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Hyperlien - Les Classiques des sciences sociales

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CENTRE TECHNIQUE NATIONAL<br />

D'ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LES HANDICAPS ET LES INADAPTATIONS<br />

2, rue Auguste Comte - BP 47 - 921 73 Vanves Cedex<br />

La surdité chez l'enfant<br />

en France<br />

Coordination : Jean-Pierre BOUILLON<br />

Direction de I'Actlcm *ciale<br />

Ministç?re de la Solidarité, de la Santé et de la Protsetion Sociale<br />

1, Place Fontenoy - 757 00 PARIS


Vient de paraître :<br />

+ LA CLASSIFtCATlON IWERNATIONALE DES HANDICAPS<br />

Deficiences - Incapacitc5s - Désavantages<br />

Un manuel de classification <strong>des</strong> consBquences <strong>des</strong> maladies<br />

+ LA CLASSIFICATION INTERNATIONALE DES HANDICAPS :<br />

DU CONCEPT A L'APPLICATION<br />

Actes du Colloque CTNERHI 28-29 novembre 1 988<br />

Institution Nationale <strong>des</strong> Invali<strong>des</strong>, PARIS<br />

+ TRAVAlL ET HANDICAP EN DROIT FRANGAIS<br />

2 tomes<br />

LES CAUSES DE LA CECITE ET LES SOINS OCULAtRES<br />

+ EN FRANCE AU DEBUT DU XIXa SJECLE (1800-1815)<br />

Zina WEYGAND<br />

4 LES TECHNtQtfES EDUCATlVES E 3 THERAPEUTIQUES DE<br />

HANDfCAP CHEZ L'ENFANT ET CADOLESCENT<br />

Seminaire de Formation de I'ENSP de RENNES<br />

+ L'ENFANT PLACE, ACTUALITE DE LA RECHERCHE FRANCAISE<br />

ET lNTERNATIONALE<br />

Actes du Cotioque international 31 mai - ler juin f 989<br />

<strong>Les</strong> opuiiom exprh6es n'engagent que Ieurs signataires, L'editeur n'a<br />

pas cherch6 B att6nuer les contradictions qui sont ici le signe; non d'aîfrontements<br />

strlrttes, mais d'une réalite ccamplexe, la surdité de l'enfant, à laquelle<br />

chaque auteur a réa@ en toute liberté.<br />

Toute reproùuction doit être soumise<br />

i'autorisation du Directeur du CTNERHE


PWFACE .................................................................................................. P. 1<br />

IWRUBUmXON ...................................................................................... Pu 5<br />

PEMXEB CIHAPnlRE : h languie <strong>des</strong> simes ..=.~~-..***...e**.e**++,eeeeeeee*ePP 45<br />

. A propos da 1a langue <strong>des</strong> signes.<br />

C. FO-R .....,.........,. ,.,.,. A. 43<br />

. hape dm signes et pédagogie.<br />

P. SBRU-GWW *.**. ...a.........<br />

~...-4.*...**.-..*.*..*.*..*....,...,ase~..-... *.--*.--abps $3<br />

. La sortie du ghetto.<br />

p 63<br />

B. MomiZ ........................................................................................<br />

, Der, pqchliatres et <strong>des</strong> sourds,., et ia pvchanafyse,<br />

Dr MM-F, DOUMENJOU, Dr J. LAB~RX~,,<br />

DErnrEME c mm<br />

.......................o.....,......<br />

*+.+ 71<br />

: XBLI~B~~? p~jk ~mp14trs ,...+..,,,,,,,....,t?..pP 83<br />

. Le fiuigagtr parlé cornplt5t6,<br />

F" N ..........*..................*.....**...1..1...1.......,,.....~......................... P. 85<br />

TROlSIEME CIEAPmm : Acrpe~l ~édiear<br />

et aadiop~t~xe~p .................................................................. . . ma<br />

. Bvduation du frandimp, mitique <strong>des</strong> barèmes actuels et<br />

prihcipe d'aactuaiisation,<br />

3.-C. MUN<br />

................................................................................. , .p. 103<br />

. RCde du rrrftdsSzm aPrbiopfion~lo@ste daas Pdquipe pluridiseipbaire.<br />

Dr L Mo~m .......................... ..................................<br />

......ttt., **II..p 117<br />

La protkè-se auditive ~3% enfants et iidolescents,<br />

Etat actuel c=;t &valulion previslbla<br />

f>. vEIT.e<br />

.............................................................................................. pP 3.27


QVATNEME CPIAPITRE : Actions nouvelles ..............................-.*p. 155<br />

. Educatian prEmce, guidance parentale, ac~ornpa@ewnt<br />

<strong>des</strong> parents,<br />

9". Dm~rs- J. HELWS., .,............ ......, ,.~~..eq--~**-~e-.m~a.*-..*.m.~~ 157<br />

. La prise an connpte <strong>des</strong> d4ficionrs auditifs par h DA.S.S,<br />

J, CWPELLET ........... *,,.....~...~....~.<br />

.~.-T*.+.,. p. 179<br />

. Prdsenhtion d'un semice de soutien B l'éducation famgde<br />

et B l'intkgation scolaire.<br />

...... * ......,...&.h.<br />

ha, VI<br />

*........*...........,....*.....*<br />

*--*=.'.~*.~~**e* *,.& $95<br />

. <strong>Les</strong> enfants déficients sensoriels surhaladicapes.<br />

M. FAIVRE ............,.,.,.......*..,.......*..... . . . . . . p. 209<br />

. Pour un eafant sourd dans torrs ses droits.<br />

E. et A. Vws<br />

................p. 225<br />

............................,*.....<br />

.* .*..<br />

. Etfenrre, ses parents et: le hngage parle mmpl6t6,<br />

N. B~mm .,,,......,...................... . p 235<br />

. Mon petit-f2s est saurd.,, ou, tmnte .es après.<br />

C. LORXOVX..<br />

.............. .,..".<br />

*,. ... . .........,. .....p. 243<br />

. Annexe 1 : Moyens de carnmtlnkatiun et solutions &duczttives<br />

dans la scolarisation <strong>des</strong> enfants et adolescents d6ficients<br />

auditgs.<br />

DELEUM, BOUILLON, Fu<br />

. 3 : Raommandation O2/1 BZAP, classrfication <strong>des</strong><br />

+.-*.*p. 323<br />

d6Eciences auditives .................. ee.eee..eeeee .............-....-...-............<br />

.Annexe 4 : Recommandation BXAS 1SJ1, intégration ou<br />

coeducation pré-scolaire et scolaire <strong>des</strong> enfants &tteints de<br />

déficience auditive dans les classes d'entendants ........,.,.,....,....,p.333


par Patrice LEGRAND<br />

sous-directeur de la rbadaptation,<br />

de la vieillesse et de l'aide sociale<br />

Bien qu'entreprise uniquement par voie réglementaire, la réforme<br />

de Péducation spéciale <strong>des</strong> enfants déficients auditifs a profondément<br />

transformé le cadre juridique et les données de base de<br />

I'activité <strong>des</strong>.établissements et services du secteur.<br />

La création d'un diplôme unique d'enseignement <strong>des</strong> jeunes<br />

sourds, la part faite 3 chacun <strong>des</strong> moyens de communication, la première<br />

directive pédagogique édictée en matiere d'éducation <strong>des</strong><br />

sourds, la diversification <strong>des</strong> mo<strong>des</strong> d'intervention <strong>des</strong> établissements<br />

et services, constituent un ensemble cohérent qui doit beaucoup aux<br />

conseillers techniques et pédagogiques de la direction de l'action sociale<br />

Jean-Pierre Bouillon et Pierre Kettler.<br />

Ces efforts, entrepris sous plusieurs ministres, n'auraient pas pu<br />

aboutir, pour ce qui est de la réforme <strong>des</strong> dipldmes, sans la détermination<br />

du sous-directeur <strong>des</strong> professions <strong>sociales</strong> et du travail social<br />

Michel Thierry.<br />

L'activite débordante de Marcel Piton au Cabinet du Secrétaire<br />

d'Etat a permis, dans le cadre d'une concertation effervescente, de<br />

faire aboutir les autres textes.<br />

L'ouvrage n'est pas achevé. Il reste à réformer le statut du personnel<br />

<strong>des</strong> instituts nationaux de jeunes sourds. 11 nous manque<br />

l'école de professeurs qui permettra d'approvisionner les établissements<br />

en personnels titulaires du nouveau diplôme. Tout cela est en<br />

route.


Ne nous leurrons pas toutefois ! Le suceès dépend beaucoup<br />

plus de la pratique <strong>des</strong> équipes éducatives et <strong>des</strong> progr& de la technologie<br />

médicale que de la modification <strong>des</strong> textes. C'est la raison<br />

pour laquelle ce livre fait sa place à d'intéressants développements<br />

sur i'audio-prothèse ou le diagnostic.<br />

Il faliait également éclairer le débat avec l'exposé <strong>des</strong> orientations<br />

pédagogiques qui apparaissent <strong>des</strong>ormais possibles en matiére<br />

de formation générale.<br />

Que serions-nous heureux si nos efforts communs pouvaient<br />

guider plus d'enfants sourds vers le baccalauréat 1<br />

Souhaitons aussi que la communauté sourde et la socikté générale<br />

se reconnaissent l'une l'autre, sans exclusive réciproque,<br />

C'est à cela que tend la réforme du 22 avrii 1988,<br />

- en insistant sur le rôle de la famue -<br />

Au r6le effectif de la famille s'ajoutent en effet ici <strong>des</strong> raisons<br />

techniques essentielles. C'est bien la famille qui recueille le


les iètablissements, & permettre aussi le recours aux intervenants<br />

sourds, ce qui fut fait.<br />

- en faisant <strong>des</strong> Cbbüssements le suppoe dfsctiûns umvertes vers fe<br />

monde ext4riem ou les catlrgcrries ml prises en charge -<br />

La réforme prdvoit en effet de codorter f'integrati~n daim en<br />

en faisant une mission explicite <strong>des</strong> services médico-educatlfs, et en<br />

se réferant eqEcitement aux programmes mêmes de l'tsducation nationale.<br />

Elle ètend les comp6tences de ces services à I'tsducation prtscoce,<br />

notamment en raison de la sp&ificitb de la prise en charge <strong>des</strong><br />

jeunes sourds.<br />

Elle permet: fa creatian de sections ou d'tstab$ssements pour enfants<br />

sourds avec handicaps associ&. On pense ainsi aux btablissements<br />

pour sourds aveu&fes : an trouvera dans ce livre un développement<br />

hpomnt consam6 cette question.<br />

En rendant compte de la mdtiplicité <strong>des</strong> aspects du handicap<br />

auditif chez l'enfant et de sa prise en charge, en faisant valoir <strong>des</strong><br />

points de vue non moins multiples, le Centre technique nationaX<br />

d'6tu<strong>des</strong> et de recherches sur le handicap et les inadaptations nous<br />

donne un ouvrage qui vient au bon moment.<br />

Paris, le 6 ami! 1989<br />

Patrice L~GRAND


INTRODUCTION<br />

Jean -Pierre BOUILLON<br />

Conseiller pédagogique et technique<br />

Direction de t'Action sociale<br />

Presque arrivé à la fin d'une carrière, il est agréable de ne pas<br />

regarder en arrikre, de ne pas se plonger dans les souvenirs, mais de<br />

demeurer tourné vers l'avenir, l'action future <strong>des</strong> successeurs.<br />

Cet écrit ne comporte donc ni historique ni bilan systématiques.<br />

Xis n'ont pas iieu d'être à un moment où, pour la première fois, I'administration<br />

donne une forte impulsion B la pédagogie <strong>des</strong> enfants<br />

sourds. Un processus évolutif a été dkclenché. Xi conduira A une<br />

transformation profonde de la r6aiit6 actueiie.<br />

Pierre Kettler aurait dû cosigner cette introduction, car il a participé<br />

à l'élaboration de tous les textes et, plus profondément, ii m'est<br />

impossible aujourd'hui de discerner ce qui est sa pensée et la<br />

mienne, tant elles se sont façonnées simultanément, s'enrichissant<br />

l'une l'autre durant une quinzaine d'années de collaboration permanente.<br />

Mais après tant d'années d'analyses, de rapports et d'instructions<br />

énoncées sur un mode le plus anonyme possible, j'estime qu'il<br />

est plus distrayant pour le lecteur d'apercevoir un «je » derrière les<br />

formules générales. Après tout, même i'administration est conduite<br />

par <strong>des</strong> hommes avec leurs sentiments. Je me suis autorisé à exprimer<br />

les miens.<br />

Depuis plusieurs déca<strong>des</strong>, <strong>des</strong> pionniers sur le terrain exploraient<br />

<strong>des</strong> voies nouvelles, riches de développements potentiels mais<br />

aussi disparates voire contradictoires. Xi était urgent de régiementer


et d'hamoniser. L'essentiel de cette tâche est accompli. Désormais,<br />

chaque acteur connaît le cadre dans lequel il aura la liberté d'innover<br />

afin de s'adapter exactement à la situation individuelle et coflective<br />

<strong>des</strong> enfants qu'ii il en charge. <strong>Les</strong> fondations sont établies, it reste à<br />

construire I%difice.<br />

En 1386, Pierre Kettler et moi d&sespérions de la signature par<br />

le Pra~er<br />

Mhistre du déctet créant le Certificat d'Aptitude au Professorat<br />

de l'Enseignement <strong>des</strong> Jeunes Sourds et nous nous prt5parions<br />

i% une nauvel.te Ionse attente, amées (peut-être dea<strong>des</strong>) de<br />

patience-<br />

-Nous ne saurons sans doute jamais dans quelles circanstances le<br />

Premier Mirllstre a signé, h suite da quelles régexions, queDes remmmandations,<br />

Qui fut le catafyseur ? Le texte était bon, jsen suis<br />

conv&cu, mais le progr& qu% ilstataurait modrfiait tant d"habitu<strong>des</strong>,<br />

reveillait tant de semi-1tSthmgies, heurtait tant de petits pouvoirs,<br />

qu'il suffisait d'un rien pour qu'il soit etouffe avant de naître, Une<br />

dkision, un coup de dé, et l'affaire fut lancée. C'était une locomotive<br />

qui allait tirer derrière elle ce qu'on appelle, au sens propre, un train<br />

de réformes* Un d&ret ressemble à un arbre : devenu adulte, iI porte<br />

de soli<strong>des</strong> branches, les arirêtés. Mais, comme le fraisier, il se rnultiplie<br />

par marcottage: d'autres d-ets, arrêtés et cifcufakes<br />

s'6panouissent & son caté. 3e souhaite aux hommes d'Et& d'avoir<br />

conscience de cette conthuité. Tour avait et6 preparé et r&&gtS sous<br />

un gouvernement ; c'est le gouvernement suivant qui inscrivit les<br />

textes dans le droit,<br />

L'action <strong>des</strong> bureaux était t?,gaIement indispensable en raison de<br />

leur rôle de suggestion, de proposition à l'6gard du politique. Pour<br />

que la mutation s'accomplisse, il fallait un concours exceptionnd de<br />

bonnes volontés, la mobilisation partielle de la Direction de P.Action<br />

Sociale afin d'envisager l'ensemble <strong>des</strong> difficultés dans leur<br />

cornplexit&,<br />

Sans la lucidite, les efforts, l'acharnement de quelques concepteurs,<br />

le possible n'aurait pas ét4 réalisé. Je ne crois plus au problhmes<br />

hsolubles : la plupart, on ne cherche pas à les rgsoudre, En<br />

dix-huit mais, du 27 octobre 1986 au 23 avrii 1988, ont ét$ produits


une dizaine de textes, travail exceptionnel, jamais effectue depuis<br />

l'Abbé de PEpée et ses prédécesseurs, et qui place la France parmi<br />

les premihres nations du monde, à la pohte de la rd@ernentation de<br />

la pédagogie <strong>des</strong> sourds. Dans une vision unitaire, la rdorganisation a<br />

porte sur la formation au professorat (un décret et trois arrêt&),<br />

l'orientation <strong>des</strong> enfants et la pédagoGe (deux circulaires), l'organisation<br />

détaaée <strong>des</strong> étabfissements et services (un d&rer et une clrculaire),<br />

la résurrwtion *ne inspection pédagogique (un arrête).<br />

Paraissaient en même temps un d&ret et une circulaire conwrnant<br />

les trtabgssements et semices d'enfants aveugles et les nouveaux statuts<br />

<strong>des</strong> corps <strong>des</strong> professeurs <strong>des</strong> Instituts nationam de jeunes<br />

sourds et de ITnstitut national <strong>des</strong> jeunes aveugles étaient presque<br />

achevés,<br />

Ces textes sont parus dans le BuIle&a 9fFciel du Mhistère <strong>des</strong><br />

Affaires Sociales, no 88-17 bis « Enfants sourds, enfants aveugles,<br />

Pour une prise en charge qu&tative du handicap ». En vente : Diretion<br />

<strong>des</strong> Journawr. Officiels, 26 rue Desaix- 75727 Paris Cedex 15 -<br />

Prix : SO F. On en trouvera ici un commentaire personnel. Ainsi que<br />

d'autres écrits qui participent de la meme phifosophie dont .irs sont,<br />

pour certains les fondements, pour d'autres Ies prolongements.<br />

*Comme toutes les gran<strong>des</strong> aventures humainess, 1'histoÿ.e de<br />

X'hprimerie et de l'édition est ceile d'un rapport didectique entre b<br />

progres technologique et l'&volution sociale. Ces deux aspects occupent<br />

tour à tour le devant de la scène, l'un entrajnant l'autre, mais<br />

c'est vraiment lorsqu'il y a convergence <strong>des</strong> deux que la pression devient<br />

irrdsistible et entraîne <strong>des</strong> changements significatrfs. Si le dBveloppement<br />

de l'imprimerie en Europe a &té rendu techniquement<br />

possible par les découvertes de Gutenberg, l'essor de ce qu'on appelait<br />

alors "l'art allemand" skxplique tout autant par les progrés de


f'alphabétisation et le climat social de la premikre Renaissance a.<br />

Howard BRABYN, Le Counier de I'mESCQ, juillet 1988.<br />

Cette loi s9appIique & la situation dans laquelle se trouve la surdité<br />

du jeune enfant en 1989. <strong>Les</strong> progrès qu'on pourrait qualifier de<br />

techniques foisonnent, alors que l'impression domine que la socikté<br />

française n'est pas mare pour en tirer parti. Elle questionne, discute,<br />

hésite, au lieu de saisir les nouveaux outils, d'en user et, ce faisant,<br />

d'en améliorer le mode d'emploi. Comme si Gutenberg avait longuement<br />

ratiocin6 sur les mérites et les inconvénients de l'imprimerie<br />

au lieu d'éditer <strong>des</strong> livres. Mais le besoin de livres était une<br />

priorité dans sa société. Il est clair qu'aucune <strong>des</strong> transformations<br />

aujourd'hui proposées pour améliorer la pkdagogie <strong>des</strong> sourds ne répond<br />

à un désir aussi unanime.<br />

Qui veut s'occuper de surdite doit accepter de penser Urconfortablement,<br />

de cheminer de thèses en antithèses, de changer de pohr<br />

de vue, d'accepter les contradictions inhérentes C1 cette rBaEte<br />

complexe.<br />

fine de ces contradictions stimulantes réside dans le décdage<br />

entre les resultats, encore trop souvent négatifs, et les moyens dont<br />

nous disposons.<br />

Durant « les trente glorieuses » de progrb économique et social<br />

dkrites par Fourasti6, la pédagogie <strong>des</strong> sourds a connu autant de<br />

mutations que l'ensemble de la société.<br />

Quelle etait la situation après la dernikre guerre mondiale ? h<br />

méthode d"enseipement s'kffhmalt « oralo-graphique B et les seuls<br />

outils supplémentaires par rapport li 1900 étaient le gros amplificateur<br />

de table, parfois complété par un oscilloscope, ainsi que la prothèse<br />

monoauridaire sous forme d'une boîte de lampes puis de<br />

transistors. Lg61ectronique tslémentake était la seule ouverture sur<br />

l'avenir. Ses effets étaient déjB évidents : dans les classes inauprées<br />

8 PINJS de Paris, les sourds moyens et sévères, une fois appareillés,<br />

commençaient à se démarquer de leurs condisciples. 'pourtant, la<br />

majorité <strong>des</strong> bons élèves ne dépassait pas le certificat d"s4tu<strong>des</strong> primaires<br />

er le CM.


Enumérons quelques progrès : leur addition est étonnante.<br />

Le nombre <strong>des</strong> acteurs médicaux et éducatifs s'est multiplié. Autrefois,<br />

quelques dizaines d'établissements recelaient les personnes<br />

compétentes en rééducation de la surdité. Il s'y ajoute aujourd'hui de<br />

nombreux orthophonistes, instituteurs spécialisés, audioprothésistes,<br />

médecins audiophonologistes, psychologues, etc. ka rééducation et<br />

l'enseignement ne sont plus cantonnés dans de rares lieux privilégiés<br />

et les parents s'attendent à rencontrer le service à côté de chez eux.<br />

En linguistique, Stokoe a découvert que la langue <strong>des</strong> signes<br />

n'était pas infra-humaine. Piaget a soulevé la chape qui écrasait la<br />

pensée sous le langage oral et Furth en a tiré les conséquences pour<br />

la psychologie et la pédagogie <strong>des</strong> sourds. <strong>Les</strong> mathématiques modernes,<br />

I'algorithmique, utilisées avec les enfants sourds prouvent<br />

qu'ils sont à même d'atteindre la logique, la pensée formelie.<br />

La sociologie, avec Mottez en France, pénètre dans l'existence<br />

d'une communauté ignorée, celie de la minorité sourde.<br />

Gr$ce à l'appareillage stéréophonique, le sourd n'est plus un<br />

borgne de l'audition et les micros H.F. suppriment l'esclavage <strong>des</strong> fils<br />

et les inconvénients de la boucle magnétique.<br />

Le langage parlé complété permet de capter visuellement la<br />

langue orale à plus de 90 %.<br />

Des métho<strong>des</strong> nouvelles, celles de Mm Borel-Maisonny, la<br />

verbo-tonale de Guberina ont été longuement expérimentées, intégrant<br />

les apportés de la linguistique, de la psychologie, <strong>des</strong> métho<strong>des</strong><br />

audio-visuelles.<br />

Quant à l'intégration, elle est susceptible de bouleverser la vie<br />

scolaire de l'enfant. Elie résout le paradoxe qui consistait à vouloir<br />

préparer l'entrée du sourd dans une société dont on commençait par<br />

le bannir et elle conduit, par une sorte d'osmose naturelie, à adopter<br />

les programmes et les exigences applicables aux entendants, alors<br />

que l'attention exagérément portee sur le handicap conduit toujours<br />

à minimiser les aptitu<strong>des</strong> de celui qui en est atteint.


Autrefois quashent nui, le rble essentiel que jouent les familles,<br />

vigoureusement représentées par leurs associations, est reconnu et<br />

I'dcluwtion peut débuter <strong>des</strong> les premiers mois sans plus attendre<br />

i'$ge de la a demutisatiorr B.<br />

La langue <strong>des</strong> signes commence LI fitre utitis6e : Pinterprète fait<br />

tomber 1â barrihre de la communication dans les situations <strong>sociales</strong><br />

et les adultes sourds enseignent l m langues aux parents et aux enfants<br />

dans les cbcoles quand Ils ne deviennent pas professeurs ou éducateurs<br />

spkiiafiscbs à part entière.<br />

<strong>Les</strong> ambitions professionnelles sont, par bonheur, devenues démesurées.<br />

La conception prevaut qu'LL n'existe pratiquement plus de<br />

cani$re hterdite.<br />

Réemment, les passibat& de communication par la lecture se<br />

sont mdtipfii4es : téléphone PUR TA TEL^ puis M ~ didogue, L procédé<br />

m O P E & ta télévision, enseignement assisté par ordinateur,<br />

enseignement par correspondance.<br />

La rbdementation admulistrative suit, ou même, prtrcbde IY6volution<br />

<strong>des</strong> moeurs. L%ncienne annexe XXIV quater permettait d&j&<br />

aux étabfissements de s'ouvrir sur I"extt*rieur par l'intem$diGe <strong>des</strong><br />

services de soins et d'éducation sp6ciaLisée à domicile. <strong>Les</strong> CDES et<br />

COTOEP, chargées de Porientation, supprhent fe hasard de la<br />

bonne ou mauvaise porte il laquelle les parents frappaient. <strong>Les</strong><br />

CAMSP mettent à la dQosition <strong>des</strong> fa<strong>des</strong> une équipe complbte<br />

de personnels eomp4tents.<br />

EXrn, @$ce à. l'avion, et am contacts avec l'étranger, en pruticulier<br />

les Etats-Unis, les modèles extérieurs tendent à être transposés,<br />

La presse non spécialisée et la téé.vision informent le grand public.<br />

Jusqu'au cinéma qui, par quelques beaux films, conduit les spectateurs<br />

à réagir personneHement face au probléme de la surdite,<br />

La panopGe s'est tellement divers3iBe qu'il est raisonnable de<br />

çonsid6rer qu% àl'exeeption de la greffe de cochlée qui -rérirait radicalement<br />

la surdité, nous disposons maintenant de moyens sufEsants<br />

pour faire de tout sourd de naissance un citoyen à part entière.


Mais b difficulté réside dans la mise en oeuvre, lksage UltensZ<br />

de ces moyens, leur appEcation spergque. Aucune thbrie d'ensemble<br />

ne permet dkassigner à chacun sa place. ILS engendrent une situation<br />

mouvante. h ur ut%sation, qui reI&ve autant de l'art que de<br />

la doetrine, exige cornpettenice, souplesse, prudence et imahation et<br />

il est hpossibie de les hserer dans un progamme rigide, rapidement<br />

caduc et nuisible.<br />

LES ANCIIENNES 1NSTRU~IONS MmISTEWELLES<br />

Jusqu'h aujourd'hui, à I'exceptian <strong>des</strong> professorats publlc et<br />

prive, les instructions mkisterielles étaient presque inexistantes=<br />

Le Ministre de ?Intérieur Wddeck-Rousseau, Direction de<br />

i'Admhistration d4partementde et eommunille, 3* Bureau, Sourdismuets,<br />

signe fe 3 septembre 1884 une ckeufa5e qul pr&ède un<br />

arrtltk hstituant <strong>des</strong> eertgiats d'aptitude de deux degés lienseignemenf<br />

<strong>des</strong> sourds-muets,<br />

Cette circulaire d'envhn deux pages, adressee aux Prefets, leur<br />

indique la phrfosophie, offlc3eUe depuis 1879, qui s'applique aux institutions<br />

nation<strong>des</strong> ahsi qu'am Ulstitutians qui reçoivent <strong>des</strong> bour*<br />

sim du. département et <strong>des</strong> communes: la methode orale pure<br />

remplace l'usage du langage mhique, Etle pr6conise la sépration<br />

compl&te entre les anciens 61:feves « qui sont depu& trop longernps<br />

formes au lmgap mùnique et les nouveawr hstrtxits par h parole<br />

qu"rl Saut soustraire absolument Ia tentation sf"exprher tant bien<br />

que mal leurs idees par <strong>des</strong> signes ,r,<br />

Le certificat du premier degr& porte sur les proc&dGs dd'enseipement<br />

de la parde et de la langue maternelle ainsi que sur les<br />

connaissances g6nt5rales (caagraphie, Bducation morale et civique,<br />

6lctments dkrithmétique, de &gapfiie, d'histoke, de fepns de<br />

choses),


Le çertifïat du demibme degres <strong>des</strong>tin4 aux formateurs, approfondit<br />

les Wiphm du premier degr&, et y ajoute l'histoire et la<br />

comparkon dm mmétho<strong>des</strong>, l%hboration du progamme.<br />

A la meme &poque, 1% maîtres rep6titeurs <strong>des</strong> Institutions na-<br />

~onala de sourds-muets sont recrutes par concours organisé, lui<br />

aw& par le *k&e de Phtbrie~r.<br />

U titre de bzrse est te brevet de capacité pour flenseipement<br />

primaire.<br />

Epreuvm écrites :<br />

1) &ritute : copie & la mniah d'un texts, pendant un quart d'heure.<br />

2) Dictee : note mUUmum 15 sur 20.<br />

3) Composition française de deux heures sur une pensde morale ou<br />

l'histoire de la Utterature fran*r?,<br />

4) Probl&mm d'arithm6Gque : fractions, calcul <strong>des</strong> ktérets, mesure<br />

<strong>des</strong> surfaea et <strong>des</strong> volmes, %te<br />

Epreuva orales :<br />

i) mtoire de France : depuis les Rois fainean& jusqul la R&vofution<br />

de 1848, Ii importe de connaltre : Ebroin et Saint-Uger? fe<br />

trait6 de Sltint-Cl& sur Epte, b Siège de Nie&, Ctznrad BI, Jean<br />

de Brienn-~ Thibaut de Champagne et Pierre Mauclerc, AEtevefd,<br />

Gou~ionS&t-.Ir:~ etc,<br />

2) CtSogapirie : la France et les cUlq continents,<br />

3) Lecture ?t haute voix : afin de juger la nettete et fa &art6 de fa<br />

prononciation.<br />

4) Ecriture et croquis d'obje~s au tableau.<br />

D'abord rrJp4titeur de classe avec un traitement de 1 000 F,,<br />

pius les avantages en nature (nourriture, chambre particuliere, chauffage,<br />

blanchhsage, &lairage), le candidat assure un service1 assiste<br />

aux cours normawr et passe <strong>des</strong> examens pour acekder aux gra<strong>des</strong> de<br />

profeseut-asjjoht puis de ptofmeur titulaire, avec titre d'agrégç5,<br />

dont le traitement culmine à 5 000 F. Y sont joints les avantages en<br />

nature sauf la nourriture.<br />

h durlie rnlnlmum <strong>des</strong> ditu<strong>des</strong> et de cinq ans,


La retraite, égale à la moitié du traitement moyen <strong>des</strong> trois dernières<br />

années, est assurée aprés 30 ans de service.<br />

Le document que je possède ne fait pas allusion au contenu de<br />

la formation.<br />

En avril 1945, R. Pringent, Ministre de la Santé publique et de la<br />

population, fait publier une série de textes sous le titre : i< Organisa-<br />

tion de l'enseignement <strong>des</strong> aveugles et de l'enseignement <strong>des</strong> sourdsmuets<br />

dans les hstitutions privées - Arrêtés - Programmes - Instructions<br />

B. La brochure comprend 36 pages : 3 arrêtés et <strong>des</strong> instructions<br />

concernant les sourds.<br />

L'arrêt4 du Secrétaire d5Etat à la Famiiie et à la santé, du 25<br />

avril 1942, s'applique aux etablissements priv6s d'aveugles et de<br />

sourds-muets. Ils doivent être agréés et soumis au contrôle du Secrétaire<br />

d'Etat. La scolarité, d'une durée de dix ans, comprend un enseignement<br />

général et professionnel.<br />

« Ces établissements comporteront nécessairement un internat,<br />

mais ils peuvent recevoir <strong>des</strong> dlhves externes ». Il est institué deux<br />

certificats d'aptitude, l'un pour renseignement <strong>des</strong> sourds-muets et<br />

l'autre pour celui <strong>des</strong> aveugles. Le contenu de l'arrêté est de vingttrois<br />

lignes seulement.<br />

R. Pringent, ii Vu Yordonnmce du 9 aoQt 1944, portant rCtablissement<br />

de la legalité républicaine sur le territoire continental», valide,<br />

le 20 avril 1946, le précédent arrêt6 pris par le gouvernement de<br />

Vichy.<br />

L'arrêt6 du 23 avril 1946, relatif au certificat d'aptitude à l'enseignement<br />

<strong>des</strong> sourds-muets, institue un certzicat du premier degré<br />

permettant d'enseigner am élèves <strong>des</strong> établissements privés de<br />

sourds-muets et un certificat du deuxikme degr6 exige pour la formation<br />

<strong>des</strong> maîtres.<br />

Le diplôme de base est le brevet supérieur ou le baccalauréat.<br />

L'enseimement professionnel est aussi concerné et les chefs<br />

d'atelier subissent un examen complet,


Trois pages <strong>des</strong> instructions du 24 avril 1946 concernent le professorat<br />

<strong>des</strong> enfants sourds.<br />

Il est rappelé que l'arrêté du 3 septembre 1884, alors vieux de<br />

soixante-et-un ans,


cycle prkparatoire : de3 A7ans<br />

premier cycle : de 7 10 ans<br />

de~ème<br />

cycle :<br />

de 10 B 14 ans<br />

- cycle technique : à partir de 14 ans.<br />

Une repartition horaire <strong>des</strong> discipiines est fixée.<br />

Sont joints un progamme de grammaire et de vacabdaire r&-<br />

digé par M. Mandin, professeur <strong>des</strong> TNJS, ainsi qu'un programme de<br />

calcul. La connaissance par les professeurs du contenu de leur enseignement<br />

est apprécike :


jointe la n&essaire techniclte5 de leurs enseignants et aux moeurs<br />

de IP4poque, eut pour conséquence de les rassembler, donc de les accueillir<br />

en intt-nat et de les séparer du reste de fa popdation. <strong>Les</strong><br />

gros établissements actuels sont les h6ritiers de cette lohtaine histoire.<br />

Leur origine explique leur pbhsophie ainsi que les uiquiétu<strong>des</strong><br />

de leur personnel confronté aux évalutions Inéluctables.<br />

En effet, depuis quelques dizaines dknn6es, se sont crdés, souvent<br />

à l'initiative d'orthopho&tes, <strong>des</strong> $tabfissements de faible effmtif<br />

qui drainent la population Iode. En mfrme temps, <strong>des</strong> parents et<br />

<strong>des</strong> hstituteurs novateurs se laxrgaie~t dans <strong>des</strong> tentativm d"istlctgation.<br />

Dans les deux cas, petit dtabifissement sp&ciLtfis& ou ktdgation<br />

chez les entendmts, 1'enfant saurd vit dans sa famille et les eEectifs<br />

<strong>des</strong> ~eBes kstitutions fandent.<br />

Certains soubaitent supprher ces 4tablissements coQtt=ux et segregatifs,<br />

qui aupentent l%olement de l'enfant, déja coup6 de fa<br />

coItectivitt5 langa5;;ere. D'autres pr6ferent les conserver car ils sont le<br />

lieu où se rencontre la compréhension la plus large du handicap, A<br />

preuve, là langue <strong>des</strong> signes qui y a subsisté en dépit de l'anathème<br />

jeté sur elle,<br />

En rddigeant h nouvelle annexe W V quater, le mhist&re s<br />

optd pour un pari : le maintien <strong>des</strong> 6tabEssements mais à la condition<br />

qu7& se rbnovent. <strong>Les</strong> critiques Bnancées i% f'cfgard de ces structures<br />

sont connues de I'ad&istration dont la decision aurait pu consister<br />

à 3.- laisser ss'E:tjoler, dépérir jusqu'a dkparition. Ce ne fut pas son<br />

choix mais, au contraire, de les aider en les Uncitant crker les services<br />

Idgexs d'6ducation pr&oce et d'htégation scolaire qui rBpmdent<br />

à la demande <strong>des</strong> parents en nombre croissant.<br />

Le recentrage sur les étabxissernents anciens n'a pas pour corollaire<br />

l'ulterdiction <strong>des</strong> structures de type récent. Le ddcret et sa<br />

circulaire sont explicites sur le aneept de rattachement, qui est souhaitable<br />

mais non hdispensable. Que les promoteurs se rassurent. Le<br />

seul prlncipe absolu est de faciliter un quadrrüage, un r6seau qui apporte<br />

le service Ià où se mangeste la demande, partir de l'échelon<br />

local, au besoin en s'aadressant au secteur libéral, jusqu'a l'4chelon<br />

régional et marne nationaf. (pour quelques metiers rares). La diffe-


ence réside en ce que, encore plus que par le passe, toute creation<br />

doit être etudiée il partir d'un plan d'ensemble.<br />

La règle de rattachement, qui s'appiique dans les meaeures<br />

conditions lorsqu'elle étabiit <strong>des</strong> relations Btroites entre les antennes<br />

et leur centre lourd, ne saurait jouer non plus contre les gran<strong>des</strong> associations<br />

qui se situent dans la mouvance de I'Education Nationale<br />

et dont la vocation a 4t6 de combler les vi<strong>des</strong> géographiques ou methodofogiques.<br />

Ge sont <strong>des</strong> partenaka qui ont fait leurs preuves et le<br />

ministère étudie avec le plus viE interêt les dossiers qu'llis deposent :<br />

ses critiques ne procèdent pas de l'intention d"4luder mais de parfaire,<br />

dans le cadre <strong>des</strong> texte.<br />

L'administration n'a r6dig4 la nouvelle annexe XXIV quater<br />

quken raison <strong>des</strong> muta~ons qui se produisaient sur le terrain. Blie<br />

était certaine de la « faisabilitb » de ce qu'elle premnisait parce que<br />

de nombrev gtablissements dparniques étaient en train de b rtsaSiser,<br />

Lbrigine de ces idées ne réside pas dans l'utopie, mais dans ce<br />

qui existe d4jb de plus performant.<br />

C4tabEssement complet, avec ses trais sections et ses deux services<br />

f, est une structure capable de prendre en charge le sourd dans<br />

son unitb, depuis ses premiers balbutiements jusqu'Èt son installation<br />

dans la vie économique.<br />

Bien entendu, l'ambition serait d4mesurée si r6tabksement<br />

devait vivre en autarcie, Au lieu de rependre aux besoins, I'6tabfissement<br />

les reduirait aux réponses qu'il peut apporter. Nous avons<br />

connu cette situation dans le passC. C'est pourquoi l'ouverture vers<br />

l'extérieur et la recherche de collaborations sont multifarmes : familles,<br />

cursus scolaires varies, autres 6taillissements q4ciaEs4sy services<br />

hospitaliers, entreprises, etc, L'6tablissement est un centre de<br />

services, qu'il les assure, les organise 'au y participe.<br />

Toutefois, pour <strong>des</strong> raisons Fmancibres et non fonctionnelles,<br />

deux services ont d0 &tre omis. L'un en amont, l'autre en aval,<br />

2. ta distinction entre section et senice n'est pas organique. Sa raisan est la dglementarian<br />

finaacii?re,


L'étabEssement doit assurer une mission d'information dans le<br />

cadre de la prkvention. Une familles, dont la ferme intention est le<br />

refus d'inscription dans un gros établissement, peut avoir envie de<br />

venk discuter de ses probl5mes lorsqu'eile se heurte à <strong>des</strong> graves difficultés,<br />

Le Mhistre reçoit parfois <strong>des</strong> deman<strong>des</strong> de conseiis alors<br />

que <strong>des</strong> experts se trouvent à quelques Uom6tres.<br />

En aval, le service de suite, le centre de promotion sociale <strong>des</strong><br />

adultes sourds, sont <strong>des</strong> organismes qui font chaque jour preuve de<br />

leur utilité : recherche d'emploi, formation continue, service social,<br />

etc. Une fois tlmancipé de toute tutelle, le sourd doit savoir oir<br />

s'adresser pour etre compris, orienté et aidi5 de fason ponctuelle,<br />

Dans toutes ses composantes, l'établissement apparaît comme<br />

un centre spécialisé dans les divers types de communication qu'il faut<br />

établir avant de prétendre enseigner, former, cultiver. De là I'însistance,<br />

au fil <strong>des</strong> textes, sur le français, le LPC, la LSF et ceux qui en<br />

sont transmetteurs : parents et professionnels. En effet, communiquer<br />

est la condition de transmission <strong>des</strong> informations. Ne jamais<br />

oublier que, quoi qu'on fasse, le fil du téléphone est coupé. La surdit4<br />

demeure. Un enfant sourd plongé dans le bain de langage du milieu<br />

entendant n'a jamais appris spontanément le français. L'adulte<br />

devenu sourd se sépare progressivement de son entourage, et réciproquement,<br />

car cette infirmité handicape autant l'interlocuteur que<br />

celui qui en est atteint.<br />

L'gtablrssement est aussi un centre de promotion dans les carrigres<br />

éduatives et enseignantes pour les sourds adultes susceptlbh<br />

d'y bénéficier d'un emploi, depuis AMP jusqu'h professeur, Durant<br />

un sikle, les sourds de naissance se sont plaints de n%tre jamais<br />

écoutés lorsqu'ils révélaient aux parents et aux enseignants quels<br />

étaient les besoins réeis <strong>des</strong> enfants. De lLt un discours passionné et<br />

inévitablement ressasseur. Dorenavivant, les sourds participent activement<br />

aux missions <strong>des</strong> établissements, ce qui entra%era <strong>des</strong> frictions,<br />

<strong>des</strong> conflits, mais aussi <strong>des</strong> modsications de qonvictions a<br />

priori de part et d'autres. En fonction <strong>des</strong> caractares, certains s'entêteront<br />

dans leurs positions, mais les esprits observateurs tireront ies<br />

lois de f expérience.


En%, bs étabtissements ont toujours &te <strong>des</strong> centres de furmation<br />

pratique ; où apprwdre 18 profession d'enseismr, si ce n'est<br />

par un contact assidu avw les mfants ? Quhe ans de respon~bat4s<br />

dans Xa dawance <strong>des</strong> dipiiôme m'ont kcdqu4 e~nEaaw dans tes<br />

Bquipes de famateuas.. Eues ont emiehi mes corn&smncm p4dag~-<br />

@quasa Dsrenavant, cet dtat de fait est r&@ement6, de sorte que $es<br />

4mles contribuent à. la pdparatiort au S, B Xa fois par las<br />

~fBves-prrof~sseu~s qu'en- rautent comme par b passts, mais aussi<br />

pour <strong>des</strong> candidats e~4rieurs qui ont besah de parfake Zews formatiorrs<br />

&@& sp&iaEset?s,<br />

En prhcipe, tout enseie;tremertxt suppose f edsteni:~ d'uns hxtspwtiun.<br />

CEducatian nationale cansidbx'e amme indisp.ensable cette<br />

fanc~on qu%ge divemifxe en pdm, da plus humhie arr plas 6Xe~6~<br />

Or cette r&gfe, appleee aux &COXS de soUfds, fa connu de bizawes<br />

vichsîtu<strong>des</strong>.<br />

<strong>Les</strong> vleux btabüissaments conscmeat dans ZC?U~S archives fa. m4-<br />

moire dl: visites d'hspectsturs, &si ie Centre Sacques Cartifor, &<br />

Sahl-Bxieu~ détient <strong>des</strong> comptc;s rendus manuscfits, datés de 1863,<br />

186% 1885, 1891, 3906, L'ulsp-ctew g&n&ral <strong>des</strong> dtabBs5mc;ixrs de<br />

sourds-maet% def&p$ par Xe mùlist&re da PIntesieurr, v&r%i&t b niveau<br />

<strong>des</strong> 4l5~es OU presidiïlt Ea wmm&sion &ar@e de dÇrXimer Is<br />

profwox'at.<br />

Dans Prur et Xra~we cas, les ambit3ans: &$aient r4duites Au d&bug<br />

h m6thode &tait gm~~-~aphique.' <strong>Les</strong> 6l&vs frdduhaieht @une<br />

langue dans fautre, mais le wntenu <strong>des</strong> cannaisances &tait limite :<br />

quelqam ordrs, pasrtics du WQS, noms d'animauc et ddgarbs~ une<br />

wnvemation rMuite à <strong>des</strong> bnaEt6s et, en cafcuf, <strong>des</strong> pmblbmes 41&<br />

mentakes, Pourtant, en 1866, M. \'fade Gabd .« nom dit qu5.l am&<br />

bt6 fromp4 d'une naniere Jndipe ciam une commuaaulb reEgielmse :<br />

an avait faufil6 parmi $es sourds-muets <strong>des</strong> enfants pasfsmtas qui


utaient ce que l'on disait et qui transmettaient les réponses aux<br />

sour<strong>des</strong>-muettes. Cette supercherie est trks blâmable ! M. l'Inspecteur<br />

eut l'air de conserver un mauvais souvenir de cette communautb.<br />

Il nous défendit bien de souffler les réponses à nos élbves B.<br />

]sa tentation de truquage devait etre induite par le niveau quasi-nul<br />

<strong>des</strong> enfants.<br />

La méthode orale ayant été inauprée le 1" octobre 1883, la parole<br />

et la labio-lecture furent dorenavant considérées comme objet<br />

@inspection et rnatibre du professorat. L'atmosphère était paternelle,<br />

u Par <strong>des</strong> paroles marquées au coin de beaucoup d'intérêt, M.<br />

PInspwteur nous dit : "Ne craignez pas, mes Chères Soeurs, nous<br />

n'allons pas nous poser devant vous en juges sévkres, vous soumettant<br />

une s&ie hterminribfe de questions. Nous jugerons du savoirfaire<br />

<strong>des</strong> mattresses par les élèves. Nous n'avons mauvaise opinion ni<br />

<strong>des</strong> unes ni <strong>des</strong> autres". Fuis, se servant d'une gracieuse métaphore,<br />

M. l'Inspecteur ajouta: "Nous allons procéder comme <strong>des</strong> arracheurs<br />

de dents, en vous donnant votre brevet sans que vous vous en<br />

aperceviez'\», L'attitude est éclairée par l'étymologie puisque les<br />

mots * inspwteur » et « évtlque P ont pour racine, le premier, un<br />

verbe latin. et, le second, un verbe grec de meme sens : surveiller.<br />

Par la suite, il a existé un « inspecteur <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> » titulaire &<br />

l'IN35 de Paris, Puis un décret de 1953 créa le statut, le grade et<br />

Pemplol « d"lttspeeteur technique <strong>des</strong> établissements pubEcs ou privés<br />

agrf:& d'enseignement de sourds-muets et &aveu<strong>des</strong> s. Mais en<br />

peu &années, le support budgétaire disparut, utilisé sans doute à<br />

d'autres fins, ce qui a Iongemps laissé planer une suspicion sur le<br />

bien fond6 de cet emploi de titulaire. C'est ainsi qu'un professeur<br />

contractuel de PENSP exerça la fonction (4 d'inspecteur de l'ensei*<br />

sement <strong>des</strong> déficients sensoriels » puis furent créés deux emplois<br />

« d'hspecteur technique et pédagogique contractuel dans le cadre du<br />

contrele technique <strong>des</strong> établissements et services pour enfants et<br />

adultes &adaptés et handicapés P.<br />

U. semble, aujourd'hui, que cette anomalie soit en voie de règlement<br />

dans le cadre de la r6organisation gencSrale de l'enseignement


de sourds puisqu'un arrêté du 9 octobre 1987 fait reference au décret<br />

de 1953,<br />

Que le contribuable qui sommeille dans tout lecteur se rassure,<br />

<strong>Les</strong> Uidices de cet inspecteur correspondent au « bas de gamme » de<br />

1'Education nationale. Pourtant, 3 s'agit d'un progrhs hportant<br />

puisque, enfin, l'enseignement <strong>des</strong> enfants sourds est reconnu devoir<br />

comporter une structure identique à ceUe de l'enseignement normal.<br />

L%dministration départementale, tutelfe <strong>des</strong> établissements et services,<br />

est compétente dans les domaines administratifs, financiers et<br />

médicaux, mais il lui manque un éclairage proprement pédagogque<br />

qu'elfe doit trouver dans une saine organisation.<br />

LES PARENTS<br />

Depuis 1965, date de naissance de I'MEDA, un nombre croissant<br />

de parents recjame la reconnaissance de leur rôle spécifique sur<br />

un pied d'kgaLitt5 avec les professionnels. II est inutife de reprendre<br />

ici ce qui est énoncé clairement dans l'ensemble <strong>des</strong> textes. L'enfant<br />

sourd n'y est plus considéré comme un malade, ni uniquement<br />

comme un élève. <strong>Les</strong> racines de son developpement plongent dans sa<br />

famille. Cette vérité psychologique, &guistique et socide est<br />

d'ailfeurs applicable aux entendants, Sans doute mériterait-eue d%tre<br />

affirmée avec autant de précision pour ces derniers afin de relativiser<br />

la responsabilité <strong>des</strong> enseipants dans les succès et les èchea.<br />

La rmendication <strong>des</strong> parents contre le pouvolt exclusif <strong>des</strong> professionnels<br />

est d'une légitimité ulcontestable. Au départ, ils sont les<br />

principaux acteurs de 1'6ducation précace puis, à mesure que l'aspect<br />

scolaire prédomine, certains deviennent d'excellents « rkpétiteurs >,<br />

et, dans tous les cas, ils demeurent les représentants, les avocats, de<br />

l'intérêt <strong>des</strong> enfants. Leurs deman<strong>des</strong> sont constamment à étudier,<br />

soit en tant que projet hmediatement réalisable, soit comme expression<br />

d'un souhait qui met I'accent sur une dimension de l'sducation<br />

dont les professionnels tiennent encore insuffisamment compte,


Des exemples de l'efficacité de l'action familiale se rencontrent dans<br />

tous les domaines : LSF, LPC, qualité de la parole, élévation du niveau<br />

scolaire, créations de services de soutien à l'éducation familiale<br />

et à l'intégration scolaire, etc.<br />

Cependant, une attitude démagogique à leur égard aurait <strong>des</strong> effets<br />

pervers. Le rôle de la puissance publique est de reconnaître<br />

l'existence de pouvoirs (médical, orthophonique, pédagogique, parental,<br />


formation <strong>des</strong> orthophonistes avec ceux <strong>des</strong> professeurs <strong>des</strong> secteurs<br />

public et privé du ministère de la Santé.<br />

En 1972 est envisage l'uniformisation <strong>des</strong> diplômes <strong>des</strong> enseignants<br />

de 1Wducation nationale et de ceux de la Santé pubfique.<br />

La loi #orientation en faveur <strong>des</strong> personnes handicapees, du 30<br />

juin 1975, en prescrivant la prise en charge par 1'Etat <strong>des</strong> dépenses<br />

d'enseignement, accélkre la poursuite de l'unification <strong>des</strong> diplômes.<br />

Des années de tractations, conduites dans un esprit constructif<br />

avec la Direction <strong>des</strong> écoles du ministère de 1'Education nationale,<br />

amènent, en 1979, à la rtldaction d'un diplôme d7Etat de professeur<br />

chargt: de l'éducation et de la réeducation <strong>des</strong> déficients auditifs qui<br />

ne peuvent acquérir le langage sans la mise en oeuvre de techniques<br />

spéciafistses (DEPEmA},<br />

Le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement <strong>des</strong><br />

jeunes sourds (CAPEJS}, nouvelle appellation du DEPERDA, voit le<br />

jour en 1983. Il est prévu que les instituteurs titulaires du certificat<br />

d'aptitude à l'enseignement <strong>des</strong> inadaptés, option handicapés auditifs<br />

fCAEf-m}, ainsi que les orthophonistes, y aient accès par complément<br />

de formation. Ce diplâme d7Etat, bien que commun aux deux<br />

ministères, sera décerne par le seul Ministre de l'Education<br />

nationale,<br />

Si le problème du diplôme unique était résolu, celui du statut<br />

<strong>des</strong> professeurs relevant du ministhre <strong>des</strong> Affaires <strong>sociales</strong> et de la<br />

sofidarité nationale ne l'était pas. En application de l'art. 5 de la foi<br />

du 30 juin 1975, ifs auraient da passer à 1'Education nationale. Le<br />

transfert s'avéra impossible,<br />

Or, depuis plus de dix ans, une sorte d'épée de Damaclès était<br />

suspendue au-<strong>des</strong>sus <strong>des</strong> écoles de sourds. <strong>Les</strong> adaptations pédagogiques<br />

indispensables &taient stoppées puisque les pédagogues allaient<br />

changer de tutelle, L'attente du futur diplôme bloquait l'évolution.<br />

Sous peine de laisser sombrer l'enseignement, une décision<br />

s'imposait. De là le décret du CAPEJS signé, enfin, le 27 octobre<br />

1986, évidemment par le Premier Ministre, mais aussi seulement par<br />

le Ministre <strong>des</strong> Affaires <strong>sociales</strong> et de l'Emploi et par fe Secrétaire


1" lorsqu'un établissement ne trouve pas de professeur de sourds<br />

sur le marché du travail, il peut dorénavant envisager de leur substituer<br />

<strong>des</strong> instituteurs spécialisés en s'adressant à l'Education<br />

nationale ;<br />

2" la formation complémentaire <strong>des</strong> instituteurs CAAPSAIS-A<br />

sera à organiser par le ministère qui délivre le CGPEJS, mais en liaison<br />

étroite avec celui de PEducation nationale.<br />

LES ORTHOPHONTSTES<br />

J'aborde ce problème 2 partir de mes origines professionnelles.<br />

Professeur <strong>des</strong> instituts nationam de jeunes sourds, j'ai aussi exercé<br />

l'orthophonie, en dispensaire et à titre libéral, car je bénéficie depuis<br />

1966 d'une ' autorisation d'exercer, Je m'honore d'être un ancien<br />

6lève demeuré constamment attentif à la pensée d'un de ses maîtres,<br />

Mme Borel-Maisonny. Le lecteur est donc en droit d'attendre de ma<br />

part un effort vers l'impartialité.<br />

Quelques remarques préliminaires.<br />

Pour s'occuper <strong>des</strong> enfants sourds, un orthophoniste se doit<br />

d'être competent dans <strong>des</strong> disciplines non médicales : phonétique,<br />

Linguistique, acoustique, etc. Il applique souvent la méthode verbotonale,<br />

découverte du Professeur Cuberina, linguiste yougoslave. Il<br />

se sert du Langage Parlé Complété, création du Docteur Cornett,<br />

physicien américain. Un nombre croissant s'initie à la langue <strong>des</strong><br />

Signes Française, moyen de communication inventé par la communauté<br />

<strong>des</strong> sourds.<br />

L'approche du sourd dépasse donc largement les concepts de pathologie,<br />

troubles de l'articulation, de la parole et du langage. La<br />

réalité est contradictoire. D'un côté, la cochlée est atteinte. De<br />

l'autre, <strong>des</strong> parents sourds considèrent que leurs relations seront parfaitement<br />

normales avec leur bébé, dans la mesure où il sera luimême<br />

sourd.


Une espèce humaine sourde est-elle inimaginable ? Elle aurait<br />

survécu plus difficilement au paléolithique mais, à condition de compenser<br />

ses pertes occasionnées par les grands prédateurs devenus<br />

'silencieux, rien n'interdit de penser qu'elle aurait su communiquer et<br />

der <strong>des</strong> civilisations avancées.<br />

Le sourd de naissance est anomal par rapport à Pentendant autant<br />

que l'entendant l'est par rapport au sourd.<br />

11 ne persoit pas certaines vibrations, ce qui est le cas de tout<br />

homme sain, atteint en rédité de surditdé et de c6citt5 par rapport à<br />

certains animaux. <strong>Les</strong> possibllltés de captation de I'espkce humaine<br />

occupent une partie extrêmement étroite de l'immense champ <strong>des</strong><br />

vibrations, Pourtant, nous ne nous en offusquons pas, ayant décide<br />

que l'home est la mesure de toutes choses, égocentrisme rl la fois<br />

logique et vaniteux.<br />

« Comment peut-on être Persan ? » demandait ironiquement<br />

Montesquieu. Ne soyons pas plus que lui dupe de la question<br />

6 Comment peut-on &tre sourd ? » en nous livrant à un acharnement<br />

pseudo-thérapeutique naïf et vain.<br />

Annie Dumont exprime sa perplexité dans aL'OrtI'z~phonistet<br />

l'enfant sourd », Masson, 1988, préface de A. Morgan :<br />

« ... l'action orthophonique auprès d'un déficient auditif ne s'envisage<br />

pas comme une rt5éducation mais comme une éducation ... »<br />

(introduction).<br />

a .,. dans f'interlocution entre le sujet sourd et l'entendant, on<br />

peut se demander qui est handicape. Est-ce le sujet sourd en raison<br />

<strong>des</strong> problèmes qui tiennent à sa mal-audition, ou I'entendant qui ne<br />

sait comment transmettre son message ? La non-circulation <strong>des</strong> messages<br />

incombe aux deux partenaires.,, >, (p. 6).<br />

« Avec le ddéficient auditif, la place de f'orthophonie est différente<br />

de celle qu'elle occupe vis-&vis d'autres difficultés langagières,<br />

et une discussion autour de l'orthophonie inévitable pour tous les<br />

sourds me semble nécessaire. >> (Conclusion).<br />

Le Professeur Jean-Claude Lafon, dans a <strong>Les</strong> enfants d6ficienfs<br />

audth'fi », SIMEP, admet qu'on ne peut exiger une formation com-


plete a la fin <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> et que lkrthophoniste doit la parfaire luimQme<br />

:<br />


leur concours est souhaitable au m&me titre que celui <strong>des</strong> autres professionnels.<br />

Leur place est reconnue dans k pédagogie entendue au<br />

sens large du terme.<br />

- Art. 7 : En ce qui concerne liedueaiion précoce et l'ht4pation<br />

scolaire, les semices peuvent passer <strong>des</strong> conventions avec <strong>des</strong> centres<br />

d'au&ophonolo@e et <strong>des</strong> CAMSI? (oh pratiquent de nombreux orthophoniste~),<br />

et mê-me <strong>des</strong> htewenants spkialisés proches du domicile<br />

<strong>des</strong> parents. Cette formule a 6th introduite à h demande de<br />

mt5decins et de parents. Elle permet aux familles de ne plus devoir<br />

choisir entre leur ofihoNniste, en qui e b ont toute confiance, et<br />

le soutien &une structure plus etaffhe à laquelle elles font aussi appd.<br />

D'une par& fa densité <strong>des</strong> enfants sourds est si faible que beaucoup<br />

d'entre eux passeront & travers le filet <strong>des</strong> établissements et<br />

services si ses mailles sont trop larges. D'autre part, les parents cherchent<br />

ant (insemer fa responsabiiite de f'ésducatian, mission hautement<br />

souhaitable. Pour tout le mande, IkpcÇrat2 du meLUeur semice<br />

pqcho-puagogique doit primer sur la recherche de clientèle.<br />

Le rnCtier d'enseipant. sera-t-if ouvert aux orthophonistes qui le<br />

sorrhaiteraimt ? Officiellement, rien n'est encore décide. Mais <strong>des</strong><br />

prk6dents justzent une telle mesure. Le défunt DEPEmA prevoy&<br />

de recruter <strong>des</strong> orthophonistes, qui furent d'ailleurs nombre=<br />

à passer le CAEUDA en b4néficiant de certains auégements (leur<br />

travail et leur savoir sont reconnus par une &quivalence totale avec le<br />

CAPWS), J'mthe qu'il faudra poursuivre dans la même direction<br />

en pemettant aux orthophonistes qui exercent dans une structure<br />

d'enseipement <strong>des</strong> enfants sourds l'amGs au professorat. L%mbitiorx<br />

d'un double titre mérite d'être encouragke,


LES IWERVENANTS soums<br />

LYAssernUée constituante votait, le 26 août 1789, la Declaration<br />

<strong>des</strong> droits de Yhomme, rédigde * par Mg Champion de Cice (1735-<br />

1810), archevêque de Bordeaux, pr6lat &lairé digne d'appartenir & la<br />

patrie de Montaigne et de MontesqGeu.<br />

L'article W est &sait sur le mur du musée du Desert, au Mas<br />

Soubeyan, prtls dtAnduze dans les Cevernes : .« La loi est l'expression<br />

de h volonté gt5RIrrafe ; taus les citoyens ont le droit de concourir<br />

personnellement, ou par leurs représentants, 2t sa fornation ; eue<br />

doit .tee la meme pour tous, soit qu'de protBge, soit qu'elle punis&<br />

Tous les citoyens, étant egam à ses yeux, sont également admissibles<br />

toutes dimit&, places et emplois pubscs, selon leur capacité et sans<br />

autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents, »<br />

Ces fartes paroles imprhIres dans un lieu sacre du protestantisme<br />

nous grneuvent encore. <strong>Les</strong> adultes sourds n'ont jamais 6té<br />

brhés par les dra-nna<strong>des</strong> ni condamnBs aux galtlres. Pourtant,<br />

nkuubons pas la façon iporninieuse dont furent chasstss les professeurs<br />

sourds de Pfnstitut nationd de Paris apr&s le Congks de<br />

Mgan, soi-dismt pour le bonheur et Pdlevation <strong>des</strong> enfants ; ni cette<br />

enseignante submergke par IVmotion parce que, pour la première<br />

fois, dans un congrès d'orthophonistes presidct, par MmBBorel-<br />

Maisomy, eue avait le droit de parler de ses parents sourds de naissance<br />

et de la iangue de son enfance : la swidt6 remn~aisslut enfin<br />

sans restriction rhummité de son père et de sa m&re, Le bons sentiments<br />

ont conduit, pendant cent ans,


spirituel. Pour cela, la tolkrance, l'6coute de l'autre, le refus <strong>des</strong> vérités<br />

défdtivm, doivent être sans cesse rappelés » (Conf6rence <strong>des</strong><br />

prix Nobel, réunie au Palais de I'Elyske à Paris du 18 au 21 janvier<br />

1988 - 3e conclusion).<br />

Cependant, d'une part, notre soci&té reste majorita2ement de<br />

langue française, d'autre part, supprimer un privilt3ge abusif et nocif<br />

ne wnsiste pas à le remplacer par un autre présentant les mêmes inconv6nients.<br />

L'enfant sourd doit donc pouvoir s'intégrer à la société<br />

française. Dans cette affaire, f'intevrète n'est qu'une b6quiI.k ou une<br />

prothèse dont il faut pouvoir se passer chaque fois qu'elle n'est pas<br />

hdispensabfe, D'où le principe du bhguisrne.<br />

Il reste que, pour un sourd de naissance, parler et ke<br />

le français<br />

est devenu un droit imprescriptible, mais non plus un devoir ou la<br />

normaLisation d'un état pathologique. Par contre, le maître ou l'orthophoniste<br />

conservent le devoir de faciliter & leur élève l'exercice de<br />

ce droit. Ils ne sauraient etre autorisés à s'en dispenser,<br />

L9Et)UCATION PRECUCE<br />

LIX déficience sensurieftr: de l'enfant sourd concerne lbrgane<br />

pri*6$6 pour l'installation de la cornmunicatian spécXquement<br />

humaine ; c'est fa seule conséquence nefaste. A preuve, les enfants<br />

déficients auditifs nés dans une famüte sourde : leur développement<br />

affect3 et inteumtuel est normal.<br />

Deux axiomes régissent I%éducation prclcoce :<br />

-pour que la communication s'etabLisse, le syst2me de signes doit<br />

être ht6gdement perceptible car ce n'est que lorsque le système<br />

est intégr4 que les signaux sont reconnaissables à partir d'indices<br />

partiels qui, au début, sont redondants. <strong>Les</strong> sens apprennent en<br />

haute fidélité ;<br />

- la langue maternelle est celle de la m&re. Il semble, de même, que<br />

1"ducation auditive de l'entendant commence avant h naissance.


De la perceptibilité découle l'exigence que la langue présentée ii<br />

l'enfant sourd soit totalement visible, ce qui caractérise la lecture fabiale<br />

complétée par le LPC, ainsi que la LSF.<br />

Du rdle predorninant de la mère, it s'ensuit que le français avec<br />

LPC et/ou la LSF ~"pprennent en les vivant, au seul de la familie,<br />

mais ni au centre de r44ducation ni à l'école. La mère et le père<br />

transmettent leur langue à leur enfant. Si ce don prbordid n'a pu<br />

&tre offert, if est vain dPesp4rer trouver un moyen de remplacement.<br />

Ou, à tout le moins, il entraîrzera retards, gaspaage d'efforts et défectuosités.<br />

Ce sont d'ailleurs les parents qui ont introduit et qui répandent<br />

le LPC en France et 2s sont d'actifs demandeurs de LSF. Par le<br />

moyen de l'un ou de l'autre? 3s retrouvent leur r61e naturel alors que,<br />

dans le passé, une infime minorit6 d'entre eux aboutissait une rkussite<br />

andope grilce au préceptorat maternel en collaboration avec<br />

une ~rtho~h'oniste.<br />

En anséquence, dans f'education précoce, b dépistage$ le diagnostic,<br />

l%appareillap, l'appkation de la phonétique articulatoke et<br />

acoustique demeurent du ressort <strong>des</strong> spécialistes.<br />

Pour le reste (éducation de l'enfant, guidance parentale, etc.) le<br />

professionnel est le mméatew entre les parents et l'enfant. El travaille<br />

h leur service afin de leur permettre le plein exercice de leurs<br />

droits et devoirs sans oublier jamais que la vkritable langue (avec ses<br />

aspects sémantiques, gammahnux, affectxs) passe par eux et non<br />

par lui..<br />

Une partie de fa prise en charge psychologique peut liicomber<br />

utaement aux adultes sourds qui incarnent une image positive de<br />

.t'évolution potentielle de l'enfant, ainsi qu'aux parents qui ont dépassé<br />

les bjocages initiaux et *< le processus de deuil ».<br />

La richesse d'apports caractérise le service hautement sp4cialistS<br />

en &ducation précoce,<br />

L'entrée <strong>des</strong> « enfants-LPC » et <strong>des</strong> « enfants-LSF u va modzier<br />

aussi profondément b pédagogie et les ambitions <strong>des</strong> 6tabEsements<br />

qui devront cagaborer etroiternent avec les parents en apipfication Ife


la loi psycho-sociologique selon laquelle la réussite scolaire et universitaire<br />

dépend statistiquement du niveau socio-culturel de la famille.<br />

Ce qui entraînera, en outre, que les professeurs ne soient pas limités<br />

par <strong>des</strong> incompétences techniques dans le choix de la méthode adaptée<br />

il l'état de leurs éléves.<br />

D'ailleurs, <strong>des</strong> parents, afin de réaliser cette synergie école-famille,<br />

créent leurs propres écoles. Ils instaurent une collaboration<br />

entre les professionnels et les usagers qui contrôlent eux-mêmes la<br />

conservation du projet initial et la qualité <strong>des</strong> résultats.<br />

Bien entendu, la surdité demeure événement gravement négatif.<br />

Dans la mesure où la famrffe ne peut le contrebalancer, le risque<br />

d'échec est accru. Cependant, grâce à la précocité d'installation et à<br />

la fiabilité <strong>des</strong> canaux de communication, la perspective doit être<br />

d'atteindre, pour tous les enfants qui ont tiré profit de l'éducation<br />

précoce, un niveau scolaire identique à celui <strong>des</strong> entendants. C'est la<br />

nouvelle frontikre du me sikcle, le défi à relever par l'administration,<br />

les établissements et services.<br />

LE BILINGUISME<br />

La langue <strong>des</strong> signes, langue visuo-gestuelle, donc physiologiquement<br />

naturelle aux sourds de naissance, fut bannie, il y a un<br />

siécle, <strong>des</strong> écoles qui espéraient réussir l'oralisme sans éducation<br />

précoce, ni intégration scolaire, ni éducation auditive, ni labio-lecture<br />

fiable, au sein de gros internats. <strong>Les</strong> résultats furent, inévitablement,<br />

décevants. Mais il ne suffit pas de le constater et d'inverser le processus<br />

pour découvrir la bonne méthode.<br />

Certains précoqisent le bilinguisme, On constate que la recette<br />

est celle du piité d'alouette : un cheval de LSF pour une alouette de<br />

français. L'acquisition <strong>des</strong> deux langues est déséquilibrée. En dépit<br />

de l'étiquette, il s'agit de mono-linguisme.


ft n'existe d'ailteurs en France aucune pédagogie bilingue. <strong>Les</strong><br />

jeunes étrangers sont placés dans <strong>des</strong> classes sp4ciales dans lesqueües<br />

on se contente de leur enseigner le franpis, En l'espace de<br />

trois mois à deux ans, ifs sont mis il niveau et suivent fe cursus scolaire<br />

de leurs condis&ples autochtones. Lknseigrrernent nkst jamais<br />

dispense sur un mode b&gue, qui reste B inventer, meme pour les<br />

entendants,<br />

L'hsothèse d'un passage ais6 de la langue <strong>des</strong> signes (conwe<br />

comme la forme orale de la langue <strong>des</strong> sourds) à sa transcription en<br />

fran~ais reçoit la caution de certains linguistes. A mon avis, ils<br />

s'abusent. Quelles que soient les diffhrences entre le français par14 et<br />

le français écrit, <strong>des</strong> ressemblances existent, ce qui n'est pas le cas de<br />

la langae <strong>des</strong> signes dont les signa= (optiqties et non acoustiques), le<br />

vocabulaire, la mo'phologie et la syntaxe sont totalment differents<br />

de ceux du français.<br />

De meme que par le pseudo-aralisme, les difficultés sont escarnotees<br />

par le pseudo-bilinguisme, Le perdant reste, dans un cas<br />

comme dans l'autre, l'enfant sourd, 21 est dupé par <strong>des</strong> promesses<br />

que l'avenir ne tiendra pas.<br />

Si j'érnigrais aux Etats-Unis, je rnkfforcerais #apprendre l'an-<br />

@ais. Je ne me satisferais pas de disposer d'un interprète-traducteur<br />

pemanent dans mes communications orales et &rites. A fortiori si<br />

ma familie était américaine, L'enfant sourd, de rnbe, a le droit de<br />

ne pas vivre puis travailler en étranger dans son propre pays, mais de<br />

participer directement à l'existence <strong>des</strong> deux eommunaut6s auxqueiles<br />

iX appartient, 11 a donc droit à un veritable bilinguisme.<br />

Prernibre et seconde langue a ici un sens temporel, non de valeur ni<br />

dVimpartance.<br />

L'&lave a, de plus, le droit que renseignement soit placé saus la<br />

responsabilité de professeurs (entendants ou sourds) titulaires <strong>des</strong><br />

titres de capacité requis. En constSquence, il n'est plus admis que la<br />

surdit&, jointe à fa hnne volunté, constitue un diplbme d%abîtitation<br />

il l'enseignement gén6ral. Etre de langue maternelle germanique ne<br />

justifie pas, à soi seul, une nomination de professeur d'aflernand.


Que le lecteur me pardonne ces banalités. Mais les évidences ne<br />

règnent pas toujours chez ceux qui s'occupent de surdité: on l'a<br />

constaté au Congrès de Milan. Ne recommençons pas la même erreur,<br />

inversée.<br />

Une hypothèse est défendable : les professeurs nouvellement<br />

formés, les anciens recyclés, ainsi que les instituteurs et orthophoniste~,<br />

les interprètes et personnes sour<strong>des</strong> recrutçis, inventeront<br />

ensemble la future pédagogie. C'est un espoir raisonnable. Ils découvriront<br />

peu à peu dans quel ordre doivent être enseignées les deux<br />

langues pour que l'enfant les assimile, quelle est la part de vécu, de<br />

méthode directe, comparative, systçimatique.<br />

Certains commencent à le savoir. J'aurais aimé être l'un de ces<br />

pionniers. Lorsque je fus appelé, en 1974, au ministère, j%tais sur le<br />

point d'&rire à M. Lenoir, Secrétaire d'Etat à l'Action sociale et<br />

dont le livre lucide et génerewr <strong>Les</strong> Exclus. était paru, pour lui demander<br />

l'autorisation de travailler en classe, sur un pied d'égalité,<br />

avec un de mes anciens élèves arrivé à la fin de ses étu<strong>des</strong> (il les avait<br />

abandonnées après un premier échec au baccalauréat dont il avait<br />

presque atteint le niveau). Envisager une telle démarche témoigne<br />

de la naïveté d'un professeur et de sa confiance dans le pouvoir d'un<br />

Secrétaire d'Etat puisqu'il aura fallu attendre le décret du 22 avril<br />

1988 pour que ce problème commence à trouver sa solution reglementaire.<br />

Quatorze années sont longues dans une vie humaine, non à<br />

l'&échelle de l'administration qui, ne I'oublions pas, remonte à<br />

Summer.<br />

L91NTEGRATION SCOLAIRE<br />

L'intégration scolaire <strong>des</strong> enfants handicapés est la meilleure et<br />

la pire <strong>des</strong> choses, Elle ne merite ni fanatisme aveugle ni dénigrement<br />

<strong>des</strong>tructeur. Réalité mondiale, elie s'impose comme un fait social<br />

et pédagogique qui invite à <strong>des</strong> jugements de valeur variés et<br />

nuancés.


Deux circulaires, celles du 29 janvier 1982 et 1983, ont pos6 les<br />

bases de cette nouvelle poGtique. Elles suggèrent <strong>des</strong> orientations rBglementakes<br />

utiles mais présentent le défaut de s'appliquer il tous les<br />

handicaps confondus. Eues proc&dent d'une attitude phrlosophique<br />

qui va du général en particulier alors que la science s'est construite<br />

par la demarche inverse.<br />

Quelques constatations introduiront le débat.<br />

D'un côté, une 6Gve d'un institut, intégrée par son 6tabEssement<br />

de la seconde à la terminale du lycée, a réussi le baccalaureat et, en<br />

conséquence, put passer le CAEJRA. Elle est professeur alors qu'il y<br />

a tente ans, elle se serait retrouvée couturière sans CAP.<br />

A l'inverse, les écoles spécialisées se plaignent de recevoir de<br />

plus en plus de (< grands mmmen-nts » âgés de IO à 14 ans qu'on<br />

s'efforce de démutiser et qui ne poss2dent presque aucun bagage<br />

scolaire.<br />

Des parents et <strong>des</strong> enseignants non spkialisés sont abusés par<br />

les résultats fallacieux <strong>des</strong> élkves : mémorisation <strong>des</strong> conjugaisons,<br />

application <strong>des</strong> règles du genre et du nombre (alors que l'enfant<br />

n'attribue aucun sens aux temps verbaux et aux lois grammaticales ; il<br />

s'agit d'un jeu intellectuel mécanique) ; connaissance <strong>des</strong> quatre opérations<br />

et incapacite ii résoudre les problèmes (non seulement par<br />

incompréhension de l'énonce, mais aussi par ignorance du sens <strong>des</strong><br />

opérations) ; leçons bien récitées, bien que non comprises, La réussite<br />

scolaire peut être artificielle et cacher de profon<strong>des</strong> ignorances,<br />

ce qui entraîne illusions immédiates et mécomptes ultérieurs irrgparables.<br />

Le ddsir <strong>des</strong> parents de voir Ieur enfant intégré pres de chez eux<br />

et la bonne volonté de l'institutrice qui accepte de l'accueillir méritent<br />

d'être encourages, Mais les uns et les autres doivent être informés<br />

<strong>des</strong> conditions nécessaires pour éviter un échec. C'est pourquoi<br />

on trouvera, en appendice, un texte qu'il est indispensable d'etudier<br />

scrupuleusement avant et tout au long d'une integration scolaire. Son<br />

apphi~tion conjurerait les catastrophes. Il a été rédige5 par un groupe<br />

de spécia1istes r6unis dans le Bureau international d'audiophonoaogie<br />

(BVU").


AGn de cerner les princip<strong>des</strong> difficultés auxquelles se heurte<br />

I%t&gation, je me suis Gvrd en 1987 à un sondage auprès de douze<br />

étabhsements qui fa pratiquent et f'esthent utile. <strong>Les</strong> ciasses annexées,<br />

les antennes, semblent donner de gran<strong>des</strong> satisfactions. Far<br />

contre, <strong>des</strong> problèmes sont & resaudre 10rsqu'G s'agit d'ùltéption<br />

individuelle puisque l'enfant est totdement hmerg6 dans le mgeu<br />

de Péeole majoritaire. Je rhume, ci-après, les observations les plus<br />

frequentes,<br />

- h dSiedt6 majeure est b retard de lwgrrge et Pécolt: ne te<br />

comble pas aisement car la &asse n%st que silence et les manuels se<br />

mact6risent par un vûcabufake riche et meme savant et <strong>des</strong> tournures<br />

gammaticales cornpiexes. Au moment de lkrientation, on<br />

veillera donc au niveau de langue, & i'aptitude à lire sur les limes, h<br />

l'adaptation prothbtique, ainsi qu'h la qualité de la parole qui favorise<br />

les echanges.<br />

- %&ence de volonté, de puissance de travail (non fatigabifité).<br />

Sinon, surmenage.<br />

-Isolement sacid qui peul aller jusqu" la prise de conscience<br />

accentu6e du handicap avec image nc4gative de soi.<br />

- L'hultgation individuelle suppose son hpfication, un investissement<br />

important de sa part*<br />

a) <strong>Les</strong> enseipants : risques de lassitude, $&couragement, sentiments<br />

d'bpulssance, de culpabilité. Remk<strong>des</strong> : le volontariat, la réduction<br />

d'effectif, l'information, et m&me la formation.


