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L'ENSEIGNANT D'EPS A-T-IL LE DROIT DEVIEILLIR ?

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<strong>L'ENSEIGNANT</strong> <strong>D'EPS</strong> A-T-<strong>IL</strong><br />

<strong>LE</strong> <strong>DROIT</strong> DE VIE<strong>IL</strong>LIR ?<br />

PAR C. DORV<strong>IL</strong>LÉ ET S. CAMEL<br />

La question iconoclaste posée en<br />

titre n'est pas nouvelle (1). L'alignement<br />

du régime de retraite des<br />

fonctionnaires sur celui du<br />

privé (2) ayant fait passer la<br />

durée de carrière d'un enseignant<br />

de trente sept et demi à quarante<br />

ans. la disparition progressive des<br />

congés de fin d'activités (CFA),<br />

les différents travaux relatifs à<br />

l'épuisement professionnel des<br />

enseignants (3), le succès de la<br />

possibilité d'une « seconde carrière<br />

» dans l'administration<br />

(possibilité de détachement dans<br />

les administrations, les collectivités<br />

territoriales et les établissements<br />

publics administratifs,<br />

offerte aux enseignants justifiant<br />

d'au moins quinze ans de service<br />

depuis la rentrée 2005), mettent<br />

en lumière l'actualité de cette<br />

interrogation cruciale, quand on<br />

sait que les professeurs de plus de<br />

50 ans représentent aujourd'hui<br />

33,6 % de la population enseignante<br />

(4).<br />

Si beaucoup de travaux portent<br />

sur les débuts de carrière, en<br />

revanche, il y a peu d'études centrées<br />

sur les enseignants en fin de<br />

vie professionnelle (5). L'enquête<br />

« Fins de carrière » publiée<br />

par le SNEP (6), révélait un profond<br />

ras-le-bol et pointait que<br />

70 % des personnels souhaitaient<br />

s'arrêter dès que la condition<br />

d'âge était remplie, même sans<br />

pouvoir bénéficier d'une retraite<br />

à taux plein.<br />

Au-delà du problème lié à la cessation<br />

de la vie active, se profile<br />

une réflexion anthropologique<br />

sur la vieillesse comme révélateur<br />

des contradictions et des<br />

inquiétudes de notre temps.<br />

Voilà, en effet, une société dans<br />

laquelle, chacun s'en réjouit, l'on<br />

vit de plus en plus en plus vieux,<br />

mais où les premiers signes de<br />

l'âge sont désormais vécus<br />

comme un handicap personnel et<br />

professionnel. Voilà une société<br />

de la performance qui associe<br />

beauté, jeunesse et réussite, au<br />

point de faire de l'apparence physique<br />

un élément déterminant<br />

d'identité (7). Plus les sociétés<br />

développées vieillissent, plus<br />

elles refusent de l'accepter. Mais<br />

plutôt que de voir le vieillissement<br />

comme une catastrophe, il<br />

serait certainement préférable de<br />

le voir comme un ensemble de<br />

défis à relever (8).<br />

L'ÉPREUVE DU TEMPS<br />

POUR <strong>LE</strong>S ENSEIGNANTS<br />

<strong>D'EPS</strong><br />

Usure du corps<br />

Le métier d'enseignant d'EPS<br />

n'est pas « un long fleuve tranquille<br />

» (9) et les représentants de<br />

cette discipline spécifique semblent<br />

plus exposés aux stigmates<br />

liés à l'âge. Ce métier nécessite<br />

un fort investissement corporel :<br />

station debout, démonstrations,<br />

parades, déplacements de matériel,<br />

aléas climatiques, grands<br />

espaces, bruit, vigilance accrue<br />

dans les activités physiques à<br />

risque, etc. Si l'on ajoute à cela<br />

les séquelles d'une formation initiale<br />

sportive et le manque<br />

d'échauffement avant chaque<br />

séance, nous pouvons comprendre<br />

que « l'usure du corps »<br />

est une réalité pour les enseignants<br />

d'EPS (10). Suite aux<br />

observations qu'il a pu faire sur le<br />

terrain, B. Paris constate que<br />

« c'est autour de cinquante ans<br />

que s'opère la bascule entre le<br />

plein dynamisme pédagogique et<br />

le début d'une certaine lassitude<br />

parfois accompagnée de micro<br />

pathologies rendant le corps déficient<br />

si ce n'est douloureux<br />

» (11). Il note d'ailleurs que<br />

les enseignants de 50 à 60 ans<br />

sont près de 40 % à qualifier leur<br />

santé de passable à mauvaise<br />

(pourcentage encore plus élevé<br />

chez les femmes).<br />

Usure mentale et morale<br />

Si le vieillissement touche de<br />

plein fouet le professeur d'EPS<br />

sur le plan physique, il peut aussi<br />

avoir des répercussions sur le<br />

plan mental (usure psychique liée<br />

à un stress important, irritabilité<br />

Comment les<br />

enseignants d'EPS<br />

recomposent-ils<br />

leurs identités<br />

professionnelles<br />

en fin de carrière?<br />

croissante), et moral (remise en<br />

question de son utilité sociale).<br />

En effet il est difficile de vieillir<br />

devant un public éternellement<br />

jeune et constamment renouvelé.<br />

H. Hamon utilise une jolie formule<br />

pour qualifier cet état de<br />

fait : « l'éternelle jouvence et<br />

l'éternelle décrépitude amorcent,<br />

dans la relation pédagogique, un<br />

tango ambigu, tantôt roboratif,<br />

tantôt exténuant » (12). Différents<br />

travaux (13) sur les représentations<br />

sociales des acteurs du<br />

système scolaire vis-à-vis de<br />

l'EPS et de ses professeurs montrent<br />

que l'image du « prof de<br />

sport » est celui d'un enseignant<br />

jeune et dynamique, toujours en<br />

forme, n'hésitant pas à participer<br />

et à démontrer. Comment incarner<br />

alors jusqu'au bout cette<br />

représentation de vitalité, d'enthousiasme,<br />

d'énergie qu'attendent<br />

notamment les élèves ? Si le<br />

professeur de lettres conserve (et<br />

souvent accroît) une maîtrise verbale<br />

et des connaissances littéraires<br />

supérieures à celles de ses<br />

élèves jusqu'au bout de sa carrière,<br />

le professeur d'EPS perd lui<br />

au fil du temps son atout le plus<br />

précieux et se retrouve parfois<br />

vaincu sur le plan de la prouesse<br />

physique par ses propres élèves.<br />

Quel est alors le prix à payer pour<br />

le renoncement à cette image un<br />

peu narcissique de « l'athlète » ?<br />

46 POUR VOUS ABONNER AUX REVUES EP.S ET EPS 1 TEL 01 55 56 71 28 EMA<strong>IL</strong> abonnements.eps@groupe-gli.com<br />

Revue EP.S n°324 Mars-Avril 2007 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé


