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<strong>26159</strong><br />

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L4 BATAILLE DE POJtëp^ _<br />

ET LES VRAIES CAUSEE"<br />

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X'>-:U';"<br />

DU RECUL DE^fiffiASJON ARABE/ ;<br />

En rencontrant dans les annales des peuples des faits<br />

d'une importance capitale pour la destinée d'une fraction de,<br />

l'humanité, la pensée, bien souvent, s'arrête comme devant un<br />

problème et 'cherche à pénétrer les causes inconnues et les con<br />

ditions réelles de l'événement dont nous ne voyons que les<br />

résultats. Le fait est là, incontestable,<br />

mais une clé manque<br />

pour en saisir l'explication. L'histoire, en effet, nous transmet<br />

le récit simple, souvent brutal, dé ce qui s'est passé ; puis ce récit<br />

passe de génération à génération , pour nous parvenir sous la<br />

forme que les contemporains et les intéressés lui ont donnée. Il<br />

reste alors à dégager les causes déterminantes ou accessoires du<br />

grand événement ; à étudier l'état moral du moment dans lequel<br />

il s'est produit; à comparer les sources diverses d'information<br />

et à reconnaître enfin si la tradition nous le présente sous son<br />

vrai jour. L'école historique actuelle s'est- adonnée spécialement<br />

à cet utile et intéressant labeur, et,<br />

si elle a droit d'être fière de<br />

la moisson de découvertes par elle faite dans ce champ, il faut<br />

reconnaître que ce travail dé restitution n'est pas près d'être ter<br />

miné.<br />

Or, un des faits décisifs de notre histoirg nationale, la bataille<br />

de Poitiers, qui a eu pour conséquence l'arrête l'invasion arabe,<br />

n'a encore été apprécié par nos historiens qulj^. point de vue<br />

de ses effets immédiats ; aucune enquêtan'à été fa*tè"pour en péné<br />

trer les causes. On s'est contenté de répéter que Karl Martel,<br />

par sa brillante « victoire, a sauvé la chrétienté ». N'est-on pas<br />

même allé jusqu'à dire que, saûs ce succès, l'Europe serait peut-<br />

•• -<br />

'<br />

> ■" f'<br />

* <<br />

,/


2 E. MERGIER.<br />

être devenue musulmane? Telle est l'opinion courante sur la<br />

bataille de Poitiers.<br />

Il est incontestable,.en effet, qu'après ce désastre, les Musul<br />

mans, bien qu'ayant encore poussé des pointes hardies dans la<br />

^vallée du Rhône, ont successivement abandonné leurs conquêtes<br />

de France, et, peu après,<br />

ont repassé pour toujours les Pyré<br />

nées. Mais comment n'a-t-on pas deviné qu'une autre cause,<br />

concomitante avec la victoire des Franks, était venue modifier les<br />

moyens d'action dont disposait l'invasion musulmane ? Une vic<br />

toire, quelque décisive qu'elle soit,<br />

arrêter un grand mouvement de population,<br />

est toujours impuissante à<br />

une immigration.<br />

Les défaites des barbares par les Romains ont-elles *empêché<br />

l'envahissement de l'empire? La- bataille de Poitiers n'aurait<br />

pas davantage arrêté les conquêtes des sectateurs du Koran, si<br />

les conditions de cette invasion n'avaient été, en même temps,<br />

profondément modifiées.<br />

C'est ce que nous allons essayer de démontrer, et, pour cela,<br />

nous nous attacherons d'abord à bien préciser l'état particulier<br />

où se trouvait le théâtre de ce grand drame et la situation réci<br />

proque des deux adversaires.<br />

*<br />

I.<br />

A la mort du second Peppin survenue en , 714, son vaste<br />

empire passa aux mains d'un eAnt en bas âge, au détriment de<br />

son bâtard Karl, déshérité par son père, quil'accusait d'être l'ins<br />

tigateur du meurtre de son autre fils Grimoald. Aussitôt, les po<br />

pulations hétérogènes qui composaient le royaume se lancèrent<br />

dans la révolte et le pays se trouva en proie à la plus grande<br />

anarchie : chaque province en profita pour ressaisir la liberté,<br />

c'est-à-dire le droit de tomber sur ses voisins plus faibles. Ejjde,<br />

duc d'Aquitaine,<br />

saisit cette occasion pour se proclamer roi de<br />

toute la contrée comprise entre la Loire, les Cévennes et les<br />

Pyrénées, riche et fertile pays, habité en grande partie par la<br />

population gallo-romaine, jouissant d'une civilisation très-<br />

supérieure à l'état demi-sauvage denses voisins et futurs domi<br />

nateurs les Franks, les rudes barbares du Nord.<br />

Cependant, en 716, Karl s'étant échappé de la prison où il,<br />

était détenu, réunit quelques anciens partisans de son père, et,<br />

par son courage indomptable et son habileté, sut rester maître


LA BATAILLE DE POITIERS.<br />

de la plus grande partie du royaume d'Austrasie. Après avoir<br />

réduit les Saxons à l'inaction, il se disposa à attaquer les Neus-<br />

triens qui s'étaient aussi donné un roi. En présence du danger<br />

commun, Neustrie et Aquitaine conclurent un traité.d'allianc<br />

Eude, bien que fort menacé au midi par l'attaque imminente des<br />

Arabes, qui, dès 712, avaient commencé leurs courses au nord<br />

des Pyrénées et détenaient déjà une partie de la Septimanie,<br />

Eude, disons-nous, réunit tous ses guerriers, et,<br />

les Franks de Neustrie près de la Seine,<br />

ayant rejoint<br />

se porta avec eux au<br />

devant des Austrasiens. C'est sur l'Aisne, non loin de Soissons,<br />

qu'eut lieu la rencontre;<br />

elle se termina par la défaite des alliés.<br />

Eude, qui paraît s'être enfui avant le combat, s'empressa de se<br />

retirer avec ses bandes au-delà de la Loire et ne tarda pas -à<br />

traiter avec le puissant roi d'Austrasie (719).<br />

Dans cette même année 719, les Musulmans s'emparaient de<br />

Narbonne. Eude se convainquit bientôt qu'il ne lui restait plus<br />

qu'à réunir toutes ses forces pour les opposer aux envahisseurs<br />

du midi,, et, en effet., en 721, Es-Sameh, ouali (gouverneur)<br />

d'Espagne, franchit les Pyrénées à la tête d'une armée considé<br />

rable et vint mettre le siège devant Toulouse. Eude accourt avec<br />

toutes ses forces, et, à la suite d'une_ bataille mémorable dans<br />

laquelle le chef des assiégeants et ses principaux guerriers<br />

trouvent la mort pour la foi islamique, il peut dégager Toulouse<br />

et rejeter l'étranger sur Narbonne.<br />

Ce^rjEant , si chèrement acheté,<br />

n'eut cependant<br />

aucune conséquence décisive. Les musulmans procédaient par<br />

expéditions, par pointes hardies : étaient-ils victorieux, ils<br />

s'établissaient comme ils l'avaient fait en Septimanie et repor<br />

taient ainsi leur première ligne en avant; de là, ils poussaient<br />

de nouvelles pointes et, s'ils étaient vaincus, leur ligne de retraite<br />

recueillait les débris de l'armée,<br />

puis on se reformait en arrière<br />

et, quand les forces étaient suffisantes, on repartait en avant.<br />

Cette tactique indique clairement qu'un courant devait alimenter<br />

par derrière l'invasion,<br />

car les Musulmans ne se ménageaient<br />

pas ; la consommation d'hommes était effrayante et il fallait non-<br />

seulement fournir au personnel des expéditions, mais occuper le<br />

pays eônfjtiis. Ge fait n'a pas échappé à la sagacité d'un de nos<br />

historiensmodernes, bien qu'il n'en ait tiré aucune déduction. «<br />

ou'il i avait de plus terrjble dans les Arabes, —<br />

irtijj,<br />

dit<br />

Ce"<br />

M. Henri<br />

— c'était leur opiniâtre constance : ils sem-


4 E. MERCIER.<br />

blaient se multiplier par leurs pertes mêmes, et raccouraient<br />

plus nombreux et plus acharnés, après la défaite comme après la<br />

victoire1 »<br />

En 725, Anbaça, ouali d'Espagne, descend de nouveau des<br />

Pyrénées, suivi de bandes innombrables, puis, tournant vers<br />

l'est, il s'avance jusqu'à la vallée du Rhône en soumettant les<br />

cités terrifiées au paiement du kharadj ou impôt des infidèles<br />

tributaires. De là, les Arabes, remontant le cours du grand<br />

fleuve,<br />

vont porter le ravage dans les opulentes campagnes de la<br />

Burgondie; ils pénètrent même dans les Vosges et mettent au<br />

pillage le monastère de Luxeuil.<br />

Pendant que le midi était Ti"<br />

théâtre des exploits des Arabes,<br />

Karl combattait sans relâche Allemands, Saxons et Souabes. Il<br />

voulait, avant de reparaître en Neustrie et en Aquitaine, assurer<br />

la sécurité sur sa frontière du nord-est. La nouvelle de l'invasion<br />

de la vallée du Rhône par les Arabes lui parvint sur les bords<br />

du Danube; aussitôt il se disposa à revenir vers l'ouest et il n'en<br />

fallut pas davantage pour déterminer la retraite des Arabes : ils<br />

rentrèrent en Septimanie en passant par la Provence.<br />

Cependant Eude,<br />

;<br />

auquel Karl reprochait de n'avoir pas exé<br />

cuté certaines conditions de leur traité, ne souhaitait nullement<br />

le retour du roi des Franks ;<br />

on peut même dire qu'il redoutait<br />

plus celui-ci que les Musulmans. Il entra donc en relation avec<br />

\e berbère Othmân_) commandât des Pyrénées orientales, et<br />

contracta avec lui une alliancecellée par le don de sa fille en<br />

mariage. Il espérait probablement que l'influence de son gendre<br />

détournerait de lui l'attaque des Musulmans ou même lui<br />

obtiendrait leur appui; mais c'est en vain qu'il avait condes<br />

cendu à cette humiliante union; l'Aquitaine prise entre deux<br />

terribles ennemis ne pouvait, réduite à ses propres forces, faire<br />

front à la fois au nord et au sud. La preuve ne s'en fit pas<br />

attendre.<br />

En 731 , Karl , après avoir guerroyé encore pendant deux<br />

ans contre les Bavarois et les Allemands et les avoir soumis au<br />

tribut et à l'obligation de lui fournir des contingents pour ses<br />

guerres, arriva en Neustrie, et, ayant franchi la Loire, ravagea<br />

le Berri. En même temps, Abd-er-Bahmân, ouali d'-E$>agne,<br />

attaquait au midi le gendre du roi d'Aauitaine. Othnlân. le<br />

1. Bistoire de France. T. II, p. 196.


,<br />

LA BATAILLE DE POITIERS. 5<br />

musulman traître à son prince et à sa religion , et envoyait en<br />

présent au khalife la tête et la femme du berbère. Attaqué de<br />

deux côtés à la fois, Eude n'avait pu secourir utilement ni le<br />

nord ni le sud de son royaume.<br />

Voilà quelle était la situation au moment où le dernier acte<br />

du drame allait commencer. Les Musulmans devaient la trouver<br />

très-favorable pour eux et se flatter de rencontrer en France la<br />

désunion qui les avait si bien secondés en Espagne.<br />

II.<br />

Après avoir passé en revue l'état de la France d'après les docu<br />

ments européens, nous jetterons un coup<br />

d'œil en arrière sur les<br />

événements dont une partie du monde musulman était simulta<br />

nément le théâtre, en nous fondant pour cela sur les données<br />

fournies par les historiens arabes.<br />

Vers l'an 707, la conquête définitive du Magreb,<br />

ou Afrique<br />

septentrionale, par les Arabes, était achevée. Pendant plus de<br />

quarante ans, les généraux des khalifes avaient dû lutter pour<br />

obtenir ce résultat;<br />

car les Arabes avaient rencontré dans le<br />

payss derrière les restes des colonies latines et grecques, une<br />

forte race autochthone, la race berbère, courageuse, méprisant<br />

la mort,<br />

et secondée par un pays difficile et hérissé de montagnes<br />

escarpées. Les premières soumissions, obtenues au prix de grands<br />

efforts,<br />

avaient été bien précaires : à peine le gros de l'armée<br />

conquérante s'était-il éloigné pour aller combattre sous d'autres^<br />

cieux, la révolte éclatait sur les pas des vainqueurs et la Berbérie<br />

ressaisissait son indépendance et reniait le culte que<br />

l'étranger lui avait imposé. Nous avons retracé ailleurs1 le récit<br />

de cette résistance qui n'a pas manqué d'héroïsme et qui n'a été<br />

vaincue que par les effets de la rivalité qui divisait les tribus<br />

berbères et paralysait leurs forces.<br />

Etabli à Kaïrouân, dans la Tunisie actuelle, le gouverneur<br />

arabe exerçait son action sur tout le Magreb. Entouré de<br />

quelques troupes arabes chargées spécialement de garantir sa<br />

sécurité et d'aider au recouvrement de l'impôt, il entretenait au<br />

milieu des Berbères, sur les points stratégiques, de petits postes<br />

1. Histoire de l'établissement des Arabes dans VAfrique septentrionale.<br />

Ch. iv, 1 partie.<br />

•<br />

'<br />

'


t> E. MERCIER.<br />

composés en majeure partie d'indigènes ralliés et de quelques<br />

Arabes qui avaient pour mission de répandre et d'enseigner l'isla<br />

misme, tout en assurant les communications. Telle était la situa<br />

tion. enJZQX"<br />

elle venait d'être obtenue par l'habileté et les succès<br />

du gouverneur Mousa*. Le peuple berbère était enfin en paix.<br />

Était-il dompté? On peut dire non, à coup sûr, mais il se trou<br />

vait dans un moment de lassitude et de trêve qui fut habilement<br />

sais'i.<br />

Vers 710, un Berbère converti, Tarek-ben-Zïad,<br />

qui se trou<br />

vait à Tanger avec quelques Arabes, comme représentant du<br />

gouverneur de Kaïrouân, entra en pourparlers avec le comte<br />

Julien et les héritiers du roi Wittiza dépossédés par Roderik.<br />

Ceux-ci l'engagèrent à passer en Espagne, lui promettant de lui<br />

faciliter la conquête du pays. Tarek, ayant obtenu de Mouça<br />

l'autorisation de tenter cette entreprise hasardée, réunit une<br />

armée de sept à huit mille Berbères convertis ayant à leur tête<br />

quelques centaines d'Arabes1. Tout le monde connaît la victoire<br />

surprenante remportée sur les bords du GuadaleJ&i_ par les<br />

Musulmans, sur les Goths dix fois plus nombreux, la mort de<br />

Roderik et la chute de sa dynastie."L'Espagne était ouverte.<br />

Bientôt<br />

Mouça,"<br />

qui semble avoir voulu laisser à Tarek la res<br />

ponsabilité de la première entreprise, accourut pour en recueillir<br />

lès fruits. Il amenait une armée de vingtmille guerriers berbères<br />

et arabes, avec laquelle il s'avala enunTselïïë~câmpagne jus<br />

qu'aux Pyrénées.fEn un an l'Espagne était conquise, à l'excep<br />

tion des montagnes abruptes et reculées de la Cantabrie. Jamais<br />

conquête n'a été si rapide : là encore la discipline d'une poignée<br />

d'hommes triompha d'une nation avilie par le despotisme et<br />

divisée par l'anarchie.<br />

Mais une des conséquences les plus remarquables du succès de<br />

Tarek,<br />

ce fut d'assurer la paix de la Berbérie en offrant un<br />

élément à l'activité du peuple indigène et à son goût pour la<br />

guerre et le pillage ;<br />

ayant toute son attention absorbée par la<br />

guerre d'Espagne, il ne pensa plus à la révolte, et, comme pour<br />

prendre part à la guerre sainte il fallait être musulman, ce fut à<br />

qui, chez les farouches montagnards du Magreb, se soumettrait<br />

1 . Voir En Nouéïri, p. 345 et suiv. (appendice au t. I d'Ibn Khaldoun, trad.<br />

de Slane), Ibn Khaldoun, t. I, p. 215 et passim, et Histoire des Musulmans<br />

d'Espagne, par Dozy, t. II, p. 31 et suiv.


LA BATAILLE DE POITIERS. 7<br />

à la nouvelle loi religieuse qui ne leur demandait d'autre initia<br />

tion que de prononcer la formule consacrée : « Il n'y a de Dieu<br />

que Dieu ; Mohammed est le prophète de Dieu ! »<br />

Cela fait, on dirigeait les néophytes sur les ports de l'ouest,<br />

où des bateaux les prenaient et les déposaient sur la terre d'Es<br />

pagne, et aussitôt on les envoyait en avant, car, en arrière,<br />

toutes les places étaient prises et, pour avoir l'honneur du<br />

combat et le profit du pillage, il fallait être au premier rang.<br />

Voilà quelle était réco.noiniêjie_rinvasion musulmane; voilà le<br />

courant qui l'alimentait et permettait aux Arabes, malgré, leurs<br />

peïtês^ malgré les besoins de l'occupation, de se porter -toujours<br />

en ayant et de « raçcourir plus nomfeipL i&<br />

acharnés<br />

apr§£ la défaite .cojome.apjiès.la..victoire:-» "*•-<br />

De ce qui précède résulte la constatation d'un autre fait : c'est<br />

le rôle prépondérant joué par l'élément berbère dans cette inva<br />

sion que nous avons appelée arabe. C'est lui en effet qui en for<br />

mait le fond. Certes, il s'y trouvait des troupes d'Orient et la<br />

plupart des chefs étaient arabes ; mais, nous le répétons, lajnagse.<br />

ét___itj3e£bère ; les Espagnols qui les ont vus de près ne s'y sont<br />

pas trompés et ne leur ont jamais donné que le nom de Maures l<br />

Du reste, les troupes du khalifat étaient occupées ailleurs et il y<br />

avait très-peu d'Arabes en Afrique. La conquête du Magreb au<br />

vne<br />

siècle, que l'on appelle quelquefois chez nous première inva<br />

sion arabe, ne fut pas une invasion : des armées arabes venaient<br />

opérer en Magreb, et, la soumission obtenue,<br />

repartaient pour<br />

l'Orient et allaient combattre dans l'Inde, en Perse ou en<br />

Arménie ; il n'en résultait aucune introduction de population<br />

arabe;<br />

une petite armée d'occupation stationnait dans cette<br />

colonie lointaine et précaire,<br />

mais il ne se produisait pas d'im<br />

migration coloniale. Le gouverneur arabe résidait à Kaïrouân<br />

et avait des représentants en Espagne et dans le Magreb resté<br />

purement berbère, bien que devenu musulman et soumis au<br />

khalifat.<br />

La véritable invasion arabe en Afrique,<br />

cette race dans le pays,<br />

(en 1049),<br />

celle qui a implanté<br />

s'est produite plusieurs siècles plus tard<br />

et dans des conditions bien différentes : elle fut le<br />

1. Pour s'en convaincre, consulter l'Histoire des dynasties musulmanes d'Es<br />

pagne, de Makkari [Ahmed-ibn-Mohammed) et l'Histoire des Musulmans d'Es<br />

pagne, de Dozy.


8 E. MERCIER.<br />

résultat de l'immigration des tribus de Hilal et de Soleïm, chas<br />

sées de l'Arabie et venant, après une station en Egypte,<br />

s'abattre sur la Berbérie. Or ces faits sont encore peu connus<br />

chez nous et c'est pourquoi tout ce qui touche à l'histoire de<br />

l'Afrique septentrionale est si mal apprécié par nos écrivains.<br />

Cette base manque et il serait temps que l'on songeât à combler<br />

une telle lacune.<br />

III.<br />

Les développements dans lesquels nous sommes entré étaient<br />

nécessaires pour bien saisir l'explication qui va suivre. Repre<br />

nons maintenant le récit des faits.<br />

Nous sommes en l'année j^b* Abd-er-Rahmân prépare en<br />

Espagne une expédition formidable : des ports du .Magreb<br />

lui<br />

arrivent des renforts qu'il organise pour l'invasion, et, en atten<br />

dant, il va, comme nous l'avons vu, écraser son lieutenant<br />

révolté dans les Pyrénées et enlever la fille du roi d'Aqui<br />

taine.<br />

En 732, Abd-er-Rahmân traverse les montagnes des Was-<br />

et inonde l'Aquitaine. Marchant droit devant<br />

cons (les Pyrénées)<br />

lui, il arrive sous les murs de Bordeaux, où Eude l'attend avec<br />

toutes ses forces ; mais, cette fois, la fortune est infidèle au prince<br />

chrétien : son armée est écrasée ek s'il échappe au désastre, c'est<br />

pour voir, dans sa fuite, les flammes dévorant sa métropole.<br />

Après avoir saccagé l'Aquitaine, les Musulmans passent la<br />

Loire, se répandent dans les contrées voisines, enlèvent et pillent<br />

Poitiers et marchent sur Tours, où, leur a-t-on dit, se trouve la<br />

plus riche basilique des Franks.<br />

Cependant, dans le nord-est, Karl n'est pas resté inactif; il<br />

a publié le ban de guerre et tout le monde a répondu à son appel.<br />

« Les plus impraticables marécages de la mer du Nord, les plus<br />

sauvages profondeurs de la Forêt-Noire vomirent des flots de<br />

combattants demi-nus qui se précipitèrent vers la Loire, à la<br />

suite des lourds escadrons austrasiens, tout chargés de fer*. »<br />

Eude s'est joint à Karl en lui faisant hommage de vassalité et<br />

lui a amené les débris de ses troupes.<br />

Dans le mois d'octobre 732, les deux immenses armées se trou-<br />

1. Hist. de France. Henri Martin, t. II, p. 202. \


LA BATAILLE DE POITIERS.<br />

vèrent en présence en avant de Poitiers. On passa plusieurs jours<br />

à s'observer curieusement de part et d'autre, et, enfin, les Musul<br />

mans se développèrent dans la plaine et attaquèrent avec impé<br />

tuosité les Franks aux cris mille fois répétés de Dieu est grand!<br />

Les guerriers austrasiens, tenus en haleine par vingt années de<br />

guerres incessantes, essuyèrent sans broncher cet assaut tumul<br />

tueux, et, pendant toute la journée, restèrent inébranlables<br />

comme un roc sous la grêle de traits de leurs ennemis. Vers le<br />

soir Eude et ses Aquitains ayant attaqué de flanc le camp des<br />

Musulmans,<br />

ceux-ci se retournent pour voler à la défense de<br />

leur butin amoncelé dans les tentes; mais aussitôt les lourds<br />

escadrons austrasiens s'ébranlent et fondent comme la foudre<br />

sur les Arabes, qui, grâce à la nuit, peuvent gagner leur camp<br />

en laissant le terrain jonché de leurs guerriers, parmi lesquels<br />

leur chef Abd-er-Rahmân.<br />

Telle fut la bataille de Poitiers ; l'on sait que, le lendemain,<br />

l'armée franke se disposait à attaquer le camp ennemi, lors<br />

qu'elle s'aperçut qu'il était vide : les Musulmans, profitant<br />

des ombres de la nuit,<br />

avaient fui en abandonnant l'immense<br />

butin qu'ils avaient fait dans leur campagne et qui passa aux<br />

mains des barbares du nord. L'armée chrétienne, occupée à<br />

s'approprier ces richesses, ne songea même pas à poursuivre les<br />

vaincus. Eude rentra en possession de son pays dévasté; quant<br />

à Karl, il profita de sa présence en Gaule pour soumettre la<br />

Burgondie ; puis il regagna les contrées du nord pour mettre ses<br />

prises en lieu suret songer à d'autres conquêtes.<br />

Le désastre de Poitiers eut un douloureux retentissement dans<br />

l'empire de l'islamisme ;<br />

mais de tels revers sont insépa<br />

rables des guerres de conquête ; bientôt on ne songea plus qu'à<br />

la vengeance;<br />

un nouvel ouali fut nommé en Espagne et le<br />

khalife lui intima l'ordre de faire oublier la défaite par de nou<br />

veaux exploits. Avant de tenter cette revanche, le gouverneur<br />

dut îutter contre des révoltes locales et Eude profita de ce répit<br />

pour organiser avantageusement ses moyens de résistance. Puis<br />

Eude étant1 mort (753) , son fils voulut secouer le joug<br />

et les hostilités commencèrent entre eux.<br />

de Karl<br />

Pendant ce temps, les Musulmans, attirés par Mauronte,<br />

comte de Provence, qui préférait se déshonorer en contractant<br />

alliance avec eux, que de subir la perspective d'une soumission<br />

inévitable à Karl, envahirent de nouveau la Provence et la


40 E. MERCIER.<br />

Viennoise; puis, remontant la vallée du Rhône, ils vinrent<br />

prendre et saccager la ville de Lyon. Cette pointe ha.rdie,futleur<br />

dernière prouesse en France. Bientôt Karf et ses Franks paru<br />

rent et aussitôt les Musulmans regagnèrent les régions du midi.<br />

Ils tentèrent une faible résistance à Avignon,<br />

les remparts de Narbonne qu'ils concentrèrent toutes leurs forces.<br />

mais ce fut derrière<br />

Karl essaya en vain d'enlever cette ville; il put seulement<br />

empêcher son ravitaillement en allant écraser, près de l'étang de<br />

Sigean, des renforts venus d'Afrique par mer.<br />

Dans le cours des années 739 et 740, Karl revint en Pro<br />

vence, défit et tua le duc Mauronte et rejeta définitiveinentjes<br />

MusulmajjsyîT^eptmanie. Dès lorsTâ situation des Arabes en<br />

Friûïce fut des plus précaires ; bientôt, pourchassés par Peppin-<br />

le-Bref, ils ne conservèrent que Narbonne, qui tomba elle-même<br />

après un siège de sept années. Les dernières bandes<br />

en 759,<br />

musulmanes rejoignirent au-delà des Pyrénées leurs coreligion<br />

naires déchirés par la guerre civile et déjà fortement entamés<br />

par Pelage qui avait enfin organisé une résistance nationale.<br />

IV.<br />

Voilà le récit succinct de l'invasion arabe en France tel que<br />

nous le donne notre histoire.<br />

Loin de nous la pensée de diminuer en quoi que ce soit la<br />

gloire conquise par Karl Martel"ur le champ de bataille de<br />

Poitiers ; cette gloire lui est due et le prince frank eut ce bonheur<br />

de briser la confiance des Arabes, confiance justifiée par leurs<br />

prodigieux succès et qui, doublant leur audace,<br />

répandait la<br />

terreur comme une avant-garde dans le pays envahi. Mais ne<br />

ressort-il pas de la logique des faits que cette belle victoire eût<br />

été insuffisante si les conditions de l'invasion fussent restées les<br />

mêmes? Toutes les forces du Magreb ne furent pas anéanties à<br />

Poitiers. Il est impossible d'évaluer le nombre de Musulmans qui<br />

restèrent sur le champ de bataille ;<br />

mais il semble qu'un chiffre<br />

de quinze ou vingt mille tués est le maximum à admettre pour<br />

une époque où l'on ne disposait d'aucun des engins de destruc<br />

tion modernes. Quant à la retraite, cette conséquence terrible de<br />

toute défaite, elle put s'effectuer sans encombre puisque les vain<br />

queurs ne poursuivirent pas. R est donc permis de dire que ce<br />

ne fut pas là un désastre assez grand pour arrêter net une inva-


•<br />

LA BATAILLE DE POITIERS. \\<br />

sion et la faire bientôt rétrograder, et, qu'en se fondant sur l'expé<br />

rience du passé, les Musulmans devaient,<br />

employées à se refaire,<br />

après quelques années<br />

reparaître plus menaçants et plus ter<br />

ribles. N'est-ce pas ce qui avait eu lieu après leur désastre de<br />

Toulouse,<br />

peut-être plus meurtrier que celui de Poitiers? Es_<br />

possédaient une excellente base d'opérations en Septimanie et ils<br />

n'avaient qu'à partir de là pour porter plus en avant leur ligne<br />

comme ils avaient fait jusqu'alors. Enfin Kari n'était plus là<br />

pour les arrêter, et, du reste, nous les voyons peu de temps après<br />

la bataille de Poitiers envahir la vallée du Rhône et saccager<br />

Lyon.<br />

La raison de leur impuissance c'est que la face des affaires<br />

avait changé en Berbérie. Voici ce qui s'y était passé.<br />

Depuis un certain nombre d'années, les Berbères avaient<br />

accueilli avec faveur un schisme que les orthodoxes stigmati<br />

saient du nom de kharedjisme (hérésie). Ce schisme avait pris<br />

naissance peu de temps après la mort de Mahomet, lors des luttes<br />

pour sa succession entre Ali, son gendre, et Moaouïa. Les kha-<br />

redjites prétendaient que l'Imâm ou chef des fidèles pouvait être<br />

choisi parmi eux tous, tandis que les autres voulaient qu'il fût<br />

pris dans la descendance du prophète (par sa fille Fatima), ou<br />

dans la tribu de Koreïch. TeUe fut l'origine de la scission.<br />

Ecrasés à Nehrouân par Ali, ces sectaires cherchèrent un refuge<br />

au loin ; l'Afrique en recueillit beaucoup ;<br />

avec le temps les désac<br />

cords dogmatiques s'accentuèrent et les kharedjites devinrent<br />

les adversaires de la constitution même du khalifat, adversaires<br />

cachés,<br />

mais dont la haine n'attendait qu'un motif pour faire<br />

explosion et se traduire par des actes. Ce fut surtout dans le<br />

Magreb extrême (Maroc actuel) que le schisme recueillit le plus<br />

grand nombre d'adhérents formant une vaste société secrète1<br />

Les Berbères en firent un moyen de résistance patriotique contre<br />

leurs dominateurs.<br />

Déjà plusieurs gouverneurs étaient venus juger par eux-<br />

mêmes de la gravité de la situation et réprimer les séditions<br />

locales; ils avaient laissé dans l'ouest des hommes fermes et<br />

énergiques. Ces précautions devaient être vaines. En 740, les<br />

Berbères du Magreb extrême se soulèvent comme un seul homme<br />

à la voix de Méïcera l'un des leurs, et mettent à mort leurs<br />

1. En Nouéïri, loc. cit. p. 359 et suiv.


42 E. MERCIER.<br />

oualis1. Le gouverneur de Kaïrouàn fait marcher contre eux<br />

les troupes arabes dont il dispose, mais elles sont taillées en pièces<br />

et le feu de la révolte se propage à tout le nord de l'Afrique.<br />

Bloqué dans Kaïrouàn, le gouverneur demande des secours en<br />

Orient. Le kalife Hecham tire douze mille cavaliers des colonies<br />

militaires de Syrie et les lance contre le Magreb. Ces troupes<br />

rencontrent les Berbères qui les attendent en bon ordre près du<br />

fleuve Sebou : attaquées par eux avec fureur, elles sont en un<br />

instant mises en déroute et coupées de leur base ; les débris des Sy<br />

riens rejetés sur la côte, parce qu'ils ne peuvent opérerleur retraite<br />

au milieu d'un pays révolté, passent en Espagne où ils sont fort<br />

mal accueillis et doivent se conquérir une place à la pointe de<br />

leur épée. La Péninsule,<br />

n'ayant plus de communications avec<br />

l'Orient, est aussi en proie à la révolte, car les kharedjites y sont<br />

nombreux et l'arrivée des Syriens apporte un élément de plus à<br />

l'anarchie2.<br />

Mais nous ne prétendons pas retracer ici les révoltes des kha<br />

redjites ; disons seulement qu'elles durèrent de longues années et<br />

qu'elles coûtèrent la vie à un nombre incalculable de Berbères.<br />

Plusieurs fois les rebelles se rendirent maîtres de Kaïrouàn et<br />

expulsèrent ou tuèrent le gouverneur arabe. La chute de la<br />

dynastie oméiade, son remplacement par celle des Abbacides et<br />

les luttes qui en furent la conséquence favorisèrent le désordre<br />

général en créant de nouveaux partis politiques ; les colonies<br />

demeurèrent sans chefs et celles fp étaient encore fidèles ne<br />

surent plus à qui elles devaient obéir. Dès que la nouvelle<br />

dynastie -fut solidement installée,<br />

elle s'attacha à réduire la<br />

révolte kharedjite du Magreb; mais le khalifat s'épuisa dans<br />

dette lutte qui se termina cependant,<br />

guerres sans merci,<br />

après cinquante années de<br />

par l'écrasement des kharedjites. Dès lors<br />

l'autorité du gouvernement arabe fut sans force en Afrique : ne<br />

pouvant plus compter sur les indigènes ni les employer dans<br />

leurs armées, isolés et noyés au milieu d'ennemis, n'ayant pour<br />

se faire obéir que les milices d'Orient, les oualis de Kaïrouàn<br />

furent soumis au bon plaisir de ces soldats et n'exercèrent<br />

bientôt plus aucune action sur l'ouest. Des dynasties indépen-<br />

1. Ibn Khaldoun, t. I, p. 216 et suiv.<br />

2. En Espagne, la dynastie oméiade ; dans le Magreb, celles des Edricides, à<br />

Fèit; des Midrarides, à Sidjilmassa (Tafllala); des Rostemides, à Xiharet, etc.


LA BATAILLE DE POITIERS. -13<br />

dantes se fondèrent en Espagne et dans le Magreb1, et ces pays,<br />

dès lors séparés pour toujours de l'Orient, vécurent de leur vie<br />

propre en'<br />

attendant que l'est, l'Ifrikïa (Tunisie et Tripolitaine),<br />

s'en détachât aussi.<br />

Il est facile de saisir maintenant de quelle manière le courant<br />

qui entretenait l'invasion musulmane en Europe se trouva dé<br />

tourné : il ne passa plus personne en Espagne,<br />

parce que tout le<br />

monde était occupé en Afrique. Le torrent arrêté à Poitiers rentra<br />

dans son lit et ne déborda plus parce que l'avalanche qui l'avait<br />

gonflé s'était portée d'un autre côté. L'invasion était arrivée à<br />

son terme;<br />

comme une marée d'équinoxe qui a atteint son<br />

summum d'expansion, elle devait, de décroissement en décroisse-<br />

ment, rentrer dans son lit.<br />

Si donc Karl Martel n'avait pas été vainqueur à Poitiers,<br />

nous ne croyons pas que la chrétienté eût été perdue. Les<br />

Musulmans auraient, il est vrai,<br />

porté leurs ravages jusqu'à la<br />

Manche, peut-être jusqu'à la mer du Nord, en supposant que<br />

les fiers guerriers franks n'eussent pas réussi dans un second<br />

effort à les arrêter ;<br />

déplorables,<br />

ces nouveaux succès de l'islam eussent "été<br />

mais nous ne pensons pas que les Musulmans<br />

fussent jamais parvenus à établir dans ces contrées une do<br />

mination sérieuse, parce que les faits dont le Magreb allait<br />

être le théâtre étaient inévitables : la révolte kharedjite était<br />

imminente et n'aurait pas été retardée d'une heure. La cause<br />

étant supprimée, l'effet cessa; l'invasion, n'étant plus alimentée,<br />

ne pouvait plus avancer et devait au contraire bientôt reculer,<br />

car dans de tels cas la réaction suit de près l'arrêt dans l'action.<br />

C'est ce qui eut lieu et voilà, en réalité,<br />

échappa au joug de l'islam.<br />

pourquoi l'Europe<br />

Ernest Mercier.<br />

1. Histoire des Musulmans d'Espagne par Dozy, t. I, p. 255 et suiv.<br />

Extrait de la Revue historique.<br />

Imprimerie Gouverneur, G. Daupeley à Nogent-le-Rotrou.


CONSTANTINE<br />

"■uuhss *b 2&0Zt?"P jZt#y* j<br />

//ïyz


CONSTANTINE<br />

AVANT LA CONQUÊTE FRANÇAISE<br />

837<br />

NOTICE<br />

sur cette ville à l'époque du dernier bey<br />

Par M. Ersest MERCIER<br />

Le 13 octobre 1837, l'armée française pénétrait par la.<br />

brèche dans Constantine,<br />

après un siège aussi glorieux<br />

que meurtrier pour nos armes. Rien de plus curieux et<br />

de plus caractéristique que l'aspect que présentait alors<br />

la vieille ville de Syphax et de Jugurtha, déjà si pitto<br />

resque par sa position topographique. L'étonnement des<br />

vainqueurs, à celte vue,<br />

a été parfaitement traduit par<br />

l'un d'eux, M. le capitaine de la Tour du Pin, dans sa<br />

Relation de la prise de Constantine : « La brèche<br />

est escaladée, dit-il,<br />

mais la colonne d'assaut trouve<br />

là quelque chose de plus terrible, de plus sinistre que la<br />

présenc» de l'ennemi;<br />

une énigme dévorante toute prêle


à engloutir quiconque ne la devinerait pas; ce sont des<br />

construclions incompréhensibles; des enfoncements qui<br />

promettent des passages et qui n'aboutissent pas; des<br />

apparences d'entrée qui n'amènent aucune issue; des<br />

rentrants et des saillants embrouillés à plaisir; des sem<br />

blants de maisons dont on ne sait prendre le sens ou la<br />

face »<br />

Tel était le vieux Constantine,<br />

européens du xixe<br />

et l'on comprend que des<br />

siècle, des Français, venant s'établir au<br />

milieu de cet amas de bicoques entassées,<br />

toutes les lois de l'art et du bon sens,<br />

en dépit de<br />

sur les vestiges<br />

superposés de diverses civilisations, ont dû dès l'abord<br />

modifier profondément ce dédale pour en rendre l'habi-<br />

lion possibleAm a donné du jour et de l'air, percé, dé<br />

moli, nivelé, aligné,<br />

reconstruit les parties occupées en<br />

premier lieu, c'est-à-dire la Kasba et le haut de la ville.<br />

Les habitations indigènes y ont successivement disparu<br />

pour faire place aux maisons européennes; puis l'occu<br />

pation française s'est étendue en descendant sur le pla<br />

teau; des rues relativement larges, poussées jusqu'au<br />

ravin, ont coupé, Ijnorcelé les parties restées arabes, de<br />

sorte que, maintenant, le vieux Constantine n'existe pour<br />

ainsi dire plus que dans le quartier de Rab-el-Djabia et<br />

dans partie de celui d'El-Kantara.^<br />

La physionomie de Constantine est donc profondément<br />

changée déjà et se transforme chaque jour : là où deux<br />

mulets ne pouvaient circuler de front el ne parvenaient à<br />

une issue qu'après avoir décrit des méandres sans nombre,<br />

se croisent des voitures de toute sorte; les hôtels à trois<br />

étages ont remplacé les mosquées délabrées ; le marchand


— — 5<br />

arabe quitte la petite échoppe où,<br />

comptoir,<br />

en restant assis à son<br />

tout était à la portée de sa main et débite main<br />

tenant sa marchandise dans des magasins bien ouverts;<br />

enfin, les indigènes font reconstruire par des architectes<br />

français les maisons qui leur [restent et que la vétusté<br />

ou des nécessités de voirie forcent de réédifier. Encore<br />

quelques années et il ne restera de l'ancienne ville ber<br />

bère qu'un souvenir s'éteignant de jour en jour, à mesure<br />

que les contemporains disparaîtront. Déjà ce souvenir est<br />

fort vague parmi les indigènes, pour toute la partie, la<br />

première francisée, comprise entre le bouvelard du Nord<br />

et la rue Damrémont.<br />

11 y aurait cependant pour nous plus d'un intérêt à ne<br />

pas le laisser périr à tout jamais et il ne serait que temps<br />

de dresser l'inventaire de Constantine en 1837,<br />

qu'à titre de curiosité archéologique.<br />

ne fût-ce<br />

C'est dans cette pensée que j'ai entrepris le présent<br />

travail. A cet effet, j'ai relevé le plan dressé par l'Etat-<br />

major après la prise,<br />

plan malheureusement incomplet et<br />

inexact dans des détails, mais qui, à défaut d'autre, pré<br />

sente, pour les lignes principales, des caractères précieux<br />

d'authenticité. J'y<br />

ai ensuite placé tous les noms que j'ai<br />

pu recueillir de la bouche des Indigènes,<br />

laissé de présenter de réelles difficultés,<br />

ce qui n'a pas<br />

en présence<br />

du peu de concordance de certains renseignements et<br />

alors que les locaux auxquels s'appliquaient les vocables<br />

ont été entièrement transformés. Pour compléter la carte<br />

et aider aux recherches, j'ai dressé un index général des<br />

noms, dont j'ai donné l'orthographe arabe et,<br />

autant que<br />

possible, la signification, en indiquant la situation actuelle<br />

ou la transformation opérée.


6<br />

Loin de moi la prétention d'avoir fait une œuvre abso<br />

lument complète et exacte : cela, je le répète,<br />

impossible; mais j'espère que les erreurs n'y<br />

est déjà<br />

sont pas<br />

trop graves ni trop nombreuses, et je l'offre tel quel, per<br />

suadé que plus l'on attendra,<br />

difficile et incertaine.<br />

Constantine, le 10 mars 1878.<br />

Constantine,<br />

et plus la restitution sera<br />

que les anciens auteurs arabes appellent<br />

l'aérienne (Kosantina-t-el- Haoua) (1),<br />

teau qui s'abaisse en pente assez régulière,<br />

s'étend sur un pla<br />

mais de plus<br />

en plus rapide, du nord-ouest au sud-est, entouré de trois<br />

côtés par l'espace,<br />

vaste presqu'île reliée à la terre par<br />

un isthtne étroit la ratâchant aux croupes du Koudiat-Ati.<br />

Il résulte de cette situation que la ville ne peut avoir<br />

d'accès direct que sur une face, celle du sud-ouest, au<br />

moyen de l'isthme dont nous avons parlé et qu'il n'est<br />

possible de relier les autres côtés à la terre que par des<br />

ponts jetés sur le ravin qui entoure la cité au sud-est<br />

et au nord-est. Deux rentrants échancrent le plateau :<br />

l'un assez prononcé, au sud, et l'autre, moins grand, à<br />

l'est.<br />

(.1) Lill. Constantine de l'espace ou du ravin.


En 1837,<br />

— — 7<br />

trois portes existaient sur la face de l'ouest :<br />

1° La porte neuve (El-Bab-el-Djedid),<br />

qui se trouvait<br />

au-dessus de la porte Valée actuelle, derrière l'emplace<br />

ment occupé maintenant par le magasin à orge de l'Admi-<br />

tralion, et donnait accès sur le versant nord de l'isthme,<br />

alors beaucoup plus étroit, véritable langue de terre dont<br />

nous avons décuplé la largeur par des remblais ;<br />

2° La porte de la rivière (Bab-el-Ouad),<br />

la porte Valée,<br />

au-dessous de<br />

vis-à-vis du centre du square. On descen<br />

dait par là vers le Bardo, d'où le nom : porte de la rivière;<br />

3° Et la porte de la citerne (Bab-elDjabia), au-dessous<br />

de la précédente et desservant la parlie basse de la ville,<br />

laquelle a pris le nom de la porte.<br />

A l'opposé, une quatrième porte,<br />

Kantara),<br />

celle du pont (Bab-el-<br />

permettait de traverser le ravin sur un ancien<br />

pont romain, restauré en 1792 par Salah-Bey, qui avait<br />

chargé de ce soin un architecte mahonais, don Barto-<br />

loméo. On sait que ce pont s'est écroulé le 18 mars 1857.<br />

et a été remplacé par le beau pont en fer qui existe<br />

maintenant.<br />

Telles étaient les seules entrées de cette ville, qui<br />

occupe une superficie de plus de trente hectares, et<br />

encore les deux premières portes faisaient-elles,<br />

en réa<br />

lité, double emploi.<br />

Un mur crénelé entourait la ville; mais cette enceinte<br />

était fort irrégulièrè et l'on avait, en maints endroits,<br />

adossé la muraille au rocher, ce qui, sur le plan, est<br />

indiqué par des lacunes qu'on pourrait prendre pour des<br />

entrées.<br />

Constantine était divisé en quatre quartiers principaux :


La Kasba, au nord-est ;<br />

Tabia, au nord-ouest;<br />

El-Kantara, au sud-est;<br />

Bab-el-Djabia,<br />

— — 8<br />

au sud-ouest.<br />

Entre ces quatre groupes occupant les quatre angles,<br />

mais dont les limites n'avaient rien de bien défini, s'éten<br />

dait un large espace n'ayant pas de désignation généri<br />

que mais une foule d'appellations particulières : c'était<br />

la partie de la ville réservée spécialement au commerce et<br />

aux métiers et le siège des hauts fonctionnaires de l'admi<br />

nistration.<br />

Les rues, étroites et contournées, coupées d'impasses,<br />

n'avaient généralement pas de noms particuliers; chaque<br />

impasse était désignée par le nom du propriétaire de la<br />

principale maison s'y trouvant, Zenket-dar-bou-Khoubza,<br />

par exemple, ou par celui de la mosquée voisine : Zenket-<br />

Sidi-Offane ; enfin, l'on rencontrait dé petits carrefours<br />

ayant une désignation particulière : comme Kouchet-ez-<br />

Z'iate, Ech-Chott, El-Hara-el-Hamra, etc. ; des voûtes (Sa<br />

bote et Kous), de petites places,<br />

comme Rahbet-el-Djemal<br />

ou Souk-el-Acer, de sorre que la même rue, dans son pro<br />

longement, rencontrait une série de dénominations diffé<br />

rentes. En ajoutant à cela l'absence complète de numéros<br />

aux maisons,<br />

on avouera qu'il devait être difficile à un<br />

étranger de s'y reconnaître dans un pareil fouillis.<br />

La ville était donc,<br />

de petits quartiers (Houma).<br />

Quatre artères principales,<br />

en réalité divisée en une multitude<br />

reliées entre elles par un<br />

grand nombre de ruelles, sillonnaient Constantine de<br />

l'ouest à l'est. C'était,<br />

en commençant par le haut :


