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Bulletin du 10 mai - Festival Passages

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Micro-trottoir<br />

Croisée à la sortie d’un<br />

zakouski <strong>du</strong> dimanche<br />

matin où intervenait<br />

Vlad Troïtskyi, Irina, la<br />

soixantaine, est ravie<br />

d’avoir enten<strong>du</strong> parler<br />

russe. Originaire de<br />

Novgorod où elle<br />

enseignait le français à<br />

l’université, Irina est<br />

une inconditionnelle<br />

de <strong>Passages</strong> depuis sa<br />

création en 1996. Elle<br />

se réjouit de<br />

l’installation <strong>du</strong> festival<br />

à Metz où elle<br />

enseigne le russe à la<br />

MJC-Metz Sud..« C’est<br />

agréable d’écouter ici<br />

<strong>du</strong> théâtre en russe et<br />

ça ne se pro<strong>du</strong>it pas<br />

souvent. Au festival<br />

<strong>Passages</strong>, je découvre<br />

toujours des mises en<br />

scènes surprenantes,<br />

des spectacles rares. »<br />

Bien sûr elle ira voir<br />

Endroit Sec et sans<br />

eau et Une Guerre<br />

personnelle, les deux<br />

spectacles de la<br />

Sibérienne Tatiana<br />

Frolova. Elle songe déjà<br />

à la mise en scène de<br />

Kokorine et se réjouit<br />

de voir les autres<br />

spectacles <strong>du</strong> Théâtre<br />

Dakh. Entendre des<br />

langues étrangères est<br />

un délice et pour elle le<br />

russe sur une scène un<br />

plaisir ja<strong>mai</strong>s assouvi.<br />

On reverra Irina sur le<br />

Campement!<br />

Citation <strong>du</strong> jour :<br />

L’Europe des Temps modernes n’est plus là. Celle dans<br />

laquelle nous vivons ne cherche plus son identité dans le<br />

miroir de sa philosophie et de ses arts. Mais où est donc<br />

le miroir ? Où aller chercher notre visage ?<br />

Milan Kundera<br />

Rencontre : Patrick Hirsch<br />

« Autodidacte et chef d’entreprise », résume Patrick Hirsch à<br />

propos de son parcours. Il a connu Charles Tordjman en 1955<br />

« quand Charles venait d’arriver à Metz », ils se sont<br />

fréquentés à l’époque où le directeur de <strong>Passages</strong> dirigeait<br />

le Théâtre populaire de Lorraine. Puis Tordjman est parti à<br />

Nancy diriger La Manufacture, Hirsch a fait carrière dans les<br />

métiers de la transformation des métaux.<br />

Un jour Charles Tordjman est venu à Metz parler de<br />

l’histoire de son festival. « En l’écoutant, j’ai eu envie de<br />

participer à l’aventure de <strong>Passages</strong> à Metz ». Le retraité<br />

Patrick Hirsch est devenu le bénévole chargé <strong>du</strong> mécénat<br />

pour le festival. Inlassablement, il est allé voir les entreprises<br />

messines et de la région.<br />

« Ça n’a pas été facile, les chefs d’entreprise ne pensent pas<br />

à l’intérêt de la culture en terme de communication<br />

interne ». Hirsch s’en souciait quand il dirigeait une<br />

entreprise, il se souvient <strong>du</strong> personnel se laissant «porter par<br />

l’événement, il y avait un sentiment de fierté chez les<br />

employés de participer à l’aventure artistique » sourit-il. Il<br />

déplore que pour cette première édition de <strong>Passages</strong> les<br />

mécènes soient rares, <strong>mai</strong>s c’est un début. Un mouvement a<br />

été lancé, de belles initiatives ont été prises : « un des<br />

mécènes avait réservé une soirée pour ses clients, tous ont<br />

malheureusement décliné l’invitation, alors nous avons<br />

décidé de conserver le capital et d’offrir à 60 jeunes qui n’en<br />

ont pas les moyens une soirée au théâtre.»<br />

À Metz, le mécénat d’entreprise est balbutiant. Patrick<br />

Hirsch œuvre à faire passer le message, à montrer combien<br />

c’est valorisant. « Lorsque Charles a commencé à La<br />

Manufacture, il a fait venir Zingaro à Nancy. C’était une<br />

grande première et j’ai invité des clients : le mécénat<br />

n’existait pas encore ! Vingt ans après, ils m’en parlent<br />

encore. Un seul spectacle a su créer un lien professionnel<br />

fort. »<br />

Réalisé par Claire Counilh, Virginie<br />

Joalland et Jean-Pierre Thibaudat<br />

LE BULLETIN<br />

n°3<br />

Le journal <strong>du</strong> festival <strong>Passages</strong><br />

<strong>du</strong> 7 au 21 <strong>mai</strong><br />

à Metz et en Lorraine<br />

Retrouvez l’actualité <strong>du</strong> festival sur :<br />

www.festival-passages.fr<br />

<strong>Bulletin</strong> n°3 - Mardi <strong>10</strong> <strong>mai</strong> 2011-