Sentiment de décalage<br />

L'EPS a vécu ces trente dernières<br />

années de profondes mutations<br />

institutionnelles concrétisées par<br />

de nombreux textes officiels<br />

organisant la discipline (contenus,<br />

programmes, évaluation,<br />

etc.), ce qui peut amener les<br />

enseignants plus âgés à se sentir<br />

en décalage avec les compétences<br />

professionnelles nouvelles exigées<br />

par l'institution (14). Au fil<br />

des ans, s'ajoutent des difficultés<br />

relationnelles avec les élèves :<br />

hétérogénéité croissante des<br />

publics, attentes diversifiées,<br />

comportements parfois anomiques,<br />

manque de motivation<br />

pour les pratiques « de base » au<br />

profit des nouvelles pratiques<br />

plus « fun » difficilement maîtrisées<br />

pédagogiquement par les<br />

collègues plus anciens. Autant<br />

d'évolutions qui affectent l'exercice<br />

du métier et peuvent expliquer<br />

ce sentiment d'usure grandissant.<br />

Cependant le vieillissement ne<br />

présente pas que des inconvénients.<br />

M. Huberman s'est intéressé<br />

à la carrière des enseignants<br />

et a décrit sept étapes organisées<br />

selon les années d'ancienneté<br />

dans leur cycle de vie professionnelle<br />

(15). Il relève notamment<br />

que les facettes pédagogiques<br />

sont mieux maîtrisées avec l'âge,<br />

que les enseignants expérimentés<br />

connaissent plus finement les<br />

rouages du système scolaire,<br />

qu'ils entretiennent de meilleures<br />

relations avec les autres enseignants<br />

et l'administration, qu'ils<br />

contrôlent mieux leur affectivité,<br />

qu'ils utilisent la mobilité horizontale<br />

(mutation) pour trouver<br />

un lieu d'exercice plus idéal (16).<br />

<strong>LE</strong>S REPÈRES<br />

THÉORIQUES ET<br />

MÉTHODOLOGIQUES<br />

Cadre conceptuel<br />

Nous nous inspirons de la sociologie<br />

constructiviste de l'identité<br />

mise en œuvre par C. Dubar (17)<br />

qui considère que les situations et<br />

les parcours professionnels sont<br />

construits par des interactions<br />

avec autrui. Les carrières des<br />

enseignants suivent un certain<br />

nombre d'étapes, de paliers, en<br />

termes de positions et de dispositions,<br />

d'intérêts et d'expériences<br />

qui s'accompagnent d'une mise<br />

en cohérence ou, au contraire,<br />

d'une mise en disjonction entre<br />

le projet professionnel initial et<br />

son actualisation pratique. La<br />

construction de l'identité profes­<br />

EP.S № 324 - MARS-AVR<strong>IL</strong> 2007<br />

sionnelle n'est jamais définitivement<br />

stabilisée. L'exigence<br />

d'adaptation, de redéfinition du<br />

métier, de recomposition de<br />

l'identité professionnelle en situation<br />

s'impose à la plupart des professeurs<br />

et se négocie à travers les<br />

interactions dans la classe avec<br />

les élèves, en salle des professeurs<br />

avec les autres enseignants,<br />

dans les réunions avec les parents<br />

d'élèves, dans les relations avec<br />

l'administration. La dynamique<br />

identitaire est le résultat provisoire<br />

d'une transaction, d'un<br />

compromis entre des processus<br />

biographiques par lesquels les<br />

individus se construisent des<br />

« identités pour soi » et des<br />

mécanismes structurels permettant<br />

ou non la reconnaissance des<br />

« identités pour autrui ».<br />

Les enseignants d'EPS partagent<br />

une identité collective forte fondée<br />

sur deux représentations : ils<br />

exercent un métier d'interactions<br />

humaines et sociales favorisant<br />

des relations privilégiées avec les<br />

élèves et leur discipline permet<br />

l'accès à des valeurs éducatives<br />

(18). Certains éléments<br />

comme l'âge viennent nuancer<br />

cette identité professionnelle<br />

commune et aboutissent à la<br />

coexistence de profils identitaires<br />

multiples et transitoires.<br />

Méthode<br />

Pour comprendre la façon dont<br />

les enseignants « construisent »<br />

leurs définitions d'eux-mêmes et<br />

des autres mais aussi leurs<br />

conceptions du monde professionnel<br />

(et donc de leurs identi­<br />

tés), il faut partir de ce qu'ils<br />

disent, se mettre à leur écoute,<br />

tenter de recueillir des paroles<br />

signifiantes, des constructions de<br />

sens, tout en écartant ses propres<br />

croyances et convictions. C'est à<br />

partir de données langagières,<br />

rattachées à des contextes d'action,<br />

que nous nous sommes<br />

efforcés de comprendre ces<br />

« constructions identitaires ».<br />

Pour mesurer les effets de la<br />

variable âge, nous avons donc utilisé<br />

une méthode inductive d'interprétation<br />

