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Note C, p. 21 - Shing-Moo et Ma-Tsoopo<br />
Si nous comparons le nom de Shing-Moo, la sainte Mère des Chinois, à un autre nom de cette déesse dans<br />
une autre province de Chine, nous pourrons conclure que Shing-Moo est précisément un synonyme de l'un<br />
des noms bien connus de la déesse-mère de Babylone. Gillespie (Pays de Sinim, p. 64) déclare que la déessemère<br />
des Chinois, ou la reine des cieux, dans la province de Fuh-Kien, est adorée par les marins sous le nom<br />
de Ma-Tsoopo. Or, Ama-Tzupah veut dire la mère qui contemple, et il y a de fortes raisons de croire que<br />
Shing-Moo veut dire la même chose; en effet, Mû est l'une des formes sous lesquelles Mut ou Maut, la Grande<br />
Mère, apparaissait en Égypte (BUNSEN, Vocabulaire, vol. I, p. 471) et Shugh, en chaldéen, veut dire regarder<br />
ou contempler. L'Égyptien Mû ou Maut était symbolisé par le vautour, ou par un oeil entouré d'ailes de<br />
vautour (WILKINSON, vol. V, p. 203). Le sens symbolique du vautour peut être fourni par une expression<br />
scripturaire: "Il y a un chemin que nul oiseau de proie ne connaît, et que l'oeil du vautour n'a point vu." (Job<br />
XXVIII, 7). Le vautour était renommé pour son oeil perçant, et de là, l'oeil entouré d'ailes de vautour montrait<br />
que pour une raison ou pour une autre, la grande mère des dieux, en Égypte, avait été appelée "celle qui voit".<br />
Mais l'idée contenue dans le symbole Égyptien avait été évidemment empruntée à la Chaldée; car Rhéa, un<br />
des noms les plus connus de la mère Babylonienne des dieux, est exactement la forme chaldéenne de l'hébreu<br />
Rhaah, qui veut dire à la fois une femme qui contemple et un vautour. L'hébreu Rhaah lui-même peut aussi<br />
se prononcer Rheah, suivant une variation de dialecte, de là le nom de la grande déesse-mère d'Assyrie était<br />
quelquefois Rhéa, et quelquefois Rheia. En Grèce, la même idée était attachée à Athéné ou Minerve qui était<br />
appelée parfois "la mère des enfants du Soleil" (note 6, p. 36). Un de ses titres était Ophthalmitis (SMITH,<br />
Dict. class., Athena, p. 102). On la désignait par là comme la déesse de l'oeil. C'était évidemment pour<br />
indiquer le même fait, que, comme l'Égyptienne Maut portait un vautour sur la tête, ainsi la Minerve<br />
d'Athènes était représentée comme portant un casque avec deux yeux, ou des trous pour les yeux dans le front<br />
du casque (VAUX, Antiquités, p. 186).<br />
Maintenant que nous avons dépeint, dans tous les pays, la mère qui contemple, nous demandera-t-on: d'où<br />
vient qu'on a donné un nom pareil à la mère des dieux? Un fragment de Sanchoniathon, sur la mythologie<br />
Phénicienne, nous fournit une réponse satisfaisante. Il nous dit que Rhéia conçut de Kronos, son propre frère,<br />
qui cependant était connu comme le père des dieux: elle mit au monde un fils qui fut appelé Muth, c'est-àdire,<br />
comme Philo-Byblius interprète justement ce nom, Mort. Comme Sanchoniathon distingue expressément<br />
le père des dieux d'avec Hypsistos, le Très-Haut 1 , nous nous rappelons naturellement ce qu'Hésiode dit à<br />
propos de Kronos, le père des dieux qui, pour une certaine action coupable, fut appelé Titan, et précipité au<br />
fond de l'enfer (Theogonia, 1. 207, p. 18).<br />
Le Kronos auquel Hésiode fait allusion est évidemment au fond un Kronos différent du père humain des dieux<br />
ou Nemrod, dont l'histoire occupe dans cet ouvrage une si grande place. Il est évident qu'il n'est autre que<br />
Satan lui-même, le nom de Titan ou Teitan, n'était autre chose (p. 409) que la forme chaldéenne de Sheitan,<br />
nom ordinaire du grand adversaire chez les Arabes, dans le pays même où les mystères chaldéens furent<br />
primitivement élaborés, – cet adversaire qui fut plus tard le vrai père de tous les dieux païens, – et qui (pour<br />
lui approprier aussi le titre de Kronos, le cornu) fut symbolisé par le Kerastes ou serpent à cornes. Tous les<br />
frères de ce père des dieux impliqués dans sa rébellion contre son propre père, le Dieu du ciel, étaient<br />
également flétris du nom de Titans; mais comme chef de la rébellion, il était naturellement Titan par<br />
prééminence. Dans cette rébellion de Titan, la déesse de la terre fut compromise, et de là (en écartant la figure<br />
sous laquelle Hésiode a déguisé le fait) cette impossibilité que le Dieu du ciel eut des enfants sur la terre<br />
(allusion à la chute). Or, si nous tenons pour avéré que c'est là le père des dieux, dont Rhéa (ordinairement<br />
appelée la mère des dieux, et identifiée à Gé ou la déesse de la terre) eut l'enfant appelé Muth ou la Mort, qui<br />
1<br />
Quand on lit cet auteur, il faut se rappeler ce que Philo-Byblius, qui 1'a traduit affirme à la fin de son<br />
Histoire de la Phénicie, savoir, que l'histoire et la mythologie sont mêlés dans cet ouvrage.