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La Nuit

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LA NUIT<br />

Tu t'es faite, ô ma sœur, gardienne à l'hôpital,<br />

Pour mieux repaître tes regards d'oiseau de proie<br />

Du spectacle écœurant, cruel et plein de joie<br />

De la chair qui se fend sous le couteau brutal.<br />

Dans le grouillis rougeâtre et gluant des viscères,<br />

Des muscles découpés, des tendons mis à nu,<br />

Des nerfs, où vibre encore un vouloir inconnu,<br />

Des glandes qu'on incise et des flasques artères,<br />

Tu plonges tes deux bras polis, avidement,<br />

Tandis qu'erre un divin sourire sur tes lèvres,<br />

Et que sur son chevet, où bondissent les fièvres,<br />

Le moribond t'appelle et parle doucement.<br />

Car ton visage, pur comme un marbre, te donne,<br />

Sous ta coiffe de toile et ton noir chaperon,<br />

0 vierge au bistouri, vierge au cœur de Huron,<br />

Le resplendissement serein d'une Madone.<br />

Sur ton sein, les stylets, les pinces, les ciseaux,<br />

<strong>La</strong> spatule, la scie équivoque et les sondes,<br />

Bijoux terrifiants et breloques immondes,<br />

Comme un bouquet d'acier étoilent leurs faisceaux.<br />

5 I

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