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La Nuit

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la nuit l45<br />

Sur les glaives, les crocs et les peignes de fer,<br />

Les tenailles, les coins et le gril et la roue,<br />

Le carcan de fer rouge et la vrille qui troue,<br />

Et les pinces où pend encore un peu de chair,<br />

Epanouis parmi les suaves pétales,<br />

Si tristes et si doux, les chers visages pâles<br />

<strong>La</strong>issent parfois couler l'eau vive de leurs pleurs.<br />

Et quand la brisse passe, alors toutes les fleurs<br />

Gémissent, et quels longs murmures, quelles plaintes,<br />

Quels sanglots et quels cris vers les étoiles saintes !<br />

C'est l'arbre de la vie, où croissent les douleurs,<br />

L'arbre dont chaque fleur qui s'ouvre est un supplice.<br />

Du fond rouge et meurtri de leur morne calice,<br />

Vase de chair, béant, palpitant et sanglant,<br />

<strong>La</strong> souffrance jaillit comme un parfum troublant,<br />

Un parfum capiteux aux puissantes ivresses,<br />

Qui beree les cerveaux en d'étranges caresses,<br />

Pleines de charité, pleines de cruauté,<br />

Où la mort se marie avec la volupté.<br />

Sur la cime de l'arbre, en des cieux de vertige,<br />

Dans la plus triste fleur qui saigne sur sa tige,<br />

Rayonne un frêle enfant, divinement vêtu<br />

De neige lumineuse. Oh mon cœur, le vois-tu ?<br />

C'est le suprême enfant de la douleur du monde.<br />

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