<strong>Passages</strong> de l’Europe<br />

« Et si on refaisait l’Europe? Quelle Europe pour la culture? »<br />

Ce double questionnement était le thème de la rencontre organisée hier sur le campement<br />

de <strong>Passages</strong> en collaboration avec le Forum-IRTS de Lorraine (Institut régional <strong>du</strong> travail<br />

social), rencontre animée par Didier Francfort (professeur d’histoire contemporaine à<br />

l’université Nancy 2) qui pendant le festival va animer des cabarets littéraires au château de<br />

Lunéville.<br />

Pas facile de répondre à ces questions. Le « populisme » que Pascal Ory (Professeur à<br />

l’Université de Paris 1) a défini comme « un petit groupe de gens qui prétend parler au nom<br />

<strong>du</strong> peuple et pour qui le reste c’est l’ennemi », fit très vite son entrée en scène. Auquel on<br />

opposa cet Arlequin qu’est le « populaire », lequel n’est mas un gros mot observèrent de<br />

concert Raymond Bayer (Ligue des droits de l’homme, Conseil Economique et Social de<br />

Lorraine) et Jean-Marc Leveratto. (Directeur <strong>du</strong> laboratoire de sciences sociales à l’Université<br />

Paul Verlaine de Metz). « La démocratie comme l’Europe cela s’apprend » jugea Priscilla<br />

Fergurson (sociologue à Colombia University de New York).<br />

On parla plus d’une fois des lois inquiétantes votées par la nouveau gouvernement de la<br />

Hongrie, pays d’où était venu Ildiko Szabo (sociologue à l’université Eötvös de Budapest) <strong>mai</strong>s<br />

aussi de l’Italie et d’ailleurs. On parla aussi des « printemps <strong>du</strong> peuple » dans les pays arabes,<br />

de la Résistance dans le Vercors. On lança des mots comme « globalisation » ou « tribu », on<br />

reconsidéra le cadastre culture face aux terres nouvelles que sont les arts que l’on disait<br />

mineurs comme la BD et les ressources d’Internet.<br />

Les débatteurs explorèrent bien des ramifications. Les deux questions posées entraînant plus<br />

de questionnements que de réponses péremptoires. Une Europe politique forte est la<br />

condition d’une forte Europe culturelle dirent certains. D’autres montrèrent que l’Europe <strong>du</strong><br />

XVIII e siècle n’avait pas atten<strong>du</strong> l‘Union Européenne pour faire circuler œuvres et artistes.<br />

<strong>Passages</strong> accueille des Ukrainiens, pays qui n’appartient pas à l’UE. Pourtant il suffit de fouler<br />

le sol de Kiev, la ville où l’écrivain Irène Némirovsky passa sa prime jeunesse, pour se sentir au<br />

cœur d’une ville européenne.<br />

Attila Vidnyanszky est né au sein de la minorité hongroise d’une petite ville d’Ukraine et<br />

dirige aujourd’hui le grand théâtre de Debrecen en Hongrie. Il vient ces jours ci à <strong>Passages</strong><br />

avec une soufflante mise en scène de Tchékhov et une envoûtante pièce hongroise<br />

contemporaine. Plusieurs de ses acteurs bien que nés dans la langue hongroise ont toujours<br />

un passeport ukrainien. Sont-ils européens ou ne le sont-ils pas ?<br />

Metz vu par Pascal Ory<br />

Professeur d’histoire culturelle à la Sorbonne, Pascal Ory était invité hier au débat Et<br />

si l’on refaisait l’Europe ? Ce n’est pas la première fois qu’il venait à Metz. « J’ai deux<br />

rapports personnels à la ville : je suis un vieil amoureux de la gare, et je suis un ami<br />

