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Prémisses d'un nouveau modèle de consommation responsable

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Pr é m i s s e s d’u n n o u v e a u m o d è l e d e c o n s o m m at i o n r e s p o n s a b l e :<br />

q u a n d l a c r i s e d e c o n f i a n c e d e s c o n s o m m at e u r s<br />

d e v i e n t l e m o t e u r d u c h a n g e m e n t<br />

iep d e to u l o u s e<br />

Mé M o i r e p r o f e s s i o n n e l p r é s e n t é pa r Ml l e lisa fay e t<br />

Di r e c t e u r D e M é M o i r e : Je a n-Ma r c Dé c a u D i n<br />

2012<br />

© Arnold Palmer Hospital


Pr é m i s s e s d’u n n o u v e a u m o d è l e d e c o n s o m m at i o n r e s p o n s a b l e :<br />

q u a n d l a c r i s e d e c o n f i a n c e d e s c o n s o m m at e u r s<br />

d e v i e n t l e m o t e u r d u c h a n g e m e n t<br />

iep d e to u l o u s e<br />

Mé M o i r e p r o f e s s i o n n e l p r é s e n t é pa r Ml l e lisa fay e t<br />

Di r e c t e u r D e M é M o i r e : Je a n-Ma r c Dé c a u D i n<br />

2012


Av e rt i s s e m e n t :<br />

L’i e p d e to u L o u s e n’e n t e n d d o n n e r A u c u n e A p p r o b At i o n,<br />

n i i m p r o b At i o n d A n s L e s m é m o i r e s d e r e c h e r c h e. ce s o p i n i o n s<br />

d o i v e n t ê t r e c o n s i d é r é e s c o m m e p r o p r e s à L e u r A u t e u r.


So m m a i r e<br />

Introduction………………………………………………….................…............................... p. 1-3<br />

Première partie - La crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs.............................................. p. 4-80<br />

Chapitre 1 : Origine <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs……………….......<br />

Chapitre 2 : Le rôle amplificateur <strong>de</strong> la crise économique <strong>de</strong> 2008………….......…..<br />

Secon<strong>de</strong> partie - Les postulats d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>.....<br />

Chapitre 3 : Reposer les bases d’une nouvelle relation <strong>de</strong> confiance<br />

avec les consommateurs……....……………………………........……....<br />

p. 4-45<br />

p. 46-80<br />

p. 81-142<br />

p. 82-113<br />

Chapitre 4 : Le rôle <strong>de</strong> la communication dans ce processus <strong>de</strong> changement….......... p. 114-142<br />

Conclusion…………………………………………………………………………................. p. 143<br />

Table <strong>de</strong>s annexes………………………………………………………………..……..…...... p. 146<br />

Table <strong>de</strong>s illustrations……………………………..……………………………….................. p. 183<br />

Bibliographie……………………………………...……………………………...................... p. 185<br />

Table <strong>de</strong>s matières……………………………...………………………………...................... p. 193


INTRODUCTION<br />

« Après dix ans <strong>de</strong> désillusion, [les Français] voient l’avenir non plus comme une promesse<br />

mais comme une menace » 1 . Cette citation <strong>de</strong> Christophe Lambert résume parfaitement la<br />

situation à laquelle est confrontée la société française <strong>de</strong>puis le tournant <strong>de</strong>s années 2000, à<br />

savoir la déferlante d’une importante vague <strong>de</strong> pessimisme. En effet, une crise <strong>de</strong> confiance<br />

généralisée semble s’être durablement installée au sein <strong>de</strong> la société française et touche<br />

l’ensemble <strong>de</strong>s sphères qui la composent. On assiste par exemple à la désacralisation croissante<br />

<strong>de</strong>s institutions (État, Famille, Syndicat, Justice...) ainsi qu’à une remise en cause <strong>de</strong><br />

l’économie <strong>de</strong> marché. Le lien social est affaibli (montée <strong>de</strong> l’individualisme, transformation <strong>de</strong><br />

la cellule familiale, précarisation, etc.) et la mondialisation est désormais accusée <strong>de</strong> tous les<br />

maux. Cette irruption du doute et <strong>de</strong> la méfiance est caractéristique <strong>de</strong> la société française<br />

contemporaine qui, comme le rappelle l’enquête BVA - Gallup International, est la plus<br />

pessimiste du mon<strong>de</strong> : « les Français n'ont jamais été aussi pessimistes qu'aujourd'hui, même en<br />

1978, après le <strong>de</strong>uxième choc pétrolier lorsque l'ensemble du système économique avait été<br />

remis en question » 2 .<br />

Cette crise <strong>de</strong> confiance touche également la composante principale <strong>de</strong> la croissance, à<br />

savoir la <strong>consommation</strong>. En effet, désillusionnés par une société <strong>de</strong> l’ « hyper<strong>consommation</strong> »,<br />

les consommateurs semblent rejeter <strong>de</strong> plus en plus un <strong>modèle</strong> où la <strong>consommation</strong> est <strong>de</strong>venue<br />

une fin en soi. Cette défiance se répercute notamment à l’égard <strong>de</strong>s principaux acteurs du<br />

secteur que sont les entreprises et les marques. Pour comprendre ce phénomène, il faut tout<br />

d’abord définir ce que revêt la notion même <strong>de</strong> confiance. Tout au long <strong>de</strong> ce mémoire, lorsque<br />

nous parlerons <strong>de</strong> « confiance », nous ferons référence à la définition proposée par Patricia<br />

Furviez : « La confiance envers une marque, du point <strong>de</strong> vue du consommateurs, est la<br />

présomption <strong>de</strong> celui-ci que la marque, en tant qu’entité personnifiée, s’engage à avoir une<br />

action prévisible et conforme à ses attentes, et à maintenir avec bienveillance cette orientation<br />

dans la durée » 3 .<br />

1 Christophe Lambert, La société <strong>de</strong> la peur, Paris, Editions Plon, 2005, 197 pages<br />

2 BVA - Gallup International pour Le Parisien, Baromètre mondial <strong>de</strong> l’espoir économique, décembre 2011<br />

3 Patricia Gurviez, « La Confiance du Consommateur dans la Marque: Conceptualisation, Mesure et<br />

Management », Actes du 14ème Colloque <strong>de</strong> l’Association Française <strong>de</strong> Marketing, p. 73-96, 1998.<br />

1


Cette définition permet d’introduire une notion très importante pour comprendre ce<br />

phénomène : les attentes <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, l’une <strong>de</strong>s principales explications <strong>de</strong><br />

cette crise <strong>de</strong> confiance concerne la rupture qui s’est opérée entre les attentes <strong>de</strong>s<br />

consommateurs et les solutions proposées par les entreprises et les marques. Celles-ci semblent<br />

en effet avoir perdues ce qui faisait leur raison d’être, à savoir être un repère <strong>de</strong> qualité. De<br />

plus, les entreprises ont jusqu’à présent, échoué dans leur tentative d’intégration <strong>de</strong>s nouvelles<br />

attentes <strong>de</strong>s consommateurs en matière <strong>de</strong> responsabilité sociétale. Les attentes matérielles et<br />

immatérielles <strong>de</strong>s consommateurs n’étant ainsi plus satisfaites, on comprend dès lors qu’une<br />

crise <strong>de</strong> confiance durable se soit instaurée.<br />

On aboutit ainsi à une situation paradoxale où les consommateurs n’ont plus confiance dans<br />

les entreprises et les marques, alors même que seules ces <strong>de</strong>rnières ont les capacités <strong>de</strong><br />

répondre à leurs nouvelles aspirations en matière <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>. En effet, nous<br />

verrons que les consommateurs ont peu à peu transféré <strong>de</strong> nouvelles responsabilités aux<br />

entreprises, en termes notamment <strong>de</strong> responsabilités sociétales. Or, il s’avère que seules les<br />

gran<strong>de</strong>s marques pourront jouer le rôle <strong>de</strong> « moteurs du changement », en s’imposant <strong>de</strong><br />

nombreuses contraintes (production locale et « circuit court », soutien à l’agriculture biologique<br />

et au commerce équitable, etc.), difficilement envisageables pour les MDD ou les hard discount<br />

s’ils souhaitent conserver leur avantage compétitif en matière <strong>de</strong> prix.<br />

Face à cette crise <strong>de</strong> confiance, plusieurs réactions sont envisageables pour les entreprises et<br />

les marques. Celles-ci peuvent, comme la majorité <strong>de</strong>s entreprises le font à l’heure actuelle,<br />

considérer qu’il s’agit uniquement d’un « mauvais moment à passer » et qu’une fois la<br />

croissance économique retrouvée, les habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> re<strong>de</strong>viendront les mêmes<br />

qu’avant la crise. À l’opposé <strong>de</strong> cette attitu<strong>de</strong> attentiste et ancrée dans un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong>structeur <strong>de</strong><br />

valeur, nous avons choisi d’adopter une approche résolument optimiste, qui envisage la crise <strong>de</strong><br />

confiance comme une opportunité à saisir pour créer un <strong>nouveau</strong> système où les entreprises et<br />

les marques retrouveront toute leur place, en re<strong>de</strong>venant une solution crédible et répondant aux<br />

nouvelles attentes <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

Dès lors, ce mémoire aura pour ambition <strong>de</strong> répondre à la problématique suivante : comment<br />

les entreprises et les marques peuvent-elles saisir l’opportunité offerte par la crise <strong>de</strong> confiance<br />

<strong>de</strong>s consommateurs, pour bâtir un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, au sein<br />

duquel elles retrouveront toute leur légitimité ?<br />

2


Pour répondre à cette interrogation, nous montrerons que les entreprises et les marques<br />

<strong>de</strong>vront adopter une démarche en <strong>de</strong>ux temps. Tout d’abord, il sera indispensable qu’elles<br />

comprennent les tenants et aboutissants <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs, en<br />

s’interrogeant sur son origine mais également sur les implications <strong>de</strong> la crise économique dans<br />

cette situation. Puis, elles <strong>de</strong>vront passer à l’action, en adoptant une attitu<strong>de</strong> résiliente,<br />

permettant <strong>de</strong> reconstruire les bases d’une relation <strong>de</strong> confiance avec les consommateurs et<br />

impulser le changement vers un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>.<br />

Nous avons pris le parti <strong>de</strong> nous concentrer essentiellement sur le marché <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong> <strong>consommation</strong> dans la mesure où ce sont les produits dont la production et la<br />

<strong>consommation</strong> ont le plus d’inci<strong>de</strong>nces sur la société. En effet, agir sur ces produits vendus en<br />

très gran<strong>de</strong> quantité est un impératif si l’on veut prétendre avoir une inci<strong>de</strong>nce significative et<br />

envisager ainsi <strong>de</strong> construire les bases d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

Le présent mémoire est donc organisé en <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s parties : la première sera consacrée à<br />

une approche théorique <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, nous<br />

présenterons un certain nombre d’éléments explicatifs <strong>de</strong> la défiance qui touche les entreprises<br />

et les marques. Nous verrons qu’il existe <strong>de</strong>s explications conjoncturelles mais aussi et surtout<br />

structurelles. Nous évoquerons également la tentative mise en place par les entreprises pour<br />

éradiquer cette défiance, qui a consisté à concentrer leurs efforts sur la communication, en<br />

l’érigeant en véritable « rock star ». Si cette démarche semblait séduisante, elle n’aura pas<br />

l’effet escompté puisqu’elle ne fera que renforcer la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

La secon<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> ce mémoire sera davantage consacrée à une approche opérationnelle<br />

visant à présenter les postulats d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>. Nous<br />

verrons notamment comment les entreprises et les marques <strong>de</strong>vront s’y prendre pour reposer les<br />

bases d’une nouvelle relation <strong>de</strong> confiance avec les consommateurs. Nous abor<strong>de</strong>rons<br />

également le rôle <strong>de</strong> la communication dans ce processus <strong>de</strong> changement, en montrant que,<br />

pour prétendre accompagner les transformations en cours, cette <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>vra repenser ses<br />

fondamentaux afin <strong>de</strong> récréer un dialogue sincère et durable avec les consommateurs.<br />

3


PARTIE 1 : LA CRISE DE CONFIANCE DES CONSOMMATEURS<br />

Cette première partie se donne pour ambition d’émettre un certain nombre d’hypothèses<br />

théoriques permettant <strong>de</strong> comprendre comment les entreprises et les marques se sont retrouvées<br />

dans une situation <strong>de</strong> défiance sans précé<strong>de</strong>nt. Nous tenterons donc d’expliquer les origines <strong>de</strong><br />

cette crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

Pour se faire, nous reviendrons tout d’abord sur la crise <strong>de</strong> confiance qui touche les<br />

entreprises, en expliquant comment ces <strong>de</strong>rnières, alors qu’elles étaient considérées comme les<br />

« pivots majeurs <strong>de</strong>s sociétés occi<strong>de</strong>ntales » dans les années 90, se sont retrouvées, au tournant<br />

<strong>de</strong>s années 2000, dans une situation <strong>de</strong> discrédit. Nous évoquerons ensuite la défiance <strong>de</strong>s<br />

consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s marques, en expliquant comment celles-ci ont peu à peu perdu leur<br />

rôle <strong>de</strong> repères <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

Nous abor<strong>de</strong>rons également un exemple <strong>de</strong> solution trouvée par les entreprises et les marques<br />

pour renouer avec les consommateurs. En effet, ces <strong>de</strong>rnières se sont réfugiées dans la<br />

communication, convaincue que celle-ci pourrait masquer leurs faiblesses, en mettant en place<br />

<strong>de</strong>s logiques <strong>de</strong> communication « push » et en camouflant le désinvestissement dans la qualité<br />

<strong>de</strong> leur produit.<br />

Une fois ces explications structurelles mises en évi<strong>de</strong>nce, nous évoquerons les causes<br />

conjonctures induites par la crise économique <strong>de</strong> 2008. Nous verrons tout d’abord que la crise va<br />

non seulement transformer les comportements <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> (achat malin, recherche <strong>de</strong> prix<br />

bas…) mais elle va, avant tout, profondément modifier la façon dont les consommateurs<br />

appréhen<strong>de</strong>nt l’acte d’achat. En effet, nous verrons que ces <strong>de</strong>rniers vont <strong>de</strong> plus en plus se<br />

lancer dans une quête <strong>de</strong> sens à travers leur <strong>consommation</strong>.<br />

Enfin, nous évoquerons une autre conséquence <strong>de</strong> la crise économique : le transfert <strong>de</strong><br />

responsabilités <strong>de</strong>s politiques vers les entreprises. En effet, nous verrons que la crise<br />

économique va participer à la désacralisation <strong>de</strong>s institutions politiques en révélant notamment<br />

leur impuissance à anticiper et à trouver <strong>de</strong>s solutions face à la crise économique. Cette remise<br />

en cause <strong>de</strong> leur légitimité aura pour conséquence un transfert <strong>de</strong>s attentes vers les entreprises,<br />

en matière sociale et environnementale notamment.<br />

4


Chapitre 1 : Origine <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs<br />

Dans ce premier chapitre, nous tenterons <strong>de</strong> présenter l’étendue <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance<br />

<strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques. Il s’agira également <strong>de</strong> mettre<br />

en évi<strong>de</strong>nce les causes structurelles à l’origine cette défiance.<br />

Nous tenterons d’expliquer, dans une première section, que cette crise <strong>de</strong> confiance<br />

touche tout d’abord les entreprises. Nous verrons que cette rupture remonte au début <strong>de</strong>s<br />

années 2000, date à laquelle on observe un phénomène <strong>de</strong> désacralisation <strong>de</strong> l’entreprise en<br />

tant qu’institution. Deux autres hypothèses seront avancées pour expliquer cette mise à<br />

distance <strong>de</strong>s entreprises : nous évoquerons la montée <strong>de</strong>s contestations en interne (au niveau<br />

<strong>de</strong>s salariés), ainsi que la hausse <strong>de</strong>s attentes et exigences <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s<br />

entreprises.<br />

Puis, nous montrerons que cette crise <strong>de</strong> confiance touche également les marques, qui<br />

doivent notamment faire face à la remise en cause <strong>de</strong> leur valeur matérielle. Nous verrons<br />

également que <strong>de</strong> nouvelles alternatives se présentent aux consommateurs, à travers<br />

notamment la montée en puissance <strong>de</strong>s Marques <strong>de</strong> Distributeurs (MDD), qui ne font<br />

qu’encourager cette mise à distance <strong>de</strong>s marques.<br />

Nous évoquerons ensuite, dans une secon<strong>de</strong> section, la tentative mise en place par les<br />

entreprises et les marques, pour restaurer une relation <strong>de</strong> confiance avec les consommateurs,<br />

en se focalisant sur la communication et ses outils. Erigée en véritable « rock star », la<br />

communication a fini par tomber dans ses propres travers, en privilégiant la recherche <strong>de</strong><br />

« coups marketing » et en <strong>de</strong>venant son propre objet.<br />

Enfin, nous verrons que cette « sur-valorisation » <strong>de</strong> la communication s’avérera être un<br />

échec et ne fera qu’amplifier la défiance grandissante à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s<br />

marques. En effet, nous montrerons que cette stratégie va renforcer la mise à distance <strong>de</strong> la<br />

valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques, ainsi que le rejet d’un <strong>de</strong>s principaux outils <strong>de</strong> la<br />

communication qu’est la publicité. Ce phénomène sera d’ailleurs renforcé par la mise en<br />

place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> d’information permise par le web 2.0, qui viendra mettre un<br />

terme à l’asymétrie informationnelle caractéristique jusque-là <strong>de</strong> la relation entre le<br />

consommateur et les marques.<br />

5


Section 1 : Quand les entreprises et les marques n’inspirent plus confiance…<br />

Dans cette première section, nous reviendrons sur les origines <strong>de</strong> la défiance généralisée<br />

<strong>de</strong>s consommateurs auprès <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques. L’objectif est avant tout <strong>de</strong><br />

comprendre d’où proviennent les racines <strong>de</strong> cette crise <strong>de</strong> confiance, en montrant que celles-<br />

ci sont avant tout structurelles.<br />

Pour ce faire, nous nous intéresserons à la rupture <strong>de</strong>s années 2000 en expliquant qu’il<br />

s’agit d’une date charnière dans la relation entre les entreprises et les consommateurs. Nous<br />

nous interrogerons également sur la nature même <strong>de</strong> cette défiance : crise <strong>de</strong> confiance<br />

localisée ou remise en cause d’un système à bout <strong>de</strong> souffle ?<br />

Nous évoquerons également la mise à distance <strong>de</strong>s marques dans le quotidien <strong>de</strong>s<br />

consommateurs et tenterons <strong>de</strong> l’expliquer à travers <strong>de</strong>ux hypothèses : la remise en cause <strong>de</strong><br />

la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques ainsi que la montée <strong>de</strong> nouvelles alternatives pour les<br />

consommateurs telles que les MDD.<br />

I. Les entreprises face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs<br />

Tantôt sublimées par les tenants du capitalisme ou accusées <strong>de</strong> tous les maux par les<br />

partisans <strong>de</strong> la décroissance, les entreprises ont <strong>de</strong>puis toujours occupées une place centrale<br />

dans les économies libérales.<br />

Avec l’avènement, dans les années 90, du libéralisme comme seul <strong>modèle</strong> économique<br />

viable, les entreprises ont consolidé leur place centrale dans les sociétés occi<strong>de</strong>ntales.<br />

Cependant, les années 2000 marquèrent un véritable tournant dans leur relation avec les<br />

consommateurs : une crise <strong>de</strong> confiance durable s’installe.<br />

Nous tenterons d’expliquer cette défiance naissante à travers trois hypothèses : la<br />

désacralisation <strong>de</strong> l’entreprise comme institution, la crise <strong>de</strong> confiance interne <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />

salariés ou encore le renforcement <strong>de</strong>s attentes et <strong>de</strong>s exigences <strong>de</strong>s consommateurs envers<br />

les entreprises. Explications…<br />

6


I.1. Années 90 : l’entreprise comme « pivot majeur <strong>de</strong>s sociétés occi<strong>de</strong>ntales »<br />

Les années 90 marquent un tournant majeur. Avec l’avènement du néolibéralisme, les<br />

entreprises triomphent : c’est l’explosion <strong>de</strong>s « success stories », le boom <strong>de</strong>s start-up et le<br />

début <strong>de</strong> la « peopolisation » <strong>de</strong>s chefs d’entreprise.<br />

I.1.1. Avènement du néolibéralisme économique<br />

Avec les années 90, c’est le <strong>modèle</strong> d’économie <strong>de</strong> marché néo-libérale qui s’impose. En<br />

effet, le système économique basé sur « une rationalité nouvelle qui se caractérise par la mise<br />

en concurrence <strong>de</strong> tous les secteurs <strong>de</strong> la société » 4 fait alors consensus. Avec la chute du<br />

mur <strong>de</strong> Berlin et la disparition <strong>de</strong> l’Union Soviétique, on assiste au déclin progressif <strong>de</strong>s<br />

systèmes alternatifs (marxisme, socialisme, social-démocratie, etc.), dans les pays <strong>de</strong> l'ancien<br />

bloc communiste et dans <strong>de</strong> nombreux pays en voie <strong>de</strong> développement.<br />

I.1.2. Success stories<br />

Avec le triomphe du libéralisme, les entreprises se retrouvent au cœur <strong>de</strong>s systèmes<br />

économiques. C’est l’ère <strong>de</strong>s « restructurations profon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’industrie et <strong>de</strong>s services,<br />

symbolisées par les mégafusions » 5 6 : par exemple, Total rachète Petrofina en 1995, Axa<br />

acquiert l’UAP (Union <strong>de</strong>s Assurances <strong>de</strong> Paris) en 1996 ou encore Boeing rachète<br />

McDonnell Douglas en 1997. C’est également l’ère <strong>de</strong>s « success stories » où <strong>de</strong> nombreuses<br />

entreprises françaises, comme Danone, L’Oréal ou Nokia 7 se voient reconnaître une<br />

consécration internationale.<br />

4 Fabrice Flipo, « La raison libérale », 12 janvier 2010, Mouvements.info.<br />

Disponible sur http://www.mouvements.info/La-raison-neoliberale.html<br />

5 Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p.42<br />

6 A ce sujet, voir Annexe I : Jean-Baptiste Jacquin, « L'année record <strong>de</strong>s fusions et acquisitions française »,<br />

19 décembre 1996, Lexpansion.fr. Disponible sur http://lexpansion.lexpress.fr/economie/l-annee-record-<strong>de</strong>sfusions-et-acquisitions-francaises_6490.html<br />

7 A ce sujet, voir Annexe II : Gilles Fontaine, « Nokia, le centenaire le plus branché <strong>de</strong> la planète », 17<br />

décembre 1998, Lexpansion.fr. Disponible sur http://lexpansion.lexpress.fr/economie/nokia-le-centenaire-leplus-branche-<strong>de</strong>-la-planete_11655.html<br />

7


I.1.3. Boom <strong>de</strong>s starts-up<br />

C’est également la décennie où l’engouement pour les nouvelles technologies apparaît,<br />

symbolisé par le boom <strong>de</strong>s start-up. On voit alors fleurir <strong>de</strong>s milliers d’entreprises liées aux<br />

technologies <strong>de</strong> l’information. C’est le cas notamment <strong>de</strong> Yahoo! et GeoCities, créées en<br />

1994, Amazon.com, fondée en 1995, Hotmail, créée en 1996 ou encore Google, qui voit le<br />

jour en 1998.<br />

I.1.4. « Peopolisation » <strong>de</strong>s chefs d’entreprise<br />

Les années 90 marquèrent également un tournant dans la gouvernance <strong>de</strong>s entreprises<br />

notamment vis-à-vis <strong>de</strong> la médiatisation <strong>de</strong>s grands patrons et <strong>de</strong> l’explosion <strong>de</strong> leur<br />

rémunération.<br />

L’extrait <strong>de</strong> l’article ci-<strong>de</strong>ssous illustre bien ce point :<br />

« Et, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans, tous les patrons du CAC y passent. Même les plus discrets comme<br />

Lindsay Owen-Jones, patron <strong>de</strong> L'Oréal, Edouard Michelin et Michel Bon, ont posé pour<br />

Paris-Match. Le premier avec épouse, les autres sans. Mais tous en tenue casual day ». 8<br />

Cette tendance s’illustre également par l’explosion <strong>de</strong>s revenus moyens (salaires et stock<br />

options) <strong>de</strong>s patrons du CAC 40 : en 1990, ces <strong>de</strong>rniers gagnaient environ 85 fois le SMIC<br />

par an (soit environ 840 000 euros) contre 500 fois en 2000 9 (soit environ 6 millions d’euros<br />

par an), ce qui correspond à une hausse <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 700%, en dix ans.<br />

8 Odile Benyahia-Koui<strong>de</strong>r, « Ces patrons qui jouent les têtes <strong>de</strong> gondole », 4 décembre 2000, Libération.fr.<br />

Disponible sur http://www.liberation.fr/economie/0101355684-ces-patrons-qui-jouent-les-tetes-<strong>de</strong>-gondole<br />

9 Selon le rapport n°7 du Conseil <strong>de</strong> l'Emploi, <strong>de</strong>s Revenus et <strong>de</strong> la Cohésion sociale, La France en Transition<br />

1993-2005, p. 108<br />

8


I.1.5. L’exemple <strong>de</strong> Vivendi<br />

La multinationale française Vivendi est emblématique <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>. Autrefois sous le<br />

nom <strong>de</strong> la « Compagnie Générale <strong>de</strong>s Eaux », l’entreprise était spécialisée dans le traitement<br />

<strong>de</strong>s déchets, dans la gestion <strong>de</strong> l’énergie et <strong>de</strong>s transports, ainsi que dans la construction et<br />

l’immobilier. Il faudra attendre les années 90 pour que la société investisse dans les<br />

télécommunications et les médias. Commence alors les nombreuses acquisitions (Cegetel en<br />

1996 ou Seagram en 2000, par exemple) et participation au capital (AOL Europe en 1996,<br />

Havas en 1998). C’est le début <strong>de</strong> la « success story » <strong>de</strong> l’entreprise, qui prend le nom <strong>de</strong><br />

« Vivendi » en 1998 et donnera naissance à la multinationale que l’on connaît aujourd’hui,<br />

autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux pôles : le pôle « Vivendi Communication » (avec Cegetel, Havas et Canal +)<br />

et le pôle « Vivendi Environnement » (avec La Générale <strong>de</strong>s Eaux, Dalkia, CGIS et SGE).<br />

L’ascension continue avec la création <strong>de</strong> Vivendi Universal en 2000, organisé autour <strong>de</strong> trois<br />

pôles : Universal MusicGroup, Vivendi Universal Publishing et Vivendi Universal<br />

Entertainment. 10<br />

Les années 90 marquèrent également l’ère <strong>de</strong> la « peopolisation » du <strong>nouveau</strong> PDG,<br />

Jean-Marie Messier, arrivé à la tête du<br />

groupe en 1996. Surmédiatisé, le patron<br />

« rock-star » fera tour à tour la Une <strong>de</strong>s<br />

magazines people, comme Paris Match (et<br />

la célèbre photo du patron <strong>de</strong> Vivendi<br />

avec ses chaussettes trouées, cf. image ci-<br />

contre), <strong>de</strong>s journaux et magazines<br />

économiques (comme Le Mon<strong>de</strong> ou<br />

l’Express) et aura même sa marionnette<br />

dans les Guignols <strong>de</strong> l’info (à qui l’on doit d’ailleurs son surnom <strong>de</strong> J6M (Jean-Marie<br />

Messier, Moi-Même, Maître du Mon<strong>de</strong>). Il sera également l’invité <strong>de</strong> nombreuses émissions<br />

télévisées comme « Arrêt sur images » et un livre lui sera entièrement consacré 11 . Enfin, la<br />

consécration ultime arrivera en 2000, date à laquelle il sera sacré l’homme <strong>de</strong> l’année par<br />

Stratégies 12 .<br />

10 Source : www.vivendi.com<br />

11 Daniel Fortin, Comment Jean Marie Messier est <strong>de</strong>venu le patron le plus puissant <strong>de</strong> France, Paris,<br />

Assouline, 1999, 116 pages.<br />

12 Stratégies, n°1170, 01 décembre 2000<br />

Fig. 1 - Jean-Marie Messier, Le <strong>nouveau</strong> Nabab - Paris Match -<br />

2000<br />

9


I.2. La rupture <strong>de</strong>s années 2000<br />

La pério<strong>de</strong> d’ « exubérance irrationnelle 13 » que nous venons <strong>de</strong> présenter, marqua un<br />

tournant majeur dans la confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises. En effet,<br />

l’exubérance boursière et l’ensemble <strong>de</strong>s dérives, abus et scandales <strong>de</strong>s années 90 vont être<br />

révélés au grand jour au début <strong>de</strong>s années 2000 et marqueront le début d’une crise <strong>de</strong><br />

confiance durable entre les consommateurs et les marques.<br />

I.2.1. Constat<br />

Les années 2000 marque un véritable tournant dans la relation <strong>de</strong> confiance entre les<br />

consommateurs français et les entreprises. Pour illustrer le constat <strong>de</strong> cette défiance<br />

naissante, nous nous appuierons sur <strong>de</strong>ux étu<strong>de</strong>s menées, l’une en 2003 par TNS Sofres et<br />

l’autre en 2011 par l’IFOP. Nous nous intéresserons également à un article publié en 2005<br />

dans le Marketing Magazine n°96, consacré à la société <strong>de</strong> méfiance.<br />

a- Enquête <strong>de</strong> TNS Sofres « L'opinion française en attente <strong>d'un</strong>e nouvelle gouvernance<br />

d'entreprise » - 2003<br />

TNS Sofres a publié, lors du salon Top Com qui s’est tenu à Paris en 2003, la synthèse<br />

d’une dizaine d’étu<strong>de</strong>s menées entre 1985 et 2002, intitulée « L'opinion française en attente<br />

<strong>d'un</strong>e nouvelle gouvernance d'entreprise ». Cette enquête met en évi<strong>de</strong>nce une diminution<br />

drastique <strong>de</strong> la confiance <strong>de</strong>s Français dans les entreprises :<br />

« En 1985, 25% <strong>de</strong>s personnes sondées déclaraient ne pas faire confiance aux entreprises.<br />

Elles étaient 54% en 2002. De plus, les gran<strong>de</strong>s entreprises sont jugées comme "surtout<br />

attentives : aux intérêts <strong>de</strong> leurs dirigeants (à 93%) et à leur réputation (à 92%). "Seuls 21%<br />

<strong>de</strong>s personnes interrogées pensent que ces multinationales sont attentives à la satisfaction <strong>de</strong><br />

leurs clients, et 18% les jugent soucieuses <strong>de</strong> l'environnement. Le mal est moindre<br />

concernant les petites entreprises, 71% <strong>de</strong>s sondés leur accordant toujours leur<br />

confiance. » 14<br />

13<br />

Terme utilisé par Alan Greenspan, dans son discours du 5 décembre 1996, <strong>de</strong>vant l’American Enterprise<br />

Institute.<br />

14<br />

TNS Sofres, L'opinion française en attente <strong>d'un</strong>e nouvelle gouvernance d'entreprise, 2003<br />

10


- Sondage <strong>de</strong> l’IFOP pour CityzenCar « Les Français et la confiance »- 2011<br />

L’IFOP a mené un sondage pour le compte <strong>de</strong> CityzenCar, dont les résultats sont parus le<br />

4 octobre 2011 15 .<br />

Le principal enseignement que l’on peut retirer <strong>de</strong> cette enquête est le suivant : « 41% <strong>de</strong>s<br />

sondés n’ont plutôt pas confiance dans les entreprises et 7% pas confiance du tout », comme<br />

en témoignage les résultats ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

Fig. 2 - Résultat <strong>de</strong> l'enquête Ifop pour CitizenCar : « D'une manière générale, faites-vous<br />

confiance à chacun <strong>de</strong>s acteurs suivants? » - 2003<br />

15 IFOP / CityzenCar, Les Français et la confiance, 2003<br />

11


c- Article <strong>de</strong> Rita Mazzoli « Société <strong>de</strong> méfiance, société <strong>de</strong> transparence » - 2005 16<br />

« Semaine après semaine, les sondages égrènent leur triste litanie. Les Français n'ont plus<br />

confiance en rien. Face au doute et à la méfiance généralisée, toutes les institutions<br />

s'accor<strong>de</strong>nt sur un point. Instaurer une nouvelle relation basée sur la transparence et la<br />

vérité. Deux postures délicates à manier. [...] Englués dans le doute et la défiance vis-à-vis<br />

<strong>de</strong>s institutions, entreprises, médias, politiques, les Français ne se contentent plus <strong>de</strong><br />

promesses, <strong>de</strong> discours. Ils veulent <strong>de</strong>s faits, <strong>de</strong>s preuves. [...] « Plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s<br />

Français déclarent ne pas faire confiance aux gran<strong>de</strong>s entreprises », note Elizabeth Pastore-<br />

Reiss, directrice d'Ethicity. Face à ces doutes, apparaît un <strong>nouveau</strong> dogme : la transparence.<br />

Cette transparence, qui s'oppose à l'opacité, aux secrets, nous l'attendons aujourd'hui <strong>de</strong><br />

tous: <strong>de</strong>s politiques, <strong>de</strong>s entreprises, <strong>de</strong>s marques. [...] Le culte <strong>de</strong> la transparence est<br />

certainement une idéologie, au sens où elle s'impose à tous comme une évi<strong>de</strong>nce indiscutable<br />

[...] La méfiance <strong>de</strong>s consommateurs ? C'est parce qu'ils ont été trompés et qu'on n'est pas<br />

assez transparent avec eux. [...] » 17 .<br />

Tous ces éléments semblent donc confirmer la défiance naissante <strong>de</strong>s consommateurs vis-<br />

à-vis <strong>de</strong>s marques, qui s’est fortement accélérée au passage <strong>de</strong>s années 2000. En effet, si l’on<br />

en croit la première enquête <strong>de</strong> 2003 réalisée par TNS Sofres, il apparaît, qu’entre 1985 et<br />

2002, la part <strong>de</strong>s consommateurs déclarant ne pas faire confiance aux entreprises a plus que<br />

doublé. Cette tendance se confirme en 2005, où Elizabeth Pastore-Reiss, Directice<br />

d’Ethicity, Cabinet <strong>de</strong> conseil en développement durable et marketing <strong>responsable</strong>, confirme<br />

que « plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s Français déclarent ne pas faire confiance aux gran<strong>de</strong>s<br />

entreprises ». L’enquête <strong>de</strong> 2011 ne fait que confirmer cette tendance lour<strong>de</strong>, en mettant en<br />

évi<strong>de</strong>nce que 48% <strong>de</strong>s français déclarent ne pas faire confiance aux entreprises 18 .<br />

Les années 2000 semblent donc être la décennie où l’entreprise tombe <strong>de</strong> son pié<strong>de</strong>stal et est<br />

confrontée à sa propre réalité. Quelles explications peut-on avancer pour justifier cette<br />

défiance naissante ?<br />

16<br />

Rita Mazzoli, « Société <strong>de</strong> méfiance, société <strong>de</strong> transparence », Marketing Magazine, n°96, 2005, p. 6<br />

17<br />

id.<br />

18<br />

Le taux <strong>de</strong> 48% est légèrement inférieur à celui obtenu en 2002, qui était à hauteur <strong>de</strong> 52%. Ce résultat peut<br />

s’expliquer en gran<strong>de</strong> partie par le fait que les résultats obtenus en 2002 concernaient uniquement les gran<strong>de</strong>s<br />

entreprises alors que ceux <strong>de</strong> 2011 concernent l’ensemble <strong>de</strong>s entreprises (les Français accordant beaucoup plus<br />

<strong>de</strong> confiance aux petites entreprises).<br />

12


I.2.2. Explications <strong>de</strong> la rupture <strong>de</strong>s années 2000<br />

Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’économie en 2001, a rebaptisé cette décennie d’exubérance<br />

que représentent les années 90, « The Roaring nineties », par référence aux « Roaring<br />

Tweenties », correspondant aux années 20 qui ont précédées le krach boursier <strong>de</strong> 1929.<br />

Comment dès lors expliquer le passage <strong>de</strong>s « Roaring nineties » à une décennie où la crise <strong>de</strong><br />

confiance semble s’être généralisée ?<br />

a. Une institution désacralisée : mensonges et manipulation au cœur <strong>de</strong>s entreprises<br />

> Scandales et frau<strong>de</strong>s politico-financiers<br />

Avec le tournant <strong>de</strong>s années 2000, c’est l’ensemble du système mis en place <strong>de</strong>puis<br />

le milieu <strong>de</strong>s années 90, centré autour <strong>de</strong>s valeurs technologiques, qui vacille. En effet, la<br />

pério<strong>de</strong> d’euphorie sur les marchés financiers (« investissements frénétiques sur <strong>de</strong>s valeurs<br />

technologiques survalorisées » 19 ), va prendre fin au début <strong>de</strong>s années 2000 avec l’explosion<br />

<strong>de</strong> la « bulle internet ».<br />

L’effondrement <strong>de</strong> cette « nouvelle économie » va être un véritable électrochoc et <strong>de</strong><br />

nombreux scandales et frau<strong>de</strong>s politico-financièrs seront alors révélés. L’une <strong>de</strong>s affaires<br />

les plus célèbres est celle <strong>de</strong> l’entreprise Enron,<br />

société américaine du secteur <strong>de</strong> l’énergie,<br />

qui a connu un succès fulgurant dans les<br />

années 90. Le scandale éclata en 2001, date à<br />

laquelle ont été révélées les nombreuses frau<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

la société qui, par <strong>de</strong> nombreux stratagèmes,<br />

gonflait artificiellement sa valeur boursière.<br />

D’autres scandales financiers éclatèrent par la suite : An<strong>de</strong>rsen en 2002, WorldCom ou<br />

Parmalat en 2003, Comverse Technology ou encore Cablevision Systems (comme le<br />

scaricature le <strong>de</strong>ssin ci-<strong>de</strong>ssus).<br />

19 Tristan Berteloot, « Finances : <strong>de</strong> la bulle internet à la crise <strong>de</strong>s subprimes », 22 décembre 2009,<br />

Nouvelobs.com. Disponible sur http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20091222.OBS1440/finances-<strong>de</strong>-labulle-internet-a-la-crise-<strong>de</strong>s-subprimes.html<br />

13<br />

Fig. 3 - Enron collapse starts domino effect -<br />

Chris Grosz - 2006


Compromissions morales<br />

D’autres scandales mettant en cause <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s entreprises multinationales éclatèrent par<br />

la suite. C’est notamment le cas avec « L’affaire Total en Birmanie » ou « L’Affaire Elf en<br />

Afrique » où ces <strong>de</strong>ux multinationales sont accusées <strong>de</strong> complicité avec les régimes<br />

dictatoriaux.<br />

On peut également citer les nombreux scandales qui ont éclaboussés l’entreprise Nike,<br />

notamment celui autour du travail <strong>de</strong>s enfants. En effet, en 1997, une photo montrant un<br />

jeune pakistanais cousant un ballon « Nike » sort dans les médias et scandalise l’opinion<br />

publique.<br />

> Désastres écologiques<br />

De nombreuses entreprises vont également être accusées d’être à l’origine <strong>de</strong> catastrophes<br />

écologiques. C’est le cas notamment du naufrage <strong>de</strong> l’Erika en décembre 1999, provoquant<br />

une marée noire sans précé<strong>de</strong>nt, ou encore <strong>de</strong> l’explosion <strong>de</strong> l’usine AZF à Toulouse, en<br />

2001, provoquant la mort <strong>de</strong> 30 personnes et causant <strong>de</strong>s dégâts écologiques considérables.<br />

> Manifestations alter-mondialistes<br />

Le début <strong>de</strong>s années 2000 marque également le succès <strong>de</strong>s mouvements altermondialistes.<br />

En effet, à partir <strong>de</strong>s manifestations <strong>de</strong> Seattle qui ont eu lieu en 1999, les mouvements<br />

altermondialistes, dont le plus connu en France est ATTAC (Association pour la Taxation<br />

<strong>de</strong>s Transactions financières et pour l'Action Citoyenne) commencent à être fortement<br />

médiatisés. Remettant en cause les dérives d’une mondialisation trop centrée sur l’économie,<br />

les idées soutenues par ces mouvements commencent à sensibiliser l’opinion publique,<br />

autour notamment <strong>de</strong>s méfaits causés par les entreprises.<br />

14


. Une crise <strong>de</strong> confiance interne <strong>de</strong>s employés<br />

Pour expliquer cette crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises, il<br />

faut également s’intéresser à un autre phénomène : la crise <strong>de</strong> confiance interne <strong>de</strong>s<br />

employés.<br />

> Licenciements boursiers<br />

Cette crise <strong>de</strong> confiance s’est peu à peu installée, notamment avec la vague <strong>de</strong><br />

« licenciements boursiers » d’entreprises en bonne santé. Ce fut le cas par exemple <strong>de</strong><br />

l’entreprise Michelin, en 1999 (on parle d’ailleurs <strong>de</strong> l’« Affaire Michelin », qui a rendu<br />

populaire l’expression « licenciement boursier »), ou <strong>de</strong> Danone en 2001. Ces <strong>de</strong>ux affaires<br />

ont révélé au grand public que les décisions <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s entreprises pouvaient être régies par<br />

<strong>de</strong>s intérêts financiers court-termistes, sous la pression notamment <strong>de</strong>s actionnaires.<br />

> Réseaux sociaux<br />

Il faut également relever l’importance <strong>de</strong>s réseaux sociaux dans la relation <strong>de</strong> confiance<br />

<strong>de</strong>s salariés avec leurs entreprises. En effet, avec l’arrivée <strong>de</strong> ces <strong>nouveau</strong>x outils <strong>de</strong><br />

communication, accessibles à tous, la frontière entre l’interne et l’externe est <strong>de</strong> plus en plus<br />

poreuse : si autrefois un inci<strong>de</strong>nt interne pouvait ne pas s’ébruiter, il est aujourd’hui <strong>de</strong> plus<br />

ne plus difficile pour l’entreprise <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s informations confi<strong>de</strong>ntielles.<br />

> Etu<strong>de</strong> « What’s Working » - 2011<br />

Cette tendance latente <strong>de</strong> mise à distance <strong>de</strong>s salariés <strong>de</strong> leur entreprise semble connaître<br />

son apogée ces <strong>de</strong>rnières années, comme nous le montre la récente étu<strong>de</strong> « What’s<br />

Working », menée en 2011 par Mercer , Cabinet <strong>de</strong> conseil en ressources humaines. 20<br />

20 Mercer, What’s working ? , 2011<br />

15


Deux enseignements peuvent être retenus <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> :<br />

-­‐ une forte baisse <strong>de</strong> l’engagement <strong>de</strong>s salariés<br />

L’étu<strong>de</strong> montre, par exemple, que 30% <strong>de</strong>s salariés français songent sérieusement à quitter<br />

leur entreprise, (contre 12,9% en 2007). De plus, la satisfaction globale <strong>de</strong>s salariés par<br />

rapport à leur entreprise est en baisse <strong>de</strong> 6 points et leur sentiment <strong>de</strong> fierté vis-à-vis <strong>de</strong> leur<br />

employeur chute <strong>de</strong> 9 points : ils ne sont plus que 58% à « être fiers <strong>de</strong> leur entreprise ».<br />

-­‐ une chute <strong>de</strong> la satisfaction au travail<br />

L’étu<strong>de</strong> montre également que le pourcentage <strong>de</strong> salariés français satisfaits dans leur travail<br />

passe <strong>de</strong> 72% en 2007 à 57% en 2011. Le sentiment d’accomplissement chute également<br />

fortement (il passe <strong>de</strong> 72% en 2007 à 58% en 2011).<br />

c. Déceptivité et exigences renforcées, au cœur <strong>de</strong> la relation consommateurs-entreprises<br />

Une troisième hypothèse consiste à montrer qu’au début <strong>de</strong>s années 2000, les entreprises<br />

ont commencé à énormément communiquer autour du « green » et du RSE. Cette « sur-<br />

communication » autour <strong>de</strong> problématiques « vertes » s’est avérée être pour la plupart du<br />

« greenwashing » (« mot utilisé communément lorsqu'un message <strong>de</strong> communication abuse<br />

ou utilise à mauvais escient l'argument écologique ») 21 .<br />

21 Définition proposée sur le site <strong>de</strong> l’ADEME, Agence <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> la Maîtrise <strong>de</strong> l’Energie :<br />

www.a<strong>de</strong>me.fr<br />

16


Trois conséquences découlent <strong>de</strong> ce phénomène <strong>de</strong> « blanchiment écologique » :<br />

> Une responsabilité attribuée aux entreprises<br />

La première conséquence nous est expliquée par Thierry Libaert, lors du « Grand Débat<br />

Cels’and Co », organisé le 29 mars 2012, à Paris 22 :<br />

« Dans les choses importantes que l’on voit apparaître, c’est l’effet boomerang <strong>de</strong> la<br />

communication sur le thème du RSE. Depuis 10 ans où les entreprises ont beaucoup<br />

communiqué sur le thème du RSE, la relation <strong>de</strong> confiance avec les entreprises a tendance à<br />

décroitre. Dans les enquêtes réalisées sur les thématiques environnementales, à la question<br />

« Qui est <strong>responsable</strong> <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> l’environnement ? », maintenant c’est l’entreprise<br />

qui est pointée. C’est la fonction d’agenda […]. Du coup, on a attiré attention sur<br />

l’environnement et donc on va considérer qu’il y a <strong>de</strong>s relations directes <strong>de</strong> responsabilités<br />

<strong>de</strong>s entreprises sur l’environnement ».<br />

> Des effets d’annonce déceptifs<br />

Une autre conséquence concerne les déceptions générées par <strong>de</strong>s « effets d’annonce », qui<br />

se sont avérés, pour la plupart, sans fon<strong>de</strong>ment. C’est ce que nous explique Laurent Habib,<br />

dans une interview réalisée par le SYRPA (Syndicat <strong>de</strong>s Rédacteurs techniques <strong>de</strong> la Presse<br />

Agricole) 23 :<br />

« Toutes les réalités à l’intérieur <strong>de</strong>s entreprises apparaissent violemment contre ce que<br />

l’entreprise raconte. Le green a été une vaste fumisterie car on était dans une sorte<br />

d’inconscience absolue, sans savoir ce qui était le plus green et le moins green et cela a<br />

permis à tout le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong>s arguments favorables en effaçant ceux qui ne l’étaient<br />

pas. Nous avons tous accepté à travers le green que les entreprises racontent n’importent<br />

quoi, en considérant que c’était bien » 24 .<br />

22 Cels’and Co, Association <strong>de</strong>s Anciens élèves diplômés du CELSA, organise chaque année un grand débat<br />

autour d’une thématique. Cette année, le thème du débat était : « Les valeurs dans l’entreprise : levier<br />

i<strong>de</strong>ntitaire ou démarche éthique ». Compte rendu en intégralité en Annexe VIII<br />

23 Propos recueilli par le Syrpa Normand, le 27 janvier 2011.<br />

Disponible sur http://www.com-agri.fr/documents/communication-Transformative.pdf<br />

24 Id.<br />

17


Des exigences renforcées<br />

Un <strong>de</strong>rnier phénomène, peu souvent cité, doit être prise en compte, celui du renforcement<br />

<strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, cette banalisation <strong>de</strong> l’argument « vert » a éveillé<br />

<strong>de</strong>s attentes et <strong>de</strong>s exigences accrues, tant en interne qu’en externe. C’est ce qu’explique<br />

Laurent Sacchi, Directeur général <strong>de</strong> la Communication et <strong>de</strong>s Relations extérieures du<br />

groupe Danone 25 :<br />

« L’effet boomerang existe aussi en interne, pas uniquement parce que l’on est déceptif ou<br />

que cela place l’entreprise face à <strong>de</strong>s contradictions mais aussi parce que cela créer un<br />

niveau d’attente. Quand on a commencé à un peu plus parler d’environnement, on a vu dans<br />

les étu<strong>de</strong>s d’opinion interne, une dégradation <strong>de</strong> l’image <strong>de</strong>s collaborateurs <strong>de</strong> Danone sur<br />

l’environnement alors que l’on faisait plus <strong>de</strong> choses et qu’ils le savaient. On avait augmenté<br />

le niveau d’intérêt et donc le niveau d’attentes <strong>de</strong>s collaborateurs».<br />

Si la crise <strong>de</strong> confiance touche fortement les entreprises, qu’en est-il <strong>de</strong>s marques ?<br />

25 Propos recueilli lors du « Grand Débat Cels’and Co », organisé le 29 mars 2012, à Paris. Cf. Annexe VIII<br />

18


II - Les marques face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs<br />

Si les entreprises doivent affronter une crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s consommateurs,<br />

les marques ne sont pas en reste. En effet, longtemps considérées comme <strong>de</strong> véritables<br />

repères <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, les marques sont désormais <strong>de</strong> plus en plus mises à distance et<br />

doivent faire face à la concurrence grandissante <strong>de</strong>s MDD (Marques De Distributeurs).<br />

Nous tenterons d’expliquer cette mise à distance <strong>de</strong>s marques par les consommateurs, en<br />

nous intéressant à la remise en cause <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rnières ainsi qu’à<br />

l’arrivée massive <strong>de</strong>s MDD sur le marché <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

II.1. Une remise en cause <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong> la marque<br />

Cette mise à distance <strong>de</strong>s marques par les consommateurs s’explique par la perte <strong>de</strong><br />

repères <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers. En effet, longtemps, la marque était considérée par les<br />

consommateurs comme un gage <strong>de</strong> qualité et d’innovation. On peut citer par exemple<br />

Moulinex, qui dès les années 30, commercialise un ensemble d'équipements électroménagers<br />

répondant aux attentes <strong>de</strong>s consommatrices, ou encore Philips, marque longtemps considérée<br />

comme une référence sur le marché <strong>de</strong> l’éclairage et <strong>de</strong> l’électroménager.<br />

A cette époque, les marques constituaient <strong>de</strong> véritables repères <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> et les<br />

promesses <strong>de</strong> qualité et d’innovation mises en avant (qui constituaient d’ailleurs les<br />

principaux messages <strong>de</strong>s publicités <strong>de</strong> l’époque, comme en témoigne les publicités <strong>de</strong> Philips<br />

ou Lu, Annexe III), étaient confirmées par l’expérience <strong>de</strong> marque.<br />

Nous tenterons <strong>de</strong> démontrer que la remise en cause <strong>de</strong>s marques par les consommateurs<br />

s’explique en gran<strong>de</strong> partie par l’abandon <strong>de</strong> ce qui fon<strong>de</strong> leur raison d’être, à savoir la<br />

qualité et l’innovation.<br />

19


II.1.1. Le désinvestissement <strong>de</strong>s marques dans la qualité <strong>de</strong> ses produits<br />

Longtemps perçues comme <strong>de</strong>s repères incontournables en matière <strong>de</strong> qualité, les<br />

marques doivent faire face, <strong>de</strong>puis quelques années, à une importante désaffection <strong>de</strong> la part<br />

<strong>de</strong>s consommateurs. Ce qu’il leur est reproché ? Leur désengagement en matière <strong>de</strong> qualité…<br />

a. Une baisse <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques, perçue par les consommateurs…<br />

En 2006, 56% <strong>de</strong>s Français interrogés considéraient la marque comme un critère<br />

important pour se faire une idée <strong>de</strong> la qualité d’un produit alimentaire. Ils ne sont plus que<br />

48% en 2011, selon le Baromètre Alimentation 2011 du Ministère <strong>de</strong> l’Alimentation, <strong>de</strong><br />

l’Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche 26 .<br />

Cette remise en cause <strong>de</strong> la qualité supposée supérieure <strong>de</strong>s marques a été testée <strong>de</strong><br />

nombreuses fois, à travers différentes étu<strong>de</strong>s. C’est le cas par exemple <strong>de</strong> l’édition 2005 <strong>de</strong><br />

l’étu<strong>de</strong> Megabrand, réalisée par TNS Sofres 27 . Cette étu<strong>de</strong> montre notamment que « la<br />

qualité <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques n’est plus perçue comme supérieure aux marques challengers, ni<br />

même aux produits <strong>de</strong> premiers prix. Pour preuve : un cinglant recul <strong>de</strong> 7,1 points dans ce<br />

domaine en seulement trois ans [entre 2002 et 2005] » 28 .<br />

De plus, l’étu<strong>de</strong> quantitative que j’ai eu l’occasion <strong>de</strong> réaliser sur un échantillon <strong>de</strong> 93<br />

personnes, va dans ce sens, puisque 76,6% <strong>de</strong>s sondés considèrent que les produits <strong>de</strong><br />

marques et les produits <strong>de</strong> MDD sont <strong>de</strong> qualité équivalente voire supérieure.<br />

26<br />

Ministère <strong>de</strong> l'Alimentation, <strong>de</strong> l'Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche, Baromètre <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> l'alimentation<br />

(n°6), Septembre 2011<br />

27<br />

TNS Sofres, Mégabrand, 2005.<br />

28<br />

Sylvie Guingois, « Crise <strong>de</strong> défiance vis-à-vis <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques », 14 avril 2005, LSA.fr.<br />

Disponible sur http://www.lsa-conso.fr/crise-<strong>de</strong>-<strong>de</strong>fiance-vis-a-vis-<strong>de</strong>s-gran<strong>de</strong>s-marques,38568<br />

20


Ces résultats sont d’autant plus intéressants lorsqu’on les met en perspectives avec les<br />

réponses à la question ouverte « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ? », posée par le<br />

CREDOC, lors <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux enquêtes réalisées en 1994 et en 2010.<br />

Fig. 4 - Graphique <strong>de</strong> l’enquête du CREDOC : « Pour vous qu’est ce qu’une bonne marque ? » - 1994 et 2010<br />

On se rend compte que la qualité et le prix <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong>s critères incontournables pour être<br />

considérée comme une bonne marque. Mon enquête corrobore cette tendance, puisque 30<br />

personnes (sur les 75 qui ont répondu à cette question ouverte) ont évoqué l’importance pour<br />

une marque <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> qualité 29 .<br />

Nous sommes donc dans une situation paradoxale où la qualité <strong>de</strong>s produits est <strong>de</strong> plus en<br />

plus reconnue comme étant un critère essentiel aux yeux <strong>de</strong>s consommateurs pour définir<br />

une « bonne marque », alors que celles-ci investissent <strong>de</strong> moins en moins dans la qualité <strong>de</strong><br />

leurs produits.<br />

29 Voir les autres résultats <strong>de</strong> l’enquête, Annexe IV.<br />

21


. … qui se confirme par l’expérience <strong>de</strong> marque.<br />

Ce constat <strong>de</strong> désengagement <strong>de</strong>s marques dans la qualité <strong>de</strong> leurs produits s’est révélé à<br />

partir <strong>de</strong> 2008, date à laquelle <strong>de</strong> nombreuses émissions, reportages et articles <strong>de</strong> presse<br />

ont été réalisés à ce sujet. C’est ainsi que l’on apprend, dans un reportage <strong>de</strong> Capital, <strong>de</strong> mars<br />

2008, intitulé « Ce que valent les produits hard discount » 30 , que le cassoulet <strong>de</strong> la marque<br />

William Saurin est quasiment i<strong>de</strong>ntique, tant d’un point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s qualités nutritionnelles<br />

que gustatives, au cassoulet estampillé Lidl. Ils seraient, en effet, issus <strong>de</strong> la même chaîne <strong>de</strong><br />

production et répondraient au même cahier <strong>de</strong>s charges.<br />

On peut également mentionner l’article d’avril 2009, « De célèbres industriels fabriquent<br />

parfois les produits MDD », publié dans le Figaro, dans lequel Jean-Pierre Gontier, prési<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> la Scamark, filiale <strong>de</strong> Leclerc en charge <strong>de</strong> la marque Repère, explique que « Seuls les<br />

très gros opérateurs comme Danone et Nestlé refusent encore <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s MDD.<br />

Senoble, Mamie Nova et Andros ne peuvent plus se le permettre » 31 . De nombreux produits<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques seraient ainsi semblables aux produits vendus par les MDD, étant issus<br />

<strong>de</strong>s mêmes chaînes <strong>de</strong> production.<br />

30 Capital, « Ce que valent les produits hard discount », mars 2008, M6<br />

31 I. L., « De célèbres industriels fabriquent parfois les produits MDD », 23 avril 2009, Figaro.fr.<br />

Disponible sur http://www.lefigaro.fr/societes/2009/04/23/04015-20090423ARTFIG00309-<strong>de</strong>-celebresindustriels-fabriquent-parfois-les-produits-mdd-.php<br />

22


Cette dénonciation se retrouve <strong>de</strong> plus en plus relayée sur Internet avec le foisonnement <strong>de</strong><br />

blogs <strong>de</strong> particuliers partageant leur expérience. C’est ainsi que le blog<br />

« gourmandisesansfrontieres.fr » a récemment rédigé un article intitulé « Les secrets <strong>de</strong>s<br />

Marques Distributeurs » dans lequel on peut lire :<br />

« Malgré cette différence <strong>de</strong> prix, la qualité <strong>de</strong>s produits est généralement proche <strong>de</strong> celles<br />

<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques, et pour cause… ce sont en fait les mêmes industriels qui<br />

commercialisent sous leur nom propre et qui fabriquent sous celui <strong>de</strong> l’enseigne <strong>de</strong><br />

distribution. Un comble : lors <strong>de</strong> dégustations, <strong>de</strong>s consommateurs ont trouvé <strong>de</strong>s saumons<br />

fumés meilleurs que ceux estampillés Labeyrie, la marque lea<strong>de</strong>r du marché en gran<strong>de</strong><br />

surface… et ces saumons MDD sont en fait fabriqués par Labeyrie ! Les cahiers <strong>de</strong>s charges<br />

fournis par les gran<strong>de</strong>s enseignes pour leurs MDD sont souvent aussi stricts que ceux établis<br />

pour les équipes marketing <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques. Ce cas n’est pas unique puisque les<br />

industriels agroalimentaires sont <strong>de</strong> plus en plus nombreux à fabriquer, en plus <strong>de</strong> leurs<br />

gammes, <strong>de</strong>s MDD. On peut citer Senoble […]Mamie Nova, Andros, Jacquet, Bonduelle,<br />

Lactalis, Lesieur, Pierre Martinet, Madrange … » 32 .<br />

Fort <strong>de</strong> ce mécontentement grandissant, les Associations <strong>de</strong> Consommateurs se sont<br />

emparées du sujet, en organisant <strong>de</strong>s tests <strong>de</strong> produits. On peut également mentionner les<br />

tests réalisés par <strong>de</strong> nombreux experts, rendus médiatiques par le biais <strong>de</strong> leur publication<br />

dans la presse écrite. L’Annexe V vous présentera les « carnets <strong>de</strong> note » attribués par 5<br />

experts, et publiés dans le magazine Capital, en juillet 2012. Les résultats sont sans<br />

équivoque : les gran<strong>de</strong>s marques sont loin d’arriver en tête du classement.<br />

Nous venons donc <strong>de</strong> voir que les marques ont peu à peu perdu leur rôle <strong>de</strong> repères <strong>de</strong><br />

qualité dans l’esprit <strong>de</strong>s consommateurs. Parallèlement à cette baisse <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong><br />

produits, un autre phénomène se met en place, celui <strong>de</strong> l’ « obsolescence programmée », qui<br />

réduit considérablement la durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s produits. Nous allons désormais montrer que<br />

cette « désuétu<strong>de</strong> planifiée » est par ailleurs fortement encouragée par « l’inflation <strong>de</strong>s<br />

<strong>nouveau</strong>tés » 33 , <strong>nouveau</strong> fer <strong>de</strong> lance <strong>de</strong>s marques.<br />

32 Article disponible sur http://gourmandisesansfrontieres.fr/2011/12/zoom-sur-les-marques-distributeurs-mdd/<br />

33 Terme utilisé par Gilles Lipovetsky dans Le bonheur paradoxal : Essai sur la société d'hyper<strong>consommation</strong>,<br />

Paris, Editions Gallimard, 2006, 377 pages<br />

23


II.1. 2. La marque a perdu <strong>de</strong> vue l’insight <strong>de</strong>s consommateurs<br />

Si les marques semblent être confrontées à une perte <strong>de</strong> légitimité grandissante vis-à-vis<br />

<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> ses produits, elles doivent également faire face à une autre critique : la perte<br />

<strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’insight <strong>de</strong>s consommateurs, entendue comme l’ « opinion ou l’attente dominante<br />

du consommateur sur un produit » 34 . Cette prise <strong>de</strong> distance avec l’insight <strong>de</strong>s<br />

consommateurs s’explique notamment par un phénomène caractéristique <strong>de</strong>s sociétés<br />

contemporaines : c’est ce que Gilles Lipovetsky appelle « l’inflation <strong>de</strong>s <strong>nouveau</strong>tés » 35 .<br />

Ce phénomène s’illustre par exemple, lorsque l’on s’intéresse aux nouvelles références qui<br />

apparaissent dans les supermarchés : en 1966, on en comptait 7000 alors que ce chiffre<br />

atteignait plus <strong>de</strong> 16 000 en 2006, dont 95% se révèlent être <strong>de</strong>s échecs.<br />

Pour continuer d’exister sur <strong>de</strong>s marchés <strong>de</strong> plus en plus concurrentiels, les entreprises se<br />

lancent dans une course à la « fausse innovation », où les produits prétendument <strong>nouveau</strong>x<br />

ne font que reprendre <strong>de</strong>s technologies existantes agrémentées <strong>de</strong> quelques fonctions<br />

subalternes. Ces innovations, inutiles et superflues, ne créent plus <strong>de</strong> réelle valeur ajoutée (ou<br />

alors une valeur ajoutée ne répondant plus aux besoins <strong>de</strong>s consommateurs). Elles se révèlent<br />

être uniquement un prétexte pour « gonfler » les prix <strong>de</strong>s produits.<br />

C’est ce que souligne l’extrait <strong>de</strong> l’article ci-<strong>de</strong>ssous, publié sur le site lexpress.fr 36 :<br />

« Un produit amélioré justifie l'augmentation <strong>de</strong> son prix. Et peu importe que le progrès<br />

soit réel (« sans colorant !») ou fantaisiste (« riche en vitamines ! »).<br />

Lorsqu'un produit change (et même si les modifications apportées sont minimes), il est très<br />

tentant pour le fabricant <strong>de</strong> faire évoluer son prix à la hausse. Car il apparaît normal, après<br />

tout, <strong>de</strong> faire payer les améliorations réalisées aux clients. Même si la <strong>nouveau</strong>té introduite -<br />

qu'elle soit réelle ou supposée - n'entraîne pas le moindre surcoût <strong>de</strong> fabrication. Pour une<br />

gran<strong>de</strong> marque <strong>de</strong> cosmétique française, c'est même une règle d'or : toute "nouvelle<br />

formule" doit coûter moins cher à produire et s'accompagner <strong>d'un</strong>e hausse <strong>de</strong> prix ! […] Ces<br />

vraies fausses innovations fournissent un bon prétexte pour augmenter les prix, puisqu'on se<br />

démarque <strong>de</strong> la concurrence. »<br />

34<br />

Laurent Habib, La communication transformative, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p. 100<br />

35<br />

Gilles Lipovetsky, Le bonheur paradoxal : Essai sur la société d'hyper<strong>consommation</strong>, Paris, Editions<br />

Gallimard, 2006, 377 pages<br />

36<br />

Rémi Vallet, « Jouer l’argument <strong>de</strong> l’innovation », 29 mai 2001, LEntreprise.com. Disponible sur<br />

http://lentreprise.lexpress.fr/prospection-commerciale/jouer-l-argument-<strong>de</strong>-l-innovation_105.html<br />

24


Ce II.1. nous a permis <strong>de</strong> montrer que les consommateurs mettaient <strong>de</strong> plus en plus en<br />

cause la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques, en considérant que les produits <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques<br />

ne remplissaient plus le contrat <strong>de</strong> qualité et d’utilité, au cœur <strong>de</strong> la relation entre les<br />

marques et les consommateurs. Nous allons désormais nous intéresser au rôle joué par les<br />

Marques <strong>de</strong> Distributeurs, dans le renforcement <strong>de</strong> cette mise à distance.<br />

II.2. Le <strong>nouveau</strong> rôle joué par les distributeurs : une alternative pour les consommateurs<br />

La remise en cause <strong>de</strong>s marques comme repères <strong>de</strong> qualité et d’innovation, ne peut se<br />

comprendre sans évoquer l’arrivée <strong>de</strong>s Marques <strong>de</strong> Distributeurs sur le marché. En effet, si<br />

les marques ont <strong>de</strong> plus en plus perdu <strong>de</strong> vue ce qui faisaient leur raison d’être, en baissant la<br />

qualité et le <strong>de</strong>gré d’utilité <strong>de</strong> leurs produits, le phénomène <strong>de</strong> défiance à l’égard <strong>de</strong>s marques<br />

s’est également accélérée avec l’arrivée <strong>de</strong> nouvelles alternatives, que constituent les<br />

marques <strong>de</strong> distributeurs.<br />

II.2.1. De <strong>nouveau</strong>x concurrents pour les marques…<br />

Créées dès 1869 par une chaîne <strong>de</strong> supermarché<br />

britannique, les marques <strong>de</strong> distributeur sont apparues<br />

en France, sous leur forme actuelle, dans les années<br />

1975, avec notamment les « produits libres » <strong>de</strong><br />

Carrefour (photos ci-contre).<br />

Longtemps considérées uniquement comme <strong>de</strong>s facteurs d’ajustement du budget, il faudra<br />

attendre le début <strong>de</strong>s années 2000 pour que les MDD soient perçues comme <strong>de</strong>s marques à<br />

part entière et non plus <strong>de</strong>s « sous-marques ». Alors qu’elles ne représentaient que 10% du<br />

volume total consommé en 1995, les MDD accaparent désormais 41,5% <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> marché<br />

<strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> <strong>consommation</strong> (en volume). 37<br />

37 Olivier Costil, « MDD : la France occupe une position intermédiaire en Europe », 16 décembre 2011, LSA.fr.<br />

Disponible sur http://www.lsa-conso.fr/mdd-la-france-occupe-une-position-intermediaire-en-europe,126842<br />

25<br />

Fig. 5 - Les produits libres <strong>de</strong> Carrefour - 1976


Les MDD acquièrent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> légitimité, en investissant notamment davantage<br />

dans la qualité et l’innovation <strong>de</strong> ses produits. Elles sont désormais <strong>de</strong>venues une alternative<br />

crédible aux gran<strong>de</strong>s marques.<br />

Fig. 6 - Part <strong>de</strong> marché en volume <strong>de</strong>s MDD dans la gran<strong>de</strong> distribution -<br />

De 1993 à 2007<br />

II.2.2. … qui transforment le marché et renforcent la mise à distance <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques<br />

L’arrivée <strong>de</strong>s MDD sur le marché <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> <strong>consommation</strong> n’est pas sans<br />

conséquence sur le fonctionnement et les repères <strong>de</strong> ce marché. En effet, en se désengageant<br />

sur la qualité et le <strong>de</strong>gré d’utilité <strong>de</strong> ses produits, les marques ont laissé une place importante<br />

aux MDD, qui sont désormais à même <strong>de</strong> les concurrencer en proposant <strong>de</strong>s produits<br />

similaires et à <strong>de</strong>s prix moins élevés.<br />

La conséquence <strong>de</strong> cet alignement est avant tout le passage d’un marché-jugement à un<br />

marché-prix 38 . En effet, comme l’explique Lucien Karpik dans son article L’économie <strong>de</strong><br />

la qualité, dès lors que les produits <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong> plus en plus homogènes (comme c’est le<br />

cas à l’heure actuelle où la qualité <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> marques tend à diminuer alors que la<br />

qualité <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> MDD s’améliorent fortement), on assiste à la mise en place d’un<br />

marché-prix, où le seul trait différentiel pertinent <strong>de</strong>vient le prix, et non plus le jugement,<br />

(fondé sur la confiance dans la marque et dans les recommandations <strong>de</strong> son réseau).<br />

38 Lucien Karpik, « L’économie <strong>de</strong> la qualité », Revue française <strong>de</strong> dociologie, vol. XXX- 2,1989, p.187-210.<br />

26


Or, sur le marché-prix, ce sont clairement les MDD qui bénéficient <strong>de</strong> l’avantage compétitif.<br />

En effet, les produits <strong>de</strong>s MDD parviennent en général à proposer <strong>de</strong>s produits entre 15 et<br />

