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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Thème 1<br />

Sommaire<br />

Maîtrise des intrants phytosanitaires : la dynamique de la filière<br />

Cognac<br />

Evolution des pratiques phytosanitaires sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac<br />

depuis 20 ans – L. BOITAUD/V. DUMOT 5<br />

Le réseau FermEcophyto - L. MORNET 13<br />

Comment adapter Ecophyto aux contraintes vitico<strong>le</strong>s ? – P. RETAUD 21<br />

Demain, des cépages plus résistants ? – G. FERRARI 28<br />

Thème 2<br />

Qualité des vins de distillation et des eaux-de<br />

de-vie nouvel<strong>le</strong>s<br />

Qualité des moûts : caractérisation et influence sur la composition<br />

des vins – G. FERRARI 37<br />

L’éthanal : du moût à l’eau-de<br />

de-vie<br />

– B. GALY 48<br />

Dynamique de la synthèse des esters et des alcools supérieurs au cours de la<br />

fermentation alcoolique : nouvel<strong>le</strong>s avancées – J.M. SABLAYROLLES/P. NICOLLE 59<br />

Facteurs de variabilité de la teneur des vins de distillation en esters et<br />

alcools supérieurs – C. ROULLAND 67<br />

ATELIERS<br />

Atelier conférences<br />

Fermentation alcoolique : avancées récentes et perspectives<br />

de la recherche - J.M. SABLAYROLLES 79<br />

Connaissance et défense du Cognac : <strong>le</strong>s apports de l’analyse – G. SNAKKERS 85<br />

Maladies du bois : point sur <strong>le</strong>s programmes de recherche en cours – P. LARIGNON 97<br />

Atelier 1 : Maladies du bois – V. DUMOT/A. CATTE 103<br />

Atelier 2 : Distillation et énergie – G. GALY 104<br />

Atelier 3 : La boîte à outils environnementa<strong>le</strong> – G. FERRARI/C. RAYER 105<br />

Atelier 4 : Connaissance aromatique des eaux-de<br />

de-vie nouvel<strong>le</strong>s – G. SNAKKERS 106<br />

1


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

7<br />

2


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Thème 1<br />

Maîtrise des intrants phytosanitaires :<br />

la dynamique de la filière Cognac<br />

3


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

4


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Evolution des pratiques phytosanitaires sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong><br />

de Cognac depuis 20 ans<br />

Laetitia BOITAUD, Vincent DUMOT, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

Le respect de l’environnement au sein de l’aire de production Cognac, ainsi que <strong>le</strong>s attentes<br />

qualitatives et sanitaires extrêmement é<strong>le</strong>vées des consommateurs du monde entier ont<br />

conduit, depuis de nombreuses années, la filière Cognac à faire de la maîtrise des intrants<br />

phytosanitaires une question centra<strong>le</strong>. Des actions sont ainsi conduites depuis plus de 20 ans<br />

par la filière en vue de définir et de promouvoir <strong>le</strong>s « bonnes pratiques vitico<strong>le</strong>s et<br />

environnementa<strong>le</strong>s » à mettre en œuvre. Les objectifs fixés intègrent la production de raisins<br />

de qualité irréprochab<strong>le</strong>, indispensab<strong>le</strong>s à l’élaboration des eaux-de-vie de Cognac.<br />

Les spécificités de la filière Cognac doivent être évaluées et prise en compte dans l’étude des<br />

pratiques phytosanitaires. Sur <strong>le</strong> plan technique, la vigne est une plante pérenne, implantée<br />

pour plusieurs décennies qui se trouve fréquemment en situation de quasi-monoculture. Dans<br />

une région d’Appellation d’Origine Contrôlée comme cel<strong>le</strong> de Cognac, la composition de<br />

l’encépagement est motivée essentiel<strong>le</strong>ment par des considérations de qualité des produits et<br />

non de résistance ou de tolérance aux bio-agresseurs. Le cépage Ugni Blanc, qui représente<br />

aujourd’hui plus de 95 % du vignob<strong>le</strong>, s’est imposé depuis plus d’un sièc<strong>le</strong> pour la production<br />

d’eaux-de-vie de qualité.<br />

La vigne subit, tout au long de son cyc<strong>le</strong>, une pression parasitaire forte, soumise à des<br />

variations annuel<strong>le</strong>s et interannuel<strong>le</strong>s très importantes. Ces fluctuations parasitaires d’une<br />

année sur l’autre sont particulièrement sensib<strong>le</strong>s dans notre région à climat océanique. El<strong>le</strong>s<br />

impliquent une protection du vignob<strong>le</strong> ajustée et raisonnée. Tout défaut de maîtrise de la<br />

protection phytosanitaire peut entraîner des baisses significatives de production, mais aussi<br />

une dégradation qualitative de la vendange, qui se traduira par une dépréciation des eaux-devie,<br />

susceptib<strong>le</strong> de s’accentuer encore au cours du vieillissement. L’élaboration durab<strong>le</strong> d’eauxde-vie<br />

de qualité, recherchées par <strong>le</strong>s marchés, passe donc par une maîtrise sans fail<strong>le</strong> de la<br />

protection du vignob<strong>le</strong> vis-à-vis de ses agresseurs sur <strong>le</strong> moyen et long terme.<br />

1 - Evaluation de l’utilisation des phytosanitaires<br />

1.1 - Les données utilisées<br />

Les données utilisées pour évaluer <strong>le</strong>s pratiques phytosanitaires sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac sont<br />

cel<strong>le</strong>s du réseau de parcel<strong>le</strong>s maturation du BNIC (réseau MATU). Ce réseau, suivi depuis 1979,<br />

comporte 55 parcel<strong>le</strong>s réparties dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac et représentatives de sa diversité<br />

(figure 1). Il se limite à des parcel<strong>le</strong>s destinées à la production de vins de distillation et ne<br />

contient que des parcel<strong>le</strong>s d’Ugni blanc. Les pratiques réalisées sur une parcel<strong>le</strong>, laissées au<br />

libre choix de l’exploitant, sont représentatives de cel<strong>le</strong>s mise en place sur l’ensemb<strong>le</strong> de<br />

l’exploitation. Le réseau MATU permet ainsi une représentation fidè<strong>le</strong> du vignob<strong>le</strong> de Cognac.<br />

5


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

De nombreuses observations et analyses sont réalisées annuel<strong>le</strong>ment sur chaque parcel<strong>le</strong> par <strong>le</strong><br />

BNIC (contrô<strong>le</strong>s maturation, notations phytosanitaires, qualité des moûts, vins et eaux-de-vie,<br />

etc). Depuis 1990 un questionnaire annuel est envoyé à chaque exploitant pour connaître <strong>le</strong>s<br />

pratiques cultura<strong>le</strong>s de l’année (fumure, entretien du sol, ca<strong>le</strong>ndrier de traitements, rendement<br />

de la parcel<strong>le</strong>, etc.). Le BNIC dispose donc des ca<strong>le</strong>ndriers de traitement des 55 parcel<strong>le</strong>s<br />

répertoriant <strong>le</strong>s pratiques phytosanitaires depuis <strong>le</strong>s années 1990.<br />

Réseau MATU BNIC<br />

Taux de Viticolité * (en %)<br />

> 60<br />

30 à 60<br />

15 à 30<br />

10 à 15<br />

5 à 10<br />

0 à 5<br />

Figure 1 : Réseau MATU du BNIC<br />

* Taux de Viticolité * : Part de la superficie<br />

plantée en vigne par <strong>rapport</strong> à la Surface<br />

Agrico<strong>le</strong> Utilisée (SAU) de la commune<br />

1.2 - Les indicateurs<br />

L’évaluation de l’utilisation des produits phytosanitaires s’appuie, notamment dans <strong>le</strong> cadre du<br />

plan Ecophyto 2018, sur une série d’indicateurs de pression (indicateurs quantitatifs) et sur des<br />

indicateurs d’impact ou de risque.<br />

Les indicateurs de pression sont des indicateurs simp<strong>le</strong>s, fondés sur <strong>le</strong>s pratiques. L’indicateur<br />

choisi pour rendre compte de l’évolution de la réduction de l’usage des produits<br />

phytosanitaires à l’échel<strong>le</strong> de l’exploitation ou d’un territoire est l’indicateur de fréquence de<br />

traitement (IFT). Cet outil ramène <strong>le</strong>s quantités de substance active utilisées par l’agriculteur à<br />

la dose homologuée et à la surface traitée.<br />

Pour chaque traitement réalisé sur une parcel<strong>le</strong>, l’IFT est obtenu en divisant la dose réel<strong>le</strong>ment<br />

appliquée par hectare par la dose homologuée par hectare pour <strong>le</strong> produit considéré. L’IFT de<br />

la parcel<strong>le</strong> est alors égal à la somme des IFT définis ci-dessus pour tous <strong>le</strong>s traitements<br />

réalisés sur la parcel<strong>le</strong>. L’IFT moyen de l’exploitation correspond à la somme des IFT par<br />

parcel<strong>le</strong>, pondérés à la surface des parcel<strong>le</strong>s. L’IFT réalisé sur l’exploitation peut-être comparé<br />

à un IFT de référence régional (tab<strong>le</strong>au 1), qui reflète <strong>le</strong>s pratiques courantes dans la région<br />

(obtenu par <strong>le</strong>s enquêtes sur <strong>le</strong>s pratiques cultura<strong>le</strong>s réalisées tous <strong>le</strong>s cinq ans par <strong>le</strong>s services<br />

de l’Etat). L’IFT de référence vigne (hors herbicide) pour la région Poitou-Charentes est de 16,7.<br />

L’IFT herbicide est de 1,41.<br />

6


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : IFT vigne de référence 2008 (Ministère de l’Agriculture, 2009)<br />

Espèce<br />

VIGNE<br />

IFT de référence 2008 IFT herbicide IFT hors herbicide<br />

Poitou-Charentes<br />

1,41 16,70<br />

Aquitaine 1,46 16,53<br />

Champagne-Ardenne 1,75 22,05<br />

L’IFT donne des informations sur l’intensité du recours aux produits phytosanitaires donc sur<br />

l’exposition potentiel<strong>le</strong> du milieu. Cependant, cet indicateur ne fournit pas d’évaluation des<br />

risques environnementaux et il est déconnecté des propriétés des molécu<strong>le</strong>s et du milieu. Cette<br />

étude envisage la prise en compte d’autres indicateurs décrivant <strong>le</strong>s pratiques mises en œuvre<br />

depuis 20 ans sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac tels que la dose de produit appliquée moyenne par<br />

parcel<strong>le</strong> et la toxicité des produits utilisés.<br />

2 - Evolution de l’utilisation des produits phytosanitaires sur 20 ans<br />

2.1 - Une tendance globa<strong>le</strong> stab<strong>le</strong> mais de fortes variations interannuel<strong>le</strong>s<br />

L’évolution des IFT annuels moyens (hors herbicide) est stab<strong>le</strong> de 1990 à 2010 sur <strong>le</strong> réseau<br />

MATU du BNIC (figure 2). Il n’apparaît pas de tendance significative sur <strong>le</strong>s 20 ans d’évolution.<br />

Cependant, on note une forte variabilité interannuel<strong>le</strong>. L’écart entre années extrêmes (2000 et<br />

2005) atteint 6 unités. Cette dispersion importante est liée à des variations de climat et de<br />

pression parasitaire entre millésimes.<br />

L’IFT de référence régional vigne (hors herbicide) en 2008 est de 16,7 (Ministère de<br />

l’Agriculture, 2009). Cette même année, l’IFT moyen du réseau MATU du BNIC est de 16,8. Les<br />

deux va<strong>le</strong>urs étant très proches, <strong>le</strong>s données du réseau MATU confirment <strong>le</strong>s données<br />

régiona<strong>le</strong>s de référence.<br />

IFT moyens (hors herbicide)<br />

RESEAU MATU BNIC<br />

20<br />

18<br />

16<br />

14<br />

12<br />

10<br />

11,2<br />

10,8<br />

16,0 15,8 16,0<br />

14,5<br />

14,9<br />

13,7 14,0<br />

15,3<br />

18,2<br />

15,4<br />

14,7<br />

14,1<br />

13,5<br />

12,2<br />

13,8<br />

18,1<br />

16,8<br />

IFT régional<br />

de référence<br />

16,7<br />

14,7<br />

13,9<br />

8<br />

6<br />

4<br />

2<br />

0<br />

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010<br />

Figure 2 : Evolution des IFT moyen (hors herbicide) sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac de 1990 à 2010<br />

(réseau MATU BNIC)<br />

7


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.2 - Forte relation entre climat et pression parasitaire<br />

Le climat des 20 dernières années sur la station météorologique de Cognac (cumul des pluies<br />

et somme des températures annuel<strong>le</strong>s) est représenté à la figure 3. Une forte variabilité<br />

interannuel<strong>le</strong> est visib<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> graphique.<br />

Il existe une bonne corrélation entre la pression parasitaire et la climatologie de l’année<br />

(figure 3). Des années à forte pluviométrie (supérieure à la moyenne sur 20 ans) comme 1993,<br />

1999, 2000, 2007 et 2008 correspondent à une forte pression du mildiou. Des années à faib<strong>le</strong><br />

pluviométrie (inférieure à la moyenne sur 20 ans) et températures é<strong>le</strong>vées (somme température<br />

supérieure à la moyenne sur 20 ans) comme 2004, 2005 et 2006 connaissent une pression de<br />

l’oïdium moyenne à forte.<br />

De plus on note très fréquemment une alternance entre <strong>le</strong>s fortes pressions mildiou et oïdium<br />

par millésime.<br />

Relation climat et pression parasitaire<br />

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010<br />

1500<br />

MILDIOU 1400<br />

OIDIUM<br />

1300<br />

Pression paraistaire :<br />

4500<br />

forte<br />

moyenne<br />

4000 faib<strong>le</strong><br />

1200<br />

1100<br />

Somme T°C moyenne sur 20 ans<br />

3500<br />

1000<br />

Somme T°C annuel<strong>le</strong><br />

3000<br />

900<br />

800<br />

700<br />

600<br />

500<br />

400<br />

300<br />

200<br />

100<br />

0<br />

Cumul des pluies moyen sur 20 ans (mm)<br />

Cumul des pluies annuel (mm)<br />

2500<br />

2000<br />

1500<br />

1000<br />

500<br />

0<br />

Figure 3 : Climat (Cognac) et pression parasitaire de 1990 à 2010 (réseau MATU BNIC)<br />

2.3 - Impact des caractéristiques du millésime sur l’utilisation des produits<br />

phytosanitaires<br />

Le climat et la pression parasitaire ont un impact direct sur l’utilisation des produits<br />

phytosanitaires. Dans <strong>le</strong> cas de millésime à forte pression parasitaire la protection<br />

phytosanitaire est nécessaire pour maintenir un niveau de production et de qualité du produit.<br />

La figure 4 présente l’évolution des IFT anti-mildiou et anti-oïdium de 1990 à 2010 sur <strong>le</strong><br />

réseau MATU du BNIC. Les années à forte pression mildiou, <strong>le</strong>s IFT anti-mildiou sont é<strong>le</strong>vés<br />

(1993, 1999, 2000, 2007, 2008). De même que <strong>le</strong>s années à forte pression oïdium, <strong>le</strong>s IFT<br />

anti-oïdium sont é<strong>le</strong>vés (1993, 1994, 2004, 2005, 2006).<br />

8


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Cependant, certaines années, <strong>le</strong>s IFT ne sont pas corrélés avec la pression parasitaire. Suivant<br />

<strong>le</strong>s années, <strong>le</strong>s viticulteurs peuvent mettre en place une lutte préventive ou une lutte conjointe<br />

(ex : mildiou et oïdium).<br />

Relation pression parasitaire et IFT<br />

16<br />

MILDIOU<br />

14<br />

OIDIUM<br />

12<br />

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010<br />

Pression paraistaire :<br />

forte<br />

moyenne<br />

faib<strong>le</strong><br />

10<br />

8<br />

IFT ANTI-MILDIOU<br />

6<br />

4<br />

2<br />

IFT ANTI-OIDIUM<br />

0<br />

Figure 4 : IFT anti-mildiou et anti-oïdium et pression parasitaire de 1990 à 2010 (réseau MATU BNIC)<br />

3 - Des efforts de réduction des produits phytosanitaires depuis<br />

20 ans<br />

3.1 - Evolution des pratiques phytosanitaires<br />

p<br />

L’IFT moyen (figure 2) ne permet pas de distinguer d’évolution d’utilisation de produits<br />

phytosanitaires par catégorie de produit. La figure 5 présente l’évolution des IFT insecticide,<br />

acaricide, insecticide et anti-botrytis sur <strong>le</strong> réseau MATU du BNIC de 1990 à 2010. Les<br />

différentes évolutions des IFT s’expliquent par une évolution des pratiques au vignob<strong>le</strong> depuis<br />

20 ans.<br />

Les IFT herbicides ont nettement diminué depuis 2006. Cela s’explique par une diminution du<br />

désherbage total de l’inter-rang au profit du développement de méthodes mixtes<br />

enherbement/travail superficiel. Seul <strong>le</strong> désherbage chimique sous <strong>le</strong> rang reste encore<br />

largement utilisé.<br />

Les IFT acaricides sont en nette régression depuis 20 ans. La lutte biologique s’est nettement<br />

développée depuis de nombreuses années. Le suivi des populations d’auxiliaires, <strong>le</strong>s<br />

typhlodromes (acariens prédateurs), permettent de régu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s populations d’acariens<br />

phytophages et de limiter l’usage des acaricides.<br />

A l’inverse, <strong>le</strong>s IFT insecticides augmentent depuis 1998. Cette hausse correspond à<br />

l’apparition de la Flavescence dorée dans <strong>le</strong>s Charentes (1997) et la mise en place d’une lutte<br />

insecticide obligatoire (3 traitements dans <strong>le</strong>s communes contaminées).<br />

9


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Les IFT anti-botrytis sont en régression car la pression du botrytis est faib<strong>le</strong> depuis plusieurs<br />

années. De plus la prophylaxie mise en œuvre (enherbement) a permis de réduire ces<br />

traitements.<br />

IFT par catégorie de produits<br />

RESEAU MATU BNIC<br />

3,0<br />

2,5<br />

IFT HERBICIDE<br />

IFT ACARICIDE<br />

IFT INSECTICIDE<br />

IFT ANTI-BOTRYTIS<br />

2,0<br />

1,5<br />

1,0<br />

0,5<br />

0,0<br />

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010<br />

Figure 5 : Evolution des IFT par catégorie de produits de 1990 à 2010 (réseau MATU BNIC)<br />

Ces évolutions montrent clairement <strong>le</strong>s progrès réalisés depuis 20 ans et l’incidence de<br />

nouvel<strong>le</strong>s contraintes (lutte contre la flavescence dorée) qui ne ressortent pas de la simp<strong>le</strong><br />

observation de l’IFT moyen.<br />

3.2 - Diminution des doses appliquées<br />

Les doses moyennes de produits appliquées à la parcel<strong>le</strong> et <strong>le</strong>s doses moyennes homologuées<br />

à la parcel<strong>le</strong> ont été calculées (figure 6). Ces doses correspondent à la somme des doses<br />

(appliquées ou homologuées) par hectare tous produits confondus, divisée par <strong>le</strong> nombre de<br />

traitements réalisés sur la parcel<strong>le</strong>.<br />

Le calcul de cet indice montre que <strong>le</strong>s doses homologuées ont diminué en tendance de 5 %<br />

depuis <strong>le</strong>s années 90 et <strong>le</strong>s doses appliquées de 37 %. On peut donc estimer que <strong>le</strong>s efforts de<br />

réduction de dose par <strong>le</strong>s viticulteurs se sont traduits par une réduction des doses de produits<br />

appliqués de l’ordre de 30 % depuis 20 ans.<br />

Dose appliquée et homologuée moyenne par parcel<strong>le</strong> (kg ou l / ha)<br />

(réseau MATU BNIC)<br />

5<br />

4<br />

Dose homologuée<br />

3<br />

2<br />

Dose appliquée<br />

1<br />

0<br />

Figure 6 : Evolution des doses appliquées moyennes par parcel<strong>le</strong> et des doses homologuées moyennes<br />

par parcel<strong>le</strong> de 1990 à 2010 (réseau MATU BNIC)<br />

10


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3.3 - Diminution de la toxicité des produits<br />

Un des indicateurs pour évaluer la toxicité des substances chimiques est la DL50 (dose<br />

provoquant 50 % de mortalité dans la population d'organismes étudiés). Plus la DL50 est faib<strong>le</strong><br />

et plus la substance est toxique. La figure 7 montre la nette augmentation des DL50 des<br />

fongicides anti-mildiou et anti-oïdium <strong>le</strong>s plus utilisés en 1993, 2002 et 2010. Cette<br />

progression illustre la diminution de la toxicité moyenne des produits appliqués sur <strong>le</strong>s<br />

parcel<strong>le</strong>s au cours des 20 dernières années.<br />

DL50 des anti-mildiou et anti-oïdium <strong>le</strong>s plus utilisés<br />

(réseau MATU BNIC)<br />

10 000<br />

9 000<br />

8 000<br />

7 000<br />

6 000<br />

5 000<br />

4 000<br />

3 000<br />

2 000<br />

1 000<br />

0<br />

DL50 moyenne<br />

1993 2002 2010<br />

Karathane 3 D<br />

SCORE<br />

OLYMP 10 EW<br />

REMILTINE CS PEPITE<br />

Mikal flash<br />

RHODAX<br />

VALIANT<br />

KARATHANE 3 D<br />

OLYMP 10 EW<br />

PANTHEOS<br />

TAIREL F<br />

ELIOS<br />

MIKAL FLASH<br />

VALIANT<br />

GREMAN<br />

CORAIL<br />

MIKAL FLASH<br />

FOLPAN<br />

KAURITIL DF<br />

POLYRAM DF<br />

Figure 7 : Evolution de la DL50 des anti-mildiou et anti-oïdium <strong>le</strong>s plus utilisés en 1993, 2002 et 2010<br />

(réseau MATU BNIC)<br />

Cette évolution qui n’apparaît pas dans la simp<strong>le</strong> observation de l’IFT, est à rapprocher de l’un<br />

des objectifs du plan écophyto 2018 qui est de …..<br />

4 - De nouveaux outils pour poursuivre la réduction produits<br />

phytosanitaires<br />

Depuis 20 ans, <strong>le</strong>s viticulteurs ont fait des efforts pour maîtriser et réduire l’utilisation de<br />

produits phytosanitaires. L’IFT global ne permet pas d’évaluer ces changements de pratiques.<br />

L’IFT par catégorie de produits montre différentes évolutions des pratiques au vignob<strong>le</strong> suivant<br />

<strong>le</strong>s ravageurs et parasites. Les doses moyennes appliquées à la parcel<strong>le</strong> ont nettement diminué<br />

en 20 ans ainsi que la toxicité des produits.<br />

Des progrès peuvent encore être réalisés sur <strong>le</strong> long terme pour réduire <strong>le</strong>s traitements<br />

phytosanitaires grâce à des démarches et des outils, nouveaux ou déjà largement utilisés dans<br />

la région, tels que :<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

- <strong>le</strong>s groupes de lutte raisonnée,<br />

- l’agro-météorologie de précision,<br />

- la modélisation et la prédiction des risques (Optidose et POD mildium),<br />

- <strong>le</strong>s nouveaux réseaux régionaux (réseaux « FERME Ecophyto » et <strong>le</strong>s projets de<br />

« PLATEFORME Ecophyto »),<br />

- <strong>le</strong>s avancées de la recherche (création de cépages résistants aux maladies (mildiou,<br />

oïdium).<br />

Ils seront développés dans <strong>le</strong>s présentations suivantes ainsi que dans <strong>le</strong> cadre de l’atelier « La<br />

boîte à outils environnementa<strong>le</strong> », proposé cet après-midi.<br />

(Remerciements F. LAMBERT et P. BOULINAUD, stagiaire)<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Le réseau FermEcophyto<br />

Laura MORNET, Dorothée BEAU, Chambre d’Agriculture de la Charente<br />

1 - Présentation du plan « FermEcophyto<br />

»<br />

Le plan Ecophyto 2018, présenté <strong>le</strong> 10 septembre 2008 en Conseil des ministres, a été mis en<br />

place dans la continuité du Grenel<strong>le</strong> de l’environnement - Loi Grenel<strong>le</strong> 2 promulguée <strong>le</strong> 12<br />

juil<strong>le</strong>t 2010.<br />

Ce plan vise notamment à réduire la dépendance des exploitations agrico<strong>le</strong>s face aux produits<br />

phytosanitaires, tout en maintenant un niveau é<strong>le</strong>vé de production agrico<strong>le</strong>, en quantité et en<br />

qualité. Le plan Ecophyto 2018 a donc pour but de réduire de 50 % d’ici 10 ans si possib<strong>le</strong><br />

l’utilisation de pesticides.<br />

Ce plan prévoit la mise en place d'un réseau «DEPHY Ecophyto» qui se divise en 5 modu<strong>le</strong>s :<br />

• EXPE : des expérimentations proprement dites, en stations expérimenta<strong>le</strong>s ou sites<br />

• FERME : un réseau de démonstration et de référence composé de groupes<br />

d’exploitations<br />

• DECI : un dispositif de développement d’outils d’aide à la décision<br />

• BASE : une base de données dédiée à la col<strong>le</strong>cte et la gestion des références<br />

expérimenta<strong>le</strong>s<br />

• GECO : gestion et partage des connaissances<br />

Dans ce cadre et pour étudier la faisabilité des pratiques moins consommatrices en pesticides à<br />

l’échel<strong>le</strong> de l’exploitation, la Chambre d’Agriculture de la Charente a mis en place un réseau de<br />

fermes de référence : FermEcophyto.<br />

2 - Le groupe Ferm<br />

ermEcophyto de la CA16<br />

L’objectif de notre réseau est de réduire de 37.5 % l’usage des produits phytosanitaires par<br />

<strong>rapport</strong> à la référence régiona<strong>le</strong> (IFT Poitou-Charentes = 18.1) d’ici 3 ans. En étant accompagné<br />

par <strong>le</strong>s équipes techniques mises à disposition par la CA16, <strong>le</strong> pari semb<strong>le</strong> réaliste et<br />

raisonnab<strong>le</strong>.<br />

Ce réseau grandeur nature a plusieurs objectifs :<br />

• Vérifier et analyser la faisabilité de réduire <strong>le</strong>s intrants à l’échel<strong>le</strong> d’une exploitation.<br />

• Tenir compte des spécificités de la production Cognac.<br />

• Identifier <strong>le</strong>s freins et <strong>le</strong>s conditions de réussite de cette réduction.<br />

• Donner la paro<strong>le</strong> aux exploitants et faire remonter l’information aux ministères<br />

concernés qui pourront prendre des décisions en connaissance des difficultés du terrain<br />

et des spécificités loca<strong>le</strong>s.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Onze exploitations vitico<strong>le</strong>s volontaires réparties sur <strong>le</strong>s deux départements 16 et 17<br />

appartiennent au réseau FermEcophyto de la CA 16.<br />

Les agriculteurs sont motivés pour tester et avancer dans la recherche d’outils adaptés<br />

permettant de réduire <strong>le</strong>s intrants tout en préservant la pérennité économique de <strong>le</strong>ur<br />

exploitation.<br />

Ces 11 exploitations vitico<strong>le</strong>s sont très diversifiées par <strong>rapport</strong> à <strong>le</strong>ur structure, <strong>le</strong>ur tail<strong>le</strong>, <strong>le</strong>ur<br />

production et <strong>le</strong>ur situation géographique en relation avec <strong>le</strong>s enjeux environnementaux.<br />

Ce groupe a été constitué de façon à ce que <strong>le</strong> maximum de viticulteurs de la région puisse<br />

s’identifier techniquement, économiquement et socia<strong>le</strong>ment à une exploitation du groupe.<br />

Les exploitations qui constituent ce réseau sont <strong>le</strong> ref<strong>le</strong>t des différentes pratiques vitico<strong>le</strong>s<br />

actuel<strong>le</strong>s de la filière à des niveaux d’engagement environnementaux très hétérogènes.<br />

3 - Les Fermes du réseau CA16<br />

3.1 - Différents systèmes de production<br />

• 2 exploitations en monoculture vignes, 7 exploitations mixtes grandes cultures et vignes<br />

et 2 exploitations mixtes avec un atelier é<strong>le</strong>vage.<br />

• 2 exploitations sont affiliées aux principaux négociants de la région.<br />

L’implication de ces structures est très importante. Cette implication est de nature à<br />

démultiplier <strong>le</strong>s messages concernant la réduction des intrants phytosanitaires et <strong>le</strong>s voies<br />

possib<strong>le</strong>s pour y parvenir.<br />

• 1 Lycée d’enseignement agrico<strong>le</strong> de la Charente fait partie du réseau.<br />

L’engagement du Lycée dans ce dispositif permet de faciliter la communication sur <strong>le</strong>s<br />

enjeux environnementaux notamment auprès des futures générations de viticulteurs.<br />

Toutes <strong>le</strong>s exploitations produisent des vins pour <strong>le</strong> Cognac. 4 exploitations sur <strong>le</strong>s 11<br />

élaborent des Vins de Pays.<br />

Produire des vins à destination Cognac est <strong>le</strong> dénominateur commun de l’ensemb<strong>le</strong> des<br />

exploitations. La productivité é<strong>le</strong>vée et la forte sensibilité du cépage Ugni blanc aux maladies<br />

cryptogamiques conditionnent souvent <strong>le</strong>s viticulteurs à adapter une protection phytosanitaire<br />

systématique. Ce groupe permet de parfaire et d’expérimenter <strong>le</strong>s méthodes <strong>le</strong>s plus économes<br />

en produits phytosanitaires adaptées aux objectifs de la production du vignob<strong>le</strong> Charentais.<br />

Les exploitations productrices de Vins de Pays permettent d’apporter des références<br />

complémentaires aux réseaux.<br />

Certaines exploitations du groupe participent déjà aux groupes Viticulture Raisonnée, animés<br />

par <strong>le</strong>s Chambres d’Agriculture de la Charente et de la Charente Maritime.<br />

Ces exploitations déjà sensibilisées aux enjeux et aux méthodes de réduction des intrants<br />

phytosanitaires, sont <strong>le</strong> moteur et <strong>le</strong> fil conducteur du groupe. Leur apprentissage est déjà bien<br />

avancé et permet aux autres exploitations de visualiser objectivement <strong>le</strong>s progrès déjà<br />

accomplis.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3.2 - Situation géographique<br />

Les deux Charentes sont représentées dans <strong>le</strong> groupe : 9 en Charente et 2 en Charente<br />

Maritime.<br />

1) 10 exploitations sont localisées sur un territoire à enjeu environnemental 1 :<br />

Bassin versant du Né, captage de la fosse Tidet, captages de la prairie de Triac et La Touche,<br />

captage de Hou<strong>le</strong>tte, captage prioritaire de Barbezieux Saint Hilaire.<br />

Figure 1 : Répartition des zones à enjeu environnemental sur <strong>le</strong> département de la Charente<br />

4 - Diagnostic initial en 2011<br />

Un premier diagnostic a été réalisé cette année sur chaque exploitation afin de définir de<br />

manière précise <strong>le</strong>s systèmes de culture (SdC) et <strong>le</strong>s objectifs de chaque exploitation.<br />