) Rythme d'acquisition trop rapide et vaste contenu <strong>des</strong><br />

progammes,<br />

c) Dsficulftks partic~èreselon le cycle. La matemel-le est souveat<br />

considér6e comme un sum&s, & condition que la parole et le<br />

langage soient travaillés htensément (c'est pourquoi, afin de remédier<br />

23 ce risque, certains ne preconisent I"ht6gration qu'au cours<br />

prdparato2e ou au cours élémentaire). Centrée en sixième est un<br />

cap dangerem (changement de niveau de langue), ainsi que le second<br />

cycle du secondaire (li'hterprète y est r6clame pour certains<br />

cours), L'intépatian dans l'enseignement technique est souvent recommandtl:e<br />

car elle permet la divers3ication <strong>des</strong> métiers et supprime<br />

le coat rédhibitoire <strong>des</strong> hestissements en rnatkriel.<br />

Elle tend à se Grniter un travail de a répetiteur B avec perte<br />

dkutonomie et de responsafittité. ]t'isolement s'y joint : plus de rdnexion<br />

commune avec les coUbgues, manque qui doit être compenstl:<br />

par le chef de service pédagoe;ique,<br />

A partir du secondaire, surtout au deuriéme cycle, hpossibtlit6<br />

de maîtriser le contenu de toutes les discipGnes,<br />

La famiUe n'accepte pas toujoum les surcoçlts du changement de<br />

r&ghe : elle doit payer la cantine et les frais de transport ne sont<br />

plus hputés sur le budget de rktâbrissement. Or, si X'intendance; et le<br />

train <strong>des</strong> Bquipages sont <strong>des</strong> service§ determinants, 2s ne sauraient<br />

imposer la stratégie.<br />

Dans 1'6cole d'accueil, les temps de concertation, synthèse, formation<br />

sont haceoutumés. De meme, le local <strong>des</strong>tine B fa parole et<br />

au soutien peut manquer.<br />

Le service spécialisk fait face 23 une organisation complexe :


- dispersion et, parfois, tloignement <strong>des</strong> &l&ves ;<br />

- horaire devant cadrer avec remploi du temps <strong>des</strong> élèves et du personnel<br />

sp&ialis6 ;<br />

- irivrestissement temporel considérable par él&ve.<br />

La maîtrise de chacun de ces facteurs est hdispensable pour kviter<br />

que Plrittçgration ne soit plus dangereuse que profitable. Il y faut<br />

une ferne volonté et un travail ophigtre qui depassent fenthousiasme<br />

(mais aussi les r6ticences) a priori, source d'improvisation.<br />

Etre obnubiié par la différence b renforce, mais la nier ne la supprime<br />

pas,<br />

SIGLES<br />

- ANFEDA : Association nationale <strong>des</strong> parents d'enfants déficients<br />

auditifs.<br />

- CAMSAIS-A : Certificat d'aptitude aux actions pedâgogiques spécialisli-es<br />

d'adaptation et d'inttogation scolaire, option A.<br />

- C M-W : Certificat d'aptitude il Z'enseignement <strong>des</strong> inadaptb,<br />

option handicapes auditifs.<br />

- C m A : Certificat d'aptitude à l'enseipement <strong>des</strong> jeunes defi-<br />

cients auditifs dans les étabGssements prives,<br />

- CAMSP : Centre d'action mkdleo-socide pr6coce.<br />

- CAP : Certificat d'aptitude professionneHe.<br />

- CAPEJS : Certificat d'aptitude au professorat de Penseignemmt<br />

<strong>des</strong> jeune sourds.<br />

- C W : Commission departementde de IVducation spéciale.<br />

- COTOREP : Commission technique d'orientation et de reclassement<br />

professionnel.


- DEPERDA : Diplôme d'Etat de professeur chargel- de l'éducation<br />

et de la rééducation <strong>des</strong> deficients auditifs.<br />

- DIS : Diplôme d'instituteur spkialisb (Université de Lyon).<br />

- 1N3A : Institut national <strong>des</strong> jeunes aveugles.<br />

- INJS : Institut national <strong>des</strong> jeunes sourds.<br />

- LPC : Langage parlé compl6té.<br />

- SF<br />

: Langue <strong>des</strong> signes française.


PREMIER CHAPITRE<br />

La langue <strong>des</strong> signes


A PROPOS DE LA LANGUE DES SIGNES<br />

Pourquoi peut-on aujourd'hui parler de LSF ou de français signé<br />

sans soulever <strong>des</strong> tempêtes de protestations ?<br />

Depuis vingt ans que ce mouvement existe, ks esprits ont eu le<br />

temps de se calmer, de r&fl&chir, de recentrer le problhme B son juste<br />

niveau, sans remettre en question l'evression orale favurisée par<br />

une éducation de plus en plus prkoce, par les progrès de l'appareilla-<br />

et par une poli:tique d'httgration si elle est judicieusement<br />

menee.<br />

Ddjjà dans ce d6but de prgsentation, vous pourriez émettre bien<br />

<strong>des</strong> rkserves. Quand il s'agit d'tducation d'enfants, rien n'est simple,<br />

a fortiori pour les enfants déficients auditifs, oii tant de paramètres<br />

entrent en jeu.<br />

Pourquoi ce renouveau de la langue <strong>des</strong> signes qui se nichait<br />

sous le bisseau depuis presque un siècle ?<br />

Plusieurs raisons convergent. Nous Ies signaIerons ans les dtsveiopper,<br />

puisque ce n'est pas le thème de cette intemention :<br />

1. Un mowvement sociofogique venu <strong>des</strong> Etats-Unis : les mlnorités<br />

finguistiques ont revendique auQrhs <strong>des</strong> pouvoirs publics la reconnaissance<br />

de leur langue et de leur culture. La communauté <strong>des</strong><br />

sourds à prétendu aux memes droits,<br />

* Professeur au Centre Nationai d3Etu<strong>des</strong> et de Formation Fur I'Ertfsttee Xnrtdapt4e<br />

(CNEFEI). Interpdte en langue <strong>des</strong> signes, Traducteur expert k la cour d'appel de<br />

Versailles.


2. De nouvelles données psycho-linguistiques : une meilleure<br />

connaissance de la maturation cérébrale a permis une approche plus<br />

fine <strong>des</strong> processus d'acquisition du langage.<br />

3, Des statistiques scolaires alarmantes : quelques réussites<br />

spectaculaires ne pouvaient masquer de graves constats d'échec.<br />

Un enseignement mal adapte (méconnaissance de l'enfant<br />

sourd, métho<strong>des</strong> trop rigi<strong>des</strong>..,) ne permet pas d'élever renfant sourd<br />

au même niveau que l'enfant entendant. Au vu <strong>des</strong> résultats, Pinférioritis<br />

<strong>des</strong> performances de l'enfant sourd n'étonne personne ; ceci<br />

sera mis au compte de ses capacités intellectuelles moindres, sans<br />

provoquer une remise en compte complète du système éducatif.<br />

Cette prise de conscience d'une situation déplorable mobiiise<br />

parents, sourds adultes, médecins et éducateurs, et alimente les arguments<br />

critiques à l'égard d'un système actuel. Mais, malheureusement,<br />

leurs arguments respectifs ne reposent pas sur les mGrnes<br />

predables.<br />

Je crois qu'il faut être réaliste : if existe de gros échecs comme<br />

de brillants succés ; mais la disproportion entre ces cas extrêmes peut<br />

nous laisser perplexes.<br />

L'enseignement est assuré si l'enseignant et l'enseigné ont une<br />

langue commune. Si ce n'est la condition suffisante, elle est tout au<br />

moins nkcessaire. Or cette condition n'existe pas toujours, D'oh te<br />

paradoxe !<br />

Four certains enfants sourds, notamment sourds profonds, la<br />

connaissance de fa langue <strong>des</strong> signes serait-elle un facteur positif?<br />

C'est fa question que beaucoup se posent, sans pouvoir obtenir de<br />

réponses très satisfaisantes, car les preuves ne sont pas éclatantes ;<br />

« tes signes » supportent te poids d'un long discrf?dit, ils font encore<br />

peur, car ils entraînent dans leur siliage l'idée de non accession à<br />

i'abstraction, de système agrammatical, etc.<br />

Ces idises prisconçues sont dues au fait d'une méconnaissance de<br />

la langue <strong>des</strong> signes. Sans vouloir refaire la philosophie du langage,<br />

ni l'histoire <strong>des</strong> langues, il est tout de même intéressant de connaître


la place du signe dans l'évolution <strong>des</strong> lmgues, et de l'importance qu'il<br />

pouvait jouer dans certaines civilisations.<br />

Aux temps les plus reculés de Ithurnanite7 le geste a waisembhblement<br />

servi de moyen prutcipf dkqrression : en approchant insthetivement<br />

et par un mouvement alternatif les doigts voup4s dans<br />

h bouche entrouverte, il fut compris UnmtSdiatement. Le son a sans<br />

doute jouê primitivement le rôle d'un signe d'appel, avant de prendre<br />

la place du geste e signifiant » auquel il était assrni&, Mais avant que<br />

la parole eût détrûné le geste, un langage universel etait employé et il<br />

n'est pas un homme, aujourd'hui encore, qui ne le comprenne : par<br />

exemple, « prendre de la nourriture B.<br />

L'organe vocaf, se joipant SIla mhique, fit que la rn&me articulation,<br />

toujours attttachbe au m&me geste, devint compr&hensibIe.<br />

D'abord adaire du geste, la voix devait ensuite prendre la première<br />

place. Le langage parlé succédait au langage d'action.<br />

Avec I'évolution de l'humanit6, <strong>des</strong> langues, peut-etre parties<br />

d'uun langue commune, prirent corps et se divisèrent en nombre infini<br />

; une chose est demeurée constante : les signes de la main, U. est<br />

probable qu'ils ont représenté d'abord les phonèmes du langage B<br />

une époque où l'écriture n'existait pas. <strong>Les</strong> monuments en effet les<br />

reproduisirent semblables à eux-mêmes, depuis les Assyriens<br />

jusqu'au siècle, c'est-&-dire pendant plus de 3000 ans. La da*<br />

lologie universelle s'étendrait mbme à rantique Mexico, oil ek<br />

transmettrait les idées conformément cc à la sêrneiolo&Ie et à la Enguistique<br />

prohefiénique >,. D'après S. Barrois dans son livre :<br />

Dac&lolo@e et lafzgagep~mit~a,<br />

La dacq10logie fut aWe au langap d'action, elle a inspké letes<br />

'Beam-arts qui nous ont légué <strong>des</strong> scufptures, <strong>des</strong> pehtures, <strong>des</strong> mosaïques,<br />

vraiment parlantes, escort~esespar la langue proheUénique.<br />

Nous pourrions multiplier les exemples qui donnent au e signe z2<br />

une place privilégiée dans la communication. Certains, appartenant:<br />

au code &rit comme les hibrog4ypheq corrmpondent aux memes caractt&ristiques<br />

spatiales de certains signifiants de la UIF pour un<br />

meme simifi6 :


fiempk : L'eau, se moquer de quelqu%n, le courage, l'adoration,<br />

l'offrande, la suppfication, etc.<br />

XI est rapporté qu'au temps d'Auguste, on psticdait et les<br />

Romains &prouvaient du plaisir B s'exprimer par les bras, les mains,<br />

ites attitu<strong>des</strong>. On raconte aussi au sangjtant épisode <strong>des</strong> Vlipres Sicilionnes<br />

en 1282, qu'une révolte avait été mhtieusement préparee<br />

dans toute 1% sans qu'un seul mat Iut prononcé ou &rit. Tous les<br />

détails de la conspùation avaient &tB ordonnés par gestes.<br />

Il est rmomu hgdement que dans certahs monastkrw, où fa lai<br />

du silence était obseméf:, fa communica6on se transmettait par<br />

signes, dont le recueil pouvait aller de 500 à 1300. C'est peut-être<br />

une <strong>des</strong> raisons qd permit à Pedro Ponce, un <strong>des</strong> premiers precepteurs<br />

apagnols, chargé dqduquer deux jeunes enfants sourds, de<br />

pouvoir mmmuniquer avec eux.<br />

Au fur et ii mesure que l'on se rapproche de notre siècle, les<br />

signes ou expressions mho-gestueues, pour une soci&t6 d'entendant~,<br />

seront réservés au théatre, corncSdiesp quelques cco~orations,..<br />

ou certains types de sociétés, comme les tribus indiennes dont la<br />

mdtipEcit4 <strong>des</strong> dialectes aurait nkessité Yutrlisation <strong>des</strong> signes<br />

generam.<br />

Parmi les moyens de communication entre uidividus, les sourds<br />

auront choisi celui qui &tait le plus à leur portée, c'est-à-dire& plus<br />

facile à appréhender, le plus imagé, le plus «parlant >> à leur<br />

imat;)uxation,<br />

Le signe appartient à l'homme ; 2 est son premier moyen d'expression,<br />

mais rel4p4 à un second plan de par Phportance de la par&,<br />

acte phonique, il est devenu l'outil de comrnmieatiori propre au<br />

sourd.<br />

C'est sur ce principe de base que I"kbb6 de rEp& et tous ses<br />

condixiples, avec quelques variantes, vont construire leur s-the<br />

Gdueatif :<br />

Signes naturels + signes méthodiques + dae~l01ol;ie pour l'enseipement<br />

du frangais écrit.


Il semblerait que l'Abbé de l'Epée ait meconnu la langue <strong>des</strong><br />

signes teHe qu'elle se parlait dans les quartiers populairesy ce qui expliquerait<br />

pourquoi ses signes méthodiques, miroir de la langue<br />

&rite, furent si vite abandonnes.<br />

La hnpe pupdake, enrichie par <strong>des</strong> mntractions <strong>des</strong> signes<br />

methodiques et par fa. créaticm de nouveawr sipes grâce B I'tsmdition<br />

de certains &l&ves, deviendra ie véritable hkrita- culturel de la<br />

communauté.<br />

Vérita'bfe, certes, mais maheureux car sa mhoh ne repose sur<br />

aucune trace écrite. Seules les traductions en langue frança-ise de discours,<br />

pokmes, lettres témoigneraient de cette richesse iinguistique<br />

et quelques ouvrages, comme cefui de l'Abbé Lambert entre autres,<br />

Cette langue s'est transmise seulement de cc main i oeil a. Seule la<br />

fidégt6 de cette transmission pourrait $tre le garant de ce patrimoine.<br />

Mais cet héritage Ltnguistique a connu un fantastique parcours<br />

du &battant : l'interdiction, avec son cortège de mutilations<br />

(appauvrissement, confusion, déformation...).<br />

Une telle


<strong>Les</strong> marphkmes sont articulés en unités 414mentaires non significatives<br />

ou chkrèmes, au nombre de 55, correspondant à fa configuration<br />

de Isr main, à la locafisation et au mouvement exécutf, par<br />

celle-ci.<br />

<strong>Les</strong> chc*rbmes ob6issent à leur tour à <strong>des</strong> règles :<br />

dkterf6rences ;<br />

de ~;ym6trie ;<br />

d'alternance ;<br />

- de domulance.<br />

Cette andyse componentiefle de Stokfte sera reprise et mud3it"e<br />

par une nouvege tstude de cherchettrs.<br />

<strong>Les</strong> cumps-nts du sipe ou chu.èmes, r6âJis6s simuttanrlment et<br />

non sumessivemen$ se compoteraient comme <strong>des</strong> traits phonologiques<br />

et non comme <strong>des</strong> phonèmes.<br />

Quels seraient ces paramètres physiofogiques ? ObEgatoirement<br />

:<br />

- une confipration de la main ou Chirie ;<br />

- une orientation de la main ou Topie ;<br />

associ6es 4veatueUement :<br />

- à un emplawment de la main ou Sornatie ;<br />

- b un mouvement de la main rectrice ou Kynksie ;<br />

- b un mouvement de la main non rectrice ou Synie.<br />

La d&omposition <strong>des</strong> signes en unités plus foxldâmenfafes<br />

constitue une liste fermCe. Mais Ia modrfiation d'un su phsieurs<br />

chirèmes l peut entraher srjit un changement de signe, soit une variation<br />

flexionnelle, soit une création nouvelle par dérivation<br />

(comme en français).<br />

]te le~teur comprendra qae les exemples décrits ne peuvent<br />

6tayer ces arwments. Se& les documents vidéo les Zustreraient., ou<br />

la transaiptioa &rite Iorsqu'eRe sera mieux connue.<br />

Cette latitude de commutation paradigrxratique <strong>des</strong> éhér&mes assure<br />

à Xa LSF une m6ativit4 lexicale fantastique.<br />

2. Chirkmes ou ChErèmes : :tilisa$ion de l'un ou I'autn: de ces deux termes.


Ces signes ne constituent pas une masse amorphe et indiffkrenciée,<br />

mais peuvent se classer dans une typologie gammaticde cornparable,<br />

certes? mais dsferente de nos parties du diours : noms,<br />

verbes, adjectifs. Ce qui explique la tutate independance de- la BI?<br />

par rqport il h lângue franpise, Il n"y pas conespondance signemot<br />

ma& s%e-conceptc,<br />

&emplg : l'adverbe modzie? dans notre langue, le sens du verb<br />

ou, tout au moins, la façon dont est ex6cutee l'action.<br />

En UF, i'adverbe est incorpore dans la mrtjoritéi <strong>des</strong> cas au<br />

verbe. Donc, selon le rythme, l'lntensit6 de f9a4cution au f'amplitude<br />

du mouvement, nous pouvons camprendre de quelle façon a kt6 ex&-<br />

cutéie l'action.<br />

Ryhme, htensit6, ampgtude sont trois paramètres fondamentaux<br />

qui entrent en jeu dans les wriations BekonneZes.<br />

La LSF possède un système prosodique propre assurd non par la<br />

vakq mais par le jeu complexe <strong>des</strong> mouvements de la tete et <strong>des</strong> expressions<br />

du visage : mimiques, souffle, direction du regard.<br />

Uqression dit visage est b la langue <strong>des</strong> signes ce que t'intonation<br />

est h fexpression orale.<br />

Fonctionneflement, la LXF prksente la plupart <strong>des</strong> caractéristiques<br />

que l'on rencontre dans une hngue comme le fran~ais. Mais sa<br />

structure tr&s particuG*re, qui heurte nut~esprit cart6sien, ne peut<br />

en aucune façon cohabiter avec h structure de la langue française.<br />

Dboù Je choix de certains enseipants pour Je français signi5,<br />

La Langue <strong>des</strong> Signes est une langue qui utilise les trois dirnensioas<br />

et qui s'utilise en situation.<br />

Sa syntaxe a pour objet d36mettqe- et de disposer les signes dans<br />

l'ordre le plus approprie à peindre exactement aux yeux la w&ne<br />

rkelle ou intellectuelle que la mémoire ou Phagination nous retrace,<br />

Dans fa nature, la cause grtseti!de les effets ; ceux-ci devenant<br />

cause i3 leur tour, engendreront a leur tour <strong>des</strong> conséquences, et ainsi<br />

se constitue une chaule qui suit l'ordre logique <strong>des</strong> faits. C'est ce fil


qui guide la pensée de nombreux sourds, enfants ou adultes, selon<br />

l'impact de la langue française sur leur mode de pensée.<br />

Exemples : . Pierre ne pouvait se consoler du départ de Michel.<br />

Traduction littérale : « Michel est parti, Pierre se consolait, irnpossible<br />

B.<br />

II guérit rapidement après avoir été vacciné.<br />

Traduction littérale : « Il a été vacciné et après il guérit rapidement B.<br />

J'attire votre attention sur l'adverbe « après » qui précède<br />

« avoir été vacciné », comme si cette action s'était déroulée dans un<br />

second temps, malgré l'utilisation du participe passé.<br />

En LST;, l'utilisation de a après » accompagne réellement la proposition<br />

relatant la seconde action. Cette présentation ne peut faire<br />

état de tout le système complexe d'une grammaire notionnelle, ni<br />

l'étudier en détail.<br />

Pour comparer ce qui est comparable, nous pouvons affirmer<br />

que la LSF situe les énoncés dans un temps précis, dans un espace<br />

déterminé et les réfère aux trois actants fondamentaux de la communication<br />

(nos pronoms personnels).<br />

Eile permet de verbaliser la quantité, l'intensité, la comparaison,<br />

la désignation, de modaliser son discours, c'est-&-dire exprimer : les<br />

souhaits, les volantes, l'ordre, l'interrogation, le doute, la certitude,<br />

etc.<br />

Grâce à tous ces procédés fonctionnels et en utilisant <strong>des</strong> unités<br />

à signifiés abstraits, la LSF peut prétendre à une verbalisation authentique<br />

<strong>des</strong> opérations intellectuelles fondamentales qu'une langue<br />

permet : juger, argumenter, démontrer, raisonner ...<br />

Le français signé né par imitation de l'américain signé est une<br />

arme double tranchant. Voulant faciliter la compréhension du<br />

français, il risque de le rendre plus obscur.<br />

Si la LSF est une langue, le français signé est une méthode qui<br />

peut être judicieuse si la personne sourde connaît bien le français et<br />

la personne entendante très bien la LSF, pour ne pas tomber dans le<br />

piège d'une traduction litterale, difficultés bien connues de tous ceux<br />

qui ont connu les versions et les thèmes,


En quoi consiste le français signé ? Définition simple en apparente.<br />

11 a pour but de visualiser la langue française en empruntant le<br />

lexique de la LSF et en le combinant selon les règies de ln syntaxe du<br />

français, afin qu'il y ait concordance exacte entre l'énoncé parlé et<br />

l'énoncé signe. (On peut utitiser le FS en parlant, durs qu'on ne peut<br />

signer en LSF et verbaliser en français en même temps, puisqu'if ne<br />

peut y avoir superposition de structures).<br />

Mais le FS reste tres difficile à déterminer précis6rnent, car son<br />

utilisation masque fe plus souvent une non connaissance de la LSF et<br />

se hite à quelques unités lexicales sans structures syntaxiques<br />

réelles.<br />

Mais il peut être intéressant dans <strong>des</strong> cas spécifiques comme<br />

l'interprétariat en simultané, Si nous voulions situer ie FS par rapport<br />

à la langue fran~aise et par rapport à la LSF, nous pourrions<br />

imaginer qu'il navigue entre deux pales, selon f'importance qu'if accorde<br />

à l'un& ou l'autre knye.<br />

L. FR. L.S.F.<br />

F. Signé<br />

Sans vouloir faire de fausses notes sur l'historique de la pédagogie<br />

<strong>des</strong> sourds, nous pourrions rapprocher les signes méthodiques de<br />

l'Abbé de 1'Epée du français signé. Toutes les unités lexicales ainsi<br />

que toutes les variations flexionnelles devaient être visualisées. Nous<br />

savons quel credit ont accord6 les successeurs de I'Abbt': de f'Epée<br />

aux signes methodiques.<br />

Le français signé peut etre utilisé pour <strong>des</strong> phrases simples, référant<br />

ii <strong>des</strong> objets ou à <strong>des</strong> procès concrets ; mais son utilisation est<br />

limitée car on se trouve vite confronté à <strong>des</strong> difficultés incontournables<br />

et on est contraint une traduction littérale, un transcodage<br />

qui n'apporte aucun sens à l'6noncé. C'est un exercice de haute voltige<br />

qui, s'il est utilisé, doit reposer sur une parfaite connaissance de<br />

la LSF, car les choix opérés sont pertinents.<br />

Pour itlustrer ces propos, les exemples abondent ; tous les enseignants,<br />

parents qui se sont confrontés à ce probl&me, ne manqueront<br />

pas de se référer à leur propre expérience,


Comment rendre par le même signe les termes de notre langue<br />

extrêmement polysémiques ?<br />

- II va A la gare, il va bien, il va écrire, le rouge lui va bien ;<br />

-je tiens un dou,<br />

j'ai perdu la montre à laquelle je tenais, je tiens<br />

il partir, je me tiens droite, je me tiens B ta disposition ...<br />

-je n'ai plus d'argent, j'ai plus d'argent, j'ai de plus en plus d'argent,<br />

de plus, j'ai de l'argent.<br />

Sans parler <strong>des</strong> tournures idiomatiques figbes, composées de<br />

termes courants mais dont la traduction littérale tombe dans le ridide<br />

et n'klaire en rien le sens <strong>des</strong> énonces.<br />

- rire jaune, avoir une peur bleue, passer <strong>des</strong> nuits blanches ;<br />

- j'ai ddQ prendre sur moi, pour ne pas me laisser aller.<br />

J3 peut meme arriver que l'on exprime par le français signé l'idée<br />

contraire de la phrase française :<br />

- c'est la moins petite.<br />

La traduction en français signé donnerait l'iiiusion qu'elle est la<br />

plus petite.<br />

Cet ensemble de critiques ne doit pas être perçu par le lecteur<br />

comme stigmatisant une méthode nocive. Ckst plutôt une mise en<br />

garde contre tous les pii?ges que renferme le français signé.<br />

Comme je l'ai dit préctsdemment, utilisé par une personne parfaitement<br />

biffngue, il peut être kttSressant comme méthode, en sachant<br />

toutefois qu'il ne visualise pas eomp-ièternent le français ; sont<br />

absents les flexions <strong>des</strong> verbes, les auxiliaires être et avoir ...<br />

Mais son emploi a permis à <strong>des</strong> pédagogues de débloquer <strong>des</strong> situations<br />

#incompréhension par l'apport de quelques signes et St <strong>des</strong><br />

parents de concilier leur langue a w un mode d'expression appréhensible<br />

par leur tout jeune enfant sourd.<br />

Si donc le Français Signé a donné à <strong>des</strong> parents la rtselle possibilité<br />

d'=mer leur r61e de parents et à leur enfant d'entrer dans h<br />

mmmunication, c'est-à-dire permettre & cet enfant de comprendre et<br />

d'etre compris, le Français Signé a rempli sa fonction langage et il a<br />

sa place parmi les autres moyens de communication.


LANGUE DES SIGNES ET PEDAGOGIE<br />

P?~iZippe SERQ-GUIUUME *<br />

La Uf; est depuis peu largement soEcit6e par une fraction non<br />

né@geable de professionnels de la surdité et <strong>des</strong> parents #enfants<br />

sourds. Introduite dans la pédagoge qtscialisée, la LSF se voit en<br />

quelque sorte i sommee sans préavis % de prendre en charge le discours<br />

p6dagogque.<br />

1l me semble utile, de presenter ce nouvel out3 UT; et d'exposer<br />

les réflexions inspi<strong>des</strong> par une evérience d'introduction de la UF<br />

en classe (LEP) r6alisde par une équipe composde <strong>des</strong> professeurs,<br />

Madame Leroux de Bretape, Monsieur Chapektin, d k htenrenant<br />

scolaire, Monsieur Clerget, d'un interprete, moi-même. De larges extraits<br />

du rapport d'activitss de ce groupe rédigé, par les enseignants<br />

précit& seront utgses dans cet article.<br />

La LSF n'est pas une langue aussi hstitutionnalts6e que le français.<br />

La diversité <strong>des</strong> degciences auditives (légère, s&v&re, profonde,<br />

pr6 ou postverbale) fait que fa LSF utilise <strong>des</strong> métissages : signifiants<br />

proprement gestuels, emprunts signés ou articules au français.<br />

* fnrerpdte à I'Institut National <strong>des</strong> Jeunes Sourds de Paris.


On observe <strong>des</strong> ruptures constantes dans la transmission de la<br />

LSF. La surdité nkst héréditaire que dans 10 % <strong>des</strong> cas. Le jeune<br />

sourd a donc <strong>des</strong> parents entendants qui, aprBs un parcours long et<br />

dmicae, ne cfio%ssent pas toujours une option &ducative gestue7fa<br />

Dans les écoles spécia2iséa ctù ta jeunes sourds arrivent souvent<br />

sans Ianprue coastituée, la rXE: n'est pas ut%s&e dans toutes les<br />

dases. <strong>Les</strong> professionnels qui maltrisent la LSF sont encore peu<br />

nombrem malgr4 I'6volution constatee : cours de UF au personnel<br />

et embauche #intervenants sourds. La ISE' n'est donc pas, à proprement<br />

parler, fa langue materneBe <strong>des</strong> jeunes sourds, sauf pour Xa<br />

mhoritb dont fes parents sont ew-mgmes sourds, mais pfutdt leur<br />

langue natweae, <strong>Les</strong> jeunes, sans mod&le hpistique solide et<br />

stable, rehventent pour partie fa LSF h. chaque gt5ndxâtiun. A Finverse,<br />

la mmmunauté <strong>des</strong> sourds adultes transmet, malgr6 tout,<br />

l'hérita- finwtique, En outre, Pémergence de la notion d'identitd<br />

edturelle sourde, dont la LSF est la manifestation la plus bvidente,<br />

les nouveaux supports vidéo, permettent un mouvement inverse de<br />

fixation de la langue.<br />

La LSF est donc soumise b, deux processus antagonistes connus<br />

et largement dkrits propos d'autres communautés humaines.<br />

La pidmation, très gossi&rement shpuication, qui appwaît<br />

lorsqu'uue communauté n'est pas homug&ne ou lorsqu'if y a <strong>des</strong> ruptures<br />

dans la transmission de la langue et qui consiste h. p~va&@er Ia<br />

functlan sGf6rentieIfe du fangage au defriment <strong>des</strong> autres fonctiûns<br />

qui fui sont Imparties.<br />

La cr&lisat,tion qui intervient lursqu%ne communaut6 fr6t6rog6ne<br />

se saude, se pérennise. On observe alors très sehématiquement<br />

une eomplefiication et une plus grande rbglarité de la langue.<br />

Un dernier point doit attre sou@& Comme toutes les languest<br />

ta LXF ne conn& pas de Lunites imputables & son &nie propre,<br />

quant b ses pussibilit6s d'expression ; ce sont les hites qui ont éti:<br />

hpos&es h. ses locuteurs qu'elle refikte : en effet, les sourds ont kt&$<br />

jusqu'h. une p4riode très rbcente, exclus de nombreux champs de<br />

commlmicication. Néanmoins, la LSF fait preuve d'une grande créativité.<br />

Au fur et a mesure que les personnes sour<strong>des</strong> ont accès (i de


nouveaux métiers, de nouveaux champs de connaissance, on peut<br />

noter la création de nouveaux signes, ceci dans les domaines les plus<br />

divers, par exemple en informatique, <strong>sciences</strong> humaines, etc. En ce<br />

qui concerne les registres de discours, on observe aussi une évolution<br />

témoignant <strong>des</strong> possibilités de la LSF. S'agissant <strong>des</strong> conversations<br />

de la vie quotidienne, le connu partagé, les relations de connivence,<br />

comme dans toutes les petites communautés, induisent <strong>des</strong> stratégies<br />

de prise de parole spécifiques : élision, implication personnelle.,. La<br />

prise en charge de domaines nouveaux (pédagogie, identité culturelle,<br />

éducation entre autres) entraîne au niveau du discours <strong>des</strong> stratégies<br />

nouvelles de prise de parole, notamment une plus grande mise<br />

distance.<br />

La LSF est donc à meme de prendre en charge le discours pédagogique.<br />

L'intégration d%tudiants sourds dans les formations (< ordinaires<br />

» (formation d'éducateurs, formation continue) par le truchement<br />

d'interprètes prouve cette capacité, <strong>Les</strong> domaines nouveaw<br />

sont ensuite intégrés en LSF par les sourds eux-mêmes.<br />

LE CONTEXTE PEDAGOGIQUE<br />

L'éducation spécialisée a toujours participé de conceptions pédagogiques<br />

plus générales s'appliquant à l'enseignement non spécialisé.<br />

Aussi, il ne me paraît pas abusif de rapprocher avec précaution<br />

l'enseignement du français aux jeunes sourds de l'enseignement <strong>des</strong><br />

langues étrangères aux jeunes entendants. En effet, si la LSF n'est<br />

pas la langue maternelle mais naturelle du jeune sourd, le français,<br />

eu égard à la déficience auditive, ne peut t?tre considéré comme sa<br />

langue maternelle ou première.<br />

Citons ici Elisabeth Lavault. « <strong>Les</strong> métho<strong>des</strong> audio-orales et<br />

audio-visuelles introduites dans les années 1960 se réclament de<br />

théories linguistiques et d'hypothèses sur l'apprentissage fondées sur<br />

le conditionnement, lkpprentissage d'une langue étrangere étant<br />

considéré comme "un processus mécanique de formation d'habi-


tu<strong>des</strong>". Dans les métho<strong>des</strong> audio-orales, qui fonctionnent avec <strong>des</strong><br />

enchahements d'exercices structuraux répétitifs généralement horscontexte,<br />

<strong>des</strong>tinés ii créer <strong>des</strong> réflexes verbaux, la traduction<br />

n'intervient pas, sauf pour expiiquer les phrases qui servent de modèles<br />

aux exercices structuraux. Dans ces conditions, elle ne peut être<br />

encore qu'un transcodage. Quant aux métho<strong>des</strong> audio-visuelles, elles<br />

prétendent éliminer radicalement la langue maternelle en y substituant<br />

un support visuel adapté (image fixe ou film) qui accompagne<br />

sans ambiguïté la présentation <strong>des</strong> signifiants étrangers. »'<br />

On ne s'étonnera pas, au vu de ce contexte pédagogique, que<br />

dans un premier temps, la LSF ait été considérée surtout comme une<br />

béquiile.<br />

Traduire pour comprendre<br />

Très schématiquement, c'est toujours le français qui est proposé<br />

en premier lieu aux élèves - qu'il s'agisse d'un texte ou d'exercices<br />

structuraux. Aprbs une première lecture, un premier essai, les points<br />

obscures sont explicités en LSF.<br />

L'exercice est difficile : le sens figuré, la polysémie <strong>des</strong> mots, la<br />

complexité <strong>des</strong> structures de langue bitent l'efficacité de cette approche.<br />

En outre, ni le professeur, ni l'intervenant scolaire sourd ne<br />

sont parfaitement bilingues, ils n'ont pas les ressources linguistiques<br />

suffisantes, sauf exception, pour mettre les deux langues à distance.<br />

Quant aux élèves, le recours i?t la LSF ne leur permet pas d'assurer<br />

une véritable traduction. Ils ne peuvent effectuer souvent qu'un<br />

transcodage, c'est-à-dire un signe pour un mot, la mise à distance <strong>des</strong><br />

deux syst&mes iinguistiques est encore plus difficile que pour leurs<br />

pédagogues. Leurs difficultés, voire leur impossibilité à « faire du<br />

sens » avec le texte français sont, semble-t-il, dues au faible niveau de<br />

langue auquel se trouvent les élkves, Rappelons que, pour qu'un<br />

texte soit compréhensible, il est nécessaire de connaître plus de 70 %<br />

1. E. LAVAULT, La Fonction de la traduction en didactique <strong>des</strong> langues, Collection Traductologie,<br />

na 2, Didier Erudition, p. 14.


<strong>des</strong> termes qu'il contient. Le texte français présenté d'emblée aux<br />

élèves se présente comme un labyrinthe semé d'embtlches et de<br />

pièges. En outre, si un dictionnaire de LSF existe, aucune grammaire<br />

n'est pubfiée à ce jour, donc éleve, enseignant, sourd ou entendant,<br />

se voient plongés dans un climat « d'insécurité » îinguistique qui ne<br />

facilite pas la tache.<br />

Malgré les difficultés évoquées, l'utilisation de la LSF représente<br />

un progrès évident. Même si les élhves ne maîtrisent pas complètement<br />

fa LSF, une explication ou une information est tout de même<br />

beaucoup plus facile à faire passer en utilisant ce mode de communication.<br />

L'utilisation de la LSF permet une meilleure transmission <strong>des</strong><br />

connaissances générales et assure un contact plus facile avec les<br />

élèves en reconnaissant et en utiiisant un mode de communication<br />

qui leur est propre. Mais elle n'a pas permis jusqu'à pr6sent un enseignement<br />

du français aux jeunes sourds.<br />

L'enseignement du français aux sourds, comme l'enseignement<br />

<strong>des</strong> langues étrangères aux entendants, est souvent conçu comme une<br />

transmission du lexique et <strong>des</strong> structures. S'il est vrai que les exercices<br />

structuraux et un apprentissage systématique du vocabulaire<br />

sont <strong>des</strong> points hportants, on ne peut réduire l'enseignement d'une<br />

langue à cette transmission. En effet, les mécanismes observés quant<br />

à l'acquisition d'une langue chez les entendants ne relèvent pas d'un<br />

apprentissage systématique. Confronté au langage, c'est l'enfant qui<br />

repère les structures et les assimile, se les approprie.<br />

Tant que la langue est objet d'exercices ponctuels et prkis, les<br />

jeunes sourds ne rencontrent pas ou peu de difficultés, mais dès qu'il<br />

y a actuatisation dans le discours écrit (ou oral) on se heurte aux difficultés<br />

connues de tous : imprécision, inexactitude dans le déroulement,<br />

mauvais usage <strong>des</strong> notions, maladresses, dues à une mauvaise<br />

maîtrise de la langue et à un manque de connaissances générales.<br />

A partir de cette constatation faite par bon nombre de professeurs,<br />

l'équipe évoquée dans l'introduction a envisagé une démarche<br />

differente.


Une tentative d'introduction contrôlée de la LSF en classe :<br />

le Primat donné au SENS<br />

LSF<br />

LSF<br />

SENS<br />

Français : non<br />

Français : oui<br />

Nous avons donc cherché i?i prhenter aux élc?ves <strong>des</strong> modèles<br />

d'expression LSF et franqais écrit en partant du principe qu'en travaillant<br />

sur le sens, les élèves se trouveraient en position de comprendre<br />

et de s'exprimer. Autrement dit, ne plus présenter d'emblée<br />

celui-ci qu'une fois le sens intégré, fut notre préomupation.<br />

Pour ce faire, il leur fut proposé <strong>des</strong> traductions en LSF enregistrées<br />

sur cassette vidéo. Ces traductions furent réalisées par l'intervenant<br />

sourd et l'interprète en présence et avec la collaboration <strong>des</strong><br />

enseignants. A aucun moment il ne fut question de réaliser un transcodage,<br />

le @nie propre de la LSF fut toujours respecté dans la<br />

mesure de nos moyens. Notre seul souci fut de proposer <strong>des</strong> équivalences<br />

au plan du sens et les solutions adoptées furent les plus idiomatiques<br />

possibles. <strong>Les</strong> textes i partir <strong>des</strong>quels nous effectuâmes ces<br />

traductions sont <strong>des</strong> «textes authentiques», poemes, articles de<br />

journaux, extraits de manuels scolaires et non pas <strong>des</strong> textes fabriqués<br />

pour l'occasion.<br />

La cassette LSF, bien que le support final ne soit pas écrit, présente<br />

quant au résultat certaines propriétés de l'écrit : forme définitive,<br />

permanence, elte offre les mêmes possibilités de reproduction et<br />

de stockage.<br />

En outre, elle permet, et ce point est capital, d'opérer une mise ii<br />

distance du « texte » (gestuel ici) comparable à celle qui s'effectue<br />

vis-à-vis de l'écrit.<br />

Cette cassette visionnée en classe permet au pédagogue de faire<br />

une « explication de texte » relativement plus aisée qu'avec de l'écrit,<br />

même si tous les élèves ne maîtrisent pas parfaitement la LSF.


Le sens étant acquis, les él&ves se trouvent à m&me d'aborder<br />

l'écrit dans de meilleures conditions.<br />

La passerelle ne se fait pas au niveau <strong>des</strong> deux lanpw par la<br />

traduction shultanee ou dgfgrée, mais par «le sens >s, par la<br />


Un enseignement systbrnatique<br />

Tout au long de cette expkrience, une approche notionnelle fut<br />

proposee aux élbves à partir <strong>des</strong> points suivants :<br />

, h s pronoms - les signes orientables - les verbes hcorporant <strong>des</strong><br />

pronoms personnels.<br />

. <strong>Les</strong> axes du temps -localisation temporelle - reguhrité.<br />

, <strong>Les</strong> notions de durée et de ponctuafitC.<br />

. <strong>Les</strong> focaflsations spatiales.<br />

Toutes ces notions étaient présentées en premier Lieu en LSF<br />

par moi-mbe, tant6t directement, tantât par Pinternédiaire de documents<br />

vidéo. Elles étaient, en second lieu, traitées en français par<br />

lm enseignants avec <strong>des</strong> batteries d'exercices, d'expressions,..<br />

Ainsi conçu, ce programme a permis conjointement une réactualisation<br />

<strong>des</strong> notions en français et leur approfondissement, et la<br />

mise en kvidence <strong>des</strong> différences entre les deux systèmes linguistiques<br />

LSF-Français.<br />

CONCLUSION<br />

Voici quelles etaient les conciusions auxquelles nous 6tions parvenus<br />

a ia fiin de cette expérience.<br />

<strong>Les</strong> elèves devraient avoir la possibilite d'enrichir leur communication<br />

gestuelle et leurs connaissances génbrales. Cela pourrait se<br />

faire, par exemple, par la cr6ation d'un journal vide0 en LSF, par <strong>des</strong><br />

cours de LSF dispenses aux 616ves par <strong>des</strong> intewenants scolaires<br />

sourds très qualifi&s, en présence <strong>des</strong> professeurs. Ces cours auraient<br />

pour centres d'intérêts <strong>des</strong> themes pédagogiques choisis par le professeur,<br />

&laborcSs en étroite collaboration par l'intervenant sourd et<br />

l"intewr&te et repris en français &rit ou oral par le professeur.


Cette manière d'htroduire la LSF dans renseignement, outre le<br />

bénefice que peuvent en retirer les elhves, offre I'htértlt de lever « le<br />

climat d'insécurité finpistique *.<br />

Cette eqérience conduite avec mes coE&gues m'amène à penser<br />

que l'accès au texte français, une fois le sens acquis grfice B la UF,<br />

permettrait à l'élève sourd, si un travail de ce type lui était propos4<br />

rêguEltlrement, de repérer et d'aequ6rir peut-&tre d'une rnanikre plus<br />

naturelle les structures et le lexique français en 6vitant la stér&oSpie.<br />

En effet, ce n'est pas la définition d'un mot, f'eqfication d'une<br />

règle de grammaire qui nous permettent fondamentalement d%assimiler<br />

ce mot ou cette rkgie, mais les multiples usages que nous repérons<br />

au fil <strong>des</strong> dialopes, <strong>des</strong> « discours >> oraux ou <strong>des</strong> textes qui<br />

nous sont prclposks.<br />

Un mot n'est intégré que s'il a été entendu ou vu 50 fois.<br />

L'approche évoquée ici me semble respecter une progression<br />

plus naturelle. En effet, il a 6t& constaté qu'il est dans un premier<br />

temps plus aisé de comprendre une langue que de s'y exprimer,


LA SORTIE DU GHETTO<br />

Toute socitSt4, pour les raisons apparemment les plus variées,<br />

tend à rejeter certains <strong>des</strong> siens, Ces exclusions peuvent être partielles<br />

: restrictions d"acct?s à certains lieux, à certaines fonctions,<br />

amputation de certains droits, EBes peuvent der jusqu" <strong>des</strong> formes<br />

extrêmes telles que le ghetto, la ddportation, le camp d'internement,<br />

fa prison ou l'hôpital psychiatrique. Ces mises l%cart peuvent etre<br />

explicit<strong>des</strong> de façon formelle, etre $dictées légalement : «nui n'est<br />

admis dans la fonction pubfique s'il n'est sain de corps et d'esprit a,<br />

Elles prennent dans de nombreux cas la forme plus incidieuse et banale<br />

du


dans un espace sacré où <strong>des</strong> investissements généreux s'imposent. Ils<br />

ne se justifient ni ne s'évaluent en termes de rentabilité économique.<br />

On est en effet enclin à mesurer i'insertion de chacun à i'aune de<br />

ce que la société lui offrirait. Il y aurait <strong>des</strong> privilégiés que la société<br />

a gâtb, et les exclus, ayant moins rqu, ou incapables de tirer un véritable<br />

profit de qui leur a été donné. Il me paraît plus judicieux de<br />

mesurer au contraire l'intégration de chacun à partir de ce qu'il apporte.<br />

Et il en est <strong>des</strong> groupes sociaux comme <strong>des</strong> individus, ils<br />

n'existent au monde, ils n'y participent, ils n"y apportent et n'en reçoivent<br />

que pour autant qu'ils s'y présentent et s'y affirment dans<br />

leur spécificité.<br />

<strong>Les</strong> exclus, les périphériques, les marginaux seraient alors ceux<br />

qui, en raison de ce qu'ils sont, n'apporteraient rien. Ou plus exactement<br />

ceux dont on n'attend rien et/ou dont on ne veut surtout rien<br />

recevoir. Ceci parce qu'on estime, à tort ou à raison, qu'ils sont incapables<br />

d'un apport véritable ou que cet apport ne peut pas être bon.<br />

Inutiles, mauvais, dangereux, ils sont en quelque sorte condamnés<br />

par avance, c'est là leur définition, à ne pouvoir jamais offrir ce<br />

qu'ils ont de sp6cifique et à ne devoir dans le meilleur <strong>des</strong> cas que<br />

toujours recevoir.<br />

Mais venons-en aux sourds et à la langue <strong>des</strong> signes.<br />

Cette dernic?re fut pendant <strong>des</strong> décennies l'objet d'un grand mépris<br />

de la part de toutes les personnes engagées à un titre ou à un<br />

autre dans teducation <strong>des</strong> jeunes sourds. Elles la considéraient<br />

comme un moyen de communication primitif. Elles la trouvaient<br />

laide, voire animalesque, pauvre, inapte à exprimer l'abstraction, les<br />

nuances, les sentiments élevés, les sentiments profonds. Que sais-je<br />

encore ? Ces éducateurs, qui voulaient à coup stlr le bien de leurs<br />

élkves, n'auraient cependant pas déployé tant d'énergie à la com-


attre s'ils ne lui avaient pas fait ce reproche majeur d'enfermer les<br />

gour& dans un ghetto, et s'ils n'avaient remarqué avec justesse dans le<br />

même temps que la langue <strong>des</strong> signes était en quelque sorte contagietnse.<br />

En contact avec d'autres sourds, un jeune sourd a en effet t8t<br />

fait de h prendre, de t'apprendre, de s'en emparer.<br />

Qn est toujours surpris du nombre de sourds que leurs éducateurs<br />

et leurs parents ont rkussi h maintenk jusqu'à un iige &van& a<br />

I'écart <strong>des</strong> leurs et de la s&duction du langage gestuel. Eduatiotz chez<br />

les entendants, éducâtian protkgee et difficae, on en convient toujours,<br />

austkre, et résewke plut& aux sourds de milieux favoris4s dont<br />

les parents peuvent assurer la doublure <strong>des</strong> maîtres.<br />

Dans les internats sp&ia2isés, par contre, il est difficile de venir<br />

a bout de ce qu'on a longtemps appel4 1's Pivraie w, Mais on a réussi<br />

gknéralement à établir une separation tranchee entre les situations<br />

dites « sérieuses B, scofaires, où les gestes sont interdits, et les situations<br />

commè la récréation, le réfectoire et le dortoir oh Ils ont libre<br />

cours.<br />

Cette sèparation tranchke entre la langue de la vie, la langue de<br />

tous les jours et la langue savante qui est en meme temps un peu la<br />

langut: <strong>des</strong> autres, n'est pas la plus favorable aux apprentissages en<br />

géneral, ni h celui du français en particulier. Eile p6nalise par ailleurs<br />

le sourd de naissance et 1e sourd inapparezable au profit du malentendant<br />

ou du devenu sourd ayant pari& Mais cette skpaation peut<br />

être v6cue comme cc dant de soi », et la tolérance aux gestes dans les<br />

matextes ordinaires fait qu'elle n'est pas nécess&ement ressentie<br />

comme oppressante.<br />

Cette pustique a sa traduction en mkok dans h culture sourde.<br />

M&me B I'âge adulte, i1 en restera quelque chose. On évitera de faire<br />

les gestes en publie. Il peut s'agir d'une honte verttable de la langue<br />

<strong>des</strong> signes en soi. Il s'agit le plus souvent de tout autre chose. U en est<br />

alors du langage gestuel comme de nombreux actes intimes ou privés,<br />

nullement honteux en soi, mais qui le deviennent h être montrés,<br />

être faits en public. On le cache. Par respect pour lui, h la bite, et<br />

pour la cczmmunaut9 de ceux qui y ont recours.


II y a <strong>des</strong> langues orgueilleuses et wnquérantes qui semblent<br />

marquées du sceau de l'universakme. Telle est du moins la façon<br />

dont les vivent les communaut6s de ceux qui les parlent. Ceux-ci donnent<br />

volontiers leur langue. Ils l'exportent. Mieux, 2s pensent que ce<br />

peut être un bienfait pour les autres qu'on la leur impose. Le français<br />

fut longtemps le prototype d'une telle langue. Qu'on pense aujourdlhui<br />

B l'anglais.<br />

Il y a, à l'opposé, les lanpes <strong>des</strong> mhoritBs ayant l'evérienee<br />

historique du mépris et de l'oppression. te yiddish ou les parlers tziganes<br />

par exemple. Des langues qu'on garde jalousement pour soi.<br />

Qui ne s'enseignent pas. Elles ne sont connues que de quelques rares<br />

personnes n'appartenant pas h ces communaut6s. Et l'on se méfie<br />

toujours de qui, n'annonçant pas la couleur et y ayant recours, se r4-<br />

vkle ne pas partager par naissance le <strong>des</strong>tin de la communaut4 de<br />

ceux qui fa parlent.<br />

La langue <strong>des</strong> signes, dans la situation que je dbcris, appartient à<br />

cette catégorie de langue. Eile a toutes les caractQistiques d'une<br />

langue de ghetto. <strong>Les</strong> sourds, à vrai dire, voient en elle alors quelque<br />

chose d'un peu différent d'une langue à proprement parler. C'est un<br />

mode de communiquer particulièrement original et qui (tout en<br />

ayant virtuellement une vocation universaliste) leur serait en réalité<br />

inhérente : les entendants seraient, par nature, incapables à jamais<br />

d'en acquérir vraiment la maîtrise.<br />

Quant aux murs de ce ghetto, ifs s'6févent à l'ininrieur même du<br />

monde <strong>des</strong> sourds, séparant ceux qui font les gestes et ceux qui mettent<br />

leur point d'honneur à surtout nkn rien savoir.<br />

Des murs faits d'ignorance rtsciproque, de mépris, de reproches<br />

et, je crois savoir, de bien <strong>des</strong> peurs aussi.


. AU DROIT DE CITE<br />

Ce qui se passe un peu partout dans le monde depuis une quinzaine<br />

d'années oblige à reconsidérer les anciennes fapns de voir et<br />

de faire. Cest au nom de l'intégration et de la lutte contre Xe ghetto<br />

qu'on a condamné et combattu les signes. Il est clair à pcbsent qu'il<br />

fdait procéder de mani&re inverse, La reconnaissance de la langue<br />

de signes est la condition sine qw nos de l'int4gration et de la mrtie<br />

du ghetto.<br />

Il y a quelques années, c'est aux Etats-Unis ou dans bs pays<br />

scandinaves qu'on aurait été chercher les éléments de la d6manstration.<br />

Dieu soit loué, on en trouve aujourd'hui en France, bien que les<br />

changements me semblent s'y passer de façon quelque peu conEctuelle<br />

et grinçante.<br />

Ce à quoi nous assistons eût été inconcevable il y a quelques années.<br />

Je pènse en premier lieu aux u sourds parlants » qui ne<br />

connaissaient pas les gestes. Ce sont eux, les premiers btsnéficiaires<br />

<strong>des</strong> interprètes. L'accès à n'importe quel exposé ou débat public leur<br />

était interdit. Cela semblait aller de soi. Ne sachant pas communiquer<br />

par signes, ils n'imaginaient pas non plus que puisse exister pour eux<br />

de conversation il plusieurs oh 2s ne soient pas mis en situation<br />

d'infériorité.<br />

Ces dkcouvertes, qui prennent parfois la forme d'une révtSfation,<br />

font de certains de ces sourds les militants les plus actifs en faveur de<br />

leur langue retrouvée.<br />

<strong>Les</strong> barrières entre sourds tombent, et tous, grilce à la multiplication<br />

<strong>des</strong> interprètes dans tous les contextes (administratifs, médicaux,<br />

culturels, religieux, professionnels, politiques ...) auront enfin<br />

accès à ce qui se passe dans le monde <strong>des</strong> entendants qui est quand<br />

même aussi le leur.<br />

Il ne suffit pas de mentionner tout ce à quoi les sourds peuvent<br />

enfin avoir accès aujourd'hui, bien que gour&. Il faudrait parler de<br />

tout ce a quoi ils ont enfin accès parce que justement ils sont sourds.<br />

Le cas exemplaire est celui de nombreux types d'interventions de ca-


actère pédagogique auprès de jeunes sourds dont ils avaient été<br />

6vincés jadis en raison paradoxalement de leur surdite.<br />

Mais c'est sur autre chose que j'airnerais m'&-tendre un peu. Je<br />

veux parler <strong>des</strong> cours de signes.<br />

Il en a existé autrefois, surtout dans ce lointain passé où ils<br />

étaient à l%onneur. fl s'agissait de bréves initiations, souvent informelles<br />

et réservées à ceux qui se <strong>des</strong>tinaient à l'enseignement spbcialisé<br />

ou à quelque forme d'apostolat auprès <strong>des</strong> sourds.<br />

Ce qui est foncièrement nouveau dans un tel enseignement, c'est<br />

d'abord son caractère systématique. Meme si les cours se développent<br />

souvent sous forme sauvage. C'est &autre part son ampleur.<br />

C'est enfin et surtout la nature du public auquel 2 s'adresse. Celui-ci<br />

dépasse largement le cadre <strong>des</strong> Gducateurs de jeunes sourds. Il<br />

concerne les parents d'enfants sourds, la famille élargie, les amis, les<br />

professionnels de toutes sortes susceptibles de rencontrer un jour ou<br />

i'autre <strong>des</strong> sourds, <strong>des</strong> personnes voulant se lancer dans l'interpr4-<br />

tariat, et tous ceux de plus en plus nombreux qui, ayant vu cette<br />

langue, en sont tout simplement devenus curieux. En France, déjh au<br />

moins dans une université, la langue <strong>des</strong> signes française est une matière<br />

à option.<br />

hs sourds américains se plaisent à dire que la langue <strong>des</strong> signes<br />

américaine serait la troisième ou la quatrième langue <strong>des</strong> Etats-Unis.<br />

Cela ne veut pas dire qu'il y a tant de sourds au Etats-Unis et qu'elle<br />

serait pour un nombre aussi grand de citoyens la langue ordinaire.<br />

Cela signifie que cette langue est utilisée par la majorité <strong>des</strong> sourds,<br />

certes, mais par un plus grand nombre encore d'entendants. <strong>Les</strong><br />

signes sont devenus une sorte de bien comrnun,<br />

Sauf erreur de rna part, la Belgique fait le même choix que nous.<br />

C'est aussi celui de nos amis de Suisse romande. <strong>Les</strong> sourds ont<br />

quasi le monopole de l'enseignement <strong>des</strong> signes. C'est loin d'être le<br />

cas dans tous les autres pays du monde. Un tel choix se justifie pleinement<br />

pour le moment présent. fl me paraît important. '<br />

Que ce soit les sourds qui enseignent ne signifie cependant pas<br />

pour autant qu'ils enseignent leur iangue. <strong>Les</strong> cours sont parfois de


longues listes de vocabulaire. Pour enseigner ce que l'on fait


DES PSYCHIATRES ET DES SOUmS...<br />

ET LA PSYCEWVALYSE<br />

Nous commencerons ce texte en livrant les résultats d'une enquirte<br />

que nous avons menée sur h situation <strong>des</strong> sourds adultes hospitalisés<br />

en psychiatrie.<br />

L'enfant sourd deviendra un adulte sourd et ce que nous apprennent<br />

les adultes sourds concerne aussi bien Yenfant qu'ils ont<br />

4té. Des enfants qui, dbs que le diagnostic de surdit6 est pas$ se retrouvent<br />

en « éducation surveillée » par les spécialistes du ddficit.<br />

Quand, en plus, cette éducation se fait au nom d'une conception<br />

audiomorphique du langage et de l'intelligence, il n'est pas êtonnant<br />

que la consdtation pour sourds de l'Hôpital Henri Rousselle en reçoive<br />

les hisses pour compte.<br />

Tant que persistera fa confusion actuelle sur le tangage entre<br />

s&uçture symbogque hkérente à I'existence humaine et son utilisation<br />

verbale, -ta parole9 nous verrons l'arsenal <strong>des</strong> tests ~ontinuer à se<br />

d6ployer pour évaluer I'intelligence <strong>des</strong> sourds.<br />

Si les psychologues ont toujours eu la curiosité =citée par le<br />

(i rnattçriet » que représentent ies sourds, pour les psychanalystes,<br />

quelle que soit la voie de la pratique de la langue, taut être humain<br />

est dans le langage, chaque sourd y est plongé comme tout sujet.<br />

* Mddecin @da-psychiatre, RespombIe du service médic*p~holo&ue de 1'fnslitut<br />

Xationai <strong>des</strong> Jeunes Sourds de Paris.<br />

** Mddeàn psychiatre, Attackd de consultation à tSH&pital Henri Rour;seiIe,


La parole ne vaut qu'adressée ii l'autre, ce n'est pas un produit<br />

pur.<br />

Des résultats de l'enquête se déduiront quelques conséquences :<br />

- les mécanismes qui contribuent à faire de la clinique avec les sourds<br />

une clinique imprecise. L'obstacle principal provenant pour le psychiatre<br />

de ce que parole et écoute promues au rang d'indispensable<br />

support ne trouvent plus à s'expérimenter dans la pratique de l'entretien<br />

selon les modalités habituelles, provoquant le désarroi puis<br />

le rejet de l'interlocuteur sourd, La surdité est un handicap qui se<br />

partage ;<br />

- les questions spcdcifiques que sont l'appel à l'interprète et le recours<br />

à l'&rit ;<br />

- enfin les perspectives immédiates qui peuvent etre proposées pour<br />

répondre la carence constatée dans l'accueil psychiatrique <strong>des</strong><br />

sourds.<br />

Dans un deuxième temps, nous ferons quelques remarques cliniques<br />

partant de notre expérience. L'enseignement que nous en tirons,<br />

à contre-pied de ce qui a pu s'écrire, nous amène i souligner<br />

l'absence de psychopathologie propre aux sourds. Nous tgcherons de<br />

nous en expliquer.<br />

Notre place nkessite, pour faire exister la condition même d'un<br />

questionnement et d'un abord clinique, rien moins que la reconnaissance<br />

<strong>des</strong> sourds comme êtres de langage. Une fois ce geste accompli,<br />

il devient evident que les sourds peuvent avoir <strong>des</strong> symptômes et<br />

qu'ils peuvent également bénéficier de lieux pour dire leurs angoisses.<br />

Pas plus fous que les autres, mais pas moins non plus.<br />

Si, comme l'écrit le Docteur Jacques Lacan (Ee&, p. 166) : i< Le<br />

phénomène de la folie n'est pas séparable du problème de la signification<br />

pour l'être en général, c'est-à-dire du langage pour l'homme »,<br />

il nous apparaît plus clairement qu'à dénier toute parole propre aux<br />

sourds on leur dénie ce qui est proprement humain, car e loin donc<br />

que la folie (...) loin qu'elle soit pour la liberté une insulte (...) l'être<br />

de l'homme, non seulement ne peut être compris sans la folie, mais il<br />

ne serait pas l'être de l'homme s'il ne portait en lui la folie comme la<br />

limite de sa liberté, »


LA SITUATION DES SOURDS HOSPITALISES<br />

EN PSYCHUTNE<br />

Des étu<strong>des</strong> épid$hologiques r6alisées à I'btranger (USA,<br />

Grande Bretagne, Danemark) depuis plus de vingt ans, il ressort les<br />

constatations suivantes :<br />

1) que la durée du séjour hospitafier <strong>des</strong> sourds est trois i%<br />

quatre fois plus longue que pour les entendants ;<br />

2) que la proportion de sourds hospitalisés en psyckiatrie est<br />

beaucoup plus grande que la proportion de sourds dans la population<br />

générale ;<br />

3) que les raisons qui eqfiqueraient cette prevalence<br />

concernent :<br />

- <strong>Les</strong> faux diagnostics, notamment la haute incidence de patients diagnostiqués<br />

& tort débiles mentaux,<br />

- les difficultés de communication qui entraînent le dhouragernent<br />

de l'équipe saignante, la n6gligence du traitement et ia prolongation<br />

inutile du séjour hospitalier ;<br />

4) enfin que la creation d'unités permettant de centraliser les<br />

soins pour les sourds (avec son corollaire : la connaissance de la<br />

lanpe <strong>des</strong> signes par l'ensemble du personnel soignant) a crzmplètement<br />

transformé cette situation.<br />

Aucune étude n'ayant h ce jour été realisée en France, nous<br />

avons décidé de l'entreprendre en envoyant une lettre à tous les<br />

chefs de services <strong>des</strong> centres hospitaliers spécialisés de la région parisienne<br />

et de la région Rkône-Alpes.<br />

Dans cette lettre, nous demandions :<br />

- de nous indiquer la présence dans le service de patients sourds hospitalisés<br />

;<br />

- quand cela $tait possible, le diapostic posé.<br />

Dans un deuxième temps, nous avons adressé le questionnaire<br />

ci-joint aux services qui nous avaient informés de la présence d'un ou<br />

de plusieurs patients sourds,


Compte tenu <strong>des</strong> Scuftb spécifiques q ~e posent les patients sourds au niveau<br />

de la communication :<br />

3" - Etes-vous satisfait du diagnostic que vous avez posé ?<br />

Oui Non Autre<br />

2" - Etes-vous satisfait de la prise en charge th4rapeutique dans le service ?<br />

Oui Non Autre<br />

3" - Efes-vous satisfait du projet de sortie et de rEinsertio~ ?<br />

O6 Non Autre<br />

4" -A%z-vow cher& un Centre psycfuatrique spMalisé pour ce type de<br />

patients ?<br />

Oui Non Autre<br />

5" - Avez-vous demandé I'aide d'un interpr&tl;t.e en langue <strong>des</strong> signes ?<br />

Oui Non Autre<br />

-Sioui:<br />

êtes-vous satisfait du résuItat obtenu ?<br />

Oui Non Autre<br />

6" -A votre avis, serait-l souhaitable de crBer <strong>des</strong> structures adaptees pour<br />

soigner ce; type de patients ?<br />

Oui Non Autre<br />

7" - Vodez-vous faùe d'autres comment&es T


anb~ufl3 aun,p « m~sso.13 » a;r?i3e~e3 aj sau5f~nos anb qej au uofs<br />

-f392dxmj 7uop '« luarua~~oduro3 np salqnoq, »: anbgsouiSerp af~o&i<br />

-e3 ej ap uopewgszxns e-[ ans anbrewal aun,nb suulaj au snoN<br />

3ah~<br />

SJ.MXLV~ ira NON<br />

3!isouSe!p ap svd<br />

(sanbjueS~o sajqno~i) salxnv<br />

ayu?lydoqq3~<br />

~fssa~dap aurolpulis<br />

a~eluaw airtrsaa<br />

aFiUEj3Juf asoy3hsd<br />

(sp~qds uou) sanbf.joq~hsd sl~la<br />

luatuasodwo:, np sayqnolyt-<br />

3LISONS)WCI<br />

: lumps nealqei a1 ?uuo!l3ajua3<br />

suom snou 'sanua~ed. iuos snou Inb sasuod?~ sap lgl~d<br />

'ajeluaw atflrqap el 13 luaura3<br />

-~odu~o:, np sajqnol) sa1 'tueq?p lex?,'f ~uaurquro~ as qo sxisoU'awp<br />

s~na!snld syop.tid iuailod spJnos meluam sapeleur sa? .qsori;?ep<br />

-Ljod np aruqqo~d na s?iuorjuo;, mururos snou snou 'pl .z.jso&<br />

-ep np ana3 ireJi) aasod suo~a snou anb uopsanb awqxnap q<br />

v<br />

: suoAnoaJ snou 's~uapad JnS<br />

.a!~iyy:,ASd ua syps splnos s3uapzd OL iur)sl@~oii 'saq~s<br />

-od iuap~a 1s iuop 'sasuoda~ 801 n5a.1 suo~e snou 'sa?Lo~ua saJila-[<br />

602 Jns : sieqnsal sou ap ari~zd aun,nb 731 suozalAg au snoN


les sourds. Clinique qui se borne à l'observation <strong>des</strong> troubles non<br />

verbaux les plus bruyants.<br />

A ce propos, nous voudrions signaler une obsewation clinique<br />

qui peut nous permettre d'ouvrir quelques pistes menant au dernembrement<br />

de la catégorie « troubles du comportement » : un hôpital<br />

de jour recevant aussi <strong>des</strong> sourds s'est ouvert rbcemment, auquel<br />

nous avons adressé quelques patients suivis en consuitation, L'offre<br />

d'un lieu d'écoute psy~hoth6rapeutique~ la présence d'autres patients<br />

sourds, la possibjlité de se faire entendre en langue <strong>des</strong> signes, a<br />

transformé les bruyantes symptomatologies dites troubles du comportement<br />

», A titre d'exemple, citons ce patient dont fa violence, les<br />

passages & l'acte et l'entrée dans fa délinquance se sont révéi6s être<br />

le masque d'un moment fecond délirant (tentative de gut5rison disait<br />

Freud) et dont l'tl-laboration apaisante n'a pu se rtlaüser qukprès fa<br />

rencontre avec ce cadre hospitalier où était utïltstse la langue <strong>des</strong><br />

signes,<br />

Dans les institutions spéciatisées pour sourds où fa tolt5rance aux<br />

dtrviances a un seuil particulierement élevé, qu'il s'agisse <strong>des</strong> performances<br />

scolaires ou <strong>des</strong> troubles de la personnaLite, la survenue de<br />

troubles du comportement sous forme de passages à l'acte n'entraîne<br />

le plus souvent, dans un grand désarroi, que sanctions et renvois,<br />

premiers pas sur le chemin de la mise à l'écart. Or, un trouble du<br />

comportement est un symptôme, mettant en scène non sedement<br />

l'enfant mais isgalement sa famue et I'hstitution Zi lôquelte il semble<br />

s'adresser. Le rôle du psychiatre dans I'hstitution, par son diagnostic<br />

et la possibifité qu" donnera i cet enfant de trouver un lieu pour<br />

dire ce qui raffecte, peut être considér6 comme préventif <strong>des</strong> solutions<br />

psychiatriques de dernier recours.<br />

D'ailleurs, du deuxième questionnaire, il ressort une forte proportion<br />

d"uisatisfactions, tant au niveau du diamostic que de la prise<br />

en chttrge thbrapeutique et de la sortie :<br />

-le recours h l'interprète, quand 2 a &te possible, se r&v&le insuf-<br />

fisant ;<br />

- à tous, il sembIe souhaitable de crker une structure adaptee pour<br />

accueillir et soigner les patients sourds.


<strong>Les</strong> questions que soulèvent l'appel à l'interprète et le recours à<br />

l'&rit ayant une incidence certaine dans la rencontre avec les sourds,<br />

nous en dirons deux mots.<br />

C'est toujours h l'interprète que s'adresse le patient. Il s'ensuit<br />

une exclusian relative du psychiatre. L'interprète peut constituer une<br />

aide pour établir un diagnostic puisqu'il traduit la parole du sourd,<br />

Nais bien souvent il donnera ou on lui demandera <strong>des</strong> commentaires,<br />

induits par sa connaissance <strong>des</strong> sourds, qui s'appuient sur <strong>des</strong><br />

critères culturels le plus souvent. D2un grand interet dans certaines<br />

situations, ils peuvent venir parasiter la relation ou « objeetaliser » la<br />

personne du sourd en occultant sa prtSsence &elle. Abolition de dimension<br />

de Ikutre d'autant plus aisément a~ompIie que 17interpr$te,<br />

lui, repond quand on fui parle. La traduction vise le sens, Elle<br />

s'appuie donc sur la croyance que le locuteur sait ce qu'il dit et ce<br />

qu'il veut. Par sa traduction, l'interprète va donc avoir tendance à refuser<br />

les manifestations insensées <strong>des</strong> symptBmes qui ne font vraiment<br />

pas sbriew;. Banalisation culturelle ou rejet de l'insensts, de la<br />

folie, les balancements de l'interprète sont autant d'obstacles à l'instauration<br />

de la relation psychothbrapeutique.<br />

Quant au recours à l'écrit, il vient signer l'échec de la rencontre,<br />

le refus de s'exposer. S'exposer ii l'erreur, à la reprise de travers oit<br />

tout le corps est engage ; exposition du corps à laquelle la domination<br />

du code linguistique par la langue <strong>des</strong> signes &te tout caractère<br />

régressif ou infantile.<br />

Par ailleurs, de nombrewr sourds ne possèdent qu'imparfaitement<br />

le français écrit et Pufisent souvent avec une syntaxe plus<br />

proche de la langue <strong>des</strong> signes que du fran~ais. Ce qui rend la lecture<br />

du message aussi peu utilisable que la parole pour un interlocuteur<br />

non averti.<br />

Nous avons cependant pu remarquer combien la réintroductiun<br />

de l'écrit, dans un second temps et souvent à l'initiative du patient,<br />

peut-&tre Pindice d'un changement de position quant au savoir et au<br />

travail,<br />

Du cdte <strong>des</strong> sourds qui ont eqérimenté l'hospitalisation en c< intégatian<br />

» sauvage, c'est un isolement redouble oii l'impossibilit& de


communiquer induit soit <strong>des</strong> phénomènes persécutifs muftiples, soit<br />

une soumission dont le bénéfice attendu serait une sortie, mais qui<br />

laisse en souffrance la possibilité d'un abord psychothérapeutique.<br />

Ces premiers résultats laissent entrevok la nécessité d'une réflexion<br />

plus large incluant les pouvoirs publics pour initier un dé,veloppement<br />

<strong>des</strong> out& de soins au niveau de l'ensemble du syst2:me de<br />

santé mentale en France.<br />

Un certain nombre de besoins peuvent d'ores et d&jà être circonscrits<br />

:<br />

- L'ouverture d'un service (comme 2 en existe un en Andeterre)<br />

recevant enfants, adolescents et adultes, ayant un fonctionnement<br />

trans-sectoriel, travaillant en liaison avec la communauté <strong>des</strong> sourds,<br />

offrant <strong>des</strong> services sociaux pour la reinsertion sociale et professionnelle<br />

<strong>des</strong> patients, la possibrlité d'une alphabétisation, comprenant<br />

<strong>des</strong> consultations externes, une équipe


QUELQUES REMARQUES CLINIQUES<br />

De notre expérience clinique, nous pouvons affirmer que nous<br />

n'avons pas dépisté de catégorie psychopathologique spkiale propre<br />

au Sourd.<br />

Il n'y a pas de e personnalité du Sourd P. Il y a autant de personnalités<br />

de sourd qu'il y a de personnes sour<strong>des</strong>. Chacune se forgeant,<br />

comme pour tout être humain, dans une histoire familiale et une parenté<br />

diffkrente pour chacun.<br />

<strong>Les</strong> questions que se posent les sourds sont celles de tout être<br />

parlant, celle de la naissance, de la procréation, de la paternité, du<br />

sexe, de l'amour, de la mort.<br />

<strong>Les</strong> symptames dont se plaignent nos patients ne sont pas directement<br />

corrélés par une relation de cause à effet à la surdité ; ils sont<br />

produits par une structure psychique qui est sous la dépendance de<br />

déterminations symboliques s'inscrivant dans la structure familiale.<br />

La surdité y prend place comme une marque particulière. Elle'n'est<br />

plus à considérer uniquement dans ses effets de privation sensorielle,<br />

mais comme signifiant prenant <strong>des</strong> sens différents pour chaque sujet.<br />

Le diagnostic de surdité est porté pour un enfant déja inscrit<br />

comme tout humain dans l'ordre symbolique, dans l'ordre du langage<br />

: ses parents, ses grands-parents, sa famille, son pays, lui préexistent,<br />

ce qui semble une lapalissade venant là pour nous rappeler<br />

que c'est la parole qui s'acquière, pas le langage.<br />

Et les sourds aussi sont dans l'histoire, malgré toutes les tentatives<br />

pour les refouler avec leurs langues gestuelles. Depuis une dizaine<br />

d'années, en France, ils témoignent de leur désir de devenir à<br />

nouveau sujets de leur histoire.<br />

1989 commémore le bicentenaire d'un moment fondamental de<br />

cette histoire, ainsi que la Déclaration <strong>des</strong> Droits de l'Homme et du<br />

Citoyen. Nous espérons contribuer pour une part à cette renaissance.<br />

En refusant d'adopter une position de maîtres d'un Savoir sur ce<br />

que serait une psychopathologie <strong>des</strong> sourds, en refusant de les mettre<br />

comme objets d'observations de ce qui constituerait ce sayoir, il est


clair que ce que aaus voulons faire entendre, c'est leur position de<br />

sujets.<br />

Sujets pouvant trouver une adresse à leurs plaintes, à leurs<br />

symptlîrna :<br />

-adresse psychiatrique pour ce qui concerne les soins et les Lieux<br />

d'accueil hospitafiers ;<br />

- adresse psychanalytique pour que de leurs plaintes ils puissent<br />

chercher à en savoir plus long sur ce qui les cause.<br />

Leurs reves, leurs actes rnanqubs, leurs erreurs, lems méprisviennent<br />

temoiper d'un hconscient suxeptible de se d6chZfrer dans<br />

une pwchanalyse. Nous citerons la dtSfulition qu'en donne le Docteur<br />

3. Lacan dans les Ecnts, p. 259 : « L%conscient est ce chapitre de<br />

mon histoire qui est marque par un blanc au oecup4 par un mensonge<br />

: c'est le cehapitre censurb mais la v6ritt5 peut $tre retrouvee ; le<br />

plus souvent déjà elle est bcrite ailleurs »,<br />

Bien sûr, on peut choisir d'y rester sourd et cela, que Ibn soit<br />

entendant (avec une audition correcte) ou bien sourd (avec une audition<br />

dbficiente).<br />

EN CONCLUSION<br />

«Vous qui connaissez les sourds ! >><br />

Eh bien non, nous ne<br />

connaissons pas


-que <strong>des</strong> enfants sourds sont oubfi6s quand Ifs sont Int8grés<br />

« sauvagement » dans <strong>des</strong> classes, Avoir et& inttJgr& jusquyen terminale<br />

sans qu'ait ét6 possible la rencontre avec &autres sourds, outre<br />

les efforts que cela repr-ésente, laisse dans une soutude douIaureuse<br />

renforcee par un ddgoût <strong>des</strong> sourds. C'est la question de I'hposs%le<br />

demandé aux sourds dans l%t%sation exclusive de la Xanpe orde et<br />

de la lecture labiale où la metaphore de la cornpetition sportive de<br />

haut niveau semble pouvoir s'appliquer. Pour les sourds, on peut se<br />

demander où est le choix et sur quel podium 3s ddskent monter et<br />

remarquer que Peffondrement pycGque au bout du pareours est<br />

leur lot commun ;<br />

- que l'on rencontre encore br;aucoup d'enfants sourds h qui l'on<br />

a barre l"a& A la langue <strong>des</strong> signes. Combien de parents refusent<br />

les signes, combien sans les refuser à leur enfant ne veulent pas les<br />

utiliser, mais aussi combien les ut2isent en se faisant plus sourd que<br />

leur enfant ? Ces refus, nous en voyons les consisquences la constltation<br />

ch-z <strong>des</strong> adultes sourds mutrliss dans leur eqression tant orda<br />

que gestuelle,<br />

L'utriisation de la langue <strong>des</strong> signes n'aurait plus h etre demontrke<br />

aux parents si les spcscialistes médicawr et para-mediaux qu'Ifs<br />

rencontrent pour leur enfant sourd pouvaient l'associer spontanément<br />

& la parole,<br />

Son apprentissage est maktenant afficie~ement exigble <strong>des</strong> enseignants<br />

; nous pouvons donc esp6rer voir se lever les inhibitions gui<br />

continuent encore à en freiner rusage.<br />

De notre h langue <strong>des</strong> sijpes fait toujours partie de la rencontre<br />

avec ün sujet sourd, quelle que soit la place qu'elle prend,


DEUXIEME CHAPITRE<br />

Le langage parlé complété


QUfESIErCE QUE LE MGAGE PAmE COWLETE<br />

QU CUED SPEECH ?<br />

La technique du Langage Parlé Complét4, ou Cued Speech,<br />

constitue une réponse au problème majeur rencontré par les déficients<br />

auditgs : celui de la perception de la parole.<br />

On sait en effet que, à partir d'un certain degr4 de surditts, les<br />

informations auditives dont dispose une personne sourde sont d'une<br />

qualité insuffisante pour lui permettre une réception satisfaisante de<br />

la langue orale, et donc la compr4hençion de ce qui lui est dit, Le recours<br />

à la lecture sur les lèvres est dès lors indispensable.<br />

Or la lecture labiale - qu'il vaudrait mieux, d'aueuxiî, appeler<br />

« lecture bucco-faciale >>, car les autres mouvements faciam, eux du<br />

mmü1aire inférieur et de la lan~e, h visibilité <strong>des</strong> dents, participent<br />

au processus de reconnaissance de la parole - ne fournit que <strong>des</strong> inforn~atiuns<br />

hcamplktes ou ambigues du fait de l'existence <strong>des</strong> sosies<br />

labiaw. Ainsi, certains sons tels que cc p-b-nt w,


C'est pourquoi la lecture labiale est un exercice extraordinairement<br />

fatigant et imprécis ; c'est pourquoi aussi on ne peut compter<br />

sur eue pour permettre à l'enfant sourd d'acqukrir et de maîtriser la<br />

langue en raison de la faible quantith d'informations qu'elle apporte.<br />

Un certain nombre de techniques d'ai<strong>des</strong> à la lecture labiale ont<br />

donc été mises au point. Le principe de toutes ces techniques est de<br />

donner, par un signe code de la main, une infamation complémentaire<br />

permettant de différencier les sosies labiaux.<br />

Le Langage Parlé CompléttS ou Cued Speech est une de ces<br />

techniques, particulièrement htéressante parce qu'elle cherche uniquement<br />

à aider la lecture labiale sans la supplanter.<br />

HISTORIQUE ET DEFIWION DU CUED SPEECH<br />

Le docteur Orin Comett, physicien de formation et vice-président<br />

du Gallaudet College h Washington, eut l'idée du Cued Speech<br />

en 1965, après s'être rendu compte que l'accès <strong>des</strong> sourds à la lecture,<br />

qui devrait Ctre pour eux un moyen d'information privüégié,<br />

était rendu ardu par leur insuEisante maîtrise de la langue, au plan<br />

lexical et syntaxique.<br />

Pour permettre aux sourds de s'approprier la langue d'une ma-<br />

&re aussi proche que possible de ce& <strong>des</strong> entendants, if. lui est apparu<br />

qu'il fallait leur prop.oser un moyen efficace pour percevoir<br />

toute la chaîne parEe par la voie visuelle, de fa m2me façon que les<br />

entendants la perçoivent par la voie auditive. La lecture labiale ne<br />

donnant qu'une representation incomplète de la chaîne parlée, il a<br />

cherche h mettre au point un systbme complémentaire de la lecture<br />

labiale qui apporte les informations manquantes et dissipe par làmême<br />

les ambiguïtés de cette lecture labiale.<br />

Dans le Cued Speech, ces informations complémentaires sont<br />

apportees par la main, qui réalise en synchronisation avec la parole,


<strong>des</strong> signes codés ou dés (eues, en anglais), constitui5s par la position<br />

de la main, ou place, et la confipration <strong>des</strong> doigts, ou forme :<br />

- la place de la main par rapport au visage reprksente la voyeile :<br />

les voyelles qui apparaissent sunjlaves sur les Ibwes sont accompap6es<br />

par <strong>des</strong> positions dZf6mntw de la main. En frawais, cinq positions<br />

sont utilisées pour les voyelles : pommette, commissure <strong>des</strong><br />

lkwes, menton, gorge, c6tt5.<br />

%r ies voyeiles.<br />

E'ma)<br />

afrnaux)<br />

a?l~euf-ieufi<br />

et toute consonne<br />

sutvie d'un e muet<br />

came1 au isotk (?C<br />

Position menton.<br />

Position gorge<br />

Qi runt<br />

y 'tu'<br />

s (tW


-la confisration <strong>des</strong> doigts représente la consonne: les<br />

consonnes qui apparaissent similaires sur les lkvres sont accompagnées<br />

par <strong>des</strong> confiprations différentes <strong>des</strong> doigts. Huit configurations<br />

<strong>des</strong> doigts sont utilisées pour le français,<br />

voyelle non<br />

precédee d'une<br />

conconne<br />

(âge)<br />

- la combinaison fome-place (ou confipration-position) d'une<br />

cl4 correspond donc à une syllabe - bien que le terme de syllabe ne<br />

soit pas absolument satisfaisant, car, dans un certain nombre de cas,<br />

le codage ne se fait pas exactement selon une décomposition syllabique<br />

: dans un mot comme « foc » (monosyllabique), on codera fo-c,<br />

avec deux co<strong>des</strong> pour une syllabe. Pour simplifier, on parlera néanmoins<br />

d'un système syllabique.


