i caufé de feur férocité, leurs moeursj ni 

ïetirs coutumes n'avoient point cûé adoucies. 

Ce que Pi ai on a dît de ces trois for te j 

de vie le peut juftrfïer par rEfcritureiâinte. 

Apres le Déluge fa vie des premiers hommes 

fut fimple & fauvage; ils s'occupoïent 

i cultiver la terre & à nourrir des troupeaux» 

& chaque père de fâmiile regnoit fur fâ 

maîibn fans aucune fubordination des tans 

aux autres. 

Page ç z. Chacun gouverne fa famille, ir 

règne fur fa femme frjurfes enfant s\ Cef 

là Ja première vie cj,ue les hommes mené

t€Tii sprcs le Déluge» connue je viens de 

l'expliquer dans fa H cm arque précédente. 

Cette vie grofllere & fauvag£ us iaiïfa pas 

de continuer » mefme dans quelques villes 

Grecques, long-temps après que fexom ^ 

raeice eut donné fi eu à la police & aux IOXK 

car Ariftote dans îe i G. IIV. de fe*Morales, 

fe plaint qoe de fon temps l'éducation de* 

entaats eïtok négligée dans pîufiears villes* 

& que chacun y vivoit à fafantaiiîe , gouvernant 

fa famille à ta maniera des -Cyclones, 

& régnant fur fa femme & fur fes en- 

dtiJ? Aujo^rd'lmy que noftrc police eft 

fi «glée, fortifiée par fc lofc & perfedioanée 

par la religion, nous ne Jaiflerions pas, 

fi nous voulions, de trouver encore dans 

es familles qqdque refte de £ette vie dû 

Cy dopes. 

Vis-à-vis à quelque difiance du part du 

iiUej que ces CycLpes habitent * un trûuv§ 

une petite îjie ] Quand on ne fçauroît pas 

certainement d'ailleurs que ïa Sicile eft oit 

le pays des.Cydopes, h pofition & le volfinage 

de cette petite ifle» dont Homère parfe 

ky, le feroit affez çonnoiflre ; car il eft évi ^* 

dent qu'il parle de fifle appellée jEgufa 

14 % REMAKQUH 

A fou terroir eft fort gras. Clavier, qui Fa 

vîfhce, y a obfirvé toutes ces choies r rrata 

mûllia ir irrigua* folum ftrtik, pur mm cmimûdumt 

fûmes iknpidffs : ce qui fait grand 

Jbaanoir à Homère d'avoir û bien marqué 

i # la Iktiation & la nature du pays. li ne 

Jiomme point fifffe, parce qu'il cft vr;ay femfckble 

qjic Méfiant point encore habite ? 

die a'avoit pas encore de nom. 

Page 93. Etoile lesCydûfes fis vûyjin* 

n*ûm pûhit de Vâtffew*] C«u ce qui pourvoit 

faire croire que les Cyciopes nettoient 

jjâs ventts d'ailleurs s *& qu'ilseftoscot nc^ 

/dans ie pays,, car ^5ùs ettoient ternis fur des 

vdiiTeaux, îJs en auroient retenu Fulâge, &, 

-comme dît Homcie, lis s en feroicnt ienis 

pour ft rendre mai fi r es d'une iiïe û bonite, 

fi commode & qui eftoit fi fort à leur bien- 

Ifearice. Cela n'eu: pourtant pas concluant. 

Car ils pouvoient eftre armez en -Sidlc for 

âcB vaifleutix ^ftrangers jk nen aôir pas 

tonfeîvê J'uâge. 

Page £4-, .Afo/j aèâtdafmes è cette ifie 

par une mm firt çi(oure > un Dim jrnis 

dmite nârn conduifant ] Cela çft ménagé 

avec beaucoup d'art pour k voyfemb lance* 

dr **!! euft fait pur & qu'ifs enfilent vu à fe 

fionduif e » ils 'feroknt pluftoft abordez en 

Sicile, & parla ils fe Jêroient perdus, & 

j&usofeBt lamais pu efebapper ikê mains

SUR L'ODTSSE'E. Lm* IX. 14g 

des Cyclopcs. Au Iku qua)ant die portez 

à cette petite iffe, Ulyfib s'en fervii comme 

d'un fort, y laîflâ fes vaifieaux, & rfcn retint 

qu'un fur lequel il patfa cri Sicile, où î! exe 

oita tout ce qu'il vg noas raconter P & 

fau\a heureufemeut. C«ft pourquoy ii ad 

joute, jun Dfeu fans doute tous cmduifant p 

Cette remarque eft d'Euftathe, & elîe m'a 

paru très judicïeufc. 

J>age 9 5 * JLes Nymphes f filles de Jupiterê 

firent lever devant nûtfs J Le boa aïr & tes 

{jJuycs cîouces fontevoittre les herbages & 

les plant£5 j & les bons herbages & les bonnes 

pian Les nourrîiTent les anitpaux. Ces 

chèvres fauvages eftoïent donc abondantes 

dans cette ifle, à caufe de la bonne "nourfiture 

quelJei y tronvoïent ,cn abondance, 

voilà pourquoy il dit, les Nymphes, filles de 

Jupiter; prem lever devant nous9 i/c* Voili 

comme la Poëfie fait dzs DKinitez des vertus 

& des fâcufccz les 1 plus natu relief- Â/ 

fort bien Euflatbe. 

iWtfw nous eut bien-tûfi envoyé une chafife 

&§ € l abondante] Homère attribue la bonne 

chaûb à la benedielion de Dieu, à. ejett une 

faîte de fa dt>dlritte? car-il a reconnu qu'une 

befte ne (çauioït eltre prife par wn chaflêur 

û Dieu ne le permet. Ceftainfi que Jacob 

répondant à ion f ère, ^ni selion jaoit de cç

144 REMAEQBES 

.qu'il cftoît fî-toft revenu de h chafle, Ôu\w 

luy dîfbit ; Qjiâmûda tam cita imenire puiuïfliï 

luy dit : Vûluntas Dei fuît ut cito ôCeurreret 

mîfti quûdvûkbam* Cefi la va buté 

de Dieu qui a fdt trûuver fi prûmptemenû 

devant mûy ce que je chetchds* GeneC 27* 

Page ç6. Avec tmfetdde mes vaifftaux 

je vais recûmwijîre mûy-mefme quels hem* 

mes habitent cette terre ] Il n envoyé plus 

de les Compagnons recormoiftre le pays* 

car il ne fe fioït plus à eux, après ce qui 

venoit de luy arriver dans lifte des Loto* 

phages & dtm le pays des Cîconîens, il f 

yz. luy-mefrne. Tout cela eft admirable* 

ïncnt bien conduit. 

Page 97. Ccjtûit-là Vhahitatiûn d'tm 

homme d'une taîlk prûdigieufe] Ce qu'Ho* 

merc dît icy eft fondé fur ce que dans ces 

ïiedef là on voyoit des Géants. Çefiede-laM 

dît Pfutarque dans fa vie de Thdœ, pmûîû 

des hûmmes d'une taille prâdigimfe, Et cela 

eft confirmé par l'Hcriiure fainte. Lon 

temps avant la guerre de Troye ceux que 

Moife envoya poisr ïecomioiftre la terre 

promife, rapportèrent que îe peuple, qui 

f habitait, eftoît de haute ftature, & qu'ils y 

^voient vu des hommes monftrueux de h 

race des Geanis. Pûpulus quem afpexîmus 

pwcerœ ftaturœ efl ; ibî vidimus mûrijîm 

fuœdam jîti

SUR L'ODYSSë'ë. Livre ÏX. 145 

îômbr. 13- 33< 34' Et Dieu iuymdhi* 

dit à Moïfe en pailant de fa terre des fifa 

cTÀmmon f 7Vr* Gtgmtum reputœut cjt s 

ir in rpfa olim habhtmrunt Gigantes > &*&• 

ciueron. 2. 2- Og Roy de Eafgn eftoÈt* 

«11 de ces Gcanls. Se La quippe Og Reiï 

B iftin réfuterai dz Jltrpe Gigantmn ; monf* 

trkuf îcâus cjus ferreus qui cji m Rabbath 

pHûf'um Atnwûn., ?wvcm ctihhos hahens bii* 

Çtîudinis if quaiiwr tatuudinis* Ihkh 3. î I . 

Ce lit de neuf couJces de longueur & de 

quatre de largeur, lait voir quelïe efîoit U 

ta|! le de ces Géants. Tel cOaït Goliath que 

Paud tua ; il a\oi: f x coudées & une paonne 

de iiatu , û CUîîA/îC pe/bk cinq mille 

fides, ccft à dire, pi us de cent cinquante 

livres. Le bois de fi pique cfiok comme i enfubîe 

d\m tifTerand, & le fer dont elle efîoit 

atmcepefbit fis cents (ides, ceft à dire, dix-' 

Jturt ou dix-neuf litres- Cependant cela n ? ap~ 

proche point de la t?iiie qu'Homeie donne 

auCydope, qui! cg?b a la plus haute montagne. 

Mais il faut tb /buvenir que ce Poète 

exagère ky for to taille de ce Géant» parcç, 

qu'il parle à des peuples fimpfes & crédule^ 

& qui nVimoicnt rien tant que ces contes 

Outrez. 

Qui pflîjprit feu! fas troupeaux fan fait? 

d$ tûiis Ls autres Cyciûpes ] Homcrc £ 

gînd foin de nous faire entendre que le 

Cydope vivoit éloigné m tous les aunes, 

Tmc II*

ï46 REMARQUES 

fin antre eflmt dans l'mdroit k phis fecîi& ? 

il paifioit put fes trûupeaux* Cela ne luy 

fuffit pas, il ad joute, fort loin de tous les 

mires* Ce ifeft pas encore aflez, Il nous dit 

qu'il ne fe me fiait jamais avec eux 9 & il 

charge cela encore, en ajoutant quï/ fâ 

ternit toujours à tefeart* Et pourquoy cela l 

pour fonder h vrayfembîance de la fabie. 13 

ne faut pas que nous oublions que ie Cydope 

eft éloigné de toyt fecours. 

Vme o S. Maton, fils d f Evanthes> grand 

preuve d'Apollon ] Ccft peut-eftre cîe ce 

Maron que b ville tHfmaie fut appelles 

D*? ^

SUE lX)BY«S£'£. LwT£ IX, tj$.y 

Page 0£. // «ï*/ZM£

EMARQUHS 

ipas de difficulté d'avouer qu'en cette OCCKiîon 

fes Compagnons avoient eu pius de 

rudenee que luy, & par cette fincerité U 

agne encore plus de ciéance fur Icfprït; 

des Pheariens 7 & les difpofé mieux à croitc 

tous fes conîe$ cornue très véritables. 

Page 103* Nous fommes fujets dît Mûy 

Agatncmttûn» dont ta glaire ] Apres qu'U •a 

ïyfïc a reprefente fes malheurs pour tafche 

d'e* citer quelque forte de compaffion dans 

le cœur du Cjciopc , il efîàyc de faire 

îiaîftre quelque efpece de terreur, en luy 

di/ânt qu'ils font ée$ fujets du Roy Ags« 

meunnon qui vient de miner un grand Em* 

pire. Par-!à ii veut luy faire envtfagcr qu'un 

Prrnce, qui a deftruit un Empire û ffbrif* 

Jant, pourrait bien venger une injure faîte 

à fes fujets. Mais nn monîlrc qui ne craîtit 

pas les Dieux, ne aaint gueie les hommes, 

Ou tu viens de bien loin\ Ceft à dire, ou 

f u es tien ftmpk ir bien ignorant* Car il 

faut venir de l'autre monde pour ne pas 

connoilîre les Cydopes. Ceft aïnfi que 

BOUS difons qu'un homme eji bien de Jm 

joaySj ou qu'il n*eft jamaisforti de fon pays9 

our dfre qu'il cft fitn pie & niais* 

Page 1 04- Si mon cœur de tzty-mejniû 

f*e Je tmr:,€ à ta pitié ] De luy~mç$mp $ 

r

sua I/ODïSSEE. Livre ix. 14 

C*eft à dire* hm aucune confideration , fansaucun 

refpea ni pour tes Dieux dont tu' 

paries, ni pour ton Âgâirtemnon. Ce que 

k Cyclope ad joute îcy fait un bon effet 

pour le Poe me» car en laîfTant Ulyfic entre' 

ïa crainte & i efperance, il y tient auflî fou 

Lecteur. 

Il parla ainft pour me tendre des pièges J 

Ccû îcy le fens du mot ms&Lfer, car il ne 

fignific pas_p

|0 R EMÀR QUES 

PUur ta perler quand elle fetûit fêchi\ 

Car fa "maffuë efïoît Farme ordinaire des 

Géants, témoin le Géant Feriphetcsqui fur 

appelle Carynetes, e'eft k dire, pûrte-tnaffu^ 

parce qu'il a voit une maïîuë d'airain* Theiee 

îe tua, & porta toujours fa maffuë» Dans 

le v i ii Liv* de f Tlîade nous avons vu un 

Areïthoiîs appelle auflï pûrte~maffiië3 parce 

qui! avoït une mafliië de fer. Par eetî€ 

arme Homère fait juger de la taille de celuy 

qui la portoit. 

J'en fis auQi-tûft durcir la pointe dans le 

feu\ Pour le rendre plus ferme & plus foïkJe 

en luy donna ni: une efpece de trempe. Cela 

fe pratique encore , car on le fert de baftons 

hïuÛez parle bout. 

Page 108. Enfuîte je fis tirer îûUS mes 

C^nipagnûtts aujort] Pour une entreprise 

fi perilleule Ulyffe ne devoît ni ne pouvoït 

choifïr ceux qu'il auroit voulu j fa prudence 

& ïa jullke vouloient qu'il en remift le 

choix au fort, afin qu*aucun ne puft le plaîn* 

dre ni d'avoir eûé preferé, ni de n'avoir pas 

efté choifh 

Mt heureufiment le firt tomba fur les 

quatre que'faut eis mûy-mefme ehûifisJUlyffs 

j&ît entendre que les Dieux, qui vouîoieM 

îe tirer dec€ danger,, firent tomber le fort 

fur les quatre qui eftoient les plus hardis 

Car fes hommes tirent au fort, mais c 

Dieu qui règle le fort mefme- Smes mit

SUR I/ODYSSE'E* Lme ÏX\ f 5 î 

twuu? Infiîtum, fed a Dûmirîû tempcraftluï* 

Prov. 16. Nous avons vu dans Flîiade de 

quelle manière eftoient ces forts f ceftoienG 

des marques, chacun donnoit fa ilenne. 

Je me mis wbtmmment^ à kur tefit ] 

Comme la prudence & la juflke deman* 

cloient qu'Uïyffe fifl: tirer au fort fes Coinpagnons 

, fhonneur & la generofïtc exî* 

geoïent qu'il fe mifl volontairement à ?em* 

tefte fans tirer au fort Thelce avoit desja 

donné feKempIe » quand on eut cholû au 

fort les fept jeunes gajçons & les ïept jeunes 

filles que fes Athéniens en voy oient tous les 

neuf ans à Minos * Thefce reconnoiffant 

qui eftoit fufle de courir la mefme fortune 

que ks fafets, s'offrit volontairement luymefbe 

ans vouloir tenter Ja fkveur du fort. 

Cette generofjte remplit d'admiration tout 

ïe monde, Si l'on fut charme qu'il sYgaîaft 

luy-mcfme m peuple , & qu if euft des Sfenriments* 

non de R0Y1 maïs de citoven. JP/tf* 

«p. 4» fa J* TV- 

Jtffl? f&?/ cratgîtîji quelque furpfife 1 C'eft 

ce que fignifie icy le mot Aontyutitt?, augurant 

quelque msL Ces eilrangers qu'il avait 

biffez dans fon autre, Iuy faifqïent foubçonner 

qu'il y en avoit d'autres cachet pour k 

piller. 

Ou que Dieu Verdvnnajt amfîj Car tous

Z REMARQUES 

ïes jours il amve que Dieu fait faire amc 

méchants des chofes pour leur perte & pouf 

ïe falut des gens de bien, Si Poïyplieme 

rfavoïtpas fait entrer contre fâ coutume les 

moutons & les bouts dans fon antie^ jamais 

TJIyfle nauroit pu fc lauver. 

Page 109. Cychpâ, tenei f èeuvez de ce 

Wï] Ce difcouis d'UIyflïe cfi meflé de r&* 

inonfirance, de cornmifcration & de flat 

terie» comme Euftathe Fa très bien remar-» 

5 

fiuc. 

Je tay appâttè avec moy pour wtis faire 

ries libatiûTts amime à un Dùii\ Voilà une 

atterie bien forte- Ulyfle fait femblant de 

regarder comme un Dreu ce monftre, qui 

vient de dévorer fix de fo Compagnon^ 

Homère veut faite voir par*là àquoy rcduîi 

ïa crainte d'un danger qui paroift inévitable. 

Page ï 10. C'cfl ta mère gjutc du neâar 

if de L'ambi ofiô me (me des Dieux ] I4mpm% 

eiî icy dïït$7tyfiÀAt a r mfpûia.i ce qui cûïile jaîis 

ejlre frej]cf c f cil ce que nous appelions aujour* 

d'huy la mere-gûiue, ou la première gmite* Ce 

que ce Cyclope dit ïcy pourroît paroiïire trop 

poli, ft on ne fc fcuvenoit que ce monftre 

€Û fils de Neptune, & qu'il eftoït vrayfeniblab'e 

qu'il avoit lbuvent oui parler du nectar 

&de i'ambiofie des Dieux. Àuicftcdans 

oiners le nechr & fainfarofie ne font îa*

swn L'ODYSSE'E, Livré LZ r'yj 

ïs confondus : le nectar eft dit de la lî-* 

ueur, & i'ambrofic de la nourriture Iblïde.- 

Maîs dans cet endroit il fembk que l'un & 

l'autre lofent mis pour la boiïToo. Homère z 

pcut-efîre donné œh à la groffiereté du 

Cycfope. Les Poètes qui font venos apré$ 

Homère ont fait tout je contraire j ifs orifc 

nus le nedar pour la nourriture icche & 

fjnûbio&c pour la liquide- Alexis a eïcrit, 

yerje tnejme à Jupheï* A lem an a dit de 

lefrne : ?» n^fe? Ifj/a^f, X^j Dieux mail-* 

gatt le neàaf* JEt Sapho, 

I/utne d'ambrojie ejïûk prépuce* 

âge IIî. Je m*appelle Perfmne J Ce 

nom eft pîus heureux en Grec, car afin 

3 54 DEMARQUES 

rerfûnnefcra te dernier que je mangeray 

II y a dans le Grec une grâce que Ion ne 

fçauroit confcrver, & qui confifte dans une 

équivoque que fait i'éfmon d une feule lettre^ 

ûvttv pour OZWûL par éBfion. Je ne mangeray 

plus perfanm. Le Cycïope prophetife fans 

y penfer. On peui voir Euilaihe p. i 633- 

V&Uii te prefent que je te préparé] Ce 

ce qui a donné fieu au proverbe» le prefent 

du Cyebpe : & comme nous difons au jourd'huy 

s la grâce du Cycbpe, 

Page 1 1 2, Cûmme quand un charpentier 

peree awc un vilebrequin vne planche dé 

èûîs] Oîï rrefçaaroit former une image plu? 

vive ni plus naïve pour reprefenter fa

SUR L'ODTSSE'E. LivreIX. i 51 

Ççmme lûrf^n'un fûrger&n\ Cette eomparaifbn 

n'cft ni moins jolie, nf moins vraye 

que fa précédente- Elle met fi fort l'objet 

devant les yeux, qu'on ne fe verrok pas 

mieux dans la nature qu'on le voit dans l'image 

C'eft en quoy Homère a excelle. 

ToStesfes comparaïfons font des images de 

îamiure.mabfiwayesû^mîroîriie 

ïeprefente pas mieux; les oh'pûs* que fc$ 

comparaifons reprefentent tout ce qu'elles 

peignent, & rien ne marque fi-bicti lefletidue 

& la jufteffe de feljjrit. 

Page 1 14. Pûîivâns - nous VûUS délivrer 

glas matin qu'il plaift à Jupiter de wus en- 

Cette réponfe des Cyclopes fait voie 

qu'ils n eftoïenfc pas toos fi impies que Poïyplieme 

Yû dît, ptiïftju lis reconnoiflent que 

îes maladies viennent des Dieux,, & qu'il 

&uc leur en demander h guerifon. Mais les 

i m près ciroyent toujours que les autres fcnl 

auffi impies qu'etax. 

Page 1 i 5, Je ne pus m'empefeher d$ 

tire Je f erreur &u ce nûm fi heureujemehê 

trouvé fo awk jetiez] HomemBoWdït ïcy 

deux chofes $ h première que ce nom équfc 

voque fut heureufement trouvé & avec beau** 

coup de ûgefle & de prudence, & la féconde* 

que c'eft une invention fort pJaîfante. L/Àu* 

tedr du Parallèle , qui avoit un efbrit bien 

fuperieur, n'en juge pas de mefme. Jbîais 

C Vï

I 5 *> REMARQUES 

?^rry quelque ekofe qui ejl bien joli, dit-iî1 

'Fûlypheme ayant demandé à Ulyffe comment 

il s*ûppeUûit) Ulyjfo luy Si qu'il /appeliok 

Perjonne, ire* Et le Chevalier ad)ou te 1 

Qtitmd on a ckuie ans pajfei, peut-on pr en d 

- dre pLïïfir à de tels eûmes ! Pour moy qu 

«s- 

zy douze ans paflez, j'avoue que ce conte 

me divertît, & que je le trouve tres heuïeufemeFit 

imagine dans loccafion prefente, 

Ce Critique nen /Lavait pas ?(Tez pour voir 

que l'équivoque du mot Grec ett mîcuK 

fondée & plus naturelle que celle denoflrc 

mot performe, qu'on ne peut ajufter fans luy 

cre\ Menée. Au Heu que le mot MTîç peu ta- 

cftrc fore naLuref'ement un nom ptopre 

On peut voir les Réflexions d'Eufiaihe fu 

ce mot. 

Page i i 6. Il yawhun belkr d $ tmegr^n 

deur ir d'ime force extraordinaire, je 

tefervay pour tnûy] Utyffb iclerve pour luy 

e plus grand bélier, non qn'il euft pics dan 

de û vie que de ceffe de fes Compagiîcns, 

car on voit au contraire quil a plusde 

foin de celle de fes Compagnons que d& 

Ja fienne, puisqu'il les fait fac ver les premiers, 

îinais parce qu'il eftoït apparemment plus 

grand» & que d'ailleurs il n'avoit que !e be *•* 

lier feul, car fon beîicr n'eiîoit point au mi 

ijeu ds deux autres, comme osux qui por 

soieiu k5 Compagnons. 

rage 117* £es brebis n 'ejlantpoint treût* 

» 

t 

>=& 

m$

sua. I/ODTSSEE. Livre IX* i$y 

tes à leur oïdinah e * ir fi trûtivant ifûp 

&hûY&£€$ d# /é#^ w£ ** terrible que cettC' 

partkuLinte ne fait neti icy, & quelle ny 

eft ija.3 necefîkïre« JVIsis il en eit os la Poëfte 

comme de la Peinture , J'une & l'autre em*» 

ploient a\cc fuctes des drconllsocss qui us 

font pas proprement ni neceflaïrement du. 

£bjcts maïs qui en font les accompagnement^ 

& qnï fervent à rendre la chofe plus vrayfomblabie 

& à luy donner un plus gran 

au" de vente 

Le heher fous lequel j'ejf^hj /brtît le der~ 

nhl Voilà le bsros* Uhfïe fait fauver feu- 

Compagnons & demeure le dernier. Hoîiiut 

ne marque à /ien de to-Jt ce que desrj^rti^nt 

Ihonneur &. la. generofitc la plus 

lurûpc 

£'; /«y /W:'

î 5 S RSMAEQUO 

chant à fcclerat. Mais yoilà fa nature bien 

peinte. Les méchants n appellent injuUke 

eratefle, que celles qulls fcuffrent, 

ils regardent é*un autre œil celles qu'ils 

Page ï f 9. Je leur fis figm de cejfer ges 

larmes] XJiyûk dit, je leur fis figm, car if 

Hofbit encore parler, fe trouvant trop prés 

de i'aotre» & craignant encore quelque terrible 

coup de defefporr de ce monftrej& 

iiiJte fait bien voir qu'il avoit raifon- 

Page i 20. Et ces maux vengeurs nepûu* 

wfem pas manquer de f arriver ] Homère 

éftoÎÉ donc per/mdé que hs crimes atU* 

roient to{l ou tard fur ceux qui les connue latent, 

des ntaux certains & îné?kabJes. 

Qu'elle îûmba devant nûJFre yaiffeoEi] Ce 

vers dans toutes les Editions eft fliivi de cei 

autre, 

TtWW lAiW

feau , ceft à dire devant fa proue, foir tombée 

preftjuc fur le gouvernail qui eft à h 

pouppe. II eft inutile de dire, comme quetqi-e$ 

anciens Critiques ont fait pour iàuver 

cettecontradidion , quVïyffb avoît tourné 

fou vaiffeau pour parler au Cyclope , car 

guelfe neceffîté y a voit-il de le tourner l Ne 

pouvofr-il pas iuy parler auflî bkn de h 

pouppe que de fa proue l En un mot, ce 

\et$ a elîc rapporte ky ma! à propos3 & répète 

fans raifon. On Ta tiré deJendroit qui 

fuit, où Homère parle de h féconde roefte 

que le Cyclope jetta contre Ulyffe » c eft-là 

a place,comme les premiers Critiques Ion! 

reconnu» 

La chute de cette ma§e énorme exetm 

& 

n ?ww$mentfi vïûknt dans la mer] Quelle 

force de peinture 1 & quels peintres pourro'ent 

exprimer les images que cette Foifm 

nous pre fente ï 

Page 122. Il y awh mure fuis ky un ce* 

ke devin] Le Grec ad joute fort ir grand, 

our f?ire entendre qui) eflok de la race 

des Cy dopes, qu'il eiîoït d une force & 

d'une taille prodigreule comme eux. PLIï£ 

iSo REMARQïï 

pour faire admirer la fagetfe cfUFyfle dV 

voir déguife Ion nom» Que fcroh'à éevm 

$\l s'efloït nomméf 

Je m'attendais de Vûlr arriver îcy quelque 

homme keau, bienfait, de grand* taille 

Car quelle apparence y avoit-ii qu'an fiomme 

ordmëre ofaft approcher du C>dope ? 

Poïyphemeattendoit un homme beau, bien 

fait, &c. c'eil k dire, on monflre qui n'euH 

qu'un ccïî comme luy au milieu du fronts 

5 SI * I L _*_ ' Jr 

- car c eitoit i? £>eaute des 

Page 123. Et aujûïira huy c efi un péta 

hûmmCi farts force if de mamaîle J7xws~\ Cet 

homme, quêtes Pheacbns ont trouve beau, 

rand, bien (ait &ds bonne mine, efl traité 

ar IeC)do-p€ d'homme faid3 fans force & 

é€ mécfiante mine- Le pi us grand homme 

auprès de ce monflre n'auroit pu paflerque 

our un nain. Ui^flc ne bazarde rien en 

rapportai!! aux Pbeaciens le mépris que le 

ycfope avoïî eu pour fu)% & il fc mlcs 

bien en fa] fan t voir combien k prudence 

cil au defiu* de k force. 

Je t'en prie, Ulyffe, ûpprûche? que je tê 

fitffi les prefens d*hûjpitahté ] Le Cyclope 

n'eft pas fî î nie nie de (t fiât ter qu'UIviîe fc 

demeura entre fes mains- Ce font de ces 

chofo que fa rage fait dire, & qui maïquenî 

totât le contraire de ce que l'on dit-

sus L'ODTSSE'E. Lîwe ÏX> i€t 

Et je n M attends mû guerifin d'aucun au** 

ire Dieu] If croît qu'il ny a aucunDîeu qui 

îc puifiif guérir que Neptune, & ilfe croît 

parce qu'il cft fon père, fans cela ri douteroiî 

de fon pouvoir comme de cefuy de tous les 

autres Dieux* Ce caradere cft bien footentu 

Comme il efffeur que Neptune m te rendra 

pas l'œil que tu as perdu] Ce n'eft pas 

qu UïyCê refufe aux Dieux le pouvoir de 

rendre h vue aux aveugles t il cfl très perfuadé 

qu'ils pement le ïàire. Maïs c'eft que 

'olvpheme ayant efîé aveugle par Iordre 

des Deftïnées, &: cet a\eugiemcnt cftani 

une punition de fa barbarie» tes Dieux ne 

ïeguei iront januu. 

En levant les mains au ciel] Quoy que 

Neptune foie ïeDieu de la mer, il ne faille 

pas deftre au ciel comme k$ autres Dieux* 

& c cft - là que ie Gydope luy adreflë lès 

pueies. 

Page iz±. Si je fuis véritablement vûjlre 

fils, lr fi vous efies véritablement mon père] 

Cela cft (péri fie avec cette précï/îon, parce 

qu'on donnoit iôuvent le nom de père 6c 

celuy de fils à des gens qui ne FeftoienK 

point véritablement 

_rï, le deflru&cur dé villes, fils d$ 

LaëitS) qui habite a Ithaque*] Il répète les 

Hiefmes titres qu'UJyfle stÛ donnez f aûa 

qu'il n'y ait point d'équivoque*

*

*Ê*****WÊ^^Wm^^mm*mm i m H l n immmmmmtlËÊ H lit 

Argument du livre X. **• 

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164 

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Ous arrîfâfmes fieurcufe 

nient dans fific d'Eolie 3 011 

» régnait Eole fils d'Hippotes & fa* 

a? vorî des Dieux, C'eft un Hic flots> 

tante 7 ceinte tout autour d une 

» forte muraille d'airain & Bordée 

» en dehors de roches efearpées. Ce 

» Roy a douze enfants f fix garçons 

^ Se ûx filles. If a marié les frères 

» avec les fœurs » & ces jeunes gens 

» patient leur vie auprès de leur père 

» Se de leur mère dans des feftîns con- 

» tinuels 011 ils n'ont rien à defirer 

5 pour la bonne chère* Fendant le 

.%

DYS, D'HOM.Z/V.X l6$ 

jour le Palais parfumé de parfums *c 

«délicieux, retentît de cris de joye, ^ 

on y entend un bruit harmonieux 3 * 

& la nuit lea maris vont coucher « 

Dres de leurs femmes mr des ta DIS C< 

fur des lits magnifiques. Nous ce 

arrivafnïes donc dans ce Palais, Le « 

Boy me régala pendant un mois, c< 

me lit mille queftions fur le fie- « 

gedeTroyc, fur la flotte des Grecs « 

tfV ItïT M*11V i-pffîjT* Jp f^lfïçfïç in fil- (f 

srîolité & je luy raeontay en détail ce 

manday cnfiiite fa permiffion de m 

ni'en retourner f & la faveur de oc 

m'en donner les moyens. II ne me « 

uïa point ? ce prépara tout ce « 

ni m'ciîoît neceflaire pour mon « 

voyage* Il me donna un outre fait * 

e la peau d*un des plus grands *t 

Bœufs, ou il enferma les foufïïes « 

impétueux des vents, car le fiïs de * 

aturne l'en a fait le difpenfateur

i66 1/ODYSSE'E 

a comme il ïuy plaljft* Il lia luy-mef* 

» me cet outre dans mon vai 

J* avec un cordon d'argent, afin qu'il 

» n'en efchapaft pas la moindre ha- 

» ieine* Ii laîïFa feulement en liberté 

» le Zéphyr c, auquel il donna ordre 

& de conduire mes \ 7 aiffeaux ; ordre 

B qu'il n'exécuta point, car nous l'en 

*> ernpefchafmes par noftre folie* qui 

» penfa nous faire tous périr. Nous 

» voguafmes heureufement pendant 

*> neuf jours entiers, & le dixième 

» jour nous découvrions desja noftre 

m chere patrie ^ & nous voyions les 

* feux allumez fur Je rivage pour ef* 

» clairer les vaifleaux:, mais accablé 

s> de travaux & de laiïitude, je me 

3? lailîay malheur eufement furprenm 

dre au fbmmeif « car Pavois t OU 

ïE jours tenu le gouvernail» & Je n'a- 

» vois pas voulu me repofer de ce 

wfoîn fur d'autres , afin d'arriver 

» plus promptement êc plus feme- 

» mcnl. Pendant que je dor m ois, m es 

m Compagnons fc mirent I parler en-

"S 

~t* 

& 

s 

^ 

9 HOMIRI- Lipn X. i6f 

femble, dans la penfëe que cet ou- 

tre, que j avoïs mon vai 

eftok rempli d ? or & d'argent qu 

Eole m'a voit donné. Ils fe dirent * 

donc ïes uns aux autres, Grands * 

ieux, combien UJyiTe eft chéri ** 

honnoré de tous ceux chez qui « 

il arrive ! II emmené de fon voyage « 

eeTroye un riche Butin, & nous 

qui avons eilé les compagnons de & 

toutes fes courfe, & qui avons ef~ « 

fuyé les mefmes dangers, nous nous & 

en retournons dans nos m ai ion s les « 

mains vu ides. Voilà encore un fac f< 

ein d'or, dont luy a fait preient « 

le Roy Eoïe pour gage de fon ami 

tié* Allons donc 3 ouvrons ce fac * 

voyons toutes les grandes richef- m 

fes dont M d\ plein. « 

Àinfî parlèrent mes Compst- « 

nous, & ce funefle confeîi fut « 

utvi. Ils ouvrirent le fac ; en mef- «c 

le temps tous les vents fortïrent

V O ® Y s s m' 

a & les éloigna de ma çherc patrie, 

a* Re veillé par ce bruit affreux, & par 

m les cris & les larmes de mes Com- 

» pagnons, je m'abandonnayprefqu 

» au defefpoir. Je déliberay en moy 

» rnefnic> fî fe ne me jetterais poli: 

*> dans la mer pour périr dans 

» gouffiresj ou fi je fupporterois en- 

» core ce revers fans me plaindre & 

» fans recourir à la mort. Je pris a ^ 

» dernier parti comme le plus d'sgn 

» de l'homme, & me couvrant la telle 

» de mon manteau - îe me couchav 

» fur le tiliac de mon navire. Toute 

» ma lotte cil repouliee par la tem 

3* perte fur les colles de PifTe d'Eoli 

» d'oà j'elîois parti. Mes Compa- 

» gnons ne pouvoient fe eonfoler & 

» fondoient en larmes, Nous defeen- 

» difmes fur le rivage , nous fi fines 

23 de l'eau, & mes Compagnons pré- 

>i parèrent le difner. Après un léger 

» repss [e pris avec moy un héraut 

30 & un de mes Compagnons , é 

& | allay avec eux au Palais dÊole^ 

que

h 

ue je trouvay à table avec fa fem- c 

me & (c$ enfants. En entrant dans c 

Ja faiïc nous nous arreftons à ïa « 

porte Se nous nous affeïons fur le m 

oie & fes fils, eftonnez de « 

nous revoir, Uiyife, me dirent-ilsj *f 

pourquoyelles-vous revenu! Quel c 

Dieu ennemi vous a fait efprouver # 

fa colère f nous vous avions donné m 

e Bonne foy tous les moyens ne- 

jceiiaires pour vous en retourner * 

dans voftre patrie, & pour aller m 

ar tout ou vous auriez voulu, m 

Helas I leur répondis - je avec m 

toutes les marques d'une verita- « 

He douleur f ce font mes infîdel- M 

les Compagnons qui m*ont trahL m 

C'cfl un moment d'un malheureux c 

fommeil qui m'a livré à cette im- c 

fortune. Mais ayez ïa charité, mes * 

amis, de remédier encore une fois c 

à tous mes malheurs, Les Dieux m 

vous en ont donné le pouvoir. c 

Je tafehois ainli d attirer leur m 

compaffion par la douceur de mes m 

Tome IL

» paroles- Ils demeurèrent tous dans 

» le fiîeiiee. Le Roy le rompt enfin, 

xt & me regardant avec des yeux d*ÎH* 

» dignstion : Va, me dît-il f fny 

B promptemcnt de celte îfle, le plus 

» méchant de tous les mortels, lï ne 

» iii'eït permis $ ni de recevoir, ni 

» d'affilier un homme que les Dieu 

*> Immortels ont déclaré leur ennemi* 

»> Va 3 fuy3 puifquc tu viens dans 

a> ni on Pahis chargé de leur haine 

*> & de leur colère. 

» li me renvoya ainfï de fon lile 

» avec inhumanité , malgré l'eftat 

B pitoyable où il me voyoit. Nous 

» nous éïoîgnafmes donc de cette 

# terre fort affligez* Le courage de 

» mes Compagnons eftoit abbatju de 

» la peniBk, navigation à laquelle 

3» nous nous voyions encore expofe^ 

» par nolire imprudence , car nous 

» n'avions plus aucune efperance de 

a» retour. Cependant nous fifmes 

» route fix îours entiers, & le feotié H-a 

ai me nous arrîvafmçs à la hauteur

D'HOMERî:. Livre X. IJï 

e la ville de Lamus 7 de la fpa- « 

cieufe Leïlrigonie qui abonde en « 

toutes fortes de troupeaux, car le « 

Berger qui ramené (on troupeau « 

moutons le foir, appelle ïe paf- c 

teur de bœufs $ qui entendant fa c 

voix* fait fbrtir auflî-toft (es bceufs * 

pour le pafturage. Là un berger, « 

qui pourroit ïe pafler de dormir ce 

la nuit, gagnerait double falaîre ; c 

il mènerait patftre les moutons le

if% Î/ODYSS 

» la marée efloit Baffe £k la mer for 

* tranquille- Mais moy, je n'y entra 

» point, Se je tins mon vaîfîeau de- 

^ hors prés d'une de ces pointes, & 

» après en avoir attaché le cable à 

u mi rocher, je montay lur une emin 

nence d'où je ne découvris aucuns 

JI travaux de laboureprs, Je vis feule- 

» ment de la fumée qui s'éïevoit 

* qui marquoit que le pays efloit ha 

» Jbité. Auffi-toïl fe choifis deux à 

» mes Compagnons que j envoyay à 

m h découverte, & je leur donnay 

p un héraut pour les accompagner» 

-m Us prirent le grand chemin par ou 

» les charrettes portoient à la ville le 

m feois des montagnes voyfines* Prés 

* de ia ville ils rencontrèrent une 

* jeune fille qui efloit fortie pour aïm 

1er pulfer de l'eau à la fontaine 

* d'Àrtacie, Se c'eftok la fille mcfme 

m d J Àntiphate Roy des Leftrygons. 

m Mes gem Rapprochèrent & lu y 

* demandèrent qui efloit le Roy du 

* pays, & cjuds eiioient les peuple?

fc*HoMERE. Livre X. iy 

quHuvobéïffoient. Elle leur mon- « 

tra le Palais de Ion père i ils y aile- ci 

rent & trouvèrent à l'entrée la fem- « 

me du Roy, dont la vue leur lit * 

horreur, car elle eiloit aufîî gran- % 

de qu'une haute montagne» Dés « 

qu'elle les vit* elle appel la fon ma- «; 

fY Àntiphate. qui eiloit à la place * 

> q u l q J fcur préparaVc « 

cruelle mort ; car empoignant da*

174 L'ODYSSéE 

* Lejftrigoîis enfilant ces malheure» 

* comme des poïïïbns, ies emportent 

* pour en faire bonne chère* Pendant 

3> qu'on maltraite ainfi mes vaifleanx 

a> qui font dans le port , je tire mon 

» efpée, & coupant le cable qui at- 

m tachoit le mien hors du port à la 

» pointe d'un rocher , j'ordonnay à 

5& mm Compagnons de ramer de ton- 

* tes leurs forces pour nous dérober 

:* au dangerqnïnonsmenaçoit.Àuflîs> 

tofl la mer blanchit fous l'effort de 

» leurs rames, & dans un moment 

m mon vaifléau fut hors de la portée 

s* des roches dont on tafchait de i ac~ 

a> câbler. Maïs les autres périrent tous 

& dans le port fans qu'il en cfchapa 

» un feul. 

» Nous crnglafmcs vers la haute 

m mer» fort afHigez de la perte de nos 

m vaifléaux êc de la mort de nos Corn 

ai pagnons, & nous arrivafmes à fiffe 

» d'Êaea, qui eftoit ia demeure de la 

3û Déefle Cïrcé dont la beauté de h 

» voix répondoit à celle de fon vi-

0 f HoMERE- Livré X 175 

fage. Elle eftok fœur du levere * 

JEëlcs; le foleil qui efckire tous les « 

hommes, les avoit eus tous deux de * 

la Nymphe Fer fa, fille de l'Océan. * 

Nous entrafmes dans le port fans * 

faire le moindre bruit 9 conduits * 

par quelque Dieu* Nous defeendif-

i76 UOnrssr 

> moy-mefme m'mformcr ; mais a^ 

^ prés y avoir bien penfe, je trouvay 

m qu'il eftoit plus à propos de retours» 

ner à mon vaille au * de faire ro 

3 paiilrc mes Compagnons $ Se de les 

9 envoyer prendre langue. J'eftoîs 

m des] a prés de mon vaiffeau lorfque 

2» quelqu'un des Dieux immortels 

s* eut pitié de me voir dénué de touî 

s feeours , & envoya fur mon cfee- 

* min un grand cerf qui fortoit de ïa 

• forefi pour aller fe defaiicrer dans 

m ic fleuve* car l'ardeur du foie il avoit 

irrité fa foi£ Comme il paffbit de- 

* vaut moy, je le frappay au milieu 

du dos SL le perçay de part en part 

m d'un coup de pique, ÎI tombe mort 

* fur la pouïîkre en pouffant un 

m grand cri. Je courus auffi toft fur 

* iuy, & Iuy menant ïe pied far la 

* gorge, j'arrachay ma pique de fou 

* corps , je ia pofay à terre, & f'allay 

* prendre quelques branches d'ozier 

» dont je fis une corde d'environ" 

» quatre coudées avec laquelle j'ai ta* 

* 

*

D* H OM £ R E* ÎAvn X 177 

eBay enfemble les quatre pieds de * 

ce monllrueux animai & le char- « 

geay fur mon cou, ma telle palTée m 

entre fes jambes; Je ïe portay ainfi « 

dans mon vaî fléau, m'appuyant fur m 

ma pique, car il n'elloit pas pofïî* m 

Bïe de le porter fur mon efpaulc m 

d'une feule main f il eftoit trop & 

rand & trop fort- En arrivant Je m 

jettay mon îardeau a terre, m. j ex-

î 7S L'ODYSS 

B elpoir- Ils le lèvent oc regardent 

» avec admiration ce cerf, qui eftoit 

» d'une grandeur énorme ; quand 

» ils fe furent r affaliez du pïaifir de 

» le contempler f ils lavèrent les 

» mains & le mrrent à préparer le 

» fouper* Nous paflafmes le relie du 

* ^ L * C > / 7 * l l 

» &: dés que le foie ri fut couché res îur les campagnes^ nous nous 

* couchafmcs prés de noflre vaifleau 

» fur fe rivage mefmc. Le lendemain 

» au point du jour j'afïemblay mes 

» Compagnons 3 & leur âis : Me^ 

* amis ? nous voity dans une terre 

» entièrement inconnue, car nous 11c 

» fçavons en quelle partie du monde 

» nous fommes par rapport au fe 

» tentrion & au midy, au couchant 

» & au levant* Voyons donc quel 

» confeil nous avons à prendre, s'il 

a& y en ^quelqu'un, &; je doute qu'il 

» y en ait un bon, car eflant monté 

*> fur une émhience f jVy reconnu

B'HOMEBI. Livre X. 17$ 

true nous fommes dans une ifle fort c 

baffe & environnée d'une vafle «c 

mer ; & f ay vu foxtir de ïa fumée et 

du milieu de fes bocages & de fes « 

Ces paroles ahbattirem entière- « 

ïiient le courage de nies Compa- ce 

nons, u aui les cruautés d'Ami- « 

celles du terrible Cyclope *c 

Poiypheme ne manquèrent pas de « 

revenir dans Fefprît. Ils fe mirent

iSi L'ODYSSE'E 

& & ou elle avoît méfié des drogues 

» enchantées pour leur faire oublier 

» leur patrie. Dés qu'ils eurent ava- 

» ïé ce breuvage enipoifbnné 3 elle 

*> leur donna fur la tcfte un coup de 

» fa verge f & tes enferma dans Peïiaw 

Me. Us avoicnt la teffce, la voix, les 

3» fbyesf eniin tout ïe corps de verita- 

J» hlcs pourceaux ? niais leur efprït 

* eftoit encore entier comme atipa* 

» ravant* lis entrèrent dans TeftaMe 

y en pleurant. Avant que de les enrmer, 

la DéeJTe remplit leur auge 

& de gland & de goulTes ? dont les 

r pourceaux ont accoutumé de fc 

» nourrir. E ur y loque retourne prom- 

» ptement au vanleau pour nous an 

» noncer la malheureufe êc furpre 

*> nante a van turc de mes Compa 

» gnons. I[ eftoit fi pénétré de don 

» leur qu'il ne pouvoît parler, quel 

» que envie qu'il eufl de nous Tap 

3P prendre, ôc îes yeux eitoient noyez 

» de pleurs» Par Peftat ou nous le 

*> voyions, il eftoit aifé de jug

D'HOMèRE Livre X. i 

. En 

B nous le prefîafmes tant de par» « 

1er, qu'ils nous apprit le malheur ce 

qui venoit d'arriver. Divin UiyfFe, emédît-if, 

nous avons parcouru ces «c 

bois félon vos ordres. Nous avons « 

trouve dans le fond d*une vallée la a 

uinîfoiî de Cîrcé ; là rions avons a 

entendu une voix nielodkufe ; c'ef- ?< 

toit une femme ou pïuftoft une «c 

Décife qui chantoit* Nos Compa- «t 

nous ont commencé à I'appeller, «c 

le a quitté pronipternent fou fie- « 

e, eïie efl: venue ouvrir les portes H 

les a convié d'entrer. Ils font «t 

entrez par un excès d*imprudence3 ce 

mais moy , foubçonnant quelque « 

cmbufchc, je fuis demeuré à la por- * 

te. Ils iont tous péris dans ie Palais, * 

aucun d'eux n'a reparu, quoy-que « 

j'aye attendu long-temps pour en « 

avoir quelques nouvelles, * 

À ces mots Je pris mon efpée * 

mi javeïot, & jôrdonnay à Eu- « 

ryloque de me conduire par le mei- u

tSo I/O i>Y$s£& 

* en marche à la tcfte de (es vingt- 

* deux Compagnons. Ils ne purent 

» nous quitter fans pleurer amere- 

M ment, ni nous* les voir partir fans 

m fondre en larmes. 

M Dans ïc fond d'une vallée Ils 

* trouvèrent le Palais de Circé qui 

» cftoit bafti de bel [es pierres de taille 

> & environné de bois. On voyoit 

* à Tentrée des loups & des lions 

» qu elle a voit aprivoife^ par fes fu- 

» neïles drogues. ïh ne le jetterent 

» point fur mes gens, au contrair 

a iï$ fe levèrent pour ies flatter ea 

M remuant la queue. Comme des 

? eîaiens domellîques careifent leur 

» maiftre qui fort de table, car iï leur 

» apporte tou joiars quelque douceur ; 

* de mefine ces lions & ces loups ca- 

> reffoïçiit mes Compagnon?, qui ne 

•x laîlïbieM pas d'eflre effrayez de ieair 

?> taille énorme, ils s'arrêtèrent fur 

* ïfr poite de la Déeffe, Si Us enten- 

> dirent qu'ef le chant oit d'une voix 

a admirable, en travaillant a un ou- 

«s

B'HOMERE, Livre X \%t 

vrage de tapifferie» ouvrage Im-

i8â L'ODYSSE'E 

JS & ou elle a voit méfié des drogues 

» enchantées pour leur faire oublier 

» leur patrie. Dés qu'ils eurent ava «* 

» le ce oreuvage empononne , eue 

» leur donna fur la telle un coup de 

» fa verge, & les enferma dans l'c Hâta 

hle. Ils avoicut la telle, la voix, 

» foyes, enfin tout le corps de verita- 

» blés pourceaux > niais leur efprit 

» eitoit encore entier comme aupa- 

» ravant* Ils entrèrent dans Fellah le 

ajr en pleurant* Avant que de les en- 

» fermer, la Décile remplit leur ange 

» de EÏand êc de soudes ? dont 

r- pourceaux ont accoutumé de le 

» nournr.turyioqueretourneprom 

» ptement au vaiffeau pour nous an 

» noncer la malheureufe & furpre 

» nante avanture de mes Conipa 

» gnons, II eftoit lî pénétré de *fou 

» leur qu il nepouvoit parler, que 

* que envie qu'il eufl de nous Ta 

a prendre, & fes yeux efîoient noyez 

» de pleurs. Par Feflat où nous le 

» voyions, il clloit aile de |ug# que 

«B 

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D'HoMERE* Lhre X i 

afflidion eftoit extrcfme. En- «r 

n nous le prcflafrnes tant de par-

i fLf. V O D r s s é'E 

» me chemin qu'il avolt tenu* Mab 

» ïuy fe jettant à mes genoux, & les 

» embraiïant eftroitcment, me con- 

» juroît avec larmes de renoncer à 

» ce deffdn. Généreux UIvfFe, n'ai- 

» lez point-là, me difoit-il, je vous 

* en prie, &: ne m'y menez pas mal 

» gré moy, Laîfîcz-moy pluftofl iey J 

» je fçay que vous n'en reviendrez 

a> poail, Si que vous ne ramènerez pas 

» un feul de voflre troupe. Fuyons 

:» fans perdre un moment ; peut-eftre 

M eft-il encore temps de nous déro- 

* ber au danger qui nous menace 

» d'éviter ce funelle jour. 

» Euryloque, luy dis-)e,r demeurez 

» donc icy à faire bonne chère fur 

m voftre vaifïeau ; pour moy jt fuis 

n réfolu d'aller, car c'eii une necef 

té indifpcnfabîe. Je ïe quitte en 

*> meïme temps $ Se |e m'éloigne du 

» rivage. 

» J avois à peine traverfe lu bois 

» Se parcouru une partie de la vallée* 

*> qi^ comme japprochois du Palais 

VA

Ï^HOMERfe. Lhri X. i 

àc Cïrcé 3 Mercure vint à ma ren- * 

contre fous la forme d'un jeune ce 

homme qui eft à la fleur de fa jeu- « 

ïieffe, Se m'abordant Se me prenant « 

par ia main, il me ait > Ou allez-

"» 

ï 86 L 3 OD YSSE'I 

mixtïonnée où eïïe méfiera des dro* 

B gués plus dangereufes que les poi 

» fons* Maïs fes enchantements fe 

» ront inutiles fur vous» Le remède 

» que je vous donne eft un excellent 

» prefervatîf, & voicy de quelle ma- 

» niere vous devez vous conduire. 

;» Quand elle vous aura frappé de la 

«i 

>i longue verge , tirez promptement 

m Fefpée* ëc feîtez vous fur elle corn* 

m me fi vous aviez delTein de h tuer. 

» Effrayée de cette audace, eïïe vous 

m offrira fa couche f & erardez-vous 

m bien de la refufer, afin qu'elle delivre 

vos Compagnons, &: quelle 

m vous donne tous hs fecours qui 

B vous font neeeffaires. Mais au pats» 

ravant obligez-la de jurer le plus 

rand ferment dm Immortels , 

» qu'elle ne vous tendra aucune forte 

de piège, afin que quand elle vous 

*> tiendra defarmé, elle ne vous ren* 

» de pas îafche & efféminé, 

» Ce Dieu ayant parlé aînfî , nie 

m prefente cet antidote, qu'il arracha

B*H0MIRE. Livre X 187 

âc terre &L dont il m'enfeisma les 

vertus, ceftoit une efpece de plante « 

dont la racine efîoit noire SL la fleur

*f?S I/OBY SSE'ê 

» le metamorphofe. Je pris la coupé 

» de fes mains & je bus, mais elle 

» ïî'eufl pas l'effet qu'elle en atteni» 

doit; die me donna un coup de fa 

» verge » & en me frappant elle dit ; 

* Va dans l'efiable > va retrouver tes 

% 

j J 

m Câmpagmns , &* ejlre cûmnw eux, 

% En mefme temps je tire mon efpée, 

» & Je me jette fur elle comme pour 

m la tuer* Elle fe met à crier, & tom- 

m tant à mes stenoux, elle me dît. le 

, VAIW m^v V*A*f 

vifage couvert de larmes, Qui ef- 

D tes-vous l d'où eflesvous ï Je fur» 

m dans un eflonnement in exprima* 

21 hic de voir qu'après avoir bu mes 

s» poifbns, vous n'eÛcs point chané. 

Jamais aucun autre mortel n'a; 

» pu refïfter à ces drogues, non feum 

îement après en avoir bu , mars 

» mefme après avoir approché la cou^ 

» pe de fm ïevrfes. II faut que vous 

ayez un efprit fuperieur à tous les 

» enchantements, ou que vous foyez 

» le prudent Ulyfîe r car Mercure 

m ma toujoun dit qu'il v iendroït icy

ï> P HOMERE. Livre X ï%$ 

au retour de la guerre de Troye. « 

aïs remettez voflre cfpée dans le

* ) 

IOO UODYSSE'E 

rand ferment des Immortels que 

vous ne me tendrez aucun autre 

*> Elle ne balança point : elle me 

» lit le ferment que je demandois. Ce 

*> ferment fait tout du îonff fans au 

23 cune ambiguïté, ]c consentis à ce 

qu'elle demandent de moy* 

» Elle avoît pies d'elle quatre 

» Nymphes dignes des voeux de tous 

» les mortels ; elles la fervoient Se 

v avoïent foin de tout dans fou Pa- 

» lais* C'eftoient des Nymphes des 

î» fontaines , des bois Sa des fleuves 

* qui portent le tribut de leurs eaux 

» dans la mer. lAine couvrit les 

33 lièges de beaux tapis de pourpre 

& & eftendit fur le plancher d'autre 

>y tapis d'une finefîe admirable 

» d'un travail exquis. L'autre drefla 

n une table d'arsent & mit deffus 

» des corbeilles d'or, La troiûéme 

» verfa ïe vin dans une urne d'arsrent 

» & prépara les coupes d'or* Et la 

» quatrième apporta dje l'eau, alluma

D*HoMEEE. Livre X, ipt 

du feu & prépara le bai». Quand * 

tout fut preft, cile rae mît au bain c 

verfa l'eau chaude fur ma telle « 

Se fur mes efpaules, Julqu'à ce « 

qu'elle eufl diffipé la laflïtude qui « 

Bic reftoit de tant de peines & de & 

trav aux que j avois foufïerts. Après « 

qu'elle m'eut baigné & parfumé « 

d'ciîences, elle me prefenta une tu- * 

nique d'une cxirefme beauté & un « 

manteau magnifique, Si me remc- « 

nant dans la falle f elle me pîacea « 

fur un beau fiege à marchepied, & « 

pie preifa de manger. Mais je n'ef- ce 

lois guère en eftat de luy obéir, « 

fa vois bien d'autres penfées , car « 

mon cœur ne me prelageoit que « 

es maux.

191 I/ODYSSE'E 

i# cœur î Craignez - vous quefqu* db 

m nouvelle cmbu fiche ! Cette crainte 

B m'eft trop injurïeufe ; ne vous ay-|c 

*> pas fait le plus grand & le plus in- 

1» vioïable de tous les ferments î 

> Grande Déefle, luy répondis-je^ 

fe efi-il quei

D'HOMèRE. Livre X. rp 

d'une autre drogue, Auïîï-tofl on * 

voit tomber toutes les fbyes quV « 

voit produites la bonfon empoi- « 

fonnée dont elle les avoit régalez, ce 

ïïs reprennent leur première for-

ïOJ- L'ODYSSI 

» Comme de tendres gcniflTcs qui 

» voyant le fblr revenir leurs mères 

» du paituïage , bondi fient autour 

» d'elles* &fans que les parcs qui les 

» renferment puîfTent les retenir , ei- 

^ les accourent au devant ôL font re- 

^ tentir de leurs meuglements toute 

» ïa plaine; de mefme mes Compa- 

* gnons me voyant , accourent & 

» s ctnprcffciit autour de moy 

s» m'environnent avec de grands cris 

les yeux baignez de larmes. Ifs 

» témoignent la ni cime jo) e que s ils 

» revoyoient leur chère Ithaque, qui 

» les a nourris Si élevez. Je n'emends 

» de tous coitez que ces paroles, Di- 

» vin Ulyflc, nous avons autant de 

» joye de voilrc retour, que û non 

*> nous voyions de retour dans nof WÊÊF 

» tre patrie. Mais contez-nous la 

» mort déplorable de nos Compa- 

» crn on 

tafchay de leur redonner COIî- 

» Je 

» rage & de met tre fin à leur don ïcur, 

» Mes amis , leur dis-je , mettons

B f HoMERE- Livre X. rp5 

rdmptemciît noftre vai fléau à icc^ ce 

retirons nofire butin, nos armes & « 

nos affres dans les grottes voyfuies, * 

réparez-vous à me fuivre pour

i 

tg6 L'ODIfSSE'Ë 

» téc qu'à l'imprudence du cBc£ 

» Je fus fi irrité de cette infblen* 

*> ce, que j'allois tirer mon efpée pour 

& ïuy abattre ïa tefte 9 malgré Fal- 

» iiance qui fa voit uni à ma maifon, 

* iî mes Compagnons ne fe fuflent 

» tous mis au devant, ëc ne m'euffent 

» retenu par leurs prières- Ulyffe, 

» me dirent-ils, confentez qui 

» meure icy pour garder le vaiïleau 

» & menez-nous fans perdre îcmp 

» au Palais de la Dée 

» Je m'éloigne en mefme temps 

*> du rivage, Eury loque ne demeura 

» point dans le vailFeau* il nous fuii» 

vit* car il craignît les terribles re* 

* proches que |e luy au rois faits. 

& Pendant que j'eftois allé clier- 

^ cïier mes Compagnons, Circé eut 

» grand foin de ceux que j'avais ïaif- 

* fe& dans fon Palais* Eiïe les fct bai- 

>y gner Se parfumer d'eïïences, elle 

» leur donna des tuniques Se des 

i» manteaux magnifiques, & en arrim 

vant nous Ie$ trouvafmes à table*

tf H OM E R E. Livre X, 197 

Je ne fçaurois vous peindre l'en- « 

trevûë de mes Compagnons. Ils « 

s'embraffent » ils fe racontent leurs a 

avautures, & leurs récits font en- « 

trecoupez de fanglots, de larmes & « 

de geimiTements qui font retentir œ 

tout le Faïais. La Déeffe s'appro- «: 

che de moy, & me dit : Généreux «• 

Ulyife, faites cefîer toutes ces lar- ce 

mes & tous ces fangïots. Je fçay «e 

tous les maux que vous avez fouf- «c 

ferts fur mer, & toutes les cruau- « 

tez que des hommes inhumains & « 

intraitables ont exercées contre «c 

vous fur ïa terre. Mais prefente- « 

tnent ne penfez qu'à vous réjouir «c 

& à faire bonne chère , iufqu a ce « 

que vos forces 6c voftrc courage « 

foîent refiablis, & que vous vous « 

trouviez dans le mefme eftat où « 

Vous eftiez quand vous partîtes « 

d'Ithaque. Le fouvenir de toutes « 

vos miferes ne fert qu'à vous abat- «r 

tre encore & à vous affoîMir - & « 

il vous empefche de gouiler les «c 

l iij

ï98 L'ODYS SI 

» pïaifirs & la joye qui fe prefentenf. 

» Ce fage confeil nous perfuada* 

5> Nous fufmes-Ià une année entière 

y> à faire grande chère & à nous ré 

» jouir» Après que les quatre faifons 

» révolues eurent confommé Tannée* 

» mes Compagnons me firent leur 

a> remontrance, ce me dirent f bage 

» UlyfTe, il eft temps que vous vous 

» fouveniez de voflre patrie ? fi les 

» Deftinécs ont réfolu de vous y re- 

» mener h en reniement* 

* Je profitay de cet avis. Nous 

» palTafmes encore tout ce jour-là à 

:» table. Mais après que ïe foleil fut 

^ couché & que la nuit eut couvert 

» îa terre de ténèbres , mes Compa- 

« gnons fe retirèrent dans leurs ap- 

?> parlements pour fe coucher- Et 

*> moy me voyant feuî prés de Cïrcéf 

2> je me jette à (es genoux; elle me 

» donne une audiance favorable, 

» je hiy dis : Grande Déeffe * après 

•f A 

s les bons traitements que j ay reçus 

» de vous ? la dernière faveur que je

B'HOME RE* Livre X 19 

vous demande c'eft de me tenir la « 

promefTe que vous m avez faite de « 

me renvoyer chez moy ; je ne * 

upire qu'après ma chère patrie, * 

non plus que mes Compagnons, ce 

m m'affligent continuellement & * 

me percent le cœur par leurs piain- « 

tes dés que je ne fuis plus prés de « 

VOUS. «c 

La Déeffe me répondit : Ulyffe, « 

il n'ell pas jufte que vous demeu- « 

riez plus Ion g-temps dans mon Pa- « 

îais malgré vous. Mais avant que ce 

de retourner dans voftre patrie , c< 

vous avez un autre voyage à faire: m 

iî faut crue vous defeendiez dans le «r 

fombre Royaume de Pluton & de & 

h redoutable Proferpine f pour y « 

confulter Famé deTirefias le The- «c 

Bain. C ? eft un devin qui eïi privé « 

des yeux du corps ? mais en re- « 

vanche il a les yeux de l'elprit fi « 

enctrants $ qu'il lit dans l'avenir « 

îc plus fombre. Proferpine iuy a * 

accorde ce grand privilège de coiv « 

i jjii

20© L'ODYSSé'ë 

* ferver dans la mort fon entendsai 

ment ; ïes autres morts ne font au- 

» prés de lu y que des ombres & de 

a> vains pbaniofmes. 

» Ces paroles jetteront ïc 

» poir dans mon cœur. Je tombay 

21 fur Ion lit que |e baignay de mes 

* larmes. Je ne voulois plus vivre ni 

» voir la lumière du foIeiL Àpi 

» que feus bien pleuré, & que je me 

*> fus bien tourmenté , je iuy MB I 

*> Cireé3 qui eft-ce qui me conduira 

ans un voyage fi difficile? Il n'y 

a jamais eu de route ouverte aux 

vailTeaux pour arriver dans les En 

i 

fers. 

» Fils de Laerte, me répondît-elfe^ 

30 ne vous mettez pas en peine de cons> 

duéteim Dreflez feulement voflrc 

*> mafl f déployez vos voiles & de- 

» meurez en repos; les feuls foufiles 

» de Borée vous conduiront. Et 

» quand vous aurez tr a verfé l'Océan, 

» vous trouverez une plage commom 

de êc Us bois de Proferpine tout 

» 

: »

B'HûMERE. Livré X, Soi 

pleins d'arbres fteriles, comme de * 

upliers & de faules* Abordez à « 

cette plage de TOcean, & allez: de- * 

là dans le ténébreux Palais de Plu- * 

ton5 à l'endroit où PAcheron re~ m 

coït dans fon lit le Puiipïiïcffeton «* 

le Cocyte, qui cil un efcouïement * 

des eaux du Styx; avancez: jufqu'a « 

ïa roche où eft le confluant de ces « 

deux fleuves dont la chute fait en m 

jeand bruit. Là creufez une fofle m 

d'une coudée en quarré* Verfez

202 L' O D Y S 

y> rcz toutes fortes de rieheffes, & qu\ 

* vous facriftcrcz en particulier à Tî •mM 

50 relias fcul un bclicr tout noir & qui 

» fera la fleur de voftre troupeau* 

» Après que vous aurez achevé vos 

» prières, immolez un beiier noir 

» une brebis noire, en ïeur tournant 

» iatefle vers FErebe, ék en détour- 

» nant vos regards du cofté de FO- 

» céan* Les Ames d'une infinité de 

» deffunts fe rendront en cet endroit, 

» A [ors prcfïcz vos Compagnons de 

» prendre ces viélîmes que vous au- 

» rez égorgées, de les dépouiller, de 

y> les brufler &d'adrcffer leurs vœux 

» aux Dieux infernaux , au puiflant 

» Pluton & à la feverc Froïerpinc, 

» Et vous, i'efoéc à ïa main 

3 A ^ v ^ ^ t* iMr * ^ ^ ^ ? 

> vous Ia3 efcancz les ombres ôc cm- 

» pefchcz qu'elles n approchent de 

» ce fan g avant que vous ayez enten- 

» du la voix de Tirefias- Ce devin ne 

» manquera pas de fe rendre biento 

» prés de vous , il vous cnfeïgnera 

» le chemin que vous devez tenir. 

t

B'HOMERE* Livre X £0 

fa manière dont vous devez vous « 

conduire pour retourner Iieureu* « 

fement chez vous* r< 

Elle me parla ainfi* En inefme ce 

temps l'aurore parut (UT fon trofne « 

ci or, La Décile m'habilla eïie-mef- « 

me & nie donna des habits magni- « 

lïqucs* Elïe eut foin auffi de fc pa- ^ 

rcr; elie prit tm grand manteau de a. 

toile d'argent d'une âiieife ad mi- a 

rable & d'un travail exquis ? mît " 

une belle ceinture d'or & couvrit « 

fa telle d'un voile tait par Ls Gra- « 

ces, or 

Je ne fus pas pïuftofi habillé , a 

que } allay par tout ic Palais éveil- «. 

1er mes Compagnons pour les pref- « 

fer de partir. Mes amis, leur dier 

fois-fe. ne goûtez pas plus ion^- « 

temps les douceurs du fommeil f a 

artons fans différer, la Dte/Tcncms .« 

en donne la permiffion. lis receu-

A- 04 UODYSSE'E 

^ reux pour les ramener tous. H y 

» avoït parmi eux un jeune homme 

11 nomme iîpenor, qui neitoit ni 

n d'une valeur dîÛInguée à la guerre, 

» ni homme de beaucoup de fens, 

» qui ayant pris trop de vin ïa veille, 

eftoit monté au haut de la maifon 

m pour chercher le frais & s'ciïoit 

n endormi* Le matin reveillé en fur* 

» faut par le bruit & par le tumulte 

s» que faisaient fes Compagnons» qui 

• m fe préparoïent au départ* il le leva, 

* & comme il efloit encore à demi 

w endormi , au lieu de prendre le 

chemin de Fefcalier, il marcha tout 

* droit devant luy, tomba du toit en 

» bas Si fe rompit le cou ; fon ame 

* alfa avant nous dans les Enfers, 

» Quand tous mes gens furent aflem- 

» b€z9 je leur dis : Vouspenlez peut 

* eftre partir pour retourner dans 

J> vofhre ehere patrie, mais Or ce m*a 

* > 

* déclaré que nous avions auparavant 

* un autre voyage a faire, oc qu n 

* faut que aous tLefçendions dans le 

* 

«M*.

fombre demeure de Pluton 

Proferpine pour confulter l'ombre « 

du devin Tirefias. m 

Ces paroles îes pénétrèrent d\i- ce 

ne douleur û vive, qu'ils fe mirent

REMARQUE 

SUR 

L'ODYSSEE D'HOMERE. 

^•î 

«•VM^ppapppbH 

LIVRE X 

Page J\TO?ts mnvafines heureufementà 

i 64» jf Y Hjîe d Eûltc] Entre ia Sicile & 

l'Italie, un peu au couchant du deflroît, il 

y a fept iflcs quon appelle Ed'wnnes 

Vulcattiennes, Homère ne parle que dune 

uii appelle Eohe, quoy-qu'il n'y en ait 

point qui porte ce nom. M?îS 11 ia nomme 

atnfi, apparemment du nom de fon R.oy 

Foie. Ôcft fans doute Fi fie de Lipara* Car 

tout ce qu Homère dît icy d'Eoiie convient 

à Lipaia, comme nous le verrons dans la 

ïe. De Me d'Êgufa, UI)flc pouvoir arriver 

facilement le [our rnefme à Tiile dEolie, 

ou Lipara, qui eu au defïus en tirant 

vers le piomontoirc de Pciore. Au icfte 

Homère continue toujours de dcpaiferleS 

fieux où UI)fle aboi de, & quoy-qu'ils foicnt 

tous véritablement dans les mers d'Italie, 

il ïes iranipoite dans L'Oaan. Jvîais cela 

ncmpefche pas quon ne \oyc t ou jour*

HMâRQ. SUR I/ODYSS, £k X 207 

«TU il tire de FHiftoirc le fond de Tes fixions, 

FHiflorre eft le canevas de Tes fables3 & il 

ïe trace & le remplit comme il 3uy plaift* 

C ? efl pourquoy Polybe rejettoit avec raifort 

le bon mot tTEratofthene, qui difoit aflez 

plaifamment, qu'on trtweroit tous les lieux 

ov Ulyjfe avait efiè porté, quand ûTî MIT oit 

trouvé cdvy qui avok coufu U jac où tous les 

vents cftoient enferme^ Et il vouloir qu'on 

ne prift nullement pour fables ce qu'il dit 

d'Eole & des erreurs d'UIyfle, foutenant 

que le fond en efl vray, mais qu'il y a mefle 

ics fiélîons de laPoefie, & e'eit-ià leientU 

ment de Strabon > qui dit qu'en fe remet 4B 

tant devant les yeux Ffaiftoire ancienne, il 

fuit examiner fur ce pied ce que difent ceux 

qui (butiennent qu'Ulyfîfe a eÛc porté dans 

les mers d Italie & de Sicile, comme Homère 

ie dit, & ceux qui le nient ; car ces 

deux oninïons ont chacune leur bon le leur 

mauvais, & ! on peut avoir nuion &fe tromper 

des dejx coftez. On a raifon fi on croit 

qu'Homère, bien perfuadé qu'Uiyfle avoit 

elle porté dans tous ces lieux » a pris pour 

le fond de fa fable ce fujet très vray, mais 

qu'il Fa traité en Poète, ccft à dire, qu'il y 

a ?dioutc U fiction. Car on trouve des \cftiaes 

qa'Ulvffe a rode non feulement fur les 

coftes d*l taHe, mais jufqu 7 en Efpagne. Et on 

le tîom-e fi on prend pour une hiftoîre 

cntonCaadce tout ic tifïu de la fidioii,

£08 REM ARQUES 

comme (on Océan f fes Enfers, fes Boeufs 

du Soleil, fes réceptions chez des DéefTesp 

fes Metamorphofes f ce qui eft dit des Cyctopes 

& des Leftrigons, ïa figure horrible 

de Scylla, îes ciîftanees des lieux & autres 

chofcs fcmblables» qui font des contes prodigieux 

qu Homère a manifeftement inventez 

| & ce lu y qui foutiendroit tous ces points 

comme autant de veritez hiftorlques , ne 

merkeroit pas plus d'élire refuté que eeluy 

qui afîeureroît qtfUlyfle eft véritablement 

arrivé à Ithaque, comme Homère Je raconte; 

qu'il a tue les Pour fuivan ts, & que les 

peuples d'Ithaque Tout pour fui vï & attaqué 

dans fa maifon de campagne. L'une

Stîft L*0Dlf5SE£. LÎWi X* 20 

oîiï dire qu il y a voit îles Mes iïoUmcs comme 

Delos & comme iMe d'Echemîs pré^ 

de îEgypte* Comment ce Poète n'auroit-ïï 

pas pu feindre cela d'une rile $ puîliju'oti a 

feint meîmes des vilfes ambulantes, comme 

une certaine ville de B ace h us dans la Libye, 

qu'on ne trou voit jamais deux fois dans un 

mefïne endroit. 