des données verbales<br />

obtenues par le biais d'entretiens<br />

semi-directifs (durée moyenne<br />

1 h 30) autour de questions<br />

ouvertes relatives à quatre grands<br />

thèmes : le déroulement de carrière,<br />

l'implication professionnelle<br />

présente et passée, les relations<br />

entretenues avec<br />

l'entourage professionnel<br />

(élèves, collègues, autres enseignants)<br />

et la perception de la<br />

retraite.<br />

Notre échantillon, délibérément<br />

contrasté, est composé de 20<br />

enseignants d'EPS de l'académie<br />

de Lille, âgés de 55 ans et plus,<br />

11 hommes et 9 femmes, 5 agrégés,<br />

12 certifiés, 3 chargés d'enseignement,<br />

exerçant dans des<br />

établissements variés (lycées,<br />

collèges et lycées professionnels)<br />

(19). Une analyse de<br />

contenu permet de dégager les<br />

éléments porteurs de sens qui<br />

structurent les interactions. Comprendre<br />

les manières dont les<br />

membres les plus âgés d'un<br />

groupe professionnel réagissent<br />

aux incitations de leur direction,<br />

argumentent le sens de ce qu'ils<br />

font, jugent leur formation initiale<br />

ou continue, collaborent aux<br />

projets pédagogiques, anticipent<br />

leur avenir, c'est se donner les<br />

moyens de découvrir la forme<br />

identitaire à laquelle ils se rattachent<br />

et la dynamique de leur<br />

identité professionnelle.<br />

<strong>LE</strong>S RÉSULTATS <strong>LE</strong>S PLUS<br />

SA<strong>IL</strong>LANTS<br />

Le rapport à la retraite<br />

Les dates de départ programmées,<br />

les projets et la façon<br />

même d'envisager la retraite sont<br />

autant d'éléments d'analyse nous<br />

permettant d'identifier un clivage<br />

assez net entre les hommes et les<br />

femmes. L'échéance de la retraite<br />

est attendue sereinement, espérée,<br />

voire anticipée, chez toutes<br />

les enseignantes : il y a des<br />

moments, j'y aspire fortement<br />

parce que j'ai parfois l'impression<br />

de venir ici et de perdre mon<br />

temps (E2) ; j'arrête pas de me<br />

dire : vivement la retraite (E8).<br />

Chez les hommes, les positions<br />

sont plus nuancées et la retraite<br />

semble parfois plus difficile à<br />

envisager. Certains sont angoissés<br />

: quand les gens partent à la<br />

retraite, les problèmes de santé<br />

arrivent plus facilement... rentrer<br />

chez moi, pourquoi faire ? Au<br />

bahut, j'ai un rôle social (E3) ; je<br />

n'ai jamais pensé vivement la<br />

retraite comme certains collègues...<br />

C'est pas une échéance<br />

espérée, je suis toujours venu au<br />

boulot le cœur content (E4).<br />

Le passage à la retraite enclenche<br />

un processus de reconstruction<br />

identitaire. La dimension professionnelle<br />

revêt une importance<br />

particulière chez les hommes.<br />

Elle conditionne une grande partie<br />

de la construction de leur identité<br />

sociale ce qui explique que<br />

l'absence de référence au travail<br />

puisse être perçue comme une<br />

source de tension, par contre la<br />

femme qui trouve d'autres scènes<br />

d'investissements sociaux,<br />

notamment la sphère familiale,<br />

négocie mieux cette transition<br />

vers d'autres formes de sociabilité.<br />

Le rapport au corps<br />

La référence au corps, outil et<br />

objet valorisé de l'éducation<br />

physique, apparaît constitutive<br />

de l'identité professionnelle. La<br />

diminution inéluctable des ressources<br />

physiques peut influencer<br />

la reconnaissance ou non<br />

d'autrui dans l'exercice du<br />

métier. Alors que les élèves<br />

47<br />

Revue EP.S n°324 Mars-Avril 2007 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé


attendent de l'enseignant une je cède aussi le secrétariat d'AS. nellement ? C'est ce que certains élèves : politesse, pro­<br />

image d'éternelle jouvence, la je passe le relais aux collègues pense (El) : finalement quand on blèmes de téléphones portable,<br />

diminution inéluctable de ses plus jeunes. On anticipe (El 4). rencontre des difficultés, ça peut etc. Je m'énerve plus vite (El4) ;<br />

possibilités physiques dégrade Nous constatons un décalage de aussi motiver, ça donne un petit il y a moins d'écoute. Il faut se<br />

cette image et les processus conception entre eux et les col­ coup de fouet !<br />

battre avec eux pour obtenir des<br />

d'identifications positives ne lègues plus jeunes et une critique<br />

choses. Il faut être très opti­<br />

jouent plus dans la relation péda­ larvée des textes officiels. Ils ne Les relations professionnelles miste (E3).<br />

gogique. Tous les enseignants se retrouvent donc plus dans L'étude du « processus relation­ Par rapport aux relations avec les<br />

