6 février 1849, numéro 37 - Archives municipales de Nantes
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Mardi 6 -Février <strong>1849</strong> Journal fondé le 24 <strong>février</strong> 1848. 2° Année.—N°57.<br />
coq HÉRON 3 -En province, chez tous les libraires et directeurs <strong>de</strong>s Messageries Pour l'Allemagne, chez M. Alexandre, à Strasbourg ? et pour Londres, chez M, Jeffs, Foreign-Bookseller, Burlington-Arca<strong>de</strong>;<br />
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Parie, & Février.<br />
SÉANCE, DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE.<br />
REJET DE LA PROPOSITION D'ENQUÊTE.<br />
Le ministère a eu aujourd'hui les dés en sa faveur. La transaction<br />
proposée par le général Oudinot a été accueillie avec empressement<br />
par les henriquinquistes, les orléanistes et les bonapartistes<br />
qui balancent en nombre, dans le sein <strong>de</strong> l'Assemblée<br />
nationale, lès hommes sincèrement dévoués aux institutions républicaines,<br />
Il est vrai que l'appoint victorieux a été fourni par<br />
ce petit groupe <strong>de</strong> déserteurs que la révolution <strong>de</strong> <strong>février</strong> avait<br />
fait passer <strong>de</strong> leur boutique <strong>de</strong> libraire aux fonctions éminentes<br />
<strong>de</strong> l'Etat, et qui ne trouveront le gouvernement républicain supportable<br />
qu'autant qu'il leur rendra leur portefeuille <strong>de</strong> ministre<br />
ou leurs galons d'ambassa<strong>de</strong>ur. Tristes recrues que nous abandonnons<br />
volontiers et sans retour à nos adversaires politiques<br />
Grâce à cette coalition monstrueuse <strong>de</strong> partis qui s'unissent<br />
tout en se détestant et se méprisant, grâce à l'appui <strong>de</strong> ces renégats,<br />
le ministère compte aujourd'hui une majorité <strong>de</strong> 15 voix.<br />
Il a bien fallu quelques sacrifices pour obtenir cette triomphante<br />
majorité? M. Léon Faucher; a mis une sourdine à son aigre<br />
chanterelle ; M. Odilon Barrot lui-même a tant soit peu voilé sa<br />
majesté habituelle et chassé les nuages qui enveloppent sa tête<br />
chenue.<br />
C'était M. Molé qui, Samedi, avait conseillé à M. Je prési<strong>de</strong>nt<br />
du conseil <strong>de</strong> noyer l'inci<strong>de</strong>nt du bulletin injurieux dans une<br />
gran<strong>de</strong> question constitutionnelle; c'était sous ce souffle inspirateur<br />
que M. Barrot avait développé cette doctrine <strong>de</strong> la perpétuité<br />
ministérielle et <strong>de</strong> la constitutionnàlité dès ministres <strong>de</strong> minorité<br />
sous le rêgime-républicain.<br />
Aujourd'hui M. Dupont (<strong>de</strong> Bussac) a fait justice <strong>de</strong> cette insolente<br />
hérésie, et a rappelé à M. Odilon Barrot, membre <strong>de</strong> la<br />
commission <strong>de</strong> Constitution, les principes qu'il avait contribué<br />
à faire prévaloir dans la discussion relativement à l'étendue du<br />
pouvoir exécutif.<br />
L'orateur a cité le texte même du rapport <strong>de</strong> la Constitution,<br />
qui est. le véritable exposé <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong> cette gran<strong>de</strong> œuvre. Là<br />
n'a pu s'élever aucun doute sur la souveraineté du pouvoir parlementaire,<br />
dont le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République n'est et ne peut<br />
être que l'instrument, l'agent direct et obéissant; l'idée du conflit<br />
n'est venue à personne ; car la responsabilité existe pour ce<br />
premier <strong>de</strong>s fonctionnaires, dans le cas seulement d'inexécution<br />
ou <strong>de</strong> mauvaise exécution <strong>de</strong>s décrets et <strong>de</strong>s ordres <strong>de</strong><br />
l'Assemblée législative ; et cette responsabilité existe pour lui<br />
comme pour tous les autres fonctionnaires publics.<br />
Mais le ministère, qui tenait tant, samedi <strong>de</strong>rnier, à débattre<br />
cette question sérieuse si impru<strong>de</strong>mment soulevée par lui, s'est<br />
bien gardé <strong>de</strong> suivre l'orateur sur ce terrain dangereux; il s'est<br />
fait simple et humble <strong>de</strong>vant cette majorité qu'il voulait recons-<br />
Feuilleton <strong>de</strong> LA RÉPUBLIQUE du 6 <strong>février</strong>.<br />
tituer à tout prix, tant il se sentait incapable <strong>de</strong> soutenir cette<br />
misérable brava<strong>de</strong> dont le Moniteur d'hier s'est rendu l'écho.<br />
M. Léon Faucher 'est venu faire les plus belles protestations <strong>de</strong><br />
respect et dé dévoûment à l'Assemblée « La note du Moniteur<br />
n'a-pas le sens qu'on a voulu y attacher; il s'est dit <strong>de</strong>; terribles<br />
choses dans les clubs ; la société a couru lundi <strong>de</strong>rnier un immense<br />
danger ; les blouses se sont promenées dans tout Paris, et<br />
sont venues se briser à la Ma<strong>de</strong>leine <strong>de</strong>vant un mur d'airain.<br />
Le complot qui s'était tramé à Paris avait <strong>de</strong>s ramifications<br />
dans les départements. Il n'a échoué que grâce à la vigilance et<br />
au courage du ministère, qui a <strong>de</strong>s droits à la reconnaissance<br />
publique. »<br />
Tel est à peu près le résume <strong>de</strong> la harangue Faucher,<br />
Quant au bulletin offensant pour l'Assemblée, il a été désavoué<br />
<strong>de</strong> rechef et en réitérant; bien plus, M. Barrot a daigné ajouter<br />
<strong>de</strong> sa propre bouche : Non seulement désavoué, mais BLAMÈ.<br />
Nous jurerions bien que cela n'a pas empêché le fameux bulletin<br />
<strong>de</strong> partir ce soir, avec ou sans commentaires, franco et<br />
sous le. cachet du ministre <strong>de</strong> l'intérieur.<br />
L'entrepreneur privilégié <strong>de</strong>s confi<strong>de</strong>nces ministérielles dit,<br />
comme ce cocher <strong>de</strong> fiacre à qui le parlement <strong>de</strong> Paris avait infligé<br />
un blâme : « Cela ne m'empêchera pas <strong>de</strong> rouler. »<br />
L'urgence <strong>de</strong> l'enquête n'a pas été admise ; mais, comme l'a<br />
dit M. Louis Perrée, elle se fait tous les jours dans la presse et<br />
à la tribune même. Toutes ces infâmes calomnie? que vous<br />
adressez aux républicains et aux socialistes, vous êtes dans<br />
l'impuissance <strong>de</strong> les prouver. L'autre jour, vous avez fait arrêter,<br />
un colonel <strong>de</strong> là gar<strong>de</strong> nationale, et le brave Guinard<br />
vous a : lancé du haut <strong>de</strong> la tribune le défi le plus solennel<br />
d'articuler contre ce digne citoyen aucune raison sérieuse<br />
pour justifier cet attentat à la liberté individuelle. La justice<br />
a donné raison à ce défi. Il est prouvé aujourd'hui que vous<br />
âviez menti et calomnié ; il en sera dé. même pour toutes les<br />
odieuses accusations que vous avez formulées. Il n'en restera<br />
rien, que le souvenir <strong>de</strong>s honteuses manœuvres que vous avez<br />
tentées pour exercer sur l'Assemblée une pression favorable<br />
à vos intérêts ; comme cet honnête chevalier <strong>de</strong>s temps monarchiques<br />
qui faisait soutenir' ses dés pipés par une compagnie<br />
<strong>de</strong> lansquenets.<br />
Du reste, nous sommes obligés <strong>de</strong> le dire, à part la question<br />
constitutionnelle <strong>de</strong> l'étendue du pouvoir du prési<strong>de</strong>nt, traitée<br />
d'une manière virtuelle par M. Dupont (<strong>de</strong> Bussac), la discussion<br />
s'est traînée dans la mesquinerie <strong>de</strong> petits arguments, <strong>de</strong> petites<br />
considérations.<br />
La priorité <strong>de</strong>mandée pour l'ordre du jour motivé <strong>de</strong> M. Oudinot<br />
sur celui <strong>de</strong> M. Perrée, a été obtenue au scrutin secret par<br />
une majorité <strong>de</strong> 435 boules blanches contre 403 noires.<br />
L'ordre du jour lui-même a été adopté au scrutin <strong>de</strong> division<br />
par 481 voix contre 339.<br />
Glorieuse victoire pour la coalition monarchique!<br />
Ce succès a été acheté au prix d'un échec préalable dans les<br />
bureaux, car M. Heckeren, le candidat, ministériel, avait été<br />
battu par M. Perrée pour la sixième place.<strong>de</strong> secrétaire.<br />
Lesvice-prési<strong>de</strong>ns ont été élus dans l'ordre suivant: MM.<br />
Goudchaux, Lamoricière, Havin, Corbon, Billault et Be<strong>de</strong>âu. Ce<br />
<strong>de</strong>rnier ne l'a emporté que <strong>de</strong> quelques voix sur M. Grévy, le<br />
rapporteur <strong>de</strong> la commission qui avait conclu au rejet <strong>de</strong> la proposition<br />
Râteau dont la secon<strong>de</strong> lecture est à l'ordre- du jour <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>main mardi. ' M - :: «<br />
La mise en liberté du Colonel Forestier a démontré jusqu'à lévi<strong>de</strong>nce<br />
le but <strong>de</strong>s arrestations <strong>de</strong>s 29 et 30 janvier. Nous ne<br />
comprenons donc pas qu'on prolonge la détention <strong>de</strong> M. d'Alton-<br />
