Collection Pierre et Franca Belfond - Bibliorare
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52<br />
HUGO, Victor<br />
(1802-1885)<br />
« Les Quatre prisonniers »<br />
Dessin original. aquarelle, encre <strong>et</strong> plume, traits préparatoires à la<br />
mine de plomb. 24 × 18 cm, encadrement sous verre.<br />
Dessin l<strong>et</strong>triste : proj<strong>et</strong> de titre illustré pour son poème « À quatre<br />
prisonniers », du recueil Châtiments.<br />
Un hommage destiné à ses deux fils <strong>et</strong> ses deux plus chers amis,<br />
victimes de Napoléon le P<strong>et</strong>it. avant même le coup d’état du<br />
2 décembre 1851, le pouvoir se durcit contre la presse, <strong>et</strong> le journal<br />
des fils Hugo, L’Événement, fut la cible de plusieurs procès qui eurent<br />
pour résultat les emprisonnements successifs de charles Hugo (11 juin<br />
1851), de françois-victor Hugo <strong>et</strong> paul Meurice (12 septembre 1851), <strong>et</strong><br />
enfin d’auguste vacquerie (24 septembre 1851). c’est au cours d’une des<br />
visites qu’il rendit à la conciergerie que victor Hugo écrivit « À quatre<br />
prisonniers » – il le ferait paraître en 1853 dans le livre iv de Châtiments :<br />
« [...] Mes fils soyez contents; l’honneur est où vous êtes.<br />
<strong>et</strong> vous, mes deux amis, la gloire, ô fiers poètes,<br />
couronne votre nom par l’affront désigné [...]<br />
ils vous ont condamnés, que l’avenir les juge! [...] »<br />
Hugo a laissé plusieurs autres compositions connues pour enluminer son<br />
nom ou des titres d’œuvres.<br />
Envoi autographe d’Hugo « Aux deux frères Aspl<strong>et</strong> », ses principaux amis<br />
<strong>et</strong> soutiens jersiais. charles aspl<strong>et</strong>, épicier à saint-Hélier, était un hugolâtre<br />
qui possédait les œuvres complètes de l’écrivain. son frère philippe aspl<strong>et</strong>,<br />
qui écrivait de la poésie en dialecte jersiais, dirigeait une fabrique de bougie<br />
<strong>et</strong> occupait les fonctions de « centenier » (officier de police <strong>et</strong> de justice). il<br />
avait également de l’admiration pour victor Hugo dont il approuvait la lutte<br />
en faveur de la liberté politique, <strong>et</strong> noua avec lui de solides relations d’amitié,<br />
l’invitant parfois chez lui pour de joyeux repas. bien qu’il n’ait pu empêcher<br />
leur expulsion de l’île en 1855 <strong>et</strong> qu’il ait dû subir les insultes de beaucoup de<br />
ses compatriotes, philippe aspl<strong>et</strong> fut d’un grand secours aux proscrits : il fit<br />
transiter secrètement par chez lui les épreuves de Châtiments, fit enfermer<br />
pour d<strong>et</strong>tes un espion français <strong>et</strong> demanda l’internement du proscrit Jules<br />
allix quand celui-ci fut pris de démence. il vint encore rendre des visites<br />
à Hugo sur l’île de Guernesey, par exemple en 1860 pour lui rem<strong>et</strong>tre une<br />
pétition lui demandant de bien vouloir assister à un me<strong>et</strong>ing en faveur de<br />
Garibaldi <strong>et</strong> de l’unité italienne.<br />
Au verso, Hugo a inscrit deux importants passages autographes de<br />
son recueil poétique Dieu, présentant de nombreuses variantes avec<br />
la version imprimée. envisagé au printemps 1855 comme une sorte de<br />
conclusion aux Contemplations, ce qui devait devenir Dieu s’affirma<br />
bientôt dans l’esprit d’Hugo comme la dernière partie d’un triptyque<br />
comprenant La Légende des siècles <strong>et</strong> La Fin de Satan. le poète y<br />
travailla le restant de ses jours sans pouvoir l’achever : Dieu parut de<br />
manière posthume en 1891.<br />
– Sur les « fantômes sans nom ». vers du dernier poème de la seconde<br />
partie (« les voix ») du premier livre (« ascension dans les ténèbres »),<br />
concernant les « fantômes sans nom » <strong>et</strong> « noirs contemplateurs »<br />
(correspondant aux vers 2233 à 2242 de la version imprimée) :<br />
« D’autres sont échoués dans l’immobilité.<br />
La terreur sans espoir fait leur tranquillité.<br />
Leur épaule fléchit comme s’ils portaient toute<br />
La charpente du monde avec toute la voûte.<br />
Et la sérénité de l’[insondable ?] nuit<br />
Descend sous leur front blême où leur œil fixe luit.<br />
Ils ont pour vision éternelle la chose<br />
Sans nom, sans jour, sans bruit, sans bord, sans fin, sans cause,<br />
Jamais ne s’arrêtant, jamais ne s’achevant,<br />
Terrible, avec des vols de spectres dans le vent. »<br />
(verso)<br />
72 Dessins D’écrivains, collection pierre <strong>et</strong> franca belfonD — 14 février 2012. paris<br />
– Sur « les mages – les druides ». vers des « paroles du spectre »,<br />
dans le livre ii (« Dieu »), concernant « Les mages – les druides » qui,<br />
dans la version imprimée deviendraient les « songeurs », « penseurs » <strong>et</strong><br />
« poètes » (vers 26 à 33 <strong>et</strong> 47 à 48) :<br />
«... Où l’étoile tombant qu’à sa trace on devine<br />
Glisse comme échappée à quelque main divine,<br />
Le grand, le vrai, le beau, l’idéal, le réel pour les sages<br />
Ont de mystérieux <strong>et</strong> limpides / splendides passages;<br />
Pour les saisir au vol dans les immensités<br />
Ils gu<strong>et</strong>tent ces éclairs qu’on nomme vérités;<br />
L’impossible les prie, l’inouï les réclame,<br />
Et grands esprits vautours, ils se lancent sur l’âme...<br />
Ils s’abattent sur l’être, ils s’abattent sur Dieu. »<br />
– Fragments. avec quelques autres vers autographes appartenant aux<br />
recherches pour le même recueil, comme ce passage des paroles de la<br />
huitième « voix » du livre ii, celle des démons :<br />
« Nous sommes les flottants de l’immense azur noir... »<br />
ou d’autres fragments versifiés non situés, comme :<br />
« Ils vont, un doigt levé,<br />
Regardant fixement l’ombre incommensurable. »<br />
ou encore comme :<br />
« <strong>et</strong> dans l’[air ?] immobile arrive <strong>et</strong> disparaît<br />
comme une fumée entre aux bois d’une forêt. »<br />
– Quelques inscriptions au crayon ont été effacées.<br />
Expositions<br />
– el po<strong>et</strong>a como artista. las palmas, centro atlantico de arte Moderno, 4 avril-21 mai 1999.<br />
reproduction p. 61 du catalogue.<br />
– L’un pour l’autre, les écrivains dessinent. caen, iMec, lisbonne, Musée berardo, ixelles,<br />
Musée communal, janvier 2008-janvier 2009. reproduction dans la notice n° 1 du catalogue.<br />
Bibliographie<br />
– dessins d’écrivains. paris, éditions du chêne, 2003. reproduction p. 13.<br />
15 000 – 20 000 €<br />
(recto)