Bruit de choses heurtées - Cégep du Vieux Montréal

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Cornard Yasmine Kaddouri « Il ne faut jamais confiance aux femmes. Elles sont retorses, artificieuses et dépravées. Elles excellent toutes sans exception dans l’art de l’hypocrisie. Elles se plaisent à séduire et à se jouer des hommes. Lorsqu’elles en tiennent un, elles donnent l’impression d’être sensibles et aimantes. C’est faux. Monstres, elles ont le don de manipulation et s’enorgueillissent de l’attention qu’elles reçoivent. Elles vous ensorcellent de leurs charmes et vous font croire qu’elles vous aiment, mais vous ne comptez pas. Elles se jouent si bien des hommes; elles savent si bien feindre! Vipères abjectes! Âmes cruelles! Créatures traîtresses! Je les tiens en horreur. Un jour, j’en ai aimé une. Elle était magnifique. Une créature que je ne suis jamais arrivé à saisir tout à fait. Ses bras me faisaient goûter un bonheur illusoire. Son nom m’enivrait et me faisait frissonner, sa peau me rendait fou. Elle était ma faiblesse, ma lâcheté. Elle avait fait de moi son esclave bienheureux. Mais elle était femme : le vice était sa nature profonde. Aussitôt que je la quittais, j’étais torturé à l’idée qu’elle puisse aller en rejoindre un autre… Ses mots étaient vides et son cœur, toujours insensible à mon amour exaspéré. Elle n’a jamais été mienne. Le soir de sa mort, elle portait cette robe bleue qui lui seyait comme à une sirène. Elle s’était pavanée dedans toute la journée, attirant des centaines d’yeux sur son corps adorable. Sa beauté m’était une insulte. De l’endroit où je m’étais embusqué, j’ai vu cet homme la suivre et entrer chez elle par le chemin qu’elle aurait dû interdire à tout autre qu’à moi. Je l’ai vue jeter un regard par-dessus son épaule et l’entraîner à sa suite. Durant cette fraction de seconde, j’ai cru saisir un éclair de peur dans l’azur de ses yeux. Ou peutêtre était-ce simplement de plaisir à l’idée de ce qu’elle allait faire. L’homme parti, je suis monté. Elle était nue, comme pour me narguer davantage. Je lui ai remis sa robe, pour qu’elle soit reconnue. » 26
Corne Corinne Lajoie Nous sommes enfermés dans cette chambre depuis plusieurs semaines. Elle est vide, j’ai déplacé les tables, les chaises. Je fais les cent pas. Chaque jour je me réveille et tu dors sur le sol près de moi. Tu te réveilles, je te regarde. Tu ne peux ni lire le journal, ni boire un café, ni aller à la piscine. Je ne pleure pas quand je dors et je dors souvent, presque toute la journée. Des heures passées sans miroir, sans te dire que je suis encore perdue, sans compter les gouttes qui coulent sur les murs de cette chambre bleue à mesure que le temps passe. Tes mains sur ma peau ne me touchent pas. Elles la trouvent rugueuse et imparfaite sous leurs paumes fatiguées. Je suis comme le muret que l’on couvre de tessons pour empêcher que les oiseaux s’y posent. Mon corps sous tes doigts me rappelle que je suis dure et souvent triste. Chaque jour la chambre semble plus petite. Tes mains sur ma peau ne me touchent plus. 27
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