Les existants indivisibles : une réalité à géométrie variable - Scor
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Focus<br />
Mars 2010<br />
<strong>Les</strong> <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> :<br />
<strong>une</strong> <strong>réalité</strong> <strong>à</strong> <strong>géométrie</strong> <strong>variable</strong>
Sommaire<br />
3 e Matinée Décennale SCOR Global P&C<br />
« <strong>Les</strong> <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> :<br />
<strong>une</strong> <strong>réalité</strong> <strong>à</strong> <strong>géométrie</strong> <strong>variable</strong> »<br />
11 juin 2009, Paris<br />
L’aspect juridique de la notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> 4<br />
<strong>Les</strong> problématiques du concept d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> 4<br />
Historique de la notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong><br />
au travers d’<strong>une</strong> analyse jurisprudentielle des principaux arrêts 7<br />
Perspectives d’évolution 10<br />
Analyse technique de la notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> 13
2 - Mars 2010 - SCOR
Introduction<br />
Jean Tuccella, Directeur de la spécialité Décennale <strong>à</strong> SCOR Global P&C,<br />
en présence des membres de son équipe, Stéphane Amilhau et Jean-Paul<br />
Pirog, a réuni ses clients français lors la troisième matinée Décennale<br />
le 11 juin 2009 sur le thème des <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> et l’assurance<br />
Décennale.<br />
La couverture des <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> dans le cadre de l’assurance<br />
Décennale suscite quelques interrogations sur le marché. Le titre qui<br />
a été donné <strong>à</strong> cette matinée « <strong>Les</strong> <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>, <strong>une</strong> <strong>réalité</strong><br />
<strong>à</strong> <strong>géométrie</strong> <strong>variable</strong> », semble correspondre au sentiment que chaque<br />
souscripteur éprouve en face d’un dossier de restructuration lorsqu’il<br />
doit définir le périmètre d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>.<br />
Cette matinée vise <strong>à</strong> déceler les clés d’analyse d’un dossier de<br />
restructuration qui vont permettre d’appréhender au plus juste<br />
cette notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>. Pour atteindre cet objectif,<br />
la conférence est partagée en deux parties :<br />
• Pour la première partie, Maître Jean-Pierre Karila, avocat renommé<br />
dans le monde de l’assurance Construction, aborde l’aspect juridique<br />
de la notion de l’existant indivisible en commençant par l’historique<br />
de cette notion pour faire comprendre les motivations de l’ordonnance<br />
de 2005 et ainsi appréhender la jurisprudence future. Et après avoir<br />
imaginé cette jurisprudence future, il sera peut-être plus facile de<br />
définir ce que sont les <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> dans un bâtiment.<br />
• La deuxième partie est assurée par un technicien, Monsieur Pierre<br />
Bertin, architecte et expert construction, qui connaît également le<br />
monde de la construction. L’approche juridique va compléter l’analyse<br />
techniques du bâtiment afin de pouvoir amener <strong>à</strong> définir physiquement,<br />
<strong>à</strong> l’aide d’<strong>une</strong> liste de cas déterminés, les <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>.
1<br />
L’ASPECT JURIDIQUE<br />
DE LA NOTION<br />
D’EXISTANTS<br />
INDIVISIBLES MAÎTRE JEAN-PIERRE KARILA<br />
Avocat, Professeur <strong>à</strong> l’ICH (Institut d’études<br />
économiques et juridiques appliquées<br />
<strong>à</strong> la construction et <strong>à</strong> l’habitation) <strong>à</strong> Paris<br />
I. <strong>Les</strong> problématiques<br />
du concept d’<strong>existants</strong><br />
<strong>indivisibles</strong><br />
Tout le monde adhère <strong>à</strong> la définition de la notion<br />
d’<strong>existants</strong> donnée par le COPAL (Comité pour l’application<br />
de la loi du 4 janvier 1978, dite loi Spinetta du<br />
nom de l’Ingénieur Général des Ponts et Chaussées<br />
président de ce comité) dans son avis du 25 novembre<br />
1983. Ainsi, les <strong>existants</strong> désignent les parties anciennes<br />
de la construction, existant <strong>à</strong> l’ouverture du chantier et<br />
sous, sur ou <strong>à</strong> l’intérieur desquelles sont exécutés des<br />
travaux de réalisation d’ouvrages nouveaux.<br />
SCOR m’a demandé de réfléchir <strong>à</strong> la notion « d’<strong>existants</strong><br />
<strong>indivisibles</strong> », notion qui serait, selon elle, « <strong>une</strong><br />
<strong>réalité</strong> <strong>à</strong> <strong>géométrie</strong> <strong>variable</strong> ».<br />
SCOR se réfère <strong>à</strong> cet égard de facto <strong>à</strong> l’ordonnance<br />
du 8 juin 2005 qui a énoncé que ne relevaient pas du<br />
domaine de l’assurance obligatoire les ouvrages<br />
<strong>existants</strong> avant l’ouverture du chantier « <strong>à</strong> l’exception<br />
de ceux qui incorporés dans l’ouvrage neuf, en<br />
deviennent techniquement <strong>indivisibles</strong> ».<br />
Je rappellerai d’abord d’un mot le contexte de l’ordonnance<br />
précitée du 8 juin 2005 qui reprend en substance<br />
les suggestions exprimées dans un rapport que j’ai<br />
rédigé avec les Professeurs Hugues Périnet-Marquet<br />
et Corinne Saint Alary-Houn et que nous avons déposé<br />
le 18 décembre 1997.<br />
4 - Mars 2010 - SCOR<br />
Vous vous souvenez sans doute qu’alors que le<br />
législateur avait parfaitement distingué le domaine<br />
de la responsabilité décennale, s’appliquant <strong>à</strong> la<br />
construction de tout ouvrage, de celui de l’assurance<br />
obligatoire de ladite responsabilité décennale limitée<br />
aux ouvrages de bâtiment, la jurisprudence tirant<br />
partie de l’absence de toute définition légale de cette<br />
notion, comme du fait que la définition réglementaire<br />
énoncée par un arrêté du 17 novembre 1978, pris pour<br />
l’application des polices d’assurance, avait été annulée<br />
par le Conseil d’Etat dès l’année suivante, avait inventé<br />
de toutes pièces le fameux critère de « technique de<br />
travaux de bâtiment », dans le cadre de sa volonté de<br />
faire coïncider les deux domaines ci-dessus évoqués de<br />
la responsabilité décennale et de celui de l’assurance<br />
obligatoire de ladite responsabilité décennale.<br />
C’est pour mettre fin <strong>à</strong> cette dérive, que j’avais suggéré<br />
dans le rapport ci-dessus évoqué, d’éradiquer le<br />
problème <strong>à</strong> la source, de ne plus parler de « Travaux<br />
de bâtiment », de supprimer dans le Code civil aux<br />
1792.2 et 1792.3 le terme « Bâtiment » et le remplacer<br />
par « Ouvrage » et de supprimer « Travaux de bâtiment<br />
» dans le Code des assurances et de lui substituer<br />
« Travaux de construction ». C’est dans ce cadre qu’est<br />
intervenue l’ordonnance du 8 juin 2005 en supprimant<br />
toute référence aux notions de « Bâtiment » et<br />
« Travaux de bâtiment » et en leur substituant celles<br />
d’« Ouvrage » et « Travaux de construction ».<br />
Désormais, dans <strong>une</strong> volonté de simplification,<br />
l’ordonnance de 2005 sur la base d’un raisonnement<br />
du « Tout Sauf », pose le principe que l’assurance
obligatoire de la responsabilité décennale concerne<br />
tous les ouvrages sauf ceux listés dans les alinéas 1<br />
(exclusions absolues) et 2 (exclusions relatives) de<br />
l’article L. 243-1-1 institué <strong>à</strong> cette occasion. D’autre<br />
part, « ces obligations d’assurance ne sont pas applicables<br />
aux ouvrages <strong>existants</strong> avant l’ouverture du chantier,<br />
« <strong>à</strong> l’exception de ceux qui, totalement incorporés<br />
dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement<br />
<strong>indivisibles</strong> ». Chaque terme a son importance.<br />
Deux conditions sont donc nécessaires pour que<br />
relèvent du domaine de l’assurance obligatoire, les<br />
dommages pouvant affecter les <strong>existants</strong>.<br />
Première condition<br />
Il faut que les <strong>existants</strong> aient été totalement incorporés<br />
dans l’ouvrage neuf.<br />
Deuxième condition<br />
Il faut que par suite cette incorporation totale dans<br />
l’ouvrage neuf, les <strong>existants</strong> en deviennent techniquement<br />
<strong>indivisibles</strong>.<br />
Etant rappelé, que lorsque les <strong>existants</strong> considérés ne<br />
remplissent pas ces deux conditions, ils doivent, en principe,<br />
faire l’objet d’<strong>une</strong> couverture d’assurance facultative<br />
dans le cadre de l’assurance dommage ouvrage.<br />
<strong>Les</strong> assureurs s’étant obligés <strong>à</strong> proposer ladite garantie<br />
facultative <strong>à</strong> tout souscripteur de la Dommages<br />
Ouvrage dans les termes prévus par <strong>une</strong> convention<br />
du 8 septembre 2005 passée entre l’Etat, les maîtres<br />
d’ouvrage et les assureurs « pour les dommages affectant<br />
les parties anciennes de la construction en<br />
répercussion des travaux ».Cette garantie facultative<br />
des dommages aux <strong>existants</strong> concerne les « dommages<br />
matériels rendant <strong>une</strong> partie ancienne impropre <strong>à</strong><br />
sa destination ou portant atteinte <strong>à</strong> sa solidité », <strong>à</strong><br />
condition toutefois que ces dommages soient « la<br />
conséquence des travaux ».<br />
La garantie couvre les coûts afférant <strong>à</strong> la remise en état<br />
des <strong>existants</strong>.<br />
Il s’agit d’<strong>une</strong> garantie pérenne de dix ans <strong>à</strong> compter de la<br />
réception, mais elle intervient aussi avant la réception dans<br />
les conditions prévues par l’assurance dommage ouvrage<br />
obligatoire pour les travaux neufs.<br />
Mon intervention sera donc exclusivement consacrée<br />
aux « <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> », c’est-<strong>à</strong>-dire <strong>à</strong> ceux<br />
relevant du dommage de l’assurance obligatoire.<br />
La question est complexe pour deux raisons.<br />
Tout d’abord, l’ordonnance du 8 juin 2005 ne concerne<br />
que l’assurance de certains <strong>existants</strong> ou plus précisément<br />
les conditions du rattachement <strong>à</strong> l’obligation<br />
d’assurance de certains <strong>existants</strong>. Elle ne se prononce<br />
pas sur la nature des responsabilités encourues <strong>à</strong> l’occasion<br />
des dommages matériels affectant ces <strong>existants</strong><br />
ou d’autres <strong>existants</strong>. En d’autres termes, ce n’est pas<br />
parce que le législateur a dit que certains <strong>existants</strong> qu’il<br />
a définis lui-même comme étant <strong>indivisibles</strong>, relèvent<br />
du champ d’application de l’assurance obligatoire, que<br />
le juge dira <strong>à</strong> propos d’autres <strong>existants</strong> (c’est-<strong>à</strong>-dire des<br />
<strong>existants</strong> non <strong>indivisibles</strong>) que la responsabilité encourue<br />
serait alors <strong>une</strong> responsabilité de droit commun.<br />
De sorte qu’il peut exister <strong>une</strong> certaine « distorsion »<br />
entre ce qui a été envisagé implicitement par l’ordonnance,<br />
<strong>à</strong> savoir soumission <strong>à</strong> la Décennale des seuls<br />
<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong> – et ce que pourrait décider un<br />
Juge en ce qui concerne la responsabilité applicable<br />
aux autres <strong>existants</strong>, c’est-<strong>à</strong>-dire, <strong>à</strong> ceux non <strong>indivisibles</strong><br />
et <strong>à</strong> propos desquels il pourrait estimer que la<br />
Décennale est applicable dans des conditions que nous<br />
évoquerons plus loin.<br />
SCOR - Mars 2010 - 5
En second lieu, la question est complexe car, on a<br />
<strong>à</strong> faire <strong>à</strong> <strong>une</strong> dualité, voire, <strong>une</strong> trilogie possible de<br />
dommages, <strong>à</strong> savoir :<br />
• des dommages sur les travaux neufs ,<br />
• des dommages sur les <strong>existants</strong> uniquement ,<br />
• des dommages affectant aussi bien les travaux neufs<br />
que les <strong>existants</strong>.<br />
et <strong>à</strong> <strong>une</strong> trilogie des causes et origines des dommages<br />
affectant les <strong>existants</strong>.<br />
En effet, concernant ces derniers dommages affectant<br />
les <strong>existants</strong>, ceux-ci peuvent résulter :<br />
• d’<strong>une</strong> répercussion des travaux menés : mauvaise<br />
conception et/ou exécution des travaux neufs ;<br />
• d’un mauvais état des <strong>existants</strong>, la réalisation des<br />
travaux neufs se trouvant être le révélateur de ce<br />
mauvais état ;<br />
• ou la combinaison des deux.<br />
Cette situation renvoie <strong>à</strong> la question de savoir si l’état<br />
préexistant de ces <strong>existants</strong> ne doit pas faire l’objet,<br />
du moins pour certaines opérations lourdes, d’un<br />
diagnostic et en cas d’<strong>une</strong> défaillance de travaux<br />
confortatifs ou réparatoires avant toute exécution<br />
des nouveaux travaux.<br />
Dans ce contexte, mon intervention se déroulera<br />
autour de deux axes :<br />
• Qu’a voulu le législateur en rédigeant l’ordonnance<br />
de 2005 ?<br />
L’objectif du législateur avait <strong>une</strong> double finalité,<br />
entériner la jurisprudence Sogebor du 30 mars 1994<br />
et exclure du champ de l’obligation de l’assurance<br />
obligatoire la jurisprudence Chirinian du 29 février 2000<br />
6 - Mars 2010 - SCOR<br />
ou encore la jurisprudence résultant d’un arrêt<br />
Syndicat des Copropriétaires Espace Brotteaux du<br />
31 octobre 2001.<br />
• Quid de la jurisprudence <strong>à</strong> l’avenir au regard de cette<br />
double finalité ?<br />
La réponse <strong>à</strong> ces questions suppose au préalable un<br />
historique de la jurisprudence.<br />
Nous pouvons dire de cette jurisprudence, avant de<br />
la synthétiser, que sur le plan de l’ordonnance du<br />
8 juin 2005, c’est globalement le fait d’avoir retenu la<br />
responsabilité décennale et la couverture d’assurance<br />
de cette responsabilité décennale dans deux séries<br />
d’hypothèses, <strong>à</strong> savoir :<br />
• lorsqu’il existe un lien technique, physique, entre les<br />
différents travaux, les travaux neufs et les <strong>existants</strong><br />
d’<strong>une</strong> part, et que les désordres n’ont pas pour origine<br />
exclusive l’état des <strong>existants</strong> eux-mêmes,<br />
• lorsque l’importance de la rénovation commande<br />
nécessairement <strong>une</strong> vérification de l’état des<br />
<strong>existants</strong> avant la réalisation des travaux neufs.<br />
Puis <strong>une</strong> troisième hypothèse est apparue très tôt en<br />
jurisprudence.<br />
En effet, lorsque le Juge se trouve confronté <strong>à</strong> <strong>une</strong><br />
situation où il n’y a pas de lien physique ou technique<br />
très fort entre les <strong>existants</strong> et les travaux neufs ou<br />
encore dans <strong>une</strong> hypothèse où il ne peut pas dire que<br />
les dommages affectant les <strong>existants</strong> n’ont pas pour<br />
origine exclusive l’état de ceux-ci ou encore lorsqu’il ne<br />
s’agit pas d’<strong>une</strong> opération très importante, il retiendra<br />
alors un critère de causalité entre la conception ou<br />
encore l’exécution des travaux neufs et les dommages<br />
affectant les <strong>existants</strong>.
