ARTÍCULOS PUIG ANTICH, JEAN MARC ROUILLAN, Delgado y ...
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Jean-Pierre Cazenave-Laroche. Durant toutes ces années, nous avons agi dans l'illégalité, mais la<br />
loi nous a rattrapés. " Pour certains, l'asile leur a été accordé tout à fait légalement " après l'arrivée<br />
de François Mitterrand. " 1981... " Un espoir et quelques petits changements ", résume l'un d'eux. A<br />
l'époque, pour la plupart, ils sont pourtant en prison. Les trois Italiens, Franco Pina, Enrico Bianco<br />
et Oriana Marchioni, son épouse, ont été arrêtés en mars 1980 et incarcérés. Franco Pina passera<br />
quatorze mois à Fleury-Mérogis en tant que DPS (détenu particulièrement surveillé). Seul en<br />
cellule, totalement isolé. Lorsqu'il sortait dans les couloirs de la maison d'arrêt, toutes les portes<br />
étaient bouclées afin qu'il n'ait aucun contact avec les autres détenus. Raymond <strong>Delgado</strong>, Martine<br />
Fournier, Sylvie Porte, Floreal Cuadrado et Werner Witteman ont, eux, été interpellés au mois de<br />
juin 1981 à Paris. Les planques ont été découvertes, les militants incarcérés. Ils ont alors vainement<br />
attendu une amnistie dont ils seront privés à la faveur d'un tour de passe-passe juridique qui, en<br />
quelques jours, les transforme en " droit commun ". Il faudra une grève de la faim et de nombreuses<br />
actions de soutien pour faire sortir les derniers militants détenus. Le réseau a alors été détruit. "<br />
Nous venions de vivre sept ans dans l'illégalité, note Floreal Cuadrado. Nous sortions de prison,<br />
nous étions marginalisés, les socialistes étaient au pouvoir. Il y avait une nouvelle donne. Nous<br />
avions besoin de souffler, de faire le point. " Des désaccords apparaissent, l'arrivée au pouvoir des<br />
socialistes les divisent. L'aventure collective est terminée.<br />
La vie " comme tout le monde "<br />
Depuis, ils vivent " comme tout le monde " et ne se revoient guère. Lorsque le président de la cour<br />
d'assises du Nord les a interrogés, le mois dernier, huit d'entre eux se sont retrouvés pour la<br />
première fois depuis des années. La police, elle, a pourtant mis un certain temps à les oublier. En<br />
1983-1984, les employeurs de Floreal Cuadrado seront contactés par la police, qui leur détaillera le<br />
passé politique de l'ancien militant des GARI. Le propriétaire de son logement, lui aussi, sera<br />
prévenu. Les pressions se multiplient suffisamment pour que Floreal Cuadrado quitte la France en<br />
1986.<br />
Ils ont désormais chacun leur vie, disent-ils. Chacun leurs convictions. Après sa sortie de prison,<br />
Franco Pina a travaillé dans une coopérative ouvrière de Lille avant de rejoindre Paris. Il a alors<br />
assuré l'entretien du théâtre André-Malraux de Rueil-Malmaison, où il est aujourd'hui régisseur<br />
lumière. Raymond <strong>Delgado</strong> travaille dans une imprimerie, Jean-Pierre Cazenave-Laroche est<br />
photographe, Martine Fournier, professeur, Floreal Cuadrado, graphiste. Ils vivent désormais " au<br />
grand jour comme des millions de Français. " Avec une histoire et des convictions en sus. Les<br />
actions illégales ont été abandonnées, mais ils restent " en éveil ", selon le mot de Raymond<br />
<strong>Delgado</strong>.<br />
Beaucoup combattent aux côtés du FLNKS pour l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie.<br />
Beaucoup sont encore " militants ", même s'ils n'aiment guère ce terme. Tous, ou presque, se disent<br />
encore " libertaires " et " internationalistes ". Même s'ils recherchent de " nouvelles formes de lutte<br />
". " Depuis 1979, ce ne sont pas tellement nos convictions qui ont changé, explique Jean-Pierre<br />
Cazenave-Laroche, c'estle contexte. Je suis toujours en état de révolte mais autour de moi beaucoup<br />
de choses ont changé. Et je me suis adapté. " Ils ne sont pas des repentis pour autant. Leur combat<br />
était juste, disent la plupart d'entre eux. Même si des divergences les séparent maintenant. " Je<br />
pourrais redire ce que je disais il y a dix ans ", explique Franco Pina, dont l'extradition vers l'Italie a<br />
été refusée par la chancellerie à l'automne 1981. " Au fond, je pense que le monde n'a pas changé,<br />
mais maintenant, les actions symboliques auxquelles nous croyions ne voudraient plus rien dire.<br />
Aujourd'hui, je regarde autour de moi, et je ne vois rien. Rien qui bouge. " Franco Pina ne milite<br />
plus, ou presque. " Par manque de temps ", dit-il. Son travail est prenant. Il vient d'avoir un bébé,<br />
qui aura quatre mois au moment du procès.<br />
La veille du procès, comme ses camarades d'antan, Franco Pina devra se rendre à la prison de<br />
Douai, où il passera la nuit précédant l'audience. Cette prison, certains la connaissent. Plusieurs<br />
d'entre eux y ont été incarcérés après les arrestations qui ont suivi l'attaque à main armée de Condésur-l'Escault.<br />
A l'époque, on parlait d'eux comme de dangereux terroristes, et, lors de leurs