- 9<br />

—<br />

1° Une rue partant d'El-Bab-el-Djedid montait pour<br />

passer devant Dar-el-Kkalifa (le Trésor .actuel) et condui<br />

sait à la Kasba,<br />

en trouvant sur son parcours : Redir-bou-<br />

el-R'arate, point où nous avons percé la rue d'Aumale, et<br />

mosquées de Djama-Khelil, Sidi-Yahia-el-Fecili et Sidi-<br />

Mouferredj. C'est à peu près le trajet des rues Basse-<br />

Damrémonl et Damrémont.<br />

La Kasba, dont l'enceinte n'était pas délimitée comme<br />

de nos jours,<br />

tions particulières-,<br />

contenait un certain nombre de construc<br />

appartenant notamment aux familles<br />

Ben-Hasseïn et Ben-Koutchouk-Ali ; plusieurs mosquées :<br />

Djama-el-Kasba, Sidi- Abd-el-Kader, Kobbet-Bechir ; une pri<br />

son (Habs), établie, dit-on, dans les citernes romaines, sorte<br />

à'in-pace; une réunion de métiers de tisserands (Terbïât-<br />

Houka), etc. A l'extrémité nord se trouvait le sinistre<br />

emplacement appelé Kehef-Chekoura (le rocher des sacs),<br />

d'où la tradition prétend que l'on précipitait dans le ravin<br />

les femmes infidèles ou celles dont les beys voulaient se<br />

débarrasser.<br />

Au-dessus de cette rue,<br />

entre la Kasba et le front nord.<br />

ouest, s'étendait le quartier de Tabia, divisé lui-même en<br />

Tabia-el-Kebira (la grande Tabia) et Tabia-el-Berrariia (Tabia<br />

des étrangers). Plusieurs mosquées s'y trouvaient; l'une<br />

d'elles, celle de Sidi-Ali- ben- Makhlouf, donnait son nom à<br />

l'angle de l'ouest, près de Bordj-Assous (la tour romaine).<br />

2° Une rue partait d'El-Moukof,<br />

près de l'endroit où se<br />

trouvait le tétrastyle de Potitus, démoli lors de la cons<br />

truction de l'hôtel de Paris,<br />

et conduisait à Souk-el-Acer<br />

(la place Négrier). Elle passait devant Dar-el-Bey, traver<br />

sait Souk-el-R'ezel (le marché de la laine filée) au-dessous


10<br />

de la mosquée de ce nom (la Cathédrale actuelle^<br />

palais (Derb), puis le quartier d'El-Blâte,<br />

el-Djouza,<br />

et du<br />

longeait Djama-<br />

mosquée qui se trouvait à l'entrée de la rue<br />

Richepanse, sur la place de l'Asile, et débouchait à Soukel-Acer<br />

par la voûle (Sabale) de Salah-Bey.<br />

Celle voie, qui était appelée, dans la seconde partie de<br />

son parcours, Zekak-el-Blâte, a reçu de nous le nom de<br />

rue Caraman, Elle communiquait avec El-Bab-el-Djedid<br />

par la ruelle nommée maintenant rue du Trésor, et avec<br />

Bab-el-Ouad par l'ancienne enlrée de la rue Rouaud.<br />

Des rues transversales la reliaient à la précédente. On<br />

parvenait ainsi à Rous-ed- Douâmes (les lêtes des souter<br />

rains), dont l'emplacement paraîl avoir été vers la rue<br />

actuelle du Palais, aux deux palais (Derb et Dréïba), à<br />

diverses mosquées telles que Sidi-Ferghane ,<br />

Annaba, etc.,<br />

Sidi-Bou-<br />

au lieu dit Hammam-es-Soultane et au pas<br />

sage appelé El-.)Iorr, sous la Kasba.<br />

Au-dessus de Souk-el-Acer se trouvait la mosquée de<br />

Salah-Bey, dite de Sidi-el-Kettani, dont nous avons refait<br />

la façade et à laquelle est adjointe la Merlraça. Pour y<br />

arriver,<br />

on passait devant le petit oratoire d'une lemme<br />

morte en odeur de sainteté, Setti-Frikha. Au delà, on<br />

entrait dans Souk-el-Djemâa (le marché du vendredi),<br />

occupé maintenant en partie par le collège. Des ruelles<br />

menaient de là à la Kasba en passant par Sour-ed-Derk.<br />

3° Une rue partant, de Bab-el-Ouad menait à Rahbet-es-<br />

Souj (la lia Ile de la laine), dont nous avons fait la place des<br />

Galettes. Elle a'formé les rues Rouaud, Combes el Vieux.<br />

Celait la principale artère du commerce et des métiers,<br />

qui s'y trouvaient groupés par catégories, formant ainsi


— — 11<br />

une suite de Souk ou bazars,<br />

villes d'Orient.<br />

comme dans la plupart des<br />

On trouvait d'abord les droguistes (Attarine);<br />

puis les<br />

selliers (Serradjine) ; puis les teinturiers (Sebbarine). Là<br />

la rue se divisait en deux branches venant déboucher<br />

l'une au sommet et l'autre au bas de Rahbet-es-Souf,<br />

chacune d'elles se terminant par une longue voûte. Le<br />

tout était réuni sous l'appellation générique de Souk-et-<br />

Teddjar (le bazar du commerce).<br />

Dans la branche supérieure se trouvaient à la suite :<br />

les cordonniers (Kherrazine) , Souk-el-Khelek (le marché<br />

populeux), les forgerons (Haddadine)<br />

(le grand bazar).<br />

et Es-Souk-el-Kebir<br />

Dans la branche inférieure venaient successivement :<br />

les fabricants de tamis (R'erabline), les menuisiers (Neddja-<br />

rine)<br />

et les parchemineurs (Rekkakine).<br />

Entre ces deux branches et au-dessus d'elles se trou<br />

vaient encore diverses rues transversales ou parallèles,<br />

occupées par d'autres industries, telles que les fabricants<br />

de chaussures de femmes (Chebarliine), les passementiers<br />

(Kazzazine), les bijoutiers (Sara), les fabricants de bâts<br />

de mulets (Bradâdine), les marchands de légumes (Khad-<br />

darine), les bouchers (Djezzarine), les marchands d'arti<br />

chauts sauvages (Kherachefïine), etc.<br />

Au delà de Rahbet-es-Souf, des ruelles menaient plus<br />

ou moins directement, en montant, à Souk-el-Acer;<br />

d'autres conduisaient, sur le même plan, à Chara, le<br />

Ghetto, où Salah-Bey avait cantonné les Israélites ; enfin,<br />

d'autres faisaient descendre à El-Kanlara, en passant par<br />

Sidi-el-Djelis,<br />

française.<br />

mosquée dont nous avons fait l'école arabe


— — 12<br />

Un grand nombre de mosquées, parmi lesquelles celle<br />

de Sidi-L'Akhdar, el plusieurs bains se trouvaient dans le<br />

pâté que nous venons de circonscrire.<br />

Presque à l'entrée de cette rue, en descendant à droite,<br />

on trouvait Rahbet-el-Djemal (la halle aux chameaux), d'où<br />

l'on descendait encore par une rue en pente très-rapide<br />

et appelée Ed-Deroudj (les escaliers, dont nous avons fait<br />

la rue de l'Échelle), à Bab-el-Djabia.<br />

Au-dessous de Dar-el-Bey<br />

(palais et caserne à l'époque<br />

turque), après avoir passé devant Ras-el- Kherrazine (la<br />

tête des cordonniers),<br />

mille de Ben-el-Feggoun,<br />

où se trouvait la Zaouïa de la fa<br />

cheïkh-el-Islam (actuellement la<br />

mosquée de Hàmmouda), l'on descendait assez directement<br />

sur El-Djamâ-el-Kebir (la grande mosquée), dont nous<br />

avons reconstruit la façade sur la. rue Nationale, à l'en<br />

droit dit El-Batha,<br />

Nationale,<br />

carrefour qui a été coupé par la rue<br />

en face de l'entrée de la rue Fonlanilhes.<br />

4° Enfin, une rue partait de Bab-el-Djabia,<br />

passait à<br />

Souïka (le petit marché), à Zellaïka (la glissante) et à<br />

Ech-Chott (le tard), à l'angle de la rue Nationale, sur le<br />

bord du ravin "de là, elle remontait pour passer devant<br />

la ruelle des Arbaïn-Cherif, puis à Frane Birrou (les fours<br />

à chaux de Birrou), puis à la mosquée de Sidi-Bou-Mâza,<br />

et, enfin, atteignait Bab-el- Kantara.<br />

Cette rue, la seule qui, entrant par une porte, traver<br />

sât directement la ville pour sortir par la porte opposée,<br />

a été nommée par nous rue Perregaux.<br />

A l'entrée de cette voie, des rues descendaient pour<br />

desservir la partie inférieure du quartier de Bab-el-Djabia<br />

et venaient aboutir à l'extrémité méridionale de la ville,


- 13<br />

—<br />

à la pointe de Sidi-Rached, à la mosquée de Sidi-Bou-<br />

Rarda et à Bir-el-Menahel (le puits des ruchers), nom<br />

donné à la parlie bordant le ravin. Dans le bas de ce<br />

quartier, la déclivité du terrain est fort grande, et, comme<br />

les rues descendent généralement à pic, leur inclinaison<br />

est attestée par les appellations significatives de Zellaïka<br />

(la glissante), de Zerzaïh'a (la glissade) et de Derdaf (les<br />

petits pas). Les mosquées ne manquent pas dans cette<br />

partie de la ville : Sidi-Abd-el-Moumen, Sidi-Rached, Sidi-<br />

Ali-Tandji, etc.<br />

Dans le bas du quartier d'El-Kantara,<br />

un certain nom<br />

bre de ruelles conduisaient, en pente plus ou moins ra<br />

pide, à l'extrémité du plateau.<br />

Sur tout le front sudrest, la ville était garnie,<br />

au bord<br />

même du ravin, de tanneries dont la plupart existent<br />

encore. En se plaçant là, les tanneurs ont eu évidem<br />

ment pour but d'éviter les frais de transport de leurs<br />

détritus et de leurs eaux qu'ils jettent à même dans le<br />

ravin, sans, pour ainsi dire, se déranger.<br />

Le ravin était, du reste, le réceptacle des immondices<br />

de la ville. Au fond de l'échancrure méridionale, près<br />

d'Ech-Cholt, se trouve l'emplacement dit El-Merma, d'où<br />

l'on précipitait les fumiers dans le gouffre; là, les nuées<br />

de corneilles et de choucas logés dans les anfracluosités<br />

des rochers venaient y chercher leur nourriture, et enfin,<br />

les grandes crues de l'hiver achevaient ce travail peu coû<br />

teux d'enlèvement des issues d'une grande cité.<br />

rité,<br />

Tel était le vieux Constantine ; singulière ville,<br />

en vé<br />

et bien capable de forcer à l'étonnement le voyageur<br />

le'<br />

plus blasé. Un général tunisien, après avoir en vain


— 14<br />

essayé de s'en rendre maître par le siège, exhala, dit-on,<br />

son dépit par cette phrase caractéristique dans sa cru<br />

dité : « Ailleurs les corbeaux fientent sur les hommes;<br />

ici ce sont les hommes qui fientent sur les corbeaux. »<br />

II.<br />

Après avoir passé cette rapide revue de Constantine<br />

avant la conquête, il nous reste à examiner,<br />

non moins<br />

rapidement, les modifications principales qui y ont été<br />

apportées par l'occupation française.<br />

Les deux portes EI-Bab-el-Djedid et Bab-el-Ouad ont été<br />

bouchées et l'on a percé entre elles la porte Valée, de<br />

sorte que Constantine actuel n'a que trois portes :<br />

La porte Valée, nouvelle;<br />

La porte Djabia, à laquelle on n'a pas touché;<br />

Et la porte d'El-Kantara,<br />

place.<br />

qui a été refaite à la même<br />

Le rempart a été en partie reconstruit, rectifié et pourvu<br />

d'un chemin de ronde.<br />

Le quartier"e Tabia a été coupé dans toute sa lon<br />

gueur par la rue Sauzai, partant du rempart, derrière<br />

Sidi-Ali-ben-Makhlouf,<br />

pour aboutir à la Kasba. Les rues<br />

Sitlius, Leblanc, Sassi, Desmoyen et du Rocher ont coupé<br />

perpendiculairement la rue Sauzai,<br />

entre le boulevard du<br />

Nord et la rue Damrémont. Il n'est donc resté des anciennes<br />

voies de Tabia que ces ruelles informes qui se nomment<br />

les rues du Lion, du Nord ou Salluste.<br />

La Kasba a été entourée d une enceinte régulière et<br />

continue. Toutes les constructions qui s'y trouvaient ont


— — 15<br />

été démolies pour faire place aux casernes d'infanterie, à<br />

l'hôpital militaire, à la prison et à l'artillerie.<br />

La rue qui a reçu le nom de rue Damrémont, a été,<br />

autant que possible, élargie et régularisée; on l'a poussée<br />

en outre jusqu'au ravin. La rue de l'Hôpital, celle de la<br />

Fontaine, y<br />

ont débouché perpendiculairement.<br />

La rue d'Aumale a été percée dans l'espace compris<br />

entre Redir-bou-el-R'arate et *Djama-el-Djouar.<br />

La rue Cahoreau a été ouverte entre Sidi-Ali-ben-<br />

Makhlouf et Tabia.<br />

La place, devant le Palais, a été régularisée et agrandie.<br />

La rue Caraman a été ouverte entre El-Moukof et la<br />

place Nemours, laquelle a été formée par la démolition des<br />

constructions occupant son périmètre.<br />

Souk-el-Acer a été agrandi et est devenu la place Négrier.<br />

Souk-el-Djemaa a fait place au collège.<br />

La rue de France a été ouverte depuis Souk-el-Rezel,<br />

au coude de la rue Caraman, jusqu'au ravin, à l'échan-<br />

crure du. front nord-est, près de Sidi-Sebaïni, donnant<br />

ainsi un accès facile à Rahbet-es-Souf et au quartier de<br />

Chara.<br />

Les rues des Cigognes et Sidi-L'Akhdar ont été percées.<br />

La place de Rahbet-es-Souf a élé régularisée.<br />

La maison d'Ahmed-Bey,<br />

la caserne des janissaires, a été démolie,<br />

que les Français ont appelée<br />

petites mosquées et maisons environnantes,<br />

place au théâtre et au marché aux légumes.<br />

Mais, ce qui a porté le plus rude coup<br />

tantine,<br />

ainsi que les<br />

pour faire<br />

au vieux Cons<br />

c'est évidemment la percée de la rue Nationale<br />

faisant communiquer la porte Valée avec celle d'El-Kan-


— — 16<br />

tara, la Halle aux grains avec la gare, la route de Philippe-<br />

ville avec celle de Batna.<br />

Cetle voie, la plus large de celles de Constantine, est<br />

partie de la place Nemours pour venir directement à<br />

Ech-Cholt,<br />

en traversant la Grande Mosquée el le carrefour<br />

d'El-Batha; de là, tournant presque à angle droit, elle<br />

s'est dirigée sur la porte d'El-Kantara,<br />

en se tenant au-<br />

dessous de la rue Perregaux et en coupant les petites<br />

rues qui descendent au bord du ravin.<br />

Telles ont été les principales modifications apportées<br />

par nous au vieux Constantine. Le reste,<br />

le quartier de Bab-el-Djabia,<br />

excentrique,<br />

et spécialement<br />

grâce à sa position plus<br />

a conservé à peu près sa physionomie. Et<br />

cependant bien des angles ont déjà été redressés, bien des<br />

réparations ont été faites par des européens et ont enlevé<br />

aux maisons ce caractère de haute fantaisie que pouvaient<br />

seuls donner des maçons indigènes. Enfin,<br />

ont été placés sur chaque porte.<br />

des numéros<br />

Si les maisons ont été numérotées, les rues ont reçu<br />

des noms. En comblant celte lacune, on a eu la généreuse<br />

pensée de perpétuelle souvenir des principaux officiers<br />

morts pendant le si%e, et leurs noms ont servi à baptiser<br />

les rues de la ville qu'ils avaient contribué à prendre.<br />

Citons par exemple les rues :<br />

Damrémont,<br />

Caraman,<br />

Perregaux,<br />

Combes,<br />

Vieux,<br />

Hackett,


Sérigny,<br />

Désmoyen,<br />

Leblanc,<br />

L'Huilier,<br />

Potier,<br />

Morland,<br />

Cahoreau,<br />

Rouaud,<br />

Madier,<br />

Grand,<br />

Guignard,<br />

Béraud.<br />

— — 17<br />

D'autres ont reçu les noms de certaines troupes ayant<br />

pris part au siège. Ce sont les rues :<br />

des Zouaves,<br />

du 26e de Ligne,<br />

du 23e de Ligne,<br />

du 47e de Ligne,<br />

du 17e Léger,<br />

du 3e Bataillon d'Afrique.<br />

D'autres appellations ont été données en l'honneur de<br />

la famille alors régnante ou en souvenir de la Patrie. Ce<br />

sont :<br />

Les places Nemours et d'Orléans,<br />

Les rues d'Aumale,<br />

de France,<br />

et Nationale.<br />

D'autres ont été prises dans l'histoire ancienne locale.<br />

Ce sont les rues :<br />

de Cirta,<br />

de Massinissa,


Enfin,<br />

—<br />

_ 18<br />

de Karthage,<br />

Sittius,<br />

Bélisaire,<br />

Salluste,<br />

Salomon (le général byzantin).<br />

un certain nombre de dénominations ont repro<br />

duit l'ancienne appellation indigène,<br />

arabe,<br />

soit par l'équivalent français.<br />

Pourjtles premières citons :<br />

Et pour les autres :<br />

Place Rahbet-es-Souf,<br />

Place^Sidi-el-Djelis,<br />

Rue Arbaïn-Cherif,<br />

Rue Sidi-Nemdil,<br />

Rue Abd-Allah-Bey,<br />

Rue Bou-Rarda,<br />

Rue Sidi-Abd-el-Hadi.<br />

Place des Chameaux,<br />

Rue des Amandes,<br />

Rue du Moulin,<br />

Ri| de l'Arc,<br />

Rue de l'Échelle,<br />

Rue des Mouches,<br />

Rue des Bains,<br />

Rue des Alises,<br />

Rue du Mouton,<br />

Rue des Corneilles,<br />

Rue des Tanneurs,<br />

Rue de l'Ecurie.<br />

soit sous sa forme


INDEX GÉNÉRAL DE CONSTANTINE<br />

au moment de la conquête française<br />

Aïoun-el-Kasba. . . .<br />

Akouas- (ou Kous)<br />

ben-Nedjda<br />

'ij—SSr3<br />

y-) t ,*.l ç_3l<br />

cT- CT><br />

Arbaïn-Cherif . . .<br />

Bab-el-Djabia<br />

>->s<br />

lyLJyL;<br />

JEl) Bab-el-Djedw.<br />

1837<br />

(Les fontaines de la Kasba). Au<br />

bout de la rue Damrémont, à l'en<br />

trée de la rue de la Fontaine.<br />

(Les arceaux de Ben-Nedjda). Ce<br />

nom était donné à la partie infé<br />

rieure de la rue de l'Arc (Bab-el-<br />

Djabia).<br />

(Voir Djama-Arbaïn-Cherif). Nom<br />

du carrefour situé devant cette mos<br />

quée, rue Perregaux, au-dessus du<br />

grand escalier de là rue Nationale.<br />

(La porte de la citerne). Est<br />

demeurée intacte en conservant<br />

son nom.<br />

(La porte neuve). Se trouvait au-<br />

dessus de la porte Valée actuelle,<br />

derrière le Trésor. A été suppri<br />

mée.


Bab-el-Kantara. . .<br />

iy.L_i_àJ! « >L_j<br />

Bab-el-Kasba<br />

Ï__._*a-S-J! v ,1-3<br />

Bab-el-Ouad<br />

Bains<br />

Bazars<br />

AyA\ yiy j<br />

Bir-el-Menahel. . .<br />

J.-=>L_À_ltj-y<br />

20<br />

(La porte du pont). A été re<br />

construite par nous à la même<br />

place, après exhaussement du ter<br />

rain,<br />

et porte le même nom.<br />

(La porte de la Kasba). Se trou<br />

vait à peu près à l'emplacement de<br />

la porte actuelle de la Kasba.<br />

(La porte de la rivière). Se trou<br />

vait plus bas que la porte Valée,<br />

vis-à-vis le milieu du square n° I.<br />

A élé supprimée.<br />

Voir Hammam.<br />

Voir Souk.<br />

(Le puits des ruchers), nommé<br />

vulgairement Bine-eUMenahel. Ce<br />

nom s'applique au trajet suivant :<br />

Au bas de la rue de l'Arc (Bab-el-<br />

Djabiaj, on entre dans la rue des<br />

Corneilles, qu'on suit jusqu'à la<br />

rencontre de la rue des Tanneurs;<br />

on remonte la rue des Tanneurs<br />

jusqu'à l'angle de la ruelle qui la<br />

fait communiquer avec la rue de<br />

l'Arc. Tout cet espace porte le nom<br />

de Bir-el-Menahel. La rue appelée<br />

par nous El-Menahel et qui débou<br />

che dans la rue des Tanneurs, se<br />

trouve donc pour la plus grande<br />

partie en dehors de ce trajet.


Blate<br />

Bordj-Assous. . .<br />

(j»y-J\ £j-><br />

Carrefour.<br />

Casernes . .<br />

Chek-Badandjala. ,<br />

Dar.<br />

Dar-Ahmed-Bey .<br />

.<br />

^Lyy|_,|j<br />

Dar-Amine-Kjoudja.<br />

Dar-Bach-Tarzi. . . .<br />

Dar-Braham-Khoudja<br />

Ai<br />

.^lyiy<br />

21<br />

Voir El-Blâte.<br />

(Le fort d'Assous). La tour ro<br />

maine qui avait donné son nom à<br />

la rue de la Tour et qui a disparu<br />

dans la rectification du rempart de<br />

l'ouest.<br />

Voir Houma, Hara et Mahla.<br />

Voir Kasba, Dar-Ahmed-Bey, Dar-<br />

ben-Baba, Dar-bou-Baaïa, Dar-el-<br />

Bey.<br />

(L'aubergine fendue en quatre).<br />

Le croisement des rues Combes et<br />

Sérigny.<br />

Maison.<br />

(La maison d'Ahmed-Bey). La<br />

vaste construction que nous appe<br />

lions caserne des janissaires et qui<br />

a été démolie pour faire place au<br />

nouveau théâtre.<br />

(d'Amine-Khoudja). A été démo<br />

lie pour l'établissement du collège.<br />

(de Bach-Tarzi). Rue Arbaïn-<br />

Cherif, à son débouché rue Vieux,<br />

dans l'impasse portant le nom de<br />

la famille Bach-Tarzi.<br />

(de Braham-Khoudja). Au bas de<br />

la rue Madier, à l'angle de la place<br />

de l'Asile. A, disparu.


- Dar ben - Abd<br />

Latif<br />

- el -<br />

,>y-C %Jjli<br />

Dar- benAïssa ....<br />

Dar-ben-Baba<br />

Ly Ly t J<br />

jyj<br />

Dar-ben-Dali......<br />

yr^.y.J^<br />

Dar-ben-Douïb-ez-<br />

ZÏATE<br />

obyl! y^>„y .y jb<br />

DAR-BEN-EL-BEDJAOUi<br />

Dar-ben-el-Feggoun (ou Lefgoun)<br />

J_jhM-'t J-fj ^<br />

Dar-ben-el- Moufti.<br />

jy^yy^<br />

Dar-ben-el- Ounissi.<br />

y<br />

. I û<br />

Dar-ben-el-Razali. .<br />

Dar-ben-K\ïd-Kasba.<br />

— 22 —<br />

(de Ben-Abd-el-Latif;. A l'angle<br />

des rues Dali-Moussa et des Abys<br />

sins.<br />

(de Ben-Aïssa). 1° rue Abd-Allah-<br />

Bey, n°<br />

10; —<br />

2° rue Vieux, 88.<br />

(de Ben-Baba). La caserne de la<br />

rue Sidi-Nemdil. A disparu et a<br />

fait place à un bain maure.<br />

(de Ben-Dali). Impasse de la rue<br />

Abd-Allah-Bey, au-dessous de la<br />

rue de Cirta.<br />

(de Ben-Douïb, le marchand<br />

d'huile). Rue des Tanneurs, 6 (Bab-<br />

el-Djabia).<br />

(de Ben-el-Bedjaoui). Rue des<br />

Zouaves).<br />

(de la famille Ben-Lefgoun ou<br />

Ben-Cheïkh). Rue Fontanilhes.<br />

(de Ben-el-Moufti). Rue Perre<br />

gaux,<br />

vis-à-vis Arbaïn-Cherif.<br />

(de Ben-el-Ounissi). Rue des<br />

Abeilles (Bab-el-Djabia).<br />

(de Ben-el-Rezali). A donné son<br />

nom à la rue. Rue de l'Écurie, 15<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

75.<br />

(deBen-Kaïd-Kasba). Rue Vieux,


Dar-ben-Kenak<br />

Dar- (ou Diar) ben-<br />

y<br />

Koutchouch-Ali<br />

' C/--' "<br />

Dar-ben-Ouareth .<br />

.<br />

Dar-ben-Oudina. . . .<br />

Dar-ben-Roum<br />

Dar-ben-Zekri<br />

Dar-bou-Baaïa<br />

ïyLx-j y Aà<br />

Dar-bou-Chettabïa. .<br />

î-jLLî «*?'->'<br />

Dar-bou-Khoubza . .<br />

Byy. yl . |0<br />

23<br />

(de Ben-Kenak). Rue Perregaux,<br />

entre la rue de Mila et Arbaïn-<br />

Cherif.<br />

(de Ben-Koulchouk-Ali). Dans la<br />

Kasba, au fond, vis-à-vis de la<br />

porte. Disparu.<br />

(de Ben-Ouareth). Dans une im<br />

passe au sommet de la rue de<br />

l'Échelle, sous la place des Cha<br />

meaux.<br />

(de Ben-Oudina). Impasse rue de<br />

l'Echelle, au-dessus de la rue de<br />

Cirla.<br />

(de Ben-Roum). Rue Damrémont,<br />

en face de la Kasba. A disparu.<br />

(de Ben-Zekrij. Rue du Tribunal,<br />

dans la partie qui débouche rue<br />

du 26e de Ligne.<br />

(de Bou-Baaïa). Rue Perregaux,<br />

n° 52. A servi de caserne et de<br />

bain. Le nom de Hammam lui est<br />

aussi appliqué.<br />

(de Bou-Cheltabïa). Impasse rue<br />

Fontanilhes à El-Batha.<br />

(de Bou-Khoubza). Dans l'im<br />

passe de la rue Vieux, à laquelle<br />

elle a donné son nom.


Dar-bou-Mezoura<br />

is,,;.^ l)JJ- yljli<br />

Dar-ed-Debar.<br />

iyjJljli<br />

Dar-el-Abadi.<br />

Dar*el-Bey.<br />

'^U_Ji<br />

Dar-el-Biskm<br />

Jljb<br />

Dar-el-Bou-Chibi. .<br />

Dar-el-Euldjïa . . .<br />

L_j_srLjtJI ,li<br />

Dar-el-Hadj- Brahim<br />

—yyjt L-xr'ïj<br />

I 0<br />

Dar-el-Hadj-Saïd .<br />

J__y-«,?.Lsr'!J!0<br />

.<br />

I<br />

— — 24<br />

(de Bou-Mezoura). Occupait par<br />

tie de l'emplacement du vieux<br />

théâtre,<br />

rue Basse-Damrémont.<br />

(La tannerie). Nom donné aux<br />

tanneries bordant le ravin au sud.<br />

(La maison.d'El-A<br />

Dans<br />

l'impasse de la rue du 26° de Ligne,<br />

au-dessous de la rue du Tribunal.<br />

(La maison du bey). Vaste pâté<br />

de constructions ayant servi de<br />

palais aux beys et de casernes,<br />

ayant une façade sur la rue Cara<br />

man et une sur la rue Rouaud.<br />

(du Biskri). Dans l'impasse de la<br />

rue l'Huillier,<br />

Conseil de guerre.<br />

en remontant vers le<br />

(d'El-bou-Chibi). Rue de l'Arc,<br />

4. (Bab-el-Djabia).<br />

(de la renégate). La maison Ben-<br />

Zagouta,<br />

Fontanilhes.<br />

ayant servi de collège rue<br />

(d'EI-Hadj-Bfahim). Impasse rue<br />

du 26e de Ligne, n° 21.<br />

(d'El-Hadj-Saïd). Rue des Abys<br />

sins, à laquelle elle a donné son<br />

nom, Zenket-el-Hadj-Saïd.


Dar-el-Khalifa..<br />

Dar-el-Khouachemi .<br />

..-«.-àys^jb<br />

Dar-Engliz-Bey.. . .<br />

J£ Ljy-jJ._tJjl 0<br />

Dar-Grina ,<br />

— »-s 1<br />

y<br />

0<br />

j<br />

Dar-Housseïn-Bey..<br />

Dar-Kaïd-Chaïr. . . .<br />

j-y-iJI J.yLàj<br />

Dar-Kelal<br />

JiLijti<br />

Dar-Salah-Bey. .<br />

Dar-Saïri<br />

I 0<br />

„jLaJ!_,b<br />

^<br />

.<br />

25 —<br />

(du Khalifa). Il existait deux<br />

maisons de ce nom : 1° l'une<br />

occupée maintenant par le Trésor,<br />

rue Basse-Damrémont ; 2° et l'au<br />

tre à l'angle de la rue Traversière<br />

et de la rue Morland (Bab-el-Dja<br />

bia).<br />

(d'El-Khouachemi). Impasse de<br />

la rue du 26a de Ligne, plus bas<br />

que celle de Dar-el-Abadi.<br />

(d'Engliz-Bey). Appelée mainte<br />

nant Dar-Salah-Bey,<br />

la voûte.<br />

rue d'Israël à<br />

(de Grina). Rue de Bagdad et<br />

boulevard de l'Ouest (Bab-el-Dja<br />

bia).<br />

(de Housseïn-Bey). Rue Béraud.<br />

(du Caïd de l'orge). Près Rahbet-<br />

es-Souf.<br />

(des cruches). Rue Perregaux,<br />

entre la rue Nationale et la rue de<br />

Mila. (A disparu).<br />

(de Salah-Bey). 1° Au bout de la<br />

rue Caraman, sous la voûte ; 2° rue<br />

.d'Israël à Mekâd-el-Hout.<br />

(de l'orfèvre). Rue Damrémont,<br />

en face de la Prison militaire. (A<br />

disparu).


Dar-Sekfali<br />

Dar-Tchaker-Bey . .<br />

— 26<br />

^£L)jjLa.j\<br />

Dar-Tchanderli-<br />

Braham<br />

yyl^Jj^-^yO<br />

Dar-Zaouche<br />

Djama<br />

(jijyJtjb<br />

y-?\—=?-<br />

I<br />

Djama- - -<br />

Arbaïn Che<br />

rif<br />

^Jriy ^yé->.J £f^<br />

Djama-el-Akhdar. .<br />

Djama-el-Biazri<br />

(de Sekfali). Rue des Zouaves,<br />

près d'El-Mouilha.<br />

(de Tchaker-Bey). Dans le carre<br />

four situé au milieu de la rue de<br />

Mila.<br />

(de Tchanderli-Braham). Sous la<br />

voûte de ce nom, rue Vieux.<br />

(de Zaouche ou des moineaux).<br />

Impasse rue Perregaux,<br />

rue de Mila et Arbaïn-Cherif.<br />

entre la<br />

(Mosquée). Les édifices affectés<br />

au culte se divisent, par rang d'im<br />

portance, en Djamâ, Mesdjed et<br />

Zaouia. Ces édifices ne sont sou<br />

vent désignés que par le nom de<br />

leur patron : Sidi un tel. Dans les<br />

Djamâ se faisaient la Khotba (ser<br />

mon) et la prière au nom du prince<br />

régnant.<br />

(La mosquée des 40 cherifs). Rue<br />

Perregaux. Occupée maintenant par<br />

la Mahakma du Cadi de la lre cir<br />

conscription.<br />

(d'El-Akhdar). Au bas de la rue<br />

Sidi-L'Akhdar).<br />

(de l'épicier). Se trouvait rue<br />

Grand, à Souk-el-Djemâa. (A dis<br />

paru).


Djama-el-Djouar .<br />

jl_j^srJ'yy<br />

Djama-el-Djouza .<br />

Bl_j-ar- ' yy<br />

Djama-el-Kasba. . . .<br />

JLy__fiJl y La<br />

Djama-Khelil<br />

J;..La. y La<br />

Djama- Rahbet -es -<br />

Souf<br />

*y£j] y.Ai &J3 La.<br />

Djama-Souk-el-Re-<br />

zel<br />

jy*A\ J_,_J"> La<br />

Deroupj-bab-el- Dja-<br />

BIA<br />

yy Lar-'l v__» Lj t-jj ^<br />

Ech-Chara<br />

ç>j L_a»J!<br />

Ech-Chebarlïïne .<br />

> I.LusJt<br />

.. .. j •<br />

— — 27<br />

(des femmes). Rue Caraman, au<br />

débouché de la rue d'Aumale. (A<br />

disparu).<br />

(du noyer) , appelée aussi de<br />

Sidi-Ahmed-Zerroug. Rue Caraman,<br />

près le débouché de la rue Riche-<br />

panse et place de l'Asile. (A dis<br />

paru).<br />

(de la Kasba). A disparu pour<br />

faire place aux constructions de<br />

l'Hôpital militaire.<br />

(de Khelil). Vers le trajet de la<br />

rue Leblanc. (A disparu).<br />

(de Rahbet-es-Souf). A disparu<br />

pour faire place à l'ancien Hôpital<br />

civil.<br />

(de Souk-el-Rezel). La Cathédrale<br />

actuelle, rue Caraman.<br />

(Les escaliers de Bab-el-Djabia).<br />

Actuellement la rue de l'Échelle.<br />

(La rue Marchande). Ce nom<br />

s'appliquait au quartier qui avait<br />

été assigné aux Juifs par Salah-<br />

Bey; il est traversé par les rues<br />

Grand et de Constantine.<br />

(Les fabricants de chaussures de<br />

femme). Voir à Souk.


-f<br />

Ech-Chott . . .<br />

Ed-Derb<br />

____,JI<br />

Ed-Dréïba . . .<br />

El-Attarine<br />

yj LJLxJ!<br />

El-Batha ,<br />

El-Blate<br />

iJL_,JL<br />

El-Bradaïïne<br />

i-j^cO ly.)l<br />

El-Djezzarine . . .<br />

El-Fahhamine . . .<br />

v-«-j»L.aik_sJI<br />

El-Guessaaïne, . .<br />

28 —<br />

(Le bord). Quartier bordant le<br />

ravin à l'angle de la rue Nationale,<br />

sous la Poste.<br />

(Le palais). L'ancien palais du<br />

Bey, occupé maintenant par le<br />

Général de Division.<br />

(Le petit palais). Nom donné aux<br />

dépendances du palais, au-dessus<br />

et au-dessous, et notamment à l'an<br />

cienne subdivision et à la partie<br />

voisine de Dar-el-Bey qui a servi<br />

au campement, rue Caraman.<br />

(Les droguistes). Voir à Souk.<br />

(L'emplacement uni). La rue<br />

Fontanilhes et la rue Nationale, en<br />

face de la grande Mosquée.<br />

(Le pavage en dalles). Le par<br />

cours de la rue Caraman, depuis<br />

l'angle-<br />

place Négrier.<br />

derrière l'Église jusqu'à la<br />

(Les fabricants de bâts). Voir<br />

Souk.<br />

(Les bouchers). Voir Souk.<br />

(Les charbonniers). Voir Souk.<br />

(Les fabricants de plats en bois).<br />

Voir Souk.


El-Habs et El-Habsa<br />

{y-y*"' ^A\<br />

El-Haddadine<br />

j_prj._sJt<br />

El-Hara-el-Hamra<br />

El-Haouch<br />

A\ (yy*<br />

El-Kantara<br />

El-Kasba<br />

S,_L_x_ft_J|<br />

£_x_^_à_J|<br />

El-Kazzazine<br />

El-Khaddarine ....<br />

El-Kharrazine ....<br />

El-Kous<br />

29<br />

(La prison). Dans la Kasba, à<br />

droite de l'entrée.<br />

(Les forgerons). Voir Souk.<br />

(Le quartier rouge). Rue Vieux,<br />

vis-à-vis du débouché de la rue du<br />

3e Bataillon-d'Afrique.<br />

(Le parc). Le boulevard de l'Est,<br />

au-dessus de la porte d'El-Kantara.<br />

Le pont). Nom du pont et du<br />

quartier situé au-dessus. (V. Hou-<br />

met).<br />

(La Kasba). Réunion de cons<br />

tructions particulières, de mos<br />

quées et fortifications, etc., dont<br />

nous avons fait la Kasba actuelle.<br />

(Les passementiers). Voir Souk.<br />

(Les marchands de légumes). Voir<br />

Souk.<br />

(Les cordonniers). Voir Souk.<br />

(L'arceau). Ce nom était donné<br />

à deux endroits : 1° l'un situé vers<br />

la rue Sittius; 2° et l'autre au bas<br />

de la rue de l'Arc,<br />

Akouas-ben-Nedjda.<br />

appelée aussi


El-Merma<br />

y-O-41<br />

El-Milïïne.<br />

El-Mouilha<br />

JL-Jl<br />

'L-^-A->,j^\<br />

El-Moukof<br />

El-Mourr ou Marr.<br />

j<br />

li<br />

El-Rerablïïne<br />

j-j^JLy [ykj<br />

En-Nedjarine<br />

Er-Recif<br />

- 30<br />

—<br />

(L'endroit où l'on jette). Echan-<br />

crure sur le bord du ravin, au-<br />

dessous du Chott, d'où l'on jetait<br />

les immondices. On l'appelait aussi<br />

Merma-el-Azbal (des fumiers).<br />

Les Miliens). Voir Zekak.<br />

(La petite (source)<br />

des Zouaves,<br />

salée). Rue<br />

au-dessous de la rue<br />

Damon, où se trouvait, paraît-il,<br />

une source salée.<br />

(Plusieurs étymologies sont pro<br />

posées au sujet de ce nom,<br />

qui pa<br />

raît vouloir dire : le lieu de réunion,<br />

l'endroit où l'on se tient). Cet em<br />

placement se trouvait au débouché<br />

de la rue Cahoreau dans la rue<br />

Nationale, derrière l'hôtel de Paris.<br />

(Reg4 El-Memarr (Le passage).<br />

^lue Damrémont, à l'entrée de la<br />

rue du 26e de Ligne.<br />

(Les tamisiers). Voir Souk.<br />

(Les menuisiers). Voir Souk.<br />

(Le tas). Sous le fondouk aux<br />

huiles, entre la rue Rouaud et la<br />

rue Nationale, près de Sidi-Abd-er-<br />

Rahmane-el-Menatki.


Er-Rekkakine<br />

^riUjJl<br />

Es-Sar'a<br />

î-à L_*aJt<br />

Es-Sebbarine<br />

^-.yL^Jt<br />

Es-Serradjine<br />

Fondouk<br />

fondouk- - - ben noui<br />

OUA<br />

zy,y J-? sj)-*-*-*<br />

FONDOUK-- EL- HAFSI<br />

OU Ez-Zite<br />

^<br />

^yjJ\y\<br />

Fondouk-Kissarli . .<br />

Frane-Barro . . ,<br />

Hadjeret-el-Bir .<br />

- 31<br />

—<br />

(Les parchemineurs). Voir Souk.<br />

(Les bijoutiers). Voir Souk.<br />

(Les teinturiers). Voir Souk.<br />

(Les selliers). Voir Souk.<br />

(Ecurie publique), pV W<br />

(de Ben-Nouioua). Rue Béraud,<br />

derrière le service des Mines.<br />

(d'El-Hafsi ou de l'huile). Démoli<br />

pour la percée de la rue Nationale,<br />

en face du service des Mines.<br />

(de Kissarli). Son emplacement<br />

est occupé en partie par le Tribu<br />

nal de lre Instance, place Négrier.<br />

(Birrou ou Barroum) (les fours<br />

de Birrou). Rue Perregaux, des<br />

deux côtés de la rue Dali- Moussa.<br />

D'anciens fours à chaux ou à plâtre<br />

se trouvaient, paraît-il,<br />

droit.<br />

en cet en<br />

(La pierre du puits). Place<br />

d'Aumale,<br />

paronne).<br />

devant la pharmacie Sca


Hammam<br />

y*<br />

Hammam-ben-Charif.<br />

tf-> fL-^<br />

Hammam-ben- Djel<br />

loul<br />

Hammam-ben-Namane<br />

Hammam-bou-Baaïa<br />

L-> L_x_! y\ /> I— ç»-<br />

•v_5 •<br />

Hammam-Deggoudj .<br />

7r_?_si ^L-?-<br />

Hammam-el-Haoua. .<br />

Hammam- - - Kaa el At-<br />

TAR1NE .<br />

♦y.L-kjeJ) ç- Ls A p.<br />

Hammam-Soul-el-Re-<br />

ZEL<br />

Jy*JI ^___y_u) j I—55.<br />

Hammam-es-Soultan.<br />

^LkJLJI ;U<br />

i<br />

— - 32<br />

(Bain, étuve).<br />

(de Ben-Charifj. Sous la place<br />

des Chameaux.<br />

(de Ben-Djelloul). Rue Sérigny,<br />

sous la rue de France.<br />

(de Ben-Nâmane). Dans la ruelle<br />

faisant correspondre la rue des<br />

Zouaves avec la rue Abd-Allah-Bey.<br />

(de Bou-Baaïa). A servi aussi de<br />

caserne et est devenu une maison<br />

particulière, portant le n" 52 de la<br />

rue Perregaux.<br />

(de Deggoudj). Rue des Bains, à<br />

l'angle de la rue du<br />

d'Afrique.<br />

3J Bataillon-<br />

(du ravin). Au-dessous de Dar-<br />

Jfelal au Chott. (Disparu).<br />

(du bas du quartier des dro<br />

guistes). A disparu dans la percée<br />

de la rue Nationale, sous la. rue<br />

Rouaud.<br />

(de Souk-el-Rezel). Rue du 47e<br />

de Ligne, sous la rue de France.<br />

(du sultan). Rue Desmoyen,<br />

maison dite de Salth-Bey.


(El-, Hammam-es-<br />

Sréïr<br />

Houma (Houmet). .<br />

A j>j—a<br />

Houmet-bab-el-Dja-<br />

bia<br />

yULLi-y<br />

Houmet-Bab-el-Kan-<br />

TARA<br />

Js.JaJ_fi.JI v >L; "i—f 5—a<br />

HoUMET-ClIARA<br />

Ç-<br />

(<br />

ï<br />

, I i-J! i i=__j_a<br />

Houmet-el-Kasba . .<br />

Houmet-Keddida . . .<br />

8 _x_9 jy Ly_,_a<br />

Houmet-Messassa . .<br />

4._j*> L..O-; •*~y_5-<br />

Houmet -<br />

Maza<br />

Sidi<br />

-bou-<br />

sy» ylyy^.. k'./ya<br />

Houmet-Souari ....<br />

33<br />

Le petit bain). Occupait un<br />

angle des dépendances de la grande<br />

Mosquée, rue Nationale. (A disparu)<br />

Quartier.<br />

(de Bab-el-Djabia). S'applique à<br />

tout l'espace compris entre le bou<br />

levard de l'Ouest, la rue Nationale<br />

jusqu'à son coude et le ravin.<br />

(de Bab-el-Kantara). L'espace<br />

compris entre le boulevard de l'Est,<br />

la rue de Mila el le ravin.<br />

Voir Chara.<br />

(de la Kasba). S'applique à l'em<br />

placement occupé par la Kasba<br />

actuelle.<br />

(de Keddida). Dans la Kasba, en<br />

face de la porte.<br />

(de Massinissa?). L'entrée de la<br />

rue Massinissa,<br />

mont.<br />

rue Basse-Damré-<br />

(de Sidi-Bou-Maza). Le bout de<br />

la rue Perregaux, depuis la rue<br />

Sidi-Bou-Maza jusqu'à El-Kantara.<br />

(des piliers). Rue Desmoyen,<br />

derrière le Palais.


Houmet-Tabia<br />

yy L_L_tl 'À-j>y-=<br />

Houmet-Tobbala<br />

i—JL-A—LJI A-J»<br />

Impasse<br />

Kaa-ech-Chara<br />

*j\ !uA\ oLj<br />

Kahouet-ed-Debbane<br />

^Ly ôX\ Ïy+J<br />

Kehef-Ciiekoura . . .<br />

tjjJS-i,<br />

Kherbet-el-Arab.<br />

Kerbet-Tina.<br />

I—i-jj—L i->-j—à<br />

— 34<br />

(de Tabia;. Partie<br />

comprise entre<br />

le boulevard du Nord, la rue Dam<br />

rémont et la rue du Bocher. Se<br />

divisait enTabia-el-Kebira et Tabia-<br />

el-Berrania.<br />

(des timbaliers). Rue des Abeilles<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

Voir Zenka (le mot propre esl<br />

Raïr'a).<br />

(Le bas de Chara). La rue de<br />

Constantine,<br />

tara.<br />

au-dessus d'EI-Kan-<br />

(Le café des mouches). Rue des<br />

Mouches,<br />

parlie occupée par les<br />

boutiques de l'établissement des<br />

Jésuites.<br />

(Le rocher des sacs). Kasba, le<br />

bord du rocher dominant les cas<br />

cades. Selon la tradition,<br />

c'est de<br />

là qu'on précipitait, sous les Turcs,<br />

les femmes dont les beys voulaient<br />

se débarrasser.<br />

(La ruine (ou l'écurie)<br />

bes). Rue Sidi-Bou-Rar'da,<br />

Sidi-Rached (Bab-el-Djabia).<br />

des Ara<br />

près de<br />

(La ruine de Tina?). Partie tou<br />

chant le rempart de l'Ouest, à côté<br />

de Kherrara (Bab-el-Djabia).


Kherrara<br />

l>tj~-<br />

Kobbet-Beciiir<br />

KOUCHA<br />

I y<br />

K0UC[lETrBEN-N0UA-<br />

RA<br />

b]yJtfi-s'sJ<br />

Kouchet-el-Djebs ou<br />

El-Djoss<br />

Kouchet-el-Meceb-<br />

BAH<br />

;_'t i_i_y_S<br />

Kous-Tabia<br />

i-y î—L—M tyj—s<br />

Maison<br />

Mahlet-el-Amamra.<br />

3»_i» L_yt_j|<br />

A-l-s"9<br />

35<br />

(L'égout). La dépression située<br />

au-dessous de Bab-el-Djabia, bou<br />

levard de l'Ouest.<br />

'Le dôme de Bechir). A l'angle<br />

de la rue du Rocher et de la rue<br />

Damrémont.<br />

(Kouchet). Four et boulangerie.<br />

(Le four de Ben-Nouara). Au<br />

débouché de la rue Namoun, rue<br />

Sidi-Nemdil.<br />

(Le four à plâtre). Rue d'Israël,<br />

vers l'entrée de la rue Varna.<br />

(Le four ou boulangerie d'EI-<br />

Mecebbah). Rue Rabier.<br />

(du sellier). Rue Abd-Allah-Bey,<br />

au-dessous de la rue de Cirta.<br />

(du marchand d'huile). Petite<br />

place au milieu de la rue Morland<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

(L'arc de Tabia). Vers la rue<br />

Leblanc. (A disparu).<br />

Voir Dar.<br />

(Quartier des Amamra). La partie<br />

inférieure de la rue du 26e de<br />

Ligne.


Marché .<br />

Medraca.<br />

ïi-.u.jj.-.-5<br />

Medrach ....<br />

yyi ^-fj-j><br />

Mesdjed fc.<br />

Mesdjed-Hafça . . . .<br />

Mila-Sreïra<br />

ïj-.-x-^a-}) A-J—y<br />

36<br />

Voir Souk et Rahba.<br />

(École supérieure). Il n'y avait à<br />

Constantine que celle de Sidi-el-<br />

Keltani,<br />

que nous avons conservée<br />

et dont nous avons refait la façade<br />

sur la place Négrier, entre le Tri<br />

bunal et la mosquée de Salah-Bey,<br />

portant aussi le nom de Sidi-el-<br />

Kettani.<br />

l'Ecole israélite). Près de Sidi-el-<br />

Biazri, à Souk-e!-Djemâa.<br />

(Le siège du poisson). Rue<br />

d'Israël, près la place de Rahbel-<br />

es-Souf.<br />

(Le siège des Zouaoua). Dans la<br />

rue qui monte de la rue de France<br />

à la place Négrier.<br />

Voir El-Merma.<br />

(Mosquée). Ce nom était donné<br />

aux mosquées de moindre impor<br />

tance que les Djama. On n'y faisait<br />

que la prière.<br />

(La mosquée de (madame) Hafça).<br />

Rue Abd-Allah-Rey, au-dessus de<br />

la rue de Cirta.<br />

(La petite Mila .<br />

milieu de la rue"<br />

Carrefour<br />

au<br />

de Mila, devant<br />

la maison de Tchaker-Bey.


Mosquée.<br />

Oulad-bet-Hasseïn -<br />

ij -<br />

Palais<br />

Porte<br />

Quartier<br />

Rahba<br />

(J<br />

A k_a ,<br />

Raiibet-ben-Saïd. . .<br />

Jl_^_x_^- yj A_X_à ,<br />

Rahbet-el-Djemal. .<br />

Rahbet-es-Souf. . . .<br />

Ras-el-Kharrazine .<br />

j-ij]y^cyb<br />

•<br />

— 37<br />

Voir Djama, Mesdjed et, Zaouia.<br />

loir aussi à Sidi, rétablissement<br />

étant souvent désigné par le nom<br />

du saint sous le vocable duquel il<br />

est placé.<br />

Groupe de bâtiments portant, le<br />

!e nom de cette famille,<br />

Kasba. (A disparu).<br />

Voir Ed-Derb et Ed-Dreïba.<br />

Voir Bab.<br />

dans \s<br />

\'oir Houma, Hara et Mahla.<br />

(Rahbet). Halle ou marché.<br />

(La halle de Ben-Sains, Ancien<br />

nom de la place des Chameaux.<br />

(La halle des Chameaux). Nous<br />

en avons fait la place des Cha<br />

meaux.<br />

(La halle de la Laine,. Nous en<br />

avons fait la place Rahbet-es-Souf,<br />

appelée vulgairement place des<br />

Galettes.<br />

(La tête (de la rue) des Cordon<br />

niers). A l'angle des rues Combes<br />

et Rouaud,<br />

où se trouve la Zaouia<br />

de la famille Ben-el-Feggoun fHani-<br />

mouda .


Ras-Souk-el-Acer. .<br />

Redir-bou-el-Rarate<br />

.L. ]y.y-<br />

Rous-ed-Douamès. .<br />

_j<br />

Rue<br />

—Ajxn yjjj<br />

Sabate<br />

- -<br />

Sabate-ben-el Bou<br />

Chibi<br />

y<br />

A" *<br />

Sabate-ben-el-Ham -<br />

LAOUI<br />

*"'<br />

Sabate-ben -Fellous<br />

-ben- Sabate Tchan-<br />

derli-Bbaham. . .<br />

^<br />

- 38<br />

(La tète de Souk-el-Acer). A<br />

l'entrée de la place Négrier.<br />

(La mare de l'endroit des caver<br />

nes). La place d'Orléans et la rue<br />

Damrémont,<br />

rue d'Aumale.<br />

vis-à-vis l'entrée de la<br />

(Les tètes des souterrains). Rue<br />

du Palais. Les Indigènes placent à<br />

cet endroit l'entrée des souterrains<br />

qui, d'après eux, sillonneraient une<br />

partie de la ville.<br />

Voir Zenket, Zekak, Souk et<br />

Chara.<br />

(Voûte,<br />

passage couvert;.<br />

de Ben-el-Bou-Chibi). Entrée de<br />

la rue de l'Arc (Bab-el-Djabia .<br />

(de Ben-el-Hamlaoui). Rue de<br />

l'Aima, au-dessus de la rue Sidi-<br />

Bou-R'arda (Bab-el-Djabia .<br />

(de Ben-Fellous). Au bout de la<br />

rue Rouaud, derrière la Poste ac<br />

tuelle. (A disparu).<br />

(de Ben-Tchauderli-Braham).<br />

Longue voûte au débouché de la<br />

rue Vieux sur Rahbet-es-Souf.


Sabate-Cheïkh- el-<br />

Arab<br />

. ysJ! i>L__._^<br />

_y^<br />

Sabate-Dar-Bach-<br />

A_C]<br />

Agha<br />

_<br />

Ù,L)jli 451 A—*o<br />

Sabate-Dar-ben-<br />

Aïssa<br />

,,a^u^£ y , ]J h LXw<br />

Sabate-Dar-el-Bey<br />

Sabate-Dar-el-Kha-<br />

lifa<br />

JLyJ.sJ'<br />

,b i L_w»<br />

Sabate-Dar-el<br />

Kheïtmi<br />

Sabate- Dar-Hous -<br />

seïn-Bey<br />

yb<br />

2 ■» 4-»<br />

y<br />

Sabate-Draa-es-S'eïd<br />

,;v~aJl Ajb<br />

h l-\-~.-<br />

39<br />

(du Cheïkh-el-Arab). Rue Perre<br />

gaux entre les numéros 72 et 64<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

(de la maison du Bach-Agha).<br />

Au-dessus de Dar-el-Bey, vers la<br />

rue Combes. (A disparu).<br />

(de la maison de Ben-Aïssa). Bue<br />

Vieux, à l'angle de la rue de<br />

l'Aigle.<br />

(de Dar-el-Bey). La voûte don<br />

nant accès à Dar-el-Bey sur la rue<br />

Caraman.<br />

(de la maison du Khalifa). Près<br />

de l'hôtel du Trésor, rue Damré<br />

mont. A disparu. Il existe une<br />

autre voûte du même nom, rue<br />

Morland, avant d'arriver à Kouchet-<br />

ez-Zïate (Bab-el-Djabia).<br />

(de la maison d'El-Kheïtmi). Rue<br />

Cahoreau, derrière l'hôtel d'Orient.<br />

(A disparu).<br />

(de la maison de Housseïn-Bey).<br />

A l'entrée de la rue Abd-Allah-Bey,<br />

rue Béraud. On l'appelle également<br />

du nom suivant.<br />

(de la patte du lion). La même<br />

que la précédente.


Sabate-Djama-el-<br />

Djouza<br />

S" * 5 *— s—PLa j J» t—».—*u<br />

Sabate-ed-Dréïba<br />

A_.; Jj Ji Il h I—j— "><br />

i/\ Sabate-el-Hanencha<br />

i_*U_J L-À_ar ' h I—»—«<br />

Sabate- el-Khalifa<br />

i_H_«JLsr"<br />

L L-Ji-u,<br />

Sabate-el-Khammar.<br />

j LJy—sr' il v_«<br />

Sabate -el-Kheroufi<br />

yj i_àr ' i I «._«,<br />

Sabate-el-Koura. . .<br />

Sabate-Mekad-el-<br />

Hout<br />

Sabate-Souk-el-<br />

ACER<br />

Setti-Frikha<br />

Am.SC,,<br />

h—9 y\_A—AV<br />

— 40<br />

(De la mosquée d'EI-Djouza). La<br />

voûte rue Caraman entre la rue<br />

des Cigognes et la place d'Asile.<br />

(du petit palais). Derrière l'é<br />

glise. A disparu).<br />

(Des Hanencha). Rue du Trésor.<br />

(A disparu).<br />

(du Khalifa). Rue Morland, avant<br />

d'entrer à Kouchet-ez-Zïale Bab-<br />

el-Djabia).<br />

(du marchand ou du buveur de<br />

vin). Rue Bagdad (Bab-el-Djabia).<br />

(A disparu).<br />

(d'EI-Kheroufi). Rue du Mouton<br />

(Bab-el-Kantara).<br />

(du boulet). Longue voûte au<br />

débouché de la rue Combes sur<br />

Rahbet es-Souf.<br />

fe (de Mekad-el-Houl), rue d'Israël.<br />

(de Souk-el-Acer). Appelée aussi<br />

Sabate-Dar-Salah-Bey. Au bout de<br />

la rue Caraman.<br />

(Oratoire de madame Friklia;.<br />

Sous la place Négrier. Est occupé<br />

actuellement par la Sous-Inten<br />

dance militaire.


Sidi.<br />

?j__<br />

Sidi-Abd-el-Hadi..<br />

^[^.bfj;y<br />

Sidi-Abd-el-Kader. .<br />

pis}] yc^y^,<br />

Sidi-Abd-el-Malek .<br />

oXi[t ys<br />

Sidi-Abd -<br />

_çy<br />

el-Moumen<br />

•y_,_4l yc jj-y»<br />

Sidi-Abd-er-Rhaman-<br />

el-Karoui<br />

jjLy^j) yc ^-y»<br />

Sidi-Abd-er-Rhaman-<br />

el-Menatki<br />

jLçy1! y ^y»<br />

Sidi-Adj<br />

x_fi_iL_U!<br />

Sidi-Ahmed-Zerroug<br />

^_^Jl j^-I ^-w-<br />

- - Sidi-Ali ben<br />

Makh-<br />

louf<br />

41<br />

(Monseigneur). Tous les noms<br />

commençant par ce mot s'appli<br />

quent à des mosquées ou chapelles<br />

portant le vocable qui suit.<br />

A l'entrée de la rue de ce nom,<br />

rue Nationale. (A disparu).<br />

Au fond de la Kasba,<br />

trouve l'Artillerie. (A disparu).<br />

où se<br />

Entre la rue des Bains et la rue<br />

Baby.<br />

Au-dessous de la rue Perregaux,<br />

dans le carrefour au-dessus de la<br />

rue des Tanneurs.<br />

Rue Hackell, derrière l'hôtel<br />

d'Orient. (A disparu).<br />

Vis-à-vis du Fondouk aux huiles,<br />

rue Rouaud.<br />

A l'angle des boulevards de<br />

l'Ouest et du Nord. (A disparu).<br />

Voir Djama-el-Djouza.<br />

A été englobé dans la Mairie.<br />

(Disparu).


Sidi-Ali-el-Kafci. . .<br />

ys-2à'l<br />

J?->-s"><br />

Sidi-Amor- el-Ouz-<br />

ZANE<br />

Sidi-ben-Alennas. . .<br />

'^w£->s<br />

Sidi-bou-Abd-Allah-<br />

Cherif<br />

s_ y'IsJilycy! sy<br />

Sidi-bou-Annaba .<br />

. .<br />

ly L-X.c_._jl ^y<br />

Sidi-bou-Annaba . . .<br />

AyL.j_c_._jt y*»'<br />

Sidi-bou-Cheddad .<br />

.<br />

J IJ «j__J —31 ^Jwj A<br />

Sidi-bou-Maza .....<br />

Byjsyy t ,__Cy_<br />

Sidi-bou-Mendjel. . .<br />

J—sr^<br />

jyl<br />

Sidi-bou-Rar'da....<br />

B^_i_,__yl__gy_<br />

42<br />

Boulevard de l'Est,<br />

rue de Constantine.<br />

derrière la<br />

A disparu dans la construction<br />

du Marché aux légumes.<br />

Au bas de la rue de l'Échelle<br />

(Bab-el-Djabia). A changé de des<br />

tination.<br />

A l'entrée de la rue des Abeilles<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

Vers le haut de la rue du de<br />

Ligne. On ajoutait « de la Kasba »<br />

pour le distinguer du suivant. (A<br />

disparu).<br />

Rue des Zouaves. Sert à la con<br />

frérie des Khouan Aïssaoua.<br />

A Zenket-el-Amamra (Bab-el-<br />

Djabia).<br />

Rue Perregaux, à l'angle de la<br />

rue Sidi-bou-Maza (Rab-el-Kantara).<br />

(A disparu).<br />

Rue du 26e de Ligne, au-dessous<br />

du débouché de la rue L'Huillier.<br />

(A disparu).<br />

Dans la rue du même nom (Bab-<br />

el-Djabia).


Sidi-Brahim-ben-<br />

Maïza<br />

Sidi-Chekfa<br />

Sidi-Debbi<br />

Sidi-Derrar<br />

—Jî Jr-V-<br />

Sidi-el-Beïad<br />

43<br />

yl £-•>■—'> 1^£-^"'<br />

Sidi-el-Biazri .<br />

. . .<br />

___,i I L-a—î I ^^Xauo<br />

Sidi-el-Djelis . . . .<br />

Sidi-el-Foual<br />

SlDl-EL-HoUARl .<br />

Sidi-el-Kettani.<br />

. .<br />

Sidi-el-Khezri. . . .<br />

J?AS»<br />

Sidi-el-Ouarda. . . ,<br />

is'ij yJ!<br />

_5y<br />

Rue Sidi-bou-Maza,<br />

(Bab-el-Kantara) .<br />

sur le ravin<br />

A l'entrée de la rue Damon, rue<br />

des Zouaves.<br />

Près de la porte Bab-el-Ouad, à<br />

l'angle du nouveau théâtre. (A<br />

disparu).<br />

Dans la ruelle de ce nom, rue<br />

Combes. (A disparu).<br />

A El-Kous de Tabia ; vers la rue<br />

Leblanc. (A disparu).<br />

)'o;r Djama.<br />

Sur la place de ce nom. Sert<br />

d'école arabe-française.<br />

A l'angle des rues Caraman et<br />

Cahoreau. (A disparu).<br />

A Zenket-ben-Titah,<br />

rue de France. (A disparu).<br />

près de la<br />

Mosquée de Salah-Bey, place<br />

Négrier.<br />

Près de la porte d'EI-Kantara,<br />

au bout de la rue Perregaux. (A<br />

disparu).<br />

A été démoli pour l'établissement<br />

de la place Nemours.