II. Historique de la notion<br />
d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong><br />
au travers d’<strong>une</strong> analyse<br />
jurisprudentielle<br />
des principaux arrêts<br />
Je vais donner douze exemples jurisprudentiels pour<br />
mieux comprendre.<br />
Le premier exemple est un arrêt du 18 mai 1989, il<br />
n’est pas forcément très significatif mais c’est le<br />
premier en la matière. Il s’agit de travaux d’aménagement<br />
et de rénovation d’<strong>une</strong> ferme comportant notamment le<br />
percement d’<strong>une</strong> baie dans le mur de refend. Au cours<br />
des travaux, avant réception, ce mur s’effondre. Il est clair<br />
que les dommages matériels affectant l’existant (le mur<br />
de refend) étaient directement liés <strong>à</strong> l’exécution des<br />
travaux neufs. Il y avait un assureur qui garantissait avant<br />
réception notamment l’effondrement.<br />
Pour retenir la responsabilité de cet assureur, la Cour<br />
de cassation a dit : « … Attendu que la cour d’appel a<br />
relevé que la clause du contrat d’assurance qui<br />
accordait avant réception des travaux la garantie<br />
des dommages affectant les travaux exécutés<br />
par l’assuré et résultant d’un effondrement, ne<br />
distinguait pas selon que l’ouvrage objet de ces<br />
travaux consistait en <strong>une</strong> construction neuve ou<br />
encore livrée ou en l’aménagement des parties<br />
d’<strong>une</strong> construction ancienne appartenant au<br />
maître de l’ouvrage ; que c’est par <strong>une</strong> interprétation<br />
souveraine exclusive de la dénaturation alléguée, que<br />
les juges du fond ont statué comme ils l’ont fait… ».<br />
Dans ce premier exemple, la Cour de cassation a retenu<br />
la Décennale parce qu’il y avait un lien de causalité<br />
entre l’exécution des travaux sur l’existant et les<br />
dommages causés <strong>à</strong> l’existant, et a tiré partie de la relative<br />
imprécision des stipulations concernant la garantie<br />
d’effondrement avant réception de l’ouvrage.<br />
Le deuxième exemple est un arrêt de la cour d’appel<br />
de Paris du 12 janvier 1990. Nous voyons apparaître<br />
dans cet arrêt rendu <strong>à</strong> l’occasion de l’application<br />
d’<strong>une</strong> assurance Dommages Ouvrage, apparaître<br />
la première fois le critère d’incorporation physique<br />
existant entre les travaux neufs et la prise en compte<br />
également du lien de causalité, les deux étant<br />
étroitement emmêlés.<br />
Il s’agissait de l’effondrement d’<strong>une</strong> poutre ancienne<br />
sous le poids des travaux neufs. La police ne prévoyait<br />
pas de garantie d’<strong>existants</strong>, les premiers juges l’avaient<br />
écarté et la cour de Paris va infirmer ce jugement :<br />
« … Considérant que selon les premiers juges, l’incorporation<br />
de la poutre ancienne <strong>à</strong> des travaux neufs<br />
de façon indissociable, puisqu’elle était destinée<br />
<strong>à</strong> leur assurer le soutien nécessaire et l’origine des<br />
désordres se situant non pas dans un vice qu’elle<br />
ne présentait pas mais dans sa surcharge, justifient<br />
l’obligation invoquée <strong>à</strong> l’encontre de la compagnie…<br />
<strong>Les</strong> travaux forment, tels qu’ils ont été<br />
conçus, un tout qui a comporté la prise d’appui<br />
sur cette même poutre, laquelle a cessé d’être un<br />
élément indépendant pour constituer un matériau<br />
de l’ensemble dont il doit suivre le sort… ».<br />
Le troisième exemple est un arrêt de cassation<br />
Résidence Carteret du 3 juillet 1990, il concerne <strong>une</strong><br />
police Dommages Ouvrage UAP, le premier arrêt<br />
véritablement important. Il est intéressant parce qu’il<br />
n’y a ni indissociabilité, ni incorporation. Des<br />
dommages affectent un ouvrage neuf réalisé et en<br />
cours d’expertise judiciaire, un mur de fondation<br />
s’effondre. La cour d’appel de Reims considérant que<br />
ce mur de fondation n’a pas fait l’objet de travaux et<br />
qu’il n’entre pas dans l’assiette de prime de la<br />
Dommages Ouvrage, a confirmé que cet effondrement<br />
n’avait pas <strong>à</strong> être pris en charge par l’assureur<br />
Dommages Ouvrage. Pour violation de l’article 1792<br />
du Code civil et L. 242.1 du Code des assurances,<br />
l’arrêt de la cour d’appel de Reims, et retenir la garantie<br />
de l’assurance dommage ouvrage, la Cour de cassation<br />
a dit : « … Attendu qu’après <strong>une</strong> opération, réalisée<br />
en 1983, de rénovation et de l’aménagement d’un<br />
immeuble en vue de laquelle le maître de l’ouvrage<br />
avait souscrit auprès de l’UAP <strong>une</strong> assurance<br />
Dommages Ouvrage dans la limite prévue <strong>à</strong> l’article<br />
L. 242-1 du Code des assurances, des désordres sont<br />
apparus en 1986 ; qu’au cours de l’expertise, un mur<br />
de fondation de l’immeuble s’est effondré ; que le<br />
syndicat des copropriétaires et trois de ceux-ci ont<br />
assigné l’UAP en paiement d’<strong>une</strong> indemnité<br />
provisionnelle, destinée <strong>à</strong> financer le coût des travaux<br />
de remise en état ; que l’arrêt infirmatif attaqué a<br />
rejeté cette demande, aux motifs que les garanties<br />
prévues au contrat d’assurance portaient exclusivement<br />
sur les travaux neufs et qu’auc<strong>une</strong> garantie n’ayant été<br />
accordée aux <strong>existants</strong>, les dommages subis par le mur<br />
de fondation, lequel n’avait pas fait l’objet de travaux,<br />
n’étaient pas couverts par la police… ».<br />
« … Attendu qu’en se prononçant ainsi, alors<br />
qu’elle a énoncé que l’effondrement du mur<br />
avait son origine dans les travaux de rénovation<br />
de l’immeuble, ce dont il résultait que le dommage<br />
était de la nature de ceux dont les constructeurs sont<br />
responsables et que, par suite, il relevait de l’assurance<br />
obligatoire des travaux de bâtiment, la cour d’appel<br />
a violé les textes susvisés… ».<br />
Le quatrième exemple est un arrêt de la cour d’appel<br />
de Dijon du 18 février 1993 qui a retenu la causalité.<br />
Il s’agissait d’un effondrement de plafond, la police<br />
concernée était <strong>une</strong> RCD et pour retenir la garantie<br />
des assureurs, la cour de Dijon a dit : « … Attendu que<br />
SCOR - Mars 2010 - 7
s’il est vrai que la police ajoute que ces dommages<br />
(matériels subis par les parties de la construction existant<br />
avant l’ouverture du chantier) doivent être la<br />
conséquence directe de l’exécution des travaux<br />
neufs et non des propres défauts des parties<br />
préexistantes, les investigations de l’expert<br />
permettent d’affirmer que le sinistre provient de<br />
l’action de la Sarl Deschamps qui a rompu l’équilibre<br />
existant en changeant le plancher par <strong>une</strong> dalle en<br />
béton armé en supprimant <strong>une</strong> cloison… ».<br />
Le cinquième exemple est un arrêt fondateur en la<br />
circonstance, c’est la jurisprudence Sogebor du 30 mars<br />
1994 que je connais parfaitement, ayant obtenu de la<br />
cour de Paris un arrêt qui a été validé par la Cour de<br />
cassation. Il s’agissait de l’attaque de la structure,<br />
en bois et maçonnerie, d’un bâtiment très ancien<br />
par des champignons pré<strong>existants</strong>. Le promoteur<br />
Sogebor avait souscrit <strong>une</strong> Dommages Ouvrage et <strong>une</strong><br />
CNR. Il est intéressant de relever que, pour demander<br />
la cassation de l’arrêt de la cour de Paris, l’assureur<br />
avait soutenu qu’il n’y avait pas aucun lien de causalité<br />
quelconque entre l’exécution des travaux neufs et les<br />
dommages qui affectaient les <strong>existants</strong>. Donc le<br />
demandeur au pourvoi s’était placé sur le terrain de la<br />
causalité dans les termes suivants rapportés par la Cour<br />
de cassation : « … Attendu que la compagnie l’Abeille<br />
Paix fait grief <strong>à</strong> l’arrêt de la condamner <strong>à</strong> garantie en<br />
application de la police CNR-constructeur non réalisateur,<br />
souscrite par la société Sogebor, alors, selon le<br />
moyen, que la responsabilité du constructeur non<br />
réalisateur et de son assureur ne peut être retenue<br />
si le dommage est sans lien de causalité avec<br />
l’opération de construction ; que la cour d’appel, qui<br />
a elle-même constaté que la cause des dommages résidait<br />
dans l’attaque des structures par les champignons<br />
et les vers bien avant les travaux, ce qui rendait inévitable<br />
la ruine de l’immeuble, ne pouvait attribuer les<br />
dommages intégralement aux opérations de rénovation<br />
sans priver sa décision de base légale au regard des<br />
articles 1792 et suivants du Code civil… ».<br />
Mais la Cour de cassation va valider l’arrêt de la<br />
cour de Paris : « … Attendu qu’ayant constaté que<br />
l’on ne pouvait ni dissocier les “<strong>existants</strong>“ des<br />
travaux neufs qui étaient devenus <strong>indivisibles</strong><br />
par leur incorporation <strong>à</strong> l’immeuble, ni affirmer<br />
que la cause des désordres résidait seulement<br />
dans les parties anciennes, la mauvaise tenue des<br />
nouveaux travaux provenant d’<strong>une</strong> erreur de<br />
diagnostic du support vermoulu et donc d’<strong>une</strong><br />
rénovation contraire aux règles de l’art, la cour<br />
d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié<br />
sa décision de ce chef… ».<br />
Le sixième exemple est un arrêt important de la cour<br />
de Paris du 11 septembre 1996. Il concerne un problème<br />
de surélévation et l’effondrement d’<strong>une</strong> toiture.<br />
8 - Mars 2010 - SCOR<br />
L’assurance en question était <strong>une</strong> Dommages Ouvrage<br />
et <strong>une</strong> RCD. Seront retenues la garantie décennale et la<br />
garantie de l’assureur en fonction de l’indissociabilité.<br />
La cour a dit : « … Considérant que s’agissant<br />
d’<strong>une</strong> rénovation lourde consistant essentiellement dans<br />
la transformation d’un corps de bâtiment en logement<br />
individuel, et les désordres dont il se trouve atteint relèvent<br />
du régime de la garantie légale des constructeurs<br />
édicté par l’article 1792 du Code civil… sans qu’il y ait<br />
lieu de distinguer eu égard <strong>à</strong> leur indissociabilité selon<br />
les parties du bâtiment existant ajoutées ou refaites.<br />
Considérant que la clause du contrat d’assurance<br />
Dommages Ouvrage selon laquelle la garantie n’est due<br />
que pour des ouvrages neufs et non pour les <strong>existants</strong>,<br />
doit être réputée non écrite compte tenu de la rénovation<br />
lourde intervenue et de l’indissociabilité en l’espèce<br />
des ouvrages neufs et anciens dont il a été fait état cidessus,<br />
qu’<strong>une</strong> telle clause contrevenant aux dispositions<br />
des articles L. 114-4, L. 241-1, L. 242-1 et L. 243-1 du<br />
Code des assurances… ».<br />
Le septième exemple est un arrêt de la cour d’appel<br />
de Paris du 30 mai 1997. Il va confirmer un jugement<br />
du Tribunal de Grande Instance de Paris qui avait<br />
retenu la garantie de l’assureur Dommages ouvrage en<br />
reprenant l’exacte formulation de l’arrêt Sogabor mais<br />
la cour de Paris avait rajouté : « … Que c’est l’ensemble<br />
de l’ouvrage qui désormais, en raison de la faute<br />
technique ainsi commise (erreur de diagnostic sur la<br />
qualité des poutres porteuses et de leur compatibilité<br />
avec les travaux envisagés… et donc <strong>une</strong> rénovation<br />
contraire aux règles de l’art) rendu inéluctablement<br />
impropre <strong>à</strong> sa destination, les <strong>existants</strong> ne pouvant<br />
plus en effet être dissociés des travaux neufs,<br />
devenus <strong>indivisibles</strong> par leur incorporation <strong>à</strong><br />
l’immeuble la solidité de l’ensemble étant <strong>à</strong> présent<br />
compromise… ».<br />
Le huitième exemple est un arrêt de cassation du<br />
17 juin 1998. Il concerne un défaut d’étanchéité des<br />
murs <strong>existants</strong>. La cour a retenu la causalité et l’intégration<br />
: « … <strong>Les</strong> dommages provenaient d’un défaut<br />
d’étanchéité des murs <strong>existants</strong>, qui avaient été intégrés<br />
dans la construction nouvelle, que l’état de ces<br />
anciens ouvrages n’était pas de nature <strong>à</strong> constituer<br />
<strong>une</strong> cause étrangère exonérant les constructeurs dans<br />
la mesure où l’immeuble devait faire l’objet d’<strong>une</strong> réhabilitation<br />
totale, qu’un état des lieux approfondi aurait<br />
dû permettre de constater la présence d’humidité… ».<br />
Le neuvième exemple est un arrêt de la cour d’Angers<br />
du 8 janvier 2002. Il a été retenu <strong>à</strong> la fois l’indivisibilité,<br />
la causalité et l’état préexistant des <strong>existants</strong>.<br />
Dans l’affaire ayant donné lieu <strong>à</strong> l’arrêt de la cour<br />
d’Angers, il s’agissait d’<strong>une</strong> restauration d’<strong>une</strong> grande<br />
ampleur, les dommages étant constitués par <strong>une</strong><br />
dégradation des pierres.
