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Sahel Dimanche - Niger

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Société<br />

Mortalité infantile au <strong>Niger</strong><br />

Une étude pluridisciplinaire qui<br />

de mortalité des enfants, du foyer<br />

Le ministre des Finances, M. Gilles Baillet, a présidé hier au Grand Hôtel<br />

de Niamey, la cérémonie d’ouverture de l’atelier sous-régional de présentation<br />

des résultats de l’enquête autopsie verbale/autopsie sociale<br />

en rappelant la nécessité, pour gouverner, ‘’de la disponibilité d’informations<br />

statistiques régulières et fiables, permettant d’apprécier les effets<br />

et impacts de ces politiques et stratégies, afin d’éclairer au mieux<br />

les progrès et reculs enregistrés’’. ‘’Réduire la mortalité infantile, afin de<br />

sauvegarder et de valoriser le bien le plus précieux que nous avons, les<br />

enfants (…), c’est tout à la fois une exigence et un défi que nous devons<br />

relever (…), à partir d’une meilleure connaissance des causes des décès<br />

infanto-juvéniles’’, a indiqué le ministre dans son discours d’ouverture<br />

de cette cérémonie qui s’est déroulée en présence du ministre de la<br />

Santé Publique, M. Soumana Sanda, du représentant de l’Unicef au<br />

<strong>Niger</strong>, M. Guido Cornale, du directeur général de l’Institut National de la<br />

Statistique, M. Idrissa Alichina Kourguéni, des représentants de l’université<br />

