Télécharger - César
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36 .<br />
What a glorious bastard !<br />
Décerner ce soir un <strong>César</strong> d’honneur à cet enfant<br />
naturel de Melville et De Palma, de Peckinpah et<br />
Howard Hawks, de Leone et Godard, de Scorsese et<br />
Russ Meyer, de la Nouvelle Vague et du cinéma<br />
d’horreur, du film de sabre asiatique et des séries<br />
B,Z et même X, et de tant d’autres, c’est bien le<br />
moins que l’Académie pouvait faire.<br />
Tant ce bâtard (comme on dit pudiquement d’un<br />
copain qu’on adore) a su aimer le cinéma, tout le<br />
cinéma, jusqu’à le magnifier, jusqu’à le faire vibrer,<br />
jusqu’à l’enflammer (au sens propre !). Jusqu’à le<br />
renouveler. Jusqu’à l’incarner.<br />
Garnement ayant pénétré par effraction dans la<br />
mythologie du cinéma, non pas comme un<br />
éléphant dans un magasin de porcelaine mais<br />
comme un magicien dans une caverne d’Ali Baba,<br />
héritier tout à la fois facétieux et ingénu des<br />
surréalistes et des artistes pop qui s’amusaient à<br />
marier exigences artistiques et références ultra<br />
populaires, humour noir et sens de l’absurde,<br />
Tarantino a su, avec une rare délectation, une<br />
généreuse jubilation et une frénétique excitation,<br />
puiser dans tous les cinémas pour faire œuvre<br />
originale, revisiter tous les archétypes pour leur<br />
donner une nouvelle vie, bousculer tous les codes<br />
pour en établir de nouveaux, réévaluer et recycler<br />
tous les genres pour en inventer un qui<br />
n’appartient qu’à lui. Avec Tarantino, ce n’est pas<br />
du sang et des larmes, mais du sang et des rires, du<br />
sang et des mots, du sang et du culot…<br />
<strong>César</strong> d’Honneur<br />
Quentin Tarantino<br />
Franchement, vous en connaissez beaucoup des<br />
cinéastes qui sont capables d’élever une<br />
conversation sur “Like a Virgin” de Madonna au<br />
rang d’une discussion métaphysique, ou un<br />
échange sur les Big Mac au rang d’une réflexion<br />
existentielle, ou qui vous démontrent que “Top<br />
Gun” est avant tout un film gay, ou qui décident<br />
tout simplement, tout naturellement, de réécrire<br />
l’Histoire (avec un H s’il vous plaît !) et de tuer<br />
Hitler dans un cinéma parisien ? Et l’on pourrait<br />
citer des tas d’autres exemples, rappeler des scènes<br />
de suspense ou d’action d’une virtuosité<br />
incroyable, parler de ce rythme singulier qu’il<br />
impose et de ces castings inattendus qui sont<br />
autant de bonheurs, mais aussi évoquer la<br />
profondeur et la mélancolie qui baignent “Jackie<br />
Brown”… En faisant du cinéma, d’abord pour le<br />
plaisir du cinéma, Tarantino provoque, irrigue,<br />
prolonge le plaisir du spectateur. Le nôtre. Ça<br />
valait bien un <strong>César</strong> d’honneur.<br />
J’entends déjà son rire quand il va être sur scène.<br />
Un rire un rien sardonique, un rien inquiétant mais<br />
avec aussi, justement, une ombre d’inquiétude.<br />
Celle d’un grand enfant qui ne peut toujours pas<br />
s’empêcher de penser que le cinéma est mieux que<br />
la vie…<br />
Jean-Pierre Lavoignat<br />
What a glorious bastard !<br />
un grand enfant qui ne peut toujours pas s’empêcher de penser<br />
que le cinéma est mieux que la vie…