Syndrome de Buschke–Ollendorff - Société Française de ...
Syndrome de Buschke–Ollendorff - Société Française de ...
Syndrome de Buschke–Ollendorff - Société Française de ...
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Résumé<br />
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com<br />
Revue du Rhumatisme 75 (2008) 292–294<br />
Fait clinique<br />
<strong>Syndrome</strong> <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> <br />
<strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome<br />
Hasna Hassikou ∗ , Fatima Tabache, Soumaya Safi, Mohamed Baaj, Larbi Hadri<br />
Service <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine interne, hôpital militaire Moulay-Ismail, Meknès, Maroc<br />
Reçu le 8 novembre 2006 ; accepté le 3 avril 2007<br />
Disponible sur Internet le 6 septembre 2007<br />
Le syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> (SBO) est une affection autosomique dominante associant un hamartome <strong>de</strong> type élastique et une<br />
ostéopœcilie.<br />
Observation. – Une jeune femme âgée <strong>de</strong> 21 ans est atteinte <strong>de</strong> syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> révélé par une ostéopœcilie. Elle présentait <strong>de</strong>s<br />
lésions cutanées à type <strong>de</strong> papules groupées <strong>de</strong> couleur chair, non douloureuses, non prurigineuses et inesthétiques au niveau <strong>de</strong> la cuisse et du<br />
tronc. La biopsie cutanée d’une papule a montré <strong>de</strong>s fibres <strong>de</strong> collagène épaissies et homogènes. Les fibres élastiques étaient larges et entrecroisées<br />
sans augmentation <strong>de</strong> leur nombre.<br />
Discussion. – Le syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> est une maladie rare (un cas sur 20 000). Son diagnostic est basé sur un bon examen clinique et<br />
sur l’analyse radiologique. Il est important d’établir le diagnostic avec précision afin d’éviter les erreurs diagnostiques (métastases con<strong>de</strong>nsantes)<br />
notamment quand l’ostéopœcilie est révélatrice.<br />
© 2008 Publié par Elsevier Masson SAS.<br />
Mots clés : <strong>Syndrome</strong> <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> ; Ostéopœcilie<br />
Keywords: <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome; Osteopoikilosis<br />
1. Introduction<br />
Le syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> (SBO) est une affection<br />
héréditaire rare associant un hamartome <strong>de</strong> type élastique et une<br />
ostéopœcilie. Les progrès <strong>de</strong> la génétique ont permis <strong>de</strong> mettre en<br />
évi<strong>de</strong>nce chez les individus atteints d’ostéopœcilie avec ou sans<br />
syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> une mutation hétérozygote,<br />
très probablement inactivatrice, du gène LEMD3 qui co<strong>de</strong> pour<br />
une protéine <strong>de</strong> la membrane nucléaire interne. Nous rapportons<br />
un nouveau cas <strong>de</strong> ce syndrome.<br />
2. Observation<br />
Une jeune femme âgée <strong>de</strong> 21 ans sans antécé<strong>de</strong>nts pathologiques<br />
est venue consulter aux urgences pour une entorse <strong>de</strong><br />
Ne pas utiliser, pour citation, la référence française <strong>de</strong> cet article, mais sa<br />
référence anglaise dans le même volume <strong>de</strong> Joint Bone Spine.<br />
∗ Auteur correspondant.<br />
Adresse e-mail : hassikouhasna@hotmail.com (H. Hassikou).<br />
1169-8330/$ – see front matter © 2008 Publié par Elsevier Masson SAS.<br />
doi:10.1016/j.rhum.2007.04.018<br />
la cheville gauche. Cette <strong>de</strong>rnière était gonflée. La radiographie<br />
<strong>de</strong>s chevilles montrait <strong>de</strong>s îlots <strong>de</strong> con<strong>de</strong>nsation arrondis <strong>de</strong><br />
