Fiche de Synthèse Nº47 de MicroSave

Fiche de Synthèse Nº47 de MicroSave
La banque par téléphone mobile, un service à forte valeur pour le client
Graham A.N. Wright, Nick Hughes, Brian Richardson et David Cracknell
Introduction
Il est aujourd'hui de plus en plus admis que l'e-banking est un
moyen unique de résoudre les deux problèmes qui empêchent
souvent les banques commerciales de travailler avec les
populations à faible revenu, à savoir la nécessité de disposer
d'un réseau d'agences et de gérer un nombre important de
transactions de faible valeur. De plus, l'e-banking va permettre
de développer des systèmes bancaires centralisés jusqu'au plus
profond des communautés rurales. 1
Malgré ceci, de nombreuses initiatives d'e-banking ont échoué.
Proposer ce type de service n'est pas toujours simple et il est
important d'en être conscient. Les échecs n'ont que rarement été
dus à des difficultés technologiques, les aspects techniques et de
sécurité étant aujourd'hui bien maîtrisés et compris. C'est
davantage vers une mauvaise compréhension des besoins des
clients qu'il faut se tourner pour les expliquer. Trop souvent, les
institutions financières ont porté leur attention sur la solution
technique et les réductions de coûts à en attendre, sans
s'intéresser aux besoins des clients et des intermédiaires qui
vendent les services sur le terrain. Cette fiche de synthèse
aborde ces questions dans le contexte de la banque par
téléphone mobile (m-banking).
Que veulent les populations à bas revenus?
Les populations à bas revenus veulent souvent davantage qu'un
simple moyen nouveau d'accéder à des services bancaires
traditionnels qui, d'ailleurs, peuvent n'avoir pour eux aucun
intérêt. Les premières recherches effectuées par Vodafone au
Kenya ont montré qu'un système de m-banking doit réunir les
deux conditions suivantes pour satisfaire les clients et
fonctionner avec succès :
1. permettre au client de répondre à la question: "Quel
bénéfice vais-je en retirer? J'ai besoin d'un moyen sûr,
pratique et pas cher d'obtenir les produits financiers qui
correspondent à mes besoins".
2. permettre une circulation rapide de l'argent au sein du
réseau du client. Les modèles de transfert de crédit
temps l'ont prouvé. Au Kenya, Safaricom a lancé un
produit appelé Sambaza qui permet aux abonnés de
transférer du crédit temps à d'autres abonnés. En
quelques semaines, le nombre de transactions de ce
type a atteint plusieurs milliers.
Les personnes pauvres sattendent d'un compte courant
accessible par m-banking qu'il leur offre:
1. un lieu sécurisé où déposer de l'argent;
2. accessibilité / liquidités – la capacité de transformer de
l'argent électronique en espèces (et vice versa) dans des
lieux adaptés (agences, distributeurs automatiques).
3. la capacité de transférer de l'argent de et vers
l'institution financière, de faire des paiements et
d'envoyer l'argent à leurs amis ou proches.
Dans le cadre de la phase préparatoire, Wizzit a recouru à des
discussions thématiques de groupes pour déterminer la manière
dont les populations à bas revenus dépensent et utilisent leur
argent. La solution de m-banking a été conçue sur base de ces
informations. Wizzit a rapidement appris que les clients
accordaient beaucoup d'importance à l'interopérabilité avec le
système de paiement basé sur les distributeurs et les points de
vente, très développé en Afrique australe.
Avantages du m-banking
Une analyse de marché réalisée pour MicroSave par des
partenaires de recherche-action impliqués dans le m-banking a
permis d'identifier les avantages suivants:
1. rapidité et gain de temps: "On ne perd plus de temps…
les fonds sont disponibles à tout moment".
2. économies associées au processus de décaissement des
prêts (il n'est plus nécessaire de se rendre à la banque et
de payer pour encaisser le chèque).
1 Pour en savoir davantage sur l'e-banking, voir Cracknell, David, “Electronic Banking For the Poor - Panacea, Potential and Pitfalls” – disponible
sur le site Internet de MicroSave: www.MicroSave.org (section "Study Programme").
MicroSave souhaite remercier les co-auteurs de cette Fiche d'Information:Nick Hughes, Directeur "Social Products & Enterprise" chez Vodafone
Group et Brian Richardson, Directeur Général de Wizzit
MicroSave P.O. Box 76436, Yaya 00508 Nairobi, Kenya Tel: 254 (20) 2724801/6 Fax: 254 (20) 2720133
Email: Info@MicroSave.org Website: www.MicroSave.org

3. sécurité accrue, grâce au recours moins important à
l'argent liquide. "On ne doit plus se déplacer avec de
l'argent en poche… Mon argent est en sécurité même si
je perds ma carte SIM".
4. facilité d'utilisation, particulièrement dans les
transactions de personne à personne. "C'est presque un
service disponible 24 heures sur 24".