<strong>du</strong> dramaturge messin Jacques Kraemer, il est mon voisin à Chartres. » Lorsqu’il<br />

ani<strong>mai</strong>t sur France 3 au début des années 1980 un programme consacré à l’histoire<br />

régionale, Pascal Ory a réalisé une émission sur cette gare qui le fascine : « l’histoire<br />

des peuples est faite de la transformation et de la récupération d’objets symboliques.<br />

La gare est désor<strong>mai</strong>s classée patrimoine historique <strong>mai</strong>s sa construction était un acte<br />

politique violent. » Venir à Metz, pour lui c’est aussi rendre hommage à Jacques<br />

Kraemer, fondateur <strong>du</strong> Théâtre Populaire de Lorraine. « Il est revenu à Metz en<br />

créant 1669, il est pour moi un bel exemple de l’artiste citoyen. »<br />

Portrait : Vlad Troïtskyi<br />

Étrange destinée que celle de Vlad<br />

Troïtskyi qui l’a mené jusqu’au Théâtre<br />

Dakh qu’il a créé en 1994. Originaire<br />

au temps de l’Union soviétique d’une<br />

Russie qu’il a bien vite quitté, il est fier<br />

de se dire ukrainien. Diplômé de l’école<br />

Polytechnique de Kiev, il commence à<br />

travailler dans la communication radio<br />

puis devient analyste financier. Il fait<br />

<strong>du</strong> théâtre à côté, de plus en plus, et<br />

finit par aller se former au GITIS la<br />

prestigieuse école moscovite. Rien n’est<br />

donc incompatible.<br />

Le théâtre, il l’a découvert à la<br />

télévision avec Eimuntas Nekrošius, l’un<br />

des metteurs en scène les plus connus<br />

de Lituanie. Suivra sa rencontre avec<br />

Anatoli Vassiliev, le grand pédagogue<br />

russe : Vlad Troïtskyi se lance et, avec<br />

ses économies, crée un petit théâtre. Il<br />

le baptise le Théâtre Dakh, ce qui<br />

signifie « toit » en ukrainien, car sa<br />

troupe a commencé à jouer, sur le toit d’un immeuble de Kiev. Dès le départ, il y<br />

établit une école dans laquelle les élèves sont formés à différents systèmes de jeu,<br />

pour façonner un style unique, pluridisciplinaire aux influences multiples. Le<br />

groupe DakhaBrakha, inscrit dans sa troupe, ancre sa volonté d’un « théâtre<br />

musical dramatique.» L’Ukraine est sans doute l’un des pays où la tradition <strong>du</strong><br />

chant a le mieux survécue : « avec les musiciens de DakhaBrakha j’ai voulu utiliser<br />

cette tradition musicale et y croiser d’autres traditions venues d’ailleurs, l’enrichir<br />

par un métissage musical. »<br />

Il en résulte un théâtre atypique qui n’a pas d’équivalent ailleurs en Ukraine, un<br />

théâtre indépendant qui ne reçoit aucune aide de l’État : « jouer en Ukraine ça<br />

nous fait perdre beaucoup d’argent, <strong>mai</strong>s heureusement les tournées à l’étranger<br />

nous permettent d’en gagner. » Resté actionnaire minoritaire dans plusieurs<br />

business, il utilise ses fonds propres pour financer son théâtre, payer ses acteurs.<br />

Infatigable, il rêve d’une Ukraine ouverte sur le monde et déplore « la crise<br />

globale de l’idée » dont souffre son pays. « Le théâtre parle d’une nouvelle<br />

civilisation qui éclot, basée sur le don, la connaissance, le partage » rêve Vlad<br />

Troïtskyi.<br />

Et puis il y a le Gogolfest, une immense manifestation artistique qu’il organise à<br />

Kiev avec son équipe depuis plusieurs années. S’y côtoient acteurs, musiciens,<br />

danseurs, plasticiens, cinéastes, vidéastes, écrivains… « Une rencontre de tous les<br />

arts » résume-t-il ? Une ambiance décontractée <strong>mai</strong>s d’une réelle exigence<br />

artistique. « Mon théâtre parle aux Ukrainiens, quand nous jouons en Russie c’est<br />

la même chose, je me demande comment les spectateurs français vont réagir. Ici<br />

on ne connaît pas grand chose de l’Ukraine, venir avec <strong>du</strong> théâtre c’est une belle<br />

ouverture pour présenter mon pays. »<br />

<strong>Bulletin</strong> n°3 - Mardi <strong>10</strong> <strong>mai</strong> 2011-

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