Autobiographie et histoire du service d'anesthésie - Secteur des ...

éveil qui, quelques temps plus tard, bénéficia de l’arrivée d’Olivier Willième et la
situation s’améliora considérablement. L’objectif reste cependant de disposer
d’une unité de soins postanesthésie ouverte 24 heures sur 24.
Notre médicalisation spécialisée de l’anesthésie signifie, entre autres, qu’il
n’y a pas d’infirmières “ anesthésistes ” en Belgique. Notre imitation des Anglais
s’est arrêtée là, car, contrairement à ce qui se passe en Grande-Bretagne,
l’anesthésie, chez nous, ne dispose pas de ses propres aides. Trop d’éléments,
totalement indépendants de notre volonté, influençaient l’efficience de l’aide
accordée par le nursing. Toutefois, dans certains secteurs, l’aide a été parfaite en
toutes circonstances. En chirurgie cardiaque, tout particulièrement, Y. Kestens
avait obtenu du nursing une aide remarquablement organisée et tout à fait
inconditionnelle. En urologie, au -1, Sylviane Torrini, avec le réel soutien de Paul
Van Cangh, avait créé, pour les anesthésistes, un superbe environnement, dans
lequel j’ai eu le privilège et la joie de passer les quatre dernières années de ma vie
professionnelle (1993 – 1997).
Le tabou de la douleur
La douleur a été longtemps considérée comme inhérente à la nature
humaine, une épreuve voulue par Dieu pour le salut des hommes. En particulier, la
douleur accompagnait la chirurgie de manière tellement inéluctable que
l’observation des propriétés anesthésiantes de plusieurs composés nouvellement
découverts ou isolés, comme l’éther diéthylique ou le protoxyde d’azote, ne
donnait à personne l’idée de s’en servir en chirurgie.
Les propriétés anesthésiantes de l’éther ont été mentionnées dès 1744 et celles du protoxyde
d’azote en 1796, mais il ne vint alors à personne l’idée de s’en servir pour diminuer la douleur au cours de
la chirurgie. Vers 1840, les premières réussites d’anesthésies chirurgicales ne furent pas publiées comme
si cela n’en valait toujours pas la peine. En science, la reconnaissance d’une découverte revient à celui qui
arrive à convaincre le monde de son intérêt et non à l’auteur de l’idée. Il est donc juste de créditer
William Thomas Green Morton de l’introduction de l’éther comme agent anesthésique puisque c’est lui
qui en fit la première démonstration publique le 16 octobre 1846, à Boston, Mass.-USA, dans ce qui porte
maintenant le nom d’“ Ether Dome ”, un auditoire du Massachusetts General Hospital. Il est très
significatif que l’anesthésie soit née aux États-Unis, première et immense contribution du nouveau monde
à la médecine. En 1884, S. Freud observait que la cocaïne avait des propriétés anesthésiantes locales sur
la cornée. La mise au point de seringues et d’aiguilles permettant l’injection sous-cutanée, intramusculaire
ou intraveineuse s’accompagna de la préparation de formes injectables de morphine ou de nombreuses
autres molécules synthétiques à action similaire. Malgré tous ces moyens, la lutte contre la douleur n’était
pas vraiment engagée. Seule l’anesthésie chirurgicale était utilisée et peut-être même dans le but premier,
non pas de soulager le malade, mais tout simplement de permettre la chirurgie.