Obstacles et défis
Plusieurs obstacles importants ont également été identifiés :
1. Beaucoup de personnes à bas revenus (80 % des clients
d'une IMF analysée récemment par MicroSave) ne
possèdent pas de téléphone portable. Beaucoup d'entre
elles ont cependant accès à un tel téléphone par le biais
d'amis ou de proches. Des bureaux publics de
téléphonie mobile pourraient permettre de résoudre en
partie ce problème.
2. L'expérience du Kenya montre que certains clients ont
besoin d'une formation importante pour pouvoir utiliser
les services de téléphonie mobile. Il est possible de
définir un profil de client cible en fonction de la
capacité à utiliser un téléphone portable.
3. Certains agents peuvent ne pas disposer de fonds
suffisants pour faire face à la demande, obligeant ainsi
le client à passer d'un agent à l'autre pour obtenir
l'argent liquide dont il a besoin.
4. Les agents disposeront de fonds plus importants, pour
faire face à la demande accrue, et devront donc dans
certains cas installer des systèmes de sécurité
supplémentaires.
5. Certains clients peuvent ne pas savoir lire ou envoyer
des messages (SMS). En Inde, une banque travaille sur
une solution faisant appel à des messages numériques.
Par exemple, le client enverra de l'argent en tapant le
code "121" suivi du numéro du portable de son
correspondant, du montant et de son code PIN.
6. Sans un marketing important pour les convaincre qu'ils
peuvent avoir confiance, certains commerçants peuvent
refuser que leurs clients utilisent le nouveau mode de
paiement.
7. Beaucoup de ruraux n'ont pas l'électricité chez eux et
doivent se rendre à pied au marché le plus proche pour
recharger leur téléphone.
8. Certains modèles de téléphone offre des fonctionnalités
limitées (mémoire, nombre de mots par message).
Faire simple et apprendre ensemble
Beaucoup de ces difficultés sont dues au fait que la technologie
étant nouvelle, les clients risquent de faire preuve de prudence
face à la solution proposée. L'expérience en Afrique du Sud et
aux Philippines a montré que lorsque les clients dépassent la
barre des trois transactions par mois, ils cessent d'avoir peur de
la technologie et l'utilisent davantage.
Les spécialistes de la technologie et les banquiers exacerbent
souvent le problème en compliquant excessivement le produit,
auquel ils ajoutent toute une série de fonctions. Dans certains
cas, une solution technique est offerte sans qu'un besoin
spécifique n'ait été exprimé. Il importe d'entrer sur le marché
avec une application ciblée, répondant à un besoin particulier,
que l'on pourra étoffer et compléter par la suite.
Aux Philippines et en Afrique du Sud, c'est un processus itératif
qui a été utilisé. La solution proposée était évaluée et en cas
d'échec, on consultait les clients pour voir comment la réviser au
mieux. Les fournisseurs de services ont également demandé aux
clients comment ils réalisaient leurs transactions et de quelle
manière ils pouvaient mieux les servir. Les applications d'ebanking
sont souvent "à forte densité de données"; elles offrent
donc des possibilités d'analyse intéressantes et sont un bon point
de départ pour la gestion des relations avec les clients.
L'argent liquide roi?
Il est important de comprendre quand les clients ont besoin
d'utiliser de l'argent liquide et quand ils peuvent s'en passer.
Certaines transactions coûtent peu, par exemple un achat dans
une boutique. Un transfert de fonds ou un versement est plus
coûteux, les frais bancaires perçus pour traiter un salaire ou le
paiement d'une pension étant plus élevés. Ces frais pourraient
être réduits si un mécanisme moins coûteux était utilisé.
Il faut cependant comprendre que travailler avec de l'argent
liquide est un exercice coûteux, à la fois pour l'institution
financière et le client. Les distributeurs de billets doivent être
entretenus et alimentés; les agents qui proposent des services sur
le point de vente (cash-back, etc.) doivent rentabiliser cette
activité, en générant des revenus, en augmentant le chiffre
d'affaires ou, idéalement, en faisant les deux! De la même
manière, croire que l'argent liquide est gratuit et ne génère
aucune friction pour le client à bas revenus est une erreur, si l'on
tient compte du transport et du temps.
Cependant, à court terme, les fournisseurs de services d'ebanking
ne réussiront dans leur entreprise que s'ils se
concentrent sur certaines transactions, notamment celles qui ne
peuvent se faire facilement en liquide et pour lesquelles l'ebanking
offre des possibilités nouvelles. On pensera notamment
aux situations suivantes:
1. paiements à la livraison;
2. versements réalisés par/à de petites entreprises
(paiements à des fournisseurs, remboursements de prêts
individuels) sur le lieu d'exploitation;
3. chauffeurs-livreurs ne devant plus emporter de liquide
dans leur tournée;
4. paiement des salaires, surtout lorsque de nombreux
salaires peu élevés sont versés dans des lieux éloignés;
5. compagnies d'assurance (collecte de primes et
paiements d'indemnités).
Conclusion
La capacité des solutions d'e-banking à répondre aux besoins
des clients et à offrir à ceux-ci et aux banques une véritable
valeur ajoutée déterminera le succès ou l'échec des solutions de
banque par téléphone mobile (et autres) développées pour
travailler avec les populations les plus pauvres.
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