30% moins chers que les produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques (voir encadré ci-<strong>de</strong>ssous). La marque<br />

intervient alors comme un critère <strong>de</strong> moins en moins pris en compte lors <strong>de</strong> l’acte d’achat.<br />

Comment les MDD parviennent-elles à proposer <strong>de</strong>s produits<br />

15 à 30% moins chers que les gran<strong>de</strong>s marques?<br />

Les produits <strong>de</strong> MDD sont fabriqués par trois principaux acteurs : le distributeur lui-même,<br />

une PME sous-traitante ou un grand groupe industriel. Dans ces trois cas, les MDD<br />

parviennent à fabriquer <strong>de</strong>s produits à moindre coût, pour différentes raisons :<br />

- lorsque le produit est fabriqué par le distributeur lui-même, tel que la marque « Les<br />

Mousquetaires » d’Intermarché, les économies se font grâce à l’absence d’intermédiaires (et<br />

les différentes marges qui se répercutent sur le produit final).<br />

- lorsque le distributeur fait appel à un sous-traitant, généralement <strong>de</strong>s PME, (comme c’est le<br />

cas, par exemple, pour la marque « Reflets <strong>de</strong> France » <strong>de</strong> Carrefour), les économies se<br />

réalisent notamment au niveau <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> R&D. En effet, très souvent, les PME<br />

doivent supporter les dépenses en Recherche et Développement, afin <strong>de</strong> tester l’innovation<br />

sous leur propre marque. Si le produit rencontre un succès, il sera ensuite commercialisé sous<br />

la marque du distributeur.<br />

- lorsque ce sont les grands groupes industriels fabriquant en même temps les produits <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s marques, qui ont la charge <strong>de</strong> fabriquer les produits <strong>de</strong>s MDD, les économies se<br />

réalisent par l’utilisation maximale <strong>de</strong>s capacités <strong>de</strong> production <strong>de</strong>s usines, permettant ainsi<br />

d’amortir les coûts fixes et réduire les coûts du produit ainsi fabriqué.<br />

Dans les trois cas, les MDD bénéficient également <strong>de</strong> l’avantage <strong>de</strong> ne pas payer <strong>de</strong> force <strong>de</strong><br />

vente (les produits ayant leur place réservée dans les rayons <strong>de</strong>s magasins) et <strong>de</strong> limiter les<br />

investissements publicitaires et promotionnels (les produits étant d’ores et déjà à <strong>de</strong>s prix<br />

compétitifs).<br />

L’invasion <strong>de</strong>s MDD sur le marché <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, à partir <strong>de</strong>s<br />

années 2000, a eu comme conséquence <strong>de</strong> modifier en profon<strong>de</strong>ur les règles <strong>de</strong> fonction du<br />

marché, et n’a fait que renforcer la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s<br />

marques, en <strong>de</strong>venant <strong>de</strong> véritables alternatives crédibles, tant au niveau <strong>de</strong> la qualité que <strong>de</strong><br />

l’utilité <strong>de</strong> ses produits.<br />

27


Conclusion <strong>de</strong> la Section 1 <<br />

À travers l’avènement du néo-libéralisme au début <strong>de</strong>s années 90, les entreprises<br />

s’imposent comme « pivot majeur <strong>de</strong>s sociétés occi<strong>de</strong>ntales ». C’est alors le début <strong>de</strong><br />

nombreuses « success stories » d’entreprises françaises qui acquièrent peu à peu une<br />

renommée internationale. Les grands patrons gagnent en visibilité médiatique et <strong>de</strong>viennent<br />

<strong>de</strong> véritable « rock star », dont les rémunérations ne font qu’augmenter tout au long <strong>de</strong> la<br />

décennie, notamment grâce à l’émergence <strong>de</strong>s stock options. Les années 90 furent également<br />

marquées par l’explosion <strong>de</strong> start-up qui se spécialisent dans les technologies <strong>de</strong><br />

l’information et investissent en masse.<br />

Avec les années 2000, c’est une nouvelle ère qui commence pour les entreprises.<br />

Accusées <strong>de</strong> tous les maux, elles tombent <strong>de</strong> leur pié<strong>de</strong>stal et doivent désormais se justifier.<br />

L’entreprise est désormais accusée <strong>de</strong> toutes les dérives : scandales politico-financiers,<br />

catastrophes écologiques, perditions morales… En interne, la situation n’est pas plus<br />

réjouissante. Devenus <strong>de</strong> véritables porte-parole <strong>de</strong> leur entreprise, notamment via les<br />

réseaux sociaux, les salariés jouent un rôle majeur dans la défiance grandissante <strong>de</strong>s<br />

consommateurs. De moins en moins engagés et satisfaits <strong>de</strong> leur entreprise, la méfiance se<br />

renforce et se répand. Enfin, les entreprises, en attisant <strong>de</strong> nouvelles attentes, notamment à<br />

travers un discours « <strong>responsable</strong> », ont entrainé un phénomène <strong>de</strong> renforcement <strong>de</strong>s<br />

exigences, ce qui va se traduire par une forte déceptivité.<br />

La crise <strong>de</strong> confiance va également toucher les marques, qui vont se voir reprocher leur<br />

manque d’investissement dans la qualité et l’utilité <strong>de</strong> leurs produits. En effet, les<br />

consommateurs sont <strong>de</strong> plus en plus nombreux à considérer que la qualité <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong><br />

gran<strong>de</strong>s marques et ceux <strong>de</strong>s marques <strong>de</strong> distributeurs sont équivalentes. La « course à<br />

l’innovation » est également pointée du doigt, dans la mesure où seules <strong>de</strong>s innovations <strong>de</strong><br />

très faibles valeurs ajoutées apparaissent, faisant ainsi grimper les prix <strong>de</strong> façon artificielle.<br />

Si les marques per<strong>de</strong>nt peu à peu leur rôle <strong>de</strong> repères <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, un <strong>nouveau</strong><br />

concurrent fait son apparition : les MDD. En effet, à partir <strong>de</strong>s années 2000, les MDD vont<br />

acquérir une réelle légitimité et concurrencer les gran<strong>de</strong>s marques. En investissant dans la<br />

qualité et l’innovation, les MDD vont alors renforcer la mise à distance <strong>de</strong>s marques et <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, ceux-ci refusant désormais <strong>de</strong> payer <strong>de</strong>s produits, semblables aux MDD, à<br />

<strong>de</strong>s prix entre 15 et 30% plus chers.<br />

28


Section 2 : … les espoirs se tournent vers une communication érigée en « rock star »<br />

Face à cette montée en puissance <strong>de</strong>s critiques à l’égard <strong>de</strong>s marques et <strong>de</strong>s entreprises,<br />

celles-ci se sont réfugiées dans la communication, dans l’espoir <strong>de</strong> reconquérir la confiance<br />

<strong>de</strong>s consommateurs. Devenue son propre objet, la communication s’est laissée guidée par <strong>de</strong>s<br />

logiques court-termistes, tout en privilégiant <strong>de</strong>s bénéfices secondaires voire factices, que les<br />

consommateurs se sont mis à rejeter.<br />

Nous verrons que cette omniprésence <strong>de</strong> la communication aura pour conséquence <strong>de</strong><br />

renforcer la mise à distance <strong>de</strong>s consommateurs, générant notamment un rejet <strong>de</strong> la<br />

publicité, jugée <strong>de</strong> plus en plus « envahissante » et « agressive ». Enfin, nous montrerons que<br />

les entreprises et les marques ont cessé <strong>de</strong> détenir le « monopole <strong>de</strong> l’information »,<br />

concurrencées par le succès du web 2.0, permettant aux consommateurs d’avoir accès, par<br />

leurs propres moyens, à une information complète sur l’entreprise et ses marques.<br />

I. Une communication autocentrée et court-termiste…<br />

Face à la désacralisation <strong>de</strong> l’entreprise comme institution et la remise en cause <strong>de</strong> la<br />

légitimité <strong>de</strong>s marques, ces autorités en situation <strong>de</strong> discrédit se sont réfugiées dans ce qui est<br />

apparu comme la solution pour retrouver la confiance <strong>de</strong>s consommateurs : la<br />

communication.<br />

I.1. Une communication qui crée une différence factice et <strong>de</strong>vient son propre objet<br />

De la fin <strong>de</strong>s années 70 et jusqu’au milieu <strong>de</strong>s années 90, le marketing se trouve à son<br />

apogée. Certains auteurs parlent même <strong>de</strong>s « 30 Glorieuses du marketing 39 », pour désigner<br />

cette pério<strong>de</strong> où la communication a permis <strong>de</strong> « mythifier » la <strong>consommation</strong>, en révélant<br />

aux consommateurs leurs « véritables besoins » et en présentant les marques comme un<br />

moyen d’inscrire leurs rêves dans un « existant accessible » 40 .<br />

La communication va alors se substituer aux produits, en perte <strong>de</strong> qualité et d’utilité,<br />

comme nous l’avons vu dans la Section 1, en se focalisant sur <strong>de</strong>s bénéficies factices et en<br />

investissant dans le packaging.<br />

39 Expression d’Olivier Geradon <strong>de</strong> Vera, vice prési<strong>de</strong>nt d’IRI France, lea<strong>de</strong>r mondial <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> marché.<br />

40 Olivier Geradon <strong>de</strong> Vera, Les marques et la crise, White Paper rédigé en Juillet 2009. Disponible sur<br />

http://www.symphonyiri.fr/portals/0/articlePdfs/Les%20marques%20et%20la%20crise%20IRI%20France%20jui<br />

llet%202009.pdf<br />

29


I.1.1. Bénéfices factices et mise en scène du packaging<br />

Nous verrons tout d’abord que la communication sera utilisée pour créer <strong>de</strong>s bénéfices<br />

factices, afin <strong>de</strong> masquer les faiblesses du produit. Nous verrons ensuite que les principales<br />

innovations se concentreront sur le packaging, afin <strong>de</strong> créer une « illusion d’utilité ».<br />

a- La communication crée un bénéfice factice …<br />

Comme nous l’avons vu dans la section précé<strong>de</strong>nte, les marques ont <strong>de</strong> moins en moins<br />

investi dans la qualité et l’innovation <strong>de</strong> leurs produits. Faute <strong>de</strong> « plus produit », elles ont<br />

alors privilégié les fausses innovations, peu créatrices <strong>de</strong> valeur ajoutée. Elles sont d’ailleurs<br />

allées plus loin, en utilisant la communication pour créer <strong>de</strong>s bénéfices factices. L’innovation<br />

marketing <strong>de</strong>vient alors le seul élément différenciant, comme le rappelle l’article ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

« […] <strong>de</strong> nombreux produits <strong>de</strong> nettoyage sont <strong>de</strong>venus "anti-bactériens ", voire "anti-<br />

acariens ", que la plupart <strong>de</strong>s paquets <strong>de</strong> corn flakes et autres préparations <strong>de</strong> céréales ont<br />

été ornés <strong>de</strong> labels " riche en vitamines ", et que les eaux minérales, à en croire leurs<br />

étiquettes, sont désormais encore plus " riches en minéraux ". On ne compte plus les<br />

produits " 0 % <strong>de</strong> matière grasse " ou " sans sucre ". Et peu importe s'ils n'ont jamais<br />

contenu ni matière grasse, ni sucre : l'écrire suffit à suggérer la <strong>nouveau</strong>té et à faire<br />

vendre ». 41<br />

b- … et utilise le packaging pour « capter ses publics » 42<br />

Destiné à l’origine à la conservation <strong>de</strong>s aliments, le packaging est aujourd’hui <strong>de</strong>venu un<br />

outil <strong>de</strong> communication à part entière. Privilégiant la forme plutôt que le fond, les marques se<br />

servent <strong>de</strong> l’emballage comme un « puissant dispositif <strong>de</strong> captation » 43 . En effet, « il capture<br />

le produit (l’enveloppe, le masque, le représente) et captive le consommateur (le fascine et<br />

l’informe, l’attire et le retient) ». Les marques ont alors concentré leurs efforts d’innovation<br />

sur le packaging <strong>de</strong> l’offre, au détriment du produit.<br />

41 Rémi Vallet , « Jouer l’argument <strong>de</strong> l’innovation », 29 mai 2001, LEntreprise.com.<br />

Disponible sur http://lentreprise.lexpress.fr/prospection-commerciale/jouer-l-argument-<strong>de</strong>-l-innovation_105.html<br />

42 Franck Cochoy, La captation <strong>de</strong>s publics, C’est pour mieux te séduire mon client, Toulouse, Presses<br />

Universitaires du Mirail, 2004, p.72<br />

43 id. p.72<br />

30


C’est ainsi que l’on a vu se multiplier <strong>de</strong> nombreux packagings innovants, <strong>de</strong>stinés eux<br />

aussi à séduire les consommateurs via <strong>de</strong>s bénéfices factices ou secondaires. On peut citer par<br />

exemple Kleenex, qui en 2009 a sorti une série <strong>de</strong> boîtes triangulaires en forme <strong>de</strong> fruit -<br />

pastèque, orange ou citron, ou encore Béghin Say et Daddy qui ont lancé une gamme <strong>de</strong> sucre<br />

en Doypack, emballage souple avec bouchon refermable (cf. ci-<strong>de</strong>ssous).<br />

Fig. 7 - Exemple <strong>de</strong> packagings « innovants » : Kleenex, Beghin Say et Daddy<br />

Toutes ces innovations marketing à l’égard du packaging ont pour objectif <strong>de</strong> couvrir<br />

l’absence d’innovation du produit, tout en justifiant une hausse artificielle <strong>de</strong>s prix. Par<br />

exemple, si l’on s’intéresse au prix d’une motte <strong>de</strong> beurre <strong>de</strong>mi-sel <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> marque, le prix<br />

au kilo avoisine les 8,30€ alors qu’il atteint 10,40€ pour le même produit en portion <strong>de</strong> 10g.<br />

I.1.2. Quand la communication <strong>de</strong>vient son propre objet<br />

Ne pouvant plus mettre en avant les mérites <strong>de</strong> ses produits par absence d’éléments<br />

différenciateurs, les entreprises et les marques ont fini par encourager un marketing auto-<br />

centré, au sein duquel la parole prend le pas sur l’action.<br />

La communication a fini par <strong>de</strong>venir son propre objet, en créant un écart entre la parole et<br />

la réalité. C’est ce que Laurent Habib nomme « les idées vaines », à savoir « les promesses du<br />

style ‘pour vous’, ‘ensemble’, ‘les <strong>de</strong>main meilleurs qu'aujourd'hui’, ‘rien ne compte plus que<br />

vous’, ces discours génériques sans effet et sans valeur. La communication <strong>de</strong>vient une<br />

abstraction en elle-même, qui aurait sa propre logique et avec laquelle on pourrait faire<br />

n'importe quoi » 44 . Les récits <strong>de</strong> marque ou « storytelling » <strong>de</strong>viennent alors <strong>de</strong> plus en plus<br />

abstraits et déconnectés <strong>de</strong> l’ADN <strong>de</strong> la marque et <strong>de</strong> ses produits.<br />

44 Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p.129<br />

31


L’illustration la plus pertinente <strong>de</strong> cette déconnexion entre la parole et la réalité est sans<br />

contexte le phénomène <strong>de</strong> « greenwashing » (ou « mascara<strong>de</strong> écologique »), qui correspond à<br />

une situation dans laquelle « un message <strong>de</strong> communication abuse ou utilise à mauvais escient<br />

l'argument écologique » 45 . La communication récrée alors un univers dans laquelle la marque<br />

est présentée comme écologiquement <strong>responsable</strong> alors qu’aucune démarche durable réelle<br />

n’est mise en place.<br />

Créée en 2008, l’OIP (Observatoire Indépendant <strong>de</strong> la Publicité) a publié le top 10 <strong>de</strong>s<br />

publicités ayant le plus abusé du Greenwashing en 2009. Voici les trois campagnes qui<br />

arrivent en top position :<br />

Numéro 1 : la publicité <strong>de</strong> Total, réalisée par l’Agence Harrisson & Wolf<br />

Fig. 8 - Publicité <strong>de</strong> Total, Agence Harrison & Wolf -<br />

2009<br />

Commentaire <strong>de</strong> l’OIP : « Un spot très intelligent,<br />

tout dans la nuance mais on sait que le diable se<br />

cache souvent dans les détails. Dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Total, tout est lisse et s’enchaîne parfaitement, le<br />

mon<strong>de</strong> industriel étant intrinsèquement lié à la<br />

nature. La réalité est hélas moins onirique que<br />

cela. »<br />

Numéro 2 : la publicité <strong>de</strong> Le Chat, réalisée par l’Agence DDB<br />

Fig. 9 - Publicité <strong>de</strong> Le Chat -<br />

Agence DDB - 2009<br />

Commentaire <strong>de</strong> l’OIP :<br />

« Un slogan: 'L'écologie, c'est le moment d'en parler moins et d'en<br />

faire plus'. Pourtant, Le Chat, marque <strong>de</strong> lessive appartenant au<br />

groupe Henkel, en fait bien moins que ce qu'il promet. Toute la<br />

mise en scène du produit laisse penser que ce <strong>de</strong>rnier est<br />

écologique. Ce n'est pas le cas. Finalement, Le Chat n'aurait-il pas<br />

dû se taire ? Sans doute l'un <strong>de</strong>s pires cas avérés <strong>de</strong> greenwashing<br />

<strong>de</strong> la sélection du mois <strong>de</strong> février 2009. »<br />

45 Définition <strong>de</strong> l’ADEME, Agence <strong>de</strong> l’Environnement et la Maîtrise <strong>de</strong> l’Energie.<br />

32


Numéro 3 : la publicité <strong>de</strong> Renault, réalisée par l’Agence Publicis<br />

Fig. 10 - Publicité <strong>de</strong> Renault - Agence Publicis - 2009<br />

33<br />

Commentaire <strong>de</strong> l’OIP :<br />

« Le bateau d'Ellen MacArthur, la voiture,<br />

un amalgame qui fait passer la voiture pour<br />

ce qu'elle est rarement : propre. Un double<br />

message savamment orchestré pour nous<br />

faire croire à l'existence dès aujourd'hui<br />

<strong>d'un</strong>e voiture 'propre'. Enfin, pour rappel,<br />

Eco2 n ' est pas un label, mais bien un<br />

i<strong>de</strong>ntifiant visuel <strong>d'un</strong>e gamme ».<br />

Ce classement a été réalisé en collaboration avec les internautes qui pouvaient noter les<br />

publicités en fonction <strong>de</strong> critères précis (mots employés induisant en erreur, exagération <strong>de</strong>s<br />

propriétés « vertes » du produit, composition graphique induisant en erreur, etc.).<br />

I.2. Une communication omniprésente, répondant à <strong>de</strong>s logiques court-termistes<br />

En plus d’être au cœur <strong>de</strong> son propre discours, la communication va tomber dans un<br />

second travers : celui d’inon<strong>de</strong>r littéralement la société, en <strong>de</strong>venant omniprésente, notamment<br />

à travers l’un <strong>de</strong> ses outils, la publicité.<br />

I.2.1. Une communication omniprésente<br />

En 2011, le total <strong>de</strong>s dépenses publicitaires réalisées par les annonceurs atteignait 11,402<br />

milliards d’euros, tous médias confondus (radio, presse écrite, télévision, cinéma et Internet). 46<br />

Si l’on s’intéresse à la télévision, on constate qu’un individu est confronté en moyenne à 23<br />

minutes <strong>de</strong> publicité par jour 47 . En ce qui concerne la radio, un individu est soumis en<br />

moyenne à un peu plus <strong>de</strong> 10 minutes <strong>de</strong> publicité par jour. 48 Si à cela s’ajoute les résultats <strong>de</strong>s<br />

autres médias (presse, cinéma et Internet), on comprend dès lors que la pression publicitaire<br />

est <strong>de</strong>venue très importante <strong>de</strong> nos jours.<br />

46 Sur la base <strong>de</strong>s chiffres publiés par l’IREP dans Le Marché publicitaire francais en 2011.<br />

47 Sur la base <strong>de</strong>s chiffres publiés par Médiamétrie en 2011 (3h47 <strong>de</strong> temps moyen passé <strong>de</strong>vant la télévision par<br />

jour), ainsi que du décret du 27 mars 1992, fixant la durée <strong>de</strong>s messages publicitaires sur les chaînes publiques à<br />

6 minutes par heure en moyenne.<br />

48 Sur la base <strong>de</strong>s chiffres publiés par Médiamétrie en 2011 (2h50 <strong>de</strong> temps moyen d’écoute <strong>de</strong> la radio par jour),<br />

ainsi que <strong>de</strong>s Cahiers <strong>de</strong>s missions et <strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> Radio France et <strong>de</strong> Radio France Internationale, plafonnant<br />

le temps d’antenne consacré à la publicité à 30 minutes par jour.


Omniprésente dans les sociétés contemporaines, la publicité <strong>de</strong> marque en télévision est<br />

pourtant un phénomène relativement récent. En effet, elle ne fut autorisée qu’en 1968, date à<br />

laquelle la première publicité <strong>de</strong> marque fut diffusée sur les écrans <strong>de</strong> l’ORTF 49<br />

(cf. illustration ci-contre). Depuis, la technique et les outils <strong>de</strong> communication se sont<br />

Fig. 11 - Première publicité<br />

<strong>de</strong> marque - Régilait - 1968<br />

perfectionnés et la publicité fait désormais partie intégrante du<br />

quotidien <strong>de</strong>s Français, tant au niveau <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> la vie quotidienne<br />

(visionnage d’une émission <strong>de</strong> télévision ou d’un film au cinéma,<br />

écoute <strong>de</strong> la radio, etc.) qu’au sein même <strong>de</strong> l’espace public.<br />

Ce <strong>de</strong>rnier point est d’ailleurs très fortement critiqué par les collectifs anti-pub, comme le<br />

souligne David, membre fondateur <strong>de</strong> l’association Chiche ! :<br />

« Alors là en l’occurrence, on frappe toujours au même<br />

endroit qui est à proximité <strong>de</strong> l’Hôpital Saint-Louis parce<br />

qu’il est symbolique du harcèlement publicitaire et <strong>de</strong>s<br />

dérives qui y sont associées. Là, on a trois panneaux<br />

déroulants très proches. On en a <strong>de</strong>ux qui sont installés<br />

sur un Hôpital classé monument historique, on en a un<br />

qui est installé juste en face d’une école. Sans compter<br />

<strong>de</strong>ux aubettes sur les abribus <strong>de</strong> la rue. Surconcentration<br />

publicitaire flagrante. Information s’ils en ont envie, personne ne leur impose. Donc ce que<br />

l’on propose est assez simple : nous ne voulons pas anéantir la pub, nous entendons remettre la<br />

publicité à sa place. Et on a un existant qui est l’affichage associatif, on veut simplement<br />

niveler par le bas. […] Il y a une revendication : c’est la limitation <strong>de</strong> l’affichage commercial à<br />

ce qui est autorisé pour l’affichage associatif à savoir 50X70 cm, non lumineux, non<br />

déroulant, en <strong>de</strong>nsité d’implantation limitée » 50 .<br />

49 Publicité pour Régilait, 1968.<br />

50 Témoignage extrait d’un séminaire « Sociologie <strong>de</strong> la publicité », enseigné par Roland Canu et Cédric<br />

Calvignac, en 5 e année <strong>de</strong> Sciences Po Toulouse<br />

34<br />

Fig. 12 - Opération « Anti-pub » : « Libérons<br />

l’espace public »


I.2.2. Une logique <strong>de</strong> « campaigning »<br />

La société mo<strong>de</strong>rne semble être marquée par un phénomène d’accélération du temps. En<br />

effet, comme nous le rappelle Nicolas Aubert, « La mutation du rapport au temps qui s’est<br />

produite <strong>de</strong>puis une quinzaine d’années constitue une <strong>de</strong>s caractéristiques les plus marquantes<br />

du fonctionnement <strong>de</strong> la société contemporaine. Avec l’avènement <strong>de</strong> la dictature du « temps<br />

réel » qui régit l’économie, et celui <strong>de</strong>s nouvelles technologies <strong>de</strong> la communication<br />

permettant l’émergence d’un espace-temps mondialisé, notre société est <strong>de</strong>venue une société<br />

du présent immédiat et trois nouvelles façons <strong>de</strong> vivre le temps sont apparues au premier<br />

plan : l’urgence, l’instantanéité et l’immédiateté » 51 .<br />

La communication n’échappe pas à ce constat <strong>de</strong> diktat <strong>de</strong> l’accélération du temps,<br />

caractéristique <strong>de</strong>s sociétés contemporaines. Une enquête, réalisée en 2008 par Strategic<br />

Research auprès <strong>de</strong>s directeurs marketing, révèle qu’« aux dires <strong>de</strong>s marketeurs, la pression du<br />

court terme est aujourd'hui la contrainte qui a le plus d'impact sur l'exercice <strong>de</strong> leur métier. Ils<br />

se plaignent du poids excessif <strong>de</strong> la fonction financière qui les pousse dans cette logique, les<br />

empêchant ainsi <strong>de</strong> penser leur fonction ». 52<br />

Cette pression s’explique en gran<strong>de</strong> partie par <strong>de</strong>s logiques <strong>de</strong> rentabilité, <strong>de</strong> plus en plus<br />

imposées par les fonctions dirigeantes. Pour se légitimer, la communication doit pouvoir<br />

prouver son intérêt et son impact. Pour cela, bien souvent, ce sont avant tout <strong>de</strong>s stratégies<br />

court-termistes qui se mettent en place et qui se traduisent notamment par une recherche<br />

inconditionnelle du « coup marketing » et du « buzz ».<br />

51 Nicole Aubert, « L’urgence, symptôme <strong>de</strong> l’hypermo<strong>de</strong>rnité : <strong>de</strong> la quête <strong>de</strong> sens à la recherche <strong>de</strong><br />

sensations », Communication et organisation, n°29, 2006, p. 11<br />

Disponible sur http://communicationorganisation.revues.org/3365<br />

52 Michael Bendavid, Directeur général <strong>de</strong> Strategic Research.<br />

35


C’est ce que Paul Isakson, ancien Directeur Conseil chez Colle+McVoy 53 et planeur<br />

stratégique indépendant, appelle les logiques <strong>de</strong> « campaigning » :<br />

« Campaigning is changing your core brand message to fit what you think people need or<br />

want to hear today so they’ll buy your product or service. Campaigning leads to a constantly<br />

changing story and people are not sure what to think of you. You don’t really have a<br />

brand» 54 .<br />

Erigée en véritable « rock star », la communication <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques est<br />

ainsi tombée dans le travers <strong>de</strong> l’omniprésence et <strong>de</strong> la pression du court-terme. Placée au<br />

cœur <strong>de</strong> son propre discours, la communication a fini par ne vanter que <strong>de</strong>s bénéfices<br />

secondaires ou factices, accélérant la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs, comme nous<br />

allons le voir dans ce II.<br />

II. … qui accentue la défiance et favorise la mise en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong><br />

d’information<br />

Depuis quelques années, la communication a acquis une place <strong>de</strong> plus en plus importante<br />

au sein <strong>de</strong> la société à tel point que certains auteurs, comme Erik Neveu 55 , en viennent à<br />

questionner l’existence d’une « société <strong>de</strong> communication ». Comme nous venons <strong>de</strong> le voir,<br />

les entreprises ont peu à peu compris l’importance <strong>de</strong> la communication et investissent<br />

désormais <strong>de</strong>s sommes colossales dans un <strong>de</strong> ses principaux outils qu’est la publicité.<br />

Face aux critiques grandissantes <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques,<br />

celles-ci ont eu tendance à se réfugier dans la communication pour retrouver la confiance.<br />

Nous allons voir que cette stratégie s’est révélée être un échec et n’a fait qu’accentuer la<br />

défiance grandissante <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

53 Agence <strong>de</strong> publicité américaine.<br />

54 Dans une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building », disponible sur son blog<br />

http://paulisakson.typepad.com<br />

« ‘Campaigning’ consiste à changer ses messages <strong>de</strong> marque pour s’adapter à ce que vous pensez que les gens<br />

ont besoin ou veulent entendre aujourd’hui afin qu’ils finissent par acheter vos produits ou vos services.<br />

‘Campaigning’ aboutit à une histoire en constante évolution et les gens ne savent plus quoi penser <strong>de</strong> vous. Vous<br />

n’avez finalement pas vraiment <strong>de</strong> marque ».<br />

55 Erik Neveu, Une société <strong>de</strong> communication ?, Paris, Montchrestien, 2006, 160 pages.<br />

36


II.1. Crise <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques et rejet <strong>de</strong> la publicité<br />

La première section <strong>de</strong> ce chapitre nous a permis <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce l’existence d’une<br />

crise <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques, à travers une remise en cause <strong>de</strong> leur légitimité en<br />

matière <strong>de</strong> qualité et <strong>de</strong> l’utilité. Nous allons désormais tenter <strong>de</strong> démontrer qu’une crise <strong>de</strong> la<br />

valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques semble également être en cours.<br />

II.1.1. Crise <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques<br />

Une marque se caractérise à la fois par <strong>de</strong>s propriétés manifestes et tangibles (à travers la<br />

qualité <strong>de</strong> ses produits, l’innovation technologique, etc.) mais renvoie également à <strong>de</strong>s<br />

« représentations psychologiques, sociales, imaginaires, sociétales ou culturelles » 56 . C’est ce<br />

que l’on appellera la « valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques ».<br />

Face à la remise en cause <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques, celles-ci se sont réfugiées dans<br />

leur valeur immatérielle, en la mettant au cœur <strong>de</strong> leur territoire <strong>de</strong> communication.<br />

Cependant, à force <strong>de</strong> mettre en avant un univers <strong>de</strong> marque abstrait et trop éloigné <strong>de</strong> son<br />

« co<strong>de</strong> génétique », nous assistons à une crise <strong>de</strong> la valeur matérielle, comme le rappelle<br />

Philippe Moati :<br />

« Les consommateurs ne croient plus en cette poudre <strong>de</strong> perlimpinpin que l’on ajoute au<br />

produit, cette couche <strong>de</strong> magie qui fait que l’on peut vendre 3 fois plus cher un produit sous<br />

prétexte qu’il est susceptible <strong>de</strong> nourrir l’imaginaire ou d’ai<strong>de</strong>r le consommateur à exprimer<br />

l’adhésion à <strong>de</strong>s valeurs » 57 .<br />

Cette crise <strong>de</strong> la valeur matérielle se retrouve notamment dans le discours <strong>de</strong>s<br />

consommateurs. En effet, si l’on se réfère à l’étu<strong>de</strong> réalisée par TNS Sofres en 2011 58 , 69%<br />

<strong>de</strong>s sondés sont d’accord pour dire qu’ils croient <strong>de</strong> moins en moins en ce que racontent les<br />

marques.<br />

56 Laurent Habib, La communication transformative, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p. 121<br />

57<br />

Dans le cadre <strong>de</strong> cycles <strong>de</strong> conférences « Décodons le futur », autour du thème « Imaginaires du commerce et<br />

<strong>de</strong> l’industrie », qui ont eu lieu en 2005.<br />

58<br />

TNS Sofres pour l’Agence Australie, Publicité et Société, huitième édition, 2011.<br />

37


De plus, si l’on s’intéresse tout particulièrement au discours <strong>de</strong>s marques autour du<br />

développement durable, qui <strong>de</strong>vient un « passage obligé » pour répondre aux nouvelles<br />

attentes <strong>de</strong>s consommateurs, la défiance à l’égard <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques s’en<br />

trouve renforcer. En effet, comme nous l’avons montré dans la première section <strong>de</strong> ce<br />

chapitre, ce discours a renforcé les exigences et les attentes <strong>de</strong>s consommateurs en matière <strong>de</strong><br />

développement durable. De plus, conscients du recours grandissant à la métho<strong>de</strong> du<br />

« greenwashing », les consommateurs se méfient <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>s discours <strong>de</strong> marques <strong>de</strong>s<br />

entreprises. Selon une enquête réalisée par le cabinet Ethicity en avril 2010 « Les Français et<br />

la <strong>consommation</strong> durable » 59 , 54% d’entre eux déclarent être méfiants sur le discours <strong>de</strong>s<br />

marques et <strong>de</strong>s entreprises en matière <strong>de</strong> développement durable et 53% <strong>de</strong>s Français pensent<br />

qu’il y a trop <strong>de</strong> messages publicitaires sur la <strong>consommation</strong> durable.<br />

La mise à distance que l’on observe vis-à-vis <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques va<br />

avoir comme conséquence directe la montée <strong>de</strong> discours <strong>de</strong> plus en plus « publiphobes », les<br />

consommateurs rejetant alors l’outil permettant <strong>de</strong> véhiculer la « magie marketing ».<br />

II.1.2. Rejet <strong>de</strong> la publicité : généralisation <strong>de</strong>s logiques d’opposition<br />

Le rejet d’une société consumériste et <strong>de</strong> son symbole le plus visible, la publicité, accusée<br />

d’encourager une <strong>consommation</strong> irrationnelle, n’est pas un phénomène <strong>nouveau</strong>. En effet, très<br />

tôt, <strong>de</strong> nombreux auteurs ont dénoncé la publicité comme étant une technique d’aliénation et<br />

d’avilissement <strong>de</strong> l’homme. C’est le cas notamment d’Herbert Marcuse, qui dans son ouvrage<br />

« L’homme unidimensionnel » 60 , publié aux Etats-Unis en 1964, présente la publicité comme<br />

un outil participant à fon<strong>de</strong>r la « société industrielle avancée », en créant <strong>de</strong>s besoins illusoires<br />

et en diffusant un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> pensée et <strong>de</strong> comportement « unidimensionnel », « au sein duquel<br />

l'esprit critique ou les comportements antisystémiques sont progressivement écartés » 61 .<br />

59<br />

Ethicity, Les Français et la <strong>consommation</strong> durable, 2010.<br />

60<br />

Herbert Marcuse, L’homme unidimentionnel, Essai sur l'idéologie <strong>de</strong> la société avancée, Paris, Editions <strong>de</strong><br />

Minuit, 1968, 281 pages.<br />

61<br />

http://fiches.lexpress.fr/livre/l-homme-unidimensionnel<br />

38


a. Un rejet <strong>de</strong> la publicité qui s’étend…<br />

La contestation a été ensuite relayée par la création <strong>de</strong> mouvements « anti-pub », qui sont<br />

apparus aux Etats-Unis, dès 1977 avec le Billboard Liberation Front. 62 Il faudra véritablement<br />

attendre l’année 1988 et la création d’ATTAC, Association pour la Taxation <strong>de</strong>s Transactions<br />

financières, ainsi que l’arrivée d’Action Citoyenne, pour que ce mouvement débarque en<br />

France. De nombreux collectifs virent ensuite le jour, comme Paysages <strong>de</strong> France, Collectif<br />

<strong>de</strong>s Déboulonneurs, Briga<strong>de</strong> Anti Pub, Résistance à l ’Agression Publicitaire, les Casseurs <strong>de</strong><br />

pub, etc. Le mouvement prendra véritablement <strong>de</strong><br />

l’ampleur au tournant <strong>de</strong>s années 2000, avec notamment<br />

l’ouvrage <strong>de</strong> Naomi Klein « No Logo : la tyrannie <strong>de</strong>s<br />

marques » 63 , ainsi qu’en 2003 où <strong>de</strong> vastes opérations <strong>de</strong><br />

dégradations d’affiches est lancée dans le métro parisien et<br />

sera fortement médiatisée.<br />

Ces mouvements idéologiques, au départ minoritaires, ont fini par s’étendre à l’ensemble<br />

<strong>de</strong> la société, comme en témoigne l’étu<strong>de</strong> réalisée par TNS Sofres 64 , pour l’Agence Australie<br />

en 2011. L’étu<strong>de</strong> révèle en effet que 81% <strong>de</strong>s Français interrogés considèrent que la publicité<br />

est « envahissante » et 57% la trouve « agressive ». Mon étu<strong>de</strong> corrobore ces résultats puisque<br />

87,6% <strong>de</strong>s sondés jugent la publicité « envahissante » et 64% la trouve « agressive » 65 .<br />

b. …et qui est renforcé par une crise <strong>de</strong> confiance à l’égard <strong>de</strong>s médias<br />

Cette contestation a été accentuée par un phénomène <strong>de</strong> défiance à l’égard <strong>de</strong>s médias,<br />

outils sur lesquels sont diffusés les messages publicitaires. En effet, les médias doivent, <strong>de</strong>puis<br />

quelques années, faire face à <strong>de</strong> violentes critiques <strong>de</strong> différentes natures 66 .<br />

62<br />

Le Billboard Liberation Front ou « Front <strong>de</strong> libération <strong>de</strong>s panneaux publicitaires », a été créé aux Etats- Unis<br />

en 1979.<br />

63<br />

Naomi Klein, No Logo : la tyrannie <strong>de</strong>s marques, Paris, Actes Sud/Leméac, 2001, 573 pages.<br />

64<br />

TNS Sofres, pour l’Agence Australie, Publicité et Société, huitième édition, 2011.<br />

65<br />

Voir les autres résultats <strong>de</strong> l’enquête, Annexe IV<br />

66 e<br />

Sur la base du cours <strong>de</strong> M. Regourd <strong>de</strong> 2 année à Sciences Po Toulouse, Médias et sociétés.<br />

39<br />

Fig. 13 - Opérations <strong>de</strong> dégradation<br />

d’affiches dans le métro parisien - 2003


Tout d’abord, ils sont accusés <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> plus en plus le jeu <strong>de</strong>s puissants et leur<br />

indépendance est fréquemment remise en cause. On leur reproche par exemple <strong>de</strong> faire<br />

preuve <strong>de</strong> complaisance à l’égard <strong>de</strong>s politiques mais également <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques.<br />

De plus, on les accuse <strong>de</strong> succomber à <strong>de</strong>s logiques financières, ce qui se traduit par un<br />

contrôle appauvri <strong>de</strong> la véracité <strong>de</strong>s informations qu’ils divulguent, une recherche incessante<br />

du « scoop », et le recours aux publi-reportages, accusés <strong>de</strong> tromper les lecteurs en rendant la<br />

frontière entre la communication et l’information <strong>de</strong> plus en plus poreuse.<br />

On peut également relever une autre critique à propos d’une tendance à la simplification<br />

<strong>de</strong> l’information (voire au simplisme), dont le but est <strong>de</strong> vulgariser l’information, pour qu’elle<br />

soit compréhensible <strong>de</strong> tous. Cela passe notamment par le recours à davantage d’images au<br />

détriment <strong>de</strong> la longueur <strong>de</strong>s articles, comme on peut l’observer en s’intéressant aux récentes<br />

évolutions opérées par le journal Le Mon<strong>de</strong>. Cette simplification se traduit également par la<br />

tentation d’opter pour une vision manichéenne, où l’on retrouve d’un côté « les bons » et <strong>de</strong><br />

l’autre « les méchants », ce qui appauvri considérablement le sens donné à l’information.<br />

Enfin, cette mécanique <strong>de</strong> simplification se traduit également par un recours <strong>de</strong> plus en plus<br />

fréquent aux métaphores et aux analogies, qui peuvent s’avérer produire <strong>de</strong>s associations<br />

d’idées maladroites. On peut citer par exemple la comparaison reprise par tous les médias,<br />

désignant Sadam Hussein comme « le nouvel Hitler » ou encore l’expression <strong>de</strong> « goulag<br />

tropical », que l’on doit à Bernard Henri Levy pour qualifier Cuba 67 .<br />

De nombreuses critiques portent également sur la généralisation d’une logique<br />

« d’émotions-réflexes » au détriment d’une logique « d’analyse-réflexion ». En effet, le<br />

traitement médiatique dominant tend à nous placer dans une proximité immédiate, autorisant<br />

<strong>de</strong> moins en moins le recul et favorisant une spectacularisation <strong>de</strong> l’information. Nous<br />

sommes désormais <strong>de</strong> plus en plus confrontés à une mise en scène du réel où les photos<br />

« choc », les témoignages <strong>de</strong>viennent une priorité, au détriment <strong>de</strong> tout recul et analyse. On<br />

assiste alors très souvent à une reconstruction <strong>de</strong> la réalité et la frontière entre l’information et<br />

la fiction se réduit.<br />

Enfin, on peut également mettre en avant une <strong>de</strong>rnière critique très souvent adressée aux<br />

67 Bernard Henri Levy, Et l'Iran ? Quand Utopia entend le mot culture... Avec Romain Goupil, mains en l'air,<br />

17 Juin 2010, Le point. Disponible sur http://www.lepoint.fr/editos-du-point/bernard-henri-levy/et-l-iran-quandutopia-entend-le-mot-culture-avec-romain-goupil-mains-en-l-air-17-06-2010-1204087_69.php<br />

40


médias, celle <strong>de</strong> la « duplication consensuelle », c’est-à-dire le phénomène <strong>de</strong> plus en plus<br />

fréquent <strong>de</strong> reproduction <strong>de</strong>s mêmes informations par l’ensemble <strong>de</strong>s médias. L’exemple le<br />

plus célèbre est l’affaire du faux charnier <strong>de</strong> Timisoara, en 1989, à l’époque où les États<br />

communistes s’effondraient les uns après les autres. Les médias vont alors diffuser <strong>de</strong>s images<br />

<strong>de</strong> cadavres torturés, en expliquant que sont <strong>de</strong>s témoignages visibles <strong>de</strong> la cruauté <strong>de</strong>s anciens<br />

régimes communistes. Toute la presse reprend ces images en boucle, qui <strong>de</strong>viennent le<br />

symbole d’une véritable révolution face à l’atrocité <strong>de</strong>s régimes. Au bout <strong>de</strong> quelques<br />

semaines, on se rend compte que c’est un faux charnier : il s’agissait en fait <strong>de</strong> douze corps<br />

(contrairement aux milliers annoncés) <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s d’un hôpital, qui avait fait don <strong>de</strong> leur corps<br />

à la mé<strong>de</strong>cine pour <strong>de</strong>s prélèvement d’organes.<br />

Nous venons donc <strong>de</strong> montrer que l’omniprésence <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong> la publicité<br />

a eu pour conséquence <strong>de</strong> rendre les consommateurs davantage méfiants, croyant <strong>de</strong> moins en<br />

moins à cette « poudre <strong>de</strong> perlimpinpin » qui ne traduit plus une réelle valeur ajoutée. Ce rejet<br />

<strong>de</strong> la publicité a été renforcé par une crise <strong>de</strong> confiance à l’égard <strong>de</strong>s médias, accusés<br />

notamment d’être <strong>de</strong> moins en moins indépendants. Nous allons désormais voir l’apparition<br />

d’un <strong>nouveau</strong> phénomène : la mise en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> d’information.<br />

II.2. Mise en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> d’information<br />

Face à ce rejet grandissant <strong>de</strong> la publicité, on assiste à un <strong>nouveau</strong> phénomène : les<br />

marques per<strong>de</strong>nt peu à peu le monopole <strong>de</strong> la « parole sur elles-mêmes », pour laisser place à<br />

un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> d’information. On passe d’un système vertical, dans lequel la<br />

communication émanait <strong>de</strong>s marques vers les consommateurs, à un système horizontal où le<br />

dialogue est désormais à la fois <strong>de</strong>scendant et ascendant.<br />

II.2.1. De l’asymétrie informationnelle…<br />

Pendant longtemps, les marques et les consommateurs se trouvaient dans une relation<br />

d’asymétrie informationnelle dans laquelle la relation marchan<strong>de</strong> était définie par l’offre avec<br />

<strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> communication unilatéraux. Les consommateurs se trouvaient ainsi dans une<br />

situation <strong>de</strong> déficit d’information, ce qui renforçait leur domination dans l’échange marchand.<br />

41


Si l’on suit le raisonnement théorisé par George Akerlof en 1970, dans son célèbre article<br />

« The Market for “Lemons” : Quality Uncertainty and the Market Mechanism » 68 , cette<br />

asymétrie <strong>de</strong> l’information peut-être un <strong>de</strong>s éléments explicatifs du désengagement <strong>de</strong>s<br />

marques dans la qualité, tel que nous l’avons montré dans la première section <strong>de</strong> ce chapitre.<br />

En effet, Akerlof explique que, dans une situation où les acheteurs n’ont qu’une information<br />

imparfaite sur la qualité <strong>de</strong>s biens qu’ils désirent acquérir, les ven<strong>de</strong>urs ont tout intérêt à<br />

surestimer la qualité <strong>de</strong> leurs produits pour pouvoir les vendre au prix le plus élevé. Les<br />

acheteurs, ayant conscience qu’ils ne peuvent véritablement avoir confiance dans<br />

l’information provenant <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs, ne peuvent non plus déduire la qualité du prix affiché,<br />

dans la mesure où ces prix sont également fixés unilatéralement par les ven<strong>de</strong>urs. Ce système<br />

opaque tend à faire disparaître les biens <strong>de</strong> bonne qualité, dont le prix élevé est justifié, dans la<br />

mesure où les ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> tels produits peuvent rencontrer <strong>de</strong>s difficultés à vendre leur<br />

produit à leur véritable prix ; les acheteurs doutant <strong>de</strong> leur qualité. Nous entrons alors dans une<br />

situation « <strong>de</strong> cercle vicieux », où les consommateurs, faisant <strong>de</strong> moins en moins confiance<br />

aux marques, encouragent finalement le désengagement <strong>de</strong> celles-ci dans la qualité et<br />

l’innovation <strong>de</strong> leur produit, renforçant in fine la suspicion <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

II.2.2. … au <strong>modèle</strong> multidirectionnel<br />

Ce <strong>modèle</strong> unidirectionnel s’est vu profondément transformé avec l’arrivée du web 2.0,<br />

au milieu <strong>de</strong>s années 2000 69 , et notamment la création <strong>de</strong>s blogs et <strong>de</strong>s wikis. Les nouvelles<br />

fonctionnalités communautaires et collaboratives, propres au web 2.0, vont permettre un<br />

rééquilibrage <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> force entre les consommateurs et les marques. On passe dès lors<br />

d’un <strong>modèle</strong> unidirectionnel (ou vertical) à un <strong>modèle</strong> multidirectionnel (ou horizontal).<br />

68 Georges Akerlof, « The Market for ‘Lemons’: Quality Uncertainty and the Market Mechanism », The<br />

Quarterly Journal of Economics, Vol. 84, No. 3, 1970, p. 488-500.<br />

69 Le terme « web 2.0. » fut utilisé pour la première fois en 2003, par Dale Dougherty, co-fondateur <strong>de</strong> la société<br />

d'édition <strong>de</strong> O'Reilly Media. Il désigne l’« ensemble <strong>de</strong>s fonctionnalités communautaires et collaboratives (blogs,<br />

avis consommateurs, flux RSS, plateformes d’échanges vidéo, etc.) qui se sont fortement développées sur<br />

Internet à partir <strong>de</strong> l’année 2005 », selon Bertrand Bathelot, agrégé d’économie gestion et fondateur d'Abc-<br />

Netmarketing,<br />

42


En effet, on assiste à un rééquilibrage <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> force, grâce à l’accès, pour les<br />

consommateurs, à une information sur les marques, n’émanant pas <strong>de</strong>s marques elles-mêmes.<br />

Le consommateur, qui dispose désormais d’un rôle plus actif (par opposition aux<br />

consommateurs passifs face à l’information publicitaire prodiguée par les marques), va<br />

pouvoir rechercher les avis et expériences d’autres consommateurs sur tel ou tel produit, via<br />

les forums <strong>de</strong> discussions, les blogs ou les réseaux sociaux.<br />

Si l’on en croit l’étu<strong>de</strong> réalisée par le CREDOC en décembre 2009 70 , 44% <strong>de</strong>s internautes<br />

interrogés ont recours « régulièrement » ou « <strong>de</strong> temps en temps » aux avis <strong>de</strong> consommateurs<br />

sur internet. Le consommateur n’est alors plus du tout contraint <strong>de</strong> faire confiance aux<br />

messages publicitaires, autrefois seules sources d’information. Le discours <strong>de</strong>s marques<br />

n’étant plus prescripteurs, il engendre <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> méfiance. Les marques ne peuvent<br />

plus se contenter <strong>de</strong> « dire », elles doivent désormais « faire », au risque <strong>de</strong> se faire démasquer<br />

sur la toile.<br />

De nombreux outils, renforçant la traçabilité <strong>de</strong>s marques et<br />

<strong>de</strong> leurs produits, voient <strong>de</strong> plus en plus le jour sur le web. Par<br />

exemple, on assiste à une tendance grandissante <strong>de</strong> « décodage »<br />

<strong>de</strong>s co<strong>de</strong>s barres. Le site internet <strong>de</strong> GS1 France, organisme <strong>de</strong><br />

normalisation français offre par exemple cette possibilité. Plus<br />

récemment, se sont développées <strong>de</strong>s applications pour<br />

Smartphone, permettant <strong>de</strong> scanner les co<strong>de</strong>s barres en magasin et d’obtenir en direct <strong>de</strong>s<br />

informations liées au produit (additifs, labels, origine, ingrédients, conservation, impacts<br />

environnementaux, etc.).<br />

Fig. 15 - Application<br />

Shopwise<br />

On peut citer par exemple l’application Shopwise, créée en 2010, qui<br />

permet, une fois le co<strong>de</strong> barré scanné, d’obtenir <strong>de</strong>s informations sur la<br />

marque et l’entreprise, <strong>de</strong> connaître la liste <strong>de</strong>s ingrédients, <strong>de</strong>s additifs<br />

et <strong>de</strong>s allergènes présents dans le produit, les valeurs nutritionnelles<br />

associées, l’obtention <strong>de</strong> labels ainsi qu’un tableau <strong>de</strong> notation,<br />

synthèse <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s critères présentés.<br />

70 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise?, décembre 2009.<br />

43<br />

Fig. 14 - Anatomie d’un Co<strong>de</strong>-Barre


Conclusion <strong>de</strong> la Section 2 <<br />

La société <strong>de</strong> « sur-communication » dans laquelle nous vivons rend les messages <strong>de</strong> plus<br />

en plus inaudibles et inefficaces. En effet, inondés <strong>de</strong> messages publicitaires, les<br />

consommateurs y portent <strong>de</strong> moins en moins attention. Dans le pire <strong>de</strong>s cas, ils la rejettent en<br />

la trouvant envahissante et agressive.<br />

La communication n’a fait qu’accentuer le rejet grandissant <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong> la<br />

marque, en célébrant <strong>de</strong>s bénéfices secondaires ou factices et en concentrant leurs efforts sur<br />

le packaging, créant ainsi une valeur ajoutée limitée.<br />

Ce rejet du discours <strong>de</strong>s marques sera par ailleurs renforcé par la mise en place d’un <strong>nouveau</strong><br />

système d’information, permise par le développement du web 2.0 et <strong>de</strong> ses outils collaboratifs.<br />

Les consommateurs ont désormais accès à une information davantage objective et peut ainsi<br />

partager ses expériences <strong>de</strong> marque.<br />

44


Conclusion du Chapitre 1


Chapitre 2 : Le rôle amplificateur <strong>de</strong> la crise économique <strong>de</strong> 2008<br />

Si nous avons vu, dans le premier chapitre, que <strong>de</strong>s causes structurelles pouvaient<br />

expliquer la crise <strong>de</strong> confiance actuelle <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s<br />

marques, nous allons désormais nous intéresser aux explications conjoncturelles. En effet,<br />

nous montrerons dans ce second chapitre, que la crise économique qui a débuté en 2008 a été<br />

un facteur <strong>de</strong> radicalisation <strong>de</strong> la défiance <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

La crise économique, qui s’est peu à peu généralisée à l’ensemble <strong>de</strong>s sphères <strong>de</strong> la<br />

société, est d’abord une crise financière 73 . Il s’agit, en effet, <strong>de</strong> la « crise <strong>de</strong>s subprimes », qui<br />

débute aux Etats-Unis à la fin <strong>de</strong> l’été 2007, et entrainera une importante récession à l’échelle<br />

planétaire. La France entrera pleinement dans une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> récession 74 au troisième<br />

trimestre 2008, conséquence d’un taux <strong>de</strong> croissance négatif au cours du 2 e trimestre (-0,4%)<br />

et du 3 e trimestre 2008 (-0,2%) 75 .<br />

Le ralentissement <strong>de</strong> l’économie française aura <strong>de</strong>ux conséquences principales : une forte<br />

hausse du taux <strong>de</strong> chômage, passant <strong>de</strong> 7,7% au 4 e trimestre 2008 à 9,6% au 4 e trimestre 2009,<br />

selon l’INSEE, soit une hausse <strong>de</strong> 525 000 chômeurs en un an, ainsi qu’une baisse du pouvoir<br />

d’achat <strong>de</strong>s ménages <strong>de</strong> 0,6% en 2008.<br />

Nous verrons que cette crise économique, et la récession qu’elle génère, va<br />

considérablement transformer les comportements <strong>de</strong>s consommateurs vis-à-vis <strong>de</strong> l’acte<br />

d’achat. En effet, il semblerait que les consommateurs sont désormais <strong>de</strong> plus en plus dans une<br />

quête <strong>de</strong> sens à travers leur <strong>consommation</strong>.<br />

Nous montrerons également que la crise mettra en évi<strong>de</strong>nce les limites <strong>de</strong>s institutions<br />

politiques, tant dans l’anticipation que dans la gestion <strong>de</strong> sortie <strong>de</strong> crise, ce qui créera un<br />

transfert d’attentes <strong>de</strong>s institutions politiques vers les entreprises. Celles-ci seront, en effet,<br />

dotées <strong>de</strong> responsabilités <strong>de</strong> plus en plus importantes <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

73<br />

Voir Annexe VI: Explication <strong>de</strong> la crise économique et financière (sur la base du TD d’Économie <strong>de</strong> Première<br />

Année à Sciences Po Toulouse, enseigné par Tristan Auvray)<br />

74<br />

Entendue au sens <strong>de</strong> l’INSEE comme un recul du Produit Intérieur Brut (PIB) pendant au moins <strong>de</strong>ux<br />

trimestres consécutifs.<br />

75 er<br />

Selon les Comptes Nationaux du 1 trimestre 2009, publiés par l’INSEE.<br />

46


Section 1 : La crise modifie les comportements <strong>de</strong>s consommateurs<br />

Nous allons voir que la crise économique va avoir <strong>de</strong>ux principales conséquences : une<br />

conséquence conjoncturelle, dont la plupart <strong>de</strong>s analystes considèrent qu’elles disparaitront<br />

avec la crise et une autre davantage structurelle qui va profondément changer les<br />

comportements <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

I. Les effets conjoncturels <strong>de</strong> la crise : la rationalité au cœur <strong>de</strong> l’acte d’achat<br />

La crise et la pression à la baisse du pouvoir d’achat a eu pour conséquence <strong>de</strong> replacer la<br />

rationalité au cœur <strong>de</strong> l’acte d’achat.<br />

Cette « <strong>consommation</strong> rationnelle » s’est traduite par <strong>de</strong>ux phénomènes : le premier,<br />

caractéristique <strong>de</strong> toutes les crises, concerne la recherche <strong>de</strong>s « prix bas », où les<br />

consommateurs vont privilégier la nécessité, et le second, davantage caractéristique <strong>de</strong> la<br />

crise économique <strong>de</strong> 2008, verra se développer un phénomène d’ « achat malin », où les<br />

consommateurs vont adopter <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x comportements d’achats tels que le co-achat ou le<br />

co-housing, par exemple.<br />

Pour mettre en évi<strong>de</strong>nce ces constats, nous nous sommes appuyés sur l’étu<strong>de</strong> réalisée par le<br />

CREDOC en 2009, intitulée « Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong><br />

comportement avec la crise ? » 76 .<br />

I.1. La recherche <strong>de</strong> « prix bas » : les consommateurs privilégient la nécessité<br />

Cette recherche <strong>de</strong> « prix bas » s’illustre à travers trois gran<strong>de</strong>s tendances : une hausse <strong>de</strong><br />

la fréquentation <strong>de</strong>s hard discounts, une comparaison renforcée <strong>de</strong>s prix entre commerces et<br />

un report <strong>de</strong> plus en plus important <strong>de</strong>s achats <strong>de</strong> certains biens durables.<br />

76 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise ?, 2009<br />

47


I.1.1. Une hausse <strong>de</strong> la fréquentation <strong>de</strong>s hard discounts<br />

Le hard discount est « un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> distribution en moyenne surface à forte dominante<br />

alimentaire, basé sur une pratique <strong>de</strong> prix bas » 77 . Ces « prix bas » sont généralement obtenus<br />

grâce à « la quasi-absence <strong>de</strong> services, un environnement <strong>de</strong> vente spartiate, une réduction<br />

<strong>de</strong>s coûts <strong>de</strong> manutention (mise en rayon par palettes), une limitation du nombre <strong>de</strong><br />

références offertes, une présence souvent très limitée <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques, une forte<br />

polyvalence <strong>de</strong>s salariés, une forte puissance d’achat (concentrée sur un petit nombre <strong>de</strong><br />

références) et <strong>de</strong>s investissements publicitaires souvent limités » 78 .<br />

Ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> distribution a connu une évolution en différentes phases, comme le montre le<br />

graphique ci-contre 79 :<br />

Fig. 16 - Evolution <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> marché <strong>de</strong>s Hard Discount - De 2001 à 2011<br />

En effet, on observe une rapi<strong>de</strong> évolution <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> marché <strong>de</strong>s hards discounts entre<br />

2001 et 2004, correspondant à une forte hausse du nombre <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vente en France.<br />

L’étu<strong>de</strong> réalisée par TNS Secodip 80 montre qu’en 2004, le hard discount était présent sur 3<br />

300 points <strong>de</strong> vente. Les principales enseignes enregistrent <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> croissance record,<br />

notamment en termes <strong>de</strong> nombre <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vente.<br />

77 http://www.<strong>de</strong>finitions-marketing.com/Definition-Hard-discount<br />

78 id.<br />

79 http://www.lsa-conso.fr/l-evolution-du-hard-discount-<strong>de</strong>puis-dix-ans,128913<br />

80 TNS Secodip, Le hard discount en France, 2005<br />

48


Par exemple, pour Lidl, lea<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s enseignes <strong>de</strong> hard discount à cette pério<strong>de</strong>, le<br />

nombre <strong>de</strong> point <strong>de</strong> vente augmentera <strong>de</strong> 20% entre 2001 et 2004 81 . Aldi passera <strong>de</strong> 400<br />

points <strong>de</strong> vente en 2001 à 705 en<br />

2004, tout comme Netto qui<br />

enregistrera une forte croissance,<br />

en passant <strong>de</strong> 190 points <strong>de</strong><br />

vente en 2001 à 310 en 2004.<br />

Fig. 17 - Profil <strong>de</strong>s principales enseignes <strong>de</strong> Hard Discount - 2004<br />

Puis, intervient une phase <strong>de</strong> stabilisation, au cours <strong>de</strong> laquelle les enseignes <strong>de</strong> hard<br />

discounts plafonnent à une part <strong>de</strong> marché aux alentours <strong>de</strong> 13,4%. Enfin, comme le montre<br />

la figure n°17, les enseignes enregistreront une nouvelle croissance, en gran<strong>de</strong> partie grâce à<br />

la crise économique.<br />

C’est ainsi que l’on observe, en 2008, que 72% <strong>de</strong>s Français ont acheté, au moins une<br />

fois, leurs courses dans un grand magasin <strong>de</strong> hard discount 82 et la proportion <strong>de</strong> ceux qui<br />

déclarent fréquenter plus souvent les hard discounts est passée <strong>de</strong> 8% en 2007 à 15% en<br />

2008 83 .<br />

I.1.2. Une comparaison renforcée <strong>de</strong>s prix<br />

Dans son étu<strong>de</strong> 84 , le CREDOC met en évi<strong>de</strong>nce un autre phénomène, caractéristique <strong>de</strong><br />

cette pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> crise : la comparaison <strong>de</strong>s prix. En effet, on constate que « la proportion <strong>de</strong><br />

consommateurs qui comparent plus les prix entre commerces s’accroît <strong>de</strong> 17 points entre juin<br />

2007 et juin 2008, pour atteindre 50,8% » 85 .<br />

Pour rendre compte <strong>de</strong> ce phénomène, il est intéressant <strong>de</strong> mettre en perspective ces<br />

chiffres avec la création <strong>de</strong>s « comparateurs <strong>de</strong> prix » sur internet, sites web donnant la<br />

possibilité aux consommateurs <strong>de</strong> comparer le prix <strong>de</strong> toutes sortes <strong>de</strong> produits ou services,<br />

entre différentes enseignes.<br />

81 Sur la base <strong>de</strong>s chiffres publiés par LSA dans l’Atlas <strong>de</strong> la distribution 2001.<br />

82 Selon l’enquête TNS Worldpanel réalisée en 2008 sur le marché du hard discount.<br />

83 Pascale Hébel, Baromètre <strong>de</strong> l’alimentation, 2009.<br />

84 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise ?, 2009.<br />

85 Id. p.23<br />

49


Ces comparateurs <strong>de</strong> prix se sont imposés en France au début <strong>de</strong>s années 2000 et sont<br />

désormais la « clé <strong>de</strong> voûte » du e-commerce. En effet, si l’on en croit l’étu<strong>de</strong> menée en 2011<br />

par l’IFOP pour l’Atelier BNP Paribas 86 , 92% <strong>de</strong>s sondés déclarent avoir au moins une fois<br />

utilisés <strong>de</strong>s comparateurs <strong>de</strong> prix sur Internet avant d’effectuer un achat.<br />

Une étu<strong>de</strong> réalisée en 2010 par<br />

ComScore, société <strong>de</strong> mesure d’audience<br />

sur Internet, témoigne <strong>de</strong> la rapi<strong>de</strong><br />

évolution <strong>de</strong>s comparateurs <strong>de</strong> prix. Par<br />

exemple, entre juillet 2009 et juillet 2010,<br />

on constate que le nombre <strong>de</strong> visiteurs<br />

uniques sur les principaux sites <strong>de</strong><br />

comparateurs <strong>de</strong> prix a augmenté <strong>de</strong><br />

8% 87 .<br />

Fig. 18 - Évolution du classement <strong>de</strong>s comparateurs <strong>de</strong> prix en<br />

France - De Juillet 2009 à Juillet 2010<br />

Enfin, si l’on s’intéresse au chiffre d’affaires du premier site français <strong>de</strong> comparateur <strong>de</strong><br />

prix, LeGui<strong>de</strong>.com, on observe une constante évolution, qui s’accélère à partir <strong>de</strong> 2008,<br />

comme le montre le graphique ci-<strong>de</strong>ssous 88 .<br />

Fig. 19 - Évolution du chiffre d’affaires <strong>de</strong> LeGui<strong>de</strong>.com - De 2004 à 2011<br />

86 IFOP pour l’Atelier BNP Paribas, Les internautes et les comparateurs <strong>de</strong> prix, avril 2011.<br />

87 ComScore, Étu<strong>de</strong> sur les comparateurs <strong>de</strong> prix en France, septembre 2010.<br />

88 D’après les chiffres clés, publiés sur le site LeGui<strong>de</strong>.com.<br />

Disponible sur http://www.legui<strong>de</strong>.com/wp-finances/fr/la-societe/chiffre-cles/<br />

50


I.1.3. Un report <strong>de</strong> l’achat <strong>de</strong> certains biens durables<br />

Une autre conséquence <strong>de</strong> la crise concerne le report <strong>de</strong>s achats <strong>de</strong> biens durables. En<br />

effet, en 2009, selon l’enquête du CREDOC 89 , 40% <strong>de</strong>s sondés ont décidé <strong>de</strong> reporter un<br />

achat important au cours <strong>de</strong>s 6 <strong>de</strong>rniers mois, et 72,1% d’entre eux pensent qu’ils <strong>de</strong>vront <strong>de</strong><br />

<strong>nouveau</strong> le reporter, au cours <strong>de</strong>s prochains mois.<br />

Les consommateurs privilégient ainsi « les plaisirs accessibles » en repoussant les gros<br />

achats <strong>de</strong> biens durables, trop coûteux et dont le plaisir se retirera sur le long terme. On<br />

constate ainsi, en 2008, un recul <strong>de</strong> 5,7% <strong>de</strong>s dépenses allouées à l’achat d’automobiles<br />

neuves, <strong>de</strong> 4,2% concernant l’achat <strong>de</strong> meubles, 1,8% pour l’achat <strong>de</strong> réfrigérateur et <strong>de</strong><br />

congélateurs, ainsi qu’un recul 2,5% pour les achats <strong>de</strong> textiles et cuir 90 , comme le montre le<br />

tableau ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

Fig. 20 - Comparaison <strong>de</strong>s croissances <strong>de</strong>s postes <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> en euros constants selon la durabilité - 1993 et 2008<br />

I.2. L’ « achat malin »<br />

L’ « achat malin » est une expression du CREDOC, utilisée pour désigner les « stratégies<br />

d’achat développées en vue <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s bonnes affaires ». On observe <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s<br />

stratégies mises en place, le « décalage saisonnier <strong>de</strong>s achats », ainsi que <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong><br />

« co-achat » <strong>de</strong> biens ou services (achat groupé, co-housing, etc.).<br />

89 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise ?, 2009, p.34.<br />

90 INSEE, Comptes nationaux – base 2005.<br />

51


I.2.1. Un décalage saisonnier <strong>de</strong>s achats<br />

Ce que l’on appelle « décalage saisonnier <strong>de</strong>s achats » correspond à la tendance observée<br />

d’optimisation <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s d’achats afin <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong>s meilleurs prix.<br />

On pense notamment aux pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sol<strong>de</strong>s, d’autant plus <strong>de</strong>puis 2009, date à laquelle la<br />

loi n° 2008-776 du 4 août 2008 91 <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> l'économie (LME) est entrée en<br />

vigueur, en modifiant les articles L 310-3 et L 310-5 du co<strong>de</strong> du commerce. Cette loi modifie<br />

les conditions d’organisation <strong>de</strong>s sol<strong>de</strong>s, seules pério<strong>de</strong>s au cour <strong>de</strong>squelles les commerçants<br />

sont autorisés à vendre à perte. La loi organise les sol<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la façon suivante : <strong>de</strong>s « sol<strong>de</strong>s<br />

fixes », d’une durée <strong>de</strong> 5 semaines, ont lieu en été et en hiver, et <strong>de</strong>s « sol<strong>de</strong>s libres »,<br />

<strong>nouveau</strong>té <strong>de</strong> cette loi, permettant aux commerçants <strong>de</strong> fixer librement <strong>de</strong>ux semaines <strong>de</strong><br />

sol<strong>de</strong> dans l’année.<br />

L’allongement <strong>de</strong> ces pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sol<strong>de</strong> coïnci<strong>de</strong> d’ailleurs avec une hausse <strong>de</strong> la<br />

proportion <strong>de</strong>s Français attendant les sol<strong>de</strong>s pour effectuer un achat vestimentaire, qui est<br />

passé <strong>de</strong> 57,5% en 2000 à 67,5% en 2009.<br />

Les sol<strong>de</strong>s ne sont pas les seules variables d’ajustements pour les consommateurs. Il faut<br />

également citer les promotions et les bons <strong>de</strong> réduction, qui foisonnent notamment sur le<br />

net. En effet, <strong>de</strong> nombreux sites internet tels que www.les-bonnes-promos.com, www.ma-<br />

reduc.com ou encore www.1001reductions.com, proposent <strong>de</strong> nombreux bons <strong>de</strong> réductions<br />

ou promotions en ligne.<br />

De plus, il faut également citer le développement <strong>de</strong>s applications pour Smartphone, qui,<br />

grâce à la géolocalisation, parviennent à proposer <strong>de</strong>s bons <strong>de</strong> réductions et <strong>de</strong>s promotions<br />

dans les magasins proches <strong>de</strong>s endroits où se trouvent les consommateurs.<br />

On peut mentionner par exemple l’application Point Insi<strong>de</strong>, qui propose <strong>de</strong>s coupons <strong>de</strong><br />

réduction dès lors que les consommateurs approchent d’ un magasin ayant souscrits au<br />

service. Cette application présente également<br />

l’avantage <strong>de</strong> permettre aux consommateurs <strong>de</strong> choisir<br />

les coupons qu’ils souhaitent recevoir, en fonction<br />

<strong>de</strong> leurs goûts.<br />

91 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> l'économie.<br />

52<br />

Fig. 21 - Logo <strong>de</strong> Point Insi<strong>de</strong>


I.2.2. Le « co-achat »<br />

Le terme <strong>de</strong> « co-achat » ou « achat groupé » désigne le fait <strong>de</strong> regrouper plusieurs<br />

acheteurs afin <strong>de</strong> pouvoir négocier <strong>de</strong>s conditions avantageuses, grâce au volume acheté. Ce<br />

phénomène a véritablement commencé à s’imposer en France, à partir <strong>de</strong> 2010, date à<br />

laquelle l’entreprise américaine Groupon va pénétrer le marché français. Côté en bourse<br />

