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Woluwe-Saint-Lambert 1967<br />
Après quelques jours de retraite à Saint Risbart, de passage<br />
à Woluwe dans son ancienne paroisse, Jeannine assiste à la<br />
messe. La messe à peine terminée ; les paroissiens se précipitent<br />
sur Sœur Sourire, dans une bousculade incroyable. Ils veulent<br />
la toucher, brandissent des calepins, des disques pour<br />
qu’elle les leur dédicace. Aidée par Annie, Jeannine parvient à<br />
gagner la pâtisserie de ses parents où elles se réfugient. Mais la<br />
foule insatisfaite assiège la place et la réclame en chantant <strong>Domi<strong>nique</strong></strong>.<br />
Chez les Deckers, la table est dressée pour le café, le gâteau<br />
est servi. Les chants et les cris fusent du dehors. Le père, Deckers,<br />
fier de sa fille opine du chef pour battre la mesure avec la<br />
foule, tandis que la mère, bras croisés, conserve une attitude revêche.<br />
Annie, silencieuse, compte les mouches… Jeannine ouvre<br />
la fenêtre, pour saluer la foule du balcon, comme une star. Les<br />
gens lui font un triomphe, puis finissent par se disperser.<br />
– Dites donc, vous n’êtes pas très bavards, fait Jeannine en<br />
reprenant place à table.<br />
– Quel succès, dit le père Deckers…<br />
– Je continue à ne rien comprendre de ce que tu fais de ta<br />
vie, dit la mère, accueillante comme une porte de prison.<br />
– Mais laisse-la vivre comme elle l’entend, fait le père.<br />
– Oui, mais tu as vu la réputation qu’on nous fait dans les<br />
journaux ? Si tu appelles ça la lumière, dit la mère, renfrognée,<br />
en repoussant du petit doigt des miettes sur la table.