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Réunion du 23 mars 2012 avec Yoann BOGET - Université d ...

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Séminaire ouvert <strong>du</strong> PIMS<br />

<strong>23</strong> <strong>mars</strong> <strong>2012</strong><br />

9h-12h<br />

<strong>Yoann</strong> Boget<br />

Présentation de sa recherche doctorale sur la figure <strong>du</strong> travailleur pauvre assisté<br />

en France et en Allemagne<br />

Présents :<br />

• Conférencier invité : <strong>Yoann</strong> Boget, ATER, doctorant à l'EHESS sous la direction de Serge<br />

Paugam<br />

• Acteurs dirigeants dans le secteur de l'insertion :<br />

• Yvan Ferrier, DGA <strong>du</strong> pôle solidarités au CG <strong>du</strong> Gard<br />

• Isabelle Potel, sous-directrice à la CAF <strong>du</strong> Vaucluse<br />

• Frédéric Rostaing, Directeur de l'UT Grand Avignon au CG de Vaucluse<br />

• Membres <strong>du</strong> groupe PIMS :<br />

• Jean-Robert Alcaras, Maître de Conférences en Science Economique<br />

• Christèle Marchand, Ingénieur de Recherche en Science Politique<br />

• Guillaume Marrel, Maître de Conférences en Science Politique<br />

• Magali Nonjon, Maître de Conférences en Science Politique<br />

– Delphine Costa, Directrice <strong>du</strong> LBNC : Accueil et message de bienvenue<br />

– Magali Nonjon : Intro<strong>du</strong>ction et présentation <strong>du</strong> séminaire et des travaux <strong>du</strong> PIMS<br />

1 - Intervention de <strong>Yoann</strong> Boget :<br />

– remerciements<br />

– son approche est complémentaire des travaux <strong>du</strong> PIMS : la managérialisation <strong>du</strong> social est la<br />

boite noire de sa recherche : entre approche législative et politique (top) et le point de vue<br />

des allocataires (bottom).<br />

– Plan de la présentation :<br />

1. objet<br />

2. construction théorique et méthodologique<br />

3. résultats issus <strong>du</strong> terrain en France et Allemagne<br />

1) Objet de recherche<br />

Point de départ :<br />

– théories des Etats-providence :<br />

– Selon Espig Andersen , les Etats providence de type bismarckien sont « gelés »,<br />

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incapables de se réformer réforme (car les cotisations ouvrent des droits qu'il est donc<br />

difficile de supprimer ou de remettre en cause)<br />

– Mais dans les faits, on assiste à une réforme en douceur de ces Etats, grâce à un<br />

processus de <strong>du</strong>alisation des systèmes bismarckiens<br />

– théorie critique (Bourdieu et Foucault) : les PS néolibérales inculquent aux citoyens des<br />

habitus qui les transforment en « entrepreneurs d'eux-mêmes » et les transforment donc en<br />

sujets autonomes et flexibles : ce seraient donc les politiques néolibérales qui créeraient les<br />

indivi<strong>du</strong>s néolibéraux... Assiste-t-on à un même processus de ce type en France et en<br />

Allemagne ? C'est plus complexe que cela, surtout quand on observe le point de vue et le<br />

vécu des allocataires eux-mêmes. Or, ces théories critiques postulent ce lien, mais il y a peu<br />

de validation empirique sur le vécu des allocataires .<br />

La recherche de YB vise donc à travailler sur les travailleurs pauvres assistés : être au travail tout en<br />

étant pris dans des régulations étatiques => quelles sont leurs expériences subjectives effectives ?<br />

2) Construction théorique et méthodologique<br />

Retour sur les évolutions des systèmes Français et Allemands :<br />

– Ils ne sont pas aussi identiques qu'on le dit souvent ! Et ils pro<strong>du</strong>isent aujourd'hui 2 figures<br />

différentes <strong>du</strong> travailleur pauvre...<br />

– Pourtant, la construction historique des 2 systèmes est similaire : protection assurentielles<br />

bismarckiennes + protection supplémentaires pour les exclus de l'assuranciel depuis les<br />

dernières décennies.<br />

– 1990 : EP similaire (chômage et pauvreté)<br />

– assurance chômage pour l'essentiel<br />

– protection d'assistance sociale (RMI, RSA...)<br />

– dispositions spécifiques type ASS ou aide au chômeur en Allemagne : dernier échelon<br />

destiné à l'extrême pauvreté, une assistance qui complète l'assurance.<br />

– Depuis les années 1990, de plsu en plus de chômeurs vont aller vers ces dispositifs<br />

complémentaires : il s'agit donc d'un transfert de publics contraints de recourir aux<br />

dispositifs assistantiels : forte augmentation :<br />

– plus d'un million d'allocataires <strong>du</strong> RMI, encore plus pour le RSA<br />