américaine John Hopkins et de plusieurs invités.<br />

Se félicitant du recul considérable (43 %) de<br />

la mortalité des enfants de moins de cinq<br />

ans dans toutes les régions du <strong>Niger</strong> de<br />

1998 à 2009, un recul mis en lumière par une enquête<br />

conduite par l’INS en 2010, le ministre Gilles<br />

Baillet a expliqué que les données collectées par<br />

cette étude avaient servi de base de sondage pour<br />

tirer un échantillon représentatif de ménages ayant<br />

enregistré des décès d’enfants de moins de cinq<br />

ans afin de tenter d’en déterminer les causes.<br />

M. Gilles Baillet a achevé ses propos en rappelant,<br />

aux côtés de son collègue de la Santé Publique, M.<br />

Soumana Sanda, ‘’l’engagement de l’Etat nigérien<br />

à ne ménager aucun effort pour poursuivre et intensifier<br />

ses efforts en vue de renforcer et de<br />

consolider les résultats atteints dans la lutte contre<br />

la mortalité des enfants de moins de cinq ans, mais<br />

aussi pour l’atteinte des autres Objectifs du Millénaire<br />

pour le Développement et pour l’amélioration<br />

significative des conditions de vie socioéconomiques<br />

des populations de notre pays.<br />

Auparavant, après un mot de bienvenue de M.<br />

Idrissa Alichina Kourgueni, directeur général de<br />

l’Institut National de la Statistique, le représentant<br />

de l’Unicef, M. Guido Cornale, a remercié les auteurs<br />

de l’étude et s’est félicité des résultats de<br />

cette enquête qu’il a qualifiés d’atout pour le système<br />

de santé, permettant de recentrer la stratégie<br />

survie et développement de l’enfant, de renforcer<br />

les interventions à haut impact, d’identifier et de résoudre<br />

les goulots d’étranglement.<br />

Présentation de la méthodologie<br />

Dans la journée, plusieurs présentations ont permis<br />

aux participants de découvrir tout autant la méthodologie<br />

mise en œuvre que les résultats mis à jour.<br />

M. Oumarou Habi, directeur des enquêtes et recensements<br />

à l’Institut national de la statistique,<br />

(lire interview ci-contre), a d’abord présenté la méthodologie,<br />

nouvelle, de l’étude. En préambule, il<br />

a rappelé que les taux de mortalité des enfants de<br />

zéro à 1 mois et de 1 à 59 mois demeuraient parmi<br />

les plus élevés au monde, à hauteur, respectivement,<br />

de 41 pour 1000 et 135 pour 1000. Les deux<br />

cohortes ont été analysées de façon séparée.<br />

Il s’agissait, pour les enquêteurs, à travers un<br />

questionnaire très approfondi adressé aux mères<br />

De jeunes mères avec leurs nourrissons au CSI d'Ingall 7<br />

des enfants, de reconstituer les causes de décès,<br />

en utilisant un algorithme des signes/symptômes<br />

élaboré à partir de normes définies par l’Organisation<br />

Mondiale de la Santé et l’analyse d’un médecin<br />

pédiatre (autopsie verbale). Par ailleurs, l’autopsie<br />

sociale avait pour objet d’estimer la prévalence des<br />

facteurs socioculturels et des facteurs liés au système<br />

de santé qui contribuent aux décès des nouveau-nés<br />

et des jeunes enfants au <strong>Niger</strong>.<br />

L’échantillon retenu pour l’enquête nationale survie<br />

et mortalité était de 25 000 ménages en 2010.<br />

Parmi eux, un nouvel échantillon a été élaboré, de<br />

1166 enfants décédés : 620 âgés de 1 à 59 mois,<br />

453 âgés de 0 à 27 jours et 93 mort-nés. La collecte<br />

des données s’est bien déroulée, la plupart des<br />

femmes parvenant à évoquer avec précision les circonstances<br />

entourant la mort de leur enfant.<br />

Résultats de l’enquête de l’autopsie<br />

verbale<br />

Le médecin pédiatre Roubanatou Abdoulaye-Mamadou,<br />

spécialiste en néonatologie, a commenté<br />

avec beaucoup de précision les résultats de<br />

l’étude. Selon elle, les décès des nouveau-nés<br />

sont majoritairement provoqués par trois pathologies<br />

: la septicémie, la pneumonie et l’asphyxie (par<br />

ordre décroissant.) Les décès des nourrissons, de<br />

1 à 59 mois, sont eux essentiellement consécutifs<br />

à la méningite, le paludisme et la pneumonie. Plusieurs<br />

participants se sont étonnés du faible poids<br />

de la malnutrition aigüe sévère et des diarrhées<br />

dans les résultats, mais le Dr Abdoulaye-Mamadou<br />

a expliqué que ces pathologies étaient prises en<br />

compte en tant que ‘’facteurs contributifs ou causes<br />

sous-jacentes’’. La forte prévalence de la ménin-<br />

l Ado Youssouf/ ONEP<br />

gite est à analyser, selon elle, au regard des épidémies<br />

enregistrées dans la période des décès<br />

concernés.<br />

D’échanges fructueux sur l’autopsie sociale<br />

L’après-midi, un débat encore plus vif a été suscité<br />

par la présentation des résultats de l’autopsie sociale,<br />

décomposés en deux exposés distincts, du<br />

Dr Yaroh Asma Gali, sur les grossesses des mamans<br />

des enfants décédés, puis de M. Abdou<br />

Maina, de l’INS, sur la prise en charge de ces enfants<br />

par les structures de santé. Si les mères se<br />

situent, statistiquement, dans la moyenne nationale<br />

par leur âge et leur niveau culturel, le nombre de<br />

femmes ayant connu des complications durant la<br />

grossesse ou à l’accouchement était nettement<br />

plus élevé. C’est ainsi que 417 des 546 mères de<br />

nouveau-nés et mort-nés ont présenté des complications<br />

dans les trois derniers mois de la grossesse,<br />

383 parmi elles avant le travail, 149 avant<br />

le travail et pendant l’accouchement, et 181 pendant<br />

l’accouchement ayant débuté à la maison. Le<br />

Dr Yaroh Asma Gali a estimé que 10% seulement<br />

des consultations prénatales offertes à ces femmes<br />

étaient de qualité.<br />

‘’Ces mères, très jeunes, analphabètes, mariés à<br />

des analphabètes, accouchent en majorité à domicile,<br />

même quand elles n’ont pas de difficulté à atteindre<br />

une structure de santé’’, a-t-elle résumé, y<br />

voyant l’un des défis révélés par l’étude. L’autre<br />

grand enseignement de ce volet de l’étude est que<br />

‘’la majorité des femmes dont les nouveau-nés sont<br />

décédés ont présenté des complications pendant<br />

la grossesse, lors de l’accouchement ou post partum’’.<br />

M. Abdou Maina lui a succédé pour décrire le chemin<br />

de survie effectué par ces enfants, de l’apparition<br />

des symptômes à la fin de la prise en charge<br />

médicale. De cet exposé, les participants ont pu retenir<br />

que la prise en charge des nouveau-nés était<br />

Les officiels à l'ouverture de l'atelier<br />

insuffisante. Bizarrement, 96% des mères ont bien<br />

conscience que leur enfant est malade, mais elles<br />

ignorent la gravité de ce mal et jugent à 43% ‘’pas<br />

nécessaire’’ de leur apporter des soins. Le Dr Kamayé<br />

Moumouni a estimé que des facteurs culturels<br />

pesaient lourd dans cette absence de réaction.<br />

‘’Retenons que beaucoup de mères ont connu des<br />

complications pour lesquelles elles n’ont pas cherché<br />

de soins, et que leurs nouveau-nés ont connu<br />

des complications pour lesquelles elles n’ont pas<br />

cherché davantage de soins’’. Les parents des autres<br />

enfants ont tenté de soigner les enfants, soit à<br />

domicile (une fois sur trois) soit à l’extérieur, en<br />

moyenne presque trois jours après l’apparition de<br />

la maladie. Mais un seul, parmi ces enfants, a finalement<br />

été référé à l’hôpital tandis que 59% des<br />

nouveau-nés sont sortis vivants du système de<br />

santé, … pour aller mourir à la maison.<br />

Dans le cas des nourrissons, à l’inverse, lorsque<br />

les mères détectent la maladie (dans 97% des cas),<br />

moins de 10% seulement d’entre elles ne jugent<br />

‘’pas nécessaire’’ d’apporter des soins. Seuls 11%<br />

des enfants restent à la maison pour y être soignés.<br />

Les autres sont presque tous adressés au système<br />

de santé, trois jours plus tard en moyenne. Parmi<br />

eux, 67,4% sortent vivants du premier prestataire<br />

de santé qui les a pris en charge, malgré la gravité<br />

Mieux connaître les causes de mortalité pour mieux protéger<br />

les enfants du <strong>Niger</strong><br />

de leur état, et près de 20% sont référés à l’hôpital.<br />

Naturellement, l’enquête ne concernant que des<br />

enfants décédés, il faut retenir que tous sont morts,<br />

finalement, malgré la prise en charge médicale.<br />

Cette conclusion de l’étude a naturellement déclenché<br />

beaucoup de débats dans la salle. La plupart<br />

des participants, toutefois, se sont entendus pour<br />

retenir que ces résultats ‘’doivent nous aider à<br />

améliorer les prestations du système de santé, audelà<br />

des efforts de sensibilisation qui doivent encore<br />

être menés dans les communautés’’.<br />

Seini Seydou Zakaria<br />

Page 26<br />

15 Mars 2013 <strong>Sahel</strong> <strong>Dimanche</strong><br />

l Ado Youssouf/ ONEP<br />

l Ado Youssouf/ ONEP

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