Shée et <strong>de</strong>s autres citoyens arrêtés avec lui et sans autres motifs<br />
que ceux qui ont dicté les mesures prises contre lui; et contre le<br />
colonel Forestier. L'arbitraire n'est déjà que, trop intolérable ;<br />
faut-il l'aggraver par l'abus? Ce. n'est pas une raison, parce<br />
qu'un gouvernement est perdu dans l'opinion publique, pour<br />
qu'il la brave encore parla violation <strong>de</strong> toutes les lois, et surtout<br />
<strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> la justice et <strong>de</strong> l'humanité.<br />
Seuls, les journaux réactionnaires enregistrent en une ligne et<br />
dans un coin reculé <strong>de</strong> leurs colonnes la mise en liberté du colonel<br />
<strong>de</strong> la 6 e légion. Nous avions raison hier <strong>de</strong> supposer leur dépit.<br />
Les autres journaux voient comme nous dans cette mise en liberté<br />
la preuve <strong>de</strong> l'indigne action du pouvoir dans la journée du<br />
29. Le National publie divers documens que nous reproduisons.<br />
«Le 30 janvier, le colonel Forestier recevait la lettre suivante<br />
signée par plus <strong>de</strong> trois cents représentans du peuple :<br />
» AU COLONEL FORESTIER»<br />
» Témoignage <strong>de</strong> profon<strong>de</strong> sympathie pour l'offre patriotique qu'il a faite<br />
<strong>de</strong> défendre l'Assemblée nationale.<br />
« Et l'honorable chef <strong>de</strong> la 6 e légion taisait la réponse suivante,<br />
que nous donnons à méditer à 'ses calomniateurs :<br />
« Citoyens représentans,<br />
» Je vous rends grâces <strong>de</strong> la sympathie profon<strong>de</strong> que vous a fait éprouver<br />
mon .offre à l'Assemblée nationale <strong>de</strong> la défendre contre ses ennemis<br />
quels qu'ils fussent.<br />
» En lisant vos généreuses signatures, je bénis ma prison.<br />
» Je n'aurais jamais cru recueillir <strong>de</strong> l'accomplissement <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>voirs<br />
une récompense aussi noble, et qui fût aussi douce à mon cœur.<br />
» Dans cette récompense est un titre <strong>de</strong> gloire trop brillant pour moi,<br />
et je ne l'accepte que pour en faire hommage à la 6 e légion, qui m'a<br />
nommé son chef.<br />
» A la 6° légion qui marchera toujours, avec ses démocratiques<br />
sœur à la tête dé l'armée pour le maintien <strong>de</strong> l'ordre et <strong>de</strong> nos institutions<br />
républicaines.<br />
» A la 6°. légion , qui comprend que <strong>de</strong> nos institutions dépen<strong>de</strong>nt le<br />
calme et la sécurité, la prospérité du commerce et <strong>de</strong> l'industrie, et qui<br />
comprend aussi que la République seule peut fermer le cerclé d'e nos révolutions.<br />
» (Signé), FORESTIER<br />
» Colonel <strong>de</strong> la 6® légion,.» ,<br />
la censure ! De quel crime s'est donc rendu coupable l'art dramatique tive. Pourquoi ne pas penser au contraire qu'il <strong>de</strong>meurera dans celte<br />
rendant cette épreuve <strong>de</strong> douze mois qu'il vient <strong>de</strong> traverser? Quel acte réserve sévère qui est le caractère distinctif <strong>de</strong> l'art, et que pour le<br />
blâmable a motivé cette soudaine explosion <strong>de</strong> violence? Qu'a-il fait maintenir dans cette voie d'honnêté et <strong>de</strong> moralité, il suffira <strong>de</strong> -la cri-<br />
pour mériter tant <strong>de</strong> haine, tant d'aveugle acharnement? Quelle conspitique vigilante <strong>de</strong> la presse et <strong>de</strong> la critique plus vigilante encore, plus<br />
ration a-t-il fomentée? Nous cherchons, et nous cherchons vainement. décisive, plus efficace du public, qui a, lui, plus que toutes les censurés<br />
THÉÂTRES.<br />
Nous le disons bien haut, et c'est notre droit, jamais le théâtre n'a fait du mon<strong>de</strong>, l'instinct <strong>de</strong> tous les sentimens élèves, <strong>de</strong> toutes les délica-<br />
<strong>de</strong> cette liberté conquise en <strong>février</strong> un plus digne usage ; jamais il n'a été tesses, du vrai et du beau ? ...<br />
La commission plus <strong>de</strong>s contenu, théâtres. plus — sobre La censure. ; jamais — L'abolition il n'a offert <strong>de</strong>s !e privilèges. spectacle — <strong>de</strong> l'art em-<br />
Au temps où nous vivons, la censure est une iniquité. C'est un outrage<br />
I THEATRE-ITALIEN : Nabuco. — THÉÂTRE DU GYMNASE : Le Dernier ployé à soulever <strong>de</strong>s passions mauvaises, à déchaîner <strong>de</strong>s instincts dan-<br />
à l'art, en ce qu'elle suppose que l'art peut pactiser avec l'immoralité ;<br />
<strong>de</strong>s Rochegune, comédie-vau<strong>de</strong>ville en <strong>de</strong>ux actes, <strong>de</strong> M. Dennery. — gereux et coupables. VARIÉTÉS : La Pension alimentaire, comédie-vau<strong>de</strong>ville en <strong>de</strong>ux actes, <strong>de</strong><br />
c'est un outrage à la raison publique," et) ce qu'elle implique que cette<br />
M. Rosier. — THÉÂTRE MONTANSIER: Les Manchettes d'un vilain, vau<strong>de</strong>veville<br />
en <strong>de</strong>ux actes.—Le Christophe Colomb <strong>de</strong> Félicien David.—Concerts. Si <strong>de</strong>ux fois dans ce laps <strong>de</strong> temps le théâtre s'est laissé aller à expo- raison publique n'est ni assez droite, ni assez sensée, ni assez forfe pour<br />
ser sur la scène <strong>de</strong>s tableaux licencieux, la presse, au nom <strong>de</strong> la résister aux lascifs entraînemens d'un couplet ou aux brutalités d'une<br />
morale publique outragée., n'a-t-elle pas unanimement rappelé les au- action scénique.<br />
Avions-nous raison.<strong>de</strong> dire que la commission nationale <strong>de</strong>s théâtres ne teurs au respect do l'art et du public; et ce public lui-même, le seul<br />
-pouvait rien, ne ferait rien en vue <strong>de</strong> l'intérêt et <strong>de</strong> la liberté <strong>de</strong>s théâ-<br />
On nous impose la censure, mais on abolit le privilège <strong>de</strong>s théâtres.<br />
et vrai juge que nous admettions, la seule censure que nous reconnaistres?<br />
qu'elle userait son temps en vaines discussions, en délibérations<br />
Compensation est faite. Singulière compensation en effet que celle qui<br />
sions aujourd'hui réelle et possible, ce public n'a-t-il pas fait plus que<br />
interminables; et qu'en fin <strong>de</strong> compte, il ne sortirait <strong>de</strong>s réunions <strong>de</strong> ces<br />
consiste, lorsque <strong>de</strong>ux conditions vitales sont nécessaires à l'art à le<br />
n'aurait jamais fait la censure officielle? n'a-t-il pas protesté par<br />
messieurs rien d'utile et <strong>de</strong> sérieux, si mieux encore il n'en sortait rien<br />
dépouiller <strong>de</strong> l'une et à se faire un mérite <strong>de</strong> lui donner d'autre !. Nous<br />
ses sifflets ? n'a-t-il pas infligé à l'œuvre coupable une peine autrement<br />
<strong>de</strong> nuisible et <strong>de</strong> désastreux? Aujourd'hui le doute n'est plus permis sur<br />
n'acceptons pas ainsi ces transactions qui ont pour but d'acheter une li-<br />
efficace que l'interdiction? L'auteur peut en appeler au public contre<br />
ses intentions, et si elle n'a pas encore émis <strong>de</strong> vole définitif, nous conberté<br />
précieuse ? il est vrai, au prix d'une autre liberté plus précieuse<br />
l'interdiction <strong>de</strong> la censure, mais à qui en appellera-t-il contre le punaissons<br />
par avarice toute sa pensée, et nous savons que l'unanimité <strong>de</strong>s<br />
encore.<br />
voix <strong>de</strong> la commission, moins une, se prononcera pour la censure.<br />
blic lui-même ?<br />
Liberté <strong>de</strong> l'industrie dramatique, liberté <strong>de</strong> la pensée dramatique ces<br />
Et c'est pour la faute d'un vau<strong>de</strong>villiste, pour quelques misérables<br />
Ainsi donc, la censure, c'est-à-dire la compression <strong>de</strong> la pensée, le<br />
<strong>de</strong>ux libertés se tiennent, elles sont indivisibles, et nous ne pouvons les<br />
bâillon appliqué à l'intelligence, voilà tout ce que nous sommes en<br />
couplets repoussés et sifflés par le parterre, que la censure serait ré-<br />
concevoir l'une sans l'autre; les séparer, c'est les annihiler c'est leur<br />
droit, d'attendre <strong>de</strong> ce gouvernement <strong>de</strong>là République dont nous avions<br />
veillée? Tous porteraient la peine d'un seuil L'art tout entier serait<br />
ôter leur raison d'être. L'une est le corps, l'autre est l'âme.<br />
salué l'événement comme celui du gouvernement <strong>de</strong> la libre publicité;<br />
traqué, bâillonné ; la pensée serait couchée sur le lit <strong>de</strong> Procuste ; la poé-<br />
la censure,, ni plus ni moins que si nous étions encore sous les serres<br />
sie serait morcelèe, inventoriée, passée au crible <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> noire du<br />
monarchiques ! En vain le temps marche portant son fanal <strong>de</strong>vant les ministère <strong>de</strong> l'intérieur, parce qu'en un jour <strong>de</strong> débauche littéraire il<br />