<strong>de</strong>puis fin 2011, Groupon a bénéficié d’un taux <strong>de</strong> croissance exponentiel et compte<br />

aujourd’hui plus <strong>de</strong> 5 millions <strong>de</strong> membres en France 92 .<br />

Ce phénomène s’est ensuite développé dans <strong>de</strong>s sphères inattendues telles que<br />

l’immobilier. En effet, on constate <strong>de</strong>puis quelques années l’apparition du « co-housing »,<br />

regroupement <strong>de</strong> personnes souhaitant acheter en commun un logement « afin <strong>de</strong> pouvoir<br />

accé<strong>de</strong>r à un lieu <strong>de</strong> vie plus spacieux, plus agréable ou mieux localisé que s'ils avaient dû<br />

acheter seul. En regroupant leurs ressources financières, 3 ou 4 familles peuvent par exemple<br />

acheter, réhabiliter et occuper un petit immeuble qu'elles n'auraient jamais pu s'offrir si elles<br />

avaient dû acheter seul ». 93<br />

La crise semble donc avoir d’importantes conséquences sur les comportements <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, qui mettent désormais la rationalité au cœur <strong>de</strong> l’acte d’achat. Cela se<br />

traduit par une recherche <strong>de</strong> « prix bas » ainsi que par le développement <strong>de</strong> « l’achat malin ».<br />

Même si pour <strong>de</strong> nombreux auteurs ces <strong>nouveau</strong>x comportements disparaîtront une fois la<br />

croissance retrouvée, il n’en <strong>de</strong>meure pas moins qu’ils ont eu un impact non négligeable<br />

dans la mise à distance <strong>de</strong>s marques, ne serait-ce qu’en prouvant aux consommateurs que <strong>de</strong>s<br />

alternatives aux gran<strong>de</strong>s marques sont possible.<br />

Nous allons désormais nous intéresser aux conséquences, davantage structurelles, <strong>de</strong> la<br />

crise économique sur les comportements <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

92 http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/marche-<strong>de</strong>s-coupons/un-groupon-tres-dominant.shtml<br />

93 http://www.changer<strong>de</strong>ville.fr/ou-se-loger/conseils-logement/co-housing-achat-groupe-950.html<br />

53


II. Les effets structurels <strong>de</strong> la crise : une quête <strong>de</strong> sens<br />

La crise économique actuelle n’a pas uniquement eu pour conséquence la mise en place<br />

d’astuces, <strong>de</strong> « comportements <strong>de</strong> débrouille » pour subvenir à ses besoins, au moindre coût.<br />

Elle a permis une véritable prise <strong>de</strong> conscience sur ce que représentait l’acte <strong>de</strong><br />

<strong>consommation</strong>.<br />

En effet, les consommateurs rejettent <strong>de</strong> plus en plus l’ « hyper-<strong>consommation</strong> » au sein<br />

duquel consommer <strong>de</strong>vient une fin en soi. Ils recherchent <strong>de</strong> plus en plus à donner du sens à<br />

l’acte d’achat en y incorporant <strong>de</strong>s préoccupations sociales, écologiques ou éthiques. Cette<br />

« <strong>consommation</strong> engagée » <strong>de</strong>vient alors un formidable « répertoire d’action » 94 <strong>de</strong> la<br />

contestation sociale.<br />

II.1. La « <strong>consommation</strong> engagée » existe <strong>de</strong>puis longtemps…<br />

On désigne par « <strong>consommation</strong> engagée », « un type <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> qui entend ne pas<br />

se limiter à la satisfaction d’un besoin ou d’un désir mais qui se veut aussi un choix moral<br />

exprimant un intérêt d’ordre collectif » 95 . Si ce phénomène <strong>de</strong> « <strong>consommation</strong> engagée »<br />

s’est retrouvé au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la scène avec la crise économique, il ne faut pas pour autant<br />

oublier que ses origines sont plus lointaines.<br />

II.1.1. Années 60 : mise en place <strong>de</strong>s bases du consumérisme mo<strong>de</strong>rne<br />

Les années 60 sont considérées comme étant la décennie la plus prospère <strong>de</strong>s 30<br />

Glorieuses, avec <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> croissance annuel avoisinant les 6%. C’est également l’apogée<br />

<strong>de</strong> la société <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, société d’abondance et <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>de</strong> masse, qui s’est<br />

peu à peu installée en France au sortir <strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> Guerre Mondiale.<br />

94 Charles Tilly, « Les origines du répertoire <strong>de</strong> l’action contemporaine en France et en gran<strong>de</strong> Bretagne »,<br />

Vingtième siècle. Revue d’histoire, n°4, Octobre 1984, p.89-108<br />

95 SMITH N. C., Morality and the market, Routledge, London and New York, 1990, 633 pages.<br />

54


C’est dans ce contexte que vont se consoli<strong>de</strong>r les critiques adressées à la <strong>consommation</strong>,<br />

accusée d’« enserrer [les individus] dans <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> domination », comme l’explique<br />

Jean Baudrillard en 1970 dans son ouvrage « La société <strong>de</strong><br />

<strong>consommation</strong>, ses mythes, ses structures » 96 . Nous assistons, en<br />

effet, à cette époque à la genèse du mouvement consumériste, avec<br />

notamment la création du Comité National <strong>de</strong> la Consommation en<br />

1960 et la parution, en 1961, du premier numéro <strong>de</strong> Que Choisir (cf.<br />

image ci-contre), publié par l’UFC (Union Fédérale <strong>de</strong>s<br />

Consommateurs), créée en 1951.<br />

Il faut bien sur également mentionner les mouvements <strong>de</strong> manifestations <strong>de</strong> Mai 1968, où<br />

l’on trouvait, parmi les nombreuses revendications, un rejet <strong>de</strong> la société <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>,<br />

ainsi que le mouvement hippie, qui connu ses heures <strong>de</strong> gloire à la fin <strong>de</strong>s années 60 et qui<br />

dénonçait l’exploitation <strong>de</strong> l’homme par la société <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

II.1.2. La « <strong>consommation</strong> engagée », <strong>de</strong>s années 60 à aujourd’hui<br />

À partir <strong>de</strong>s années 70, les premières préoccupations environnementales font leur<br />

apparition dans le débat public. Par exemple, l’IFOAM (International Fe<strong>de</strong>ration of Organic<br />

Agricultural Mouvements) se crée en 1972. On observe également, en 1973, les premières<br />

attributions <strong>de</strong> la mention « Nature & Progrès », label d’agriculture et <strong>de</strong> cosmétiques<br />

biologiques. Le choc pétrolier <strong>de</strong> 1973 permettra une réelle prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong> l’impact<br />

négatif <strong>de</strong>s activités humaines sur les ressources naturelles et alimentaires. Enfin, un autre<br />

événement, qui a eu lieu au cours <strong>de</strong> cette décennie, marquera l’histoire <strong>de</strong> la<br />

« <strong>consommation</strong> engagée » : le boycott <strong>de</strong> Nestlé, lancé en juillet 1977 aux Etats-Unis, qui<br />

s’étendra par la suite en Europe. Ce qui était reproché à Nestlé était <strong>de</strong> promouvoir <strong>de</strong>s<br />

substituts au lait maternel, accusés notamment par l’INFACT (Infant Formula Action<br />

Coalition) <strong>de</strong> contribuer à la mort <strong>de</strong> nourrissons.<br />

96 Jean Baudrillard, La société <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, ses mythes, ses structures, Paris, Éditions Denoël, 1970<br />

55<br />

Fig. 22 - Premier numéro<br />

<strong>de</strong> Que Choisir - 1951


La prise <strong>de</strong> conscience environnementale, initiée dans les années 70, se renforcera dans<br />

les années 80, avec notamment la publication du Rapport Brundtland « Notre avenir à tous »<br />

en 1987, par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement <strong>de</strong> l’ONU.<br />

Ce rapport est connu pour avoir posé les bases d’une définition du développement durable,<br />

entendu comme « un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> développement qui répond aux besoins <strong>de</strong>s générations du<br />

présent sans compromettre la capacité <strong>de</strong>s générations futures à répondre aux leurs » 97 .<br />

Puis, les années 90 marquèrent un tournant dans l’histoire <strong>de</strong> la « <strong>consommation</strong><br />

engagée » à travers les prises <strong>de</strong> position <strong>de</strong> trois grands mouvements : le mouvement<br />

altermondialiste, qui fait son apparition, ainsi que le commerce équitable et le mouvement<br />

écologique, qui prennent <strong>de</strong> l’ampleur, au cours <strong>de</strong> cette décennie.<br />

Le mouvement altermondialiste, revendiquant une mondialisation maîtrisée<br />

et solidaire, est révélé au grand public en 1999 à l’occasion <strong>de</strong>s<br />

manifestations <strong>de</strong> Seattle, organisées en réaction du sommet <strong>de</strong> l’OMC<br />

(Organisation Mondiale du Commerce). Soutenant qu’« un autre mon<strong>de</strong> est<br />

possible », le courant altermondialiste sera représenté en France par le biais<br />

d’ATTAC, Association pour une Taxation <strong>de</strong>s Transactions Financières.<br />

Fig. 24 - Logo Max<br />

Havelaar France<br />

Le commerce équitable prendra véritablement <strong>de</strong> l’ampleur au début<br />

<strong>de</strong>s années 90, avec la création <strong>de</strong> Max Havelaar France, en 1992. Cette<br />

association <strong>de</strong> solidarité internationale délivre un label « Fairtra<strong>de</strong> / Max<br />

Havelaar », garantissant notamment <strong>de</strong> bonnes conditions <strong>de</strong> travail, ainsi<br />

qu’un « prix d’achat juste », permettant aux producteurs <strong>de</strong> vivre dans <strong>de</strong>s<br />

conditions décentes.<br />

Enfin, le mouvement écologiste connaîtra un regain d’intérêt sur la scène internationale,<br />

avec notamment le Sommet <strong>de</strong> la Terre, en 1992, qui sera l’acte fondateur marquant une<br />

réelle prise <strong>de</strong> conscience mondiale et fixant un certain nombre d’engagements. Par exemple,<br />

cette conférence a permis <strong>de</strong> mettre sur pied « l’Agenda 21 », plan d’action pour le 21 e<br />

siècle, formulant un certain nombre <strong>de</strong> recommandations autour <strong>de</strong> sujets aussi divers que la<br />

santé, le logement, la pollution <strong>de</strong> l’air, la gestion <strong>de</strong> l’agriculture ou encore la gestion <strong>de</strong>s<br />

déchets.<br />

97 Rapport Brundtland, Notre avenir à tous, Québec, Éditions Lambda, 1987, 432 pages.<br />

56<br />

Fig. 23 - Logo « Un autre<br />

mon<strong>de</strong> est possible »


Les années 2000 verront la consécration du mouvement dans l’opinion publique, comme<br />

en témoigne l’évolution du chiffre d’affaires <strong>de</strong>s produits biologiques et <strong>de</strong>s produits<br />

émanant du commerce équitable. En effet, au cours <strong>de</strong> la décennie, le chiffre d’affaires <strong>de</strong>s<br />

produits biologiques a été multiplié par 4, passant d’un peu moins <strong>de</strong> 1 milliards d’euros en<br />

2001 à 3,9 milliards d’euros en 2011 98 . Le marché <strong>de</strong>s produits équitables a, lui aussi, connu<br />

une croissance exponentielle durant ces 10 années, comme en témoigne le chiffre d’affaires<br />

<strong>de</strong>s produits labellisés Max Havelaar qui atteignent, en 2011, 315 millions d’euros (contre 12<br />

millions d’euros en 2001) 99 .<br />

II.1.3. Les formes mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> « <strong>consommation</strong> engagée »<br />

Dans son ouvrage « La <strong>consommation</strong> engagée », Sophie Dubuisson-Quellier 100 , présente<br />

les différentes formes <strong>de</strong> l’action contestataire (cf. tableau ci-<strong>de</strong>ssous).<br />

Formes <strong>de</strong> l’action<br />

contestataire<br />

Individuelle<br />

Collective<br />

Espaces <strong>de</strong> l’action contestataire<br />

Dans les actes d’achat Dans les pratiques sociales élargies<br />

> Boycott et Buycott<br />

> Consommation et pratiques<br />

Labels environnementaux,<br />

résistantes<br />

équitables. Agriculture bio, Décroissance, simplicité volontaire,<br />

éthique…<br />

frugalité, contre-culture, réemploi…<br />

> Mouvement coopératif et<br />

systèmes alternatifs<br />

Groupes d’achat solidaires,<br />

Coopératives <strong>de</strong> consommateurs,<br />

Système d’Échange Locale,<br />

AMAP,…<br />

Fig.25 - Formes et espaces <strong>de</strong> l’action contestataire<br />

57<br />

> Actions collectives <strong>de</strong><br />

consommateurs<br />

Actions antipublicitaires, pétition<br />

auprès <strong>de</strong>s acteurs publics ou privés<br />

pour le rachat <strong>de</strong> terres agricoles,<br />

marches décroissantes …<br />

On retrouve notamment les actions <strong>de</strong> « buycott », qui désignent le fait d’« acheter un<br />

bien plutôt qu’un autre pour promouvoir une cause » 101 . Le « buycott » s’exprime à travers<br />

plusieurs formes telles que l’achat <strong>de</strong> produits biologiques, éthiques ou équitables, achat <strong>de</strong><br />

produit « Ma<strong>de</strong> in France », etc. D’autres mouvements plus collectifs voient également le<br />

jour, comme par exemple les AMAP, Associations pour le Maintien <strong>d'un</strong>e Agriculture<br />

Paysanne, qui rassemblent différents groupes <strong>de</strong> consommateurs souhaitant établir une<br />

relation directe avec un producteur local.<br />

Nous allons maintenant voir que ces « formes <strong>de</strong> l’action contestataire » vont prendre une<br />

nouvelle tournure avec la crise économique actuelle.<br />

98 Selon l’évaluation <strong>de</strong> la <strong>consommation</strong> alimentaire biologique - AND-International / Agence BIO - 2011<br />

99 Selon les chiffres publiés sur maxhavelaarfrance.com<br />

100 Sophie Dubuisson-Quellier, La <strong>consommation</strong> engagée, Paris, Les Presses <strong>de</strong> Sciences Po, 2009, 143 pages<br />

101 http://www.scienceshumaines.com/boycott-buycott-la-<strong>consommation</strong>-engagee_fr_26452.html


II.2. … mais prend une nouvelle tournure avec la crise économique actuelle<br />

Avec la récente crise économique, on assiste à l’émergence d’un phénomène qui va<br />

prendre <strong>de</strong> plus en plus d’importance : la recherche <strong>de</strong> sens par les consommateurs dans<br />

l’acte d’achat. Nous mettrons en évi<strong>de</strong>nce les <strong>de</strong>ux principales facettes <strong>de</strong> ce phénomène : la<br />

« <strong>consommation</strong> d’usage » et la « co-production ».<br />

II.2.1. La <strong>consommation</strong> d’usage<br />

Cette quête <strong>de</strong> sens dans l’acte <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> va tout d’abord se traduire par une<br />

recherche <strong>de</strong> la valeur du bien, et non plus uniquement <strong>de</strong> sa possession. En effet, on se rend<br />

compte qu’un phénomène <strong>de</strong> « substitution <strong>de</strong> la propriété à l’usage » 102 opère <strong>de</strong>puis<br />

quelques années, comme le rappelle le CREDOC. C’est ainsi que l’on constate que « 71%<br />

<strong>de</strong>s Français pensent que l’usage d’un bien importe plus que sa propriété » 103 .<br />

Cette tendance nous est expliquée par Gilles Lipovetsky, dans « Le bonheur paradoxal.<br />

Essai sur la société d'hyper<strong>consommation</strong> » : « La civilisation <strong>de</strong> l’objet a été remplacé par<br />

une économie <strong>de</strong> l’expérience […] c’est dans ce contexte que l’hyperconsommateur<br />

recherche moins la possession <strong>de</strong>s choses pour elles-mêmes que la multiplication <strong>de</strong>s<br />

expériences, le plaisir <strong>de</strong> l’expérience pour l’expérience, l’ivresse <strong>de</strong>s sensations et <strong>de</strong>s<br />

émotions nouvelles » 104 .<br />

Ce constat s’illustre parfaitement par un phénomène qui nous vient <strong>de</strong>s<br />

Etats-Unis : la <strong>consommation</strong> collaborative. Rachel Botsman et Roo<br />

Rogers, auteurs du livre « What’s mine is yours, the rise of collaborative<br />

consumption 105 » définissent ce phénomène comme étant « A social and<br />

economic system driven by network technologies that enable the sharing<br />

and exchange of all kinds of assets from spaces to skills to cars in ways<br />

and on a scale never possible before » 106 .<br />

102 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise ?, 2009, p. 58<br />

103 id. p. 61<br />

104 Gilles Lipovetsky, Le bonheur paradoxal. Essai sur la société d'hyper<strong>consommation</strong>, Paris, Gallimard,<br />

2006, p.58<br />

105 Rachel Botsman et Roo Rogers, What’s mine is yours, the rise of collaborative consumption, New York,<br />

HarperCollins, 2010, 304 pages<br />

106 « Un <strong>modèle</strong> économique et social au cœur duquel les nouvelles technologies permettent le partage et<br />

l’éçhange <strong>de</strong> tout type <strong>de</strong> biens, allant d’un pièce à un savoir-faire, en passant par une voiture, et ce à une<br />

échelle et à <strong>de</strong>s niveaux jusque-là inatteignables ».<br />

58<br />

Fig. 26 - Livre « What’s<br />

mine is yours » - Rachel<br />

Botsman et Roo Rogers -<br />

2010


Ce <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> économique, où l’usage prédomine sur la propriété, n’est pas une<br />

remise en cause <strong>de</strong> la <strong>consommation</strong> en tant que telle mais <strong>de</strong> la manière dont les gens<br />

consomment. En effet, il s’agit dès lors <strong>de</strong> consommer différemment à travers une<br />

« économie du partage » où le lien social joue un rôle à part entière.<br />

Les sites <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> collaborative se multiplient en France. On peut citer par<br />

exemple le site E-loue.com, qui s’est rendu célèbre en proposant une chèvre à louer 10 euros<br />

par jour pour tondre écologiquement sa pelouse. D’autres sites proposent un service <strong>de</strong><br />

location <strong>de</strong> voitures entre particuliers, comme Voiturelib.com ou cityzencar.com, un service<br />

<strong>de</strong> location <strong>de</strong> sac à main, comme sacdunjour.com ou sac<strong>de</strong>luxe.fr, ou encore un service<br />

d’échange <strong>de</strong> maisons, comme trocmaison.com ou homeforexchange.com.<br />

Tous les consommateurs a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> ce <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> économique, partagent l’idée<br />

selon laquelle « Un jour, nous regar<strong>de</strong>rons le XX e siècle et nous nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rons pourquoi<br />

nous possédions autant <strong>de</strong> choses » 107 . Nous allons désormais voir que ces « néo-<br />

consommateurs » s’intéressent également <strong>de</strong> près à un autre phénomène : la co-production.<br />

II.2.2. La « co-production »<br />

Le second phénomène caractéristique <strong>de</strong> cette « quête <strong>de</strong> sens » <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />

consommateurs est la « co-production », qui désigne la contribution <strong>de</strong>s consommateurs à la<br />

production d’un bien ou d’un service qu’ils consomment. Le consommateur est ainsi<br />

directement impliqué dans « les différentes étapes <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> valeur » 108 du bien ou du<br />

service, lui permettant <strong>de</strong> mieux connaître les produits qu’ils consomment. Ce phénomène<br />

constitue un véritable « retour aux fondamentaux » dans le sens où le consommateur souhaite<br />

<strong>de</strong> plus en plus maîtriser sa <strong>consommation</strong>, en connaissant les différentes étapes précédant le<br />

produit fini. L’objectif est alors <strong>de</strong> connaître ce que l’on consomme (origine et qualité <strong>de</strong>s<br />

produits, étapes <strong>de</strong> fabrication, etc.), afin d’adapter sa <strong>consommation</strong> au plus proche <strong>de</strong> ses<br />

besoins. La co-production permet donc « au consommateur d’être l’artisan <strong>de</strong> sa propre<br />

expérience » 109 .<br />

107 Bryan Walsh, « Today’s Smart Choice : Don’t Own. Share », 17 mars 2011, Time Magazine<br />

108 CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise ?, 2009, p. 9<br />

109 Antoine Carton, « L’expérience <strong>de</strong> coproduction par la consommateur : le cas <strong>de</strong>s meubles en kit », 2008,<br />

13 e Journée <strong>de</strong> Recherche en Marketing <strong>de</strong> Bourgogne.<br />

59


Ce phénomène <strong>de</strong> « co-production » s’illustre parfaitement dans la tendance du « Do it<br />

yourself », qui s’est considérablement développée en France, à partir <strong>de</strong> 2007. En effet, le<br />

« fait-maison » semble avoir retrouvé ses lettres <strong>de</strong> noblesse, comme en témoigne<br />

l’explosion <strong>de</strong>s ventes <strong>de</strong> machines à pain, qui a plus que triplé entre 2005 et 2008, passant<br />

<strong>de</strong> 256 000 unités vendues à 929 000 110 . Le succès pour le « Do It Yourself » dans le secteur<br />

alimentaire, s’explique par « cette peur <strong>de</strong> la perte <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s aliments, <strong>de</strong>s pratiques et<br />

<strong>de</strong>s savoir-faire, [qui] marque l’importance du sens <strong>de</strong> ce que l’on mange, <strong>de</strong>s saveurs<br />

reconnaissables ou réattribuables, et <strong>de</strong> ses effets à court et long terme » 111 . On constate en<br />

effet un besoin <strong>de</strong> simplicité, un « retour aux fondamentaux » face à la montée <strong>de</strong>s « aliments<br />

dénaturés », tels que les OGM, par exemple.<br />

La crise économique <strong>de</strong> 2008 a donc eu une conséquence très importante sur la perception<br />

<strong>de</strong>s consommateurs <strong>de</strong> l’acte d’achat. En effet, il semblerait que ceux-ci aient pris conscience<br />

que l’acte d’achat pouvait avoir une autre fonction que la simple <strong>consommation</strong> : c’est ce<br />

que l’on a appelé la « <strong>consommation</strong> engagée ». À travers cette nouvelle façon <strong>de</strong> percevoir<br />

la <strong>consommation</strong>, les consommateurs se lancent dans une quête <strong>de</strong> sens, qui s’illustrera<br />

notamment par le biais <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux phénomènes : la <strong>consommation</strong> d’usage et la co-production.<br />

110<br />

Selon les statistiques publiées sur www.gifam.fr, site du Groupement Interprofessionnel <strong>de</strong>s Fabricants<br />

d’Appareils d’Equipement Ménager.<br />

111<br />

Interview <strong>de</strong> Danielle Rapoport, « Une complexe quête <strong>de</strong> la simplicité », mars 2009, Le Bulletin <strong>de</strong> l’Ilec,<br />

n°398.<br />

60


Conclusion <strong>de</strong> la Section 1 <<br />

Cette première section nous a permis <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce l’impact <strong>de</strong> la crise<br />

économique sur les comportements <strong>de</strong>s consommateurs. Nous avons ainsi pu déceler <strong>de</strong>ux<br />

types <strong>de</strong> conséquences : un conséquence conjoncturelle <strong>de</strong> rationalisation <strong>de</strong> l’acte d’achat,<br />

et une conséquence davantage structurelle caractérisée par une quête <strong>de</strong> sens <strong>de</strong>s<br />

consommateurs.<br />

Le premier comportement qui émerge avec la crise correspond à une « <strong>consommation</strong><br />

rationnelle » qui s’exprime à travers notamment une recherche <strong>de</strong> « prix bas ». On constate<br />

alors que la fréquentation <strong>de</strong>s magasins <strong>de</strong> hard discounts est en hausse, que les<br />

consommateurs effectuent une comparaison <strong>de</strong> plus en plus poussée <strong>de</strong>s prix entre les<br />

différentes enseignes et que l’achat <strong>de</strong> biens durables se trouve <strong>de</strong> plus en plus repoussée.<br />

Cette rationalité retrouvée se caractérise également par un comportement d’ « achat malin »<br />

que l’on retrouve à travers le « co-achat », ainsi que par le biais d’un phénomène<br />

d’optimisation <strong>de</strong>s achats en fonction <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s (sol<strong>de</strong>s, promotions, etc.).<br />

Nous avons également montré que la crise a modifié, <strong>de</strong> façon plus globale, la relation<br />

qu’entretenaient les consommateurs avec la <strong>consommation</strong>. On voit, en effet, émerger un<br />

consommateur recherchant <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> sens à travers l’acte d’achat. Cette<br />

« <strong>consommation</strong> engagée », loin d’être un phénomène <strong>nouveau</strong>, a pris une nouvelle tournure<br />

avec la crise à travers l’émergence d’une « <strong>consommation</strong> d’usage » et <strong>de</strong> la « co-<br />

production ».<br />

Cette prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong>s consommateurs va non seulement modifier leurs<br />

comportements, comme nous venons <strong>de</strong> le voir dans cette première section, mais elle va<br />

également attiser <strong>de</strong> nouvelles attentes à l’égard <strong>de</strong>s entreprises. En effet, on observera dans<br />

la secon<strong>de</strong> section <strong>de</strong> ce chapitre, que la crise va renforcer la désacralisation <strong>de</strong>s institutions<br />

politiques en les présentant notamment comme impuissantes face à un capitalisme financier<br />

omnipotent, ce qui ne va qu’accentuer les attentes et espoirs <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard<br />

<strong>de</strong>s entreprises.<br />

61


Section 2 : Un transfert <strong>de</strong> responsabilités <strong>de</strong>s institutions politiques<br />

vers les entreprises<br />

I. Désacralisation <strong>de</strong>s institutions politiques<br />

La politique occupe une place centrale au sein <strong>de</strong> la société française, comme le rappelle<br />

Jean-Paul Dubois, en 2004, à l’occasion <strong>de</strong> la sortie <strong>de</strong> son livre « Une vie française 112 » :<br />

« En France, la politique occupe une place très importante, elle sépare et déchire les familles.<br />

Toutes les familles ont <strong>de</strong>s histoires reliées à l’occupation, à la guerre d’Algérie, à Mai 68.<br />

Ce sont <strong>de</strong>s séquences, <strong>de</strong>s respirations politiques. Les Prési<strong>de</strong>nts pour les Français, cela<br />

donne <strong>de</strong>s repères immédiats, ce sont <strong>de</strong>s souvenirs, <strong>de</strong>s couleurs ».<br />

On peut faire remonter cette prédominance du politique dans les sociétés contemporaines<br />

au len<strong>de</strong>main <strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> Guerre Mondiale où l’EÉtat jouera un rôle central dans la<br />

reconstruction et le retour <strong>de</strong> la croissance <strong>de</strong>s « 30 Glorieuses », ainsi que dans le<br />

développement <strong>de</strong> l’État provi<strong>de</strong>nce. Il <strong>de</strong>vient alors un pivot majeur <strong>de</strong> la société française<br />

et sera perçu comme tel par les citoyens.<br />

Cependant, il semblerait que <strong>de</strong>puis quelques années, la légitimité <strong>de</strong>s institutions et <strong>de</strong>s<br />

hommes politiques soient remises en cause. Nous verrons que cette défiance s’est accélérée<br />

avec la crise économique, révélant une « crise <strong>de</strong> l’impuissance politique ».<br />

I.1. Les institutions politiques face à une désaffection structurelle<br />

À partir <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong>s années 70, il semblerait que l’État per<strong>de</strong> peu à peu son rôle central<br />

au sein <strong>de</strong> la société française. Entachées par la révélation <strong>de</strong> nombreux « scandales<br />

politiques », les institutions doivent également faire face à une remise en cause <strong>de</strong> leur<br />

légitimité.<br />

112 Jean-paul Dubois, Une vie française, Paris, L’Olivier, 2004, 334 pages.<br />

62


I.1.1. Scandales et mensonges politiques<br />

La V e République va connaître <strong>de</strong> nombreux scandales et affaires politiques dans lesquels<br />

d’importants <strong>responsable</strong>s politiques seront cités voire mis en examen. Parmi ces scandales,<br />

on peut citer l’affaire du « Carrefour du développement », qui portait sur un détournement<br />

d’argent mettant en cause le ministre <strong>de</strong> la Coopération <strong>de</strong> l’époque, ou encore l’ « affaire<br />

du sang contaminé », où les noms <strong>de</strong> plusieurs ministres socialistes furent cités. D’autres<br />

scandales, plus mineurs, viendront entacher la réputation <strong>de</strong> nombreux hommes politiques,<br />

comme en 1971 où le Canard Enchaîné révèle que le premier ministre <strong>de</strong> l’époque n’a pas<br />

payé d’impôts entre 1966 et 1969, bénéficiant d’un « avoir fiscal ».<br />

À ces scandales s’ajoute la révélation <strong>de</strong> nombreux<br />

mensonges politiques comme par exemple, la découverte <strong>de</strong>s<br />

faux bulletins <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> François Mitterrand. Les médias<br />

vont jouer un rôle important dans la révélation <strong>de</strong> ces<br />

mensonges à l’opinion publique. On pense bien évi<strong>de</strong>mment<br />

aux Guignols <strong>de</strong> l’info qui ont consacré une marionnette à<br />

Jacques Chirac , prénommée SM « Super Menteur » , qui<br />

<strong>de</strong>vient très vite un super héros ayant recours au mensonge pour<br />

secourir <strong>de</strong>s personnes dans le besoin.<br />

I.1.2. Crise <strong>de</strong> légitimité : quand « les mots n’engagent plus […] et échouent à transformer<br />

le réel » 113<br />

Parallèlement à ces différentes « affaires », les institutions politiques entrent dans une<br />

crise <strong>de</strong> légitimité où la parole <strong>de</strong>s hommes politiques est <strong>de</strong> plus en plus remise en cause.<br />

On les accuse notamment <strong>de</strong> manier avec brio la rhétorique et l’art oratoire, sans pour autant<br />

que ces promesses se transforment en actes.<br />

113 Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p. 57<br />

63<br />

Fig. 27 - Marionnette <strong>de</strong>s<br />

Guignols - Jacques Chirac -<br />

« Super Menteur »


À titre d’exemple, on peut citer le « baromètre <strong>de</strong>s réformes <strong>de</strong> Nicolas Sarkozy », publié<br />

en 2007 par l’institut indépendant Thomas More, think tank basé à Paris et Bruxelles.<br />

L’institut s’est attaché à répertorier pas moins <strong>de</strong> 1 322 mesures, annoncées lors <strong>de</strong> la<br />

campagne prési<strong>de</strong>ntielle ou au cours du mandat <strong>de</strong> Nicolas Sarkozy. Ces promesses ont été<br />

étudiées et notées en fonction <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> réalisation. Une note <strong>de</strong> 9,5/20 a ainsi été<br />

attribuée au quinquennat <strong>de</strong> Nicolas Sarkozy où 44,4% <strong>de</strong>s mesures annoncées ont été<br />

inachevées ou abandonnées.<br />

Ce type d’initiatives témoigne d’une défiance grandissante <strong>de</strong>s citoyens à l’égard <strong>de</strong><br />

l’action politique et <strong>de</strong>s capacités performatives <strong>de</strong>s discours politiques. Roland Cayrol a<br />

d’ailleurs écrit un livre à ce sujet, intitulé « Tenez enfin vos promesses » 114 , dans lequel l’ex-<br />

directeur <strong>de</strong> l’institut <strong>de</strong> sondage CSA, évoque les raisons qui ont entrainé la désaffection<br />

actuelle <strong>de</strong>s citoyens à l’égard du mon<strong>de</strong> politique : « À force <strong>de</strong> donner le sentiment que<br />

non seulement les promesses électorales ne sont jamais tenues mais qu’elles sont carrément<br />

faites pour ne pas l’être, les politiques vont finir par subir l’opprobre ou l’indifférence du<br />

peuple français ».<br />

I.2. « Une crise <strong>de</strong> l’impuissance politique », renforcée par la crise économique <strong>de</strong> 2008<br />

Si les mécontentements à l’égard <strong>de</strong>s institutions politiques sont loin d’être un phénomène<br />

récent, il n’en <strong>de</strong>meure pas moins que la crise économique actuelle a renforcé ce sentiment<br />

d’ « impuissance politique », en révélant à la fois l’incapacité <strong>de</strong>s classes politiques à<br />

maîtriser un pan entier <strong>de</strong> l’économie (la finance), mais aussi en montrant les limites <strong>de</strong><br />

l’action politique dans la sortie <strong>de</strong> crise.<br />

114 Roland Cayrol, Tenez enfin vos promesses, Essai sur les pathologies politiques françaises, Paris, Éditions<br />

Fayard, 2012, 215 pages.<br />

64


I.2.1. Un capitalisme financier omnipotent<br />

La crise <strong>de</strong>s subprimes <strong>de</strong> 2008 a agit comme un électrochoc au sein <strong>de</strong> la société civile<br />

internationale en révélant l’absence totale <strong>de</strong> contrôle politique sur un pan entier <strong>de</strong><br />

l’économie, à savoir la finance. Lorsque la crise financière a éclaté, les politiques ont été<br />

accusés <strong>de</strong> ne pas avoir détecté les prémisses d’une crise mondiale voire même ont été<br />

rendus <strong>responsable</strong>s <strong>de</strong>s dérives <strong>de</strong> la Finance. On les accuse dès lors d’avoir complètement<br />

abandonné ce secteur, et ce dès la fin <strong>de</strong>s années 70 avec la déréglementation <strong>de</strong>s marchés<br />

financiers. En effet, face à une réglementation jugée trop complexe, les autorités politiques<br />

ont décidé <strong>de</strong> libéraliser les marchés afin <strong>de</strong> faciliter notamment la circulation internationale<br />

<strong>de</strong>s capitaux.<br />

En France, cette déréglementation a véritablement commencé en 1984, date à laquelle le<br />

marché bancaire est libéralisé, puis en 1986, avec la « loi Bérégovoy » <strong>de</strong> déréglementation<br />

<strong>de</strong>s marchés financiers, ainsi que la signature <strong>de</strong> l’ « acte unique européen » 115 , au sein<br />

duquel est posé le principe <strong>de</strong> « libre circulation <strong>de</strong>s capitaux ».<br />

L’attribution <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> la crise financière aux politiques s’est vérifiée lors<br />

d’un sondage réalisé en janvier 2011 par Opinionway 116 . On constate alors que 44% <strong>de</strong>s<br />

sondés considèrent que le gouvernement fait partie <strong>de</strong>s acteurs qui portent la plus lour<strong>de</strong><br />

responsabilité dans le déclenchement <strong>de</strong> la crise financière.<br />

115 L’Acte Unique Européen est un ensemble d’amen<strong>de</strong>ments qui modifie le traité <strong>de</strong> Rome <strong>de</strong> 1957. Entré en<br />

vigueur en 1987, consacre une nouvelle liberté, la « liberté <strong>de</strong> circulation <strong>de</strong>s capitaux », qui sera effective le 1 er<br />

juillet 1990.<br />

116 Opinionway pour Le Journal du Dimanche et Maximal Productions, Le regard <strong>de</strong>s Français face à la crise,<br />

Octobre 2011<br />

65


Pour illustrer cette critique, adressée aux politiques, voici un <strong>de</strong>ssin humoristique <strong>de</strong> R.J.<br />

Matson, publié dans le St. Louis Post-Dispatch 117 :<br />

Fig, 28 - Dessin humoristique « Off my back for the future » - R.J. Matson - 2008<br />

Ce <strong>de</strong>ssin témoigne <strong>de</strong> la pression exercée par les marchés financiers sur les institutions<br />

politiques pour s’autoréguler, afin <strong>de</strong> laisser libre cours aux lois du marché. On comprend<br />

également qu’une fois la crise déclenchée, ces mêmes acteurs financiers ont été obligés <strong>de</strong><br />

faire appel aux politiques pour éviter la faillite. Cette dénonciation fait échos avec la secon<strong>de</strong><br />

critique adressée aux politiques, que nous allons voir dans une secon<strong>de</strong> sous-partie :<br />

l’impuissance <strong>de</strong> leurs mesures <strong>de</strong> sortie <strong>de</strong> crise.<br />

117 RJ Matson, Off my back for the future, 9 septembre 2008, The St Louis Post Dispatch<br />

66


I.2.2. Impuissance <strong>de</strong>s politiques dans la sortie <strong>de</strong> crise<br />

Comme le rappelle Olivier Ferrand, fondateur <strong>de</strong> Terra Nova, think tank proche du partie<br />

socialiste : « La crise du politique est en gran<strong>de</strong> partie une crise d’inefficacité et d’absence <strong>de</strong><br />

résultats. Les citoyens estimant que les politiques sont incapables <strong>de</strong> sortir le pays <strong>de</strong> la crise<br />

se retournent alors contre leurs dirigeants » 118 .<br />

Cette remise en cause <strong>de</strong> l’efficacité politique dans les solutions <strong>de</strong> sortie <strong>de</strong> crise s’est<br />

notamment illustrée suite à la tenue du G20 en 2009 où les principaux dirigeants<br />

économiques se sont regroupés afin <strong>de</strong> mettre en place une nouvelle régulation financière. En<br />

effet, à cette occasion, la société civile et les élites françaises se sont élevées contre un<br />

« G vain » 119 qui n’aurait pas véritablement tirer les conséquences <strong>de</strong> la crise, comme<br />

l’explique André Orléan, Directeur <strong>de</strong> recherches au CNRS 120 :<br />

« Toutes les institutions auraient fauté sauf une, étrangement, le marché lui-même, qui se<br />

trouve exonéré <strong>de</strong> toute responsabilité. […] En conséquence, selon le G20, tout doit être<br />

transformé à l'exception <strong>de</strong> la concurrence financière, dont ‘l'intégrité’ doit être préservée.<br />

Elle <strong>de</strong>meure, dans le projet du G20, comme le mécanisme central qui organise l'allocation<br />

du capital à l'échelle planétaire. On n'ose pas, ou on ne veut pas, remettre en cause l'idée que<br />

le marché disposerait <strong>de</strong> capacités régulatrices intrinsèques ».<br />

À cela, s’ajoute la crise <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte publique en 2010, qui ne fait qu’accentuer le sentiment<br />

d’impuissance politique. En effet, la crise <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ttes souveraines a révélé que les Etats<br />

européens subissaient une importante pression <strong>de</strong>s marchés et <strong>de</strong>s agences <strong>de</strong> notation<br />

financière.<br />

118<br />

Philippe Plassart, « Puissance et impuissance », 9 février 2012, LeNouvelEconoomiste.fr<br />

Disponible sur http://www.lenouveleconomiste.fr/pouvoir-et-impuissance-13684/<br />

119<br />

Expression employée par Jacques Attali, à l’occasion <strong>de</strong> l’Université Populaire Participative, organisée au<br />

Théâtre Déjazet le 6 juillet 2009.<br />

120<br />

Philippe Frémeaux, entretien avec André Orléan, « Crise financière : l’erreur du G20 », septembre 2009,<br />

Alternatives Economiques, n°283.<br />

67


C’est ce que nous explique Dominique Plihon, Professeur d’économie financière à<br />

l’université Paris-XIII :<br />

« Les agences <strong>de</strong> notation ont contribué à amplifier les tensions sur les marchés en modifiant<br />

à plusieurs reprises les notes <strong>de</strong>s pays en<strong>de</strong>ttés, qu’il s’agisse <strong>de</strong> la Grèce, <strong>de</strong> l’Irlan<strong>de</strong>, <strong>de</strong><br />

l’Italie, <strong>de</strong> l’Espagne et peut-être <strong>de</strong>main <strong>de</strong> la France. Ces agences fonctionnent comme <strong>de</strong>s<br />

boîtes noires, on ne connaît pas leurs mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> notation, or elles n’ont aucune<br />

responsabilisation, ni légitimité pour faire ce travail. Elles se sont imposées en tant<br />

qu’agences <strong>de</strong> notation alors que les États, les marchés et tous les acteurs concernés n’ont<br />

jamais validé leur mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> notation. Leur caractère très discrétionnaire est inacceptable et<br />

dangereux. Une réforme radicale <strong>de</strong>s agences <strong>de</strong> notation est nécessaire » 121 .<br />

La crise économique <strong>de</strong> 2008 a donc renforcé la défiance <strong>de</strong>s citoyens à l’égard <strong>de</strong>s<br />

institutions politiques en les présentant comme impuissantes face à un capitalisme financier<br />

surpuissant. En effet, alors même que la confiance <strong>de</strong>s citoyens avait d’ores et déjà était<br />

entachée par l’absence <strong>de</strong> performativité <strong>de</strong>s discours politiques ainsi que par la révélation <strong>de</strong><br />

nombreux scandales, la crise a fortement accéléré ce processus.<br />

Nous allons désormais nous intéresser à la conséquence <strong>de</strong> cette défiance à l’égard <strong>de</strong>s<br />

institutions politiques : le transfert <strong>de</strong> responsabilités <strong>de</strong>s politiques vers les entreprises.<br />

121 Entretien réalisé par Anna Musso, « Faut-il interdire les agences <strong>de</strong> notation », 30 septembre 2011,<br />

L’humanité.<br />

68


II. De <strong>nouveau</strong>x espoirs et responsabilités attribués aux entreprises<br />

Face à cette remise en cause <strong>de</strong> l’action politique, renforcée par la crise économique <strong>de</strong><br />

2008, il semblerait que les espoirs et attentes <strong>de</strong>s citoyens se tournent désormais davantage<br />

vers les entreprises. On assiste ainsi à un transfert <strong>de</strong> responsabilités du politique vers les<br />

entreprises, et ce au niveau social et environnemental.<br />

Ces attentes renforcées à l’égard <strong>de</strong>s entreprises se trouvent confrontées à un autre<br />

phénomène : un certain désengagement <strong>de</strong> l’État dans la sphère sociale et un retard en<br />

matière environnementale, ce qui vient accentuer le transfert <strong>de</strong> responsabilités vers les<br />

entreprises. Ces nouvelles attentes s’expriment notamment par le biais <strong>de</strong> la RSE<br />

(Responsabilité Sociale et Environnementale <strong>de</strong>s entreprises), <strong>nouveau</strong> concept <strong>de</strong><br />

gouvernance.<br />

II.1. Quand l’État se désengage sur les problématiques sociales et accuse un grave retard<br />

dans la préservation <strong>de</strong> l’environnement…<br />

Comme nous venons <strong>de</strong> le montrer, les institutions politiques doivent faire face à une<br />

importante remise en cause <strong>de</strong> leur légitimité à maîtriser la sphère économique, accusées<br />

d’être à la fois inefficaces et dominées par la finance mondiale. Cependant, ces institutions<br />

politiques vont <strong>de</strong>voir subir d’autres critiques sur <strong>de</strong>ux autres domaines : la sphère sociale et<br />

environnementale.<br />

II.1.1. Désengagement <strong>de</strong> l’État dans la sphère sociale : une crise <strong>de</strong> l’État Provi<strong>de</strong>nce ?<br />

Selon François-Xavier Merrien, l’ « État Provi<strong>de</strong>nce » désigne la monopolisation par<br />

l’État <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> solidarité sociale » 122 . L’État serait donc la seule autorité à assurer le<br />

lien social qui relie les citoyens. Or, <strong>de</strong>puis quelques années on constate que l’État se<br />

désengage <strong>de</strong> plus en plus en matière sociale, à tel point que certain auteur, comme Pierre<br />

Rosanvallon, parle <strong>de</strong> « crise <strong>de</strong> l’État Provi<strong>de</strong>nce » 123 , pour désigner les difficultés<br />

rencontrées par les institutions politiques au niveau <strong>de</strong> la finance <strong>de</strong> la protection sociale,<br />

ainsi qu’au niveau <strong>de</strong> l’efficacité et <strong>de</strong> la légitimité du système.<br />

122 François-Xavier Merrien, L’État-provi<strong>de</strong>nce, Presses Universitaires <strong>de</strong> Frances, Que sais-je ?, 2007, p. 11<br />

123 Pierre Rosanvallon, La crise <strong>de</strong> l’Etat-provi<strong>de</strong>nce, Paris, Le Seuil, 1981, 194 pages.<br />

69


D’un point <strong>de</strong> vue financier, comme le montre le rapport annuel <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong>s Comptes<br />

sur l’application <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité sociale 124 , on assiste en 2010 à un<br />

record du déficit <strong>de</strong> la sécurité sociale d’une valeur <strong>de</strong> 30 milliards d’euros. Ces difficultés à<br />

maîtriser le financement <strong>de</strong> la protection sociale ne fait qu’accroître les critiques adressées<br />

aux institutions politiques. Le système est également fortement critiqué quant à son efficacité<br />

(en termes <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong>s inégalités et <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> régulation rencontrée) et à sa<br />

légitimité (autour <strong>de</strong>s thématiques <strong>de</strong> déresponsabilisation individuelle et d’assistance<br />

notamment).<br />

Ces critiques « théoriques » autour d’un <strong>modèle</strong> qui serait à bout <strong>de</strong> souffle, se renforcent<br />

par les décisions prises par l’État, qui ne font que confirmer son désengagement en matière<br />

<strong>de</strong> politique sociale. En témoigne, par exemple, les récentes décisions prises en matière<br />

d’éducation où 16 000 suppressions d’emplois ont été effectuées en 2011 (<strong>de</strong> façon plus<br />

globale, on constate une réduction <strong>de</strong> 52 000 postes <strong>de</strong>puis 2007 125 ). On peut également<br />

effectuer ce constat en matière <strong>de</strong> logement, puisque l’on observe, comme le rappelle<br />

Bertrand Delanoë, que : « les crédits délégués par l’État aux collectivités locales pour<br />

financer le logement social ont baissé <strong>de</strong> 40%, passant <strong>de</strong> 630 millions d’euros en 2010 à 450<br />

millions d’euros en 2012 » 126 . La politique <strong>de</strong> l’emploi souffre du même désengagement,<br />

comme en témoigne la baisse du budget alloué à la mission « Travail et Emploi », qui passe<br />

<strong>de</strong> 12,64 milliards d’euros en 2007 127 à 9,3 milliards d’euros en 2012 128 . Cette réduction<br />

budgétaire aura <strong>de</strong>s inci<strong>de</strong>nces notamment sur le financement <strong>de</strong> Pôle Emploi, organisme<br />

chargé <strong>de</strong> l’emploi en France, sur le volume <strong>de</strong>s contrats aidés, contrats pour lesquels<br />

l’employeur bénéficie d’ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’Etat, ainsi que sur l’accès à la formation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs<br />

d’emploi.<br />

124<br />

Cour <strong>de</strong>s Comptes, Rapport annuel sur l'application <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité sociale, 8<br />

septembre 2011.<br />

125<br />

Béatrice Jérôme, « En cinq ans, 150 000 postes <strong>de</strong> fonctionnaires en moins », 28 septembre 2011, Le Mon<strong>de</strong>.<br />

126<br />

Bertrand Delanoë, « Crédits <strong>de</strong> l’État pour le logement social à Paris : un baisse inacceptable », 6 mars 2012,<br />

Paris.fr.<br />

127<br />

Sénat, Rapport général nº91 sur le projet <strong>de</strong> loi <strong>de</strong> finance pour 2008, 22 novembre 2007.<br />

128<br />

http://www.emploi.gouv.fr/ressources-budget<br />

70


II.1.2. Des politiques environnementales qui peinent à s’imposer<br />

Condamnée à <strong>de</strong> nombreuses reprises par la Cour <strong>de</strong> justice européenne pour non respect<br />

<strong>de</strong>s directives européennes portant sur la protection <strong>de</strong> l’environnement 129 , la France s’est<br />

véritablement engagée dans une démarche environnementale à partir <strong>de</strong> 2007, avec le<br />

Grenelle <strong>de</strong> l’Environnement. Initié au cours <strong>de</strong> la campagne prési<strong>de</strong>ntielle <strong>de</strong> 2007 lorsque<br />

Nicolas Hulot a <strong>de</strong>mandé à tous les candidats <strong>de</strong> signer le « pacte écologique », cet<br />

engagement s’est traduit par la mise en place <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux lois : la loi « Grenelle I » et « Grenelle<br />

II », promulguées respectivement en 2009 et 2010. L’objectif <strong>de</strong> ce Grenelle était d’initier<br />

une véritable « gouvernance verte ».<br />

Si le Grenelle <strong>de</strong> l’Environnement a été relativement bien perçu par les citoyens, comme<br />

en témoigne l’enquête IFOP réalisée en 2008 où l’on constate que <strong>de</strong>ux Français sur trois ont<br />

considéré qu’il s’agissait d’un événement important, il n’en <strong>de</strong>meure pas moins que seul « un<br />

Français sur cinq jugent « plutôt efficaces » les décisions prises pour la protection <strong>de</strong> la<br />

biodiversité et <strong>de</strong>s ressources naturelles » 130 . En effet, trois ans après la loi « Grenelle I », le<br />

bilan effectué par les Français et l’ensemble <strong>de</strong> la société civile est plutôt négatif. José Bové,<br />

eurodéputé d’Europe Ecologie confirme d’ailleurs ce constat en expliquant que la France est<br />

« bien loin <strong>de</strong>rrière d'autres pays européens en matière <strong>de</strong> progrès environnementaux, en<br />

particulier pour l'agriculture biologique » 131 .<br />

Les dizaines d’associations écologiques regroupées sous le réseau « Action Climat » vont<br />

également dans ce sens, en dénonçant « l’absence criante <strong>de</strong> mesures <strong>de</strong> rupture,<br />

structurantes et réellement efficaces » 132 . Le réseau critique notamment l’abandon <strong>de</strong><br />

mesures « phares » du Grenelle, telles que la Taxe Carbone, taxe environnementale sur<br />

l’émission <strong>de</strong> gaz à effet <strong>de</strong> serre, ou la TVA réduite sur les produits verts.<br />

129<br />

Par exemple, la France a été condamnée en 2005 pour « pour violation <strong>de</strong> la législation communautaire<br />

concernant la protection <strong>de</strong>s stocks <strong>de</strong> poissons risquant <strong>de</strong> disparaître », accusée d’avoir failli « <strong>de</strong> façon grave<br />

et persistante à ses obligations communautaires en matière <strong>de</strong> pêche », selon la Cour <strong>de</strong> justice,<br />

Commission/France, affaire C-304/02 (12 juillet 2005).<br />

130<br />

IFOP pour Terre Sauvage, Les français et le Grenelle <strong>de</strong> l'environnement, 2008.<br />

131<br />

« Les défenseurs du Grenelle <strong>de</strong> l'environnement se sentent trahis par Sarkozy », 7 mars 2010, Liberation.fr<br />

avec AFP.<br />

Disponible sur http://www.liberation.fr/terre/0101623134-les-<strong>de</strong>fenseurs-du-grenelle-<strong>de</strong>-l-environnement-sesentent-trahis-par-sarkozy<br />

132<br />

« Le ‘new <strong>de</strong>al’ écologique promis n'a pas eu lieu, dénoncent <strong>de</strong>s associations », 22 octobre 2010,<br />

LeMon<strong>de</strong>.fr avec AFP<br />

71


De plus, <strong>de</strong> nombreuses critiques sont adressées aux institutions politiques vis-à-vis du<br />

non respect <strong>de</strong>s objectifs fixés quant à la production d’énergies renouvelables. En effet,<br />

comme le rappelle Jean-Louis Bal, Prési<strong>de</strong>nt du Syndicat <strong>de</strong>s énergies renouvelables (SER),<br />

« plus <strong>d'un</strong> tiers <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> développement <strong>de</strong>s énergies renouvelables en France ne<br />

seront pas atteints d'ici 2020 » 133 . Le budget <strong>de</strong> l’Etat <strong>de</strong>stiné à la mise en place <strong>de</strong>s mesures<br />

prises lors du Grenelle <strong>de</strong> l’Environnement pour la pério<strong>de</strong> 2009-2011, a d’ailleurs était<br />

largement inférieur a ce qui avait était initialement prévu, puisque seul 3,5 milliards d’euros<br />

ont été alloué (contre 4,5 Md€ initialement prévus) 134 . Les dépenses fiscales favorables à<br />

l’environnement sont également montrées du doigt puisqu’elles n’ont cessé <strong>de</strong> diminuer<br />

<strong>de</strong>puis 2009. Didier Migaud, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong>s Comptes, considère même que « la<br />

maitrise <strong>de</strong> l'outil fiscal a été largement insuffisante, source d'inefficacité, d'incohérence et <strong>de</strong><br />

coût pour les finances publiques » 135 . Ce constat est partagé par Gaël Virlouvet,<br />

« Responsable Economie » <strong>de</strong> France Nature Environnement, puisqu’il déclare, à l’occasion<br />

<strong>de</strong> la publication du bilan <strong>de</strong> la Cour <strong>de</strong>s Comptes, que ce document « pointe un important<br />

retard <strong>de</strong> la France en matière <strong>de</strong> fiscalité verte. Le Grenelle avait opéré un premier<br />

verdissement <strong>de</strong> la fiscalité. Mais la dynamique s’est retournée, faute <strong>de</strong> volonté politique ».<br />

Toutes ces critiques adressées à la politique environnementale <strong>de</strong>s instances politiques<br />

témoignent <strong>de</strong>s limites <strong>de</strong> l’efficacité <strong>de</strong> l’Etat en matière environnementale. Forts <strong>de</strong> ce<br />

constat, les citoyens vont peu à peu reporter leurs espoirs sur les entreprises, comme nous<br />

allons le voir dans ce II.2.<br />

133<br />

Lors <strong>de</strong> la Conférence <strong>de</strong> presse du SER, du 26 avril 2011.<br />

134<br />

Selon le Référé sur l’impact budgétaire et fiscal du Grenelle <strong>de</strong> l’environnement, publié par la Cour <strong>de</strong>s<br />

Comptes, novembre 2011.<br />

135<br />

Lors <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s Finances <strong>de</strong> l’Assemblée Nationale du 18 janvier 2012, à l’occasion <strong>de</strong> la<br />

présentation du bilan budgétaire et fiscal intermédiaire du Grenelle <strong>de</strong> l'environnement.<br />

72


II.2. …les attentes <strong>de</strong>s consommateurs se renforcent à l’égard <strong>de</strong>s entreprises<br />

Les nouvelles responsabilités transférées aux entreprises vont se cristalliser autour d’un<br />

<strong>nouveau</strong> concept : la RSE (Responsabilité Sociale et Environnementale <strong>de</strong>s entreprises).<br />

Nous allons voir dans cette partie, que s’il est incontestable qu’une démarche RSE se met en<br />

place au sein <strong>de</strong>s entreprises françaises, il n’en <strong>de</strong>meure pas moins qu’elles sont encore loin<br />

<strong>de</strong> satisfaire les exigences, <strong>de</strong> plus en plus fortes, <strong>de</strong>s consommateurs en matière sociale et<br />

environnementale.<br />

II.2.1. Une mise en place limitée <strong>de</strong> la démarche RSE au sein <strong>de</strong>s entreprises<br />

La RSE se définie, selon la Commission européenne, comme un « concept dans lequel les<br />

entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales, et économiques dans<br />

leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes sur une base<br />

volontaire » 136 . Apparue dans sa forme mo<strong>de</strong>rne à la fin <strong>de</strong>s années 80, notamment à la suite<br />

du rapport Brandtland <strong>de</strong> 1987, la RSE se verra véritablement consacrée à la suite <strong>de</strong>s lois<br />

Grenelle I et II, en 2009 et 2010.<br />

Ces <strong>de</strong>ux lois sont venues renforcer les <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong>s entreprises en matière <strong>de</strong> RSE, en<br />

étendant la loi NRE (loi sur les Nouvelles Régulations Économiques), votée en 2001, qui<br />

obligeait les entreprises cotées à mentionner l’impact social et environnemental <strong>de</strong> leurs<br />

activités dans leur rapport annuel, à l’ensemble <strong>de</strong>s entreprises non cotées.<br />

Cette démarche RSE recouvre différentes facettes, telle que la<br />

mise en place d’une charte éthique, la réalisation d’un bilan<br />

carbone ou encore l’obtention du label Diversité. De nombreuses<br />

entreprises se sont lancées dans cette démarche, tel que le<br />

Groupe Casino, qui s’est distingué en 2012 en recevant le<br />

« Grand Prix Essec <strong>de</strong> la Distribution Responsable ».<br />

136 Commission européenne, Livret vert, 2001.<br />

73<br />

Fig. 29 - Logo « Grand Prix<br />

Essec <strong>de</strong> la Distribution<br />

Responsable »


En matière sociale, le Groupe a publié son premier Rapport <strong>de</strong> Développement Durable<br />

en 2003, et a mis en place sa propre « Charte du Développement Durable ». De plus, un<br />

comité stratégique RSE s’est mis en place, chargé <strong>de</strong> « vali<strong>de</strong>r les axes d’engagement du<br />

Groupe en tenant notamment compte <strong>de</strong>s principes du Pacte Mondial et <strong>de</strong>s questions<br />

centrales <strong>de</strong> la norme ISO 2600 » 137 . Le Groupe a également signé le « Plan Espoir<br />

Banlieue » qui s’est traduit par le recrutement <strong>de</strong> 3000 jeunes issus <strong>de</strong>s quartiers. En 2009, le<br />

Groupe obtient d’ailleurs le Label Diversité. Le Groupe Casino s’est également engagé au<br />

niveau <strong>de</strong> l’accès à l’emploi <strong>de</strong>s seniors (en recrutant 500 seniors entre 2009 et 2012) et <strong>de</strong>s<br />

jeunes (il est notamment signataire <strong>de</strong> la Charte <strong>de</strong> valorisation du service civique).<br />

Au niveau environnemental, l’entreprise s’est engagée à supprimer <strong>de</strong> tous ses produits<br />

« Casino » la présence d’huile <strong>de</strong> palme, et un « Indice Carbone » est présent sur plus <strong>de</strong> 500<br />

Fig. 30 - Exemple d’étiquette<br />

« Indice Carbone »<br />

produits, indiquant aux consommateurs l’impact<br />

environnemental <strong>de</strong> leur <strong>consommation</strong>. Le Groupe s’est<br />

également engagé dans une démarche <strong>de</strong> proximité, en créant le<br />

concept « Le meilleur d’ici », permettant <strong>de</strong> valoriser <strong>de</strong>s<br />

produits locaux achetés dans une zone <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 100 km.<br />

Enfin, Casino a investi dans l’énergie solaire en faisant<br />

installer <strong>de</strong>s panneaux solaires sur les ombrières <strong>de</strong> ses parkings<br />

et les toits <strong>de</strong> ses magasins.<br />

D’autres concours ou classements existent en matière <strong>de</strong> RSE, tels que les Trophées <strong>de</strong><br />

l’Economie Responsable, remis par le réseau Alliances, qui se donne pour objectif <strong>de</strong><br />

« d'accompagner les entreprises pour qu'elles améliorent leurs performances tout en<br />

respectant l'Homme et l'Environnement » 138 , ou encore le classement « Dow Jones<br />

Sustainability In<strong>de</strong>x », le plus ancien classement mondial en matière <strong>de</strong> RSE, qui classe,<br />

parmi les 2500 sociétés les plus importantes du Dow Jones 139 , les 10% les plus performantes<br />

au niveau économique, social et environnemental.<br />

S’il est incontestable que la RSE est, en France, dans une phase ascendante, il semblerait<br />

cependant que les entreprises françaises soient encore loin <strong>de</strong> répondre entièrement aux<br />

attentes croissantes <strong>de</strong>s Français, comme nous allons le voir dans le II.2.2.<br />

137 www.rapportannuel.casino.fr<br />

138 www.reseau-alliances.org<br />

139 Le Dow Jones désigne l’indice <strong>de</strong>s bourses <strong>de</strong> New York (New York Stock Exchange).<br />

74


II.2.2. Les Français et la RSE : <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong> plus en plus fortes envers les entreprises<br />

Désillusionnés quant à l’efficacité <strong>de</strong>s politiques publiques à l’égard <strong>de</strong>s avancées sociales<br />

et environnementales, les Français transfèrent <strong>de</strong> plus en plus leurs espoirs sur les<br />

entreprises. L’étu<strong>de</strong> E<strong>de</strong>lman Goodpurpose 2012 140 montre en effet que « 78% <strong>de</strong>s Français<br />

pensent que les entreprises ont un rôle à<br />

jouer dans la prise en charge <strong>de</strong>s questions<br />

sociétales ». Cependant l’étu<strong>de</strong> montre<br />

également que 38% <strong>de</strong>s sondés<br />

considèrent que les performances<br />

actuelles <strong>de</strong>s entreprises sont mauvaises<br />

voire très mauvaises (seuls 13% d’entre<br />

eux sont satisfaits). Ces <strong>de</strong>ux résultats témoignent parfaitement <strong>de</strong> ce phénomène <strong>de</strong> transfert<br />

<strong>de</strong> responsabilités envers les entreprises : si les Français considèrent les entreprises comme<br />

un acteur central dans les problématiques sociales et environnementales, celles-ci sont<br />

cependant encore loin <strong>de</strong> satisfaire totalement les nouvelles attentes <strong>de</strong>s citoyens.<br />

Il faut également retirer un second apprentissage <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> E<strong>de</strong>lman Goodpurpose 2012 :<br />

on y apprend en effet que seul 11 % <strong>de</strong>s Français (contre 31 % dans le mon<strong>de</strong>), « disent<br />

connaître <strong>de</strong>s marques ou entreprises qui accor<strong>de</strong>nt autant ou plus d’importance au soutien<br />

d’une bonne cause qu’à la réalisation <strong>de</strong> bénéfices » 141 . Alors que la communication sur le<br />

développement durable est en plein essor, comme on l’a vu précé<strong>de</strong>mment, il semblerait que<br />

les consommateurs français ne parviennent pas, parmi cette abondance communicationnelle,<br />

à sortir une marque du lot.<br />

Parmi les principales attentes <strong>de</strong>s consommateurs, on note une volonté <strong>de</strong> transparence et<br />

<strong>de</strong> preuves <strong>de</strong> l’engagement <strong>de</strong>s entreprises, considérées jusque-là comme insuffisantes. Par<br />

exemple, l’étu<strong>de</strong> réalisée par Ethicity en 2012 142 nous montre que « 51% <strong>de</strong>s personnes<br />

interrogées déclarent être intéressées par <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong> s’ils<br />

avaient plus <strong>de</strong> transparence sur l’engagement social et environnemental <strong>de</strong>s entreprises<br />

produisant ces produits ». De plus, « 76 % <strong>de</strong>s Français considèrent que les entreprises ne<br />

donnent pas assez d’informations sur les conditions <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong> leur produits ».<br />

140<br />

E<strong>de</strong>lman Goodpurpose 2012, Global consumer survey, 2012.<br />

141<br />

Id.<br />

142<br />

Ethicity, Les Français et la <strong>consommation</strong> Durable, avril 2012.<br />

75<br />

Fig. 31 - Logo « Good Purpose »


On assiste donc à une hausse <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong>s Français à l’égard <strong>de</strong>s entreprises en matière<br />

sociale et environnementale. Les entreprises se lancent <strong>de</strong> plus en plus dans une démarche<br />

RSE, comme en témoigne le Groupe Casino, mais il semblerait que ces efforts ne soient pas<br />

encore suffisants pour satisfaire les attentes <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, ils atten<strong>de</strong>nt<br />

notamment un effort supplémentaire <strong>de</strong> transparence et <strong>de</strong> preuves <strong>de</strong>s engagements<br />

entrepris par les entreprises.<br />

> Conclusion <strong>de</strong> la Section 2 <<br />

Cette secon<strong>de</strong> section nous a permis <strong>de</strong> mettre en avant les nouvelles attentes <strong>de</strong>s<br />

entreprises, suscitées par la crise économique. Cette crise va tout d’abord avoir pour<br />

conséquence <strong>de</strong> renforcer la « désacralisation » <strong>de</strong>s institutions politiques, en révélant<br />

notamment leur impuissance à réguler le secteur financier et à sortir le pays <strong>de</strong> la crise. Cette<br />

« crise <strong>de</strong> l’impuissance politique » vient renforcer une défiance déjà présente vis-à-vis <strong>de</strong><br />

l’absence <strong>de</strong> performativité <strong>de</strong>s discours politiques et <strong>de</strong>s nombreux scandales qui ont<br />

entachés d’importants <strong>responsable</strong>s politiques.<br />

Face à cette défiance, les citoyens vont alors transférer leurs attentes à l’égard <strong>de</strong>s<br />

entreprises. En effet, on constate que <strong>de</strong> nombreuses responsabilités sociales et<br />

environnementales vont être déplcées vers les entreprises, l’État se désengageant d’ailleurs<br />

<strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> ces problématiques.<br />

76


Conclusion du Chapitre 2


Conclusion <strong>de</strong> la PARTIE 1<br />

Cette première partie nous a permis <strong>de</strong> poser le constat d’une crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s<br />

consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques. Face à cette défiance, qui s’est<br />

véritablement révélée au tournant <strong>de</strong>s années 2000, les entreprises ont décidé d’axer leur<br />

stratégie autour <strong>de</strong> la communication, afin <strong>de</strong> restaurer une relation <strong>de</strong> confiance avec les<br />

consommateurs. Cette stratégie s’est révélée être un échec puisqu’elle n’a fait que renforcer<br />

la défiance. Nous avons également pu voir que la crise économique <strong>de</strong> 2008 a joué un rôle<br />

d’amplificateur <strong>de</strong> crise, puisqu’elle a modifié à la fois les comportements et les attentes <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, ceux-ci étant <strong>de</strong> plus en plus exigeants à l’égard <strong>de</strong>s entreprises.<br />

Face à cette crise <strong>de</strong> confiance, certains auteurs évoquent une remise en cause plus<br />

globale <strong>de</strong> la société capitaliste mo<strong>de</strong>rne, qui serait désormais à bout <strong>de</strong> souffle. Le système<br />

économique actuel, qui repose sur une « dynamique sans arrêt croissante <strong>de</strong> la<br />

<strong>consommation</strong> » 143 serait en effet en péril, si l’on en croit les <strong>nouveau</strong>x comportements et<br />

aspirations <strong>de</strong>s consommateurs. Ce constat se confirme d’ailleurs par les résultats <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong><br />

réalisée pat TNS Sofres 144 en 2011 où l’on constate que les opposants au <strong>modèle</strong><br />

consommatoire constituent le groupe le plus nombreux (33% <strong>de</strong>s sondés), en constante<br />

progression <strong>de</strong>puis 2007.<br />

Faut-il cependant sortir complètement du système, comme le préconise par exemple<br />

Hervé Kempf dans son livre « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme » 145 , ou au<br />

contraire conserver les bases du <strong>modèle</strong> pour l’améliorer, comme le suggère l’économiste<br />

Michel Beaud, dans son ouvrage « Histoire du capitalisme » 146 ? La question reste ouverte.<br />

Ce qui est sûr, cependant, c’est que nous assistons à la déconstruction d’un système,<br />

ancré <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> nombreuses années, où la <strong>consommation</strong> est érigée comme une fin en soi. Le<br />

marché <strong>de</strong>s Produits <strong>de</strong> Gran<strong>de</strong> Consommation s’en trouve fortement impacté et nous voyons<br />

émerger quatre gran<strong>de</strong>s tendances.<br />

143 Philippe Moati, dans le cadre <strong>de</strong> cycles <strong>de</strong> conférences « Décodons le futur », autour du thème « Imaginaires<br />

du commerce et <strong>de</strong> l’industrie », qui ont eu lieu en 2005.<br />

144 TNS Sofres pour l’Agence Australie, Publicité et Société, 2011.<br />

145 Hervé Kempf, Pour sauver la planète, sortez du capitalisme », Paris, Édition Seuil, 2009, 168 pages.<br />

146 Michel Beaud, Histoire du capitalisme, Paris, Seuil, 2010, 456 pages.<br />

78


Tout d’abord, nous passons d’un <strong>modèle</strong> où les consommateurs font preuve d’une certaine<br />

passivité (<strong>modèle</strong> top-down), à un <strong>modèle</strong> horizontal où les consommateurs ont désormais un<br />

véritable rôle à jouer. De plus, le <strong>modèle</strong> où la croyance en la superpuissance <strong>de</strong>s médias<br />

faisait <strong>de</strong> la publicité l’outil privilégié <strong>de</strong>s marketeurs, semble à bout <strong>de</strong> souffle, comme en<br />

témoigne notamment la fragmentation <strong>de</strong>s médias et l’éparpillement <strong>de</strong>s audiences. Nous<br />

passons également d’un <strong>modèle</strong> où les cibles sont clairement définies (CSP +, ménagères <strong>de</strong><br />

plus <strong>de</strong> 50 ans, etc.), à un système complexe où les consommateurs sont <strong>de</strong> plus en plus<br />

hétérogènes. Enfin, nous <strong>de</strong>vons faire face à une prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong>s enjeux sociétaux<br />

entrainant l’apparition <strong>de</strong> nouvelles habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