Système de culture : « Ensemb<strong>le</strong> des modalités techniques mises en œuvre sur des parcel<strong>le</strong>s<br />

traitées de manière identique ».<br />

Dans <strong>le</strong> cadre du groupe réseau FermEcophyto de la CA16, <strong>le</strong>s systèmes de cultures ont été<br />

définis selon <strong>le</strong>s types de production (Cognac, vin de pays), <strong>le</strong> terroir et la conduite du<br />

vignob<strong>le</strong>.<br />

1 objectif : améliorer la qualité des ressources en eau<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Ce diagnostic permet de mettre en évidence <strong>le</strong>s stratégies et <strong>le</strong>s décisions du viticulteur ainsi<br />

que ses pratiques concrètes sur <strong>le</strong>s parcel<strong>le</strong>s.<br />

Ce diagnostic a aussi permis d’évaluer la « pression phytosanitaire ». Pour cela, il est<br />

nécessaire de calcu<strong>le</strong>r l’Indicateur de Fréquence de Traitement (IFT) exercée sur l’exploitation.<br />

Pour chaque traitement réalisé, on tient compte de la dose homologuée, de la dose réel<strong>le</strong>ment<br />

appliquée et de la surface concernée.<br />

Des Indices de Fréquence de traitements ont été fixés par chaque exploitant pour 2013. Les<br />

exploitants, avec <strong>le</strong> soutien de la CA16, réfléchissent, testent et mettent en œuvre, différentes<br />

techniques et moyens pour atteindre l’objectif d’IFT fixé pour 2013.<br />

Objectif IFT 2013<br />

30,00<br />

IFT<br />

25,00<br />

20,00<br />

15,00<br />

10,00<br />

5,00<br />

2009/2010<br />

Objectif 2013<br />

moyenne 2013<br />

IFT référence<br />

régiona<strong>le</strong><br />

0,00<br />

EA1 EA2 EA3 EA4 EA5 EA6 EA7 EA8 EA9 EA10 EA11<br />

Exploitations<br />

Figure 2 : Niveau d’IFT (Indice de Fréquence de Traitement) moyen en 2009/2010 et fixé pour 2013 sur<br />

<strong>le</strong>s 11 exploitations du réseau Fermecophyto.<br />

5 - Quels sont ces moyens ?<br />

5.1 - Conduire une lutte phytosanitaire raisonnée<br />

Lutte raisonnée : « Emploi rationnel de préparations phytopharmaceutiques, se définissant<br />

notamment par <strong>le</strong> choix des produits, de <strong>le</strong>ur dose, de l'époque d'application et des techniques<br />

à mettre en œuvre, au sein d'un programme tenant compte de l'évolution des organismes<br />

nuisib<strong>le</strong>s ».<br />

Se former et s’informer au travers de groupes de viticulture raisonnée : Ces groupes<br />

permettent aux viticulteurs de se tenir informer de la situation parasitaire loca<strong>le</strong>, de l’actualité<br />

du vignob<strong>le</strong> et de la rég<strong>le</strong>mentation.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Les viticulteurs peuvent aussi se former à reconnaître <strong>le</strong>s maladies et ravageurs de la vigne,<br />

s’approprier des méthodes et outils d’aide à la décision tel que <strong>le</strong> modu<strong>le</strong> Optidose®, mais<br />

aussi comprendre <strong>le</strong>s modes d’action, <strong>le</strong>s restrictions et la toxicité des matières actives, et ainsi<br />

déc<strong>le</strong>ncher des stratégies de traitements et d’entretien du sol raisonnées.<br />

Pour étayer <strong>le</strong>urs conseils, <strong>le</strong>s techniciens vitico<strong>le</strong>s s’appuient sur des modè<strong>le</strong>s de prévisions<br />

des maladies basés sur <strong>le</strong>s interactions entre la plante, son agresseur ainsi que <strong>le</strong> climat. Ces<br />

modélisations permettent de simu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> développement du « parasite ».<br />

La modélisation prend en compte trois variab<strong>le</strong>s :<br />

• Les données météorologiques : températures, pluviométrie et humidité relative.<br />

• Les données agronomiques : sol et topographie.<br />

• L’antériorité de la parcel<strong>le</strong> : degré de sensibilité aux maladies.<br />

Des données qualitatives et quantitatives sont ainsi obtenues sur l’évolution de la pression<br />

épidémiologique et des contaminations au cours de la campagne.<br />

Grâce à ces éléments, <strong>le</strong>s techniciens peuvent donner aux viticulteurs un niveau de risque pour<br />

<strong>le</strong>s principa<strong>le</strong>s maladies du vignob<strong>le</strong> (Mildiou, Oïdium). Face à ces niveaux de pression, <strong>le</strong>s<br />

viticulteurs prennent ou non la décision de déc<strong>le</strong>ncher un traitement phytosanitaire.<br />

S’abonner au bul<strong>le</strong>tin technique Vitiflash 16/17 : Bénéficier d’une information complète pour<br />

agir, être plus réactif, optimiser <strong>le</strong>s traitements et sécuriser ses choix.<br />

Utiliser et appliquer un outil d’adaptation des doses (<strong>le</strong> modu<strong>le</strong> Optidose® IFV) : Adapter <strong>le</strong>s<br />

doses de produits phytosanitaires en fonction de la pression parasitaire, du volume de<br />

végétation, du stade phénologique.<br />

Mettre en place un témoin non traité sur son exploitation afin d’évaluer la pression parasitaire<br />

de son vignob<strong>le</strong> et de mieux appréhender <strong>le</strong>s épidémies et <strong>le</strong>s cyc<strong>le</strong>s biologiques des<br />

ravageurs.<br />

Limiter l’utilisation de désherbants<br />

: faire évoluer <strong>le</strong>s pratiques (enherbement des interangs ;<br />

réduction de la largeur de la zone à désherber ; réduction du nombre de passages) et cib<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s<br />

applications en fonction du taux et du type de recouvrement (identification des adventices plus<br />

fine).<br />

Observer et suivre <strong>le</strong>s maladies et <strong>le</strong>s ravageurs de la vigne : piégeage∗, observations et<br />

comptages.<br />

∗ Ex : Le piégeage sexuel des tordeuses de la grappe : dispositif composé d’une capsu<strong>le</strong> - diffuseur de phéromone<br />

placé dans un piège englué. Il permet de connaître <strong>le</strong> début de chaque vol et donc d’indiquer plus précisément la<br />

pression des ravageurs et la date du traitement éventuel<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

5.2 - Introduire des méthodes alternatives aux pesticides<br />

Mettre en place la confusion sexuel<strong>le</strong> contre <strong>le</strong>s « vers de la grappe » : Méthode de lutte qui<br />

consiste, à l'aide de capsu<strong>le</strong>s apposées dans <strong>le</strong>s vignes, à saturer l'air en phéromones sexuel<strong>le</strong>s<br />

femel<strong>le</strong>s afin que <strong>le</strong>s mâ<strong>le</strong>s s'épuisent dans <strong>le</strong>ur quête amoureuse, puis meurent. La femel<strong>le</strong><br />

n'étant plus fécondée, <strong>le</strong>s larves, appelées « vers de la grappe », ne se logent plus dans <strong>le</strong>s<br />

baies de raisin et <strong>le</strong> viticulteur peut ainsi se passer de l'utilisation d'insecticides ravageurs.<br />

Développer <strong>le</strong> désherbage mécanique avec l’utilisation d’outils mécaniques sur <strong>le</strong> cavaillon<br />

comme <strong>le</strong>s lames interceps, <strong>le</strong>s outils rotatifs….<br />

Tester <strong>le</strong> désherbage thermique<br />

5.3 - Optimiser la qualité de pulvérisation<br />

Contrô<strong>le</strong>r et rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s pulvérisateurs, entretien et nettoyage régulier<br />

6 - Le conseil tout au long de la campagne<br />

Les exploitations sont accompagnées par un conseil<strong>le</strong>r vitico<strong>le</strong> soit en individuel soit au sein<br />

d’un groupe de viticulture raisonnée.<br />

7 - Résultats de la première campagne<br />

Un bilan de campagne est mené après chaque campagne vitico<strong>le</strong> de façon à évaluer la<br />

performance du programme de traitement mis en œuvre par chaque exploitant.<br />

Ce bilan permet de mettre en évidence sur chaque exploitation :<br />

• La pression au niveau des adventices, des maladies et des insectes, qui s’est exercée<br />

sur <strong>le</strong> système de culture.<br />

• Les stratégies de protection du vignob<strong>le</strong> mises en place par l’exploitant durant la<br />

campagne.<br />

• Les performances techniques, environnementa<strong>le</strong>s et économiques du programme<br />

appliqué.<br />

• Les IFT des parcel<strong>le</strong>s engagées et du système de culture :<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Evolution des IFT<br />

25,00<br />

20,00<br />

Parcel<strong>le</strong>s engagées 2011<br />

IFT<br />

15,00<br />

10,00<br />

5,00<br />

Système de culture 2011<br />

Objectif 2013<br />

0,00<br />

EA1 EA2 EA3 EA4 EA5 EA6 EA7 EA8 EA9 EA10 EA11<br />

Exploitations<br />

Figure 3 : Niveau d’IFT (Indice de Fréquence de Traitement) atteint sur la campagne 2011 sur <strong>le</strong>s 11<br />

exploitations du réseau FermEcophyto de la Charente<br />

Pour la campagne 2011, toutes <strong>le</strong>s données chiffrées n’étant pas encore enregistrées, il n’est<br />

pas possib<strong>le</strong> de connaître <strong>le</strong> pourcentage exact de la réduction moyenne des intrants.<br />

Cependant, au vu des résultats recueillis à ce jour, l’IFT a diminué au sein de chaque<br />

exploitation. Le groupe ferme devrait remplir ses objectifs et <strong>le</strong>s programmes de traitements<br />

déployés apparaissent performants. Une analyse technico-économique plus poussée courant<br />

de l’hiver permettra d’en juger.<br />

La campagne phytosanitaire 2011 a été « exceptionnel<strong>le</strong> » en terme de climatologie, hiver et<br />

printemps secs. La pression mildiou est restée faib<strong>le</strong> jusqu’à la fin juil<strong>le</strong>t et <strong>le</strong>s temps de<br />

travaux s’en sont trouvés allégés (moins de traitements, d’entretien du sol et de rognage).<br />

L’année 2011 a été plus propice à l’oïdium et au développement de mildiou et de pourriture en<br />

fin de campagne. L’objectif d’IFT devrait donc être atteint sur <strong>le</strong> réseau sans une prise de<br />

risque trop importante.<br />

Cependant, face à ces premiers résultats, on constate une forte hétérogénéité au sein du<br />

réseau qui peut être expliquée par plusieurs facteurs (cf figure n°3) :<br />

• l’obligation de traiter la cicadel<strong>le</strong> de la flavescence dorée pour certaines exploitations,<br />

• la réactivité de l’exploitation dans <strong>le</strong>s interventions phytosanitaires variab<strong>le</strong> selon la<br />

structure (nombre d’hectare, nombre de salariés, type de matériels, temps nécessaire à<br />

l’observation),<br />

• <strong>le</strong>s objectifs de rendements,<br />

• la sensibilité parcellaire aux maladies et ravageurs des vignob<strong>le</strong>s engagés,<br />

• <strong>le</strong> niveau de prise de risque de l’exploitant suivant l’expérience acquise dans la<br />

réduction des intrants phytosanitaires….<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

8 - Jusqu’en 2013<br />

Ce réseau de ferme de référence sera animé et suivi pendant 3 ans et une analyse des<br />

stratégies de protection sera réalisée pour chaque exploitation.<br />

Toutes ces données seront communiquées régulièrement à la cellu<strong>le</strong> nationa<strong>le</strong> afin d’alimenter<br />

<strong>le</strong>s connaissances dans <strong>le</strong> domaine de la réduction des produits phytosanitaires.<br />

Le but de ce réseau étant :<br />

• De démontrer à d'autres exploitants agrico<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s possibilités ouvertes par ces systèmes<br />

de culture et de témoigner de <strong>le</strong>urs performances obtenues sur <strong>le</strong>s plans technique,<br />

environnemental, économique et social ;<br />

• Pour <strong>le</strong>s organismes de conseil et de service, d'utiliser ou de mettre au point des<br />

méthodes et outils d’accompagnement individuel ou col<strong>le</strong>ctif valorisant l’expertise et<br />

<strong>le</strong>s références produites par <strong>le</strong> dispositif ;<br />

• D'informer <strong>le</strong> monde associatif et plus largement <strong>le</strong> grand public de la mobilisation et<br />

des progrès effectués par <strong>le</strong>s acteurs agrico<strong>le</strong>s pour réduire l'usage des produits<br />

phytosanitaires.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Comment adapter Ecophyto aux contraintes vitico<strong>le</strong>s ?<br />

Patrice RETAUD, Chambre Régiona<strong>le</strong> d’Agriculture de Poitou-Charentes<br />

Le plan ECOPHYTO 2018 est la déclinaison agrico<strong>le</strong> du Grenel<strong>le</strong> de l'environnement. Dans ce<br />

plan, plusieurs types d'actions ont été définis pour toutes <strong>le</strong>s cultures. Chaque culture possède<br />

ses particularités, notamment la viticulture. Il faut prendre en compte <strong>le</strong>s contraintes et trouver<br />

<strong>le</strong>s adaptations pour mettre en œuvre la réduction des intrants phytosanitaires, si possib<strong>le</strong>,<br />

comme lors de la campagne 2011.<br />

1 – Les contraintes vitico<strong>le</strong>s<br />

1.1 - La nécessité de maîtriser <strong>le</strong>s parasites<br />

Souvent, l'agriculture consiste cultiver un seul type de plantes sur une surface restreinte. Ce<br />

confinement favorise alors <strong>le</strong> développement et la dissémination des parasites. En viticulture,<br />

sans intervention, certains parasites peuvent anéantir la récolte, voire <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong>. Pour<br />

maitriser <strong>le</strong>s parasites, <strong>le</strong>s produits phytosanitaires sont souvent mis en préventif, avant que<br />

<strong>le</strong>s attaques explosent, et parfois à des périodes où <strong>le</strong>s dégâts ne sont pas encore visib<strong>le</strong>s (cas<br />

de l'Oïdium ou du Botrytis).<br />

1.2 - Une culture pérenne<br />

Une plantation de vigne est réalisée pour plusieurs décennies. Le cépage, <strong>le</strong> clone, <strong>le</strong> portegreffe,<br />

la parcel<strong>le</strong>, donc <strong>le</strong> sol et <strong>le</strong> sous-sol, sont alors fixés. Les changements dans <strong>le</strong> mode<br />

de conduite sont limités : ils peuvent concerner l'entretien du sol, <strong>le</strong> type de tail<strong>le</strong>, la<br />

fertilisation. La protection phytosanitaire est en partie conditionnée par <strong>le</strong>s options retenues au<br />

moment de la plantation.<br />

1.3 - Des contraintes structurel<strong>le</strong>s et rég<strong>le</strong>mentaires<br />

Le nombre de viticulteurs diminue : ils sont amenés à cultiver des surfaces plus grandes au<br />

niveau de <strong>le</strong>urs exploitations. Cette diminution relative du personnel s'accompagne d'une<br />

optimisation des investissements en matériel : un appareil de traitement traite des surfaces<br />

plus grandes. Les temps d'interventions phytosanitaires sont donc plus longs et moins soup<strong>le</strong>s<br />

à gérer.<br />

Parfois, des contraintes liées à l'emploi de main-d'œuvre salariée s'ajoutent. Les délais<br />

rég<strong>le</strong>mentaires de réentrée du personnel dans <strong>le</strong>s parcel<strong>le</strong>s contribuent à favoriser <strong>le</strong>s<br />

traitements juste avant <strong>le</strong> weekend. Dans certains cas, <strong>le</strong>s interventions sont réalisées par des<br />

entreprises.<br />

Ces contraintes limitent la réactivité des viticulteurs et l'adaptation des interventions au seul<br />

risque parasitaire : planning de semaine plus compliqués à organiser (moins de jours pour<br />

intervenir), temps d'intervention plus longs. Or la vigne et <strong>le</strong>s parasites se développent 7 jours<br />

sur 7 et quelques heures suffisent à la réalisation des contaminations.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.4 - Des débuts d'épidémies plus ou moins faci<strong>le</strong>s à détecter<br />

Pour <strong>le</strong> Mildiou, l'évaluation des risques est<br />

réalisée à partir de suivis biologiques (œufs<br />

d'hiver, sorties de taches, répartition<br />

géographique, …) et à partir de modè<strong>le</strong>s<br />

simp<strong>le</strong>s ou comp<strong>le</strong>xes. Les premières attaques<br />

sont (assez) faci<strong>le</strong>ment détectab<strong>le</strong>s (foyers<br />

primaires), <strong>le</strong>s sorties secondaires des cyc<strong>le</strong>s<br />

suivants sont faci<strong>le</strong>ment repérées notamment<br />

sur des bouts de rangs « témoin » (non<br />

traités). Pour l'Oïdium, <strong>le</strong>s premières attaques<br />

sont trop discrètes, surtout sur Ugni blanc.<br />

Contrairement au Mildiou, il est plus diffici<strong>le</strong><br />

Le Mildiou : une maladie de climat humide<br />

d'évaluer <strong>le</strong> risque.<br />

1.5 - Des périodes d'intervention décalées des infestations<br />

Pour l'Oïdium, <strong>le</strong>s premiers symptômes sont<br />

insidieux et pratiquement impossib<strong>le</strong>s à<br />

localiser dans <strong>le</strong>s parcel<strong>le</strong>s traitées. On <strong>le</strong>s<br />

repère plus faci<strong>le</strong>ment sur des sites non<br />

traités (témoins). La quasi-totalité de la<br />

protection est réalisée avant que <strong>le</strong>s<br />

symptômes soient détectab<strong>le</strong>s par <strong>le</strong>s<br />

viticulteurs.<br />

Des expérimentations à la fin des années 90<br />

avaient permis de définir une "fenêtre" de<br />

réceptivité maxima<strong>le</strong> qui s'étend du stade<br />

"boutons floraux séparés" à la fin de la<br />

fermeture (45 à 50 jours).<br />

L'Oïdium : une maladie de climat plus sec<br />

Pour <strong>le</strong> Botrytis, <strong>le</strong> développement se produit<br />

dans <strong>le</strong>s deux semaines qui précédent la<br />

récolte, période à laquel<strong>le</strong> on ne traite plus. Les<br />

interventions sont réalisées entre la floraison et<br />

la véraison, avant que l'on connaisse <strong>le</strong>s<br />

conditions qui précèdent la récolte. La<br />

protection est décidée a priori : el<strong>le</strong> constitue<br />

une assurance préventive contre <strong>le</strong> Botrytis en<br />

fonction du niveau de qualité visé (selon la<br />

destination de la récolte).<br />

Le Botrytis : une menace à la récolte<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.6 - Des fluctuations d'infestation annuel<strong>le</strong>s ou pluriannuel<strong>le</strong>s<br />

Certains parasites ont des fluctuations annuel<strong>le</strong>s très liées du climat comme pour <strong>le</strong> Mildiou ou<br />

<strong>le</strong> Botrytis. Bien que très dépendant des conditions climatiques éga<strong>le</strong>ment, l'Oïdium ne<br />

s'exprime fortement qu'une année sur 8 ou 10. D'autres parasites, comme <strong>le</strong>s tordeuses où la<br />

Nécrose bactérienne fluctuent graduel<strong>le</strong>ment sur un pas de temps de 10 à 15 ans.<br />

Le réchauffement climatique aura-t-il une action sur <strong>le</strong> développement de certains parasites ?<br />

Nous n'avons pas encore de certitude.<br />

1.7 - Cas des maladies de dépérissement du bois<br />

b<br />

D'une année à l'autre, l'expression des<br />

maladies du bois varie au sein de chaque<br />

parcel<strong>le</strong>. Ce ne sont pas toujours <strong>le</strong>s mêmes<br />

ceps qui expriment <strong>le</strong>s symptômes foliaires.<br />

Pour ce comp<strong>le</strong>xe de maladies de<br />

dépérissement, seu<strong>le</strong>s des mesures<br />

prophylactiques sont utilisab<strong>le</strong>s pour<br />

maîtriser <strong>le</strong>s pertes de récolte. Or,<br />

l'agrandissement des exploitations et la<br />

diminution du personnel, rendent plus<br />

contraignants <strong>le</strong>s chantiers d'assainissement<br />

et de remplacement des souches.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.8 - Lutte obligatoire contre la Flavescence dorée et son vecteur<br />

La Flavescence dorée menace la pérennité du<br />

vignob<strong>le</strong>. Les deux ou trois interventions<br />

insecticides contre la cicadel<strong>le</strong> vectrice sont à<br />

réaliser dans <strong>le</strong>s communes du périmètre de<br />

lutte obligatoire, quel que soit <strong>le</strong> niveau de<br />

risque.<br />

Une des difficultés est que la Flavescence dorée<br />

nécessite une lutte col<strong>le</strong>ctive de haut niveau.<br />

Toute négligence risque d'être payée « cash ».<br />

Pour lutter contre la Flavescence, il faut parfois<br />

se confronter à des problèmes de succession, de<br />

voisinage, ….<br />

1.9 - Les risques de résistances<br />

Les maladies et <strong>le</strong>s ravageurs ont des facultés pour s'adapter aux variations de <strong>le</strong>urs milieux de<br />

vie : adaptation à <strong>le</strong>urs plantes hôtes (agressivité), au climat, voire à la pression de sé<strong>le</strong>ction<br />

exercée par <strong>le</strong>s produits phytosanitaires. Des modifications du métabolisme ou <strong>le</strong> hasard des<br />

mutations (parfois sur un seul gène) peuvent aboutir à une nouvel<strong>le</strong> « souche » de parasite qui,<br />

par divers processus, devient plus tolérante vis-à-vis des spécialités utilisées.<br />

Les produits phytosanitaires homologués sont souvent très spécifiques des parasites visés pour<br />

limiter <strong>le</strong>s actions secondaires indésirab<strong>le</strong>s dans l'environnement sur <strong>le</strong>s auxiliaires, <strong>le</strong>s microorganismes<br />

du sol, la vie aquatique, <strong>le</strong>s oiseaux,… Ces produits spécifiques limitent éga<strong>le</strong>ment<br />

<strong>le</strong>s risques encourus par <strong>le</strong>s agriculteurs lors des manipulations (toxicité aigüe et toxicité<br />

chronique moindres). C'est aussi un moyen pour protéger <strong>le</strong>s consommateurs des éventuels<br />

résidus.<br />

Ces contraintes contribuent souvent à mettre sur <strong>le</strong> marché des matières actives qui n'agissent<br />

que sur un point précis et unique du métabolisme du parasite (mode d'action uni-site). En<br />

conséquence, <strong>le</strong>s parasites peuvent s'adapter plus faci<strong>le</strong>ment à ces produits qu'à des produits<br />

multi-sites souvent plus polyva<strong>le</strong>nts.<br />

2 - Adaptation du plan ECOPHYTO à la viticulture<br />

Certaines actions seront des démarches nouvel<strong>le</strong>s. D'autres actions d'expérimentation et de<br />

surveillance biologique engagées avant <strong>le</strong> plan ECOPHYTO sont à poursuivre.<br />

2.1 - Evaluation des risques r<br />

phytosanitaires<br />

Pour évaluer <strong>le</strong>s risques phytosanitaires, <strong>le</strong> plan ECOPHYTO prévoit la mise en place d'une<br />

surveillance biologique des cultures sans liaison avec <strong>le</strong> conseil et la préconisation. Cette<br />

surveillance aboutit à la rédaction d'un Bul<strong>le</strong>tin de Santé Végétal (BSV) qui est gratuitement à<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

disposition des viticulteurs et des techniciens, notamment sur <strong>le</strong> site de la Direction Régiona<strong>le</strong><br />

de l'Agriculture et de la forêt :<br />

http://draaf.poitou-charentes.agriculture.gouv.fr/<br />

(rubrique : Nos publications - Bul<strong>le</strong>tin de santé du végétal)<br />

Pour la viticulture en Charentes, <strong>le</strong>s réseaux de surveillance concerne la météorologie, la<br />

phénologie, l'évolution des maladies des feuil<strong>le</strong>s et des grappes sur des sites « témoin », <strong>le</strong><br />

piégeage des tordeuses et des cicadel<strong>le</strong>s, des observations biologiques, <strong>le</strong> suivi des<br />

infestations notamment des maladies du bois,…. Ces réseaux sont en place depuis la<br />

campagne 2010. Ils remplacent entre autres ceux qui fonctionnaient auparavant pour <strong>le</strong>s<br />

Avertissements Agrico<strong>le</strong>s.<br />

2.2 - Réseaux de fermes de référence<br />

Plusieurs réseaux vitico<strong>le</strong>s ont été présentés pour suivre des pratiques qui permettront de<br />

réduire <strong>le</strong> recours aux pesticides tout en appréciant <strong>le</strong>s contraintes. Ces réseaux sont en cours<br />

de mise en place dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> charentais.<br />

2.3 - Expérimentations et recherches<br />

Pour trouver des parcours moins consommateurs de produits phytosanitaires, certaines<br />

expérimentations déjà en cours répondent aux problématiques d'ECOPHYTO.<br />

Pour <strong>le</strong>s maladies du bois, certaines expérimentations sur <strong>le</strong>s méthodes de lutte prophylactique<br />

sont implantées. C'est un travail de longue ha<strong>le</strong>ine qui demande une dizaine d'années<br />

d'observations pour tirer des conclusions sérieuses.<br />

L'IFV et <strong>le</strong>s Chambres départementa<strong>le</strong>s d'agriculture expérimentent un système de réduction<br />

des doses appelé « Optidose ». Les doses appliquées dépendent du volume de la végétation et<br />

du risque parasitaire lié à l'année climatique et à la parcel<strong>le</strong>. Ces réductions de doses ne sont à<br />

envisager que si la pulvérisation est irréprochab<strong>le</strong> (vitesse d'avancement, débit des différentes<br />

buses, orientation des buses, …).<br />

L'INRA et <strong>le</strong> CEMAGREF ont proposé un système de raisonnement des interventions dénommé<br />

« POD MILDIUM ». Quelques traitements sont incontournab<strong>le</strong>s, d'autres sont décidés en<br />

fonction de comptages précis.<br />

Ces expérimentations seront présentées dans <strong>le</strong>s ateliers et stands de la seconde partie de la<br />

journée.<br />

2.4 - Gérer <strong>le</strong>s résistances pour diminuer <strong>le</strong>s intrants<br />

Si <strong>le</strong>s résistances ne sont pas décelées à temps, on risque alors d'avoir des sur-utilisations de<br />

produits phytosanitaires (cadence de protection raccourcie, emploi d'autres produits en<br />

rattrapage, …), avec d'éventuels dégâts significatifs sur la récolte.<br />

Pour limiter <strong>le</strong>s risques de résistance, il faut :<br />

• ne pas être en retard pour identifier <strong>le</strong>s pertes d'efficacité,<br />

• restreindre l'utilisation des matières actives concernées par la résistance,<br />

• alterner des famil<strong>le</strong>s chimiques,<br />

25


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

• ou <strong>le</strong>s associer avec des matières actives ayant d'autres sites d'action complémentaires,<br />

• ne pas oublier de réaliser <strong>le</strong>s applications dans des conditions optima<strong>le</strong>s.<br />

Pour surveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong> comportement des matières actives à risque, différents organismes, publics<br />

ou privés, réalisent des tests de résistance (monitoring). Ces études aboutissent à la rédaction<br />

de notes nationa<strong>le</strong>s qui recommandent des précautions et des restrictions d'utilisation. Pour la<br />

surveillance des conséquences secondaires sur <strong>le</strong>s différents vignob<strong>le</strong>s de France, l'Expert<br />

Vigne de la Direction régiona<strong>le</strong> de l'Alimentation (DGAL), en liaison avec <strong>le</strong> laboratoire<br />

d'analyses de l'ANSES, cherche à maintenir <strong>le</strong> dispositif de surveillance des résistances qui<br />

accompagnait <strong>le</strong>s Avertissements Agrico<strong>le</strong>s.<br />

2.5 - Cas de la Flavescence dorée<br />

Les interventions contre la cicadel<strong>le</strong> vectrice sont obligatoires dans des périmètres de lutte<br />

départementaux définis par des arrêtés préfectoraux annuels. Depuis 2004, pour retirer des<br />

communes du périmètre de lutte afin de limiter <strong>le</strong>s insecticides épandus dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de<br />

Cognac, des prospections ont été entreprises par <strong>le</strong>s viticulteurs selon un protoco<strong>le</strong> précis.<br />

El<strong>le</strong>s étaient encadrées par des techniciens de Chambres d'agriculture et de la FREDON. El<strong>le</strong>s<br />

étaient contrôlées par <strong>le</strong> Service Régional de la Protection des Végétaux (devenu DRAAF - SRAL)<br />

puis soumises aux votes des Commissions départementa<strong>le</strong>s de lutte. Cette démarche a montré<br />

son efficacité sur <strong>le</strong> département de la Charente.<br />

Malheureusement, la Flavescence dorée progresse fortement depuis quelques années sur la<br />

Charente maritime, qui était pourtant moins touchée que la Charente. Des « déficiences » dans<br />

la détection de la maladie à l'automne, en dehors du périmètre de lutte, sont la principa<strong>le</strong><br />

cause de ce renversement de tendance.<br />

Une meil<strong>le</strong>ure lutte contre la Flavescence et son vecteur passe par une meil<strong>le</strong>ure prise de<br />

conscience et peut-être parfois par une véritab<strong>le</strong> confrontation avec la maladie. La lutte dépend<br />

des surfaces à prospecter sur <strong>le</strong>s différentes exploitations, des motivations et des moyens<br />

humains mis en œuvre, y compris pour faire appliquer <strong>le</strong>s mesures rég<strong>le</strong>mentaires d'arrachage<br />

des ceps malades (lutte directe) et <strong>le</strong>s interventions contre la cicadel<strong>le</strong> vectrice (lutte indirecte).<br />

Le dispositif ECOPHYTO ne peut pas répondre tota<strong>le</strong>ment à ces problématiques. Tous <strong>le</strong>s<br />

acteurs de la viticulture doivent agir ou influencer pour une meil<strong>le</strong>ure détection de la maladie<br />

et pour l'arrachage de tous <strong>le</strong>s ceps suspects.<br />

3 - Conclusion<br />

Des parasites ont déjà été vaincus sans pesticides. Citons <strong>le</strong> Phylloxera grâce à la mise en<br />

œuvre du greffage à la fin du XIXe sièc<strong>le</strong>. Au début des années 1990, <strong>le</strong>s acariens phytophages<br />

ont été maîtrisés par <strong>le</strong>s typhlodromes (acariens prédateurs). Les actions secondaires des<br />

produits phytosanitaires sur <strong>le</strong>s typhlodromes ont été étudiées. Ils se sont ensuite installés<br />

dans <strong>le</strong>s différents vignob<strong>le</strong>s grâce à la diminution de l'emploi des produits qui <strong>le</strong>ur étaient<br />

néfastes.<br />

Le Botrytis est <strong>le</strong> principal responsab<strong>le</strong> de la régression de la Fol<strong>le</strong> blanche.<br />