hommes et les gouvernemens, éclairant <strong>de</strong> sa lumière civilisatrice le serait passé en tête d'un écrivain <strong>de</strong> faire débiter quelques obscénités<br />
gouffre dans lequel ils semblent fatalement se précipiter ; en vain les ré- par une <strong>de</strong>mi-douzaine <strong>de</strong> jeunes filles très légèrement vêtues I Est-ce<br />
volutions se succè<strong>de</strong>nt sapant les préjugés, déracinant les abus : la' cen- digne ? est-ce convenable.? est-ce juste ?<br />
sure est toujours là , s'abritant sous le manteau royal ou sous le frac • Les défenseurs <strong>de</strong> !a censure diront peut-être : Quel moyen <strong>de</strong> préve-<br />
•prési<strong>de</strong>ntiel, refusant <strong>de</strong> lâcher prise, s'éternisant dans cette vieille nir. le retour société <strong>de</strong> semblables œuvres, blasée ou d'oeuvres et décrépite pires qui encore n'a plus ? Nous j par résoubresauts,<br />
que <strong>de</strong> sublimes<br />
.instincts <strong>de</strong> ses droits et do ses libertés, sans avoir la force <strong>de</strong> les saisir pondrons d'abord que chaque fois que <strong>de</strong>s œuvres semblables se pré-<br />
complètement et <strong>de</strong> les gar<strong>de</strong>r.<br />
senteront, le public, dans le bon. sens et le mérite <strong>de</strong> qui nous avons<br />
toute confiance, les sifflera, et que nous ne Voyons nul inconvénient<br />
bien au contraire, à ce que la justice soit rendue au théâtre par le public<br />
La censure, toujours la censure. C'est aujourd'hui, comme autrefois,<br />
et par lui 'seul. Nous répondrons ensuite que le gouvernement, lors<br />
la gran<strong>de</strong> raison d'Etat. Sans elle pas <strong>de</strong> gouvernement possible. Saris la<br />
même qu'il n'y aurait pas <strong>de</strong> censure, ne serait pas tellement désarmé<br />
censure, la morale publique est chaque jour exposée à rougir; sans la censure, la sûreté <strong>de</strong> l'Etat est compromise. Que la monarchie, pour im<br />
poser un frein à l'opinion, ait hasardé ces hypocrisies, nous le compre-<br />
que s'il venait à se produire une <strong>de</strong> ces œuvres dont les tendances imnons<br />
presque; mais que la République s'en fasse un bouclier <strong>de</strong> défense,<br />
morales et monstrueuses parussent une conspiration contre le <strong>de</strong>voir<br />
c'est là ce que nous né pouvons plus concevoir ; c'est là une <strong>de</strong>s tristesses<br />
et la société, il ne pût la déférer aux tribunaux comme il ferait d'une<br />
navrantes <strong>de</strong> notre époque, si fécon<strong>de</strong> en amertumes et en désillusions.<br />
action coupable ou d'un mauvais livre.<br />
Mais pourquoi se tourmenter dans <strong>de</strong>s hypothèses dont rien jusqu'à ce<br />
Comment t c'est après un an d'une complète liberté conquise par la ré- jour n'est venu démontrer la réalisation possible ? pourquoi prêter à l'art<br />
volution au profit <strong>de</strong>» théâtres, qu'on vient proposer le rétablissement <strong>de</strong> dramatique <strong>de</strong>s tendances mauvaises que rien jusqu'à ce jour ne mo-<br />
: due fera le<br />
corps? sans l'âme, c'est-à-dire sans la vie? Qu'importe que l'industrie<br />
soit affranchie du privilège, si la pensée reste tributaire et asservie ? que<br />
; la concurrence soit organisée sur la plus large échelle, que le nombre<br />
<strong>de</strong>s théâtres soit illimité, si les œuvres scéniques ne peuvent circuler sans<br />
le laisser-passer du ministère? Aussi, tout entier à la douleur que nous<br />
cause, la perle <strong>de</strong> la liberté qui s'en va, ne nous reste-t-il aucun sourire<br />
• pour saluer la liberté qui nous arrive. . . . •<br />
Le théâtre est une publicité, comme la presse. C'est un <strong>de</strong>s moyens<br />
, les plus larges <strong>de</strong> communiquer la pensée humaine, et à coup sûr c'est<br />
le moyen le plus sympathique, en ce qu'il s'adresse tout à la fois<br />
; tient à la même heure, dans le même lieu, <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> spectateurs,<br />
sous le charme et la pression <strong>de</strong>s mêmes émotions, <strong>de</strong> la même pénsée,<br />
du même enthousiasme. Le théâtre est donc une publicité qui convient<br />
surtout au peuple, qui s'adresse à son intelligence, à" ses instincts, et<br />
a qu'il faut faite servir à son instruction et à sa moralisation. Nous avons<br />
- <strong>de</strong>mandé pour la presse la liberté <strong>de</strong> se produire sans entravés ; nous <strong>de</strong>mandons<br />
pour le théâtre la même liberté, les mêmes droits. Le théâtre,<br />
a pour être populaire, pour accomplir son œuvre d'instruction et <strong>de</strong> moralisation,<br />
pour être vrai et attachant, doit être libre : libre dit privilège qui<br />
met l'art dramatique à la merci <strong>de</strong>s entrepreneurs patentés du gouverneaux;
» Le len<strong>de</strong>main c'était un nombre très considérable d'officiers<br />
<strong>de</strong> tous gra<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s nationaux qui lui écrivaient en ces<br />
te.'**<br />
/ « Paris, 31 janvier.<br />
» Colonel,<br />
» Les soussignés, officiers, sous-officiers et gar<strong>de</strong>s nationaux <strong>de</strong> la<br />
6 e légion, ont appris avec douleur la mesure incompréhensible qui est<br />
venue vous frapper dans l'exercice <strong>de</strong> Vos fonctions au moment, où. vous<br />
accomplissiez le mandat qu'ils vous ont confié, au-moment où vous preniez<br />
toutes les mesures propres à assurer l'ordre, la tranquillité et le<br />
maintien <strong>de</strong> nos institutions républicaines, à la défense <strong>de</strong>squelles ils vous<br />
ont vu constamment consacrer toute votre énergie.<br />
» Ils vous offrent l'expression <strong>de</strong> leurs plus profon<strong>de</strong>s sympathies, et<br />
vous prient <strong>de</strong> compter sur leur entier dévouement. »<br />
La mesure prise par le ministère contre M. Forestier a non<br />
seulement été inique, arbitraire, mais encore souverainement<br />
maladroite et hostile au prési<strong>de</strong>nt même <strong>de</strong> la République dont<br />
M. Barrot prétend si bien servir les intérêts. Cela résulte clairement<br />
<strong>de</strong> la lettre suivante adressée au National:<br />
nous rappelions la journée du 29, et nous savions à quel excès<br />
d'audace se portent les provocateurs. Heureusement le peuple <strong>de</strong><br />
Paris sait maintenant ou sont ses ennemis, et il est resté impassible<br />
et calme : nous l'en félicitons encore. Laissons la réaction<br />
se désespérer <strong>de</strong> l'ordre qui règne dans la rue !<br />
Les chambres du Piémont ont été ouvertes le 1 er lévrier, à<br />
Turin, par le roi, qui a prononcé presqu'à voix basse le discours<br />
suivant:<br />
« Mon cœur est heureux, puisque je me trouve en celte solennelle occasion<br />
au milieu <strong>de</strong> vous, qui représentez si dignement la nation.<br />
» Lorsque le parlement s'est ouvert pour la première fois, notre fortune<br />
était plus mauvaise, mais notre espoir n'était pas moindre. L'espoir<br />
s'est accru dans les hommes <strong>de</strong> cœur, car l'expérience et la constance<br />
dans le malheur s'ajoutent à nos anciens droits.<br />
» Les travaux que vous avez à accomplir dans cette <strong>de</strong>uxième session<br />
sont multiples, variés, dignes <strong>de</strong> vous.<br />
» Nous avons à développer nos institutions intérieures et à les mettre<br />
en harmonie avec le génie et les besoins <strong>de</strong> notre époque, et à poursuivre<br />
ainsi ce but qui <strong>de</strong>vra être accompli par l'assemblée constituante du<br />
royaume <strong>de</strong> la haute Italie.<br />
» Le gouvernement constitutionnel repose sur <strong>de</strong>ux pivots : le roi et<br />
le peuple. Le premier représente l'unité et la force ; le second soutient<br />
la liberté et le progrès <strong>de</strong> la nation.<br />
-» J'ai rempli et je remplis mon rôle en adoptant pour mes peuples<br />
<strong>de</strong> libres institutions, en donnant les places et les honneurs au mérite<br />
et non à la fortune, eu composant ma cour avec l'élite <strong>de</strong>s citoyens, en<br />
dévouant ma vie et celle <strong>de</strong> mes enfants au salut et à l'indépendance <strong>de</strong><br />
la patrie.<br />
» Vous m'avez dignement aidé dans mon entreprise difficile. Conti-,<br />
nuez-moi ainsi votre concours et soyez convaincus que ce n'est que <strong>de</strong> l'union<br />
intime <strong>de</strong> nos efforts que peuvent naître le bonheur et le salut commun.<br />
» 'La sympathie et l'estime <strong>de</strong>s nations civilisées <strong>de</strong> l'Europe, et surtout<br />
<strong>de</strong>s peuples qui tiennent à nous par <strong>de</strong>s liens communs <strong>de</strong> nationalité,<br />
nous suivront et nous ai<strong>de</strong>ront dans notre noble but. Nous avons<br />
fait notre possible pour resserrer ces liens fraternels, et si les <strong>de</strong>rniers<br />