La cour d’Angers, pour retenir la responsabilité<br />
décennale et la garantie d’assurance de l’assureur de<br />
responsabilité décennale, a énoncé :<br />
« <strong>Les</strong> travaux de restauration de grande ampleur effectués<br />
sur les murs de pierre de tuffeau d’un château qui<br />
ont eu <strong>une</strong> incidence sur le système d’écoulement des<br />
eaux sur les murs et sur l’épaisseur et la porosité des<br />
éléments constitutifs de l’édifice, constituent un ouvrage<br />
indissociable de l’existant et relèvent du champ<br />
d’application de l’assurance obligatoire de responsabilité<br />
prévue par l’article L. 241.1 du Code des assurances ».<br />
Le dixième exemple est l’arrêt Chirinian du 29 février<br />
2000. L’arrêt Chirinian concernait La Concorde/Generali.<br />
Il s’agissait de l’adjonction d’<strong>une</strong> aile sur un bâtiment déj<strong>à</strong><br />
existant pour faire deux chambres supplémentaires, avec,<br />
<strong>à</strong> l’intérieur de cet ouvrage neuf accolé de façon indivisible<br />
<strong>à</strong> l’ouvrage déj<strong>à</strong> existant, <strong>une</strong> cheminée. La mauvaise<br />
exécution de cette cheminée <strong>à</strong> insert a généré un incendie<br />
qui va entraîner des dommages très importants sur<br />
l’aile nouvelle mais aussi sur la partie ancienne.<br />
En la circonstance, un arrêt de la cour d’appel d’Angers<br />
avait condamné l’assureur de responsabilité décennale de<br />
l’entrepreneur pour les dommages affectant tant la partie<br />
neuve que la partie ancienne existante <strong>à</strong> l’ouverture du<br />
chantier desdits travaux neufs.<br />
L’assureur reprochait <strong>à</strong> la cour d’Angers d’avoir ainsi statué<br />
alors qu’il n’assurait que les dommages causés <strong>à</strong> l’ouvrage<br />
<strong>à</strong> la réalisation duquel son assuré avait participé.<br />
Dans le cadre de l’instruction de cette affaire devant la<br />
Cour de cassation, Monsieur SARGOS, Conseiller<br />
Rapporteur avait demandé <strong>à</strong> la haute juridiction de se<br />
« démarquer » de la jurisprudence Sogébor, et tout en<br />
reconnaissant qu’en la circonstance, les travaux neufs et<br />
les <strong>existants</strong> étaient parfaitement divisibles, avait suggéré<br />
<strong>à</strong> la Cour de cassation, de valider l’arrêt de la cour<br />
d’Angers au motif que dès lors que la mise en œuvre de<br />
techniques de travaux de bâtiment avait provoqué des<br />
dommages de nature décennale, l’assureur devait garantir<br />
les conséquences de cette mauvaise mise en œuvre tant<br />
en ce qui concerne les dommages affectant la partie<br />
nouvelle de la construction que la partie ancienne.<br />
La cour suivra l’avis du Conseiller Rapporteur Sargos et<br />
rejettera en conséquence le pourvoi formulé <strong>à</strong> l’encontre<br />
de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers.<br />
Le onzième exemple est l’arrêt Espace Brotteaux du<br />
31 octobre 2001. Il s’agissait de la transformation d’<strong>une</strong><br />
ancienne gare ferroviaire en un immeuble en copropriété<br />
dans la région de Lyon. Une rénovation assez lourde mais<br />
sans toucher <strong>à</strong> la toiture. Un ou plusieurs bâtiments <strong>à</strong><br />
usage d’habitations sont réalisés et le vendeur en VEFA<br />
titulaire d’<strong>une</strong> police CNR vend des combles aménageables<br />
sans toucher <strong>à</strong> la toiture ni aux combles. Il se trouve<br />
qu’un défaut d’étanchéité de la toiture va provoquer des<br />
infiltrations qui vont endommager ces combles qui<br />
avaient été aménagés par les différents acquéreurs des<br />
lieux. <strong>Les</strong> dommages affectent des <strong>existants</strong> qui n’ont fait<br />
l’objet d’aucuns travaux alors que leur cause provient de<br />
ces <strong>existants</strong> (toiture, combles). La Cour de cassation va<br />
s’appuyer sur l’engagement du vendeur, qui avait dit que<br />
les combles étaient aménageables, pour dire qu’il doit la<br />
garantie des vices cachés et a retenu la responsabilité<br />
décennale du vendeur de l’immeuble <strong>à</strong> construire et la<br />
garantie de son assureur en CNR.<br />
Je rappelle ici encore que l’ordonnance du 8 juin 2005<br />
a voulu entériner la jurisprudence Sogebor d’<strong>une</strong> part,<br />
et « couper court » <strong>à</strong> la jurisprudence Chirinian d’autre<br />
part, voire celle Espace Brotteaux.<br />
SCOR - Mars 2010 - 9
III. Perspectives d’évolution<br />
Quid dans l’avenir au regard de la double finalité de<br />
l’ordonnance du 8 juin 2005 ?<br />
• Soit la jurisprudence appliquera l’ordonnance du<br />
8 juin 2005 et dans cette hypothèse, l’assureur peut<br />
être en quelque sorte rassuré, dès lors que Chirinian<br />
et l’Espace Brotteaux ne se reproduiront plus, étant<br />
observé qu’<strong>une</strong> application rigoureuse de l’ordonnance<br />
est quasiment impossible parce que<br />
l’incorporation n’est pas possible de sorte que dans<br />
cette première hypothèse, il faut envisager <strong>une</strong><br />
application non pas rigoureuse mais avec sagesse de<br />
l’ordonnance précitée du 8 juin 2005.<br />
Dans cette perspective, on peut estimer que la jurisprudence<br />
admettra que pour les dommages matériels<br />
affectant des <strong>existants</strong> non <strong>indivisibles</strong>, ni indissociables,<br />
il y aura lieu d’appliquer la responsabilité de droit<br />
commun et non pas la responsabilité décennale<br />
puisqu’aussi bien, et alors même que l’ordonnance ne<br />
traite que de l’assurance, il est clair qu’elle n’a envisagé<br />
la couverture d’assurance des dommages matériels<br />
affectant certains <strong>existants</strong>, qu’<strong>à</strong> raison du fait que<br />
pour ces <strong>existants</strong> <strong>une</strong> responsabilité décennale était<br />
encourue, ce qui implicitement conduit <strong>à</strong> penser que<br />
pour les autres <strong>existants</strong> non <strong>indivisibles</strong>, ni indissociables,<br />
la seule responsabilité encourue serait <strong>une</strong><br />
responsabilité de droit commun.<br />
• Soit la jurisprudence persiste dans ces précédents<br />
errements au motif que l’ordonnance du 8 juin 2005<br />
ne s’est en aucun cas prononcée sur la nature des<br />
responsabilités encourues <strong>à</strong> propos des dommages<br />
matériels affectant des <strong>existants</strong> non <strong>indivisibles</strong><br />
ni indissociables.<br />
Mais il y a un arrêt qui peut laisser penser que la seconde<br />
branche de l’alternative invoquée ci-dessus ne sera<br />
pas concrétisée en jurisprudence : C’est un arrêt du<br />
5 juillet 2006, donc postérieur <strong>à</strong> l’ordonnance du<br />
8 juin 2005, qui ne statue pas par application de cette<br />
ordonnance mais par référence <strong>à</strong> l’état existant. Nous<br />
avons exactement la même situation que dans l’arrêt<br />
Chirinian, un pavillon, rajout d’<strong>une</strong> aile, <strong>une</strong> cheminée<br />
<strong>à</strong> insert et un incendie. La cour d’appel va condamner<br />
10 - Mars 2010 - SCOR<br />
l’assureur : « … Attendu que pour condamner la<br />
société Groupama Sud <strong>à</strong> garantir M. Y... de toutes les<br />
conséquences dommageables de ses manquements,<br />
l’arrêt retient que cet assureur garantit la responsabilité<br />
décennale de M. Y... et qu’il n’y a pas<br />
lieu de distinguer, pour ce type de garantie, selon<br />
la nature des préjudices… ». Mais la Cour de<br />
cassation, contrairement <strong>à</strong> l’arrêt Chirinian, va casser<br />
l’arrêt de la cour de Nîmes pour violation des articles<br />
L. 241.I et A 243.I du Code des assurances en disant :<br />
« …Qu’en statuant ainsi alors que le contrat<br />
d’assurance de responsabilité obligatoire ne<br />
garantit que le paiement des travaux de réparation<br />
de l’ouvrage <strong>à</strong> la réalisation duquel l’assuré<br />
a contribué et des ouvrages <strong>existants</strong> qui lui sont<br />
indissociables, la cour d’appel a violé les textes<br />
susvisés… ». Je dois vous préciser ici qu’<strong>à</strong> la Cour de<br />
cassation, il y a un certain nombre de chambres civiles,<br />
commerciales et financières et <strong>une</strong> chambre sociale.<br />
Jusqu’en juillet 2005, la 1 re chambre civile « légiférait »<br />
et traitait la totalité de la jurisprudence en matière<br />
d’assurance, toutes assurances confondues y compris<br />
l’assurance Construction. La 2 e chambre civile traitait<br />
des questions de procédure. La 3 e chambre civile,<br />
chambre spécialisée en matière immobilière, de copropriétés,<br />
baux commerciaux, et du droit de la<br />
construction, et de la responsabilité des constructeurs,<br />
était amenée occasionnellement <strong>à</strong> traiter de<br />
l’assurance Construction puisque statuant et ayant<br />
compétences exclusives en matière de responsabilité<br />
des constructeurs, elle était conduite, <strong>à</strong> l’occasion <strong>à</strong> se<br />
positionner sur l’assurance obligatoire, et même si elle<br />
ne partageait pas l’opinion de la 1 re chambre civile, elle<br />
s’inclinait puisque la 1 re chambre civile était en quelque<br />
sorte « le chef » en la matière.<br />
A partir de juillet 2005, la 3 e chambre civile a repris<br />
tout ce qui concerne l’assurance Construction qui<br />
a été considérée indissociable du problème de la<br />
responsabilité. Si bien que dans son rapport de 2006,<br />
commentant son arrêt précité Mérel du 5 juillet 2006<br />
marque son refus de suivre la jurisprudence Chirinian.<br />
Enfin j’indique que je n’ai pas encore vu de contrat<br />
d’assurance sur les <strong>existants</strong> dans le cadre de l’ordonnance<br />
du 8 juin 2005 ni cette garantie facultative, et<br />
si certains d’entre vous l’ont déj<strong>à</strong> mis au point, je serais<br />
heureux d’en avoir un exemple.