admettent faire moins de l'image de l'EPS aujourd'hui nel », c'est-à-dire de l'ensemble collègues, le travail collectif<br />

démonstrations et être physique­ promue et restent fortement mar­ des interactions de l'individu étant une quasi-nécessité en EPS<br />

ment moins actifs lors de leurs qués par leur « identité héritée ». avec les autres (limité ici au (partage des installations, projets<br />

cours. Les enseignantes, sem­ C'est de moins en moins concret. milieu professionnel), permet de pédagogique, etc.), avec l'âge,<br />

blent cependant en souffrir beau­ On n'a pas été formés comme ça. comprendre la transaction objec­ des difficultés peuvent apparaître<br />

coup plus (ou en tout cas, elles Il y a longtemps que je trouve que tive ou externe pour accommo­ liées notamment au décalage de<br />

l'admettent plus facilement) et c'est du blablabla (E8) ; l'EPS der l'identité pour soi et l'iden­ formation (les enseignants<br />

leurs problèmes physiques enta­ est devenue très intellectualisée. tité pour autrui. Le métier de proches de la retraite n'ont pas<br />

ment parfois leur moral. C'est Il y a des trucs aberrants (parlant professeur d'EPS est avant tout connu le cursus universitaire<br />

difficile moralement de ne plus des fiches d'évaluation du un métier d'interactions<br />

STAPS) : on n'a pas la même<br />

faire avec eux... Avant je faisais bac) (El6) (20). Enfin une mino­ humaines et sociales diverses et<br />

formation, on a plus la même<br />

quasiment tout, maintenant, il y a rité se concentre exclusivement variées avec les différents<br />

façon de voir les choses. Et<br />

des choses que je ne fais plus.<br />

même si on a encore la foi, c'est<br />

Cela me gêne beaucoup (E2) ;<br />

difficile parce que l'écart<br />

est... (E8). Ce conflit de généra­<br />

là, je ne peux plus rien démontions<br />

est ressenti différemment<br />

trer... c'est terriblement frus­<br />

selon le sexe. Les enseignantes le<br />

trant (E5). Les hommes sem­<br />

ressentent davantage sur le mode<br />

blent moins affectés et<br />

de l'infériorité : il y a un déca­<br />

développent d'autres arguments<br />

lage de formation. Je pense que<br />

pour parer aux effets dévasta­<br />

je suis un petit peu en retrait<br />

teurs du temps sur l'usure du<br />

maintenant. Je n'ai plus envie de<br />

corps. Ils justifient cette moindre<br />

me creuser la tête. C'est presque<br />

implication par des choix péda­<br />

une démission... Et ça me bouffe<br />

gogiques (utilisation de fiches,<br />

la santé parce que je sens que<br />

découverte des règles d'action<br />

c'est très dégradant (E5). Les<br />

par les élèves, etc.) : la démons­<br />

enseignants gèrent mieux cette<br />

tration est surtout utile pour les<br />

situation et l'altérité ne modi­<br />

petits mais pour les grands, on<br />

fient pas leur identité<br />

peut expliquer, faire démon­<br />

incorporée : on a la même envie<br />

trer (E12).<br />

mais pas la même façon de bosser<br />

(El 2).<br />

L'implication professionnelle<br />

présente et passée<br />

Selon M. Huberman, « l'acti­<br />

« L'identité héritée »<br />

visme » des enseignants aurait<br />

C. Dubar la définit comme le<br />

tendance à s'étioler en fin de car­<br />

résultat d'un parcours biograrière<br />

pour aboutir à la dernière<br />

phique, d'une trajectoire, d'une<br />

phase professionnelle qu'il quali­ sur leur mission première (cours acteurs de la scène scolaire socialisation professionnelle qui<br />

fie de période de « désengage­ aux élèves) et n'ont plus aucune (administration, collègues, conduit les personnes à recompoment<br />

» (serein ou amer) caracté­ implication dans des domaines parents, élèves, etc.).<br />

ser à différentes étapes de leur<br />

risée par un désinvestissement tels que les projets disciplinaires, Même si les enseignants se décla­ carrière, leur identité.<br />

professionnel et par un repli et un les fonctions de coordonnateur, rent globalement satisfaits des La grande majorité des ensei­<br />

recentrage sur une vie intérieure secrétaire de l'AS, etc. : je n'ai relations entretenues avec les gnants interrogés (80 %) a une<br />

plus dense. Si nous constatons aucune implication ici. J'ai pas le élèves (beaucoup parlent de rap­ origine sociale modeste objecti­<br />

effectivement une baisse de la temps ni l'envie. Moi j'en ai rien ports privilégiés), tous reconnaisvée par la profession des parents<br />

motivation professionnelle dans à faire, quand il y a une réunion, sent un décalage, une forme de dans les PCS « ouvrières » et<br />

notre échantillon, nous devons je m'échappe (E3).<br />

distance dans ces relations. Ce « employées ». L'enquête réali­<br />

nuancer ce constat.<br />

Contrairement aux thèmes précé­ décalage peut être vécu positivesée par P. Perier (21) montre une<br />