événeménts <strong>de</strong> l'Italie centrale ont suspendu l'effet <strong>de</strong> nos démarches,<br />
BOUS avons la confiance qu'ils ne pourront l'arrêter plus longtemps. La<br />
confédération <strong>de</strong>s princes et <strong>de</strong>s peuples italiens est un <strong>de</strong>s vœux les<br />
plus chers <strong>de</strong> notre cœur, et nous emploierons tous nos efforts pour<br />
qu'elle se fasse promptement.<br />
« Mes ministres vous diront plus, spécialement quelle politique suivra<br />
le gouvernement dans les questions qui agitent la péninsule, et j'espère<br />
que VOUS la trouverez judicieuse , nationale et généreuse.<br />
» A moi <strong>de</strong> vous entretenir surtout <strong>de</strong> notre armée et <strong>de</strong> notre indépendance,<br />
but suprême <strong>de</strong> nos soins. L'es corps <strong>de</strong> l'armée sont réorganisés,<br />
complétés, florissans, et luttent <strong>de</strong> beauté et <strong>de</strong> vaillance avec<br />
notre flotte. Dans les revues que j'ai passées, j'ai pu voir sur les visages<br />
<strong>de</strong>s; soldats et parleurs applaudissemens combien est gran<strong>de</strong> l'ar<strong>de</strong>ur patriotique<br />
qui les enflamme.<br />
» Tout nous fait espérer que la médiation qui nous est offerte par<br />
<strong>de</strong>ux puissances généreuses et amies aura une prompte fin. Que si notre<br />
confiance était trompée, nous recommencerions la guerre avec le fermé<br />
espoir <strong>de</strong> conquérir la victoire.<br />
» Mais, pour vaincre, il faut à l'armée le concours <strong>de</strong> la nation. Cela<br />
dépend <strong>de</strong> vous ;'Cela dépend surtout <strong>de</strong> l'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces provinces qui<br />
Sont une partie si précieuse <strong>de</strong> notre royaume, et qui tiennent tant à notre<br />
cœur, <strong>de</strong> ces provinces qui joignent aux vertus communes le mérite<br />
<strong>de</strong> là constance et du martyre. Que les sacrifices que vous avez à faire<br />
ne vous soient. pas trop lourds ; car ils ne se prolongeront point, et le<br />
fruit qu'on en retirera sera stable. Joignons la pru<strong>de</strong>nce à l'audace, et<br />
Pousserons sauvés. C'est là mon vœu , c'est là votre rôle ; en le remplissant,<br />
vous aurez suivi l'exemple <strong>de</strong> votre, prince. »<br />
Les élections à l'assemblée constituante italienne sont enfin<br />
terminées, et lès noms sortis <strong>de</strong> l'urne ont tout lieu <strong>de</strong> rassurer<br />
les amis <strong>de</strong> l'indépendance. Voici les noms <strong>de</strong>s douze députés <strong>de</strong><br />
Rome, avec le nombre <strong>de</strong>s suffrages qu'ils ont obtenus. Nous<br />
trouvons utile <strong>de</strong> publier ces détails parce qu'ils donnent un dé-<br />
menti formel aux calomnies <strong>de</strong>s journaux royalistes français sur<br />
la révolution qui s'est accomplie à Rome :<br />
François Sturbinetti, avocat, 16,153 ; 2 e , François Armellini, avocat,<br />
13,174;°3e,le docteur Pierre Sierbini, 11,718; 4 e ,Charles Em. Muzzarelli,<br />
ecclésiastique, ' 11,555 ; 5e, Joseph Galletti, avocat, 11,277 ; 6 e ,<br />
Félix Scifoni, 9,859; 7°, Pompée Campello, 9,317; 8 e ,le professeur l'ascal<br />
<strong>de</strong> Rossi, 7,706 ; 9 e , Alexandre Calandrelli, chef <strong>de</strong> bataillon, 7,697 ;<br />
10, e ; Joseph Gabussi, avocat. 7,095; lie, Livio Mariani, 6,777; 12 e , Charles<br />
Bonaparte (<strong>de</strong> Canino), 6,449<br />
Les élections <strong>de</strong>s provinces sont également toutes démocratiques<br />
ou du moins favorables à la cause <strong>de</strong> l'indépendance nationale.<br />
Florence enverra bientôt ses députés, ainsi que Venise et<br />
la Sicile. Mais en Piémont l'adhésion à la constituante rencontre<br />
une résistance invincible dans le ministère actuel présidé par<br />
l'abbé Gioberti. MM. Bargnani et Brofferio ayant <strong>de</strong>mandé à ce<br />
ministre, au nom du cercle politique dit <strong>de</strong> la Constituante, que<br />
le gouvernement eût à suivre l'exemple <strong>de</strong> la Toscane, en envoyant<br />
<strong>de</strong>s députés à Rome, Gioberti refusa net en disant que<br />
tant qu'il resterait ministre, il refuserait son adhésion à la constituante<br />
convoquée à Rome. C'est là ce fameux libéralisme <strong>de</strong><br />
l'abbé Gioberti dont les royalistes se montraient tant effrayés.<br />
Un conflit sérieux s'était élevé à Bologne, à la date du 27, entre<br />
le général Latour, commandant les mercenaires suisses, et l'autorité<br />
municipale .secondée par le gouvernement et par tous les<br />
bons citoyens.<br />
Le général suisse, sur l'ordre reçu <strong>de</strong> Gaëte, s'apprêtait à partir<br />
avec ses <strong>de</strong>ux mille' hommes pour aller renforcer à Gaëte le<br />
corps d'armée que le roi <strong>de</strong> Naples <strong>de</strong>stine à une expédition contre<br />
Rome. L'énergie <strong>de</strong>s citoyens et du corps municipal força le<br />
général suisse à différer sou départ ; mais, comme il persistait<br />
dans son <strong>de</strong>ssein, il est fort à craindre qu'une collision sanglante<br />
ne s'en soit suivie.<br />
Le parlement <strong>de</strong> Turin a .ouvert sa nouvelle session le 1 er <strong>février</strong>.<br />
Nos correspondances et les journaux que nous recevons <strong>de</strong><br />
l'Allemagne ne nous apprennent rien qui soit digne d'intérêt.<br />
La prise <strong>de</strong> Kossuth, que plusieurs feuilles annonçaient en se<br />
rendant l'écho <strong>de</strong> bruits sans fon<strong>de</strong>ment, n'est pas confirmée.<br />
Tout porte à croire, au contraire, qu'il se prépare à la plus énergique<br />
défense.<br />
Le comité <strong>de</strong> la justice est chargé <strong>de</strong> l'examen d'une proposition pré<br />
santée parle citoyen Lucien Murât, relative à la revendication <strong>de</strong>s biens<br />
<strong>de</strong>s héritiers <strong>de</strong> Joachim Murât. D'après celte proposition, les tribunaux<br />
civils statueront sur les prétentions élevées contre le domaine <strong>de</strong> l'Etat<br />
par les héritiers <strong>de</strong> Joachim Murât, relativement à l'exécution <strong>de</strong>s articles<br />
3 et 4 du traité secret passé à Bayonne, le 15 juillet 1808, entre ce<br />
<strong>de</strong>rnier et l'empereur Napoléon.<br />
La commission nommée pour examiner la proposition <strong>de</strong> M. Astouin<br />
tendant à étendre le privilège qui garantit le salaire <strong>de</strong>s ouvriers a terminé<br />
aujourd'hui ses délibérations; Elle a. choisi pour son rapporteur<br />
M. Bravard-Veyrières, qu'elle a chargé <strong>de</strong> conclure au rejet <strong>de</strong> la proposition<br />
<strong>de</strong> M. Astoin et au maintien <strong>de</strong> la législation actuelle sans<br />
modification.<br />
PRÉSIDENCE DU CITOYEN MARRAST.<br />
Séance du 5 <strong>février</strong>.<br />
A <strong>de</strong>ux heures la séance est ouverte et le procès-verbal adopté.<br />
Nous ne remarquons autour <strong>de</strong> l'Assemblée aucun préparatif militaire.<br />
La physionomie <strong>de</strong> l'Assemblée est fort animée. Presque tous les membres<br />
sont à leurs bancs. Les ministres sont au grand complet.<br />
Des pétitions nombreuses sont déposées pour et contre la dissolution <strong>de</strong> l'Assemblée<br />
nationale.<br />
L'Assemblée adopte au milieu du bruit <strong>de</strong>s conversations particulières <strong>de</strong>s<br />
projets <strong>de</strong> loi d'intérêt local autorisant la commune <strong>de</strong> La Villette (Seine), la<br />
ville <strong>de</strong> Blois, la ville <strong>de</strong> Troyes, la ville <strong>de</strong> Lunéville, la ville <strong>de</strong> Vienne (Isère)<br />
à s'imposer extraordinairement.<br />
Le citoyen Lebreton entre dans la salle, comme dans les jours <strong>de</strong> danger, en<br />
grand uniforme <strong>de</strong> maréchal-<strong>de</strong>-camp. Cet apparat militaire excite une certaine<br />
hilarité.<br />
LE CIT. PRÉSIDENT. Je dois donner connaissance à l'Assemblée du résultat<br />
du scrutin pour l'élection <strong>de</strong>s vice-prési<strong>de</strong>ns et dés secrétaires.<br />
Voici pour les vice-prési<strong>de</strong>ns .<br />
Nombre <strong>de</strong>s votans, 673.<br />
Les citoyens Goudchaux, 506 voix; Lamoricière, 504 ; Havin, 494 ; Corbon,<br />
476; Billault, 419; Be<strong>de</strong>au, 364; Gouin, 327; Guinard, 122; Bixio, 69 ; Vivien,<br />
66 ; Dufaure, 09.<br />
En conséquence, les citoyens Goudchaux, Lamoricière, Havin, Corbon, Billault<br />
et Be<strong>de</strong>au sont proclamés vice-prési<strong>de</strong>ns.<br />
Voici maintenant le résultat du vote pour les secrétaires :<br />
Nombre <strong>de</strong>s votans, 677<br />
Majorité absolue, 339<br />
Le cit. Peupin, 5<strong>37</strong><br />
Le cit. Louis Perrée, 363 (Ah !...)<br />
Les citoyens Peupin et Louis Perrée sont proclamés secrétaires.<br />
LE CIT. PRÉSIDENT. Citoyens représentans, dans votre <strong>de</strong>rnière séance,<br />