Echange de vues<br />
avec la salle<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je note avec consternation qu’aucun assureur ici<br />
présent n’a mis au point au sein de sa compagnie, des<br />
conditions générales et particulières sur l’assurance<br />
facultative des <strong>existants</strong> non <strong>indivisibles</strong>. Sur le plan<br />
des garanties facultatives, l’un des participants peut-il<br />
dire si cela a été fait au sein de sa compagnie ?<br />
Une participante<br />
Nous avons dans notre garantie RC <strong>une</strong> exclusion des<br />
<strong>existants</strong> qui sont couverts au titre de la Décennale au<br />
départ. Dans notre contrat RC et non pas Dommages<br />
Ouvrage, nous couvrons les <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>.<br />
C’est <strong>une</strong> multirisque complète avec volet RC pour<br />
les Décennales.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je serais heureux de l’avoir. Si j’ai bien compris aucun<br />
assureur, y compris les grands de l’assurance<br />
Construction, tels qu’Axa, AGF ou SMABTP, n’a mis dans<br />
ses conditions générales de l’assurance Décennale<br />
obligatoire ce qu’il y a dans l’ordonnance.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Je suis surpris parce que, sauf erreur, sur certains dossiers<br />
que nous réassurons en facultative, nous donnons<br />
bien la couverture des <strong>existants</strong>, <strong>existants</strong> garantie<br />
facultative.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
La garantie facultative aux <strong>existants</strong> a toujours existé,<br />
je parle de la garantie facultative aux <strong>existants</strong> telle<br />
que prévue par la convention. Du 8 septembre 2005,<br />
la garantie facultative qui existait auparavant étant<br />
assez draconienne car il était précisé très clairement<br />
que les dommages ne devaient en aucun cas provenir<br />
de l’état de l’existant lui-même. Ce n’est pas tout <strong>à</strong> fait<br />
ce qu’il y a dans la convention.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Avons-nous déj<strong>à</strong> eu des sinistres sur des <strong>existants</strong> qui<br />
ont mobilisé la RC Générale de l’entreprise au lieu de<br />
la RC Décennale ? Est-ce arrivé ? Est-il possible que<br />
cela arrive ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Quelques décisions disent tout de même que ce n’est<br />
pas de la Décennale, donc les garanties de la Décennale<br />
ne doivent pas être mobilisées. C’est de la responsabilité<br />
de droit commun de l’entreprise mais je n’ai pas vu<br />
d’arrêt qui condamne un assureur RC <strong>à</strong> cet égard.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Si nous prenons l’arrêt du 5 juillet 2006, il a clairement<br />
été défini que les dommages aux <strong>existants</strong> ne relevaient<br />
pas de la RC Décennale.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Non, l’arrêt dit que les dommages aux <strong>existants</strong> ne<br />
relèvent pas de la Décennale sauf si les <strong>existants</strong> sont<br />
indissociables.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Donc dans ce cas précis, les dommages aux <strong>existants</strong><br />
ne relèvent pas de la RC Décennale.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Dans ce procès, il n’y avait pas d’assureur de RC.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Alors, c’est peut-être la RC Générale de l’entreprise<br />
fautive, <strong>à</strong> l’origine des dommages par suite de défauts<br />
dans ses travaux neufs, qui aurait dû jouer.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Oui, mais nous ne savons pas s’il y en avait <strong>une</strong>. D’<strong>une</strong><br />
façon générale, si ce sont les travaux neufs de l’entreprise<br />
qui ont causé des dommages <strong>à</strong> l’existant,<br />
l’assurance Décennale n’est pas a priori concernée sauf<br />
bien évidemment s’il s’agit d’un existant indivisible. Je<br />
n’ai pas de décision qui condamne un assureur RC,<br />
mais la garantie RC peut-être amenée <strong>à</strong> jouer quelquefois.<br />
Tout dépend en définitive de la qualification de<br />
l’existant : indivisible ou non ?<br />
M. Cantonnet, voulez-vous apporter des précisions sur<br />
la RC ?<br />
Stéphane AMILHAU - SCOR<br />
Jusqu’<strong>à</strong> présent nous avons parlé des <strong>existants</strong><br />
indissociables des travaux neufs. Mais qu’en est-il<br />
quand ce sont des travaux neufs, des ouvertures dans<br />
des murs par exemple, qui sont totalement communs<br />
<strong>à</strong> l’existant ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
M. BERTIN en parlera mais je crois qu’il faut être assez<br />
souple parce que si nous voulons coller <strong>à</strong> la définition<br />
c’est impossible, il n’y aura jamais d’assurance. Il faut<br />
comprendre la finalité de l’ordonnance du 8 juin 2005<br />
comme étant la légalisation de Sogebor.<br />
Marcel CANTONNET - AGF IART<br />
Pour nous aider, nous assureurs, <strong>à</strong> établir des contrats<br />
en conformité avec ce nouveau texte, pouvez-vous<br />
nous apporter <strong>une</strong> précision sur le point suivant : les<br />
clauses types applicables <strong>à</strong> la Dommages Ouvrage<br />
n’ont pas été modifiées suite <strong>à</strong> l’ordonnance. Or, dans<br />
la définition d’assiette de cotisation, elles ne visent par<br />
définition que les travaux neufs. Aussi, du fait de l’ordonnance,<br />
l’assureur Dommages Ouvrage est-il fondé<br />
aujourd’hui alors que les clauses types n’ont pas été<br />
modifiées, <strong>à</strong> intégrer dans son assiette de cotisation<br />
la valeur <strong>à</strong> neuf des travaux soumis <strong>à</strong> obligation<br />
d’assurance ?<br />
SCOR - Mars 2010 - 11
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Vous savez qu’elles n’ont pas été modifiées mais<br />
qu’elles vont l’être incessamment.<br />
Marcel CANTONNET<br />
Donc, les clauses types s’inspirent du texte initial qui<br />
ne parle que des travaux neufs et pas des parties<br />
anciennes. Est-ce que désormais, du fait du texte de<br />
l’ordonnance qui intègre dans l’obligation d’assurance<br />
les <strong>existants</strong> soumis, c’est-<strong>à</strong>-dire ceux qui respectent<br />
les deux conditions, l’assureur Dommages Ouvrage est<br />
fondé <strong>à</strong> intégrer dans la définition de son assiette de<br />
cotisation la valeur <strong>à</strong> neuf des <strong>existants</strong> soumis ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Oui, parce que les clauses types ne régissent pas<br />
du tout les modalités de calcul de votre assiette de<br />
prime.<br />
Marcel CANTONNET<br />
Elles ne les régissent pas mais elles ne parlent que de<br />
la valeur des travaux neufs. Dans l’esprit, nous pourrions<br />
dire que c’est effectivement la totalité de ce qui<br />
est soumis <strong>à</strong> obligation d’assurance qui doit entrer<br />
dans la définition d’assiette, y compris les <strong>existants</strong><br />
soumis. Mais le texte ne le fait pas puisqu’il n’a pas été<br />
modifié.<br />
L’autre variante consiste <strong>à</strong> agir sur le taux de cotisation<br />
mais quel est le bon choix <strong>à</strong> faire par l’assureur<br />
Dommages Ouvrage qui souhaite mettre en place un<br />
contrat totalement adapté <strong>à</strong> l’ordonnance : doit-il agir<br />
par rapport aux <strong>existants</strong> soumis sur la définition de<br />
l’assiette et peut-il le faire ? Ou bien ne peut-il agir que<br />
sur le taux de cotisation ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
L’un ne va pas sans l’autre. Il est vrai que le contrat<br />
d’assurance de responsabilité décennale est la repro-<br />
12 - Mars 2010 - SCOR<br />
duction obligée des clauses types. Mais rien n’interdit<br />
aujourd’hui d’y ajouter ce qui est édicté par le législateur<br />
concernant les <strong>existants</strong>, même si les autres<br />
clauses types n’ont pas été adaptées. Et en ce qui<br />
concerne le taux de prime, encore <strong>une</strong> fois les clauses<br />
types ne régissent pas de façon particulière les modalités<br />
de calcul de votre assiette, rien ne vous interdit d’y<br />
ajouter le montant des <strong>existants</strong> qui rentrent dans<br />
l’assurance obligatoire. Et la difficulté réside dans le fait<br />
qu’outre cet aspect, il y a l’assurance facultative que<br />
vous vous êtes obligés <strong>à</strong> donner dans les conditions<br />
prévues par la convention du 8 septembre 2005.<br />
Marcel CANTONNET<br />
J’ai <strong>une</strong> deuxième question. Pouvons-nous admettre,<br />
sur <strong>une</strong> même opération de construction, que nous<br />
ayons deux catégories d’<strong>existants</strong>, les uns soumis <strong>à</strong><br />
obligation d’assurance et les autres non. Si oui, comment<br />
passer la frontière entre les deux catégories ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Il peut y avoir deux catégories d’<strong>existants</strong>. S’il y a des<br />
<strong>existants</strong> qui risquent d’être affectés par le fait<br />
de l’exécution des travaux, donc des dommages<br />
matériels, sans auc<strong>une</strong> intervention sur, sous ou <strong>à</strong><br />
l’intérieur de cet existant, vous avez intérêt <strong>à</strong> le rentrer<br />
dans la catégorie de la garantie facultative parce qu’il<br />
y aura un certain plafond de garantie et <strong>une</strong> garantie<br />
d’assurance. Il y aura forcément un vide et le juge a<br />
horreur du vide. Parce que s’il n’y a pas de garantie de<br />
cet existant, il vous l’imputera au titre de la garantie<br />
obligatoire. Donc, les assureurs ont tout intérêt <strong>à</strong><br />
donner <strong>une</strong> garantie facultative sur cet existant parce<br />
qu’il y aura <strong>une</strong> assurance, certes avec un plafond.<br />
Tandis que s’il n’y a pas d’assurance, tout va basculer<br />
dans l’obligatoire. Et il n’est pas du tout inconcevable<br />
que dans <strong>une</strong> même opération il y ait des <strong>existants</strong><br />
<strong>indivisibles</strong> et d’autres qui ne le sont pas.
2<br />
ANALYSE TECHNIQUE<br />
DE LA NOTION D’EXISTANTS<br />
INDIVISIBLES PIERRE BERTIN,<br />
Architecte DPLG- Expert Construction<br />
Il s’agit ici de déterminer sur le<br />
plan technique ce qui est indivisible. Afin de<br />
nourrir le débat, quelques notions vont être<br />
dégagées dans cette partie. Une série d’exemples<br />
sera abordée et des perspectives concrètes seront<br />
développées en conclusion, pour se prémunir de<br />
ces risques en répercussion.<br />
Au plan technique, la notion d’existant peut être<br />
comprise de façon très large, puisqu’elle pourrait désigner<br />
tout ce qui existe avant l’œuvre nouvelle. Il en<br />
serait ainsi par exemple du sol qui existe par définition<br />
avant l’œuvre ; mais il est acquis que la maîtrise du sol<br />
est résolument ancrée sur la Décennale. Dans <strong>une</strong><br />
approche un peu plus philosophique, cela pourrait<br />
désigner l’ensemble des matières premières (ciment,<br />
plâtre, verre) préexistantes au nouvel ouvrage qui<br />
servent <strong>à</strong> réaliser les produits de la construction.<br />
De façon plus pragmatique, aujourd’hui, pour<br />
réduire ce champ et définir techniquement les<br />
<strong>existants</strong>, on parle des éléments déj<strong>à</strong> construits<br />
par la main de l’homme (ce qui ne signifie pas pour<br />
autant qu’ils soient capables de supporter les ouvrages<br />
neufs, ni qu’ils soient en bon état).<br />
Le point de départ de la réflexion est donc celle de<br />
l’extension explicite ou implicite de la Décennale<br />
des travaux neufs aux <strong>existants</strong>.<br />
Je vous propose un certain nombre d’exemples très<br />
concrets.<br />
Le premier exemple concerne <strong>une</strong> reprise en sousœuvre<br />
réalisée sous un bâtiment existant avec la<br />
création d’un sous-sol ou plusieurs sous-sols. Dans un<br />
tel scénario, les ouvrages neufs sont la reprise en sousœuvre,<br />
le décaissement du sol, la réalisation et la<br />
construction d’un nouveau sous-sol, donc <strong>une</strong> dalle,<br />
des murs, un radier, des fondations nouvelles, des<br />
structures nouvelles dans la hauteur du sous-sol créé,<br />
et les <strong>existants</strong> sont tout ce qui existait sur cette œuvre<br />
nouvelle, c’est-<strong>à</strong>-dire le bâtiment situé au-dessus. Pour<br />
appréhender le risque d’extension, il convient d’imaginer<br />
ce qui peut arriver <strong>à</strong> cet existant. Il est relativement<br />
facile de comprendre que trois phénomènes peuvent<br />
se produire, un tassement, homogène ou différentiel<br />
c’est-<strong>à</strong>-dire non homogène, des fissures, voire éventuellement<br />
un effondrement, partiel ou total. J’aurais<br />
tendance <strong>à</strong> penser que si les dommages, tassements,<br />
fissures et effondrement, se produisent au cours des<br />
travaux, ils mobilisent seulement la responsabilité civile<br />
des constructeurs, mais Maître Karila nous a cité un<br />
cas de jurisprudence qui va rechercher la responsabilité<br />
décennale.<br />
SCOR - Mars 2010 - 13
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Il ne s’agit pas de la responsabilité décennale mais de<br />
la responsabilité civile accordée par l’assureur Décennale<br />
de façon traditionnelle dans ces polices qui comportent<br />
toujours des garanties avant réception qui est <strong>une</strong><br />