La r&gle de base du Langage Par14 Complet6 est donc que tous<br />

les phonhmes simifaires sur les lhvres; sont ammpapbs d'une cl&<br />

=4rente, tandis que les phunilmes dsdrents sur les lèvres peuvent<br />

fltre eod4s avec <strong>des</strong> <strong>des</strong> identiques. Chacune <strong>des</strong> cinq poations eorrespond<br />

ahsi h dewr ou trois voyefles faciles à dgfbrencier sur les<br />

lilwes @as aemple la position


- L9Momation visuelle donnée par les lèvres doit faire partie<br />

btdmnte du système, et cela pour deux raisons :<br />

* La main est trop massive pour permettre de communiquer un<br />

message complet la vitesse normale de la parole. <strong>Les</strong> connaissances<br />

en physique du docteur Comett lui ont permis de calculer que la<br />

main pouvait produire la moitié de l'information du langage parlé et<br />

les 1Wes l'autre moitié.<br />

* Le systéme doit obliger l'enfant à Lire sur les l&vres et l'entraber<br />

2 devenir un bon lecteur labial afin de ne pas créer une dépendmm<br />

totale par rapport au code.<br />

- Le système doit être smamment simple : les parents doivent<br />

pouvoir l'apprendre en quelques semaines pour s'exprimer avec leur<br />

enfant et il doit pouvoir être appréhendé en réception par un trbs<br />

jeune enfant sourd (moins de deux ans, selon Cornett).<br />

- Par <strong>des</strong>sus tout, le système doit avoir pour rksultat une perception<br />

estdmement précise <strong>des</strong> phonèmes, la précision de la perception<br />

devant être équivalente B celle qu'obtiennent les entendants par<br />

l'audition seule.<br />

C'est en se fondant sur ces considérations que le docteur<br />

Cornett a conçu le Cued Speech.<br />

Il a été ainsi conduit à éliminer une approche qui lui avait Semblé<br />

logique a p M, & savoir une approche phonétique qui aurait<br />

consisté A « arranger » les phonèmes de manière à indiquer les propritrtés<br />

phonétiques <strong>des</strong> sons produits (occlusives voisés, o~lusives<br />

non voisés, fricatives non voisées, etc.). En effet, les tests effectués<br />

ont fait apparaître qu'il nxtait pas possible de rendre le systéme à la<br />

fois extrr?mement précis en réception et également phon6tique. C'est<br />

pourquoi l'agencement <strong>des</strong> co<strong>des</strong> en groupes de phonèmes ne correspond<br />

pas & <strong>des</strong> propriétés phonétiques ou acoustiques de la<br />

parole.<br />

En second lieu, le docteur Cornett a cherché à maximiser le<br />

contraste visuel entre les différents phonèmes.


U s'est 6gdement attach4 au probl&me de I'iiCcoaomie d94nergie<br />

en i< arrangeant B les conGprations <strong>des</strong> doigts d'apr&s la frequence<br />

<strong>des</strong> phonèmes qui leur sont associ6es. Par exemple, la wnfiguration<br />

5 (les cinq doigts de la maul prkenttss ettendus) est utilisée avec le<br />

groupe de phon&mes le plus fréquent, car c'est la fame 1% plus fade<br />

h faire puisqu'ege demande de ne plier aucun doigt. ERS autres<br />

forma sant choisies de maniare à ce que te poupe de plus faible<br />

frQquence corresponde à la forme la plus difPfic1e à fa%e. Ceci afin de<br />

pas trop fatiguer le locuteur utilisant le Cued Speech.,<br />

Deux autres él4ments ont été pris en compte par le docteur<br />

Comett pour concevoir le Ched Speech : d'une part, il a fait en sorte<br />

de permettre de représenter toutes les distinctions fines faites par les<br />

locuteurs d'une même langue (dIff6rences de pronondation de<br />

voyelles, par exemple), sans dkider lui-m&me quelles étaient les disthctions<br />

ut* ou inutiïes ; d'autre part, if a voulu que le syst&me mit<br />

compatible'entre plusieurs knmes, m&me si cette compatibüit6 2'8<br />

amen4 à sacrifier d'autres critères de earrception. De fait, actuegement,<br />

le Cued Speech a été adapt4 B une quarantaine de langues -<br />

ce qui permet d'envisager l'apprentissage <strong>des</strong> langues étrangères par<br />

les enfants sourds.<br />

A QUI LE LANGAGE PARLE CbMPmTE EST-IL, DES'ltTNlk: ?<br />

On aura compris que le Lanpge Par16 Ccrmpl4t4 est <strong>des</strong>the en<br />

premier rîeu B être exécutts par le locuteur entendant afin de rendre<br />

sa parole hteES;ble pour son interlocuteur sourd.<br />

Le degr& de surdité ne constitue pas un critère dtstermhant.<br />

Certes, le LPC sera moins indispensable B un sourd sévkre qu'à un<br />

sourd profond. Mais dans tous les cas où le recours h la lecture labiale,<br />

partielle ou totale, est n4cessafre, l'aide apportee au sourd par<br />

le se rtsvèle prkieuse du fait que, toutes les amb!gultCs &tant<br />

supprhcstis, Partention peut etre plus diffuse et la fatise moindre.


WC et enfants sourds<br />

Tout ce qui prkède montre clairement que le docteur Cornett,<br />

en concevmt le Cued Speeeh, voulait avant tout minimiser le problkme<br />

de la cornunication initiale entre les enfants sourds profonds<br />

et leurs parents (sachant que 96 % <strong>des</strong> enfants sourds profonds ont<br />

<strong>des</strong> parents entendants).<br />

Aussi, quand on lui demande qui, parmi les interlocuteurs de<br />

l'enfant sourd, doit utiliser le Langage Parlté Complétlê, sa réponse<br />

est trks nette :<br />

- s'il faut choisir entre une utitisation par les parents ou une utitisation<br />

par les professionnels, c'est I'utllisation par les parents qui est<br />

la plus hportante ;<br />

- mais, si les parents ne codent pas, l9ut&ation du Langage Parlé<br />

Comp16t6 par les professionnels (orthophonistes et enseipants)<br />

apportera toujours quelque chose à l'enfant, même si les résultats<br />

risquent d'être moins rapidement visibles.<br />

En d'autres termes, il vaut mieux <strong>des</strong> parents qui codent et <strong>des</strong><br />

professionnek qui ne codent pas que l'inverse ; mais il vaut mieux, si<br />

les parents ne codent pas, <strong>des</strong> professionnels utilisant le Langage<br />

Parle Compi6tB plutôt que pas de Langage Parlé Complété du tout.<br />

La situation idéale est évidemment cefie oir tous les interlocuteurs<br />

de l'enfant sourd codent ; ceci a &té clairement mis en. évidence<br />

dans les recherches menées par lqquipe du Centre Comprendre et<br />

Parler de Bruxelles (Catherine Hage et Brigitte Charlier), en collaboration<br />

avec le Laboratoire de Psychologie Evérkentale de l'Université<br />

Libre de Bruxelles : un <strong>des</strong> aspects de ces recherches a<br />

consisté à objectiver l'amélioration <strong>des</strong> performance,^ perceptives de<br />

l'enfant sourd placé dans la condition de lecture labiale complétée<br />

par rapport à la condition lecture labiale seule,<br />

Cinquante-cinq enfants ont étté soumis une épreuve dite<br />

« épreuve de réception » consistant il leur présenter une phrase, soit<br />

en parole uniquement (lecture labiale), soit en parole complétée par<br />

le Langage Parlé Complété (lecture labiale + LPC), Devant l'enfant<br />

se trouve une carte contenant quatre images. L'enfant doit recon-


naître l'image correspondant i% la phrase « entendue ». <strong>Les</strong> items ont<br />

été groupés par groupes de quatre images qui reprêsentent <strong>des</strong><br />

phrases :<br />

faciles à distheer entre eftes ;<br />

- de dZficult6 moyenne à dGtinguer entre elles ;<br />

- dBic3es à distkwer entre elles '.<br />

LRS &quante


Si on cansidbre la condition dif£iclle, on voit que les pourcentages<br />

sont encore beaucoup plus hteressants parce que, dans cette<br />

situation mEc$e, les pourcentages de départ sont faibles, tandis que<br />

dans les conditions faciles, les résultats sont déjà hportaats au<br />

départ.<br />

Considhant h condition difficile, on observe :<br />

- pour le groupe E, une am6lioration de 16,08 % ;<br />

- gour le groupe N, une amélioration de 22 % (on passe de 44 96 à<br />

66 96 de raonnaissance) ;<br />

-pour le goupe M + E, une amé1Xoriftion de 42 % (on passe de<br />

27 % It 69 9%).<br />

Ces r&sdt&ts confment que fktifisafiun du LPC B fa niahon et<br />

en sitrratiun scolaire semble bien constituer me situation optimale.<br />

Si le hngage Parle Complété a été conçu principalement pour<br />

être utüXsd par <strong>des</strong> parents avec leur enfant sourd, rien n'empêche,<br />

bien entendu, l'hterlwuteur d'un adulte déficient auditif de recourir<br />

à cette twhdque ; et le docteur Cornett a coutume de dire qu'il ne<br />

lui faut, que: quelques minutes pour expliquer aux sourds adultes<br />

wment le LPC peut résoudre le probl&me de la lecture labiale auquel<br />

3s sont codrontés en permanence. Mais, contrairement à ce qui<br />

se passe avec de jeunes enfants, qui se l'approprient par imprtr,<br />

gaation progriessive et globale, le L;PC doit faire dans ce cas l'objet<br />

d'une présentation raisonnée et d'un apprentissage systématique du<br />

dkodage, it partir de l'expérience qu'a le sourd adulte de sosies<br />

labiaux.<br />

LPC entre semds<br />

Enfin, et le daeteur Cornett I'avait pressenti, I'exp&ience a montre<br />

que <strong>des</strong> déficients audit& ayant bénéficib précocemnent du LPC<br />

pouvaient i"ut%ser cornme moyen de communication entre eux* <strong>Les</strong>


premiers enfants sourds élevés avec le LPC en France, actuellement<br />

âges de 10 à 15 ans, en tbmoignent, Il s'agit là bien entendu d'enfants<br />

ayant aceéde ii l'oralisme et dont l'articulation est suffisamment précise<br />

pour produire <strong>des</strong> images labiales fiables.<br />

QUE PEXJT-ON AmENDE DE L'WILISATION DU LANGAGE<br />

PARLE COMPLETE ?<br />

LPC et lecture iabialte<br />

La plupart <strong>des</strong> auteurs, se fondant sur le fait que la perception<br />

de la parole complétée par le LPC est inséparable de la lecture labiale,<br />

affirment que l'utilisation du Langage Parlé Complété produit<br />

de bons labi'o-lecteurs.<br />

Il semble, en particulier à la lumière <strong>des</strong> résultats <strong>des</strong> travaux,<br />

évoques plus haut, de Charlier et Hage sur les performances perceptives<br />

de l'enfant sourd avec et sans LPC, que l'on ne puisse se<br />

contenter de cette affirmation, et que la question de l'amélioration<br />

de la lecture labiale grâce au LPC mériterait une étude spkifique<br />

qui n'a, jusqu"ici, pas encore été entreprise.<br />

<strong>Les</strong> rksultats de cette recherche doivent, semble-t-if, conduire à<br />

s'interroger sur les capacités en labio-lecture acquise par les enfants<br />

béneficiant du Langage Parlé Complété. En effet, ils tendraient h<br />

montrer que les enfants du groupe « LPC-maison » (44 9% de reconnaissance<br />

en lecture labiale seule) seraient de meilleurs lecteurs<br />

labiaux que les enfants du groupe « LPC-maison + école fe» (27 % de<br />

reconnaissance en lecture labiale seule).<br />

Ceci doit-2 amener formuler l'hypothèse que les enfants qui rie<br />

reçoivent le LPC qu'à la maison, et qui se trouvent donc plus souvent<br />

en situation de recours à la lecture labiale seule par rapport aux enfants<br />

du groupe « maison + école », entraînent davantage leurs capacités<br />

de labio-lecture ?


Il ne s'agit pour l'instant que d'une intenogation, mais il<br />

convient sans aucun doute de rtlfiéchir, lorsqu'on utilise le Langage<br />

Parle CampltSté, 3 la mise en oeuvre, en parallale et selon les enfants,<br />

d'une stratégie d'amélioration de la lecture labiale lorsque cela para'lt<br />

n&ess&e.<br />

Réct?ptiorr de fa paroie et pmductian de ia parole<br />

Il faut bien comprendre que le Langage Parlé Complété est uniquement<br />

une technique d'aide B la réception de ta langue paride.<br />

Il ne s'agit pas d'une aide h la production de la parole, à la différence<br />

de la méthode verbo-tonale ou de la méthode Borel-Maisonny,<br />

Ceci est &portant à préciser, d'une part pour &ter les confusions et<br />

ne pas demander au Langage Parlé Complt5té de faire ce pour quoi il<br />

n'est pas fait - le LPC est un outil bien spéczique -, d'autre part<br />

pour pouvoir mesurer quelles peuvent être les complémentarités du<br />

Langage Parlé Complété avec d'autres outils.<br />

Cela étant, on constate que le TJC peut être utiliscÇ secondairement<br />

avec profit par l'entendant pour rectifier une erreur articulatoire<br />

de l'enfant sourd qui lui parle, ou par l'enfant sourd lui-même<br />

comme moyen d'&vacation et d'accompagnement du mouvement articdatoire.<br />

Il peut donc avoir certains effets sur le terrain de ia production<br />

de la parole* ce qui nuance ce qui a été dit plus haut,<br />

On a souligné que le Langage Parlé Complété n'étai qu'un outil<br />

au service de la réception du langage parlé. Or « réception u ne veut<br />

pas dire


Lknfant sourd, comme l'enfant entendant, découvrira la sipification<br />

d'un mot nouveau grâce au contexte et à 18 r&p&titi.on. Mais<br />

sans doute est-il nécess~e, pour que la compréhension du langage<br />

donne à un enfant sourd avec I'aidde du LPC s7hstalle, de mettre en<br />

oeuvre une strategie spkcifique et trhs certainement renforeh par<br />

rapport h ceIfe que mettent en oeuvre spontan4ment et quasi-hconseiemment<br />

les parents d'enfants entendants,<br />

Cela sigrSe qu'on ne peut se passer, forsquY.on empXoie le bngage<br />

Par16 Complété avec un petit enfant sourd, de I'utifisation <strong>des</strong><br />

gestes eqress&, <strong>des</strong> mhiques, du recours h I'hae ou h la d&i&nation<br />

afin que, dans sa tête, et comme cela se passe chez Penfant entendmt<br />

avec les formes sonores, le lien se fasse entre la forme<br />

visuelle qui lui est donnée par les 1Ècvres et le code, et l'objet, le<br />

concept, la notion évoqués,<br />

C'est là un précepte de base, dont la m4connaissance peut etre à<br />

l'origine de bien <strong>des</strong> échecs.<br />

WC et acquisition <strong>des</strong> stmctures de fa tangue par l'enfant sourd<br />

Le LPC se revhle pârPicuEGrement performant en ce qui<br />

concerne Pacquisition par l'enfant sourd <strong>des</strong> structures de Xa langue<br />

seion un processus quasi semblable à celui qui est mis en oeuwe par<br />

l'enfant entendant.<br />

En effet, le codage de toute la cfiahe parlée donne & lknfant<br />

sourd une representatiun visuelle <strong>des</strong> aract4ristiques phonologiques,<br />

gammatic<strong>des</strong> et qntaxiques de la fangixe : grâce au WC, 2 voit les<br />

marques du pluriel, les d4sinences <strong>des</strong> formes verb<strong>des</strong>.,, Ceci lui<br />

permet de faire <strong>des</strong> hypothèses sur le fonctionnement de fa langue,<br />

comme le ddénotent les


POUR CONCLW<br />

Le Langage Parlé Compléte, il faut y insister, est un outil specifique,<br />

U. ne constitue pas une solution miracle, non plus que l'outil<br />

unique pour Z'éducration de l'enfant sourd.<br />

Sur les terrains qui ne sant pas les siens, essentieuement celui de<br />

la production de la parole et de l'utilisation <strong>des</strong> restes auditzs,<br />

d'autres techniques ou métho<strong>des</strong>, comme la méthode verh-tonale,<br />

peuvent et doivent être utilisées,<br />

Le LPC est aussi un outil dont lktüisation doit s'inscrire dans<br />

une stratégie de communication avec l'enfant sourd.<br />

Ahsi, if faut non seulement veiller à ce que la réception de la<br />

langue soit accompagnée de la comiprékiensiiox, mais aussi h ce que le<br />

lmgap défin-6 à l'enfant sourd soit suffisamment riche en quantith<br />

et en qmJit4 ; il est evident que l'outil de transmission ne peut remplacer<br />

la matière transmettre : si le message est pauvre, il restera<br />

pauvre même avec le LPC.<br />

Mais si le mode d'emploi a 6th bien donne et bien compris, si<br />

l'outil est mis au service d'une rc5elle volonté de communication avec<br />

t'enfant sourd, alors t'utilisation du LPC produit <strong>des</strong> effets qui vont<br />

bien au-del& de son caractbe shplement hstrumental. Disposant<br />

d'un out3 efficace, les parents se sentent restaures dans leur rôle de<br />

parents, reprennent confiance dans leurs comp6tences et celles de<br />

leur enfant. Lf6If:vation du niveau d'ambition et d'exigences qui s'ensuit<br />

entrabe un enrichissement progressif <strong>des</strong> &hanges verbaux, Des<br />

lors, plus qu'un outil, le LPC devient un moteur de progrès dans le<br />

chmbement de l'enfant sourd vers l'acquisition de la langue.


- AsHe J.L. (19801, Quelques aspects de l'apport du Cued Speech<br />

dans fa rehabilitation de l'enfant handicapé auditif. Bc622.Adophonul,<br />

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- LUISON L.P. C., Numéros 1 h 3 1, Paris* ALPC, 21-23, me <strong>des</strong><br />

Quatre Frhres Peignot, 75015 Paris.


TROISIEME CWITRE<br />

Aspect médical<br />

et audioprothétique


EVALUATXON DU MDICAP,<br />

CNTIQUE DES BAREMES A_CTUELS<br />

ET PmCIPES D'ACTUALISATION<br />

Dléja, au début du xxe siècle, Jean*Marc Étard cherchait h &aluer<br />

l'effet du handicap surdité en vue d'evlaiter pedapgiquement<br />

les aptitu<strong>des</strong> de l'enfant sourd. Dans les decennies qui ont suivi, les<br />

medechs ont eu le souci dPapprf3cter le niveau de la surdit6 et sa locdisation<br />

distinwant la surdititi: de transmission et la surdit6 de perception,<br />

à l'aide de diapasons, cor<strong>des</strong> vibrantes et autres hstruments<br />

acoustiques, ainsi que par l'écoute de la voix haute et de h .vaUr chuchotée.<br />

Depuis quarante ans, on évalue la capacit6 de perception en<br />

audiornBtrie tonde et vocale en chambre sourde. Ptrraflèlement, les<br />

mseipants d'enfants sourds ont cherché à esther f"acquis de langage<br />

et de parole pour ajuster les mtStho<strong>des</strong> p6dagogi~es afin d%-<br />

tekdire <strong>des</strong> niveaux daires et de cornmunicatian orale acceptables,<br />

De mbme, Xes orthophonistes, singuE&rement Suzanne Borel<br />

Maisonny* et les phoniatres se sont attachés B evaluer de fason aussi<br />

objective que possible les aptitu<strong>des</strong> il l'apprentissage verbai et les acquis<br />

de parole et de langage. Pour t'enfant sourd, une commission du<br />

Bureau International d'Atrdiophonulpgie a travaiE4 pendant dix ans<br />

sur la possibilitk de rendre objective cette anaiyse de capacitbs fonctiorineEes,<br />

de l'acquis de langage et de parole, du nitreau scolaire.<br />

Aussi disposons-nous d'un ensemble de techniques et de tests<br />

pour arriver au but de découvrk quelles sont les passibaith de I'en-<br />

* Professeur (I'ORL et de Phoniatrie, Faculté de Mddecine et de Pharntacie de Wsanpn.


fant et de mesurer ses capacités actueiles. U. se trouve que l'administration<br />

a également besoin d'avoir une evaluation chiffr6e de ces<br />

deux aspects. Cette évatuation aboutissant un pourcentage est naturekment<br />

relative, comme tout classement,<br />

ri y a toujours un grand laps de temps entre ce qui est possible et<br />

ce qui est admis. Ainsi, les audiomGtsies vocales (test d'hteEgib3ité<br />

et test phontstique), edstant respectivement depuis 1948 et 1958, ne<br />

sont pas eneore prises en compte faute d'titre consid6rees wmme<br />

« normafisees B. Cefa tient ii ce que tuus les prafessionnels et l'administration<br />

doivent adhgrer à ces propositions.<br />

fl existe actueflemerit pour la surdit6 plusieurs barhmes en fonction<br />

<strong>des</strong> types de surdité et <strong>des</strong> administrations, Ces barèmes à<br />

double entrde ont encore me 4cheIie en voix haute et en voix chuchotée,<br />

abandonnée depuis trente ans dans le diapostic audiologique,<br />

Le plus avantageux, celui <strong>des</strong> pensions militaires, est, utilisé<br />

rédementairement par les CDES et les COTOWP pour la surdité<br />

venant du premier âge, du fait de l'incidence de la surdit6 sur le d6-<br />

veloppement du langage. <strong>Les</strong> essais d'actualisation ont plac6 en plus<br />

une &chelle de moyenne en dB par rapport à 190re"te normale, Pour<br />

fa surdité professionnene, une moyenne arbitrake, non justa6e par<br />

la valeur hformatiomelte <strong>des</strong> octaves, sert de décision, mais <strong>des</strong><br />

barbmes avec d'autres valeurs servent a prkiser le pourcentage d'incapacité<br />

qui, &alement, est fixé arbitrairement par les services<br />

administratifs de la Sécurit6 Sociale, Parfois d'aaeurs, ce qui est recoxnrnmdb<br />

sous forme de barkmes laisse à d4sirer dms son a~zplicatien,<br />

les membres <strong>des</strong> commissions responsables, trop souvent<br />

incomp6tents, sbnogent cependaa l'autorité de ne pas les appXiquer<br />

et dkttribuer les incapacitbs au gré de leur humeur,<br />

Effectivenent, ce moyen de chiffrer une perte sociafe ou professionnefle<br />

est arbitraire et sujet & critiques pour ses uriperfections,<br />

efle ne tient pas compte de la rkdaptation ni <strong>des</strong> pussibaités rtkflies<br />

de cornmunicatiun verbale.<br />

II faudrait au moins prendre en compte, tant pour Pentant que<br />

lkdulte, les capacités de compréhension de la parole. Cette démarche<br />

avait étE: faite aux USA après la guerre 39-45 pour indemni-


ser les victimes de guerre en mesurant la capacité vocale avec <strong>des</strong><br />

mots monosyllabiques, cette capacité défhissant l'inv&dité. En<br />

France, cette proposition est faite régulièrement aux pouvoirs publics<br />

qui craignent que cette modification du principe même de l'estimation<br />

de la gêne ne vienne aumenter le fhmcement nécessaire, <strong>Les</strong><br />

professionnels ayant par ailleurs plusieurs mo<strong>des</strong> différents dyestima-<br />

$ion, le projet est repoussé à <strong>des</strong> dates ultt4rieures. On aurait pu faire<br />

<strong>des</strong> ajustements en fonction de la vocale mais le problème en fait<br />

reste identique. Persuadés cependant de la nécessit6 de connaftre la<br />

perception verbale, les conseillers en vue de la réglementation sur la<br />

surdité professionnelie ont fait rendre obligatoire l'audiométrie vocale,,,<br />

dont le mode d'utilisation n'est pas précisé !<br />

Un groupe de travail du rnirtistère <strong>des</strong> affaires <strong>sociales</strong> s'était<br />

peneh6 il y a quelques années sur ce probfème. fl est hcontestable<br />

que, si pour l'adulte une grille tonde est applicable malgr& les réserves<br />

que l'on peut y mettre, pour i'enfant, il n'est pas possible de ne<br />

pas tenir compte du langage verbal et de la parole lorsqu'on envisage<br />

d'estimer une incapacité venant d'une surdité. Nous utitîserons ces<br />

travaux et les critiques judicieuses apportees par l'administration. Le<br />

projet est resté sans suite du fait de l'incertitude de son incidence financière<br />

qui aurait cependant pu &tre assez facilement estimée par<br />

<strong>des</strong> sondages,<br />

Il serait important d'arriver à un système qui puisse être généralisé<br />

à l'enfant comme à l'adulte, plus juste sans pour autant modifier<br />

l'enveloppe financière tout au mohs pour les affaires <strong>sociales</strong>. Il est<br />

certain que son appfication peut modifier celle de la surdit6 professionnelle<br />

sous-estimee par quelques services concernes de Ia S&urité<br />

sociale. Avec la réserve également que le refus d'invalidité pour la<br />

surdite profonde de certaines COTOEP peut changer localement<br />

l'enveloppe financière si on leur demande d'appiiquer les barèmes<br />

actuel ou futur.


LES PQEVFS EN DfSCUSSION<br />

<strong>Les</strong> barkmes ne tiement campte que de la perte aaudi~ven dB,<br />

or, s'il y a une ço~ISlation entre ces pertes et h @ne sociale et prafwsiomeBe*<br />

si Sa reparation d'un dommage doit en tenir compte,<br />

cepndant le domaule le plus hportant, celui de la capacité de<br />

communication n'est pas pris en. considération, pas plus que chez<br />

Pedant les difEcuft6s hduites par Pkteagibilite de la parole eq&<br />

mec, par ie $veau du dévelupppesmenrt du lang&ge et par la cornprkhensian<br />

de la parole peque,<br />

Pour l'enfant, ces donnees dvoIuent avec II"$@, une esthation<br />

doit donc etre r&@&rement ajustee sans pour autant entraber us<br />

<strong>des</strong>Sr de fa part <strong>des</strong> parents de rnahte~k f'edant dans son hv&dit6.<br />

fl. semble que les dbials de cinq anxlrSes soient raisonnablm. Us correspondent<br />

au premier 2ge et & fa periade prdscolake, & Sa pdriode<br />

scolaira, b 1"âp du colI&ge enfin b la p6riode de l'orientation professionnelle,<br />

&p auquel on peut considérer que le sourd ne progressera<br />

plus, L'acquisition de la lecture labiale se fait entre un an et dix ans,<br />

la mpacitc?! de communication est arriviv6e à un palier h l'adolescence*<br />

elle ne s%m@ore pkre ensuite,<br />

On a beaucoup dscutts de la prothèse auditive* certahs ewerts<br />

demandent la courbe audiometrique du sujet apparege et cùnsidb<br />

rent que cette vaieur de perte en dB correspond h h capacit6 de<br />

communication d'une oreille qui pr&enterGt ce seuil, soit, pur une<br />

surdit6 sevére, celle d'une surdit6 1egÈ:re ou moyenne, Ils comparent<br />

volontiefs cette reparâtion à cek que donnent Ses lunettes, Il n'y a<br />

gpl&re de rapport. <strong>Les</strong> lunettes corrigent le trajet <strong>des</strong> rayons lulnkeux<br />

pour les adapter au milieu opgque de f"oeü. La prothese auditive<br />

ampme les sons mais leur recrrnnaissance est Eke aiix distorsions de<br />

J-"oreae iriterne et à ses capadtes -s&idueUes que k prothèse ne madifie<br />

gzl&re. ff serait donc pius logque de comparer avec les amblyopies<br />

et les ekit6s. NatatureflGment* b prothèse auditive rend plus âis&<br />

une eommunica~on or& de Eaczte P&ducation, f'aqvisition de fa<br />

leture latride, de fa paroie et du langage : c'est sur ces effets que<br />

doit 6tre jugk fe abonus » apporté par fa proth6se. Le braille peut<br />

être cornplird h la langue <strong>des</strong> signes? mais la communication tenant


sous sa dépendance le langage fonction essentielle de la personn&té<br />

et <strong>des</strong> capacittss d'abstraction la surdit6 a <strong>des</strong> incidences hucaup<br />

plus profon<strong>des</strong>, bien qu'h~sibles, que la cécité, celle-ci permet une<br />

communication socide verbale peu modifiee.<br />

<strong>Les</strong> seuils du contrôle audioprothétique dependent de la puissance<br />

régI6e par le potentiomètre, ce qui permet en l'augmentant de<br />

ramener presque tontes les courbes à moins de 50 dB de perte, b<br />

plus souvent à 30 dB, niveau admis corne optimal pour les surdite<br />

moyennes et certaines surdit& siÈv&res,<br />

On peut obtenir n'hporte quelle courbe suivant les r4giages. Ce<br />

niveau n'indique pas la rkhabilitation du sourd. On pourrait bien sûr<br />

utiliser une mesure vocale de l'oreille appareillée plus proche de h<br />

qualit4 de la correction auditive qu'un seuil d'audition, avec <strong>des</strong> réserves<br />

important= du fait <strong>des</strong> capacites en lecture labiale et de la<br />

compensation linguistique. 2 faut un test oh la marge d'erreur puisse<br />

Otre estim6e et où la relation avec la capacité de cornmunicatian<br />

puisse être calculee comme I'a fait en 1929 Fletcher pour la qualit6<br />

<strong>des</strong> t6léphones. Cette option suppose une étude expérimentale bien<br />

construite et bien critiquée sur le plan scientifique, car il est certain<br />

que d'avoir un certain coefficient d7hteEgib8ité appareîllb ne correspond<br />

pas à cette même htelligibrtité à oreille normale.<br />

Le plus simple est de proposer un barème pour <strong>des</strong> oreilles appareillabres<br />

comme l'a fait le I4gisiateur pour le barème <strong>des</strong> pensions<br />

rniütaires, La. grille comprend pour les pertes au-delà de 50 dB deux<br />

valeurs : l'une pour les surdites non appareaables, Ikutre pour celles<br />

qui peuvent être réadaptées par <strong>des</strong> prothl?ses auditives.<br />

IEI est plus simple de considérer que les surdittss sont n&cessa$ement<br />

appareillablesf donc que le bar&me ne amporte que <strong>des</strong> valeurs<br />

carrespondantes : Le barème doit concerner Ies sourds appareillables<br />

dont la perte audioIogique est mesurGe en dB sans<br />

prothèse, au casque.<br />

Certaines surdités ne sont pas appareillables pour <strong>des</strong> raisons<br />

diverses, On peut estimer que ces surdités doivent voir leur perte tonale<br />

augmentée arbitrairement de 10 dB, ou encore comme le fait le<br />

bareme <strong>des</strong> pensions militaires, on augmente de 5 9% l'iincapacit$


Cette dernibre façon de faire est moins avantageuse, or cette disposition<br />

s'appiique essentiellement à de rares surdités sév8res avec atteintes<br />

centrales (agnosies), le 10 dB de plus paraît le mieux adapte,<br />

il mmepondrait B 10 % d'incapacith de plus sans dépasser 80 5%.<br />

Pour les surdit& profun<strong>des</strong>, cette proposition n'en modifie pas le<br />

taux b'in~pacité.<br />

De merne, les troubles appoH4s par une d ttl unitatemte sont<br />

dkutés. Chez l'enfant, ce diagnostic n'est fait que lors de contrbles<br />

ystématiques scolaires ou lors d'une dkouverte fortuite <strong>des</strong> parents.<br />

Elle ne modifie pas la parole et le Iangage, mais entrabe une &ne<br />

dans fa 10cafEsatiun <strong>des</strong> sons et surtout dans l'hteG$bilité dans le<br />

bruit. Son invalidité est plus &portante chez l'adulte devenu sourd<br />

qui doit se rbhabituer A un nouveau mode de perception De même<br />

d'ailleurs la surdité acquise bilatérale sévhre ou profonde entraîne<br />

une déstabilisation sociale et professionnelle trop peu souvent prise<br />

en compte. Elle est socialement plus invalidante qu'une surdité<br />

cangdnitale avec laquelle le langage s'est développt-: et les habitu<strong>des</strong><br />

<strong>sociales</strong> se sont construites. Un barème acoustique pour l'enfant est<br />

applicable A l'adulte pourvu que l'on estime indépendamment les capacités<br />

de parole et de langage,<br />

Le niveau de paroie et de Iangage, contrairement à fa mesure du<br />

seuil tonal, n'est pas normalisé, il dépend donc d'appréciations subjectives<br />

et de l'utilisation de tests dont la multiplicité indique bien le<br />

caractere partiel et souvent peu precis. On ne peut donc indiquer sur<br />

quels examens ou &preuves doivent se baser les experts qui ont 2 en<br />

juger. Par contre, il est possible de définir <strong>des</strong> symptômes facilement<br />

identziables, chaque praticien disposant <strong>des</strong> moyens pour les mettre<br />

en évidence et les dkrire,<br />

Nous devons consid6rer deux démarches :<br />

- celle qui &ablit par <strong>des</strong> bilans un état et un pronostic éducatif pour<br />

I'orientation et les moyens éducatifs mettre en oeuvre, elle apprB<br />

cie 1"ulfluence; de fa ptldagogie, <strong>des</strong> techniques et <strong>des</strong> qppareaages.<br />

On ne saurait indiquer une orientation sans un dossier complet ;<br />

- celle qui permet à une instance administrative de constater un niveau<br />

de handicap et d'acquis en vue d'apprécier une incapacité es-


thde suivant les aspects observes de la parole et du langage, pour<br />

laquelle un barème est propos6,<br />

En fait* LI est uidispensable d'utiliser les bilans pour la première<br />

dkmarrche, 2s ne sont pas inutiles dans la de&&me,<br />

On peut les résumer dans Ir: tableau suivant :<br />

F u<br />

Unm E m m<br />

-IRES<br />

CLINQUE Etiologie données ciiniques Psychlatrje<br />

date d'apparition Neurologie mographie<br />

Statut otofogique<br />

E.E.G.<br />

Awlo~Wl~ Auüiograrnme tonal Audiojogie Mque Xmp4dencem4tfie<br />

Vocale phonétique Tests acoustiques Rf:Beixe stap6dien<br />

Audioprothèse Lecture labiale P+EA<br />

P ~ C H Q ~ E Bilan psycho adaptl: Psyehornotricitts<br />

(iige, niveau de<br />

~w%@<br />

Etat mental<br />

Comportement<br />

LANGAGE Compréhension & Syntaxe Niveau en langue<br />

expression orales v0tgüulaS.e acquis <strong>des</strong> signes<br />

CO~~PITION Mode de Prosodie Capacite qf‘esske<br />

ETPA~O~E comunicâtion RVthme en wed speech<br />

Articulation fntonation ou en langue <strong>des</strong><br />

signes<br />

Vm Hauteur Timbre Mblodie<br />

EDUCAQF Mode d'éducation Progression scolaire Bila scolaire<br />

Guidance parentale<br />

Tpe de scolarit6


Le barème parole et le langage n'intervient que pour les surdités<br />

sévères et profon<strong>des</strong>. Sinon, il y a certainement un autre handicap ou<br />

une éducation très indigente.<br />

Lsr communication en iangue <strong>des</strong> signes n'est pas mentionnée.<br />

EUe constitue un désavantage dans un milieu oraliste justifiant éventuellement<br />

la présence d'un interprète. Le barème à ajouter correspond<br />

au taux de 20 %. Elle concerne essentiellement les surdités<br />

profon<strong>des</strong> souvent inappareillables, Le taux est de 100 % pour les<br />

pensions miritaites.<br />

<strong>Les</strong> surdités de transmission ne dépassent pas 60 dB. Si on leur<br />

applique une incapacité, elle ne dépasse pas 30 %. A notre avis, elle<br />

ne pourrait être appliquée qu'en cas d'hpossibitité d'appareillage<br />

(suppuration, cavité large d'évidement). Le tableau proposé<br />

concerne en principe les surdités de perception ou mixtes.<br />

Avant 3 ans, la surdit6 unilatérale n'est pas dépistée, mais elie ne<br />

g&ne gu&re l'acquisition du langage. Il arrive trop souvent que <strong>des</strong><br />

surdités profon<strong>des</strong> bilatérales de cet &ge ne soient pas diagnostiquées.<br />

<strong>Les</strong> surdité professionnelles ont peut-être une meilleure inteLli-<br />

GbZté a perte tonale identique, mais le champ auditif à 4 000 Hz est<br />

le plus touché, utiie ii Pinteuigibilité, cette octave intervient peu dans<br />

le calcul du taux d'invalidité, domant à ces surdités une certaines<br />

dépréciation. Il serait juste, pour ces surdités, que l'invalidité soit calcul6e<br />

sur la moyenne 500, 1 000,2 000 et 4 000 HZ, sans pondrltration.


PROPOSITION<br />

TAUX D'INCMACITE APPLICABLES A UNE PERSONNE<br />

DEFICIENTE AUDITIVE<br />

Pour dt4termher le taux d'incapacité d'une personne d6Eciente<br />

auditive, on doit tenir compte non sedement de la perte auditive tonale,<br />

mais aussi <strong>des</strong> répercussions de cette surdité sur le langage et<br />

sur fa quafit6 de 13eqression orale. Il est donc nécessaire d'établir<br />

deux notations cump~émentakes pour ces deux domaines acoustiques<br />

et bguistiques, qui ne peuvent Ctre confondus dans un bar2me<br />

unique.<br />

L9appareillage par prothèse auditive modifie la perception <strong>des</strong><br />

sons. L'effet de lYappareiUage se retrouve dans la qualit6 de l'expression<br />

estim6e dans le barème de niveau de parole et de langage, il<br />

n'est pas & prendre en compte dans le barème acoustique.<br />

Le niveau relatif <strong>des</strong> deux oreilles est important dans la réception<br />

<strong>des</strong> signaux. Son appréciation se trouve dans la double entrlire du<br />

barème acoustique.<br />

2. Barbe du niveau acoustique d'audition<br />

Le calcul de la perte moyenne s'effectue à partir de la perte en<br />

déciBels pour les fréquences de 500 Hz, 1 000 Hz, 2 000 Hz, mesurées<br />

en audiometrie tonde au casque.<br />

Le tabieau d9incapa&t6 suivant indique le pourcentage d'incapacite<br />

en fowtion de la perte moyenne en dB de chaque oreifte<br />

(tableau 3).<br />

Lorsque la surdité n'est pas appareaable, le niveau de perte tonale<br />

est augment6 de 10 dB pour chaque oreille concernée.


TABLEAU 2<br />

PLUS MAWAISE OREILLE<br />

profonde/profonde 80 %<br />

s&vère/profonde 70 à 80 oreille ùrqpareaable + 10 dB<br />

sévère / sévère 60 h 70<br />

moyenne / sévère 40 à 60<br />

moyenne/moyenne 20 a 45<br />

3, Barème du niveau de paroIe et de langage<br />

Si les valeurs chiffrées en dB facilitent considérablement f'appr6-<br />

ciation quantitative de la perte d'audition, dans ce barbme, c'est la<br />

qualite de la parole et du langage.<br />

Le taux &incapacité qui r6sulfe de YappEmtion de ce barème de<br />

parole et de langage doit s'ajouter arithmétiquement celui résultant<br />

de it7app;tication du barème du niveau acoustique d'audition. Il cornporte<br />

quatre paliers : O %, 5 5, 10 %, 20 %.<br />

Premier groupe avec O % dkincapacité :<br />

- élocution normale<br />

- niveau de langage normal,<br />

I)edèni(e pupe avec 5 5% d'hcapacite :<br />

- difficulté d9t510cution relevant de plusieurs aspects suivants :


. perturbation du débit et du rythme de la phrase, difficultés<br />

mélodiques et d'intonation<br />

. troubles d'articulation liés ii la surdité<br />

. troubles de la voix : hauteur anormale, timbre assourdi, voix<br />

nasonnée ... Ie larynx et le pharynx 6tant normaux.<br />

- niveau de langage normal,<br />

TroisiiSme groupe avec 10 % d'incapaciti. :<br />

- difficultés d'elocution<br />

les memes que les deuxi5me groupe associees & un retard de Iangage.<br />

- retard de langage<br />

dans l'expression, on trouve les perturbations :<br />

.chute de la fin <strong>des</strong> mots et difficultés de prononciation <strong>des</strong><br />

groupes consonantiques, mots deformés<br />

. emploi peu fréquent <strong>des</strong> mots grammaticam (articles, adverbes,<br />

conjonctions, etc.), temps <strong>des</strong> verbes incorrects.<br />

Quatrième groupe avec 20 % d'incapacité :<br />

- difficu1ti.s d'élocution majeures<br />

-troubles de langage importants ou meme absence dkxpression<br />

acoustique de la parole<br />

. i'agrammatisme de la phrase est habituel, celle-ci est souvent<br />

réduite à un ou plusieurs mots sans liaisons<br />

. la parole n'est intelligible que pour la famille et pour ceux qui<br />

leur servent d'interprètes.<br />

Avant 3 ans,<br />

Avant I"$ge de trois ans, an appfique automatiquement B toutes<br />

les deficiences auditives Ie taw d'incapacité de 20 5% du quatrième<br />

groupe, lorsqu'il existe m retard de parofe et de imgage dû à ta deficience<br />

auditive.<br />

4. Handicaps associés<br />

<strong>Les</strong> handicaps associés A fa surdité entraînent l'application du<br />

barème d'hcitpacité en usage pour un handicap different du handicap<br />

dominant.


On compare Ies taux d'hv&dit& de la grille proposke B celles<br />

<strong>des</strong> pensions militairesf surdit& appareiüabfes* <strong>des</strong> Caisses de S&urit6<br />

socide (i973), <strong>des</strong> accidents du travail et <strong>des</strong> eqertises médirxrtegales<br />

en ORL (1 972) (taux ideatiques), de k'qtitude rnrlitake,<br />

Tautes sont basées sur fa V Q haute ~ et fa voix chuehot&, adapttçes<br />

en dB3 donc avec <strong>des</strong> &heftes parfois curieuses.<br />

On a choisi les pertes metriques pour shpuier la comparaison.<br />

dB Proposition PM Sec, Six. Accidents Aptitude BLAP<br />

perte universelle apparrillabtes travail militaire<br />

expertise<br />

S 5 0 S f&@res (L)<br />

15 15/35 IO/% S. moyennes<br />

25 50 35 @Q<br />

55


APPLICATIONS<br />

On note la similitude de la griile proposée et de celle <strong>des</strong> pensions<br />

militaires pour les surdités appareillables jusqu'à 70 dB, partir<br />

de 12, la grille proposée devient minorante de 10 %, elle laisse place<br />

au baréme additif parole et langage. La grille Sécurité Sociale a un<br />

taux plus faible au-delà de 50 dB de perte, elle sous-estime l'incidence<br />

<strong>des</strong> surdités sévères et profon<strong>des</strong> qui sont pourtant très invalidantes<br />

: il y a <strong>des</strong> problèmes d'adaptation prothétique, d'autant plus<br />

que le « recrutement », pathologie de l'oreille dans les surdités acquises,<br />

provoque une intolérance à l'amplification. On retrouve cette<br />

même tendance pour la grille Accident du Travail - Expertises<br />

medico-lég<strong>des</strong>, généreuse de 45 dB 65 dB tjusqu'à 20 % de plus)<br />

alors qu'a partir de 80 dB, frontiere importante <strong>des</strong> r&percussions <strong>sociales</strong><br />

de la surdité, elle minore l'invalidité. L'échelle d'aptitude militaire<br />

a une échelle proche, le taux devenant plus élevé au-delà de<br />

45 dB.<br />

La grille proposée a <strong>des</strong> échelons plus réguliers à partir de 70 dB<br />

(3 échelons pour deux aux pensions et à l'aptitude militaire). Cette<br />

modulation est justifihe par les possibilités actuelles <strong>des</strong> prothèses<br />

auditives.<br />

Lorsque I'on compare les taux en pourcentages appliqués dans<br />

les différentes possibilités d'association <strong>des</strong> niveaux suivant la classification<br />

BLAP (profonde P, sévère S, moyenne N, legBre L), on a :<br />

(tableau 4).<br />

On constate le peu de modulation pour les surdités sév&res et<br />

profon<strong>des</strong> dans les barèmes actuels, cette modulation en fonction du<br />

niveau en dB nkpparalt que pour les surdités moyennes. La différence<br />

entre le barème Sec Soc et celui qui est propose est de 10 %, il<br />

est de 20 % pour le barème Sec Soc avec les pensions militaires,


Propose PM PM Sec. Soc. Acc. & Exp.<br />

appareiliables<br />

Pour les CDES et COTOmP, on constate que le taux d'incapacité<br />

de 50 % est atteint pour la surdité moyenne associée à une surdité<br />

profonde. Ii est & la limite pour une surdité sévère lorsque la<br />

surdité moyenne controlat4rale est importante, proche de la surdité<br />

s6vère. L'incapacité 80 % n'est appliquée qu'aux surdités profon<strong>des</strong>,<br />

excepté s'il y a un problème de langage, elle s'applique alors à certaines<br />

surdités sévères.<br />

Lorsque la surdité est bilatérde au-delà de 80 dB de perte auditive,<br />

le taux d'incapacité peut atteindre 80 % s'il y a <strong>des</strong> problhmes<br />

de parole. Pour la grille <strong>des</strong> pensions militaires, ces surdités ont une<br />

hvafidit6 de 90 %, surdités appareillables, sinon de 100 96.


ROLE DU MEDECIN AUDIOPHONOLOGISTE<br />

DANS LyEQUIPE PLURIDISCIPLINAIRE<br />

(Réflexions il propos du décret no 88-423 du 22 avril 1988,<br />

remplaçant l'annexe XXIV quater)<br />

Dr Lucien MOA~I<br />

*<br />

L'audiophonologie est pluridisciplinaire et le BIAP en donne la<br />

définition suivante :<br />

« L'audiophonologie a pour objet l'étude de l'audition, de la<br />

phonation, de la parole et du langage chez l'homme. Elle comprend<br />

les aspects anatomique, physiologique, psychologique, acoustique,<br />

phonétique, linguistique de la communication. Elle relkve donc de<br />

différentes branches : médecine, lettres et <strong>sciences</strong> physiques et naturelles.<br />

En ce qui concerne les troubles de la communication, leur<br />

réadaptation présente une part médicale, une part pédagogique, une<br />

part orthophonique ou logopédique, et une part prothétique. Leur<br />

thkrapeutique est une spécialité médicale. >><br />

Le médecin « audiophonologiste » ou « audio-phoniatre >> est<br />

donc. médecin, donc titulaire d'un Doctorat en Médecine d'Etat, et<br />

de plus audiophonologiste, c'est-A-dire ayant acquis <strong>des</strong> connaissances<br />

supplémentaires dans les domaines cités dans la définition ci<strong>des</strong>sus.<br />

Généralement, il est titulaire d'un Certificat d'Etu<strong>des</strong> Spkiales<br />

en Oto-Rhino-Laryngologie et Compétent en Phoniatrie (la Compétente<br />

est reconnue par une commission du Conseil de l'Ordre <strong>des</strong><br />

* Oto-IUlino-h~yngologiste Phoniatre, Attacht d'audiophonologie A l'Hôpital Trousseau.


Médecins qui statue sur dossier au vu <strong>des</strong> stages, travaux et recherches<br />

effectués par le demandeur).<br />

La pratique quotidienne d'un médecin audiophonologiste en<br />

matière de surditd de l'enfant l'amènera donc à :<br />

-poser les diagnostics de surdité et en apprécier les conséquences<br />

sur le développement général et les possibilités de communication ;<br />

- en rechercher les causes en coopération avec le pédiatre et d'autres<br />

spécialistes ;<br />

- poser le cas échéant les indications thérapeutiques médicales ou<br />

chirurgicales et 6ventueUement les mettre en oeuvre ;<br />

- décider de l'indication prothétique et assurer régulihrement (en<br />

relation très étroite avec l'audioprothésiste qui effectue cet appareillage)<br />

la surveillance médicale <strong>des</strong> opérations en cours ;<br />

- orienter l'enfant et sa familie vers la structure d'éducation et d'enseignement<br />

qui lui paraît la plus adéquate ;<br />

- assurer éventuellement lui-même <strong>des</strong> séances de rééducation phoniatrique<br />

dans les domaines notamment de la voix, l'articulation et<br />

l'éducation auditive ;<br />

- aider à la mise en oeuvre <strong>des</strong> mesures <strong>sociales</strong> en faveur de l'enfance<br />

handicapée, notamment par la rédaction <strong>des</strong> certificats médicaux<br />

permettant l'ouverture <strong>des</strong> droits, et ses interventions directes<br />

auprès <strong>des</strong> médecins-conseils en cas de litige ;<br />

- assurer ensuite régulièrement, à un rythme variant selon les besoins,<br />

le suivi régulier de cet enfant jusqu'à son $ge adulte en<br />

gardant toujours <strong>des</strong> relations etroites avec la famille, l'audioprothésiste,<br />

les équipes éducatives et pédagogiques.<br />

Ces fonctions quotidiennes du rnedecin audiuphonologiste lui<br />

permettent d'etre am6 pour assurer la fonctions qui seront les<br />

siennes dans le cadre d'un « etabfissement ou seivice prenant en<br />

charge <strong>des</strong> enfants atteints de déficience auditive grave » selon le<br />

texte du décret 88-423 du 22 avril 1988 dans son annexe =IV<br />

quater.<br />

Cependant, si fe texte du décret de l'Annexe XXIV quater précise<br />

bien la spécialisation ORL associée à la compétence phoniatrique,<br />

la détermination <strong>des</strong> qualités en question est encore trop


mouvante actueilement pour que le texte soit interprété avec rigidité,<br />

En effet, cette discipiine est très récente et il est probable qu'elle fera<br />

l'objet dans les prochaines années de modifications dans ses structures,<br />

Certains médecins parfaitement au fait <strong>des</strong> connaissances de<br />

l~udiophonolol+ie peuvent ne pas avoir fait reconnaître à ce jour<br />

leurs compt5tences, il ne faut sorernent pas se priver de leurs capacités<br />

pour ces postes très sp6cialisc4s. Par ailleurs, certains projets de<br />

formation <strong>des</strong> phoniatres intégrant largement une fornation 0RL<br />

punaient amener à une révision de l'exigence de la spkialittr ORL.<br />

L'essentiel est que ces postes soient assmf.~ par un personnel<br />

mkdical vraiment eornpetent et non par <strong>des</strong> spéciafistes 0FU ne<br />

connaissant de l"audiophon01ogie que I'aspect tympanique du probfèm<br />

de la surdit6 de l'enfant ou <strong>des</strong> phoniatres plus au fait <strong>des</strong> aspects<br />

pycbo-affectrfs <strong>des</strong> troubles de la parole et du langage que <strong>des</strong><br />

probl&mes du handicap majeur de la cummunication qu'entra'ine la<br />

surdité.<br />

De plus, la pluridisciplinarité qui caractérise I'audiophonoEogie<br />

imposera h ce médecin multispécialiste 0RL et phoniatre l'acceptation<br />

d'un travail en équipe avec <strong>des</strong> non-médechs dans une relation<br />

où la notion de hiérarchie n'est pas toujours &idente ni forchment<br />

n&essaire.<br />

Quelle sera donc la place et la fonction de ce médecin audiophonologiste<br />

au sein d'une équipe pluridisiphaire ayant à traiter<br />

<strong>des</strong> enfants sourds de la naissance vingt ans, dans un Centre, Ecolit.,<br />

Ekternat, Institut, ou toute autre dénomkation d'une structure dont<br />

le rdle va de l"établissement du diagnostic à la pédagog2e prsfessionneile<br />

spkiaEsée ? Il travaaera avec d'autres confrères éventaeuement<br />

(pediatres, psychiatres), et egdement avec <strong>des</strong> membres de<br />

profesions para-médicales (pqchologue% ortfiuphonistes, infirmiÈires,<br />

audio-protbt5shtes), <strong>des</strong> travaifteurs sociaux (assistantes<br />

<strong>sociales</strong>, éduszateurs), <strong>des</strong> pédagogues (profmeurs de sourds ou instituteurs<br />

spéciafist5s), <strong>des</strong> sourds adultes enseignant la langue <strong>des</strong><br />

signes, et enfin le personnel administratif. Son temps de travail dans<br />

l'établissement dépendra <strong>des</strong> effectifs et <strong>des</strong> besoins, 2 sera souvent<br />

plus réduit que celui d%utres disciplines? notamment les pédagogues,


Sa tache est difficile. Quelle sera sa place, quel sera son apport ?<br />

Nous allons analyser ces fonctions, mais, sans avoir besoin de longs<br />

développements, on peut répondre d'emblée qu'elle ddpendra de sa<br />

personnalité.<br />

CE QUE DISENT LES TEXTES<br />

Dans son article 5, le décret prévoit que l'équipe médiale doit<br />

&tre composée d'un médecin puaüflé en oto-rhho-laryngologie,<br />

compétent en phoniatrie, &?un pbdiatre et, en fonction <strong>des</strong> besoins de<br />

l'établissement, d'un psychiatre, et que leur concours doit permettre<br />

19examen complet de tous les enfants une fois au cours de I'annbe,<br />

ainsi qu'un examen par trimestre et la surveillance <strong>des</strong> traitements<br />

ordonnes et <strong>des</strong> rééducations pratiquées.<br />

Dans son article 1, il précise que ces « Etablissements ou Services<br />

prennent en charge <strong>des</strong> enfants dont la déficience auditive entraîne<br />

<strong>des</strong> troubles de la communication nkcessitant le recours & <strong>des</strong><br />

techniques spikialisées pour le suivi médical, ... ». Et dans son article<br />

2, que cette prise en charge comporte entre autres « la sweiiiance<br />

mcldicaie dguliere, générale et du handicap ; la surveiUance =&dicale<br />

et technique de Padaptation prothétique ».<br />

Dans son article 7, il est prévu la création éventuelle d'un (< service<br />

d'kducation familiale et d'éducation précoce pour les enfants de<br />

la naissance à 3 ans » avec entre autres comme objectif « I9appmfondissement<br />

du diagnostic et de Padaptation pmthbtique », soit dans le<br />

cadre meme du Centre, soit dans le cadre d'autres Services avec lesquels<br />

<strong>des</strong> conventions seraient passées.<br />

Enfin, dans son article 10, le texte du d6cret pr6cise certains aspects<br />

<strong>des</strong> locaux dont doit disposer YEtabGssement, et notamment<br />

« lorsque les examens audiornétriques camants sont pratfqués dans<br />

l'4tabiissement, ce dernier doit disposer <strong>des</strong> équipements nécessaires<br />

comportant une cabine audiométrique équipée du matériel


d9audiom4trfe tonale au casque et en champ libre et dysudiam~trk<br />

vocale S.<br />

QUE WULENT DIRE LES TEXTES<br />

lifs demandent clairement que k swezmce médicafe <strong>des</strong> enfants<br />

atteints de déficience auditive grave, suivis dans ces établissements,<br />

soit assurée par <strong>des</strong> médecins compétents en mati&re de surdité<br />

de l'enfant. Cette compétence est garantie par la spkinlisation<br />

QRL et la compktence en phoniatrie. Nous avons vu plus haut que<br />

cette double exigence risque d'être trop contraignante en certaines<br />

circonstances aujourd'hui. Mais elle doit conduire à une politique de<br />

formation adéquate pour que les besoins de l'ensemble du territoire<br />

sait couverts. Comme nous l'avons dit plus haut, il faut pour ces<br />

postes <strong>des</strong> ORL suffisamment au courant de tous les aspects <strong>des</strong><br />

problèmes de communication et notamment de langage <strong>des</strong> enfants<br />

sourds, et <strong>des</strong> phoniatres suffismment au courant <strong>des</strong> probl&mes<br />

concernant l'audition, sa physiologie, ses mo<strong>des</strong> d-loratioar, sa pathologle<br />

et sa correction.<br />

Le texte du dwet prévoit, dès son article 2, ia suweillance m4-<br />

dide de f'enfant et de son handicap dans le cadre de lPtstabEssement<br />

et précise gfobalement les modalités de cette surve~mce. Le rBIe du<br />

mbdecin est donc essentiel dans cette surveillance.<br />

Mais son rate doit dgbrder ce que prévoit fe texte : If doit imposer<br />

B I'eqtlipe et 2t Padrnsstration la nation du libre ehok du m&<br />

d& traitant et savoù-, si fa famille le souhaite, assurer b contact<br />

avec le mkdecin extérieur à l'étabüssement (hospitalier ou privé), si<br />

les conditions requises de qualification sont respectées. Ii doit aussi,<br />

si la surveillance médicale de l'enfant est exclusivement assurçSe dans<br />

l'tstablissement, obtenir que la f d e soit associée aux différentes<br />

étapes de cette surveillance en assistant aux consultations, aux décisions<br />

quant à la thérapeutique et l'appareillage, Cette participation<br />

de la famille au suivi médical, l'impliquant dans la dbmarche thQa-


peutique et cjducative de l'enfant, ne peut qu'avoir <strong>des</strong> effets bénéfiques,<br />

Nous avons vu trop souvent <strong>des</strong> familles dtscouvrant subitement,<br />

après de nombreuses annCes, les problèmes de leur enfant. Il<br />

n'est jamais bon de faciiiter & ce point la tache d'une fade qu'elle<br />

en arrive & se démob&er,<br />

C'est d'aaiew-s suivre l'esprit de ce texte que de fa& participer<br />

au m&m les fada aux differentes demarches puisque, pour la<br />

premihre foisy les sotions s d'accompapement <strong>des</strong> famrUes >F, de<br />

« soutien à Féduatiun familiate », e f'intégation scolaire a, et Taffirmation<br />

que a toutes les fois que cela est possiblet les enfants déficients<br />

auditiEs demeurent hébergh dans leur famitte * sont mentionntses<br />

eqressérnent. fR médecin doit aider & aller dans ci; sens,<br />

La totalité <strong>des</strong> fonctions du mêdf-in audiophonolol;iste sont assur4es<br />

larsqu9e&te « un service d'accompawement familid et<br />

d%ducation précoce pour les enfants de la naissance à trois ans >>.<br />

D?aautres di5velopperont dans un autre chapitre de cet ouvrage les diff4rentes<br />

missions et objectrfs de ce service partic~er* Mais c'est bien<br />

là, auprbs de ce jeune bebé, que I'envkonnement; sera essentiellement<br />

médical et para-médical. C'est à ce stade que le diapostic se<br />

pr&cise et s'affine, h ce stade que le choc parental r4ceent requiert un<br />

abord psychologique de cet ensemble farnlliaZ dont dépend pour<br />

beaucoup le résultat de cette éducation précoce et les résultats à long<br />

terme de Péducation de l'enfant. C'est bgalernent & ce stade de l'&ducation<br />

prtktxe que les prob1Gm.e~ de dkvefoppement global de l'enfant<br />

entrent en Epe de compte et que les apports par tous les mo<strong>des</strong><br />

de perception aident à f'épano&ement pycho-affectif de i'enfank<br />

C'est bien s@r à ce stade que h première adaptation protht4tique est<br />

la pfus déliate et requiert un travail en comfnun très étroit entre le<br />

rn6decin et l'audioprothésiste, C'est encore h ce stade que le problbfexne<br />

de l'étiologie de k surdit6 se pose avec le plus dkcuitb et que<br />

le médecin audiophonolo@ste doit traiter avec prudence pour répondre<br />

autant que* possible aux familles sans les détourner de la<br />

t&che la plus urgente de la mise en route de l'apparetllage auditif et<br />

<strong>des</strong> mesures globales d'bducation pr6coce. Cest enfin & ce stade que<br />

le dépistage <strong>des</strong> troubjes associés est de la responsab2litb du médecin<br />

audiophonologiste, en coliaboration avec son colikgue pédiatre et,


ien entendu, avec l'aide <strong>des</strong> informations prkieuses que lui fourniront<br />

les psychologues et orthophonistes.<br />

Au fur et à. mesure que l'on s'adresse à <strong>des</strong> enfants plus âgés, Ies<br />

fonctions de diagnostic hisseront h place <strong>des</strong> fonctions de surveitlance<br />

qui n'en sont pas moins importantes et ne doivent pas faire<br />

sombrer dans la routine.<br />

La suwe3ance <strong>des</strong> conduits auditifs, pour banale qu'elle soit, est<br />

prhurdiale pour assurer une effiacite opthde <strong>des</strong> prothéses auditives.<br />

La surveiliance <strong>des</strong> courbes audiométriques doit impérativement<br />

être régulière, tous les six mois une fois le diagnostic assuré avec certitude<br />

après la première période d'investigation, une fois par an au<br />

minimum, ensuite, tout au long de la scolarité. Cette surveillance audiombtrique<br />

tonale et si possible vocale, avec et sans prothèses, en<br />

présence <strong>des</strong> parents, faite par le m6decin lui-même est l'occasian<br />

d'un bilan giobal auditif, linguistique et général de l'enfant et <strong>des</strong><br />

problbmes que rencontre la famille.<br />

Le contrale régulier de l'audition de l'enfant est rendu n&essaire<br />

pour dépister l'existénce toujours possible, surtout avant dix<br />

ans, d'une otite séreuse aspptomatique aggravant la surdite, ou<br />

I'évolutivitf: négative de la surdité de perception dont la thérapeutique<br />

est malheureusement d'autant moins efficace qu'elle est appliquée<br />

tardivement, ou l'apparition d'acouphènes (bruits subjectifs<br />

anormam pergus par le déficient auditif) t6rnoignant d'une souffrance<br />

<strong>des</strong> voies auditives périphCriques ou parfois centraies. Ce<br />

contrale de la perception auditive débouche toujours sur le contrhle<br />

de ses capacités de discrhùlation, d"intbgation, et d'expression<br />

abordant ahsi les aspects proprement centraux d'un handicap lié au<br />

départ à. une lésion en principe périphérique (l'oreille interne), mais<br />

dont les incidences sur les voies centrales afferentes et efférentes<br />

sont loin d'&tre négiigeables,<br />

Bref, cette surveillance réguli&re du médecin audiaphonologiste<br />

est « un autre regard », qui doit apporter à l'équipe <strong>des</strong> pédagogues<br />

et <strong>des</strong> rétrducateurs un éclairage different sur cet enfant dont elle a la<br />

charge au jour le jour.


CE QUE LES TEXTES NE DISENT PAS<br />

<strong>Les</strong> rbfiexions que nous inspire le texte de l'annexe XXIV quater<br />

sont ECes à notre expérience personnelle de l'audiophonolo~e~ de la<br />

pratique de mkdeein audiophonolo&te dans un établissement de ce<br />

type et à notre participation aux travaux qui ont conduit B l'6laboration<br />

du texte, C'est dire que nous sommes impliqués à plus d'un titre.<br />

Mais, autant ce qui est dit dans les textes est important et orientera<br />

fe fonctionnement <strong>des</strong> btabgssements, autant ce qui n'y est pas<br />

dit doit être précisé par ceux qui ont vécu les situations.<br />

Xfn texte ne peut déerife la vie quotidienne d'un étabüssement,<br />

lies relations qui se nouent entre les participants à cette entreprise,<br />

les reunions de synthèse qui rfiunissent l'équipe dans son ensemble<br />

ou en rbunions partielles, les apports rkiproques de chacun & la<br />

formation de l'autre, le mode de relation avec les familles et les enfants,<br />

l'organisation <strong>des</strong> réunions avec les parents, ou de réunions<br />

entre parents, l'information donnée aux enfants sur leur surdité ou<br />

leur devenir.<br />

Tout ceci est absent d'un tel texte et il ne pourrait en être autrement.<br />

Cependant, dans chacune <strong>des</strong> situations ahsi pr&cisCes, le<br />

médecin a son rale à jouer. A lui de savoir le faire avec tact et discrimination,<br />

de savoir donner son temps autant qu'ii le peut, de savoir<br />

« apporter ,> sans imposer une prfi6minence qui n'a pas cours<br />

dans une équipe pluridisciphaire de ce type, de savoir toucher à<br />

tous les domaines de sa compfltence sans empiéter sur ceüe <strong>des</strong><br />

autres, de savoir écouter pour savoir trancher.<br />

La surdité de f'enfant est une affection particulièrement grave<br />

de Ia pathologie infantile. Ses conséquences d6coulerit de l'altération<br />

d'une fonction prhordiale de notre vie de relation, l'audition, dont<br />

la principale est f'impossibilit6 à acqufirir le langage oral. Tous les<br />

moyens de pallier ce-handicap, toutes les métho<strong>des</strong> de rééducation et<br />

de pgdagogie spéciale, ne peuvent qu'utiliser ies aptitu<strong>des</strong> qui lui restent<br />

pour surmonter ses difficult6s. Le rôle du médecin est d'apporter<br />

ses capacités et ses connaissances dans ce but.


Il lui faut donc savoir penser en médecin (c'est-à-dire intégrer le<br />

problème à traiter dans la globalité de l'individu à étudier), raisonner<br />

en médecin (c'est-&-dire dans une d6marche rigoureuse d'analyse de<br />

la situation, d'évaluation <strong>des</strong> données, de décision du choix thdrapeutique<br />

en fonction <strong>des</strong> étapes prtkédentes, et de critique et de mise en<br />

cause permanente de sa méthodologie selon les résultats obtenus),<br />

mais aussi connaître ses limites et accepter cette notion de pluridisciplinarité<br />

qui est l'essence même de l%udiophonolo~e,


LA PROmESE AUDfflVE<br />

DES ENFANTS ET ADOLESCENTS<br />

Etat actuel et EvoIutian prévisible<br />

1. M6diateur physique s'insérant dans la cha%ie de communication<br />

audiophonatoire <strong>des</strong> personnes atteintes de déficience auditive,<br />

la prath&se auditive est un ensemble mhnique, electro-acoustique<br />

et Csfectronique s'htégrant au schéma corporel, <strong>des</strong>tin$ à capter, h<br />

traiter, à adapter et à amplifier les signaux acoustiques de maniare h<br />

permettre à CGS personnes de recevoir, dans Ies limites de leur capacité<br />

de perception et de tolérance, l'&formation qu'ils transportent.<br />

2, La proth&se auditive est réalisée à partir d'appareils de correction<br />

auditive ')), de constmctian industriefle ou artisanale, dont le<br />

choix et le redage <strong>des</strong> fonctions permettent I'appropriation hdividuelfe<br />

personnalisée.<br />

Tirant parti <strong>des</strong> technologies de pointe aussi bien pour la<br />

conception que pour la construction <strong>des</strong> appareils, bénéficiant en<br />

outre de recherches méthodologiques récentes tendant à affiner les<br />

prwddures d'appareillage, la prothese auditive peut actuellement intervenir<br />

dans la stratégie de réhabilitation de presque tous les enfants<br />

et adolescents atteints de déficience auditive, son champ<br />

* Directeur du Laborat&= de ~ ~ t i o n auditive, Pbident de la Commission Prothèse auditive<br />

du Bureau international dTAudiophofiologie.<br />

1, Cf. Nome française NP-C-97-610 du 20.8.1986.


d'appiimtion s'étendant <strong>des</strong> déficiences légères jusqu'aux surdités<br />

profon<strong>des</strong>.<br />

3. L'appareillage audiaprothétique comprend le choix et l'adaptation<br />

<strong>des</strong> appareils de correction auditive, le contrôle d'efficacité<br />

immédiate de la prothèse auditive réalisée, sa délivrance, f'éducation<br />

prothétique de Penfant ou adolescent appareaé et ceUe de son entourage,<br />

ahsi que le contrôfe pemanent de Pefficacité et de b tolérance<br />

de h prothèse auditive déEt.'r&e (art. I,510-1 du Code de fa<br />

Santd publique - Recommandation BfAP 0611).<br />

L'appareillage en prothèse auditive est assuré par les audiaprathésistes<br />

dont la profession est régementée par les articles L 520-1 à<br />

8 du Code de h Santé publique.<br />

Ifs disposent d"une vaste gamme d'apparezs de correction auditive<br />

dont la qualité est contrôlée par leur conformité aux normes<br />

d'homologation décr6tées par les pouvoirs pubtics (arrêt6 du<br />

21.4.1981,8O. du 9.5.1981).<br />

II. LES APPAREXLS DE CORRXCTION AUDITIVE<br />

1. Constitutian d'un appareil de correction auditive<br />

Un tel appareil comporte nkessairement quatre sous-ensembles<br />

: captation et transduction, amplification et adaptation, restitution,<br />

ahentation ; les pr0grf.s les plus spectaculaires, à I'heure<br />

actuelle, ont été réalisés au niveau de la captation ainsi que de l'ampfification<br />

et de l'adaptation.<br />

2.1. C ~ A ~ ET OMSDUTTfION N<br />

13%<br />

1.1.1. Le micmphor~e<br />

SIGNAUX SONORES<br />

La captation <strong>des</strong> signaux sonores skffectue habitueDement par<br />

l'intermédiaire d'un microphone qui convertit en tension électrique


alternative (transduction) les variations de pression acoustique produites<br />

par tes vibrations sonores, On utGse actueuement pour les<br />

appareils de correction auditive <strong>des</strong> micmphones B &lectret, variante<br />

du miaophone à mndensateur, dont la courbe de réponse héaire et<br />

ta bande passante &endue de SO A 15 000 Efi sont le gage dkne assez<br />

bonne fid6lité en dèpit de leurs dhensians très r&duites.<br />

1.1.2. Le capteur de champ mapd~qge, ou bobine d"duction captrice<br />

(Nf: C 97-610), appel6e commun6ment bobine t614phonique.<br />

Un capteur de champ magn&tique, constitué par un bobinage de<br />

petite dimension comportant un tres grand nombre de spires de<br />

conducteur, peut se substituer au microphone pour délivrer aux<br />

bornes d'entrée de i9ampMicateur me tension modulée produite par<br />

couplage inductif avec un bobhage &metteur (boucle magnétique ou<br />

écouteur tBféphonique).<br />

<strong>Les</strong> signaux sonores utiles au d6ficient auditif sont souvent parasitds<br />

ou masqués par le bruit provenant de l'environnement hm&-<br />

diat ou lointain. Des capteurs adtiquats, dkrits au chapitre V;<br />

permettent de les acheminer i l'abri <strong>des</strong> perturbations jusqu'h l'amplzicateur<br />

de l'appareil de correction auditive par Pinternédiaire de<br />

son « entrge audio », canstituée par <strong>des</strong> bornes d'entrtre &tetriques<br />

<strong>des</strong>tinees à être connectees directement i% une source de modulation,<br />

Le sipal électrique moduf6 déIiv1-6 par le microphone ou les<br />

autres capteurs est transmis à l'amplificateur qui le met en forme,<br />

17adapt& et l'amplüie avant de le transmettre au sous-ensemble de<br />

restitution.<br />

LYampBicateur b6néficie tout particulièrement <strong>des</strong> progr& de la<br />

miniaturisation : grilce & la technique <strong>des</strong> circuits intées, <strong>des</strong> groupements<br />

dvtages amplificateurs liaison directe sont inclus dans un


soiide (c6ramlque ou résine synthétique) dont les dimensions sont de<br />

l'ordre de quelques millhnbtres. Il en résulte une plus grande fiabilité,<br />

une résistance accrue aux aci<strong>des</strong> (ceux de la transpiration en<br />

particulier) et aux chocs, ainsi qu'une réduction notable du bruit de<br />

fond propre,<br />

Molette comportant un repérage matériase par <strong>des</strong> chzfres ou<br />

<strong>des</strong> points, le potentium&tre permet à 1"usager de doser le nivwu<br />

d"ampEeaticzn de l'appareil pour obtenir le confort auditif subject"<br />

qu'il souhaite en function <strong>des</strong> conditions dans lesqueiles It se trouve<br />

(ambiance &e ou bruyante - interlocuteur parlant avec une voix<br />

&intensité faible, moyenne ou forte).<br />

Accessibles à l'usager, ils sont essentieuement de deux sortes :<br />

. le commutateur marche-arrêt ;<br />

, le commutateur de fonctions d'entrée à deux positions : microphone<br />

(M) - bobine tbléphonique (T), plus, éventuellement, une troisiIbme<br />

position, associant les deux entrées microphone et bobine<br />

téltsphonique (MT).<br />

1.2.2.3. <strong>Les</strong> commads <strong>des</strong> fonctiom d 'amplificah'on<br />

Elles se présentent gtsnéralement sous la forme de minuscules<br />

potentiomètres, soit rotatifs.(vis), soit kt5aires (poussoirs), qui peuvent<br />

être groupés sur une plaquette de rkgiage, véritable tableau de<br />

'bord de l'adaptation individuelle <strong>des</strong> caractbistiques de f ampmcation,<br />

Une &novation réente consiste à remplacer par un sysL&me de:<br />

commande digital les comman<strong>des</strong> <strong>des</strong> fonctions d'ampl"cation rdgl&s<br />

jusqu'à présent manuellement à l'aide de tournevis. t%udioproth&siste<br />

dispose d'un pupitre de commande relié dkéctement par<br />

un c&ble à la prothkse auditive en place. dans l'oreille du patient. <strong>Les</strong><br />

ordres sont transmis sous forme de signaux numtsriques & une centrale<br />

digitale régulatrice <strong>des</strong> fonctions de l'amplificateur.


Ce nouveau mode dkdaptation permet d'évaluer instantanément<br />

chez le patient les effets <strong>des</strong> modziations <strong>des</strong> caractéristiques<br />

de Pampmmtion, La procrSdure d'appareillage gagne en souplesse et<br />

en subtilité grâce h un plus grand nombre de paramlstres ajustables et<br />

un 6cheionnement plus progessz et plus précis <strong>des</strong> paliers disponibles,<br />

mettant ainsi A fa disposition de l"audioproth&siste plus d'un<br />

rnaoa de combhaisons <strong>des</strong> dzfbrentes caractéristiques.<br />

Cbutew rmnvertit Ira tension électrique alternativq amplifiCe<br />

et adapte@, disponible am bornes de sortie de l'mpWicateur, en<br />

variations de pression acoustique, c'est-&-dire en vibrations sonores<br />

ampltfiées et adaptées aux possib%tés de réception et de tol4rance<br />

du déficient .auditif.<br />

Dernier mailion de la chaîne tslectro-acoustique, I'rScouteur est<br />

l'tsltsment qui a le moins évolué, abstraction faite <strong>des</strong> progib;s réalisés<br />

dans sa miniaturisation, Ses câract4ristiques déterminent in fine la<br />

qualité du signal acoustique restitué.<br />

1.3.2, Le coupleur au&taire<br />

Le coupleur auriculaire conduit les vibrations transmises par<br />

l'écouteur i l'htkrieur du conduit auditif externe. Sa forme h plus<br />

courante est 19embuut, confectionné d'aprlss Pemprehte du conduit<br />

auditif et du pavilion et r&alisrS dans la rnatihre la plus appropriée<br />

l%tat du conduit auditif; en gen6ral en rbsine qnthétique souple ou<br />

dure. Son ajustage précis contribue pour une grande part au confort<br />

du ddficient auditif appare86 ; par contre, une adqtation insuffismment<br />

ajusttse risque d'être h I'origine de smements dbsagrtsables<br />

(effet Larsen),<br />

Quand, dans le cas d'une surditb de transmission ou d'une surdit6<br />

mixte, une suppuration chronique de l'oreille moyenne ou un


w4ma r&idivant du conduit auditif interdisent le maintien d'un<br />

embout obturant, l'kouteur peut btre remplacé par un ossivibrateur<br />

qui, appEqu4 sur la mastoïde, transmet directement, par conduetion<br />

osseuse, ks vibrations acoustiques i l'oreille interne.<br />

LT6nergie nécessake au fonctionnement <strong>des</strong> appareiis de correction<br />

auditive est gtl-nerafement fournie par <strong>des</strong> pites de rype * butan<br />

» dont b durée d'utifisation (de 50 à 300 heures) & fonction de<br />

ieur tailla et de la puissance de Pmp11"eateur qukelles *entent.<br />

Certains appare2s de pwhe très puissants utilisent une ou deux piles<br />

a baton » de 1,s V,<br />

Contrairement aux piles, les &cmmdat:eum peuvent être rechargés<br />

au moyen d'un chargeur branché sur une prise de courant.<br />

Aprhs une charge de 12 2 14 heures, la durée d'utilisation varie<br />

de 5 B 8 heures selon fa puissance de l'appareil alimenté, L'espérance<br />

de vie d'un accumdateur peut aller de 12 à 18 mois en fonction du<br />

rythme d'utilimtion.<br />

2, Csraetèrlstiques acoustiques et: électroniques <strong>des</strong> appareils de<br />

cometiion auditive<br />

Fami les caract4ristiques <strong>des</strong> appareils, ü importe de connaître<br />

celies qui pemettent de prévoir et d'analyser Paction de la prothèse<br />

auditive dans les dB6rentes conditions de son utiEsation par f'enfant<br />

ou l'adolescent sourd (cf, arretci du 21,4.19$31, J.O. du 9.5.1981), Ce<br />

sont :<br />

2.1, LE ~m ACUUWQW, c'est-h-dire la dsférence, en ddcibels,<br />

entre le niveau acoustique d'entrée et le niveau acoustique de sortie<br />

& une frdquence donnée.