Ceinte tout autour d'une fur te muraille 

d'drakï] Ces quatre mots montrent ia profonde 

connoîfîknce qu'Homère avoit des 

lieux dont it parte- If feint que cette ifîe 

a¥oit des murailles d'airain f parce quelle 

eftoît pleine de feux foufterrains qui de 

temps en temps for cotent de lés entrailles* 

Âriftote en parlant de Lipara s qui elt la 

pi os confiderabfe de cçs ifles Eoliennes, dit 

qm la nuit an vûk rifle de Lipara efciairée 

par des feux, & Strabon y reconnoift des 

foupïraux de feu, Ceft pourquoy on a placé 

dans les carrières de cette îiîe les forges de 

Vukain 6c des Cydopes, & ceft de-Jà met 

me quelle a tire fon nom ; car, comme Bodiart 

Fa fait voir, elle a cfié ainfî nommée 

du Phénicien nibaras ou nîbras, qui fignific 

un jtamhau, une utche allumée f & ïa raifbn 

eft que cette i(ïe efcïaîroit h nuit comme mn 

ambeau. Voilà ce qui me perfuade que 

Me d'Eofe eft fa mefme que Lipara. Et ce 

qui ïuit m'a encore confirmée dans ce feutiment 

; auffi Virgile a-Ml dit ; j£ûliam M k

%10 REMARQUES 

par en, ./Eneïd. liv< 8, 

Ce Rûy a dûuie enfants 3 fix gdrçûns if 

Jîx flies] Je fuis peifuadce qu'il y a dans 

Homère des fiélbns qui nont point de fens 

caché, & qui ne renferment que ce que la 

lettre prefente> Mais je croy auffi qu'il yen 

a d'autres qui cachent quelque myftere, 

mais la difficulté eft de fe dé\e!opper. On 

recherche icy fe fens de cette aîlegorîe 

d'EoIe, qui a douze enfants. Euftathe dit 

qu Eofe eft l'année qui a douze enfants, qui 

font les douze mois, &c. maïs cette idée ne 

me paroift pas fort jufte* Je croîroîs plus 

naturel de dire que Je Poète ayant feint un 

Eoïe Roy des vents, par la raifbn que j'eX •m 

pïiqueraypfus bas,il luy a donné douze en iM 

lants, &ces enfants ce font les douze vents 

principaux , qui font toujours dans ces antres 

dans des feftïns continuels, parce que 

les feux & les exhaîaifons ks entretiennent 

continuellement , & leur fervent comme de 

nourriture. Les frères fe maiïent aêc les 

fœurs, parce que les vents fe niellent, &c* 

Page i 6 j. Pendant le jour le Palais, par* 

fumé de parfums délicieux, retentît de cris 

de jeye 9 un y entend un k uit harmonieux] 

J*ay desja rappoité quelques raifbns qui 

m*ont fait croire qi/icy fifle d'Eolie eft Pîïle 

de Lipara : en voïey une nom elle qui m'a 

confirmée dans ce intiment & qui me pa-

SUR ï/ODYSSI'E, Livre X 2 i r" 

Toîft décîfïve. C ? eft ce qu'Homère dit, que 

le Palais d'Eoïe retentit tout le jour de cris 

de joye, ire* Ce Poète nlgnoroîi pas m 

quort dîfoit des merveîfîes de cette ifle* 

Dans une des fept ifies dEûle, appellèe 

Lipara, dit Àrif lote dans le livre des Merveilles, 

on raconte qu'il y a un tombe au dûM 

en dit des chojes prodtgievfes, ire, on af~ 

pire qu'en y entend ttn bruit de tambours if 

de cymbales avec des eris eje latent s » é*c* 

II eft aifé de voir que oJa eft fondé fur le 

bruit que faîfoit ce feu enferme dans les 

cavernes de cette ifie, & pat là Homère fait 

allufion à ï ancien nom de rifle qui eftoit 

appelîce Meligûunis, avant que d'avoir îe 

nom de Lipar a j comme Callijmque noue 

fapprend dans l'Hymne h Diane : Elle alla 

chercher les Cyclopes, if elle les trouva dans 

îifle de Lipar a { c*efî le nom quelle a pre* 

Jmtement, m lis alors elle ejioit appeliez Me* 

hgonnis) iU travailtûient a un gros Mee de 

pr rouge dont ils eflûte nt prefei de faire 

im abreuvoir pmir les chcyitux de Neptune* 

Or, comme Bochart fa fait ?oir? cefî ce 

Bruit qui iuy fit donner ce nom, car elle 

fut âppeflce Meligeunis, du mot Phénicien 

Mëlûgmin ou Mônaggenîn, qui fignîiie tijh 

de ceux qm jouent des ïnflruments* Tout 

ce qu'Homère dit donc icy neft pas abfokment 

de fon invention > d c£l fondé fur 

y s Tmdrtions anciennes! dont il eitoit parai 

terne m

ti2 REMARQUES 

Jefatisfisfa €uriûfui\ Homère fait bîea 

voir icy qu'il a voit beaucoup de matière pour 

amufer Ion Lcéteur* mais Si ne s'attache qu à 

ce qui regarde Ulyfïe. 

// me donna un autre fait de la peau d'un 

des plus grmds bœufs 3 ûû il enferma ks 

fûuffles impétueux des vents ? car le fils de 

Saturne l'en a fait le difpenfauvr ] ISf î Po* 

ïybe ni Strabon ne veulent qu'on prenne 

pour fable tout ce qui eft dît icy d'EoIe* 

mais ils veulent qu'on (oit perïuadé qu Ho^ 

mère a pris un lait hrftorique qui! a era -» 

belli par une ingenieufe fiétion. Le fait hif 

torique elt que le Roy de ces ilîes eftoit un 

e dmpïit très Jage & très avîfé, qui 

par la longue expérience qui! avoit faite, 

connoiffoit la vents qui dévoient régner, & 

il en jugeoit par le cours de la fumée qui 

fortoit de ion îfle, ou mefine par le bruîî 

que faifoient les feux & les vents dans 

cavernes foufterraines. On peut voir S ira* 

bon , liv» 6. Servîus rapporte de Varron i 

, Varw mitem dïch fa m injuiarum Regem 

fiïtffe* e$ quorum nebuiis irfuma Vuicattm 

înfulœ pradteem futur a flabra ventûrum, êb 

împmtîs vifus efi ymtûs jua pneftate retinere* 

Mais ce que ces Hiftoriens n'ont pas 

ïteu» & que Bochart a découvert 7 c*eft que 

le nom d'Eûk; Homère J'avoit appris des 

Phéniciens, qui difoient aol pour tûurbillûn> 

tempejle, étage 3 d'où les Grecs oui fait îç 

-*

SUR L'ODYSSE'E. Livre X zt$ 

tûoî at W, tempifle. Ces Phéniciens voyanl 

ïe Prince de ces îjfîes fi habile à prédire les 

vents rappelèrent le Roy Âûtin, c J eft à dire» 

le Roy des vents &* des tempefies, & de-ïà 

Homère a formé le nom propre de ce Roy 

& l'a appelle Eûfe* Voilà ïe vray ; ce qu'Homère 

adjoute de cet outre, &c c'eft la fable 

pour repaiftre les Pheadeng avides de contes 

& de contes prodigieux* Ces contes ont 

donné lieu dans la fuite à des peuples du 

ord de débiter qulls vendoient les vents. 

Page i 66. Il Im ] §a feulement en Bèeriè 

le Zephyre ] Ceft le vent du couchant, & 

c'eftoit le feuï bon vent pour aller dç Me 

Lïpara à Ithaque* 

Nous vogua/mes heurcitfemem pendant 

fteuf jûurs entiers ] Voicy encore îa fable. 

De Fifle de Lïpara on pou voit arriver en 

îres peu de temps à Ithaque, mais pour em* 

belltr fon conte & faire croire que ces ifles 

Eolrennes eftoîent fort loin dans l'Océan, il 

dit qu il vogua heureufement pendant neuf 

fours. 

^ Et mus voyions les feux œliutftez fur le 

] II parle ky des feux que les habitants 

thaque tenoient allumez nuit & pur, 

pour marquer aux vaifTeaux le lieu ïe plus 

leur pour h defeente. Sans cela comme l'ifie 

eloît toute environnée de rochers, tous les 

vaîfleaux auraient efté expofez à fe briïk; 

c ontre le rivage. 

m-

£ I 4 ~ IlMAËQUIS 

Page i 67, Dans la pmfèe que tel autre 

ue faVûis dans m un vaiffcau ejfak rempli 

d'or if d'argent J Rien ne retfernble moins 

à un outre plein d'or qu'un outre rempli de 

vent. Mais le cordon d argent qui Jïoît cet 

outre, les trompa, & 1 avarice ne rayonne 

point» elle a pïuftoil agi que penfé, D'ailleurs 

Eofe luy-me'me avoit attache cet otare au 

vaîfleau, de manière qu'ils ne pouvoient ie 

ïoapefcr fans Je défiler. Voilà pour la Fable, 

ais comme ie but d'Homère eft de donfier 

dans toutes fes frétions des préceptes 

utiles, il efl bon de développer cefuy qui efl 

enfermé dans cet outie de vents que le^ 

Compagnons

SUR L'ODYSSE'E. Livre X 21 j 

fur à aforia. Comme celuy qui mange trop de 

viid en cft incommodé, de me/me celuy qui 

veut fonder la majeflé » efi ûpprhnê par fa 

gloire* Les fages fujets Jai(îënt fes vents enieimcz 

dans leur outre, & fe fervent de celu 

y que Je Prince a voulu lafeher, & qui eft 

3c feul qui leur hit propre. 

Page 1 £8- Je dèlîheray en moy-mefme 

l je ne me je tur ois point dans la merj II ne 

t pas inférer

Siô REMARQUES 

des fûppîîants & des pauvres > qui par re£ 

fcû n'oient entrer & s'approcher. 

Page 170* Va» me ditSf fuy prûwptement 

de cette i$ef le plus méchant de tous 

olcûh ce jugement d'UlySc^ 

«arce qu'ayant en fa difpofiiion tous les 

venu, les Dieux fuy avoient rend a ce prefenÊon 

feulement InutHe^maisfunefte, Ces 

barbares jugeoknt ordinairement des fiom* 

Bacs par îes biens ou par les maux qui leur 

arrivoient Ceft ainfî qu'à Mahe une vipère 

scellant attachée à la main de faint Paul, les 

barbares fe mirent à dire entre eux, Cet 

ûmme efifans dûttîe quelque meurtrier>pitif*> 

qu*après quil s'ejf fœuyê de la merM lajujiice 

dmm le pûurfuit enecre if fie veut pas le 

iaifer vivre* A£L 2-8, 3* 

1/ ne m'tjtpas permis de recevoir ni d'afy 

ter un hûtnme que les Dieux immûrtels tmt 

déclaré leur ennemi] On peut demander icy 

comment UiyfTe ofe dire des raîfons û fortes 

devant le Roy des Pheadens ^ ne doîi-il 

pas craindre que (exemple d'Eofe ne jette 

quelque ferupuie dans Ftfpiit de ce Prince, 

& ne f oblige à îuy refufer le fecours doni ïi 

a befoitif Non ii n'a plus cela à craindre ; 

h colère des Dieux efl fatisfaite par tout ce 

qui! a fouffert^ & puifquil eft e(chaj>pé [cul 

& qu'il eft abordé cîiez les Pheadens, ceiî

SUR I/ODYSSE'E. Livre J£ %ty 

une marque feure que îes Dieux font appaîfez, 

& qu'on peut le fecourir fans leur 

déplaire* 

Cependant nous fifmes route Jix pms en* 

tiers* iT le feptîeme nûus arrhajmes à la 

hauteur de ia ville de Lamus3 de lajpadeufe 

Leflrygjme'] Il ne fâJIoit pas fept fours pour 

armer de Ilfle d'EoIe à h ville de Lamus* 

oui eftoit l'ancienne Formes, fur h eofte de 

laCanipame, mais Momcre continue 

fa Géographie fkbuieuib » & il augmente 

réloignement pour rendre fcs avantures 

plus merveîileufes&plus terribles. Tous les 

Hiftoricns conviennent que la ville de La 

t 

mus eft For m ics, Si que JFbrmïes cftoît fan 

* 

de fi ne habitation des Leiïrygons. Ciceron a 

Atticus liv. 2, epifh 13. Si vero in hanc 

*mh£uvhn y crier is Aaf$pu}pvitivt Formas di~ 

Cû, Pi in liv. 3. chap, 5. Oppidum Forma, 

H&rmue ante difium, ut mijiîmavere, attd que le nom de 

p

Lcfirygan & eeîuy cîc Leomïn ne /ont que 

le mefme nom ; car, comme Bothm i'a 

émontrc, Lœflrygon cû un nom Phénicien, 

Lais tircamt Lion qui devûre, & ce nom a 

efté rend a en Latin par ccluy de Leontm 

qui fignîfie la ïïïefme chofe? & qui marque 

les mœurs féroces & léonines de ces peuples 

fcarbares. Il y a donc de J apparence 

que comme les Pheaciens a voient quitté h 

Sicile pour ailer à Corcyre, les Leïtrygons, 

ou une partie des Leftrygons, fa quittèrent 

de mefme & altèrent s'eftablir fur tes coiîes 

de la Campanie. On ne peut pas douter 

que Lamus, qui battit FormîeSj ne fuft un 

Leftrygon, fon nom rnefme le témoigne, car 

Lamus fjgnifîe devûtateur, efîant tire du 

Phénicien Laham ou Lahama, qui fignîfie 

deVGtcr* Et de-fà mefme a eflé tiré le nom 

de cette fàmeufe Rcync de Libye appcfîée 

JL^mia, parce qu'eife fendoit le ventre des 

femme3 greffes pour dévorer leurs enfants, 

H once en parle dans fon Art poétique, 

Page 171* De la Jpacieufe hefbrygonie ] 

TWOTAOC peut fjgniher trois chofcs, grande, 

vajle P ou fart éloignée , ou qui a des 

portes fart hautes if fart larges* Le premier 

fens me paroîft le plus naturel & le pi m 

vray. 

Qui abonde en toutes fortes de troupeaux $ 

mt le berger qui ramené fan troupemu de 

t

30R ï/OBYSSEV. IfareX* firf 

ftîûiiiûMs le f$tï\ Ce pafïàge a paru fort di£êék, 

je ne fçay pas pourquoy» ce neft pas 

ïe défaut d'Homère d'être obfcur. Je croy 

que h difficulté vient de ce qu'on a voulu y 

chercher trop de finefTe, & que pour en 

trouver le véritable fcnsjl ne faut que s attacher 

aux termes, car dés que l'on a trouve 

ce que les termes prefcntent naturellement, 

on peut s'aifeurer qu on a trouve ce que le 

Poète a vouiu dire» Nous avons vu que 

quand 51 a parlé de la terre des Cydopes, îi 

a dit qui! n'y avoit que des mouton & des 

chèvres, Icy pour caraélerifêr ïe terroir de 

Leftrygome, il fait voir qi/iî confiftoît eu 

pafturages, êc qu'il nourrïflbit non feulement 

âc$ troupeaux de moutons, maïs auffi de$ 

troupeaux de bœufs. Ces derniers ne fe menoient 

pailîxe que la nuit à caufe des mouches 

qui font très incommodes en ce payslà 

j au lieu que les moutons paîfîbient ïe jour, 

paice quiis font garenus par leur lame- Homère 

defcrit cela poenquement, &il dît que 

le berger ramenant fbn troupeau de moutons 

le fcir, avertit le pafteur de boeufs qu'il 

efl temps de fortir pour ïes mener au pa£ 

titrage, & quVmfice dernier fort quand l'autre 

rentre. Jufques-Ià nous ne pouvons pas 

douter que ce ne foït-ïà le véritable fans de 

te pa%e. Voyons û h fuite fera plus dît 

«crie. 

Là un berger qui murrûk fe pajpnr de 

ï\

dormit Ifi nuit, gagner oit doubk fnlmrc\ Ce 

qu il vient de dire attire naturellement cette 

réflexion économique j quand le berger 

icntre le fuir > ceïuy qui doit mener paiftre 

ïes boeufs fort & les garde ia nuit: ainfi un 

berger qui pourroît Te pafler de dormir f 

jagneroît double falaire. Et pour faire voir 

que le pays luy donneront cette commodité, 

il ad;oute, car ks chemins du jour èr de la 

nuit font Vûyfms* Il n'y a perfonne qui ne 

voye que ce vers efl la raifon du précédents, 

comme le fait affez voir k particule car, qui 

marque toujours la raifon, ia caufe- Ce bcr« 

er pourroît gagner double là!aire5 car fes 

chemins du four & de la nuit font voy/îns, 

Homère appelle ky chemins du jour ir de 

la nuit ïes pafturages où ion menoit les 

moutons le jour, & ceux où l'on m en oit les 

bœufs la tiuît, & il dît qu'ils font voyfins, 

pour dire qu'ils font proche, & que par confequent 

un berger fuffirosl pour le jom & 

pour fa nuit. Car fi les pafturages du jour 

& ceux de îa nuit efloîent éloignez > il ne 

ferok pas poflïble que le mefme berger menait 

le jour les moutons & la nuit les bœufs, 

Cela eft fenfible. On a pourtant voulu cherchercher 

ky un my itère Agronomique & 

expliquer ce vers de ia brièveté des nuits* 

Comme fi Homère a voit voulu marquer 

Féle\atîon du pokj &par leleâtîon , h fituatipn 

du lieu* Lis chemins du pur if d$

s VIL L'ODYSSE'E. Ltnt J£ 221 

fa mm font vûyfms, ceft à dire » dîfent iïs f 

A/ nuit eji fort caum &* k four fort bng* 

Gates a eÛê fe premier Auteur de cette 

elfe explication. Mais e'efê faire grand tort 

à Homme de luy imputer une vue û faufle 

& une chofe de û mauvais fêns, Qu'eft-ce 

que cette brièveté de nuits feroitau berger! 

en devroit-il cftrc moins de temps aux paflurages 

i & le jour & k nuit, vvK7nf**pw3 

rfauroit il pas fes vingt-quatre heures également 

! Crates a beau dire que les Leftry- 

•ons font fous la queue du Dragon où i! 

B ? y a prefque point de nuit Telle, ceft pou*- 

Àratus a dit $ 

WLÎvy>rm\ Mmiç m nguj dva*mh£*4 dfàvihymi 

Le cûuchant ir te levant fo méfient irji 

confondent* Et Scaiiger a beau appliquer à 

cela le vers de Manille , 

Vîxfîie m tus 3 ûccafas crk* 

Tout cela ne peut s accorder ni avec fa rsrfcn 

ni avec la Géographie. II ne peut s'accorder 

avec la Géographie, parce que, comme 

Bochart Fa remarqué, ii ell faux que la 

ville de La m us fbît fous ta queue du Dragon 

, fi elfe y avoit efté, il aurolt fallu à 

Ulyfîè, non pas (ept jours, mais plus de fept 

mois pour aiier des tJles Eoiiennes a celte 

Ml'e, & pour revenir de cette ville à Fîfle dç 

Grec, c'eft à dire, à Qrce'j. Et il ne peut, s'accorder 

avec la raUon, parce qu'Homère reair 

"• *

%%% REMARQUES 

droit par-îà «ne rai/bn très peu fenfée, & 

qui ne feroit nullement une raifbri, comme 

Je lay desja dit. Ceft donc une imagination 

qui n*a nol fondement, & 51 ne mut pas 

chercher d'autre fens à ce pafîage que celuy 

que je luy ay donné, & qui eftle mcfme 

que celuy que Didyme avoit embraffé, a| 

mKttûç, Les paflurâges du jour à? ceux de 

la nuit font prés de la ville* 

Pour entrer dans k port qui ejl fart ce 

lebre^ Ceft le port mefme qui avoît 

donner ïe nom à ïa ville i car, comme Stra 

bon la remarqué, la ville de Formies avoït 

cflé appdlée Honnies, à caufe de ïa com 

modité de fon port ôppustf s ipjjiai M^PJU% 

Page 172, Afais moy je ny 

Ce qui venoît de luy arriver chez les Cy 

dopes I'avoit rendu plus prudent. Maïs pour pf 

quoy fouffre-t-îl que fes Compagnons y en 

trent, & que ne fe contente-t il d'envoyer 

un feul vaifleau? Apparemment ils efloient 

entrez avant qu'il euft pu donner un ordre 

contraire. 

D'où je ne découvris micuns travaux de 

laboureurs "I ïl ne vit aucunes terres cultivées 

j ce n elloit que des paftuiages^ Jes Lef 

tf ygonSj non plus que les Cy dopes, ne s'a- 

^ 

4 

* 

m

SUR L'OBYSSE'E- îérê X 22,3 

mufoîeut pas à labourer & à fémer, ils ne 

faifoient que des nourritures de troupeaux : 

& ceft poorquoy Bochart a eu raïfoi* de 

croire que leur pays avoîe eue appelle fe 

p^ys des Aur onces & des Aufûnes 3 des moti 

Hébreux averût & iw*A, dont le premier 

fignifie des parcs de en bis, & Tau ire des 

ejlitMes à bœufs* 

Es c % efiait la fille du wefme Antiphat* 

Mûy des Leflrygûns~\ Comment Ulyfie peutil 

eftre informé de toutes ces particularités, 

puisque ceux qu'il avoit envoyez reconnoîftre 

le pays , périrent, que tous !es vait 

féaux furent eferaiez dans le port, & qu'il 

ny eut que ion vailTeau fêuï qui fe fauva ! 

On repond que ce fut ou Qrec ouCafypfc 

qui rinôraîfirent de toute cette avanture, 

car il paroi 11 qu elles eft oient très bien informées 

de tout ce qui luy eftoit armé. 

Page 17 y Elk leur munira fe Palais du 

Rûy fan père] Les Cydopes n'avoîent point 

e Roy, chacun regnoît dans fa famille, & 

voicy un Roy qui règne fur îes Leftrygons, 

race des Cydopes ; & la rai [on de cette différence 

eft que les Cyelopes n'avoient point 

changé de demeure, au iieu que les Lefîry 

gons ayant quitte la Sicile pour aller sefla 4 

Iir fur les cofles de la Campanie, à Fur m 

WI/MJP ils fe firent un Roy & obéirent à ce m 

ïiiy qui les conduifoiu 

P4 

-Mi

324- K EM ARQUES 

Page 174. Les Lefirygûfts enfilant cas 

malheureux c&mme des peijpms] Ceft le 

véritable fens de ce vers, ij^ôcff *tfc*>ç mipwmç* 

Ulyfle ne pouvoit donner une pîus 

rande idée de îa taille gigantefque & de 

la force de ces Lefbygons, qu'en 

qu'avec Ici inflmments dont ifs eiloîent aimez, 

ils enfiïoient fes Compagnons, &fes 

ayant enfilez, ils les emponorent fur leurs 

efpauïes comme une broche de barangs. If 

faut fe fouvenir qu'UiyfTe parle icy aux 

Pheaciens» ceft à diref a des gens très crédules 

& amoureux de fables ëi de contes fes 

pîus remplis du merveilleux le plus incioyafeîe. 

Et mus arriva/mes a tijk d'jEteœ, qui 

efiûit la demeure de h Dêeffe Gréé] De la 

¥ïilc de Lamus, qui eft Formiesf Ulyflê arriva 

îe jour mefme à l'ifle d 7 y£aaf ceft à 

dire à Qrceï f qui eft une montagne fort 

voyfine de Formîes * il l'appelle une ijïe È 

arce que, comme dit Strabon, 1a mer 

es marais, qui l'environnent, en font une 

refque ifte. Là eftoit la ville de Grec, & if 

y avoit un autel consacré a Mercure. Homère 

iuy donne le nom d'JEaa 

qu'il tranfporte icy tout ce qui eft dit d'y£œa 

dans 1a Colchrde * comme fe fexpliqueray 

plus au long fur le commencement du x 1 1 < 

Livre. 

Page i/jf Me ejiûît fœur du fev$r$

se» L'ODYSSB'B. Livre X sa y 

jEeses] Strabon remarque fort bien qu'orner 

e connoïfiant ce qu'on a dit de Colchos, 

& la navigation de Jafort à la ville 

«F^sa, &de toutes [es fables de Medée & 

de Cïrcé , de leurs enchantements & de la 

conformité de leurs mceors » les a fait de la 

mefmc famille, quoy-qu'elle* fiiffent fort 

élo^nces, & que Tune habihitt à l'extrémité 

da Pont Euxin , & fautre fur les coftes de 

F Italie, & il ks a placées Fune & Fautre au 

milieu de l'Océan. Il (çavoit bien que eeuit 

s qui Uiyflc partait ne découvr if oient pat 

ce menfonoe. 

Page iy6* Mais après avoir bien 

je trouvay quil ejïûît plus à propos j Cela 

efl fort bien ménagé pour la vrajfembïanc^ 

de la fible qu'il va débiter, dit Euffathe 

l'envoy de fes Compagnons donne lieu a* 

bieuvagc de Ctrcé & a tous fes fortilcges, 

au lieu que fi Uhfle fuft allé d'abord, tout 

cei a ne pou voit plus trouver place. 

Page J 77. Et h ehargeay fut mon CûU * 

ma ttjie pafj'ée entre fes deux jambes] C'efi 

ce que ngnie jùa^hafdéfyL $tptovt pûTtatU 

Jur ks deux ejpaules t car pour îe porter 

ainfi iï falloîtque la tefte dulyffe fuft pafïee 

entre les ïambes de l'animal» Cette 

manière de ïe porter Juy laiObît une main 

«bre pour sappu\er (ut îk pique, ce €^Qï 

•m

â2£ REMARQUES 

le fouîageoit & le faïfoit marcher plus û(& 

ment- 

Page 178* NûUS vaky dans ung une 

entièrement inconnue $ car mus m fçavûns 

en quelle partie du monde nous fmmespar 

rappûft au feptentriûn, ire* ] Cefl à mon 

avis le véritable fens de ce païïâge, car 

Ulyftê ne veut pas dire qu'il ne fçait pas oit 

eft le nord de HAe, où eft le midy, où eft 

îe couchant, où efl fe fevant ; il luy eftoït 

facile de s'orienter, puifqu'il a voit vu le coucher 

& le fever du foîeiî ; mais iï veut faire 

entendre que la difpofïtîon du ciel eft 

changée» qull eft ïmpoflîble de connoiftre 

à quelle élévation du pôle ils lbnt»& fi cette 

iïle eft plus ou moins orientale que îes terres 

qulb connoiffent.L«aftr« ne font plus 

fes mefmes, car cette difpofition change k 

mefure qu'on s'approche ou qu'on s'éloigne 

du pôle. Homère parle ainfi pour rendre 

plus croyable ce déplacement qu'il fait des 

lieux où Uiyffè a abordé, & pour mieux 

perïiiader qu'ife font au milieu de l'Océan* 

J'ay fïiivî Strabon* qui eferit, fiv. 1 o.qu'Ho 

mère ,1 parlé icy des quatre points du mon 

de, & que fr*. Ubfcvhê, eft pour le ùf. 

tentrion, & mffïaurûreÀ pour ie midy, ou 

la pîage mericuonate, M W ^ km mtpGah^ & 

nous en avons vu des fa un exemple. On 

pourroit croire aufïi qu'UIyfie ne parle dans 

ces trois vers que de deux collez du mon J«- ft €3 

P 

**

SUR L'ODYSSE'E. Lme X 227 

u couchant & du levant, {hnf ïûbfcurïtê, 

pour le cmichant, & w&V, Xaurore t pour fe 

levant § & que ie refle » ni ûà le fûkil paffe 

tous la terre, ni oit il en fort, nefl que l'explication 

de ces deux termes. Et qu'il veut 

dire fïmplernent qu'if ne Jçaït 1 quelle exposition 

il eft par rapport aux autres terres» 

fur-tout par rapport à Ithaque. En effet, 

cette ignorance a commencé à paroi ftre 

uand îi eit parti de Formies, car au lieu 

de prendre à gauche au levant, comme 

falloit pour aller à Ithaque, if a pris à droit 

au couchant & eft arrivé à Tifle de Grcé, 

qui eft au couchant de Formies. De forte 

qui! a raifon de dire qu'il ne fçait plus où 

ileft. 

Et je dûute quil y en ait un ban, car ef* 

tant mûmé] Il auroit meilleure efperance û 

l'ifle eftoit deferte, mais ayant connu qu'elle 

eftoit habitée, ceft ce qui Eut fon defefpoîr, 

à caufe de tout ce qu'il vient d efprouver des 

Leftrigons & des Cy dopes. 

Page 179. Ek a quây fervent kscris ir 

les larmes dans i'affïiéiiûn!] Le vers Grec 

veut dire mot à mot f mais en criant &* en 

pleurant ûti ne trouve paint d*iffuê, de re~ 

me de a [es affaires* Ceft ce qui fonde ce 

qui fuit» mais mûy les ayant mis pajfei en 

revûëj ire Ulyfle ne s'amufepas à pleurer, 

& ^git, il cherche. 

* 

vj

22 8 R Ê K A « Q C E S 

Jejeiiay en me [me temps deux forts dans 

un eafque pour w:r que lie compagnie t 

aUet à fa déceuvene] Les tragiques aven 

tures qui leur eïloîent arrivées chez les Cy #tf 

dopes & chez les Leftrygons les a\ oient te ^ 

ïemetit effrayez ^ qu'UIyffe neftoit pas af -* 

feuré délire obéi, s'il avoit voulu les envoyer 

de fbn autoatéi Voila pourquoy il a 

recours au fort. 

Page i 80- A fa ujfe de fes vingt-deux 

Cûmpdgmnsl Ulyfle avoit cinquante hommes 

fur chacun de fc$ vaïfîpux. Il en avoit 

perdu ûx par chaque vanneau , il en a\ oit 

donc encore quarante-quatre fur fe fïen f 

vingt deux pour chacune de ces deux bandes, 

Et emitûtîné de èais] Ceft aînft que j explique 

Je texte, «erfWfWl» iyl ^p^, dans 

un lieu eeuvert, & n@n pas comme Hefychîus, 

dans un lieu élevé* Car comment 

peut-îl eftre dans un lieu élevev & dans une 

vallée ? On peut [expliquer aufll, dans un 

lieu reculé* 

Des bups if des liens quelle œvm ap* 

prîvûifei par fes ftmefies dragues] Cîrcé eft 

îcy fembfefine de fa volupté, & Homère 

treut faire voir que la volupté dompte ks 

animaux les plus féroces. Pc ut-eflre melme 

que par ces lions & ces loups app ri voilez 

#|ui gardent la porte du Palais de Circé, le 

¥œw reprefenê les miuilîres de ces mai*

SUR L'ODYSSEE. Lhfê X 2.2$ 

fbns île débauche qui paroiiïènt doux & 

polis, & qui dans ïe fond font plus fcroces 

à plus dangereux que les lions rnefmes. Au 

teile cet avanture d'Ulyfïe avec Grec iieft 

pas une pure fiction t eile a un fondement 

veritabfe. Ciicé eftok une fameufe courûfane 

qui retint Ulyfle chez elle aiïez Ion 

temps* Ses mœurs corrompues n erapefcherent 

pas la pofterité de luy accorder les 

honneurs divins. Du temps de Cîceron elle 

e il oit encore adorée par Tes habitants de 

C* f 4 

ïrcei. 

Page i 8 i, Le Brave Pûlîtes, qui eftoh k 

fis prudent de la irûUpe] Ceft adiré, le 

plus prudcwt de ceux qui efto ; ent cofnraan- 

fut pius prudent que luy, puifqu'il jicntra 

point. 

Et km (m un hr envase corrvofè de fromage 

de farine & de miel détump^ dans 

du vin de Prmnni\ Jufques-là il n'y a rien 

d'extraordinaire dans ce breuvage. Ceftoït 

la boiiïbn. ordinaire que Fon fervoit aux 

personnes de difhn&ion, & fui-tout à ceux 

qm avoient beaucoup fatigué, Noos avons 

\u dans l'onzième Livre de flliadc, tom. 2. 

pag. 206. que la belle Hecarnede en fer vît 

un paicil à Machaon, qu'on avoît ramené 

Wcflc du combat,excepté que te miel n'y 

eÛoït pas itteficj mais elle fa voit fetvi à part 

dans un bafiïa. Or ce ad joute à cette b«f-

230 R E M A R Q U E S 

fon des drogues enchantées, & rî e 

d'imaginer ce qu'Homère a entendu par 

Page i 8 a. Elle leur donna pr la teftê 

un €0up de fa verge*] Or Ja verge eftoit 

neceffarre pour tous les enchantemems, 

& pour toutes les opérations 

miraculeufes, & on ne peut pas douter que 

ïes Payens nayent tiré toutes ces idées de 

ïhiftoire de Moïfe» 

m tout le corps de véritables fûur^ 

eeemx j maïs km ejprît eflok encore entier 

tomme auparavant] Ceft à dîre , qu'ils eftoîent 

vautrez dans i ordure comme de vo 

ritables pourceaux, qu ils a voie m abandon-" 

île leur corps à ta débauche, maïs que leur 

efprit n eftoit pas abfolument changé. Ce * * 

pendant il eft certain que Fcfprit ne de 

meure pas entier à ceux qui s'abandonnent 

au vice, 

La Déejfe remplit leur auge de gland èf 

de gâujfes, dont les pourceaux ont accoutumé 

de je nourrir] Voila ie fort malheureux 

de ceux qui vivent dans la débauche, leur 

nourriture n'eft plus que la nourriture des 

pourceaux. Au refte je ne fçay fi l'on ne fefoït 

pas bien fondé à croire que ceft ce 

paflage d'Homère} je veux dire cette fiction 

fî ingenîeufe, que Je vice metamorftiofe 

les hommes en bdtes brutes# qui a 

m 

p 

m

SUR I/ODYSSE'I. Livre X aji 

donné lieu à h fameufe Metempfycofe I* 

$ 

ou* fi cette Metempfycofe eft plus ancienne 

u'Homere » car on prétend qu'avant !uy 

die avoit eflé imaginée par les Egyptienss 

je ne fçay fi l'on peut s'empefcher de croire 

que c'eft de ces peuples qu'Homère fa tirée* 

Quoy-qu'H en foït, cette fable favori(c 

tout à fait ie fèntiment de ceux qui ont 

fbutenu que la Metempfycofe n'eft qu'une 

figure, & en me fine temps elle a tout ce 

qu'il faut pour pafTer pour une vérité fimpte 

dans Fefprit des peuples crédules & fuperitieux. 

Page 183. NûUS avons pareûuru ces 

félon vos ordres, nous avans ttûmé dans le 

fond d'une vallée la matjhn de Cireé] Euryloque 

eft fi pénétré de douleur, qu'if ne 

parle pas de fuite f fon di(cours n'eil point 

continu, ii eft coupé per meifa, comme di« 

fent les Rhéteurs 1 & Longin a rapporté ce 

;e dans fe chap. 1 6. pour montrer que 

rien ne donne plus de mouvement au dît 

cours que d'en ofter les liai fans- En effet, 

it-îl, un dtfcûws que rien ne lie if n*em* 

barraffe marche if coule de fey-mefme, if 

il s'en faut peu qu'il n'aille quelquefois plus 

vifie que lapenjée mejme de l'orateur* Ayant 

approché leurs boucliers les uns des autres 

dît XenûphûTî, ils reculoîent f ils combat 

totem;, ils tuoîent, ils mouroîent enfemble. 

// m eji de me/me de ces perdes d'Eurylg^ 

'9

*r 

Z^Z REMARQUES 

que a Ulyffe : nous avons parcouru ces 

bois félon vos ordres ; nous avons trouvé 

dans le fond dune vallée la imifon deCïrcé 

» &c. Car ces périodes awfi coupées, i? 

prononcées néanmoins avec précipitation, 

fûtit les marques d'une vive douleur > qui 

Vempejche en mcfme temps ir le force de 

parler* C f efl aïnfj qu'Homère fçait oiîer où 

il faut îçs iiaifons du difcours. Euftathe a 

bien connu en quoy confiée fa beauté de 

ce pafiâge: Les Anciens f dit-il, ont faiié U 

nombre ir l'harmonie de ces deux vers, mais 

il y a um autre beauté, dejï le retranchement 

de tiaifons» K&hév 4* h mviziç %$j « 

Page i H _u Mais luy fe jet tant à ipes 

g:nmx ] Ce canciere d'Eury loque eft le 

caraclcre dïm homme fige s

sum L'ODYSSE'E. Livre X, 233 

Fuyons fans perdre un mûmerttj C efl ce 

que doit dire comageufement tout homme 

que l'idée de fa volupté commence à attaquer, 

Et d'éviter ce funefïe jêitr J J'ay voulu, 

conferver cette exprefllon qui efl prédeufe 

& d'un grand fen*. Il n'y a point de jour 

plus funefte que celtiy ou fon fuccombc à 

h volupté. 

Demeurez donc icy, Eiiryîûque, a faire 

hc-nne €hcre\ Cette rcponfe eft pFcîne d'amertume. 

Ccrame Ulyfie n'a pas vu œ 

qu'Euryloque a \xx, il croît que c'eft par 

îaftheté qu'il refufe de îe fuîvre. Et voSà 

comme on juge fou vent très mal des a€lioos 

des hommes, parce qu ? on n'en connoiit pas 

ïcs motifs. 

Page 185. Mercure vint à ma rencêtîtw 

fms la forme d'un jeum hûmme ] Homère 

a crû avec raifon que fa fiÔâon auroit manque 

de vra)frmblancc, s'il avoit fait cpiTJ- 

5} ffc fe tiïaft de~là par fes feules forces ? & il 

a voulu enfeigner qu'en toutes rencontres, 

& fur-tout dans celle *cy, les hommes ne 

peuvent tirer leur force que du fècours des 

Dieux- 

Comme des pûtitceaux*] Par ce fêtil mol 

canine Homère fait voir cyie cette metamorphofe 

eft une allégorie ; fes Compagnons 

d'Uîyffc ne font pas changez effe^li- 

Yemcnt en pourceaux, iù ne font pourceaux

4|4* REMAEQUEI 

que pa* h vie qu'ils mènent 

Page 18 6. Elle veus âflrirafét cwche, fr 

garde^-yûus bien de la refiifer*] Voilà un 

malheureux confeil pour un Dieu. Mais H ne 

fout pas juger de ces temps-là par les noftrès» 

où l'Évangile a poné par-tout fa lumière 

& fait voir la neceffité indrfpeniàbfe 

de la pureté. Dans ces temps-là ces commerces, 

qui font aujourd'huy û odieux, cf. 

toïent non feulement loufferts parmi les 

Payens, maïs encore permis f & mefme 

louez. It n'y avoit que l'adultère qui fijft 

un crime défendu par les loïx, & quelquefois 

puni de mort. Nous avons \û 

auffi dans le dernier Livre de l'Iliade, 

que TJietîs mefme confeîHe à fon fils de 

le livrer à J amour pour fe confeîer de 

la mort de Patrocle* On peut voir là ma 

Remarque, tom. 3. pag. 595- Cette Remarque 

auroit bien dû empefeher l'împer* 

tîneiîce d'un malheureux Critique, qui ma 

accu fée d'avoir introduit le vice dans les 

maifons, en y intrûduifant une Traduction 

Françoife dnomere- Mars, dïra-t-on îcy» 

Ulyffe contentant à la paflion de Circé ne 

fâît que ce qu'ont fait les Compagnons. Où 

eft donc la différence, &où eft Futilité du 

prefervatif l Les Compagnons d'UI)fle fe 

font livrez à cette volupté pour aflbuvir leur 

paillon brutale $ ilê foat pofledez par Circé>

su m L'ODITSS!'!. Livre X ±$$ 

$L ils croupi fient dans cette ordure ; mais 

Ulyfle fortifie par ce préfervatif, ne fe livre 

qu'avec quelque forte de fagefïe pour délivrer 

fes Compagnons & pour obtenir lei 

fecours qui luy font neceÉûresj, il pofîêde 

Circé & n en eft point poffedé ; il ne boit 

pas en infênfe comme fe$ Compagnons ; il 

ne cherche point à aflbuvrr une pafïion 

brutale» il a un but qui exeufe fa comptaifance, 

& qui » feion ces temps de t eue bref* 

h rend mefme gbrieufe pouf luy» 

'n que quand elle VûUS tiendra déformé 

, elle ne VûUS rende pas lajcke ir effe* 

miné] Apres qu'il aura quitte fes armes, il 

faut que la raîfon &. finftruftion luyenfer* 

\ent t & quelles Tempefchent defuccombeî 

à l'attrait de la volupté. 

d? Dieu m*ayant parlé atnji, me prefente 

cet antidate qu'il arrache de terre, &c* ] Le 

fens cache fous cette allégorie n'eft pas difficile 

à pénétrer, & Euflathc Fa expliqué à 

merveilles. Mercure eft la raifon, ou mefme 

ieDieu des faences, & fa plante qui! donne 

pour prefervaiif & dont la racine eft noire 

& la fleur blanche & douce, c'eft l'infimetion» 

la fagefle ; fa. racine eft noire, parce 

que les principes de l'inftrucftbn font defagrcables 

& amers, comme Platon dit fort 

bien en quelque endroit i Les c&mmence** 

wMts de l'injbru&jfln jmt mpurs awmz

JP" 

236 REMARQUéS 

•pagmz de dûukur if d& trijîeffe, Sa fleur 

eft blanche & douce» parce que les fruits de 

fiiiftruéiion font doux, agréables & nourrîfiants, 

Mercure donne cette plante, parce 

que imftru&îcn ne peut venir que de Dieu» 

Mercure ne porte pas avec luy cette plante, 

mais il la prend dans fc lieu mefnie où il eflj 

pour marquer que par tout où Dieu fe trouve, 

on peut trouver l'jnflrurtion &Ja /àgeffe 

pourvu qu'il veuille nous enfugner» & que 

nous foyons difpolez à Fdcouter & à Juy 

icjr. 

-tu 

Fa#c 1 8T. Les Dkux tûfpcliaa MQ\\ 

J 

On prétend que jVhiy cû un piot Egyptien 

& qu'il y a une véritable plante qui poitece 

nom en Egypte, & qu'elle U? bonne contre 

les enchaînements, "D oiir moy je cioy qu 

en cfl du Adûiy comme du Nspentlws dont 

il a efté parlé fur le quatrième U\ re* 

11 eft difficile aux martels de l'arr^chi ] 

Car l'homme par Tes feules forces ne peu! 

parvenir a lafageile, u isut qui! la reçonc 

de Dieu , fans luy tous /es efforts font inutiles: 

cefl ce que Platon a fort bien fait 

voir. Si Dku fe veut 3 dit Socrate à Theage$, 

vêtis ferez € $ e grands prûgrés dans 

fcfïude de h f&gtffe > fnaL s'il m l§ vmi 

pas $ wus irûVaîïferî m vain» 

Page 1S 8, Je pris la ejzipe défes mains

fr je hisj Ulyfle boit Ja coupe , maïs il ne 

h bwt pas en fou & en eflourdi comme fes 

Compagnons, il la boit après s'eftrc muni 

du contrepoison dont il avoit belbîn, &quî 

Je met en eftat de refifter à tous fes charmes 

de fon ennemie. Cefl ce qu'Horace 

avoit bien compris, lor (qu'il filer h k Loliius 

dans fa 1 1. Epift. du iiv. 1 - 

Sirenwn vûces if Circm pâcula nûfii, 

Qûm fi eum Spciis ? fiultus, cupïdufque 

Soi domina maettice fiiifiet îurpîs fr 

exc&rs, 

Ixiffet taras immundus > aut arnica 

iutû fus. 

On peut voir les Remarques de M. Dacicr, 

Page 19 0 - Ce ferment fait tûut du bn^ 

pus mif une amMguké\ Ceft ce que fignifie 

ce vers, 

QfMV 

Mot à met » mais après quelle eut juré if 

achevé fon ferment* Celuy qui exrgeoît le 

forment, le dkftoit luy-mefme, & il n'oubiîoit 

rien pour le rendre très précis, très 

€ .prés & fans aucune équivoque- Ceft ce 

«JIIê. les Latins appelaient cûncepds verèis 

jurarç, & jurare in veréa alicajus* Horac^ 

rô feiba jurakas me$¥

_^ m* ___ 

a^5 RsMAlQffïs 

L'autre drejfa une table d'argent] lî f g 

dans le Grec ejîmdk* Ce qui fait conjeétuter 

que c'eftorent des tables qui fe plîoient 

& fe déploient comme nous en voyons au* 

jourd'huy. 

Page 19 i - Elle me plmea fur un beau 

fiege à marchepied ] Après ce vers il y en 

a cinqque jay retranchez, parce qu'as font 

d'ailleurs, & répétez mal à propos. Nom 

avons desja vu une des quatre Nymphes 

mettre fa table, Homère n*a donc garde de 

faire venir une autre efcîave apporter de l'eau 

& mettre la table- On voit bien que cela ne 

peut fubfifter, cela ofle mefmc ufie grande 

beauté à ce paflages Homère ne samufe 

pasicy à rapporter ce quon avoit iêni à ce 

repas. 

Car mm cœur ne me préfageûh que des 

maux] Voilà la fageffë & la prudence dUlyflè, 

après tout ce que Circé fait pour luy 

plaire & pour fe bien traiter» après le ferment 

qu'elle fuy a fait, il eft encore trifte, 

& fon cœur ne luy préfage que des maux, 

un homme fage ne fe croit jamais en feureté 

dans une maifbn comme celle de Grec, 

Et d'ailleurs ce preffentîment, qui caufoit 

fa trifteflèj n'efloït que trop fondé ; car 

fe commerce qu'UIyfîè eut avec cette cour* 

tîfane fut très malheureux pour lay, puîfqu'il 

en eut un fils nommé Telegonut, qws 

k tua fans le connoiftre.

SifR L'ODYSSk'l. Livré JT. $0 

page 193. Et parurent plus jaines, plus 

Uaux ir plus grands qu'apparmant] Ho* 

mère marque bien ky le changement admirable 

qui fe fait dans ceux qui quitte ni 

le vice pour embrafler la vertu. La joye de 

Je voir dçiîwez des maux qui accompagnent 

toujours les vicieux, & en poflêflîon de§ 

biens que la vertu prodigue à ceux qui la 

finirent, les rajeunit & les fait paroiftr e tout 

aytres. Cette Remarque eft tirée d'Euiaîhe, 

& elle m'a paru digne de iuy, 

Page 1 p ^. Comme de tendres geniffes\ 

Cette comparaifbn tîrec de ce qu'il y a de 

plus doux dans Ja vie mftïque, fait ky un 

tres bon effet 3 & fait paflêr agréablement 

dun ton trifte à un ton plus guay. 

V 

Page 1 p 5* Avei'VOtts ûîibliéles cruauté 

Le Grec dît, comme a fait le Cychpe* Êï 

comme le Cydope n a lien fait de fembbbie, 

les Anciens ont fort bien remarqué 

qu'Homère fait parler ky Euryloque d une 

minière embarraflee & fans fuite, pour 

mieux marquer le defordre où jette la 

frayeur- Ceft, dît fort bien Euftathe, l'imi* 

taiien d'un caraélere entièrement ttmhlé, 

$tie de reprefinter Eurykque parlant mec 

J* ptu de raiftm b* défaite* Maïs je n'ay paï 

j^gé à propos de biffer ce defordre dam 

^Traduélion, on me f aurait attribué , &

24^ REMARQUE! 

d'ailleurs ce defordre ne rcuflit pas en nof. 

tre langue. 

Leur perte ne doit eftrc imputée qu'à 

Vhn/n'ttdence du fhefj Autant que le premier 

refus qu'Euryloque a fait de fuhtç 

UfyfTe a cÛé fr-ge» autant ce fécond efl m* 

fokîit & ïnfênfë, après ie rapport que îuy a 

fait fon gênerai do bon efîat où îl a laiffc 

les Compagnons. Homère a voulu montier 

qu'il y avoit de 1 humeur & de l'aigreur dm$ 

la fageiîe d'Ëuryloque ; & quand cela cfl,il 

n'eft guère poffibJc de garder de milieu. 

Page i 97. Malgré Ialliance qui taVûk 

uni a ma maifinl Car il efïoit beaufrere 

d'Ufyfîê, ayant efpoufc la feeur Ctirnenc. 

Page 199. Il faut que vous defçendir^ y 

dans le fombre Royaume de Plut m ] Pourt|uoy 

ûut-il qu'Ulyfle deicende dans fe 

Enfers pour ai 1er confulter Jame de Tireas 

f Orce, qui eitoit uneuceiicj ne pouvoit-elle 

pas Iuy découvrir tout ce qui Te reardoiî 

? Voicy fur cela une remarqued'Euf 

tathe qui me paroift 1res fenfee, Circé déclare 

à Ufyiïe îa neceflîté de ce voyage, afra 

qu'apprenant de h bouche rnefme de Tîrelias 

que la mon Itty doit venir de la mâr, 

if fait difpo/c paria à s an citer dans fou Mit 

à ion retour de ce Royaume fombre* & à 

m pas sexjpo&r à la mort dont il fe verra 

s

SUR L'ODYSSE'E. Ltwe X, 241 

inenacc ; ou s'il r>e vent pas demeurer avec 

£42 REMARQUES 

mère dit ky de f Aine de Tireras, 

• É 4 # * 

Elle cûTtfèrve jïm &(prk , fûn entendement 

muer* Selon h doâri&e des Egyptiens, 

qu'Homère fmt, l'Ame efi compose d'un 

iXjrps fubtîl & lumineux, & de ce qu'on appelle 

Xentendernent* Xejpyit* Le torps fubtî! 

cil ïa partie matérielle de ]*Ame, & fentendement 

ou l'efpntj, çpivtçt cft Ja paitie Ipi. 

truelle. Apres h mort, c'eft-à-dire, après 

E réparation du corps teircftre &. de T Ame, 

îî le fsît une autre feparalïon des deux parties 

de cette Ame, Lç corps fuhtil t qui eft 

Xidôle, limage du corps terreftre, $m va 

dans les Enfers, & îenteîidemeilt, J'efprit 

qui ert ia partie ipirituelle, \a dans le ciel 

On voit par-là que le* Ames de tous les 

hommes dans les Enfers font fëparces de 

leur entendement, de leur efprit, ctS à dire, 

de la partie fpîrïtudle, comme Achille le dit 

foït bien. Mm l'Ame de Tireras a eu ce 

riviïege, qu'elfe n'a point fbuffert cette 

js2fatiori; elle a confervé ton entendement^ 

fom efprit, & voilà ponrcjuoy elle a tant d'avantage 

fur les aptres Ames} qui ne font 

auprès délie que de véritables ombres, de 

vains phantolmes,, ccft à dire, des idoies3 des 

images du corps terreftre & moi tei 

c quand VûUS mr$i iraverfë t'Océd®*

sum L'ODTSSE'E. livre JE 243 

y&Us trûuverei une plage commode] De i'ffïe 

de Cif£Cf ou de Circeï, Ulyiïe arrive k meA 

me pur au lieu où Homère a placé la def* 

cente des Enfers, & Fendroit par où Ton 

cioquoit les Ames des morts, c'eft pourquoy 

il eft ai fc de voir qu'il parle d'un iieti 

qui eft entre Bayes & Cumes pres du lac 

Avertie \ car, comme dit fort bien Strabon* 

tes Anciens ont placé la Necrornantie d*Ho~ 

mère prés de l'Averm* La description 

qu Homère eti fait cotivrenl a?ec lesRela* 

tïons des Géographes* C'cft-Jà qu'on a placé 

f Acheron, le Puriphlegeton, ïe Cocyte, 

le Styx. On peut voir Strabon, ïîv- j. Mais 

comme Homère a transporte fifle de Cireé 

dans l'Océan, il ne faut pas seftonner qu'il 

continus cette Géographie f^buleufe» 

Page zoi* La plus felfe geriiffe de ws 

faftwrages, ir qui aura toujours ejfé fier Me] 

Car Si ne Hlloit offrir aux morts aucun animal 

fécond : 

-,. Stérile wfue tiM; Proferpma vaccam* 

Virgile. 

Un Bïïjcher ou vous jetterei toutes fortes 

de richeffes~\ Non feulement du miel, des 

Heurs, mais de riebes efloffes, des armes, 

comme c eft oit la coutume» 

Page 204 » Il y avoit parmi eux tm jeu* 

ne homme nommé J3pemr ? qui déficit ta 

L ij

^44 REM A R a SUE L'ODYS- IM* X 

dune valeur diflinguée à la guerre* ire*'] Ces 

fortes de particulftritez ne font pas inutiles, 

elles donnent à la narration un air de vérité, 

comme û e eftoît une hîftoïre, car les Hifloriens 

caraéterifent fcaveiit ainfi ceux dont 

Hs parlent. 

Tûîîiba du toit m bas irilfi rûmpit k CûU 

On allok fiir les toits des maîlbns, Us e 

loient tous en terraffe. 

Page 2 o y. Et à s'arracher Us cheveux\ 

Ceft la coutume de beaucoup de Nations, 

& fur-tout des Orientaux, dans les douleurs 

vives de s^rracher les cheveux. Nous avons 

vu dans ïe X. Liv* de l'Iliade, qu'Agamemnon 

s'arrachoît les cheveux. Ceft aïnfi 

qtt'Eftfras dit ; Cumque audfffem fermûmm 

ijlum, feidî pallium meum îT tunicam , èr 

evelii capilbs cupitis mei if barbm, irfedi 

mœrens, i< Efd 9. 13. 

Deux moutons nûtrs, un mafle £r une fe* 

] Car ils eftoîent neceflsires, puifqu'i 

n fallût t verier le fang pour les Am

Argument du Livre X ï ù 

Y T&yf* racmte aux Phêaeiens h wy#£* 

£-/ qu'il fit aux Enfers pat fûrdre de 

; les difiûurs que luy tint Tirejtas, 

pour luy enjeigner les moyens de fi fauver 

if de fauver fis Compagnons ; les her&$ 

if les kerûtnes qu'il y vit ; la cornerfatim 

qu'il eut avec fa mère, ir mec beaucoup 

de ceux qui avaient efiè avec luy à la guerre 

de Trûye, if les peines que les méchants 

fûuff'rmt dans m endrûkfiparé* 

iij

v ERE, 

Xn 

L'ODY 

i / K X/. 

UAND nous fufmes donc 

arrivez à nofire navire, nous 

2> 

» le mettons à Feau 5 nous dre 

e mafl3 nous déployons tes voiïe$? 

» & après avoir embarqué les v 

•u 

» mes, dont nous avions bcfoin, nous 

» quittafmes le rivage> accablez de 

» trîilefTe & baignez de pleurs» La 

» Décile nous envoya un vent favo- 

» table qui enfla nos voiles, & qui 3 

» fécondé par l'effort de nos rameurs 

iar Fadrefîe de nofïre pilote, 

» nous faifoît voguer heurenfement 

* Nous courufmes ainîi tout le ion 

»

L'ODYS. D'HOM. VmXL 247 

jufqu'au coucher du foleil, & ïorf- * 

que la nuit répandît (es ténèbres * 

fur la terre, noftre vaiffeau arriva «. 

à l'extrémité de FOcéan. C'eft-Ià « 

qu'habitent les Cimmeriens tou- * 

jours couverts de nuages & enve- * 

loppez d'une profonde obfcurité. «: 

Le foleîl ne les eielaîrc ianiais de m 

(es rayons, ni ïorlqull monte dans « 

h crel & qu'il fait difparoiftre les « 

àftres, ni Iorfque fc précipitant du « 

ciel dans Tonde, il laiffe à ces afires « 

toute leur clarté ; une éternelle « 

nuit eitend fes fombres voiles fur

3 L'Ol>Y55E'E 

nous fifmcs à tous les morts lea 

» efïufions qui nous efîoient ordon- 

» nées ; îa première de lait & de mieL 

3» la féconde de vin pur ? & ïa troi- 

^ fié me d'eau f oè nous avions dé- 

5> trenapé de la farine, J'adreïTay-îà 

» mes vœux à ces ombres, & je leur 

x promis que dés que je fcrois à Itha- 

» que, je leur îiiintolerois iincgenlffe 

3) fterile, la plus beïlc de mes paiîu- 

2> rages , que je ferois confumer a 

» leur honneur un bufeher rempli 

3i de foutes fortes de riche/les, &que 

* je facrifierois en particulier à Tii> 

relias fcul, un bélier tout noir qui 

» fe^roit la Heur de mes troupeaux* 

SJ Après que j'eus adreffé à ce^ 

» morts mes vœux & mes prières? je 

:» pris les vuftimes Se je les égorgeay 

& ïur la folle. Le fan g coule à gros 

•v 

» bouillons • les ombres tiennent 

n de tous collez du fond de FErebc, 

ji On voit pelle mcllc de jeunes femja 

mes, de jeunes hommes, des vieil- 

> lu* dcLhcz Par de loB2s ir*

B*HoMERÊ. Lîvrt XL % 

vaux, de Jeunes filles décedées à la » 

0eur de leur âge f des guerriers a 

couverts de larges MefTures, viéti- « 

mes du Dieu Mars, & dont les « 

armes eftoient encore teintes de « 

fan g. lis fe preflent tous autour de « 

h foffe avec des cris aigus ; une « 

frayeur pafleraefaîlît. Je comman- « 

de à mes Compagnons de dépoiiil- « 

1er les victimes que j'avois égor- « 

'ées- de les Lruf. er, & d'adrefler ce 

leurs prières aux Dieux infernaux, « 

au piiiflant Pluton & à la ïevere « 

Proferpîne. Et moy Fefpée à la « 

ïnain j'efearte ces ombres & j'em- « 

pefche qu'elles n'approchent du « 

ng » avant que j'aye entendu la

250 U O D Y S S E'ë • 

» faires & que le temps preflbif* 

» Quand je le vis, îi nie fit pitié, Je 

» ne pus retenir mes larmes^ & luy 

;» adrefFant le premier ia parole, je 

» Hy dis : Elpcnor, comment elles- 

x> vous venu dans ce tcnebreux fe- 

» jour? Qpoy-que vous foyez à pied 

» vous m'avez devancé, moy qui fuis 

» venu fur mon vaifîeau , 6c à qui la 

» mer & les vents ont efte fa vorables* 

» Fils de Laertc , nie répondit-iJ 

» en foupirant, c f eïl mon mauvais 

» genîe 6c le vin que j'ay bu avec 

7ï 

excès qui m'ont mis dans Peïlat ou 

>:> vous nie voyez. J'eftoîs couché 

» tout au haut du Palais de Cîrcé 

•» à mon réveil je ne me fuis pas ïou •

»'HOMERE. Livre XL 251 

par voflre père, qui vous a élevé « 

avec tant de foin & de tendrcflc, ce 

par voftre 'fils Tdcmaque 5 ce fils « 

unique, que vous avezlaifïe encore « 

enfant dans voftrc Palais f fouve- « 

nez vous de nioy dés que vous fe- * 

rez arrivé à Me de Circé f car je « 

r 

çay qu'en vous en retournant du «e 

j 

Palais de Plu ton vous aborderez « 

encore à cette îïîc. N'en partez « 

point, je vous prie, fans m'avoïr « 

rendu les derniers devoirs, de peur * 

que je n'attire fur voftrc telle la œ 

colcï'e des Dieux. Brufïez mon ** 

corps fur un bufeher avec toutes « 

mes armes* & élevez-mov un tom- « 

beau fur le bord de la mer, afin que « 

ceux aui Dafferont fur cette rive* « 

apprennent mon malheureux fort, « 

N'oubliez pas de mettre fur mon « 

H-x/111 JJCtL LX 111 et Jidfl 11C lJ J ULii XIILIXVI LICJL W* 

ma piDfcffion & le fervice que je « 

VOMS ay rendu pendant ma vie. « 

Je i'afleuray que j'exeeuterois « 

de point eh point tout ce qu'il de- ce 

L YJ

252 L'ODYS SE'E 

» Croît- Pendant que nous nous 

*> tretenïons aiufi triftcment 3 favois 

>i toujours Pefpée nue pour efearter 

» ces ombres & pour les empefdier 

» de Boire de ce fang ,dont elles font 

*r fort avides. Tout d'un coup )e vis 

^ arriver l'ombre de ma merc Ami- 

$ cîée f fille du magnanime Autoly- 

» eus, que j'avois laiffé pleine de vie 

a? à mon départ pourTroye* Jem'at- 

« tend ris en la voyant & je fondis 

a en larmes. Mais quelque douleur 

» que je reflentîfie en mon cœur, 

& quelque touché que je fuffe de fa 

* peine, je ne ia laiifay pas appro- 

* cher de ce fang avant l'arrivée de 

» Ti refias* Enfin je vis arriver l'a- 

® me de ce devin- ÏI avoit à la maïu 

» fon feeptre ; il me reconnut & me 

» paria le premier: GénéreuxUlyffc, 

a> me dit-ïl , pourquoy avez - voui 

s quitté la lumière du foleil pour 

v venir voir des morts, & cette trîfte 

3& demeure f Vous efles Bien mallieu- 

» rcux ! Mais éloignez-vous un pew

OMERE. Livre XL 2j| 

le cette foiîe & détournez cette & 

efpée, afin que je J>oîve de ce fan 

que je vous annonce ce qiae vous «* 

voulez fçavoir de moy. Je m eloi- ** 

gne donc de la foffe & je remets « 

mon efpéedans le fourreau, I/om- « 

ï-w c ? 3 nnmrfip knlr Af* /v* Gintr Âr *» 

me prononce fes oracles* « 

Ulyfle, vous cherchez les mo- « 

yens de retourner henreufement « 

dans voilre patrie, mais un Dieu « 

VOuS iCllOx3 CJC xCtOtlX QliiiCllC OC ^ 

laborieux ; car je ne penfe pas que

2 54 L'O DY SSE'E 

» Soleil, qui voit tout & qui eut en 

» tout. Si vous avez la force de ne 

11 pas toucher à fes troupeaux dans 

* la veûé de ménager voftre retour, 

^ vous pourrez efperer qu'après avoir 

» beaucoup fouffert vous arriverez à 

« Ithaque* Mais û vous y touchez, 

» je vous prédis que vous périrez, 

s vous , voilre vaîfleau Se vos Coin- 

» pagnons. Qpc fi par une faveur 

» particulière des Dieux vous cJchap- 

» pez de ce grand danger, vous ne 

» retournerez chez vous de Ion s tics 

» années & qu'après avoir perdu tout 

» voftre monde. Vous y arri\crcz 

» Feul & fur un navire eftrangn\ 

* Vous trouverez dans voftre Fa fars 

» de ffrands de j ordres, des Princes in- 

» fblents qui pourfuivem voftre ferm- 

s me & qui luy font de grands pre- 

» fents. Vous punirez leur infolence. 

» Mars après que vous les aurez mis 

» à mort ou par h ruie ou par la 

39 force, prenez une rame, mettez- 

» vous en chemin , & m a reliez mf-

HOMèRE. Livré XL é$$ 

qu'à ce que vous arriviez chez des

5 

DYSSE'E 

& vos peuples heureux. Voilà tou 

5 1 

» ce que j ay a vous 

» Quand il eut ceifé de parler, Je 

» ïuy répondis : Tire fias $ je veu 

» croire que ïes Dieux ont prononcé 

j* ces arreïts contre nioy* Mais expli- 

;*> quez-moy^ Je vous prie, ce que 

» je vais vous demander/ Je vois* là 

a> l'ombre de ma mère* eïie fe tient 

i> prés de la foffe ihns un profond 

;» filencc fans daigner ni regarder fou 

J> ftîs ni iuy parler, comment pour- 

® rois-Je faire pour l'obliger à nie 

» reconnoiftre ? 

» Vous me demandez-ïà une cho- 

» fe qu'il n'eft pas difficile de vous 

» efeiarreir* Sachez donc qu'il n'y a 

» que les ombres aufqueiles vous 

» permettez d'approcher de cette fof- 

» fe & d*en boire le fang, qui puiifent 

» vous reconnoiftre & vous prédire 

» l'avenir, & que celles à qui vous 

» le refu ferez s'en retourneront fans 

» vous parler. 

% Qjiaud f ombre de TireOas m'eût 

m

B*HOMERE. tkn XL 257 

$snii parlé & rendu fe$ oracles, elle « 

fe retira dans le Palais de Plu ion. * 

Mais moy, je dcmeuray4à de pied « 

ferme jufqu*à ce que ma mère fe * 

(uû rapprochée & qu'elle euft bû c 

de ce fang. Dés le moment elle me ff 

reconnutj & faifant de grandes la- * 

mentations s elle me parla en ces « 

termes : Mon fils, comment elles- m 

vous venu tout en vîe dans ce fe- K 

four de ténèbres ? II cil difficile aux « 

vivants de voir l empire des Morts, * 

car ils font féparez par de grands c< 

fleuves & par une grande eltendiië m 

d'eaux, fur-tout par l'Océan, qu'il « 

ji'efl pas aifé de traverfer. EiVce m 

qu'à voflre retour de Troye vous « 

avez perdu voflre route, & qu'a- « 

prés avoir efîé longtemps égaré

jS I/ODïSSE'E 

m de confulter l'ombre de Tïrefris 

» m'a fait entreprendre ce terrible 

» voyage. Je îi'ay pu encore appro- 

» cher de la Grèce ni regagner ma 

» patrie; mais accablé de maux; j*cr- 

» re de plage en plage depuis que j'ay 

» fuivi Àgamemnon pour faire la 

5> guerre aux Troyens. Maïs appre- 

» nez-moy f je vous prie 3 de quelle 

* manière la deftinée vous a fait tom- 

^ ber dans les liens de la mort- Eïlm 

ce une longue maladie f ou feroilm 

ce Diane qui avec (es douces flé- 

3@ elies auroît terminé vos jours î 

» Dïtes-moy des nouvelles de m oit 

» père ôc de mon fils ; regnent-ils en- 

D core dans mes Eilats l ou quelqu'un 

» s'en eil-il mis en poffeffion, & n ? a t 

% tend-on plus mon retour! Àppx 

» nez-moy aufO ce que penfe im 

m femme & la conduite qu'elle tient 

» Eft-elle toujours prés de fon fils 

» &: a-t-elle foin de fa maifon ! o\ 

» quelqu'un des plus grands Princes 

^ de la Grèce fa-t-il efpoufee f

D'HOMERE. Livre Xî. 2j 

Ma mère me répondit fans ba- m 

lancer : Voftre femme demeure en* «r 

fermée dans voftre Palais avec un « 

courage & une fsigcEû qu'on ne m 

peut affez admirer ; elle pafle les

a6® L'ODYSSé'E 

» jours livré à fes ennuis, qu'entre- 

» tient & qu'augmente de plus en 

» plus la douleur de voftre abfence 

s> qui le fait encore plus vieillir que 

» les aimées. C'eft cette mefme dou- 

» leur qui mz précipitée dans le 

3> tombeau : ni Diane n J a abrégé mes 

» jours par fes douces fléebes , ni au- 

» cune maladie n'eft venue me con- 

» fumer par fes langueurs, mais es 

» le regret de ne vous plus voir, c'eft 

» la douleur de vous croire expofé 

» tous les |ours à de nouveaux perils3 

» c'eft le tendre fouvenîr de tout 

» vos rares qualitez qui m'ont oflé 

» îa vie. 

m À ces mots fe voulus embrafler 

» cette chère ombre ; trois fois je me 

» jettay fur elle, & trois fois elle fe 

* déroba à mes embraifements, fem- 

» blabïe à une vapeur ou à un fbnge ; 

» ce qui redoubla ma douleur. Ma 

» mère, m J efcrjay-je5 pourquoy vous 

u refnfez vous au deffr extrefme que 

s* | ay de vous embrafler ? pourquoy

D'HOME RE. livré XL %6t 

%\e voulez-vous pas que joints tous «G 

deux par nos tendres embraffe- «r 

rnents, nous méfiions enfembïenos « 

larmes, & que nous nous rafla fions

^ 

£62 L'ODTSSI'E 

* Mais retournez-vous-eo prompte- 

» ment à la lumière, Si retenez bhn 

*> tout ce que |e vous ay appris, afin 

» que vous puiflîez le redire à voftre 

» ehcre Pénélope. 

» Pendant qne nous nous entre- 

^ tenions ainû , je vois arriver les 

* femmes êc les filles des plus grands 

m capitaines f que Proferpîne laîfToit 

» pafler. Elles s'afîembloient en foule 

» autour de la foiTe pour boire du 

» lang, mais moy qui cherchois les 

» moyens de les entretenir chacune 

» en particulier, je pris le parti de 

* tirer mon efpée & de les empefcher 

30 de boire toutes enferabïe. Elïe ap- 

B procherent donc de fuite Tune as 

prés l'autre 3 & chacune m'appre- 

» noit fa naifîance^ Ain fi j'eus le 

39 temps de les entretenir toutes 6L de 

» fçavoir leurs avantures. 

* La première qui fe prefenta, ce 

^ futTyro, Mue d'un fang très no- 

» ble, car elle me dit quelle eûoit 

» fille du grand Salmpnée $ Se clJfi

•'HOMèRE. Livre XL 263 

fut femme de Crethée fils d'Eolus. « 

Autrefois devenue amoureufe du & 

i 1 Ivin fleuve Enipée, le plus Jieau «: 

de tous les fleuves qui arrofent les c 

campagnes, elïe alloit fouvent fe oc 

promener fur (es charmantes rives.