garantie d’assurance de choses d’ailleurs et non pas<br />
<strong>une</strong> assurance de responsabilité.<br />
Pierre BERTIN<br />
Mon analyse se situe sur le plan de la responsabilité<br />
des constructeurs. Si ces désordres surviennent<br />
pendant la période de garantie décennale des ouvrages<br />
neufs, nous avons deux scénarios classiques<br />
possibles. Soit, nous avons un effet différé des travaux<br />
neufs et nous sommes sur la même logique que<br />
précédemment, avec <strong>une</strong> notion de RC Décennale,<br />
soit nous avons un effet consécutif <strong>à</strong> <strong>une</strong> faiblesse<br />
des travaux neufs. Ce cas est typiquement décennal,<br />
les travaux neufs sont affaiblis par un défaut de<br />
conception ou d’exécution, ils sont endommagés<br />
et par répercussion, ils endommagent ce qui est<br />
au-dessus puisque ces ouvrages neufs ont <strong>une</strong><br />
fonction de support.<br />
Dans cette circonstance, il me semble que les constructeurs<br />
sont obligés de prendre en compte non<br />
seulement la réparation des ouvrages neufs, mais aussi<br />
toutes les conséquences occasionnées aux <strong>existants</strong>.<br />
Et nous voyons mal où pourrait s’arrêter alors, dans un<br />
cas aussi simple mais aussi classique, cette obligation<br />
de réparation des conséquences occasionnées aux<br />
<strong>existants</strong>. Ce cas pourrait être rapproché de celui d’<strong>une</strong><br />
fissure structurelle qui affecte un voile en béton armé,<br />
un cas peut-être encore plus simple mais qui pose<br />
intellectuellement un problème. <strong>Les</strong> constructeurs vont<br />
répondre de la réparation de la fissure du voile pour<br />
reconstituer l’homogénéité structurelle de l’élément<br />
qui se casse, mais ils vont aussi devoir prendre en<br />
compte un certain nombre de dommages indirects,<br />
c’est-<strong>à</strong>-dire ce qui habille le mur, un doublage, un<br />
habillage, un décor, <strong>une</strong> peinture, un revêtement de<br />
tissu. Pour aller réparer la fissure, il faut ouvrir ces<br />
ouvrages et les réparer. En général dans tous nos dossiers,<br />
nous voyons que les constructeurs doivent<br />
prendre en charge toutes les conséquences directes ou<br />
indirectes de cet événement, c’est-<strong>à</strong>-dire des protections,<br />
des revêtements de sol, des déménagements et<br />
réaménagements de biens, des déménagements et<br />
ré-emménagements d’occupants, voire des préjudices<br />
consécutifs. Ce scénario est connu. Pour revenir <strong>à</strong> mon<br />
exemple, l’idée directrice qui sous-tend l’approche,<br />
c’est que les travaux neufs qui touchent les structures<br />
d’un existant sont susceptibles de modifier ces dites<br />
structures. Ce qui permet de faire ressortir la notion<br />
de modification structurelle. Dans le cas présent, les<br />
modifications structurelles affectent les fondations<br />
existantes, puisqu’elles vont être complétées, approfondies<br />
ou remplacées par de nouvelles fondations, et<br />
impactent également les conditions d’appui et de descentes<br />
de charges de l’existant. Ce sont ces paramètres<br />
14 - Mars 2010 - SCOR<br />
qu’il faut auditer et maîtriser au niveau de la technique<br />
comme au niveau de l’assurance.<br />
Pour résumer et pour répondre <strong>à</strong> la question de<br />
M. Tuccella, les travaux structurels sous un existant<br />
rendent <strong>à</strong> mon avis <strong>indivisibles</strong> les structures existantes,<br />
puisqu’elles vont se comporter de façon associée.<br />
J’ai commencé par un exemple particulièrement lourd<br />
puisque dans ce cas, c’est la totalité des <strong>existants</strong> qui<br />
peut être concernée par répercussion de la pérennité<br />
décennale des ouvrages neufs. Nous allons voir<br />
heureusement avec d’autres exemples qu’il n’en est<br />
pas toujours ainsi et que tous les <strong>existants</strong> ne sont pas<br />
automatiquement en répercussion de la Décennale.<br />
Un deuxième exemple est le cas d’un grand chantier<br />
de rénovation. Un cas extrêmement classique et<br />
extrêmement connu surtout dans les grandes villes.<br />
Il est procédé <strong>à</strong> <strong>une</strong> rénovation quasi-totale mais<br />
en conservant la façade du bâtiment existant. Vous en<br />
avez tous vu puisqu’il y a encore maintenant un certain<br />
nombre de cas dans Paris. La façade ancienne, qu’il<br />
faut conserver en général pour des raisons purement<br />
administratives, est soutenue provisoirement par des<br />
structures créées <strong>à</strong> cet effet et ensuite elle est associée<br />
<strong>à</strong> terme aux ouvrages neufs. Je dis volontairement le<br />
mot associée. Dans un tel cas, la réponse technique sur<br />
l’indivisibilité est très simple. La façade est totalement<br />
associée au projet neuf puisqu’elle ne dispose d’auc<strong>une</strong><br />
autonomie structurelle. Ce cas permet de dégager<br />
deux notions, <strong>une</strong> notion d’association et <strong>une</strong> notion<br />
d’autonomie. Si l’existant n’est pas associé de façon<br />
intime aux travaux neufs, je dis mais c’est mon avis<br />
d’expert, qu’il reste divisible. Si l’existant garde son<br />
autonomie, il est l<strong>à</strong> encore divisible. Par contre, s’il est<br />
associé ou s’il est dépendant ou s’il est les deux <strong>à</strong> la<br />
fois, il devient indivisible. J’ajoute en matière d’autonomie<br />
qu’<strong>une</strong> typologie se dessine en trois volets sur<br />
l’autonomie :<br />
• <strong>une</strong> autonomie structurelle, puisque la façade ne<br />
tient pas sans les ouvrages neufs,<br />
• <strong>une</strong> autonomie technique,<br />
• <strong>une</strong> autonomie fonctionnelle, la fonctionnalité étant<br />
un domaine assez inquiétant sur lequel je reviendrai.<br />
Le troisième exemple, après le sous-œuvre et la<br />
rénovation globale avec un existant qui demeure, est<br />
celui de la surélévation. Un ouvrage neuf est ajouté sur<br />
un bâtiment existant. Cette situation diffère de la<br />
construction sous un existant parce qu’il existe, avec<br />
<strong>une</strong> surélévation, <strong>une</strong> certaine autonomie structurelle<br />
entre l’élément existant et l’élément neuf. <strong>Les</strong> constructeurs<br />
ont bien entendu <strong>à</strong> se préoccuper de la qualité<br />
de l’existant et puisque c’est un support, ils doivent<br />
l’analyser pour que l’ouvrage neuf soit pérenne. Mais<br />
il n’est pas évident que, s’il y a un dommage <strong>à</strong> l’ouvrage<br />
neuf qui est au-dessus, notamment un dommage<br />
structurel, il y ait <strong>une</strong> répercussion de dommage sur le<br />
bâtiment en dessous. Un voile peut se fissurer dans la<br />
partie neuve de l’étage au-dessus sans que le bâtiment
existant n’en souffre. Donc, nous avons déj<strong>à</strong> <strong>une</strong> certaine<br />
autonomie mais il est difficile de parler<br />
d’indivisibilité dans le cas d’espèce puisque l’existant<br />
ne peut pas être enlevé sans nuire <strong>à</strong> l’ouvrage neuf.<br />
Il n’y a pas d’autonomie, les deux font corps. De plus,<br />
tout événement dommageable décennal dans<br />
l’ouvrage neuf risque, s’il est important, d’atteindre<br />
l’existant par <strong>une</strong> simple contamination presque gravitaire.<br />
Une fuite d’eau d’un réseau dans l’ouvrage neuf<br />
au-dessus va entraîner par gravité des dommages en<br />
répercussion sur l’existant. De même, <strong>une</strong> dégradation<br />
électrique importante dans l’ouvrage neuf qui provoque<br />
un incendie, risque de créer quelques dommages<br />
<strong>à</strong> l’ouvrage existant.<br />
Ce cas montre <strong>une</strong> originalité en ce sens que le risque<br />
en répercussion des neufs sur <strong>existants</strong> n’est pas le<br />
même selon les corps d’état puisque les risques en<br />
répercussion sont évidemment concentrés sur les corps<br />
d’état principaux qui sont les structures, le gros-œuvre<br />
et d’<strong>une</strong> façon générale les corps d’état techniques.<br />
<strong>Les</strong> corps d’état secondaire, peinture, etc. sont moins<br />
des corps d’état en répercussion. Je raisonne évidemment<br />
par rapport aux constructeurs et non pas par<br />
rapport <strong>à</strong> la police Dommages globale.<br />
Le quatrième exemple est celui d’<strong>une</strong> rénovation<br />
avec la conservation de la structure existante dont <strong>une</strong><br />
illustration vous est actuellement donnée avec le bâtiment<br />
de l’Armée de l’Air qui est <strong>à</strong> la Porte de Sèvres.<br />
Ce bâtiment existant, qui était relativement ancien et<br />
donc démodé dans ses techniques d’aménagements<br />
intérieurs, a été totalement désossé mais les éléments<br />
porteurs ont été conservés, les planchers, les poutres,<br />
les voiles, les contreventements, les gros éléments de<br />
structure. S’amorce maintenant <strong>une</strong> grande opération<br />
de rénovation dans cet ouvrage existant. En l’espèce,<br />
les constructeurs doivent s’approprier la structure existante.<br />
Il s’agit d’un support, ce qui me permet de faire<br />
émerger la notion du support appréhendable. Si la<br />
structure existante vient <strong>à</strong> défaillir en période décennale<br />
des ouvrages neufs, il reste <strong>à</strong> considérer deux cas.<br />
Si la structure ne supporte pas les ouvrages neufs,<br />
nous comprenons bien que l’approche support va<br />
déclencher la responsabilité décennale des constructeurs<br />
qui ne pouvaient pas ignorer ce support et qui<br />
ont dû se l’approprier. Par contre, si la structure révèle<br />
un défaut intrinsèque qui n’a rien <strong>à</strong> voir avec ce que<br />
les ouvrages neufs lui apportent, j’aurais tendance <strong>à</strong><br />
dire que le raisonnement doit tenir compte du niveau<br />
d’appréhension de cet existant, si l’appréhension est<br />
aisée ou si elle est difficile, voire quasiment inimaginable.<br />
Mais, même dans cette deuxième hypothèse où<br />
le vice de l’existant aurait été vraiment caché de<br />
façon fondamentale pour les constructeurs, sauf<br />
<strong>à</strong> démolir quasiment tous les morceaux les uns après<br />
les autres, ce qu’ils ne font pas en général lorsqu’ils<br />
vont s’en servir, je crois malheureusement que les<br />
tribunaux considéreront que de toute façon cette<br />
appropriation du support entraîne <strong>une</strong> obligation de<br />
garantir non seulement les travaux neufs mais aussi<br />
forcément le support existant. Dans un tel cas, j’aurais<br />
tendance <strong>à</strong> dire que l’existant ne peut échapper <strong>à</strong><br />
l’indissociabilité.<br />
Après ces quelques exemples, est-ce <strong>à</strong> dire que les<br />
<strong>existants</strong> sont finalement tous indissociables ? La réponse<br />
reste encore négative. Heureusement il va y avoir<br />
quelques éléments pour aller dans un sens plus léger.<br />
Le cinquième exemple concerne des interventions<br />
ponctuelles sur <strong>une</strong> structure existante couramment<br />
pratiquées : l’ouverture d’un trou, d’<strong>une</strong> trémie, le percement<br />
d’<strong>une</strong> porte ou d’<strong>une</strong> fenêtre, la création d’<strong>une</strong><br />
cage d’escalier ou d’<strong>une</strong> cage d’ascenseur, c’est-<strong>à</strong>-dire<br />
des travaux moins importants et moins généralisés que<br />
dans les exemples précédents.<br />
A travers ces quelques exemples, nous voyons apparaître<br />
la notion d’échelle qui joue un rôle majeur dans<br />
l’analyse du risque.<br />
Lorsque nous perçons un trou de dix centimètres de<br />
diamètre dans un élément, qu’il soit <strong>une</strong> maçonnerie,<br />
un voile ou <strong>une</strong> poutre, sauf cas particulier où l’on<br />
passe <strong>à</strong> l’endroit sensible structurellement de l’élément<br />
(mais souvent nous échappons <strong>à</strong> cette zone sensible<br />
pour passer dans <strong>une</strong> zone relativement neutre), nous<br />
n’imaginons pas, pour passer un tuyau ou <strong>une</strong> gaine,<br />
que celui qui va passer le tuyau voit sa Décennale élargie<br />
SCOR - Mars 2010 - 15
<strong>à</strong> l’élément structurel qui est franchi. C’est bien<br />
la notion d’échelle. Si le percement devient important<br />
<strong>à</strong> l’échelle de l’élément structurel considéré, ceci<br />
implique pour celui qui fait le percement <strong>une</strong> prise en<br />
compte du fonctionnement structurel de l’élément<br />
sollicité. C’est ainsi qu’un voile de contreventement qui<br />
est un élément extrêmement sensible et important et<br />
dont le rôle est majeur sur le plan structurel, ne peut<br />
être significativement affaibli, recoupé, retaillé ou<br />
entrouvert sans mettre en place nécessairement <strong>à</strong><br />
cette occasion et même avant, un dispositif de renfort<br />
ou de substitution. Nous revenons <strong>à</strong> <strong>une</strong> idée d’appropriation<br />
de la structure.<br />
J’ai dirigé il y a quelques années l’aménagement d’<strong>une</strong><br />
agence bancaire dans un immeuble existant et nous<br />
avons dû faire pour cela <strong>une</strong> très large baie au rez-dechaussée<br />
dans un vieux refend. Plusieurs dommages<br />
peuvent se produire <strong>à</strong> cette occasion. Si des dommages<br />
surviennent pendant l’exécution de l’ouverture et le passage<br />
de filets métalliques pour franchir la baie, ils vont<br />