26


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

La recherche de clones plus résistants aux Mildiou et à l'Oïdium est engagée depuis plusieurs<br />

années : c'est un travail de longue ha<strong>le</strong>ine. Mais la plantation de cépages plus résistants risque<br />

peut-être de favoriser d'autres parasites actuel<strong>le</strong>ment secondaires.<br />

Le plan ECOPHYTO nous pousse à franchir de nouvel<strong>le</strong>s étapes. Sur une plante pérenne comme<br />

la Vigne, pour réduire l'usage des produits phytosanitaires, de fortes contraintes existent et<br />

el<strong>le</strong>s ne sont pas uniquement liées aux parasites. L'objectif est de préserver la récolte. Cela<br />

s'accompagnera d'une évolution de la technicité et d'une évolution de l'état d'esprit des<br />

viticulteurs et des techniciens.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Demain, des cépages plus résistants ?<br />

Gérald FERRARI, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

Les variétés de vigne cultivées traditionnel<strong>le</strong>ment en Europe (Vitis vinifera L.) sont très<br />

sensib<strong>le</strong>s à de nombreuses maladies ou insectes importés au cours de l’histoire : oïdium<br />

(1845), phylloxéra (1867), mildiou (1878). De plus, ces cépages ont été sé<strong>le</strong>ctionnés par<br />

l’homme au cours des sièc<strong>le</strong>s pour améliorer <strong>le</strong>ur qualité de production, probab<strong>le</strong>ment aux<br />

dépens de <strong>le</strong>ur rusticité (OLLAT, 2005).<br />

Pour maîtriser ces maladies, la lutte s’était d’abord orientée vers la destruction des agresseurs<br />

à l’aide de produits chimiques ou d’origine naturel<strong>le</strong>. Seu<strong>le</strong> la lutte contre <strong>le</strong> phylloxéra a<br />

fina<strong>le</strong>ment réussi grâce à une réponse biologique et durab<strong>le</strong> : <strong>le</strong> recours au greffage sur des<br />

porte-greffes résistants.<br />

Le développement considérab<strong>le</strong> de l’industrie chimique après la dernière guerre mondia<strong>le</strong> a<br />

largement pourvu <strong>le</strong>s vignerons en produits phytosanitaires, pouvant laisser croire à une<br />

maîtrise tota<strong>le</strong> des ravageurs par ce moyen (BAIN, 2001). Mais, malgré la multitude de produits<br />

proposée, <strong>le</strong>s insuffisances de ce type de lutte et ses effets secondaires néfastes ont<br />

progressivement ouvert la voie à la réf<strong>le</strong>xion sur la recherche d’autres moyens de lutte plus<br />

respectueux de l’homme et de son environnement. L’apparition des fléaux évoqués<br />

précédemment avait déjà généré des recherches de ce type, et notamment l’obtention de<br />

croisements permettant d’introduire des caractères de résistance chez Vitis vinifera, dès <strong>le</strong>s<br />

années 1880 (BOUQUET, 2001).<br />

De nouvel<strong>le</strong>s études ont été consacrées aux parasites pour mieux <strong>le</strong>s connaître, aux relations<br />

hôte-parasite pour élucider <strong>le</strong>s stratégies de chacun lors de l’attaque, et enfin aux systèmes de<br />

défenses naturel<strong>le</strong>s de la vigne. Le progrès constant de la génétique a permis de soutenir ces<br />

études et des avancées majeures ont été obtenues récemment, notamment avec <strong>le</strong> séquençage<br />

du génome de Botrytis en 2005 et celui de la vigne en 2007 (JAILLON, 2007). D’autres travaux<br />

sont en cours pour caractériser finement la fonction des gènes ainsi que pour améliorer la<br />

compréhension de la variabilité génétique naturel<strong>le</strong> et de ses liens avec la variation des<br />

phénotypes, donc la sé<strong>le</strong>ction. Les nouveaux outils génétiques sont aussi appliqués à la<br />

connaissance des populations de parasites afin de <strong>le</strong>s identifier, de mieux <strong>le</strong>s connaître et de<br />

suivre <strong>le</strong>urs évolutions et <strong>le</strong>urs déplacements.<br />

Figure 1 : Les éléments de base de la génétique végéta<strong>le</strong> : du gène à la plante (D’après Audeguin, 2011)<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

A partir de ces éléments, nous avons choisi d’éclairer deux stratégies innovantes, susceptib<strong>le</strong>s<br />

d’amener de nouvel<strong>le</strong>s solutions de lutte alternatives dans <strong>le</strong>s années à venir, pour répondre<br />

notamment aux impératifs de respect de l’environnement :<br />

• la stimulation des défenses naturel<strong>le</strong>s de la vigne (SDN),<br />

• la création de cépages résistants.<br />

Ces nouvel<strong>le</strong>s perspectives apparaissent indispensab<strong>le</strong>s pour affronter <strong>le</strong>s défis de la filière<br />

vitico<strong>le</strong> dans une perspective de Développement Durab<strong>le</strong> : réduction des intrants<br />

phytosanitaires, adaptation au changement climatique, qualité des produits.<br />

1 - Les défenses naturel<strong>le</strong>s de la vigne<br />

La reconnaissance de l’existence de résistance active dans <strong>le</strong>s plantes est relativement récente,<br />

bien qu’el<strong>le</strong> soit <strong>le</strong> fruit de trois décennies de recherches en phytopathologie et biologie<br />

végéta<strong>le</strong> (BENHAMOU, 2009). Cette résistance se caractérise par la comp<strong>le</strong>xité des mécanismes<br />

mis en jeu. En effet, <strong>le</strong>s plantes ont développé au cours de <strong>le</strong>ur évolution des défenses<br />

efficaces contre de nombreux agents pathogènes (KAUFFMANN, 2000).<br />

1.1 - Les mécanismes<br />

Aujourd’hui, il est admis que la plante dispose de défenses passives (barrières de type cire,<br />

cuticu<strong>le</strong>, pectine, cellulose) et actives. Ces dernières, comp<strong>le</strong>xes, peuvent se résumer à 3<br />

phases, consécutives au contact avec un pathogène :<br />

• réaction d’hypersensibilité, rapide, qui peut al<strong>le</strong>r jusqu’à l’autodestruction des cellu<strong>le</strong>s<br />

(nécrose foliaire) ; el<strong>le</strong> a pour but d’éviter la propagation de l’intrus,<br />

• résistance loca<strong>le</strong> acquise : avant <strong>le</strong>ur autodestruction <strong>le</strong>s cellu<strong>le</strong>s émettent des signaux<br />

aux cellu<strong>le</strong>s voisines, mettant en jeux de nombreuses molécu<strong>le</strong>s de défense,<br />

• résistance systémique acquise : des signaux sont aussi envoyés dans toute la plante<br />

pour la protéger durab<strong>le</strong>ment.<br />

Les connaissances actuel<strong>le</strong>ment disponib<strong>le</strong>s permettent d’envisager des stratégies pour<br />

déc<strong>le</strong>ncher préventivement et augmenter l’efficacité de ces mécanismes, car de nombreuses<br />

molécu<strong>le</strong>s de signalisation et de défense sont identifiées. Ces substances sont connues sous <strong>le</strong><br />

terme générique de « SDN » (Stimulation des Défenses Naturel<strong>le</strong>s). D’autres molécu<strong>le</strong>s ou<br />

extraits capab<strong>le</strong>s de déc<strong>le</strong>ncher ces réactions sont désignées par <strong>le</strong> terme « eliciteur ».<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure<br />

2 : Mécanismes de défense naturel<strong>le</strong> des plantes (d’après Benhamou)<br />

1.2 - Les possibilités<br />

Grâce à ces connaissances, il est possib<strong>le</strong> aujourd’hui de déc<strong>le</strong>ncher des réactions de défense<br />

(KAUFFMANN, 2000) en l’absence de pathogène : cela permet de protéger la plante avant<br />

l’attaque de l’agresseur à l’aide de produits naturels non toxiques. De très nombreuses<br />

molécu<strong>le</strong>s ou extraits naturels sont testés dans ce but dans <strong>le</strong> monde.<br />

Nombre d’entre eux montrent une certaine efficacité en laboratoire, voire même en serre.<br />

Cependant, <strong>le</strong>s essais au champ et à la vigne se révè<strong>le</strong>nt à ce jour peu concluants (AVELINE,<br />

2010).<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.3 - Les difficultés<br />

Les échecs relatifs, au vignob<strong>le</strong>, de ces SDN, et <strong>le</strong> manque de reproductibilité de <strong>le</strong>ur efficacité<br />

soulève de nombreuses questions :<br />

• Les conditions d’application : on ne maîtrise pas encore tous <strong>le</strong>s paramètres (dose, date,<br />

formulation…),<br />

• L’état physiologique de la plante,<br />

• La pression parasitaire,<br />

• L’évaluation de l’efficacité de ces SDN, dont l’action est très différente de cel<strong>le</strong> des<br />

produits phytosanitaires classiques.<br />

Le constat actuel est qu’il reste encore beaucoup de travail au niveau de la recherche sur ces<br />

mécanismes, afin de mieux <strong>le</strong>s maîtriser (HARM, 2011).<br />

1.4 - Perspectives<br />

Les nombreux essais conduits au vignob<strong>le</strong> montrent une efficacité irrégulière qui est souvent<br />

insuffisante pour protéger correctement la vigne.<br />

Certains de ces nouveaux produits permettent toutefois d’envisager de réduire l’usage des<br />

produits phytosanitaires classiques en <strong>le</strong>s intégrant dans <strong>le</strong>s programmes de traitement.<br />

2 - Les cépages résistants<br />

Nous venons de voir que la vigne possède un Système de Défenses Naturel<strong>le</strong>s, mais que celuici<br />

est insuffisant vis-à-vis de certains agresseurs, même après une stimulation. Ce système est<br />

sous <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de gènes, et il a été démontré que Vitis vinifera ne possède pas de gène de<br />

résistance spécifique à l’oïdium et au mildiou. Ces gènes existent chez d’autres vitis d’origine<br />

américaine ou asiatique, et il est possib<strong>le</strong> de <strong>le</strong>s intégrer par croisements dans <strong>le</strong> génome de<br />

Vitis vinifera (BOUQUET, 2001). Cela est en fait connu depuis <strong>le</strong>s années 1850, qui ont vu la<br />

création d’hybrides résistants au mildiou et à l’oïdium, mais dont la qualité du vin n’était pas<br />

satisfaisante.<br />

Dans <strong>le</strong>s années 1970, Alain BOUQUET, Directeur de Recherche à l’INRA de Montpellier, a initié<br />

un nouveau programme de croisements utilisant Muscadinia rotundifolia, cépage américain<br />

multi-résistant. Après plusieurs retro-croisements (de 4 à 6) avec des vinifera, une population<br />

d’obtentions résistantes produisant des vins de qualité satisfaisante a été obtenue. Il a été<br />

démontré depuis que cette résistance peut être attribuée à 2 gènes, l’un vis-à-vis du mildiou,<br />

l’autre de l’oïdium. Les retro-croisements de niveau 5 présentent un génome provenant à<br />

98,4 % de Vitis vinifera et <strong>le</strong>s niveaux 6 à 99,2 %.<br />

Ces croisements, résistants au mildiou et à l’oïdium, présentent des résistances de type monogénique.<br />

Il apparait aujourd’hui que ce type de résistance simp<strong>le</strong> peut présenter un risque de<br />

contournement par <strong>le</strong>s parasites. Pour éviter ce risque, de nouvel<strong>le</strong>s populations à résistance<br />

dites « multi-génique » sont en préparation. Il s’agit de combiner dans une même variété<br />

plusieurs gènes de résistance d’origines différentes afin d’obtenir une résistance plus forte et<br />

plus durab<strong>le</strong> (MERDINOGLU, 2010).<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.1- Un cépage résistant pour <strong>le</strong> Cognac ?<br />

Dès 2002, une collaboration a été initiée avec l’INRA pour sé<strong>le</strong>ctionner, parmi la population<br />

d’obtentions résistantes, des individus (ou génotypes) présentant une proximité avec <strong>le</strong>s<br />

qualités recherchées dans l’Ugni blanc (productivité, précocité, acidité, …).<br />

L’objectif était doub<strong>le</strong> :<br />

• Identifier un génotype pouvant convenir pour la production d’eaux-de-vie.<br />

• Sé<strong>le</strong>ctionner un parent pouvant être utilisé dans de nouveaux croisements avec l’Ugni<br />

blanc, afin de renforcer <strong>le</strong> type recherché.<br />

2.2 - Etat de lieux des recherches en cours<br />

En 2005, deux génotypes INRA blancs, résistants au mildiou et à l’oïdium et présentant des<br />

caractéristiques s’approchant du cahier des charges « vins de distillation », ont été implantés<br />

en Charente, en comparaison avec l’Ugni blanc, pour tester <strong>le</strong>ur niveau de résistance in situ et<br />

évaluer <strong>le</strong>ur comportement.<br />

Dès <strong>le</strong>ur troisième feuil<strong>le</strong>, ils ont fait l’objet d’observations vitico<strong>le</strong>s (présence de maladies en<br />

l’absence de traitement, comportement) et de vinification et distillation à l’échel<strong>le</strong> pilote pour<br />

évaluer la qualité de <strong>le</strong>ur production. Les premiers résultats sont encourageants. Ces 2<br />

nouveaux cépages, bien que différents, présentent des qualités qui s’approchent de cel<strong>le</strong>s de<br />

l’Ugni blanc : productivité et acidité é<strong>le</strong>vée notamment.<br />

En parallè<strong>le</strong>, un retro-croisement a été réalisé entre l’un des cépages résistants et l’Ugni blanc.<br />

Après sé<strong>le</strong>ction des individus obtenus sur <strong>le</strong>urs caractères de résistance, 40 génotypes ont été<br />

implantés en Charentes en 2008. Leur première évaluation a été réalisée en 2011<br />

(ampélographie, récolte et analyse des jus). Une grande diversité a été observée et el<strong>le</strong> sera<br />

caractérisée dans <strong>le</strong>s années à venir.<br />

Ces génotypes en cours d’étude à la vigne présentent donc tous une résistance de type monogénique.<br />

Compte tenu des craintes vis-à-vis de la durabilité de <strong>le</strong>ur résistance, nous avons<br />

poursuivi notre collaboration avec l’INRA pour obtenir des génotypes multi-résistants, avec <strong>le</strong><br />

même doub<strong>le</strong> objectif de sé<strong>le</strong>ctionner soit un individu intéressant, soit un parent destiné à être<br />

croisé avec l’Ugni blanc. La première étape de sé<strong>le</strong>ction des géniteurs se dérou<strong>le</strong> en 2011, pour<br />

un croisement en 2012.<br />

2.3 - Conclusion<br />

Ce nouveau type de matériel végétal, naturel<strong>le</strong>ment résistant au mildiou et à l’oïdium, présente<br />

un grand intérêt dans l’optique de réduire significativement <strong>le</strong>s intrants phytosanitaires, mais<br />

aussi pour avoir des solutions d’adaptation au changement climatique. En effet, <strong>le</strong>s cépages<br />

obtenus présentent des différences notab<strong>le</strong>s en termes d’acidité tota<strong>le</strong> et plus particulièrement<br />

de <strong>rapport</strong> entre l’acide malique et l’acide tartrique. Ces différences pourront être exploitées<br />

avec <strong>le</strong> support de la recherche génétique (caractérisation des gènes et des voies métaboliques)<br />

en vue de la sé<strong>le</strong>ction de nouveaux cépages adaptés à l’évolution climatique et aux attentes<br />

sociéta<strong>le</strong>s en matière de respect de l’environnement.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

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33


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Thème 2<br />

Qualité des vins de distillation<br />

et des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Qualité des moûts : caractérisation et influence sur la<br />

composition des vins<br />

Gérald FERRARI, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

Le changement climatique mondial, dont l’incidence sur <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> de Cognac a fait l’objet<br />

d’études récentes (BOITAUD, 2009) induit des modifications dans <strong>le</strong> cyc<strong>le</strong> végétatif de la vigne,<br />

la maturation des raisins et <strong>le</strong>ur composition à la récolte. Ceci a des conséquences (baisse<br />

d’acidité, augmentation des sucres) sur <strong>le</strong>s conditions de vinification des vins de distillation,<br />

dont la qualité peut aussi être impactée par <strong>le</strong> botrytis et <strong>le</strong> processus de maturation des<br />

arômes. Des travaux récents ont permis des avancées significatives sur la connaissance de la<br />

composition des moûts et son influence sur la qualité des vins et des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s :<br />

équilibre entre <strong>le</strong> Titre Alcoométrique Volumique probab<strong>le</strong> (TAVp) et l’acidité, teneur en azote<br />

assimilab<strong>le</strong>, composition aromatique, botrytis, … (FERRARI, 2005, 2007, 2009).<br />

Nous proposons de faire <strong>le</strong> point sur <strong>le</strong>s acquis <strong>le</strong>s plus récents concernant trois paramètres<br />

importants : l’acidité des raisins, <strong>le</strong> botrytis et la maturité aromatique.<br />

1 - L’acidité des raisins et des moûts<br />

Il est bien connu que l’acidité des raisins décroît au cours de la maturation, mais à ce jour, peu<br />

d’informations sont disponib<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong> potentiel acide à la véraison, son influence sur <strong>le</strong>s<br />

teneurs à maturation, <strong>le</strong>s équilibres tartrique/malique/potassium,…. Ces dernières années ont<br />

confirmé l’intérêt de suivre l’acidité tota<strong>le</strong> (AT) en cours de maturation car sa limite qualitative<br />

(AT >7.5 g/l) est atteinte avant cel<strong>le</strong> du TAVp (


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

• L’acide tartrique, qui est synthétisé dans <strong>le</strong>s baies durant la phase herbacée jusqu’à la<br />

véraison, reste en quantité stab<strong>le</strong> au cours de la maturation ; cependant sa<br />

concentration diminue par dilution (grossissement de la baie). Le déterminisme et <strong>le</strong>s<br />

mécanismes de sa synthèse et de sa dégradation sont encore peu connus. Cet acide est<br />

spécifique de la vigne et c’est <strong>le</strong> plus fort du raisin ; c'est-à-dire qu’il participe<br />

fortement à l’abaissement du pH du moût et ensuite celui du vin, contribuant ainsi à sa<br />

stabilité biologique (prévention des accidents bactériens).<br />

• Le comportement de l’acide malique est différent : au cours de la maturation, il est<br />

dégradé par la respiration et sa teneur diminue dans <strong>le</strong> raisin. Température é<strong>le</strong>vée<br />

(>30°C) et stress hydrique favorisent cette dégradation. Les voies de synthèse et de<br />

dégradation de cet acide sont el<strong>le</strong>s mieux connues.<br />

• Le potassium est un paramètre complémentaire de l’acidité : il s’accumu<strong>le</strong> dans la baie<br />

(pulpe) au cours de la maturation en fonction de la nature du sol, la fumure, la densité<br />

de plantation et <strong>le</strong> régime hydrique. Il salifie <strong>le</strong>s acides de la baie : ceux-ci deviennent<br />

des tartrate et malate de potassium en quantité variab<strong>le</strong>.<br />

Les acides malique et tartrique sont, sous forme de sels de potassium essentiel<strong>le</strong>ment,<br />

responsab<strong>le</strong>s de 90 % de l’acidité tota<strong>le</strong> du moût. Dans <strong>le</strong> cadre de la vinification, l’équilibre<br />

malique/tartrique/K+ participe à la qualité du vin et à sa stabilité (DELOIRE, 2007).<br />

Afin d’avoir une vision globa<strong>le</strong> permettant de mieux appréhender la maîtrise de l’acidité des<br />

moûts, nous avons cherché à caractériser <strong>le</strong> potentiel acide à la véraison, étape où il est<br />

maximal, puis nous avons suivi son évolution.<br />

1.2 - Potentiel acide à la véraison de l’Ugni blanc<br />

Nous avons quantifié <strong>le</strong>s concentrations (g/l) en acidité tota<strong>le</strong>, acides malique et tartrique et<br />

potassium à la véraison sur <strong>le</strong>s 55 parcel<strong>le</strong>s du réseau maturation pour la période 2001-2010.<br />

Ces va<strong>le</strong>urs sont éga<strong>le</strong>ment calculées en quantité d’acides présents dans <strong>le</strong>s baies (kg/ha).<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : Statistiques descriptives des teneurs en acides à véraison par an (55 parcel<strong>le</strong>s, 2001 à 2010)<br />

Minimum Maximum Moyenne Ecart type CV %<br />

Acidité tota<strong>le</strong> (g/L d’H2SO4) 23,7 27,7 25,7 1,35 5.2<br />

Titre alc. Vol. potentiel (% vol.) 1,53 2,33 1,94 0,26 11<br />

pH 2,33 2,44 2,38 0,03 1.3<br />

Acide malique (g/L) 22,1 29,4 25,9 2,01 8.0<br />

Acide tartrique (g/L) 10,5 13,4 11,7 0,88 7.0<br />

K potassium (g/L) 0,94 1,28 1,05 0,09 9.0<br />

Quantité d’acide malique (Kg/ha) 289 438 350 45,2 13<br />

Quantité d’acide tartrique (Kg/ha) 117 195 157 22,6 14<br />

38


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Ces résultats montrent qu’il y a en moyenne deux fois plus d’acide malique (25.9 g/l) que<br />

tartrique (11.7 g/l) dans <strong>le</strong>s moûts d’Ugni blanc à véraison. Il est remarquab<strong>le</strong> que <strong>le</strong>urs<br />

coefficients de variation (Ecart type / Moyenne) soient très proches à ce stade.<br />

L’écart entre années acides et peu acides est de l’ordre de +/- 2 g/l.<br />

Les va<strong>le</strong>urs exprimées en quantité à l’hectare (kg/ha), qui sont représentées par la figure<br />

suivante, illustrent la faib<strong>le</strong> diversité inter-annuel<strong>le</strong> du potentiel en acides à véraison.<br />

Figur<br />

ure 2 : Quantités des acides malique et tartrique (kg/ha) et va<strong>le</strong>ur de l’acidité tota<strong>le</strong> (g/L d’H2SO4) à<br />

véraison des 55 parcel<strong>le</strong>s maturation de 2001 à 2010<br />

Afin de caractériser <strong>le</strong> comportement des parcel<strong>le</strong>s, un test de Fisher a été réalisé sur <strong>le</strong>s<br />

données annuel<strong>le</strong>s cumulées d’acide tartrique de 2001 à 2010. Le test montre qu’il existe une<br />

variation significative entre parcel<strong>le</strong>s, plus importante que la variation annuel<strong>le</strong>.<br />

1.3 - Evolution de l’acidité au cours de la maturation<br />

Au cours de la maturation du raisin, <strong>le</strong>s teneurs en acides diminuent mais pas de la même<br />

façon pour <strong>le</strong> tartrique et <strong>le</strong> malique. Les teneurs en acide malique diminuent (-75%) en<br />

moyenne deux fois plus que cel<strong>le</strong> du tartrique (-38%). La variabilité des teneurs en malique à la<br />

récolte augmente fortement (28%) par <strong>rapport</strong> à la véraison (8%), alors que cel<strong>le</strong> du tartrique<br />

reste proche.<br />

Tab<strong>le</strong>au<br />

2 : Statistiques descriptives à la récolte (55 parcel<strong>le</strong>s, 2001-2010)<br />

Minimum Maximum Moyenne Ecart type CV %<br />

Acidité tota<strong>le</strong> (g/L d’H2SO4) 5,42 9,21 7,51 1,25 16<br />

Titre al. Vol. potentiel (% vol.) 8,84 10,15 9,45 0,44 5<br />

pH 2,86 3,11 2,96 0,07 2<br />

Acide malique (g/L) 3,82 9,27 6,31 1,78 28<br />

Acide tartrique (g/L) 6,55 8,64 7,26 0,65 9<br />

K (g/L) 1,21 1,50 1,33 0,10 7<br />

Quantité d’acide malique (Kg/ha) 73 196 132 34 26<br />

Quantité d’acide tartrique (Kg/ha) 119 188 152 21 14<br />

39


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Les évolutions de teneurs en cours de maturation ont été suivies pour <strong>le</strong>s acides tartrique et<br />

malique, ainsi que pour l’acidité tota<strong>le</strong> (échantillon moyen hebdomadaire du réseau<br />

maturation).<br />

Figure 3 : Evolution des teneurs de<br />

l’échantillon moyen hebdomadaire<br />

(g/l) 2001-2010<br />

Les évolutions en quantité sont différentes pour tartrique et malique : <strong>le</strong> premier reste<br />

globa<strong>le</strong>ment constant, ce qui est conforme aux données bibliographiques, alors que <strong>le</strong> malique<br />

est dégradé (figure 4). L’effet dilution est du à l’évolution du poids des grappes.<br />

40


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure<br />

4 : Evolution des quantités d’acide tartrique et malique en cours de maturation (échantillon moyen,<br />

en fonction du N° de contrô<strong>le</strong> maturation)<br />

Le déterminisme des teneurs en acides malique et tartrique est lié à la vigueur de la vigne, mais<br />

là aussi de façon différenciée entre <strong>le</strong>s deux : <strong>le</strong> malique est très influencé, <strong>le</strong> tartrique<br />

beaucoup moins (voir figure 5).<br />

Figure 5 : Relation entre la vigueur<br />

(poids des bois de tail<strong>le</strong>) et <strong>le</strong>s teneurs<br />

en acides à la récolte (essai entretien<br />

du sol-fumure azotée)<br />

Nous avons regardé la typologie des parcel<strong>le</strong>s maturation à récolte sur la période 2001-2010<br />

en fonction de la teneur (g/l) en acide tartrique (voir figure 6).<br />

41


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure 6 : Teneurs en acide tartrique moyenne, maxi et mini sur 2001-2010. Identification des parcel<strong>le</strong>s<br />

<strong>le</strong>s plus et <strong>le</strong>s moins acides du réseau maturation<br />

Le comportement de la parcel<strong>le</strong> la plus riche en moyenne en acide tartrique (n°7_1), et de la<br />

plus faib<strong>le</strong> (n°36) est montré sur la figure 6. Par contre, la parcel<strong>le</strong> la plus acide en moyenne ne<br />

l’est pas sur toutes <strong>le</strong>s années. Les écarts par <strong>rapport</strong> à la moyenne sont généra<strong>le</strong>ment de<br />

l’ordre de +/- 1 g/l (voir figure 6).<br />

Les écarts entre ces parcel<strong>le</strong>s peuvent s’expliquer par l’influence des terroirs et des modes de<br />

conduite ; <strong>le</strong>s caractéristiques de ces parcel<strong>le</strong>s sont en cours d’étude actuel<strong>le</strong>ment pour essayer<br />

de caractériser <strong>le</strong>ur effet sur l’acidité et plus particulièrement l’acide tartrique.<br />

Figure 7 : Comparaison à la moyenne<br />

de la parcel<strong>le</strong> la plus riche en acide<br />

tartrique (7_1), la plus faib<strong>le</strong> (36), une<br />

moyenne (37_1), à récolte (2001-2010)<br />

Ces résultats sont à rapprocher de l’étude sur l’Ugni blanc réalisée en 2005 qui avait montré<br />

que <strong>le</strong>s pratiques régiona<strong>le</strong>s de conduite du vignob<strong>le</strong> conduisent au maximum à +/- 1 g/l<br />

d’acidité tota<strong>le</strong>, soit sensib<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> même écart qu’entre parcel<strong>le</strong>s.<br />

42


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Conclusion<br />

Le raisin accumu<strong>le</strong> des acides durant sa phase herbacée jusqu’à la véraison où <strong>le</strong> potentiel<br />

maximal est atteint. Ensuite celui-ci décroît jusqu’à la récolte mais <strong>le</strong>s deux principaux acides<br />

ont un comportement différent qui a pu être caractérisé. Sur <strong>le</strong> réseau maturation, il apparait<br />

que <strong>le</strong>s parcel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus acides à véraison ne <strong>le</strong> sont plus à la récolte. Les écarts entre<br />

parcel<strong>le</strong>s restent cependant faib<strong>le</strong>s (+/- 1 g/l par <strong>rapport</strong> à la moyenne).<br />

Compte tenu de l’importance d’obtenir un pH bas dans <strong>le</strong> vin de distillation, une bonne acidité<br />

des raisins doit être recherchée à la récolte, avec suffisamment d’acide tartrique. Afin de mieux<br />

connaître <strong>le</strong> déterminisme de sa synthèse une nouvel<strong>le</strong> étude est en cours avec l’Institut<br />

d’œnologie de Bordeaux (ISVV) avec l’objectif de proposer à terme des itinéraires techniques<br />

favorisant des teneurs é<strong>le</strong>vées en acide tartrique.<br />

A l’avenir, pour trouver des marges de progression plus importantes, il faudra expérimenter<br />

des modalités de conduite du vignob<strong>le</strong> qui ne sont pas encore utilisées dans la région, mais<br />

éga<strong>le</strong>ment d’autres clones, cépages et porte-greffes.<br />

2 - Maturité aromatique<br />

A la suite des récoltes 2003 et 2005, il est apparu nécessaire de mieux évaluer la maturité des<br />

raisins en complément des indicateurs habituels : sucre et acidité. En effet, <strong>le</strong>s récoltes<br />

réalisées précocement pour éviter un TAVp trop é<strong>le</strong>vé et une acidité faib<strong>le</strong> ont donné des eauxde-vie<br />

ne présentant pas des caractéristiques aromatiques optima<strong>le</strong>s. Il a été formulé<br />

l’hypothèse d’un décalage entre maturité aromatique et technologique.<br />

2.1- Indicateurs de maturité<br />

Nous avons étudié plusieurs indicateurs destinés à évaluer la maturité aromatique des raisins.<br />

Un premier indicateur a été construit à partir de composés aromatiques du raisin qui évoluent<br />

significativement en cours de maturité et que l’on retrouve dans l’eau-de-vie nouvel<strong>le</strong> ; Il est<br />

mesuré sur raisin à partir de l’extrait isooctane d’un microdistillat de jus. (FERRARI, 2009).<br />

Indicateur r Maturité Aromatique = [cis-3 hexénol]/[terpineol]+[vitispirane]+[damascénone]<br />

Ce ratio a été mesuré sur <strong>le</strong>s essais maturité et sur l’échantillon moyen des contrô<strong>le</strong>s<br />

maturation hebdomadaires de 2008 à 2011 : supérieur à 3 à la véraison il diminue pendant la<br />

phase de maturation et tend vers une va<strong>le</strong>ur voisine de 1 à la maturité.<br />

Un autre ratio, dont la détermination analytique est plus simp<strong>le</strong>, est <strong>le</strong> <strong>rapport</strong> Cis 3-<br />

hexénol/hexanol, qui suit la même tendance. De plus, ce dernier est bien corrélé avec la date<br />

de récolte dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s.<br />

Le premier ratio (IMA) devrait permettre d’orienter <strong>le</strong> choix du type d’arôme recherché dans<br />

l’eau-de-vie. Le deuxième semb<strong>le</strong> plus indiqué pour déterminer une date de vendange en<br />

fonction des arômes du raisin.<br />

43


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure<br />

9 : Evolution des 2 Indicateurs de Maturité Aromatique des raisins au cours de la maturation<br />

(2008-2011)<br />

2.2- Composés volatils des eaux-de<br />

de-vie nouvel<strong>le</strong>s<br />

L’analyse en composante principa<strong>le</strong> des teneurs en composés volatils des eaux-de-vie pilotes<br />

des essais date de récolte est présentée sur la figure 10. Le groupe « précoce » est décrit par<br />