quelques millimètres <strong>de</strong> diamètre séparés les uns <strong>de</strong>s autres sur le<br />
tarse, les métatarses et les phalanges <strong>de</strong> façon bilatérale. Aucune<br />
fracture n’était constatée. La patiente a reçu un traitement<br />
symptomatique à base d’antalgiques et d’anti-inflammatoires<br />
non stéroïdiens et a été orientée en rhumatologie pour une<br />
enquête étiologique. L’examen clinique montrait une patiente<br />
en bon état général pesant 58 kg pour 1,60 m. À l’examen rhumatologique,<br />
on ne remarquait ni douleurs ni déformations<br />
osseuses. L’examen cutané révélait à la cuisse droite (Fig. 1)<br />
et au tronc, <strong>de</strong>s papules multiples disposées en groupe à surface<br />
irrégulière, <strong>de</strong> couleur chair, non douloureuses et non prurigineuses.<br />
Ces lésions étaient présentes <strong>de</strong>puis l’enfance et se<br />
sont étendues progressivement avec la croissance. Les examens<br />
biologiques comprenant la vitesse <strong>de</strong> sédimentation, la numération<br />
formule sanguine, le bilan phosphocalcique, hépatique<br />
et rénal étaient sans anomalie. La radiographie du squelette<br />
montrait l’atteinte <strong>de</strong> tous les os (région métaphyso-épiphysaire<br />
<strong>de</strong>s os longs et du bassin (Fig. 2) à l’exception du rachis et
Fig. 1. Papules groupées à la cuisse <strong>de</strong> couleur chair, à surface irrégulière.<br />
du crâne). La biopsie cutanée <strong>de</strong> la cuisse droite avait montré<br />
<strong>de</strong>s fibres <strong>de</strong> collagène épaissies et homogènes au niveau<br />
du <strong>de</strong>rme ; les fibres élastiques étaient larges et entrecroisées<br />
sans modifications <strong>de</strong> leur structure au microscope électronique.<br />
Le diagnostic d’ostéopœcilie a été porté sur la base <strong>de</strong>s<br />
données radiologiques. Son association avec les lésions cutanées<br />
décrites ci-<strong>de</strong>ssus permet <strong>de</strong> diagnostiquer un syndrome<br />
<strong>Buschke–Ollendorff</strong>. Aucune étu<strong>de</strong> génétique n’a pu être réalisée.<br />
Fig. 2. Radiographie standard antéropostérieure du bassin révélant <strong>de</strong> multiples<br />
zones <strong>de</strong>nses arrondies et ovalaires <strong>de</strong>s extrémités supérieures fémorales et du<br />
bassin.<br />
H. Hassikou et al. / Revue du Rhumatisme 75 (2008) 292–294 293<br />
3. Discussion<br />
Le SBO est une affection héréditaire rare (un cas sur 20 000<br />
dans la population) transmise selon un mo<strong>de</strong> autosomique dominant<br />
à expressivité variable. Il ne connaît pas <strong>de</strong> prédilection<br />
raciale ni <strong>de</strong> prédominance <strong>de</strong> sexe. Buschke et Ollendorff<br />
l’ont décrit en 1928 [1]. Ce syndrome est caractérisé par la<br />
présence d’hamartomes disséminés <strong>de</strong> type élastique (<strong>de</strong>rmatofibrose<br />
lenticulaire disséminée) associé à une ostéopœcilie<br />
[2,3]. Deux différentes présentations cliniques ont été décrites<br />
dans la littérature au cours du SBO [4]. Pour la première,<br />
il s’agit <strong>de</strong> petites papules lichénoï<strong>de</strong>s asymptomatiques, uniformes<br />
et symétriques. Pour la secon<strong>de</strong> présentation, les lésions<br />
ressemblent au pseudoxanthoma elasticum. Le terme <strong>de</strong> <strong>de</strong>rmatofibrose<br />
lenticulaire disséminée est utilisé pour désigner ce<br />
premier type. Fréquemment, les lésions sont à type <strong>de</strong> nodules<br />
larges groupés <strong>de</strong> couleur chair et asymétriques. Cette présentation<br />
a été observée chez cette patiente et chez les trois membres<br />
<strong>de</strong> la famille japonaise [3]. Les lésions cutanées peuvent apparaître<br />
à n’importe quel âge, mais sont fréquentes avant la puberté<br />