Face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs et au bouleversement total du marché,<br />

nous allons voir que différentes attitu<strong>de</strong>s sont possibles pour les entreprises et les marques,<br />

comme le rappelle Jean Burnod dans son ouvrage « Crise, une chance pour<br />

l’entreprise ? » 147 . En effet, l’auteur nous rappelle que, face à une crise, trois réactions<br />

instinctives peuvent apparaître. L’autorité, en situation <strong>de</strong> discrédit, peut tout d’abord avoir<br />

comme réaction le « Flight », qui correspond à une situation <strong>de</strong> fuite, d’abandon.<br />

L’entreprise renonce alors à se battre pour survivre. Une second réaction est possible, le<br />

« Freeze », qui correspond à une absence d’actions, une attente, où l’autorité évite le pire, en<br />

essayant à tout prix <strong>de</strong> rester dans le système. Enfin, une <strong>de</strong>rnière réaction, le « Fight »<br />

consiste à faire face à la situation avec énergie. L’auteur explique qu’en adoptant cette<br />

<strong>de</strong>rnière attitu<strong>de</strong>, les difficultés <strong>de</strong>viendront « une vraie cure <strong>de</strong> jouvence », jouant un rôle<br />

« d’accélérateur et <strong>de</strong> révélateur <strong>de</strong> ses forces et faiblesses » 148 .<br />

C’est cette <strong>de</strong>rnière attitu<strong>de</strong>, qui peut également prendre l’appellation <strong>de</strong> « résilience »,<br />

que nous allons évoquer. Si ce terme a longtemps été utilisé en psychologie, il est <strong>de</strong>puis peu<br />

également appliqué aux sciences <strong>de</strong>s organisations, comme en témoigne la définition <strong>de</strong><br />

Pierre d’Huy, Consultant pour le cabinet-conseil en innovation Experts : « La résilience est<br />

la capacité, non pas à résister d’un seul bloc comme vents et marées mais à se structurer <strong>de</strong><br />

façon à ce que la crise ou le choc, même et surtout ceux qui sont totalement imprévisibles,<br />

puissent être supportés par l’entreprise, et parfois même (finissent) par la renforcer » 149 .<br />

147<br />

Jean Burnod, Crise, une chance pour l’entreprise ? Profitez <strong>de</strong> la tempête pour gagner, paris, Éditions du<br />

Cygne, 2010, 198 pages.<br />

148<br />

Id. p.189<br />

149<br />

Lugdivine Bout, « De la gestion <strong>de</strong> crise à la résilience organisationnelle », novembre 2005, Magazine <strong>de</strong> la<br />

Communication <strong>de</strong> crise & Sensible, vol.10, pages 14-15.<br />

79


C’est cette attitu<strong>de</strong> qu’a adoptée l’Ecole Franco-Américaine <strong>de</strong> New York lorsqu’elle a du<br />

affronter la crise économique <strong>de</strong> 2008. En effet, la Directrice <strong>de</strong> la Communication et du<br />

Développement <strong>de</strong> l’époque, Jane Von Trapp, nous explique que la crise a finalement été une<br />

occasion <strong>de</strong> se réinventer : « Sometime changes are for the better because you reexamine<br />

yourself, change your structure, being more creative and make you think. It’s very<br />

healthy » 150 .<br />

Face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques,<br />

nous allons voir que la meilleure attitu<strong>de</strong> est d’adopter un comportement résilient. En effet,<br />

ces <strong>de</strong>rnières <strong>de</strong>vraient faire <strong>de</strong> cette situation complexe une occasion <strong>de</strong> repartir sur <strong>de</strong><br />

nouvelles bases et réinventer un <strong>nouveau</strong> système davantage créateur <strong>de</strong> valeurs, intégrant<br />

ainsi les critiques qui lui sont adressées. C’est ce que nous allons abor<strong>de</strong>r dans cette secon<strong>de</strong><br />

partie, à travers différentes hypothèses qui pourraient servir <strong>de</strong> postulats pour la mise en<br />

place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>.<br />

150 Extrait <strong>de</strong> l’interview <strong>de</strong> Jane Von Trapp et Eliza Huleatt, du 4 Juin 2010, réalisée à l’Ecole Franco-<br />

Américaine <strong>de</strong> New York. Interview en intégralité, : Annexe VIII.<br />

« Des fois, les changements s’avèrent positifs car ils te poussent à te réexaminer, à modifier ta structure, à être<br />

plus créatif. Ils te poussent à réfléchir et cela se révèle être très positif ».<br />

80


PARTIE 2 : LES POSTULATS D’UN NOUVEAU MODELE DE<br />

CONSOMMATION RESPONSABLE<br />

Imaginer un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong> suppose <strong>de</strong> repenser<br />

entièrement les fondamentaux du <strong>modèle</strong> existant. Nous allons voir que les entreprises et les<br />

marques vont <strong>de</strong>voir s’interroger sur trois principaux éléments : leur « What », leur « How »<br />

et leur « Why », si l’on en croit Simon Sinek, écrivain américain auteur du best-seller « Start<br />

with why » 151 . En effet, cet écrivain, spécialiste du management, propose une théorie<br />

intitulée « Gold Circle » (cf. image ci-contre), dans laquelle<br />

il explique qu’à l’heure actuelle 100% <strong>de</strong>s entreprises<br />

connaissent leur « What » (ce qu’ils produisent, les services<br />

qu’ils proposent, etc.), quelques unes d’entre elles<br />

connaissent véritablement leur « How » (brevet, savoir-faire,<br />

etc.) mais très peu connaissent leur « Why » (causes,<br />

croyances, raison d’être <strong>de</strong> leur existence). Fig. 32 - Gold Circle - Simon Sinek<br />

L’auteur nous explique que ce qui sera déterminant à l’avenir pour les organisations sera<br />

<strong>de</strong> s’intéresser avant tout à leur « why » : « People don’t buy what you do but why you do<br />

it » 152 . Transposée à un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> durable, cette théorie nous permet <strong>de</strong><br />

montrer l’importance <strong>de</strong> l’engagement <strong>de</strong>s entreprises dans <strong>de</strong>s causes qui leur permettront<br />

<strong>de</strong> construire les bases d’un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>.<br />

Cette secon<strong>de</strong> partie seront donc consacrée à la présentation <strong>de</strong> ces trois fondamentaux<br />

que sont le « What » (les marques <strong>de</strong>vront retrouver leur raison d’être, en s’engageant dans<br />

une démarche qualité), le « How » (les entreprises et les marques <strong>de</strong>vront se pencher sur leur<br />

i<strong>de</strong>ntité et leurs valeurs) et le « Why » (les entreprises <strong>de</strong>vront s’engager dans <strong>de</strong>s causes qui<br />

dépassent leur propre intérêt personnel si elles veulent retrouver leur légitimité dans le<br />

<strong>nouveau</strong> système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>). Nous évoquerons également l’importance <strong>de</strong> la<br />

communication pour accompagner et impulser le changement <strong>de</strong> <strong>modèle</strong>.<br />

151<br />

Simon Sinek, Start with Why, How Great Lea<strong>de</strong>rs Inspire Everyone to Take Action, Minneapolis,<br />

Hardcover, 2009, 256 pages.<br />

152<br />

« Les gens n’achètent pas ce que vous faites mais la raison pour laquelle vous le faites ».<br />

81


Chapitre 3 : Reposer les bases d’une nouvelle relation <strong>de</strong> confiance<br />

avec les consommateurs<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie, la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs<br />

à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques tient avant tout à une « rupture du contrat », en ce<br />

sens que les entreprises ont subi une véritable désacralisation, <strong>de</strong> part une attitu<strong>de</strong> qui a<br />

entrainé <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> déceptivité (scandales, « discours vains », etc.) et que les marques<br />

n’ont plus tenu leurs engagements en termes <strong>de</strong> qualité et d’utilité <strong>de</strong> leurs produits.<br />

Comment, dès lors, restaurer une relation <strong>de</strong> confiance avec les consommateurs ? Il<br />

semble désormais indispensable <strong>de</strong> revoir les bases du « contrat », que ce soit au niveau <strong>de</strong>s<br />

entreprises que <strong>de</strong>s marques.<br />

En effet, les marques doivent retrouver leur raison d’être, à savoir être un « marqueur » <strong>de</strong><br />

qualité et d’utilité sur ses produits. La marque doit retrouver son rôle <strong>de</strong> repère <strong>de</strong><br />

<strong>consommation</strong>, en proposant <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> qualité, ayant <strong>de</strong>s effets utiles pour les<br />

consommateurs. Les entreprises, quant à elles, doivent désormais assumer leur <strong>nouveau</strong> rôle<br />

sociétale, en déterminant quelles sont ses missions et son utilité pour la société.<br />

82


Section 1 : La marque doit retrouver sa raison d’être<br />

Dans cette première section, nous verrons qu’il <strong>de</strong>vient tout d’abord impératif <strong>de</strong> redonner<br />

<strong>de</strong> la valeur matérielle à la marque. En effet, on a pu observer ces <strong>de</strong>rnières années que la<br />

tendance était <strong>de</strong> se focaliser sur la valeur immatérielle <strong>de</strong> la marque, en perdant <strong>de</strong> plus en<br />

plus <strong>de</strong> vue les « fondamentaux » qui justifiaient la raison d’être d’une marque. C’est ainsi<br />

que les consommateurs se sont peu à peu éloignés <strong>de</strong>s marques, refusant <strong>de</strong> payer « cette<br />

couche <strong>de</strong> magie, qui fait que l’on peut vendre un produit trois fois plus cher sous prétexte<br />

qu’il est susceptible <strong>de</strong> nourrir l’imaginaire ou d’ai<strong>de</strong>r le consommateur à exprimer<br />

l’adhésion à <strong>de</strong>s valeurs » 153 .<br />

Nous verrons que les marques <strong>de</strong>vront non seulement réinvestir dans la qualité, à travers<br />

une « démarche qualité » forte, mais aussi se concentrer sur les effets utiles <strong>de</strong> ses produits<br />

en étant à l’écoute <strong>de</strong> ses consommateurs.<br />

I. La marque doit se recentrer sur la qualité <strong>de</strong> ses produits<br />

Comme nous l’avons vu dans la précé<strong>de</strong>nte partie, les marques ne peuvent être<br />

compétitives sur un « marché-prix » 154 . En effet, face aux MDD et aux hards discounts, les<br />

marques ne parviennent pas à tirer leur épingle du jeu si la différence ne se fait que sur les<br />

prix. De plus, sur ce type <strong>de</strong> marché, les « mauvais produits chassent les bons », dans la<br />

mesure où les innovations sont découragées en raison <strong>de</strong> l’invisibilité <strong>de</strong> toute hausse <strong>de</strong><br />

qualité. Les marques entrent alors dans un cercle vicieux, où la qualité <strong>de</strong> leurs produits<br />

s’aligne sur celles <strong>de</strong>s MDD et leur raison d’exister disparaît peu à peu.<br />

153 Philippe Moati, dans le cadre <strong>de</strong> cycles <strong>de</strong> conférences « Décodons le futur », autour du thème « Imaginaires<br />

du commerce et <strong>de</strong> l’industrie », qui ont eu lieu en 2005.<br />

154 Lucien Karpik, « L’économie <strong>de</strong> la qualité », Revue française <strong>de</strong> dociologie, vol. XXX- 2,1989, p.187-210.<br />

83


Pour contrecarrer cette tendance, les marques doivent réinstaurer un « marché-jugement »,<br />

au sein duquel les choix se font grâce à une diminution <strong>de</strong> l’incertitu<strong>de</strong> sur la qualité, à<br />

travers <strong>de</strong>ux variables : le réseau et la confiance, comme nous l’explique Lucien Karpik 155 .<br />

Face à ce constat « théorique », il faut désormais s’intéresser à la notion même <strong>de</strong> qualité,<br />

afin <strong>de</strong> tester empiriquement si les consommateurs intègrent ces <strong>de</strong>ux variables dans leur<br />

critère <strong>de</strong> qualité. Nous retiendrons la définition proposée par l’AFNOR, Association<br />

Française <strong>de</strong> Normalisation : « un produit ou service <strong>de</strong> qualité est un produit dont les<br />

caractéristiques lui permettent <strong>de</strong> satisfaire les besoins exprimés ou implicites <strong>de</strong>s<br />

consommateurs » 156 .<br />

I.1. « Satisfaire les besoins exprimés <strong>de</strong>s consommateurs »<br />

Cette première composante d’un bien <strong>de</strong> qualité correspond à la capacité <strong>de</strong> ce bien à<br />

satisfaire les attentes <strong>de</strong>s consommateurs à son égard. Il convient donc <strong>de</strong> s’intéresser à la<br />

perception <strong>de</strong> la qualité chez les consommateurs, afin <strong>de</strong> connaître leurs différents critères.<br />

Pour ce faire, nous nous intéresserons au Baromètre <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> l’alimentation,<br />

réalisé en 2011 par le CREDOC pour le compte du Ministère <strong>de</strong> l’Alimentation, <strong>de</strong><br />

l’Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche 157 . En effet, cette étu<strong>de</strong> a permis <strong>de</strong> mettre en lumière les critères<br />

retenus par les consommateurs pour définir un produit alimentaire <strong>de</strong> qualité. Parmi les<br />

différents critères évoqués par les consommateurs, nous retiendrons <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s<br />

catégories : les critères « d’expérience » et le critères « <strong>de</strong> preuve » 158 .<br />

I.1.2. Des produits qui doivent passer le test <strong>de</strong> « l’expérience »<br />

Cette première catégorie renferme <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> critères : <strong>de</strong>s critères qui renvoient à<br />

l’expérience propre du consommateur et d’autres qui se réfèrent davantage à son réseau.<br />

155<br />

Id.<br />

156<br />

www.afnor.org<br />

157<br />

CREDOC pour le Ministère <strong>de</strong> l’Alimentation, <strong>de</strong> l’Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche, Baromètre <strong>de</strong> la perception<br />

<strong>de</strong> l’alimentation nº6, septembre 2011.<br />

158<br />

Dans cette partie, seuls les critères qui ont attrait à la valeur matérielle <strong>de</strong> la marque ont été retenus.<br />

84


L’enquête nous montre tout d’abord que « le goût apprécié lors d’un achat antérieur » se<br />

révèle être le critère le plus souvent cité par les consommateurs interrogés. Ce premier<br />

constat nous montre que les consommateurs s’en tiennent en premier lieu à leur propre<br />

expérience pour juger <strong>de</strong> la qualité d’un bien et que cette expérience est avant tout gustative.<br />

Les consommateurs recherchent donc un produit qui soit bon, savoureux et qui ait été testé<br />

comme tel par leur propre expérience.<br />

Lorsque les consommateurs n’ont pas eu l’occasion d’avoir cette première expérience du<br />

produit, un second acteur va jouer le rôle <strong>de</strong> prescripteur : le réseau. C’est ce que l’on<br />

appelle plus communément le « bouche à oreille » et qui se révèle être une variable très<br />

importante dans la décision d’achat. En effet, si l’on se réfère à l’étu<strong>de</strong> 159 que j’ai menée sur<br />

un échantillon <strong>de</strong> 93 personnes, 85,2% <strong>de</strong>s sondés déclarent qu’un produit recommandé par<br />

d’autres personnes les incite à l’acheter à leur tour. L’expérience avec le produit reste au<br />

cœur <strong>de</strong> l’acte d’achat par le biais <strong>de</strong> recommandations <strong>de</strong> ses paires, qui ont eu <strong>de</strong> leur côté<br />

cette première expérience du bien.<br />

I.1.2. Des produits qui doivent faire leur preuve<br />

La secon<strong>de</strong> catégorie <strong>de</strong> critères correspond aux preuves <strong>de</strong> qualité. Comme nous avons<br />

pu le mettre en évi<strong>de</strong>nce dans la première partie, il semblerait que les consommateurs soient<br />

<strong>de</strong> plus en plus méfiants à l’égard <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> marques. En effet, la gran<strong>de</strong> majorité<br />

d’entre eux considèrent que les produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques sont <strong>de</strong> qualité équivalente aux<br />

produits <strong>de</strong> MDD. Face à ce constat, on observe que les consommateurs ont besoin <strong>de</strong> plus<br />

en plus d’avoir <strong>de</strong>s preuves tangibles <strong>de</strong> qualité.<br />

Parmi ces preuves, on peut tout d’abord citer une première preuve visuelle. En effet,<br />

l’étu<strong>de</strong> du CREDOC montre que 89% <strong>de</strong>s sondés considèrent que « l’apparence <strong>de</strong><br />

l’aliment » est un critère important pour se faire une idée sur la qualité d’un bien. Un autre<br />

critère entre dans cette catégorie : il s’agit <strong>de</strong> la composition du produit.<br />

159 cf. Annexe IV<br />

85


En effet, les consommateurs considèrent qu’il est important <strong>de</strong> connaître la liste <strong>de</strong>s<br />

ingrédients ainsi que la provenance du produit, pour se faire une idée <strong>de</strong> sa qualité. Une fois<br />

encore les consommateurs exigent une preuve <strong>de</strong> qualité qui passe par la connaissance <strong>de</strong>s<br />

ingrédients utilisés (par exemple, l’absence d’huile <strong>de</strong> palme peut être un critère <strong>de</strong> qualité<br />

pour certains consommateurs), ainsi que la provenance du produit (comme en témoigne<br />

l’intérêt grandissant <strong>de</strong>s consommateurs pour le « ma<strong>de</strong> in France », par exemple 160 ). Enfin,<br />

une <strong>de</strong>rnière exigence <strong>de</strong> preuve apparaît dans les critères <strong>de</strong>s consommateurs, à travers<br />

l’importance <strong>de</strong>s « labels officiels <strong>de</strong> qualité ». 65% <strong>de</strong>s sondés considèrent en effet que ces<br />

labels, tels que le Label Rouge, Label AB, AOC, etc., sont <strong>de</strong>s critères témoignant <strong>de</strong> la<br />

qualité d’un produit.<br />

On observe donc que pour « satisfaire les besoins exprimés <strong>de</strong>s consommateurs », les<br />

marques doivent désormais proposer <strong>de</strong>s produits qui puissent passer « le test <strong>de</strong><br />

l’expérience », que ce soit par les consommateurs eux-mêmes ou par leur réseau. Pour ce<br />

faire, les consommateurs exigent <strong>de</strong> plus en plus que ces produits portent <strong>de</strong>s preuves <strong>de</strong> leur<br />

qualité, que ce soit au niveau visuel, au niveau <strong>de</strong> leur composition ou encore au niveau <strong>de</strong><br />

leurs labels <strong>de</strong> qualité. Il semblerait d’ailleurs que cette exigence <strong>de</strong> preuves soit en forte<br />

augmentation, comme en témoigne l’étu<strong>de</strong> réalisée par Ethicity en 2011, dans laquelle on<br />

observe que 60% <strong>de</strong>s sondés seraient davantage convaincus d’acheter plus <strong>de</strong> produits<br />

durables s’ils avaient <strong>de</strong>s preuves concrètes <strong>de</strong> leur meilleure qualité (soit une hausse <strong>de</strong> 15<br />

points par rapport à 2010) 161 .<br />

Nous allons désormais voir que s’il est essentiel <strong>de</strong> satisfaire les besoins explicites <strong>de</strong>s<br />

consommateurs qui correspon<strong>de</strong>nt finalement aux « minimas » exigés à l’égard <strong>de</strong>s produits<br />

<strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques, celles-ci doivent également satisfaire <strong>de</strong>s besoins implicites.<br />

160 En témoigne, par exemple, l’enquête menée par l’IFOP pour le CEDRE (Comité <strong>de</strong>s Entrepreneurs pour un<br />

Développement Responsable <strong>de</strong> l’Économie) en décembre 2011, dans laquelle on apprend que 72% <strong>de</strong>s<br />

Français se disent prêts à acheter plus cher un produit fabriqué en France.<br />

161 Ethicity pour l’ADEME, Les Français et la <strong>consommation</strong> durable, 2011.<br />

86


I.2. « Satisfaire les besoins implicites <strong>de</strong>s consommateurs »<br />

La satisfaction <strong>de</strong> ces besoins implicites correspond à ce que Paul Isakson synthétise dans<br />

l’expression « make people’s life better » 162 . En effet, les marques doivent pouvoir produire<br />

<strong>de</strong>s effets et <strong>de</strong>s solutions utiles aux consommateurs par le biais <strong>de</strong> leurs produits. Nous<br />

allons voir dans un premier temps qu’il existe différents types d’utilité, pour nous concentrer<br />

dans un second temps sur la métho<strong>de</strong> à utiliser pour parvenir à produire ces solutions utiles.<br />

I.2.1. Utilité ex-ante et utilité fonctionnelle<br />

Nous allons voir que les marques peuvent proposer <strong>de</strong>s solutions utiles en amont <strong>de</strong> l’acte<br />

d’achat (utilité ex-ante) mais également pendant la <strong>consommation</strong> du bien (utilité<br />

fonctionnelle).<br />

a. L’utilité ex-ante<br />

Tout d’abord, une marque peut contribuer à produire une utilité qui précè<strong>de</strong> l’achat. Parmi<br />

ces utilités ex-ante, on peut citer notamment la diminution du coût <strong>de</strong> recherche<br />

d’informations, qui semble être une <strong>de</strong>s utilités ex-ante qui prend <strong>de</strong> plus en plus<br />

d’importance aux yeux <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, ces <strong>de</strong>rniers se trouvent à l’heure<br />

actuelle dans une situation paradoxale : alors que l’on assiste à une « accélération du<br />

temps », caractéristique <strong>de</strong>s sociétés mo<strong>de</strong>rnes, comme l’explique le philosophe Hartmut<br />

Rosa 163 , au sein <strong>de</strong>squelles les consommateurs passent <strong>de</strong> moins en moins <strong>de</strong> temps à faire<br />

leurs courses (90 minutes en 1980 contre 35 minutes en 2011 164 ), ceux-ci déclarent<br />

rechercher davantage d’informations pour connaître mieux les produits (utilisation <strong>de</strong>s<br />

comparateurs <strong>de</strong> prix, recherche d’avis <strong>de</strong> consommateurs, etc.), ce qui représente un coût <strong>de</strong><br />

recherche d’informations important.<br />

162<br />

Dans une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building », disponible sur son blog<br />

http://paulisakson.typepad.com/<br />

163<br />

Hartmut Rosa, Accélération, une critique sociale du temps, Paris, Éditions La Découverte, 2010, 480 pages.<br />

164 e<br />

Kantar Worldpanel, 16 édition du Référenseigne Expert, septembre 2011.<br />

87


La résolution <strong>de</strong> ce paradoxe pour les marques présente un formidable<br />

axe <strong>de</strong> développement. Il s’agit en effet <strong>de</strong> réfléchir à la façon d’informer<br />

le consommateur <strong>de</strong> la manière la plus complète et objective que ce soit<br />

afin qu’il puisse effectuer son choix <strong>de</strong> façon éclairée, limitant ainsi la<br />

déceptivité. De nombreuses démarches ont d’ores et déjà été mises en<br />

place, telles que l’apparition <strong>de</strong> logo « Origine France Garantie » sur les<br />

packagings, attestant <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s produits, ou encore l’appellation<br />

« sans OGM » pour attester la qualité <strong>de</strong>s ingrédients utilisés.<br />

Fig. 35 - Photo d’un Smartphone scannant<br />

un QR Co<strong>de</strong><br />

Cependant, certaines marques vont plus loin,<br />

grâce notamment à l’explosion <strong>de</strong>s smartphones, qui<br />

permettent d’avoir recours aux technologies <strong>de</strong> scan <strong>de</strong><br />

co<strong>de</strong>s barres ou <strong>de</strong> QR co<strong>de</strong>, donnant alors accès à une<br />

information plus précise. Les marques <strong>de</strong>vront donc se<br />

pencher sur la façon d’utiliser le packaging pour fournir<br />

une véritable information aux consommateurs, tout en<br />

gardant à l’esprit les contraintes <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> transparence. En effet, les consommateurs<br />

auront besoin d’accé<strong>de</strong>r à une information rapi<strong>de</strong>, où l’on trouvera <strong>de</strong>s preuves <strong>de</strong> ce qui est<br />

énoncé. Les marques <strong>de</strong>vront notamment être très strictes sur les formulations retenues. Nous<br />

reviendrons sur ce point dans un second chapitre, consacré à la communication.<br />

b. L’utilité fonctionnelle<br />

L’utilité fonctionnelle désigne l’utilité retirée par le consommateur pendant la<br />

<strong>consommation</strong> du bien. Il s’agit <strong>de</strong>s « fonctions <strong>de</strong> base » du produit, qui doivent accomplir<br />

leur rôle utilitaire. C’est cette utilité qui a été <strong>de</strong> plus en plus mise à l’écart ces <strong>de</strong>rnières<br />

années au profit d’une utilité plus expérientielle ou émotionnelle.<br />

88<br />

Fig. 33 - Logo « Origine<br />

France garantie »<br />

Fig. 34 - Logo<br />

« Sans OGM »


Cependant, il semblerait que les consommateurs replacent <strong>de</strong> plus en plus « l’utilité au<br />

cœur <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> la valeur. 59% <strong>de</strong> nos compatriotes se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt s’ils ont<br />

vraiment besoin <strong>de</strong> tel ou tel produit » 165 . Dans l’étu<strong>de</strong> que j’ai réalisée (Annexe IV), on<br />

observe ainsi que presque 90% <strong>de</strong>s sondés considèrent qu’un produit utile et innovant est un<br />

critère important pour les inciter à acheter ce produit. C’est d’ailleurs ce que remarque<br />

Philippe Moati, dans une interview donnée en 2010 : « [La marque] ne doit pas simplement<br />

viser à séduire les consommateurs pour les amener à acheter, elle doit être un soutien<br />

crédible et fiable dans l’acte <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> par l’apport d’une valeur d’usage fiable et<br />

adaptée aux besoins » 166 .<br />

À l’avenir, les marques <strong>de</strong>vront donc réinvestir leurs efforts pour pouvoir proposer <strong>de</strong>s<br />

produits véritablement utiles pour les consommateurs et ainsi faire partie intégrante <strong>de</strong> leur<br />

quotidien. Ce <strong>de</strong>rnier élément est primordial pour récréer une relation <strong>de</strong> confiance avec les<br />

consommateurs. C’est ce que rappelle Benjamin Palmer, co-fondateur <strong>de</strong> The Barbarian<br />

Group 167 : « [Bran<strong>de</strong>d Utility] is where the brand creates a commitment to a Relationship.<br />

It’s where the brand creates something useful to you, something that’s a utility in your life.<br />

The consumer will free more confi<strong>de</strong>nt with the Relationship if the brand will continue to be<br />

part of your life » 168 .<br />

Les marques <strong>de</strong>vront également intégrer les nouvelles pratiques <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, que<br />

nous avons vu dans la première partie, notamment lorsque nous évoquions la<br />

« <strong>consommation</strong> d’usage » ou la « <strong>consommation</strong> collaborative ». Il s’agira dès lors <strong>de</strong><br />

proposer <strong>de</strong>s solutions utiles permettant d’encourager et <strong>de</strong> soutenir ces nouvelles pratiques<br />

<strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

Nous allons maintenant nous intéresser à la manière dont les marques doivent s’y prendre<br />

pour capter les besoins <strong>de</strong>s consommateurs, afin <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s biens qui produisent <strong>de</strong>s<br />

effets et <strong>de</strong>s solutions utiles.<br />

165<br />

http://www.influencia.net/fr/archives/etu<strong>de</strong>s.html?actu_id=623<br />

166<br />

Interview <strong>de</strong> Philippe Moati donnée à l’Ujjef – Communication et Entreprise, « La communication et la<br />

marque dans le capitalisme immatériel ». Disponible sur http://www.philippe-moati.com/article-lacommunication-et-la-marque-dans-le-capitalisme-immateriel-59599236.html<br />

167<br />

The Barbarian Group est une Agence <strong>de</strong> Marketing Interactif dont le siège social est à New York.<br />

168<br />

Interview <strong>de</strong> Benjamin Palmer par l’entreprise PSFK, 7 novembre 2006.<br />

Disponible sur :<br />

http://www.psfk.com/2006/11/bran<strong>de</strong>d-utility-interview-with-benjamin-palmer-of-barbarian-group.html<br />

« L’utilité <strong>de</strong> marque correspond au moment où la marque crée un engagement dans une relation. C'est lorsque<br />

la marque crée quelque chose d'utile, quelque chose qui rend votre vie plus simple. Le consommateur se sentira<br />

plus confiant dans la relation si la marque continue <strong>de</strong> faire partie <strong>de</strong> sa vie ».<br />

89


I.2.2. « Start trully listening » 169<br />

Nous allons voir désormais que pour parvenir à faire partie intégrante du quotidien <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, il <strong>de</strong>vient indispensable <strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x outils permettant<br />

d’être véritablement à leur écoute.<br />

a. Le web 2.0 et les nouvelles métho<strong>de</strong>s d’étu<strong>de</strong> : la « cyberanthropologie »<br />

Les marques doivent reconstruire une relation d’écoute avec leurs consommateurs mais<br />

pour cela, elles doivent changer profondément leurs métho<strong>de</strong>s. En effet, comme le rappelle<br />

Paul Isakson, les outils marketing utilisés jusqu’à présent ne sont plus vraiment adaptés aux<br />

« néo consommateurs 2.0. ». Ces outils (focus group, étu<strong>de</strong>s ethnographiques, tests<br />

utilisateurs, etc.) ne semblent plus assez pertinents pour comprendre les nouvelles habitu<strong>de</strong>s<br />

et pratiques <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> entrainées notamment par l’apparition du web 2.0.<br />

C’est ce que confirment <strong>de</strong>ux représentants <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques : Akio Morita<br />

(co-fondateur <strong>de</strong> Sony) et Bill Jobs (co-fondateur d’Apple) :<br />

« We don’t ask consumers what they want, they don’t know. Instead we apply our brain<br />

power to what they need, and will want, then make sure we’re there, ready » 170 , Akio Morita.<br />

« It’s really hard to <strong>de</strong>sign products by focus groups. A lot of times, people don’t know what<br />

they want until you show it to them » 171 , Steve Jobs.<br />

169 Terme <strong>de</strong> Paul Isakson, issus d’une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building »,<br />

disponible sur son blog http://paulisakson.typepad.com/<br />

170 Chris Dixon, 25 avril 2010, Businessinsi<strong>de</strong>r.com<br />

Disponible sur : http://articles.businessinsi<strong>de</strong>r.com/2010-04-25/strategy/30062996_1_enterprise-serversoftware-companies-sony<br />

« Nous ne <strong>de</strong>mandons pas aux consommateurs ce qu'ils veulent, ils ne le savent pas. Au lieu <strong>de</strong> cela, nous<br />

faisons marcher nos cerveaux pour comprendre ce dont ils ont besoin et ce qu’ils voudront acheter, puis nous<br />

faisons en sorte d’être là, prêts à y répondre ».<br />

171 BusinessWeek, 25 mai 1998.<br />

« Il est vraiment difficile <strong>de</strong> concevoir <strong>de</strong>s produits par le biais <strong>de</strong>s focus group. La plupart du temps, les gens<br />

ne savent pas ce qu'ils veulent jusqu'à ce que vous leur montrait. »<br />

90


Le web 2.0 offre <strong>de</strong> nombreuses métho<strong>de</strong>s pour comprendre l’insight <strong>de</strong>s consommateurs,<br />

avec notamment l’apparition <strong>de</strong> la « cyberanthropologie 172 » (ou « anthropologie digitale »).<br />

Cette nouvelle science nous offre <strong>de</strong> nombreux outils avec les réseaux sociaux, les gaming,<br />

les blogs, etc. Il s’agit d’entrer dans une véritable discussion avec les consommateurs en les<br />

impliquant <strong>de</strong> façon directe dans les processus <strong>de</strong> décisions.<br />

De nombreuses marques se sont déjà lancées dans cette démarche. On peut citer le célèbre<br />

exemple <strong>de</strong> Danone, avec sa marque Danette, qui organise chaque année <strong>de</strong>s concours sur<br />

Internet pour faire élire le <strong>nouveau</strong> parfum qui viendra élargir la gamme <strong>de</strong>s crèmes <strong>de</strong>ssert.<br />

En les impliquant <strong>de</strong> la sorte, la marque parvient à déceler les<br />

véritables attentes <strong>de</strong>s consommateurs, tout en créant une<br />

relation <strong>de</strong> proximité et <strong>de</strong> confiance en les impliquant dans<br />

les processus <strong>de</strong> décisions.<br />

b. Vers <strong>de</strong>s « marques <strong>de</strong> consommateurs » ?<br />

D’autres auteurs poussent la démarche encore plus loin en évoquant la possibilité <strong>de</strong> créer<br />

<strong>de</strong>s « marques <strong>de</strong> consommateurs ». C’est le cas notamment <strong>de</strong> Gérard Mermet, sociologue<br />

spécialisé dans l’analyse du changement social et <strong>de</strong> la <strong>consommation</strong>. En effet, dans un<br />

article intitulé « Et pourquoi pas <strong>de</strong>main, <strong>de</strong>s ‘marques <strong>de</strong> consommateurs’ ? 173 », Gérard<br />

Mermet évoque la possibilité pour les marques <strong>de</strong> pousser la logiques collaborative à son<br />

maximum, en créant <strong>de</strong>s « marques <strong>de</strong> consommateurs » : « [...] les marques classiques<br />

doivent maintenant se réinventer. Comment ? En bouclant la boucle, et en inventant <strong>de</strong>s<br />

« marques <strong>de</strong> consommateurs ». Cela implique <strong>de</strong> [...] refon<strong>de</strong>r les éléments du ‘marketing<br />

mix’ traditionnel. Ainsi, les produits seront définis, testés et sélectionnés en association avec<br />

<strong>de</strong>s consommateurs volontaires. La production sera [...] contrôlée par un ‘comité <strong>de</strong><br />

consommateurs’ concernés et [...] les prix, éléments déterminants <strong>de</strong> l’offre, seront fixés en<br />

liaison avec le ‘comité’, en toute transparence. [...] La distribution sera assurée dans les<br />

réseaux choisis par les consommateurs, le référencement étant poussé par eux dans les<br />

circuits et points <strong>de</strong> vente <strong>de</strong> leur choix. »<br />

172 La cybertechnologie est l’« étu<strong>de</strong> du comportement <strong>de</strong>s individus et <strong>de</strong>s machines/objets dans leurs<br />

interactions et leurs impacts sur la culture <strong>de</strong>s sociétés », selon Geoffroi Garon, consultant en gestion <strong>de</strong><br />

l’innovation.<br />

173 Gérard Mermet, « Et pourquoi pas <strong>de</strong>main, <strong>de</strong>s ‘marques <strong>de</strong> consommateurs’ ?», 12 février 2012,<br />

E-marketing.fr. Disponible sur http://www.e-marketing.fr/Breves/Et-pourquoi-pas-<strong>de</strong>main-<strong>de</strong>s-marques-<strong>de</strong>consommateurs-44297.htm<br />

91<br />

Fig. 36 - Logo « On vote tous pour<br />

la nouvelle Danette » - 2009


Nous avons donc montré dans ce I. que pour que les marques puissent sortir d’un<br />

« marché-prix » et restaurer un « marché-jugement », celles-ci doivent impérativement<br />

réinvestir dans la qualité, afin <strong>de</strong> satisfaire à la fois « les besoins exprimés <strong>de</strong>s<br />

consommateurs » (en passant le test <strong>de</strong> l’expérience et en apportant <strong>de</strong>s preuves <strong>de</strong> sa<br />

qualité), mais aussi les « besoins implicites <strong>de</strong>s consommateurs » (par le biais d’une double<br />

utilité, ex-ante et fonctionnelle). Cela passera également par une écoute renforcée <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, qui <strong>de</strong>vront être <strong>de</strong> plus en plus impliqués dans les processus <strong>de</strong> décisions.<br />

Nous allons désormais abor<strong>de</strong>r l’importance pour les marques <strong>de</strong> mettre en place une<br />

« démarche qualité », afin d’atteindre l’ensemble <strong>de</strong> ces objectifs.<br />

II. La marque doit se lancer dans une « démarche qualité »<br />

Pour faire preuve d’une attitu<strong>de</strong> résiliente, les marques doivent se lancer dans une<br />

démarche qualité, afin d’analyser les défaillances auxquelles elles sont confrontées et se<br />

lancer dans une dynamique d’ « amélioration continue », pour <strong>de</strong>venir un référent en matière<br />

<strong>de</strong> qualité.<br />

Selon la Direction générale <strong>de</strong> la Compétitivité, <strong>de</strong> l’Industrie et <strong>de</strong>s Services, une<br />

démarche qualité désigne « un processus volontaire et participatif d’amélioration continue<br />

nécessitant une implication totale <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> l’entreprise » 174 . Nous allons voir que cette<br />

démarche présente un intérêt pour l’entreprise à la fois en interne et en externe.<br />

II.1. Intérêts d’une démarche qualité<br />

Nous allons montrer que se lancer dans une démarche qualité est bénéfique pour<br />

l’ensemble <strong>de</strong>s parties prenantes <strong>de</strong> l’entreprise, comme le rappelle l’ANACT (Association<br />

Nationale pour l’Amélioration <strong>de</strong>s Conditions <strong>de</strong> Travail) : « [La démarche qualité] a pour<br />

but <strong>de</strong> faire évoluer l'organisation pour réaliser les meilleures prestations en matière <strong>de</strong><br />

produits et services, tout en faisant progresser l’ensemble du personnel. Il s’agit <strong>de</strong><br />

promouvoir la qualité dans et hors <strong>de</strong> l’entreprise » 175 .<br />

174 http://www.industrie.gouv.fr/portail/pratique/qualite/notions-cles-qualite.php<br />

175 ANACT, Fiche pratique « Les démarches qualités » ©, 2007<br />

92


II.1.1. En interne<br />

Instaurer une démarche qualité est une <strong>de</strong>s voies à explorer afin <strong>de</strong> palier à la crise <strong>de</strong><br />

confiance interne <strong>de</strong>s salariés, telle que nous l’avons décrite dans la première partie. En effet,<br />

fédérer l’interne autour d’une dynamique d’amélioration continue peut être un excellent<br />

moyen pour lutter contre la perte du sentiment d’accomplissement. C’est ce que l’on appelle<br />

le « management par la qualité » dont les 8 principes fondateurs ont été définis par la<br />

norme ISO 9004 176 .<br />

Tout d’abord, on retrouve le « Customer focus ». Il s’agit <strong>de</strong> placer la satisfaction client<br />

au cœur du dispositif, en s’assurant <strong>de</strong> connaître et comprendre les besoins actuels et les<br />

attentes futures <strong>de</strong>s clients, afin d’être en mesure <strong>de</strong> les satisfaire pleinement. L’orientation<br />

client suppose également <strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s démarches d’évaluation, afin d’intégrer une<br />

démarche participative permettant une constante amélioration. Cette satisfaction client se<br />

retrouve également au niveau <strong>de</strong> la qualité du service après vente, comme a pu le révéler<br />

l’enquête que j’ai effectuée auprès d’un échantillon <strong>de</strong> 90 personnes. En effet, les résultats à<br />

la question ouverte « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ? », indique qu’une part non<br />

négligeable <strong>de</strong>s sondés (8%), estiment qu’une bonne marque est une marque qui investit dans<br />

son SAV.<br />

Le second principe fondateur du « management par la qualité » concerne le<br />

« Lea<strong>de</strong>rship ». Cela consiste pour la Direction <strong>de</strong> l’entreprise à définir <strong>de</strong> manière<br />

cohérente ses objectifs et ses orientations. Il s’agit par exemple <strong>de</strong> fixer <strong>de</strong>s objectifs selon la<br />

règle « SMART », c’est-à-dire <strong>de</strong>s objectifs qui soient Spécifiques (il s’agit d’éviter <strong>de</strong> se<br />

fixer <strong>de</strong>s objectifs trop « vagues » difficilement réalisables), Mesurables (permettant ainsi <strong>de</strong><br />

récompenser les efforts effectués), Acceptable (l’objectif doit être en effet accepté par toutes<br />

les parties prenantes), Réaliste (l’objectif doit être accessible, réalisable, sous peine <strong>de</strong><br />

générer <strong>de</strong> la frustration) et Temporellement défini (afin <strong>de</strong> permettre notamment son<br />

évaluation). L’objectif <strong>de</strong> ce principe <strong>de</strong> « lea<strong>de</strong>rship » est <strong>de</strong> fédérer l’interne autour <strong>de</strong><br />

valeurs et d’objectifs communs.<br />

176 La norme ISO 9004 – Gestion <strong>de</strong>s performances durables d’un organisme – Approche du management par la<br />

qualité, fait partie <strong>de</strong>s 19 500 normes actives <strong>de</strong> l’Organisation internationale <strong>de</strong> normalisation, présente dans<br />

157 pays.<br />

93


Le principe suivant concerne l’« Involvement of people ». Il s’agit d’impliquer le<br />

personnel à tous les niveaux <strong>de</strong> l’organisation afin <strong>de</strong> leur faire comprendre leur rôle dans la<br />

réussite globale <strong>de</strong> l’entreprise. L’objectif est alors d’impliquer et d’engager le personnel en<br />

facilitant notamment les échanges d’expériences et <strong>de</strong> connaissances. La formation peut être<br />

un excellent outil dans la recherche d’implication du personnel afin notamment <strong>de</strong> favoriser<br />

le sentiment d’accomplissement <strong>de</strong> ses salariés.<br />

Le quatrième principe repose sur le « Process approach », c’est-à-dire la mise en place<br />

<strong>de</strong> processus pour chaque action, afin non seulement d’utiliser efficacement chaque<br />

ressource, mais également afin <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s solutions cohérentes et adaptées à chaque<br />

projet. Cette approche permet d’ailleurs d’i<strong>de</strong>ntifier l’impact et les performances <strong>de</strong> chaque<br />

action, favorisant ainsi la mise en place d’actions d’amélioration.<br />

Le « System approach to management » constitue un autre principe important, qui<br />

permet d’i<strong>de</strong>ntifier le rôle <strong>de</strong> chacun, afin d’éviter notamment les conflits et blocages inter-<br />

fonctionnels.<br />

Le sixième principe concerne le « Continual improvement », au cœur du management<br />

par la qualité. En effet, le processus d’amélioration continue est au cœur <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong><br />

recherche <strong>de</strong> performance.<br />

Il ne faut pas oublier un autre principe très important qui est le « Factual approach to<br />

<strong>de</strong>cision making ». Ce principe suppose que les décisions prises doivent être basées sur<br />

l’analyse <strong>de</strong> données et d’informations fiables. Il s’agit donc d’analyser les données <strong>de</strong><br />

manières factuelles et non pas uniquement théoriques, par le biais d’indicateurs, <strong>de</strong> tableaux<br />

<strong>de</strong> bord, etc.<br />

Le <strong>de</strong>rnier principe concerne les « Mutually beneficial supplier relationships », à savoir<br />

le fait que les entreprises et leurs fournisseurs doivent travailler <strong>de</strong> façon interdépendante. Il<br />

s’agit <strong>de</strong> maintenir une communication claire avec ses fournisseurs afin <strong>de</strong> faciliter souplesse<br />

et la réactivité. L’objectif est avant tout <strong>de</strong> créer une plus forte valeur ajoutée.<br />

Une « démarche qualité », qui s’illustre en interne par le biais d’un management par la<br />

qualité, permet donc <strong>de</strong> toucher l’ensemble du fonctionnement interne à travers notamment<br />

la satisfaction client, la formalisation <strong>de</strong> processus stratégiques ou encore l’amélioration <strong>de</strong><br />

l’implication <strong>de</strong>s salariés. Il s’agit dès lors <strong>de</strong> se lancer dans une démarche d’ « amélioration<br />

continue » afin <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir un véritable référent en matière <strong>de</strong> qualité, dans un premier en<br />

interne, pour ensuite appliquer ces principes en externe, comme nous allons le voir dans une<br />

secon<strong>de</strong> sous-partie.<br />

94


II.1.2. En externe<br />

Se lancer dans une démarche qualité présente également <strong>de</strong>s intérêts à l’égard <strong>de</strong> la<br />

relation <strong>de</strong> la marque avec son environnement extérieur, vis-à-vis notamment <strong>de</strong> ses clients,<br />

<strong>de</strong> ses concurrents, <strong>de</strong> ses investisseurs et <strong>de</strong> ses « futures recrues ».<br />

En effet, il s’agit avant tout <strong>de</strong> montrer aux consommateurs que la marque est dans une<br />

dynamique d’amélioration, en valorisant ses actions. La mise en avant <strong>de</strong> cette démarche<br />

permet alors à l’entreprise d’entrer dans un cercle vertueux au sein duquel toute nouvelle<br />

amélioration sera fortement valorisée. Il s’agit également <strong>de</strong> montrer aux clients l’image<br />

d’une entreprise à l’écoute, qui a compris ses nouvelles attentes en termes notamment <strong>de</strong><br />

qualité et d’utilité <strong>de</strong> ses produits.<br />

Le second intérêt d’une telle démarche est également d’envoyer un signal fort à l’égard <strong>de</strong><br />

ses concurrents et <strong>de</strong> ses investisseurs financiers, en leur montrant que l’entreprise est dans<br />

une dynamique <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> productivités et <strong>de</strong> conquête <strong>de</strong> nouvelles parts <strong>de</strong> marchés.<br />

Il s’agit donc à la fois <strong>de</strong> générer <strong>de</strong> la confiance et <strong>de</strong> rappeler son rôle d’acteur pro-actif au<br />

sein du marché.<br />

Enfin, on peut relever un <strong>de</strong>rnier intérêt en termes d’attractivité <strong>de</strong> la marque à l’égard <strong>de</strong><br />

sa politique <strong>de</strong> recrutement. En effet, une marque qui se remet en question constamment<br />

afin d’atteindre un niveau <strong>de</strong> performance maximale, indique qu’elle dispose d’une culture<br />

d’entreprise et <strong>de</strong> valeurs fortes et engageantes. Ce <strong>de</strong>rnier point est notamment très<br />

important à l’heure actuelle, à l’égard <strong>de</strong> la « Génération Y 177 », qui se caractérise, entre<br />

autre, par une volonté <strong>de</strong> comprendre le sens <strong>de</strong> leurs missions, ainsi que par un goût pour les<br />

défis, tel que le décrit François <strong>de</strong> Wazières, Directeur international du recrutement chew<br />

L’Oréal : « Toutes les générations possè<strong>de</strong>nt leur lot <strong>de</strong> défis mais celle-ci est la plus<br />

'challengeante' car elle remet en question toutes nos métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> management et nous<br />

forcent à revoir nos <strong>modèle</strong>s » 178 .<br />

177 La Génération Y regroupe <strong>de</strong>s personnes nées entre la (fin <strong>de</strong>s années 70 et le début <strong>de</strong>s années 90 et serait<br />

pour certains auteurs une nouvelle « sous culture » disposant <strong>de</strong> caractéristiques propres.<br />

178 Caroline Politi, « Génération Y, le choc <strong>de</strong>s cultures en entreprise », 7 avril 2010, Lexpress.fr. Disponible<br />

sur http://www.lexpress.fr/emploi-carriere/generation-y-le-choc-<strong>de</strong>s-cultures-en-entreprise_882538.html<br />

95


Nous venons donc <strong>de</strong> voir qu’une « démarche qualité » présentait également <strong>de</strong>s intérêts à<br />

l’égard <strong>de</strong> l’environnement externe <strong>de</strong>s entreprises, composé notamment <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, <strong>de</strong>s concurrents, <strong>de</strong>s investisseurs financiers et <strong>de</strong>s « futures recrues ». Nous<br />

allons désormais nous attacher à présenter les différentes étapes à suivre pour mettre en place<br />

cette « démarche qualité ».<br />

II.2. Étapes d’une « démarche qualité »<br />

Nous allons voir que la mise en œuvre d’une démarche qualité repose sur différentes<br />

étapes, qui peuvent aboutir à la mise en place d’une évaluation à travers la certification.<br />

II.2.1. La roue <strong>de</strong> Deming<br />

Les différents principes à suivre pour mettre en place une démarche qualité ont été<br />

synthétisés par la roue <strong>de</strong> Deming 179 , appelée également le « cycle d’amélioration<br />

continue ». Il s’agit, en effet, <strong>de</strong> mettre en place une<br />

démarche en 4 temps 180 :<br />

- Planifier (déterminer les objectifs à atteindre)<br />

- Faire (mettre en œuvre les actions)<br />

- Vérifier (vérifier la mise en œuvre)<br />

- Agir (définir les priorités d’amélioration)<br />

179 On doit l’appellation « roue <strong>de</strong> Deming », au statisticien William Edwards Deming, qui a rendu populaire,<br />

dans les années 50, la métho<strong>de</strong> développée par Walter A.Shewhart.<br />

180 Selon http://www.industrie.gouv.fr/portail/pratique/qualite/notions-cles-qualite.php<br />

96<br />

Fig. 37 - Roue <strong>de</strong> Deming


Il s’agit donc <strong>de</strong> suivre l’adage suivant : « J’écris ce que fait, je fais ce que j’écris et je<br />

vérifie que ce qui est écrit et fait » 181 . La DGCIS rappelle que « cette démarche globale vise<br />

[…] à la maîtrise <strong>de</strong>s « 5M » :<br />

• Main d’œuvre : Qualification et formation <strong>de</strong>s intervenants,<br />

• Machines et moyens : Qualité <strong>de</strong>s équipements <strong>de</strong> production et <strong>de</strong> contrôle,<br />

• Métho<strong>de</strong>s ou mo<strong>de</strong>s opératoires : Standardisation et reproductibilité, respect <strong>de</strong>s<br />

spécifications,<br />

• Milieu : Environnement <strong>de</strong> travail adapté, propre, ordonné, sécurisé … ,<br />

• Matériaux : Qualité <strong>de</strong>s approvisionnements et <strong>de</strong> la sous-traitance. » 182<br />

Cependant, il ne faut surtout pas perdre <strong>de</strong> vue qu’une « démarche qualité » doit être<br />

participative et non pas être une démarche « top-down », qui serait imposée par la Direction.<br />

En effet, il est primordial d’impliquer l’interne, comme nous avons pu le voir à travers le<br />

« management par la qualité ». Il peut également être intéressant d’impliquer les<br />

consommateurs dans cette démarche, en les questionnant notamment sur leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

satisfaction à travers <strong>de</strong>s « bilans qualité », par exemple. Les moyens mis à disposition par le<br />

web 2.0 se révèlent être <strong>de</strong> formidables outils pour recueillir ce type d’informations.<br />

Nous allons maintenant voir que cette « démarche qualité » peut aboutir à l’obtention<br />

d’une certification, attestant dès lors du bon déroulement <strong>de</strong> cette démarche.<br />

II.2.2. L’évaluation <strong>de</strong> la démarche : l’obtention d’une certification<br />

Obtenir une certification permet véritablement d’achever la « démarche qualité », en<br />

disposant alors d’une « preuve » <strong>de</strong> sa volonté d’amélioration. Cette notion <strong>de</strong> « preuve » est<br />

particulièrement intéressante si l’on se réfère aux critères <strong>de</strong>s consommateurs pour définir ce<br />

qu’est un bien <strong>de</strong> qualité, évoqués dans le I. Il semblerait en effet que, face aux nombreuses<br />

déclarations sans fon<strong>de</strong>ments, qui se sont avérées être monnaie courante ces <strong>de</strong>rnières années<br />

à l’instar du greenwashing, les consommateurs exigent <strong>de</strong>s preuves tangibles <strong>de</strong> ce qui,<br />

jusque-là, ne s’apparentait qu’à du déclaratif.<br />

181 id.<br />

182 Direction Générale <strong>de</strong> la Compétitivité, <strong>de</strong> l’Industrie et <strong>de</strong>s Services<br />

97


Il existe différentes normes, telles que la norme ISO 9000 qui décrit avant tout les<br />

principes essentielles et le vocabulaire associé aux systèmes <strong>de</strong> management <strong>de</strong> la qualité, la<br />

norme ISO 9001, consacrée aux obligations <strong>de</strong>s entreprises qui se lancent dans une telle<br />

démarche, ou encore la norme ISO 9004 qui décrit les lignes directrices du management <strong>de</strong><br />

la qualité.<br />

Cependant, seule la norme ISO 9001 peut faire l’objet d’une certification, dans la mesure<br />

où il s’agit <strong>de</strong> l’unique norme à lister une série d’exigences à l’égard <strong>de</strong> l’entreprise. On<br />

considère qu’en 2010, 23 837 entreprises françaises ont reçu la certification ISO 9001, ce qui<br />

se révèle être très faible en comparaison avec leurs homologues européennes (notamment<br />

italiennes et espagnoles), comme le montre le diagramme ci-<strong>de</strong>ssous 183 :<br />

Fig. 38 - Répartition mondiale <strong>de</strong>s certificats ISO 9001 délivrés par pays - 2010<br />

Nous avons donc montré qu’une « démarche qualité » permettait <strong>de</strong> mettre en place une<br />

dynamique d’amélioration continue, à la fois en interne et en externe. Pour se faire, il s’agit<br />

<strong>de</strong> suivre différentes étapes, illustrées par la Roue <strong>de</strong> Deming, permettant <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir un<br />

acteur référent en matière <strong>de</strong> qualité. Cette démarche peut d’ailleurs aboutir à une<br />

certification, <strong>de</strong>venant dès lors une preuve tangible <strong>de</strong> qualité à l’égard <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

183 Source : http://strategik.fr/blog/les-statistiques-officielles-iso-9001/05/2010/<br />

98


Conclusion <strong>de</strong> la Section 1 <<br />

Dans cette première section, nous nous sommes intéressés aux rôles <strong>de</strong>s marques dans le<br />

<strong>nouveau</strong> système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, davantage créateur <strong>de</strong> valeur durable. Il s’agissait <strong>de</strong> se<br />

concentrer sur la valeur matérielle <strong>de</strong>s marques, en démontrant que pour retrouver la<br />

confiance <strong>de</strong>s consommateurs, celles-ci <strong>de</strong>vaient avant tout se lancer dans une « démarche<br />

qualité », afin <strong>de</strong> re<strong>de</strong>venir un repère <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> crédible.<br />

Pour ce faire, nous avons montré que les marques <strong>de</strong>vaient se concentrer sur la<br />

satisfaction à la fois <strong>de</strong>s besoins exprimés <strong>de</strong>s consommateurs (en s’intéressant notamment<br />

aux <strong>de</strong>ux principaux critères <strong>de</strong> qualité mis en avant par ces <strong>de</strong>rniers, à savoir le « test <strong>de</strong><br />

l’expérience », ainsi que les preuves <strong>de</strong> qualité) mais aussi les besoins implicites <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, qui consistent notamment à produire <strong>de</strong>s solutions utiles, et ce à <strong>de</strong>ux<br />

niveaux : une utilité ex-ante et une utilité fonctionnelle. Nous nous sommes également<br />

attachés à présenter la façon <strong>de</strong> parvenir à ces résultats, qui passe essentiellement par<br />

l’écoute <strong>de</strong>s consommateurs, ainsi que par leur implication dans les processus <strong>de</strong> décisions.<br />

Puis, dans un second temps, nous nous sommes intéressés aux tenants et aboutissants <strong>de</strong><br />

la mise en place d’une « démarche qualité », en présentant les intérêts d’une telle démarche<br />

en interne tout comme en externe, ainsi que les différentes étapes à suivre pour aboutir à une<br />

certification. Il s’agissait avant tout <strong>de</strong> montrer qu’une dynamique d’amélioration continue<br />

était indispensable pour que les marques retrouvent leur raison d’être.<br />

Nous allons désormais montrer, dans une secon<strong>de</strong> section, que les entreprises vont<br />

également <strong>de</strong>voir se lancer dans une telle démarche, afin d’assumer les nouvelles<br />

responsabilités sociétales attribuées par les consommateurs.<br />

99


Section II : L’entreprise doit assumer son <strong>nouveau</strong> rôle sociétal<br />

Si les marques doivent retrouver leur rôle <strong>de</strong> référent en matière <strong>de</strong> qualité, il n’en<br />

<strong>de</strong>meure pas moins que les entreprises doivent également se remettre en question et ce à<br />

<strong>de</strong>ux niveaux : elles doivent tout d’abord travailler sur leur i<strong>de</strong>ntité et leurs valeurs, pour<br />

ensuite s’intéresser à leur mission et à leur <strong>nouveau</strong> rôle sociétal.<br />

Nous verrons notamment que pour être au cœur d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> créateur <strong>de</strong> valeur<br />

durable, les entreprises <strong>de</strong>vront <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> véritables acteurs du progrès, en accompagnant<br />

les consommateurs dans leur quête <strong>de</strong> sens.<br />

I. « Define who you are » 184 …<br />

Pour répondre aux nouvelles attentes <strong>de</strong>s consommateurs en matière <strong>de</strong> responsabilité<br />

sociétale et ne pas tomber dans d’écueil du déclaratif, les entreprises doivent tout d’abord<br />

faire un travail sur elles-mêmes, afin <strong>de</strong> redéfinir à la fois leur i<strong>de</strong>ntité mais aussi leur<br />

système <strong>de</strong> valeurs. Ce ne sera que sur cette base que les entreprises pourront prétendre, dans<br />

un <strong>de</strong>uxième temps, assumer pleinement leur <strong>nouveau</strong> rôle sociétale.<br />

I.1. L’entreprise doit formaliser son i<strong>de</strong>ntité<br />

Il est indispensable pour une entreprise <strong>de</strong> connaître sa singularité, son histoire, afin <strong>de</strong><br />

pouvoir ensuite définir ce vers quoi elle tend, et prétendre pouvoir répondre aux nouvelles<br />

aspirations <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

I.1.1. L’i<strong>de</strong>ntité : « le seul avantage compétitif qui ne peut être dupliqué par un<br />

concurrent » 185<br />

De façon générique, l’i<strong>de</strong>ntité désigne le « caractère permanent et fondamental <strong>de</strong><br />

quelqu'un, <strong>d'un</strong> groupe, qui fait son individualité, sa singularité », si l’on en croit la définition<br />

proposée par le dictionnaire Larousse. Appliquée aux entreprises, cette définition nous<br />

montre que l’i<strong>de</strong>ntité doit être au cœur du fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> l’entreprise en ce sens qu’elle définit<br />

sa singularité.<br />

184 Terme <strong>de</strong> Paul Isakson, dans une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building »,<br />

disponible sur son blog http://paulisakson.typepad.com/<br />

185 Propos <strong>de</strong> Michael Dell, recueilli par Muriel Jasor, « L’i<strong>de</strong>ntité d’entreprise, un avantage compétitif », 3<br />

juillet 2006, Les Echos n° 19700, page 12.<br />

100


Or, dans une économie où les marchés sont <strong>de</strong> plus en plus concurrentiels et où les<br />

produits <strong>de</strong> plus en plus substituables, les entreprises doivent s’intéresser à ce qui les rend<br />

uniques. C’est d’autant plus le cas à l’heure actuelle où les entreprises, qui sont en situation<br />

<strong>de</strong> discrédit comme nous l’avons vu dans la première partie, doivent se relégitimer, en<br />

effectuant cette introspection sur leurs racines. C’est ce qu’explique Jérôme Hervé, Vice-<br />

prési<strong>de</strong>nt au Boston Consulting Group (BCG) 186 : « Travailler son i<strong>de</strong>ntité, c'est retourner à<br />

ses racines. Cette introspection, qui n'a rien <strong>de</strong> nostalgique, met en relief les forces réelles sur<br />

lesquelles s'appuyer pour raisonner en rupture, régénérer un concept initial et tirer profit <strong>de</strong><br />

ce retour sur i<strong>de</strong>ntité » 187 . Pour adopter une attitu<strong>de</strong> résiliente, les entreprises doivent passer<br />

par cette première étape d’ « introspection », afin <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce les forces dont elle<br />

dispose pour perdurer dans le temps. Pour se faire, l’entreprise doit s’intéresser à ce qui<br />

fon<strong>de</strong>nt son i<strong>de</strong>ntité.<br />

I.1.2. L’i<strong>de</strong>ntité : « un cocktail concocté avec cinq ingrédients » 188<br />

Jérôme Hervé considère que l’i<strong>de</strong>ntité d’une entreprise est le résultat <strong>de</strong> 5 éléments : « un<br />

concept, une technologie, un savoir-faire, un capital client et une compétence <strong>de</strong><br />

management ». L’i<strong>de</strong>ntité coïnci<strong>de</strong>rait donc avec une partie <strong>de</strong>s actifs immatériels <strong>de</strong><br />

l’entreprise, tant au niveau <strong>de</strong> son capital humain (par le biais <strong>de</strong> son savoir-faire), son<br />

capital organisationnel (avec ses compétences managériales), son capital savoir (à travers son<br />

concept et sa technologie) et son capital relationnel (par le biais <strong>de</strong> son capital client) 189 .<br />

C’est en se référant à cette i<strong>de</strong>ntité que l’entreprise pourra, dans un second temps,<br />

prétendre endosser <strong>de</strong> nouvelles responsabilités sociétales et être légitimes pour le faire. En<br />

effet, comme nous le verrons dans le II., pour que les nouvelles attentes <strong>de</strong>s consommateurs<br />

en matière <strong>de</strong> responsabilité sociétale soient pleinement remplies, il faudra que les<br />

entreprises prouvent leur bonne foi, en démontrant leur légitimité à intervenir. Cette<br />

légitimité sera notamment fondée sur le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> proximité entre l’entreprise et la cause<br />

défendue, ce qui passera non seulement par son i<strong>de</strong>ntité mais également par ses valeurs, sur<br />

lesquelles nous allons désormais nous intéresser.<br />

186<br />

Le Boston Consulting Group est un cabinet international <strong>de</strong> conseil en stratégie, dont le siège social est à<br />

Boston.<br />

187<br />

Muriel Jasor, « L’i<strong>de</strong>ntité d’entreprise, un avantage compétitif », 3 juillet 2006, Les Echos n°19700, page 12.<br />

188<br />

Propos <strong>de</strong> Jérôme Hervé, recueilli par Muriel Jasor, « L’i<strong>de</strong>ntité d’entreprise, un avantage compétitif »,<br />

3 juillet 2006, Les Echos n° 19700, page 12.<br />

189<br />

Classification proposée par Hervé Baculard et Julia Jérôme dans Les immatériels actifs – Le <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong><br />

<strong>de</strong> croissance, Paris, Cherche-Midi, 2011, 160 pages.<br />

101


I.2. Se positionner autour d’un système <strong>de</strong> valeurs<br />

Le second effort à effectuer <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s entreprises concerne son système <strong>de</strong> valeurs.<br />

Celles-ci sont en effet encore trop souvent associées à une démarche uniquement déclarative,<br />

comme le confirme l’étu<strong>de</strong> « Branding For Good », réalisée en 2007, qui montre que « 38%<br />

<strong>de</strong>s Français pensent que le plus souvent, les valeurs affichées par l’entreprise sont un<br />

‘argument pour faire <strong>de</strong> l’argent’ » 190 .<br />

Ce constat tient en gran<strong>de</strong> partie au fait que les entreprises sont encore trop peu<br />

nombreuses à savoir véritablement ce qu’est une « vraie valeur » et ce à quoi elle sert. Pour<br />

pouvoir continuer d’exister face aux <strong>nouveau</strong>x enjeux et nouvelles attentes <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, les entreprises <strong>de</strong>vront s’atteler à mener une véritable réflexion stratégique<br />

autour <strong>de</strong> leur système <strong>de</strong> valeurs. Nous allons définir dans un premier temps ce qu’est une<br />

« vraie valeur » pour ensuite évoquer l’intérêt stratégique <strong>de</strong> définir un système <strong>de</strong> valeurs.<br />

I.2.1. Définition d’une « vraie valeur »<br />

Comme l’explique Thierry Wellhoff 191 , on peut retenir cinq principes pour définir ce<br />

qu’est une « vraie valeur ». Une valeur est avant tout un mot auquel on doit associer une<br />

définition précise, afin <strong>de</strong> « recouvrir un sens et notamment un sens partagé ». Il est en effet<br />

important <strong>de</strong> définir ce que l’entreprise perçoit <strong>de</strong>rrière <strong>de</strong>s termes génériques tels que<br />

« l’ambition », « la loyauté », « la liberté », etc.<br />

Le second principe qui définit une valeur concerne son « champ d’application », à savoir<br />

l’endroit où l’on place le curseur sur ce que l’on considère comme étant la valeur retenue. En<br />

effet, si l’on prend l’exemple <strong>de</strong> l’ambition, il faut définir ce que signifie avoir trop ou pas<br />

assez d’ambition, appréciation qui peu varier d’une entreprise à une autre.<br />

Un autre élément pour déterminer si l’on a affaire à une « vraie valeur » est <strong>de</strong> se<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si le non respect <strong>de</strong> cette valeur suscite l’indignation. En effet, une valeur doit<br />

avoir <strong>de</strong>s répercutions réelles afin <strong>de</strong> ne pas être considérée comme étant uniquement un<br />

effet d’annonce.<br />

190 Ad<strong>de</strong>d Value, Brandind For Good, 2007.<br />

191 Propos recueilli lors du « Grand Débat Cels’and Co », organisé le 29 mars 2012, à Paris. Cf. Annexe VIII<br />

102


Une valeur doit également être universelle, en ce sens qu’elle doit s’adresser à toutes les<br />

parties prenantes <strong>de</strong> l’entreprise. En effet, si une valeur est uniquement à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s<br />

clients, <strong>de</strong>s salariés ou <strong>de</strong>s actionnaires, elle ne pourra jouer son rôle <strong>de</strong> « fédérateur <strong>de</strong><br />

sens ».<br />

Enfin, une valeur doit se traduire en principes d’actions, afin d’avoir un véritable impact<br />

sur le réel. En effet, comme le rappelle Thierry Wellhoff : « Une valeur n’existe qu’à travers<br />

<strong>de</strong>s actes qui l’illustrent au même titre que les actes n’ont pas <strong>de</strong> sens s’ils n’ont pas <strong>de</strong><br />

valeurs » 192 .<br />

À travers ces cinq principes, les entreprises doivent entièrement repenser leur système <strong>de</strong><br />

valeurs qui, pour la plus gran<strong>de</strong> partie d’entre elles, n’a aucune véritable inci<strong>de</strong>nce sur le<br />

réel. Si cette absence <strong>de</strong> performativité <strong>de</strong>s valeurs s’explique notamment par la<br />

méconnaissance <strong>de</strong> la définition d’une « vraie valeur », les entreprises ont également du mal<br />

à percevoir l’intérêt stratégique d’acquérir un tel système <strong>de</strong> valeurs.<br />

I.2.2. Le système <strong>de</strong> valeurs : entre réalité et idéal partagé<br />

Nous allons voir qu’un système <strong>de</strong> valeurs a <strong>de</strong>ux principales vertus : il permet à la fois <strong>de</strong><br />

fédérer autour d’une réalité commune, tout en conduisant à l’action à travers un idéal<br />

partagé.<br />

Un système <strong>de</strong> valeurs est tout d’abord le reflet d’un ensemble <strong>de</strong> fondamentaux partagés<br />

au sein <strong>de</strong> l’entreprise. Il s’agit donc <strong>de</strong> se saisir d’une réalité qui témoigne <strong>de</strong>s priorités que<br />

l’entreprise se donne. S’engager dans la définition d’un système <strong>de</strong> valeurs permet donc <strong>de</strong><br />

fédérer l’ensemble <strong>de</strong>s parties prenantes autour <strong>de</strong> mêmes principes.<br />

S’investir dans une « démarche valeurs » permet également <strong>de</strong> conduire à l’action à<br />

travers le partage d’un idéal commun. En effet, une valeur ne correspond jamais pleinement<br />

à une réalité, celle-ci étant toujours perfectible. Il s’agit dès lors <strong>de</strong> mettre en place un certain<br />

nombre d’actions pour se rapprocher au mieux <strong>de</strong> la valeur ainsi énoncée.<br />