<strong>le</strong>s alcools en C6, <strong>le</strong> « tardif » par <strong>le</strong>s composés terpéniques (terpinéol, nérolidol).<br />

Précoce<br />

Médiane<br />

Figure 10 : Analyse en composante<br />

principa<strong>le</strong> des composés volatils des<br />

eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s 2005-2010<br />

(essais pilotes)<br />

Tardive<br />

Conclusion<br />

Les deux nouveaux indicateurs de maturité aromatique des raisins proposés apparaissent<br />

cohérents et présentent une bonne dynamique au cours de la période de maturation pour <strong>le</strong>s<br />

quatre années étudiées. Il reste à préciser des va<strong>le</strong>urs indicatrices de limites intéressantes :<br />

maturité aromatique insuffisante ou trop avancée, en relation avec la qualité sensoriel<strong>le</strong> des<br />

eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s.<br />

44


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Les résultats d’analyses d’arômes et <strong>le</strong>s dégustations des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s issues des<br />

essais maturité sont en cohérence. Il apparaît que la qualité de cel<strong>le</strong>s-ci en cas de vendange<br />

précoce est dépréciée, en corrélation avec des composés aromatiques (alcools en C6)<br />

marqueurs des notes de type « verdeur ». Ces résultats obtenus à l’échel<strong>le</strong> pilote doivent être<br />

confirmés par <strong>le</strong>s essais réalisés en grandeur réel<strong>le</strong>.<br />

3 - Impact qualitatif du botrytis sur <strong>le</strong>s vins et <strong>le</strong>s eaux-de<br />

de-vie<br />

Les effets négatifs sur la qualité aromatique des eaux-de-vie de l’altération de la vendange par<br />

<strong>le</strong> botrytis sont redoutés. Si ces effets sont faci<strong>le</strong>ment caractérisab<strong>le</strong>s sur moût et vin, il n’en<br />

n’est pas de même sur eau-de-vie nouvel<strong>le</strong>. Une étude de la Station Vitico<strong>le</strong> avait fait <strong>le</strong> point<br />

sur nos connaissances (URRUTY, 2007) et nous allons présenter ici <strong>le</strong>s dernières avancées.<br />

D’autre part, un aspect important est de pouvoir identifier <strong>le</strong>s moûts et <strong>le</strong>s vins potentiel<strong>le</strong>ment<br />

atteint par <strong>le</strong> botrytis afin de <strong>le</strong>s écarter si nécessaire de la production de l’eau-de-vie.<br />

3.1 - Le point sur <strong>le</strong>s marqueurs analytiques dans l’eau-de<br />

de-vie<br />

Les eaux-de-vie issues de vendanges botrytisées présentent un défaut sensoriel souvent décrit<br />

comme « odeur de champignon ». Le marqueur analytique de ce défaut est une cétone : la<br />

octèn-3-one, présente à de très faib<strong>le</strong> teneur (< µg/L), mais perceptib<strong>le</strong> au nez en raison de<br />

son seuil de détection olfactif très bas. Son dosage est diffici<strong>le</strong> et nous avons développé une<br />

méthode dédiée en GC/MS. Il est donc possib<strong>le</strong> maintenant de doser cette cétone et même la<br />

nonèn-3-one qui l’accompagne.<br />

Abundance<br />

800<br />

600<br />

400<br />

200<br />

Time--><br />

Abundance<br />

Ion 140.00 (139.70 | to 140.70): 11070711.D\DATASIM.MS<br />

32.152<br />

|<br />

|<br />

|<br />

|<br />

|<br />

|<br />

|<br />

31.50 32.00 32.50 33.00 33.50 34.00<br />

Figure 12 : 1 octen-3-one en GC/MS-<br />

SIM après dérivation 0.3 µg/L<br />

800<br />

600<br />

400<br />

200<br />

Ion 321.00 (320.70 to 321.70): 11070711.D\DATASIM.MS<br />

32.146<br />

Time--><br />

31.50 32.00 32.50 33.00 33.50 34.00<br />

Cependant, ce dosage spécifique est comp<strong>le</strong>xe et n’est pas utilisab<strong>le</strong> en routine. Nous avons<br />

donc développé une autre solution basée sur <strong>le</strong> dosage de l’extrait à l’isooctane, réalisé en<br />

routine. Il s’agit de doser l’alcool (octen-3 ol) correspondant à cette cétone. Sa teneur moyenne<br />

est de l’ordre de 100 µg/l dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie botrytisées.<br />

45


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3.2 - Un nouveau test pour <strong>le</strong>s moûts et vins<br />

Un kit immuno enzymatique apparu récemment sur <strong>le</strong> marché, <strong>le</strong> B-LFD (Quick Stix® de la<br />

société Envirologix) a été évalué par la Station Vitico<strong>le</strong> dans <strong>le</strong>s conditions régiona<strong>le</strong>s. Les<br />

avantages attendus de ce type de test sont la spécificité, la rapidité et la simplicité de mise en<br />

œuvre. Le résultat du test, semi quantitatif, se lit en dix minutes sur des bande<strong>le</strong>ttes ou à l’aide<br />

d’un <strong>le</strong>cteur optique (voir photos). Il est donc susceptib<strong>le</strong> d’être utilisé dans <strong>le</strong>s chais.<br />

La réponse donnée par ce test a été comparée au dosage de marqueurs traditionnels dans des<br />

moûts et des vins (acide gluconique, polyols) et au taux de présence visuel<strong>le</strong> du botrytis (voir<br />

figure 13).<br />

Ces résultats montrent l’intérêt de ce test rapide dans <strong>le</strong>s vins mais aussi dans <strong>le</strong>s moûts.<br />

D’autres essais sont en cours pour vérifier sa réponse pour des fortes va<strong>le</strong>urs de<br />

contamination. L’utilisation de ce kit pour sé<strong>le</strong>ctionner des vins en fonction de l’impact du<br />

botrytis semb<strong>le</strong> envisageab<strong>le</strong>. Les modalités exactes de son utilisation (dilution…) sont en<br />

cours d’évaluation et l’interprétation des résultats devra être affinée.<br />

Figure 13 : Corrélation des résultats du test rapide avec <strong>le</strong> taux visuel (%) et l’acide gluconique<br />

Lecteur optique de bande<strong>le</strong>ttes<br />

Résultats sur bande<strong>le</strong>ttes (d’après Envirologix)<br />

46


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

4 - Bibliographie<br />

BOITAUD L., 2009. Le changement climatique de la région de Cognac. Journée Technique de la Station<br />

Vitico<strong>le</strong> du BNIC, 10-09-2009, Cognac, France.<br />

DELOIRE A. 2007. Le raisin, métabolismes primaires : <strong>le</strong>s acides organiques. Fiche n°7, Observatoire<br />

vitico<strong>le</strong>, Montpellier SupAgro.<br />

www.obs-viti-cg34.com/viti/download_fi<strong>le</strong>.jsp?id_doc=1047<br />

URRUTY L., SNAKKERS G., AUDEBERT J., FERRARI G., LURTON L., 2010. Re<strong>le</strong>vance of an immunoassay<br />

test for rapid detection of botrytis cinerea in Ugni B. must and wine. Poster, MACROWINE June 16-18-<br />

2010, Torino, Italy.<br />

URRUTY L., 2007. Le point sur <strong>le</strong>s marqueurs analytiques de l’état sanitaire de la vendange : du moût à<br />

l’eau-de-vie. Journée Technique de la Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC, 6-09-2007, Cognac, France.<br />

FERRARI G., LOISEAU B. 2007. Du raisin à l’eau-de-vie : nouvel<strong>le</strong>s perspectives de caractérisation de la<br />

maturité. Journée Technique de la Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC, 6-09-2007, Cognac, France.<br />

FERRARI G., ROULLAND C., 2009. Qualité de la matière première : nouvel<strong>le</strong>s avancées. Journée<br />

Technique de la Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC, 10-09-2009, Cognac, France.<br />

FERRARI G. 2005. Les caractéristiques de la production du moût : état actuel et perspectives. Journée<br />

Technique de la Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC, 8-09-2005, Cognac, France.<br />

ROUBELAKIS K.A., 2001. Mo<strong>le</strong>cular Biology and biotechnology of the Grapevine. Angelakis (ed.). Kluwer<br />

Academic Publishers. 35-57.<br />

LE CUNFF L., KELNER J.J., TORREGROSA L., BOUQUET A., THIS P., ROMIEU C., 2010. Génomique et<br />

acidité de la baie. Colloque Euroviti. Angers, France.<br />

MELINO V.J., SOOLE K.L., FORD C.M., 2009. Ascorbate metabolism and the developmental demand for<br />

tartaric and oxalic acids in ripening grape berries. BMC Plant Biology. 9 :145.<br />

MELINO V.J., SOOLE K.L., FORD C.M., 2009. A method for determination of fruit derived ascorbic,<br />

tartaric, oxalic and malic acids, and its application to to the study of ascorbic acid catabolism in<br />

grapevines. Australian Journal of Grape and Wine Research. 15, 293-302.<br />

47


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

L’éthanal : du raisin à l’eau-de-vie<br />

Bernard GALY, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

1 - Introduction<br />

En œnologie, l'éthanal (acétaldéhyde, ou aldéhyde acétique) est un produit intermédiaire de<br />

transformation, principa<strong>le</strong>ment produit par la <strong>le</strong>vure à un stade charnière entre deux<br />

mécanismes biochimiques : la glycolyse et la fermentation alcoolique. Différents facteurs<br />

technologiques peuvent éga<strong>le</strong>ment être à l’origine d’une synthèse ou d’une dégradation<br />

d’éthanal dans <strong>le</strong> vin.<br />

L’éthanal représente un réel enjeu qualitatif dans <strong>le</strong> processus d’élaboration du Cognac.<br />

Lorsqu’il est présent en excès dans <strong>le</strong>s vins, il est alors responsab<strong>le</strong> du caractère « éthéré » qui<br />

déprécie la qualité des eaux-de-vie. Certaines prescriptions techniques permettent aujourd’hui<br />

d’éviter la présence excessive d’éthanal résiduel dans <strong>le</strong>s vins, lors de la vinification et en cours<br />

de conservation jusqu’à la distillation.<br />

Ethanal :<br />

Masse molaire :<br />

Point d’ébullition :<br />

CH3CHO<br />

44,05 g.mol-1<br />

20.8°C<br />

Un composé très volatil et très réactif du vin<br />

En présence d’alcool, <strong>le</strong>s aldéhydes évoluent <strong>le</strong>ntement vers un équilibre chimique avec <strong>le</strong>s<br />

formes acétals (loi d’action de masse). L’équilibre dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s entre<br />

l’éthanal présent et la forme acétal est atteint quelques mois après la distillation ; il est<br />

fonction du titre alcoométrique et du pH du milieu. Pour tenir compte de cet équilibre<br />

chimique, on traduit <strong>le</strong>s teneurs en éthanal et acétal présents dans <strong>le</strong>s microdistillations ou <strong>le</strong>s<br />

eaux-de-vie en « éthanal total » selon la relation : [éthanal total] = [éthanal] + [acétal] /118 x<br />

44.<br />

48


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2 – Les mécanismes<br />

de formation de l’éthanal<br />

2.1 – Un produit intermédiaire de la fermentation alcoolique<br />

La glycolyse comprend <strong>le</strong>s réactions chimiques qui, à partir du sucre assurent la libération<br />

d'énergie sous forme de molécu<strong>le</strong>s d'ATP. Au terme de ces réactions se forme l'acide pyruvique<br />

qui doit disparaître pour que la dégradation des sucres se poursuive. Dans <strong>le</strong> moût, milieu<br />

riche en sucre et pauvre en oxygène, la <strong>le</strong>vure ne peut recourir à la respiration pour<br />

transformer cet acide. Un autre processus d'élimination est mis en place : la fermentation<br />

alcoolique.<br />

La fermentation alcoolique proprement dite permet la transformation de l'acide pyruvique et<br />

conduit à l'éthanol, produit final de dégradation, qui est pour la <strong>le</strong>vure un déchet dont el<strong>le</strong> se<br />

débarrasse dans <strong>le</strong> moût de raisin. Le stade ultime de cette transformation est la réduction de<br />

l’éthanal en éthanol sous l’effet d’une enzyme, l’alcool déhydrogénase. Au cours de cette<br />

réaction, la <strong>le</strong>vure obtient <strong>le</strong> recyclage d'une molécu<strong>le</strong> (NADH2, NAD) réutilisée pour la<br />

réalisation de la glycolyse.<br />

La fermentation glycéro-pyruvique est la seconde voie de dégradation des sucres et du<br />

recyclage du NADH2, NAD. Cette réaction est favorisée au début de la vinification lors de la<br />

multiplication cellulaire et sert à amorcer la fermentation alcoolique dès que l’éthanal est en<br />

quantité suffisante pour jouer son rô<strong>le</strong> réducteur (RIBEREAU-GAYON et al).<br />

Figure 1 : Voies métaboliques des sucres par la <strong>le</strong>vure,<br />

(1) fermentation glycéropyruvique, (2) glycolyse et (3) fermentation alcoolique (PRIOR)<br />

49


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.2 – Oxydation de l’éthanol<br />

Certains mécanismes oxydatifs interviennent à différents stade de l’élaboration du Cognac :<br />

Lors de la conservation du vin :<br />

En cas de mauvaises conditions d’ouillage des cuves, certaines <strong>le</strong>vures de contamination sont<br />

capab<strong>le</strong>s d’oxyder l’éthanol du vin en éthanal, c’est la maladie de la f<strong>le</strong>ur (IFV-Fiche pratique).<br />

Le vin acquiert un caractère « d'évent » caractéristique, dû à l'éthanal. Les microorganismes<br />

responsab<strong>le</strong>s sont des <strong>le</strong>vures à métabolisme oxydatif du genre Candida, qui se développent<br />

en surface du vin en formant un voi<strong>le</strong> blanchâtre.<br />

La parade consiste donc à réaliser très tôt <strong>le</strong>s p<strong>le</strong>ins des cuves de conservation qui doivent être<br />

équipées de cheminées d’ouillage. Il faut éga<strong>le</strong>ment prévoir un ou plusieurs compléments de<br />

remplissage, quelques jours voire quelques semaines après la fin des vinifications, pour<br />

compenser <strong>le</strong>s réductions de volume du vin (fermentation malolactique, refroidissement).<br />

Il est aussi intéressant de pouvoir disposer d’une cuve à chapeau flottant permettant la<br />

conservation d’un volume variab<strong>le</strong> de vin à l’abri de l’air.<br />

Lors du vieillissement en fûts :<br />

Lors du vieillissement sous bois, <strong>le</strong> taux d’éthanal total augmente dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie en<br />

relation avec des réactions d’oxydation chimique de l’alcool éthylique (éthanol) avec <strong>le</strong><br />

dioxygène de l’air.<br />

2.3 - Réactivité chimique de l’éthanal<br />

Le SO 2, utilisé comme antioxydant ou antiseptique en œnologie classique, ne peut pas être<br />

employé pour l’élaboration du Cognac.<br />

En effet, lors de la vinification, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>vures réagissent à la présence de dioxyde de soufre par<br />

une production accrue d’éthanal. Cette réponse de la <strong>le</strong>vure correspond à une réaction de<br />

détoxication du milieu : <strong>le</strong> SO 2 combiné à l’acétaldéhyde n’est plus toxique pour la cellu<strong>le</strong>.<br />

L’élaboration de vins en présence de SO 2 conduit donc inévitab<strong>le</strong>ment à la production d’eauxde-vie<br />

riches en éthanal : la liaison éthanal-SO 2, qui est stab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> vin, se rompt lors de la<br />

distillation en libérant l’éthanal.<br />

Le sulfitage des vins en cours de conservation, qui a été pratiqué à faib<strong>le</strong>s doses jusqu’aux<br />

années 90, n’est plus utilisé aujourd’hui. Les effets bénéfiques du SO 2, vis-à-vis des<br />

microorganismes d’altération (flores bactériennes lactique et acétique, <strong>le</strong>vures de la f<strong>le</strong>ur), sont<br />

en effet accompagnés d’une augmentation significative d’éthanal dans <strong>le</strong>s vins (ROULLAND,<br />

1997). Le bilan global ne montre pas d’amélioration significative de la qualité des eaux-de-vie<br />

produites.<br />

L’éthanal peut participer éga<strong>le</strong>ment, en milieu fortement réducteur et en présence de<br />

composés soufrés, à la formation de composés indésirab<strong>le</strong>s comme <strong>le</strong> mercaptan.<br />

H²S + Ethanal → Ethyl sulfure (Mercaptan)<br />

Cette déviation organo<strong>le</strong>ptique, qui peut poser problème pour <strong>le</strong>s vins de consommation, ne<br />

présente pas un réel danger pour <strong>le</strong> Cognac grâce à l’effet neutralisant du cuivre, vis-àvis des<br />

composés soufrés, lors de la distillation.<br />

50


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3 - Contexte de la production des vins de distillation<br />

3.1 - Sé<strong>le</strong>ction des vins<br />

La vinification des vins de base Cognac s’inscrit dans un contexte œnologique particulier. Les<br />

composés volatils formés au cours des étapes de transformation et <strong>le</strong>ur évolution au cours de<br />

la conservation des vins ont une incidence primordia<strong>le</strong> sur une production d’eau-vie de qualité.<br />

On peut retenir quelques grands principes :<br />

• l’absence d’antiseptique (dioxyde de soufre notamment) lors des vinifications comme<br />

au cours de la conservation des vins,<br />

• une initialisation rapide de la fermentation alcoolique avec des souches de <strong>le</strong>vures<br />

qualifiées,<br />

• la conservation des vins à l’abri de l’air.<br />

Les contrô<strong>le</strong>s qualité mis en œuvre par <strong>le</strong>s différents opérateurs prennent en compte <strong>le</strong> niveau<br />

d’éthanal résiduel dans <strong>le</strong>s vins. Les va<strong>le</strong>urs limites retenues par <strong>le</strong>s acheteurs peuvent être<br />

faib<strong>le</strong>s, voire très basses, ce qui fait de ce paramètre un élément clé de la sé<strong>le</strong>ction qualitative<br />

réalisée en amont de la distillation. Les critères qualitatifs retenus aujourd’hui ont beaucoup<br />

progressé dans <strong>le</strong> sens de l’exigence par <strong>rapport</strong> aux va<strong>le</strong>urs d’il y a vingt cinq ans (tab<strong>le</strong>au 1).<br />

Ces va<strong>le</strong>urs de référence sont indicatives et la plupart du temps el<strong>le</strong>s sont utilisées en<br />

complément de la dégustation.<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : Sé<strong>le</strong>ction qualitative des vins avant distillation<br />

Observateur<br />

Va<strong>le</strong>ur excessive d’éthanal total<br />

mg/L sur microdistillation à 70% vol.<br />

1987 Commission de la qualité du BNIC Au-delà de 200<br />

Aujourd’hui<br />

Distillateurs de profession,<br />

Maisons de négoce<br />

de 30 à 100<br />

selon <strong>le</strong>s opérateurs<br />

3.2 - Qualité des eaux-de<br />

de-vie<br />

Le réseau annuel d’observation de la qualité de la Station Vitico<strong>le</strong> donne un aperçu des<br />

variations de la composition des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s.<br />

Les teneurs en éthanal total peuvent varier sensib<strong>le</strong>ment en fonction de l’année, mais aussi<br />

selon <strong>le</strong> site de production.<br />

En moyenne, pour <strong>le</strong>s quinze dernières années, la teneur en éthanal total dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie<br />

nouvel<strong>le</strong>s de cet échantillonnage est légèrement inférieure à 20 mg/L. Une dispersion des<br />

résultats assez importante apparaît. La moyenne peut ainsi passer du simp<strong>le</strong> au doub<strong>le</strong> entre<br />

années avec un minimum à 11.7 mg/L en2010, et un maximum à 22.8 mg/L en 2007<br />

(figure 2).<br />

51


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Par ail<strong>le</strong>urs, l’analyse des données montre ponctuel<strong>le</strong>ment un effet site lié notamment aux<br />

méthodes de travail des producteurs. Parmi <strong>le</strong>s plus fortes va<strong>le</strong>urs d’éthanal, certaines sont<br />

corrélées à de faib<strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs de lactate d’éthy<strong>le</strong> (effet FML). Mais ce mécanisme n’explique pas<br />

tout. D’autres facteurs interviennent éga<strong>le</strong>ment, comme <strong>le</strong>s conditions de conservation<br />

notamment, pour expliquer la tendance pour certains sites à produire des eaux-de-vie à<br />

teneurs plutôt fortes ou faib<strong>le</strong>s en éthanal. Les résultats de distribution de l’éthanal total<br />

présentés par la figure 4 illustrent <strong>le</strong>s effets des différents facteurs : millésime, FML, pratiques<br />

de certains bouil<strong>le</strong>urs de cru.<br />

Figure 2 : Réseau d’observation de la qualité des eaux-de-vie de la Station Vitico<strong>le</strong> : effet année,<br />

dispersion des résultats (35 à 42 éch. selon <strong>le</strong>s années)<br />

Figure 3 : Réseau d’observation de la qualité des eaux-de-vie de la Station Vitico<strong>le</strong> : effet sites, dispersion<br />

des résultats (35 à 42 éch. selon <strong>le</strong>s années)<br />

52


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1 site présent<br />

9 fois sur 15<br />

(ET > 30)<br />

ETHANAL -TOTAL<br />

mg/L EDV nouvel<strong>le</strong>s<br />

(N=505)<br />

Lactate d'éthy<strong>le</strong><br />

180,0<br />

150,0<br />

120,0<br />

1 site présent<br />

8 fois sur 15<br />

(ET < 10)<br />

90,0<br />

2007<br />

29<br />

2010<br />

12<br />

60,0<br />

30,0<br />

0,0<br />

Figure 4 : Réseau d’observation de la qualité des eaux-de-vie de la Station Vitico<strong>le</strong>.<br />

Distribution des résultats de 1996 à 2010. Illustration des effets millésime, FML et sites<br />

3.3 - Effets souche de <strong>le</strong>vure et température fermentaire<br />

Les conditions du dérou<strong>le</strong>ment de la fermentation alcoolique peuvent occasionner des teneurs<br />

résiduel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s d’éthanal dans <strong>le</strong>s vins. Si l’on s’intéresse au dosage instantané de<br />

l’éthanal en cours de vinification (figure 5) on remarque, dès <strong>le</strong>s premières heures, une<br />

accumulation de ce composé dans <strong>le</strong> milieu. Au cours de cette phase qui correspond à la<br />

fermentation glycéropyruvique, l’éthanal s’accumu<strong>le</strong> avant de jouer un rô<strong>le</strong> réducteur et<br />

d’amorcer la fermentation alcoolique. Le niveau maximal atteint en cours de fermentation et<br />

<strong>le</strong>s teneurs résiduel<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> vin fini semb<strong>le</strong>nt liés à la souche de <strong>le</strong>vure utilisée et à la<br />

cinétique fermentaire. Les va<strong>le</strong>urs <strong>le</strong>s plus é<strong>le</strong>vées en éthanal peuvent éga<strong>le</strong>ment être reliées<br />

aux températures de fermentation <strong>le</strong>s plus basses (FABREGUETTE, 1995).<br />

Ethanal mg/L (microdistillation)<br />

400<br />

350<br />

300<br />

250<br />

200<br />

150<br />

100<br />

50<br />

0<br />

0 16 36 45 66 89 132 184 228<br />

Heures de fermentation<br />

Figure 5 : Effets souche de <strong>le</strong>vure et température fermentaire sur la production d’éthanal en cours de<br />

fermentation alcoolique<br />

Souche A 28° C ―, Souche B 28° C ―, Souche A 20° C ----, Souche B 20° C ----<br />

53


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3.4 - Rô<strong>le</strong> régulateur des bactéries de la fermentation malolactique sur la<br />

teneur en éthanal résiduel du vin<br />

Les bactéries lactiques (oenococcus oeni) ont la faculté de dégrader des quantités importantes<br />

d’éthanal au cours de la fermentation malolactique. Cette transformation apparaît donc comme<br />

un véritab<strong>le</strong> mécanisme régulateur de la teneur des vins en éthanal qui est réduit en éthanol<br />

(FABREGUETTE, GALY, 1995).<br />

Sur un plan pratique, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de l’achèvement des fermentations malolactiques des vins<br />

avant la distillation permet d’éviter, dans la plupart des cas, l’apparition du défaut éthéré sur<br />

<strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s. Le contrô<strong>le</strong> de la présence excessive d’éthanal s’impose pour <strong>le</strong>s<br />

vins dont la transformation malolactique ne serait pas faite.<br />

Des cas particuliers d’une moindre fermentescibilité malolactique peuvent se rencontrer pour<br />

plusieurs raisons :<br />

- l’effet de la souche de <strong>le</strong>vure, qui exerce une inhibition de la flore bactérienne,<br />

- <strong>le</strong> refroidissement brutal du vin après la fermentation alcoolique,<br />

- un pH très bas du vin inférieur à 3.1,<br />

- la synthèse par <strong>le</strong>s <strong>le</strong>vures d’acides gras inhibiteurs, dans des conditions de stress.<br />

Ce dernier point, qui relie <strong>le</strong>s difficultés de fermentescibilité malolactique des vins à la<br />

présence d'acides gras octanoïque (C8) et décanoïque (C10), a fait l’objet de nombreux travaux<br />

(LAFON-LAFOURCADE, LONVAUD-FUNEL, STEVENS, CAPUCHO, RENOUF). Certains auteurs<br />

(RENOUF et ROY, 2011) évoquent notamment <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> inhibiteur de certains résidus de produits<br />

de traitement, qui agiraient sur <strong>le</strong> métabolisme des <strong>le</strong>vures et conduiraient cel<strong>le</strong>s-ci à produire<br />

plus d’acides gras C8 et C10. Certains résidus pourraient aussi perturber indirectement la<br />

croissance des bactéries lactiques.<br />

3.5 - Conservation des vins et mise en œuvre lors de la distillation<br />

D’une manière généra<strong>le</strong>, on n’observe pas d’augmentation de l’éthanal dans <strong>le</strong>s vins en attente<br />

de distillation. Il suffit pour cela que <strong>le</strong>s bonnes conditions de conservation soient respectées,<br />

avec notamment la mise en œuvre d’un ouillage comp<strong>le</strong>t des cuves. L’éthanal a généra<strong>le</strong>ment<br />

tendance à diminuer dans <strong>le</strong>s vins au cours des premières semaines ou premiers mois de<br />

conservation, suite au calage des fermentations malolactiques. Les teneurs se stabilisent par la<br />

suite (figure 6).<br />

Par contre, des risques significatifs de déviation existent lors de la distillation, en raison de<br />

l’oxydation du vin au cours de la vidange progressive des cuves. Pour limiter ce phénomène, on<br />

peut agir en réduisant la capacité des cuves de charge de l’alambic, de manière à limiter <strong>le</strong><br />

temps de mise à l’air du vin à 48 heures maximum.<br />

Une seconde solution, plus confortab<strong>le</strong>,<br />

Ethanal (mg/L microdistillation à 70 % vol.)<br />

consiste à équiper <strong>le</strong> bassin ou la cuve<br />

50 -<br />

de charge d’un système d’inertage.<br />

40 -<br />

30 -<br />

Figure 6 : Suivi de l’évolution de l’éthanal résiduel dans<br />

<strong>le</strong>s vins en cours de conservation. Synthèse de résultats<br />

d’analyses (récoltes 2007, 2008, 2010)<br />

20 -<br />

10 -<br />

0 -<br />

Oct Nov Déc Jan Fév Mars<br />

54


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

4 - Dosage de l’éthanal – facteurs d’erreurs de mesure<br />

4.1 - Echantillonnage<br />

Quelques précautions doivent être prises pour s’assurer que l’échantillon reflète bien la<br />

composition réel<strong>le</strong> du vin en cuve. Préférer <strong>le</strong>s prises d’échantillons par robinets dégustateurs<br />

en avinant <strong>le</strong> contenant au préalab<strong>le</strong>. Si <strong>le</strong> prélèvement ne peut se faire que par <strong>le</strong> haut de la<br />

cuve, il est nécessaire de pré<strong>le</strong>ver l’échantillon à cœur. La couche de vin située sous la trappe<br />

de fermeture est généra<strong>le</strong>ment plus riche en éthanal. La prise d’échantillon est réalisée à l’aide<br />

d’une canne de prélèvement ou d’un panier inox <strong>le</strong>sté. Le choix du récipient est très<br />

important : il doit permettre <strong>le</strong> remplissage comp<strong>le</strong>t et <strong>le</strong> bouchage hermétique d’un récipient<br />

chimiquement neutre. La bouteil<strong>le</strong> d’eau minéra<strong>le</strong> en matière plastique convient bien à cet<br />

usage.<br />

Un élément à prendre éga<strong>le</strong>ment en compte est <strong>le</strong> délai entre <strong>le</strong> prélèvement et l’analyse, qui<br />

ne doit pas excéder 24 h. Au-delà, l’éthanal de l’échantillon peut augmenter.<br />

4.2 - Analyses<br />

L’éthanal et l’acétal sont classiquement dosés par Chromatographie en Phase Gazeuse, en<br />

injection directe (R CE 2870/2000).<br />

Leur somme en équiva<strong>le</strong>nt éthanal constitue, avec l’acétate d’éthy<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s alcools supérieurs et<br />

l’acidité volati<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s substances volati<strong>le</strong>s dont <strong>le</strong>s minimas sont rég<strong>le</strong>mentés pour plusieurs<br />

spiritueux, dont <strong>le</strong>s eaux-de-vie de vin (R CE 110/2008).<br />

La précision des dosages, notamment pour la forme éthanal, est moins bonne que cel<strong>le</strong><br />

constatée pour <strong>le</strong>s autres composés volatils. Le tab<strong>le</strong>au 2 donne <strong>le</strong>s coefficients de dispersion<br />

des résultats de dosage des deux composés comparativement à ceux des alcools supérieurs<br />

dont la dispersion est faib<strong>le</strong>. On peut constater la plus faib<strong>le</strong> dispersion des résultats de<br />

l’éthanal total, ce qui conforte bien l’intérêt d’utiliser cette conversion.<br />

Tab<strong>le</strong>au 2 : Dispersion des résultats de dosage de composés volatils, Coefficients de dispersion (%)<br />

Intralaboratoire<br />

(SV)<br />

Interlaboratoires<br />

circuit régional Cognac<br />

éthanal 15 25<br />

acétal 3 15<br />

Ethanal total* 8 10<br />

alcools supérieurs 2 5<br />

* [éthanal total] = [éthanal] + [acétal] x 44/118<br />

55


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

5 - Acétalisation<br />

de l’éthanal en milieu hydroalcoolique<br />

5.1 - Équilibre chimique<br />

Dans l’eau-de-vie nouvel<strong>le</strong> fraîchement distillée, une réaction d’acétalisation se réalise<br />

<strong>le</strong>ntement. L’éthanal tend vers un équilibre avec sa forme acétal (diéthoxy-1,1-éthane), selon<br />

la loi d’action de masse : éthanal + éthanol acétal + eau.<br />

A la sortie de l’alambic, l’éthanal est la forme majoritaire. Les proportions évoluent en quelques<br />

mois vers l’équilibre qui est atteint en moins d’un an. L’acétal devient alors prédominant<br />