Quelques enseignants restent dents, la variable sexe ne déparment par certains (plus de séré­ élévation manifeste du recrute­<br />

encore impliqués au sein ou à tage pas notre échantillon. Il nité, meilleure maîtrise affective) ment social des enseignants<br />

l'extérieur de l'établissement. Ils semble ici que ce soit le type ainsi que le témoigne (El) : je depuis déjà quelques années (22).<br />

sont moins présents mais conser­ d'établissement et le parcours réussis à mieux gérer le stress qui Ce n'est donc pas le poids de<br />

vent néanmoins certaines tâches professionnel qui tracent une fait qu'on va répondre au coup l'héritage familial qui a amené<br />

qu'ils estiment constitutives de ligne de partage et influencent par coup à un gamin qui nous fait nos interviewés vers l'enseigne­<br />

leur identité professionnelle pro­ l'implication de fin de carrière. suer ou (E5) : quand j'étais ment (aucun d'entre eux n'a<br />

fonde : tous les ans, c'est moi qui Les enseignants de lycée général jeune, j'étais très exigeante, d'ailleurs un parent enseignant)<br />

fais les emplois du temps, qui vais semblent se désinvestir davantage presque pénible... Avec le temps, mais l'image forte d'un « prof de<br />

dans les réunions de mairie. La que leurs collègues de lycée pro­ je les comprends mieux. En gym » qui les a guidés précoce­<br />

place que je dois tenir, je la fessionnel ou de collège. Des vieillissant, je suis peut-être plus ment vers ce métier. Ils ont enra­<br />

tiens (El). D'autres par lassitude conditions de travail plus diffi­ conciliante. Pour d'autres, la disciné très tôt dans leur scolarité le<br />

et une volonté de laisser la place ciles renforcent-elles les liens tanciation créée avec les élèves choix du métier.<br />

aux jeunes, se désengagent pro­ interpersonnels, obligent-elles à est source de difficultés : je ne<br />

gressivement : l'année prochaine se remettre en cause profession­ supporte plus le comportement de<br />

L'enseignement de la discipline<br />

(alliée à une pratique sportive<br />

48<br />

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assidue) et le contact aisé avec les Trois configurations identi­<br />