Le gain acoustique peut $tre réglé par l'utilisateur de l'appareil<br />

grâce au potentiomètre qui, en fin de course, permet d'obtenir le<br />

gain acoustique maximal.<br />

2.2. U CUWE DE REPUNSE ACOU~QUE QUI^, dans <strong>des</strong> mditions<br />

spécifiém, exprime la variation du gain acoustique entre 100 et<br />

8 000 Hz en fonction de la fréquence.<br />

2.3. U C omE DE NIVEAU ACUUmQW! de saturation visualisant fa<br />

variation du niveau acaustique de sortie entre 100 et 8 000 Hz en<br />

fonction de la fréquence pour un niveau acoustique d9entr6e de<br />

90 dB, le gain de l'appareil étant réglé & sa valeur maximale.<br />

Pour éviter que le niveau acoustique de sortie d6passe <strong>des</strong> valeurs<br />

pouvant incommoder l'utiiisateur dans le cas, par exemple, ot"l if<br />

souffre de recrutement, les appareils sont souvent 6quipBs de dispositifs<br />

limitant, en cas de besoin, le niveau acoustique de sortie*<br />

Ce dispositif électronique ampute automatiquement H'gnergie<br />

excédentaire lorsque les signaux acoustiques dépassent l'amplitude<br />

compatible avec la tol4rance du sujet. Son effet est hmBdiat, mais<br />

produit <strong>des</strong> distorsions proportionneues à Pimpartance de I'kretage,<br />

ainsi qu'une détérioration du rapport simal/bmit.<br />

2.4.2, IR contrdle autamatiigue de gain MGC)<br />

Kr gain acoustique est réduit progressivement et automatiquement<br />

en fonction de I'augmentation du niveau de sortie dès que<br />

celui-ci dépasse le niveau tolér6 par fe sujet. L'action de ce dispositif,<br />

appelée communément tompressi~n, demande un certain temps<br />

pour etre efficace, Ce temps de dponse varie d'un appareil b Yautse,<br />

entre 2 et 30 rns. Le temps de retour au gain initial est sait prkd6-<br />

termine par le constructeur, soit réglable par 1'audioprathésiste,


entre 50 et 500 ms. L'efficacité du systkme dépend du choix judicieux<br />

du &veau de limitation et <strong>des</strong> temps de repense et de retour. L'ACC<br />

peut être asservi au signal de sortie (AGC-O) ou au signal d'entrbe<br />

(AGC-1).<br />

L'association <strong>des</strong> deux dispositifs, AGC et PC, proposbe dans<br />

certains appareils, permet d'assurer une bonne tolérance lorsque le<br />

champ auditif de l'enfant déficient auditif est affecté d'un fort pincement<br />

de sa dynamique.<br />

3. Formes achelies <strong>des</strong> apparerts de correction auditive<br />

3.1. LES A PPmU PORTES AU I'WBAU DES OREUES<br />

3.1.1. <strong>Les</strong> contours d'oreIIfa<br />

LogtZs dans le sillon rétro-auriculake, ils continuent à former le<br />

gros bataillan (60 %) <strong>des</strong> appareils actuellement utilisés. Avec leurs<br />

plaquettes de rtaglage ou, mieux encore, avec le pupitre de commande<br />

digital, véritable tableau de bord de l'adaptation individuelle<br />

<strong>des</strong> caractCristiques de l'amplification, 2s permettent de traiter la<br />

presque total34 <strong>des</strong> probllèmes que pose la diversité <strong>des</strong> aspects et<br />

<strong>des</strong> degrés de la déficience auditive :<br />

. <strong>Les</strong> eumectem de la courbe de réponse de l'ampfificateur servent<br />

i% donner 3 celle-ci le profil fe plus apte 3 pracurer la meilleure<br />

intelliWbItltf: du message sonore. La flexibilité <strong>des</strong> courbes de réponse<br />

est devenue telle quYelle permet non seulement de favoriser,<br />

par exemple, l'émergence <strong>des</strong> consonnes aiguës et de leurs transitions<br />

phonétiques, indispensables h l'intelligibilité de la parole, mais<br />

également & optimiser la perception <strong>des</strong> timbres propres à valoriser<br />

le caractGre esthbtique du message sonore.<br />

. Lorsque les examens audiologiques font état d'une intol4ranee<br />

aux niveaux sonores blevés, les dispositifs de compression automatique<br />

du gain acowstigue permettent d'ajuster, cas par'cas, la dynamique<br />

de l'amplification pour sauvegarder le confort auditif indispensable<br />

dans toutes les circonstances d'utiIisation de la prothese


auditive. L'asservissement de la compression au signal d'entrée ou au<br />

signal de sortie, l'adaptation de ses caractéristiques temporelles -<br />

temps d'attaque et temps de retour -, le choix du facteur de compression<br />

interviennent en fonction de la nature de l'environnement<br />

sonore du déficient auditif et de ses capacités de disc~imination perceptive.<br />

3.1.2, <strong>Les</strong> appat?i& in&-aggca&ires<br />

Logés soit dans fa mnque et le conduit auditif, soit, meme, enti2rement<br />

dans le conduit auditif, ifs dduisent par leur petite taille.<br />

<strong>Les</strong> grands progr& realisés rhmment dans la conception de leurs<br />

circuits d'ampfification permettent actueuement de construire <strong>des</strong><br />

prothèses personnalisées adaptées avec une grande précision aux caractéristiques<br />

individuelles <strong>des</strong> deficiences auditives légeres ou<br />

moyennes.<br />

Utilisant, grâce à la position rationnelle du microphone au creux<br />

de la conque, les fonctions naturelles d'ampiification et de focalisation<br />

<strong>des</strong> signaux sonores par le pavillon de l'oreille, les prothèses auditives<br />

intra-auriculaires privilégient les informations véhiculées par<br />

le médium et l'aigu du spectre sonore, où se retrouvent 95 % <strong>des</strong><br />

traits phonétiques nkcessaires à la reconnaissance de la parole.<br />

Aisément dissimulables, eues permettent de surmonter les appréhensions<br />

<strong>des</strong> malentendants pour lesquels la prothèse auditive est<br />

trop souvent encore la signature visible de leur handiap. L'appareillage<br />

intra-auriculaire a permis, lorsque leur champ auditif résiduel<br />

nous y autorisait, de convertir à l'usage rdgulier de leurs protheses<br />

<strong>des</strong> enfants et <strong>des</strong> adolescents jusqu'alors farouchement oppostSs B<br />

l'id6e m&me du port de contours d'oreille3 quitte, bien sur, à procéder,<br />

lorsque la croissance le rend nkessaire, au reajustement de la<br />

coque de leurs appareils intra-auricdakes.<br />

3.1.3. <strong>Les</strong> lutaenes acoustiques<br />

Tous les constituants - microphone, ampldicateur, pile - sont<br />

inclus dans une ou, éventuellement, deux branches de lunettes. Rarement<br />

utilisables chez les enfants, à cause <strong>des</strong> mensurations de la


face et du cr$ne, elles permettent chez l'adolescent d'appareiller 616-<br />

gamment une surdite de transmission provoquée, par exemple, par<br />

une otite chronique, en remplaçant l'tkouteur de la prothase par un<br />

vibrateur en but de branche. On peut aussi suppleer & l'hpossibilité<br />

@appareaer une ureitfe cophotique en pla~ant de son c&té dans la<br />

branche de lunette un microphone relié* dans l'autre branche, B PampMimteur<br />

et & l'écouteur <strong>des</strong>tiné à l'autre oreh (système C.R.O.S.),<br />

3.2, APPAREILS DE POCHE<br />

<strong>Les</strong> appareils de poche, comportmt un baQier hcorporant fe<br />

mirnophone, f'ampfifiateur et la ou les piles, avec un cordon et un<br />

6couteur externes, sunt utiles forsqu'on a besoin d'une ampmication<br />

plus bportante que ceEe fournie actueEement par les contours<br />

d'orese ou lorsque <strong>des</strong> difficultés motrices en rendent la manipulation<br />

daelle ou hpossible. Ils sont égdement utilisés pour I'apparelllage<br />

prtkuce du nouveau-né ou du nourrisson, pendant ta phase<br />

exploratoire précedant l'appareaage stéréophonique avec <strong>des</strong><br />

contours d'oreille.<br />

L'6tiolugie9 la nature et l'hportanee de la ddficience auditive de<br />

I'enfant ou de l'adolescent orientent le choix <strong>des</strong> caracttsristiques de<br />

Pampmation et <strong>des</strong> voies de transmissian du sipal acoustique.<br />

-RUT mode d'itppEcation, les modalrtb <strong>des</strong> procédures d'adaptation<br />

et <strong>des</strong> contrales prothétiques sont suhrdonnés sui contr&tes imposees<br />

par P$ge de Penfant, le niveau de son langage, l'état de sa parole<br />

et, éventuellement, l'association d'autres handiaps. En outre,<br />

les aptitu<strong>des</strong> et le comportement de Prtnfant ou de l'adolescent, Il'attitude<br />

et les compétences de Penvkonnement famzllah la nature <strong>des</strong><br />

structures éducatives interviennent pour inaechlr I'indication, les<br />

mod&t& et les objectifs de l'appareillage.


De la juste appréciation de l'interaction de ces divers facteurs<br />

dépendront les options que le médecin prescripteur, l'audioprothésiste<br />

et l'équipe psycho-pédagogique chargée de l'bducation ou de la<br />

rééducation seront amenés à prendre. La diversité et la complexité<br />

<strong>des</strong> situations individuelles sont telles que chaque enfant ou adolescent<br />

déficient auditif peut et doit être considéré comme un cas particulier<br />

(cf. Bulletin d'information annexé Li. la Recommandation BLAP<br />

061 1).<br />

1. Le choh de Pappareü de corredion auditive appeue une suite<br />

d'opérations tendant à la sélection rationnelle de celui-ci.<br />

Elles comportent notamment :<br />

- la mesure ou l'évaluation <strong>des</strong> caract6ristiques psychoacoustiques de<br />

la fonction auditive, utiles à la correction prothetique du déficit ;<br />

- la détermination <strong>des</strong> spécifications optimales de correction (gain<br />

acoustique, courbe de réponse, niveau de saturation, hitations,<br />

etc.) ;<br />

-la détermination <strong>des</strong> modalités d'appareillage (type et forme de<br />

l'appareil, voie de transmission, mode stéréophonique ou monophonique,<br />

etc.), en se conformant au<br />

indications et contre-indications<br />

médicales portées à la connaissance de l'audiaprothésiste.<br />

NB : L'appareillage normal est Pappareiiiage slt5r4ophonique pratique<br />

au niveau <strong>des</strong> oreiües avec deux amplificateurs et leurs transducteurs<br />

qui constituent ensemble l'appareil de correction auditive<br />

stéréophonique.<br />

2. L'adaptation de I'appareil de correction auditive comprend<br />

les opérations ayant pour but son appropriation individuelle, telles<br />

que la prise d'empreinte <strong>des</strong> pavillons et <strong>des</strong> conduits auditifs externes,<br />

la confection et l'ajustage mécanique et acoustique <strong>des</strong> embouts<br />

auriculaires, la mise en place de l'appareil, la rbgulation de ses<br />

fonctions et le réglage de son fonctionnement.<br />

L'appareil ainsi adapté et personnalise constitue <strong>des</strong>urmais une<br />

prothèse auditive. La prothése auditive stédophoniqae peut être<br />

rbalisée avec deux contours d'oreille, avec dem appareils intra-auri-


culaires ou avec deux branches de lunettes acoustiques. Elle donne h<br />

l'enfant ou adolescent déficient auditif la possibilité de localiser la<br />

source sonore et, donc, d'acquérir la notion de la direction <strong>des</strong> sons<br />

et de leur déplacement dans l'espace. En prêtant l'oreille, en choisissant,<br />

comme l'entendant, une perception préférentielle, c'est-&-dire<br />

en écoutant d'une ore& plus que de l'autre, 2 privil(hgie, au milieu<br />

du bruit, la parole provenant d'une direction d6terminée et en assure<br />

la discrhhatlon gr3ce à une v6ritable emergence pqchologique.<br />

3, Le contrôk de ifem?c8cft4 Immédiate a pour but de s'assurer<br />

de la pertinence du choix et de l'adaptation de la prothèse auditive et<br />

d't5vduer la correction obtenue. 11 s'effectue à l'aide <strong>des</strong> moyens et<br />

<strong>des</strong> procédés permettant d'apprkier comparativement le comportement<br />

auditif du déficient auditif avant et aprks l'adaptation de la<br />

prothese,<br />

4, L9éducation prothbtique du d6ficient auditif a pour but l'adaptation<br />

de celui-ci à sa prothèse. Elle consiste a donner h. lknfant ou<br />

adolescent, ainsi qu'h son environnement familial et scolaire, l'assistance<br />

nécessaire à la mise en oeuvre optimale de la prothèse. Elle<br />

comporte notamment le contrôle de i'entraînement ou de la réadaptation<br />

du déficient auditif la perception <strong>des</strong> signaux acoustiques<br />

d6I1w6s par la prothèse auditive.<br />

5.h contdle de h permanence de l'eEweit4 de h prothèse<br />

artditive exige <strong>des</strong> ~(hrifications periodiques de l'état et du fonctionnement<br />

de I'appareil, <strong>des</strong> sources d'knergie 61ectrique et <strong>des</strong> &pipements<br />

compl6mentaires, ainsi que les réparations éventuellement<br />

nécessaires. Des bilans audioprothétiques réguliers permettent de<br />

contrôler et, éventuellement, de rectifier l'adaptation de la prothèse<br />

auditive par une modification addquate de ses caract$ristiques<br />

acoustiques.


IV. LES INDICATIONS DE LA PROTHESE AUDITIVE<br />

Il est parfois assez difficile de préjuger du sort d'un appareillage<br />

avant que celui-ci n'ait été mené à son terne. Pour la plupart <strong>des</strong><br />

surdités de l'enfant ou de l'adolescent, Ia prothèse auditive n'est<br />

qu'un <strong>des</strong> éléments de la rehabiiitation, qui ne trouvera sa pleine efficacité<br />

que si elle est intimement intégrée à l'action éducative -<br />

psychologique, orthophonique et pédagogique - et si le milieu familial<br />

est préparé à l'accepter et à lui accorder la place qui lui revient.<br />

1. Surdités de transmission<br />

La prothèse auditive est indiquée dans les rares cas où les traitements<br />

médicaux et/ou chirurgicaux n'ont pas réussi i% lever l'obstacle<br />

oppose à la transmission <strong>des</strong> signaux acoustiques au niveau de<br />

l'oreille externe et de l'oreille moyenne.<br />

L'appareillage sera effectué autant que possible par voie aérienne<br />

avec, de préférence, <strong>des</strong> contours d'oreille dont la courbe de<br />

réponse flexible doit pouvoir t?tre ajustée pour amplifier les signaux<br />

acoustiques préférentiellement dans les plages fréquentielles où leur<br />

transmission est affaibiie. Par contre, si l'obturation du conduit auditif<br />

par un embout est contre-indiquée, dans le cas d'une otite chronique<br />

par exemple, il convient d'employer <strong>des</strong> appareils à conduction<br />

osseuse. <strong>Les</strong> surdités de transmission bilatérales par aplasie doivent<br />

être appareillées au plus tdt, par conduction osseuse, d b que l'intégrité<br />

de l'oreille interne aura été constatée.<br />

2. Surdités de perception<br />

Dans leur très grande majorité, les déficiences auditives de l'enfant<br />

relèvent de la surdité de perception.


En l'absence dkn dépistage systematique, la découverte d'une<br />

déficience auditive IégtLre est souvent tardive et provoquée, par<br />

exemple, par Ibbsewation d'un trouble persistant de I'articulation ou<br />

d'me dysorEh;opaphre à base de confusions phonétiques, D'une maniere<br />

gbnerde, l'appareillage est indiqué dès que la perte auditive<br />

moyenne atteint ou depasse JO décibels ; il est néanmoins parfois nécessaire<br />

d'appareaer un enfant ayant une perte auditive moindre,<br />

mais dont la courbe tonde, normale dans les graves, s'inffkhit fortement<br />

aux frequences élevées, signant une mauvaise perception <strong>des</strong><br />

phon&- aigus.<br />

ta procédure. d%ppareiilage dem toujours etre conduite avec<br />

prudence et doigté ; une surcorrection risquerait en effet dkntraker*<br />

soit le refus de 1% prothèse (r6action sabutaire), soit <strong>des</strong> troubles physiol~@ques<br />

au psycholo&ques dont la gravit6 ne doit pas être sousestimée.<br />

Aussi, les contrBles de tolerance prothétique seront-ils d'autant<br />

plus fréquents et plus attentifs que la perte auditive initiale aura<br />

été plus faible. Le port de la prothèse pourra souvent n'être qu'intermittent<br />

et hit&, par exemple, h la rééducation orthophonique et/ou<br />

am activités mlaires.<br />

Ce sont celles gui relevent par excellence de la prothkse auditive.<br />

Leur apparesage est néanmoins bien souvent difficile et la recherche<br />

de fa solution prothétique la plus efficace et la mieux toléree<br />

peut être longue et ardue. La concertation périodique avec l'équipe<br />

rnédico-psycho-pédago&que ayant en charge i'edant complétera<br />

utgement I'hformarion de l'audioprotfi6siste et le mettra en mesure<br />

de. prwéder aux ajustements <strong>des</strong> caractéristiques de la prothése exi-<br />

2. te Bureau intemagonat d'AudiophonaEo@e, dit BIAP, a cfassiS les diSEcierrces auditives en<br />

quatte etegories, en fonction de la moyenne <strong>des</strong> pertes audiamdtSques toriales refevhes aux<br />

frequences 500,l Oa0 et 2 Oa0 Nz.<br />

DA. 16gères : moyenne <strong>des</strong> pertes comprise entre 20 et 40 dB,<br />

DA. moFnnes : moyenne <strong>des</strong> pertes comprise entre 40 et 70 dB.<br />

DA. s4&m : moyenne <strong>des</strong> pertes compiise entre 70 et 90 dB.<br />

RA profon<strong>des</strong> : moyenne <strong>des</strong> pertes dépassant 90 dB.


gés par le développement de l'enfant et l'évolution de ses aptitu<strong>des</strong><br />

perceptives.<br />

L'é14vation <strong>des</strong> seuils d'audition nécessite une mpfIfiation h-<br />

portante <strong>des</strong> signaux acoustiques. La plupart <strong>des</strong> deficients auditifs<br />

profonds pourront etre appareiltés en contours d'oreille2 car les progrBs<br />

récents de la miniaturisation <strong>des</strong> compos~ts électroniques ont<br />

permis un accroissement notable de la puissance utile de leurs amplificateurs<br />

qui bénéficient en outre d'une flexibilité étendue de leurs<br />

caractéristiques. On peut donc envisager pour ces déficients auditifs<br />

profonds, au même titre que pour les autres catégories de sourds, la<br />

possibilité d'un appareillage stér6ophonique qui les mettra en mesure<br />

de prendre conscience du caractère spatial <strong>des</strong> signaux<br />

acoustiques.<br />

3. Surdités acquises<br />

L'indication de l'appareillage est, dans ce cas,, toujours d'une extrêmes<br />

urgence, sauf, éventuellement, s'il s'agit d'une déficience auditive<br />

légère.<br />

Si la surdité survient apres l'acquisition du langage, c'est-à-dire<br />

apres l'gge de 5-6 ans, il importe de conserver à l'enfant la possibllitç!<br />

de percevoir, au moins partieuement, <strong>des</strong> messages acoustiques en<br />

provenance de son envkonnement, même si l'image qu'il en reçoit lui<br />

para% le plus souvent caricaturale, du moins au début. L'essentiel,<br />

c'est de sauvegarder Ia communication par l'utilisation <strong>des</strong> reliquats<br />

auditifs dont la rééducation concomifante tentera de tirer le meilleur<br />

parti possible. Il faut éviter à tout prix de laisser l'enfant se couper du<br />

mande sonore dont il a eu connaissance, quitte à lui en faire accepter<br />

une représentation qui, même tronquée, lui fournira les points de<br />

repère indispensables A la sauvegarde de son insertion sociale.<br />

Dans le cas d'une surdité acquise sévsvère ou profonde, l'appareillage<br />

hrnkdiat permet également de faire retrouver à l'enfant un cer-


tain contrôle audiophonatoire qui aidera l'orthophoniste ou le pho-<br />

~atre à lutter contre la dégradation de l'articulation et l'altération du<br />

timbre de b voix.<br />

Si l'enfant devient sourd avant qu'il sache ke, le fangage risque<br />

de se détériorer rapidement. On concevra donc sans peine l'importance<br />

de l'intervention immédiate du ré6ducateur et de l'audiuprothéskte.<br />

4. Handicaps multiples avec atteinte de lyaudition<br />

La Recommandation B W 21-01 prgcise dans ce cas que « l'ap-<br />

pareillage auditif, idMement stéréophonique, doit être envisagé<br />

d'autant plus précocement que la déficience auditive est plus importante<br />

... Un contrBle effectif et régulier de la permanence de Yefficacité<br />

et de l'acceptation de la prothèse auditive doit être effectu6 dans<br />

le cadre d'une observation de longue durée ... L'expression multiple<br />

du handicap et le dépistage tardif de la déficience auditive ne constituent<br />

jamais une contre-indication à l'appareillage. Certes, l'expression<br />

multiple du handicap sera parfois telle qu'une communication<br />

orale restera aléatoire, mais l'apport de la prothèse auditive restera<br />

primordial, tant sur le plan psychomoteur que sur le plan relationnel<br />

et affectif, favorisant ainsi la prise en charge globale du problème<br />

posé par l'enfant W.<br />

V; DISPOSITWS TECHNIQUES COIMPLEMEWmS<br />

Pour l'btudiant sourd confrontf: aux pikges acoustiques d'amphithégtres<br />

rarement préparés à l'accueillir, pour l'enfant déficient auditif<br />

intégré en milieu scolaire normal, en dépit d'un bon appareillage<br />

réalisé avec <strong>des</strong> protheses parfaitement adaptées à leur handicap, les<br />

obstacles il la bonne réception d'un message sonore restent<br />

nombreux :


. La distance de la source sonore provoque non seulement l'affaiblissement<br />

de l'intensité de la voix de l'enseignant ou du conférencier,<br />

mais aussi et surtout un amortissement rapide <strong>des</strong> frdquences<br />

aigues indispensables à la discrimination de sa parole.<br />

. Une mauvaise qualité acoustique du I d t une Ft!ver6réntiun<br />

inopparhine sont trop souvent source d'interférences acoustiques alterant<br />

f*hieIii9;bilité du message.<br />

, Le bnùt d9ambianrre de l'environnement immédiat ou lointain,<br />

enfin, peut masquer partieEement ou totalement le message sonore.<br />

1. Le bruit, handicap majeur du déficient auditif appareille<br />

En dépit <strong>des</strong> nombreux perfectionnements apportBs depuis vingt<br />

ans par leurs concepteurs aux appareils de correction auditive, le<br />

problkme dé la compr6hension de la parole dans un environnement<br />

bruyant reste pour le déficient auditif appareiiiB la préoccupation<br />

majeure.<br />

En effet, que ce soit dans une rue bruyante, en classe, ou dans<br />

une réunion famitiafe, le microphone de la proth$se auditive captera<br />

tout autant, et souvent mieux, le bruit <strong>des</strong> voitures et celui <strong>des</strong><br />

conversations que le signal utile à l'enfant déficient auditif, c'est-àdire<br />

la parole de son interlocuteur. La correction auditive binaurale,<br />

stereophonique, en restaurant la localisation sonore, amtsriore bien<br />

sûr dans une notable mesure la discrimination de la parole dans k<br />

bruit, mais fa composante grave du bruit, qui domine generalement<br />

dans le bruit de fond de l'environnement, masque le plus souvent les<br />

traits pertinents aigus indispensables à 1'inteEgibEté de la parole.<br />

Des innovations r4centes tentent dktténuer cet effet de masque.<br />

Il s'aigit essentiellement d'amplificateurs de prothèse auditive deux<br />

canaux, dont l'un est équipé d'un système de réduction automatique<br />

du bruit. Ce système diminue automatiquement, dès l'apparition<br />

d'une perturbation acoustique, l'amplzication de la zone grave, selon<br />

un mode programmé préalablement par i'audioprothbsiste en fonction<br />

<strong>des</strong> caractéristiques de la déficience auditive de son patient. Dès


que b bruit perturbateur dkparaît, l'amplificateur retrouve automatiquement<br />

sa caractéristique initiale.<br />

L'idée de relayer le mode aerien d'achemhement de l'information<br />

acoustique, parfois trop perallem pour le handieap6 auditif, par<br />

<strong>des</strong> supporls physiques - les rayannernents'dlettmmagn4tiques -,<br />

plus sOrs et plus fidèles, n'est pas nouveüe. PrinGipes et applications<br />

ont déjà fait l'objet de nombreuses publications. Leur mise en pratique<br />

s'est rkemment beaucoup améliorée. Avec une mise en oeuvre<br />

et une maniabilité plus ah&ce, les dispositifs proposés assurent, mieux<br />

encore que par le pass6, <strong>des</strong> Piaisons privfi6gi6es entre un locuteur et<br />

les auditeurs deficients auditias. Une autre source sonore peut ega-<br />

Peinent se trouver au depart d'une telle liaison privifégiée qui peut<br />

actuellement etre établie selon trois mo<strong>des</strong>.<br />

2.1. LA LWSON m m-WQmNCE (HF)<br />

La liaison haute-fréquence s'effectue par le moyen de sipaux<br />

radio-électriques émis en modulation de frCqbence.<br />

L'&metteur comporte le plus souvent un microphone cùutérieur<br />

clips6 au vgtement du Iucuteur de maniere A se trouver il environ 20<br />

centimètres de sa bouche. Une entrée adaire de l'émetteur permet<br />

de le coupler ti une autre source de modulation (magnétophone,<br />

rkepteur de TVy etc.) et d'en transmettre le messa- sonore isolément<br />

ou en parailèle avec b voix de l'enseigriant ou du conférencier.<br />

Le récepteur, ob6gatokement accord6 il la fréquence de l'dmetteur,<br />

est connecté aux prothèses auditives individuelles par l'intermédiaire<br />

de leur entrée audio. <strong>Les</strong> prothèses qui n'en sont pas pourvues


peuvent être reliées au récepteur par l'intermédiaire d'une liaison<br />

inductive (mini-boucle ou plaquettes inductives).<br />

Au récepteur peut iitre intégré un microphone d'ambiance avec<br />

son amplificateur qui, dans un <strong>des</strong> systèmes proposés, peut faire office<br />

de prothèse auditive. Plus généralement, le microphone d'ambiance<br />

permet l'interactivité du déficient auditif avec son entourage.<br />

Lorsque le récepteur est dépourvu de microphone d'ambiance, l'interactivité<br />

est assurée griice au microphone <strong>des</strong> prothèses individuelles.<br />

La transmission radio-électrique privilégie le signal utile qui se<br />

trouve disponible à l'entrée de l'amplificateur de la prothèse dans<br />

l'intégralité de sa qualité acoustique, sans aucune altération du fait<br />

de la distance d'émission qui, dans <strong>des</strong> circonstances favorables, peut<br />

dépasser 30 mètres, et sans perturbation par le bruit de l'environnement.<br />

La sélectivité de la transmission HF est telle que <strong>des</strong> fr6quences<br />

porteuses voisines peuvent être utilisées dans <strong>des</strong> locaux juxtaposés<br />

sans qu'il y ait interférence entre les émissions.<br />

Efficace même en plein air (cour de rkréation, promenade,..) le<br />

systbme HF permet de rester en liaison constante avec le déficient<br />

auditif qui reçoit le message oral intégral comme si son interlocuteur<br />

se trouvait à 20 centimètres (distance de la bouche du locuteur au<br />

microphone de l'émetteur).<br />

Transmise sur l'une <strong>des</strong> fréquences autorisées en France - de<br />

32 à 72 fréquences, selon le système proposé - l'émission ne peut<br />

être reçue que par un récepteur accordé à la frkquence de l'émetteur.<br />

Pour pallier cette rigidité et permettre les échanges ou les regroupements<br />

d'élèves de classes différentes, diverses modalités sont<br />

actuellement proposées :


.le récepteur peut comporter deux ou trois anaux fréquentiels<br />

cornmutables dont l'un est rtlsemé aux activités communes ;<br />

<strong>des</strong> modutes de réception, rep6rés par un code de couleurs, peuvent<br />

&tre htemfrangés instantanément pour accorder le recepteur à la<br />

fréquence de l'&metteur choisi.<br />

2.2. LA LWSON INFRAROUGE,<br />

L'information acoustique est transmise par rayonnement infrarouge<br />

en modulation d'imp&ions.<br />

L'émetteur port4 sur h poitrine comporte 9 dio<strong>des</strong> hettrices<br />

cowant l'espace dans toutes les directions. Son microphone, plac6 à<br />

envkon 20 centùnètres de fa buuche, peut, à la demande, être dtrectionnel,<br />

ce qui améliore encore fe bon rapport signal-bruit.<br />

Le tkepteur comporte un &mplificateur intkgré. Le microphone<br />

d'ambiance incorporé assure i'interactivitt5 du déficient auditif avec<br />

son environnement. L+e récepteur peut être connecté aux prothèses<br />

auditives individuelles soit dkectement par leur entr6e audio, soit<br />

par liaison inductive (6i-bucle ou plaquettes). Le niveau de sortie<br />

de PampWiateur autorise également X'utilisatiun directe de transducteurs<br />

de sortie : casque à 9çouteurs supra-auricuIaUes ou &outeurs<br />

auricdakes adaptables avec embouts individuels.<br />

Dans ce mode de transmission, les fréquences d'émission et de<br />

modulation sont uniques. <strong>Les</strong> récepteurs peuvent donc être utiiis6s<br />

indifféremment avec tous les émetteurs d'un même établissement ou<br />

d'tltablissements diff6rents, ce qui facilite beaucoup les possibilites<br />

d%terchangeab%té individuelle ou de groupes.<br />

Soumise aux lois de l'optique, Xa propagation du rayonnement<br />

infrarouge se trouve arrêt6e par <strong>des</strong> cloisons opaques. L'émission


este donc limitée au local auquel elle est <strong>des</strong>tinée, sans brouillage<br />

mutuel entre locaux contigus.<br />

L'émetteur infrarouge couvre environ 30 mètres canés. Pour<br />

une surface supérieure, un amplificateur d'impdsions infrarouges, le<br />

transpmdeur, relaie les signaux émis et permet de cowrir environ<br />

80 mètres carrés. Pour <strong>des</strong>servir <strong>des</strong> salles plus importantes, 3 suffit<br />

d'utiliser simultanément plusieurs transpondeurs.<br />

2.2.4. Servitu<strong>des</strong><br />

La transmission du message sonore par rayonnement infrarouge<br />

modulé n'est pas possible en plein air* cas elle s'y trouve masqube<br />

par le spectre infrarouge aléatoire de la lumi&re salaire. Par contre,<br />

la liaison infrarouge peut être utilisée dans <strong>des</strong> salles aux baies vitrées<br />

largement ouvertes sur l'extérieur.<br />

2.2.5. Extensions<br />

Outre son utilisation dans un environnement éducatif, la liaison<br />

infrarouge est de plus en plus employée dans un cadre familial ou<br />

convivial pour faciliter l'écoute de la TV, de la radio ou d'une chaîne<br />

électroacoustique.<br />

L'émetteur plat, monophonique, se branche 3 la sortie casque ou<br />

haut-parleur extérieur. Son rayonnement couvre environ 30 metres<br />

carrés, Pour les salles de plus gran<strong>des</strong> dimensions, <strong>des</strong> radiageurs infrarouges<br />

de plus grande puissance peuvent fui être raccordés.<br />

Une large palette de récepteurs est actuellement disponible sous<br />

forme de stethoscope ou de boîtier pectoral, pour usagers non appareillés<br />

ou pour déficients auditifs porteurs de prothèses.<br />

Cette très grande souplesse d'application rend la liaison infrarouge<br />

particulièrement intéressante pour l'écoute en groupe d'émissions<br />

de TV, dans <strong>des</strong> foyers de jeunes par exemple.<br />

2.3. LA LIAISON INDUCTIVE<br />

La liaison inductive est assurée par un champ magnétique alternatif<br />

modulé.


L'émetteur le plus courant a la forme d'une boucle magnétique<br />

constituée par une ou plusieurs spires d'un conducteur électrique<br />

parcouru par un courant alternatif basse fréquence provenant d'une<br />

source de modulation (microphone, magnétophone, tuner, etc.).<br />

Pour que le champ magnétique engendré par la boucle ait une<br />

intensité suffisante, un amplifiateur doit nécessairement être interposé<br />

entre la source de modufation et la boucle. Si la boucle ceinture<br />

un local, la puissance de l'amplificateur doit etre proportionneue i1 ja<br />

surface à couvrir. A titre d'exemple, un ampuimteur de 15 watts<br />

permet de couwir une surface de 60 mètres carrés environ.<br />

Ii existe, pour l'usage individuel, soit <strong>des</strong> « mini-boucles >, portées<br />

en collier autour du cou et connectées par un cable léger à la<br />

sortie de l'amplificateur d'un récepteur de TV, par exemple, soit <strong>des</strong><br />

plaquettes inductives <strong>des</strong>tinées être insérées entre un contour<br />

d'oreille et le crane. Ces deux dispositifs peuvent également servir de<br />

relais entre les récepteurs HF ou infrarouges et les prothèses dépourvues<br />

d'entrée audio.<br />

2.3.2. Réception<br />

Le champ magnétique modulé crée dans la bobine d'induction,<br />

dont sont généralement pourvus les appareiis de correction auditive,<br />

une force Qectro-motrice d'induction. Celle-ci est appliquée aux<br />

bornes de I'amplificateur qui, après adaptation et amplification, la<br />

restitue aux bornes de f'écouteur de la prothèse auditive.<br />

Premier en date <strong>des</strong> mo<strong>des</strong> de transmission privZk@&e de l'information<br />

acoustique A I'intention <strong>des</strong> déficients auditifs, la liaison<br />

inductive avait trouv& un vaste champ d'application dans les classes<br />

d'enfants handicapés auditifs.<br />

Un inconvénient majeur, la diaphonie, c'est-à-dire la captation<br />

réciproque <strong>des</strong> signaux émis par les boucles équipant deux locaux


voisins, en a fait abandonner progessivement l'ut&ation dans la<br />

plupart <strong>des</strong> 6tabEssernents d'enfants sourds.<br />

La liaison inductive par boucle magnétique reste n4anmoins la<br />

solution economique lorsqu'il s'agit d'acheminer B l'abri <strong>des</strong> perturbations,<br />

susceptibles d'en entacher la quafitk, un message sonore<br />

dans <strong>des</strong> locaux relativement vastes <strong>des</strong>tinés à recevoir <strong>des</strong> cofiectivités<br />

powant comprendre en leur sein <strong>des</strong> déficients auditgs apparerlles,<br />

tels que les salles de conférences, les maisons de la culture, les<br />

théâtres, les cinémas, les lieux de dte, sans oublier les amphithéâtres<br />

universitaires.<br />

Il paraît surprenant que de tels équipements relativement faciles<br />

h installer et d'un coQt modéré, se rencontrent encore si rarement en<br />

France, quand on sait quel confort auditif ils pourraient apporter aux<br />

malentendants, trop souvent frustrés de communication dans notre<br />

monde voué A l'audiovisuel.<br />

L'induction magnétique est aussi mise à contribution pour l'activation<br />

de différents systémes d'alerte transformant les sonneries<br />

d'appel téléphonique ou de porte d'entrée en signaw lumineux (tiash<br />

électroniques, etc.). Des combhaisons ingénieuses permettent également,<br />

par I'ktermédiaire de vibrateurs, d'alerter pendant leur<br />

sommeif les personnes atteintes de deficience auditive sevbre ou profonde,<br />

dont la sensibilité vibro-tactile est presque toujours trés<br />

développée,<br />

VI. PROSPECTIVE<br />

<strong>Les</strong> tendances actuelles de I'hlution de la prothhse auditive<br />

concernent essentiellement la conception <strong>des</strong> appareils correcteurs<br />

de la surdité, la méthodologie de 't'appareillage et l'int6gation de la<br />

prothèse grsce à la chirurgie.


1. Evo~ution de la conception <strong>des</strong> appareils correcteurs de la surdité<br />

1.1. LE SYSRWE DE REDUmON AUTOMmQm DU BRUIT$ sipaf6<br />

prkedernment, améliore I'hteEgibilité là où le bruit de fond<br />

est A dominante grave (rue, voiture, atelier). E est moins efficace<br />

dans un lieu 09 les conversations multiples s'entrmroisent et se remument:<br />

il en rèsulte un bruit de fond particulier, le bruit de<br />

cc &ail party » <strong>des</strong> amsticiens, o& dominent les fléquences et les<br />

rythmes propres à la parole. En fonction de son niveau, ce bruit de<br />

fond peut constituer pour le deficient auditif appareak un masque<br />

presque absolu pour fa comprehension de la parole.<br />

Plusieurs axes de recherche tendent à proposer une solution à<br />

cet aspect particarement délicat <strong>des</strong> performances <strong>des</strong> prothtsses<br />

auditives. L'une <strong>des</strong> solutions consiste équiper X'ampUicateur de<br />

trois canaux d'aamplification se partageant le spectre sonore et pouvant<br />

être programmés separément par l'audioprothésiste de manière<br />

B reguler les correctifs d'amplification en fonction <strong>des</strong> pârticularités<br />

du champ auditif et <strong>des</strong> aléas de l'environnement.<br />

Une autre solution consiste à proposer dans un meme contour<br />

d'oreille quatre programmations dürérentes pour quatre ambiances<br />

diE4rentes, les paramétrages respectifs 6tant m6moris~s dans la<br />

mkmoire d'une commande B distance semant A activer X'un ou l'autre<br />

programme en fonction de l'environnement du moment,<br />

l<strong>Les</strong> plus grands espoirs résident dans b remplacement, ii moyen<br />

terme, de hmpfificateur anafogique <strong>des</strong> prothèses actueffes par un<br />

ampldcateur n-6rique. Sans doute verra-t-an alors proposer une<br />

prothase auditive digitale à plusieurs canaux d'ampfification, régut&s<br />

par <strong>des</strong> micraprotesseurs adaptant automatiquement les caracteristiques<br />

sonores, supprimant les bruits genants par un filtrage adaptatif<br />

et procurant au malentendant le confort auditif auquel ii aspire.<br />

1.2. L'AVENIR DE LA PRU~ESE AI.JDIT~VE est étroitement lié aux<br />

progrès réalisés dans le traitement du signaX, tel que le .permettra la<br />

technique numérique. Tenant compte <strong>des</strong> distorsions de fréquence et<br />

de temps qui affectent souvent le champ auditif r4siduel <strong>des</strong> surdités<br />

de perception, il sera alors sans doute possible dkxentuer, par


exemple, les transitions phonétiques utiles à i>ùlteili&;b%té de la parole,<br />

imitant ainsi les effets d'une articuiation correcte, IEln se rapprochant<br />

<strong>des</strong> traitements employés dans les proc&d& de rwonn~ssance<br />

de la parole, on pourrait aussi, par une r6duction de sa redondance,<br />

extraire de la parole les paramètres les plus pertinents susceptibles<br />

d'iitre identifiés par le déficient auditif.<br />

IT convient de mentionner taut paticuli&rement les rmherches<br />

dirigées par Xe Professeur 3.-C, Lafon, reposant sur le principe de la<br />

translation <strong>des</strong> parties simntes du s@re aigu dans une zone<br />

grave? où se trouve reconstituée une structure acoustique, support6e<br />

par <strong>des</strong> sons audibles du sujet, qui apporte les él6ments dtintensité,<br />

de rythme, de durée et de mélodie néeessaires A Pidentgication du<br />

message.<br />

A l'intention d'une catbgorie de sourds auxquels la gravité de<br />

leur handicap interdit l'accès à la prothèse auditive, plusieurs solutions<br />

techniques proposent la substitution de l'information auditive<br />

par une information vibro-tactile.<br />

2, Evolufion de Ia méthodologie de l'appareillage<br />

L'empirisme de fait, qui longtemps prévalait dans It; choix <strong>des</strong><br />

appareifs de correction auditive, a heureusement c6dé le pas aux métho<strong>des</strong><br />

rationnelles de sélection, parmi lesquefies if faut citer les métho<strong>des</strong><br />

françaises de pre-regage de Renard et C.T.M. de Le Her. En<br />

outre, la possibilité de pratiquer <strong>des</strong> mesures « in situ », c'est-&-dire<br />

de mesurer directement, dans le conduit auditif, la pression acoustique<br />

exercée sur le tympan par un signal acoustique donné (son pur<br />

ou bande de bruit aléatoire), oreille nue, puis oreille appareüféq<br />

permet d'obtenir comparativement fa valeur réelie <strong>des</strong> araetgristiques<br />

de f'arnpfifimtion, compte tenu <strong>des</strong> variations hdividuefles<br />

dues il l'obturation et a u dimensions résiduelles du conduit auditif<br />

ainsi qu'aux modifications acoustiques imputables A i'ernbout.<br />

La précision <strong>des</strong> procédures d'adaptation bbneficie aussi considérablement<br />

de l'évolution <strong>des</strong> possibilités de gestion <strong>des</strong> données


acoustiques et audiologiques par <strong>des</strong> logiciels informatiques spécifiques<br />

de l'appareillage audioprothétique.<br />

3. La prothèse auditive integrée au geste chirurgical<br />

. A la condition que l'inefficacité absolue <strong>des</strong> prothèses auditives<br />

traditionnelles ait été démontrée (Recommandation BIAP 07-1 bis),<br />

l'application de la technique de l'implant cochléaire, introduite en<br />

France en 1976 par le Professeur Cl. H. Chouard, est susceptible<br />

d'être envisagée pour les enfants et adolescents atteints de surdité<br />

profonde ou totale quand le nerf auditif a conservé au moins partiellement<br />

sa fonction. Elle consiste à court-circuiter la cochlée en<br />

stimulant directement les fibres nerveuses auditives par <strong>des</strong> signaux<br />

électriques élaborés à partir d'un traitement <strong>des</strong> signaux sonores.<br />

L'électrode extracochléaire et l'implant monocanal ne délivrent<br />

qu'une information limitée, mais « l'apport d'informations sonores<br />

d'intensité, de rythme, de durée, d'environnement par la prothèse<br />

cochléaire est essentiel lorsque l'isolement sensoriel est total » (Pr.<br />

A. Robier). L'enfant devra être


CONCLUSION<br />

Chaque enfant sourd est un cas particulier ; aussi, son appareillage<br />

est-LI ni rapide, ni facile.<br />

De l'indication à l'accomplissement et jusquti l'ultime contrôle,<br />

le chemin est long à parcourir, pas toujours tracé d'avance et souvent<br />

malaisé ; mais surtout - ne BYoubLions jamais - son appareilla- est<br />

un acte qui engage, plus qu'on ne le suppose parfois, l'avenir de cet<br />

enfant qui nous a été confié.<br />

11 faudra savoir remettre en question, à un moment donné, les<br />

choix, les options qui, pourtant, paraissaient devoir être défhitives ;<br />

mais si, en plus de son savoir srt de son savoir-faire, l'audioprothbsiste<br />

y met un peu de son coeur, al: connaîtra peut-être une joie houbliable<br />

: celle que procure, & qui en est le témoin, l'éveil à %a vie<br />

bruissante d'un tout petit quand, pour lui, e Pa porte s'ouvre et laisse<br />

entrer l'avenir » (Graham Greene).


ANNEXE<br />

Arrêté du 21 septembre 1987 modifiant le tarif interministériel<br />

.<strong>des</strong> prestations sanitaires (IO. du 3.10.1987).<br />

. . . Article premier -<br />

... <strong>Les</strong> appareils correcteurs de la surdité, sous réserve qu'ils<br />

soient réguiierement homologués et sans préjudice <strong>des</strong> dispositions<br />

en vigueur au regard de la réglementation <strong>des</strong> prix, sont pris en<br />

charge dans les conditions ci-après :<br />

A, - Dispositions générales :<br />

Apparerls, y compris l'adaptation<br />

Quel que soit l'appareil appliqué, le remboursement est effectué<br />

sur la base d'un tarif de responsabiüté égal à 1 472,30 F 3.<br />

B. - Dispositions particulières concernant les jeunes dgés de moins de<br />

16 ans révolus :<br />

1. - Lorsque l'appareil appliqué figure sur la Liste annexée ciaprhs,<br />

le remboursement est effectué sur la base du tarif de responsabilite<br />

correspondant.<br />

II. - L'attribution d'un apparertlage stéréophonique est accordée<br />

sur prescription médicale circonstanciée et sous réserve de l'avis favorable<br />

du contrale médical.<br />

Sans changement 4.<br />

Entretien et réparations<br />

Art. 2 - La riste et le tarif mentionnés au B (1) de l'article le' sont<br />

ceux annexés à I'arreté du 18 février 1986 ...<br />

3. Rameni5 à 1 310 P du fait de la baisse de la TVA ramenée a 5,5 %.<br />

4. L'allocation annuelle d'entretien de 240 francs est maintenue.


QUATRIEME CHAPITRE<br />

Actions nouvelles


EDUCATION PREZOCE<br />

GUIDANCE PARENTALE<br />

ACCOMPAGNEMENT DES PARJ3NTS<br />

Education précoce et guidmce parentale sont indissociables.<br />

Elles s'interpénètrent à chaque instant. Plus l'enfant est jeune ou la<br />

découverte de la surdité récente, plus la guidance parentale tient une<br />

place prépondérante. Et, bien qu'il soit difficile de séparer les éléments<br />

de la prise en charge qui relèvent de l'éducation précoce de<br />

ceux qui relèvent de la guidance parentale, on pourrait dire que la<br />

prernit?re recouvre davantage les aspects pragmatiques et la seconde<br />

les aspects relationnels. Au terme de guidance parentale, largement<br />

utilisé et compris de tous, on peut préférer celui « d'accompagnement<br />

<strong>des</strong> parents » ou « relation d'aide aux parents ».<br />

Cette séparation virtuelle en deux parties a pour mérite de<br />

mettre en évidence les particularités de la guidance parentale. Apporter<br />

une aide individualisée aux parents tout au long d'une prise en<br />

charge est une entreprise si délicate qu'il paraît difficile d'en concevoir<br />

un modèle idéal, adaptable à chaque famille. D'autre part, autre<br />

difference par rapport à l'éducation précoce, elle ne se limite pas à la<br />

periode de la petite enfance, mais se poursuit dans le temps, avec <strong>des</strong><br />

moments charnières,<br />

* Médecin phoniatre attache 5 t'hôpital Trousseau, Paris. CAlMSP Espoir 93. ClSR Des<br />

Guiblets. Créteîl94ûûû.<br />

** ORL phoniatre. Service ORGAudiophonologie, CHR Besançon, 2,000.


L'éducation précoce, comme son nom l'indique, consiste en une<br />

-action éducative instaurée très tôt, c'est-&-dire en règle générale,<br />

avant trois ans (cap de l'entrée en école maternelle). Il s'agit d'une<br />

prise en charge pluridisciplinaire, à caractère médico-éducatif, visant<br />

à préparer l'enfant sourd à l'acquisition du langage et & entrer dans<br />

un système éducatif scolaire comme tout enfant de son âge.<br />

Mais l'éducation est avant tout affaire de parents, Il se trouve<br />

que cette période d'éducation précoce, proche de la naissance et <strong>des</strong><br />

premiers mois, coïncide avec l'émergence normale et l'apprentissage<br />

de la fonction parentale l.<br />

Entre les méandres de cet apprentissage et les aspects spécifiques<br />

liés à la surdité et ses conséquences, le risque est grand de<br />

confusion. Essayer d'éviter la confusion (<strong>des</strong> rôles en particulier) et,<br />

chacun gardant sa juste place, aider les parents à découvrir la leur,<br />

légitime, à l'investir, et à y éprouver du plaisir 2, voilà un premier<br />

objectif, certes ambitieux.<br />

Mais quel est ce « travail » d'éducation précoce qu'un accompagnement<br />

<strong>des</strong> parents rendra possible et fructueux ? Cette période est<br />

marquée par l'intervention d'un grand nombre de spécialistes aux<br />

technicités particulières (médicales, para-médicales, pédagogiques,<br />

<strong>sociales</strong> ...) regroupés autour d'un certain nombre d'objectifs, et observant<br />

une certaine chronologie.<br />

<strong>Les</strong> objectifs sont à peu près les mêmes que ceux mis en place il<br />

y a maintenant une vingtaine d'années où tous les efforts furent faits<br />

pour généraliser le dépistage et la réhabilitation précoce de l'enfant<br />

déficient auditif. Probablement le contenu s'est-il précisé, affiné, circonstancié<br />

au fil <strong>des</strong> années mais, dans l'ensemble, les objectifs sont<br />

bien connus de tous et suscitent un consensus.<br />

1. Texte du Colloque ANPEDA, nov. 79 : n L'Enfant sourd avant trois ans (enjeu et embDches<br />

de l'éducation précoce) m.<br />

2. M.-P. GRAU, Rééducation onhophonique. Septembre 1986, volume 24, no 147.


« <strong>Les</strong> conséquences de la surdité profonde peuvent être totalement<br />

transformées par une action cohérente menée & partir du dépistage<br />

précoce et englobant toutes les techniques favorisant la<br />

communication » @.-C. Lafon).<br />

Faisant suite à un dépistage et à un diagnostic (que l'on souhaite<br />

précoce), l'éducation précoce a pour objectif actuel :<br />

- de veiller au développement harmonieux de l'enfant au sein de sa<br />

famille, grfice à un accompagnement attentif et adéquat <strong>des</strong> parents<br />

(plus particulièrement de la mère) ;<br />

- de développer la communication dans tous ses aspects en stimulant<br />

tous les canaux utilisables, y compris le canal visuel, en s'aidant de<br />

tous les moyens possibles pour pallier les manques, en restant attentif<br />

à ne pas mettre l'enfant en échec ;<br />

- de permettre et faciliter l'éveil et la maturation de la fonction auditive,<br />

indispensable à l'acquisition de la parole et du langage oral<br />

(entre autres par l'appareillage et l'orthophonie) ;<br />

- d'affiner le diagnostic et le pronostic par <strong>des</strong> bilans et un suivi<br />

constant : <strong>des</strong> possibilités de communication, du développement de<br />

l'enfant et <strong>des</strong> possibilités de réaction de l'entourage ;<br />

- d'assurer une aide sociale et technique chaque fois que nécessaire ;<br />

- d'assurer information et formation <strong>des</strong> parents pour le choix et<br />

l'élaboration d'un projet pédagogique propre & leur enfant et dans<br />

lequel tous se sentiront à l'aise.<br />

Ainsi, et pour schématiser, l'éducation précoce s'appuie sur trois<br />

principaux types d'interventions : l'appareillage, l'orthophonie, les<br />

bilans et suivis (audiologiques, psychologiques, pédiatriques ...) et ...<br />

surtout sur une équipe. Le plus souvent, le travail d'éducation précoce,'<br />

de par son caractère, pluridisciphaiLe, requiert une équipe,<br />

type CAMSP (Centre d'Action Médico-sociale Précoce), ou Centre<br />

&Audiophonologie.<br />

<strong>Les</strong> intervenants et leurs rôles<br />

Il est indispensable que les intervenants connaissent et se réfèrent<br />

constamment aux processus de développement précoce de I'en-


fant normal, notamment pour la communication, même si l'aide<br />

apportée n'apporte que <strong>des</strong> réponses indirectes aux problbmes posés<br />

par la surdité. Tous les intemenants doivent incorporer, dans leur<br />

pratique, les exigences liées au caractère précoce de la prise en<br />

charge, dans le cadre de la guidance parentale. Chronolo~quement,<br />

panni les différentes interventions, on distingue :<br />

1) <strong>Les</strong> bilans et suivis medieaux et para-médicaux : le médecin<br />

ORL compétent en phoniatrie suit l'audiométrie, les fonctions de<br />

communication, la qualité <strong>des</strong> éhssions vocales, l'évolution de l'audition,<br />

de la parole et du langage, est attentif à insérer ces paramètres<br />

dans le développement global de l'enfant.<br />

Au carrefour de plusieurs disciplines, le médecin phoniatre facilitera<br />

la perception par les parents de la cohérence <strong>des</strong> interventions<br />

mdtiples, apparemment dispersées, fragmentées, mais indissociables.<br />

D'autant plus qu'il aura été présent au début, au moment du<br />

dépistage et du diagnostic, moments clés de la relation aux parents.<br />

Le médecin pédiatre pourra examiner l'enfant, suivre son développement<br />

et prescrire <strong>des</strong> examens complémentaires A visée étiolo-<br />

@que ou à la recherche d'éventuels troubles associés (visuels<br />

notamment).<br />

Le médecin psychiatre pourra assurer <strong>des</strong> consultations auprès<br />

<strong>des</strong> familles, apportera la prise en compte de la dimension psychanalytique<br />

et assurera la régulation du fonctionnement de l'équipe. U<br />

aura à integrer dans son système de réference les exigences <strong>des</strong> techniques<br />

et <strong>des</strong> apprentissages audiophonatoires indispensables à<br />

l'enfant sourd.<br />

te pychologue participera rkmlibrement à f'évaluation du développement<br />

de l'enfant, de ses possibilités et de ses acquis, appréciera<br />

la capacité de réactions de l'entourage en assurant un accompagnement<br />

régulier de la famille.<br />

2) L'appareillage : l'appareillage précoce est fondamental pour<br />

permettre A l'enfant d'utiliser au maximum ses restes auditifs et entraîner<br />

la maturation de la fonction auditive. Il s'agit de capter, am-


plifier, déiivrer à un niveau nécessaire et suffisant <strong>des</strong> sons qui pourront<br />

être perçus par le déficient auditif. <strong>Les</strong> sons et la dynamique de<br />

la parole étant privilégiés, perception/inttsgration/émission r6dkeront<br />

le circuit audiophonatoire et les résultats seront directement liés<br />

au travail orthophonique et à ce qui se vit à la maison,<br />

L'appareillage du petit enfant est particulièrement dt5licat. Il<br />

convient qu'il soit confié à un audioprothésiste expérimenté, à h<br />

technique sûre, qui veillera à l'efficacité et à la tolérance de la prothèse,<br />

et dont la pratique s'inscrira dans les objectifs géneraux de<br />

l'éducation précoce et plus partidhrement de l'accompagnement<br />

<strong>des</strong> parents. Compte tenu <strong>des</strong> relations délicates que les fa<strong>des</strong> entretiennent<br />

avec la prothèse, donc avec l'audioprothésiste, une formation<br />

à la relation paraît souhaitable. Des contacts réguliers avec le<br />

Centre, ou l'équipe dont il fait partie, faciliteront l'intégration <strong>des</strong><br />

aspects techniques dans le processus d'accompagnement <strong>des</strong> parents.<br />

3) L'orthophonie : L'adaptation définitive <strong>des</strong> prothbses doit<br />

trouver un écho indispensable en orthophonie et c'est pour cela<br />

qu'elle doit être mise en place parallèlement à l'appareillage. Sinon,<br />

on court le risque d'une mauvaise acceptation de ses protheses par<br />

l'enfant et d'un découragement <strong>des</strong> parents. L'orthophoniste aidera<br />

l'enfant à différencier ce qu'il entend avec ses appareils de ce qu'il<br />

n'entend pas sans eux. L'élargissement de sa discrimination auditive<br />

et de la signifiante de son environnement sonore comblera de plaisir<br />

i'activité exploratoire de l'enfant. Ainsi, il sera amené, par entraînement<br />

et parce que cela lui procure <strong>des</strong> satisfactions, & accepter ses<br />

appareils et à les réclamer. A noter que l'acceptation est plus délicate,<br />

voire problématique, lorsqu'il existe <strong>des</strong> difficultés relationneiies,<br />

<strong>des</strong> troubles associés (en particulier <strong>des</strong> troubles de la personnalisé)<br />

; les démarches seront prudentes et i'audioprothésiste très<br />

expérimenté.<br />

<strong>Les</strong> séances seront instaurées le plus t6t possible, parauhlement<br />

A la prescription de l'appareillage. En effet, circuit audiophonatoire<br />

et genèse du langage sont étroitement liés.


Circuit audiophonatoire - Communication prtl-lulguistique<br />

Il existe une période sensible entre sept et dix mois où le circuit<br />

audiophonatoire semble jouer un r61e prépondérant, par le plaisir<br />

que l'enfant prend à préparer son entrée dans le langage. Brièvement,<br />

cette période se caracterise par un jasis (jeu exploratoire vocal<br />

de l'enfant) et un début de synabation répétées à visée de communication.<br />

A ce stade, on observe <strong>des</strong> modifications de la voix du bébé et<br />

une certaine stabilisation de la mamique vocale : en effet, l'enfant<br />

comprend vite les strategies de communication efficaces et sélectionne<br />

les courbes mélodiques sipifiantes, explorées pendant le jasis.<br />

Chez le bébé sourd, cette étape de jasis, où la parole est encore<br />

un geste eploratoire, existe mais privée du contrôre auditif, donc du<br />

plaisir de s'entendre, le jasis va s'appauvrir ou s'arrêter. On comprend<br />

mieux alors l'importance d'assurer au plus vite une meilleure<br />

rkeption <strong>des</strong> caractères acoustiques du message verbal, pour l'ajustement<br />

<strong>des</strong> essais vocaux de l'enfant. <strong>Les</strong> parents servant de modèle,<br />

la mélodie et l'intonation, reflets de I'affeetivité, introduisent un<br />

début de fonction hguistique.<br />

Pendant les séances, l'orthophoniste interviendra auprès de l'enfant,<br />

le plus souvent avec les parents (parfois même seulement avec<br />

les parents lorsque le btsbé est très jeune et la relation mère /enfant<br />

fragile), puis en petit groupe dès que l'âge de l'enfant le permet.<br />

A travers toutes les occasions suscitees lors de la s&ance, elle<br />

cherchera à développer la commnication de l'enfant dans tous ses<br />

aspects. Elle encouragera et valorisera tous les systemes d'expression<br />

(regards, mimiques, mouvements du corps, désignations, voix, mélodie...),<br />

tout ce qui peut être porteur de sens. En reconnaissant, puis<br />

commentant les tentatives de l'enfant pour communiquer, elle aidera<br />

les parents à interpréter les signaux et h y rependre, Ce qui permettra<br />

aux parents de relancer leurs échanges, de consolide^ leurs intuitions,<br />

de découvrir et expérimenter toutes les possibilités de communication<br />

qui existent entre eux et leur enfant,


Education perceptivo-motrice et sensorielle<br />

L'éducation précoce est essentiekment éducation perceptivomotrice<br />

et polyserisorielie. L'enfant sourd est handicapé non seulement<br />

dans sa communication verbale, mais aussi dans sa relation à<br />

l'environnement par la perte de la fonction de vigilance et par ses<br />

difficultés dans la perception de l'espace et du volume (J.-C. Lafon 3).<br />

A cet figes, l'éducation est globale et l'accent est mis sur <strong>des</strong> activités<br />

sensori-motrices - on sait en effet l'intrication à cet âge entre<br />

gestes corporels et gestes vocaux. <strong>Les</strong> activités portent surtout sur les<br />

déplacements dans l'espace, le positionnement du corps et <strong>des</strong> segments<br />

de corps dans l'espace, ainsi que sur <strong>des</strong> manipulations d'objets<br />

et de formes dans l'espace.<br />

Par le biais de ces activités, l'orthophoniste peut travailler sur :<br />

La prise de conscience du corps et de ses possibilités motrices, la<br />

maîtrise <strong>des</strong> conduites motrices de base (marche lente-rapide, saut,<br />

sautillement...), la bonne coordination motrice, l'équilibre, l'anticipation<br />

par la posture de l'acte qui va suivre, l'organisation motrice séquentielle,<br />

la distance, la durée (de plusieurs séquences, de la chute<br />

d'un objet), le volume.<br />

<strong>Les</strong> activités de groupe à partir de 18 mois donneront b l'enfant<br />

plus d'aisance dans l'espace et une meilleure prise de possession de<br />

l'espace.<br />

Elles apprennent à l'enfant la notion d'alternance, de tour de<br />

rôle, de réversibilité <strong>des</strong> rôles, préparant ainsi à l'écoute, au dialogue,<br />

aux &les d'auditeur et de locuteur en alternance, séquences temporelles<br />

et spatiales A la base de la communication verbale. Selon<br />

Bruner « <strong>Les</strong> structures de l'action et de l'attention apportent <strong>des</strong> repères<br />

permettant l'interprétation <strong>des</strong> règles de distribution séquentielle<br />

dans la grammaire initiale (un concept agent, action - objet -<br />

<strong>des</strong>tinataire prélinguistique, aide l'enfant à appréhender la signification<br />

hpistique <strong>des</strong> énoncées ...) B.<br />

3. J.-C. LAPON, <strong>Les</strong> enfants déficients auditifs, SIMEP, 1985,207 p.


Pour l'enfant entendant, il n'y a pas de discontinuité entre geste<br />

corporel et geste vocal. Il verbalise en agissant. En éducation précoce<br />

de l'enfant sourd, il doit y avoir cette même continuité. L'adulte Ter-<br />

$alise en proposant une action, dénomme le matériel, commente<br />

l'action, complimente l'enfant pour sa réussite ... C'est ainsi que vont<br />

être compris les premiers verbes d'action, les premieres notions spatiales<br />

et temporelles, un travail individuel orthophonique permettra<br />

leur généralisation et l'apprentissage <strong>des</strong> contraires. Ainsi l'enfant<br />

comprend et verbalise ce qu'il voit.<br />

La séquence verbale est saisie par l'enfant dans son enveloppe<br />

mélodique, rythmique et intonative, paramètres reconnus par le<br />

sourd profond qu'il reproduira ensuite.<br />

Le langage fait donc partie de toutes les activités d'éducation<br />

précoce, fangage adapté & 17$ge de l'enfant et à sa surdité avec <strong>des</strong><br />

phrases courtes, une redondance <strong>des</strong> mots clés, une accentuation de<br />

la mélodie, une minogestualité riche et bien sûr face à l'enfant. De<br />

plus, <strong>des</strong> jeux spécifiques portant sur la reconnaissance <strong>des</strong> différents<br />

paramètres acoustiques sont proposés à l'enfant. Ainsi, ces jeux porteront<br />

sur la reconnaissance de la présence de bruit, l'intensité puis<br />

la hauteur, la durée, le rythme, la successivité temporelle. Cette éducation<br />

est faite avec <strong>des</strong> objets familiers, <strong>des</strong> instruments de musique<br />

et la voix (jeux vocaux, onomatopées associées à <strong>des</strong> bruits familiers<br />

d'objets ou d'animaux familiers par exemple) en accordant toujours<br />

une importance particuliére à la reconnaissance du bruit et à sa signification<br />

de fa~on & ce qu'il n'y ait pas de rupture entre perception<br />

et identification. On travaille également les perceptions kinesthésiques<br />

(reconnaissance d'objets, de matihres), ce qui permet également<br />

de travailler les sensations tactiles (froid, chaud, dur, ça<br />

pique...), les transformations de forme et de volumé avec conservation<br />

de h matière (pâte à modeler).<br />

Pour la perception visuelle, cinq axes de travail retiennent l'orthophoniste<br />

: coordination visuornotrice, discrimination fond-forme,<br />

constance <strong>des</strong> formes, positions dans l'espace et relationi spatiales.<br />

Ces jeux en éducation précoce se font souvent avec un matériel<br />

banal, dont les attributions peuvent varier ; le jeu de faire semblant


tient une place particulière de par sa relation avec le langage. Ainsi<br />

on amène l'enfant à évoquer, à élaborer <strong>des</strong> systèmes de représentation<br />

de lui-même et du monde environnant.<br />

Savoir solliciter et rendre porteur de sens les prémices corporels<br />

du langage semble $tre l'aide que la psychomotricité peut apporter,<br />

plus particuliérement lorsqu'il existe <strong>des</strong> troubles associés à la surdité,<br />

notamment pour les sourds surhandicapés qui nécessitent <strong>des</strong><br />

programmes éducatifs hautement spécialisés et individualisés.<br />

Le corps, et le i< geste n en prolongement du corps, restent fondamentaux,<br />

quand bien m&me ces gestes, captés très facilement par<br />

le canal visuel de l'enfant sourd, en arriveraient à être codés jusqu7à<br />

réaliser une langue.<br />

Projet médico-éducatif<br />

Au cours et nécessairement au terme de l'éducation précoce (à<br />

l'entrée en maternelle), se pose le problème du choix <strong>des</strong> métho<strong>des</strong><br />

éducatives et de l'orientation de l'enfant vers un mode de scolarisation<br />

(intégration - milieu spécialisé).<br />

Il est du rBle de l'équipe responsable de l'éducation précoce<br />

d'informer les familles le plus largement possible sur toutes les métho<strong>des</strong><br />

existantes, de leur faciliter l'accès vers ces informations et les<br />

approches nouvelles, comme le bilinguisme ou le LPC. Nous profitons<br />

de cette ptCriode où rien n'est encore joué, fixé, pour affiner<br />

d'une part diagnostic et pronostic, d'autre part mieux cerner les possibilités<br />

de communication de i'enfant et de relation de la famille. En<br />

raison de tout cela, et avec <strong>des</strong> parents interlocuteurs avertis et<br />

actifs, le choix d'une méthode ou de plusieurs métho<strong>des</strong> combinées<br />

ne doit plus poser de problémes majeurs. Le choix peut &tre fait pour<br />

chaque enfant, pour chaque famille, personnellement, en dehors de<br />

toutes préoccupations idéologiques.


LA GUIDANCE PARENTALE<br />

Le suivi précoce de l'enfant sourd et de sa famille s'est généralisé<br />

grilce à la prhcité accrue du diagnostic de surdité de l'enfant, à<br />

partir <strong>des</strong> années 1970, avec le dépistage systématique de la surdité à<br />

la naissance, le développement de l'audiométrie objective (électrocochléographie<br />

puis potentiels évoqués du tronc cérébral) et l7appareiilage<br />

précoce <strong>des</strong> nourrissons sourds. <strong>Les</strong> travaux portant sur le<br />

développement du langage de l'enfant, la mise en évidence de la<br />

compétence précoce du nourrisson et les interactions mkre-enfant<br />

ont contribué ii en préciser la methodologie.<br />

Si le diagnostic de surdité peut actuellement être posé dès la<br />

naissance, cela implique comme corollaire obligatoire qu'il soit immédiatement<br />

suivi par une action de guidance parentale et d'éducation<br />

précoce. A cet tige, la réussite de l'éducation précoce dépend<br />

fortement de l'intervention <strong>des</strong> professionnels auprès <strong>des</strong> familles<br />

d'enfants sourds, au point que nous devrions plutôt parler comme le<br />

font les Anglo-saxons, de programme pour enfants sourds ET leur<br />

famille.<br />

Nous appellerons donc guidance l'aide apportée aux familles au<br />

niveau psychologique et éducatif.<br />

Historiquement, ce travail auprès <strong>des</strong> familles s'est fait en deux<br />

temps. Dans les années cinquante, apparaissent les premieres initiatives<br />

généralisées d'aide aux parents (L. Tracy, D. Ling, J. Mervant)<br />

sous forme d'enseignement à domicile pour apprendre aux parents<br />

comment communiquer av& leurs enfants sourds pour favoriser l'apparition<br />

du langage. En France, la revue Réadaptation publie à partir<br />

de 1960 <strong>des</strong> articles pour conseiller les parents et en 1963, paraît le<br />

premier manuel pour parents d'enfants sourds. Mais, confrontés aux<br />

limites de ces conseils techniques isolés, les professionnels se tournent<br />

vers la psychologie pour analyser les processus psychologiques<br />

qui limitent l'efficacité de leurs conseils et se donner <strong>des</strong> outils plus<br />

opérants de sorte que, depuis une quinzaine d'années, les publications<br />

sur ce sujet sont innombrables et les outils psychologiques divers<br />

(Rogers, approche comportementale, psychanalyse, analyse<br />

transactionnelle, thérapie systémique). Actuellement, on admet que


ces deux axes de travail auprès <strong>des</strong> familles se complètent et sont<br />

tous deux indispensables pour assurer un développement harmonieux<br />

à l'enfant sourd au sein de sa famille et pour permettre un bon<br />

démanage de la communication, quelles que soient les options pédagogiques<br />

choisies.<br />

Processus de deuü<br />

Aprbs l'annonce du diagnostic de surdité, les professionnels<br />

voient souvent leur action éducative entravée par les réactions émotionnelles<br />

<strong>des</strong> parents face B la dkouverte puis la sanction du diagnostic.<br />

Ces réactions tSmotionnelles sont souvent <strong>des</strong> manifestations<br />

de ce qui a été décrit par le terme de «processus de deuil »<br />

(E. Kubler-Ross, 1969 ; K. Moses, 1977 4), tout événement provoquant<br />

une rupture avec un être cher ou dans l'image que s'en fait la<br />

personne, entraîne habituellement un processus de deuil, processus<br />

par lequel un individu se sépare de ses illusions perdues pour s'adapter<br />

B l'événement en retrouvant une congruence entre ses sentiments,<br />

ses pensées, ses actions et ses croyances. <strong>Les</strong> étapes du deuil<br />

sont d'abord le déni puis l'anxiété, la peur, le culpabilité, la dépression<br />

et la colère, le dernier stade en est l'acceptation psychologique<br />

qui permettra à la personne de mettre en oeuvre de nouvelles stratégies<br />

psychologiques et comportementales adaptées à la situation et<br />

orientées vers l'avenir. Cependant, les parents confrontés au diagnostic<br />

de handicap peuvent mettre longtemps à considérer la perte psyçhologique<br />

de l'enfant normal et être incapacités dans leurs actions.<br />

La traversée du processus et son aboutissement positif semblent<br />

facifit6s par les relations intelpersonnelles et par une aide psychologique<br />

ou psychothQapique. Or, souvent sans connaissance de ce processus,<br />

les professionnels, par leurs attitu<strong>des</strong>, leurs exigences,<br />

peuvent bloquer le processus alors que leur rôle devait être de le faciliter.<br />

Par une attitude d%coute, d'empathie, de non-jugement et de<br />

4. 33. K ~ BRossz L ~ On Bath and dylng, New-York N.Y. : Maemiltsn, 1969.<br />

K. MOSES* infanc de~~fiesss and pnrentui grief: p~hsociaf ear& intenmionft Ed~eunon of tke<br />

henrr'ng *ire& &'W. ChCDfege fiiftprass, San Diego, Cafifornia, 1985.


centrage sur les sentiments, nous pouvons au contraire améliorer<br />

notre cammunication avec les parents et les aider.<br />

A chaque étape de la vie de l'enfant, ces différents sentiments se<br />

trouvent réactivés. C'est souvent le cas pour le passage en cours préparatoire<br />

(moment où l'enfant va &tre comparé à ses pairs entendant~),<br />

i la puberté, au moment de l'entrée en apprentissage, au<br />

passage en secondaire, à l'entrée en étu<strong>des</strong> supérieures, au passage à<br />

l'autonomie compllste (mariage, entrée dans la vie professionnelle...).<br />

C'est la raison pour laquelle la guidance parentale, si elle commence<br />

à l'annonce du diagnostic et se superpose chronologiquement au debut<br />

de l'éducation précoce, continue pendant plusieurs années, suivant<br />

l'enfant dans sa maturation physique, psychologique, scolaire,<br />

jusqu'à l'&ge adulte.<br />

Analyse du processus de hi demande sociale<br />

A partir du moment où les parents rencontrent, découvrent le<br />

handicap de feur enfant, se noue pour eux quelque chose de l'ordre<br />

de la « mise en drame ». L'enfant est posé comme victime secondaire<br />

et les parents comme victimes principales ou encore l'enfant comme<br />

porteur du mai, de la maladie et Ies parents coupables - en tous cas<br />

cdpabillsés - comme cause ou comme source possible du mal : les<br />

parents entrent alors dans ce que nous appellerons le triangle dramatique.<br />

Dans la guidance parentale, les thérapeutes et les 6ducateurs<br />

perçoivent A la fois la démission <strong>des</strong> parents et la revendication <strong>des</strong><br />

parents : ils per~oivent que les parents i la fois décrochent, n'investissent<br />

pas « corne il faut » leur enfant et qu'ils ont les parents « sur<br />

le dos », qu'ils sont l'objet d'un transfert ... enfin ils ne savent pas bien<br />

quoi ...<br />

Ils perçoivent généralement les deux choses et s'efforcent de les<br />

résoudre en rephrant plus vaguement une sorte d'alternance, appréciant<br />

rarement que cette alternance entre les deux positions est sollicitée<br />

par eux-mêmes ; ou encore ils perçoivent (la dimension norma-


tive est parfois trbs explicite) les bons parents et les mauvais parents,<br />

les parents coopérateurs et les parents sans coopération possible,<br />

c'est-&-dire encore qu'ils s'accommodent de cette typologie. Dans la<br />

réalittr, les parents ne sont ni bons ni mauvais, ils sont le plus souvent<br />

comme le dit Winnimtt c( d'assez bons parents » et la question de<br />

leur parentage se pose aüleurs.<br />

Au triangle dmatique ( man S. ') présent4 au départ de la<br />

« prise en charge » (l'expression est claire) est opposable? de la part<br />

du thQapeute, de 174ducateur, de Phstitution de soins, le triangle<br />

thtrrapeutique ou éducationnel :<br />

1) par rapport à l'enfant<br />

2) par rapport aux parents<br />

3) à investir par les parents par rapport à leur enfant<br />

4) eventuellement dans une ré6laboration du systBme famgal.<br />

Persecution<br />

Par la norme excessive<br />

Sauvetage<br />

Substlturion, gavage<br />

- Victime<br />

f soumise)<br />

Puissance<br />

A<br />

de l'enfant libre<br />

Protection<br />

Permission<br />

de la norme adaptée<br />

ouverture d'un espace<br />

(ici, maintenant)<br />

de liberté<br />

Normatif + Nourricier +<br />

Adulte aux comman<strong>des</strong><br />

S. S. Ww, « Fairy tales and scxipt drama analysis », in TA.B., 7,1968, p. 39-43.<br />

169


De h « guidance parentale » au Parentage<br />

L'fféquipe professionnefle doit travailler avec les parents de telle<br />

sorte que les parents puissent, se permettent, r&&sent de fapn pertinente<br />

et pour kur propre compte cette m he fonction de parentage<br />

avec leur enfant; du coup, l'essentiel va reposer, pour les<br />

parents, dans le rapport de parentage du thbrapeute aux parents, sur<br />

une Ilhération, une rupture d'avec leur position de Victime, fondée<br />

sur la « Puissance de leur Enfant libre » (déparasitage <strong>des</strong> sentiments,<br />

traitement <strong>des</strong> méconnaisances du problème, « dhntamination<br />

» <strong>des</strong> eîats du Moi), leur d6marcIie sera prioritairement soutenue<br />

par la Permission accompagnée, par la Protection,<br />

Cette dbmarcbe est fondée sur l'affhation que les parents peuvent<br />

être <strong>des</strong> Parents positifs : ils peuvent « faire face », ils sont capables,<br />

pour peu qu'on écoute leur demande authentique et qu'on ne<br />

les sauve pas de cette demarche autonome,<br />

Le système familhl<br />

La structuration de la famiIle comme système, en I'wurrenee,<br />

s'est fond& sur le handicap, s'est légitim6e par lui ; d'une ccjrtaine<br />

façon, le handicap manifeste (avec un patient explicite et l6&isne),<br />

a saum » le systeme familial de ses troubles, en tout cas <strong>des</strong> troubles<br />

rhctionnds au dtz-voilement du handicap (<strong>des</strong> troubles cans6cutifs B<br />

l'assertion da trouble : f'institutionnalimtion du trouble* du handicap<br />

ou di: la maladie, est la fortifiation avancee - comme mauvais objet<br />

- de fa strategie de défense du systeme famrXia1).<br />

Le handicap, sitôt que rév6f6, prend place et s'incorpore dans le<br />

systame fam%aI. Selon les cas, il peut &lxe même une a protection du<br />

systame familid s, les changements du cc patient explicite et mis en<br />

avant >> risquent de contrecarrer le système, suscitant les freins du<br />

système famLtia1, sa résistance au changement. <strong>Les</strong> changements ou<br />

la guerison du


On a plus fréquemment mis en avant la perturbation provoquée<br />

chez la famiiie par la révélation du handicap. Ii importe de restituer<br />

cette part complémentaire et tout aussi importante de la rt4alité : les<br />

deux aspects dans leur caractère paradoxal, indiquent la dimension<br />

« systématique » du prwessus éducatif ou thérapeutique.<br />

Il y a Lieu de traiter le système comme tel, ce qui ne signifïe pas<br />

de rencontrer nécessairement ou à chaque instant la famille tout entière,<br />

mais d'incorporer cette dhension dans le traitement bducatif<br />

et thérapeutique à tout le moins dans la phase diagnostique, dans<br />

t'organisation du plan de traitement, dans l'évaluation du cours de la<br />

démarche et dans les indications du suivi.<br />

Le travail prend pour objectif la restructuration chez les parents<br />

de leurs rapports aux rôies sociaux, aux modèles de relation avec l'extbriwr<br />

(et notamment les modèles parentaux et éducationnels), aux<br />

N patterns u de leur groupe de référence, leur relation aux valeurs et<br />

aux normes, rendant ainsi possible et soutenant efficacement le<br />

développement spécifique de leur enfant handicapé. Si certaines personnes<br />

organisent toute leur vie comme une lutte contre leurs parents,<br />

il importe ici que les parents ne structurent pas toute leur vie<br />

comme une lutte contre le handimp (c'est-&-dire « contre u l'enfant<br />

handicapé), ne fondent pas leur vie sur le trouble ou la maladie,<br />

C'est un droit <strong>des</strong> parents que de se permettre B em-mêmes de<br />

pouvoir être parents : sur cette double permission (qui, entre autres<br />

choses, va les engager à se donner et à donner leur enfant la permission<br />

dkxister et de se developper de façon adaptée - c'est-&-dire<br />

non n4cessairement conforme aux nomes, aux valeurs et aux seh6-<br />

mas de développement genbraux, donc excessifs) va s'organiser une<br />

réponse 3 la double contrahte de la «mise en drame » par le<br />

handicap b<br />

6. P. GBNIN et M. GUICHARD, Extraits de Méthodologie pour une guidance parentaie : de la<br />

guidance précoce au parentage, BulL Audiopfromlagie, vol. 9, na 6,1979,63-78.<br />

171


Trop souvent, tout se passe comme si les professionnels sous-esh&ent<br />

les parents et comme si les parents sous-estimaient l'enfant.<br />

Si les parents ont un soutien psychologique adapte par un travail personnel<br />

individuel ou en groupe, ils pourront alors mieux entendre les<br />

hfomations spéei£iques concernant la surdité, que nous avons A leur<br />

transmettre.<br />

Ly~ormation ne prend son efficacité que si les éléments d'information<br />

apportés rencontrent chez l'interlocuteur un besoin pour afler<br />

plus loin dans son développement, pour lui permettre une perception<br />

plus juste d'un problème, pour affiner ses observations ou les expliquer.<br />

C'est la raison pour laquelle nous avons à les donner progressivement<br />

et uidividueuement, meme si un groupe de parents fanetionne<br />

pardalement.<br />

Nous diviserons ces informations pour les besoins de l'exposé en<br />

plusieurs chapitres :<br />

- la mmmunication verbale et non verbale, le processus de la cornmunication<br />

verbale, le dialogue, les outils de la communication de<br />

l'enfant sourd (restes auditüs, lecture labiale, cued speech, mùnogestuafite,<br />

langue <strong>des</strong> signes, français signé) ;<br />

- la surdité, son type, son degré, ses conséquences sur la perception<br />

de la parole ;<br />

- la prothese auditive, son intérêt et ses hites, la perception auditive<br />

et ses possibilités d'améfioration par l'entrahement auditif ;<br />

- les i étapes » du prélangage et du d6veloppement du langage de<br />

l'enfant. La relation entre la compréhension et l'expression verbale.<br />

La compréhension verbale et non verbale (situations - mimogestuatité).<br />

Le langage par rapport A la parole et I'articdation.<br />

- les relations entre niveau de langage et niveau de d6veloppement.<br />

<strong>Les</strong> capacités psychologiques de l'enfant.