Sidi-Fat ah- Allah .<br />

Sidi-Ferg'ane. . .<br />

Sidi-Fliou<br />

0--uta-X-_.9 £_X* U."<br />

Sidi-Hassoun<br />

. ) 9 —«*_a L C, Xmv<br />

Sidi-Heddjam<br />

Sidi-Hidane<br />

>!j—;>a y^y~<br />

Sidi-Iasmine<br />

Sidi-Iasmine<br />

Sidi-Ioumen<br />

Sidi-Kaïs<br />

.<br />

y-%-3 yy_<br />

.<br />

Sidi-Kemmouche. . . .<br />

— — M<br />

Impasse de la rue d'Israël entre<br />

les rues de Varna et Richepanse.<br />

A été démoli pour l'établissement<br />

de la place du Palais.<br />

Rue Salomon,<br />

(A disparu).<br />

en face la Kasba.<br />

Occupait une partie de l'empla<br />

cement du vieux théâtre, rue Basse-<br />

Damrémont. (A disparu).<br />

Rue Caraman,<br />

entre la rue Des<br />

moyens et l'impasse. (A disparu).<br />

Au-dessus du Chott, à l'angle de<br />

la rue Nationale. (A disparu).<br />

A l'angle des rues Dali-Moussa<br />

et des Abyssins. (A disparu).<br />

Au bout de la rue Perregaux,<br />

au-dessus d'El-Kanlara. (A disparu).<br />

Rue d'Israël, près de la rue de<br />

Varna.<br />

Mila.<br />

Carrefour du milieu de la rue de<br />

L'oratoire dit Zaouiet-ben-Badis,<br />

au fond de la première impasse de<br />

la rue du 23e de Ligne, derrière<br />

la pharmacie.


Sidi-Kenniche<br />

S^ir<br />

Sidi-Khezer<br />

" ' ^<br />

JJ<br />

Sidi-Krama<br />

'à—t ]yS<br />

Sidi-Mahammed ou<br />

M'hammed-Azouaou<br />

Sidi-Mahammed-ben-<br />

Neïmoun<br />

&+?&•*-& ^^tr<br />

Sidi- - -<br />

Mahammed En<br />

Neddjar<br />

jLyJI j__ç? ,y_<br />

Sidi-Meïmoun<br />

SlDI-MûGREF<br />

«y—^ £^£*"<br />

Sidi-Mouferredj.. .<br />

— .<br />

i_2_j»<br />

£«3-J— ■<br />

Sidi-Nar'r'ache.. . .<br />

Sidi-Nemdil<br />

45<br />

1 Parlie inférieure de la rue Ma-<br />

dier. (A disparu).<br />

Au bas de la rue des Tanneurs,<br />

n° 14 (Bab-el-Djabia).<br />

Rue du 3e Bataillon-d'Afrique,<br />

n" 10. (A disparu).<br />

Rue Rouaud, n° 91. (A disparu).<br />

Rue Vieux,<br />

près de la rue de<br />

Mila, sert de Mahakma à la 2e cir<br />

conscription.<br />

Rue Perregaux, n°<br />

de Sidi-Abd-el-Moumen.<br />

52, au-dessus<br />

Rue des Bains. (A disparu).<br />

Au bas de la rue Abd-Allah-Bey<br />

(Bab-el-Djabia).<br />

Rue Damrémont,<br />

du Lion. (A disparu).<br />

près de la rue<br />

Rue Morland (Bab-el-Djabia),<br />

Rue Sidi-Nemdil (Bab-el-Djabia).


Sidi-Offane<br />

^La-c<br />

Sidi-Rached<br />

Sidï-Remmah<br />

yyj\£-*v<br />

Sidi-Saffar<br />

SlDl-S_BÀÏNI<br />

,__ÇJy><br />

Sîw-Yabïa-el-Fecïm<br />

Sla<br />

eAy«aJ| 4_rf ,^V"<br />

Sla-ben-Deguiga . . .<br />

-&..ft.,»-J 3 »i Le|<br />

Sla-David-el-Dje-<br />

ZAÏRI<br />

ysrJl<br />

,___££><br />

Jy;-y<br />

Sla-Dar-Rebbi- Mes-<br />

SAOW» . *<br />

Jy y.J l_v"°<br />

SfcA*_4)ï£DlDA (Es).<br />

Sjyju-ar't<br />

46 -<br />

Rue Morland, n° 17 (Bàb-el-<br />

Djabia) .<br />

A la pointe méridionale de Cons<br />

tantine,<br />

sur le ravin. A donné le<br />

nom à ce quartier.<br />

Rue Dali-Mou ssa. Sert d'école<br />

aux filles musulmanes.<br />

Au bas de la rue »fe Constantine.<br />

Ancienne école des filles (Bab-el-<br />

Kantara).<br />

Au bout de la rue de France,<br />

sous la place Négrier, (Â dispanU).<br />

Rue Damrémont, eu face de la<br />

rue Sassi. (A disparu).<br />

(Synagogue).<br />

(de Ben-Deguiga). Au-dessus de<br />

Sidi-el-Biazri,<br />

rue de la Synagogue.<br />

(de David l'Algérien). A Sîdi-el-<br />

Biazri, à Souk-el-Djemaa.<br />

(de la maison du rabbin Mes-<br />

saoud). A Mekaad-el-Hout, rue<br />

d'Israël.<br />

gue.<br />

(La neuve]. Rue de la Synago


Sia-el-Keoimâ (Es).<br />

L_yjLjJliJ__J1<br />

S_a.-Rebbi-Chlomou-<br />

Ammar<br />

jl^yjlt-<br />

^yj<br />

Su.-Rebbi-Natak . . .<br />

souika ou souiket-<br />

«ab-el-Djabia<br />

*L_r_xr'' v__ju ÏJLj_ju,<br />

Souïket-ben-Mega-<br />

ILBF<br />

Souk<br />

jJLjy<br />

y ï-à-_y<br />

Souk-ech-Chebar-<br />

LÏINE<br />

Souk-ech-Ghoït<br />

souk-el-acer<br />

Souk-el-Attabine . .<br />

__. — 47<br />

gue.<br />

(La vieille). Rue de la Synago<br />

(du rabbin Salomon- Ammar). A<br />

Kaa-Chara,<br />

rue de Constantine.<br />

(du rabbin Natan). A Kaa-Chara,<br />

rue de Constantine,<br />

(Le petit marché de Bab-el-Dja-<br />

bîa). Rue Perregaux,<br />

en face du<br />

carrefour de Sidi-Abd-el-Moumen.<br />

(Le petit marché de Ben-Megâlef),<br />

Entre Djama-Kbelil et Sidi-Mou-<br />

ferredj (Tabia).<br />

Marché, bazar ou rue marchande.<br />

(Des fabricants de ehaussures de<br />

femme). La rue du 17e Léger, près<br />

Dar-el-Bey.<br />

(3n Chott). A l'angle de la rue<br />

Nationale,<br />

près du ravin.<br />

(de quatre heures du soir). La<br />

place Négrier.<br />

(des droguistes). Entrée de la<br />

rue Rouaud. Occupé maintenant<br />

par l'hôtel d'Orient et la rue Na<br />

tionale;<br />

au-dessous se trouvait le<br />

Sowk-el-Attarine-el-Asfel (d'en bas).


Souk-el-Bradaïïne. .<br />

^yj_y My-^JI ^_,_-.<br />

Souk-el-Djemaa. . . .<br />

'


uk-el-Kharrazine<br />

vrOï<br />

o3~<br />

uk-el-Kiierache-<br />

fïïne<br />

JI<br />

,-*-y.&!y£r i. . —w<br />

uk-el-Moukof. .<br />

ij-41 o>-<br />

uk-el-R'erablïïne<br />

yy*J| ^jy~»<br />

uk-el-Rezel. . . .<br />

)uk-en-Neddjarine<br />

>uk-er-Rekkakine.<br />

j___->t3yj| y^--<br />

)uk-es-Sar'a ....<br />

i._cL_*_Jl à._»_u><br />

)UK-ES-SERRADJ1NE.<br />

*-«_-a —_<br />

|j-xu,J\ à._^<br />

)UK-ET-TEDDJAR . . .<br />

)UR-ED-DERK .<br />

— — 49<br />

(des cordonniers). A l'entrée de<br />

la rue Combes.<br />

(des marchands de cœurs d'arti<br />

chaut sauvage) .<br />

de la rue des Mouchas.<br />

Partie<br />

inférieure<br />

(d'El-Moukof). Le bas de la rue<br />

Cahoreau, derrière l'hôtel de Paris.<br />

(des tamisiers). Rue Rouaud,<br />

vers le fondouk aux huiles.<br />

(de la laine filée). Rue Caraman,<br />

derrière l'église.<br />

(des menuisiers). Rue Vieux.<br />

(des parchemineurs). Rue Vieux<br />

en approchant de la voûte.<br />

(des orfèvres). Le bas de la rue<br />

du 23e de Ligne, au-dessus du pas<br />

sage Jaïs.<br />

(des selliers). Rue Rouaud, avant<br />

d'arriver en dessous de Dar-el-Bey.<br />

(du commerce). Comprenait les<br />

différents Souk établis dans la cir<br />

conférence décrite par les rues<br />

Combes, Rouaud et Vieux, jusqu'à<br />

Rahbet-es-Souf.<br />

(Le rempart des guenilles). Rue<br />

Damrémont,<br />

et de l'Hôpital.<br />

entre les rues Salomon


Sour-el-Mehaoula<br />

'L.}yl _srg jj-<br />

Stah-el-Mouadjene.<br />

j~wlj4l


Terbïat-el-Fahha-<br />

mine<br />

w_y^r_-csJI SL.*-..;<br />

Terbïat-el-Madjen<br />

Terbïat-Houka<br />

i—Ty-a S_.3l_j__J._J<br />

7"^r-<br />

- Terbïat Rahbet- el-<br />

Djemal........<br />

*-*-£-j<br />

lJtj^<br />

y—i<br />

£~H*-_j<br />

TûBBANA<br />

VOUTE<br />

Zaouïa<br />

iLJL___LJ!<br />

ï—<br />

>J ]\<br />

Zaouïet-ben-Abd -ER-<br />

Rahman<br />

c)l_^y,!yc(j.yyy,j<br />

Zaouïet-ben-Badis. .<br />

- -- Zaouïet ben Djel<br />

loul<br />

Zaouïet-ben-Namoun<br />

— 51<br />

- Ctr<br />

—<br />

-<br />

*•-*<br />

(des charbonniers)<br />

"Mouches. (A disparu).<br />

"'f<br />

. Rue des<br />

(de la citerne). Rue Perregaux,<br />

près de celle de Ben-Gana.<br />

'des métiers à tissage). Se trou<br />

vait dans la Kasba. (A disparu).<br />

(de la place des Chameaux). (A<br />

disparu).<br />

Ou mieux Toppana (en turc la<br />

batterie). Au-dessous de Bab-el-<br />

Djabia,<br />

sur le rempart de l'Ouest.<br />

Voir Sabate, Kous el Akouas.<br />

Chapelle et école.<br />

Au bout de la rue Vieux en ar<br />

rivant, à Chara. Serl aux Khouan<br />

de Sidi-Abd-er-Rahman.<br />

Au fond de la première impasse<br />

de la rue du 23e de Ligne, der<br />

rière la pharmacie;<br />

aussi Sidi-Kemmouche.<br />

est appelée<br />

Au bas de la rue Desmoyen,<br />

près de la rue Caraman, appelée<br />

aussi Zaouïel-Souari. (A disparu).<br />

Rue Perregaux, 76. Sert aux<br />

Khouan de la secte de Tedjini.


Zaouïet-ben-Re-<br />

douane<br />

.\*<br />

Zaouïet-el-Hanafïa.<br />

L-*.2-J— 3sr'<br />

_j'j<br />

Zaouïet-el-Khera-<br />

chefïïne<br />

lyyij<br />

^yyhyJi<br />

Zaouïet-en- Neddja-<br />

R1NE<br />

Zaouïet-Moulaï-<br />

,<br />

Taïeb<br />

A--y-<br />

_y_y l-ij<br />

\j<br />

Zaouïet-Ras-el-<br />

Kharrazine<br />

Zaouïet-Souari ....<br />

Zaouïet-Tlemçani . .<br />

._j !___LxJI ï-yj II<br />

Zekak.<br />

—<br />

àj<br />

Zekak-el-Blate. . .<br />

_._y_Jl_jL_*j<br />

52<br />

Rue Combes,<br />

douk aux huiles.<br />

au-dessus du fon-<br />

(des Hanafites). Rue Fontanilhes.<br />

Rue des Mouches, au-dessous<br />

de la rue Vieux. Sert à la secte<br />

des Khouan Fogra de Sidi-Ammar.<br />

Appelée aussi Zaouïet-Hensala.<br />

Rue Vieux;<br />

sala.<br />

Rue des Zouaves,<br />

sert aux Khouan Hen-<br />

en face, de<br />

l'entrée de la rue Damon. Sert aux<br />

/Khouan de la secte de Moulaï-Taïeb.<br />

(Ou des Oulad-Cheïkh-el-Feg-<br />

goun). A l'angle des rues Combes<br />

et Rouaud, la mosquée dite de<br />

Hamouda.<br />

(ou de Ben-Djelloul). Voir Zaouïet-<br />

ben-Djelloul.<br />

Bue de Conslantine. Est occupée<br />

maintenant par les Sœurs du Bon-<br />

Secours.<br />

Rues.<br />

Les rues d'El-Blàle). Rue Cara<br />

man, depuis l'église jusqu'à la rue<br />

des Cigognes.


Zekak-el-Milïïne. . .<br />

..jj-jj-yj!<br />

_JLJj<br />

Zellaïka<br />

Zenka<br />

ï—iyVyJî<br />

i k—ij<br />

Zenket -Ahtchi-Ba-<br />

KIR<br />

..J..C.J xs"! i_fl_j;<br />

Zenket-Arbaïn- Ché<br />

rif . .<br />

^jH.y^J LàJj<br />

Zenket-Bar'la<br />

ï 1-x.j L.à-jj<br />

Zenket-ben-Cheïkh .<br />

.j £_iJj<br />

Zenket-ben-Dali-<br />

Moussa<br />

Zenket- ben- el- R'a-<br />

ZALl<br />

^JlyiJl^ï-iJj<br />

Zenket-ben-Sammar .<br />

jl_.^aJl^j ÏJUJ<br />

- 53<br />

(La rue des Miliens). Rue des<br />

Zouaves, au-dessous de Sidi-bou-<br />

Annaba.<br />

(La glissante). Entrée de la rue<br />

Rhumel, rue Perregaux (Bab-el-<br />

Djabia).<br />

Rue et impasse.<br />

(L'impasse d'Ahtçhi-Bakir). Rue<br />

Perregaux,<br />

Barrou.<br />

'<br />

au-dessus de Frane-<br />

(des 40 cherifs). Rue Arbaïn-<br />

Chérif dans la partie tombant rue<br />

Perregaux.<br />

(de la mule). Impasse de la rue<br />

de Conslantine.<br />

(de Ben-Cheïkh). Rue des Cigo<br />

gnes, au-dessus de la rue de France.<br />

(A disparu).<br />

(de Ben-Dati-Moussa). La rue<br />

Dali-Moussa,<br />

Ali-Moussa.<br />

appelée improprement<br />

(de Ben-el-Razali). Rue de la<br />

Coite,<br />

près Bab-el-Djabia.<br />

(de Ben-Sammar). L'impasse Sidi-<br />

el-Djelis.


Zenket-ben-Si-el-<br />

Hacen<br />

Zenket-ben-Tarzi . .<br />

Zenket-ben-Titah .<br />

-JX-*Ji \i


Zenket-Dar-Braham-<br />

Khoudja<br />

A-ay-a yj-Aj!_<br />

A_fl.jJ<br />

Zenket-Dar-el-Hadj-<br />

Brahim<br />

yy)<br />

_.L_""<br />

.o ï.iJj<br />

Zenket-Dar-el-Hadj-<br />

Saïd<br />

jL_jy___L_-'l<br />

,t_ X_£yj<br />

Zenket-ed-Derdaf. .<br />

s|j>j_xJ| ïjljj<br />

Zenket-el-Amamra. .<br />

B._j»LyJI X_jyj<br />

Zenket-el-Hadj-Saïd<br />

X- a, ---L-r ' ï_i.j J<br />

Ze.nket-el-Rouamel.<br />

Zenket-es-Soultane<br />

\l __!-_,Jl __à_;j<br />

Zenket-Halmougha .<br />

- 55<br />

—<br />

(de la maison de Braham-Khou-<br />

dja). A l'angle de la rue Madier et<br />

de la place de l'Asile. (A disparu).<br />

(de la maison d'El-Hadj-Brahim).<br />

Impasse rue L'huillier.<br />

(de la maison d'El-Hadj-Saïd).<br />

La rue des Abyssins.<br />

(des petits pas). Ainsi nommera<br />

cause de la pente. Impasse près la<br />

porte Djabia,<br />

et celle de la Cotte.<br />

entre la rue Morland<br />

(des Ammar). Rue Abd-Allah-<br />

Bey, au-dessous de la rue Perre<br />

gaux.<br />

Voir Zenket-Dar.<br />

(des marchands de sable). La rue<br />

du Sud,<br />

au-dessous de la rue Na<br />

tionale (Bab-el-Kantara).<br />

(du Sultan). Impasse rue Perre<br />

gaux, entre les rues de l'Échelle et<br />

près de Bab-el-Dja<br />

Abd-Allah-Bey,<br />

bia.<br />

(des baies de myrte). La rue des<br />

Alises.


Zenket-Khera—<br />

s)^-_r-'<br />

à-S-i<br />

A<br />

Zenket-Mekaïs.<br />

/<br />

yy I<br />

&-/> i_i_j :<br />

Zenket-Salah-Bey ; .<br />

.çls ^_.'L_/_> 'ÀJs-i ;<br />

c<br />

Zenket-Sari<br />

Q, L—*_> A__t_jl<br />

Zenket-Sidi-Derrar.<br />

_J)<br />

. J'J<br />

£X- iï-flyl<br />

Zenket-Sidi-Offane.<br />

—a_c Ç_^_j>__, i_i_j J<br />

Zenket-Terbïat- EL-<br />

DjEZZAR<br />

•<br />

Jt , .<br />

)_yJ| ,1<br />

~_—> ,.j ~_a_j i<br />

,Zerzaïh'a.<br />

r'.y<br />

«>jjy<<br />

— — 56<br />

(de l'ordure). Ruelle donnant rue<br />

Perregaux, vis-à-vis de l'Arc, et re<br />

joignant en montant la rue Abd-<br />

Allah-Bey.<br />

(des coupures). Impasse rue des<br />

Cigognes,<br />

partie inférieure. A été<br />

en partie englobée dans la percée<br />

de la rue.<br />

(de Salah-Bey). Impasse au bout<br />

de la rue Caraman,<br />

(de Sari). Rue Sari,<br />

Nationale.<br />

sous la voûte.<br />

sous la rue<br />

(de Sidi-Derrar). Impasse de la<br />

rue Combes,<br />

de Ligne et Sérigny.<br />

entre les rues du 23e<br />

(de Sidi-Offane). La rue Morland,<br />

partie supérieure.<br />

d"<br />

(de la Terbïa d'EI-Djezzar). Rue<br />

ravin,<br />

sous la rue Nationale.<br />

(La glissade). Au bas de la rue<br />

Traversière, près du boulevard de<br />

l'Ouest (Bab-el-Djab»r-7^<br />

/é-A-^


{Ay


CHUTE DE LA DYNASTIE<br />

DES<br />

GOUVERNEURS A'RLEBITES<br />

EN AFRIQUE.<br />

ÉTABLISSEM ENT<br />

DE<br />

L'EMPIRE OREÏDITE.w<br />

(886-912)<br />

FRAGMENT HISTORIQUE.<br />

La conquête de l'Afrique septentrionale par les Arabes, achevée<br />

vers la fin du 1er siècle de l'Hégire, et suivie aussitôt de l'enva<br />

hissement de l'Espagne (710), donna au Khalifat ce vasle territoire<br />

que les Orientaux désignèrent sous le nom de Mag'reb (Occident).<br />

Les conquérants, en lançant l'élément actif berbère à la curée<br />

des riches provinces de la Péninsule Ibérique,<br />

surent tirer un<br />

merveilleux parti du peuple vaincu, tout en assurant la tranquil<br />

lité de l'Afrique.<br />

Cependant, lorsqu'il ne resta plus rien à piller en Espagne,<br />

lorsque les peuples chrétiens, revenus de leur stupeur eurent<br />

(1) Ces deux chapitres sont extraiis d'un ouvrage d'ensemble sur l'his<br />

toire de l'Afrique septentrionale auquel nous mettons la dernière main.<br />

Nous les offrons aux lecteurs de la Revue Africaine, parce que ce recueil<br />

a déjà publié différents documents sur la fondation de l'empire d'Obeïd-<br />

Allah,<br />

notamment une excellente traduction d'Ibn-Hammad, enrichie de<br />

notes par M. Cherbonneau.


4<br />

organisé la résistance, lorsque, enfin, les nouveaux arrivés ne<br />

trouvèrent plus la même facilité pour s'établir, parce que les pla<br />

ces étaient prises, l'émigration se ralentit en Afrique, et l'esprit<br />

d'indépendance se réveilla chez les Berbères. Le schisme Khared-<br />

jite, dans lequel ils s'étaient tous jetés,<br />

servit de prétextelï<br />

levée de boucliers qui prit naissance dans l'extrême Mag'reb<br />

(Maroc actuel),<br />

nale.<br />

et s'étendit bientôt à toute l'Afrique septentrio<br />

A partir de ce moment, le rôle des gouverneurs arabes, repré<br />

sentants du khalifat à Kaïrouàn,<br />

devint précaire. Contraints de<br />

faire venir leurs troupes de l'Orient, ils se trouvèrent isolés au<br />

milieu des indigènes,<br />

contre lesquels il leur fallut combattre<br />

à outrance. La guerre entre les armées arabes et les Berbères-<br />

Kharedjiles ensanglanta de nouveau l'Afrique, erTêTîrpôur<br />

"d'arrêter net l'émigration des Maures (1) en Europe. Ce fut le salut<br />

de la chrétienté.<br />

y <<br />

. )<br />

Sur ces entrefaites, la dynastie omeïade ayant été renversée en<br />

Orient par celle des Abbacides,<br />

un membre de la famille déchue<br />

se réfugia en Espagne et y fonda une royauté indépendante<br />

(755j. Ainsi le khalifat perdit en Mag'reb une première province.<br />

Pendant de longues années, les Berbères d'Afrique combattirent<br />

avec des chances diverses et firent éprouver de rudes échecs aux<br />

milices syriennes envoyées d'Orient. Plusieurs fois, même, ils<br />

s'emparèrent de Kaïrouàn et ne laissèrent échapper, que par<br />

leurs dissensions inteslinesÉt leur manque d'union, l'indépen<br />

dance un moment reconquise.<br />

Enfin, vers l'an 800, un excellent général arabe, nommé Ilira-<br />

him-ben-Abou-1'Ar'leb,<br />

réussit à rétablir la paix dans l'Est. Dési<br />

gné comme gouverneur de l'Afrique par Haroun-er-Rachid, il<br />

obtint de ce prince les prérogatives d'une vice-royauté hérédi<br />

taire, sous la suzeraineté directe du khalifat.<br />

Mais si cette habile mesure devait relarder d'un siècle la chute<br />

complète de l'autorité arabe en Afrique, elle consacrait la perte<br />

de tout le Magreb-extrême, qui, suivant l'exemple de l'Espagne,<br />

s'était entièrement détaché pendant les guerres des Kharedjites.<br />

(1; Habitants de la Mauritanie, autrement dits les Berbères du Mag'reb.


5<br />

Un arabe de la famille d'Ali, nommé Edris-ben-Abd-Alluh,<br />

après avoir échappé au désastre de sa famille el de ses partisans,<br />

écrasés à Fekh par les Abbacides, avait trouvé un refuge dans<br />

l'Ouest de l'Afrique et, avec l'appui des Berbères, avait fondé en<br />

773, la ville de Fès et l'empire edricide.<br />

Dans le Mag'reb central, la famille berbère des Ben-Rostcm,<br />

régnait à Tehert (Takdemt),<br />

sur les Kharedjites. Enfin à Sidjil-<br />

massa (Tafilatat), la tribu berbère des Miknaça avait fondé la dy<br />

nastie des Beni-Midrar, dont l'autorité s'étendait sur les contrées<br />

du Sud-Ouest.<br />

Il ne restait donc en Afrique, aux Kalifes d'Orient représentés<br />

par les gouverneurs ar'lebiles, queîTIfrikïa,<br />

c'est-à-dire la<br />

Tunisie, la Tripolitaine ei la province actuelle de Constantine.<br />

En vain le 'premier Ar'lebite essaya d'étendre son influence<br />

vers le couchant; en vain Haroun-er-Rachid envoya d'Orient<br />

à Fès un émissaire pour empoisonner Edris ; l'Ouest de l'Afrique,<br />

de même que l'Espagne, demeura perdu pour le khalifat.<br />

Renonçant donc à reconquérir ces provinces, Ibrahim-ben-el-<br />

Ar'leb s'attacha à maintenir la paix dans les siennes Pour con<br />

trebalancer l'influence de la milice syrienne, dont l'indiscipline<br />

avait antérieurement causé bien des malheurs, il créa un corps<br />

de troupes nègres, en fesant acheter des esclaves qu'il affranchit.<br />

Avec ces forces régulières et en employant l'appui des tribus<br />

berbères soumises, contre celles qui se lançaient dans la révolte,<br />

les princes arlebites surent maintenir leur autorité et faire bril<br />

ler d'un certain éclat les derniers jours de la domination arabe<br />

en Afrique. La conquête de la Sicile, de Malte el d'une partie de<br />

la Sardaigne augmenta leur puissance, tout en ajoutant à leur<br />

gloire.<br />

Vers l'an 886,<br />

I.<br />

Abou-Ish'ak-Ibrahim ben-el-Ar'leb régnait à<br />

Kaïrouàn. Successeur de son frère Abou-1-R'aranik,<br />

ce prince<br />

avait été porté au pouvoir par le peuple en 875, et, comme avant<br />

la mort de son frère, il lui avait juré solennellement de ne pas-


s'emparer de l'autorité,<br />

6<br />

il ne s'était décidé à l'accepter que pour<br />

ne pas la voir passer aux mains d'une autre famille.<br />

Les premiers actes d'Ibrahim avaient été empreints de justice<br />

et de bonté. Etabli dans le château de Rokkada (1 ), qu'il fit cons<br />

truire à quatre milles de Kairouan, afin d'y être à l'abri des sédi<br />

tions de la milice, il dirigeait la guerre sainte alors concentrée en<br />

Sardaigne,<br />

et s'occupait de régulariser l'administration de ses<br />

provinces. Mais l'esprit d'insubordination, sinon d'indépendance<br />

semblait s'être réveillé chez les Berbères. Les indigènes de l'Au<br />

rès, de la Tripolitaine et même du pays de Barka, sur la frontière<br />

de l'Egypte se lancèrent tour-à-tour dans la révolte, firent<br />

essuyer de sérieuses défaites aux généraux ar'lebites et forcèrent<br />

le gouverneur à de sévères mesures de répression.<br />

Dès lors,<br />

le caractère du prince ar'lebite changea. Naturelle<br />

ment soupçonneux , irrité par la résistance qu'il rencontrait<br />

autour de lui, on peut-être, perverti par l'exercice du pouvoir, il<br />

devint d'une cruauté inouie, exerçant ses caprices sanguinaires<br />

tant sur ses parents ou ses favorites, que sur ses ennemis (2).<br />

Tandis qu'Ibrahim se livrait ainsi aux écarts de son étrange<br />

nature, donnant successivement l'exemple d'une véritable gran<br />

deur d'âme ou d'une lâche cruauté, la secte des Ch'iaïtes dont le<br />

siège était en Orient et qui, depuis quelque temps avait envoyé<br />

des missionnaires en Afrique, y gagnait de nombreux adhérents.<br />

De même que lors de l'appuilion du Kkaredjisme, les Berbères<br />

accueillaient avec empressement un schisme qui leur offrait un<br />

motif de résistance contre leurs dominateurs.<br />

'<br />

',,<br />

s<br />

,? } .<br />

'• La base de la secte chj__aïte, «^SSlï^É^faB^^ée^^Khared-<br />

jile était que l'Imam, ou chef de la religion, ne pouvait être pris<br />

"que parmi les descendants du prophète par sa tille Fatima et son<br />

'gendre Ali JEn outre de cette divergence, dit M. Si de Sacy (3),<br />

y/ 4 '%-^y.M^ .<br />

"' ~l<br />

,.<br />

'<br />

.■/,-■ ■<br />

. .<br />

(1) Rokkada: ta dormeuse. Ce château était construit dans le lieu de<br />

l'Ifrikia où l'air était le plus pur, le elimat le plus tempéré et les<br />

champs les mieux fleuris. L'on y souriait sans motif et l'on y était<br />

» gai sans cause. » (En-Notteïri, appendice 1" 11, page 425, tome d'ibn-<br />

Khaldoun).<br />

(2i Voir En-Noueiri, toc. cit. p. 436 et suivantes<br />

(3) Rfligion des Druses.


1<br />

7<br />

ils contestaient certains points de dogme et surtout de rite, rame<br />

nant, par leurs leçons, la religion musulmane au matérialisme.<br />

Vaincus en l'an 41 de l'Hégire par les Oméiades, ces schismati<br />

ques se répandirent dans tout le monde musulman, où ils firent<br />

une propagande active, et reçurent le nom de Chiàïtes 'sectaires1.<br />

Peu après l'établissement de la dynastie abbacide (132 de l'Hé<br />

gire), ils se crurent assez forts pour lui disputer le pouvoir; mais,<br />

vaincus par le khalife El-Hâdi à la bataille de Fekh, où tous<br />

leurs chefs tombèrent (1), ils durent rentrer dans l'ombre. Ils se<br />

formèrent alors en sociétés secrètes et envoyèrent des agents dans<br />

toutes les directions, même en Afrique,<br />

exercée contre eux par les Abbacides.<br />

malgré la surveillance<br />

Le schisme chiaïte se divisait en plusieurs sectes dont les<br />

principales étaient : les Zïadïa, partisans de Zeïd,<br />

— et de Fatima ; les Keiçanïa,<br />

petit-fils d'Ali<br />

enseignant que l'Imamat passa des<br />

enfants de Fatima à"un autre fils d'Ali dont la mère se nommait<br />

Kêîçân; '— les Imamïa (Imamiens), formant les Ethna-Acherïa<br />

^Duodécemains) et les\lsmaïlïa (Ismailiens) .<br />

Les Ethna-Acherïa comptaient douze Imam et enseignaient que<br />

le douzième, ayant disparu mystérieusement,<br />

devait reparaître<br />

plus tard pour faire renaître la justice sur terre. Il serait ainsi le<br />

Mehdi (ou êtrejdirigé), prédit par Mahomet (2).<br />

Lés Ismaïliens ne comptaient que six Imam, successeurs d'Ali,<br />

ayant régné; le septième, Ismaël, désigné pour succéder à son<br />

père était, selon eux, mort avant lui. A partir de ce septième,<br />

leursdmam étaients dits cachés » (mektoum),<br />

ne transmettant<br />

leurs ordres au Monde que par l'intermédiaire des D'aï (invileurs,<br />

missionnaires) (3). Le troisième Imam-caché, nommé Mohammedel<br />

Habib, vivait à Salemïa, ville du territoire d'Emesse en Syrie,<br />

à l'époque où nous commençons ce fragment historique. De sa<br />

(1) L'un d'eux, Edris, put cependant échapper et se réfugier en Mag'reb;<br />

v. ci-devant n?_..„<br />

(2) C'est leQIoul-es-Sad (le maître de l'heure)'<br />

que les indigènes de l'Al<br />

gérie attendent encore, quoiqu'on puisse compter par vingtaines ceux<br />

qui se sont déjà présentés comme tels en Afrique.<br />

(3) ,V.<br />

Ibn-Khaldoun,<br />

chïïtes i<br />

t. 11, append. II, ■ du Khalifat et des sectes


"<br />

8<br />

Vlmam-<br />

retraite, car il ne se montrait pas aux yeux des profanes,<br />

carhé lançait des D'aï dans différentes directions. Les uns, sous<br />

la conduite d'Ibn-Haucheb,<br />

surnommé El-Mansour (le victorieux),<br />

obtinrent dans l'Iémen de grands avantages et envoyèrent des<br />

émissaires jusqu'au fond de l'Inde. D'autres gagnèrent l'Afrique.<br />

Deux de ces D'aï s'établirent en Mag'reb : l'un à Mermadjenna)<br />

au N.-E. de Tebessa jjl'autre dans le pays des Ketamajj), non loin<br />

i*du Souf-DjimarJ,2). fis firent de nombreux prosélytes et en déci<br />

dèrent quelques-uns à faire le pèlerinage de Salemïa.<br />

Averti des heureux résultats obtenus en Mag'reb par ses mis<br />

sionnaires, Mohammed-el-Habib résolut d'y<br />

envoyer un de ses<br />

plus fidèles adhérents, nommé Abou-Abd Allah-el-Hoceïn-ben-<br />

Mohammed-ben-Zakarïa. Cet homme de mérite, qui devait rendre<br />

de si grands services à la cause fatémide, avait d'abord été<br />

/ Mohtacib, c'est-à-dire receveur d'un marché de Bassora ; puis, il<br />

avait enseigné publiquement les doctrines des Imamiens, ce qui<br />

lui avait valu le l\lt%A'El-M'allem (le maître) (3). Il partit pour<br />

jle Mag'reb en compagnie de chefs des Ketâmâ qui lui avaient été<br />

adressés en Orient, et, comme les Abbacides faisaient, avec soin,<br />

surveiller les routes, les voyageurs passèrent par les déserts<br />

de l'Egypte, afin d'éviter leurs agents, puis traversèrent ceux de<br />

la Tripolitaine, et enfin, pénétrèrent par les montagnes, dans le<br />

Tel de Constantine. De là, ils gagnèrent les chaînes des Ketâma<br />

et s'établirent au lieu dil\Ikdjan, ou plutôt Guedjal (4), localité<br />

du territoire des Beni-SekiaÉ tribu des Djimela, près Sétif. ^ J<br />

(1)<br />

Bône.<br />

Grande tribu berbère établie entre Bougie, Sétif, Constantine et<br />

(2) En Berbère , la rivière du sable, que les Arabes ont traduit littéra<br />

lement par Ouad-er-Remel. C'est la rivière qui passe à Constantine.<br />

(3) V. Ibn Khaldoun, t: II, append. 11, p. 509, et aussi l'historien Ibn-<br />

Hammad, dont M. Cherbonneau a publié une excellente traduction dans<br />

la Revue Africaine, n0><br />

72 et 78.<br />

(4) M. Carette (notice sur les migrations, etc,), place cette localité, dont<br />

il ne peut préciser l'orthographe, dans les montagnes du golfe de Bougie,<br />

et cela, h cause d'une analogie de noms, du reste inexacte. M. Cherbon<br />

neau a établi d'une manière incontestable {Bévue Africaine, n°<br />

72), que<br />

cette localité est nommée aujourd'hui Guedjal et se trouve, comme l'in<br />

diquent l'Gdrisi, El-Hekri, lbn-Hammad et Ibn-Khatdoun lui-même, h<br />

quelques milles au Nord de Sétif.


Le chef de ces indigènes, Mouça-ben-Horeïlh, un de ceux qui<br />

avaient fait connaissance du Chiâïte en Orient, protégea son éta<br />

blissement dans cette localité, qui fut appelée le ravin des gens de<br />

bien (Feddj-el-Akhiar). Ce nom ne fut pas pris au hasard ; Abou-<br />

Abd-AlTâb"annonça ert'éffet que le Mehdi lui avait révélé qu'il<br />

serait forcé, comme le Prophète, de fuir son pays (d'avoir une<br />

hégire), et qu'il serait soutenu par des gens de bien (ses Ansars),<br />

dont le nom serait un dérivé du verbe katama (cacher;.<br />

1 Ces moyens, habilement choisis, devaient réussir auprès de<br />

gens ignorants tels que les montagnards du Mag'reb. Aussi,<br />

les Berbères-Kelama, flattés de voir leur nom prendre une origine<br />

arabe et d'être désignés pour le beau rôle d'Ansars du nouveau<br />

prophète, vinrent-ils en foule se ranger sous la bannière du D'aï<br />

chiaïle.<br />

Ces faits se passèrent sans doute entre les années 890 et 893,<br />

car la date de l'arrivée en,Afrique d'Àbou-Abd-AUah est incer<br />

taine.<br />

Vers le même temps, le gouverneur ar'lebite Ibrahim, qui<br />

venait de fajre périr ses propres filles et un grand nombre de ses<br />

esclaves (1),<br />

attira par ses promesses les principaux chefs berbères<br />

du Zab et de Belezma (2), à Rokkadypuis il les fil massacrer et<br />

s'empara déleurs richesses. Un millier d'indigènes périrent, dit-<br />

on, dans ce guet-apens,<br />

qui eut pour effet de jeter un grand<br />

nombre de Ketama dans les bras des Chiaïtes, car les gens de<br />

Belezma étaient leurs suzerains (3).<br />

Cependant Ibrahim, apprenant la propagande que faisait Abou-<br />

Abd-Allah,<br />

lui écrivit pour lui enjoindre d'avoir à cesser toute<br />

prédication. Le Chiaïte répondit par une lettre injurieuse, et le<br />

(1) En-Noueïri, p. 427<br />

(2) Le Belezma-des-Mezata de Bekri, le K'çar-Belezma actuel, au Sud de<br />

Constantine, sur le versant de l'Aurès qm"â pris son uom.(V. l'Annuaire<br />

de la Société achéologiqne de Constantine, 1856-7, p. 172. V. aussi<br />

Abou-<br />

Obeïd-el-Bekri, Géographie de l'Afrique.)<br />

~(3) Selon le Baîau, les habitants de Belezma étaient de race arabe, des<br />

cendant, soit des premiers conquérants soit des anciens miliciens. Ce<br />

serait donc un des rares groupes arabes laissés dans l'intérieur par la<br />

conquête de l'an 650, qu'il ne faut pas confondre avec l'immigration de<br />

1050. |<br />

~


10<br />

gouverneur donna aussitôt aux commandants des provinces voi<br />

sines, l'ordre de marcher contre les rebelles. Les chefs de Sétif,<br />

de Belezma et de Mecila, ville qui semble dès lors avoir remplacé<br />

Tobna comme capitale du Zab, se préparèrent donc à attaquer les<br />

champions de l'agitateur. A l'approche du danger, les Ketama<br />

commencèrent à se repentir de leur audace, et plusieurs cheiks<br />

émirent l'avis d'expulser IeChiâïte, mais les Djimela prirent sa<br />

défense, et, soutenu par eux, Abou-Abd-Allah vint.se retrancher<br />

à Tazrout, non-loin de Mila où habitait la tribu ketamienne des<br />

R'asman (1).<br />

Tandis que ces événements s'accomplissaient dans les monta<br />

gnes des Ketama, une révolte importante éclatait en Tunisie. La<br />

\ péninsule de Cherik (2), la ville de Tunis, celles de Badja et<br />

"iïé~Laribus (3), enfin la ville et la montagne de Kammouda (4),<br />

au Sud de Kairouan, s'étaient lancées dans la rébellion contre le<br />

gouverneur ar'lebite. Inquiet des proportions que prenait cette<br />

révolte, Ibrahim fit renforcer d'abord les retranchements de<br />

Rokkada, afin d'y trouver un refuge contre toute éventualité,<br />

puis il envoya dans la péninsule de Cherik une armée qui dis<br />

persa les insurgés el s'empara de leur chef, lequel fut mis en croix<br />

à Kairouan . En<br />

même temps, l'eunuque Meimoun et le général<br />

Ibn-Nâked, commençaient le siège de Tunis, pendant que l'eu<br />

nuque Salah allait faire rentrer dans le devoir la province de<br />

Kammouda . A<br />

Bientôt, les troupes arTebites entrèrent victorieuses à Tunis et<br />

mirent cette ville au pillage. Douze cents des principaux citoyens<br />

furent réduits en esclavage et envoyés à Kairouan. Les morts,<br />

même, furent, par l'ordre d'Ibrahim, chargés sur des charretles<br />

pour être promenés, dans les rues de la capitale, aux yeux des<br />

habitants.<br />

Peu de temps après, c'est-à-dire en 894, le gouverneur ar'lc-<br />

(1) lbn-Khaldoun, t. II, p. 512 et suivantes.<br />

(2) Le point de la Tunisie le plus rapproché de la Sicile.<br />

f3) Ces localités sont au S.-O. de Tunis, non loin du poste actuel du<br />

Kaf ; la première est la Vacca de Salluste.<br />

(4) Gammouda selon la prononciation actuelle.


f<br />

ii<br />

bile transporta le siège de gouvernement à Tunis; puis, lorsqu'il<br />

y fut complètement installé,<br />

il résolut la mise à exécution d'un<br />

projet qu'il méditait depuis longtemps, et qui n'était rien moins<br />

que de déclarer la guerre aux Toulounites gouverneurs de l'E<br />

gypte. Ayant donc rassemblé un grand nombre de troupes, il se<br />

"nuTâ leur tête, et prit la route de l'Est (896) (1). Parvenu dans la<br />

province de Ncfonça près Tripoli, il se heurta contre une révolte<br />

des indigènes de cette localité. Un combat sanglant s'ensuivit et,<br />

comme les Nefouça avaient l'avantage de la position, les troupes<br />

ar'lebites plièrent après avoir vu tomber leur chef Miuioun. Mais<br />

Ibrahim ayant lui-même rallié ses soldats, attaqua les rebelles<br />

avec vigueur et les mit en déroule. Le plus grand carnage suivit<br />

cetle victoire ; le gouverneur ayant, par extraordinaire, manifesté<br />

quelque regret de voir couler tant de sang musulman, ses cour<br />

tisans le rassurèrent en lui faisant remarquer que les Nefouça<br />

étaient hérétiques (kharedjites). La conscience ainsi tranquillisée,<br />

; Ibrahim fit amener devant lui les principaux prisonniers el<br />

s'amusa à les percer lui-même de son javelot, II ne s'arrêta dit-on<br />

qu'au nombre de cinq cents (2).<br />

Le prince ar'lebile continuant sa marche, arriva à Tripoli, où<br />

il fit crucifier le gouverneur de cette ville dont le seul crime<br />

consistait à avoir, par ses talents et son érud i lion, excité la jalousie<br />

d'Ibrahim.<br />

Mais tant de crimes devaient à la fin retomber sur leur auteur.<br />

Parvenu à Aïn-Taourg'a au fond du golfe de la grande Syrte, le<br />

gouverneur se vit abandonner par son armée à la suite d'une<br />

dernière cruauté commise sur des soldats. Force lui fut alors de<br />

rentrer à Tunis et de renoncer à son projet. L'année suivante, il<br />

envoya son fils Abou-l 'Abbas en Sicile où une révolte venait<br />

d'éclater et le chargea, après avoir rétabli l'ordre, de prendre la<br />

direction de la guerre sainte en Sardaigne.<br />

Ainsi le gouverneur ar'lebite s'occupait fort peu des progrès<br />

du schisme chiaïte parmi les Ketama, méprisant trop ces indignes<br />

(1) En-Nouéiri,<br />

(2)<br />

p. 429 et suivantes<br />

Selon Ibn-Khaldonn, le gouverneur se serait donne ce passe temps<br />

après son retour à Kairouan.


12<br />

adversaires ; el cependant, le moment était proche où le triomphe<br />

de la secte fatemide allait anéantir sa dynastie et délivrer l'Afri<br />

que de la domination arabe.<br />

Après le mouvement hostile qui s'était prononcé parmi lés Ke<br />

tama, contre Abou-Abd-Allah, sous l'empire de la terreur produite<br />

par l'annonce de l'attaque prochaine des Ar'lebilés, plusieurs<br />

combats avaient été livrés entre les tribus fidèles et les partisans<br />

du Chiaïte. L'avantage étant resté à ce dernier, il avait vu le<br />

noyau de ses adhérents se grossir de ces masses qui suivent tou<br />

jours le vainqueur. Les gens de Belezma, les Lehiça et Addjana,<br />

tribus ketamiennes, quelques fractions des Sanhadja (I), tribu<br />

qui jusque-là était restée fidèle aux Ar'lebites, et enfin des<br />

Zouaoua, montagnards du Abou-<br />

Djerdjera, se déclarèrent pour<br />

Abd-Allah.<br />

Pendant que le Chiaïte recueillait ces soumissions, un chef de<br />

la fraction kelamienne des Latana, nommé Ftah-ben-Yahïa, qui<br />

s'était montré l'adversaire déclaré du novateur, se rendit à Rok<br />

kada dans l'espoir de décider le gouverneur à entreprendre une<br />

campagne sérieuse contre les rebelles. Au même moment, Abou-<br />

Abd-Allah, prenant l'offensive,<br />

s'empara par trahison de Mila et<br />

mit à mort le commandant ar'lebitc de cette ville.. Le fils du chef<br />

qui avait évité, par la fuite, le sort de son père, vint à Kairouan<br />

où il retrouva Flah,<br />

obtenir vengeance. *<br />

Ibrahim était alors en Sicile,<br />

et tous deux redoublèrent d'efforts pour<br />

par suite des événements que<br />

nous raconterons plus loin. Abou-l'Abbas qui gouvernail en l'ab<br />

sence de son père, se décida à envoyer contre les Ketama un corps<br />

de troupes sous la conduite de son fils Abou-l'-Kaoual (902).<br />

Abou Abd-Allah fit marcher à leur rencontre un groupe de ses<br />

adhérents ; mais les troupes régulières les ayant dispersés avec la<br />

plus grande facilité, il dut évacuer précipitamment la place forte<br />

de Tazrout,<br />

pour se réfugier dans son quartier-général de Guedjal<br />

situé au milieu d'un pays coupé et d'accès, difficile (2). Abou-<br />

(1) Cette puissante tribu berbère était cantonnée entre le méridien de<br />

Bougie, celui de Tenez et la mer. D'autres groupes des Sanhadja habi<br />

taient le Magreb et le désert.<br />

(2) lbn-Khaldoun, t. 11, p. 51 :> cl suivanles.


13<br />

l'Kaoual, après avoir démantelé Tazrout,<br />

essaya de relancer son<br />

cnnnemi dans sa retraite; mais en s'avançant au milieu du dédale<br />

des montagnes ketamiennes, il reconnut bientôt qu'il ne pourrait,<br />

sans s'exposer à une perte certaine, poursuivre la campagne dans<br />

un tel lerrain. Les Berbères surent profiter habilement de son<br />

indécision et du découragement qui gagnait son armée pour le<br />

harceler, surprendre les corps isolés, el enfin le forcer à évacuer<br />

leur pays. Débarrassé de ses ennemis, le Daï chiaïte s'établit<br />

d'une façon définitive à Guedjal, dont il fit sa ville sainte et qu'il<br />

appelaAQar-el-Hidjera (la maison du refuge);<br />

Pendant que les montagnes ketamiennes étaient le théâtre des<br />

faits que nous venons de rapporter, voici ce qui avait eu lieu en<br />

Tunisie. Quelque temps auparavant, les habitants de Tunis, qui<br />

gémissaient sous la tyrannie d'Ibrahim,<br />

avaient réussi à faire<br />

parvenir au Kalife une supplique dans laquelle ils lui exposaient<br />

tous leurs griefs contre son représentant. En apprenant de tels<br />

excès, le souverain de Bag'dad, El-Moladhed, décida de suite la<br />

révocation d'Ibrahim el lui envoya un de ses officiers pour lui<br />

signifier l'ordre de remettre le pouvoir entre les mains de son<br />

fils Abou-1'Abbas,<br />

puis de se rendre en personne à Bag'dad pour<br />

expliquer sa conduite. Mais Ibrahim était trop prudent pour aller<br />

ainsi se livrer à la colère de son suzerain . Après<br />

avoir fait le<br />

plus brillant accueil à l'envoyé, il déclara qu'il venaitd'êlre touché<br />

de la grâce divine, se revêtit d'habillements grossiers, fit mettre<br />

en liberté les malheureux qui gémissaient dans les prisons, puis<br />

annonça son intention d'abdiquer et de faire le saint pèlerinage.<br />

Ayant donc remis la direction des affaires à son fils Abou-1'Abbas,<br />

il prit le chemin de l'Orient. Mais, parvenu à Souça, il s'arrêta et<br />

fit prévenir le Khalife qu'il renonçait à se rendre aux Villes<br />

Saintes, car, disait-il, il n'aurait pu en traversant l'Egypte, évi<br />

ter un conflit avtc les Toulounites,<br />

auxquels il avait précédem<br />

ment déclaré la guerre- Il lui annonçait, en outre,<br />

qu'il allail<br />

prendre la direction de la guerre sainte en Sicile. Effectivement,<br />

il partit de Souça pour celte île, et se signala dès son arrivée par<br />

de brillants succès.<br />

i Ibrahim était depuis quelques mois en Sicile el se trouvait<br />

'occupé au siège dc.Kasna (Cosenza?), lorsqu'il tomba gravement


14<br />

malade. Bientôt, tout espoir de lui conserver la vie fut perdu, et<br />

peu de jours après (octobre 902), il expira, âgé de 52 ans, sur<br />

lesquels il avait régné 28 ans et demi. Avant sa mort, il décida<br />

que le commandement de la guerre serait pris par son petit- fils<br />

Ziadel-Allah. Par l'ordre de ce prince, une trêve fut accordée aux<br />

assiégés, et on rentra à Palerme, où le corps d'Ibrahim fut enterré<br />

en grande pompe.<br />

La mort du gouverneur ar'lebite coïncida avec la défaite de ses<br />

troupes dans le pays des Ketama.<br />

A Kairouan, le prince Abou-1'Abbas qui n'avait pas encore osé<br />

prendre le titre de gouverneur, craignant la violence de son père,<br />

se fit reconnaître officiellement. Ses premiers actes furent em<br />

preints d'une grande modération et l'on pul croire qu'une ère de<br />

justice allait succéder à la lerreur du règne précédent. Malheu<br />

reusement, il fut bientôt obligé de sévir contre son propre fils<br />

Ziadet-Allah et de le jeter dans les fers, avec un grand nombre de<br />

ses partisans pour prévenir un attentat qui ne devait que trop<br />

bien s'exécuter plus tard (1).<br />

Malgré les embarras qui l'assaillirent ainsi au début de son<br />

règne, Abou-1'Abbas comprenant toute la gravité des progrès des<br />

Chiaïtes, envoya contre eux, pour la seconde fois, son fils Abou-<br />

l'Kaoual. Mais le jeune prince n'eut pas plus de succès dans cette<br />

campagne que dans la précédente el dut se contenter de s'établir<br />

dans un poste d'observaliwi (2).<br />

Quelque temps avant cm événements, le chef de la secte des<br />

Ismaïliens, Mohammed-el-Habib, troisième Imam-caehé était<br />

mort en Orient, laissant sa succession à son fils Obeïd-Allah. Se<br />

sentant près de sa fin, il lui avait adressé ces paroles : « C'est toi<br />

» qui est le Mehdi ; après ma mort, tu dois te réfugier dans<br />

» un pays lointain où lu auras à subir de rudes épreuves (3).<br />

Pour se conformer à ces recommandations, Obeïd-Allah<br />

qui était alors âgé de 19 ans, quitta, après la mort de son<br />

père, la ville de Salemïa et voulut d'abord se diriger vers<br />

(Il En-Noueïri,<br />

p. 439.<br />

l2) Ibn-Khaldoun, t. 11, p. 514.<br />

(3) Ibn-Khaldoun, t. II, p. 515.