relever du domaine de la responsabilité civile. Par contre,<br />
si le linteau qui vient d’être réalisé se comporte mal parce<br />
qu’il a été mal conçu ou mal réalisé, il est probable que<br />
la Décennale des constructeurs va s’étendre <strong>à</strong> l’ensemble<br />
des dégâts causés <strong>à</strong> l’existant. Enfin, si l’existant au-dessus<br />
révèle un jour un vice propre, il faut faire valoir, et<br />
c’est mon point de vue de technicien, que ce vice ne<br />
regarde que les propriétaires de l’immeuble et non pas<br />
les auteurs des travaux du rez-de-chaussée.<br />
En résumé <strong>à</strong> partir de cet exemple, j’aurais tendance <strong>à</strong><br />
dire que les interventions importantes <strong>à</strong> l’échelle des<br />
<strong>existants</strong> créent un risque de répercussion, mais les<br />
interventions plus modestes n’élargissent pas le champ<br />
de la responsabilité des constructeurs aux <strong>existants</strong>.<br />
S’il devait en être autrement, il faudrait finalement<br />
s’imposer un audit technique des <strong>existants</strong> de façon<br />
complète chaque fois qu’un existant est touché, ce qui<br />
n’a évidemment aucun sens, ni techniquement ni<br />
économiquement.<br />
Le sixième exemple est celui de la réfection d’un sol<br />
industriel, la réfection d’un dallage fissuré ne peut<br />
a priori se contenter d’un traitement de surface. Arrive<br />
donc la notion de diagnostic du support qui s’impose<br />
aux constructeurs. Ce qui me ramène <strong>à</strong> la notion d’appropriation<br />
du support. En l’espèce, la responsabilité<br />
des constructeurs, par rapport <strong>à</strong> la pérennité du sol<br />
traité, sera de facto élargie <strong>à</strong> l’ensemble de l’élément<br />
traité : il peut s’agir d’<strong>une</strong> dalle, d’<strong>une</strong> chape, d’un<br />
plancher. Par contre, cet élargissement de responsabilité<br />
a ses limites car les constructeurs chargés de la<br />
reprise d’un sol industriel n’auront pas <strong>à</strong> répondre, ce<br />
qui me paraît de bon sens mais peut-être que la jurisprudence<br />
dira le contraire, du comportement<br />
d’éléments extérieurs <strong>à</strong> l’élément traité, ces éléments<br />
extérieurs pouvant être par exemple le sol au sens<br />
géotechnique et non plus le sol traité, ou encore<br />
16 - Mars 2010 - SCOR<br />
la structure porteuse si cette chape est refaite sur un<br />
plancher. Dans ce cas, la notion d’appropriation du<br />
support se combine avec celle de support traité. Sinon,<br />
nous en venons <strong>à</strong> tout auditer et <strong>à</strong> proposer des travaux<br />
phénoménaux pour <strong>une</strong> simple réfection qui<br />
paraît au départ limitée.<br />
Le septième exemple est celui du ravalement. Dans<br />
<strong>une</strong> expertise qui s’est déroulée dans le vieux Paris, rue<br />
du Cherche-Midi, un ravalement neuf a dû être totalement<br />
refait <strong>à</strong> la suite de la défaillance d’un support.<br />
Vous connaissez tous ces façades qui sont en pans de<br />
bois avec des remplissages en maçonnerie.<br />
La responsabilité décennale des constructeurs a été<br />
mobilisée pour <strong>une</strong> mauvaise appréciation du support<br />
ancien et les constructeurs ont dû payer non<br />
seulement la réfection totale du ravalement avec<br />
les échafaudages, etc. mais aussi quasiment la<br />
recons-truction de cette façade support. Autrement<br />
dit, le ravalement d’<strong>une</strong> façade existante rend celle-ci<br />
indivisible en ce sens que les constructeurs ne peuvent<br />
concevoir et réaliser un ravalement adéquat et pérenne<br />
sans <strong>une</strong> parfaite maîtrise du support.<br />
Dans la même logique, et pour prendre un exemple<br />
plus contemporain, je pense <strong>à</strong> <strong>une</strong> expertise actuellement<br />
en cours dans l’est parisien. Dans le cadre du<br />
marché des travaux de ravalement, l’entreprise a<br />
réalisé un enduit décoratif D3 sur un ancien revêtement<br />
plastique épais (RPE), lui-même réalisé il y a bien longtemps<br />
sur <strong>une</strong> façade en béton. A nouveau, la<br />
responsabilité des constructeurs est susceptible d’être<br />
recherchée non seulement pour le revêtement D3 qui<br />
va probablement devoir être entièrement refait, mais<br />
aussi pour <strong>une</strong> mauvaise appréciation du support. En<br />
effet, l’entreprise devait se préoccuper non seulement du<br />
RPE qui n’était pas en bon état malgré des sondages en<br />
un certain nombre de points, mais aussi du béton armé<br />
qui dans certaines zones était dégradé par des poussées<br />
de fer. Vous voyez que nous allons loin alors que<br />
l’entreprise a fait un simple badigeon. Donc, pour un<br />
ravalement de propreté, <strong>une</strong> décoration, l’entreprise doit<br />
répondre de la fissuration non visible d’un béton armé<br />
par suite de la poussée et de la rouille des fers <strong>à</strong> béton.<br />
Nous pouvons penser qu’il aurait fallu un audit plus<br />
pertinent mais lorsqu’<strong>une</strong> entreprise de ravalement est<br />
consultée en concurrence, si elle vient demander un<br />
supplément pour faire un audit avant le démarrage des<br />
travaux, elle a peu de chance d’être adjudicataire du<br />
marché. Ce qui m’amène <strong>à</strong> la notion un peu complexe<br />
d’audit exigible.
Le huitième exemple est <strong>une</strong> mise aux normes de<br />
sécurité incendie, que m’a suggéré M. Tuccella. C’est<br />
vrai que tant pour les assureurs que pour les experts,<br />
nous avons de plus en plus de litiges dans la grande<br />
hôtellerie, très en retard en matière de sécurité incendie<br />
en France. Elle essaie de se rattraper progressivement<br />
mais les budgets sont si considérables que ces travaux<br />
ne peuvent pas se faire en un jour. La pression administrative<br />
est tout de même l<strong>à</strong> pour que les hôtels<br />
deviennent de plus en plus sûrs. La responsabilité des<br />
constructeurs dans le domaine de la sécurité incendie va<br />
être liée <strong>à</strong> <strong>une</strong> notion très importante qui est celle de la<br />
fonctionnalité. En effet, pour procéder <strong>à</strong> la mise aux<br />
normes de sécurité, il faut que les conditions de sécurité<br />
soient remplies. Ce qui me ramène <strong>à</strong> la notion d’<strong>existants</strong><br />
appréhendables. Comme pour <strong>une</strong> structure, si<br />
l’audit permet de déceler facilement l’état défaillant des<br />
<strong>existants</strong> qu’il va falloir corriger, le risque décennal paraît<br />
étendu <strong>à</strong> la totalité de l’installation de sécurité. Par<br />
contre, si l’audit ne permet pas cette compréhension du<br />
système existant, le risque se réduit mais je ne suis pas<br />
certain qu’il s’annule.<br />
Ce qui fait émerger la notion de niveau d’audit. Quel<br />
niveau d’audit ? L’approche est très difficile sur un tel<br />
sujet. Je vais prendre un exemple concret. Nous<br />
sommes dans la sécurité incendie et <strong>une</strong> entreprise est<br />
chargée de refaire des volets de désenfumage. Cette<br />
entreprise ne va-t-elle pas accepter un risque décennal<br />
de fonctionnalité pour tous les éléments qui sont<br />
autour ? Derrière le volet, il y a <strong>une</strong> gaine, en haut de<br />
la gaine, il y a un ventilateur, s’il y a <strong>une</strong> alarme de<br />
détection, elle est déclenchée par <strong>une</strong> centrale de<br />
sécurité, <strong>une</strong> centrale SSI qui fonctionne avec un logiciel<br />
de gestion. Vous connaissez ces sujets mais je<br />
ressors <strong>une</strong> notion qu’il faut certainement explorer,<br />
celle de fonctionnalité périphérique. C’est-<strong>à</strong>-dire qu’il<br />
faut essayer de limiter la responsabilité de fonctionnalité<br />
<strong>à</strong> la périphérie de l’ouvrage pour lequel nous<br />
sommes saisis. Cependant, dans mon scénario, les<br />
volets sont testés avec des essais de désenfumage,<br />
avec des cartouches fumigènes, la commission de<br />
sécurité de la préfecture de police donne un avis et,<br />
<strong>une</strong> fois les volets refaits, l’ensemble est censé répondre<br />
<strong>à</strong> <strong>une</strong> obligation de résultat.<br />
Par contre, <strong>à</strong> l’inverse, la société spécialisée en informatique<br />
qui est chargée un jour de changer le logiciel<br />
de gestion du système de sécurité, va probablement<br />
voir son fonctionnement périphérique limité. Nous ne<br />
voyons pas en effet comment ce spécialiste de l’informatique<br />
pourrait aller s’assurer du bon fonctionnement<br />
des terminaux, des détecteurs qui vont donner <strong>une</strong><br />
information au logiciel, lequel va déclencher l’ouverture<br />
des volets. Donc nous ne pouvons pas imaginer<br />
que le spécialiste de l’informatique ait <strong>à</strong> répondre<br />
d’<strong>une</strong> quelconque fonctionnalité de ces détecteurs et<br />
des dispositifs actionnés de sécurité. Quel est le raisonnement<br />
<strong>à</strong> rechercher ? Cet exercice dépasse très<br />
sensiblement le cadre du présent exposé. La matière<br />
est complexe mais je dirais qu’il en fut un peu de<br />
même lorsque j’ai mis au point le barème de préfinancement<br />
de la CRAC. Dans <strong>une</strong> première étape, nous<br />
avons défini les besoins et recherché un système et<br />
dans <strong>une</strong> deuxième étape, beaucoup plus longue et<br />
plus lourde, nous avons conçu dans le détail un<br />
système que vous connaissez tous avec un fichier<br />
pathologique et <strong>une</strong> grille codée de répartition des<br />
responsabilités.<br />
Le neuvième exemple est celui de la mise aux normes<br />
parasismiques d’un ouvrage dont il est fait de plus en<br />
plus état notamment après l’événement qui s’est produit<br />
en Italie. J’ai eu <strong>une</strong> expertise sur la mise aux<br />
normes d’un pont du tramway de la Ville de Caen. Nous<br />
avons dû faire la mise aux normes parasismiques en<br />
expertise après la réalisation de l’ouvrage parce que<br />
cette mise aux normes avait été oubliée. Nous avons<br />
effectivement dû mettre en place entre les culées supports<br />
et le pont lui-même, des appuis spécifiques<br />
parasismiques capables de permettre au pont et au<br />
tablier de vibrer en cas de séisme sans<br />
se casser. Pour calculer ces appuis, les constructeurs,<br />
maîtres d’œuvre, entrepreneurs, bureaux d’études et<br />
contrôleurs techniques, ont dû prendre en compte les<br />
données structurelles de l’ouvrage mais cette prise en<br />
compte s’est limitée aux hypothèses de calculs. C’est-<strong>à</strong>dire<br />
que ceux qui avaient calculé le pont ont donné des<br />
valeurs de calculs, qui ont été intégrées par ceux qui ont<br />
eu la charge de calculer les appuis. Ils n’ont travaillé<br />
que sur des hypothèses de calculs. Je veux dire que la<br />
garantie attachée aux dispositifs antisismiques ne<br />
saurait <strong>à</strong> mon sens impliquer <strong>une</strong> extension de la garantie<br />
décennale de ceux qui réalisent ces appuis, <strong>à</strong> l’ouvrage<br />
existant, lequel continue sa vie avec ses garanties<br />
propres. En l’espèce, le pont avait été construit peu<br />
avant, il avait <strong>une</strong> bonne décennale devant lui mais nous<br />
pouvons imaginer <strong>une</strong> intervention sur un bâtiment existant<br />
ancien qui n’a même plus de garantie décennale.<br />
Il est donc impensable de demander <strong>à</strong> celui qui<br />
va faire les appuis pour un bon comportement de la<br />
structure de répondre de tous les vices qui pourraient<br />
survenir dans l’ouvrage existant qui est traité. Ici,<br />
pourtant malgré ce que je dis, nous sommes devant des<br />
ouvrages totalement indissociables. J’ai peut-être tort<br />
sur le plan technique et la jurisprudence dira peut-être<br />
qu’il faudra répondre d’<strong>une</strong> nouvelle Décennale sur le<br />
vieux pont.<br />
Le dixième exemple concerne les éléments d’équipement.<br />
Ils sont le plus souvent de nature dissociable<br />
mais il existe des éléments d’équipement indissociables.<br />
J’attire votre attention sur le fait que les orientations<br />
consuméristes et jurisprudentielles actuelles ont tendance<br />
<strong>à</strong> voir partout de l’impropriété <strong>à</strong> la destination et donc <strong>à</strong><br />
les ramener <strong>à</strong> la Décennale lorsque les désordres qui<br />
SCOR - Mars 2010 - 17
affectent ces éléments d’équipement revêtent <strong>une</strong> certaine<br />
gravité. Nous pouvons citer le cas d’un hôpital dont<br />
l’installation de chauffage tombe en panne. Un hôpital<br />
ne peut pas continuer <strong>à</strong> fonctionner sans chauffage, ce<br />
qui conduit les magistrats <strong>à</strong> conclure <strong>à</strong> l’impropriété<br />
<strong>à</strong> destination et les exemples sont très nombreux.<br />
Ma réflexion sur les éléments d’équipement m’amène<br />
<strong>à</strong> faire émerger deux autres notions, celle d’incorporation<br />
et celle d’unité fonctionnelle. En matière<br />
d’éléments d’équipement, si l’élément neuf et l’élément<br />
existant ont besoin l’un de l’autre pour<br />
« fonctionner », le neuf prend en quelque sorte en<br />
garantie l’existant interactif. Contrairement au cas d’un<br />
équipement qui n’est pas modifié mais qui fait l’objet<br />