192 Propos recueilli lors du « Grand Débat Cels’and Co », organisé le 29 mars 2012, à Paris. Cf. Annexe VIII<br />

103


Les valeurs se révèlent donc être un formidable outil permettant à la fois <strong>de</strong> s’unir autour<br />

<strong>de</strong> principes communs, mais aussi <strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s actions afin d’atteindre un idéal<br />

partagé. Pour prétendre répondre aux nouvelles attentes <strong>de</strong>s consommateurs, les entreprises<br />

<strong>de</strong>vront « se positionner clairement et sincèrement dans un système <strong>de</strong> valeurs » 193 , dans<br />

lesquelles elles croient et qui seront autant <strong>de</strong> repères pour gui<strong>de</strong>r leurs actions. Ce n’est qu’à<br />

partir <strong>de</strong> là, que les entreprises pourront acquérir une légitimité pour assumer leurs nouvelles<br />

responsabilités sociétales, comme nous allons le montrer dans le II.<br />

II. … « and what you stand for » 194<br />

Dès lors que les entreprises acquerront une réelle i<strong>de</strong>ntité, fondée autour <strong>de</strong> valeurs fortes<br />

et engageantes, elles pourront prétendre endosser les nouvelles responsabilités qui lui sont<br />

conférées par les consommateurs. Leur principale mission va être <strong>de</strong> faire en sorte que la<br />

<strong>consommation</strong> <strong>de</strong>vienne une <strong>consommation</strong> engagée, citoyenne et <strong>responsable</strong>. En effet,<br />

comme le rappelle Sophie Dubuisson-Quellier, dans son ouvrage « La <strong>consommation</strong><br />

engagée » 195 , la <strong>consommation</strong> actuelle est objet <strong>de</strong> nombreuses critiques mais elle « se pare<br />

<strong>de</strong> nombreuses vertus quand elle est rendue engagée, citoyenne ou <strong>responsable</strong> » 196 .<br />

Pour se faire, les entreprises vont <strong>de</strong>voir adopter une nouvelle attitu<strong>de</strong>, qui se réalisera en<br />

<strong>de</strong>ux temps. Il s’agira tout d’abord <strong>de</strong> commencer par « responsabiliser » leurs activités en<br />

optimisant leurs impacts économique, social et environnemental. Cette première étape est<br />

essentielle pour prendre conscience <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s enjeux et défis qui les atten<strong>de</strong>nt pour<br />

ensuite prétendre <strong>de</strong>venir un acteur proactif du changement en accompagnant les<br />

consommateurs dans leurs nouvelles aspirations.<br />

193<br />

Interview <strong>de</strong> Philippe Moati par Communication & Entreprise, 22 ocotbre 2010. Disponible sur<br />

http://www.communicationetentreprise.com/le-kiosque/webzin/<strong>de</strong>tail-webzin/article/philippe-moati.html<br />

194<br />

Terme <strong>de</strong> Paul Isakson dans une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building », disponible<br />

sur son blog http://paulisakson.typepad.com/<br />

195<br />

Sophie Dubuisson-Quellier, La <strong>consommation</strong> engagée, Paris, Les Presses <strong>de</strong> Sciences Po, 2009, 143 pages<br />

196 id. p.138<br />

104


II.1. Responsabiliser son activité<br />

Une entreprise <strong>responsable</strong> est avant tout une entreprise qui connaît et maîtrise l’ensemble<br />

<strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> son activité sur la société. Nous allons tout d’abord voir quels sont les enjeux<br />

<strong>de</strong> cette « responsabilisation », pour présenter ensuite <strong>de</strong>s exemples concrets d’entreprise qui<br />

se sont lancées dans cette démarche.<br />

II.1.1. Les enjeux <strong>de</strong> la « responsabilisation »<br />

Les entreprises doivent tout d’abord avoir en tête qu’adopter une attitu<strong>de</strong> <strong>responsable</strong> est<br />

loin d’être antinomique avec les objectifs <strong>de</strong> rentabilité économique. Au contraire, il s’agit<br />

<strong>de</strong> répondre à l’une <strong>de</strong>s missions que se dotent toutes entreprises, à savoir être pérenne dans<br />

le temps. Nous allons donc tenter <strong>de</strong> démontrer qu’adopter une attitu<strong>de</strong> <strong>responsable</strong> doit être<br />

perçue comme un moyen <strong>de</strong> satisfaire ses intérêts privés, non pas pour s’en servir comme un<br />

argumentaire commercial mais au contraire comme un principe structurant.<br />

Les premiers enjeux <strong>de</strong> cette responsabilisation sont avant tout économiques. En effet, on<br />

peut tout d’abord évoquer le fait que les entreprises vont <strong>de</strong>voir anticiper les nombreuses<br />

réglementations qui vont apparaître dans les prochaines années. En effet, si les obligations en<br />

matière <strong>de</strong> développement durable sont encore très faibles, on peut facilement imaginer que<br />

ces réglementations vont s’amplifier tant les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s émanant <strong>de</strong> l’opinion publique se<br />

renforcent. Ainsi, se lancer d’ores et déjà dans une démarche <strong>de</strong> responsabilisation permettra<br />

aux entreprises <strong>de</strong> mieux anticiper les coûts engendrés par la mise au normes <strong>de</strong> leurs<br />

activités.<br />

Un autre enjeu économique doit être mis en avant : il s’agit pour les entreprises <strong>de</strong> se<br />

saisir d’une opportunité <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s économies, en limitant par exemple ses dépenses<br />

d’énergies, la prise en charge <strong>de</strong> ses déchets ou encore en mettant en place une « lutte contre<br />

le gaspillage ».<br />

Il faut à ce niveau faire attention à ne pas confondre « responsabilisation <strong>de</strong> ses activités »<br />

et « argumentaire <strong>de</strong> vente ». En effet, il est indispensable que les entreprises parviennent à<br />

« normaliser » cette attitu<strong>de</strong> plutôt que d’en faire un avantage compétitif. C’est à cette seule<br />

condition que les consommateurs pourront véritablement adhérer à cette démarche.<br />

105


Un autre enjeu, non négligeable, concerne la productivité <strong>de</strong>s salariés. En effet, adopter<br />

une telle démarche est un excellent moyen <strong>de</strong> fédérer l’interne autour <strong>de</strong> projets et d’objectifs<br />

communs, ce qui peut accroître considérablement l’engagement et l’épanouissement <strong>de</strong>s<br />

salariés. C’est ce que confirme Patrick Widloecher, à l’occasion <strong>de</strong> la sortie <strong>de</strong> son ouvrage<br />

« Gui<strong>de</strong> du développement durable en entreprise » 197 : « En permettant aux collaborateurs <strong>de</strong><br />

prolonger dans leur entreprise les comportements éco-citoyens qu’ils ont adoptés dans leur<br />

vie personnelle, on les remotive et on les ‘recrante’ à l’entreprise alors que ces trente<br />

<strong>de</strong>rnières années les avaient progressivement éloigné » 198 .<br />

Nous allons désormais présenter quelques initiatives mises en place par <strong>de</strong>s entreprises<br />

qui ont peu à peu intégrer cette démarche <strong>responsable</strong> au sein <strong>de</strong> leurs activités.<br />

II.1.2. Exemples d’initiatives <strong>de</strong> « responsabilisation »<br />

Voici trois exemples <strong>de</strong> « bonnes pratiques » en matière <strong>de</strong> développement durable,<br />

témoignant d’une prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong> ces entreprises à l’égard <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> leurs<br />

activités sur la société.<br />

Commençons tout d’abord par une initiative concernant la maîtrise <strong>de</strong>s dépenses<br />

énergétiques avec l’Usine Bosch <strong>de</strong> Ro<strong>de</strong>z. En effet, cette usine a mis en place, à partir <strong>de</strong><br />

janvier 2006, une étu<strong>de</strong> afin <strong>de</strong> réaliser un bilan sur l’ensemble <strong>de</strong> l’éclairage du site. À la<br />

suite <strong>de</strong> cet audit, ont été lancées différentes opérations afin d’améliorer les performances <strong>de</strong><br />

l’usine en matière d’éclairage. Cette opération <strong>de</strong> rénovation a consisté à la mise en place<br />

« <strong>de</strong> 554 appareils d’une puissance <strong>de</strong> 2 x 80W, <strong>de</strong> tubes haut ren<strong>de</strong>ment T5 à ballasts<br />

électroniques et <strong>de</strong> réflecteurs performants. […] La durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> ces luminaires est<br />

multipliée par <strong>de</strong>ux et les pertes <strong>de</strong> flux sont divisées par quatre » 199 . Les résultats sont très<br />

encourageants puisque la part du poste « éclairage » dans les factures <strong>de</strong> l’usine est passée <strong>de</strong><br />

10% en 2006 à 5% en 2009, permettant ainsi un gain <strong>de</strong> 170k€ par an. Cette opération,<br />

rentable au bout <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières années, a permis d’éviter l’émission <strong>de</strong> 170 tonnes <strong>de</strong><br />

CO2.<br />

197<br />

Patrick Widloecher et Isabelle Querne, Gui<strong>de</strong> du développement durable en entreprise », Paris, Eyrolles,<br />

2009, 301 pages.<br />

198<br />

Philippe Cabin, Entretien <strong>de</strong> Patrick Widloecher et Isabelle Querne, 9 mars 2009, Enjeux Les Echos.<br />

199<br />

Selon la fiche pratique nº9 <strong>de</strong>s bonnes pratiques énergétiques, publiées par l’ADEME, en décembre 2011.<br />

106


Voici un autre exemple qui vient illustrer la gestion <strong>de</strong>s déchets : l’opération menée par<br />

l’entreprise Nature et Découvertes autour du recyclage <strong>de</strong> 17 catégories <strong>de</strong> déchets tels que<br />

les cartons, les piles, les écrans d’ordinateur hors service, les cartouches d’encre, les<br />

ampoules, etc. Depuis longtemps engagée dans le recyclage, l’entreprise a mis en place un<br />

« réseau vert » composé <strong>de</strong> salariés, permettant d’assurer la présence d’un « correspondant<br />

environnement » sur chaque site, chargé <strong>de</strong> faire respecter le cahier <strong>de</strong>s charges<br />

environnemental. Cette politique <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s déchets a permis à l’entreprise d’éviter<br />

l’émission <strong>de</strong> 106,7 tonnes <strong>de</strong> CO2 en 2010.<br />

Nous allons maintenant présenter une <strong>de</strong>rnière initiative d’entreprise, qui concerne la mise<br />

en place d’une politique sociale. Nous pouvons par exemple citer l’entreprise GDF Suez qui<br />

a ouvert en janvier 2011, sa première crèche d’entreprise, intitulée « TBabies ». Par<br />

l’intermédiaire d’un communiqué <strong>de</strong> presse, l’entreprise explique les raisons qui l’ont<br />

motivées à se lancer dans ce projet : « Convaincu qu’un juste équilibre entre vie<br />

professionnelle et vie personnelle est un facteur <strong>de</strong> motivation et <strong>de</strong> performance, GDF<br />

SUEZ participe en effet concrètement à faire évoluer les représentations liées à la parentalité<br />

et les pratiques en entreprise. Outre la signature <strong>de</strong> la Charte <strong>de</strong> la parentalité en entreprise en<br />

2008 et son adhésion à l’Observatoire <strong>de</strong> la parentalité en entreprise, GDF SUEZ propose<br />

plusieurs solutions concrètes pour faciliter la vie <strong>de</strong> ses salariés-parents » 200 . 60 berceaux ont<br />

ainsi pu être proposés aux salariés <strong>de</strong> l’entreprise qui pourront profiter <strong>de</strong> prestations <strong>de</strong><br />

haute qualité : salle d’allaitement, salle <strong>de</strong> jeux ou encore salon <strong>de</strong>s parents ont été intégrés à<br />

la crèche, pour satisfaire au mieux les parents-salariés.<br />

Une fois que leurs propres activités entrent dans un processus <strong>de</strong> responsabilisation, les<br />

entreprises vont pouvoir s’engager dans <strong>de</strong>s causes plus globales, afin <strong>de</strong> répondre aux<br />

nouvelles attentes <strong>de</strong>s consommateurs. C’est ce que nous allons voir dans ce II.2.<br />

200 GDF Suez, Communiqué <strong>de</strong> presse « GDF SUEZ inaugure sa crèche d'entreprise à la Défense », 30 mars<br />

2011.<br />

107


II.2. « Commit something biger than yourself »<br />

Une fois que les entreprises auront consenti à la mise en place d’efforts pour maîtriser<br />

pleinement l’impact <strong>de</strong> leurs activités sur la sphère économique, sociale et environnementale,<br />

celles-ci pourront dès lors acquérir une légitimité pour s’engager dans <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s<br />

causes et <strong>de</strong>venir ainsi un véritable acteur du changement.<br />

II.2.1. L’entreprise doit <strong>de</strong>venir l’acteur du changement …<br />

Comme nous l’avons vu précé<strong>de</strong>mment, les institutions politiques subissent une grave<br />

crise <strong>de</strong> légitimité, notamment vis-à-vis <strong>de</strong> leurs capacités à transformer le réel. Les<br />

consommateurs se sont alors tournés vers les entreprises pour satisfaire leurs nouvelles<br />

attentes. Cependant, on constate qu’il existe encore beaucoup <strong>de</strong> déclaratif <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, qui ont du mal à passer véritablement à l’action. C’est à ce moment là que<br />

doivent intervenir les entreprises en accompagnant les consommateurs, pour qu’à travers leur<br />

<strong>consommation</strong>, un changement <strong>de</strong> comportement opère.<br />

En effet, pour accompagner les consommateurs dans leur quête <strong>de</strong> sens et leur volonté <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s consom’acteurs <strong>responsable</strong>s, les entreprises <strong>de</strong>vront impulser le changement, et<br />

ce <strong>de</strong> trois manières. Il s’agira tout d’abord, comme nous l’avons évoqué dans la première<br />

section <strong>de</strong> ce chapitre, <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> qualité, qui permettent <strong>de</strong> faire prendre<br />

conscience aux consommateurs <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> maîtriser ce que l’on consomme,<br />

notamment lorsqu’il s’agit <strong>de</strong> produits alimentaires. En effet, à l’heure actuelle, les<br />

consommateurs ont totalement perdu le contrôle <strong>de</strong> la composition et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s<br />

produits qu’ils ingurgitent, alors même que l’alimentation joue un rôle fondamental dans la<br />

santé humaine et dans la préservation <strong>de</strong> l’écosystème.<br />

De plus, les entreprises <strong>de</strong>vront maîtriser l’impact <strong>de</strong> leurs activités au niveau <strong>de</strong> la sphère<br />

économique, sociale et environnementale, comme nous l’avons vu dans le II.1. afin <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>venir <strong>de</strong> véritables acteurs <strong>responsable</strong>s. Cette démarche <strong>de</strong> responsabilisation est<br />

indispensable, et ce à <strong>de</strong>ux niveaux. Tout d’abord les entreprises doivent montrer l’exemple<br />

dans la mesure où leurs activités sont au cœur <strong>de</strong> toutes les sociétés et leur niveau<br />

d’influence peut se révéler important. De plus, si les entreprises souhaitent répondre aux<br />

nouvelles aspirations <strong>de</strong>s consommateurs, elles doivent gagner en légitimité à travers<br />

l’exemplarité <strong>de</strong> leurs propres activités.<br />

108


Enfin, une fois les « bases » d’un système <strong>responsable</strong> posées, les entreprises <strong>de</strong>vront<br />

s’engager dans <strong>de</strong>s causes qui dépassent leurs propres intérêts privés. C’est d’ailleurs ce que<br />

souligne Vincent Balusseau, dans un essai intitulé « Advertising Reloa<strong>de</strong>d » 201 : « Pour servir<br />

leurs intérêts privés, les marques <strong>de</strong>vront <strong>de</strong> plus en plus se poser la question <strong>de</strong> leur<br />

contribution à l’intérêt général ».<br />

Nous allons désormais nous intéresser plus en détail à ce troisième point, en présentant les<br />

enjeux sous-jacents, ainsi que <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> « gran<strong>de</strong>s causes », qui seront autant <strong>de</strong><br />

piliers fondateurs du <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

II.2.2. … en s’engageant pour créer un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong><br />

Pour pouvoir perdurer dans le temps et répondre aux nouvelles aspirations <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, les entreprises vont <strong>de</strong>voir s’engager dans différentes causes qui permettront<br />

d’impulser <strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> comportements individuels. Il s’agit finalement <strong>de</strong> repenser<br />

le rôle <strong>de</strong>s entreprises au cœur <strong>de</strong>s sociétés mo<strong>de</strong>rnes, en les propulsant comme vecteur du<br />

changement. Pour ce faire, les entreprises <strong>de</strong>vront faire évoluer leur approche cour-termiste<br />

<strong>de</strong> maximisation du profit par le paradigme suivant : « Les entreprises seront <strong>responsable</strong>s ou<br />

ne seront pas ».<br />

En effet, alors que les entreprises qui se sont d’ores et déjà engagées dans <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s<br />

causes, le font dans la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s cas pour obtenir <strong>de</strong>s avantages concurrentiels<br />

(« redorer » leur image, créer un plus-produit inexistant, etc.), les entreprises « <strong>de</strong> <strong>de</strong>main »<br />

<strong>de</strong>vront intégrer ces problématiques non pas comme un outil <strong>de</strong> communication mais comme<br />

un élément structurant <strong>de</strong> leurs activités. Les entreprises <strong>de</strong>vront désormais assumer leur<br />

<strong>nouveau</strong> rôle sociétale, qui doit <strong>de</strong>venir leur raison d’être, la maximisation <strong>de</strong>s profits<br />

<strong>de</strong>venant alors non plus une fin en soi mais un moyen d’atteindre cet objectif. Ce n’est qu’au<br />

prix <strong>de</strong> cet effort que les entreprises pourront perdurer dans le temps et <strong>de</strong>venir légitimes aux<br />

yeux <strong>de</strong>s consommateurs. La rentabilité financière et la maximisation du profit ne sont bien<br />

évi<strong>de</strong>mment pas écartées du <strong>nouveau</strong> système mais ils <strong>de</strong>viennent autant d’outils pour<br />

pouvoir œuvrer à la mise en place d’un <strong>modèle</strong> créateur <strong>de</strong> valeur durable.<br />

201 Vincent Balusseau, Advertisng Reloa<strong>de</strong>d, pour une publicité (encore) plus utile, Influencia.net, mai 2010.<br />

109


Il s’agit donc <strong>de</strong> réaliser un cercle vertueux où les consommateurs, à travers leur pouvoir<br />

<strong>de</strong> consommer, permettent aux entreprises <strong>de</strong> créer <strong>de</strong> la richesse, ce qui permettra à leurs<br />

tour <strong>de</strong> faire évoluer à la fois la qualité <strong>de</strong>s produits et la minimisation <strong>de</strong>s impacts <strong>de</strong> leurs<br />

activités, tout en permettant aux entreprises d’investir dans un certain nombre <strong>de</strong> causes à<br />

l’échelle <strong>de</strong> la société. Quand la société se sera accaparée <strong>de</strong> ces évolutions (à travers la mise<br />

en place <strong>de</strong> normes, réglementations, etc.), elle <strong>de</strong>viendra alors prescriptives <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x<br />

comportements individuels, renforçant les attentes auprès <strong>de</strong>s entreprises et poussant ces<br />

<strong>de</strong>rnières à aller encore plus loin dans la démarche.<br />

Les différentes causes à partir <strong>de</strong>squelles les entreprises pourront impulser <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x<br />

comportements <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> sont très nombreuses. On pense tout d’abord au soutien à<br />

la filière biologique. Alors que la composition <strong>de</strong>s aliments est aujourd’hui <strong>de</strong> plus en plus<br />

floue, que les étapes <strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong>s produits finis <strong>de</strong> moins en moins connues, un <strong>de</strong>s<br />

défis <strong>de</strong> la <strong>consommation</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>main sera <strong>de</strong> renouer avec <strong>de</strong>s produits que l’on maîtrise sans<br />

passer par la chimie <strong>de</strong> synthèse. Il s’agit en effet <strong>de</strong> renouer avec un procédé <strong>de</strong> fabrication<br />

qui s’engage à respecter à la fois l’environnement (rotation <strong>de</strong>s cultures, respect <strong>de</strong>s cycles<br />

biologiques, interdiction d’utiliser les produits chimiques <strong>de</strong> synthèse, etc.) mais aussi la<br />

santé <strong>de</strong>s consommateurs (absence <strong>de</strong> pestici<strong>de</strong>s, qualité nutritionnelle <strong>de</strong>s produits, absence<br />

<strong>de</strong> conservateurs ou additifs, etc.). Cependant, à l’heure actuelle ce procédé est encore trop<br />

élitiste (les prix pratiqués sont en effet encore trop élevés <strong>de</strong> part le peu d’offres sur le<br />

territoire) et le discours est encore trop culpabilisant. Il faut s’attacher à « normaliser » cette<br />

agriculture, qui n’est finalement qu’un retour aux fondamentaux. Les entreprises <strong>de</strong>vront<br />

donc s’engager dans la certification biologique <strong>de</strong> leur production mais aussi soutenir la<br />

filière pour faire en sorte que la production biologique <strong>de</strong>vienne la norme.<br />

Une autre gran<strong>de</strong> cause qui fera partie <strong>de</strong>s défis d’un système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> durable<br />

concerne le commerce équitable. Comme le définit les « Artisans du Mon<strong>de</strong> » 202 , le<br />

commerce équitable désigne : « un partenariat commercial fondé sur le dialogue, la<br />

transparence et le respect, dont l’objectif est <strong>de</strong> parvenir à une plus gran<strong>de</strong> équité dans le<br />

commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant <strong>de</strong> meilleures<br />

conditions commerciales et en garantissant les droits <strong>de</strong>s producteurs et <strong>de</strong>s travailleurs<br />

marginalisés ».<br />

202 Artisans du Mon<strong>de</strong> est un réseau <strong>de</strong> distribution associatif et militant, qui défend, <strong>de</strong>puis 1974, une vision<br />

engagée du commerce équitable.<br />

110


S’engager dans le commerce équitable, c’est adopter une démarche <strong>responsable</strong> à travers<br />

le paiement d’un « prix juste », la garantie <strong>de</strong> conditions <strong>de</strong> travail décentes et le soutien<br />

économique aux petits producteurs. Encore trop marginalisé, le commerce équitable souffre<br />

à la fois d’une accessibilité trop réduite et d’une perception trop lointaine <strong>de</strong>s enjeux. Une<br />

fois encore, le défi sera <strong>de</strong> « normaliser » ce système d’échange en présentant <strong>de</strong>s preuves<br />

tangibles aux consommateurs <strong>de</strong>s impacts du commerce équitable.<br />

On peut également citer un autre exemple d’engagement <strong>responsable</strong> : la promotion <strong>de</strong>s<br />

circuits courts, à savoir « un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> commercialisation <strong>de</strong>s produits agricoles qui s’exerce<br />

soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte, à<br />

condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire » 203 . Les enjeux autour <strong>de</strong> ces circuits courts<br />

sont nombreux. Ils sont à la fois économiques (dans la mesure où les intermédiaires étant<br />

limités, les prix pratiqués s’avèrent être « justes »), environnementaux (réduction <strong>de</strong>s<br />

émissions <strong>de</strong> CO2, moindre emballage..) et sociaux (accroissement <strong>de</strong>s échanges et liens<br />

sociaux entre les producteurs et les consommateurs). La promotion <strong>de</strong>s produits locaux<br />

permet donc d’adopter une démarche <strong>responsable</strong>, en consommant <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> saison<br />

(qui proposent donc <strong>de</strong>s qualités nutritives supérieures aux produits réfrigérés et ayant subis<br />

<strong>de</strong> nombreuses heures <strong>de</strong> transport) et en maîtrisant les impacts environnementaux <strong>de</strong> sa<br />

<strong>consommation</strong>. Les entreprises pourront tout d’abord commencer par montrer l’exemple en<br />

achetant leur matière première au niveau local et en impulsant en interne une dynamique, en<br />

proposant par exemple aux salariés <strong>de</strong> créer une AMAP.<br />

Les causes et les initiatives à soutenir sont donc extrêmement nombreuses et les trois<br />

précé<strong>de</strong>mment citées sont loin d’être exhaustives. Un système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong><br />

et créateur <strong>de</strong> valeurs durables est donc parfaitement envisageable. Pour être efficaces, ces<br />

initiatives <strong>de</strong>vront être pensées <strong>de</strong> façon globale, à l’image<br />

du mouvement « Slow Food », qui promeut une<br />

alimentation basée sur « la liberté <strong>de</strong> choix, sur l’éducation,<br />

sur l’approche multidisciplinaire <strong>de</strong> la nourriture, qui nous<br />

permette <strong>de</strong> vivre nos vies du mieux possible tout en utilisant<br />

à bon escient les ressources qui sont à notre disposition » 204 .<br />

203 Selon la définition du Ministère <strong>de</strong> l’alimentation, <strong>de</strong> l’agriculture et <strong>de</strong> la pêche.<br />

204 www.slowfood.fr/le-memento-slow-food<br />

111<br />

Fig. 39 - Logo « Slow Food »


Leur slogan « bon, propre et juste » synthétise leur philosophie, à savoir la promotion <strong>de</strong><br />

produits « bons » (« goûteux et savoureux, frais, capables <strong>de</strong> stimuler et <strong>de</strong> satisfaire les sens<br />

<strong>de</strong> ceux qui les consomment »), « propres » (<strong>de</strong>s produits qui ne portent pas « atteinte aux<br />

ressources <strong>de</strong> la terre, aux écosystèmes et à l’environnement, et sans mettre en danger la<br />

santé <strong>de</strong> quiconque » et « justes » (« respectueux <strong>de</strong> la justice sociale, c’est-à-dire avec <strong>de</strong>s<br />

rétributions et <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> travail équitables à chaque étape du processus, <strong>de</strong> la<br />

production à la <strong>consommation</strong> »).<br />

> Conclusion <strong>de</strong> la Section 2 <<br />

Comme nous venons <strong>de</strong> le voir, les entreprises ont un véritable rôle à jouer dans la mise<br />

en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> durable. Elles doivent, en effet, tout mettre<br />

en œuvre pour <strong>de</strong>venir un véritable acteur proactif du changement.<br />

Pour ce faire, nous avons montré, que les entreprises <strong>de</strong>vaient commencer par effectuer<br />

une introspection, tant au niveau <strong>de</strong> leur i<strong>de</strong>ntité que <strong>de</strong> leur système <strong>de</strong> valeurs, étape<br />

indispensable pour acquérir une légitimité à intervenir dans <strong>de</strong>s causes sociétales qui<br />

dépassent leurs propres intérêts privés. En effet, les consommateurs auront d’autant plus<br />

confiance dans <strong>de</strong>s sociétés qui présentent une attitu<strong>de</strong> irréprochable en matière <strong>de</strong><br />

responsabilisation <strong>de</strong> leurs activités, et qui s’engagent dans les « gran<strong>de</strong>s causes » en lien<br />

avec leur histoire, leur mission et leurs valeurs.<br />

Une fois cette première étape effectuée, les entreprises pourront dès lors prétendre créer<br />

un <strong>nouveau</strong> système où la <strong>consommation</strong> <strong>de</strong>vient engagée, citoyenne et <strong>responsable</strong>. Elles<br />

doivent, pour cela, <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s acteurs pro-actifs, en accompagnant les consommateurs pour<br />

que leurs attentes se concrétisent en véritables comportements <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>. Il sera donc<br />

indispensable pour les entreprises <strong>de</strong> soutenir et d’impulser au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la « scène »,<br />

différentes causes sociétales qui <strong>de</strong>viendront autant <strong>de</strong> piliers du <strong>nouveau</strong> système. On pense<br />

notamment au commerce équitable, à la production biologique ou encore aux « circuits<br />

courts ».<br />

112


Conclusion du Chapitre 3


Chapitre 4 : Le rôle <strong>de</strong> la communication dans ce processus <strong>de</strong> changement : récréer<br />

les bases d’une relation <strong>de</strong> confiance<br />

Comme nous l’avons vu lors <strong>de</strong> la première partie, la communication est <strong>de</strong>venue<br />

omniprésente dans les sociétés mo<strong>de</strong>rnes, à telle point qu’elle est <strong>de</strong> plus en plus considérée<br />

comme intrusive et agressive. En effet, les marques et les entreprises, par le biais <strong>de</strong>s médias<br />

<strong>de</strong> masse, ont peu à peu envahit l’espace public afin d’émettre <strong>de</strong>s messages à sens unique.<br />

Cependant, nous montrerons que la communication a un rôle fondamental à jouer dans le<br />

<strong>nouveau</strong> système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>. Elle doit, en effet, accompagner la<br />

transition, afin <strong>de</strong> rendre « pensable, crédible et possible le changement » 205 . Pour se faire, la<br />

communication va <strong>de</strong>voir récréer les bases d’un dialogue avec les consommateurs afin <strong>de</strong><br />

générer une synergie positive.<br />

Nous verrons que la communication va <strong>de</strong>voir entièrement repenser sa façon d’être, afin<br />

d’instaurer un dialogue sincère et constructif avec les consommateurs. Elle <strong>de</strong>vra, en effet, à<br />

la fois, repenser la façon <strong>de</strong> présenter les entreprises et les marques, s’interroger sur la façon<br />

<strong>de</strong> susciter l’intérêt <strong>de</strong>s consommateurs et enfin mettre en place un système facilitant les<br />

échanges mutuels.<br />

Nous montrerons, par le biais <strong>de</strong> la première section, que la communication <strong>de</strong>vra tout<br />

d’abord jeter les bases du dialogue, en repensant sa façon <strong>de</strong> présenter les marques et les<br />

entreprises, mais aussi en s’interrogeant sur la manière <strong>de</strong> susciter l’intérêt <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, pour que le dialogue perdure.<br />

205 Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p.10<br />

114


Section 1 : Impulser le dialogue avec le consommateur<br />

Nous allons voir dans cette première section que la communication a un rôle très<br />

important à jouer dans la construction d’un <strong>nouveau</strong> dialogue entre les consommateurs, les<br />

entreprises et les marques. Pour ce faire, nous montrerons que la communication va tout<br />

d’abord <strong>de</strong>voir repenser la façon <strong>de</strong> présenter les entreprises et les marques aux<br />

consommateurs.<br />

En effet, pour restaurer sa légitimité, la communication <strong>de</strong>vra réconcilier le « dire » et le<br />

« faire », pour que le discours <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques soit confirmé par l’expérience<br />

<strong>de</strong>s consommateurs, empêchant ainsi la déceptivité <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers, qui se révèle être <strong>de</strong> plus<br />

en plus importante à l’heure actuelle. Nous verrons que cet élément est indispensable pour<br />

dépasser la défiance <strong>de</strong>s consommateurs, qui ne croient plus dans une communication qui<br />

leur vend une « couche <strong>de</strong> magie » 206 , déconnectée du réel.<br />

I. Se présenter <strong>de</strong> façon sincère et honnête : « Dire ce que l’on fait »<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie, la communication est tombée <strong>de</strong>puis<br />

quelques années dans <strong>de</strong> nombreux travers, en <strong>de</strong>venant notamment son propre objet <strong>de</strong><br />

discussion, à telle point que son discours est <strong>de</strong> plus en plus perçue comme déconnectée <strong>de</strong> la<br />

réalité et <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

Nous verrons dans cette première section qu’une telle démarche ne permet pas<br />

d’accompagner un système en quête <strong>de</strong> sens et <strong>de</strong> cohérence, et encore moins <strong>de</strong> créer un<br />

dialogue sincère et dénoué <strong>de</strong> toute con<strong>de</strong>scendance. La communication ne peut plus être<br />

fondée ex nihilo et doit entièrement revoir son discours. Nous verrons que désormais, pour<br />

construire ses messages, la communication doit repartir <strong>de</strong> sa raison d’être, à savoir « Dire ce<br />

que l’on fait ». Il s’agit donc pour la communication <strong>de</strong> partir du réel, du « tangible », <strong>de</strong> ce<br />

qui fait le lien entre les consommateurs et les marques : les produits.<br />

206 Terme utilisé par Philippe Moati, dans le cadre <strong>de</strong> cycles <strong>de</strong> conférences « Décodons le futur », autour du<br />

thème « Imaginaires du commerce et <strong>de</strong> l’industrie », qui ont eu lieu en 2005.<br />

115


I.1. Présenter les marques : « The product is the marketing » 207<br />

Dans cette première sous-partie, nous allons voir que la communication, quatrième<br />

composante du « mix marketing », ne peut plus agir indépendamment <strong>de</strong>s trois autres (Prix,<br />

Produits et Distribution). Elle doit en effet se recentrer sur la raison pour laquelle la marque<br />

existe : ses produits (ou services).<br />

I.1.1. En finir avec une communication auto-centrée et déconnectée <strong>de</strong> la réalité<br />

Comme nous l’avons évoqué précé<strong>de</strong>mment, face au désinvestissement <strong>de</strong>s marques dans<br />

la qualité et l’utilité <strong>de</strong> leurs produits, la communication a fini par se « mettre en scène »,<br />

afin <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> renouer avec la confiance <strong>de</strong>s consommateurs. Elle s’est alors retrouvée à<br />

<strong>de</strong>voir palier les faiblesses <strong>de</strong>s marques en ayant recours à <strong>de</strong>s arguments qui s’éloignaient<br />

<strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> la réalité. Les consommateurs se sont rendus compte <strong>de</strong> cette<br />

« supercherie » par le biais <strong>de</strong> l’expérience (perte <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong>s produits, innovation factice,<br />

etc.) et ont alors accusé la communication <strong>de</strong> « manipulation ».<br />

C’est ce que résume Paul Isakson, dans l’interview que nous avons réalisé en Juin 2012 :<br />

« Marketing is the four Ps. Product, Price, Place, Promotion. Without Product, there is<br />

nothing for the others to do. […] It always begins with the product. The problem is that too<br />

many companies went away from this and thought they could just say great things about<br />

their products and services without their products and services actually being great » 208 .<br />

Face à ce constat, nous allons voir que si la communication veut adopter une démarche<br />

<strong>responsable</strong> et accompagner les entreprises et les consommateurs dans leur quête <strong>de</strong> sens,<br />

elle <strong>de</strong>vra construire l’ensemble <strong>de</strong> sa stratégie autour <strong>de</strong> ce qui fait la raison d’être <strong>de</strong>s<br />

marques : ses produits.<br />

207 « Le marketing, c’est le produit ».<br />

Expression <strong>de</strong> Paul Isakson, dans une présentation intitulée « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building »,<br />

disponible sur son blog http://paulisakson.typepad.com<br />

208 « Le marketing, c’est les 4P : Produit, Prix, Place [Distribution], Promotion [Communication]. Sans le<br />

produit, les autres n’ont pas <strong>de</strong> raison d’être. […] Tout part du produit. Le problème c’est que beaucoup trop<br />

d’entreprises se sont éloignées <strong>de</strong> ce principe et ont considéré qu’ils pouvaient se contenter <strong>de</strong> dire <strong>de</strong>s choses<br />

formidables sur leurs produits et services alors même que ces <strong>de</strong>rniers ne le sont pas ».<br />

Interview dans son intégralité en Annexe IX<br />

116


I.1.2. Reconstruire une communication autour du produit<br />

Tout d’abord, il convient <strong>de</strong> rappeler qu’adopter une telle démarche ne peut se faire que si<br />

les marques ont assimilé les postulats d’un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, que nous<br />

avons présentés précé<strong>de</strong>mment. En effet, si les marques n’ont pas intégré qu’elles <strong>de</strong>vaient<br />

investir dans la qualité afin notamment <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s effets utiles, la communication ne<br />

pourra que retomber dans l’écueil dans lequel elle est aujourd’hui, c’est-à-dire « masquer <strong>de</strong>s<br />

faiblesses ». Pour que la communication retrouve son rôle <strong>de</strong> « porte-parole » <strong>de</strong> ce qui fait<br />

la force <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s marques, il faut que ces <strong>de</strong>rnières aient en amont effectué cette<br />

remise en cause. Ce n’est qu’à partir du moment où les démarches seront lancées, que la<br />

communication pourra prétendre intervenir <strong>de</strong> façon légitime.<br />

La communication <strong>de</strong>vra, dès lors, repenser son discours en faisant en sorte qu’il soit <strong>de</strong><br />

<strong>nouveau</strong> ancré dans le réel. Pour ce faire, il s’agira <strong>de</strong> repartir d’une réalité tangible et<br />

partagé avec le consommateur, à savoir le produit. C’est ce que confirme Ajaz Ahmed,<br />

Fondateur et Directeur général <strong>de</strong> l’Agence AQKA 209 : « Our belief is that marketing and<br />

product have converged. The consumer does’nt separate the marketing experience from the<br />

product » 210 .<br />

Le produit <strong>de</strong>vient alors le lien qui unit les consommateurs et les marques, et <strong>de</strong>vra servir<br />

<strong>de</strong> « fil rouge » structurant <strong>de</strong> toute communication. Le produit se transformera en « porte<br />

parole » à la fois <strong>de</strong> la marque, dans la mesure où il intégrera les problématiques <strong>de</strong> qualité et<br />

d’utilité, mais aussi <strong>de</strong> l’entreprise, puisqu’il <strong>de</strong>viendra le symbole <strong>de</strong> ses engagements<br />

sociétaux (nous développerons ce point dans le II.).<br />

Dire que « le marketing, c’est le produit » ne signifie bien évi<strong>de</strong>mment pas qu’une fois le<br />

produit fabriqué, le marketing n’a plus <strong>de</strong> rôle à jouer. Au contraire, le marketing <strong>de</strong>vra faire<br />

en sorte que les consommateurs puissent avoir une première expérience avec le produit, la<br />

qualité et l’utilité <strong>de</strong> celui-ci prenant ensuite le relai pour finir <strong>de</strong> convaincre le<br />

consommateur <strong>de</strong> sa supériorité.<br />

209<br />

AQKA est une agence digitale faisant partie du réseau WPP <strong>de</strong>puis Juin 2012.<br />

210<br />

« Nous croyons que le marketing et le produit ne font plus qu’un. Les consommateurs ne séparent plus<br />

l’expérience marketing du produit ».<br />

Megan Mcilroy, « Ad Age's Digital Agency of the Year Is Actually in the Business of Product Innovation», 17<br />

mars 2008, Adage.com.<br />

Disponible sur http://adage.com/article/special-report-digital-alist-2008/digital-a-list-2008-2-akqa/125664/<br />

117


Nous venons donc <strong>de</strong> voir que la communication doit retrouver son rôle initial, à savoir<br />

rendre compte d’une réalité, en reconnectant le « dire » et le « faire ». Pour démontrer cela,<br />

nous nous sommes appuyés sur la fonction première <strong>de</strong> la communication : mettre en avant<br />

la supériorité tangible <strong>de</strong>s produits. Nous allons voir que la communication a également un<br />

autre rôle à jouer en rendant compte <strong>de</strong>s nouvelles responsabilités <strong>de</strong>s entreprises. Celle-ci<br />

doit, en effet, accompagner la concrétisation <strong>de</strong>s nouvelles aspirations <strong>de</strong>s consommateurs en<br />

véritables comportements <strong>responsable</strong>s.<br />

I.2. Présenter l’entreprise à travers ses nouvelles responsabilités sociétales<br />

Comme l’explique Laurent Habib, dans son ouvrage « La communication<br />

transformative », la communication doit pouvoir « donner la force <strong>de</strong> conduire une<br />

transformation » 211 . Nous verrons que pour cela, la communication doit cesser <strong>de</strong> faire rêver<br />

les consommateurs à un mon<strong>de</strong> meilleur mais au contraire permettre une prise <strong>de</strong> conscience<br />

<strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> la société et <strong>de</strong>s étapes à franchir pour construire un système créateur <strong>de</strong> sens.<br />

I.2.1. Faire un état <strong>de</strong>s lieux sincère<br />

Pour que la communication puisse retrouver ses lettres <strong>de</strong> noblesses et reconstruire une<br />

relation <strong>de</strong> confiance avec les consommateurs, celle-ci <strong>de</strong>vra ériger la sincérité 212 comme un<br />

principe structurant <strong>de</strong> son activité. Elle <strong>de</strong>vra tout d’abord commencer par établir un état <strong>de</strong>s<br />

lieux <strong>de</strong> la situation.<br />

Pour illustrer ce point, nous prendrons comme exemple<br />

l’entreprise agro-alimentaire « Michel et Augustin », qui<br />

s’engage à fournir aux consommateurs « <strong>de</strong> bons produits,<br />

avec du vrai goût, sains… » 213 .<br />

211 Laurent Habib, La communication transformative, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, Paris, 2010, p.13.<br />

212 Nous préférons le terme « sincérité » au terme « transparence » dans la mesure où ce <strong>de</strong>rnier se révèle être<br />

dans <strong>de</strong> nombreux cas utopique. En effet, faire preuve <strong>de</strong> transparence est difficilement applicable à l’ensemble<br />

<strong>de</strong>s entreprises, toutes activités confondues. Si la « transparence » s’apparente à un vœu pieux, la « sincérité »<br />

quant à elle s’adapte très facilement à toutes les situations.<br />

213 www.micheletaugustin.com<br />

118<br />

Fig. 40 - Logo « Michel et Augustin »


Cependant consciente qu’elle a encore <strong>de</strong> nombreux efforts à fournir pour satisfaire<br />

pleinement cette promesse, l’entreprise n’hésite pas à communiquer sur son site internet,<br />

autour du fait qu’il n’y a « Aucun conservateur dans les sablés […], les petits carrés […], les<br />

cookies […], les vaches en petit pot et les fruits entiers mixés. […] Certaines recettes à bases<br />

<strong>de</strong> fruits […] contiennent encore un peu <strong>de</strong> conservateur <strong>de</strong> fruit à savoir du sorbate <strong>de</strong><br />

potassium. […] C’est évi<strong>de</strong>mment sans aucun danger pour la santé. Mais c’est une question<br />

<strong>de</strong> philosophie donc on travaille d’arrache-pied à pouvoir bientôt s’en passer ! Nous ne<br />

sommes pas parfaits. On y travaille ;) ».<br />

Cette entreprise a compris qu’il ne servait à rien <strong>de</strong> masquer les faiblesses d’un produit ou<br />

d’une entreprise dans la mesure où à l’heure actuelle, avec notamment l’apparition du web<br />

2.0., les informations circulent très rapi<strong>de</strong>ment et les consommateurs ne sont désormais plus<br />

du tout dupes. C’est ce que nous avons démontré dans la première partie où nous évoquions<br />

la montée en puissance <strong>de</strong>s avis <strong>de</strong> consommateurs sur internet, <strong>de</strong>s applications pour<br />

smartphones permettant <strong>de</strong> connaître la qualité d’un produit, sa provenance, etc. Pire encore,<br />

masquer les faiblesses d’une marque ne fait qu’accentuer la suspicion <strong>de</strong>s consommateurs à<br />

son égard. Il s’agit dès lors d’adopter une attitu<strong>de</strong> constructive, en faisant un état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong><br />

la situation et en évoquant les pistes d’améliorations que l’entreprise s’engage à suivre,<br />

comme nous allons l’évoquer dans le I.2.2.<br />

I.2.2. Montrer le chemin à parcourir<br />

Pour accompagner l’émergence <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x comportements <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, la<br />

communication ne doit pas s’arrêter au simple constat d’une réalité perfectible. Elle doit<br />

également « rendre pensable le changement » 214 , en évoquant notamment les objectifs à<br />

atteindre, les difficultés rencontrées, les conséquences <strong>de</strong> ses actions et les démarches en<br />

cours. Elle doit, en effet, s’atteler à mettre en avant les enjeux d’une telle démarche, afin <strong>de</strong><br />

l’ancrer dans un futur proche et encourager les consommateurs à « passer à l’action ».<br />

214 Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 2010, p.10<br />

119


Par exemple, on peut citer l’entreprise « Innocent », qui produit <strong>de</strong>s smoothies, et qui s’est<br />

lancée dans le soutien aux fermes respectant <strong>de</strong>s principes socio-environnementaux. Pour se<br />

faire, la marque privilégie, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans, l’achat <strong>de</strong> ses fruits dans<br />

<strong>de</strong>s fermes certifiées par la Rainforest Alliance 215 . Elle explique, dans<br />

sa communication, qu’à l’heure actuelle , seules les bananes sont<br />

entièrement certifiées mais qu’elle engage <strong>de</strong>s démarches pour élargir<br />

cette certification à l’ensemble <strong>de</strong> ses fruits.<br />

La communication d’Innocent vient appuyer cette démarche, en présentant :<br />

- les enjeux : « Il est important d’être fiers <strong>de</strong> tous les fruits que nous utilisons dans nos<br />

smoothies » 216 .<br />

- les objectifs : « Maintenant, notre priorité est d’acheter tout notre jus d’ananas dans <strong>de</strong>s<br />

fermes elles aussi certifiées » 217 .<br />

- les obstacles : « Il n’existe que trois fermes certifiées qui produisent <strong>de</strong>s ananas dans le<br />

mon<strong>de</strong>, et nous <strong>de</strong>vons être sûrs <strong>de</strong> pouvoir transporter les ananas <strong>de</strong>s fermes jusqu’à nos<br />

mixeurs à smoothies géants, puis jusque chez vous » 218 .<br />

- les processus en marche: « Nous voulons travailler avec <strong>de</strong>s agriculteurs qui<br />

s’investissent le plus dans cette mission et les ai<strong>de</strong>r à réussir. Le programme ‘Plus près du<br />

fruit’ que nous avons lancé en 2007 fait appel à <strong>de</strong>s employés d’innocent et à <strong>de</strong>s<br />

auditeurs indépendants pour contrôler le niveau social et éthique <strong>de</strong> chaque ferme, et pour<br />

trouver <strong>de</strong>s solutions d’amélioration » 219 .<br />

- les conséquences : « nous sommes prêts à payer nos fruits un peu plus cher pour qu’ils<br />

aient les accréditations les plus élevées en matière d’éthique » 220 .<br />

215 Rainforest Alliance est une organisation non gouvernementale, qui s’est donnée pour objectif <strong>de</strong> « préserver<br />

la biodiversité et d’assurer <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> subsistance durables en transformant les pratiques agricoles, les<br />

pratiques commerciales et le comportement <strong>de</strong>s consommateurs ». (Source : www.rainforest-alliance.org)<br />

216 http://www.innocent.fr/notre-ethique/<strong>de</strong>s-fruits-issus-<strong>de</strong>-l-agriculture-durable<br />

217 id.<br />

218 id.<br />

219 id.<br />

220 id.<br />

120<br />

Fig. 41 - Logo « Innocent »


Si le second rôle <strong>de</strong> la communication que nous venons <strong>de</strong> mettre en avant, à savoir<br />

« accompagner le changement », peut s’apparenter à ce que l’on appelle aujourd’hui la<br />

« communication institutionnelle », il ne faut pour autant pas perdre <strong>de</strong> vue qu’y compris<br />

lorsque la communication se dotera pour principales missions d’évoquer les nouvelles<br />

responsabilités <strong>de</strong> l’entreprise en matière sociétale, celle-ci <strong>de</strong>vra impérativement faire un<br />

lien avec la légitimité <strong>de</strong> l’entreprise à agir dans <strong>de</strong> telles causes. Cette légitimité reposera<br />

sur les produits <strong>de</strong> ses marques, ainsi que son i<strong>de</strong>ntité et ses valeurs. L’adage « The product<br />

is the marketing » conservera donc tout son sens, dans la mesure où le produit <strong>de</strong>vra être<br />

l’incarnation <strong>de</strong> l’engagement sociétal <strong>de</strong> l’entreprise (à travers le port d’un label, par<br />

exemple).<br />

Par le biais <strong>de</strong> ce I., nous avons pu montrer que la communication, pour qu’elle puisse<br />

recréer un dialogue avec les consommateurs afin <strong>de</strong> les accompagner vers un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, <strong>de</strong>vait avant tout retrouver son rôle initial, à savoir « Dire ce que<br />

l’on fait ». Cette réconciliation entre le « Dire » et le « Faire » doit s’effectuer à la fois au<br />

niveau <strong>de</strong>s marques, qui doivent organiser leur communication autour <strong>de</strong> ce « qu’elles font »<br />

à savoir <strong>de</strong>s produits utiles et <strong>de</strong> qualité, mais aussi au niveau <strong>de</strong>s entreprises, qui doivent<br />

accompagner le consommateur dans leur quête <strong>de</strong> sens, en montrant l’exemple à travers leurs<br />

engagements dans <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s causes sociétales.<br />

Dès lors que la communication aura jeté les bases d’un dialogue sincère et honnête en<br />

présentant les marques et les entreprises conformément à ce qu’elles font, celle-ci <strong>de</strong>vra<br />

s’interroger sur la manière <strong>de</strong> faire vivre ce dialogue ainsi amorcé, en suscitant l’intérêt <strong>de</strong>s<br />

consommateurs.<br />

121


II. Susciter l’intérêt <strong>de</strong>s consommateurs : « Être utile »<br />

Pour que la communication retrouve sa légitimité et qu’elle parvienne à instaurer un<br />

dialogue avec les consommateurs sur le long terme, celle-ci <strong>de</strong>vra produire <strong>de</strong>s effets utiles<br />

dans leur vie quotidienne. Nous allons voir que la communication pourra intervenir à <strong>de</strong>ux<br />

niveaux : en amont <strong>de</strong> l’acte d’achat et pendant la <strong>consommation</strong> du bien.<br />

II.1. Être utile en amont <strong>de</strong> l’acte d’achat<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie, les consommateurs ont mis en place un<br />

système d’information parallèle à celle prodiguée par les marques. L’objectif est alors <strong>de</strong><br />

confronter le discours <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rnières avec un complément d’information considérée<br />

comme étant plus crédible et objectif. Cependant, cette recherche d’information a un coût,<br />

notamment en termes <strong>de</strong> temps passé, alors même que les consommateurs se trouvent dans<br />

une situation où le rapport au temps est <strong>de</strong> plus en plus exigu. Ce paradoxe constitue une<br />

excellente opportunité pour les marques, qui doivent dès lors investir dans un contenu<br />

sincère et honnête, en re<strong>de</strong>venant une source d’information fiable et en mettant en place <strong>de</strong>s<br />

dispositifs d’évaluation crédible.<br />

II.1.1. Re<strong>de</strong>venir une « source d’information fiable »<br />

Comme nous l’avons évoqué précé<strong>de</strong>mment, la communication doit repenser sa façon <strong>de</strong><br />

présenter les marques et les entreprises. Cependant, s’en tenir à « dire ce que l’on fait » ne<br />

suffira pas pour convaincre les consommateurs, qui restent désabusés face aux discours<br />

déclaratifs et sans fon<strong>de</strong>ments auxquels ils ont été confrontés pendant <strong>de</strong> nombreuses années.<br />

Si la communication veut re<strong>de</strong>venir une source d’information fiable aux yeux <strong>de</strong>s<br />

consommateurs, elle <strong>de</strong>vra opter pour un discours argumenté <strong>de</strong> preuves tangibles.<br />

122


Pour illustrer ce point, nous allons nous référer au programme publié par l’Association<br />

pour une Communication Plus Responsable 221 , qui s’intitule « Programme pour réformer<br />

globalement et radicalement les pratiques du secteur <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong> la<br />

publicité ». Parmi les différentes propositions énoncées, l’une d’entre elles vient<br />

parfaitement illustrer ce que nous venons d’évoquer. Il s’agit <strong>de</strong> la proposition 2.5 :<br />

« Pour prétendre être "vert", "green", "écologique", "respectueux <strong>de</strong> l'environnement",<br />

"meilleur pour la planète" (liste non-exhaustive), une organisation ou un produit doit<br />

afficher <strong>de</strong> façon immédiatement visible (sur le produit et le support <strong>de</strong> communication) un<br />

écolabel officiel décerné par un organisme indépendant (accrédité par la COFRAC), avec<br />

son numéro <strong>de</strong> certificat. En France, il s'agit <strong>de</strong> l'Ecolabel européen et <strong>de</strong> NF<br />

environnement. Citons également les labels Agriculture Biologique Europe et AB. En outre,<br />

seule une entreprise ou organisation certifiée ISO14001 (dotée <strong>d'un</strong> système <strong>de</strong> management<br />

environnemental) peut prétendre maîtriser l'impact environnemental <strong>de</strong> ses activités.<br />

Certains labels privés sont plus exigeants que les labels précités (Demeter, Nature et<br />

Progrès, Ange Bleu...). D'autres sont au contraire peu exigeants (Mieux vivre d'Auchan,<br />

Charte pour le Nettoyage durable, Naturally Sephora...). D'autres enfin sont <strong>de</strong> simples<br />

indications <strong>de</strong> conformité à la règlementation en vigueur (Point Vert, logo "respecte la<br />

couche d'ozone"...) » 222 .<br />

Cette proposition suggère donc que chaque déclaration environnementale soit<br />

accompagnée d’une preuve tangible, qui est dans ce cas-là un label. Les marques <strong>de</strong>vront<br />

s’inspirer <strong>de</strong> ce type d’initiatives afin d’acquérir un réflexe qui consiste à systématiquement<br />

prouver chaque élément <strong>de</strong> discours. C’est en effet le prix à payer pour reconquérir la<br />

confiance <strong>de</strong>s consommateurs et re<strong>de</strong>venir une source d’information fiable.<br />

Nous allons voir que les marques pourront également être utiles aux consommateurs en<br />

encourageant voire en mettant en place ses propres dispositifs d’évaluation.<br />

221 L’Association pour une Communication Plus Responsable, anciennement intitulé « Collectif <strong>de</strong>s<br />

publicitaires Eco-socio-innovants » est « issue <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> position, en avril 2008, <strong>de</strong> 8 patrons d'agences <strong>de</strong><br />

communication pour un changement <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong>s métiers <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong> la publicité ».<br />

(Source : http://collectifcom<strong>responsable</strong>.fr)<br />

222 Cette proposition n’a pas encore été rendue publique dans ces termes puisqu’elle est la résultante d’ateliers<br />

<strong>de</strong> travail qui se sont tenus en mai 2012 auxquels j’ai participé avec les membres <strong>de</strong> l’association et dont les<br />

restitutions sont en cours.<br />

123


II.1.2. Mettre en place <strong>de</strong>s dispositifs d’évaluation crédibles<br />

Si les marques et les entreprises se lancent dans une dynamique d’amélioration continue<br />

par le biais d’une « démarche qualité » et par l’intégration à leurs activités <strong>de</strong> nouvelles<br />

responsabilités sociétales, elles <strong>de</strong>vront encourager la mise en place d’évaluation. En effet, il<br />

est indispensable pour celles-ci d’obtenir <strong>de</strong>s preuves tangibles <strong>de</strong> leurs efforts, en termes <strong>de</strong><br />

qualité <strong>de</strong> leurs produits et <strong>de</strong> responsabilisation <strong>de</strong> leurs activités.<br />

Pour cela, les entreprises et les marques <strong>de</strong>vront tout d’abord encourager les dispositifs<br />

d’évaluation existants en leurs permettant, par exemple, un accès facilité aux informations<br />

dont ils ont besoin. Cette démarche a un double avantage : il s’agit dans un premier temps<br />

d’envoyer un signal fort quant à la volonté <strong>de</strong> l’entreprise d’être le plus sincère possible dans<br />

le compte-rendu <strong>de</strong> ses activités, mais aussi d’obtenir davantage <strong>de</strong> preuves « objectives »<br />

relatives à la « démarche qualité » mise en place. Parmi ces dispositifs d’évaluation, on peut<br />

citer les « blogs test » qui se sont multipliés ces <strong>de</strong>rnières années. En effet, on constate <strong>de</strong><br />

plus en plus que <strong>de</strong>s blogs se créent en ayant pour objectif <strong>de</strong> tester un certain nombre <strong>de</strong><br />

produits, souvent selon une thématique donnée (alimentation, produits <strong>de</strong> beauté, etc.), en<br />

présentant les avantages et les inconvénients du produit ainsi testé. Entrer en relation avec<br />

ces blogueurs prescripteurs peut être une excellente solution pour se doter <strong>de</strong> preuves<br />

tangibles et « objectives » <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> ses produits. Il faudra cependant être très<br />

intransigeant quant à la relation entre le blogueur et la marque et s’interdire toute<br />

complaisance <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier ou billet sponsorisé (cf. la section 2 à ce sujet), si la marque veut<br />

reconquérir la confiance <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

De plus, les entreprises et les marques pourront aller plus loin en créant leur propre<br />

dispositif d’évaluation. L’écueil à éviter sera bien sur <strong>de</strong> masquer les éventuelles faiblesses<br />

mises en avant par les résultats. Pour que les consommateurs accor<strong>de</strong>nt du crédit à ce type<br />

d’initiatives, il sera indispensable <strong>de</strong> les impliquer dans le processus, par une démarche<br />

collaborative. On peut par exemple citer le site internet <strong>de</strong> Sephora, qui permet aux<br />

consommateurs <strong>de</strong> donner leurs avis sur les produits en ligne et consulter les avis <strong>de</strong>s autres<br />

consommateurs. Dans ce cadre-là, les marques <strong>de</strong>vront être sincères quant à la métho<strong>de</strong><br />

utilisée pour modérer les avis émis, afin <strong>de</strong> ne pas être accusées <strong>de</strong> « censure » et <strong>de</strong><br />

subjectivité dans les avis publiés.<br />

124


Les initiatives que nous venons <strong>de</strong> présenter seront autant d’exemples à suivre pour que<br />

les marques puissent re<strong>de</strong>venir présentes dans le quotidien <strong>de</strong>s consommateurs, en leur<br />

proposant <strong>de</strong>s solutions utiles, en amont <strong>de</strong> leurs achats. Il s’agit notamment <strong>de</strong> leur<br />

permettre d’accé<strong>de</strong>r à une information fiable et la plus « objective » possible, afin d’éclairer<br />

au mieux leur choix en matière <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>. Nous allons désormais voir que les<br />

marques et les entreprises peuvent également être utiles aux consommateurs en les<br />

accompagnant dans leur expérience client une fois le produit acheté.<br />

II.2. Être utile en accompagnant l’expérience client<br />

La communication peut également s’avérer utile pour accompagner le consommateur dans<br />

son expérience avec la marque. Cette utilité est souvent appelé « brand content » ou<br />

« contenu <strong>de</strong> marque » et désigne un contenu « directement créé par et pour une marque, qui<br />

en est l’éditeur, le diffuseur et le producteur. Ce contenu a un lien ‘naturel’ avec l’ADN <strong>de</strong> la<br />

marque » 223 .<br />

Nous allons voir que ce « lien naturel » passe par les produits, qui permettent <strong>de</strong> créer du<br />

contenu autour <strong>de</strong> leur valeur intrinsèque mais également autour <strong>de</strong> leur valeur extrinsèque à<br />

travers les nouvelles responsabilités sociétales <strong>de</strong>s entreprises dont il est le symbole.<br />

II.2.1. Créer un contenu utile autour <strong>de</strong> la valeur intrinsèque du produit<br />

Lorsque l’on interroge les consommateurs sur ce qu’ils atten<strong>de</strong>nt du « brand content », on<br />

se rend compte que « 84% <strong>de</strong>s internautes souhaitent y trouver <strong>de</strong>s informations produits et<br />

<strong>de</strong>s tutoriaux pour se faire leur propre opinion » 224 . Cependant, il semblerait que <strong>de</strong> plus en<br />

plus, le brand content, <strong>de</strong>venu le <strong>nouveau</strong> « saint graal » <strong>de</strong> la communication, se détache<br />

aujourd’hui <strong>de</strong> « l’ADN » <strong>de</strong> la marque afin <strong>de</strong> ne pas être assimilé à <strong>de</strong> la publicité aux yeux<br />

<strong>de</strong>s consommateurs. Cette tentative <strong>de</strong> « dissimulation » ne fait qu’accentuer les soupçons <strong>de</strong><br />

ces <strong>de</strong>rniers, qui ne comprennent plus dès lors le lien entre le discours et la marque.<br />

223<br />

Définition issus <strong>de</strong> la présentation d’Olivier Binisti, Brand content : quand la marque prend le pouvoir ?,<br />

Novembre 2011.<br />

Disponible sur http://www.sli<strong>de</strong>share.net/obinisti/le-brand-content-quand-les-marques-prennent-le-pouvoir<br />

224<br />

Yahoo !, Brand Content : quels <strong>nouveau</strong>x enjeux pour les marques ?, mars 2012<br />

125


Au contraire, nous considérons que la marque <strong>de</strong>vrait assumer son rôle <strong>de</strong> « créateur <strong>de</strong><br />

contenu », en proposant <strong>de</strong>s solutions utiles à ses consommateurs, par le biais <strong>de</strong> ses<br />

produits. Il s’agit par exemple <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s fiches recettes, <strong>de</strong>s « livrets blancs », <strong>de</strong>s<br />

applications mobiles, etc. Nous citerons un exemple emblématique, celui <strong>de</strong> Nestlé, qui a<br />

crée un site internet « croquonslavie.fr », <strong>de</strong>stiné à ai<strong>de</strong>r les consommateurs à adopter une<br />

meilleure nutrition. C’est ce que confirme Claire Boca, Directrice <strong>de</strong> la relation clients <strong>de</strong><br />

Nestlé : « Cette nouvelle plate-forme<br />

relationnelle ‘Croquons la Vie’ traduit l’ambition<br />

du groupe Nestlé d’ai<strong>de</strong>r les consommateurs à<br />

Mieux Manger, Mieux Vivre au quotidien et ce<br />

en leur apportant <strong>de</strong>s solutions simples,<br />

concrètes, adaptées à leur mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie » 225 . Par<br />

le biais <strong>de</strong> cette plate-forme, Nestlé propose par<br />

exemple <strong>de</strong>s recettes, dans lesquelles l’on<br />

retrouve ses produits, accompagnées <strong>de</strong> coupons<br />

<strong>de</strong> réduction, d’avis <strong>de</strong> consommateurs, ainsi que<br />

<strong>de</strong>s conseils bien-être. On y retrouve également<br />

<strong>de</strong>s interviews <strong>de</strong> professionnels, ainsi que la<br />

possibilité pour les consommateurs <strong>de</strong> proposer<br />

<strong>de</strong>s nouvelles idées par le biais <strong>de</strong> la « boîte à idées ».<br />

Cet exemple est emblématique <strong>de</strong> l’instauration d’un dialogue avec les consommateurs,<br />

impulsé autour <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s produits d’une marque, qui souhaite accompagner le<br />

consommateur dans son expérience, en leur proposant <strong>de</strong>s solutions utiles. Nous allons<br />

maintenant nous intéresser à la production d’autres contenus utiles, où le produit est toujours<br />

prédominant, mais davantage centrés autour <strong>de</strong> ses qualités extrinsèques, qui correspon<strong>de</strong>nt<br />

aux nouvelles responsabilités sociétales <strong>de</strong>s entreprises.<br />

225 http://www.blogagroalimentaire.com/nestle-site-internet-croquons-la-vie<br />

126<br />

Fig. 31 - Site internet www.croquonslavie.fr


II.2.2. Créer un contenu utile autour <strong>de</strong> la valeur extrinsèque du produit<br />

Dans ce cas <strong>de</strong> figure, le brand content se révèle être un outil indispensable pour<br />

accompagner le changement. En effet, les entreprises vont alors proposer du contenu<br />

permettant <strong>de</strong> faire comprendre aux consommateurs l’importance <strong>de</strong> la cause qu’elles<br />

défen<strong>de</strong>nt, et dont le produit en est le symbole. Il s’agit dès lors <strong>de</strong> transmettre <strong>de</strong>s<br />

informations utiles aux consommateurs (présentation <strong>de</strong>s enjeux, <strong>de</strong>s défis <strong>de</strong> la cause<br />

soutenue) lui permettant <strong>de</strong> comprendre qu’à travers la <strong>consommation</strong> <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong><br />

l’entreprise, ces <strong>de</strong>rniers participeront à faire avancer la cause défendue. Les consommateurs<br />

prennent alors conscience du pouvoir que leur confère la <strong>consommation</strong>, ce qui est<br />

indispensable pour pouvoir créer un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, où les<br />

« consom’acteurs » sont au cœur du système.<br />

Nous mentionnerons <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong> l’entreprise Innocent, qui s’engage dans une opération<br />

Fig. 432 - Site internet<br />

www.adoptyourbee.com<br />

« Adopt your bee » 226 , dont l’objectif est <strong>de</strong> participer à<br />

l’éradication <strong>de</strong> la disparition <strong>de</strong>s abeilles. Par le biais<br />

d’un site internet dédié (adoptyourbee.com), l’entreprise<br />

présente les enjeux d’une telle opération, en rappelant par<br />

exemple les raisons évoquées par les scientifiques pour<br />

expliquer la disparition <strong>de</strong>s abeilles, leurs rôles dans la<br />

production alimentaire ou encore leur importance dans la<br />

production <strong>de</strong>s smoothies Innocent (« les smoothies<br />

Innocent dépen<strong>de</strong>nt directement du travail <strong>de</strong>s abeilles. Eh<br />

oui sans abeille, il n'y a pas <strong>de</strong> pollinisation, sans<br />

pollinisation les fleurs ne produisent pas <strong>de</strong> fruits et sans<br />

fruits… on peut dire au revoir à nos smoothies,<br />

sniff » 227 ). En reliant cette action avec son i<strong>de</strong>ntité, ses valeurs, ainsi que ses produits,<br />

l’entreprise renforce la légitimité <strong>de</strong> son intervention. Innocent mettra d’ailleurs un point<br />

d’honneur à placer ses produits au cœur <strong>de</strong> son engagement sociétal, en proposant aux<br />

consommateurs « d’adopter une abeille » pour chaque smoothie acheté. L’entreprise<br />

reversera dès lors une somme à la SCA (Société Centrale d’Apiculture), pour que celle-ci<br />

puisse créer <strong>de</strong> nouvelles ruches.<br />

226 « Adoptez votre abeille »<br />

227 http://www.adoptyourbee.com/commitment_engagement.php?country=france#top<br />

127


Cet exemple nous permet <strong>de</strong> voir que les entreprises <strong>de</strong>vront s’appuyer sur leurs marques<br />

et leurs produits afin d’en faire les symboles d’un engagement collectif. Il s’agit dès lors <strong>de</strong><br />

faire prendre conscience aux consommateurs <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong>s impacts qu’ils peuvent<br />

avoir par le biais <strong>de</strong> leur pouvoir <strong>de</strong> consommer. C’est en effet une piste très intéressante<br />

pour ai<strong>de</strong>r les entreprises à impulser le changement et accompagner les consommateurs dans<br />

le « passage à l’acte ».<br />

> Conclusion <strong>de</strong> la Section 1 <<br />

La première section <strong>de</strong> ce chapitre nous a permis <strong>de</strong> montrer que pour construire un<br />

dialogue constructif avec les consommateurs, il fallait tout d’abord refondre les bases <strong>de</strong> la<br />

relation <strong>de</strong> confiance. En effet, les entreprises et les marques doivent, par le biais <strong>de</strong> leur<br />

communication, repenser entièrement leur façon <strong>de</strong> se présenter en mettant un point<br />

d’honneur à « Dire ce que l’on fait ». Ce n’est qu’en se présentant <strong>de</strong> cette manière, <strong>de</strong> façon<br />

sincère et honnête, que les entreprises pourront prétendre reconstruire une relation <strong>de</strong><br />

confiance, indispensable pour créer les bases d’un dialogue.<br />

Nous avons également montré, qu’une fois les bases établies, les entreprises et les<br />

marques <strong>de</strong>vront faire vivre ce dialogue, en suscitant l’intérêt <strong>de</strong>s consommateurs. Pour se<br />

faire, les entreprises <strong>de</strong>vront produire <strong>de</strong>s solutions utiles à ces <strong>de</strong>rniers, que ce soit en amont<br />

(en <strong>de</strong>venant par exemple une source d’information fiable) ou pendant l’acte d’achat (en<br />

accompagnant l’expérience client, par le biais du brand content, notamment).<br />

Cependant, pour que la confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises et <strong>de</strong>s<br />

marques soit renforcée, il est indispensable que le dialogue puisse perdurer dans le temps.<br />