(figure 7).<br />

Les proportions d’éthanal et d’acétal à l’équilibre dépendent de la richesse relative en eau et en<br />

éthanol. Ainsi pour un TAV de 70 % vol., <strong>le</strong> ratio acétal/éthanal à l’équilibre est supérieur à 2.<br />

Ce ratio est identique quel<strong>le</strong>s que soient <strong>le</strong>s conditions de stockage des eaux-de-vie (témoin<br />

sous verre, fûts, tonneaux - figure 8).<br />

Figure 7 : Evolution des teneurs en<br />

éthanal et acétal après distillation<br />

Figure 8 : Evolution du ratio<br />

acétal/éthanal en fonction du TAV de<br />

l’eau-de-vie<br />

56


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

5.2 - Impact organo<strong>le</strong>ptique<br />

En solution hydroalcoolique (40 % vol.), <strong>le</strong>s seuils de détection sensoriel<strong>le</strong> ont été évalués à<br />

0.5 mg/L pour l’acétal et à 6.4 mg/L pour l’éthanal. L’acétal possède donc un impact<br />

organo<strong>le</strong>ptique environ 10 fois plus important que l’éthanal. Par ail<strong>le</strong>urs, la note olfactive de<br />

l’acétal, « alcool à brû<strong>le</strong>r » à forte concentration, est plus désagréab<strong>le</strong> que cel<strong>le</strong> de l’éthanal qui<br />

s’apparente à la « pomme verte ». Ces nuances organo<strong>le</strong>ptiques, clairement identifiées pour de<br />

faib<strong>le</strong>s teneurs dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s par des dégustateurs entraînés, sont moins<br />

perceptib<strong>le</strong>s dès <strong>le</strong> début du vieillissement sous bois de chêne.<br />

6 - Conclusion<br />

L’éthanal est principa<strong>le</strong>ment un composé intermédiaire du métabolisme fermentaire de la<br />

<strong>le</strong>vure. Il peut éga<strong>le</strong>ment provenir de l’oxydation chimique de l’éthanol. Sa teneur dans <strong>le</strong>s vins<br />

de base Cognac doit être la plus basse possib<strong>le</strong>.<br />

L’éthanal constitue aujourd’hui un critère important du contrô<strong>le</strong> qualité des vins, réalisé en<br />

amont de la distillation. Au-delà d’un certain seuil, il est responsab<strong>le</strong>, avec sa forme acétalisée,<br />

du caractère éthéré des eaux-de-vie.<br />

La maîtrise des étapes fermentaires, des conditions de la conservation des vins et de <strong>le</strong>ur mise<br />

en œuvre en distil<strong>le</strong>rie, doit permettre de garantir un niveau qualitatif irréprochab<strong>le</strong>.<br />

7 - Bibliographie<br />

RIBEREAU-GAYON P., DUBOURDIEU D., DONECHE B., LONVAUD A., 1998. Traité d’œnologie, Tome 1 :<br />

Microbiologie du vin, vinifications, Ed Dunod, pp 68-73.<br />

PRIOR B.A., HOHMANN S.. Glycerol production and osmoregulation in Yeast sugar metabolism, Ed. by<br />

ZIMMERMANN F.K., ENTIAN K.-D., pp 313-337.<br />

STEENSMA H.Y.. From Pyruvate to Acetyl-Coenzyme A and Oxaloacetate in Yeast sugar metabolism,<br />

Ed. by ZIMMERMANN F.K., ENTIAN K.-D., pp 339-357.<br />

IFV - Publications technique – Fiches pratiques « La maladie de la f<strong>le</strong>ur »<br />

http://www.vignevin-sudouest.com/publications/fiches-pratiques/f<strong>le</strong>ur.php<br />

ROULLAND C., 1997. Journée technique de la Station Vitico<strong>le</strong>, Thème IV : Connaissance du Cognac -<br />

Les facteurs de qualité - Mécanismes fermentaires mis en jeu lors de la vinification et de la<br />

conservation du vin : conséquences qualitatives.<br />

FABREGUETTE V., 1995. Mémoire de DNO, Université de Bourgogne Institut Universitaire de la Vigne et<br />

du Vin. Etude des facteurs de production de l’éthanal lors de la vinification des vins pour l’élaboration<br />

des eaux-de-vie de Cognac.<br />

GALY B., ROULLAND C., BERNARD V., FABREGUETTE V., 1995. Facteurs de production de l'éthanal en<br />

vinification, 5ème symposium d’œnologie de Bordeaux 15-17 juin.<br />

LAFON-LAFOURCADE S., GENEIX C., RIBEREAU-GAYON P., 1984. Appl. Environ. Microbiol. 47 : 1246-<br />

1249.<br />

LONVAUD-FUNEL A., JOYEUX A., DESENS C., 1988. J.Sci Food. Agric., 44 : 183-192.<br />

STEVENS S., SERVAAS HOFMEYR J-H., 1993. Appl. Microbiol. Biotechnol. 38 : 656-663.<br />

CAPUCHO I., SAN ROMÃO M.V.. Appl. Microbiol. Biotechnol. 42 : 391-395.<br />

57


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

RENOUF et al, 2010. Fermentescibilité malolactique des vins : rô<strong>le</strong> essentiel des acides octanoïques et<br />

décanoïques, problématique et solutions. Rev ; Fr. Oenol. 243, 10-16.<br />

RENOUF V. et al., 2011. Rô<strong>le</strong> de certains résidus de traitements phytosanitaires dans l’inhibition des<br />

bactéries de la fermentation malolactique dans <strong>le</strong>s vins. 9ème Symposium d’œnologie de Bordeaux<br />

15-17 juin.<br />

58


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Dynamique de la synthèse des esters et des alcools<br />

supérieurs au cours de la fermentation alcoolique :<br />

nouvel<strong>le</strong>s avancées<br />

Jean-Marie SABLAYROLLES, INRA Montpellier<br />

Pamela NICOLLE, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

1 - Introduction<br />

La fermentation alcoolique est une étape clé dans l'élaboration du vin. Au cours de ce<br />

processus, <strong>le</strong>s sucres sont majoritairement convertis en éthanol et dioxyde de carbone (CO 2),<br />

mais de nombreux autres composés sont aussi synthétisés. Certains de ces composés jouent<br />

un rô<strong>le</strong> important sur <strong>le</strong>s propriétés sensoriel<strong>le</strong>s du vin final. La souche de <strong>le</strong>vure a un impact<br />

majeur, toutefois la composition du moût et <strong>le</strong> mode de conduite de la fermentation sont aussi<br />

très importants.<br />

Le niveau technologique des caves s’est nettement amélioré ces dernières années (régulation<br />

de température, <strong>le</strong>vurage, …), mais la fermentation alcoolique reste encore parfois mal<br />

maîtrisée. Cette situation tend à évoluer et on constate une volonté accrue des viticulteurs à<br />

contrô<strong>le</strong>r cette étape. L’utilisation de capteurs pour analyser en temps réel la fermentation est<br />

de plus en plus envisagée et ce même à échel<strong>le</strong> industriel<strong>le</strong>.<br />

Le suivi en ligne de la fermentation permet d'effectuer des mesures avec une haute fréquence<br />

d’acquisition (plusieurs mesures par heure). Plusieurs méthodes ont été proposées pour<br />

contrô<strong>le</strong>r la bioconversion du sucre en éthanol et CO 2 (SABLAYROLLES, 2009) et des prototypes,<br />

voire des produits commerciaux sont d’ores et déjà disponib<strong>le</strong>s. Grâce à certains de ces<br />

capteurs, et plus particulièrement ceux mesurant <strong>le</strong> dégagement de CO 2, il est possib<strong>le</strong><br />

d'évaluer non seu<strong>le</strong>ment la quantité d’éthanol et de sucre résiduel, mais aussi la vitesse de<br />

dégagement de CO 2. Ces informations supplémentaires sont importantes parce que la vitesse<br />

de fermentation instantanée est directement proportionnel<strong>le</strong> à (i) l'activité de la <strong>le</strong>vure<br />

(importance microbiologique) et (ii) l'énergie exigée pour <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de température<br />

(importance technologique).<br />

Bien que <strong>le</strong>s objectifs d’ordre technologique représentent généra<strong>le</strong>ment une condition<br />

préalab<strong>le</strong> (épuisement des sucres, durée de la fermentation, énergie nécessaire pour <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong><br />

de température …), l’optimisation de la qualité du produit reste cependant l’objectif principal.<br />

Ce critère diffici<strong>le</strong>ment mesurab<strong>le</strong>, n’est accessib<strong>le</strong> que par l’analyse sensoriel<strong>le</strong>. Cette<br />

technique lourde et coûteuse est mal adaptée au contrô<strong>le</strong> des fermentations. Heureusement,<br />

des molécu<strong>le</strong>s spécifiques de différents « sty<strong>le</strong>s de vins » ont été mises en évidence.<br />

59


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

El<strong>le</strong>s sont :<br />

- soit issues du métabolisme <strong>le</strong>vurien. Il s’agit des arômes fermentaires, avec parmi <strong>le</strong>s<br />

molécu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus abondamment produites (plusieurs mg/L à plusieurs dizaines de<br />

mg/L), <strong>le</strong>s alcools supérieurs et <strong>le</strong>s esters. Ces composés peuvent avoir un fort impact<br />

organo<strong>le</strong>ptique, plus particulièrement dans <strong>le</strong> cas des vins jeunes et fruités.<br />

- soit issues de molécu<strong>le</strong>s précurseurs déjà présentes dans <strong>le</strong> raisin et libérées par la<br />

<strong>le</strong>vure. Il s’agit des arômes variétaux, qui sont spécifiques de certains cépages.<br />

Dans cette étude, un dispositif expérimental permettant la mesure toutes <strong>le</strong>s heures de la<br />

concentration en composés volatils majoritairement formés lors de la fermentation (alcools<br />

supérieurs et esters) est présenté. Quelques résultats sont ensuite exposés pour illustrer<br />

l’intérêt de ce dispositif.<br />

2 - Le système de suivi en ligne des composés volatils<br />

2.1 - Description et validation<br />

Le suivi des composés volatils au cours de la fermentation se fait par un système de<br />

chromatographie en phase gazeuse (CPG) en ligne. L’ensemb<strong>le</strong> du dispositif expérimental est<br />

présenté en Figure 1. Il permet de suivre conjointement l’évolution des teneurs en composés<br />

carbonés et soufrés présents dans <strong>le</strong> gaz de fermentation. Quatre fermenteurs sont<br />

instrumentés et la fréquence maxima<strong>le</strong> d’analyse est de une par heure.<br />

Figure 1 : Système de chromatographie en phase gazeuse en ligne utilisé pour la mesure des composés<br />

volatils dans <strong>le</strong>s gaz de sortie de fermentation (MOURET et al., 2010).<br />

Les composés carbonés présents dans <strong>le</strong> ciel gazeux du fermenteur sont au préalab<strong>le</strong><br />

concentrés. Pour cela, <strong>le</strong> gaz fermentaire est pompé à un débit de 14 mL/min à travers une<br />

ligne de transfert chauffée et concentré pendant 6 minutes sur un piège froid (Tenax TM). Le<br />

piège est alors chauffé à 160°C pendant 1 minute et <strong>le</strong>s composés désorbés sont envoyés vers<br />

<strong>le</strong> chromatographe en phase gazeuse pour analyse. Les composés soufrés sont quant à eux,<br />

directement injectés (bouc<strong>le</strong> d’injection de 1 mL) puis analysés. Les différents paramètres<br />

chromatographiques sont renseignés dans <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au 1.<br />

60


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : Récapitulatif des paramètres chromatographiques du système de chromatographie en phase<br />

gazeuse en ligne utilisé pour la mesure des composés volatils dans <strong>le</strong>s gaz de sortie de fermentation.<br />

Injecteur<br />

Colonne<br />

Four<br />

Détecteur<br />

Type<br />

Température<br />

Pression<br />

Gaz<br />

Type<br />

Dimension<br />

Programme de<br />

température<br />

Type<br />

Température<br />

Suivi des carbonés<br />

Suivi des soufrés<br />

Split/Split<strong>le</strong>ss<br />

Split/Split<strong>le</strong>ss<br />

200°C<br />

200°C<br />

120 KPa<br />

95 KPa<br />

Hélium<br />

Hélium<br />

ZBWax (Phenomenex Inc.)<br />

RTX1 (Restek Inc.)<br />

60 m x 0,32 mm x 0,5 µm<br />

60 m x 0,53 mm x 7 µm<br />

Palier à 38°C pendant 3 minutes, rampe de 3°C/min jusqu’à 65°C,<br />

rampe de 6°C/min jusqu’à 160°C, palier à 160°C pendant 5 minutes,<br />

rampe à 8°C/min jusqu’à 230°C, palier à 230°C pendant 5 minutes<br />

Détecteur à ionisation de flamme Détecteur à photométrie de flamme<br />

260°C<br />

260°C<br />

Jusqu’à présent, l’attention s’est essentiel<strong>le</strong>ment portée sur <strong>le</strong>s composés carbonés, et plus<br />

spécifiquement sur 16 composés volatils (tab<strong>le</strong>au 2) d’intérêt métabolique ou organo<strong>le</strong>ptique<br />

(SWIEGERS et al., 2005). Il s’agit majoritairement d’esters et d’alcools supérieurs.<br />

Tab<strong>le</strong>au 2 : Liste des composés carbonés mesurés avec <strong>le</strong> système de suivi en ligne.<br />

Famil<strong>le</strong> chimique Nom du composé Intérêt métabolique ou aromatique<br />

Aldéhyde Acétaldéhyde Intermédiaire de synthèse<br />

Propanol<br />

Alcools supérieurs<br />

Esters<br />

Isobutanol<br />

Alcool isoamylique<br />

2-Phenyléthanol<br />

Acétate d'isobuty<strong>le</strong><br />

Acétate d'isoamy<strong>le</strong><br />

Acétate de 2-phenyléthy<strong>le</strong><br />

Acétate d'éthy<strong>le</strong><br />

Butyrate d'éthy<strong>le</strong><br />

Hexanoate d'éthy<strong>le</strong><br />

Octanoate d'éthy<strong>le</strong><br />

Décanoate d'éthy<strong>le</strong><br />

Dodécanoate d'éthy<strong>le</strong><br />

Acétate d'hexy<strong>le</strong><br />

Succinate de diéthy<strong>le</strong><br />

Alcools supérieurs provenant du<br />

métabolisme des céto-acides<br />

Esters provenant du métabolisme des<br />

céto-acides<br />

Marqueur plutôt négatif mais ayant une<br />

forte concentration dans <strong>le</strong> vin<br />

Esters provenant du métabolisme des<br />

acides gras<br />

La reproductibilité du suivi en ligne est très bonne puisque l’écart moyen entre des duplicats<br />

(Figure 2) est inférieur à 7 % pour tous <strong>le</strong>s composés, excepté <strong>le</strong> dodécanoate d’éthy<strong>le</strong> (15 %).<br />

61


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure 2 : Reproductibilité de la mesure des composés carbonés, exemp<strong>le</strong> de l’acétate d’éthy<strong>le</strong>. L’acétate<br />

d’éthy<strong>le</strong> est exprimé en pourcentage de sa va<strong>le</strong>ur maxima<strong>le</strong>.<br />

2.2 - Relation gaz/liquide<br />

Afin d’étudier la représentativité de la phase gaz par <strong>rapport</strong> à la phase liquide, différentes<br />

fermentations ont été menées. Un suivi des volatils dans la phase gaz ainsi que dans la phase<br />

liquide a été réalisé. L’étude de la relation gaz/liquide révè<strong>le</strong> la présence trois groupes :<br />

- Groupe 1 (isobutanol, alcool isoamylique, acétate d’éthy<strong>le</strong>, butyrate d’éthy<strong>le</strong>) : <strong>le</strong>s<br />

concentrations gaz et liquide sont corrélées tout au long de la fermentation. (Figure 3),<br />

- Groupe 2 (propanol, acétate d’isobuty<strong>le</strong>, acétate d’isoamy<strong>le</strong>, hexanoate d’éthy<strong>le</strong>,<br />

octanoate d’éthy<strong>le</strong>, décanoate d’éthy<strong>le</strong>) : la relation est simp<strong>le</strong> (linéaire) sauf à la fin de<br />

fermentation. La concentration devient constante dans <strong>le</strong> liquide alors qu’el<strong>le</strong> décroit<br />

dans <strong>le</strong> gaz (figure 3),<br />

- Groupe 3 (acétaldéhyde, acétate d’hexy<strong>le</strong>, succinate de diéthy<strong>le</strong>, dodécanoate d’éthy<strong>le</strong>,<br />

acétate de 2-phényléthy<strong>le</strong>, 2-phényléthanol) : la relation est comp<strong>le</strong>xe (non linéaire).<br />

Figure 3 : Relation entre <strong>le</strong>s concentrations dans <strong>le</strong> gaz et <strong>le</strong> liquide. Exemp<strong>le</strong>s de l’acétate d’éthy<strong>le</strong><br />

(groupe 1) et de l’acétate d’isoamy<strong>le</strong> (groupe 2). Les composés volatils sont exprimés en pourcentage de<br />

<strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur maxima<strong>le</strong>.<br />

En vu de ces résultats, il a été choisi de se focaliser uniquement sur <strong>le</strong>s composés des groupes 1 et 2.<br />

62


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.3 - Calcul des vitesses de production<br />

La haute fréquence d’acquisition du dispositif expérimental permet <strong>le</strong> calcul de la vitesse de<br />

production des composés volatils (Figure 4). Grâce à la mesure (« hors ligne ») de la biomasse,<br />

il est aussi possib<strong>le</strong> d’accéder à la vitesse spécifique qui est proportionnel<strong>le</strong> au flux<br />

métabolique. Ces paramètres ont un intérêt majeur dans la compréhension et la modélisation<br />

du métabolisme secondaire. D’autre part, grâce à la vitesse spécifique, il est possib<strong>le</strong> d’obtenir<br />

la durée de la phase exponentiel<strong>le</strong> de croissance.<br />

Figure 4 : Evolution de la production, de la vitesse de production et de la vitesse spécifique de production<br />

de l’acétate d’éthy<strong>le</strong>. Le composé est exprimé en pourcentage de sa va<strong>le</strong>ur maxima<strong>le</strong>.<br />

3 - Intérêt du suivi en ligne<br />

Le suivi en ligne devrait permettre d’avancer dans la compréhension – et plus tard dans la<br />

maîtrise – de la synthèse des alcools supérieurs et esters. Ceci est illustré par <strong>le</strong>s exemp<strong>le</strong>s<br />

suivants.<br />

3.1 - Relation des alcools supérieurs et esters avec la réaction principa<strong>le</strong><br />

La production des différents alcools supérieurs et esters a été tracée en fonction du CO 2<br />

dégagé (proportionnel à la consommation des sucres). Les Figures 5a et 5b, avec <strong>le</strong>s exemp<strong>le</strong>s<br />

de l’alcool isoamylique, l’acétate d’isobuty<strong>le</strong>, l'acétate d'éthy<strong>le</strong> et l'octanoate d’éthy<strong>le</strong>, indiquent<br />

qu’il existe une relation linéaire pendant la quasi-totalité de la fermentation entre la<br />

production des alcools supérieurs et des esters et cel<strong>le</strong> du CO 2. Le rendement de production<br />

des composés volatils reste donc quasi constant pendant la phase de production (qui ne dure<br />

pas toujours pendant la totalité de la fermentation). Cette observation illustre clairement la<br />

relation forte entre la production de composés volatils et la réaction principa<strong>le</strong>.<br />

63


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

L’étude de la relation entre la production des alcools supérieurs et <strong>le</strong>urs acétates<br />

correspondants montre une très forte corrélation (Figure 5c) indiquant que <strong>le</strong>s esters d'acétate<br />

sont synthétisés, avec un rendement constant, à partir des alcools précurseurs (exemp<strong>le</strong>s de<br />

l’isobutanol et de l’alcool isoamylique). On observe aussi que la synthèse des esters d’acétate<br />

ne peut commencer qu’à partir d’une certaine concentration en alcools supérieurs (environ 15%<br />

de la concentration fina<strong>le</strong>).<br />

Figure 5 : (a)-(b) Evolution de la production d’alcool isoamylique, d’acétate d’isobuty<strong>le</strong>, d’acétate d’éthy<strong>le</strong><br />

et d’octanoate d’éthy<strong>le</strong> en fonction de la production de CO2. Les coefficients de régression sont<br />

respectivement de 0.997, 0.993, 0.995 et 0.994. (c) Corrélation entre l’acétate d’isobuty<strong>le</strong> et l’isobutanol<br />

(r 2 =0.996) et entre l’acétate d’isoamy<strong>le</strong> et l’alcool isoamylique (r 2 =0.992). Les composés volatils sont<br />

exprimés en pourcentage de <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur maxima<strong>le</strong>.<br />

3.2 - Relation entre alcools supérieurs et l’azote assimilab<strong>le</strong><br />

Le suivi « hors ligne » des acides aminés et de l’azote assimilab<strong>le</strong> couplé à l’analyse en ligne<br />

des volatils présents dans <strong>le</strong> gaz fermentaire a permis des observations nouvel<strong>le</strong>s concernant la<br />

synthèse d’alcools supérieurs, en lien avec la consommation d’azote assimilab<strong>le</strong>.<br />

Il a ainsi été montré que la production de propanol s’arrête lorsque l’azote assimilab<strong>le</strong><br />

(ammonium et acides aminés autres que la proline) est entièrement consommé à la fin de la<br />

phase de croissance. A l’inverse, la production d’isobutanol et d’alcool isoamylique continue<br />

d’augmenter durant la phase stationnaire, après l’épuisement de l’azote assimilab<strong>le</strong> (figure 6).<br />

Ces résultats sont tout à fait explicab<strong>le</strong>s. En effet, en présence d’azote résiduel, <strong>le</strong>s alcools<br />

supérieurs peuvent être produits par différentes voies : métabolisme carboné et métabolisme<br />

azoté (figure 7). Le propanol est exclusivement produit par <strong>le</strong> métabolisme azoté, directement<br />

64


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

par désamination de la thréonine ou suite à l’interconversion d’autres acides aminés en<br />

thréonine, catalysé par l’aminotransférase ou la transaminase. L’alcool isoamylique et<br />

l’isobutanol, eux, peuvent être produits soit par <strong>le</strong> métabolisme azoté soit par <strong>le</strong> métabolisme<br />

carboné.<br />

Figure 6 : Cinétique de synthèse du propanol et de l’isobutanol, et évolution de la concentration en azote<br />

assimilab<strong>le</strong> au cours de la fermentation alcoolique. Les composés volatils sont exprimés en pourcentage<br />

de <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur maxima<strong>le</strong>.<br />

Figure 7 : Schéma des différentes voies de synthèse des alcools supérieurs.<br />

65


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

4 - Conclusion<br />

Le dispositif expérimental mis en place a permis d’obtenir des données inédites tel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s<br />

cinétiques de production précises de quelques alcools supérieurs et esters.<br />

Il a ainsi été montré que la vitesse de production des alcools supérieurs est directement<br />

corrélée au métabolisme azoté et que <strong>le</strong> rendement de production des esters d’acétate est<br />

directement relié au sucre et à <strong>le</strong>urs alcools correspondants. Le cas particulier du propanol a<br />

été mis en évidence, à savoir que sa synthèse dépend essentiel<strong>le</strong>ment de la disponibilité en<br />

azote du milieu fermentaire.<br />

Ce dispositif offre de nouvel<strong>le</strong>s perspectives à la fois pour la description, la modélisation et la<br />

synthèse des composés volatils (MORAKUL, 2011).<br />

5 - Références<br />

MORAKUL S., 2011. Etude et modélisation de la composition du gaz fermentaire en conditions<br />

œnologiques : intérêt pour <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de la fermentation. Thèse de l’éco<strong>le</strong> doctora<strong>le</strong> : Sciences des<br />

procédés – Sciences des aliments Spécialité : biotechnologie, microbiologie.<br />

MOURET J.R., NICOLLE P., ANGENIEUX M., AGUERA E., PEREZ M. & SABLAYROLLES J.M., 2010. On-line<br />

measurement of « quality markers » during winemaking fermentation. Inter<strong>national</strong> Intervitis<br />

Interfructa Congress. Stuttgart, Germany.<br />

SABLAYROLLES J.M., 2009. Control of alcoholic fermentation in winemaking. Current situation and<br />

prospects. Food Research Inter<strong>national</strong>. 42, 418-424.<br />

SWIEGERS J.H., BARTOWSKY E.J., HENSCHKE P.A., PRETORIUS I.S., 2005. Yeast and bacterial modulation<br />

of wine aroma and flavour. Australian Journal of Grape and Wine Research. 11, 139-173.<br />

66


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Facteurs de variabilité de la teneur des vins de<br />

distillation en esters et alcools supérieurs<br />

Claudie ROULLAND, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

Les alcools supérieurs sont, après l’éthanol, <strong>le</strong>s composés majoritairement synthétisés par la<br />

<strong>le</strong>vure au cours de la fermentation alcoolique. En trop fortes concentrations (>3500 mg/L), ils<br />

peuvent apporter un caractère de lourdeur aux eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s. La synthèse de ces<br />

composés est à la fois liée au métabolisme des sucres et de l’azote, ce qui rend <strong>le</strong>urs voies de<br />

régulation comp<strong>le</strong>xes.<br />

Les esters sont, quant à eux, <strong>le</strong>s principaux composés aromatiques synthétisés par la <strong>le</strong>vure.<br />

D’un point de vue biochimique, ils peuvent être distingués en 2 groupes : <strong>le</strong>s acétates (acétate<br />

d’éthy<strong>le</strong>, <strong>le</strong> plus abondant, et acétates d’alcools supérieurs) et <strong>le</strong>s esters d’acides gras liés au<br />

métabolisme des lipides. D’un point de vue pratique, <strong>le</strong>s deux groupes d’esters à distinguer<br />

sont ceux libérés dans <strong>le</strong> vin au cours de la fermentation alcoolique (acétates, esters d’acides<br />

gras légers) et ceux qui sont liés à la distillation des lies (esters d’acides gras présentant un<br />

sque<strong>le</strong>tte carboné d’une longueur supérieure à 6 atomes de carbone). L’acétate d’éthy<strong>le</strong>, ester<br />

<strong>le</strong> plus présent dans <strong>le</strong>s vins, peut être à l’origine du caractère acescent dépréciant la qualité<br />

des eaux-de-vie. Cet ester n’est pas spécifique du métabolisme de la <strong>le</strong>vure Saccharomyces<br />

cerevisiae. Sa présence excessive dans <strong>le</strong>s vins peut résulter du métabolisme fermentaire mais<br />

aussi d’une piqûre lactique ou de l’expression indésirab<strong>le</strong> de la microflore <strong>le</strong>vurienne préfermentaire.<br />

Les esters d’acides organiques, tels que <strong>le</strong> lactate ou succinate d’éthy<strong>le</strong>, ne sont pas classés<br />

parmi <strong>le</strong>s esters aromatiques : en concentration importante, ils sont considérés comme des<br />

masqueurs d’arômes qui atténuent la perception des autres composés aromatiques.<br />

Le profil recherché pour <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s de Cognac correspond en règ<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> à<br />

des produits riches en esters et plutôt pauvres en alcools supérieurs. S’il n’est actuel<strong>le</strong>ment pas<br />

possib<strong>le</strong> de modéliser et de piloter de manière fine la synthèse et l’équilibre de ces composés,<br />

différents <strong>le</strong>viers existent néanmoins pour optimiser <strong>le</strong> profil des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s. Quels<br />

sont ces <strong>le</strong>viers, <strong>le</strong>urs limites, et éventuels inconvénients ?<br />

1 - La composition du moût, principal facteur de variabilité de la<br />

teneur des vins en esters et alcools supérieurs<br />

L’influence des teneurs en sucres, de l’acidité et de la composition azotée des moûts a fait<br />

l’objet d’investigations expérimenta<strong>le</strong>s. La concentration en azote assimilab<strong>le</strong> représente un<br />

élément important de variabilité ; <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> joué par <strong>le</strong>s teneurs en sucres et l’acidité, composés<br />

marqueurs de la maturité du raisin, est moins net.<br />

67


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.1 - Richesse en sucres<br />

Les essais menés sur l’incidence qualitative de l’état de maturité du raisin, indiquent que <strong>le</strong>s<br />

eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s issues des moûts récoltés <strong>le</strong> plus tardivement (plus riches en sucres)<br />

conduisent globa<strong>le</strong>ment à une augmentation de la teneur des eaux-de-vie en alcools<br />

supérieurs de l’ordre de 1 %.<br />

Logiquement, au cours de la fermentation alcoolique, la synthèse des alcools supérieurs et des<br />

esters, proportionnel<strong>le</strong> à la réaction principa<strong>le</strong> devrait être d’autant plus importante que la<br />

concentration en sucres est é<strong>le</strong>vée. Pourtant, à l’échel<strong>le</strong> du laboratoire, l’ajout de sucres<br />

(glucose+fructose,+ 20 g/l, +40 g/l) dans un moût n’a pas permis d’augmenter sensib<strong>le</strong>ment<br />

la concentration des alcools supérieurs ni des esters dans <strong>le</strong>s vins. Ainsi, la microdistillation<br />

des vins de plus forts TAV (moûts correspondants enrichis en sucres) a généré des distillats<br />

(microdistillats titrant 70 % vol.) un peu moins riches en esters (acétate d’éthy<strong>le</strong> excepté) et en<br />

alcools supérieurs (fort TAV = concentration moindre).<br />

1.2 - Acidité<br />

L’analyse des composés volatils réalisée sur <strong>le</strong>s microdistillats de vins issus de différents essais<br />

d’acidification n’a pas permis de caractériser d’effets significatifs des pH, concentrations en<br />

acide malique ou tartrique sur la synthèse des esters.<br />

En revanche, dans des essais réalisés à l’échel<strong>le</strong> du laboratoire, la synthèse des alcools<br />

supérieurs est légèrement augmentée par <strong>le</strong>s ajouts d’acide malique. Ces effets sont<br />

proportionnels à la concentration d’acides ajoutés (figure 1) et affectent presque exclusivement<br />

l’isobutanol. L’incidence qualitative de la variabilité des teneurs en acide malique des moûts<br />

d’Ugni blanc (min : 3.8 g/l, max : 9.3 g/l) mériterait d’être étudiée.<br />

Figure 1 : Lien entre la synthèse de l’isobutanol et <strong>le</strong>s ajouts d’acide malique<br />

(ajouts de 5 et 10 g/l dans l’essai 1 et de 2, 4 et 6 g/l dans l’essai 2)<br />

68


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1.3 - Azote assimilab<strong>le</strong><br />