de l’ajout d’un élément, lui-même prolongé ou précédé<br />
d’un élément neuf, par exemple des travaux sur<br />
<strong>une</strong> installation de chauffage sans toucher <strong>à</strong> la chaudière,<br />
des travaux de plomberie sans toucher au ballon<br />
d’eau chaude, ou encore des travaux de gaine sans<br />
toucher <strong>à</strong> la centrale de traitement d’air. Par contre, le<br />
risque d’extension se matérialise lorsque l’équipement<br />
existant est modifié, par exemple le remplacement<br />
d’un brûleur sur <strong>une</strong> chaudière ou le remplacement<br />
d’un moteur sur un ventilateur. L’extension de garantie<br />
est implicite, elle n’est pas évidente si chaque composant<br />
est isolable donc divisible avant, pendant et après<br />
les travaux. Il est vrai que le remplacement d’un brûleur<br />
n’implique pas que le constructeur ait <strong>à</strong> répondre<br />
du reste de la chaudière existante, mais il y a un risque<br />
d’implication par rapport <strong>à</strong> la fonctionnalité. Ce qui<br />
promet de belles batailles si le cas se présente.<br />
Je vais terminer par les perspectives. Comme vous le<br />
voyez, même pour moi, et la jurisprudence l’est encore<br />
plus, la matière technique est lourde, complexe et<br />
préoccupante. Je pense qu’il est possible d’imaginer<br />
<strong>une</strong> sorte de règle du jeu qui nous permettrait de simplifier<br />
notre compréhension et qui pourrait comporter<br />
d’un côté <strong>une</strong> identification des risques et de l’autre<br />
des conseils préventifs. A mon sens, l’exercice mérite<br />
d’être tenté. Evidemment il dépasse le cadre de mon<br />
intervention de ce jour mais même si l’exhaustivité<br />
n’est pas possible, l’exercice permettrait au moins de<br />
dégager des principes et des réflexes. Ensuite, il paraît<br />
imaginable de travailler par approximation, par<br />
similitudes sur cette base qui aurait déj<strong>à</strong> le mérite<br />
d’exister, de façon <strong>à</strong> mieux maîtriser les risques<br />
techniques des <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>.<br />
Je vous remercie.<br />
18 - Mars 2010 - SCOR<br />
Jean TUCCELLA<br />
Merci M. BERTIN pour votre exposé. Avant de passer<br />
aux questions, je donne la parole <strong>à</strong> Maître KARILA qui<br />
souhaite répondre sur différents exemples.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je vais apporter un éclairage juridique sur certains<br />
exemples. Sur le cinquième exemple des interventions<br />
ponctuelles sur existant, M. BERTIN a utilisé <strong>à</strong> juste<br />
titre la notion d’échelle en disant que tout dépend de<br />
l’échelle. En <strong>réalité</strong>, il faut rappeler que toute la problématique<br />
que nous traitons aujourd’hui de savoir si les<br />
dommages matériels affectant des <strong>existants</strong> vont<br />
rentrer ou non dans le domaine de la Décennale, suppose<br />
que les travaux neufs sont eux-mêmes constitutifs<br />
de la construction d’un ouvrage au sens de l’article<br />
1792 du Code civil, sinon la problématique n’existe<br />
pas. Il faut donc d’abord être en présence de travaux<br />
qui eux-mêmes peuvent être considérés comme étant<br />
la construction d’un ouvrage au sens de l’article 1792<br />
du Code civil. D’<strong>une</strong> manière générale, dans le cadre<br />
des opérations de rénovation, il faut prendre en<br />
compte l’importance qualitative des travaux et non pas<br />
la nécessité ou non d’un permis de construire. C’est si<br />
nous sommes en présence de travaux de construction<br />
au sens de l’article 1792, par exemple la création d’un<br />
plancher intermédiaire ou la modification des<br />
structures, que s’appliquera pour ces travaux neufs la<br />
Décennale et que s’appliquera ou non pour les<br />
dommages affectant les <strong>existants</strong>, la problématique<br />
qui est l’objet de notre réunion.<br />
Pierre BERTIN<br />
J’ai volontairement pris le trou de 10 cm, parce qu’il<br />
paraît tout <strong>à</strong> fait modeste et anodin. Mais il s’agit d’un<br />
trou réalisé dans le contexte d’un marché de chauffage<br />
complet dans un immeuble.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je ferai la même réponse pour le sixième exemple de<br />
la réfection d’un sol industriel. La problématique se<br />
pose si cette réfection de ce dallage constitue la<br />
construction d’un ouvrage.<br />
Ainsi que pour le septième exemple du ravalement. Il<br />
y a ravalement et ravalement. Un ravalement pour les<br />
taches et un ravalement qui comporte le rebouchage<br />
de fissures, des travaux d’étanchéité, ravalement et<br />
peinture étant d’ailleurs indissociables, et dans votre
exemple de support ancien en bois et maçonnerie, le<br />
ravalement peut avoir des conséquences graves parce<br />
que le diagnostic n’a pas été fait. Mais si le ravalement<br />
lui-même ne constitue pas la construction d’un<br />
ouvrage au sens de l’article 1792, même s’il y a <strong>une</strong><br />
erreur flagrante au niveau du diagnostic, même si les<br />
conséquences sont graves, il ne rentrera jamais dans<br />
le domaine de la Décennale.<br />
Pour avoir beaucoup écrit et avoir fait le point de la<br />
question en matière de ravalement dans diverses<br />
revues, la clé du raisonnement est la suivante. Ou<br />
bien le ravalement comportant <strong>une</strong> peinture suppose<br />
la création ou la réfection d’<strong>une</strong> étanchéité et alors<br />
c’est la construction d’un ouvrage. Ou bien il est simplement<br />
décoratif et ne comporte pas d’étanchéité,<br />
il n’y a pas de différence entre l’étanchéité et l’imperméabilisation.<br />
Il faut se méfier du réflexe qui conduit<br />
<strong>à</strong> dire que c’est l’impropriété <strong>à</strong> destination. Peu<br />
importe, l’impropriété <strong>à</strong> destination est un des critères<br />
de la Décennale mais n’est pas un critère exclusif<br />
de la Décennale. Elle est un critère de responsabilité<br />
dans d’autres domaines. Dans le domaine de la garantie<br />
des vices cachés, l’impropriété <strong>à</strong> destination est<br />
bien incluse dans la garantie des vices cachés et n’a<br />
rien <strong>à</strong> voir avec la Décennale. Si c’est la construction<br />
d’un ouvrage et les conséquences sont graves, les<br />
dommages relèvent de la Décennale. Si ce n’est pas<br />
la construction d’un ouvrage et les conséquences<br />
sont graves, les dommages ne relèvent pas de la<br />
Décennale mais du droit commun.<br />
J’en arrive au huitième exemple et la mise aux normes<br />
de la sécurité incendie. Cet exemple est un peu spécifique,<br />
effectivement il s’agit de travaux sur existant.<br />
Il faut voir ce que vous envisagez au travers de cet<br />
exemple. Sur la mise en conformité elle-même, il n’est<br />
pas nécessaire qu’il y ait des dommages. S’il s’avère<br />
que cette mise en conformité n’est pas atteinte, elle<br />
relèvera de la Décennale et non pas du droit commun<br />
tout simplement en raison du risque pour la sécurité<br />
des usagers du bâtiment et des passants. Dans votre<br />
exemple, il n’y a que si cette mise en conformité<br />
cause des dommages <strong>à</strong> l’existant qu’elle relèvera<br />
de la Décennale.<br />
Pierre BERTIN<br />
J’évoquais cet exemple que j’ai en expertise. La sécurité<br />
incendie existe, mais il est commandé <strong>une</strong> remise <strong>à</strong><br />
niveau partielle, ce qui génère un enchaînement de<br />
responsabilités.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Quant <strong>à</strong> votre exemple sur la mise en conformité du<br />
pont <strong>à</strong> des exigences parasismiques. Si ce travail de<br />
mise aux normes sur existant cause des dommages, il<br />
mobilisera la Décennale quel que soit l’âge du pont.<br />
Parce qu’aujourd’hui, rentrent dans la Décennale des<br />
<strong>existants</strong> qui existent depuis trente, quarante ou<br />
cinquante ans.<br />
Pierre BERTIN<br />
J’évoquais plutôt dans mon exemple le fait que le pont<br />
puisse avoir un vice caché intrinsèque et que celui qui<br />
fait les appuis ne peut pas répondre de ces vices.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
C’est l’état de la jurisprudence avant l’ordonnance du<br />
8 juin 2005 mais il ne faut pas que le vice de la structure<br />
existante du pont soit la cause exclusive des<br />
dommages. Comme par hypothèse, c’est par l’exécution<br />
de cette mise en conformité aux règles<br />
parasismiques qu’il y aura des dommages, mais peu<br />
importe que le pont ait vingt ans ou trente ans.<br />
Je voulais compléter et donner mon éclairage juridique<br />
sur les exemples techniques de M. BERTIN.<br />
SCOR - Mars 2010 - 19
Echange de vues<br />
avec la salle<br />
Jean TUCCELLA<br />
Avez-vous des questions suite <strong>à</strong> ces deux<br />
interventions ?<br />
Marcel CANTONNET - AGF IART<br />
Je suis inquiet sur les perspectives de développement<br />
d’obligation d’assurance sur les <strong>existants</strong> proposés par<br />
M. BERTIN mais je me rassure en constatant que ces<br />
perspectives sont offertes <strong>à</strong> partir du critère essentiel,<br />
peut-être exclusif de l’indivisibilité. Or, je voudrais<br />
rappeler les deux conditions pour qu’un existant soit<br />
soumis, l’indivisibilité mais aussi avant même l’indivisibilité,<br />
l’incorporation dans les travaux neufs.<br />
Je voudrais revenir sur votre premier exemple d’<strong>une</strong><br />
reprise en sous-œuvre d’un bâtiment existant que vous<br />
avez cité où vous avez conclu au caractère décennal de<br />
la responsabilité des constructeurs. S’il y a des désordres<br />
<strong>à</strong> la superstructure du fait de la reprise en<br />
sous-œuvre plus ou moins bien faite, effectivement la<br />
responsabilité des constructeurs est engagée. Mais il<br />
ne me semble pas que nous soyons dans le domaine<br />
de l’obligation d’assurance parce que la superstructure<br />
en question n’est <strong>à</strong> aucun moment incorporée dans les<br />
travaux neufs qui ne concernent que la reprise en<br />
sous-œuvre. Partagez-vous cette analyse pour dire que<br />
certes il y a responsabilité, certes il y aura probablement<br />
un schéma d’assurance en place mais pas au titre<br />
d’<strong>une</strong> obligation d’assurance pour ce qui concerne<br />
la superstructure parce que la condition préalable de<br />
l’incorporation n’y est pas ?<br />
Pierre BERTIN<br />
J’ai raisonné en responsabilité. Après, <strong>à</strong> la question<br />
de savoir si nous pouvons attacher <strong>une</strong> obligation<br />
d’assurance sur <strong>une</strong> telle situation, c’est <strong>à</strong> vous les<br />
assureurs de répondre.<br />
Marcel CANTONNET<br />
Je pense <strong>à</strong> la responsabilité RC mais en aucun cas<br />
Décennale parce que nous ne parlons pas de l’ouvrage<br />
neuf qui a été réalisé mais des parties anciennes<br />
conservées et qu’il n’y a pas obligation d’assurance<br />
quel que soit le fondement juridique de responsabilité<br />
sur les dommages aux parties anciennes parce que le<br />
critère initial de l’incorporation n’y est pas.<br />
20 - Mars 2010 - SCOR<br />
Jean TUCCELLA<br />
Je vais compléter votre question parce que nous arrivons<br />
<strong>à</strong> des conclusions différentes, ce qui est surprenant<br />
après les interventions.<br />
Si j’ai bien compris ce matin, un dommage sur la partie<br />
existante supérieure dû <strong>à</strong> la reprise en sous-œuvre en<br />
dessous relève de l’obligation d’assurance Décennale<br />
parce qu’il y a un lien de causalité.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
J’ai dit que le recours <strong>à</strong> la notion de causalité traverse<br />
la jurisprudence avant l’ordonnance du 8 juin 2005<br />
quand justement il n’y a pas d’indivisibilité et pas<br />
d’incorporation. Il reste quand même que l’ordonnance<br />
ne s’est pas référée <strong>à</strong> la causalité puisqu’elle a<br />
voulu entériner Sogebor qui justement a été rendu<br />
alors qu’il n’y avait pas causalité. Il a été considéré qu’<strong>à</strong><br />
partir du moment où c’est indivisible, indissociable<br />
et qu’il n’est pas possible de prouver que la cause<br />
exclusive provient de l’état du préexistant, cela rentrera<br />
dans l’obligation d’assurance. Donc pour en revenir <strong>à</strong><br />
la reprise en sous-œuvre, je donnerai raison <strong>à</strong><br />
M. Cantonnet. Effectivement, en appliquant l’ordonnance,<br />
les dommages matériels affectant l’existant,<br />
c’est-<strong>à</strong>-dire la superstructure, n’entrent pas dans le<br />
champ d’application de l’assurance obligatoire<br />
Décennale des <strong>existants</strong>. Ce qui ne veut pas dire qu’un<br />
juge ne dira pas que ce n’est pas de la Décennale. Il<br />
dira peut-être c’est de la Décennale parce que l’entreprise<br />
ne s’est pas suffisamment préoccupée de<br />
l’existant et la reprise en sous-œuvre aurait dû être<br />
effectuée selon des modalités différentes, et c’est<br />
l<strong>à</strong> qu’il y a peut-être un risque de dérive.<br />
Mais en l’état de la volonté du législateur qui a <strong>une</strong><br />
double finalité et si nous nous en tenons <strong>à</strong> l’ordonnance<br />
du 8 juin 2005, M. CANTONNET a raison. Quant<br />
<strong>à</strong> dire ce qu’il en sera dans l’avenir, nous n’en savons<br />
rien, peut-être le risque de dérive, tout en pensant tout<br />
de même que nous avons un signe positif avec l’arrêt<br />
du 5 juillet 2006.