* 

XJK" 

Ê64 UODTSSI'E 

» îes nourrir &: de les élever, Retour •1 

a nez dans le Palais de voftre perc 

» me me nommera perfonne, Se fça- 

» cficz que Je fuis Neptune qui ay 

» le pouvoir d'esbranfler ïa terre juf- 

& qu'à fes fondements. En finifFant 

* ces mots il fe ptonge dans la mer, 

» Tyro accoucha de deux enfants, 

» de Pelîas & de Nelée» qui tous deux 

* furent minîftres du grand Jupiter» 

* Car Pelias régna à Jolcos ou II fut 

» ricfi€ en troupeaux, & Neïée fut 

» Roy de Pylos fur ie fleuve Ama- 

» thus. Tyro eut de fon mary Cre- 

* thée fes autres enfants Êfon, Phe- 

* res & Âmythaon qui fe plaifbit à 

» drelTer des chevaux. 

® Apres Tyro, je vu approcher 

>* la fille d'Àfopus, Antiope , qui fe 

» vantoit d'avoir dormi entre îes 

* bras de Jupiter* li ell vray quelle 

» eut deux fils, Zethus & Àmphion, 

» qui les premiers Jetterent les fon- 

» démens de la ville de Thebes, & 

» qui élevèrent fes murailles & fes 

tours** 

$

B f HoMÏRi. Livre XL %$$ 

tours» car quelque forts & vaillants ë 

qu'ils fuffent» ils ne pou voient ha- « 

biter feurement une fi grande ville * 

fans fes tours qui la défendoieiit, m 

Je vis enfuite Alt me ne femme « 

Amphitryon, qui des embraffe- « 

ments de Jupiter eut le fort, le * 

patient, le courageux Hercule. ce 

Apres elle venoit liegare» fille « 

dufuperbeCreon. Elle fut femme « 

du laborieux fils d'Amphitryon, m 

du grand Hercule. m 

Je vis auflî k belle Epicafte

G66 U O DYSSI'ë 

* temps fa mcre & fa femme 

t 1* 

^ précipita dans les Enfers, car vain* 

n eue par fon defefpoir, elle attacha 

3» au haut de fa chambre un fatal 

% cordon, qui fut l'înftrument de fa 

* mort; & en mourant elle ïaîlfa à 

» fon fils, devenu fbn marjj un fond 

» inefpuifable de malheurs, que les 

» Furies, qu'elle avoît invoquées, nç 

» manquèrent pas de remplir. 

» AprèsEpicpiie j*appcrceus Chic 

^ ris, la plus jeune des filles d ? Am 

h d'Iafus, qui régna dans 

& Orchomcne des Minyens ; Neiée 

» fefpaufa à caufe de fa parfaite 

» beauté, après ïuy avoir fait une m- 

3> fînîté de prefens très magnifiques. 

30 Elle régna avec Jny à Pylos & Iuy 

3» donna trois fils, NeAor* Chromius 

& & le fier Periclymene, & une fïife 

» nommée Pero, qui par fa beau e 

* & par fa fageffe fut la merveille 

* de fon temps. Tous les Princes 

voyfins la recherchoîent en maria- 

» ge, mais JNeiçc pe voulut ia p?o 

** 

*4

OMERE. Livre XL 267 

etfre qu'à ccluy qui ïuy amené- « 

i*oît de Phylacé les bœufs d'Iphi- « 

chis. C'eftoit une entrcprife très « 

clïc Se très perilleufe; il n*y oc 

ut qu'un Devin^ nommé Melam- «: 

us f qui eut f audace de l'entre- « 

prendre. Les arrcfls des Dieux, ies « 

rgecs qui gardoient ces Bœufs & * 

lm liens, où il fut retenu, i'empcf- «c 

cherent de l'exécuter. Mais après « 

que les fours & les mois en s'ef- * 

coulant curent achevé l'année f « 

ïphichis délivra Melampus fon prî- « 

fonnier, pour le récompenfer de

S6§ 1/OBY5SF 

» dans le fejour des ténèbres ifs o^ 

^ receu de Jupher ce grand privifc 

n ge f qu'ils vivent & meurent toi 

*> à tour, & reçoivent des honneui 

53 égaux à ceux des Dieux meûnes. 

K» " Après Leda je vis Iphïmedç 

2> femme d'ÀIoëus, qui fe van toi 

s d'avoir efté aimée deNeptuije. El 

s* le eut deux ûh% dont ïa vie fut foi 

*5 courte* le divin Otus & le ceïebr 

* 

^ Ephiaites, les deux plus grands & 

m les plus beaux hommes que I 

s* terre ait Jamais nourris, car ils ef 

s» toîent d'une laiile pyodfgîeufe I 

» d'une beauté fi grande, qu'elle ni 

» cedoît qu'à la beauté d'Grion, i 

3 I*âge de neuf ans Us avaient neu; 

m coudées de grofieur êc trente-fi] 

» de hauteur. Ils menaeoient lesl 

» mortels qu'ils port croient la guern 

w jufques dans les oeux; 8ç pour ce 

s» effet ils entreprirent d'entaiïer I 

* mont Oiïi fur ie mont Olympi 

m & de porter le Pelion fur ¥Q$ 

m afin de pouvoir çfcafcder les jefeui

0^HOMERE. Livw XI. 269 

t iïs Fan raie nt exécuté fans don- « 

te, s'ils eftoîent parvenus à l'âge « 

parfait, mais ïc fils de Jupiter &: « 

de Latonc les précipita tous deux « 

dans les Enfers avant que le poil m 

follet eu II ombrage leurs joiies & « 

crue leur menton eu il fleuri.

£7 & puifiant5 c 5 eïl pourqnoy ne vous 

5i preflez pas de ie renvoyer, & par 

:» cette diligence n'eftropiez point 

» ïes prefens que vous ïuy devez dans 

» la necelîité où il fe trouve. Vous 

» avez dans vos mai fous des biens 

» infinis a ne vous tepez de la bonté

D'HOMèRE. Livre XL iyt 

es Dieux , qud meilleur ufage en

372 L s O & Y S S E 

» veux bien lent donner l'exemple 

* puifque je tiens icy le premie ? 

ÙiyiTe touché de ces honneiîe- 

* te*;, répondit : Àkînoiis^ que vos 

» grandes qualitez diftinguent autant 

* que voflrc throfuc^ fi vous vouliez 

M que je uemeurane icy une année 

:» entière pour vous donner le temps 

:» de préparer tout ce qui eft necef- 

» faire pour mon départ, & de me 

3» faire des prefeus niaenîfîaues 

9 dignes de vous, iV cou fentiroîs de 

& tout mon cœur. Car il me leroit 

» bieij plus avantageux d'arriver dans 

» ma patrie avec des marques fi glo- 

5> rieufes. J'en fer ois plus honnoré & 

» mieux receu de ceux qui me ver- 

® roient de retour dans Ithaque. 

ai Àlcinous répondit ; "Ulyflc, à 

» vous voir an ne fçauroit vous 

» foubçonner d'eftre un înipofteur 

5& ni un fourbe, comme il y en s 

* grand nombre qui courent le mon 

m de z & qui pour venir à leurs fins

D* HOMERE, livré XL 27 

compofent des fables que Fou ne « 

fçauroit démentir. Pour vous, iï eft « 

vray que vos paroles ont tout Fair « 

âc ces contes ingenieufenient m 

v entez , maïs vous avez un efprit « 

m T F • 

trop loliue pour vouloir trorn- * 

per. Vous nous avez €xpoféf com- « 

me le meilleur chantre Fauroit m 

pu faire , Fh iftoire de tous ies * 

Grecs & celle de vos malheurs, et 

Mais dïtes-raoy, je vous prie, faits « 

me rien cacher, û vous avez vu « 

dans les Enfers quelqu'un de ces « 

rands hommes f de ces J héros « 

qui ont elle avec vous au fiege m 

de Troye, êc qui font morts dans c 

cette expédition, Les nuits font * 

longues, & il n'efl pas encore temps « 

de fe coucher ; contez -moy ces * 

a van turcs mcrveilleufcs. Pour moy « 

j'attendrais avec plaifir Faurore en c 

vous efeoutant, û vous aviez la « 

force de me raconter tout ce que m 

vous avez fouffert dans ce voyage, m 

Grand Roy, reprit IJljÏÏe, il cil m 

M ¥

ij^ ÏJ G D Y S S E' 

» vray que les nuits font longues, 

» ik que j'auray tout le temps de 

» vous conter encore plufieurs hif- 

^ toires, &. de dormir. Si vous avez 

» fi grande envie de m'entendre 3 je 

j) ne vousrefuferay pas cette faiLfac- 

» tion,£c je vous raconteray des avan- 

» tures plus pitoyables encore arri» 

» vées à mes ilîuftres amis, qui après 

m avoir efchapé à tous îes periïs de la 

» guerre lous les remparts d'IIion, 

JP ont trouvé fa mort dans leur Pa- 

3& lais par fa perfidie mcfme de leur 

^ propre femme. 

» Après que h ebafte Proferpïne 

» eut fait retirer les ombres de ton- 

i» tes îes femmes dont je viens 

» vous parler , je vis arriver Fam 

» d'Aganiemnon toute cfplorée* 

» environnée des âmes de tous ceux 

s qui av oient efté tuez avec lu y dans 

a> le Palais d'Egîfthe. ïl n 7 eut pas 

» pluftoft bu du fan g dans la fofie 

^ qu'il me reconnut, & fe mit à fet- 

?» tel des cria perçants* à fondre e

D'HOMEEE, Livre XL 27J 

larmes, & à eftendre ks raaius vers « 

moy pour ni'embrafler; mais cette * 

ombre eiloit deftituée de nerfs, & & 

n'a voit plus nî vertu ni force* À & 

cette vue Je fus iaïfi de compaffion, & 

e s larmes aux yeux je luydis; * 

Fils d'Àtrée, le plus grand des «r 

oys, comment la Parque cruelle * 

vous a-t'-elle fait efprou ver fon * 

pouvoir! Neptune vous a-t'~il fait m 

périr avec voïlre fiotte, en excitant « 

contre vous fes flots & en dédhaïf- * 

naiit fes vents & fm tempeftes ï Ou * 

des étrangers vous oni-iïs fait m orce 

dre îa poufîîere f en courant fur & 

vous lorfque vous emmeniez leurs

276 L'ODYSSE' 

» peftes, ni je n'ay fuccombé fbuj 

» l'effort des cftrangers qui ayenî 

» voulu repoufïer mes violences ; nia 

» mort eft Fouvrage du traiftre Egi- 

» flhe & de ma pernicieufc femme 3 

» qui par le plus noir des attentats 

» m ? ont affaffîné a un feftin comme 

» on afïbmme un taureau à fa cre- 

& che, Voiià quelle a eûé ma lin mai» 

» heureufe. Tous mes compagnons 

» ont elïé égorgez autour de moj 

a comme on égorge des moutons 

» dans la maîfon d'un homme puif- 

» fant & riche pour un feilin cfe 

» nopees, pour quelque grand repa*f 

* ou pour quelque grande débauche. 

» Vous avez bien va mourir des 

» hommes qui ont elle tuez à vos 

» yeux, foit en combat iiirguïier, foit 

J* dans la fanglaete méfiée, mais cette 

» vue n ? a rrcn qui approche de l'hor- 

» rible fpeélacle de nous voir ma 

z> crez autour de F urne fa crée & de 

m h table où nous eïîions afîîs, & de 

» voir le plancher mondé de {m

©'HOMERE, Livre XL 277 

Pans le moment mefhie qu'on * 

m'aflaflînoit f j'entendis la vohc * 

plaintive de la fille de Priam , de « 

Calandre, que h perfide Qytem- « 

neflrc tiiok pour me faire mourir * 

us cruellement, À (es erisfquoy- « 

que je fuffe desfa, à terre & expi- * 

rant, je m des efforts pour porter « 

la main à mon efpée 7 mais cette « 

impudente me l'avoit ofîée. Après « 

ma mort elle n'approcha point de * 

itioy pour me rendre les derniers « 

devoirs 9 en me fermant les yeux « 

ia Douene* rôn, ïI ny a rien m 

de plus pernicieux ni de plus im- « 

pudent qu'une femme capable de * 

fe meure en telle des aélions auffi « 

abominables que le forfait 1 que m 

Clytemneftre a commis, en affaf- « 

finant fon mary, & un mary avec « 

ui elle a voit pafle fa première feu- * 

neffe. Dans îe temps que jepenfoîs « 

ue mon retour feroït la foye de « 

mes enfants & de ma famille, cette « 

Rialheureufe îaftruîie aux crimes» *

78 L'ODYSS 

» s'eft couverte d'une éternelle înfa m 

» mîc qui rejaillira fur toutes les fem- 

3> mes qui naiflront après elle, mefj> 

me fur les plus vertueufes & fur 

% celles qui aimeront ïe plus tendre- 

& ment leurs maris. 

» 0Dieux! ni'efcriay-je, îe puif- 

» fant Jupiter, aux yeux duquel rien 

» n'eft caché, a donc bien haï la race 

JP d'Àtrée? puilqulï loy a fait tant de 

a maax, & toujours par des femmei, 

D A combien de héros Hélène par 

an un feu 1 crime n'a-1'-elle pas 

» la mort ï & voilà ClytenmeArc qui 

» vous prépare un piège mortel pen- 

» dant voftre abfence, 

» Mon exemple, reprît prornpte- 

» ment Àgamcmnon, doit vous api> 

prendre à n'avoir pas pour voiire 

» femme trop de c 0111 pî ai fan ce, & à 

» ne pas luy faire part de tous vos 

y> feercts. Il y a des cïiofes que vous 

m pouvez luy communiquer, mais iï 

» y en a d'autres qu'il faut luy tenir 

» cachées, Qiiand je dis vous, je parle

D ? HOMERI. Lhri XL 27 

à tons les hommes. Car pour vous, « 

vous n'avez rien à craindre de iem* & 

Blabfc de îa fiife dlcarius, Yoïtre « 

Pénélope efl un modelfe de p?u- « 

dence & de fagcJTe. Quand nous * 

partifmes pour Troye nous la ïaîf- « 

jafmcs très jeune dans voftre Païaîs, « 

ion fils efloil encore à la mammel- « 

le, & prcfentement il doit cfire en « 

âge d'homme. Qu*ii efl heureux ! « 

fon père aura la congélation de ïe < € 

revoir, & il aura ïe plailir d'embraf- ft 

1er fon pere3 qu'il n'a pas encore « 

connu, Ma pernlcieufe femme n'a « 

pas permis que j'aye eu ia fatisfac- « 

lion de voir dénies yeux mon cher « 

refte , eiîe m ? a afTaffiné au para- « 

van t. Et fur cela f ay un avis à vous « 

ravez-ïe bien dans voflre * 

efprit, c'efl que vous ne fouffriez « 

as que voftre vaifleau entre en « 

eîn jour dans le port d'Ithaque, « 

îafchez d'y entrer fans eïlre connu, « 

car en un mot il ne faut plus le « 

lier aux femmes* Mais dîtes-moy «

â8o L'ODY S S tE 

» une chofe, & dites-la moy fans dé- 

» guifemenî, avez-vous appris quelle 

que nouvelle de mon fils l Eftiï 

3o en vie ? s'dt-il retiré à Orchome- 

» ne, on à Pylos chez Neftor, ou. à 

30 Sparte chez mon frère Mcneks l 

50 Car mon cher Orefte n*eïl pas 

*> mort, nous ne I avons pas vu dans 

» ce Royaume fombre, 

» Fils d'Âtrée, lu y répondis-je 

a> pourquoy me faites-vous ces quef 

» tions l Je ne fçay fi voflre fils cil 

» mort ou s*il efl en vie, & il eft in* 

» utile de parier de ce qu'on ne fçaït 

» pas. ' < k 

3 

» Pendant cette çonverfàtion plei- 

» ne de trifteffe & de ïarmes, je vois 

» arriver Famé d'Achille 5 celle de 

» Patrocle, celle d'Àntïloque & celle 

*> d'Àjax^ qui eftoit le plus beau 

» le mieux fait dtB Grecs après le 

» fils de Pelée, L. ? ame d'Achille me 

*> reconnut ? Se ni'adrefTant ia parole 

* avec de grandes lamentations, élis 

» me dit ; Divin fils de Laerte, 

=»

B ? HOMERE. Livré XL %Ëf 

UlyiTe iî fécond en reifources & « 

en expédients * quelle entreprife « 

uïus hardie que toutes celles que « 

vous avez Jamais faîtes» venez-vous

2Ë2 Î/ODYS 

& jL/ieu, oc après voitre trépas VQM 

» régnez fur toutes ces ombres. Oe; 

» pourquoy, Achille, ne vous plai* 

» gnez poiflt lant d'efbe mort. 

» Et vous, généreux Ulyffc, re- 

» partit Àchilie^ ne me parlez point 

9» de îa mort. Je préférerais d'eftre 

a? dans le inonde le jardinier d'un fei> 

» mier, qui ne gagner oit fa vie qu'à 

m îa fueur de fon front, à régner îcy 

3& fur toutes les ombres. Mais dites TJ 

3& inoy, je vous prie3 des nouvelle '">? 

%* 

K> de mon fils. Suit-il mes exemples! 

» fe dïflingue-t il à ta guerre, & pro 

w met-il d'effre le premier des héros! 

* Àpprenez-moy auffî fi vous fçavez 

» quelque chofe de mon père. Sa 

» fu jets lu y rende nt-ils toujours les 

» mefmes honneurs ï ou le méprî- 

» fent-iis à eanfe de fon grand âge l 

a> Car ne joiiîiïant plus de îa lumrere 

» du jour, je ne puis fe fceounr* SI 

» fefiois tel que vous m'avez vu au- 

33 trefois, lorfque volant au fecours 

» des Grecs je fis mordre la pouffierc

I 

7 HoMEftE, Livré XL 2 

un peuple de vaillants hommes, « 

que je panifie un moment dans «x 

e Palais de mon père f Je f crois « 

lientoft fen tir la force de mon feras

4 L* O D Y È S E 

* tinfî au milieu des bataillons on de? 

m efeadrons, il de van coït toujours les 

» troupes Se voloit le premier à l*en- 

» nemi, ne cédant la gloire du cou- 

» rage à aucun de nos héros. II a tué 

» de ia mam une infinité de vaillants 

» hommes dans la fangfante méfiée, 

» Je ne fçauroîs vous nommer îey 

» tous ceux qui font tombez fous 

7k fas coups; je vous dîray feulement 

» que c'efl à ïuy que nous devons fa 

JO défaite du héros Enrypyfe 

» fes troupes qui fe firent toutes tiier 

% autour de fon corps. Ces heiîi- 

» queufes Bandes deCetéens elîoien t 

si venues à cette guerre ^ attirées paf 

» des prefeos & par Pefperance d'ef- 

» poufer des femmes Troyennes ; 

» leur gênerai de voit élire gendre de 

» Prïa"ï?i* Je n'ay jamais vu tuî fi beau 

» Prince; il n'y avoît qucMemnon 

» qui fuft plus beau que luy. Mais 

» Poccafion où vofîre fils fignata le 

j> plus fon courage s ce fut forfque 

» nous nous cnfermaimcs dans le

OMEEE* Livré XL 285 

cfrevaï de bors avec Vélhe des ge~ * 

Beraux de Par niée, C'eftoit moy « 

uî conduiibis cette entreprife, &

sS6 L'ODYSS 

» À ces mots Famé d'Achille pîeî* 

» ne de joye du témoignage que j V 

& vois rendu à la valeur de fon fils, 

$*en retourna à grands pas dans h 

» prairie d'Afphodele. Les autres 

» âmes s'arreflerent prés de mov 

x> plongées dans une proronde trif- 

» teiïc, & elles me racontoient leuo 

» peines & leurs douleurs- Mais IV 

» nie d*Ajax fils de Teïamon fe te* 

» noit un peu à l'efeart, toujours pofa> 

fedéc par la fureur où I avoît jette 

» la vuftoire que je remportay fur 

5> luy, lorfqu*on m'adjugea les armes 

*> d'Achille, ce fut la Décile fa mere? 

» Theds elle-mefme, qui propofa ce 

0 prix, Se ce furent les Troyens 

» Minerve qui me l'adjugèrent. Eh> 

» pluft aux Dieux que je ne ï'euffe 

» pas remporté l la terre ne couvn 

* roit pas aujourdlruy un fi grant 

v perfonnage, qui en bonne mine 

» en exploits de guerre efloit le preja 

mier des Grecs après le vaillant 

B Achille. Luy adrelFaiit donc le pre*

OMERE, Livra XL 187 

mïer la parole avec ïe plus de dou- * 

ceur qu'il me fut pofllbie pour taf- « 

her de l'appaifer ; Fils de Tela- « 

mon, luy dis-|ef ne voulez-vous * 

point mefnie après la mort oublier « 

la colère que vous avez coneciie c 

contre moy h caufe de ces malheu- « 

reufes armes que les Dieux ont

JS§8 L'ODïS S E 1 

n s'en alla retrouver les autres onv 

» ht es dans ie fond de FErebe, Si 

» je lavais fjuivî * quelque irrité 

n qu*il fuft contre moy, il n'auroij 

» pu reiufer de me parler, ou de 

n m'entendre, mais je voulus voir 

3* les autres ombres, & ma curiofité 

3î 1 VWtHVl %€** 

» Là fe vis Filluflre fils deJupix> 

ter, Minos, aflLs lur fou throûiCj 

» le Iceptre à la main* & rendant la 

m juftice aux Morts, Toutes 1m oma> 

bres coniparoifîbknt devant ion 

s> tribunal pour eftre jugées ; les unes 

*> eflorent afïifes &lcs antres debout» 

» Un peu plus loin j'apperecus le 

3û grand Orion qui pourfuivort dans 

» cette vafle prairie les beÛes qu'il 

& avoit tuées fur les montagnes, li 

$ avoit une maiïuë toute d'airain. 

» Au de-ïà je vis Tityus , ce fils 

3 de la Terre, tout cftendu, ôc oui de 

i qui 

» fon vafte corps eouvroit neuf ar 

» pents# Deux vautours attacher in 

* celfammem à ceitc Qmbre7 luy 

chirent

i 

, ^1 

D'HOMERE. Livn XL 2S9 

çfirrent le foyc fans qu'il puiiïe « 

les cha/Ter , car il a voit eu l'info-

z$® UODYSS 

3» des figues* des olives- Mais toutes 

M les fois que ce malheureux ievoit 

» les bras pour en cueillir, un vent 

i> jaloux les élevoit Jufqu'aux nues* 

** Le tourment de Sîfyphc ne me 

» parut pas moins terrible; il avoit 

» dans fes mains un gros rocher qu'il 

» tafchoît de pouffer lur le fomniet 

B d'une montagne en grimpant avec 

» les pieds & avec les mains : mais 

m lorfqu'aprés des efforts infinis il 

» eftoit prcfque parvenu julqu'à la 

s» cime 3 SL qu'il alloit placer ion 

*> rocher f une force majeme le rc- 

> pouffoit » & cette énorme ri erre 

* rctomboit en roulant jufques dans 

n la plaine. Ce malheureux ia repro 

» iioit fur Theure ôL raommcntoii 

2> fon travail ; des torrents de iueuf 

T& couioient de tous (es membres , ô 

» fa tefte tïcvoit des tourbillons à 

A pouffiere en pouflant fon roche; 

é» contre le moût, 

^ Après Sif\ phe j'appereen* 1 

* £rand Hercule* c'eft à dire f bxi uni

CHOMER!. Livra XL 2$t 

S02 L'ODY 

& jette les }Ciix fur raoy, qu'elle 

%> reconnut, & qu'en pou if an t de pn> 

» fonds foupirs, elic me parla en ces 

» termes ; À h * malheureux Ulvfiï 

f ,**„*IÛ.LÛA v M i J W 5 

B es-tu auffi perfeculé par îc me 

» Défini qui m*a pouriuivi pendant 

» ma vie ? J'efiois fiîs du grand Ji> 

» pi ter, mais ma nai fiance n ? a pas cm- 

» pciehé que je n'aye paffé mes jours 

» dans des peines & des traverics 

» continuelles. J ? ay cité fournis à un 

» homme fort inférieur à moy, qui 

s m'a ordonné des travaux très cî.f- 

» ficilcs. En dernier tien ii me cenv 

*> manda de dcfceixlre dans cet em 

3 

pire des Morts

D 

a 

5 HOMèRE. Livre XL % 

[tendre ma réponfe. Je demeuray « 

là de pied ferme pour voir s'il ne « 

•\icndroit point encore quelque « 

ombre importante 9 quclqu'autre « 

des héros de ce temps-là. Et peut- « 

cflre que j'aurais eu la fatisfadlion « 

èc voir ces grands perfonnages fi « 

Jlfl.ies de ma curiofité, Pirithoiis « 

JJ^ JL f iulLLj tLÛ itlLïILIvâ vlvi v v i i Ll dii L S ^ 

éts Dieux ; mais des légions de « 

Morts 5 3 aiFembictenc autour de « 

jïioy avec des crîs perçants, -La ce 

frayeur me faifit, & j eus peur que « 

la fevere Profcrpîne n envoyait du

*K «*3*#3£*&&i&H tmi

SUR L'OPYSSE'E. Livre XL zp$ 

fonge qni avoit pris la figure de ce Pro»* 

phetc- L'une & Pautrc opinion ont des defftnfeurs 

refpeélables ; }e dîray feulement 

que je panche plus du cafté de ceux qui 

croyant que e'eftoît une ïmpofture du De-* 

mon. Quoy-quM en foit, on voit par-ïà que 

cette DmnaUm, Ncu/ia, eft fort ancienne 

& qu Homère ne fa pas inventée. Eîie cf 9 

loît née îong-temps avant luy dans la Chaï «V 

dee, & cile fe répandit dans tout l'Orient 

où elle fe conferva long-temps. Dans une 

Tragédie d'Efebyfe, intitulée ks PerjtSj 

lame de Darius, père de Xerxes » eft évoquée 

de raefme que celle de Samuel 7 & 

vient déclarer à la Reyne Àtoffa tous les 

malheurs qui la menacent- Voilà le fondement 

de cette fiétion. Elle eft baftîe (UY une 

pratique confiante & \ en table f mars Homere 

Ta ajuftée à fa manière avec tous les 

ornements que la Poe fie fçaït emprunter de 

h fable. 

Page 2^/. Jufyuau coucher du Sûkiî? 

$? brfqm la nuit rêpcmdk je s timbres fut 

la terre] II n'y a peu t-e lire pas dantHomère 

un plus beau vers, ni un vers plus harmonieux 

que celuy-ey; 

Mot à mot 1 k fûieïlfe coucha, iftûUs k$ 

chemins furent ûbfcutcts par ks ûmhes de 

& mm, Cependant c eft ce beau vers ijue 

N iiif 

3

9^6 R E M A R Q U E S 

f Auteur du Parallèle dcïïgure par cctt 

Traduction très ridicule i Le faleil fa câu 

cha, et on ne vit plus goutte dans les rués, 

Dafis les rués ! iéprend le Chevalier : & le 

Prefidcnt, encore plus lot que le Chevalier, 

xepond, C*ejl vne manière pùèiiqiie d'expiimer 

la venue de la mut. 

Nûfire vnhftûU arriva à l'extrémité de 

VOcéan] Homcie appelle îcy Y extrémité dt 

l'Océan 9 le bout de fa. mer occidentale o?i 

le foleïl fe couche 5 & et qui a donne Im à 

cette fiélion, c'eft qu'Homère avoît appi s 

dans les voyages qu'Ulyfîe p^rit cfK pc & arrive le foir fur les coftes 

des CimmerieflS. Il faut donc chercher 

quels peuples ce font que les Ctmmeriens 

& où il les place. Sîrabon 7 pour faire voir 

qu'Homère tire toutes les fiel ions d'un fondement 

vray 3 ne fait pas difficulté de s appuyer 

fur cet exemple- Ce Poète > drt-il,^ 

connu les Qmmeriens du Bofphore, qui ha -* 

bit eut vers le feptentrwn dans un heu teu Œ, 

jours couvert etefpais nuages. Et il ne peuveit 

les ignorer, car c*efl vers le temps de la 

aijfance de ce Poètef ou peu d'années ai 4i 

•*ar

'SUR L'ODYSSéE. Livré XL 297 

P$fâfa?it que ces Cimmerîens firent des 

cûurfes jufyucs dans l'I&nie* Ce Poète conp 

Giflant donc non feulement le nom de a s 

Fj^ypjCS i ixicii*? «uni icLir criiiTiHL $ JçS « LrfliîJ 1 * 

portez fur ics caftes de fa Campante % Si û 

5 y a tranfî)ortez avec toutes les ténèbres 

i 

j-w». 

cioni i' s l

«ju'il n'efl pas encore lerops que ces Âmes 

•viennent, & que d ailleurs il n eft pas poflî- 

Meque ïes bleïïurcs paroiflent fur ies Ames, 

Mais cette critique me paroift très fauffe, 

Pourquoy n'eft-ïï pas temps que ces Ames 

Tiennent, Homère neditil pas que tes âm 

èrtis des mûrts viennent tfe unis eejfez 

ftmd de VErebeï Se ne reçoivent-ik pas ce 

vers ? Les fîx qui le fuhent n'en font que 

l'explication. Quant aux bfLiïures.il til bier % 

wav qu'elles ne peuvent paroifîre fur la par 

lie fpiritadlc de l'Ame, aulfi n'eft-ce pas 

de celle-là dont Home ce pailc, puîfque îes 

Morts ne fa voient pius ; iï parle du corps 

fubtu de l'Ame * & tout ce qui a^ït blcftc 

le corps terreftre, avoït auffi bietïc fc coips 

fubtif, êi y a voit Jaîfle ù marque. Voila pour* 

quoy i! eft drt que dans les fonges on \olE 

îes Ames dans Je menue eftat où font ks 

corps5 & voilà auffi d'où \icnt la différence 

qu'UIyffe remarque dans ces ombres. Ce 

qui me paroift fe plus fur prenant icy5 c eft LS 

qu'Uly fie ad joute, que ces Ames avoient encore 

leurs armes, & qtc ces armés efûieH 

encûre ternies de fang* Comment ces âmes, 

ces ombres, qui n'eftoient que le corps fubtil 

de famé, pou voient-elles confener leurs 

armes l Je croy que c eft un point nouveau 

u'UIyffc ad joute îcy à Ja Théologie receiîe, 

& qL If i ad joute, parce quji parle aus 

Mieaciecs, ocuple peu ioflruit Cependant 

^

SUE I/ODYSSES. Hwe XL %$f 

gette opinion s'eft fi bien eflablie, que 

Virgile s'y eft conformé, & n a pas dédaigné 

de !a faivre. 

Page 249. Ce fut celle d'Eipenûr qui 

li&oit pas encore ejïé enterré ] Et qui par 

confequent iVavoît pas encore efté receue 

dans les Enfers, Efle erroit à l'entrée» e'ell 

pour quoy elle vient la première & par an salie 

chemin que les autres. 

Page 250* Quây-miâ VûUSpyei à pied 

yens tnavei devance\ Ulyfie, quoy-qu'attendri 

en voyant lame d'Eipenor, me%potirtant 

h plaifanterie à lés larmes, Le ca-* 

raflere tîElpcnor ne demandoit pas ua 

}A'S grand fèrieux. UlyfFe pfaïfante donc 

fur fa dtîgence. Et Euflaihc dit fort bie^' 

que le Letleur efpanoai rira de cette idcV 

d'ane Ame à pied qui delcend pks ifïûm 

aux Eniirs qu'un homme vivant qui va par 

mer & qui a eu hs vents favorables. Matsecl*e 

platiânteiie ne laiffe pas d'avoir ta 

1res bon fens, quand on vient à l'examiner^ 

En dFet » c'eft une chofe très merveilleux 

qu'une Ame le ttouve dans les Enfers déi 

h moment quelle a quitté le corps. Qui 

efi-ce qui expifquera comment fe fait ce vol 

fi rapide l Celt dans ce moment qaon peut 

dire de S'A me ce que les f beaciens dilarenî 

de leius vaiiFéaux , qu'elle ya avffi vrjle qu& 

kpeKJêe, 

P?yj zyi* Car je fçay qu'en \mi$ m te*

00 REMARQUES 

tournant du Palais de Plutûn ] CeÛoiz un 

point de la Théologie paye une, qu'après b 

mon [es Ames eftoient plus efclairces que 

pendant la ûe. 

N*oublia pas de mettre fur mon tombeau, 

ma ram&~\ Selon h coutume très ancienne 

de mettre fur le tombeau les înftrumcnts 

qui marquoient la prolcffion du iiiOit. 

P?ge 253. Dan à H (le de Tiînaoic\ La 

Sicile eftoit appelle e Tnnûcrw3 k cm Se de 

fes tiois promontoires Pachinc 9 Pylore & 

Page 254.- Que fi par une faveur p&rv* 

culierc des Dieux vous efchi-pcj, a e: danâer 

j Autant que ce qu UKlic a drt de U 

colère de Neptune pcmo.t allarmer les 

Phcadens, en leur fîfant craindre de dcpïairc 

à ce DECU s'ils û\onfoient Uhfîe3 

autant ce qu'il dit icy dciî: k^ raffiner, ai 

leur faifant cmifo&er qu : en le ren\ovam/> 

e leurs \ailfe«ux, 11$ ne îeiont que ktvu 

à i accompliffc m en ï des Dcfunces 5 61 tU 

îre rinftrumcnt de ia faveur des Dieux, 

£1 ûw? hv font dti granas pi s feus 1 ïîs 

ïie savitèrent que Lard de la vouloir g-&ncr 

par leur libéralité, comme nous !c ver*oi 

dans *L * vi 1 1. Lhre. 

Ou peir la rajif eu par Idfû^ce] ÏI pouvoit 

n'employer que u lufe^ mais comme ce

SUR L'ODYSSéE- Livre XL *&1 

iôyen feuï ncft pas aiîez noble pour un 

giand guerrier , après la rufe il aura recours 

a la force comme à un moyen plus beroï» 

crue & plus digne de luy. 

pr&icz unc ram*? mettez-vous en chcmiri\ 

Voicy un plai&nt pèlerinage que Tïreiîas 

fan faire à Ulyfic, en luy ordonnant Je 

picndie une rame fur les efpauies, & d'aller 

fane leconnoifhe Neptune dans des lieux 

oii i! nefioît point connu, car ceft aïnfi que 

h SJioïîafte Fa expliqué. 

Itge 2-55. Qîâ n affuifâtincntpûint leurs 

thïth tie W] Il frmble qu'Homère ait voulu 

c?*adicnfcr par ià les peuples qui ne connoiïuit 

pas la mer, & qu'il ait crû qu'ils ne 

ff fenoient pas de (cl , & de-îa on peut 

conjeflerer que ce Poète ne connoîUbit 

cjt'c le feï de fa mer. 

Qj jid VOUS rencontrereifur vûjfre che* 

irm\ Homère fait bien garderky àTirefîas 

le caractère des oracles, qui dcfîgnoient 

toujouis par quelques drconiUnccs les lieux 

ou dévoient s'accomplir les choies qu'ils 

Picdifuent. 

ni vcn± dira que vous poriei un van fur 

wfie ejp&ule ] Car de prendre une iame 

pour un van, cefl une mai que feuie d'un 

peuple qm ne connoift pas la met, mais 

Ken l'agi,culture, car le yan efîûji inflmnient 

dont on £ (en pour fjpaicr h par lie 

& ics 01 dures du bon grain 5 m»is il failoit

302 KEMA1Q 

que de ce temps-îà le van fufl tout autre 

jntmt qu'il n'eft aujourd'huy 1 c cftoït corn •^ 

me une efpece de pelle, & c'eft ainfi quef. M* 

toît fe \an des Hcbreux. Ceft pourquoy 

laint Jean-Baptifte dit de noflre Seigneur 

Qu'il a le van a la main, $f qu'il netoyera 

fin aire, Match, y 1 2. Luc 3- iy* Étc "w 

qui confirme cette conjeétuie, c'eft qu'api es 

orneie on a appelle d%pQKùiy>y9 van^ 

ûchkar* £• Mû^LAIV, h cuillère dont 00 fe ferî 

à remuer la bouîfîie, parce qu'elle cft faîte 

comme une efpece de pelle. Sophocle 

nomme d$v\pQ*c&%v* 

n faifant aliuiion à ce paflkge d'Homerc 

Cifrei en faaificc à Neptune un mûutpn, 

vit îfmeaH LV un wruit] Un mouton pour 

jnsinuer Li douceur de ia mer quand eiie 

cil uanqu'He; le taureau, pour nwquei h 

eur & its n\tt£ifïements quanti elle cil ir 

ïkée>& ic \errat, pour marquer fa £ ton d w 

73 lîjfoîi 2p/m$yi \i%i Euflt'thc Ces fauîces 

de trois viélimes de différente efpece 

eftoîent appeliez ??riivd. 

Du fi in de ht mer finira k trait fitd 

qui VûUS dannei a la mot t ] Voila an oracfe 

dont il efioit impofîibie à Ulyffe de pénétrer 

ïe fens> & qui marque bien que l'avenir 

elioii prefem au* yeux da Prophète. 

• J -

SUR L'ODYSSE'I. Livre XL 303 

En effet Ulyffe fut tué par Ton propre fjfe 

Teiegonus qu'il eut de Gre4 Car ce fi te 

ayant efté envoyé par fa mère pour fe faire 

comioîftre à fon père * il fut poufle par la 

tempefle fur les cofles d'Ithaque, ii defœndit 

diins frAe dont H ignoroït le nom, & ût 

quelque dégalt Ufyflê & Tefemaque ac CSP 

couiurent, il y eut là un combat où Tefe -m 

gonos tua fon père fans le connoiftre, & ïl 

|e tua d'un javeîot dont le fer eftoit de i os 

dun poXïbn appelle Turtur marina,ûz forte 

quevodà bien clairement {accomplidément 

de ForacJe, Qui eft-ce qui l'aurait devine l 

Diftys conte cette hifloiie un peu autiemeiit. 

On peut \olr la les Remarques. Je 

ne pat le pas ky de féqujvoque qui eft dans 

le ceUe, é| dioç\ car il peut élire feparé en 

deux mots, î% dhùç\ du (en de la mer* El 

il peut n'eftie quun mot, tkâhôç, qui fignî* 

fie tout le contraire, hors de la mer* Je ne 

croy point du tout qu'Homère ait penfe à 

cette équivoque qui ne me paroit pas digne 

de iuy. L'obicurité de foracle e 

grande» il ne faut pas chercher ài'auzmtfe- 

ter par 1 équivoque du terme. 

Page 2jtf, Et VûUS laijferei VUS peuples 

mur eux ] Queile promeflë pour un bon 

Koyl 

Scachei dune qui! ny a mie tes ombres 

^^picUes YJUS permettrai d'apprûchcr de

304 REMARQUES 

cette fejfe 1 Maïs ne \ ïent-on pas cîe voir ïc 

contraire l ESpcnor a reconnu Ul)ffe fans 

avoir bu de ce fang. Tirefïas la reconnu 

de reefmc a\ant que d'en avoir bu. Cela 

cft tout différent. El peu or n'eftoit pas en. 

coie enteiré, aînfi fon Ame efloit encore 

entière. E!Ic confenoiî fon entendement* 

Et pour TrreilaSj Homère nous a a\ems 

que ion ombre confenoit suffi fon entendement 

Vo^ly poiirquoy ils aboient toute 

leur connoiiîance. 

âge 2.57. Sur-tout par VOcéan, f^/ri 

fi 

*>5 

J ^î /w ^ ^ traveijer ] Homcie iaiE 

voir ICY bien clairement.comme laien-iarque 

Euftathc,quc cette defcentc auxEnf 

fe fait aa bout de l'Océan, car il eft natareï 

de penfer que le feu! endroit pour } 

defeendre, ceit ceîuypar lequel le foieii &. 

les autres aftres y descendent eux-mefmcs 

ioiiuu'iis ieffa&nenL le deflbus de la tenc3 

èc qu'ils Je plongent dans la niht. Fa la 

Homcre \cut confirme! fa Geîaphie is~ 

boîeule, & taure cioire que les lieux do^t 1 

e , & qui font véritablement dà::z (

sum L'ODTSSE'E. Livre XL 30j 

gu coeur à Ton fi fa. Quel cloge pour Pêne* 

'Cl 

Et Vît aux fi/fins publics, que tes Ptinces 

$/ ceux ù qui Dieu a confié fa jujlice if 

Ces loix f Suivent konûrer de leur prâfence 

Cefloït une coutume ancienne, les peuples 

èm$ tous les feftms publics imitaient tou- 

Jours les Roys & les principaux m agi ft rats. 

Et les Roys & les magîlliats honnoroîent 

ces repas de leur prefcnce- CciacntreEenoit 

i umon des peuples avec leurs chefs 7 & faî* 

fox que les Koys regaidoient Ici»s fujets 

comme leurs criants, & que les frjets rcgaidoÏLnt 

les Roys comme leurs pères. 

J_esRo}5 Schs niagiftrats eftoîeiit-ïà comme 

les Dieux, & joiïifîbient du pïaïilr de fe 

\oir regardez comme les auteurs du bontcur 

& de la joye des peuples pal la fage 

u*c îeur gouvernement 

Il cvuthe au milieu de fa vigne fur un i 

de feuilles, tûujûurs livre àfes ennuis] Ce 

de cet endroit d Homère, & de deux auties 

que je marqueray dans la fuite» que 

paroilt avoir efte tire le caiatfcrc admirable 

de ïHcouiontïmommenûs de Tcrence, 

de ce père qui fe punit luy-mefme de I abfence 

de fon fils, qui fe prhe de toutes fes 

douceurs de la îe, & qui fc rend malheureux: 

pour égaler en quelque foi te fa mïfcic 

de ce fils. Ce nVit donc pas fans rai» 

fon qu'Àriliotç a dit quHomcre ayoit four-

goô KEMÀRQUIS 

îIî des idées & des caractères de toutes fa 

fortes de Fuëfie* 

Page 2 6 o *

SUR L'ODTSSE'E. Livre XL 307 

& fubtïl dont l'efprit eft reveftu. Ceft cette 

dernière partie qui defcend dans les Enfers > 

a qui eft appeliée idoU & f/?Mj^ comme je 

jav desja expliqué- 

"Page 262. Ainfi feus le temps de les 

mefwnntr toutes] Homère ne fe contente 

pas de faire pafler en revue des femmes & 

des filles, il y fait paffer aufli des héros, & 

toujours avec une variété admirable. Quel 

ire for d'biil aires & de fables ce Poète n a *f 

î-il pas jette dans fon Poëme par cette in 

venûon de la defcente d'UJyffe dans le& 

Enfersi Combien de différents caracfteresl 

Quelle abondance d'idées capables de four* 

nïr chacune tin Poëme parfait f &qud riche 

fuppiement au Poëme de FI!iade! Virgile 

m a^ oit bien connu la beauté, puifqtni Fa 

imité dans fon Eneïde. Et û Vïrgîîe a fçii 

interefler les Romains par ies grandes cho 

(m qui dit de leur Empire» Homère a aoflï 

imerefîe la Grèce, en parlant des hiftoïres^ 

des principales familles, de la plufpart de£ 

quelles il reftoit encore alors des de fréta?» 

dams. 

Qu'eltff ejïmtfitb dufage Salmmêe] Cette 

epithete, qu Homère donne à Salmonée, 

prouve que ce qu'on a dît de ce Prince, qu'ileftoit 

un impie, qui s'égaloît à Jupiter, qui 

uni toit k$ tonnerres & qui en fut foudroyé* 

cl! mie fable inventée après Juy. 

Page 2,6 3* Aumfm tfîant dtyemë ameu* 

m

308 RlMAEQUES 

jeufie du divin fictive Entpée ] Les An déni 

île font pas d'accord fur ïe fleuve dont Ho 

mère paileicy; les uns veulent que ce fou 

eu fleu\e Enipce dans ïaThdÏjJie, lequel 

deftendant du mont Othrys, reçoit FApî -WEft 

4 

danus dans fon (cm. Apollodo.e & Pro *3 

perce ap*és luy, ont efté de ce fenLiment. 

Les autres prétendent que c'tft du fleu\c 

Enîpce qui eu enEiide, & qui coulant du* 

fie fource qui cft près de la ville de Simone, 

fe jette dansfÀlphce Jefuïsperfliack'e 

qu'Homère parle de ce damer. La ville de 

•almoiie & le voy Image de h mer femblect 

appuyer ce fentîment. 

Neptune prenant h figure de ce -fleuve 

Comme les jeunes perfonnes allaient fou 

vent fe baîgjncr dans les fleuves , cela donil 

oit lieu de leur faire nulle ftfcheufes fupercheiies, 

dont elles fc confoloient , clans lopin 

ion que c'eiloit le Dieu du fleuve qui Ici 

avoït aimées. 

Page 2 6±> Qui tous deux fièrent mimfi 

très du grand Jupiter'] Le Grec dit, les fer m 

tueurs de Jupiter, Sî^mvmç &toç\ Ho 

mère appeffe ies Roy5 les firvîteurs ds 

Jupiter, comme Dieu luy- mefme appelle 

Moifefimfieiykeur, Bï&tTmîjucôu Mmim^ 

Car Pelias régna à Jû!CûS\ Dans la 

méfie, qui faifoit partie de la Thefîalie iurlc 

goîphe relafgique, Ccft delà que paraient 

^t

SUE I/ODYSSE'H. Liwê XI. 30 

|js Argonautes, Pelias ayant emoyé fon 

tlCX ctiXifoa à la Coichide pour k conquefîc 

Je h toi fon. 

J^ v/i" approcher la fille d'Àfopus\ Àfbwu* 

cfloït un fleu\e de ïa Beolie au deflbus 

gle ïhebes. 

Zethus b* Amphum f qm les premiers 

htttient les fâpdemems île la ville de The- 

&es] On peut conjecturer fîirement de ce 

paff^c, cjue la fable deThebes bafîie par 

ÀrnphtOR au fon de fâ lyre» n*a efte faite 

qu'après Hem ère , fi te Poète fa voit coo- 

LLIC, il n'auLoii pas manqué d'en orner fon, 

Poème- 

Page z6y Car quelque forts ir vaillants 

qu'ils fujfLiit, ils ne pouvaient hdbher feure* 

himt une fi grande Ville jansfes tûurs] Plus 

tiiteuffc efl grande, plus il faut qu'elle /bit 

foi te. Zethus & Àmphron, qui baftirent 

Thebes, furent oblîgez de la fortifier, parce 

qcùfs a voient des ennemis redoutables » 

fui-tout k$ Phlegrens. 

Je? vis en fuite Alcmene* femme d'Amp* 

* 

î irymî ] Voicy deux femmes de fuite dont 

Homeic ne dit qu'un mot, quoy* qu'il ne 

manquaft pas de matière. Mais en cela il 

faut louer la fagefle du Poète» qui a au ne 

cevoir rren adjouter à l'éloge qu'il leur donne, 

en dïfant que f une fut mère & f autre 

Il lemme d'Hercule. 

Jt l vis auffi la h lie Epicafie mère dVèdl*

31 o REMARQUES 

p/\ lï appelle Epicafle celle que cem qgj 

font venus après iuy ont appellée Jfcafîe, 

Qui cûrnmit un très grand'fiîfait, en e 

pôuftmt fin fils, fûn pwpre fils, qui venw 

de tuer fin peu ] Homère t pour micu: 

peindre l'horreur de cette adbn, infifte fïi 

îe mot efpûtifa, car après lavoir dit de 1 

mcre, il le dit du fils. J ay crû que je con 

-verois toute cette horreur, en infïlknî fe 

le mot fils, fin fils, fin pwpre fils, Sopho« 

cle a fait for ce fujet une Tragédie qui efi 

peut-eftre la plus parfaite pièce qui ait jamais 

efté mife fut le Théâtre. 

Ce malheureux Prime accablé de dûukut% 

régna fur les (îiperbes defcendams de Cad* 

mus] Tout ce qu'on a donc adjouté AfhiA 

toîre d'Oëdîpe, qu'if le creva les yeux, qu'if 

fat chaffé j que conduit par fa filîe Amîgonep 

B arriva à Athènes dans le temple des Furie* 

& qull mourut au milieu dune violente 

tempefte, qui le fit defeendre dans les Enfers 

; tout ceïa a efté inventé après Homère 

par les Poètes tragiques. Car Homère nous 

dit ïcy quOëdïpeaprès fes malheurs conti* 

nua à régner àThcbes* 

Page 2,6 6. D'Amputait fils d'Iafus] 

Pour le diflinguei de I autre Àmphion dont 

il vient de pat ter, qui ciloit frère de Zeihufe 

& fils de Jupiter & d'An t tope. Apoilodore 

•a confondu ces deux Amphîon*»

' 

g ¥ fit i/O Dr s s E'E. Livre XL % i f 

Qui régna dans Orckomcne des Aimyens\ 

Ceftort une ville trcs confiderâbîe & trei 

riche, entre la Beotie & h Phocrde fur le 

fleuve Ccphife. Et ciîe -eft appeliée viHc des 

jHmyens, parce cjue les Minyena, ancien 

peuple, y a voient règne. Une colonie de 

ces Mmycns alla à Jolco?. Ceft pourquoy 

les Argonautes furent appeliez Mmyens* 

Et luy donna trois fils ] ÀpoJfodore eîî 

compïc onze. Homère ne nomme que les 

tiois plus confrclcrabfes. 

£t k fur Periclymene] Homère l'appelle 

fer, paice que Neptune luyavoit donné le 

i 

x>u\oiir de fe changer çn toutes fortes de 

ormes, & que cela fe rendoit d'une fierté 

înfupponabfc. Neptune ne hifTa, pas de le 

tuci maigre ce beau preftnt. 

Page 2 6j- Quà celuy qui luy amènerait 

de Phylacê les èœufs d'Ifhklus] Ce n eftoil 

pas par un efprit d'în juftfce & de rapine que 

Nefce vouloit qu'on iny amenait ies bœufs 

d'Iphidus. Ceiloit pour recouvrer le bien 

de fa femme Tyro, qu'Iphiclu% fils de Defonte 

oncle de Tyro, r et en oit î »ju dément. 

Pîiyktc eûolt une ville de laThefialie. Cecyeft 

conté plus au long dans le XY. UV. 

Câjîûk mie entrepriji très difficile iftfes 

vci?tlt.ii(t\ Car outie que ces bœufs eftoient 

^domptables a ifs eÔoîent gardez par dm

F 1 * 

3 ' M 

dlàCIli 

E M ARQUES 

ont penbnne ifoibit approcher, 

1/ f? JJJ eujî que te dtvui Aie iatnpus] II cf. 

toit fiïs d'Àmythaon fils de Cieihée & ck 

T)ro, ainfi Meiampua eflott oblige de fans 

îcftituer à fa giande-mere le bien que ors 

coufîn gennam Iphicfus luy retcnoit injjf 

îement. Melampus traâilloit en me 

temps pour fon fieie Bias qui devoit e£ 

ou fer Feio. 

/•£• J amjfs des Dieux] Car iî eftoîl dans 

s Deftînccs que celuy qui entreprend toit 

enlever ces bœufs, feront piïs, & garde t i n 

an entier dans une eflioite prifôn; qu'après 

l'année finie il ferait dcii\rc,& emmcneiOti 

fa proye Cette hîftc/îre efî racontée au lona 

ar ApolFooore, îrv- 1. 

Pour k recompenjer de ce qu'il hty OVû»: 

expliqué les tint te ri s oracles ] Car il iuy avo'l 

expliqué ce xjue Jes anciennes prophéties 

aboient annoncé qui! n'auLoit des enfantë 

que par le fecours d'un Devla, quî,inftiurt 

arun vautour, luy en donnerait ie mo)c ! 

¥ûy?Z Àpolhdûrc* 

Dûrn elle eujè deux fth ] Ceux qui fon' 

Venus après Homcre ont dit qu'elle n'eut rie 

T) ndarc qu'un fils, qui eftoit Cdlior, &qu2 

de Juprrer efJc eut Poflux. 

Page 268. Je vh Iphimcdéz femme d& 

tocus~\ Cet Aiodus efioit fiis de Catucé & 

iC 

Neptune } ôi il efpQa 

1 

•F 

& 

U

1 

y • 

£:. fon ficicTrrtps. 

pont la ùe fut fart tourte*] Comme le 

ordinaire ni eut fa vie de ceux qui font h 

guerre aux Dieux:, 

Al*âge de neuf ans Us avèrent neuf cou* 

dé es de grofeur è* treme-fx de hauteur 

Homère et, 

£iot à mot : Ckr ** /*

fié RïMASQïïn 

avoït propkipc fun tcmpîc, k retint dbife 

cette ifle ou cite mouiU. 

DÎJ tijîc de Did\ Entre Kfle de Crcte 

fi Pîfie de Thera. 

Je vis Mœra9 Ctymme] M sera, fiïfe d 

ï^jfOctus &

SUR I/ODYSSE'E. Liwâ XL %iy 

«qui Fa ptïs fous û proteéHon. 

Et par cette tUSgence ft'effrppkz pas ks 

prefe/s que wus àty devet dans ta nece&té 

au il fi twitve'j Ce il Je veiitablë fens de ce 

pafïàge. La Rcyne prévient îcy une penfee 

que iavnrice pouvoic dicter à ces Princes 

qui dîoït de renvoyer promptementUlyfle 

& de prendre pour prétexte l'envie de fay 

faire plaifir, & de fatisûiie pluftoft fan îm« 

Vaîï€ûce3 iorjau en eîîet ils ne chercher oient 

Qu'une rdfon pJau/lbïe Je ne pas iuy faire 

de p?us riches prefens 9 que îe temps trop 

court ne permettroit pas de luy préparer g 

elïe leur défend cette précipitation fiufîe* 

ment obligeante & véritablement intereflee. 

Cela renferme un intiment très fin, 

je 2 71. Et qtiil ne danm luy-mefme 

ïexemptj\ Cela cft admirablement bien dit. 

Ceft an Roy d ordonner, mais deû auffi à 

ïay a donner l'exemple. C'eft ce qui fonde 

la réponfê genereafe d'AIcinoùs- 

* 

aê 2yz. Sivûus vôulïei que je demetè* 

Ya(fe 2cy une année entière pour VûUS d&nner 

U temps de préparer ] Il lemble d'abord 

que cette réponfe d 1 l/Mfe eft trop intérêt 

j«. (mais ce rfcft nullement finiLft qui 

G *'" r parier, ccÛ l'envie Je répondre aux 

wûÛetcs d'Àkinoûs & des autres Pria 

**% 

«i

14 REMARQD 

tant cette entrcpfîie de puérile à caufe de 

fort impofthîizté, nrnrqu oient ces vers comme 

des vos qui dévoient eâre rej citez, 

Voilà des Ciîtiqoes bien prudents & bien 

jm de regier les idées des Poètes fur la 

oflibî!ité* Mais eîl-il poflible qu'il y m ey 

4Îes Critiques qui nayent pas fentï Ja grandeur 

&. h beauté de cette idée ! Longirt n'en 

a pas jugé comme eux éms fon ehap, iï*m 

%\ traite ÛGsfûurees^gnmd^ il rapporte cm 

mzfmes vers d'Hoiu cre pour prouver que 

ïe grand fc trouve ibuwent fans le pathétique, 

& que fouveat il fc rencontre quanti te 

dechofes grandes & fubltmcs , où ri n'entre 

point du tout de pafîioo- Et tel efi, adjoute- 

\-\\7ce que dk Hemere avec tant de hardteffe» 

en pariant d'Abeus : Ils me T iaçoîet nr 

ïes 1 m mouds, &c Ce qtijitit ejt encore plus 

fort : Et Hs fauroknt exécuté uns doute. 

£n effet il n'y a rien de plus grand & de 

us beau. 

Et pûiér cet effet ils entreprirent d'entaffer 

le mont Offa Jur (e mont Olympe ir

pûs petite ; âïnfi la plus grande eft h bafe, 

comme îa raifon le veut; fut cette bafe on 

doit mettre la plus grande en fuite, & 1* 

*>Ius petite doit eftre fur les deux comme îa 

pyramide- Voila donc pour ce qui regarde 

îa grandeur, II y a encore une autre figeffe 

d'Homère dans ce qui regarde la fuite* 

I/Olympe eft îa première montagne en 

defcentlAïU vers îe mïdy, i'Ofla la fecondefi 

& le Peiion la troîfïéme. Ain fi le mont Ofla 

doit eftre mis fur rO!>mpe comme le plus 

vovfiH, & te tnont Peiion ne peut eftre mis 

que fur l'Ofiâ- Vii gile a prfs tout le contre MM 

pied, 6L fans avoir aucun égard pour la grau « 

deura il a fuivr feulement l'ordre, parce qa en 

remontant du midy au nord de la Macédoine 

le Peîion eft le premier # fOïTa ÎC 

fécond j & l'Olympe le troiiiérae ; aïnfi il a 

mis le Pelron pour fa bafe 9 fur îe Peiion 

rOfla, & fur I'Ofla f Olympe. Mais Tordre 

d'Homère eft le meilleur, parce qu'il efl fc 

plus raîfonnable. 

Page 2^p- Et qu'il vâulûh mener dans h 

Jâcrêe ville d'Àthmes, mais il ne put Ffl 

eûnàiirz] Homère juftrfie icy Thefce de 

l'infidélité qu'on luy a repro^ée dWok 

^mtté Ariadne, après les obligations effen m* 

tidies qu'il luy avoit.»Selon ce Poëte. The 

jûe n eft ni ingrat ni inftdelie f il vouloît 

la conduire à Athènes pour vivre toujours 

£vee elle j mais Diane ofFeafëe de ce qu'elfe 

m

-* -I**— - - —y 

fï© KIMAlQtîlS 

avoit propViïmé fwn temple, h retint fa\ & fut punie par Diane, qui la fit mourir. 

Clymenéfiile de Aîiayas &. inere d'Iphi- 

Et tûdieufe Etiphyk 9 qut préfhra un c 

lier dût à la v& de fan maryj Eiîphvle 

lie de Talatis & de L)/iniachcs quf ïuc 

iparice àÀmpliîaraiis, 4 quf gagnee par on 

çolier d or, que luy donna Fofynîce, obligea 

ûm mary daller à jb guerre de Tfiebes* 

quoy- qu'elle fçut bien qu'il y dei oit mourîr. 

Voilà pourquoy il fuy donne cette cpiihete 

^ûdieufs, tiomere ne manque jamais de 

caraâ&ri&r ainfi les vertus ou les vices des 

es dont il parîe. Erîphyle fut t 

ar fon £3s Alaiœon. 

Page zj®. Ou dans h vaiffeau qw Wd$ 

m'avez fait équîgpef] Comme nous faônf 

vu dans le v 11 ï * Liv* 

C'ejï mon hûjîe? ér chacun de vmis efi riche 

îr puijfant] Voiïà deux railbnj dent la 

Beyne Areté ft ftït pour porter ce* Piinccs 

è faire à Uiyflc, quelle voit réduit à la derrière 

necefïlté* des preféns qui répondent 

à leurs richefief & à la dignité de cdl*

4 

SUE I/ODYSSE'E, Liwe XL %%y 

qui Ta pris fous fa proteéiion* 

££par cette diligence n'ejîrûpïei fas ks 

pefens que VûUS luy devei dans lu neçeffiti 

m Ufi trouve] Ceft le veiïiable fens de ce 

paffage. La Reyne prévient iey une penfee 

que {'avarice pou voit dîsfler à ces Princes 

qui eftoit de renvoyer promptementUlyflè 

& de prendre pour prétexte 1 envie de Juy 

ire plaïfir, & de fatisfaïre pïuftoft fon ira* 

arience, ïorfquen effet ils ne chercheraient 

u'une raîfon pJaufïble de ne pas luy faire 

î de plus riches prefais, que le temps trop 

I court ne pennettroit pas de luy préparer 

elle icur défend cette précipitation fâuiTe m 

ment obligeante & véritablement întereflee* 

L Cela renferme un fendment: très fin. 

Page zy>i> Et qu'il ne dùnnc luy-rncfme 

hxemplJ] Cela tft admirablement bien dît. 

Ceft au Roy d'ordonner, mais ceft aufft à 

luy a donner l'exemple. Ceft ce qui fonde 

la réponfe génère ufe d'Àkinoûs. 

Page 27 2. Si VûUS vouliez $ ue J € demm

KEMAUQUES 

ces, cfeft pourquoy il leur fait entendre q^ 

quelque impatience qu'il ait de partir» il de* 

meureroît-fâ un an pour leur faire plaîfir» en 

Jeur donnant le temps de îuy faire des pre- 

Jens dignes deux» Car comme ccfloit une 

loire pooï ïcs Princes de seftre acquitta 

honorablement des devoirs de ïhofpitaJitc, 

c'elioit une pojuclfe à leurs hofies de ïeur 

donner pour cela tout ie temps ncœ flaire, 

Jttpour les mieux aiïèurer qu'il le feioitde 

tout fon cœur f il leur fait voir l'avant,!g? 

ni luy en reviendioû à iu^-mclme, tefi 

qu'il en feioit plus efhmé & plus honore s 

liiez luy qând on îe verrou retenir con: «a 

é de pr tiens û nui es. 

J'en fer ois plus honoré è? mieux reecu 

H ne confidere pas ces prefens k caufe d 

leur richelîe, mais à caufe de Hdee avanta m 

eufe qu'ils donnent* de ceiuy qui les a re a 

ceus* Us luy attirent i'ellime, ie fefpeft A 

ïaitirtïé de tout ie monde. Et eefi de ce 

refens qu'on peut dire avec raiibn o 

«quHeiiode dit des rkheiîes^ 

\ W * 3 _ ft. rJ 

«••». TLkQvTto Jl'dpim v^m vBJbç è-mêïh 

Lis richeffes font fiâmes de l'honneur if S 

ia vertu* Comme Didyme la remarque. 

Qui pour venir à leurs fins, èajiiffent des 

eibles que Fûtt ne fçauroit démentira C& 

iffage fait voir que Fart des fables eft fer*

sum L'ODYSSE'E. Livre Xt 31^ 

îicïen* les hommes y font portez naturel* 

ment, & leur întereft adjoute fouvent beau 

û 

v 

coup à cette pente naturelle* 

Page 273. Pûtir VûUS il efi wœy que VUS 

vûroks ont tout tair de ces ççmes ingenieu* 

(eimnt invente^, mais VûUS œve% un efprïi 

trop Jûlide paur VûUIûîT tromper] C'eft à raoïî 

avis le véritable fcns de ce vers, 

Par ftûpvv im&Vifârma verèômm, iî entend 

k tour ingénieux de fa composition, qui en 

effet a tout l'air du t!£Fu d'une fable 9 mais 

cela cft corrigé par tofinç i£>>tài} par i/ff 

bon efprit, car cette io!iultâ d clbrit, qui 

efclate par tout, fait croire qu'il ne trompe 

point Se qu'il ne dît rien que de vray, car un 

efpiit lolide ne nient point &. ne trompe 

point Ce païFage eft très ingénieux, Homère 

fm donner à les contes par Àkinoûs 

le plus grand de tous les éloges* Ils ont tout 

l'agrément de lafcbfej ^cl jmppn imm^ maïs 

en mefme temps ils ont toute la vérité & 

toute la fblîdité de l'hiftoire, fpw? i&\#l* 

t par-là ifs font bien au defliis de toutes 

Ses fables communes & vulgaires qui ne forif 

rai tes que poor tromper, comme la ptuÉpar? 

de celles que nous voyons aujourdliuy* EfS 

voilà ce qui fait le véritable caractère de* 

O un

±n KEMARÇUÎS 

m 

u> 

bernes d'Homère* Ils ont tout îc merv 

leux de fa fabîe 6c tout futile de la vente 

C'eft ce qu'Ariflote a û bien connu & fi ad 

mîrabîement dtmefté. On pc*it voir îe 2chap* 

de fa Poëtique» & les Remarques à qui j'ay foLIigatîon de celle cj\ 

Vous nrnis avei e '-:pafê, cemm& le melikut 

ehantre l'aurmi pu faire, l hifiûiri\ Voilà h 

fuite ôi l'effet de ce qa il vient de dire ; ce 

merveilleux de fa narration, qui reflem 

au tiHu dune fabîe» à cette\crîtcf

atJR L'ODYSSE'E. LivreXL %%^ 

wùll qui ait trouvé ïa mort dans fanPafais 

mt la perfidie de fa femme, & que le Poète 

parle au pfurïei, on a voulu expliquer ce 

p«if&gc autrement, &pary^wr,jPrfr cette 

femmey entendre ou Heienc ou Caflandre* 

mars tollt cdaeft force. Homcrc en parlant: 

su pluLÎel» porte dabord la \ûë lur ce qui! 

y a de plus tragkjuej & c eft la 

toire qu'il va conter* 

Page 27 5, Lorfque vais emmeniez leurs 

uwjpeaux] Ccf! ce que fijjniSe le mot »- 

^Çtî>4uÉycKè Hcfychius Ta fort bien explîc, 

que, -TTze/&/

22T KEMARQU 

Oy cîe fuhrre pied à pied fÀuteur du Par^ 

e pour faire voir le ridicule de fes aid* 

ijucs, & de relever celles dont 

n'a point parié , je rapponeray icy la manière 

dont il rend ce paffage poui ie rendre 

impertinent ; Agamemnon dît à Ufyffcqui 

fut ajfommê comme un bœuf par Egifthc 3 if 

qm ceux qui l'accompégnûiem firent tuei 

gomme des cochons qu'un homme riche fait 

tuer pâUT une nopee ou pour une fejfe, ou 

pour Wi fefiin ûù chacun apparie jm pht% 

A quoy le Chevalier adjoute, Je veux bien 

que les gens d'Agamemnâîi fuient tue^ comme 

des cochons, quoy-que la comparât/on m 

foit pas fort noble, mais qu'importe pour» 

quoy ces coi kons font tut\ f Tout fe trouve 

là 9 une Tiadu^tîon plate & baffe » & une 

très ignorante critique. Le mot Grec avtr 

ji'eftoii point ignoble, & Fufâge continuel 

qu'on faîfoît de cet animai pour les fàcnflces 

3 lavoît maintenu en honneur » & il eft 

encore reîevc icy par cette cpnhete h armajrieufe 

djçdtfbvmç. Homère ne pou voit pas 

iJeviner ïidCe bafîe que nous aurions en nefîre 

langue des mots pourceaux & cochons^ 

se II pourquoy il a fallu Jes changer dans 

la Traduction pour s'accommoder à cette 

de f ira t die de noftre fiede. Du refte, l'idcc 

cÛ es belle & très jufle» & îa circonilancs 

u'Home e ad joute n'efl nullement inutile 

uîlû'elit fert à marquer le grand nonibrc

• 

SUR L'ODYSSE'E. Ltwe XL 323 

de ceux qui furent luez avec Agamemnoiï» 

J>/r encûmbatfingulkr] Car il arrivoîl 

fouvent que l'on choîfîflbît deux combatants 

pour fe battre en duel pour les deux 

txu'ûs 5 fouvent mefme dans les batailles \% 

i" 

/i\oit de ces combats fînguliers* Nous 

stvons vu des exemples de fune & de ! au* 

trc efpece dans l'Iliade. Il ne faut pas fe 

fervîr de ce paffage pour eftablir fancienneté 

de ces dueis que nous avons vus de 

nos jours, qu'une fureur diabolique a infpirez, 

& que la pieté du feu Roy a abolis, Lct 

Grei$ ni les Romains n en ont jamiis connu 

Pufage. 

Page 2,77* A fes m$> quoy-que je fuffe 

desta à terre h* expirant9 je fis des efforts] 

Homère conferve icy le caraélere d'Àgamemnon 

> qui eftoït un homme fort enclin 

à famour. Les cris de la perfonne qu'il ai 

m'jit, font plus fur iuy que le loin de 

propre vie. 

hjlruhe aux crimes] Elfe y a voit efté 

inftruite par f adultèref grand artifan de 

crimes. 

Page 278* Qui rejaillira fur toutes les 

femmes ûUî naiftront Mprés elle, mefme fur 

Us plus vertumfes ] De quelles noires coa 

*cuis riomerc îçait peindre le crime • 1 a 

t41 lien de plus horrible & qui doive faire 

plus d'itmpreifion fur l'eforit d'une perfonne 

O vj 

m

g 24 R ë M à R Q U 

qui va commettre un crime, que de peaf*r 

que par cette aétion elle *a fe deshonnoj rf 

cteïnelJemetitp & deshonnorcr toutes cc T Ic$ 

de fcn (exe qui naîftront dans tous les f> 

des & qui le mériteront ïe moire • 

Et tûujmirs par des femmes] Il ne Applique 

pas davantage, Àg«rmcmncn ferv 

tendoît bien s il veut parler dAërope fem* 

me d'Atrée, qui ayant efîé corrompue p?; 

Thyefte t plongea toute cette famille dan* 

îes plus cfpou\ en tables de tous ïcs malheurs. 

A n'avoir pas pour vofire femme irûp %a 

gûmplaifance, ir à ne pas luy faire part de 

lâus VUS Jecrets] Je ne dis pas que ce cernfeM 

ne foît fort fage ^ mais on peut répond*ç 

à Agamcnirioiî que ce ne font pas les cornplaïfances 

quil a eues pour là femme qui 

Font perdue, &qui l'ont rendu capahfc de 

commettre le plus grand des forfaits. Âgamemnon 

parle en homme irrite -, qui voudrait 

que tous les hommes punifTent leurs 

femmes du crime que k fiennc a commis 

Mm$ je voudrois bien fçavoîr te que pen* 

Ibit la Reyne Areté de ce difeours dÂga* 

ïïietunon, car il femblc autant tait pour Ion 

inary que pour Ulyiïe. Au refte Ui}iÎ£ 

profitera û bien de ces a\îs d'Àgamemnor, 

qu'il entrera inconnu à Iihaquci à. qu'il W 

fe découvrira à fa femme qu'après avoir 

^^ ^H m-m

i 

«ta SUR L'ODYSSéE. Ltwe XL $2$ 

Ucbc\ê fon entreprife, & seftre vu iam 

i4iie entière feuretc- 

Qu'il ejî heureux ! fon père aura la cen** 

û'arien de ie rcmr, if il aura le plaifir 

'ii'embra'for fon père ] II n'y a rien de plus 

tendre & de plus touchant que ce fend meut 

TJ9f*#f* jvicnetas f i t^bez les amis 

s t-fi-il retiré à Pybs chei Ncjîûr I Enfin 

clans quelque ville forte, qui fott un afyte 

inviolable, & telle eftoit la viiie d'Or chômene 

dans îa Beotie à caufe de fes grande! 

ridiefies, Agamemnon ne fçavoit pas que 

%3 fîlsfaYOit Y«Bgcp quïïaYat lue Egifthc 

r j

326 RlMARQU 

& Clytemneftre, & qu'il eftoit paifible pût 

fcfïeur de fes Eftats. 

Page 280- Je y&is arriver l'Ame d *3 

J A 

iïhÏÏle? eelle de Patrmle% celle d'Anùlûqm fa 

celle d'Ajax] Avec quel art & quel nature! 