Nous allons voir dans la secon<strong>de</strong> section les différents éléments à prendre en compte pour<br />

que les échanges puissent s’établir sur un « temps long ».<br />

128


Section 2 : Encourager le dialogue et le faire perdurer<br />

Comme nous l’avons vu dans la première section, la communication a un rôle central à<br />

jouer dans l’instauration d’un <strong>nouveau</strong> dialogue avec le consommateur. Une fois les bases<br />

d’une nouvelle relation <strong>de</strong> confiance établies, il convient désormais <strong>de</strong> tout mettre en œuvre<br />

pour que le dialogue perdure.<br />

Nous allons voir, dans cette secon<strong>de</strong> section, que les entreprises et les marques <strong>de</strong>vront<br />

dans un premier temps opter pour <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x outils <strong>de</strong> communication afin <strong>de</strong> faciliter les<br />

échanges avec les consommateurs. En effet, il sera désormais indispensable d’en finir avec<br />

une communication « push » qui s’impose à ces <strong>de</strong>rniers. Nous verrons ensuite, que pour<br />

faire perdurer le dialogue dans le temps, les entreprises et les marques <strong>de</strong>vront s’imposer une<br />

éthique <strong>responsable</strong>, afin <strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x principes d’actions, conforme au<br />

discours tenu.<br />

I. Encourager le dialogue par le choix <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x outils : « Faciliter l’échange »<br />

Pour faciliter l’émergence d’un véritable échange avec les consommateurs, les entreprises<br />

et les marques vont <strong>de</strong>voir repenser leurs outils, afin <strong>de</strong> privilégier ceux encourageant<br />

l’interaction et non plus la diffusion d’un message à sens unique. Pour se faire nous nous<br />

interrogerons sur la légitimité <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> la publicité, outil privilégié d’une<br />

communication « push » imposée. Nous évoquerons ensuite différents d’outils participatifs et<br />

expérientiels, qui seront autant <strong>de</strong> pistes à creuser pour favoriser les échanges.<br />

I.1. Vers la fin <strong>de</strong> la publicité ?<br />

Comme nous l’avons vu dans la première partie, la publicité est <strong>de</strong> plus en plus rejetée par<br />

les consommateurs qui la considèrent comme étant « envahissante » et « agressive ». Nous<br />

montrerons que ce rejet témoigne <strong>de</strong>s limites d’un outil qui se révèle être à la fois le symbole<br />

<strong>de</strong> « l’opulence d’un capitalisme triomphant », mais aussi celui d’une communication<br />

unidirectionnelle qui s’impose aux consommateurs.<br />

129


I.1.1. La publicité : « le porte drapeau d’un capitalisme triomphant » 228<br />

Comme nous l’avons vu précé<strong>de</strong>mment, les consommateurs rejettent <strong>de</strong> plus en plus les<br />

dérives d’un capitalisme outrancier, où produire et consommer « toujours plus » <strong>de</strong>vient un<br />

caractère structurant du système. La publicité est <strong>de</strong>venu le symbole <strong>de</strong> « cette société<br />

opulente » en participant à la promotion d’une « hyper<strong>consommation</strong> déraisonnée ».<br />

Si les consommateurs associent la publicité aux dérives du capitalisme, c’est notamment<br />

en référence aux sommes colossales investies dans cet outil <strong>de</strong> communication, d’autant plus<br />

considérées comme étant une attitu<strong>de</strong> indécente face aux différentes crises que doit affronter<br />

la société à l’heure actuelle. En effet, en 2011, plus <strong>de</strong> 11,4 milliards d’euros ont été<br />

dépensés par les annonceurs dans la publicité. Le film « 99 Francs » <strong>de</strong> Fré<strong>de</strong>ric Beigbe<strong>de</strong>r,<br />

qui a remporté un très grand succès en 2007, a été l’un premier à désacraliser à ce point le<br />

mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la publicité. Même si la plupart <strong>de</strong> ce qui est énoncé est bien évi<strong>de</strong>mment très<br />

caricatural, le film a participé à médiatiser les sommes colossales investies dans ce qui est<br />

présenté comme étant quelque chose <strong>de</strong> très éphémère et indécent face notamment aux<br />

difficultés financières d’une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s pays pauvres. Le générique <strong>de</strong> fin du film se<br />

termine d’ailleurs sur la phrase suivante : « Chaque année, le budget mondial dépensé en<br />

publicité s’élève à 500 milliards <strong>de</strong> dollars. Une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’ONU estime que pour réduire <strong>de</strong><br />

moitié la faim dans le mon<strong>de</strong> 10% <strong>de</strong> cette somme suffirait » 229 .<br />

Il faut également noter que les consommateurs refusent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir assumer<br />

le coût très élevé <strong>de</strong> la publicité, en payant <strong>de</strong>s produits dont les prix ont été augmentés pour<br />

palier à ce surcoût. C’est d’ailleurs ce qu’ont révélé les résultats <strong>de</strong> l’enquête que nous avons<br />

réalisée. À la question ouverte « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ? », voici un<br />

extrait <strong>de</strong>s réponses obtenues : « c’est une marque qui ne se sert pas <strong>de</strong> la pub comme un<br />

moyen <strong>de</strong> conquête du marché (pour moi si une entreprise a un énorme budget pub c'est que<br />

son produit n'est pas bon puisqu'elle doit argumenter pour qu'on l'achète) », « c’est aussi une<br />

marque ou le prix du produit n’est pas multiplié par <strong>de</strong>ux en raison <strong>de</strong>s coûts <strong>de</strong> marketing et<br />

publicité... », « [Une marque] qui ne s'affiche pas dans les pubs (ce qui ferait baisser les<br />

prix) » 230 .<br />

228 Vincent Balusseau, Advertisng Reloa<strong>de</strong>d, pour une publicité (encore) plus utile, Influencia.net, mai 2010.<br />

229 Jan Kounen (réal.), 99 francs, Pathé Distribution, 2007, 99 minutes.<br />

230 Annexe IV<br />

130


La publicité est donc <strong>de</strong> plus en plus rejetée par les consommateurs qui voient en elle le<br />

symbole <strong>de</strong>s dérives du capitalisme. Accusée <strong>de</strong> faire la promotion d’une <strong>consommation</strong><br />

ir<strong>responsable</strong>, la publicité apparaît dès lors comme étant un outil inadapté aux nouvelles<br />

aspirations d’une société en quête <strong>de</strong> sens. Nous verrons également que la publicité ne<br />

permet pas <strong>de</strong> construire les bases d’un dialogue dans la mesure où celle-ci est<br />

unidirectionnelle et s’impose aux consommateurs, <strong>de</strong> façon quelque fois brutale.<br />

I.1.2. La publicité : un outil unidirectionnel qui s’impose aux consommateurs<br />

La secon<strong>de</strong> limite à laquelle est confrontée la publicité rési<strong>de</strong> dans son inadéquation<br />

croissante avec les évolutions <strong>de</strong> la société. Alors que les consommateurs <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong><br />

moins en moins passifs et <strong>de</strong> plus en plus complexes <strong>de</strong> part l’hétérogénéité <strong>de</strong> leurs besoins,<br />

que les médias et les audiences sont <strong>de</strong> plus en plus fragmentés et que les consommateurs<br />

aspirent à une quête <strong>de</strong> sens dans leur <strong>consommation</strong>, la publicité ne peut intégrer dans son<br />

<strong>modèle</strong> ces évolutions structurelles.<br />

En effet, celle-ci ne peut être efficace et légitime que dans un « <strong>modèle</strong> classique », au<br />

sein duquel tout d’abord les consommateurs sont passifs. Comme le rappelle Nicolas Riou<br />

dans son ouvrage « Marketing Anatomy », « le crédo ‘persuasion is repetition’» 231 , n’est<br />

valable que pour <strong>de</strong>s individus passifs à qui l’on répète <strong>de</strong>s messages mais n’a aujourd’hui<br />

plus aucun sens, face à <strong>de</strong>s consommateurs <strong>de</strong>venus actifs « qui s’approprient les messages,<br />

conversent sur les marques et peuvent déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> lancer un buzz négatif si un message ne<br />

leur convient pas » 232 .<br />

La publicité nécessite également que les besoins <strong>de</strong>s consommateurs soient homogènes<br />

dans la mesure où celle-ci s’adresse, par le biais d’un message unique, à une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong><br />

la population grâce aux médias <strong>de</strong> masse. Comme le rappelle Nicolas Chemla, International<br />

Strategy Office chez TBWA\ Being, « Comme la société qu’elle était censée moyenniser,<br />

Mme Michu s’est atomisée. Elle est multiple, plurielle, variée » 233 .<br />

231<br />

Nicolas Riou, Marketing Anatomy, Les nouvelles tendances marketing passées au scanner, Octobre 2009,<br />

Paris, Eyrolles, p.9<br />

232<br />

Jean Watin-Augouard, « Nouveau Paradigme L’humilité », entretien avec Nicolas Riou, avril 2010, Revue<br />

<strong>de</strong>s marques, numéro 70.<br />

233<br />

Présentation <strong>de</strong> Nicolas Riou, Le marketing <strong>de</strong> <strong>de</strong>main s’invente aujourd’hui, janvier 2010, sli<strong>de</strong> 19.<br />

Disponible sur http://www.sli<strong>de</strong>share.net/CREADIGITAL/creadigital-day-nicolas-riou<br />

131


Enfin, la publicité est fondée sur la « superpuissance » <strong>de</strong>s médias <strong>de</strong> masse, support sur<br />

lesquels elle véhicule ses messages. Hors, on constate <strong>de</strong>puis quelques années que la<br />

puissance <strong>de</strong>s médias est <strong>de</strong> plus en plus remise en cause, notamment à cause <strong>de</strong> la<br />

fragmentation <strong>de</strong>s médias et <strong>de</strong>s audiences. L’arrivée <strong>de</strong>s chaînes <strong>de</strong> la TNT, l’évolution <strong>de</strong>s<br />

fréquences radios, la multiplication <strong>de</strong>s titres <strong>de</strong> presse avec notamment l’arrivée <strong>de</strong> la presse<br />

gratuite, sont autant d’éléments qui ont participé à la dilution <strong>de</strong> l’audience, ce qui rend<br />

l’impact <strong>de</strong> la publicité beaucoup moins efficace.<br />

Il <strong>de</strong>vient alors très compliqué <strong>de</strong> continuer d’avoir recours à un outil dans un <strong>nouveau</strong><br />

<strong>modèle</strong> qui ne lui assure plus du tout ses conditions d’efficacité. Pire encore, nous allons voir<br />

que la publicité se révèle être contre-productive, dans la mesure où elle ne permet pas <strong>de</strong><br />

construire un dialogue avec les consommateurs.<br />

En effet, comme nous l’avons vu précé<strong>de</strong>mment, la publicité est <strong>de</strong> plus en plus accusée<br />

d’être « envahissante » et « agressive ». C’est d’ailleurs ce qu’illustre le <strong>de</strong>ssin humoristique<br />

ci-contre. Dans ce contexte, il <strong>de</strong>vient<br />

dès lors très difficile d’engager un<br />

dialogue avec les consommateurs dans<br />

la mesure où la publicité ne permet pas<br />

d’interactions. Elle s’impose aux<br />

individus, comme le rappelle Paul<br />

Isakson : « Traditional advertising is<br />

the medium for the maker’s story, told<br />

how they want it told, where they want<br />

it told, and when they want it told » 234 .<br />

Face à ce constat accablant, il <strong>de</strong>vient dès lors indispensable <strong>de</strong> réfléchir à <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x<br />

outils participatifs, permettant d’encourager un dialogue permanent avec les consommateurs.<br />

234 « La publicité traditionnelle est un outil fait pour les marketeurs, qui raconte une histoire <strong>de</strong> la façon dont ils<br />

le souhaite, où ils le souhaite et quand ils le souhaite ».<br />

Interview complète : Annexe IX<br />

132<br />

Fig. 33 - Dessin humoristique - Hugh


I.2. Privilégier les outils expérientiels et participatifs<br />

Face à une « communication média » qui perd peu à peu <strong>de</strong> sa pertinence au regard <strong>de</strong>s<br />

évolutions <strong>de</strong> la société mo<strong>de</strong>rne, nous verrons que la « communication hors média » trouve<br />

sa place face aux nouvelles aspirations <strong>de</strong>s consommateurs. Nous insisterons sur les outils<br />

hors médias qui présentent les <strong>de</strong>ux caractéristiques suivantes : privilégier l’expérience client<br />

et la participation.<br />

I.2.1. Des outils « experience centric »<br />

Pour encourager le dialogue avec les consommateurs, il est indispensable que les<br />

entreprises et les marques puissent partager une expérience commune, sur la base <strong>de</strong> laquelle<br />

les échanges pourront porter. La communication a donc pour objectif <strong>de</strong> rapprocher la<br />

marque du quotidien <strong>de</strong>s consommateurs, d’aller à leur rencontre pour les inciter à partager<br />

cette expérience commune. La relation directe avec le consommateur sera donc à privilégier<br />

dans le choix <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> communication.<br />

Il faudra notamment s’intéresser à l’événementiel, en lui redonnant la place qu’il mérite<br />

dans la construction d’une relation directe entre le consommateur et la marque. En effet, la<br />

marque vient à la rencontre <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier dans son quotidien, ce qui l’inscrit dans une réalité<br />

tangible. Les opérations <strong>de</strong> street marketing et <strong>de</strong> dégustation, seront autant d’outils<br />

permettant <strong>de</strong> placer le produit au cœur <strong>de</strong> la relation, la qualité <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier prouvant dès<br />

lors aux consommateurs la véracité du discours tenu. Parmi <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> street<br />

marketing réussies, nous pouvons citer la marque « Les 2 vaches », appartenant au groupe<br />

Danone. Dans le cadre du lancement <strong>de</strong> la marque, cette <strong>de</strong>rnière a<br />

mis en place un road show dans toute la France, à bord d’un car<br />

customisé aux couleurs <strong>de</strong> la marque. Au programme : dégustation<br />

<strong>de</strong>s produits, explication <strong>de</strong> leur engagement à l’égard <strong>de</strong>s<br />

fermiers bio, animations autour <strong>de</strong> l’agriculture biologique, etc.<br />

Cette campagne « hors média » <strong>de</strong> lancement<br />

s’est révélée être un franc succès pour la marque<br />

qui souhaitait privilégier avant tout une<br />

communication <strong>de</strong> proximité.<br />

Fig. 45 - Dispositif <strong>de</strong> street marketing - Les 2 Vaches - 2010<br />

133


I.2.2. Des outils participatifs du web 2.0<br />

La communication 2.0 s’est fortement développée ces <strong>de</strong>rnières années avec l’arrivée<br />

d’outils puissants tels que Facebook, Twitter, ou encore Via<strong>de</strong>o et LinkedIn. Ces différents<br />

outils peuvent s’avérer très pertinents et permettre <strong>de</strong> tisser un dialogue permanent avec les<br />

consommateurs. Il est cependant très important <strong>de</strong> bien connaître les co<strong>de</strong>s et les règles à<br />

respecter pour que ces outils soient utilisés <strong>de</strong> façon appropriée.<br />

D’autres outils participatifs, tels que les blogs, les wikis ou autres applications mobiles,<br />

seront également à intégrer afin <strong>de</strong> permettre à la marque d’être présente dans le quotidien<br />

<strong>de</strong>s consommateurs. Nous allons nous focaliser sur une <strong>de</strong>s possibilités permises par le web<br />

2.0 : la géolocalisation. Il faudra, en effet, s’intéresser <strong>de</strong> près aux nouvelles évolutions<br />

technologiques qui vont permettre dans un futur proche <strong>de</strong> rendre cette technique encore plus<br />

attractive pour les marques et les consommateurs. On peut d’ores et déjà citer une opération<br />

lancée sur le réseau social « Foursquare » par la marque <strong>de</strong> chaussure Jimmy Choo.<br />

L’opération baptisée « Catch a choo » a pris la forme d’une chasse aux trésors dans les rues<br />

<strong>de</strong> Londres. Il s’agissait <strong>de</strong> suivre les « check-in » <strong>de</strong> la marque sur « Foursquare », afin<br />

d’accompagner le parcours <strong>de</strong> la paire <strong>de</strong> chaussure <strong>de</strong> Jimmy Choo. Le premier participant<br />

parvenant à intercepter la paire <strong>de</strong> chaussure dans l’une <strong>de</strong> ses localisations, remportait la<br />

fameuse paire en ca<strong>de</strong>au. Cette opération fut un véritable succès avec pas moins <strong>de</strong> 4000<br />

participants, 4000 tweets générés autour <strong>de</strong> l’opération, 250 articles rédigés par <strong>de</strong>s<br />

blogueurs, etc 235 .<br />

Les différents outils que nous avons cités dans ce I.2. seront autant <strong>de</strong> pistes à explorer<br />

pour faciliter les échanges et encourager un dialogue constructif entre les marques et les<br />

consommateurs. Nous allons voir désormais, qu’il est important que ce dialogue perdure,<br />

pour renouer avec la confiance <strong>de</strong>s consommateurs et envisager <strong>de</strong> les accompagner vers<br />

l’adoption <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x comportements <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

235 Selon Charlie Osmond, Directeur <strong>de</strong> l’Agence FreshNetworks, en charge <strong>de</strong> l’opération.<br />

134


II. Permettre au dialogue <strong>de</strong> perdurer dans le temps : « S’imposer une éthique<br />

<strong>responsable</strong> »<br />

Si les entreprises et les marques souhaitent retrouver la confiance <strong>de</strong>s consommateurs et<br />

instaurer un dialogue qui perdure dans le temps, ces <strong>de</strong>rnières <strong>de</strong>vront s’imposer et respecter<br />

une éthique en cohérence avec les <strong>nouveau</strong>x principes qui les régissent. Il s’agit dès <strong>de</strong> ne<br />

plus se contenter <strong>de</strong> « Dire ce que l’on fait » mais également <strong>de</strong> « Faire ce que l’on dit ». Il<br />

faudra dans un premier temps s’attacher à définir les principes d’actions autour <strong>de</strong>squelles<br />

l’éthique <strong>de</strong> l’entreprise se construit, et le faire transparaitre dans le choix <strong>de</strong>s outils et <strong>de</strong>s<br />

pratiques <strong>de</strong> communication.<br />

II.1. L’éthique : « Faire ce que l’on dit »<br />

La notion d’ « éthique d’entreprise » reste à l’heure actuelle un terme relativement flou,<br />

qui est encore très souvent confondu avec <strong>de</strong>s notions voisines telles que les « valeurs », la<br />

« morale », la « déontologie » ou encore le « droit ». Nous tenterons <strong>de</strong> proposer une<br />

définition, permettant <strong>de</strong> comprendre les tenants et aboutissants <strong>de</strong> cette notion, et nous<br />

montrerons également comment ce principe théorique peut s’appliquer au quotidien, par<br />

l’intermédiaire <strong>de</strong> principes d’actions.<br />

II.1.1. Définition<br />

Pour définir l’éthique d’entreprise, nous retiendrons la définition proposée par Jacques<br />

Lauriol et Hervé Masure, dans leur ouvrage « L’éthique d’entreprise à la croisée <strong>de</strong>s<br />

chemins » 236 . Ils considèrent l’éthique d’entreprise comme étant « un ensemble <strong>de</strong> principes<br />

et <strong>de</strong> moyens qui actualisent l’idée que la performance d’ensemble d’une entreprise doit<br />

prendre en compte <strong>de</strong>s dimensions non économiques et que tous les moyens ne sont pas<br />

acceptables pour la réaliser même si la loi ne les interdit pas » 237 .<br />

236 Jacques Lauriol et Hervé Masure, L’éthique d’entreprise à la croisée <strong>de</strong>s chemins, Paris, L’Harmattan, 2003,<br />

182 pages.<br />

237 Id. p. 67<br />

135


Cette définition permet <strong>de</strong> mettre en avant <strong>de</strong>ux éléments importants. Il s’agit tout d’abord<br />

du fait que l’éthique n’est pas qu’un principe théorique qui ne se traduirait pas dans une<br />

réalité concrète. Au contraire, la définition souligne qu’il s’agit d’un « ensemble <strong>de</strong> principe<br />

et <strong>de</strong> moyens », ce qui permet <strong>de</strong> montrer qu’une entreprise se revendiquant avoir une<br />

éthique, doit traduire les concepts qui la régissent en principes d’actions et en moyens<br />

concrets pour y parvenir.<br />

Le second élément important <strong>de</strong> cette définition concerne le terme « acceptable ». Cette<br />

notion permet d’introduire l’idée qu’une éthique peut varier d’une entreprise à l’autre, en<br />

fonction <strong>de</strong> ce qu’elle considère ou non comme étant <strong>de</strong>s « moyens acceptables » pour<br />

parvenir à optimiser sa performance. Dès lors, nous allons voir qu’il est indispensable <strong>de</strong><br />

formaliser son éthique, par le biais <strong>de</strong> principes d’actions, afin que l’entreprise puisse se<br />

doter <strong>de</strong> principes directeurs tant dans son organisation interne que dans ses actions externes.<br />

II.1.2. Formaliser son éthique par <strong>de</strong>s principes d’actions <strong>responsable</strong>s<br />

Formaliser son éthique consiste à mettre en place un référentiel normatif par le biais <strong>de</strong> la<br />

rédaction d’un document traduisant les fon<strong>de</strong>ments éthiques <strong>de</strong> l’entreprise en principes<br />

d’actions. Cette formalisation permet à l’entreprise <strong>de</strong> réguler ses actions tant au niveau<br />

interne qu’au niveau externe.<br />

Dans un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, les entreprises <strong>de</strong>vront se doter <strong>de</strong><br />

principes d’actions engageants, autour <strong>de</strong>squels toutes les actions menées <strong>de</strong>vront strictement<br />

être organisées. En interne, ces principes d’actions <strong>de</strong>vront permettre <strong>de</strong> réguler les rapports<br />

sociaux et envoyer un signal fort aux salariés quant à l’engagement <strong>de</strong>s entreprises dans une<br />

relation saine et constructive avec les consommateurs.<br />

L’éthique permettra également <strong>de</strong> régir les actions à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> l’environnement<br />

externe <strong>de</strong> l’entreprise, dans ses relations avec l’ensemble <strong>de</strong> ses parties prenantes. Les<br />

principes d’actions définies par le biais d’un co<strong>de</strong> ou d’une charte éthique, <strong>de</strong>vront dès lors<br />

transparaitre dans la relation entre l’entreprise et les consommateurs. Cette relation, prise en<br />

charge en gran<strong>de</strong> partie par la communication, <strong>de</strong>vra s’imposer un respect très strict <strong>de</strong><br />

l’éthique, si celle-ci souhaite faire perdurer le dialogue avec les consommateurs.<br />

136


Nous allons voir dans le II.2. un exemple <strong>de</strong> pratique communément admis à l’heure<br />

actuelle, qui ne pourra perdurer dans un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, si les<br />

entreprises veulent être cohérentes avec leur <strong>nouveau</strong> discours et leur éthique.<br />

II.2. Exemple <strong>de</strong> pratique à bannir : le publi-reportage<br />

Si les entreprises et les marques souhaitent retrouver la confiance <strong>de</strong>s consommateurs, il<br />

leur sera indispensable <strong>de</strong> s’imposer une éthique très stricte dans leurs relations avec ces<br />

<strong>de</strong>rniers. Cette relation, prise en charge par la communication, <strong>de</strong>vra bannir un certain<br />

nombre d’outils et <strong>de</strong> pratiques communément admis à l’heure actuelle. Nous nous<br />

intéresserons à l’un d’entre eux : le publi-reportage.<br />

II.2.1. Le publi-reportage dans les médias traditionnels<br />

Le publi-reportage désigne un « dossier ou article publicitaire rédigé <strong>de</strong> concert entre<br />

l'annonceur ou son agence <strong>de</strong> communication et le support dans lequel il est <strong>de</strong>stiné à être<br />

inséré. Il utilise, en général, le format, la mise en page, la police et la taille <strong>de</strong>s caractères du<br />

support, pour mieux se fondre dans le reste du rédactionnel » 238 .<br />

Le « publi-reportage », aussi appelé « publi-rédactionnel », « publi-communiqué » ou<br />

encore « publi-information », a été pendant très longtemps l’apanage <strong>de</strong> la presse écrite. En<br />

effet, grâce à son format long, le « publi-reportage » présente l’avantage <strong>de</strong> prendre très<br />

facilement l’apparence d’un véritable article <strong>de</strong> presse. Si la loi n° 86-897 du 1 août 1986 sur<br />

la réforme du régime juridique <strong>de</strong> la presse, réglemente l’usage <strong>de</strong> cette pratique en<br />

spécifiant que « tout article <strong>de</strong> publicité à présentation rédactionnelle doit être précédé <strong>de</strong> la<br />

mention ‘publicité’ ou ‘communiqué’ » 239 , il n’en <strong>de</strong>meure pas moins que la frontière entre<br />

l’information et la communication est <strong>de</strong> plus en plus exiguë. Ce type <strong>de</strong> procédé ne fait<br />

qu’accentuer la défiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises, accusées dès lors <strong>de</strong><br />

vouloir les tromper en camouflant une publicité en article <strong>de</strong> presse. De plus, on constate<br />

que, très souvent, la mention censée alerter le consommateur qu’il s’agit d’une publicité,<br />

n’apparaît pas ou alors <strong>de</strong> façon confuse.<br />

238 Selon e-marketing.fr<br />

239 Loi n° 86-897 du 1 août 1986 portant réforme du régime juridique <strong>de</strong> la presse, article 10.<br />

137


Voici un exemple <strong>de</strong> publi-reportage récent (publié en mars 2012) <strong>de</strong> l’entreprise Azelis<br />

France, distributeur <strong>de</strong> produit chimique, dénoncé par l’OIP (Observatoire Indépendant <strong>de</strong> la<br />

Publicité). Les <strong>de</strong>ux principaux reproches qui lui<br />

sont adressés correspon<strong>de</strong>nt tout d’abord au fait<br />

que le nom <strong>de</strong> l’annonceur n’apparaît à aucun<br />

endroit du publi-reportage et d’autre part, il<br />

semblerait que l’indépendance <strong>de</strong> l’expert interrogé<br />

soit fortement remise en cause. Ce <strong>de</strong>rnier serait en<br />

effet animé <strong>de</strong> conflits d’intérêts (il se révèle être<br />

un membre du jury d’un prix décerné par le lea<strong>de</strong>r<br />

mondial <strong>de</strong> l’aspartame).<br />

Cet exemple est emblématique <strong>de</strong>s<br />

problématiques engendrées par cette forme <strong>de</strong><br />

publicité camouflée. Les entreprises ne peuvent<br />

prétendre à la fois être sincère et communiquer<br />

autour d’une éthique irréprochable, et se soumettre à <strong>de</strong> telles pratiques. La frontière entre<br />

information et communication doit être clairement délimitée, pour redonner à la<br />

communication sa raison d’être et sa légitimité. Nous allons voir désormais que la pratique<br />

du publi-reportage a fortement évolué avec l’arrivée du web 2.0. et prend <strong>de</strong> plus en plus la<br />

forme <strong>de</strong> billets sponsorisés sur <strong>de</strong>s blogs influents.<br />

II.2.2. Le publi-reportage à l’heure du web 2.0 : les billets sponsorisés<br />

Le phénomène <strong>de</strong>s billets sponsorisés a pris une très gran<strong>de</strong> importance ces <strong>de</strong>rnières<br />

années. En effet, rares sont désormais les blogs influents à ne pas tomber dans cet écueil<br />

alléchant. Si l’on en croit les témoignages <strong>de</strong>s différents blogueurs, un billet peut être<br />

rémunéré entre 30 et 200 euros, pour un blog « moyen », c’est-à-dire qui compte environ 500<br />

visites par jour. Le principe diffère quelque peu du publi-reportage traditionnel dans la<br />

mesure où le blogueur a un rôle central à jouer dans la rédaction <strong>de</strong> l’article, afin <strong>de</strong><br />

conserver le même ton utilisé dans l’ensemble du blog et rendre ainsi crédible ce qui est<br />

énoncé. L’annonceur transmet un brief au blogueur comprenant l’ensemble <strong>de</strong>s éléments<br />

qu’il souhaite voir apparaître dans le billet. Il a également la possibilité <strong>de</strong> lire l’article avant<br />

sa publication et <strong>de</strong> transmettre au blogueur les changements qu’il souhaite effectuer.<br />

138<br />

Fig. 34 - Publi-reportage - Azelis France - 2012


Si le principe diffère légèrement, les critiques adressées au publi-reportage traditionnel<br />

sont également valables pour les billets sponsorisés. En effet, on observe, <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>, une<br />

confusion entre ce qui relève <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong> l’information. Cette critique est<br />

d’autant plus vive sur le web, dans la mesure les consommateurs cherchent, par le biais<br />

notamment <strong>de</strong>s blogs, <strong>de</strong>s informations alternatives à celle prodiguée par les marques. Ces<br />

<strong>de</strong>rniers sont à la recherche <strong>de</strong> renseignements plus « objectifs » et « critiques » sur ces<br />

supports participatifs et se retrouvent finalement confrontés à une information galvaudée.<br />

De plus, la mention « billet sponsorisé » est elle aussi très fortement critiquée dans la<br />

mesure où elle est très souvent peu lisible, voire inexistante. Pour illustrer ce <strong>de</strong>rnier point,<br />

nous mentionnerons la critique adressée à E-buzzing, l’une <strong>de</strong>s plate-formes virales lea<strong>de</strong>r<br />

sur le marché, par un blogueur influent (son blog comptabilise plus <strong>de</strong> 2000 visiteurs uniques<br />

par jour). En effet, celui-ci dénonce, dans un billet intitulé « Ebuzzing veut que je vous<br />

trompe, alors j'arrête le billet sponsorisé... » 240 , toutes les dérives <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> pratique.<br />

Parmi l’un d’entre elle, on peut citer le refus <strong>de</strong> la plate-forme <strong>de</strong> faire apparaître la mention<br />

« Publi-rédac » dans le titre du billet, indiquant que « Pour eux la mention ‘billet sponsorisé’<br />

doit apparaître en petit caractères tout à la fin du billet et pas ailleurs » 241 . On constate donc,<br />

par le biais <strong>de</strong> cet exemple, qu’il y a une véritable volonté <strong>de</strong> « mélange <strong>de</strong>s genres », en<br />

essayant <strong>de</strong> camoufler au mieux l’aspect publicitaire <strong>de</strong>s messages transmis.<br />

Ce II. nous a permis d’évoquer la <strong>de</strong>rnière étape à effectuer pour maintenir un dialogue<br />

dans le temps, à savoir s’imposer une « éthique <strong>responsable</strong> ». Il s’agit dès lors <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s<br />

principes d’actions qui doivent permettre <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>r l’entreprise dans l’ensemble <strong>de</strong> ses<br />

actions. Les valeurs d’honnêteté et <strong>de</strong> sincérité, qui <strong>de</strong>vront être au cœur du système<br />

<strong>responsable</strong>, seront <strong>de</strong>s sources d’inspiration pour bâtir une éthique, en cohérence avec une<br />

i<strong>de</strong>ntité et une histoire propre à l’entreprise.<br />

L’entreprise <strong>de</strong>vra notamment être intransigeante sur le respect <strong>de</strong> cette éthique dès lors<br />

qu’il s’agira <strong>de</strong> régir ses relations avec les consommateurs. C’est pourquoi, un certain<br />

nombre <strong>de</strong> pratiques actuellement admises, telles que le recours au publi-reportage, ne<br />

pourront plus perdurer dans le <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong>.<br />

240 http://clement.blogs.com/thomas_clment/2008/07/publi-rdacs-ebu.html<br />

241 id.<br />

139


Conclusion <strong>de</strong> la Section 2 <<br />

Si la communication veut retrouver sa légitimité dans un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong><br />

<strong>responsable</strong>, celle-ci <strong>de</strong>vra non seulement impulser les bases d’un <strong>nouveau</strong> dialogue avec les<br />

consommateurs mais aussi le faire perdurer dans le temps. Pour se faire, nous avons vu qu’il<br />

fallait tout d’abord repenser ses outils <strong>de</strong> communication, afin d’en finir avec une<br />

communication « push », qui s’impose aux consommateurs. La publicité en est le symbole et<br />

l’on peut, à juste titre, questionner la pertinence <strong>de</strong> son utilisation dans un système où le<br />

dialogue est préféré au « matraquage publicitaire ». Les outils permettant d’approfondir le<br />

partage et l’expérience client seront dès lors à privilégier.<br />

Nous avons également évoqué l’importance pour les entreprises <strong>de</strong> s’imposer une éthique<br />

<strong>responsable</strong>, transposée en principes d’actions engageants. Il est en effet indispensable <strong>de</strong><br />

s’imposer une ligne <strong>de</strong> conduite à suivre, et ce notamment lorsqu’il s’agit <strong>de</strong> la relation avec<br />

les consommateurs. La communication, sujette à <strong>de</strong> nombreuses dérives, doit « redorer son<br />

image » en démontrant aux consommateurs qu’elle n’est pas là pour les manipuler mais au<br />

contraire leur « rendre compte d’une réalité ». Ce constat s’applique notamment aux outils <strong>de</strong><br />

communication pressentis, qui <strong>de</strong>vront être conforme aux principes éthiques retenus. La<br />

pratique du « publi-reportage » ne pourra trouver sa place dans un système <strong>de</strong> <strong>consommation</strong><br />

<strong>responsable</strong>, où la sincérité et l’honnêteté seront érigées en valeurs structurante.<br />

140


Conclusion du Chapitre 4


Conclusion <strong>de</strong> la PARTIE 2<br />

Cette secon<strong>de</strong> partie nous a permis <strong>de</strong> mettre en avant un certain nombre <strong>de</strong> postulats<br />

permettant d’imaginer un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>. Il s’agissait avant<br />

tout <strong>de</strong> montrer que les entreprises et les marques <strong>de</strong>vaient repenser entièrement leur manière<br />

<strong>de</strong> concevoir leurs activités, leur façon <strong>de</strong> travailler ainsi que la raison d’être <strong>de</strong> leur<br />

existence.<br />

En effet, nous avons montré que les marques, si elles voulaient retrouver leur légitimité,<br />

<strong>de</strong>vaient re<strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s repères <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, en se lançant dans une démarche qualité.<br />

Ce n’est qu’à ce prix que les marques pourront retrouver leur raison d’être et satisfaire<br />

pleinement les besoins exprimés et implicites <strong>de</strong>s consommateurs.<br />

Puis, nous avons également montré qu’il était important que les entreprises réfléchissent à<br />

leur i<strong>de</strong>ntité et à leurs valeurs, qui seront autant <strong>de</strong> piliers structurants, leur permettant d’agir<br />

<strong>de</strong> façon légitime dans <strong>de</strong>s causes dépassant leur propre intérêt personnel. Ces étapes sont<br />

indispensables pour construire les bases d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong><br />

<strong>responsable</strong>.<br />

Enfin, nous nous sommes intéressés au rôle <strong>de</strong> la communication dans ce processus <strong>de</strong><br />

changement. Nous avons essentiellement montré que cette <strong>de</strong>rnière avait un rôle central à<br />

jouer dans l’instauration d’un dialogue honnête et durable avec le consommateur. Il s’agit<br />

dès lors <strong>de</strong> parvenir à impulser le dialogue, l’encourager et le faire perdurer dans le temps.<br />

142


CONCLUSION<br />

La crise <strong>de</strong> confiance actuelle <strong>de</strong>s consommateurs qui frappe les entreprises et les<br />

marques ne doit pas être considérée comme un phénomène conjoncturel qui s’évaporera si<br />

tôt la croissance économique retrouvée. Au contraire, cette défiance doit être analysée<br />

comme un signal fort <strong>de</strong> contestation <strong>de</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> dans lequel nous<br />

évoluons. Les consommateurs se lancent désormais dans une quête <strong>de</strong> sens, qui ne pourra<br />

être pleinement satisfaite que si les entreprises et les marques prennent la mesure <strong>de</strong> la<br />

« révolution » qui s’opère.<br />

Pour ce faire, ces <strong>de</strong>rnières <strong>de</strong>vront tout d’abord comprendre et analyser les tenants et<br />

aboutissants <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance, comme nous l’avons fait dans la première partie <strong>de</strong> ce<br />

mémoire. Elles <strong>de</strong>vront notamment comprendre qu’un système au sein duquel les<br />

consommateurs doute <strong>de</strong> leur intégrité (mensonges, scandales, remise en cause interne, etc.)<br />

et <strong>de</strong> leur légitimité (déceptivité, perte <strong>de</strong> qualité et d’utilité, propositions d’alternatives<br />

crédibles, etc.) ne pourra perdurer et créer <strong>de</strong> la valeur sur du long terme. Les entreprises et<br />

les marques <strong>de</strong>vront également apprendre <strong>de</strong> leurs erreurs passées. Elles ne pourront, pas<br />

exemple, plus tomber dans l’apparente facilité qu’offre la communication pour renouer avec<br />

la confiance <strong>de</strong>s consommateurs. En effet, lorsque la communication <strong>de</strong>vient son propre<br />

objet, sans aucune emprise avec le réel, la méfiance se renforce et rejette d’autant plus ce qui<br />

s’apparente à <strong>de</strong> la « manipulation ».<br />

Lorsque les entreprises et les marques auront compris la portée <strong>de</strong>s transformations qui<br />

sont en cours, elles <strong>de</strong>vront s’interroger sur les raisons pour lesquelles leur présence est<br />

légitime dans un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> durable. Pour se faire, elles <strong>de</strong>vront s’interroger<br />

sur la raison d’être <strong>de</strong> leur existence. Elles <strong>de</strong>vront notamment repenser leur i<strong>de</strong>ntité, leurs<br />

valeurs et surtout leur mission, qui <strong>de</strong>viendra le leitmotiv <strong>de</strong> leurs actions. Elles pourront<br />

s’appuyer sur la communication à condition que celle-ci soit un outil pour accompagner le<br />

changement, en créant les bases d’un dialogue sincère et durable avec les consommateurs.<br />

143


Parvenir à créer un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>, créateur <strong>de</strong> valeur durable, peut<br />

s’apparenter, pour certains, à une vague utopie. D’autres considéreront que les postulats<br />

imaginés pour ce <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> se révèlent être finalement du bon sens, loin <strong>de</strong> constituer<br />

une véritable révolution. Nous partageons entièrement ces <strong>de</strong>ux constats, qui, loin d’être <strong>de</strong>s<br />

critiques, constituent, au contraire, <strong>de</strong>s éléments constitutifs du <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong>. En effet,<br />

faire preuve <strong>de</strong> bon sens, dans un mon<strong>de</strong> où l’irrationalité et l’extravagance <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong><br />

plus en plus monnaie courante, constitue une <strong>de</strong>s conditions préalables à la création d’un<br />

<strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>. Le caractère utopique d’un tel <strong>modèle</strong> doit également<br />

être pleinement assumé, dans la mesure où c’est à cette seule condition que le <strong>modèle</strong> mis en<br />

place adoptera une démarche « d’amélioration continue », l’idéal à atteindre étant toujours<br />

plus exigeant. À ce sujet, Raymond Ruyer disait d’ailleurs à son époque que « Les utopies<br />

sont comme <strong>de</strong>s enveloppes <strong>de</strong> brume sous lesquelles s’avancent <strong>de</strong>s idées neuves et<br />

réalisables » 244 …<br />

Pour conclure ce mémoire, nous proposerons une <strong>de</strong>rnière citation <strong>de</strong> Gildas Bonnel 245 ,<br />

synthétisant parfaitement les défis qui atten<strong>de</strong>nt désormais les entreprises, les marques et les<br />

consommateurs, afin <strong>de</strong> parvenir à construire les bases d’une société <strong>responsable</strong> :<br />

« Oui, notre mon<strong>de</strong> ne va pas bien du tout, il est complexe, il est dangereux […] Oui, la<br />

planète subit une explosion démographique extraordinaire, tous les écosystèmes sont<br />

perturbés. Oui, nous allons <strong>de</strong>voir nous adapter, transformer nos mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie, abandonner<br />

du confort et pas mal <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>s aussi. Oui, nos vies et situations particulières vont être<br />

durablement impactées. Oui, c’est sur que l’on ne va plus aller voyager à travers le mon<strong>de</strong><br />

pour faire un week-end shopping trois jours à New York dans dix ou vingt ans, ça serait<br />

complètement grotesque et farfelue, surtout avec le prix <strong>de</strong> la taxe carbone ! La formule trois<br />

jours trois nuits pour aller se faire bronzer aux Baléares, ça sera complètement inconvenant,<br />

c’est sur. Je pense que l’on va voyager autrement, que l’on va créer autrement, travailler<br />

autrement, découvrir <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x <strong>modèle</strong>s, c’est certain. Est ce que vous pensez vraiment<br />

que dans vingt ou trente ans, nous serons tous propriétaires d’une perceuse électrique que<br />

l’on utilise en moyenne huit minutes tous les six mois ?<br />

244 Raymond Ruyer, L’utopie et les utopies, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 1950, 293 pages.<br />

245 Gildas Bonnel est le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’Agence Sidiese.<br />

144


Honnêtement ! Non, on va apprendre à réparer, à réutiliser, on va apprendre à recycler, on<br />

va inventer <strong>de</strong>s tas <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x business, vous allez voir, en plus cela va créer <strong>de</strong> l’emploi,<br />

on va relocaliser, on va avoir plus <strong>de</strong> loisirs, on va voyager autrement. On apprendra le<br />

chinois et on ira <strong>de</strong>ux ans, on ira peut être à pieds, j’en sais rien, mais ça sera différent.<br />

N’ayons pas peur <strong>de</strong> cela. Moi je pense que l’on va re<strong>de</strong>ssiner les villes, re<strong>de</strong>ssiner les<br />

loisirs, re<strong>de</strong>ssiner la gouvernance dans les entreprises et nos mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> collaboration, c’est<br />

certain. En fait, vous savez quoi, je pense que la « conquête <strong>de</strong> l’ouest », ça ne fait que<br />

commencer ! » 246 .<br />

246 Discours <strong>de</strong> Gildas Bonnel, à l’occasion <strong>de</strong> la conférence TEDxParis, du 30 janvier 2010. Discours en<br />

intégralité, Annexe<br />

145


TABLE DES ANNEXES<br />

ANNEXE I - ARTICLE « L'ANNEE RECORD DES FUSIONS ET ACQUISITIONS FRANÇAISE » -<br />

L’EXPANSION.FR - 19 DECEMBRE 1996 .......................................................... 147<br />

ANNEXE II - ARTICLE « NOKIA, LE CENTENAIRE LE PLUS BRANCHE DE LA PLANETE » -<br />

L’EXPANSION.FR - 17 DECEMBRE 1998......................................................... 149<br />

ANNEXE III - PUBLICITES PHILIPS ET LU (ANNEES 50)...................................................... 152<br />

ANNEXE IV - ENQUETE « LA CONFIANCE DES CONSOMMATEURS » - JUILLET 2012 » ....... 154<br />

ANNEXE V - CARNETS DE NOTES DES MARQUES - MAGAZINE CAPITAL - AVRIL 2012 ...... 161<br />

ANNEXE VI - EXPLICATION DE LA CRISE ECONOMIQUE ET FINANCIERE ............................ 163<br />

ANNEXE VII - INTERVIEW DE JANE VON TRAPP, DIRECTRICE DE LA COMMUNICATION<br />

ET DU DEVELOPPEMENT ET ELIZA HULEATT, CHARGEE DU DEVELOPPEMENT<br />

DE L’ECOLE FRANCO-AMERICAINE DE NEW YORK (EN ANGLAIS) -<br />

4 JUIN 2010 ................................................................................................ 164<br />

ANNEXE VIII - GRAND DEBAT CELS’AND CO : « LES VALEURS DANS L’ENTREPRISE :<br />

LEVIER IDENTITAIRE OU DEMARCHE ETHIQUE » - 29 MARS 2012............... 169<br />

ANNEXE IX - INTERVIEW DE PAUL ISAKSON, PLANNEUR STRATEGIQUE INDEPENDANT -<br />

22 JUIN 2012 (EN ANGLAIS) .......................................................................... 179<br />

ANNEXE X - DISCOURS DE GILDAS BONNEL, CONFERENCE TEDXPARIS - 30 JANVIER 2010<br />

................................................................................................................................. 180<br />

146


ANNEXE I : ARTICLE « L'ANNEE RECORD DES FUSIONS ET ACQUISITIONS FRANÇAISE »<br />

- L’EXPANSION.FR -<br />

L'année record <strong>de</strong>s fusions et acquisitions françaises<br />

Jean-Baptise Jacquin - publié le 19/12/1996 à 09:48<br />

Une année exceptionnelle. 1996 aura été marquée par une activité spectaculaire sur le<br />

marché <strong>de</strong>s fusions et acquisitions en France. Pas moins <strong>de</strong> cinq opérations ont dépassé<br />

cette année la barre <strong>de</strong>s 15 milliards <strong>de</strong> francs (voir tableau ci-contre), contre une seule en<br />

1995 et en 1994. Les dix plus grosses opérations totalisent déjà 160 milliards. Le marché<br />

<strong>de</strong>s fusions et acquisitions, qui représentait 242 milliards <strong>de</strong> francs en 1995, <strong>de</strong>vrait cette<br />

année crever les plafonds. Les difficultés <strong>de</strong>s récentes privatisations ne sont même pas<br />

parvenues à ternir le sourire qu'affichent en cette fin d'année les banquiers d'affaires. Et<br />

pour cause : en dépit <strong>d'un</strong>e concurrence redoublée entre les banques d'affaires, le marché<br />

n'a jamais été aussi animé.<br />

Première explication : l'éclatement <strong>de</strong>s noyaux durs qui fragilise l'actionnariat <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s<br />

entreprises. Jusqu'à présent, le système <strong>de</strong>s participations croisées condamnait le<br />

capitalisme hexagonal à l'immobilisme. La faiblesse <strong>de</strong> la Bourse française a entraîné<br />

d'inévitables réactions. « Plus encore que la réactivation du marché <strong>de</strong>s grosses<br />

transactions, c'est l'évolution <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s opérations qui est remarquable », analyse<br />

Jean-Michel Steg, le patron du corporate finance à la Compagnie financière BZW.<br />

1. Les tabous tombent, les opérations hostiles reviennent<br />

Cas d'école, la fusion Axa-UAP, <strong>d'un</strong> montant record <strong>de</strong> 45 milliards <strong>de</strong> francs, dont la<br />

logique industrielle a paru si évi<strong>de</strong>nte. Pourtant, une telle opération semblait impensable il<br />

y a encore un an. Elle était susceptible <strong>de</strong> bousculer l'establishment et le subtil équilibre<br />

politico-financier <strong>de</strong>s noyaux durs. Sans compter le sacrilège que représente le<br />

changement <strong>de</strong> contrôle <strong>d'un</strong>e privatisée. « L'opération Axa-UAP est porteuse <strong>de</strong><br />

changements importants dans d'autres secteurs jusqu'ici considérés comme tabous tels que<br />

la banque, l'agroalimentaire, ou l'électronique <strong>de</strong> défense », prévient Georges van Erck, <strong>de</strong><br />

JP Morgan, l'une <strong>de</strong>s banques américaines les plus actives en France. « Quelle sera la<br />

prochaine privatisée à se faire absorber ? » s'interroge un autre banquier, manifestement<br />

convaincu que la réponse ne tar<strong>de</strong>ra pas. Autre <strong>nouveau</strong>té <strong>de</strong> 1996, le retour d'opérations<br />

hostiles. L'OPA d'Auchan sur Docks <strong>de</strong> France lancée à la veille <strong>de</strong>s vacances d'été est la<br />

première OPA hostile à la Bourse <strong>de</strong> Paris <strong>de</strong>puis la bataille pour Perrier en 1992. Une<br />

véritable exception tricolore, puisque <strong>de</strong> tels assauts sont banalisés à la City et plus encore<br />

à Wall Street.<br />

2. Les restructurations dans la finance française dopent le marché<br />

Première bénéficiaire <strong>de</strong> ces opérations spectaculaires, la Bourse <strong>de</strong> Paris. Les OPA et<br />

OPE réalisées sur le marché français <strong>de</strong>vraient représenter plus <strong>de</strong> 120 milliards <strong>de</strong> francs<br />

en 1996, contre à peine plus <strong>de</strong> 30 milliards en 1995. Une aubaine pour les actionnaires<br />

<strong>de</strong>s sociétés concernées, UAP et Docks <strong>de</strong> France en premier lieu. Mais pas seulement. Ce<br />

sont <strong>de</strong>s secteurs entiers qui ont bénéficié <strong>de</strong> ces coups <strong>de</strong> projecteur. Les valeurs<br />

financières et celles <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> distribution en ont largement profité. La palme revient<br />

au secteur <strong>de</strong> la finance, dont les restructurations ont indéniablement dopé le marché <strong>de</strong>s<br />

fusions et acquisitions. Parmi les plus gros <strong>de</strong>als <strong>de</strong> l'année, outre la fusion record dans<br />

l'assurance, on retrouve le rapprochement entre le Crédit local <strong>de</strong> France et le Crédit<br />

communal <strong>de</strong> Belgique, l'acquisition <strong>de</strong> la Banque Indosuez par le Crédit agricole, et les<br />

OPA <strong>de</strong> Paribas sur la Navigation mixte ou <strong>de</strong> la Caisse <strong>de</strong>s dépôts sur le Crédit foncier.<br />

147


3. La logique industrielle impose <strong>de</strong>s regroupements d'envergure<br />

Signe particulier <strong>de</strong> cette redistribution <strong>de</strong>s cartes dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s affaires : la logique<br />

industrielle. Les schémas fumeux ne sont plus <strong>de</strong> mise. Dans <strong>de</strong>s secteurs aussi différents<br />

que le travail temporaire (Ecco-Adia), le financement <strong>de</strong>s collectivités locales (Crédit<br />

local <strong>de</strong> France-Crédit communal <strong>de</strong> Belgique) ou la gran<strong>de</strong> distribution (Auchan-Docks<br />

<strong>de</strong> France), les restructurations n'avaient qu'un seul but : l'effet <strong>de</strong> taille et la<br />

complémentarité. Le mot " synergie " a été tellement dévoyé qu'il est désormais banni au<br />

profit <strong>de</strong> justifications plus concrètes. C'est dans cette logique que s'inscrit la récente<br />

acquisition par Carrefour du tiers du capital du groupe familial contrôlant Cora.<br />

Témoignage du réel ancrage <strong>de</strong> ces <strong>nouveau</strong>x comportements, la plupart <strong>de</strong>s transactions<br />

<strong>de</strong> poids <strong>de</strong> l'année écoulée ont été initiées par <strong>de</strong>s Français. Parmi les dix plus grosses<br />

opérations <strong>de</strong> 1995, une seule était franco-française. Cette année, cinq opérations 100 %<br />

tricolores font partie <strong>de</strong>s dix premières. Ce qui ne veut pas dire que les investisseurs<br />

étrangers se désintéressent <strong>de</strong> l'Hexagone. Plusieurs mégaopérations ont sans aucun doute<br />

été accélérées justement par l'intérêt <strong>de</strong> groupes étrangers pour certaines proies. Il ne fait<br />

plus mystère que Docks <strong>de</strong> France, Valeo ou l'UAP attisaient <strong>de</strong>s convoitises<br />

internationales. Preuve, n'en déplaise aux cassandres qui ressassent les faiblesses du<br />

capitalisme hexagonal, que les entreprises françaises ont <strong>de</strong> belles capacités <strong>de</strong> réaction<br />

dès lors qu'elles se sentent menacées sur leur propre marché.<br />

4. Les banques d'affaires anglo-saxonnes s'imposent sur le marché français<br />

En dépit <strong>de</strong> cette baisse relative <strong>de</strong>s opérations transfrontières, les banques d'affaires<br />

anglo-saxonnes ont continué <strong>de</strong> grignoter <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> marché. Si l'éternelle Lazard reste<br />

sans conteste la première banque d'affaires sur le marché français, l'écart qui la sépare <strong>de</strong><br />

ses poursuivantes se réduit inexorablement d'année en année. Côté anglo-saxon, les<br />

maisons en tête du hit-para<strong>de</strong> sont Goldman Sachs, Morgan Stanley et JP Morgan. Côté<br />

français, la petite qui monte, Rothschild et Cie, fait désormais jeu égal avec les gran<strong>de</strong>s<br />

banques d'affaires internationales.<br />

L'évolution <strong>de</strong>s rapports entre les entreprises et leurs banques d'affaires facilite<br />

gran<strong>de</strong>ment cette redistribution <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> marché. Car l'époque où une entreprise, voire<br />

son patron, avait sa banque d'affaires attitrée semble définitivement révolue. Sous<br />

l'influence <strong>de</strong>s pratiques anglo-saxonnes, <strong>d'un</strong> marketing agressif et professionnel, les<br />

banques d'affaires " démarchent " les entreprises avec <strong>de</strong>s projets d'opérations<br />

pratiquement " clés en main ".<br />

L'année 1996 ne <strong>de</strong>vrait pas être un feu <strong>de</strong> paille. " Les restructurations sectorielles qui<br />

ont pris le relais <strong>de</strong>s privatisations sont appelées à se poursuivre ", constate Eric Lombard,<br />

membre du comité exécutif <strong>de</strong> l'activité conseil chez Paribas, dont les commissions ont<br />

doublé en trois ans, à 300 millions. Et chaque banque d'affaires, sans dévoiler ses projets,<br />

promet un cru 1997 au moins aussi généreux et spectaculaire que celui <strong>de</strong> cette année.<br />

148


ANNEXE II : ARTICLE « NOKIA, LE CENTENAIRE LE PLUS BRANCHE DE LA PLANETE »<br />

- L’EXPANSION.FR -<br />

Nokia, le centenaire le plus branché <strong>de</strong> la planète<br />

Gilles Fontaine - publié le 17/12/1998 à 10:06<br />

Bagages au pied, Frank Nuovo s'agite sur le trottoir <strong>de</strong> l'aéroport <strong>de</strong> Singapour. Son<br />

chauffeur se fait attendre, et le beau Californien est tout près d'exploser lorsqu'une charmante<br />

brune, regard bleu azur, lui propose <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> sa limousine. Il accepte et se présente : "<br />

Frank Nuovo, je suis <strong>responsable</strong> du <strong>de</strong>sign chez Nokia. - Je sais, répond l'inconnue. Je<br />

m'appelle Sari Baldauf, je suis prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> Nokia Télécommunications. " Bien sûr, le<br />

<strong>de</strong>signer californien s'excusera platement pour sa bévue.<br />

Mais Frank Nuovo a <strong>de</strong>s circonstances atténuantes. Depuis le début <strong>de</strong>s années 90, le groupe<br />

finlandais est en perpétuel bouleversement. Totalement inconnu voilà à peine dix ans, Nokia<br />

atteint aujourd'hui le huitième rang mondial <strong>de</strong>s entreprises <strong>de</strong> télécommunications. Depuis<br />

le mois <strong>de</strong> novembre 1998, il est <strong>de</strong>venu le premier fabricant mondial <strong>de</strong> téléphones mobiles,<br />

<strong>de</strong>vant l'américain Motorola et le suédois Ericsson. Il <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus difficile <strong>de</strong><br />

résister au géant finlandais, qui, au cours <strong>de</strong>s cinq <strong>de</strong>rnières années, a triplé son chiffre<br />

d'affaires, dépassant maintenant les 70 milliards <strong>de</strong> francs.<br />

Il y a dix ans, la Finlan<strong>de</strong> représentait 60 % <strong>de</strong> l'activité <strong>de</strong> Nokia. Elle ne pèse plus que 4 %.<br />

Côté forces vives, la moitié <strong>de</strong>s 44 000 salariés du groupe ont été embauchés au cours <strong>de</strong>s<br />

trois <strong>de</strong>rnières années, et l'effectif global continue <strong>de</strong> croître <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 30 % par an. Et<br />

lorsque Frank Nuovo rencontre Sari Baldauf, il y a quelques mois, <strong>de</strong>vant l'aéroport <strong>de</strong><br />

Singapour, elle vient tout juste d'être promue, à 42 ans, à la tête <strong>de</strong> l'une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux plus<br />

importantes divisions <strong>de</strong> Nokia, après <strong>de</strong>ux années passées à développer les positions du<br />

groupe en Asie.<br />

En dix ans, le groupe finlandais est passé du conglomérat local à la multinationale<br />

spécialisée. Le parcours fulgurant <strong>de</strong> cette dirigeante finlandaise a été remarqué par le<br />

magazine américain Fortune, qui, en octobre <strong>de</strong>rnier, l'a classée parmi les cinq<br />

businesswomen les plus puissantes d'Europe. Rien d'exceptionnel pour Nokia puisque autour<br />

du PDG Jorma Ollila, 48 ans, les cinq membres du comité <strong>de</strong> direction - dont Sari Baldauf -<br />

sont tous âgés <strong>de</strong> 41 à 45 ans. Et la moyenne d'âge pour l'ensemble du groupe est <strong>d'un</strong> peu<br />

plus <strong>de</strong> 30 ans...<br />

Derrière l'exemple <strong>de</strong> Sari Baldauf, c'est la trajectoire du groupe nordique qui fascine et<br />

continue <strong>de</strong> surprendre : pour les neuf premiers mois <strong>de</strong> l'année 1998, Nokia a annoncé <strong>de</strong>s<br />

profits en hausse <strong>de</strong> 74 %, à environ 10,5 milliards <strong>de</strong> francs, très au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s prévisions<br />

<strong>de</strong>s analystes, qui ont appris à respecter la firme venue du froid. " Au départ, dans l'esprit <strong>de</strong>s<br />

gens, nous étions forcément un groupe japonais, explique Sari Baldauf. Aujourd'hui, on se<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> comment <strong>de</strong>s Finlandais sont capables <strong>de</strong> fabriquer <strong>de</strong>s téléphones au pôle Nord. "<br />

Autre mystère : comment un groupe vieux <strong>de</strong> 133 ans s'est-il trouvé une secon<strong>de</strong> vie en<br />

<strong>de</strong>venant champion <strong>de</strong>s technologies <strong>de</strong> l'information ? " Quand j'ai rejoint Nokia, en 1986,<br />

c'était un vrai conglomérat : vous n'aviez qu'à citer un produit et nous l'avions ", se rappelle<br />

Lauri Kivinen, vice-prési<strong>de</strong>nt chargé <strong>de</strong> la communication du groupe. Des pneus, du papier<br />

toilette, <strong>de</strong>s bottes, <strong>de</strong>s radiotéléphones, <strong>de</strong>s ordinateurs, <strong>de</strong>s télévisions... Nokia était alors<br />

partout dans la vie <strong>de</strong>s Finlandais.<br />

149


À partir <strong>de</strong> la petite usine <strong>de</strong> pâte à papier fondée en 1863 dans le village <strong>de</strong> Nokia, à une<br />

centaine <strong>de</strong> kilomètres au nord d'Helsinki, le groupe s'était transformé en un géant local.<br />

Cette expansion démesurée fut essentiellement conduite par un homme, Kari Kairamo. Son<br />

suici<strong>de</strong> en 1988 marque le début <strong>d'un</strong>e nouvelle ère pour Nokia. Dans les années qui suivent,<br />

le groupe va se séparer progressivement <strong>de</strong> ses activités non stratégiques : la microinformatique<br />

est cédée à Fujitsu, la télévision est vendue à Akai... Nokia joue alors son<br />

avenir sur le seul téléphone.<br />

Il faut dire qu'en 1987 le marché <strong>de</strong>s télécommunications en Finlan<strong>de</strong> s'ouvrait à la<br />

concurrence. " Un beau matin, après <strong>de</strong>s années <strong>de</strong> monopole d'Etat, nous avons ouvert notre<br />

porte. La première chose que nous avons vue, ce sont <strong>de</strong>s congères, et, juste après, le visage<br />

<strong>de</strong> nos concurrents ! " raconte Sari Baldauf. La Finlan<strong>de</strong> est parmi les premiers à avoir<br />

dérégulé le marché <strong>de</strong>s télécoms, en même temps que l'ensemble <strong>de</strong> la Scandinavie. C'est la<br />

première raison du succès <strong>de</strong> Nokia.<br />

Le premier <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> Nokia est très prisé par les yuppies branchés <strong>de</strong> la City à Londres. Le<br />

vélo, l'électricité et le téléphone ont été introduits dans le pays immédiatement après leur<br />

invention. Les Finlandais ont toujours été précurseurs. Nokia soigne cette réputation. En<br />

1987, le groupe commercialise le premier téléphone cellulaire mobile selon la norme NMT<br />

(Nordic Mobile Telecommunications), en vigueur en Norvège, au Danemark, en Suè<strong>de</strong> et en<br />

Finlan<strong>de</strong>. Défini en 1981, le NMT, premier standard international <strong>de</strong> téléphonie cellulaire, va<br />

permettre au marché du mobile <strong>de</strong> décoller ici plus vite qu'ailleurs. C'est la <strong>de</strong>uxième raison<br />

<strong>de</strong> la réussite <strong>de</strong> Nokia et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> son grand rival suédois, Ericsson.<br />

Le premier téléphone mobile Nokia, le Mobira Cityman, ressemble à un gros talkie-walkie et<br />

coûte environ 25 000 francs. " A chaque fois qu'un commercial vendait un <strong>de</strong> ces engins, on<br />

ouvrait le champagne ", se souvient un membre <strong>de</strong> l'équipe. La chose s'est banalisée <strong>de</strong>puis :<br />

la semaine <strong>de</strong>rnière, les usines du groupe ont fabriqué 1 million <strong>de</strong> mobiles. Mais le Mobira<br />

n'est pas mort pour autant : l'antique objet est actuellement très en vogue chez les yuppies<br />

branchés <strong>de</strong> la City londonienne.<br />

Le troisième ingrédient du succès <strong>de</strong> Nokia n'a rien à voir avec la stratégie commerciale ou<br />

avec les questions <strong>de</strong> standard. " Nous avons eu beaucoup <strong>de</strong> chance, et ça nous arrive à peu<br />

près une fois par semaine ", reconnaît Sari Baldauf. L'une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s chances <strong>de</strong> Nokia est<br />

d'avoir su, au cours <strong>de</strong>s six <strong>de</strong>rnières années, se développer à gran<strong>de</strong> vitesse vers<br />

l'international, " pratiquement au feeling ", selon l'expression <strong>d'un</strong> dirigeant. Le groupe a<br />

pourtant frôlé la catastrophe il y a trois ans : pris dans le tourbillon <strong>de</strong> sa folle croissance, le<br />

fabricant a subitement connu <strong>de</strong> graves problèmes <strong>de</strong> logistique. Ailleurs dans le mon<strong>de</strong>, les<br />

têtes auraient roulé... Chez Nokia, l'état-major en est sorti renforcé. " A la différence <strong>de</strong>s<br />

groupes américains, où l'on agit souvent avant <strong>de</strong> réfléchir, les Finlandais essaient d'abord <strong>de</strong><br />

comprendre les causes du problème ", explique Jean-Clau<strong>de</strong> Trezin, directeur général <strong>de</strong><br />

Nokia Display Products pour l'Europe <strong>de</strong> l'Ouest.<br />

Depuis l'inci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> 1995, Jorma Ollila est terrifié par la routine. Au cours <strong>de</strong> l'été <strong>de</strong>rnier, il<br />

a chamboulé l'ensemble <strong>de</strong> son comité <strong>de</strong> direction, redistribuant les fonctions <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong><br />

ses adjoints. Plusieurs d'entre eux ont été prévenus par un simple coup <strong>de</strong> téléphone, avec un<br />

délai <strong>d'un</strong>e semaine pour réfléchir. Objectif <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong> : supprimer les positions <strong>de</strong><br />

confort. " Leur culture est pour beaucoup dans leur réussite, explique Reijo Lilius, directeur<br />

général d'IDC-Finlan<strong>de</strong>. Grâce à l'organisation très "plate", le top management est très<br />

proche <strong>de</strong> ses troupes, et, avec ce système <strong>de</strong> rotation <strong>de</strong>s fonctions, les managers ont une<br />

bonne vision d'ensemble <strong>de</strong> leur métier. "<br />

150


« La météo, la fiscalité et la langue sont contre nous ». Nokia s'est donc décentralisé. Pour<br />

encadrer sa croissance, Nokia a recruté <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x talents. Visa Huuskonen est <strong>de</strong> ceux-là.<br />

Ancien consultant et professeur <strong>d'un</strong>iversité, il est arrivé il y a environ un an pour prendre les<br />

fonctions <strong>de</strong> directeur du développement <strong>de</strong>s ressources humaines. Sa tâche : organiser le<br />

système développé <strong>de</strong> manière totalement empirique <strong>de</strong>puis le début <strong>de</strong> l'internationalisation<br />

du groupe. Le management local a toujours bénéficié <strong>d'un</strong>e très gran<strong>de</strong> autonomie, selon le<br />

principe : " Nokia est plusieurs ". Le groupe veut préserver ces particularismes, mais trouver<br />

un système global <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s ressources humaines, autour <strong>de</strong> certains principes : « Dans<br />

sa pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> transition, le <strong>nouveau</strong> Nokia a gardé les valeurs du Nokia classique. Ici, on<br />

travaille dur, les rapports sont égalitaires, et les salariés sont très loyaux », estime Visa<br />

Huuskonen, pour qui ces trois valeurs décrivent « l'esprit d'entreprise finlandais ».<br />

Car même si le fabricant réalise la quasi-totalité <strong>de</strong> son chiffre d'affaires à l'étranger, son<br />

management est resté très local. Pour Sari Baldauf, c'est une gran<strong>de</strong> force : « Chez Nokia, il<br />

n'y a aucun agenda caché, aucune manoeuvre politique, les gens se parlent franchement,<br />

parfois en criant, mais au moins on se concentre sur la bonne marche <strong>de</strong> l'entreprise. »<br />

L'autre gran<strong>de</strong> préoccupation, c'est le recrutement. Dans l'année à venir, Nokia <strong>de</strong>vrait<br />

embaucher entre 10 000 et 15 000 personnes. Dont un bon quart d'ingénieurs. Il y a<br />

longtemps que les universités finlandaises n'y suffisent plus. « Nous n'essayons même pas <strong>de</strong><br />

faire venir les gens ici, explique Visa Huuskonen. La langue, la fiscalité et la météo sont<br />

contre nous. Finalement, sur les quelque 20 000 personnes travaillant en Finlan<strong>de</strong>, on compte<br />

moins <strong>de</strong> 700 étrangers. »<br />

Pour pallier ses handicaps, Nokia a décentralisé ses structures. La prochaine génération <strong>de</strong><br />

mobiles, qui verra le jour d'ici <strong>de</strong>ux à trois ans, est développée par <strong>de</strong>s équipes installées au<br />

Japon, au Royaume-Uni et bien sûr en Finlan<strong>de</strong>. Quant au <strong>de</strong>sign, il est élaboré en Californie<br />

par l'équipe <strong>de</strong> Frank Nuovo, en collaboration étroite avec les filiales du groupe. « Le <strong>de</strong>sign<br />

<strong>d'un</strong> nouvel appareil est une décision globale », explique Sari Baldauf, qui impose parfois ses<br />

concepts. Le pen<strong>de</strong>ntif argenté autour <strong>de</strong> son cou, par exemple, est un Nokia 8810, le <strong>de</strong>rnier<br />

téléphone haut <strong>de</strong> gamme<strong>de</strong> la marque. « Ce n'est pas <strong>de</strong> la frime, se défend-elle.<br />

J'expérimente une nouvelle façon d'utiliser mon appareil. » Les hommes le placent au bout<br />

<strong>d'un</strong>e chaînette dans le gousset <strong>de</strong> leur veste. Mais le rêve <strong>de</strong> Sari Baldauf, c'est un téléphone<br />

en forme <strong>de</strong> boucle d'oreille. Frank Nuovo <strong>de</strong>vrait pouvoir bientôt lui arranger ça.<br />

151


ANNEXE III : PUBLICITES PHILIPS ET LU (ANNEES 50)<br />

Fig. 47 - Publicité Philips - 1957<br />

Magnétophone PHILIPS - Publicité Elvinger - Format 17 x 25cm - 1957<br />

« L’enregistrement <strong>de</strong> haute qualité à la portée <strong>de</strong> tous, avec le <strong>nouveau</strong> magnétophone<br />

PHILIPS »<br />

152


Fig. 48 - Publicité Lu - 1953<br />

LU - Jean Colin - Format 24 x 32cm - 1953<br />

« Qualité et renommée mondiales, Exiger la marque LU »<br />

153


ANNEXE IV : ENQUETE « LA CONFIANCE DES CONSOMMATEURS » - JUILLET 2012<br />

1. Contexte<br />

L’enquête a été réalisée par le biais <strong>de</strong> l’outil SurveyMonkey ® , logiciel <strong>de</strong> sondage en<br />

ligne. Elle a été administrée par email, ainsi que par le biais <strong>de</strong>s réseaux sociaux, entre le<br />