dans la discussion sur la question d'urgence pour l'enquête parlementaire, l'or-<br />
pité le mouvement, que nous avons déjoué. Cette circonstance, c'est l'émotion<br />
qui s est élevée dans la gar<strong>de</strong> mobile.<br />
Vous savez qu'une certaine fermentation a eu lieu dans ce corps parce que<br />
le gouvernement, dans un intérêt <strong>de</strong> discipline et d'économie, a cru <strong>de</strong>voir lancer<br />
un arrêté <strong>de</strong> réorganisation. Cet arrêté excluait un certain nombre d'officiers<br />
qui ne comptaient ni parmi les plus capables ni parmi les plus disciplinés. Ces<br />
officiers ont substitué une affaire <strong>de</strong> corps à une affaire personnelle; ils parvinrent<br />
à égarer dans la journée du samedi un assez grand nombre <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s mobiles<br />
qui se rendirent à l'Elysée et à l'état-majer.<br />
Ils s'y présentèrent d'une manière séditieuse. Au même moment un bataillon<br />
<strong>de</strong> la gar<strong>de</strong> mobile se constituait, dans le fort <strong>de</strong> La Briche, en état <strong>de</strong> rébellion<br />
flagrante! (Rumeurs.) En même temps, dans <strong>de</strong>s réunions secrètes on donnait<br />
<strong>de</strong>s ordres, on distribuait <strong>de</strong>s cartouches. Dans le même moment, enfin, on réunissait<br />
quelques-uns <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s mobiles, ou leur donnait <strong>de</strong>s encouragemens<br />
et un mot d'ordre !<br />
C'est dans ces circonstances que les sociétés secrètes crurent le moment favorable<br />
pour agir. Aussi, dès le dimanche matin, on vit dans les rues une procession<br />
interminable <strong>de</strong> faux ouvriers ; car <strong>de</strong> bons ouvriers ne font pas d'émeutes!...<br />
Quelques uns portaient le signe distinctif <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> barrica<strong>de</strong> ! Cette<br />
foule reflua sur le boulevard !<br />
EH même temps, <strong>de</strong>ux ou trois points principaux étaient occupés... Voilà la<br />
Stratégie <strong>de</strong> la révolte !<br />
Mais quand ces ban<strong>de</strong>s se dirigèrent vers là Ma<strong>de</strong>leine, ils trouvèrent là un<br />
rempart d'airain. La répression aurait pu être terrible et efficace. (Mouvement )<br />
Devant cet obstacle, la révolte recula. La journée se termina sans aucune effusion<br />
<strong>de</strong> sang.<br />
Mais tout n'était pas fini ! Tant qu'un pouvoir trouve en face <strong>de</strong> lui le pouvoir<br />
rival <strong>de</strong>s associations, il éprouve le besoin <strong>de</strong> se défendre.<br />
Dans cette journée, et dans les suivantes, il s'est produit <strong>de</strong>s faits qui portaient<br />
atteinte à l'autorité légitime. J'ai à eu à faire procé<strong>de</strong>r à une arrestation<br />
pénible, mais nécessaire. (Rires.) Celle du colonel <strong>de</strong> la 6e légion, lorsque le succès<br />
<strong>de</strong> la journée n'était pas encore assuré. (Bruit.)<br />
Le gouvernement fut prévenu qu'il y avait <strong>de</strong> l'agitation dans la 6e légion. on<br />
lui rapporta que <strong>de</strong>s propos Offensans pour le prési<strong>de</strong>nt dé la République, pour<br />
les agens <strong>de</strong> l'autorité, s'y tenaient hautement. Un soupçon <strong>de</strong> trahison était mis<br />
en circulation par le chef <strong>de</strong> là légion. Il y avait péril à cette heure-là ; on pouvait<br />
entraîner une partie <strong>de</strong> la force publique dans un mouvement avec une apparence<br />
légale. Le gouvernement dut aviser, afin d'empêcher qu'on n'égarât <strong>de</strong><br />
hors citoyens.<br />
Voilà le motif <strong>de</strong> l'arrestation du colonel Forestier. Lé fait à été soumis à la<br />
justice. Elle a prononcé. Nous nous inclinons <strong>de</strong>vant son arrêt. (Longue rumeur.)<br />
A GAUCHE. Finissez-en donc.<br />
dre du jour pur et simple ayant été rejeté, l'Assemblée doit se prononcer sur<br />
l'ordre du jour motivé. Il y en a <strong>de</strong>ux : le premier, du citoyen Louis Perrée,<br />
qui est ainsi conçu : « Les tendances du ministère paraissant <strong>de</strong>voir créer <strong>de</strong>s<br />
dangers à la République, l'Assemblée passe à l'ordre du jour. » (Très bien !,<br />
Voici un second ordre du jour du général Oudinot : « L'Assemblée nationale<br />
adopte les conclusions <strong>de</strong> la commission, le bulletin offensant pour l'Assemblée<br />
ayant été complètement désavoué par le ministère. » (Oh! oh ! — Longue interruption.)<br />
LE CIT. LÉON FAUCHER, ministre <strong>de</strong> l'intérieur. Citoyens représentais.,<br />
l'ordre du jour proposé par le général Oudinot me paraissant circonscrire le débat<br />
dans un point, je viens donner quelques nouvelles explications.<br />
Je commence par déclarer à l'Assemblée que la note publiée par le Moniteur<br />
n'a pas été également comprise par tout le mon<strong>de</strong>. (Oh! oh!) Quelques personnes<br />
ont pu y voir ce qui est hors <strong>de</strong> notre pensée, hors <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>voirs<br />
: un défi jeté à l'Assemblée nationale.<br />
Cette note avait pour 'but <strong>de</strong> rassurer le pays dans un moment où la tranquillité<br />
publique était menacée, et une crise ministérielle ne pouvait qu'augmenter<br />
le danger, indépendamment <strong>de</strong> nos personnes. Voilà la portée <strong>de</strong> cette note:<br />
elle signifie que tant que M. le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République nous continuera<br />
sa confiance, nous croirons <strong>de</strong>voir rester à notre poste.<br />
Encore quelques mots sur un inci<strong>de</strong>nt qui a été introduit dans la discussion,<br />
sans que le gouvernement en ait été prévenu. Je veux parler <strong>de</strong> ce bulletin<br />
dont on a fait <strong>de</strong>s citations tronquées. On y a vu <strong>de</strong>s offenses pour l'Assemblée.<br />
Le gouvernement est étranger à ce bulletin, il en désavoue l'intention et les paroles.<br />
Le ministère <strong>de</strong> l'intérieur n'a pris encore aucun parti sur cette correspondance.<br />
A la séance <strong>de</strong> samedi j'ai consulté mon prédécesseur, M. Dufaure. Je me réserve<br />
<strong>de</strong> prononcer sur cette correspondance qui était envoyée par mes prédécesseurs<br />
sous <strong>de</strong>s enveloppes du ministère confiées à cette administration particulière.<br />
J'ignorais comment cela se faisait, je l'ignorais samedi encore ; j'ai tout connu<br />
par mes prédécesseurs. Mais, averti par l'inci<strong>de</strong>nti; je déclare qu'en réservant le<br />
parti à prendre, j'exclurai toute espèce d'opinion <strong>de</strong> ces bulletins.<br />
Je n'ai pas besoin <strong>de</strong> dire à l'Assemblée que nous ne voulons rien enlever au<br />
respect que les populations lui doivent ; nous regar<strong>de</strong>rions comme un grand malheur<br />
que ce respect fût diminué.<br />
Le gouvernement est convaincu que les pouvoirs doivent se respecter mutuellement.<br />
Oui, le dangereux serait <strong>de</strong> signaler l'Assemblée aux populations comme<br />
contraire à l'ordre.<br />
Il ne faut pas que l'élection nouvelle fasse une révolution ou une contre-révolution.<br />
Une proposition d'enquête a été déposée <strong>de</strong>vant vous ; la commission a<br />
conclu au rejet <strong>de</strong> l'enquête. Le rapport a été présenté sans que le gouvernement<br />
ait été entendu. Le gouvernement croit <strong>de</strong>voir donner quelques détails. (Ecoutez<br />
!)<br />
Lorsque nous avons eu l'honneur <strong>de</strong> déposer une loi contre les clubs,<br />
vous avons signalé les dangers permanens qu'entraîne l'existence <strong>de</strong> ces foyers<br />
d'agitation. Comme à notre avis tes clubs sont le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> la situation<br />
je vais donner quelques documens à l'Assemblée.<br />
Voici citoyens, quelques extraits <strong>de</strong>s procès-verbaux <strong>de</strong>s clubs, pour vous fixer<br />
sur ce qui se passe dans les séances <strong>de</strong> ceux qui se tiennent à Paris. Je parlerai<br />
aussi <strong>de</strong> la province ; car on a eu tort <strong>de</strong> restreindre la question à ce qui se pas<br />
se dans la capitale. Les dangers peuvent naître sur tous les points <strong>de</strong> la France.<br />
Je puis dire que dans la seule ville <strong>de</strong> Lyon il existe, à l'heure qu'il est, cent<br />
trente-<strong>de</strong>ux clubs.<br />
Je puis diviser les questions qui les occupent en <strong>de</strong>ux catégories : les attaques<br />
à la propriété et les menaces à l'ordre. Par exemple, au club Roisin, on a<br />
dit : « On doit partager la propriété comme les rayons du soleil, sinon la propriété<br />
est un vol !...» Au club <strong>de</strong> la Reine-Blanche, on disait : « Tout homme, en<br />
venant au mon<strong>de</strong>, a le droit <strong>de</strong> propriété ; il a donc droit à un partage.»<br />