Homère fçait ranimer l'attention & la eu* 

ïiofité de fes Lecteurs. 

Page 282. Je préférerais d'eflre dans k 

monde le jardinier d'un fermier, qui ne ga+ 

gnermtja vk qu'a la futur de fin front, à 

régner ky fur toutes les timbres] Voky un 

des pafîàges que Platon a condamnez dans 

ïe 3. lîv- de fa Republique, & qu'il trouve 

très dangereux pour fes mœurs. 11 ne peut 

foufïrir que le Poëte fafïc dire à Achiî's 

qu'iipicfereroît ïa mifére & lafervlîude à fa 

mort 3 car ce femiment ne peut que mi 

la mott effroyable aux jeunes gens, & les 

drfpoïer à tout (buffrïr pour i éviter. Cela efi 

fort bon dans la morale ^ mais fa Poéfiea 

d'autres règles qui la mènent au me (me buL 

Elle met avec fuccés dans la bouche d'un 

héros comme Achille une fentence tirée da 

fentîment corn m un f & pourtant contraire à 

Fexaéte moraie, quand cette fentence eft 

directement oppofee a tes fentîment s qui 

font connus. ïî ne faut pas craindre qu'Achille 

perfuade à quelqu'un qu'il faut préer 

ia fervîtude à la mort3 my qui a mieu£ 

aimé mourir que de ne pas venger Patrode. 

Il ne nous perfuadera pas plus ky iju'd

sus. I/ODYSSE'ë. Livre XL $%?* 

îious a perfuadez dans le 1 x. Lïv. de Fliist* 

de, quand H a dit que la vie efi £un pfm 

infini que rien n'égale; que tûus les trefors 

du monde ne peuvent luy ejlre compare^, if 

au il préfère une langue vie à une gkire im~ 

mortelle, ire* Ces paroles démenties & pai 

les ïcnûments &par les actions deceluy qui 

oaile, font au contraire un très bon effet* 

Page 28 s. Apprenei-mey auffi fi vûîis 

, avez quelque clwje de mon père] Voilà Is 

/* 

caractère d'Achille œnferve tel qu'Homère 

Je pre fente dans Fil rade, car nous avons un 

que ce héros eftoit un très bon âis, & piiiïï 

de tendrefle pour fon père. 

Page 283* Car ce fut mûy 

de l ijle dé Scyrûs à Trûye] UJ 

parce qu'AchiJie navoît pas vu 

au fiege, il n'y arriva qu'après 

/ ie meiïity. 

lîe dit cecy, 

eopîoleme 

/à mort. 

Et appuyoh fort lien fon mis fans sV 

carter en vains dtfcaurs] Voilà un grand 

précepte pour 1 éloquence en gênerai 

fur-tout pour celle qui* convient quand on 

parle dans ks affemblées où il s agit de délibérer- 

Il ny avait que Nefiûr i?*mây qui s 

l'art de parler "empûrtfans fur luy tavatt* 

toge ] Ccft ainfi qu'Ulyflc doit parler, en 

compaiant Ndlor & luy à un jeune homme 

comme NeoptoJem^*

zB REMARQUES 

Page 284.. Ces belliqueufes bandes dj 

cjlûient venues à cette guerre f atti^ 

rées par des prefens ir par l'ejperanœ 

d'efpûtifcr des femmes Troymnes ] II y a 

mot à mot clans ie Grec, Ses compagnons 

Cetêens fe firent mer autour de luy pour des 

prefens de femmes. Et cefl ce qu'il faut ex«* 

pliquer. Voicy d'abord ce que Strabon a 

penfô de ce paffage dans fon n 1 1 1. Ll\, 

Homère nous propûfe plufîûft icy un énigme 

qu'il ne nous expofe un point d'kîjfoire clair 

ir net* Car mus ne fç avons, ni quels peuples 

ce font que ces Cetêens; ni ce qu'il fuit 

entendre par ces prefens de femmesf if ks 

Grammairiens en nous débitant leurs fable-^ 

nous débite m leurs imaginations bien plus 

qu'ils ne tranchent la difficulté, Après ccfa 

n'y aura-t-il point de la témérité à moy d'entreprendre 

d'expliquer ce qu un fi {cuvant 

homme a trouvé trop difficile- Cependant 

je ne ppîs mempefchei de icfliyer. Il 3 a 

donc icy deux dîfficultez ; la première, cdt 

de fçavoîr qui font ces Ceiiens ; & Fautic, 

ce qu'il faut enicndie par ees prefens de 

femmes* Commençons par k première- îî 

elt certain que le Royaume de Tdepniw 

père d'Eurypyîe, eftoît dans fa Myfie ACa ** 

tique, dans la Teutrame prés du fleuve Caï 

que, Strabon en convient» & if dit que cfeft 

le fentimeïit d'Homère, Il convient encore 

que dans le Calque va fe décharger yn gïos 

«a

I J 

I 

i 

i 

I I 

1 

3t ç R I/OûYSSEB. ZJV/V Aie 32 

î.nunt qui t ft comme on fleuve, & qui eÈ 

onpellé Celée, KHWOV. Je ne voy donc pas 

mm quoy ce* peuples, qui cfloïcnt aux en- 

\iroiis dû Caïqtte & de ce gros torrent, ne 

pcn\ oient pas avoir elle appeliez Caé&ts, du 

nom de ce torrent ; c'eft mefme !e lentement 

d'Hefychius » K ruiez, pyoç Mt/tfw «^5 *8 

nuçppf&wnç r m i miuMû HLVIZQç* Les Ce tiens 

font des peuples de Myfie, ainjî appdlei du 

fleuve Cetêe qui pa§c dans leur pays* Il y a 

peu de noms de peuples dont forigine toit 

mieux marquée & plus certaine- venons h 

l'autre difficulté qui efl fur ces prefens de 

hnmes, Je fuîsperfuadee que la fokle noai 

onne le moyen de fefclaircir* Elle nous dit 

que Priam, pour oblrger Alîyoche fa fœur 

à envoyer à fon fecours fou fils Etiïypyfc* 

luy fit de magnifiques prefens» & luy envoya 

en ne autres chofes une vigne d'or que Jupiter 

avoît donnée autrefois i Tros, Par cea 

picfcns de femmes on peut donc entendre 

ces prefens envoyez à Àftyoche* & qui furent 

la caufe de la perte d'Eurypyle & de: 

fes troupes. Pïiam ne le contenta pas de cela, 

H promit de donner à Eurypyîe fa fille 

Caflândre, & Eurypyîe, dans lefperance d'e& 

poufer cette Prînceiîe» marcha à Troye avee 

fes troupes. Voilà donc ces prefens de femmes 

qui l'attirèrent, Ceft aînfi que ce Poète 

a raeflc l'amour dans JUiade, quand i! a dit 

dOtiirjciice quil dloit^çnu deThraw»

33* REMAEQUïS 

ce fîege, poufle par la gloire & par l'amour 

car il demandoit en mariage cette mtOms 

Câflandre, Lîv* xin. tom. 2,-pig. 274 

t quand il dit ieypar des prejens de femmes* 

il peut avoir embrafle les deux histoires 

dont je viens de parler, c'ell à dire, lesprefens 

faits à Aflyoche mère d'Eurypy!e2 

& te beau prefent promis à Eurypyle mefme. 

Did.ys les a embraffees toutes deux, 

înter quœ nuncius Priame fupervemt Ewy* 

pylum Tekpht ex Mûëfia adveniare quem 

Mex muais emteœ Hleéîum preermis, adpef* 

tremum oblatione dejpon[ee Ca(fandrm cou* 

frmaverat* Lib» 4. pag. 9 5. Je lay firivi 

|e me flatte qu'on ne trouvera plus ky d t* 

îiîgme- 

Page 22 y. La vms auriez vu les plus 

Braves capitaines effuyer enfecret leurs lar« 

mes ir trembler de frayeur J II y a des occasions 

où e$ plus braves pcu\ ent tremble/. 

Et je ne doute pas que dans celle-cy il ny 

euft bien des moments où les pfus relblus 

auroienî bien voulu n eftre pas enfermes 

dans cette machine, 

Page ZË6. Dans la prairie d'Ajpheddt 

J*ay confervé ce mot» parce que c efloit I 

nom de h prarrie, à caufe d'une plante He^ 

rie dont elle eïtoit pleine. 

Far [a fureur eu favûû jette la viélotr* 

ne je rempûrtay fur luy hrjqu'en ni adjura 

les armes d'AchïllÂ Quel deyoit eflre 

p

?ï 

i 

suft I/ODYSSE'E. Livra XL 33 ï 

fcbonnement des Pheadens de voir un iaconnu 

pailer ainfî de fe5 grandes avantures! 

Si quelqu'un pourroït-iJ eftre furprîs de la* 

grande attention qu'ils luy donnoîent î 

Ce fut la Déeffsfa mère, Thetis elle-mef* 

me, quiptûpûfa ce prix] Fourquoy ne pas 

garder les armes d'Achille pour ion fils î 

Ces armes divines ne dévoient pas eftre pot* 

fedées par 011 jeune homme qui rfavoît en* 

core rien fait, il eftoit mefme trop jeune & 

elles ne luy auraient peut eftre pas convenu 

: ciVrlleurs Thetis vouloir honorer la me 1 * 

moire de fon fiîs 7 en fâîfant difputer ces 

armes par les deux plus grands héros de 

farmee- 

Et £e fwteM ks Tr$ym$ if Àfinerv* 

Comment ïesTroyen s furent-ils juges de 

ce différent l Àgamemnon & les autres ge

jjâ REMARQUES 

as luy attirer de h part des Pheadens! 

Eh plujt aux Dieux qiw je ne Feujfe pu ,1 

remporté 1 .] Ce fesi liment eft grand & digne 

d'Ufyle. Il \oudroit avoir efté vaincu , ann 

qu'Ajax ViG fui! p*s mort- 

Page 2.87. Fils de TeLtmûit f îuy dis-je 

Il nV a rien de plus poli ni de plus flateur 

pou* Àjax que ce dîfcours, cependant il n'ea 

tû point touché , à il ne daïgne pas fêuta 

nient répondre, Homère a parfaitement! 

connu ce AU il faut donner à ee$ Ames atig- 

ces» Il n'y a que fe flience qui leur convienne^ 

Qu*auroït- il dit I 

Et qui, p$ur la punir plus vifièfement, 4 

terminé wjfre vie] Quelle grandeur dans ce 

feul trait. Toute f armée des Grecs punie 

affaiblie par la mort d'un feul homraç l 

Qui cfl-ce qui ftjaït ainli louer î 

Page s 8 S- Les mes ejîûknt affifes 

les mitres debout ] Celles qui eftoïent detout, 

c'eftoient celles qui pîaïdoicnt pont 

acculer ou pour défendre ; & celles qui eftoïent 

aflifes, cefîoit celles pour lesquelles 

ou contre lesquelles on pïaidoit, & qui alloïent 

eflre Jugées, 

Qjripcwfuwh dans cette yajle prairie les 

hefics qitilavûii tuées] Cela eft hetticu'é- 

333eut imaginé, poux faire entendre, fclon Is 

/

l t f O&yshf titre 21 |j| 

ifieologlc pa}tnne?que les hommes porteni 

dans J autre vie les me fracs pa fiions qui les 

ont agitez dana cdle-ty. 

1 

jiu de - là je vis Tityus, ce fils de 

erre ] Ce Tityus eft l'image de ceux qui 

font devenez par Ici paillons, & fur-tout par 

famour, dont les Anciens pïaçoient le fiege 

dais? le foyc. Z* véritable Tityus, dit Lu 

crèce, fiv- 3* i?/f £é£/y £/^« le cœur eji de •*3 

chhé par l'amant P§ 

f qui ejl dévoré par de cul 

fiâtes inquiétudes P m tourmenté far d'aulits 

cuifants jauds9 

Page; zBf. Commeelksramjctt k$ dê~ 

ïùiehjes campagnes de Pattûpe pour aller à 

Pytlio] Panope efi dans la Phoade au def- 

Lus du Parnalîe prés de Deiphes. Strabon 

cfcrït qu'Apollon aïfant d'Athènes à Delphes, 

pafla a Panope, où il tua Tityus qui y 

îcgnoît, êi qui efloit on homme violent & 

b|tiile, Cependant nous avons vu dms le 

ui. Li v. de f Od) ffee , que les Pheadens 

condui firent autrefois Rfaadamanthe en EU-F 

Ixe, où il efloît allé voir Tityus qui eftoil 

pc dans celte Me; & Stiabon nous affeure 

que de fon temps encore l'on y m on tr oit 

un antre appelle ££ïft?, du nom de fa merç 

de ce Géant j & une chajxelîe où l'on rendoit 

à ce monfîre une efpece de culte» Ces 

deux traditions, qaî paroi lient fi contraires* 

uvcm aifement ie concilier» Jupiter cftant 

eêau amoureux d'Elara ûHe ë'Orduomç-

|4 REMARQUES 

ne, c|uï regnoït dai.s h ville de ce 

peu éloignée de Panope, eut d'elle ceT^ 

tyus* mais pour dérober à Junon la cou. 

saillante de cette intûguc, il alla cacher 

cet entant (bus la terre dans i'Eubée, &lca 

retira tn fui te- Voilà pourquoy ©n dit qui 

effon fais de la terie. Cet enïant devenu 

rand, ictouma enfin dans le pays de (g 

HitiCg qui eltoit fa êjjtable patrie, & où ij 

fut tue par Apollon. Les Eubcens,pour fpire 

honneur à leur jfle d avoir eilc comme feu 

berceau, montioxjit 1 antre où il avoît cité 

caché » & une chapelle où on luy rendent 

quelques honneurs tomme à an fils de Jupiter 

| car les peuples profitent de tout pour 

honorer leur pays. Voilà pourtant un plaidant 

font que Tit) 11$. 

Je vis k célèbre Tantale ] C eft la véritable 

image des avares qui meurent de far 

& de foîf au milieu de h plus grande aboi* 

ance. Horace a bien employé cette image 

ans fa fat- i • du iîv« i - 

Page 2po. Le teurment de Sifyphe m 

me parut pas moins terrible ] Sifyphe cfi 

fembfefme des ambitieux. Homère ne noue 

lait \oir qu'un criminel puni pour chaque 

vice s maïs par - la iî nous fait enviliger le 

fupplke de tous ceux qui ont veicu dani le 

juelnie dérèglement. 

Une fer ce majeure le repoujfeit\ On paît 

entendre aufli quç h propre force de ce xo

OR L'ODYSSE'E.. Livre XL 33- 

* Jtcr c ie repouflbit, car ii anime ce rocher 3 

c'cft pourquoy il adjoute, lr cette pierre im 

t*udtï8te retûffîùûU en TOUUIM, iTC* Je nay 

ofc bazarder la nicfrne épithete , & j'ay 

craint les oreilles trop dclkates & peu ac- 

: cootumecs à ces figures hardies, doiat l'audace 

fait la beauté* 

Ccjl à dire, (on image, car paur luy ] 

t Voie y une confirmation bien claire de ce 

['ay tlesja dit plus d'une (dis fur ce partage 

de F Ame après la mort. L'ombre 

d Ker-cule,quî eïl dans ïcs Enfers, ccft l'image 

de fon corps, *UWwt ceftàdire, le corps 

dihC & fubtil dont fon Ame eftoit rcvefluë. 

t Iavf c'eft feriteadement, Famé ipirituefie 

I qui cfloit reveftuc de ce corps fubtiL Cette 

î rhéologie a cflé affes expliquée* 

Fâj[e 291. Et il a pour femme la char* 

vante Hdè, fille de Jupiter fr de Junon 

1 Cette fable qui donne à Hercule après fa 

mort Hebé pour femme, me paroift heureufement 

inventée » pour faiie entendre 

nu une perpétuelle jeuneiïe , c'eft à dire $ 

j une léputatîon qui ne vieillît jamais , eft h 

iccorapenfe des Iieros, qui comme Hercuîp 

ont fait 1er vis leur -valeur & leur force aa 

iûmagement des hommes. 

Des ois aigus de mûris qui fuyaient de* 

>mt *&] Ceux qu'il avait domptez & punis 

fa,

en cette vie, ou qui pour fe dérober 

vengeance, s eîtoient cachez dans des cavernes, 

le craignoient &ie fuyoîent cnccit 

apres fa mort. 

J>/2 ejlâmac ejlûk couvert d'un large baie* 

drier d*&r~\ Dans le xiv. Lîv. de l'Iliade} 

Homcïe nous a donne la ce En turc de Venus 

admirablement bien travaillée & charée 

d'ouvrages très exquis, Voicy le pen^ 

3ant tforeitie, sil rri'tft permis de parier 

ainfi , ceft le baudrier d'Hercule charge auffi 

d'ouvrages admirables* naîs qui font miïi 

terribles que les autres font giacîeux. Et 

ceft cette oppofition qui en fait toute la 

|>eauté* Comme ce Poëte s niis fur cette 

ceinture de Venus tous les artifices djnt die 

fe fert pour furprendre les hommes & pour 

les perdre, il a mis fur le baudrier tTHciculc 

tout ce que des héros comme luy font 

pour les fecourïr & pour Ls fauver- lis domptent 

les monflrcs, ils s'expofent aux plus 

rands dangers. Quelle grandeur & quelle 

iînciïe dans ce contrafte ! 

On y wyoit des ûurs, des fangliers% eus 

lïûns, des combat* ] II y a bien de fefjnrt 

& dugouft à avoir mis fur ce baudrier Dates 

les avions d'Hercule, au iieu de les m* 

conter. 

Qtie tûuvricr qui Va fait n'en puijfl' j> 

maïs faite de femhlabie] Cet cndioit

• i 

- 

SUR X/ODYSSH'I. Livre XL 337 

Eut bien que ïes Anciens y ayent trouve 

puifquifs en ont donné 

deux explications très différentes. Les uns 

font expliqué aïnfî : Celuy qui fa fait, n*ett 

ûVûii famais fait de (emMable È èr iî netl 

fera jamais de pareil, car il a empfayé à 

ttky-là toute fa vie» Ou bien : II y a ef 

puifétoute la force de pu art * Et les autres: 

due ecluy qui ta fait, qià m a imaginé k 

éefôin f n en fœffe jamais de fcmbiabte* La 

première explication fait une très grande 

violence au texte, & d'ailleurs elle ne dit 

pas grand chofe & ne fait que réloge de 

l'ouvrier. Jay donc fuM la dernière i car 

outre qu'elle s'ajuite mieux avec les paroles 

d'Homère & quelle eft plus naturelle» elle 

renferme un fmùmtnt très paffîonné, & 

très digne d'un homme lâge & vertueux 

comme Uïyflë^ car bien loin que ce fait 

me imprécation contre I ouvrier, comme 

font crû les Auteurs de ia dernière explication 

, au rapport mefme d'Euftathe, inpôs 

A, dît-il , 7W Kû^PY UÇ dg$ÙÇ

I? un fieras comme Juy, qui a cfefîrtiït 

laper beTroye, qui a affronté tant de per 

avec mnt (fe fermeté, & qui a eu le courage 

ée de (cendre aux Enfers, eft effrayé de fi 

mage feule des mordlces qu Hercule a dom 

ptez, quel héros neftoît point Hercule devoir 

attaqué ces montres mefmes & de h$ 

avoir débits ï Que produit cette peur âU 

ïyffe ï un fentiment plein d'humanité, il s ef m 

crie »

SUR L'ODVSSEE. Ltvre XL 3^ 

Jeftûis fils du grand Jvpher , mais m* 

ndfanee n'a pas empefchéqueje nayepa 

mes JûursJ Homère donne iey une iniînic 

mon indîreéle, qui me paroïft d'une grande 

beauté & dune grande utilité. Hercule eC* 

toit fils de Jupiter, & H na pas Jaifïc d'eftre 

atfhjcti à des traverfes infinies. Touie fa vie 

n'a eiié qu'un tïflu de peines & de travaux* 

Les hommes ordinaires, qui ont dans la vie 

quelques malheurs» oferoient-îls fe plaindre! 

fay ejlé fournis à un hûmme fm w t inférieur 

amey] Un ûls de Jupiter peut donc eftre 

fournis aux hommes- Grande vérité 6c em 

mefme temps grande leçon. M. Dacier m'a 

fourni fur cela une reflexion d'Eprdieie que 

[c trouve divine : Hercule, exercé par Euryf* 

thà3 m fi difok point malheureux* à* exe 

cutûh tûui ce que ee tyran luy ardûfmmt d 

plus pénible , h* t&y exercé par un Dieu qui 

efl ion pwe, tu cries% tu te plains, fr tu te 

imms malheureux ! 

En demkr lieu il me câmmanda de defcendre 

dans cet empire des mûrts] Pui£> 

qu'Hercule eftoît desja defcendu dans lei 

Enfers, Homère na donc rien fait d'extraordinaire 

ni d'incroyable en y allant def 

cendre Ulyffe* C'eft ainfi que ce Poète fçm 

de la vrâyfembiance de fa &Me. Cela e 

fort adroit. 

Page 2j9 3, Et peut-efire que j'aurois m 

PU

34^ RïMARQUïî 

Jk fatisfaéliûn de vûîr ces grands perfên* 

nages] Homère fait encore voir iey qu\l 

n'aurdil pas manqué de matière pour continuer 

cet épi Code sli avoit voulu f mais i{ fe 

cîontente de faire voir cette eran 

fans s'y amufef» 

N M envâyafl du fend de l'Erebe, la terri- 

Me tefie de h Gmgûne, fout Vexpofsr à 

mes yeuâf] Cela eft pîailânt» comme lï fombre 

mefme de la Gorgone avoit pu faire 

dans les Enfers ce que la Gorgone elle-mefme 

faifoit dans cette vie, qui eftoît de rendre 

immobiles & de convertir en pierres 

ceux qui la regardoîent* Maïs toute cette 

idée n'eft que pour dire poétiquement qu'il 

eut peur que ce fujet û agréable ne lama* 

lall trop longtemps, &ne lu y Bû oublier 

fofi retour* 

^La terrible tejîe de la Gûrg&m] Athénée 

dans fon liv. 5- nous rapporte un partage 

d'Alexandre de Myndcs du 1 1„ de fort 

hiftoire des Animaux , qui nous découvre 

i origine de cette fable de la Gorgone. Cet 

tiiftorien dit que dans la Libye il naiflbit 

%m animal, que les Nomades appellent G&r* 

gûne, qui reflcmbloit à use brebis fauvage 

ou à un veau, & dont fhaleine eiîoit û empoïlbnnce, 

qu'elle tuoit fur îe champ tous 

ceux qui Fapprochoient. Une efpece de crinière 

iuy tomboit du front fur les yeux, & 

1 pefante, qu'elle ayoît bjen d$ h pçine à

suit L*Opff SK'E. IâWS XL 341 

la fccoûer & à lefoirter pour voir. Marri 

quand elle Yuvoh efcartce » elfe tuoit fut 

theure îOQS ceux qui k regardoient 11 ad* 

joute qoe quelques foldats de Marïus en 

firent une trille expérience

Argument du Livre X » 

Tf Tfy$* ?$£$ïïte ma Rôy des Pheaciens 

*--^ èf aux Filmés de fa ceur cûmmem a 

fûft YâtûttY des Enfers il arriva PûUT la fe- 

cende fuis ckei Circé dans fijle d*j^ma ; 

eûmmem il efch$ppa à la Vûix meiedieufe 

&es Sirènes, if évita les Ruches mpuvantes 

Je Scylk ir de Ckarybde. Il fait enfmt 

k ** * fin *&*. ** I.U" 

*& /« Umpagnûtis cm matent tue quel 

ques-wts des bœufs cmfacrci au Sûleil j if 

il reprejente enfuïte les dangers qu*îl CûU*> 

rut dans ce naufrage > if la manière don% 

il fe fauva dans fijie de Calypfû fm WS 

/ortie du majl de/m yaijfeavg

8 

f iV£ 

*•* tf W W* 

^ i •• 

f 

ODYSS 

D'HOMER & 

LIVRE JCIL 

/ 

i \ 

UAN0 noftre vaiffeau eut * 

furmonté les courants du « 

tan ci Océan & qu'il eut agne la * 

haute mer, nous arrivafmes à ïiûe * 

d'jCsea f oà font les chœurs & les « 

danfcs de l'aurore & qui voit naif- « 

tre le foleil. Nous entrafmes dans « 

ïe port, nous tirafmes ïe 

et 

fur le fable, & ayant mis pied à * 

terre , nous nous couehafmes fur * 

ïe rivage en attendant le jour. Le * 

lendemain, dés que 1-aurore eut an- * 

nonce ïe retour du foleil, j'en- « 

Toyay «ire partie de mes Compâ- * 

F iiii

44 UOïïYssrt 

* gnons au Faïais de Circe pouy 

a m'apporter le corps d'Elpenor, qui 

:» eiloît mort Je jour de mon départ 

» Nous cowpafmes du bois pour le 

m bufcher, que nous dreiTafmes fur 

* un cap élevé qui avançoît dans h 

» mer, Qjuand le corps fut hrufïé 

» avec les "armes, hons enterrafhies 

» fes cendres avec toutes les maria 

quesd*unc véritable douleur. Nous 

38 ïuyéievalmes un tombeau, fur le- 

» quel nous dreffafmes une coïom- 

» ne 5 & nous pïaçafmes fa rame 

» fur le haut du tombeau. A peine 

» avions-nous achevé de nous ae- 

>y quitter de ce trille devoir , que 

» Cïrcé, avertie de noilre retour, aras 

riva. Eïle eHoit fuïvie^de fes femm 

mes qui nous apport oient toutes 

» fortes de rafraîfchiffements. La 

j - -m. 

si DéeCe scellant avancée au milieu, 

» nous dit ; Malheureux $ qui tout 

» vivants efîes descendus dans FEm 

• ê M 

* pire des ombres * deux fois vitfli 

5 JXk^s de la mort, au lieu que les au 

**•

D'HOMERE* livre XII 345 

très hommes ne meurent qu'une * 

; paflez le refte du jour à vous * 

re Jouir & à faire bonne chère ; de- ^ 

maîn à la pointe du |our vous vous « 

rembarquerez pour continuer vof- « 

tre route : je vous enieigneray « 

ïiioy-mefrae le chemin que vous «c 

devez tenir, oc je vous aonneray « 

toutes les inftruétions neceflaires, « 

înt que vous évitiez les malheurs & 

dont vous eftes encore menacez & « 

fur terre &: iur mer , & oà vous « 

me manqueriez pas ae périr par ce 

voftre imprudence. 1 * 

Elle parla aïnfl3 & nous pcrfiia- * 

a fans peine. Nouspaffafmes donc ce 

ie refte du four à boire & à m an* « 

;cr,

4

I- .4 

B s HoM£RE. LivrtXlL 347 

non$ * de peur qu'ils ne les en* or 

rendent. Pour vous, vous pouvez « 

les entendre fi vous voulez, mais « 

fou venez-vous de vous faire bien « 

lier auparavant à voïtre maft tout « 

e bout avec de bonnes cordes 5 « 

qui vous attacheront par ïés pieds * 

par les mains ? afin que vous

348 UOBYSS E'E 

» deux roches fort hautes contre ïef» 

» quelles les flots d'À m phi tri le vont 

» fe i>rifer avec un horrible mugif- 

J» fernent. Les Dieux immortels les 

» appellent les roches errantes. Lea 

» oyfcaux des deux ne voient point 

» par deffus, & les eof ombes mefmesr 

n qui portent i'anibrofïe à Jupiterr 

» ne tes panent point impunément, 

» car le fommet de ces roches ei* 

» abat toujours quelqu'une „ mais 

s» liopicer a. loin ci en envoyer iou- 

» jours une autre à îa place, afin que 

» fe Ji#mbre fbit toujours complets 

:» oï quelque vaïfleau en approche 

u malheureusement ? il ny a pîu§ 

a pour luy d'efperance ; il eft d'aho 

m fracaffé , & fes débris & les hom~ 

2j mes qui le mojïtorent,fent empor* 

?> te?, pefïe mefle par les vagues & 

& par les teinpeftes J méfiées de tour- 

» bîlions de feu, lï n'y a jamais eu 

y> qu\in feuï vaï/Teau qui fe folt tiré 

» de J ces abyfraes, c*cft la célèbre na- 

a "vire Àreo qui, chargée de la ôc^

D* H cm ERE, Livre XÏL 34^ 

des héros de la Grèce, paffa par-là * 

en revenant de îa Cokhide, où « 

jegnoit ïe Roy Aetés; & il ne faut * 

î douter que les courants ne m 

Peu fient portée contre ces roches* « 

ii Junon ne ï'euft conduite elle- » 

mefine, & ne Feuft fait paffer fans * 

danger, parce qu'elle aîmoit &pro-

o L'ODYSSE'E 

s* prés de-là fur fon vaiffeau , ne 

» pourroit pouffer fa flèche jufqu'à 

» fon fommet; paffez ïe plus viîh 

» qu*M vous fera poïïible, car c'efi la 

» demeure de la pernïcieufe Scylia3 

» qui pouffe des hurlements horri riè 

a& Mes; fa voix efl femMaMe au ru 

a> giffement d'un jeune lîon, c'efl un 

» monftre ai3freu3k f dont les hommea 

a& ni les Dieux mefnies ne peuvent 

» foutenir la vue. Elle a douze strif- 

» fes qui font horreur, fix coïs d'une 

» longueur énorme $ * Si fur chacun 

& une tefte cfpouvantaMe avec une 

» gueule béante sr^rnie de trois rangs 

» de dents qu'habite la mort* Elle a 

» la moitié du corps 1 eftendu àms fa 

» caverne f elfe avance dehors fes fix 

» telles monïlru eu fes 5 & en aïlon- 

» géant fes coïs efle fonde toutes Jet 

» cachetés de fa caverne, & pefche 

s> habilement les dauphins, les chiens 

» marins . les haleines mefmes 

» les autres montres qu*Âmphitrit: 

» nourrit dans fon fein. Jamais Fi

1 

D OMERL LivreXII 35F 

ote n 

7 

a pu fe vanter devoir paffé « 

impunément prés de celle roche ; m 

car ce mcmïîre ne manque jamais « 

c chacune de fes fix gueules ton*

^|2 L'O DYSSE'E 

* qu 5 il vous fera poffîble, car if vaut 

» encore mieux que vous perdiez fix 

» de vos Compagnons que de lei 

» perdre tous & de périr vous-mef* 

a» me, 

» Mais , grande E>éefle, !uy ré* 

» pondis-je, diies-moy, je vous prie3 

m û je fais tant que de m'éloigner d«s 

3i Charybe & d'approcher de Scylla, 

3 ne pourray-jc pas venger fur ecttç 

ai dernière ïa mort de mes Ex Cornai 

pagootis qu'elle arura dévorez î 

» À h, mon cher Ulyffe, repritm 

elle, quoy mefme enFellat on vous 

î» eftes, vous ne pouvez vous refou- 

» dre à renoncer à la Euerre & aia 

» travaux , & vous ne voulez p 

:*• mefme céder aux Dieux l S caches 

% que ce neft pas une créature ordîai 

naïre & mortelle que vous vous 

m propofez de combatre , mais lam 

» monflre terrible, inhumain, inviiif 

, » « « » , « « ! 

» cible & immortel; touie la vaïeur 

» humaine ne fçauroit luy refiiler 

a* Le plijs fgur efl de h dérober à

D'HOMIRE. Livre XIL 3^3 

fureur par la fuite. Car pour peu * 

ue vous arrefiiez prés cTeiie pour « 

rendre vos armes, je crains bien m 

[u'eïle ne vous enlevé fix autres « 

le vos Compagnons, & vous au- «* 

xez encore la douleur de les voir «c 

dévorer en voftre prefence* Paffcz; « 

ville, vous dis-je, & appeliez à 

la JL/eeiie i^ratee,

54 V OBYSSE 1 

» DéefleNécré troupeaux fans y toucher & fans 

5i leur faire aucun mai 5 & il eft fetiî 

» «pie vous arriverez à ïthaquej que 

s> ques traverfes que vous ayez à ci 

r 

s> fuyer. Mais fi vous y touchez ? ]c 

# vous prédis la perte certaine de 

» voflre vai/îeau & de vos Comparât 

irions- ëc fi vous elles affez heu 

» reux pour efchaper, vous n arriva m 

m ress chez vous qu'après un Ion 

» temps, CL après avoir vu périr tous 

» vos Compagnons Jufcju'au der» 

a» nier. 

s» Elle parla ainfi, & l'aurore vint 

» annoncer îe îour. La Déefle reprît 

» le chemin de fon Palais * & Je r 

» tournay à mon vaïfîeau. J'ordonne 

* à mes Compagnons d« Peinte =m 

mat

i 

i 

5 

qtier» de délier les caMes ik de pren* * 

drc ics avirons- Ils obéïiTent & fe * 

mettent à ramer* La beile Circé * 

nous envoya un vent favorable 

qui donna le temps à nos rameurs * 

de fe fbulager * car avec ce bon ** 

vent f Fadreffe lente de noïlre pi 

îote fuffit pour nous conduire. À m 

fors> quoy-qu*accabïé de douleur^ 

|e pris ce moment pour parler à * 

mes Compagnons. 

m 

Mes amis, ieur dis fe, il n*eft «r 

pas jufle que nous ne Cbyons îey 

qu 5 un ou deux qui fçachions 

avantures que Circé m 5 m 

a prédites 

n 

Je vais VOES en informer tous 

afin que, comme elies vous regar 

m 

dent tous également , vous en m 

îoyez auii tous également inf- « 

fruits, foit que nous devions tous « 

périr, ou que nous puifiioms efpe m 

rer d'efehaper aux dangers qui « 

ftous menacent- Premièrement îa «: 

éefle nous ordonne d'éviter ia « 

voix des Sirènes & de fuir loin de ^ 

«

356 UODYSSE' 

» la prairie qu'elles habitent. Elle n* 

» permet qui moy feu! d'en tendre 

» leurs chants f mais auparavant îj 

m faut 

porté du plaifir de les entendre, je 

m vous ordone de me détacher s garai 

dez-vous bien de m'ohéïr, & lieza> 

moy plus fortement encore* 

» Pendant que je leur parlois aîn fr, 

» nofhrc vaiiïeau pouiîe par un Bon 

m vent arrive à FMIe des Sirènes > le 

» vent s*appaife dans le moment, les 

^ vagues tombent & le calme règne. 

» Àuffitoft mes Compagnons fe lejà 

vent, plient les voiles, reprennent 

j& leurs rames & font efeumer ïa mer 

m fous l'effort de leurs avirons , Je 

m prends en mefme temps un grand 

» pain de cire, je le mets en pièces 

» avec mon efpée f & tournant ces 

» morceaux dans mes mains 7 Je les 

» amolis. La cire eft bientofl amolie 

» & cède à la force de mes mains &

D'HOMèRE. Livre XIL 357 

l la chaleur du foïeil qui eftoit fort 

grande. J *en remplis les oreilles de 

îixes Compagnons f qui après cela 

me lièrent par les pieds & par les 

mains tout dehout au mail du 

vaîfîeau, & s'eïlant remis fur les 

bancs 9 iïs recommencèrent à ramer. 

Quand noflre valïFeau ne fut « 

plus éloigné du rivage que de la «r 

portée de la voix, & que fans abor- *t 

Jer nous pourfuivions noflre rou- « 

, les Nymphes nous aperceurent, « 

à auffi-tofl élevant leurs voix, el- «c 

les fc mirent à chanter . a me « 

dire : Approchez de nous, gène- c 

n 5 reux Uïyfe > qui méritez tant d*é 

loges, êc qui eftes Fornement & la « 

gloire des Grecs % arrefiez voitre m 

vaifléau fur ce rivage pour enten- «r 

dre noftre voix. Jamais perfonne «e 

a ces lieux ïans avoir au- m 

paravant admiré ia douce harmo- « 

flie de nos chants. On continue fa « 

ïoute après avoir eu ce plaifir, n 

ce

L f O DYSSE'E 

après avoir appris de nous une îR 

J» imité de choies, car nous fçavçm 

* tous les travaux que les Grecs 

m les Troyens ont efluyez par la voi» 

tonte des Dieux fous les remparts 

» de Troye» & rien de tout ce qui fe 

*» paffe dans ce vafte univers ne nous 

» eft caché» 

m Voilà ce qu'elles nie dirent avec 

» une voix pleine de charmes. J'en 

a fus fi touché 9 que je vouiois ap- 

» procher pour les entendre* & que 

M je lis figue à mes Compagnons de 

s> me délier. Mais ils fe mirent à faire 

•B force de rames, & en mefme temps 

» Periniede & Euryloque s*eftant lem 

vez, vinrent me charger de non 

m veaux liens & m'attacher plus for 

» tement. Quand nous eufmes paffe 

» ces lieux charmants, mais trop dm 

M gercux, & que nous fufmes a 

& loin pour ne pouvoir plus entai 

m dre ni les fons, ni la voix de m 

m e n chan ter elfes, alors mes Qommnotas 

pilèrent la cire dont j'avo *.».'

OMÊRE. L 

bouché leurs oreilles 9 ik vinrent * 

me délier* Mais nous n'eufines pa 

ptuftoft quitté cette ifîes que j'ap m 

perças une fumée affreufe, que je c 

y\$ les flots s'amonceler & que j'en 

tendis Am mugifTements horribles m 

Mes Compagnons furent fi ef ** 

frayez, que les raines leur tombe .«•» 

xent des mains ; tous les environs te 

retentifioienc de ces mugifTements

|6a L'ODïSSE'E 

» prudence, par mon courage Scp^ 

» mon adreffe nous nous tirafmes de 

» ce terrible danger ; j'ay peine à 

» croire que cela foit Ibrti de vollre 

» mémoire, Exécutez feulement les 

» ordres que je vais donner, Vous, 

» rameurs, ne vous ménagez poîst 

» & que les lîots hlanehilTent fems 

*> vos rames ; Jupiter veut peut-eftre 

» que noilre vie foït le prix de vos 

» grands efforts. Et vous* Pilote, 

B puifque vous avez en main le gou- 

» vernaîi» ce que c eit a vous a nous 

» conduire , éloignez tou|our€ vof- 

» tre \aifïeau de l'endroit oà vous 

» voyez cette fumée & les Hots amon- 

» celez s ayez toujours la vue atta* 

» chée fur ïe rocher qui eft à gau~ 

» die , tafehez d'en approcher % 

*> prenez bien garde que les couxan ts 

» ne vous entraîfnent mfenfibleznent 

a> de l'autre collé, & que parla vous 

*» ne nous précipitiez dm$ une mort 

» certaine. 

» Ils obéirent tous avec un mer 

veilteu

yeiikux courage-, mais je me gar- « 

iJay Jbkîî de leur nommer Seylla, * 

e peur que ce feul nom ne les « 

jettaft dans k defefpoîr f & qu'a* « 

ban donnant leurs rames ils n'alïaf- * 

font tous fe cadrer. Alors je ne me ^ 

fcuviiis plus de Fordre trop dur « 

«jue Circé m'avoit donné ; j'en- * 

oïFay mes armes f ik prenant en * 

main deux bons javelots, je mV

•H 

*f* 

«t 

6% VOBYSBlft 

» faifoit retentir les rivages, êc Pe£ 

» eu me mon toit jufqu'à la cime de 

» ces afireux rochers, 8c quand die 

» les retirait, on etîtendok des mq- 

» ffïlïemcnts teiriMesf tout le rocli 

^ en retentîfToït, & l'on voyoit I 

» découvert le fable n oir de ces ahyt 

» mes* Mes Compagnons font faiûs 

» de frayeur. Pendant que nom 

» avions les yeux attachez fur cette 

» monflrueufe Charybde pour évi- 

» ter la mort dont elle nous mena. 

» çoit » la cruelle Seylla enleva de 

» mon vaiiTeau ûx de mes Comptas 

gnons quelle choïfit les meilletiïs 

a> & les plus forts ; attiré par le hruit 

*> je tournay la vue de leur cofté. Je 

& vis encore leurs pieds & leurs mains 

» qui s'agitoient en Pair comme elle 

» les enfevoït > & fe les entendis qui 

» m ? appeïïoient à leur fecaurs. Mais 

w ce fut pour la dernière fois que je 

a» les vis Se que je les, en tendis. Com- 

» me un peîcheur, qui fe tenant far 

* Ja pointe d'un rocher avancé, jette 

?! 

1»

5 H©MEmi, LwnXlL 

i&m la mer fa ligne dont il a garni « 

l'hameçon d'un appaïl trompeur, « 

aadeflbus de la corne qui iecouvre, « 

c enlevé un petit poiflon tout pal- « 

pi tant qu'il jette fur le faMe, £cylla * 

enlevé de mefme mes fix Compa- * 

gnons dans fon rocher & les de- * 

vote à l'entrée de fa caverne. Ces * 

malheureux jqttoient des cris qui m 

me perçoieut le cœur, oc fis me «c 

îendoïent les mains pour implorer * 

mon afîiitance. Vous pouvez juger a 

de mon eftat. De tout ce qui m'cil * 

mrivé de plus fenûbïe A de plus * 

affligeant dans mes CQurfes $, voilà « 

M que f ay trouvé de pïiis crueL «: 

nous eufmes paiTé ces m 

cruelles roches, Scylla & Charyh- « 

de, nous arrivafmes incontinent à «t 

rifle du Soleil ou paîffoient Jes * 

bœufs & les moutons dç ce Pieu. * 

Avant que, d'ahorder % J'entendis * 

h$ meuglements & les heflements « 

de ces troupeaux, Je me reflTouvins * 

abord de ce

$4 I/ônrsSË'Ë 

D devin Tireftas , & de Votera que 

mavoit donné laDéefleCircéj qu| 

m'avoit recommandé fur toutes 

3» chofes d'éviter fifîe du Soleil quj 

J » fait la Joye d%$ Hommes. Je me re, 

*> foltls donc de paîrîer à mes Corn* 

» pagnons quoyqae feuiTe le cceur 

* ferré de trifteffb : Mes amis, leur 

» dfc-jc * efcoiitez lavis que j'ay à 

*> vdus donner 3 & que les ^fatigues 

^ dont vous elles accablez ne vous 

» rendent pas indociles, J'ay à vous 

» déclarer les oracïes que fay receis 

^ de.TIreJïas & de Circé* Ils m'ont 

» orefonné d'éviter fur-tout Pîlîe du 

n Soleil qui fait ïa joye & le bon 

» Heur dm hommes , & ils in'on 

a> prédit que fi J'y entrais, il nous y 

» anivcroit à ton? un trésgfâitdmal- 

* "heur- Eloigncz-en donc fc Vaiïîèau 

3o ïe plus qull vous fera' poffiWe/ 

» , Ces paroles leur abattirent fe 

'» courage & les i-emplircnt de doua> 

'fctii- Euryîoque Te levant av 

» fictifmûon j me répoiidfr d u

D'HQMIrft*. Livre XÏL 3^5 

ton fort aigre : tJIyffê, vous elles « 

le plus impitoyable & le plus dur c 

4e tous tet kimpics » vous nulles • 

î^mais las de travaux* rien pe VOUS « 

çf il faut que vos entrailles * 

foient toutes de fer* Vous vi?yez * 

vos Compagnon* accablez; de font- «p 

ïalîîlu 

Bjeu o^cu;îajiimw» ot vous ne pou- C 

vez fouffirir qp'ïk rclafcheat à vue * 

îHe où ils touchent d&JA'» & où 9 

ils pottrroîejit tr

% â'empïre , que les meilleurs vaif- 

JO féaux ne peuvent leur refiûct , 

91 

m qu m perïiient tous * maigre le 

% Dieux mefmes, â l'heure qu'il e; 

» oHéïffons à la nuit, defcendons i 

nï terre* préparons le fouper prés do 

•» noÛm vaifleau fur le rivage. &dc- 

» lïiain des la pointe du jour nom 

* noùl remettrons m mer. 

» : Ce difeours fut approuvé de 

» tous fes Compagnons, Je reconnus 

» alors qu f un Dieu ennemi me pré- 

» paroît derioufêaux'ftiaïlieîâ^. Re* 

*> prenant doncf k parole, Jqïuy drs: 

» EuryFoqùe, je ne puis vous refî fier* 

a cir je fuis^feûl contre tdu^ M 

ai afaàf queitous abordions/prdmetm 

tez^ïhoy & confirmez -vc^fiê pro* 

* meffe par le phis grp# des fer- 

* méats, que%rau$ tïtfuveâ SUterr* 

» des Bœufs & des rrtôâtotis vâucim 

» de vous n*aura îa foîic d*en tuer 

m un feul, & que vous vous cohtea- 

* tereE de mang'er ïea pïWfilkms que 

* Circé îiorts-jt données* v

D 9 HoMERE. LivnXIL 367 

Ils jurent tous en raeime temps. « 

Ce ferment fait nous entrons dans «. 

ïeport » nous arreftons noiîre vaif- m 

{cm prés d'un lieu qu'arrofoit une « 

elle fontaine. Mes Compagnons * 

cfefcendemt & commencent à pré-

X'OBY.£&£K , 

m fe miroieuî & faifbieBt leurs dan 

» fe$. Là j'aficoiblay 'mes 'Çompa 

noH3v& I e fcwr dî^ Mes ami h 

» Mous avcwis dans BoUïevaïffeau 

» tontes les provifions de touche q\i§ 

* nous font aecefîaîres, ne touchons 

^ doue ni aux bœufs ni aux moutons 

w de cette ïfle, de peur qu'iï ne nous 

& arrive quelque grand malheur, car 

» ils appartiennent à un Dieu terri* 

m Me, au Soleil qui voit tout & qu 

w entend tout, 

>y ] i oucraez £se mfô paroles^ 115 me 

» pmmmm mut ce que je vouloir 

» La tempefle excitée par le veut do 

» niiâf commua un mois entier fin» 

ir ïtf defee f & à ce vent de mMy fe 

*r joignit le veut du levait qui xen^ 

» doit lu tempefte plus furietfie* Feu- 

^r daàtr çoe ities Compagnons ne 

ar îkaaqueareîîf ni de paiii ni" de vin, 

» îïs s'afritinsent de toucher aux trouar 

peaui: du Soleil > car ils 11e vouai' 

ïoiait que conferver leur vie. Maïs 

M quand toutes no» çmxvMkmsi iiueot

I 

3 

D'HOMftftf. UwiXîL 36^ 

confuméçs * alors fe dîfperfant par « 

necefîïté, ils fe mirent à chaffer & « 

à pefcBer à là ligne les poïflbns, les

x faim. Choififfbas donc païmî h 

» bœufs du SoIeiMos-pIuf beaux 

s» les meilleur?, $£ fmfoiw nn fïcrifîcc 

^ aux Dieux immortels & & iî nous 

» foîîimcs-alîcz heureux pour arriva 

» à ïthaqueiioftre dïerç patrie, nof- 

» tre premier £om lira Relever an 

» Père du |our MH bc&U'j^srapIe, qui 

*> nous enrichirons dâ~{[uaiuhé d'of- 

» frandes très JuagRificiii^. Que fi ce 

» Dieu irrité de ce que BOUS aurons 

» pris fes bcBUjfe v - veut faire periï 

^ noiîre vaifleau & que tous les au- 

» fïes JDieux y confentent f. faim 

*> mieux encore mourir au raîiieu des 

•» Jïots que de languir miferaMcruenï 

» dans cette ifîe dciextt & d'y cftre 

» cou fumé par la Eu m. - . 

*> l Ainlï parla Euryïoque * éfe cfi 

» pernicieux confeil mt ïoiié & fui- 

» vi* Sans ptrdre un - moment ils 

» vont choiftr dans les troupeaux 1« 

» hœuh les meilleurs & les plus gras, 

» & ils n'allèrent pas h$ - cherche? 

» Bien loin , car tomme ces bmi*^ 

é* 

*#

D'jtiOM E R Eï Livré XIf, j 71 

ïêfioîent point effarouchez 3 ils «c 

paiiToient prés de nofïre vaiffeau tx je re 

pris le chemin de mon vaî 

Comme j'approchais, une odeur « 

« 

Cf 

%

71 L'ODYSS 

» agreaMe de fumée de facrilce 

» rdp»îKtît autour de moy. Je K 

& doutay point de moi maiieur , 

» ni adfeftant aux Dieux * je m cfb 

criay arec de profoftdi fou pin; 

y* Gtmd Jupiter$ & totts les autre* 

i) Immortels cui Iiabh«z au il F0- 

& fympe, c*eft donc pour ma perte 

» que vous m'avez fait fermer 

a paupières par ce malheureux fom 

^ meil ; car mes Compagnons 

h venus audacieux & rebelles pa: 

* mon aWcticé, ont commis un ter 

X» 

z^ 

3» Jàn'mefme teïnps h Jbeile Lam- 

*> petïe alla porter au Soleil la nou* 

% veïle de cet horrible attentat de 

» mes Compagnons. Le Soleil oua 

tre de eoïere f dît aux Dieux: 

a* Gfand Jupiter , & tous fe autres 

* luèmorteis qui habitez aufli ce 

» ferilkîit Olympe , vengez - moy 

^ des Compagnons d'Uïyffe fils cte 

» Laërte, qui avec une infoïence S- 

» fflie de to*us vos cbafHmjents, OBî

D'HOMEat- Lhn JtîL 

égorgé ms& bœufs que je TOJOIS m 

toujours avec un nouveau plaïfir « 

quand fe rmmtoh na ciel pour ef- ce 

clairer les hommes, on quand je ^ 

ndoh du ciel fous la terre m 

à la nuit» Si ces « 

Ao*ir raire place â 

infoieitts ne portent Bîentoft la «r 

peine que mérite leur facrrlege* |e m 

defeendray dans TErebe & Je n*e£ « 

daireray plus que les morts» « 

Le maiftre du tonnerre ïny ré- « 

pond : Soleil, continuez de faire * 

part de voftre lumière aux Dieux, er 

& aux hommes qui font refpandus

374 

v L' OBYSSE J 

» très feveres réprimandes* Mais tout 

* cela n'appoïtoit aucun remède à 

» nos mmx9 les bœufs du Soleil ef- 

* toient tuez. Les Dieux ne tarde- 

» rent pas d'envoyer à ces malheua 

tcux dm fi mies de leur colère 

« peaux de ces Boeufs fe mirent à 

19 marcher; les chairs* qui rotififoieat 

» itir les charbons, commencèrent à 

» mugir; celles qui eftoient encore 

» ornes répondaient à leurs mugifle- 

*> ments , & nous croyions entendre 

*> les boeufs mefmesiÊx 

Malgré ces prodiges mes Com- 

» pagnons pafferent fix jours entiers 

» à faire bonne cîiere, & dés que Ju- 

» piter eut fait luire le feptiéme Jour, 

*> la tempefie, qui jufques-là avoit 

a» cflé fi furïeufe, celîk tout d'un 

» coup* Pour ne pas perdre un temps 

;» fi favorable» nous nous rembar- 

?> quafmes fur l'heure, & après avoîif 

*> drefle le maft & déployé nos voi- 

» lesj nous nous mi/mes en mer* 

» Pés que nous cufoics perdu F If

'ÏÏ0MIRE. Livré Xït 37 

lé de vuë,*que nous ne découvrions ^ 

plus aucunes terres & que nous ne «: 

pouvions phis voit que la mer EL ^ 

le ciel, alors Jupiter fit lever au « 

defTus de noftre vaiffeau un nuage oc 

iioir, qui couvrit tout à coup la

376 î/OfiYSSÊ'E 

li en fut esbranfié » une odeur

B*0oAtERE« Livre MIL 377 

uay au gré dc$ vents. Dans ce mo

378 L'ODYSSE'E 

5» & ombrageoîent tout cet abyfmet 

* Je desmiray donc ainfc fufpendu 

» en attendant que le monftre en 

m rejetîant les flots me renvoyait 

% mon mafL Enfin mon impatience 

» fut fatïsfaite, car dans le temps que 

» le juge t après avoir jugé quantité 

& de procès, quitte fon tribunal pour 

^ aller difner, Je vis fortir mon ma 

» de cet abyfme ; comme il palîbit 

» fous moy je me laiffay aller, je tom* 

» hay un peu à cofté avec un grand 

» Bruits & l'ayant accroché, je m'af* 

» fis au milieu & Je nageay avec les 

B pieds & les piains qui me fer voient 

3» de rames. Le Perc des Dieux 

* des hommes ne .permit pas que je 

m repaflafTe prés de Scylla, car jamais 

J» |e n'aurois pu éviter la mort. Je 

» fus porté en cet eilat au gré 

» ou habite la belle Cal y pfo} qui me 

» receut avec beaucoup die hou té &

£)' H O M E R E. X^r* A77. 2

«C MWMttSWWWMH MWttWSjH fcM 

REMARQUE 

SUR 

1/ODYSSEE D'HOMER 

L I V M £ 1 IL 

Fage / l Uand mftre vaîffhau eut fut* 

34flend 

depuis ïe tropique d'hiver jufigu'au poïe me* 

ïïdbfal » £fl% dït-il f fuand un eji fini d$ 

ce golphe $ meft encore dans l Océan s au 

Mm que quand un efi Jhrii de l'Océan, on 

fie peut pas dire qi/ûn entre dans F Océan* 

SdhcLtm,, la mer, ir mactrèç, /'Océan, efi 

tant jcy une feule if mefme chefe* A mon 

avis ceft embrouiller & obfcurtrr le texte 

au lien de Fexpïîquer. H ne faut poin* 

dtercher but de fin efïé pour ce pafTage,& 

il peut élire entendu tout fimpiement, il 

ne faut que le reprefenter le lieu d'où 

t/fyffe part % il vient des Enfers, ceft k dire,

jMÂRQ. Sun h f Oî>r$. Ih. XIL 58 r 1 

eu bout du monde, des lieux ou le foleî 

couche. Dans cette pente ïes courants de 

fOcém dévoient eftre 1res violents & très 

npldesf il fallut ïes lufffionter. Quand cela 

fut fait, qu f Uf yfTe eut quitté as mirants, 

«W ë'Mavo7û, il arriva au fin de la mer, ïmt 

f f3p& dtzhdômç, ceft à dire, qu'il arma en 

pleine mer* quV/ gagtta la hffîte mer. Cela 

me paroi ft fenfible. 

Nous afrivajm$s à fijle d*JE*$œ, ou font 

les ehpurs ir les danfes de I*Aurore] Ho* 

m ère cftoit parfaitement îfîft ru it du voyage * 

de Jafon dans le pays d'Êaea, c eft à dire, 

m fa Cokhide ou regnoît -/Eëtes père de 

Medce , car ïi en va parier tout à l'heure 

dans ce mefîne Livre. Comme Medée & 

Cïrcé eftoient deux lâmeufes ençhantereffes5 

fur cette conformité de mœurs & dû 

profeftion, il les fait parentes, Car il feint 

que Circé eftoît fbeur d'-Jïëies, comme î! 

fa dit dans le x. IJv- quoy-quelles fia 

taffent des pays bien éloignez , car 

habitait fur ïes coftes de l'Italie, & Medéé 

dans la Coichtâe au bout du Pont Euxin, 

Maïs comme îi n eftoît ni wayfêmbkble ni 

poflîble qu'XJIyfle à fon retour de Troye; 

fiant armé à h ville de Lamus, qui e(i 

or mies, euft efté de-là poité dans la Cotchide, 

Homère félon fa coutume déplace 

ces pays à fa fàxitaifîe» II tranfporte Mm& 

far les coftes d'Italie , au promontoire Cfc»

ceï, car tout ce qu if dit icy convient dans fc 

vérité à ce promontoire, & non content dr 

cela f il dépaïïe encore davantage ce pavs 

â'Mmz, ce promontoire de Cireeï 3 & je 

place «fans l'Océan. Deux choïês ky ont 

Jervi à faire tout ce remuement avec qu€|, 

que forte.de vrayfembjance. La premier^, 

la Tradition confiante

sus. IÔDYSSE'E. ZiVr*? ML 3S| 

fa clarté, comme H a transporté far lm 

coftcs de fa Campanie ies Gmmcriens da 

ofphore avec toutes leurs ténèbres. D'ailleurs 

ce Poète paroift parfaitement mûrmt 

des contes des Phéniciens. II va nous dire 

quUlyffeenterraElpenor, un de fesCompagnons, 

for le rivage de cette îïle à fa pointe 

du promontoire. Or il efl conflgntquil fut 

enterré au promontoire de Cïrcei, & que 

ce promontoire fut appelle de km nom El *v 

m?iût> Sur cela, comme Boehart Ta décou 9 

tert» les Phéniciens, qui voulurent rappor^ 

îer à leur langue tous les noms, dirent que 

ce promontoire n'efloit pas appelle Elpemr3 

du nom de ce Compagnon d'Uiyfîê, 

mais du mot Miblnoi% qui lignifie, uhi albefek 

lux mamtina , ou l'aube du jûur pa~ 

j tûijï* Parce que comme ce promontoire eft 

fort avancé f la première pointe de iaube y 

paroift, & îi reçoit les premiers rayons de 

l'Aurore. Cette tradition, dont Homère ek 

îoiî fans doute informé » luy a fourni cette 

idée desdanfes & des chœurs de FÂurore& 

des premiers rayons du foleil, & cette idée 

dt d'autant plus heureufe, quelle ne convient 

pas moins à la véritable JLaea de fa 

Coldùde qu'à Hile d^sca prïfe pour ïe promontoire 

de Circer. Car comme les Anciens 

a voient pris le Phafé, fleuve de la Cofciiide, 

pour les dernières bornes de ïa terre liabi- 

nhk vers i'Grient, JE%* qui eftoit la capl-

!£, 

% JS * #" 

talc du Roy J*£te§ fur le Pbafe 3 eftc prîfe 

Avec raifon pour le lieu où ie fetaii fe fevçl 

& par confèrent pour on lieu fitoé fqf* 

fOcean, pmÉû'ite con venotent ipe FOcéaa 

environne % terre- Cett pgurquoy Mil» 

norme a 

1 

AXTtVtÇ %£V0€® XMiMXUi W SftKaftto 

A k mUe 4*Ams eu Us tayâns ak fûîé 

yarmffmt dmns an Ut d k m fur ks imrds et 

4*Océan, ûh tilwda mtreMs h dkîn Jœfûn* 

,€cia prouve qtt f Bortie*e woit une profonde 

coatioîflance de l'Antiquité» & que» cûiijme 

îrabon Fa dlabfi en pïufïeurs endroits, fei 

Miens les plp eftonmntes «nt toujours 

rune venté pour fondement. 

nous couchafmes fur U rivage 

Comme ils eftoient arrivez im un jour de 

Orrai' chez tes Cimmer ieiu, Us retournèrent 

le lendemain du pays des Qmmerien* à 

XTirceï. Et ta nuit, qui fepara ces deux jours, 

&t remplie parce qu'il vient de raconter. 

w i «* JN&J/J 

Page 344. $)m$fûis viéMmêf de la msrt$ 

Le Grec dit en un feul mot ft&Smiu- E* 

ttftathf remarque que comme les longues 

ûntenes n£ couviepaent point à une 

pprfoiafl^

gyE I/ODYSSE'BL LivreXII 38j 

performe grave & de dignité dans dçs oeca* 

0oii5 ferïeufes, Circc ne dit qu'un fepl mof, 

finit iapIaifanterÎ€,eiçî/fl)«4Jtp fur cette douc 

mort. 

ige34

REMARQUES 

Jer* Ne dirait-on pas que cette image dHo *• 

mère a. eflé tirée de celle de ce fage Roy ! 

Page 3 47- Pc??# vous f ww pouvez k$ 

Le fage, qae les bons préceptes 

ont muni contre fappaft de h volupté, peut 

entendre en pafîant fe chant des Sirènes, 

pourvu qu'il ait eu ïa précaution de fe faire 

bien lier ks pieds & ïes mains, c*eft à dire, 

pourvu qu'il foit affeuré qu'il efl incapable 

de faire ni îa moindre aélïon ni ia moindre 

émarche contre ies règles de îa fageiTe, 

Les autres, que îa Philofopfiie n'a pas foulez» 

n'ont d'autre parti à piendrs que de 

bien Coucher les oreilles, ceft à dire, de fe 

mettre hors d'eftat d'entendre ce qui les 

perdroit infailliblement, 

Page 348* ïly a deux ruches fort hautes 

•cylla & Gharybde àfentrée du defîroit de 

îa Siaie du coffcé du Pefoie. Scylla fur la 

cofle d ? ïtaïref & Cbarybde fur ia colîe de 

Sicile. Par ïa description qu'Homère fait de 

ces deux roches, if paroîft qu'il cftoit inftruïtde 

ia tradition des Phéniciens, car l'un 

fut appelle Scylla$ du mot Punique fid 

qui fignïfie ruine, perte. Et l'autre fut appelle 

Charybde, du mot charûbdam qui fini 

fie abyjme déperdition. Dans ces ancre 

temps ces efdieîls efloient fort dangereux, 

à caufe de la qualité des vaîfleaux qu'on 

a voit alors. Mais aujourd'huy nos valffeau^

SUE L*ODltSS&% Lme Xît %%? 

fe mocquent de ces moitftref, comme dg§ 

Officiers de Marine me font âMkmé* 

Les Dieux immûrtels ks appellent ks f#« 

des errantes] Ceft , à mon avis, pour dire 

qu'en ks voyant de loin elles fembîent jointes» 

& qu'en approchant on les trouve fe* 

paices par le deftrort, ainfi il fembîe qu'elles 

aillent & viennent mais ce neft pas encore-là 

tout Strabon a fort bien vu quHomere 

attribue ïcy aux roches de Scyïfa &de 

c harybde ce qu'on avait dît avant ïuy des 

roches Cyanées, qui font deux petites iÛes 

vis-p-vis i une de l'autre à l'entrée du Pom 

u\in au Bofphore de Thrace, l'une du 

coflc de ÏAfie & l'autre du colîé de l'Europc 

& qui eft oient appeilées Symfkgades, 

paice qu'on difcit qu'elles s'approdioîenr §c 

feftoiffûieîit» apparemment par h raîfon que 

je \iens de dire. Homère, dit cet excellent 

Géographe 3 a imaginé ces ruches errantes 

fur ks ruches Cyanées, tirant toujours h 

fonds de fa fable de quelque hijîûire cûnnuë* 

Car il feint que ces ruches eftoimi difficiles 

fr dangereufis, cûmme en le difûh des Cyœnées 

qui çftolem appeliées Sympîegades p€Gt 

cette mifmi* Et ce tranfport, que le Poëte 

fait de ces roches Cyanées aux efciieîfs de 

Scylta &L de Charybde, eftoït d autant pïus 

ane, que îa tradition portoit que Jafon, qnî 

ftvoit piffé entre ces deux roches Cyanéef|

EMARQXTFS 

eftoit venu aufïï dans la mer d'Italie, & no 

mère a fuivi cette tradiîrorî» 

£* les colombes mefines qui partent tam* 

'hfûîfte a Jtipher, ne les paffem point impu« 

' miment] Cette fiction des colombes qui po^ 

' fent fambrofie à Jupiter & qui pafîent fin 

ces roches qui en abattent toujours quelqu'une, 

a paru fort finguffere & fort m)fxrieufe, 

& on a fort fouliartéden découd *» 

le feus. Je fuis charmée qu'une femme ait i 

première aprofcndr cette fiel ion, & quVli 

eu ait développé tout îc myftere Ceft ui w 

.iemme de Byzance appeïïée Mœro* Elle 

dit donc au rappoit d'Athencc, Jiv, lu 

thap. 12- que dans ïe vers d'Homère fe 

mot peUïaaes 3 qu'on a toujours expliqué 

Cûfoinbes, eft pour pléiades, pour 3es Pkn 

dzs iîlf es d'Atlas. Cette confteilatïon par (on 

' lever & par fon coucher marque les ladons, 

îe temps des femences, de ia récolte à de 

'la maturité des fruits, ceft pourquoy Homère 

a dît qu'elfes portoiept Fambiofie à 

Jupiter, car ce font les faifbns & la recotte 

' des fruits qui fournirent les libations & les 

lacrifices, Quand ïe Poète adjoute que ce! 

roches abattent toujours quelqu'une de ces 

- efloiies, c*eft une bjperboîe poétique pou* 

: 

$Mîe croire que quand ces eftoïiesfe couchent^fb 

ibîit ces roches qui à caufe de leur 

xceffive hauteur les ont abattues, & 

uand elfes reparoiffen^ c'eft Jupitei qu

su & L*OBYSSE'E. Livre Xi f L 38^ 

fabftituë d'autres, car leur nombre eft toa* 

fours compkt, TI faut avouer que cette ex* 

plication cft aufli ingenieufe que Ildéed'Ho* 

bere cfl poétique, EJîe eit mefme d'autantpîus 

vrayfemblable, que Sîmonide, Pfridare, 

EfLhyïe &Theocrite ont dit comme noftrc 

Voêlc pdemdes pourpleïiïde*» Je fçay bien 

que Bochard a prétendu quec'eft une&bïe, 

Phénicienne née des mots kemau Se emam*. 

dont ïe premier fïgnîfie des colombes, &, 

l'autre P un preftre , «ne prejhefe* Ain(i~ 

qmnd ils difolent que des colombes nourri 

(hknt Jupiter, ils partaient des preftret le* 

des preftêffes qui lay offeoient des Ôcrifi~ 

te*, que l'Ëfcriturc Idinte raeûne appçffe Ii 

viande » fa nourriture de Ûieu * cïbum J)eîm. 

Maïs de cette manière que deviendra fe. 

rode de h fiélîon ! Comment ces roches 

abattent-elles de ces preftrefîbf, ik comment 

Jupiter ea fiibftîtuë-t-if d'autres en km pi®*ce? 

Ii faut que cela demeure fans explication, 

à moins que I on ne dife qu'Homère. 

a joint les deux idées f comme ce font les 

Picfades qui nourriflent Jupiter par les raîfonfi 

qu'on a fuës 5 il les a appeliéefi peJeïa '** 

des, calomèes, en faifant aHufîon à l'équivo -d 

que Phénicienne, & en la confirmant met 

me dms fa langue, car h mefme équivoque 

qui eft entre ktman 3 cohmBes , & emam t 

pïïfîrefe$p eft entre pléiades àipeléïades* 

Ainfî ii ne faut rien changer dans la Ta- 

R iîï

| po REMARQUES 

duélion* Je fuis eïtonnée que Longm aî( 

tmtté une fiélïon fi grave & û nobïe de 

nÎÉÛiène qui marque laffoibiïflement de Tçfprit 

d'Homère* Cette critique n'eft pas tfi. 

gne de luy. J'en ay parié dans la Prc&c, 

C#/? £z cekhre navire Argo, qui chargée 

de la fleur des herûs de la Grèce] J ay voulu 

rendre toute la force & toute 1 eflenduë da 

fem que renferme fcpitliete qu'Homes 

donne à la navire Argo mzm/AÂKx&tL, pro 

prement, qui fdt k foin de tout U monde ^ 

ce qui lignifie demu chofes, qui efl cehhn 

par tout le monde, & à laquelle tout k mon* 

de prend imereft* Comme elle portait k 

fleur des héros de la Grèce, tout le moa 

avoit intereft à h cooièrvation. 

Page 34P* Si Junûti ne teufl conduite] 

Car J Linon cflant la pa trône dei Roys, elle 

lie pouvait pas manquer d'avoir foin d'un 

vailîeaii qui ponoit tant de Princes. D'ailleurs* 

comme Junon écû l'air, Homère au 

poétiquement que tes Argonautes eurenï 

an beau temps pour pafîer ces roches, Apolïodore 

dît que ïa navire Argo elchapa par 

ïe iecours que Tfaetis & les Nercïdes luy 

donnèrent à la prière de Junon. 

L'un fur te fa cime jufqu'aux deux ], ta 

peinture que lait Homère de ces deux Jfo-

su H L'ODYSSE'E. IMWXÎL 39 r 

cliers comme de deux monftres affreux font 

admirables. Maïs, dit-on # tous ces épifbdes 

de Circc, des Sïœnes, d'Àntrphate, de Po m 

lypheme, de Scylla &de Charybde font-ils 

vrayfemblablcs J Le merveilleux doit re-» 

gner dans fe Poème Epique, ceîa eft vray* 

mais if ne doit pas deftruire la viayfêmblan* 

ce, quoy-qu'il pafîe ïes bornes de la raifort 

Ariiîote nous donne une règle pour juftï-* 

Iref tous ces endroits f & pour nous faire 

entendre h grande adreJîe cfHomère- Là 

Fuite, dit-ilf dét plufîûfl chûifir les ckêfes 

impoffièles # pûwvu qu'elles fuient wayjem- 

MaMes, que tes poffibles qui font incroyables 

mec tûiits leur pa0èiBté* Poltîq. chap. 1 j * 

Je ne fais qu'employer ky la Remarque de 

M- Dacier fur cet endroit de la Poétique. 

L'Iliade, l'OdylIce & l'Eneïle font pleines 

de diofts humainement impoffibïes, & qui 

ne laiflent pas d'élire vrayfemblabfes. Ôr 

i y a deux fortes de ces impoflibilitez qui 

fcnt pourtant dans les règles de la vrayfemfcfance. 

Les premiereSj qu'on peut appdfer 

If s plus grandes & les p!ui incroyables, font 

celles qui exigent toute la vrayfemblanœ 

Divine, comme le cheval qui parle dani 

l'Iliade, la metamorphofe du vaiffeau d'Uîyflê 

en une pierre dans i'Odyilce, & celle 

des vatflèaux: d'Enée en autant de Nymphes, 

dans l'Enéide. Cefles-Ià ne doivent 

s eftre trop fréquentes dans le Foëme, & 

m]

3f A REM A * QU I s 

un Poê'fe ncn dort pas abufer. Les autre* 

font celles qui eftanî iitipoflfbfesfneIai/]çni 

pas d'eftre vrayfembïablçs humamemern, 

lbit par elïes-mefmesf foît par la crédulité de 

ceux à qui onies débite* 

Ceft de cette dernière manière qu*Ho* 

mère a fait rentrer dans h vrayfembfaiiçç 

humaine ce qui nefl point vrayfêmbïahfç 

humainement comme fhrftoire de Grec, 

d'Antiphate, de Foîypheme, de Scylïa, de 

Cfaarybde» des Sirènes, &c. Car Homère a 

ifeint très ingenîeufêment quUlyffè débite 

ces avâîitures aux Pheaciens, qui efloient 

des peuples fans efprit, /impies & creduics, 

M qui plongez dans une grande moleffe & 

daiis une grande oyfiveté » n'aim oient rien 

tant que les fables. Ce Poète nous a mar* 

que par avafice le caractère de ces peuple^ 

en nous avertîlïànt au commencement du 

ïiîv. v i. quV/i- haèîtûtént loin des demeures 

des gens d'efprh* Maïs comme cette vray** 

femMance, qui fe tire de la ïîmplicïte de ces 

jpeupfes, ne devoir pas difpenfer œ Poète de 

eonferver dans ces mefmes ikhlcs une autre 

forte de vrayfêm bîaoce pour ies Ledeurs 

raîfonnables & pour les fçavants, ceft à quoy 

il a pourvu avec beaucoup dadrefle, en cachant 

des veriiefc phyiîques ou morales fous 

ces allégories miraculeufes, & par-là il a ré • 

dtiît dans fa vérité & dans îa vrayfemblana 

poétique toutes ces merveilles* Horace l'a

SUR I/ODYSSK'E. Livre XIL 313 

voit bien compris 3 car il les appelle des 

fnir actes efclatœMs* Art. poëtïq, y » 14.4* 

* # • L£ Jpeciefa dehînc mkaeuta pr#mMs 

Jlntipkaten f Seyliamque, it mm Cycbpe 

Charybdki 

ion gin les appelle des fûnges f mats des 

fanges de Jupiter, Euftathe a fort bîeo parié 

fur Ja beauté de cette Foëfie. 