15<br />

t'Iemen. Il était accompagné de son jeune fils Abou-l'Kacem et<br />

de quelques serviteurs. En chemin, il apprit que les partisans<br />

de son père dans l'Iemen avaient à peu près abandonné sa doc<br />

trine et paraissaient peu disposés à le recevoir. Il était donc fort<br />

indécis, lorsqu'il reçut un message d'Abou-Abd-Allah, apporté<br />

du Mag'reb par Abou-l'-Abbas, frère de celui-ci et quelques chefs<br />

Ketamiens. Le fidèle missionnaire le félicitait de son avènement<br />

comme Imam el l'engageait à venir le rejoindre en Afrique, où<br />

son parti devenait de jour en jour plus puissant.<br />

Ces bonnes nouvelles décidèrent Obeïd-Allah à gagner l'Occi<br />

dent. Mais l'annonce de l'apparition du Mehdi attendu par les<br />

Chiaïtes s'était répand ue;)Je kalife El-Moktefi le fit rechercher<br />

avec le plus grand soin. Son nom et son signalement furent<br />

envoyés aux gouverneurs des provinces les plus reculées avec<br />

ordre de le saisir partout où on le découvrirait. Obeïd-Allah par<br />

vint cependant à passer en Egypte mais en se déguisant en mar<br />

chand, car, selon l'énergique expression arabe, les yeux étaient<br />

aiguisés sur lui (1). Arrêtés au Caire par le gouverneur de cette<br />

ville, les voyageurs ne recouvrèrent la liberté que grâce à l'ha<br />

bileté de leurs réponses. Ils purent alors continuer leur route,<br />

mais en redoublant de prudence.<br />

Vers celle époque, c'est-à-dire dans le mois de juillet_903J_ le<br />

g_ojrve£ne.ur ar'lebile to^baA_àJ_unis, sous les poignards de trois<br />

de ses eunuques poussés à ce crime par son fils Ziadet-Allah.<br />

Après a^ir^commïs leur forfait, les assassins vinrent annoncer à<br />

celui qui les avait gagnés que son père n'existait plus; mais<br />

Ziadet-AUah, craignant quelque piège,<br />

ne voulut pas se laisser<br />

mettre en liberté avant d'avoir la certitude du meurtre. Les<br />

eunuques étant donc retournés auprès du cadavre, lui coupèrent<br />

la tête el l'apportèrent à son fils, qui, devant cette preuve irré<br />

cusable, consentit à ce qu'on brisât ses fers.<br />

Abou-l'-Abbas avait montré, pendant son court passage aux<br />

affaires,<br />

des qualités remarquables. C'était un prince instruit et<br />

digne, en tout point, du nom ar'lebite (2).<br />

(1) Ilm-Hammad {Revue Africaine).<br />

(2) En-Noueïri, p. 440.<br />

~~


16<br />

Quant à Ziadet- Allah qui n'avait pas craint d'arriver au pouvoir<br />

par le meurtre de son père, il était facile de prévoir ce que sérail<br />

son règne. Un de ses premiers actes fut d'ordonner le supplice<br />

des eunuques qui avaient assassiné Abou-l'-Abbas. Il se livra<br />

ensuite à tous les déportements de son caractère, qui avait la féro<br />

cité de celui d'Ibrahim, sans en avoir le courage et l'intelligence.<br />

Vingt-neuf de ses frères et cousins furent, par son ordre, dépor<br />

tés dans l'île de Korrat, puis mis à mort. Cela fait, il envoya,<br />

à son frère Abou-l'-Kaoual qui opérait dans le pays des Ketama,<br />

une lettre écrite au nom de leur père, lui enjoignant de rentrer<br />

de suite. Abou-l'-Kaoual s'étant conformé à cet ordre, subit à son<br />

arrivée le sort de ses parents.<br />

Tandis que tous ces meurtres ensanglantaient Tunis, Obéïd-<br />

Allah, le mehdi, continuait sa route vers l'Ouest. Parvenu au<br />

près de Tripoli, il garda avec lui son fils,<br />

et envoya en avant ses<br />

compagnons avec sa mère, sous la conduite d'Abou-l'Abbas, frère<br />

d'Abou -Abd-Allah, pour annoncer son arrivée aux Ketama. La pe<br />

tite caravane, accompagnée de quelques marchands,négligea toute<br />

précaution, et, au lieu de prendre la roule du Sud, vint passera<br />

Kairouan. Mais des ordres sévères étaient donnés : personne ne<br />

pouvait rester inaperçu. Abou-1'Abbas fut donc arrêté avec tout<br />

son monde, el conduit à Ziadet-AUah. Devant ce prince, le frère<br />

du Dâï fut impénétrable : ni promesses, ni menaces ne purent lui<br />

arracher son secret . Quelu^'un<br />

de la suite ayant déclaré qu'il<br />

venait de Tripoli, le gouverneur arlebite devina sans doute que<br />

le Mehdi devait y être resté, car il envoya au commandant de<br />

cette ville l'ordre de l'arrêter (1).<br />

Cette fois encore, Obeïd-Allah, prévenu par quelque émissaire<br />

secret,<br />

put échapper par une prompte fuite. Il gagna probable<br />

ment l'intérieur, et, reprenant sa marche vers l'Ouest, vint<br />

passer près de Constantine. De là, il pouvait très-bien se rendre<br />

chez les Ketama, etcependant, il continua sa marche, ne voulant<br />

pas, s'il se découvrait, sacrifier Abou-1'Abbas qui était resté entre<br />

les mains de Ziadet-Allah (2) ; ne devait-il pas, du reste, ac-<br />

(1) Ibn Khaldoun, t. il, p. 516.<br />

(2) C'est, du moins, l'opinion d'Ibn-el-At'ir.


17<br />

complir la prophétie de son père : ... "Tu dois te réfugier dias<br />

un pays lointain, où tu subiras de rudes épreuves. U fallait<br />

au Mehdi des aventures extraordinaires, et opérer de suite sa<br />

jonction avec Abou-Abd-Allah, c'était le triomphe sans les épreu<br />

ves. Il continua donc à errer en proscrit.<br />

Cependant Abou-Abd-Allah, son apôtre, achevait de lui con<br />

quérir un empire. Après le départ d'Abou-l'Kaoual, seul obstacle<br />

qui s'opposait à sa marche, il réunit tous ses adhérents el vint<br />

audacieusement mettre le siège devant Sétif.<br />

Le gouverneur de cette ville soutenu par quelques chefs<br />

kelamiens demeurés fidèles, essaya une résistance désespérée,<br />

mais lorsqu'ils furent tous morts en combattant, la place capitula<br />

et fut rasée par les Chiâïtes vainqueurs.<br />

A cetle nouvelle, le prince de Tunis envoya contre les rebel<br />

les, un de ses parents, nommé Ibn-Hobaïch, avec une armée de<br />

quarante mille hommes (1). Ces troupes vinrent se masser près<br />

de Constantine, où elles perdirent un temps précieux; puis, elles<br />

s'avancèrent jusqu'à Belezma, et, non loin de cette ville, offri<br />

rent le combat aux Ketama, qui avaient marché en grand nom<br />

bre à leur rencontre. La victoire se déclara pour les Chiâïtes.<br />

Ibn-Hobaïch dut se replier en désordre avec les débris de ses<br />

troupes à Bar'aïa (2), d'où il gagna ensuite Kairouan.<br />

Profitant habilement de cet avantage, Abou-Abil-Allah se<br />

porta sur Tobna avec une partie de son armée, el divisa le reste<br />

en deux corps qu'il envoya opérer dans différentes directions .<br />

Tobna, puis Belezma tombèrent en son pouvoir. En même temps,<br />

un de ses généraux s'emparait de la ville de Tidjest en accor<br />

dant à la garnison une capitulation honorable . (3) Mais,<br />

d'un<br />

autre côté, le général ar'lebite Haroun-et-Tobni ayant poussé<br />

une pointe audacieuse, vint, sur les derrières des Chiâïtes, sur<br />

prendre et brûler la place de Dar Melloul (4) .<br />

(1) Ce chiffre est très-probablemen exagéré.<br />

(2) Bar'aï. dans l'Aurès. V. Notice sur les Amamra, Annuaire archéol.<br />

V 1868.<br />

(3) Tidjiet est sans doute l'ancienne Tigisis à dix ou onze lieues S. E.<br />

de Constantine.<br />

(4) Bekri place celte ville à une journée de Tobna.<br />

2


18<br />

En somme, la cause des Chiâïtes obtenait de<br />

constants avanta<br />

ges, et les populations, attirées, tant par l'appât de la nouveauté<br />

que par la clémence el la justice déployées par Abou-Abd-Allah»<br />

accouraientse ranger aulourde lui. Le gouverneur ar'lebite voyait<br />

bien le danger approcher, mais ses prédécesseurs avaient négligé<br />

d'écraser l'ennemi quand il était sans forces, et maintenant, il<br />

était trop tard. Les rebelles tenaient déjà les principales places de<br />

l'Ouest,<br />

. jour à l'autre et mettre le siège devant Kdirouan Dans<br />

et Ziadet-Allah pouvait s'allendre à les voir jparaUre d'un<br />

cette<br />

prévision, il s'empressa faire réparer les fortifications 4e la ville<br />

ainsi que des places environnantes; en même temps, il vidait le<br />

trésor public pour lever des troupes el les opposer à l'ennemi.<br />

En 907, fl se porta avec une armée contre lesGhiaïles qui opé<br />

raient sur les versants de l'Aurès ; mais, parvenu à Laribus., il<br />

ne jugea pas prudent de s'avancer plus loin et rentra à Tunis,<br />

laissant le général lDrahim-ben-Abou-1'Ar'lcb en observation<br />

avec un corps de troupes<br />

Quant à Abou-Abd-Allah, il s'empara successivement de Ba-<br />

r'aïa et de Mermadjenna ; puis, il réduisit les tribus Nefzaouien-<br />

nes (1 ) , et s'avança jusqu'à Tifech (2), dont il obtint la soumission<br />

et où il laissa un gouverneur. Il rentra alors vers son centre<br />

d'opérations afin de préparer une nouvelle campagne ; mais<br />

aussitôt le général Ibrahim s'avança à sa suite et reprit une par<br />

tie du territoire qu'il avaitgxmquis, avec la ville de Tifech.<br />

Bientôt le Dâï chiaïle réparai dans l'Est, laissant derrière lui<br />

Constantine, qu'il n'osa attaquer en raison de sa position inex<br />

pugnable, et vint, à la tête d'une nouvelle armée,<br />

kiana et Tebessa. Delà, il pénétra en Tunisie,<br />

enlever Mis-<br />

réduisit la ville<br />

et le canton de Kammouda, et, continuant sa marche victorieuse,<br />

s'avança sur Rokk'ada. Mais il avait trop présumé de ses forces.<br />

Bientôt, en effet, le général Ibrahim étant accouru avec toutes les<br />

(1) La grande tribu berbère des Nefzaoua occupait le versant K. E.<br />

de l'Aurès, les plaines de la. province de Constantine jusqu'à Éône et une<br />

partie de la Tunisie.<br />

(2) La ville de Tifech est construite sur les ruines de l'antique Tipasa<br />

de l'Est. (V. à ce sujet les travaux de M. Chabassière, Annuaire Ar-<br />

chéol., 1866.)


Î9<br />

troupes disponibles pour lui barrer le passage, lui infligea une<br />

défaite complète : les Chiâïtes s'enfuirenl en désordre par lotis<br />

les défilés ; Abou-Abd-Allah, lui-même, ne s'arrêta qu'à Guedjal.<br />

Celte victoire des Ar'lebites eut pour effet do faire rentrer mo<br />

mentanément sous leur domination la plupart des places con<br />

quises par les révoltés, y compris Bar'aïa .<br />

Mais l'échec des Chiâïtes,<br />

qui aurait pu avoir les suites les plus-<br />

graves si leurs adversaires avaient su profiter de Ienr succès en<br />

prenant vigoureusement l'offensive, ne devait retarder que de-<br />

bien peu de jours la ehute définitive des Ar'lebites. Sitôt, en<br />

effet, qu'Abou-Abd-Allah eut appris qu'Ibrahim,<br />

au lieu de le<br />

poursuivre, était rentré dans son poste d'observation de Laribus,<br />

il vint mettre le siège devant Constantine, et s'en empara ainsi<br />

que du pays environnant ; puis il alla reprendre Bar'aïa, et,<br />

après y avoir laissé un commandant,<br />

rentra dans son quartier-<br />

général de Guedjal. Ibrahim marcha alors sur Bar'aïa, mais le<br />

chef des Chiâïtes lança contre lui un corps de douze mille<br />

hommes,<br />

défilé d'El-Arâr (1).<br />

qui repoussa les Ar'lebites et les poursuivit jusqu'au<br />

Cependant Abou-Abd-Allah ne restait pas inaelif à Guedjal . Il<br />

avait adressé un appel à tous ses adhérents et alliés el s'occupait<br />

de réunir une armée formidable. De tous eôtés arrivaient les<br />

contingents: Zouaoua du Djerdjera, Sanhàdja du Mag'reb central,<br />

Zenala du Zab, Nefzaoua de l'Aurès,<br />

venaient se joindre aux<br />

vieilles bandes ketamiennes. Au moisde mars 909 (2), Abou-Abd-<br />

Allah se mit en matche à la tête d'une armée innombrable,<br />

portée par Ibn-Khaldoun à deux cent mille hommes,<br />

divisés en<br />

sept corps (3). Avec de telles forces', il se dirigea en ligne droile<br />

sur la capitale de son ennemi. En vain Ibrahim essaya de re<br />

pousser les Chiâïtes : vaineu dans plusieurs rencontres, il dut<br />

(t) Sans doute un des dejlés voisins de Tebessa.<br />

(2) M. Cherbonneau, dans sa traduction d'Ibn-Hammad, donne la date<br />

de 907, mais nous pensons que c'est par erreur, car le manuserit de cet<br />

historien porte bien 296 {de TH.). comme le texte d'Ibn-Khaldoun .<br />

(3)<br />

lbn-Hammad donne même le chiffre de trois cent raille combat<br />

tants, tant infanterie que cavalerie. Il est inutile désister sur l'exagéra<br />

tion de ces chiffres.


20<br />

abandonner son camp et se replier sur Kairouan où se tenait le<br />

gouverneur ar'lebite. L'armée d'Abou-Abd-Allah s'arrêta à Lari-<br />

nus le temps nécessaire pour mettre cette ville à sac, puis péné<br />

tra comme un torrent en Tunisie il).<br />

Dans cetle circonstance solennelle, Ziadet-Allah se montra ce<br />

qu'il avait toujours été, c'est-à-dire, lâche, cruel et incapable.<br />

Lorsqu'il eût appris la défaite de son général, et qu'il fut con<br />

vaincu qu'il ne lui restait aucun moyen de résister à la tourbe<br />

de ses ennemis, il tit courir, dans la ville de Rokkada, le bruit<br />

que ses troupes avaient remporté la victoire ; puis, il ordonna<br />

de mettre à mort toutes les personnes qu'il retenait dans les fers,<br />

et de promener leurs têtes à Kairouan, au Vieux-Château (2) elà<br />

Rokkada,<br />

en annonçant qu'elles provenaient des cadavres en<br />

nemis (3). En même temps, il s'empressa de réunir tous les<br />

objets précieux et les trésors qu'il possédait et se prépara à fuir<br />

avec ses courtisans et ses favorites. En vain un de ses meilleurs<br />

officiers, nommé Ibn-es-Saïr',<br />

s'efforça de le retenir et de l'ex<br />

horter à la résistance en lui rappelant les exploits de sesayeux.<br />

Le dernier des Ar'lebites ne répondit à ces généreux efforts que<br />

par des paroles de défiance et de menace, accusant le conseiller<br />

de vouloir le livrer à son ennemi.<br />

Bientôt,<br />

tout fut prêt pour le départ: les plus fidèles serviteurs<br />

esclavons reçurent chacun une ceinture contenant mille pièces<br />

d'or;<br />

on plaça les autres objets précieux el les femmes sur des<br />

mulets, et, à la nuit close,*iadet-Allah sortit de Rokkada, pre<br />

nant la route de l'Egypte. Al'heure du coucher du soleil, dit En-<br />

Noueïri (4), il avaitappris la défaite de ses troupes ; à celle de la<br />

prière de A'El-Acha (de huit à neuf heures du soir)y il prenait la<br />

fuite (5). -----<br />

Ce fut ainsi que le descendant des Ar'lebites quitta le pouvoir.<br />

(I) Ibn Khaldoun v. u, p. 519, et aussi Abou-Obeïd-el-Bekri, qui rap<br />

porte que les habitants de Laribus furent massacrésdans<br />

la mosquée où<br />

ils s'étaient réfugiés.<br />

(21 Résidence des premiers Ar'lebites à peu de distance de Kairouan.<br />

(3) En-Noueïri, p. 441.<br />

(4) Ibid. p. Vil.<br />

(.">) Il prît ta mttlpimr monture, dit Ibn-Hammad.


21<br />

La population de Rokkada l'accompagna quelque temps à la<br />

lueur des flambeaux ; un certain nombre d'habitants suivit<br />

même sa fortune .<br />

Aussitôt que la nouvelle de la fuite du gouverneur fut con<br />

nue à Kairouan, le peuple se porta en foule à Rokkada, et mit<br />

cette ville, et surtout le palais, au pillage. En même temps, le<br />

général Ibrahim arriva à Kairouan, ramenant les débris de ses<br />

iroupes qui achevèrent de se débander en apprenant la fuite de<br />

Ziadel-Allah. Malgré l'état désespéré des affaires, Ibrahim voulut<br />

tenler un dernier effort pour sauver l'empire. S'étant rendu au<br />

Divan, à la tête de partisans dévoués, il se fit proclamer gouver<br />

neur et adressa à la population des paroles pleines de noblesse et<br />

de courage pour l'engager à la résistance. Mais la lerreui: des<br />

règnes précédents avaient éteint tout sentiment d'honneur chez<br />

ce peuple opprimé. Après avoir, d'abord, obtenu l'adhésion de<br />

la foule, le général ar'lebite la vit bientôt, par uude ces revire<br />

ments fréquents chez les masses, se tourner contre lui, et dut,<br />

pour sauver sa vie, s'ouvrir un passage à la pointe de son épée.<br />

Il partit alors, avec ses compagnons, pour rejoindre Ziadet-Allah.<br />

Sur ces entrefaites, l'avant-garde des Chiâïtes, commandée par<br />

Arouba-ben-Youçof et El-Hacen-ben-Abou-Khanzir, chefs keta-<br />

miens, apparut sous les murs de la ville. U ne fallut rien moins<br />

que la terreur inspirée par les farouches Berbères,<br />

cesser le pillage qui durait depuis une semaine à Rokkada.<br />

pour faire<br />

Peu de joursaprès, c'est-à-dire dans le mois d'avril 909, Abou-<br />

Abd-Allah fit son entrée triomphale dans la ville. Il était précé<br />

dé d'un crieur psalmodiant ces versets du Coran (Sourate delà<br />

fumée) : C'est lui qui a chassé les infidèles de sa maison... —<br />

— Combien de jardins et de fontaines abandonnées ? Combien<br />

a de champs ensemencés et d'habitations superbes ! —<br />

« de délices où ils passaient agréablement leur vie !... (1).<br />

Combien<br />

(I) Ibn-Hammad. Selon cet auteur, Abou-Abd-Allah, à son arrivée à<br />

Rokkada, ordonna te massacre de la garde nègre, « dont les cadavres<br />

furent placés la face contre terre. Ce fait est assez dans les mœurs du<br />

temps; cependant, il ne s'accorde pas avec l'amnistie dont parie Ibn-<br />

Khaldoun. Il faut remarquer, en outre, que les Chiâïtes occupèrent la<br />

ville avant l'arrivée de leur chef et que Ziadet-Allah avait emmené pres<br />

que tous ses esclavons.


22<br />

L'avant-garde avait déjà pris possession de Kairouan ; mais,<br />

comme la plupart des habitants de cette, ville et des cités voisines<br />

s'étaient enfuis, Abou-Abd-Allah proclama une amnistie géné<br />

rale qui rassura les esprits et fit rentrer les émigrés. Il prit sous<br />

sa protection les quelques esclaves que le prince n'avait pu em<br />

mener, et distribua des logements dans la ville à ses principaux<br />

officiers. Un de ses premiers soins fut aussi de mettre en liberté<br />

son frère Abou-1'Abbas et la mère du Mehdi qui, jusqu'alors,<br />

étaient restés en prison.<br />

Tous les adhérents du gouverneur déchu étaient venus se<br />

grouper autour de lui à Tripoli. Ibrahim qui l'avait également<br />

rejoint dut aussitôt prendre la fuite pour éviter le supplice que<br />

Ziadet-Allah voulait lui infliger, comme coupable de tentative<br />

d'usurpation du pouvoir. Après avoir passé dix-sept jours à Tri<br />

poli, pendant lesquels il fit trancher la tête d'Ibn-es-Saïr', le mi<br />

nistre qui avait en vain tenté d'arrêter sa lâche fuite, le prince<br />

ar'lebite continua sa roule vers l'Egypte. Parvenu au Caire, il<br />

écrivit au kalife El-Moktader-bTllah en sollicitant de lui une<br />

entrevue. Pour toute réponse, il reçut l'ordre d'attendre à Rakka,<br />

en Syrie, des instructions ultérieures. Quelque temps après, il<br />

obtint de rentrer en Egypte où il finit misérablement sa vie dans<br />

les plus honteuses débauches.<br />

Ainsi s'éteignit la dynastie ar'lebile qui avait fourni des princes<br />

si remarquables à l'Afrique* Avec elle disparaissait le dernier<br />

reste de l'autorité arabe imposée aux Berbères deux siècles et<br />

demi auparavant. Le Mag'reb qui avait alors été conquis, mais<br />

non colonisé, reprenait possession de lui-même et. les indigènes,<br />

délivrés de la suprémaiie du Khalifat allaient former de puissants<br />

empires berbères.<br />

Mais l'Afrique, pour son malheur, ne devait pas être, à jamais,<br />

délivrée des Arabes. Un danger bien plus sérieux que la couquêie<br />

de 650 la menaçait : c'était l'immigration Hilalienne, évé<br />

nement qui devait avoir pour résultat de rompre définitive<br />

ment l'unité du peuple berbère et d'arabiser l'Afrique septen<br />

trionale.


23<br />

H<br />

Après sa rapide victoire, Abou-Abd-Allah s'occupa de l'orga<br />

nisation de l'empire qu'il avait conquis, et, pour cela, envoya,<br />

dans toutes les provinces, des gouverneurs pris dans la tribu des<br />

Ketama. II congédia les auxiliaires, qui retournèrent chez eux<br />

chargés de butin, puis s'appliqua à faire rentrer dans Kairouan<br />

el dans Rokkada même, les populations émigrées. Etabli dans le<br />

palais des princes ar'lebites, il s'entoura des insignes du pouvoir.<br />

fit frapper des monnaies nouvelles (1), et s'occupa de l'organi<br />

sation des troupes régulières, auxquelles il donna des armes<br />

et des étendards portant des inscriptions à la louange des Fate-<br />

mides.<br />

Lorsqu'il eut, de cetle manière, solidement établi le gouver<br />

nement, il songea à faire profiter de ses conquêtes,<br />

celui pour<br />

lequel il avait travaillé, son maître Obeïd-Allah. Celui-ci<br />

n'avait cessé d'errer en proscrit, tenu, dit-on,<br />

au courant des<br />

succès de ses partisans, par des émissaires secrets. Continuant<br />

donc sa marche vers l'ouest, toujours accompagné de son fils<br />

Abou-1-K'acem, il arriva un dimanche de la fin d'août 909 (2) à<br />

Sidjilmassa,<br />

oasis de l'intérieur du Magreb, qui étaitalors le siège<br />

de la pelite royaulé des Beni-Midrar, tribu miknacienne (3). Le<br />

prince régnant, Eliça, avait reçu du kalife de Bagdad l'invita<br />

tion de saisir le Mehdi s'il entrait dans ses Etats. Les deux voya<br />

geurs lui ayant donc élé signalés, il devina de suite leur carac<br />

tère et les fil arrêter. Ainsi,<br />

après avoir échappé pendant sept<br />

années aux recherches de ses ennemis, Obeïd-Allah trouvait<br />

la captivité dans une oasis de l'extrême sud du Magreb, à plus<br />

de mille lieues de son point de départ.<br />

(1) Ces monnaies portaient les inscriptions suivantes: (d'un côté) Hoddja-t-Allahi<br />

(la preuve de Dieu), et (de l'autre) Tafarraka-'Ada-ou llahi<br />

(que les ennemis de Dieu soient dispersés!)<br />

(2) Cette date précise est donnée par Ibn-flammad. Ibn-Khaldoun (t. I,<br />

p. 263, et t. il, p. 516), n'en indique aucune.<br />

(3) Sidjilmassa est l'oasis moderne de Tafilalat, au sud du Maroc. (V. à<br />

ce sujet1 la notice que nous avons publiée dans ta Revue africaine, iv<br />

63 et 64).


24<br />

Aussitôt que cette nouvelle fut parvenue en Ifrikïa, Abou-<br />

Abd-Allah résolut d'aller délivrer son maître. Ayant donc réuni<br />

■<br />

un corps de troupes < dont le nombre inondait la terre dit ,<br />

Ibn-flammad, il se mit en marche vers l'ouest, laissant à Kai<br />

rouan, pour gérer les affaires, son frère Abou-PAbbas, assisté du<br />

chef ketamien Abou Zaki-Temmam (1). Les populations zenètes<br />

que les Chiâïtes rencontrèrent sur leur passage, se retirèrent<br />

devant eux ou offrirenl leur soumission, et enfin, l'armée par<br />

vint sous les murs de Sidjilmassa. Abou-Abd-Allah ayant envoyé<br />

à Eliça un message pour l'engager à éviter les chances d'un<br />

combat en rendant les prisonniers, le prince midraride, pour<br />

toute réponse, fit mettre à mort ceux qui composaient la dépu-<br />

lation.<br />

Après cette tentative infructueuse d'arrangement,<br />

aux mains non loin de la ville,<br />

de leur roi,<br />

on en vint<br />

car les Miknaça, sous la conduite<br />

s'étaient avancés à la rencontre des guerriers keta-<br />

miens. La victoire se déclara, dès les premiers engagements,<br />

pour les Chiâïtes : les troupes d'Ellça furent taillées en pièces/<br />

et ce prince dut prendre la fuite, suivi seulement de quelques<br />

serviteurs. Le lendemain de la bataille, les principaux habi<br />

tants de la ville vinrent au camp des assiégeants implorer leur<br />

clémence et leur offrir de les mener à la prison où était détenu<br />

le Mehdi (2).<br />

Abou-Abd-Allah se réserâp le soin de mettre lui-même en li<br />

berté les prisonniers. Il les revêtit ensuite d'habits somptueux,<br />

les fit monter sur des chevaux de parade et salua Obeïd-Allah du<br />

titre d'Imam. Puis il le conduisit au camp en marchant à pied<br />

devant lui, et pendant le chemin, il s'écriait en versant des<br />

larmes de. joie: Voici votre Iman! voici notre Seigneur!<br />

C'était, pour le Mehdi, le triomphe après les épreuves.<br />

Les troupes ketamiennes ne tardèrent pas à se saisir d'Eliça,<br />

qui fut mis à mort. Après un repos de quarante jours à Sidjil-<br />

(1) Ibn-Hammad confond ces deux personnages, en disant qu'il laissa le<br />

commandement à son frère Abarek-ben-Temmam.<br />

(2) 1,1 est probable que Sidjilmassa, de même que la Tafilatat moderne<br />

était une agglomération d'oasis.


25<br />

massa, l'armée reçut l'ordre du retour. En quittant la ville, le<br />

Mehdi y<br />

laissa comme gouverneur Je ketamien Ibrahim- ben-<br />

R'âleb. Lorsque, en revenant, on fui arrivé à Guedjal, le fidèle<br />

Abou-Abd-Allah remit à son maître les trésors qu'il avait amassés<br />

dans cette place. Ces richesses provenaient du bulin des précé<br />

dentes campagnes, et avaient été religieusement conservées pour<br />

que le Mehdi en opérât lui-même le partage.<br />

Dans le mois de décembre 909, Obeïd-Allah fit son entrée à<br />

Rokkada. Quelques jours après, il reçut dans une séance d'inau<br />

guration solennelle, le serment des habitants de Kairouan.<br />

En attendant qu'il eut bâti une ville pour lui servir de rési<br />

dence royale (I), Obeïd-Allah s'établit dans le palais de Rokkada.<br />

Son empire se composait de la plus grande parlie du Mag'reb<br />

central, de toute l'Ifrikïa et de la Sicile. Vingt années, à peine,<br />

avaient suffi pour arracher aux Ar'lebites cet immense territoire;<br />

mais, en raison même de la rapidité de cette conquête,<br />

la fidé<br />

lité des populations n'était rien moins que bien établie; en<br />

maints endroits l'autorité chiaïte n'était pas officiellement re<br />

connue. C'est pourquoi le Mehdi envoya dans toutes les pro<br />

vinces des agents kelamiens chargés de sommer les populations<br />

de faire acte d'adhésion au nouveau souverain. Grâce à ces me<br />

sures et à la sévérité déployée dans leur application,<br />

car tout<br />

opposant était mis à mort, l'ordre fut établi et le fonctionnement<br />

de l'administration assuré (2).<br />

Pour trancher complètement avec le régime tombé,<br />

les an<br />

ciennes places-fortes, sièges des commandants ar'lebites, furent<br />

rasées, et les préfets fatemides s'établirent dans d'autres localités<br />

élevées ainsi au rang de chefs-lieux. La tribu des Ketama qui avait<br />

assuré le succès d'Obeïd-Allah, fut comblée de faveurs. Elle<br />

fournit les premiers officiers du gouvernement et des généraux<br />

pour les postes importants de Sicile et de la Tripolitaine.<br />

(1) El-Mehdïa<br />

(2! Ainsi se trouva accomplie une prédiction annonçant pour la fin du<br />

III» siècb de l'Hégire la chute de la domination arabe dans l'ouest. « Le<br />

soleil se lèvê.ra à l'occident », tel était le texte ambigu de cette prédic<br />

tion répandue dans le Magreb et qu'on faisait remonter à Mahomet. (V.<br />

llaretle : Migrations, tic, p 386).


- Dans<br />

26<br />

le courant de l'année 910, le général kelamien Arouba-<br />

bert-Youçof qui n'avaii cessé d'opérer dans le Mag'reb contrai,<br />

renversa la dynastie des Rostemides,<br />

en s'emparant de leur capi<br />

tale, Tehert (1). Ce centre du kharedjisme Eibad'ire une fois<br />

détruit, Àrouba obtint promptement I» soumission des tribus<br />

schismatiques voisines, telles que les Lemaïa, Azdadja, Louata,<br />

Malmata (2). Puis, laissant un gouverneur kelamien à Tehert, il<br />

vint mettre le siège devant Oran, ville qui, depuis sept ans, était<br />

au pouvoir desOméïades d'Espagnî_. Il ne tarda pas à s'en rendre<br />

maîlre, et, après l'avoir abandonnée à la fureur du soldat, la li<br />

vra aux flammes. Ayant ainsi étendu l'autorité de son maître<br />

sur presque tout le Mag'reb eentral, Arouba entra en relation<br />

avec Messala-ben-Habbous,<br />

de la Moulouia;<br />

rouan.<br />

Cependant,<br />

chef de la grande Iribu des Miknaça<br />

puis il ramena ses troupes victorieuses à Kai<br />

un grave dissentiment s'était élevé à Rokkada<br />

entre Obeïd-Allah et son fidèle serviteur Abou-Abd-Allah. Ce<br />

dernier, sous l'influence de son frère Abou-lVAbbas, avail voulu<br />

s'appuyer sur les services rendus pour conserver une grande<br />

influence dans la direction des affaires. Mais le Mehdi n'enten<br />

dait nullement partager son autorité avec qui que ce fut. Abou-<br />

Abd-AIIah voyant donc ses avis repoussés, montra d'abord une<br />

grande froideur envers son maître. Puis, il se mil, avec plusieurs<br />

autres chefs, à conspirer co^re lui. Ces méconti-nis répandirent-<br />

le bruit que le Mehdi în'èrail pas l'instrument de la voloiîié<br />

divine, l'être surnaturel dont le caractère devait se révéler aux<br />

mortels par des miracles. Nous nous sommes trompés à son<br />

sujet,<br />

— —<br />

disaient-ils<br />

car il devrait avoir des signes pour<br />

« se faire reconnaître; le vrai Imam doit faire des miracles et<br />

imprimer son sceau dans la pierre comme d'autres le feraient<br />


27<br />

pour lui seul les trésors de Guedjal. La plupart des chefs ke-<br />

lamiens, qui érvfient toute confiance en Abou-Abd-Allah, prê<br />

tèrent l'oreille à ses discours et chargèrent leur grand cheikh de<br />

présenter leurs observations à Obeïd-Allah lui-même.<br />

Le danger était pressant pour le Mehdi;, puisque ses adhérents<br />

commençaient à s'apercevoir que celui qu'ils avaient soutenu<br />

comme un être surnaturel,<br />

n'était qu'un homme. Obeïd-Allah<br />

comprit que sa seule porte de salut était l'énergie, qui impose<br />

toujours aux masses, et, pour toute réponse, il fit mettre à mort<br />

le grand Cheikh des Ketama . Puis,<br />

comme la conspiration faisait<br />

des progrès, il -envoya les principaux chefs occuper -des comman<br />

dements éloignés, de sorte qu'ils se trouvèrent dispersés et sans<br />

force avant d'avoir eu le temps d'agir. Les plus compromisfurent<br />

tués au loin et sans bruit, par des émissaires dévoués.<br />

L'auteur de là Conspiration restait à punir : le Mehdi n'hésita<br />

pas à sacrifier à sa sécurité l'homme auquel il devait le pouvoir.<br />

Dans le mois de janvier 911, Abou-Abd-Allah se promenait avec<br />

son frère Abou-1-Abbas dans les jardins du palais, lorsque, deux<br />

autres frères, Arouba el Hobacha (1) ben-Youçof,<br />

coup des massifs,<br />

sortant tout-à-<br />

se précipitèrent sur eux. Abou-l'-Abbas fut<br />

frappé le premier. En vain Abou-Abd-Allah essaya d'imposer son<br />

autorité aux deux chefs qui avaient été autrefois ses lieutenants.<br />

Celui à qui tu nous a ordonné d'obéir nous commande de<br />

luer (2) », répondirent-ils, et Abou-Abd-Allah lomba, percé de<br />

coups, sur le cadavre de son frère.<br />

Obeïd-Allah. fit enterrer avec honneur les deux frères : Il pré<br />

sida lui-même au lavage de leurs corps; puis, après la récitation<br />

des prières des morts, il dit à haute voix, en s'adressant au cada<br />

vre d'Abou-Abd-Allah : Que Dieu te pardonne et qu'il te récom<br />

pense dans l'autre vie,<br />

grand zèle ! —<br />

i Quanl à toi,<br />

Se<br />

car tu as travaillé pour moi avec un<br />

tournant ensuite vers Abou-1-Abbas ,<br />

— — dit il, qu'il ne t'accorde aucune pitié, car tu<br />

es cause des égarements de ton frère : c'est toi qui l'as conduit<br />

(!) Ibn-Hammad écrit ce nom Hôçaba ce qui est peut-être la bonne<br />

leçon.<br />

(2) Ibn-Khaldoun, t. II, p. 522.


28<br />

aux abreuvoirs du trépas ! Les deux victimes furent enterrées<br />

au lieu même où elles étaient tombées sous le prflg^hard des assas<br />

sins (1).<br />

Des troubles partiels, chez les Ketama, suivirent ces exécutions ;<br />

mais ils furent promptement réprimés par le supplice de ceux<br />

qui en étaient les promoteurs. Grâce à ces mesures énergiques,<br />

léTîouvoir d'Obeïd-Allah,<br />

loin de ressentir aucune atteinte, se<br />

renforça de tout l'effet produit par l'échec de ceux qui avaient<br />

voulu le renverser.<br />

Tels furent les commencements de la dynastie obeïdite, qui,<br />

après avoir régné sur toute l'Jfrikïa, devait,<br />

bères du Mag'reb,<br />

pire des Fatémides d'Orient.<br />

(1) Ibn-Hammad.<br />

avec l'appui des Ber<br />

conquérir l'Egypte et la Syrie et fonder l'em<br />

/■?-<br />

E. Mercier.<br />

Inpe0r§tç judiciaire.<br />

.<br />

-


di^W»^y-I:/_^_ _.<br />

7^/<br />

:<br />

■~"-€?~?-__*_fyz'£*/<br />

LA CONFRERIE DES KHOUAN<br />

de -ol.r-.fv [y^ ay4^y<br />

K


ÉTUDE<br />

SUR<br />

LA CONFRÉRIE DES KHOUAN<br />

DE<br />

SIDI ABD EL-KADER EL-DJILANI<br />

A PROPOS D'UN CATÉCHISME A L'USAGE DE LADITE SECTE<br />

L'influence des religions sur les destinées des peuples<br />

a toujours été considérable. Les grandes guerres, les per<br />

sécutions, les conquêtes, les invasions, les émigrations,<br />

toutes ces causes de modifications ethnographiques ont<br />

eu, le plus souvent, pour point de départ ou, au moins,<br />

pour prétexte, l'idée religieuse. Il n'entre pas dans noire<br />

cadre de faire la balance du mal et du bien produits ;<br />

nous constatons seulement un fait,<br />

n'est, peut-être, aucune religion,<br />

fluence sur ses sectateurs,<br />

et nous ajoutons qu'il<br />

ayant eu autant d'in<br />

que le mahomélisme. Etudier<br />

la pratique de cette religion, c'est donc étudier le peuple<br />

du nord de l'Afrique.<br />

Bien peu de temps après l'établissement de l'islamisme<br />

et la mort de Mahomet, de grandes querelles divisèrent


les musulmans,<br />

— — 6<br />

pour la succession au khalifat, trône du<br />

chef spirituel et temporel des vrais croyants. Ali, fils<br />

d'Abou T'aleb, cousin du prophète et son unique gendre,<br />

puisque Mahomet, sur le grand nombre de ses épouses,<br />

d'obtenir la<br />

n'obtint qu'une fille, essaya, par la force,<br />

reconnaissance de ce qu'il appelait ses droils à l'ima<br />

mat ; mais, il rencontra une résistance des plus tenaces<br />

de la part des habitants de la Mecque,<br />

la famille des Oméïades. Vaincu,<br />

ayant à leur tête<br />

après plusieurs batailles<br />

sanglantes, Ali ne put empêcher l'Oméïade Moaouïa de<br />

prendre la succession de Mohammed.<br />

Renonçant alors à la guerre ouverte,<br />

organisèrent la résistance occulte,<br />

les partisans d'Ali<br />

et fondèrent la pre<br />

mière société secrète religieuse musulmane. Cet exemple<br />

devait être largement imité,<br />

puisqu'on compte mainte<br />

nant, en Orient, jusqu'à trente-deux sectes. Les partisans<br />

d'Ali prétendaient que le khalife ne pouvait être pris que<br />

dans la descendance de Mahomet par sa fille Fatima ;<br />

presque en même temps, une autre secte,<br />

se fondant sur<br />

ce que le chef de la religion devait êlre pris dans la to-<br />

talilé des fidèles, se forma, et,<br />

djisme (schisme),<br />

sous le nom de khare-<br />

acquit bientôt une grande puissance.<br />

Comment l'islam^me, ayant à lutter, dès son début,<br />

contre cetle triple cause de dissolution,<br />

ne sombra-t-il<br />

pas, à la suite des batailles acharnées, entre musulmans,<br />

qui en furent la conséquence ?<br />

C'est là un de ces problèmes historiques, pour lesquels<br />

la raison humaine chercherait en vain une solution plau<br />

sible.<br />

Le nord de l'Afrique, très peu de temps après avoir été<br />

conquis et converti par les armées arabes, se jeta, avec


_ 7<br />

—<br />

une sorte de rage, dans toutes les hérésies qui signalè<br />

rent les premiers siècles de l'islamisme. Les Berbères y<br />

trouvaient un prétexte toujours renaissant de secouer le<br />

joug<br />

de leurs maîtres. Il fallut deux siècles de luttes pour<br />

éteindre, dans le sang, le kharedjisme en Afrique. C'est<br />

assurément à ces guerres, qui arrêtèrent le courant de<br />

l'émigration berbère sur l'Espagne,<br />

que la chrétienté dut<br />

son salut. Le khalifat d'Orient usa ses forces et perdit son<br />

prestige dans ces combats,<br />

où les indigènes de l'Afrique<br />

apprirent à lutter avec les Arabes et aies vaincre. Aussi,<br />

à peine les kharedjites étaient-ils à peu près domptés,<br />

qu'ils furent remplacés par les chiâïtes (sectaires), par<br />

tisans de la famille d'Ali.<br />

Ce schisme, que nous avons vu se fonder sous la forme<br />

de première société secrèle,<br />

Orient, malgré les efforts des Abbacides,<br />

Oméïades,<br />

avait continué à s'étendre en<br />

successeurs des<br />

et malgré la défaite des petit-fils d'Ali. Divisé<br />

en cinq sectes principales, il avait des pontifes établis<br />

dans différentes villes saintes, et, de là,<br />

envoyait des mis<br />

sionnaires (daï), jusque dans l'Inde, au Levant, et dans<br />

au Couchant.<br />

l'extrême Mog'hreb (Maroc actuel),<br />

Le chef d'une de ces sectes, celle des Ismaïliens, nommé<br />

Obeid Allah, dit le mehdi, n'eut qu'à paraître en Afrique,<br />

pour renverser ce qu'il y restait de l'autorité arabe. Les<br />

sectes chiâïtes se répandirent alors chez les indigènes du<br />

nord de l'Afrique, et y<br />

religieuses qui y existent maintenant.<br />

furent le principe des confréries<br />

Le rôle de ces sociétés secrètes, dont les membres sont<br />

désignés, de nos jours, sous le nom de khouan (frères),<br />

est encore très important. Ce sont elles, en grande partie,<br />

aveu-<br />

qui entretiennent, parmi les indigènes, ce fanatisme


— — 8<br />

gle qui conduit le peuple arabe à sa perte. Certains admi<br />

nistrateurs ont essayé d'employer en notre faveur l'in<br />

fluence de ces secles; mais il y<br />

aurait folie à compter sur<br />

de tels auxiliaires, qui sont, bien plutôt, nos ennemis<br />

nés. De bons esprits y voient, au contraire, un des plus<br />

grands obstacles à notre domination dans le pays.<br />

L'étude de ces confréries religieuses a déjà attiré<br />

l'attention d'écrivains de talent,<br />

parmi lesquels nous cite<br />

rons M. Brosselard, auquel l'Algérie scientifique doit tant,<br />

et M. de Neveu. On peut se reporter aux ouvrages de ces<br />

auteurs,<br />

autorité.<br />

qui ont traité la question avec la plus grande<br />

Nous offrons aujourd'hui au lecteur le résumé d'un<br />

curieux manuscrit, sorte de catéchisme el de formulaire,<br />

à l'usage des khouan de Sidi Abd el-Kader el-Djilani, une<br />

des neuf ou dix sectes répandues en Algérie. Ce factum<br />

est écrit sur une longue bande,<br />

composée de feuilles de<br />

papier larges de quatorze centimètres environ, sur qua<br />

rante de long, et collées les unes aux autres par une bande<br />

de papier appliquée en-dessous, à la jonction de chaque<br />

feuille. Le tout forme un rouleau qui mesure quatre mè<br />

tres quarante-huit centimètres de longueur,<br />

centimètres, largeur"e chaque feuille.<br />

sur quatorze<br />

Avant de donner un aperçu de ce document, quelques<br />

détails ne seront peut-être pas superflus.<br />

La secte de Sidi Abd el-Kader el-Djilani est une des plus<br />

anciennes et des plus répandues, tant en Orient qu'en<br />

Afrique. Elle doit son nom à Sidi Abd el-Kader, natif de<br />

Djilan, ou Gaïlan, en Perse, célèbre marabout, mort vers<br />

561 (1165-6 de J. -C.) à Bagdad. C'est dans celte ville<br />

qu'est le siège de la secte, laquelle fait remonter son


- 9<br />

—<br />

origine à Ali, el dérive du soufisme,<br />

comme la plupart<br />

des autres. En Algérie, Sidi Abd el-Kader est le patron<br />

des pauvres et des affligés, qui sollicitent sans cesse la<br />

charité en son nom.<br />

Le supérieur (khalifa) de la secte, habite Bagdad. C'est<br />

de là qu'il envoie son mot d'ordre, dans tout le monde<br />

musulman,<br />

à ses mokaddem ou cheikh (représentants).<br />

Ces lieutenants sont revêtus de l'autorité spirituelle dans<br />

laur ressort ; ils ont un cachet, et possèdent le droit de<br />

nommer sous leurs ordres des nekib ou naïb (vicaires).<br />

lyse,<br />

A la suite de la pièce dont nous allons donner l'ana<br />

nous verrons un diplôme conféré par le mokaddem.<br />

Les khouan se réunissent en assemblée présidée par<br />

le cheikh, qui confère Youerd (certificat d'admission) au<br />

néophyte,<br />

après différentes scènes mystiques et un inter<br />

rogatoire dont notre manuscrit nous donne le formulaire.<br />

Le néophyte reçoit ensuite la ceinture (chedd) symboli<br />

que, image de l'union de la confrérie et de sa fermeté ;<br />

puis un festin commémoratif termine la séance.<br />

Les principales règles de la secte sont : l'obéissance<br />

absolue aux chefs de l'ordre, le renoncement au monde,<br />

la retraite, la veille, l'oraison conlinue et l'obligation<br />

d'assister aux réunions périodiques. Ces règles sont énon<br />

cées de la manière suivante, dans le catéchisme qui suit:<br />

« rejeter les mauvaises paroles ; prononcer sans cesse le<br />

nom de Dieu ; mépriser les biens de la terre ; repousser<br />

les amours humaines,<br />

et craindre le Dieu très-haut. »<br />

Des noms allégoriques servent à désigner chaque chose;<br />

ainsi, la secte s'appelle : t'rik'a ('ij_j J-)'), c'est-à-dire,<br />

la voie droite ou la règle. Les frères ( .i„3_l), s'intitu<br />

lent :


— — 10<br />

As'h'âb el-feloua (__„.a)tv A-sr**!), c'est-à-dire com<br />

pagnons de la décision (1);<br />

As'h'âb<br />

el-beçat'<br />

(_5L.__JK jLs^I), compagnons<br />

du tapis ou de la natte ;<br />

As'h'âb ech-chedd ou el-ied (_ujL_\.,£j^ ,<br />

compagnons de la ceinture (fermeté),<br />

^Lsr'^l).,<br />

et de la main (puis<br />

sance) ;<br />

Ahel el-t'rik'a (Sjy Jaîl ysA), gens ('e 'a voie ;<br />

Aoulâd el-menn ( ViS^iJi), enfants de la douceur.<br />

Bien d'autres noms désignent encore les frères. Les<br />

affiliés à la confrérie se reconnaissent à des signes et à<br />

des mois de convention.<br />

Notre manuscrit commence par un long récit, fort<br />

embrouillé,<br />

ayant pour but d'expliquer les mystères reli<br />

gieux sur lesquels s'appuie la secte, et d'en donner l'ori<br />

gine. Nous ne reproduirons de ce long<br />

texte que ce qui<br />

pourra servir à l'intelligence du questionnaire suivant,<br />

qui est la partie la plus intéressante du manuscrit. L'écri<br />

ture est peu élégante,<br />

mais assez lisible. Malheureuse<br />

ment, le copiste, soit négligence, soit ignorance,<br />

mis de nombreuses fautes, répétitions,<br />

positions,<br />

passages,<br />

a com<br />

erreurs ou trans<br />

qui renden"indécise l'intelligence de certains<br />

puisqu'on manque de poinl de comparaison.<br />

Aussi est-ce avec la plus grande raison, que l'écrivain,<br />

dans un moment d'humilité s'écrie :<br />

.L__iùMj ioljjJI y iSJu.J<br />

(t) Le mot fetoua nom d'action de la quatrième<br />

„y?)> ( forme du<br />

verbe fêta, signifie : la décision, la marche à suivre, donnée par un doc<br />

teur,<br />

le sens d'oraison.<br />

en réponse à une consultation. Les khouan semblent l'employer dans


— — 11<br />

(Je prie Dieu de m'éviler les répétitions et les oublis).<br />

Nous avons divisé ce que nous appellerons l'exposi<br />

tion en trois parties :<br />

La première, contient le récit de la fondation du tem<br />

ple de la Mecque,<br />

par Dieu aux enfants d'Adam ;<br />

et les détails du pacte d'alliance accordé<br />

La deuxième, l'abrégé des faits relatifs à la nuit de<br />

l'ascension (mâradj),<br />

pendant laquelle Mohammed est allé<br />

de la Mecque à Jérusalem, et de là au Irône de Dieu ;<br />

La troisième, le récit du retour du pèlerinage d'adieu,<br />

et des cérémonies dans lesquelles le prophète est censé<br />

avoir transmis sa succession à son gendre Ali.<br />

C'est sur ces faits principaux que sont basées les règles<br />

des khouan, de Sidi Abd el-Kader el-Djilani.<br />

Vient ensuite le catéchisme proprement dit,<br />

suivi de<br />

la généalogie de Sidi Abd el-Kader, et enfin un diplôme<br />

de mokaddem, conféré au frère El-Hadj<br />

hammed ben bel-Kheïr.<br />

RÉSUMÉ PRÉLIMINAIRE<br />

Au nom du Dieu clément et miséricordieux !<br />

Ahmed ben Mo<br />

Que Dieu répande ses grâces sur N. S. Mohammed, sur<br />

sa famille et sur ses compagnons !<br />

(Empreinte effacée d'un cachet mesurant 22 millimètres<br />

de diamètre).<br />

O vous qui aurez recherché cette décision (feloua), et<br />

cette règle de conduile (t'rik'a), puisse Dieu vous diriger


— — 12<br />

pour le bien dans les deux maisons : celle de cette vie,<br />

et celle de l'autre vie !<br />

Les auteurs primitifs de celte feloua, les maîtres de la<br />

règle de conduite sont au nombre de quatre. Ce sont les<br />

quatre docteurs des œuvres : le premier est Adam; le se<br />

cond, Noé ; le troisième, Abraham,<br />

el le quatrième Mo<br />

hammed (1). Adressons à Dieu quatre tekbirat (2) pour<br />

chacun d'eux.<br />

Adam se trouvait dans le paradis,<br />

ceurs et ayant Eve à ses côtés. Or, Salan, —<br />

maudit ! —<br />

I<br />

environné de dou<br />

qu'il soit<br />

vint vers eux ; il les détourna de manger les<br />

friandises du paradis,<br />

et les incita à manger du fruit dé<br />

fendu. Et ils en mangèrent, et aussitôt le diadème (tadj),<br />

s'envola de la tête d'Adam,<br />

d'Eve disparut.<br />

et le vêtement de chasieté<br />

Ils cherchèrent alors parmi les arbres du paradis, afin<br />

de trouver de grandes feuilles pour couvrir leur nudité ;<br />

mais ils arrivèrent jusqu'au figuier,<br />

sans qu'aucun arbre<br />

leur eut donné de se&feuilles. Alors le figuier leur donna<br />

huit feuilles : trois plur Adam et cinq pour Eve.<br />

Dieu cria alors à cet arbre : t Pourquoi, ô figuier,<br />

lorsque tous les arbres du paradis ont refusé leurs<br />

feuilles, donnes-lu les tiennes sans mon ordre ? »<br />

Le figuier répondit en invoquant la bonté de Dieu.<br />

(t) Nous supprimons la formule : qu» Dieu répande sur lui ses grâces<br />

etc., qui accompagne toujours la mention du prophète.<br />

(2) La tekbira consiste à prononcer celte invocation: Allabou Akbar<br />

(Dieu est très grand 1 ).


— — 13<br />

La vérité (Dieu) lui cria alors, disant : « Réjouis-toi,<br />

ô arbre, car je l'élève en noblesse au-dessus des arbres<br />

du paradis.... »<br />

Après leur faute, Adam et Eve furent chassés du pa<br />

radis, et Dieu leur dit,<br />

paradis et soyez ennemis ! »<br />

Aussitôt,<br />

rèrent.<br />

en les renvoyant: « Descendez du<br />

Adam el Eve devinrent ennemis et se sépa<br />

Adam alla dans l'Inde,<br />

tagne de Derbh'an.<br />

et Eve se réfugia dans la mon<br />

Cependant, après 350 ans, Dieu eut pitié d'Adam, et<br />

lui enseigna une parole de repentir. Adam la prononça,<br />

puis il dit : «O! Seigneur, pourquoi m'as-lu chassé du pa<br />

radis ? »<br />

Dieu lui répondit : « Parce que tu m'as irrité. »<br />

Adam reprit : « O! Seigneur, je me repens, accueille<br />

mon repentir ! -><br />

Mais Dieu lui dit : « 0! Adam,<br />

sept cents ans avant de<br />

l'avoir créé, j'avais résolu que je te chasserais du paradis.<br />

— « O! Seigneur, répéta Adam, daigne accepter mon<br />

repentir. »<br />

La vérité (Dieu) lui dit alors : « J'ai sur terre une<br />

demeure (1); va vers elle, fais-en le tour,<br />

et adore-moi<br />

en ce lieu ; alors, j'accueillerai ton repentir el j'exauce<br />

rai tes vœux, car je suis le miséricordieux des miséricor<br />

dieux; alors,<br />

œuvres. »<br />

j'effacerai tes péchés et j'écrirai les bonnes<br />

Aussitôt, Adam partit de l'Inde,<br />

précédé d'un ange en<br />

voyé par Dieu, lequel lui indiqua la route et le conduisit<br />

auprès d'Eve.<br />

(1) Le temple de la Mecque.


- 14<br />

—<br />

Mais Eve, à sa vue, s'enfuit jusqu'à la monlagnc d'A<br />

rafat. Adam l'y ayant rejoint, lui dit: « O! Eve, je suis<br />

Adam! » Mais elle lui répondit: « Non, lu n'es pas<br />

Adam ! » En effet, la figure d'Adam était complètement<br />

changée; ses cheveux avaient poussé,<br />

les yeux.<br />

el lui couvraient<br />

Elle refusa donc de le reconnaître. Mais Adam s'étant<br />

prosterné, s'écria: « 0! mon Dieu, si (u acceptes mon<br />

repentir, fais que la reconnaissance s'opère entre moi et<br />

Eve, ta servante. »<br />

Aussitôt, l'ange Gabriel descendit des cieux, apportant<br />

la pierre, le rasoir et le bassin ; puis il rasa la tête d'A<br />

dam, lui coupa la barbe el la nelloya. 11 lui enseigna<br />

ensuite celte invocation : « O ! mon Dieu, il n'y a d'au<br />

tre Dieu que loi ; sois-tu exalté ! —<br />

vers; pardonne-moi,<br />

Mon<br />

cœur a élé per<br />

toi qui es le refuge miséricordieux!»<br />

En même temps, Eve reconnut Adam,<br />

rejoignit dans les montagnes d'Arafat.<br />

et celui-ci la<br />

Alors descendirent du ciel vers lui, Gabriel, Michel et<br />

Asrafil, accompagnés de soixante-dix mille anges;<br />

et ils<br />

lui annoncèrent que son repentir et son pèlerinage étaient<br />

acceptés.<br />

^<br />

C'est à partir de cr moment que les montagnes où se<br />

passèrent ces faits reçurent le nom d'Arafat (1).<br />

Alors les anges emmenèrent Adam à une station prés<br />

de la Mecque, —<br />

que Dieu l'ennoblisse! — nommée<br />

Ouad Nâman. Eve séjourna à la Mecque.<br />

Le diadème fut replacé sur la tête d'Adam,<br />

puis on le<br />

(1) Ce nom, en arabe, signifie connaissance. La montagne qui le porte<br />

est siluôe à quelques lieues de la Mecque ; on y passe la journée du 9 de<br />

Dhou l'Heddja.


