Projet1:Mise en page 1 29/09/2011 16:51 Page 1 - Le Journal Des ...
Projet1:Mise en page 1 29/09/2011 16:51 Page 1 - Le Journal Des ...
Projet1:Mise en page 1 29/09/2011 16:51 Page 1 - Le Journal Des ...
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
JDT226-P25-INFRA-Reportage OKAG:JDT193 28/<strong>09</strong>/<strong>2011</strong> 18:19 <strong>Page</strong> 25<br />
Reportage<br />
Fibre<br />
infrastructures<br />
Par Eric Montagne - Directeur du SmartWIPclub<br />
RuraliTIC :<br />
contre un Yalta<br />
sur le très haut débit<br />
<strong>Le</strong>s élus des zones rurales dénonc<strong>en</strong>t<br />
l’abandon de leurs territoires dans la mise <strong>en</strong><br />
œuvre du plan Très Haut Débit. Alors que la<br />
demande est plus forte que dans les villes.<br />
Du très haut débat au très haut débit !<br />
<strong>Le</strong> thème de la sixième édition du<br />
forum RuraliTIC - sorte d’université<br />
d’été du très haut débit dans les territoires<br />
- qui s’est t<strong>en</strong>u fin août à Aurillac dans le<br />
Cantal, sonne comme un cri d’alarme et d’indignation.<br />
En clair, les discours du gouvernem<strong>en</strong>t<br />
ne saurai<strong>en</strong>t masquer la réalité : les zones<br />
rurales sont les oubliées du très haut débit, et il<br />
<strong>en</strong> va de leur av<strong>en</strong>ir. Tel est le constat qui s’est<br />
inscrit comme une plainte lancinante au cœur<br />
des débats du Forum. Pour bi<strong>en</strong> des participants<br />
de RuraliTIC, les plans gouvernem<strong>en</strong>taux du<br />
déploiem<strong>en</strong>t de la fibre <strong>en</strong> France s’appar<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t<br />
à un Yalta qui a du mal à passer. Aux opérateurs<br />
privés les zones d<strong>en</strong>ses pour déployer de la<br />
fibre, c’est-à-dire là où c’est r<strong>en</strong>table. Aux collectivités<br />
le reste, c’est-à-dire les zones rurales.<br />
Et charge à elles de se débrouiller pour m<strong>en</strong>er à<br />
bi<strong>en</strong> leur mission d’aménagem<strong>en</strong>t numérique du<br />
territoire et de t<strong>en</strong>ir l’échéance de 2025 fixée<br />
par le gouvernem<strong>en</strong>t pour le Très Haut débit<br />
pour tous. <strong>Le</strong> problème est que les poches de<br />
l’Etat comme celles des collectivités sont vides.<br />
Alors qui va financer la fibre dans les villages<br />
et les hameaux ? Personne n’a la réponse.<br />
La fracture<br />
du Très Haut Débit<br />
Pour l’heure, ce Yalta <strong>en</strong>térine de fait que l’usager<br />
des villes et l’usager des champs n’auront<br />
pas demain les mêmes services. « L’arbitrage<br />
<strong>en</strong>tre court et long terme n’a pas été fait par le<br />
gouvernem<strong>en</strong>t, regrette Jean-Luc Sallaberry,<br />
chef de mission de l’AVICCA, l’Association des<br />
Philippe <strong>Le</strong>roy,<br />
sénateur de la Moselle<br />
Villes et Collectivités pour les Communications<br />
électroniques et l’Audiovisuel, les collectivités<br />
n’auront d’autre choix que d’aller sur des demimesures,<br />
comme la Montée <strong>en</strong> Débit, et d’écarter<br />
la fibre dans de nombreux espaces ruraux ».<br />
Et Alain Calmette, maire d’Aurillac, de r<strong>en</strong>chérir<br />
: « <strong>Le</strong> Très Haut Débit est pourtant la clé de<br />
nos soldes migratoires à l’horizon 2020-2025.<br />
Actuellem<strong>en</strong>t, il est négatif et nous devons<br />
inverser la t<strong>en</strong>dance pour r<strong>en</strong>dre nos territoires<br />
ruraux plus attractifs. Or les migrants, demain,<br />
n’iront pas là où le THD est abs<strong>en</strong>t. » Pour bi<strong>en</strong><br />
des élus, la situation a évolué d’une fracture<br />
numérique, celle de l’accès à l’ADSL, à une fracture<br />
sociale par le numérique, celle de l’accès<br />
au THD. Quand le Ministre Eric Besson, chargé<br />
de l’Industrie, de l’Energie et de l’Economie<br />
numérique, rappelle aux participants de Rurali-<br />
TIC les objectifs du plan France Numérique<br />
2020, beaucoup s’interrog<strong>en</strong>t sur le décalage<br />
<strong>en</strong>tre les int<strong>en</strong>tions et la réalité des moy<strong>en</strong>s.<br />
D’un côté le discours : permettre à tous les Français<br />
d’accéder aux services numériques de<br />
demain, développer les cont<strong>en</strong>us, les services,<br />
accroître les usages <strong>en</strong> <strong>en</strong>treprises, dans l’administration<br />
et chez les particuliers… de l’autre<br />
des pans <strong>en</strong>tiers de la France privés des infrastructures<br />
de réseaux, seules capables de diffuser<br />
ces services. « C’est précisém<strong>en</strong>t<br />
l’isolem<strong>en</strong>t géographique qui r<strong>en</strong>d <strong>en</strong>core plus<br />
nécessaire l’augm<strong>en</strong>tation des débits, affirme<br />
Sylvain Dejean, économiste et coordinateur du<br />