Dmt i'ûuverture eft tûtimée vers te c$u* 

{liant &* vers tErebe ] Ceft à dire, vers 

I Empire des Morts, & c f eft pour faire eneedre 

qu'on ne peut paflèr prés de4à fans 

fc perdre. 

Page 350. Ni tes Dieux mefmes n& peuvent 

fautenir la vue ] Ceft une hyper bofe 

poétique pour rendre îa chofe plus terrible. 

If pefche habiteinent les davpftws, les 

ihïens marins] Polybe avoît fait vorr qu'Homère 

en deferivant cette pefche de Seylla, 

a m vue une pefche qui je faifok effectivement 

dan$ ce deftroît p**c$ de cette roche, 

qu'on appelïoit h pefche des Gakates, ou 

chiens marins, On peut voir Strabonliv. i« 

qui rapporte la deftnptkm mefine que ce 

grand Hiftorien en a voit faîte , & qui a 

beaucoup de rapport avec ce qu'Homère 

dit icy. 

Page 351. Un y wit un fguîer fatwagê 

R v

94* HïMARQUES 

tient tes branches chargées de feuilles] Ç^ 

pardcuîarîtez, qui ne paroiflènt d'aucun 

conséquence, fervent beaucoup à Ja vray, 

ïêmblance , & font croire que ce qu'on dj£ 

n'eft pas une fable, mais une écrite. Car qui 

cft-ce qui s'aviferoit de placer-ïà un figuier 

fhiïvage s'il n'y eftoït pas effectirenient l Homère 

fe fen admirablement de cette adreflè. 

Je l'ay desja fait remarquer ailleurs. Au 

refte ce figuier n T eft pas imaginé icy en vain, 

If fera d'un fort grand feeours à UJyiTe. Le 

Poète dit que fes branches font chargées & 

feuilles, pour faire entendre que ïa faifon 

îi'eftort pas encore fort avancée & qu'on et 

loit en automne, comme je Fay desja dit. 

Car chaquepur eîk its engbuth par mb 

fuis, if par très fûts elle les rejette "j Serabon 

h îert avec raifon de ce pafTage» pour 

faire voir qu*Homere a connu Je flux à reflux 

SUR L'ODYSSE'ê- Livre XII 395 * 

viflc (jtd a mis ie*V» trois fois,pêtir Sïuèm& 

fois, eu un ôubïn On pourroit croire aufli 

que e eft une exagération de la Déefle, qui 

pour rendre la chofe plus terrible arîjome à 

fa verîté. 

Tafihei piujfûji de pafper du c&fiê de 

Scyila ] Ceft à dire, qu'au paflage de ce 

(tcflroït iï vaut mieux coftoyer l'Italie que 

h Sicile, parce qu'il y a moins de danger. 

Page 352. Né f$urmy-je pas venger fur 

cette dernière la mûït de mes fix Campa 'm 

gnûnsf] Voilà toujours le héros qui ie dé w 

clare- Grec a beau Iuy dépeindre le pïus 

affreux danger, il cherene à l'affronter pour 

venger fes Compagnons, Auffi la Déefîe ne 

manque pas de relever cette intrépidité & 

cette magnanimité d'Ulyfle. 

Page 3 Ç3- Appelle^ à vojtrc fecûurs I4 

Dêcffc Crâtie] On prétend que cette Déeffe 

Cratée eft la mefme qu'Hécate; or Hécate 

eft la Dédie des forciers & des enchanteurs* 

elle prefîde aux enchantements & aux for» 

tikges. Je m'imagine donc que ïorfque Cir* 

ce dit à Uiylîe que pour efchapper à ce 

monftre3 il faut recourir à celle qui fa enfanté 

, elle luy dit énîgmatiquement que 

comme ceft la magie qui forme ce monftre, 

cfeft aufli à la magie à laffoibJir & à en ga* 

tmûu Cette magie > c'eft la Poëfie d'Ho* 

TTk * *

39& KIMARQ0ES 

mère, h plus grande enchantere(fe-qur fa 

jamais, cfîe crée des monflres, mais quand 

eîïe eft bien entendue, elle les dcftruit, ou 

e!fe les affoibitt, car quand on fepare la vç, 

rite d avec 1 enchantement que Fan y a acL 

fotité, ces monftres n'ont plus rien de u* 

doutât le* 

Où paijfent un grand nattére de bœufs 

iy* de monta fis ] La fable quTfomere conte 

îcy de ces troupeaux immortels confacre?, 

au fcîeil, efi fondée fur deux veritez confiantes. 

La première» qu'il y avoit dans ces 

anciens temps des troupeaux entiers qui et 

toîcnt confierez aux Dieux, & qui par~Ià et 

toient faarez & in viola bfes; Ôc h féconde, 

5*UR L'OOYSSI'E. LÎVTÊX1L 3£pr 

facrîâer le bmé qui fervoït au kooii* 

rage* 

Xtf fo/jfe Phaëwfe if la charmante Lam-> 

pttfilL'une eft pour figoîfter la lumière du 

Soleil, & fautre îa lumière de fa Lune, ce 

font les deux bergères de ces troupeaux, 

rce qu'il* paiflbient & le jour & la nuît- 

!es font Mes du Soleil & de h Dédîe 

HUxêT qui fignifte hjeunejjï, parce qu elles 

ne vieHIiflênt jamais, & que la lumière cft 

toujours Ja mefme & a toujours le raefoie 

t 

Page 35+- La Dée$e reprit le c 

Jm Palais, & moy je reiûwnay à mon ym(~ 

feott] Homère ne sarnufe point icy à rapporter 

les adiemede Circé &cTUIyffe en h 

feparant- 

Page j 5 5. Un nemfavûrabk qui dmna 

h temps à ms rameurs de je fmlager] it 

n'ay pu conferver le terme de J'originaf, il 

a fallu me contenter d'en rendre !e ïëns. Le 

Giec dît i NûUS effîûya un vent a plaines 

wiksi brave cûrnpagnm* iS^hm iwupev. Et 

eda eiî ïieureufcment dit, le bon veitt eft 

un bon rameur & vaut mieux qu'un grand 

nombre de rameurs, 

Je pais vans en informer tmi\ ïi y a pourtant 

une chofe qu il leur cachera. II ne leur 

dira rien de ce que Circé luy a prédit 7 que 

Scylïa luy engloutiroit fix de fes Compagnons 

, car cela ne fer virait qu'à les jette? 

dans le deiefboîr.

39 B RE Al ARQUES 

Page $$y. £i aufli-tûft élemnt leur vûi ^ 

elles je mirent à chanter j Car ces bonnes 

perfonnes cftoîent fort levantes & grandes 

mufîcrenne& Et c'efî ét4h mefme que)les 

ont eftc appelles SITûLCS, Car félon Bu*. 

chart /r eft un mot Punique qui ligmriç 

chant, de forte que Sirène lignifie propre 

ment un monfire qui chante, manjîrum ca* 

iiûrum* Ce qui contient fort bien aux personnes 

dont îl parle. 

Apprûchei de mus, généreux Ulyffe] 

Elles nomment Uiyffe par fon nom, poux 

ïuy faire voir qu'elfe fçavenz toutes chofe, 

Homère veut monftrer par-là que IaPoèfe 

cft une divination, une inipiiation. Ij y g 

un naturel merveiikox dans ce chant "des 

Sirènes, & on doit appliquer à h Poèfie 

d'Homère ce que ces Nymphes difent de 

leurs chants, Jamais petfonne fie les a entendus 

fans les admirer , i? [ans y mât 

appris une mftwté de ckûfes* On peut voir 

fur cet endroit une Remarque de AL D*v 

eîer dans fes Cemmeniaïres d'Horace, epjft* 

I i. iiy, i. tom. 8 - pag* i 5 6* Je n'en rap* 

porteray que la fin. Qceron efldt fi teuchi» 

dit-il, de la beauté de cet endroit, qu'il l'a 

Vûuhi traduire dans fen j , liv. de fini bus* 

ûU il mus fait remarquer une grande adref 

Je du Pûètc 3 qui voyant que Ja fiéihn ne 

ferûk jamais appreuvée s'il faijûk qu'un 

au$ grand famme quUlyfe pufi eftre rc*

SUR l/O DYSSE'ë, IdWâ Xlt 39 

tâimpar la feule douceur d& quelques petites^ 

thanftns, hy fait prûmettre la feience » qui 

fans miracle pomok faire oublier a Ufyffe 

l'amour qu'il avûit petit fon pays, car il n'y 

$ rim de fi fart dans Vejprit €ks hommes 

que la curiûfité £r l'tnw de tout ffavoir* 

Aurefte, fi quelqu'un veut fè donner la 

pefne de conférer la Traduction, que Ciœron 

a fi f ce en vers de et pzffkge d'Homèrev 

as ce les vers de l'originaf, fe fuis prefque 

feare qu'il avoiîcra qu'il eft difficile, mefme 

aux plus grands hommes, car quel plus grand 

homme que Cîcer©n ? de traduire en vers* ce* 

excellent* originaux, & doppofer Poëiie à 

Page 358- Pour ne pouvoir pàcs entendre 

ni les fons, ni la VûîX de ces enchante-» 

nps"] C'eft ainfî, à mon a¥iss qu'if faut expliquer 

ces deux mots du texte ovM $%fyitCi 

tiJi rto/JBf. p%Fyn fe dît du fon desïnftroments, 

& atâiiïi de îa vok. Car de ces Sirènes, 

Tune chantoit, f autre joïioït de la flûte, 

à h troïfiéme jouoic de ïalyre- Harum ima 

wee, altéra téiis, alk lyra c^mkat : dît 

Servms. 

JPÎes amis, nmis ne femmes point novices 

afamenir de grands maux] Naturellement 

îf auroit fdïu dire» mes amis* leur difûis-Jë§ 

i?c* mais Ulyfle fupprime ce mot leur di» 

fots-je, qui fàil languir Je ûïfcoms. Homère 

Raccommode toujours au temps f &> btest*:

ôO RlMAE(8tJE5 

oin d'employer des paroles inutiles, H ^ 

retranche à propos de necdTaîres pour fui, 

vre le mouvemeni de celuyqnli fait parier. 

Ce difcours d'UIyfle eft parfait, il y a une 

grande éloquence dans ce qu'il dit, & beaucoup 

d'adrcfle dans ce qu'il fupprrme. 

Page 3 £o. Par ma prudence, par mm 

cmrage If par mon adrsjfe nous nctis ur^f 

mes de ce terrible danger'] Plutarque en 

parlant des occasions où H cft permis ans 

grands hommes, aux hommes tfeftat, cjui 

manient de grandes affaires, dcfe louer & 

de parler magnifiquement d'eux-mefnies., 

n'oublie pas celîe où Je trouve icy Uiylîë, // 

vûit, dit-d f fes Campagnmis effrayez de h 

fumée ir des vagues, $* du grand bruit qui 

fendent des gaufres de Charyde &* â§ 

Seylla, Il les rafieure en ks faïfant rcffiu* 

venir de fa prudence% de fin courage ir de 

fan adreffh qui luy meient fait tramer de fi 

grandes reffburces dans des dangers encore 

plus grands. Ce n'efi pûint par vanité quM 

fi donne ces grands élcges, c'efifûur tendre 

ie courage à ceux quii voit ejfûnnei, if il 

km derme fa vertu p fa capacité, fin CûUTU* 

ge pour gages de la confiance quils déveni 

avoir en iuy* Voilà comme parfe un homme 

fenfé* J ay donné à cette matière un pïus 

grand jour dans mon Traité des Caufis de 

h Corruption du Gcufi, pag, i i é. &c»

Bv R l/O BYS S E'E. Lme XIL 4 o i 

Eiûi^n^l tûîijâurs vejlie vaiffeem de Feft* 

drdt où VûUS Vâyez cette famée] ÎI veut qu'iii 

s'éloignent de la roche de Chai ybde qui eft 

à fa droite fur la cofie de Siofc , & qu'ifs 

approchent de Scjifa qui cfl à la gauche 

far la cofte d'Italie* 

Page 361. Alors je ne me fomins puis 

ek l'ordre trop dur que Gxcéfmoït donné, 

j'mdûffay wes armes ] Circé luy a voit dit 

de ne pas prendre fes armes contre ce monflw 

de Seylfa, parte qu'il efloit immortel & 

invincible. Maïs un héros oublie cet ordre, 

à ne fait que ce que luy infpire foti courage, 

qui veut qu'il fe mette en efïat de de£ 

fendre fes Compagnons menacez dqn Ci 

grand péril. II k met mefeie à fendroft le 

pîus expofé. 

Quand elle les rejettoit, le hmilànnemeffî 

de ces eaux, [emhlable a une eme preffée 

par un fiu viûlemj Je yoy que ce paflâge a 

fait de la peine aux anciens Critiques f car 

pour i expliquer ils ont vcmîii violenter les 

termes, II n y a rien de plus naturei que ce 

qu'Homère dit icy. H attribue la eaufe du 

flux & reflux de k mer à Charybde. Ex-» 

ptïquons ces termes afin qu J il ne refte aucu»e 

difficulté, to&wl** quand Carybde 

ïejete, revûmit les eaux» ccâ a direa dans Je 

ux, lorfque h mernaonte, c'efl alors que 

Ses \ague* ^élèvent jufqua la cime des rochers 

de Scylla ? car la mer s'cïevc fur la

• 

'40S R£MAEQUE$ 

colle 3 & alors fe bouillonnement de ce3 

eaux eft fort bien comparé à celuy de I can 

dune cuve que le feu fait monter & déborder| 

voilà le flux. $T* av&€po%m, ferfquç 

cette me/me Charyède attire èr engbutit k$ 

eaux quelle avok revomies. Ceft à dire, loifque 

!a mer s'en retourne, qu'elle deicend & 

fe retire, alors on entend des mugiflememi 

horribles, & le labié des environs de Scylîa 

paroifl à découvert t car le fabïe ne paroift 

que quand h mer fe retire. Et voilà le re* 

flux fort bien explique. Il faut toujours fe 

Convenir qu'Homère parle comme tous tes 

iieux eftant dans l'Océan. Il n y a rien de 

plus fort ni de mieux peint que tous ces 

tableaux, & on ny apperçoit nullement la 

VJeiiieiîè d'Homère. 

Page %6z* Attifé par le h uîuje tourna? 

vue m tûftê de mes Compagnons ] Car 

comme il efloit fur h prouë & qu'il a voit 

toujours ies yeux attachez fur la roche de 

Cbarybde, il ne %oyoit pas ce qui le paflbil 

derrière lay» 

Comme mi pefckmr, fia Je tenant fur k 

pointe d'un Tâcher avancé] Cette comparaison 

douce empruntée d'un art agréable & 

employée pour une avantme horrib!e3 fait 

ïey un très bon effet» & adoucit heureufement 

le ton atroce qui règne dans cette 

narration. Homère fçait varier fes tous avec 

une adreffg merveMIeufe*

sua L'O^TSSë'ë. Livre XII 40J 

Page 363* Dont il a garni l'hameçon 

dm &fF#ft ttûmpeur au deflous de la corm 

mi k comte ] Ce paflâge eft aflcx expliqué 

par ce que j*ay dir fax un paCage tout fem* 

friable du scxiv. Ov- de riîiade» tom* ^tf 

pag- 594. 

JN&J/J arriva/mes incontinent à fijk du 

Sûkïl ] C'cft à dire en Sicile » du cofté du 

Peîore aux environs de Mcflmc 

if k plus dur de tous les hommesj Homerd 

eft, f€ croy, le premier qui ait trouvé fait 

de faire fervir Jes reproches aux plus grands 

éiogcs. Ce qu'Euryloqtte en colère dit îcy 

a \Jl\ffc renferme un éloge parfait. Et or* 

éloge qae fait un homme en colère ne peaï 

pas élire foupçonne de faux. Nous awns 

vu un exemple fêmblable dans le m. Lîv. 

de niiade où Paris dit à He

4.O4 KEMÀHQUlS 

en vue quand il efcrïfoit» $d%i$, vnç %mî*ç\ 

Fondant qu'ils purent conférer leur vie, 

^ns toucher à ces troupeaux, ils obéirent I 

Ulyfïê, mais des que les pro?i/ïon$ leur 

manquèrent, & qu'ils fe virent en eftat de 

mourir de faim * la tentation fut fi violente, 

qu'ils ne purent y refîfler. Cependant cette 

extrémité ne ïes juftifia point* Ji n'y a poinî 

«feftat qui difpenfe d'obéir aux ordres des 

Dieux* 

Page 369. Les pêiffbns, ks ûyféaux mu •m 

fins] Ces ûyfeaux marins peuvent cftre re

Sflït l'ODtSSE'E* Livre XIL â^$ 

Pieu aime mieux l'obéïiTance que ie lacrifrec 

Homère connoiffoit bien ies homme?, 

fis cherchent des ^étestes pour autorïfts: 

leurs crimes f & ilê le fktent que Dieu fen 

fàûsfùt de ces vaines couleurs. 

Aux Dfeux hnmûruls\ Il ne veut pas ftaîScr 

au Soleil feu!» mais à tous les Dieux, 

afin que les autres Dieux gagnez par ce fecrificc, 

soppofent au Soleil s'il veut les punir- 

Nû/ire premier foin fera d'élever au Fere 

du pur un beau temple] Apres avoir tafché 

do gagner tous les Dieux par un facrifîce, il 

veut prendre le Soleil mefme par fîntereiî» 

il iuy voue un temple, car tout eft à bon 

marché pour les hommes quand il ne îcor 

en coate que des vœux pour fatîsfgire leur 

pafiion. 

Qtic nous enrkMrons de quantité d'of* 

pandes très magnifiques] EuftaLhc a fort 

mm vu quicy aj&hjLtwk ne Irgmfie pas des 

ïhmés, niais des offrandes, dw t )iijMLl$L qui 

font les ornements des temples, car UJôCAJIAA 

fignific dyoihhmjiMLfgL, dy?M?jw&%£> toutes 

les ebofes dont on le pare, comme dans ce 

paflage du iv« Lîv. de i'Iiiade, où en pariant 

de fivoyre teint en pourpre, Homère 

dît, (hùL&fhnt KJk!*mj{ ày&&tÀ&* 11 efi refervë 

pour (a parure d J tm Éûy, Sur quoy fiefycliius 

a très bien dit, él^&hÂ, Tm ïf *ï ^

406 REMARQUES 

ysL hpo* fignifie tout ce dont on fi pare > 4 

non pas une fiatuè, eemme on l'empbye #, 

eMnakemmt* * 

Page 37r» £f commeilsîiavoientpoint 

d'orge peut le confacrer > félon la coutume f 

?£r prirent des feuilles de chefné\ Quand on 

manquait de quelque choie neceflafre pour 

le (kctlfizt, on y fuppleoit en faifant fervir an 

jnefme ufagejies choies iesplas commun^ 

uonavoitfous la main. 

Page 3 72. £n mefme temps la bel fa Lampette 

alla porter au Soleil la terrible no-u 

voile J Fuifque le Soleil voit tout, queft-i! 

befoin qu'un counier aiJIe ïuy porter cette 

nouvelle l Mais ce courrier nefi autre que 

fa lumière mefme. 

Vbngei-moy des Compagnons d'Utyfjï 

fils de Lûërte 1 Le Sofeîl prie les autres 

.Dieux de le venger, parce qu'if ne peut pas 

je venger ïuy-mefme,car il n'a d'autres armes 

que fa-lumière & fa chaleur, qui Ïuy 

Ibfit Inutiles contre ces facrijeges. 

Page yy$m Je fiefetndray dans l'Erehs 

ir je îiefclairoray plus que les morts ] Ce 

pafiage me paroift conuderable. II fetnble 

qu'Homère avoit attendu parler du miracle 

de Jofué, ïorfqu'à fa paroie le ibfeil s arreiïa 

au milieu du ciel. Stetit itaquefol m medio 

pjffSi i? nonfifimmit occwnfere jpatîû unius

sua h*ODYSSéE, lim XIL 407 

iiê* J°^- l °* 1 3 m $ l ^ € *^ € ^ P cut s ' arre fl e f 

un jour entier au haut du del, ne pourra* 

£4I pas s'arrefter aulïl fous la terje ï 

Et cette eomerfaûon des Dieux, yV l*ap+ 

ms de la bette Catypjc\ II faut que dans le 

*pocme Epique il n'y ait rien fans fondement. 

Ce qu'Ulyflê rapporte îcy de cette 

convention des Dieux auroit paru une fa* 

blc incroyable & hors de toute vrayfernblance, 

s'il n'avoit dît de quri! la tenoit f 

car Ufyffe ne pouvoît pas eftrc informe par 

ïuy-mefinc de ce qui fe paflok dans le cieL 

Vodà pourquoy îi nomme tes auteurs. El 

par cette adreffe le Poe le donne à fa fable 

tout fair de la verrïé. 

Qui me dit la unir de Mtrcare me/me J 

Car Cafypfo* toute Déeffe qu'elle eftoîr, ne 

pouvok pas fçavoir cette converfiuron , û 

quelqu'un des grands Dieux ne ïa luy avoifc 

apprîfe. 

Page 374- Les chairs qui wûffmmtfw 

ks charbons cûmïïwnctrem à mu0r\ Voicy 

an grand piodige, mais que ne peut pas fe 

permettre fa Poëfie fur le fait des prodiges, 

torique FHifioire mefme en rapporte de 

tout pareils. Hérodote à la fira de fbn der* 

nier livre nous raconte que les Grecs ayanÊ 

mené à Sefie quelques prifonnïers qu'ils 

ftvoîent faits de l'armée de Xerxés , & entre 

autres un de fes généraux appelle Âttayetcf

40 H REMARQUE S 

& jfon fiïs ; un de ceux qui les gardoîent 

Éaïfîmt griller un jour des poiflems pour f0ïl 

dîfncr, tout àeeup ces poîflbns fe mirent | 

bondir & à palpiter comme des poïffom u 

vants- Ceux qui eftoïent prefemts e fiant; 

eilonnez» Atîayeîes appelfa (on garde, 4 

îuy dit: Ne t'allât me peint de ee predige, i 

m te regarde peint , il ne regarde que mc^ 

e'ejï Pr&iefelas qui m J av$rtit que quoya^ 

mûri if embaumé, il a te fumoir de me p(,« 

mît* Si ce prodige arrive pour Px'otefïîaSj 

dont Attayetes a voit pille Je temple, que 

ne doit il pas arriver pour le Soleil contre 

ïequel on a commis un fi grand haltme ! 

Jlâes Cûmpagnâns payèrent fi$ jeurs en* 

tfeis à faire bûnne chère] II àxu Mes Cornpagnons 

pafferent f ire* pour faire entende 

qu'il ne prît aucune part à cette bonne die* 

Te, pour ne pas participer au faailege don* 

cette bonne chère eftoil fe fruit. 

Page 376* Mais mute veye de falut Jeu 

efiûh fermée par tordre de Jupiter"] Tout ce 

paiîage prefente une leçon cachée qui! efï 

bon de développer. Tous les Compagnons 

d'Ulyffe eftôient coupables, ils periretiî 

4-ous; 

Uiyffe eftok feu! innocents il futfeul 

* 

Un fécond eûtip de vent beameup plus 

fûït vim èrîfer mm majïpm le pied] Et œ

S 

SUR L'ODYSSG'E* Ltwt :XTL 4^9 

jt le fafat ci' U Jyffe, car ce reafî eftant briii, 

j s'en fer vît pour fortifier & pour doubler, 

M cfl permis de parler ainfi, kquîfle de fors 

vaifieau, qtiï par-là fut plus en eflaedo refî* 

lier à i effort des vagues. 

Page $yy. Et ce fut jugement dans h 

inmzïït que cetle-cy tngbutijpnt les fiûts 

CeA à dire, dans le temps que îa mer baiG 

foi! & qu'elfe fe rc tir oit des coftcs de Seylh 

& ffcft à dire, pendant h reflux. On se" 

ynfinïmeiit trempe à ces partages où il e: 

uarfc des marecs. On a pris icy le reflux 

pour Je flux, & plus bas on a fait tout le 

cort/aîre. 

G?& /ztf «» oyftœu de miït] Car on préteti 

que CCE oyfea.u de nuit» rt/?t*ps^f, t& chauve-* 

fvwis, ne le peiche pas far les branches, 

mars quelle s ? y pend? comme en le verra à 

lz un de ce Poème. 

Page 3 7 S. £« attendant que k mmjîr€s 

m ryettant les jlûts] Comme dans Je pafïa~ 

ge rapporte ézns h Remarque qui eft avant 

la précédente , on SL pris îe reflux pour le 

îîax» îcy en continuant la inefme faute on 

E pris le Hux pour le reflux. Ce fat dans îe 

temps du reflux, cefl à dire, lorfque îa mer 

bailîbît f qu'Ulyflê fe trouva entre Scylk 

Charybde, & qu'il penfaeftre entraïfhé dans 

cette dernière par le courant » alors il fe pï\% 

aux branches du figuier, & ainfî fiifpeodu iï 

attendît que Cbarybde revomîft les ûQWS 

Tome II 

•ë ,s- 

V.

ï G RnUftQUES 

dcft à dire, que fa mer remonta fî vers îes 

eufles deScyl(a,&par confequent il sttcnUis 

îe^fîux, 

-Ckr dans ie temps que M juge après ayûh 

Jugé quantité de procès ] Rien ne fait piqs 

d'honneur à Homère que les fâufîes critf. 

ques qu on a faites contre tuy> Cet endro^ 

en a fourni une qui mérite d'eftre rappoitée- 

L'Auceur moderne, qui entre autres 

grands defleins avoit entfepiis de rendie 

Homère ridicule» n ! a fait que fe couviîr de 

ridicule luy-mefme. Ce grand Critique 

crû trouver icy une très grofTc impertinen 

ce, mais elle n'y eft que dans fa Ti a du ai on, 

Vfyffe, dit-il, infant perte fur jm muji bnji 

iers la Ckatybde > jufiement dans k temps 

que l'eati s'êlevûft, $T craignant de îûmhr 

mifmdi quand te au vkndrûtt à redéfini* 

dre* il Je prit à wi fgmer [amag€ qui foxtoit 

du Imm du rucher, ou il s'attacha cmme 

une chauve/mms f où il attendait airtfi 

Jfif pendu que fin maJF, quieftoit aHéàfâiid» 

rvnnft fur l'eau > aéjmtant que larfqud à 

fit revenir, il fat aujfi ajfe qu'un juge quiji 

kvf d$ deffus Jim fiegt pûur aller difmr, 

après avoir jugé plufïmrs procès* II triomphe 

de cette comparaifbn bizarre de la joye 

d'UIyïîe avec fa joye d'un juge -qaî va dit 

ïier* Il deffie les adverfaïres de luy montrer 

u'il n'a pas ftdeUeraenî: traduit Je teste 

ce qmje m traduis pas i* 

ta

SUE I'ODTSSE'E. Lîvrt XTL çit 

deltemcnt le texte d'Homère I À quoy le 

PicfîJcnt repond ; C'en efl bkn la fubflanee* 

tués U faudrait voir comment cela efl énoncé 

dans le Grec, Le Chevalier, aufli fin ûe le 

piefident, ad joute, JVjf a-1-il pas dans le 

Crée des mots Grées qui répondent aux mots 

français! Et après quelques raiiferics tres 

faciès, le mefhie Chevalier fink par cette 

belle cûîidufïon ; Dés le mûmeffi qu'Hemer$, 

tout H(? nere qu'il efi f veut trouver de la 

rsfcmèlance entre tin homme qui fi réjouît 

de voir fan niafl revenir fur teau9 à um juge 

fui fe kve pour aller dijner après avoir jugé 

plufïeursprocès> il ne fçauroh dire qu'une 

impertinence* IJ a raîfoo3 mais l'impertinence 

ne vient pas d'Homère f elle vient de luy9 

comme M. Defpreaux fa fort bien ûlt voir 

dans (es Réflexions fur Longîn f Refîex* 6m 

Ce mauvais Critique, dît-iï, fait iey une des 

plus énormes bevuè's qui ayent jamais efti 

faites, prenant une date pour une comparaîfon. 

JËn effet îl n'y a aucune comparaison 

dans ce paflage, & 9 n'y s perfonne qui 

ne voyc que ceil une date toute limple> 

Dans le temps que le juge après avoir jugé 

pkfiewsprocès* Ceft comme s'il dîioït, vers 

les deux heures après midy* Ce pauvre Critique 

ne fçavok pas que dans ces anciens 

temps Je jour n'eAoît pas encore partagé etl 

heures, car on ne COIîIîO flbit les heures que 

four 3es &ifcn$| & qye Ygu datait par

4 r 2 KEMÀRQUES 

fondrons de ia journée, quand le juge en> 

trûk afin ttïhmalj quand il enjor toit * ircs 

Jïoô.cy une preuve bien claire» par un paffage 

d'Hippoerate que M. Bacier m\ fourni, 

ex qui elt precilement la mefrne dite que 

celle d'Homère* Ce gratta perfonnage par 

d ? un homme qui ayant elle bie/Fé fe matin 

d'an ja?eiot dans le toyjs, mourut Je jour met 

me on peu avant !e temps dont Homère pade* 

i.$ct¥% dît-Hf GifiY dytptw ht^YWf. Il mourut 

'avant que te juge faift le jkge, avant que 

l'affanèlée fitft congédiée Ou tempe d'ajites 

I expliquent, avant que le marché fufi 

mnié On trouve une parejfle date dansXct 

* >' A. r ^ * * * 1 s 

fyvçvur. I*b. i. de exped. Cyr, Dans h temps 

que te marché ejfcîi plein de gens, Maïs ce 

ziefl pas la feule be\ûé que cet Auteur ait 

faite fur ce paflàge f il a encore confondu les 

marées. Ulyffe $ dit-il, porte fur fin îjhtjt 

in(e jttjftmem dans le temps que l'eau (e 

lewit* Cela eft feins & ne fçauroit élire, i£ 

pe fut [Joint dans ie temps du flux , mais 

ns celuy du rpflui qu'tJlyfle porte fur ce 

mafl craignit deftre cntraifnc dans la Ourybde, 

le flux û contraire i'ep éloîgnoit, & 

2Ï w craignit pas non plus de tomber au fine 

quand leau viendrait à redejeendre* C 

n'efi qu'un pur galimatias» Ulyffe pour éviter 

que le reflux ne femraîinaft dans Je 

oiiiirs ds Charybde, fe prit au figuier 

g

SUB L'ODYSSB'E. LmêXlL 413 

ainfi fufpcndu il attendit, non que Veau vînfl 

à redefcendre, maïs au contrarie que Veau 

yinff à remanier, c'eft à dire, qu'il attendis 

que Charybde yevomift les eaux, &cefioit- 

|à le flux. Je fuis fafchée que M. Defpreau* 

n'ait pas relevé ces fautes , & plus encore* 

que luy- mefme y foït tombé s car il a pris 

aufli le Hux pour le reflux. Dans tefperan^ 

a, dit-* il, ^w & reflux venant, la Charybde 

pmrrûit enfin rewmir k débris de fin mif* 

fiau* Il failoit dire le flux venant* En efFel 

le flux efioit lorfque ia Charybde revomit 

fmx les eaux, car ceftott alors que k me* 

mon toit vers la cofte. Cela eft aflez; prouvé^ 

j cfpere quit paroîftra fenfibïe à tout le 

Je vis finir mûn maft~\ On ne peut pas 

déterminer préeîfemenî le teMps qtfUIyflfe 

demeura fufpendu à fon figuier, car cela dépend 

du moment du reflux ou il s'y atta 

dm Dans un jour lunaire il y a deux ma 

rées, c'eft à dire, que la mer monte & def 

cend deux fois par jour. Àinfi elle eft environ 

fîx heures à monter, & autant à descendre, 

Ulyffe sat tacha à fon figuier quand 

die defee ndoït> & y demeura jufqua ce 

quelle remontift II fufftt qu Homère noua 

dît que ce fut justement lorfque le juge 

quittoit fon fiege, & ce n'eftoit que vers la 

huitième heure du jour , c'eft à dire, vers 

nos dam heures après midy- 

S IIJ

4i4 REMARQ.SU* LODYS IMlll 

Et je tomhay un peu à cêftè avec un 

grand èruit~\ La prudence n'abandonne jV 

maïs UlyfFe. Il ne fe îaffîe pas tomber (m 

le maft, car tî pouvoit $ y bleffer, maïs il 

tombe un peu à cofté, 7mpt%f vis-à-vis du 

milieu t & à portée de 1 accrocher. 

- Le père d$s Dieux if des hommes ne 

jermit pas que je repaffaffe prés deScylid] 

Ceftoic une faveur bien évidente, car (e 

t otf ceft à dif€, fa naer qui mon toit, le poj> 

toit fur cette cofte- 

Je fus pur té en cet eftat au gré des fûts 

fc des vents neuf jours entiers* ir la dixième 

nuit les Dieux me firent aborder à tt(fe 

d'Ogygie ] Il fut donc balotté fur ce maft 

dix jour, entiers , & par conséquent fans 

prendre aucune nourriture» Longin a trouvé 

cela fi peu vrayfemblabfe, qu'if Je traite de 

feadinerîe qui marque que 3'efprît d'Homère 

commençoit à seftefndre. En quoy il seft 

infiniment trompé, comme je ï'ay inoHÏiré 

dans la Préface, où j*ay fait voir que des 

hommes battus de 8a terapefle ont elle plus 

de dix jours ims manger* 

mii%

- 1 

4, 

i M * * è * mwÉÊÊF P • • ' •*•!% - - I é M I — E A U P ^ 

Argument du Livre XII ry 

Jlxmûus $7*tmte fa cûur ont pris tant 

JJ~ deplaifir à entendre le recît des avati** 

Vif es dTJIyJfe, quils ky fini de nouveaux 

prefins* Us mettent en fouie dans fin vaifi 

fimi 3ûdt ce qid efi neceffdtre peur fin 

y âge* Ufyflï prend eûngê du Mûy, ir 

embarque* Ceux qui le cendmfent /r défi 

tendent à terre fir le rtvagsr d'Ithaque 

pendant qu // efi endermi, i? s'en r&teur* 

dent. A leur ternir Neptune change* en 

pierre leur veàffeatt* Minerve sâpparûjj? â 

e fur le rivage ; elle luy éûnne fis 

eenfeits fur la manière ehnt il deitfi cm* 

duire pûur tuer les Pmrfuhants, l*0hlîg& à 

retirer dam une grotte wïfrne tentes fis 

?ichejfes9 ir le memmmplwfi en fieillarÂ 

* * 

S te

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4£4 

L'ODY 

n* ••* 

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^r*$*^ 

D'HOMERE J* 

£Rt»nP^KlPM4fc* •«% 

LIVRE XI IL 

ULYS SE finît ainfi le récit Je 

fcs avant tires, Le fiïence règne 

dans Pa/Femhlée des Plieaden% 

& tous ceux qui font dans cette 

faite magnifique ne font occuper 

que du pfaifir qu*ik ont eu à l'entendre. 

Enfin ÀIcïnoib prenant h 

» parole y dit : Ulyffc 9 puîfquc vous 

» eftes ¥enu dans mon Palais « ie ne 

» croy pas qu*à voftre départ de cett 

» ifle vous vous effariez de voftre 

que vous el prouviez les 

» incfnies traverfes que von s avez cf- 

» pmuvécs avant que d'y arriver- £i 

rf-i

UOï>.,D*HOM« Lîv.XIIL 417 

5*adreffant enfui te aux Princes de 

fa cour , il leur dit ; Princes, qui ce 

rftes reeeus tous les jours à ma ta- c< 

L!e, & q 

k\ 

u * avcz ^ c piaifîr d'enten-

4*5 L'ODYSSéE 

pos- Le lendemain dés que fefloii^ 

du matin eut fait place à l'aurore, 

ils vont tous porter leurs cuvette? 

& leurs trépieds dans le vaifieau. 

Le Roy s'y rendit aufïï3 Se il voni 

it prendre la peine de placer Se d e 

ranger hiy- mcfnie tous ces vafes 

fous hs bancs, afin que les rameurs 

3iVe pufîcnt eûre incommodes 

dans leur manœuvre. L'affemblée 

retourne en lui te au Palais % où l'on 

prépara un grand feftin. Ai ci nous 

offrît en facrifice un taureau au 

ku qui règne fur hs Dieux & 

fur les hommes. Quand on eut 

t farufler les cuifies Air Faute! 

jfelon la coutume, on fe mit à table. 

le diantre Dcmodacus^ que la 

peuples honnoroicat comme un 

Dieu} rendît le repas délicieux paï 

les chants admirables. MaîsUlyiTe 

îournoit fou vent la lefle pour voir 

le foleil dont la courfe lu y paroif 

foît trop lente. ÏI auroit fouhaîté 

ijue cet alîre euft hafté fon cou- 

m

OMifti, Lip&XIIL 41 

cher pour jecoïiôer 1 impatience - 

u'il avoit de partir* Comme uaabourcur, 

qui du foc de fa charrue 

a fendu lefein d'un gueret, 

y a tracé de pénibles filions tout 

fa fournée, voit avec plaifir le fb 

7 

Icil fe précipiter dans 

amener l'heure du louper f iï s'e*v 

retourne avec Joyey la laffitudeïuy 

îaifant prefque manquer les geroux 

; te coucher du foieil fait 

micfoie pîaifir à Ulyffe. Sans perdre 

un moment il adreiTe îa parole 

aux Pheaciens* Se fur-tout au Hoys 

à qui il parie en ces termes : À ici- * 

nous, que Tefclat de la majeflé fait m 

aifôiucnt reconnoifire pourlemaif-

4^0 L' OD Y S S E' 

w fi té a furpafïc toutes mes efperar:. 

» ces. Non feulement vous me foim 

» nifïez tout ce qui cil necelfaire pou^ 

^ mon voyage , mais vous m'avez 

» comblé de prefens 5 veuillent les 

» Dieux les rendre heureux pour 

» moy. Que je retrouve dans moi] 

» Palais ma femme telle que je la de- 

* fire, & tous mes amis en parfaite 

» fanté. Et pour vous, jniïiûtz-vom 

» eftre îey long-temps ia confolation 

» & ïa joye de vos femmes & de vos 

» enfans ,"& que les Dieux vous 

^ donnent toutes les vertus, qu'ils 

^ répandent fur vous à pleines maîm 

» toutes fortes de profperitez 3 

?» cjuîls détournent tous les maux 

vos peuples» 

Ge compliment pïut merveiJîeufement 

au Roy & à toute h 

cour. Sur Fàeure on donne ordre 

ue tout fuft preft pour le départ 

Et ïe Ko y s'adrefTant au herauH 

% Pontonoiis j Iny dit : Pontonoiis, 

» rempli fiez une urne du plus exçd-

T3 J H OM ERE, Livre XîIIm 42 ï 

lent ¥in êc prefcntez-cn dans des t< 

coupes à tous ceux qui font icy & 

mcfents, afin qu'après qu'ils auront

42-2 I/OB Y SSE'Ë 

» ncnt jamais cette demeure, & que 

» toujours aimée & eftimée du Roy 

x voftre efpoux & des Princes vos 

» enfants, vous receviez continuelle- 

» ment de vos fujets les marques d'à* 

» mour & de rc/ptdl qu*ils vous doî- 

» vent. 

En achevant ces mots , UlyiTe 

fbrtît de la falie. Âldnoiis Iuy donna 

un héraut pour le conduire à 

fon vai fléau, ik la Reync Arc té luy 

donna pîufieurs de les femmes pour 

porter les prefens & les provifiona. 

L'une efloit chargée des tuniques 

& des manteaux, l'autre portoit la 

caffette, une troifiéme portoit I* 

pain & le via. 

Quand on fut arrivé an port, 

ceux qui dévoient conduire Ulyf- 

, embarquent les provî fions 

cïtefTent un lit pour luy fur le t 

iac, où ils eftendent des peaux 

es eitoffes pour fervir de couvertures* 

UlyiTe monte & le couche, 

les rameurs le placent fur leur* 

s.

B'HoMERE. LivreXIIL 42^ 

> 

Bancs en bon ordre, dé 

cable qui arrefloit le irai fléau à un 

relierJ & en fe courbant & fe renyerfant, 

ils font blanchir la mtB 

fous l'effort de leurs rames- 

Cependant le fommeiL s'empare 

des paupières d'UIyflc 9 mais 115 

I (1 dodx

424 V OD YSSE'ë 

ce Prhiee avoit efîuyé des înaicç 

infinis 5 ioît dans les guerres quM 

avoit Iieureufement terminées, ioît 

fur la mer; mais alors plongé da.r.3 ù 

un prçfond fommeil il oublioit 

toutes fes peines. Qpand ta brlïïante 

eftolle qui annonce iarrivée 

de l'aurore fe leva , le vaîifeau 

aborda aux terres d'Ithaque, II y s 

dans cette colle vn nort qu'on appelle 

le port du vieillard Phorcyne 

un des Dieux marins ; îï eft entre 

deux grandes rades herHîées de ro 

qui avancent extremeinen 

A* 

c 

1# 

dans la mer» & qui le mettent k 

l'abri des vents. Dés que les vail- 

(eaux y font entrez, ifs n'ont rien 

à craindre, 6c ils y font en feuieté 

fans eiïre attachez. Ce port cfi 

couronné d'un bois d'oIîviers3 qui 

par leur ombre y entretiennent une 

fraifeheur agréable, & prés de ce 

bois cû un antre profond & dé- 

icieux coiiiacre aux rNymprîC; 

u'on appelle Nayades, Tout au 

•*

OMEAE. Livre XIIL 42 

%o\it de l'autre en dedans on voi 

de grandes urnes & des cruche* de 

belle pierre qui ferveni de ruches 

à des effains d'abeilles qui j fonC 

leur miel. On y voit aufli de grands 

meftiers taillez dans la pierre, fut 

îefquels les belles Nymphes tra^ 

vaillent à des eiloftes de pourpre 

qui font la merveille des yeux. Ce 

iieu charmant eft arrofé par des 

fontaines dont l'eau ne tarit jamais. 

Pour y entrer ïï y a deux portes M 

lune au fepîentrion toujours ouverte 

aux hommes $ êc l'autre au 

ïmdy plus divine f car elle n'e 

ouverte qu aux i/ieux 

Les rameurs d'UIylFe entrent: 

dans ce port qu'ils connoîiîbient 

depuis long-temps , 

feau avance dans les terres jufqu'à 

la moitié de fa longueur, fi grand 

eftoit ïe mouvement qu'ils lu y a 

voient imprimé par la force de 

leurs rames. Ils defeendent à terre, 

c 

«lèvent Uiyftc tout endormi avec 

-*

-v 

426 UOBYfrS E'E 

fou lit, & Fexpofent fur ie rivan 

fans qu'il s'éveille, lis prennent 

tontes les bardes & tous les beaux 

refens que les Phcaçicns Iuy a* 

voient faits , par Pinfpiratïon de îa 

_ciîercufcMîn€r?e. JIs les mettent 

au pied d'un ofîvkr hors du chemin, 

de peur qu'ils ne fufient ex* 

ofez au pillage fi quelqiie vovaeur 

vcnoit a paffer par-la avant 

fon réveil. Ccfa efiant fait, ils 

rembarquent & reprennent ïc che 

min de S chérie. 

Neptune n'oublia pas les mouces 

qtrïl avoit faites à Ulyffe 

s'adreffant à Jupiter, comme pour 

interroger fa providence^ if luy dit: 

s» Grand Jupiter, père des Dieux 

» des hommes, Je ne feray donc plus 

» honnoré parmi les Dieux immoral 

tels, puifque des mortels comme 

» les Pheaciens, qui raefme font defarcendus 

de moy, me méprifent. J p 

*> me perfuadoîs qu'UIyffc ne re 

» tournerait dans fa patrie qu'api'é

HoMUREi Livre XIII, 427 

avoir fouffert encore bien des pei- * 

Bes & foutenu les nouveaux tra- « 

vaux que je luy préparois , car je m 

jic luy avois pas aMblument ferme « 

toutes les voyes de retour, depuis « 

que vous luy aviez promis qu'il ar-

L'O D y 3 s 

a lez quand ii vous plaifl les foncfcs 

ments de la terre 9 quels difcouii 

» venez-vous de tenir l Les Dieux 

» immortels ne ce/feront jamais de 

» vous hormorer* Il fcroit difficile 

» de méprifer wn Dieu auffi ancien 

^ que vous , auffï grand & auffï rci- 

» pedablc, QJJC s'il y a-queîque moi- 

» tel qui maigre fa foibleiFe ait Fins 

folence de vous refufer l'honneur 

T> qui vous eil dû , les voyes de la 

» vengeance ne vous font-elles pas 

» toujours ouvertes l rai les donc a 

*> que vous trouverez à propos ; ii 

» tisfaites-vous & que rien ne vou 

» retienne. 

*> Je me falïsferay très prompte 

» ment, repartit Neptune , comme 

» vous m'en donnez la pcrrnifion. 

» iviais je crains toujours de vous 

» offenfer » & je redoute voflre co- 

» 1ère- Pour plus grande feurété je 

•» vais donc vous communiquer mou 

» deffein. Je veux faire périr cchc* u 

-*) vaiflTeau des Pheaciens au milieu do

HOMERE- Livre 

k nier pendant: qu'il s'en retourne, ce 

«fri qu'inftruits par cet exemple, « 

ils renoncent à remener déformais ce 

ics hommes qui aborderont chez ec 

eux, & fe veux couvrir leur ville ce 

d'une haute montagne qui mena- « 

ccra toujours de i'efcrafer. « 

h bien» repondît le maître des % 

pieux 3 voîcy de quelle manière je GC 

;roy que vous devez exécuter cette

43& L J ODYSSéE 

qui eft îa patrie des Phcacicns $ 

attendit»là te retour du vaiffeau. ï{ 

n'eut pas ic temps de s'impatienter, 

car dans le moment on vît ce vaiffeau 

qui fendoit les ondes avec une 

merveilïeufe légèreté* Neptune s'en 

approche , & le pouffant du plut 

de h main , il le change en un 

rand rocher auquel il donne de 

profondes racines, qui en Parrcftam 

fur les flots , appuyent fes fondements 

dans les aby fines. Ce Dr eu 

s'éloigna en mefme temps. Les 

Pheaciens, qui eltaient tous Ibnis 

de la viile3 eftonnez de ce prodîgc5 

3* fe difoient Fun à l'autre : Grands 

» Dieux, qui efl-ee qui a lié noftrc 

» vai fléau fur la mer à la fin de fa 

» courfe ! car ïe vaiffeau paroi fltiD 

a* tout entier- lis tenoient tous le 

me fine langage & aucun ne fçavoit 

tU 111 XllLUI LL-td, CllUll diiAVC j iUll 

qu'Àïcinoiis ^'avançant au milieu 

d'eux, leur parla en ces termes, 

a* Mes amis, voicy l'accompliffc^

B'HoMEftE. Livré XIIL 43 £ 

ment àts anciens oradcs que mon c 

ticrc m'a voit annoncez. II me di- « 

foît toujours que Neptune eftoit * 

il rite contre nous de ce que nous «: 

citions les meilleurs pilotes qu'il y « 

euft au monde, êc que nous ne re- « 

levions point de luy. Et il ad|ou7 «c 

toit qu'un JourceDreu feroit pe> ce 

rir au milieu des Ilots un de nos « 

meilleurs vaiKcaux qui reviendrait « 

de conduite un mortel dans la pa~ c* 

trie, & qu'il couvrirait nofîre ville « 

d une montagne qui nous enraye-.

DYSSE 

* ver la vengeance^ en couvrant uo£ 

,* tre viïle de cette haute montagne 

& dont nous (brames encore menacez. 

Àinfi parla îe Roy. Les peuple* 

furent faïlis de frayeur & préparesent 

le faerifiee* 

Pendant que les Princes EL C 

des Pheapens faifoient leurs prie* 

jes à Neptune autour de fon autelpUlyJÛTe, 

qui eiloit profondément 

endormi fur fa terre natale, fercveilla 

de fou fqrame; il ne reconnut 

point du tout cette terre chejrie, 

H en eftoit ablent depuis trop 

long-temps , & la Dée/Te Minerve 

l'enveloppa fur le champ d'un efpaîs 

nuage, a&n qu'il ne pufl la i 

connoifire, & qu'elle euil le temps 

de l'avertir de tout ce qu'il avoit 

# à éaire, Car jl falloit qu'il ne fufl 

reconnu ni de fa femme ni de fes 

amis, ni de fes citoyeas, zvmt 

u!il euft CirA vengeance de Finfuftice 

ik de Finfolence des Pourï 

vaut s. Voilà pourquoy cette 

Déefe 

lui

OM ERE* Livre XIIL 4J| 

elfe fit que toute la face du pays 

1 ^ ' ï J ï " 

|uy parut cnangee5 les grands ciierftins 

, l^ s ports, îa pïage, les rochers 

qui s'avançoient dans la mer* 

es arbres mcfmes ; en un mot* 

j\m r/eôiî reconnol fiable pour 

Jav. II f £ leva plein d Pilonne nient* 

jia„t 1a vû/de tous cofe, 

frappant les cuîlTes . il dit avec de 

profonds foupirs: Ah ! malheureux * 

{TIJC t w L *«*id § li£t 1*10 IJ L* \#A t/'ct \ ô lî.j\^ ff 

rouvay-je ! Vais-je tomber entre «t 

les mains cThommcs cruels & fan- « 

vages, ou entre les mains d'hom- œ 

mes liofpïtallers & pieux ? Où vais- ce 

je porter î on tes les rfchcfïes que m » 

j ay avec moy l Ou-vaîs-je moy~ m 

eîme m*égarer & me perdre î «* 

ïull aux Dieux que je fuffe de- ce 

raeuré parmi les Pheacicns, ou qtie

414 L* O 0 Y S S E'£ 

3 mettre en leurcte, car il n y a fti 

» d'apparence de im hiïTer icy, ils de- 

& vîendroient biea-toft la proye du 

» premier paffant. Grands Dieux! 

» les Princes & les Chefs des Phea- 

» ciens n'eltoient donc pas fi fages ni 

j» û jufles que je penfois. lis mV 

» voient promis de me remener à ma 

» chère Ithaque3 & ils m'ont expofé 

# fur une terre étrangère ! Que Ju~ 

» pi ter prote

HOMèRE, LivreXIII. 435 

inquiétude, il ne fait pins que km» 

pîrer après fa chère patrie* en parcourant 

le rivage de la mer. Pendant 

qu'il eft plongé dans îm trifs 

peu fées , Minerve s'approcîie 

de luy fous la figure d'un jeune 

Berger, beau, bien fait, de bonne 

mine, & tel que peuvent eilre les 

fils des plus grands Roys. II avoit 

fur fes efpauies un manteau d'une 

belle efloffe très iïne, à fes pieds 

c beaux brodequins & on Ion 

Javelot à la main, UlyiTe fut ravi 

de fa rencontre 3 & l'abordant, i 

luy parla aîn 

erger, puifque vous elles ïe et 

premier que Je trouve dans cette m 

terre eftrangere, je vous faluë de m 

tout mon cœur, & je vous prie de « 

ne point former contre rnoy de « 

mauvais deffems ; fauvez-moy tou- *t 

tes ces richefles Ôc fauvez-moy « 

înoy-mcfme, je vous adreiTe mes c 

rieres comme à un Dieu3 SL j'em- * 

raife vos genoux comme voftre « 

T iî

43^ 1/ODYSSE' 

» fuppliant. Mais avant toutes cho- 

» fes dites-moy, je vous prie * fan; 

» me rim déguHer5 quelle e£l cet 

» te terre , quel cil fon peuple, 

» quels font les hommes qui ITiabî- 

» tent î Eft-ce une iileî ou n 5 eft-ec 

» ïcy que la plage de quelque 

» tinentf 

M il faut que vous foyez bien peu 

%> inftruh, îoy répondit Minerve, ou 

» que vous veniez de Bien loin, puif- 

3» que vous me demandez quelle cil 

» cette terre. Ce n'eft pas un pais 

2* inconnu* 11 eft célèbre jufques dans 

» les eiîmats qui voyait lever le fo 

» leii , & dans ceux qui ïe voyent le 

» précipiter dans Fonde. Véritable- 

» ment c*efi un pavs aforc & qui n ? eii 

» pas propre à nourrir des chevaux^ 

>J mais s'il n 3 a pas de plaines fort fpa- 

» cieufes, il n'efl pas non piusHerilc 

^ & Icc. Cette tene porte du fro- 

» nient & du vin en abondance, elle 

» a les pluyes neceiïaircâ dans les fai 

» fous & les rofées qui rejoûiffent U

D'HOMERE. Livre XIIL 437 

plantes- Les chèvres ÔL les boeufs « 

y trouvent des p afin rages exceï- « 

ieuts ; îl y a toutes fortes de bois « 

de forefts , & elïe eft arrofée de « 

quantité de fources dont les Nym- ce 

plies ne ïaifïent jamais tarir les eaux « 

dans la plus grande fécherelFe. En- c< 

fin, eft ranger, ïe nom d'Ithaque efl « 

nir-tout connu dans les campagnes c< 

de Troye f quoyque cette iïïe foit « 

fort loin de l'Achafc, « 

A ces paroles Uïyfïe ïentit une 

joye qu'on ne peut exprimer, de fe 

retrouver dans fa patrie 7 feïon le 

npport que lu y venoîi de faire ïa 

Me de Jupiter. ÏI répondît à cette 

éelïe, non pas dans la pure vérité, 

mais en forgeant fur ïe champ 

une fable, & en confervant toujours 

ïe caraélere d'homme rufé 

dilfjmulé: J ay fort entendu parler « 

d'Ithaque, ïuy dit-il? dans Fille de ot 

Crète - qui eft fort éloignée & au «~ 

milieu delà mer. Je fuis venu icy cr 

avec toutes ces richefles, j'en ay 

i 1 i

1/ O B Y S S E f 

» laiffé autant à mes enfants , & fe 

*> cherche ïcy un aîyle, ayant efté 

& obligé de prendre la fuite, à caufe 

» d'un meurtre que j'ay commis f en 

» tuant le fils dl do menée % le brave 

& Grfiïoque , qui eftoit fi ïcger à la 

» courfe , que dans ïes plaines de 

3» Crète il furpaflbit ceux qui avoient 

» acquis le plus de réputation. Nof- 

^ tre querelle vint de ce qu'il von- 

» ïoït m'ofter ma part du Butin qui 

» m'eftoît efchûe à Troye, & que 

» j'avois aequife par tant de travaux 

& Se de dangers que j'avois eïïuyez 

* & à la guerre & fur la mer f car 

& ïr confervoit contre moy quelque 

» reflentïmcnt de ce qu'à Troye js 

» refufois d*obéïr à fan père 

» que je voulais commander fepare 

» ment mes Compagnons, Je le per fi? 

s> çay d'un coup de pique dans un 

» chemin où je lu y avois dreffé une 

* embufeade alîîfté d'un de mes amis* 

* La nuit eftoit fort obliure , per 

^ fonne ne nous vit, & îe le tuay fan 

*0 

«g

OMERE. Livre JCÎIf. 4 

cftre ap perce ti* Dés le lendemain à & 

îa pointe du Jour je trouvay heu- ^ 

reniement un vaïflean de PhoÊtiï*- «r 

cie qui eftoit prcft à faire voile, je « 

mhy ces Fhœnîeiens de me îece- '«r 

voir & de me rendre ou à Pyîos $ ® 

ou en EHde* où régnent les Epé- «c 

eus, & pour les y engager je leur 

\ r une partie de mon Matin, & 

mais les vents contraires les éloî- * 

nerent toujours de ces coftes f c 

uelques efforts qu'ils fi fient pour m 

f aborder, car ils n'a voient aucu- «r 

me mauvaife intention; nous fuf- &

44^ L ? ODYSSéE 

» dans un profond fommeiL Le* 

3» Fhoeniciens, pour profiter du veut 

^ qui venoit de changer, ont déhar^ 

» que ce matin toutes mes lichefics, 

i* les ont Jidellement mifes prés du 

3 lieu ou f eâoîs en dormi > & s'eftam 

38 rembarquez ils ont fait voile vers 

» Sidon. C'eft ainû que je fuis de* 

» meure feul dans cette terre eftraa* 

» gère, livré à de cruelles inquiets 

m âcsf dont je n'attends le foulage* 

w ment que de voftre fecotirs. 

Àînfi parla Ulyfle. La Déeffe 

foufrît de voir fa difïîmuïatîon, 

lie le prit par la main, ce ileftoit 

plus fous ïa figure d'un pafteurB 

mais fous celle d'une femme d'uns 

excellente beauté, d'une taille ma* 

f eftueufe &: telle que font les per* 

ibnnes qui ont efté bien élevées» 

Elle ïuy parla en ces termes : 

* Celuy-Ià feroit bien fin & bien 

» fubtiï qui vous furpafleroit en tou- 

*> tes fortes de diffimulatïons 6c de ru- 

* fcs. Un Dieu mefme y feroit eiu-

B'HOMERë. LivreXIIL 44* 

bsrraffé. O le plus diflîmulé des « 

mortels 9 homme inefpuifable en « 

s9 en détours 6c en ftnefles. « 

Dans le fein mcfme de voftre pa- « 

trio voua ne pouvez vous empef- « 

cher de recourir à vos fables & à *c 

V os deguîiementsqui vous font fa- « 

ers dés voftre naiiïauce* Mais « 

JI IL 

Iaiilbns-Ià les tromperies, que nous « 

connoifTons fî bien tous deux; car « 

fi vous eftes le premier des mortels « 

pour imaginer des fables pleines *. 

d'invention & de prudence* je puis « 

dire que parmi les Dieux j'ay la « 

TTDîItalion d'exceller dans ces ref- « 

Jburces que la fageffe peut fournir* « 

e reconn 01 liez-vous point eneo- ce 

te la fille de Jupiter, la DéeffeMi- « 

nerve, qui vous affifte, qui vous « 

foutient & qui vous conferve dans *; 

tous vos travaux, ex qui vous a ren- * 

u 0 agréable aux yeux desPhea- « 

cieos, que vous en avez receu ton- *c 

tes fortes d'af&ftances î Prefente- « 

ment je fuis venue icy poux vous- « 

T ¥

DYSSE 

» donner les confeils dont vous a\ 

» befoïiîj &: pour mettre en feuret p 

u 

» tous ces beaux prefens dont les 

30 Pbeaciens vous ont comblé à vof- 

* tre départ par mes infpirations fe- 

» crêtes. Je veux aufïï vous appren- 

» dre tous les chagrins & tous les 

» périls auxquels la deflinée va en- 

» core vous expo fer dans voflre prox> 

pre Palais. (Z'cÛ à vous de vous 

» munir de force pour les fimportez 

» courageufement puifque c 7 di uns 

» neceflîté. Gardez-\ous bien fur- 

39 tout de vous faire connoiflrc à per 

* fonne^ ni à homme ni à femme, 

s de découvrir vos défieras. Souf- 

» fiez dans îe fdence tous les rnaux^ 

» tous les affronts & toutes les info- 

JO ïences que vous aurez à efiuycrdei 

*> Pourfuivants & de vos fujeîs mef- 

» mes* 

» Grande Dé elfe, repartit Ulyfie, 

» il ferait bien difficile à l'homme 

» le plus clairvoyant de vous recon- 

» noiftre quand vous voulez vous ca-

*m 

OMERE. LivreXIIï. 44 

iher7 car vous prenez comme il m 

1 oiîs plaift toutes fortes de figures, ce 

Je fçay fort bien, & je ne l'oublie- & 

y jamais » que vous m'avez cfté «c 

toujours favorable pendant que «r 

TJOUS avons combattu ïous les murs

444 L'OBY s SE'B 

M me conduire votis-mcfme jufqiic 

» dans le Palais d'Akinoiis* Aujour 

» d*huy l'embrafïe vos genoux, 

3 vous co ni lire au nom de vofli 

» perc de me dire s*îî eit vray que je 

» fois de retour dans ma patrie3 car 

s je me deffire de ce bonheur, 

% crains que ce ne foït encore icy 

* quelque terre cftrangere , & que 

si vous ne m'ayez parlé comme votiè 

s, avez fait que pour vous moeqner 

* de moy êc pour m'abufer par de 

^ vaines cfpcrances; dites-moy donc; 

•» je vous prie, s'il effc bien vray que 

» je fois fur les terres d'Ithaque. 

3* Vous eftes toujours le mefme, 

r» repartît Minerve* & voilà de vos 

* loubçons. Mais je ne veux pas 

5a vous abandonner & vous précipita 

1er par-là dans des malheurs inévias 

tables» Car je voy que vous cites 

» un homme fage, d'un efprit ton* 

» jours prefent & plein de modéra- 

» lion & de prudence 3 & voilà les 

ens qui font digues de ma pro- 

•i

B'HoîttERE, LivreXIIL ^f 

t£ ik paIfe tri jlemeiit les jours * 

les nuits à foupîrer & à répan- « 

re des larmes. Si je ne vous ay et 

as fecotiru depuis voflre enibar- « 

uement, c*eft que je ïl'ignorois « 

as que vous vous tireriez de tous

t 

%êfi L'ODYSS 

» vous avez aveuglé fon cher fiïs„ 

» Mais pour vous faire voir que je 

» ne vous trompe point, Je vais vous 

» faire reeoimoiftre ïes lieux & vous 

» montrer Ithaque telle que vous 

*> Favcz îaiffée. Voiià ïe port 

» vieillard Phorcyne un des Dieux 

» marins ; le bois d'oliviers qui le 

* couronne, c'eft ïc mefmc que vous 

» y avez toujours vu ; voilà prés de 

» ce bois Fantre obfcur & délicieux 

» des Nymphes qu'on appelle Na) E" 

» des, c ? eft le raefme ou vous avez 

B offert tant de fois à ces Nymphes 

» des hécatombes parfaites ; cette 

» montagne couverte d'une forefl5 

B c'efl fe mont Ncrite. 

EH achevant ces mots, ïa Déefïe 

dif&pa le nuage dont elle Favoiî 

environné, & dans Finftani il reconnut 

la terre qui Favoiî nourri. 

On ne fçauroît exprimer les tranf- m 

ports de joye qu'il fentit en rc 

voyant cette terre chérie^ il ïa Bai 

ù; &en élevant les mains, il admffî 

t *

pTÏOMERE. LivreXIIL 447 

aux Nymphes cette prière. Belles * 

Nayades f filles de Jupiter, )e n'efte 

erois pas iTcflrc a fiez heureux « 

pour vous revoir de nia vie ; puïf- « 

ne j ? ay ee bonheur » contentez- ic 

vous prefentement, douces Nym- et 

, des vœux fmeeres ouc ie « 

vous prefente* Bien-toit f ïi la « 

rande Minerve, qui préfide aux « 

iTemblées des peuples, continué de « 

me favori fer êc qu'elfe conlerve ma « 

vie& celle de mon fils, fe vousof- « 

îray, comme je îailois autrefois, « 

des facriiiees qui vous marqueront * 

a joye oc ma reeonnomance. « 

Ne douter point de mon fe* « 

cours, repartit Minerve* & qu'au- « 

cune deffiance ne vous inquiète. & 

Retirons d'abord dans ic fond de « 

1 antre toutes ces richeftes 3 afin K 

que vous les conserviez, & nous « 

délibérerons enfui te fur ïe parti « 

yie BOUS devons prendre, m 

En parlant ainfi eiie entre dans 

cette caverne obfturc, & cherche

448 L* O B Y s s E'K 

dans tous les coins une câcïic &• 

délie* Ulyïfe la fui voit & port oie 

tout For, le cuivre & les habits 

que les Pheaeiens luy avoîerat donnez. 

II les met dans l'endroit eue 

hiervc luy montra, & en for* 

tant, la Décffc ferma elle-mefmc 

l'entrée de la caverne avec une 

pierre, Ils suffirent tous 

deux en fuite au pied d'un olivier, 

fe mirent à confuîter fur les 

moyens qu'ils dévoient choifir 

pour punir Pinfolence des Pourïuivants» 

Minerve parla la premien 

ve f & dît : Divin [ils de LaeVtr, 

7- fage Ulyfle , c'efi icy qu'il faut 

* employer tout voflre eJfprit pour 

* trouver les moyens de faire mo?- 

» dre la pouffierc à ces infolents, qui 

» depuis trois années régentent dans 

» voftrc Pafais * ik pourfuivent vof- 

» tre femme, en luy offrant tous les 

» ïoifrs de nouveaux nrefents* Elle 

» ne fait que foupircr après voilre 

» retour ; elle fa$ amufe tous • & ie

9 OMEHE. Livre 

promet à chacun 3 en leur envoyant 

très fou vent des meflages. 

"gis ies penfées ne répondent «e 

ûete a ces uem on lira non s* * 

Grands Dieux ! déferla Uîyffe, « 

un fort auiTi f unefte que celuy

45® 1/ Ours S 

» nous exécuterons ce grand expîoi^ 

» & jepenfeque bien~tofl quelq^^ 

» de ces Feurfuivants f qui confu- 

» ment vofîre Bien &qui fe nourrit 

» fent de vaines efperances, inonde- 

3 ra de fon fan g la faite du fellin, 

» Mais avant toutes chofes je vaii 

» vous rendre méconnoïflable à tous 

» les mortels. Je vais deflecher &L ri- 

» der voflre peau, faire tomber ces 

» Beaux cheveux blonds, vous cou- 

* vrir de haillons fi vilains f qu on 

* aura de la peine à les regarder 3 & 

» ces yeux fi beaux Si û pleins de 

•» fm^ je vais les changer en des y cul 

m eïieïnts & efraillez* afin que vous 

» paroiffiez difforme à ces Pourfuim 

vants f à voilre femme & à voflre 

a> fils, Àinfi changé, la première eho 

» fe que vous devez faire, c'eft d'à 

* 1er trouver voflre fidelïc Eumée à 

39 qui vous avez donné Fin tendance 

* d'une partie de vos troupeaux; c f e 

a un homme plein de fagefle, & qui 

a eiï entièrement dévoilé à voflre fils 

o 

—*

OMERE. LivréXIIL 451 

à la fage Pénélope, Vous ïe trou* « 

^rez au milieu de fes troupeaux m 

qui paîffent fur la roche Coradenne 

prés de la fontaine d'Ârethufe, « 

où ils fc nourrirent du fruit des m 

chefnes, qui cft îa nourriture ïa « 

plus propre pour les engraifTer. « 

Dameuresi-îàprésdeluy, & faites- «c 

vous instruire de tout ce que vous « 

devez; fçavoir? pendant que j'ïray à ^ 

parte pour faire venir voftre ûlsÈ *c 

qui efl ailé die* Menelas pour taf- m 

cher d'apprendre de vos nouvelles* « 

de découvrir fi vous elles en- « 

core vivant. « 

aïs, fage Minerve, répondit m 

TJIyfle , permettez - moy de vous m 

emander pourquoy vous ne IV * 

yez pas informé de ce qui mère- « 

arde, vous qui fçavez toutes cho- « 

fes. Eft-ce pour le faire errer com- « 

me moy fur la vafte mer avec des « 

eines infinies, pendant que fm en-

4) a L J O D Y S s E 

* Ne foyez point en peine dcvoi- 

3» tre fils, répondit la fage Minerve, 

v je iuy ait fait entreprendre ce voya* 

» ge, & }e Fay conduit moy-mefnie, 

» afin qu'il fe fiï!: une bonne rép^ 

» tatioïi, li ii'efl c^pofé à aucun dan* 

» ger ; il eft en repos dans le Palais 

» du fifs d'Àirée, où il eft traité avec 

i 

» Beaucoup ae magnificence 

?% 

?

HOMèRE. Livre XIIL 45^ 

fuir. LaDéeffe changea fcs beaux 

habits en vieux haillons enfumes 

àrapetaflez qui Iuy fervoîent de 

manteau, & par delîus elle l'affubla 

d'une vieille peau de cerf dont tout 

le poil cftoit tombé, elle iuy mita 

h main un gros baÊon, & fur fes 

dpauies une befaee toute rapiécée., 

qui attachée à une corde5 luy peudoit 

jufcu'à la moitié du corps. 

:éb que la Déeffe & iuy eurent 

pris enfemble ces mefures, ils fe 

leparerem, & Minerve prit le chemin 

de Sparte pour Iuy ramener 

l'on ils*

«©$ C*ÎÈ*(i«^€^>e^È^«f*46*4«iJHS&> 

EMARQUES 

UR 

L'ODYSSEE D'HOMER 

M H I vw«Mi . 

£ I V M E XI1L 

Page 

4i6* 1 V «*'«& ont eu à YentendreX Car 

le plairfïr que donnent c» contes U 

avec tant

JREMABQ* SUE J/OPYS. Lh. XÏIL 455 

teus mfemèfe! mus venons de boire avec 

*t€ iitvkî\ li parle de Demodocus : fa table 

d'Akmoûs n'eftoit jamais ans mufique. 