— 15<br />

—<br />

revêtit d'un riche manteau, qui fut, pour cela, appelé<br />

manteau de la décision ((cloua).<br />

Dieu s'adressa alors à Adam, et lui dit: «0! Adam, je<br />

veux recevoir l'engagement de fidélité et d'alliance de<br />

toi et de ta postérité, afin que vous m'obéissiez et que<br />

vous ne transgressiez pas mes ordres.<br />

Adam répondit : « 0! mon Seigneur, tu demandes mon<br />

alliance et celle de ma postérité ; mais où est ma posté<br />

rité ?<br />

— « Dans ton dos ! » lui dit Dieu; puis, de sa main<br />

puissante, il frotta le dos d'Adam et en retira une petite<br />

boule dont il forma sa postérité. Il reçut ensuite d'eux<br />

l'engagement de fidélité et d'alliance et leur dit : « Ne<br />

suis-je point/votre Seigneur?<br />

— « Si! » répondirent-ils.<br />

C'est à/cela que se rapporte cette parole divine (du<br />

Coran):* Je contracterai alliance avec vous,<br />

dorezpas le démon,<br />

tels/mais si vous m'adorez,<br />

droite. »<br />

si vous n'a-<br />

car c'est pour vous un ennemi mor<br />

vous serez dans la voie<br />

Gabriel écrivit cet événement; Michel, Asrafil, Mah'laïl<br />

et un grand nombre d'anges,<br />

l'engagement d'Adam et de sa postérité.<br />

portèrent témoignage sur<br />

Dieu ordonna alors à la pierre noire (1) de s'ouvrir, et<br />

lorsqu'elle se fut ouverte, il y plaça l'écrit,<br />

et referma la<br />

pierre. Cet écrit restera dans la pierre jusqu'au jour de<br />

la résurreclion.<br />

Et le jour de la résurrection, on retirera cet écrit, et<br />

on le lira à la postérité d'Adam ; or, quiconque aura ac-<br />

(1) La pierre noire est conservée à la mosquée de la Mecque; les pè<br />

lerins doivent la loucher.


— — 16<br />

compli l'engagement contracté sera parmi les heureux ;<br />

et quiconque ne l'aura pas accompli sera parmi, les gens<br />

de l'enfer.<br />

Et la pierre portera témoignage pour quiconque aura<br />

fait le pèlerinage et l'aura touchée.<br />

Ensuite, Gabriel, par l'ordre de Dieu,<br />

ceinture de coton mélangée de laine,<br />

présenta une<br />

et dit : « O! Adam,<br />

ceci s'appelle la ceinture de l'accomplissement; ceins-là<br />

à les reins, en disant : accomplissez l'engagement ! ne<br />

suivez pas la voie du démon,<br />

votre ennemi ! ne vous at<br />

tachez pas à la terre et à ce qu'elle contient! désirez<br />

ce qui est entre les mains de Dieu ! suivez les<br />

commandement du Dieu très-haut ! »<br />

Adam répondit : « J'accepte ! »<br />

Gabriel apporta alors à Adam le lapis du khalifat, el<br />

le fit asseoir dessus ;<br />

puis il alla chercher au paradis du<br />

lait et du miel, les mélangea ensemble et en lit une<br />

friandise qu'il mit sur un plateau et déposa sur la pierre<br />

noire.<br />

Adam se mit à manger de ce mets, bouchée par bou<br />

chée, et en laissa un peu pour Eve;<br />

rivée,<br />

et celle-ci étant ar<br />

mangea de la friandise et remercia Adam.<br />

Ensuite, Adam retourna vers le pays de l'Inde,<br />

el de<br />

puis, chaque année, il accomplit le pèlerinage. Telle est<br />

l'origine de cetle sainte coutume.<br />

Plus tard, Adam s'étant fâché avec son fils Chit (Seth?),<br />

Dieu lui ordonna de remettre la fetoua à son fils Nouch<br />

(Enoch 1). Elle se transmit ensuite de l'un à l'autre et<br />

arriva à Noé, lequel vécut mille et cinquante ans, prê<br />

chant la foi aux gens de sa famille, dont le nombre élait<br />

de quarante hommes et quarante femmes.


— - 17<br />

Noé remit ensuite la fetoua à son fils Sern,<br />

et elle se<br />

transmit de l'un à l'autre, jusqu'à ce qu'elle arriva à<br />

Abraham, l'ami de Dieu (1). Et lorsque Dieu lui donna<br />

ordre de bâlir la Kâba, Gabriel, accompagné des autres<br />

anges,<br />

radis,<br />

apporta un plateau chargé des friandises du pa<br />

elle déposa à la place que devait occuper la Kàba.<br />

Gabriel dit alors à Abraham : « Ton Seigneur l'envoie<br />

le salut et te fait dire d'employer ton fils Ismaël à re<br />

construire la maison sacrée de Dieu, à la place où elle<br />

doit s'élever. î<br />

Abraham fit ce que Gabriel lui avait ordonné, el alla<br />

chercher une pioche ; mais une vieille femme vint alors<br />

vers lui et lui dit: « Le salut soit sur toi, ô Abraham!<br />

— » Sur toi soit le salut, répondit-il.<br />

— » Que veux-lu faire ici? Abraham, reprit-elle.<br />

— d Dieu,<br />

— qu'il soit loué et exalté,<br />

—<br />

désire que je lui élève une maison en ce lieu.<br />

répondil-il,<br />

— » Cependant, reprit-elle, Dieu ne peut léser les<br />

hommes pour la valeur du poids d'un atome, et j'ai un<br />

droit réel sur ce terrain.<br />

— » Veux-lu donc, dit Abraham,<br />

du Dieu très-haut ?<br />

résister aux volontés<br />

— » 0 ! Abraham, répondit la vieille, Dieu ne peut vou<br />

loir celte construction sur lerre. »<br />

Alors Gabriel descendit du ciel et dit : « 0! Abraham,<br />

donne-lui ce qu'elle demandera. »<br />

La vieille élant revenue,<br />

Abraham lui dit : « Je le de<br />

mande celte parcelle de terrain et t'offre en échange,<br />

des chameaux, des moutons, des vaches el tout ce que<br />

lu voudras! »<br />

(t) Surnom d'Abraham (El-Khelil).


— — 18<br />

Mais la vieille continua de refuser, jusqu'à ce qu'A<br />

braham lui dit: « Mais, vieille femme,<br />

que veux-tu donc?<br />

— » Abraham, répondit-elle, il faut donc absolument<br />

que lu me prennes ce terrain pour y bâtir la maison sa<br />

crée de Dieu?<br />

— » Oui,<br />

» dit-il.<br />

— » Eh bien! reprit-elle, je le le donne;<br />

mais c'est à<br />

la condition que, lorsque tu en auras pris possession et<br />

que la maison de Dieu sera achevée, tu me remettras<br />

les clefs de la maison,<br />

en compensation de ma parcelle.<br />

Celle clef sera pour moi et pour ma postérité, jusqu'au<br />

jour de la résurrection. En t'imposant cette condition, je<br />

m'appuie sur celle parole divine: « Dieu vous ordonne<br />

» de remettre le dépôt à son maître. »<br />

Gabriel étant alors descendu du ciel, dit à Abraham :<br />

t Le salut soit sur loi ; Ion Dieu t'envoie le salut, et te<br />

fait dire d'accorder à la vieille tout ce qu'elle désirera. »<br />

C'est pourquoi Abraham accéda à sa demande,<br />

jura d'exécuter la promesse qu'il lui faisait.<br />

et lui<br />

Mais la vieille ne se contenta pas de ce serment : « Si<br />

lu es sincère dans tes paroles, dit-elle, contracte avec<br />

moi un engagement au nom de Dieu! »<br />

Abraham refusa ^e s'engager de la sorte, se souvenant<br />

de ce qui lui était arrivé, par suite de la promesse faile<br />

au nom de Dieu, à Sara,<br />

au sujet de l'émigration d'Ismaël.<br />

La vieille lui dit alors: « Si tu ne contractes pas avec<br />

moi cet engagement, tu ne bâtiras pas sur mon terrain. »<br />

Aussitôt, Gabriel descendit du ciel el dit à Abraham:<br />

« Dieu l'ordonne de t'engager pour cela, en son nom,<br />

envers elle, »<br />

Abraham, se conformant à ces paroles, s'engagea are-


— — 19<br />

mettre les clefs à la vieille et celle-ci lui permit de cons<br />

truire.<br />

Or,<br />

sachez que la Kâba a élé construite en sept fois.<br />

Elle a été édifiée premièrement par les anges; secon<br />

dement par Adam; troisièmement par Abraham; qua<br />

trièmement par Djorhem (?); cinquièmement par Koreïch;<br />

sixièmement par Abd-Allah ibn-Zobeïr ; et septièmement<br />

par Haddjadj, —<br />

ses désirs!<br />

que Dieu le fasse atteindre au but de<br />

On demanda un jour à l'envoyé de Dieu (Mohammed)<br />

quel était le péché le plus laid que pussent commettre<br />

les gens destinés au feu.<br />

— a C'est, répondit-il, de manquer à l'engagement<br />

pris envers Dieu et de rompre son alliance. « O ! mes<br />

compagnons, ajouta-t-il, selon ce que rapporte Abou-<br />

Dhorra, —<br />

ayez le plus grand respect pour le pacle, car<br />

c'est l'engagement contracté envers le Dieu magnifique.<br />

Les infidèles eux-mêmes respectent leur engagement.<br />

Aussi Dieu a-t-il rendu le pacte sacré dans ce monde et<br />

dans l'autre. »<br />

L'Envoyé de Dieu a encore dit : s Gabriel est venu vers<br />

moi et m'a dit : « Ton Seigneur t'envoie le salut, et l'offre<br />

ses bénédictions et ses grâces; il me charge, en outre,<br />

de te révéler cetle parole : la pire des fautes, le jour do<br />

la résurrection, sera d'avoir rompu le pacte d'alliance;—<br />

et cette autre parole: ceux qui,<br />

après avoir reçu l'al<br />

liance de Dieu, rompront l'engagement contracté envers<br />

lui;<br />

ceux qui refuseront d'exécuter ce que Dieu a or<br />

donné et commettront le péché,<br />

dants (ou les égarés). »<br />

ceux-là seront les per<br />

L'Envoyé de Dieu a dit, en outre : « Ceux qui rompront


— — 20<br />

l'engagement et le pacte d'alliance,<br />

perdront la vie de ce<br />

monde et l'autre vie, el n'obtiendront pas mon interces<br />

sion le jour de la résurrection. »<br />

— » O ! Envoyé de Dieu, lui dit Abou-Dhorra,<br />

vole et si l'on commet l'iniquité,<br />

si l'on<br />

mais qu'on ne rompe<br />

pas l'alliance, entrera-t-on néanmoins au paradis ? »<br />

Le Prophète lui répondit : « Certes, Dieu pardonnera<br />

tous les péchés sauf celui de rompre l'alliance el l'enga"<br />

gement qu elle entraîne,<br />

cl celui de donner à Dieu un<br />

associé. La terre est aux hommes, prenez donc garde, ô<br />

vous qui rompez l'alliance et le pacte,<br />

si vous donniez un associé à Dieu ! »<br />

car c'est comme<br />

Or, celui qui, le premier, a reçu le pacte d'alliance,<br />

est Gabriel, lequel l'a transmis à Adam. D'Adam il est<br />

passé à Seth, de Selh à Enoch, d'Enoch à Noé, de Noé à<br />

Abraham, d'Abraham à notre Seigneur Mohammed, de<br />

noire Seigneur Mohammed à i'Imam Ali, de l'Imam Ali<br />

à Sliman-el-Farsi , et de Sliman à tous ceux qui se sont<br />

transmis après lui l'alliance et l'initiation.<br />

II<br />

Ce qui suit est rapporté dans la Sonna du Seigneur<br />

des Envoyés : La nuit du mâradj (1), Dieu dit à Gabriel :<br />

« Va au paradis; prends -y un coffre el relires- on la<br />

foudre el les éclairs;<br />

med,<br />

ensuite tu te rendras vers Moham<br />

et lu l'inviteras à venir auprès de moi. » Il ajouta :<br />

« Emmène avec toi un certain nombre d'anges, j><br />

(I) Nuit de l'ascension , dans laquelle les mûsulmaus rapportent que<br />

Mohammed a voyagé à travers les airs, depuis la Mecque jusqu'à Jérusa<br />

lem,<br />

et de là au trône de Dieu.


21<br />

Voici donc que Gabriel vint vers Mohammed et lui dit :<br />

« Le salut soit sur toi, ô Mohammed! Ton Dieu l'envoie<br />

le salut,<br />

et t'invite à te rendre auprès de lui. »<br />

En entendanl ces paroles, le prophète récita deux<br />

rikâ (1)<br />

et célébra les louanges du Dieu très-haut.<br />

Lorsqu'il eut fini ses prières, Gabriel le coiffa du dia<br />

dème, le revêtit de la tunique et lui ceignit les reins de<br />

la ceinture; puis, il le fit monter sur la foudre, et, après<br />

avoir volé avec lui un certain temps à travers les airs,<br />

il lui dit : « Descends,<br />

éloigné (2). »<br />

et prie deux rikâ dans le temple<br />

Le prophète descendit alors et, ayant regardé autour<br />

de lui, à droite et à gauche,<br />

il aperçut les anges. Il leur<br />

adressa le salut, et ils le lui rendirent; puis il dit:


—<br />

— 22<br />

tenu dans une de ces trois coupes, et laisse les deux au<br />

tres. »<br />

Or, Mohammed prit la coupe du lait et en but la moitié.<br />

— « Sois en paix ! ô Mohammed, dit Gabriel, car, si<br />

tu avais bu le miel, ton peuple aurait pris davantage le<br />

goût du vin, et si lu avais bu le vin, ton peuple aurait,<br />

bien plus encore, mangé el bu ce qui est défendu. Mais<br />

puisque tu as bu le lait, Dieu fera entrer tout ton peuple<br />

au paradis, par ton intercession. »<br />

III<br />

Le prophète entreprit le pèlerinage d'adieu dans le mois<br />

de dhou l'heddja. Il sortit alors de Médine, la noble, et<br />

se rendit à la Mecque. Le pèlerinage achevé, il reprit le<br />

chemin de sa noble ville,<br />

et tandis qu'il était à la moitié<br />

de la roule, Gabriel descendit du ciel devant lui,<br />

révéla ce verset : « 01 envoyés,<br />

et lui<br />

proclamez ce qui vous a<br />

élé révélé de la part de Dieu ; car si vous ne proclamez<br />

pas ce que vous avez reçu comme message, Dieu éloignera<br />

de vous les gens. »<br />

Le prophète ordonna alors qu'on lui élevât une chaire<br />

avec les bâts des chameaux, et, lorsqu'on les eûl entassés<br />

de manière à faire une chaire, il y monta et prononça<br />

une khotba (allocution) éloquente. Il dit ensuile,<br />

en s'a<br />

dressant à ses auditeurs : « 0! gens, qui vous a dolés<br />

d'une âme dont vous êtes les maîtres ?» —<br />

prophète,<br />

» répondit-on.<br />

« Dieu et son<br />

L'envoyé de Dieu ajouta : « Ali et moi, nous sommes<br />

une même lumière; Ali est à moi, comme je suis à lui;


— - 23<br />

nous sommes les successeurs de Moïse et d'Aron. O! mon<br />

Dieu,<br />

sois avec Ali partout où il ira. »<br />

Il dit ensuite : « Chaque prophète a un disciple qui<br />

devient son successeur; or, toi Ali, fils de mon oncle, tu<br />

seras l'héritier de mes sciences,<br />

et celui qui tiendra ma<br />

place après ma mort. Je suis le sceau des prophètes; toi<br />

Ali, tu seras le prince des croyants et le pontife (imam)<br />

des fidèles. Seul, le vrai croyant sera ton appui ; seul,<br />

l'infidèle t'allaquera ! »<br />

Ensuite,<br />

pagnons,<br />

le prophète dirigea son visage vers ses com<br />

—<br />

— que la faveur de Dieu soit pour eux tous,<br />

el leur dit : s O! mes compagnons, je suis le sceau des en<br />

voyés, le plus grand des prophètes,<br />

grand de mes amis. »<br />

et Ali est le plus<br />

« Sois le bienvenu, ô! Ali, s'écrièrent tous les compa<br />

gnons, puisses-tu être l'ami (1)<br />

croyante. »<br />

Ensuite, le prophète récita deux rikâ,<br />

prière du d'ohôr (midi). Il s'assit alors,<br />

gnons,<br />

heures); puis,<br />

de lout croyant et de toute<br />

et prononça la<br />

avec ses compa<br />

jusqu'au moment de la prière d'el-acer (trois<br />

il se leva el ses compagnons firent de même.<br />

Alors, le prophète retira son manteau de dessus ses<br />

épaules, el l'étcndit sur le tapis à prières ; puis il dit:<br />

« O! mon Dieu, je te prends à témoin ; je prends à té<br />

moins tes envoyés, tes prophètes, les anges, toute ta tribu,<br />

les mystères de les cieux et de ta terre,<br />

objets créés qu'ils renferment,<br />

sur ce que toi, Dieu,<br />

es unique et n'as pas d'associé ;<br />

exalté sans cesse ! »<br />

(1)<br />

Ou le chef (ouali).<br />

avec lous les<br />

— que je porte témoignage<br />

es le souverain très-saint, que lu<br />

puisses-tu être béni et


Ensuite,<br />

— — 24<br />

il prit le manteau et le plaça sur les épaules<br />

d'Ali en disant : « Ali, lève-toi. »<br />

Et Ali se leva devant le prophète.<br />

Le prophète récita alors les versets suivants : « 0 ! noire<br />

seigneur, nous sommes croyants ;<br />

pardonne-nous donc<br />

nos fautes, et évite- nous le châtiment de l'enfer. —<br />

qui seront patients.... etc. — Il<br />

lui ; il est le glorieux, le juste. »<br />

Ensuite, il retira le ahram (1)<br />

Ceux<br />

n'y a d'autre Dieu que<br />

de dessus les épaules<br />

d'Ali, en disant : « O! Ali, de même que Gabriel m'a ceint<br />

les reins, la nuit du mâradj (ascension), lorsqu'il m'a<br />

— conduit en présence de la justice (Dieu), que sa gloire<br />

—je veux le ceindre les reins. — Louange<br />

soit proclamée,<br />

à Dieu, ajouta-t-il; car, après avoir créé Adam,<br />

il l'a ins<br />

titué son vicaire ; ensuite, il lui a envoyé Gabriel, qui<br />

lui a sanglé la ceinture, après avoir reçu de lui l'engage<br />

ment, et lui a légué les sciences, en lui recommandant<br />

d'éviter ce qui est défendu. »<br />

— « Sachez que le Sirat est un passage que les gens<br />

pieux el ceux dont la langue est sincère peuvent seuls<br />

franchir.<br />

— » Sachez,— que Dieu vous fasse miséricorde! — que<br />

la feloua est la décisi% légale et le résumé de ce qu'on<br />

doit exécuter. »<br />

Ayant achevé ces paroles, le prophète prit la ceinture,<br />

la fit passer du côté droit de l'imam Ali,<br />

el la lui cei<br />

gnit à la taille. Au premier nœud, il dit : « Au nom de<br />

Dieu clément et miséricordieux ! au nom de Dieu, à cause<br />

de la certitude, el louange à Dieu pour l'accomplisse<br />

ment! » Au second nœud, il dit: « Au nom de Gabriel! »<br />

(1) Vêtement des pèlerins.


— Il<br />

— — 25<br />

boucla enfin la ceinture en disant: « Il est écrit à la<br />

porte du paradis ces mots : Il n'y a d'autre Dieu que<br />

Dieu, Mohammed est le prophète de Dieu (1). » — « Cetle<br />

ceinture, ajouta-t-il, ce pacte et cette confrérie,<br />

âme commune. »<br />

Les gens de la feloua,<br />

soirée de la ceinture.<br />

ont une<br />

nomment cette après-midi : la<br />

Ensuite, le prophète invoqua Dieu en faveur de l'imam<br />

Ali; puis, il le fit asseoir sur le sedjada (tapis à prières),<br />

et tous les assistants s'assirent autour. Le prophète dit<br />

alors :


— — 26<br />

et de te faire devenir l'ami de Dieu. » — Puis,<br />

l'ayant<br />

revêlu du manteau de la fetoua, il ajoula :


Le 7e, Haçan el-Bas'ri.<br />

Lo 8e, Kêmïa Ibn....<br />

— — 27<br />

Le 9e, Le page (fêta) d'Ali.<br />

Le 10e, Abd Allah Ibn Abbas.<br />

Le 11°, Ahmed....<br />

Le 12°, (Manque).<br />

Le 13% Abou Dhorra el-R'effar.<br />

Le 14e,<br />

Abou Dhorra el-K'ader.<br />

Le 15e, Abou Obeïda el-Heridi.<br />

Le 16e, Abou en-Nous Abd Allah.<br />

Et le 17e, El-Heddja.<br />

Cela fait, l'imam Ali s'assit sur le tapis,<br />

et ordonna à<br />

Sliman el-Farsi, de ceindre le reste des compagnons et<br />

de les recevoir,<br />

Dieu.<br />

selon le rite établi par le prophète de<br />

Dix-sept des compagnons avaient élé reçus par l'imam<br />

Ali ; le reste fut ceint par Sliman el-Farsi.<br />

Ce furent :<br />

1° Omar Ibn el-Bridi ;<br />

2° Adassi Ibn ben Yameni ;<br />

3° Abou Omar Ibn Abd el-Bouasti ;<br />

4° Sliman el-Koufi ;<br />

5° Obéïd el-Mosri ;<br />

6° Mahçen Ibn Othman ;<br />

7 L'Emir, frère de Baïa, sultan ele la ville d'Arouan ;<br />

8° Zahed el-Kaltani;<br />

9° Daoud Ibn Abd er-Rah'man ;<br />

10° H'âmed Ibn Abd Allah ;<br />

11° Amran Ibn A mm ;<br />

12 Daoud Ibn Saïd ;<br />

13° Akil Ibn Menïa ;


14° Mentour Ibn Mi'ad ;<br />

15° K'acem el-Koufi ;<br />

16° Abd Allah Ibn Tirai ;<br />

17° El-Yemeni ;<br />

18° Abou Yezid el-Hendi ;<br />

19° Habib Ibn Medjia ;<br />

— — 28<br />

20° Abou K'acem el-Mobarek ;<br />

21« El-Tedjani Ibn K'acem el-Bettar<br />

22° Nacer Ibn el-Abed ;<br />

23° Nacer Ibn Nacer ;<br />

24» Hâm Ibn Abd Allah el-Basri ;<br />

25» Obéïd Ibn Djâfer el-Teïar ;<br />

26" Sâad ;<br />

27" Mohammed Ibn Asir ;<br />

28° Ammamou Ibn Dïas ;<br />

29° Abou Nacer ;<br />

30° Acer el-Hendi es-Sïaf ;<br />

31» Abou l'Ftah'<br />

Ibn Abd Allah ;<br />

32« Nacer ibn Abd Allah el-Mekki ;<br />

33° Ibn Obéïd Allah el-Hendi ;<br />

34° Hacen el-Fettal el-Màadi ;<br />

35° Amram el-Hou» ;<br />

36" Noçr Allah ;<br />

37° Abou K'acem el-Houni ;<br />

38° Abd Allah Ibn Habib ;<br />

39° Ibn Nacer ;<br />

40° Ibn Abou Ouakas ;<br />

41° Abou Mohammed Ibn 'Amran ;<br />

42° Amer Ibn Abd Allah ;<br />

43« El-Milani ;<br />

44° (Manque) ;


45° R'ialh Ibn el-Harani ;<br />

46° Abou Zeïd el-Hendi ;<br />

— — 29<br />

47° Mohammed Ibn el-Kebir el-Oustani ;<br />

48° Derraga Ibn el-Melladi ;<br />

49° In 'Amran ;<br />

50° Abou Charbi el-Iraki ;<br />

51° Abd Allah Ibn el-Haurani ;<br />

52» Ahmed Ibn Abd Allah ;<br />

53° Mohammed Ibn Abd Allah ;<br />

54° (Manque) ;<br />

55° Nocr ed-Din el-Hendi ;<br />

56° Ech Chadeli, -—<br />

que<br />

Dieu l'accueille !<br />

Cela fait, l'imam Ali s'écria : « Dieu soit loué ! lui qui<br />

répand ses grâces sur un grand nombre de créatures et<br />

spécialement sur ses serviteurs les vrais croyants ! »<br />

Puis,<br />

il se leva et entra dans la tente. Il en rapporta<br />

des dattes et du miel,<br />

qu'il remit au prophète. Celui-ci<br />

pétrit ces aliments ensemble, dans ses doigls,<br />

une sucrerie qu'il divisa, de sa noble main,<br />

et en fit<br />

en deux<br />

parts. Il les remit à Ali, en disant: « Sois en paix, Ali ,<br />

car tu es le maître de tous les musulmans et de toutes<br />

les musulmanes. »<br />

Alors, l'imam Ali entra dans la tente, et le prophète<br />

invita ses compagnons à entrer tous, un par un, auprès<br />

d'Ali,<br />

Tous les compagnons,<br />

pour eux ! —<br />

pour lui rendre hommage.<br />

entrèrent<br />

l'imam Ali. Et en entrant,<br />

— que le paradis de Dieu soit<br />

alors, successivement, auprès de<br />

chacun lui rendait hommage<br />

et recevait de lui un morceau de la friandise.<br />

Ali enveloppa ce qui resta de cette sucrerie,<br />

scella le<br />

paquet et le remit à Sliman el-Farsi, en lui ordonnant


— — 30<br />

de le porter à Médine, à El-Haçan et El-Hoceïn (1),<br />

leur mère Fatima-ez-Zohra, —<br />

eux !<br />

et à<br />

que le paradis soit pour<br />

C'est en commémoration de ce fait que, de nos jours,<br />

on envoie de ville en ville, la friandise du banquet.<br />

RITUEL DE LA SEANCE DE RECEPTION<br />

DU NÉOPHYTE.<br />

Tout d'abord, le cheïkh rasera la tête du néophyte;<br />

puis, il recevra de lui l'acte de contrition et l'engage<br />

ment (âhed).<br />

Ensuite il le coiffera du diadème et le revêtira du man<br />

teau. Il le liera à tel frère qu'il voudra, lui ceindra aux<br />

reins la ceinture et l'initiera à la science.<br />

Cela terminé, il le fera asseoir sur le tapis, lui prépa<br />

rera la friandise et chacun en mangera. On en enverra en<br />

différents endroits, et de ville en ville, à ceux qui n'auront<br />

pu être présents, afin de leur prouver l'intérêt constant<br />

que leur portent les frères. Il y aura un interprète de<br />

langue pour expliquer les mystères.<br />

Il est nécessaire qiie le compagnon de la ceinture et de<br />

la main relienne par cœur les préceptes et les questions<br />

qui suivent, lesquels lui vaudront des grâces divines et<br />

le rendront glorieux auprès des maîtres de la connais<br />

sance.<br />

Il devra, tout d'abord, réciter celte invocation: « Je<br />

cherche, auprès de Dieu, un refuge conlre sa colère, et<br />

le prie de me détourner de rejeter la ceinture, de rom-<br />

(1) Les deux fils d'Ali.


— - 31<br />

pre le pacte et de méconnaître la confrérie établie au<br />

nom de Dieu. Car quiconque conservera la ceinture, le<br />

pacte et la confrérie, sera conservé par Dieu, et obtien<br />

dra ses bénédictions; mais quiconque les rejetera, irri<br />

tera Dieu contre lui; aussi, le jour de la résurrection, il<br />

se présentera le visage noir, de sorte que les anges du<br />

ciel le maudiront! »<br />

Le néophyte devra aussi apprendre tout le résumé qui<br />

précède.<br />

Comme il est essentiel que le compagnon du tapis soit<br />

versé dans la loi, la justice, la voie droite et la connais<br />

sance,<br />

voici les réponses qu'il devra donner aux questions<br />

qui lui seront posées. C'est avec le questionnaire suivant<br />

que le cheikh initiera à la connaissance du Dieu très-<br />

haut.<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

Qui, le premier,<br />

Gabriel.<br />

Où<br />

Au<br />

Qui<br />

Les<br />

QUESTIONNAIRE (1)<br />

l'a-t-il reçue ?<br />

ciel.<br />

l'en a ceint ?<br />

a reçu la ceinture?<br />

anges du ciel, par l'ordre de la Vérité, —<br />

que sa gloire soit proclamée !<br />

D. —<br />

Qui,<br />

R- — N.<br />

le second,<br />

S. Mohammed.<br />

a reçu la ceinture?<br />

(t) La formule interrogative est celle-ci : s-_^>_3 1J l_3 I _<br />

1^ ',<br />

la réponse s'énonce par le mot:<br />

.._ A*sr


D. —<br />

Qui<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

l'en a ceint?<br />

Gabriel,<br />

— — 32<br />

par l'ordre du Maître de l'univers.<br />

Qui, le troisième,<br />

Ali, fils d'Abou Taleb.<br />

Qui<br />

l'en a ceint ?<br />

Mohammed.<br />

Qui,<br />

Sliman<br />

le quatrième,<br />

el-Farsi.<br />

Qui l'en a ceint ?<br />

Ali.<br />

A<br />

a reçu la ceinture?<br />

a reçu la ceinture ?<br />

qui appartient la ceinture (au fig. fermeté),<br />

et à qui la main (puissance) ?<br />

R. —<br />

La<br />

ceinture est à Ali, fils d'Abou Taleb,<br />

main à Mohammed,<br />

mettront à toi,<br />

el la<br />

car Dieu a dit : « Ceux qui se sou<br />

seront comme s'ils se soumettaient à<br />

Dieu, et ceux qui se révolteront contre toi,<br />

se révolteront<br />

contre eux-mêmes, car la main de Dieu est au-dessus<br />

d'eux. —<br />

Celui<br />

qui accomplira ce que Dieu lui a imposé<br />

comme engagement, je le récompenserai d'une manière<br />

magnifique (1). »<br />

D. —<br />

R. -<br />

Combien<br />

- Deux<br />

férieure.<br />

D. —<br />

R. —<br />

A<br />

La<br />

y a-t-il de ceintures ?<br />

: k ceinture supérieure et la ceinture in<br />

'<br />

qui appartiennent-elles ?<br />

ceinture supérieure est à Gabriel ; elle est<br />

dans le ciel ; la ceinture inférieure est à Ali, fils d'Abou<br />

Taleb ;<br />

D. —<br />

La<br />

elle est sur la terre : c'est la confrérie.<br />

elle composée ?<br />

ceinture (secte), de combien d'éléments est-<br />

(1) Ces deux phrases sont des citations plus ou moins altérées du Coran,<br />

comme la plupart de celles que nous mettons entre guillemets.


R. —<br />

De<br />

— — 33<br />

trois éléments. Le premier est Gabriel ; le<br />

second, Mohammed, et le troisième, Ali, fils d'Abou<br />

Taleb.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Sur<br />

Sur<br />

ceïn, fils d'Ali.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Qu'est-ce<br />

C'est<br />

combien de bases repose la ceinture?<br />

deux bases, qui sont : El-Haçan et El-Ho-<br />

que la voie (t'rik'a) ?<br />

la science, la continence, la sagesse, la pa<br />

tience et l'excellence des successeurs.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Quelles<br />

De<br />

sont les obligations de la voie ?<br />

rejeter les mauvaises paroles ; de prononcer<br />

sans cesse le nom de Dieu ; de mépriser les biens de la<br />

terre ; de repousser les amours humaines et de craindre<br />

le Dieu très-haut.<br />

D. —<br />

voie ?<br />

R. —<br />

A<br />

Ces<br />

quels signes se reconnaissent les gens de la<br />

signes sont : la bienfaisance, la retenue de<br />

langue, la piété, la douceur et l'éloignemcnt pour les<br />

péchés.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Quel<br />

La<br />

est ton ouerd (1), et que t'impose-l-il ?<br />

recherche du fealut et de la nourriture di<br />

vine ; la douceur des paroles, la confraternité et la sin<br />

cérité du langage el des œuvres.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Qu'est-ce<br />

C'est<br />

que le tapis de la voie ?<br />

le tapis à prières du cheikh,<br />

se prosterne et on est purifié ;<br />

passent les mystères.<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

Le<br />

sur lequel on<br />

c'est sur lui que se<br />

tapis de la voie, combien a-t-il d'attributs ?<br />

Quatre.<br />

Quels<br />

sont-ils ?<br />

(1) L'ouerd est le certificat d'admission dans la secte.


R. —<br />

Loi<br />

— — 34<br />

divine, vérité suprême, voie droite, con<br />

naissance du Dieu très-haut.<br />

D. —<br />

Le<br />

quels sont-ils ?<br />

R. —<br />

Quatre<br />

tapis, combien a-t-il de mois symboliques, et<br />

: le premier est Gabriel, le second Mi<br />

chel, le troisième El-Haçan et le quatrième El-Hoceïn.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Combien<br />

Il<br />

a-t-il y de lettres, el quelles sont-elles ?<br />

en a quatre : la première est ta (, la<br />

deuxième mim (A)<br />

noun<br />

( .).<br />

I<br />

• la troisième ha (s) ;<br />

et la quatrième<br />

D. -^Quelle est la signification de ces quatres lettres ?<br />

R. —<br />

La<br />

première, ta, veut dire que le compagnon<br />

du tapis doit être la poussière (^__^ J)<br />

voie ;<br />

— le<br />

des gens de la<br />

mim, qu'il doit-être semblable à l'eau<br />

( £__.-)> courante et pure —<br />

; le ha, qu'il doit être comme<br />

le zéphir (.£j*), soufflant dans le feuillage des arbres;<br />

le compagnon du tapis doit, en effet, être un esprit ré<br />

pandant sur les gens de la voie la perfection et les fa<br />

veurs légales ;<br />

le feu (.U)><br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

Vers<br />

Vers<br />

Quelle<br />

dessus d'elle,<br />

R. —<br />

La<br />

— le<br />

nom indique qu'il doit être comme<br />

1u' embrase la maison du pervers.<br />

qui jnarchez-vous ?<br />

la pUce d'Ali.<br />

est la forme de cette place, qu'y a-t-il au<br />

que contient-elle ?<br />

place d'Ali est tracée par les vieillards, com<br />

pagnons de la fetoua; sur elle, est le tapis, et, au dessus<br />

d'elle, est la vérité (Dieu), le Tout-Puissant, le Généreux,<br />

qui domine ses esclaves.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Combien<br />

Quatre<br />

faul-il de pas, pour la traverser ?<br />

pas ; un pour chacun des saluts que con-<br />

'


naît l'interprète de langue,<br />

les mystères.<br />

D. —<br />

Combien<br />

la place d'Ali,<br />

R. —<br />

Trois<br />

— — 35<br />

qui en explique les secrets et<br />

doit-on passer de ponts pour arriver à<br />

ponts.<br />

et s'asseoir sur le tapis ?<br />

D. Qu'y a-t-il à votre droite, à votre gauche, derrière<br />

vous, devant vous, sur votre tête et sous vos pieds ?<br />

R. —<br />

A<br />

ma droite est Gabriel ; à ma gauche, Michel ;<br />

derrière moi, Azraïl ; devant moi, Asrafil ; au-dessus de<br />

moi, le Souverain Glorieux ; et sous mes pieds, la mort,<br />

qui est plus proche de nous que la veine jugulaire ne<br />

l'est de la gorge,<br />

conformément à cetle parole divine :<br />

« Toute âme doit goûter de la mort ; vous recevrez<br />

voire salaire le jour de la résurrection (Coran) .<br />

— D. Qu'y a-l-il dans votre tête, dans votre oreille,<br />

dans votre œil, dans votre bouche, dans votre poitrine<br />

et dans vos pieds ?<br />

R. —<br />

Dans<br />

»<br />

ma têlc, la noblesse des pensées, l'intel<br />

ligence el la connaissance ;<br />

— dans<br />

mon oreille, les pa<br />

roles de celui qui m'a dirigé vers l'obéissance de Dieu ;<br />

— dans<br />

mon œil, la vue de la face du Seigneur Généreux<br />

(Dieu) ;<br />

— dans<br />

ma bouche, la loi divine, la vérité, la<br />

règle, la connaissance el les paroles de bien ;<br />

— dans<br />

ma poitrine (cœur), la patience pour supporter les cala<br />

mités et les mauvaises paroles ;<br />

— et dans mes pieds, un<br />

moyen de me rendre auprès des maîtres de la connais<br />

sance, sur le tapis de la voie droite,<br />

gens de la vérité.<br />

D. —<br />

Qu'y<br />

a-t-il dans votre cœur?<br />

R. — L'impureté et l'ignorance,<br />

en présence des<br />

que je dois racheter<br />

par l'humilité et la soumission devant mon maître.


D. —<br />

R. —<br />

Quels<br />

Ma<br />

— — 36<br />

sont vos témoins ?<br />

main droite et ma main gauche ; elles por<br />

teront témoignage, le jour de la comparution suprême<br />

par devant le Maître de l'univers et les deux anges écri<br />

vant par son ordre.<br />

D. —<br />

En<br />

se rendant vers la place d'Ali, d'où vient-on,<br />

et par où s'en va-l-on ?<br />

R. —<br />

On<br />

vient de la maison périssable, et on se rend<br />

jers la maison de l'éternité. Accorde-moi la richesse, ô<br />

Riche ! et l'éternité,<br />

D. —<br />

Quelle<br />

ô Eternel !<br />

est la maison périssable ? Quelle est la<br />

maison éternelle ?<br />

R. —<br />

La<br />

terre est périssable, avec tout ce qu'elle con<br />

tient, car c'est la maison de l'illusion,<br />

conformément à<br />

cette parole divine : « La vie de la terre n'offre que des<br />

jouissances trompeuses (Coran). » — Quant<br />

éternelle, c'est la maison de l'autre vie,<br />

à la maison<br />

et ne l'habi<br />

tera pour l'éternité que celui qui aura fait les bonnes<br />

œuvres, multiplié les bienfaits,<br />

moralité, méprisé les amours terrestres,<br />

rejeté l'impureté et l'im<br />

et détourné ses<br />

regards des choses illicites. C'est la réunion des serviteurs<br />

au plus haut des cieux ; c'est en ce lieu qu'ils obtiendront<br />

l'intercession effi^ce de Mohammed, l'envoyé de Dieu,<br />

le Maître des miracles.<br />

D. —<br />

Lorsque<br />

vous entrez sur la place el que vous<br />

vous avancez au milieu des vieillards, compagnons de la<br />

voie,<br />

comment vous accueille le cheikh ?<br />

R. — 11 m'accueille avec une invocation sincère, et<br />

m'enveloppe de son regard bienfaisant.<br />

D. — Quels sont vos initiateurs pour enlrer dans la<br />

voie de la pureté?


R. —<br />

Ce<br />

— 37 —<br />

sont les vieillards sages qui sont mes inter<br />

médiaires auprès d'Ali. C'est en leur présence et dans<br />

leur généreuse société qu'on est reçu.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Où<br />

Sur<br />

est-on reçu?<br />

le tapis de la vérité, sous les pieds du trône<br />

de Dieu, sur la place d'Ali,<br />

gnons de la fctoua.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Combien<br />

Deux,<br />

et en présence des compa<br />

avez-vous de frères dans la voie droite?<br />

qui sont ma ceinture et mon pacte, que<br />

je tiens dans ma main,<br />

vie et dans la mort.<br />

D. —<br />

Par<br />

sort-on ?<br />

R. —<br />

On<br />

quelle porte enlre-t-on,<br />

et qui m'accompagnent dans la<br />

entre par la porte de l'amour,<br />

et par quelle porte<br />

et on sort par<br />

celle de la miséricorde et de l'accueil des compagnons de<br />

la fetoua.<br />

D. —<br />

Où<br />

qui l'apporte?<br />

R. —<br />

Elle<br />

est cuite notre bouchée,<br />

qui l'a humeclée et<br />

est cuite au foyer du miséricordieux, et est<br />

apportée par les anges du paradis de délices.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Où<br />

Sur<br />

la dépose-l-on ?<br />

le tapis de la puissance, entre les mains des<br />

compagnons de la décision.<br />

D. —<br />

droite,<br />

R. —<br />

lui!<br />

D. —<br />

R. —<br />

En<br />

Sur<br />

arrivant dans la réunion des gens de la voie<br />

sur quoi s'assied-on?<br />

le lapis d'Ismaël ; que le salut soit sur<br />

Comment s'assied-on sur le tapis de la voie ?<br />

Par<br />

la permission qne le cheïkh en donne, et<br />

avec le cœur rempli d'humilité et de modestie,<br />

sence des intermédiaires.<br />

en pré


D. —<br />

Qu'est-ce<br />

— — 38<br />

que la foula (pièce d'étoffe)? Quelle est<br />

son origine, et quelle largeur a-t-elle ?<br />

R. —<br />

La première foula a élé formée des feuilles de<br />

figuier dont se sont couverts Adam et Eve. La largeur<br />

de la foula est celle de votre bras droit,<br />

et sa longueur<br />

celle de votre bras gauche. Son origine revient à Omar<br />

Ibn Omeïa el-Medorri,<br />

l'imam Ali.<br />

D. —<br />

Comment<br />

sort-on ?<br />

R. —<br />

On<br />

car c'est lui qui en fit présent à<br />

entre- t-on dans la voie,<br />

et comment en<br />

y entre avec l'âme humble de l'imnlfrant,<br />

et on en sort avec le cœur joyeux de celui qui a obtenu.<br />

D. —<br />

Lorsqu'on<br />

vous boucle la ceinture, qu'y a-l-il<br />

dans votre main droite?<br />

R. —<br />

Nous<br />

tenons dans notre main droite le livre de<br />

notre destin, selon cette parole divine: « 0 ! mon Dieu,<br />

donne-moi mon livre (destin), dans ma main droite, et<br />

non dans ma main gauche ! »<br />

D. —<br />

gauche.<br />

R. —<br />

Il<br />

Qu'y<br />

baut. a<br />

D. —<br />

R. —<br />

Il<br />

a-t-il entre votre main droite et votre main<br />

y a, entre les deux, l'alliance du Dieu trés-<br />

Qu'y<br />

a-t*<br />

entre vous el votre initiateur ?<br />

y a, entre nous, le pardon du Dieu magnifi<br />

que, seigneur de Moïse et d'Abraham; selon celte parole<br />

divine : « O! vous qui croyez, offrez, en entier, votre re<br />

pentir à Dieu,<br />

Et cetle autre parole : « Celui qui accomplira l'engage<br />

et demandez-lui le pardon de vos fautes. »<br />

ment contracté envers Dieu, je le récompenserai magnifi<br />

quement. »<br />

D. —<br />

Par<br />

quoi est-on affranchi?


R. —<br />

Par<br />

— — 39<br />

la pureté du cœur de l'initiateur et la sin<br />

cérité du néophyte.<br />

D. —<br />

Qui<br />

courte ?<br />

R. —<br />

L'homme<br />

possède la chose longue,<br />

et qui la chose<br />

juste a la langue longue, et le pécheur,<br />

dans son avilissement, a la langue courte.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Quelle<br />

La<br />

est la clef du ciel?<br />

profession de foi: « Il n'y a de Dieu que Dieu,<br />

Mohammed est le prophète de Dieu;<br />

sur lui ses grâces et lui accorde le salut!<br />

D. —<br />

Quelles<br />

—<br />

choses sont venues du ciel,<br />

est supérieure à l'autre ?<br />

R. —<br />

Le<br />

que Dieu répande<br />

et dont l'une<br />

blé el la viande. La viande est supérieure au<br />

blé, car le blé a élé apporté du paradis par Adam, tandis<br />

que le bélier a été envoyé du ciel pour servir de rançon<br />

à Ismaël,<br />

D. —<br />

Quelle<br />

que son père allait immoler.<br />

est la maison sans porte, la mosquée sans<br />

mihrab (1) et le prédicateur sans livre?<br />

— R. La maison sans porte, c'est la terre,<br />

qu'un séjour d'illusions trompeuses; —<br />

la<br />

qui n'est<br />

mosquée sans<br />

mihrab, c'est la kâba, que le Dieu très-haut la protège !—<br />

et le prédicateur sans livre, c'est Mohammed,<br />

car il prê<br />

chait sans livre, et on écrivait, au contraire, ses paroles<br />

sur le livre.<br />

D. —<br />

Le<br />

la votre?<br />

R. —<br />

Il<br />

diadème de l'islam est-il sur ma tête,<br />

est sur ma tête,<br />

ou sur<br />

sur la vôtre et sur celle de<br />

tous les serviteurs; car Dieu l'unique, le puissant, est<br />

celui qui dit à une chose : « Sois ! » et elle est.<br />

(1) Le mihrab, dans les mosquées, est le renfoncement, dirigé du côté<br />

de la Mecque, dans lequel se met le prédicateur.


— - 40<br />

D. — En quoi espérez-vous ?<br />

R. —<br />

En<br />

la miséricorde de Dieu,<br />

afin qu'il me fasse<br />

admettre, ainsi que vous, au paradis.<br />

— D. Par quoi s'obtiennent la loi, la justice, la règle<br />

et la connaissance.<br />

R. —<br />

La<br />

loi s'obtient par le travail et l'élude; la jus<br />

tice, par la volonté du Dieu très-haut ,<br />

de pareil,<br />

celui qui n'a pas<br />

le dispensateur de loul bien, le créateur de<br />

toute chose, le vivificaleur et l'exterminateur de ce qui<br />

existe;<br />

on arrive à la règle en suivant la voie de la vé<br />

rité et de la sincérité; enfin, la connaissance consiste<br />

dans la science des paroles de Dieu, de son livre, et dans<br />

les efforts pour rester dans l'obéissance de Dieu.<br />

D. —<br />

rure?<br />

R. —<br />

Quelle<br />

Sa<br />

est la clef de la loi,<br />

et quelle est sa ser<br />

clef est cetle parole : « Au nom de Dieu, clé<br />

ment et miséricordieux! » et sa serrure, celte aulre pa<br />

role : « Louange à Dieu, maître de l'univers! i<br />

D. —<br />

R. —<br />

En<br />

Elle<br />

quoi consiste l'observance?<br />

consiste à se nourrir de ce qui est permis,<br />

rejeter ce qui est illicite,<br />

obéir aux deux fils (Haçan et<br />

Hoceïn), et se rapprocher de Dieu.<br />

— D. Si la viandlse gâte, par quoi la reclifie-t-on ?<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

D. —<br />

R. —<br />

Par<br />

le sel.<br />

Et si le sel se gâte, comment le rectifie-t-on ?<br />

Par<br />

Quelle<br />

l'assemblée sur la place d'Ali.<br />

est la signification de ces réponses ?<br />

La viande représente les gens de notre sainte so<br />

ciété; le sel est le cheikh. Si les membres de la confrérie<br />

de la voie se gâtent, le cheikh les guérit ; et si le cheïkh<br />

se gâte, ou le remplace dans l'assemblée.


D. —<br />

R. —<br />

Quels<br />

Il<br />

— — 41<br />

sont les mystères qui enveloppent le lapis ?<br />

est entouré par quatre fatiha (1) ; on le déroule<br />

avec une fatiha ; ou le roule avec une fatiha,<br />

porle avec une fatiha.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Que<br />

11<br />

fait le cheikh en approchant du lapis ?<br />

et on l'em-<br />

commence par invoquer le salut et indiquer<br />

les prescriptions de la voie. Puis,<br />

il avance son pied droit<br />

et soulève le pied gauche ; il récite alors une fatiha, et<br />

fait pour le pied gauche comme il a fait pour le pied droit.<br />

Il s'avance ainsi peu à peu,<br />

mine par la bénédiction,<br />

en récitant la fatiha et ter<br />

et l'appel des faveurs divines et<br />

du salut sur N. S. Mohammed, le maître des envoyés.<br />

D. —<br />

R. —<br />

Comment<br />

En<br />

Dieu très-haut,<br />

le cheikh se retire-t-il du tapis ?<br />

prononçant trois falika, la tekbira pour le<br />

l'appel de la bénédiction et du salut sur<br />

N. S. Mohammed, maître des envoyés,<br />

sur ses compagnons,<br />

sur sa famille et<br />

et l'invocation du salut pour tous.<br />

Enfin, il implore Dieu de nous pardonner,<br />

ainsi que vous<br />

et que tous les musulmans elles musulmanes, les croyants,<br />

cl les croyantes, Amen ! Amen,<br />

med,<br />

le seigneur des envoyés !<br />

par les mérites de Moham<br />

Fin du questionnaire ainsi que de la fetoua,<br />

grâce de Dieu.<br />

(1) La fatiha est le premier chapitre du Coran.<br />

par la


—<br />

— 42<br />

ORAISON FINALE<br />

Revenons maintenant vers notre père et'notre<br />

ancêtre<br />

le cheikh 'Abd el-Kader el-Djilani,<br />

— vers celui qui l'a<br />

reçu et l'a ceint, et qui est Abou l'Haçan ech-Chadeli,<br />

que Dieu l'accueille! —<br />

reçu par l'imam Ali,<br />

Il<br />

ceint cinquante cinq compagnons ;<br />

avait lui-même élé ceint et<br />

que Dieu lui soit propice ! et avait<br />

qui a été ceint et reçu par l'Envoyé de Dieu,<br />

— vers l'imam Ali,<br />

que Dieu<br />

répande sur lui ses grâces et lui accorde le salut, ainsi<br />

qu'à tous les prophètes, les ouali, les gens purs, les<br />

maîtres de l'oraison, de la scienee et du Coran,<br />

famille et ses compagnons,<br />

les grâces les plus complètes!<br />

— à<br />

sa<br />

auxquels il puisse accorder<br />

Répétons sans cesse cette parole de l'envoyé de Dieu :<br />

« Notre voie (t'rik'a),<br />

quiconque y montera sera sauvé,<br />

gnera sera perdu ! »<br />

Notre cheikh,<br />

— que<br />

est comme le vaisseau de Noé :<br />

Dieu l'accueille ! —<br />

et quiconque s'en éloi<br />

a vécu quatre-<br />

vingt-quatre ans ; il ast mort dans le Ve siècle de l'hégire<br />

(de 1009-10 à 1106-1 de l'ère ch.).<br />

Voici la liste de ses ancêtres, en remontant jusqu'au<br />

prophète. Il se nomme : AbJ el-Kader,<br />

Fils d'Abd Allah,<br />

de Salah,<br />

de Mouça ez Zahed,<br />

de Mohammed,<br />


Fils de El-Djoud,<br />

de Mohammed,<br />

d'Abd Allah,<br />

de Mohammed,<br />

d'Abd Allah el-Kâmel,<br />

d'El-Haçan el-Moulhin,<br />

d'El-Haçan ch-Beçal',<br />

d'El-Haçan,<br />

— — 43<br />

et de la dame glorieuse, chaste et pure, Falima, fille<br />

de l'envoyé de Dieu, —<br />

grâces et lui accorde le salut !<br />

Après sa mort,<br />

ses bénédictions, Amen ! —<br />

liste de ses successeurs :<br />

Le premier fut : Abd er-Rezzak,<br />

Auquel succéda Abd el-Ouahhab,<br />

Sid Abd er-Rahman,<br />

Sid Mohammed,<br />

Sid Salah,<br />

Sid Ali,<br />

Sid Djâfer,<br />

Sid El-Haçan,<br />

Sid Djemal ed-Din,<br />

Sid Mohammed,<br />

Abd es-Somd,<br />

Sid Aïça,<br />

Abd el-Flah',<br />

Ce dernier Laissa Ifois filles,<br />

1° Madame Hfcmma, à Bag'dad ;<br />

2° Madame Salh'a, en Syrie ;<br />

que Dieu répande sur lui ses<br />

— que Dieu nous fasse profiler de<br />

voici, d'après Ibn Frah, la<br />

qui sont :<br />

Et 3° Madame El-T'ahâra, connue à Tlemcen.


— — 44<br />

C'est d'elles que descendent tous les chérif établis dans<br />

les différentes localités.<br />

Nous avons, abrégé la chaîne (selsela) ci-dessus, qui<br />

nous eut entraînés trop loin, en la donnant en entier.<br />

Salut !<br />

Écrit à la date des dix derniers jours de Redjeb de<br />

l'année 1269, (du 29 avril au 9 mai 1853).<br />

(Empreintes de deux cachets mesurant,<br />

l'un 23 milli<br />

mètres de diamètre, el l'autre 15 millimètres ; lous deux<br />

entièrement illisibles).<br />

DIPLOME DE MOK'ADDEM,<br />

CONFÉKÉ AU FIIÈRE<br />

EL-IUDJ AHMED BEN MOHAMMED BEN BEL-KHEÏU.<br />

Louange au Dieu unique ! etc.<br />

(Empreinte effaqâe d'un cachet).<br />

Louange à Dieu r<br />

Nous sommes guidés vers la voie droite, el, certes, nous<br />

ne serions pas dans le droit chemin, si Dieu ne nous y<br />

avait dirigés,<br />

car les envoyés de Notre Seignenr nous ont<br />

apporté la vérité et nous ont dit : « Vous hériterez du<br />

paradis,<br />

selon ce que vous aurez fait sur la terre.<br />

« 0! mon Dieu,<br />

place-nous au nombre de ceux qui se<br />

ront sauvés ! Dirige-nous vers l'abreuvoir du prophèle,<br />

et, de là, au paradis !


