LE COMPOST
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LE COMPOST
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JARDIN<br />
Le compost<br />
de la fabrication à l’utilisation<br />
Les déchets abondent, les préparations de sol vont commencer.<br />
Voici quelques conseils pour réussir votre compost et savoir en<br />
utiliser toutes les vertus !<br />
© A. David<br />
Le compost est un produit qui résulte<br />
de la fermentation de substances<br />
organiques diverses. Donc,<br />
pour faire du compost, il faut des<br />
matières fermentescibles et des conditions<br />
physico-chimiques propices,<br />
notamment de l’air, car les processus<br />
de fermentation sont essentiellement<br />
aérobies.<br />
Diverses populations d’organismes<br />
vivants se succèdent au fur et à mesure<br />
de l’évolution des matières en<br />
fermentation. Le compost est un produit<br />
évolutif et instable ; en conditions<br />
défavorables (froid, excès d’humidité,<br />
sécheresse, excès de certaines substances…),<br />
son évolution peut être<br />
bloquée ou réorientée vers un produit<br />
moins intéressant pour le jardin.<br />
L’écosystème<br />
compost<br />
Il est assez voisin de celui d’une litière<br />
de feuilles en forêt, si tout se passe<br />
bien dans le composteur. Quels<br />
sont les habitants du compost ? Les<br />
bactéries, dès la première heure,<br />
entrent en action et sont présentes<br />
tout au long du processus, même à<br />
haute température. Parmi la diversité<br />
des populations bactériennes actives,<br />
les actinomycètes ont un rôle clé,<br />
car elles décomposent cellulose et<br />
lignine, deux composants spécifiques<br />
des végétaux permettant la formation<br />
d’humus vrai qui est indispensable à<br />
l’amélioration sur le long terme de la<br />
structure du sol. Les champignons<br />
agissent en complément des bactéries.<br />
Du côté des invisibles, on rencontre<br />
aussi des virus, des protozoaires, des<br />
algues.<br />
Et enfin la macrofaune : des larves<br />
d’insectes, des insectes divers (punaises…),<br />
des cloportes, des myriapodes,<br />
des escargots et des limaces<br />
et, bien sûr, des vers de fumier et<br />
des vers de terre, acteurs essentiels<br />
du « finissage » du compost ou de<br />
sa maturation. Les vers ont un métabolisme<br />
qui leur permet d’assembler<br />
l’humus, issu de la décomposition du<br />
compost, et les particules d’argile :<br />
c’est le fameux complexe argilohumique,<br />
si essentiel à la structure et<br />
à la fertilité des sols.<br />
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Angela David<br />
Faire un bon<br />
compost<br />
Même s’il existe des différences dans la<br />
façon de faire, les grandes lignes sont<br />
les mêmes pour obtenir un produit<br />
qui soit utilisable au jardin et de bonne<br />
qualité : diversité des ingrédients avec<br />
un taux de carbone adapté par rapport<br />
à l’azote ; fragmentation des matières<br />
(pas de morceaux de plus de 10 cm),<br />
aération du tas par un brassage régulier,<br />
surveillance et maintien d’une<br />
humidité adaptée (50 à 60 %).<br />
Les ingrédients ou matières<br />
fermentescibles<br />
Ce sont des matières organiques. Le<br />
déclenchement de la fermentation est<br />
activé par une forte teneur en glucides<br />
peu polymérisés* qui, rapidement,<br />
sont hydrolysés en nutriments pour<br />
nourrir les décomposeurs présents.<br />
L’équilibre entre les teneurs en carbone<br />
et en azote doit être respecté<br />
et être adapté pour servir le développement<br />
des décomposeurs. Un excès<br />
d’azote provoquera des dégagements<br />
d’ammoniac et enrichira les jus en nitrates<br />
polluants.<br />
Que mettre dans le compost ?<br />
À peu près tout ou presque, en ce qui<br />
concerne les déchets de la cuisine et<br />
du jardin. Quelques points de vigilance<br />
cependant :<br />
u apportez les déchets si possible<br />
sous forme fragmentée (morceaux de<br />
2-3 cm pour les déchets ligneux) ou<br />
écrasée pour les coquilles d’œufs ou<br />
de fruits secs ;<br />
u écartez les déchets traités (épluchures<br />
non bio, plantes traitées…) ; les<br />
produits de traitement ne se décomposent<br />
pas ou peu, et se retrouveront<br />
dans votre compost.<br />
u évitez les apports massifs de déchets<br />
humides (exemple : déchets de tonte<br />
fraîche) ; répartissez-les dans le tas si<br />
celui-ci est sec ou faites un peu sécher<br />
les déchets avant de les incorporer.<br />
u triez les déchets du jardin : les aiguilles<br />
de pins acidifient trop (les utiliser<br />
en faibles quantités), les lauriers<br />
ont une dégradation lente et produisent<br />
des composés chimiques qui<br />
se révèlent toxiques pour les cultures,<br />