@f/£ yâus, qui par VUS cûnfeih m'aydei a 

gvuvtTîter mis peuples ] Âlcinoiis 611 bien 

voir encore icy la fhperiorïté qu'il avoît fur 

îes douze Princes qui compofoient fon coiffe 

il Ils ne gouvernoient que fous ïuy, & Alcinoiis 

avoit la principale autorité, comme 

je lay expliqué fur le v 111. livre* 

Mais que chacun de mus tuydoune en- 

4m wi trépied i? une cuveUe~\ En vérité les 

contes qrfUIyfle vient de faire valent Hm 

tfn prêtent en particulier. Homère içait bien 

relever le mérite de la Poëfie. II n'y a rieti 

que ces tables, fi ingénieusement inventées, 

n'arrachent à de fins connoffleurs, mars pour 

ces gens groiliers dont les oreilles par une 

cire naturelle font bouchées à cette douce 

harmonie* 6c pour qui les Grâces mefmes 

l'ont point d'apaft, ils ne daignent pas les 

recevoir, ou s'ils les reçoivent par vanité 3 ils 

les renvoyent fans honneur par ignorance, 

comme dit Tfeeocrite, dJù^si émmf^îi, 

& chacun dît»

45 C REMARQUES 

Amajpms du bim, fr que les Dieux bemi 

fem les Poètes, On peut voir (t\t cela la j & 

idyiJe de Theocnte, qui femble pius lgiït 

pour noflre fiede que pour k ûen. Akiiîous 

faitîcy le procès à tous ces barbares qyj 

«'honorent pas îes Poètes, car après avoir 

comblé LIiyfle de prefents3 comme fou hoi 

te* if lay en fait de nouveaux en partictiliei 

pour honorer (es Fables

SUE L'OBYSSE'E. LmeXJÏL 45^ 

-onfdter, & qu'ils retirent enfuite par .«oc 

impoiiïion 

Page 41 y » Rendît le repas délicieux p&r 

(es chants ] Homère ne s'a mu Te pas à rapporter 

ces chants a comme il aurait fait ea 

une antre occafion , car le temps prefle, & 

cela ne pouvoit s'accorder avec Fim patience 

cjti'Ufyjfe avoit de partir- 

Page 420- Veuillent les Pieux les rem* 

ffre heur MX pour moy] Homère a donc connu 

cette vérité, que fes Princes ont beau 

nous Aire des prefèns & nous donner ton! 

ce qui nous eft neceflaîre, tout ceia ne nom 

Jert de rien fi Dieu n'y répand {à bénédiction 

, & ne fes rend fieureuK pour nous, autrement 

ils nous leroient funefies. 

Et que les Dieux vous donnent toutes les 

'jriiAjj qu'ils répandent fur vous a pleines 

Faim toutes for Us de prefperke^ Homère 

ditçccy en quatre mots, 3ftci *fl'aptiùv èml* 

mm naiirjùiUfih Que les Dieux vous donnent 

tonte forte de vertu* Sous ïe nom de vertu, 

if&inç, il compreriok toutes les fortes de 

profperites, wmûhC^ parce qu'ils les regardoient 

comme le fruit de la vertu. Je croy 

que Calîimaque a expliqué & eftendu ee£ 

endroit, quand il a dit dans Ion Hymne à 

Jupiter 1 

S > "M »/ */ 10 

Tom$ IL * V

1- 

4-to RIHAKQlHi 

JV? les richéffes ne pemem rendre les hem. 

mes keuremfans la vertu, ni la venu Jan^ 

les mhejfes* Dennei * nûus dâm , grand 

Dieu, les tkheffes ir la vertu* 

Page 421. Utyjfe fini fe kva> ifpYefen* 

-tant fa cûupe à la Reyne] Ulyiïë fe levé » & 

après avoir fah la libation debout, il prefente 

fa coupe h h Reyne pour la prier è 

boire h première, comme ceftok la coutqme, 

& c'eft ce qu'ils appelloient *®p$mmh 

Je croy l'avoir desja remarqué. 

je 42^- j&* achevant ces mût s 

fer in de lafallej Je me (00viens que la pre 

miere fois que je Jus Homère , & j'eftw 

afors fort jeune , }e fus un peu âfcîiee qu'il 

fyffe euft oublié la PrinceiTe Naufict?, & 

qu'il ïi f y eoft pas îcy un petit mot pour elle 

Maii j'ay bien connu depuis que la Pcmcefîê 

n'eftant pas prefente, car eife n'affifloft 

peint à ces feÛ'ms » Ul) fîe tfm devoït pas 

parler, de peur de donner quelque Ibupçon, 

D'ailleurs les voeux qu'il iàit pour elle font 

renfermez dans ceux qu'il fan pour ie Roy 

& pour la Jteyne dans îe compliment admirable 

qu'on vient de lire, 

Page 4^4.. Quand la brillante efhile^d 

mumet Varrivée de l'awmfi kv^ k w{

siiB. L*00Y35E'E. LmeXIIL 4,5 f 

eau d'Ufyf* aborda mm terres d'Ithaque 

Ce vaiffeaH arrive deCoreyre à Ithaque m 

une nuit, & la véritable dîftanœ dea lieux 

fait voir que cela eft pofïibie. Homère e£ 

toit donc tien inflruit. Mais comme il a 

dcpaïfé cette ilïe des Pbeadens, & qu'il la 

tranfportée dans l'Océan , cette diligence 

ferdt incroyable s'il tie J'avoit ftuvée, en 

nous averti fiant que les vaïïTeaux dei Pheacicus 

voloient plus vïfie que I epervier, 

qu'ils cgaioîent fa rapidité de ia peu fée. 

•m 

Appelle le part du vieillard Phûreyne _ 

Phorcyne, ou Phortys, eftoît fîfe de l'Océan 

h de la Terre 3 ce port d'Ithaque luy eftoït 

cc*ofacré fie il y avoir peut-eftre un temple. 

Ce port exiftoit fans doute du tempsé noir: 

ère* & s'il «eft plus aupurd'huy, il en 

j/utaceufer les fiecles qui changent tout, 

Et prés de ce fans efi un antre jnspmd 

b 4 dtlfcieuiï ] On prétend que cet antre des 

Nymphes eft une allégorie qui renferme 

tin myftef e très profond* ires merveïlïeuic 

Le fçzvant Porphyre s'eft occupe à f expliquer 

dans un Traité qu'il a fait exprés» & je 

croy que c'eil I antre de Platon qui luy â 

donné cette idée. H dit donc que cet antre 

c'eft ce inonde ; il eft appelle ûbkur & mrêûr - 

WSf, f^poaJfcf, tm&Lbfi objeur% parce quii 

eft ait d'une matière qui eftoït tenebi^ô # 

Vii

,460 R SMARQUIS 

M fans forme , & agi cable, parce quTî efl 

devenu agréable par Tordre & par l'arran. 

gement que Dieu y a mis ; Il cjl cûnfaçjé 

aux Nymphes, ceft à dire, qu'il eft deflinc 

jpour l'habitation des aines qui viennent à 

la n aisance ;. Ces urnes j? ces cruches de 

èciies pierres, ce font les corps qui font pa les empef* 

chent de fe corrompre ; Cet ûuvrage merye& 

kux que ces Nymphes font fur leurs mcf!krs} 

c'efl ce tiiîii admirable de veines, d'artères 

& de nerfs qu'elles eilendent furies os com* 

me fut des mçïifeps; Les fontaines qui ar« 

refont cet antre, ce font les mers, les rivières 

, les cftangfl, & les deux pur tes s ce font 

îes deux pôles ; ceîle qui eft au feptentrion 

rit ouverte aux âmes qui defeendertt à la 

vie, & celle du midy eft ouverte à ces met 

mes âmes qui s'en retournent au ciel. Voifà 

un précis de l'explication de Porphyre i elle 

eft tics îîigenieufe & très vrayfemblable Je 

fuis pourtant très pc^luadée qu'il y aura bien 

des gens qui diront que jamaïsHomcrena 

penfé à de fi grandes merveilles & qu'il n'a 

fait îcy que Cou meiljer de peintre. Qui ne 

fçait que h$ peintres pe'gnent Ipuvent d'imagination 

Iffls autre défiera que de plaire 

aux yeux I Cela eft vray t maïs ce n'eft pas 

h raeibode d'Honiere. Poqr fondai: cette

t.UR L'OUYSSE'E* Livre 1711 ^6T 

*xpïication de Porphyre on peut dire qu'à 

cft certain que daoj ces anciens temps, ces 

fartes d^îfegories eft oient foiï en vogue ; 

mu$ n'en pouvons pas douter, puifque Sabinon 

lay-mefee dans le dernier chapitre 

jde fEccfaïafîe, en a fait une très belfe fui 

feftat oit fhomme fe trouve dans fa vîeït^ 

lefîe- Toutes fes parties du corps'fcnt defi^* 

gnées par des figuçes très juflfcs & qui leà 

tfiprî mcn t parfaitement* 

Page 42, 5. £* /ewr yaiffeau avance dans 

Us terres jufques à krmûiué de fa langueur^ 

Jx voila une grande marque quils conooîf -4 

ftjïent ce port, car slb ne l'avaient pas coït «p 

nuf ils n'auraient ofê pou fier û fort leur vai£ 

u contre terre pendant h naît 

Us dépendent à terre, enlèvent Vtyjfô 

iûut endttmi, i^texpqfmtfur k rivage fan^ 

fid s'éveille ] Cette expofition d'Ufyffe 

îout endormi a efté bkfinée des Anciens* 

comme peu vïayfemblaMe. Hutarque dans* 

Ion Traité comment il fimt lire tes Fuitesy 

nous apprend que les Tyrrhemens, pour la 1 

fonder en quelque forte, fatlbient des Jhïf^ 

toires par lelquelfes i[ paroijfoit qu'Uîyfîe 

eftoit naturellement grand dormeur, ce qui 

ftïfoîi qu f on a volt fcuvent de h peine à 1 uy 

parler. Maïs comme cela fie feur paroïfîbîc 

pss encore fuffi&nc pour juftiffer ce conte 5» 

'fe difoient que cç ionimeit d'UIyfll* efloi S- 

m

4£ REMàEQWES 

un fommeil feint % car ayant honte de reit, 

vçym îes Piieacîens fans les recevoir ch« 

luy & fans îeur faire des prefens* à ne pcm* 

vant îe faire fai^s eitre reconnu, H fit km, 

blant de dormir pour éviter tous ces inconyenrents. 

Mars de tons les Critiques qui ont 

parié de ce pâiTage d'Homère, Àriftote tft 

ceiuy qui en a Je mieux jugé. £>

Sun I/ODTSSê'ê. UmllIL ^é$ 

jûté de cette abfardité » & ne pouvant I* 

changer, if sera eft fervi pour rendre le refte 

vrayfembfable ; car il faifoît necefîairemetiç 

qu'Ulyflè abordaft feol h Ithaque, afin qu'I 

puft y eflre caché. S'il euft efté évcIUé, îes^ 

pheaciens auroient efté obligez de ïe fui* 

^re, ce qu 1 UJyfTe n'a u roi t pu ni refufer bon^ 

nefiemenc > ni accepter avec feurefé. Homère 

n'a voit pas d'autre moyen pour dé** 

nûixer heureu feraient û fable. Et pour ca^ 

cher cette abfurdîté il ramalïê tout ce qulï 

a de force & d adfefle » & jette dan* cette 

partie de for* Poëme tant de chofes merwùkuCes, 

que Fefprït du Ledîeur enchanté 

ne peut plus en aucune manière s'apperce^ 

voir de ce défaut, il eft fur cek aufTrmdor-* 

mi qa'Uiyfïe, & il ne fçaît non plus que 

hf comment on fa mis4à. Cefl Fendrai! 

d'Homère le plus orné par ies fiéliom 

t ^ 

h pius travaillé pour fe Jftyîe- Si j atoîs pu 

conferver dans ma Proie les beautez dfe fês 

vert & faire fentir leur harmonie, je fui* 

Jeure qu'il n'y auroit point de Le

#4* ..'.'REM A* QUI 

cette^ritii^Tef d'Homère efttres ïropQjv 

tant & d'une tré§ grande utifûé ; i/y^j 

referver $ dil-ïl9\ tous l&s ornements de 1$ 

difâim pour les endroits foibks j ceux qui 

renferment de béante fentîmems mi des 

mctutsn'en ont aucun bepin j um expreffon 

tifckttante irluminmfe leur nuit au contraire 

> if ne feri qu'à les cachât* 

Page 42p« Qtiand tout le peuple fera 

fêfti de la ville pour voir arriver ce vaiffian] 

Il y a un air de vérité merveilleux clans k 

manière dont fe fait ce prodige ; e'eft Jppi* 

for qui ordonne Euy~mefme comme iï doit 

fe Eure * & eeft à la vuë de tout un peu-. 

4 » 

pic que Neptune fait cette metamorphofo 

Peut-on douter d'une choie qui a un fi 

grand nombre de témoins i Voilà iadrefle 

du Poète pour rendre croyables ces contes* 

II y a de l'apparence que cette fable eft 

fondée fur ce qu'il y ayoit peut-efire prêt 

de Corcyre quelque rocher qui aYoit à peu 

prés fa figure d'un vaîïleau. 

. Et cû?iforyei4uy la figure de vaiffèau, afiïï 

fue tous ks hommes dans tous les temps J 

Car c'eït cette figure qui le mettra en eftat 

dcfîormcr & d'inftruire toute îa-pofteritéj 

parce que tous ceux qui fe verront, frappez 

de cette ligure , ne manqueront pas d'en 

demander Ta raifen* 

Et le pouvant du plat de k main, ii l*

SUR ï/GBYSSE'E. lÀmXÏU. ±6$ 

éaïïge en un grand rêtkef\ Vofcy une me* , 

tamorphofe bien merveîlieufe, mail eft-eilc 

Tiayfemblabïc i oiiy lans doute, apiés tou~ 

tes les mefures qu'Homère a prifespour cri 

fonder ia vrayfembîance & pont en eftablir 

}a vérité* Àiiitote, Foëtîq. chap. 25, nous 

apprend que dans le Poëme Epique on a < 

U liber ré de poufler le merveilleux au de-Ià 

db bornes de h raifon. M faut* efit-îl,/?;ter 

le merveilleux dans la Tragédie, mais 

encere plus dans l'Epûpée f qui va en cela 

jufiju'au déraifhinabk. Et il en adjoute la 

rgifbn, Car cûmme dans l'Epopée mi ne wifi 

pas les perfonnes qui agîfem, tûut ce qui 

pajfe les bornes de la mtpn ejl très propre 

à y produire f admirable ir le meryëîkux* 

Si un Poète tragique expofoit à nos yeux un 

wfifeau cfcange en rocher, cela ieroit ridt* 

cette» car nos yeux le dementiroienr dans le 

raoment. Maïs dans F Epopée il n eft point 

démenti, parce qu'on ne ôit pas la chofè & 

qu'on ne i apprend que par le récit II ne 

faut pourtant pas s'imaginer , comme M* 

Baaar i'a remarqué dans Jfes Commentai 

tes, qu Ariftote confeïHe aux Poètes de mettre 

dans ie Poëme Epique des chofes évidemment 

impofîibles ou incroyables ( & 

qo'iï kur donne une pleine iiœoce de les 

porter à un excès qui détruîfe ouvertement 

la vrayfembfance & qui choque la railbn* 

Comme ém$ ia Tragédie îe vrayfembUble 

V ¥

4

SUR L'ODTTSSîfE. Livre XÏÏl ±€^ 

Virgile. Il faut encore, comme l'a fort bien 

-gm^roïié l'Auteur du Traite du Pûèmz 

vue, que imites œ$ machines, qui exîjd 

h Yrayfèmbkrtce dMoe, forent éé^ 

gées de radtîon è& Poème, de telie forte 

qaç ïon paiffe ïes en retrancher fana deA 

troîre cette aélion $ mm? celles qui font ne*» 

cefiaires à Faction & qui en fon c dei parerez 

effencîeîles, doivent eflre fondées fur h 

Kayfemblaiïce humaine & non for h fimpfe 

puiflâiice de Dieu. 

Page 4 3 i• Et les vûiîà à mûkîé œceûm* 

plies* Mais aifans, executms tûus tordre 

que je vais dmner] Vdcy un oracle formel 

qui contient deux menaces. La première 

efl accomplie par le changement do vaiffeau 

en rocher. L'autre n'eft pas moîm fore 

maïs Àkïnoiis croit qu on pourra fa preve 

nir, en déformant h colère du Dieu qui eft 

Smié* Altinoiïs, c cil à dire Homère, con-« 

noiflbre donc cette vepiccertaine, que Diea 

n'accomplit pas toujours fes menaces , & 

qu'il fe faifTe fléchir par le repemîr de ceux 

4^8 REMARQUES 

point que la feeonde menace fut cffeAnfc' 

& il itou* Ymmlt dit fi elfe favoit efté. 1} 

Mt entendre que Dieu fe laîfïë flechii, % 

que lors mefme qu'il a commencé à punir, 

par un retour à fuy on peut arrefter fou bras 

preft à frapper les dernier» coups de k vci:-. 

geance. Les Payens avoïent ces fentimems, 

comme l'Efcrimre mefme nous l'apprend 

par l'exemple êm Niuivites, & cette iiiftoire 

eft à peu près du temps d'Homère* Quand 

Jonas leur eut annoncé de la part de Dîçi 

que dans quarante jours leur îïie feroit de£ 

truite, ifs firent pénitence, rïiumîferem»& 

dirent t Qpis fih fi c^mertatur if ignofitA 

Devs, S 0 rsvertatur à fur&re îrm fum,t 

mn pmbimus, Qjû fçmt fi Dieu m fi re* 

pmtirœpûintr s'il m pardonnera point* *'& 

ne renoncer* point a ïa fureur dé fa cdm% 

ir s'il m nous mpefeher* pas de ptnu 

11 en ûfiûh ûbfmt depuis trûp bng-tentps 

Vingt ans ne fuffifent pas pour rendre um 

terre méconnoïflàfcde à un homme qui y 

eft né> êiqm avok desja quelque âge quand 

il j'a quittée* Mais cela rend le mirade de 

ce changement plus aifé&pluswayfembk- 

We- 

La Dhffe Minerve lemeloppa fut k 

thamp d'um ejpais nuage f afin qu'il m pufi 

la reconnûifire] 11 nre paroift que ces derniers 

mots, afin qtfîl m p&Jl la monmifim 

4

su E L' O D Y s S E'E. £iw# JS7//. 4 g> 

ont eéé mal pris par les Interprètes : le 

Gwc dit, i?e^ M4f m%v % &.^mç$y riu%m¥* 

Et on Fa expliqué» **^ ^ tempe/cher d'ef* 

tre ncmnUi Et iUum ip/hm ignawm facent* 

Ce rfeft point du tout là le feus, Minerve 

n enveloppe point Ulyfle d'un nuage pour 

le rendre inconnu, maîf pour Juy rendre 

fa terre méconnoifïable» pour lempefcher 

luy de la reconnoiftre. Ce nuage efloit pour 

iuy comme un verre qui change oit k face 

des objets- Les Interprètes ont £it cette 

faute , pour ne s'eftre pas apperceus qa ? rcy 

tyw&ç n'eft pas feulement paflifa mnïsaufïi 

adif, c eft à dire » qu'il ne ignific pas feulement 

fia n'efipûînt cennu, mars auffi fui ne 

tennotft pûînt ; aytmtç efl comme dyvèç$ 

qui eft ailrf & paffif » comme nous j'aflenre 

le Scholïafte de Sophode fur TOëdipe «, mw 

Kpimcf, H^J tf*rt' « /w« JMHWW. H fautfça* 

veir, dit-iï f f &?£ /# jftrt dyr^ç fi trouve ï/nployé 

peur dire celuy quieflimûnnu, irpûhr 

ttluy fui ne cûnnmft pûint* Et une mai que 

fcure que lyvmmç a icy la lignification active, 

ceft qu'Homère nous dira dans la fuitea 

La Déefe dtffipe le nuage dûm eiie tmm$ 

tnvebppi, ir a Un fiant U recomeifi h terre 

fui l'avait MûurrL On a iâir des fautes innies 

en cette langue pour n'avoir pas pris 

garde à cette double Signification de certains 

mots. « 

"H,

|7 ô REMARQUES 

Vmïà pëurqucy cette Déefe fit qm tm$ 

h fam du pays hj pœut changée^ Car il] 

Favoît reconnue» H ferait peut-dire alié 

droit à h vilte fans aucun ménagement, & 

ftîîs prendre les mefbres neeeffaires posï 

tirer vengeance des Poursuivants. Il auroit 

cfté reconnu , * par4à fes affaires efloiem 

minée§. 

Page 434.. Grands Dieux » fo Princes 

if Chefs des Pheaéens n'e^ment donc pas 

fif&ges ni fijujies! ] Le Grec dtt, n'ejtment 

pas fi prudents ni fi jiifi$s> ttipanç odJV 

h Et cela me parorft remarquable, 

omere fait toujours entendre que h prudence 

veut toujours cpie Ton foit jufie Er* 

effet on n'eÛ famaîs injufie que par ignorance, 

par imprudence. 

Mais il faut qu& je tmpte MUS mes èrefats, 

& ftte /*? vûye fi ces perfides J Uîyfîè 

ne compie pas ié| trelbrs par an efprït d'avarice 

dans fa crainte d'en avoir perdu une 

partie» ceia ferofe trop miferabie, for-tout 

dans Feftaî où 11 eft. Mail ii £àt cette revue 

pour avoir des preaves certaines defe 

jnauvaife fcy ou de la fidélité des PheadeiU; 

or s1!s ont emporté une partie de ces rïcheiTes, 

il n J a plu$ à douter de fon malheur? 

& s'ils ne luy ont rkn pris, i! doit fafpendre 

fotï jugement , à: attendre d'eftre efclaird 

d un myftcre cjû'ii n'entend point. En quûy* 

dit Plutarque t il nufi pas d& mauvais in-

SUE L'ODYSSE'E. ImeUll 4 7^ 

$&s> iffaprudmci m ce fait ejî digne d$ 

Page 435* SûUS h figure dunjenm ht» 

mf hm> bien fait, m bmm mms i? td 

qpe peuvent âfire tes fils des plus grands 

Rty s ] ^ ette image n'eft point outrée pour 

un iiecle comme celuy-ià, où les ftl§ des 

oys pafïflbiernïes troupeaux, comme nous 

j'g\ons vu dans f Iliade. 

Itavûkjurfes ejpautesim mamem d'une 

folle êfl&ffs msfim] Homère adjou te Jlïflit* 

^ ce qui ne fîgmfiepas double, mais afîen 

ample pour eftre mis en double en le portant, 

car les Grecs appelloîent St^ûîék9 

duplieçm, un habit d ufie grande ampleur, 

& qui en cas de befem pouvort eftre mia 

en double 9 car > comme |e Fay rein arqué 

for k K, Liv« de i'IIîade, tom» z> pag. 481^ 

ii ne parorfl pas qtie îes anciens Grecs ayent 

connu fufcge de doulîer les habitf. Helyehius 

pourempefeher qu'on ne fe trompait 

à ce mot» Ta fort bien expliqué, Atwfmm^p 

%$£%{• On appelle êlTiAnnm & é'ïïkbm mi 

manteau deuble, un manteau fart ample $T 

qu'on peut pût ter m d&ubk^ Ii ditlarnefrne 

chofe fur J)moîJkt car il définit pafr ibs^n* 

ptïtw x&ttftiJk ôK W" ?Q/>«c9ttf, un manteau 

qu'an peut mettre en dmbfc m k pûrtam* 

Cela paroift iaamteiiablemeat par mot paf-

4M 

47s ItEMAIQU ES 

fage du x x 11. Lfv. de l'Iliade, ou Homère 

dit qu'Ândromaque travaillât fiir {e mef, 

lier a uw ouvrage de broderie, & il appelle 

cet ouvrage *Jfe* mus, jmpfmfiiut, dûubk if 

brillant* Un ouvrage fur le meftier eft-il 

double î 

Quelle eft cette terre, quel eftfin peuple^ 

it quels fûM les hmmes qui l'habhem\ 

Quelle eft cette terre, eeft à dire» dt-eîle de 

l'Europe ou de l'Âfie l Quel eftfm peuple', 

c'eft à dire, quefie nation eït-ce l Quels jont 

ks hommes î font-ce des hommes polis on 

fâuvages* juftes ou ïnjwfles ! &c 

Page 4,37. Les chèvres ir les bœnfs y 

trouvent despaftwages excellents] Minerve 

exagère un peu en parlant de la bonté de 

l'jiîep& cette peinture eft fkrtce. Il y avoit 

de boni pafturages pour fes chèvres, car elles 

païflent fur les rochers, mm iî n'y en 

avoit point pour les bœufs* & il falloît qm 

•eux ifUlyfle fuflent dans le continent vot- 

Enfin? effranger, le nom d'Ithaque eft fur* 

tvut cûrmu dans les campagnes de Troye} 

Qneîle politeffe il y aicy, & quelle louange 

fine pour Ulyffe ! 

Quûyque cette ijle Jmt fart hin de fÀeèaie 

] Car e!ie eft au couchant du Pefo* 

ponnefe. Quoyque cette iiîe fuit prefque 

h plus eloïgnce par rapport aTroye, eue 

eft oit pourtant plus cckbre que tous les 

%

utres pays q a * avoient envoyé des troupes 

l cette expédition, û grande eftoit la gloire 

'Uiyfle- 

Page 43 8- ^4 m#/tf ^202 meurtre quefay 

cffmnàs, m tuant le fils d'Idommée] Les 

ATîCîCïIS font remarquer icy une grande fiïie/ïe 

d'Ulyflfii qui dans la vue de s'attirer 

Ja protection des Pour fui van ts, feint qu'il 

a tué le fifs d'Idomenée, grand ami

474 REHAHQUIS 

JE* parfaitemffit Men élevée ] Le G^ 

dit i Et mfirmte ètam les plus faaux mm^ 

gês* Mais comme eek ne peut pas paioîflfe 

à une première tûë, & que ce n'eft qu'imç 

préemption, fay mis parfaitement Men êk 

yè$P car la bonne éducation ne laiffe pas 4 

parotflre à un premier abord. 

Page 44 u Mais laiffbns-là ces m®* 

peries que nous cmnmffms fi bim îûUI 

deux, car fi VûUS ejles le premier des mer. 

iefs) Homère, pour faire entendre que cette 

diflimuîanon perpétuelle d'UiyCe qui ie cache 

ton jour tf 

$f eft une diffiraulaîion de pru 

dence s & que ce caraélei e cil très eftïma 

bh & très ioiiabîe, fait que Minerve eliemefme 

le îoiie & quelle k prend, car elfe 

fc déguife icy en berger, comme Uiyflc Je 

déguife en Cretois. LaDceiîe fe découvre 

b première, & îoiie Ulyfle de ce que cet 

dégur/cmerrts luy eftoïœt fi aifea & il naturels. 

Tous les deguî/ements, que h pru* 

dence fournity & qui font dune nature à 

«ftre mtotî&z & ïoiiez par h Déefle mefme 

de h fageffe » font honneur à celuy qui 

s'en ferk Il y a dans ce paffage beaucoup 

dadrede, & ce qui me paroiït icy trei admirable, 

c cft l'éloge le plus ingénieux & le 

plus adroit qu on ait jamais fett de ces fa 

blés f de ces contes, car c'eft Minerve elle 

mefme qui dit que ce font des inventions 

„ue k fâgeffe & fa prudence fuggerent*qui 

i 

m 

stfit L'ODYSSE'E, LiwXilL 475 

ont d'une grande utilité» &daos lesquelles 

cette Déefle fe vante de fuifpaffer tous tel 

pieux, comme Ulyfle y furpafïè tous les 

homme** Qui ne voit qu'UIyfle eft icy Hoinere 

Juy-mefme, & qae cet éloge Jwy appirrierit 

véritablement ! 

Page 44-4- £#/* wy ^ w*w £/?#J A» 

homme/âge» d'un ejprit tmjûurs prefent if 

plein Je modération ifde prudcnct\ Voilà 

donc Jeton Homère les gens que Minerve 

cherche pour îeur accorder fa p*oieélionr 

ceuK qui ont de la fegefle» de fa prudence 

& un efprït vif & prcfent» les autres ne doivent 

pas prétendre aux faveurs de cettç 

Page 445. Tirât antre qui rmâmdrmi 

d*un veyûgt auffl long] Vorfi «ne grande 

marque que Minerve donne de la fageflê & 

de la prudence d'IMyfiê, le peu d'impatient* 

ce qa'il a d'aller apprendre des nouvelle* 

de là maifon après une û longue abfence» 

Sa induite eft telle que VMspmmi ta 

de^rer, car elle efitçujmirs enfermé* dans 

Vûftrç Palais] Homère eft îe premier homme 

du monde pour faire des éloges fimpïes 

& naturels, qui font à mon avis les plus 

grands de tous les éloges. Quel éloge de 

Pénélope ! & par qui ! par Minerve elfe- 

Page 446, ~2tf achevant tes mets, à

47 tf REMAEQ0 1S - 

Béeffk difftpa k nuage dont effe Fawit r/„ 

nrûnnê, èfdans t'mjîant il reconnut fa Un A 

Il parorfidonc par-fà que Je nuage dont jVîi 

serve svoit enveloppé Ulyfîe, neftoit pas 

pour fempefeher d'eftre reconnu, maïs p*Lr 

îempefcfcer de reconnoiftre le pays d'IAs- 

sa m I/QDYSSE'E. Lhn XIIL 477 

c mordre la pouflîcre aux plus hardis, & 

foncier ie temps k Ajax.de venir le degagci. 

Mais ce qu'il y a de plus remarquable 

dans ce pa/îage , c J efi ce fen liment d'Hojncre. 

Il a connu cette grande vérité, qu'ira 

homme alîifté par un Dieu, non feulement 

114 rien à craindre, mais qu'il eft raefme 

fetir de triompher de toutes les iorces humaines 

qui s'uniront contre luy, Ccft fa 

mcfmc thofe que ce que David dît phê 

fortement encore: il cmfijîant adverfum 

me coffra* mn timehit cor weum* Si mur gai 

o&ierjitm me prtv!him,m hûc £gû fperabû* 

Si uw armée 0jîâk rangée en bataille centre 

my* je m la crmndreis faim* Si elle m'at^ 

taqmt 9 j'qfpercïpis de la vaincre* Pfiim, 

z 

Page 450. Qitand nous exécuterons ce 

pand expfoh'] EiJe ne dfî pas quand mus 

émanerez, mais quand mus exécuterons* 

la Déeïîe fe met eîlc-meftne de h partie» 

jfin que le JLe€leur ne fok pas Ibrpris. lï y 

a bien de Fart dans tous ces tmts. 

ha faîte dufefîin ] Je a'approm e pas icy 

k remarque d'Euftathe, qui veut qu'on exjjlique 

i^m^y ^Jk^9 h terre d*Ithaquef ?W 

iwwF, parce, di*-iff qt/me fatle eji trep 

peau pûur ejïre appeîlée dernier, immeïïje* 

Ceft une erreur j «OTIW ïie iiguiie que 

'aciéufej vqfUj une faite où îanï de Pris-

47§ R uiiRyu ES 

ces faifcïent leurs banqueta pouvoir f^ 

bien eflre appelléc y^» «xWtsr, *iW ^ 

r**;*;. Hcfych- 

VûJIrefdetfe Bornée à qui yous mei é^ 

ne l*intendance de VUS trtwptaujcj I_çS j^ 

tendants des troupeaux efioîent des hom* 

mes confiderabteSj comme nous le voyons 

dans TEfcriiure hmte* J'en ay fut aiiiemi 

une Remarque que je ne repeteray point 

icy- 

Page 4 5 J. i#r /^ TWA* Cûracïenni] Ai ni 

nommée à caufe de faccident d'un |cun& 

homme appelle Cûmx^ qui s'y tua en pourfuivant 

un lièvre* Sa in ère Ai eth ufe au ce* 

fefpoir de Ja mort de Ion ûk, fe jetta dans 

une fontaine voifîne où elie Je noya, à u 

fontaine fut appelée de Ton nom. 

Page 4 5 3 * £

!• 

! 

s un I/ODTSSE'Jë. LhreXllL 4,79 

riare du Poème. Et ces neuf Livres comprennent 

toutes les avantures & h$ erreurs 

i) Ul>flfe, & tout ce ^ l Q J e ^ arrive depuis 

fon départ de Troye jufqu'à ce moment, 

c'eft a dire huit ans & demi » qu'il réduit à 

peu de Jours p£r le moyen de la narration. 

£t toutes ces avantures ne font point des 

parties détachées & des pièces étrangères, 

mais elfes font avec ferefte tout ïe fujet du 

Poème» puifque YOdyffée n f cil autre thofe9 

félon i expofkion d'Homère mefme, qttê le 

tecit des amnmres de eet homme prudent, 

m m 

après m&w rténé lajacrée ville de Trûye, 

jfuî errant plufieurs années en % différents 

pays, vifita les villes de plufieurs peiïples, b* 

'offrît des peines iiïfînics fur la mer pendant 

qu'il travaillûk à fmmr fa vie > ir à 

procurer a fes Cûmpœgnûns nn heureux re~ 

test. Et c'efî en quoyil faut admirer Fart 

du Poe te. L'acïion de F Odyilce eftok trop 

longue pour eflre continuée naturellement 

tout du fon g comme deffe de Fllîade qui 

fort courte ^ c eft pourquoy Homère a 

eu recours à l'ordre artifice!, en commençant 

fon Poëme j5ar les incidents de fon 

action qui font arrivez ïes derniers félon les 

temps, & en rappellent enfuîte par la narration 

tous les autres qui ont précédé. 

U oe prend pour la matière de h narra* 

,*k>n que ce qu'il y a de coiïtmu dans la un 

4% fon a£Hoo? & enfuîte il fait naifire quel-

i 3o REMARQUES 

tjce occafion naturelle & vrayiemMabJe 

reprendre les cliofes considérables & nCCç 

Pures qui ont précédé ces commencements 

& de les faire raconter naturellement ^ 

les héros mefmes de ion Poërqe. Maïs cçs 

detiK paires de l'action , dont fune efl ra* 

contée par le Poëte, qui la traite amplement 

éc avec toute la pompe & la magnificence 

que foa art luy peut fournir ; fie l'autre, qnr 

eft beaucoup plus ample par le nombre des 

incidents & pour fe temps, mais qui eft racontée 

par Je JhcroS d'une manfefepîus ferrée 

, ne composent qu'une feule & mefme 

aéliofi qui fait fe fïijet du Pocrne, Ainfi te; 

neuf Livres depuis Je i v. jufqu'au xi v. tjqj 

nous remettent devant les yeux tout ce 

qui BCÛ palîe aânt l'ouverture du Pocmc, 

ne font pas moins le fujet de l'Odyffie 

que tout ce que le Poète raconte Juy-mefme. 

Et l'on peut dire que le véritable ai 

du Poème confîfte dans cet ordre artificiel" 

qu'Horace a fort bien expliqué, & qup Yir* 

gife a fuivl 

Arerumefit

Argument du Livre XIV* 

£)# £$*& quitté Minerve f prend 

le chemin de la waïjôti d'Eumêe Kb* 

m arrivant il court vn gra»d danger, qu'il 

ev:te par fa prudence ir par le je cours de 

ççpajleur* 1/cftat oè il trouve ce fcrvkeuf 

pdeile ; le ben acciietl qu'il en reçoit, if 

l'cntietien qu'ils ont enfemble* Ufyjfc feint 

mûi cft de Crète ; il raconte les avant wes^ 

wi&es ftippefées M $T luy e^pife emmnent il 

r/f arrivé et Ithaque* Eumée fait unfacri* 

£ 

fL* m fa faveur if peur demander U ye** 

tûinr d'Ulyjfe ; le ripas d&nt ce jacrifice e_ 

phi* Après le fouper ils vent fe coucher 

La nuiï efl freide ; Ulyffe, qui meurt de 

fteH, demande un manteau pour fe CûUvnr, 

en faijant une petite hîfloire d'une 

ammire qui luy eflok arrivée dsv&ntTroyê* 

VîgJance dEumée pour les treupeaux de 

fc/i maijlre 3 if l'équipage dans lequel U 

fort de la maïfen pmr ûlkr pafer la nuk 

en rafe campagne» 

Q 

**»

^=st&m+**mm 

ODY 

D'HOM RE 3 

LJVR XI F. 

À I s UlyiTe en s^élojgm^ 

du port, où H s'efloît entretenu 

avec Minerve, marche par 

des chemins raboteux au travers 

des Lois & des montagnes pour 

aiïer au lieu ou la Déeffe iuy avoit 

dit qu'il trouveroit l'intendant de 

les troupeaux , qui a voit foin de 

tous fes autres paftcu» & de fa 

doineftiques. Ii le trouva ibus uij 

des portiques qui regnoîent toui 

u tour d'une hdle mail on InÛîe 

e groïFes pierres dans un Ii eu fort 

écouvert. Ce ferviteur fîdej

i5*llaM.E!lï. Lîf«XïV* 4§j 

YOit baliie de fes efpargnes $ fans 

11 parler ni à Pénélope, ni au bon 

vkiilaid JLaërte? au .milieu dun^ 

-cour fort vafte

4% -L 9 O DYSS Z'E 

kloxs il cftck afîïs fous ce portique, 

ira vaillant à fc faire une chaufFuie 

de cuir de boeuf avec tout ion 

poiL Trois de fes bergers cft oient 

slie mener leurs troupeaux en 

ferents paflurages^ & le quatrième^ 

iï Fa voie envoyé à la ville porter à 

ces fiers Pourfuivants le tribut ordinaire 

pour leur table. Les cliiem 

appercevant tout d'un coup Uiyffbj 

fe mirent à aboyer & à courir 

fur luy. Ulyfîe pour fe garentir^ 

Je couche à terre & jette ion bafton 

; ce Prince cft oit expofé-Ià û 

pïus grand de tous les dangers & 

dans ia niaifbn lîicfme, fi ce maiitre 

pafleur ne fuft accouru promptement* 

Dés qu'ii eut entendu 

Faboy des chiens , fon cuir iuy 

tomba des mains, il forlit du portique 

& courut en diligence à Fendrait 

oà il entendoit ie bruit. À 

e cris & de pierres il efeam 

enfin ces chiens, & ayant délivré 

yffe $ il iuy parla m ces termes ;

! 

1 

: 

1 

D'HOMERE. Llv. XIV. 4?; 

YieiHard, il s'en eu peu faïlu que £ 

ines chiens ne vous ayent dévoré; «c 

vous in auriez: expofé à une don^ ce 

leur très fenfibïe ék à des regrets « 

éternels. Les Dieux m ont envoyé

4§é L'ODYSSE' 

s fous avez fouffert* 

il achevant ces mots, il îe fai 

entrer êc le conduit luy-mefmc, 

J)é$ qulls font dans la maifon, d 

jette à texre quelques broflaïlies 

iendres qu'il couvre d'une grande 

eau de chèvre fauvage où il le 

ait afeoir. UlyfTe cÛ ravi de ce 

on acciieiï & luy en témoigne fz 

» reconnoilTance : Mon hofle, Iuy 

it-il» que Jupiter & tous les au- 

» très Dieux accompliffent tout ce 

» que vous defirez , pour vous re- 

> compenfer de la Bonne réception 

* que vous me faites* 

Divin EuméCj vous luy réponites 

: Bon homme, il ne m'eft pas 

» permis de méprifer un effranger9 

y> non pas mefme quand i[ feroit dans 

» un eftat plus jîtf^Sc plus 

a> Lie que ceîuy où vous eftes , car 

;» tous les eftrangers & tous les pau- 

3> vres viennent de Jupiter, Je ne 

» fuis pas en eftat de leur faire de 

» grandes chantez, il faut me COIî*

'HOMèRE. UV.XIV. 4H7 

tenter de leur donner peu, Q*cÛ4k « 

;e devoir de bons domeflique^, ils

^SS L'OlJYSSE'E 

«> n*eufl jamais \û la lumière du |OCï3 

& car elle a elle caufe de la mou 

ne infinité de grands perfonna- 

» ges. Mon maiflre alfa comme les 

m antres faire ïa guerre aux Troyens, 

» & aider Àgamemnon à tirer ven- 

» geance de l'injure qu'il avoil r«> 

» ceue. 

Ayant ainS parlé, il releva f* 

tunique à fa ceinture , & courut 

promptcnient à une des cfiables, 

Ji en apporta deux jeunes cochons 

; il les égorgea, les prépara 

ïcs mît par morceaux, & après les 

avoir fait roflir, il les fervk à U- 

Ïv/Te avec les broches nicfmes ik 

j 

îcs faupoudra de fleur âc farine : il 

méfia en fut te l'eau & le vin dans 

une urne f & s'citant aïîis vis-à-vis 

«TUIyfle ? il le prefic de manger : 

nger, lu y dit-il, mangez de 

» cette viande qu'on donne icy aux 

» pafteurs ; nos cochons engraiffex 

» font refervez pour les Pourfuî 

l vantt j gens fans conûdcratio

ft- 

I I 

t 

i 

D'HOMèRE. Lh.XÎV. 4 

fans mifericordc. Cependant les 

Pieux n'aiment point les injufti- ce 

ces ? ils puniffent les violences & « 

récompenfent les bonnes aélions, «: 

Les pirates mefmes les plus cruels « 

les plus féroces, qui vont à main * 

armée faire des dcfcenies dans les *c 

pais cftrangers, & qui après les « 

avoir ravagez & avoir fait un grand « 

utîn , s'en retournent fur leurs « 

\gifFeaux, on les voit tous les jours, « 

îrappez de ia crainte des Dieur? 

chercher à fe mettre à couvert de 

la vengeance divine.Mais les Pour- «s 

fui van Es perfeverent dans leurs violences 

fans aucuns remords. Àflcu- «t 

rcment ils ont eu des nouvelles de

4^0 * L'ODYJS 

» lence & fans aucun menaffemer. i 

* car & tous les jours & toutes ies 

» nuits iïs ne fe contentent pas d ? of. 

» frîr une ou deux vkîf mes, ils font 

» un dégaft prodigieux* nofîrc meil 

s> leur vin eft au pillage, en un mot 

s ils vivent à dtfcreiioo. Mon m&U 

^ tre avoit des xicheffes iranien f es 

*& avant leur arrivée ; il n'y avoit 

oint de Prince û riche ni icy % 

Jû Ithaque ni dans le continent ; les 

s> rïcheffes de vingt de nos pïus ri- 

» ches Princes n'égaloient pas les 

a fiennes > & je m'en vais vous en 

» faire ic déi?H. îï avoit dans le con- 

» tment voifïn douze troupeaux de 

n bœufs f autant de troupeaux de 

» moutons > autant de troupeaux de 

» cochons & autant de troupeaux ds 

» cilevtes* Tous ces troupeaux e( 

* toïent fous ïa conduite de fës ber 

» gers & de bergers cflrangeo f 

n îcy dans cette ille il avoit onze 

» grands troupeaux de chèvres qui 

* paiiïbient à l'extrémité de cette ifle

f I 

P^HOMëHE. Liv.XIV. 491 

fous les yeux de bergers fidellcs.

^ 

A >. I 

495 VOnt s s ë'E 

» donner l'intendance de fes trou 

» peaux, & que vous dites que h 

35 querelle d'Àgaraemnon a fait pc 

* rir! Apprenez-moy fon nom, afin 

» que je voye fi je ne l'aurais poin 

» connu. Jupiter & les autrès Dîeux 

» fçavent û je ne pourray pas vous 

* en donner des nouvelles & fi je ne 

lay pas vu, car j'ay parcouru dt- 

» 

» Ycrfes contrées. 

>y À h, mon aniis repondit ï'inten- 

» dant des bergers, ni ma maifbeilc 

» ni fon fils n'adjouteront plus de 

» loy a tous ïes voyageurs qui 

» vanteront d'avoir \û Ulyffe ; on 

» fçait que ïes eft rangers, qui ont he- 

>J foin d'affiltancc, forgent des men- 

» fonges pour fe rendre agréables, 

» &: ne difent prelque jamais la vc- 

» rïlé. Tous ceux qui paffent îcy 110 * 

a> cherchent qu'à a mu fer ma mail 

» treffe par leurs contes. Elle ïes re 

» coït, les traite le mieux du monde, 

» & pafle les jours à les queftionner ; 

s> eile efcouie leurs difeours, les boit 

* 

Kg 

*?

t 

'HOMèRE, Liv.XIV. 

avec avidité , s*arreftc fur tout ce « 

qui la flatte, & pendant qu'ils par- «* 

Jerit on voit fon beau vifage bai- « 

né de pleurs, comme c'efila cou- « 

tu me des femmes vertueufes dont « 

les maris font morts éloignez d'el- *c 

les. Etpeut-cftre qucvous-mefme, « 

bonhomme, vous inventeriez de

^6 L'ODYSSE'E 

» traiter fa femme & fon fi Es avec 

» tant d'info tence. 

Eumée peu fenfiblc à ces belles 

» promcfTes ? répondit : Bon horn- 

*> me, je n'efpere pas devons donner 

» jamais la récompenfe de ces bon- 

» nés nouvelles que vous m'annon* 

» cez, car Je ne verray jamais de rc- 

» tour mon cher Ulyffe ; maïs beu- 

* ve^ en repos, parlons de tout au- 

» tre choie, & ne me rappeliez point; 

*> un fi trille fou venir. Je n'entends 

J» jamais parler de ce Roy fi bon, fi 

» refpet5hbk> que mon cœur ne foit 

» accablé de douleur- L aillons-là vos 

» fermenis , & qu'UIylTe revienne 

* comme |e ïe délire & comme ïe de- 

» firent Pénélope, le vieillard Laèrte 

le jeune Telemaque* Le mai- 

» heur de ce jeune Prince réveille 

» mon affliction ; après les foins que 

» les Dieux avoient pris de luy, en 

» Télevant comme une feu ne plant e^ 

» j*efperois que nous le verrions en- 

» trer âms le monde avec diftinClioa

ÔMEEI. th. XIV. 4 

& avec efelat f ëc que dans toutes * 

les qualitez de l'efprit & du corps 

il égalcroît fon père; mais quelque ce 

Dieu ennemi, ou quelque homme c< 

33ial intentionné luy a renverfé i'ef- « 

pril, car i! eil allé à Pylos pour ap* « 

prendre des nouvelles de fon pere9 #c 

& ces fiers Pourfuivants luy dref- * 

fent des embufehes à fon retour 9 ec 

pour faire pcrir en luy toute la race « 

àa divin Àrcefius. Mais ne preve- « 

nous point les malheurs qui le me- «t 

nacent, peut-eftre perira-t-il, peut- * 

eftre aufîî qu'il fe tirera heureufe- « 

ment de ces pîeges, & que Jupiter ce 

cftendra fur luy fon bras puifîant* ce 

Bonhomme, Tacontez-moytoutes œ 

vos avantures, fk dites - moy fans « 

déguifement qui vous eftes-, d'où oc 

vous elles, quelle eft voftre ville, ce 

uels font vos parents f fur que! « 

vaiiTeau vous elles venu, comment m 

vos matelots vous ont amené à « 

Ithaque, & quels matelots ce font, « 

«r la, mer eft ïe feu! chemin qui ^ «r 

*

2* dans ïa niaifon de mon père 

» nia mcre qui m'ont éicvé avec tant 

yy de foin, La douleur que jVy donc 

T 

« plus voir ces cfiers pprcnls, que; 

•» que grande qu'elle foit , ne m 

» confie point tant âc larmes,. & je 

» ne fa fupporte pas fi impatîcra- 

» ment que cciïc de ne pfus voir moi: 

» cher XJlviTe. Et je vous afl 

» mon bon homme, que tout abfenî 

» qu'il eft, je me fais encore un ftrj 

» pu le &L jb me reproche de fe nom- 

» mer par Ion nom ; il m aimoit u 

» tendrement, il avoit tant de borné 

» pour moy}& feeonferve pour ïuv 

» tant de refpc 

fiez de croire à mes paroles , lu y 

y> répondît ie dîvrn Uly0l% & que 

vous perfïftiez dam vo'îre deffian 

» ce> en vous opînîallrant à fouienir 

& que jamaisUiyflc ne reviendra, je 

» ne ïaiïFe pas de vous affcurer > & 

» iîiefiïic avec ferment, qtie vous le 

v

2)1 T O M ERE, Lfa.XÏV. 40 S 

•errez bicn-toft de retour. Q^/àer 

Y 

récoîtipenfe pour la bonne non- c 

veile qtie je vous annonce 7 loit ne 

prefte tout à l'heure dés qu'il arri- u 

ïcra. Je voirs demande que vous ce 

^hanffîcz ces haillons en magnïii-- ce 

MT 

ques habits, mais je ne Iç demande ce 

qu'après qu'il fera arrivé^ quelque ce 

hcfoïn que j'en ayCj |c ne les rece- *• 

vrois pas auparavant 9 car je bais « 

comme fe mort ceux onî cédant à ce 

la pauvreté ? ont la na*i£*îe ci m* ce 

venter des fourberies» Je prends « 

donc iey à témoin , premièrement et 

le fouverain des Dietix 9 enfiïite « 

celle table iiofbkaliere ou vous

%$6 I/0Dif SSE'E 

» traiter fa femme & fou fils avec 

» tant cflnfoïence. 

Eumée peu fenfible à ces belles 

» promeffes, répondit : Bon Iiom- 

*> me, je n*efpere pas de vous donner 

s> jamais la récompense de ces bon- 

» nés nouvelles que vous ro'annon- 

*> cezj car Je ne verray jamais de r e- 

» tour mon cher Ulyfle ; mais bcn- 

» ve2 en repos, parlons de tout au- 

* tre chofe, 6c ne me rappeliez point 

» un fi ttifle fou venir. Je n'en Le nefs 

* jamais parler de ce Roy fi bon3 i\ 

» refpe

h. 

D'HOMèRE* Liv. XIV. 457 

ci avec efckt, & que dans toutes ® 

les qualités de Tefprit & du corps « 

îl egaicroit fon père; mais quelque ce 

])ieu ennemi, ou quelque homme c< 

niaï intentionné luy a renverfé Tef- « 

rit, car il cil allé à Pylos pour ap- te 

prendre des nouvelles de fon père* u 

ces fiers Poursuivants luy dref- « 

fent des embufehes à fon retour, « 

pour faire périr en iuy toute la race ce 

u divin Ârcefius. Mais ne preve- ce 

nous point les malheurs qui ie me- « 

nacent, peut-eftre perira-t-H^peut- « 

cilre auffi qu'il fe tirera heureufe- « 

ment de ces pièges, & que Jupiter cr 

eftendra fur luy fon bras puifiant- et 

on homme, Tacontez-moy toutes « 

vos avantures, & dites-moy fans

49^ L'ÛDYSSE'X. 

'B liuHfe mener dans wie if le 

Le prudent Ulyfîc lit y repoi; 

» dit ; Mon hofte, je vous diray dans 

*> la pure veiné tout ce que vous me 

» demander mais croyez que quand 

35 nous ferions icy une année entière 

» à table, & que tous vos sens îrofcnt 

X _ 

51 cependant vacpier à leurs affaire 

& ce temps-là ne me fuffiroit pas pour 

» vous racorter tous les malheur; 

» que fa y ctïuycz par la volonté acs 

» Dieux, 

» Je fuis de la grande illc deCre* 

v te, &ft[s d'un homme riche- Noui 

» fomtnes pluficurs enfants ; tous k 

» autres font nez de femmes legiti •ii 

» mes s & moy je fuis êfs d'une cf- 

» trangere que mon père avoit achet- 

>* tçe, Se dont il avoît fait fa concu- 

^ bine. Mars mon jiercf qui avou 

» nom Caftor, fils d'Hylax, me rc- 

» gardoït & m'aîmoit comme tous 

» les autres enfants nez d'un verita- 

»'ble mariage, Vorlà pour ce qui 

3»* concerne mon père, cjui efloit ho fi*

D'HOMIRÏ. Lh.XIV. 4j5 

noré comme un Dieu par tous les « 

peuples de Crète, à caufe de fa for- c^ 

mne* de fes nchefFes & de es grand *s 

ïïombre d'enfants tous fort eûi- * 

jnez, Mais après que la Parque «r 

cruclïe l'eut précipité dansIePafais « 

de Plu ton ? mes frères firent un par- « 

îa?e de fes Lier s * tirèrent les lois « 

et 

nu fort & ne nie ïaiflerent que très x* 

peu de choie avec une maifon* *t 

J'eus ie bonheur- d'cfpoufer une « 

femme d'une famille riche, &dont cr 

Je père & la m cire aJTez contents de « 

onîic mine & de ma réputa- « 

îîon, voulurent bien me ehoifîr «c 

pour gendre5 car je n'eiloîs pas mal i « 

fait 5 & je palîbis pour un homme « 

qui ne fuyois pas dans les batailles ; « 

prefencernent I âge m'a raî toutes % **-- 

ces bonnes qualitez. Mais je me « 

Satte qujencore, comme dit le pro- « 

verbe $ le chaume vous fera juger * 

de k moiffon, & qu'à m'examîner w 

vous ne laiïferez pas de démefler « 

JL 

se que j'ay pu eftre dans ma jeu- w

©o L'ODYSSéE 

% neiie ; quoyquc je vous parons 

>^ accablé de mifcre &d%hrmiié, \o 

& puis dire que Mars & Minen 

s m'avoîent inipiré une force & u^ 

» audace qui paroiflbient dans toute* 

yy les occasions ^ fur-tout Iorfqu'auc 

s> des hommes thoîfis & détermine* 

» je dreïîbis à mes ennemis qud 

» embuicade. Jamais mon contas 

$ ne m'a laîffé cnvîfager la mort» 

s» mais la ïanec ii la main me jettan 

» ïe premier au milieu des ennemis, 

a je leur fai fois laldier le pied on 

a> mordre ia pouffiere. Voilà quel 

& j'eftois à la guerre; tout autre genre 

» de vie ne me touchoit point, je 

» n'ay jamais aimé te travail, ni le I 

** 

» bourage, ni l'œconomie domeili- 

» que qui donne le moyen de non- 

& rir & d'élever fes enfants. Mais j'ay 

» aimé les vaiffeaux bien équippeZj 

» la guerre, les javelots, les liée 

» toutes cîiofes qui paroîCent fi tri 

» les & fi affreufes à tant d'autres 

* je ne prenois pïaifir & je ne ïX* ? OC

Cupoîs uniquement qu'aux chofes *e 

poiw lefquelïes-Dieu m a voit don- « 

fj de l'inclination ? car les gouils « 

des hommes font différents ? ce- m 

luy-cy fc plsift à une chofe, ëc ce-

l î ODY^SE , 

55 féaux de Crète à Ilion avec le ce 

& lebre ïdomcnée. Je n'avois aucut 

» prétexte plaufible de refufer cet 

» honneur, & |e craignois les repro 

3> ehes du peuple 9 car la réputation 

» d'un homme de guerre eft mie 

55 îteur que la moindre clioie termL 

» Nous MmcB h guerre dans les pki- 

» nés d'ÎIion neuf ans entiers^ 6c k 

35 dixième année, apîcs avoir faccagé 

» cette fuperbe ville dePriam f nous 

>j nous embafquafmes pour retourt> 

ner dans nos mai fous. À ce rctout 

p Jupiter difperfa noflre iîotte, 

» me deftîna dés ce moment à des 

# malheurs infinis. Jârrivaylieureu- 

*> fement à Crète, mais à peine avois- 

25 je elle un mois à me délafler^ à me 

» rérôiiîr avec ma femme & mes eu- 

» fants 5 & à joitîr de mes richeiies, 

» que l'en vie me prît d aller faire 

» une courfe fur le fleuve j£gyptus» 

» J'armay neuf vaïfTeaux, 6c je nom 

5> may ceux qui dévoient me fuïvre 

a> Ces troupes furent «ifemblées tre 

Hjl 

**# 

3

OMERE. Liv.XIV. 50 

promptement. Avant que de par- «c 

t ir nous paffafmes ûx jours à faire « 

onne chère , ik le leur fournis *c 

quantité de viélîmes pour faire des « 

facrifices aux Dieux, & pour con- « 

fa mer le refte à leurs tables• Nous ce 

nous embaxquafkies le feptiéme c< 

jour & nous nous éloigna fines du ce 

rivage décrète portez par le Bo- ce 

rée oui nous eftoit très favorable: ce 

nous voguions aimi aoucejiient ce 

que fi âMis une rivière nous n'a- c< 

vions fait que fuivre ïe courant c< 

de Peau. Aucun de mes vailfeaux

5-4 "L f ODYSSE'ï 

^ prudents fe ïaifTant emporter à leur 

» férocité & à leur courage, au lieu 

^ d'exécuter mes ordres > le mirent à 

* piller les fertiles champs des EJJ 

» ptieiis, à emmener leurs femmes 4 

» icurs enfants, & à faire main-feafïe 

*> fur tout ce qui s'oppofoit à leur 

» furie. Le bruit affreux que ce grand 

a* deîbrdre caufblt retentit juïqiics 

» dans la ville voifine ; les citoyens 

» attirez par les cris, parurent eu arm 

mes au point du jour- Touie h 

» campagne fut pleine d'infan teric 

e cavalerie, & elle paroi flbit en 

feu par Fcfclat de l'airain dont elle 

eftoit toute couverte» Là le maiftre 

du tonnerre foufEa la terreur 

» ôk la fuite parmi mes compagnons ; 

» aucun n'eut ie courage de le def- 

» fendre, car ils eftoient enveloppez 

toutes parts* Les Egyptiens en 

» tuèrent un Erand nombre, & firent 

les autres prîfonnicrs^ & les réduîfîrent 

en un irilîc efclavagc. Dans 

celte extrémité Jupiter m'infpîr» 

«ne 

&> 

±- 

. V «i

une peu fée , que ne mourus-je «r 

pluftoft fur la place] aii de grands « 

malheurs m'attendoient encore ; je QC 

détache mon cafque * je le jette à «c 

terre, j'abandonne mon boucïier

^••i, 

506 L'OOYSS 

» nue, il fe prefenta h moy un 

» nicien très instruit dans toutes for- 

» tes de rufes & de fourberies , mîtn 

gna fripon, qui a voit fait une in- 

» Imité de maux aux hommes» Cet 

» inipofteur me feduifant par fes bel* 

» les parole* me perfuada d'aller avec 

» ïuy en Fhenieie où il avoit fa mai- 

» ion & fon bien- Jcdemeuray che* 

* ïuy un an entier, Quand l'année 

» fut révolue, il me propofa de pafî> 

fer avec ïuy en Libye, & for 

^ mille menfonges dans ia vue de me 

» porter à faire les avances pour la 

3J char se de fon vaiffeau : ùm deiîeiu 

:» eftoït de me vendre en Libye 

i de faire un grand profit. Qjioyque 

J> les grandes prouie ITes commencaf- 

» lent à m*eftre fufpedies , je îe fui- 

» vis par neceffité, Nous voilà donc 

2 ; noiire vaîfléau cou- 

» roit par un vent de nord qui le 

» porta à ïa hauteur de Crète* Jup 

*> ter avoit refoïu la perte de ce vaif- 

y fcaïuDésquenoKifufoics éloigne* 

«3 

,cJ

; 

HOMERE. Ly.XIF. J©7 

le cette îfïe &c que nous ne vif- ^ 

nies plus que les flots & le ciel, le % 

Sis de Saturne aflembîa au deiTus m 

e BOUS un nuage noir qui cou- ce 

vrit la mer d*une aflfreufe obfcu- «r 

îté ; ce nuage fut accompagné de

•m * 

50S L'ODYSS E'E 

*? me jour pendant une nuit for 

» noire le Hot me pouffa contre 

» terre des Thefpro tiens. Le héros 

» Phidon, cjuî citoit Roy de cette 

& terre, me receut avec beaucoup de 

» generofné & ne me demanda point 

» de rançon, & fon fils eftant arrivé 

2a fur le rivage , & m'ayant trouvé 

» demi mort de froid & de fatigue, 

3» me mena dans fon Palais en nie 

3» louienant îuy-mefme, car je n'a- 

& vois prefque pas ïa force de mar- 

3* cher. Le Roy me fit donner des 

30 habits magnifiques- Là j'entendis 

& beaucoup parler d'UIyffe 9 & k 

;» Roy Juy-mefme me dît qu'il Ia- 

» voit receu Se traité dans fon Palais 

5i comme il païToit chez ïuy poiH 

» s'en retourner dans fa patrie. lime 

>2 montra mefme toutes les richcifcs 

» qu'UIyffe avolt amaffées dans ce 

» voyage, l'airain. For, ie fer, Si feu 

» vis une û grande quantité, qu'elle 

» pourroit luliire a nourrir pendan 

» dix générations deux familles com

D'HOMèRE. tw.XIV. 509 

xne la fiennc. Sur ce que je parus * 

oniié que tous ces trefors fuf- ** 

V 

fe0t-là fans lu y, il me dit qu*Uîyffe * 

les avoit ïaiifez pour aller à Do- ** 

donc confulter le chefne ittîraeu- «; 

Ieuxf & recevoir de ïuy la répon- & 

fe de Jupiter mefme f pour iça- « 

voir comment il devoït retourner « 

à Ithaque après une fi longue ab~ « 

fence, &$'il devoit y entrer ouver- ce 

tement, ou fans fe faire connoiftre. & 

e Prince jura meime en me par- «: 

faut à moy-mefme & au milieu des « 

libations, que ïe vaiffeau & ïes race 

meurs qui devoîeiat le mener émis & 

fa patrie eiîorent prefts* Je n'eus «r 

as le temps d'attendre* car ïacom- *c 

modité d*un vaiffeau de Thefpro- «c 

tîe , qui partoît pour Duiichrum « 

s'efîant offerte f il me renvoya fur « 

ce vailfeau 3 & ordonna au patron * 

de me remettre fidcUernent entre « 

les mains du Roy Âcafte* Ce pa- ce 

tron & fç$ compagnons loin d'e- « 

xccuter cet ordre, concourent un » 

Yiij

#• ^ 

UOBYSSE'E 

SI* méchant deïiem contre nioy poui 

& me lai fiant-la, ils def- 

* rendirent à terre ment mes liens. Je mis mes hai[- 

*> Ions autour de ma telle, & me 

» laifiknt aller le long du gouvernail, 

» je me-jeltay dans L'eau & nageay de 

m .toute ma force- Je me trouvay 

* -Mîcn-tofl zffez loin de ces fcelerats 

» pour ofer prendre terre ; j'aborday 

a» dans vu endroit prés d\m Beau 

» bois où je me cachay. Ges barba- 

» res fort affligez firent quelque Je- 

5? gère perauifaioii, mais ils ne îu*

0MEEE. Lh.XÎK $ït 

aèrent pas à propos de me cher- & 

cher plus long-temps & avec plus « 

exactitude, ils fe rembarquèrent « 

j promptement. C*efl ainfi que les** 

à Dieux m'ont fauve de leurs mains, * ^ 

? 

^ 

l* 

qu'ils m'ont conduit dans la mai* « 

fon d'un homme fage Se plein de

5^2^ U ODYSSê'E 

» guerre ; car tons les Grecs ïuy zi: 

» roient élevé un tombeau xnagnif 

30 que, ôL h gloire du père auroit rc„ 

a> jalîî fur ïe Msf maïs ils ont permis 

29 qu'il ait elle fms honneur ïa proye 

» des Harpyes. Pour moy j'en luis fi 

^ afîîigé» que je me fuis confiné dam 

» cette ferme j & je ne vais Jamais à 

» ïa ville que loifque la fage Pêne- 

» iope me mande pour me faire part 

» des nouvelles qu'elle a recettes de 

» queïqu*endroii. Dés qu'on me voit 

» dans le Palais, on m'environne en 

» foule pour me demander ce que 

*> j'ay appris. Les uns s'aflligent it 

» la langue abfcence de ce cher maif- 

» tre, & les autres s'en rékmiflentj 

» parce qu'ils confument impuné- 

39 ment Ton bien. Pour moy je n'en 

s» demande plus de nouvelles depuîs 

» que j'ay cfîé trompé par un EtO- 

* lien, qui obligé de prendre la fuite 

» pour un meurtre qu'il avoit com- 

» mis, après avoir erré dans plufieurs 

» contrées, arriva dans ma maîfbn5

OMERE. LtV.XIV. 513 

ou je ïe receus le mieux qu'ii me «: 

fut pofïible. II me dit qu'il avoit

514- î/OD Y S SE'E 

» les hommes , répondit Ulyffe, 

s* puïfqu'aprts tous les ferments que 

» je vous ay faits, je ne puis ni vous 

» perfuader ni vous esbranfkr. Maïs 

a> faifens, Je vous prie, un traité vous 

» & moy, & que les Dieux, qui 

» habitent POIympe, en foyent ié- 

& moins : fi voftrc Roy revient dans 

w fes Eftats, comme je vous Pay dit, 

» vot:s me donnerez des habits & 

si vous in'envoyerea fur im vailFeai 

m à Duïîchitim» d J où j'Iray psr loin 

» ou- il me plaira; & s'il ne revient 

3> pas 5 vous exciterez contre moy 

» tous vos domeftiqu€s5 & vous leur 

» ordonnerez de me précipiter de 

30 ces grands rocïiers f afra que ce 

» chaftiment apprenne à fous les pau- 

» Très qui arriveront chez vous à 

2» ne pas vous &btifer par leurs vaincs 

0 

•*•* 

3a tltranger, répondît Humee^ que 

a» deviendrait la réputation que j'ay 

3* acquife parmi les hommes & pour 

» ïe prefent & pour fa venir î Q,uc

D'HOMèRE. LIV. XIV. 515 

evîcn droit ma vertu $ qui eft en- «• 

corc plus précieufe que la réputa- & 

tloii, fi après vous avoir receu clans ^ 

ma maifon, & vous avoir fait tous ^ 

hs Bons traitements qui ont dé- « 

pendu de moy & que demande « 

iliofpîtaïitc , f aïïoïs vous oïler

Jï6 L/GDTSSé'E 

y> fre un facrifice à Jupiter eu faveur 

» de cet effranger qui efl uoftre hof. 

» te , & que nous en profilions ea 

s mefrae temps, nous qui avons tous 

J» les jours tant de fatigues à garder 

* ces troupeaux 3 pendant que d'au* 

» très le nourri Cent tranquillement 

- » des fruits de nos peines* 

Ayant ainft parlé, il fendit du 

, bois pour le facrifice, Les bergers 

amenèrent la victime ïa plus graffc? 

c'eiloit un cochon de cinq ans, 

îa prefenterent à l'autel. Eumée 

n'oublia pas alors les Dieux, car 

il eftoit plein de pieté* Il prend les 

foyes du haut de la tefie de cette 

vîélime & les jette dans le feu 

comme les prémices, & demande à 

tous les Dieux par des voeux très 

ardents, qu'UIyffe revienne enfin 

dans fon Palais. Sa prière finie, il 

affomme la viéiime avec le tronc 

du mefme chefne dont il avoit 

coupé le bois pour l'autel & qu'il 

svoit refervé pour cette fon^lion *

B'HOMERE. Liv.XIV, 517 

La vidUme tombe fans vie ; les berers 

regorgent en mefme temps, 

îa font paiTer par les flammes & la 

mettent en quartiers. Eu niée prend 

es petits morceaux de tous les 

membres, les met fur la grai 

ont il avoît enveloppé les cuilTes* 

après avoir répandu deffus de 

ïa fleur de farine, il ies jette au feu 

pour les faire brufler. Le refte fut 

enfuite coupé par morceaux, mis 

en broche & roIH avec foin. G a 

les mit fur des tables de euifine;, 

le maiftre pafleur fe leva pour faire 

îuy- mefme les portions f car iï eftoit 

plein d'équité* II en fit fept 

parts, il en offrit une aux Nymphes, 

une autre à Mercure èh 

aïa, en accompagnant fon offrande 

de prières. Ses trois bergers Se 

Iuy curent aufli chacun leur part t 

Uiyffe fut régalé de la partie la 

plus honorable! qui eftoit le dos 

de la viétime. Ulyffe ravi de cette 

diftindion P en témoigne fa recon-

noiiïance en ces termes ; 

» Eumée, daigne le grand Jupiter 

** vous aimer autant que je vous ai- 

^ me pour le bon acciieil que vous 

m me faîtes > en me traitant avec tant 

!» d'honneur, malgré Fcïiat miferabk 

» où je me trouve* 

» Eumée lu y répondit, Eflrair 

» gerf que j'honore comme je dois, 

» faites bonne chère des mets que je 

J puis vous offrir ; Dieu nous doniy 

ne une chofe &nous en refiifeune 

» autre, menant noitre vie de njens 

» & de maux comme il luy plii 

« car îi elî tout puiflaitt. 

En finifl&nt ces mots, iï jette au 

feu les prémices de fa portion, 

renant la coîpc pleine de vin, 

après en avoir fait les ii hâtions, îï 

k jtrefentfi à Uiyflc fans fe lever 

eîa pïacé, Un efclave^ qu'Euméo 

avoit achetté de quelques marchands 

Taplirens depuis le dépirt 

de (on maîftre, & qu'il avoit achetté 

de fon argent fans le fecowrs de

.'HontEHE. Liv.XlV. §t 

ctielope ni du bon vieillard La 

crte , fervït le pain, Qjiand ils au 

jent mangé & bu, Se qu'ils furent 

raflaûca, l'efckve de/Terviî* & peu 

de temps après ils 1 allèrent fc cou •^ 

cher, La nuit fut très froide êi tre 

_ 

obfcure. Jupiter verfa un délu 

d'eaux , & le 2,ephyre 5 toujours 

chargé de pïuyes., fit entendre fes 

foufrfes ora creux* Ulyffc adrclïknt 

a parole a ces' Bergers pour piquer 

y niée, & pour voir s*il ne luy 

donneroit point, ou s'il ne îuy ferait 

pas donner quelque bon ha» 

bit qui puft ïe deffendre du froid 

car if a voit grand foin de luy 

Euxnée, dit-il 3 & vous bergers *• 

efcoutez-moya je vous prie,&per- « 

mettez que je me vante un peu de- *t 

vain voUsa le vitt fera mon exeufe, * 

M a la vertu de rendre les hommes « 

ous ; il fait chanter, rire & dan- & 

er ïe plus fage, 6c tire des cœurs

520 1/ O DYSSfE 

» vous dire auffi des folies f êc pui 

» que la parole eft lafehée je eonti m 

» nùeray. Ah ! phift aux Dieux qu* 

» f euffe encore la vigueur & la for- 

:» ce que fa vois quand nous drefTaf-* 

» mes une embufeade aux Trovens 

» fous les remparts de Troyc. Uiyii 3 

» & Menelas efloient les chefs de 

» cette entrepritc 5 ce ils me nreni 

» fhonneur de mechoîftr pour par 

M tager avec eux ce commandement 

» Quand nous fufmes prés des mu 

» railles, nous nous cachafmes fou 

* nos armes dans des broiîaiIles 

» des roleaux d'un marais qui en cf- 

1» toit proche. La nuit il fe leva tout 

* à coup un vent de nord fi froid 

* qu'il gïaceoït a & ïï tomba beau- 

» coup de neige qui fe geloit en tom- 

» bant, en un moment nos bouchers 

» furent heriiTez de glace. Les autres 

» a voient de bonnes tuniques ik de 

» bons manteaux, & dormoîent Iran- 

» quiliement les efpautes couverte 

» de leurs boucliers> Mais moy> fa

fois eu Vïm prudence de kiflerdans « 

ma tente mon manteau, ne pcnfant « 

noiiît que la nuit dûiï cftre fi froi- « 

de, & Ta vois marché avec ma feu- « 

le tunique ceinte ce mes armes- « 

Vers la iroîfiéme veille de la nuit* c< 

lorfque les aftres commencèrent à « 

eticher vers leur coucher, je pouf- « 

ây du coude XJIyfle qui eftoit « 

couclié prés de moyf il fe réveilla m 

promptement, & Je iuy dis : Ge- « 

nereuxUIyfie, vous pouvez com- * 

pter que je ne feray pas long-temps « 

en vïe? je luis pénétré de froid, car *e 

je n'ay point de manteau f un Dieu « 

ennemi m a mauit a venir icy en « 

tunique, & voilà un temps auquel « 

Il m'efi impoffible de refifter, oc 

Dans le moment Ulyffe trouva *e 

îe moyen de me fecourîr ; comme * 

il eftoit homme de grande reflbur- ce 

ce & auffi bon pour le confeiï que « 

pour les combats, voicy ce qui Iuy « 

vint dans l'efprit ; il s'approcha de m 

îîion oreille & me dit tout bas; ^

zr taifez-vous, de peur que queîqu 5 ^ 

% des Grecs ne vous entende, & ^ 

» raefme temps I» teie appuyée foc 

» fon coude5 il hauffa tin peu la voi* 

* & ditj Mes amls3 efcootez ce q^ 

:* fay avons dire3 pendant mon fonia> 

mell un fonge sêli apparu à moy 

» de la part des Dieux. Nous voilà 

^ fort éloignez de nos vaiffeaux 

» nom fora mes en petit nomhr 

> que quelqu'un- aille donc promp- 

JO tement prier Agamemnon de nous 

a- envoyer un renfof 

a A ces mots Thoas, fils d'Ândre- 

33 mon, fe leva, & fans attendre mi 

3> autre ordre f il jette l à terre fou 

» manteau de pourpre '& fe met à 

* courir. Je pris ce manteau, 

2> m'eftant réchauffé, je dormis traiv 

39 quillement jufqu'au point du jour. 