La distribution des teneurs en azote assimilab<strong>le</strong> (azote aminé + ammoniacal) naturel<strong>le</strong>ment<br />

présent dans des moûts d’Ugni blanc (après pressurage), et mesurées sur un réseau de 55<br />

parcel<strong>le</strong>s de 2001 à 2010, est représentée figure 2.<br />

Figure 2 : distribution des teneurs en azote<br />

assimilab<strong>le</strong> dans <strong>le</strong>s moûts d’Ugni blanc<br />

Figure 3 : Relations « types » entre la teneur en azote<br />

assimilab<strong>le</strong> (naturel +ajouté) et la synthèse des alcools<br />

supérieurs mesurée en fin de fermentation alcoolique<br />

sur <strong>le</strong>s microdistillats de vins<br />

Les effets positifs de l’azote assimilab<strong>le</strong> entre 0 et 200 mg/l (naturel ou ajouté) sur la synthèse<br />

de tous <strong>le</strong>s esters (acétate d’éthy<strong>le</strong> compris) ont été décrits lors de la précédente Journée<br />

technique (FERRARI, 2009) ; ils sont cependant plus ou moins marqués selon <strong>le</strong>s moûts (toutes<br />

choses éga<strong>le</strong>s par ail<strong>le</strong>urs, figure 4).<br />

Rappelons qu’au-delà de 200 mg/l, il existe un risque de « découplage » de la synthèse de<br />

l’acétate d’éthy<strong>le</strong> (la synthèse de l’acétate d’éthy<strong>le</strong> continue de progresser tandis que cel<strong>le</strong> des<br />

autres esters plafonne).<br />

La relation entre azote et synthèse des alcools supérieurs est plus comp<strong>le</strong>xe ; el<strong>le</strong> semb<strong>le</strong><br />

décrire une courbe « en cloche ». Les moûts carencés (170 mg/l) conduisent en général à une plus faib<strong>le</strong> synthèse d’alcools<br />

supérieurs que ceux moyennement pourvus (autour de 100/120 mg/l) qui montrent souvent<br />

une synthèse plus importante (figure 3).<br />

Ainsi, <strong>le</strong> <strong>rapport</strong> esters (+)/alcools supérieurs (-) est maximal pour des concentrations en azote<br />

é<strong>le</strong>vées, comprises entre 170 et 200 mg/l. A ces niveaux de concentration cependant, <strong>le</strong>s<br />

teneurs en acétate d’éthy<strong>le</strong> mesurées en fin de fermentation alcoolique sont souvent assez<br />

é<strong>le</strong>vées, généra<strong>le</strong>ment supérieures à 300 mg/l (va<strong>le</strong>ur mesurée dans <strong>le</strong>s microdistillats).<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure 4 : Relations « types » (observées selon <strong>le</strong>s moûts) entre la teneur en azote assimilab<strong>le</strong><br />

(naturel +ajouté) et la synthèse des esters mesurée en fin de fermentation alcoolique sur <strong>le</strong>s<br />

microdistillats de vins<br />

2 - Pratiques œnologiques, des <strong>le</strong>viers intéressants<br />

2.1 - Apport de sels ammoniacaux<br />

Les ajouts de sels d’ammonium en début de fermentation alcoolique conduisent dans la très<br />

grande majorité des cas à une diminution de la synthèse des alcools supérieurs (ce sont <strong>le</strong>s<br />

isopentanols et l’isobutanol qui sont <strong>le</strong>s plus touchés) ; ils peuvent cependant dans certains cas<br />

générer une augmentation de la synthèse des alcools supérieurs (lorsqu’ils ramènent la<br />

concentration en azote assimilab<strong>le</strong> autour de 100 mg/l, voir chapitre précédent, figure 3).<br />

Cette intervention est avant tout motivée par la maîtrise des cinétiques de fermentation<br />

(ROULLAND, 2005) ; la va<strong>le</strong>ur cib<strong>le</strong> varie dans ce cas et selon <strong>le</strong> TAVp du moût de 110 (TAVp<br />

9 % vol.) à 150 mg/l (TAVp 11 % vol.). Cependant certains opérateurs raisonnent <strong>le</strong>s ajouts pour<br />

atteindre des va<strong>le</strong>urs fina<strong>le</strong>s comprises entre 170 et 200 mg/l, afin d’optimiser <strong>le</strong> <strong>rapport</strong><br />

esters/alcools supérieurs ; un apport de sels ammoniacaux de 20 à 50 g/hl (correspondant à<br />

42 et 105 mg/l d’azote assimilab<strong>le</strong>) permet de répondre dans la majorité des cas (voir figure 2)<br />

à cet objectif. Le niveau de complémentation doit tenir compte des teneurs initia<strong>le</strong>s des moûts<br />

en azote. Des doses importantes (>30 g/hl) ajoutées à des moûts déjà bien pourvus<br />

(>150 mg/l) peuvent générer des élévations de températures fermentaires, conduire à des<br />

déséquilibres analytiques susceptib<strong>le</strong>s d’affecter la typicité des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s (alcools<br />

supérieurs


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.2 - Choix de la souche de <strong>le</strong>vure<br />

Actuel<strong>le</strong>ment 7 souches adaptées au cahier des charges des vins de base de Cognac<br />

(ROULLAND, 2007) sont qualifiées par la Station Vitico<strong>le</strong>. L’exploitation statistique des données<br />

issues des essais <strong>le</strong>vure permet de caractériser <strong>le</strong>s écarts moyens entre <strong>le</strong>s souches qualifiées<br />

(exemp<strong>le</strong> figure 5) et de relativiser ces effets souche de <strong>le</strong>vure par <strong>rapport</strong> aux effets liés à la<br />

composition du moût (tab<strong>le</strong>au 1).<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : Comparaison des effets souche et composition du moût (teneurs mesurées en fin de<br />

fermentation dans <strong>le</strong>s microdistillats de vin)<br />

Moyenne Ecart type « souche » Ecart type « moût »<br />

Alcools supérieurs 3350 302 601<br />

Phényl-2 éthanol 15 4.4 3.6<br />

Acétate d’éthy<strong>le</strong> 280 34.5 50<br />

Acétate d’isoamy<strong>le</strong> 24 6 12<br />

Esters éthyliques d’acides gras<br />

liés aux lies : C8+C10+C12<br />

66 13 58<br />

Les composés <strong>le</strong>s plus affectés par la souche de <strong>le</strong>vure sont <strong>le</strong>s alcools supérieurs et en<br />

particulier <strong>le</strong> phényl2éthanol. En solution hydro-alcoolique, ce composé présente une odeur de<br />

rose ; son impact aromatique dans l’eau-de-vie nouvel<strong>le</strong> reste à préciser. Pour ce composé,<br />

l’effet « souche de <strong>le</strong>vure » est supérieur à l’effet « composition du moût ».<br />

Les teneurs en acétate d’éthy<strong>le</strong> et acétate d’isoamy<strong>le</strong> sont éga<strong>le</strong>ment sensib<strong>le</strong>ment influencées<br />

par <strong>le</strong> choix de la souche de <strong>le</strong>vure. L’expression de ces deux caractères, dont <strong>le</strong>s voies de<br />

synthèse sont communes, est fortement liée<br />

En revanche, la variabilité, observée au sein de ce panel, vis-à-vis de la synthèse des esters<br />

éthyliques d’acides gras majoritaires (et liés à la distillation des lies) est faib<strong>le</strong>.<br />

Les écarts indiqués sur la figure 3 sont des écarts moyens qui permettent de classer <strong>le</strong>s<br />

souches dans l’absolu, indépendamment des résultats d’un essai en particulier. Ces écarts sont<br />

très variab<strong>le</strong>s d’un essai à un autre : ils sont généra<strong>le</strong>ment d’autant plus importants que <strong>le</strong><br />

« potentiel de synthèse » des alcools supérieurs ou d’esters lié à la composition du moût ou à<br />

d’autres paramètres technologiques est é<strong>le</strong>vé.<br />

Figure 5 : Ecarts moyens entre <strong>le</strong>s 7 souches qualifiées (ex : alcools supérieurs et acétate d’éthy<strong>le</strong>.<br />

Le classement des souches vis-à-vis des autres composés est visib<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> site extranet du BNIC)<br />

71


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.3 - Débourbage des moûts<br />

En l’absence de débourbage, il convient de veil<strong>le</strong>r à ce que <strong>le</strong>s opérations pré-fermentaires<br />

génèrent <strong>le</strong> moins possib<strong>le</strong> de bourbes afin notamment de limiter la synthèse des alcools<br />

supérieurs et de préserver <strong>le</strong>s esters. Cependant, d’après KLINGSHIRN (1988), l’impact des<br />

bourbes sur la synthèse des alcools supérieurs est lié non seu<strong>le</strong>ment à la concentration mais<br />

éga<strong>le</strong>ment à la tail<strong>le</strong> des particu<strong>le</strong>s. L’impact de la qualité des bourbes sur la synthèse des<br />

esters et alcools supérieurs, en relation avec l’état de maturation des baies d’Ugni blanc, n’a<br />

pas fait l’objet d’études.<br />

Des essais de débourbage statique pendant une durée de 2 à 3 heures et permettant<br />

d’atteindre un niveau de bourbes de 1 % à 4 % (v/v, mesuré après 24 h de décantation) ont été<br />

réalisés à la Station Vitico<strong>le</strong>. Ces conditions de débourbage induisent une réduction sensib<strong>le</strong> de<br />

la synthèse des alcools supérieurs (<strong>le</strong> methyl2 butanol1 et <strong>le</strong> méthyl3 butanol1 sont plus<br />

particulièrement affectés). La synthèse des esters légers est par ail<strong>le</strong>urs légèrement augmentée.<br />

En revanche <strong>le</strong>s effets du débourbage sur la synthèse des esters éthyliques d’acides gras à<br />

moyenne chaîne n’ont pas été caractérisés. De plus, <strong>le</strong> débourbage ne semb<strong>le</strong> pas affecter<br />

significativement la teneur des vins en acétate d’éthy<strong>le</strong> d’origine fermentaire. Dans ce cas, la<br />

déconnexion des effets observés entre <strong>le</strong>s teneurs en acétate d’éthy<strong>le</strong> et acétate d’isoamy<strong>le</strong><br />

(composés généra<strong>le</strong>ment corrélés) pourrait s’expliquer par une action des estérases (hydrolyse<br />

des esters légers en présence de bourbes). Par contre, en absence de sulfitage, la mise en<br />

œuvre de cette pratique peut conduire à une synthèse accrue d’acétate d’éthy<strong>le</strong> liée à<br />

l’expression indésirab<strong>le</strong> de la microflore préfermentaire. Pour contourner cet obstac<strong>le</strong>, certains<br />

opérateurs réduisent <strong>le</strong>s temps de décantation à ¾ d’heure environ. Cette pratique peut être<br />

intéressante au point de vue qualitatif mais n’a pas d’effet très sensib<strong>le</strong> sur la réduction des<br />

alcools supérieurs. Dans ces conditions, pour mieux assurer l’implantation de la souche de<br />

<strong>le</strong>vure sé<strong>le</strong>ctionnée, il est possib<strong>le</strong> d’apporter <strong>le</strong>s LSA très tôt (sous <strong>le</strong> pressoir) sans<br />

compromettre l’étape de décantation (REYNOSO PUERTAS, 2004).<br />

L’utilisation d’enzymes pectinolytiques s’est révélée efficace pour améliorer l’opération de<br />

décantation des moûts, augmenter la synthèse des esters légers (acétate d’isoamy<strong>le</strong> en<br />

particulier) et diminuer la synthèse des alcools supérieurs. Les enzymes utilisées ont cependant<br />

généré une libération accrue de méthanol. De plus, la décantation en présence d’enzymes mais<br />

sans régulation thermique a conduit, dans <strong>le</strong>s essais réalisés, à des teneurs excessives en<br />

acétate d’éthy<strong>le</strong>. Le champ d’application de cette technique doit être limité aux vendanges de<br />

température basse et ne peut pas faire l’objet d’une préconisation généralisée.<br />

2.4 - Maîtrise des températures<br />

Les fermentations se déroulant à basse température (22 à 25°C) permettent un gain qualitatif<br />

mais sont plus <strong>le</strong>ntes et nécessitent une bonne maîtrise de tous <strong>le</strong>s facteurs de risques de<br />

déviation microbiologique.<br />

Les effets d’une régulation de la température à 22°C sont très nets sur la synthèse des alcools<br />

supérieurs. Dans ce cas c’est l’isobutanol qui est presque exclusivement concerné par la<br />

baisse. Les effets sur la synthèse des esters est plus diffici<strong>le</strong> à mettre en évidence.<br />

72


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Les esters légers sont parfois sensib<strong>le</strong>ment augmentés par une régulation thermique mais de<br />

manière non systématique. Les effets sur la synthèse des esters d’éthy<strong>le</strong> à longue chaîne n’ont<br />

pas été mis en évidence.<br />

2.5 - Apport des lies lors de la distillation<br />

La comparaison d’eaux-de-vie distillées avec ou sans lies ainsi que l’analyse de distillats<br />

modè<strong>le</strong>s obtenus avec des lies remises en suspension dans une solution hydro-alcoolique a<br />

permis de préciser l’apport des lies en composés volatils.<br />

L’incidence des lies se caractérise notamment par un apport d’esters d’acides gras à plus de 6<br />

atomes de carbone (et des acides gras correspondants) : esters d’éthy<strong>le</strong> (avec l’éthanol) mais<br />

aussi de méthy<strong>le</strong> (avec <strong>le</strong> méthanol), de propy<strong>le</strong> (propanol), d’isobuty<strong>le</strong> (isobutanol), d’isoamy<strong>le</strong><br />

(méthyl-2-butanol-1 et méthyl-3-butanol-1), de phényléthy<strong>le</strong> (phényl-2-éthanol) et d’hexy<strong>le</strong><br />

(hexanol).<br />

De façon similaire, l’apport des lies enrichit <strong>le</strong>s eaux-de-vie en alcools à longue chaîne<br />

carbonée (octanol (C8), décanol (C10), dodécanol (C12), tétradécanol…).<br />

En revanche, l’apport des lies n’enrichit pas <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s en esters légers<br />

(acétates d’éthy<strong>le</strong> et d’alcools supérieurs), en propanol, en isobutanols et en phényl2éthanol,<br />

libérés dans <strong>le</strong> vin au cours de la fermentation alcoolique.<br />

Parmi <strong>le</strong>s esters apportés par <strong>le</strong>s lies, <strong>le</strong> caprylate d’éthy<strong>le</strong> (C8), <strong>le</strong> caprate d’éthy<strong>le</strong> (C10) et <strong>le</strong><br />

laurate d’éthy<strong>le</strong> (C12) sont largement majoritaires (<strong>le</strong> caprylate d’éthy<strong>le</strong> est en partie libéré<br />

dans <strong>le</strong> vin au cours de la fermentation tandis que <strong>le</strong> caprate et <strong>le</strong> laurate d’éthy<strong>le</strong> sont<br />

pratiquement exclusivement liés à l’apport des lies). En pratique, la somme de ces trois esters<br />

est un indicateur utilisé pour caractériser l’apport qualitatif des lies. Le potentiel des lies d’une<br />

cuve vis-à-vis de ces composés est influencé par la teneur en azote assimilab<strong>le</strong> (naturel +<br />

ajouté) des moûts. Cel<strong>le</strong>-ci conditionne à la fois la quantité et la qualité des lies produites à<br />

l’issue des fermentations.<br />

Dans l’exemp<strong>le</strong> ci-dessous (fermentations à l’échel<strong>le</strong> du laboratoire), on note que la quantité<br />

de biomasse produite augmente de manière continue entre 0 et 200 mg/l d’azote (figure 6) ; <strong>le</strong><br />

potentiel en caprate d’éthy<strong>le</strong> d’un poids constant (10 grammes) de lies augmente entre 0 et<br />

150 mg/l ; au-delà <strong>le</strong> contenu cellulaire semb<strong>le</strong> diminuer. L’augmentation de la teneur en<br />

esters d’acides gras mesurée dans <strong>le</strong>s microdistillats de vin distillés avec toute la lie, résulte de<br />

l’augmentation de ces 2 facteurs.<br />

73


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Figure 6 : Influence des teneurs en azote assimilab<strong>le</strong> sur la synthèse du caprate d’éthy<strong>le</strong> et la production<br />

de biomasse en fin de fermentation alcoolique<br />

2.6 - Durée et température de conservation des vins<br />

On note au cours de la période de conservation des vins en attente de distillation une<br />

augmentation de certains esters éthyliques d’acides organiques (acétate d’éthy<strong>le</strong>, lactate<br />

d’éthy<strong>le</strong>, succinate d’éthy<strong>le</strong>) et une diminution des teneurs en acétates d’alcools supérieurs<br />

(acétate d’isoamy<strong>le</strong>…). Le refroidissement des cuves au cours de la conservation des vins<br />

permet néanmoins de ra<strong>le</strong>ntir l’hydrolyse de ces composés aromatiques (GALY, 1990 et 1991).<br />

Ces évolutions de nature chimique se traduisent par une perte aromatique, généra<strong>le</strong>ment très<br />

nette à partir du mois de février.<br />

3 - Dans <strong>le</strong>s eaux-de<br />

de-vie nouvel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s teneurs en esters et alcools<br />

supérieurs sont généra<strong>le</strong>ment corrélées négativement<br />

A travers <strong>le</strong>s résultats précédemment exposés, on note que la plupart des facteurs passés en<br />

revue jouent corrélativement (et négativement) sur la synthèse des alcools supérieurs et des<br />

esters. Ainsi <strong>le</strong>s eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s riches en esters sont el<strong>le</strong>s généra<strong>le</strong>ment pauvres en<br />

alcools supérieurs. Ce constat très global doit cependant être modulé. En effet, cette relation<br />

« esters +/alcools supérieurs – » mais éga<strong>le</strong>ment l’équilibre entre <strong>le</strong>s molécu<strong>le</strong>s de chacune de<br />

ces deux classes de composés chimiques, varient selon l’itinéraire technologique des<br />

vinifications. Par exemp<strong>le</strong>, tous <strong>le</strong>s acétates d’alcools supérieurs (acétate d’isoamy<strong>le</strong>, d’hexy<strong>le</strong>,<br />

de phényléthy<strong>le</strong>…) sont très corrélés entre eux ; <strong>le</strong>ur niveau de concentration, qui résulte de<br />

l’équilibre entre <strong>le</strong>ur synthèse et <strong>le</strong>ur dégradation (estérases, hydrolyse chimique), est affecté<br />

par <strong>le</strong>s mêmes facteurs de vinification (composition des moûts, souche de <strong>le</strong>vure, température,<br />

74


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

débourbage, durée de conservation des vins avant distillation). En revanche <strong>le</strong>ur corrélation<br />

avec l’acétate d’éthy<strong>le</strong> (moins sujet à l’hydrolyse et non spécifique du métabolisme de<br />

S. cerevisiae) ou encore avec <strong>le</strong>s esters d’acides gras à moyenne chaîne (liés à la distillation des<br />

lies, moins sensib<strong>le</strong>s à plusieurs <strong>le</strong>viers technologiques) n’est pas systématique : el<strong>le</strong> dépend<br />

de l’itinéraire technique des vinifications, depuis la récolte jusqu’à la distillation. De la même<br />

façon, <strong>le</strong> profil des alcools supérieurs d’une eau-de-vie nouvel<strong>le</strong> peut varier dans la mesure où<br />

comme vu précédemment, tous <strong>le</strong>s <strong>le</strong>viers technologiques n’affectent pas <strong>le</strong>s mêmes<br />

composés.<br />

4 - En résumé<br />

Au cours de ces dernières années, l’évolution de nos connaissances (sur l’influence de la<br />

concentration azotée des moûts en particulier) et l’amélioration du niveau d’équipement des<br />

chais a permis une meil<strong>le</strong>ure maîtrise de la composition des eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s et en<br />

particulier de la production des esters et alcools supérieurs. Certains <strong>le</strong>viers technologiques<br />

(débourbage, maîtrise thermique) présentent des difficultés de mise en œuvre dans <strong>le</strong>s<br />

conditions de la vinification charentaise (absence de sulfitage). De plus, l’efficacité des <strong>le</strong>viers<br />

technologiques dépend étroitement de la composition des moûts. De nombreux facteurs<br />

influençant la synthèse des alcools supérieurs et des esters légers ont été caractérisés. Les<br />

données concernant <strong>le</strong>s facteurs d’influence de la synthèse des esters liés à la distillation des<br />

lies sont moins complètes.<br />

Les facteurs de la composition du moût ainsi que la recherche de nouveaux <strong>le</strong>viers<br />

technologiques (nouvel<strong>le</strong>s souches de <strong>le</strong>vure) influençant la synthèse de ces composés<br />

représentent des sujets de recherche toujours d’actualité pour la Station Vitico<strong>le</strong>.<br />

5 - Bibliographie<br />

iographie<br />

FERRARI G., ROULLAND C., 2009. Qualité de la matière première : nouvel<strong>le</strong>s avancées. Journée<br />

technique de la Station Vitico<strong>le</strong>, pp 110-121.<br />

GALY B., ROULLAND C., LURTON L., CANTAGREL R., 1992. Connaissance des paramètres influant sur la<br />

conservation des vins destinés à l’élaboration des eaux-de-vie de Cognac. Elaboration et connaissance<br />

des spiritueux ED Lavoisier, pp 218-224.<br />

GALY B., 2001. Vinifications 2000, conseils de campagne. Journée technique de la Station Vitico<strong>le</strong>,<br />

pp 63-68.<br />

GALY B., MASSACRE T., 2005. Réf<strong>le</strong>xions sur <strong>le</strong>s pratiques vitico<strong>le</strong>s et œnologiques mises en œuvre<br />

dans une exploitation charentaise. Journée technique de la Station Vitico<strong>le</strong>, pp 57-61.<br />

KLINGSHIRN L.M., LIU J.R., GALLANDER J.F., 1987. Higher Alcohol formation in Wines as related to the<br />

partic<strong>le</strong> size profils of juice insolub<strong>le</strong> solids. Am.J.Enol.Vitic., 38, 207-210.<br />

MAILLET A., 2001. La formol titration. Rapport de stage pour l’obtention du DUT génie chimique<br />

option génie des procédés.<br />

Règ<strong>le</strong>s de base de la vinification charentaise, 2008. Document édité par <strong>le</strong> BNIC.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

REYNOSO PUERTAS C., 2004. L’élaboration des vins de base de Cognac : étude de quelques facteurs<br />

qualitatifs lors de la récolte 2003. Mémoire présenté à la faculté d’œnologie de l’Université de<br />

Bordeaux 2 pour l’obtention du diplôme d’œnologue.<br />

ROULLAND C., 2005. Besoins azotés des <strong>le</strong>vures ; cas des vinifications des vins pour la distillation.<br />

Journée technique de la Station Vitico<strong>le</strong>. pp 49-55.<br />

ROULLAND C., 2007. Impact de la souche de <strong>le</strong>vure sur la composition des eaux-de-vie. Journée<br />

technique de la Station Vitico<strong>le</strong>, pp 53-59.<br />

ROULLAND C., GALY B., SNAKKERS G., FERRARI G., LURTON L., 2011. Caractérisation du profil<br />

phénotypique de souches de <strong>le</strong>vure : exemp<strong>le</strong> des souches utilisées pour la vinification des vins de<br />

base de Cognac. 9 ème édition du Symposium inter<strong>national</strong> d’œnologie « oeno 2011 » 15, 16 et 17 juin.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

ATELIERS<br />

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Fermentation alcoolique : avancées récentes et<br />

perspectives de la recherche<br />

Jean-Marie SABLAYROLLES, INRA Montpellier<br />

La fermentation alcoolique est une étape clé pendant laquel<strong>le</strong> l’essentiel du sucre (plus de<br />

90 %) est converti en éthanol et dioxyde de carbone, mais de nombreux autres composés sont<br />

aussi synthétisés et certains d’entre eux jouent un rô<strong>le</strong> important sur la qualité fina<strong>le</strong> du vin. Le<br />

dérou<strong>le</strong>ment de la fermentation est à la fois fonction de la composition du moût, de la <strong>le</strong>vure et<br />

du mode de contrô<strong>le</strong> de la fermentation. Dans cet artic<strong>le</strong>, nous nous focaliserons<br />

principa<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> mais en insistant sur <strong>le</strong> fait que celui-ci doit toujours être<br />

raisonné en fonction des caractéristiques du moût. Quant au choix des <strong>le</strong>vures et aux<br />

perspectives dans ce domaine, il s’agit d’un autre sujet, lui aussi très riche et prometteur<br />

même s’il ne sera pas traité ici.<br />

Optimiser <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de la fermentation alcoolique en œnologie est comp<strong>le</strong>xe. En effet, <strong>le</strong>s<br />

objectifs d’ordre technologique, tels que l’épuisement des sucres, la durée de la fermentation<br />

ou la quantité d'énergie nécessaire pour régu<strong>le</strong>r la température de fermentation, sont<br />

importants et constituent généra<strong>le</strong>ment une condition préalab<strong>le</strong>, mais l’objectif principal est<br />

l’optimisation de la qualité du produit. Or, ce critère est très diffici<strong>le</strong>ment mesurab<strong>le</strong> : il n’est<br />

généra<strong>le</strong>ment accessib<strong>le</strong> que par l’analyse sensoriel<strong>le</strong>, qui nécessite une forte expertise et<br />

constitue une technique lourde et mal adaptée au contrô<strong>le</strong> des fermentations. Une autre<br />

particularité des conditions œnologiques est l’encadrement très strict des pratiques,<br />

notamment dans <strong>le</strong> contexte des AOC.<br />

Faut il, dès lors, considérer que <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> des fermentations ne peut guère progresser et que<br />

<strong>le</strong>s améliorations réalisées en matière de cuverie ou de systèmes de régulation (température…)<br />

sont suffisantes ? Peut-on, au contraire, penser que <strong>le</strong>s années à venir devraient donner lieu à<br />

des évolutions très importantes dans ce secteur ? C’est cette dernière hypothèse qui paraît la<br />

plus probab<strong>le</strong>. En effet :<br />

• de plus en plus de vinificateurs considèrent qu’il est –et sera- indispensab<strong>le</strong> de disposer<br />

d’outils permettant d’adapter <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de la fermentation en fonction, d’une part, du<br />

type de vin souhaité et, d’autre part, des caractéristiques des moûts,<br />

• <strong>le</strong>s connaissances sur <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment des fermentations et l’impact des principaux<br />

paramètres de contrô<strong>le</strong> n’ont cessé d’évoluer, notamment au cours des dernières<br />

années,<br />

• l’utilisation de capteurs permettant de suivre en temps réel, <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment de la<br />

fermentation apparaît de plus en plus faisab<strong>le</strong>.<br />

Si <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> des fermentations risque donc d’évoluer fortement au cours des prochaines<br />

années, quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s approches qui devraient se développer ? Nul ne peut en<br />

établir une liste exhaustive mais il est possib<strong>le</strong> d’en dégager quelques-unes particulièrement<br />

prometteuses.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

1 - Suivre plus précisément <strong>le</strong>s fermentations<br />

Généra<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> suivi des fermentations se limite à la mesure quotidienne de la densité du<br />

moût. Ceci ne rend compte que très imparfaitement du dérou<strong>le</strong>ment de cette étape très<br />

comp<strong>le</strong>xe et, si l’on veut améliorer de façon très significative <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> des fermentations, on<br />

peut estimer que cela passe nécessairement par l’amélioration de <strong>le</strong>ur suivi. Le suivi en ligne<br />

est une des alternatives <strong>le</strong>s plus performantes et de plus en plus crédib<strong>le</strong>. En effet, il présente<br />

l’avantage d’être automatique et donc réalisab<strong>le</strong> avec une fréquence très importante (plusieurs<br />

mesures par heure). De nombreux systèmes, prototypes ou commerciaux, ont déjà été<br />

élaborés et plusieurs méthodes ont été proposées pour suivre la transformation du sucre en<br />

alcool et CO 2 : mesure de la densité, de l’indice de réfraction, du dégagement de CO 2<br />

(compteur, débitmètre massique, venturi), suivi de la pression osmotique, utilisation d’infra<br />

rouge à transformé de Fourier, biocapteurs é<strong>le</strong>ctrochimiques….<br />

Avec certains capteurs, notamment ceux basés sur la mesure du dégagement de CO 2, il est<br />

possib<strong>le</strong> d’estimer non seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s teneurs en éthanol et sucre résiduel mais aussi la vitesse<br />

instantanée de fermentation. Cette nouvel<strong>le</strong> information a un doub<strong>le</strong> intérêt car el<strong>le</strong> est<br />

directement proportionnel<strong>le</strong> (i) à l’activité des <strong>le</strong>vures (intérêt microbiologique) et à l’énergie<br />

nécessaire pour la régulation de température (intérêt technologique). Actuel<strong>le</strong>ment, l’enjeu<br />

majeur est certainement de déterminer quel(s) capteur(s) possède(nt) l’ensemb<strong>le</strong> des<br />

caractéristiques (coût, fiabilité, précision, robustesse) nécessaires pour une utilisation en cave.<br />

Des tests comparatifs sont en cours en ce sens, notamment à l’INRA de Pech Rouge.<br />

Le suivi en ligne constitue donc un moyen d’automatiser <strong>le</strong> suivi des fermentations et<br />

d’améliorer sa précision.<br />

En outre :<br />

- il est faci<strong>le</strong>ment accessib<strong>le</strong> à distance ce qui, dans certaines situations, présente un réel<br />

intérêt et ouvre de nouvel<strong>le</strong>s perspectives,<br />

- il permet un archivage des données beaucoup plus performant. Au-delà du stockage<br />

des courbes dans des bases de données, des évolutions sont possib<strong>le</strong>s en direction de<br />

« systèmes d’informations » c’est-à-dire de systèmes capab<strong>le</strong>s de stocker des<br />

informations de toutes sortes (incidents, diagnostics, expertise…). De tels outils<br />

devraient se révé<strong>le</strong>r, à terme, très puissants non seu<strong>le</strong>ment pour restituer <strong>le</strong> passé<br />

(notion de traçabilité) mais aussi pour exploiter cette multitude d’informations comme<br />

aide à une meil<strong>le</strong>ure gestion des pratiques (notion d’aide à la décision).<br />

La figure 1 décrit un exemp<strong>le</strong> de ce type. Il concerne pour l’instant des fermentations réalisées<br />

à l’échel<strong>le</strong> laboratoire et pilote mais son extrapolation à l’échel<strong>le</strong> industriel<strong>le</strong> est tout à fait<br />

envisageab<strong>le</strong>.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Fig 1a<br />

30 fermenteurs<br />

1050 fermentations<br />

16 cuves<br />

450 fermentations<br />

Fig 1a<br />

Fig 1b<br />

Fig 1c<br />

Figure 1 : Exemp<strong>le</strong> de suivi à distance et de base de données sur <strong>le</strong>s fermentations (INRA Montpellier et<br />

Pech Rouge). Figure 1a : débit de production de CO2 (proportionnel à la vitesse instantanée de<br />

fermentation). Figure 1b : température. Figure 1c : temps cumulé de circulation de liquide réfrigérant<br />

(proportionnel à l’énergie nécessaire pour la régulation de température).<br />

2 - Adapter <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> à chaque situation<br />

Actuel<strong>le</strong>ment, dans l’immense majorité des cas, <strong>le</strong> mode de conduite de la fermentation<br />