élèves représentent leurs pretaires de professeurs d'EPS en<br />

mières motivations profession­ fin de carrière<br />

nelles. Devenir professeur pour Une identité de professeur<br />

enseigner la discipline que l'on d'EPS assumée et revendiquée<br />

aime (El8) demeure le principal jusqu'au bout<br />

moteur d'accès au métier. Nous<br />

Quatre enseignants illustrent cet<br />

pouvons parler de l'expression idéal-type.<br />

d'une vocation, ce que l'on L'âge ne semble pas avoir eu<br />

retrouve chez la plupart : j'avais d'effets sur leur vie profession­<br />

15 ans quand je voulais être prof nelle pour laquelle ils sont encore<br />

de gym. On a un beau métier avec très impliqués. Ils tirent de cette<br />

les jeunes ! (El4) ; pour rien au effervescence professionnelle<br />

monde, j'aurais changé de leur espace de reconnaissance et<br />

métier. Le contact avec les gosses donc n'anticipent pas le passage<br />

m'a apporté beaucoup de d'une identité d'actif à une iden­<br />

joie (E5). L'attachement à la distité de retraité, synonyme pour<br />

cipline est fortement affirmé par eux d'une certaine « mort<br />

tous les enseignants. La cohé­ sociale ». Rien dans leur vie<br />

rence pédagogique et identitaire sociale ne rapproche d'ailleurs<br />

de cette posture s'accompagne<br />

d'une forte satisfaction par rapport<br />

au métier : le sentiment<br />

d'être éducateur a balayé toute<br />

ma vie (E9). Nous retrouvons<br />

également un fort engagement<br />

sportif en club lié à l'impact de<br />

leur formation initiale à une<br />

période où les liens entre l'éducation<br />

physique et le sport fédéral<br />

étaient forts. Tous les hommes de<br />

notre échantillon ont prolongé<br />

leur pratique sportive par une<br />

expérience d'entraîneur durant<br />

une grande partie de leur carrière.<br />

A l'inverse, les femmes ont eu<br />

tendance à freiner leur investissement<br />

sportif à la naissance de<br />

leurs enfants.<br />

Alors que les conditions objectives<br />

d'exercice (établissement<br />

demandé et obtenu, choix des<br />

classes, etc.) sont supposées<br />

meilleures, nous constatons que<br />

si l'ensemble des enseignants<br />

rencontrés expriment en majorité<br />

un fort degré de satisfaction au<br />

regard de leur expérience professionnelle,<br />

tous reconnaissent<br />

cependant que le métier a changé<br />

et évolué. Pour les enseignantes,<br />

cette évolution est avant tout liée<br />

aux relations avec les élèves à la<br />

fois porteuses de satisfactions et<br />

de frustrations, à cela s'ajoute<br />

aussi chez elles une usure physique<br />

incontestable associée parfois<br />

à une perte de crédibilité et à<br />

une espèce de dévalorisation<br />

inconsciente de leur capacité à<br />

exercer leur métier. « L'usure »<br />

semble néanmoins beaucoup<br />

moins prégnante chez les<br />

hommes.<br />

A cela s'ajoute une reconnaissance<br />

(dans un environnement<br />

éducatif qui survalorise les disciplines<br />

conceptuelles, abstraites)<br />

et un salaire jugés insuffisants<br />

(23).<br />

EP.S № 324 - MARS-AVR<strong>IL</strong> 2007<br />

ces hommes de la retraite :<br />

conjoints respectifs encore actifs,<br />

pas de petits enfants, vie sportive<br />

et associative riche. Ils revendiquent<br />

largement un rôle d'éducateur<br />

et sont très attachés à l'aspect<br />

socialisant, à la transmission de<br />

valeurs en EPS. Il s'agit d'abord<br />

pour eux, d'aider les élèves,<br />

s'adapter à eux, exercer une responsabilité<br />

à leur égard. Ils<br />

n'évoquent pas de problèmes de<br />

santé et utilisent encore fréquemment<br />

la démonstration. Ils semblent<br />

tenir beaucoup à la représentation<br />

sociale quelque peu<br />

narcissique du professeur d'EPS<br />

dynamique, débordant d'énergie<br />

et modèle pour les élèves. Leur<br />

stratégie identitaire consiste dés<br />

lors à nier les effets de l'âge dans<br />

leur pratique professionnelle<br />

pour éviter la remise en cause de<br />

leur identité professionnelle.<br />

Encore passionnés, ils veulent<br />

éviter la routine et organisent<br />

encore des événements au sein de<br />

leur établissement scolaire (cross,<br />

stage, voyage).<br />

Une identité professionnelle en<br />

reconversion<br />

Elle concerne dix enseignants, en<br />

majorité masculins. Après une<br />

implication conséquente dans les<br />

différents établissements scolaires<br />

où ils ont exercé, il s'agit<br />

progressivement de « laisser la<br />

place » aux jeunes en abandonnant<br />

petit à petit leurs fonctions.<br />

Ils expriment un bilan positif de<br />

l'ensemble de leur carrière et<br />

prennent encore du plaisir à exercer<br />

leur activité professionnelle.<br />

Leur projet de retraite est cependant<br />

prévu mais sans impatience<br />

ni angoisse. Les problèmes phy­<br />

siques existent mais ne les gênent<br />

pas trop dans leur pratique quotidienne.<br />

Par contre ils perçoivent<br />

un décalage entre eux et leurs collègues<br />

plus jeunes ou avec leurs<br />

élèves ce qui entraîne une mise à<br />

distance affective. Tout en suivant<br />

l'évolution de la discipline<br />

(textes, programmes), ils en ont<br />

une vision parfois critique et<br />

empreinte de nostalgie. La distance<br />

culturelle entre les attentes<br />

des élèves (centres d'intérêt, références<br />

ludo-sportives) et les<br />

savoirs dispensés dans la classe,<br />

est perçue par sept enseignants<br />

sur dix. Au fil de l'ancienneté, est<br />

né un sentiment d'usure grandissant,<br />

dû entre autre au comportement<br />

des élèves (passivité, incivilité<br />

croissante) et à la difficulté de<br />

les faire tous progresser. Ils ont<br />

du mal à gérer le dilemme entre<br />

leur fonction d'éducation (socialisation)<br />

et d'instruction (apprentissage)<br />

(24, 25).<br />

Une identité professionnelle en<br />

crise<br />

Les six enseignants concernés<br />

(forte majorité féminine) aspirent<br />

à la retraite. Même s'ils expriment<br />

un bilan positif de leur carrière<br />

(5 referaient les mêmes<br />

choix), ils terminent leurs dernières<br />

années de vie active plutôt<br />

las et fatigués. Cette usure peut<br />

déboucher sur le burn-out (26).<br />

Les difficultés physiques les<br />

contraignent à modifier radicalement<br />

leur façon d'enseigner. Le<br />

décalage, sur le plan théorique et<br />

didactique accentue un sentiment<br />

de dévalorisation et de doute de<br />

leurs propres compétences. Crispés<br />

sur les références issues de<br />

leur formation initiale et des ins­<br />

tructions officielles de 1967, ils<br />

expriment un jugement négatif<br />

sur l'évolution récente de la discipline.<br />

Le sentiment de ne plus<br />

être à sa place conduit alors ces<br />

sujets à vouloir quitter au plus<br />

vite leur identité de professeur<br />

d'EPS. La tension trop forte entre<br />

« identité pour soi » et « identité<br />

pour autrui » ne peut se résoudre<br />

que par un retrait. Ils développent<br />

un discours pessimiste sur leur<br />

statut dévalorisé, sur les difficultés<br />

à exercer leur métier correctement<br />

et soucieux de sortir de cette<br />

crise. Ils s'investissent davantage<br />

dans la sphère du « hors travail »<br />

anticipant ainsi leur cessation<br />

d'activité et parlent beaucoup de<br />

ce qu'ils feront lorsqu'ils seront<br />

enfin à la retraite.<br />

La spécificité d'un travail sur et<br />

avec le corps, la rapide évolution<br />

49<br />

Revue EP.S n°324 Mars-Avril 2007 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé


des pratiques sociales et des<br />

conceptions sur lesquelles repose<br />

l'éducation physique, conduit de<br />

fait à une nécessaire redéfinition<br />

du métier et à une recomposition<br />

de son identité. Alors que leur discipline<br />

est associée aux notions de<br />

santé, d'énergie, de jeunesse et<br />

dynamisme corporel, les enseignants<br />

s'éloignent au fur et à<br />

mesure de l'avancée de leur carrière<br />

de tout ce qu'ils sont censés<br />

représenter. Nous avons vu les<br />

différentes stratégies ou transactions<br />

leur permettant de réduire<br />

l'écart entre « identité pour soi »<br />

et « identité pour autrui » et donner<br />

ainsi une cohérence à leur<br />

action en fin de carrière.<br />

Un clivage important semble se<br />

dessiner entre les hommes et les<br />

femmes de notre échantillon. La<br />

retraite est espérée et anticipée<br />

pour les femmes alors qu'elle est<br />

retardée et plutôt angoissante<br />

pour les hommes. Les femmes<br />

« vieillissent » plus mal dans<br />

l'exercice de leur fonction :<br />

davantage de problèmes physiques,<br />

baisse du sentiment de<br />

compétence, relations plus ambiguës<br />

et moins satisfaisantes avec<br />

les élèves. Mais le sexe n'est pas<br />

la seule variable pertinente pour<br />

expliquer les compromis identitaires.<br />

Des conditions de travail<br />

plus ou moins difficiles, l'engagement<br />

extrascolaire (sportif,<br />

syndical), les prises de responsa­<br />

bilités, la situation familiale, etc.,<br />

nuancent le vécu de la fin de carrière<br />

dans cette discipline originale<br />

et spécifique.<br />

Il convient maintenant de pointer<br />

quelques limites à cette étude.<br />

Outre les écueils liés à la<br />

démarche qualitative (interprétation<br />

subjective des discours), à un<br />

échantillon restreint et limité géographiquement,<br />

il y a le risque que<br />

la typologie soit perçue comme un<br />

véritable étiquetage, forcément<br />

réducteur par rapport à la diversité<br />

des situations vécues quotidiennement.<br />

Les trois formes identitaires<br />

typiques présentées sont schématiques,<br />

elles permettent de mettre<br />

de l'ordre dans le foisonnement<br />

des discours. Chaque enseignant<br />

est pris dans des contradictions<br />

entre ces différentes formes, ces<br />

définitions de soi par lui-même et<br />

par les autres qu'il s'efforce souvent<br />

de combiner et de concilier.<br />

Enfin, pour répondre à une de nos<br />

interrogations de départ : est-il<br />

plus difficile de vieillir dans cet<br />

enseignement, il nous apparaît<br />

nécessaire dès lors de poursuivre<br />

et d'élargir ce travail en interrogeant<br />

des enseignants d'autres<br />

disciplines pour établir des éléments<br />

comparatifs.<br />

Alors que J. Rochefort (27),<br />

directeur du CREDOC, prédit un<br />

allongement inéluctable de la<br />

durée du travail, il faut s'interroger<br />

sérieusement sur la place du<br />

travail dans la vie et casser le<br />

mythe de la non-discrimination<br />

par l'âge et d'une productivité<br />

censée rester identique du début à<br />

la fin de carrière. La gestion des<br />

âges étant devenu un sujet capital,<br />

nous pouvons faire quelques<br />

remarques et suggestions.<br />

Contrairement à une dizaine de<br />

pays d'Europe (28) qui permet<br />

aux enseignants de diminuer leur<br />

temps de travail en fonction de<br />

leur ancienneté, la France ne prévoit<br />

aucune réduction pour les<br />

fins de carrière (29) (et comme le<br />

professeur d'EPS appartient au<br />

cadre « sédentaire » de la fonction<br />

publique, il n'est pas prévu<br />

d'aménagements statutaires). Si<br />

l'on est persuadé que le thème de<br />

la pénibilité du travail doit être<br />

central dans le débat sur les dernières<br />

années de vie professionnelle<br />

parce qu'il est facteur d'inégalités,<br />

il nous semble devoir<br />

admettre qu'à partir d'un certain<br />

âge, il faudra certes continuer de<br />

travailler, mais à condition de travailler<br />

autrement. Si les enseignants<br />

d'EPS doivent prolonger<br />

leur présence dans les gymnases,<br />

stades, piscines après 60 ans il<br />

faut alors imaginer des modalités<br />

de fin de carrière innovantes en<br />

jouant sur les tâches et les fonctions<br />

: varier les tâches par de la<br />

formation d'adultes (FPC), diminuer<br />

le temps en présence<br />

d'élèves (effectuer en décharge<br />

horaire certaines activités telles<br />

que la coordination, le secrétariat<br />

de l'AS), développer des fonctions<br />

intermédiaires de conseiller<br />

pédagogique, de responsable de<br />

niveau pour les jeunes collègues<br />

et de soutien aux enseignants de<br />

ZEP, multiplier les responsabilités<br />

administratives à l'intérieur<br />

des établissements (favoriser par<br />

des formations adaptées, l'accession<br />

à la fonction de chef d'établissement<br />

ou à un autre poste<br />

administratif), être mis partiellement<br />

à disposition auprès de certaines<br />

associations, etc.<br />

A la lumière de la longévité<br />

accrue de la vie professionnelle,<br />

il paraît aussi légitime de repenser<br />

la formation initiale (et donc<br />

le CAPEPS) pour limiter les<br />

risques physiques et sensibiliser<br />

les futurs enseignants aux problèmes<br />

de gestion de leur carrière<br />

à long terme, ceci en liaison avec<br />

une formation professionnelle<br />

continue abordant les techniques<br />

d'entretien corporel et la gestion<br />

du stress.<br />

Christian Dorvillé<br />

Maître de conférences,<br />

Faculté des sciences<br />

du sport et de l'EP,<br />

Université Lille 2.<br />

Stéphanie Camel<br />

Enseignante d'EPS,<br />

Collège Dolto,<br />

Pont à Marcq (59).<br />

Notes bibliographiques<br />

(10) Le bilan de l'enquête du SNEP « Vous (17) Dubar C, La socialisation : construc­<br />

(1) Pujade-Renaud C, Questions réponses et votre santé » met en évidence que le tion des identités sociales et profession­<br />

en EPS, Éd. ESF, coll. Sciences de l'éduca­ corps est soumis à de nombreux traumanelles, 3<br />

tion, 1977.<br />

tismes qui se traduisent avec l'âge par des<br />

douleurs ankylosantes, lombalgies, blo­<br />

(2) Loi Fillon n° 2003-775 du 21 août cages cervicaux, problèmes de voix, en<br />

2003.<br />

particulier chez les femmes, ce qui<br />

(3) Colloque MGEN du 11.03.2004. amène S. Duquesne à constater « une fin<br />

de carrière extrêmement difficile pour un<br />

(4) Ce pourcentage moyen diffère sensible­ grand nombre de collègues », Bulletin du<br />

ment selon les académies du Nord ou du SNEP n° 743, novembre 2005.<br />

Sud de la France si l'on se réfère aux données<br />

de C. Peretti, Dix huit questions sur le (11) Paris B., « A propos du prolongement<br />

svstème éducatif, La documentation fran­ de la carrière d'enseignant d'EPS », revue<br />