» Fluft aux Dieux donc que j'eufle 

» aujourd'huy fa mefme jcimeffe à 

» la mefme vigueur, & quequela> 

qu'un des Bergers qui fout icy me 

* sionnail un bon manteau & par

2>'HoMiRE. Lh.XIV. fî 

amitié & par refpecft pour un hom- « 

nie de bien f maïs ils me méprifent « 

à caufe de ces vieux haillons. m 

on homme, luy répondit Eu- ce 

niée, vous iiou$fakes4à fur un face 

|et véritable un apoîogue très in- «c 

ciileux, vous avez très bien parié or 

& voftrc difeours ne fera pas in* « 

utile, vous ne manquerez ni de

524* 

L *° DYSSE'i 

B fîniflant ces mots il fe Iei2, 

u feu ie lit d'UIyffe& 

y eiîendit des peaux de brebis et 

de chèvres, & Ulyfle scellant couché 

, il le couvrît d'un manteau 

très ample & très efpaïs qu'il avoir 

de rechange pour fe garantir du 

froid pendant Phy ver le plus rude, 

Les jeunes bergers fe couchèrent 

prés de In y t mais Eumée ne ja- 

;ea pas à propos de s'arrefîcr-ll 

à dormir loin de fes ITOU peaux- 

H fe prépara pour aller dehors 

Ulyffc eftoït ravi de voir les foins 

que ce bon païleur prenoit de fou 

bien pendant fon abfeiice. Premièrement 

il mît fur fes efpaufes 

fon baudrier d'où pendoit une lare 

efpée ; il mit enfuîte un bon 

manteau qui pouvoit le deffendre 

contre la rigueur du temps, îl prit 

auffi une grande peau de chèvre* 

& arma fon bras d'un long javelot 

pour s'en fervir contre les 

chiens & contre les voleur*. Efl

HOMèRE. Lh.XlV. 525 

cet équipage il forîit pour aller 

dormir fous quelque roche à i'abry 

des fouffles du Borée prés de 

les troupeaux.: 

\

EMARQU 

SUR 

ODYSSEE D'HOM 

•HÉ '"• » ••»'"'" •^"'«iP"*''^»^ 

L I V M M £ 1 V> 

âge fÊ finit* ur fiddk Vasoit baftk 

êçZxX^j défis efpargms, fans en park 

r.ï à Penelepe ni au bân wittard Laertc \ 

Voicy un grand à. beau modeile d'aecono» 

i\ii€ qu Homère donne aux intendants des 

grandes in ai fous, CTeft Eumée, qui de fa 

dpargnes avoit ballf une grande maifofl & 

une balîè-ccmr pour les troupeaux de for, 

niaiifr e. Depuis le fiede d'Homère ceîa cft 

un peu changé; on volt bien des intendants 

qui des efpargnes d J tm bien* qui ne 

leur appartient pas, baftiiîent des mm(oms 

mm ce n*eft pas pour leurs maiïfre& 

Page 48 j« Travaillant à fe faite um 

ehaujlfure dé £uir de bœuf avec tout fin 

poil] Car quoy-quil fiifl l'intendant & le 

maîitre des autres pafteurs, il ne laïiîbit pas 

«1e travailler de fc$ mains 5 les Princes met 

mes ummlkmm}comme nous Favoiu /bu-

tcnt\u dans l'Iliade & dans i'Ody/Tée» & 

ccft cett€ bonne & louable coutume qui 

avoit mis Ulyffe en eftat de faire dans I& 

jiccciîîsé ce qui le fauva- Ce maifire pafteur 

avoit taillé luy-raefhie les chefîies dont il 

1^ 

î 

voit fortifié fa haye » & il fe fait icy une 

hauflurc , c'efl à dîre3 une forte de botlne 

aeceflaire à un homme foïgneux f qui alloil 

nuit & pur pour veiller fur lb troupeaux. 

La peîntuTe qu'Homère fait de feftat où eft 

e pafteur quand U lyffe arrive cfiez luy, eft 

£ 

:re* naturelle & très agriabiet auffi-bien que 

e recît du danger qu Ulyfle courut a & il 

y a qu'un gouft corrompu qui puifîe sct| 

rooequer comme a fait i'ÂJUteur du Parais 

ïeJe- Ce herûsf dit-il, va tramer Euméefoft 

pûTcher, qui eftoit affis devant fa pur te, i? 

qui raccûmmûdâh jes fmlkrs* Les chiens 

d'Euméë abûyqrent fart, ir'firent grande 

pmr au heras, qui fi emeka par terre ir 

iaijfa tomber jm baftm* Le porcher en fe 

kvam pûUr châffer les chiem^ ttdffa t$mfep 

le cuir qu'ibcwpok, ifc* Voilà un heureux 

îûcm pour défigurer tes images les plus mm 

sureHcs & les plus fages* 

Ufyjfë pûur Je garantir fi Cûmke à ferra 

If jette pn baftm~\ Ulyfle fçavoîï que te 

moyen le plus feur de fe deffendre contre 

îes chiens & autres beftes féroces, c'eftdç 

fe coucher à ierre, de }etwr les- armes ^ti'on 

«1 avoir, à h maia a & da fâke le mecgi

$ 28 REMARQUAS 

Au refte f dans la vie d'Homerc jay ^ 

quif y a voit de l'apparence que ce Fceis 

donne ky à Ulyflê une a van turc qui Jyy 

eftoït arrivée à Iuy-mefme, ioriqu'ayant 

efté expofé fur le rivage de Chio paj tjes 

pefcheurs qui Favoîent mené fur un radea; 

& eftant allé du cofté qu'il entendoit dt$ 

chèvres, il fut attaqué par des chiens qui 

Fiiuroîent êevorê û le berger Gïaucus n'eul 

couru à fon fecours ; ce berger^ après 1 awr 

délivré, ie mena dans ia cabane & le rernila 

le mieux qu'il Juy fut poffibfe. Le Poète 

tafcha de divertir Ion hotte, en fuy racontant 

ce qu'il avoït vu de plus curieux dans 

les voyages. Quand je voy Uiyffe s entr m 

tenir avec Eumée, je prends plaifir à m'imâ a 

giner que je voy Homère s'entretenir avec 

Glaucus. 

Page 48 5 . Vieillard* il $*m ejl peu fallu 

que mes chiens ne VûUS ayent devûré] Rien 

ne marque mieux qu Eumce eftoït un homme 

de conséquence & qui avoit cflé bmïï 

élevé, .que les dtfcours qui! fait ky à Uiyflc 

Ik tout ce qui! luy dit enfuite dans la couve* 

faîion qui! a avec luy. II y a une éloquence 

très naturelle & très naïve & beaucoup 

de lageffe; aufli voit-on dans k Livre 

liiivant qu'il efioit fils d un Frkce qui avoit 

régné dans fifle de Scyros. Je ne releveray 

point ky les froides railleries que de petits 

Auteurs modernes ont âftès fur cette qu** 

liifcawti

-SUR UODYëSEE. Zjwtf XIK 529 

filiation qu'Homère iuy donne de *#i/£ 

porcktr* Cela marque leur bon efprit. 

Je pafp? ta vi& à pleurer Vabfenee, ir 

pivl-eflre la mort de mon cher maijlre] 

Quelle joy€ pour Ufyffe î quel plaifir pour 

Je Ledcur que cette fituahon I Àriflote a 

ibi t bien dit qu Homère cft ie premier qui 

ait fait des imitations dramatiques 1 car.» 

comme M, Dacter Ta fait voir dans les Commentaires 

fur h Poétique, l'Iliade & FOdyffee 

peuvent puffer pour de veritables Tragédies 

à caufe de fmillion, de ladîJpofitiûiî 

& de fœconomic du fujet, du lîieiïaiîge admirable 

des épïfbdes, de la nature des cataftrophes, 

de h vivacité des paffiom, & des 

fit nattons ferprenantes dont ils font pleins*. 

Audi Platon dit qu'Homère n eu pas feu* 

ietnent le pi us grand des Poètes, mais qu'il 

eft îe premier des Poètes tragiques. Dans le 

TheëEet. & dana le liv. 10. de la Repab. 

Page 48^. Qu'il cerne d'une grande 

peau de chèvre fartage"] Homère défigne 

ordinal rement par des épi th êtes la nature 

dm chofes dont il parie. Icy en parlant de 

k chèvre Ikuvage A adjoute hvBmJêçÈ ce qui 

figiïifie proprement qui a des zxcrefcences 

qui pendent mtûur du eau des chèvres f Se 

ces excreicences font appelées ïov%t. Nof. «» 

il e langue n'a point de terme pçurTexpi 

Tûme IL 

mu

53O KlMARQUIg 

met* ou du moins je ne le fçay point 

Ztârfff Enviée, vous luy répondîtes] Noos 

avons vu dans l'Iliade qu'Homère le ftrt 

fou vent de ces apoftrophcs, quand ce fon 

des perfotinages confiderabfes qui parlent 

& qu'au lieu de dire un tel répondu, il sa 

drefle à luy, & lu y dit w# j répondîtes* Cela 

féveille l'attention du Leéïeur, ôc fait connoiftre 

que eeluy à qui on adrelïe mn{ 

parole* eft un homme digne de confidera 

tion. Homère employé icy cette apoftro 

phe pour Eamce, marquant par-là Feflime 

qu'il avait pour luy. 

Bon homme 3 il ne m'ejl pas permis d& 

mèprijer un eflratiger, non pas me/me quand 

il ferait dans un eftat plus vit èr plus mè« 

prijabie que celuy ou VûUS ejfes, car, àrç,] 

Ce païfage me paroift admirable j l'homme 

du monde qui en a fe mieux connu fa beau 

té» & qui a le mieux développé le precept 

qu'il renferme» c'eft Epi die te dont M. Da* 

crer ma fourni ce paffage tiré d'Amen; 

Souviens - toy toujours de ce qu'Eumêe dit 

dans Homère à Ulyffe inconnu qui le re* 

mer doit des fans traitements qu'il en awît 

.- recetis: Bonhomme, il ne m'eft pas per- 

* mis de mépriler un eftranger qui vient chez 

fu rnoy, non pas mefme quand il feroît dani 

un eflat plus vil & plus méprîfeble que ce** 

luy où vous elles f car les cftwngcrs & 

I 

•dl 

*z 

**

I 

SUR L'ODYSSéE.'LanXIV. j^t 

¥,_ , e Jupiter. D£* /^ mejme 

chofe à ton frère, a ton père, a ton prêchant 

jt m Jtt'efi pas permis d'eiî ufer mat avec 

yms, quand votés feriez encore pis que vous 

n'eftes> £# r VÛUS venci de Dku* En effet, 

nous ferions bien heureux û nom en ufions 

avec nos proches, comme Eumec en «fe 

ivec cet étranger, 

Page 4 8 7* Cefldà le devoir de ïons dû* 

mefiiques, ils dûivent ejhre toujours dans la 

crainte* fur-tout quand ils ont de jmnes 

maijlresj Euftathe a expliqué cet endroit 

comme fi Eumce par ces jeunes mdflres 

euft voulu pair 1er des Poyrftitvanp, & qu'if 

euft voulu dire que quand il y a dans une 

maîfon des tyrans comme ceux-là, les domeitïques 

font en crainte & ne peuvent pat 

faire (es charitez qu'ifs voudraient. Mais je 

ne eroy pas que ce foit-ïà le fens. Il n'y % 

pas d'apparence qu'Eumee falTe un précepte 

gênerai d'une chofe qui eftoït înoiâie & fans 

exemple* Afieurenient il parie de ce qui 

doit fe faire ordinairement Des doineftiqms 

qui ont un maiftue jeune doivent eftre 

encore plus attentifs & plus craint ifs lor£ 

qu'il s'agit de dépenfibr ( que quand ils ozU 

un maîltre qui jouit de les droits & qui goa* 

êrne fon bien» car alors ils ont, comme on 

d\ts leurs coudées plus franches. Le préce^ 

pte cÛ bien plus beau; Eumée a un jeune 

niaifïrej Tekmaque, ainfi ii doit eflre plus

-5 3 à REMARQUES 

cimïde, plus attentif, plus ménager. 

Et dont Dieu a béni le labeur, comme H 

et béni le mien dans tout ce qui m*a e 

renflé ] Homère enfeignok donc que to 

le travail des hommes efl inutile fi Dieu ne 

le bénit. Quand on entend Eumce parler 

de cette manïeis, ne croiroït-on pas entendre 

Jacob, qui dit à fbn bcauperc Laban; 

Benedixk tibi Dûtmnus adintrûttum meum< 

Dieu vms aient depuis me je vans fers. Et 

labûiem mammm me arum rcfpexii Deus 

Dieu a regardé le iravdl M mes mains 

jC'efl à dire, il t'a béni, il Ta fait proïpeicr. 

Page 4 S S. Et cêmut pnmipuwem à tme 

des ejiiwks , ij* il en appât ta devp jeunes 

cûchûtis, il ies égorgea? les prépara] II cil 

aîfc de reconnaître îcy dans ces coutumes 

des temps héroïques les ufaês des temps 

des Patriarches, on n'y fâifoit pas plus de 

façon pour ies aepas. Quand Abiaham re 

cent ,chez fuy les trois Anges , il eft dit 

îpfe ad armerdmn aicurrït r Èr iitlu indè 

vitulum terni rimum ir optimum , dedkqut 

puero « qui feJKnavk ir cûxit illurn, ire* 

Et les fœupmdm de fleur déforme"] Ce 

tait une fleur de faiine rallie. Je crois que 

ôand on fervoit des viandes qui ifooiett 

& ~>i$ eue oîtertes en facrifite ? on y repaie 

m, 

s

4 

SUR L'ODYSSE'I. LiwéXlK y 3 3* 

oit de cette fleur de farine, qui tenoit iîeti 

lorge facré avec lequel on confacroit ïes 

viâîmcs. Ce qu'Eumce hit ky eiî une force 

d'aéle de Religion. 

J\>5 cochens e?tgrai[fei font nferte?^ pûur 

Us PôUffîdmïîîs, gensfa?ts cûnfidcrathn it 

faits miftfkurde ] Je croy que c'efi ce paffage 

qui a perfhade Euiîathe que ces jeunes 

tnaiflres 3 dont Eu race a parfé vingt-* 

deux vers pks haut, cfïoîent ie3 Pourfui^ 

ymts. Mm je perfifte dans ma première 

penfee ; ce qu Enrnce dit icy peut fort bien 

fufa/ïfler avec le feus que fay donné à ce 

ver5, 5r J Éïnxpatmwtff &v&KTtç ii y M/. Âll 

refte il paro^ft par ce paiîàge que les an .** 

ciens mettoient uile grande différence en *ï 

tre pîpetç & mùLMtç çu&çs\es premiers ef 

•** 

toi en t les cochons ordinaires qu'on falfoit 

feulement paiflrc fens en prendre d'autre 

foin, & I« autres m&htu, eftoient les co-* 

chons que Ton avoit engiaiflez à l'auge. 

Page 4S 9. VûMà paurquay ils ne vm*> 

km point demander la Rsyns clans les for-* 

mes] Eumée eft perfuadé qaeTunique bus 

des Pourfuîvants eft de demeurer dans te 

Palais d'UJ) ffe & de manger Ton bien» en 

faifant Jemblant de pourfuivre PeneJope eu 

aiiarîage» & voky le raisonnement de ce doixieftique 

ûdeYte qui tfeft point fi mal fon- 

"1; S'ils fçavoient Ulylfe en vie, ils dema 

Z iïj

5|4 RlMAlQtJIS 

deroienf cette Rejne dans îes formes, parce 

qu'ils feroient alîeureg qu'elle ne le rem^ 

rîeroit jamais pendant {a vie de fon msrv 

sinfi ils demeurcroknt-ià avec une fbitede 

prétexte; mais ils ne la demandent point 

«ans les formes, îfs nepreiTent point le mariage 

i ils ont donc appris fans doute pat k 

jenommée, ou par quelque orack qifUlyfli 

cft mort Voiià poorqaoy ifs ne fa demandent 

point * parce que û elfe le rcmarioir, 

die ne feïok qnk un feuï, & tous ks autres 

feraient obligea de fe retirer. Voiîà ce qui 

a fait dire à Horace que toute cette fenneflc 

jïenfbtt moins an mariage qu'à la cuifine ; 

ÎSfhc tantum vmeris quantum jludivfû 

Page490. limât dans le émanent va* 

fin dûu\p troupeaux de bœufs] Vorcy Terni* 

meration des richefles d'Uiyffe. EUes coufi 

(lait principalement en troupeaux9 comme 

celles des Patriarches. Sed i? Lût fut* 

rmt grèges wium if arment a» Gcnef, r 3- 5- 

Ditawjque eji home ( Jacoi } uàm vwdtmi 

if habuit grèges nwltûs f mwillas frjerwh 

mmdûs ir afims* Gene/l 30. 43. 

Page 491* Après qu'il fut tajfaftè7 il prît 

la coupe ûù il avûh ht, la remplit de vin ir 

la prefenta à Eumée ] I! faut bien prendre 

;arde à ce paflage, car on s'y trompe 01 di*

SUR L'ODYSSE'I. LmtXÏK ni 

nairement; on croît d'abord que c'eft Eu* 

mec au! préfet te fa coupe à Uhflk & ce 

w contraire Uiyffe «pu fc prefenté à Eu ** 

juée3 commeEuftaihe la fort bien remar 19 

que* J'ay dcsja dit aïiïeurs que pour faire 

honneur à quelqu'un on fuy prefentoit û 

coupe pour le piler de boire Je premier, ce 

qu'on appelkm ^ ^ c'eft de cette a» 

tome que font venues les fautez qu'on boïî 

aurourdhuy. Mais outre cela il y a îcv une 

poWe qui mérite d'eflre expliquce-W 

toit à la fin du repas qu'on faifoit les Irbalion,, 

& c efi à fa fin du repas cÛIyffë 

prend k coupe & qu'il fa prefente a Eumée 

pour luy témoigner fa reconnoiflance s & 

comme pour i'afibeier aux Dieux qui Font 

Éiuvé. Eumée fent bien tout ce que marque 

cette bonnette té d'Ulyfle, & c'eft pourelt 

ravi. xiLipt M BU/Aù** 

Page 45} 2. £//i? /f ^ r^foh, to iwfït & 

mieux du mm Je, frjtofir les jûws À les 

$itéj}îanmr"\ Le beau portiaît qu'Homère 

fait icy d'une feiïîrae vertueufe, qui aimant 

tendrement fon mary , ne trouve d'autre 

confolatbn dans fon abfence que de demander 

de fes nouvelles f & que d'efeouter 

tous ceux qui peuvent luy parler de luy ! 

Page 493. Et peut-eflre que Vûus-mef* 

nie, bûn homme, vous inventeriez de pareil*

5j£ REMARQUES 

tes faites] Le Le(5leur prend pfaHîr à vci 

ce foubçcn d'Eumée fi bien fonde Ulyffe 

cftoit le plus grand artiân de fab!es qg 

euft jamais eflé* 

Page 494. Je me fais eneûre un fcrupuk 

ir je me reproché de le nommer p^y 

2m «^«] li y a icy un fentiment plein de 

tendreiTe & de délicateJÎc* Eumee dit qnlf 

fe fait un (crupufe & un reproche de nommer 

Ulyflê par fon nom, car c'efl: le nom 

que tout le monde ïuy donne, tous les e^ 

mangers, îes gens les plus inconnus l'appellent 

Ulyiîe. II ne Fappefle pas non plus 

fon Roy, fbn maiflre, car tous fes fufets 

¥ appellent akifï,& un homme qui en a toujours 

eflé û tendrement: aimé, & qui luya 

des obligations û elîêndelfes doit luy donner 

un nom qui marque un fentimeiat plia 

tendre & plus vif; il J'appelle doncjûii père, 

ou comme dit le texte Jim frère aîjfnê, 

$,3*7*ç. Mais jay changé ce nom êe frère 

en celuy de père qui eft plus refpe^talila 

Page 49 $ - Smt prejfe tout a theure ^ 

Homère melïe des mots interefîants & qui 

font graad plaîfir au Lecteur inftruity cel elî 

ce mot tout à l'heure i . Il fêmble que la re* 

connoifïimee va fe faire, mais il f éloigne en* 

liiîte j en adjoutant des qu'il arrivera* 

Enfuhe cène table Aûjpiialiere] AiDacicr

suit L'ODYSSE'E* LivréUK $$*? 

fflt le premier qui ait hasardé ce mot en 

aoftre langue, & qui l'ait tranfporté des permîmes 

aux chofes dans fa Tradu il reviendra a la fin d'un fâûis > 

au commencement de l'autre] Il n'eftoit pas 

poflîbie qoe le bçn Eumée entendit! fe fkm 

de ce vers, 

entendait ûm doute qulHylfe reviea 

oit a h fin d'un mus, ou au comment

53S REMARQUES 

ment d'un antre, & ri ne s'imagmoit pas q^ 

ion hollc parlait d'an feul & mefme jour» 

Solon fat le premier qui pénétra ce m^fiere, 

& qui découvrît îé fens de cet énigme ? 

qui marque qu'Homère n'eftoi* p2s rgno, 

rant dans fÂfironomie. Je fie /çaurois 

mieux l'expliquer quentappor^nt lepaHige 

mtfmç de Ftatarque qui ncus appicnd 

cette particularité : Selon > dît H, voyant lm w 

égalité des mois ,ir que la lune ne J* SWCûT 

doit ni avec k kver ni avec k coucher du 

foleil, maïs que fouvent en un mefme pin 

elle F atteignit ir le paflbit, voulut qiï&i 

nomnurft ce jour-là ci* JJ*| via, la vieille u 

nouvelle lune ; fr attribua a la fin du IP / 

paffe ce qui précédait la conjonction , ir au 

commencement de l'autre ce qm la fimdu 

D'où ton peut juger qu'il fut le premier qui 

comprit k fins de ces paroks d* Homère, 

à k fin d'un mots or-ià Ja lime eQoit vieille & nouvelle, 

c'eft à dire, qu'elle ftniflbrt un mois 

«H commençait un autre. 

Page4 97, Mais quelque Dieu vnnem> tâ 

quelque homme mal m meurtrie] Ce voyage 

ileTeîemaque avoit al larme avec raîfon fa 

îmnûmiïè de ce doHiefiîqae fiddJe, car il ne 

içawit pas qu'il JîC ïmdit entrepris que paï

sua L'ODYSêE'ê, LmeXIK 539 

foi lire de Minerve- Et voilà comme on juge 

ordinairement des cliofes dont on rm 

connoift ni les ctufes ni les moti 

1 

Ou quelque hûmme mal ÎMemîûnné*\ Car 

les Dieux ne font pai îes feufs qaï peuvent 

rcnverfer Fefprit, les hommes le peuvent 

&uffi très fouvent, foît par des breuvagei § 

foît par des difcourâ empoîfcnnez» plus dan ^ 

gereuK encore que ïes breuvages. 

PûUT fmre périr avec luy imie la rac€ du 

iHijhi Àrcefius] Àrcefius eftoit peie de Lah 

te Telernatjue fon arrière petit-fils eftoif 

k feul lejetton de cette race. 

Et que Jupiter eflendrajur iuyfffî bras 

puijfant ] Voilà leicpreiîîon de rElcrttare» 

qui dit que Dieu ékvejm bf&$3 qui! ejisnd 

jon bras fur quelqu'un, poor dire qïi'îl le 

fauve de tous les dangers qui l'environnent» 

Page 4,98. Je fuis de h grande ifle de 

Crète] Êurnée vient de déclarer qu'il eft 

convaincu que tous les eft rangers font fujets 

à débiter des fables pont fe rendre pkis 

agréables, & il a fait eonnoiftre à Uïy 

qu'il le tenoit très capable de les imiter, en 

un mot il a para eftre extrêmement en garde 

contre ces conteurs dliiftoires fauffes, & 

cependant voiev qu'il fe laiffê far prendre SXL 

L vi

5 j o R E Jl A R Q u 

conte qu'Uiyffe luy fait Cela marque k 

pouvoir que les contes ont fur i'efprît de& 

hommes. Il faut avouer auffi crue ce conte 

d'Ulyfle eft ttes ingénieux. Homère pour 

ie mettre en efkt dlrîterefTer tous les hom 

m 

mes qui viendront dans tous les hg€$, faf- •r 

fâifonne d'hifloîies véritables, de defcrip* 

fions de lieux & de beaucoup d'autres chohs 

importantes &. utiles, & il embellit fa 

narration de tout ce que féloquence peut 

fournir de plus capable de plaire. Par tous 

les contes différents dont le Poème de t'Od) 

ffee eft orné & égayé , on vort bien que 

l'imagination du Poète n eft ni efpmfée m 

ùtrguée , puîfquelJe invente une infinité 

de Tu jets tous capables de fournir un long 

Poème. 

Et mûy, je fais fils d'une ejiratfgere que 

mm père avûit achettde, èr dûnt il ami 

fait fa concubine] Nous avons vu dans f Iliade 

que ces fortes de ïiaïflances n'eïloient 

point honîcufês fk qu'on les avoiiok fam 

JOugîr. Ceft ainfr qa'd eft dit dams l'Efcriture 

feinte, que Gedeon eut foixame-dm 

êls de plufîeurs femmes qu'il avoit e/poulees» 

& que dune concubine, qu if avoit * 

Skhem, M eut uo fils nommé Abhneiec 

Jug. 8. 30. 3 r. car en ces temps-là. if n'efîoïl 

point dtrffendu d avoir des concubines* 

NûB erat vetitus eu tempore concubinatus» 

wque concubina a nmtrma nifi dignkaîe 

j*

SUE L'OBYSSE'E, LiweXIK 54** 

'tSftaBat ; dit Grotius fur ce pafTage des ju *r 

ges. Euftafche veut que Ton remarque icy 

ïa fiticfTe d'Uljffe, qui fe dît fils d une con 

cabine, pour attirer k bienveillance d'Eu 

tncû qui avoît une naiffance toute pareille 

mais cette remarque eft très mal fondée ; p 

Eumée neftoît nullement fris d'une efcfave, 

ï! eftort très légitime * comme on Je ver> 

m dans îe Livre foïvanî. 

M'aïmûît cûmrne tûtisfes autres enfants 

mi d'un veruabk mariage ] C efl ce que figrufîe 

le mot Isa^tcerï, enfants légitimes, 

qui font nez d'un véritable mariage. Car 

pour lis concubines il n'y avoït ni con vert* 

tiens matrimoniales, ni foîemnitc, au lie 

quii y en avoit pour les femmes* 

Page 4 9 9. Et de ce grand nombre d'enfonts* 

tau* fâttejHmei\ Car le grand nombre 

d'enfants, & fur-tout d enfants vertueux 

& braves, fert beaucoup à faire honorer & 

lefpeâer les percs, Ceft ce que David fût 

entendre, quand après avoir dît que les fils 

font l'héritage que le Seigneur donne, il 

d joute: Skut faghtœ in manu petentis? ita 

•in mcuffûrum, Èeatus vir qui impfevk de •mfid&rmn 

fuum ex ipfts $ tien confwdetur 1 

cutn lequeinr cum inimkis Juis in pût ta* PC ^ 

3 2 6. 4. 5. 

Aies frères firent m partage de fis 

tiens, tirèrent les lots au fin ] Voilà Fan- 

«a

54* REMARQUES 

dcnne manière de partager ia fuccefllon 

des pères. On faîfblt les lots mec le pi 

d'égalité qu iî eftoit poflibic , &on les tîroi 

au fort Et cela ne fe pratrquoit pas feule 

ment dans les maifons des particuliers, mais 

dans les maifons des Princes mefmes, puîfque 

nous voyons dans le xv. Liv- de f Iliade, 

que Neptune dît, Que {'Empire du monde 

fut partagé entre Jupiter, Pluton irky} 

qu'un en fit trois fats, qui ne furent ptnnt 

d&nnei par rapport à tordre de la ?kê{~ 

fonce» que Vûge ne fut pûînt refpeélê> qu'en 

tira au fort, £r que la fortune décida de m 

partage* Cependant le droit d'aineflb eftoît 

genera'ement reconnu des ce temps-h, 

puifque nous voyons dans le mefme Livre 

quHomere dit que Dieu a donné aux ait 

nez les noires Furies pour gardes, afin qu et 

ïes vengent les affronts que leur feront 

leurs cadets. En quoy confiftoit donc ce 

droit t II confiftoit dans l'honneur & dans 

le rcfpeél que les cadets eftotent obligez 

de rendre aux aïfnez» & dans l'autorité que 

les aifhez a voient ht leurs cadets. 

Et ne me laifferem que très peu de chê* 

fe avtc une maifon ] Car les enfants des 

concubines n'herltoicnt pcïnt & ne partageoïent 

point avec les enfants légitimes, ife 

n avoient que ce que leurs frerei vouloir 

bien Jeui donner.

âif /* ^î^ jî^tt* qu'encore, comme dît 

le proverbe, le ckaumv vous fera juger de la 

mûijfon\ JWroîs bien pu trouver en noftre 

fangue des équivalents pouf ce proverbe, 

PIûS il m'a para (i fenfé & û^humel, que 

jay cru le pouvoir cooferver dans Ja Tra •m 

dadion. Comme un beau chaume fait ju 

ger qne la mouTon a efté belle, de mefme 

une vreillelîb forte & vigourenfë fait jugef 

que ïcs fruits de fa jea nèfle ont efté fort 

bons. Ce qu'il y a de remarquable dans fe 

vers d'Homère, c'eft que fe proverbe n 3 eft 

pas achevé, feGreedrt feulement, mais je 

me flatte au 'en vûyant le chaume s VûUS cm -mt 

^ « qui &ÎÎ voir qu'en Grc« on» 

voit des proverbes dont: on ne r^pportoit 

que îes premiers mots , 6c qui ne Laiïïbrenl 

pas d'eftre entendus. Nous' en avons ée 

niefhic en tioflre langue» 

Page > o o* Sur-tout lûtfqu'mee des hômnus 

clîûifis if ' jdêtcrmine^ je dreffois à mes 

ennemis quelque mnèufeade} Car e'efloil h 

manière de fme fa guerre qui leur parois 

foit !a plus pcrilïenfe» &. oit fes braves & les 

fafches eft oient le mieux reconnus. Cefl c* 

qo'Idomence dit dans le x i i i. Livre de 

iîiîade i C'eftÈ emmm yous fçavei, détm 

cette forte de guerre que les hommes parœifi* 

[eut le plus fe qu'ils font f car les lafches y 

changent à imt mûmeM decouleur ; ils nom 

m ver m m &unyp, leurs gznmw tremblants 

m 

•**

\ 

544 REMARQUES 

m pement les fautenir, ils tmbent de pi 

bkffe P le cœur leur bat de la peur qu'Us en, 

de la mârtp mu km c$rps frifûwie > mi Iki 

que les brades m changent point de nfa^ h 

ire, On peut voîi-îà les Remarques* tom. & 

Je n'ay jamais aimé ni le travail t ni k 

labourage, ni tœconomîe dmmjîique ] J'ay 

foivi icy fes anciens Critiques, qui ont à\\ 

qu'Homère % employé îe mot *j>y>vt travail 

labeur, pour le travail des champs, le labourage 

9 & éi%m§îhw pour les occupations plus 

douces & plus hicrathes, comme fœeonomie 

do m eftiq«e, qui comprend le commerce, 

la marchandée. Ceft pourquoy ri ul 

foute, qui donne le m$yen de bien élever fij 

enfant s M Plu? arque cite ce pâftâge d'Hc^ 

mère dansïa comparaison de Caton le Censeur 

avec Ariftîde, & \\ nous avertit que es 

Peete a voulu nûus enfeigner par-là que eilî 

une nei effilé que ceux qui négligent fœcp 

fwmh irlûfûin de kur maifan? tirent L& 

entretien de la violence ir de l'hijuftke* Ccft 

une maxime très certaine- Mais je ne fay 

û Homère y a penfé P car dans ces temps 

heioïques ia piraterie ni les guerres ne pa r * 

foïent point pour mjuïiice- Le précepte cfl 

toujours très bon- 

Qui parafent fi trtfies ir fi affrenjès à 

tant d'autres'] Voilà un irait de fatfre contre 

une Jnhûitc de gene à qui iç§ armes font 

peur.

SUR L'ODYSSE'E. LhuXlY* 545 

Page y o r. -fiwr Ufquels Dîm m'avait 

iiûtmê de l'inclination ] il y a dant !e Grec, 

me Gûu m'avoit mis aans Vefprit* Homère 

reconnoift icy que le choix, que les hommes 

font tics profefflons qu'ils ernbraflent, 

vient de Dieu, quand ils coiifultent & qu'ils 

foi vent le pendant mturel qui les y porte. 

Car on ne voit que trop fouveui des hommes 

qui choififlënt des emplois & des proférions 

auxquelles h providence ne les avoït 

pas défîmes, & qu'ils n'embrafient que par 

leur folie. 

Avant que Us Grecs entreprirent lagtierye 

contre Tfûye\ H y a dans îe Grec : Avant 

ma les Grecs mûntaffhnt à Trçye* Car fes 

Grecs difoient monter de tous les voyages •# 

qu'on faifoit au Levant, comme cela a desja 

cilé remarqué. 

Gamme General 3 j* avais chûifi pûur moy 

0 qu'il y avûit de plus prêdeuiï\ C 'eftoit le 

droit du Gênera!» il choififfoir dans îe butin 

ce qu'il y ayoit de plus précieux qu'il prévoit 

par préférence » & partageoit îe xcûe 

avec fes troupes* Mais \e croy qu Ulyfle 

parle ky pluftoft en capitaine de corlairef, 

qu'en Général dune véritable armée, eu 

Sious ne voyons point dans Flliade que les 

Généraux priflent rien pour eu% avant ie 

partage , ils portoimt tout en commun, 

sîis a voient quelque choie en particulier 

«'efioient les troupes qui le leur donnoient

546 REMARQUES 

Page 503. Pi?n$i par le BûréeJ Ce n efl 

pourtant pas Je Borée, le véritable vent

$VrL I/ODTSSE'E. Livre XÎK y47 

fcpt années entiere$"\ C 'eft ainfi qu'il dcgaife 

Ion fejour dans Fille de Calypfc. 

'' Page 506. !//£ prefonta à mùy un Phe-* 

nicien très inftruû dans tûmes fortes de rufcs] 

Les Phéniciens ont eflé fort devriez; 

dans tous les temps pour leurs mfeu & pour 

Jeurs friponneries. Grotius remarque que 

c'eft eux que le Prophète Osée a défignez 

fous fe nom de Chaman, quand il a dit 

chap. 12.7. Chanaan, m manu ejusjtaterm 

dûbfa, calumnîam dilexk* Et Phïloftrate 

dît à un Phénicien f VûUS ejits fort déferiez 

pur vûjire commerce comme gens avares $T 

grands trompeurs* 

Je demeuray ehei îuy un an entier 

place chez ce fripon le fejour qu'il fit chea 

Grcé, où il nous a dit qu'il lut un an* 

Qtiûyque ces grandes premejfes eûmmm~ 

faffent à m'ejirefufpeâes, je k fubis par 

nscejjîté'] Homère marque bien iey ce qui 

n'arrive que trop ordîoarreurent quand on 

eft une fors engagé avec des fripons j quoy 

qu'on sen deffie on ne peut pas toujours 

fompre avec cuxf & une 4taïe meceffite 

oblige de les fuîvre- 

Nûflre vaîfëdu cûurdt par un vent de 

fiûrd fui U pûrta à la hauteur de Crète] Il 

appelle encore ky Borée nord* le veot nordeft, 

car le Borée ne pouvoît pas porter de

54S REMARQUéS 

Phenicie en Crète. Ceftoit proprement Aib. 

vent nord-eô» 

Page 5 oj. Enfin k dixième jour pendant 

me nuit furt vbfcure, k flot mepûujja centre 

la terre des Thefprottens] Voïià comme il 

déguifë fon arrivée à fïfle d'Qgygie chu 

Calypfo* Il met icy à [a place la terre des 

Thefprotiens, qui habitaient la cofle de 

¥Epire, vis-à-vis de fïfle des Pheadens, < 

J» 

V 

C$rf$u* Eî il méfie îcy fhiftoire de fon ani * 

vée dans cette ifle de Corfou, en changeant 

les noms. U met un Prince nommé Phidoo, 

au lieu du Roy Àlcînoûs, & au lieu deNay* 

ftcaa filie d'Àicinoiis, il met un jeune Prince 

fib de ce Phidon. 

Page % o 9 * Pour aller à Bûdane cûnfyt- 

7 le chcjhe miraculeux, &* recevoir de luy 

la rêpmje de Jupiter ] J'ay dcsja pailc ck 

cet oracle de Dodone dans mes Remarques 

fur ïe xvi. Liv* de l'Iliade. Et j'ay promis 

de traiter cette matière plas h fond fur ce! 

endroit de FOdyfiec Dodonc eftoit anciennement 

une ville de la Thefprotie ; les 

limites ayant changé dans la fui te 9 elle fui 

du pays des Molofles, c'eft à dire, qu'elle 

cftoit entre l'Epire & la Thefiàlic* P*és de 

cette ville il y avoit un mont appelle Jû* 

marus & Tmanis; fcns ce mont il y avoii 

un Temple, & dans l'enceinte de ce Temple 

un bois de chefnes qui rendoient eu» 

mefines des orades aux preftre% & ces pref*

% 

SUE L'ODYSSE'E. LtweXIK J4 

lies ies rendaient à ceux qui les confultoient. 

Ce Tempîe eftoit le plus ancien de 

J.I Grèce , & H ftit fondé par fes Pelafges. 

D'abord il fut defervi par d€B preftres appeliez 

Selles* Dans la fuite des temps fa 

Dccffe Dîoné ayant efté aflbdée à Jupiter, 

& fon cuke ayant efte îeceu dans ce temple 

, %& lieu de preftres il y eut trois preftt 

elles fort âgées qui le deffervoïent. On 

pi étend que leâ vieilles femmes eftorent ap* 

pellées -ziAmaLi dans îa langue des Moiolïc*, 

comme les vieillards eft oient appeliez m* 

kmt 1 & comme mhmdj fîgnifie aufli des 

colombes, e'eft, dit-on, ce qui donna lieu à 

fa fable, que des colombes dioient les propiieceiîes 

de cp temple. Maïs dans ma Remarque 

fur ce vers du x 1 1 - Lîv* de FOdyC 

Et fes cûlambes mefmcs qui partent tambrû* 

fw à Jupiter9 je croy avoir fart voir que cette 

b!e avoit une autre origine. Quoyquil en 

ît 1 ce temple avoir une chofe bien mer *# 

ver ï feule, ceft que Jupiter rendoit fes ora •m 

des par ia bouche des chefries mefrnes, s'il 

cil permis de parler atnfL Après avoir cherché 

long-temps ce qui pouvoit avoir donne 

tau à cette fable fi eftonnante, Je croy ctî 

avoir trouvé enfin le véritable fondement s 

cuit que les preftres de ce temple ie tenoient 

dans ïe creux de ces chefnes quand 

iis rendoient leurs oracles, c'eftoit-ia leur 

iï£pied? ainlfï cjuand ils répoodoient, ®n d%

^50 REMARQUES 

ibit que les chefnes a voient répondu, Cçf 

pourquoy Heftode a dit de cet orade qu'j 

habite dansk creux du ckejhe, v&jw k ^% 

fdvi f wjjcl) i? que de ce creux tous ksh&n* 

mes en rapparient les rêponfes dont Us ont 

fcfûin. 

Comme nous îe voyons par le beau fra^ 

ment rapporté par le Sdiofiafte de Sophocle 

fur le vers i i 8 3 » des 

Qui par tût pûur Dtdkhmm ] Une des 

ïfies Echinades 3 entre Ithaque & h code 

du Peloponefe. 

Page 5 11. Et qu'Us m*uni conduit dam 

la mdfon d'un homme fage ] L'çxpreflion 

Grecque efl remarquable , il y a à la lettre, 

dans la maifin d'un homme inj{miit 

mtyiç {ms&juÂvew, eeft kàkefdum homme 

Jïîge, d'un homme vertueux* Ce qui prouve, 

ce que fay desfa dit placeurs fois, qu'Homère 

a crû que les vertus s'apprenoîent pai 

1 éducation ; que c efloieni des fcknœs9 mm 

des fcienees que Dieu fêul enfeigne ; qu'il 

ïIV a que les vertus qui fuient h véritable 

Science de Hiomme, & que l'homme fige 

& vertueux eft le ïëul que l'on doit appelier 

jçévant & mfiruiu Platon a en&igné cette 

venté & Ta démonflrée, & cefl une chofe 

maniable 3 que ce qur tait encore aujourd'iiuy 

tant d'iionneuir à ce PJzilo&phe, ai£

SUR VODYSSéE. Livre XJVt 551 

-fté tiré d'Homère, & que ce /bit dans fa 

Foemes qu'iU'a pui/c. 

Page 5 1 a- lidais ils ûnt permis qu'UaU 

éê fms honneur la proye des Harpyes 1 

C'eft à dire, qu'il ait efié enlevé fans qu'on 

fcachc ce qu if cû. devenu. On peut voîf 

ce crui a efté remarqué fur cet le expreflion 

dans le i * Lisr. tom, i - pag. pj, 

Page 514» (2w deviendrait la réfuta* 

im quefay acmijfe] Eumée eft eftonee de 

{a proposition que luy fait VlyCk, de îe faire 

précipiter do haut d'un rocher, en cas qu'il 

fs trouve menteur. Et if nous enfeigne que 

iotues les conditions quWi nous offre, & 

qui peuvent nous engager à violer la jufii- 

€€, ne doivent jamais eflre efcoutées par 

ceux qui ont foin de leur réputation. 

Et pâur le prefom £7* pmr l'avenir J Ce 

yftaiftre pafteur ne le met pas feulement en 

peine de h réputation qu'il aura pendant fa 

vie, mais encore de ceile qu'il aura après là 

morts par-là Homère combat le fentiment 

Infenfé de ceux qui fbutïennent que îa réputation 

après ia mort n'eft qu une chimère* 

Page y 1 5. Et nos bergers ferant èieti-* 

iofiicy] Le texte dit mes compagnons, quoyque 

maiftre de ces bergers, & fQp, fuperreur 

a eux par la naiflance 7 il i\e laîfîe pas de les 

^ppeller/^ compagnons ^ mais en ïioïiielaiî* 

*

$$z ' REMARQUES 

gue )€ cloute que compagnons & camarades 

puïfîe fe dire de bergers. 

Page 5 16. £^r ?7 */fc;A /?&& de pieté] 

Le Grec dît ; Car il #wit èûnfetis» bon ef 

prit, J ay desfa fait remarquer ailleurs qu' 

Homère dit ordinairement quVi hûmniû a 

bon ejprki pour dire qu'il a de fa pieté, cr 

quii n'a pas ion efpriu pour dire qu jf ed 

impie» Car la pieté eft la marque fa pin 

ïëure & la plus infaillible du bon cfpiit 

Page 5 17. Eumèe prend de petits nw* 

ceatixdetûus les mémères] Toute? Jes cérémonies 

de faenfices ont efté affez expliquées 

dans les Remarques fur Je 1. Lîy, et 

Iliîade, tom- 1 - pag*315- 

Et après aVûir répandu deffiis de îajlew 

de farine] Cette fleur de far r ne tenoit iki 

de i'orge ïaerc méfié avec du fel que l'on 

répandait: fur la tefte de fa \ idnie pour k 

consacrer, & cefl ce que Ion appelloit mmûkr* 

Car il efloh plein d'équité] Amû if mk% 

les parts avec égalité, ûnsfàvonfër fun pins 

que l'autre. 

Il enfnfept parts, il en offrit une M 

miphes , une autre a Mercure fis 

Mdia~] Vorcy une coutume dont nous nV 

vons poini; cîieore vu d'exemple dans les 

facrifkcj dont Homère nous a parlé juiqitës 

îcy, mars ceft rcy un faqrifice ruftique, à i

sujt î/ÛDYSSI'ïû LbrefflK 553 

campagne on fuît des coutumes ancien* 

pes qu'on oe pratique ni à la vîlie ni à Farulee. 

Eumée offre une part aux Nymphes, 

parce que ce font les Nympftes qui prêû* 

£mt aux bois* au* fontarnes & aux rivières, 

lendentles campagnes fécondes & nourrie 

lent tes troupeaux- Et il en offre une autre 

à Mercure, parce que c'eft un des Dieux des 

bergers, qu'il préside aux troupeaux & qui 

fes fait profpcrer à. eroiftre, C eft pourquoy 

on met toit ordinairement un beîlier au pied 

de fes flatuës, quelquefois mefme on ïe reprefentoit 

portant on beliier fur fes efpaules 

ou foui fon bras- On peut voir imRemar* 

que fur la fin du x 1 v. Liv- de Tlfiade, tom« 

2. pag. 552. Au refte cette coutume de 

donner uae part aux Nymphes me rappelle 

ccJfe quôii pratique auiourd*iiuy dans le par* 

ïage qu'on fait du gafteau des Roys. Ùeû 

ïinfï que des cérémonies Religieuses ont 

buvent foccede à des cérémonies profanes^ 

que FeJprit de vérité a purifié & fmûïûé 

œ que Fefprît de menton ge avoit introduis 

fous un faux prétexte de Rdïgïon. 

Et Ufyjfe fut régalé de la partie la plus 

hûnorabie % qui eftûit le dûs de la viélime J 

Ceft aiûfi que dans ïe v i 1. Li?, de Fliiade 

Âgajîiemnon fert à Ajax le dos de ia vKfli m 

Rie, On peut voîr-Ià fes Remarques, tom. 2 

fàg> 40^. j adjouteray feulement que cei-ce 

Jmw II, • A a 

P

Çj4 REMARQUES 

.coutume de donner h portion la plus fi0. 

norable à ceux qu'on vouioh diflînguer t[toit 

de mefme parmi les Hébreux. Samiîci 

voulant faire honneur à Saiil, qu'il alfoït i 

xrer pour Roy, luy fit fervîr Fefpaule entie 

ée la vîtftime, qui eftoït regardée comme I 

plus honorable, parce que Dku Fa voit donliée 

à Àaron. Levavk auiem CûCUS arnmi 

ir pûfuit ante Saiïh Le cuifimer leva i'ef 

paule entière de la viéiime iriafervk devant 

Page 518. Ejiranger? que j'hanûte mn^ 

mis je dm$, faites bûnne chère dits mets çug 

je puis VûUS ûffrirl Euméc sexeufe d'abord 

de la petite chère qu'il fait à fon boite, à 

en mefîne temps il le confoîefur fenmfbr 

îune, en lefaiùntfouvenir que Dieu më (3 

îïoftre vie de biens & de maux, & qu il faut 

fecevoir tout ce qui nous vient de la main* 

efeiave, qitEumée avûit achêtti dû 

gue/qms marchands TapMens ] L'jjle de 

Taphos au deffus d'Ithaque vis-à-vis de 

rAcarnanie- Homère nous a dît dans le 1. 

Livre quelle obéïfîbit à un Roy nommé 

entes, & que fes habitants ne s'appJiuoient 

qu'à la marine, & dans fe Livre Vivant 

il fes appelle >mr*ç$Lç>des cûrfaireSf 

Car en ce temps-là le met lier de pirate iTeftok 

pas îiifàmej comme H 1 eft aujourd'hui 

C*cft raefîue ce meftîer-ià qui ieur moi 

B 

j * 

•*È 

s

S0R I/ODTSSU'IL LhtêXÎV. 555 

donne cenom» car, comme Bochart nous 

{'apprend, du mot taph, que ïes Phéniciens 

difoicïit pour Imtaph, & qui fignîfie enlever3 

ravir, cette ifle a voit efté appejfée Tapfws* 

ceft à dire, /'j/fe *&J Valeurs, & fes peuples 

Tœpkkns, ceft à dire, voleurs, ravifleurs. 

Page 5 19* La nuit fat très froide if ires 

oh faite, car la lune approchait du temps de 

la conjonction ] Ceft ainfi que félon fes aériens 

Critiques il faut expliquer ce ver£, 

0%^%imvnç fignffie une finit objeure, parce 

que la. lune eft prés de la conjonction, car 

ejïe sbbfcurtit à mefure quelle s'en approche, 

ïufqu'à ce qu'eftant conjointe p elle foie 

entièrement & totalement obïcurcie- Homère 

nous a desja avertis qa'UIylfe déçoit 

arriver à Ithaque à la fin du mois f îe der* 

tîîer jour du mois, lorfque la îune aoitieremenc 

"perdu fa lumière, Icy il nous fmt 

fbuvenir que nous voilà prés de ce )o«r-là| 

que la lune eft fur la fin de fon dernier 

quartier, & qu elfe va eilrebïen-toft enconr 

jon&ion.Nous allons voir Calage qu Ufyiîe 

va faire de cette nuit obïeure & froide. II 

n'y a rien de mieux imaginé que l'hîftoîrç 

u'il va faire & quII tourne cri apologue. 

our piqmr Eumée] Ceû ce que figniie 

Â^ Il

$$6 REMARQUES 

îcy ce mot mipn4(mt peur piquet', & COIîI, 

me nous dirions pûitr agacer Eumée* 

Page j 2 r. Ne penfant pmnt que ta nua 

tiuji tfîre fi frédé] Il faut le fouvenîr qu2 

dans ces pays4à , apres des fournées fort 

rhaudes, il lurvîent tout à coup des nuits 

ires frosdes & des neiges tnefme contre 

l'ordre des faifoRS s e'eft ce qui juftifie UlyfFc 

d'avoir laîfTc fan manteau dans fa tente li 

Baurolt pas efté ii imprudent ûon euft efté 

CD hiver* ou que la hïfon euft eflé avancée 

Page 5 a a- i\fcw VflKà? Îï ébignei é 

nés vm$eaux, ifmmjûrnmes enpem mm* 

hre ] li rapporte à fès compagnons fc fena 

de ce que le fonge fuy avok du, fans s'amu* 

fer à faire parler Je iboge- 

Page 523. Et par amitié irpat rejpeâ 

pûut un hûmme Je bien ê mais Us me mép\i* 

jent à eœt{fe de ces vieux haillûns] Homeie 

icîi/erme beaucoup éz /ens en peu de paroles. 

Deux chofes doivent porter àfecOii* 

ïîr les gens de bieo, l'amitié, car on doit armer 

les vertueux3 & h relped deu à laverie 

car fa venu eft re/pe£tabîe. Maïs les hommes 

font faits de manière, qwe la vertu eft 

prefque toujours mépiifée quand elle n'eft 

affublée que de hzûlom* 

Vous nûus fait es-fa jnr un fujet verkabk 

un apdûgue m s ingeniem] La plaifants k?

SUR I/ODYSSE'é. LhtêXiy* ^f 

vue cTuti interprète qai a pris ky 4W pour 

kûaiiges* afvoç eft une fable, un apologue* 

jorfqu'on applique à un fait prefent un fûjet 

feint, ou une hiftoire véritable- Et cette for m 

te d'apologue diffère des fables & des apo

|5

sum L'ODTSSE'E. LiweXÏV. 55 

m jer pour couvrir une partie qui fe dccou- 

•vie à mefure qu'il en couvre une autre, ou 

jïiefme pour les cacher, pour ne faire pa

J6o REMABQUn 

ïcs prononce n'entend point. 

Page 524. MaisEmme ne jugea pm 4 

propos de s'arrejhr a dormir loin de j€s 

troupe&itx\ Homère cnft'igne fort bien rCy 

que ceux qui font au ddïus dt$ autres, doivent 

avoir plus de foin que ies autres* £^ 

înée, quî cû intendant fort à la campagne 

pendant que les pafîeurj, qui font fbusîuy, 

«forment à couvert à ia maïfon. Plm la nuit 

efl obfcure, pîus ii fe croît oblfgé de foiur 

pour veiller â ia garde de fes tioup eaux* 

II prit auffi une grande peau de chèvre] 

Cette peau elîoît à deux fins 5 en marchant 

elle fei voit à fe couvrir à à ie deftenefre de 

la pfuye & de ia neige, ôc quand i( cftoiî ar* 

fefié, elle îuy fervoit de ht & 1 *empefcheii 

tfejftre incommodé de l'htwnidJtc de la Le< jç, 

JEi ^mr^ &J wl; ws] Car les voleurs fou! 

pîus à craindre pendant les nuits obfoires, 

parce quelles leur font très fa\orable$, & 

qulls veulent en profiter. 

Page 525- En cet équipage il finit pour 

mller dormir fius quelque vache à takry d$s 

pwffles du Borée prés de fis troupeaux ] 

Car Homère nous a fait entendre qu'Eu* 

mec lailToit fa nuit en pleine campagne les 

malles de fes troupeaux. Au refïe, \oïcy 

une nouvelle bevûë très ridicule, où femîe 

de critiquer a précipité ïAuteur du Parai-

SUR L'ODYSSéE. IJvreXlK $61 

Je'c Le divin percher* dit-ii, fitfiuper le 

iliwi Vfyjfi t if U mit cûmher avec Us 

vvrctaitx aux dents Manches* Homère tfa 

jamais dît cela. C'eft le bon Eumée qui va 

coucher près de fes cochons qui eftoîent 

dthors, maïs il fait coucher Ulyffe dans fa 

maifbrij puifqu'Homere dît qdilapprûcha 

fin lit du feu, Quelle pitié de n'avoir pas 

mdme fçû bien lire les endroits qu'il voulok 

tourner en ridicule l Mais, dira-t-on, 

c lomment cela fe peutîl faire qu'on attri- 

( biië à un Poëte ce qu'il n'a pas dit î Je ne 

U.s pas obligée de découvrir comment cela 

fc fait, il fuffit que cela s'efl fait, Voicy 

pourtant h méthode de ces grands Crid m 

cjuçs. Comme ils ne lifent point forigina t 

qu'ils n'entendent point, ils parcourent la 

Traduction Latine3 qu'ils ne îifent pas mef 

me entière, Ceiuy cy ayant trouvé à JU un 

de ce x î v. Liv* 

Ferremt autem ire dûrmkurus uèijues* 

fans autre examen il a attribué à Uiyflc 

ce que le Poëte dit d'Eumée* 

A a T

m 

"**•*•**, 

Argument du Livre XV. 

ItJfhmm appatûifl a Tekmœqmptn* 

J wJL dam la nuît§ pûur texhûrteras^n 

fetûurtm À Ithaque, Ce jeune Prineeâprii 

avûir pris cengê de Jltfenefas ir en mm 

receu de grands prefenis, part de Lacedemûm 

fur vn chafavec le fils de Nejlm 

ir va cûîicher à Pheres* Le lendemain h 

arme a Pylos > mais il n'entre peint dms 

la ville, de peur d*eftre retenu par Nefim^ 

ir U s*embarque* Il reçoit dans fm yœf 

feau un devin d'Argus ttppellé Tàeedymené, 

ûhBgé de quitter fan pays peur un 

meurtre, Cependant U/yjjfe ir Ëumêe s M m* 

trewnmm, ir Eumée raconte cûmment du 

eorfains Phéniciens rayant enlevé de Hp 

de Syrie, le vendirent a Latrie* Le vnijfemt 

de Telemaqne arrhe pendant ce temps 

là aux eûjles d'Ithaque* Le Prince remeys 

à la vtlfe le vaijfeau qui tavûh porté, è? il 

fa a pied a la mmfm d'Êumée dont il m> 

mit h fidélité,

Q *>- 

-

5% L* O DYS s E'E 

de ion pcrc le tcn oient fou vent 

éveillé. LaDéefTe s'approdhant de 

fou lit 5 luy parla en ces termes : 

» Teleniaque^ Il n'eft pas îionnefte 

^ que vous demeuriez plus long. 

» temps éloigné de vos Eftats , 

» que vous laiffiez ainfi tout voilre 

» bien en proye à des gens pleins 

& d'infolence &qtri achèveront de le 

» confumer ^ ou qui le partageront 

^ entre eux pendant que vous faites 

& un voyage fort inutile- Levez- 

» vous f êc fans perdre un moment, 

» preffes le vaillant Meneïas de vous 

» renvoyer, fi vous vouiez trouver 

» encore voftre mère dans les mefmes 

» fentimenu ou vous l'avez laiffée, 

» Desja fon père mefme

D'HOMèRE. Livre XV. 5 

{on la plus grande partie de voftre m* 

hkn. Vous connoiflez l'humeur

566 I/ODYSS 

» vaiiïeau de ces endroits qui vous 

* feroient funeftes, ne voguez que la 

2> nuit. Celuy des Dieu% qui vous 

J» garde &qui veille à vofîre feurett^ 

» vous eavoyera un vent favorable, 

^ Dés que vous ferex arrivé à la pre~ 

» mlere pointe d'Ithaque ? ne mac- 

3» quez pas de renvoyer fur l'heure 4 

$> la ville vofîre vaiiïeau avec loir 

3» l'équipage , & fans vous arrefîer à 

3» qui que ce foit, allez trouver lina> 

tendant de vos troupeaux» voilre 

» cher Eumée f qui eft toujours le 

39 plus fidelle & le plus affectionné 

:» de tous vos Serviteurs, Après avoir 

j» paffé h nuit chez lu y, vous fen- 

^ voyerez au Palais porter en dili- 

3 gence à la fage Pénélope la bonne 

J> nouvelle que vous elles de retour 

^ de Pyîos &en parfaite fan té 

En fini fiant ces mots la 

s'éleva dans les airs êc s'en retour 

na dans F Olympe* Elle B%Iî pas 

piuftoft difparu f que Telemaque 

pouffant le fiîs de Neilor? 1 éveille 

**

B\ïl0B*EftI. LwtêXY* Jù^ 

lu y dit : Pififlrate, levez-vous 9

568 L'ODY S SE'E 

belle Hélène arrive prés de ces 

Princes. Dés que le fils

D'HOMèRE* LivreXV, $6$ 

incfroc jmpojitcjTe à congédier « 

ceux qui défirent de refier, qu'à « 

faire des violences pour retenir «; 

ceux qui veulent partir. Il faut ai- « 

jucr & bien traiter ceux qui veu- « 

lent demeurer avec nous. & lai/Fer ^ 

i [iberté à ceux qui veulent nous « 

uitter. Mais attendez an moins « 

ne j'aye fait porter dans vojftrc « 

rhar les prefents qu'on doit faire à « 

fes hoftes, & que j'aye le plaifir « 

que vous les voyiez de vos yeux. « 

Cependant je vais ordonner aux * 

parer à dHherdece qui fe trouvera * 

ans la maiion. \Jxi ne cioit pss le *; 

mettre en chemin fans avoir man-^^ 

é 2 la poli telle & rhtranefleté de « 

l'hotte ne Je peuvent foufirîr& îe * 

befbïn des voyageurs s'y oppofe. « 

Si vous vouïiez, pour vous diver- « 

tir, vous détourner & traverfer la cc 

Grèce & îe pays d'Argos, je ferois « 

atteler mon x char pour vous ac- cc 

compagner

57^ L'OD Y S SE'ë 

» moy-mefme dans toutes nos helkz 

2» villes ; il n'y en a pas une feule où 

» nous ne fuifrons très bien recela 

» & qui ne vous fift prefent de quel. 

;» que trépied 7 de quelque eu vête, 

3& de quelque couple de mulets, ou 

^ de quelque coupe d'or. 

Le fage Telemaque répondit: 

» Grand Roy, je fuis obligé de m'en 

» retourner promptemenî ; je n'ay 

39 ïaiJle perfonne chez moy pou 

» prendre foin de mes affaires, & j'ay 

» tout fujet de craindre que pendant 

» que je cours inutilement pour ap- 

» prendre des nouvelles de mon pesa 

re, je ne me fois perdu moy-mei- 

&*me & que je ne me trouve ruiné. 

Menelas ayant entendu fes raïfons 

» donne ordre à Hélène Se à 

fes femmes de préparer le difher* 

n mefme temps arrive îe fïdelle 

h de Bbëthus ? qui ne 

quittoît jamais Menelas. Le Roy 

iuy ordonne cTaïîumex du feu & 

re promptement rojftïr ïes

OMEEE. LinzXV* $fi 

viandes- Et luy cependant defcen 

avec Hélène & fon fils Megapenthés 

dans un cabinet magnifique 

d'où s'mhûoit un parfum délicieux 

; dans ce cabinet efloit tout 

ce qu'il avoît de plus précieux 

e plus rare en meubles & en toues 

fortes de vafes les mieux travail* 

'et. Iï prend une belle coupe à deux 

onds & fait prendre à fon fils une 

urne d'argent, & Hélène ayant ouvert 

un de fes coffres où eftoienf 

les voiles en broderie qu'elle avoit 

travaillez de fes belles mains , eîÏ€ 

eboifit îe plus grand, îe plus ma- 

;nifîc|ue & cetuy qui efloit d'un* 

effein le plus beau & le plus varié; 

M efloit brillant comme f aiîre dm 

four, 6c iï fe trouva au deiïbus de 

tous les autres. Chargez tous trois 

e cm prefents, ils retournent trouver 

Teïemaqne^ & Menelas iuy 

dit, en Fabordant, Prince, queJu- f * 

iter. mary de la refpeclable Ju- « 

non. \ ous ramené dans voÔrer pa- «

72 L'ODYSS 

» me auiii neuremement que vous 

» le pouvez defirer. Mais recevez, |c 

» Vous prie, ces prefents? qui font ce 

*> que J'ay de plus beau & de phs 

» précieux dans tous mes meubla 

» c'eft une double coupe d argent 

» mais dont les bords font de For le 

a* plus fin, Elîe eft d'un très beau tra- 

» vaiïj c*eft un ouvrage de V ulcain 

» mefnie, Le Roy des Sidoniens m*m 

» fit prefent quand il me reeeut chez 

» ïuy à mon retour de Troye, & je 

» ne feaurois en faire un meilleur 

» ufage que de vous ïc donner. 

Ln fmiffant ces mots il iuy remet 

ïa coupe entre les mains. Me* 

japemhes s'avance > & met aux 

pieds du Prince Pu me d'argent. La 

îjeïîe Hélène fe prefente enfuite, 

tenant entre fes mainsie voile mer «4. 

veilfeux quelle avoit fait clle-m ^ 

me, elle ie prefente à Tefemaque, 

» & luy dit : Mon cher fils, je vous 

x> fais auffi ce prefent, qui vous fera 

» toujours fou venir du travail d*Ho

X> 5 HGMERE. lim XV* 573 

Iviie; il vous fervïra le jour de vos m 

nopccs à orner la Fri 11 celle que *c 

vous efpouferez; ; jufqu'à ce jour m 

defirable vous le donnerez à gar- « 

cr à la Reyne voltre mère. Je « 

vous fouhaite un heuretix voyage, m 

%mncm les Dieux vous conduire « 

cux-mefmes dans vos £ftat?. «1 

Elle luy remet en mefme temps 

ce voile entre les mains. Telema- 

que le reçoit avec toutes les marques 

de joyc & de reconnoilïancef 

le Prince Piilftratc le prenant 

es mains de Tefernaque, le ferre 

ans une cafTette, ik ne peut fe laffer 

d'admirer la beauté de ces prefents. 

Mené la s mené enfui te les 

Princes dans la falle, ou ils s'aient 

fur de beaux fieges; une 

belle efclave porte fur un baffin 

d'argent une aiguière d*or pour 

donner à laver» & dreffe une table 

très propre & ires polie ; la rnaiftrèfle 

de l'office la couvre de c 

qu'elle a de plus exquis» Eteoné 

«*•"

74 L s O D y s s E 

coupe les viandes & fert les por 

£ioiis, ëc le fils de Menelas fait f0{, 

ftee d'efehanfon & prefente le vin 

dans des 

Après que la bonm chère & Ia 

iverfité des mets eurent chaffé fa 

faim, Telemaque & Je fils de Ncftor 

montèrent dans leur char. 

r* 1 

pou fiant leurs chevaux, ils trave 

ferent la cour & fbrtirent des portiques. 

Menelas les fui vit jufqu'à 

la porte> tenant à la main une cou* 

pe d'or pleine de vîn, afin qu'ils 

ne parti/lent qu'après avoir fait des 

libations- II fe mit su devant de 

leur eharf & leur prefcntant la couj.y 

pe, il ïeur dit : Jeunes Princes, 

» rendez -vous toujours Jupiter fa- 

» vorable. Dites à Ncftorf qui gons* 

veme fi juftement fes peuples, que 

» je prie ïes Dieux de îuy envoyer 

JI toutes fortes de profperitez ; il a 

» toujours eu pour moy une Bonté 

& de père pendant que nous avons 

J* combattu fous les remparts d'IIion.

^HOMERE- Lbn XV. 57| 

]Le prudent Telemaque ïuy répondit 

: Grand Roy, quand nous ç< 

ferons arrivez à Pyios nous ne «c 

manquerons pas de dire à Neftor ©c 

toutes les aniitîez que vous nom « 

faites pour Iuy, Flufl aux Dieux * 

u'eftant de retour à Ithaque, je ce 

puITe auïîï conter à Utyffe toutes ce 

les marques de bonté & de gène-

f 

576 " L'ODYSîE'E " ' 

Le fils de Neflor , le fage Pj m 

- ftrate, prenant alors ia parole, dit 

* à Menelas, Grand Prince, je vous 

» prie d'examiner ce prodige, & de 

» déclarer fi Dieu fa envoyé pour 

» vous ou pour nous, car il nous 

» rpgarde aïîeu rement les uns ou k$ 

?» autres. 

Menelas fè met en mcfme temps 

à penfer profondément en luymefme 

commentai! expliquerait 

- ce figue.. Mais la Belle Hélène m 

£uy en donna cas le temps f car le 

prévenant, elle dit par une fubite 

» infpiration : Princes ^ efeoutez- 

» moy, |e vais vous déclarer Texplïsa 

jeation de ce ligne, telle que la 

» Dreux me l'infpurent, & févene- 

» meut ïa Juftifiera, Comme cet ai- 

» gïe parti d'une montagne oà il 

» eftné&oùîLa laiffé fes aiglons, 

» a enlevé d'une baffe - cour* cette 

s» oye domeftique ; de mefme Ulyïie^ 

9» après avdft^fouffert beaucoup de 

p maux & erré dans pluâeuis contréesj

Jk 

D'HOMERE, livre XV. tJ7 

, retournera dans fa maiion, «: 

& punira les Poursuivants âufli r fa-" « 

cilement que"cet -aigle ¥ déchiré «t 

i'oye qu'il a enlevée. Peut- eftrc * 

mefme qu'à l%êure que ]e-parle ^ * 

Ulyffe efl desja -chez hr?i et qu% 5 

prend les raefures £our fe venger * 

de ces iafolents. • 

Telenimque,«ivi dîttéïîére cet 

te propbetïe, $*€&*& an $^ 

i flelcne, Ah 9 que le maiïlrc

57§ L'ODYSSE'* 

bords de l'Àlphée» ils paJTerent la 

îauit chez luy, & en recourent toui 

les bons traitementsquêxjge i'hofpitalité. 