It faut autre chose pour que les informations soient entendues<br />

par les parents et pour qu'ils se les approprient ; il leur faut être rassurés<br />

sur leurs propres capacités de savoir faire, de savoir dire, de<br />

savoir observer, d'intégrer le savoir transmis. C'est dans cette valorisation<br />

d'eux-mêmes, dans le fait d%tre confortés dans la justesse de<br />

leurs actes et dans leurs résultats, qu'ils puisent l'énergie nécessaire<br />

pour poursuivre leur tâche longue et difficile. Ce sont également les<br />

progrès verbaux de leur enfant qui les motivent, à nous de savoir les<br />

expliciter à chaque étape ou dans les moments de découragement,<br />

tout en leur apprenant la patience.<br />

Cela nous amène l'importance du travail par étapes. Le fait<br />

d'avoir atteint un but est sécurisant et valorisant pour les parents.<br />

Cela borne un chemin apparemment sans fin, les progrès ne sont<br />

ainsi pas noyés dans l'angoisse de l'avenir, on peut mesurer ensemble<br />

pas à pas le chemin parcouru et l'expliciter.<br />

Plus f'intervention peut paraître technique, plus il est important<br />

de la situer dans le contexte global, en tâchant de mettre en évidence<br />

le mieux apporté par la technique, mais aussi de valoriser d'autres<br />

aspects de l'enfant. Cela peut être sa communication extra-verbale,<br />

son autonomie, sa motricité, sa spontanéité, sa finesse à saisir certaines<br />

situations, etc. Savoir montrer aux parents les étapes que l'enfant<br />

a franchies, qu'ils puissent s'en réjouir. De même, on peut<br />

essayer de jalonner les étapes, donner <strong>des</strong> repères pour que les parents<br />

puissent anticiper les progrès, avoir la joie de les découvrir euxmêmes,<br />

y trouver <strong>des</strong> satisfactions et du plaisir.<br />

De la même façon que l'on valorise l'enfant, est-on toujours bien<br />

attentif à valoriser les parents lorsque l'occasion s'en prhsente ? On<br />

peut toujours trouver quelque chose à positiver sur les instants qui<br />

viennent de se dérouler, ou ce qui est rapporté de la vie familiale ou<br />

de l'orthophonie. Par exemple, le fait que les parents puissent remarquer<br />

que dans telle ou telle situation, « l'enfant réagit mieux » ou<br />

« est plus il l'aise », est en soi « remarquable ». -On peut ainsi leur<br />

renvoyer l'image positive de ce qu'ils n'auront peut-être pas repéré<br />

comme étant un signe d'être de


trouvent renfords dans leurs potentialités et acceptent mieux ensuite<br />

les indications du spécialiste.<br />

Eux aussi ont besoin de signes de reconnaissance. Notamment<br />

cette réassuranm dans leur fonction de parents peut les aider à libb<br />

rer chez eux ou acquérir les attitu<strong>des</strong> &ducatives qui font souvent<br />

dkfaut, notamment en matiere de fimites à poser à Yenfant. Assez<br />

fréquemmentF les parents ont du mal & dire e non B, à poser bites<br />

et interdits, mettant souvent en avant les dacdtés de communtatio~<br />

: n on ne peut pas lui expziquer ...»<br />

Ces deux aspects, l'un plus pJychologique, l'autre plas infornatg<br />

dans le travail avec les parents, sont en relation &roite et les termes<br />

ut%s& le montrent bien. Qu'il s'agisse pour lm h@o-smons de<br />

conselling, guidance, parenting », pour les francophones de n guidance,<br />

parentage, &oute active, accompapement, aide aux parents<br />

», l'objectif reste le même : arriver a ce que les parents se sentent<br />

impliqués dans l'éducation de leur enfant sourd, faire la distinction<br />

entre les difficultés spécifiques & la surdit9 et celles inhérentes<br />

au fonctionnement d'un couple, d'une famille fragüishs par le<br />

handicap, différencier ce parcours et les dvdnements lies il la surdité*<br />

intégrer les objectifs de l'éducation pr6eoce dans la dynamique familiale,<br />

donc que les parents se réapproprient dans sa dobalitt. leur enfant<br />

subitement passé sous la pseudo-raponsabilitd éducative <strong>des</strong><br />

professionnels depuis l'annonce du handicap (audioprothkssiste pour<br />

entendre ! orthophoniste pour apprendre à parler ! puis école specialisde..,).<br />

<strong>Les</strong> capacités de développement d'un enfant dépendent dans<br />

une large mesure du projet qu'ont pour fui les parents ET les professionnels,<br />

et c'est iorsqu'il s7&tabfit une harmonisation <strong>des</strong> projets parentaux<br />

et de I'équipe éducative que les rhsultats peuvent istre les<br />

meilleurs.<br />

Entre la relation avec les oahophonistes, les audioproth~sistes<br />

et les parents, au carrefour de plusieurs disciplines, le médecin pboniatre<br />

est en quelque sorte au centre du projet et le garant de sa COhérence.<br />

C'est à peine une boutade de dire que son rôle commence à<br />

Pissue du diagnostic. De sa façon de presenter am parents le pro-


gramme de suite pour leur enfant et pour eux-mêmes, dépendra en<br />

partie la cohérence impliquant d'emblée à part égale les parents dans<br />

la suite éducative par rapport aux professionnels soucieux de respecter<br />

le rythme propre <strong>des</strong> parents, kvitant le morcellement apparent<br />

de l'enfant entre les intervenants.<br />

En expliquant et donnant les reperes dans le temps, on permet<br />

aux parents d'imaginer, d'anticiper, et d'être plus actifs. Toutefois,<br />

cela ne résout pas tous les problèmes d'acceptation, loin de là, et l'on<br />

pourrait se pencher sur la dimension fantasmatique.<br />

Autant de réflexions qui se réfèrent à la pratique de l'écoute, du<br />

parentage (apprentissage de la fonction de parent), du travail de<br />

l'équipe sur elle-même,<br />

La réalisation <strong>des</strong> objectifs de l'4ducation précoce est affaire de<br />

tous, parents, spécialistes, pédagogues. Eue a besoin pour cela de<br />

s'organiser autour d'une cohérence (<strong>des</strong> informations, <strong>des</strong> métho<strong>des</strong>,<br />

<strong>des</strong> interventions, de l'équipe pluridisciplinaire).<br />

Comme l'enfant a besoin de la cohérence de son environnement,<br />

les parents ont besoin de ressentir également cette cohérence.<br />

Devant tel ou tel aspect inquiétant de la prise en charge, l'ensemble<br />

de l'équipe pourra réfléchir sur les éléments rapportés par tel<br />

ou tel intervenant, et se poser les questions suivantes :<br />

- Y a-t-il déception, frustration, fragilisation du plaisir ?<br />

- Où en est l'apprentissage de la fonction de parent ?<br />

- <strong>Les</strong> « modèles » qu'on offre sont-ils adéquats ?<br />

-.<strong>Les</strong> « modèles » proposés à l'enfant sont-ils à revoir, à perfectionner,<br />

à réassurer chez les parents ?<br />

- <strong>Les</strong> stimulations et les signes de reconnaissance adressés à l'enfant<br />

et aux parents sont-ils suffisants et de qualité ?<br />

- Existe-t-il quelque chose (émotion) qui fait obstacle à la relation<br />

d'intimité avec l'enfant ?<br />

- <strong>Les</strong> informations aux parents sont-eues suffisantes ? <strong>Les</strong> ont-ils<br />

entendues ?<br />

La présence du mCdecin psychiatre, du psychologue, en aidant à<br />

l'analyse de ces observations et en introduisant les composantes psy-


chologiques et psychanalytiques permet réflexion et adaptation de la<br />

conduite % tenir. En effet, le handicap peut s'installer dans un systkme<br />

familial. avec son rBle propre, et tout changement que l'on tentera<br />

d7htrod~e à propos du handicap se heurtera aux r6sistances du<br />

ystame tout entier. U y a donc lieu d'incorporer cette dimension à<br />

tout instant dans le projet thérapeutique et éducatif.<br />

CONCLUSION<br />

Guidance parentale et éducation précoce font hmédiatement<br />

suite au diagnostic de surdite. C'est 1% un schéma de fonctionnement<br />

pour l'enfant de O il 3 ans applicable dans sa méthodologie à, tout<br />

handicap après l'annonce du diagnostic. L'&éducation précoce, c'est<br />

aussi cette tranche de temps comprise entre le diagnostic et la période<br />

préscolaire où, certes, l'action de l'orthophoniste est prépond6-<br />

rante en temps, mais c'est aussi la période de la prkision du<br />

diapostic et de l'adaptation prothétique : les prclcisions <strong>des</strong> observations<br />

médicales et orthophoniques débouchent sur une meilleure<br />

adaptation prothétique. L'éducation precoce s'adresse à l'enfant, la<br />

guidance aux parents. Ces deux actions sont toutes deux nécessaires.<br />

Comme dans Péducation précoce les ktewenants sont multiples, l'intervenant<br />

central &tant le psychologue dont l'intervention auprès <strong>des</strong><br />

parents et de l'enfant se poursuivra au-del& de la période d'éducation<br />

prbce. Ce schhrna de suivi de l'enfant sourd est independant du<br />

degr6 de la surdith, la blessure parentale est sans rapport avec notre<br />

diagnostic et notre pronostic. De même, pour les surdftes moyennes,<br />

on ne peut faire abstraction de la précision diamostique et du suivi<br />

prothétique, et les habitu<strong>des</strong> de mmmunication prises entre les parents<br />

et l'enfant vont d'autant plus entraver l'éducation que le diagnostic<br />

est plus tardif.


A propos de l'enfant, petite personne à devenir grande, nous citerons,<br />

pour finir, ces mots de A. Menegawr7 : « Une chose est de<br />

dire "oui, tu peux", une autre est de s'accroupir, inc~er la tete, sourire,<br />

tendre la main en esquissant un mouvement pour accompagner<br />

lknfant, tout en disant "Oui, vas-y, tu peux" ... Ne considérer que les<br />

canaiax et oublier que lkformation qui transite par eux est mue par<br />

une Bnergie, c'est ne considérer que Phformation qui passe et oublier<br />

les signes de reconnaissance qui empkhent "la moeile épinière<br />

de se flétrir"', c'est oublier que la mémoire (et la mémorisation) sont<br />

"teintées cf'affectivité.,.". C'est réduire à un problème fiformatique<br />

ce qui est de l'ordre du plaisir et de la tendresse ».<br />

7. A. MENEGAUX, « Des caresses physiques aux signes de reconnaissances verbaux P, BuIfetin<br />

d%luciiophonologe, Besançon, Prélangage 1979.


LA PRISE EN COMPTE DES DEFiCIENTS AUDITIFS<br />

PAR LA D.A.S.S.<br />

Exposé présenté aux journées d9étu<strong>des</strong><br />

de la Fédération Nationale <strong>des</strong> Instituts de Jeunes Sourds<br />

et de Jeunes Aveugles de France (FISAF)<br />

ie 23 novembre 1988<br />

Jean CHAPPELLET *<br />

Je voudrais vous faire connaître, à travers l'exemple particulier<br />

d'un Département, la Drôme, d'une catégorie de handicaps, la déficience<br />

auditive sévère ou profonde la façon, dont travaiiie la DASS<br />

pour permettre la rtSponse aux besoins de ta population.<br />

Il faut prhiser que la démarche n'est pas sensBement différente,<br />

qu'il s'agisse de deficience sensorielle ou de handicap autre.<br />

Je ne parlerai pas du handicap visuel. Pourquoi ce choix de la<br />

déficience auditive ? Tout simptement parce que mon Département<br />

a été amené à s'intéresser de plus près à ce problème du fait de<br />

l'existence d'un IlvE recevant <strong>des</strong> deficients auditifs.<br />

Je me contenterai d'un exposé où je poserai le cadre théorique<br />

de notre action, puis je relaterai ce qui a été fait dans la Drhme et ce<br />

qui, à mon sens, reste à faire.<br />

* Directeur Départemental <strong>des</strong> Affaires Sanitaires et Sociales de la Ddme.<br />

179


1 - LE CADRE THEORIQUE DE L'ACTION DE LA DASS<br />

A - Lorsque l'on parle de fa DASS, ce n'est pas toute la DASS.<br />

Sont concernés le Méd& hspecteur départementd, le service de<br />

Tutelle et de la CDES, service conjoint avec 17Education nationale.<br />

Le MID intervient comme conseiller technique, la CDES a un<br />

rôle éminent en matiare de planification, le service de Tutelle ayant<br />

le rdle essentiel de réception <strong>des</strong> projets, d'analyse et de contrôle <strong>des</strong><br />

actions conduites et l'arbitrage revient au Directeur entre <strong>des</strong> projets<br />

aussi divers qu'une section de cure médicale ou un SSESAD.<br />

Il faut bien voir que le problème <strong>des</strong> déficients sensoriels n'est<br />

qu'un é1f:ment de la politique sanitaire ou médico-sociale departementale.<br />

Ainsi, dans la Drôme, le nombre d'ktablissements sous tarification<br />

préfectorale, donc sous eomp6tence de la DASS est de 111,<br />

reprbentant 1 366 268 915 F. Là <strong>des</strong>sus l'enfance handicapée représente<br />

21 6tablissements ou services, 19 9% <strong>des</strong> établissements mais<br />

10,76 % de la masse budgétaire, Quant au budget consacré aux déficients<br />

auditifs, c'est 26 M. de francs, soit moins de 2 %. A budget limitts,<br />

arbitrages nécessaires entre tous les secteurs.<br />

B -A noter 6gdernent que la DASS n'est pas le seul partenaire<br />

hstitutionnel à intervenir, et cela a son importance.<br />

Interviennent également :<br />

- l'Assurance maladie financeur, puisque de façon générale, le Ministère<br />

de h Santé ne prend pas en charge financièrement les etabEssements<br />

sanitaires ou médico-sociaux ;<br />

- 1'Education nationale de plus en plus partenaire oblige compte tenu<br />

du développement de I'htégration ;<br />

- la Santé scolaire (Education nationale) et la PMI (Conseil g6néral)<br />

depuis le le' janvier 1984 ;<br />

- enfin, les gestionnaires d76tablissements et les associations d'usagers,<br />

puisque nous sommes depuis longtemps un ministère décentralisé.


C'est dire l'importance du r81e de concertation et de coordination<br />

que nous sommes amenés à jouer dans le domaine <strong>des</strong> déficients<br />

sensoriels comme dans les autres.<br />

C - <strong>Les</strong> contraintes ou règles d'action de la DASS<br />

Je dirai qu'elles sont au nombre de quatre :<br />

- La première est, bien entendu, le cadre réglementaire que nous<br />

sommes chargés de faire appliquer : réglementation générale ou spécifique,<br />

comme dans le cas particulier le décret du 22 avril 1988 modifiant<br />

l'Annexe XXIV quater.<br />

- La deuxième est qu'il convient de veiller en toutes circonstances<br />

à ce que les finances de l'assurance maladie soient utilisées au<br />

mieux <strong>des</strong> besoins ; ceci est d'autant plus une obligation que les dépenses<br />

de l'assurance maladie ne doivent pas évoluer au plan départemental<br />

de façon supérieure au taux directeur annuel. Nous sommes<br />

donc contraints en permanence à une appréciation de la gestion <strong>des</strong><br />

établissements ou services et à <strong>des</strong> ajustements de budgets.<br />

- La troisième, voisine de la deuxième, est qu'il faut adapter en<br />

permanence les mo<strong>des</strong> de prise en charge aux besoins de la population<br />

et aux nouveaux mo<strong>des</strong> de prise en charge.<br />

. Le domaine <strong>des</strong> handicaps sensoriels est à cet 6gard particulièrement<br />

significatif ; 1'Education nationale, suite aux circulaires de<br />

1982 et 1983 (et même avant) a mis en place <strong>des</strong> classes spécialisées,<br />

cause et conséquence d'une certaine désaffection pour les établissements<br />

classiques. Dans le même sens, jouent une nouvelle attitude<br />

<strong>des</strong> parents, <strong>des</strong> associations de parents, <strong>des</strong> établissements euxmêmes,<br />

de nouvelles techniques bien sQr. Tout cela est repris dans<br />

l'annexe XXIV quater « nouvelle version » qui affirme le rôle irremplaçable<br />

de la famille en matière de compensation du handicap<br />

sensoriel.<br />

C'est pourquoi la règle d'action que nous fixe le Ministère depuis<br />

quelques années, et que nous appliquons, est dans ce domaine :


ouverture sur l'extérieur pour l'intégration et diversification <strong>des</strong><br />

mo<strong>des</strong> de prise en charge.<br />

- Enfin, la dernière contrainte à laquelle j'ai déjil fait allusion en<br />

parlant d'arbitrage est la contrainte de la non-progession <strong>des</strong> dBpenses<br />

de l'assurance maladie. Il faut savoir que, pour réaliser les<br />

projets nouveaux, les DASS disposent de deux moyens :<br />

. la marge de manoeuvre, laquelle a tendance il se réduire : 0,36 %<br />

en 1989, soit pour la Drame 5 M. de francs environ, à rapprocher<br />

du coQt d'un SSESAD de 16 places pour enfants sourds, 800 000 F. ;<br />

. les redéploiements, c'est-à-dire la récupération de moyens devenus<br />

inutiles sur les établissements.<br />

Compte tenu <strong>des</strong> besoins dans d'autres secteurs (personnes<br />

agées notamment), de la relative désaffection <strong>des</strong> établissements de<br />

l'enfance inadaptée, nous considérons que la marge de manoeuvre<br />

ne peut abonder ce secteur. C'est pourquoi toute ouverture de services<br />

nouveaux dans le secteur de l'enfance inadaptée ne peut se<br />

faire que par redéploiement à partir de ce secteur.<br />

C'est d'ailleurs le contenu de la circulaire annuelle sur les redéploiements.<br />

II - LA SITUATION DE LA DROME : DEPARTEMENT DE<br />

389 000 HABITANTS, 114 000 JEUNES DE MOINS DE 19 ANS<br />

A - La situation initiale (1981)<br />

1 - UNE3 TERN3 D'ACCUEIL POUR L'ENFANCE INmmE<br />

Qu'il s'agisse <strong>des</strong> IMP, IMPro, IME, les étabissements sont<br />

nombreux dans la Drame et très supdrieurs aux indices régionaux ou<br />

nationaux. Ces établissements jouent donc un r61e d'appel pour les<br />

départements voisins.


2 - EN MA'MERE DE DEFICIENTS AUDITIFS, la situation est identique<br />

puisqu'existait au pied du Vercors un IME agréé depuis 1970 au titre<br />

de l'annexe XXIV quater pour recevoir <strong>des</strong> déficients auditifs débiles<br />

moyens (QI de 0'50 à 0'70) <strong>des</strong> deux sexes âgés de 5 h 20 ans, de 150<br />

places.<br />

Le recrutemefit est largement national puisque en 1981-1982 la<br />

région Rhône-Alpes représente 40 % de l'effectif de l'établissement.<br />

Le taux d'occupation connaissait une tendance à la baisse amorcée<br />

dbs 1978, devenue très nette en 1981 ; l'âge moyen <strong>des</strong> pensionnaires,<br />

de plus, permettait de penser que cette tendance ne pourrait<br />

que s'accroître du fait <strong>des</strong> départs non compensés.<br />

Enfin, on constatait l'importance <strong>des</strong> handicaps associés à la d6-<br />

ficience auditive.<br />

Très tôt se sont mises en place, ainsi qu'il apparaît sur la carte,<br />

<strong>des</strong> structures pour l'enfance inadaptée susceptibles de concourir à<br />

l'accueil et au traitement <strong>des</strong> déficients auditifs ou non, mais significatives<br />

du mouvement de développement de l'intégration.<br />

Ainsi, dans le domaine médico-social, relève-t-on deux CAMSP<br />

(40 places), quatre CMPP, deux SSESAD.<br />

S'y ajoutaient deux classes maternelles et une classe primaire<br />

pour enfants sourds (de I'Education nationale) accueillant <strong>des</strong> enfants<br />

sourds avec le soutien du CMPP et du CAMSP (classes situées<br />

à Valence).<br />

B - <strong>Les</strong> modifications intervenues<br />

l/ De missions d'enquête en enquêtes de I'IGAS l, sur proposition<br />

de l'établissement en 1986, fut réalisée une réduction de l'agrément<br />

à 110 lits, s'accompagnant d'une modification de la population<br />

1. Inspection G6nérale <strong>des</strong> Affaires Sociales.


accueillie (déficients auditifs, débiles moyens, et déficients auditifs<br />

présentant <strong>des</strong> troubles associès), par arrêté du Préfet de Région en<br />

date du 7 novembre 1986.<br />

Cette diminution de capacité s'accompagnait de la nkessit6 de<br />

supprimer 16'25 emplois, toutes categories confondues, et la recommandation<br />

de recentrer l'activité sur le sud-est.<br />

21 Ouverture d'un foyer exterieur pour les 18/20 ans de 9 places<br />

à l'extérieur de 1'Etablissement compris dans la capacité de 110<br />

places.<br />

31 Avant la circulaire de 1988, i'établissement se comportait en<br />

centres de ressources, en appuyant les SSESAD du département voisin<br />

par mise disposition conventionnelle <strong>des</strong> professeurs C W A<br />

« exddentaires »: 3'5 postes.<br />

4/ Enfim, depuis la rentrée scolaire 1988-89, PétabEsernent a<br />

également ouvert un SSESAD de 16 places (8 materneiles - 8 primaires)<br />

à Valence, à peu près rempli, pour déficients auditifs s6vGres<br />

et profonds.<br />

A noter que YEducation nationale dispose parallèlement de<br />

deux postes ambulatoires #enseignants spécialises maternelle et<br />

primaire il Vaience et de deux postes à Romans et Valence, en primaire,<br />

pour déficients auditifs moyens-légers.<br />

C - Projets Immddiats<br />

L'etabfissement, parmi les 107 pensionnaires à ce jour, en<br />

compte 43 (soit 40 %) de plus de 18 ans, dont un certain nombre relevant<br />

de CAT. Compte tenu <strong>des</strong> besoins en matière de travail prot&g&<br />

non couverts sur le département, il est prévu de mettre en place<br />

un CAT (40 places) géré par l'hociation, mais non spécgique du<br />

handicap auditif. Reconversion qui, bien entendu, conduira Ct remettre<br />

en cause la capacitts de PIME.


D - L'avenir<br />

A noter d'ores et déjà que les gran<strong>des</strong> lignes de la circulaire de<br />

1988 sont satisfaites : ouverture sur l'extérieur de l'établissement,<br />

établissement centre de ressources et le tout, bien sQr, sans crédits de<br />

postes et par redéploiement.<br />

<strong>Les</strong> questions qui se posent B ce point de l'exposé sont les<br />

suivantes :<br />

- les besoins de la population sont-ils couverts ?<br />

- le fonctionnement <strong>des</strong> structures existantes est-il opthaf ?<br />

Si l'on résume, la situation se présente de la façon suivante : une<br />

étude de besoins a été faite en 1985-1986 par la CDES concluant<br />

un recensement A l'époque de 98 enfants d'tige maternelle, primaire,<br />

secondaire nés entre 65 et 85 déficients auditifs sévères et profonds<br />

(dont 55 de moins de 11 ans).<br />

Cette enquête fait également apparaître <strong>des</strong> mo<strong>des</strong> de prise en<br />

charge très différents (suivi Education nationale, placement en établissement<br />

spécialisé hors département, pas de suivi) et bien entendu<br />

une dispersion sur l'ensemble du département.<br />

L'importance de ces chiffres nous a conduit à recommencer une<br />

enquête adressée A la PMI, Santé scolaire, centres hospitaliers<br />

(ORL), CAMSP ; enquête nominale, dont les résultats seront connus<br />

le ler décembre 1988.<br />

Une parenthèse: la perception <strong>des</strong> besoins est très difficile.<br />

Raisons :<br />

- évolution permanente de la situation ;<br />

- possibzté de dégager seulement <strong>des</strong> indications générales, qui ne<br />

tiennent pas compte <strong>des</strong> souhaits <strong>des</strong> intéressés ; nous ne disposons<br />

même pas de l'appui <strong>des</strong> indices lits/population, contrairement au<br />

secteur sanitaire ;<br />

- très équipé pour le constat, mais pour la prévision : très difficile ;<br />

Quoi qu'il en soit, de nombreuses questions se posent encore :<br />

- seule une petite partie du département est couverte : nord, sud de<br />

département où les besoins ont été recensés d'ores et déjà ;


- la prise en charges <strong>des</strong> enfants d'fige pré-maternel n'est pas encore<br />

réalisée ; l'assistance aux familles <strong>des</strong> enfants frequentant l'école<br />

ordinaire n'est pas faite ;<br />

- le recrutement de 1'IME n'est pas encore suffisamment local, malgré<br />

les recommandations de l'IGkS. Ainsi, ii ce jour, 34 % seulement<br />

<strong>des</strong> pensionnaires sont originaires de RhBne-Alpes.<br />

CONCLUSION<br />

C'est pourquoi, en vertu <strong>des</strong> recommandations de la circulaire<br />

de 1988, nous pensons que le schéma précédant pourrait être<br />

complété d'un SSESAD sur le sud du département, d'un service<br />

d'éducation précoce et de soutien de I'intégration scolaire et d'une<br />

diminution de la capacité de I'INE (cf. dernier schéma),<br />

Un vaste chantier demeure donc encore.<br />

Mais <strong>des</strong> conditions doivent être remplies pour cela :<br />

- une modification <strong>des</strong> pratiques professionnelles : moins de Pensionnaires,<br />

plus d'activités extérieures ;<br />

- une volonté de collaboration entre structures (Education nationale<br />

et associations notamment) ;<br />

- dépasser le département pour un raisonnement au plan rggional<br />

voire inter-régional (cf. le Vaucluse).<br />

Le delai de deux ans ouvert par le décret de 1988 devrait permettre<br />

cette transformation.


ETABUSSEMENTS<br />

ET SERVICES POUR L'ENFANCE<br />

ET LA JEUNESSE M DIWEES


ENFANTS PLACES DANS LES ETABLISSEMENTS<br />

(ANNEE SCOLAIRE 85-86)<br />

SPECIALISES<br />

* 6 à 12 ans = 13<br />

O > 12ans = 23<br />

TotaI = 41


ENFANTSUMS PAR L'ECOLE AMBULATOIRE<br />

ET LA CLASSE POUR ENFANTS DA.<br />

(ECOLE A. BAYET)<br />

(-E SCOMRE 85-86)<br />

w maternelle = 10<br />

4 élémentaire = 8<br />

Total = 18


ENFANTS QUI NE BENEFICIENT @AUCUNE STRUCIïJRE<br />

e < 6ans = 17<br />

4 6k12ans = 9<br />

X >12ans=13<br />

Total = 39


TABLEAU RECAPITULATIF GLOBAL :<br />

enfants suivis par l'dcole ambulatoire et la classe pour enfants déficients a<br />

enfants placés dans les btablissements spdciaiisés = 41<br />

enfants qui ne Wéficient d'aucune saucture = 39


110 places<br />

(dont 9 en<br />

foyer exterieur)<br />

r------- 7 CENTRE DE RESSOURCES<br />

t H f s e i o n de<br />

!<br />

t 3,s professeurs


S.S.E.S.R.D<br />

VALENCE<br />

X.M.E.<br />

PLACES ?<br />

S.S.E.S.A.D.<br />

SUD-DROME<br />

C.A.T.<br />

40 places<br />

FAMILIAL<br />

SOUTIEN A L'INTEGFIATION<br />

SCOLAIRE<br />

EPUCATION NATIONALE<br />

ENSEIGNEMENT ORDINAIRE<br />

OU SPECIALISE


PRESENTATION D'UN SERVICE DE SOUTIEN<br />

A L'EDUCATION E m W E<br />

ET A L91NTEGWTION SC0<br />

A VALENCE (SSEFIS)<br />

ORIGINE DYUN SERmCE DE SOUmEN A L'EDUCATlON<br />

FGhllILmE ET A L'mEGMTION SCOLAIRE A VUENCE<br />

CEtablissement prive pour Déficients Auditifs g6ré par une Association<br />

loi 1901 & Saint Laurent en Royans, dans la Drome, totalise<br />

une longue expérience de la prise en charge en internat <strong>des</strong> enfants<br />

et adolescents sourds plurihandicapés (agrément pour 110 pensionnaires),<br />

& l'échelle régionale, voire nationale.<br />

Il a souhaité la cr6ation dkn SSEFIS pour plusieurs raisons interdépendantes.<br />

1") Répondre aux deman<strong>des</strong> <strong>des</strong> familles du departement de la<br />

Drorne <strong>des</strong>ireuses dqviter ou de retarder le placement de leur jeune<br />

enfant sourd en internat (les etablissements les plus proches sont distants<br />

d'au moins POO km), tout en lui assurant une prise en charge<br />

sp&ialisee à l'école ordinaire. Ainsi, le recensement, réalisé avec la<br />

couaboration de VAPEDA et les Services de 1'Education speciale,<br />

avait permis de dénombrer une population de seize enfants en âge<br />

* Responsable pédagogique, Institut MédimEducatif pour Déficients Auditifs «La Providence<br />

», Saint Laurent en Royans,<br />

1. APEDA : Association de parents d'enfants déficients auditifs.


maternel et primaire nécessitant la création d'un SSEFIS pour enfants<br />

sourds sévères et profonds du Nord du département.<br />

2") Permettre à l'établissement spécialisé, tout en poursuivant<br />

son projet initial, de se transformer progressivement en structure<br />

proposant <strong>des</strong> services spécifiques diversifiés pour enfants et adultes<br />

déficients auditifs.<br />

Ainsi le redéploiement partiel de ses moyens (personnels spécialisés<br />

et moyens techniques) en direction <strong>des</strong> i< usagers B parents et<br />

enfants déficients auditifs du département, conformément aux directives<br />

en vigueur, notamment la circulaire de janvier 1983, a permis<br />

l'ouverture d'un SSEFIS à Valence depuis septembre 1988.<br />

FONCTIONNEMENT DU SSEFIS DE VALENCE<br />

Dans la perspective de l'ouverture d'un SSEFIS à Valence, plusieurs<br />

rencontres de travail eurent lieu au cours de l'année 1988, à<br />

l'initiative du DDASS de la Drome et réunissant les différents partenaires<br />

sociaux : représentants <strong>des</strong> parents, de l'Education nationale,<br />

de la Ville de Valence, de l'Etablissement spécialisé, et devant aboutir<br />

à la signature d'une Convention quadripartite (DDASS, Education<br />

nationale, Mairie de Valence, Etablissement spécialisé). Cette<br />

Convention rappelle les objectifs du SSEFIS et précise les relations<br />

<strong>des</strong> institutions partie prenante de ce projet. Puis les rencontres eurent<br />

lieu entre les bquipes éducatives de I'Education nationale et du<br />

SSEFIS afin de permettre d'établir le projet pédagogique relatif à la<br />

prise en charge <strong>des</strong> enfants sourds accueWs il l'Ecole ordinaire ainsi<br />

que les modalités de participation de chaque membre de l'équipe<br />

pluridisciplinaire. L'élaboration commune de ce projet favorise la<br />

connaissance et reconnaissance mutueue <strong>des</strong> personnels de formations<br />

différentes mais complémentaires.<br />

Depuis septembre 1988,l'Ecole maternelle Romain Rolland accueiue<br />

un groupe de sept enfants soutds sévères et profonds âgés de<br />

3 à 6 ans, en classe maternelle spécialisée, et l'Ecole d'application


Léo Lagrange accueille 8 enfants sourds sévères et profonds $g6s de<br />

6 à 12 ans en classe primaire.<br />

Ces enfants sont ori&aires du nord de la Drome. Us sont<br />

conduits & l'école par leur famille ou par un taxi après accord de la<br />

CDES. Ils prennent leur repas à la cantine scolaire.<br />

<strong>Les</strong> tocaux<br />

La Convention passée avec I'Education nationale et avec le<br />

Maire de Valence a prévu L'utstaUation d'une salle de classe dans<br />

chaque Me, ce qui favorise l'intervention conjohte <strong>des</strong> personnels<br />

spécialisés du SSEFTS et de I'Education nationale, une cloison permettant<br />

<strong>des</strong> activités pédagogques en sous-groupe. Ces salles possèdent<br />

une banne isolation phonique, souhaitée pour l'utssation<br />

d'appareillages ampEateurs collectifs et individuels. Une salle<br />

d'éducation de la parole attenante à la salle de classe permet la prise<br />

en charge individuelle de chaque enfant pour l'apprentissage et la<br />

correction de la parole. Elle est équipée de matériel amplificateur.<br />

LE CADRE ADMINISmTIF<br />

Le SSEFIS possède un budget distinct de YEtablissement d'origine<br />

et établi par ce dernier. Des conventions sont passées avec les<br />

organismes payeurs (Caisse régionale d'assurance maladie) et avec<br />

I'Ecole ordinaire et la Viiie de Valence, en application de la circulaire<br />

no 834 du 29 janvier 1983. Le personnel du SSEFIS, redt5ployd<br />

à partir de I'établissement d'origine, et sous l'autorité du directeur,<br />

comprend :<br />

- La responsable pédagogique : 4 h. d'interventions hebdomadaires.<br />

- 3 professeurs spécialisés (Certificat d'aptitude à I'enseipement <strong>des</strong><br />

jeunes déficients audit&) dont une personne sourde mi-temps.<br />

- 1 psychologue clinicien (8 h. hebdomadaires).


- 114 de temps de psychomotricienne.<br />

- 1 médecin audiophonologiste vacataire.<br />

- 1 temps partiel de secrétariat et comptabilité (assuré par l'établissement).<br />

- 1 audioprothesiste vacataire.<br />

LE CADRE EDUCATIF DU SSEFfS<br />

La famille inscrit son enfant sourd à l'école ordinaire et au<br />

SSEF3S (après dbision de la CDES). Dans le cadre de rencontres<br />

régufibres avec l'équipe éducative, elle est inform4e du projet éducatif<br />

propos4 à son enfant, elle donne son avis et participe à la rbalisation<br />

de ce projet.<br />

<strong>Les</strong> enfants sourds étant accueillis dans une classe spécialisée,<br />

maternelle et primaire à I'intérieur d'un groupe scolaire ordinaire,<br />

leur prise en charge scolaire est assurtSe par un maître de l'enseignement<br />

public dipl8mé (Certificat d'aptitude à l'enseignement <strong>des</strong> inadaptés,<br />

option handicap& auditifs), en CO-responsabilité avec un<br />

professeur sptscialisé (CAEJDA) ; ce dernier assure plus particdierernent,<br />

mais non exdusivement, f'enseiflernent du franqis et les<br />

apprentissages spécifiques lies à la surdité, individuellement ou collectivement.<br />

Le maître spf?cialisé de l'enseignement public dispense<br />

l'enseimement <strong>des</strong> autres disciplines scolaires selon les programmes<br />

officiels de lPEducation nationale.<br />

<strong>Les</strong> enfants bknéficient par ailleurs d'un enseignement de la LSF<br />

dispensé par un professeur sourd spécialisé (CAEJDA) intervenant à<br />

temps partiel (6 h. hebdomadaires).<br />

Dans cette &pipe pédagogique de base et en collaboration<br />

etroite avec elle, interviennent, en fonction <strong>des</strong> besoins propres à<br />

chaque enfant ou à la dasse, une psychomotricienne, un psycholope<br />

chicien L1 temps partiel, un médecin audiophonologiste vacataire, un<br />

psychologue scolaire, un audioprothésiste.


<strong>Les</strong> représentants de l'école ordinaire (inspecteur de 1'Education<br />

spéciale, directeurs, conseillers pédagogiques, psychologues scolaires,<br />

assistantes <strong>sociales</strong> de 17Education spéciale ou de secteur), participent<br />

à l'élaboration et au réajustement du projet pédagogique et<br />

d'htégration scolaire, aux reunions de synthèses, aux bilans trimestriels<br />

ou annuels.<br />

L'ACTION EDUCATlVE DU SSEFIS<br />

Auprès <strong>des</strong> familles <strong>des</strong> enfants sourds<br />

La famille est responsable tout au long de la scolarité <strong>des</strong> choix<br />

et <strong>des</strong> décisions qui président à l'éducation de son enfant aux c6tQ<br />

de l'équipe éducative.<br />

%e r6le du SSEFIS consiste dans l'aide personnalisée qu'il peut<br />

apporter à chaque famille pour la construction et l'édification d'une<br />

communication.<br />

Ainsi, la présence <strong>des</strong> personnels spkialisés, leur écoute attentive,<br />

les informations et conseils dispensés lors <strong>des</strong> rencontres, peuvent<br />

permettre aux parents de rendre la relation entre eux et avec<br />

leur enfant beaucoup plus spontanée et naturelie, en favorisant l'expression<br />

de leur inquiétude et attente face au handicap. Désireux de<br />

respecter le choix <strong>des</strong> familles en matière de communication, le<br />

SSEFIS propose <strong>des</strong> cours hebdomadaires de TSF ; par ailleurs, un<br />

enseignement à l'utilisation du langage parlé complété (LPC) est en<br />

projet pour la prochaine rentrée scolaire.<br />

Gr$ce à l'instauration et au maintien d'une communication gratifiante<br />

et efficace avec leur enfant, les parents peuvent se sentir<br />

compétents dans leur fonction parentale langagière. Ils préparent<br />

avec les professionnels les fonctions indispensables à l'apprentissage<br />

de la langue orale et écrite et à l'intégration scolaire de leur enfant.


Ils sont invités à participer régulièrement à <strong>des</strong> rencontres ii<br />

l'école afin qu'ils soient informés de l'évolution de leur enfant et<br />

qu'ils puissent donner leur avis concernant tout changement pouvant<br />

intervenir dans la prise en charge : mise en place de soutien spécifique,<br />

mesure d'intégration individuelle, orientation alaire.<br />

Un cahier de liaison écolelfamille véhicule les petites informations<br />

journalihres.<br />

Au sein <strong>des</strong> classes sp6ciaiisées<br />

Dans le but de réaliser cet équilibre souhaitable pour l'enfant<br />

sourd entre ses besoins de communication, de participation sociale et<br />

d'apprentissages scolaires, les échanges se fondent, au sein de la<br />

classe, sur une communication bimodale, basée à la fois sur le langage<br />

parlé et le langage gestuel.<br />

La fonction du professeur spéciaiisé comprend :<br />

- L'éducation auditive : <strong>des</strong> situations collectives ou individuelles<br />

exercent l'enfant sourd, muni d'une prothèse auditive, à utiliser au<br />

maximum ses restes auditifs et ii structurer ses expériences auditives<br />

quotidiennes.<br />

- L'apprentissage et la correction de la parole font l'objet d'un<br />

travail éducatif individuel de une demi-heure par jour et par enfant,<br />

dans le local <strong>des</strong>tiné à cet usage.<br />

Cette éducation du langage parlé, dans ses aspects syntaxiques et<br />

sémantiques s'appuie largement sur <strong>des</strong> activit4.s intégrant la dimension<br />

de la communication.<br />

- L'entraînement à la lecture labiale.<br />

Cet enseignement est entrepris paraliblement à l'éducation auditive<br />

et ii l'apprentissage de la parole lors d'activités individuelles ou<br />

collectives.<br />

- L'enseignement de l'écrit est entrepris précocement. <strong>Les</strong> situations<br />

de lecture s'attachent & faire découvrir à l'enfant sourd la signi-


fication de l'écrit par la mise en relation graphie-sens en entraînant<br />

pardblement l'enfant à l'apprentissage <strong>des</strong> relations graphie-son,<br />

Cet enseipement a recours à la LSF et aux ai<strong>des</strong> techniques visuelles<br />

multiples : pictogramme, idéogramme..,<br />

- L'enseignement de la Langue <strong>des</strong> signes française.<br />

Outre le fait que le geste fait partie intégrante de la cornmunieation<br />

de l'entendant, dans son développement initial, ou dans son accompapslement<br />

spontané, il est naturellement utilis6 par l'enfant<br />

sourd dans sa communication visuo-pstuelle avec son entourage.<br />

L'apprenthge de la LXF par le jeune enfant sourd trouve toute<br />

sa justifiation dans la mesure où elle introduit rapidement l'enfant<br />

dans l'ordre de la communication semiotisée, dans le cadre familial<br />

ou avec ses pairs. Elle contribue à donner à l'enfant sourd identité et<br />

valorisation par une communi~ation gratifiante.<br />

- L'enseignement de la LSF est proposé à chaque enfant, 6<br />

heures par semaine par le professeur spécialis6 sourd.<br />

Ee médecin audiophanologiste assure <strong>des</strong> vacations régulibres<br />

afin de prwkder i3 l'examen chique de l'enfant sourd, I'examen audiométrique,<br />

le suivi rééducatrf concernant chaque enfant.<br />

Ee psychofape chicien suit l'évolution de chaque enfant en<br />

prenant en compte les aspects cognitifs et affectifs, ainsi que I'environnement,<br />

ceci afüi de prkvenir les troubles de la personnalité en<br />

aidant l'enfant à s'accepter comme enfant sourd. Xi etablit <strong>des</strong> bilans<br />

psychologiques dans le but de coilaborer à une meilleure orientation<br />

de la prise en charge.<br />

11 participe à l'éducation parentale en favorisant les rencontres<br />

parents-adultes sourds pour leur permettre de comprendre leur enfant<br />

en tant qu'etre en devenir.<br />

Xi participe, en etroite collaboration avec l'équipe, aux différents<br />

projets qui concernent I'intégration de chaque enfant,<br />

La psychomotricienne, chargée de la rééducation psychomotrice,<br />

s'adresse principalement aux enfants présentant <strong>des</strong> troubles psychomoteurs<br />

et relationnels, au cours de séances individuelles.


L9int4gratlon scolaire<br />

L'intégration scolaire collective et progressive est souhaitable<br />

afin que I'enfant sourd ne soit pas isolé dans un grand groupe d'enfants<br />

entendants, qu'il puisse avoir <strong>des</strong> échanges sémiotiques avec ses<br />

pairs.<br />

Le développement de compétences indispensables à l'insertion<br />

en classe ordinaire rend nkessaire une prise en charge éducative<br />

spkialisée préalable ou simultanée de l'enfant sourd et son intégration<br />

scolaire graduelle selon ses compétences.<br />

Ainsi, dans chaque école ordinaire, l'intégration du groupe ou<br />

d'une partie <strong>des</strong> enfants sourds s'opère d'abord sur un mode social.<br />

<strong>Les</strong> enfants sourds fréquentent les enfants entendants et participent<br />

aux activitb para-scolaires de certaines classes.<br />

<strong>Les</strong> enfants entendants, dans cette fréquentation habituelle <strong>des</strong><br />

enfants sourds, ajustent progressivement leur comportement, nouant<br />

ainsi <strong>des</strong> relations mutuelles.<br />

<strong>Les</strong> enfants sourds <strong>des</strong> classes maternelle et primaire spécialisées<br />

vont en classe aux mêmes heures que leurs camara<strong>des</strong> entendant~,<br />

ils partagent les lieux communs, cours de récréation, restaurant<br />

scolaire, locaux sanitaires et de sommeil.<br />

Ils s'intègrent ensemble aux activités récréatives, sportives,<br />

rythmiques, B certaines disciphes d'éveil ou classes de découverte.<br />

Des actions de coéducation s'organisent progressivement.<br />

Cette intégration collective prépare activement l'enfant sourd<br />

une intégation individuelle chaque fois qu'elle est possible.<br />

Une intégration individuelle à temps partiel ou complet d'un ou<br />

plusieurs enfants sourds dans une classe ordinaire fait l'objet d'une<br />

préparation minutieuse de l'équipe pédap@que, eile tient compte<br />

<strong>des</strong> capacités personnelles, scolaires, de chaque enfant et de ses possibilités<br />

communicationnelles avec l'entourage. L'apprentissage<br />

d'une communication mimo-gestuelle, l'utilisation de Français signé


ou du LPC par l'instituteur de la classe intégrante facilite la participation<br />

de l'enfant sourd.<br />

L'organisation pédagogique de ces différentes mesures d'intégration<br />

collective ou individuelle s'inscrit dans un projet élaboré par<br />

l'équipe éducative composée <strong>des</strong> personnels du SSEFIS et de i'école<br />

ordinaire, au début de l'année scolaire et remanié pour les besoins<br />

au fur et à mesure <strong>des</strong> rencontres de travail, au cours <strong>des</strong> bilans et<br />

synthèses.<br />

<strong>Les</strong> relations enseignants enseignés et entre enfants entendants<br />

et sourds se fondent sur la langue orale et écrite, mais aussi sur un<br />

langage mirno-gestuel.<br />

Une Cquipe Cducative pluridisciplinaire<br />

Elle comprend les différents intervenants auprès de l'enfant<br />

sourd, précédemment cités.<br />

Elle se réunit lors <strong>des</strong> rencontres de travail et de réflexions, <strong>des</strong><br />

synthèses, <strong>des</strong> bilans.<br />

Elle élabore et réajuste les projets individuels et collectifs de<br />

prise en charge, donne son avis concernant les admissions <strong>des</strong> nouveaux<br />

élèves sourds et se prononce sur une éventuelle réorientation,<br />

en relation avec la famille et les personnels de l'école ordinaire.<br />

Elle est soucieuse de l'évolution de chaque enfant, elle suit particulièrement<br />

le développement de leur communication, condition<br />

sine qua non de l'épanouissement de l'enfant sourd et de son intégration<br />

scolaire.<br />

Chaque professionnel évalue son action personnelle auprès de<br />

chaque enfant, ainsi que du groupe dont il est responsable (enseignants),<br />

en établissant <strong>des</strong> bilans réguliers.<br />

L'établissement d'origine assure un soutien régulier de l'équipe<br />

pluridisciplinaire en participant aux instances de travail et en proposant<br />

<strong>des</strong> actions de formation.


En cas de besoin, cette équipe pluridisciplinaire fait appel à <strong>des</strong><br />

spkialistes.<br />

Le SSEFIS, structure souple<br />

L'action éducative spécialisée entreprise par le SSEFIS, d'une<br />

part auprès <strong>des</strong> familles, d'autre part auprès de leur enfant sourd accueilli<br />

dans l'une <strong>des</strong> deux &les de Valence, est appelée à se modifier<br />

au fur et à mesure de l'évolution de chaque enfant et de ses besoins,<br />

en cours d'année scolaire et pour le temps que durera sa prise<br />

en charge h l'école ordinaire.<br />

L'intervention actuelle du SSEFIS couvre la scolarits de l'enfant<br />

de 3 à 12 ans.<br />

Un fonctionnement rigoureux mais souple du SSEFIS, une collaboration<br />

étroite de la famille et <strong>des</strong> diffkrents professionnels sociaux<br />

concernés par l'éducation et l'intégration de l'enfant sourd,<br />

sont autant de conditions nécessaires à son maintien à l'école<br />

ordinaire.


CONVENTION entre :<br />

Madame 1'Inspateur d'Académie de la Drome, Monsieur le<br />

Maire de la ViUe de Valence et Monsieur le Directeur de I'Institut<br />

Médico-Educatif « La Providence », concernant les actions du<br />

S.E.E.S.A.D. dans le cadre :<br />

- de la classe maternelle Romain Rolland, rue Béranger à Valence ;<br />

- de la classe primaire L. Lagrange, chemin Saint Joseph à Valence,<br />

accueillant <strong>des</strong> enfants déficients auditifs sévkres et profonds ;<br />

Suivant le projet &ducatif et thérapeutique visant Yintégration<br />

cokctive et individuelle d'enfants sourds sév&res ou profonds en<br />

classe ordinaire, à établir de manière coll6giale, entre l'équipe de<br />

l'école ordinaire et <strong>des</strong> classes spécialisées placées sous la responsabilité<br />

de l'Inspecteur d'Académie et de l'Inspecteur chargé, de l'education<br />

spkiale, et l'équipe du S.S.E.SA.D, placée sous la responsab%ttf<br />

du Directeur de l'Institut Médica-Educatif « La Providence M,<br />

W le décret du 15 mai 1974,<br />

W les circulaires intermulistérieues no 82-2 et 82-048 du 29<br />

janvier 1982, no 83-4 du 29 janvier 1983,<br />

IL est convenu ce qui suit :<br />

Article premier : Dispositions gdndrales<br />

Le placement <strong>des</strong> enfants accueillis au S.S.E.S.A.D. sera subordonné<br />

à la décision de la C.D.E.S.<br />

Ces enfants feront I'objet d'une double inscription à la fois au<br />

S.S.E.S.A.D. et à l'école ordinaire.<br />

L'école met à la disposition du S.S.E.S.A.D. les locaux nécessaifes<br />

à son fonctionnement :<br />

- 2 salles de classe meublées ;<br />

- 1 bureau pour le personnel mgdical et para-medical du S.S,E.A,D, ;<br />

- et toutes salles nécessaires au fonctionnement du Service,


Dans les classes, les maîtres de l'enseignement publie diplanrés<br />

CAEI-WA sont responsables <strong>des</strong> groupes d'enfants ; ils travailfent en<br />

CO-responsabgté avec les professeur CAEJDA ou CAPEJS, lesquels<br />

assurent plus particulièrement l'enseignement du Français et <strong>des</strong><br />

techniques relatives & i'apprentksage de la communication et la<br />

rééducation de la surdi-mutité (L.S.F. - L.P.C. - Education Auditive,<br />

etc.).<br />

Un projet pédagogique annuel est établi en coflaboration entre<br />

l'Inspecteur d'Académie, l'Inspecteur de l'éducation spéciale, l'Inspecteur<br />

Départemental de 1'Education Nationale, l'Inspecteur spécifi6,<br />

le Maître Directeur, le Professeur ou CAPHS, et<br />

le Dkecteur du S.S.E.S.A.D.<br />

Il est soumis au Directeur de l'école, afin d'envisager les modalités<br />

pratiques d'intégation.<br />

Article 2 : Actions d'4frvaIuation<br />

Le contr8le pédagogque de la classe est assuré par l'Inspectrice<br />

de lPEducation Spéciale concernant les personnels CAEI-H;A et par<br />

le Responsable pédagogique du S.S.E.S.A.D. ancemant les personnels<br />

DA ou CAPUS.<br />

Le suivi médical <strong>des</strong> enfants sourds sévères et profonds, ainsi<br />

que la guidance parentale sont assurés par l'équipe du S.S.E.SA.D.<br />

L'équipe médicale et para-m.exlicale habilttée par la direction du<br />

S.S.E.S.A.D. a libre ac&s aux locaux affectés au S.S.E.S.A.D.<br />

Article 3 : Dispositions diverses<br />

La responsabilité civile <strong>des</strong> enfants est assurGe dans les conditions<br />

habituelfes <strong>des</strong> textes en vigueur dans une école pubüque.<br />

Le S.S.E.S.A.D. assure l'équipement <strong>des</strong> locaux en matériel nécessaire<br />

& la r64ducation de la surdi-mutité.


Un comité de gestion composé :<br />

- de Madame l'Inspectrice d'Académie ;<br />

- du Directeur Départemental <strong>des</strong> Affaires Sanitaires et Sociales ;<br />

- de l'Inspectrice de l'Education Spkiale ;<br />

- du Directeur du S.S.E.S.A.D. ;<br />

- du Responsable pédagogique du S.S.E.S.A.D. ;<br />

- du Directeur de l'école ;<br />

- d'un représentant de la Commune ;<br />

- d'une représentant élu <strong>des</strong> parents d'élèves handicapés,<br />

est institué.<br />

Le comité de gestion se réunit au moins une fois par an ; il est<br />

consulté sur les orientations en matière d'intégration <strong>des</strong> enfants<br />

sourds sévères et profonds ; il est tenu informé du fonctionnement<br />

<strong>des</strong> classes.<br />

La présente convention est conclue à titre expérimental pour<br />

l'année scolaire 1987-1988 et reconductible de manière tacite,<br />

Chaque partie se réserve le droit de la dénoncer moyennant un<br />

préavis de trois mois.<br />

Fait a Saint-Laurent-en-Royans, le 18 juillet 1988.<br />

Madame l'Inspecteur d'Académie de la Drome,<br />

Monsieur le Directeur de 1'I.M.E. « La Providence »,<br />

Le Maire de Valence,<br />

Monsieur le Directeur départemental <strong>des</strong> affaires sanitaires et<br />

<strong>sociales</strong> de la Drome.


LES ENFANTS DEFICIENTS SENSORIELS SURlX4NDICAPES<br />

Henri F m *<br />

L'6ducation d'un enfant sourd, comme celle d'un enfant aveugle<br />

ou amblyope, pose <strong>des</strong> problèmes extremement délicats si cet enfant<br />

est atteint de surcroît d'un autre handicap, physique ou sensoriel, ou<br />

encore d'une maladie chronique ou 6volutive. Il n'est pas possible<br />

à'« additionner » pour lui les thérapeutiques ou les techniques éducatives<br />

relatives à chacun de ces handicaps car, très souvent, ces derniers<br />

se combinent, s'imbriquent de telle manière que l'approche est<br />

& repenser de manière globale et spécifique. L'exemple le plus ffagant<br />

est celui de l'enfant sourd-aveugle de naissance : les eompensations<br />

visuelles traditionnelles chez le déficient auditif sont mises en<br />

échec, de même que les campensations auditives auxqueiles recourt<br />

la personne aveugle. Dans tous les cas, la conjonction <strong>des</strong> handicaps<br />

provoque un trouble global.<br />

Qui sont ces enfants ?<br />

La typologie retenue par les pouvoirs publics à la suite de l'étude<br />

du CîN "distingue :<br />

- Le pIwihandicap : association circonstancielle de handicaps<br />

physiques (dont un ou deux handicaps sensoriels) : le taux de preva-<br />

*<br />

&&sident du Comité de Liaison et d'Action <strong>des</strong> Parents d'Enfants et d'Adultes Atteints de<br />

Handicaps associes (C.LA.P.EA.HA.).<br />

1. Centre technique national d'étu<strong>des</strong> et de recherche sur les handicaps et les inadaptations,<br />

2, me Auguste Comte, 92170 Vanves. «<strong>Les</strong> Enfants atteints de handicaps associés »,<br />

Dr. E. Zucm et J.-A. SP~NGA


lence s'établit, pour les moins de vingt ans, entre 0,s et 1'5 pour<br />

mille et l'effectif minhum est de 8 000,<br />

- Le polyhandicap, handicap très grave à expressions multiples<br />

avec restriction extrême de l'autonomie : chez ces enfants (deux pour<br />

mille), la déficience mentale sév&re est générdement associée à un<br />

handicap moteur et, tr&s fréquemment, B un handicap sensoriel.<br />

- Le surhandicap, surcharge progressive d'une déficience (notamment<br />

sensorielle) par <strong>des</strong> troubles de la personnalitd (troubles<br />

relationnels, troubles d'apprentissage). Le taux global de prévalence<br />

de cette catégorie est au maximum de 5,5 pour mille : il faut noter<br />

que, selon les étu<strong>des</strong> épidémiolo~ques, les psychoses caractérisées<br />

sont relativement plus nombreuses chez les enfants aveugles (plus de<br />

de) que chez les enfants sourds (cinq cents ?) alors que les autres<br />

troubles du comportement sont reneontrgs de manière plus fréquente<br />

chez les enfants sourds. Le taux de prévalence s'accroît B<br />

l'adolescence, surtout dans la pkiode récente (échecs de l'intégration<br />

scolaire 1orsqu'eEe n'a pas bénéficié d'un soutien suffisant).<br />

Ajoutons quelques résultats <strong>des</strong> « analyses de correspondance »<br />

effectuées par les épidémiologistes :<br />

- les enfants sourds ou aveugles psychotiques sont très rarement atteints<br />

d'un troisième handicap ;<br />

- en revanche, les enfants polyhandicapés sont trh fréquemment atteints<br />

de trois handicaps ou plus ;<br />

- les handicaps sensoriejs sont accompagnés (mais de façon identique<br />

a la moyenne globale de la population <strong>des</strong> enfants handicap&), de<br />

troubles somatiques divers (cardiopathies notamment) ou de maladies<br />

chroniques. Ces atteintes sont généralement d'origine congénitale.<br />

L'étiologie de ces mdtrhandicaps revgt une extrême importance,<br />

notamment pour l'approche éducative : plus le handicap<br />

sensoriel est tardif, plus l'éducation pourra s'appuyer sur les acquis<br />

antérieurs (structuration du langage, connaissance de l'espace...).<br />

2. Etabli à partir <strong>des</strong> dossies <strong>des</strong> Gmmisions dépanementales de l'éducation spéciale.<br />

3. Tel qu'il &ultc d'une étude épidémîolo@que effectuée par l'INSERM et te Centre d'étude,<br />

de soins et d'action permanente en faveur <strong>des</strong> déficients mentaux : GESAP.


En revanche, les handicaps à caractère évolutif peuvent être la<br />

cause de problèmes psychologiques graves.<br />

Un exemple de cette diversité est celui <strong>des</strong> sourds aveugles : si,<br />

durant la petite enfance, l'étiologie dominante reste la rubéole<br />

foetale (plus de 80 % <strong>des</strong> cas), à l'adolescence et l'$ge adulte, près de<br />

50 % de ces cas résultent d'atteintes progressives, teife que celie provoquée<br />

par le wdrome de Usher : sourd dès la petite enfance, i'adolescent<br />

est atteint de rétinite pijgmentaire évoluant vers la &ité<br />

totale.<br />

Où sont-ils ?<br />

En ce qui concerne les enfants polyhandicap& atteints notamment<br />

d'une dkficience auditive ou (et) visuelle, leur atteinte sensorielle<br />

n'a généralement pas d'incidence sur leur orientation : ils<br />

suivent le sort <strong>des</strong> autres enfants polyhandicapds, dont l'atteinte<br />

mentale très profonde et le handicap moteur également très lourd<br />

amènent à relativiser » l'atteinte sensorielle surajoutée. Un grand<br />

nombre d'entre eux sont accueillis dans <strong>des</strong> établissements pour enfants<br />

infirmes moteurs cérébraux et, certains, dans les sections pour<br />

enfants <strong>des</strong> hôpitaux psychiatriques. Longtemps placés sous le vocable<br />

de la a défectologie », ces sections ont évolué durant l'époque<br />

rikente : si les soins corporels y occupent, par néeessité, une partie<br />

dominante de la vie quotidienne, une certaine dimension animation<br />

>> y est maintenant admise, du moins dans un certain nombre<br />

d'étabiissements, cette dimension ayant en réalité une mbition éducative<br />

mo<strong>des</strong>te mais réelle. Toutefois, les équipes concernées sont<br />

souvent bien peu formées à prendre en compte la composante sensorielle<br />

du polyhandicap. Et, en ce qul concerne les étabiissements psychiatriques,<br />

le dialogue avec les familles est gdnéralement ignore ou<br />

nettement rejeté.<br />

Le présent chapitre sera donc consacré essentiellement au cas<br />

<strong>des</strong> enfants plurihandicapés et <strong>des</strong> enfants surhandicapés, pour lesquels<br />

I'évofution récente est particuEhrement importante,


Au sein <strong>des</strong> Instituts pour enfants sourds et pour enfants<br />

aveugles (en particulier les Instituts régionaux), la proportion d'enfants<br />

et d'adolescents plurihandicapés augmente régulièrement.<br />

<strong>Les</strong> dasses traditionnelles pour enfants « monohandicapés » se<br />

vident lentement, en raison de la baisse de la natalité et, surtout, de<br />

la politique d'intégration en milieu ordinaire. D'année en année, ces<br />

instituts sont amenés, en raison du nombre de cas qui leur sont<br />

adressés par les CDES, à accepter <strong>des</strong> enfants atteints, outre leur<br />

handicap sensoriel, d'une déficience mentale légère ou moyenne, de<br />

troubles moteurs (sous réserve de l'accessibilité <strong>des</strong> locaux), Il s'agit<br />

soit d'un a redéploiement » volontariste, soit bien souvent, d'une<br />

sorte de reconversion « rampante » qui peut être grave de conséquences<br />

lorsque cet accueil de cas plus lourds n'est pas assorti d'un<br />

véritable projet pédagogique adapté et de l'octroi <strong>des</strong> moyens supplémentaires<br />

indispensables.<br />

Un certain nombre d'enfants déficients sensoriels multihandicapés<br />

sont accueiilis dans <strong>des</strong> établissements (ou <strong>des</strong> sections d'établissements)<br />

créés spécialement pour eux. Citons, il titre d'exemple :<br />

- pour les enfants atteints simultanément de surdité profonde et d'un<br />

handicap moteur lourd (IMC), la « Gentilhommière » à Mame-la-<br />

Coquette ;<br />

-pour les enfants aveugles ou amblyopes graves plurhandicapés<br />

(surcharges diverses autres que la cécité profonde), 1'IME de Loosles-Lille<br />

;<br />

- pour les enfants sourds-aveugles, le Centre éducatif de hrnay, près<br />

de Poitiers, celui de Chevreuse et celui de Toulouse ;<br />

- pour les enfants sourds déficients mentaux, ceux de Saint-Laurent<br />

en Royans, Jarville La Malgrange ou Nogent le Rotrou,<br />

Cette liste est loin d'être exhaustive, mais elle permet de constater<br />

que ces établissements, très inégalement répartis sur le territoire,<br />

couvrent une aire géopaphique généralement très large. Certains<br />

ont même un recrutement national, et ce phénomène ne se corrige<br />

que très lentement, au fil <strong>des</strong> créations nouvelles, chaque familie restant<br />

généralement fidble, jusqu'il ce qu'il ait vingt ans, à l'équipe qui<br />

a accueW son enfant.


Reste le problème <strong>des</strong> enfants déficients sensoriels smhandfeapés<br />

: les troubles graves de la personnalité dont ils sont atteints les<br />

ont souvent amenés à être renvoyés <strong>des</strong> instituts, dont ils perturbaient<br />

gravement la vie collective et en particulier l'activité scolaire.<br />

Certains ont et6 admis dans <strong>des</strong> hapitaux de jour, où l'équipe thérapeutique<br />

a « buté >> sur le handicap sensoriel (surtout s'il s'agissait de<br />

surdité).<br />

Quelques-uns sont dans leur famille (suivis ou non par le secteur<br />

de neuropsychiatrie infanto-juvénile), plus souvent en hôpital psychiatrique.<br />

Ils régressent souvent, faute d'approche éducative proprement<br />

dite.<br />

L'approche éducative précoce<br />

Elle est rendue particulièrement difficile par les difficultés<br />

même du diagnostic et ses conséquences sur la famrlle.<br />

Même pour une équipe médicale spécialisée dans le multihandicap,<br />

le tableau clinique <strong>des</strong> premiers jours et <strong>des</strong> premiers mois ne<br />

permet guère un diagnostic pr6cis. Le handicap visuel est en général<br />

détecté plus précocement que le handicap auditif. Leur présence<br />

rend, de toutes façons, très délicate la mesure, même approximative,<br />

d'un éventuel handicap intellectuel. Selon certains sp&iaiistes, même<br />

les métho<strong>des</strong> « objectives » de la surdité semblent parfois mises en<br />

échec en cas de déficit mental hportant.<br />

Le diagnostic sera donc prudent et surtout progressif, ce qui<br />

provoque chez les parents une angoisse de type particulier et une<br />

épreuve morale r.<br />

S'y ajoutent les hospitalisations souvent répétées et les traumatismes<br />

subis par le b6bé à l'occasion <strong>des</strong> interventions chirurgicales<br />

indispensables.<br />

Or, cet enfant a encore plus besoin qu'un autre de la présence<br />

de sa mère. La conjugaison d'une (ou deux) atteinte sensorielle grave


et d'une éventuelle atteinte cérébrale provoque le plus souvent un<br />

« comportement autistique » explicable par les privations majeures<br />

dont souffre l'enfant. Il ne s'agit certes pas d'un « autisme vrai »,<br />

puisqu'il est correctible par l'amorce précoce d'une communication<br />

avec l'entourage. ft s'agit d'un « isolement » qui peut se transfomer<br />

en véritable « retrait du monde » si l'intemention th6rapeutique et<br />

éducative se fait trop tardivement.<br />

Des distinctions seraient certes à opérer suivant la nature du<br />

handicap surajouté. Elles auraient de toutes façons un caractère assez<br />

artificiel : chaque enfant multrhandicapé est un cas spécifique représentant<br />

une somme extrêmement varit5e de difficdtés, dqchecs et<br />

d'espoirs personnels.<br />

La mBre est particulièrement démunie face au comportement<br />

erratique de son enfant : indifférence au monde extérieur, mouvements<br />

stt5réotypés (surtout en cas de handicap visuel).<br />

Ces cas appellent donc une guidance parentale spéci£ique, très<br />

individu&6eY effectuée à partir de bilans pQiodiques par <strong>des</strong><br />

équipes compétentes, capables de guider l'intervenant en exerçant à<br />

son égard le rble d'un « veritable centre de ressources B.<br />

Cet intervenant devra d'abord aider la famiBe, et surtout la<br />

mère, it ne pas « focaliser » sur les handicaps de son enfant avec l'espoir,<br />

largement fallacieux, de les « corriger ». Ce ne sont pas ces<br />

atteintes physiques et cette grande dépendance qui sont importantes<br />

pour l'avenir de l'enfant, mais ses viftudtés. Au iieu de le comparer<br />

sans cesse aux autres, il faut découvrir ses capacités et prendre appui<br />

sur elles en vue de son épanouissement.<br />

A ses parents, comme tout bébé, il demande chaleur, nourriture<br />

et sommeil. Mais il faut aussi lui permettre, il son rythme, d'entrer en<br />

relation avec cet univers qui l'entoure et dont ses handicaps semblent<br />

le retrancher.<br />

Ses parents doivent tout d'abord apprendre & lui fournir <strong>des</strong> repères,<br />

S'il ne peut voir qu'on s'approche de lui et qu'on va le saisir<br />

dans son berceau ou qu'on va le plonger dans sa baignoire, il faut le<br />

prévenir, grilce au sens non atteint ou même par un toucher spécial.


<strong>Les</strong> parents doivent amsi apprendre à le nourrir, en évitant tout<br />

gavage (surtout s'il est cardiaque) : ce temps doit etre un temps de<br />

contact privilégié fait de disponibifité à son égard. Il doit sentir que<br />

ses parents y 6 prennent plaisir B.<br />

L'apprentissage de la communication sera souvent très fruste :<br />

par exemple, pour l'enfant sourd-aveugle, elle passera par notre<br />

souffle, le toucher, les odeurs. Il sera lié à un début d'effort de socialisation,<br />

qui exige <strong>des</strong> parents de nie pas céder à la faciiité. L'enfant<br />

multihandicapé préfère généralement rester allongé. Il faut trouver<br />

ce qu'il aime accomplir en position assise, lui offrir <strong>des</strong> jeux capables<br />

de le détourner de ses stéréotypes (et notamment <strong>des</strong> « biindismes »).<br />

Contrairement aux autres enfants, il craint la nouveauté, il faut, sans<br />

le déstabiliser par <strong>des</strong> sollicitations abusives, lui imposer le<br />

changement.<br />

Ce « métier » de jeune parent nécessite un soutien important,<br />

psychologique et technique, que peuvent seules apporter les équipes<br />

réellement compétentes dans le domaine du multihandicap (CAMSI)<br />

spécialisé par exemple).<br />

A l'âge scolaire, une approche diversifibe<br />

Au-delà de trois ans, l'approche va se diversifier pour s'adapter<br />

à la complexité <strong>des</strong> besoins de l'enfant multihandicapé. Selon l'expression<br />

de Madame le Docteur Zucman, « elle doit, comme toute<br />

éducation, être progressive, dosée du plus simple au plus complexe,<br />

bien que cette règle de pédagogie générale soit souvent déjouée par<br />

la multiplicité <strong>des</strong> besoins de l'enfant, par la lenteur de son évolution<br />

et par l'angoisse créée par sa dépendance, tant chez les parents que<br />

chez les intervenants P.<br />

Certains traits seront néanmoins communs à tous, de même<br />

d'ailieurs qu'à tous les enfants très gravement handicapés.<br />

Il s'agit dans tous les cas d'aider le multihandicapé à construire<br />

sa personnalité. Alors qu'à l'âge précédent, il s'agissait surtout de<br />

donner à l'enfant <strong>des</strong> informations grâce à tous ses restes sensoriels,


il s'agit désormais de l'aider à intégrer ces informations, à les classer,<br />

les utiliser, les passer au crible de sa personnafité pour que, petit A<br />

petit, il prenne l'initiative de l'action.<br />

S'agissant d'enfants tous atteints d'un handicap sensoriel grave,<br />

l'une <strong>des</strong> dominantes de l'gducation sera la Communication.<br />

Le stade présymbolique<br />

C'est un stade dont la durée sera très diverse selon le nombre et<br />

la gravité <strong>des</strong> handicaps : un enfant sourd-aveugle par suite de ru-<br />

Mole congénitale y demeurera parfois pendant plusieurs années<br />

avant que ne soit franchie l'étape du i< premier signe » rendu célèbre<br />

par l'expérience d'Helen Kelier.<br />

A ce stade, l'6veil initial au dialogue avec l'environnement se<br />

fera par le canal de la motricité. Il s'agit d'utiliser toutes les potentialités<br />

physiques de l'enfant (capacitb ou


La balnéothérapie sera, dès cette phase motrice, un moyen privilégié<br />

de cette maîtrise corporelle progressive. Eiie permettra en<br />

particulier de proposer <strong>des</strong> mouvements d'abord « coactifs », puis<br />

<strong>des</strong> mouvements hitks par l'enfant, qui produira à son tour les premiers<br />

signes expressifs de ses désirs, de ses émotions ou de ses<br />

intentions.<br />

Cette phase exige, de la part de l'éducateur, une grande maîtrise.<br />

Il s'agit d'augmenter progressivement la distance entre le corps de<br />

l'adulte et celui de l'enfant : progressivement, les contacts, au cours<br />

de mouvements coactifs, se feront avec le seul contact de la main, et<br />

ces contacts seront à leur tour restreints ou remplacés par <strong>des</strong><br />

moyens codés (signes, pictogrammes, etc.). L'aide donnée à l'enfant<br />

pour réaliser une action sera juste suffisante pour qu'il réussisse sans<br />

que l'adulte se substitue à lui.<br />

Le processus éducatif fera appel, dès que possible, à <strong>des</strong><br />

« séries » d'activités, qui s'enchaîneront au sein de « circuits » alternant<br />

<strong>des</strong> exercices plus exigeants et <strong>des</strong> séquences gratifiantes.<br />

L'autonomie<br />

Cette phase présymbolique fera bien entendu appel très largement<br />

à toutes les occasions qu'offre à l'enfant sa vie quotidienne.<br />

<strong>Les</strong> parents et les professionnels proposeront à l'enfant toutes<br />

les « petites étapes » qui l'aideront à conquérir son autonomie.<br />

Xi s'agira notamment de la toilette : tous ces enfants aiment<br />

l'eau, mais il s'agit de les habituer, par une incitation modérée mais<br />

obstinée, à « utiliser » l'eau comme moyen de propreté, à se laver, 8<br />

utiliser d'eux-mêmes la serviette.<br />

L'apprentissage de la propret6 sera particulièrement long et se<br />

prolongera parfois jusqu'à l'âge adulte.<br />

Il exigera de la part de l'adulte un grand sang-froid, car l'enfant<br />

sera très sensible, même s'il apparaît « emmuré sensoriel », à l'anxiété<br />

ou la nervosité de son entourage. Plus encore que pour tous les


autres enfants, il faudra établir une régularité dans ses habitu<strong>des</strong>, et<br />

veiller à son confort. Il faudra lui faire comprendre que tous les<br />

membres de son entourage, et en particulier les autres enfants, vont<br />

aux WC.<br />

Mais le domaine privilégié de l'apprentissage de l'autonomie<br />

sera celui de la nourriture. Chez un grand nombre d'enfants multihandicapés,<br />

le repas demande un temps considérable. Son rythme<br />

doit être respecté. Sa fatigabilité peut être importante. Il n'est pas<br />

toujours facile de savoir quand il faut passer du liquide au mixé >>,<br />

lui proposer de saisir la cuiller, etc.<br />

Cette éducation, étendue à l'habillage, au rangement, sera décomposée<br />

en étapes progressives qui donneront lieu à un véritable<br />

programme de conquête de l'autonomie individuelle.<br />

La commwication proprement dite<br />

Il est difficile d'en traiter de manière générale, car les potentiafités<br />

de l'enfant aveugle (sauf atteinte cérébrale grave) seront souvent<br />

supérieures, sur ce plan, à celles de l'enfant sourd multihandicapé.<br />

Lorsque l'enfant commence à accéder au stade symbolique,<br />

c'est-à-dire lorsqu'il comprend qu'un geste, un objet, ou tout autre<br />

donnée peut « signifier » une autre réalité, toutes les pistes doivent<br />

être utilisées dans le sens de la « communication totale >>.<br />

Si l'enfant possède une bonne audition, l'éducation auditive sera<br />

primordiale : LI s'agira de lui apprendre à écouter, puis à se faire entendre<br />

en utilisant au départ le maximum de contenus affectifs (désir,<br />

plaisir, souffrance).<br />

Mais, pour beaucoup d'enfants déficients sensoriels multihandicapés,<br />

la communication passera par l'utilisation de ce que les Anglosaxons<br />

classent sous le vocable de NVCS (Non Vocal Communication<br />

System).<br />

Cela pourra consister tout d'abord en <strong>des</strong> signes gestuels très<br />

frustes (le pouce renversé sur la bouche pour « boire »).


Ce sera aussi le recours à <strong>des</strong> pictogrammes et, progressivement,<br />

à <strong>des</strong> systèmes plus complexes. Si i'enfant est atteint d'un handicap<br />

moteur surajouté, il faudra par exemple tester sa rkeptivité la méthode<br />

« bliss », qui permet de conjuguer en « phrases » toute une<br />

série de pictogrammes, d'idéogrammes et de signes encore plus abstraits<br />

(pour les verbes, les actions, etc.).<br />

Chez l'enfant atteint notamment d'une surdité profonde (ainsi<br />

que chez l'enfant sourd-aveugle), l'étape suivante sera l'apprentissage<br />

progressif de l'alphabet dactylologique et de la langue <strong>des</strong><br />

signes. Chez l'enfant aveugle (et sourd-aveugle), celie du Braille.<br />

Mais de nombreux enfants, surtout ceux dont l'atteinte est d'origine<br />

congénitale, ne parviendront pas (ou ne parviendront que partiellement)<br />

à ce stade.<br />

La conquête de la cornunication devra donc être, comme celie<br />

de Pautonomie, à la fois mbitieuse et réaliste, et s'adapter au cas de<br />

chacun.<br />

Le temps, 17espace et h socialisation<br />

L'une <strong>des</strong> dimensions primordiales de l'éducation de l'enfant déficient<br />

sensoriel multihandicapé visera à l'aider à structurer le temps<br />

et l'espace. Au début de Papprentissage de la communication, l'enfant<br />

a tendance à prendre toute « annonce » comme devant être suivie<br />

de réalisation immédiate. 11 va falloir lui faire admettre, avec<br />

patience et fermetfi, que « Maman va ven ir... demain ».<br />

11 va lui falloir aussi, surtout s'il est aveugle, apprendre à explorer,<br />

à baliser l'espace environnant, à se mouvoir au milieu <strong>des</strong> pièces<br />

et <strong>des</strong> objets en les « structurant » les uns par rapport aux autres.<br />

Cet apprentissage du temps et de l'espace est capital pour la socialisation<br />

de l'enfant : il lui faut admettre que son espace a pour limite<br />

l'espace d'autrui et que la satisfaction du désir passe par le<br />

« chacun son tour ».