(exemp<strong>le</strong> du régime de température) est décidé à l’avance en fonction, principa<strong>le</strong>ment, du type<br />

de vin souhaité. Ce mode de conduite prend rarement en compte <strong>le</strong> fait qu’un même mode de<br />

conduite peut conduire à des dérou<strong>le</strong>ments de fermentation très différents. En effet, une des<br />

caractéristiques essentiel<strong>le</strong>s de l’œnologie est la grande variabilité de la « matière première »<br />

non seu<strong>le</strong>ment suivant <strong>le</strong> cépage, <strong>le</strong> terroir, la situation géographique, <strong>le</strong> mode de conduite de<br />

la vigne mais aussi selon l’année. Il n’est, donc, généra<strong>le</strong>ment pas possib<strong>le</strong> de prévoir comment<br />

va se dérou<strong>le</strong>r une fermentation même en prenant en compte <strong>le</strong>s dosages réalisés sur <strong>le</strong>s<br />

moûts. En effet, ceux ci, à l’exception de la teneur en sucre et en azote assimilab<strong>le</strong> (lorsqu’il<br />

est effectué), renseignent peu sur l’aptitude du moût à bien fermenter.<br />

Le suivi en ligne rend possib<strong>le</strong> la notion d’optimisation cuve par cuve, prenant ainsi en compte<br />

la variabilité de la composition des moûts. L’information mesurée en continu (en particulier la<br />

vitesse instantanée de fermentation) devient une nouvel<strong>le</strong> donnée et un nouveau paramètre de<br />

contrô<strong>le</strong> au même titre que la température, par exemp<strong>le</strong>. La question essentiel<strong>le</strong> est alors :<br />

comment utiliser au mieux ce nouveau paramètre, c’est-à-dire : quel<strong>le</strong> décision prendre en<br />

fonction de cette information et ce, à tout moment de la fermentation ? Il ne sera ni possib<strong>le</strong> ni<br />

souhaitab<strong>le</strong> de proposer des « recettes » uniques et généralisab<strong>le</strong>s et l’enjeu sera que chaque<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

utilisateur puisse imaginer des utilisations spécifiques. On peut cependant donner quelques<br />

exemp<strong>le</strong>s illustrant de nouveaux modes possib<strong>le</strong>s de raisonnements.<br />

Exemp<strong>le</strong> 1<br />

Régulation de la vitesse de fermentation. En vinification en blanc, il est bien connu que <strong>le</strong>s<br />

basses températures sont favorab<strong>le</strong>s pour l’obtention de produits aromatiques mais est-ce<br />

bien la température en tant que tel<strong>le</strong> qui est importante ? N’est-ce pas plutôt la vitesse de<br />

fermentation ? En effet, cette dernière est (i) directement proportionnel<strong>le</strong> au stripping<br />

(entraînement) causé par <strong>le</strong>s fortes vitesses de dégagement de CO 2 et donc aux pertes de<br />

composés aromatiques et (ii) reliée à l’activité métabolique des <strong>le</strong>vures et donc à <strong>le</strong>ur aptitude<br />

à synthétiser certains de ces composés d’intérêt aromatique. On peut donc imaginer de<br />

nouvel<strong>le</strong>s stratégies de contrô<strong>le</strong> de la fermentation basées sur une « régulation » de cette<br />

vitesse.<br />

Exemp<strong>le</strong> 2<br />

Détection de carences nutritionnel<strong>le</strong>s et optimisation de <strong>le</strong>ur ajout. Il est acquis que, dans la<br />

plupart des moûts, c’est l’azote assimilab<strong>le</strong> qui est <strong>le</strong> nutriment limitant de la vitesse de<br />

fermentation. Le suivi en ligne permet non seu<strong>le</strong>ment de détecter <strong>le</strong>s situations dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s<br />

cet ajout est nécessaire mais aussi de définir <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur moment pour réaliser cet ajout.<br />

L’oxygénation est une autre intervention importante. Cette opération est généra<strong>le</strong>ment<br />

effectuée en une fois, en cours de fermentation, avec pour objectif principal une limitation des<br />

risques d’arrêt de fermentation. Le suivi en ligne peut non seu<strong>le</strong>ment être utilisé pour<br />

automatiser cet ajout (contrô<strong>le</strong> du moment et de la quantité) mais aussi pour <strong>le</strong> réaliser de<br />

façon très progressive et optimisée en asservissant la vitesse d’ajout à la vitesse de<br />

fermentation, c’est-à-dire à l’activité des <strong>le</strong>vures.<br />

3 – « Piloter » directement la qualité<br />

L’objectif est extrêmement ambitieux et ne pourra être atteint que partiel<strong>le</strong>ment mais il est de<br />

moins en moins utopique de considérer que <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> de la fermentation puisse prendre<br />

directement en compte la qualité fina<strong>le</strong> du produit.<br />

Au cours des dernières années, ont été mises en évidence des molécu<strong>le</strong>s spécifiques de « sty<strong>le</strong>s<br />

de vins » ? C’est plus particulièrement <strong>le</strong> cas pour <strong>le</strong>s vins fruités et ceux issus de certains<br />

cépages caractéristiques. L’exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> plus connu est celui du Sauvignon blanc mais des<br />

« molécu<strong>le</strong>s marqueurs » ont aussi été décrites pour d’autres cépages : Chardonnay, Riesling,<br />

Syrah, Melon B., Cabernet Sauvignon, Merlot, Pinot noir et Muscat. En parallè<strong>le</strong>, des travaux ont<br />

été réalisés sur l’impact des paramètres fermentaires sur la synthèse de ces molécu<strong>le</strong>s.<br />

Beaucoup de travail reste encore à réaliser mais il est, par exemp<strong>le</strong>, acquis que la température<br />

- et donc, la vitesse de fermentation ? - peut jouer de façon antagoniste sur la synthèse<br />

d’arômes fermentaires et sur cel<strong>le</strong> d’arômes variétaux. L’impact des ajouts de nutriments est<br />

aussi partiel<strong>le</strong>ment décrit et des travaux sont en cours pour mieux préciser dans quel<strong>le</strong> mesure<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

des ajouts contrôlés (quantité, moment et, éventuel<strong>le</strong>ment, régime d’apport) d’oxygène,<br />

d’azote et d’activateurs comp<strong>le</strong>xes peuvent constituer des outils maîtrisab<strong>le</strong>s de contrô<strong>le</strong> non<br />

seu<strong>le</strong>ment du bon dérou<strong>le</strong>ment de la fermentation mais aussi de la synthèse de composés<br />

d’intérêt aromatique. A noter que certains composés, notamment soufrés, peuvent avoir un<br />

impact négatif et la diminution de <strong>le</strong>ur synthèse peut aussi constituer un enjeu important.<br />

Les vins rouges sont généra<strong>le</strong>ment moins marqués par <strong>le</strong> processus fermentaire proprement<br />

dit. Par contre, l’extraction de composés polyphénoliques qui a lieu pendant cette même phase<br />

de la vinification est essentiel<strong>le</strong> pour la qualité fina<strong>le</strong> du vin. Si <strong>le</strong>s <strong>le</strong>vures ne jouent pas un rô<strong>le</strong><br />

direct sur cette extraction, el<strong>le</strong>s sont responsab<strong>le</strong>s de l’évolution de la température et de la<br />

concentration en éthanol, qui sont <strong>le</strong>s deux paramètres qui influent <strong>le</strong> plus sur l’extraction des<br />

anthocyanes et tannins. Ainsi, il est probab<strong>le</strong> que <strong>le</strong> suivi en ligne de la fermentation soit aussi<br />

un moyen de contrô<strong>le</strong> de ce processus de macération.<br />

Dans tous <strong>le</strong>s cas, <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> sera d’autant plus efficace que l’on disposera de données<br />

pertinentes et, si possib<strong>le</strong>, en temps réel. S’il n’est pas envisageab<strong>le</strong> de suivre en ligne la<br />

totalité des molécu<strong>le</strong>s potentiel<strong>le</strong>ment intéressantes, on peut imaginer, à moyen terme,<br />

disposer de capteurs permettant de mesurer quelques molécu<strong>le</strong>s ou paramètres clés. C’est <strong>le</strong><br />

cas pour <strong>le</strong>s vinifications en rouge, de la mesure de la cou<strong>le</strong>ur à différentes longueurs d’onde<br />

caractéristiques. Si cette mesure pose peu de problèmes techniques, beaucoup de travail reste<br />

à accomplir concernant l’interprétation de ces mesures. En effet, l’enjeu est d’évoluer vers une<br />

extraction de plus en plus sé<strong>le</strong>ctive et qualitative.<br />

Un nouvel outil de suivi en ligne par chromatographie gazeuse, utilisab<strong>le</strong> à l’échel<strong>le</strong> laboratoire<br />

et pilote, permet de mesurer <strong>le</strong>s concentrations des principaux alcools supérieurs et esters<br />

avec une fréquence très é<strong>le</strong>vée (jusqu’à une mesure toutes <strong>le</strong>s heures). Il est ainsi possib<strong>le</strong><br />

d’accéder à un suivi très fin de la dynamique de synthèse de 16 composés et de calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>urs<br />

vitesses globa<strong>le</strong>s et spécifiques (proportionnel<strong>le</strong>s aux flux métaboliques) de production. Ce<br />

dispositif permet d’ores et déjà, de progresser dans la compréhension du métabolisme<br />

<strong>le</strong>vurien, notamment du métabolisme azoté. Il ouvre, par ail<strong>le</strong>urs de larges perspectives en<br />

terme de stratégies de contrô<strong>le</strong> des fermentations.<br />

4 - Anticiper – prévoir<br />

Si l’adaptation du contrô<strong>le</strong> en fonction du dérou<strong>le</strong>ment de la fermentation comporte déjà une<br />

notion d’anticipation, on peut imaginer al<strong>le</strong>r encore plus loin dans ce sens, avec la notion de<br />

prédiction du dérou<strong>le</strong>ment de la fermentation. L’idée est d’utiliser <strong>le</strong>s données initia<strong>le</strong>s sur la<br />

composition du milieu et <strong>le</strong>s informations acquises pendant <strong>le</strong> début de fermentation, pour<br />

pouvoir, de façon très précoce, prévoir <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment ultérieur de la fermentation et adapter<br />

<strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> en fonction de cette estimation. Plusieurs modè<strong>le</strong>s prédictifs ont déjà été proposés<br />

et –au moins– un d’entre eux possède un domaine de validité suffisant pour être utilisab<strong>le</strong> dans<br />

la pratique. Il a débouché sur un logiciel de simulation de la cinétique fermentaire et de<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

l’évolution des besoins en frigories pour la régulation de température (1). Celui-ci permet de<br />

raisonner à l’échel<strong>le</strong> d’une cuve mais il est aussi utilisab<strong>le</strong> à l’échel<strong>le</strong> d’une cave, sachant que<br />

<strong>le</strong>s besoins en cuverie et en énergie doivent être raisonnés prioritairement à cette échel<strong>le</strong>. Une<br />

étape suivante consistera à inclure cette approche prédictive dans un logiciel de contrô<strong>le</strong>, avec<br />

possibilité d’intervenir, à titre préventif, sur <strong>le</strong>s différentes cuves.<br />

Un défi majeur consistera ensuite à intégrer dans cette démarche de contrô<strong>le</strong> prédictif des<br />

aspects relatifs à la qualité du produit. S’il est illusoire de chercher à modéliser la qualité<br />

globa<strong>le</strong> d’un vin, on peut imaginer qu’il sera, à terme, possib<strong>le</strong> de prévoir et d’orienter <strong>le</strong> « type<br />

de vin ».<br />

5 - Optimiser l’utilisation des <strong>le</strong>vures<br />

Le nombre de souches commercia<strong>le</strong>s de <strong>le</strong>vures n’a cessé d’augmenter ces dernières années<br />

offrant une pa<strong>le</strong>tte de plus en plus large au vinificateur. Cette tendance devrait se poursuivre,<br />

voire s’accentuer, avec l’introduction de souches possédant de nouvel<strong>le</strong>s fonctionnalités, y<br />

compris en dehors de l’espèce S. cerevisiae. Une autre tendance concerne l’utilisation<br />

simultanée de plusieurs souches, afin d’obtenir des vins possédant une plus grande comp<strong>le</strong>xité<br />

aromatique. Cette utilisation de cultures mixtes constitue un chal<strong>le</strong>nge important en matière de<br />

contrô<strong>le</strong>. En effet, si ces souches cohabitent déjà dans des mélanges très comp<strong>le</strong>xes au sein<br />

des flores spontanées, el<strong>le</strong>s se comportent, dans ces conditions, de façon tota<strong>le</strong>ment aléatoire<br />

en fonction des conditions de mise en œuvre (flore initia<strong>le</strong>, moût, température…). Maîtriser des<br />

mélanges de souches, et ainsi profiter de façon systématique des avantages de chacune d’entre<br />

el<strong>le</strong>s nécessitera tout d’abord de mieux comprendre <strong>le</strong>s interactions qui peuvent exister entre<br />

ces souches puis de mettre en œuvre des modes de conduite appropriés. Cela passera parfois<br />

par des ensemencements séquentiels : d’abord la souche qui pousse <strong>le</strong> moins faci<strong>le</strong>ment, puis<br />

- à un moment bien déterminé - cel<strong>le</strong> qui s’implante rapidement dans <strong>le</strong> milieu. Une autre<br />

stratégie pourra consister à augmenter la population de souches « fragi<strong>le</strong>s » en <strong>le</strong>s utilisant<br />

sous forme de <strong>le</strong>vures immobilisées sur des supports. Les perspectives dans ce domaine sont<br />

donc réel<strong>le</strong>s… mais comp<strong>le</strong>xes.<br />

De façon généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s fermentations devraient, dans <strong>le</strong>s années à venir, être contrôlées de plus<br />

en plus finement grâce à l’apparition de nouveaux outils et à la mise en œuvre de nouveaux<br />

modes de contrô<strong>le</strong>. Mais ces évolutions ne seront effectives que si el<strong>le</strong>s sont perçues par <strong>le</strong>s<br />

vinificateurs comme de nouveaux moyens mis à <strong>le</strong>ur disposition et venant en complément – et<br />

non à la place – de <strong>le</strong>ur expertise.<br />

(1) Logiciel SOFA ® INRA-Intelli’oeno.<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Connaissance et défense du Cognac : <strong>le</strong>s apports de<br />

l’analyse<br />

Guillaume SNAKKERS, Station Vitico<strong>le</strong> du BNIC<br />

1 - Introduction<br />

Première activité économique de Poitou-Charentes, fortement ancrée dans <strong>le</strong> territoire<br />

régional, la filière Cognac est éga<strong>le</strong>ment un secteur important de l’économie nationa<strong>le</strong> dont <strong>le</strong><br />

chiffre d’affaire est réalisé pour plus de 97 % à l’exportation. Ainsi, plus de 150 millions de<br />

bouteil<strong>le</strong>s sont expédiées chaque année (161 millions en année mobi<strong>le</strong> à fin août 2011) vers<br />

158 pays. Cette présence sur <strong>le</strong>s marchés du monde entier rend la filière Cognac<br />

particulièrement vigilante aux rég<strong>le</strong>mentations des différents pays de destination de ses<br />

produits.<br />

Une des missions du BNIC est donc naturel<strong>le</strong>ment de garantir l’accès aux marchés. El<strong>le</strong> est<br />

menée en concertation étroite entre <strong>le</strong> Département Juridique du BNIC et la Station Vitico<strong>le</strong>,<br />

laboratoire de référence pour l’analyse des produits. D’un point de vue analytique, el<strong>le</strong> intègre<br />

un travail de fond de constitution et de mise à jour de bases de données sur <strong>le</strong>s spiritueux, la<br />

reconnaissance des méthodes analytiques existantes et <strong>le</strong> développement de nouvel<strong>le</strong>s.<br />

L’objectif de cette présentation est d’illustrer <strong>le</strong>s spécificités analytiques des eaux-de-vie de<br />

Cognac en relation avec <strong>le</strong>ur origine tout au long de la chaîne d’élaboration du produit. Ces<br />

connaissances, issues des travaux de la Station Vitico<strong>le</strong> ainsi que la constitution de bases de<br />

données analytiques sont mises quotidiennement à profit pour la défense du Cognac, faciliter<br />

son accès aux marchés et l’authentifier par <strong>rapport</strong> à d’autres spiritueux.<br />

2 - Le Cognac<br />

2.1 - La rég<strong>le</strong>mentation actuel<strong>le</strong><br />

En référence au règ<strong>le</strong>ment européen N°110/2008 sur « la définition, la description, la<br />

présentation et l’étiquetage des boissons spiritueuses », <strong>le</strong> Cognac est une eau-de-vie de vin.<br />

L’Indication Géographique Cognac ainsi que <strong>le</strong>s Indications Géographiques complémentaires<br />

qui peuvent lui être associées figurent à l’annexe III du même règ<strong>le</strong>ment. Selon <strong>le</strong> droit<br />

français, <strong>le</strong> Cognac est une Appellation d’Origine Contrôlée dont <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s de production, plus<br />

restrictives que cel<strong>le</strong>s définies par <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment européen 110/2008 pour <strong>le</strong>s eaux-de-vie de<br />

vin, sont précisées par <strong>le</strong> décret n°2011-685 du Ministère Français de l’Agriculture, de<br />

l’Alimentation, de la Pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire en date du 16 juin<br />

2011.<br />

Les règ<strong>le</strong>s de production des eaux-de-vie de Cognac comprennent notamment :<br />

• Une aire géographique de production délimitée,<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

• Un encépagement largement dominé par l’Ugni blanc et des règ<strong>le</strong>s de conduite du<br />

vignob<strong>le</strong>,<br />

• Certaines règ<strong>le</strong>s concernant la vinification : interdiction des pompes centrifuges à<br />

pa<strong>le</strong>ttes et des pressoirs continus à vis d’Archimède, interdiction de l’utilisation<br />

d’anhydride sulfureux pendant <strong>le</strong>s périodes fermentaires,<br />

• Une méthode de distillation traditionnel<strong>le</strong>, doub<strong>le</strong> distillation, TAV maximum des eauxde-vie<br />

de 72.4 % vol., avec l’alambic dit « charentais » dont la forme, <strong>le</strong> matériau utilisé<br />

(cuivre), la capacité et <strong>le</strong> mode de chauffage sont définis depuis 1936,<br />

• Des dates de distillation, une période de conservation des vins limitée,<br />

• Le vieillissement sous bois des eaux-de-vie.<br />

Avec un TAV maximal de 72.4 % vol. pour <strong>le</strong>s eaux-de-vie, la distillation charentaise est une<br />

méthode peu rectificatrice. Le terme « rectification » correspond au tri réalisé pendant la<br />

distillation entre l’alcool (éthanol) et <strong>le</strong>s autres substances volati<strong>le</strong>s.<br />

2.2 – L’eau<br />

eau-de<br />

de-vie, un mélange comp<strong>le</strong>xe de substances volati<strong>le</strong>s<br />

Ainsi, <strong>le</strong>s eaux-de-vie de Cognac se caractérisent par <strong>le</strong>ur richesse en substances volati<strong>le</strong>s, qui<br />

est un des critères analytiques retenus par la rég<strong>le</strong>mentation européenne (R CE 110/2008). Les<br />

substances volati<strong>le</strong>s sont définies comme la somme des composants volatils majoritaires autres<br />

que l’éthanol et <strong>le</strong> méthanol : alcools supérieurs (propanol, isobutanol, méthyl-2-butanol-1,<br />

méthyl-3-butanol-1, butanol-1, butanol-2), aldéhydes (éthanal et acétal), acétate d’éthy<strong>le</strong>,<br />

acides volatils (R CE 2870/2000),<br />

Figure 1 : Substances volati<strong>le</strong>s et méthanol, Cognac – brandies – marcs - whiskies<br />

De nombreux autres composés volatils, généra<strong>le</strong>ment non rég<strong>le</strong>mentés et présents en quantité<br />

plus faib<strong>le</strong>, entrent éga<strong>le</strong>ment dans la composition des eaux-de-vie. A ce jour, plusieurs<br />

centaines de composés volatils ont été identifiés dans <strong>le</strong> Cognac (DE RIJKE et al., 1983 ;<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

LEDAUPHIN et al., 2010). De nombreuses famil<strong>le</strong>s chimiques sont représentées : alcools,<br />

acides, esters, éthers, aldéhydes, acétals, cétones, hydrocarbures, terpènes, C13<br />

norisoprénoïdes, lactones, composés soufrés et azotés, phénols….<br />

L’ensemb<strong>le</strong> de ces composants volatils est responsab<strong>le</strong> de l’arôme des eaux-de-vie (LURTON et<br />

al., 2011b). La figure 2 illustre la grande diversité des substances volati<strong>le</strong>s qui <strong>le</strong>s composent,<br />

ainsi que la variabilité existant entre différents produits, qui fait que deux eaux-de-vie de<br />

Cognac ne sont jamais identiques.<br />

Figure 2 : Superposition de 40 chromatogrammes en FID d’eaux-de-vie nouvel<strong>le</strong>s de Cognac. (a) : global,<br />

(b): focus sur une zone restreinte (flèche). E-C6 : ethyl hexanoate, E-C8 : ethyl octanoate, E-C10 : ethyl<br />

decanoate, E-C12 : ethyl dodecanoate, E-C14 : ethyl hexadecanoate, E-C16 : ethyl hexadecanoate, E-<br />

C18 : ethyl octadecanoate, E-C18-2 : ethyl lino<strong>le</strong>ate, TPB : E-1-(2,3,6-trimethylphenyl)buta-1,3-diène<br />

(TPB)<br />

Les teneurs en ces composés résultent de <strong>le</strong>ur formation/dégradation tout au long du<br />

processus d’élaboration, de la vigne à la bouteil<strong>le</strong>. Toutefois, certains composés sont plus<br />

fortement impactés par une étape particulière du processus et peuvent alors être utilisés<br />

comme marqueurs. Pour l’analyste, ces composés volatils, marqueurs des différentes étapes,<br />

constituent la mémoire du produit.<br />

2.3 - Les éléments de la spécificité<br />

2.3.1 - La matière première : <strong>le</strong> raisin, une aire géographique<br />

Les spiritueux issus de différentes matières premières possèdent des compositions<br />

relativement différentes. Par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong>s alcools de grains, contrairement aux spiritueux<br />

d’origine vitico<strong>le</strong>, ne contiennent pas ou pratiquement pas de méthanol (dégradation des<br />

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pectines de fruits) ou de composés d’arôme tels que <strong>le</strong>s vitispiranes, <strong>le</strong> TDN ou d’autres C13<br />

norisoprénoïde issus du raisin. L’origine vitico<strong>le</strong> d’un spiritueux est donc, en général, faci<strong>le</strong> à<br />

établir.<br />

Une autre source d’information, indépendante des composés volatils, est la composition en<br />

isotopes stab<strong>le</strong>s de la molécu<strong>le</strong> d’éthanol du spiritueux (GUILLOU et al., 1993). Cette<br />

composition dépend de l’origine botanique de la matière première (plantes en C3 et en C4)<br />

mais aussi de l’aire géographique, principa<strong>le</strong>ment du climat. Les eaux-de-vie de Cognac<br />

possèdent ainsi des ratios isotopiques qui peuvent être utilisés, notamment pour détecter soit<br />

la présence d’éthanol d’origine non vinique soit d’une origine géographique extérieure à la<br />

zone d’AOC Cognac. Cette analyse peut être réalisée sur des alcools très rectifiés ne contenant<br />

que très peu de substances volati<strong>le</strong>s. Les analyses isotopiques de l’éthanol nécessitant un<br />

appareillage couteux et spécifique sont réalisées par des laboratoires spécialisés.<br />

2.3.2 - Un cépage particulier : l’Ugni blanc<br />

Au sein des spiritueux d’origine vinique, qui possèdent une base commune, chaque cépage<br />

possède un profil particulier utilisab<strong>le</strong> pour caractériser <strong>le</strong>s produits.<br />

Ainsi, l’Ugni blanc présente certaines caractéristiques spécifiques dans sa composition en<br />

alcools à 6 atomes de carbone (hexanol, cis-3-hexenol…). Les raisins d’Ugni blanc sont<br />

éga<strong>le</strong>ment relativement riches en précurseurs de C13-norisoprénoïdes : β-damascènone, TDN,<br />

qui sont révélés lors de la distillation et se retrouvent dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie (LURTON et al,<br />

1990).<br />

2.3.3 - Une technique de vinification spécifique<br />

De nombreux composés volatils (alcools supérieurs, esters, aldéhydes, acétals, acides gras…)<br />

sont formés par <strong>le</strong>s <strong>le</strong>vures pendant la phase de fermentation alcoolique (LURTON et al, 1995).<br />

Ils représentent quantitativement <strong>le</strong>s fractions volati<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus importantes.<br />

La composition de la matière première (fraction azotée, matières en suspension …) et <strong>le</strong>s<br />

conditions de fermentation (température, oxygène, souche de <strong>le</strong>vure ….) déterminent <strong>le</strong>s<br />

teneurs des produits fermentés.<br />

A titre d’exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> ratio méthyl-3 butanol-1/méthyl-2 butanol-1 diffère de façon très<br />

significative entre alcools d’origine vitico<strong>le</strong> et alcools de grain (figure 3).<br />

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Figure 3 : Ratio méthyl-3 butanol-1/méthyl-2 butanol-1, Cognac – brandies – marcs - whiskies<br />

La grande particularité de la vinification des vins de distillation est l’absence d’utilisation du<br />

SO 2, car celui-ci entrainerait une augmentation des teneurs en éthanal dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie.<br />

Ainsi, <strong>le</strong> débourbage est limité, la fermentation est initiée rapidement. La maîtrise de l’hygiène<br />

fermentaire est éga<strong>le</strong>ment crucia<strong>le</strong> pour éviter <strong>le</strong>s altérations pendant <strong>le</strong>s phases de<br />

conservation des vins qui se traduisent d’un point de vue analytique par une augmentation des<br />

teneurs en butanols, en butyrate d’éthy<strong>le</strong> et en acétate d’éthy<strong>le</strong> (figure 4).<br />

Figure 4 : Détail des substances volati<strong>le</strong>s, Cognac – brandies – marcs<br />

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2.3.4 - Une distillation traditionnel<strong>le</strong><br />

Comme déjà énoncé, la distillation charentaise se caractérise notamment par son faib<strong>le</strong> niveau<br />

de rectification. Ainsi, <strong>le</strong> Cognac est en général plus riche en composés volatils que <strong>le</strong>s<br />

brandies. De ce fait, la distillation charentaise confère une importance particulière au bon<br />

dérou<strong>le</strong>ment des différentes étapes du procédé d’élaboration : <strong>le</strong> moût, puis <strong>le</strong> vin doivent être<br />

exempts de défauts car la distillation possède une capacité de rectification limitée.<br />

Outre <strong>le</strong> faib<strong>le</strong> niveau de rectification, la distillation charentaise se caractérise par <strong>le</strong> chauffage<br />

direct à feu nu qui entraîne la formation de composés nouveaux. L’alambic peut alors être<br />

comparé à un réacteur. Sous l’action de la cha<strong>le</strong>ur se forment notamment des aldéhydes issus<br />

de la dégradation de sucres en C5 (non fermentescib<strong>le</strong>s) comme <strong>le</strong> furfural ou encore<br />

l’isobutanal (GALY et al., 1990, figure 5).<br />

Figure 5 : Isobutanal, composé formé lors de la distillation (chauffage du vin)<br />

Enfin, la distillation du vin en présence des <strong>le</strong>vures contenues dans <strong>le</strong>s lies de vinification se<br />

traduit par un enrichissement en esters d’acides gras (chaines de 8 atomes de carbone et plus),<br />

en acides gras et en d’autres substances d’arôme.<br />

2.3.5 - Un vieillissement sous bois<br />

Le vieillissement se traduit premièrement par l’apparition et l’augmentation en composés<br />

extraits du bois : des dérivés de la lignine (la vanilline est la plus connue), des lactones<br />

(principa<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s méthyl octalactones), des dérivés furaniques, <strong>le</strong> furfural… (CANTAGREL et<br />

al., 1993).<br />

Le vieillissement correspond éga<strong>le</strong>ment à un processus d’oxydation ménagée. Après la phase<br />

d’extraction, des évolutions interviennent dans <strong>le</strong> pool des composés extraits du bois : ainsi, <strong>le</strong><br />

coniféraldéhyde est transformé en vanilline et en acide vanillique (CALVO et al, 1993).<br />

Les composés issus de l’eau-de-vie nouvel<strong>le</strong> évoluent éga<strong>le</strong>ment : augmentation des méthyl<br />

cétones, par β-oxydation des acides gras (MARCHE et JOSEPH, 1975 ; VIDAL et al, 1993 ;<br />

WATTS et al, 2003), formation d’acétaldéhyde et d’acétate d’éthy<strong>le</strong> par oxydation de l’éthanol<br />

(REAZIN, 1981).<br />

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Lors du vieillissement sous bois, la richesse en éthanol diminue par évaporation (PUECH et al,<br />

1984). Les composants moins volatils que l’éthanol, par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong>s alcools supérieurs, voient<br />

<strong>le</strong>ur concentration augmenter.<br />

Les esters d’alcools supérieurs formés lors de la fermentation voient <strong>le</strong>urs teneurs diminuer par<br />

trans-estérification. De même, certains parmi <strong>le</strong>s composés cités précédemment sont en partie<br />

dégradés : isobutanal, TDN, … : <strong>le</strong>urs concentrations ont tendance à diminuer (figure 6).<br />

Figure 6 : Teneur en TDN, Eaux-de-vie de Cognac 00, et spiritueux<br />

2.4 - La défense du Cognac<br />

2.4.1 - Disposer de données analytiques actualisées et fiab<strong>le</strong>s<br />

L’activité de la Station Vitico<strong>le</strong> concernant la défense du Cognac passe dans un premier temps<br />

par la constitution de bases de données de référence. De nombreux spiritueux, plus de 500<br />

références par an, principa<strong>le</strong>ment des Cognacs, sont ainsi quotidiennement analysés. Notre<br />

base de données Cognac comporte aujourd’hui plus de 10 000 références, traitées au cours<br />

des 40 dernières années.<br />

Les analyses de référence comprenant une trentaine de paramètres (TAV, substances volati<strong>le</strong>s<br />

et composés volatils majoritaires en Chromatographie en Phase Gazeuse) sont réalisées sur<br />

l’ensemb<strong>le</strong> de ces échantillons. Un menu analytique plus comp<strong>le</strong>t : composés volatils traces par<br />

CPG de l’extrait isooctane, CPG-Masse, composants extraits du bois en Chromatographie en<br />

phase liquide (CHLP), sucres), soit un total d’environ 150 paramètres, est réalisé sur un sousensemb<strong>le</strong>.<br />

Cette base de données spiritueux comporte aujourd’hui environ 1800 références<br />

(Cognacs (environ 1000), brandies, Armagnacs, whiskies, rhums …).<br />

L’accréditation ISO 17 025 de la Station Vitico<strong>le</strong> constitue un gage de fiabilité de ces données<br />

analytiques.<br />

91


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Chaque année, pour validation, <strong>le</strong>s nouveaux résultats sont comparés à ceux déjà présents<br />

avant d’être intégrés aux bases de données (figure 7). L’ensemb<strong>le</strong> de ce travail permet de<br />

disposer de données analytiques fiab<strong>le</strong>s, actualisées et représentatives de la production<br />

régiona<strong>le</strong>.<br />

Figure 7 : Validation des nouveaux résultats, aldéhydes, acétate d'éthy<strong>le</strong>, propanol<br />

