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syLvain-cLaude fiLion
rédacteur en chef intérimaire
sylvain-claude.fi lion@itineraire.ca
Le PLacard des auTres
En décembre 1977, le Québec a été la première province canadienne à voter une loi
interdisant la discrimination basée sur l’orientation sexuelle. Malgré les années sida,
l’implantation d’un Village gai à Montréal, l’attrait touristique et la force du dollar
rose ont fait de Montréal l’un des endroits les plus tolérants au monde. En 2005, le
Canada a été l’un des premiers pays à reconnaître le mariage gai.
À l’heure actuelle, onze États autorisent
le mariage entre personnes du même sexe,
mais l’homosexualité demeure illégale
dans la moitié du monde, essentiellement
en Afrique et en Asie. Pis : elle est passible
de la peine de mort en Iran, en Arabie
Saoudite, en Afghanistan, en Mauritanie,
au Soudan, au Yémen, au Pakistan, dans
les Émirats Arabes Unis et dans les états
musulmans du Nigéria.
En Occident, le débat fait encore rage :
la France est déchirée par la loi Taubira
qui, maladroitement, jumelle mariage
gai et adoption, choquant l’imaginaire
en remplaçant les mots «père» et «mère»
par l’expression «parents 1 et 2» dans les
registres. Aux États-Unis, un sondage
récent Washington Post/ABC nous apprend
que 58 % des Américains appuient le
mariage gai... qui est légal dans seulement
9 États.
Si l’homosexualité semble de plus en
plus acceptée dans le monde – artistes
et politiciens occidentaux affichent
maintenant leur différence sans ambiguïté
– il reste que le malaise demeure.
HomoPHobie ou HyPocrisie ?
Âgé de 14 ans, David Fortin se faisait traiter
de fif et de tapette à l’école depuis des mois
lorsqu’il s’est enfui de son village natal
d’Alma en février 2009. On ne l’a toujours
pas revu; il aurait aujourd’hui 18 ans. Les
rumeurs ont voulu qu’il se soit réfugié dans
une communauté gaie, comme tant de jeunes
le font pour fuir des villages reculés ou
l’homosexualité est encore bien mal perçue.
Les récentes publicités du gouvernement du
Québec contre l’homophobie ont dérangé.
Sur le site web de la campagne, on présente
quelques situations. Par exemple, deux
hommes partagent une vie commune : «est-ce
que ça vous dérange?» Vous répondez non,
en toute bonne conscience. Puis, la seconde
question frappe : «et si c’était votre frère?»
Et là, apparaît le malaise. Les Québécois
acceptent l’homosexualité, mais encore trop
souvent à condition qu’elle reste à une certaine
distance. On veut bien qu’ils s’aiment, mais
on ne veut pas les voir s’embrasser.
Les parents du jeune David Fortin ont
toujours insisté pour affirmer que leur fils
n’était pas homosexuel, malgré le caractère
homophobe du harcèlement dont il était
victime à l’école. Que doit-on déduire de
ces propos? Que ces parents craignent d’être
associés, par filiation, à l’homosexualité?
D’être contaminés, par procuration, à
cause de l’ostracisme rétrograde qui sévit
toujours en région ?
Les Québécois prétendent-ils accepter
l’homosexualité pour se donner bon
teint alors qu’au fond, cela les choque
plus viscéralement qu’ils n’osent l’avouer?
Sommes-nous homophobes ou hypocrites?
Notre grand dossier, à lire en page 8,
dévoile des statistiques qui ont de quoi
susciter la question.
Car si bon nombre déclare accepter les
homosexuels, il en reste beaucoup qui
ne semblent pas prêts à les voir dans leur
propre salon.
L’ItInéraIre
1er mai 2013
éditorial
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