Parfois jusqu'ii l'adolescence, l'enfant multihandicapé ne traite<br />

l'adulte (parents, éducateurs) que comme un outil, sollicité pour la<br />

satisfaction d'un désir immédiat. L'Bducation aura pour objectif de<br />

l'amener ii le considérer progressivement comme un être distinct,<br />

qu'il observera, qu'il admettra ou refusera. Un signe très important<br />

de cette évolution sera d'ailieurs son attitude vis-à-vis <strong>des</strong> autres enfants.<br />

L'enfant multihandicapé ne s'y intéresse pas spontanément. Il<br />

les ignore. <strong>Les</strong> équipes éducatives, qui ont longtemps négligé cet<br />

aspect, du moins en France, y attachent ii juste raison, un souci croissant<br />

en proposant <strong>des</strong> activités interactives d'échanges et de communication<br />

entre les enfants eux-mêmes : cette communication peut<br />

accélkrer de mani&re importante la conquête de l'indépendance visà-vis<br />

<strong>des</strong> adultes, notamment au stade de l'adolescence.<br />

L'apprentissage de la Relation constitue, bien entendu, une dominante<br />

dans le cas <strong>des</strong> enfants surhandicapés, c'est-à-dire atteints<br />

de troubles graves de la personnalité. Pour eux, l'approche éducative<br />

et la dimension psychothérapeutique seraient étroitement imbriquées.<br />

Peuvent-& b4n4ficier d9activit4s de type scolaire ?<br />

La réponse à cette question sera tris diverse. Tout enfant capable<br />

d'accéder 2 un langage structuré de type syllabique pourra se<br />

voir offrir <strong>des</strong> activités « scolaires », même si l'approche et le programme<br />

sont beaucoup plus individualisés, personnalisés, que dans le<br />

cas d'enfants monohandicapés,<br />

Mais 2 tous peut et doit être impérativement offerte la possibilité<br />

d'acquisitions cognitives. Chez chacun d'eux, toutes les capacités<br />

de connaissances doivent être sérieusement et progressivement<br />

explorées.<br />

Ce pourra etre au départ, comme au jardin d'enfants, la connaissance<br />

<strong>des</strong> formes (et pour les 4 voyants », celle <strong>des</strong> couleurs) ; ainsi<br />

que l'acqukition <strong>des</strong> notions de quantités, de grandeur, etc.


Cette activite para-scolaire sera, bien entendu, très int6g;ise à<br />

I'apprenthsage de la communimtion. L'objet réel sera confront6 avec<br />

son mbole (modele réduit, maquette, pictogramme) puis avec son<br />

expression écrite.<br />

Une capacit6 fr6quente chez ces enfants est celle de la m6-<br />

moire : il peut être fait appel à elie de maniere croissante (les<br />

moyens informatiques pouvant, surtout dans l'avenir, constituer dans<br />

ce domaine une aide non néggeable).<br />

De pmpammes pemonnafisés au service d'une<br />

pemariente<br />

recherche<br />

Pour utiliser pleinement les capacites de chaque enfant, l'observation<br />

individuelle est un facteur essentiel. Elle doit être le fait aussi<br />

bien de ceux qui sont en contact permanent avec lui (éducateurs, parents),<br />

que <strong>des</strong> responsables disposant d'un minimum de recul<br />

(équipe médicale, directeur pédagogtque). Le dialogue entre ces divers<br />

partenaires doit aboutir à la dtsfinition, pour chaque enfant, d'un<br />

programme individuel dynamique et ambitiem, mais aussi respectueux<br />

<strong>des</strong> possibilit6s rtlelles de l'enfant, de ses paliers, de ses 6ventuelles<br />

régessions.<br />

Cette 6ducation a, plus que celle <strong>des</strong> autres enfants, une dirnension<br />

de recherche permanente. Face à <strong>des</strong> enfants parfois très dtlmunis,<br />

aucune <strong>des</strong> mmho<strong>des</strong> mises au point par Ies équipes le plus<br />

prestigieuses ne doit être Ignar6e. Mais aucune ne doit être imposée<br />

: chacune doit être relativisee, adaptee, transpos6e en fonction<br />

de la persornalit6 de chaque enfant multrhandicap6.


<strong>Les</strong> parents - Témoignages


POUR UN ENFANT SOURI) DANS TOUS SES DROITS<br />

Estelfe et A d6 Vo~os<br />

Magali et Sandrine sont nées en avril 1980. Magafi est sourde<br />

profonde de naissance, Sandrine entend, Elles sont fausses jumelles<br />

et trbs différentes. Maintenant qu'elles ont 9 ans, nous avons assez<br />

de recul et de sérénité pour décrire notre expérience, notre vie familiale<br />

et l'kducation de Magafi. Nous avons recouru dès le début ii tous<br />

les moyens de communication, y compris la Langue <strong>des</strong> Signes Française<br />

(UT;) avec l'aide inestimable d'adultes sourds.<br />

Un d6pistage précoce, à l'iige d'un an ; <strong>des</strong> prises en charge immédiates<br />

et continues (appareillage, orthophonie..,) ; le soutien précieux<br />

<strong>des</strong> autres parents et <strong>des</strong> associations, et le dévouement de<br />

professionnels très compétents ; la participation parentale il la scolarité<br />

dans le dialogue avec les enseignants ... tous ces facteurs ont à nos<br />

yeux aussi un rdle capital, comme il est bien dit partout. Ce n'est pas<br />

partout, en revanche, que les parents peuvent découvrir que les<br />

adultes sou& aussi ont beaucoup à nous apprendre, quand il s'agit<br />

de comprendre et d'aider les enfants sourds, Car ces adultes détiennent<br />

l'expérience vécue de la surdité, souvent dès l'enfance ; mais il<br />

leur est rarement accordé beaucoup de place. Nous-mêmes avons<br />

largement bCnéficié du contact précoce avec la communauté <strong>des</strong><br />

sourds, nous initiant il la langue <strong>des</strong> signes et il leur culture. C'est que<br />

nous avons eu ta chce d'etre infctmzks trirés t6t à ce sujet. Pour toutes<br />

ces raisons (et par manque de place), c'est cette facette de notre expérience<br />

qui apparaîtra plus ici.


Premiers contacts<br />

Vers l'$ge d'un an, Magali était surtout repliée sur elle-même,<br />

refusant de nous regarder, avec un retard de motricitts important.<br />

Nous craignions d'autres choses qu'une surdité.<br />

<strong>Les</strong> premiers conseils d'éducation que reçoivent les parents d'un<br />

enfant sourd sont d'une influence déterminante sur son avenir.<br />

Nous avons eu cette chance au départ d'être très bien orientés et<br />

sans retard, d'abord par le pédiatre, puis f'ORL, jusqu" une orthophoniste<br />

connaissant bien le monde sourd dans son ensemble. Elle<br />

nous a fourni une information très étendue, avec quantité de documentation<br />

et d'adresses utiles : revues, centres, autres parents. Sous<br />

le choc du diagnostic, nous vouiions très vite un maximum d'informations<br />

et nous n'avons négLigé aucune piste. Mais, tout de suite, sur les<br />

conseils de l'orthophoniste et parce que nous sentions à quel point il<br />

était vital de rétablir au plus vite la communication avec Magali, nous<br />

avons accepté d'essayer la Langue <strong>des</strong> Signes Française et de rencontrer<br />

<strong>des</strong> adultes sourds.<br />

Habitant alors dans l'Essonne, nous avons commencé à suivre<br />

<strong>des</strong> cours de signes et fréquenter <strong>des</strong> sourds, l'Académie de la<br />

LSF rue Saint Jacques, au Château de Vincennes, et à un stage de<br />

l'Association 2LPE. Nous avons aussi rencontré <strong>des</strong> sourds élev6s<br />

dans l'oralisme dont certains avaient un haut niveau d'étu<strong>des</strong>. Nous<br />

avons ainsi découvert un monde que nous ignorions totalement auparavant.<br />

Nous avons tout de suite noté que certains sourds n'avaient pas<br />

un niveau convenable de français oral et écrit, alors que d'autres atteignaient<br />

une qualité de parole très impressionnante. Mais leur<br />

degré d'épanouissement et d'autonomie n'&tait pas uniquement fonction<br />

de leur maîtrise de l'oral ; certains sourds qui parlaient bien<br />

semblaient plus dépendants et handicapés dans leurs relations que<br />

certains autres qui n'avaient que la langue <strong>des</strong> signes mais se sentaient<br />

bien dans leur peau. A i'évidence, <strong>des</strong> sourds nomalement intelligents<br />

pouvaient très bien gchouer dans l'apprentissage oral, mais<br />

il existait pour eux d'autres moyens de s'en sortir,


Notre choix<br />

Ces rencontres précoces nous ont d'abord apporté un sodagement<br />

immédiat en nous montrant <strong>des</strong> perspectives positives : bien<br />

que sourde, Magaii pouvait échapper au <strong>des</strong>tin de handicapée perpétuellement<br />

assistée. Mais 1 fallait surtout qu'elle ait une langue et,<br />

afin de lui faciliter au maximum la communication, il valait mieux la<br />

faire passer par le canal visuel. Or il existe une langue développée<br />

par les sourds eux-mêmes, qui est donc naturellement adaptée à la<br />

communication visuelle tout en étant uce langue (= moyen de communication<br />

d'un groupe social) : la langue <strong>des</strong> signes. Pour l'acquérir,<br />

notre bébé sourd aurait les mêmes chances qu'un béb6 entendant<br />

face à la langue orale, pourvu qu'il trouve un environnement adéquat<br />

! Quant à L'apprentissage oral, nous le jugons certes très souhaitable<br />

mais plus artificiel, et trop risqué pour accepter d'en faire le<br />

passage obligé vers toute l'éducation ultérieure,<br />

En fait, nous nous imaglliions alors confrontés au dilemme suivant<br />

: soit encourager Magali & se couper du monde entendant en<br />

misant sur la LSF (ce qui lui assurait du moins une langue), soit retarder<br />

gravement ses acquisitions en misant sur l'oral (ce qui créerait<br />

encore d'autres problèmes en cas d'échec). Nos rencontres avec <strong>des</strong><br />

famiiles ayant connu la deuxième situation, et qui en sortaient grilce<br />

la LSF, nous ont nettement incités à juger que la première &entualité<br />

constituait le moindre &que. Nous avons donc envisagé pour<br />

Magali les objectifs suivants : le plus vite possible, une langue « parlée<br />

», et alors la LSF s'imposait ; en second par ordre d'importance,<br />

le français sous sa forme écrite, donc visuelle, pour accéder & la<br />

culture majoritaire (et aussi pour les plaisirs de la lecture, à défaut<br />

d'avoir ceux de la musique ...) ; enfin, autant que possible, le français<br />

oral, Dans cette optique, c'est la langue <strong>des</strong> signes qui ferait le pont<br />

vers le français écrit, et aussi vers le français oral (N.B. : la langue<br />

<strong>des</strong> signes ne s'écrit pas). Nous options donc pour une éducation bilingue<br />

encourageant tous les mo<strong>des</strong> de communicatiorz.<br />

Ii y avait bien plusieurs structures pour enfants sourds dans<br />

notre département ; mais pour l'option bilingue, rien ! (Un centre<br />

très proche et bien équipé refusait la langue <strong>des</strong> signes). Nous avons


donc dO chercher dans Paris pour trouver un unique CAMSP bilingue,<br />

et encore son existence était-elle constament menacée. Ce<br />

centre nous a offert une prise en charge incluant la famille, ce qui<br />

nous a et6 très benefique. Magali était prise deux fois par semaine,<br />

soit en groupe, soit individuellement, avec un adulte sourd et une orthophoniste<br />

vraiment bjlingue, qui l'eveiuaient sur tous les plans.<br />

Pendant ces séances, un cours de LSF était assuré par un adulte<br />

sourd pour les parents. Sandrine aussi pouvait venir de temps à autre<br />

trouver une écoute à ses difficult6s face au poids de la surdité dans la<br />

famille, A 3 ans, Magali allait en outre être intégrée le matin dans<br />

l'école maternelle de notre quartier.<br />

Une « nomice » sourde<br />

Dès le départ, il nous a semblé essentiel que Magali puisse recevoir<br />

de ddtenteurs de la LSF un cc bain de langage » dans toutes les<br />

situations de vie d'un enfant de son $ge. Nous n'&ions pas capables<br />

de le lui donner nous-mêmes, et son temps avec les sourds du<br />

CAMSP n'y suffisait pas non plus. Nous avons donc demandé, en<br />

plus, à une dame sourde de garder Magali chez elle deux, puis trois<br />

journées par semaine. Magali y dtoyait trois genérations de sourds,<br />

leurs amis et un autre garçon sourd de son âge !<br />

La nourrice s'occupait de Magali comme elle s'&ait occupée de<br />

sa propre fille sourde quelques années plus t6t. Elle lui commentait<br />

tout, signait pour elle dans une langue adaptée à un tout petit enfant,<br />

racontait <strong>des</strong> histoires, la faisait jouer, plus tard lui épelait <strong>des</strong> mots<br />

en dactylologie. Magali profitait aussi de toutes les conversations<br />

ambiantes, alors que nous avions tendance au début à ne signer que<br />

pour elle et à l'affût d'une réponse, sans vraie spontanéité.<br />

Très vite, la nourrice a su attirer son regard et à partir de lh, les<br />

progrès n'ont cessé d'être constants et gratifiants. Magali s'est remise<br />

à nous regarder, en commençant par sa soeur, et de plus en plus longuement.<br />

Ses signes apparaissaient, parfois mal formés, mais la nourrice<br />

nous aidait à les comprendre. Elle nous donnait <strong>des</strong> conseits<br />

basés sur son expérience vécue de la surdité, insistait sur l'impor-


tance de tout faire comprendre à un enfant sourd et nous montrait,<br />

cas par cas, comment nous pouvions nous y prendre. Cette famille a<br />

ainsi établi <strong>des</strong> relations très riches et durables avec Magali et nous.<br />

Une jeune fille sourde venait aussi chez nous une fois par semaine<br />

s'occuper de Magali dans son cadre de vie ; ses impressions et<br />

réflexions nous ont aussi éte précieuses, et nous ont confortes dans<br />

nos choix.<br />

En quelques mois, Magaii s'est développée, ses retards divers se<br />

sont estompés, elle a rapidement démarré la LSF et en même temps<br />

la parole. En effet, presque pardèkment aux premiers signes sont<br />

apparues les ébauches orales <strong>des</strong> mots correspondants,<br />

Nous comprenons donc mal certaines réticences de professionnels<br />

à l'idée d'une nourrice sourde ! Il faut certes que celle-ci soit de<br />

qualité, et que les parents conservent leur autorité en position centrale<br />

face à toutes les parties en présence. La nourrice ne nous a pas<br />

« pris » Magali, elle nous a permis au contraire de rétablir une relation<br />

profonde qui nous échappait de par notre mkonnaissance du<br />

vécu intériorisé de ta surdité de notre enfant.<br />

Queiie est sa langue maternelle ?<br />

Ou bien : de qui I'enfant sourd reçoit-il la langue en héritage 2<br />

Ces questions sont souvent présentées aux parents comme <strong>des</strong> dilemmes<br />

dont la solution est le pivot <strong>des</strong> choix éducatifs. Pour nous,<br />

ces questions paraissent d'un intérêt surtout théorique ; aux linguistes<br />

d'y répondre au sujet de Magali.<br />

En tant que parents, nous avons ressenti non pas tant de la frustration<br />

à ne pas donner entièrement nous-mêmes la langue première<br />

à notre fille, mais bien plutôt du plaisir à communiquer vraiment et<br />

la sensation de regagner beaucoup de temps.<br />

La LSF a d'abord donné A Magali une langue, nous permettant<br />

enfin de dire : 2Mizguli n'est que sourde. Nous avons pu alors lui proposer<br />

aussi de plus en plus souvent notre langue, lui parlant et signant


en même temps et, parfois, lui épelant <strong>des</strong> mots en dactylologie : il<br />

était exclu pour nous de signer vraiment comme les sourds, puisque<br />

nous débutions en LSF et que Sandrine commençait à parler. Il y<br />

avait <strong>des</strong> moments purement en signes (les contes), ou bien en oral,<br />

toujours h la faveur <strong>des</strong> circonstances et jamais de façon rigide. Nous<br />

encouragions aussi les jeux de voix, l'intonation ; Sandrine s'y prêtait<br />

aussi avec beaucoup de plaisir. <strong>Les</strong> progrès de Magai, tantôt en<br />

signes, tantdt en oral, nous ont toujours encouragés à aller plus loin.<br />

Mais nous avons toujours refuse de lui enreigner une langue (queile<br />

qu'elle soit) ; son langage s'est développé en situation de communication.<br />

Son langage il elle était un m6lange de UF, de français signtz,<br />

d'oral et de mimique, toujows pour être le mieux comprise. Magali a<br />

très vite pris conscience de ses deux mon<strong>des</strong>. Elle testait son interlocuteur<br />

: s'il ne signait pas, elle filaborait un babillage qui fut longtemps<br />

incompréhensible ; mais avec la famille, l'entourage et les<br />

sourds, le dialogue s5nstaurait tout de suite.<br />

La jeune tante <strong>des</strong> filles s'est mise elle-rnhe facilement aux<br />

signes, alors que les gands-parents ont dQ assez vite abandonner, à<br />

leur grand désespoir. Heureusement, les gestes spontanés puis l'oral<br />

et l'&rit leur ont permis beaucoup d'&changes.<br />

Fratrie et famirte<br />

En quoi la prgsence d'une soeur jumelle entendante peut-elle<br />

être instructive au plan général ?<br />

D'abord, cette présence (avec les rivalités qu'elle induit) agit<br />

comme un rappel très fort et permanent: il ne faut pas sacrifier<br />

l'équilibre global de la vie familiale au profit d'une focalisation plus<br />

ou moins exclusive sur l'enfant sourd. A ce point de vue, la U F favorise<br />

une cammunication mieux répartie et une vie plus détendue au<br />

sein de notre famille, Sandrine l'a apprise spontanément, et elle a<br />

certainement relayé beaucoup d'uiformations à sa soeur, Elle est de-


venue une vraie petite interprète, mais eiie sait aussi dire que souvent<br />

le rale d'intermédiaire, et la surdité en général, lui pèsent.<br />

Ensuite, le fait d'avoir un enfant sourd et l'autre entendant du<br />

même âge met constamment en évidence leur différence, amplifiant<br />

notre désir d'en réduire les effets, en famille comme dans la société.<br />

Nous avons donc toujours proposé à Magali les mêmes activités qu'à<br />

sa soeur, au même moment. Et elle a ainsi pu : écouter <strong>des</strong> contes,<br />

aller au théâtre pour enfants, au chérna, au musée, faire <strong>des</strong> jeux de<br />

société, parler de la vie et de la mort, de l'amour ... toujours &us la<br />

compréhension, grilce à la langue <strong>des</strong> signes. Si d'aventure nos explications<br />

ne passaient pas, les sourds nous aidaient à la première occasion.<br />

Magali a ainsi pu assimiler beaucoup de choses à l'âge approprié,<br />

certes toujours au prix de beaucoup de disponibilité et d'efforts<br />

réciproques, mais avec <strong>des</strong> résultats constamment gratifiants.<br />

Scohrité<br />

A quatre ans et demi, Magali a commencé une vraie scolarité<br />

dans une école spécialisée. <strong>Les</strong> deux premières années, elle a continué<br />

d'être intégrée à mi-temps dans une maternelle ordinaire près<br />

du centre. Ceci l'a sans doute aidée à prendre conscience de la nécessité<br />

de parler, <strong>des</strong> difficultés et <strong>des</strong> frustrations qu'elle aurait dans<br />

le monde <strong>des</strong> entendants (« Elle racontait <strong>des</strong> histoires et je ne cornprenais<br />

rien », dit-elle maintenant de sa maîtresse qu'elle aimait<br />

pourtant beaucoup), mais que de fatigue et de tension ! Nous avons<br />

donc pensé qu'elle aurait une scolarité plus u normale W... à plein<br />

temps dans l'école spécialisée. Elle y a en effet un niveau presque<br />

comparable à sa soeur, car ses enseignants, entendants ou sourds, et<br />

très compétents, s'imposent de tout expliquer à un enfant sourd<br />

comme à un enfant entendant du même âge.<br />

C'est en voyant ses capacités à comprendre et à répondre dans<br />

cet environnement plus oral, que nous avons aussi acquis confiance<br />

en ses possibilités orales. En fait, son adaptation a été facilitée par<br />

tout ce qu'elle avait déjh assimilé l'aide de la LSF. Grâce à un travail<br />

progressif et réfléchi avec ses enseignants, Magali a maintenant


ien conscience <strong>des</strong> syntaxes différentes <strong>des</strong> deux langues, et passe<br />

sans problème de l'une à l'autre. De même que nous corrigeons son<br />

français, elle corrige nos fautes de signes avec amusement. Elle<br />

adore lire, écrire, téléphoner (sans aide) avec le Minitel Dialogue ...<br />

Son langage oral aussi est riche et spontané. Elle a encore un peu de<br />

mai à communiquer avec ceux qui n'ont pas l'habitude <strong>des</strong> sourds et<br />

doit améliorer son articulation et sa lecture labiale (elle accepte le<br />

cued-speech (LPC), mais seulement en classe). Elle a compris qu'elle<br />

doit se débrouiller dans un monde très majoritairement entendant,<br />

tout en étant sans effort à l'aise dans la communauté sourde. Le pari<br />

qu'elle devienne bilingue peut donc être gagné.<br />

L'expérience de Magali contredit certains arguments avancés<br />

pour ne pas donner la LSF au démarrage de l'éducation. La langue<br />

<strong>des</strong> signes n'a h aucun moment entravé ni le désir ni la capacité de<br />

Magali d'accéder à la parole ; elle l'a stimulée en l'aidant à structurer<br />

plus t8t ses capacitb cognitives, en lui donnant accès au sens, et en<br />

i'eveuant à la communication dans les deux mon<strong>des</strong>, sourd et entendant.<br />

Croire que les filières scolaires de meilleur niveau doivent être<br />

d'abord celles qui évitent la LSF (quitte parfois à l'admettre pour<br />

l'adolescent, ou en cas d'échec), cela nous apparaît donc comme un a<br />

priori dépourvu de fondement rationnel. De même que de voir la<br />

LSF comme une méthode de rééducation parmi (contre? en-<strong>des</strong>sous<br />

?) d'autres, car la LSF se situe ailleurs : c'est une langue en plus,<br />

un atout supplémentaire pour mieux communiquer. L'idée qu'il vaut<br />

mieux se passer <strong>des</strong> signes autant que faire se peut, cette idée nous<br />

paraît donc anti-pédagogique ainsi que préjudiciable à l'épanouissement<br />

maximal de l'enfant sourd.<br />

Conclusion et espoirs<br />

De quel droit aurions-nous privé Magalî de la langue natureile<br />

de ceux dont elle partage la déficience ? Cette langue belle et riche<br />

lui donne le plaisir de communiquer, de tout exprimer, et d'acquérir


<strong>des</strong> savoirs sans retard (lui facilitant en fait i'accès au français écrit et<br />

oral).<br />

<strong>Les</strong> choix éducatifs incombent certes & chaque famille selon ses<br />

aspirations profon<strong>des</strong>. Mais pour que le choix soit réellement libre,<br />

encore faudrait-ii :<br />

- que tous les parents reçoivent au départ une information complète<br />

et objective, y compris sur la LSF ;<br />

- et que l'option bilingue ne soit pas dofavorisée, en nombre et en<br />

qualité de ses implantations, par rapport aux autres fiiières. Or, si<br />

nous avons déjà subi la rareté <strong>des</strong> centres bilingues, nous sommes<br />

bien plus inquiets quand nous pensons au secondûire : Magali trouvera-t-elle<br />

un seul cycle bilingue dans tout Paris ? Alors qu'une utiiisation<br />

miime partielle de la LSF mettrait sans doute à la portée de<br />

plus de sourds le bac et, pourquoi pas, les étu<strong>des</strong> supérieures à<br />

l'aide d'interprètes qualifiés.<br />

Nous avons donc le sentiment à la fois de bénéficier de récentes<br />

et substantielles évolutions, et d'être encore loin d'une appréciation<br />

équitable de la valeur <strong>des</strong> sourds reconnus comme teh, de leur culture<br />

et de la langue <strong>des</strong> signes et, en retour, de leur droit d E'infomabon<br />

sous fomze accessible.<br />

En cette année de bicentenaire (<strong>des</strong> droits de l'homme, mais<br />

aussi de l'Abbé de l'Epée), qu'il nous soit donc permis d'espérer<br />

qu'une tefie reconnaissance authentique prenne enfin place dans la<br />

société, les médias (notamment la TV) et l'éducation.


ETIENNE,<br />

SES PARENTS ET LE LANGAGE PARLE COMPLETE<br />

Mal 1983 : Etimne, deux ans et demi, est inscrit à l'école maternelle<br />

du quartier.<br />

Juin 1983 : Sa surdit4 est dktectée par potentiels évoquks.<br />

Oreilles nues au casque, 2 a - 60 dB à 250 HZ, - 80 dB à 500 Hz, -<br />

105 dB a 2 O00 Hz. Avec prothèses, il est à - 40 - 50 dB jusqu'à<br />

2 000 Hz.<br />

La directrice de l'école materneHe accepte de le garder.<br />

Par les rumeurs du quartier, nous savons qu'à cbté de chez nous,<br />

habitent <strong>des</strong> parents qui « utiiisent une méthode inconnue » pour<br />

leur petite fiUe, Isabelle, déficiente auditive. <strong>Les</strong> mmeurs sont imprécises<br />

mais toujours optunistes. <strong>Les</strong> vacances sont d6ja commencées<br />

et les contacts avec eux difficiles. Par chance, nous arrivons à<br />

joindre Françoise Chmbon qui rnet dans notre boîte aux lettres<br />

deux audiocassettes d'apprentissage du 6 Langage Par16 Complété »<br />

(a LPC >>).<br />

Juillet 1983 : Etienne est appareiiié. Nous partons en vacances<br />

avec, dans nos valises, une Iettre de Frangoise Chambon et les deux<br />

audiocassettes.


C'EST ALORS QUE COMMENCE NOTRE AVENTURE<br />

AVEC LE LPC...<br />

Août 19s : Chaque soir, nous écoutons la cassette, apprenant<br />

une leçon et révisant celle de la veille. En même temps, nous commençons<br />

h utiIiser le code avec Etienne. En fait, peut-on parler<br />

d'a utiliser » ? Six ans après, je pense que non et qu'il s'est agi plutôt<br />

de SENSIBILISER Etienne au codage. En effet, les mots codés sont<br />

peu nombreux : oui, non, c'est bon, regarde, on s'en va... et ils sont<br />

toujours mimés ou associés.<br />

-


A l'école, pas de LPC. En famiIle, on continue à coder quelques<br />

mots ou groupes de mots, mais pas proprement parler de phrases.<br />

Nous codons aussi un peu entre nous, mon mari, GiUes, et moi, en<br />

présence d'Etienne, mais là aussi <strong>des</strong> mots simples, avec l'idée que<br />

cela l'aidera à prendre conscience que le codage est un moyen de<br />

communication. Ce faisant, nous nous entraînions à coder car, au<br />

bout d'un mois, nous anonnions encore !<br />

ET PUIS UN SOIR.. LE DECLIC I<br />

Son père revenait à la maison dors que nous 6tions déjà à table.<br />

Je codais hvariablement : «Ab I Papa » alors que son pare entrait<br />

dans la pièce. Un soir du mois d'octobre, après le codage du « Ah !<br />

Papa » rituel, Etienne se prkipite vers l'escalier pour attendre son<br />

père qui montait mais qu'il n'avait pas encore vu : E- A V ~<br />

COMPRïS. Nous avons eu conscience, ce soir-là, qu'un processus<br />

s'était enclenché : il avait fdu QWZE JOURS de «Ah ! Papa »,<br />

DEUX MOIS après les premiers mots codés.<br />

Une fois ce «Ah ! Papa » gagné, nous avons continué notre<br />

route en codant «Ah ! Papa arrive » qui, plus tard, mais bien plus<br />

tard, deviendra


Puis, PROG-IVEMENT,<br />

LE MESSAGE.<br />

ETAPE PAR ETAPE, NOUS COMPLIQUIONS<br />

C'est aussi dès cette première annee de LPC que nous avons<br />

pris conscience qu9Etienne recherchait le RXTE DU CODAGE. Ainsi,<br />

pour le conduire au centre spkialisé, nous passions chaque fois en<br />

voiture sous un viaduc et, par jeu, j'avais pris I'habitude de me baisser<br />

(pour mher) et de coder « on passe sous le pont », codage qu2il<br />

regardait dans le rétroviseur de la voiture. Un jour, j'oublie de coder<br />

en passant sous ce viaduc. Etienne me secoue violemment pour me<br />

rappeler il tordre en agitant sa main autour de son visage. Il avait<br />

donc ses habitu<strong>des</strong>, ses repères en LX, et il les réclamait,<br />

LA COWmHENSXUN S'EST m-E; PROGRESSI-m. EKR"I'<br />

MOIS APW le démarrage du LPC, pendant les vacances de P$ques<br />

(mars 1984), Etienne a commencé- à comprendre de PEITITS<br />

FBEwSEs. Parmi les premières, celle-là : 4< Antoine est dans fa maison<br />

de Marie, on va le chercher ». C'est Etienne qui nous a conduits chez<br />

Marie pour aller chercher son frgre, il avait donc compris. Il avait<br />

trois ans et quatre mois,<br />

La cadence de compr6hension s'est accé-lkrée ; pour certains<br />

mots, coder une seule fois suffisait (ex. papy, fessée), pour d'autres,<br />

c'&tait un peu plus long avant qu'ils soient intégrés, mais nous n'insistions<br />

pas, attendant son heure.<br />

Puis, peu 3 peu, dans les derniers mois de cette première annee<br />

de WC, Etienne est devenu e demandeur », montrant par exemple<br />

son coude en nous demandant d'en coder le nom, rkpetant lui-même<br />

systématiquement le code, commençant même à coder spontanément,<br />

à bon escient, quelques mots comme « attends », MAIS ENCORE<br />

SANS LE5 Dm.


LA WNTRElE SCOLAIRE 1984-1985<br />

L'Institut National <strong>des</strong> Jeunes Sourds (INJS) de Paris et l'Me<br />

maternelle de notre quartier parisien où il avait fait sa première année,<br />

décident conjointement de mettre en place une stmcture d'intégration,<br />

avec LPC et verbo-tonale, pour deux enfants déficients auditifs<br />

dont Etienne. A partir de ce jour, Etienne s'est donc trouvé dans<br />

un environnement plus LPC qu'avant, avec le Professeur de sourds et<br />

l'Educatrice qui codaient, bien sOr. Son institutrice, pour cette premiére<br />

année d'intégration, a suivi un stage de LPC. Elle codait peu,<br />

quelques mots par-ci, par-18, mais elle se rappelle encore les yeux<br />

d'Etienne lorsqu'elle a codé pour la premihre fois en classe, c'était<br />

l'extase ! (nous codions depuis un an en famille). Sa nourrice et une<br />

grand-mère codaient. Elies codaient peu, mais elles codaient ... et cet<br />

environnement LPC, bien que peu intensif, a installé tout natureliement<br />

le LPC dans la vie d'Etienne. Après avoir été le moyen de<br />

communication entre lui et ses parents, il est devenu le moyen de son<br />

intégration dans la vie.<br />

La compréhension a continué progressivement à s'enrichir et<br />

parallèlement, notre propre expression est passée de la petite phrase<br />

« économique » à la phrase parlée, plus courante, plus nuancée.<br />

« C'est Papa qui arrive » est devenu « Je crois que Papa arrive » ;<br />

« Tu I'abîmes » est devenu « C'est dommage !<br />

tu l'abîmes » ;<br />

« Tu veux faire pipi ? » est devenu « As-tu envie de faire pipi ? »<br />

« On sonne ! » est devenu « Tiens ! quelqu'un sonne ;<br />

entends-tu ? »<br />

Le rythme d'acquisition a continué 8 s'accélérer. Puis la démutisation<br />

et le langage ont commenct5. Très t8t et très souvent, Etienne<br />

a codé, ce qui, dans les balbutiements <strong>des</strong> premiers mots, nous a été<br />

bien utile. On a compris par le codage que « pépon » était « maison<br />

», « atou » était (< voiture »... et on a pu déchiffrer « locomotive »,<br />

pas facile à dire à cinq ans !


Nous codons depuis bienttlt six ans, Etienne a huit ans et quatre<br />

mois.<br />

POINT ESSENTIEL POUR NOUS : NOUS NE SOMMES PAS DU TOUT<br />

SEVRES DANS NOTRE COMMWCAmON AVEC ETIENNE. Nous fui<br />

avons bien sQr transmis <strong>des</strong> connaissances, mais au-delà, c'est par le<br />

LPC qu'if a eu et a accès à tout ce qui fait le patrimoine culturel et<br />

spirituel de la famille : les habitu<strong>des</strong> linguistiques, <strong>des</strong> formules du<br />

terroir à celles de la grand-mère, l'humour, les plaisanteries, etc. UN<br />

EXEMPLE RECENT : à l'occasion du 1" avril, il me dit « poisson<br />

d'avril » et je lui réponds, comme au temps de mon enfance, dans ma<br />

petite école, «poisson d'avril, tête d'imbécile ». Je continue dans<br />

mon élan (< tiens, écoute : avril-imbécile, sa rime ! » Etienne A Vü LA<br />

avec le LPC. Quelques jours plus tard, il resservait le « poisson<br />

d'avril, tête d'imbécile >> à son père !<br />

Antoine, son frère qui a quatre ans de plus que lui et qui code<br />

très bien, s'est charge de lui apprendre toutes les expressions dans le<br />

vent !<br />

Etienne est actuellement intégré dans l'école primaire de notre<br />

quartier, toujours dans le cadre de la structure de 1'INJS de Paris,<br />

c'est-à-dire avec le soutien WMA.RQUABLE (il s'agit bien d'un soutien,<br />

d'une aide à la communication et en rien d'un tutorat) du Professeur<br />

de sourds et de PEducatrice spécialisée qui sont avec lui<br />

depuis maintenant cinq ans. De l'avis de l'équipe pédagogique, son<br />

niveau à l'école est bon (pour le moment, bien sCtr, car l'évolution est<br />

toujours imprévisible).<br />

Son langage progresse régulièrement. Il a actuellement une<br />

bonne structure de la phrase et <strong>des</strong> formules très spontanées. Il ne<br />

code pas les consignes ni les petites phrases, mais code les gran<strong>des</strong><br />

explications. 11 est bavard ... bavard ...<br />

Le LPC n'a pas annulé sa surdité et il convient de rester vigilant,<br />

de ne pas dire n'importe quoi et n'importe comment : si notre langage<br />

avec Etienne est presque courant, il reste adapt4 et lorsque<br />

nous parlons en codant avec Antoine, son frère, pour qu'Etienne


puisse suivre la conversation, nous nous rendons compte que nous ne<br />

parlons pas aux deux frères de fapn identique. LA méthodologie du<br />

début reste valable et par exemple il est rare qu'il y ait pour Etienne<br />

deux mots nouveaux dans une même phrase.<br />

LE LPC EST-IL UNE COWWNTE ?<br />

Bien sOr, d'autant que je fais encore <strong>des</strong> fautes et que je ne serais<br />

pas capable de faire de la traduction simultantse, mais nous COdons<br />

très spontanément et la contrainte du codage ne nous a jamais<br />

fait renoncer à un échange avec Etienne. Mais s'attarde-t-on à une<br />

contrainte, face au plaisir qu'on a de voir progressivement un<br />

plus » qui se met en place ? Ces petits « plus », qui s'ajoutent tranquillement,<br />

successivement, les uns aux autres, c'est comme une<br />

route qu'on construit, pavé après pavé. Le LPG nous fait mesurer,<br />

par la complexité progressive du codage, cette QUASI-CONSTRU~ON<br />

de la compréhension. CON~UI~,<br />

c'est esptsrer, aussi n'avons-nous<br />

jamais 6th dbespérés.<br />

LA VIE AU QUOTUDIEN :<br />

Mardi 25 avril 1989, le matin : Etienne se liilve. Hier soir, il a fait<br />

une plantation de riz.<br />

Etienne : Maman, est-ce que le riz développe ? (il ne code pas).<br />

Moi :<br />

Est-ce que le riz SE développe ? (je code en insistant sur<br />

le SE ; les verbes pronominaux, les pronoms - je LE LUI<br />

ai dit - sont parfois encore escamot6s).<br />

Etienne : Est-ce que le riz se dtsveloppe ?<br />

Moi : Non, c'est trop tôt, le riz ne pousse pas en une nuit.<br />

Etienne : Maman, est-ce que c'est une mini-rkibre que j'ai<br />

fait(e) ... comme en Chine ?


Moi : Tout à fait , mais vraiment mini !<br />

Il boit son bol de lait et change de sujet,<br />

Etienne : Maman, en Amérique, est-ce que les shérifs sont riches ?<br />

Moi : Ça depend ... certains le sont.<br />

Etieme : Riches,.. comme Picsou ?<br />

Moi : Ça, je ne sais pas s'ils sont aussi riches que Picsou.<br />

Etienne : Et sont-& avares eomme Picsou ?<br />

Moi : Je pense que certains sont avares, d'autres non, Allez ...<br />

fide à l'école, ce nkst pas le moment de discuter. A ce<br />

soir, bonne jouxnee.<br />

Etienne : Saiut, à ce soir.<br />

Et voüB, Etienne vient de partir.<br />

Mer soir, B l'occasion de la lecture, j'ai jet& un oeil discret sur la<br />

leçon de langage du lendemah, ce sera «perdre son temps ... son<br />

sanekaid ... la raison ... perdre une dent.,. » J'espère qu'il se débrouillera.<br />

De toute façon, Geneviève et MichiE:le sont là, visantes.<br />

Nous nPavons parlé de rien.<br />

LA VIE= EN- LPC CONTINUE.


MON PETIT FILS EST SOURD<br />

.,OU, TWNTE ANS APRES<br />

Gaston LORIOUX *<br />

Ma filie Véronique a trente-cinq ans, elle est ntse sourde profonde.<br />

Son fis Philippe vient d'avoir quatre ans, il est également né<br />

sourd profond, Pour lui, je me suis promis de tout mettre en oeuvre<br />

pour réussir son éducation mieux que je ne l'ai fait pour sa mare, afin<br />

qu'A vingt ans il se sente, A la fois, bien dans sa difftrrence et bien<br />

dans notre monde d'entendants où il devra sYint6gter, Et mon premier<br />

souci, qui est d'ailleurs permanent, Eut de m"former, tant j'ai<br />

le regret de m%tre heurté, il y a trente ans, à ce qui trtait alors l'inconnu<br />

de la surdité. Seuls quelques « gens de savoir » semblaient en<br />

posséder et garder le secret, ce qui leur permettait de maintenir les<br />

parents sous leur dépendance.<br />

Depuis cette dpoque, nous sommes parnenus, ma femme et moi,<br />

a assumer la surdittr de notre fille, d'autant que nous la voyons vivre<br />

pleinement sa vie de femme et de mère, même si nous gardons toujours,<br />

au fond de nous-mêmes, les marques <strong>des</strong> traumathes subis et<br />

de notre révolte. Aussi, jknvisage l'avenir de Phrtippe avec plus de<br />

sérénité mais conscient de l'importance <strong>des</strong> dzférentes étapes de son<br />

éducation et <strong>des</strong> chok qu'elles impliquent.<br />

C'est dans cet esprit que j'aborde ces étapes, en red6couvrant,<br />

en &rand-père, le parcours d'un jeune parent d'enfant sourd,<br />

* Associarion Nationale <strong>des</strong> Parents d"t7nfants D6Ftcients Auditih (A,N.P.EDA.).


« Elle est sourde, "collez-la" dans un établissement spkialisé et<br />

vous la récupérerez ii vingt ans, c'est ce que vous avez de mieux à<br />

faire P. C'est en ces termes que cet éminent professeur parisien<br />

(notre ultime espoir) nous formula son diagnostic sur la surdité de<br />

VQonique. Nous étions en 1956. Trente ans plus tard, c'est dans une<br />

toute autre ambiance que j'ai ét6 accueilli, avec Philippe, par l'équipe<br />

d'un Centre d'Aaion Médico-Social Précoce, dkpendant d'un service<br />

d~audiophonolo@e de grande renommée. Sachant tr&s bien que<br />

PhZppe était sourd, j'ai fait, avec le médecin ORL, « l'économie » de<br />

cette phase préhinaire si dramatique qu'est, pour les parents, l'annonce<br />

du diagnostic, Mais, après plus d'une heure d'entretien, j'ai<br />

quitté le médecin avec une idée précise <strong>des</strong> actions ii entreprendre,<br />

de leur calendrier et de leur répartition entre les professionnels et les<br />

parents. J'ai tout de suite rencontre les autres membres de l'équipe :<br />

l'orthophoniste, l'audioprothésiste, la psychologue. Ii y a dans cette<br />

notion d%quipe quelque chose de rassurant pour les parents, la diversité<br />

de leurs personnaiittns permet de mieux comprendre et d'être<br />

mieux &outé ; leur volonté commune est rassurante. Us m'ont précisé<br />

leurs r&les et ma place, non pas en tant que patient qui attend<br />

saencieusement la fin de la rédaction de l'ordonnance, mais en tant<br />

que partenaire et responsable d'éducation. Ce plan d'éducation, c'est<br />

la réponse d'espoir que le médecin donne aux parents qui, dCsespérds<br />

et ignorants, lui avaient demandé : « mais quoi faire ? ».<br />

Alors, qu'on n'entende plus ces propos lénifiants qui avaient été<br />

notre espoir, il y a trente ans, mais qui ont trop souvent cours encore<br />

aujourd'hui : « Ne vous inquietez pas, ça s'arrangera, dans quelques<br />

années on l'opérera <strong>des</strong> végétations, puis vous verrez à la formation ...<br />

repassez me voir dans les trois mois », Ou alors c< de toutes façons,<br />

elle parlera comme les autres, elle ira ii i'écofe comme les autres u,<br />

quelle escroquerie ii l'espoir ce « comme les autres » auquel les parents<br />

veulent croire contre toute logique ! Que de temps perdu et<br />

que de fausses orientations ! Comment la formation <strong>des</strong> medecins<br />

ORL et généralistes peut-elle comporter de telles lacunes ?<br />

Je passerai sur l'bducation précoce de l'enfant dont l'importance<br />

n'est plus à demontrer, pour insister sur la prise en charge (la guidance)<br />

<strong>des</strong> parents. Il faut redire le traumatisme qui les écrase au


moment du diagnostic. Brutalement, ils se sentent isolés, perdus devant<br />

leur enfant qui est devenu un être étrange. Maladroitement, l'attitude<br />

de compassion de leur entourage ne fait qu'accentuer leur<br />

désarroi. De jeunes parents me disaient récemment qu'ils se sentaient<br />

rejetés de la société. Désespoir, culpabitité, impuissance, angoisse<br />

... <strong>Les</strong> psychologues ont analysé ce traumatisme auquel aucun<br />

de nous n'a échappé et qui a bouleversé nos vies. Mais ils ont aussi<br />

détaillé le parcours de « reconquête » de ces jeunes parents aliant du<br />

>.<br />

DBs lors, ils ressentiront un besoin impériew d'information pour apprendre<br />

cette différence et résoudre, en conséquence, le problème de<br />

l'éducation de leur enfant.<br />

C'est à l'équipe <strong>des</strong> professionnels de les guider dans cette recherche<br />

de l'information mais, concurremment, les associations de<br />

parents y ont un rBle capital à jouer. Car si les professionnels ont la<br />

science, ils ne ressentent pas le tourment que les parents portent<br />

quotidiennement en eux. Josette Le François1 l'a très bien exprimé :<br />

6 En dépit de l'amélioration de la qualité de services offerts aux<br />

jeunes déficients auditifs, en d6pit de nombreuses heures de rencontre<br />

avee <strong>des</strong> professionnels, les nouveawr parents demeurent insatisfaits.<br />

Un de leur besoin fondamental demeure non-comblé. Il s'agit<br />

de ce besoin de partager leur v&cu, leurs émotions, leurs peurs, leurs<br />

craintes face à la surdit6 de leur enfant, face à cet événement tragique<br />

qui a changé subitement le cours de leur vie. Ils ont besoin<br />

d'oreilles attentives, de coeurs ouverts capables de comprendre sans<br />

juger, capables de les encourager, de les stimuler il avancer. En bref,<br />

ils ont besoin d'un semblable dans l'&preuve, d'un quelqu'un qui a luimême<br />

vécu le problBme et qui s'en est sorti. »<br />

Mais faut-il encore que I"association soit en mesure d'assumer ce<br />

rdle d'accueil et d'information. Pour cela, elle doit avant tout être<br />

1. Professeur Adjoint à 1'Ecole d'Orthophonie et d'Audiologie de l'Université de Montdal,<br />

245


ouverte ii toutes les tendances et dkpasser les sectarismes qui divisent<br />

trop souvent les parents. Comment pourrait-elle, autrement,<br />

pretendre & une information objective ?<br />

J'ai la chance d'avoir rencontre une association locale qui réalise<br />

cette osmose en regroupant <strong>des</strong> parents avec <strong>des</strong> enfants aussi bien<br />

en intégration dans l'kole ordinaire qu'en étabtissement spécialisé,<br />

pratiquant la LXF ou l'oralisme avec ou sans utzsation du LPC.<br />

C'est 1A que va se jouer la complémentarité, de l'information donnée<br />

par les professionnefs et vécue dans l'association. <strong>Les</strong> professionnels<br />

expliquent la nature de la surdité avec ses conséquences dans le développement<br />

de la personnalité de l'enfant et son devenir. Ils parlent<br />

de l'intérêt de l'appareillage mais aussi de ses limites. Jls expliquent<br />

les particularités du développement <strong>des</strong> différents mo<strong>des</strong> de langage<br />

et l'importance capitale de la communication. Mais après ces cours<br />

théoriques », c'est au sein de l'association que les parents en verront<br />

les applications sur les enfants de tous (iges qui préfigurent l'évolution<br />

de leur propre enfant.<br />

C'est aux professionnels d'orienter les jeunes parents vers les associations.<br />

Ils y parviendront d'autant mieux qu'eux-mêmes en feront<br />

partie. La notre compte, parmi ses adhérents, pratiquement toute<br />

l'équipe du CAMSP, <strong>des</strong> Directeurs d'établissement, <strong>des</strong> enseignants<br />

et éducateurs spécialisés. Alors, une toute autre relation s'établit<br />

entre les parents et ces professionnels. Il n'y a plus la barrière de la<br />

blouse blanche, du fauteuil de bureau, du vocabulaire ésotérique, A<br />

la relation hiérarchique de subordination du patient, se substitue un<br />

nouveau rapport e horizontal >>, convivial, qui permet aux parents de<br />

parler et d'être écoutés. <strong>Les</strong> professionneh sont les premiers bénéficiaires<br />

de cette nouvelle forme de relation avec les parents-partenaires.<br />

Cbt dans cette ambiance que l'hfomation «passera » Ie<br />

mieux, quel qukn soit le support : conférences-débats, tables ron<strong>des</strong>,<br />

discussions de groupes, & charge pour l'association de l'imaginer et<br />

d'en renouveler 1'intér:rêt.<br />

Enfin, c'est l'association qui sera le mieux à même de créer l'ambiance<br />

favorable & la rencontre <strong>des</strong> jeunes parents avec les adultes


sods. Sans cette rencontre, l'information serait pavement tronquée,<br />

Mais elle est souvent délicate à faire accepter par <strong>des</strong> parents<br />

qui n'ont pas encore entièrement admis que leur enfant appartienne<br />

au monde <strong>des</strong> sourds.<br />

« Comment communiquer avec mon enfant ? » Cette question,<br />

prhordiale aujourd%ui, remplace celle que nous posions il y a trente<br />

ans : « Quand parlera-t-il pour que nous puissions wmmuniquer<br />

avec lui ? » En fait, Vbronique ne s'est même pas posé la question, la<br />

langue maternelle de PhQpe sera la sienne : la tSF. « Je suis très<br />

heureuse que mon fils soit sourd car, ainsi, je serai sa vraie mère »<br />

(sa fille, entendante, a été élevée surtout par ses grands-parents).<br />

Alors j'ai pris <strong>des</strong> cours de LW et toute la familtle proche, oncles,<br />

tantes, cousines, en ont appris les rudiments, Ces cours qui avaient<br />

lieu au CAMPS, avec un poupe de jeunes parents, nous ont permis<br />

de dkouvrir une langue riche dont les structures, si différentes de la<br />

ndtre, nous faisaient entrevoir ce mode de « pensee visuelle » <strong>des</strong><br />

sourds qu'if nous est si difficile d'haginer. « La LSF se parle comme<br />

on <strong>des</strong>sine » m'a dit un sourd, et j'ai rapproché cette réfiehn de<br />

celle que Véronique me fait quand elle ne comprend pas mes explications,<br />

«Papa, n'oublie pas que dans ma tête je n'ai que <strong>des</strong><br />

images P.<br />

Et Phrlippe s'est approprié la LXF avec la même facilité q ub<br />

bébé entendant s'approprie notre langue. Aujourd'hui, à quatre ans,<br />

if nous assaille de questions en participant à tous les petits événements<br />

de son environnement. Avec lui, je vértfte à quel point la<br />

communication est à la base du développement et de l'épanouissement<br />

d'un enfant, II y a trente ans, dans les mhes circonstances,<br />

nous étions désespérés en présence de Véronique. A part quelques<br />

actes élémentaires de la vie de tous les jours, nous étions kcapables<br />

de lui faire comprendre ce que nous voul_tons lui dire et de comprendre<br />

ce qu'elle voulait. Alors, ces vaines tentatives se teminaient<br />

presque toujours par <strong>des</strong> cris et <strong>des</strong> trépipements. Il est vrai qu'&<br />

l'époque, nous pensions que ces réactions étaient nomales chez un<br />

enfant sourd. Un 6mtnent professeur, qui faisait autoritb, démontrait


qu'un enfant sourd était hypernerveux, instable, coléreux, que le développement<br />

de sa personnaLité et de son intelligence avait de 3 à 6<br />

ans de retard par rapport aux entendants. Un enfant sourd n'avait<br />

pratiquement pas accès à l'abstrait et à l'ima&aire. J'avoue avoir<br />

éprouvé un réel plaisir en lisant, ces derni&res annees, <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> qui<br />

ridiculisaient les arguments de ce docte professeur.<br />

Quand ma femme ou moi nous nous absentions, c'était un drame<br />

pour Véronique. Pour Phappe, rien de tel quand sa mère s'absente ;<br />

il suffit de lui expliquer. Celle-ci étant en voyage pour une semaine,<br />

deux jours aprks son départ, PWppe nous dit (en signes) « Maman<br />

est partie, elie va revenir, Philippe ne pleure pas », c'était sa premi&re<br />

phrase, il avait dix-neuf mois.<br />

Mais devant cette facilité, je suis conscient du risque de voir<br />

Philippe s'installer dans le confort de la LSF, en ignorant le langage<br />

parlé <strong>des</strong> entendants. Aussi son orthophoniste s'attache à le démutiser<br />

et à le faire parler en utilisant les signes, mais dans une communication<br />

bimodale en français signé, compl6t:tée par le LPC. D&s I'âge<br />

de 9 mois, elle a commencé lui faire prendre conscience du monde<br />

<strong>des</strong> entendants. Et Phrlippe a compris. Ii avait trois ans quand il nous<br />

a dit à table, en demandant à boire : « Phsppe dit "eau" à papy et<br />

mamy parce qu'ils entendent, mais il fait le signe "eau" à maman<br />

parce que son oreille est « cassée » comme celie de Philippe S. '11 y a<br />

trente ans, Véronique n'avait pas pris consience de sa surdité, ce<br />

n'est que vers douze ans qu'elie I'a réalisée. Et elle veut que son fils<br />

parle.<br />

En revanche, il a faHu arementer longtemps pour lui faire admettre<br />

la pratique du LPC. « C'est encore une trouvaze <strong>des</strong> entendants<br />

qui ont invent4 une nouvelle hngue <strong>des</strong> signes pour remplacer<br />

la nôtre qu'ils n'aiment pas ». Eile a compris la nature et l'utilité de<br />

ce code quand elfe i'a epérhent6 avec l'orthophoniste de son fifs.<br />

«Oui, mais Philippe va confondre LSF et LPC, il ne va plus rien<br />

comprendre B. C'est PhrIippe qui lui a donné la rkponse, il avait trois<br />

ans et demi. En revenant du cabinet de toilette, tout fier, il explique<br />

en UF à sa mere qu'il venait de faire pipi et que 6 c'$tait pareil »<br />

(en LSF) que pipi @rononc(: et code en LPC). Depuis, Véronique


est rassurée. Mais elle reste quelque peu réticente pour ce «truc »<br />

<strong>des</strong> entendants qu'elle tolère ... pour me faire plaisir.<br />

Comme moi, elle est obsédée par Tappropriation du français lu,<br />

&rit .et parlé, par son fils. « Je veux, me dit-eue souvent, qu'il sache<br />

lire un journal, écrire une lettre et se faire comprendre, sed, <strong>des</strong> entendant~<br />

w. C'est dans cette perspective que nous avons choisi le système<br />

éducatif qui nous semblait le mieux convenir au cas particulier<br />

de Philippe,<br />

EtabLissement spéciafisé ou integation dans l'&ole ordhaire ?<br />

Pour Véronique, la réponse est évidente : il n'est pas concevable<br />

qu'un enfant sourd puisse se retrouver, seul, dans une classe d'entendant~.<br />

Et, de fait, ne pouvant pas, moi-même, assurer le rBIe de<br />

soutien-précepteur que ma me ne peut pas envisager, Philippe ne<br />

pouvait être scolarisé que dans un établissements spécialisé.<br />

Mais, pour moi, 2 n'&ait pas question, comme il y a trente ans,<br />

de rester à la porte de Etablissement. Nous entendions bien, Véronique<br />

et moi, y entrer en même temps que Philippe, en partenaires<br />

d'éducation. Et nous souhaitions y trouver une classe maternelle<br />

conçue comme une suite lo@que de l'éducation prkwe, développant<br />

le merne mode de communication et d'édu-ttion audiophonatoke.<br />

Par chance, l'équipe de professeurs, éducateurs et intervenants sourd<br />

de la maternene travaillent en liaison avec le CAMSP, sur le même<br />

projet pédagogque et avec le meme souci d'une participation réelle<br />

<strong>des</strong> parents il leur travail. De plus, les enfants sont int&gr&, trois<br />

demi-journées par semaine, accompagnés d'une éducatrice, dans une<br />

maternelle dkntendants dont les mattresses connaissent tes sourds<br />

depuis plusieurs ann6es. Cette formule est excegente pour la socialisation<br />

<strong>des</strong> petits sourds qui dtscouvrent le monde <strong>des</strong> entendants et<br />

apprennent & y vivre. Le r6sultat a 6t6 spectaculaire pour PhZppe et<br />

sa mère a convenu que Tintégation pouvait avoir <strong>des</strong> aspects<br />

positifs.<br />

Le choix d'un système éducatif est, aprbs celui d'un mode de<br />

eonimunication, la décision la plus importante et la plus angoissante<br />

que les parents ont à prendre. « Il faut bien insister auprbs <strong>des</strong> pa-


ents sur l'objectif fondamental qui est celui de déterminer la scolarité<br />

la plus adaptée à l'enfant et non pas au désir parfois utopique de<br />

la familie >> (Docteur Lucien Moatti). Or, combien de familles ont<br />

choisi l'intégration en materneile « parce qu'à cet âge, tout se passe<br />

bien, après on verra » mais surtout parce que leur enfant ira à l'école<br />

« comme les autres ». Certes, d'autres sont conscients du soutien impératif<br />

(et de ses contraintes) qu'ils devront apporter à leurs enfants<br />

; ceux-là réussiront. Enfin, certains n'ont pas d'autre choix en<br />

raison de leur isolement géographique.<br />

La spécificité de l'éducation d'un enfant sourd résulte d'abord<br />

d'un problème majeur de communication dont l'importance est capitale<br />

dès la petite enfance. Elle est fonction de la nature de la surdité :<br />

un devenu sourd, un sourd sévère et un sourd profond ne seront pas<br />

tributaires de la même solution éducative. La c< pgdagogie pour<br />

tous » de 17Education nationale n'est pas applicable, teiie qu'eue, aux<br />

enfants sourds, d'abord parce qu'elle est basée sur l'expression orale<br />

mais, surtout, parce qu'elle s'adresse à <strong>des</strong> enfants qui arrivent à six<br />

ans, en cours prgparatoire, en parlant le français qu'ils se sont approprié<br />

naturellement avec leurs parents. Et c'est à partir de ce français<br />

fondamental que l'instituteur va travailler la syntaxe, la grammaire,<br />

le vocabulaire (avec les difficultés que l'on sait). L'enfant<br />

sourd à six ans ne possède pas ce français fondamental. C'est donc<br />

une pédagogie spécialisée dont il a besoin, que ce soit en établissement<br />

spécialise ou en intégration, par le biais <strong>des</strong> soutiens dont ii devra<br />

impérativement et massivement bénéficier. Enfin, on ne parie<br />

bien une langue que lorsqu'on pense en cette langue. Or, en quoi<br />

pense l'enfant sourd ? J'ai dit qu'il semble que son mode de pensée<br />

se traduise dans la structure « visuelle » de la LSF, si différente de<br />

celle du français. Et nous savons que la difficulté majeure pour les<br />

sourds est de comprendre la structure de nos phrases. C'est sans<br />

doute ce transfert de pensée qui constitue l'essentiel du problème<br />

pédagogque à résoudre pour nos enfants.<br />

A douze ans, Véronique réussissait à rendre intelligible un texte<br />

de quelques lignes qu'elle récitait par coeur. Quelle joie pour nous.<br />

Queiie dfsception quand elle ajoutait : « mais papa, pourquoi veux-tu<br />

que je parle, ça sert à quoi ? » Et si je voulais une expfication sur le


sens de sa récitation, elle éclatait de rire en disant : cc Je n'y eomprend<br />

rien W. A vingt ans, elle est sortie du systt3me éducatif spécialisé<br />

avec un CAP mais pratiquement incapable de rire un journal, en<br />

dehors <strong>des</strong> titres et incapable d'écrire une lettre, comme la majorité<br />

<strong>des</strong> sourds profonds. Tels sont, pour moi, les termes du bilan de<br />

l'oraiisme cc traditionnel » d'il y a vingt ans.<br />

Qu'en est-il de ce bilan aujourd'hui? Je reconnais avoir été<br />

comblé par les textes officieh publiés au cours de ces dernit3res années,<br />

Tout semble avoir été écrit sur la nouvelle pofitique d'4ducation<br />

<strong>des</strong> enfants sourds, la moder~sation <strong>des</strong> établissements et structures<br />

spécialisées, les conditions et les moyens de l'intégration, la<br />

formation <strong>des</strong> enseignants, le r61e <strong>des</strong> parents et leur place dans le<br />

systhme éducatif.<br />

Mais, vu de province, au contact <strong>des</strong> établissements spécialisés,<br />

<strong>des</strong> classes de 1'Education nationale qui accueillent <strong>des</strong> enfants<br />

sourds, <strong>des</strong> parents isolés dans les départements sous-équipés, l'application<br />

de ces directives ne semble pas der de soi. Qui va assumer<br />

fa responsabiliré de la mise en oeuvre de cette réforme, et à quels<br />

échelons ? Qui va organiser les coordinations nécessaires, les étu<strong>des</strong><br />

et recherches pédagogiques qu'elle implique ? <strong>Les</strong> textes ne le disent<br />

pas et aucune structure en mesure de le faire n'existe, ni à l'échelon<br />

national, ni à l'échelon régional. Mors ?<br />

<strong>Les</strong> Etablissements spécialisés, à quelques exceptions pr&s, gèrent<br />

en toute quiétude leur autonomie et leurs «habitu<strong>des</strong> acquises<br />

», sans avoir de compte à rendre à personne, en dehors de<br />

leur gestion administrative. Or, leurs enseignants et éducateurs représentent<br />

un potentiel pédagogque et psychologique irremplaçable<br />

mais actuellement sous-exploité. Qui transformera ces lour<strong>des</strong> structures,<br />

préoccupées de chaque ligne de leur plan comptable, en cc Entreprises<br />

» dynamiques et conquerantes, préoccupées, avant tout, de<br />

la qualité de leur produit, de leur conquête <strong>des</strong> marchés, du suivi de<br />

leurs clients et de la cohésion de l'équipe de leur personnel ?<br />

LPEducation nationale ne joue le jeu de l'intégration que g&ce Q<br />

la bonne volonté de certains hstituteurs qui en acceptent les<br />

contraintes mais sans moyens et facilités particulières. Elle semble


participer 4 la réforme en cours en signant quelques textes communs<br />

aux deux Ministères, mais elle conserve la formation particulière de<br />

ses instituteurs spécialisés. Et, localement, la coopération entre<br />

l'école et les établissements spécialisés est toujours subordonnée à<br />

l'initiative et au bon vouloir <strong>des</strong> personnes.<br />

Quant A la vingtaine de départements dépourvus de toute structure<br />

spécialisée, on ne voit pas comment « dans le cadre <strong>des</strong> moyens<br />

existants » (leitmotiv de tous les textes officiels) pourraient être satisfaits<br />

leurs besoins.<br />

Enfin, dans ma quête d'information, je n'ai toujours pas trouvk<br />

les statistiques élémentaires sans lesquelles il me semble bien difficile<br />

de mettre en oeuvre un plan de réforme. Et, en attendant ces<br />

statistiques qui nous permettraient de parler objectivement de résultats,<br />

de bilan et d'évaluation, qui prendra l'initiative d'effectuer sérieusement<br />

un simple recensement <strong>des</strong> enfants sourds scolarisés dans<br />

notre pays ?<br />

Avec mon petit fils, j'ai découvert ce que j'avais cherché en vain,<br />

trente ans plus tôt, avec ma fille : l'éducation précoce, la guidance<br />

parentale, les parents partenaires d'éducation, la priorité de la communication,<br />

la reconnaissance de la LSF, la pratique du LPC, <strong>des</strong><br />

prothèses plus performantes. Certes, j'ai dit mon inquiétude en mesurant<br />

le décalage existant entre, d'une part les novations et la modernisation<br />

<strong>des</strong> solutions éducatives qu'elles impliquent et, d'autre<br />

part, la lourdeur <strong>des</strong> structures existantes qui doivent se réformer,<br />

Mais je fais confiance aux professionnels, en particulier aux enseignants<br />

et éducateurs, pour se remettre en cause et réaliser collectivement<br />

cette modernisation dont ils sont, en fait, UndividueUement<br />

les initiateurs.<br />

Mais j'ai découvert également les associations de parents, lieu<br />

privilbgik d'accueil, d'information et de formation. Aussi, qu'il me<br />

soit permis de rendre hommage à ~'ANPEDA~, au dynamisme cha-<br />

2. L'Association Nationale <strong>des</strong> Parents d'Enfants D€ficients auditifs a €té fondtSe en 1965. Ce<br />

fut la premitrc association nationale de cette nature.


leureux de son équipe dirigeante qui m'a accueilli. Elle joue parfaitement<br />

son double rôle d'intervenant permanent auprès <strong>des</strong> partenaires<br />

publics (Minlst&res, milieux associatifs, organismes techniques<br />

et professionnels) et de guidance <strong>des</strong> parents. Elle a donné espoir et<br />

confiance à <strong>des</strong> &ers de familles désemparées. Elle a su prendre<br />

en compte, sans exclusive, l'ensemble <strong>des</strong> composantes du systkme<br />

éducatif actuel dont l'osmose est indispensable pour que nos enfants<br />

puissent y trouver une place correspondant au stade de leur évolution.<br />

Le cas de Philippe nous a pos6 la question du choix d'un projet<br />

éducatif ; je laisserai il Josette Chalude, Présidente d'honneur et<br />

fondatrice de L'ANPEDA, le soin d'y répondre, en témoignage d'admiration<br />

et de reconnaissance pour son action militante au service<br />

<strong>des</strong> enfants sourds, de leurs parents ... et de quelques grands-parents :<br />

« Education et épanouissement : l'éternel débat <strong>des</strong> anticipations positives.<br />

Qu'aura-t-on gagné si notre jeune arrive à entrer dans une<br />

relation authentique avec les personnes entendantes sur le plan de la<br />

vie quotidienne, ce qui est déjà un fameux résultat, mais s'il ne peut<br />

trouver parmi eux de vrais amis, un compagnon partageant son intimité,<br />

avec qui ii ne soit pas constamment dans l'effort et le faux semblant<br />

? Mais par ailleurs, qu'aura-t-on gagné si notre jeune est bien<br />

dans sa peau, mais à la condition de ne pas &tre obligé de fréquenter<br />

le monde ordinaire sinon par le truchement d'un interprète ?<br />

<strong>Les</strong> parents, fondateurs du projet éducatif, tout comme les professionnels<br />

qui participent à sa réalisation, ne devraient pas titre invités<br />

à faire <strong>des</strong> choix s'excluant l'un l'autre, mais s'armer, au contraire,<br />

pour gagner sur les deux tableaux : celui <strong>des</strong> instruments de l'autonomie<br />

et celui de l'épanouissement personnel. »


CONCLUSION<br />

-<br />

olivier PERIER<br />

C'est un honneur pour moi que d'avoir étd invité il écrire la<br />

conclusion de cet ouvrage. Un honneur que je tiens à partager avec<br />

mes collaborateurs du Centre comprendre et parler et de SEcole<br />

intégrée, car c'est notre oeuvre commune qui me le vaut.<br />

L'ensemble de ces textes, s'iis font effectivement le point sur la<br />

situation actuelle en France, comme l'indique le titre, se veulent<br />

aussi constituer les bases d'actions encore plus efficaces ik l'avenir, Je<br />

souhaite qu'à leur instar, ces dernières pages apparaissent comme<br />

une conclusion « en marche B.<br />

L'impression générale peut se résumer par ces qualités cornrnunes<br />

: la sincérité, la compétence, le respect de l'autre. Dans<br />

chaque domaine, ce sont <strong>des</strong> personnaiités éminentes qui ont été invitées<br />

à traiter d'un sujet qu'elles connaissaient bien. Ce qu'elles ont<br />

dit est le fruit d'observations et de réflexions fondées sur une solide<br />

elperience. Si chacun a présent6 sans fard sa vérité personnelle, aucune<br />

n'a tenté de la faire admettre comme universelle. Loin <strong>des</strong><br />

dogmatismes et <strong>des</strong> fanatismes d'un passé encore récent, ils ont défendu<br />

leurs options par <strong>des</strong> arguments positifs, exprimant de manière<br />

nuancée leurs critiques ou leurs craintes à l'égard d'autres pratiques,<br />

évitant les jugements sans appel sur les autres choix que les leurs.<br />

Reconnaître aux autres le droit à la parole, c'est admettre que nul<br />

n'est seul qualifié pour décider ce qui convient le mieux aux enfants<br />

sourds de France et du monde. Si l'on peut en féliciter les auteurs, on<br />

peut aussi se réjouir du fait que cela a étb rendu possible par l'évolution<br />

gt5nCrale <strong>des</strong> esprits, à la veille de cette dernière décennie du


siècrle, L'ouvrage vient son heure, celle ob le dialogue, aprbs une<br />

période d'erontements passionnés et passiomels, est redevenu<br />

possible.<br />

Chaque chapitre apporte une pierre contribuant à la cohérence<br />

de l'edifice. Au fil de leur lecture, certains points m'ont particulièrement<br />

frappé, par leur pertinence ou leur nouveauté.<br />

L'introduction de Jean-Pierre Bouillon m'est apparue comme un<br />

exemple hautement demonstratif <strong>des</strong> vertus g6nérales de l'ouvrage. Il<br />

situe bien celui-ci dans le prolongement <strong>des</strong> textes légaux parus de<br />

1986 a 1988, reflétant un travail exceptionnel qui fait honneur à la<br />

France. Je me plais en extraire deux citations, qui me paraissent<br />

dignes d'&être inscrites au fronton de nos institutions, ou mieux encore<br />

& Pavant-plan de nos esprits :<br />

i< Qui veut s'omuper de surdité doit amepter de penser inconfortablement.<br />

>><br />

« La perspective doit ktre d'attehdre, pour tous les enfants qui<br />

ont tir4 profit de l'éducation précoce, un niveau scolaire identique il<br />

celui <strong>des</strong> entendants. C'est la nouvelle frontibe du XX.P siècle, le défi<br />

a relever par l'addktration, les établissements et les services ». Enfin,<br />

comment taire la joie que procure la lecture de ce texte clair,<br />

concis et prkis, exemple de ce génie de la langue française qui lui<br />

donne tant de prix nos yeux.<br />

C'est la langue <strong>des</strong> signes qui est le sujet du premier chapitre, et<br />

I est juste qu'il en soit ainsi, après le iong ostracisme dont eiie fut<br />

victime jusqu'à il y a peu. Christiane Fournier explique bien la valeur<br />

de cette langue et définit ce qu'est le français signé, faisant ressortir<br />

le hiatus entre théorie et pratique, mettant en garde contre les pi&ges<br />

que renferme cette technique de visualisation commode mais imparfaite<br />

du français, sans en nier pour autant 17int6rêt pour les pédagogues<br />

et les parents.<br />

PhZppe Séro-Guillaume attire l'attention sur la grande créativité<br />

de la langue <strong>des</strong> signes, lui permettant de combler rapidement<br />

les lacunes imputables à son exclusion, jusqu'à une période récente,<br />

de nombreux champs de communication. Il relate une int6ressante


eptitrience personnelle d'introduction de la LSF en classe par Pintermbdiake<br />

de vidéo-cassettes, véritabfes traductions en LSF: de textes<br />

frmçais dans lesquefies la prhauté était donnée au sens plutbt qu'à<br />

une traduction trop « Ettérale », Le texte £rangais présent6 ensuite<br />

pemettait de faire <strong>des</strong> comparaisons entre les deux wstèmes luiguistiques,<br />

&approfondir et de réactuaEser <strong>des</strong> notions dont le sens était<br />

<strong>des</strong>ornais mieux peGu.<br />

On connaît le r6le hport-ant joue par Bernard Mottez dans la<br />

rcshabatation de la LSF et de la communauté <strong>des</strong> sourds dont elle est<br />

à la fois le ciment et le Een culturei le plus précieux. Son texte argumente<br />

avec talent l'idée que loin d'enfermer les sourds dans un<br />

ghetto, comme on lpa longtemps proclamé, la langue <strong>des</strong> signes pouvait<br />

leur permettre d'en sortir, La multipGcation <strong>des</strong> interprktes dans<br />

différents contextes permet un accès plus large à ce qui se passe dans<br />

le monde <strong>des</strong> entendants, qui est quand même aussi celui <strong>des</strong> sourds.<br />

Marie-Françoise Doumenjou et Jacques Laborit sont parmi ces<br />

quelques psychiatres français, ces rares psychiatres de par le monde,<br />

pratiquer la langue <strong>des</strong> signes et à savoir de ce fait communiquer<br />

avec tous les sourds. Leur evérience les a amenés réaffirmer qu'il<br />

n'y a pas de « personnalité du sourd », qu'il y a autant de personndités<br />

de sourds qu'il y a de personnes sour<strong>des</strong>. « Chacune se forgeant,<br />

comme pour tout être humain, dans une histohe famltinfe et une<br />

parent6 dIff6rentes pour chacun B. Us livrent les résultats de leur enquête<br />

sur la situation <strong>des</strong> sourds en milieu psychiatrique, qui la<br />

rev&le semblable à celle d'autres pays : s'il n'y a pas de psychopathologie<br />

spéciale propre aux sourds, ceux-ci restent plus longtemps hospitalisés,<br />

en raison de Phadéquation de la plupart <strong>des</strong> institutions, et<br />

en particulier de la non-utilisation de la langue <strong>des</strong> signes dans la<br />

plupart de ceiia-ci. Ils terminent leur article et ce chapitre par un<br />

plaidoyer pour que la langue <strong>des</strong> signes ne soit plus refusée à de<br />

nombreux enfants sourds, refus auquel ils imputent les difficuttb<br />

dans Peqression tant orale que gestueiie dPadultes sourds qui les<br />

consultent.<br />

Le deuxième. chapitre est consacré au Langage parlé cornplétG<br />

Eerit par Française Chambon, présidente de SAssociation pour le


développement du UC, 2 explique clairement en quoi consiste la<br />

technique et donne les principales réfdrences bibliographiques la<br />

concernant. Ce chapitre vient heureusement illustrer les textes 16-<br />

gaux rkemrnent parus en France qui reconnaissent l'hportance du<br />

LPC mais ne pouvaient en faire la <strong>des</strong>cription. Ce sera l'occasion<br />

pour les lecteurs qui n'ont jusqu'ici entendu parler que de manière<br />

parcellaire de ce moyen relativement récent d'en prendre véritablement<br />

connaissance.<br />

L'auteur souligne judicieusement le double aspect du LPC : aide<br />

a la lecture labiale, certes, mais aussi moyen de permettre it l'enfant<br />

sourd de parents entendants de s'approprier la langue de ceux-ci selon<br />

un processus comparable à celui de l'enfant entendant. Permettant<br />

une visualisation précise et complète de la parole, le LPC peut<br />

restaurer celle-ci comme moyen efficace d'acquisition d'une langue<br />

premibre et devenir ensuite un outil de communication. Cependant,<br />

souligne I'auteur, la parole complétée, même si elle est totalement<br />

appréhendable par la vue, n'est pas plus porteuse de sens que le mot<br />

entendu pour la première fois. Elle requiert donc comme lui un<br />

contexte situationnel et linguistique pour parvenir it la signification.<br />

<strong>Les</strong> gestes expressifs, mimiques, recours à l'image ou à la désignation,<br />

dont les parents d'enfants entendants accompagnent spontanément<br />

leur parole, seront encore plus nécessaires à l'enfant sourd<br />

pour que le lien s'établisse entre la forme visuelle qu'il perçoit et<br />

l'objet, l'action, le concept 6voqués.<br />

Le troisieme chapitre traitant <strong>des</strong> aspects médicaux et audioprothétiques<br />

a été rédigé par <strong>des</strong> audiophonologistes membres du<br />

BIAP (Bureau international d'audiophonologie) creuset où se rencontrent<br />

les diverses disciplines dont i'audiophonologie souligne la<br />

complémentarité. C'est dire si chacun <strong>des</strong> auteurs a apporté B sa<br />

contribution l'expdrience du travail ulterdisciplinaire vécue au sein<br />

de cette association. Jean-Claude hfon a accepté la tâche ardue<br />

d'analyser les pratiques actuelles d'évaluation et d'indemnisation du<br />

handicap auditif. Parmi les critiques qu'il adresse aux différents barèmes<br />

et aux modalités de leur appfication, c'est l'absence de prise en<br />

compte effective <strong>des</strong> possibifités de communication verbales quyii<br />

relève en priorité. Il souligne la difficulté de concilier la nécessité


d'un ajustement périodique du taux d'hvalidité de l'enfant avec le<br />

souci d'tsviter que les parents ne soient tentt5s de mahtenir celui-ci<br />

dans son hvalidité. Comment rmnnaître une amtSLToration de capacité<br />

sans pénaliser l'effort qui l'a pemise ? L'auteur fait <strong>des</strong> propositions<br />

mncrètes et dktaiflées, reprenant une partie <strong>des</strong> dispositions<br />

actuelles tout en les ajustant, et ouvre ainsi d'intkressantes perspectives<br />

d'améEoration.<br />

C'est ensuite Lueien Moatti qui, partant de la dé~ition de l'audiophonologie,<br />

expose la spkificité de la formation et de la pratique<br />

du médecin qui se rklame de cette « pluridisciphe ». Partant <strong>des</strong><br />

nouveam textes légaux, l'auteur eqlicite le rale de ce médecin au<br />

sein <strong>des</strong> équipes, montrant comment ce rôle doit d$asser le cadre<br />

trop restrictif d'une action uniquement thérapeutique et de surveillance<br />

otologique, tout en assumant aussi cette tâche h&spensable et<br />

trop souvent négligée.<br />

La sensibilité à l'égard de la famiile et fa nécessit6 de la faire<br />

participer & la démarche thérapeutique et éducative sont mangestement<br />

<strong>des</strong> préoccupations vécues intensément par l'auteur. Son affirmation<br />

de Phportance d'un abord psychologique adéquat de i'ensemble<br />

familial, lors du choc du diagnostic, témoipe de sa profonde<br />

compréhension du r61e du médecin à ce moment critique. Savoir<br />

penser en médecin, nous dit-il en temhant, mais aussi connaître ses<br />

hites et accepter cette notion de pluridiscipharité qui est l'essence<br />

même de l'audiophonologie.<br />

L'article de Paul Veit sur Ia prothèse auditive ddfhit de rnanihe<br />

précise et syst6matique <strong>des</strong> termes et <strong>des</strong> notions bien souvent mal<br />

compris par les non-physiciens. Cette nécessaire clargieation aidera<br />

certahement tous ceux qui étaient jusqu'ici rebutés par l'aspect 6sotbrique<br />

de ce domaule nbessairement technique. L'énoncé clair <strong>des</strong><br />

prhcipes devant guider i'apparerllage prothetique aux dgférents<br />

iiges, la <strong>des</strong>cription <strong>des</strong> caractéristiques particulières et <strong>des</strong> qualités<br />

respectives <strong>des</strong> dispositifs de transmission i distance ferant de ce<br />

texte un outil hdispensable aux responsables <strong>des</strong> équipements individuels<br />

et collectifs en faveur <strong>des</strong> enfants à audition déficiente.<br />

L'article se termine par d'intéressantes vues prospectives et par le


témoignage du caractère profondement humain du travail de l'audioprothésiste<br />

qui « en plus de son savoir et de son savoir-faire, y met<br />

un peu de son coeur S.<br />

Actions nouveiies, c'est le titre du quatrième chapitre qui commence<br />

par l'article de Patricia Dubois-Chapuy et Jocelyne Relias<br />

intituIts « Education prhce, guidance parentale, accompagnement<br />

<strong>des</strong> parents ». Le dernier terme de ce titre « accompagnement <strong>des</strong><br />

parents » reflkte bien, en effet, une nouveauté, par rapport à celui,<br />

plus classique, de « guidance ». Il fait ressortir cette maîtrise rendue<br />

aux parents, premiers acteurs de l'éducation de leur enfant, grilce à<br />

une information plus complète qu'auparavant et à la mise à leur disposition<br />

de tout l'arsenal actuel <strong>des</strong> moyens de communication. Il insiste<br />

avec pertinence sur la nkessité de se référer m s cesse aux<br />

processus du développement nomal de l'enfant non handicapé.<br />

Après un exposé dbtazU6 <strong>des</strong> objectifs de l'bducation précoce, l'article<br />

expose les principes d'une mise en oeuvre @namique, associant les<br />

différents membres de l'équipe concernée, La prise en compte complète<br />

du système f adal pemettra, quand n&cessaire, une restructuration<br />

: elle évitera que toute la vie <strong>des</strong> parents ne soit organisée<br />

comme une lutte contre le handicap, au risque de devenir une lutte<br />

contre i'enfant handicapé. Information et réussurance seront <strong>des</strong> aspects<br />

essentiels de 174ducation précoce, et la famn de les concevoir<br />

qui est exposbe ici s'inscrit veritablement dans le cadre <strong>des</strong> « actions<br />

nouvelles B.<br />

Viennent ensuite les articles de Jean Chappelet et de Mireille<br />

Villard, exemples concrets de la mise en appEcation dans un département<br />

<strong>des</strong> nouvelles dispositions régfementaires. Trop peu familiarise<br />

avec les structures françaises, il m'est difficile d'analyser en<br />

profondeur la portée de ces réalisations. J'ai pu néanmoins constater<br />

que l'un comme l'autre demontrait qu'aux mains de responsables<br />

animés d'une volonte d'aller de l'avant, les textes actuels permettaient<br />

effectivement <strong>des</strong> progrès importants, <strong>des</strong> adaptations structurelles<br />

parfois considérables. Un meilleur encadrement pédagogique,<br />

avec notamment la participation d'un professeur sourd spécialise,<br />

une action plus efficace auprès <strong>des</strong> familles, l'utilisation de moyens<br />

de communication plus efficaces, tant en classe spkialisée qu'en in-


tégration, enfin une meilfeure organisation de cette intégration selon<br />

<strong>des</strong> modalités variables, adaptées à chaque enfant, autant de points<br />

positifs dont la mise en oeuvre paraît maintenant possible à qui sait<br />

utiliser les nouveaux outils légaux.<br />

Ih est juste et bon que ce chapitre Actions nouvelles se termine<br />

par l'article d'Henri Faivre sur les enfants déficients sensoriels surhandicapés.<br />

Comment ne pas reconnaître que c'est là un sujet que<br />

l'on n'ose souvent pas aborder, auquel s'applique plus que tout autre<br />

cette nécessite de «penser inconfortablement » à laquelle Jean-<br />

Pierre Bouilfon fait allusion dans son introduction. Qui d'entre nous,<br />

les e professionnels de la déficience auditive » ne se sent pas interpelle<br />

par « ces enfants-IQ », et qui d'entre nous ne se sent pas<br />

coupable ? Plus sbv&rement handicapes que d'autres de par leur<br />

condition physique, ils le sont aussi par leur petit nombre, et par les<br />

difficultés particulikres inhérentes à leur prise en charge adéquate.<br />

Henri Faivre lutte pour eux depuis <strong>des</strong> années, avec lucidite, détermination<br />

et compétence. Dans cet article, il a l'occasion d'exposer à<br />

tous les problèmes particufiers soulevés par l'association <strong>des</strong> handicaps,<br />

mais aussi <strong>des</strong> solutions éducatives adaptées et realistes, ainsi<br />

que <strong>des</strong> élkments objectifs permettant de nuancer, voire de dkpasser<br />

le sombre pronostic que cette association suggère : souvent l'un <strong>des</strong><br />

handicaps est de caractère modéré et, s'il est adéquatement pris en<br />

compte, ne compromet pas la réussite du processus educatif nécessité<br />

par le handicap principal. Et lorsque les deux handicaps sont<br />

profonds, il faut apprendre, et aider les parents à apprendre, ne pas<br />

se focaiiser sur eux, mais s'attacher à découvrir les virtualités de l'enfant<br />

et prendre appui sur elles en vue de son épanouissement. Arnbition<br />

et rtklisme, adaptation au cas de chacun, sont les maîtres-mots<br />

de ce beau programme.<br />

Un de mes fils et ma fille étant sourds, je suis particfièrement<br />

heureux que le cinquième chapitre soit consacres aux parents et à<br />

leur témoignage. La participation <strong>des</strong> parents Q cet ouvrage est une<br />

application concr&te <strong>des</strong> principes énoncés dans Sa nouvelle Annexe<br />

XX'V quater, reconnaissant leur statut de membres de l'équipe éducative,<br />

et leur place primordiale en son sein.


