Umberto Saba - Esprits nomades
Umberto Saba - Esprits nomades
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opium parfois, livres anciens, passants, souffle du vent de<br />
Trieste, le bora, il écoule son existence presque en silence.<br />
Il meurt le 25 août 1957 à Rome, à la clinique San Giusto di<br />
Gorizia, quelques mois après la mort de sa femme. Seul, très<br />
seul.<br />
Avec lui meurt tout un pan immense de la poésie italienne.<br />
Toute ma vie s’est déroulée contre-courant, ce qui peut<br />
convenir à un homme taillé pour la lutte, non pour des<br />
caractères comme le mien. J’aurais eu besoin de vivre dans une<br />
autre période historique ; peut-être aurais-je pu alors donner<br />
davantage de moi-même ; au moins aurais-je moins souffert ?<br />
(Lettre à une amie).<br />
Une autobiographie intérieure<br />
Je puise dans mon expérience personnelle (comme dans la<br />
seule possible) un exemple, qui mieux qu'une affirmation nue,<br />
peut prouver la difficulté qu'il y a à ne pas introduire d'abord et<br />
à expulser ensuite les éléments étrangers à notre vision.<br />
(Femmes de Trieste).<br />
<strong>Umberto</strong> <strong>Saba</strong> est avant tout l'homme d'une ville, Trieste la<br />
cosmopolite. Il aura tant erré dans ces avenues interminables<br />
conduisant à la mer, tant traîné dans les bars populaires où se<br />
refaisait à chaque fois le monde, les Alpes lointaines, les<br />
collines. Cette ville semble conduire à une certaine oisiveté, ou<br />
tout du moins une certaine nonchalance. Une brume de<br />
mélancolie tombe de ses murs. Ainsi se passeront ses journées<br />
de jeune homme, ainsi se passeront ses journées de petit<br />
libraire.<br />
« Les rêves longs et fatals » seront son exutoire et sa<br />
géographie intérieure, à l'ombre des grands arbres anciens.<br />
Son berceau est taillé dans le bois des souvenirs de son<br />
enfance, l'amour pour sa mère, pour sa tendre nourrice. Il fait<br />
les cent pas dans sa difficulté d'être.<br />
En fait tous ses poèmes, ses nouvelles, ses aphorismes, ne<br />
seront qu'un voyage dans son autobiographie intérieure.<br />
Attentif aux mystères, au temps qui fuit et coule sans nous, il<br />
médite tendrement: « Je regarde et j'écoute: parce que c'est là