»0! mon Dieu, dirige-nous vers le bien ella voie droite! »<br />

Nous accordons à El-Hadj Ahmed ben Mohammed bon<br />

bel-Kheïr, la faveur entière; nous lui conférons le di<br />

plôme authentique, complet, général, conformément à la<br />

règle du cheïkh Abd el-Kader.<br />

Nous l'élevons au rang de Mok'addem, de telle sorte<br />

qu'aucune main ne sera au-dessus de la sienne parmi les<br />

Mok'addem.<br />

Il conférera Youerd, donnera le titre de na'ib (vicaire)<br />

â qui lui en fera la demande,<br />

cevoir cet honneur.<br />

Les frères devront avoir confiance en lui,<br />

avons eu, nous-même, confiance ;<br />

et s'il le juge digne de re<br />

comme nous<br />

et quiconque parmi les<br />

frères lui obéira, obéira au cheïkh Abd el-Kader ; mais<br />

quiconque lui désobéira,<br />

se rendra criminel.<br />

Il (El-Hadj Ahmed) se servira de ce pouvoir exécutoire<br />

comme il le, voudra, dans l'intérêt de la vérité, de la loi,<br />

et de la secte.<br />

Il ne fera pas de distinction entre les frères,<br />

vront tous être sur le même rang.<br />

S'il est d'un avis contraire aux frères,<br />

vront pas le contredire.<br />

qui de<br />

ceux-ci ne de<br />

Lorsque les frères auront résolu une entreprise, il<br />

faudra absolument qu'ils prennent son avis, et quiconque<br />

parmi les frères lui désobéira dans ce qu'il aura dit pour<br />

Je bien,<br />

ne sera plus des nôtres.<br />

O! frères, vous écoulerez sa parole,<br />

et aucun de vous<br />

ne devra mettre opposition aux droits que lui confère<br />

son diplôme, lequel devra être lu publiquement,<br />

du festin,<br />

Mok'addem susdit !<br />

le jour<br />

afin de rehausser et de répandre la gloire du


— - 40<br />

O! enfants de la grâce, il faut absolument que vous<br />

obéissiez à notre Mok'addem El-IIarlj Ahmed ,<br />

et que nu'<br />

de vous ne lui fasse obstacle dans l'accomplissement de la<br />

bonne œuvre, car il a élé nommé par le Sid Mohammed<br />

Efendi, descendant des saints, le cheïkh Abd el-Kader><br />

— que Dieu nous fasse profiter, ainsi que vous, des fa<br />

veurs, dont il est entouré, Amen ! ô ! maître "de l'univers !<br />

Salut !<br />

Écrit dans les dix derniers jours du mois de Dieu, re-<br />

djeb,<br />

année 1269 (du 29 avril au 9 mai 1853).<br />

(Empreinte d'un cachet sur lequel on lit : El-Hadj,<br />

plus bas : Sid, ou peut-être Efendi,<br />

et au-dessous : Mo<br />

hammed ; ce qui donne: Sid El-Hadj Mohammed,<br />

Hadj<br />

Mohammed Efendi).<br />

ou El-<br />

Pour conférer l'alliance du cheïkh Abd el-Kader, vous<br />

prendrez la main du néophyle,<br />

verset: « Je cherche, auprès de Dieu,<br />

Satan le lapidé (Coran). »<br />

Puis,<br />

et vous lui réciterez ce<br />

un refuge contre<br />

vous lui ferez prononcer ce serment : « Je m'en<br />

gage envers Dieu, el je le prends à témoin,<br />

que je ne<br />

me délournerai ni ne me retirerai de la règle du cheïkh<br />

Abd el-Kader ! » — Celte<br />

phrase sera répétée trois fois.<br />

Vous lui direz ensuite, par trois fois : « Acceptez-vous,<br />

acceptez-vous ? t<br />

Il vous répondra : « J'accepte. »<br />

Vous lui conférerez alors l'ouerd selon la règle.<br />

Salut !<br />

(Suit une prière.)<br />

Ici s'arrête le manuscrit dont nous venons de donner<br />

un aperçu. Les différents points, tant de dogme que de


- 47<br />

—<br />

rite, sur lesquels s'appuie la confrérie, y<br />

vement traités,<br />

l'ordre de Sidi Abd el-Kader.<br />

sont successi<br />

et en font une véritable monographie de<br />

Le lecteur pourra donc y prendre une idée assez pré<br />

cise de l'esprit et du but de cette secte, et comprendre<br />

quelle influence pernicieuse de telles associations peuvent<br />

avoir,<br />

dans le milieu de fanatisme et d'ignorance où elles<br />

exercent leur action.


y^c* 'ct£3


CONSTANTINE AU XVIe SIÈCLE<br />

ÉLÉVATION DE LA FAMILLE EL-FEGGOUN<br />

Par Ernest MERCIER<br />

I.<br />

Au commencement du xvie siècle de notre ère, Cons<br />

tantine, dont les dynasties hafside,<br />

zeyanite et méri-<br />

nide (1) s'étaient, pendant de longues années, disputé la<br />

possession, vivait dans une sorte d'indépendance, ou<br />

d'autonomie,<br />

sous la suzeraineté des sultans hafsides de<br />

Tunis, qui lui envoyaient des gouverneurs, et sous la domi<br />

nation plus réelle des tribus arabes du Sud. Ces étrangers<br />

avaient profité de l'affaiblissement des trois empires ber<br />

bères, auxquels ils offraient tour à tour leurs bras, dans<br />

leurs guerres incessantes, pour se faire accorder des<br />

concessions (Iktâ) et dés villes où ils ne s'étaient fixés<br />

qu'à demi, forcés'qu'ils étaient de conserver la vie no<br />

made; puis, des faveurs telles que le droit de percevoir<br />

les impôts au nom du prince, et, enfin, des dons en<br />

(t) Régnant : la première à Tunis, la seconde à Tlemcen et h troisième<br />

à Fès.


_ 4<br />

—<br />

argent et en nature qu'ils venaient chercher dans les<br />

villes du Tel (1).<br />

Nous voyons, dans Ibn-Khaldoun, que les Daouaouida,<br />

tribu rïahide (2) établie dans le Zab et le Hodna, tou<br />

chaient, vers 1385, à Constantine,<br />

« une somme fixe à<br />

litre de don et cela en sus des concessions qu'ils tenaient<br />

du sultan, et qui consistaient en villes et territoires situés<br />

les uns dans le Tel, les autres dans le Zab (3). » Et si,<br />

par hasard, il prenait fantaisie au gouverneur de leur<br />

refuser leur don, les Arabes,<br />

oubliant les haines particu<br />

lières qui les divisaient en temps de paix,<br />

masse s'établir .à<br />

sac la province. « On pillait,<br />

l'entrée<br />

du Tel et, de là,<br />

venaient en<br />

mettaient à<br />

on dévastait les moissons el<br />

on revenait les mains pleines, les montures chargées de<br />

butin (4). »<br />

Ce fut ainsi que s'établit cette situation anormale d'un<br />

^peuple étranger<br />

et usurpateur, imposant son autorité à la<br />

nalion aborigène dix fois plus nombreuse; ce fut ainsi<br />

qu'une poignée de brigands arabes, vivant sur les confins<br />

du Désert, établit sa prépondérance dans la grande ville<br />

berbère de Conjlantine, à plus de soixante lieues au nord<br />

de ses cantonnements. Ces Arabes étaient de véritables<br />

pirates de terre, tenant le pays par la terreur et jouant,<br />

dans l'intérieur, le même rôle que les corsaires d'Alger^<br />

de Tunis ou de Tétouan sur la Méditerranée. Ce sont les<br />

(I) Ibn-Khaldoun, flist. des Berbères, 1 1 ad . de<br />

117. 150, etc., el T. m. p. 31, etc.<br />

Slane, T. i, p. 90, 103,<br />

t_) Les llïali formaient une des tribus Italiennes qui envahirent l'Afri<br />

que septentrionale en 1049 de notre ère.<br />

(3) T. m, page IU et suiv.<br />

(i) Ibn-Khaldoun, T. m, p. 115.


— — 5<br />

Turcs qui ont mis fin à cette situation, et c'est un fait qui,<br />

croyons-nous, n'a encore élé relevé par aucun historien ;<br />

cependant il doit être porté à leur actif.<br />

Pendant le xv6<br />

siècle, cet état,<br />

si bien caractérisé par<br />

Ibn-Khaldoun à la fin du siècle précédent, ne fit que<br />

s'aggraver. Les Arabes de la Tunisie (1), qui, depuis<br />

longtemps, tenaient celte province dans la plus grande<br />

anarchie (_), pénétrèrent sur le territoire de Constantine,<br />

el,<br />

unis aux nouvelles tribus aborigènes qui avaient pri^<br />

les mœurs et la langue des Arabes,<br />

cha, Harakta, etc.,<br />

telles que les Hanen<br />

ou même aux tribus hilaliennes de<br />

la famille de Athbedj, telles que les Dréïd, Karfa (ou<br />

Garfa), etc.,<br />

étendirent leurs ravages sur le pays. C'est<br />

alors que les Oulad-Soula [Sj commencèrent à exercer<br />

leur autorité sur Constantine, en concurrence avec les<br />

Daouaouida du Zab et du Hodna; selon que les péri<br />

péties de la guerre ou les intrigues des chefs accordaient<br />

la suprématie aux uns ou aux autres,<br />

la vieille cité ber<br />

bère subissait la tyrannie des Arabes du Sud-Est ou dW,<br />

ceux du Sud-Ouest.<br />

Au commencement du xvte<br />

siècle, une famille religieuse<br />

venue du sud du Maroc, de Saguiet-el-flamra, dans le<br />

pays de Derâa,<br />

occupait à Constantine une position in<br />

fluente. Le pays de Derâa a été une véritable pépinière de<br />

marabouts qui,<br />

sans doute dans le cours du xve<br />

siècle, a<br />

(1) Tribu des Soléïm.<br />

(2) El-Kaïrouani, Histoire de l'IfrUâa, trad. Pélissier el de Ilemiisat,<br />

442. Cet auteur donne le nom de guerre sainte<br />

p. 264, 273, 39-, 393,<br />

(Djrhad)<br />

aux expéditions entreprises contre les Arabes de la Tunisie.<br />

(3) Fraction de la iribu arabe de î-oleïm. Un petil groupe, perdu dans lo<br />

Sahara, représente, de nos jours, le dernier reste des Oulad-Soula, naguère<br />

si puissants.


couvert la Berbérie de missionnaires dont l'action a été<br />

grande au point de vue religieux et même ethnographi<br />

que; car ces saints personnages, accueillis d'abord, quel<br />

quefois à peiné tolérés au milieu des populations berbères<br />

déjà en partie arabisées,<br />

ont formé le noyau d'agglomé<br />

rations d'éléments divers, devenues plus tard des tribus<br />

qui ont pris le nom du marabout fondateur. Ils ont ainsi<br />

contribué à modifier la physionomie de la population<br />

autochthône en lui donnant celle qu'elle a maintenant.<br />

Les blanches koubbas (dômes), semées partout, en Algérie,<br />

sont les tombeaux de ces missionnaires.<br />

Mais fermons cette parenthèse et revenons à Constan<br />

tine. Si l'action prépondérante exercée dans les campagnes<br />

par les marabouts de l'Ouest s'explique par la supériorité<br />

de leur culture<br />

intellectuelle,'<br />

il est bien surprenant que<br />

des étrangers soient parvenus à se faire accepter, d'abord<br />

par la population d'une des plus vieilles villes berbères,<br />

et ensuite à la dominer. La famille qui a su obtenir ce<br />

résultat est celle des Oulad Abd-el-Moumen, qui subsiste<br />

encore et a des représentants à Constantine (1), où elle<br />

possède une mosquée vénérée qui a donné son nom à<br />

une partie du quartier de Bab-el-Djabia (_), à Biskra et<br />

à Saguiet-el-Hamra. Elle était soutenue par les tribus<br />

arabes et notamment par les Oulad-Soula. A une époque<br />

qu'il est assez difficile de préciser, mais que l'on ne peut<br />

faire remonter au delà du xive<br />

siècle, elle avait reçu,<br />

(1) Le chef de la famille, Sidi-Abd-el-Malek, âgé acluellement d'environ<br />

quatre-vingis ans. est père d'un grand nombre de fils dont les aînés sont<br />

déjà presque des vieillards. Il vit depuis longtemps dans une retraite<br />

absolue.<br />

(2) Dans le carrefour au-dessus de la rue des Tanneurs.


— — 7<br />

probablement des sullans hafsides de Tunis, le titre de<br />

Chéikh-el-Islam ou chef de la religion islamique, vicaire<br />

de l'Imam dans le Mag'reb;<br />

outre Emir-er-Relceb,<br />

pèlerins de l'Ouest,<br />

et les lieux saints.<br />

un de ses membres était en<br />

ou conducteur de la caravane des<br />

allant chaque année visiter La Mekke<br />

C'était une mission importante que celle de conduire<br />

les pèlerins en Orient. Le moment fixé pour le départ<br />

était annoncé longtemps à l'avance dans chaque localité;<br />

puis la caravane de l'Ouest arrivait à Constantine, où se<br />

trouvaient déjà réunis les voyageurs du pays; quand tout<br />

était prêt, on partait en grande pompe,<br />

bours, drapeaux déployés,<br />

en tête.<br />

au son des tam<br />

avec l'Emir-er-Rekeb ou Rokkas<br />

De grands privilèges étaient attachés à ces fondions, et<br />

l'on se rend facilement compte de l'influence qu'elles<br />

devaient donner à la famille qui en était titulaire, d'autant<br />

plus que le caractère religieux de sa charge la plaçait en<br />

dehors et au-dessus des luttes politiques, intestines et<br />

étrangères dont l'empire hafside était sans cesse le théâtre.<br />

Cetle situation devait lui attirer les faveurs de tous les<br />

partis,<br />

en la tenant à l'abri des revers de fortune aux<br />

quels chacun était alors grandement exposé dans la Ber-<br />

bérie.<br />

II.<br />

L'on sait comment un obscur corsaire, Baba-Aroudj,<br />

profitant de l'affaiblissement de la puissance berbère,<br />

s'empara, en 1516, d'Alger,<br />

ville sur laquelle les Zeya-<br />

nites de Tlemcen et les Hafsides de Tunis exerçaient des.


'8<br />

prétentions, et qui, par sa situation centrale, était mar<br />

quée pour devenir la capitale d'une partie du littoral<br />

africain de la Méditerranée. A ce moment, les attaques<br />

réitérées des Espagnols contre les Barbaresques, leurs<br />

conquêtes de Melila (14-96), de Mers-el-Kebir (1505),<br />

d'Oran (1509) et de Bougie (1510); leur établissement sur<br />

l'îlot du Pegnon, dans le port même d'Alger, indiquaient<br />

une intention bien arrêtée de conquérir la Berbérie.<br />

Bientôt, en effet, Tlemcen, Mostaganem, Tenès, Vêlez,<br />

puis Tunis, Bônev Djerba, Tripoli, tombaient devant les<br />

armes espagnoles, et, malgré l'échec mémorable de Charles-<br />

Quint devant Alger (1541),<br />

on pouvait s'attendre à voir<br />

le drapeau chrétien flotter avant peu sur toutes les villes<br />

du littoral barbaresque. Des circonstances de diverse na<br />

ture devaient empêcher cetle présomption de se réaliser;<br />

pendant trois siècles, la Méditerranée et son littoral allaient<br />

être en proie à la tyrannie des corsaires africains, et c'est<br />

à la France qu'il était réservé de mettre fin à celte into<br />

lérable situation.<br />

Après la mort du premier Barberousse (1518), son<br />

frère Kheïr-ed-Dine,<br />

qui avait en vain essayé de rétablir<br />

son autorité et o% se défendre par ses propres forces<br />

contre les Espagnols et contre les Indigènes, car il avait<br />

des ennemis à l'intérieur et à l'extérieur, Kheïr-ed-Dine,<br />

donl la position n'était plus lenable,<br />

offrit au Grand-<br />

Seigneur la souveraineté de la Berbérie, dans l'espoir<br />

d'en être nommé vice-roi et de recevoir des secours en<br />

hommes et en argent. Les Turcs s'empressèrent d'ac<br />

cepter un royaume dont l'acquisition leur coûtait si peu<br />

cher^ Bientôt Kheïr-ed-Dine reçut,<br />

des renforts au moyen desquels il sut tenir les Espagnols<br />

avec le titre de Pacha,


•9<br />

en échec, renverser définitivement la dynastie hafside,<br />

dont le trône avait élé relevé par les Chrétiens, et sou<br />

mettre les Indigènes. Avant la fin du siècle, les Espagnols<br />

étaient chassés de leurs conquêtes et ne conservaient<br />

qu'Oran et Vêlez sur le littoral africain.<br />

Telle fut l'origine de l'établissement de la suzeraineté<br />

turque sur l'Afrique. Peu de conquêtes furent aussi fac<br />

tices et eurent aussi peu d'attaches dans le pays conquis;<br />

il n'a rien moins fallu que l'état de désorganisation pro*<br />

fonde où se trouvait la Berbérie pour que l'autorité tur<br />

que, représentée par quelques milliers de janissaires,<br />

pût s'y établir d'abord et s'y maintenir ensuite pen<br />

dant trois cents ans. Les Turcs, il est vrai, employèrent<br />

comme procédé de gouvernement,<br />

rité exemplaire,<br />

des grandes familles indigènes,<br />

en outre d'une sévé<br />

une politique qui consistait à se servir<br />

à les opposer les unes<br />

aux autres, à profiter de leurs rivalités et à faire naître<br />

leurs conflits; du reste,<br />

d'administration,<br />

peu scrupuleux sur les détails<br />

laissant leurs créatures user et abuser<br />

des pouvoirs qu'elles tenaient d'eux et s'appliquant à pa<br />

raître ignorer ce qu'ils ne pouvaient empêcher.<br />

Selon M. Vayssettes (1),<br />

dont les arguments, en l'état<br />

de la question, paraissent probants, la puissance otto<br />

mane s'établit pour la première ibis à Constantine, vers<br />

l'an 1534,<br />

après la prise de Tunis par Kheïr-ed-Dine. Les<br />

documents précis manquent absolument sur cette période,<br />

mais tout donne à penser que,<br />

selon leur politique cons<br />

tante, ils essayèrent de s'appuyer sur la famille Ben-Abd-<br />

(I) Histoire des Beys de Constantine (Recueil des Mémoires de la Société<br />

archéologique de Constantine, 1867, p. 281 el suivantes;.


- 10<br />

—<br />

el-Moumen pour asseoir leur influence. La tradition en a<br />

conservé le souvenir et elle ajoute que ces marabouts,<br />

soit par excès de prudence,<br />

sympathie,<br />

soit par manque absolu de<br />

refusèrent de se faire les agents des usurpa<br />

teurs ou ne leur prêtèrent qu'un concours. apparent. Ils<br />

ne furent pas seuls à manifester cette attitude de résis<br />

tance,<br />

car nous voyons aussi le célèbre cheïkh Si-Amor-<br />

el-Ouezzane refuser les fonctions de Cadi dont le pacha<br />

Hassan-Aga lui offre l'investiture (I).<br />

Une autorité manquant tellement de racines devait être<br />

exposée à de fréquentes vicissitudes. En 1568, les habi<br />

tants de Constantine, oubliant leurs rivalités, s'unirent<br />

pour chasser la garnison turque et mettre à mort leur<br />

gouverneur. La répression ne se fit pas attendre; dans<br />

le cours de la même année, selon Marmol, le pacha Ali,<br />

renégat, surnommé El-Fortas (le chauve),<br />

s'étant porté<br />

avec des troupes nombreuses sur Constantine, Jofça la<br />

ville,<br />

châtia rigoureusement ses habitants çt'leur imposa<br />

une forte rançon. En 1572, nouvelle révolte, suivie d'une<br />

répression terrible. « Les maisons des particuliers furent<br />

livrées au pillage, les enfants furent impitoyablement mas<br />

sacrés et les habitau(| vajncus durent plier sous le joug<br />

de l'étranger (_). »<br />

Quelle fut, pendant ces mouvements, l'attitude de la<br />

famille Abd-el-Moumen? Selon la tradition,<br />

elle continua<br />

d'être hostille aux Turcs. M. Cherbonneau a raconté (3)<br />

les récits qu'il a recueillis à ce sujet et d'après lesquels<br />

(I) Voir, à ce sujet, sa curieuse lettre dans l'histoire de M. Vaisselles,<br />

p. 397 el suivantes.<br />

(2) Ibld.,<br />

p. 310.<br />

(3) Annuaire de la Société atchéologique de Constantine (1856-57).


- 11<br />

—<br />

Sidi-Abd-el-Noumen, qui s'était compromis en aidant les .<br />

Oulad-Soula dans leur résistance, fut attiré au camp des<br />

Turcs et mis à mort, comme un simple ennemi, en dépit<br />

de son caractère religieux. On dit même que son cadavre<br />

aurait été écorché et que i sa peau bourrée de paille<br />

aurait été envoyée à Alger en manière de trophée. »<br />

Quoi qu'il en soit de l'exactitude des détails transmis<br />

par ce souvenir populaire, et du degré de créance qu'il<br />

faut y attacher, il subsiste un fait positif, c'est l'hostilité<br />

de la famille Abd-el-Moumen contre l'établissement de<br />

l'autorité turque,<br />

et nous n'en voulons pas d'autre preuve<br />

que sa dépossession du titre de Cheïkh- el-Islam etd'Emir-<br />

er-Rekeb et l'élévation d'une famille rivale (1).<br />

111.<br />

Au commencement de ce même xvie<br />

siècle,<br />

vivait à<br />

Constantine une famille de jurisconsultes distingués, con<br />

nue sous le nom patronymique de famille des Oulad-el-<br />

Feggoun (2). D'après un auteur indigène estimé, mais<br />

non dépourvu de malice, Sidi-Abd-el-Kader-er-Rachedi,<br />

les Ben-et-Feggoun, qui se sont, plus tard, créé des généa<br />

logies les rattachant aux races nobles de l'Arabie, seraient<br />

simplement des Berbères, originaires de Feggouna? bour<br />

gade de l'Aourès, et se seraient appelés,<br />

dans le prin<br />

cipe, El-Feggouni, adjectif relatif de Feggouna; mais<br />

c'est là un point sans importance pour nous.<br />

(1) Après la mort du cheïkh Sidi-Abd-el-Malek, il sera peut-èlte possible<br />

d'obtenir quelques détails précis à<br />

conservé des documents de l'époque.<br />

cet égard, si toutefois la famille a<br />

(2) Vulgairement : Lefgoun,<br />

*<br />

f


- 12<br />

-<br />

Cette famille se trouvait-elle déjà en rivalité avec celle<br />

des Oulad-Abd-el-Noumen? C'est probable,<br />

car nous<br />

voyons, en 1535, Yahïa-el-Feggoun, chef de la famille,<br />

réfugié à Tunis,<br />

périr lors de la prise de cette ville par<br />

Charles-Quint : il fut mis à mort par. un soldat, dans une<br />

mosquée où il était en prières. Son fils Kassem, de retour<br />

à Constantine, fut Imam de la grande mosquée d'EI-<br />

Batha (I), puis cadi,<br />

mourut le 9 juillet 1558.<br />

tenant son investiture des Turcs. Il<br />

A quelle époque la dignité de Cheikh-el-Islam fut-elle<br />

conférée aux Ben-el-Feggoun? Nous ne pouvons le dire,<br />

car, dans les annales de cetle famille, le premier diplôme<br />

manque; on y<br />

trouve seulement que le premier Emir-er-<br />

Rekeb fut Sidi-Abd-el-Kerim, troisième fils de Sidi-Yahia.<br />

Cet Abd-el-Kerim est mort le 13 août 1580.<br />

D'autre part, nous savons qu'en 1563,<br />

un membre de<br />

la famille Abd-el-Moumen est mort avec le titre d'Emir-<br />

er-Rekeb (2). C'est donc entre ces deux dates qu'il faut<br />

placer l'élévation de la famille Ben-el-Feggoun. M. Vays-<br />

selles choisit celle de 1567 ou 1568; quant à nous, nous<br />

proposons de la placer en 1572, c'est-à-dire après la<br />

grande révolte, suivi! probablement de la mise à mort du<br />

chef de la famille Abd-el-Noumen, événement dont la tra<br />

dition à conservé le souvenir.<br />

Ce n'est pas sans motifs que M. Vayseltes préfère la<br />

date de 1567,<br />

et nous ne pouvons mieux faire que de<br />

donner ici le passage relatif à cette question : « La ville<br />

était divisée en deux sof ou partis. D'un côté, les Abd-el-<br />

(I) Actuellement la grande mosquée rue Nationale.<br />

|2) Histoire des Beys (Vaysseitesi, Ioc. c. p. 323.


13<br />

Moumen avec tous les habitants du quartier de Bab-el-<br />

Djabia, ou de la basse ville, représentant le parti de la<br />

résistance; de l'autre, les Ben Lefgoun avec les habitants<br />

de la haute ville, depuis le quartier d'El-Belaha,<br />

où est<br />

située la grande mosquée, jusqu'à la Kasba, représentant<br />

le parti nouveau. Lors de la révolte de 1567, dont les<br />

principaux instigateurs se trouvaient dans le camp des<br />

Abd-el-Moumen, le cheïkh Abd-el-Kerim, qui,<br />

occasion,<br />

en cette<br />

avait pris ouvertement fait et cause pour les<br />

Turcs, dut profiter de son séjour à Alger pour gagner<br />

entièrement les bonnes grâces du Pacha qui y comman<br />

dait. De retour à Constantine, il aida de tout son pouvoir<br />

à la restauration du gouvernement turc el rallia à lui<br />

tous les membres de la Djemaâ, alors au nombre de qua<br />

rante. Le titre de Cheïkh-el-Islam,<br />

retiré aux Abd-el-<br />

Moumen, qui venaient de succomber dans la lutte, lui<br />

fut donné en récompense de ses services (I). »<br />

Celte argumentation ne manque pas de valeur; mais, k<br />

ce qui nous fait pencher pour la date de 1572, c'est juste<br />

ment la proximité de cette nouvelle révolte et l'énergie<br />

des mesures de répression qui l'ont suivie. Le vainqueur<br />

a pu pardonner une première fois aux Abd-el-Moumen<br />

dans l'espoir de les rallier, mais, à coup sûr, après la<br />

seconde révolte, le châtiment a dû être inexorable.<br />

Ainsi donc, soit après la révolte de 1567,<br />

soit après<br />

celle de 1572, la famille El-Feggoun arrive au pouvoir dans<br />

la personne de son chef Sidi-Abd-el-Kerim, nommé par les<br />

Turcs Emir-er-Rekeb. Abd-el-Kerim meurt en 1580 (2),<br />

Ul Histoire des Beys,<br />

p. 327.<br />

(2) M. Cherbonneau a donné son épitaphe dans l'Annuaire de la Société,<br />

1856-57, p. 87.


— - u<br />

et, par diplôme délivré par le pacha Djafer, dans les<br />

derniers jours d'août 1581,<br />

son fils Abd-AUah-Mohammed<br />

le litre, —<br />

la<br />

— le remplace. « Il est nommé, dit à<br />

dignité d'Imam (prêtre) et de Khatib (prédicateur) de la<br />

grande mosquée, en remplacement de son père, décédé.<br />

Il y fera les cinq prières, prononcera la Khotba (sermon)<br />

et remplira toutes les fonctions occupées par son père<br />

En conséquence,<br />

nous lui donnons pleins pouvoirs pour<br />

l'administration des, biens de la mosquée il pour<br />

voies à ses dépenses et dirigera tous ses employés et nul<br />

ne pourra s'opposera ce qu'il aura jugé utile, ni les fonc<br />

tionnaires de ladite mosquée, ni les cadis,<br />

ni les repré<br />

sentants (de notre autorité), ni l'administration des hobous,<br />

ni personne autre ....<br />

»<br />

On le voit, les titres de Cheïkh-el-Islam el d'Emir-er-<br />

Rekeb ne sont pas encore prononcés. Ces fonctions dès<br />

lors appartiennent-elles de droit à l'Imam de la grande<br />

mosquée, comme les Ben-el-Feggoun le prétendent; c'est<br />

possible; peut-être aussi les Turcs tenaient-ils à s'assurer<br />

de la fidélité du titulaire tout en lui laissant quelque<br />

chose à désirer^lls la nomment Imam de la grande mos<br />

quée et le chargent de prononcer la Khotba ou prône du<br />

vendredi, dans laquelle les bénédictions divines sont appe<br />

lées sur le Prince des Croyants ou sur son représentant.<br />

C'est, en pays musulman, la plus haute fonction reli<br />

gieuse, et l'imam, dans ce cas, est bien le vicaire de<br />

l'Imam de La Mekke. Ce qui démontre l'importance de la<br />

position, c'est que le titulaire se trouve placé au-dessus<br />

du cadi représentant la loi et au-dessus du chef adminis<br />

tratif représentant le pouvoir temporel, le pacha.<br />

A partir de cette époque, tous les pachas qui se sont


15<br />

succédé à Alger ont, en prenant le pouvoir, envoyé au<br />

Cheïkh-el-Islam de Constantine,<br />

un diplôme de renouvel<br />

lement, et, au décès de chaque titulaire, un diplôme d'in<br />

vestiture à son successeur. Tous se sont plu à augmenter<br />

ses prérogatives et à créer ainsi une puissance qui, dans<br />

un pays oîj l'autorité était si éphémère,<br />

a traversé les<br />

siècles et a été trouvée par nous intacte. Malgré la pru<br />

dence qui a été de tradition chez les Oulad-el-Feggoun,<br />

celte famille s'est trouvée, dès lors, mêlée aux événements<br />

politiques,<br />

purement religieux.<br />

sans cependant se départir de son caractère<br />

Voici un aperçu des avantages accordés successivement<br />

au Cheïkh-el-Islam :<br />

Mission de conduire, comme Emir-er-Rekeb, la cara<br />

vane des pèlerins du Mag'reb,<br />

avec droits absolus sur<br />

loutes les personnes la composant et profits de toute<br />

sorte résultant de cette fonction.<br />

Administration sans contrôle des biens considérables de<br />

la grande mosquée d'El-Batha.<br />

Exemption d'impôts et de toutes charges pour leurs<br />

biens hobous et leurs propriétés urbaines et rurales :<br />

maisons, fours, bains, moulins, ateliers de tisserands,<br />

boutiques, jardins, etc.<br />

Exemption des charges, corvées, prestations, droits<br />

d'entrée et de sortie, fourniture de la nourriture et du<br />

logement aux troupes et aux fonctionnaires,<br />

tous avan<br />

tages dont profitaient aussi leurs domestiques, tenanciers,<br />

bergers, colons partiaires, khammès,<br />

religieux).<br />

Dons et apanages en immeubles, etc.<br />

khoddam (serviteurs


16<br />

Droit de décime sur les tapis et bois apportés de<br />

l'Aourès à Constantine.<br />

Droit de perception des redevances sur le marché aux<br />

fruits et légumes.<br />

Enfin, droit d'asile non-seulement dans leurs maisons,<br />

mais même dehors', toute personne sur laquelle le Cheïkh-<br />

el-Islam étendait le pan de son manteau devenant invio-<br />

ble,<br />

« eût-elle commis le plus grand crime. »<br />

Le Cheïkh-el-Islam avait en outre des prérogatives im<br />

portantes dans là pratique du<br />

Le dernier titulaire a élé Sid-M'hammed-el-Feggoun,<br />

trouvé par nous investi de cette fonction lors de la prise<br />

de Constantine,<br />

en 1837. Il a été traité par nous avec<br />

considération et est mort peu de temps après en laissant<br />

huit fils dont sept existent encore. Naturellement, il n'a<br />

pas été remplacé.<br />

Nous donnons, pour finir, le texte et la traduction de<br />

quelques-uns des diplômes accordés à la famille Ben-el-<br />

Feggoun.


- 17<br />

—<br />

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TRADUCTION. —<br />

Louange a dHu! (1).<br />

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Quiconque parmi les caïds et administrateurs et tout<br />

le monde, en particulier et en général, dans le pays de<br />

Constantine, —<br />

que<br />

Dieu dirige les actes de tous ! —<br />

notre présent ordre généreux, etc.,<br />

suit :<br />

verra<br />

soit averti de ce qui<br />

Nous renouvelons au Cheïkh, au savant, au pieux, à<br />

celui qui craint Dieu, etc., au pèlerin pieux, à l'expéri-<br />

(i\ Nous supprimons les formules surabondantes et inutiles qui encom<br />

brent le texte.


- 19<br />

—<br />

mente, à l'auteur d'ouvrages, etc.,<br />

suasif, Sidi-Abd-el-Kerim-el-Feggoun, —<br />

au prédicateur per<br />

que Dieu lui<br />

perpétue son assistance favorable et nous fasse profiter<br />

de ses grâces! — l'octroi<br />

de nos faveurs, conformément<br />

aux dispositions des diplômes dont il est possesseur.<br />

Et,<br />

attendu qu'il a déjà fait le voyage de la noble terre<br />

et a visité le tombeau du choisi (Mahomet), —<br />

soient la bénédiction et le salut! —<br />

demandé (dans ses prières) l'avis de Dieu, —<br />

sur<br />

lui<br />

après avoir à ce sujet<br />

qu'il soit<br />

glorifié! — et qu'il est disposé à suivre la voie tracée par<br />

l'Imam de la certitude, le Cheïkh des Cheïkh,<br />

connaissait que Dieu, le très-précis,<br />

celui qui ne<br />

celui dont les béné<br />

dictions se répandent dans toutes circonstances de mou<br />

vement et de repos, Sidi-Ahmed-Zerrouk (1); —<br />

nous fasse profiter de ses grâces! —<br />

etc.<br />

que<br />

Dieu<br />

L'autorisons a faire retentir les timballes, à emmener<br />

les Musulmans comme cela se faisait et à être le courrier<br />

(Rokkas) du Prophète;<br />

salut !<br />

sur lui soient la bénédiction et le<br />

Personne ne lui suscitera d'empêchement,<br />

d'opposition et ne le repoussera,<br />

de cetle mission, etc.<br />

ne lui fera<br />

car c'est le plus digne<br />

Nous lui recommandons de. bien exécuter le mandat<br />

qui lui est confié et de bien accomplir les devoirs de la<br />

charge dont il est investi ; de suivre les errements établis<br />

et la voie consacrée;<br />

d'être bienveillant pour les com<br />

pagnons et ceux qui désirent se rendre à la maison anti<br />

que ; de conformer sa marche à la leur et de ne pas pro-<br />

(1) El-Faci-el-Berneci,<br />

grand chef religieux professant le soufisme et<br />

dont l'influence s'étendait au xv« sièqfe sur toute la Berbérie. Il amenait<br />

la caravane de l'Ouesl el était reçu che_ les BeiirAbd-el-Moumen.


20<br />

léger les uns à l'exclusion des autres, etc.<br />

Par cet acte,<br />

nous avons en vue la face du Dieu admi<br />

rable et l'espoir de sa récompense abondante, t Car<br />

Dieu. . . ele, »<br />

Ecrit par l'ordre du serviteur de Dieu, de celui qui<br />

combat dans sa voie, Abou-el-Hacen-Ali-Pacha; —<br />

Dieu l'assiste!<br />

que<br />

A la date du premier tiers de Ramadan, le magnifique<br />

de l'année 104-8 (du 5 au 15 janvier 1639).<br />

(En tête figure un cachet où on lit) : Le plus faible des<br />

serviteurs de Dieu, Ali.<br />

Ce diplôme mérite d'attirer l'attention; il en résulte en<br />

effet que des désordres s'étaient produits dans la con<br />

duite des pèlerins, puisque le pacha énonce, comme con<br />

sidérant de sa décision,<br />

que Sid-Abd-el-Kerim se dépose<br />

à reprendre les errements établis par Sidi-Ahmed-Zer-<br />

rouk, décédé depuis un siècle environ ; et cependant, les<br />

Oulad-el-Feggoun étaient en possession du titre d'Emir-er-<br />

Rekeb depuis près de 80 ans. On remarquera aussi les<br />

prescriptions charitables el égalitaires imposées à l'Emir.<br />

Le voyage en Ori^pt était alors une grande entreprise qui<br />

créait des liens d'égalité étroite entre ceux qui en par<br />

tageaient les fatigues et les dangers.<br />

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Louange a Dieu ! etc.<br />

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II.<br />

Quiconque parmi les Caïds, etc.,<br />

ordre généreux, etc., soit averti :<br />

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Lywl ^J te J Lo_<br />

verra notre présent


- 23<br />

—<br />

Que nous avons octroyé nos faveurs au porteur du pré<br />

sent, le très-magnifique, le légiste, etc., Abou-Abd-Allah-<br />

Mohammed, fils du feu Cheïkh,<br />

Sidi-Abd-el-Kerim-el-Feggoun ;<br />

profiter de ses grâces! etc.,<br />

— en<br />

— que<br />

source de bénédictions<br />

Dieu nous fasse<br />

lui renouvelant les<br />

avantages résultant des ordres dont il est porteur et qui<br />

sont émanés de nos frères les pachas qui nous ont pré<br />

cédé.<br />

En conséquence, il tiendra la place de son père, le<br />

défunt susdit, comme imam agréé de tous, homme revêtu<br />

de la confiance générale et prédicateur à la grande mos<br />

quée.<br />

Il y prononcera, pour le public, les cinq prières, exac<br />

tement, régulièrement et obligatoirement, aux heures<br />

consacrées.<br />

Il y fera la Khotba les vendredi et jours de fête.<br />

La direction de tous les biens hobous de ladite mos<br />

quée,<br />

se trouvant tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de la<br />

ville, lui appartiendra; il en appliquera les revenus à<br />

pourvoir aux besoins de la mosquée,<br />

c'est-à-dire à l'achat<br />

de l'huile, des appareils d'éclairage et des nattes, au<br />

paiement du salaire des Mouedden (crieurs), Hezzab (réci-<br />

tateurs du Koran), balayeurs,<br />

gens chargés de l'éclairage<br />

et de l'approvisionnement de l'eau; il exécutera tout ce<br />

qui sera nécessaire comme constructions,<br />

démolitions et<br />

réparations et profitera de ce qui lui restera comme excé<br />

dant, selon l'usage suivi précédemment, l'habitude con<br />

sacrée et les errements établis par son père susdit et les<br />

imam ses prédécesseurs,<br />

et conformément encore à l'usage<br />

suivi par les imam d"<br />

Alger, la ville bien gardée par Dieu.


__ _ 24<br />

Il sera traité avec respect et vénération, etc., et l'on<br />

n'agira pas vis-à-vis de lui de la même manière que vis-<br />

à-vis d'une personne ordinaire.<br />

De même, tous les serviteurs de ladite mosquée, tous<br />

ses khammès et ses associés jouiront du respect qui l'en<br />

vironne, conformément à l'usage, etc.<br />

Cet octroi de faveurs est complet; c'est un renouvelle<br />

ment béni, etc.<br />

Ecrit par l'ordre du serviteur de Dieu,<br />

celui qui com<br />

bat dans la voie du très-haut, le très-glorieux Abou-es-<br />

Sedek, notre maître Ismaïl-Pacha ;<br />

—- que Dieu l'assiste!<br />

A la date du second tiers de Safar le bon de l'année<br />

1074 (du 13 au 23 septembre 1663).<br />

(En tête se trouve un cachet portant) : Ismaïl-ben-<br />

Khelil.<br />

... VyOi Liy! Xe. **<br />

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Louange a Dieu! etc.<br />

III.<br />

Quiconque parmi les Caïds, etc., et les personnes revê<br />

tues de fonctions en la ville de Constantine, verra notre<br />

présent ordre généreux, etc., soit averti de ce qui suit :<br />

Le légiste, le très-glorieux Emir-er-Rekeb des Musul<br />

mans, courrier du prophète du maître de l'Univers, Sidi-<br />

Abd-el-Kerim-el-Feggoun, étant venu vers nous, nous a<br />

présenté un écrit émané des très-magnifiques, très-estimés<br />

Farhate-bey et Redjeb-bey (1), établissant qu'ils lui ont<br />

(1) Ont tous deux représenté l'autorité turque à Constantine : le premier,<br />

de 1047 à 1653, et le second, oncle du précédent, probablement après<br />

celui-ci, ou peut-être concurremment avec lui.


26<br />

concédé le produit des droits sur le marché des fruits et<br />

des légumes.<br />

En conséquence, tout son périmètre sera entre les<br />

mains du Seigneur susmentionné qui en disposera pour<br />

les besoins de la mosquée.... (lacune) en huile, appa<br />

reils d'éclairage, nattes, etc., et pour les réparations, sans<br />

que personne puisse lui faire d'opposition à cet égard, etc.<br />

Ecrit par l'ordre du serviteur de Dieu, combattant dans<br />

la voie de notre maître, Abouel-Felah-Mourad-Pacha, —<br />

que Dieu l'assiste!<br />

A la date du premier tiers de Chaoual de l'année 1060<br />

(7-17 août 1650).<br />

En tête figure un cachet où on lit : Le plus humble des<br />

esclaves : Mourad.<br />

Ce diplôme, fort abîmé,<br />

plusieurs lacunes;<br />

1<br />

est difficile à lire et présente<br />

il est d'ailleurs mal rédigé et incorrect.<br />

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Louange a Dieu ! etc.<br />

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IV<br />

A___. ,<br />

Quiconque, parmi les Caïds, etc.,<br />

verra notre présent<br />

écrit délivré en vertu des ordres de notre maître le Pacha,<br />

— que Dieu lui accorde la victoire ! —<br />

qui suit :<br />

soit<br />

averti de ce<br />

Le porteur du présent, le très-magnifique, le légiste, etc.,<br />

Emir-er-Rekeb des Musulmans, Rokkas du prophète du<br />

maître de l'Univers, le seigneur maître, l'appui le plus<br />

haut, le pèlerin pur, la source de bénédictions, le cheïkh<br />

Mohammed, fils du défunt Sid-El-Hadj-Abd-el-Kerim-el-<br />

Feggoun, etc., est investi par nous, en renouvellement, du<br />

litre d'émir agréé, d'homme de confiance incorruptible<br />

et d'Amin pieux pour la conduite de la caravane des Mu<br />

sulmans et de Rokkas du prophète du maître de l'Univers.<br />

11 s'occupera de leurs affaires et veillera à tous leurs<br />

intérêts et à ce qui pourra leur être profitable.<br />

En conséquence, tous les Musulmans composant la cara<br />

vane et se dirigeant avec lui vers le séjour de toute no<br />

blesse (La Mekke),<br />

— sur<br />

son maître soient la plus géné<br />

reuse des prières et le plus pur des saluts! — seront


sous sa direction,<br />

sance.<br />

30<br />

sous ses ordres el soumis à son obéis<br />

Personne ne pourra contrevenir à ses prescriptions, ni<br />

enfreindre ses défenses : ses paroles devront être écoutées<br />

par eux et ses décisions seront exécutoires pour ceux<br />

auxquelles elles s'appliqueront.<br />

Il suivra à cet égard la voie tracée par son père, le<br />

défunt susdit, et les errements établis dans le passé par<br />

les très-glorieux seigneurs, les purs, très-glorieux,<br />

très-<br />

pieux Emir-er-Rekeb des Musulmans qui l'ont précédé, et<br />

cela pour l'exécution des charges imposées à son profit<br />

et la perception de ses bénéfices, en observant à cet égard<br />

l'usage consacré et en suivant la voie pratiquée et suivie.<br />

L'autorisons, en conséquence (1), lorsqu'il se disposera<br />

à partir pour visiter le tombeau du choisi, du porteur de<br />

bonne nouvelle,<br />

à inviter les gens à se rendre en pèleri<br />

nage et, à cet effet, à faire retentir les timballes pour<br />

■avertir ceux qui désirent aller accomplir l'obligation im<br />

posée (par la religion),<br />

nobles.<br />

en se rendant aux lieux élevés et<br />

Aucune opposition ne lui sera faite à ce sujet, car c'est<br />

lui le plus digne d'en être chargé, étant de ceux auxquels<br />

appartient cetle mission,<br />

et élant à même de l'accomplir.<br />

Le Prophète a dit : « Ne donnez pas le pouvoir à ceux<br />

« qui ne sont pas dignes de le recevoir, car vous lui<br />

« feriez tort; et n'en privez pas ceux qui en sont dignes,<br />

« car vous leur feriez tort (2). »<br />

(1) Il doit y avoir ici une erreur dans le lexle arabe, l'écrivain ayant<br />

écrit v<br />

/.~~_-J<br />

au lieu de O^s^<br />

(2) Hadilb ou recueil de traditions sur le Prophète.


— — 31<br />

Ce qu'il aura décidé sera exécutoire. Il lui est recom<br />

mandé de suivre la voie de ceux qui servent de modèle<br />

et ont atteint leur but; d'être bienveillant pour les com<br />

pagnons; de traiter avec douceur ceux qui font le voyage<br />

vers la maison antique; de conformer sa marche à la leur;<br />

de ne pas. rapprocher de lui les uns à l'exclusion des<br />

autres, etc.<br />

Par cet acte, etc.<br />

Il (le titulaire) sera traité avec respect, vénération, hon<br />

neur, considération et protection pour sa personne, de<br />

telle sorte que les honneurs dont il jouit ne pourront<br />

être réduits et que sa grandeur ne pourra être diminuée.<br />

De même, tous ses serviteurs, gens de sa maison,<br />

khammès, colons partiaires, seront traités avec un respect<br />

abondant.<br />

Tout ce qui viendra chez lui,<br />

en passant par la porte<br />

de la ville susdite ou ce qui sortira de chez lui, sera<br />

exempt de tout contrôle de la part -du Caïd-el-Bab (per<br />

cepteur des droits)*<br />

On ne pourra en rien réduire les honneurs dont il jouit;<br />

personne ne pourra lui faire subir d'injure ni de vexation.<br />

En tout cela, on se conformera à l'usage établi pour<br />

lui et aux errements suivis vis-à-vis de ses ancêtres, sans<br />

que personne puisse lui faire d'opposition.<br />

Ce renouvellement est complet, etc.<br />

Ecrit par l'ordre du très-mâgnifique Moustafa, agha<br />

(général)<br />

de l'armée victorieuse par l'appui de Dieu.<br />

A la date du dernier tiers de Ramadan de l'année 1075<br />

(6-16 avril 1665;.<br />

(Au dos se trouve un cachet portant ce qui suit) : Celui<br />

qui recherche la grâce, Moustafa-ben-Khelil.


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36<br />

Quiconque parmi les beys, les très-doctes oulama, les<br />

aghas, les khalifas et tous les personnages de race arabe<br />

ou appartenant à la milice (turque),<br />

fonctions dans le pays,<br />

verra le présent écrit,<br />

— que<br />

qui remplissent des<br />

Dieu les dirige tous! —<br />

soit averti :<br />

Que nous avons octroyé nos faveurs au savant, au très-<br />

glorieux, etc., au Cheïkh, au généreux<br />

Abou-Abd-Allah-<br />

Sid-Mahammed-Cheïkh, de la descendance du légiste, etc.,<br />

le défunt, le bienheureux Sid-Abd-el-Kerim-el-Feggoun, et<br />

que nous lui avons renouvelé les avantages établis par<br />

les ordres dont il est porteur et qui sont émanés de nos<br />

seigneurs les pachas et de nos frères les beys du temps<br />

passé.<br />

Ces diplômes relatent qu'il est Emir-er-Rekeb des pèle<br />

rins, Rokkas de l'auteur du Miaradj (ascension), notre<br />

seigneur Mohammed; —<br />

que<br />

Dieu., etc.<br />

il suit la trace laissée par ses pieux ascendants et est<br />

réputé comme pratiquant leur voie droite et éclatante.<br />

Il est juste dans sa manière d'être personnelle; ses<br />

actes sont dignes d'approbation; il porte les caractères<br />

de ceux qui sont 4ms la voie du salut; tout ce qui<br />

émane de lui mérite successivement la louange; il suit la<br />

Sonna (loi traditionnelle) de Mohammed;<br />

soient. . . etc.<br />

— sur<br />

son auteur<br />

11 ordonne de pratiquer le bien et est célébré pour sa<br />

générosité et sa douceur.<br />

Il fournit la nourriture; il sert de médiateur pacifique<br />

entre les gens; il est l'ami des gens de bien, de paix et<br />

d'équité; il est l'ennemi des gens vicieux et de désordre;<br />

ii offre sa personne en don au Dieu très-haut; il dépense<br />

sa fortune dans l'intérêt de ce qui est bien.


- 37<br />

-<br />

Il est donc obligatoire qu'il soit protégé avec les soins<br />

les plus assidus ; qu'il soit traité de la manière la plus<br />

extraordinaire;<br />

qu'il soit accueilli par tout le monde en<br />

particulier et en général, avec les signes du contentement<br />

et de la joie.<br />

Nous disons tout cela en raison de la tendresse que<br />

nous lui portons à cause de ce qui précède et parce qu'il<br />

est de la famille des nobles de race, des purs, des légistes,<br />

des bons, de ceux qui connaissent Dieu,<br />

qui se gardent<br />

des choses défendues par lui et qui craignent son châtiment.<br />

Or, la protection à accorder aux savants, aux oualis<br />

(saints), les honneurs dont on doit les entourer, sont<br />

d'obligation étroite pour tous les hommes, surtout lors<br />

qu'il est question de quelqu'un se rattachant par sa filia<br />

tion au Prophète ;<br />

sur lui . . . etc.<br />

Il est l'imam agréé, le prédicateur indiquant bien la<br />

voie et l'orateur- triomphant de la grande mosquée située<br />

à El-Batha (1), laquelle est célèbre par le nom de son<br />

aïeul ;<br />

— que Dieu lui fasse miséricorde !<br />

Il y prononce la prière les vendredis et jours de fête<br />

et est chargé de veiller à ce qu'elle soit dite aux heures<br />

consacrées.<br />

Il a l'administration de la mosquée susdite et de ses<br />

dépendances, et. notamment de la zaouia située à Ras-el-<br />

Kharrazine (2), ainsi que de tous ses biens hobous.<br />

Il doit veiller également à ce que le Hizb (section du<br />

Koran), dit de Ben-Hassein (3), soit récité,<br />

affectés à cette fondation étant entre ses mains.<br />

(t) La grande mosquée de la rue Nationale.<br />

(2) Actuellement la mosquée dite de Hamouda, rue Rouaud.<br />

tous les hobous<br />

(3) Il est sans doute question d'une tondation hobous établissant la réci<br />

tation d'un certain nombre de Hizb.


— — 38<br />

C'est lui qui perçoit les fruitsxles hobous constitués au<br />

profit de ce qui précède; c'est par ses soins que le mon<br />

tant est dépensé pour les besoins de la mosquée susdite<br />

et de la zaouia : il fait réparer ce qui a besoin de répa-<br />

tions; achète ce qui est nécessaire comme nattes, eau et<br />

huile pour les lampes; il solde le salaire des employés,<br />

des tolba qui récitent les Hizb, des surveillants et autres,<br />

conformément à l'usage et aux règlements établis.<br />

(Après avoir pourvu à ces dépenses), l'excédant est<br />

employé par lui dans son intérêt, à son profit et pour ses<br />

affaires,<br />

suivant en cela la règle consacrée par ses an<br />

cêtres très-généreux et ses pères défunts.<br />

cela.<br />

Personne, en dehors de lui,<br />

n'a le droit de s'occuper de<br />

U est recommandé en outre de le traiter avec respect,<br />

vénération, protection el générosité ; d'entourer, de même,<br />

sa maison du respect le plus complet et de protéger qui<br />

conque vient y chercher asile, car, depuis les temps les<br />

plus reculés, elle est inviolable;<br />

pour ceux qui fuient;<br />

c'est un lieu de refuge<br />

un abri pour ceux qui ont un sujet<br />

de craindre; un IieÉ sûr pour ceux qui implorent secours;<br />

un gîte pour les pauvres et les misérables, étrangers et<br />

voyageurs.<br />

Tous les gens qui viennent y chercher un refuge, ceux<br />

qui se trouvent dans ses parvis, ont droit à la paix, à la<br />

sécurité et aux bons traitements,<br />

eussent-ils commis la<br />

faute la plus grave : personne ne peut les en laire sortir,<br />

ni violer les droits sacrés de cette demeure,<br />

et cela con<br />

formément à l'usage anciennement établi et à la voie an<br />

térieurement et constamment observée.