évitez les mauvaises herbes à graines,<br />
car les graines peuvent se conserver…<br />
* polymère = assemblage d’un grand nombre de molécules de<br />
base appelées « motif » ; la cellulose ou la lignine sont des glucides<br />
polymérisés.<br />
u limitez les déchets d’origine animale<br />
(viande, os, coquillages…) ; leur<br />
contribution à la qualité du compost<br />
est réduite, par contre ils dégagent des<br />
odeurs peu agréables.<br />
Pour les autres matières organiques<br />
présentes dans la poubelle (emballages,<br />
journaux, tissus ou fibres naturelles,<br />
sciures de bois, cendres, bioplastiques…)<br />
: vous pouvez choisir de<br />
les composter ou non. En effet, pour<br />
certains déchets, il peut être préférable<br />
d’utiliser une filière de recyclage<br />
structurée et efficace, pour d’autres,<br />
les volumes qu’ils génèrent sont trop<br />
importants ou leur décomposition<br />
trop lente (journaux, boîtes d’œufs,<br />
cartons ou tissus se décomposent<br />
lentement ; tous ces déchets seront à<br />
fragmenter si vous les compostez).<br />
Avant de composter quoique ce soit,<br />
étudiez la composition avec soin : les<br />
encres ou teintures de couleurs ou certaines<br />
cendres contiennent des métaux<br />
lourds, les copeaux d’un bois traités<br />
ne seront pas intéressants. À noter<br />
que tous les gros volumes doivent être<br />
répartis de façon homogène dans la<br />
masse du tas, surtout les pulvérulents<br />
ou très humides : cendres, litière animale,<br />
poussière…<br />
Les conditions de fabrication<br />
Le compostage se fait en tas, dans<br />
un composteur ou non. En préalable,<br />
réduisez la taille des déchets avec un<br />
broyeur ou tout simplement à la tondeuse.<br />
Vérifiez aussi que :<br />
u le tas peut être couvert, cela active<br />
le processus et évite d’attirer une faune<br />
désagréable (mouches, guêpes…). La<br />
couverture est utile, surtout en cas<br />
de sécheresse ou de fortes pluies (un<br />
avantage du composteur).<br />
u les écoulements de jus éventuels à<br />
la base du tas sont possibles et canalisés<br />
pour éviter les pollutions.<br />
u le tas pourra être remué et aéré<br />
environ toutes les trois semaines<br />
pour les 2/3 supérieurs du tas. Petite<br />
astuce : une technique peu fatigante<br />
reste le déplacement du tas ; au cours<br />
de l’opération, mélangez les parties<br />
sèches et les parties humides ; c’est le<br />
moment d’enrichir le compost avec<br />
des sels minéraux qui alimenteront<br />
les plantes et la flore microbienne :<br />
potasse, calcium et autres sels des<br />
cendres de bois, calcium et magnésium<br />
de la dolomie, phosphore de la<br />
poudre d’arêtes de poissons, etc.<br />
u le tas pourra être humidifié, si besoin.<br />
Le suivi du compostage<br />
L’augmentation de température est<br />
fréquente, mais pas obligatoire. Elle<br />
témoigne de la fermentation ; celle-ci<br />
peut aller jusqu’à 50-60 °C. L’humidité<br />
du tas sera maintenue entre 50-<br />
60 %. On la vérifie ainsi : prenez<br />
une poignée de compost, serrez-la<br />
fortement, aucun jus ne doit s’écouler<br />
et, lorsque vous la relâchez, la matière<br />
doit s’effriter spontanément. Le pH ne<br />
pose en principe pas de problème. Si<br />
les matières apportées sont très acides,<br />
complétez par une pulvérisation de<br />
chaux éteinte ou de lithothamne. Pour<br />
accélérer la décomposition, ajoutez<br />
des orties ou pulvérisez un jus d’ortie ;<br />
cette technique se justifie surtout<br />
lorsqu’il y a trop de carbone dans les<br />
déchets (paille, vieux bois…) et trop<br />
peu d’azote.<br />
Le lombri-compostage, c’est quoi ?<br />
En deux mots, il s’agit d’un compost<br />
fait obligatoirement dans un composteur<br />
pour obtenir des conditions<br />
propices au développement des vers<br />
de terre et de fumier avec lesquels on<br />
a ensemencé le compost. Les déchets<br />
en morceaux fins (5-8 cm) sont à l’abri<br />
de la lumière entre 15 et 25 °C. On attend<br />
ou on installe des vers de fumier<br />
traditionnels (Eisenia foetida), éventuellement,<br />
on peut compléter par des<br />
vers du commerce dits vers de Californie<br />
(Eisenia andrei).<br />
Comment bien<br />
utiliser le compost<br />
au jardin ?<br />
C’est une vraie question pour de nombreux<br />
jardiniers car, selon le stade de<br />
son évolution, l’effet sera différent sur<br />
les plantes et la terre.<br />
a Quand utiliser le compost ?<br />
Trois critères pour se repérer : la densité<br />
de vers rouges est faible, il est impossible<br />
de reconnaître les déchets utilisés<br />
(sauf morceaux de bois, noyau…) et<br />
l’odeur est agréable et rappelle celle<br />
du sous-bois ; en règle générale, le<br />