Puis les éloges exagérés du socialisme. Dans un autre club du boulevard du<br />
Temple, un orateur s'écriait : « A l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s ançiennes lois, on s'empare dé la<br />
propriété. Elle rési<strong>de</strong> dans un petit nombre <strong>de</strong> mains. Donc, la propriété c'est<br />
le vol 1 » Un <strong>de</strong>s théoriciens du club entrait dans <strong>de</strong> plus grands développemens,<br />
et disait en finissant : « Si le peuple n'a pas le droit au travail, il a le<br />
droit <strong>de</strong> prendre un fusil pour se procurer sa nourriture. »<br />
Dans le club <strong>de</strong> Ménilmontant, on disait : « On appelle les grands révolutionnaires<br />
<strong>de</strong> 93 <strong>de</strong>s septembriseurs et <strong>de</strong>s démolisseurs, ces hommes qui ont su<br />
conquérir la vraie démocratie !»<br />
Au club <strong>de</strong> la barrière Poissonnière, on avait rédigé un projet <strong>de</strong> décret pour<br />
que le milliard donné aux émigrés fût restitué par eux !<br />
UNE voix. Ce serait assez juste.<br />
LE CIT. LÉON FAUCHER. Dans un autre, on disait : « La misère a ses droits;<br />
<strong>de</strong>s hommes no peuvent, pas mourir <strong>de</strong> faim à côté <strong>de</strong>s richesses <strong>de</strong>s autres. Il<br />
faut bien alors qu'on finisse par s'emparer <strong>de</strong> tout ça. »<br />
Je crois que j'en ai fait entendre assez à l'Assemblée.<br />
QUELQUES voix. Non!... Lisez encore !<br />
LE CIT. FAUCHER. Je remercie l'Assemblée <strong>de</strong> sa. patience, (Rires. — OH!)<br />
Dans un autre club, le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>mandait <strong>de</strong>s documens sur les événemens <strong>de</strong><br />
juin à tous les membres pour prouver que les insurgés ne sont pas <strong>de</strong>s assassins.<br />
Un orateur disait : « Nous ne voulons pas d'une Constitution qui ne renferme ni<br />
le droit au travail, ni l'abolition <strong>de</strong> la peine <strong>de</strong> mort !... Mais tout n'est pas fini.<br />
Le peuple a été battu, mais il n'est pas vaincu. Réunissons-nous, et avec une<br />
puissante organisation on peut remuer toute la France. Nous, formons un Etat<br />
dans l'Etat; sachons connaître nos forces. » Enfin voici encore quelques détails<br />
dont je veux épargner la lecture à l'Assemblée. Je dirai seulement les <strong>de</strong>rniers<br />
mots. C'était après l'élection du vice-prési<strong>de</strong>nt dp la République ! L'orateur du<br />
club terminait ainsi : « Ce que nous <strong>de</strong>mandons, nous, démocrates socialistes,<br />
c'est un boulet rouge ! » (Explosions.) Tous les yeux se tournent vers la tribune<br />
du vice-prési<strong>de</strong>nt, qui se trouve sur le premier banc. Il se mêle au rire prolongé<br />
<strong>de</strong> l'Assemblée.<br />
Enfin, je termine par une <strong>de</strong>rnière citation. Aux élections pour le colonel <strong>de</strong><br />
la l re A Dijon, il y a eu une véritable émeute. (Ce n'est pas vrai !) Des conjurés<br />
ont pris l'uniforme <strong>de</strong> dragon... Il y a eu <strong>de</strong>s violences contre là force publique :<br />
un agent a reçu <strong>de</strong>s blessures ! Dans les Pyrénées-Orientales, l'hôtel du préfet<br />
a été forcé ; à Vaucluse, autres désordres !<br />
Dans un autre département on a arboré le bonnet rouge, sjgne détesté <strong>de</strong><br />
nos populations ! Je sais bien que tous ces projets n'ont pas réussi... Pourquoi?<br />
Parce que nous avons averti les préfets..'. (Allons donc !) Parce que tous les<br />
agens <strong>de</strong> l'autorité étaient sur pied en province comme à Paris!<br />
Citoyens, au lieu <strong>de</strong> faire un sujet d'attaque <strong>de</strong> la prévoyance que nous avons<br />
montrée; vous <strong>de</strong>vriez nous en remercier. (Oh ! oh ! -Rires.) Nous avons prouvé<br />
que la société recouvrait le sentiment <strong>de</strong> sa force! Nous nous honorerons toujours<br />
d'avoir réprimé un mouvement formidable. (Vive hilarité.)<br />
LE CIT. FLOCON monte à là tribune.<br />
LE CIT. PRÉSIDENT. Il s'agit' dans' ce moment <strong>de</strong> savoir auquel <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />
ordres du jour on accor<strong>de</strong>ra la priorité.<br />
LE CIT. FLOCON. C'est sur cette question dé priorité que j'avais <strong>de</strong>mandé la<br />
parole ! Mais <strong>de</strong>puis, M. le ministre <strong>de</strong> l'intérieur a élargi la discussion.<br />
Les renseignemens qu'il nous a donnés eussent été mieux placés dans la commission<br />
<strong>de</strong> la loi sur clubs. Il est impossible <strong>de</strong> laisser passer ce qui a été dit sans<br />
réponse. Je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si les documens qu'il nous a donnés on été fournis à la<br />
commission <strong>de</strong>s clubs?<br />
LE CIT. CRÉMIEUX. Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la parole.<br />
LE CIT. FLOCON- Si ces documens ne lui Ont pas été fournis, quel parti en<br />
veut-on tirer ici ? S'ils ont été fournis, ils n'ont pas empêché la commission <strong>de</strong><br />
repousser l'urgence.<br />
Je ferai remarquer d'ailleurs que ces documens sont sans date. Cependant le<br />
gouvernement est averti jour par jour <strong>de</strong> c» qui se passe dans les clubs ; c'est<br />
son <strong>de</strong>voir et il n'y manque pas ; il faudrait savoir si ces fragmens n'ont pas<br />
été déférés aux tribunaux, s'ils n'ont pas entraîné la fermeture <strong>de</strong>s assemblées<br />
ou ils ont été prononcés.<br />
Encore une observation : Une phrase a été prononcée qui a produit une vive<br />
émotion... Mais elle n'a pas été prononcée dans an club... c'était dans une assemblée<br />
électorale ! Et si l'on voulait adopter le principe <strong>de</strong> M. le ministre, il<br />
faudrait interdire la délibération <strong>de</strong>s Comités électoraux!<br />
LE CIT. SAINT-GAUDENS. C'est ce qu'ils veulent!<br />
, LE CIT. FLOCON. Comment ! dans une société un homme prononcera une<br />
opinion et toute l'assemblée en sera responsable ! Du reste, il n'y à rien ici qui<br />
atteigne 1 esprit <strong>de</strong>s clubs.<br />
Enfin j'ai encore un mot à dire sur l'enquête! Si les faits que Vous apportez<br />
sont vrais,_ pourquoi refusez-vous l'enquête à l'Assemblée ? Au lieu d'apporter<br />
<strong>de</strong>s faits ici, portez-les à une commission d'enquête. Si votre politique est bonne,<br />
si vous avez sauvé le pays, présentez-vous <strong>de</strong>vant la commission d'enquête et<br />
vous serez remerciés. (Rires.)<br />
Le ministère a dit qu'il apportait <strong>de</strong>s explications à l'Assemblé.! sur une note<br />
du Moniteur. C'est précisément là-<strong>de</strong>ssus que je voulais appeler l'attention <strong>de</strong><br />
l'Assemblée. Le citoyen ministre prétend que cette note n'a aucun caractère<br />
offensant, que ce n'est pas un défi jeté à l'Assemblée !<br />
Dans la forme <strong>de</strong> cette note il n'y a rien que <strong>de</strong> régulier ; mais quant à la<br />
portée <strong>de</strong> la pensée, c'est autre chose. Il y a eu une autre note, il y a huit jours.<br />
Dans celle-là, le citoyen prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République intervenait directement;<br />
dans celle d'hier, il n'intervient' pas. « Ils ont décidé. » Ce sont les ministres<br />
qui ont décidé.<br />
Il y a huit jours, c'était le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République lui-même qui promettait<br />
un appui ferme et persévérant à ses ministres. Aujourd'hui le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />
la République a disparu. (Exclamations à droite.) Dans la note d'hier, le prési<strong>de</strong>nt<br />
<strong>de</strong> la République a disparu... le ministère seul s'engage.<br />
voix. Pas du tout ! Lisez la note. Il y a : Il a été décidé.<br />
AUTRE voix. Et la réunion a eu lieu à l'Elysée.<br />
LE CIT. FLOCON. Je dis qu'il y a huit jours on faisait dire que le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />
la République promettait son appui tandis qu'hier...<br />
VOIX. A l'Elysée.<br />
AUTRE voix. Lisez le Moniteur : « Il a été décidé! »<br />
LE CIT. LAUSSAT. Le Moniteur<br />
décidé.<br />
porte : Il a été décidé, et non pas ils ont<br />
LE CIT. FLOCON. Un honorable membre me fait observer que le Moniteur<br />
porte : Il a été décidé. .<br />
VOIX. Lisez le Moniteur.<br />
LE CIT. FLOCON. Je lis ces mets : « Il a été décidé, » et on trie reprend pour<br />
dire : «Ils ont décidé. » C'est ici une discussion grammaticale... (Rires.) Ce qu e<br />
je veux établir, c'est que la personne principale est venue dans le conseil. C'est là<br />
le point important. Je ne veux pas abuser <strong>de</strong> la patience <strong>de</strong> l'Assemblée ; mais<br />
je la prie <strong>de</strong> faire attention à la secon<strong>de</strong> note dont les termes varient<br />
A DROITE. La clôture! C'est jugé !<br />
A GAUCHE. C'est indécent d'interrompre ainsi.<br />
LE CIT. FLOCON. Je parie ici du système le plus inconstitutionnel, le plus<br />