De même,<br />

39<br />

nous avons donné des instructions pour la<br />

protection de tous ses khoddam, ses zaouia, tels que les<br />

Oulad-Djebara, les Beni-Ouftine et les Thouara et tous ses<br />

khammès, etc. Personne ne pourra leur faire subir de<br />

vexation ni d'avanie, etc.<br />

Les Beys ne pourront rien exiger de ses zaouïa, etc.<br />

Cet octroi de faveurs est complet. C'est un renouvelle<br />

ment béni, etc.<br />

Salut de la part de l'humble devant son Dieu,<br />

son ser<br />

viteur Ahmed-Bey;<br />

— que Dieu l'assiste par sa bonté!<br />

Donné dans le tiers de Moharrem, premier mois de<br />

l'année 1242 (24 août-4 septembre 1826).<br />

En marge est apposé le sceau de Sid-El-Hadj-Ahmed-<br />

bey-ben-Mohammed-bey,<br />

avec la date de 124-1 (1825-26).,<br />

Ce diplôme, émané d'El-Hadj-Ahmed, le bey auquel<br />

nous avons arraché Constantine, représente le type des<br />

derniers diplômes. On remarquera le très-curieux passage<br />

relatif au droit d'asile dont jouissait la maison des Ben-el-<br />

Feggoun « depuis les temps les plus reculés. »


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HISTORIQUE<br />

DES CONNAISSANCES DES ANCIENS<br />

SUR<br />

LA GEOGRAPHIE DE L'AFRIQUE SEPTENTRIONALE<br />

Résumé de leur système (t)<br />

Les premiers renseignements précis que les Grecs reçu<br />

rent sur l'Afrique septentrionale leur parvinrent par l'E<br />

gypte. Vers 660 avant J.-Ch., Psammétik Ier, ayant ouverl<br />

les ports de son empire aux Grecs d'Ionic, ceux-ci, pat<br />

leurs rapports avec les Phéniciens, apprirent qu'à l'occi<br />

dent de l'Egypte s'étendait, une vaste contrée appelée Li<br />

bye (Libué), du nom de ses habitants, les Louba (Lou-<br />

birn de la Bible),<br />

Nil (sans doute le Niger),<br />

nale, et, au-delà,<br />

ou Libues (identifiés aux Louata). Le<br />

en formait la limite méridio<br />

s'étendait l'Ethiopie ou pays des noirs.<br />

Antérieurement à cette époque, les Grecs ne possédaient<br />

que de vagues traditions sur ces contrées, traditions dont<br />

certains passages des chants d'Homère nous ont transmis<br />

l'écho.<br />

Ces premières notions se précisèrent par les rapports<br />

(l) Le bel ouvrage de M. Vivien de Saint-Martin a Le Nord de l'Afriqui<br />

dans » l'antiquité, nous a fourni la plus grande parlie des matériaux de<br />

cet article.


_ 4- —<br />

de plus en plus fréquents des Grecs avec l'Afrique, et,<br />

notamment,<br />

par la fondation de leur colonie do Kyrèno<br />

(vi° siècle avant J.-Ch.) ; mais ùïïA s'étendirent surtout<br />

au littoral de la mer Rouge et à la vallée du Nil. Enfin,<br />

Hérodote étant venu lui-même en Egypte, y recueillit des<br />

renseignements certains et les produisit dans ses ouvrages<br />

(vers 420 avant J.-Ch.).<br />

Les données précises d'Hérodote s'élendent, à l'Ouest,<br />

jusqu'au territoire de Karthage; au-delà, ses notions n'ont<br />

rien de défini. Pour lui,<br />

la Libye comprend « le territoire<br />

« situé entre l'Egypte et le promontoire de Soleïs (sans<br />

« doute le cap Cautin). Elle est habitée par les Libyens<br />

« et un grand nombre de peuplades libyques,<br />

et aussi<br />

« par des colonies grecques et phéniciennes établies sur<br />

« le littoral. Ce qui s'étend au-dessus de la côte (le Tel],<br />

« est rempli de bêtes féroces ; puis, après cette région<br />

« sauvage, ce n'est plus qu'un désert de sable, prodi-<br />

« gieusement aride et tout à fait désert. »<br />

Après avoir décrit assez minutieusement le littoral de<br />

la Kyrénaïque et des Syrtes, Hérodote s'arrête au lac<br />

Triton (le Chot-el-Djcrid). Il ne sait rien, ou du moins<br />

ne parle pas spéci^ement de Karthage, qui était alors<br />

dans toute sa puissance. « —<br />

Au-delà du lac Triton,<br />

« —<br />

dit-il, on rencontre des montagnes boisées, habitées<br />

« par des populations de cultivateurs nommés Maxyes.. »<br />

Enfin, il a entendu dire que, bien loin, dans la même<br />

direction, était une montagne fabuleuse appelée Atlas et<br />

dont les habitants se nommaient Atlantes (1).<br />

(1) Variante: Alarantes. On a comparé les noms d'Atlas et Ataranles, à<br />

VAdrar berbère (pi. Idraren}, qui signifie montagne et s'applique encore<br />

et spécialement à la chaîne du Grand-Atlas.


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v-t<br />

Parmi les principaux noms do peuplades cités par<br />

Hérodote,<br />

nous reproduirons :<br />

1° Les Adyrmakhides, demeurant aux environs de<br />

Kyrène ;<br />

^y w**/v*a_v. y ,Xt^ a '>■>*/. •<br />

2° Les Auskhises, au-dessous de Barka;<br />

3° Les Nasamons,<br />

sur le littoral de la Grande-Syrte et<br />

s'étendant jusqu'à l'oasis d'Audjelcs (Audjela) ;<br />

4° Les Psylles, voisins des précédents,<br />

Grande-Syrte .<br />

au fond de la<br />

(Renommés comme charmeurs de serpents;<br />

leur nom semble même une onomatopée destinée à rap<br />

peler le sifflement çlc cet animal; ;<br />

5» Les Garamantes, divisés en Garamantes du Nord, ,,<br />

habitant les montagnes au midi de Tripoli, et Garamantes Wjis,e<br />

du Sud, vtisins de l'oasis de Garama (Djerma, dans le^»*?<br />

Fezzan), dont ils ont pris le nom; """ry: «,<br />

6° Les Tj_ogl______vJ_3s,<br />

voisins des précédents (qui seront<br />

reportés, plus tard, beaucoup plus à l'Est). Ils parlaient ^.^<br />

un langage différent, vivaient dans des cavernes (1) et<br />

étaient renommés pour, leur légèreté à la course. Les<br />

Garamantes leur donnaient la chasse;<br />

7° Les Makcs, dans le territoire traversé par le Kinyps<br />

(Ouad-Souf-Djin) ;<br />

8J Les Lotophages, dans l'île Mcninx (Djerba)<br />

littoral voisin;<br />

9° Les Makhlyes,<br />

et sur le<br />

jusqu'au fleuve Triton (le débouché<br />

du lac du Djcrid, qui, alors, communiquait avec la mer);<br />

10° Les Auses, des deux côtés du lac Triton;<br />

11°, 1_° et 13° Les Maxyes, les Zaouckcs et les Ghy-<br />

.(I) Il est à remarquer que la tribu berbère des llïen (Ifiï signifie ca-Yi<br />

verne dans cette langue) sera placée dans les mêmes localités que les ''<br />

Troglodytes.<br />

"lH"*1"


— 6 —<br />

zantesv, au nord du lac Trilon et sur le littoral, vis-à-vis.<br />

les îles Ccrcina (Kcrkinna).<br />

Telles sont les principales notions laissées par Hérodote<br />

sur l'Afrique. Pendant longtemps,<br />

ces détails servirent<br />

aux auteurs anciens qui, tous, les reproduisirent (1).<br />

Vers l'époque où écrivait Hérodote, Karthage, —<br />

l'avons dit,<br />

nous<br />

— atteignait l'apogée de sa puissance. Elle<br />

étendait ses colonies au loin vers le couchant, et,<br />

ordre,<br />

par son<br />

l'amiral Hannon parlait avec une flotte de soixaate<br />

navires à rames,<br />

portant trente mille colons phéniciens<br />

et libyens, dans le but de reconnaître les côtes africaines<br />

de l'Océan et d'y<br />

fonder des établissements. L'amiral<br />

karlbaginois parvint, en suivant la côte, jusqu'à une vaste<br />

dépression, dont la pointe reçut le nom de Corne du Midi<br />

(le cap des Palmes, à l'extrémité du golfe de Guinée). En<br />

voyant cetie vaste mer qui s'étendait au levant, Hannon<br />

revint sur ses pas, « n'osant pas s'aventurer plus loin,<br />

« de crainte de manquer de vivres. » Ce voyage audacieux<br />

qui ne devait être renouvelé que deux mille ans plus tard<br />

(1462;, par les Portugais, donna aux Karthaginois une<br />

connaissance assez c^cte des côtes occidentales de l'A<br />

frique. Les concitoyens d'Hànnon en furent tellement<br />

frappés d'admiration, qu'ils décidèrent qu'une inscription,<br />

relatant les principaux faits du voyage, serait placée dans<br />

le temple de Karthage. Longtemps après, cette inscrip<br />

tion, qui était en langue punique, fut traduite par un<br />

(I) « Il faut remarquer,<br />

— dit<br />

M. Vivien de Saint-Martin,— que, chei<br />

lous les géograplies de l'époque romaine, on troffve, exactement repro<br />

duit, le fond dus notions d'Hérodote sur les peuples de la Libye, saut<br />

l'addilion de circonstances et de détails nouveaux que les rapports des<br />

Romains avec ces contrées fournissaient aux auteirrs. » P. '7, noie l.<br />

'


__ — 7<br />

voyageur étranger, dont le nom est demeuré inconnu.<br />

Elle nous est parvenue sous le nom de périple d'IIannon (1).<br />

Les découvertes importantes d'IIannon ne firent pas<br />

avancer les connaissances des Grecs et des Romains sur<br />

l'Afrique, puisque, ainsi que nous l'avons dit, l'ins<br />

cription de Karthage ne fut traduite que beaucoup plus<br />

lard.<br />

Les notions des Grecs se complétèrent cependant, dans<br />

le cours du ive siècle avant notre ère,<br />

par les voyages<br />

des navigateurs grecs, tant dans la mer Rouge que sur<br />

l'Océan. Parmi ces périples, le plus remarquable fut celui<br />

de Skylax, lequel s'avança sur les côtes occidentales<br />

d'Afrique jusqu'à une distance qui n'avait pas encore été<br />

atteinte par ses concitoyens.<br />

Peu de temps après, éclatèrent les guerres puniques<br />

qui se , terminèrent, en 146 avant J.-Ch.,<br />

par la chute<br />

de Karthage. Dès lors, le voile qui cachait aux Romains<br />

l'Afrique septentrionale fut déchiré. Aussitôt après avoir<br />

achevé sa conquête, Scipion Emilicn envoya Polybe vers<br />

l'Ouest pour reconnaître les établissements karthaginois.<br />

Ce voyageur, qui avait déjà exécuté, dans l'Est de la Mé<br />

diterranée, un voyage de circumnavigation, rapporta, de<br />

sa course sur l'Océan les notions les plus précises. Par<br />

malheur, toute cetle partie de son grand ouvrage manque,<br />

et. nous n'en connaissons que les extraits rapportés par<br />

Pline.<br />

(I) Au sujet de l'époque probable du voyage d'IIannon, nous ne pos<br />

sédons que celle phrase de Pline commentant le périple : « Hanno, Car-<br />

thaginensium dux, punicis rébus florentissimis,<br />

explotare ambitum Africœ<br />

jussus, ele. ; t ce qui induit a le placer entre l


— — 8<br />

Voici qu'elles furent, dès lors, les notions générales<br />

des Romains sur la géographie et l'ethnographie du pays<br />

auquel ils conservèrent le nom de Libye,<br />

en le restrei<br />

gnant toutefois aux parties orientale et méridionale.<br />

qae,<br />

A l'Est, sur le littoral méditerranéen,<br />

était la Cyrénaï-<br />

s'étendant de l'Egypte aux Syrtcs et occupée par les<br />

tribus dont Hérodote a donné les noms. *"<br />

Les Styles étaient habitées par des tribus nomades<br />

libyennes, et, notamment,<br />

comme pirates.<br />

Puis, venait le territoire de Karthage,<br />

par les Nasamons renommés<br />

comprenant la<br />

Tunisie actuelle et formant Y Afrique proprement dite. Ce<br />

nom parait avoir été trouvé par les fondateurs de la<br />

colonie phénicienne, s'appliquant,<br />

soit à la localité soit à<br />

la peuplade qui l'occupait et qui a dû disparaître.<br />

A l'Ouest de Karthage, jusqu'au fleuve de Molochalh<br />

(la Moulouia), était la Numidie,<br />

mides (1).<br />

ou territoire des Nu<br />

Au-delà de la Molochath, jusqu'à l'Océan, était la<br />

Maurusie ou Mauritanie, pays des Maures, nom qui leur<br />

avait élé donné par les Phéniciens, et qui parait avoir eu<br />

la signification d"ccidcnlaux ,(2). La Mauritanie était<br />

habitée par deux peuples principaux : les M^ssyli (Massy-<br />

(li Nous nous conformons, pour celle limite occcidcnlale de la Nu-<br />

mirlie, aux indicalions fournies par les auteurs du temps Cependant<br />

il parait résulter de l'étude comparée de la géographie .et de l'histoire<br />

antiques, que celte limite s'arrêtait au méridien de Bougie. Au-delà<br />

étaient les deux Mauritanies, comme plus lard les deux Mag'reb.<br />

12) En Hébreu et en Clialdéen, occident se dit Maa'rab; or, le Phéni<br />

cien parait avoir eu. la plus grande alfiniié avec le Clialdéen. De même,<br />

en arabe, le Maroc actuel est appelé Mag'reb _j ,i.j et les Marocains<br />

Mag'roba (occidentaux).


liens), à l'Est,<br />

s'<br />

— — 9<br />

avançant sans doute jusque vers le méri<br />

dien de Bougie (voir la note 1 de la page 24),<br />

sœsyli (Massœsyliens), à l'Ouest.<br />

et les Mas-<br />

Tels étaient les contrées et les peuples des régions<br />

littorales.<br />

Dans l'intérieur, les Romains connaissaient :<br />

Au sud des Syrtes, la Pltazame, habitée par les Gara<br />

mantes (le Fezzan actuel) ;<br />

Et, au sud de la Numidie et de la Mauritanie, la Gétulie,<br />

habitée par les Gétules nomades.<br />

Le Nil ou le Niger,<br />

car les auteurs anciens confondent<br />

sans cesse ces deux fleuves, supposant même, souvent,<br />

qu'ils n'en font qu'un, forme la limite méridionale du<br />

désert. Au-delà est YÉlhiopie, dont ils n'ont aucune<br />

notion précise et qu'ils croient baignée par l'Océan, bor<br />

nant l'Afrique en ligne directe de la Corne du Midi (la<br />

pointe du golfe de Guinée) au Cap<br />

mité du golfe d'Adcn).<br />

des Aromates (extré<br />

Après la conquête de Karthage, les rapports des Ro<br />

mains avec l'Afrique deviennent de plus en plus fréquents,<br />

et, bientôt, de nouvelles guerres portent leur domination<br />

à l'est et à l'ouest de la colonie phénicienne.<br />

La guerre de Jugurtha (111 à 106 avant J.-Ch.), étend,<br />

d'abord, l'influence romaine sur les contrées de l'in<br />

térieur et la Numidie. En 74, la Kyrénaique devient<br />

de la Grande République. En 46, la guerre de<br />

Juba l'ancien est suivie de la prise de possession de la<br />

Numidie. En 30,<br />

c'est l'Egypte entière qui tombe sous lo<br />

joug de Rome. A la mort de Bocchus, la parlie de la<br />

Mauritanie comprise entre Saldse (Bougie) et la Molo-


— — 10<br />

cliath est réduite en province romaine (vers l'an 25).<br />

Enfin, vers l'an 40 de J.-Ch., la prise de<br />

nitive de la Mauritanie occidentale (Tingilanc),<br />

possession défi<br />

l'Afrique septentrionale aux mains du Peuple-Roi.<br />

met toute<br />

Pendant cet espace de deux siècles qui sépare la chute<br />

de Karthage de la conquête de la Mauritanie, la géogra<br />

phie do l'Afrique se complète par de nouveaux documents.<br />

Salluste, qui fut le premier proconsul de la Numidie,<br />

écrit son histoire de la guerre de Jugurtha, où, au milieu<br />

de la surabondance de détails inutiles, se trouvent<br />

quelques renseignements à noter, comme représentant<br />

les traditions ayant cours dans le pays à celte époque.<br />

L'expédition de Cornclius-Balbus en Phazanic (19 avant<br />

J.-Ch.),<br />

apporte un grand nombre de noms de peuplades<br />

et de localités ayant figuré à son triomphe (1). Celle<br />

de Suetonius Paulinius (41 de J.-Ch.), fait connaître le<br />

Grand-Atlas et le cours du Ger, le Guir actuel (2;, en<br />

plein Sahara. Malheureusement,<br />

cette expédition ne nous est pas parvenue,<br />

la relation importante de<br />

et nous n'en<br />

connaissons que les extraits si caractéristiques donnés<br />

parpar<br />

Pline : « L'Atlas a une grande élévation (3) ; les<br />

« tics inférieures son^couvertes d'épaisses et profondes<br />

a forêts ; le sommet est revêtu, même en été, d'une<br />

« grande quantité de neige (4)... Il Suetonius; l'atteignit<br />

(I) Ces noms sont tellement altérés sous leur forme latine, que nous ne<br />

croyons pas devoir reproduire les synonymies pioposécs par M. Vi\ien<br />

de Saint-Martin.<br />

(_j Où une expédition a été conduite, il y a doux ans, par le général do<br />

Wimpfea.<br />

(3) Les sommets du Giawl-Ulas dépassent 3,500 inè; res.<br />

14) Voir la description de l'Atlas d'Ibu-Khaldoun (ï. Il, p 159), comme<br />

terme de comparaison.


- 11<br />

—<br />

« en dix marches, et, au-delà, il arriva â une rivière<br />

« appelée le Ger, à travers des solitudes couvertes d'une<br />

« poussière noire, d'où surgissent, çà et là, de? rochers<br />

« qui semblent noircis par le feu (1). Ces lieux sont<br />

« inhabitables, même en hiver,<br />

à cause do la grande<br />

« chaleur. Les gens qui vivent dans les forêts voisines<br />

« (de l'Atlas), remplies d'éléphants, de bêtes féroces et<br />

« de serpents, se nomment Canarii, parce que le chien<br />

« est leur nourriture (2),<br />

ainsi que la chair des bêtes<br />

« fauves, etc.. »<br />

Ces rapports militaires sont complétés par les études<br />

de savants écrivains grecs et latins. Strahon, vers l'an 25<br />

de Jésus-Christ, donne une description générale de l'Afri<br />

que qu'il nomme Libye. Il prend, comme toujours, le<br />

Nil pour limite orientale; puis, il suit le littoral méditer<br />

ranéen, depuis le Delta jusqu'aux colonnes d'Hercule.<br />

Au-delà du détroit, il s'avance jusqu'au fleuve Lyxus<br />

(Ouad-cl-Kous). Là s'arrêtent ses notions, qui, dans cette<br />

partie occidentale, sont très-peu précises. Il parle d'une<br />

grande montagne se trouvant dans la Mauritanie, « mon-<br />

« tagne que les Grecs nomment Allas et les barbares<br />

« Dyrin (3). » 11 sait qu'au-delà se trouvent des peuples<br />

nomades appelés Éthiopiens occidentaux; puis, « qu'à<br />

« partir des Ethiopiens,<br />

la côte prend sa direction enlrc<br />

« l'Orient et le Midi. » Quant à la distance approximative,<br />

(1). . eminentibus inlcrdum veînt exuslis caulibns...<br />

(2) Ibn-Haukal,<br />

géographe arabe du X'<br />

siècle, donne aux habitants de<br />

Sidjilmassa Talîlalai, oasis peu éloignée de l'Atlas, l'habitude de manger<br />

du chien. C'est aussi cette coutume qui a valu aux lies Canaries leur<br />

nom.<br />

(3) On reconnaît le Deren berbère.


— — 12<br />

il n'en a aucune idée et ne possède que des données<br />

très-vagues sur les peuples de l'intérieur : « tout ce<br />

« qu'on sait,<br />

— — dit-il,<br />

c'est que les Ethiopiens sont le<br />

« plus au Sud et qu'ils onl, au Nord, les Garamantes, les<br />

« Pbarnsions et les Nigritcs, et, plus près de nous, les<br />

« Gétulcs. »<br />

Il divise les pays du littoral de la manière suivante :<br />

1° La Kyrénaïque,<br />

habitée par les Kyrénéens et diffé<br />

rentes tribus dont les noms sont conformes à ceux rap<br />

portés par Hérodote. Puis les Syrtcs, habitées par les<br />

Nasamons et les Psyllcs ;<br />

2° Le territoire de Karthage qu'il appelle Byzacène,<br />

pays des Byzaciens (les Ghyzantos d'Hérodote) et des<br />

Si nies;<br />

3° La Numidie, habitée par des peuples numides, parmi<br />

lesquels il compte les Massyliens et les Massœsylicns ;<br />

4° La Maurusie ou Mauritanie.<br />

Telle est l'Afrique de Strabon (1).<br />

Pomponius Mcla,<br />

du ior<br />

siècle,<br />

écrivain latin de la première moitié<br />

nous a laissé un précis géographique com<br />

plet du littoral africain. Il fait In périple des côtes depuis<br />

le détroit de Gadès ju<br />

u'à l'Egypte,<br />

et depuis le golfe<br />

arabique, revient par l'Ouest au détroit de Gadès, en sui<br />

vant une ligne imaginaire qui traverse le Sahara.<br />

Sa description géographique ne s'éloigne pas du littoral;<br />

elle est d'une précision assez satisfaisante. Ses divisions<br />

par provinces sont les mêmes que celles de Slrabon.<br />

Quant aux populations qu'il cite, elles sont idenliques à<br />

(I) C'est à Strabon que l'on doit celte comparaison, si peu exacte, et<br />

depuis si répélée, du désert, à une peau de panthère dont les mouche<br />

tures forment les oasis.


- 13<br />

-<br />

celles indiquées par Hérodote;<br />

mais il ajoute à sa<br />

nomenclature quelques peuples fabuleux : les Binnyes,<br />

ayant le visage au milieu de la poitrine; les Gumphazan-<br />

les, habitant les contrées situées au midi des Syrles, et<br />

les Egypmis. moitié hommes et moitié animaux, à l'Ouest<br />

des précédents.<br />

Mêla dit de l'Afrique en général : « C'est une terre<br />

« merveilleusement fertile, là où elle est cultivée; mais<br />

« qui est restée inculte et inhabitable dans sa plus grande<br />

« étendue, à cause des sables dont elle est envahie, des<br />

« animaux malfaisants qui l'infestent, de son ciel sans<br />

« pluie et de son sol sans eau (1). »<br />

Pline clôt brillamment la liste des géographes du pre<br />

mier siècle (il écrivait vers 70). Ses notions ne s'étendent<br />

pas beaucoup au-delà de la région tellienne. Il suit,<br />

comme Mêla, le périple de la Méditerranée en commen<br />

çant par l'Ouest, et cite successivement : la Mauritanie, la<br />

Numidie, l'Afrique propre, les Syrtcs et la Kyrénaïque.<br />

Il suit ensuite le littoral égyptien, pénètre dans la mer<br />

Rouge et rejoint le détroit de Gadès,<br />

par l'Atlantique.<br />

Les dimensions qu'il donne sont prises sur la grande<br />

carte du monde connu, dressée par les soins d'Agrippa<br />

vers l'an 15 de J.-Ch.<br />

Pline qui avait pu consulter,<br />

l'apprend,<br />

— les<br />

—<br />

c'est lui qui nous<br />

ouvrages de Juba II et les relations de<br />

Polybe et de Suetonius Paulinius,<br />

entre dans des -détails<br />

assez précis sur les habitants, les mœurs, la flore et la<br />

faune du pays qu'il décrit; malheureusement, il répète,<br />

sans examen, la plupart des fables ayant cours de son<br />

(1) Chap IV.


— — 14<br />

temps. Le tout est écrit dans ce style concis et nerveux<br />

qui lui est propre.<br />

« L'Afrique,<br />

— dil-il<br />

(1), —<br />

n'est<br />

« que sous le nom de Libye, et cela,<br />

connue des Grecs<br />

parce qu'ils ont<br />

« trouvé les populations où ils ont fondé la colonie de<br />

« Kyrènc, portant le nom de Loul'a (2). De même, le<br />

« premier territoire où les Romains ont mis le pied en<br />

« Afrique était habile par les Afarikas (3). i><br />

Ces quelques lignes de Pline nous donnent,<br />

en peu de<br />

mots, l'origine très probable, sinon certaine, des deux<br />

anciennes appellations du pays.<br />

Les peuplades du littoral sont indiquées par Pline dans<br />

le même ordre que par Mêla, Strabon et même Hérodote,<br />

pour la partie décrite par ce dernier. Dans l'intérieur, il<br />

cite aussi les peuples fabuleux relatés par Mêla (4j ; mais<br />

il ajoute, pour le Sud-Ouest,<br />

thiopes;<br />

les Libya?gypti et les Leucœ-<br />

au midi des Gélules et au-delà de ces deux peu<br />

plades, les NigriUe, les Gymnètcs et les Pharusii, voisins<br />

de l'Océan. Il cite encore les Pcrorsi dans la Mauritanie.<br />

Après la période des géographes dont nous venons d'a<br />

nalyser les ouvragÀ, les connaissances des Romains sur<br />

le Sud-Est de l'Afrique se complètent par de nouvelles<br />

(I) Liv. V, sect. I.<br />

(2) Loubim de la Bible, Libues des Grecs, Lebalhaï de Procope, lia—<br />

guaten de Corippus, Louata des autcuis arabes.<br />

(3)<br />

M. Vivien de Saint-Martin identifie les Afaiikas aux Aouriria des<br />

auteurs arabes. Nous pensons qu'en présence d'une double altération du<br />

nom primitif, par les Latins et par los Arabes, on ne saurait être trop<br />

prudent dans la recherche de ces synonymies.<br />

(4) Le géographe arabe Abou-Ohcïd-el-Bckri parle aussi de peuplades<br />

fantastiques, moitié hommes, moitié animaux, habitant l'intérieur de l'A<br />

frique, ce qui prouve que, pour la géographie, cpmme pour les autres<br />

sciences, les Arabes avaient puisé aux sources antiques.


- 15<br />

-<br />

expéditions militaires et par les périples entrepris parles<br />

navigateurs grecs de l'Egypte,<br />

tions commerciales.<br />

pour étendre leurs rela<br />

Vers l'an 140, Ptolémée d'Alexandrie réunit tous les<br />

documents nouveaux et écrit son grand travail géogra<br />

phique, le plus complet que l'antiquité nous ait légué.<br />

La partie relative à l'Afrique forme huit chapitres :<br />

1° Mauritanie;<br />

2° Numidie;<br />

3° Afrique propre;<br />

4° Kyrénaïquc;<br />

5° Marmariquc;<br />

6° Zone libyque;<br />

7° Egypte;<br />

Et 8° Zone intérieure, divisée en Libye intérieure,<br />

Ethiopie et Ethiopie intérieure.<br />

La description générale de Ptolémée rappelle celle de<br />

tous les auteurs anciens,<br />

en ce sens qu'il n'a aucune idée<br />

du prolongement méridional de l'Afrique. Cependant, il<br />

sait que ce continent s'étend, au Midi, beaucoup plus<br />

loin que ne l'indiquent ses prédécesseurs, et il en porte<br />

les limites au-delà de l'équateur.<br />

Relativement à la Mauritanie, ses connaissances sont<br />

beaucoup<br />

plus précises que celles des autres auteurs.<br />

Après avoir donné les principales rivières de celte con<br />

trée,<br />

et décrit la côte de l'Océan jusqu'au mont Théôn<br />

ocltèma, ou char des dieux,<br />

point reconnu par Hannon à<br />

peu de distance de la Corne du Midi (la pointe du golfe<br />

de Guinée), il désigne les principales tribus parmi les<br />

quelles nous indiquerons :


— 16 -<br />

Dans la Mawilanie-Tingilane :<br />

1° Les Masikes (1);<br />

2° Les Rakouates (2) ;<br />

3° Les Makanites (3) ;<br />

4° Les Zegrensii;<br />

5° Les Baniurœ;<br />

Dans les montagnes :<br />

Les Arokkes.<br />

Au Sud :<br />

Les Daraclœ,<br />

actuel).<br />

A l'extrême Sud :<br />

1° Les Perorsi ;<br />

2° Les Pharusii ;<br />

3° Les Leucœthiopes.<br />

sur les bords du fleuve Darat (le Deraa<br />

Les populations de. la Mauritanie césarienne, de la Nu<br />

midie, de l'Afrique propre et de la Kyrénaïque, sont tou<br />

jours à peu près les mêmes, augmentées d'un certain<br />

nombre de tribus dont les noms sont<br />

gurés. Ê<br />

complètement'<br />

défi<br />

Dans la Libye intérieure, divisée en Libye déstrie, au<br />

(1) Nous nous conformons à l'habitude qui devient générale de rendre<br />

la lettre K par le k qui reproduit, en français, beaucoup mieux sa pronon<br />

ciation. On remarquera l'analogie de Masikes avec Amaz-ir'<br />

ou Amazik',<br />

fém Tamazik't, qui s'emploie actuellement chez nos berbères du Sud et<br />

de l'Ouest, pour signifier grand, noble. La langue elle-même se nomme<br />

l'amacliekt ou Thamazik't.<br />

(2) Identifiés aux Uerg'ouata cités par les auteurs comme habitant les<br />

mêmes localités, sur les bords de l'Océan.<br />

(3j Identifiés aux Miknaca.


- 17<br />

—<br />

sud de la Kyrénaïque et de l'Afrique, et Gélulie,<br />

des Mauritanies, il cite :<br />

au sud<br />

1° Les Garamantes, s'étendant des sources du Bagradas<br />

(Medjerda) au lac Nouba, à l'est de la Phazanic ;<br />

2° Les Gétules, au midi des Mauritanies;<br />

3° Les Mclano-Gétules, au midi des Gétules;<br />

4° Et, enfin, les Ethiopicns-Ganges, les Éthiopiens-Nigri-<br />

tes et les Ethiopiens-Odrangides, à l'extrême Sud.<br />

Telle est, en résumé, l'Afrique de Ptolémée. C'est l'ex<br />

posé le plus complet des connaissances des anciens sur<br />

l'Afrique. Les tables de Pcutinger et d'Antonin,<br />

postérieures,<br />

son avec ses cartes.<br />

qui sont<br />

peuvent servir d'utiles points de comparai<br />

Après les travaux de ces auteurs, les documents pou<br />

vant être utiles se trouvent semés dans les ouvrages qui<br />

retracent les opérations militaires ou les faits se ratta<br />

chant à l'histoire générale, et auxquels le hasard a donné<br />

l'Afrique pour théâtre. Parmi ces ouvrages, nous cite<br />

rons : la guerre des Vandales, de Procope,<br />

nide,<br />

et la Johan-<br />

poëme de l'Africain Corippus pour célébrer les vic<br />

toires de Jean Troglyta. Tous deux datent du vie siècle et<br />

renferment de nombreux noms de tribus dont la forme<br />

se rapproche beaucoup<br />

arabes,<br />

et sert ainsi de transition.<br />

de celle donnée par les auteurs<br />

Après avoir suivi pas à pas la marche des connaissan<br />

ces des anciens sur l'Afrique, il nous reste à résumer<br />

leurs notions et à indiquer leur système géographique et<br />

ethnographique. C'est ce que nous allons faire dans les<br />

tableaux suivants :


__ — 18<br />

L'Afrique septentrionale (moins l'Egypte), nommée<br />

Libye par les Grecs, et Afrique par les Romains, forme<br />

les divisions suivantes :<br />

RÉGION LITTORALE<br />

1° Kyrénaïque, comprenant la Mitrmarique, —<br />

les frontières occidentales de l'Egypte,<br />

la Grande-Syrte ;<br />

2° Province Proconsulaire d'Afrique,<br />

Région Syrlique et Y Afrique propre,<br />

cène et Zeugitane, —<br />

depuis<br />

sources du Bagradas (Mccljerda);<br />

3° Numidie, —<br />

depuis<br />

depuis<br />

jusqu'au golfe de<br />

comprenant la<br />

appelée aussi Dyza-<br />

la Grande-Syrte, jusqu'aux<br />

l'Afrique propre, jusqu'au 3°<br />

de longitude Est (à peu près la province actuelle de<br />

Constantine);<br />

4° Mauritanie, —<br />

depuis<br />

divisée (vers 46 avant J.-Ch.),<br />

la Numidie jusqu'à l'Océan,<br />

en Mauritanie orientale<br />

et en Mauritanie occidentale, séparées par le fleuve<br />

Molocbath, puis (vers 297)<br />

divisée de nouveau en Mau<br />

ritanie Sihfienne, depuis la Numidie jusque vers Icosium<br />

(Alger), Mauritanie Cc^iennc, jusqu'au Molochath, et<br />

Mauritanie Ttngitane, jusqu'à l'Océan.<br />

RÉGION INTÉRIEURE<br />

i° Libye déserle, comprenant la Phazanie,<br />

de la Kyrénaïque et de la Région-Syrtique ;<br />

2° Gètulie, —<br />

tanie;<br />

au<br />

— au<br />

sud<br />

sud de la Numidie et de la Mauri<br />

3° Ethiopie, comprenant la Trogloiylique, —<br />

des précédentes,<br />

au sud


— - 19<br />

Populations<br />

RÉGION LITTORALE<br />

Kyrénaïque et Région-Syrtique<br />

1° Libyens, nom générique se transformant en Ltbathai<br />

dans Procope et Ilugualen dans Corippus (identifiés aux<br />

Ilaouaten berbères et aux Louala des adtcurs arabes);<br />

2° — Adyrmachides, littoral nord de la Kyrénaïque;<br />

3° —<br />

Ghiligammcs, littoral nord de la Kyrénaïque ;<br />

4° — Asbysles, littoral nord de la Kyrénaïque;<br />

5° — Nasamons, dans l'intérieur de la Kyrénaïque,<br />

sur la ligne des oasis, jusqu'au golfe de la Grande-Syrte;<br />

puis, sur tout le littoral de ce golfe;<br />

6° Psylles, —<br />

habitant la Grande-Syrte; puis, refoulés<br />

vers la Kyrénaïque;<br />

7S — Makes, littoral occidental de la Grande-Syrte;<br />

8° Zaouekes, (Arzugues de Corippus), —<br />

littoral<br />

com<br />

pris entre la Grande et la Petitc-Syrte ; ils ont donné leur<br />

nom à la Zeugitane (identifiés aux Zouar'a) ;<br />

9° (Pour mémoire, ces populations ayant disparu fort<br />

—<br />

anciennement) Troglodytes,<br />

Tripoli, et — Lotophnges, île<br />

1° Zaouekes, —<br />

midi<br />

2° — Maxyes,<br />

3° — Byzanles et Ghyzantes,<br />

montagnes voisines de<br />

de Djerba et littoral voisin.<br />

Afrique propre<br />

du Lac Triton ;<br />

environ du lac Triton ;<br />

littoral<br />

et environ du lac<br />

Triton. Ces tribus paraissent avoir donné leur nom à là<br />

Byzacène ;<br />

4° Libo- Phéniciens,<br />

— peuplade<br />

mixte du territoire de<br />

Karthage, qui a formé plus tard,<br />

lément latin, les peuplades coloniales dites Afri.<br />

par l'adjonction de l'é<br />

:


— — 20<br />

Numidie<br />

1° Numides, nom générique de ses habitants ;<br />

2° Nabalhres,<br />

— région Nord-Est ;<br />

3° Massœiyliens, puis MassyUens, —<br />

les contrées mé<br />

ridionales et occidentales; remplacés ensuite par les peu<br />

plades suivantes :<br />

4° Kedamousiens, sur la rive gauche de l'Amsaga (Ouad-<br />

Remel), jusqu'à l'Aourès (identifiés aux Ketama) ;<br />

5° Babares ou Sibabarei, sur la rive gauche de l'Am<br />

saga (identifiés aux Babor) .<br />

Mauritanie orientale<br />

1° Maures, nom générique, remplacé ensuite par Ma-<br />

ziques ;<br />

2° Quinquegentiens, divisés en Isaflimes (identifiés aux<br />

Iflissen ou Flissa), Jubalenes, Fraxinenses et Massinis-<br />

senses, plus les Nababes,<br />

les plus anciens habitants du pays,<br />

(Djerdjera) ;<br />

ces derniers paraissant avoir été<br />

— le<br />

3° Massœsyliens, pis Mussyàens, —<br />

Ferratus, —<br />

pulations ;<br />

remplacés<br />

Mons-Ferratus<br />

au sud du Mons-<br />

de bonne heure par d'autres po<br />

4(> Makhourebes et Baniourcs,<br />

Ferratus ;<br />

— à<br />

l'ouest du Mons-<br />

i)"Makhrusii,jsm" le littoral montagneux, à l'ouest des<br />

précédents ;<br />

0° Nacmnsii, clans la région des Hauts-Plateaux, au<br />

midi des précédents (Sersou) ;<br />

7° Massœsyliens, sur la rive droite du Molochath.


1° Manrrs, —<br />

2° Ma.ssœsyliens, —<br />

- |L-<br />

Mauritanie occidentale<br />

nom générique;<br />

bassin<br />

du Molochath et littoral<br />

(peuple ancien : Mas-Isli, race d'Isli en berbère (lj ;<br />

31 —<br />

Mazikes, sur le littoral de l'Océan (identifiés aux<br />

Amazik'j ;<br />

4°<br />

\lakeniles, sur le cours du Subur (Sebou, identifiés<br />

aux Miknaça);<br />

5° Bakouates, —<br />

voisins<br />

des précédents, et ayant,<br />

pendant une période, étendu leur domination vers l'Est<br />

(identifiés aux Berg'<br />

ouata) ;<br />

6° Autololes, Baniures, etc.,<br />

l'Oum-er-Rebïa ;<br />

7° Daradœ, —<br />

versant<br />

droite du Darath (Ouad-Draa).<br />

1° Libyens,<br />

— nom<br />

— dans<br />

le bassin de<br />

méridional de l'Atlas et rive<br />

RÉGION INTÉRIEURE<br />

Libye déserte<br />

générique;<br />

2° Garamantes, appelés aussi Gamphazantes, —<br />

Pha-<br />

zanie (Fezzan), s'avançant, au Nord, jusqu'aux monta<br />

gnes de Tripoli;<br />

3° Blemyes et Troglodytes, —<br />

dents ;<br />

Gélulie<br />

1° Gélules, nom générique,<br />

au sud-est des précé<br />

— toute<br />

la ligne des Hauts-<br />

Plateaux et la lisière du Désert (identifiés aux Guezoula<br />

et aux Guedala) ;<br />

2° Melano-Gélules,<br />

— au -midi des précédents;<br />

(t) Remarquer qu'il existe, dans ces localités, un Ouad-Isli.


•<br />

3° Perorses, Pharuséeus et Machurèbes, à l'ouest des<br />

précédents, dans le désert et sur la rive gauche du Darath.<br />

Ethiopie<br />

Éthiopiens, terme générique,<br />

rouges,<br />

divisés en Éthiopiens<br />

Éthiopiens blancs et Éthiopiens noirs (1).<br />

Allas-Major. —<br />

Le<br />

Atlas, dans le Maroc.<br />

Atlas-Minor. —<br />

Les<br />

Montagnes<br />

Deren des Indigènes,<br />

notre Grand-<br />

chaînes secondaires du Grand-<br />

Atlas, où sont les sources du Sebou et du Bou-Regreg, au<br />

Maroc.<br />

Carapha. —<br />

Kinnaba. —<br />

L'Ouarensenis,<br />

Mons-Ferratus. —<br />

actuelle.<br />

Aurasius-Mons. —<br />

de Constantine.<br />

dans la province d'Alger.<br />

Le Djebel-Amour, au sud du précédent.<br />

Le Djerdjera ou Grande-Kabilie<br />

Le<br />

Gyri ou Gyigiri-Monles. —<br />

de Tripoli.<br />

Bagradas. —<br />

Medjerda,<br />

Djebel-Aourès,<br />

| Fleuves et rivières<br />

Amsagas ou Ampsagas. —<br />

Kebir,<br />

dans la province<br />

Le Djebel-R'arïan,<br />

au sud<br />

sur la limite de la Tunisie.<br />

Oued-Remel<br />

rivière passant à Constantine.<br />

ou Ouad-el-<br />

(\) Nous ne pouvons nous empêcher, avec M. Berbrugger, de rappro<br />

cher les Ethiopiens rouges ou Ganges, appelés aussi par les auteurs<br />

Agaggines el Adraggides, des Iznagen ou Santiago qui, comme eux, habi<br />

taient au midi delà Gélulie, sur les bords de l'Océan,<br />

et ont donné leur<br />

nom au Sénégal. Citons aussi le nom Ouaggag, qui se rencontre dans<br />

l'histoire des Sanhaga au Lith-m.


— Nasaoua ou Nasabath. Oued-Sahcl, dont l'embou<br />

chure est à Bougie.<br />

— Asar ou Usar. Sans doute lo Cholif,<br />

dant du Djebel-Amour. AA<br />

Chylèmalh. —<br />

Makta,<br />

rivière descan- '<br />

o^, A '


y^_>*^^__Ai_, i>-_y<br />

Zcséfcc*? ■*<br />


ETHNOGRAPHIE<br />

DE<br />

L'AFRIQUE SEPTENTRIONALE<br />

NOTES SUR L'ORIGINE DI PEUPLE BERBÈRE<br />

Les tribus de race arabe (Hilal et Soléim), qui occupent actuel<br />

lement une grande parlie du Tel de l'Afrique septentrionale, se<br />

sont établies dans le pays à une époque relativement récente.<br />

Chassés de l'Arabie au commencement du onzième siècle, par les<br />

Fatemides, pour avoir soutenu la sanglante révolte des Karmat,<br />

les Béni Hilal et Soleïm séjournèrent quelque temps dans la<br />

Haute-Egypte, puis, vers 1050, furent lancés sur le Mag'reb, par<br />

le kalife El-Mostancer, dans le double btit de se débarrasser<br />

d'eux et de punir la révolte de son lieutenant de Kaïrouàn.<br />

Les nomades arabes trouvèrent,<br />

dans le pays qu'ils envahis<br />

saient, une forte race indigène ayant un langage, des mœurs et<br />

un esprit national propres. Ce_ peuple avait subi la conquête<br />

arabe du septième siècle el était resté pendant plus de deux cents<br />

ans tributaire du khalifat ; puis, en 909, il avait expulsé Jes<br />

Ar'lebites, derniers représentants du souverain de Bagdad (1), et<br />

(1) Voir notre notice Sur la chute des gouverneurs Ar'lebites et l'éta<br />

blissement de l'empire obéïditc.


de puissanls empires s'élaient formés dans son sein. Seule, la<br />

religion des conquérants était restée dans le pays comme souvenir<br />

de leur passage; aussi, la langue du Coran était-elle usitée à la<br />

cour des princes indigènes et dans les écoles célèbres de Mag'reb<br />

et d'Espagne.<br />

Se heurtant ainsi à iin peuple très-nombreux et guerrier, et<br />

rencontrant une civilisation supérieure à la leur, il semble que<br />

les envahisseurs arabes eussent dû être expulsés et exterminés<br />

jusqu'au dernier. Mais il n'en fut pas ainsi. Après avoir conquis<br />

une première place dans les déserts de la Tripolitaine et de la<br />

Tunisie, ils profitèrent des discordes qui désolaient les Indi<br />

gènes, se mirent au service de leurs princes,<br />

soutinrent tous<br />

les agitateurs, et, s'insinùànt au milieu de leurs hôtes, s'établi<br />

rent peu à peu dans les vallées,<br />

au détriment de l'élément au-<br />

tochthbne. Après Irois siècles, ils occupaient les plaines du Tel<br />

et les Hauts-Plateaux, depuis l'Egypte jusqu'à l'Atlantique, en<br />

tourés de foules parts par la race indigène,<br />

disjointe el rompue.<br />

qu'ils avaient ainsi<br />

Depuis cette époque jusqu'à nos jours, les populations et les<br />

idiomes de l'Afrique septentrionale onl, de plus en plus, subi<br />

l'influence des envahisseurs, et l'on peut dire que ce pays a été<br />

■arabisé. Cependant, pour l'observateur, il est facile de recon<br />

naître que celte transformation est encore bien incomplète. La<br />

race indigène se retrouve à chaque pas en Afrique, dans les<br />

plaines comme dans les villS, dans les montagnes comme dans<br />

les déserts, avec son type, ses mœurs et son langage.<br />

C'est l'origine de cetle race, intéressante à plus d'un titre, que<br />

nous allons étudier.<br />

Un peuple unique parait avoir habité, dès la plus haute anli-<br />

quité, l'Afrique septentrionale. Cette race autochthone se re<br />

trouve, encore intacte, sur le littoral de la mer Rouge, en<br />

Egypte, dans les déserts de la Nubie et du Sahara,<br />

sur les rives<br />

du Sénégal et les bords de l'Océan, et, enfin, dans les montagnes<br />

et les oasis du Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie, de la Tripoli<br />

taine et de la Cyrcnaïqùe. Elle y porte les différents noms de


Berber (plur. Braber et Brabra), Tibou, Imouchar', Touareg,<br />

Chelouh, Zenèle, Kabyle, Chaouïa, Maure,<br />

ele. Nous lui conser<br />

verons l'appellation de Berbère, onomatopée que les étrangers<br />

ont, sans doute, appliquée, dans le principe, à son langage, puis<br />

à sa race, el, de là, à une partie du pays qu'elle habitait : la<br />

Berbérie, improprement désignée par nous sous le nom de<br />

Barbarie (1).<br />

Les auteurs anciens, tant Grecs que Romains, n'ont pas fait<br />

usage du terme de Berbère, pour désigner, d'une façon générale,<br />

le peuple de l'Afrique septentrionale; ils ne paraissent pas avoir<br />

apprécié cette race dans son unité et parlent successivement des<br />

peuplades habitant le pays,<br />

sans paraître se douter du lien qui<br />

les unit ; si même, tels que Ptolémée, ils ne les présentent pas<br />

comme des nations distinctes. Il ne faut pas, du resle, attacher<br />

trop d'importance à leurs nomenclatures ni cherchera les relier,<br />

par des procédés plus ou moins ingénieux, aux données précises<br />

fournies par les historiens arabes. En effet,<br />

parmi les noms<br />

qu'on trouve dans les ouvrages anciens, les uns appartiennent<br />

aux langues grecque ou latine,<br />

et s'appliquent à une circons<br />

tance physique de la peuplade qu'ils qualifient ; les autres ont<br />

été tellement défigurés, en prenant une nouvelle forme, qu'il<br />

serait léméraire de prétendre les ramener à leur véritable ori<br />

gine. Pour les premiers, nous citerons : Numides, du grec No<br />

mades (pasteurs, nomades); —Ethiopiens, de Aithôs —<br />

(brûlé)(2j;<br />

Leucœthiopiens, Melano-Gétules (Ethiopiens blancs, Gétules<br />

noirs);<br />

— Liby-œgypti,<br />

P.héniciens);<br />

—<br />

lotus), Troglodites<br />

Liby-phœnices (Liby-Egypiiens, Lib'y-<br />

— Gymnotes<br />

(nus);<br />

— Lotopbages<br />

(mangeurs de<br />

(vivant dans les cavernes (3);<br />

— Metago-<br />

—<br />

nilcs; Atlantes ou Atarantes (habitants de l'Atlas);<br />

— Gara<br />

— mantes (habitants de Garama); Daradœ (habitant les bords du<br />

(1) Les historiens espagnols du XVI- siècle n'ont pas commis celte<br />

erreur<br />

(2j Les Hébreux avaient déjà nommée l'Ethiopie Kousch, qui signifie<br />

noir, brûlé.<br />

t'S) 11 est à remarquer que les Berbères lfren sont placés par les pre<br />

miers auteurs arabes dans les mêmes localités que les Troglodytes. Or,<br />

lfren nous semble être le pluriel de Ifri, qui, en berbère, signifie<br />

caverne


0<br />

— fleuve Daradus ou Darath (le Derâa actuel); Lyxites (habitant<br />

les bords du Lyxus), etc., tous noms qui n'étaient évidemment<br />

pas usités par les Indigènes. Pour les seconds, il suffit de nom<br />

mer les Ghiligammes, les Auskhises, les Adyrïnakhides, les<br />

Odrangides, les Zegrènsii,<br />

assimilation.<br />

Mais,<br />

pour renoncer à entreprendre loute<br />

si le nom de Berber ne semble pas avoir été appliqué<br />

en terme générique aux Aborigènes de l'Afrique septentrionale,<br />

plusieurs passages des auteurs anciens prouvent cependant<br />

qu'il n'était pas ignoré dans le pays. Hérodote, qui avait voyagé<br />

en Egypte,<br />

dit : « Les Egyptiens appellent Barbar tous ceux<br />

qui parlent une autre langue que l'Egyptien (1). > Le périple<br />

de la mer Erythrée, document anonyme qui paraît remonter à 20<br />

ou 25 ans avant notre ère, donne le nom de Barbarie (Barbarihé<br />

êpeiros) au littoral africain de la mer Rouge et du golfe d'Aden.<br />

Ptolémée répèle cette assertion en étendant l'appellation île<br />

Barbarie jusqu'au-delà de l'équateur (2). Enfin, Julius Honorius<br />

cite une peuplade de Barbares près du fleuve Malva (la Moulouïa).<br />

Voici donc un fait bien établi : les géographes grecs ont eu<br />

connaissance d'un peuple de Barbar, habitant au midi de l'Egypte<br />

et sur les bords du Nil, là où, de nos jours, se trouvent des<br />

tribus appelées Brabra,<br />

qui se relient aux autres Berbères de<br />

l'Afrique du nord. Nous voyons même un auteur latin appliquer<br />

ce nom à une peuplade desgaords de la Malva. Pourquoi donc les<br />

anciens ne l'ont-ils pas employé d'une façon plus générale?<br />

Nous pensons, avec M. Vivien de Saint-Martin (3), que la raison<br />

peut en être cherchée dans l'analogie de celte appellation avec<br />

l'adjectif barbare [barbaros, Barbarus), dont le sens était beaucoup<br />

trop<br />

étendu et qui aura élé confondu avec le substantif.<br />

En somme, soit que les Arabes, à leur arrivée dans le pays,<br />

aient trouvé le nom de Barbar usité par les colons grecs et ro<br />

mains (Afri), pour désigner, comme substantif, le peuple indi<br />

gène, ou, comme adjectif, leurs voisins non civilisés; soit qu'Us<br />

(1) H. - CLV1II.<br />

(2) Ou sait que les caries du géographe alexandrin pèchent toutes par<br />

le même défaut : une grande expansion des distances vers le midi .<br />

(3) Le Nord de l'Afrique dans l'antiquité, p. 208, 209.<br />

• ■. .-<br />

. v U..A.


aient eux-mêmes<br />

7'<br />

créé"<br />

ce mot en le faisant dériver de leur racine-<br />

quadrilittère berbera(i) (yy prononcer des mots inintelligibles,<br />

bredouiller), le nom de berbère devint, dès lors, sans conteste,<br />

celui du peuple aulochthone de l'Afrique septentrionale. En<br />

l'absence d'une autre désignation aussi précise, nous continue.<br />

rons à l'employer.<br />

fLe pays des Berbères s'étend depuis la Méditerranée jusqu'au<br />

Soudan, qui a toujours formé, au sud, la limite de cetle nation.<br />

Seulement, le domaine de la race nègre parait s'être avancé, au<br />

trefois, beaucoup plus au nord, à une latitude qu'on he peut<br />

préciser, et ce peuple semble avoir été, depuis les temps les<br />

plus reculés, constamment refoulé vers le sud par l'élément ber<br />

bère! Au point de rencontre des deux races, de nombreux mé<br />

langes ont eu lieu, et ces croisements, complétés par l'influence<br />

du climat, ont produit des types intermédiaires chez lesquels,,<br />

cependant, les trails du Berbère dominent. M. Vivien de St-<br />

Marlin, dans son bel ouvrage : Le nord de l'Afrique dans<br />

l'antiquité, » dit, à propos des Tibou, une de ces races intermé<br />

diaires : ' Les Tibou sont un des anneaux d'une chaîne immense<br />

qui commence aux rivages de la mer Erythrée, enveloppe tout le<br />

couvre la<br />

bassin moyen du Nil, se développe à travers le Sahara,<br />

haute région de l'Atlas et se termine à la mer occidentale. Dans<br />

cette vaste zone de populations congénères qui s'étend d'un bord<br />

à l'autre du continent africain, l'idenlité originaire se révèle.<br />

soit par la communauté de l'appellation primordiale deBerber,<br />

qui se retrouve chez les branches les plus distinctes de la fa<br />

mille, soit par l'analogie de conformation physique, soit par les<br />

rapports que présentent encore les nombreux dialectes entre-<br />

lesquels la langue mère s'est morcelée (2). »<br />

Examinons maintenant les diverses hypothèses émises au sujet<br />

des origines de la race berbère. L'antiquité, malheureusement ,<br />

nous a légué, à cet égard, bien peu de documents sérieux ; c'est<br />

ee qui a constamment rebuté les personnes qui ont entrepris»<br />

(1) Warwar, en sanscrit a le même sens. C'est de cette racine que dé<br />

rive l'adjectif grec barbaros.<br />

(2) P. 80.