[5]. Il ya un seul cas rapporté dans la littérature où les lésions<br />
sont apparues à la cinquième décennie [6]. Chez cette patiente,<br />
les lésions cutanées existaient <strong>de</strong>puis l’enfance. Les résultats <strong>de</strong><br />
la biopsie cutanée sont variables [3] :<br />
• les fibres <strong>de</strong> collagène peuvent être épaissies, groupées ou<br />
normales ;<br />
• les fibres élastiques, quant à elles, peuvent être nombreuses<br />
ou en faible quantité, larges et entrecroisées, fragmentées ou<br />
normales.<br />
La physiopathologie <strong>de</strong>s lésions cutanées <strong>de</strong>meure imprécise.<br />
Giro et al. [7] ont constaté que les fibroblastes en culture<br />
<strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong> SBO produisent trois à huit fois plus <strong>de</strong><br />
tropoélastine que les fibroblastes <strong>de</strong>s sujets sains et que le taux<br />
d’ARNm codant pour l’élastine était élevé. Ces signes cutanés<br />
ne nécessitent aucun traitement spécifique.<br />
Le SBO est associé à une ostéopœcilie. Il s’agit d’une ostéopathie<br />
con<strong>de</strong>nsante rare qui obéit à un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> transmission<br />
autosomique dominant et dont le diagnostic est radiologique<br />
[8,9]. Classiquement, les sujets atteints sont asymptomatiques,<br />
mais 15 à 20 % décrivent <strong>de</strong>s douleurs et <strong>de</strong>s épanchements articulaires.<br />
Chez cette mala<strong>de</strong>, elle a été découverte fortuitement<br />
suite à la radiographie réalisée pour une entorse <strong>de</strong> la cheville. La<br />
radiographie standard montre <strong>de</strong>s petites con<strong>de</strong>nsations squelettiques<br />
arrondies ou ovalaires allant <strong>de</strong> quelques millimètres à un<br />
centimètre <strong>de</strong> diamètre, aux contours pas toujours nets, séparés<br />
les unes <strong>de</strong>s autres. Ces lésions sont bilatérales et symétriques ;<br />
elles sont disséminées sur les épiphyses et les métaphyses <strong>de</strong>s<br />
os long, l’os spongieux <strong>de</strong>s ceintures, <strong>de</strong>s os du carpe et du<br />
tarse [10,11]. Le crâne et le rachis sont respectés. Ces lésions<br />
n’ont pas <strong>de</strong> caractère évolutif, ne fixent pas à la scintigraphie et<br />
n’ont aucun retentissement négatif sur la consolidation osseuse<br />
en cas <strong>de</strong> fracture [11,12]. Les différentiels radiologiques sont<br />
surtout l’ostéopathie striée, la mélorhéostose, la sclérose tubéreuse,<br />
les métastases osseuses con<strong>de</strong>nsantes et l’ostéome [9,10].
294 H. Hassikou et al. / Revue du Rhumatisme 75 (2008) 292–294<br />
Chez cette mala<strong>de</strong>, le diagnostic <strong>de</strong> SBO n’a pu être établi que<br />
<strong>de</strong>vant la découverte fortuite <strong>de</strong>s images d’ostéopœcilie. Les<br />
lésions cutanées étaient négligées car elles n’avaient entraîné<br />
aucune douleur ni gêne esthétique. Une étu<strong>de</strong> génétique menée<br />
par les métho<strong>de</strong>s classiques d’analyse <strong>de</strong> liaison sur l’ensemble<br />
du génome a été menée sur trois familles avec ostéopœcilie<br />
avec ou sans syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> ou mélorhéostose.<br />
Tous les individus atteints étaient porteurs d’une mutation<br />
hétérozygote, très probablement inactivatrice, du gène LEMD3<br />
(également appelé MAN1) qui co<strong>de</strong> pour une protéine <strong>de</strong> la<br />
membrane nucléaire interne. Chez les quelques patients pour<br />
lesquels cette recherche a été effectuée, une mutation somatique<br />
du <strong>de</strong>uxième allèle <strong>de</strong> LEMD3 n’a pu être mise en évi<strong>de</strong>nce que<br />