– ce public n'était pas prévu par ces modèles sociaux<br />

– cela crée donc une crise de légitimité de ces programmes<br />

– et un retournement dans la conception des politiques sociales (UE, OCEDE, workfare,<br />

contrepartie, activation...)<br />

– les EP bismarkien appliquent ces dispositifs et considérent de plus en plus les aides et<br />

assistances comme des instruments désincitatifs au travail ou des entraves au retour à<br />

l'emploi…<br />

– D'où un glissement des politiques sociales de lutte contre la pauvreté vers des politiques<br />

de l'emploi et de retour à l'emploi.<br />

– Dans ce cadre, on a donc assisté à 2 réformes :<br />

– RSA en France<br />

– Hartz IV en Allemagne : fusion de l'assistance et de l'aide sociale dans un seul<br />

dispositif<br />

Pour cette recherche, YB va utiliser le concept de « gouvernementalité » (Foucault) en le<br />

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croisant <strong>avec</strong> celui de rationalité des formes de gouvernement (Weber) : les instruments des<br />

politiques sociales sont des instruments de con<strong>du</strong>ite des con<strong>du</strong>ites.<br />

– une gouvernementalité de valeur : identiques en France et Allemagne (même volonté de<br />

créer des incitations au retour des assistés sur le marché <strong>du</strong> travail<br />

– une gouvernementalité instrumentale de moyens : là, on constate des différences entre les 2<br />

pays, notamment dans le dosage entre méthodes d'incitation financière (plutôt en France) et<br />

disciplinaire (plutôt en Allemagne).<br />

3 niveaux d'observation :<br />

• catégories semblables de définition des allocataires en référence à l'emploi : disparition<br />

des références à la pauvreté<br />

• transformation des institutions de prise en charge : Pôle emploi en France, Agences de<br />

l'emploi en Allemagne<br />

• instauration de technique d'incitation à l'emploi : financières (France), obligations,<br />

contractuelles, sanctions (Allemagne).<br />

La différence essentielle entre les 2 pays tient dans le poids relatif de ces différentes techniques :<br />

– d'incitation (homoeconomicus) = plus fortes en France<br />

– disciplinaires (obligation, contrôle, sanction) = plus fortes en Allemagne<br />

Différence sur les montants d'allocation : All>Fr<br />

Différence sur les niveaux de cumuls<br />

Modalité Fr : libérale, peu interventionniste et peu de suivi<br />

Modalité plus paternaliste en All : + généreux mais plus stricte<br />

=> 2 figures de l'allocataire<br />

– Fr : RSA chapeau, salarié + allocation<br />

– All : exerce des activités qui lui sont réservées (≠ emplois) « 1 euro job » : en plus de<br />

l'allocation, 1,25 euros de l'heure travaillée en moyenne, emplois n'ouvrant pas droit à<br />

l'assurance.<br />

Méthode de la recherche : enquête par entretiens qualitatifs :<br />

– 50 en Fr : Belfort (été 2010)<br />

– 40 en All : Iena à la frontière E/W (hiver 2009)<br />

3) Principaux résultats issus <strong>du</strong> terrain en France et Allemagne<br />

Convergences et divergences, points communs et différences entre les vécus subjectifs des<br />

travailleurs pauvres en France et en Allemagne : beaucoup de différences, peu de similitudes .<br />

Convergences :<br />

– valorisation extrême de leur activité (même activité stigmatisée) : activité préférée à<br />

l'inactivité<br />

– le W comme valeur morale réaffirmée : il faut travailler, par de retrait volontaire « ne pas se<br />

laisser aller... »<br />

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Divergences :<br />

Rapport aux institutions :<br />

– All : place très importante pour les allocataires (conflictuelle ou non), car l'institution<br />

est essentielle comme distributrice des emplois<br />

– Fr : au contraire, les allocataires sont moins en contact direct <strong>avec</strong> les institutions : ils<br />