8<br />

des recherches sur cette obscure question ethnographique; c'est<br />

encore ce qui explique la grande divergence des opinions<br />

émises.<br />

Salluste,<br />

un des premiers auteurs qui aient traité cette ques<br />

tion, Salluste qui avait été proconsul d'Afrique et qui déclare<br />

avoir consulté les livres du roi Hiempsal,<br />

nique,<br />

—<br />

écrits en langue pu<br />

rare bonne fortune dont il a assez mal profilé,<br />

s'exprime en ces termes (1) : L'Vfrique fut d'abord occupée<br />

par les Gélules et par les Lybiens,<br />

peuples barbares et gros<br />

siers (2), qui se nourrissaient de la chair des bêles sauvages et<br />

paissaient comme des troupeaux. Sans mœurs, sans lois, sans<br />

chefs,<br />

ils n'étaient soumis à aucun gouvernement. Toujours<br />

en mouvement, errant à l'aventure,<br />

c'était la nuit qui déter<br />

minait leur lieu de repos. Mais Hercule (3) étant mort en Es<br />

pagne, comme le pensent les Africains, son armée, composée de<br />

diverses nations, se dispersa. Les Mèdes, les Perses et les Armé<br />

niens qui s'y trouvaient s'étant embarqués pour l'Afrique, y<br />

prirent des postes dans le voisinage de Notre Mer. Les Perses,<br />

toutefois, s'approchèrent plus de l'Océan : en renversant le corps<br />

de leurs vaisseaux, ils s'en firent des espèces de cabanes<br />

Insensiblement, ils se mêlèrent 'aux Gélules par des mariages, ej,<br />

comme ils avaient souvent changé de lieux, se nommèrent eux-<br />

mêmes Numides (4). Du resle, les habitations des paysans<br />

numides, qu'ils appellent mapalia, sont encore aujourd'hui, par<br />

Jeur longueur et par leurs^sits cintrés des deux côtés, assez<br />

semblables à des carcasses de vaisseaux (5) .<br />

Pour les Mèdes et les Arméniens, ils se fortifièrent par l'ad<br />

jonction des Lybiens,<br />

car ceux-ci étaient plus voisins de la mer<br />

d'Afrique Leur nom fut sensiblement altéré par les<br />

(t) Bell Jug., g XVII à XX.<br />

dit le texte. 11 aurait été curieux de voir Sal<br />

...asperi (2) incultique,<br />

luste employer l'adjectif barbants. .<br />

(3) C'est de l'Hercule Tyrien qu'il est question, i \ _ ( ,<br />

.<br />

, , ;<br />

,<br />

\ t<br />

(4) On sait que ce, mot est d'origine grecque, de'iVowje, pâturage.<br />

(5) On reconnaît assez la description du gourbi de nos populations<br />

indigènes.<br />

v ;<br />


9<br />

Lybiens qui, dans leur jargon barbare (1), les nommèrent Maures<br />

au lieu de Mèdes. »<br />

« Quant aux Perses, ils devinrent bientôt puissants, et, depuis<br />

qu'ils eurent pris le nom de Numides, s'étant considérablement<br />

multipliés, les plus jeunes se séparèrent de leurs pères, et,<br />

ayant quitté le désert, vinrent s'établir dans celte contrée voi<br />

sine de Carthage qui porte le nom de Numidie. Dans la suite, les<br />

uns et les autres, en se prêtant des secours mutuels, assujettirent<br />

leurs voisins par la forr.e des armes ou par la terreur, et acqui<br />

rent beoucoup de gloire, principalement ceux qui s'étaient<br />

avancés vers Notre Mer, parce que les Lybiens étaient moins<br />

guerriers que les Gétules. Enfin, presque toute la partie infé<br />

rieure de l'Afrique passa aux Numides; tous les peuples vaincus<br />

furent incorporés au peuple vainqueur et en prirent le nom.<br />

« Des Phéniciens, dans la suite ayant gagné des gens du<br />

bas peuple el quelques autres hommes amateurs d'aventures,<br />

fondèrent sur la côte maritime, Hippône, Hadrumet, Leptis et<br />

Carthage... etc. »<br />

Tel est à .peuprès tout le bagage que nous a transmis l'anti<br />

quité sur les origines du peuple autochthone de l'Afrique sep-<br />

tenlrionafe. Par une fatalité singulière, la partie de l'histoire<br />

de Polybe consacrée à l'Afrique manque; il en est de même de<br />

celle de l'histoire générale tle Cornélius Nepos et dé l'ouvrage<br />

historique de Juball. Strabon, Pline et Ptolémée, lui-même,<br />

n'approfondissent pas sérieusement la question de l'origine des<br />

peuples dont ils donnent les sèches nomenclatures.<br />

Le Bas-Empire, représenté par l'écrivain Procope, apporte à<br />

la cause son petit contingent de documents. Le judicieux histo<br />

rien de la guerre des Vandales reproduit, sur l'origine des Afri<br />

cains, des renseignements puisés évidemment aux traditions<br />

hébraïques. Il les représente comme chassés de la Palestine par<br />

les Hébreux, arrivés d'Egypte sous la conduite de Moïse, et à la<br />

suite des grandes guerres qui furent la conséquence de ce mou<br />

vement. Après avoir en vain cherché à s'établir en Egypte, ils se<br />

seraient jetés sur l'Afrique septentrionale et l'auraient occupée<br />

(1) Cette fois, Salluste dit : ...barbarà lingnà Maures pro Médis appellantcs.


10<br />

jusqu'au détroit de Gadès. Une inscription gravée sur deux co<br />

lonnes et rappelant ces faits, se trouvait, dit-il,<br />

Tigisis (1),<br />

en Numidie.<br />

Sans nous arrêter davantage à celte tradition,<br />

ment soutenue et attaquée par des écrivains de mérite,<br />

dans la cité de<br />

qui a élé égale<br />

nous ne<br />

pouvons nous empêcher de remarquer une certaine analogie<br />

dans ces deux documents puisés à des sources diverses et écrits à1<br />

cinq<br />

siècles de distance.<br />

Les assertions de Salluste ont donné lieu à de nombreuses<br />

légitimes critiques; il ne faut cependant pas les rejeter en entier.<br />

Nous les apprécions comme le résumé des traditions ayant cours<br />

en Numidie un demi-siècle environ avant notre ère, traditions<br />

que les Phéniciens avaient fondues avec leur légende de l'Hercule<br />

punique, génie tulélaire de Tyr. L'abbé Mignot pense que l'his<br />

torien a voulu désigner des peuplades cananéennes et syriennes,<br />

telles que les Madianiles, les Phereséens et lesAraméens. M. Mo-<br />

vers suppose que ces traditions s'appliquent aux troupes merce<br />

naires que Sidon envoyait à ses colonies de la Jléditerranée. 11<br />

est certain qu'on y voit le souvenir des mouvements de peuples<br />

orientaux qui, de tout temps, sont venus modifier l'ethnographie<br />

de l'Afrique septentrionale.<br />

T"*M. Vivien de Si-Martin combat ces systèmes,<br />

qu'il appelle « in<br />

suffisants el peu vraisemblables. » Il déclare reconnaître les noms<br />

donnés par Salluste dans ks tribus berbères citées par les au<br />

teurs arabes et notammenPdans celles de Medaça, Ourmana,<br />

Mediouna, etc.<br />

M. Tauxier (2), suivant la même voie, traduit le mot Masmoud,<br />

ancien nom des Berbères de l'Atlas, par : descendant de Moud<br />

et signale l'analogie de Moud avec les Mèdes de<br />

(Mas-Moud),<br />

Salluste.<br />

Mais, en admettant que ces identifications soient exactes, ce<br />

que nous ne contestons pas, l'origine de ces Berbères n'est<br />

(I) On est indécis sur la position exacte de cette ville antique. Les uns<br />

la placent non loin de Dellys ; d'autres, avec plus de raison, selon nous.<br />

au sud-est de Constantine.<br />

(2) Ethnographie de l'Afrique septentrionale avant Mahomet. (Revue<br />

africaine, 18f>.'l).<br />

et'


il<br />

pas indiquée et l'hypothèse de l'abbé Mignot reste entière__<br />

La littérature hébraïque, où, nous l'avons vu, Procope paraît<br />

avoir puisé ses renseignements, vient confirmer ce fait d'une<br />

émigration ancienne de peuples cananéens en Afrique. Le rabbin<br />

Maïmounide, un des plus célèbres commentateurs du Thalmud,<br />

nous apprend que, lors de la conquête du pays de Canaan, Josué<br />

extermina une partie des habitants et força le reste à s'expatrier.<br />

Les Gergéséens émigrèrent en Afrique (1).<br />

Passons aux indications fournies par les auteurs arabes.<br />

L'historien Ibn-Khaldoun,<br />

qui a résumé à peu près tout ce<br />

qu'ont écrit ses devanciers sur la matière, s'exprime en ces<br />

termes (2) : Les Berbères sont les enfanls de Canaan, filsde<br />

Cham, fils de Noë. leur aïeul se nommaient Mazir; ils avaient<br />

pour frères les Gergéséens et étaient parents des Philistins, en<br />

fants de Kasluhim, fils de Mesraïm. Le roi, chez eux, portait le<br />

titre de Goliath (3). Il y eut, en Syrie, entre les Philistins et les<br />

Israélites, des guerres rapportées par l'histoire et pendant les<br />

quelles les descendants de Canaan et les Gergéséens soutinrent<br />

les Philistins contre les enfants d'Israël. .<br />

., etc.<br />

« Vers ce temps-là, les Berbères passèrent en Afrique.<br />

Cette opinion d'Ibn-Khaldoun, comme le fait très-bien remar<br />

quer M. de Slane, dans le savant appendice placé à la fin de sa<br />

traduction, n'est appuyée sur aucune preuve certaine . Cepen<br />

dant, sans s'arrêter au système de filiation qu'elle adopte, on<br />

doit reconnaître que le même fait subsiste : la tradition de l'ori<br />

gine sémijique des Berbères. Les écrivains latins, byzantins,<br />

TTèTireux et arabes sont d'accord sur ce point. Rien, du reste,<br />

n'est impossible dans la tradition qu'ils rapportent, puisque, à<br />

une époque qui n'est séparée de nous que de huit siècles, l'émi<br />

gration hilalienne a suivi exactement les mêmes phases que celle<br />

retracée par Procope .<br />

'<br />

la Moàs, etc. (Qxanii, 1655, 1 vol. in-4-.1<br />

(1) Voir l'édition latine : Porta<br />

l/p' i8!4.' L<br />

(2) Histoire des Berbères.^ trad. i. de %?'de Slanèff.<br />

~~1A)<br />

Djaiout ou plutôt Galout, car l'on sait que les Arabes emploient la<br />

lettre djim (_-), pour rendre le g dur des Berbères ou le ghimel hé<br />

braïque,<br />

qu'ils n'ont pas.<br />

;


Enfin,<br />

12<br />

pour compléter le nombre de faits pouvant se rapporter<br />

à l'origine des Africains, rappelons que, plus de dîx-huil cents<br />

ans avant notre ère, un peuple se rattachant aux Philistins et<br />

que l'histoire nomme Hyksos ou pasteurs,<br />

rappelle le nomades des Grecs et le chaouïa (1) actuel<br />

— qualificatif<br />

qui<br />

— peuple<br />

qni habitait au-delà du Delta (comme les Hilaliens du onzième<br />

siècle), envahit l'Egypte et renversa la XIIIe dynastie. Les Pha<br />

raons se réfugièrent en Ethiopie, el ce ne fut que deux siècles et<br />

demi plus tard, qu'ils expulsèrent, après de longues luttes, les<br />

Hyksos. Que devint alors cette race asiatique? N'est-il pas admis<br />

sible qu'elle fut refoulée vers l'ouest? N'est-il même pas probable<br />

que cette invasion, dont l'histoire a conservé le souvenir, à cause<br />

de son importance, a élé précédée ou suivie de mouvements du<br />

même genre. L'Egypte a toujours élé la route et le lieu de station<br />

des peuples sémitiques dans leurs marches vers l'ouest.<br />

D'autres traits procédant du dialecte, des mœurs et de la reli<br />

gion des Berbères, viennent renforcer les présomptions qui les<br />

classent parmi les peuples d'origine asiatique. Il est évident que<br />

la langue berbère, par les sons gutturaux qu'elle renferme, par<br />

sa syntaxe, par cette particularité caractéristique de racines géné<br />

ralement trilittères, indiquant une idée primitive,<br />

des formes dérivées toujours constantes,<br />

modifiée par<br />

par ses règles de per<br />

mutation des lettres faibles, et enfin par une foule d'autres (rails,<br />

offre de grandes analogies atec les langues sémitiques. Seul, le<br />

dictionnaire s'en éloigne, etc'est ce qui a porté M. Renan(2) à<br />

classer le berbère dans une famille qu'il propose d'appeler cha-<br />

mitique, avec le copte et les dialectes non-sémitiques de l'Abys-<br />

sinie. La connaissance chaque jour plus complète que l'on ac<br />

quiert de la langue berbère, décidera certainement la question.<br />

Dans lous les cas, il est à remarquer que la domination latine,<br />

qui a imprimé des traces si profondes dans le pays; celle des<br />

Vandales qui l'a suivie,<br />

et enfin celle des Grecs de Byzance<br />

(1) Le mot chaouïa parait signifier dans le dialecte berbère de ce nom :<br />

bergers.<br />

(2) Dans son bel ouvrage intitulé : Histoire générale et système comparé<br />

des langues sémilii/ues.


13<br />

ires deux dernières fort éphémères, il esl vrai), n'ont, pour<br />

ainsi dire, laissé aucun souvenir dans la langue berbère, tandis<br />

que l'arabe l'a modifiée à un tel point que l'on compte mainte<br />

nant un tiers de mots arabes ayant pris la forme berbère et in<br />

corporés dans cetle langue (1). Celte facilité d'assimilation est<br />

un indice non équivoque d'analogie. Le phénicien paraît égale<br />

ment s'être si bien confondu avec le berbère, qu'il est souvent<br />

difficile de décider si les inscriptions constamment mises au<br />

jour en Algérie sont libyques ou puniques.<br />

Quanta la religion primitive des aborigènes, c'était, pour les<br />

contrées du littoral de la Byzacène, le culte barbare de Carthage.<br />

L'auteur chrétien Terlullien, qui écrivait vers la fin du IIe siècle<br />

de notre ère, nous apprend que, de son lemps,<br />

on sacrifiait<br />

encore des enfants ù Saturne. Il est probable que la majorité des<br />

Berbères ne suivaient pas ces rites sanguinaires, importés par<br />

les Phéniciens; néanmoins, le poète Corippus, dans la Johan-<br />

nide (2j, les représenle comme adorant Gurzil, Mastiman et autres<br />

divinités barbares.<br />

Ajl ressort de l'élude des documents fournis par les historiens<br />

v (arabes de la conquête, que la religion la plus répandue en<br />

"*<br />

Afrique était le magisme ou culte du feu,<br />

tel qu'il était pratiqué<br />

vdans l^Asie occidentale avant l'islamisme. Certaines tribus étaient<br />

'<br />

juives, et, enfin, les Indigènes voisins des colonies latines ou<br />

ifrecques étaient chrétiens.<br />

Les tribus berbères juives ont dû être d'établissement plus ré<br />

cent en Afrique. Chassés à leur tour de leur pays, lors de la<br />

dispersion des douze tribus, les Israélites ont apporté en Mag'reb<br />

leur contingent, et, tout en conservant leur religion, se sont<br />

fondus au milieu de la race du pays (3M<br />

(1) Notamment dans le dialecte des Zouaoua.<br />

(2) Poème laudatif en l'honneur des victoires de Jean Troglita (VI"<br />

siècle).<br />

(3) Nous reproduisons ici l'opinion de M. Vivien de St-Martin, lequel<br />

dit, à propos du royaume d'Axoum : 11 est très-probable que des tri<br />

bus juives ont pénétré de très-bonne heure jusqu'aux extrémités de<br />

l'Ethiopie, et, s'il nous fallait fixer une date, nous indiquerions cel{e de<br />

la chute d'Israël et de la dispersion des douze tribus (vers 721 avant J.~<br />

C.)... etc — [Le nord de l'Afrique dans l'antiquité, p. 205-206).


14<br />

-/. Pour ce qui est de la religion chrétienne, elle n'était répandue<br />

que parmi les Berbères romanisés des plaines de la Numidie;<br />

citaient, du reste, de fort mauvais chrétiens, qui, en prenant<br />

part à tous les excès des Donatistes et des Circoncellions, four<br />

nissaient à leurs voisins l'occasion d'usurper leurs places. Saint<br />

Augustin et Ibn-Khaldoun lui-même ont donc élé beaucoup trop<br />

absolus en disant : « Les Berbères sont chrétiens. » >k<br />

Avant de donner notre conclusion sur les origines de la race<br />

berbère, abordons la question de conformation physique, qui<br />

doit entrer en ligne de compte.<br />

La race aborigène de l'Afrique septentrionale présente les<br />

types les plus divers, depuis le nomade basané de l'extrême<br />

Sahara jusqu'au cultivateur blond et taché de rousseur de la<br />

Grande Kabylie, depuis le Mzabi lymphatique jusqu'au vigou<br />

reux montagnard du Rif marocain. Cependant, il est permis<br />

d'avancer que la majeure partie des Berbères rappellent bien des<br />

traits du type sémitique. De nombreux sous-genres se sont for<br />

més par le croisement avec les anciennes races africaines ou avec<br />

les divers peuples conquérants, qui, depuis les temps les plus<br />

reculés, ont envahi el occupé le pays.<br />

Celte présence du type blond aux yeux bleus parmi les Ber<br />

bères,<br />

rapprochée du sens de différentes inscriptions égyptiennes<br />

dont M. de Rougé et autres spécialistes ont donné la traduction,<br />

a porté certains savants et notamment M. le général Faidherbe,<br />

a conclure qu'une race blo^e des bords de la Baltique ou du<br />

nord de la Gaule a conquis, il y a trois mille ou trois mille cinq<br />

cents ans, l'Afrique septentrionale el s'y est établie.<br />

Il est évidemment très-difficile de se prononcer catégorique<br />

ment sur une question ethnographique si reculée. Cependant,<br />

on peut dire qu'il n'y a rien d'impossible dans cette hypothèse<br />

que nous résumons ainsi : une race blonde, originaire de l'Eu<br />

rope, a, sans doute, dans des temps très-anciens, fait invasion<br />

en Afrique et s'est établie dans les cantons du littoral nord. Les<br />

sépultures du genre dit celtique trouvées en maints endroits de<br />

l'Algérie, sont peut-être l'œuvre de celte population qu'il est<br />

permis d'appeler pré-historique. Enfin, les blonds de la Grande<br />

Kabylie sont probablement les descendants de cette race,.


15<br />

Mais il est -certain que ce peuple n'a laissé aucun souvenir<br />

tlans les mœurs et le langage du pays, et que, par conséquent,<br />

les Berbères l'ont, depuis longtemps absorbé.<br />

Après avoir successivement passé en revue les documents pou<br />

vant éclairer la question de l'origine des Berbères et les avoir<br />

discutés sans parti pris, nous arrivons au moment de conclure.<br />

Ce n'est pas sans une réelle appréhension que nous nous voyons<br />

dans la nécessité d'émettre un avis là où tant d'érudits ont hésité<br />

à se prononcer. Il est facile —<br />

l'Algérie ne saurait trop —<br />

a dit M. Lacroix, écrivain dont<br />

déplorer la perle il est facile de bâtir<br />

un ou plusieurs systèmes, de produire, à l'appui, des textes<br />

nombreux, en un mot, d'édifier, à grands frais d'érudition, un<br />

paradoxe ethnographique. . . » Cela est fort juste. Le même écri<br />

vain ajoute, avec non moins de raison : « On ne peut, sur la<br />

question de l'origine des Indigènes de l'Algérie, émettre que des<br />

conjectures (1) ».<br />

C'est donc à ce dernier titre que nous résumons notre opi<br />

nion de la manière suivante :<br />

£j° L'Afrique septentrionale a dû être peuplée par une<br />

série d'immigrations très-anciennes de peuples sémitiques<br />

venus de la Syrie, du nord de l'Arabie ou des bords de l'Eu<br />

phrate (2).<br />

2° Ces groupés araméens se sont assimilé des populations<br />

d'origines diverses —<br />

— trouvées<br />

basanées dans le sud, blondes dans le nord<br />

par eux dans le pays ou venues postérieurement à<br />

leur établissement.<br />

3° La réunion de ces éléments el leur assimilation a formé la<br />

race africaine ou berbère.<br />

4° Cette unification a dû être complète,<br />

à une époque si re-<br />

(1) Lacroix : Ouvrage inachevé, dont la Revue a publié divers ex<br />

traits.<br />

(2) Nous ne parlons pas des<br />

gration arabe hilaliennf.<br />

modifications récentes résultant de l'immi


16<br />

culée, qu'il est permis d'appliquer le litre d'autoehlhones aux<br />

Berbères de l'Afrique (1).<br />

il) M. Oppetit, dans un article sur les tombeaux celtiques, que la So<br />

ciété archéologique de Constantine vient de publier dans son Annuaire<br />

(1870), traite la question de l'origine des Indigènes de l'Afrique et conclut<br />

absolument dans le même sens que nous. Ce résultat identique, fruit de<br />

travaux distincts et de recherches toutes personnelles, doit être pour<br />

nous un grand encouragement. Nous sommes heureux de nous rencon<br />

trer ainsi, avec notre collègue, sur un terrain où l'accord a été, jus<br />

qu'ici, rarement unanime.<br />

Alger. — Typ. Bastille.


l'Afrique<br />

J_^C-C><br />

COMMENT


GOMMENT<br />

L'AFRIQUE SEPTENTRIONALE<br />

A ÉTÉ ARABISÉE (*).<br />

Sur toute la zone littorale de l'Afrique du nord,<br />

depuis la Mer-Rouge jusqu'à l'Atlantique, se trouve<br />

répandue, en diverses proportions selon les localités,<br />

une race d'origine arabique, mélangée assez intime<br />

ment à l'élément indigène pour que le pays ait pris<br />

une physionomie générale arabe. Mais cet aspect n'est<br />

que superficiel, et, dès que l'observateur quitte les<br />

plaines ouvertes du Tel,<br />

tochtnone, avec son type,<br />

il retrouve la vieille race au-<br />

sa langue et ses mœurs<br />

propres. Sur les rives du Nil et sur celles du Sénégal,<br />

dans les montagnes de la Kabylie et au milieu du<br />

Désert;<br />

des Beni-Snous ;<br />

sur les sommets de l'Aurès et dans les vallées<br />

au midi de Tripoli et sur tout le ré-<br />

(*) Ce mémoire a été écrit pour les lectures publiques de la Sorbonne<br />

(1873).


_ 4<br />

—<br />

seau de l'Atlas marocain, partout,<br />

on rencontre le<br />

peuple aborigène de la Berbérie. La race arabe y est<br />

en minorité, el la prépondérance qu'elle y<br />

a acquise<br />

aurait lieu de surprendre si l'histoire des invasions ne<br />

nous offrait plus d'un exemple semblable.<br />

L'époque de l'arrivée et les phases de l'établisse<br />

ment des Arabes en Afrique ont été, jusqu'à présent,<br />

mal connues des historiens européens. En effet, c'est<br />

à l'invasion arabe du VIIe siècle, qui, de fait, n'a été<br />

qu'une conquête lointaine, que l'on a attribué les effets<br />

d'un événement historique beaucoup<br />

plus récent :<br />

l'immigration hilalienne. Ainsi, le peuple berbère,<br />

nombreux et puissant à la chute de la domination by<br />

zantine, s'est trouvé, pour nous, transformé subitement<br />

en peuple arabe, et déchu du grand rôle qu'il a joué<br />

pendant le Moyen-Age. Hâtons-nous de dire qu'il était<br />

difficile, sinon impossible,<br />

d'apprécier sainement cette<br />

question avant la correction des textes et la traduction<br />

des ouvrages des anciens auteurs arabes et notamment<br />

celles de YHistoire des Berbères, d'Ibn Khaldoun*,<br />

faites dans ces dernières années par M. de Slaae.<br />

C'est dans ces texte*<br />

et avec l'appoint de nos re<br />

cherches loeales que nous avons puise les matériaux<br />

d'une Histoire de l'établissement des Arabes dans<br />

l'Afrique septentrionale, dont nous allons essayer de<br />

donner un aperçu. Les strictes limites imposées (1)<br />

nous dispenseront d'entrer dans des détails et de four<br />

nir des justifications pour lesquels nous renvoyons à<br />

notre ouvrage.<br />

(1)<br />

heure.<br />

La lecture de chaque mémoire ne pouvait prendre plus d'une demi


— 5<br />

I.<br />

La conquête de l'Afrique septentrionale par les<br />

Arabes, ,les<br />

achevée dans premières années du VIIIe<br />

siècle et suivie aussitôt de l'envahissement de l'Es<br />

pagne, donna au khalifat ce vaste territoire que les<br />

Orientaux désignèrent sous, le nom de Mag'reb (Occi<br />

dent). Cette conquête s'était effectuée par expéditions<br />

successives dont les premières semblent n'avoir eu<br />

pour mobile que l'espoir du butin : après la victoire ,<br />

les guerriers de l'Islam rentraient, chargés de dé<br />

pouilles, en Orient, et, de là,<br />

allaient guerroyer dans<br />

d'autres directions. Plus tard, les campagnes en Afrique<br />

s'accentuèrent dans un but de conquête ; on exigea<br />

d'abord, la soumission des vaincus ; puis, on leur im<br />

posa la conversion. La ville de Kaïrouane, fondée par<br />

devinMe chef-lieu des nouvelles provinces et la<br />

Okba,<br />

résidence du gouverneur arabe chargé de les admi<br />

nistrer,<br />

avec l'appui de troupes d'Orient/Après un<br />

dem|?siècle de luttes contre les révoltes des indigènes<br />

la soumission de la Berbérie au khalifat fut assurée et<br />

la religion nouvelle se trouva acceptée de tous ; mais<br />

il ne s'introduisit pas, dans le pays, de population co<br />

loniale arabe, et la domination fut toute militaire. Les<br />

conquérants entraînèrent, alors, à leur suite, l'élément<br />

actif berbère à la curée des riches provinces espa<br />

gnoles et surent tirer un merveilleux parti du peuple<br />

vaincu, tout en assurant la tranquillité de l'Afrique. *<br />

Cependant, lorsqu'il n'y eut plus rien à piller en<br />

Espagne ; lorsque les nations revenues chrétiennes, de<br />

leur stupeur, eurent organisé la résistance ; lorsque,<br />

enfin, les nouveaux arrivés ne trouvèrent plus les<br />

mêmes facilités pour s'établir parce que lès places


— — 6<br />

étaient prises, l'émigration d'Afrique se ralentit, et<br />

l'esprit d'indépendance se réveilla chez les Berbères.<br />

Le schisme kharedjite dans lequel -ils s'étaient tous<br />

jetés,<br />

servit de prétexte à une levée de boucliers qui<br />

prit naissance dans l'extrême Mag'reb (Maroc actuel)<br />

et s'étendit bientôt à toute l'Afrique septentrionale.<br />

A partir de ce moment, le rôle des gouverneurs<br />

arabes représentants du khalifat à Kaïrouane devint<br />

précaire. Contraints de tirer leurs troupes d'Orient, ils<br />

se trouvèrent isolés au milieu des indigènes, contre<br />

lesquels il leur fallut combattre à outrance. La guerre<br />

entre les armées arabes et les Berbères kharedjites<br />

ensanglanta de nouveau l'Afrique et eut pour effet<br />

d'arrêter brusquement l'émigration des Maures en<br />

Europe. Ce fut le salut de la Chrétienté, que l'effort<br />

héroïque de Poitiers n'eût pas préservée pour long<br />

temps,<br />

si le courant qui alimentait l'invasion musul<br />

mane ne se fût tari.<br />

Sur ces entrefaites, la dynastie oméiade ayanjuété<br />

renversée, en Orient, par "celle dès Abbaciièsf urr-<br />

membre de la famille dtehue se réfugia en ËsjjÈgne, *<br />

pays qui se trouvait, alo, complètement livré aUuimême,<br />

et y fonda une royauté indépendante (755). La<br />

le commen<br />

perte de l'Espagne fut, pour le khalifat,<br />

cement du démembrement de ses possessions dans le<br />

Mag'reb.<br />

Durant de longues années, les Berbères d'Afrique<br />

firent éprouver de rudes échecs aux milices syriennes<br />

envoyées d'Orient pour les réduire. Plusieurs fois<br />

même ils s'emparèrent de Kaïrouane et ne laissèrent<br />

échapper que par le fait de leurs dissensions intestines<br />

l'indépendance un moment reconquise.<br />

Enfin, vers l'an 800, un excellent général arabe,<br />

nommé Ibrahim ben Abou l'Ar'leb, parvint à rétablir<br />

la paix dans l'Ifrikià (partie orientale de l'Afrique du


v<br />

— — 7<br />

Nord). Désigné comme gouverneur par Haroun-er-<br />

Rachid^, il obtint de ce prince les prérogatives d'une<br />

vice-royauté héréditaire, sous la suzeraineté directe<br />

du khalifat.<br />

Mais,<br />

si cette habile mesure devait retarder d'un<br />

siècle la chute de l'autorité arabe en Afrique, elle<br />

consacrait la perte de tout le Mag'reb extrême, qui, au<br />

profit des guerres des kharedjites, avait reconquis son<br />

autonomie. Un Arabe de la descendance d'Ali, nommé<br />

Edris, après avoir échappé au désastre de Fekh,<br />

où sa<br />

famille et ses partisans avaient été écrasés par les<br />

Abbacides,<br />

se réfugia en Mag'reb. Bien accueilli par<br />

les Berbères de cette contrée, qui l'avaient reconnu<br />

comme chef, il avait fondé, en 789, à Oulili (non loin<br />

de l'emplacement de Fès) l'empire édricide. Plusieurs<br />

autres principautés indépendantes s'étaient établies<br />

dans le Mag'reb central et dans le Sahara.<br />

Il ne restait donc, en Afrique,<br />

aux khalifes d'Orient<br />

l'Ifrikïa,<br />

que'<br />

représentés par les vices-rois ar'lebites,<br />

la Tunisie et la province<br />

Tripolitaine,<br />

de Constantine.<br />

-."-sîCà-dire la<br />

Pandant près d'un siècle, la dynastie arlebite régna<br />

à 1-aïrouane avec un certain éclat. Renonçant à toute<br />

action sur le Mag'reb,<br />

les princes de cette famille re<br />

portèrent leur activité contre les îles de la Méditer<br />

ranée et soumirent à leur puissance la Sicile et Malte,<br />

et, sur le continent, la Calabre et les côtes de la Cam-<br />

panie.<br />

Mais,<br />

tandis que -le nom arabe jetait ainsi un der<br />

nier reflet de.gloire en Occident, un nouvel élément<br />

de trouble s'introduisait en Afrique, et il allait en ré<br />

sulter de profondes secousses. Des émissaires de la<br />

secte chiaïte (fâtemide), arrivés d'Orient, trouvaient un<br />

refuge chez les Berbères de la tribu de Ketama, habi<br />

tant les montagnes situées entre Constantine et Bougie


et faisaient adopter promptement leur doctrine par ces<br />

indigènes. Vers 893,<br />

tandis que l'ar'lebite Ibrahim ré<br />

égnait en despote à Kaïrouane, la tribu de Ketama pre<br />

nait les armes à la voix d'un certain Abou Abd Allah,<br />

représentant du chef de lasecte, le Mehdi Obéïd Allah.<br />

En peu d'années, grâce à l'habileté de ce lieutenant<br />

et à l'enthousiasme patriotique des Berbères, les gou<br />

verneurs ar'lebites se trouvèrent réduits à la dernière<br />

les Chiâïtes<br />

extrémité, et, enfin,- au mois d'avril 909,<br />

firent leur entrée à Kaïrouane, tandis que Ziadet Allah,<br />

dernier vice-roi arlebite, prenait la fuite vers l'Orient.<br />

Dès lors,<br />

le khalifat ne conserva plus la moindre<br />

de la<br />

autorité sur la Berbérie, et l'on peut dire que,<br />

domination arabe en Afrique, il ne resta que la reli<br />

gion qu'elle y avait implantée et la langue du Coran,<br />

parlée par élégance à la cour des princes indigènes et<br />

dans les écoles du Mag'reb et de l'Espagne. Le pays<br />

reprit entièrement son autonomie, car l'empire obéïdite<br />

(ou fâtemide), qui remplaça à Kaïrouane la vice-royauté<br />

des Ar'lebites, bien qu'ayant à sa tête une faïnilètf<br />

arabe, ne s'appuya uniquement que sur l'élément in<br />

digène ; c'est ce qui avait lieu au Mag'reb^our<br />

déj^<br />

les Edricides et'en Espagne pour les Oméïades. X<br />

Bientôt, du reste, la famille obéïdite,<br />

qui ne songeait<br />

qu'à s'emparer du trône du khalifat, sur lequel elle<br />

prétendait avoir des droits comme descendante de<br />

Mahomet, tourna tous ses regards vers l'Orient. De<br />

grandes révoltes des Berbères retardèrent la réalisation<br />

de ses plans. Mais, sous le règne de l'obéïditeElMoaz,<br />

la pacification de l'Ifrikia ayant été obtenue, ce prince<br />

fit la conquête de l'Egypte,<br />

chidites, et, en 973,<br />

gouvernement fâtemide.<br />

renversa le trône des Ikh.<br />

transporta au Caire le siège du<br />

Un chef berbère de la tribu des Sanhâdja, Bolog-<br />

guine, de la famille Ziride,<br />

reçut le titre de gouver-


— — 9<br />

neur de l'Afrique pour le compte des Fâtemides, et<br />

établit sa résidence à Kaïrouane. Vers la même époque,<br />

la dynastie édricide achevait de s'éteindre dans le<br />

Mag'reb, et celle des Oméïades d'Espagne penchait<br />

vers son déclin. La race berbère, rendue à elle-même,<br />

se déchirait dans des luttes intestines et incessantes ;<br />

les vieillis tribus indigènes y consumaient leurs forces ;<br />

mais une nouvelle génération africaine, arrivant du<br />

Sud,<br />

en profitait pour s'avancer insensiblement vers<br />

le Tel et se préparer à saisir le pouvoir : c'est par elle<br />

que l'unité berbère allait se rétablir.<br />

Cependant, les bonnes relations entre les souverains<br />

fâtemides et leurs représentants de Kaïrouane n'avaient<br />

pas tardé à se troubler et à devenir des plus difficiles.<br />

Les princes zirides avaient déjà l'indépendance de fait ;<br />

ils la proclamèrent en répudiant solennellement la su<br />

zeraineté des khalifes du Caire.<br />

Cette déclaration d'indépendance eut lieu vers 1048.<br />

L'Afrique se trouvait alors en proie à une anarchie<br />

générale ; la famille ziride s'était fractionnée : un<br />

groupe, avec El Moaz pour chef, continuait de résider<br />

à Kaïrouane,<br />

mais ce prince avait perdu toute autorité<br />

sur. l'Ifrikïa ; l'autre groupe ziride avait fondé la dy<br />

nastie des Beni-Hammad, à la Kalâa, au nord de Me<br />

dia. Tout le reste de l'Afrique était en butte aux ri<br />

valités des partis. L'Espagne musulmane ne se trouvait<br />

pas dans une situation meilleure ; le trône oméiade<br />

s'était<br />

'<br />

écroulé et tous les gouverneurs de province<br />

luttaient pour s'arracher le pouvoir.<br />

Tel était l'état du pays vers le milieu du XIe siècle.


10<br />

IL<br />

Le khalife fâtemide du Caire, dans l'impossibilité de<br />

tirer une vengeance directe de la rébellion de son re<br />

présentant de Kaïrouane, lança contre l'Afrique les<br />

tribus arabes de Hilal et de Soleïm. « Je vous fais<br />

« cadeau du Mag'reîT— leur dit-il —-<br />

« d'El Moâz le Sanhadjien,<br />

« à l'autorité de son maître »<br />

et<br />

du royaume<br />

esclave qui s'est soustrait<br />

Ces tribus étaient originaires de la province deNedj^<br />

er^ Arabie,<br />

où elles s'étaient établies dans le courant<br />

du VIIIe siècle. Pendant longtemps, elles avaient par<br />

couru, en nomades, ces solitudes, vivant autant du<br />

brigandage que du produit de leurs troupeaux. Lors<br />

de la sanglante révolte des Karmate, dans le Xe siècle,<br />

les tribus de Hilal et de Soleïm prirent part à tous les<br />

excès.de cette secte dévastatrice, puis l'aidèrent à dé<br />

fendre la Syrie contre les Fâtemides. Aussi, dès que<br />

le khalife El Aziz eut a|fievé d'effectuer cetle con<br />

quête, au prix des plus grands efforts, jugea- t-il né<br />

cessaire d'éloigner les nomades indisciplinés qui lui<br />

avaient suscité tant d'embarras. Par l'ordre de ce<br />

prince, ils furent, vers le commencement du XIe siècle,<br />

transportés dans le Saïd, ou Haute-Egypte, et can<br />

tonnés sur la rive droite du Nil. Mais, bientôt, des<br />

inconvénients sans nombre résultèrent de la concen<br />

tration de ces Arabes sur un territoire trop restreint.<br />

La situation était devenue intolérable, lorsque la<br />

révolte d'El Moâz se produisit. Le khalife fâtemide<br />

trouva alors le moyen de susciter au rebelle de graves<br />

difficultés et de se débarrasser des Arabes, en les lan<br />

çant sur la Berbérie.


- 11<br />

—<br />

La tribu de Hilal formait cinq divisions principales :<br />

Athbedj;<br />

Djochem ;<br />

Riah';<br />

Zor'ba ;<br />

Makil.<br />

Celle de Soleïm formait de nombreuses subdivi<br />

sions (1).<br />

Il est impossible d'évaluer, d'une façon précise, le<br />

chiffre de la population qui passa alors en Afrique ;<br />

mais diverses raisons déduites dans l'ouvrage nous<br />

font croire qu'il n'y a pas. lieu de l'estimer à plus de<br />

deux, cent ou deux cent cinquante mille personnes.<br />

Du premier bond, les Arabes "hilaliens envahirent<br />

la Tripolitaine ; puis, les tribus de Riah'<br />

et Djochem<br />

pénétrèrent dans la Tunisie, que le ziride El Moâz<br />

leur ouvrit dans lo fol espoir de se servir d'elles pour<br />

vaincre son cousin le Hammadite de la Kalâa. Pendant<br />

que ces Arabes livraient au pillage les plaines de la<br />

Tunisie,<br />

l'ouest,<br />

le reste des Hilaliens continuait sa route vers<br />

par le Djerid et le Souf. Quelques groupes pé<br />

nétrèrent dans la province de Constantine par les dé<br />

filés<br />

des'<br />

montagnes. Quant à la tribu de Soleïm, qui<br />

sans doute, était la dernière dans l'ordre de marche,<br />

elle occupa la Tripolitaine.<br />

Du Souf, le flot des Hilaliens devenant de moins en<br />

moins compacte, entra dans le Zab et le Hodna et<br />

vint mourir à l'extrémité occidentale de cette plaine.<br />

Ce fut la première phase de l'immigration,<br />

car à ce<br />

moment, c'est-à-dire vers le premier tiers du XIIe siècle,<br />

chacun avait trouvé sa place.<br />

Les Soleïm, avons-nons dit,<br />

taine ;<br />

(1) Voir, dans notre ouvrage, les fractions de ces tribus.<br />

occupaient la Tripoli


Les Riah'<br />

— — 12<br />

et Djochem s'étaient établis dans les<br />

plaines de la Tunisie.;<br />

Les Athbedj entouraient, au sud, la province de<br />

Constantine ; une de leurs fractions, celle des Aiadh,<br />

avait pénétré dans les montagnes au nord-est de Mecila ;<br />

Les Zor'ba parcouraient, en nomades, le Zab occi<br />

dental et le Hodna ;<br />

Les Makil, avec les Amour (4es Athbedj), com<br />

mençaient à entrer dans les hauts-plateaux du Mag'reb<br />

central.<br />

Les tribus berbères avaient bien lutté isolément<br />

pour défendre leurs territoires contre les envahis<br />

seurs ; mais, réduites à leurs propres forces, trahies<br />

souvent par leurs rivales, elles avaient dû céder pied<br />

à pied ou s'ouvrir devant l'étranger. Les souverains<br />

indigènes n'avaient pas tenté d'efforts sérieux contre<br />

l'invasion ; plusieurs même n'avaient vu dans' les Hi<br />

laliens que d'utiles auxiliaires pour leurs guerres per<br />

sonnelles, et quand, revenus de leur erreur, ils avaient<br />

essayé de repousser l'étranger, lev sort des armes leur<br />

avait été contraire. Ils avaient, alors, renoncé à la<br />

lutte ; peu leur import_|fc, en effet,<br />

que les contrées<br />

du sud, les hauts-plateaux arides, fussent occupés par<br />

les nomades arabes ou par les nomades berbères.<br />

La fondation du puissant empire almoravide, en<br />

Mag'reb, par les Sanhâdja du Désert, en commençant<br />

de rétablir l'unité chez le peuple berbère, absorbait,<br />

alors, toute son attention. Celte révolution politique et<br />

religieuse fut complétée par l'Africain Abd-el-Mou-<br />

mene, qui,<br />

après avoir renversé la dynastie almora<br />

vide, sut réunir sous son autorité toute l'Afrique sep<br />

tentrionale et l'Espagne musulmane. Ainsi, en 1147,<br />

l'empire des Masmouda, montagnards du Grand-Atlas,<br />

succéda, sous le nom d'Almohâde, à celui des no<br />

mades sahariens (Almoravides).


— — 13<br />

Pendant que ces révolutions occupaient le peuple<br />

berbère, les Arabes hilaliens, dont les conditions<br />

d'existence étaient devenues bien meilleures dans leur<br />

nouvelle patrie, se multipliaient rapidement et conti<br />

nuaient, sans bruit et insensiblement, leur<br />

d'expansion vers l'ouest. Mais, partout ils se trouvaient<br />

à l'étroit : il fallait un écoulement à leur, trop plein,<br />

mouvement'<br />

un aliment à leur exubérance d'activité. La révolte<br />

des Ben-R'anïa,<br />

ravide,<br />

princes berbères de la famille almo-<br />

en fournit l'occasion et les moyens. Pendant<br />

près de cinquante ans, les deux Ben R'anïa tinrent<br />

la campagne contre les Almohades, et, soutenus par<br />

répandirent la dévastation dans le Mag'reb<br />

les Arabes,<br />

central et l'Ifrikïa. De leur quartier général, situé<br />

dans les contrées sahariennes de la Tripolitaine, ces<br />

infatigables aventuriers poussaient des pointes har<br />

dies sur le Tel : Tunis, Bougie, Alger, Tripoli, etc.,<br />

tombèrent successivement en leur pouvoir et eurent à<br />

supporter leur tyrannie et les excès des Hilaliens.<br />

Cette révolte, dont les souverains almohades finirent<br />

par triompher, porta un coup mortel à leur empire en<br />

nécessitant, à Tunis, la création d'une vice-royauté<br />

qui ne tarda pas à se déclarer indépendante ; elle eut,<br />

en outre, pour résultat d'ouvrir partout le Tel aux Hi<br />

laliens. En 1188, le khalife almohâde El Mansour,<br />

à la<br />

suite d'une victoire remportée sur Ibn R'anïa, voulut<br />

punir les Arabes de la Tunisie qui avaient soutenu<br />

l'aventurier et les mettre dans l'impuissance de nuire<br />

de nouveau. A cet effet, il fit transporter trois tribus,<br />

les Acem et Mokaddem des Djochem, et une grande<br />

partie Riah', dans les plaines de Tamesna et d'Azr'ar,<br />

sur le versant océanien du Mag'reb (Maroc) et les éta<br />

blit au milieu de populations berbères qui,<br />

fait,<br />

sans ce<br />

seraient sans doute restées jusqu'à aujourd'hui<br />

pures de tout mélange arabe. Des fractions de la tribu


— — 14<br />

de Soleïm remplacèrent ces Hilaliens en Tunisie. Les<br />

souverains almohades employèrent aussi un grand<br />

nombre d'Arabes à la guerre d'Espagne contre les<br />

chrétiens,<br />

qui avaient repris une vigoureuse offensive<br />

•et remporté de grands succès.<br />

L'empire almohâde, réduit par la séparation hafside<br />

et déchiré par les factions, s'affaiblit promptement ;<br />

en 1266, il s'écroula sous les coups d'une autre tribu<br />

indigène,<br />

celle des Beni-Merine. Trois dynasties se<br />

partagèrent alors la suprématie de l'Afrique : les Al<br />

mohades hafsides régnèrent à Tunis ; les Abd-el-Oua-<br />

dites ou Zeyanites, à Tlemcen, et les Merinides, à Fès.<br />

Ces deux derniers empires avaient été fondés par des<br />

tribus berbères-zenètes (Beni-Merine et Abd-el-Ouad)<br />

qui autrefois habitaient en les hauts-plateaux<br />

et avaient pénétré dans le Tel en profilant de l'affai<br />

blissement des vieilles tribus indigènes, pendant les<br />

guerres que les Almoravides et les Almohades avaient<br />

eu à soutenir. Les Arabes hilaliens qui avaient contri<br />

bué à leur refoulement prirent, dans les hauts-pla<br />

teaux, les places laissées par les Zenètes, et il se<br />

trouva qu'ils garnissaient toute la ligne des contrées<br />

méridionales, prêts à s'élancer dans le Tel à la première<br />

occasion.<br />

Les luîtes incessantes qui divisèrent les Hafsides,<br />

les Zeyanites et les Merinides ne tardèrent pas à leur<br />

fournir cette occasion. Offrant, tour à tour, leurs bras<br />

aux souverains berbères ou à leurs compétiteurs, les<br />

Arabes se firent donner, en récompense, des fiefs dans<br />

le Tel. Les princes indigènes s'entourèrent de ces<br />

auxiliaires étrangers,<br />

dont la fidélité leur semblait ga<br />

rantie par l'intérêt qu'ils avaient de conserver leurs<br />

territoires. Mais, une fois entrés dans cette voie, il<br />

leur fut bientôt difficile de contenter l'avidité des Hi<br />

laliens dont chaque service devait se payer par la


— — 15<br />

concession de nouveaux fiefs, au détriment de la race<br />

berbère. Si, alors, la récompense tardait, les Arabes<br />

trouvaient sans peine quelque prétendant qui, avec<br />

leur appui, s'emparait du pouvoir, régnait par leur bon<br />

plaisir et n'avait rien à leur refuser.<br />

Les souverains hafsides abandonnèrent ainsi toute la<br />

Tunisie aux Soleïm.<br />

Les plaines de la province de Constantine furent<br />

envahies par les Dréid, Dahhak, Aïadh, Kerfa, etc.,<br />

fractions des Athbedj.<br />

Le Hod'na fut occupé par les Daouaouida (des<br />

Riah');<br />

Les fractions de la tribu de Yezid (Zor'ba) : Saad,<br />

reçurent en fief<br />

Khachna, Beni-Moussa, Djouab, etc.,<br />

les plaines de Hamza et s'étendirent dans les mon<br />

tagnes environnantes.<br />

Celles de la tribu de Hocéine (Zor'ba) : Djendel,<br />

s'établirent aux environs du Titeri<br />

Kharrach, etc.,<br />

(près de Médéa).<br />

Les Thaaléba (des Makil),<br />

environs de Médéa,<br />

après avoir occupé les<br />

pénétrèrent dans la Mitidja.<br />

D'autres fractions de la tribu de Zor'ba,<br />

les Attaf, Malek et Souéid,<br />

telles que<br />

cette dernière formant :<br />

les Chebaba, Hasasna, Flitta, Sbéih', Habra, Med-<br />

jaher, etc.,<br />

et de ses environs.<br />

prirent possession de la vallée du Chélif<br />

Le reste des Zor'ba, c'est-à-dire la fraction de Oroua,<br />

formant les Obéid-Allah, Naïl, Cherifa, Sahari, Ou-<br />

lad-Slimane, etc.; celle des Dïalem, formant les Bénibou-Ziad,<br />

Akkerma, etc., et celle des Amer, s'éten<br />

dirent dans les hauts-plateaux qui environnent le<br />

Djebel-Amour.<br />

A Tlemcen,<br />

les Abd-el-Ouadites s'entourèrent com<br />

plètement d'Arabes. Yar'moracène ben Zeyane, fon<br />

dateur de cette dynastie,<br />

était allé chercher aux envi-


— — 16<br />

rons du Hod'na les Hameyane, des Zor'ba, et les<br />

Mehaia et Amer, des Athbedj, et les avait établis au<br />

midi de sa capitale (1283). Ses successeurs concédèrent<br />

aux Souéid et aux Amer toutes les plaines de la pro<br />

vince d'Oran, et, à la fraction makilienne des Doui-<br />

Obéid^Allah, formant les Djaouna, R'ocel, Metarfa,<br />

etc., la campagne au nord et â l'ouest de Tlemcen.<br />

Les autres fractions des Makil, telles que les Douipénétrèrent<br />

dans la<br />

Mansour, Beni-Mokhtar, Hedadj,<br />

vallée de la Moulouïa, ou bien —<br />

et ce fut le plus grand<br />

nombre — contournèrent le Grand-Atlas et.occupèrent<br />

la région méridionale du Maroc, jusqu'à l'Atlantique.<br />

Ce fut ainsi que toutes les plaines passèrent succes<br />

sivement aux mains des étrangers, tandis que les abo<br />

rigènes se retranchaient dans les montagnes escarpées<br />

ou dans les cantons retirés du littoral.<br />

Ce mouvement fut achevé vers la fin du XIVe siècle,<br />

et, dès lors,<br />

l'unité du peuple berbère se trouva rom<br />

pue ; le mélange intime qui se fit entre la race indigène<br />

et l'élément étranger,<br />

celui-ci,<br />

en donnant la prédominance à<br />

acheva l'œuvre de dénationalisation de la<br />

Berbérie. Les aborigènes! repoussés par leurs princes<br />

qui s'accordaient mieux de la servilité des Arabes,<br />

formèrent, par-ci par-là, des groupes indépendants,<br />

des confédérations comme ce que nous appelons la<br />

Grande-Kabilie,<br />

thône se sont conservées.<br />

où les traditions du peuple autoch-<br />

L'établissement de la domination turque ne modifia<br />

|en rien ces conditions. La seule politique des Ottomans<br />

consista à s'appuyer sur l'antagonisme des populations<br />

en les opposant les unes aux autres ; ils contribuèrent<br />

ainsi à éteindre dans le pays tout sentiment national,<br />

et c'est par ce moyen qu'ils purent, avec des forces<br />

très-minimes,<br />

le maintenir sous leur joug.<br />

Les populations de race berbère qui se trouvaient


— - 17<br />

en contact avec des groupes arabes, subirent promp-<br />

tement leur influence, se mélangèrent à eux,<br />

et fini<br />

rent par oublier, sinon renier leur origine. C'est ce<br />

qui est déjà constaté, d'une, façon três-caractéristique,<br />

par Ibn Khaldoun, qui écrivait vers 1390. « Il se<br />

« trouve des Houara —<br />

dit<br />

cet auteur (t. I, p. 278) —<br />

«. sur les plateaux, depuis Tebessa jusqu'à Badja. Ils<br />

« vivent en nomades et sont comptés au nombre des<br />

« Arabes pasteurs de la tribu de Soléim, auxquels, du<br />

« reste, ils se sont assimilés par le langage et l'habil-<br />

« lement,<br />

ainsi que par l'habilude de vivre sous la<br />

« tente. Comme eux, ils se servent de chevaux pour<br />

« montures, ils élèvent des chameaux,<br />

ils se livrent à<br />

« la guerre, et ils font la station du Tel dans l'été et<br />

« celle du Désert dans l'hiver. Ils ont oublié leur dia--<br />

« lecte berbère pour apprendre la langue plus élégante<br />

« des Arabes et à peine comprennent-ils une parole<br />

« de leur ancien langage. y><br />

Cette peuplade berbère ainsi arabisée a formé la<br />

grande tribu qui s'appelle maintenant les Hanencha;<br />

car il arriva ceci, qu'en changeant de nationalité, les<br />

vieilles tribus prirent d'autres noms. De nouvelles ag<br />

glomérations se formèrent d'épaves des anciennes<br />

tribus indigènes et de groupes arabes qui se réunirent<br />

autour de marabouts venus généralement du Maroc<br />

et dont elles prirent les noms. C'est ce qui explique<br />

que lorsque l'on questionne en Algérie les indigènes<br />

arabes ou arabisés sur leur origine, on obtient trèssouvent<br />

cette réponse : « Nous descendons de Sidi....,<br />

« marabout originaire de l'Ouest. » Ces gens n'ont,<br />

du reste,<br />

aucune notion de leur histoire et se con<br />

tentent, à cet égard,<br />

fausseté le dispute à l'absurde.<br />

de répéter des traditions où la


— — 18<br />

y /Comme conclusion à ce qui précède/ résumons les<br />

faits dans l'ordre chronologique suivant :<br />

1° De 660 à 710,<br />

les Arabes ; ./<br />

période de conquête du pays par<br />

*'<br />

.__<br />

''..^jej-i-^-Ay,'<br />

2° De 710 à 909, occupation militaire par les Arabes,<br />

réduite successivement à la possession de l'Ifrikia et<br />

cessant en 909, par l'expulsion des Arlebites, derniers<br />

représentants du khalifat ;<br />

3° De 909 elle-<br />

à 1048, l'Afrique berbère, rendue à<br />

même, obéit à des chefs indigènes sous la suzeraineté<br />

des Fâtemides; en 1048, elle se déclare indépen<br />

dante ;<br />

Et 4° 1048, immigration hilalienne qui introduit l'é<br />

lément arabe comme population en Afrique ; ces<br />

Arabes, après avoir séjourné dans les hauts-plateauxy<br />

s'établissent, peu à peu, dans les plaines du Tel. Vers<br />

1400 ce mouvement est terminé.<br />

^ / ;<br />

— Cette rapide esquisse pourra donner nous l'espé<br />

— rons une idée généraleMes conditions dans lesquelles<br />

l'Afrique septentriolale aT5té arabisée.<br />

Nulle part — croyons-nous — la question n\_e,nr3bï>_'<br />

été ainsi envisagée. L'histoire de l'Afrique du nord<br />

entre donc dans une nouvelle phase ; les voiles qui<br />

nous la dérobaient se déchirent, les erreurs disparais<br />

sent et la chaîne rompue des événements se relie.<br />

Quant à nous, si de longues années de recherches<br />

nous ont permis d'apporter notre contingent à cette<br />

œuvre de réédification, nous en reportons tout le mé<br />

rite à M. le baron de Slane,<br />

vaux l'a rendue possible.<br />

qui par ses savants tra<br />

CONSTANTINE. — IMPRIMERIE L. MARLE.


•y<br />

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