GIS M@rsouin. La télémédecine est d’autant<br />
plus nécessaire à l’habitant d’une zone rurale<br />
qu’il est éloigné de l’hôpital. C’est la même<br />
chose avec l’e-administration car il est loin de<br />
la Préfecture ».<br />
<strong>Le</strong>s ruraux,<br />
avides de la fibre<br />
Et ce sont désormais les administrés qui interpell<strong>en</strong>t<br />
leurs élus : « Avant hier, note Vanik<br />
Berberian, maire et Présid<strong>en</strong>t de l’AMRF, on me<br />
demandait si l’école du village allait être maint<strong>en</strong>ue,<br />
hier, on me réclamait Internet, aujourd’hui<br />
on me questionne sur l’arrivée de la<br />
fibre. » La situation est d’ailleurs paradoxale.<br />
de gauche à droite, Jean-Michel Billaut, blogger, Vinc<strong>en</strong>t <strong>Des</strong>coeur, Député du Cantal, Présid<strong>en</strong>t du Conseil général<br />
du cantal et Présid<strong>en</strong>t de l’ANEM, et Vanik Berberian, Présid<strong>en</strong>t de l’AMRF, Maire de Gargilesse-Dampierre<br />
Dans les grandes métropoles urbaines françaises,<br />
là où le FTTH a été déployé par les<br />
grands opérateurs, le taux d’abonnem<strong>en</strong>t avoisine<br />
seulem<strong>en</strong>t les 10 %. Mais les pilotes fibre<br />
réalisés dans les zones rurales montr<strong>en</strong>t une<br />
tout autre appét<strong>en</strong>ce des cli<strong>en</strong>ts. Dans l’Ain, ce<br />
sont 60 à 70 % des habitants d’une commune<br />
nouvellem<strong>en</strong>t fibrée qui ont souscrit immédiatem<strong>en</strong>t<br />
un abonnem<strong>en</strong>t, trop heureux d’abandonner<br />
leur petit débit poussif de quelques<br />
c<strong>en</strong>taines de Kbit/s. Alors qu’un peu plus loin, à<br />
G<strong>en</strong>ève, les cli<strong>en</strong>ts qui ont déjà du haut débit à<br />
20 Mbit/s se demand<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> pourquoi troquer<br />
leur forfait ADSL triple play survitaminé pour un<br />
forfait FTTH. Car, à part la TV 3D multiposte à la<br />
maison - <strong>en</strong>core balbutiante -, les services et<br />
cont<strong>en</strong>us justifiant une infrastructure à débit<br />
symétrique de 100 Mbit/s comme la fibre<br />
n’exist<strong>en</strong>t pas. Difficile de v<strong>en</strong>dre du v<strong>en</strong>t ou des<br />
promesses ! Même constat à Aumont-Aubrac,<br />
à Issoire ou <strong>en</strong>core à Chevry-Cossigny [cf JDT<br />
222], où un réseau FTTH a été déployé et<br />
exploité dans le cadre des projets pilotes<br />
sélectionnés par le gouvernem<strong>en</strong>t. Quand la<br />
bourgade de Chevry-Cossigny (Seine et Marne)<br />
a ouvert les inscriptions à ses 3 500 habitants,<br />
« il y avait une queue de 400 personnes avec<br />
leur chèque d’inscription à la mairie le l<strong>en</strong>demain,<br />
précise Pascal Emond, Directeur du<br />
Développem<strong>en</strong>t de l’opérateur Covage, et les<br />
g<strong>en</strong>s se sont ainsi succédés p<strong>en</strong>dant trois jours<br />
pour dire : la fibre, je la veux. ». ■<br />
Trop chère la fibre ? Tout est relatif !<br />
La demande pour déployer de la fibre existe dans les campagnes, mais reste le<br />
financem<strong>en</strong>t. Et la tr<strong>en</strong>taine de milliards que nécessiterait le fibrage de la France<br />
est à remettre <strong>en</strong> perspective par rapport à d’autres investissem<strong>en</strong>ts. « <strong>Le</strong> schéma<br />
national des transports coûte vingt fois plus cher, relativise le sénateur de la<br />
Moselle Philippe <strong>Le</strong>roy. Personne ne s’émeut des c<strong>en</strong>taines de milliards que représ<strong>en</strong>te<br />
l’arrivée d’une ligne TGV ici, d’une route à quatre voies ou d’un aéroport là.<br />
Dans mon seul départem<strong>en</strong>t, l’investissem<strong>en</strong>t annuel dans le réseau routier et d’assainissem<strong>en</strong>t<br />
des eaux s’élève à 150 millions d’euros. » Avec le sénateur de l’Eure<br />
Hervé Maurey, Philippe <strong>Le</strong>roy veut relancer le débat au Sénat <strong>en</strong> fin d’année afin<br />
d’am<strong>en</strong>der le plan national du gouvernem<strong>en</strong>t et l’<strong>en</strong>richir de nouvelles dispositions<br />
<strong>en</strong> faveur des zones oubliées. « Pour que les collectivités soi<strong>en</strong>t des opérateurs de<br />
rang égal et non des supplétifs. » Et Fabi<strong>en</strong> Bazin, Présid<strong>en</strong>t de Niverlan et signataire<br />
d’un mémorandum visant à replacer les collectivités au cœur de l’aménagem<strong>en</strong>t<br />
numérique de la France, d’ajouter « les territoires ruraux sont considérés<br />
comme des territoires de relégation. Il est grand temps de pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> compte<br />
l’action des collectivités <strong>en</strong> tant qu’opérateur d’opérateurs. »<br />
25 <strong>Le</strong> <strong>Journal</strong> des télécoms N°226 Octobre <strong>2011</strong>