impolitique, système soutenu à celle tribune par le chef du cabinet, et vous ne<br />
voulez pas écouter! Je me bornerai à faire remarquer à l'Assemblée la différence<br />
qu'il y a dans le langage tenu dans <strong>de</strong>ux notes différentes, à huit jours <strong>de</strong> distance.<br />
LE CIT. JAMES DEMONTRY monte à la tribune.<br />
A DROITE Assez! la clôture! (Bruit.)<br />
LE CIT. PRESIDENT. Le général Oudinot a présenté un amen<strong>de</strong>ment qu'il<br />
doit développer. Il a la parole.<br />
LE CIT. GÉNÉRAL OUDINOT. L'ordre du jour qui vous-est présenté est fait<br />
légion, on a posé cette question à M. Lucien Murât, candidat : « Dans le dans une pensée <strong>de</strong> réconciliation à laquelle je fais appel.<br />
cas où votre cousin voudrait se faire nommer empereur, consentiriez-vous à lui vais le relire, pour bien préciser le vote :<br />
Cet amen<strong>de</strong>ment, je<br />
plonger un poignard dans le sein? » (Rire général.—Interruption.)<br />
« L'Assemblée nationale, adoptant les conclusions <strong>de</strong> la commission, et attendu<br />
Quelques voix dans l'auditoire expriment un cri d'horreur! On crie : Mais que le bulletin offensant pour l'Assemblée a été désavoué, passa<br />
c'est un assassinat! L'orateur reprend : «Pansez-vous que Charlotte Corday, qui jour. »<br />
à l'ordre du<br />
a tué Marat, soit un assassin; et que celui quia tué Rossi à Rome soit un as- LE CIT. OD. BARROT. Non seulement désavoué , mais blamé! (Ah! ah!)<br />
sassin ? Non ! seulement celui qui a tué Rossi a eu le tort <strong>de</strong> S'être enfui après LE CIT. OUDINOT. J'accepte les paroles du citoyen prési<strong>de</strong>nt du conseil :<br />
une si belle œuvre.» (Mouvemens en sens divers.)<br />
« Non seulement désavoué, mais blâmé: » Comme prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Commission<br />
Dans les clubs, on en était arrivé à préconiser le partage <strong>de</strong>s biens, la révolte, qui <strong>de</strong>vait se prononcer sur la question d'urgence, j'ai eu sous lès yeux tous les<br />
l'assassinat ! Cette situation, lorsqu'elle se prolonge, crée <strong>de</strong>s périls pour la so- documens. J'ai pu apprécier la nécessité où était le ministère d'avoir recours<br />
ciété; lorsqu'on tient ce langage, la révolte n'est pas loin. Nous avons reçu <strong>de</strong>s à <strong>de</strong>s mesures répressives.<br />
renseignemens certains nous apprenant qu'il y avait un complot formidable (Oh ! Nous allions donc voter sur l'urgence, quand M. Louis Perrée a présenté à<br />
oh !) organisé à Paris et dans les départemens !<br />
la traverse un ordre du jour motivé. Examinons la question avec calme et sur-<br />
Nous savions que les sociétés secrètes avaient décidé une prise d'armes ! tout ne sortons pas <strong>de</strong> la discussion première.<br />
Nous savions que <strong>de</strong>s émissaires avaient été envoyés dans les départemens,. Nous sommes tous solidaires, et nous sentons vivement les injures adressées à<br />
afin que le noyau <strong>de</strong>s affiliés pût se tenir prêt à profiter du mouvement pari- l'Assemblée.<br />
sien. En même temps on appelait à Paris un certain nombre d'hommes détermi- Le bulletin reproché au citoyen ministre <strong>de</strong> l'intérieur nous a indignés tous.<br />
nés qui <strong>de</strong>vaient ai<strong>de</strong>r les frères et amis <strong>de</strong> la capitale. Le complot <strong>de</strong>vait éclater Mais le désaveu du ministre ne doit plus laisser <strong>de</strong> doute sur ce point. N'aggra-<br />
au commecement <strong>de</strong> la semaine qui vient <strong>de</strong> s'écouler. Une circonstance a précivons pas la situation par une question ministérielle. Eh! mon Dieu! la conduite du<br />
LE CIT. L. FAUCHER. Ce n'est pas un fait isolé. Les nouvelles que nous avons reçues<br />
régnait dans lés départemens et que sur quelques points elle s'est traduite en<br />
conflits.
ministère n'est pas exempte <strong>de</strong> blâme. Il a commis <strong>de</strong>s fautes, peut-être; mais Le $,9 janvier vous avez déployé un énorme appareil <strong>de</strong> force. Le même jour,<br />
dans <strong>de</strong>s moments difficiles ? Peut-être n'a-t-il pas eu le citoyen ministre <strong>de</strong> la justice nous a donné <strong>de</strong>s explications, mais il n'a pas parlé<br />
assez <strong>de</strong> confiance dans votre appui (Vive approbation.)<br />
le moins du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce complot dont on parle tant aujourd'hui. Il s'agissait<br />
seulement <strong>de</strong> quelques gar<strong>de</strong>s mobiles qui voulaient abandonner le drapeau, <strong>de</strong><br />
A DROITE! On le lui a refuse, (Exclamations.)<br />
l'ordre sous lequel ils ont marché jusqu'ici, Mais comme la, gar<strong>de</strong> mobile n'a<br />
- A Gauche. il ne l'a jamais recherché.<br />
.mais.au- commis aucun acte d'insubordination ..<br />
LE CIT OUDINOT. Il peut avoir quelquefois manqué <strong>de</strong> fermeté.<br />
â nous occu- A DROITE. Oh I oh ! . ' • '<br />
blions cela, et ne songeons qu'à la. situation. ici. nous n'avons<br />
ltes seutimëns.<br />
à<br />
(Mou-<br />
par que <strong>de</strong> l'enquête. Nous sommes tous animés <strong>de</strong>s memes<br />
nous sommai animés <strong>de</strong>s<br />
sentiments divers.— Interruption.) j'ai dit et je le pense, nous sommes animès <strong>de</strong>s<br />
mêmes sentimens. Oui, nous voulons tous au même <strong>de</strong>gré la gran<strong>de</strong>ur et la prospérité<br />
<strong>de</strong> la France, (interruption.)<br />
A GAUCHE. De la République !<br />
LE CIT OUDINOT. Oui. Vous 11 oublierez pas les périls <strong>de</strong> la situation, et<br />
que nous ne voulons tous que la gloire et la consolidation <strong>de</strong> notre jeune Rèpublique<br />
Titrés bien!)<br />
Le vote que vous allez prononcer ne doit engager que la question d enquête ;<br />
voilà pourquoi nous proposons cet ordre du jour, et nous avons pleine confiance<br />
dans son adoption. (Oh !.)<br />
UNE VOIX. Ç'est différent !... (Mouvemens divers.)<br />
Le citoyen James Demontry monte à là tribune.<br />
A DROITE. La clôture !...<br />
VOIX NOMBREUSES. Parlez ! parlez ! (Interruption.)<br />
LE CIT. JAMES DEMONTRY. Citoyens représentai, permettez-moi <strong>de</strong> citer<br />
un fait; Le préfet 'dé la Côte-d'Or écrivait <strong>de</strong>rnièrement:<br />
« Lé mouvement dé Paris était concerté avec les sociétés secrètes <strong>de</strong>s provinces.<br />
Lés socialistes se sont remués ici. Deux <strong>de</strong>s principaux meneurs ont pris<br />
l'uniforme <strong>de</strong> dragons, et cherché à fomenter <strong>de</strong>s troubles. Lors <strong>de</strong> leur arrestation,<br />
ils ont càssé le bras d'un sergent <strong>de</strong> ville. »<br />
Il ajoute qu'on aurait arrêté d'autres personnes avec les dragons. Eh bien ! citoyens,<br />
ces <strong>de</strong>ux dragons, socialistes prétendus, que M. le préfet dit plus bas<br />
disposés à marcher sur Paris, sont cependant restés dans te local où ils ont été<br />
arrêtés (Approbation. — Rires.)<br />
Voici une lettre d'un habitant dont le caractère honorable ne laisse aucun<br />
doute sur sa véracité : il dit: « Ces faits n'ont pas <strong>de</strong> valeur. Une discussion a<br />
eu lieu dans le café du Midi... »<br />
A DROITE. Assez ! assez ! La clôture ! (Tumulte.)<br />
LE CIT. JAMES DEMONLRY. On ne veut pas entendre mes paroles, et l'on<br />
nous parle toujours <strong>de</strong> sociétés sécrètes, socialistes.<br />
Il y a <strong>de</strong>s sociétées dont on ne parle jamais, qui sont bien plus dangereuses ;<br />
et là on conspire impunément contre la République. A côté <strong>de</strong> cela, on nous parle<br />
d'Une prétendue conspiration du 29 janvier. Eh bien ! si l'enquête ne prouve<br />
pas cette-conspiration, la responsabilité <strong>de</strong>s événement du 29 retombera sur le<br />
ministère. (Très bien !)<br />
LE CIT. PRÉSIDENT. Le citoyen-Dupont (<strong>de</strong> Bussac) a la parole au nom <strong>de</strong><br />
la minorité dé la commission.<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Citoyens représentans, on est venu aujourd'hui<br />
vous proposer <strong>de</strong> donner un vote <strong>de</strong> confiance au ministère. Nous avons dû<br />
être étonné <strong>de</strong> cette nouvelle proposition.<br />
Je crois que le ministère ne mérite pas pas un vote un <strong>de</strong> vote confiance, <strong>de</strong> confiance, ni pour ses doc- ni pour ses doctrines,<br />
ni pour ses .actes...<br />
A DROITE. L'acte a été blâmé !<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). J'entends dire : L'acte a été blâmé bien tardivement<br />
! Mais il y a <strong>de</strong>s doctrines plus dangereuses que dés actes; que le ministère<br />
vienne les désavouer à cette tribune. M. Guizot aussi a soutenu longtemps<br />
Agite thèse, qu'on pouvait gouverner avec <strong>de</strong>s minorités. Et vous savez où<br />
il a entraîné le gouvernement ! Le citoyen Oditon Barrot vient vous soutenir que<br />