Estelle et Andrg Voros, expliquent les raisons qui les ont amen6s<br />

à choisir pour leur fille Magali une &ducation bilingue privagiant<br />

la langue <strong>des</strong> signes au début, avec l'aide d'une jeune femme<br />

sourde. Leur récit de l'6volution de Magali, empreint d'amour et de<br />

réalisme, est un exemple de réussite de cette formule d'éducation,<br />

qu'ils espèrent voir rendre plus accessible Q d'autres parents, à<br />

d'autres enfants. Nicole Bernard raconte l'histoire de son fils<br />

Etienne, h qui elle et son mari ont pu transmettre leur langue grke<br />

au L9C. <strong>Les</strong> nombreux exemples concrets rUustrent comment celui-ci<br />

permet à l'enfant d'asshiter par l'usage, dans la vie de tous les jours,<br />

les structures de plus en plus complexes, ahsi que les expressions<br />

courantes de la langue parlêe. Enfin, Gaston Lorioux, pare et grandpère<br />

d'enfants sourds, écrit au nom de PANPEDA, soulipant le r61e<br />

essentief <strong>des</strong> associations de parents dans I'aceueil et I'infomation<br />

<strong>des</strong> jeunes parents, ainsi que dans la représentation <strong>des</strong> parents auprès<br />

<strong>des</strong> pouvoirs publics, Importance du choix d'un mode de cornmunication,<br />

puis d'un systkme &ducatif : c'est à Josette Chalude qu'il<br />

laisse le dernier mot, à propos de ces questions. Sa réponse mesurée,<br />

fruit de toute une vie de r6fXexion et d'action, est un message d'espoir<br />

et de confiance, puisqu'elle propose de choisir sans exclure, pour<br />

>.<br />

Après avoir passé en revue les contributions <strong>des</strong> dzférents auteurs,<br />

en essayant d'en dégager les lignes directrices et d'en souXagner<br />

les principaux m&rites, j'ai lhpression d'une grande richesse, et d'un<br />

assez bon équilibre. J'y retrouve la volont6 de pr6senter aux parents<br />

avertis et aux professionnels l'ensemble <strong>des</strong> options possibles,<br />

comme le fait le rtkent ouvrage américain « Choiees in Deafness »,<br />

en faisant ressortir les mérites de chacune sans dênigrer les autres. If<br />

y a cependant <strong>des</strong> absents, parmi les options et parmi les auteurs.<br />

La méthode verbo-tonale, citée plusieurs fois, n'est pas décrite.<br />

Elle fait cependant partie du tableau « l'enfant sourd en France >> et<br />

aurait mérité d'y avoir sa place, S'il est vrai que beaucoup lui reprochent<br />

de ne pas offrir à l'enfant sourd profond un moyen complet de<br />

communication et d'accès au langage, il n'en reste pas moins qu'elle<br />

a permis à de nombrewr enfants français d'exploiter au maximum<br />

leur audition résiduelle, completée au besoin par la perception vibro-


tactile, pour atteindre un bon niveau d'expression orale. Ses techniques<br />

particarement efficaces dans les domaines de la voix, de<br />

l'articulation et de la prosodie peuvent avantageusement être incluses<br />

dans le processus Cdu~tif global faisant par ailleurs appel aux<br />

signes et/ou au LPC pour développer langage et communication.<br />

Pas d'orthophonistes parmi les auteurs... Ce sont cependant elles<br />

aussi qui, dans les équipes d'éducation prhoce, assument la plus<br />

grande partie du dialogue avec les parents, qui les aaompapent pas<br />

ia pas dans la pre~bre communication avec leur enfant. Ce sont elles<br />

et eux qui par la suite vont nouer avec l'enfant sourd une relation individueue<br />

sur la base de laquelle langage et parole pourront s'enrichir<br />

et se perfectionner. Ne pas les avoir invités à prendre part cet<br />

ouvrage me paraît mhonnaître l'importance de leur r61e. La plupart<br />

ont consenti ces dernieres anntres de grands efforts pour dépasser le<br />

cadre restreint que semblerait & tort leur assigner le terme qui désigne<br />

leur profession, si l'on s'en tient & 176tymologie. Bien au-del& de<br />

fa voix et de la parole, leur champ d'action s'&tend ia tous les aspects<br />

du langage et de la communication. C'est dommage qu'elles n'aient<br />

pas eu l'occasion de l'exprher ici.<br />

Et les sourds ? Il avait &té prévu d'inclure le témoignage de l'un<br />

d'entre eux. On peut regretter que cela ne se soit pas fait. Encore<br />

eut-il fallu fatre appel à plus d'un t&moignap, car il n'aurait pas suffl,<br />

pour l'équare de l'ensemble, de recueillir l'avis d'un membre de la<br />

communautb <strong>des</strong> sourds, Celle-ci appelle tous les enfants sourds à la<br />

rejoindre, convaincue de pouvoir leur apporter les valeurs essentielles<br />

de sa langue et de sa cuiture, hdispensables à ses yeux i% l'epanouissement<br />

de leur personnalit&. Cette position a Cté exprimée B<br />

plusieurs reprises, et est maintenant bien connue. Mais d'autres<br />

sourds vivent parmi les entendants et n'ahent pas leur surdité. Sans<br />

la nier, leur personnaEté s'est forgee en quelque sorte malgr6 elle,<br />

aussi ne souhaitent-ils pas témoigner en tant que sourds. Ils ne se<br />

sentent nuftement privés de ne pouvoir participer aux dbbats, congrès<br />

ou festivals dont la surdité est le thème. Non reeensables puisque ne<br />

constituant pas un groupe social, leur existence et leur nombre sont<br />

souvent minimisés par ceux qui croient que seule f'identzication en<br />

tant que sourd permet l'épanouissement. Ils sont cependant eux aussi


<strong>des</strong> modèles d'adultes qui peuvent être proposés aux enfants sourds<br />

et à leurs parents.<br />

Enfin, n'aurait-il pas été possible de recueillir l'avis <strong>des</strong> enfants ?<br />

De ces adolescents qui ont reçu une éducation bilingue, de ces autres<br />

qui communiquent entre eux en LPC? A l'Ekole intégrée de<br />

Bruxelles, une enquête a été faite auprès <strong>des</strong> grands du secondaire,<br />

qui n'avaient pas connu dans leurs jeunes années la combinaison<br />

LPC-français signé actuellement utilisée en éducation précoce. Il en<br />

ressortait surtout une envie et un regret, de n'avoir pas bénéficié<br />

comme les petits d'aujourd'hui de moyens dont ils constatent l'efficacité,<br />

qui leur auraient permis, ils en sont convaincus, d'atteindre une<br />

meilleure maîtrise du français.<br />

Faudrait-il laisser le choix aux enfants <strong>des</strong> moyens de communication<br />

et de la langue de l'enseignement ? C'est tentant, au nom de la<br />

liberté et du respect de la personnalité de l'enfant. Mais tant qu'il n'a<br />

pas acquis une certaine maturité, l'éducation même la plus libérale se<br />

doit de ne lui proposer de choix qu'entre <strong>des</strong> options ayant fait la<br />

preuve de leur égale efficacité à long terme. Et c'est là tout le problème<br />

qui, au terme de cet ouvrage, reste entier. Car ces preuves,<br />

nous ne les avons pas.<br />

Chacun de nous a ses convictions, basées sur une expérience<br />

personnelle. Aucun de nous ne possède encore de certitu<strong>des</strong>, car les<br />

résultats <strong>des</strong> différentes options proposées n'ont pas fait l'objet<br />

d'évaluations scientifiques comparatives. Seules <strong>des</strong> recherches rigoureuses<br />

permettront d'avancer vers <strong>des</strong> appréciations plus objectives<br />

qu'actuellement. Mais elles sont difficiles à réaliser, puisqu'il<br />

s'agit de mesurer non pas seulement <strong>des</strong> performances mais bien<br />

aussi une qualité de vie. Aussi faut-if se résigner à n'avancer que pas<br />

à pas en ce domaine. Entre temps, chacun a le droit de garder sa<br />

vérité, et personne n'a celui de i'imposer aux autres. Que ces vérités<br />

parfois divergentes mais pas nécessairement incompatibles aient pu<br />

être rassemblées ici, c'est le grand mbrite <strong>des</strong> auteurs de cet ouvrage.


- ANNEXES -


MOYENS DE COMMUNICATION<br />

ET SOLUTIONS EDUCATmS<br />

DANS LA SCOLARLSATION DES ENFNTS<br />

ET mOLESCENTS DEFICIENTS AUDITXFS<br />

Ce texte est im dwment de travail.<br />

Le souci <strong>des</strong> auteurs a été d'informer, de clarifier et d'appeler 3<br />

la refteson et aux échanges.<br />

Ont rddigé ce document :<br />

- Monsieur DELHUM, Professeur au Centre National d'Etu<strong>des</strong> et de<br />

Fornation pour l'Enfance Inadaptée (CmFEI) et collaborateurs :<br />

- Monsieur BOUILLON, Conseiller Pédagogique et Technique, Direction<br />

de l'Action Sociale - Mlnistére <strong>des</strong> Affaires Sociales et de la<br />

Solidarité Nationale.<br />

- Madame FOWER, Professeur au Centre National dYEtu<strong>des</strong> et de<br />

Formation pour l'Enfance Inadaptée (CNEF*EI).<br />

- Monsieur ER, Conseiller Pé-dagogique et Technique, Direction<br />

de ktion Sociale - aistère <strong>des</strong> Affaires Sociales et de la<br />

Solidarité Nationale.


OBJECTIFS GENERAUX DU RAPPORT<br />

1, Diversite <strong>des</strong> situations, <strong>des</strong> solutions, <strong>des</strong> analyses<br />

1.3. Diversité <strong>des</strong> situations<br />

- Remise en question de l'ordisme<br />

- Influence <strong>des</strong> modèles étrangers<br />

- R61e <strong>des</strong> progrès techniques et <strong>des</strong> associations (de sourds et<br />

de parents)<br />

1.2. Diversité <strong>des</strong> solutions<br />

-<strong>Les</strong> termes généraux cachent une grande variété de cas<br />

particuliers<br />

1.3. Diversité <strong>des</strong> analyses<br />

R8le <strong>des</strong> critères idéolo@ques, linguistiques et pédagogiques<br />

- La prise en compte <strong>des</strong> objectifs éducatifs<br />

2. La problématique bilingue<br />

2.1. Du statut linguistique de Ia LSF<br />

2.2, <strong>Les</strong> argments en faveur du français, langue nationale, langue de<br />

l'école<br />

2.3. <strong>Les</strong> arguments en faveur de la LSF, seule garante d'une communication<br />

langagière précoce<br />

2.4. Paradoxes de la situation actuelle<br />

- La revendication d'une langue maternelle conduit à de redoutables<br />

contradictions<br />

- <strong>Les</strong> conditions du bihguisme restent actuellement problématiques


3. <strong>Les</strong> moyens intermddiaires<br />

3.1. Le LPC, un out2 efficace<br />

3.2. Le FS, une technique plus discutee<br />

3.3. L'4ventail <strong>des</strong> combinaisons<br />

4, R6dui.m les contradictions<br />

4.1. <strong>Les</strong> r4ponses &ducatives dbpendent, aussi, de l'atteinte auditive<br />

4.2. Ecouter les usagers, parents et élèves<br />

4.3, L'htemention <strong>des</strong> adultes sourds<br />

S. Conclusion<br />

6. Post-face : sept propositions à ddbattre


Cette courte étude a pour objet de tenter une mo<strong>des</strong>te synthèse<br />

de la situation actuelle dans les domaines de la scolarisation <strong>des</strong><br />

jeunes sourds, <strong>Les</strong> controverses parfois passionnées qui secouent le<br />

monde <strong>des</strong> professionnels, <strong>des</strong> sourds et <strong>des</strong> parents trouvent leurs<br />

sources dans cet ensemble de conditions historiques, socio-finguistiques<br />

et éducatives qu'il faut connaître pour pouvoir aussi sereinement<br />

que possible apprtkier les arguments de chaque partie. Ces<br />

arguments sont nombreux, variés, complexes et ont suscité depuis un<br />

siècle? et plus partic~èrement depuis vingt ans, une copieuse littérature,<br />

Il n'est pas dans l'intention de ce bref travail de les reprendre<br />

un à un, de les comparer, de les discuter : un &pais ouvrage n'y suffirait<br />

pas. Dans le cadre de la problématique indiquée d&s le titre (les<br />

choix éducatifs dépendant <strong>des</strong> options communicationnelies) on se<br />

contentera plus mo<strong>des</strong>tement de dresser le tableau de la situation en<br />

1985 afin d'espérer dégager, en conclusion, quelques principes clairs,<br />

cohérents et acceptables sinon par tous, du moins par une forte majorité<br />

de praticiens, de parents et de sourds adultes. Ces principes, ou<br />

pour mieux dire, ces « directions d'action » devraient, après avoir été<br />

discutées par toutes les parties intéressées, former les bases d'un<br />

consensus le plus large possible afin que le temps <strong>des</strong> affrontements<br />

soit dépassé et que s'ouvre celui <strong>des</strong> réalisations cohérentes et efficaces,<br />

pour le plus grand bien <strong>des</strong> enfants et <strong>des</strong> adultes.<br />

1.1. Une analyse diachronique, couvrant les deux derniers<br />

siècles, s'avérerait nécessaire pour expliciter dans le détail la cornplexité<br />

et la varieté de la situation actuelle qui se présente d'abord<br />

comme le produit d'une histoire. On comprendra aisément d'après<br />

ce qui précède qu'un travail aussi ambitieux ne peut trouver sa place<br />

ici. On se bornera donc à relever, dans un ordre qui ne se veut ni<br />

chronologique ni hiérarchique, les principaux facteurs qui entrent en<br />

jeu dans la conjoncture présente.<br />

- Autant il serait injuste de parler d'un échec de l'oralisrne<br />

(chaque méthode particulière peut se prévaloir à juste titre de nombreuses<br />

réussites scolaires, professionnelles et humaines), autant il<br />

semblerait illusoire de nier la réalité d'une crise de l'oralisme. <strong>Les</strong>


espoirs ambitieux et légitimes <strong>des</strong> maîtres de voir leurs él&ves maîtriser<br />

la langue française, suivre une scolarisation réussie et s'insérer<br />

dans la communauté de leur pays, ces espoirs ont été souvent d6çus.<br />

La conquête du système de notre langue et surtout de son versant<br />

oral reste pour de nombreux adolescents imparfaite et lacunaire,<br />

l'intégration scolaire <strong>des</strong> jeunes sourds apparaît comme une <strong>des</strong> plus<br />

délicates qui soient, le nombre de sourds poursuivant <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> secondaires<br />

ou supérieures demeure dans notre pays dramatiquement<br />

restreint. Ces résultats décevants, en regard <strong>des</strong> efforts fournis, de la<br />

compétence et du dévouement <strong>des</strong> professionnels, suscite le désarroi<br />

de certains, l'interrogation et le doute du plus grand nombre. Si<br />

d'aucuns brfllent avec un z&le iconoclaste tout ce qu'ils ont adoré<br />

(l'appareaage prothétique, la lecture labiale, l'éducation auditive...),<br />

ii tort sarernent, nombreux sont ceux qui se tournent vers <strong>des</strong> solutions<br />

moins intransigeantes en recherchant, sans renier tous %es acquis<br />

du passé dans le domaine de l'enseignement du français, une<br />

voie plus souple, ouverte à l'intervention d'autres moyens communicationnels<br />

propres à permettre précocement et authentiquement<br />

l'acquisition d'un système codé et performant, susceptible d'établir<br />

une intercompréhension fine entre le tout jeune sourd et les adultes<br />

qui l'entourent.<br />

- Beaucoup plus que leurs coHègues du secteur ordinaire, les enseignants<br />

spéciaiisés dans l'éducation <strong>des</strong> jeunes déficients auditifs<br />

sont toujours restés à l'écoute <strong>des</strong> solutions pédagogiques et educatives<br />

préconisées dans les grands pays étrangers. La communauté <strong>des</strong><br />

préoccupations et <strong>des</strong> techniques, la régularité <strong>des</strong> rencontres dans<br />

les congrès internationam, l'histoire aussi toute pleine de polémiques<br />

(opposant <strong>des</strong> individus ou <strong>des</strong> écoles de pensée) dépassant<br />

largement le cadre <strong>des</strong> frontières, tout cela explique sans doute cette<br />

réceptivité particulière <strong>des</strong> professionnels aux expériences, aux réussites,<br />

aux conceptions de leurs collègues étrangers. Ii faut connaître<br />

et comprendre cette situation particulière pour mieux saisir la sensibilité<br />

spécifique <strong>des</strong> enseignants pour sourds en France, gardiens<br />

d'un héritage prestigieux qui, au travers du nom de l'abbé de l'Ep6e<br />

fait de l'Institut National de Paris par exemple un lieu de pèlerinage<br />

international, et fascinés à la fois par certains modèles étrangers qui


leur paraissent plus efficaces ou plus fondés que le ndtre. Chfluence<br />

<strong>des</strong> Etats-Unis et <strong>des</strong> pays scandinaves sur les professeurs <strong>des</strong> instituts,<br />

de la Yougoslavie sur les maîtres pratiquant ]ta méthode verbotonale,<br />

a &té déterminante : on ne s'étonnera donc pas, dans les<br />

débats d'idees actuels, de rencontrer de nombreuses références à ces<br />

situations eaérieures et une démarche inteuectuelle souvent comparative.<br />

Quoique totalement française par son enrachement et ses<br />

données propres, la problématique récente est aussi l'kho, le reflet,<br />

le contrecoup D' =ISE E.N Q ~ O N<br />

TION DES ENFANTS SOURDS.<br />

MO~NE DE L'J~XWCA-<br />

-Ce trtss ancien problème <strong>des</strong> moyens de cammunication<br />

propres à assurer aux sourds une éducation opthale s'est trouvé<br />

ravivé, depuis quelque vin@ ans, à la suite de toute une série de progrbs<br />

$techniques, pédagogques et sociaux. Le temps où les controverses<br />

nqtaient le fait que <strong>des</strong> seuls enseignants paraît totalement<br />

révolu, Du c6té <strong>des</strong> progrès thniques et pédagodques il faut placer,<br />

sans prétendre analyser ici ni les uns ni les autres, les performances<br />

toujours améliorées <strong>des</strong> prothèses offrant aujourd'hui à bon<br />

nombre d'enfants, mais non B tous, un appréciable gain audit& la<br />

pr&ocité de I'htewention éducative qui permet de nos jours de<br />

prendre en charge le tout jeune enfant grilce à i'action parentale à<br />

une période où toutes les acqukitions seront déterminantes pour son<br />

avenir d'etre wmuniquant et d'&olier, Pktêgration qui a eu au<br />

moins comme premier effet bénéfique une rkvkion <strong>des</strong> objectrfs vers<br />

plus d'eggence et dkmbition. Ces nouvefles dom&es apportent un<br />

sang neuf à I'option or&@ et justifient que certains y placent encore<br />

tous leurs espoirs. Du &té <strong>des</strong> progrbs sociaux, ü faut noter la place<br />

gandissante - et totalement fondêe - dans le débat <strong>des</strong> parents<br />

d'enfants déficients auditrfs et <strong>des</strong> associations de sourds adultes. II<br />

n'est pas question ici d'entrer dans le détail <strong>des</strong> deman<strong>des</strong> ou <strong>des</strong> revendications<br />

<strong>des</strong> uns et <strong>des</strong> autres ni dkapprécier le bien fondé de<br />

leurs esllgences parfois contradictoires. If faut prendre ce fait comme<br />

un evenement sans toute kréversible et lui donner sa juste place dans<br />

la problématique dducative et communicationneBe. On ne devra jamais<br />

oublier que le choix d'un ou de deux mo<strong>des</strong> de communiation,<br />

et même le choix <strong>des</strong> moyens pour parvenir à cette (ces) compb


tence(s) dépassent le seul cadre de l'&ole, le seul débat <strong>des</strong> techniciens,<br />

et renvoient non à une interrogation singulièrement plus large<br />

d'ordre idéologique et philosophique. L'intervention de ces partenaires<br />

nouveaux déplace les problèmes en ce sens qu'elle jette dans<br />

la balance tout le poids du vécu, vécu <strong>des</strong> adultes sourds qui ont manifestement<br />

« leur mot & dire », vécu <strong>des</strong> parents qui jouent un r81e<br />

essentiel et dont il faut savoir écouter aussi les appels et les deman<strong>des</strong>.<br />

EN 1984, LA REPONSE AUX PROBLEMES EDUCATïFS DES<br />

"NFm DEF2CIENTS AUDITIFS NE S A W SE! LIMITER A DES SOLU-<br />

TIONS P- PEDAGOGXQW.<br />

1.2, <strong>Les</strong> mots, comme cela arrive souvent, renvoient non à <strong>des</strong><br />

objets particullers mais & <strong>des</strong> catégories d'objets masquant ainsi sous<br />

l'extension du concept l'hmense variéte du réel. Cette fatalité du<br />

discours oblige à manier de vastes abstractions (l'oralisme, le bilinguisme,<br />

l'intégration ...) propres B permettre le débat mais le dévoyant<br />

en même temps dans la mesure o\i la signification <strong>des</strong> termes<br />

utilises ne recouvre pas, pour chacun, la meme référence, les mêmes<br />

expériences, le même vécu. On ne peut 6ckapper sans doute, quand<br />

on veut tenir un discours nkessairement gtsnéral, à cette perversité<br />

du langage, encore faut-il ne pas en rester dupe.<br />

Chacun <strong>des</strong> mots employlss ici recouvrant donc non une réalité<br />

uniforme mais une étonnante diversité de situations et de solutions,<br />

2 faut prendre en eompte ce phénomène, par simple honnetteté intefiectueue<br />

d'abord, et pour fuir dans un second temps les jugements<br />

entiers, abrupts, sans nuances, qui n'apportent findement rien i<br />

l'élucidation <strong>des</strong> questions et ne font que stérilement relancer les<br />

querelles à t'infini.<br />

En reprenant les trois termes évoqués prwdemment on s'apercevra<br />

que chacun correspond en fait à un large éventail de solutions<br />

éducatives et eommunicationnefies :


a) pour l'intégration<br />

- hsertion d'une classe (ou d'un groupe) dans un étabfissement<br />

ordinaire ;<br />

- intégration <strong>des</strong> enfants pour toutes les activités autres que la classe<br />

(repas, clubs, récrbations, plein air..,) ;<br />

- intdgration <strong>des</strong> enfants dans les activités sportives et artistiques ;<br />

htdgration <strong>des</strong> enfants dans toutes les activités sauf le français ;<br />

- htçillation totale avec soutien ;<br />

- htégration sans soutien mais avec bterprète (dans le secondaire et<br />

le superieur par exemple) ;<br />

- &tégrarion dans <strong>des</strong> structures spéciaEsbes <strong>des</strong>tinées aux entendants<br />

(S.B.S. notamment).<br />

Encore faudrait-il davantage nuancer selon que l'on parle d'htntégration<br />

au nivau maternel, prhaire, secondaire !<br />

b) pour lbrafisme<br />

On a conçu historiquement, et l'on peut encore concevoir, divers<br />

cas de figure :<br />

- selon la rigueur du principe dBun&guisme : si de tout temps I'usage<br />

de communications gestuelles, entre les élèves et hors de la classe,<br />

dtait plus ou moins tacitement toléré, il existe en 1984 <strong>des</strong> holes -<br />

celles qui pratiquent la méthode verbo-tonde par exemple - oQ les<br />

enfants sourds ne connaissent aucun signe cudd et communiquent<br />

exclusivement par la parole et Ie mime spontané,<br />

On peut trouver dans fa situation oraliste actuelle tous les degres<br />

de toldrance l'égard du langage gestuel depuis I'ignorance totale<br />

(voire l'ùrterdiction) jusqu'à une coesstence pacifique - sans que<br />

i'on puisse pour autant parler d'éduation bitingue.<br />

- selon les métho<strong>des</strong> d'enseignement du français. En simplifiant grossièrement,<br />

on peut opposer une mkthode c< <strong>des</strong> instituts * sujette<br />

elle-même ii de nombreuses variantes selon les établissements, une<br />

méthode verbo-tonde pratiquée dans certahes classes de 1'Eduation<br />

nationale et la pédagogie d'adqtation <strong>des</strong> maîtres CAEI (<strong>des</strong>


orthophonistes prenant alors en charge Yacquisition et le perfectionnement<br />

de la parole).<br />

- selon la place respective du frangais 6crit et du français parlé. A<br />

une mnception oraliste intransigeante qui ne fait htemenk Z'apprenfissage<br />

du code &rit qu'à Page habituel et privîlé@e systématiquement<br />

I'acees à la parole s'oppose une attitude plus grapatique<br />

prônant lknseignement précoce de la lecture et plus orientée vers<br />

l'acquisition du système du français que vers sa pratique langaere,<br />

c) pour le bilulguisme<br />

La variété naît ici prhcipalement (mais non exclusivement) de la<br />

conception que l'on se fait du moment d'acquisition <strong>des</strong> deux co<strong>des</strong>.<br />

. <strong>Les</strong> deux systèmes sont proposés conjointement et développés parauèlement<br />

(dans la mesure du possible !),<br />

. La communication gestueae est premi&re et le franqais s'apprend<br />

comme une langue seconde (selon <strong>des</strong> modalités elles-mêmes tres<br />

variables).<br />

. Le français reste la langue maternelle, la LWx étant proposé ultérieurement<br />

afin de permettre au futur adulte de s'intégrer dans la<br />

communauté <strong>des</strong> sourds, s'îl le désire.<br />

Ce catalome peut paraître long, îl ne représente cependant<br />

qukne image très shpMiée de la compledté <strong>des</strong> faits et de la bigarrure<br />

du terrain. Derrière les «grands mots », il ne faudra jamais<br />

perdre de vue cette réalité multifome, ne jamais oublier que LES<br />

ONS POSEES NE PEUVENT SE PERM<br />

IQW OU IMP STES.<br />

1. Le si@ LSF Wngue <strong>des</strong> Signes Française) sera ici employe, sans préjuger de fa ~lidité de<br />

l'eqression ou de I'empIoi du mot a sipe » dans ce sens particulier, pour désigner ie tangage<br />

gestuel <strong>des</strong> sourds de notre pays. Cette désignation conventionnelle, consade par<br />

l'usage, êtant familière B tous mux qui se pdmw~nt <strong>des</strong> probI&mes de la su&it6, nous<br />

l'avons utilisée sytématiquement pour la clart6 de I~er>os&.


13. Pour prendre une juste mesure de la complexité du problème,<br />

il faut expliciter clairement les critéres qui sous-tendent les<br />

jugements et les arguments <strong>des</strong> uns et <strong>des</strong> autres. Ces critères ne relèvent<br />

pas <strong>des</strong> mêmes modèles ~ologiques, ils se fondent sur <strong>des</strong><br />

systhes de valeurs hétérogènes rarement conc%ables, On ne s'étonnera<br />

donc pas que dans le débat d'idées les points de vue puissent<br />

être si divergents, que souvent les argumentations se côtoient ou s'affrontent<br />

plus qu'elles ne se rencontrent, chacun campant dans le terrain<br />

idéologique qui est le sien et qui peut demeurer fermé à l'interlocuteur.<br />

Mais chez la même personne, <strong>des</strong> niveaux d'analyses<br />

contradictoires peuvent parfaitement coexister, suscitant la perplexité<br />

et f'hésitation chez les plus luci<strong>des</strong> ou les plus prudents.<br />

Une première grille de jugement peut analyser le même phénoméne<br />

selon divers points de vue et aboutir à <strong>des</strong> conclusions plus ou<br />

moins incompatibles. Un exemple précis, celui du français signé,<br />

6claire bien ce mécanisme :<br />

a) critères pédagogiques<br />

Le français signé visualise le discours oral qu'il accompagne mot<br />

il mot : c'est un excellent moyen de communication pour favoriser<br />

l'acquisition du français et beaucoup plus facile à apprendre par les<br />

entendants (maîtres et parents) que la ISF.<br />

b) critères *pistiques<br />

Emprunter les unités lexi<strong>des</strong> d'une langue pour les cumbher<br />

selon les règles gammaticales d'une autre soulkve d'énormes problèmes<br />

tant theoriques que pratiques. La traduction <strong>des</strong> multiples<br />

expressions idiomatiques de notre langue B l'aide <strong>des</strong> lexèmes d'un<br />

autre système aboutit B d'énormes contre-sens. L'utiLisation du<br />

mbe vocabulaire selon deux systhmes syntaxiques différents peut<br />

gravement perturber l'acqukition <strong>des</strong> deux co<strong>des</strong> par le jeune enfant.


c) critères idéologiques (sociaux, éthiques, culturels ...)<br />

Le français signé est un sabir ; le terme péjoratif, ii lui seul, disquaaie<br />

l'outil et le stigmatise comme impropre & assurer toute<br />

communication structurante pour l'esprit et susceptible de vdhiculer<br />

une authentique culture.<br />

Comment ne pas hésiter devant les conclusions si divergentes, et<br />

quel type de critère a-t-on le droit de privild@er a h d'accepter ou de<br />

rejeter l'emploi du français signé ?<br />

Une seconde grille, au moins, fonctionne pardblement à la pr&<br />

cédente et vient encore comptiquer la recherche de solutions claires<br />

et cohérentes. Ji s'agit ici d'analyser les problèmes en fonction <strong>des</strong><br />

objectifs traditionnellement reconnus à l'éducation. Sans entrer dans<br />

la dixussion de fa validité de ces objectifs, et en les exprimant dans<br />

les termes les plus simples possibles, on peut au moins en déterminer<br />

quatre fondamentaux. L'éducation doit viser :<br />

l'dpanouissement de l'individu ;<br />

la transmission <strong>des</strong> savoirs ;<br />

- la préparation à la vie professionnelle et au métier ;<br />

-l'insertion dans le monde <strong>des</strong> adultes et dans la communauté<br />

nationale.<br />

Dans l'ideal, ces objectifs ne devraient jamais être contradictoires<br />

et aucun d'eux ne devrait prévaloir sur les autres : il n'y a pas<br />

d'insertion sociale réussie si le jeune adulte se retrouve sans profession,<br />

il n'y a pas de metier qui ne nécessite de comaissances, il n'y a<br />

pas de savoir qui puisse s'acquérir chez un sujet non désirant.<br />

Cette harmonieuse conjonction <strong>des</strong> finalitds, dtsjh problématique<br />

dans l'enseignement ordinaire, devient encore plus aléatoire lorsqu'il<br />

s'agit d'tsduquer <strong>des</strong> enfants sourds. Ici encore, les critères choisis<br />

aboutissent à <strong>des</strong> conclusions antinomiques : teile solution communicationnelle<br />

visera d'abord l'6panouissement du sujet, que l'on<br />

voudra, selon les formules consacrées,


deux mots, encore faut-il clairement savoir de quelle rêrissites, de<br />

quels échecs on parle !<br />

Le probl&me peut alors se poser en ces termes : peut-on imaginer<br />

<strong>des</strong> solutions qui réduisent au maximum (et peut-être totalement)<br />

ces contradictions, qui puissent mener de front tous les objectifs de<br />

l'éducation et concilier les nécessités de l'efficacité pédagogique, le<br />

respect <strong>des</strong> opinions et les impératifs propres à l'acquisition <strong>des</strong><br />

langues ? Ii serait bien aventuré de répondre par l'afhative ; on<br />

peut cependant affirmer que les meilleures réponses seront sans<br />

doute celles<br />

- QUI N'OmUERONT PAS ClTiïX DIVFJRSlTE DES APPROCHES ;<br />

- QUI ESSAIERONT DE CONCIUER LE PLUS GRAND NOMBRE POSSIBLE<br />

D'EMGENCES.<br />

De toute façon, ce sont 1h <strong>des</strong> pr6occupations qui devront rester<br />

toujours présentes dans I'analyse plus détaill6e qu'il faut maintenant<br />

aborder.<br />

2. La situation actuelle ne saurait en aucune façon se réduire à<br />

une opposition manichéenne du type : français versus LSF2 ; la diversité<br />

<strong>des</strong> réponses Gducatives évoquées ci-<strong>des</strong>sus le montre à loisir.<br />

Il n'en demeure pas moins que ce serait se voiler la face devant la<br />

réalité <strong>des</strong> choses que de refuser de prendre en compte ce problème<br />

fondamental, inévitable, parce que touchant au coeur de l'humain, à<br />

<strong>des</strong> réôlites qui dépassent largement le problhme de la pédagogie et<br />

même de l'éducation (le choix d'une langue maternelle, la conception<br />

d'une vision du monde et d'une culture, l'intégration à <strong>des</strong> communautés,<br />

la prise de conscience d'une identité ...).<br />

Cette question centrale, essentielle, demeure bien celle de la<br />

rencontre - pour ne pas dire de l'affrontement - entre deux dis-<br />

2. Le titre « pmblématique bilingue » est une expxession rapide et commode qui renvoie évidemment<br />

non au choix entre le français et le langage gestuel mais au choix entre une éducation<br />

unilingue en français et une éducation bilingue français-LSF.


cours, creuset de toutes les positions extrémistes pour les uns et de<br />

toutes les hésitations, de tous les doutes pour ceux qui désirent menager<br />

deux ordres d'impératifs divergents. C'est par là qu'il faut donc<br />

commencer i'andyse, pour pouvoir montrer dans un second temps<br />

que cette bipolarisation du problPme peut et doit être dépassée.<br />

2.1. Construire une ddfinition rigoureuse et cornplPte du langage<br />

hmain n'est pas une tgche faciie, malgré ce que pourrait en croire le<br />

plus grand nombre de locuteurs qui vivent l'utilisation de ce langage<br />

sur le mode de l'évidence. <strong>Les</strong> définitions proposées par les lurfistes<br />

peuvent se répartir en trois groupes : définitions formeiles, fonctionnelles<br />

et sémantico-prapatiques : aucune n'est à i'abri d'une critique<br />

serrée qui peut en ruiner les fondements, aucune ne peut<br />

prgtendre h la fois à l'e~austivité et à la rigueur scientifique.<br />

SAS dbfinitions formeiles mettent l'accent sur la vocalité, la<br />

double articulation linéaire, l'auto-suffisance <strong>des</strong> règles internes et la<br />

structuration en système. Outre que ces aracthres peuvent se retrouver<br />

dans d'autres qstames sémiotiques, on a juste titre relevé à<br />

la fois la nature trop purement hstrumentaliste de ces conceptions<br />

qui subordonnent la spcUciEicité du langage humain il la communiation<br />

et leur caractère trop réducteur qui ne donne du langage et de<br />

ses possibilités qu'une hage abstraite, %hématique et videe peutêtre<br />

de ce qui est l'essentiel pour celui qui l'utilise.<br />

<strong>Les</strong> eqgations plus détaa<strong>des</strong> qui s'appuient sur la liste <strong>des</strong><br />

fonctions remplies par le langage ne trouvent pas plus grâce aux yeux<br />

de certains hguistes. Nous ne ferons qu'évoquer ici l'analyse impitoyable<br />

h laquelle se livre F. Flahault (la parole intermédiaire -<br />

Seuil, 1978) <strong>des</strong> fonctions etablies par Jakobson, sous le titre « <strong>Les</strong><br />

généralités sur les fonctions du langage, pseudo-réponses à une question<br />

qui n'est pas posée », L'exercice aiguisé de l'esprit critique pulvgrise<br />

littéralement les fondements d'une théorie pourtant fort<br />

répandue et acceptde souvent sans défiance.<br />

Mais s'il est vrai que « ... on ne saurait dt5crUe le sens d'un<br />

ênoncé en dehors <strong>des</strong> relations de celui-ci avec le cadre fourni par les<br />

repères pertinents de son énonciation » (F. Flahault - op. cit.), les


analyses pragmatiques, infiniment plus riches que les précédentes,<br />

risquent fort de nous faire perdre de vue la spécificité du langage<br />

dont 17élucidation reste une <strong>des</strong> taches premières de la linguistique.<br />

Le danger est grand de glisser vers un psychologisme d'autant plus<br />

pernicieux qu'il demeure parfois inconscient : l'approche sémantique,<br />

sous couvert de nous parler du langage, risque en effet d'analyser<br />

en réalité tout le référent physique et conceptuel du discours,<br />

donc au bout du compte le fonaionnement mental de l'esprit humain<br />

ou les stmctures relationnega de l'individu aux autres et au monde,<br />

et l'objet-langue se perd dans un flou que les définitions formefles<br />

voulaient justement éviter.<br />

Quand on passe du niveau général du langage à celui, plus particulier,<br />

<strong>des</strong> diverses langues humaines, le problème devient encore<br />

plus épineux, Nous n'en donnerons pour preuve que les difficultés<br />

que rencontrent les linguistes à déteminer l'existence <strong>des</strong> différentes<br />

langues du monde pour en établir les atlas et les Filiations : l'évaluation<br />

varie, selon les experts, de 3 500 à 8 000 langues environ ! C'est<br />

qu'il est en effet fort dcSlicat de dhuper dans le continuum <strong>des</strong><br />

idiomes les limites Ilinguistiques et géographiques précises permettant<br />

de conclure : ici s'arrête une langue, là commence une autre,<br />

telles que l'on puisse dlscrire chacune dans son originalité. Inversement,<br />

certaines langues de grande culture, tri% rbpandues, se subdivisent<br />

en un tel nombre de parlers qu'il n'est pas du tout évident que le<br />

fermier du Wisconsin, le professeur de Nouvelle Zélande et le négociant<br />

de Tokyo parlent « la même langue » quand ils utilisent l'angloaméricain.<br />

Le probl&rne devient encore plus complexe si l'on considère tout<br />

ce qui sépare 19Nwmatioii méthodologique de l'existence d'une<br />

langue, établie par les linguistes, de la reconnaissance de cette<br />

langue au sein de la grande famiile <strong>des</strong> autres langues déjA officiellement<br />

légitimées. La question n'est plus ici seulement technique, car<br />

les critères de cette reconnaissance débordent largement du domaine<br />

préGis que la discipline linguistique (qui se veut générafement objective<br />

et axiologiquement neutre) se fixe d'habitude. Ce sont alors les<br />

considérations ethnolo@ques, sociolo@ques, historiques, éthiques, et<br />

au bout du compte politiques - au sens général du terme - qui pri-


ment, L7existence d'une langue précise sera alors justifse par <strong>des</strong><br />

éléments earhsèques & sa nature propre : la réalité d'une communaut6<br />

de locuteurs (mais fondée sur quels csit6res ?) la reférence à<br />

une culture (mais définie de queue façon ?) ... On le devine, le champ<br />

<strong>des</strong> controverses s'ouvre alors largement à ceux qui s'aventurent en<br />

un tel terrain,<br />

On comprendra aisément qu7apr&s de telles considérations, qui<br />

ne sont nuHement <strong>des</strong> prhutions rhétoriques, il ne nous appartient<br />

pas de trancher dans un débat qui durera sans doute lon@emps, s'il<br />

trouve un jour sa solution, Chacun <strong>des</strong> points que nous avons relevés,<br />

et susceptible d'entrer dans la d6fStion d'une langue, peut se prêter<br />

soit à <strong>des</strong> analyses divergentes de la part <strong>des</strong> théoriciens du langage<br />

ou de la pvchologie, soit à <strong>des</strong> appr6ciations opposées de la part <strong>des</strong><br />

praticiens, <strong>des</strong> parents et d'une façon génerale, de tous ceux qui sont<br />

concernés par la surdit6.<br />

On rappellera par exemple;, pour ce qui est de la Gttérature<br />

consacrée au sujet en langue française, la position de P. Oléron (Le<br />

langage gestuel <strong>des</strong> sourds est-il une langue ? in R4éducation Orthophonique<br />

no 133) qui dénie, avec <strong>des</strong> arguments d'une grande pertinence,<br />

l'existence d'une double articdation en ILSF et met en doute<br />

fe caractbre auto-suffisant de ces regles internes, L'auteur n'en<br />

ajoute pas moins in fine ces considerations qui peuvent éclairer notre<br />

position : « fl est vrai qu'au-del& <strong>des</strong> grammaires - et en kvitant les<br />

spéculations sur les Universaw du langage - on pourrait remonter à<br />

f'organisation cognitive. Ne serait-ce pas cette organisation, la distinction<br />

et la mise en relation de cadres conceptuels (actems/r&epteurs<br />

de l'action, objetlqualitk de l'objet, shple/multiple, répétitS/<br />

continu, etc.) que les langues orales et le LGS eprheraient chacun<br />

à leur manibre et en fonction de leurs ressources propres » ? Dans la<br />

perspective éducative qui est la nôtre, la question n'est pas en effet<br />

de décréter si la LSF est une langue ou non, mais bien si elle consti-<br />

tue un langage susceptible de remplir, auprès du jeune locuteur, un<br />

rble similaire à celui dPune langue, ou, en d'autres termes, de prendre<br />

position par rapport B une tradition de critiques adressées à la com-<br />

3. Langage Gestuel <strong>des</strong> Sourds.


munication gestuelle selon lesquelles elle ne permettrait ni l'organisation<br />

de la pensée structurée au travers d'une syntaxe, ni l'accès à<br />

l'abstraction. Un bref rappel du fonctionnement de la LSF et de ses<br />

possibilités de verbalisation nous semble devoir faire justice de cette<br />

dernière opinion.<br />

On s'accordera à reconnaître que la LSF possède en effet un<br />

lexique riche, varié et potentiellement infini, formé d'unités signifiantes<br />

« arbitraires ». L'iconicité souvent soulignée dans le langage<br />

signé tient, nous semble-t-il, à la matérialité visuelle de ses signifiants<br />

: une figure de géométrie semble plus


La ZSF possède un système prosodique propre assuré non par la<br />

voix évidemment mais par le jeu complexe <strong>des</strong> mouvements de la<br />

tête et <strong>des</strong> organes de la face : mimiques faciales, positions et mouvements<br />

de la tête, expiration du souffle, direction du regard,<br />

<strong>Les</strong> unités lexicales forment <strong>des</strong> éno~cés en se mmbhmt selon<br />

les règles dkne grammaire ori&a1e4 qui reste encore larsment h<br />

découvrir et h dkire malgré de nombreuses étu<strong>des</strong> parceuaires entreprises<br />

depuis quelques années.<br />

Venons-en à ce qui est à nos yeux l'essentiel, le plan de la verbalisation<br />

où la tâF' présente la plupart <strong>des</strong> caractéristiques que l'on<br />

renwntre dans une langue audio-voeale :<br />

- eue peut situer ses énoncés dans un temps pr&is, dans un espace<br />

détermin6 et les réf6rer aux trois actants fondamentawr de la commmication<br />

(nos pronoms personnels) ;<br />

- elle possède un système complexe verb&ant la quantittz, l'intensité,<br />

h comparaison, Ia désipation ;<br />

- elle peut modaliser son discours selon le double: paradipe <strong>des</strong> modalités<br />

phrastiques et logiques, c'est-&-dire eprher i'ordre, i'interrogation,<br />

la negation, le doute, la certitude, l'évidence, Pabsurditd..<br />

Gr$ce à tous ces procédés fonctionne-ls et en utiLisant <strong>des</strong> unités<br />

à sipsi& abstraits, la LSF nous semble donc atteindre, comme<br />

toutes les langues répertoriées, à la verb~sation authentique <strong>des</strong><br />

opérations intellectuelles fondamentales qu'une langue autorise : elle<br />

permet de juger, d'arementer, de démontrer? de rater, de raisonner.<br />

Ajoutons cette Este <strong>des</strong> propriétés de la LSF un dernier arpment<br />

que l'un pourrait appeler « par les faits » : Pesstence même <strong>des</strong><br />

interprBtes et la nature de leur travail quotidien. Ce personnel est<br />

amené sans cesse à traduire en LSF non seulement les tznoncés les<br />

4. Tout au moins par rapport B la nBtre. Ceux qui dtnient que la LSP ait une movhvtaxe<br />

au même titre que les tangues naturelies s'appuient sur la prégnance du référent qui organiserait<br />

necessairement l'lononcd. II nous semble que seule une étude portant sur un nombre<br />

éle& de langues gestuelles, @lpapXquement très étoigncfes, permettrait d'aboutir B une<br />

conclusion certaine avant d'affirmer que c'est fe contexte situatiannel qui explique systématiquement<br />

ta combinatoire <strong>des</strong> unith.


plus courants du français mais aussi et surtout certains emplois<br />

parmi les plus complexes de notre langue : la langue de la justice, de<br />

la médecine, <strong>des</strong> communications savantes dans les congrès ... Si cet<br />

outil ne présentait pas avec les langues naturelles au moins un<br />

nombre élevé de traits communs, s'il n'était qu'une pantomime enracinée<br />

dans le référent, cette activité de traduction, avec sa prkision<br />

et ses nuances, serait-elle possible ?<br />

IL NOUS SEMBLE DONC RAISONNABLE DE CONCEVOIR LA UF<br />

COMNE LE MOYEN DE COMMUNICATION SPECIFIQUE D'UNE COMMU-<br />

NAUTE LUI PERMEïTANT DE VERBALISER TOUT L'UNIVERS PHYSIQUE<br />

ET IDEEL CONCEVABLE PAR DES ENONCES CONSTRUlTS ET DANS DES<br />

ACTES DE PAROLE PERTINENTS, ET QUE L'ON PUISSE DONC, SANS<br />

ABUS DE LANGAGE, PARLER DE LA PAROLE DES SOURDS QUI SIGNENT<br />

ET DE BILINGUISME POUR LES LOCUTEURS CAPABLES DE S'EXPRIMER<br />

DANS LES DEUX CODES. DOTER LE JEUNE ENFANT SOURD D'UN OU-<br />

TIL AUSSI PERFO- N'FEZ PAS DEmmR NI SUR LE PLAN EDU-<br />

CATXF Ni SUR LE PLAN HUMAIN.<br />

Un trait cependant distingue nettement la LSF d'une langue<br />

comme la nôtre, trait tout à fait secondaire et mineur pour les linguistes<br />

mais essentiel pour les pédagogues : l'existence d'une forme<br />

écrite <strong>des</strong> langues gestuelles. Le fait que les chérèmes ne correspondent<br />

pas à la seconde articulation, au sens habituel du terme, explique<br />

sans doute la difficulté (et peut-être l'impossibilité) que l'on<br />

rencontre à imaginer pour la LSF une écriture de type alphabétique.<br />

<strong>Les</strong> tentatives connues ce jour sont plutôt <strong>des</strong> « transcriptions P,<br />

car les chérèmes ne correspondent pas aux phonèmes <strong>des</strong> langues<br />

audio-vocales mais aux traits distinctifs qui n'ont pas d'organisation<br />

linéaire. Ces transcriptions sont donc souvent complexes car elles ne<br />

peuvent pas faire autre chose, même les plus récentes, qu'offrir une<br />

<strong>des</strong>cription <strong>des</strong> éléments pertinents <strong>des</strong> signes, éléments dont le<br />

nombre a tendance à s'agrandir dangereusement quand on affine<br />

l'analyse. Utiles pour les spécialistes, elles sont d'un piètre économie<br />

par rapport à nos systèmes scripturaux. Ii semble bien qu'une écriture<br />

idéographique correspondrait plus au « génie » <strong>des</strong> langues signées,<br />

mais l'économie pour l'apprenti lecteur n'en serait guère<br />

améliorée.


Ahsi, la LSF présente les caractères cdturels, et les limites, <strong>des</strong><br />

langues natuream sans écritures : ses manifestations üttérakes @O&-<br />

sie et thégtre sufiout) sont vouées & Mphémère si on ne les enregistre<br />

pas, elle-même se transmet d'individu à individu, non plus de<br />

bouche à oreiile? mais de « main oeil W. Si la parole que pennet la<br />

FXF ne nous paraît pas inférieure en effiacité à celle du français, en<br />

revanche, dans le projet d'une &ducation bhodale, l'absence d'une<br />

éaiture place l'un <strong>des</strong> deux co<strong>des</strong> en position de faiblesse par rapport<br />

à l'autre,<br />

22. Que l'on considère les langues comme moyen par excellence<br />

de la cornunication humahe, facteur de h constitution du moi et<br />

de t'insertion dans une communaut& outil prodigiem de conwptuasation<br />

et de raisonnement, cadre kemplapble de l'expression de soi<br />

et du monde, ou qu'on les considère comme objet d'étude de h<br />

science lingistique, un principe demeure clair : il n'y a pas de différence<br />

entre les langues, toutes sont &gales en dignité, en valeur, en<br />

richesse. Mais cette parité s'dvanouit dès que l'on prend en compte<br />

leur r81e au sein de la communauté générale <strong>des</strong> hommes et qu'an<br />

les compare à l'aune de crithres sociaux, culturels et politiques. Dans<br />

I'clconomie internationale <strong>des</strong> khanges linguistiques, dans l'appréciation<br />

de la valeur et de I'importance <strong>des</strong> diverses cdtures actuelles ou<br />

passées, on ne peut mettre par exemple sur le même pied d"f:g&t6<br />

une langue prestigeuse, riche d'une littérature plus que millenaire,<br />

couvrant une aire géographique souvent hportante (le chinois, l'anglais,<br />

le latin ...) et le parler d'une peuplade amazonienne forte de<br />

deux à trois mille personnes.<br />

Pour de multiples raisons (nombre de locuteurs, puissance économique<br />

et pofitique, ancienneté, r61e culturel ...) on doit bien reconnaître<br />

une hiearchie <strong>des</strong> langues, prolongée d'aailturs, au sein de<br />

chaque systeme, par une hi4rarchie <strong>des</strong> diseours (le choix <strong>des</strong> langues<br />

vivantes et mortes dans le second degré illustre bien cette situation).<br />

Certes, depuis quelques amées, les langues r6gon<strong>des</strong> reprennent<br />

vie et auront peut-être droit de cité un jour à l'école. Mais qu'elles<br />

soient <strong>des</strong> gran<strong>des</strong> langues de civgsation ou <strong>des</strong> idiomes régionam


plus mo<strong>des</strong>tes, toutes les langues dont s'occupe 1'6cole offrent un<br />

trait commun : elles possedent une kriture. Dans nos sociétés teehnolo&ques<br />

modernes, où la ckcdation et le stockage <strong>des</strong> informations<br />

tendent à prendre la première place de toutes les activith de<br />

mmmuni-ttion, d'&change et de création, l'&iture, cette « mémoire<br />

du mande » regne en mattresse et pour lon@emps encore sans doute.<br />

<strong>Les</strong> media modernes sont loin d'avoir déebnd la « galaxie Gutenberg<br />

», cePtahs pronostiquent même qu'ils la renforceront. Sans &riture,<br />

une langue a peu de chances de jouer un rble important dans<br />

l'activité IllteiletueBe et konomique d'un pays moderne ; on le voit<br />

bien à propos <strong>des</strong> jeunes &ats du Tiers Monde, indépendants depuis<br />

quelques années, où les idiomes vernacdaires loam promus au rang<br />

de langues oEcieUes se dotent d'abord d'une ecriture. Faute de cela,<br />

leur statut social les re16gue au niveau de parlers plus ou moins archdques,<br />

tout juste propra à maintenk les khanges de communaut&<br />

horitaires ou mw@dw.<br />

Non seulement l'écriture permet la facilite et la permanence <strong>des</strong><br />

échanges Iguistiques, universase la communication <strong>des</strong> idées et<br />

assure leur rayonnement par le biais de la Gttérature (au sens large<br />

du terme : livre, presse, etc,), mais encore et surtout, elle transforme<br />

à la fois nos façons de penser et notre pouvoir d'action sur le réel.<br />

C'est ce que résume bien un auteur comme E. Genouvrier quand il<br />

&rit (Orâmmake pour enseigner le français, Tome 1) :<br />

« De nos cdturm or<strong>des</strong>, il ne nous reste plus que <strong>des</strong> coins de<br />

paysage,,. Pour le reste, P&itwe a tout chambodd, réorganise, invente,<br />

de nos fapns de penser, puisees dans la presse ou à l'ble, à<br />

nos façons de batir, de vivre en famae, de nous distraire ou de travailler<br />

... Parce qu'elle fut et demeure un immense lieu de travail,<br />

l'écriture occidentale a edantts <strong>des</strong> <strong>sciences</strong>, <strong>des</strong> techniques et <strong>des</strong><br />

idées qui nous mbnent, Jamais la parole n'eeQt &té propre auus: mêmes<br />

usages : comme le montre la vie radidement autre qui est celle <strong>des</strong><br />

cultures orales. Pow la même raison, Sartre vle&sant disait que la<br />

ph2osophie s'éloipait de lui (il devenait aveugle), Merleau-Ponty<br />

constatait qu'il pensait ce qu'il écrivait (et non Pinverse) : récriture<br />

ne fie pas un cantenu préedstant, elle Iltstaure quelque chose de<br />

neuf. »


On ne s'étonnera donc pas du mouvement actuel qui s'amorce<br />

dans la pédagogie du français. Après plusieurs dkennies passées<br />

sous le mot d'ordre «priorité à l'oral », on assiste ii un retour en<br />

force de l'écrit, trop délaissb pour ne pas dire sacrifié. Dans l'bducation<br />

<strong>des</strong> déficients auditifs, les praticiens de la métho<strong>des</strong> verbotonde<br />

eux-memes révisent leur position et se rendent compte que la<br />

recherche acharnée de la qualité phonétique de la parole a trop affecté<br />

l'objectif pédagogique de l'accks à la langue écrite.<br />

P. Ricoeur, dans « Evénement et sens dans le discours », rappelle<br />

que i'kriture fixe la parole en la soustrayant A la disparition,<br />

l'ouvre sur un monde qui l'arrache à la seule situation de dialogue et<br />

à la simple intentionnalité du locuteur, lui donne enfin une audience<br />

illimitée. Ces fonctions, la LSF, langue orale, ne les assure pas, ou<br />

pas au même degré.<br />

Fourrait-on concevoir une scolarisation qui ferait I'impasse de<br />

l'écrit, de la trace &rite, de la structuration <strong>des</strong> idées et de leur verbalisation<br />

par l'écrit ? Malgré les moyens audio-visuels mis actuellement<br />

il la disposition <strong>des</strong> sourds, on sait bien qu'un individu privé de<br />

l'écrit n'aura que médiocrement accès à l'information, au savoir, au<br />

mouvement <strong>des</strong> faits et <strong>des</strong> idées de son temps (que I'on songe par<br />

exemple au rôle du Braille pour les aveugies). D'ailleurs, la personnes<br />

sourde qui utilise un téléphone adapté ou un ordinateur, qui<br />

demande le sous-titrage <strong>des</strong> films ou <strong>des</strong> émissions téltsvisées, qui<br />

milite dans une association et publie une revue, cette personne se<br />

sert quotidiennement de l'écrit, et cet écrit est nécessairement Pt'criture<br />

du français. L'EXISTENCE DE L'ECR~]. FONDE POUR LA LANGUE!<br />

FRANÇAISE UN MPEMmF DE PRIMAUTE.<br />

Dans cette perspective, la maîtrise de la langue française parlée<br />

et écrite est un droit imprescriptible qui ne saurait être refusé aux<br />

sourds. Si l'acquisition de la parole (la démutisation) exige beaucoup<br />

de travail, elle permet cependant, quand elle est bien menée, d'atteindre<br />

un niveau d'intelligibilité utilisable - ce qui n'implique pas<br />

pour autant que la situation de dialogue ou de réception de la langue<br />

parlée soit une situation confortable pour le déficient auditif ni pour<br />

son interlocuteur. Mais l'objectif le plus important, et le plus ardu,


demeure la maîtrise du système du français, sans lequel il ne peut y<br />

avoir ni lecture véritable, ni compréhension fine, ni utgsation de la<br />

fonction instrumentale du langage.<br />

La primauté du franpis ne sipifie pas pour autant Yexdusion<br />

de la LSF, D'autant plus que la fidklité envers une langue ne dépend<br />

pas seulement de sa notoriété, de son hportance ou de son prestige.<br />

Bien d'autres critkres, d'ordre agfecttif et pratique, entrent en jeu<br />

pour le locuteur et sont kminemment respectables. Il faut, pour bien<br />

saisir l'attachement d'une communauté à son parler, essayer de quitter<br />

le point de vue de Sirius et entrer & I'intgrieur du probIGme, comprendre<br />

les raisons de ceux qui le parlent et surtout - dans ce cas<br />

particulier - de ceux qui rapprennent, c'est-à-dire apprkier la<br />

double valeur de I'expression « langue maternefie » la fois héritage<br />

d'un bien #autant plus prkiem qu'il a été longemps dépréxié et<br />

manifestation première de lknfmt comme être communiquant, C'est<br />

alors un tout autre systarne de valeurs qui en justEe la ntkessité.<br />

Si la nature du langage, comme nous l'avons vu, pose de redoutables<br />

problames de définition, a fortiori celle de «langue maternefie<br />

», expression investie de tout un arriZSre plan affectif et idéologique,<br />

ne va pas de soi. <strong>Les</strong> conceptions la encore peuvent être fort<br />

dIff6rentes selon que I'on privacçgîe la crhronologie <strong>des</strong> événements<br />

(c'est alors le premier systbme de communication codée utilisé par le<br />

petit enfant), le mode &héritage (il s'agit cette fois de la transmission<br />

de la langue maternelle <strong>des</strong> parents, ce qui exciut de la d6finition les<br />

variantes de la langue initiale transdses par <strong>des</strong> sous-groupes ethnogaphiques,<br />

sociaux ou professionnels, comme les patois, les argots<br />

et les jargons), le mode d'appropriation par le sujet (qui sera déveluppé<br />

dans le point sulvmt), ou d'autres critères comme le référent<br />

culturel Itnpliqué par tout langage particulier, la tradition historique,<br />

etc.<br />

S'il est vrai que, le plus souvent, la LSF a été et est encore acquise<br />

par le jeune enfant aupri3s de ses abés, au sein <strong>des</strong> instituts notamment,<br />

la transmission que l'on pourrait appeler « classique » par<br />

la famille, ne constitue pas lkxaption, soit dans les ménages de


sourds soit auprès <strong>des</strong> parents entendants qui ont déEbérément opté<br />

pour ce mode de cornunication Stide.<br />

Répétons une fois de plus que notre objectif nkst pas d'essayer<br />

d'apporter <strong>des</strong> réponses défstives à <strong>des</strong> questions d'ordre théorique<br />

ou ph3osophique, mais de subordonner notre analyse à Phpératif de<br />

I'eff"icacit.4 edueative. Nous allons tenter de montrer maintenant, à la<br />

lumihre <strong>des</strong> domées psycho-hpistiques de notre temps, que la précocité<br />

d'une communication codée est une urgence dans le déve1up<br />

p e m psycho-&fatif et hteuwtuel de I'enfant et que si cette<br />

prêcocité ne peut 6tre respectée <strong>des</strong> dommages kréparabfs se produisent<br />

dans l'ensemble <strong>des</strong> processus qui gén&rent un sujet parlant.<br />

En ce sens, 3 ne semble pas outrancier d'utsser L'eqression consacrée<br />

« lange maternelte », sans vouloir lui faire dire plus ou autre<br />

chose que ce que nous venons d'indiquer, pour parler de la LSF<br />

comme premier moyen pour Penfant sourd de s'errprher par le langage<br />

et de comprendre celui d'autrui.<br />

23, Il y a de nombreuses causes à la crise de lkragsme dvoquée<br />

au début de cet article, mais la principale a 6tC bien ana4ysée grilce<br />

aux résuftats <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> contemporahes de la psycho-hguistique.<br />

Un hmense et passionnant champ de recherches s'est ouvert, depuis<br />

quelques années, sur les processus dkcquisition du langage, et sinp<br />

fièrement dans les premières annkes de la vie. Ici encore, If ne s'agit<br />

pas de dresser un catalogue de toutes les conceptions nouvelles de la<br />

ge"étique linguistique qui ont, à bien <strong>des</strong> égards, bouleversé la vision<br />

antérieure que l'on avait du dkveluppement du fangage (une bonne<br />

synthèse de ce travaux apparaît, appgquée au domaine de la surdité,<br />

dans la thèse de D. Bouvet : « La parole de l'enfant sourd B).<br />

On peut en shématiser ahsi les premières conclusions :<br />

- Capprentissage de la langue ne demarre pas à partir du « premier<br />

mot » mais s'inscrit dans un prmessss constant et interactif<br />

m&re-enfant instawé dès la naissance. J. Cosnier propose pour désigner<br />

ce phénomène te terme d'kpigenese interactionnefie dé-finie<br />

comme « le processus ontogdné-tique du phdnotype comportemental<br />

communicationnel» qui « se fait par une série d'instructions réci-


proques permettant 1'6volution <strong>des</strong> compétences infantiles et maternelles<br />

» (« Epigenèse interactionnelle, communication et langage » in<br />

Bulletin d'Audiophonologie no 2-3-1982).<br />

- « L'enfant est un être de dialogue » dès le dbbut, et il n'y a pas<br />

de système linguistique futur qui ne s'enracine dans cette communication<br />

primitive. « Le langage ne se développe pas sur <strong>des</strong> bases protophonologiques<br />

ou protomt~ques, mais comme une extension<br />

sp&ialisée et conventionneile de l'interaction coopérative, et cette<br />

extension va former un systeme sémiotique dont une partie sera<br />

(éventueliement) verbale » (J. Cosnier, op. cit).<br />

- Toute privation, tout manque dans ce processus entraîne <strong>des</strong><br />

lacunes sans doute irréversibles, aussi bien sur le plan de la structuration<br />

du système que sur celui de 17ut&ation pragmatique de ses<br />

formes.<br />

Ainsi la notion de « langues maternelles » se trouve-t-elle fondée<br />

sur un choix de critères objectifs, non pas nécessairement comme<br />

langue de la mère (<strong>des</strong> parents) - ce qui est tout de même la situation<br />

la plus fréquente - mais comme Zangue premiére, c'est-à-dire<br />

constitution d'un outil symbolique et relationnel qui seul sera en mesure<br />

de produire un langage codé authentique. En apprenant sa<br />

« langue maternelle », le jeune enfant apprend en même temps les<br />

formes du code, l'usage du code, les significations auxquelles il réfère,<br />

les opérations mentales qu'il permet, il prend conscience à la<br />

fois de ce que dit le langage et de ce à quoi il sert.<br />

Or, en toute objectivitb, 2 apparaît bien que, malgr6 les apports<br />

non négligeables de l'appareaage, de l'éducation précoce, de l'éducation<br />

auditive, le jeune enfant sourd profond ne peut avoir un accès<br />

normal et rapide à ce processus dans la seule perspective d'une<br />

langue audio-vocale. La dtSfatLfance hsumontable du canal auditif<br />

oblige à <strong>des</strong> palliatifs, à <strong>des</strong> détours, à <strong>des</strong> stratégies qui toutes, malgré<br />

leurs efforts, aboutissent au même rbsultat : les acquisitions<br />

linguistiques et langagières se font avec un retard et un dysfonctionnement<br />

hautement prbjudiciable à l'instauration d'une activité de<br />

parole digne de ce nom.


Le désarroi <strong>des</strong> parents devant la dificulte à établir une mmmunication<br />

qui ne soit pas seulement infra-verbale, avec les troubles<br />

p-ychologiques qui en sont une <strong>des</strong> conséquences, l'hpossibZt6 de<br />

l'enfant à s'approprier le code pour répondre ces soKcitations ne<br />

font qu'aggraver ces déseqabres : le feed-back dialo$que (c'est-àdire<br />

l'auto-adaptation immtsdiate, aitemative et rkursive, du lueuteur<br />

aux réponses verbales et comportementales de l'interlwutew)<br />

nécessaire à l'apprentissage ne s'installe pas, et les retomwes affectives,<br />

linguistiques et intellectuelles de ce dysfonctionnement ont tsté<br />

maintes fois analysées.<br />

Le retard et l'anormalité du prmessus vont avoir <strong>des</strong> effets d'autant<br />

plus graves qu'ils ne sont guère rattrapables dans le temps : on<br />

ne fait pas en classe à huit ans ce qui se fait sur les genoux de sa<br />

mère à deux ans ! <strong>Les</strong> deficits ne sont pas gommés ultérieurement,<br />

mais ils se cumdent, et on n'en connait que trop les rksultats sur le<br />

plan luiguistique, scolaire et plus géné-rdement humain.<br />

Ainsi, la ntscessité d'une communication visuo-gestuelle skpose<br />

dans toute sa force, car elle seule est capable de restaurer dans leur<br />

authenticité et dans leur chronologie les étapes du développement<br />

luiguistique, LWSAGE DE LA UF SE TROUVE! FOWE DANS rJN fhtl-<br />

PERA~F DE PNQ . Pour avoir oubli4 cela, on se focalise sur la<br />

déficience, orgrnique, objective, qui relève de la médecine, de la prothèse<br />

et de la rééducation et on accroît du coup le handicap, phhnomène<br />

social, fonction du degré de rejet que présente la société à l'encontre<br />

d'une déficience. La LSF est une expression du pouvoir inventif<br />

de l'home. Le besoin de communiquer provoque la crhtion de<br />

l'outil : ne pouvant &tre acoustique, ii devient visuel. Lutter contre la<br />

nature revient ti mutiler l'enfant et à ajouter au malheur innocent.<br />

La méthode orale préconisée en 1880 par le congrès de Milan<br />

était appliquée dans <strong>des</strong> conditions qui nous paraissent aujourd'hui<br />

paradoxales : début de l'éducation aprh l%ge &acquisition du langage,<br />

sans ampuication acoustique et en milieu swegatrf. Malgré<br />

d'importantes améEorations ultérieures, l'oralisme mal compris a<br />

contribué 2 margkaliser les sourds puisqu'üs ne peuvent guère participer<br />

& la culture dominante.