2.4.2 - Faciliter l’accès aux marchés<br />

Faciliter l’accès aux marchés consiste, en partenariat avec <strong>le</strong> service juridique, à constituer des<br />

dossiers permettant de <strong>le</strong>ver des situations de blocage avec des administrations étrangères, ou<br />

d’infléchir des projets de rég<strong>le</strong>mentation pour que ceux-ci restent compatib<strong>le</strong>s avec <strong>le</strong>s<br />

caractéristiques du Cognac.<br />

Ces dossiers intègrent des éléments rég<strong>le</strong>mentaires, techniques et analytiques. L’objectif est<br />

fréquemment de démontrer que <strong>le</strong>s teneurs du Cognac en un composé sont liées aux règ<strong>le</strong>s de<br />

production et en constituent donc une caractéristique intrinsèque.<br />

Une récente note relative à la spécificité Cognac a été transmise aux autorités vietnamiennes<br />

pour faciliter l’enregistrement d’une référence. Pour ce même pays, un projet publié en 2010<br />

relatif à un maximum en aldéhydes a été amendé grâce aux interventions menées dans <strong>le</strong> cadre<br />

de la Confédération Européenne des Producteurs Spiritueux (CEPS). La nouvel<strong>le</strong> rég<strong>le</strong>mentation<br />

vietnamienne entrée en vigueur en juil<strong>le</strong>t 2011 ne contient pas de clauses analytiques gênantes<br />

pour la circulation du Cognac, notamment pas de limite maximum en aldéhydes.<br />

Au cours de ces dernières années, des lots de Cognac ont été bloqués au Brésil en raison d’une<br />

rég<strong>le</strong>mentation de ce pays qui comporte des va<strong>le</strong>urs maxima<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong>s eaux-de-vie de vin en<br />

substances volati<strong>le</strong>s (total), alcools supérieurs, acidité volati<strong>le</strong> …. Une note à l’attention des<br />

autorités brésiliennes démontrant que <strong>le</strong>s teneurs des eaux-de-vie de Cognac sont la<br />

conséquence des règ<strong>le</strong>s de production (méthode de distillation, vieillissement sous bois) a<br />

permis de <strong>le</strong>ver ces situations de blocage.<br />

92


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.4.3 - Authentifier (Cognac)<br />

Ces bases de données servent aussi de référence pour déterminer si un produit inconnu<br />

correspond ou non au profil Cognac.<br />

Un échantillon suspect traité cette année est pris en exemp<strong>le</strong> (figures 8 et 9).<br />

L’Analyse Factoriel<strong>le</strong> Discriminante est un outil statistique multivarié (<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s<br />

concentrations de différents composés) qui permet de différencier au mieux <strong>le</strong>s groupes<br />

soumis à l’analyse. Un échantillon inconnu sera affecté au groupe dont il est <strong>le</strong> plus proche.<br />

Cette technique permet donc d’optimiser et généraliser sur un grand nombre de composés une<br />

règ<strong>le</strong> de décision qui serait basée sur <strong>le</strong>s concentrations en seu<strong>le</strong>ment deux composés (figures<br />

8 et 9).<br />

Figure 8 : Echantillon suspect, concentrations<br />

pour deux composés<br />

Figure 9 : Echantillon suspect, Analyse<br />

Factoriel<strong>le</strong> Discriminante<br />

2.4.4 - Caractériser un spiritueux<br />

Des profils analytiques permettent de visualiser de quel<strong>le</strong> manière l’échantillon diffère du<br />

groupe de référence Cognac (figures 10 et 11). Les composés sont représentés sur l’axe<br />

horizontal. Pour chaque composé, l’axe vertical permet de situer <strong>le</strong> niveau de concentration<br />

d’un échantillon inconnu (rouge) par <strong>rapport</strong> à la moyenne (par construction, va<strong>le</strong>ur de 0) et<br />

aux va<strong>le</strong>urs extrêmes du groupe Cognac (centi<strong>le</strong>s 1 % et 99 %).<br />

Pour <strong>le</strong> produit concerné <strong>le</strong> profil des composés marqueurs de la matière première ne permet<br />

pas d’exclure une origine au moins partiel<strong>le</strong>ment vitico<strong>le</strong> (figure 10). Néanmoins, <strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>s<br />

teneurs en C13 norisoprénoïdes (Vitispiranes, TDN et Bdamascénone) apparaissent hors des<br />

limites usuel<strong>le</strong>s (99 %) du Cognac et de l’Ugni blanc.<br />

Cet échantillon possède éga<strong>le</strong>ment de faib<strong>le</strong>s teneurs en isobutanol, méthyl-2-butanol-1,<br />

méthyl-3-butanol-1 (vinification, distillation - rectification) et en isobutanal et fufural<br />

(composés néoformés pendant la distillation) (figure 11).<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

A l’opposé, il possède des teneurs plutôt é<strong>le</strong>vées en butanols (altération bactérienne). Le ratio<br />

propanol/isobutanol confirme cette activité bactérienne. Les caractéristiques de ce produit sont<br />

conformes à cel<strong>le</strong>s observées sur certains brandies.<br />

Enfin <strong>le</strong>s teneurs relativement é<strong>le</strong>vées en lactate d’éthy<strong>le</strong> et en succinate d’éthy<strong>le</strong> pourraient<br />

confirmer une origine vinique. Ces esters sont formés lors de la fermentation malolactique,<br />

<strong>le</strong>ur teneur augmente avec la durée de conservation du vin avant distillation.<br />

Figure 10 : Echantillon suspect, profil en composés marqueurs de la matière première<br />

Figure 11 : Echantillon suspect, Composés impactés par la vinification et la distillation<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

2.5 - Conclusion<br />

Le Cognac est une eau-de-vie de vin sous IG (Indication Géographique). A ce titre, un cahier<br />

des charges fixe ses conditions de production. Parmi ces règ<strong>le</strong>s, la distillation avec des<br />

alambics charentais correspond à un faib<strong>le</strong> niveau de rectification. Ainsi <strong>le</strong>s eaux-de-vie de<br />

Cognac sont riches en composés volatils générés aux différentes étapes du process.<br />

Les informations issues des très nombreuses analyses réalisées au cours du temps par la<br />

Station Vitico<strong>le</strong> sont utilisées pour constituer des dossiers pour faciliter l’accès du Cognac aux<br />

marchés de différents pays.<br />

Ces informations analytiques permettent éga<strong>le</strong>ment de caractériser certains aspects du process<br />

de production d’un spiritueux et de contribuer à l’authentification des produits en déterminant<br />

si un échantillon correspond ou non au type Cognac.<br />

3 - Bibliographie<br />

CALVO A., CAUMEIL M., PINEAU J., 1993. Extraction des polyphénols et des aldéhydes aromatiques<br />

pendant <strong>le</strong> vieillissement du Cognac, en fonction du titre alcoolique et du « degré d’épuisement » des<br />

fûts, In Elaboration et connaissance des spiritueux, recherche de la qualité, tradition et innovation,<br />

Cantagrel coordinateur, BNIC ed. Cognac, France, 562-566.<br />

CANTAGREL R., MAZEROLLES G., VIDAL J.P., GALY B., BOULESTEIX J.M., LABLANQUIE O., GASCHET J.,<br />

1993. Evolution analytique et organo<strong>le</strong>ptique des eaux-de-vie de Cognac au cours du vieillissement.<br />

In Elaboration et connaissance des spiritueux, recherche de la qualité, tradition et innovation,<br />

Cantagrel C coordinateur, BNIC ed. Cognac, France, 567-582.<br />

DE RIJKE D., TER HEIDE R., 1983. Flavour compounds in Rum, Cognac and Whisky In Flavour of Distil<strong>le</strong>d<br />

Beverages : Origin and Development. Piggott JR Eds.; Ellis Horwood Chichester, 1983. 192−202.<br />

GALY B., LOIZEAU A., GIRAUD N., LURTON L., 2007. Mécanismes de formation et conséquences<br />

qualitatives de l'Isobutanal présent dans <strong>le</strong>s eaux-de-vie de Cognac, 2 ème Symposium sur <strong>le</strong>s eaux-devie<br />

traditionnel<strong>le</strong>s d’origine vitico<strong>le</strong>. Université Bordeaux 2, 25-27 Juin.<br />

GUILLOU C., MARTIN G.J., VIDAL J.-P., CANTAGREL R., 1993. The applications of deuterium Nuc<strong>le</strong>ar<br />

Magnetic Resonance of the analysis of spirits. In Elaboration et connaissance des spiritueux, recherche<br />

de la qualité, tradition et innovation, Cantagrel coordinateur, BNIC ed. Cognac, France, 417-424.<br />

LEDAUPHIN J., SAINT-CLAIR J.F., LABLANQUIE O., GUICHARD H., GUICHARD E., BARILLIER D., 2004.<br />

Identification of Trace Volati<strong>le</strong> Compounds in Freshly Distil<strong>le</strong>d Calvados and Cognac Using Preparative<br />

Separations Coup<strong>le</strong>d with Gas Chromatography−Mass Spectrometry. J. Agric. Food Chem.. 52, 16,<br />

5124-5134.<br />

LURTON L., MAZEROLLES G., GALY B., CANTAGREL R., VIDAL J.P., 1990. Influence de la technologie de<br />

vinification sur la qualité des eaux-de-vie de Cognac : exemp<strong>le</strong> des norisoprénoïdes et des alcools<br />

supérieurs, 1er Symposium Inter<strong>national</strong> sur <strong>le</strong>s eaux-de-vie traditionnel<strong>le</strong>s, Bordeaux 26/06/1990, In<br />

« Les eaux-de-vie traditionnel<strong>le</strong>s d’origine vitico<strong>le</strong> », Lavoisier ed.Tec & DOC, 127-136.<br />

LURTON L., SNAKKERS G., ROULLAND C., GALY B., VERSAVAUD A., 1995. Influence of the fermentation<br />

yeast strain on the composition of wine spirits, Journal of the Science of Food and Agriculture. Volume<br />

67, Issue 4, 485–491.<br />

LURTON L., FERRARI G., SNAKKERS G., GALY B., ROULLAND C., 2011a. Vinification des vins de<br />

distillation et qualité des eaux-de-vie de Cognac. Congrès de l’OIV, Lisbonne, Portugal, 20-24 juin.<br />

95


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

LURTON L., FERRARI G., SNAKKERS G., 2011b. Cognac : production and aromatic characteristics, in<br />

Alcoholic beverages : sensory evaluation and consumer research, Piggott J.R. Editeur : Woodhead<br />

Publishing. A paraître.<br />

MARCHE M., JOSEPH E., 1975. Etude théorique sur <strong>le</strong> Cognac, sa composition et son vieillissement<br />

naturel en fûts de chêne, Revue Française d’œnologie, 1975, 57, 3-107.<br />

PUECH J.L., LEAUTE R., CLOT G., NOMDEDEU L., MONDIES H., 1984. Evolution de divers constituants<br />

volatils et phénoliques des eaux-de-vie de Cognac au cours de <strong>le</strong>ur vieillissement, Sciences des<br />

aliments, v4, n°1, 65 – 80.<br />

R CE 110/2008. RÈGLEMENT (CE) N°110/2008 du 15 janvier 2008 concernant la définition, la<br />

désignation, la présentation, l'étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons<br />

spiritueuses et abrogeant <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment (CEE) n°1576/89.<br />

R CE 2870/2000. RÈGLEMENT (CE) N°2870/2000 du 19 décembre 2000 établissant des méthodes<br />

d'analyse communautaires de référence applicab<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> secteur des boissons spiritueuses.<br />

REAZIN G.H., 1981. Chemical mechanisms of whiskey maturation. Am. J. Enol. Vitic., 32 : 283-289.<br />

VIDAL J.P., MAZEROLLES G., ESTREGUIL S., CANTAGREL R., 1993. Analyse quantitative de la fraction<br />

carbonylée volati<strong>le</strong> des eaux-de-vie de Cognac, In Elaboration et connaissance des spiritueux,<br />

recherche de la qualité, tradition et innovation, Cantagrel coordinateur, BNIC ed. Cognac, France. 529-<br />

537.<br />

WATTS V.A., BUTZKE C., BOULTON R., 2003. Study of Aged Cognac Using Solid Phase Microextraction<br />

and Partial Least-Square Regression, J. Agric. Food. Chem, 51, 7738-7742.<br />

96


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Maladies du bois : point sur <strong>le</strong>s programmes de<br />

recherche en cours<br />

P. LARIGNON, IFV Pô<strong>le</strong> Rhône-Méditerranée, Nîmes<br />

1 - Introduction<br />

Les maladies du bois sont considérées comme très dommageab<strong>le</strong>s pour la pérennité du<br />

patrimoine vitico<strong>le</strong> car <strong>le</strong>s champignons responsab<strong>le</strong>s de ces maladies attaquent <strong>le</strong>s organes<br />

pérennes de la vigne, provoquant à plus ou moins long terme la mort du cep. Dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong>,<br />

el<strong>le</strong>s se manifestent par différentes symptomatologies au niveau de la partie herbacée. El<strong>le</strong>s<br />

peuvent se caractériser par des formes plus ou moins sévères allant jusqu’à l’apop<strong>le</strong>xie ou par<br />

des formes <strong>le</strong>ntes conduisant à l’affaiblissement progressif de la plante (perte de vigueur), pour<br />

aboutir à la mort d’une partie de la plante (coursons, bras), puis à la plante entière. Ces<br />

dernières s’expriment soit par des tigrures des feuil<strong>le</strong>s, soit par des rabougrissements de la<br />

végétation. Selon la gravité de la maladie ou la période où el<strong>le</strong> se manifeste, el<strong>le</strong> peut toucher<br />

<strong>le</strong>s inflorescences ou <strong>le</strong>s fruits. Ces derniers peuvent ne pas atteindre <strong>le</strong>ur maturation, se<br />

dessécher ou encore prendre un aspect mil<strong>le</strong>randé. Il est éga<strong>le</strong>ment possib<strong>le</strong> d’observer la mort<br />

de la plante sans qu’il y ait expression de symptômes visib<strong>le</strong>s. Dans <strong>le</strong> bois, ces maladies se<br />

traduisent par différentes nécroses qui sont plus ou moins développées allant de quelques<br />

vaisseaux obstrués jusqu’à la formation de chancres. Le bois peut présenter différents aspects<br />

de dégradation (pourriture blanche, pourriture mol<strong>le</strong>).<br />

2 – Les maladies du bois et <strong>le</strong>ur répartition dans <strong>le</strong> monde<br />

Ces maladies peuvent toucher <strong>le</strong>s jeunes plantations (< 5-6 ans voire 10 ans) (figure 1) et <strong>le</strong>s<br />

vignes plus âgées (> 7-8 ans) (figure 2).<br />

97


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Pied noir<br />

Agents impliqués : Ilyonectria liriodendri, Ilyonectria macrodidyma<br />

Maladie de<br />

Petri<br />

Agents impliqués : Phaeomoniella chlamydospora, différentes espèces de Phaeoacremonium<br />

Verticilliose<br />

Agents impliqués : Verticillium dahliae, Verticillium albo-atrum<br />

Figure 1 : Maladies des vignes jeunes : symptômes, répartition et agents associés<br />

Eutypiose<br />

Agent pathogène : Eutypa lata<br />

Esca<br />

Agents impliqués : Phaeomoniella chlamydospora, Phaeoacremonium a<strong>le</strong>ophilum, Fomitiporia spp.<br />

(mediterranea en Europe, polymorpha en Californie, australiensis en Australie, etc… )<br />

Botryosphaerioses<br />

Agents impliqués : Botryosphaeriaceae (Neofusicoccum parvum, Diplodia seriata, Fusicoccum aesculi,<br />

Diplodia mutila en France). Cette maladie touche éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s jeunes plantations.<br />

Figure 2 : Maladies des vignes adultes : symptômes, répartition et agents associés<br />

98


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

3 - La création d’un groupe inter<strong>national</strong> des maladies du bois de la<br />

vigne<br />

La sensibilisation de plusieurs chercheurs – Ian Pascoe (Australie), Laura Mugnai (Italie), Lucie<br />

Morton (Virginie), Lisa van de Walter (USA), Luigi Chiarappa (Californie), Philippe Larignon<br />

(France) - aux maladies de dépérissement (plus particulièrement la maladie de Petri) a permis<br />

de créer lors d’une visite du vignob<strong>le</strong> californien en 1998 un groupe inter<strong>national</strong> sur <strong>le</strong>s<br />

maladies du bois de la vigne appelé ICGTD (Inter<strong>national</strong> Council Grapevine Trunk Disease) qui<br />

s’est réuni pour la première fois en 1999 à Sienne et se réunit actuel<strong>le</strong>ment tous <strong>le</strong>s deux ans :<br />

Lisbonne (2001), Christchurch (2003), Stel<strong>le</strong>nbosch (2005), Davis (2006), Florence (2008),<br />

Santa Cruz du Chili (2010), Va<strong>le</strong>nce en Espagne (2012). Il regroupe maintenant une centaine de<br />

chercheurs venant de tous <strong>le</strong>s pays vitico<strong>le</strong>s. Les congrès ont pour but de partager <strong>le</strong>s<br />

connaissances acquises lors des différentes recherches menées et de réfléchir sur <strong>le</strong>s futures<br />

études à conduire, bien-sûr dans l’objectif de trouver une méthode de lutte efficace à l’égard<br />

des maladies du bois. Ne traitant tout d’abord que <strong>le</strong> problème de l’Esca, il s’est élargi sur <strong>le</strong>s<br />

autres maladies du bois de la vigne (Eutypiose, Botryosphaerioses, Hoja de Malvon, Pied noir,<br />

Maladie de Petri…).<br />

Les thèmes de recherche touchent <strong>le</strong>s différents aspects de la pathologie. Ils concernent :<br />

1) la détermination des causes responsab<strong>le</strong>s des dépérissements observés dans <strong>le</strong><br />

vignob<strong>le</strong>, et l’identification de l’agent pathogène par des méthodes de biologie<br />

moléculaire et par la description morphologique (taxinomie),<br />

2) l’épidémiologie,<br />

3) l’identification des facteurs environnementaux,<br />

4) <strong>le</strong>s interactions entre la plante et l’agent pathogène (toxines, enzymes),<br />

5) <strong>le</strong>s méthodes de lutte (lutte chimique, lutte biologique, pratiques cultura<strong>le</strong>s).<br />

Auparavant, un autre groupe, désigné sous <strong>le</strong> nom de FAVOR, mis en place par l’association<br />

« Lien de la Vigne » et réunissant des chercheurs européens, américains et australiens, se<br />

réunissait deux fois par an dans <strong>le</strong> but de construire des programmes de recherches<br />

européens. Deux programmes ont vu <strong>le</strong> jour et coordonnés par LVMH : programme CAMAR<br />

n°8001–CT–91.205 portant sur l’Eutypiose (1989-1993) et <strong>le</strong> programme FAIR n°1CT-95.654<br />

« Maîtrise de l’Esca et Respect de l’Environnement » (1996-1999).<br />

4 – Le point sur <strong>le</strong>s recherches en France<br />

4.1 - L’eutypiose<br />

Suite à l’« explosion » de l’eutypiose en 1978, puis en 1983 en faveur de conditions<br />

climatiques favorab<strong>le</strong>s sur l’ensemb<strong>le</strong> du vignob<strong>le</strong>, des recherches ont tout d’abord débuté à<br />

l’INRA, puis se sont amplifiées à la fin des années 80 au cours desquel<strong>le</strong>s une structure de<br />

coordination des travaux sur <strong>le</strong>s maladies de dépérissement animée par l’INRA de Bordeaux a<br />

été mise en place (Groupe National Maladies de dépérissement). Pour connaître réel<strong>le</strong>ment<br />

l’état sanitaire du vignob<strong>le</strong>, des enquêtes ont été mises en place : tout d’abord en Charentes<br />

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J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

par <strong>le</strong> groupe Eutypiose Charentes entre 1988–1993, puis dans d’autres régions françaises par<br />

<strong>le</strong> Service de la Protection des Végétaux en 1990 (réseau <strong>national</strong> de surveillance). Les études<br />

ont porté sur une meil<strong>le</strong>ure connaissance du cyc<strong>le</strong> biologique de l’agent pathogène (périodes<br />

de dissémination, voies de pénétration), sur la compréhension de l’expression des symptômes<br />

(rô<strong>le</strong> du climat, mise en évidence de toxines) et sur la recherche de moyens de lutte en<br />

collaboration avec des sociétés phytopharmaceutiques (produits en protection des plaies de<br />

tail<strong>le</strong>, techniques de pratiques cultura<strong>le</strong>s). Toutes ces études réalisées dans différentes régions<br />

françaises et par différents organismes ont conduit à donner des solutions aux viticulteurs<br />

pour pouvoir limiter l’eutypiose dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> (prophylaxie, techniques de recépage, tail<strong>le</strong><br />

tardive, systèmes de tail<strong>le</strong>). Des opérations de communication (par ex. l’ascospore en<br />

Charentes) ont été effectuées dans différentes régions françaises au travers de plaquettes pour<br />

sensibiliser <strong>le</strong>s viticulteurs à <strong>le</strong>s mettre en pratique. Même si l’intérêt des recherches a diminué<br />

au milieu des années 90, des études se sont toujours poursuivies dans l’objectif d’améliorer la<br />

lutte prophylactique, ou de trouver des solutions plus économiques et plus faci<strong>le</strong>s à mettre en<br />

pratique. Ces recherches, menées par <strong>le</strong> CNRS de Poitiers ou encore par <strong>le</strong>s Universités<br />

(Poitiers, Bordeaux) ont porté sur la mise au point de tests de diagnostic, sur la compréhension<br />

de l’expression des symptômes foliaires, sur la recherche de marqueurs de résistance qui<br />

seront par la suite utilisés pour l’amélioration génétique, ou encore sur la recherche de<br />

molécu<strong>le</strong>s stimulatrices des mécanismes de défenses de la plante.<br />

A part <strong>le</strong>s méthodes de lutte liées aux pratiques cultura<strong>le</strong>s, aucune autre méthode de lutte<br />

n’est efficace même si des produits (Brotomax, Trichoderma…) sont homologués dans<br />

différents pays. Aucune expérimentation n’a montré que <strong>le</strong>ur utilisation limitait l’expression<br />

des symptômes foliaires. En France, un produit à base de Trichoderma a été homologué en<br />

2010 en protection des plaies de tail<strong>le</strong> ; un suivi post-homologation est réalisé afin de<br />

connaître s’il est vraiment efficace. Contrairement à ce qu’on peut parfois lire ou entendre, à<br />

rappe<strong>le</strong>r que l’arsénite de sodium n’avait aucune efficacité sur cette maladie.<br />

4.2 - L’esca et <strong>le</strong>s Botryosphaerioses (BDA)<br />

L’Esca fut attribuée à un champignon à la fin du XIXe sièc<strong>le</strong> et de ce fait se distinguait du<br />

fol<strong>le</strong>tage, maladie physiologique. La découverte de l’efficacité de l’arsénite de sodium à l’égard<br />

de ce dépérissement de façon tout à fait fortuite a entraîné à partir des années 20 l’arrêt des<br />

travaux sur cette maladie pendant un demi-sièc<strong>le</strong> en Europe. Durant <strong>le</strong>s années 80, <strong>le</strong>s<br />

recherches ont été initiées de nouveau en France par l’INRA de Bordeaux en raison d’un<br />

éventuel retrait de l’arsénite de sodium, du fait de sa toxicité non seu<strong>le</strong>ment pour l’homme<br />

mais aussi pour l’environnement. Les études ont porté sur l’identification des champignons qui<br />

y sont associés, <strong>le</strong>ur mode d’action, <strong>le</strong>ur cyc<strong>le</strong> biologique…. A la fin des années 90, une autre<br />

maladie a été identifiée en France, <strong>le</strong> Black dead arm (BDA), qui est associé aux champignons<br />

du genre Botryosphaeria. Ces champignons, considérés à tort comme des saprophytes, ont pris<br />

une attention toute particulière depuis seu<strong>le</strong>ment quelques années. Ils sont responsab<strong>le</strong>s d’un<br />

grand nombre de dépérissements chez la vigne mais aussi chez de nombreux arbustes et<br />

arbres.<br />

100


J O U R N E E T E C H N I Q U E D E L A S T A T I O N V I T I C O L E<br />

Suite à la suppression de l’arsénite de sodium en novembre 2001, un groupe <strong>national</strong> de<br />

travail, sous l’égide de l’ONIVINS (actuel<strong>le</strong>ment FranceAgriMer) et animé par l’IFV, a été créé.<br />

Son objectif est d’apporter aux viticulteurs une méthode aussi efficace et de moindre toxicité<br />

que l’arsénite de sodium. Il regroupe <strong>le</strong>s différents organismes de recherche et<br />

<strong>interprofessionnel</strong>s qui travail<strong>le</strong>nt en collaboration avec <strong>le</strong>s chercheurs internationaux. Comme<br />

dans <strong>le</strong> cas de l’eutypiose, un groupe <strong>national</strong> Maladies du Bois, animé par l’IFV, a été mis aussi<br />

en place pour coordonner <strong>le</strong>s recherches et un observatoire (2003-2008) a été mis en place par<br />

la SRAL de façon à évaluer l’état sanitaire du vignob<strong>le</strong>. Ces études ont permis d’apporter de<br />

nombreuses connaissances sur <strong>le</strong>s maladies du bois, mais sont encore insuffisantes pour<br />

pouvoir proposer des méthodes de lutte vraiment efficaces. El<strong>le</strong>s ont permis de montrer par<br />

exemp<strong>le</strong>, la propagation des champignons associés aux maladies du bois par <strong>le</strong> matériel<br />

végétal, l’identification de certaines voies de pénétration dans la plante, l’influence du sol sur<br />

l’expression des symptômes foliaires, l’identification des facteurs climatiques favorab<strong>le</strong>s à<br />

l’expression des symptômes, la sécrétion de toxines par certains champignons….<br />

Pour renforcer <strong>le</strong>s travaux de recherche et d’expérimentation sur des moyens innovants de<br />

prévention et de lutte contre <strong>le</strong>s maladies du bois, <strong>le</strong> Ministère de l’alimentation, de<br />

l’agriculture et de la pêche a lancé en décembre 2008 dans <strong>le</strong> cadre du plan quinquennal de<br />

modernisation de la viticulture, un appel à projets spécifique, financé à hauteur de 1,5 million<br />

d’euros par <strong>le</strong> CASDAR. Cet appel à projet est une volonté du Ministère et des professionnels<br />

du secteur vitico<strong>le</strong> pour que soient trouvées des solutions durab<strong>le</strong>s pour lutter contre ces<br />

maladies (Black Dead Arm, esca, eutypiose) (Tab<strong>le</strong>au 1). A côté de ces programmes de<br />

recherches, d’autres se sont mis en place portant sur <strong>le</strong>s cyc<strong>le</strong>s biologiques, <strong>le</strong>s méthodes de<br />

lutte, la compréhension des interactions entre la plante et <strong>le</strong> pathogène avec des outils de<br />

haute-technologie, etc…. Les entreprises privées prennent part éga<strong>le</strong>ment aux recherches sur<br />

<strong>le</strong>s maladies du bois et travail<strong>le</strong>nt avec <strong>le</strong>s organismes de recherche.<br />

Tab<strong>le</strong>au 1 : Les programmes Casdar<br />

N° Titre du projet Casdar Organisme porteur du<br />

projet<br />

1 Black Dead Arm, caractérisation Université de Reimsde<br />

mécanismes impliqués dans Champagne-Ardennes<br />

l’expression des symptômes et<br />

identification des toxines<br />

2 Epidémiologie de l’esca/Black INRA Bordeaux UMR<br />

Dead Arm et caractérisation du 1065 Santé<br />

microbiote colonisant <strong>le</strong> tronc de Végéta<strong>le</strong>/ENITA<br />

la vigne<br />

Bordeaux<br />

Actions<br />

Identifier <strong>le</strong>s toxines.<br />

Caractériser <strong>le</strong>s mécanismes impliqués dans<br />

l’établissement et <strong>le</strong> développement de la<br />

maladie.<br />

Comprendre la propagation de la maladie et<br />

son extériorisation. Identifier <strong>le</strong>s facteurs<br />

pédologiques et écophysiologiques.<br />

Identifier la microflore protectrice des ceps.<br />

3 Recherche de marqueurs<br />

physiologiques et moléculaires<br />

impliqués dans la tolérance de la<br />

vigne à certains champignons<br />

des maladies de dépérissement<br />

Institut des Sciences de<br />

la Vigne et du Vin,<br />

Bordeaux<br />

Identifier <strong>le</strong>s marqueurs moléculaires dans<br />

la tolérance à l’eutypiose et au Black dead<br />

arm.<br />

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4 Impact des choix culturaux des<br />

viticulteurs sur <strong>le</strong><br />

développement des maladies du<br />

bois<br />

5 Recherche et évaluation de<br />

procédés permettant la<br />

production de plants indemnes<br />

de champignons associés aux<br />

maladies du bois<br />

Chambre régiona<strong>le</strong><br />

d’agriculture<br />

Languedoc-Roussillon<br />

Chambre d’agriculture<br />

de la Gironde<br />

Connaître l’influence du clone, de la<br />

densité, de la tail<strong>le</strong>, de l’irrigation et de la<br />

vigueur.<br />

Développer des outils de diagnostic.<br />

Définir des processus de multiplication des<br />

plants permettant de garantir la production<br />

d'un matériel sain.<br />

Etudier en p<strong>le</strong>in champ l'intérêt du<br />

traitement à l'eau chaude des plants au<br />

cours de <strong>le</strong>ur production.<br />

Actuel<strong>le</strong>ment, aucune méthode de lutte n’est disponib<strong>le</strong> pour lutter contre ces maladies. Des<br />

sociétés commercialisent des procédés (ondes sonores) ou encore des produits (Bilko, engrais<br />

foliaires, oligo-éléments…) sans qu’une quelconque démonstration ne soit faite sur <strong>le</strong>ur<br />

efficacité.<br />

5 – Conclusion<br />

Les travaux effectués depuis l’interdiction de l’arsénite de sodium n’ont pas permis pour<br />

l’instant d’apporter de solutions satisfaisantes aux viticulteurs. Les difficultés de la mise au<br />

point de moyens de lutte efficaces sont liées : à la comp<strong>le</strong>xité de ces maladies se manifestant<br />

sous différents faciès dans <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong>, impliquant de nombreux champignons au rô<strong>le</strong> encore<br />

mal défini ; à la non connaissance véritab<strong>le</strong> des agents responsab<strong>le</strong>s des symptômes sur la<br />

partie herbacée (formes <strong>le</strong>ntes de l’esca et du black dead arm) ; à l’incapacité de faire pénétrer<br />

des substances efficaces in vitro au sein des tissus ligneux empêchant <strong>le</strong> développement des<br />

champignons ; à l’incapacité de protéger <strong>le</strong>s voies de pénétration de la maladie par des<br />

méthodes économiquement acceptab<strong>le</strong>s par <strong>le</strong> viticulteur ; à la longueur de certaines<br />

expérimentations pour montrer l’efficacité d’un produit ou d’un procédé.<br />

Plusieurs pistes de recherche au niveau des méthodes de lutte ont été arrêtées car el<strong>le</strong>s ne<br />

permettront pas de limiter <strong>le</strong>s maladies du bois ou trop coûteuses d’application. D’autres se<br />

poursuivent. La lutte devra certainement être menée dès la pépinière et durant toute la durée<br />

de vie de la vigne et certainement en conjuguant plusieurs méthodes de lutte. Sur du très long<br />

terme, on peut penser que des plantes tolérantes aux maladies du bois obtenues par<br />

l’amélioration génétique soient proposées.<br />

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