N° 139 - Octobre 2011 109<br />
Suite p. 110
JARDIN<br />
compost a alors entre 3 et 6 mois, c’est<br />
cependant encore un produit assez<br />
compact et collant qu’il faudra alléger<br />
avant utilisation.<br />
a Comment utiliser le compost ?<br />
Le produit va évoluer et donc ses<br />
caractéristiques et propriétés aussi ;<br />
pour optimiser les effets, il faut en<br />
tenir compte ; si la dégradation des<br />
matières n’est pas homogène, on<br />
peut tamiser et remettre le refus de<br />
tamisage au tas.<br />
Le compost frais ou demi-mûr<br />
Il a environ six mois, il est assez riche<br />
en éléments minéraux et en azote<br />
utilisables rapidement par les plantes.<br />
Sa transformation est déjà suffisante<br />
pour améliorer la structure du sol, avec<br />
des composés humiques qui vont<br />
favoriser le développement des microorganismes<br />
et contribuer à la cohésion<br />
des particules du sol.<br />
On l’utilisera au printemps (sauf en<br />
terres lourdes) en post semis pour<br />
nourrir les jeunes plantes, ou en saison<br />
pour les légumes gourmands, les massifs<br />
floraux, les arbres fruitiers et globalement<br />
les plantes pérennes. Épandez<br />
une couche de 5-8 cm de compost<br />
en surface, incorporez-le superficiellement<br />
par griffage et recouvrez d’un<br />
paillage pour éviter le dessèchement.<br />
On peut faire un apport de compost<br />
allégé avec du sable en cours d’été,<br />
en sols argileux, sur les cultures en<br />
place ; par contre, pour améliorer la<br />
structure des sols sableux en fin d’été,<br />
on apporte uniquement du compost.<br />
Dans les deux cas, l’effet sera renforcé<br />
par la pratique des faux-semis.<br />
Le compost mûr<br />
Plus grumeleux, dégageant une<br />
bonne odeur de terre de forêt, il s’utilise<br />
sans restriction ; assez évolué, il<br />
sera incorporé plus profondément<br />
dans le sol à 12 cm environ pour favoriser<br />
l’activité biologique et contribuer<br />
à la formation du complexe argilohumique.<br />
La libération des minéraux<br />
pour les plantes est plus lente, il faut<br />
donc anticiper l’épandage par rapport<br />
aux besoins.<br />
Le compost mûr s’emploie : pour les<br />
semis (godet, caissette ou en place)<br />
et les repiquages ; pour les jeunes<br />
plants (ils bénéficient de ses effets<br />
assainissant vis-à-vis de certains champignons<br />
et germes pathogènes) ; pour<br />
les plantations de pérennes, pour les<br />
massifs floraux au repiquage, pour<br />
les légumes dans leur ensemble au<br />
moment de la mise en place, puis en<br />
cours de saison.<br />
On incorpore toujours le compost<br />
pour limiter sa déshydratation et le<br />
mettre à la portée de la faune du sol.<br />
Ce compost mûr est également celui<br />
des plantes délicates, et les plantes<br />
d’appartement l’apprécient aussi lors<br />
des rempotages ; c’est un produit affiné<br />
et précieux qu’il faut savoir utiliser<br />
à temps ; sa durée de conservation<br />
n’excède pas un an, au-delà il s’agit<br />
d’un compost vieilli, car a perdu une<br />
grande partie de ses propriétés.<br />
Le compost<br />
POUR TRAITER<br />
Étonnant, mais réel, quelques chercheurs<br />
ont planché sur le sujet et les<br />
résultats sont là : le compost peut être<br />
utilisé comme produit de traitement.<br />
Bien sûr, il faut toujours affiner, préciser,<br />
mais voilà une piste intéressante pour<br />
le jardinier bio.<br />
a Comment faire ?<br />
Ajoutez à un volume donné de compost<br />
mûr deux ou cinq volumes d’eau,<br />
mélangez pendant 2 ou 3 minutes et<br />
laissez « incuber » à température ambiante<br />
pendant 3 à 5 jours ; filtrez le<br />
jus obtenu avec de la gaze (plusieurs<br />
couches) et pulvérisez sur les feuilles<br />
des végétaux à traiter, en fin d’aprèsmidi<br />
de préférence.<br />
a Les constats ?<br />
Jusqu’à présent, l’efficacité de ce produit<br />
de traitement est démontrée<br />
pour la tavelure du pommier et pour le<br />
mildiou de la vigne. Le produit agit en<br />
préventif et en curatif.<br />
a Les explications ?<br />
Les phénomènes en jeu sont complexes,<br />
mais on peut dégager quelques<br />
hypothèses : ce n’est pas la flore microbienne<br />
contenue dans les extraits de<br />
compost qui agit (après stérilisation, les<br />
résultats sont les mêmes), mais il semblerait<br />
que ce soient plutôt les composés<br />
humiques qui agissent. Comment ?<br />
Peut-être parce que, suite à la pulvérisation,<br />
les mécanismes de résistance de la<br />
plante et/ou de la flore microbienne naturellement<br />
présente seraient stimulés.<br />
Angela David<br />
© A. David<br />
Compost grossier<br />
Compost demi-mûr<br />
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