Ces arguments d'ordre psycho-hguistique ne sont pas les seuls<br />

que les défenseurs de la LSF avancent : ils se réfèrent également la<br />

notion d'héritage culturel, selon laquelle la langue <strong>des</strong> sourds, moyen<br />

de communication d'une partie <strong>des</strong> Français, porteuse d'une culture<br />

spkifique, ferait alors partie du patrimoine culturel de notre pays et<br />

meterait en cela respect, protection et développement. Discuter<br />

dans le détail le bien fondé de cette position entraînerait à <strong>des</strong> développements<br />

trop longs pour trouver ici leur place. Il faut avouer<br />

cependant que ce type d'argumentation est surtout celui <strong>des</strong> adultes<br />

sourds (de la majoritC d'entre eux, mais non de tous) ; pour les parents<br />

entendants, c'est surtout l'argument psycho-linguistique qui<br />

prime, car la LSF leur donne enfin le moyen d'établir avec leur enfant<br />

une communication précoce et rCelle (en ce sens que non seulement<br />

ils peuvent se faire comprendre, mais qu'ils reçoivent de leur<br />

enfant <strong>des</strong> t5noncés construits et htefligibfes). On voit alors jouer<br />

pleinement cette divergence <strong>des</strong> analyses sous-jacentes aux choix<br />

communicationneb : la primauté du français repose surtout sur <strong>des</strong><br />

raisons <strong>sociales</strong> et culturek, ia priorité de la LSF sur <strong>des</strong> raisons<br />

psycho-hg~istiques ; LA CONCILWmON DES DEUX WEMnm N'EST<br />

PAS EVïDENTE POUR TOUS et ils peuvent longuement se contrebaiancer<br />

à I'intdrieur de chacun de nous.<br />

2.4. Ile plus en plus s'impose de nos jours l'idée que l'apprentissage<br />

du langage par l'enfant sourd ne saurait être le fait <strong>des</strong> seuls<br />

professionnels ; parents et enseignants doivent participer à cette<br />

longue entreprise dans un esprit d'étroite collaboration, mais chacun<br />

selon ses modalités propres. <strong>Les</strong> rB1es respectifs se conjuguent mais<br />

ne se confondent pas. C'est alors que surgit toute une série de diffidt&<br />

nées de I"mbigujit.6 meme de fa notion de «langue maternelle<br />

» et surtout de sa double dimension: première forme de<br />

communication 1angagiBre et héritage de la langue <strong>des</strong> adultes.<br />

On s'aperçoit rapidement que ?acquisition du français comme de<br />

ia LSF ne va pas sans poser quelques problhes épineux.<br />

Le sumBs de l'option oraliste necessite la conjonction de plusieurs<br />

facteurs : les potentialités intellectuelles de l'enfant, la préco-


cite de la rééducation, la qu&ation <strong>des</strong> professionnels, le soutien<br />

constant <strong>des</strong> parents. Un tel faisceau d'esgence a fait dire il certains,<br />

exagérément, que seule une éducation pr(rceptode pouvait rtsussir<br />

un tel miracle ! b propos est trop entier pour être totdement juste<br />

mais contient une part de vt4;ritk. tes r6ussites les plus spwtacdakes<br />

de l'oralisme doivent souvent beaucoup à une situatron plus ou moins<br />

proche du prtrceptorat (qui fut, il faut le rappeler, fa premibre forme<br />

historique de l'éducation <strong>des</strong> sourds) : certaines fa<strong>des</strong> profondément<br />

bpliqulses dans I'objwt2 orafiste, disposant du temps ntrcessaire<br />

et d'une certaine efEcacitb pédago@que intuitive portent,<br />

comme on le dit parfois, leur enfant « il bout de bras ». Une attention<br />

de chaque moment, un exercice pemanent et exigeant de la langue<br />

française finit le plus souvent par donner d'heweux resultats : ces parents<br />

se transfoment en prkepteurs de leur enfant. XI existe aussi un<br />

préceptorat de certains orthopbonistes où l'enfant, en réeducation<br />

indiGdueae quasieonstante, soutenu par <strong>des</strong> parents eux aussi tres<br />

aidants, bénéficie de k mêrrne quaüté et surtout de la meme densit6<br />

d'attention, d'efforts et de soEcitation à la parole.<br />

Ces cas de figure ne sont pas à dkrier systématiquement et l'on<br />

peut s'inspirer de certaines de Ieurs démarches, de leurs trouvailles<br />

p6dagogiques9 de Ieurs stratéges d'enseieement. Nais la situation<br />

la plus frtsquente et la plus gdnérale ne peut reproduire ces conditions<br />

opth<strong>des</strong> ou id6<strong>des</strong> : tous les parents ne sont pas aptes ou disponibles<br />

pour se transformer en précepteurs, et la situation de classe<br />

est une situation @enseignement collectif, hittse ntrcessahent<br />

dans le temps. "est là que l'option oraliste touche souvent à ses limites<br />

et que professionnels et parents se tournent ainsi vers l'utilisation<br />

de moyens de communication wsuo-gestuels.<br />

Mais la grade majorit6 <strong>des</strong> enfants d6ficients audit* ne naît<br />

pas dans <strong>des</strong> es sour<strong>des</strong> : il faut abrs évoquer toutes les difficultés<br />

qui peuvent apparaître de Putirisation d'un langage gestuel<br />

dans un milieu entendant. Certes, la découverte de la LSF par les parents<br />

est pour eux une solution souvent salvatrice, le moyen enfin de<br />

communiquer avec leur enfant, avec tous les effets bénéfiques que<br />

l'on peut imaginer : l'usage d'un langage commun dès le dt4;but de la<br />

vie représente un formidable lien relationnel, affectif, qui fait effet


de miracle. Mais une langue est aussi plus que cela : en lwant leur<br />

langue, les parents transmettent un système complexe de significations,<br />

de règles, de concepts, véritable


l'institution scolaire, creuset en fait de la communauté sourde, car on<br />

n'apprend rtleilement une langue que dans un milieu qui la parle<br />

vraiment. Dans la mesure où il y a là renversement d'une tendance<br />

rkente vers l'ouverture et l'intégration, il faut en prendre<br />

conscience.<br />

On touche du doigt le paradoxe où conduit la revendication de la<br />

: les entendants qui veulent léguer la leur (le<br />

français) n'en ont pas toujours les moyens, ceux qui se donnent les<br />

moyens de communiquer n'ont qu'un héritage bien mince A transmettre<br />

! HB~AGE<br />

ET UTILISATION PMCOCE NE S7m0NISEm<br />

PAS MCKI)SATmENT.<br />

Un autre paradoxe tient à X"évo1ution de la scolarisation <strong>des</strong> déficients<br />

auditifs, marquée par un effacement progressif de l'internat.<br />

Depuis le congr&s de Milan (1880) jusqu'au milieu de ce sihle, période<br />

durant laquelle l'usage de la LSF se trouvait officiellement<br />

prohibt., l'enseignement oralo-gaphique reposait en fait sur un bilinguisme<br />

réel mais non reconnu et surtout non exploité par les enseignants.<br />

<strong>Les</strong> instituts étaient avant tout <strong>des</strong> internats, rt.unissant une<br />

population dant <strong>des</strong> jeunes enfants Qusqu'am grands adolescents de<br />

vingt ans et plus. Ces élhves sourds vivaient donc dans une v6ritable<br />

communauté sourde dont le moyen communieationnel naturel, en<br />

dehors de la classe, était la UF. Ainsi l'héritage hguistique et culturel<br />

se transmettait normalement et les jeunes possédaient un langage<br />

premier, appris dans les conditions habituelies de i'échange et du<br />

dialogue en situation, qui leur permettait d'acquérir tous les concepts<br />

auxquels les entendants aecgdent par le biais du français. Sans quqs<br />

s'en rendissent compte, les enseignants avaient d'une certaine façon<br />

leur t$che facilitée dans l'enseipement du français, non point par<br />

l'utitisation <strong>des</strong> signes (puisqu'als n'en faisaient pas) mais par le fait<br />

qu'il s9établlssait de nombreuses correspondances entre la langue découverte<br />

et le langage déjà connu, au niveau conceptuel tout au<br />

moins. <strong>Les</strong> enfants hteugents pouvaient faire cette traduction inconsciente<br />

en partant d'une compréhension plus ou moins élaborée,<br />

mais d&jà en place, pour aller vers les structures de la langue seconde.<br />

<strong>Les</strong> élèves étaient rtCellement bilingues, sachant communiquer<br />

avec Ieurs semblables et, peu il peu, s'exprimer dans la langue de


leurs interlocuteurs entendants. Or, aujourd'hui, le bilinguisme est de<br />

plus en plus prdné alors qu'il a quasiment disparu <strong>des</strong> écoles !<br />

Deux raisons principales expliquent cette situation paradoxale :<br />

- les internats ont perdu beaucoup de leur importance : les parents<br />

refusent souvent une telle séparation, l'existence <strong>des</strong> familles d'accueil<br />

et l'extension du ramassage scolaire ont fait le reste ; partant,<br />

la vie communautaire s'est étiolée et, avec elle, son mode de communication<br />

spécifique ;<br />

- élevés donc au sein de leur famille, les enfants sourds de parents<br />

entendants, dans un environnement à peu près exclusivement ora-<br />

Liste, sollicités plus ou moins fortement à parler avec leur voix,<br />

ignorent souvent la LSF (ou ne l'utilisent pas si leurs interlocuteurs<br />

l'ignorent).<br />

Ainsi en 1985, dans quelques internats subsistants, un embryon<br />

de pratique visuo-gestuelle tente de se maintenir et de survivre. Mais<br />

fatalement cette communication demeure fruste, ressemble de moins<br />

à moins à la LSF, s'appauvrit dans son lexique et sa grammaire, cantonnée<br />

qu'elle se trouve à quelques échanges purement utilitaires et<br />

simplistes, et ne peut donc remplir les fonctions d'un langage riche et<br />

nuancé. L'enseignement du français ne reposant plus sur aucun langage<br />

premier porteur de significations et de structures, devient encore<br />

plus difficile, débouchant sur la crise qui sévit actuellement. A<br />

ceux qui songent à réintroduire la pratique de la LSF au sein de<br />

176cole, il faut cependant rappeler que cette solution ne pourra pas<br />

gommer les retards du développement hguistique et intellectuel si<br />

la communication gestuelle est à son tour enseignée comme une discipline<br />

scolaire sans connaître les processus indispensables d'une<br />

langue acquise naturellement dans la vie de tous les jours et à l'âge<br />

adéquat.<br />

Quoi qu'il en soit, voilà bien le second paradoxe de la situation<br />

pr6sente : QUAND LE BILINGUISME EXISTAIT, ON NE L'A PAS UTILISE ;<br />

hfAJNZNANT ON VOUDRAIT L'EXPLOITER, MAIS IL N'EXISTE PLUS.<br />

Toutes ces difficultés, toutes ces contradictions, pour graves<br />

qu'elles soient, ne semblent pas insurmontables et ne ruinent pas, de<br />

toute façon, les espoirs que l'on peut mettre dans l'usage <strong>des</strong> com-


munications signées. Sans anticiper sur le point no 4, on peut cependant<br />

tirer un premier enseignement au terme de cette étude sommaire<br />

: si l'on veut que la LSF reprenne sa juste place dans les<br />

établissements, si l'on veut que la faible compétence <strong>des</strong> parents entendant~<br />

soit rapidement relayée par la maîtrise de bons locuteurs<br />

gestuels, L'mRVENTION PWCOCE ET CONTINUE DES ADULTES<br />

SOURDS S'IMPOSE COMME LA SEULE SOLUTION ENVISAGWLE DANS<br />

L'OPTIQUE DU BILINGUISME.<br />

3. Avant d'envisager quelques propositions de réflexion et d'action<br />

susceptibles de réduire les difficultés énumérées précédemment,<br />

il est nécessaire de compléter ce tableau <strong>des</strong>criptif par l'analyse<br />

rapide de quelques autres moyens de communication auxquels les<br />

enseignants spécialisés peuvent avoir recours. La problématique générale<br />

de l'éducation <strong>des</strong> enfants sourds ne se réduit pas au face à<br />

face du français et de la LSF, il existe entre ces deux systemes <strong>des</strong><br />

techniques visuelles intermédiaires (et il faut bien insister sur le mot<br />

u technique » et non langages) qu'il faut prendre en considération<br />

car leur utilisation judicieuse peut se révéler d'un grand secours pour<br />

les parents et pour les maîtres et apporter une aide précieuse au dépassement<br />

<strong>des</strong> contradictions relevées jusqu'ici.<br />

3.1. Le langage parlé complété (LPC) ou Cued Speech est un<br />

complément manuel à la parole assurant la visualisation quasi-totale<br />

du français. Huit configurations de la main combinées & cinq positions<br />

sur la face et le cou permettent d'éliminer les sosies labiaux,<br />

donc de discriminer les phonèmes présentant le même mouvement<br />

et la même position <strong>des</strong> lèvres (par exemple dans <strong>des</strong> mots comme<br />

« pain », « main », « bain ») et, par là, de percevoir l'intéj~ralité du signifiant<br />

phonématique du message (le niveau si important de la prosodie<br />

n'est pas toujours intégralement conservé maheureusement).<br />

On comprendra ainsi que le LPC n'a aucune autonomie linguistique,<br />

c'est-&-dire qu'à lui tout sed il ne sert jamais à représenter une unité<br />

de quelque niveau que ce soit. Il assure certes une visualisation de la


parole, mais en accompagnant pas à pas celle-ci : pour appréhender<br />

la forme <strong>des</strong> énoncés le sujet doit synthétiser les informations visuelles<br />

de la lecture labiale et les indices visibles fournis par la main<br />

du locuteur. Le LPC est donc une technique visuo-gestuelle assurant<br />

la réception du français ; simplement les formes acoustiques de la<br />

parole impossibles à percevoir par le sujet sourd sont remplacées par<br />

<strong>des</strong> formes visuelles à deux composantes interdépendantes : lèvres et<br />

mains.<br />

Le LPC offre donc pour les parents et pour les enseignants <strong>des</strong><br />

avantages considérables :<br />

- <strong>Les</strong> informations provenant de la lecture labiale et de l'appareillage<br />

prothétique dbpassent rarement le taux de 50 % d'intelligibilité<br />

chez les sourds profonds. Encore s'agit-il de sujets bien entraînés<br />

à la labio-lecture et possédant une excellente connaissance de la<br />

langue permettant d'assurer la suppléance mentale nécessaire à ce<br />

type de déchiffrage (une forme est discriminée parmi d'autres possibles<br />

à partir de ce que le sujet sait du thème de l'énoncé, du vocabulaire<br />

du français et de ses constructions grammaticales). Cette<br />

compétence particulière, on le voit, ne peut être le fait de très jeunes<br />

enfants puisqu'elle présuppose en grande partie la connaissance de<br />

ce vers quoi tend justement l'éducation : la maîtrise de la langue !<br />

Avec l'aide du LPC, l'intelligibilité peut, dans le meilleur <strong>des</strong> cas, atteindre<br />

les 100 % et surtout l'outil peut être utilisé dès le tout début<br />

de la communication. En remplaçant les informations audibles par<br />

<strong>des</strong> informations visibles équivalentes on se ressitue, théoriquement,<br />

dans les conditions habituelles de l'acquisition du langage : en corrélant<br />

<strong>des</strong> tranches de signifiants à <strong>des</strong> objets, <strong>des</strong> situations, <strong>des</strong> procès,<br />

etc., le sujet sera à même de s'approprier le langage en donnant<br />

<strong>des</strong> significations à <strong>des</strong> structures.<br />

- Quand le processus réussit, on n'observe donc presque plus<br />

aucun retard dans l'acquisition de la langue française. <strong>Les</strong> mots<br />

grammaticaux (souvent monosyllabiques) si difficiles pour l'enfant<br />

déficient auditif et pourtant indispensables à la structuration de<br />

notre langue, sont connus, compris et réutilisés, la construction <strong>des</strong>


phrases kvitant ce chaos qu'offrent le plus souvent les énoncés <strong>des</strong><br />

tr&s jeunes sourds,<br />

- Enfin, et ce n'est pas le moindre de ses misrites, le LPC est relativement<br />

facile à apprendre par les adultes entendants, incomparablement<br />

plus facile qu'une langue étrang&re (à double titre : par son<br />

organisation propre et par le canal utilisé) telle que la LSF. Ii n'y a<br />

plus besoin ici de mkmoriser <strong>des</strong> muers d'unit& leiXicales, <strong>des</strong> centaines<br />

de règles et de s'efforcer à penser dans un système dif£érent<br />

du sien. On part d'un glément farnifier (le frangais) et il faut sedement<br />

se plier à une petite adaptation: prendre conscience de la<br />

forme phonique <strong>des</strong> knonds &mis. Selon les praticiens du LPC, une<br />

semaine suffit pour apprendre les gestes et un trimestre de pratique<br />

quotidienne permet de manier aisément le Cued Speech à la vitesse<br />

du debit de parole, Cette facifité &apprentissage et #utilisation<br />

donne à cette technique un avantage déterminant,<br />

Au demeurztnt, le LPC n'est pas une panacée et l'on connaît ses<br />

limites :<br />

- <strong>Les</strong> kinbmes visudsent surtout le niveau phonématique de la<br />

parole et toute la prosodie (rythme, mélodie, intonation) tellement<br />

importante dans la compréhension <strong>des</strong> premiers échanges bngaGers<br />

si souvent hpoeoristiques, n'est pas parfaitement rendue, Seuls les<br />

praticiens particufikrement exercks arrivent h communiquer les informations<br />

de la prosodie et à conserver toutes les expressions faciales<br />

qui les soucpent.<br />

- Le LPC favorise la dception <strong>des</strong> messages et Yintégration du<br />

système de notre langue, ce qui est déjà énorme, mais joue un r6Ie<br />

moins hportant sur les dBbuts de l'4mission de la parole chez Pen-<br />

fant sourd : tout le travail de démutisation et une grande partie du<br />

travail &orthophonie restent faire (le même reproche s'adresse a<br />

fortiori à toutes les communications visuelles, français signé ou LSF),<br />

- L'aide que le Cued Speech apporte à la lecture labiale peut<br />

avoir un effet pervers en dimhuant parfois l'attention du sujet à la<br />

labio-lecture seule. Or, devenu adulte, le jeune sourd vivra dans un<br />

monde qui ne pratiquera pas le LPC et la lecture sur les lavres restera<br />

pour lui le moyen essentiel pour comprendre la parole d'autrui.


Selon certains, le LPC constitue la meilleure voie d'accès possible<br />

la lecture labiale ; pour d'autres, il faut amener l'enfant à se priver<br />

progressivement de cette aide et accroître donc l'entraînement h la<br />

labio-lecture seule.<br />

- On signale enfin quelques cas d'échecs, dans le cadre de l'éducation<br />

précoce, les enfants n'ayant pas compris que la valeur <strong>des</strong> kinèmes<br />

n'existait qu'en relation avec les configurations labiales : pour<br />

eux, les gestes étaient devenus <strong>des</strong> signes, c'est-à-dire <strong>des</strong> unités signifiantes<br />

; à partir de cette erreur, le processus d'acquisition du système<br />

n'avait pu se développer normalement. On a noté parfois aussi<br />

<strong>des</strong> d3ficultés d'analyse visuelle fine chez certains sujets.<br />

Si l'on prend soin de ne pas oublier le travail, indispensable de<br />

toute façon et dans n'importe quelle solution choisie, d'acquisition et<br />

de perfectionnement de la parole et d'entrakement à la lecture labiale<br />

(sans oublier l'éducation auditive), on voit que les réserves que<br />

l'on peut 6mettre<br />

l'bgard du LPC ne pèsent guère face à ses mé-<br />

rites et à ses vertus aussi bien communicationnelles que pédagogiques.<br />

<strong>Les</strong> parents et les professionnels ont à leur disposition un<br />

outil efficace et simple pour améliorer et peut-être réussir l'acquisition<br />

du français : l'gtonnmt demeure que cette technique ait rencontré<br />

si peu de succès dans notre pays. Sans doute le contexte polémique<br />

dans lequel elle est apparue explique-t-21 un accueil aussi<br />

réservé, une audience aussi faible et la mise en doute radicale par<br />

certains de ses avantages :<br />

- Pour certains oralistes intransigeants, elle demeure irrémédiablement<br />

marquee du caractère rédhibitoire de la gestualité, donc elle<br />

sent de quelque manière le soufre.<br />

- Pour de nombrem partisans du bilinguisme, ces gestes qui véhiculent<br />

le message français ne peuvent que porter ombrage aux authentiques<br />

signes de la UF. Il y a B leurs yeux danger de confusion<br />

entre les véritables signifiants de leur langue et tous les moyens<br />

visuo-motems utilisés par la pédagogie spéciale : LPC, gestes de<br />

rappel, pantomime, stimulations corporelles de la méthode verbotonale,<br />

dactjrlologie, etc,


-De nombreux parents enfin, malgré les difficultés de l'entreprise,<br />

sont sans doute plus convaincus par les promesses ambitieuses<br />

de la LSF (fournir à l'enfant sourd une «langue maternelle » qui<br />

sera toujours pour lui le véhicule préférentiel de ses pensées et de<br />

ses sentiments) que par les considérations plus étriquées et plus<br />

« techniciennes » du LPC.<br />

On ne peut que regretter ces préventions dont le bien fondé<br />

reste il dtsmontrer. Xi faut que les oraiistes convaincus se persuadent<br />

que le LPC sert à visualiser la langue qu'ils veulent transmettre et<br />

enseigner, et que loin de porter atteinte à l'orthodoxie de leur doctrine,<br />

il s'y inscrit au contraire dans le doit fil. Quant aux adeptes du<br />

b~mkme, ils ne peuvent demander


tractions utiles pour i'andyse mais deux réalit& étroitement interdépendantes<br />

dans l'usage effectif de la langue ;<br />

- qu'il puisse exister une correspondance terme 2 terme entre les vocabulaires<br />

de deux langues différentes; la connaissance de<br />

quelques langues étrang&res, la pratique du theme et de la version<br />

prouvent abondamment le contraire.<br />

Dès qu'il quitte le domaine de quelques phrases, référant à <strong>des</strong><br />

objets ou à <strong>des</strong> procès concrets, l'utiüsateur du FS se trouve<br />

confronté à <strong>des</strong> difficultés hcontournabfes et se voit contraint, nécessairement,<br />

de faire de la traduction ; encore faut-il qu'il soit<br />

conscient de cette situation, qu'il sache dans quel sens il traduit (va-til<br />

privilégier un <strong>des</strong> deux systèmes, et lequel ? et pourquoi ?) qu'il se<br />

rende compte <strong>des</strong> probl&mes d'hterprétation de son message quand<br />

il opte pour le respect <strong>des</strong> signifiants ou au contraire <strong>des</strong> signifiés !<br />

La pratique du FS devient aiors un exercice de haute voltige où l'on<br />

n'est jamais trop sOr de la validité <strong>des</strong> choix opkrés en fonction du<br />

sens que f'on veut faire saisir à l'enfant.<br />

Quelques exemples rapi<strong>des</strong>, parmi <strong>des</strong> milliers possibles, illustreront<br />

f'hconfort d'une teiie entreprise :<br />

a) L'existence de termes spécifiquement français, n'ayant pas de<br />

signes


jeu de ; c'est un beau jour - il va à la gare ; il va bien ; il va écrire ;<br />

cela lui va bien - il habite tout près ; est-ce tout ? ; il ne comprend<br />

rien du tout ; il est resté tout bête ; ça fait combien en tout ?).<br />

On comprendra qu'il ne s'agit pas là de quelques tournures rares<br />

et recherchées, d'un sous-ensemble margind du vocabulaire français<br />

que l'on pourrait hrter dans un premier temps et qui n'hvdderait<br />

pas la tentative ; c'est au contraire au détour de chaque énoncé, ou<br />

presque, que l'on va se trouver confronté à ces délicats problèmes<br />

dont l'issue paraît si incertaine : ou bien l'on transcode tout, mot à<br />

mot (mot signe faudrait-il dire) et que va comprendre l'enfant devant<br />

ce qu'il ressentira comme un mhenage bizarre de ce qui est<br />

pour lui sa langue ? Ou bien on fait une authentique traduction,<br />

c'est-à-dire que l'on rend l'expression française par le ou les signes<br />

qui ont en LSF un sens équivalent, mais alors que reste-t-il de la<br />

forme spécifique <strong>des</strong> tournures de notre langue ? L'enfant comprendra<br />

certes la signification globale (et c'est beaucoup), mais il ne<br />

pourra pas pour autant saisir la


fants et la famille ou les éducateurs, de faire circuler du sens, même<br />

vaille que vaille, de permettre l'éciosion <strong>des</strong> premières manifestations<br />

langagieres de l'enfant sourd, mérite le respect et l'intérêt <strong>des</strong><br />

théoriciens. Peut-être ne faut-il pas tout exiger tout de suite et refuser<br />

droit de cité à un outil imparf&t sans doute mais susceptible de<br />

permettre la compréhension d'autrui, de se faire comprendre, de<br />

faire saisir intuitivement à l'enfant sourd ce que c'est que communiquer<br />

par le langage. L'essentiel dans un premier temps est peut-être<br />

là, dans la découverte de ce à quoi sert l'instrument avant même<br />

qu'on en utilise toutes les possibilités et qu'on en touche les limites.<br />

S'il faut d'abord installer la «fonction langage », l'appétence à la<br />

communication, la joie pour l'enfant sourd de s'exprimer en &tant<br />

compris, alors le FS, à côté <strong>des</strong> autres moyens, a toute sa place. On<br />

voit rnaf au nom de quelles raisons on refuserait <strong>des</strong> parents l'usage<br />

de cet outil qui fut pour eux la clé de l'entrée en communication avec<br />

leur enfant, le déblocage d'une situation de mutisme réciproque si<br />

atrocement dommageable. Quant aux enseignants, ils savent aussi<br />

que souvent la signification entici-re d'un message tient à un seul indice<br />

qui n'a pas été perçu ou compris : que cet indice soit fourni, et<br />

tout s'éclaire, le discours et l'échange peuvent continuer, On n'empêchera<br />

jamais un maître de se priver d'un tel moyen ! Devant la<br />

réalité multiforme et quotidienne <strong>des</strong> achoppements de l'intercommunication,<br />

on assiste souvent à une débâcle <strong>des</strong> constnietions inteilectualistes<br />

a priori ; tout fait usage : l'image, la pantomime,<br />

l'ecriture, l'utilisation <strong>des</strong> restes auditifs, les signes de nature diverse..<br />

. L'existence de la « communication totale » reflète cette recherche<br />

pragmatique de la communication à tout prix, malgré les<br />

beiles considérations <strong>des</strong> théories savantes et <strong>des</strong> systèmes.<br />

Certes, 3 ne s'agit pas de faire n'importe quoi, n'importe comment<br />

: l'enjeu est trop grave, aussi bien pour les parents que pour les<br />

maîtres (et pour les enfants en premier lieu !) mais il ne servirait à<br />

rien d'excommunier pour les meilleures raisons raisonnantes du<br />

monde un outil qui, dans la réalité <strong>des</strong> faits, au niveau le plus humble<br />

<strong>des</strong> situations familiales ou scolaires, rend souvent d'estimables services.<br />

LE FS DOIT ETRE UTILISE AVEC LUCIDm ET PRWENCE, MAIS


IL A SA PLACE DANS LA. PANOPLIE DES MOYENS UTILISABLES AVEC<br />

LES ENFANTS SOURDS.<br />

33.1 devient maintenant possible, B l'issue de ces rapi<strong>des</strong> analyses,<br />

de synthétiser en un petit tableau les caractères fondamentaux<br />

<strong>des</strong> quatres moyens de communication étudiés :<br />

Statut linguistique<br />

Fonctionnement<br />

Fonction Langue écriture autonome<br />

langage naturelle<br />

spécifique<br />

Français + + + +<br />

L E - " -<br />

FS ? - - - c5<br />

UF + ? ", +<br />

Une étude exhaustive devrait maintenant étudier tous les cas<br />

possibles de combinaisons pour discerner les (in)compatibilités, les<br />

avantages et les inconvénients. Car la réalité <strong>des</strong> pratiques correspond<br />

une sorte de continuum dont le schéma ci-<strong>des</strong>sous donnera<br />

une idée simplifiée mais assez complète :<br />

5. Dans son usage strict, le ES accompagne la paroie. Comme la LSF utilise moins de morphèmes<br />

que le français, le FS consiste le plus souvent à dire les mots grammaticaux et à<br />

signer les unités plus riches en lexèmes (verbes, noms, adjectifs, certains adverbes). Or, ce<br />

sont justement ces morphèmes courts qui posent le plus de problèmes aux enfants sourds.<br />

Une solution astucieuse, utilisée en Belgique (mais sans doute aussi ailleurs) consiste alors B<br />

réaliser en LPC les mots grammaticaux et à signer les autres. La conjonction ES + LPC<br />

atteint ainsi B une autonomie presque totale et offre plus de souplesse, les signes n'étant pas<br />

obligés de i< coller » systématiquement à la parole.


Français dominant 1 oralisme<br />

Français dominant 2 oralisme + LPC<br />

Français dominant 3 ordisme + FS<br />

Français dominant 4 orfime + FS + LPC<br />

Bilinguisme 5 françajs + LSF<br />

Bilinguisme 6 français + LSF + FS<br />

Bilinguisme 7 français + LSF + FS + LPC<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-laure)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

(avec bien sûr éducation auditive<br />

et labio-lecture)<br />

Une telle entreprise dépasserait le cadre de ce rapport. Seule<br />

d'aiileurs une étude détaiUée <strong>des</strong> diverses réalisations effectives, de<br />

leurs difficultés, de leur évolution et de leurs succès permettrait<br />

d'avancer quelques conclusions, toujours révisables d'ailleurs. Ce travail<br />

nécessiterait une longue enquête sur le terrain, qu'il faudra bien<br />

mener un jour si l'on veut à la fois se pourvoir de moyens d'évaluation<br />

<strong>des</strong> solutions éducatives et argumenter plus sur <strong>des</strong> faits que sur<br />

<strong>des</strong> théories. Le BIAP s'était engagé dans cette voie il y a quelques<br />

années ; il faut espérer que les difficultés matérielles qui ont momentanément<br />

gelé ce projet soient un jour levées et que cette analyse indispensable<br />

<strong>des</strong> pratiques et de leurs résultats puisse être menée B<br />

bien. On se contentera ici de quelques remarques <strong>des</strong>tinées surtout à<br />

alimenter la réfiexion.<br />

-Le français demeure, bien entendu, l'objectif unique ou l'un<br />

<strong>des</strong> objectifs fondamentaux de chaque option, De tous les moyens<br />

additionnels, le LPC paraît, comme il a été dit en 3.1.' le plus souple<br />

et le plus facile 3 maîtriser par les adultes. On peut cependant<br />

craindre que certaines solutions éducatives particulièrement cumulatives<br />

(comme le no 7 par exemple) n'entraînent quelques difficultés<br />

chez le jeune enfant. Confronté B plusieurs systkmes de gestes différents<br />

par leur rôle et leur economie, le jeune sourd ne risque-t-il pas<br />

d'être perdu face à une avalanche de signifiants hétérogènes? Ces


associations multiples de moyens comrnunicationnels devraient être<br />

étudiées soigneusement.<br />

- L'association du FS et de h LSF soulève tous les probl&mes qui<br />

ont été évoqués en 3.2. Il faut cependant reconnaître que l'utilisation<br />

conjointe du fiançais et du ES présente infiniment moins d'obstacles.<br />

Il n'y a plus ici le risque de voir un systeme maltraité (la LSF) par<br />

injection de son lexique dans le sabir, il n'existe plus la malencontreuse<br />

conjonction de deux co<strong>des</strong> originaux mais seulement le couplage<br />

d'une langue (le français) et d'une technique de visualisation<br />

de certaines de ses unités. Dans cette optique, le problème du sens se<br />

pose différemment : il n'est pas plus absurde de représenter la signification<br />

d'une expression comme « j'ai eu chaud » par certains signes<br />

que par une suite d'unités sonares. En un mot, les problèmes de traduction<br />

s'évanouissent puisque, justement, il n'y a plus traduction.<br />

<strong>Les</strong> difficultés réapparaîtront si, un jour, l'enfant apprend la LSF : il<br />

se trouvera confronté alors à une étrange situation où les signes seront<br />

à la fois connus de lui dans un système et inconnus dans le système<br />

nouveau ; cela n'ira pas sans doute sans bon nombre de confusions<br />

et un difficile effort d'adaptation. On comprend alors les préventions<br />

de certains avocats de la LSF à l'égard du FS, comparables<br />

au refus du « franglais » par les défenseurs de la langue française.<br />

- Le bilinguisme enfin n'offre pas, malgré les apparences, une<br />

solution évidente où toutes les difficultés se trouveraient magiquement<br />

résolues. La reconnaissance de l'efficacité de deux systèmes ne<br />

saurait se traduire par une simple addition; 3 serait naïf de<br />

conclure : puisque le français excelie en ceci et la LSF en cela,<br />

apprenons-les tous deux à l'enfant et il n'y aura plus de problèmes !<br />

Ce terme si couramment utilisé de *( bilinguisme » fausse la véritable<br />

nature de la problématique en cause car il renvoie à une situation<br />

fréquente certes mais différente. <strong>Les</strong> bilinguismes connus et étudiés<br />

sont ceux de langues audio-vocales, utilisant donc le même canal et le<br />

même support (phonique) ; quand un jeune enfant pratique une<br />

langue A, puis une langue B, il aurait pu tout aussi bien avoir le parler<br />

B pour langue première : il n'y a entre A et B aucun ordre de<br />

priorité (cf. 2.3.). Et s'il apprend en même temps les deux langues A


et B comme premières langues, toutes deux se structurent en parallèle<br />

; il n'y aura pas d'hétérochronie entre l'acquisition de A et de B.<br />

Tout est bien différent ici : la spécificité du français et de la LSF,<br />

le cas particulier de la surdité, rendent cette coexistence plus délicate,<br />

et le grand risque du bilinguisme, il faut l'avouer, c'est qu'il se<br />

rr&alise au détriment du français, langue non seulement seconde dans<br />

le temps mais hcomparablement plus ardue, plus rébarbative, plus<br />

longue à acquérir. On peut craindre que le saut de la LSF au français<br />

ne se produise pas et qu'on assiste au mieux à une sorte de « coexistence<br />

pacifique » <strong>des</strong> deux systèmes. L'étiquette explicite de « bilinguisme<br />

N occulterait alors une réalité bien différente de ce qu'elle<br />

prétend promettre.<br />

Ces quelques réflexions montrent que les sept configurations<br />

établies précédemment ne sont encore rien si l'on ne réfléchit, pour<br />

chacune, au rdle, à la place, à l'importance de chaque moyen communicationnel<br />

utilisé. Le moment d'initiation, les modalités d'emploi,<br />

les stratégies de passage (par exemple de la LSF au français)<br />

comptent autant si ce n'est plus que les combinaisons elles-mêmes.<br />

On ne peut que répéter ici ce qui a été dit plus haut : rien ne semble<br />

a priori hpossible, aucun argument théorique ne permet d'écarter<br />

un <strong>des</strong> quatre termes du problgme ni une <strong>des</strong> sept combinaisons répertoriées<br />

: seule une vaste étude <strong>des</strong> réalisations concr&tes, menées<br />

dans les classes, dans les étabiissements, auprès <strong>des</strong> parents, dans la<br />

période sensible de l'éducation précoce surtout, sera à même d'apporter<br />

plus de lumière et de montrer peut-être s'il existe <strong>des</strong><br />

solutions plus performantes ou plus harmonieuses que d'autres,<br />

4. Sans donc prétendre surmonter les difficultés et les contradictions<br />

nombreuses qui ont jalonné ce rapport, on peut cependant,<br />

pour terminer, évoquer quelques éléments du probl&me susceptibles<br />

de relativiser la gravité <strong>des</strong> questions soulevées ou de laisser entrevoir<br />

une ébauche de solution possible.


4.1. On n'a jusqu'& maintenant parlé que de sourds et d'entendants<br />

et trop souvent la Littérature consacrée au sujet ne va pas plus<br />

loin dans la nuance, opposant ainsi schématiquement deux blocs ou<br />

plut& deux types d'enfants ; l'entendant d'un CM, le sourd profond<br />

de l'autre, privé de tout reste auditif utilisable et difficilement appareillable.<br />

Mais on sait que la réalité est infiniment plus complexe.<br />

Tout classement, toute ~ologie impose à la variété, à la continuité<br />

du réel <strong>des</strong> tiroirs, c'est-&-dire <strong>des</strong> cloisons, <strong>des</strong> discontinuités. Parler<br />

de surdité moyenne, sévère, profonde, reste utile certes (sinon l'infinie<br />

diversité du reel n'est plus maîtrisable par le discours) et correspond<br />

d'ailleurs & une certaine homogénéité de comportement <strong>des</strong><br />

sujets qui, en gros, justifie cette partition ; mais i< en gros » seulement.<br />

En réalité, si I'on fait intervenir tous les paramètres qui constituent<br />

un individu déficient auditif (les potentialités de l'enfant et son<br />

histoire propre, le rBle de la famille, l'âge d'atteinte, le degré de<br />

perte auditive et mille autres facteurs ...) on aboutit à une myriade de<br />

cas individuels, du déficient léger ou moyen dont la surdité passe inaperçue<br />

pour un observateur non averti jusqu'au sourd profond<br />

incapable d'utiliser la parole, mais aussi du mal-entendant pratiquement<br />

sans langage jusqu'au sourd ingénieur ou professeur de percussions<br />

!<br />

On ne peut être que surpris quand on voit certains zélateurs du<br />

bfigukme proposer leur solution pour tous les enfants deficients<br />

auditifs, sans plus de nuance, alors que I'on connaît (surtout dans les<br />

classes spécialisées de l'Education nationale) bon nombre de malentendants<br />

dont la surdité moyenne, bien dépistée, bien appareillée,<br />

ne se traduit, aprbs une bonne éducation précoce, que par quelques<br />

difficultés d'articulation, un français légèrement lacunaire et un petit<br />

retard scolaire ; il n'est pas sOr que ces enfants se reconnaîtraient,<br />

forgeraient leur identittr, dans une communauté de sourds,<br />

Pour ces mêmes raisons, il faut dénoncer certaines attaques ironiques<br />

ou virulentes contre les possibilités prothétiques, présentées<br />

comme une sorte d'acharnement thérapeutique sans fondement<br />

(comme si la spécificité sourde avait besoin, pour exister, de nier<br />

toute information auditive possible), alors que pour un grand


nombre d'enfants, les prothèses apportent un gain auditif appréciable<br />

et utilisable.<br />

Cette prise en compte de la variété <strong>des</strong> possibilités auditives et<br />

linguistiques <strong>des</strong> enfants atteints de surdité doit permettre d'affirmer :<br />

- QUE LE DEPISTAGE, L'APPAREILLAGE ET L'EDUCATION AUDITIVE<br />

DEMEWNT DES ELEMENTS ESSENTIELS DE L'EDUCATION<br />

DES<br />

JEUNES SOURDS et qu'il faut les développer et les améliorer sans<br />

cesse ;<br />

- que pour de nombreux enfants moins atteints que d'autres, une pédagogie<br />

d'adaptation (avec éventuellement le LPC), telle qu'elle est<br />

pratiquée dans les classes de I'Education nationale - ou d'un soutien<br />

adapté pour les élèves intégrés - présente la solution la meilleure,<br />

et que le passage par une langue étrangère » (la LSF) - en<br />

admettant que les parents l'acceptent - complique inutilement la<br />

situation.<br />

4.2. Avant d'envisager <strong>des</strong> solutions, il faut aussi que l'institution<br />

scolaire reste attentive aux deman<strong>des</strong> <strong>des</strong>


- selon une cohérence, une évolution interne, une histoire que l'on<br />

peut soumettre à critique mais dont on doit tenir compte ;<br />

- selon aussi, pourquoi le nier, la compétence de leurs membres. Apprendre<br />

la LSF ou le FS ou le U C ou les trois ensemble, les intégrer<br />

sufiout à un projet éducatif cohérent et perfomant est une<br />

t$che longue, difficile, hasardeuse parfois. On ne peut exiger <strong>des</strong><br />

personnels <strong>des</strong> changements de cap tout coup, au gré <strong>des</strong><br />


... Et puissions-nous trouver pour nos enfants <strong>des</strong> éducateurs<br />

compétents pour nous guider dans la voie que nous aurons Choisie7 M.<br />

Mais qui oserait oublier, parmi « les premiers interessés », les<br />

enfants sourds ewr-mêmes ? Car ils nous parlent de quelque façon,<br />

différemment selon leur $ge bien sûr, par leurs attitu<strong>des</strong> d'abord (refus,<br />

régression, épa'nouissement) et par leurs interpellations plus tard<br />

(cf. les témoignages <strong>des</strong> adolescents et jeunes adultes), Une fois de<br />

plus, il faut savoir écouter et garder la tête froide. Au-delil <strong>des</strong> outrances<br />

verbales, <strong>des</strong> reproches cingiants et injustes & l'égard d'edueateurs<br />

qui n'ont pas démérité (et qui leur ont même donné précisdment<br />

les moyens de s'exprimer comme ils le font !), de la griserie à<br />

s'engager dans une cause toute neuve et de l'htransigeance adolescente,<br />

on sent bien qu'une teile rancoeur, une telle violence cachent<br />

quelques blessures véritables qu'on ne peut écarter d'un haussement<br />

d'épaules.<br />

Ne nous iliusionnons pas sur la possibItitd, avec les jeunes, de<br />

voir accueiftir favorablement un discours de compromis et de<br />

nuances. Mais peut-etre faut-il néanmoins rappeler deux ou trois vérités<br />

que l'on a tendance parfois il oublier,<br />

- Si l'on a raison d'insister sur le confort communicationnel que<br />

prbente l'usage de la LSF pour les sourds, opposé il la tgche longue<br />

et aride de l'apprentissage du français, il serait faux de leur laisser<br />

croire pour autant que la maîtrise d'une langue, quelle qu'eile soit,<br />

peut se réaliser sans effort. Qu'ils regardent leurs petits camara<strong>des</strong><br />

entendants, qui ont pourtant appris il parler spontanément: que<br />

d'années d'étu<strong>des</strong>, que d'exercices, que de labeur pour parvenir il<br />

une maîtrise moyenne de leur langage maternel ! S'agit-il de l'écrit<br />

seulement ? Pas du tout : combien de Français adultes sont-ils Capables<br />

de s'adresser par la parole à un auditoire, avec sttreté et<br />

aisance ?<br />

- L'on va répktant, comme une evidence, que dans la rencontre<br />

du sourd et de i'entendant, il y a deux handicapés et que le second<br />

est un


elation duelle, cela ne l'est plus au niveau de la communauté dominante.<br />

Si vous vous retrouvez perdu dans une rue de Pékin, vous<br />

serez bien embarrassé pour vous faire comprendre et vos interlocuteurs<br />

le seront tout autant. La seule différence, et eue est de taille,<br />

c'est que ce qui peut être un drame pour vous (incapable de retrouver<br />

votre hôtel, de commander un repas, etc.) ne sera qu'une péripétie<br />

pour les milfiers de Chinois qui vous entoureront. Ils s'occuperont<br />

sans doute gentiment de vous un moment, et puis ils continueront<br />

leur vie ... <strong>Les</strong> sourds reprochent parfois, et avec raison, aux entendants<br />

de ne pas aller vers eux pour dialoguer; mais il faut comprendre<br />

cette dure réalité qu'un entendant a tellement de partenaires<br />

potentiels pour écbanger <strong>des</strong> paroles qu'il ne trouve qu'un<br />

bien maigre i< bénéfice » à s'efforcer à une communication périlieuse<br />

avec un non-entendant. Se& sont handicapés ceux qui se trouvent,<br />

pour une quelconque raison, dans la nkessité de dialoguer avec les<br />

sourds (parents, professionnels...), pas les autres. Cette constatation<br />

réaliste vise à atténuer les illusions d'un certain ang&fisme et justifie,<br />

à sa manière, la nécessité sociale du maniement du français,<br />

- Cette nécessité, il faudrait en donner une conscience plus<br />

claire. Une petite enquête rhente (Je-F, Auffret. Etude de cas sur la<br />

communication bimodale chez les enfants sourds ; ses implications<br />

pédagogiques et <strong>sociales</strong>. Mémoire de DDES Suresnes 1982) réalisée<br />

auprès d'adolescents sourds au seuil de la vie professionnelle montrait<br />

leur soudaine angoisse à l'égard de Ieur compétence en français.<br />

Une demande se degageait, fondée sur une motivation beaucoup<br />

plus forte que celle <strong>des</strong> simples rtrsultats scolaires, ancrée dans un<br />

besoin enfin net d'intégration sociale : pouvoir revenir Lt l'Institut<br />

pour perfectionner leur français (et également leur LSF). A une<br />

époque où, pour tout le monde, on ne peut plus concevoir une seule<br />

scolarisation initiale qui donnerait les savoirs et les savoir-faire nécessaires<br />

pour le restant de la vie, il semble qu'il faille inscrire dans<br />

les taches prioritaires <strong>des</strong> étabEssements spéciaGsés cette ~0~sni3ï-<br />

LITE DE PEWmONNEMENT CONTINU DES ADULTES,


43. La complexité et la diversité <strong>des</strong> problèmes expliquent, on<br />

l'aura compris, l'état de confusion et de tatonnements dans lesquels<br />

se trouve l'éducation <strong>des</strong> enfants déficients auditifs de notre pays en<br />

1985 : il n'est pas exceptionnel de voir <strong>des</strong> établissements où l'équipe<br />

pédapgique se scinde en groupes distincts, voire opposés, au non de<br />

théories pédagogiques peu conciliables, ou bien d'assister à <strong>des</strong> remises<br />

en question brutales qui font figure de reniements. Si l'analyse<br />

théorique <strong>des</strong> problèmes nous incite à une grande prudence dans les<br />

conc~usions, l'expêrience du terrain ne peut guère davantage nous<br />

éclairer, et ce pour deux raisons au moins :<br />

- trop peu d'expériences ont été conduites en classe dans <strong>des</strong> conditions<br />

de contrble sêvère avec bilan initial et régulier de chaque<br />

élève ; nous retrouvons ici cette carence dans l'évaluation <strong>des</strong> résultats<br />

que nous avons dejja évoquée.<br />

- le manque de compétence en LSF ou en FS de la part du corps enseignant.<br />

Il s'agit là d'un goulot d'étrangement technique fréquent<br />

dans notre société de haut niveau technologique. A l'inverse, si les<br />

entendants possèdent les titres de capacité à l'enseignement, le niveau<br />

universitaire <strong>des</strong> personnes sour<strong>des</strong> leur interdit le plus souvent<br />

de devenir professeurs.<br />

Cependant, en dépit <strong>des</strong> incertitu<strong>des</strong>, les exigences de l'action<br />

sont susceptibles d'imposer, à certains moments, <strong>des</strong> décisions pratiques.<br />

C'est ainsi que, si les considérations linguistiques, mor<strong>des</strong>,<br />

anthropologiques, conduisent h une attitude de respect h l'égard de<br />

la LSF, la volonté d'efficience pédagogique peut amener à lui préférer<br />

le LPC ou même le FS dans un but d'enseignement du français.<br />

L'objectif commun demeure le même que dans le passé : l'insertion<br />

scolaire, cultureue, professionnelle et sociale dans le monde<br />

majoritaire entendant avec lequel les sourds doivent être à même de<br />

communiquer. Cette exigence impfique que l'enfant ne présente, si<br />

possible, aucun retard dans le domaine <strong>des</strong> concepts et <strong>des</strong> connaissances,<br />

que l'adolescent soit au même niveau qu'un entendant d'&ge<br />

identique et que la scolarité debouche - en fonction uniquement de<br />

l'hteKgence et du travail personnel - sur l'enseignement supérieur.<br />

En somme, de même que l'aveugle, misérable et inculte il y a<br />

quelques siècles, peut devenir professeur d'université, de même, le


sourd de naissance doit voir s'ouvrir toutes les carrières qui ne dépendent<br />

pas de la seule audition.<br />

La réalisation passe, dès l'éducation précoce, par la possibilité<br />

de choix réel offerte aux parents entre les divers moyens de communication,<br />

soit que les CAMSP et les SSESD se spécialisent dans une<br />

même vilie, soit que tout organisme sache guider chaque famille vers<br />

la décision correspondant le mieux à sa volonté profonde.<br />

Dans les classes, si l'accent est mis sur l'acquisition du français,<br />

le I;PC serait dominant ; il constituerait aussi, par le biais de la traduction<br />

simultanée, une aide déterminante à l'intégration scolaire. Si<br />

on vise plutôt l"accé1Qation et la précision <strong>des</strong> acquisitions dans les<br />

autres disciplines, la LSF deviendrait le moyen de communication<br />

privilégié. L'un et/ou l'autre seront utilisés en priorité avec les débutants<br />

ou, à l'inverse, avec <strong>des</strong> élèves $gés afin de rattraper les retards.<br />

Dans tous les cas, une attention vigilante sera accordée durant tout le<br />

temps de la scolarité à la parole articulée afin de fixer de soli<strong>des</strong> mécanismes<br />

neuro-musculaires.<br />

L'ignorance de la LSF chez les enseignants doit être comblée<br />

par <strong>des</strong> recyclages proposés sur le mode du volontariat car il serait<br />

inefficace d'imposer réglementakement un tel bouleversement de<br />

l'attitude ptsdagogique. Cet apprentissage supplémentake permettra,<br />

au minhum, aux enseignants de mieux comprendre leurs élèves<br />

mais non d'enseigner la LSF dont la connaissance complète ne peut<br />

être acquise que de naissance ou après de longues années de pratique<br />

intensive.<br />

U. semble contradictoire de recruter depuis le 24/11/1975 <strong>des</strong><br />

élèves-professeurs sourds dans les établissements privés relevant du<br />

ministère <strong>des</strong> Affaires <strong>sociales</strong> et de la Solidaritts nationale et dans<br />

les établissements publics depuis le 29 / 10/1981, ou de les préparer,<br />

depuis septembre 1981, au diplôme d'éducateur spécialisé et, simultanément,<br />

de mettre en place <strong>des</strong> « moniteurs de langue <strong>des</strong> signes »<br />

ou « intervenants sourds ». U. suffit, pourtant, de constater l'attitude<br />

<strong>des</strong> enfants face à un adulte sourd, Ieur attention, la spontanéité du<br />

dialogue, le caractère normal <strong>des</strong> échanges sur les plans finguistiques<br />

et psychologique, pour admettre que, meme si elle parait parfois


dangereusement révolutionnaire et pénible à supporter pour certains,<br />

la présence <strong>des</strong> adultes sourds dans le systkme &ducatif devient<br />

logiquement un impératif.<br />

Ceux-ci ne sauraient &tre <strong>des</strong> instituteurs ou <strong>des</strong> professeurs de<br />

sourds à moins d'&tre titulaires du titre de capacité requis ; ni <strong>des</strong><br />

professeurs de langue <strong>des</strong> signes puisque le professorat exige une licence<br />

d'enseignement ; il n'est pas non plus possible de créer un<br />

nouveau professorat spécialisé qui s'ajouterait ii ceux déjà existants<br />

et en voie &unSication. Il reste donc créer une nouvelle catégorie<br />

de personnel dont il faudra déterminer les critères de recrutement et<br />

de formation, le diplôme et le statut.<br />

L'utilité d'une autre profession, celle <strong>des</strong> interprkes en LSF,<br />

apparaîtra dans le cadre de l'intégration scolaire afin de favoriser la<br />

participation <strong>des</strong> enfants sourds au sein de Ia classe d7entendants.<br />

Ainsi le bébé sourd, puis le jeune enfant, peuvent avoir un amks<br />

direct au langage humain, que ce soit le français grâce au LPC ou la<br />

UF. Dans le premier cas, il perçoit à 100 %, dans le second il reçoit<br />

et émet à 100 %. Jusqu'ici, ii fallait de longues années de rééducation<br />

réussie pour que le fran~ais appris atteigne le degré de richesse, de<br />

nuances et de précision de toute langue bien maîtrisée. Aujourd'hul<br />

ii n'existe plus de raison primordiale pour que l'enfant déficient auditif<br />

présente un retard dans le domaine symbolique et son intelligence<br />

doit se dévefopper au même rythme que s'il avait été entendant.<br />

S. L'analyse que nous avons proposée <strong>des</strong> questions que soulèvent<br />

l'éducation et la scofarisation <strong>des</strong> jeunes déficients auditifs se<br />

veut d'abord le constat d'une situation, à un moment donné. L'histoire<br />

de la derniére décennie nous a montré que, dans ce domaine,<br />

l'évolution <strong>des</strong> faits et <strong>des</strong> mentalités peut aller très vite et que, sans<br />

préjuger de l'avenir, elle n'est sans doute pas encore stabilisée.<br />

En ces temps d'interrogations, où tant de parents et de professionnels<br />

se trouvent it juste titre désemparés, il nous a paru n&essaire<br />

de souligner l'urgence de certaines mesures qui, sans pretendre


ésoudre TOUS les problkmes abordés, ne relhvent cependant pas de<br />

l'utopie, C'est ce souci d'efficacité éducative et pédagogique qui a été<br />

notre fil dd'Ariane, afin que le débat théorique et philosophique, au<br />

demeurant indispensable, ne paralyse cependant pas I'action <strong>des</strong><br />

adultes ou ne la laisse pas sP6mietter dans une sorte de baanisation<br />

de la pédagogie spécialisée.<br />

A ce danger qui nous menace si la situation actuelle persiste, il<br />

ne $agit pas pour nous de répondre en biitissant une doctrine ; ou si<br />

doctrine il y a, c'est celle du chok d'un certain nombre de moyens<br />

utilisable A court ou & moyen terne et celle de la liberté <strong>des</strong> options<br />

parentales et de i'indépendance p6dagoglque <strong>des</strong> équipes. A partir<br />

d'un abject" central peu dkcutable : LA. -SE DU FRANÇAIS PAR<br />

L'ENFXNT ET L'ADUILT~ SOURDS, <strong>des</strong> voies d'accès différentes sont<br />

parfaitement concevables ; chacune a sa logique et peut réussir par<br />

<strong>des</strong> moyens appropriés : le LPC, le langage gestuel conduisant normalement<br />

B l'intervention <strong>des</strong> adultes sourds dans les étabfissements,<br />

l'int6patlon sous diverses formes selon l'option communicationnelle<br />

ehuisie.<br />

A la diversite <strong>des</strong> choix parentaux, am besoins spt4cZiques <strong>des</strong><br />

enfants sourds qui peuvent s'épanouir dans un système et s'étioler<br />

dans un autre, Pinstitution scolaire devrait repondre par la variété<br />

<strong>des</strong> structures éducatives d'accueil, mais une varieté cohérente, pensée<br />

et raîsonnable, dépoulUée de toute trace d'incompréhension,<br />

d'affrontement ou de; d6dain entre ceux qui mettront en oeuvre <strong>des</strong><br />

solutions.<br />

En fin de compte, notre plus grande satisfaction serait d'avoir<br />

réussi A persuader les lecteurs qu'ils est peut-être possible de parler<br />

de ces probl&mes, en 1985, en laissant les passions à la porte fors<br />

une : ceile de mieux accomplir notre tâche,<br />

6. En guise de post-face, on rappellera le principe sous-jacent à<br />

notre analyse, selon lequel lknseipment de fa langue française,<br />

langue de la communauté nationale, demeure dans tous les cas la fi-


nalité majeure de l'enseignement <strong>des</strong> enfants déficients auditifs car<br />

elle seule assure une insertion sociale, professionnelle et cultureile<br />

dans h vie et les activités du pays. Cela dit, on avancera une Liste de<br />

sept propositions, présentées sous une forme délibérément concise<br />

puisque les arguments ou les explications qui les justifient ont fait<br />

l'objet <strong>des</strong> analyses du présent rapport. Ces sept principes, une fois<br />

discutés et amendés par les représentants de toutes les parties<br />

concernées, pourraient former les bases d'une sorte de « charte » de<br />

l'éducation <strong>des</strong> déficients auditifs en France, afin d'assurer la cohérence<br />

<strong>des</strong> actions et, de plus, d'affiner les exigences de la formation<br />

<strong>des</strong> professionnels.<br />

Po) L'option d'un ou de deux mo<strong>des</strong> de communication (français<br />

seul ou français + LSF), pouvant jouer le r61e de langues maternelles,<br />

reste un choix parental, obéissant en premier lieu à <strong>des</strong> critères<br />

d'ordre philosophique. L'institution et les professionnels ont<br />

pour devoir d'éclairer et de conseiller les famiiles, non de se substituer<br />

à elles.<br />

2") En l'état actuel <strong>des</strong> analyses et <strong>des</strong> expériences, aucune solution<br />

éducative ne prévaut pour <strong>des</strong> raisons théoriques ou par ses<br />

réussites notoires. L'institution alaire devrait donc répondre à la<br />

demande parentale en proposant <strong>des</strong> solutions diversifiées, aux différents<br />

niveaux de l'intervention auprès <strong>des</strong> enfants : éducation précoce,<br />

cycle pré-élémentaire et primaire, enseignement secondaire.<br />

3") A la variété <strong>des</strong> solutions et <strong>des</strong> structures qui en découlent<br />

devrait correspondre en revanche une grande cohérence <strong>des</strong> objectifs<br />

et <strong>des</strong> modalités d'action au sein de chaque établissement. Parents et<br />

enfants devraient trouver <strong>des</strong> équipes éducatives homogènes, offrant<br />

un projet cohérent et dotées <strong>des</strong> moyens matériels et humains nécessaires<br />

pour l'atteindre.<br />

4") Aucune solution ne doit omettre ou contrecarrer l'intégration<br />

scolaire en classe ordinaire, quand elle est possible. Au<br />

contraire, chacune doit y contribuer selon ses moyens et ses voies<br />

propres.


5") Pour sa facilité d'apprentissage et son efficacité, le LPC mérite<br />

d'être largement propagé en France. Un effort de recyclage auprès<br />

<strong>des</strong> maîtres devrait être rapidement fait en ce sens.<br />

6") La connaissance de la LSF par les enseignants entendants<br />

leur permet d'abord une meilleure connaissance <strong>des</strong> élhves, de leurs<br />

capacitb communicationnelles et de leurs potentiafités intellectuelles<br />

; elle favorise aussi les échanges d'ordre affectif et informatif<br />

au sein de la petite communauté <strong>des</strong> enfants et <strong>des</strong> adultes dans<br />

l'établissement. Seule une grande maîtrise de l'outil autorise à l'utiliser<br />

dans <strong>des</strong> situations d'enseignement. L'apprendre aux enfants<br />

sourds ne saurait aujourd'hui être le fait <strong>des</strong> professionnels non<br />

sourds, sauf s'ils ont les capacités reconnues et certifiées pour le<br />

faire. Quant aux professionnels sourds, la connaissance parfaite de<br />

leur langue maternelle constitue une condition nécessaire mais non<br />

suffisante pour justifier leur intervention auprès <strong>des</strong> enfants.<br />

7") Dans les établissements qui ont opté pour le bilinguisme ou<br />

dans ceux qui, tout en conservant leur vocation ordiste, désirent que<br />

les enfants dont les parents en ont fait la demande puissent apprendre<br />

la LSF, la présence d'adultes sourds s'impose alors en toute<br />

logique. Ce personnel a pour fonction essentielle de transmettre la<br />

compétence linguistique qui est h sienne, non d'enseigner (h moins<br />

bien sOr de posséder les capacités et les titres requis). La formation<br />

et le statut de ces intervenants restent à définir.


Minist&re de ta Santé et de la S4mité socilale<br />

Direction de l'Action Sociale<br />

Le Secretaire d'Etat<br />

auprb du Wtre<br />

de la Santé et de la S&uritcS Sociale<br />

(Action Socide)<br />

Paris, le 8 juin 1977<br />

Messieurs les Directeurs <strong>des</strong> Instituts Nationaux de Jeunes Sourds<br />

Messieurs les Censeurs<br />

Messieurs les Professeurs, Educateurs, Chefs d'Ateliers,<br />

OBJET :- Utilisation de la langue <strong>des</strong> signes dans l'enseignement <strong>des</strong><br />

jeunes déficients auditifs.<br />

Depuis le 24 Novembre 1976, les deficients auditifs ont la possibilité<br />

de passer le C.A.E.J.D.A. dans les étabbements priv6s. LR 3<br />

Octobre 1977, commencera un enseignement intitulé « Approche<br />

dyune pédagogie de la langue <strong>des</strong> signes », au cours de la préparation<br />

par les élèves-professeurs du C.A.P.I.N.J.S.<br />

Après une centaine d'années d'ostractrme, la langue <strong>des</strong> sipes<br />

n'est plus stigmatisée comme une tare ou comme un handicap.<br />

La eonsBquence de cette 6volution ne doit pas &tre de transformer<br />

nos Instituts en écoles ségregatives dans lesquelles serait abandonne<br />

en partie l'enseignement de la parole, de la langue française et<br />

<strong>des</strong> matières scolaires qui permettent aux 6lèves de passer le C.A.P.,<br />

le B.E.P., le B.E.P.C., etc., ou de poursuivre leur scolarité dans le<br />

cadre de leur coéducation avec les entendants.


Le bagage linguistique <strong>des</strong> professeurs et <strong>des</strong> éducateurs actuels<br />

dans la langue <strong>des</strong> signes est d'une telle pauvreté que si le dialogue<br />

s'établissait essentiellement dans cette langue il se limiterait au maniement<br />

de quelques dizaines et au maximum, dans les meilleurs cas,<br />

de quelques centaines de signes. Ce nombre de signifiants est incompatible<br />

avec la création d'une pensée adulte.<br />

Notre but demeure exactement le même que dans le passé : l'insertion<br />

scolaire, professionnelle et sociale dans le monde <strong>des</strong> entendants<br />

avec lesquels nos élèves doivent apprendre ii communiquer.<br />

Le bon usage <strong>des</strong> signes implique d'avoir constamment présents<br />

à l'esprit ces risques et ces impératifs. II implique aussi de ne pas<br />

considérer l'utilisation de la langue <strong>des</strong> signes comme une solution<br />

de facilité conduisant le professeur ou l'éducateur B abaisser le niveau<br />

de ses exigences mais, au contraire, comme un moyen supplémentaire<br />

permettant de clarifier et d'accélérer la transmission <strong>des</strong><br />

connaissances et, par conséquent, d'augmenter le savoir <strong>des</strong> 6l.èves.<br />

Cette modsimtion <strong>des</strong> principes pédagogiques sera appliquée<br />

de telle sorte qu'elle s'harmonise avec les métho<strong>des</strong> modernes de<br />

dépistage, de diagnostic, d'appareillage et d'éducation précoces. Elie<br />

ne doit pas inciter les parents B choisir, de préfkrence à la scolarité<br />

dans un I.N.J.S. lorsqu'elle s'avérerait profitable, une intégration<br />

« sauvage >> en milieu entendant sans soutien spécialisé efficace.<br />

Pour le Secrétariat d'Etat<br />

auprès du Ministre de la Santd<br />

et de la Skuritd Sociale<br />

et par délégation<br />

Le Directeur de l'Action Sociale.<br />

A. RAMOFF


Bureau International d'Audiophonologe<br />

29, rue J.B. Vandereammen, 1160, Bruxelles, Belgique.<br />

I R E C O ~ A ~ OS/% O N B W<br />

CUSSmCAmUN DES DEHCLENCES AW1mS<br />

Une classZication n'a d'intéret que si elle autorise une action efficace<br />

pemettant la prévention, le diagnostic, le traitement et la réadaptation<br />

<strong>des</strong> déficiences auditives.<br />

Nous écarterons donc les classifîcations <strong>des</strong>criptives n'ayant<br />

qu'une valeur de catalogue.<br />

Elle doit permettre un tri sans ambipitd <strong>des</strong> cas que l'on peut<br />

rencontrer. Ce qui nécessite qu'elle emploie une méthodojogie de<br />

classement suffisamment précise et claire pour qu'un utilisateur non<br />

spécialement averti puisse s'en sentir et que deux testeurs dtfferents<br />

aboutissent à un classement identique <strong>des</strong> déficiences auditives<br />

examinées.<br />

Elle doit être simple tant par souci de clarté que pour éviter la<br />

mdtiplication <strong>des</strong> catégories.<br />

Elle doit cependant être suffisamment variée pour n'avoir pas à<br />

être complétée par <strong>des</strong> répartitions secondaires.<br />

Elle doit tenir compte de nos connaissances actuelles, mais également<br />

<strong>des</strong> nécessités méthodologiques qui apparaissent du fait de<br />

l'ulsuffisance <strong>des</strong> moyens dont nous disposons.<br />

Une classification doit donc être ouverte vers une recherche<br />

éventuelle.


Elle doit pouvoir être adaptée aux grands courants internationaux,<br />

en particulier pouvoir être confrontée aux classifications anglosaxonnes<br />

sans ambiguïté de définition <strong>des</strong> classes.<br />

Il est illusoire de vouloir adopter une classification unique. <strong>Les</strong><br />

échelles sont variables suivant l'orientation de la personne qui classe<br />

et les renseignements qui sont demandés. <strong>Les</strong> principales causes<br />

d'échec ou d'inutilités <strong>des</strong> classifications données ce jour sont de<br />

deux sortes : soit insuffisance catégorielle, l'auteur n'ayant envisagé<br />

qu'un aspect de la déficience auditive, soit multiplicité <strong>des</strong> sous-catégories<br />

rendant illusoire une répartition valable <strong>des</strong> sujets.<br />

Nous distinguerons donc deux gran<strong>des</strong> orientations que l'on peut<br />

définir comme étant :<br />

1) médicale ;<br />

2) pédagogique.<br />

Leur but est, pour les deux, la réadaptation de l'enfant, mais leur<br />

mode d'action et leur point d'impact est différent.<br />

1) Bases mtfdicales d'une classification<br />

Nous avons A marquer pour chaque acte un aspect particulier<br />

que nous pouvons réduire cinq propositions :<br />

1) préventive et de dépistage : classification étiologique ;<br />

2) thérapeutique : classification clinique,<br />

Elle permet la réadaptation suivante :<br />

3) le niveau auditif : classification audiométrique tonale et vocale ;<br />

4) la possibilité prothbtique : classification de perception verbale<br />

(audiométrie vocale) ;<br />

5) l'état médico-pédagogique : classEcation psychologique.<br />

2) Bases ptfdagogiques chez l'enfant<br />

Destiné donner un « état actuel >> <strong>des</strong> acquisitions.


Alors que les classifications prkédentes classent souvent <strong>des</strong><br />

facteurs constants non améliorables, nous avons ici à étudier l'acquis<br />

du sujet au moment de l'examen qui dépend bien sûr <strong>des</strong> propositions<br />

mais également de l'entourage, de la rééducation, de facteurs<br />

sociaux, etc. Cet état <strong>des</strong> acquisitions nous paraît être de deux<br />

ordres :<br />

- classification de parole et de langage, détermination d'un niveau<br />

linguistique ;<br />

- classification <strong>des</strong> acquisitions scolaires (vocabulaire, calcul ...)<br />

1,Génétiques<br />

- constitutionneBe<br />

- dégénérative (surdités familiales progressives..,)<br />

II. Prénatale<br />

- embryopathie (affect, maternelles, en particuLier rubeole ...)<br />

- foetopathie (incomp. sanguine, hemorragies)<br />

III. Néonatde<br />

- prématur6<br />

- anoxie<br />

- traumatisme obst. (dystocies, forceps ...)<br />

IV. Infantile<br />

infectieux (méningitique, virale, otitique.,.)<br />

toxique exogène (streptomycine.,.)<br />

traumatique (sonore, cr$nien ...)<br />

- métabolique (endocrinien, protéique, toxique? endoghe ...)<br />

V. Adulte<br />

En plus <strong>des</strong> précédents :<br />

- vasculaire<br />

allergique<br />

- de sénescence.


B. La méthodolo@e est médicale<br />

obsemation, antécédents ;<br />

- examens paraciiniques :<br />

électro-encéphalogaphie<br />

radiologie<br />

caryorne<br />

hématologie<br />

vestibulaire<br />

6iectro-nystapographie<br />

- oculaire.<br />

Classification clinique<br />

Nous distulguerons les surditb de transmission et les surdités de<br />

perception.<br />

1) WSMISION<br />

(seuil par voie osseuse meilfeur que par voie<br />

aérienne. (Nous appelons « transmission » la surdité que l%udiomCtrie<br />

tonale permet de distinguer de la surdittl de perception. L'extension<br />

du terme transkssion aux iiqui<strong>des</strong> de Poreille interne est ici<br />

écartée, rien ne permettant cliniquement de distinguer avec certitude<br />

eette fonne de réception <strong>des</strong> autres).<br />

aplasie<br />

- infections<br />

- aération defectueuse de l'oreille moyenne (tubaire, tumorale)<br />

- atteinte otospongieuse<br />

- dislocation traumatique<br />

2) ~ R C E ~ (seuil O N par voie osseuse identique au seuii par<br />

voie aérienne)<br />

a) réception Cperte tonale)<br />

- proprement dite (oreille interne)<br />

- riétro-cochiéaire, souvent associee il un trouble dktégation


) intégration (trouble verbal non lié à la perte tonale si elle existe)<br />

- trouble fonctionnel<br />

- trouble lésionnel<br />

La déficience auditive peut être la seule alteration pathologique.<br />

Mais occasionnellement, la surdité peut être associée à d'autres<br />

troubles qui sont :<br />

- soit habituellement liés à la surdité et provoqués par la même étiologie<br />

(syndromes à nomination) ;<br />

- soit assez souvent en corrélation sans que l'on puisse affirmer une<br />

cause commune ;<br />

- soit indépendants mais d'une connaissance nécessaire au diagnostic<br />

clinique et & l'orientation, surtout s'il s'agit d'un enfant (telles les<br />

débilités).<br />

a) dysplasies associées<br />

b) altérations fonctionnelles<br />

- sensorielles (troubles vestibulaires, amblyopie ...)<br />

- motrices (I.M.C., débilité motrice ...)<br />

c) troubles mentaux et du comportement<br />

- débilité dont le degré est défini par le quotient intellectuel :<br />

. légère : Q.I. compris entre 80 et 70<br />

. moyenne : Q.I. compris entre 70 et 50<br />

. profonde : Q.I. compris entre 50 et 30<br />

- arriération, imbécillité, idiotie<br />

- troubles caractériels, demences.<br />

B. M6thodologie<br />

Eile est rnCdicale et parackique : O.R.L., neuropsychiatrique,<br />

pédiatrique, ophtafmologique ...<br />

Audiologie vestibulaire et électro-nystapographie, électroencéphalogtaphie,<br />

radiologie, psychologie, diagnostic, psychologie,<br />

diagnostic médical de synthèse.


Chssmation audionnétrique<br />

Réference courbe audiornétrique tonale I.S.O.<br />

Le edcuf. se fait sur les frbquences conversationnelles classiques<br />

(adoptées par l'OMS) : 500 - 1 000 - 2 000 &.<br />

Toute fréquence non perçue est comptCe de 120 dB de perte.<br />

On ajoute les valeurs de dB et l'on divise la somme par trois.<br />

1, Auditions nomales et sub-nomaies<br />

Seuil inférieur h 20 dB - aucune difficulté de perception de la<br />

parole.<br />

II, D6flciences auditives légères<br />

Seuil compris entre 20 et 40 dB - les éfements de la parole courante<br />

ne sont pas tous identifib,<br />

In. Déficiences auditives moyennes<br />

Seuil compris entre 40 et 70 dB - le seuil vocal se situe dans ta<br />

zone d"uitensit6 de fa parole normale.<br />

W. Diificiences auditives sévères<br />

Seuil compris entre 70 et 90 dB - seule la parole de forte intensit6<br />

est perçue.<br />

Seuil supérieur ou égal à 90 dB - aucune parole perçue.<br />

Lorsque fa perte auditive est supérieure 90 dB, la nouveile<br />

moyenne dcufée en tenant compte de la fréquence 250 Hz fait apparattre<br />

trois degres de déficienms auditives profon<strong>des</strong> :<br />

lcr degré : perte hfbrieure ou égaie à 90 dB<br />

Sc degré : perte comprise entre 90 et 100 dB<br />

Se degr6 : perte supérieure B 100 dB.<br />

Pour tenir compte <strong>des</strong> problèmes particuEers posbs par la forme<br />

de la courbe, on momie le classement de la façon suivante :


a) Pour toutes les dtrficiences :<br />

Si l'&art entre 500 et 2 000& atteint ou dépasse 40 dB, le<br />

calcul est fair avec les valeurs <strong>des</strong> frbquenees 500, 1000, 2 000 et<br />

4 000 Hz, la somme est divisCe par quatre.<br />

b) Pour les déficiences auditives sévères et profon<strong>des</strong> :<br />

Si la fréquence 4 000 Wz a un seuil plus bas (valeur plus faible en<br />

dB, meilleure perception) que celui de la fréquence 2 000 Hz, on<br />

remplace dans le calcul la valeur du 2 000 Hz par celle du 4 000 Hz.<br />

ClassIfEcation auative verbale<br />

A. Langage acquis (niveau supérieur & « 5 ans »)<br />

La surdite est survenue après un acquis de langage ou bien la<br />

surdité est congénitde et le langage a été acquis spontanément ou<br />

par $ducation, Le niveau de parole doit $tre suffisant pour l'examen.<br />

- Cfassifi-ttion TP basse sur les normes de Test Phon4tique : pourcentage<br />

de phonèmes non idenrifiCs ;<br />

- Classification IN basée sur les mesures du test d>hte%&b%té au.<br />

mots dksyUabiques sim%iatifs : pourcentage de mots reconnus.<br />

RéfCrence du seuil ISO pour la perception tonale.<br />

Mesure chiffrée & 90 dB pour les pertes tonales moyennes<br />

jusqu 'A 50 dB ;<br />

- à 100 dB pour les pertes tonales moyennes jusqu'à 80 dB ;<br />

- à 110 dB pour les pertes tonales supérieures si ce niveau sonore<br />

n'est pas inconfortable.<br />

Classement en quatre catisgories :<br />

Tl'<br />

IN<br />

1 Moins de 5 % Plus de 95 % identüIcation normaie<br />

appareillage simpie<br />

2 Erreurs de 5 ti 20 % Intell. de 95 B 50 % qpareillage courant<br />

3 Erreurs de 20 40 % ïntell. de 50 à 20 % appareillage cifficile<br />

4 Au-delil de 40 96 Moins de 20 % appareillage spécial


B. Absence de langage ou langage d4fecîueux - (niveau infërieur A<br />

a 5 ans »)<br />

Classés dans la catégorie 4.<br />

Une déficience auditive de l'enfant classée dans la catégorie 4<br />

nécessite que l'audioprothésiste applique les techniques adaptées aux<br />

problèmes que posent la perturbation de parole et le retard de langage<br />

dans la surdité de l'enfant : régularité <strong>des</strong> contr6les, moyens de<br />

vérification de l'efficacité <strong>des</strong> prothèses adaptées aux possibilités expressives<br />

de l'enfant.<br />

Rappelons qu'aucun appareillage n'est appEqué sans pédagogie<br />

adaptée simultanée.<br />

Remarques<br />

Premi&re remarque<br />

Nous avons peu utiXis6 le terme de surdité et pas celui de cophose<br />

pour laisser transparaître que le problème tonal, s'il est important,<br />

n'est pas l'essentiel dans les déficiences auditives de l'enfant :<br />

c'est une catégorie de la classification.<br />

La rédaction ne contient pas le terme d'hypoacousie à l'élasticité<br />

trop grande : il s'adresse autant ceux qui ont une perte tonale légare<br />

(II) qu'à ceux que nous classons déficients auditifs sévères (IV).<br />

La rédaction ne contient pas le terme de demi-surdité q& lui aussi<br />

est ambigu, surtout que son emploi va de la déficience auditive profonde<br />

(V) à h déficience auditive légkre (II) suivant les centres de<br />

rééducation et l'intérêt technique du personnel pédagogique. En<br />

principe, il s'adresse am déficients auditifs moyens et sévères (III et<br />

IV).<br />

La rédaction ne contient pas le terme de mal-entendant qui<br />

confond dans la même temuiologie ce qui a trait à l'oreille et ce qui<br />

a trait au langage sans que l'on sache l'importance accordée à chacun<br />

de ces états. Il s'adresse en principe aux déficiences auditives


moyennes avec du langage (III 1 et iII 2) ainsi qu'aux déficiences auditives<br />

légbres dont l'acquisition de langage a été entravée (II 4).<br />

ka rédaction ne contient pas le terme dur d'oreille, traduction<br />

du terme anglo-saxon pour les mêmes raisons que cophose.<br />

Ces termes sont très certainement utiies dans l'application médicale<br />

(ou p6dagogique) d'un sourd, Mais nous pensons qu'une classification<br />

ne doit pas laisser place h une interprétation variable, ce<br />

qui ne veut pas dire que leur emploi doive être proscrit.<br />

Deuxieme remarque<br />

Iia apparaît utile de ne pas restreindre les classifications <strong>des</strong> déficiences<br />

auditives aux quatre catégories données dans ce rapport en<br />

ce qui concerne plus particulièrement l'enfant.<br />

Si le niveau mental lui-même intervient dans I'orientation et la<br />

décision du neuro-psychiatre (dans le cadre d'une réunion de synthèse),<br />

nous n'avons pas notre disposition cet élément important<br />

pour la réadaptation, la réponse il la question : «l'enfant peut-il<br />

structurer ce que nous faisons percevoir à ses sens ? »; autrement<br />

dit, quel est le degré de la structuration perceptive permettant l'apprentissage<br />

? Ce niveau n'est pas obligatoirement dépendant du niveau<br />

mental et de I'éducation. Il correspond à un état et non à un<br />

rendement ou à un développement.<br />

Il apparaît donc nécessaire de compléter les examens de l'enfant<br />

sourd par la détermination de ce niveau à l'aide de :<br />

- test de perception <strong>des</strong> formes et de leurs qualités physiques ;<br />

- test d'intégration visuelle non moteur ;<br />

- test d'intégration auditive (type test phonétique).<br />

En fait, les éléments de ces tests existent et demanderaient à<br />

être rassemblés et étalonnés, pour permettre de déterminer un quotient<br />

perceptif dans une cinquième catégorie.


Troisieme remarque<br />

Ce rapport ne comprend pas la classification pédagogique qui<br />

fera l'objet d'une deuxième recommandation.<br />

Heidelberg (RFA) 1968-04-28


- ANNEXE 4 -<br />

Bureau Internationd d'Audiophonologie<br />

29, rue J.B. Vandeicmmen, 1160, Bruxelles, Belgique<br />

RECOMMANDATION B W 15/1<br />

IWEGMmON OU COEDUCATION Pm-SCO-<br />

ET SCOMRE DES EWmTS AmENS DE DEmCIENCE<br />

AIJDm DANS LES ' CLASSES D 'EmNDmS<br />

L9init4gration ou wéducation pré-swlairc! et scolaire est le fait<br />

de permettre aux enfants atteints de déficience auditive qui en sont<br />

capables de recevoir une partie ou la totalité de leur enseiwement<br />

dans <strong>des</strong> classes d'entendants.<br />

Elle est considérée comme un moyen pour certains enfants atteints<br />

de dtsficience auditive d'accéder à une meilleure insertion sociale<br />

que par la fréquentation exclusive de Penseipement sp&ialisé.<br />

Cette definition hpzque que les enfants atteints de déficience<br />

auditive integrés ou coéduqués soient rkellement aptes h répondre<br />

aux exigences d'un enseignement qui ne leur est pas spécifiquement<br />

adaptts, un soutien audiophonologique et pédago@que approprik<br />

demeurant nécessaire.<br />

Elle est compl8te quand l'enfant atteint de déficience auditive<br />

reçoit la totalité de son enseignement dans <strong>des</strong> classes d'entendants.<br />

ELle est partielle quand l'enfant atteint de déficience auditive<br />

doit recevoir une partie de son enseignement dans un établissement<br />

spécialisé ou dans une classe spéciaEske.<br />

2. Peut être remplace5 par un autre terme selon les pays.


L'intégration ou coéducation pré-scolaire et scolaire est un processus<br />

complémentaire à l'enseignement spécialisé, mais il ne s'y<br />

substitue pas puisqu'il ne s'adresse qu'à certains enfants atteints de<br />

déficience auditive et non à leur ensemble.<br />

PARAME- A ENVISAGER LORS D'UNE EWNTUELLE INiE-<br />

GRATION OU COEDUCATION PRE-SCOLAIRE ET SCOLAIRE D'UN EN-<br />

FANT AïTEW DE DEFICIENCE AUDlTiVE DANS UNE CLASSE<br />

D'ENTEND~.<br />

A. Caractéristiques audito@ques de l'enfant avec et sans aide<br />

prothétique auditive, ce qui inclut :<br />

1") l'importance de la perte auditive ;<br />

2") le type de la déficience auditive ;<br />

3") l'&ge de l'enfant lors de l'installation de la déficience auditive ;<br />

4") le caracthre, évolutif ou non, de la déficience auditive ;<br />

5") l'efficacité de l'adaptation prothétique auditive.<br />

B. Moment de la prise en charge de l'enfant atteint de déficience<br />

auditive par une équipe audiophonologique spécialisée.<br />

« Suivi » de cette prise en charge.<br />

C. Profil médico-psycho-pédagogique de l'enfant atteint de déficience<br />

auditive établi par l'équipe (citée en B) qui a suivi l'enfant, ce<br />

qui inclut :<br />

1") ses facultés intellectuelles, le développement de ses possibilités<br />

d'abstraction, son équilibre psycho-affectif et son développement<br />

sensitivo-moteur ;<br />

2") l'absence ou la présence de troubles associés ;<br />

3") sa motivation personnelle à son education et h son intégration<br />

éventuelle ;


4") ses aptitu<strong>des</strong> particulières :<br />

- quant au langage oral (compréhension et expression) dans ses aspects<br />

articdatoires d'une part, dans ses aspects le~cologiques,<br />

grammaticaux et syntaxiques d'autre part ;<br />

- quant à la lecture labio-faciale, seule ou avec l'aide de compléments<br />

manuels ;<br />

- quant à l'utilisation de ses restes auditifs ;<br />

- quant au langage écrit (compréhension et expression) ;<br />

- quant à tout autre moyen d'expression et de rkeption du message<br />

linguistique.<br />

5") le niveau de ses acquisitions pédagogiques.<br />

D. Environnement de l'enfant atteint de déficience auditive :<br />

1") Environnement famiiial:<br />

- situation affective ;<br />

attitude vis-à-vis du handicap ;<br />

niveau d'information, motivation ?i l'intégration ;<br />

- participation à l'éducation : aptitude, disponibitité ;<br />

- niveau socio-économique.<br />

2") Environnement social (famille élargie, amis, voisins ...) :<br />

- niveau d'information ;<br />

- attitude vis-à-vis du handicapé.<br />

E. Conditions d'accueil en milieu scolaire et para-scolaire pour<br />

entendants :<br />

1") une formation pédagogique g6nérale reconnue <strong>des</strong> enseignants<br />

<strong>des</strong> classes d'accueil ;<br />

Y) une information spécifique préalable suivie d'une adhésion<br />

active de l'equipe d'accueil au projet proposé ;<br />

3") la présence d'une équipe éducative constituée pour chaque<br />

enfant par <strong>des</strong> représentants de l'équipe audiophonologique spéciali-


sée, par <strong>des</strong> reprbentants <strong>des</strong> structures d'accueil et par les parents<br />

de l'enfant concernés.<br />

Elle est dotée de nombreux moyens d'action :<br />

- elle réalise la collaboration permanente et assure notamment les<br />

liaisons nécessaires au moyen de rbunions, de visites dans les<br />

classes, de conseiis donnés, d'interventions exercées ;<br />

- elle organise <strong>des</strong> soutiens appropri6s et en assure la continuité ;<br />

- elle procede périodiquement il l'évaluation du degré d'efficacité du<br />

processus d'intégration mis en oeuvre ; elle peut, éventuellement,<br />

l'assouplir, le modifier et même proposer d'y mettre un terme et<br />

conseiller d'autres orientations en s'efforpnt de voir maintenue<br />

une guidance effective.<br />

Gesves, le 1" mai 1985.


Edité par le C.T.N.E.R.H.I.<br />

Tirage par la Division Reprographie<br />

D4pôt légal : Janvier 1990<br />

lSBN 2-87710-036-7<br />

ISSN 02234696<br />

CPPAP 60.1 19<br />

Le Directeur : Annie Triomphe

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