Le lendemain iês que l'aurore 

eut fait voir fes premiers rayons s 

ils prirent congé de Diodes, & estant 

montez fur leur char, ils traverferent 

la- cour & continuèrent; 

ïeur voyage, lis arrivèrent bien- 

toft aux portes de Pylos ; alor 

Telemaque dît au fils de Neftor 

3 Mon cher Pifïftratc, voulez-vous 

» m 3 s 

3 

obliger l promettez - moy 'quo 

^ vous m'accorderez la prière que fe 

^ vais vous faire. Nous femmes de* 

^ puis long*temps unis de père en îlls 

2> par Ie$ facrez liens de l'hofpitaïité; 

» nous fonjmes de mefme âge, 

^ voyage, que nous venons de faire 

» cnfemble, va encore ferrer divan» 

m tage les nœuds de noflre amitié ; jfl 

m 

*» vous conjuxe dogic ne ne pas m o- 

& bliger à m%k>jgner de mon vaifm 

» ieau 3 sautez-moy îcy,

D'HOMèRE. LivreXV. 57^ 

ue |c m'embarque & que je n'en- m 

ire point dans ïa ville> de peur que « 

voltre pcre ne veuille me retenir «c 

our me donner de nouvelles mar- m 

ucs de fbn affecflion t * quelque c 

preffe que je fois de m'en retour- ce 

vous îçavez que mes airaires ne 

que j'arrive prompte- « 

tient à Ithaque. * « 

ififtrate, ne pouvant îerefufer, 

enfa en luy-mefme comment il 

evoil faire pour ïuy accorder ce 

u'ii demandoit. Enfin il trouva 

ne le plus feur eftoit de îe conduire 

luy-jitcfme fur le rivage ; il 

étourne fes chevaux & prend le 

chemin de la mer- Dans ie moment 

il fait embarquer ks prefens que 

enelas ïuy avoit faits, for, l'argent 

& le voiie précieux que 

elieHelene ïuy avoit donné ; alors 

eL preffant de partir 9 il iuy dit : 

on cher Tekmaque t montez m 

fans différer fur ce vaîfleau, & or- « 

onnez à vos rameurs de s'éloigner « 

* * 

i

9 L'ODYSSéE 

prompcemeot de la cofîc avant q^g 

* je foi* de retour chez mon père, & 

* que |eluy,aye appris voïlre départ, 

* car cannoiiîaiit fcn humeur co 

» me je h connois» je £uîs feur qu'd 

v ne vous ïaïiFeroit point emW 

» quer; il viendrait ïuy-mefmepoui 

3* vous retenir, Jk je ne penle pas qm 

* toute voftre refiftance puïi rendie 

^ fon voyage vaîn, car fï vous le rc~ 

& fuûez, il fe mettrait verïtablem 

& en colère* 

il imîfî&nt ces mots il fe quit 

te, prend ie chemin de la. vilie , 

îen-toft il arrive dams le Palais de 

Mon 

Cependant Telemaque s'adrefle 

s compagnons , & leur dit ; 

es amis* préparez vos rames, déloyez 

les voiles^ & fendons prom- 

3& ptement ïe fein de la valte mer. Os 

obéiflent 3 on prépare tout pour le 

départ, & Telemaque de fou coûé 

oSrc fur fa poupe un facrifice à Misrve 

pour uvpiojçr wa lecours

a'HOtam. Livre XV. jfh 

_ am ce moment il fe prefe«t£ 

a ïuy un eftranger, obligé de quît 

îer Àrgor pour un meurtre qu'i 

avoit commis. C'eftcît UB dcvin^ 

defcendu en droite ligne du ceîeire 

Melauipus qui'demeuroït an^ 

dénuement dsns la ville de 

4* 

ICM, qui nourrit de fi beaux trou ^ 

ôcaux* ou iï pofledoît de grandes* 

xicheffes & habitait un fuperbe Pa^ 

îaïs ; maïs en fuite il a voit eflé for^* 

ce de quitter fa patrie & de fe ré-* 

tirer dans un autre pays, pour s*é-^ 

loigaer de Nelée fbn oncle^ qui efr 

loit le plus fier & le phis glorieux 

fies mortels,- oc qui iuy ayant en^ 

levé des biens infinis, les* retînt un 

an entier. Ce pauvre malheureu 

idla à la ville de Phylacus pouif 

exécuter une entreprise très dîffï^ 

cile à laquelle il s'eftok engagé â* 

maïs il fut retenti priibnnîer dans- 

Palais de Phyïacus, ou iï foufrît 

beaucoup de maux à caufe de 

e de Nelée* & de la violent 

h i 4 

* 

p

I/ODY53I J 

impreiïîon que les terribles FUïk 

avoient faite fur ion efprît 

enfin il évita la mort* Se il lit par 

ion habiieté ce qu'il n'avoit pd 

laire par îa force ; il emmena k$ 

hœuk de Fhyîacus à Pylos 

voyant que Neîée ne von loi t pas 

ïuy tenir la parole qu'il ïuy avoît 

donnée, il le vainquit dans un com- 

I>at finguiier f & le força de luj 

donner fa fiïle pour fon frère Bias* 

après quoy il le retira à Argos^ 01 

le Deftin vowloit quîl regnaïi fîir 

les peuples nombreux des Argiens, 

II s'y maria, & y baftït un magnique 

Païab. II eut deux fils, An* 

tîphate & Mantius f tous deux 

pleins de valeur ; d'Antîphate fortit 

le magnanime Oïclée, & d'Oïcïée 

vint le brave AmpJiiaraiis, à 

qui Jupiter & Apollon donnèrent 

à Fenvî des marques de Faffeéiioii 

la plus fînguîiere, II ne parvînt pa? 

jufqu'à la vieiileflefcar encore jeune 

îf périt à Thehes ; ïe prefent qu'on

CHOMER!. LipreXV. 

t à fa femme Eriphyle avança fa 

mort. Cet Àmphiaraiis tût deux 

s , Akmeon & Amphiloque 

antius eo eut auiïi deux, Poly 'm 

phide Si Ctitus. Ce dernier fut enlevé 

par la belle Aurore pour fa 

grande beauté, dont la terre n'ef* 

toit pas digne; elle voulut ie faire 

aiïboiravec les Immortels, & le 

magnanime Polyptiîde t Apollon 

le rendit le plus efclaîré de tous 

les devins après ïa mort d*Aiïi~ 

pbiaraiis. Ce PoIyjAide irrité cemtre 

Mantius fou père, fe retira à 

Hyperefie, ville du pays d'Argo*f 

oà il jfkïfoit fes prédirions à toas 

ceux qui ailoient le coafuïter. 

1/eftranger, qui fe prefenta 

Teïemaque pendant qu*ii faifoit 

fes libations à Minerve % eftoît fils 

de ce dernier * & il s'appelioit 

Theoelymene, il s'approcha du fifc 

d'Uiyfle j & luy dît : Puifque |e « 

fuis afTez heureux pour vous trou- « 

ver an milieu de vos prières 6c de

U O D Y S S %' 

» "voflre facrifîcc, je vous conjure p^ 

* ce mefmfi facrifice, au nom de Ia 

3 Divinité à laquelle vous l'offrez, 

* par voihre telle qui doit eftre fi 

^ chère à vos peuples, & parle falut 

si de lotis vos compagne as , rcpoiv 

» dcz-moyfans aucun déguifemen 

n» une tîiofe que j'ay à vous de m ana 

der : dites-moy qui vous efles^ de 

» queï pays vous elles, & quels foiiï 

Le /ûgeTeïemaque luy répond, 

» Eflranger ^ je vous dlray la verhé 

» toute pure fans aucun déguife- 

» ment : Je fui* d'Ithaque; mon po 

» te fe nomme Ulyffe, $*ii efl vray 

j* 1 /* + ' * 

si qu H ] oit encore en vie, €ar je crains 

» bien qu*H ne fou mon depuis long- 

» temps ; c'eftoh pour en apprendra 

» des nouvelles que pavois quitté 

» mes Eftats, & que je i&'eftois em- 

» Barque avec mes compagnons s 

%> mais j'ay fait un voyage inutile* 

* J'ay auffi efté obligé de quîttei 

a zna pairie, répondit Thcoelymeiie! 

*% 

£

HOMEKE. Livre XV. 

oar avoir tué un de mes compa 

Sriotes, qui a dansÀrgos beaucou 

de parents, tous ies plus 

?DI its de ïa Grèce, Je cherche 

a me mettre à couvert de ïcur ref~ 

fentimeot, & à fuir la mort dont 

î h nie menacent , car c*dl ma 

née d'errer dans tous les climats. 

Ayez donc ïa bonté de me 

recevoir dans voftre vailfeau» PU ifque 

dm ma ai te fe fiais devenu 

vonre juppîianîi vous aunea a 

vous reprocher nia mort û Je tomois 

entre ïeurs mains > car ils ne 

manqueront pas de me pourfuivre* 

Je n'ay garde de vous x 

une chofe fi fuite, répondit ïefage 

TÎemaque, montez dans mon 

vai fléau , nous vous y recevions le 

mieux qu'il nous fera polïiMe 

n ce mots il prend îar 

que deTheocIymene* la coucha 

le Ion 

it 

u vaineau on n rayde à» 

monter s'eft&nt afiîs fur la poue, 

il le fait afieoir prés de loy, 

et 

es 

et 

ce 

Ci

586 V O Dt SSÎÏt 

En mefme temps on délie fcs 

cables 3 & Telemaque ordonne à 

fes compagnons d'appareiller ; on 

drefTe le maft, on déployé les voiles 

fur les antennes , & Minerve 

leur envoyé un vent très favorable 

qui les fait voguer rapidement fur 

les flots de la vafte mer. Ifs paflent 

ïes courants de Crunes & de Chai- 

cîs qui a de û beiïes eaux ;

D'HOMèRE. Lhre XV. $%j 

fbit du cofté du midy dam le défirent 

de Samos. 

Pendant ce temps-là Ulyfle & 

Eu niée eiloïent à table avec les berers. 

Le fouper eftant fini, Uiyïfe 

pour efprou ver Eumée & pour 

voir s'il avoit pour iuy une véritable 

affection, & s'il voudrait ïe retenir 

plus long-temps » on s'il feroit 

bien aife de fe deifaire de luy 

Fen voyer à la vilie, luy parla 

en ces termes : Eumée* & vous ber- m 

ers , f ay envie d'aller demain à h

$SS L'ODYSSéE 

» Palais d'Uïyffe pour tafcher i 

» donner de Bonnes nouvelles à I 

>* fage Pénélope. J'auray mefnie Pau 

» dace d'aborder les fiers 

» vants, pour voir s'ils voudront bien 

yy me donner quelques refies de tant 

» de mets qu'on fert fur îeur tabïe 3 

» & je m*oftriray à leur rendre ton3 

» ïes fer vie es qu'ifs pourront exiger 

» demoy, car je vous diray une choyj 

fe, je vous prie defentendre & de 

•» ne pas l'oublier 9 c'eft que par uns 

» laveur toute particulière de Mer- 

-» cure3 qui, comme vous fçavez5 efl 

s îe Dieu qui répand fur toutes les 

s acTcîons des hommes cette grâce qui 

3> les fait réiiïlïr, il ny a perfopn^ de 

:» fj adroit ni de fi prompt que moya 

:» foit à allumer du feu ou à fendre 

^ du bois, foit à faire la cuiline ou à 

» fervir d'efeuyer tranchant ou mef- 

^ me d'cfchanfon5 en un mot tout ce 

ue les riches peuvent attendre du 

» fervke des pauvres* fêle fais mieu 

&

I 

2> f H0MERE* LivreXV. $ 

A cette proposition Eumée en 

îia dans une véritable colère. Eh, «s 

jbon homme f luy dit - il % quelle * 

enfee eft-ce qui vous eft venue

59» 1/GBYSSE't 

* joye* Qjiand le fils d'UIyife fera 

» venu, il vous donnera des hahîtg 

» tels que TOUS les devez avoir, & il 

m vous fournira les moyens à'ûkt 

n par tout où vous voudfrez. 

UïyfFe, ravi de ces marques d al> 

feélion, luy en témoigne fa recon- 

» noiiTance en ces termes ; Mon cher 

» Humée* je fouhake de tout mon 

» cœur que Jupiter vous iâvorife au- 

*> tant que je vous aime, pour la cha- 

» rite que vous avez eiie de me reti» 

» rer chez vous & de mettre fin à ma 

» mïfcre* C'efl le plus grand de tous 

* les malheurs pour les hommes que 

» ïa mendicité. Quand on efl réduit 

*> en cet eftat, la mifere, ia faim & b 

» froid forcent à faire & à fouffrir 

» ies cfiofes les plus indignes* Mais 

» puifque vous vouiez me retenir, 

que vous me rorcez a 

» chez vous» dkes-moy, ]e vous prie* 

^ des nouvelles de la mère d'UlyfTe 

^ & de fon père, qu'à fon départ il 

? iaiiïa dans «B âge desja affez avan-

'HOMèRE. DvrsXV* 591 

cé; apprene2-moy donc s'ils jouif- & 

fcnt encore de la lumière du foïeil,

% vonrs^t 

* le pour 1 entretenir & pour taf- 

15? cher de la confcler* car elle avoit 

* eu la bonté de permettre que je 

3? fuffe élevé avec la belle Ctimenev 

» la pïus jeune de fes filles, & je 

» dire qu'elle n'avoît guère moins db 

» tendreffe pour moy que pour cette 

*> Prince 

» Maïs après que nous fu fines ton 

» deux fortis de l'enfance, fon pe ri 

53 Se fa mère la marièrent à Samos 3 

s» &reeeurent des prefents infinis de 

a» leur gendre. Et pour moy, après 

» m avoir bien équipé de toutes cho- 

* fes, la Reyne m'envoya dans cette 

* terre, oc ion airection pour moy a 

s> toujours augmenté. Je fens bien k 

» perte que j'ay faite; & les fecours 

^ dont je fuis privé. Maïs les Dieux 

* ont béni mon application & mon 

» travail affidu dans les choies qu 

» m'ont efté confiées, SL j-ay en pax^ 

» leur bonté de quoy me nourrir 

» de quoy affiflerceux qui m'ont pa 

» ru dignes de fecours* Four ce qu 

4- !

!> 5 H0MERE- LtoriXV. 5 

tÈ de ma maiftreffe Feneîope, Je tt 

ne prends plus pïaifir ni k en par* m 

kr, ni à en entendre parler ; une « 

calamité affreufe tû tombée fur fa te 

jnaifon; une fouïe de Princes Info- « 

lents & fuperbes fc font attachez à cf 

c\h & fa ruinent; elle en cil ton- « 

ours f* obfedée , que fes fi de lies a 

éditeurs n'ont la liberté ni de luy * 

arïer j ni de l'avertir de ce qui fe ce 

alïe , ni de recevoir fes ordres , à *t 

eineont-ils dequoy fottrorrà leur « 

entretien f Bien-loin de pouvoir « 

nous envoyer icy quelque douceur ce 

our nos donîcfiiques* « 

elas i mon eber Eu niée * c f efl *c 

onc depuis voflre enfance que «& 

Vows cfîcs éloigné de vofire patrie « 

vos parents. i\acontez-moy, *t 

je vous prie, vos avantures* & dî* «t 

tcs-nioy fi c'eft que la ville où ha- ^ 

Bit oient voftre père & voflre mère « 

a eite laccagee par vos ennemis, ou

594 L*OD rss £'E 

s vos troupeaux, vous ont enïevg 

3» dans leurs navires, vous ont ame- 

& né à Ithaque, & vous ont vendu à 

& Laerte tout ce qu'ils ont vouIu3 

*> Beaucoup moins que vous ne valez» 

» Eftranger, puifque vous voulez 

» fçavoir mes avanîures* reparut Eum 

mee, je ne vous remferay pas ce 

m plaîfîr. Efeoutez-moy donc avec 

«i attention fans quitter la table ; lei 

» nuits font fort longues , on a h 

& temps de dormir & de fe divertir 

» à faire des contes, il ne faut pas 

» vous coucher de fi bonne heure» le 

& trop dormir laffe & fait maL SI 

» quelqu'un de ces bergers a envie 

& de fe coucher, il peut fortir, car iî 

f ** I^VUI. *V**A.» , 

» faut que demain à la pointe du four 

» il ait déjeuné & qu ? il mené 

% troupeaux aux paliurages. Mais 

» pour nous demeurons ïcy à table, 

ti à boire êc à manger, & à nous di- 

» venir en racontant ITiîftoirede nos 

» malheurs ; car tout homme qui a 

» beaucoup couru & beaucoup fouf-

HoM£A£. IhrtXV* 595 

ert dans (es eourfes, prend un pïaî-

ff5 I/O BYSJE'I 

s jours atec leurs douces fïéches, Â 

» y a dans cette ifle deux villes quj 

* partagent tout fou territoire. Mon 

» père Ctefjus, fils d'Ormenus fem, 

» bïablc aux Immortels , en CïîQïî 

s» Roy. Un jour quelques Phcm- 

» riens, ffeus eclebres dans h, marine 

m & grands trompeurs, abordèrent i 

sa nos coiies t portant dans leur \atfs* 

feau quand té de chofes curieufes 

s> & rares. 

» II y avoit alors dans ïe Pahîs de 

3* mon père une femme Phcmuenne, 

» grande, belle & très habile à ion- 

» tes fortes de beaux ou vrages* Ces 

» Fhenicrens déceureât cette femme 

» par leurs infrnuations & par leurs 

* fourberies. Un jour qu'elle la voit 

» des bardes à I& fontaine* Fun è*mK 

» obtint d'elle les dernières faveurs 

3* &-fc rendit abfolument maiftre de 

» fen efprit ; malheur ordinaire au 

3* personnes meimes les plus iiaïpes 

*> qui fe font laifFé abufer, II luy de- 

* manda donc cjui elle eioifc & d'où

B'HOMIRE. LivreXV. 597 

elle eftoît» Elïe ïuy enfdgna dV « 

Jbord iePaïais de mon peref & ïny •« 

dit qu'elle cÛolt de l'opulente ville «c 

s Bidon & fille d'Àrybas Homme « 

cres riche ik très pu r fia a t ; que des « 

res Tauhiens i'a voient eiûe- « 

vée comme elle revenoit de la cam- ^ 

oaffne, & i'avoient menée dans l*i£ïe « 

o—' s 

de Syrie, ou ils l'avoient vendue à

L'ODYSSE'S 

» mandoît, après quoy elle leur Ait: 

*> Tenez , je vous prie f ce complot 

» fecretj & qu'aucun de voilre trou 

» pc ne s'avife de m aborder, ni de me 

n parler, foit dans les chemîm oà i 

» îa fontaine, de peur cjue quelqu'un 

& ne ie voye oc ne coure au ratais ïC 

» rapporter à noftre vieillard, qui eu m 

n trant d'abord en quelque foupçon $ 

» ne manquerait pas de me charger 

a de chaîfnes f & de trouver les mon 

yens devons faire tous périr- Carp 

dez bien ie fecret & haftez-vous 

a d'aehetter les provifions pour k 

» voyage. Quand voflre vaifïeau fe» 

*> chargé, vous n'aurez qu'à ni'en- 

*i voyer un meïFager pour m'en don- 

» ner avis- Je vous apporteray tout 

» i or qui fe trouvera fous ma main. 

3jp Je tafclieray mefme de vous payer 

p un prix encore plus grand pour 

m mon pafTage, car ) eleve dans le Fa» 

P lais ie Jeune Prince, qui eft desjx 

% fort aviféj & qui commence à imt- 

$ cEeic & à foilk ddkors ^ pourvi

"HOMèRE. LivreXV m 

cîiî'on le tienne* Je n'oublieray rien

&o L/OBYSSé'ê 

» fit figue à noftre Phénicienne» 

» le figue fait SL apperceu, il s'en re- 

* tourne prompt émeut dans fon vaif. 

» feau. 

» En mefme temps cette femm^ 

» me prend par ïa main 9 & me mm 

» dehors comme pour me promener 

» En fort an t elle trouve dans le vcfsa 

tïhuïe des tables drefTées & des eou< 

J* pes d'or fur le buffet, car les offi- 

& ciers de mon père [firéparoieni h 

v* fouper , & par hazard ifs eftoient 

a» fortis, attirez par quelque rumeuï 

m qu'on a voit entendue devant h 

» Palais- Elle ne perdît pas l'occa- 

» lion, elle cacha fous fa robe trois 

» coupes & continua fon chemin ; je 

» la lui vois avec innocence fans con m 

-* 

» noîftre mon malheur. Après ïe (a 

» Ieii couché, & les chemins eftanî 

a> desja couverts de ténèbres , nous 

» arrivafmes au port oà efloit le vaif- 

» feau des Phéniciens. Ils nous font 

» embarquer promptement & met- 

3 tcat à la voiIe> pouffez par un vent 

favorable

D*HOMERE. Lzvre XV. SQX 

favorable que Jupiter leur envoya, «f 

Mous vogafmesi cet eftatfixioL « 

1% nuits* Le feptîéme |our Dia- « 

BC décochafes flèches fur cette fem- « 

nie Phénicienne, qui mourut tout * 

un coup & tomba au pied du * 

ma IL Ou ïa jetta d'abord dans la « 

mer, où elle fer vit de pafture aux « 

oiflbiis. Je fus fort effonné &af-

QZ î/OBYSSE' 

& vous fournit avec foin la nourri- 

*> ture, les habits & tout ce dont vous 

» avez befoin, de forte que vous me- 

3* nez icy une vie fort douce. Mais 

» moy, après avoir erré dans plu* 

» fieurs contrées t j'arrive icy dans 

» Feftat où vous me voyez. 

C'efl ainfi que s'entretenoieni 

Ulyfle écEumée. Ils n'eurent pas 

beaucoup de temps pour dormir, 

car i aurore vlnî bien-toit fur fou 

char d ? or annoncer la lumière aux 

liommes* 

Cependant Teïemaque & fcs 

compagnons arrivent au port, 

plient les voiles, abattent le maft, 

ik à force de rames ils font entrer 

ïeur vaiffcau dans ïe port ; ils jettent 

Tancre, arrêtent ïe vaiïîeau 

avec les cables „ & defeendent fur 

îe rivage où ils préparent leur diluer. 

Quand ils eurent fait leur rcas 

, ic prudent Telemaque ieui 

* dit : Mes compagnons, remenez l< 

3» vaiffeau à ïa ville, |e vais feul vift

D'HOMERE* Lkre JTF. 60^ 

ccr une petite terre qui cft prés d'îey «s 

voir mes bergers ; fur le foir après « 

avoir va comment tout fe paiïe « 

die2 moy, je vous rejomoray, oc « 

emain pour noflre heureufe arrî- «: 

véc je vous donneray un grand dif- ^ 

it* où h bonne chère & le Jbon * 

vin vous feront oublier toutes vos * 

fa ti sues. ^ 

aïs, mon cker fils f repartit le & 

devin Theoclymene, où iray-|e ce- «s 

idant l dans quelle maifoii d'I- c 

thaque ponrray-|e me retirer î puis- « 

fe prendre la liberté d'aller tout « 

droit dans le Palais de la Reyne « 

voftre merel a 

ans un autre temps s iuy répondit 

le fage Teieniaque * je ne 

fouffriroîs pas que vous allafïiez 

ailleurs que dans mon Palais* & riem 

e vous y manquerait, on vous y ce 

rendroit tous les devoirs qye l'hof- *. 

itatité rxiffe. Mais auiourd'hn 

ce ferait un parti trop ^dangereux 

car outre que je ne fcrois point 

* 

-4P» 

c J 1

04 ï/ODYSSE'ë 

» 

& avec vous f vous ne pourriez Voir 

» ma mcrc ^ qui «e fe monftre que 

» très rarement aux Fourfui vants & 

» qui fe tient loin d'eux clans 

» appartement, toujours occupée à 

^5 fes ouvrages- Je vais vous cnfei~ 

& gner une maîfon ou vous pour- 

» tez ailer, c'efl chez Eurymaque ûh 

m du fagePoïybe, Tous les peuple* 

» d'Ithaque le -révèrent comme uu 

*» Dieu , & cfeft de tous les Pourfuia> 

vants ceïuy qoï a le plus de mérite 

*> Àuflî efpere-t-ii d'efpoufer ma m& 

>» re.

D 3 HaMEEE- LivreXV. 60 

Theoclymene tirant en mefm© 

temps ce jeune Prince à i*eicart, luy 

met la main dans la fiemie, & luy 

it : Cet oyfeau qui voie à voftre m 

iroite , n'eu point venu fans l'or- * 

re de queïque Dieu, Je 11 ay pas m 

eu pbftoft jette les yeux fur Iuy?

êo6 UODYSSE'I: 

^ attaché à moy & le plus prompt à 

ai exécuter mes ordres ; je vous prie 

» de mener chez vous cet ho fie quç 

3» je vous confie, ayez de Inj lom les 

» foins & faîtes-ïuy tous ïcshonneim 

3 qu'il mérite jufqu'à ce que Je fois 

» de retour à Ithaque. 

Le vaillant Pirée fuy répond ? 

» Telemaque, vous pouvez vous af- 

* feurer que quelque long fejour 

1» que vous ralliez ^cy» j auray lora 

% de l!hofle que vous me confiez, 

:» qu'il ne manquera chez nioy d'au- 

» en ne des chofes que demande Fhoi- 

33 ili Ici li* C» \ 

En fîniiOmt ces mots il monte 

ans ion vaiffeau, & commande a 

fes compagnons de s'embarquer & 

e délier les cables ; ils obéïffent à, 

placent fur les bancs- 

Cependant Teïemaquc met fe s 

uîns, arme fon bras d'un 

onne picruCs & pendant que les 

compagnons remenent le vanieau 

à la ville, comme il Favoit ordon-

D'HOMèRE, LïvreÊV. £07 

ïié, il fe met en chemin pour aller 

yifiter fes nombreux troupeaux *> 

fur lefquels le bon Euméef toujours 

plein d'affeélion pour fes 

s, veilloît avec beaucou 

d'attention & de fidélité. 

c mr 

RMfi

*>$ **M

EMARQ.SUR L'ODTTS. Lkl XV. éùf 

tju'Uiyfiê fui avec Caîypfo depuis farrivée 

Je Mercure » les vingt jours qu'il employé 

à arriver de !Me d'Ogygîe à ceiîe des Pheactens, 

& ïe temps qu'il fut-là à conter fes 

avantures, & à attendre k mî&m qu*Qi% 

luy avoit promis. 

Page 5 £4- Il neflpas lumnefte que VûUS 

demeuriez plus hng~ temps êbîgné de vûk 

EJtats] En effet ce fefour avoit tûê 

feng, & prefentement qull ny a pius au 

cane nouvelle à attendre d'Uijiîe* qui e 

éesjô arrivé à Ithaque, il faut cpie Telemaque 

perife à revenir* 

Desja fin père me fine if fis frères ] H 

eft îreâ vraylembJable qu'Fcarius, père de 

Pénélope, las de vo'r ces Pourfuivams cou-* 

fumer fon bicn5 ia 

miner, & delpoufer le plus riche de ces 

Princes* 

Et fis frères^ Car on aflêure qu'Icarîus* 

eut de fa femme Pcribée cinq fiîs, Tfioa$f 

Daiïiafippe, ïmeufimus, Aie tes & Periiaii% 

& une feule filîe, qui eïl Peneîope. 

£t ùffie une plus grûffi dot 

affez parlé de cette coutume 

que ies mariez donnoient à ' 

Page 565 

^# d'un fie end 

fiemem le 

J'ay desja* 

de la doi 

femmes. 

lies fini tmt peur favanta 

mary if ûuètimt très prgm 

f if ruinent les enfi 

&

6iû REMARQUES 

qu'elles m mu eus] Eft-if pofflbfe queîes 

femmes du temps a Homère reffembiâffan 

fi fort à quelques-tmes que nous voyons 

aujourd'hui ! Mais je voudrois qu'Homère 

nous euft dit û de ion temps les hommes 

femarïcz fe fouvenoîent beaucoup de feur 

première femme, & s'ils efloîent plus juftes 

tnvers leurs enfants du premier lie. 

Jufqu'à ce que ks Dieux wus ayant dûflftê 

une femme prudente ir habile quipuiffe 

gpwetner vofire wmpm J Homère efloit 

donc perfuadé qu'une femme prudente h 

habile eft un prêtent du ciel P & que c eft la 

femme prudente & habile qui fait les mai-» 

fans, & la foie qui les deftruit. Sapiens muter 

œdijkat domum» ditSalomon, Proverb. 

14. i- Et i auteur de rEedefiaftrque, après 

avoir dit que fe rnary d'une femme prudente 

efl heureux, que les années de la vie 

1bnz doubles, adjoute, Pars bon&9 mulier 

âûna, in parte tmmthm Deum dabhur Wû 

jprûfaéHs ejus. 2^, 1. z. Noilre fiede en* 

connoift pïufia'rs que Dieu a données i 

ceux dont il a voulu récompenfer la vertUc 

Les plus déterminez des P&urJufaarUS 

wus ont drejfe une embujeade ] Comm& 

ïious favons va à la iin du 1 v. Livre. 

Page 5 £ 6. Ne manquai pas 4% renwyçt

SUR L'ODYSSéE, ZJweXV* 611 

fur t heure à la vilk vaflre vaïffeœu avec tout 

t équipage ] Car comme c'eftoit un vaïffcaa 

qu'il avoit emprunté, il eftoit jufle qu'il ie 

renvoyaft; & aaiileurs efbnt chez Eumée* 

il nWoit plus befoin ni du vaifTeau ni de fes 

compagnons qui l'avaient fuivi 

Vous fanwyerei au Palais pûrter m diligence 

à l&f&$$ Penebpe la bûmie nmfelk 

Minerve ne manque à rien. Quelle aurait 

elle la douleur de Pénélope t fi elle avoit 

oui dire que le vaifleau eftoit revenu fans 

fils ! Tout ce que l'équipage luy aurais 

dit pour ia rafle ur#r auioît elle in utile* 

Page 567. Pijtfirme, twei-wus, J* vms 

prie 3 ir allez frmnptement atteler vûfire 

char"] Tout ce que fay dît fi (bavent de la 

fimplicité des mœurs de ces temps heroV 

mt$t doit empefeher, à mon avis, qu'on ne* 

fort fur pris de voh 

uy voyagent 

( quun jeune Prince comme 

Pififtrate allie iuy-mefme atielier fon 

char f & que Tekmaque 

fans gardes, uns vaïets, 

NûUS mfçauriûm nous mettre $n chemin 

pendant une nuit fi ûbfcme~\ Ceft 1a me fine 

nuit dont i[ a dit dans le Liv, précédant, La 

nuit fut ire s froid* if très ûb/cur** Jupîuy 

verfa un déluge d s mux , if le Zéphyr t wu 

jours chargé mpluyes% fit entendre fis [ouf 

jfcs ûragmx» Ceft îa me fine nuit où Ulyue 

C, Ç \!

lit ce bel apologue » pour avoir de quoy f| 

couvrîr & fe garentîr du froid. 

Page $68* Et je ne fç aurais appwmm 

ces hûjhs exceftfs ir dans tempreffetnem 

£T dans TmdrÇcrence qu'ils tcmmgnem a 

ceux qu'ils ont recens cmi eux] Il y a dans 

le Grec; Je ne /courais Jbwffrir ces ht/fes 

qui aiment exceffwmem ir qui haïjfent dt 

me/me ceux qu'ils mi recelés chez eux* Mail 

if eft aifé de voir qu en cet endioït Homère 

a mis amitié pour empreffement, & haine 

pour indifférence. Comme quelquefois dans 

fEfcrituic feinte le mot de haine fe prend 

cm ce fen$- là. Le précepte que Menelss 

donne ky pour reg!er Je milieu qu'il faut 

tenir SL\ee ceux quon reçoit chez foy eft admirable 

; l'emprcflement exceflif efl intom* 

mode» & Tindiffcience outrée eft injurieufé 

igeante pour ceîuy h qui on la témoigne, 

& impolie h cciuy qui la marque. Il 

faut polhefle &. irberié» 

Il eji mieux de garder en mit de jujles 

eûmes ] C eft ce vers d'Homère, comme 

Euirathe l'a fort Lien remarqué, qui a donné 

lieu au proverbe que les Phîlofbphes ont 

enseigné après Iuy, tmMv ijmr, nequid'ni* 

mis, rien de trûp, 

Page s 70* Donne ûrdre à Hélène if à 

Jes femmes de préparer le di/ner ] Car ce 

ibîn regardoît particulièrement fes femmes 

J ay vu des gens qui ne poyvokiît foufftic

s0m L*OB¥SSE'E. HmXV* $i 

que Menclas donne à fa femme un ordre 

€onnneceluy-Ià, ma * s *' s f° nt tro P délicats* 

$ ils ne fe fou viennent pas que les mœurs 

des temps héroïques font ïes mdmes que 

celles des Patriarches. Oeil aïnfî ç[u'Aèra* 

ham cûwtûM h fa Unie, dit à Sara: dêpef* 

dei-vûus, pdpïî mis mefares de farine* 

fr faites des gajîeaux* Fefimavk Abraham 

m tabernaculum ad Saram? dixkque ti : MC*> 

cekra j tria fata fimila cammifce, if fa£ 

fukmerkks panes» Genêt i 8* é. 

Page 5 71 - Dans un cabinet ma. 

a ou s'exhahh un parfum délicieux ] C'eft 

aînft quli a dit d'Heoube dans le vi- Lhre 

de Ti lia de, Cette Prince fe défie nd dans un 

taèina parfumé de tenté 1 s fortes dvdeurs 

Us plus exquifes, eu elk awù quantité de 

meubles précieux* Et fur ces cabinets par ci 

hmm JJ 

% on peut voir la Remarque, tom* i 

pag. 5 o"5. 

Prendune èelle caupe à deux fonds"] C*èÛ 

ainfi que fay explique eifMpnubntoay. Une 

double coupe dont l'une fait de bafe à Fau 

ire- J'en ay fait une Remarque au i* Liv m 

de Flliade, pag. 326* 

Il efiidt brillant cemme l'acre du jûwrÈ if 

ilfe trouva au deffûus de tûUs les autres j 

Comme il a dit du tapis, dont Hecube veut 

aire prêtent à Minerve dans le v 1. Liv. de 

ïliiade, Ilfe trûumjms tûm les autres 3 M 

4

#14 REM A m QTjr I S 

eftûtt efclatant comme le pkiL Ce qui y *?** 

a 

de plus précieux eft d'ordinaire le plus ca 

ché, & Homère adjoute cette parJcukrit 

pour marquer le foin que ces PrincefiTes 

avoîent de choïfir ce qu'elles avoîent de plus 

beau & de plus magnifique dans tous ccâ 

voiles, & pour cela il falioit les vîfitcr mm. 

Page 57 s. Cefi une double c#vpe d'ar* 

nt] Homère donne îcy ïe mefine nom à 

ja coupe que IWeneîas met entre îes maîns 

deTelemaqucj & à l'urne que Megapenthes 

met à fes pieds> car îi appelle Tune & l'autre 

gpyriïfijbi Mars îi les distingue fort bien, en 

appellant eniuitc la première ^^JJOÂA^ 

une double coupe* 

Le Roy des Sîdûniens in en j£# prefem 

uand ït me récent chez ^ U J * mûn retour de 

rûyi\ Mcnelas nous a dit qu'à fon retoui 

de Troye ii fut porté à Cypre, en Plienkie 

& en Egypte. 

Tenant entre fes mains h votk menaitleux 

quelle avait fait etle-mefmc] Car Hélène 

travaifoît admirablement en broderie, 

coimtïîe Hotnere nous l'apprend dans le itu 

Liv. de l'Tliade 3 où il dît qiilrïs la troum 

dans fan*Palais q\l travaillait à un merveilleux 

ûtivrage de broderie ; c'ejîûiî un grand 

wile bwdé par deffus è^ par défions tout 

krillant d'or, ir ou efloit employé tout l'art 

de .Mimrw* Cette Primeffi y reprefentoif 

4

suit L'ODYSSéE, Livu3fK €i^ 

totis ks grands cûmbats qtte les Trâyem S* 

ks Grecs thrûimt pûur elk fous ks yeux* 

rnefmes du Dieu M.&f$* Il faut eftre bien 

habile pour exécuter un û grand defiein. 

Page 574< Et le fils d&Memlasfait fûf 

jice d'efckanfmj Les fïfe des plus grands 

Princes ne dédaignaient pas de faire cetîe 

fonction- 

Il Je mît au devant de leur char, if leur 

prefentant la tûtipe* il hur dit ] Lorfqoe 

Piiam partit pour aller racketter le corps 

de fon fîis & quM fut for ibn char, Reeube " 

iapprocha de Ju) f 3 tenant dans fa main une 

coupe d'or pleine de vfo» afin qu'avant Iondépart 

îî fifï fes libations & fe rendift Jupiter 

favorable* EHe fe tînt à Ja tefte de fe 

chevaux, & ïuy dît : Priam} m partei pas 

fans eivûîr fait vus libations à Mpher, ère, 

Iliad Lw. xxiv. Meneks fait icy la me£ 

me cïiofe à ces Princes. Leîbauons cpj'oiï 

avoît faites à la fm du repas n eftoîent pas 

fuffifantes 3 il falioit en faire encore fur ie 

moment da départ* 

Page 57e- Le fége Ptfiflmte prenantalûrs 

la parak3 dk à Mmelœs~\ Fïïîflrâf*? 

& fon ami Telemaqae eftoîent trap jeunes 

poar entreprendre dupliquer ce iWne* La 

raifon & la bienféance voutoîent donc qu'ils 

en demandaient 1 explication à Menefas^ 

g»« ayant plus d'expérience, pou¥oit mieux*

6%6 REMARQUES 

m découvrir le fens. 

Menetasfe met en mefme temps apenfet 

pççfûftdêmmt* mms la belle Hélène ne luy en 

donna pas le temps'] Pendant que MeHefas 

penfe fortement & médite pour trouver l'explication 

de ce prodige > Hélène fa trouve 

tout d'un coup, non par la force & par la pe« 

Rêtratïon de fon efprît, mais, comme elle 

raiïëure elle-naefme, par une inspiration fk~ 

bke, Par-la Homère en%ne fort clairement 

que les lumières des hommes (ont 

courtes, que d eux-mefines ils ce fçauroien! 

expliquer les prodiges , & que comme ce 

font les Dieux qui les envoyent, c'eft auffi 

à eux à en révéler le fem, Oeil ce que Daniel 

dit au Roy Nabucodonofor, Le myf* 

tare dont le Roy demande l*explication, m 

les fage$> ni les mages> ni les devinsM ni ks 

éirujpkes ne peuvent le déclarer au Rûy? 

mais il y a un Rûy dans le ciel, qui révéler 

ks myjlms. Et enfuite ïnfpiré par ce Dku 

ïMuy déclare le fonge qrïl[ avdt

SUR Ju'ODYSSEX LÎW4XK €v? 

à a Ithaque, & cette oye domeflique qu i; 

îent dans fes ferres, cefomlesPourfuîvants. 

Comme cette oye ne Éït que manger datls 

h bafîe-couï & cft enfin tuéef de raefme 

îesPourfuïvants, apréi avoir patTé pfufieurs 

années à faire banne cbere dans le Paiafi, 

feront enfin tuez par Uiyfle. 

Page y/y* Et je vûuspremets que dans 

Ithaque je wus adfejferay mes vœux cem** 

tm à mie Dcejfe ] Car û la prophétie a'àccDmpfit,Tclemaque 

juge que celle, que ici 

Dieux daignent in/pirer, mérite d élire in* 

loquee comme une Dceffe. 

Page 578, Sûufreiqtië je m'emêarqm 

ir qw je n'entre peint dans la ville'] Il km *sr 

Me queTdemaque pèche ky contreîapo 

Jheflc, de paffer à Pyfoi fans alîer prendre 

congé de Neftor. Maïs outre quli donne à 

celte adkm un prétexte très obligeant poui 

ce Prince, il a des raiibns très fortes de ne 

pas s 'arrefter. Premièrement l'ordre de Minerve, 

en fécond lieu îe prodige & l'explication 

qu Hélène luy a donnée, qui a ranimé 

fes efperances, en luy faifant enviiâger qu 1 - 

Ulyfle pouvoîteflre de retour. 

âge 580. En ftwffœm ces mm s il h 

quitte, prend le chemin de la ville, ir biett^ 

i arrive dans le Palais de Neftor] Homère 

ne s'a m ut pas à nous dire ky ce que 

Bfiftraîe dit à Helîor pour excttferTdema» 

ûe, ni k déplaîfir de JNefior, de ce qae ç 

4

éi2 IEMARQïJIS 

Prince eftoit panï fms Je voir» Céû e 

tranger à fon fujet* & il va toujours à et 

qui rappelle* 

Page 5 8 f. C'ejiûft nn dmn qiâ defccn? 

doit en arûîît ligne du ceiebre JWêimnpus] 

ÏI eftoît ùm arrière petit-fifc 7 & vmey h genealogie- 

De Cretheps naquît Àmydiaorj 

qui fut Roy de Pyloi, Cet Àmyîaon cm 

deux frit, 

Bias ir Mekmpui : ce&ty-cy eut deux fis, 

Mari crus ir Ântiphate 

I I 

Polyphide Oïcles 

' 1 ir Ciy tus 

llieodymeiie. Amphiaraiïs 

ÀIcmœori 

à 1 Àinpïiiïoque, 

Faut s'âmgmr de Neiéefûn ûncfe ] Me* 

fcmpws efioît neveu de Nelée parTyro fille 

de Saîmoïiée» qui ayant efté aimée de Nep» 

tune» en eut Nelce avant que d'clpoufer 

Crethée père d'Àmythaon » mnû Amythaorï 

ôc Neloe efloient frcres utérins» àû 

lefte fay un peu efclaircï celte hifloiredtftf 

Ja Traduction f car Homère la racdnîe fi 

brièvement, qu'elfe ne feroit pas intelligible* 

Du temps de ce Poète tout le monde eftoît 

inftruit de cette hiiïoire qui eftoit tre* 

i à csufé dm Wtmdcs inaiibns

SUR L'OB^SSEE. Livre XV, 6îç 

CM elle regard oit, mais aujourd'huieïfe e 

uop ignore pour eftre kiiie fans efciairdiTemenL 

Homère en a dcsja dît quelque 

tJiofe dans i onzième Livre. 

Et qui lity ayant enlevé des Mens infinis 9 

U retint tm anémier'] Il luy enleva fc$ biens 

pour l'obliger à aikr enlever les bœufs il** 

phitfus à Pbyïacé en ThelFalîe. 

Alla à la ville de Phylams] Ce Phyfacus 

cftort fils de DeîoïiéeRoydekPliQcide & 

père dlphidus. U avoit donné (bu nom à la 

•vifle de Phyfacé où il regnoït 

II fut retenu prtpnnkr dans le Palais de 

JPkyiacMsJ II fm pris comme ii ernineBoiî 

ces bœufs & retenu en prifont fefon que 

l'oracie le luy a voit prédit- On peut toir ce 

qui en a elle dit dans le x i • Liv* 

A ca&fe de la fille deNiléi\ A csufe de 

Perû qïi'ît voufoît 6ire elpoufer à fon frère 

ias, c f eft paurqtioy il s'efioif chargé de 

tette entreprîfe fi terrible cfaiîer enlever les. 

bœufs d'Iphklus. 

Et d^ la violents impreffiûft qïïe les terri 

bks Furhs avaient faite jur fm efprh] Ce 

pafïkge efl remarquable. Meiampus pour 

feivir fereflen liment de fon ondeNeJée, & 

pour faire efpoufer fa Me Pero à ion frère 

Bîas, leebargeadaller enlever en ThefMh 

les bœufs dlphklus, & il s'en chargea quo)*qu 

il fceult les maux qui luy en dévoient arriver, 

Et c eft ce qu'Homère appelle un de£

m, 

es,® REMARQUES 

Icîn fuggeré par les Furies3 car M n'y avoi* 

qu'un furieux qui puft fe charger d'une pa* 

rtilfe entreprife- Mais ùnû s'accomplifïbiem 

les décrets de Jupiter, qui veuïoît que ce 

MeFampus alîafl enfcigner à Pfiylacus les 

remèdes necelfaîres pour mettre fon fils 1 

ïphidus en eftat d'avoir des enfants, El 

Dieu fç lèït également de la fâgeife & de la 

ie des hommes pour l'exécution de fes 

* Page 582. Et il fît pttr fin ha&Uetë ce 

qu'Un'awhjpû faire par la force] Car ayant 

promis à Phylacus qu'il îuy enfeigneroit 

comment Ion fils Ipbidus pourroit avoi? 

des cniarïts, moyennant qu'il Iuy donnai! 

lesbœûû qu'il s'eftoit chargé denmener3& 

Fhylaciis ayant accepté ce parti, Mdampoi 

donna à Iphirîus des remèdes qui euretis 

tout le fuceés qu'if en attendoit, car Iphirfuf 

eut un fils qui fut appelle Podarces. Vay% 

Apûllûdûrep Uv* ^< 

Le èmve Amphiaraiis] Car il donna 

bonne heure des marques de fon courage 

M alla avec Jafbn à l'expédition des Àrgo= 

A fui Jupiter if Apdlm dûnmrtnt t 

l'tmi des marques éfe i ajfeflwn la plus fm 

gulieré] Jupiter en le rendant un très gran 

Prince, très confideré & très refpec^é j 

Apolîon en Je rendant un très grand devin- 

L¥oilà fcs premkiei marques qu'il jeçeut da

m 

ftffetfion de ces Dieux, Homère ce les explique 

pas, il ne fait mention que de la derrière 

que nous allons voir, 

M ne parvint pas jufqu'à la vkilkjfe 

toutes les faveurs qu'Amphîaraiis receut dje 

Jupiter & d'Apollon, ceft h feule qu'Homère 

explique, c eft qu'il mourut jeune. II 

regarde cela comme la plus grande, parce 

que la vie des hommes eftant icy bas un 

îiffu de miferes & de calamitez > ceft unie 

grâce que Dieu fait d'en retirer de bonne 

ieure. Âaflî Platon dans FAxïochuSjs'il efë 

vray que ce dialogue foït de luy, afleare que 

les Dieux ayant une connoîfignœ pariait e 

des chofes humaines, retirent promptement 

de la vie ceux qu'ils aiment le plus, & il rapporte 

à ce fujet deux hîftoîres qui en font 

des preuves très évidentes. JLa première eft 

edie dAgamede &L de Trophonîus, qui 

âpres avoir bafti le temple d'Apollon à Py ^ 

tho % demandèrent à ce Dieu pour récom 

enfe ce qu'il y a voit de meilleur pjpur les 

ommes t & fe lendemain ils forent trouvez 

morts daqs leur lit La féconde, celle de la 

Preflrefle de Junon à Argos» qui ayant prié 

fa Déefle de %ecomp^fer fes deux fils de la 

pieté qu'ils avoient .témoignée m s'attefant 

eux-mefmes à fon char pour h mener an 

temple, fes chevaux tardant trop à venir, h 

Décile i exauça 3 fes deux fils moururent fa 

.cuit mefiner Apres quoy Pjaton rapporte ce 

m

afTage d'Homère» comme un témoigna^ 

refpeétable de fa vérité de ce foi liment, 

Fiat» t$m* $ < pag* $ éy* 

Page 5 8 3 » Pour fa grande beauté dont 

!a terre n'efieitpas digne ; elle vûukt kfal 

te ajfeûir parmi ies Immortels ] Vokry ^ 

grand éloge de la beauté; une beauté parfaste 

n'eft pas pour la terre, elîe doit dire 

dans le ciel, où fe trouvent Jes véritables 

z -7 dans ce monde il n'y a que cfo 

beautez imparfaites > des ombres de beauté» 

Ce Potyphide trrké contre Mmtïus jc>n 

p^rej On trouve dans Homère des exemples 

de tout ce qui Je pafle dans la vie* iufqu 

aux querelles qu'an malheureux interefï» 

ou quelque pafïion in|ufle,font fcuvent naïf 

4re entre les pères & les enfants* 

Puifque je fuis ajfei heureux peut VOUS 

trûimrj II y a dans le Grec m P/AI, mûn ami, 

œ qui nous paroifl: effrange en noftre langue, 

& félon nos mœurs, qui ne permettent 

pas que nous abordions avec tant de 

familiarité des gens tonfïderabtes. Maïs dans 

tes heureux temps on n'y fsûibit pas tant de 

façon, & ce qui pafle aujourcTliuy pour mie 

familiarité trop giande &bJamabîe, efloil 

pris alors pour une pol i tefîe & pour une marque 

dlionnefteté. Ce compliment de Tfieodymene 

me paroifl: admirable. 

Page 584. Ditw-may fié vous ejles $

SUR I/ODTSSE'E- LtweXV, 6z 

quelp

*Grunts, b* de CkaUis qui a dé fi h$lki 

44ux] CtÛ un vers tjui manque dans toutes 

les éditions d'Homère, & dont EuftatJie 

mefme n'a fart aucune mention, lï cft pour* 

tant îieceiïaire, & H faut fe reftabJïr, car 

Strabon le reconnoiftj après Je vers zp^ 

M faut donc rapporter celuy-cy comme 5 mlion 

nous ie patente dans ion 8. fîv- 

Hornere marque fort clairement la navr 

tlon de Telemaqae, & je me fob attaefic 

à fexpliquer apres Strabon, qui dit qneT c- 

îemaque courut d'abord toui droit vers Je 

feptermtrion fufqu'au de-ià de Phées & de fa 

hauteur des coftes d l Elide, &que delà aa 

fieu de détourner à gauche, c'eft à dire m 

couchant, pour eoftoyer fifîe deSamos, oa 

Cephalenic, qui cftoït le chemin le pïu* 

court pour armer à ïthaqae, il prit à droite 

du cofté du levant, pour éviter îembufeade 

mion luy avoît dreiïée entre Ithaque & Cephalenie, 

comme Minerve len a voit avor* 

tr, & pouflà droit vers les iûes qui font au 

deflus de Dulicfiium, & qui font partie des 

Ëdrinades, & qu ainfi ayant pafifé Ithaque, 

qu'il a voit derrière luy ô midy» il detooma 

tout d*uu coup à gauche comme pour aller 

vers FAcamanîe & aborda à Ithaque par fe 

coïlé du feptenairion t au lieu de ceiuy du 

midy 

m

SUR L'ODYSSS'E. Livre XV. $t ifc* 

Le ViJfjeau air ha à la hauteur dePhéesJ 

Ceft alnn, à mon avis, qu'il faut lire, & non 

pas Plwres, qui eft trop loin de-là, & au milieu 

des terres, au Heu que Phées ou Phefe 

eft fur la cofle au bas de FEIide, au dcfliis 

de l'embouchure de l'Àiphée- 

Page 5 87. Pendant ce temps-la Ufyffe 

if Eumée ejloient a table avec les bergers 

epuis h nuit froide & obfcure où Utyfïe 

s demandé par un apologue de quoy fe garenùr 

du froid, H/eû paffé deux jours, car 

îe matin qui a fuîvi cette nuit, Telemaque 

eft parti de Latedemone & eft a!îé coucher 

à Pheres, & le lendemain il eft parti de Pheles, 

eft arrivé de bonne heure à fon vaxffeau 

prés de Pylos, s'eft embarqué & eil arrivé 

h nuit faivante à Ithaque dans le temps 

qu Ulyfle & Eumée font à table avec les 

bergers. Le matin à la pointe du jour iï ar* 

rive chez Eumée dans le moment qu'UIyffe 

Tûme IL - D d 

t

è€ * REM ARQUE? 

ce fMefJe Palleur achèvent de desîeim 

Page j88. Cejî que parunefaveur tûutg 

jtarikuBere de Mercure, qui, cûmme VûUS 

fçayei* efkDîeu qui répand fur toutes kj 

aèïtms des hmnmes ] Comme Mercure eg 

ie ferviteur & le miniftre des Dieux » on a 

feint qu'iï eftoit le patron & le Dieu de tou 

xcax qui eftoient auferîce des autres, & 

que ceftoit par fa faveur que chacun réùflîfïoit 

dans toutes les fondions defon eftat, 

Page 5 8 9. A cette prûpûfthn Euméeentra 

dans une yerkable cûiere ] 11 ne fe con« 

tente pas de rejetter la proportion d'Ulyiï^ 

il fe met véritablement en colère, ce qur 

marque bien la charité de ce pafleur» à 

Faffcdîon fincere cjuil a voit pour les eftrai> 

ers qui arrivoient chez iuy. 

Dont la yi&îmce i? tïnfblence mûntent 

jufqu'aux deux] Dont la violence & J'info* 

Jence font û grandes, qo elles ne refpe&ei! 

pas les Uienx, & qu eues attaquent ïe ce! 

e* ijrotiui 1 explique autrement t \ 

veut que cette manière de parler, mûtum 

jufqu aux deux, folt pour dire qu'elfes montent 

aioc oreiflea de Dieu, que Dhu les en 

«a 

tend, comme Dieu luy-meftne dit de So 

«• 

dôme & de-Gomorrhe» Defiendmn irn 

debû uirum chmûrem, qui vent ad me, vperieyerïm* 

CeneC * £« ai. 

s 

**

Ce fine de beaux jeunes Iwmmes qui

ézB SSMUQUES " 

tua fens infâme un vers plein de potfeu? & 

qui renferme un grand (entiment depiet^, 

Èumée reconnoift icy que c'eft par ta fce, 

nediéiîon que les Dieux ont répandue fm 

fon labeur, qu'il a eu de quoy vivre large. 

ment, & de quoy affilier les gens de bien, 

$ibhim tJhûim , ûgniûe proprement jay 

dûnné aux gens dignes de refpeéî ir de 

cûfifideratim pâtir leur venu. ajtfbMim, wi* 

êpdmv jtqtfbtç d%tn€* Et voicy comme Hefychius 

l'a fort bien expliqué- df&ï°t* Jin&pç 

*nwoç> #4&H 3%&ç. ajJiiïof figmfie un hemim 

de bien, honorablef digne de rejpeél* Et i! 

ad joute, Hemere fefert atifft de ce mût pour 

dire celuy qui a une fa"te de honte, pour m 

mendiant* Et çeft-ià le fens qu Homère luy 

donne dans ce pafiâgc* Maïs l'un vient de 

fëcitre » les pauvres viennent de Dieu, & par 

là i(s font dignes de confédération* 

T? Je ne prends plus piaifw à en 

pat 1er ni à en entendreparler] Ceii fefcris 

dp ce vers, ®ô jmlht^v isiv dmtï^ 9 Ce nefi 

pas une dûucmr pout mûy* Nûn dulce g?» 

Car if ne faut pas joindre ju&ihi^y avec fo 

mots Imç & tp^H du vas fuîyant- 

C'ejf dune depuis vûjlre enfance que veut 

ejies ébigné de vûjire patrie!] Car En niée 

v^snt de dire qu'il fut élevé encore en fini 

3% te h pi us jeune de* filles jfe Lacrfe»

SUR I/ODYSSB'E* ÏMeXV. 6ep 

page 594- Les mâts font fort bngues"\ 

omere a toujours foin de faire remarquer 

la fiifon où l'on eft Les nuits eft oient fort 

longues, car l'automne eftoit desja fort avancée. 

Le trop dû finir laffe if fat mm[\ Le bon 

nmcc âéhiïa fcy un aphoriûne de médecine 

f mais un aphorifme que l'expérience 

enfeigne. Le trop long fommeîl fait ïe me£ 

me effet que îes trop longues veilïes, car 

épiai fe & diflipe ks efprits. Hippocrate a 

dît encore plus fortement qu'Homère * Le 

mmeii &" les véiies, quand Us font excefo 

"fifs, font une maladie* Àphoiïf. liv- 7. 

Page 59 5- Pr&td un plmjir fingutwr à 

s'en fûtmnïr if à en parier ] Cela eft très 

cej tain» & la caufe de ce plaifnr eft l'idée qu'a 

eeluy qui raconte ce qu'il a feuffert, qu'il 

•Jera loué de fa patience, de fa prudence, & 

qu on le regardera comme un homme favorifé 

du ciei, pmfquil Fa tiré de tant de 

Rangers où mille autres auraient péri 

Au de-là de l'ijle d'Ortygie eji une i$e 

appelle Syrie] L'ifîe d'Ortygîe eeft Delot, 

une éts îfïes Cydades dans la mer Egée, Eê 

Tiffe de Syrie, qui eft atiJîî appellce Syrûs, 

eft un peu au de-là ou au de fus? eeft à dire 

vers l'Orient ]>ar 130port à Camée qui pa 

ïe & qui çft à Ithaque» Ceft pourquoi Ho m 

*4

£$$ REMARQUES 

iBcre âk fort bien qu'elle eft Cfpwyttr^ ^ 

Simp$zf au dejfus, au de-lè dVrtygm Q. 

£èkm toui les Géographes elle cû à fori^ 

de Defos , comme on fe verra dans fa Rt 

marque fuîvante» 0 ne faut pas confond 

cette ifle de Syros avec celle de Sûyros qi 

efi ati nord de i'Eubee. 

C$jl dans cette ifie que fi wymi les && 

verfiûns Jufilél] Voïcy an pafàge très un, 

portant. M, Defpreaox dans ïês Reflexîonj 

fm Longrn a fort bien refuté la ridicule 

Critîqoe que TÀutear du Parai ielc, homme 

irjuï eftoittres ignorant en Grec, en Latin, 

& fbrtwt en Géographie, avoit faite contre 

Homère^ ceft à drre3 contre te père è 

la Géographie, en Txcufanc d'eflre tombé 

dans lapios énorme bevûë qa un Poète ui 

jamais faite; C'ejl* dit il, d'avûir mis f# 

de Syrûs è^ la nwr Méditerranée fous k txo* 

pique ; beuU, adjoute-t-H, que tes Inttrptu 

tes d'Homère ont tafchê en vain de faumt 

en expliquant ce p^ffetge du Cadrm que b 

Phî&fûphe Ph$Ye€Ïd£, qui mwk tïds ce$tt 

ans $prê$Hûmere> avûkfak dans cette ijh» 

Il n'y a rîen-)à qui ne marque l'ignorance 

groffiere de cette Auteur, car if cft égafe* 

ment fmx & qu Homère ait pfacé Me à 

Syros fous le tropique % & qa'on ait jama^ 

voulu juftîfier ce Poète, en expliquant ce 

jîaffage du Cadran de Plierecïde qui rc 

lui fait que trois cems ans après. Mm f

SUE I/ODYSSE'E. Livré XV, €$t 

fuîs kkhée que M. Defpreaux, qui réfute 

teite maîheureuie Criuqaeavec tant demi- 

|bn & cïe fbîkiîté 7 ne Jbit pas mieux entré 

luy-niefiîie dans le \sntabfe fens de ce pa£ 

âge» & qu'îï fe foit hffîé tromper par une 

note d'Euiiathe, qui luy a perfuadé que ces 

mots hfè *?fomi lîtAtôiô, veuïenr dire que 

fflle de Syros efi au couchant de Bêlas ; car 

c'cîï ainfi qu'Eufïathe Fa d abord expliqué a 

fjtkp* Hç G>TV>W, &c. CV/? ci «£r#, que Syros 

efi fntiêe au couchant dufikil, au couchanù 

de fifo d'Qrtygie, Car ^(mS^t fe tourner,, 

fe dit du fi Mi pour SémP fè coucher. M* 

Dcfprcaux devoir voir qt-te cette explication 

cfî infoutetiabîe» car il eft abfelument faux 

que i'ifle de Syros foît au couchant de De- 

IGS. Aucun Géographe ne fa jamais dît Et 

comment Homère auroît-if pu le dire dans 

îe mefme vers où il a dit O^TU^ùLç mômpStr, 

au de fus de Tille d'Ortygîe j ce qui eft au 

de fus ou au de-là de cette iiîe par rapport 

à Eurnée qui eft à Ithaque, ne peut jamais 

cftre au couchant Voicj comme en parle 

le fçavani Bochart dans fk Chanaan, liv- i* 

chap, x i v- Ëuftathe fi trompe quand il veut 

qmpar nhm *f 03rt*£ m entende le couchant\ 

somme â ViSe de Syrûs efîâit au couchant de 

Belos* car au contraire elle eft au levant fc* 

VUE eu couchant de cette ijîe* Ceft lafatia- 

(ion q:ie luy donnent les Géographes 9 &* U 

D d m

é$Z KEMA1QUI5 

m faut que ee vers d'Hêmerê peur prêuvi 

que ceft fa véritable pofitwn $ pmfquet të 

mée, qm eft è Ithaque, ajfewe que Sym ^ 

au deffus, au de-là cfûnygk^ ce qui fwt 

très faux Ji elle eftali au couchant deD^ *t 

Eurnée aureh pluftoft dû dire en deçà, \\ 

fâfloit donc s'en tenir à. la féconde expiratfon 

qu'Euftatbe a adjoutee dans la meurt 

Remarque, D'autres , dft-îï, expliquent a 

pajfage en dijant que dans i'ijle de Sym il 

y œwh un antre qui marquûk les cmwrfiens 

du fûleii, c'eft à dire fes folftices, ir qu'an 

tzppeUûii F antre dufileil par eetie raifen* Et 

Vcilà ce quH#mere entend par ces mets} oh 

font les cerner fions du fûleii, Voîfà fa fait 

verUaMe emfiaiiion* elle mérite d'élire cfdairae. 

Nous \0}ons par ce partage mcfme 

que les Phenkîcns a\ oient îait un long fe* 

four dans Fille de Syros ; ii cil certain qm 

îe nom mefme de Syrûs vient des Pheni* 

tiens, comme nous le verrons pi as ba f & 

Bons fçavons d'ailleurs que les Phenicîeiii 

eftoient très fçavants en Àftronomic, ceft 

delà qu'il faut tirer Implication de flposwJ 

MIKUW, ÔL il eft aife devoir que ceft nKiû*ifo* 

mwf Vhûtiûtrûpe, e'eft à dire le Cadran P & 

parJà Homère nous apprend que les Phéniciens 

avorent fait dans cette jfîe un Cadran 

dont le flyîe ou f aiguille par (e moyen de 

fbn ombre marcjuolt ies fohtices. Et cornme 

€ elîoit une chofe foïi tare & fort mer-

SUR I/OBYSSR'E. LiwtXV. €% 

feilkûfe dans ces temps-ii, Homère fofi 

curieux & fort Jnflruk de tous ces points 

d'Antiquité, la marque comme une rareté 

qui dirtinguoit cette ifle* Bien toft après les 

Cadrans fuient pfus communs. Environ fix 

rngt3 ans après Homère, FEftriturc fârn» j^..s ^ 20m 

haï mention d'un Cadran qui eftoît à Jem- z. 

faïeflii & qu'on appelloît Je Cadran d'Achas, 

fur lequel Dieu fît en faveur de ce Prince 

que l'ombre rétrograda de dix degrés. Ce 

Cadran marquoit les heures & non les folices. 

II y stvoit donc des Cadrans avant ceïuy 

de Pherecîde, qui ne fit le ûen à Syros 

que deux cents ans après celuy d'Achat» & 

trois cents ans après ecluy des Phéniciens, 

par confequent pour expliquer ce pafïage 

«FHomcre, on n'a eu recours qu'à ce Cadan 

des Phéniciens & nullement à celyy de 

Plier ecide qu Homère n'a jamais connu» Il 

me femble que cela eft prouvé. Mais iï y % 

us encore, c efl qu'il y a bien de l'apparence 

que ce Cadran f que Pherecide fit à 

Syros trois cents ans après Homère, ne fût 

fait que fur les découvertes des PhenicîenSj 

car Hefychîus de Miîet dans ïe livre qufiï & 

it de ceux qui ont efté célèbres par leur 

rudition, nous afïëure que Pherecîde qui 

ejtcit de Syros me/me, n'eut pûîni de maiftre, 

if qu'il je rendit haMk en efiudiant quelques 

livres farets des Phéniciens qu'il œvûk 

recûuyrei. Je me flate que ce paflàge tfHo-

^4 'REMARQUES 

mère cft aïTe^ efcfairci, & c eft par le ftcoir; 

que M, Dader ma donné. 

On y Murrit de grands troupeaux é 

bœufs if de nmhmx tfûtipéœux de mok 

ions'] Ce qu'Homère dit icy de 3a fertilité 

de cette iile & de la bonne température à 

fon air qui en barmî/Foit toutes fortes de mi 

îadies, prouve que cePoëte efloit parfais 

ment inftruit de k nature de cette ifle &

SUR Z/ODYSSE'B. Lm*XV,*63£ 

Benfeîen$,quï après l'arrivée des Hébreux 

dans la terre de Chanaan, où ifs furent conduits 

par Jofaé, n'ayant plus pour eux que 

cette tifiere qui eft fur h cofte, s'adonnèrent 

encore pi us qu'ils n'a voient fait à la marine, 

toufurent toutes les coites de la méditerfïinée 

& les îfles, allèrent nicfme jufques 

I\MB la mer Atlantique, & envoyèrent des 

colonies en différents lieux. 

Fûrtatti dans leur vmjfeau hauemjp d$ 

y* 

)ûfis curknfes $? rmes ] Car les Phéni 

ciens eftoîent les pïas habiles ouvriers du 

monde en tout ce que demandent le luxe 

la magnificence, tant pour les meubles 

que pour les bijoux, & ils portoîent dans 

toutes les illes & dans tous les ports leurs 

cuïfofitez dont ils fâiïbient un très grand 

commerce- G'efl pourquoy lfaie dit > Nego* 

tiaîûrçs Sidûttis transfretantâs mare* 13-2* 

II y avait a fur s dans le Palais de tn&npete 

une femme Phemcienme* gronda, belle et 

très haUlé] Je ne comprends pas ce qui a 

pu donner lieu à Euftathe de s'imaginer 

que cette femme Phénicienne eftoit la propre 

mère d'Eumée j dans toute fi narration 

îi ny a pas un feul mot qui ne prouve ïe 

contraire. Eumee auroit-îl avoué fi franchement 

la honte de la mère, en la faîfant paroilii-e 

non feulement débauchée, maisvo- 

Icufei £n la monftraûf mx de fi vilains €v£

é$6 REMARQUE 

tez , aurok-îî ofé dire mSvi* jwjfoty » y***tanda 

mater, comme ii l'appelle dans la 

fuite î Je for/ bien que ceft t epithete ordinaire 

que les erfants donnent à ieur mère 

pour mai-quei f e rcfpcél qu'exige celte qualité. 

Ctft ainfi que la mère d'irus eft ap-> 

pdlée mdvtct* Mais on ne s en ferviioit point 

en parlant d'une perlbniie û \ idéale. 

Malheur ordinaire aux personnes mefmes 

[es plus habiles qui je JûHI Lûffé abufer\ 

Ceft une vérité confiante, des qu'une 

peilônne s cil îaifTcc corrompre, elle eft livrée 

à fon corrupteur, elle n'a plus de volonté, 

& quelque habile qu'elle foh d ailJcais, 

die dépend abfoiument de teluy qui fa 

aDu*ce- 

Page 597- Et pie d'Àrîhœsl Àribas 

iiom Phénicien tiré do nom A(ju&aat> d'où 

ÎOîI a fait AfdtuèaU Bochari- 

Page y£ 8 * Je wus apporter ay tout ter qm 

Je tfûurmajèus m0 main ] Voilà une franche 

voleule doiïiefkique* Comment peut-on 

croire qu'Eumée euft parlé ainfi de fa merci 

J'ékve dans le Palais le jeune Prince] Ce 

îi*eftoit donc pas fa mère f mais fa gouvernante. 

Comment Euflathe peut-il s'imaginer 

que fi cette Phénicienne eufl efte la 

mère d'Eumce, elle euft pu le ïefcudre à le

SîTH L'OBYSSI'E. LivréXV. €rf 

met à ces Phénicien?, afm quels aîIaiîetiC 

vendre l 

Page 599- Et ma mert mefine] Cette 

mère eft donc différente de cette Phénicienne, 

il dit me!me OTîJwot pjr^, veneran* 

dd mater* Cette épithete £ refpeélueufe 

coîiveûoit-elle à une femme fi méprifabie l 

Page (î o o. Je la JMVMS avec tmiûcmce 

fans cmnotpe mon matheuf\ On demande 

comment Eurace, qui eftoît un enfant à \z 

IKkre quand i! fut enlevé, a pu fçavoir toui 

ce qui! vient de raconter î car ïï n eftoît pas 

en eflat d'avoir la moindre attention à ce 

qalfe paffoit, ni de rien remarquer, cepem* 

dant voila une narration fortcirconftatîcïée. 

On répond que les Phéniciens, qui favoknc 

vendu, avoîent fans doute conté toute cette 

hlftoiie à Laërte» & qu'Euméefavoît apprife 

de luy. 

Page 601 * Sur kfair k mefme vent mus 

pouffa à Ithaque ] Ainfi Homère compte 

que par un bon vent on peut arriver en ûx 

jouis &deniî de Me de Syros àltbaque* 

Page 602. Cependant Tekmaqae if je s 

compagnons arrivent au pou ] Noos avons 

vu à Sa fin dm i.^Liv* que Tefemaque paru 

d* Ithaque fort tard & fong-femps après le 

coucher du foleiï, arrive le Jeu demain à Pyïos 

après ïe lever de 1 aurore* Et icy le me£ •*.

*êjB REMARQUES 

me Prince, arrivé de bonne heure de Plier 

au port de PyJos, /embarque iong temp^ 

avant le toucher du foieii, & il narrive qm 

Je lendemain matin. II eft donc quelques 

heures de pins à faire ce trajet, maïs il faut 

fe ibuvenir, commer je Fay desja dit au commencement 

du i i 1 * Livre 3 qulcy il prend 

un détour pour arriver k h cofte fcptem~ 

trionaïe d'Ithaque & pour éviter kê embufches 

des Pour fin van ts. 

Page 6o*y^Cyi chei Eurymafm pis 

fage Pûlyhe\ M croit qu'if fefa mieux & plus 

feurement chez cet Euryniaque qui de tous 

Jes Poor/uivanw cfloît celuy qui valoît ie 

mieux, niais il ne pcrfifte pas dans ce fentrment 

, cJomme nous ialions voir dans k 

fuite. 

On vit valer à fa droite un auteur] Ces 

oyfcau paroilFant toutàcoupiorfquc Tdemaque 

achevoit ce qu'il vient de dire, ne 

pou voit pas manquer deftre mi augure des 

plus marquez, On voit bien que la co'ombe 

defigne les Pour fui V2nts timides 3 & qu Uî)ÏÏ€ 

efi defrgné par i autour 

Page 60 j. Theoclywxne tirant en tnefmû 

temps €£ jeune Prince a reJean ] Car if ne 

\rouloit pas que perfcnne entendift l'explrcation 

qull alloît donner de cet awgurej de 

peur qu'on ne ie divulgaft dans la ville, & 

qae les Pour/trivanis n'en profitaient powr 

met tre a couver t>

gUïi I/ODYSÊ'E. Une XV. 6$$ 

ii n'y a point dans Ithaque de race plus 

fûyaie

Fit m es ù J Omijfwns a corriger. 

Page SU, après ces parcUs, que kl 

GïiX.b avoient bafîie au devant de fcuis 

vai fi eaux- Adjoutt^ : Mais cette remarque 

nefl pas entièrement jutte, car Homère ne 

dit pus formellement que cette montagne 

tomberont véritablement fur là viHe des 

Pheacien*; mais jJ fait entendre qu'elle menacerait 

d'y tomber» & que cette \ilîc ferait 

couverte d'tfne momagne qui mensceroit 

toujours de feiira%. CeÛ air, fi que 

Neptune s'explique iuy-niefme dans le lk, 

xi i 1. Et 1 on ne voit pas melme que cette 

menace ait efté effectuée. Homère donne 

ïieu de penfer que le repentir des Pheaciens 

êi le iâcrifîce qu ils offrirent à ce Dieu l'cm- 

Pefehent d achever fa, % engeance- 

Page 87, à leurs ïscours, Lijsi, à leur 

iecaurs. 

Page 138* par contradiction. Ufoz,pur 

contraction. 

Pdg* Si- $* VoHà comme if deguife fou 

arnvee à TiJîe d'Ogyg'e ihez Caîjpfo* Zrff* 

"Voiià comme il dCguile ion arrivée à fi fa 

de Sellerie chczÀlcïnoûâ,

M - Notes du mont Royal

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