çaise. 2004.<br />

Hyper n° 224, 2004.<br />

(5) Signalons la communication de (12) Hamon H., Tant qu'il y aura des<br />

T. Roux-Perez au colloque : Vieillir dans le élèves, Seuil. 2004.<br />

métier, Paris, 2005. qui portait sur « La bio­ (13) Dorvillé C, 1991, « Représentations<br />

graphie professionnelle des enseignants de l'enseignant d'EPS par les élèves et les<br />

d'EPS : investissements et décrochages », professeurs », STAPS n° 24 ; Gleyse J.,<br />

article paru chez De Boeck, 2006. 1993 : Baudrit A.. 1993 ; Beunart B.,<br />

(6) Enquête « Fins de carrière », Bulletin 1999 ; etc.<br />

du SNEP n° 649, 13/10/2001.<br />

(14) J. Metzler, op. cit., pointe les difficul­<br />

(7) J.-F. Amadieu dans Le poids des appatés liées aux attentes institutionnelles perrences<br />

; Beauté, amour et gloire, O. Jacob, çues comme trop complexes, trop éloi­<br />

2002. illustre bien cette tendance à la mise gnées du terrain.<br />

en scène de soi pour rendre son corps pré­ (15) Huberman M., La vie des enseisentable<br />

dans les relations interpersonnelles.gnants<br />

: évolution et bilan d'une profession,<br />

Delachaux et Niestlé. 1989.<br />

(8) X. Gaullier, dans l'article « Dépen­ (16) A. Léger (in Léger A., Tripier M., Fuir<br />

dance, vieillesse, handicap : quelle poli­ ou construire l'école populaire ?, Méridiens<br />

tique sociale ? », Revue Esprit, n° 300, Klincksieck, 1988) a décrit les carrières des<br />

décembre 2003, liste l'ensemble de ces enseignants sous l'angle des déterminants<br />

défis : scientifique, culturel, social, psy­ sociaux qui conduisent les enseignants les<br />

chologique, démocratique, idéologique. plus âgés (et les plus gradés), à occuper les<br />

(9) Metzler J., « Le métier d'enseignant postes dans les lycées de centre ville (plus<br />

d'EPS : un long fleuve tranquille ? », Les bourgeois) et corrélativement, à fuir les éta­<br />

cahiers du CEDRE n° 3, 2002. blissements les plus populaires.<br />

e<br />

d'une profession », Thèse de doctorat en<br />

sciences du sport. Université de Stras­<br />

éd, Armand Colin, 2004. bourg, sous la direction de B. Michon,<br />

1999.<br />

(18) Roux-Perez T., « Identité professionnelle<br />

et modes d'implication privilégiés (25) Couturier C, Duret P., « Enseigner<br />

chez les enseignants d'éducation phy­ l'EPS : l'identité professionnelle à<br />

siques et sportives », Les sciences de l'épreuve du sport », Centre national<br />

l'éducation. Pour l'ère nouvelle, vol. 36. d'études EPS et Société, 2000.<br />

n° 4, 2003.<br />

(26) Ce concept, identifié par des cher­<br />

(19) Pour des raisons de respect de l'anocheurs nord-américains, définit une crise<br />

nymat, nous utiliserons la formule E1, E2. directement liée à des métiers au service de<br />

etc., pour identifier les enseignants. l'humain. Il entraîne chez le sujet une<br />

(20) A. Hébrard dans « EP.S interroge A. forme d'épuisement le conduisant à déve­<br />

Hébrard », Revue EP.S n°312, mars-avril lopper des attitudes négatives envers les<br />

2005, remarque également l'incompréhen­ autres avec également un fort sentiment de<br />

sion des textes officiels de la discipline. dépréciation de soi.<br />

(21) Perier P., « Une crise des vocations ? (27) Rochefort J., La retraite à 70 ans ?<br />

Accès au métier et socialisation des ensei­ Éd. Belin, 2004.<br />

gnants du secondaire », Revue française de<br />

pédagogie n° 147, 2004.<br />

(28) Le rapport rendu public en 2003 par<br />

EURYDICE, réseau d'information sur<br />

(22) L'enquête que nous avons menée en l'éducation en Europe, permet de comparer<br />

2005 sur une cohorte d'étudiants de STAPS les statuts, les emplois du temps, les<br />

à la FSSEP de Lille met en évidence salaires des enseignants de l'Union Euro­<br />

« l'embourgeoisement » relatif des étupéenne.diants (en particulier des étudiantes) de la<br />

filière éducation et motricité.<br />

(29) Le mode de gestion centralisée et<br />

impersonnelle du ministère de l'Éduca­<br />

(23) II semble que le « complexe du prof de tion nationale est discutable : pour lui, un<br />

gym » soit encore bien présent : je crois enseignant en début de carrière et un<br />

qu'on est pas encore réellement intégré. enseignant proche de la retraite sont tota­<br />

Vis-à-vis des parents et des autres profs, on lement interchangeables (mêmes établis­<br />

est toujours ceux qui remuent de l'air, ça sements, mêmes classes, mêmes condi­<br />

n'a pas beaucoup changé à ce niveautions de travail, etc.). L'administration ne<br />

là (E9).<br />

tient aucun compte des caractéristiques<br />

(24) Marsault C, « Enjeux d'une défini­ personnelles et uniformise le métier d'ention<br />

socio-juridique de l'EPS. Légitimation seignant.<br />

50<br />

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