10 et le 28 juillet 2012. 93 réponses ont été récoltées à la suite <strong>de</strong> ce sondage.<br />

Voici les caractéristiques <strong>de</strong>s 93 participants :<br />

• 22,6% sont <strong>de</strong>s hommes et 77,4% <strong>de</strong>s femmes<br />

• 52,7% ont entre 18 et 24 ans et 47,3% ont 25 ans et + (21,5% ont entre 25 et 34 ans,<br />

18,3% ont entre 35 et 49 ans, 7,53% ont plus <strong>de</strong> 50 ans).<br />

2. Méthodologie<br />

Nous avons fait le choix d’opter pour une enquête quantitative afin <strong>de</strong> recueillir <strong>de</strong>s<br />

résultats « représentatifs » <strong>de</strong> la population ciblée, à savoir les consommateurs.<br />

L’ensemble <strong>de</strong>s questions posées sont <strong>de</strong>s questions fermées à l’exception <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière<br />

qui avait pour objectif d’élargir le propos.<br />

Les objectifs <strong>de</strong> cette enquête étaient avant tout <strong>de</strong> tester l’actualité <strong>de</strong>s résultats<br />

obtenus dans un certain nombre d’enquêtes préexistantes (enquêtes du CREDOC,<br />

notamment).<br />

154


3. Principaux résultats<br />

Grâce à cette étu<strong>de</strong>, nous avons pu mettre en évi<strong>de</strong>nce six principaux résultats.<br />

> Crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs dans les institutions<br />

Le premier constat qui s’est vérifié avec cette enquête <strong>de</strong> terrain concerne la crise <strong>de</strong><br />

confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s autorités. On constate en effet, par<br />

exemple, que 70,8% <strong>de</strong>s sondés n’ont pas confiance dans les hommes politiques. Les<br />

résultats sont également sans appel quant à la crise <strong>de</strong> confiance à l’égard <strong>de</strong>s entreprises<br />

(56,1% <strong>de</strong>s sondés).<br />

A contrario, les associations et les <strong>nouveau</strong>x médias semblent bénéficier d’une certaine<br />

confiance puisque l’on constate que, respectivement, 84,5% et 70% <strong>de</strong>s sondés leur<br />

accor<strong>de</strong>nt leur confiance.<br />

Lse hommes politiques<br />

Les <strong>nouveau</strong>x médias<br />

(Internet, réseaux<br />

sociaux..)<br />

13,30%<br />

5,60%<br />

15,90%<br />

Les entreprises 6,70%<br />

Les instituts <strong>de</strong> sondage<br />

Les associations<br />

D'une manière générale, faites-vous tout à fait confiance, plutôt<br />

confiance, plutôt pas confiance ou pas du tout confiance, à chacun <strong>de</strong>s<br />

acteurs suivants?<br />

Les médias<br />

Les syndicats<br />

29,20%<br />

18,90%<br />

14,40%<br />

24,40%<br />

42,20%<br />

39,80%<br />

49,40%<br />

43,30%<br />

60,70%<br />

73,30%<br />

64,40%<br />

155<br />

43,30%<br />

43,20%<br />

42,70%<br />

36,70%<br />

10,10%<br />

1,10%<br />

5,60%<br />

1,10%<br />

1,10%<br />

1,10%<br />

11,10%<br />

Pas du tout confiance<br />

Plutôt pas confiance<br />

Plutôt confiance<br />

Tout à fait confiance<br />

Fig. 49 - Résultat enquête « D'une manière générale, faites-vous confiance à chacun <strong>de</strong>s acteurs suivants? »


La crise <strong>de</strong> confiance touche également les marques, puisque 71,5% <strong>de</strong>s sondés<br />

considèrent que ces <strong>de</strong>rnières ne les comprennent pas et 79,5% estiment ne plus croire en<br />

ce que racontent les marques.<br />

Pour chaque proposition, dites-moi si vous êtes tout à fait d’accord,<br />

plutôt d’accord, plutôt pas d’accord, ou pas du tout d’accord.<br />

Les marques vous comprennent.<br />

Vous avez <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> moyens<br />

pour dire ce que vous pensez <strong>de</strong>s<br />

marques.<br />

Les marques font <strong>de</strong> plus en plus<br />

attention à vos attentes.<br />

Vous croyez <strong>de</strong> moins en moins<br />

ce que racontent les marques.<br />

17%<br />

8% 14,80%<br />

9,10%<br />

19,30%<br />

54,50%<br />

35,20%<br />

42%<br />

54,50%<br />

156<br />

50%<br />

28,40%<br />

35,20%<br />

5,70%<br />

25%<br />

Fig. 50 - Résultat enquête « la confiance dans les marques »<br />

Pas du tout d’accord<br />

Plutôt pas d’accord<br />

Plutôt d’accord<br />

Tout à fait d’accord


Recherche <strong>de</strong> sens dans l’acte <strong>de</strong> <strong>consommation</strong><br />

On a également pu observer que les consommateurs étaient à la recherche <strong>de</strong> sens<br />

dans leur <strong>consommation</strong>, en ce sens que ces <strong>de</strong>rniers considèrent qu’une bonne marque<br />

est avant tout une marche <strong>responsable</strong> et éthique, comme le montre le tableau ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

On observe ainsi qu’à la question « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque », le<br />

caractère <strong>responsable</strong> <strong>de</strong> la marque a été citée 20 fois et son caractère éthique 18 fois.<br />

Une marque <strong>responsable</strong> (respectueuse<br />

<strong>de</strong> l’environnement et du développement<br />

durable, qui s'engagee dans une<br />

<strong>de</strong>marche RSE ou dans le commerce<br />

équitable)<br />

Une marque éthique (intègre,<br />

transparente, authentique, qui respecte<br />

ses engagements)<br />

Fig. 51 - Résultat enquête « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ?» 1/2<br />

> Recherche <strong>de</strong> produits <strong>de</strong> qualités et utiles<br />

L’enquête nous a également permis <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce la volonté <strong>de</strong>s<br />

consommateurs d’acquérir <strong>de</strong>s biens <strong>de</strong> qualités et qui leur sont utiles. En effet, on<br />

constate qu’à la question « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ? », l’utilité et<br />

l’innovation <strong>de</strong>s produits sont citées 14 fois, et la qualité est citée 30 fois.<br />

Des produits utiles et innovants<br />

Pour vous, qu'est ce qu'une bonne marque ?<br />

Pour vous, qu'est ce qu'une bonne marque ?<br />

Des produits <strong>de</strong> qualité<br />

Fig. 52 - Résultat enquête « Pour vous, qu’est ce qu’une bonne marque ?» 2/2<br />

157<br />

18<br />

14<br />

20<br />

30


Ce constat est également confirmé par les réponses à la question que nous avons<br />

posée concernant les raisons d’acheter <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>. On constate, en<br />

effet, que 78% <strong>de</strong>s sondés considèrent que le critère d’utilité et d’innovation est une<br />

raison importante pour acheter un produit <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>.<br />

Voici plusieurs raisons d’acheter <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>. Pour<br />

chacune d’entre elles, dites-moi si elle vous incite beaucoup, assez, un peu<br />

ou pas du tout, à acheter un produit :<br />

L’entreprise respecte le droit <strong>de</strong>s salariés.<br />

L'entreprise est présente sur le marché <strong>de</strong>puis<br />

longtemps.<br />

La marque est engagée dans une cause<br />

humanitaire.<br />

La marque vous inspire conHiance.<br />

16,10%<br />

7,70% 18,70%<br />

15,20%<br />

6,50%<br />

8,70%<br />

7,60%<br />

11%<br />

Le prix est compétitif. 4,40%<br />

27,20%<br />

25,30%<br />

Fig. 53 - Résultat enquête « Les raisons d’acheter <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>?»<br />

158<br />

32,60%<br />

Le produit présente <strong>de</strong>s garanties écologiques. 7,60% 16,30%<br />

Le produit est innovant et utile.<br />

Le produit est fabriqué en France<br />

ou en régions.<br />

Le produit porte un label <strong>de</strong> qualité.<br />

Le produit vous est recommandé par d'autres<br />

personnes.<br />

29,30%<br />

34,40%<br />

38%<br />

39,60%<br />

44,40%<br />

43,50%<br />

52,70%<br />

35,90%<br />

38,50%<br />

33,30%<br />

27,20%<br />

58,70%<br />

59,80%<br />

46,20%<br />

50%<br />

20,90%<br />

19,60%<br />

32,60%<br />

29,30%<br />

33%<br />

16,10%<br />

Pas du tout<br />

Un peu<br />

Assez<br />

Beaucoup


Mise en place d’un <strong>modèle</strong> alternatif d’information<br />

Nous avons également pu mettre en évi<strong>de</strong>nce un autre phénomène : la mise en place<br />

d’un <strong>modèle</strong> alternatif d’information. Comme le premier diagramme le montre, il semblerait<br />

que les consommateurs aient confiance dans les <strong>nouveau</strong>x médias, ce qui se traduit par<br />

l’émergence d’un <strong>modèle</strong> d’information concurrent à celui prodigué par les marques. On<br />

constate par exemple, que 58,4% <strong>de</strong>s sondés sont d’accord pour dire que grâce à internet, ils<br />

ont plus <strong>de</strong> pouvoir face aux marques.<br />

Si je vous dis : « Grâce à Internet, vous avez plus <strong>de</strong> pouvoir face<br />

aux marques », êtes-vous : tout à fait d'accord, plutôt d'accord,<br />

plutôt pas d'accord ou pas du tout d’accord, avec cette phrase ?<br />

12,40%<br />

24,70%<br />

4,50% 13,50%<br />

44,90%<br />

Fig. 54 - Résultat enquête « Grâce à internet, vus avez plus <strong>de</strong> pouvoir face aux marques »<br />

De plus, 62,20% <strong>de</strong>s sondés déclarent rechercher <strong>de</strong>s avis <strong>de</strong> consommateurs sur<br />

Internet, avant d’acheter un produit, ce qui confirme à la fois la confiance accordée à ces<br />

<strong>nouveau</strong>x outils en ligne, mais aussi la mise en place d’un <strong>modèle</strong> d’information parallèle.<br />

16,70%<br />

21,10%<br />

20%<br />

42,20%<br />

159<br />

Pas du tout d’accord<br />

Plutôt pas d’accord<br />

Plutôt d’accord<br />

Tout à fait d’accord<br />

Ne sait pas<br />

Avez-vous déjà recherché <strong>de</strong>s avis <strong>de</strong> consommateurs sur Internet,<br />

avant d'acheter un produit ?<br />

Régulièrement<br />

De temps en temps<br />

Jamais<br />

Rarement<br />

Fig. 55 - Résultat enquête « Avez-vous déjà recherché <strong>de</strong>s avis <strong>de</strong> consommateurs sur internet avant d’acheter un produit ? »


Rejet <strong>de</strong> la publicité<br />

Nous avons également pu remarquer que la publicité subissait une défiance grandissante,<br />

comme le montre le diagramme ci-<strong>de</strong>ssous. En effet, on constate que 50,5% <strong>de</strong>s sondés sont<br />

d’accord pour dire que la publicité est dangereuse. De plus, ils sont 64% à considérer qu’elle<br />

est agressive et 87,6% qu’elle est envahissante.<br />

Dangereuse<br />

Convaincante<br />

Agressive<br />

Distrayante<br />

Informative<br />

Envahissante<br />

Pour chacun <strong>de</strong>s qualificatifs suivants, dites-moi si vous êtes tout à<br />

fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt pas d’accord, ou pas du tout<br />

d’accord. La publicité est …<br />

Utile<br />

Banale<br />

7,90%<br />

14,60%<br />

15,70%<br />

10%<br />

11%<br />

11,20%<br />

33,70%<br />

32,60%<br />

41,60%<br />

26,20%<br />

49,40%<br />

42,70%<br />

57,50%<br />

34,80%<br />

33,70%<br />

29,20%<br />

41,60%<br />

52,30%<br />

33,70%<br />

36%<br />

52,80%<br />

30,30%<br />

28%<br />

Fig. 56 - Résultat enquête « Les consommateurs et la publicité »<br />

160<br />

21,30%<br />

22,50%<br />

11,40%<br />

2,20%<br />

5,60%<br />

3,40%<br />

Pas du tout d’accord<br />

Plutôt pas d’accord<br />

Plutôt d’accord<br />

Tout à fait d’accord


ANNEXE V : CARNETS DE NOTES DES MARQUES - MAGAZINE CAPITAL<br />

Avec l’ai<strong>de</strong> l’Atelier Chef Martial, le Magazine Capital a réuni, en avril 2012, un jury <strong>de</strong><br />

cinq experts (nutritionniste, chefs et consultants), afin <strong>de</strong> tester différents produits <strong>de</strong><br />

marques et <strong>de</strong> MDD. Voici les résultats :<br />

Fig. 57 - Carnet <strong>de</strong> notes <strong>de</strong>s marques (1/2) - Capital - 2012<br />

161


Fig. 58 - Carnet <strong>de</strong> notes <strong>de</strong>s marques (2/2) - Capital - 2012<br />

Source : Capital<br />

162


ANNEXE VI : EXPLICATION DE LA CRISE ECONOMIQUE ET FINANCIERE<br />

La crise économique, qui s’est peu à peu généralisée à l’ensemble <strong>de</strong>s sphères <strong>de</strong> la<br />

société, est d’abord une crise financière. Il s’agit, en effet, <strong>de</strong> la « crise <strong>de</strong>s subprimes », qui<br />

débute aux Etats-Unis à la fin <strong>de</strong> l’été 2007, dans un contexte particulier. En effet, <strong>de</strong>puis les<br />

attentats du 11 septembre 2001, le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la banque centrale <strong>de</strong>s Etats-Unis, Alan<br />

Greenspan, avait baissé ses taux d’intérêt à seulement 1% afin <strong>de</strong> relancer l’économie (en<br />

inondant le marché <strong>de</strong> liquidités), provoquant une forte création monétaire et un gonflement<br />

<strong>de</strong>s bulles sur le marché immobilier et sur le marché <strong>de</strong>s matières premières. Avant le début<br />

<strong>de</strong> la crise, lorsqu’un ménage souhaitait acheter une maison, il <strong>de</strong>vait fournir un acompte et<br />

souscrire à un prêt immobilier auprès d’un établissement <strong>de</strong> prêt, qui pouvait le revendre à<br />

une banque d’investissement. Cette <strong>de</strong>rnière recevait alors tous les mois l’argent du<br />

remboursement du prêt.<br />

Pour tenter <strong>de</strong> limiter les risques (bien que ceux-ci étaient faibles dans la mesure où les<br />

propriétaires <strong>de</strong>s maisons disposaient <strong>de</strong> ressources suffisantes), les banquiers ont eu recours<br />

à la titrisation (transformation d’une créance ou d’un bien en titres négociables sur un<br />

marché financier). Le succès <strong>de</strong> ce système, ajouté à cela la politique d'accession à la<br />

propriété mis en place par le gouvernement américain (encourageant les établissements <strong>de</strong><br />

prêts immobiliers à fortement baisser leurs critères <strong>de</strong> sélections aux prêts), ont conduit les<br />

banques d’investissement à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aux établissements <strong>de</strong> prêts immobiliers davantage <strong>de</strong><br />

titres. Pour cela, les banques ont alors du prêter à <strong>de</strong>s ménages dont les revenus étaient<br />

faibles. C’est la création <strong>de</strong>s « subprimes mort-gage » (prêts hypothécaires à haut risque).<br />

Dans la mesure où la valeur <strong>de</strong>s maisons ne faisait qu’augmenter (avec la bulle immobilière),<br />

les banques n’imaginaient pas prendre <strong>de</strong> gros risques, d’autant plus qu’en cas <strong>de</strong> défaut <strong>de</strong><br />

paiement, ils récupéraient la maison et pouvaient la revendre à un prix élevé. De plus, le fait<br />

<strong>de</strong> revendre ces titres à différents investisseurs permettait d’éparpiller les risques.<br />

Cependant, un problème <strong>de</strong> taille est survenu, en 2006, lorsque la FED, au début du<br />

mandat <strong>de</strong> Ben Bernanke, a augmenté son taux directeur, passant <strong>de</strong> 1% à 5% afin <strong>de</strong> réduire<br />

les pressions inflationnistes grandissantes. Cette hausse du taux directeur a provoqué un<br />

dégonflement <strong>de</strong> la bulle immobilière américaine <strong>de</strong>s années 2000, et a entraîné un<br />

renchérissement <strong>de</strong>s mensualités <strong>de</strong> remboursement <strong>de</strong>s crédits immobiliers (les crédits étant<br />

souvent négociés à taux variables). Un nombre important <strong>de</strong> ménages ont alors cessé <strong>de</strong><br />

rembourser leur crédit. Les paiements mensuels perçus par les banques d’investissement, se<br />

sont alors « transformés en maisons », qui furent aussitôt mises en vente sur le marché. Plus<br />

le nombre <strong>de</strong> maisons en vente augmentait, plus le prix <strong>de</strong> l’immobilier chutait.<br />

Dès lors, les propriétaires qui pouvaient encore rembourser leur prêt, ont vu le prix <strong>de</strong> leur<br />

maison chuter et ont ainsi décidé à leur tour <strong>de</strong> ne plus payer. La situation est <strong>de</strong>venu alors<br />

très compliquée : les banques étaient désormais propriétaires <strong>de</strong> maisons qui ont perdu une<br />

gran<strong>de</strong> partir <strong>de</strong> leur valeur. Bien évi<strong>de</strong>mment, les investisseurs n’ont plus voulu acheter ces<br />

titres « subprimes ». Certaines banques et investisseurs, qui avaient eu énormément recours à<br />

ce type <strong>de</strong> prêts, se sont retrouvés dans <strong>de</strong>s situations financières critiques. De plus, les<br />

banques se sont méfiées les unes <strong>de</strong>s autres et n’ont plus voulu se prêter d’argent entre elles.<br />

C’est alors la crise <strong>de</strong> confiance sur les marchés interbancaires, ce qui va entrainer la faillite<br />

<strong>de</strong> certaines banques.<br />

À partir <strong>de</strong> ce constat, on peut très facilement comprendre le mécanisme <strong>de</strong> propagation<br />

<strong>de</strong> la crise financière en crise économique mondiale. C’est ce que l’on appelle le risque <strong>de</strong><br />

crise systémique ou « effet domino ».<br />

163


ANNEXE VII : INTERVIEW DE JANE VON TRAPP, DIRECTRICE DE LA COMMUNICATION ET DU<br />

DEVELOPPEMENT ET ELIZA HULEATT, CHARGEE DU DEVELOPPEMENT DE L’ECOLE<br />

FRANCO-AMERICAINE DE NEW YORK (EN ANGLAIS) - 4 JUIN 2010<br />

Since when did you realize that the financial crisis would be an issue to <strong>de</strong>al with in the<br />

communication strategy of FASNY?<br />

Fig. 59 - Photo <strong>de</strong><br />

Jane Von Trapp<br />

Jane Von Trapp : We were aware as it pretends to FASNY that we will<br />

possibly run into a dropping enrollment at the School probably at the end of<br />

the summer of 2008. It was becoming very clear that what was happening in<br />

the US, with the banks, with the world, was going to hit us eventually. And<br />

because half of the School are expats that it would probably impact us in a<br />

big way but we didn’t know how badly. So, we started to talk about the<br />

largest fundraiser of the year that we have, which is the Gala, should we<br />

even have a gala, an annual diner. What happens in a situation like this is<br />

should we adopt the same thing that we will normally do every year or should we change our<br />

strategy because of it. And because the way people feeling were about it, we had some events<br />

early in the School year where people just didn’t come. And people ma<strong>de</strong> us feel that it was<br />

inappropriate in some ways to be holding these events because of the bad times and so many<br />

people were feeling. In the Board also people lost their job, people were very shaky and<br />

thought that they might be loosing their job or at least that they are going to change<br />

drastically. Everybody was uncertain and I think the uncertainty was even more impactful<br />

than when thing became real and when the reality hit we knew exactly what’s going on. The<br />

other thing that was very uncertain was how long it was going to last and would we be going<br />

on for years, trying to recover as nation or as a School, would it be something that will<br />

Passover within the year’s time and uncertainty was huge. So we pretty much <strong>de</strong>ci<strong>de</strong>d to go<br />

ahead and do thing as we were going to do them when it came to events but when it came to<br />

the way we do appeals or thing like that we change our message and our communication<br />

message became more centered on “We feel your pain and so we want to commiserate with<br />

you but when you’re setting your priorities” and that basically what we learn from our<br />

colleagues and other schools and from the newspaper that philanthropy was going<br />

drastically impacted but what was happing, people were reprioritizing who they are going to<br />

gave money to because in the US everybody has this feeling of philanthropy as their causes if<br />

they can afford to give they have their causes to who they are going to and our message<br />

became “Thank you so much for making FASNY your priority and we recognize that you<br />

need to make choices”. And the way it impact to the School was huge. The Board had<br />

budgeted for far more children to be in the School than they were in the long term for that<br />

year. And because the Board does this budget in the fall before for the following school year,<br />

so if you’re doing that almost 6 months before how can you predict what’s going to happen 6<br />

months ahead of time. So when we budgeted for 830 kids, which is basically flat from the<br />

year before and we han<strong>de</strong>d up with 770, somewhere in that neighborhood, we had a huge<br />

financial <strong>de</strong>ficit and what we normally put in our reserve to cover surprises like that, ¾ of it<br />

was spent in or<strong>de</strong>r to open up the doors this year and be able to provi<strong>de</strong> the same labels of<br />

program and service. It also impacted faculty salaries in that the School traditionally giving<br />

somewhere in the neighborhood of 3 or 4 % of raise every year and the raise went down to<br />

2.5 % so the School still want to let people know that they were valued and they did a great<br />

job and <strong>de</strong>served some bonus money but in fact they can not give them the money at the same<br />

rate that they did in the past. We didn’t change our i<strong>de</strong>ntity, we really change our message.<br />

We did heard back from people; people were very skeptical especially the Board member:<br />

164


we shouldn’t spend the money having reunion, annual dinner…those thing that we normally<br />

do and we should suspend and not do this year. But what we need to keep because we need<br />

to reinforce the message that the School is healthy. If we had change and not had for<br />

instance the general assembly and annual dinner it would have sent very negative message<br />

to our community that the School is hurting. So we nee<strong>de</strong>d to like we were telling them for<br />

the State-of-the-School, keep that and said we try to cut back whatever we could in the way<br />

of expenses. We knew that we nee<strong>de</strong>d to keep that going because otherwise it would have<br />

sent very negative messages that we didn’t want to send. But School community was very<br />

supportive throughout the all-initial crisis but fundraising was very down as far as<br />

participation. And the good news is that it’s picking up. I think people have renewed energy<br />

and confi<strong>de</strong>nce in the economy and that’s ma<strong>de</strong> a difference a year later as to their giving<br />

ability and their willingness to give. And, they also, although I’m sure people are still<br />

impacted, I think our objectives are the same, we still want 100% participation from people,<br />

we still want to show that we are a thriving community. And I think one of the most positive<br />

thing that I’ve heard about in the past is that from an Admission stand point, we seem to be<br />

right back when we were before that happens and the number right know is 830 projected for<br />

next year. So we have this momentary blooper time with Admission and it’s apparently the<br />

companies that bring expats over here that are bringing people back like they did in the past<br />

because they are confi<strong>de</strong>nt in the economy. The other way that we were hugely impacted was<br />

our <strong>de</strong>mand for financial aid for those people who don’t receive it from the French<br />

government and don’t receive compensation from their companies to send their kids to<br />

School, our <strong>de</strong>mand was up by 20% and we respon<strong>de</strong>d by adding to our budget accordingly<br />

so that we could help those family that have either an impact by loosing their jobs or didn’t<br />

get their bonuses. The other thing that happen at our Gala this year, the Olivia Tucker ask,<br />

which happen every year and that goes to financial aid, was far more supported this year<br />

than usual (went from $30 000 to $57 000) in 15 minutes. We had a great auctioneer, the<br />

Board of the Chair who get up and said we need your help in this direction but whether or<br />

not it had to do with people just very strongly feeling that they wanted to support this type of<br />

imitative. We and our <strong>de</strong>partment had to cut back a position and some of the ways we<br />

<strong>de</strong>livered our publications for next year. Because the budget was set a all six months earlier,<br />

we still have our budget to work with this year but the impact will be seen next year in the<br />

way we <strong>de</strong>liver our communication tools. As far as the new web site goes, the spenditure for<br />

the web site was justify by the fact that we were told to cut back in printing which cost a lot<br />

more (issues of the magazine, view book.. hundred of thousand of dollars) and to spend<br />

30.000 on the new web site we could <strong>de</strong>livered this communication in electronic fashion<br />

seems justifiable to the Board and the Head of School. Advertising – we didn’t seems to have<br />

any issues there, in fact we double or triple our advertising income. The economy didn’t<br />

seems to heart the Gala anyway and in fact we went from $220 000 and we ad<strong>de</strong>d a $100<br />

000 more than we did in the past.<br />

I don’t think they were a School that was not impacted by this recession and particularly<br />

those that are international in nature. The fact that they <strong>de</strong>pend on expats, everybody have to<br />

have been in the same situation that we were and I assume that they all in a positive going<br />

for as far as the Lycee is looking for more properties. We are very different from the Lycee,<br />

far more French and less bilingual than we are even they do have English classes. We have a<br />

mission and I don’t think that the School even with this financial impact would waver from<br />

the mission of the School to accommodate. This is not the first time we had a recession. The<br />

way this School is set up takes in to account the adding flow of expats coming and going all<br />

the time. Every year we have to do that, recession or not. This was just a much larger and<br />

uncertain length of time rather than encapsulated within one year of what would be the<br />

165


future. So we are very lucky because it’s looks like we are over the hump and we are on to<br />

jumping right back where we were but it will impact the School for a all other year because<br />

of the way the budget was set the year before. And because of that we have to make up for<br />

the money we had to use (3/4 of a million dollar) from our reserve fund that is there for<br />

emergency and surprises like this. We have to replenish that and feel that we are back. Most<br />

people were very uncertain they looked the trend, the previest recession and there were<br />

prediction all over the place, 6 months, 10 years. One thing that everybody agreed on that I<br />

heard was that we won’t know when we were coming out of it until 6 months after we are out<br />

of it. So how can you plan when you are not going to know until 6 months afterwards? Our<br />

School as any indicator, people are very positive, we are back to the level of admissions that<br />

we wanted to be at, it’s almost that we are like we were 18 months ago. If we had suspen<strong>de</strong>d<br />

for a year it would have been several giant step backward. Then pickup again what you left<br />

off you would have to start all over again and that takes years to cultivate people to get them<br />

to un<strong>de</strong>rstand what we are trying to do. You could not stop.<br />

Fig. 60 - Photo <strong>de</strong><br />

Eliza Huleatt<br />

Eliza Huleatt : I think that one of the har<strong>de</strong>st thing for us when there are so<br />

kind of recession like this and you need to reduce your budgeting, the<br />

importance of marketing and fundraising is very hard for us, especially<br />

because fundraising is so new here and for a lot of people in the Board and<br />

in administration, to convince people that you can’t stop fundraising,<br />

marketing and cultivating for a year. If we had suspen<strong>de</strong>d the annual fund<br />

last year, this year we will have a 40% of participation and luckily we are<br />

doing well. So, that was one of our challenge for our office I think,<br />

convincing people about what we were doing was right, that we have to keep going.<br />

Obviously we did ma<strong>de</strong> some changes. One of our the main thing we did differently last year<br />

was that we used to do those very speak appeal. We had corresponding vi<strong>de</strong>o with these little<br />

mailing and inserts. They look very cool and they were fun and we did 5 or 6 of them a year<br />

through the mail to all of our constituent all over the world so it’s certainly an expense in<br />

printing and posting. But they were really fantastic. But I think last year in the winter we<br />

realized that a much more affective thing to do was just send emails with nothing fancy with<br />

text saying we know it’s a very hard time and thank you for keeping FASNY a priority. But<br />

literally, it was 4 or 5 sentences just text and a link to donate. That was one sort of major<br />

change. We have done an option to donate on certain fund. We pushed that a little bit more<br />

because we find that people feel a little bit better knowing where their donations’ going and I<br />

thing that ma<strong>de</strong> people a little better about donating. People are less targeted this year. We<br />

encourage participation whatever the gift amount. It’s really important just to especially in<br />

that kinf of economic climat, is just to pay attention to your own School amd so we did in an<br />

individual basis, we knew people who had lost their job, a lot of family when the dad was<br />

moved back to France because he was send back…people had huge family issues. So a lot<br />

more fundraising was done maybe not in an individual basis but really looking at our<br />

families we were going through. We stopped mailing pretty much all together last year,<br />

which saved a lot of money. We don’t anymore mailed to faculty at all, just stuck in their<br />

mail box at school. We don’t mail to alumni because they respond better to email.<br />

166


Jane Von Trapp : We started to pay attention to social networking site especially for alumni.<br />

When I had to make the budget for this year, last year, we went to something called 0-base<br />

budgeting which means that you start from 0. Rather than looking last year’s budget, just<br />

because there is inflation, I just add 2 or 3 % to it and keep it in the budget for next year, we<br />

go back to 0, really looking what it was going to cost next year to do the same thing and start<br />

again, just don’t add money to it from year to year. I think a lot of business and school went<br />

on this direction and it’s very smart to look into each item individually and ask you if you<br />

really need it, can we do it in a different way etc…<br />

Our total fundraising went down around 20 %, which was better some other School. Nobody<br />

was horrified by that. Parents participation went down around 10%, 70% to 60% that<br />

percentage is pretty low in compare to other American school but again it could have been a<br />

lot worth.<br />

Jane Von Trapp : That’s been the har<strong>de</strong>st choir this year that is to build back the<br />

participation levels although monetary we are ahead from last year, the participation level<br />

has not build back up so what that says is people are giving more money, new people are<br />

giving money and maybe some people dripped out. But there is not the right spread support<br />

that we will like to see across the board. And I think some of it has to do culturally. If people<br />

just have 10 dollars to give they think it’s so insignificant that it won’t make an impact, that<br />

it’s embarrassing to them, they will be judged. Although we do offer an anonymous status to<br />

them for our annual report. We try to get that message across through our volunteers that it<br />

really doesn’t matter how much you give, it’s really the participation. And that’s key because<br />

it impact when we go to foundation or corporation, they want to know the percentage or<br />

participation of teachers, alumni, parents, etc and it impact how much money they will give<br />

to us because if we are not supported by people who are directly affected by the services of<br />

our school then why should they support us. That’s been a big <strong>de</strong>al that we try to get that<br />

message across.<br />

Giving is an habit so that’s why we try to get alums to give when they are young even if it’s<br />

only 5$ because then you are an habit of it and it’s become something that you do.<br />

Jane Von Trapp : People who pay for private School are generally have a different ethic<br />

when it comes to giving and they feel that it’s a priority in their live. But it’s a very American<br />

cultural thing. One of the thing that we have here, for instance in our school is the<br />

community service hours, it’s a huge part of our educational process with our kids, whether<br />

it’s public or private school. They go out and do thing for their community and they give<br />

themselves, volunteer hours, it’s just part of our culture. Giving sort of goes behind that. And<br />

there is a lot of advertisement on TV about giving to organizations.<br />

4. The impact was still huge and it felt particularly for us because the School has just<br />

beginning this momento, we were on the track, we were growing by lips down.<br />

Jane Von Trapp : We’ll be at a million dollars for the annual fund. One area that we<br />

<strong>de</strong>finitely noticed it too was on corporate and foundation si<strong>de</strong>. The companies wee very<br />

struggling. Our parents are very focus in working in banks, alcohol and luxury, so it’s the 3<br />

areas that were very struggled last year. Company had donate $30 000 to annual fund the<br />

year before and last year we get $0 from them. And the Gala for 2009 we didn’t have the<br />

corporate support that we have this year, and corporate money is a lot of money. And the<br />

Gala is half of our annual fund. That was huge. We also has a lot of parents’ company who<br />

167


afford to match gift and so if the parents were laid of, it was not working anymore and we<br />

lost $10 000 almost. Some companies give away from their matching gift program so it was<br />

not just our parents.<br />

We had to change the way we budgeted. The corporate foun<strong>de</strong>rs change their strategy of the<br />

way they will give money. They are not going to give us other $30 000, they are going to<br />

spread over 3 years an give us $10 000 each year. They still want to support the School but<br />

this is how they are going to do it differently. And that’s the major impact. Every business<br />

and that’s probably the major impact, was required to reexamine the way they did business<br />

and sometimes this is not a bad thing to look how you’re doing business, change the way<br />

you’re giving raises, change the way you’re distributing money; this is a very healthy thing,<br />

it’s like when the market readjust the stock market. It’s an healthy thing to have that selfexamination<br />

and it’s unfortunate that a lot of people hand up getting heart in the process but<br />

it’s an excuse to reexamine also the way you do business and I think business come up at this<br />

thing healthier because they striped out a lot of the excesses. And they come with better<br />

structure. The impact on Alumni relations, the most immediate thing is our budget. Most of<br />

local private schools have alumni family living right there so it’s easy to do an event in the<br />

campus. Our alums are all over the world, which is part of our character, one of the coolest<br />

things of the school but in the other hand if you want to get a bunch of alumni together it’s<br />

nearly impossible and expensive. So what we had just started to do are the regional events:<br />

we had diner with 7 or 8 alumni, we was planning to do something in san Francisco. We<br />

used to do an event every summer, one in NYC and one in Paris but obviously those thing<br />

are very expensive. We couldn’t justify spending a few thousand dollars to get ten or 15<br />

alumni together. We just start those events and it seems very successful. On the other hand<br />

like Jane mention, we started facebook effort and the alumni page. Hopefully with the new<br />

website it will be a little more interactive but in that sense I’m feeling we bunch the alumni a<br />

little better. We got a least reconnected virtually with more alums. Also we have started the<br />

i<strong>de</strong>a of fundraising with the young alums and it’s seems awkward and inappropriate to come<br />

out of nowhere with fundraising when it’s new. So we just have to wait a couple of years I<br />

think.<br />

There is always room for improvement and for changes, just by having a new communication<br />

person in the office, there are going to be changes and differences, and her bilingualism is a<br />

big change and all the positions in the <strong>de</strong>partment that will make the most sense. From a<br />

strategy stand point, I think the fact that we are starting the new website, we have the vi<strong>de</strong>o<br />

camera so that we could handle some vi<strong>de</strong>o on our own, we try to keep up with changes in<br />

society and that way people want vi<strong>de</strong>o, more instantaneous communication, people don’t<br />

want to sit and watch a magazine that has 6 months old new in it; I think if we can going for<br />

more instantaneous or more real time, I think we are going to cultivate people better and it’s<br />

what people are <strong>de</strong>manding. But there is a purpose to send all these stuff like the colleges to<br />

show us how we are, still the way college use to do it, if it’s good and have a cover that<br />

attract, they are going to go through this and see things immediately (age of kids, different<br />

languages. There is a lot of way that we are going to change. We are going to pay a lot more<br />

attention to social networking, I have confi<strong>de</strong>nce in this website, because of the way that<br />

portal setup is (people are not paying attention to our website anymore). Acess to teacher<br />

comments, see the art show pieces they just did, etc…<br />

Sometime change for the better because you reexamine yourself, change you structure, being<br />

more creative, it make you think.<br />

168


ANNEXE VIII : GRAND DEBAT CELS’AND CO : « LES VALEURS DANS L’ENTREPRISE :<br />

LEVIER IDENTITAIRE OU DEMARCHE ETHIQUE » - 29 MARS 2012<br />

Le Grand Débat Cels’and Co du 29 mars 2012 a eu lieu dans le Grand amphithéâtre <strong>de</strong><br />

l'Asiem (6, rue Albert <strong>de</strong> Lapparent, Paris 7e). Ce débat fut proposé et animé par Jérôme<br />

Marcadé, conseiller technique pour les étu<strong>de</strong>s et les analyses au cabinet du ministre <strong>de</strong> la<br />

défense et <strong>de</strong>s anciens combattants. La thématique pressentie pour l’édition 2012 du Grand<br />

Débat Cels’and Co était :<br />

« Les valeurs dans l’entreprise : levier i<strong>de</strong>ntitaire ou démarche éthique »<br />

Intervenants : Thierry Wellhoff, Prési<strong>de</strong>nt-fondateur <strong>de</strong> l’Agence Wellcom, Thierry<br />

Libaert, Professeur en sciences <strong>de</strong> l’information et <strong>de</strong> la communication à l’université <strong>de</strong><br />

Louvain et Laurent Sacchi, Directeur général <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong>s relations<br />

extérieures du groupe Danone<br />

Introduction :<br />

Le thème <strong>de</strong>s valeurs intéresse beaucoup <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>. Phénomène <strong>de</strong> mo<strong>de</strong> ou démarche<br />

éthique ? Rappelons tout d’abord que nous sommes dans un contexte actuel <strong>de</strong> campagne<br />

électorale où le mot valeur est apparu très rapi<strong>de</strong>ment. Nous ne nous intéresserons pas aux<br />

valeurs politiques mais aux valeurs <strong>de</strong> l’entreprise en ces temps <strong>de</strong> crise financière, <strong>de</strong> crise<br />

économique, sociale voire morale, au moment où l’opinion publique est en perte <strong>de</strong> repères<br />

ou tout est vu sous le prisme du développement durable, il semblait intéressant <strong>de</strong> réfléchir à<br />

la dimension sociale et i<strong>de</strong>ntitaire <strong>de</strong> l’entreprise, ce que l’on appelle communément<br />

l’entreprise citoyenne. L’une <strong>de</strong>s composantes <strong>de</strong> cette entreprise citoyenne, ce sont bien<br />

entendu ses valeurs.<br />

Les entreprises s’investissent <strong>de</strong> plus en plus dans <strong>de</strong>s démarches <strong>de</strong> développement<br />

durable pour <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s entreprises citoyennes, à une époque où les chefs d’entreprise, leurs<br />

salariés et leurs clients sont en quête <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x repères. A la recherche <strong>de</strong> leur co<strong>de</strong><br />

génétique, les entreprises ont ainsi entrepris <strong>de</strong> définir leurs propres valeurs : simple action<br />

<strong>de</strong> communication pour « être dans l’air du temps » ou réflexion i<strong>de</strong>ntitaire sur leur <strong>nouveau</strong><br />

rôle social ?<br />

Fig. 61 - Photo <strong>de</strong><br />

Thierry Wellhoff<br />

Interview <strong>de</strong> Thierry Wellhoff, Prési<strong>de</strong>nt-fondateur <strong>de</strong> l’Agence Wellcom,<br />

Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Syntec Conseil en Relations Publics. Auteur <strong>de</strong> «Les valeurs»<br />

(Eyrolles 2009) et co-auteur avec Jean-François Clau<strong>de</strong> <strong>de</strong> «L’entreprise<br />

en 80 valeurs» (Liaisons 2011).<br />

Pourquoi vous êtes vous intéressé aux valeurs en entreprise ?<br />

Je dirige une Agence qui a fêté ses 30 ans l’année <strong>de</strong>rnière. En tant qu’Agence, je me<br />

suis toujours intéressé aux valeurs <strong>de</strong> marques. Cela fait partie du travail d’une agence <strong>de</strong><br />

s’intéresser à la marque, qu’il s’agisse <strong>de</strong> la marque produit ou <strong>de</strong> la marque entreprise, on<br />

s’intéressait aux valeurs. Il y a une quinzaine d’années, on a vu apparaître <strong>de</strong>s entreprises qui<br />

affichaient leurs valeurs soit dans le hall d’accueil, les plaquettes ou leurs sites internet. Il y<br />

169


en avait qui l’avait fait <strong>de</strong>puis longtemps mais <strong>de</strong>puis une quinzaine d’années <strong>de</strong> plus en plus<br />

d’entreprises affichaient les valeurs mais ce n’était plus du tout <strong>de</strong>s valeurs sur lesquels on<br />

était habitué <strong>de</strong> travailler comme l’authenticité, le terroir, et la on voyait apparaître <strong>de</strong>s<br />

valeurs comme l’honnêteté, l’intégrité, le respect…<br />

On s’est dit qu’il y avait un sujet là-<strong>de</strong>ssus et tout notre travail à l’agence est parti d’une<br />

intuition : c’est qu’il y avait une espèce d’incompréhension interne à l’entreprise quand on<br />

parlait <strong>de</strong> valeurs. Et en gros, il y a <strong>de</strong>ux attitu<strong>de</strong>s : une première qui est d’origine<br />

marketing : les valeurs sont faites pour montrer que l’on est pas les mêmes que les autres, ce<br />

qui a fait dire à Bor<strong>de</strong>aux Chesnel, nous n’avons pas les mêmes valeurs. De l’autre côté, il y<br />

avait une vision qui était plus d’obédience RH, qui était plus une vision éthique (cf charte <strong>de</strong><br />

déontologie, charte éthique, principes d’actions, qui étaient <strong>de</strong>stinés plus à dire aux<br />

collaborateurs : il faut se conduire d’une certaine manière. On a vu qu’il y avait une<br />

schizophrénie dans l’entreprise avec d’un côté l’entreprise corporate, celle qui essaie <strong>de</strong><br />

montrer qu’elle se conduit bien et qu’elle a <strong>de</strong>s valeurs qui sous entend le terme <strong>de</strong> valeur<br />

morale et <strong>de</strong> l’autre côté, l’entreprise qui vend, qui voyait plus <strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong> manière<br />

différenciante. Mais une entreprise c’est <strong>de</strong>ux choses. Une entreprise qui ne vend pas, ce<br />

n’est pas une entreprise mais une entreprise qui vend n’importe comment en faisant<br />

n’importe quoi a du mal à vendre longtemps, pour autant qu’elle soit dans un marché<br />

concurrentiel.<br />

À partir <strong>de</strong> cette intuition, on a décidé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>ux choses : d’abord regrouper un<br />

groupe d’experts avec <strong>de</strong>s profils venant <strong>de</strong> différents horizons : <strong>de</strong>s agrégés <strong>de</strong> philosophie,<br />

<strong>de</strong>s gens qui venaient du marketing, <strong>de</strong>s ressources humaines pour comprendre ce qu’étaient<br />

les valeurs dans une entreprise. On a nourrit ce groupe d’expert d’une étu<strong>de</strong> : on a créé<br />

l’in<strong>de</strong>x <strong>de</strong>s valeurs, qui est <strong>de</strong>venu ensuite l’in<strong>de</strong>x international <strong>de</strong>s valeurs, qui avaient <strong>de</strong>ux<br />

pendants dans cette étu<strong>de</strong> : un pendant très qualitatif pour démarquer les meilleures pratiques<br />

en formalisant les valeurs dans les entreprises et un <strong>de</strong>uxième pendant plus quantitatif qui<br />

était <strong>de</strong> voir les mots utilisés par les entreprises pour définit les valeurs et voir si l’on pouvait<br />

en tirer quelques choses.<br />

Une première étu<strong>de</strong> en 2003, 2004 et on l’a porté à l’international en 2007, on l’a refait en<br />

2009 et bientôt une nouvelle en 2012. Cela représente plus <strong>de</strong> 4000 entreprises étudiées dans<br />

13 pays et 14 secteurs d’activités.<br />

Qu’est ce qu’une valeur dans l’entreprise ?<br />

Ce qui est intéressant avec les valeurs, c’est que tout le mon<strong>de</strong> est intéressé car cela<br />

parle autant au collectif qu’à l’individuel. Il y a aussi beaucoup <strong>de</strong> critiques quand on parle<br />

<strong>de</strong> valeurs en entreprises : tout le mon<strong>de</strong> se dit que c’est du pipeau, que les entreprises qui<br />

parlent <strong>de</strong> valeurs ne les appliquent pas. On s’est arrêtés sur 5 principes pour définir ce que<br />

seraient les « vraies valeurs », qui correspon<strong>de</strong>nt à quelque chose qui serait un petit peu<br />

soli<strong>de</strong>.<br />

Le premier principe c’est qu’une une valeur c’est un mot. Si je donne un mot comme<br />

l’ambition ou la loyauté, on ne mettrait pas tous la même chose <strong>de</strong>rrière ce mot. On a besoin<br />

d’une définition propre à l’entreprise pour recouvrir un sens et notamment un sens partagé.<br />

170


La <strong>de</strong>uxième chose c’est qu’il y a un champ d’application à une valeur, il y a un au<strong>de</strong>ssous<br />

et un au-<strong>de</strong>ssus. Qu’est ce que c’est que ne pas avoir assez d’ambition et qu’est ce<br />

que c’est que d’en avoir <strong>de</strong> trop, par exemple. Aristote disait qu’une vertu est une ligne <strong>de</strong><br />

crête entre <strong>de</strong>ux abîmes. C’est un peu pareil pour une valeur.<br />

Le troisième point est que le non respect d’une valeur doit susciter <strong>de</strong> l’indignation.<br />

Quand je vais dans une entreprise et que je travaille sur une démarche valeur, en générale,<br />

j’aime bien leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r : par exemple j’arrive dans votre entreprise, qu’est ce qu’il faut<br />

que je fasse et surtout que je ne fasse pas pour être accepté par le groupe ? Le contraire d’une<br />

vraie valeur doit susciter <strong>de</strong> l’indignation. En gros, s’il y a la valeur respect dans une<br />

entreprise et qu’il y a <strong>de</strong>s gens irrespectueux et que tout le mon<strong>de</strong> s’en fout, c’est que ce<br />

n’est pas une vraie valeur, c’est juste <strong>de</strong> l’affichage.<br />

Le quatrième point est qu’une valeur doit s’adresser à tous les publics <strong>de</strong> l’entreprise,<br />

<strong>de</strong>s parties prenantes. Inutile <strong>de</strong> dire que la satisfaction client n’est pas une valeur. C’est une<br />

valeur qui est reprise par les entreprises. Bonne nouvelle, cela va en diminuant mais une<br />

valeur doit s’adresser à tous les publics. Si cela doit s’adresser qu’aux clients, qu’à l’interne<br />

ou qu’aux actionnaires, cela ne marche pas. Il faut prendre quelque chose <strong>de</strong> suffisamment<br />

conceptuel, qui se déclinera en principes d’actions en fonction <strong>de</strong>s différentes parties<br />

prenantes.<br />

Enfin, une valeur doit se traduire en actes car une valeur qui ne se traduit par en actes<br />

n’a aucun intérêt. Une valeur n’existe qu’à travers <strong>de</strong>s actes qui l’illustrent au même titre que<br />

les actes n’ont pas <strong>de</strong> sens s’ils n’ont pas <strong>de</strong> valeurs. : il y a un espèce d’aller-retour entre les<br />

valeurs et les actes où l’un n’existe pas sans l’autre.<br />

Est ce que l’on peut imaginer qu’il y ait un système <strong>de</strong> valeurs, <strong>de</strong>s critères ?<br />

Il y a quatre dimensions pour définir un système <strong>de</strong> valeurs qui nous semblent<br />

essentielles : d’abord la dimension i<strong>de</strong>ntitaire, c’est-à-dire qui doit porter l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la<br />

société. On associe une société comme Apple à l’anticonformisme. Il s’agit <strong>de</strong> la marque<br />

entreprise.<br />

La <strong>de</strong>uxième chose, c’est la dimension éthique. Cette dimension éthique est assez riche,<br />

surtout à l’air d’internet où l’on retrouve l’image et les opinions véhiculées toujours au<br />

même niveau. L’image en gros c’est la communication et l’opinion c’est en gros ce qui<br />

résulte du comportement <strong>de</strong> l’entreprise. L’intérêt <strong>de</strong>s valeurs c’est qu’elles vont permettre<br />

<strong>de</strong> fédérer à la fois l’image et donc <strong>de</strong> structurer la communication et <strong>de</strong> structurer aussi le<br />

comportement éthique. Il est donc indispensable que les valeurs soient au cœur <strong>de</strong><br />

l’entreprise pour fédérer l’aspect i<strong>de</strong>ntitaire et éthique.<br />

L’autre dimension est une dimension <strong>de</strong> reflet <strong>de</strong> projet. Si les valeurs ne correspon<strong>de</strong>nt<br />

pas à une réalité <strong>de</strong> l’entreprise, cela aura un effet d’affichage voire pipeau. Et les valeurs qui<br />

sont là pour définit unique ment un existant, il n’y aura pas beaucoup <strong>de</strong> managers qui vont<br />

s’y intéresser car le rôle d’un manager est d’emmener son entreprise vers autre chose.<br />

La <strong>de</strong>rnière dimension concerne la réalité vécue. Donc un système <strong>de</strong> valeur compte 3 ou<br />

5 valeurs plus quelques valeurs associées qui pourront s’y rattacher. Chez Wellcom on parle<br />

d’un co<strong>de</strong> génétique qui doit fédérer ces 4 dimensions pour fédérer l’ensemble <strong>de</strong> la<br />

démarche <strong>de</strong> l’entreprise.<br />

171


Une entreprise c’est fondamentalement <strong>de</strong>ux choses : d’abord une mission, ce à quoi on<br />

sert, le pourquoi elle fonctionne. C’est aussi le comment, et là ce sont les valeurs qui<br />

structurent l’entreprise. Le comment est ce qui va déterminer toute une façon <strong>de</strong> faire.<br />

Quel est le top 10 <strong>de</strong>s principales valeurs à l’international ?<br />

Sur 13 pays, voici le top 10 <strong>de</strong>s valeurs : la qualité (en tête dans tous les pays sauf la<br />

France en 6 e ), l’innovation (en France l’innovation arrive en tête, ce qui est normal vu que<br />

c’est un pays d’ingénieur), la satisfaction client, l’intégrité, l’environnement, la<br />

responsabilité sociale, le succès, le savoir-faire, la responsabilité et l’esprit d’équipe.<br />

Quelles sont les 8 familles que tu as définies dans ton ouvrage ?<br />

On a essayé d’avoir <strong>de</strong>s regards croisés et on s’est dit que l’on allait essayé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s<br />

familles <strong>de</strong> valeurs. On a définit 8 familles <strong>de</strong> valeurs : les valeurs <strong>de</strong> compétence<br />

(excellence, savoir-faire, professionnalisme), les valeurs conquérantes (ambition, courage,<br />

performance), les valeurs <strong>de</strong> conduite (passion..), les valeurs environnement/société (valeurs<br />

sociétales en évolution, comme si les entreprises se vivaient beaucoup plus en<br />

correspondance avec la société), les valeurs relationnelles (convivialité, respect, ..), les<br />

valeurs morales (6% <strong>de</strong>s valeurs retenues), les valeurs d’épanouissement (plaisir, talent..) et<br />

les valeurs sociales (équité, participation).<br />

Fig. 62 - Photo <strong>de</strong><br />

Thierry Libaert<br />

Interview <strong>de</strong> Thierry Libaert, Professeur en sciences <strong>de</strong> l’information et <strong>de</strong> la<br />

communication à l’université <strong>de</strong> Louvain, Prési<strong>de</strong>nt du comité scientifique <strong>de</strong><br />

Communication & Entreprise. Auteur <strong>de</strong> nombreux ouvrages sur la<br />

communication, dont « Communication et environnement, le pacte impossible »<br />

(PUF 2011).<br />

Les valeurs <strong>de</strong> l’entreprise ce n’est pas un domaine scientifique, le questionnement sur les<br />

valeurs est transverse à beaucoup d’organisation. La réflexion sur quelles sont nos valeurs,<br />

on peut le retrouver dans <strong>de</strong>s institutions publiques, <strong>de</strong>s ONG, etc.. C’est une démarche qui à<br />

mon sens est commune. Sur le regard universitaire, tous les auteurs qui ont écrit sur les<br />

valeurs, ont toujours eu <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> vue différents. Par exemple, Charles Harrison définit<br />

l’image comme la composante <strong>de</strong> 4 éléments : l’i<strong>de</strong>ntité, la personnalité, la réputation et les<br />

valeurs.<br />

Dans un même temps, il y a une relation claire entre d’autres types <strong>de</strong> démarches,<br />

notamment les démarches éthiques, toujours avec une frontière trouble. La relation valeuréthique<br />

n’est pas claire. Par exemple la satisfaction client, c’est plutôt du bon sens<br />

managériale. La frontière sur ce thème est poreuse et il y a une relative nébulosité. Le<br />

sentiment <strong>de</strong>s universitaires est que l’on est à un sta<strong>de</strong> embryonnaire. Il n’y a pas d’étu<strong>de</strong>s<br />

faites sur le fait <strong>de</strong> faire un blind test sur les valeurs <strong>de</strong>s entreprises. Les valeurs apparaissent<br />

un peu interchangeables. La manière dont cela se passe dans beaucoup d’organisation est que<br />

l’on fait un atelier où l’on choisit 5 valeurs et le comité <strong>de</strong> direction tranchera, ce qui est<br />

contre-productif.<br />

172


Il faut s’intéresser à l’origine même du thème : il y a une sorte <strong>de</strong> triangulation <strong>de</strong><br />

l’origine <strong>de</strong> la démarche valeur entre le Directeur <strong>de</strong> la communication d’un côté, la DRH<br />

associée car il ya une relation par rapport à l’aspect social, et l’approche développement<br />

durable, toujours avec <strong>de</strong>s relations entre les 3 à prendre en considération. Ce que l’on peut<br />

voir c’est que ça n’infuse pas. Quand on va sur <strong>de</strong>s sites internet, il y a toujours la rubrique<br />

« nos valeurs » mais c’est tout, comme si la valeur était un peu catégorisée à l’intérieur d’un<br />

affichage. Les valeurs doivent être en relation avec une démarche participative. La démarche<br />

importe davantage que le résultat.<br />

Sur les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années, 2010/2011, on peut citer 4/5 étu<strong>de</strong>s anglosaxonnes :<br />

-­‐ Une étu<strong>de</strong> sémantique sur la façon dont les entreprises parlent <strong>de</strong> valeurs. Ce que l’on<br />

retient c’est que tout est très autocentré, nombriliste, non contextualisé par rapport aux<br />

parties prenantes <strong>de</strong>s entreprises. Il n’ya a jamais une relation, c’est presque une déclaration.<br />

-­‐ Quand on interroge <strong>de</strong>s professionnels <strong>de</strong>s Relations Publics, en entreprises et en agences,<br />

on a les mêmes réponses (transparence, intégrité, …). Les ruptures sont à l’intérieur <strong>de</strong>s<br />

organisations par métiers : confi<strong>de</strong>ntialité <strong>de</strong>s renseignements, on a <strong>de</strong>s réponses très<br />

différentes <strong>de</strong>s gens qui travaillent dans le CRM, le marketing client, etc.<br />

Est ce que cela est utile les valeurs?<br />

-­‐ On a une étu<strong>de</strong> américaine, qui porte sur le déclaratif, et on analyse les entreprises qui ont<br />

<strong>de</strong>s chartes <strong>de</strong> valeur et celle qui n’en n’ont pas. La différence la plus remarquable, c’est sur<br />

le thème <strong>de</strong> la corruption. Les gens qui sont dans <strong>de</strong>s entreprises avec <strong>de</strong>s chartes <strong>de</strong> valeurs<br />

ont un déclaratif sur le caractère inacceptable <strong>de</strong> la corruption plus important que ceux qui<br />

n’en n’ont pas.<br />

-­‐ Sur les problématiques <strong>de</strong> la charte <strong>de</strong> valeurs, à quel moment en parle-t-on ? Deux<br />

possibilités : quand on la fait et peu ensuite. Et le seul moment où cela revient c’est avec les<br />

jeunes embauchés.<br />

-­‐ Un autre point mesuré est l’exemplarité : la croyance en la réalité <strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong><br />

l’entreprise est conditionnée par <strong>de</strong>s valeurs d’exemplarité.<br />

-­‐ Puis, dans le cadre <strong>de</strong> conflits <strong>de</strong> valeurs, à la question « avez-vous été confronté à <strong>de</strong>s<br />

conflits <strong>de</strong> valeurs ? » 65% <strong>de</strong> cadres disent que oui. Le point le plus essentiel c’est « Mon<br />

entreprise a pris <strong>de</strong>s choix que je désapprouve » et le second est que 11% répon<strong>de</strong>nt à<br />

comment y avez-vous été confronté ? « on m’a forcé à me taire et j’ai désapprouvé ».<br />

Un vrai sentiment que l’on peut rencontrer avec ce type <strong>de</strong> problématique <strong>de</strong> valeurs.<br />

Comment les valeurs et l’éthique sont enseignées dans les écoles <strong>de</strong> communication ?<br />

Une belle étu<strong>de</strong> internationale a été faite sur 237 universités dans le mon<strong>de</strong> sur <strong>de</strong>s cursus<br />

management, d’école <strong>de</strong> commerce et <strong>de</strong> communication. Sur l’ensemble <strong>de</strong>s universités,<br />

37% <strong>de</strong>s universités ont un enseignement où on retrouve le mot éthique ou valeurs. Très<br />

majoritairement c’est l’éthique d’entreprise. L’éthique <strong>de</strong> la communication intervient dans<br />

les filières journalistes, on est plus sur la déontologie presse.<br />

173


Est ce que la transparence est une valeur ?<br />

Il y a quelques années, j’ai fait une analyse <strong>de</strong> contenu. J’ai pris <strong>de</strong>s sites internet et <strong>de</strong>s<br />

éditoriaux <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>nts dans les rapports d’activité et <strong>de</strong>s communiqués <strong>de</strong> presse. J’ai<br />

analysé cela sur une quarantaine d’entreprises. Les <strong>de</strong>ux entreprises qui utilisaient le plus le<br />

mot transparence étaient Vivendi et Enron !<br />

Thierry Wellhoff : une valeur a <strong>de</strong> la valeur pout autant qu’on lui attribue <strong>de</strong> la valeur.<br />

Pour ma part, la transparence n’est surement pas une bonne valeur car il n’y a pas <strong>de</strong> société<br />

dans la transparence, on ne peut pas tout dire. Je préfère le concept <strong>de</strong> sincérité car c’est<br />

s’assurer que tout ce que l’on dit est vrai alors que la transparence est quelque chose<br />

d’illusoire. Eventuellement, on peut parler <strong>de</strong> transparence <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> décisions.<br />

Il y a une sur-utilisation du mot transparence dans les valeurs <strong>de</strong>s entreprises. On est toujours<br />

sur le type du discours utopique avec le discours <strong>de</strong> la transparence. On ne peut pas être<br />

société anonyme et transparente en même temps. Il faut raisonner avec 3 axes : dans notre<br />

entreprise, qu’est ce qui peut être transparent et ne pas l’être, par rapport à quel type <strong>de</strong><br />

public, et la temporalité <strong>de</strong> la transparence (<strong>de</strong>s moments où on ne peut pas être transparent<br />

et on le sera plus tard).<br />

Fig. 63 - Photo <strong>de</strong><br />

Laurent Saachi<br />

Interview <strong>de</strong> Laurent Sacchi, Directeur général <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong>s<br />

relations extérieures du groupe Danone. Elu « personnalité communicante<br />

2011 », par Communication & Entreprise.<br />

Il faut se méfier <strong>de</strong> quelqu’un qui répète toutes les 5 minutes qu’il est honnête. C’est la<br />

même chose avec les valeurs. Chez Danone, on a toujours été persuadés que les valeurs<br />

n’avaient pas besoin d’être énoncés pour exister. Et ce n’est pas parce qu’elles sont énoncées<br />

qu’elles existent. Pendant longtemps, Danone, était reconnue comme étant une entreprise<br />

ayant <strong>de</strong>s valeurs, si bien que quand on a entamé un travail <strong>de</strong> formalisation <strong>de</strong>s valeurs en<br />

1996, tout le mon<strong>de</strong> pensait que cela avait déjà été fait. On l’a fait avec un peu <strong>de</strong> réticence<br />

car nous avions 3 craintes :<br />

-­‐ la crainte <strong>de</strong> figer les choses : alors que nous étions une entreprise plutôt agile, qui a<br />

changé 4 fois <strong>de</strong> métiers<br />

-­‐ la crainte <strong>de</strong> savoir ce que c’est que <strong>de</strong>s valeurs et peur <strong>de</strong> se lancer dans <strong>de</strong>s débats<br />

intellectuels<br />

-­‐ la crainte <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir gérer <strong>de</strong>s contradictions car les valeurs c’est un idéal et on n’est pas<br />

toujours à la hauteur <strong>de</strong> ces valeurs.<br />

Malgré ces 3 craintes, on a poussé pour énoncer les valeurs <strong>de</strong> Danone. On l’a fait car le<br />

prési<strong>de</strong>nt avait la volonté <strong>de</strong> marquer un peu les choses et aussi parce que on entamé une<br />

pério<strong>de</strong> d’expansion très forte en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> notre camp <strong>de</strong> base qui était la France et<br />

l’Espagne. On s’apprêtait à partir vers l’Asie et l’Amérique latine et il y a eu une crainte que<br />

si l’on n’exprimait pas <strong>de</strong>s valeurs, que l’on n’avait pas besoin d’exprimer jusque-là car on<br />

était <strong>de</strong> la même culture, on dilue la culture <strong>de</strong> la société. On avait la conviction que la<br />

culture <strong>de</strong> l’entreprise était un <strong>de</strong> ses avantages compétitifs forts.<br />

174


D’abord, on a travaillé en <strong>de</strong>mandant à quelqu’un d’extérieur qui connaissait bien Danone<br />

<strong>de</strong> nous définir par un certain nombre <strong>de</strong> valeurs. Puis, tous les comités <strong>de</strong> direction <strong>de</strong>s<br />

filiales <strong>de</strong> Danone à travers le mon<strong>de</strong> d’animer <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail. On a fait la synthèse et<br />

4 valeurs ont été définies. On a exclu certains types <strong>de</strong> valeurs. Tout ce qui était autour <strong>de</strong> la<br />

performance ne nous semblait pas être du registre <strong>de</strong>s valeurs. Tout ce qui était du must have<br />

ou du registre <strong>de</strong> l’évi<strong>de</strong>nce, <strong>de</strong> l’obligation non plus comme l’honnêteté, la satisfaction<br />

client. On a fait attention à la banalisation, en prenant le hit para<strong>de</strong> <strong>de</strong>s termes employés à la<br />

majorité <strong>de</strong>s entreprises. Et on évite tout ce qui attrait à la stratégie. A l’époque, Danone a<br />

pris un virage <strong>de</strong> la santé en 96 (alors qu’on était sur 9 catégories d’alimentation et du verre<br />

d’emballage avant puis on a décidé <strong>de</strong> se concentrer sur quelques catégories autour <strong>de</strong> la<br />

santé).<br />

Danone a finalement retenu quatre valeurs : l’humanisme, l’ouverture, la proximité et<br />

l’enthousiasme, qui sont <strong>de</strong>s valeurs d’organisation que l’on pourrait porter personnellement.<br />

Puis, on a fait un travail lent <strong>de</strong> diffusion pour que cela percole. On n’a pas fait d’affiches<br />

ou <strong>de</strong> leaflet car on s’est dit que cela <strong>de</strong>vait percoler en interne, en laissant à chaque filiale le<br />

soin <strong>de</strong> choisir la manière la plus adaptée à sa propre culture locale et à son histoire avec le<br />

groupe <strong>de</strong> se les approprier. On a fait le choix <strong>de</strong> ne pas publier en externe, car elles doivent<br />

s’exprimer par <strong>de</strong>s actes.<br />

Thierry Wellhoff : Les valeurs structurent la communication et ne sont pas un objet <strong>de</strong><br />

communication. Elles encadrent un style <strong>de</strong> communication qui illustre les valeurs. C’est un<br />

squelette.<br />

Quel est le lien entre les valeurs et la responsabilité sociale <strong>de</strong> l’entreprise ?<br />

Thierry Libaert : On peut considérer que la responsabilité peut être une valeur et que les<br />

valeurs s’intègrent dans une démarche <strong>de</strong> responsabilité sociale. Quand on parle <strong>de</strong><br />

responsabilité, il y a les <strong>de</strong>ux niveaux : « répondre <strong>de</strong> » c’est à dire assumer, et « répondre<br />

à », c’est à dire dialoguer, partager, et là, c’est une approche communicationnelle du sujet.<br />

Je dirais que pour être efficace, <strong>de</strong>ux écueils doivent être à éviter pour faire la jointure entre<br />

les valeurs et la démarche RSE :<br />

-­‐ Le premier serait <strong>de</strong> ne pas écouter ce que disent les gens, c’est à dire se lancer dans une<br />

démarche sans l’écoute. Les étu<strong>de</strong>s montrent que l’image que les entreprises ont du RSE et<br />

ce que les consommateurs ont n’est pas la même chose. Quand on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux<br />

consommateurs ce qu’est une entreprise <strong>responsable</strong> : les thèmes qui reviennent le plus c’est<br />

d’abord l’honnêteté et la qualité <strong>de</strong>s produits et services. Le 3 e point c’est <strong>de</strong> bien traiter ses<br />

employés. Quand on regar<strong>de</strong> ce qui intervient en queue dans les attributs <strong>de</strong> ce qu’est le RSE,<br />

en avant <strong>de</strong>rnière position, on retrouve l’environnement, alors que quand on écoute les<br />

discours RSE <strong>de</strong>s entreprises, il y a une survalorisation du thème environnementale. Puis le<br />

mécénat ensuite.<br />

-­‐ L’écueil inverse serait <strong>de</strong> trop les écouter. Il y a un formidable déclaratif. Il y a une<br />

enquête <strong>de</strong> Weber Shandwick sur les consommateurs face aux démarches RSE. 80% disent<br />

acheter avant tout <strong>de</strong>s produits <strong>responsable</strong>s. Le journal The Guardian a fait une contreenquête<br />

sur ces étu<strong>de</strong>s en interrogeant les consommateurs : est ce que vous pouvez me citer<br />

une entreprise qui a un comportement socialement <strong>responsable</strong>. Pas <strong>de</strong> réponse. C’est plutôt<br />

vue à l’inverse : une entreprise qui n’aura pas un comportement socio-<strong>responsable</strong>, on<br />

évitera. Les consommateurs sont plutôt pragmatique, c’est à dire avec un décalage entre<br />

l’approche citoyenne et l’approche consumériste où c’est la qualité du produit et le prix qui<br />

compte prix.<br />

175


Quel est le rôle <strong>de</strong> la communication dans une démarche <strong>de</strong> développement durable ?<br />

Thierry Libaert : En termes <strong>de</strong> réputation, quand vous regar<strong>de</strong>z les classements <strong>de</strong>s 100<br />

entreprises ayant une meilleure réputation, globalement 90% aucune n’a fait du RSE un axe<br />

fort <strong>de</strong> sa communication et vice versa, les entreprises qui communiquent beaucoup sur le<br />

RSE sont <strong>de</strong>s entreprises que l’on ne retrouve pas. C’est donc plutôt parce que l’on a une<br />

bonne opinion <strong>de</strong> vous, <strong>de</strong> ce que vous faites et <strong>de</strong> vos services, que l’on va considérer que<br />

vous avez une bonne démarche citoyenne.<br />

Dans les choses importantes que l’on voit apparaître, c’est l’effet boomerang <strong>de</strong> la<br />

communication sur le thème du RSE. Depuis 10 ans où les entreprises ont beaucoup<br />

communiqué sur le thème du RSE, la relation <strong>de</strong> confiance avec les entreprises a tendance à<br />

décroitre. Dans les enquêtes réalisées sur les thématiques environnementales, dans les<br />

questions « Qui est <strong>responsable</strong> <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> l’environnement », maintenant c’est<br />

l’entreprise qui est pointé.<br />

C’est la fonction agenda, c’est à dire que la communication n’aboutit pas à ce que vous<br />

<strong>de</strong>vez penser mais à quoi penser. Du coup, on a attiré attention sur l’environnement et donc<br />

on va considérer qu’il y a <strong>de</strong>s relations directes <strong>de</strong> responsabilités <strong>de</strong>s entreprises sur<br />

l’environnement. Ça commence à décroitre mais il y a eu cette survalorisation <strong>de</strong> la<br />

thématique environnementale qui est apparu comme la panacée, le petit dénominateur<br />

commun <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s communications que l’on pouvait avoir dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

l’entreprise.<br />

Quand on lit <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> responsabilité sociale, (cf. prochaine étu<strong>de</strong> sémantique<br />

publiée par Communication & entreprise), dans le précé<strong>de</strong>nt, le mot contradiction apparaît<br />

une fois pour dire qu’il n’y en a pas. On est sur un registre <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> idéal, rêvé. C’est<br />

encore pire en interne. On a analysé les journaux internes où on a l’impression qu’il s’agit<br />

d’un concours <strong>de</strong> beauté environnementale et sociale. C’est grave car on a beaucoup <strong>de</strong><br />

montée <strong>de</strong> tensions et le discours interne reste centré sur ce registre là. Et cela crée <strong>de</strong>s<br />

tensions car on ne se retrouve pas. Cela peut créer un discours qui peut se révéler contreproductif.<br />