le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République a le droit <strong>de</strong> conserver, <strong>de</strong> défendre son ministère ;<br />
il a été jusqu'à dire qu'on voulait forcer le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République à employer<br />
<strong>de</strong>s mains indignes <strong>de</strong> tenir lés portefeuilles.<br />
Je ne sais si ce langage <strong>de</strong>vait être tenu <strong>de</strong>vant l'Assemblée.; je ne le crois<br />
pas. Il faut au moins qu'il se mette d'accord avec elle, et qu'il désavoue ou au<br />
moins mitigé ses docrtines, s'il veut obtenir d'elle un vote <strong>de</strong> confiance. Chaque<br />
jour on déplace la -question, on s'égare, on oublie le point <strong>de</strong> départ... Quand<br />
il s'est agi dé nommer le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République, <strong>de</strong> graves débats se sont<br />
élevés dans' la pressé, dans le mon<strong>de</strong> politique, dans l'Assemblée. Que disait-on<br />
alors? Je prends le rapport fait à ce sujet <strong>de</strong>vant cette Assemblée : c'est le citoyen<br />
Marrast qui parle. (Ah! ah!)<br />
L'orateur lit un extrait du rapport, où les conflits qui pouvaient survenir entre<br />
les <strong>de</strong>ux pouvoirs sont prévus, et qui se termine par ces mots : « Tout doit<br />
plier <strong>de</strong>vant la puissance souveraine <strong>de</strong> 1',Assemblée. » (Très bien !)<br />
Votre commission entière a été <strong>de</strong> cet avis ; il n'y avait pas <strong>de</strong> division sur ce<br />
point-si grave, sur cette situation prévue, et personne n'aurait appuyé alors la<br />
doctrine du citoyen ministre <strong>de</strong> la justice.<br />
A GAUCHE. Tout a bien changé <strong>de</strong>puis ce jour-là !<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Après le discours prononcé par le citoyen<br />
Félix Pyat, qui établissait si nettement la position, le citoyen dé Tocqueville approuvantes<br />
paroles du préopinant, ajoutait : « Le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République, à<br />
côté <strong>de</strong> l'Assemblée, sera le simple exécuteur <strong>de</strong> ses lois, le simple agent <strong>de</strong> ses<br />
volonté; rien dé plus, rien <strong>de</strong> moins! >. On ne peut pas être plus précis. Il disait<br />
encore : « Et près du prési<strong>de</strong>nt, il y aura un conseil également responsable sans<br />
lequel il ne pourra rien faire ! » Eh bien, citoyens représentans, n'êtes-vous pas<br />
frappes <strong>de</strong> la contradiction immerise qu'il y a entre ces paroles et le langage du<br />
citoyen prési<strong>de</strong>nt du conseil? Je ne crains pas <strong>de</strong> le dire, les ministres qui ont<br />
osé afficher à cette tribune <strong>de</strong> pareilles doctrines ont causé un scandale public<br />
(Très-bien !'),'et ils <strong>de</strong>vraient avoir assez <strong>de</strong> réserve pour ne pas <strong>de</strong>man<br />
<strong>de</strong>r un vote <strong>de</strong> confiance, tant qu'ils n'auront pas désavoué leurs doctrines<br />
comme ils ont déjà désavoué leurs actes. (Très bien ! très bien !)<br />
Maintenant, je vous ferai cette question, citoyens i représentans : les : actes du ca-<br />
binet méritent-ils là confiance <strong>de</strong> l'Assemblée ?... Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pardon <strong>de</strong><br />
revenir sur la circulaire... (Interruption a droite.)<br />
A DROITE. Assez! assez !<br />
A GAUCHE. C'est inouï !... Parlez!<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Suffit-il <strong>de</strong> venir désavouer un article, quand<br />
pendant-quinze jours, un mois, il sera parti dé votre ministère, sous votre cachet...(Bruit<br />
à droite.) Comment, il vous suffira <strong>de</strong> le désavouer quand par hasard<br />
il sera produit <strong>de</strong>vant l'Assemblée ? Mais il y en a d'autres à vous citer :<br />
Le conseil municipal <strong>de</strong> Marseille s'est assemblé pour exprimer une opinion sur<br />
la dissection <strong>de</strong> l'Assemblée nationale, et vous l'avez autorisé! (Exclamations<br />
<strong>de</strong> surprise:)'<br />
A DROITE. Cola n'est pas !<br />
A GAUCHE. Si ! 81 ! (Bruit.)<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong>.Bussac), avec force. J'affirme le fait! (Mouvemens divers,<br />
— Longue interruption.)<br />
Vous protestez <strong>de</strong> votre respect pour la liberté <strong>de</strong>s voles I Eh bien, je vous apporte<br />
quatre lettres signées du citoyen Jules Faucher, qui est le frère du citoyen<br />
Léon Faucher... (A droite : Oh I oh I —Assez !—Des commérages !) Quand vous<br />
saurez que-le citoyen Jules Faucher est sous-préfet, peut-être m'écouterez-vous<br />
mieux. (Ah ! ah I) '<br />
Ces lettres sont adressées à quatre instituteurs, primaires... En voici une.<br />
«" Monsieur l'instituteur primaire, au nom du comité supérieur d'instruction<br />
primaire, je vous invite à vous rendre dans son sein pour y justifier certains<br />
actes <strong>de</strong> votre conduite pendant la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>rnière. » (Mouvement.)<br />
A DROITE. Très bien Tirés bien ! (Oh ! oh !)<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Ainsi voilà la liberté que le ministère réserve<br />
aux élections prochaines.<br />
A DROITE. A là question!<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac.) Oui, voilà ce qu'on nous réserve pour les élecctions<br />
futures ! Sur toute la surface du pays on se prépare à nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />
compte <strong>de</strong> notre conduite dans les élections.<br />
LE CIT. BERARD. En tant que fonctionnaires publics ! (Murmures )<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Comment I les fonctionnaires publics doivent<br />
compte <strong>de</strong> leur vote électoral?<br />
A DROITE. Non ! non ! on a dit cela <strong>de</strong> leur conduite, et non <strong>de</strong> leurs votes :<br />
A GAUCHE. Oui ! oui ! vous l'avez dit <strong>de</strong> leurs votes !<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Je ne puis me dissimuler l'inquiétu<strong>de</strong> que j'éprouve<br />
pour 'la liberté dès citoyens dans les élections prochaines. Je m'étonne<br />
que ces doctrines trouvent un seul approbateur dans cette Assemblée ; et sous<br />
la République qui a pour base la liberté !<br />
En présence <strong>de</strong> pareilles tendances, pouvons-nous être confians?<br />
J'ai ici quatre lettres, et on a dû en écrire dé pareilles sur bien d',<br />
Comment voulez-vous que moi et mes amis (Rires à droite), no<br />
fiança «a '<strong>de</strong>s ministres qui viennent avec une sorte d'impu<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r compte<br />
à leurs agents <strong>de</strong> leurs votes.<br />
LE CIT. BÉRARD, On ne leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas compte <strong>de</strong> leurs votes, mais <strong>de</strong><br />
leur conduite !<br />
LE CIT. HECKEREN. Lisez donc les trois autres lettres !<br />
A GAUCHE. N'obéissez pas ! Pas <strong>de</strong> sommations !<br />
LE CIT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac.) Je propose d'écarter l'ordre du jour du citoyen<br />
Oudinot, et je voterai pour celui du citoyen Perrée. Remarquez-le bien,<br />
celui du citoyen Oudirot nous entraîne fort loin. En votant contre l'urgence, il<br />
nous propose <strong>de</strong> donner notre confiance au ministère. Ce qu'a dit le citoyen<br />
ministre <strong>de</strong> l'intérieur est-il bien propre à nous y déci<strong>de</strong>r? On dirait vraiment<br />
que lui seul et ses amis sont en état <strong>de</strong> défendre la société. (Rires.) . .<br />
' L® ministère nous dit": Puisqu'il y a <strong>de</strong>s abus dans les clubs, puisqu'il y a<br />
<strong>de</strong>s dangers, votez pour moi l Moi seul je suis capable <strong>de</strong> sauver la société. (On<br />
rit.)<br />
, Quand bien même tout serait vrai dans ce qu'on VOUS a dit sur les clubs, ce<br />
dont je doute, je n'en concluerais pas qu'il faut voter pour le ministère ! Voyons<br />
d abord, messieurs lès ministres, si VOUS méritez la confiance en raison <strong>de</strong> vos<br />
allégations.<br />
: citoyen Oudinot.<br />
voix A GAUCHE. Le scrutin <strong>de</strong> division !<br />
LE CIT. PRÉSIDENT. Voici l'ordre du jour du citoyen Oudinot. :<br />
« L'Assemblée nationale, adoptant les conclusions <strong>de</strong> la commission d enquête,,<br />
et considérant que le bulletin offensant pour elle» •lté formellement désavoué<br />
blâmé par le ministère, passe à l'ordre du jour. »<br />
' :'•;'<br />
A GAUCHE. Aux voix ! aux voix! le scrutin <strong>de</strong> division!,<br />
LE CiT. DUPONT (<strong>de</strong> Bussac). Je n'ai ai pas entendu dire que la gar<strong>de</strong> mobile LE CIT. PRÉSIDENT, Vingt membres fini <strong>de</strong>mandé le scrutin <strong>de</strong> division. On<br />
dit commis <strong>de</strong>s actes d'insubordination. cette gran<strong>de</strong> conspiration disparais- Va y procé<strong>de</strong>r.<br />
sait... Et à cinq heures et