Jean TUCCELLA<br />
Maître KARILA, pouvons-nous repasser en revue les<br />
trois ou quatre exemples de M. BERTIN pour savoir s’ils<br />
relèvent de l’assurance obligatoire ou pas ?<br />
Une réfection totale <strong>à</strong> l’intérieur d’un bâtiment ancien<br />
tout en conservant les façades.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je crois qu’il est prudent de dire qu’ils relèvent de<br />
l’assurance obligatoire.<br />
Pierre BERTIN<br />
A mon avis, les critères d’indissociabilité et d’incorporation<br />
sont remplis, parce que nécessairement cette<br />
façade sera appuyée sur des structures porteuses et<br />
elle sera habillée <strong>à</strong> l’intérieur et <strong>à</strong> l’extérieur puisqu’elle<br />
sera ravalée complètement. Donc, l’élément de façade<br />
est incorporé totalement. L’existant est incorporé<br />
totalement dans le neuf et non pas l’inverse.<br />
Jean TUCCELLA<br />
L’autre exemple était la surélévation d’un bâtiment<br />
existant par la construction de deux ou trois étages<br />
au-dessus.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Techniquement, le premier critère n’est pas rempli,<br />
il n’y a pas d’incorporation et le deuxième ne le serait<br />
peut-être pas non plus.<br />
Pierre BERTIN<br />
C’est pourquoi il y a <strong>une</strong> grande différence entre<br />
le constructeur et l’assureur.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Nous avons commencé <strong>à</strong> parler d’<strong>existants</strong> en 1989-<br />
1990. J’ai été le premier <strong>à</strong> écrire en la matière. Dès<br />
1991, j’avais écrit <strong>une</strong> étude sur les <strong>existants</strong> et j’en ai<br />
écrit <strong>une</strong> seconde en 2006.<br />
En 1959, pour <strong>une</strong> surélévation sur un bâtiment<br />
déj<strong>à</strong> existant dont les travaux avaient généré des<br />
infiltrations dans l’existant, la cour d’appel d’Amiens a<br />
appliqué la Décennale sur la totalité en disant que la<br />
terrasse sur laquelle avait été édifiée la surélévation<br />
était comme un sol. Vous êtes comptable du sous-sol,<br />
vous êtes comptable du support.<br />
Pierre BERTIN<br />
Ce qui ne serait plus le cas maintenant.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Au départ, la responsabilité décennale et le domaine<br />
de l’assurance obligatoire de la Décennale ne se<br />
recoupaient pas. C’est parce qu’ils ne se recoupaient<br />
pas et que la jurisprudence a voulu qu’il y ait <strong>une</strong><br />
coïncidence parfaite que le gouvernement a désigné<br />
en mai 1997, un comité restreint de trois personnes<br />
présidé par M. Périnet-Marquet avec Mme Corinne<br />
Saint Alary-Houin et moi-même pour lui proposer <strong>une</strong><br />
définition qui permette de mieux délimiter le champ<br />
de l’assurance obligatoire, alors que le législateur était<br />
clair, Décennale pour la construction de tout ouvrage<br />
et obligation d’assurance de la Décennale seulement<br />
si cet ouvrage est un ouvrage du bâtiment. C’est parce<br />
qu’il y avait eu cette dérive que ce comité restreint a<br />
déposé son rapport le 18 décembre 1997 qui est bien<br />
connu sous le nom de rapport Périnet-Marquet. Et<br />
l’ordonnance du 8 juin 2005 est la transposition<br />
législative des préconisations que nous avions faites,<br />
notamment la création d’un article 1792-7 et les<br />
rectifications du problème <strong>à</strong> sa base, avec la<br />
suppression des termes « travaux de bâtiment »,<br />
« ouvrages » et « bâtiment » et par l’adoption d’un<br />
système Tout Sauf, tous les ouvrages sauf.<br />
Donc, ne confondons pas le domaine de la Décennale<br />
et le domaine de l’assurance obligatoire de la<br />
Décennale qui est forcément limité puisqu’il ne<br />
s’applique pas aux ouvrages figurant dans l’alinéa 1 de<br />
façon absolue, il ne s’applique pas non plus aux<br />
ouvrages figurant dans l’alinéa 2, que j’ai appelé<br />
exclusions relatives, sauf s’ils sont l’accessoire d’un<br />
ouvrage neuf soumis <strong>à</strong> obligation d’assurance et il ne<br />
s’applique pas non plus aux <strong>existants</strong> « … <strong>à</strong> l’exception<br />
de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage<br />
neuf, en deviennent techniquement <strong>indivisibles</strong> … ».<br />
Jean TUCCELLA<br />
Nous poursuivons avec l’exemple de la rénovation avec<br />
conservation de la structure existante, les murs porteurs,<br />
les planchers, etc., dans laquelle sont reconstruits<br />
tous les corps d’état secondaires. Si des problèmes<br />
surviennent sur l’existant, ceux-ci relèvent-ils de la<br />
garantie obligatoire ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Je vois mal l’exécution de travaux de second-œuvre<br />
avoir des conséquences sur <strong>une</strong> structure.<br />
Pierre BERTIN<br />
Techniquement, il est possible d’imaginer des charges et<br />
surcharges importantes si vous amenez <strong>une</strong> charge de<br />
matériel, par exemple <strong>une</strong> centrale de traitement d’air.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Est-ce que cela va relever de la Décennale ? Ou de<br />
l’obligation d’assurance des <strong>existants</strong> ? Il faut retrouver<br />
les deux conditions. Y a-t-il incorporation totale ?<br />
Y a-t-il indivisibilité technique ?<br />
SCOR - Mars 2010 - 21
Pierre BERTIN<br />
Dans cet exemple, je répondrais oui assez facilement.<br />
Il s’agit de la réfection d’un bâtiment dans <strong>une</strong> structure<br />
conservée. A la fin des travaux, la façade est<br />
refaite donc l’existant est totalement incorporé dans le<br />
neuf et ensuite il est indissociable puisqu’il n’est pas<br />
possible d’imaginer retirer un morceau de l’existant<br />
sans que le bâtiment ne s’effondre. Donc, je pense que<br />
les deux critères sont remplis et d’ailleurs j’imagine mal<br />
que les constructeurs chargés de cette réalisation n’intègrent<br />
pas de façon extrêmement fine les qualités du<br />
support.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Une autre question ?<br />
Guy CHEZAUBERNARD, souscripteur chez Covéa<br />
A mon sens, un des problèmes qui a été induit par la<br />
création de cette notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>, c’est<br />
le risque d’être engagés bien au-del<strong>à</strong>, généralement<br />
sur de très gros chantiers, du montant des travaux<br />
neufs. Jusqu’<strong>à</strong> présent, nous maîtrisions assez bien nos<br />
engagements puisque nous nous référions au coût des<br />
travaux neufs sur la base de devis. Aujourd’hui, <strong>à</strong> travers<br />
cette notion d’<strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>, nous pouvons<br />
être amenés, au cours d’<strong>une</strong> réparation, <strong>à</strong> aller bien<br />
au-del<strong>à</strong> du montant des travaux neufs. Face <strong>à</strong> cela,<br />
nous sommes relativement démunis et sur des<br />
opérations très lourdes, nous pouvons même<br />
aller jusqu’<strong>à</strong> dépasser nos capacités de réassurance<br />
généralement facultatives.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Ne serait-il pas prudent sur ces opérations particulièrement<br />
lourdes, d’arriver <strong>à</strong> la notion d’un audit de<br />
valeur ?<br />
Guy CHEZAUBERNARD<br />
Aujourd’hui, nous sommes face <strong>à</strong> deux questions auxquelles<br />
nous ne savons pas répondre. Personnellement,<br />
je ne sais pas ce que signifient des <strong>existants</strong> totalement<br />
incorporés et techniquement <strong>indivisibles</strong>. Par ailleurs,<br />
je ne connais pas non plus la valeur de l’existant.<br />
Prenons un exemple concret. Imaginons la reprise en<br />
sous-œuvre d’un bâtiment historique, par exemple<br />
d’<strong>une</strong> gare dans Paris, qui, nous l’avons dit ne devrait<br />
a priori pas relever de l’obligation d’assurance.<br />
Imaginons aussi que par sécurité, nous considérons<br />
que nous sommes face <strong>à</strong> des <strong>existants</strong> <strong>indivisibles</strong>. Une<br />
fois résolue la terminologie, quel est le coût <strong>à</strong> prendre<br />
22 - Mars 2010 - SCOR<br />
en compte ? Nous avons deux problèmes. D’<strong>une</strong> part,<br />
devons-nous parler de la valeur historique du<br />
bâtiment ? Devons-nous parler de la valeur de reconstruction<br />
? D’autre part, quelle est la zone géographique<br />
concernée par les travaux ? Nous sommes bien obligés<br />
de nous ramener <strong>à</strong> ce que nous appelons le SMP, le<br />
sinistre maximum possible. C’est-<strong>à</strong>-dire que nous raisonnons<br />
de la façon suivante : nous avons <strong>une</strong> reprise<br />
en sous-œuvre et après réception, se produit l’effondrement<br />
du bâtiment historique situé au-dessus, qui<br />
est la conséquence directe d’un défaut de conception<br />
de la reprise en sous-œuvre. Vais-je avoir un effondrement<br />
au droit de mon défaut ? Ou vais-je avoir<br />
l’effondrement total du bâtiment ? Ce sont des questions<br />
auxquelles nous, assureurs, nous sommes<br />
incapables de répondre. Nous sommes tentés<br />
aujourd’hui de poser la question aux personnes qui<br />
connaissent le sujet, les maîtres d’œuvre ou le maître<br />
d’ouvrage. Nous posons la question au maître<br />
d’ouvrage en lui disant de poser la question <strong>à</strong> son<br />
maître d’œuvre et en fonction de la réponse qui sera<br />
donnée, <strong>à</strong> savoir la valeur des <strong>existants</strong> et la zone<br />
géographique <strong>à</strong> prendre en compte, nous arrivons<br />
<strong>à</strong> un montant de travaux de reconstruction que<br />
nous rajoutons au coût des travaux neufs, ce qui<br />
finalement correspond <strong>à</strong> notre engagement maximum,<br />
<strong>à</strong> notre SMP.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Vous calculez votre prime sur le plafonnement ?<br />
Guy CHEZAUBERNARD<br />
Tout <strong>à</strong> fait. Mais il y a des cas où cela peut rester en<br />
dessous et il peut y avoir des écarts importants.<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Vous calculez au plus juste votre prime sur le plafonnement,<br />
mais il est actuellement admis que s’il<br />
dépasse, vous calculez au plafond admis légalement.<br />
Guy CHEZAUBERNARD<br />
Est-ce pour nous <strong>une</strong> sécurité réelle d’obtenir cette<br />
information du maître d’ouvrage officiellement ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
II faut que nécessairement vous appliquiez dans votre<br />
détermination de prime le montant des <strong>existants</strong>. Vous<br />
calculez bien votre prime en fonction du montant des<br />
travaux. Et si les <strong>existants</strong> rentrent dans le champ, vous<br />
devez aussi avoir la remontée de leur valeur.
Guy CHEZAUBERNARD<br />
Il y a deux façons de procéder. Soit c’est nous qui<br />
faisons cette estimation et qui l’intégrons, c’est notre<br />
problème. Mais si après nous avons effectivement<br />
un sinistre et que nous passons devant un tribunal,<br />
est-ce que le fait de pouvoir ressortir du dossier<br />
d’origine l’évaluation qui nous a été remise par<br />
le maître d’ouvrage, est <strong>une</strong> sécurité ou cela ne<br />
change-t-il rien ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Que vous fassiez cette appréciation vous-mêmes ou<br />
que vous la fassiez avec l’aide du maître d’ouvrage ou<br />
du maître d’œuvre, quelle est la différence ?<br />
Guy CHEZAUBERNARD<br />
Imaginons que le maître d’ouvrage me communique<br />
un montant d’existant <strong>à</strong> prendre en compte et qu’il<br />
y ait <strong>une</strong> erreur d’approche de vingt millions. Et <strong>à</strong> l’occasion<br />
d’un sinistre, j’ai trente-cinq millions de<br />
réparations <strong>à</strong> effectuer sur l’existant. Est-ce <strong>une</strong> sécurité<br />
pour moi de pouvoir dire que j’ai fait mon approche<br />
selon l’estimation remise par le maître d’ouvrage alors<br />
qu’il y avait <strong>une</strong> erreur ?<br />
Maître Jean-Pierre KARILA<br />
Une déclaration inexacte de bonne foi entraînerait certainement<br />
l’application d’<strong>une</strong> règle proportionnelle.<br />
Il ne faut pas oublier que nous sommes dans un<br />
contexte différent des déclarations spontanées.<br />
Aujourd’hui, l’assuré n’est pas obligé de tout dire <strong>à</strong> son<br />
assureur, il est obligé seulement de répondre aux questions<br />
mais s’il y répond mal et de bonne foi, nous<br />
pouvons imaginer que cela donnerait lieu <strong>à</strong> <strong>une</strong> règle<br />
proportionnelle.<br />
Jean TUCCELLA<br />
Vous êtes engagé probablement au-del<strong>à</strong> mais s’il y<br />
a <strong>une</strong> erreur manifeste quelque part et que vous<br />
puissiez identifier l’auteur de cette erreur, vous pouvez<br />
peut-être déclencher <strong>une</strong> action.<br />
Je remercie nos intervenants et je vous remercie<br />
d’être venus.<br />
Fin des débats.<br />
SCOR - Mars 2010 - 23
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