La communication sur le développement durable peut avoir un effet prédictif, peut<br />

créer une ambition, c’est la notion <strong>de</strong> prophétie autoréalisatrice mais dans le temps, il faut<br />

faire attention au décalage par rapport à l’i<strong>de</strong>ntité et à la réalité même.<br />

Quel bilan peut-on tirer <strong>de</strong> la recommandation <strong>de</strong> l’ARPP sur l’environnement dans la<br />

communication ?<br />

Thierry Libaert : Il y a eu un excès <strong>de</strong> fixation sur la thématique du développement durable.<br />

On accepte la publicité sauf dans le domaine <strong>de</strong> l’environnement où elle doit faire <strong>de</strong> la<br />

pédagogie, elle doit informer. Pourquoi y a t-il eu cette fixation publicitaire, cette remise en<br />

cause avec la régulation publicitaire sous l’optique du développement durable ? C’est un<br />

sujet lourd qui pose la question <strong>de</strong> la relation publicité-autorégulation et RSE.<br />

Dans les choses qui m’ont le plus surpris, dans la recommandation sur le Développement<br />

Durable dans la publicité, c’est que pas grand chose n’a été fait. Si on regar<strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière<br />

recommandation par rapport aux précé<strong>de</strong>nts (97 et 2003), c’est un peu la même chose. Ce<br />

qui a changé est le rapport <strong>de</strong> force, cela s’est politisé.<br />

Le bilan vient d’être publié la semaine <strong>de</strong>rnière (travail <strong>de</strong> l’ADEME et ARPP). On<br />

constate une forte baisse <strong>de</strong> l’argument écologique dans l’argument publicitaire. Entre 2006<br />

176


et 2009, l’argument écolo dans la publicité a été multiplié par 5 et là, on est plutôt sur une<br />

pente décroissante et on a une stabilisation <strong>de</strong>s manquements, ce qui est considéré comme<br />

une bonne nouvelle. Les annonceurs ont compris qu’il fallait que la communication sur ce<br />

thème soit être plus mo<strong>de</strong>ste.<br />

Est ce que le double projet économique et social <strong>de</strong> Danone est toujours d’actualité ?<br />

Laurent Sacchi : Pour revenir sur ce qu’a dit Thierry, je m’occupais du chantier <strong>de</strong>s valeurs<br />

en 1996 mais je ne m’occupais pas <strong>de</strong> la communication. La direction <strong>de</strong> la communication<br />

est restée extérieure à ce chantier.<br />

Un certain nombre d’entreprise ont intégré ou fusionné leur Direction <strong>de</strong> Développement<br />

Durable avec la Direction Communication. Danone a fait le choix <strong>de</strong> dire non car on tuait la<br />

démarche <strong>de</strong> développement durable. On est là pour communiquer ce qui a été fait et non<br />

réduire à <strong>de</strong>s actes <strong>de</strong> communication <strong>de</strong>s comportements d’entreprise.<br />

L’effet boomerang existe aussi en interne, pas uniquement parce que l’on est déceptif ou<br />

que cela place l’entreprise face à <strong>de</strong>s contradictions mais aussi parce que cela créer un niveau<br />

d’attente. Quand on a commencé à un peu plus parler d’environnement, on a vu dans les<br />

étu<strong>de</strong>s d’opinion interne, une dégradation <strong>de</strong> l’image <strong>de</strong>s collaborateurs <strong>de</strong> Danone sur<br />

l’environnement alors que l’on faisait plus <strong>de</strong> choses et qu’il le savait. On avait augmenté le<br />

niveau d’intérêt et donc le niveau d’attentes <strong>de</strong>s collaborateurs.<br />

Concernant le double projet, c’est quelque chose qui a plus <strong>de</strong> 40 ans. C’est le fait qu’il ne<br />

peut pas y avoir <strong>de</strong> développement économique sans développement social (Antoine<br />

Riboud). On marque la naissance symbolique du projet par le discours <strong>de</strong> Marseille.<br />

La responsabilité <strong>de</strong> l’entreprise ne s’arrête pas aux 4 murs <strong>de</strong> son entreprise mais elle<br />

doit avoir un impact sur le social, non pas pour <strong>de</strong>s raisons morales mais surtout<br />

économiques. C’est passer <strong>de</strong> la communication à l’intégration dans la stratégie car on n’a<br />

pas le choix. Prendre soin <strong>de</strong> l’environnement autour <strong>de</strong> la source d’Evian, ce n’est pas juste<br />

par gran<strong>de</strong>ur d’âme mais aussi pour <strong>de</strong>s raisons économiques. Si on ne prend pas soin <strong>de</strong> la<br />

source d’Evian, dans 15 ans, l’eau est pourrie. Il y a vraiment une fusion <strong>de</strong>s intérêts<br />

économiques et sociaux. Une fois que les entreprises l’auront pris en compte dans la manière<br />

<strong>de</strong> se comporter, ce sera un peu plus simple <strong>de</strong> communiquer sur ce sujet.<br />

Quels sont les axes <strong>de</strong> Danone concrètement ?<br />

Laurent Sacchi : Nature, réduction <strong>de</strong>s empreintes Carbone et un axe autour <strong>de</strong> la santé et<br />

sociaux autour du bien être au travail. Par exemple, faire moins 30% d’émission carbone en<br />

30 ans. Ce qui est important c’est la manière dont on le fait. On essaie d’être plus efficace<br />

que la moyenne et plus crédible en travaillant, en co-construisant avec <strong>de</strong>s parties prenantes<br />

comme les ONG.<br />

177


Fig. 64 - Photo <strong>de</strong><br />

Paul Isakson<br />

ANNEXE IX: INTERVIEW DE PAUL ISAKSON, PLANNEUR STRATEGIQUE INDEPENDANT<br />

22 JUIN 2012 (EN ANGLAIS)<br />

Paul Isakson est un planeur stratégique indépendant qui a travaillé pendant<br />

longtemps dans <strong>de</strong> très gran<strong>de</strong>s agences <strong>de</strong> communication en tant que<br />

Directeur du Développement. Il est également <strong>de</strong>venu un lea<strong>de</strong>r d’opinion très<br />

influent sur le web.<br />

Do you believe that “a revolution is in process”? Do you think that brands and compagnies<br />

should seize the opportunity given by the crisis to build a new mo<strong>de</strong>l, that converges toward<br />

sustainable creation of value and meanings?<br />

Things are certainly changing in advertising and marketing in general. And there are<br />

opportunities for brands and companies to change. But far bigger things than advertising<br />

have to change before we have a true revolution that brings about sustainable creation of<br />

value and meaning. As long as we continue to evaluate companies in the same way we<br />

always have, very little is going to change.<br />

Do you believe that the “new mo<strong>de</strong>l” should focus on the fact that compagnies should<br />

restore meanings to “the act of consunption” (by offering better products, making people’s<br />

life better, etc.)?<br />

I think companies should do what’s right and best for the people who use/consume their<br />

products. If they focus on that, the rest will follow. Maybe not immediately. But it will follow.<br />

The problem is, too many companies place that further down the line to focus on what’s best<br />

for Wall Street.<br />

If we build a new mo<strong>de</strong>l based on the following postulate “The product is the marketing”,<br />

this presupposes to rethink the entire marketing approach. Do you think that marketing<br />

should be only focused on the product?<br />

Marketing is the four Ps. Product, Price, Place, Promotion. Without Product, there is<br />

nothing for the others to do. So, in reality, it doesn’t rethink the entire marketing approach.<br />

It just brings it back to where it was always supposed to be. It always begins with the<br />

product. The problem is that too many companies went away from this and thought they<br />

could just say great things about their products and services without their products and<br />

services actually being great.<br />

178


If we envisage the end of advertising, what would be for you the best new marketing tools? Web<br />

only? Or all the tools that can focus on “brand experience?” (events, etc.)<br />

Do you believe that the future of marketing would be focused on consumers experience tools?<br />

A brand is a story, told by both its makers and the people who come into contact with it. The<br />

greater people’s experiences with the brand, the greater the brand will be. However those<br />

experiences occur and where ever they occur is where marketing truly happens. So, to answer<br />

one of your questions, the best new tools are all of the tools available for where a product or<br />

service comes into contact with people, or information about that product or services can reach<br />

them. We shouldn’t limit ourselves to one tool only.<br />

Traditional advertising is the medium for the maker’s story, told how they want it told,<br />

where they want it told, and when they want it told. If that goes away, as you’re suggesting with<br />

this question, then the maker is forced to focus more on the experience people have with their<br />

product in all other places.<br />

The i<strong>de</strong>al future for marketing is one where the makers of the product or service focus on<br />

making their product or service the absolute best it can be, according to their beliefs for what<br />

that means and is. They then let people know in a truthful way, what they have ma<strong>de</strong> and why<br />

they believe it is the best. From there, people do the rest to either validate or discredit that<br />

through their experiences with it.<br />

For instance, what do you think of the creation of “consumers brands”?<br />

(Products would be chosen and tested by voluntary consumers. Production would be ma<strong>de</strong> by<br />

local manufacturers, and controlled by a “consumers comity”. Prices would be <strong>de</strong>termined by<br />

the comity and marketing would be managed by consumers and diffused by consumers media<br />

(blogs, social networks, forums..). Consumers would be rather suppliers, members, medias,<br />

retailers, ambassadors and buyers).<br />

I think part of this is a reality and is already beginning to happen. Consumers are being<br />

asked more about what they are interested in seeing produced and are being invited into<br />

product <strong>de</strong>velopment earlier. I think that is about as far as you can go though. People are<br />

already far too busy with their own lives and work to become as involved as this proposes. I can<br />

see an “advisory board” of consumers who provi<strong>de</strong> strong input. But anything beyond that is<br />

asking people for too much.<br />

179


ANNEXE X: DISCOURS DE GILDAS BONNEL - CONFERENCE TEDXPARIS - 30 JANVIER 2010<br />

Fig. 65 - Photo <strong>de</strong><br />

Gildas Bonnel<br />

Gildas Bonnel est le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’Agence <strong>de</strong> communication Sidièse.<br />

Professeur d’histoire <strong>de</strong> formation, Gildas Bonnel créé sa proche agence en<br />

1999. Il est désormais membre <strong>de</strong> la Commission Développement Durable<br />

<strong>de</strong> l’AACC et du collectif Adwiser.<br />

« Et oui, je suis publicitaire. Je suis historien <strong>de</strong> formation et je suis tombé complètement<br />

par hasard il y a une vingtaine d’années dans le secteur <strong>de</strong> la communication. J’ai créé mon<br />

Agence il y a dix ans exactement et au début c’est la pério<strong>de</strong> que j’aime bien appeler la<br />

« conquête <strong>de</strong> l’ouest », quand on fonce tête baissée pour gagner <strong>de</strong>s budgets, pour<br />

augmenter la marge brute, que l’on mange <strong>de</strong>s pizzas tard le soir en buvant <strong>de</strong>s bières pour<br />

réfléchir sur les concepts et puis après on fait la fête parce que l’on a gagné <strong>de</strong>s clients. Et<br />

puis, en 2004, on a gagné un budget, un gros dossier qui a complètement changé ma vision<br />

du mon<strong>de</strong> et la vision que j’ai <strong>de</strong> mon métier. C’était une campagne <strong>de</strong> sensibilisation sur le<br />

réchauffement climatique pour les enfants <strong>de</strong> 8 à 12 ans. Je suis un peu désolé <strong>de</strong> vous en<br />

parler aujourd’hui car je sais que <strong>de</strong>puis beaucoup d’eau à passer sous les ponts et que le<br />

sujet est <strong>de</strong>venu un peu envahissant, surtout <strong>de</strong>puis Copenhague. Donc, j’étais un peu embêté<br />

d’abor<strong>de</strong>r cela avec vous mais ce que je voulais vous raconter, c’est que ce qu’il s’est produit<br />

pour moi n’est pas du tout du ressort <strong>de</strong> la révélation, je ne suis pas du tout <strong>de</strong>venu écolo en<br />

lisant le brief qui nous a été donné, cela a été plus subtile que cela, plus insidieux en fait.<br />

Ce que je voulais vous raconter aujourd’hui, c’est que avant, dans la communication <strong>de</strong>s<br />

entreprises on disait « c’est la danseuse du prési<strong>de</strong>nt » et c’est vrai que la com’, la publicité,<br />

ça a toujours été l’apanage du pouvoir et <strong>de</strong> l’argent, c’était les paillettes, le « vu à la télé »,<br />

c’était un peu le showbiz <strong>de</strong> l’entreprise capitaliste. Et puis, les choses ont subtilement<br />

changé, aujourd’hui la communication dans notre société est considérée comme suspecte et<br />

même notre expertise est jugée comme douteuse parfois. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé en<br />

fait. Parce que nous on savait vendre n’importe quelle lessive, en vous faisant rigoler ou en<br />

vous faisant rêver, on était bon pour cela. Vous vous souvenez <strong>de</strong> la pub « Omo » ? Avec le<br />

chimpanzé Rikiki maousse costaud, c’était bien ça marchait quoi. On a sauvé une marque<br />

avec Rikiki maousse costaud ! […] Et maintenant, il se passe quoi maintenant ? Vous avez<br />

vu votre réaction là avec la pub ? Nous on vendait du rêve, pour créer l’envie, c’était ça notre<br />

métier, tout simplement.<br />

Aujourd’hui on est à un tournant et tout le mon<strong>de</strong> le sait. Une sorte <strong>de</strong> défiance poisseuse<br />

s’est installée dans la société. Jamais les Français n’ont été aussi soupçonneux ou craints<br />

d’être manipulés. Tiens, je voulais faire un test d’ailleurs. Est ce que ceux qui se sont fait<br />

vacciner contre la grippe H1N1 veulent bien lever la main ? […] Je n’ai pas d’autres<br />

questions votre honneur ! Non mais vous imaginez, le Ministère <strong>de</strong> la Santé, l’OMS niveau<br />

6, […] ni la déferlante médiatique, Christine, elle est où Christine, n’ont réussi à nous faire<br />

changer d’avis « j’y crois pas, je sais pas, j’y vais pas ». Qu’est ce qu’il s’est passé ?<br />

Comment peut-on comprendre une société qui doute autant d’elle-même ? Moi je pense que<br />

l’on nous a fait trop peur : la crise <strong>de</strong> civilisation, la vieille Europe, le prix du pétrole, le<br />

périple climatique, la crise économique, la crise sanitaire.<br />

180


Il y a peu je tentais le périlleux exercice d’aller directement d’un congres sur le<br />

développement durable au festival <strong>de</strong> la publicité à Méribel. Je n’ai pas réussi. Je suis resté<br />

planté en plein burnout en tirant ma valise dans la neige en plein milieu, entre le centre <strong>de</strong><br />

congres et l’hôtel. Je voulais un train mais c’était Méribel, il n’y avait pas <strong>de</strong> train. Je pense<br />

qu’à ce moment-là, l’antagonisme entre mon métier, ses co<strong>de</strong>s, son univers et les<br />

informations que je venais d’entendre et partagée m’ont paru intenable, insoutenable. Alors,<br />

comment on peut le dire, le grand écart m’est apparu violemment impossible, pourtant je suis<br />

un homme <strong>de</strong> communication […] C’est dire si j’y crois à la com’, je suis certain que c’est la<br />

pierre angulaire <strong>de</strong> toutes les réussites, <strong>de</strong> tous les succès et qu’il n’y a pas un projet humain<br />

qui peut fonctionner sans communication, sur les enjeux, les objectifs, les moyens à mettre<br />

en œuvre. On le sait tout ça. […]<br />

Alors <strong>de</strong>puis six ans, j’ai rencontré <strong>de</strong>s tas d’experts, <strong>de</strong>s spécialistes, j’ai pas mal<br />

bouquiné, j’ai pas mal étudié, sur ce que l’on est en train <strong>de</strong> nous raconter, et c’est évi<strong>de</strong>nt<br />

que tous les experts soulignent et témoignent <strong>de</strong>s mêmes faits : oui, les mutations du mon<strong>de</strong><br />

sont profon<strong>de</strong>s, son extraordinaire expansion démographique, sa boulimie énergétique, la<br />

rupture <strong>de</strong> ses <strong>modèle</strong> économiques et sociaux…mais moi j’ai redécouvert mon métier. Je<br />

fais <strong>de</strong> la communication mais la question c’est comment on se le dit ? Comment on y va sur<br />

ces <strong>nouveau</strong>x <strong>modèle</strong>s ? Alors allons-y, je vais essayer la sincérité, j’crois que c’est ça<br />

l’innovation. Oui, notre mon<strong>de</strong> ne va pas bien du tout, il est complexe, il est dangereux mais<br />

on le sait, non ? Oui, la planète subit une explosion démographique extraordinaire, tous les<br />

écosystèmes sont perturbés. Oui, nous allons <strong>de</strong>voir nous adapter, transformer nos mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

vie, abandonner du confort et pas mal <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>s aussi. Oui, nos vies et situations<br />

particulières vont être durablement impactées. Mais dans quel sens ? et comment se le dire ?<br />

et comment moi puis-je passer <strong>de</strong>s messages sur ces sujets-là, sans tomber dans l’espèce <strong>de</strong><br />

gloubiboulga actuel, extrêmement héritant du « vous aussi vous pouvez sauver la planète et<br />

les ours blancs en envoyant un sms à igloo, i.g.l.o.o. ou le pire, les messages incantatoires<br />

insupportables, millénaristes qui nous disent « en 2050, 250 000 réfugiés climatiques sur les<br />

cotes bretonnes ». C’est sur que c’est pas la voie.<br />

Un jour, j’ai rencontré un homme formidable, qui a répondu en gran<strong>de</strong> partie aux<br />

questions que je me posais pour mon métier, pour savoir comment abor<strong>de</strong>r le bidule, il<br />

s’appelle Pierre Radanne, un ancien prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’ADEME. […] Et je lui dis un jour, Pierre,<br />

comment tu ferais toi pour expliquer cela à <strong>de</strong>s ados ? […] il m’a apporté une solution que<br />

j’avais envie <strong>de</strong> partager avec vous. Il m’a dit, tu vois, moi quand j’étais petit, j’habitais à<br />

trente kilomètres du côté <strong>de</strong> Grenoble, en pleine campagne et je me souviens du jour où ma<br />

maman m’a annoncé un jour <strong>de</strong> marché, que j’allais aller en pension. Et pour accompagner<br />

cette annonce qui était tellement forte, tellement lour<strong>de</strong>, elle m’a tout <strong>de</strong> suite dit mais tu sais<br />

Pierre, tu vas aller en pension parce que tu vas faire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s supérieures, parce que tu vas<br />

avoir ton baccalauréat, parce que tu vas avoir un super boulot, que tu vas apprendre <strong>de</strong>s<br />

langues étrangères, que tu vas voyager à travers le mon<strong>de</strong>, que tu vas prendre l’avion. Et<br />

comme cela, sa maman, elle lui racontais l’avenir, elle l’accompagnait avec <strong>de</strong>s mots et elle<br />

gommait ses peurs et sa tension. Et moi je pense que ça, ça m’a ouvert une clé importante<br />

pour mon problème <strong>de</strong> communication sur le sujet.<br />

Oui, c’est sur que l’on ne va plus aller voyager à travers le mon<strong>de</strong> pour faire un week-end<br />

shopping trois jours à New York dans dix ou vingt ans, ça serait complètement grotesque et<br />

farfelue, surtout avec le prix <strong>de</strong> la taxe carbone ! La formule trois jours trois nuits pour aller<br />

se faire bronzer aux Baléares, ça sera complètement inconvenant, c’est sur. Je pense que<br />

l’on va voyager autrement, que l’on va créer autrement, travailler autrement, découvrir <strong>de</strong><br />

181


<strong>nouveau</strong>x <strong>modèle</strong>s, c’est certain. Est ce que vous pensez vraiment que dans vingt ou trente<br />

ans, nous serons tous propriétaires d’une perceuse électrique que l’on utilise en moyenne huit<br />

minutes tous les six mois ? Honnêtement ! Non, on va apprendre à réparer, à réutiliser, on va<br />

apprendre à recycler, on va inventer <strong>de</strong>s tas <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x business, vous allez voir, en plus<br />

cela va créer <strong>de</strong> l’emploi, on va relocaliser, on va avoir plus <strong>de</strong> loisirs, on va voyager<br />

autrement. On apprendra le chinois et on ira <strong>de</strong>ux ans, on ira peut être à pieds, j’en sais rien,<br />

mais ça sera différent. N’ayons pas peur <strong>de</strong> cela. Moi je pense que l’on va re<strong>de</strong>ssiner les<br />

villes, re<strong>de</strong>ssiner les loisirs, re<strong>de</strong>ssiner la gouvernance dans les entreprises et nos mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

collaboration, c’est certain. En fait, vous savez quoi, je pense que la « conquête <strong>de</strong> l’ouest »,<br />

ça ne fait que commencer !<br />

182


TABLE DES ILLUSTRATIONS<br />

FIG. 1 - JEAN-MARIE MESSIER, LE NOUVEAU NABAB - PARIS MATCH - 2000 ....................................................................9<br />

FIG. 2 - RESULTAT DE L'ENQUETE IFOP POUR CITIZENCAR : « D'UNE MANIERE GENERALE, FAITES-VOUS<br />

CONFIANCE A CHACUN DES ACTEURS SUIVANTS? » - 2003........................................................................................ 11<br />

FIG. 3 - ENRON COLLAPSE STARTS DOMINO EFFECT - CHRIS GROSZ - 2006 .................................................................... 13<br />

FIG. 4 - GRAPHIQUE DE L’ENQUETE DU CREDOC : « POUR VOUS QU’EST CE QU’UNE BONNE MARQUE ? » -<br />

1994 ET 2010 .................................................................................................................................................................... 21<br />

FIG. 5 - LES PRODUITS LIBRES DE CARREFOUR - 1976.......................................................................................................... 25<br />

FIG. 6 - PART DE MARCHE EN VOLUME DES MDD DANS LA GRANDE DISTRIBUTION - DE 1993 A 2007................... 26<br />

FIG. 7 - EXEMPLE DE PACKAGINGS « INNOVANTS » : KLEENEX, BEGHIN SAY ET DADDY............................................. 31<br />

FIG. 8 - PUBLICITE DE TOTAL, AGENCE HARRISON & WOLF - 2009 ................................................................................. 32<br />

FIG. 9 - PUBLICITE DE LE CHAT - AGENCE DDB - 2009...................................................................................................... 32<br />

FIG. 10 - PUBLICITE DE RENAULT - AGENCE PUBLICIS - 2009 ........................................................................................... 33<br />

FIG. 11 - PREMIERE PUBLICITE DE MARQUE - REGILAIT - 1968.......................................................................................... 34<br />

FIG. 12 - OPERATION « ANTI-PUB » : « LIBERONS L’ESPACE PUBLIC »............................................................................ 34<br />

FIG. 13 - OPERATIONS DE DEGRADATION D’AFFICHES DANS LE METRO PARISIEN - 2003 ........................................... 39<br />

FIG. 14 - ANATOMIE D’UN CODE-BARRE .................................................................................................................................. 43<br />

FIG. 15 - APPLICATION SHOPWISE.............................................................................................................................................. 43<br />

FIG. 16 - EVOLUTION DE LA PART DE MARCHE DES HARD DISCOUNT - DE 2001 A 2011............................................. 48<br />

FIG. 17 - PROFIL DES PRINCIPALES ENSEIGNES DE HARD DISCOUNT - 2004................................................................... 49<br />

FIG. 18 - ÉVOLUTION DU CLASSEMENT DES COMPARATEURS DE PRIX EN FRANCE<br />

DE JUILLET 2009 A JUILLET 2010 ............................................................................................................................. 50<br />

FIG. 19 - ÉVOLUTION DU CHIFFRE D’AFFAIRES DE LEGUIDE.COM - DE 2004 A 2011................................................. 50<br />

FIG. 20 - COMPARAISON DES CROISSANCES DES POSTES DE CONSOMMATION EN EUROS CONSTANTS<br />

SELON LA DURABILITE - 1993 ET 2008 ..................................................................................................................... 51<br />

FIG. 21 - LOGO DE POINT INSIDE ............................................................................................................................................... 52<br />

FIG. 22 - PREMIER NUMERO DE QUE CHOISIR - 1951........................................................................................................... 55<br />

FIG. 23 - LOGO « UN AUTRE MONDE EST POSSIBLE »............................................................................................................ 56<br />

FIG. 24 - LOGO MAX HAVELAAR FRANCE................................................................................................................................. 56<br />

FIG. 25 - FORMES ET ESPACES DE L’ACTION CONTESTATAIRE ............................................................................................. 57<br />

FIG. 26 - LIVRE « WHAT’S MINE IS YOURS » - RACHEL BOTSMAN ET ROO ROGERS -2010 .......................................... 58<br />

FIG. 27 - MARIONNETTE DES GUIGNOLS - JACQUES CHIRAC - « SUPER MENTEUR » ................................................... 63<br />

FIG, 28 - DESSIN HUMORISTIQUE « OFF MY BACK FOR THE FUTURE » - R.J. MATSON - 2008.................................... 66<br />

FIG. 29 - LOGO « GRAND PRIX ESSEC DE LA DISTRIBUTION RESPONSABLE » ................................................................ 73<br />

FIG. 30 - EXEMPLE D’ETIQUETTE « INDICE CARBONE » ...................................................................................................... 74<br />

FIG. 31 - LOGO « GOOD PURPOSE »........................................................................................................................................... 75<br />

FIG. 32 - GOLD CIRCLE - SIMON SINEK ..................................................................................................................................... 81<br />

FIG. 33 - LOGO « ORIGINE FRANCE GARANTIE » ................................................................................................................... 88<br />

FIG. 34 - LOGO « SANS OGM» ................................................................................................................................................... 88<br />

FIG. 35 - PHOTO D'UN SMARTPHONE SCANNANT UN QR CODE ......................................................................................... 88<br />

FIG. 36 - LOGO « ON VOTE TOUS POUR LA NOUVELLE DANETTE » - 2009 ....................................................................... 91<br />

FIG. 37 - ROUE DE DEMING ......................................................................................................................................................... 96<br />

FIG. 38 - REPARTITION MONDIALE DES CERTIFICATS ISO 9001 DELIVRES PAR PAYS - 2010........................................ 98<br />

FIG. 39 - LOGO « SLOW FOOD »................................................................................................................................................111<br />

FIG. 40 - LOGO « MICHEL ET AUGUSTIN ».............................................................................................................................118<br />

FIG. 41 - LOGO « INNOCENT »...................................................................................................................................................120<br />

FIG. 42 - SITE INTERNET WWW.CROQUONSLAVIE.FR.............................................................................................................126<br />

FIG. 43 - SITE INTERNET WWW.ADOPTYOURBEE.COM ..........................................................................................................127<br />

FIG. 44 - DESSIN HUMORISTIQUE - HUGH ..............................................................................................................................132<br />

FIG. 45 - DISPOSITIF DE STREET MARKETING - LES 2 VACHES - 2010 .............................................................................133<br />

FIG. 46 - PUBLI-REPORTAGE - AZELIS FRANCE - 2012........................................................................................................138<br />

FIG. 47 - PUBLICITE PHILIPS - 1957.........................................................................................................................................152<br />

FIG. 48 - PUBLICITE LU - 1953 .................................................................................................................................................153<br />

FIG. 49 - RESULTAT ENQUETE « D'UNE MANIERE GENERALE, FAITES-VOUS CONFIANCE A CHACUN DES ACTEURS<br />

SUIVANTS ? » ......................................................................................................................................................................155<br />

FIG. 50 - RESULTAT ENQUETE « LA CONFIANCE DANS LES MARQUES » ..........................................................................156<br />

FIG. 51 - RESULTAT ENQUETE « POUR VOUS, QU'EST CE QU'UNE BONNE MARQUE ?» 1/2.........................................157<br />

183


FIG. 52 - RESULTAT ENQUETE « POUR VOUS, QU'EST CE QU'UNE BONNE MARQUE ?» 2/2.........................................157<br />

FIG. 53 - RESULTAT ENQUETE « LES RAISONS D'ACHETER DES PRODUITS DE CONSOMMATION?» ...........................158<br />

FIG. 54 - RESULTAT ENQUETE « GRACE A INTERNET, AVEZ-VOUS PLUS DE POUVOIR FACE AUX MARQUES ?».......159<br />

FIG. 55 - RESULTAT ENQUETE « AVEZ-VOUS DEJA RECHERCHE DES AVIS DE CONSOMMATEURS AVANT<br />

D'ACHETER UN PRODUIT?» ........................................................................................................................................159<br />

FIG. 56 - RESULTAT ENQUETE « LES CONSOMMATEURS ET LA PUBLICITE»....................................................................160<br />

FIG. 57 - CARNET DE NOTES DES MARQUES (1/2) - CAPITAL - 2012 ................................................................................161<br />

FIG. 58 - CARNET DE NOTES DES MARQUES (2/2) - CAPITAL - 2012 ................................................................................162<br />

FIG. 59 - PHOTO DE JANE VON TRAPP ....................................................................................................................................164<br />

FIG. 60 - PHOTO D'ELIZA HULEATT .........................................................................................................................................166<br />

FIG. 61 - PHOTO DE THIERRY WELLHOFF ..............................................................................................................................169<br />

FIG. 62 - PHOTO DE THIERRY LIBAERT....................................................................................................................................172<br />

FIG. 63 - PHOTO LAURENT SAACHI ..........................................................................................................................................174<br />

FIG. 64 - PHOTO DE PAUL ISAKSON .........................................................................................................................................178<br />

FIG. 65 - PHOTO DE GILDAS BONNEL......................................................................................................................................180<br />

184


Ouvrages<br />

BIBLIOGRAPHIE - SITOGRAPHIE<br />

Georges Akerlof, « The Market for "Lemons": Quality Uncertainty and the Market<br />

Mechanism », The Quarterly Journal of Economics, Vol. 84, No. 3, 1970, p. 488-500.<br />

Jean Baudrillard, La société <strong>de</strong> <strong>consommation</strong>, ses mythes, ses structures, Paris, Éditions<br />

Denoël, 1970<br />

Hervé Baculard et Julia Jérôme dans Les immatériels actifs – Le <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong><br />

croissance, Paris, Cherche-Midi, 2011, 160 pages.<br />

Michel Beaud, Histoire du capitalisme, Paris, Seuil, 2010, 456 pages.<br />

Rachel Botsman et Roo Rogers, What’s mine is yours, the rise of collaborative consumption,<br />

New York, HarperCollins, 2010, 304 pages<br />

Jean Burnod, Crise, une chance pour l’entreprise ? Profitez <strong>de</strong> la tempête pour gagner,<br />

paris, Éditions du Cygne, 2010, 198 pages.<br />

Roland Cayrol, Tenez enfin vos promesses, Essai sur les pathologies politiques françaises,<br />

Paris, Éditions Fayard, 2012, 215 pages.<br />

Franck Cochoy, La captation <strong>de</strong>s publics, C’est pour mieux te séduire mon client, Toulouse,<br />

Presses Universitaires du Mirail, 2004, p.72<br />

Jean-Paul Dubois, Une vie française, Paris, L’Olivier, 2004, 334 pages.<br />

Sophie Dubuisson-Quellier, La <strong>consommation</strong> engagée, Paris, Les Presses <strong>de</strong> Sciences Po,<br />

2009, 143 pages<br />

Daniel Fortin, Comment Jean Marie Messier est <strong>de</strong>venu le patron le plus puissant <strong>de</strong> France,<br />

Paris, Assouline, 1999, 116 pages.<br />

Laurent Habib, La communication transformative, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France,<br />

2010, p.42<br />

Hervé Kempf, Pour sauver la planète, sortez du capitalisme », Paris, Édition Seuil, 2009,<br />

168 pages.<br />

Naomi Klein, No Logo : la tyrannie <strong>de</strong>s marques, Paris, Actes Sud/Leméac, 2001, 573<br />

pages.<br />

Christophe Lambert, La société <strong>de</strong> la peur, Paris, Editions Plon, 2005, 197 pages<br />

Jacques Lauriol et Hervé Masure, L’éthique d’entreprise à la croisée <strong>de</strong>s chemins, Paris,<br />

L’Harmattan, 2003, 182 pages.<br />

185


Gilles Lipovetsky dans Le bonheur paradoxal : Essai sur la société d'hyper<strong>consommation</strong>,<br />

Paris, Editions Gallimard, 2006, 377 pages<br />

Herbert Marcuse, L’homme unidimentionnel, Essai sur l'idéologie <strong>de</strong> la société avancée,<br />

Paris, Editions <strong>de</strong> Minuit, 1968, 281 pages.<br />

François-Xavier Merrien, L’État-provi<strong>de</strong>nce, Presses Universitaires <strong>de</strong> Frances,<br />

Que sais-je ?, 2007, p. 11<br />

Alexan<strong>de</strong>r McClure, "Abe" Lincoln's yarns and stories: a complete collection of the funny<br />

and witty anecdotes that ma<strong>de</strong> Lincoln famous as America's greatest story teller,<br />

International Publishing Company, 1901, 448 pages.<br />

Erik Neveu, Une société <strong>de</strong> communication ?, Paris, Montchrestien, 2006, 160 pages.<br />

Nicolas Riou, Marketing Anatomy, Les nouvelles tendances marketing passées au scanner,<br />

Octobre 2009, Paris, Eyrolles, p.9<br />

Hartmut Rosa, Accélération, une critique sociale du temps, Paris, Éditions La Découverte,<br />

2010, 480 pages<br />

Pierre Rosanvallon, La crise <strong>de</strong> l’Etat-provi<strong>de</strong>nce, Paris, Le Seuil, 1981, 194 pages.<br />

Raymond Ruyer, L’utopie et les utopies, Paris, Presses Universitaires <strong>de</strong> France, 1950, 293<br />

pages.<br />

Simon Sinek, Start with Why , How Great Lea<strong>de</strong>rs Inspire Everyone to Take Action,<br />

Minneapolis, Hardcover, 2009, 256 pages.<br />

N.C. Smith, Morality and the market, Routledge, London and New York, 1990, 633 pages.<br />

Charles Tilly, « Les origines du répertoire <strong>de</strong> l’action contemporaine en France et en gran<strong>de</strong><br />

Bretagne », Vingtième siècle. Revue d’histoire, n°4, Octobre 1984, p.89-108<br />

Patrick Widloecher et Isabelle Querne, Gui<strong>de</strong> du développement durable en entreprise »,<br />

Paris, Eyrolles, 2009, 301 pages.<br />

> Revues - Magazines<br />

Nicole Aubert, « L’urgence, symptôme <strong>de</strong> l’hypermo<strong>de</strong>rnité : <strong>de</strong> la quête <strong>de</strong> sens à la<br />

recherche <strong>de</strong> sensations », Communication et organisation, n°29, 2006, p. 11<br />

Philippe Frémeaux, entretien avec André Orléan, « Crise financière : l’erreur du G20 »,<br />

septembre 2009, Alternatives Economiques, n°283.<br />

Lucien Karpik, « L’économie <strong>de</strong> la qualité », Revue française <strong>de</strong> Sociologie, vol. XXX-<br />

2,1989, p.187-210.<br />

186


Lugdivine Bout, « De la gestion <strong>de</strong> crise à la résilience organisationnelle », novembre 2005,<br />

Magazine <strong>de</strong> la Communication <strong>de</strong> crise & Sensible, vol.10, pages 14-15.<br />

Jean Watin-Augouard, « Nouveau Paradigme L’humilité », entretien avec Nicolas Riou, avril<br />

2010, Revue <strong>de</strong>s marques, numéro 70.<br />

> Articles <strong>de</strong> presse (écrite ou en ligne)<br />

Vincent Balusseau, « Advertisng Reloa<strong>de</strong>d, pour une publicité (encore) plus utile », mai<br />

2010, Influencia.net.<br />

Odile Benyahia-Koui<strong>de</strong>r, « Ces patrons qui jouent les têtes <strong>de</strong> gondole », 4 décembre 2000,<br />

Libération.fr.<br />

Tristan Bertelot, « Finances : <strong>de</strong> la bulle internet à la crise <strong>de</strong>s subprimes », 22 décembre<br />

2009, Nouvelobs.com.<br />

Philippe Cabin, Entretien <strong>de</strong> Patrick Widloecher et Isabelle Querne, 9 mars 2009, Enjeux Les<br />

Echos.<br />

Olivier Costil, « MDD : la France occupe une position intermédiaire en Europe », 16<br />

décembre 2011, LSA.fr.<br />

Chris Dixon, 25 avril 2010, Businessinsi<strong>de</strong>r.com<br />

Fabrice Flipo, « La raison libérale », 12 janvier 2010, Mouvements.info.<br />

Gilles Fontaine, Nokia, le centenaire le plus branché <strong>de</strong> la planète, 17 décembre 1998,<br />

Lexpansion.fr.<br />

Sylvie Guingois, « Crise <strong>de</strong> défiance vis-à-vis <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s marques », 14 avril 2005, LSA.fr.<br />

Bernard Henri Levy, « Et l'Iran ? Quand Utopia entend le mot culture... Avec Romain<br />

Goupil, mains en l'air », 17 Juin 2010, Le point.<br />

Jean-Baptiste Jacquin, « L'année record <strong>de</strong>s fusions et acquisitions française », 19 décembre<br />

1996, Lexpansion.fr.<br />

Muriel Jasor, « L’i<strong>de</strong>ntité d’entreprise, un avantage compétitif », 3 juillet 2006, Les Echos<br />

n° 19700, page 12.<br />

Béatrice Jérôme, « En cinq ans, 150 000 postes <strong>de</strong> fonctionnaires en moins », 28 septembre<br />

2011, Le Mon<strong>de</strong>.<br />

I. L., « De célèbres industriels fabriquent parfois les produits MDD », 23 avril 2009,<br />

Figaro.fr.<br />

Rita Mazzoli, « Société <strong>de</strong> méfiance, société <strong>de</strong> transparence », Marketing Magazine, n°96,<br />

2005, p. 6<br />

187


Megan Mcilroy, « Ad Age's Digital Agency of the Year Is Actually in the Business of<br />

Product Innovation», 17 mars 2008, Adage.com.<br />

Gérard Mermet, « Et pourquoi pas <strong>de</strong>main, <strong>de</strong>s ‘marques <strong>de</strong> consommateurs’ ?», 12 février<br />

2012, E-marketing.fr.<br />

Anna Musso, « Faut-il interdire les agences <strong>de</strong> notation », 30 septembre 2011, L’humanité.<br />

Philippe Plassart, « Puissance et impuissance », 9 février 2012, LeNouvelEconoomiste.fr<br />

Caroline Politi, « Génération Y, le choc <strong>de</strong>s cultures en entreprise », 7 avril 2010,<br />

Lexpress.fr.<br />

Rémi Vallet, « Jouer l’argument <strong>de</strong> l’innovation », 29 mai 2001, LEntreprise.com.<br />

Bryan Walsh, « Today’s Smart Choice : Don’t Own. Share », 17 mars 2011, Time Magazine<br />

> Sites internet et blogs<br />

www.adoptyourbee.com > Site événementiel <strong>de</strong> la marque agroalimentaire Innocent, dans le<br />

cadre <strong>de</strong> leur opération « Adopt yout bee ».<br />

www.a<strong>de</strong>me.fr > Site <strong>de</strong> l’Agence <strong>de</strong> l’Environnement et <strong>de</strong> la Maîtrise <strong>de</strong> l’Energie<br />

www.afnor.org > Site <strong>de</strong> l’Association Françaises <strong>de</strong> Normalisation<br />

www.agencebio.org > Site <strong>de</strong> l’Agence bio, groupement d'intérêt public dont la mission est<br />

<strong>de</strong> développer et <strong>de</strong> promouvoir l'agriculture biologique<br />

www. clement.blogs.com > Blog <strong>de</strong> Thomas Clément, autour <strong>de</strong> l’actualité en générale.<br />

www.<strong>de</strong>finitions-marketing.com > Site proposant <strong>de</strong>s définitions en lien avec le secteur<br />

marketing<br />

www.e-marketing.fr > Site d’Editialis, éditeur <strong>de</strong> presse et <strong>de</strong> sites internet, <strong>de</strong>stiné aux<br />

professionnels du marketing<br />

www.gifam.fr > Site <strong>de</strong> l’Organisation fédératrice <strong>de</strong> l’industrie <strong>de</strong>s appareils ménagers<br />

www.gourmandisesansfrontieres.fr > Blog autour <strong>de</strong> la thématique <strong>de</strong> l’alimentation<br />

www.industrie.gouv.fr > Site <strong>de</strong> la Direction générale <strong>de</strong> la compétitivité, <strong>de</strong> l’industrie et<br />

<strong>de</strong>s services<br />

www.influencia.net > Site du trendmag <strong>de</strong>s influences médias communication et innovations<br />

www.innocent.fr > Site d’Innocent, marque agroalimentaire qui commercialise <strong>de</strong>s<br />

smoothies<br />

www.leGui<strong>de</strong>.com > Site <strong>de</strong> LeGui<strong>de</strong>.com, comparateur <strong>de</strong> prix sur internet<br />

188


www.maxhavelaarfrance.com > Site institutionnel <strong>de</strong> l’Association Max Havelaar France,<br />

proposant un label international pour le commerce équitable<br />

www.micheletaugustin.com > Site <strong>de</strong> Michel & Augustin, marque agroalimentaire<br />

www.oip.org > Site <strong>de</strong> l’Observatoire Indépendant <strong>de</strong> la Publicité<br />

www.paris.fr > Site officiel <strong>de</strong> la Marie <strong>de</strong> Paris<br />

www.rapportannuel.casino.fr > Site du distributeur Casino, dédié au rapport annuel<br />

www.reseau-alliances.org > Site <strong>de</strong> l’Association Alliances, qui a pour objectif<br />

d’accompagner les entreprises dans l’amélioration <strong>de</strong> leurs performances, tout en respectant<br />

l’Homme et l’Environnement<br />

www.slowfood.fr > Site <strong>de</strong> l’Association « Slow Food » qui milite pour une alimentation<br />

« bonne, propre et juste».<br />

www.vivendi.com > Site institutionnel <strong>de</strong> la multinationale française, spécialisée dans le<br />

divertissement et la communication<br />

> Interviews<br />

Interview <strong>de</strong> Jane Von Trapp, Directrice <strong>de</strong> la communication et du développement et Eliza<br />

Huleatt, Chargé du Développement <strong>de</strong> l’Ecole Franco-Américaine <strong>de</strong> New York, 4 Juin<br />

2010.<br />

Interview <strong>de</strong> Paul Isakson, planeur stratégique indépendant, 22 juin 2012<br />

> Conférences - Présentations<br />

Olivier Binisti, « Brand content : quand la marque prend le pouvoir ? » : présentation <strong>de</strong> 45<br />

sli<strong>de</strong>s autour du brand content, Novembre 2011.<br />

Gildas Bonnel, Conférence TEDxParis, 30 janvier 2010.<br />

« Grand Débat Cels’and Co » : Conférence annuelle organisée par l’Association <strong>de</strong>s Anciens<br />

élèves diplômés du CELSA. La thématique 2012 était : « Les valeurs dans l’entreprise :<br />

levier i<strong>de</strong>ntitaire ou démarche éthique ».<br />

Philippe Moati, Conférences « Décodons le futur » (2005) : cycle <strong>de</strong> conférence organisé par<br />

GS1 France. Le thème choisi en 2005 était « Imaginaires du commerce et <strong>de</strong> l’industrie ».<br />

Patricia Gurviez, « La Confiance du Consommateur dans la Marque: Conceptualisation,<br />

Mesure et Management », Actes du 14ème Colloque <strong>de</strong> l’Association Française <strong>de</strong><br />

Marketing, p. 73-96, 1998.<br />

189


Paul Isakson, « Presentation on mo<strong>de</strong>rn brand building » : présentation <strong>de</strong> 47 sli<strong>de</strong>s autour <strong>de</strong><br />

l’avenir <strong>de</strong>s marques, 2008.<br />

Philippe Moati, Conférences « Décodons le futur » (2005) : cycle <strong>de</strong> conférence organisé par<br />

GS1 France. Le thème choisi en 2005 était « Imaginaires du commerce et <strong>de</strong> l’industrie ».<br />

Nicolas Riou, « Le marketing <strong>de</strong> <strong>de</strong>main s’invente aujourd’hui » : présentation <strong>de</strong> 62 sli<strong>de</strong>s<br />

autour <strong>de</strong>s nouvelles tendances marketing, janvier 2010.<br />

Université Populaire Participative : réunion organisée au Théâtre Déjazet le 6 juillet 2009.<br />

> Rapports<br />

Association pour une Communication Plus Responsable, Programme pour réformer<br />

globalement et radicalement les pratiques du secteur <strong>de</strong> la communication et <strong>de</strong> la publicité,<br />

2012.<br />

Commission européenne, Livret vert, 2001.<br />

Conseil <strong>de</strong> l'Emploi, <strong>de</strong>s Revenus et <strong>de</strong> la Cohésion sociale, rapport n°7 : La France en<br />

Transition 1993-2005, p. 108<br />

Cour <strong>de</strong>s Comptes, Rapport annuel sur l'application <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité<br />

sociale, 8 septembre 2011.<br />

Cour <strong>de</strong>s Comptes, Référé sur l’impact budgétaire et fiscal du Grenelle <strong>de</strong> l’environnement,<br />

novembre 2011.<br />

Olivier Geradon <strong>de</strong> Vera, Les marques et la crise, White Paper rédigé en Juillet 2009.<br />

IREP, Le Marché publicitaire francais en 2011, 2012.<br />

INSEE, Comptes Nationaux du 1 er trimestre 2009, 2009.<br />

INSEE, Comptes nationaux – base 2005, 2006.<br />

Rapport Brundtland, Notre avenir à tous, Québec, Éditions Lambda, 1987, 432 pages.<br />

Sénat, Rapport général nº91 sur le projet <strong>de</strong> loi <strong>de</strong> finance pour 2008, 22 novembre 2007.<br />

190


Enquêtes - Sondages<br />

Ad<strong>de</strong>d Value, Brandind For Good, 2007.<br />

BVA - Gallup International pour Le Parisien, Baromètre mondial <strong>de</strong> l’espoir économique,<br />

décembre 2011<br />

ComScore, Étu<strong>de</strong> sur les comparateurs <strong>de</strong> prix en France, septembre 2010.<br />

CREDOC, Le consommateur va-t-il changer durablement <strong>de</strong> comportement avec la crise?,<br />

décembre 2009.<br />

CREDOC, pour le Ministère <strong>de</strong> l’Alimentation, <strong>de</strong> l’Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche, Baromètre<br />

<strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> l’alimentation nº6, septembre 2011.<br />

E<strong>de</strong>lman Goodpurpose 2012, Global consumer survey, 2012.<br />

Ethicity, Les Français et la <strong>consommation</strong> durable, 2010.<br />

Ethicity, pour l’ADEME, Les Français et la <strong>consommation</strong> durable, 2011.<br />

Ethicity, Les Français et la <strong>consommation</strong> durable, avril 2012.<br />

IFOP / CityzenCar, Les Français et la confiance, 2003<br />

IFOP, pour Terre Sauvage, Les français et le Grenelle <strong>de</strong> l'environnement, 2008.<br />

IFOP, pour l’Atelier BNP Paribas, Les internautes et les comparateurs <strong>de</strong> prix, avril 2011.<br />

Kantar Worldpanel, 16 e édition du Référenseigne Expert, septembre 2011.<br />

Mercer, What’s working ? , 2011<br />

Ministère <strong>de</strong> l'Alimentation, <strong>de</strong> l'Agriculture et <strong>de</strong> la Pêche, Baromètre <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong><br />

l'alimentation (n°6), Septembre 2011<br />

Opinionway pour Le Journal du Dimanche et Maximal Productions, Le regard <strong>de</strong>s Français<br />

face à la crise, Octobre 2011<br />

TNS Sofres, L'opinion française en attente <strong>d'un</strong>e nouvelle gouvernance d'entreprise, 2003<br />

TNS Sofres, Mégabrand, 2005.<br />

TNS Sofres, pour l’Agence Australie, Publicité et Société, huitième édition, 2011.<br />

TNS Secodip, Le hard discount en France, 2005<br />

TNS Worldpanel, Le marché du hard discount, 2008.<br />

Yahoo !, Brand Content : quels <strong>nouveau</strong>x enjeux pour les marques ?, mars 2012<br />

191


Cours <strong>de</strong> Sciences Po Toulouse<br />

TD d’Économie, enseigné par Tristan Auvray, en 1 ère Année à Sciences Po Toulouse.<br />

Cours magistral « Médias et sociétés », enseigné par M. Regourd, en 2 e année à Sciences Po<br />

Toulouse.<br />

Séminaire « Sociologie <strong>de</strong> la publicité », enseigné par Roland Canu et Cédric Calvignac, en<br />

5 e année <strong>de</strong> Sciences Po Toulouse<br />

> Reportages - Films<br />

Capital, « Ce que valent les produits hard discount », mars 2008, M6<br />

Jan Kounen (réal.), 99 francs, Pathé Distribution, 2007, 99 minutes.<br />

> Textes <strong>de</strong> loi<br />

Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> l'économie.<br />

Loi n° 86-897 du 1 août 1986 portant réforme du régime juridique <strong>de</strong> la presse, article 10.<br />

Cour <strong>de</strong> justice, Commission/France, affaire C-304/02 (12 juillet 2005).<br />

192


Ta b l e d e s m aT i è r e s<br />

Introduction………………………………………………….................…............................... p. 1-3<br />

Première partie - Crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs à l’égard <strong>de</strong>s entreprises<br />

et <strong>de</strong>s marques…………………………………………………..................….......................<br />

Chapitre 1 : Origine <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs………………................. p. 5<br />

p. 4-80<br />

> Section 1 : Quand les entreprises et les marques n’inspirent plus confiance…............. p. 6<br />

I. Les entreprises face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs............................ p. 6<br />

I.1. Années 90 : l’entreprise comme « pivot majeur <strong>de</strong>s sociétés occi<strong>de</strong>ntales ». p. 7<br />

I.1.1. Avènement du néolibéralisme économique............................................. p. 7<br />

I.1.2. Success stories.......................................................................................... p. 7<br />

I.1.3. Boom <strong>de</strong>s starts-up................................................................................... p. 8<br />

I.1.4. « Peopolisation » <strong>de</strong>s chefs d’entreprise.................................................. p. 8<br />

I.1.5. L’exemple <strong>de</strong> Vivendi............................................................................... p. 9<br />

I.2. La rupture <strong>de</strong>s années 2000............................................................................ p. 10<br />

I.2.1. Constat...................................................................................................... p. 10<br />

a. Enquête <strong>de</strong> TNS Sofres « L’opinion française en attente d’une nouvelle<br />

gouvernance d’entreprise » - 2003............................................................. p. 10<br />

b. Sondage <strong>de</strong> l’IFOP pour CityzenCar « Les Français et la confiance » -<br />

2011............................................................................................................ p. 11<br />

c. Article <strong>de</strong> Rita Mazzoli « Société <strong>de</strong> méfiance, société <strong>de</strong> transparence » -<br />

2005............................................................................................................ p. 12<br />

I.2.2. Explications <strong>de</strong> la rupture <strong>de</strong>s années 2000............................................. p. 13<br />

a. Une institution désacralisée : mensonges et manipulation au cœur <strong>de</strong>s<br />

entreprises................................................................................................... p. 13<br />

b. Une crise <strong>de</strong> confiance interne <strong>de</strong>s employés............................................. p. 15<br />

c. Déceptivité et exigences renforcées, au cœur <strong>de</strong> la relation<br />

consommateurs-entreprises......................................................................... p. 16<br />

II - Les marques face à la crise <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong>s consommateurs............................. p. 19<br />

II.1. Une remise en cause <strong>de</strong> la valeur matérielle <strong>de</strong> la marque............................ p. 19<br />

II.1.1. Le désinvestissement <strong>de</strong>s marques dans la qualité <strong>de</strong> ses produits........ p. 20<br />

a. Une baisse <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong>s produits <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s marques, perçue par les<br />

consommateurs… ..................................................................................... p. 20<br />

b. … qui se confirme par l’expérience <strong>de</strong> marque......................................... p. 22<br />

II.1.2. La marque a perdu <strong>de</strong> vue l’insight <strong>de</strong>s consommateurs........................ p. 24<br />

II.2. Le <strong>nouveau</strong> rôle joué par les distributeurs : une alternative pour les<br />

consommateurs................................................................................................... p. 25<br />

II.2.1. De <strong>nouveau</strong>x concurrents pour les marques… ...................................... p. 25<br />

II.2.2. … qui transforment le marché et renforcent la mise à distance <strong>de</strong>s<br />

gran<strong>de</strong>s marques...................................................................................... p. 26<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 1................................................................................................ p. 28<br />

193


Section 2 : … les espoirs se tournent vers une communication érigée en « rock star » p. 29<br />

I. Une communication autocentrée et court-termiste.................................................. p. 29<br />

I.1. Une communication qui crée une différence factice et <strong>de</strong>vient son propre<br />

objet................................................................................................................. p. 29<br />

I.1.1. Bénéfices factices et mise en scène du packaging................................... p. 30<br />

a. La communication crée un bénéfice factice… .......................................... p. 30<br />

b. … et utilise le packaging pour « capter ses publics »................................ p. 30<br />

I.1.2. Quand la communication <strong>de</strong>vient son propre objet................................. p. 31<br />

I.2. Une communication omniprésente, répondant à <strong>de</strong>s logiques<br />

court-termistes.................................................................................................. p. 33<br />

I.2.1. Une communication omniprésente........................................................... p. 33<br />

I.2.2. Une logique <strong>de</strong> « campaigning »............................................................. p. 35<br />

II. … qui accentue la défiance et favorise la mise en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong><br />

d’information......................................................................................................... p. 36<br />

II.1. Crise <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques et rejet <strong>de</strong> la publicité............ p. 37<br />

II.1.1. Crise <strong>de</strong> la valeur immatérielle <strong>de</strong>s marques.......................................... p. 37<br />

II.1.2. Rejet <strong>de</strong> la publicité : généralisation <strong>de</strong>s logiques d’opposition............. p. 38<br />

a. Un rejet <strong>de</strong> la publicité qui s’étend… ........................................................ p. 38<br />

b. …et qui est renforcé par une crise <strong>de</strong> confiance à l’égard <strong>de</strong>s médias....... p. 39<br />

II.2. Mise en place d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> d’information...................................... p. 40<br />

II.2.1. De l’asymétrie informationnelle… ........................................................ p. 41<br />

II.2.2. … au <strong>modèle</strong> multidirectionnel.............................................................. p. 42<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 2................................................................................................ p. 44<br />

Conclusion du Chapitre 1.................................................................................................. p. 45<br />

194


Chapitre 2 : Le rôle amplificateur <strong>de</strong> la crise économique <strong>de</strong> 2008....................................... p. 46<br />

> Section 1 : La crise modifie les comportements <strong>de</strong>s consommateurs............................ p. 47<br />

I. Les effets conjoncturels <strong>de</strong> la crise : la rationalité au cœur <strong>de</strong> l’acte d’achat......... p. 47<br />

I.1. La recherche <strong>de</strong> « prix bas » : les consommateurs privilégient la nécessité... p. 47<br />

I.1.1. Une hausse <strong>de</strong> la fréquentation <strong>de</strong>s hard discounts.................................. p. 48<br />

I.1.2. Une comparaison renforcée <strong>de</strong>s prix....................................................... p. 49<br />

I.1.3. Un report <strong>de</strong> l’achat <strong>de</strong> certains biens durables....................................... p. 51<br />

I.2. L’achat malin................................................................................................... p. 51<br />

I.2.1. Un décalage saisonnier <strong>de</strong>s achats........................................................... p. 52<br />

I.2.2. Le « co-achat »......................................................................................... p. 53<br />

II. Les effets structurels <strong>de</strong> la crise : une quête <strong>de</strong> sens............................................. p. 54<br />

II.1. La « <strong>consommation</strong> engagée » existe <strong>de</strong>puis longtemps… .......................... p. 54<br />

II.1.1. Années 60 : mise en place <strong>de</strong>s bases du consumérisme mo<strong>de</strong>rne.......... p. 54<br />

II.1.2. La « <strong>consommation</strong> engagée », <strong>de</strong>s années 60 à aujourd’hui................. p. 55<br />

II.1.3. Les formes mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> « <strong>consommation</strong> engagée »............................ p. 57<br />

II.2. … mais prend une nouvelle tournure avec la crise économique actuelle...... p. 58<br />

II.2.1. La <strong>consommation</strong> d’usage...................................................................... p. 58<br />

II.2.2. La « co-production ».............................................................................. p. 59<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 1................................................................................................ p. 61<br />

> Section 2 : Un transfert <strong>de</strong> responsabilités <strong>de</strong>s institutions politiques vers les<br />

entreprises.................................................................................................... p. 62<br />

I. Désacralisation <strong>de</strong>s institutions politiques.............................................................. p. 62<br />

I.1. Les institutions politiques face à une désaffection structurelle....................... p. 62<br />

I.1.1. Scandales et mensonges politiques........................................................... p. 63<br />

I.1.2. Crise <strong>de</strong> légitimité : quand « les mots n’engagent plus […] et échouent<br />

à transformer le réel ».............................................................................. p. 63<br />

I.2. « Une crise <strong>de</strong> l’impuissance politique », renforcée par la crise économique<br />

<strong>de</strong> 2008............................................................................................................ p. 64<br />

I.2.1. Un capitalisme financier omnipotent........................................................ p. 65<br />

I.2.2. Impuissance <strong>de</strong>s politiques dans la sortie <strong>de</strong> crise................................... p. 67<br />

II. De <strong>nouveau</strong>x espoirs et responsabilités attribués aux entreprises......................... p. 69<br />

II.1. Quand l’État se désengage sur les problématiques sociales et accuse un<br />

grave retard dans la préservation <strong>de</strong> l’environnement… ............................. p. 69<br />

II.1.1. Désengagement <strong>de</strong> l’État dans la sphère sociale : une crise <strong>de</strong> l’État<br />

provi<strong>de</strong>nce ?........................................................................................... p. 69<br />

II.1.2. Des politiques environnementales qui peinent à s’imposer.................... p. 71<br />

II.2. …les attentes <strong>de</strong>s consommateurs se renforcent à l’égard <strong>de</strong>s entreprises.... p. 73<br />

II.2.1. Mise en place <strong>de</strong> la démarche RSE au sein <strong>de</strong>s entreprises.................... p. 73<br />

II.2.2. Les Français et la RSE : <strong>de</strong>s attentes <strong>de</strong> plus en plus fortes envers les<br />

entreprises............................................................................................... p. 75<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 2................................................................................................ p. 76<br />

Conclusion du Chapitre 2.................................................................................................. p. 77<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Première partie....................................................................................... p. 78<br />

195


Secon<strong>de</strong> partie - Les postulats d’un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong>........ p. 81-143<br />

Chapitre 3 : Reposer les bases d’une nouvelle relation <strong>de</strong> confiance<br />

avec les consommateurs...................................................................................... p. 82<br />

> Section 1 : La marque doit retrouver sa raison d’être.................................................... p. 83<br />

I. La marque doit se recentrer sur la qualité <strong>de</strong> ses produits....................................... p. 83<br />

I.1. « Satisfaire les besoins exprimés <strong>de</strong>s consommateurs ».................................. p. 84<br />

I.1.2. Des produits qui doivent passer le test <strong>de</strong> « l’expérience »....................... p. 84<br />

I.1.2. Des produits qui doivent faire leur preuve................................................ p. 85<br />

I.2. « Satisfaire les besoins implicites <strong>de</strong>s consommateurs »................................. p. 87<br />

I.2.1. Utilité ex-ante et utilité fonctionnelle........................................................ p. 87<br />

a. L’utilité ex-ante............................................................................................. p. 87<br />

b. L’utilité fonctionnelle.................................................................................. p. 88<br />

I.2.2. « Start trully listening »............................................................................. p. 90<br />

a. Le web 2.0 et les nouvelles métho<strong>de</strong>s d’étu<strong>de</strong> : la « cyberanthropologie » p. 90<br />

b. Vers <strong>de</strong>s « marques <strong>de</strong> consommateurs » ?.................................................. p. 91<br />

II. La marque doit se lancer dans une « démarche qualité........................................... p. 92<br />

II.1. Intérêts d’une démarche qualité....................................................................... p. 92<br />

II.1.1. En interne.................................................................................................. p. 93<br />

II.1.2. En externe................................................................................................. p. 95<br />

II.2. Étapes d’une « démarche qualité »................................................................. p. 96<br />

II.2.1. La roue <strong>de</strong> Deming................................................................................... p. 96<br />

II.2.2. L’évaluation <strong>de</strong> la démarche : l’obtention d’une certification.................. p. 97<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 1................................................................................................. p. 99<br />

> Section II : L’entreprise doit assumer son <strong>nouveau</strong> rôle sociétal...................................<br />

I. « Define who you are »… .......................................................................................<br />

I.1. L’entreprise doit formaliser son i<strong>de</strong>ntité...........................................................<br />

I.1.1. L’i<strong>de</strong>ntité : « le seul avantage compétitif qui ne peut être dupliqué par<br />

un concurrent » .........................................................................................<br />

p. 100<br />

p. 100<br />

p. 100<br />

p. 100<br />

I.1.2. L’i<strong>de</strong>ntité : « un cocktail concocté avec cinq ingrédients »....................... p. 101<br />

I.2. Se positionner autour d’un système <strong>de</strong> valeurs................................................ p. 102<br />

I.2.1. Définition d’une « vraie valeur »............................................................... p. 102<br />

I.2.2. Le système <strong>de</strong> valeurs : entre réalité et idéal partagé................................ p. 103<br />

II. … « and what you stand for »................................................................................. p. 104<br />

II.1. Responsabiliser son activité............................................................................. p. 105<br />

II.1.1. Les enjeux <strong>de</strong> la « responsabilisation ».................................................... p. 105<br />

II.1.2. Exemples d’initiatives <strong>de</strong> « responsabilisation »..................................... p. 106<br />

II.2. « Commit something biger than yourself ».................................................... p. 108<br />

II.2.1. L’entreprise doit <strong>de</strong>venir l’acteur du changement… ............................... p. 108<br />

II.2.2. … en s’engageant pour créer un <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong> p. 109<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 2................................................................................................. p. 112<br />

Conclusion du Chapitre 3...................................................................................................<br />

196


Chapitre 4 : Le rôle <strong>de</strong> la communication dans ce processus <strong>de</strong> changement....................... p. 114<br />

> Section 1 : Impulser le dialogue avec le consommateur................................................ p. 115<br />

I. Se présenter <strong>de</strong> façon sincère et honnête : « Dire ce que l’on fait »....................... p. 115<br />

I.1. Présenter les marques : « The product is the marketing ».............................. p. 116<br />

I.1.1. En finir avec une communication auto-centrée et déconnectée <strong>de</strong> la<br />

réalité........................................................................................................ p. 116<br />

I.1.2. Reconstruire une communication autour du produit............................... p. 117<br />

I.2. Présenter l’entreprise à travers ses nouvelles responsabilités sociétales........ p. 118<br />

I.2.1. Faire un état <strong>de</strong>s lieux sincère.................................................................. p. 118<br />

I.2.2. Montrer le chemin à parcourir.................................................................. p. 119<br />

II. Susciter l’intérêt <strong>de</strong>s consommateurs : « Être utile »............................................ p. 122<br />

II.1. Être utile en amont <strong>de</strong> l’acte d’achat............................................................. p. 122<br />

II.1.1. Re<strong>de</strong>venir une « source d’information fiable »...................................... p. 122<br />

II.1.2. Mettre en place <strong>de</strong>s dispositifs d’évaluation crédibles........................... p. 124<br />

II.2. Être utile en accompagnant l’expérience client............................................. p. 125<br />

II.2.1. Créer un contenu utile autour <strong>de</strong> la valeur intrinsèque du produit......... p. 125<br />

II.2.2. Créer un contenu utile autour <strong>de</strong> la valeur extrinsèque du produit......... p. 127<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 1................................................................................................ p. 128<br />

> Section 2 : Encourager le dialogue et le faire perdurer.................................................. p. 129<br />

I. Encourager le dialogue par le choix <strong>de</strong> <strong>nouveau</strong>x outils : « Faciliter l’échange ». p. 129<br />

I.1. Vers la fin <strong>de</strong> la publicité ?.............................................................................. p. 129<br />

I.1.1. La publicité : « le porte drapeau d’un capitalisme triomphant »............. p. 130<br />

I.1.2. La publicité : un outil unidirectionnel qui s’impose<br />

aux consommateurs................................................................................... p. 131<br />

I.2. Privilégier les outils expérientiels et participatifs...........................................<br />

I.2.1. Des outils « experience centric »............................................................. p. 133<br />

I.2.2. Des outils participatifs du web 2.0.......................................................... p. 133<br />

II. Permettre au dialogue <strong>de</strong> perdurer dans le temps : « S’imposer une éthique<br />

<strong>responsable</strong> »......................................................................................................... p. 134<br />

II.1. L’éthique : « Faire ce que l’on dit ».............................................................. p. 135<br />

II.1.1. Définition................................................................................................. p. 135<br />

II.1.2. Formaliser son éthique par <strong>de</strong>s principes d’actions <strong>responsable</strong>s.......... p. 136<br />

II.2. Exemple <strong>de</strong> pratique à bannir : le publi-reportage......................................... p. 137<br />

II.2.1. Le publi-reportage dans les médias traditionnels................................... p. 137<br />

II.2.2. Le publi-reportage à l’heure du web 2.0 : les billets sponsorisés........... p. 138<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Section 2..................................................................................................... p. 140<br />

Conclusion du Chapitre 4....................................................................................................... p. 141<br />

Conclusion <strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> partie............................................................................................. p. 142<br />

Conclusion............................................................................................................................... p. 143<br />

Table <strong>de</strong>s annexes....................................................................................................................... p. 146<br />

Table <strong>de</strong>s illustrations................................................................................................................. p. 183<br />

Bibliographie.............................................................................................................................. p. 185<br />

Table <strong>de</strong>s matières...................................................................................................................... p. 193<br />

197


Depuis quelques années, les entreprises et les marques doivent faire<br />

face à une profon<strong>de</strong> remise en cause <strong>de</strong> leur fonctionnement et <strong>de</strong> leur<br />

légitimité. Les consommateurs rejettent désormais le <strong>modèle</strong> qui encourage<br />

l’hyper<strong>consommation</strong> et la dégradation constante <strong>de</strong> valeurs. Les consommateurs<br />

aspirent dorénavant à une quête <strong>de</strong> sens dans leur <strong>consommation</strong>, ce qui passe<br />

notamment par <strong>de</strong> nouvelles attentes en matière <strong>de</strong> responsabilités sociétales.<br />

Le <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> actuel ne peut intégrer ces nouvelles aspirations<br />

et se retrouve dès lors à bout <strong>de</strong> souffle.<br />

Quelles réactions adopter face à cette vision pessimiste <strong>de</strong> l’avenir ? Faut-il<br />

attendre que la confiance revienne avec la future reprise économique ? Et revenir<br />

ainsi au statut quo en attendant la prochaine crise ?<br />

Et si finalement, cette crise <strong>de</strong> confiance ne constituerait pas une opportunité<br />

pour construire un <strong>nouveau</strong> <strong>modèle</strong> <strong>de</strong> <strong>consommation</strong> <strong>responsable</strong> ? Pourquoi<br />

les entreprises et les marques, en adoptant une attitu<strong>de</strong> résiliente, ne ferait-elle<br />

pas <strong>de</strong> cette défiance le moteur du changement ?<br />

Voici autant <strong>de</strong> thématiques que nous abor<strong>de</strong>rons dans ce mémoire, qui se dote<br />

pour mo<strong>de</strong>ste ambition <strong>de</strong> proposer un système où le bon sens retrouve toute sa<br />

raison d’être, face à l’irrationnalité et l’extravagance d’un <strong>modèle</strong> en perdition.<br />

Mo t s-clés : c r i s e - c o n f i a n c e - résilience - c o n s o M M at i o n - responsabilités - s e n s

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