éprouvent souvent un détachement // à Pôle emploi « qui ne sert à rien », même si<br />

leur relation aux services sociaux départementaux est souvent jugée plus utile et<br />

meilleure.<br />

Statut // emploi :<br />

– All : la majorité des allocataires ne se considèrent pas « en emploi », ils déprécient le<br />

travail qu'ils réalisent : ils se savent sur un marché <strong>du</strong> travail secondaire : activité ≠<br />

travail.<br />

– Fr : au contraire, il y a une survalorisation <strong>du</strong> statut de l'emploi qu'ils occupent,<br />

même s'il est précaire : c'est important de travailler, pour eux...<br />

Statut d'allocataire :<br />

– All : ils se considèrent encore comme « pauvres », malgré l'emploi qu'ils occupent :<br />

ils n'ont pas l'impression de sortir <strong>du</strong> dispositif <strong>avec</strong> ces activités<br />

– Fr : l'aide est perçue comme une simple allocation complémentaire au revenu : ils ne<br />

perçoivent donc pas le poids <strong>du</strong> statut, se sentent moins stigmatisés ; ils perçoivent le<br />

RSA comme une aide comme une autre (APL, autres allocations de la CAF).<br />

Perception de l'activité :<br />

– All : c'est l'activité qui est vécue comme très importante, structurante, permettant une<br />

socialisation primaire<br />

– Fr : c'est le statut qui compte surtout. On met plus en avant l'importance de<br />

l'acquisition d'un statut : « à travers le travail, j'existe » (une forme de logique de<br />

l'honneur, qui tient surtout compte <strong>du</strong> regard des autres sur soi-même).<br />

Efficacité de la mesure :<br />

– Fr : jugée d'autant plus efficace qu'on est peu inséré au marché de l'emploi. Moins on<br />

est inséré, et plus on juge la mesure efficace ! Mieux on est inséré, plus on juge le<br />

RSA comme ayant des effets limités.<br />

– All : les plus éloignés de l'emploi sont aussi les plus satisfaits, mais pour des raisons<br />

≠ .<br />

Au final : grande différence dans le sentiment d'autonomie :<br />

– Fr : on se sent responsable de son insertion sur le marché <strong>du</strong> W : « si je me bouge, je<br />

vais y arriver ».<br />

– All : on est + fataliste : « de toute façon, il n'y a pas de travail ».<br />

Pour conclure :<br />

En France, on peut dégager 3 types d'allocataires <strong>du</strong> RSA :<br />

– ceux qui se vivent comme demandeurs d'emploi perpétuels : petites activités précaires<br />

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variables depuis longtemps => contrats aidés et insertion. On les retrouve le plus souvent<br />

sur des contrats aidés et des structures de l'IAE.<br />

– les travailleurs pauvres : insérés dans le travail, stables, mais aux revenus trop faibles<br />

(smic, temps partiel...), ils ne s'en sortent pas (ou <strong>du</strong> moins, ils ont ce sentiment).<br />

– en transition : jeunes en reprise de formation (RSA activité) ; ruptures professionnelles,<br />

en reconversion... relativement mieux formés que les autres, mais se vivent en situation<br />

temporaire.<br />

Efficacité <strong>du</strong> RSA comme incitation à la reprise d'activité ?<br />

– Non ! Le RSA ne peut pas être un instrument d'incitation au travail.<br />

– 3 raisons<br />

– le travail est plus qu'un revenu : socialisation, structuration de sens, de statut<br />

social... : ce sont là les raisons profondes et essentielles de la recherche d'emploi. Les<br />

incitations financières sont donc secondaires...<br />

– Le système d'incitation financière est totalement méconnu et incompris par les<br />

allocataires : beaucoup méconnaissent le mécanisme, ceux qui le connaissent ne le<br />

comprennent pas : connaissance pratique, d'expérience = incertitude, insécurité<br />

– Ce système est trop complexe (CAF et CG agissent sur ce dispositif, prime pour<br />

l'emploi, règles <strong>du</strong> cumul) = sentiment que le RSA les déstabilise, augmente leur<br />

précarité = amplifie les variations de revenu : calculé sur base trimestrielle : les actifs<br />

saisonniers sont en décalage... = stratégie : ne pas bouger, éviter les creux = peu<br />

incitatif.<br />

Questions / commentaires :<br />

YF : dans les CG, on a l'impression qu'il y a un fort taux de non recours. Une bonne partie <strong>du</strong> public<br />

ciblé ne vient pas réclamer ses droits au RSA. La complexité <strong>du</strong> dispositif pourrait être la clé de ce<br />

mystère...<br />

FR : le RSA n'a pas trouvé son public : vous ne touchez que ceux qui sont dedans et pas ceux qui<br />

son dehors.<br />

IP : confirme ce constat. Un croisement entre fichier CAF et ceux <strong>du</strong> fisc (84) avait con<strong>du</strong>it à une<br />

estimation de 31000 bénéficiaires potentiels : or, enregistrement de 18000 seulement actuellement,<br />