ce soit sur les fibroblastes <strong>de</strong> la peau atteinte dans un cas <strong>de</strong><br />
syndrome <strong>de</strong> <strong>Buschke–Ollendorff</strong> ou sur la peau apparemment<br />
normale d’un patient atteint <strong>de</strong> mélorhéostose, ce qui laisse penser<br />
que la perte <strong>de</strong> fonction <strong>de</strong> 50 % <strong>de</strong> la molécule suffit à faire<br />
apparaître le phénotype pathologique, un phénomène connu sous<br />
le nom d’haplo-insuffisance. La fonction <strong>de</strong> la protéine codée<br />
par le gène LEMD3 n’est pas encore clairement i<strong>de</strong>ntifiée, mais<br />
elle semble interagir en inhibant les <strong>de</strong>ux voies <strong>de</strong> signalisation<br />
intracellulaire médiées par BMP et SMADS ; cette <strong>de</strong>rnière voie<br />
dépendant notamment <strong>de</strong> l’activation <strong>de</strong>s récepteurs au TGFB<br />
et à l’activine. [13–15]. Le SBO ne semble pas entraîner une<br />
augmentation <strong>de</strong> la morbidité ou <strong>de</strong> la mortalité, sauf dans les<br />
rares cas <strong>de</strong> dégénérescence maligne <strong>de</strong>s lésions osseuses [16].<br />
Références<br />
[1] Buschke A, Ollendorff H. Ein fall von <strong>de</strong>rmatofibrosis lenticularis disseminata<br />
und osteopatha con<strong>de</strong>nsans disseminata. Derm Wochenschr<br />
1928;86:257–62.<br />
[2] Woodrow SL, Pope FM, Handfield-Jones SE. The <strong>Buschke–Ollendorff</strong><br />
syndrome presenting as familial elastic tissue naevi. Br J Dermatol<br />
2001;144:890–3.<br />
[3] Kawamura A, Ochiai T, Tan-Kinoshita M, et al. <strong>Buschke–Ollendorff</strong><br />
syndrome: three generations in a japanese family. Pediatr Dermatol<br />
2005;22:133–7.<br />
[4] Foo CC, Kumarasinghe SP. Juvenile elastoma: a form fruste of<br />
the <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome ? Australas J Dermatol 2005;46:<br />
250–2.<br />
[5] Cairns RJ. Familial juvenile elastoma: osteopoikilosis (two cases). Proc R<br />
Soc Med 1967;60:1267.<br />
[6] Reinhardt LA, Rountree CB, Wilkin JK. <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome.<br />
Cutis 1983;31:94–6.<br />
[7] Giro MG, Duvic M, Smith LT, et al. <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome associated<br />
with elevated elastin production by affected skin fibroblasts in culture.<br />
J Invest Dermatol 1992;99:129–37.<br />
[8] Carvalho AC, Santos Beze R, Picinini SE. Osteopoikilosis – a case report<br />
and review of the literature. Radiol Bras 2002;35:1–6.<br />
[9] Borman P, Özoran K. Ostéopoecilie : un cas clinique et revue <strong>de</strong> la littérature.<br />
Rev Rhum 2002;69:326–30.<br />
[10] Kotulska A, Kucharz EJ. Osteopoikilosis and <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome.<br />
Case Rep Clin Pract Rev 2002;3:290–3.<br />
[11] Zahar A, Najeb Y, Rafai M, et al. Fracture du col du fémur sur ostéopœcilie.<br />
Rev Chir Orthop Réparatrice Appar Mot 2002;88:725–7.<br />
[12] Buyukbebeci O, Karakurum G, Sirikçi A, et al. Fracture healing in a patient<br />
with osteopoikilosis. Joint Bone Spine 2005;72:343–4.<br />
[13] Dereure O. <strong>Buschke–Ollendorff</strong> syndrome: inactivating mutation of the<br />
LEMD3 gene. Ann Dermatol Venereol 2005;132:593.<br />
[14] Lin F, Morrison JM, Wu W, et al. MAN1, an integral protein of the<br />
inner nuclear membrane, binds Smad2 and Smad3 and antagonizes<br />
transforming growth factor-beta signaling. Hum Mol Genet 2005;14:<br />
437–45.<br />
[15] Hellemans J, Debeer P, Wright M, et al. Germline LEMD3 mutations<br />
are rare in sporadic patients with isolated melorheostosis. Hum Mutat<br />
2006;27:290.<br />
[16] Grimer RJ, Davies AM, Starkie CM, et al. Chondrosarcoma in a patient<br />
with osteopoikilosis. À propos of a case. Rev Chir Orthop Reparatrice<br />
Appar Mot 1989;75:188–90.