<strong>avec</strong> en outre un fort turn over de la population. Où sont les 13000 personnes qui pourraient<br />

prétendre au RSA mais qui ne le font pas ? Cela concerne surtout le RSA socle et le RSA activité<br />

(beaucoup moins le RSA chapeau). Ceci est confirmé par des études de la DREES, sachant que cela<br />

change un peu sur le RSA socle (mais pas sur le RSA activité).<br />

YF : au CG30, on est face aux mêmes proportions.<br />

Il faut regarder le marche <strong>du</strong> travail.<br />

Voir statistiques de la Drees au niveau national : augmentation <strong>du</strong> RSA socle (parce que le marché<br />

de l'emploi est au point mort), mais la part prévue entre RSA socle et RSA activité dérive.<br />

Cf étude de chercheurs de Dauphine : échec relatif <strong>du</strong> RSA, en effet.<br />

On aurait même <strong>du</strong> non-recours sur le RSA socle : un certain nombre d'allocataires refusent la<br />

dimension disciplinaire (flicage).<br />

FR : l'All annonce <strong>du</strong> disciplinaire mais ne le mobilise pas, la Fr, c'est l'inverse. Quelle est la<br />

proportion de la mobilisation de l'arsenal ?<br />

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• All : Rapport social très négatif à ce type de PP d'activation : Hartz = infamie<br />

• Fr : maintien d'une figure plus positive = Vauquier<br />

Fr : le système d'EP est un mélange de beveridgien et bismarckien : articulation entre protection<br />

sociale, assurance sociale et aide sociale sur la norme <strong>du</strong> CDI.<br />

Echec des PP de l'EP dont on rend responsables les indivi<strong>du</strong>s<br />

Système d'aide sociale All : contrôlé par l'Etat mis en oeuvre par la commune/<br />

Fr : complexité de la décentralisation : l'Etat oriente moins les con<strong>du</strong>ites par les textes que par les<br />

finances : responsabiliser financièrement les CT (2004).<br />

Gouvernance par les finances !<br />

Réponses (YB) :<br />

– oui des trajectoires de systèmes divergentes<br />

– mais dans les 1990 : crise conjoncturelle<br />

– non-recours : 2ème boite noire de mon travail. Mon hypothèse : ce sont les travailleurs<br />

pauvres = pas d'habitude au recours : qui ne se vivent pas comme ayant-droits potentiels.<br />

YF : sur le non-recours aux droits = la complexité bureaucratique est au service de la contrainte<br />

budgétaire !!!<br />

Dimension politique : L. Wauquiez a défen<strong>du</strong> récemment une vision proche des « 1 euro job » à<br />

l'allemande... Mais dans notre système (décentralisé) au final, c’est l'élu qui prend la sanction =><br />

risque politique. D'où l'absence relative de sanctions.<br />

On ne délègue pas au travailleur social car il est trop proche : on monte des systèmes de contrôle...<br />

Jusqu'où va-ton dans la poche de pauvreté (8M en Fr) ?<br />

Interrogation des responsables : modalités techniques, question éthique et choix politiques<br />

YB : sur la complexité qui freinerait le recours... : à la CAF démarche anonymes et simples, mais<br />

plus intrusives dans les centres d'action sociaux<br />

Sur l'organisation : gestion éclatée <strong>du</strong> RSA<br />

– CAF = finance<br />

– Pôle emploi = censé gérer le suivi d'1/3 des bénéficiaires<br />

– Suivi social et pilotage par les CG<br />

A Belfort : peu de contact<br />

IP : le RSA activité est le moins complexe, le moins contrôlé, le plus facilement instruit et pourtant,<br />

on ne fait pas le plein : il y a malgré cela <strong>du</strong> non-recours.<br />

YB : trop de lien à l'aide sociale . Question de la stigmatisation<br />

FR : sur l'arsenal disciplinaire, pas de statistiques... Discussion sur la dimension <strong>du</strong> contrôle :<br />

finalement très fort et croissant en France : effet de structure éclatée en France ?<br />

IP : à la CAF, on progresse dans la montée en puissance des dispositifs de contrôle des droits des<br />

usagers. On met en œuvre <strong>du</strong> datamining et <strong>du</strong> scoring pour mieux gérer ce type de contrôle.<br />

Présence forte des instruments (notamment numériques) dans cette perspective...<br />

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